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CHAPITRE I : MECANISME DE FORMATION DES BASSINS DE RIFT ET DES

BASSINS DE MARGE PASSIVE

I. MECANISME DE FORMATION DES BASSINS DE RIFT

Un rift (le terme signifiant en anglais « fissure, crevasse, rupture, déchirure ») est un fossé
d’effondrement se localisant le long d’une fracture de l’écorce terrestre lors d'un processus
d'extension. Le rift est limité par des bords plus ou moins surélevés (appelés épaulements de
rift) formant généralement des gradins correspondant à une série de blocs basculés (horst,
graben et demi-graben) le long de failles normales.

En surface, un rift forme un fossé d'effondrement allongé, dont les dimensions peuvent atteindre
quelques dizaines de kilomètres de large pour plusieurs centaines de kilomètres de long. Cette
dépression allongée, limitée par deux failles normales dites failles bordières, est le lieu d'une
sédimentation le plus souvent lacustre et d'un volcanisme soutenu.

La sédimentation peut atteindre plusieurs milliers de mètres d'épaisseur en fonction de


l'intensité de la subsidence. Des incursions marines pendant la période de sédimentation sont
parfois observées comme dans le fossé d'effondrement de La Limagne. La formation des rifts
est associée, soit dans un stade tardif soit dans un stade précoce (voir rift actif versus rift passif)
à l'ouverture de fissures dans lesquelles s'injecte du magma alcalin. Les rifts sont ainsi souvent
associés à la formation de grands volcans (par exemple le Kilimandjaro, le long du rift est-
africain ou le strato-volcan du Cantal dans le rift du Massif central).

Parce qu'ils sont le lieu de l'amincissement de la lithosphère, les rifts représentent le stade initial
de la rupture lithosphérique. Lorsque celle-ci intervient, le rift devient une dorsale océanique et
constitue la limite entre les deux plaques lithosphériques nouvellement formées. La dorsale est
le lieu où, par refroidissement du magma, se forme la croûte océanique.

 Rift actif ou rift passif

La lithosphère continentale est composée d’une partie supérieure (30 km) peu dense, la croûte
de composition globalement granitique, et d’une partie inférieure (100 km) très dense,
constituée de péridotite (roche du manteau). L’ensemble est appelé la lithosphère et constitue
la plaque proprement dite qui se déplace sur du manteau fluide dénommé asthénosphère.
L’amincissement de cette lithosphère, c’est à dire la formation d’un rift, peut se produire à la
suite de deux mécanismes fondamentaux distincts : le rifting actif ou passif. L’évolution
tectonique est alors très différente suivant l’un ou l’autre de ces deux modes d’amincissement.

Un rift actif résulte de l’ascension d’un panache mantellique depuis les profondeurs de la
Terre. Comme un gigantesque chalumeau situé à l’aplomb de la plaque et qui l’amincit par en
dessous (phénomène appelé érosion thermique), cette ascension provoque dans un premier
temps un soulèvement topographique marqué, dont les causes essentiellement thermiques, ont
déjà été modélisées numériquement. Si le volcanisme peut être synchrone de ce bombement en
liaison avec la décompression de l'asthénosphère, l'extension de la lithosphère n'apparaît
qu'ensuite, comme une conséquence de ce soulèvement. Il en résulte que la sédimentation est
tardive dans l'évolution générale du système. L'évolution tectonique classique associée à ce
mode de rifting correspond à la suite chronologique : 1. soulèvement et volcanisme puis 2.
extension, formation des fossés d’effondrement et sédimentation.

Figure: Evolution d’un rift passif

A l'inverse, un rift est dit passif lorsque l’extension résulte de forces trouvant leur origine aux
limites de la plaque tectonique. Celle-ci s’étire alors horizontalement comme un chewin-gum,
ce qui provoque d'abord en surface des fossés d’effondrement (grabens) qui se comblent de
sédiments et où le volcanisme est généralement absent. Ce n'est que dans un second temps qu'un
soulèvement d'origine thermique et un volcanisme concomitant se produit. L'évolution
tectonique classique associée à ce mode de rifting correspond alors à la suite chronologique :
l’extension et la sédimentation puis le soulèvement et le volcanisme.

Figure : Evolution d’un rift actif

Qu’il soit actif ou passif, un rifting peut se décomposer en trois phases :

1) une phase pré-rift durant laquelle la croûte continentale est étirée et amincie,

2) une phase syn-rift durant laquelle la croûte va se rompre et

3) une phase post-rift, pouvant être éventuellement associée à la mise en place d’une croûte
océanique, contemporaine de la mise en place de dépôts sédimentaires importants.

Outre les contraintes tectoniques à l’origine de l’amincissement et de la rupture de la croûte, il


est important de comprendre les réponses mécaniques de la lithosphère aux contraintes
extensives, en particulier pour mieux contraindre les effets et les conséquences sur la croûte.

 Rift continental ou rift océanique

Le rift continental, dit aussi intracontinental, se forme sous l'effet de contraintes tectoniques
distensives de grande ampleur (rift passif) ou sous l'action de la remontée d'un panache
mantellique déterminant un bombement puis un étirement de la lithosphère (rift actif) . Il est
typiquement limité par des épaulements formant généralement des gradins. Ce rifting peut à
terme, soit avorter, soit évoluer en rift océanique donnant, par océanisation progressive, un
embryon d'océan (typiquement la mer Rouge) puis un océan véritable. La morphologie de la
zone active de l'axe des dorsales, ainsi que leur structure globale et le type de mise en place de
leurs laves, présentent des différences importantes selon leur ouverture. Les dorsales rapides
(divergence de 9 à 16 cm/an) sont larges (jusqu'à 3 000 km) et présentent de part et d'autre de
leur partie axiale en forme de dôme des pentes faibles. Les dorsales lentes (taux d'écartement
de 1 à 5 cm/an) sont plus étroites et présentent typiquement une vallée axiale bordée de failles
normales (qui a tous les caractères du rift continental) large de 10 à 30 kilomètres et profonde
de 1 à 2 km, les blocs basculés faisant quelques centaines de mètres ou kilomètres. Les dorsales
intermédiaires (divergence de 5 à 9 cm/an) présentent généralement à leur sommet un plateau
axial.

Figure : Schéma simplifié de l’ouverture progressive d’un rift continental

 Formation des bassins rifts

Du point de vue géotectonique : le régime de contrainte en tension se traduit par une structure
classique en horsts et grabens limités par des failles normales qui assurent par le jeu de blocs
basculés l'essentiel de la distension. Ces bassins peuvent se former aussi aux extrémités de
grands décrochements, par transtension (voir plusloin).

Figure : structure d'un rift continental

Du point de vue géodynamique : on note généralement la formation de failles synthétiques


dans la phase de naissance de rift et de failles antithétiques dans la phase proximale. Ces
accidents s'estampent (ou se façonnent) progressivement durant le comblement du bassin par les
sédiments post rifts, à la suite de l'arrêt de la subsidence tectonique qui est relayée par les
processus thermique (subsidence thermique) et gravitaire (subsidence par surcharge).

50 k m E XT E N S I ON

so km

xm

Figure : bassin de type « Rift » dans son contexte


Du point de vue sédimentation : la phase initiale de rifting à subsidence rapide se traduit par
un approfondissement et souvent par un confinement du milieu de dépôt lacustre ou marin
(dépots syn rift). Le riit se comble ensuite par des sédiments mal classés et diachrones (Fait
pour une couche gardant un faciès constant d'avoir des âges différents selon les lieux, ou âge de
plus en plus jeune dans le sens de la transgression pour un faciès constant dans une couche).

I 0-50 km

Figure : bassin de type « Rift » (détail)


II. MECANISME DE FORMATION DES BASSINS MARGES PASSIVES

En géologie et tectonique des plaques, la marge passive désigne une zone de transition entre
une croûte continentale et une croûte océanique au sein de la même plaque. Une marge passive
est la transition entre la lithosphère océanique et continentale qui n'est pas la marge active d'une
plaque.

Elle représente la frontière entre le continent et l'océan, différente de la frontière divergente et


de la frontière convergente en tectonique des plaques.

 Formation des bassins de marges passives

La vision classique de l'ouverture océanique se déroulait de manière assez symétrique en 3


phases : 1- étirement de la croûte continentale, 2 - début de la fusion partielle des péridotites
par décompression, rupture continentale et pour finir 3 - l'expansion d'un fond océanique
magmatique.
Figure : Évolution classique d'une océanisation

Bien que certains de ces termes puissent encore être utilisés, d'autres étapes spécifiques de
chaque type de marge ont pu être mises en évidences. Un autre point important est lié à
l'assymétrie des marges conjuguées générée lors des les prémices de la distension. Cette
assymétrie, que l'on retrouve qu'elle que soit le type de marge, va conduire à la mise en place,
pour les marges volcaniques ou non, d'une marge qualifiée "d'Upper Plate" et de son pendant
conjugué qualifié "Lower Plate"

Figure : Représentation schématique du concept Upper and Lower Plate d'après Lister et al. 1986 (46)
; DF : failles de détachement.
Une Upper plate est caractérisée par un domaine de striction relativement étroit avec une
terminaison crustale nette et une struture d'exhumation mantellique similaire à celle des core-
complexes (fig.21 - MCC) recouverte par des grands bassins "perchés" entre les blocs basculés.
On y distingue un haut topographique type H-bloc résiduel, découpé par une succession de
failles normales en séries et de blocs basculés qui délimitent un graben standard. La
sédimentation sur cette Upper plate est continue du préryft au synrift, c'est une sédimentation
d'eau peu profonde lié à un faible espace d'accomodation au dessus du H-bloc (fig. 21).

Une Lower plate est caractérisée par un large domaine de striction, caractérisé par une
succession de failles de détachement. Le domaine distal est constitué de plusieurs sous
domaines de croûte hyper-étirée et exhumés. Le bassin situé au dessus de la faille de
détachement distal présente un important espace d'accomodation qui reçoit des sédiments
enregistrant 3 grandes phases ; les unités basales sont syn-tectoniques, les unités intermédiaires
enregistrent l'élargissement et la migration de la déformation vers le domaine distal, enfin les
unitées supérieures sont post-tectoniques.

Figure : Schéma résumant les principales différences entre les marges Upper et Lower Plates à partir
de l'exemple de deux zones de la marge AngolaGabon(46)

Cependant la répartition géographique des portions Upper et Lower est la aussi très "cahotique"
puisque sur la même marge on peut observer la succession de domaines Upper et Lower. Les
études ont pu mettre en évidence que latéralement on passe d'une Upper à une Lower par deux
types de jonctions, soit par une coupure nette (sharp trasfert) par le biais d'une faille soit par
une zone diffuse (diffuse transfert). Ce second type de frontière semble être le résultat de la
délamination d'un haut topographique.

Figure 22. Répartition des domaines Upper et Lower Plate sur la marge Angola-Gabon (46)

Cette structuration (fig.23) est tout a fait compréhensible si on conçoit la zone d'ouverture non
pas comme une grande cassure mais comme le résultat d'une succession de pull aparts reliés
mais à fonctionnement individuel (style marge oblique avec partitionnement). Ces systèmes en
distension en dissociant des blocs crustaux, de composition et de structuration variées, capables
de pivoter au dessus d'un soubassement ductile pouraient induire ce type de structuration de
marge.
Figure : Représentation 3 D des variations latérales entre les marges Upper et Lower Plates (46)

Nous étudirons successivement les différentes étapes de l'ouverture des Marges Passives
Pauvres en Magma, puis celles des Marges Passives Volcaniques avant d'évoquer les étapes
conduisant à la mise en place d'une Marge Transformante.

Cas des Marges Passives Pauvres en Magma

 Phase d'étirement (stretching)

Cette phase se caractérise par le développement régional de failles listriques qui s'enracinent
dans la croûte inférieure (parfois jusqu'au manteau) et affectent la croûte supérieure cassante
induisant une déformation par cisaillement. La coûte peut être très faiblement amincie ce qui
induit la mise en place de petits bassins sédimentaires discontinus découpés par des failles
normales ou listriques en demi-grabens. Cette phase est de courte durée. De petits blocs peuvent
êtres surélevés et leur couverture sédimentaire érodée.
Figure 24 : Schéma d'une phase de streaching et profil sismique des dépôts sédimentaires déposés
dans un bassin en phase d'étirement (marge de Norvège13).

 Phase d'amincissement et de couplage (thinning & coupling)

La déformation se focalise sur une zone moins étendue dont la croûte va s'amincir rapidement
jusqu'à une dizaine de kilomètres d'épaisseur formant un domaine hyper-étiré. On en retrouve
les traces aujourd'hui dans les "zones d'étranglement - necking domains" des T.O.C.. La
déformation cassante de la croûte ne permet pas d'expliquer l'amincissement mais les profils
sismiques permettent d'observer que la déformation n'est pas accomodée uniformément avec la
profondeur et l'amincissement se réalise par le développement de failles de détachement. On
peut étudier ces mécanismes à l'affleurement le long de la Cordillière Nord Américaine (20) où
l'on peu observer l'exhumation de croûte continentale (C.C.C. : Continental Core Complexe).
Figure : Localisation du C.C.C. du Nevada et schéma interprétatif des structures d'exhumation
de la croûte profonde le long de la Cordillière d'Amérique du Nord (20) .

Ce genre de détachement se produit grâce à une faille plane, bien définie de pendange inférieur
ou égal à 30°. Il est caractérisé par la présence de brèches tranformées par un métamorphisme
dans le faciès des schistes verts (à chlorite et épidote) dans la partie supérieure du détachement,
constituée tous les types de roches crustales mylonitisées sur des épaisseurs de plusieurs
centaines de mètres (fig. 26). Ces roches mylonitisées ont enregistré des faciès de haut grade
avec des paragenèses à sillimanite et cordiérites pouvant parfois aboutir à des migmatites,
l'ensemble ayant été remonté très rapidement lors de l'exhumation. Les minéraux se
réorganisent pendant le fluage comme on peut l'observer sur les lames minces (fig.27).
L'exhumation se déroule par le biais d'un roulement le long d'une charnière de détachement en
fluant sur un chenal mylonitisé (fig. 28).

Figure 26. Affleurement de deux domaines crustaux profonds exhumées montrant le plan de faille et le
fluage des blocs le long de la surface mylonitisée(20) .
Figure 27. Observation de quartz étirés et partiellement recristallisés et de micas allongés dans les
mylonites (20)

Figure : Schéma simplifié des mécanismes intervenant dans la mise en place d'un C.C.C. (20)

Ce processus d'amincissement, limité dans le temps, peut conduire à la disparition des niveaux
ductiles permettant aux failles de traverser la totalité de la croûte continentale et d'atteindre le
moho. Cette phase va permettre le couplage entre le reste de la croûte et le manteau supérieur
permettant l'hydratation du manteau supérieur et initier la serpentinisation (fig. 29). La semelle
de péridotite serpentinisée permettrait ensuite l'initiation de système de détachement.
Figure : Schéma synthétique de la phase d'amincissement crustal jusqu'au début du couplage et
éléments du profil sismique montrant le couplage

 Phase d'exhumation

Dès que la croûte continentale hyper-étirée se rompt, les systèmes de détachement vont pouvoir
exhumer de vastes portions de manteau subcontinental (fig. 30). On ne distingue donc plus de
Moho. Le socle exhumé, d'une épaisseur comprise entre 2 et 4 km (évalué par sismique), est
serpentinisé. De petits pointements magmatiques éparses peuvent apparaître en surface du
manteau et des corps gabbroïques se mettent en place dans le manteau exhumé. Ce magmatisme
lié à la décompression est de type M.O.R.. Le volume de magma émis augmente avec
l'éloignement par rapport au continent et la composition de ce magma évolue parallèle ce qui
laisse entrevoir des modifications au niveau lithosphèrique. L'évolution de ces fonds est
polyphasée, asymétrique et voit la déformation se déplacer vers le large.
Figure 30. Schéma synthétique de la phase d'exhumation du manteau subcontinental et profil sismique
de la marge Ibérique

Un modèle numérique récent associe la croissance de la marge à la migration de l'état d'équilibre


du rift qui déplace une zone d'activation de failles séquencielles dans la croûte supérieure, du
continent vers le futur océan. Ce déplacement est couplé à un flux affectant la croûte inférieure
(fig. 31). La vitesse de déplacement conditionne la forme des marges conjuguées, notamment
leur étirement, la fusion partielle et les flux crustaux de matière.

Figure 31. Modélisation des processus de migration du rift sur une marge peu magmatique; 1
a-e : synématique, f : corelation avec la marge conjuguée BrézilAngola; 2: Modèles
numériques ; Interprétation et mise en évidence de l'influence de la vitesse de déplacement du
rift (de 4 à 10 mm.an-1

 Phase de rupture lithosphèrique (breakup)

Cette phase est une étape importante qui consiste au passage latéral entre une lithosphère
continentale et une lithosphère d'origine océanique (fig. 32). Des études montrent que le passage
entre des péridotites subcontinentales et des péridotites enrichies et refertilisées par
imprégnation de M.O.R. est une étape progressive avant la mise en place de la première croûte
océanique stable. C'est un processus graduel qui conduit à la formation d'une croûte hybride.

Figure 32 : Schéma synthétique de la phase de rupture

 Océanisation

Le début de l'accrétion, pris dans le sens de croissance de la lithosphère océanique, n'est pas
forcément lié à la mise en place d'une croûte magmatique puisque nous avons pu mettre en
évidence dans un autre chapitre l'existence de fond océanique peu magmatisé comme c'est le
cas dans les rides lentes. Selon Cannat (16) l'accrétion océanique ne démarre que quand le
régime thermique de la zone de divergence des plaques ne dépend plus que de l'équilibre actif
entre l'apport de chaleur (principalement magmatique) et le refroidissement (hydrothermal et
conductif). Cet équilibre n'est donc possible que si la divergence est déjà localisée de façon
durable. Cette définition offre la possibilité de concevoir tous les types "d'accrétions
océaniques" qui seront développés plus loin.
Cas des Marges Passives Volcaniques (V.P.M.s)

Les marges passives volcaniques caractérisent la rupture continentale dans les Large Igneous
Provinces (L.I.P.s) c'est à dire les régions à l'aplomb d'un point chaud (magmatisme de plume,
en rouge fig. 33) (15, 21) .

Figure 33. Carte de la répartition des Larges Igneous Provinces depuis l'assemblage de la
Pangée (320 Ma) (21)

L'exemple actuel en activité est celui des Afars. Des études montrent que dans ce type de site,
contrairement aux idées reçues, ce n'est pas une extension significative de la lithosphère qui a
initiée le mécanisme fusion partielle (fig. 34). Dans ces zones, la fonte précoce de la lithosphère
sous l'effet de la plume, produit des pièges volcaniques qui couvrent de larges zones du craton
continental ou de ses bordures sur des surfaces supérieures à 100 km2. Dans ce type de marge
on différentie une phase de dilatation, suivie d'une phase d'étirement, une phase d'expansion
continentale précédant l'expansion océanique (fig.35).
Figure 34 . Schéma explicatif de l'initiation de la rupture des Afars par la mise en place d'une
déformation liée à la plume.

Figure 35. Modelisation de l'évolution temporelle de la lithosphère soumise à l'érosion thermique


d'une plume asthénosphèrique et d'une permanente intrusion thermique (dikes au travers de la coûte) 1
& 1' conditions initiales, 2 & 2' évolution rhéologique de 3 sections successives de la croûte, 3 & 3'
limite thermique entre la lithosphère et l'asthénosphère, 4 & 4' évolution topographique conduisant au
rifting(46) .
 Phase précoce : phase de piège

La première phase est associée à une intense dilatation de la croûte qui ne produit cependant
qu'une extension tectonique mineure. Cette dilatation massive de la croûte est le résultat de la
mise en place de dikes intra-crustaux (fig. 36). La concentration de ces dikes favorise l'extension
de la lithosphère qui va être réchauffée dans sa partie supérieure (ramollissement thermique),
bien que sa partie inférieure soit stabilisée par la mise en place de sills sub-horizontaux mais
assez épais (formations magmatiques empilées sur 2 km d'épaisseur).

Figure 36 Schéma simplifié de la phase de dilatation (15)

 Phase d'étirement et d'amincissement lithosphèrique

Les données sismiques permettent d'observer des zones étroites de striction syn-magmatique de
la croûte supérieure (fig. 37). Le Moho n'est pas à une profondeur homogène dans toute la zone.
Au coeur de la zone il est le plus profond (33 +/- 1 km) et remonte en périphérie (25 +/- 1 km).
On distingue ainsi l'individualisation d'un Bloc Continental crustal central (C-bloc) encadré de
zones de strictions de la croûte inférieure injectée de magma. En surface se mettent en place
des coulées volcaniques formant les S.D.R. (Seaward Dipping Reflector, fig. 38) et en
profondeur des formations plutoniques L.C.B.s (Lower Crustal Bodies). Ce sont des cumulats
gabbroïques à olivine, produits par la fusion partielle du manteau. Dans certaines marges ces
formations profondes sont associées, dans des proportions assez importantes, à des restes de la
croûte continentale inférieure de faciès de haute pression (granulites et éclogites)33 ; ceci qui
montre que leur mise en place ne nécessite pas obligatoirement un important gradient thermique
en relation avec la plume mantellique.
Figure 37 Schéma simplifié de la phase d'étirement (15)

Figure 38 . Dynamique des mécanismes d'étirement (15)

Phase d'expansion continentale

Pendant cette phase le "bloc C" se fragmente et s'étale à cause du cisaillement intense ; d'autres
S.D.R. plus superficiels se mettent en place (fig. 39). On observe cette structure sur les profils
sismiques au larges de la côte d'Argentine (fig. 40).
Figure 39 . Schéma simplifié de la phase d’étirement (15)

Figure 40. Profil sismique et interprétation de la marge volcanique d'Amérique du Sud (18)

Le bloc-C disséqué va produire différentes structures crustales dans ces marges hyper-étirées
(cf hauts topographiques) qui peuvent dans certains cas être émergées et érodées. Ces conditions
de mise en place ont été validées par les modélisations d'ouverture sous point chaud réalisées
par Geoffroy(15) (fig. 41). Ces modélisations corroborent les observations sismiques, les
résultats des forages et les observations directes effectuées tant sur les marges conjuguées de la
Norvège et du Groendland que dans l'Atlantique Sud au niveau de les marges conjuguées
Argentine-Brésil et de Angola-Gabon(18) .

Figure 41. Modélisations des étapes d'évolution d'une marge passive volcanique (15)

 Phase d'expansion océanique

La mise en place d'une croûte océanique n'est pas forcément la suite logique de l'hyper
extension continentale. Par exemple, l'accrétion océanique ne démarre dans l'océan Atlantique
Nord que quand un changement cinématique intervient. La déformation migre vers le domaine
océanique et la composition des roches magmatiques change (table 1) (24) . Les profils
sismiques et les modélisations suggèrent une rupture brutale au niveau d'une région d'étirement
et de magmatisme différentiel (fig. 42) qui vont entraîner des zones de faiblesse du socle. La
mise en place d'une croûte océanique serait favorisée par les sous plaquages gabbroïques sous
le front de serpentinisation, l'insertion dans le manteau serpentinisé de filons conduisant à des
épanchement en surface de laves.
Figure 42. Schémas synthétiques des phases magmatiques successives sur la marge passive de
Norvège pendant les étapes de l'ouverture

Les marges passives volcaniques sont donc définies par une forte activité magmatique alors que
les marges peu magmatiques ne présentent que de très faibles injections de magmas, la quantité
de magma présente dans une marge dépendra de l'état thermique de la lithosphère, de la
composition du manteau associé et du taux d'expansion lors du rifting. Cependant, la réalité
n'est pas si simpliste (22) car, d'une part les apports magmatiques peuvent varier latéralement
sur une même marge (fig. 2); d'autre part, certaines marges peuvent être peu magmatiques
pendant le rifting mais magmatiques pendant l'accrétion (ou l'inverse).

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