Vous êtes sur la page 1sur 79

ETUDE SOCIO-ECONOMIQUE DU TITRE-

RESTAURANT EN FRANCE ET DE SON


IMPACT SUR LES FINANCES DE L’ETAT
ET L’ECONOMIE EN GENERAL
ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015
2
SOMMAIRE

Sommaire p 3
Synthèse générale p 6 à 18

Partie I. Analyse économique et sociale du modèle du titre-restaurant en France

1. Les trois piliers d’un modèle socio-économique original

1.1. Le titre-restaurant vient rendre effective la volonté du législateur

1.1.1. L’esprit de la loi et la fonction sociale du titre restaurant. p 20

1.1.2 Les grandes étapes de la construction du modèle TR. p 21

1.2 Le modèle TR est nécessairement porté par un engagement tripartite

1.2.1L’Etat ouvre la possibilité d’une négociation dans l’entreprise. p 23

1.2.2. Le TR ne peut être financé unilatéralement. p 23

1.3. Une régulation paritaire, rouage essentiel du modèle

1.3.1. La naissance d’une institution paritaire de régulation. p 24

1.3.2. Une régulation efficiente à moindres frais. p 26

1.3.3. Une structure légère en manque de moyens et de statut. p 27

1.3.4 Une remise en cause discutable. p 28

2. Le TR : une question d’égalité entre les salariés.

2.1. Assurer un repas digne à tous les salariés

2.1.1. Eviter un salariat à deux vitesses. p 29

2.1.2 L’égalité devant le repas au travail : une corde à l’arc de l’Etat Providence. p 31

2.2. Le TR réussit-il à maintenir une égalité entre salariés ?

2.2.1. Une couverture de la population cible importante mais incomplète. p 32

2.2.2. L’effort financier des salariés selon le mode de restauration. p 34

2.2.3. La logique sociale et juridique de l’Etat. p 37

2.2.4. La situation des salariés modestes. p 37

2.2.4. La logique égalitariste du TR au sein de l’entreprise. p 39

3. Le modèle du TR crée un écosystème socio-économique de masse

3.1. Un modèle devenu massif en croissance régulière

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


3
3.1.1. Une extension rapide puis tempérée. p 39

3.1.2. Une progression équilibrée qui devrait se prolonger. p 40

3.2. Des externalités à la dimension du modèle

3.2.1. Le gain social individuel et collectif. p 41

3.2.2. Un levier de la politique sociale pour les entreprises. p 42

3.2.3. La satisfaction d’un besoin primaire facteur de productivité. p 43

3.2.4. Un effet de déversement massif dans l’économie non délocalisable. p 45

3.2.5. Le modèle TR est la condition d’existence de certains affiliés. p 47

3.2.6. Un coût d’opportunité nul voir négatif pour l’Etat. p 47

4. Les enjeux de la dématérialisation

4.1. Continuité et changement du cadre général

4.1.1. Une stabilité du cadre général. p 49

4.1.1 .La conservation du statut de titre spécial. p 49

4.1.2. Un changement d’habitudes et une simplification pour les utilisateurs. p 50

4.2. Des opportunités et des risques industriels

4.2.1. Des opportunités collectives. p 51

4.2.2. La nécessaire visibilité réglementaire pour faire face aux risques. p 52

Partie II. Modèle d’impact du titre restaurant sur l’économie et les finances de l’Etat et simulations
dynamiques des effets d’un choc de taxation

1. Paramètres du modèle d’impact du TR sur l’économie et les finances de l’Etat

1.1. Quels scénarios d’évolution en cas de choc social et fiscal ?

1.1.1. Le scénario de référence. p 55

1.1.2. Projections en absence de choc. p 55

1.1.3. Effets d’un choc : « scénario 20 ». p 55

1.1.4. Effets d’un choc : « scénario 30 ». p 56

1.1.5. Effet d’un choc forfait social : « scénario 15 ». p 56

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


4
1.2. Articulation logique du modèle

1.2.1. Itération du calcul des gains théoriques pour l’Etat. p 56

1.2.2. Itération du calcul des effets induits par le déversement. p 57

1.2.3. Itération en dynamique. p 57

2. Le scénario de référence. p 57

3. Impact d’un choc : « scénario 20 ». p 59

4. Impact d’un choc : « scénario 30 ». p 61

5. Impact d’un choc : « scénario 25 ». p 63

6. Impact du choc forfait social : « scénario 15 ». p 65

7. Synthèse des résultats du modèle. P 66

Annexes. p 69 à 79

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


5
SYNTHESE GENERALE

Partie I
Analyse socio-économique du
titre-restaurant en France

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


6
Le titre-restaurant pèse autant que la restauration d’entreprise

Le titre-restaurant est un titre spécial destiné au paiement de biens de consommation


alimentaires au sein d’un réseau d’affiliés agrées. Cofinancé par l’employeur et le salarié
à part sensiblement égale, exonéré par l’Etat de charges sociales et fiscales, il est né dans
les années 60 en France pour solvabiliser « la cantine » des salariés privés de restaurant
d’entreprise. Une ordonnance de 1967 l’institutionnalise et, sous l’impulsion des
partenaires sociaux dans les entreprises et, à l’époque de trois sociétés émettrices1, il est
devenu, en cinq décennies, un mode de financement du repas du salarié notamment en
journée continue comparable, par son ampleur, aux restaurants d’entreprise. En 2014, 3,8
millions de salariés ont utilisé 763 millions de titres pour une valeur de 5,8 Mds€ auprès
de 180 000 affiliés restaurateurs, boulangers, charcutiers-traiteurs, commerçants de
proximité ou grandes et moyennes surfaces. Et, si sa progression modérée mais constante
observée depuis dix ans se prolonge, le titre-restaurant à l’horizon 2018 pourrait
bénéficier à 4,2 millions de salariés et opérer un transfert de droits sociaux de
l’ordre de 6,61 Mds€. Il est donc massivement, et de plus en plus, ancré dans le
paysage du monde salarial.
Comment un titre spécial de paiement que la législation n’impose pas a-t-il pu connaître
une telle expansion ?

Un modèle fondé sur un engagement solidaire tripartite : Etat-


employeurs-salariés

Le succès du titre-restaurant doit beaucoup au triple engagement « solidaire » de l’Etat,


des employeurs et des salariés. Cette co-construction est la clé de voute du modèle ou
système titre-restaurant : par l’exonération, l’Etat incite explicitement à l’ouverture d’une
négociation interne à l’entreprise dont il fixe lui-même les limites et les conditions. Les
partenaires sociaux se saisissent (ou pas) de l’opportunité et négocient le montant de leur
co-financement. Cette articulation en deux temps et trois acteurs solidairement engagés
structure très fortement le modèle du titre-restaurant, si bien qu’il est raisonnable de
penser que le désengagement de l’une des parties sonnerait le glas du modèle tout entier.
Le succès du modèle, fondé sur la confiance réciproque et donc la stabilité et la sécurité,
doit aussi à la qualité de sa régulation confiée à une commission indépendante (CNTR) et
paritaire (les employeurs, les salariés, les affiliés, les émetteurs – sous la tutelle de l’Etat) :
lieu de concertation qui a su démontrer sa capacité à construire et entretenir un réseau
qui bénéficie à 180 000 affiliés, tout en contrôlant les flux physiques (titres papier) et

1 Désormais le marché compte huit sociétés émettrices.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


7
financiers traités par les opérateurs. Paradoxalement efficace et sûre et néanmoins
parfois contestée, la CNTR mériterait d’être dotée d’un statut juridique plus solide
et de moyens à la hauteur de ses missions.

Le titre-restaurant permet d’assurer une égalité relative entre tous les


salariés

Depuis un décret pris en 1913, le repas digne du salarié devient un impératif à la fois au
nom du droit social des travailleurs mais aussi dans l’intérêt même des entreprises. Si la
restauration collective d’entreprise a d’abord permis, historiquement, de franchir une
étape en ce sens, elle est demeurée inaccessible à des millions de salariés, créant, de facto,
un salariat à deux vitesses puisque dans un cas, le salarié pouvait accéder à un repas de
qualité à prix modéré et dans l’autre, il se trouvait contraint de recourir à la gamelle. La
fonction sociale majeure et incontestable du titre-restaurant est donc de rétablir
une forme d’égalité devant le repas entre tous les salariés, quels que soient la taille
et les moyens de l’entreprise qui les emploie. Il en résulte que toute intention de
modification du périmètre, de la réglementation, des conditions d’accès, etc., du titre-
restaurant doit s’apprécier au regard de ses effets sur « l’égalité devant le repas » entre
tous les salariés.

Globalement, et sur la base d’une population salariée éligible au titre-restaurant de 12,2


millions (16,2 millions de salariés éligibles – 3,8 millions de salariés bénéficiant d’un
restaurant d’entreprise), 30,6 % en disposent et en bénéficient. La couverture du titre-
restaurant est donc large, ce que personne ne peut contester, tout en demeurant
incomplète. Le titre-restaurant a donc, quantitativement, rempli sa fonction sociale
principale et sa dématérialisation à venir pourrait être l’instrument d’une
extension de sa couverture. La perspective de renforcer la fonction sociale du titre-
restaurant en l’étendant aux salariés notamment des entreprises de petite taille
devrait être un objectif collectif du secteur soutenu par l’Etat.
Individuellement, le titre-restaurant comble partiellement les inégalités entre salariés. En
effet, un travailleur au salaire médian, bénéficiant d’un système de restauration collective,
pour un repas complet, consacre 6,50 % de son salaire brut à son repas méridien contre
8,94 % et 10,30 % pour celui disposant de titres-restaurant dont la valeur faciale est
respectivement de 7,50€ et de 5€. Seul le cas d’un titre-restaurant fixé au plafond
(10,72€) permet au salarié qui en bénéficie de fournir un effort financier équivalent à
celui qui accède à un restaurant collectif. La légitimité de fixer un engagement
minimum c’est à dire un niveau plancher à la valeur faciale du titre-restaurant

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


8
ouvrant droit à l’exonération au nom de l’égalité entre les salariés est réelle et
pourrait faire l’objet d’un débat. Conjoncturellement, en tous cas, l’écart entre salariés
ne pourra que s’aggraver si le pouvoir d’achat du titre-restaurant continue à s’éroder, pris
dans un effet de ciseau causé par une non - ou faible - revalorisation de son plafond
d’exonération conjuguée à une hausse des prix dans la restauration plus élevée que celle
de l’indice général des prix à la consommation. Avec la suppression de la première tranche
d’IR sur laquelle était indexée l’exonération plafond du titre-restaurant, il incombe à
l’Etat de définir un nouveau référentiel préservant le pouvoir d’achat du titre. Au
final, le titre-restaurant échoue à rétablir une égalité absolue mais sans lui, « l’inégalité
devant le repas » entre salariés serait fortement accrue.
L’Etat ne s’y trompe pas en réservant à la restauration collective et au titre-restaurant un
régime d’exonération sociale et fiscale relevant d’une logique similaire d’incitation faite
aux partenaires sociaux à investir des moyens dans la restauration du salarié et à
s’assurer d’un financement à parts égales entre tous. Au nom de l’égalité des salariés,
l’Etat devrait veiller à maintenir cet équilibre règlementaire indispensable.
L’enjeu que représente « l’égalité devant le repas » est particulièrement aigu s’agissant
des salariés aux revenus modestes. Pour eux, l’effort à consentir, pour un repas similaire
aux autres, est mécaniquement le plus élevé de tous. Sans titre-restaurant, un salarié au
smic est dans la situation de consacrer 15,9 % ou 13,2 % de son salaire brut
respectivement s’il consent à dépenser 12 € ou 10 € par jour travaillé. Compte tenu de la
contrainte budgétaire de ces ménages (75 % des revenus sont pré-engagés), quel salarié
peut fournir un tel effort financier ? Dans ces conditions, un effondrement de la qualité
nutritionnelle et un retour à la gamelle ne sont pas à exclure. Il est donc légitime de dire
que le titre-restaurant parmi tous les salariés, protège plus particulièrement les
salariés modestes.
Au final, toute politique publique dans ce domaine devrait avoir pour ligne de conduite
d’éviter une rupture d’égalité, plus grande encore, entre tous les salariés et en particulier
ceux, aux revenus modestes, pour lesquels les effets de cette politique seront les plus
prononcés.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


9
Le titre-restaurant : un écosystème socio-économique aux retombées
positives très importantes

Avec 5,8 Mds € de titres en 2014 utilisés par 3,8 millions de salariés auprès de 180 000
affiliés, le titre-restaurant est devenu un phénomène massif. Son usage de proximité, la
spécificité des commerçants affiliés, l’impossibilité de transformer le titre en monnaie
participent à former un écosystème socio-économique dont les externalités positives sont
considérables.

 Le gain social individuel et collectif

Le gain social individuel et collectif est bien connu : le titre-restaurant représente un objet
de cohésion sociale interne qui importe autant au salarié qu’à l’employeur dans un
contexte ou le temps de trajet augmentant, la prise du repas méridien à domicile est
devenue difficile. La qualité du transport et du repas hors domicile ne sont plus des
accessoires mais des impératifs du travail salarié lui-même. Le restaurant collectif et
le titre-restaurant sont donc au repas ce que le titre de transport francilien (Navigo) ou
son équivalent en région, est au transport, à savoir un droit, ou une compensation, pour
lequel le législateur a imposé une participation de l’employeur.

 La prévention des risques de santé

Le titre-restaurant contribue à assurer au salarié un repas de qualité. En ce sens, il


constitue un outil de prévention des maladies, qui a toute sa place dans les politiques
publiques à la fois de santé publique et de compétitivité des entreprises. Cet enjeu était
déjà présent à l’esprit du le législateur en 1913. Il est plus que jamais d’actualité. Comme
le restaurant collectif, le titre-restaurant demeure une garantie d’un repas décent.
Cependant, avec la progression continue de l’acceptation des TR par les magasins de
distribution alimentaire qui absorbaient 14% des titres en 2010 et 21% en 2014, le titre-
restaurant est pris dans des processus globaux (changement d’habitudes alimentaires,
moindre progression du pouvoir d’achat, diminution du temps de pause etc.), qui, par
incidence, peuvent affecter son rôle sanitaire. S’il est manifeste que l’offre alimentaire des
GMS a su s’adapter et s’améliorer et qu’une Charte réserve l’utilisation des titres-
restaurant pour l’acquisition de préparations alimentaires immédiatement
consommables, il n’en reste pas moins que la progression de l’utilisation des titres-
restaurant en GMS pourrait être porteuse de régressions sur le temps consacré au repas,
les conditions matérielles de prise du repas et les qualités nutritionnelles des aliments. Le
sujet devrait attirer l’attention des acteurs à commencer par celle de l’Etat dont la volonté

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


10
a toujours été d’ouvrir toujours plus largement l’utilisation du titre-restaurant à de
nouvelles formes de commerces et de services.

 Un déversement massif dans l’économie non délocalisable

L’impossibilité de transformer un titre-restaurant en monnaie, son déversement en


totalité dans le tissu économique local au sein d’un réseau restreint de commerces et
services alimentaires ou la part des produits importés est plus faible que la moyenne (taux
de fuite quasi nul) expliquent l’effet multiplicateur considérable entrainé par le titre-
restaurant.
Si l’on ajoute à la valeur faciale du titre, le complément moyen que le salarié consent à
payer (sorte de « reste à charge ») pour financer son repas estimé à 2,31€, le titre-
restaurant apporte au total un volume d’affaires annuel de 7,49 milliards d’€ (en
2014) dont 4,7 milliards d’euros dans la restauration rapide et traditionnelle, 1,3
milliards d’euros dans les GMS et 1,5 milliards d’euros dans les commerces de
proximité dont les commerces de bouche. Globalement, chaque euro engagé par un
employeur dans le titre-restaurant engendre ainsi une dépense de 2,37 € auprès du
réseau des affiliés. L’écosystème que forme le titre-restaurant est ainsi devenu un
« apporteur d’affaires » structurant pour ses affiliés, raison pour laquelle d’ailleurs ils
sont si nombreux. En 2014, il a ainsi contribué pour 10 % au chiffre d’affaires du secteur
de la restauration et on peut considérer que 74 000 emplois soit 13,9% de l’emploi total
de ce même secteur en dépendent directement. Avec au total 109 847 emplois induits
en 2014, l’écosystème titre-restaurant contribue à l’emploi en général et devrait
demain y contribuer encore davantage s’il poursuit son expansion de manière
naturelle, avec 113 000 emplois induits en 2015 et 125 000 emplois à l’horizon
2018 - en l’absence de choc interne ou externe. A cela il faut ajouter la fonction vitale
jouée par le titre-restaurant pour les restaurants proposant des « repas ouvriers » ainsi
que de multiples commerces de bouche (boulangerie, charcutiers-traiteurs, etc) dont
l’activité est concentrée sur la pause méridienne et qui sont situés à proximité de zones
d’activité intenses en emplois. Sans qu’on puisse en quantifier le nombre sans mener une
analyse complémentaire, la disparition partielle ou totale du dispositif titre-restaurant et
de son écosystème pourrait ainsi provoquer une vague de faillites et de fermetures
d’établissements.

 Des recettes pour l’Etat supérieures aux pertes théoriques

Pour l’Etat, et sans parler des avantages de disposer d’un modèle sécure, sans falsification
et régulé à moindre frais, le coût d’opportunité du modèle titre-restaurant est neutre voire

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


11
négatif. En clair, les gains théoriques perdus (par l’exonération sociale et fiscale) sont plus
que compensés par les recettes induites par le déversement. En 2014, la perte théorique
est estimée à 1,35 milliards € et les recettes réelles induite par l’écoulement des
titres dans le tissu économique local (total des prélèvements obligatoires induits :
TVA, CS, IR et IS) à 1,6 milliards € soit un solde net positif de 250 millions €.
L’assujettissement du titre-restaurant aux charges et impôts comme s’il était assimilé à
du salaire ou au forfait social (ce qui signifierait un désengagement de l’Etat) provoquerait
un choc ayant pour conséquence un rétrécissement du marché du titre-restaurant
(comme en Suède) et donc mécaniquement de l’assiette taxable conduisant à une baisse
des cotisations prélevées sur la valeur du titre-restaurant lui-même et de celles prélevées
sur le CA induit déversé auprès des affiliés. Au final, en dynamique, un tel choc opèrerait
une destruction de valeur pure et simple sans bénéfice pour l’Etat ni pour les régimes de
protection sociale (voir les résultats du modèle)

La réussite de la dématérialisation suppose la stabilité du cadre


juridique

Depuis le 2 avril 2014, un décret autorise et encadre l’émission de titres dématérialisés.


A ce jour, ils émergent à peine et pèsent pour seulement 1,06 % du marché. Globalement,
le cadre réglementaire général qui prévalait pour le titre papier est reconduit. En
particulier est réaffirmée la non assimilation du titre-restauration à de la monnaie et donc
à du salaire. En clair, le titre dématérialisé conserve son statut de titre spécial et n’est donc
pas assimilable à de la monnaie électronique. La dématérialisation apporte une
simplification pour les affiliés et, pour les salariés et un surcroit de souplesse (le titre est
désormais sécable et plafonné à 19€ par jour). Mais, la dématérialisation permet un
contrôle a priori plus grand des usages (la solution dématérialisée, carte ou mobile, peut
être rendue inutilisable par exemple le dimanche ou les jours fériés et ne peut être
acceptée qu’auprès des commerces autorisés par la CNTR) qui peut expliquer
l’appréhension des salariés face aux nouveaux supports. Pour l’heure il est difficile d’en
estimer l’intensité. En revanche, on peut attendre du côté des affiliés une appétence plus
grande pour le dispositif sous réserve que les 180 000 établissements aient adapté leur
terminal de paiement au système CONECS de transaction développé par les émetteurs
historiques.

Economiquement, la dématérialisation est porteuse d’opportunités pour le marché en


général. D’une part, si une partie des gains de productivité est reportée sur le prix du
service, il faut s’attendre à une hausse de la valeur faciale moyenne (7,61 € pour le papier

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


12
contre 8,12€ pour la carte en moyenne en 2014). A titre d’illustration, si, en 2014, tout le
marché avait été dématérialisé, la valeur globale des titres-restaurant aurait bondi de 389
millions € soit une croissance du marché de 6,77 %. D’autre part, la dématérialisation
offre aussi l’opportunité d’étendre le marché à des segments autrefois peu accessibles
commercialement et peu rentables pour les émetteurs. Elle ouvre la voie à une meilleure
couverture de la « longue traine » que constituent les 3 millions de petites entreprises. Un
objectif collectif non seulement économique mais aussi social qui permettrait d’étendre
le bénéficie du titre-restaurant à de nombreux salariés qui en sont exclus aujourd’hui.
Mais la dématérialisation comporte aussi des risques sensibles : technologique tout
d’abord relatif à l’évolution des moyens de paiement. Les émetteurs n’ont pour l’heure
pas encore bénéficié des avantages du basculement des utilisateurs vers les supports
dématérialisés alors qu’ils ont d’ores et déjà investi dans la dématérialisation près de 100
millions d’€. Risque commercial ensuite : la dématérialisation est l’occasion d’une
révision des conditions contractuelles entre émetteurs et affiliés (négociation des frais
d’apport d’affaires, de participations, délais de remboursement etc). Enjeux
concurrentiels enfin, si l’on songe que le marché est plus accessible via des solutions
dématérialisées (l’investissement pour une émission et la gestion de titres sur support
papier étant plus important). Enfin il convient d’ajouter l’incertitude sur la possibilité
d’une extinction forcée du papier que pourrait décider l’Etat, sujet stratégiquement
sensible pour tous les acteurs.
Au final, la réussite de la dématérialisation y compris pour les quatre nouveaux entrants
déjà présents, au regard des risques sensibles et du poids et de l’influence de la
réglementation, repose sur la stabilité juridique sans laquelle les prises de risques
industriels, technologiques et commerciaux, sont rendues plus hasardeuses. Pour
sécuriser les investissements des acteurs liés à la dématérialisation (initiée par
l’Etat), les pouvoirs publics auraient dont tout intérêt à donner de la visibilité aux
acteurs quant à la stabilité du cadre juridique et fiscal.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


13
Partie II

Modèle d’impact du titre-


restaurant sur les finances de l’Etat
et l’économie.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


14
Le scénario de référence : des recettes induites pour l’Etat supérieures
aux recettes auxquelles il renonce.

Ce scénario repose sur une hypothèse d’absence de choc. Pour calculer le coût théorique
de l’Etat, on estime les gains théoriques qu’il aurait perçus si le titre-restaurant était
considéré comme du salaire. On estime de la même manière, les gains réels (les
prélèvements obligatoires) consécutifs au déversement des titres auprès des affiliés. La
comparaison gains théoriques et des gains réels induits déterminent le coût théorique
pour l’Etat.
En l’espèce, les recettes fiscales et sociales induites pour l’Etat excèdent les pertes
théoriques de 250 millions € en 2015. Le déversement des 7,49 milliards €
engendre par ailleurs 109 847 emplois dont 73 990 emplois dans la restauration.

Modèle avec choc de taxation : une destruction partielle du marché, un


assèchement progressif des recettes pour l’Etat

Il est fait l’hypothèse d’un choc de taxation dès 2015 : désormais le TR est traité comme
si il était du salaire. Les gains sur le titre-restaurant autrefois théoriques deviennent réels
pour l’Etat. Dans la mesure où l’écosystème du TR est construit dès l’origine sur l’espace

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


15
d’exonération sociale et fiscale et au regard du niveau des cotisations, le choc est brutal et
à l’instar du cas suédois, les acteurs se détournent progressivement du TR. Le volume
et/ou la valeur du TR diminue année après année. Le modèle comme il est d’usage fait
l’hypothèse d’une décrue modérée, moyenne et plus prononcée respectivement de 20, 25
et 30 % chaque année jusqu’en 2018. Le modèle rapporte les gains pour l’Etat après le
choc année après année aux gains qu’il aurait eu si le choc n’avait pas eu lieu (dit scenario
de référence).

Prélèvements obligatoires directs et induits


situation de référence et 3 scénarios de baisse du marché
2,8
PO en Mds €

2,3
1,8
1,3
0,8
2014 2015 2016 2017 2018
PO de référence 1,616 1,666 1,724 1,782 1,841
PO avec choc 25 2,231 1,674 1,255 0,941
PO avec choc 20 2,380 1,904 1,523 1,219
PO avec choc 30 2,083 1,458 1,020 0,714

Impact de la perte d'exonération du TR sur les


prélèvements obligatoires
Différence des scénarios avec la situation de référence
1,0
0,5
PO en Mds €

0,0
-0,5
-1,0
-1,5
2015 2016 2017 2018
Scénario 20 0,715 0,180 -0,259 -0,622
Scénario 25 0,566 -0,050 -0,527 -0,900
Scénario 30 0,417 -0,266 -0,762 -1,127

Quel que soit le scenario en 2015, les gains pour l’Etat excèdent ceux qu’ils auraient en
l’absence de choc de 417 à 715 millions d’€ selon les cas. En 2016, le rétrécissement du
marché commence à assécher à la fois les cotisations sociales perçues en amont sur le TR
et celles induites par le déversement (plus faible) auprès des affiliés. C’est pourquoi avec
une baisse de 25 % ou 30 % du marché, l’Etat est déjà en quelque sorte « perdant »
puisque il retire moins de gains que si le choc de taxation n’avait pas eu lieu. La poursuite
du rétrécissement du marché en 2017 et 2018 continue d’assécher les gains en

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


16
prélèvements obligatoires si bien que l’écart entre ce que l’Etat perçoit avec choc et ce
qu’il aurait perçu sans choc ne cesse de s’accroître. Si l’on fait l’hypothèse d’un baisse de
25 % par an, à l’horizon 2018, l’Etat devrait tabler sur « un manque à gagner » de 900
millions d’€. Sur le plan strictement comptable donc, l’Etat est quel que soit le scenario,
sur une période de quatre années, largement perdant. Autrement dit, un choc de
taxation aurait un effet de destruction de valeur dont finalement, et sur un plan
strictement comptable, l’Etat ne trouverait aucun avantage. Le rétrécissement du
marché et du déversement dans l’économie locale mécaniquement provoque au fur et à
mesure des années, des suppressions d’emplois d’ampleurs non négligeables.

Impact de la perte d'exonération du TR sur les emplois


induits par le marché du TR
Différence des scénarios avec la situation de référence
emplois en milliers

0,0
-20,0
-40,0
-60,0
-80,0
-100,0
-120,0
2015 2016 2017 2018
Scénario 20 -25,305 -46,852 -64,884 -80,104
Scénario 25 -30,798 -55,365 -74,784 -90,341
Scénario 30 -36,290 -63,329 -83,448 -98,723

Quel que soit le scenario dès 2015, tous secteurs confondus (restauration traditionnelle
et rapide, GMS, commerces de bouches ou alimentaires spécialisées), les pertes d’emplois
sont significatives supérieures à 25 000. Les pertes plus conséquentes d’années en années
approchent les 100 000 dans le plus mauvais des cas et dépasse les 80 000 dans le
scenario le plus favorable. L’impact est partout significatif mais particulièrement
important dans les secteurs réputés riches en emplois c’est à dire les moins
capitalistiques. A l’horizon 2018, en cas de choc de taxation, la restauration pourrait
perdre 90 % des emplois autrefois induits par le déversement des TR.

Choc forfait social : un jeu perdant-perdant pour l’Etat et les acteurs dès
2016
Le choc change ici de nature. On suppose l’assujettissement du titre-restaurant au forfait
social. L’assiette est soumise à une taxation de 28 % (y compris la CSG et CRDS) mais
continue d’échapper aux cotisations salariales. Le choc est moindre mais très substantiel
encore. Le marché décroit alors de 15 % par an et perd 48 % de sa valeur en quatre ans.
Le coût d’opportunité pour l’Etat est négatif l’année du choc, neutre en 2016 et devient

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


17
positif dès 2017, de 608 millions d’€ en 2018. Par rapport à la situation de référence, 67
756 emplois ont été perdus. La décrue du marché moins forte d’année en année limite la
baisse des effets induits positifs mais en amont la captation de cotisations sociales par
l’Etat est moins forte que précédemment en raison du moindre niveau de prélèvement.
Au final les résultats ici se rapprochent de ceux du scenario 20 % examiné précédemment.

Conclusion
Ainsi donc, et quel que soit le scénario, l’écosystème du titre-restaurant étant
économiquement structuré par l’engagement de trois acteurs, le désengagement de
l’acteur-Etat provoque un rétrécissement de volume correspondant a une destruction de
valeur importante. Y compris sur le plan comptable l’Etat finit, même sous hypothèse
prudente, par engranger moins de prélèvements obligatoires que si il avait maintenu en
l’état le cadre fiscal et social du titre-restaurant.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


18
PARTIE I

ANALYSE ECONOMIQUE ET SOCIALE DU


MODÈLE DU TITRE-RESTAURANT EN
FRANCE

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


19
1. Les trois piliers d’un modèle socio-économique original

1.1. Le titre-restaurant vient rendre effective la volonté du législateur

1.1.1. L’esprit de la loi et la fonction sociale du titre restaurant


Le titre-restaurant (TR) a été institutionnalisé en France par une ordonnance prise en septembre
1967 2 . Le titre restaurant TR est défini comme un titre spécial de paiement remis par l’employeur aux
salariés pour leur permettre d’acquitter tout ou partie du repas consommé au restaurant ou acheté auprès
d’une personne ou d’un organisme agrée. Il est à noter que l’ordonnance de 1967 ne donne pas naissance
au TR mais vient étendre et institutionnaliser une innovation issue du dialogue social, née en Angleterre au
début des années 1950 et reprise en France à partir de 1957 par la société « Crédit-Repas ». Le TR est donc
historiquement et nativement une innovation issue du dialogue social dans l’entreprise que le législateur a
souhaité, au nom de l’intérêt général, instituer et étendre. Et, il n’est pas, comme on l’entend par erreur, une
obligation faite aux employeurs au nom de la loi.

En effet, depuis 1913 3 , les employeurs sont seulement tenus d’assurer à leur personnel la
possibilité de prendre leur repas dans des conditions satisfaisantes. L’obligation est précisée dans une
ordonnance de 1960 selon laquelle lorsqu’au moins vingt-cinq salariés en font la demande, l’employeur est
tenu d’installer un réfectoire dans les locaux de l’entreprise. C’est en raison d’une difficulté d’application de
la loi dans un grand nombre d’établissements ne disposant pas de locaux, que sont apparus les TR. Ces
derniers viennent donc historiquement créer les conditions du respect de la loi - « prendre un repas dans
des conditions satisfaisantes » - partout où cela était de fait impossible. Il importe donc de considérer le TR
non comme une simple application du droit mais un modèle volontariste de financement partiel des repas
des salariés afin que la loi puisse être effectivement appliquée partout. Dispositif complémentaire aux
cantines d’entreprise, le TR doit être vu comme un levier puissant tendant à l’effectivité de la
législation. Il est un allié et un outil dans la mise en œuvre de la volonté intrinsèque du législateur
dont il faut rappeler l’intitulé du décret de 1913 : « Mesures générales de protection et de salubrité : repas
et boissons dans l'entreprise »

Ce détour rétrospectif est essentiel pour saisir la nature volontaire contractuelle ou quasi
contractuelle du TR et son utilité vis-à-vis des principes du droit du travail relatif à la santé des travailleurs :
le TR implicitement voulue par la loi au nom de son effectivité mais jamais imposé par elle se construit, par
négociation volontaire, au nom du droit effectif du salarié à un repas satisfaisant. En cela, il peut être qualifié
d’acquis social.

2 Ordonnance n° 67 .830 du 27 septembre 1967

3Décret du 10 juillet 1913 Mesures générales de protection et de salubrité : repas et boissons dans l'entreprise (Modifié par le décret
N° 60-1087 du 5 octobre 1960). Art. 7. « Il est interdit de laisser les salariés prendre leur repas dans les locaux affectés au travail. »

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


20
Acquis social que le législateur en retour a toujours cherché à préserver, si l’on en juge par la
relative stabilité législative en la matière. Le socle juridique des années 60 a été amendé en plusieurs points
mais le législateur n’a pas ressenti le besoin de modifier en profondeur les obligations dévolues aux
employeurs. A ce jour, en effet, aucune disposition légale et/ou réglementaire n’impose à l’employeur
l’usage du TR ou toute autre obligation de même nature. La seule obligation mise à la charge de l’employeur 4
demeure celle inscrite dans l’ordonnance de 1960 : l’installation d’un véritable local de restauration
lorsqu’au moins vingt-cinq salariés souhaitent prendre leur repas sur leur lieu de travail ou un simple
« emplacement » en deçà de vingt-cinq salariés. Obligation corollaire à l’interdiction de laisser les salariés,
, prendre leur repas à leur poste de travail pour des raisons d’hygiène évidentes.5 Par la suite, le législateur
est bien venu préciser notamment l’équipement minimal du local 6 (le local doit être équipé de tables et de
chaises, d’un réfrigérateur, d’un ou plusieurs appareils permettant de réchauffer les aliments : plaque de
cuisson ou four à micro-ondes) mais sans modifier la teneur et l’étendue générale des obligations. L’action
effective du TR qui bénéficiait à 700 000 salariés en 1981 et à 3,8 millions à la fin 2014 a, semble-t-il, satisfait
l’objectif que le législateur s’était lui-même fixé en la matière il y a plus de 45 ans.

1.1.1. Les grandes étapes de la construction du modèle TR

Les étapes de la construction du modèle du TR

1913 Première loi instaurant une restauration d’entreprise.

1950 Le docteur WINCHENDRON conçoit, au Royaume-Uni, un système de " bons-repas " : première ébauche
du titre-restaurant.

1957 Premières initiatives en France d’introduction du système de bons repas.

1962 Lancement du « Chèque-Restaurant » par Monsieur Roger VASSELIN.

1963 Création du « Ticket-Restaurant »® par la société Jacques Borel.

1964 Lancement du « Chèque Déjeuner » par la société® " Le Chèque Coopératif Restaurant ".

1967 Institution légale du système du titre-restaurant par l’ordonnance n° 67-830 du 27 septembre 1967.

1972 Création de la Centrale de Règlement des Titres (CRT).

1977 Renforcement de l’organisation du système et des pouvoirs de contrôle de la Commission Nationale des
Titres-Restaurant (CNTR).

1980 Le groupe Sodexo rachète les sociétés " Ticket Repas " et " Chèque Restaurant " et choisi de conserver la
marque unique " Chèque Restaurant ".
1981

4 C. trav., art. R. 4228-22


5 C. trav., art. R. 4228-19
6 C. trav., art. R. 4228-22

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


21
Le Titre Restaurant passe la barre des 700.000 salariés bénéficiaires pour une valeur globale de 2
milliards de francs.

1982 Lancement du titre " Chèque de table " par le groupe des Banques populaires.

2001 Loi n° 2001-1276 du 28 décembre 2001 ouvre officiellement la possibilité aux collectivités publiques et
à leurs établissements de délivrer des Titres Restaurant.

2006 Création de deux titres associatifs, le Titre Repas du Volontaire et le Chèque Repas du Bénévole sur le
modèle du titre-restaurant.

2007 La CNTR dotée de nouveaux pouvoirs de décision, contrôle et sanction devient l’interlocuteur unique des
commerçants restaurateurs ou non restaurateurs pour l’obtention de l’autorisation permettant
d’accepter les titres restaurant.

2008 Au 1er mai 2008 transposition à droit constant des textes législatifs et réglementaires relatifs au titre-
restaurant dans le code du travail.

2009 La loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et
aux territoires modifie les articles L3262-1 et L3262-5 en élargissant l’utilisation du titre-restaurant
auprès des détaillants en fruits et légumes.

2010 Parution du décret n° 2010-220 du 3 mars 2010 qui fixe les conditions d’application de l’utilisation du
titre-restaurant auprès des détaillants en fruits et légumes.

Parution du décret n° 2010-1460 du 30 novembre 2010 qui dispose que les titres restaurant ne peuvent
être utilisés que pour acquitter en tout ou en partie le prix d’un repas composé de préparations
alimentaires directement consommables, le cas échéant à réchauffer ou à décongeler, notamment de
produits laitiers. Le repas peut également être composé de fruits et légumes, qu’ils soient ou non
directement consommables.

2011 Le titre-restaurant passe la barre des 3,5 millions salariés bénéficiaires et celle des 5 Mds € de valeur
globale.

2014 Le décret 2014-294 du 6 mars 2014 adapte les conditions d’émission et d’utilisation des titres restaurant
en fonction de leur support. A compter du 02 avril 2014, les titres-restaurant peuvent être émis sur un
support papier ou sous forme dématérialisée.

Le marché du titre restaurant compte désormais quatre nouveaux entrants : Moneo Resto, Monetico
(groupe CIC), Digibon et Resto Flash proposant tous un titre dématérialisé.

2015 Année prévue de mise en service du système Conecs : plateforme technique d’acheminement et de
collecte des transactions des titres-restaurant dématérialisés.

Source CNTR et Alternatives Economiques

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


22
1.2. Le modèle TR est nécessairement porté par un engagement tripartite

1.2.1. L’Etat ouvre la possibilité d’une négociation dans l’entreprise


L’analyse de l’origine du TR, de son développement depuis 1967 en France, montre qu’il procède
d’une construction nécessairement à trois : Etat, employeur et salarié. Il est facile et même de bon sens
de considérer que la tripartition des efforts est la clé de voute centrale du modèle TR sans laquelle
il devient difficile d’imaginer son existence même. Il convient même de considérer que ces engagements
se tiennent les uns aux autres pour former une chaîne de responsabilités et de solidarité étroitement liées
et donc interdépendantes. Depuis l’ordonnance de 1967, le TR pour être financé bénéficie du soutien de
l’employeur, du salarié et de celui de l’Etat. Si le taux de participation ou d’effort peut varier (dans une
certaine limite) d’une entreprise à une autre, il n’y a pas d’exception à la règle de l’engagement tripartite. Si
l’Etat ne participe pas financièrement en tant que tel au TR, il lui réserve un régime social et fiscal de sorte
que la participation financière de l’employeur est exonérée de charges sociales et celle du salarié est sortie
de son assiette d’imposition. Historiquement, le développement à grande échelle du TR s’appuie donc
essentiellement sur l’espace de négociation au sein de l’entreprise, ouvert par l’Etat. De fait, le régime
d’exonération social et fiscal en vigueur dès l’origine a joué comme une incitation implicite à l’ouverture
d’une négociation interne sur le recours au TR dans les entreprises dépourvues de locaux dédiés ou de
restaurant, et les conditions de son financement par les employeurs et les salariés.

L’Etat va plus loin encore dans l’affirmation d’un modèle nécessairement tripartite et ne se contente
pas, comme il aurait pu le décider, d’en faire une condition préférée. Il en fait une condition nécessaire. Pour
éviter un financement unilatéral à la charge de l’une ou l’autre des parties, il conditionne en effet le bénéfice
des exonérations sociales et fiscales à un partage du financement du TR par l’employeur et le salarié. Le TR
est donc nécessairement cofinancé et de surcroit sensiblement à parts égales 7 . Selon la législation en
vigueur, la contribution de l’employeur ne peut en effet être ni inférieure à 50% ni supérieure à 60% de la
valeur libératoire des titres. Le non-respect de ces limites fait perdre le caractère et la qualification de TR,
et par voie de conséquence, l’employeur ne peut se prévaloir des exonérations d’ordre fiscal (taxe sur les
salaires, impôt sur le revenu) et de cotisations de sécurité sociales sur sa part contributive instituées par la
loi.

1.2.2. Le TR ne peut pas être financé unilatéralement


Il ne peut donc exister de modèle du TR sans l’une ou l’autre des parties prenantes. Le principe de
coresponsabilité et de solidarité est inscrit dans le marbre des règles voulues par l’Etat : sans engagement
de l’Etat, absence d’espace de négociation possible dans l’entreprise, sans engagement du salarié ou de
l’employeur, privation du bénéfice de l’exonération sociale et fiscale. Pour cette raison, il paraît peu
probable que le modèle du TR puisse se maintenir à grande échelle et le cas échéant se développer en France
si pour une raison ou pour une autre devait être brisé la tripartition des engagements qui le fondent quasi

7 C. Trav., article L 3262-6

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


23
nativement. Autrement dit, et pour être parfaitement clair, le retrait d’une des trois parties
prenantes, au contrat implicite qu’elles forment, sonnerait le glas du modèle du TR.

On pourrait avancer, pour pondérer l’analyse qui précède, la possibilité d’une négociation
bilatérale. En effet, rien n’interdit formellement une entreprise ou une branche d’activité de négocier le co-
financement d’un titre de restauration avec les représentants du personnel hors des limites réglementaires
fixées par l’Etat. Mais depuis 1967, aucune entreprise, aucune négociation, à notre connaissance, n’a pris le
parti de s’affranchir de l’espace de négociation ouvert par l’Etat ouvrant droit aux exonérations sociales et
fiscales voulues par lui.

Il est ainsi souvent fait référence s’agissant du TR à la notion de modèle social paritaire à la
française. Cette qualification n’est pas usurpée si l’on en juge par cet entremêlement de la législation créant
les conditions d’une dynamique sociale par un co-engagement tripartite, au nom d’un impératif de santé
publique et d’amélioration des conditions de travail des salariés. L’expression n’est pas usurpée non plus
au regard de l’étendue des TR au sein du monde salarié dépourvu de restaurant d’entreprise. Chaque année,
en France, les partenaires sociaux négocient, dans les limites fixées par le droit, les conditions de leur co-
engagement dans le TR dans près de 170 000 entreprises pour près de 3,8 millions salariés bénéficiaires. Il
n’est donc pas surprenant que les acteurs du TR rencontrés dans le cadre de l’étude, quels qu’ils soient,
aient été unanimes pour reconnaître les acquis de 45 années de négociations encadrées et saluer la vertue
observée du modèle sur la dynamique sociale dans l’entreprise.

1.3. Une régulation paritaire, rouage important du modèle

1.3.1. La naissance d’une institution paritaire de régulation


Dans le sillage de la construction sociale du modèle du TR, il était assez cohérent d’accompagner
l’engagement nécessairement tripartite d’une gestion paritaire. Ce type d’administration du système était
et demeure praticable notamment par le fait que le TR n’ayant jamais été considéré par le législateur
européen ou français comme une monnaie et la carte dématérialisée comme un moyen de paiement, sa
régulation ne pouvait justifier de placer l’activité sous le contrôle d’une autorité administrative de
régulation de type prudentiel comme il en existe pour les activités bancaires, financières ou assurancielles.
En logique donc avec la tripartition des engagements qui le fonde, il a d’emblée été fait le choix d’une
régulation du TR par un organisme rassemblant l’ensemble des acteurs. Un décret d’application de
l’ordonnance de 1967 crée explicitement une instance collégiale au pouvoir peu élargi mais assez
rapidement un décret de novembre 1977 8 en redéfinit et en précise les fonctions et le périmètre
d’intervention désormais national. Un décret d’octobre 2007 parachève le renforcement et l’élargissement
des missions de l’instance collégiale devenue la Commission Nationale Des Titres Restaurant (CNTR). Sans
en avoir le statut, la CNTR dispose d’une palette de fonctions : de représentation des partenaires socio-
professionnels, d’informations des usagers des TR, de décisions et de contrôle en général, qui en font une
véritable instance de régulation de fait dont la particularité réside dans sa composition paritaire : présidée

8 Article 15 al 1 du décret n°77.1243 du 8 novembre 1977

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


24
alternativement par un représentant des salariés et des entreprises, son secrétaire général est fonctionnaire
détaché de l’administration.

Ainsi la CNTR remplit une mission9 :

- d’information des utilisateurs de titres-restaurant (entreprises, salariés, émetteur, restaurateurs


et assimilés) sur la réglementation en vigueur.
- De médiation entre les différents acteurs.
- D’étude, de propositions et d’avis10 en se saisissant de toute question se rapportant aux TR, et de
transmission aux autorités ministérielles compétentes de toutes propositions de modification de
la réglementation. A plusieurs reprises, la CNTR a été à l’origine d’une modification de la
législation11.
- De décision au nom du ministre chargé de l’économie d’agreement au TR dans le cadre de la
procédure réglementaire des commerçants dont l’activité ne ressort pas de la restauration rapide
ou traditionnelle.
- De vérification de l’exercice de la profession de restaurateur.

- De contrôle du respect de l’application de la réglementation en vigueur tant par les sociétés

émettrices de TR que par les professionnels acceptants les TR dans le cadre de leurs activités

commerciales.
- De contrôle du fonctionnement des comptes de titres-restaurant ouverts par les entreprises
émettrices avec droit d’information permanent : la commission contrôle ainsi les mouvements tant
physiques que financiers liés aux opérations d’émission et de remboursement de titres effectuées
par ces sociétés. Elle est d’ailleurs assistée pour l’exercice de ces contrôles d’un expert-comptable

9 Les missions et pouvoirs de la CNTR sont prévus à l’article R 3262-32 à 36 du Code du Travail.

10 En 2013, les collèges de la CNTR réunis en assemblée générale extraordinaire rendent un avis (motion) sur le projet de décret relatif
à la dématérialisation des TR qui leur a été soumis par la DGCCRF.
11 En avril 2001 la CNTR a transmis, aux ministres chargés de l’économie et du travail les propositions de modification de
l’Ordonnance du 27 septembre 1967 et de ses décrets d’application, élaborées par le groupe de travail ad hoc qu’elle avait mis en place
et adoptées par l’ensemble de ses membres.
En 2005, elle contribue à la mise en place, à compter du 1er janvier 2006, d’une indexation annuelle de la limite d’exonération de
la contribution des employeurs à l’achat de titres-restaurant par les salariés - article 114 de la loi de finances pour 2006. (cf.
bulletin officiel des impôts 5F-1-06 n°9 du 19 janvier 2006). D’autre part elle formule des propositions nouvelles de modification
de la réglementation des titres-restaurant qui ont été retenues par le Ministre de l’Economie des Finances et de l’Industrie dans le
projet de décret modifiant le décret 67-1165 du 22 décembre 1967 validé par le Conseil d’Etat le 17 janvier 2006.
En 2007, elle finalise avec les ministères de tutelle, les accords qui ont permis la parution au Journal Officiel du 14 octobre 2007 du
décret 2007-1461 du 12 octobre 2007, modifiant le décret 67-1165 du 22 décembre 1967, portant modification des conditions et
procédures d’acceptation des titres restaurant et de l’arrêté subséquent fixant les pièces constitutives du dossier de
demande d’autorisation permettant d’accepter les titres-restaurant.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


25
inscrit au tableau de l’ordre et désigné par un arrêté conjoint des ministres en charge de l’Economie
et du Travail.12

Il est patent que la CNTR, dans la limite de ses moyens, remplit efficacement les missions de régulation
qui lui sont dévolues. Rien, dans tous les cas, ne semble indiquer le contraire. Bien que partie prenante au
sein de la CNTR, aucun des collèges en particulier n’exerce d’influence particulière. Chacun représentant
des intérêts spécifiques pouvant être alignés mais aussi contradictoires avec ceux des autres, ensemble ils
font l’exercice de la concertation continue qui semble faire ses preuves depuis plus de 45 ans et dont le
secrétaire général de la commission, agent de l’administration, est en quelque sorte le garant impartial. Il
est clair que les acteurs du système joue au sein de la commission un rôle qu’il sera difficile de retrouver
dans une autorité administrative plus classique. Ceci étant, cela ne fait pas de la CNTR une « institution des
acteurs » et pour cette raison, s’il semble injustifié d’assimiler la CNTR à une autorité classique de
régulation, il est de même abusif de considérer que le système ou modèle du TR est sous le régime pur d’un
autocontrôle ou d’une autogestion des acteurs 13. Il s’agit en vérité d’une régulation d’un genre hybride
ou l’administration continue de jouer un rôle opérationnel central et l’Etat une tutelle de droit. 14 En
lieu et place de jugements a priori et de principe sur une forme, il est vrai, atypique de régulation, il doit
être porté un regard fondé sur la régulation effective que 45 années d’expérience offre à l’analyse objective.

1.3.2. Une régulation efficiente à moindre frais


Or, si le modèle du TR a connu un tel développement en France sans problème de gestion global
cela tient pour beaucoup à la sécurisation du dispositif dont la CNTR est en partie responsable. Le
modèle du TR fonctionne à la manière d’un club ouvert dont l’accès est uniquement conditionné au respect
de la législation en vigueur. Sous cette seule réserve évidente, il n’existe aucune barrière à l’entrée quel que
soit la nature et la fonction de l’opérateur dans le système : n’importe quel restaurateur ou commerçants
éligibles qui le souhaitent peut devenir affilié au système TR, n’importe quelle société (sous réserve du
respect de règles notamment prudentielles) peut entrer sur le marché de l’émission de titres et n’importe
quelle entreprise sur le territoire peut avoir recours au TR pour le compte de ses salariés. L’analyse montre
que la CNTR a su jouer son rôle de filtre notamment pour disposer, avec le temps, d’un réseau propre
d’affiliés de 180 000 structures en 2014 c’est à dire effectivement éligibles pour recevoir et traiter des TR.
Depuis 1977, chaque structure dont l’éligibilité n’était pas automatique a donc fait l’objet d’un agreement

12 La Commission, pour l’exercice de cette mission, s’est vue reconnaître un droit d’information permanent auprès des sociétés
émettrices de titres. Ces sociétés sont de plus tenues de lui communiquer un état mensuel récapitulant le nombre de titres émis et
remboursés au cours de la période mensuelle concernée, et chaque année un rapport annuel établi par un expert-comptable rendant
compte de leur activité.
13 Cela est évidemment vrai pour tous les domaines ou la CNTR n’est pas compétente en particulier en matière de régulation
concurrentielle. Par conséquent la CNTR ne saurait soustraire les acteurs et notamment les émetteurs au droit commun de la
concurrence.

14 La CNTR est sous la double tutelle du ministère de l’économie et celui du travail et de l’emploi.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


26
individuel15 ; travail de contrôle devenu plus ardu à mesure que l’usage du TR a été, étendu par les pouvoirs
publics à la grande et moyenne distribution et aux commerces de détail (boulangerie, charcuterie, épicerie,
etc), au-delà de la restauration traditionnelle et rapide. Par ailleurs, son droit d’information permanent sur
les émetteurs lui permet d’agréger et de recouper mensuellement l’ensemble des flux physiques et
financiers permettant à l’Etat de disposer d’un historique des flux transparent. La traçabilité totale des flux
constitue un niveau de transparence inégalée. Sur ce plan, nous ne connaissons aucune autorité
administrative sectorielle dotée d’un droit d’information capable d’établir une telle cartographie
des flux financiers des opérateurs relevant de son activité. Il est à noter que cette transparence opérée
par la CNTR est intrinsèque et donc imputable au TR qui a la propriété de laisser des traces tangibles (de
l’émission à l’utilisation) qui rendent son suivi particulièrement aisé. Sur ces deux points : contrôle à
l’entrée des affiliés, contrôle des flux, deux missions centrales de la CNTR, aucune irrégularité ou
dévoiement n’a été relevé ou porté à la connaissance des juridictions compétentes depuis 1977, date à
laquelle le législateur a élargi les compétences de la CNTR. Jamais le secrétaire général, agent de l’Etat n’a
fait usage de son droit de saisine du procureur de la République. La CNTR ayant fait ses preuves, elle a
toutes raisons d’être confortée dans ses missions historiques.

1.3.3. Une structure légère en manque de moyens et de statut


La CNTR en charge de contrôler et réguler un système national de titres de paiement spéciaux d’une
valeur globale de 5,8 Mds€ est paradoxalement une institution d’une surprenante légèreté. Au 1er février
2015, elle comptait 10 salariés sous statut d’agent public. Si, il y a matière à se féliciter de la faiblesse des
coûts induits pour l’administration au regard des enjeux, cette modestie des moyens révèle aussi la faible
capacité de la CNTR à effectuer correctement l’ensemble des missions de contrôle qui lui sont assignées
autres que le contrôle de l’éligibilité au TR des affiliés. En particulier, il est admis que la commission n’a
jamais disposé des moyens humains et logistiques nécessaires pour déployer un contrôle des usages du TR
notamment auprès des affiliés qui en sont bénéficiaires. Si, le contrôle exhaustif était et demeure hors de
portée et sans nécessité au regard de son coût, la possibilité d’effectuer un nombre de contrôles minimum
jugé efficaces et donc dissuasif des usages non réglementaires ne pourrait qu’être favorable au système. Il
conviendra néanmoins de réévaluer les moyens à affecter à la CNTR (250 K€ de budget annuel seulement)
à l’aune des possibilités de contrôle ex-ante induites par la dématérialisation du titre.

15 La législation en vigueur prévoit une procédure d’agreement des commerçants souhaitant accepter les TR. Dès l’origine, les
commerçants pratiquant d’une manière traditionnelle leur activité de restauration (consommation d’un repas sur place dans un
établissement spécialisé) se sont vu reconnaître la possibilité d’accepter les titres-restaurants sans agreement préalable. En 1993, les
pouvoirs publics ont admis que les professionnels exerçant une activité dite de « restauration rapide » (friteries, sandwicheries,
pizzerias) pouvaient également bénéficier des mêmes conditions d’acceptation des titres que celles applicables aux restaurateurs. La
possibilité d’accepter les TR a été ensuite ouverte à de nombreux commerces aux activités « alimentaires ». Toutefois ces commerçants
doivent faire l’objet d’une décision administrative « d’assimilation à restaurateur ». Décision prise par la CNTR dans le mois qui suit la
date de réception du dossier. En cas d’avis favorable, la CNTR adresse au requérant une autorisation provisoire d’un an qui devient
définitive si le commerçant apporte la preuve que l’activité concernée est effective. En cas d’avis défavorable, le commerçant peut
former un recours gracieux auprès de la CNTR ou introduire un recours en annulation de la décision auprès du tribunal administratif.
Cf. C. travail. ; Articles 3262-27 à 32 et décret du 7 septembre 1989.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


27
Enfin et indirectement, la question de la dotation renvoie à celle du statut de la CNTR encore aujourd’hui
largement indéfini d’un point de vue juridique. A la fois dotée d’un budget propre abondé en partie par une
redevance assise sur les titres périmés, elle ne possède pas de personnalité juridique. A vrai dire, la
régulation satisfaisante du système du TR inviterait, sans malice, à recommander une stabilité juridique et
donc à un maintien de l’existant. Néanmoins, au regard des enjeux sociaux et financier à l’œuvre, le flou
juridique de la CNTR pourrait devenir un élément d’insécurité dans un système dont la valeur
repose au contraire, notamment pour les 180 000 entreprises affiliées, 3,8 millions de salariés et les
8 émetteurs sur le marché16, sur la sécurité juridique et économique du modèle.

1.3.4. Une remise en cause discutable

Bien qu’ayant fait ses preuves, la CNTR n’est pas exempte de toute critique. Les pouvoirs publics
expriment parfois un sentiment d’insatisfaction qui repose, selon notre analyse, moins sur des défaillances
de la CNTR qu’aurait eu à observer l’administration que sur des positions de principe et autres éléments
implicites qualifiés de suspicion à l’égard notamment des émetteurs. Sur la position de principe,
l’administration considère aujourd’hui que la CNTR n’est pas légitime à contrôler des comptes et des flux
émanant des émetteurs alors que ces derniers sont représentés au sein de sa gouvernance (Bureau). Qu’en
l’espèce, la CNTR serait dans un potentiel conflit d’intérêt justifiant un transfert de compétences
directement à l’Etat. Le raisonnement n’est pas incohérent mais poussé à son bout, il mènerait de facto à la
disparition complète de l’institution CNTR et doit donc s’interpréter comme une contestation de la
régulation paritaire du système du TR toute entière. Par construction en effet, chaque mission de contrôle
ou de vérification de la CNTR implique un ou plusieurs de ses collèges et s’expose donc, en principe, à un
conflit d’intérêt : l’agreement au TR, le contrôle de son usage, etc., impliquent des entreprises et des salariés
représentés au Bureau de la CNTR. En l’espèce, contester une mission particulière de la CNTR sur le motif
du conflit d’intérêt, c’est implicitement toutes les contester. Or, la force de la commission provient selon
nous de son paritarisme. Par ailleurs, il convient de ramener l’enjeu à la proportion qu’il mérite. La mission
de la CNTR ne porte pas sur le remboursement des TR ; autrement dit la CNTR n’intervient pas sur les
transactions commerciales réelles. Ces dernières s’opèrent de gré à gré entre émetteurs (tenus par une
obligation de remboursement) et affiliés. La mission de la CNTR se limite à vérifier la véracité des
informations transmises par recoupement des informations sur les flux réels et financiers dont elle dispose.

La remise en cause générale du modèle de régulation n’est pas à trouver dans une défaillance de la
commission. La qualité du travail effectuée par la CNTR au regard de surcroît de ses faibles effectifs et
moyens est difficilement contestable par l’administration elle-même. Il faut donc trouver ailleurs les raisons
des réserves émises à son encontre. Deux sujets semblent cristalliser de longue date une forme de suspicion
à l’égard de la commission et des membres de ses collèges. Le premier s’adresse en particulier aux
émetteurs dont la structure de marché à quatre opérateurs alimente les doutes de la DGCCRF sur l’intensité
concurrentielle du secteur. Le second se rapporte à la distribution des TR périmés ou perdus (entre 28 et
31 M€ par an), c’est-à-dire les titres dont la valeur faciale a été perçue auprès des entreprises clientes du
TR et non restituées par les affiliés, adressée en totalité par les émetteurs aux œuvres sociales des

16 Source : CNTR.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


28
entreprises clientes gérées le plus souvent par les organisations syndicales en vertu de la législation en
vigueur. 17 La distribution en pluie auprès des entreprises chaque année de la valeur des périmés et TR
perdus a fait l’objet d’investigations de l’Inspection Générale des Finances (IGF) en 2012 visiblement sans
résultat puisque l’enquête administrative semble avoir été abandonnée ou du moins n’a fait l’objet d’aucune
communication ou de suite connue. A notre connaissance, la CNTR a toujours rendu disponible l’ensemble
des données à l’administration quand celle-ci le jugeait utile et il ne semble exister à ce sujet aucun problème
particulier à relever.

Il importe quoi qu’il en soit, que l’Etat, partie prenante dans la régulation paritaire du modèle TR, puisse
avec l’ensemble des acteurs, continuer à agir dans le cadre d’une relation de confiance indispensable à la
pérennité du modèle. Le réengagement de l’Etat (présence effective de représentants des ministères
de l’Economie et des finances - DGCCRF – et du ministère du travail au sein de la CNTR, etc) est une
nécessité pour consolider un modèle stable.

2. Le TR : une question d’égalité entre les salariés.


2.1. Assurer l’accès à un repas décent à tous les salariés

2.1.1. Eviter un salariat à deux vitesses


Comme énoncé par ailleurs, la volonté du législateur, depuis le décret fondateur du 10 juillet 1913
de « mesures générales de protection et de salubrité : repas et boissons dans l'entreprise » modifié par le
décret du 5 octobre 1960, s’est toujours fondée sur l’hypothèse que l’objectif impérieux d’offrir à chaque
salarié les conditions d’un repas de qualité devait ou pouvait trouver sa solution dans l’entreprise elle-
même. C’est pourquoi, la législation à l’origine, en la matière, porte sur l’obligation, sous certaines
conditions, de mettre à la disposition des salariés un réfectoire logé dans l’enceinte même de
l’établissement. La solution du réfectoire constitue donc l’obligation de base minimale que les partenaires
sociaux, sous l’égide et avec le soutien de l’Etat, ont voulu dépasser au nom d’une part de l’amélioration des
conditions de travail eu égard à la faiblesse de l’obligation au regard de l’objectif et de l’impossibilité
matérielle dans certains cas de satisfaire à l’obligation minimale elle-même. Cela révèle en creux que la
solution unique du réfectoire (la gamelle du travailleur) n’était pas en mesure de permettre à chaque salarié
de déjeuner correctement.

17 « Les titres qui n'ont pas été présentés au remboursement par un restaurant ou un détaillant en fruits et légumes avant la fin du
deuxième mois suivant l'expiration de leur période d'utilisation sont définitivement périmés. Sous réserve de prélèvements autorisés
par le décret prévu à l'article L. 3262-7, la contre-valeur des titres périmés est versée au budget des activités sociales et culturelles des
entreprises auprès desquelles les salariés se sont procuré leurs titres. » C du Trav.; Art L3262-5. A noter que la CNTR prélève pour
frais de gestion 1% des montants réalloués.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


29
Dans le sillage des mouvements sociaux de la première moitié du XXe siècle concomitants à la prise
de conscience patronale de l’importance de disposer de salariés en bonne santé 18 et pour accompagner le
développement de la journée continue (c’est- à-dire avec une courte interruption le midi), se développe
ainsi la restauration d’entreprise, nommée familièrement cantine d’entreprise, soit autogérée soit concédée
à un prestataire extérieur. Le développement de la restauration collective a constitué une avancée sociale
d’importance et donc une forme d’avantage individuel légitime indéniable pour les salariés bénéficiaires.
Avancée matériellement et financièrement hors de portée des entreprises petites et moyennes alors même
que 52% des actifs salariés du privé travaillaient dans une entreprise de moins de 50 salariés en 1976 (Et
65,6% dans une entreprise de moins de 200 salariés). 19 20 C’est donc logiquement que la restauration
d’entreprise s’est développée, notamment après 1945, sous l’impulsion des comités d’entreprise dont la
restauration devient une des prérogatives, sans pour autant concerner la majorité des salariés en France.

La décision des pouvoirs publics d’autoriser la distribution des TR 21 , sous l’impulsion des
partenaires sociaux et le soutien de l’Etat, constitue moins une volonté d’exempter les entreprises de
l’obligation de tenir un réfectoire que de « compléter » le dispositif là ou, ni la loi ni la restauration collective,
ne pouvaient rendre effectif l’impératif social et économique désormais admis du repas de qualité dévolu
au salarié. Il ne pouvait pas être admis qu’individuellement un salarié, selon la taille de son entreprise donc
indépendamment de sa volonté, puisse dans un cas bénéficier d’un repas complet à un prix modéré pris
dans des conditions d’hygiène satisfaisante et dans un autre, être contraint d’en rester à la gamelle dans une
salle simplement munie d’une table, d’une chaise, d’un point d’eau et d’un point « chaud ». Collectivement
ensuite, si la liberté de négociation sur ce point devait être garantie dans chaque entreprise, il ne pouvait
pas être toléré une inégalité sociale structurelle de cette envergure au sein la population salariée. Le TR est
donc avant toute chose un outil tendant au rétablissement de l’égalité, s’agissant du repas au cours

18 « À la fin du XXe siècle et dans les pays industrialisés, manger à la cantine est totalement entré dans les mœurs, ce qui satisfait le
patronat car l’objectif rattaché à ce service est de fournir une saine nutrition au salarié afin de lui permettre de se maintenir en bonne
condition physique et de garder un bon moral. Si le salarié a plus d’énergie pour travailler, il y a moins de risques d’accidents au travail
et plus de chances d’accroitre son rendement ». In Lakhdar Sekiou, Louise Blondin, Bruno Fabi, Mohammed Bayad, Jean-Marie Peretti,
David Alis, Françoise Chevalier, Gestion des ressources humaines, De Boeck Université, 2001. P.204.

19 Source : http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/ref/EMPLOIR08c.PDF

20 En 2012, 52% et 76,5% des salariés du privé travaillaient respectivement dans une entreprise de moins de 50 salariés ou de 200
salariés. Source : http://www.clesdusocial.com/les-salaries-dans-les-entreprises-en-2012-selon-leur-taille

21 Décision du Ministre du Travail acceptant la substitution du «Titre-Restaurant» aux obligations du Décret du 5 octobre 1960. «Il
m'apparaît dans ces conditions que dans la mesure où les représentants du personnel ont, dans une entreprise déterminée, donné leur
accord à l'adoption du système proposé, il n'y aurait pas lieu de faire usage en l'espèce de la faculté de mise en demeure qui vous est donnée
par l'article 31 du décret du 10 juillet 1913, modifié pour l'application de l'alinéa 2 de l'article 7 du même décret, dès l'instant qu'il existe
à proximité de l'entreprise un ou plusieurs restaurants en mesure de fournir, en contrepartie du «TITRE-RESTAURANT » des repas au
personnel, dans des conditions satisfaisantes». RJ/YR. Direction Générale du Travail et de Main d'Œuvre, 6ème bureau. N° 3045 (19
décembre 1962).

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


30
de la journée continue de travail, entre des salariés liés à des entités (entreprises, collectivités
locales, associations, etc) de taille et donc moyens différents et inégaux.

2.1.2 L’égalité devant le repas au travail : une corde à l’arc de l’Etat-providence


En préservant, dans son domaine, le monde du travail d’une fracture ou rupture d’égalité flagrante
entre les salariés, le TR remplit la principale de ses fonctions sociales. Or, ce souci d’égalité ou de moindre
inégalité est important à plusieurs égards : d’abord parce qu’il se rapporte en l’espèce à la satisfaction d’un
besoin primaire vital chargé d’une valeur symbolique particulière, ensuite au nom du principe de non-
discrimination sociale évoqué plus haut, et enfin, parce qu’il participe à préserver l’attractivité sociale des
petites et moyennes entreprises. 22 Remarquons donc que le sujet ne se cantonne pas à traiter le sort
individuel et collectif des salariés et soulève aussi avec lui une problématique économique de limitation des
écarts d’attractivité entre entreprises de taille différente du tissu productif français. Il faut déduire de cette
analyse un principe très clair qui devrait tenir d’impératif et de préalable méthodologique à toute analyse
sur le sujet. L’analyse du TR ne peut en rester au TR lui-même et à son écosystème et doit nécessairement
englober la question de l’égalité entre tous les salariés. En particulier, toute proposition de modification
des règles entourant le modèle du TR susceptibles d’en modifier les conditions matérielles ou
financières d’accessibilité, ne devrait jamais faire l’impasse sur une analyse d’impact de ces
modifications en terme d’égalité de traitement entre salariés qui bénéficient d’une restauration
d’entreprise et ceux n’en bénéficiant pas. Cette exigence est loin d’être secondaire ou l’expression d’une
posture intellectuelle ; elle exprime la volonté d’abord implicite puis explicite du législateur, de l’Etat et des
partenaires sociaux depuis l’origine, de tendre, s’agissant du repas, vers une égalité de traitement entre tous
les salariés.

2.2. Le TR réussit-il à maintenir une égalité entre salariés ?


La question peut être abordée de trois manières différentes et se sous diviser en trois questions.
Une première approche peut faire le point sur le taux de couverture du TR c’est à dire sa capacité, telle
qu’observée, à couvrir les besoins là où ils ne le sont pas notamment par la restauration collective et qui se
formulerait trivialement par la question : le TR a-t-il atteint sa cible ? Une seconde viserait à comparer les
conditions matérielles et financières d’accès au repas pour un salarié type en restauration collective et sous
le régime du TR et que l’on formulerait par la question : à qualité de repas comparable, l’effort financier du
salarié munis de TR est-il comparable à celui bénéficiant d’un restaurant collectif ? Enfin une troisième, plus
juridique, recoupant en partie la seconde, comparerait les régimes sociaux et fiscaux du TR de la
restauration collective et viserait à répondre à la question : l’Etat traite-il équitablement ces deux modes de
restauration salariée ?

22 La question de la bonne ventilation des salariés parmi toutes les entreprises du tissu productif français quelle que soit leur taille est
un sujet d’intérêt économique général débordant la seule question du repas méridien. Il est un fait, souvent observé que les grands
groupes mettent à la disposition de leurs salariés des services tendant à améliorer les conditions de travail et de vie absents dans les
entreprises de plus petites tailles. L’attractivité des PME demeure un sujet d’envergure en France

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


31
2.2.1. Une couverture de la population cible importante mais incomplète
S’agissant de la restauration collective, en 2014, 3 800 000 salariés 23 ont bénéficié de restaurants
d’entreprise ou inter-entreprises (mutualisation du restaurant collectif entre plusieurs entreprises) soit
environ 17,5 % de la population active salariée. Cet indicateur est cependant trop imparfait pour approcher
« le taux de couverture » ou « taux d’atteinte de la cible ». Si la définition d’un indicateur parfaitement exacte
nécessiterait un travail plus pointu, il est cependant possible d’élaborer un indicateur cohérent, en sortant
de la base des salariés éligibles les salariés non concernés par la journée continue. 24 Sur la base de 16,2
millions de salariés « éligibles », la restauration collective a bénéficié à 23,4% d’entre eux en 2014. 12,4
millions de salariés pour la plupart logés dans des entreprises de taille intermédiaire, moyenne ou petites
seraient ainsi susceptibles d’avoir recours au TR. En 2014, 3,8 millions de salariés ont bénéficié de TR
dans 130 000 entreprises (dont plus de 90% de moins de 250 salariés) soit 30,6% des salariés
concernés.25

A eux deux, restauration collective et TR couvrent environ 54% des salariés travaillant en journée
continue. Le TR vient massivement compenser l’absence de restaurant collectif. Incontestablement donc il
remplit une fonction sociale étendue en matière d’égalité, qui a beaucoup progressé, mais échoue à couvrir
l’ensemble des salariés dépourvus de restauration collective. L’idée répandue selon laquelle le TR a
désormais complétement couvert les besoins auxquels il était censé répondre doit donc être pondéré par
son succès relatif au regard de la cible. Il conviendrait alors d’analyser plus avant la situation des salariés
dépourvus et de cantine d’entreprise et de TR. Mais d’ores et déjà plusieurs facteurs peuvent être avancés
pour expliquer la pénétration incomplète du TR notamment au sein des PME. En premier lieu, la décision
de recourir au TR dans les petites entreprises relève le plus souvent de la décision unilatérale du chef
d’entreprise. Dans ces structures, le repas méridien et donc le TR à des difficultés à émerger comme un
enjeu social en raison de l’absence ou de la faiblesse de la négociation sociale en interne. En second lieu, les
émetteurs ont une incitation faible à consacrer des frais commerciaux d’acquisition souvent élevés dédiés

23 Source : Observatoire Girafood de la restauration collective, 2014.

24 Pour estimer la base des salariés « éligibles », il convient d’écarter ceux dont l’activité salariée ne se déroule pas en journée continue.
En effet une part de la population active occupée n’est pas en situation de devoir prendre un repas à l’occasion de la pause méridienne
ou voit celui-ci être pris en charge par l’entreprise, du fait de conditions de travail particulières (expatriés, etc), nécessairement par
d’autres moyens que le restaurant collectif ou les TR.
Aux 26,5 millions d’actifs occupés, il convient en premier lieu de ne retenir que les actifs salariés du secteur marchand et non
marchands soit 23 millions fin 2013. Auxquels, il faut retrancher les salariés dont le temps de travail hebdomadaire est inférieur à 5h
(1,8 millions), les travailleurs occasionnels ou permanent de nuit n’ouvrant pas droit au TR (2,5 millions) ainsi que les salariés en
équipe en horaires décalés (1,6 millions en équipe du matin dont la journée de travail s’achève avant la pause méridienne), les salariés
de l’hôtellerie et de la restauration (0,936 million) et autres secteurs spécifiques. Par approximation, on peut considérer que 66% des
salariés du secteur marchand et non marchand sont dans le périmètre des obligations légales imposées à l’employeur au titre du repas
de la pause méridienne et sont donc de fait « éligibles » soit à un réfectoire soit à un restaurant d’entreprise soit aux TR, soit 16,2
millions de salariés. Source : http://www.insee.fr/fr

25 Le TR est souvent proposé en option dans les grandes entreprises disposant de restaurant collectif. Néanmoins, la fonction sociale
du TR étant de compléter la restauration collective, sa population cible est ici celle des entreprises de moins de 250 salariés. C’est
pourquoi 2% (100-98) des TR sont ici considérés hors cible.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


32
à des entreprises dont la taille est trop modeste pour autoriser des gains d’échelles. En somme, en deçà d’un
certain seuil de salariés, les émetteurs considèrent que les revenus qu’ils obtiennent de la vente de TR ne
compensent plus les coûts fixes (commerciaux d’acquisition) et variables (imprimerie, acheminement, etc)
nécessaires à la production du service. Enfin, les équipes commerciales des émetteurs quadrillent le
territoire mais peinent à couvrir toute la profondeur du tissu productif. Cela est vrai pour les très
nombreuses micros entreprises (plus de 2 500 000 entités en 2013) et les entreprises les plus petites parmi
les 982 000 entités de 1 à 9 salariés.26

Pour étendre le « taux de couverture », deux pistes peuvent être évoquées. La première vise à
dynamiser par la mutualisation des moyens le dialogue social dans les petites entreprises. Ainsi, depuis
2011, à l’initiative de certaines organisations syndicales des salariés et des organisations professionnelles 27,
des commissions paritaires locales ont été constituées dans tous les champs professionnels de l’artisanat
(entretien, coiffure, couture, garages, etc). La seconde piste se rapporte aux opportunités que pourrait offrir
la dématérialisation du titre pour rentabiliser des segments d’entreprises autrefois peu exploitable. En effet,
la modification des rendements d’échelle dans un univers dématérialisé, avec disparition partielle de coûts
variables et donc des coûts marginaux, peut rendre viable le traitement des ventes dispersées à petite
échelle. L’exploitation de la « longue traine » 28 des 3 500 000 petites entreprises en France doit être
considérée avec sérieux par les émetteurs.

Au final, si l’on analyse la question de l’égalité sous le prisme de l’offre mis à la disposition des
salariés, on en arrive à la conclusion d’un modèle du TR ayant su, avec le temps, remplir une fonction sociale
de premier ordre. A la faveur de la dématérialisation à venir du titre, son extension souhaitable aux
zones encore vierges devrait être un objectif collectif commun à tous les acteurs et soutenu par les
pouvoirs publics.

26 http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?ref_id=NATTEF09203

27 « L’accord pour le développement du dialogue social dans l’artisanat va permettre de prendre des initiatives et de négocier au plus près
des réalités de l’artisanat, qu’il s’agisse de déterminer les minima salariaux, d’améliorer les conditions de travail, ou d’optimiser l’accès à
la formation (…) Toutes les entreprises relevant de l’accord, bénéficieront des mesures négociées (…) Enfin, ce dispositif mutualisé permet
d’éviter aux entreprises les coûts inhérents à une organisation en interne du dialogue social : prises en charges des délégués du personnel,
financement du comité d’entreprise ( 0,2% de la masse salariale) ». Union Professionnelle Artisanale (UPA) 2009. Source :
http://upa34.fr/dialogue_social.php

28 La longue traîne est un phénomène d’abord constaté sur les sites marchands proposant un grand nombre de références. Le
phénomène de longue traîne traduit le fait qu’une bonne part du chiffre d’affaires puisse provenir d’un très grand nombre de
références vendues chacune en petite quantité. La longue traîne "contredit" la règle des 20/80. Selon le principe de distribution Pareto,
80 % du chiffre d’affaires est réalisé par 20 % des clients (Pareto a initialement souligné ce principe de répartition non linéaire pour
la détention des richesses par la population). La longue traine est symptomatique du e-commerce et rend possible la commercialisation
de produit à très faibles volumes de vente.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


33
2.2.2. L’effort financier des salariés selon le mode de restauration

La question de l’égalité peut aussi s’appréhender sous l’angle du taux d’effort du salarié selon qu’il
bénéficie d’un restaurant collectif ou d’un TR. L’analyse ici ne prétend pas à l’exactitude d’un véritable
modèle prenant en compte l’extrême variété des situations mais propose d’exposer des faits stylisés donc
significatifs suffisants pour « dimensionner » la question. Quelques simulations simplifiées délivrent des
ordres de grandeur utiles à l’analyse. Dans les trois simulations la participation salariée nécessaire pour
acquitter le prix du repas dans un restaurant d’entreprise est fixe et normé à 6€. Celle du salarié au régime
TR varie en fonction de la valeur faciale du titre (donc du montant de l’aide employeur). Les simulations
font varier la valeur faciale du TR et l’impact sur l’effort financier consenti comparé à celui observée pour
le salarié en restaurant d’entreprise.29 Encore une fois, l’écart à la moyenne de la valeur des paramètres
étant forte (le prix d’un repas de la restauration commerciale pouvant varier selon l’établissement, la zone
géographique, le prix salarié de la restauration collective variant globalement de 4 à 8€ et naturellement le
niveau de rémunération du salarié etc), les simulations ne peuvent pas représenter la variété des situations
mais des cas généraux exemplaires. De même, la simulation ne peut prétendre à une comparaison « toutes
choses égales par ailleurs » mais « toutes choses comparables par ailleurs » s’agissant notamment de la
qualité de la prestation et du choix du prestataire, imposé dans un cas et librement choisi dans un autre ou
du régime fiscal de la part salarié non exonérée dans un cas et partiellement exonérée dans l’autre.

CAS 1 (VF du TR à 7,5€)

Mode Nombre Coût annuel total Participation salarié Taux


restauration repas effort

TR 218 2616 1798,5 8,94

RC 218 1308 1308 6,50

29 La réalisation de ces simulations repose sur quelques paramètres. Le prix d’un repas de la restauration commerciale a été fixé à 12€.
Hypothèse réaliste plutôt modeste si l’on s’en réfère d’une part aux données de l’étude récurrente Girafood sur la restauration et
l’évaluation faite en 2009 par la DGCCRF. Dans le cadre de la réflexion engagée sur la baisse de la TVA dans la restauration française,
la DGCCRF a relevé 7.400 prix dans plus de 2.400 restaurants de 99 départements. Il ressort que le coût moyen du menu s'affiche à
12,95 euros. Concernant le plat du jour, les agents de la Direction générale de la concurrence ont relevé un tarif moyen de 9,67 euros.
La participation de l’employeur a été fixée à 50% de la valeur faciale (VF) du TR. Dans le cas 1, la (VF) est fixée à sa valeur moyenne
soit 7,5€, à 5€ dans le cas 2 et à son plafond dans le cas 3 soit 10,72€. La participation annuelle du salariée est donc égale au coût total
du repas auquel on soustrait la participation de l’employeur multiplié par le nombre de repas. La participation du salarié au repas dans
le cadre de la restauration d’entreprise a été fixé à 6€, moyenne estimée par XXX. Enfin, le taux d’effort représente la part du revenu
brut d’un travailleur payé au salaire médian consacrée au financement de son repas méridien.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


34
CAS 2 (VF du TR à 5€)

Mode Nombre Coût annuel total Participation annuelle salarié Taux


restauration repas effort

TR 218 2616 2071 10,30

RC 218 1308 1308 6,50

CAS 3 (VF du TR à 10,72€)

Mode Nombre Coût annuel total Participation annuelle salarié Taux


restauration repas effort

TR 218 2616 1447 7,25

RC 218 1308 1308 6,50

Evidemment et dans tous les cas, le recours au TR ouvre la possibilité d’une participation de
l’employeur au financement du repas. En cela, le TR comble une partie de l’inégalité de traitement entre
salariés bénéficiant d’un restaurant collectif et les autres. Sans participation de l’employeur, le salarié
sans possibilité d’accès à un restaurant collectif consacrerait 13% de son revenu brut annuel à son repas
méridien contre 7 à 10 % selon l’effort consenti par l’employeur.

Néanmoins et dans tous les cas, c’est-à-dire quelle que soit la valeur faciale du TR, l’effort
demandé au salarié est toujours supérieur à celui d’un salarié déjeunant dans un restaurant
collectif. Ecart significatif de 2,5 points du revenu brut annuel au salaire médian et de 3,5 points lorsque la
valeur faciale du TR quitte sa valeur moyenne (7,5€) pour baisser à 5€. Seule un TR fixé à sa valeur
« maximale » (plafond de la part employeur exonérée de cotisations sociales fixé à 5,36 euros pour 2015)
permet de rendre comparable, bien que non alignés, les efforts financiers consentis par les salariés quel que
soit le mode de restauration. Si le principe de la libre participation de l’employeur au TR a toujours été de
mise contribuant à son attractivité, se pose néanmoins la question, puisque un plafond a été défini, de la
légitimité d’un seuil plancher de participation employeur dans l’objectif de contenir les écarts de
situation entre salariés bénéficiant du TR d’une part mais aussi et surtout entre ceux-ci et les bénéficiaires
d’un restaurant d’entreprise.

Ces simulations projettent des situations standardisées. Dans la réalité, l’examen de situation
concrète révèle des écarts conformes ou plus significatifs que ceux induits par les paramètres de la
simulation. Ainsi et à titre d’exemple, le prix repas complet dans les selfs intra-entreprises du groupe

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


35
Vivendi-Canal + a été après négociation fixée à 4,5€, à 6,20€ à la SNCF, entre 6 et 8€ dans les 3 restaurants
inter-entreprises du centre-ville de Pau, etc.30 31

Les écarts constatés s’expliquent logiquement par le fait que le restaurant d’entreprise a par
définition l’obligation de proposer un repas à un prix modéré c’est à dire « sensiblement » inférieur à celui
qu’il serait dans un restaurant commercial. Que le restaurant collectif soit autogéré ou concédé, il permet
dont au salarié de participer à un repas dont le prix global est inférieur au marché et parfois même égal au
coût (service non marchand). S’agissant du TR, si le salarié dispose d’une liberté quasi totale de choix dans
sa restauration, il doit dans tous les cas assumer le prix commercial d’un service marchand. A titre
d’illustration, et selon la DGCCRF, le prix moyen d’un « plat du jour » était proche de 10€ dans la
restauration commerciale contre 3 à 5€ dans un restaurant collectif d’entreprise en 2009. A cela s’ajoute,
au cas par cas, l’effort très important de l’employeur au financement du restaurant collectif excédant celui
qu’il consentirait pour cofinancer un TR même fixé à son plafond. Cet effort (participation au CE,
subventions directes et/ou participation aux frais du repas du salarié) correspond à une politique globale
des ressources humaines : le restaurant de plus en plus diversifié en self, bar, salons etc., devient,
notamment au sein des grandes entreprises, une place centrale de cohésion interne et d’amélioration des
conditions de vie au travail.

A ces différences structurelles à l’origine de taux d’effort différents du salarié consacré au repas
méridien, selon le mode de restauration, il convient d’ajouter des facteurs conjoncturels non négligeables
susceptibles de combler ou d’aggraver les écarts. Notamment, il importe de mentionner la perte de pouvoir
d’achat du TR depuis le début des années 2000. Cette tendance est le résultat d’un effet ciseau avec d’un
côté le gel du barème de la première tranche d’imposition (depuis 2011) sur lequel était indexé le plafond
d’exonération du TR freinant sa revalorisation et de l’autre, une tendance à l’augmentation des prix dans le
secteur de la restauration plus rapide que celle observée pour l’ensemble des biens et des services,
d’environ 0,7 point d’indice annuellement (entre 2000 et 2009). Au final, l’effet de ciseau a provoqué une
baisse du TR en valeur (ou en pouvoir d’achat) de l’ordre de 9 % depuis 2005 d’ailleurs reconnue dans un
rapport parlementaire de 2012.32 Pour 2015, une décision de revalorisation du plafond de 0,5% a été prise

30 Exemple de conditions d’accord de restauration : Dassault Aviation. Sur la base du prix d'un repas complet: 50% est à la charge du
consommateur, 28% est à la charge du CE, 22% est à la charge de la Direction. Les investissements, fluides (eau, gaz et électricité) et
frais de gestion sont payés par la Direction. Le prix de revient du repas est de 10,33€. Un repas complet coûte au salarié 5,20€ en
moyenne. Le plat principal est au prix de 3,3 €, le reste (entrées, fromages, desserts) à 80 cts.

31 Exemple de co-financement de la restauration sociale collective : Le CNRS. La restauration sociale collective (infrastructure,
équipement, audits et titres repas compris) constitue pour l’établissement une dépense totale de 20 800 223 €. La restauration sociale
représente 62,16 % des dépenses d’action sociale et 0.65 % du budget global du CNRS en 2011 (3 204 M€). Parallèlement, la
participation des usagers au cout du repas génère des recettes qui viennent abonder les crédits sociaux et diminuer le coût de revient
de la restauration. Ces recettes se sont élevées en 2011 à 5 758 480 € HT. Au final, la participation du CNRS, au coût de la fourniture
des repas aux usagers de ses restaurants propres, est de 6 253 685 € HT. Aussi, ramené à l’unité repas, la participation employeur en
restauration propre est de 4.35 € HT et de 3,99 HT pour le salarié.

32 Sénat, Marie-France BEAUFILS, « remboursements et dégrèvements », projet de loi de finances pour 2013, rapport général Tome
III Annexe 25, fait au nom de la commission des finances.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


36
par le gouvernement. Compte tenu de l’inflation très modérée en 2014 et probablement en 2015, l’enjeu
reste circonscrit. Cependant, en prévision d’une inflation plus importante, il conviendrait de redéfinir une
règle cohérente et visible d’indexation. Le gel du plafond du TR dans tous les cas ne peut que creuser les
écarts entre salariés disposant ou non d’une restauration collective.

2.2.3. La logique sociale et juridique de l’Etat

Enfin, la question de l’égalité peut être examinée du point de vue des règles juridiques applicables.
En la matière, force est de constater que l’Etat, pour sanctuariser en quelque sorte le repas méridien, a
depuis plus d’un demi-siècle cherché à faire bénéficier, sous conditions, la restauration collective puis le TR
de régimes sociaux et fiscaux favorables à leur existence et à leur développement. S’agissant de la
restauration collective, les subventions de l’entreprise dédiées notamment aux infrastructures (bâtiment
logeant le restaurant) ou dépenses de fonctionnement (électricité, chauffage) sont imputées en charges et
ne sont naturellement pas soumises à cotisations. Les règles d’exonération sociale de la participation
financière directe de employeur, à l’instar du TR, sont encadrés et relève d’une logique assez similaire.33 En
clair, si la participation au repas du salarié dépasse un seuil (au moins égal à 50% d’un montant forfaitaire
fixé par l’administration), l’avantage n’est pas intégré à l’assiette des cotisations. De la même manière,
l’exonération de la participation employeur au TR s’applique si cette participation en deçà d’un plafond
(5,36€ en 201534) est comprise entre 50 et 60% de la valeur faciale du titre. Le législateur n’a donc eu de
cesse de consacrer la nature sociale et exceptionnelle de la prestation, quel qu’en soit son mode de
distribution, et de retenir un régime d’exonération différencié mais propre à : soutenir la négociation
et l’initiative sociale au sein de l’entreprise, écarter les modes de financements unilatéraux et préserver
une égalité fiscale relative entre les salariés quel que soit leur mode de restauration.

33 On entend par cantine ou restaurant d’entreprises les établissements bénéficiant du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée aux
recettes provenant de la fourniture de repas au sens de l’article 85 du code général des impôts. Lorsque la participation financière du
salarié est inférieure à l'évaluation forfaitaire de 4,65 euros, il convient de distinguer deux situations : si la participation est inférieure
à 50 % de l’évaluation forfaitaire, il convient de réintégrer la différence dans l'assiette des cotisations ; si la participation est supérieure
ou égale à 50 % de l'évaluation forfaitaire, l’avantage en nature peut être négligé et ne doit pas être intégré dans l’assiette des
cotisations. Exemple : la participation salariale s’élève à 3 euros par repas, l’avantage en nature nourriture peut être négligé et ne pas
être intégré dans l’assiette des cotisations. Source : URSSAF.
34 Plafond indexé jusqu’en 2104 sur la revalorisation de la première tranche de l’IR. L’indexation sur un indicateur de coût de la vie
soit général soit sectoriel paraît être l’option la plus logique. Ce point mérite néanmoins un examen approfondi.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


37
2.2.4. La situation des salariés modestes
S’agissant d’ « égalité face au repas », il convient de porter un regard particulier sur les salariés dont
la rémunération est la plus modeste3536. Logiquement, le taux d’effort financier auquel ils sont contraints
pour manger le midi est le plus élevé de tous. La variation de la participation monétaire implicite
(exonération social et fiscal) et explicite (contribution employeur) a donc un impact économique relatif plus
important chez les salariés modestes. Au smic et en gardant les hypothèses de la simulation qui précède,
avec un TR dont la valeur faciale est de 5€, le taux d’effort atteint 12,5% du salaire brut pour un ticket
moyen journalier à 12€ et de 9,9% pour un ticket moyen à 10€. Sa valeur constitue un sujet de pouvoir
d’achat certains pour le salarié notamment au smic ou proche du Smic en rappelant que le salaire net
médian en 2014 était de 1712€ en France.

Si l’on simule la disparition totale du TR, toutes choses égales par ailleurs, le salarié au smic
consacrera 15,9% ou 13,2% ou bien 6,6% de son salaire brut respectivement pour un ticket moyen37 de 12,
de 10 ou de 5€. Placé dans cette situation, soit le salarié décide de maintenir une qualité de repas inchangée
et devra transférer une part supplémentaire de ses revenus au repas méridien, soit il consacre à ce dernier
un ticket moyen plus faible. Compte tenu des dépenses contraintes d’un ménage modeste qui pré-engage
près de 75% de son revenu et donc de son niveau de contrainte budgétaire, un « retour à la gamelle » ou
un appauvrissement nutritionnel des repas ne peuvent pas être écartés.

D’autant que, du point de vu nutritionnel, une variation du revenu est associée à un effet qualitatif
particulièrement marqué lorsque les individus disposent de faibles revenus. Une étude américaine (J.
Castner & J. Mabli) démontre que la qualité nutritionnelle (à ne pas confondre avec la part du revenu
consacré à l’alimentation) est fonction croissante du revenu. Ainsi tout euro supplémentaire destiné à la
nourriture par un salarié modeste est « investi » dans une alimentation supérieure d’un point de
vue nutritionnel. L’étude américaine est cohérente avec les observations et analyses faites sur l’obésité en
France. Le gradient social de l’obésité en France, ou le problème est relativement moins aigu que dans
certains autre pays, est particulièrement prononcé : plus le revenu diminue plus le risque d’obésité
augmente.38 La question de la participation financière au repas des salariés aux revenus modestes soulève

Voir l’étude sur le comportement alimentaire des ménages pauvres aux USA lié à une variation du revenu. L. Castner et J.
35

Mabli.2010.

http://www.mathematicampr.com/~/media/publications/PDFs/nutrition/FoodExpendDietQuality.pdf

36 Voir aussi l’étude de référence de Christopher Wanjek : « Food at work ». Organisation du Internationale du Travail (OIT). 2005

37 Il est rappelé que le ticket moyen désigne la dépense moyenne journalière du salarié pour déjeuner au cours de sa journée de
travail.

38 La France est l’un des pays européens les moins touchés par l’obésité, mais c’est aussi un de ceux où les inégalités sociales d’obésité sont
les plus prononcées. L’étude Obépi-Roche, conduite par le docteur Marie-Aline Charles (Inserm-U780, Villejuif) et le professeur Arnaud
Basdevant (hôpital Pitié-Salpêtrière) a été la première à attirer l’attention sur les inégalités sociales d’obésité en France et à permettre
d’en suivre l’évolution, à l’aide d’enquêtes répétées tous les trois ans depuis 1997. Elle montre que l’obésité a fortement progressé chez les
adultes français, passant de 8,5 % en 1997 à 14,5 % en 2009, et que d’importantes différences se cachent derrière ces moyennes, en fonction
de la catégorie socioprofessionnelle, du niveau d’éducation et du revenu. Ces différences se sont accentuées avec le temps. Ainsi, en 2009,

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


38
donc un double problème lié entre eux, de pouvoir d’achat effectivement consacré au repas et de qualité
nutritionnelle de ces repas. Par conséquent, toute intention de modification des conditions de
participation au repas du salarié doit se préoccuper des effets de ces changements sur la population
salariée modeste, celle pour qui, les effets quantitatifs et qualitatifs des changements, seront les plus
prononcés.

2.2.4. La logique égalitariste du TR au sein de l’entreprise

Enfin, toujours sur le terrain de l’égalité, il faut noter que le TR participe à une logique égalitaire au
sein de l’entreprise (intra-entreprise). Il est fait parfois reproché au TR d’être indistinctement distribué à
tous les salariés d’une entreprise dans des conditions identiques. Et, il est vrai que la contribution de
l’employeur, sauf exceptions notamment au sein de certaines collectivités territoriales, est identique, quel
que soit le salaire de l’employé. D’emblée, on fera la remarque que cette règle pratique éloigne le TR de
l’idée qu’il est un salaire déguisé et non une prestation rendue solvable. Le TR n’est en effet pas indexé sur
la hiérarchie des salaires. Il se situe donc ailleurs, sur un autre plan visant une universalité d’accès. En
distribuant à tous les salariés un TR chaque jour aux mêmes conditions, le dispositif vise l’exercice d’un
droit interne (droit au TR) décorrélé de la logique salariale et calqué sur la satisfaction du besoin primaire
égal pour tous (se nourrir). Même si matière à discussion il y a, le modèle du TR n’a pas vocation à remplir
une fonction redistributive, remplie pour l’essentiel dans l’entreprise par la hiérarchie des salaires entre les
salariés.

En conclusion sur cette question centrale de l’égalité relative ou de la recherche d’égalité face au
repas entre les salariés : le suivi du taux de couverture respectif de la restauration collective et du TR, du
taux d’effort comparé des salariés selon le mode de restauration, du pouvoir d’achat du TR au regard de
l’évolution du prix de la restauration collective, du régime social et fiscal comparé, de la condition
spécifiques des salariés modestes ; tous ces éléments doivent être pris en compte dans l’analyse du TR et
de son évolution à venir si l’on tient pour important l’objectif de sanctuariser le repas de tous les salariés,
comme un droit de base tenu pour acquis et éviter une rupture flagrante d’égalité plus importante encore
que celles que nous observons déjà.

il y avait 22 % d’obèses chez les plus pauvres et 6 % chez les plus riches, soit un risque 4 fois plus élevé chez les personnes les plus
défavorisées, alors qu’en 1997 le risque était « seulement » 2,5 fois plus élevé. Cette relation inverse entre statut socio-économique et
obésité est présente dès l’enfance, et chez l’enfant comme chez l’adulte, ce qui frappe, c’est son aspect linéaire et très régulier : le
pourcentage d’obésité augmente de façon progressive à chaque fois que le niveau de revenu diminue. C’est pourquoi cette relation est
dénommée « gradient social de l’obésité », ce qui suggère une relation de cause à effet entre statut socio-économique et obésité. Nicole
Darmon, chercheur INSERM. Janvier 2015.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


39
3. Le modèle du TR crée un écosystème socio-économique de masse
3.1. Un modèle devenu massif en croissance régulière

3.1.1. Une extension rapide puis tempérée


L’extension de la couverture du TR est le fruit du modèle qui oblige à l’engagement de chacune des
parties mais en contrepartie duquel chacune y trouve, pourrait-on dire, son compte. Est-il d’ailleurs possible
d’imaginer qu’un modèle gagnant pour les uns, perdant pour les autres, puisse en un peu plus de 40 ans,
gagner plus de 3 millions de bénéficiaires salariés dans environ 120 000 entreprises utilisatrices, auprès de
180 000 affiliés en France et, gagner la confiance de 39 pays dans le monde ou désormais le TR est d’usage
courant ? En France, les années 70, 80 et 90 ont vu le TR prendre une dimension nationale d’envergure. En
1970, 175 000 salariés bénéficiaient d’un TR, contre 700 000 en 1980, 2 000 000 en 1990. Depuis les années
2000, l’extension du TR a suivi un sentier de croissance stable mais plus modéré expliqué par la difficulté à
pénétrer le tissu des petites et très petites entreprises. Le ralentissement de la croissance est donc naturel.
A ce sujet, la généralisation de la dématérialisation pourrait offrir de nouvelles perspectives de croissance.
C’est l’un des enjeux de ce saut technologique39. Quoi qu’il en soit, la stabilité juridique et économique du
modèle a donc autorisé une croissance équilibrée et depuis 2009, une croissance en valeur et en volume
relativement modérée. Le soutien à la croissance vient d’une part des efforts commerciaux déployés par les
émetteurs pour convertir au TR de nouvelles entreprises mais aussi de l’ouverture progressive du TR à la
fonction publique notamment territoriale et à ses établissements. Jusqu’à maintenant, le législateur a donc
suivi une logique d’ouverture du TR au monde du travail et non l’inverse. Ce développement a été de pair
avec celui du réseau d’affiliés (restaurants, commerces de détail spécialisé, supermarché et épicerie, etc)
souhaité par l’Etat de plus en plus variés et nombreux. En 1980, le modèle comptait 40 000 affiliés, fin 2014
il en comptait 180 000.

Avec un taux de couverture 40 de l’ordre de 30,6%, déversant dans l’économie locale et


nationale 7,5 Mds€, le TR est devenu un écosystème social et économique de premier ordre.

3.1.2. Une progression équilibrée qui devrait se prolonger


Sa stabilité, sa sécurité et sa notoriété auprès des acteurs dont notamment les salariés invite à
penser que la croissance maitrisée, plus modérée mais constante devrait se poursuivre dans les années à
venir. Sur la base des données des années précédentes, une projection, par régression, permet de vérifier et
de dimensionner les valeurs futurs attendues en l’absence de choc endogène (venant du marché lui-même)
ou exogène (venant de l’extérieur) majeur.41 La progression du TR est équilibrée en rythme et en structure.
Depuis 2009, le rythme de progression est relativement stable autour de 2,2% par an. Cette progression est
structurellement équilibrée portée à la fois par un effet de valeur (augmentation de la valeur faciale
moyenne pour l’essentiel liée à la revalorisation du plafond d’indexation) et un effet de volume (extension

39 Cf. L’analyse du taux de couverture du TR.

40 Taux de couverture est l’estimation du nombre de salariés potentiellement éligibles au TR qui en bénéficie effectivement.
41 Cf. Partie II. Le modèle d’impact.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


40
du nombre de salariés bénéficiaires). En projection, la valeur globale (valeur faciale moyenne multipliée par
le volume de titres émis), de 5,8 Mds € en 2014 devrait atteindre 6,18 Mds en 2016 et 6,6 Mds en 2018. Le
nombre de salariés bénéficiaires devrait quant à lui progresser de 3,8 millions en 2104 à 4,1 millions en
2018. Ces projections témoignent du caractère massif du modèle du TR : écosystème socio-économique
dont les effets devraient aller en croissant.

3.2. Des externalités à la dimension du modèle

3.2.1. Le gain social individuel et collectif


Le TR forme donc un modèle massif dont on estime la valeur à l’aune des effets sociaux et
économiques qu’il est susceptible de produire dans et hors de l’écosystème qu’il forme à part entière. Les
avantages induits pour chacun des acteurs du modèle ont fait l’objet de nombreuses analyses par le passé.
Il est néanmoins utile de les repasser en revue en faisant remarquer en préambule que le modèle applique
aux acteurs un principe clair selon lequel il n’y pas de liberté sans responsabilité. C’est pourquoi le modèle,
globalement, est assis sur un ensemble de droits et de devoirs associés. Les contraintes limitent la liberté
de chacun mais permettent de renforcer la cohésion de l’ensemble et notamment de garder le TR dans le
champ de son objet social, pilier de sa légitimité. Le modèle repose donc sur la confiance réciproque des
acteurs et chaque acteur apporte un élément de garantie pour l’ensemble.

En premier lieu il faut remarquer que le TR participe d’une politique sociale interne à l’entreprise.
Bien que bénéficiant à chacun individuellement, le TR est de nature collective et sociale. Il est général ou il
n’est pas. Les conditions de sa négociation varient bien entendu d’une entreprise à une autre en fonction
notamment de la taille de cette dernière et de l’état des forces syndicales. En règle générale, le TR intègre le
socle des sujets internes relatifs aux conditions de travail à négocier et n’est pas à proprement parlé négocié
dans le cadre des négociations sur les salaires.

Il s’inscrit dans un cadre général de généralisation de la journée continue, loin du domicile. Selon
plusieurs études 42, le temps de trajet moyen en France aller et retour excède 45 minutes c’est-à-dire le
temps minimum légal de la pause méridienne. Paradoxalement, l’accélération des transports s’est
accompagnée d’un allongement de la durée de transport en moyenne, si bien que justement, dans le cadre
de la journée continue, les conditions de transport et de restauration hors domicile (près du lieu de
travail) à la pause méridienne, sont devenues des contraintes associées au travail lui-même. Ce n’est
pas sans raison qu’au côté du développement du TR, le législateur relayé par les partenaires sociaux ait
trouvé motif à déployer des dispositifs légaux et conventionnels visant à prendre en charge partiellement
les frais de transport. 43

Individuellement, le bénéfice social et économique du salarié est évident puisque le TR matérialise


la participation de l’employeur aux frais de repas. Il préserve un budget repas dont le montant est en

42 http://resources.grouperandstad.fr/les-temps-de-trajet-des-francais-pour-se-rendre-au-travail/

43C. du trav; L3261-2 à 11à 11 sur l’obligation de prise en charge des frais de transports publics, personnels, les conditions de prise
en charge et d’exonération sociale et fiscale.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


41
quelque sorte réservé et stable. Il offre au salarié une visibilité de son budget affecté à cet objet. Il offre en
outre un équilibre entre contrainte et liberté d’usage. 44Il permet au salarié d’exercer sa liberté, en fonction
de l’offre disponible, en termes de choix alimentaires d’ordre religieux, culturel ou diététique (végétarisme,
etc).

Comme il est fréquent que tout un chacun ait eu à entendre ou à observer un usage du TR hors des
règles, l’idée que l’usage initialement prévu fasse l’objet de d’usages important hors les règle est monnaie
courante. La question n’est pas à sous-estimer ou à ignorer. Ces pratiques existent et son courantes. A
l’inverse, elle ne doit pas être surdimensionnée : les données et contrôles confirment que le TR est très
majoritairement utilisé dans le cadre des règles imposées. La dématérialisation du titre devrait sur ce point
changer considérablement la donne. L’impossibilité de dépasser les 19€ limite, d’utiliser ses titres le
dimanche (hors autorisation de l’employeur) ou de régler des biens non éligibles sont en mesure de
fortement limiter les usages intempestifs.

Le TR, du fait de son ancienneté, de sa généralisation est ainsi devenu un modèle socio-économique
qui est rentré dans les mœurs pour faire partie du patrimoine socio-culturel vivant de la vie en entreprise.
D’ailleurs, la notoriété du TR auprès des salariés est désormais proche de 100%. Plusieurs études
confirment l’attachement des salariés au TR. Près de 80 % des salariés utilisateurs, anciens ou potentiels le
considère comme un acquis social.45 76 % comme un avantage important. 46 69% des salariés ne disposant
pas de TR ont déclaré souhaiter vouloir en disposer 47 . 75% jugeraient inacceptable sa taxation et 83%
apporteraient leur repas sur leur lieu de travail si le TR était supprimé.48Enfin, parmi tous les « services »
de l’entreprise, le TR est le préféré des salariés (25,5%) devant la mutuelle (21,5%) et la voiture de fonction
(17%).49

44 Les titres-restaurant sont personnels. Seul vous pouvez en faire usage. Vous pouvez utiliser vos titres-restaurant les jours ouvrables.
Vous ne pouvez pas vous en servir les dimanches et jours fériés, sauf décision de votre employeur si vous travaillez ces jours-là. Vous pouvez
payer avec vos titres-restaurant : un repas au restaurant, des préparations alimentaires directement consommables, notamment des
produits laitiers, dans les commerces assimilés aux restaurants (charcuteries, traiteurs, boulangeries...), des fruits et légumes (directement
ou non consommables) dans des commerces de détail. Dans les grandes et moyennes surfaces, vous pouvez acheter les plats suivants :
sandwichs, plats cuisinés frais, surgelés ou en conserve, salades préparées ou composées. Vous pouvez utiliser vos titres-restaurant dans
la limite de 19 € par jour. Lorsque vous utilisez une carte ou une application sur votre smartphone, vous êtes débité de la somme exacte à
payer. Si vous utilisez des titres papier, le commerçant n'a pas à vous rendre la monnaie ou à vous accorder un avoir. Lieux d'utilisation :
vous ne pouvez régler vos repas par titres-restaurant que dans le département où vous travaillez et dans les départements limitrophes
(sauf décision contraire de votre employeur si vous effectuez des déplacements professionnels hors de ces départements). Période de
validité : Les titres-restaurant sont utilisables pendant l'année civile de leur émission et les mois de janvier et février de l'année suivante.
Si vous ne les avez pas utilisés, vous devez les rendre à votre employeur dans les 15 jours suivant la fin de leur période de validité. Vous
obtiendrez en échange un nombre égal de titres valables pour le nouveau millésime. Source : http://vosdroits.service-
public.fr/particuliers/F21059.xhtml

45 http://www.cntr.fr/V2/presse/etude.php

46 http://www.cntr.fr/pdf/synthese_CNTR_2609.pdf

47 http://www.edenred.fr/Pages/BarometreEdenred.aspx

48 Etude IPSOS. 2009.


49 Enquête R. Half auprès de 200 directeurs des ressources humaines. 2014.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


42
3.2.2. Un levier de la politique sociale pour les entreprises
Pour les entreprises, le TR permet en premier lieu de remplir ses obligations légales (puisque il est
admis que l’instauration de TR l’exonère de devoir aménager un réfectoire au sein de l’entreprise). Dans les
entreprises de taille petite, moyenne ou intermédiaire, le TR est un levier de cohésion sociale permettant à
l’entreprise de garder une forme d’attractivité vis-à-vis des grandes entreprises disposant le plus souvent
d’une restauration collective et, au choix, de TR. C’est pourquoi, le TR demeure pour l’employeur un
argument utile à donner en phase de recrutement et ensuite un outil efficace de fidélisation des salariés. 50Il
est par ailleurs un outil administrativement et comptablement facile à mettre en œuvre et à suivre dont le
coût reste mesuré au regard de la nature du service rendu. Ces avantages ont su trouver un écho aussi au
sein des collectivités locales et territoriales depuis la loi 51du 3 janvier 2001.

Il est parfois fait porter au TR la responsabilité de la modération salariale. Si, l’on peut admettre
intellectuellement que le TR puisse se substituer à une hausse de salaire à moindre frais alors encore faut-
il préciser que cette augmentation prend la forme d’une quasi prestation (un titre nécessairement dédié à
la nourriture) et non d’un salaire : le TR n’est pas une monnaie juridiquement et économiquement parlant :
il est ni parfaitement liquide et ni remboursable. Une assimilation pure et simple est donc abusive s’agissant
d’une participation à une prestation (le repas) devenu au fil du temps une nécessité sociale.

Ces éléments réunis expliquent pourquoi le TR qui n’est pourtant pas obligatoire et exige de
l’employeur un surcroit de dépenses, est pourtant largement apprécié par lui. Des organisations patronales
(CGPME, MEDEF) aux entreprises elles-mêmes, le TR bénéficient du soutien du monde de l’entreprise. 73%
des employeurs considèrent que le TR contribue à renforcer l’image sociale de l’entreprise, 61% qu’il est
argument à l’embauche et 60 % cesseraient de l’utiliser ou baisserait sa valeur faciale, s’il devait être taxé.52

3.2.3. La satisfaction d’un besoin primaire facteur de productivité

Si le lien qualité du repas et état de santé (physique et moral) du salarié peut difficilement faire
débat, on en oublie parfois, celui de la santé du salarié avec les performances de l’entreprise. Il est vrai que
les conditions du débat ne sont plus ceux de la fin du XIXème et du début du XXème siècle. D’une part, les
risques sur la santé physique se sont déplacés (obésité, maladies chroniques). D’autre part, dans une
économie majoritairement de services servie par des emplois plus qualifiés, la santé morale associée à la
bonne santé physique devient un enjeu pour l’entreprise et la société en général. Le sujet du lien « repas –
santé – productivité » n’est donc pas derrière nous et demeure un enjeu économique même si les termes du
débat et les enjeux nutrionnels ont changé au fil du temps.

En fait, dans les grandes entreprises, cette question est prise au sérieux comme en témoigne par
exemple Patrick Gilbert, médecin en chef, département de la santé, PSA Peugeot-Citroën :

50 Etude IPSOS. 2010.


51 Loi sur la résorption de l’emploi précaire dans la fonction publique du 3 janvier 2001.
52 Etude IPSOS. Juillet 2010.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


43
« Nous ne sommes pas ici pour imposer aux gens ce qu'ils doivent manger, c'est à chacun de décider.
Nous voulons simplement leur rappeler les règles nutritionnelles élémentaires, qu'ils ont tendance à oublier.
Les affiches dans les cantines, les distributeurs automatiques et les snack-bars mobiles qui proposent des
aliments sains sensibilisent à une alimentation de qualité. Les repas sains sont subventionnés, ce qui permet de
les proposer au même prix que les autres aliments plus classiques qui sont offerts. Peugeot-Citroën espère que,
à terme, la productivité augmentera: un personnel en meilleure santé risque moins de prendre des congés de
maladie. 53»

De manière générale, les études détaillent le lien entre santé générale et productivité 5455 et peu,
malheureusement, se focalisent sur la question de la nutrition au travail. L’étude de l’Organisation
Internationale du Travail (OIT), coordonnée par Christopher WANJEK, reste une référence en la matière 56.
Selon lui :

« Une bonne alimentation au travail est un élément déterminant de la productivité, de la santé et de


la sécurité, des salaires et de la sécurité de l’emploi – autant de préoccupations partagées par les employeurs,
les syndicats et les travailleurs. En n’offrant pas un meilleur choix de repas à leurs employés, les entreprises
agissent à l’encontre de leurs propres intérêts. ».

L’étude affirme que des repas sains pris dans un cadre propre et calme ne devraient pas être
considérés comme un luxe mais comme un élément indispensable au moral, à la santé, à la sécurité et à
l’efficacité des travailleurs. François EYRAUD, Directeur du Programme des conditions de travail et d’emploi
de l’OIT considère que :

« Il existe corrélation entre une alimentation saine et une productivité accrue. Importante d’un point
de vue social, économiquement viable, une nourriture décente au travail est également un facteur de
rentabilité pour les entreprises. Qu’il s’agisse des gouvernements, des employeurs et des travailleurs, une
nutrition adéquate sur le lieu de travail est une solution gagnante pour les trois parties ».

Dans l’ensemble, l’étude évalue l’enjeu de productivité dans un intervalle compris entre 10 et 20%.
Cette étude mondiale distingue naturellement les enjeux et les solutions envisageables pays par pays. Et
s’agissant en particulier du TR, l’étude le considère comme l’un des outils et levier à privilégier lorsque
une offre abondante, variée et de qualité de restauration commerciale ou d’alimentation est
accessible dans la zone géographique de travail du salarié.

L’action positive du TR sur la santé des salariés et la santé publique en général n’est plus à
démontrer mais mérite d’être réexaminée à l’aune des changements de comportements alimentaires des
salariés. L’ouverture progressive du TR à des formes nouvelles de consommations alimentaires (salades,

53 http://www.ilo.org/global/about-the-ilo/multimedia/video/video-news-releases/WCMS_083319/lang--fr/index.htm

54 file:///Users/juliendourgnon/Downloads/NA-2009-14565_CA-French.pdf

55 Santé et productivité : De l’économie à la psychologie sociale et au modèle de propagation. Irina Peaucelle. ENS. 2003

56 http://www.ilo.org/global/about-the-ilo/newsroom/news/WCMS_005659/lang--fr/index.htm

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


44
plats préparés dans la GMS) associée à une montée en puissance de la restauration rapide (fast-food,
pizzeria, kebab, saladeries, etc) en général modifie en profondeur et progressivement l’usage du TR. Si
originellement, le TR était utilisé dans la restauration traditionnelle, cela est moins le cas aujourd’hui.
Désormais, 45,5% des TR sont utilisés en restauration rapide ou en grande et moyenne surface (GMS). On
ne peut pas en déduire une dégradation de la qualité nutritionnelle des repas du salarié tant les enseignes
ont su renouveler et améliorer leur offre. Mais ce sujet devrait rester sous surveillance. La progression
continue de la grande distribution (14% en 2010 contre 21% des TR en 2014) au détriment de la
restauration traditionnelle notamment pourrait être porteuse de régression sur le temps que le
salarié se réserve pour déjeuner, les conditions matérielles de sa prise de repas et la qualité
nutritionnelle des aliments. Cette évolution n’est pas à porter au compte du TR lui-même mais il est un
fait que ce dernier est pris dans des processus plus globaux (changement des habitudes alimentaires,
variation de pouvoir d’achat, développement du travail en mode projet dans l’entreprise, etc) qui, par
incidence, peuvent toucher à son objet social et sanitaire. C’est un sujet qui engage aussi la responsabilité
des pouvoirs publics dont la volonté constante a été d’ouvrir le périmètre d’utilisation du TR à de nouvelles
formes de commerce et de services. Or, Si l’on s’en tient à la vocation originelle du TR, il est impératif qu’il
puisse, associé à une liberté d’usage pour le salarié, continuer à être un levier du mieux disant social et
nutritionnel.

3.2.4. Un effet de déversement massif dans l’économie non délocalisable

La massification du TR est devenue un enjeu économique pour le tissu économique local. D’abord,
par définition, il est entièrement déversé à proximité du lieu de travail donc dans l’économie locale. Par
ailleurs et de par la nature des produits et services consommés, la part des produits importés dans la
consommation induite par le TR est très largement inférieure à celle constatée pour une consommation
habituelle en biens et services. Autrement dit, le taux de fuite macroéconomique hors de la zone locale et
nationale est quasi nulle tandis qu’en moyenne 15% de consommation se porte sur des produits importés.
Par ailleurs et majoritairement encore, le TR est déversé dans des secteurs de l’économie (restaurant,
boulangerie, commerce de proximité) peu capitalistique et où donc la part de la valeur ajoutée consacrée à
l’emploi (frais de personnel) est importante. C’est pourquoi tout euro déversé est susceptible de produire
un effet multiplicateur élevé sur l’économie locale et national. Quoi qu’il en soit, le modèle du TR comme
évoqué est une construction à trois : l’espace d’exonération invite l’employeur à réserver des fonds destinés
au repas du salarié lesquels enclenchent une dépense du salarié décomposée en sa part au co-financement
de la valeur faciale du TR auquel s’ajoute un surplus (estimé à 2,3€ en moyenne par repas57). Ainsi, pour
chaque euro engagé par l’employeur, 2,37 € ont été déversés dans l’économie locale en 2014
(Respectivement 2,62, 1,9€, et 2,14€ dans les restaurants, la GMS et les commerces de proximité) 58.

57Cf. Partie II. Les paramètres du modèle.


58Ces différences par secteur s’explique par le fait que le ticket moyen (et donc le surplus) du salarié est différent selon le type de
commerce alimentaire.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


45
Au total et en 2014, le TR a généré un flux de revenus de 5,8 Md€ dans ces différents secteur auquel
il convient d’ajouter « le reste à charge » du salarié égal à la différence entre le ticket moyen (somme
effectivement dépensée) et la valeur faciale moyenne du TR (7,6€ en 2014), estimé à 2,31€ par repas.59. Au
final, en 2014, près de 7,5 Mds d’€ liés au TR auront été déversés dans l’économie locale dont 4,7
Mds dans la restauration traditionnelle et rapide, 1,3 Mds dans les GMS et 1,5 Mds dans les
commerces de proximité (dont les commerces de bouche). Par projection et en l’absence de choc, le
montant déversé devrait atteindre 7,99 Mds € en 2016 et 8,5 Mds € en 2018.

Pour la seule restauration, cela représente près de 10% du CA total de la restauration


commerciale en France60. L’impact sectoriel est donc substantiel. C’est pourquoi, il est courant d’entendre
dire que le TR reste un bon apporteur d’affaires pour les commerces éligibles (affiliés). On comprend mieux
aussi pourquoi le parc des affiliés n’a jamais cessé de croître depuis 40 ans. Au-delà de l’ouverture du
périmètre d’éligibilité voulue par le législateur, les affiliés trouvent avantage à voir venir une clientèle
locale, récurrente et donc potentiellement fidèle.

Le modèle réalisé pour l’étude permet d’estimer les emplois induits auprès des affiliés. Compte tenu
des revenus différents ventilés et des caractéristiques économiques (nombre d’emploi par tranche de CA),
l’impact est logiquement différent. Au total, en 2014, le TR aura soutenu 109 847 emplois dont près de
74 000 pour la seule restauration soit 13,9% de l’emploi total de ce secteur. 61En l’absence de choc, le
TR soutient l’emploi et pourrait y contribuer davantage si sa croissance observée ces dernières années se
confirmait, à hauteur de 113 000 en 2015, 117 000 en 2016, 121 000 en 2017 et 125 000 emplois en 2018 62.

3.2.5. Le modèle TR est la condition d’existence de certains affiliés


Il va de soi que l’impact économique pris au niveau individuel est variable selon le commerce et les
caractéristiques socio-économiques de la zone d’implantation. Pour un restaurant implanté dans une zone
ou l’activité économique est peu intense ou peu riche en entreprises, l’impact du TR sur son activité est
modeste et inversement pour un restaurant implanté dans une zone de bureaux ou d’activité intense. Cette
évidence a pour objectif de montrer que la concentration des TR autour des zones d’activité produit, dans
un certain nombre de cas (qu’il faudrait évaluer), une dépendance économique vitale du restaurant vis à vis
du TR. Dans ce cas, ce dernier est davantage qu’un soutien à l’activité du restaurant, il est une condition
nécessaire de l’existence de l’établissement. Il en va ainsi des restaurants mais aussi boulangeries et
commerces de bouche qui, dans des zones dites de bureau, réalisent la majeure partie de leur CA le midi
composé parfois à plus de 30 %, 40 %, ou 50 % de TR. En d’autres termes, et en l’espèce, un choc, modifiant

59 Cf. Paramètre du modèle d’impact : le ticket moyen.


60 http://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/dgccrf/documentation/dgccrf_eco/dgccrf_eco28.pdf

61 Cf. Le modèle ci-après estime l’emploi généré dans la restauration (au prorata de la valeur des TR déversé dans ce secteur) à 74
000 ETP sur un total du secteur de 534 000 emplois.
62 Cf. Partie II. Le modèle d’impact.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


46
les masses de TR déversés, pourrait provoquer une vague de faillites et de fermetures de
restaurants et commerces dont l’ampleur reste à mesurer.

La vertu du modèle pour l’économie locale est évidente. Les émetteurs et plus globalement le
modèle du TR lui-même est, comme il a été déjà dit, un apporteur d’affaires pour l’économie locale. Mais la
modification progressive de la ventilation des TR déplace le bénéficie des TR d’un secteur à un autre. Ce
déplacement s’inscrit dans un cadre plus global de changement des habitudes alimentaires dont bénéficient
la restauration rapide et la GMS et des difficultés relevées de la restauration traditionnelle à maintenir un
équilibre économique viable. La « fuite » du bénéficie du TR de la restauration traditionnelle se poursuit
mais désormais à un rythme plus lent. (33 % en 2010 contre 31 % en 2014). A l’horizon 2017, la part
cumulée de la GMS et de la restauration rapide pourrait franchir la barre des 50%. A mesure que les flux de
revenus du TR se déplacent, la perception du TR par les secteurs est susceptible de se modifier. Si la
restauration traditionnelle soutient le modèle du TR pour les raisons déjà évoquées, elle regrette la fuite du
TR hors de son périmètre tandis que les commissions perçues sur elle par les émetteurs sont, selon elle,
supérieures à celles qui sont appliquées aux enseignes nationales ou à la GMS. La restauration traditionnelle
tout comme les commerces de bouche, dont le pouvoir de négociation est limité, ne souhaitent pas être les
principaux contributeurs à la viabilité du modèle alors même que leur équilibre économique est de plus en
plus fragile.

3.2.6. Un coût d’opportunité nul voir négatif pour l’Etat

Le modèle du TR opère des transferts de flux sociaux dont les avantages pour la collectivité et l’Etat
sont nombreux. Sur le plan social, l’analyse a été faite du gain en terme d’égalité entre tous les salariés
indépendamment de leur lieu de travail ou de la taille de l’entreprise qui les emploie. Le TR à cet égard peut
être considéré comme un outil de cohésion sociale interne (au sein de l’entreprise) et externe (au niveau
national). Or, il est admis que la cohésion sociale est sur la longue durée un facteur de stabilité et une
condition de l’innovation et du progrès économique en général. Créer les conditions d’une alimentation
satisfaisante au travail dépasse donc le seul intérêt de l’entreprise et doit être considéré (à l’instar du
transport au travail) comme d’intérêt national.

Ce modèle, il faut le rappeler, offre une garantie de transparence des flux. Si l’on écarte la question
des usages et l’on se place du point de vue financier, le TR offre une traçabilité et une visibilité inégalée.
Cette qualité associée au savoir faire technique des émetteurs expliquent que le TR n’ait jamais fait l’objet
en France de falsification hors cas très rares : le TR est donc suffisamment sécurisé pour décourager les
falsificateurs. Le fait que le TR soit délivré mensuellement donc en petite quantité, d’une valeur faciale
nécessairement modeste et soit éphémère (sa durée de validité est limitée dans le temps), contribuent aussi
à dissuader la falsification. Or, il importe à l’Etat que le modèle opérant près de 6 Mds € de transferts sociaux
via des titres spéciaux soit parfaitement sécurisé.

La « contribution » de l’Etat nous l’avons dit est le préalable au processus d’abondement au TR par
l’employeur et le salarié. L’engagement de l’Etat prend économiquement la forme d’un régime social et fiscal

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


47
d’exception (sous conditions). Depuis quelques années, l’administration fiscale ou la Cour des comptes
pointent du doigt le coût du dispositif TR au regard de son rendement social et économique jugé très faible.
Il est difficile de juger de cette évaluation par l’IGF en 2011 jamais rendue publique. Mais il y a lieu de
s’étonner de la sévérité du jugement au regard des critères génériques utilisés par l’administration : sur
l’efficacité, l’efficience globale (le dispositif bénéficie-t-il à tous les contribuables visés ? Est-il capté par des
intermédiaires ?), l’efficience en elle-même de la dépense (le coût de gestion, le degré de complexité, la
distorsion d’équité horizontale et verticale), l’observation et l’analyse apportent des éléments d’analyse sur
le rendement économique et social du modèle TR qui rend la sévérité de l’évaluation de l’IGF peu
compréhensible. De son côté, le Haut Conseil du Financement de la Protection Sociale dans son rapport
d’étape sur la « clarification et la diversification du financement des régimes de protection sociale » remis
au gouvernement le 7 juin 2013 estime qu’un certains nombres d’avantages exemptés pourraient se
substituer à une rémunération sous forme de salaires donc assujettis aux cotisations sociale. Le Haut
Conseil estimait donc nécessaire une poursuite de l’évaluation notamment des « accessoires de salaires »
(Titres-restaurant, chèques-vacances, avantages octroyés par les comités d’entreprise). Cette assimilation
des titres spéciaux de services a du salaire et du TR à n’importe quel titre de services rendus dans
l’entreprise constitue une grille de lecture qui ne correspond pas à l’objet social du TR. On peut regretter
par ailleurs le périmètre des évaluations qui semblent faire peu de cas d’une part des effets dynamiques
d’un choc de taxation sur le modèle et d’autres parts des effets induits notamment sur l’égalité entre les
salariés, les salariés modestes et l’économie locale ou sont déversés les TR. Le positionnement de
l’administration est symptomatique d’une tendance plus large de modification de la perception de la nature
et de l’objet des titres de services en général et du TR en particulier. La nature et l’objet social du TR sont
peu à peu édulcorés dans l’analyse pour faire de celui-ci un équivalent du salaire et ainsi ouvrir la voie à une
taxation par service (partiel ou total, au régime général ou au forfait social, etc) ; ou bien conduit à vouloir
le fusionner avec les autres aides directes (repas, santé, retraite, vacances, etc) aux salariés dans une même
enveloppe. Celle-ci nommée « rémunération flexible ou rémunération à la carte » serait traitée comme du
salaire avec le cas échéant un plafond global d’exonérations utilisées par le salarié vers les services qu’il
jugerait prioritaires. Le législateur ferait alors le choix de « de-sanctuariser » le repas méridien pourtant
considéré comme un impératif.

Sur le coût de l’exonération63, il convient, à toutes fin utiles, de rappeler que l’Etat ne finance pas le
TR mais renonce à des cotisations sociales en partant du principe, contestable, que, pour lui, le titre-
restaurant serait du salaire. L’idée que la levée de l’exonération garantirait à l’Etat ou aux caisses de
sécurité sociale des recettes de cotisations en proportion du taux de prélèvement (régime général
ou forfait social à 20 %) est une erreur manifeste. Ce raisonnement peut tenir en statique mais en
dynamique, le surenchérissement du TR conduirait à une diminution plus que proportionnelle de l’assiette
taxable et donc à une diminution progressive des cotisations à la mesure de l’extinction progressive du TR.
Comme il a été dit, sans l’espace de négociation ouvert par l’exonération, l’incitation initiale des partenaires
sociaux à s’engager est gravement atteinte et il faut s’attendre à une décrue prononcée de l’usage du TR
dans les entreprises et les collectivités territoriales. Au final, le risque est d’obtenir l’extinction

63 Cf. Partie II : Etude d’impact quantitatif

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


48
progressive du modèle du TR sans bénéfice budgétaire direct pour l’Etat ou les organismes de
sécurité sociale du fait du rétrécissement du marché.

Même en gardant une analyse statique (c’est-à-dire sans effet sur l’assiette de cotisation) des pertes
directes théoriques, on observe que ces dernières sont plus que compensées par les recettes induites par le
déversement du TR. Le modèle de l’étude fait apparaître une perte théorique pour l’Etat de 1,35 Mds si la
valeur du TR était traitée comme du salaire dont 1,2 Mds de cotisations et 0,1 Md d’impôt sur le revenu. En
cumulant les recettes induites de TVA, de cotisations sociales (CS), d’impôt sur les sociétés (IS) et d’ (IR), le
TR génère via sa circulation auprès des affiliés, 1,6 Mds de recettes soit un solde positif pour l’Etat de 0,25
Md d’€ en 2014 auquel il faut ajouter 109 000 emplois induits. Sans donc même évoquer les effets
économiques en dynamique d’un choc (extinction de la base de cotisation) et des effets sociaux (rupture
d’égalité entre les salariés, choc de pouvoir d’achat pour le salariés du bas de l’échelle des rémunération
désirant maintenir une qualité de repas équivalente, détérioration du dialogue social au sein des entreprises
etc), l’analyse statique démontre que le modèle du TR est, y compris pour l’Etat et ses finances, un modèle
globalement à l’équilibre et laissé en l’état, destiné à produire un surplus de prélèvements obligatoires
allant croissant.

4. Les enjeux de la dématérialisation


4.1. Continuité et changement du cadre général

4.1.1. Une stabilité du cadre général


Depuis le 2 avril 201464, un décret autorise l’émission des TR sous forme dématérialisée (carte ou
autre moyen de paiement). Ce décret est l’aboutissement d’un long chantier commencé en mai 2011 à
l’initiative de la ministre de l’économie et des finances. Le 11 octobre et le 22 décembre 2011, l’assemblée
nationale et le Sénat adoptent dans les mêmes termes l’article 10 undecies du projet de loi
« consommateurs » qui vise à modifier le code du travail afin de permettre la dématérialisation du TR. Mais
le projet de loi, après une seconde navette est abandonné. Le dossier est réactivé en octobre 2012 par les
deux ministères qui confirment que la dématérialisation se fera à l’issue d’une concertation pilotée par la
DGCCRF débouchant sur une adaptation de la réglementation. Entre décembre 2012 et juin 2013, plusieurs
réunions de concertation ont lieu en présence de tous les acteurs. En septembre 2013 en assemblée
générale extraordinaire, la CNTR à l’unanimité, remet à la DGCCRF un avis sur le projet de décret. Le décret
du 6 mars 2014, applicable le 2 avril, est publié au journal officiel. Ce décret reprend les grands principes
du décret originel applicable au titre papier : utilisation possible uniquement auprès de commerçants
agrées par la CNTR, exclusivement destiné au repas compris dans les horaires de travail du salarié, non

64Décret n° 2014-294 du 6 mars 2014 relatif aux conditions d'émission et de validité et à l'utilisation des titres-restaurant.
http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000028690805&dateTexte=&categorieLien=id

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


49
utilisables les dimanches et les jours fériés (sauf dérogation pour les salariés dominicaux). Deux évolutions
marquent un changement avec le titre papier : le titre dématérialisé est sécable (le salarié paye au centime
près) et il est plafonné à 19€ par jour contre deux titres maximum auparavant. La volonté des pouvoirs
publics en concertation avec les acteurs a donc été de conserver le cadre global qui présidait au
fonctionnement du titre papier. De ce point de vue, le titre-restaurant dématérialisé (TRD) vient asseoir le
principe même du modèle TR. En particulier, toutes les obligations liées à l’usage par le salarié ou à
l’acceptation et au traitement du TR exclusivement au sein d’un réseau limité ont été conservées. L’objet
socio-économique initial du TR est donc pérennisé et il demeure un titre non assimilable à de la monnaie et
non assimilable à du salaire.

4.1.1 .La conservation du statut de titre spécial

Le maintien du statut original de titre spécial de paiement non assimilable à de la monnaie est un
élément fondamental du modèle puisque le TR et aujourd’hui le TRD se veulent être une prestation
solvabilisable sur le marché et non l’équivalent d’une prime panier et encore moins d’un salaire. Le TR et le
TRD constituent des titres prépayés prédéterminés à des consommations spécifiques dédiés (principe de
spécialité). Ils n’ont donc pas la qualité d’équivalent universel, propriété intrinsèque de la monnaie. Ni celle
d’être remboursable en échange de monnaie (non fongibilité). Pour le TR, le code monétaire et
financier65conformément d’ailleurs au droit européen considèrent que les titres spéciaux de paiement ne
sont pas des « services de paiement ». Depuis 201366, le dit code est complété67et étend au TRD la qualité
de titre spécial. Le TRD n’est donc pas de la monnaie électronique. Si cela devait être le cas, les TRD
pourraient être remboursés aux salariés en monnaie et auraient alors la même propriété que le salaire
délivré en monnaie. Ou bien encore ils permettraient d’acquérir n’importe quels biens et services auprès de
n’importe quel partenaire. Or, les TRD constituent, à l’instar du titre papier, un titre de consommation
prédéterminé au sein d’un réseau limité de partenaires. Cette caractéristique constitue l’une des pierres
angulaire de l’originalité du modèle. A cet égard, on ne peut que s’interroger sur l’utilité de
l’ouverture toujours plus grande du périmètre d’usage du TR et de fait du TRD.

4.1.2. Un changement d’habitudes et une simplification pour les utilisateurs

Le TRD présente des avantages pratiques sensibles pour les utilisateurs affiliés. En termes de temps
et de complexité, le TRD constitue un « choc de simplicité » : plus de coins à découper, de tampons à apposer,
de comptage (le TR compte plusieurs centaines de valeurs faciales différentes), de bordereaux à remplir et
d’envois notamment à la CRT (Le centre de règlement des titres communs aux émetteurs proposant des
titres sur support papier). Enfin, le TRD hausse d’un cran encore le niveau de sécurité puisque il rend

65 Article L314-1
66 Arr. du 17 juin 2013
67 Article L.525-4

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


50
impossible le vol ou la perte des titres chez l’affilié tandis que le porteur peut faire opposition en cas de
perte ou de vol. Jusqu’à ce jour, la totalité des cartes mises en circulation fonctionne sur le TPE (terminal de
paiement) bancaire sans aucun changement. En effet, les transactions sont incluses dans les transactions
par cartes bancaires, suivent les mêmes flux, font l’objet de la même télécollecte et sont remboursées aux
mêmes conditions que autres transactions bancaires. Mais, la situation devrait être transitoire dans la
mesure où les émetteurs historiques ont fait le choix d’un nouveau standard de marché, ouvert, nommé
CONECS, s’appuyant sur les standards du GIE carte bancaire mais séparé du système interbancaire (ceci
permettant notamment de séparer les flux sociaux du titre-restaurant des flux monétaires véhiculés par les
banques). L’affilié peut garder le même TPE mais doit télécharger un module rendant le terminal compatible
avec CONECS. Pour ces quatre émetteurs, qui occupent la quasi-totalité du marché, le passage au TRD oblige
à amener les 185 000 affiliés, un par un, à adapter son TPE. Il existe donc un enjeu d’information
indépassable.

Du côté du salarié, le TRD s’équilibre en lui apportant de nouveaux avantages mais aussi de
nouvelles contraintes. Désormais sécable au centime et plafonné à 19€, les règles d’usage offrent un surcroit
de souplesse. Pour autant, en contrepartie, le TRD autorise techniquement une traçabilité et un contrôle a
priori des usages qui peuvent déplaire. La carte est en effet inutilisable le dimanche, strictement plafonnée,
etc. Il existe donc un risque de réticence au TRD d’autant plus fort que les salariés garderont le choix entre
le titre papier et le titre dématérialisé. S’il convient de ne pas surestimer le risque, il convient tout
d’autant de le considérer : du moins dans les premiers temps, les salariés pourraient offrir une
résistance au passage à la dématérialisation.

4.2. Des opportunités et des risques industriels

Le processus de dématérialisation est à peine engagé. Il devrait s’intensifier en 2015 et surtout à


partir de 2016. Fin 2014, les TRD couvraient en effet 1,06 % du marché. Depuis 2012/2013, le marché,
notamment, du côté des émetteurs, est rentré, dans une phase de mutation profonde. Comme tout
changement de technologie majeure, ce sont les usages, le modèle économique tout entier et la structure du
marché qui sont susceptibles d’être modifiés voire bouleversés dans les années qui viennent. Ces
changements constituent pour les uns des risques majeurs et pour les autres (notamment les nouveaux
entrants sur le marché de l’émission), des opportunités de s’ancrer dans un marché déjà constitué.

4.2.1. Des opportunités collectives

La dématérialisation offre aussi des opportunités collectives, à savoir susceptibles de bénéficier à


tous les acteurs. La baisse des coûts de production et de commercialisation autorise une extension en
volume du marché vers les entreprises de petites tailles. Comme il a été dit, la dématérialisation peut rendre
rentable l’exploitation de niches multiples (longue traine) auparavant inaccessible. Une telle extension

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


51
serait bénéfique sur le plan économique (extension du marché) et social (extension du taux de couverture
du TR auprès des salariés dépourvu de restauration d’entreprise). Une autre opportunité collective porte
sur les répercussions de la baisse des prix de revient sur la valeur faciale moyenne. Les données disponibles
sur les TRD en 2014 font état d’une valeur faciale supérieure à celle du papier de 0,51cts € (8,12€ contre
7,61 pour le titre papier). Si l’on interprète cette différence comme la conséquence d’une répercussion de
la baisse des coûts, alors il y a matière à penser que la dématérialisation pourrait aller de pair, jusqu’à un
certain point, avec une hausse de la valeur faciale moyenne. Sur la base de celle constatée en 2014 et si
tout le marché avait été dématérialisé à cette date, la valeur globale des TR désormais TRD
s’élèverait de 389 millions d’€ soit une extension du marché en valeur de 6,77%. L’analyse soulève
en général la question de l’importance des gains de productivité liée à la dématérialisation et de la
répartition de ces gains auprès des acteurs du modèle.

4.2.2. La nécessaire visibilité réglementaire pour faire face aux risques

La dématérialisation comporte un risque industriel. Depuis 2011, les émetteurs historiques


travaillent et investissent sur la dématérialisation. Le risque est à considérer à plusieurs niveaux. Il se porte
sur la capacité à maintenir un réseau étendu d’affiliés convertis à la nouvelle technologie, à dépasser les
réticences des salariés, sans quoi, l’économie du modèle fondée sur les gains d’échelle serait affaiblie.
Surtout, les émetteurs historiques ainsi d’ailleurs que les nouveaux entrants sur le marché ont engagé des
investissements donc des coûts fixes de taille. On estime selon les données entreprises que le système
CONECS de transactions, pour sa phase de conception, de réalisation et de déploiement dans tout le réseau,
a nécessité l’injection de près de 100 millions d’euros depuis 2012. A l’heure où les géants de la carte
bancaire songent à dématérialiser la carte bancaire elle-même, les émetteurs ayant investi dans CONECS
doivent assumer de surcroit un risque industriel de nature technologique. A l’instar de l’Afrique ou les
télécommunications se développent par les technologies hertziennes sans avoir eu recours aux
technologies filaires (la paire de cuivre), le modèle du TRD pourrait de la même manière sauter la
technologie carte pour passer directement au paiement mobile. C’est en tous cas le pari fait par le nouvel
entrant Resto Flash et auquel s’intéresse également les autres émetteurs.6869. En attendant, les opérateurs
devront assumer, pour un temps incertain, les coûts liés à la double circulation des titres papiers et
dématérialisés. Si, une transition numérique brusque serait contreproductive, l’Etat pourrait s’interroger
sur l’opportunité d’éteindre définitivement et obligatoirement la circulation des titres papiers en

1 68 Resto Flash lève 1,1 million d’euros pour accélérer la numérisation des titres restaurants.

http://www.usine-digitale.fr/editorial/resto-flash-leve-1-1-million-d-euros-pour-accelerer-la-numerisation-des-titres-
restaurants.N313403.

69Edenred France, Orange et MasterCard s’associent pour tester le paiement mobile des titres-restaurants sur le marché français.
http://www.edenred.fr/Documents/Edenred-France/CP_Edenred_POCTRMobile.pdf

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


52
interdisant leur usage à une date butoir, ni trop proche, ni trop lointaine, dont les modalités devront faire
l’objet d’une concertation.
Quoi qu’il en soit, les émetteurs en général et les émetteurs historiques en particulier doivent et devront
faire face des incertitudes industrielles et technologiques sensibles.

Enfin, la dématérialisation est fortement liée à une modification des rapports de négociation entre
acteurs et de la structure même du marché. La dématérialisation est l’occasion d’une remise à plat des
conditions contractuelles entre les acteurs. Les affiliés en particulier espèrent une baisse sensible des
commissions des émetteurs, associée à un raccourcissement des délais de remboursement des titres. Or, il
est un fait que le modèle économique des émetteurs repose sur ces commissions et la gestion de trésorerie,
en contrepartie des services apportés aux entreprises en amont et aux affiliés en aval. Les affiliés voient
donc dans le passage à la dématérialisation l’occasion d’une renégociation générale. Sans rentrer dans le
débat de la légitimité des demandes, il convient juste de noter que le marché rentre dans une phase de
renouvellement des conditions contractuelles que pourrait accompagner une modification de la structure
du marché. En effet, la dématérialisation offre l’opportunité à de nouveaux entrants de s’ancrer sur un
marché ouvert (pas de barrière à l’entrée sous réserve de respecter les critères prudentiels notamment)
par la baisse des coûts d’entrée justement et de production du service. Certes la taille du marché, importante
en valeurs transférées mais limitée en excédents d’exploitation, pourra difficilement se maintenir à 8
émetteurs (toutes choses égales par ailleurs) comme cela est le cas aujourd’hui. 70 Quoi qu’il en soit, la
structure de marché occupée aujourd’hui à 99% par quatre émetteurs historiques pourrait se transformer
à l’avenir soit par une augmentation (limitée ou non) du nombre d’émetteurs soit par le remplacement de
un ou plusieurs émetteurs historiques par de nouveaux entrants connus ou non encore identifiés.

Dans ces conditions les acteurs devraient, pour les années à venir, disposer de la plus grande
visibilité qui soit. Les conditions de réussite de la dématérialisation y compris pour les nouveaux acteurs du
marché, repose sur la stabilité du cadre juridique. Sur un marché fortement structuré par la réglementation
(exonérations, plafond d’exonération, etc), la stabilité juridique est la condition de la prise de risque
technologique, industrielle et commerciale. Les pouvoirs publics auraient donc tout intérêt à donner
aux acteurs une visibilité quant à la stabilité du cadre règlementaire du moins aussi longtemps que
le processus de dématérialisation n’aura pas été achevé.

70Le marché compte au 1er février 2015, 8 émetteurs dont 4 historiques (Edenred, Chèque Déjeuner, Sodexo, Natixis intertitres) et 4
nouveaux entrants : Monetico Resto, Resto Flash, Digibon et Moneo resto).

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


53
PARTIE II

MODÈLE D’IMPACT DU TITRE


RESTAURANT SUR L’ECONOMIE ET LES
FINANCES DE L’ETAT

ET

SIMULATIONS DYNAMIQUES DES EFFETS


D’UN CHOC DE TAXATION

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


54
1. Paramètres du modèle d’impact du TR sur l’économie et les
finances de l’Etat.

Le modèle reprend la logique d’un modèle élaboré par le professeur Christian Saint Etienne mais s’en
distingue en plusieurs points dont l’un est d’estimer, en dynamique, l’impact d’un choc consécutif à
changement du régime social et fiscal du TR.

1.1. Quels scénarios d’évolution en cas de choc social et fiscal ?

1.1.1. Le scénario de référence

En situation de référence établie sur les données de 2014, le modèle estime le gain en prélèvements
obligatoire (PO) théorique de l’Etat, en cotisations et impôts (si le TR était du salaire). Sur la base de
paramètres (Cf. ci-dessous), le modèle estime aussi les recettes en (PO) induites par le déversement des
revenus du TR auprès des affiliés (restaurants, commerces de bouche, grande et moyenne surface agrées,
etc). Les effets induits totaux du déversement sont obtenus par le cumul des effets estimés segment d’affiliés
par segment d’affiliés.

La différence entre, le gain théorique de PO (si le TR était traité comme du salaire) et les recettes
réellement induites de PO auprès des affiliés, donne le solde pour l’Etat ou le coût d’opportunité du régime
d’exonération sociale et fiscale du TR. Le modèle estime par ailleurs le nombre d’emplois induits par le
déversement des revenus du TR segment par segment.

1.1.2. Projections en absence de choc

En l’absence de choc exogène et sur la base des données recueillies depuis 2009, le modèle projette
le modèle de référence sur les années 2015, 2016, 2017 et 2018. Cette simulation permet de suivre
l’évolution du solde (ou coût d’opportunité pour l’Etat) pour le l’Etat de 2014 à l’horizon 2018.

1.1.3. Effets d’un choc : « scénario 20 »

Il est fait l’hypothèse d’un choc externe consécutif à un changement du régime social et fiscal de la
participation financière versée par l’employeur. Celle-ci est donc socialement et fiscalement considérée
comme un salaire. Le modèle s’applique à estimer l’impact du changement sur les revenus du TR déversés
dans l’économie locale c’est à dire des affiliés et l’emploi induit. Au final, le modèle d’impact estime le solde
(coût d’opportunité pour l’Etat) et son évolution à partir de l’année du choc (en 2015) jusqu’en 2018.

Dans ce premier scénario on fait l’hypothèse d’une extinction partielle progressive du TR. Le TR, le
plus souvent, est négocié entre les partenaires sociaux au sein de l’entreprise. L’engagement mutuel peut
être d’une durée variable (annuelle, pluriannuelle). Le recours et la valeur faciale du TR peuvent donc être
considérés comme relativement rigides à très court terme. A plus long terme, les nouvelles conditions
afférentes au TR amènent l’employeur à réviser ses choix. Il a deux possibilités qui d’un point de vue

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


55
monétaire sont équivalentes : soit, il déplace la négociation sociale sur un autre service au salarié (le droit
n’impose pas le TR) et abandonne le TR soit il le conserve mais compense le surcroit de charges par une
contribution moindre à la valeur faciale du TR entrainant avec elle une diminution de la contribution du
salarié (la part employeur devant être comprise entre 50 et 60 % de la valeur faciale du titre). Il a donc été
décidé, pour rendre compte de ces spécificités, d’établir un modèle sur quatre années. 2014 représente
l’année de référence, le choc social et fiscal prend effet pleinement en 2015 puis se prolonge en 2016, 2017
et 2018. Le cas de référence est ici la Suède ou, à la suite d’un choc similaire, le marché du TR a, en moins
de deux ans, perdu 65% de sa valeur initiale. Le scénario retenu ici projette une décroissance du marché
moindre égale à 59% du marché en quatre ans soit de 20% chaque année.

1.1.4. Effets d’un choc : « scénario 30 »

Un second scénario reprend les hypothèses du premier scénario mais projette une décrue plus forte
soit de 30% annuellement soit une perte de valeur globale de 76% à la fin 2018. Ce scénario projette donc
une réaction du marché plus forte exprimant une forte sensibilité des entreprises à la suppression des
exonérations.

1.1.5. Effet d’un choc forfait social : « scénario 15 »

Un troisième scénario pose l’hypothèse de la décision d’assujettir le TR au forfait social. La


participation au TR serait majorée de 20% auquel il convient d’ajouter la CSG et CRDS de 8%, soit 28% au
total en moyenne. Dans ces cas l’ampleur du choc est moindre que dans les cas précédents mais reste de
grande ampleur. L’estimation retient une perte de marché de 48% en 4 ans soit 15% par an. Il s’agit d’un
scénario optimiste de faible sensibilité des entreprises à un choc durable d’ampleur.

1.2. Articulation logique du modèle


1.2.1. Itération du calcul des gains théoriques pour l’Etat

Est déterminé en premier lieu la valeur globale du TR soit la valeur faciale moyenne multipliée par
le nombre de titres émis. Puis l’assiette dite fiscale (AF) soit 55% de la valeur globale (égale à la part de
l’employeur). Les cotisations patronales moyenne (Cf. paramètres) (sauf cas du scénario au forfait social)
sont égales à 30% et de 21% du côté du salarié. Ainsi le total des cotisations est égal à 51/130 de l’ (AF) et
le salaire net du salarié est égal à 79/130 de l’ (AF). Sur la base du salaire net est estimé l’IR du salarié. La
somme des cotisations et de l’IR forme le total des gains (théorique ou réel selon l’existence du choc en
prélèvements obligatoires) pour l’Etat et les caisses de Sécurité Sociale.

1.2.2. Itération du calcul des effets induits par le déversement

En premier lieu la différence entre la valeur faciale moyenne du TR et le ticket moyen permet
d’estimer le « surplus » ou « reste à charge » supplémentaires acquitté par le salarié. Par exemple pour
2014, la valeur faciale moyenne est de 7,62 tandis que le ticket moyen (Cf. paramètres) est estimé à 9,93€,
le « reste à charge » est donc de 2,31€ en moyenne. Le rapport entre ticket moyen et part de l’employeur au

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


56
TR définit un coefficient multiplicateur. En 2014 on obtient 9,93/4,19 soit 2,37. Autrement dit, chaque fois
qu’un employeur engage 1€ dans le financement d’un TR, 2,37 € sont déversés auprès des affiliés.

Ainsi le total des sommes engagés par les employeurs pour le TR soit ici l’ (AF) multiplié par le
coefficient multiplicateur permet d’obtenir le chiffre d’affaire (CA) total déversé TTC et le CAHT en
défalquant la TVA. En fonctions des paramètres segment par segment (taux de marge, part du CA consacré
au frais de personnel, niveau de rémunération des salarié), et de la ventilation des titres par segment, il est
aisé de déterminer l’IS, le nombre d’emplois induits, les charges et l’IR adossées aux salaires de ces emplois
pour chaque segment. La somme TVA, IS, CS et IR de tous les segments donne les gains en prélèvements
obligatoires (PO) induits par le déversement.

1.2.3. Itération en dynamique

En l’absence de choc, le modèle projette les données comme indiquées ci-dessus sur 4 ans. Ce
scénario est dit de référence.

En cas de choc, l’articulation du modèle est identique. Pour calculer le solde où coût d’opportunité
pour l’Etat il est fait la somme des gains directs pour l’Etat (liés à la levée de l’exonération ou à
l’assujettissement au forfait social selon le cas) et des gains indirects induits par le déversement. Cette
somme est comparée aux gains en situation de référence c’est à dire en l’absence de choc. Si le solde est
positif cela signifie que l’Etat engrange plus de gains suite au choc qu’en situation de référence et
inversement si le solde est négatif. Le modèle projette le marché à l’horizon 2018.

2. Le scénario de référence
Pour rappel le scénario de référence est celui ou en l’absence de choc sont calculés les gains
théoriques (puisque non réels) pour l’Etat d’un traitement du TR comme un salaire (donc soumis à
cotisations et IR pour le salarié mis en rapport avec les gains réels (puisque à l’œuvre) consécutifs au
déversement des TR auprès des affiliés. Dans un tel scénario de continuité de l’existant, le marché du TR
poursuit sa progression annuelle de l’ordre de 2 à 2,5 % selon les années. Progression liée à un effet valeur
(revalorisation de la valeur faciale moyenne) et à un effet volume (extension du nombre de salariés
bénéficiaires). A l’horizon 2018, la valeur globale des TR serait de 6,61 Mds€ utilisés par 4,2 millions

Valeur globale des TR (en Mds€)


7
5
de salariés en France.
3
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018

valeur faciale (VF)

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


57
Nombres de salariés bénéficiaires
4 300 000

3 300 000
2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018

nombres de salariés bénéficiaires

En 2014, les gains théoriques qu’auraient généré les CS et l’IR si le TR était traité comme du
salaire étaient de 1,35 Mds d’€. Dans le même temps, le déversement des TR a généré des gains induits
(TVA, CS, IS et IR) de 1,6 Mds €. Le coût d’opportunité est donc négatif de 258 millions d’€. En clair, les gains
induits dépassent ceux que l’Etat tirerait de la levée des exonérations sociales et fiscales. Cet écart en
projection est relativement stable puisque estimé à 298 millions à l’horizon 2018.

Malgré des hypothèses prudentes sur les paramètres, le rendement du déversement est fort du
fait de l’absence de fuite et de la relative faiblesse de l’intensité capitalistique (donc relativement riche en
emplois) du secteur de la restauration notamment et de l’effet de levier de l’ajout ou « reste à charge » du
salarié qui vient gonfler le CA déversé.

La contribution des restaurants (traditionnelles et rapides) est de 1,05 Mds€, de 0,18 Md€ pour
la GMS et de 0,384 Md€ pour les commerces de proximité (dont les commerces spécialisés). Ces différences
tiennent au poids de chacun dans la ventilation des titres mais aussi aux caractéristiques économiques de
chaque segment. Elles se retrouvent quel que soit le scénario emprunté.

Par ailleurs, la plus grande part des gains induits proviennent des CS et marginalement de l’IR induit.

Coût d'opportunité du TR
gains en MdS €

1,900
1,700
1,500
1,300
2014 2015 2016 2017 2018
Gain fiscal theorique 1,359 1,400 1,449 1,498 1,547
recettes fiscales induites 1,616 1,666 1,724 1,782 1,841

Structure des gains induits (en Mds€)

2,00

0,00
2014 2015 2016 2017 2018
cotisations sociales impot sur le revenu

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


58
En terme d’emplois, le déversement est à l’origine de 109 847 emplois en 2014. La progression naturelle du
marché permet d’anticiper une hausse régulière de l’emploi induit et de la contribution de chaque segment.
Le TR a généré 73 990 emplois dans la restauration en 2104 contre 84 267 attendus pour 2018. La relative
faiblesse de la contribution de la GMS alors que sa part de marché (part des TR écoulée chez elle) progresse
est liée à l’hypothèse que la richesse en emploi de ce segment est relativement faible. Aussi, une
augmentation du CA provoque un accroissement de l’emploi plus faible par exemple que dans la
restauration.

Emplois induits par le CA du TR


situation de référence
150,000

100,000

50,000

0,000
2014 2015 2016 2017 2018

restauration GMS commerces de bouche

3. Impact d’un choc : « scénario 20 »


Pour rappel, le choc est constitué par un changement du régime fiscal et social du TR.
Désormais l’abondement de l’employeur est considéré comme du salaire. Cette somme est donc soumise à
cotisations sociales patronales et salariés. Par ailleurs, elle est réintégrée dans l’assiette fiscale du salarié.
L’espace de négociation ouvert par l’Etat se referme. L’employeur trouve argument à l’abandon du TR tandis
que les avantages du salarié sont réduits. Le marché entame une baisse constante de 20% chaque année
pendant 4 ans. Au final, le marché a perdu 59% de sa valeur.

Le choc prend effet pleinement en 2015 et se traduit par une chute de la valeur totale du TR
par une baisse de la valeur faciale moyenne (l’employeur réduit son abondement) et surtout une baisse des
volumes (l’entreprise abandonne le TR). A l’horizon 2018, la valeur totale du TR passe à 2,38 Mds€ contre
6,61 Mds€ en situation de référence (absence de choc).

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


59
Valeur totale du TR
(en Mds €)
7,5
5,5
3,5
1,5
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018

valeur faciale (VF) VF de référence

En 2015, l’Etat bénéficie à plein d’une part des gains en (PO) liés à la levée de l’exonération et
des effets positifs sur ces gains du déversement. Déjà en 2016, le solde positif se réduit fortement du fait de
la baisse de la taille du marché et mécaniquement de la baisse d’une part de l’assiette de cotisation sur les
TR et d’autre part de l’importance des effets positifs du déversement réduisant les gains induits. En 2017,
le cout d’opportunité du choc devient positif. En clair, les gains en PO avec choc deviennent inférieurs à ce
qu’ils auraient été en l’absence de choc c’est à dire en situation dite de référence. A mesure que le marché
se réduit, le cout d’opportunité augmente non linéairement c’est à dire à un rythme de plu en plus rapide. A
l’horizon 2018 soit 4 années après l’introduction du choc, le coût d’opportunité pour l’Etat est de 622
millions d’€

Prélèvements obligatoires directs et induits (en Mds


€)
2,8
2,3
1,8
1,3
0,8
2014 2015 2016 2017 2018
PO avec choc 2,380 1,904 1,523 1,219
PO de référence 1,616 1,666 1,724 1,782 1,841

Logiquement, la somme des gains en PO se réduit fortement. L’Etat perçoit de moins en moins

de PO directs liés à l’assujettissement fiscal et social du TR et de PO indirects liés au déversement auprès


des affiliés. Du fait du rétrécissement progressif du marché, les PO directs passe de 1,3 Mds€ en 2014 à 0,55

Md€ en 2018. Les PO indirects de 1,16 Mds€ à 0,66 Md€ en 2018.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


60
Evolution des prélèvements obligatoires
avec choc (en Mds €)

4,0

PO indirects
2,0
PO directs
0,0
2014 2015 2016 2017 2018

Le ralentissement du déversement a pour conséquence une diminution de l’emploi induit de


109 847 en 2014 à 44 993 en 2018, à mettre en miroir des emplois induits en l’absence de choc. En 2018,
le choc fait perdre 80 104 emplois par rapport à la situation de référence.

Evolution des emplois induits par le TR


150,000

100,000
emplois avec choc
50,000
emplois de référence
0,000
2014 2015 2016 2017 2018

L’impact est logiquement très marqué dans le secteur de la restauration ou le choc à l’horizon 2018
ferait perdre 53 953 emplois à l’horizon 2018 soit environ 9% de l’emploi total du secteur. Les commerces
de proximité et de bouche perdraient 17 022 emplois.

Perte d'emplois lié au choc


2015 2016 2017 2018
0,000
restauration
-20,000
GMS
-40,000 commerces de bouche

-60,000

4. Impact d’un choc : « scénario 30 »


Pour rappel, ce scénario reprend les mêmes hypothèse que le précédent mais anticipe une
réaction au choc plus marquée. Avec une baisse annuelle de 30% sur 4 ans, le marché perd dans cet
intervalle 76% de sa valeur. Le scénario peut sembler extrême mais d’une part il est peu éloigné du cas
suédois où le marché s’était écroulé de 66% en moins de deux ans et d’autre part, il est conforme à l’idée
que l’exoneration est très structurante. Il importe donc de le considérer comme un scénario plausible.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


61
Le marché à partir de 2015 s’effondre à un rythme rapide. La valeur globale des TR passe de 5,8 Mds€ en

2014 à 1,39 Mds€ en 2018.

Valeur totale du TR
(en Mds €)
11,5

1,5
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018
valeur faciale (VF) VF de référence

Le coût d’opportunité pour l’Etat reste négatif en 2015 mais dès 2016, les gains en PO issus du
choc chutent lourdement, le coût d’opportunité devient positif et s’accroit d’année en année. En 2018, les
PO ne sont plus que de 0,714 Md€ contre 1,84 Mds€ en l’absence de choc. Le coût d’opportunité pour l’Etat
est de 1,12 Mds€. La baisse de la taille du marché consécutif au choc joue comme un effet de levier négatif
sur l’écosystème du TR. Plus le marché se réduit moins les PO prélevés en amont arrivent à compenser
la diminution des effets induits et donc des PO induits.

Prélèvements obligatoires directs et induits (en Mds €)


2,4
1,9
1,4
0,9
0,4
2014 2015 2016 2017 2018
PO avec choc 2,083 1,458 1,020 0,714
PO de référence 1,616 1,666 1,724 1,782 1,841

L’assiette de cotisation s’effondre et explique la diminution rapide des PO directs et indirects.

Evolution des prélèvements obligatoires


avec choc (en Mds €)

3,0

2,0
PO indirects
1,0 PO directs

0,0
2014 2015 2016 2017 2018

Les emplois induits mécaniquement diminuent très fortement. La restauration perd près de 90% des
emplois induits par le TR.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


62
Evolution des emplois induits par le TR
150,000

100,000
emplois avec choc
50,000 emplois de référence
0,000
2014 2015 2016 2017 2018

Perte d'emplois lié au choc


2015 2016 2017 2018
0,000
restauration
-20,000
GMS
-40,000
commerces de bouche
-60,000
-80,000

Tout comme le scénario qui précède, le choc, au-delà des gains en PO, opère une destruction de
valeur par réduction de la taille du marché. L’écosystème du TR est partiellement détruit.

5. Impact d’un choc : « scénario 25 »

Pour rappel, ce scénario emprunte les mêmes hypothèses et simule une réaction du marché
intermédiaire entre les deux scenarii précédents. A -25% chaque année, le marché perd au bout de 4 ans,
68% de sa valeur globale pour une valeur globale du TR de 1,83 Mds€ à l’horizon 2018 contre 5,81 Mds€
en 2014.

Valeur totale du TR
(en Mds €)
11,5

1,5
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018
valeur faciale (VF) VF de référence

Le coût d’opportunité négatif (gains du choc supérieurs aux gains en l’absence de choc) en 2015

est proche de 0 en 2016 (-50 millions €) et s’inverse en 2016 pour croître ensuite en 2017 et 2018. A cette

date le coût d’opportunité du choc est fortement positif de 900 Millions d’€.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


63
Prélèvements obligatoires directs et induits (Mds €)
2,8
2,3
Gains 1,8
1,3
0,8
2014 2015 2016 2017 2018
PO avec choc 2,231 1,674 1,255 0,941
PO de référence 1,616 1,666 1,724 1,782 1,841

La baisse des PO suit la baisse de l’assiette sur laquelle ils sont assis.

Evolution des prélèvements obligatoires


avec choc (en Mds €)

4,0
PO indirects
2,0
PO directs
0,0
2014 2015 2016 2017 2018

Le volume d’emploi généré et les pertes d’emplois sont conformes à l’hypothèse de baisse
tendancielle de 25% par an du marché. La restauration perd 81% des emplois auparavant induits par le TR.
Au lieu de générer 125 000 emplois induits, l’écosystème du TR n’en induirait que 34 700 à l’horizon 2018.
L’impact serait sans surprise massif dans la restauration ou l’intensité en emploi est forte et le titre encore
majoritairement déversé.

Evolution des emplois induits par le TR


150,000

100,000
emplois avec choc
50,000
emplois de référence
0,000
2014 2015 2016 2017 2018

Perte d'emplois lié au choc


2015 2016 2017 2018
0,000 restauration
-20,000
GMS
-40,000
-60,000 commerces de bouche
-80,000

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


64
6. Impact du choc forfait social : « scénario 15 »
Ce scénario se distingue des trois précédents par la nature du choc. Il est fait l’hypothèse que le
TR n’est pas traité comme du salaire mais est assujetti au forfait social. Ainsi l’(AF) est désormais taxable
au forfait de 20% auquel doit s’ajouter la CSG et la CRDS respectivement de 7,5% et 0,5%. Dans ce cas, l’
(AF) est soumise au forfait social et à la CSG et CRDS, mais ne l’est pas aux cotisations salariée. Par rapport
aux chocs précédents, le choc est de moindre ampleur mais reste substantiel. Il a été fait l’hypothèse d’une
moindre réaction du marché de l’ordre de -15% chaque année. Hypothèse des plus prudentes. Au final, le
marché perd en 4 ans 48% de sa valeur.

Valeur totale du TR
(en Mds €)
11,5

1,5
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018

valeur faciale (VF) VF de référence

Le coût d’opportunité pour l’Etat l’année du choc, est négatif de 746 millions €, proche de 0 en 2016
et devient négatif dès 2016 pour s’accroître jusqu’en 2018. A cette date le coût d’opportunité est de 608
millions €. En clair et trivialement, le choc est pour l’Etat « gagnant » en 2015, « neutre » en 2016 et
« perdant » ensuite. Les résultats sont donc peu éloignés du scénario d’un choc comme imaginé
précédemment avec une décroissance du marché à 20% c’est à dire sous hypothèse prudente. Cela n’est pas
contradictoire : certes le choc forfait social impact moins fortement les gains en PO induits (15 contre 20%
de recul du marché) mais le gain de cotisations (patronales et salariés) est aussi moindre. Il faut retenir de
cela que toute destruction de valeur sur le marché du TR entraîne des pertes (en PO et emplois) qui
finissent toujours par surpasser les gains liés à l’assujettissement du TR aux PO.

Prélèvements obligatoires directs et induits (en Mds €)


2,8
2,3
Gains

1,8
1,3
0,8
2014 2015 2016 2017 2018
PO avec choc 2,362 2,008 1,707 1,451 1,233
PO de référence 1,616 1,666 1,724 1,782 1,841

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


65
Evolution des prélèvements obligatoires
avec choc (en Mds €)

5,0
PO indirects
PO directs
0,0
2014 2015 2016 2017 2018

La destruction d’emplois est moindre que précédemment mais reste à un niveau élevé à 67756 par
rapport à la situation de référence à l’horizon 2018. Comme attendu, les pertes restent massives dans la
restauration de l’ordre de 60% (45 641) et très conséquente dans les commerces de proximité qui
perdraient 14 398 emplois et 7716 dans les GMS.

Evolution des emplois induits par le TR


150,000
100,000
emplois avec choc
50,000
emplois de référence
0,000
2014 2015 2016 2017 2018

Perte d'emplois liée au choc


60,000
40,000 restauration
20,000 GMS
0,000 commerces de bouche
2015 2016 2017 2018

7. Synthèse des résultats du modèle

Prélèvements obligatoires directs et induits


situation de référence et 3 scénarios de baisse du marché
2,8
PO en Mds €

2,3
1,8
1,3
0,8
2014 2015 2016 2017 2018
PO de référence 1,616 1,666 1,724 1,782 1,841
PO avec choc 25 2,231 1,674 1,255 0,941
PO avec choc 20 2,380 1,904 1,523 1,219
PO avec choc 30 2,083 1,458 1,020 0,714

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


66
Impact de la perte d'exonération du TR sur les
prélèvements obligatoires
Différence des scénarios avec la situation de référence
1,0
0,5
PO en Mds €

0,0
-0,5
-1,0
-1,5
2015 2016 2017 2018
Scénario 20 0,715 0,180 -0,259 -0,622
Scénario 25 0,566 -0,050 -0,527 -0,900
Scénario 30 0,417 -0,266 -0,762 -1,127

Quel que soit le scenario en 2015, les gains pour l’Etat excèdent ceux qu’ils auraient en l’absence de choc de
417 à 715 millions d’€ selon les cas. En 2016, le rétrécissement du marché commence à assécher à la fois
les cotisations sociales perçues en amont sur le TR et celles induites par le déversement (plus faible) auprès
des affiliés. C’est pourquoi avec une baisse de 25% ou 30% du marché, l’Etat est déjà en quelque sorte
« perdant » puisque il retire moins de gains que si le choc de taxation n’avait pas eu lieu. La poursuite du
rétrécissement du marché en 2017 et 2018 continue d’assécher les gains en prélèvements obligatoires si
bien que l’écart entre ce qu’il perçoit avec choc et ce qu’il aurait perçu sans choc ne cesse de s’accroître. Si
l’on fait l’hypothèse d’un baisse de 25% par an, à l’horizon 2018, l’Etat devrait tabler sur « un manque à
gagner » de 900 millions d’€. Sur le plan strictement comptable donc, l’Etat est quel que soit le scenario, sur
une période de quatre années, largement perdant. Autrement dit, un choc de taxation aurait un effet de
destruction de valeur dont finalement, et sur un plan strictement comptable, l’Etat ne trouverait aucun
avantage.
Le rétrécissement du marché et du déversement dans l’économie locale mécaniquement provoque au fur et
à mesure des années, des suppressions d’emplois d’ampleurs non négligeables.

Impact de la perte d'exonération du TR sur les emplois


induits par le marché du TR
Différence des scénarios avec la situation de référence
0,0
emplois en milliers

-20,0
-40,0
-60,0
-80,0
-100,0
-120,0
2015 2016 2017 2018
Scénario 20 -25,305 -46,852 -64,884 -80,104
Scénario 25 -30,798 -55,365 -74,784 -90,341
Scénario 30 -36,290 -63,329 -83,448 -98,723

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


67
Quel que soir le scenario dès 2015, tous secteurs confondus (restauration traditionnelle et rapide,
GMS, commerces de bouches ou alimentaires spécialisées), les pertes d’emplois sont significatives
supérieures à 25 000. Les pertes plus conséquentes d’années en années approchent les 100 000
dans le plus mauvais des cas et dépasse les 80 000 dans le scenario le plus favorable. L’impact est
partout significatif mais particulièrement important dans les secteurs réputés riches en emplois
c’est à dire les moins capitalistiques. A l’horizon 2018, en cas de choc de taxation, la restauration
pourrait perdre 90 % des emplois autrefois induits par le déversement des TR.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


68
ANNEXES

ANNEXE 1. Choix des principaux paramètres du modèle.71


La TVA
Le CA HT déversé auprès des affiliés sera retrouvée en déduisant la TVA applicable. Pour
les épiceries, alimentation spécialisée, mais aussi les superettes, supermarchés, commerces de
bouche, se mélangent deux taux de TVA à 5,5 et 10%. Néanmoins au regard des usages du TR, la
majorité des achats se portent sur des consommations auxquelles s’applique le taux de 10%. A
titre d’exemple, dans une boulangerie, les produits salés et sandwich ou pâtisserie non consommé
sur place sont assujettis au taux. Et il en va de même pour les produits traiteurs et transformés en
général destinés à une consommation immédiate.72 Seules les catégories produites frais au taux

71 Sources :

http://www.insee.fr/fr/themes/detail.asp?ref_id=fichesect-com&page=donnees-detaillees/fichesect-com/commerce_impaira.htm

http://insee.fr/fr/themes/document.asp?reg_id=0&ref_id=ip1286&page=graph

http://www.insee.fr/fr/ppp/bases-de-donnees/donnees-detaillees/fichesect-serv/pdfservice/fic55g.pdf

http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/ref/SERFRA12A_d%20_flot2_h.pdf

http://www.insee.fr/fr/themes/detail.asp?reg_id=0&ref_id=esa-service-2010&page=donnees-detaillees/esa/esa-service/esa-
service-2010/fiche5610A.html

http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/ref/comfra09h.PDF

http://www.insee.fr/fr/themes/detail.asp?reg_id=0&ref_id=esa-commerce-2010&page=donnees-detaillees/esa/esa-
commerce/esa-commerce-2010/fiche4711D.html

http://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/dgccrf/documentation/dgccrf_eco/dgccrf_eco28.pdf

http://vosdroits.service-public.fr/professionnels-entreprises/F31326.xhtml#N1007E

http://www.girafoodservice.com/base-donnees/restaurants-collectivites.php

http://www.expert-comptable-tpe.fr/posts/view/charges-sociales-montant-salaire

http://www.efl.fr/en-direct/indices_taux/social/salaire/taux_cot.html

http://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/dgccrf/documentation/dgccrf_eco/dgccrf_eco28.pdf

http://www.cntr.fr/V2/home.php

72 Les ventes à emporter ou à livrer de produits alimentaires préparés en vue d’une consommation immédiate consistent en la
fourniture de nourriture préparée et/ou de boissons, destinées à une consommation immédiate, c’est-à-dire dans les instants suivant
l’achat, que ces produits soient vendus chauds ou froids. Ces produits ne sont pas destinés à être conservés par le consommateur. Cette
situation découle des caractéristiques du produit lorsqu’il est nécessaire de le consommer très rapidement pour que son goût ne
s’altère pas ou pour que le produit ne se gâte pas. La circonstance que le client ne souhaite pas ou ne puisse pas consommer

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


69
de TVA à 5,5% posent question. Au regard de son poids en valeur dans l’ensemble de ce segment,
il est négligé. Le taux de 10% est appliqué. Dans la restauration traditionnelle et rapide, le taux de
référence est de 10%. La encore, certaines consommations (eau en bouteille, etc) sont au taux de
TVA de 5,5% mais la encore, cela reste négligeable dans l’ensemble et dans l’étude, le taux de 10%
est appliqué à partir de 2014.

Les cotisations sociales


Le taux moyen de cotisations sociales est de l’ordre de 42%. Deux réformes obligent à
pondérer le taux moyen. D’une part la mise en œuvre du CICE qui permet à l’entreprise depuis
2013 de baisser le coût du travail à hauteur de 6% de la masse salariale des salaires inférieurs à
1,6 fois le smic. Pour autant, à proprement parler, le CICE ne modifie les cotisations puisqu’il est
dispensé sous forme de crédit d’impôt et n’est pas immédiatement restitué si le bénéficie de
l’entreprise est inférieur au crédit. Il a donc été décidé de ne pas l’inclure ici mais de l’impacter
dans le calcul de l’IS. Par contre le dispositif « zéro charges » visant à réduire à néant les
cotisations URSSAF sans préjudice sur les cotisations chômage et retraite a été pris en compte. Au
final, pour un salarié au smic, le taux de cotisation employeur est normé à 19% du salaire brut
(1457 €) soit un salaire brut chargé de 1733€.73 Pour les salaires compris entre le smic et 1,6 fois
le smic, le taux de référence est de 23% (dégressivité de l’exonération). Pour les salaires

immédiatement le produit en question ne fait pas obstacle à sa taxation au taux réduit de 10 %, sous réserve des produits surgelés et
plats cuisinés lorsqu’ils ne sont pas consommés immédiatement dans les locaux du vendeur. Source :
http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/2033-PGP.html

73 Le dispositif "zéro charge" permet une réduction des cotisations patronales payées sur les salaires inférieurs à 1.6 Smic soit un
montant mensuel brut s'élevant à 2.332,032 euros .
L'exonération se calcule en prenant en considération un coefficient (C) dont la valeur s'obtient de la façon suivante : Coefficient =
(T/0,6) × (1,6 × SMIC calculé pour un an/ rémunération annuelle brute-1).

T représente la valeur maximale du coefficient. Sa valeur dépend de la taille de l'entreprise, elle est fixée par décret.

Pour l'année 2015, les taux sont les suivants :

 0,2795 pour les entreprises de moins de 20 salariés,

 0,2835 pour les entreprises dont l'effectif est supérieur (2).


A titre d'exemple dans une entreprise de moins de 20 salariés, si la rémunération du salarié considéré correspond à un montant de
1.500 euros mensuels bruts, le coefficient (C) s'obtient par le calcul suivant :

Coefficient = (0.2795/0.6) x (1.6 x 17.490, 24/18.000 -1) = 0,2584 (arrondi à quatre décimales, au dix millième le plus proche).
Réduction de charge = coefficient (C) x rémunération brute = 1.500 x 0,2584 = 387,6 euros

L'entreprise bénéficie d'une exonération de charges patronales de 387.6 euros par mois sur un salaire brut mensuel de 1.500 euros.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


70
supérieurs à 1,6 fois le smic le taux de 42% est appliqué. Ce découpage autorise une estimation
plus pointue des flux de cotisations et donc plus proche de la réalité.

Sachant que selon l’INSEE, 15% des salariés perçoivent une rémunération égale au smic, 45%
entre le smic et 1,6 fois le smic et 40% au-delà. Les cotisations potentielles seront calculées selon
les taux de prélèvement du segment au prorata de son poids dans la population salariée. Ainsi, les
cotisations afférentes au TR dont on aura calculé l’assiette sociale (AS) sera :

CS totales = (AS*0,19)*0,15 + (AS*0,23)*0,45+ (AS*0,42)*0,40 soit un taux moyen de 30%

De la même manière, pour estimer les cotisations sociales induites par le déversement des
revenus du TR auprès des affiliés, on considère que 45% des emplois sont au niveau du smic
(INSEE), 30% entre 1 et 1,6 smic et 25% au-delà de 1,6 smic. Les recettes induites seront égales
à:

CS induites totales : (CAHT* PMS*0,19)*0,45 + (CAHT*PMS*0,23)*0,30 + (CAHT*PMS*0,42)*0,25

Avec PMS : part du CAHT consacrée à la masse salariale

Les paramètres par segment d’affiliés


Pour estimer les recettes fiscales et sociales ainsi que l’emploi induit, il convient de
disposer pour chaque secteur ou les revenus du TR sont déversés de : taux de marge moyen du
segment, de la part du CAHT affecté au frais de personnel en général c’est à -à-dire à la masse
salariale et du CAHT par ETP (emploi équivalent temps plein). En effet, l’intensité capitalistique
est variable d’un secteur à un autre et les effets induits sont donc différents. La restauration à
CAHT égal emploie par exemple un nombre bien supérieur de salariés que la GMS. Les TR étant
désormais déversés en masse vers ceux-ci, il convenait de calculer des coefficients propres à
chaque secteur. Les normes sont fondées essentiellement sur les fiches sectorielles de l’INSEE
notamment de 2009 et 2010. Bien qu’un peu datées, ces références établies sur la totalité de la
population étudiée ont semblé plus adaptées que celles de Girafood établies sur la base
d’échantillons. Mis à part le taux de marge, les autres ratios (intensité capitalistique, etc) sont
structurellement stables. Il n’y a donc pas en l’espèce de problème majeur sur la datation des
données. Le niveau de rémunération des emplois induits prend en compte la répartition de
l’emploi par tranche de salaire vue plus haut.

S’agissant de l’alimentation spécialisée (charcuterie, boulangerie) : le taux de marge en


moyenne est proche de 30%. Les frais de personnel représentent 34% du CAHT. Le segment
occupe un ETP par tranche de 0,15 M€ de CAHT. S’agissant des supermarchés : le taux de marge

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


71
en moyenne est proche de 18%. Les frais de personnel représentent 18% du CAHT. Le segment
occupe un ETP par tranche de 0,37 M€ de CAHT. S’agissant de la restauration traditionnelle et
rapide : le taux de marge moyen est de 19%. Les frais de personnels représentent 37% du CAHT.
Le segment occupe un ETP par tranche de 0,1 M€. Enfin, il est considéré qu’en sus des frais de
personnel, chaque segment d’affiliés au TR fait appel à des travailleurs indépendants à hauteur de
12% de la masse salariale.

L’impôt sur le revenu (IR) et l’impôt sur les sociétés (IS)


Concernant l’ (IR), le niveau de salaires a été pris en compte. Ainsi un salarié au smic, du
fait de la suppression de la première tranche d’imposition, assume une pression fiscale de 0, de
7,4% du salaire imposable lorsque sa rémunération brute est égale à 1,4 fois le smic et de 8,8%
lorsque cette rémunération est égale à 2 fois le smic.

IR total = (SN*0,19)*0% + (SN*0,23)*7,4% + (SN*0,42)*8,8% soit un taux moyen de 5,4%

S’agissant de l’ (IS), pour prendre en compte le CICE, le taux de référence de 33% a été
ramené à 30% et non à 27%. Ce point peut porter à discussion. En effet selon le comité de suivi
du CICE seuls 40% des crédits exigibles l’ont été faute de bénéfices suffisants des entreprises ou
de non recours (perte d’opportunité). Il a donc été décidé de considérer que le CICE permettait en
moyenne d’abaisser de 3 points le taux de l’IS. En l’espèce le choix de reporter 3ou 6 % du CICE
impact très modérément les résultats.

Le « ticket moyen »
Pour déterminer le CAHT induit par l’usage des TR et déversés auprès des différents
affiliés, il convient de déterminer le « ticket moyen » : le prix HT dépensé par chaque salarié en
moyenne par repas. Compte tenu de la ventilation actuelle des TR et des spécificités de chaque
segment d’affiliés, il serait réducteur de déterminer un seul ticket moyen. Aussi, il a été décidé de
déterminer un ticket moyen par segment. Les données Girafood, l’étude de la DGCCRF et les
données relatives aux titres dématérialisées permettent de définir une dépense moyenne par
segment. Sur cette base, le ticket moyen dans un restaurant est normé à 11€, à 9€ dans les
commerces de bouche et 8,1€ dans les supermarchés. Le ticket moyen de la restauration à 11 €
comprend la restauration traditionnelle ou le niveau de service et les prix sont supérieurs à ceux
de la restauration rapide. Dans la première le ticket moyen est fixé à 13€ contre 8,2€ dans la
restauration rapide. Au regard de la part de la restauration rapide dans l’ensemble de ce segment
(42%), on obtient une moyenne pondérée de 11€.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


72
Ticket moyen global : (11€*0,56) + (8,1€*0,21) + (9€*0,23) soit un ticket moyen de 9,93€

Soit, un « reste à charge » de 2,31€ par rapport à une valeur faciale moyenne de 7,62 en 2014. La
baisse du ticket moyen en 2014 de 9,93 contre 10,24 € en 2009 s’explique par un effet de structure
et le basculement progressif de la restauration traditionnelle vers la restauration rapide, les
commerces de bouche de proximité (boulangerie, etc) ou le ticket moyen est en moyenne
moindre. Pour les années 2015 à 2017, on conserve le « reste à charge » ou ajout du salarié de
30,3% (2,31/7,62€).

Le CAHT total est donc égal à la moyenne pondérée des tickets moyens. Pondération
conforme à la ventilation de la valeur faciale des TR par segment d’affiliés observée en 2014. Le
CAHT total est donc estimé selon le calcul suivant :

CAHT total= (CAHT1*PDM1*TM1*) + (CAHT2*PDM2*TM2) + (CAHT3*PDM3*TM3)

Ou PDM1 : part de marché TR du segment. TM1 : ticket moyen du segment 1, etc.

Le salaire moyen induit


L’idée est de se rapprocher de la structure des salaires observés dans chaque segment
d’affilié. Sur la base des données de l’INSEE notamment et de Girafood, on estime que 45% des
salariés sont au smic, 30 % entre le smic et 1,6 smic et 25% au-delà de 1,6 smic. En effet il semblait
un peu simplificateur de considérer que tous les emplois induits devaient être identiques donc
situé à un niveau de rémunération aussi identique.

Valeur faciale moyenne


Pour 2014, avec l’introduction des cartes la valeur faciale moyenne est de 7,62 compte
tenu de la valeur faciale par carte supérieure à celle sur papier. La valeur faciale moyenne bouge
peu du fait du faible poids (1,06%) des cartes dans l’ensemble.

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


73
ANNEXE 2
1.1. Tableaux année de référence
Recettes théoriques
en euros 2014 2015 2016 2017 2018
VF moyenne prix d'un TR 7,62 € 7,70 € 7,79 € 7,89 € 7,98 €
prix moyen d'un repas (TR+3,10 euros) 9,93 € 10,03 € 10,16 € 10,28 € 10,40 €
part employeur 55% de VF d'un TR 4,19 € 4,23 € 4,29 € 4,34 € 4,39 €
coef multiplicateur 2,370 2,370 2,370 2,370 2,370
en Mds. €
CA total lié au TR 7,573 7,803 8,077 8,351 8,625
Recettes fiscales et sociales induites par le TR (TVA+IS+CS+IR) 1,616 1,666 1,724 1,782 1,841

Recettes et emplois induits


Calcul des recettes induites par secteur 2014 Colonne1 Colonne2 Colonne3 2015 Colonne4 Colonne5 Colonne6
en Mds. € restauration GMS commerces prox TOTAL restauration GMS commerces prox TOTAL
CA total= AF*mult 4,698 1,297 1,579 7,573 4,840 1,337 1,627 7,803
CA de la restauration hors tva 4,651 1,284 1,563 7,498 4,792 1,323 1,610 7,726
TVA 5,5% (10% en 2014) 0,047 0,013 0,016 0,075 0,048 0,013 0,016 0,077

Marge (20% du CA HT) 19%, 18%, 30% 0,884 0,231 0,469 1,584 0,911 0,238 0,483 1,632
IS sur marge (1/3 de la marge) 0,265 0,069 0,141 0,475 0,273 0,071 0,145 0,490
charges courantes 1,488 0,668 0,375 2,531 1,534 0,688 0,386 2,608
salaires chargés (30% CA HT) 1,738 0,233 0,537 2,508 1,791 0,241 0,553 2,584
rémunérations chargées salaires+indépendants (50% CA HT) 2,279 0,385 0,719 3,383 2,348 0,397 0,741 3,486
nombre emplois dérivés du TR en milliers 73,995 12,510 23,343 109,847 76,242 12,890 24,052 113,183
CS sur salaires (65/144 des salaires chargés) 0,682 0,092 0,211 0,984 0,703 0,094 0,217 1,014
salaires nets (79/144 des salaires) 1,056 0,142 0,326 1,524 1,088 0,146 0,336 1,571
IR (3% des salaires nets) 0,0570 0,0077 0,0176 0,082 0,0588 0,0079 0,0181 0,085

Recettes fiscales et sociales induites par le TR (TVA+IS+CS+IR) 1,051 0,181 0,384 1,616 1,082 0,187 0,396 1,666

Calcul des recettes induites par secteur 2016 Colonne1 Colonne2 Colonne3 2017 Colonne4 Colonne5 Colonne6 2018 Colonne7 Colonne8 Colonne9
en Mds. € restauration GMS commerces de prox TOTAL restauration GMS Commerces de prox TOTAL restauration GMS Commerces de prox TOTAL
CA total= AF*mult 5,010 1,383 1,684 8,077 5,180 1,430 1,741 8,351 5,350 1,477 1,798 8,625
CA de la restauration hors tva 4,960 1,370 1,667 7,997 5,129 1,416 1,723 8,268 5,297 1,463 1,780 8,539
TVA 5,5% (10% en 2014) 0,050 0,014 0,017 0,080 0,051 0,014 0,017 0,083 0,053 0,015 0,018 0,085

Marge (20% du CA HT) 19%, 18%, 30% 0,942 0,247 0,500 1,689 0,974 0,255 0,517 1,746 1,006 0,263 0,534 1,804
IS sur marge (1/3 de la marge) 0,283 0,074 0,150 0,507 0,292 0,076 0,155 0,524 0,302 0,079 0,160 0,541
charges courantes 1,587 0,712 0,400 2,700 1,641 0,736 0,414 2,791 1,695 0,761 0,427 2,883
salaires chargés (30% CA HT) 1,854 0,249 0,572 2,675 1,917 0,257 0,592 2,766 1,979 0,266 0,611 2,857
rémunérations chargées salaires+indépendants (50% CA HT) 2,431 0,411 0,767 3,608 2,513 0,425 0,793 3,731 2,595 0,439 0,819 3,853
nombre emplois dérivés du TR en milliers 78,917 13,342 24,896 117,154 81,592 13,794 25,739 121,126 84,267 14,246 26,583 125,097
CS sur salaires (65/144 des salaires chargés) 0,727 0,098 0,225 1,049 0,752 0,101 0,232 1,085 0,777 0,104 0,240 1,121
salaires nets (79/144 des salaires) 1,127 0,151 0,348 1,626 1,165 0,156 0,360 1,681 1,203 0,162 0,371 1,736
IR (3% des salaires nets) 0,0608 0,0082 0,0188 0,088 0,0629 0,0084 0,0194 0,091 0,0650 0,0087 0,0201 0,094

Recettes fiscales et sociales induites par le TR (TVA+IS+CS+IR) 1,120 0,194 0,410 1,724 1,158 0,200 0,424 1,782 1,196 0,207 0,438 1,841

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


74
1.2. Tableau choc « scénario -25% »
Recettes réelles directes
en Mds. € 2014 2015 2016 2017 2018
Valeur totale du TR (VF) 5,811 4,358 3,269 2,452 1,839
Assiette fiscale (0.55 de VF)=AF 3,196 2,397 1,798 1,348 1,011
Cotisations patronales versées (30% de AF) 0,96 0,72 0,54 0,40 0,30
Cotisations salariée versées (51/130 de AF) 1,25 0,94 0,71 0,53 0,40
Salaires nets (79/130 de AF)=SN 1,94 1,46 1,09 0,82 0,61
Impots sur le revenu (3% de SN) 0,105 0,079 0,059 0,044 0,033
Prélèvement fiscal et social théorique (CS + IR) 1,359 1,019 0,764 0,573 0,430

Recettes et emplois induits de 2015 à 2018


Calcul des recettes induites par secteur 2014 Colonne1 Colonne2 Colonne3 2015 Colonne4 Colonne5 Colonne6
en Mds. € restauration GMS commerces de bouche TOTAL restauration GMS commerces de bouche TOTAL
CA total= AF*mult 4,698 1,297 1,579 7,573 3,523 0,973 1,184 5,680
CA de la restauration hors tva 4,651 1,284 1,563 7,498 3,488 0,963 1,172 5,624
TVA 5,5% (10% en 2014) 0,047 0,013 0,016 0,075 0,035 0,010 0,012 0,056

Marge (20% du CA HT) 19%, 18%, 30% 0,884 0,231 0,469 1,584 0,663 0,173 0,352 1,188
IS sur marge (1/3 de la marge) 0,265 0,069 0,141 0,475 0,199 0,052 0,105 0,356
charges courantes 1,488 0,668 0,375 2,531 1,116 0,501 0,281 1,898
salaires chargés (30% CA HT) 1,738 0,233 0,537 2,508 1,304 0,175 0,403 1,881
rémunérations chargées salaires+indépendants (50% CA HT) 2,279 0,385 0,719 3,383 1,709 0,289 0,539 2,537
nombre emplois dérivés du TR en milliers 73,995 12,510 23,343 109,847 55,496 9,382 17,507 82,385
CS sur salaires (65/144 des salaires chargés) 0,682 0,092 0,211 0,984 0,511 0,069 0,158 0,738
salaires nets (79/144 des salaires) 1,056 0,142 0,326 1,524 0,792 0,106 0,245 1,143
IR (3% des salaires nets) 0,0570 0,0077 0,0176 0,082 0,0428 0,0057 0,0132 0,062

Recettes fiscales et sociales induites par le TR (TVA+IS+CS+IR) 1,051 0,181 0,384 1,616 0,788 0,136 0,288 1,212

Calcul des recettes induites par secteur 2016 Colonne1 Colonne2 Colonne3 2017 Colonne4 Colonne5 Colonne6 2018 Colonne7 Colonne8 Colonne9
en Mds. € restauration GMS commerces de bouche TOTAL restauration GMS commerces de bouche TOTAL restauration GMS commerces de boucheTOTAL
CA total= AF*mult 2,642 0,730 0,888 4,260 1,982 0,547 0,666 3,195 1,486 0,410 0,499 2,396
CA de la restauration hors tva 2,616 0,722 0,879 4,218 1,962 0,542 0,659 3,163 1,472 0,406 0,495 2,373
TVA 5,5% (10% en 2014) 0,026 0,007 0,009 0,042 0,020 0,005 0,007 0,032 0,015 0,004 0,005 0,024

Marge (20% du CA HT) 19%, 18%, 30% 0,497 0,130 0,264 0,891 0,373 0,098 0,198 0,668 0,280 0,073 0,148 0,501
IS sur marge (1/3 de la marge) 0,149 0,039 0,079 0,267 0,112 0,029 0,059 0,200 0,084 0,022 0,045 0,150
charges courantes 0,837 0,376 0,211 1,424 0,628 0,282 0,158 1,068 0,471 0,211 0,119 0,801
salaires chargés (30% CA HT) 0,978 0,131 0,302 1,411 0,733 0,099 0,226 1,058 0,550 0,074 0,170 0,794
rémunérations chargées salaires+indépendants (50% CA HT) 1,282 0,217 0,404 1,903 0,961 0,163 0,303 1,427 0,721 0,122 0,227 1,070
nombre emplois dérivés du TR en milliers 41,622 7,037 13,130 61,789 31,217 5,278 9,848 46,342 23,412 3,958 7,386 34,756
CS sur salaires (65/144 des salaires chargés) 0,384 0,052 0,118 0,554 0,288 0,039 0,089 0,415 0,216 0,029 0,067 0,311
salaires nets (79/144 des salaires) 0,594 0,080 0,183 0,857 0,446 0,060 0,138 0,643 0,334 0,045 0,103 0,482
IR (3% des salaires nets) 0,0321 0,0043 0,0099 0,046 0,0241 0,0032 0,0074 0,035 0,0180 0,0024 0,0056 0,026

Recettes fiscales et sociales induites par le TR (TVA+IS+CS+IR) 0,591 0,102 0,216 0,909 0,443 0,077 0,162 0,682 0,332 0,057 0,122 0,511

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


75
Annexe 1.3. Tableau choc « scénario -20% »
Recettes réelles directes
en Mds. € 2014 2015 2016 2017 2018
Valeur totale du TR (VF) 5,811 4,649 3,719 2,975 2,380
Assiette fiscale (0.55 de VF)=AF 3,196 2,557 2,045 1,636 1,309
Cotisations patronales versées (30% de AF) 0,96 0,77 0,61 0,49 0,39
Cotisations salariée versées (51/130 de AF) 1,25 1,00 0,80 0,64 0,51
Salaires nets (79/130 de AF)=SN 1,94 1,55 1,24 0,99 0,80
Impots sur le revenu (3% de SN) 0,105 0,084 0,067 0,054 0,043
Prélèvement fiscal et social théorique (CS + IR) 1,359 1,087 0,870 0,696 0,557

Recettes et emplois induits


Calcul des recettes induites par secteur 2014 Colonne1 Colonne2 Colonne3 2015 Colonne4 Colonne5 Colonne6
en Mds. € restauration GMS commerces de bouche TOTAL restauration GMS commerces de bouche TOTAL
CA total= AF*mult 4,698 1,297 1,579 7,573 3,758 1,038 1,263 6,059
CA de la restauration hors tva 4,651 1,284 1,563 7,498 3,721 1,027 1,250 5,999
TVA 5,5% (10% en 2014) 0,047 0,013 0,016 0,075 0,037 0,010 0,013 0,060

Marge (20% du CA HT) 19%, 18%, 30% 0,884 0,231 0,469 1,584 0,707 0,185 0,375 1,267
IS sur marge (1/3 de la marge) 0,265 0,069 0,141 0,475 0,212 0,055 0,113 0,380
charges courantes 1,488 0,668 0,375 2,531 1,191 0,534 0,300 2,025
salaires chargés (30% CA HT) 1,738 0,233 0,537 2,508 1,390 0,187 0,429 2,007
rémunérations chargées salaires+indépendants (50% CA HT) 2,279 0,385 0,719 3,383 1,823 0,308 0,575 2,707
nombre emplois dérivés du TR en milliers 73,995 12,510 23,343 109,847 59,196 10,008 18,674 87,878
CS sur salaires (65/144 des salaires chargés) 0,682 0,092 0,211 0,984 0,546 0,073 0,168 0,787
salaires nets (79/144 des salaires) 1,056 0,142 0,326 1,524 0,845 0,114 0,261 1,219
IR (3% des salaires nets) 0,0570 0,0077 0,0176 0,082 0,0456 0,0061 0,0141 0,066

Recettes fiscales et sociales induites par le TR (TVA+IS+CS+IR) 1,051 0,181 0,384 1,616 0,840 0,145 0,308 1,293

Calcul des recettes induites par secteur 2016 Colonne1 Colonne2 Colonne3 2017 Colonne4 Colonne5 Colonne6 2018 Colonne7 Colonne8 Colonne9
en Mds. € restauration GMS commerces de bouche TOTAL restauration GMS commerces de bouche TOTAL restauration GMS commerces de boucheTOTAL
CA total= AF*mult 3,006 0,830 1,010 4,847 2,405 0,664 0,808 3,878 1,924 0,531 0,647 3,102
CA de la restauration hors tva 2,977 0,822 1,000 4,799 2,381 0,658 0,800 3,839 1,905 0,526 0,640 3,071
TVA 5,5% (10% en 2014) 0,030 0,008 0,010 0,048 0,024 0,007 0,008 0,038 0,019 0,005 0,006 0,031

Marge (20% du CA HT) 19%, 18%, 30% 0,566 0,148 0,300 1,014 0,452 0,118 0,240 0,811 0,362 0,095 0,192 0,649
IS sur marge (1/3 de la marge) 0,170 0,044 0,090 0,304 0,136 0,036 0,072 0,243 0,109 0,028 0,058 0,195
charges courantes 0,953 0,427 0,240 1,620 0,762 0,342 0,192 1,296 0,610 0,274 0,154 1,037
salaires chargés (30% CA HT) 1,112 0,149 0,343 1,605 0,890 0,120 0,275 1,284 0,712 0,096 0,220 1,027
rémunérations chargées salaires+indépendants (50% CA HT) 1,459 0,247 0,460 2,165 1,167 0,197 0,368 1,732 0,933 0,158 0,294 1,386
nombre emplois dérivés du TR en milliers 47,357 8,006 14,939 70,302 37,885 6,405 11,951 56,242 30,308 5,124 9,561 44,993
CS sur salaires (65/144 des salaires chargés) 0,436 0,059 0,135 0,630 0,349 0,047 0,108 0,504 0,279 0,038 0,086 0,403
salaires nets (79/144 des salaires) 0,676 0,091 0,209 0,976 0,541 0,073 0,167 0,780 0,433 0,058 0,134 0,624
IR (3% des salaires nets) 0,0365 0,0049 0,0113 0,053 0,0292 0,0039 0,0090 0,042 0,0234 0,0031 0,0072 0,034

Recettes fiscales et sociales induites par le TR (TVA+IS+CS+IR) 0,672 0,116 0,246 1,035 0,538 0,093 0,197 0,828 0,430 0,074 0,157 0,662

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


76
Annexe 1.4 Tableaux choc « scénario -30 % »
Recettes directes
en Mds. € 2014 2015 2016 2017 2018
Valeur totale du TR (VF) 5,811 4,068 2,847 1,993 1,395
Assiette fiscale (0.55 de VF)=AF 3,196 2,237 1,566 1,096 0,767
Cotisations patronales versées (30% de AF) 0,96 0,67 0,47 0,33 0,23
Cotisations salariée versées (51/130 de AF) 1,25 0,88 0,61 0,43 0,30
Salaires nets (79/130 de AF)=SN 1,94 1,36 0,95 0,67 0,47
Impots sur le revenu (3% de SN) 0,105 0,073 0,051 0,036 0,025
Prélèvement fiscal et social théorique (CS + IR) 1,359 0,951 0,666 0,466 0,326

Recettes induites
Calcul des recettes induites par secteur 2014 Colonne1 Colonne2 Colonne3 2015 Colonne4 Colonne5 Colonne6
en Mds. € restauration GMS commerces de bouche TOTAL restauration GMS commerces de bouche TOTAL
CA total= AF*mult 4,698 1,297 1,579 7,573 3,288 0,908 1,105 5,301
CA de la restauration hors tva 4,651 1,284 1,563 7,498 3,256 0,899 1,094 5,249
TVA 5,5% (10% en 2014) 0,047 0,013 0,016 0,075 0,033 0,009 0,011 0,052

Marge (20% du CA HT) 19%, 18%, 30% 0,884 0,231 0,469 1,584 0,619 0,162 0,328 1,109
IS sur marge (1/3 de la marge) 0,265 0,069 0,141 0,475 0,186 0,049 0,098 0,333
charges courantes 1,488 0,668 0,375 2,531 1,042 0,467 0,263 1,772
salaires chargés (30% CA HT) 1,738 0,233 0,537 2,508 1,217 0,163 0,376 1,756
rémunérations chargées salaires+indépendants (50% CA HT) 2,279 0,385 0,719 3,383 1,595 0,270 0,503 2,368
nombre emplois dérivés du TR en milliers 73,995 12,510 23,343 109,847 51,796 8,757 16,340 76,893
CS sur salaires (65/144 des salaires chargés) 0,682 0,092 0,211 0,984 0,477 0,064 0,147 0,689
salaires nets (79/144 des salaires) 1,056 0,142 0,326 1,524 0,739 0,099 0,228 1,067
IR (3% des salaires nets) 0,0570 0,0077 0,0176 0,082 0,0399 0,0054 0,0123 0,058

Recettes fiscales et sociales induites par le TR (TVA+IS+CS+IR) 1,051 0,181 0,384 1,616 0,735 0,127 0,269 1,132

Calcul des recettes induites par secteur 2016 Colonne1 Colonne2 Colonne3 2017 Colonne4 Colonne5 Colonne6 2018 Colonne7 Colonne8 Colonne9
en Mds. € restauration GMS commerces de bouche TOTAL restauration GMS commerces de bouche TOTAL restauration GMS commerces de boucheTOTAL
CA total= AF*mult 2,302 0,636 0,774 3,711 1,611 0,445 0,541 2,598 1,128 0,311 0,379 1,818
CA de la restauration hors tva 2,279 0,629 0,766 3,674 1,595 0,441 0,536 2,572 1,117 0,308 0,375 1,800
TVA 5,5% (10% en 2014) 0,023 0,006 0,008 0,037 0,016 0,004 0,005 0,026 0,011 0,003 0,004 0,018

Marge (20% du CA HT) 19%, 18%, 30% 0,433 0,113 0,230 0,776 0,303 0,079 0,161 0,543 0,212 0,056 0,113 0,380
IS sur marge (1/3 de la marge) 0,130 0,034 0,069 0,233 0,091 0,024 0,048 0,163 0,064 0,017 0,034 0,114
charges courantes 0,729 0,327 0,184 1,240 0,511 0,229 0,129 0,868 0,357 0,160 0,090 0,608
salaires chargés (30% CA HT) 0,852 0,114 0,263 1,229 0,596 0,080 0,184 0,860 0,417 0,056 0,129 0,602
rémunérations chargées salaires+indépendants (50% CA HT) 1,117 0,189 0,352 1,658 0,782 0,132 0,247 1,160 0,547 0,093 0,173 0,812
nombre emplois dérivés du TR en milliers 36,257 6,130 11,438 53,825 25,380 4,291 8,007 37,678 17,766 3,004 5,605 26,374
CS sur salaires (65/144 des salaires chargés) 0,334 0,045 0,103 0,482 0,234 0,031 0,072 0,338 0,164 0,022 0,051 0,236
salaires nets (79/144 des salaires) 0,518 0,070 0,160 0,747 0,362 0,049 0,112 0,523 0,254 0,034 0,078 0,366
IR (3% des salaires nets) 0,0279 0,0038 0,0086 0,040 0,0196 0,0026 0,0060 0,028 0,0137 0,0018 0,0042 0,020

Recettes fiscales et sociales induites par le TR (TVA+IS+CS+IR) 0,515 0,089 0,188 0,792 0,360 0,062 0,132 0,554 0,252 0,044 0,092 0,388

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


77
1.4 Tableau choc forfait social « scénario -15% »
Recettes directes
en Milliards 2014 2015 2016 2017 2018
Valeur faciale (VF) 5,811 4,939 4,198 3,569 3,033
Assiette fiscale (0.55 de VF)=AF 3,196 2,717 2,309 1,963 1,668
Cotisations patronales versées (20% de AF) 0,639 0,543 0,462 0,393 0,334
Cotisations salariée versées (28/120 de AF) 0,746 0,634 0,539 0,458 0,389
Salaires nets (92/120 de AF)=SN 2,450 2,083 1,770 1,505 1,279
Impots sur le revenu (0% de SN) 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000
Gain fiscale et social théorique (CS + IR) 0,746 0,634 0,539 0,458 0,389

Recettes induites
Colonne1 2014 Colonne2 Colonne3 Colonne4 2015 Colonne5 Colonne6 Colonne7
Colonne1 restauration GMScommerces de boucheTOTAL restauration GMS commerces de boucheTOTAL
CA total= AF*mult 4,698 1,297 1,579 7,573 3,993 1,103 1,342 6,437
CA de la restauration hors tva 4,651 1,284 1,563 7,498 3,953 1,092 1,329 6,374
TVA 5,5% (10% en 2014) 0,047 0,013 0,016 0,075 0,040 0,011 0,013 0,064
0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000
Marge (20% du CA HT) 19%, 18%, 30% 0,884 0,231 0,469 1,584 0,751 0,197 0,399 1,346
IS sur marge (1/3 de la marge) 0,265 0,069 0,141 0,475 0,225 0,059 0,120 0,404
charges courantes 1,488 0,668 0,375 2,531 1,265 0,568 0,319 2,152
salaires chargés (30% CA HT) 1,738 0,233 0,537 2,508 1,477 0,198 0,456 2,132
rémunérations chargées salaires+indépendants (50% CA HT) 2,279 0,385 0,719 3,383 1,937 0,328 0,611 2,876
nombre emplois dérivés du TR en milliers 73,995 12,510 23,343 109,847 62,895 10,633 19,841 93,370
CS sur salaires (65/144 des salaires chargés) 0,682 0,092 0,211 0,984 0,580 0,078 0,179 0,836
salaires nets (79/144 des salaires) 1,056 0,142 0,326 1,524 0,898 0,121 0,277 1,296
IR (3% des salaires nets) 0,057 0,008 0,018 0,082 0,048 0,007 0,015 0,070
0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000
Recettes fiscales et sociales induites par le TR (TVA+IS+CS+IR) 1,051 0,181 0,384 1,616 0,893 0,154 0,327 1,374

Colonne1 2016 Colonne2 Colonne3 Colonne4 2017 Colonne5 Colonne6 Colonne7 2018 Colonne8 Colonne9 Colonne10
Colonne1 restauration GMScommerces de boucheTOTAL restauration GMS commerces de boucheTOTAL restauration GMScommerces de boucheTOTAL
CA total= AF*mult 3,394 0,937 1,141 5,472 2,885 0,797 0,969 4,651 2,452 0,677 0,824 3,953
CA de la restauration hors tva 3,360 0,928 1,129 5,418 2,856 0,789 0,960 4,605 2,428 0,670 0,816 3,914
TVA 5,5% (10% en 2014) 0,034 0,009 0,011 0,054 0,029 0,008 0,010 0,046 0,024 0,007 0,008 0,039
0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000
Marge (20% du CA HT) 19%, 18%, 30% 0,638 0,167 0,339 1,144 0,543 0,142 0,288 0,973 0,461 0,121 0,245 0,827
IS sur marge (1/3 de la marge) 0,192 0,050 0,102 0,343 0,163 0,043 0,086 0,292 0,138 0,036 0,073 0,248
charges courantes 1,075 0,483 0,271 1,829 0,914 0,410 0,230 1,555 0,777 0,349 0,196 1,321
salaires chargés (30% CA HT) 1,256 0,169 0,388 1,812 1,067 0,143 0,330 1,540 0,907 0,122 0,280 1,309
rémunérations chargées salaires+indépendants (50% CA HT) 1,647 0,278 0,519 2,444 1,400 0,237 0,442 2,078 1,190 0,201 0,375 1,766
nombre emplois dérivés du TR en milliers 53,461 9,038 16,865 79,365 45,442 7,683 14,335 67,460 38,626 6,530 12,185 57,341
CS sur salaires (65/144 des salaires chargés) 0,493 0,066 0,152 0,711 0,419 0,056 0,129 0,604 0,356 0,048 0,110 0,514
salaires nets (79/144 des salaires) 0,763 0,103 0,236 1,101 0,649 0,087 0,200 0,936 0,551 0,074 0,170 0,796
IR (3% des salaires nets) 0,041 0,006 0,013 0,059 0,035 0,005 0,011 0,051 0,030 0,004 0,009 0,043
0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000 0,000
Recettes fiscales et sociales induites par le TR (TVA+IS+CS+IR) 0,759 0,131 0,278 1,168 0,645 0,111 0,236 0,993 0,548 0,095 0,201 0,844

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


78
ANNEXE 3

Listes des personnes interrogées pour la réalisation de l’étude

NOM PRENOM STRUCTURE FONCTION


BELISSON CHARLY UMIH- CNTR RESP TR UMIH
BISMUTH CATHERINE CAB MIN AFF SOC CONSEILLERE SANTE PUBLIQUE
BOUALAK SMAIL BRASSERIE MAGENTA PROPRIETAIRE
CICITTONI XAVIER CAB SEC ETAT COM CONSEILLER COMMERCE ARTISANAT
COSTES NICOLAS CAB MIN TRAVAIL EMPLOI CONSEILLER ECO DU TRAVAIL
CROHARE MARTINE UPIH DIRECTRICE GENERALE
DELANNOY CHRISTIAN CNTR - MEDEF PRESIDENT CNTR
DELEMOTTE YVONNE CFDT CH DE MISSION- EX COMM EXECUTIVE CFDT
DELMAS LAURENT EDENRED DG EDENRED France
DEXEIT BERNARD CGT REPRESENTANT POUR TR
GALLEGO VINCENT CNTR SEC GENERAL CNTR
GIRARD EDOUARD EGIRIS EX DG NATIXIS INTERTITRES
HERBRETEAU NICOLAS EDENRED DIR RELATIONS INSTITUTIONNELLES
HUBERT XAVIER CAB MIN ECOFI CONSEILLER JURIDIQUE
JOLY CATHERINE CAB SEC ETAT COM DIR CAB ADJOINTE
MAUFOUX EMMANUEL CHEQUE DEJEUNER DIR RELATIONS INSTITUTIONNELLES
MOLEUX MARGUERITE CAB MIN TRAVAIL EMPLOI CONSEILLER BRANCHES INTERNATIONAL
MONDANGE HERVE AFOC DIRECTEUR JURIDIQUE
PERROT DOMINIQUE CGAD SECRETAIRE GENERAL
PETIT FRANCOIS-X CAB MIN TRAVAIL EMPLOI CONSEILLER COM
RAIGNEAU BENJAMIN CABINET PM CONSEILLER SOCIAL
REYNAUD JEAN-JACQUES CNTR- FO VICE PRESIDENT CNTR
RUELLAN ROLANDE INDEPENDANTE EX DIR SECU ET PDTE CHAMBRE SOCIALE CC
VALLAUD BORIS PRESIDENCE DE LA REP SEC GENERAL ADJOINT
VIRONDA JEAN-JACQUES SODEXO DIR STRATEGIE ET MARKETING
WANJEK CHRISTOPHER INDEPENDANT CHERCHEUR JOURNALISTE

ALTERNATIVES ECONOMIQUES ETUDES & COMMUNICATION- FEVRIER 2015


79

Vous aimerez peut-être aussi