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Tels des “invalides passifs”, les usagers de la psychiatrie sont enfermés au sein d’un système
impersonnel et infantilisant, qui réduit leur identité à leur maladie (“les borderlines”) et les
destituent de tout pouvoir de décision sur leur traitement et leur avenir, alors dans les mains du
corps médical (Davidson et al., 2012). Avec un objectif de guérison, synonyme de disparition des
troubles, l’institution fait le choix de l’évolution de la maladie au détriment de celui de la personne.
Le rétablissement se distancie nettement de cette perception médicale et psychiatrique et
centre son approche sur l’individu. Inscrite dans une démarche accompagnant/accompagné, la
personne est aidée par ses proches, mais également par ses pairs qui, ayant vécu des expériences
similaires, peuvent apporter un soutien authentique. Au sein de réseaux de pair-aidance, tels que les
Groupes d’Entraide Mutuelle (GEM), on en parle parce qu’on le vit. L’expérience est alors source
d'expertise et son partage promet l’entraide, la reconnaissance et l’espoir (Boevink, 2012). Guidée
pour (re)prendre confiance en elle, la personne fait d’abord le choix de son identité et s’engage dans
un processus actif de réappropriation de son pouvoir d’agir et de décider (Koenig et al., 2014;
Pachoud, 2012b). En récupérant le contrôle sur sa vie, son histoire et ses choix, elle “s’empower”
(s’autonomise) et apprend à composer au quotidien avec sa maladie. L’évolution des troubles ne se
base plus sur des critères symptomatiques, mais sur des critères expérientiels, gage de retour à la
vie active (Pachoud, 2012b).
Le rétablissement remet en question les “normes sociales rigides” de la perception médicale
du trouble psychique soutenant l’acculturation et l’affranchissement de tout symptôme, perçu
comme différenciant et donc négatif, pour être réintégré à la société (Davidson et al., 2012). En
favorisant l’inclusion de chaque personne avec ses troubles psychiques, tel un citoyen singulier, le
rétablissement joue ainsi un rôle crucial dans la déstigmatisation des troubles psychiques en
permettant à la différence de s'inscrire dans une nouvelle normalité.
Bien que son application se heurte encore à des réticences des institutions, considérées
encore comme une tradition à conserver (Pachoud, 2012a), et à une stigmatisation sous-jacente
nourrie par l’étiquette “handicap” (Marcellini, 2019), le rétablissement est une révolution de la
perception des troubles en santé mentale. Il rompt avec la conception classique psychiatrique qui
a, dès le début, conditionné la personne à une vie isolée et dépendante en passant du statut “dément”
à “usager-acteur-citoyen” (Koenig et al., 2014). Ainsi, le rétablissement ouvre la voie à de nouvelles
politiques en santé mentale priorisant le réengagement des personnes dans une vie sociale et active
choisie (Pachoud, 2018).
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Bibliographie
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