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Le questionnaire de soutien social de Sarason 

(SSQ6). Une adaptation


française

Marilou Bruchon-Schweitzer, Nicole Rascle, Florence Cousson-Gélie, Carole


Bidan-Fortier, Yiorgos Sifakis, Aymery Constant
Laboratoire de Psychologie (EA 3662), Université de Bordeaux 2,
Equipe de Psychologie de la Santé
3 ter, Place de la Victoire 33076 Bordeaux Cedex
Article paru dans : Psychologie Française, 2003, 48, 3, 41-53.

Résumé : Cette étude se propose de mettre à l’épreuve la généralité de la structure bifactorielle de l’échelle
abrégée de soutien social de Sarason (SSQ6) qui mesure deux dimensions du soutien social (satisfaction et
disponiblité). Nous avons administré la version française du SSQ6 à 869 adultes français (303 femmes, 566
hommes) confrontés à des situations plus ou moins stressantes (vie étudiante, chômage, maladie ou handicap
sévère). Des analyses confirmatoires ont été entreprises sur toute la population et sur les sous-groupes
(étudiants/patients/chômeurs ; hommes/femmes) pour tester l’équivalence des structures factorielles obtenues
dans les différents groupes. Elles confirment la stabilité de la structure factorielle du SSQ6 (entre groupes et
entre cultures). En outre, les deux dimensions du SSQ6 (satisfaction et disponibilité du soutien) sont associées à
des processus transactionnels fonctionnels (coping actif, styles de vie sains) et à divers critères de santé
émotionnelle et somatique.

Mots-clé : Soutien social, SSQ6, Sarason, analyse confirmatoire, santé.

Summary : This study aimed to test the stability of the bifactorial structure of the short version of Sarason's
Social Support Questionnaire (SSQ6) which measures two dimensions of social support (satisfaction and
availability). The French version of the SSQ6 was administered to 869 French adults (303 females, 566 males)
confronted with more or less stressful situations (student life, unemployment, severe illness or handicap).
Confirmatory analyses were undertaken on the whole population and on the subgroups
(students/patients/unemployed men; males/females) to test the equivalence between the factorial structures
obtained in the different groups. They confirmed the stability of the factorial structure of the SSQ6 (between
groups and between cultures). Moreover, the two dimensions of the SSQ6 (satisfaction and availability of
support) were associated with functional transactional processes (active coping, healthy behaviours) and with
criteria of emotional and somatic health.

Key words : social support, Sarason, SSQ6, confirmatory analysis, health.


Le concept de soutien social est apparu il y a 25 ans environ (Caplan, 1974 ; Cassel,
1976 ; Cobb, 1976). De très nombreux travaux empiriques et théoriques se sont développés à
partir de cette notion (environ 200 articles ont été recensés par Hupcey, 1998). Dans les
publications consacrées au soutien social, on trouve soit la construction et la validation
d’outils mesurant le soutien social, soit l’étude des effets directs et indirects du soutien sur de
nombreux critères de santé physique et/ou émotionnelle. Les études théoriques sont rares et ce
concept est encore immature. En effet, il n’y a pas de consensus quant à sa définition, et l’on
sait peu de chose sur les mécanismes expliquant son impact bénéfique sur la santé,
mécanismes encore hypothétiques (Spitzer, Bar-Tal et Golander, 1995 ; Furukawa, Sarason,
et Sarason, 1998).

Le soutien social : définitions et mesures 


Il existe plusieurs conceptions relatives au soutien social. La première, d’origine
sociologique concerne le « réseau social » dans lequel un individu est inséré et ses propriétés
objectives : nombre de liens sociaux, fréquence des contacts, intimité, type d’aide reçue
(Coyne et Downey, 1991). Diverses études épidémiologiques utilisant cette notion ont montré
que les individus bénéficiant d’un réseau social important ont un taux de morbidité et de
mortalité moindre (maladies cardio-vasculaires et cancers) que ceux ayant un réseau réduit,
cet effet étant plus important après 60 ans (Berkman et Syme, 1979 ; House, Robbins et
Metzner, 1982). L’isolement social y apparaît comme facteur de vulnérabilité, chez les sujets
âgés notamment.

D’après une seconde conception, d’origine psychologique, c’est la façon dont


l’individu perçoit le soutien dont il est l’objet, plus que le soutien effectif qu’il reçoit, qui a
des effets bénéfiques sur la santé. On appelle « soutien social » la façon dont l’individu
perçoit l’aide d’autrui (Gentry et Kobasa, 1984). On a observé depuis longtemps que l’effet
du soutien social est généralement protecteur. Il y a un très grand nombre de travaux montrant
son effet favorable sur la santé émotionnelle et physique (Berkman, 1995 ; Cohen et Syme,
1985 ; Pearlin, 1985 ; Sarason, Sarason, Potter et Antoni, 1985 ; Thoits, 1986 ; Vaux, 1988).1

1
Le soutien social peut s’avérer nocif dans certains cas (entourage surprotecteur ou qui fournit des modèles de comportements à risque).
Si cette notion désigne les aspects subjectifs du soutien, elle reste encore polysémique.
On distingue par exemple divers types de soutien en fonction de leur nature : soutien
émotionnel, d’estime, matériel ou informatif ou de leur source : famille, amis, collègues,
professionnels (Rascle, 1994). Le soutien social est plus efficace (ses effets bénéfiques sont
plus importants) s’il y a adéquation entre sa nature et sa source, d’une part, et les besoins de
l’individu, d’autre part. Chez des sujets malades (cancers, polyarthrite), on a observé par
exemple qu’un soutien informatif est plus efficace s’il provient d’un professionnel de la santé
et qu’un soutien émotionnel est plus efficace s’il vient d’un proche (Dunkel-Schetter, 1984).

On a parfois confondu le réseau social et le soutien social en utilisant des index


composites qui amalgament ces deux types de soutien (Berkman et Syme, 1979). Or, il
convient de les distinguer, car l’existence d’un réseau relationnel ne garantit pas la qualité des
relations ni la satisfaction qu’elles procurent, et inversement. De nombreux auteurs pensent
que le soutien social perçu a un impact plus important sur le bien-être que le soutien effectif
(Sarason, Levine, Basham et Sarason, 1983 ; Sarason et Sarason, 1986), ce qui a été établi en
effet (Kessler, 1992).

S’il paraît absolument nécessaire de distinguer le réseau social du soutien social, il


serait très intéressant de prendre en compte simultanément ces notions dans les recherches
consacrées à la prédiction de la santé et du bien-être, afin d’évaluer leur rôle respectif et leurs
éventuelles interactions (Pearlin, 1989 ; Turner et Marino, 1994). Ces deux aspects du soutien
sont en fait complémentaires : à l’aspect « objectif » du premier vient s’ajouter l’aspect
« phénoménal » du second. D’après la revue de littérature de Thoits (1995), qui synthétise
plus de 200 publications consacrées au soutien social, le réseau social et le soutien social
(perçu) ont chacun un effet direct et positif sur la santé physique et mentale des individus,
mais seul, le soutien social perçu a, en outre, un effet « tampon » (buffer). Il protège les
individus contre les effets délétères des événements de vie stressants.

Même si l’on s’en tient au seul soutien social perçu, ce concept n’est pas sans
ambiguïté. Pour certains, c’est une caractéristique dispositionnelle de l’individu, proche de la
sociabilité, de l’expansivité et de l’extraversion et qui s’apparente à une ressource personnelle
(Sarason et Sarason, 1986 ; Furukawa et Shibayama, 1997). Pour d’autres, le soutien social
(perçu) est une caractéristique transactionnelle qui correspond à la phase d’évaluation
secondaire décrite par Lazarus et Folkman (1984)2. C’est cette définition du soutien, décrite
au paragraphe précédent, que nous adopterons ici. Pour d’autres enfin, le soutien social, est
bien de nature transactionnelle, mais il correspond à la capacité du sujet à rechercher et à
obtenir de l’aide de la part d’autrui, ce qui l’apparente à une stratégie de coping (Thoits, 1995,
p.66 ; Bruchon-Schweitzer, Cousson, Quintard, Nuissier et Rascle, 1996).

Nous avons souhaité adapter en français le questionnaire abrégé de soutien social de


Sarason, le SSQ6 (Sarason, Sarason, Shearin et Pierce, 1987a). En effet, cet outil, dans sa
version américaine, permet d’évaluer de façon économique (12 items en tout) deux aspects
très stables du soutien social perçu : la disponibilité et la satisfaction. La disponibilité
correspond à l’estimation par l’individu du nombre de personnes pouvant lui apporter une
aide en cas de besoin. La satisfaction est l’adéquation perçue par l’individu entre le soutien
reçu et ses attentes et besoins. Ces dimensions sont conceptuellement distinctes. Ainsi, on
peut être satisfait malgré un nombre réduit d’amis et de relations et insatisfait même si ce
nombre est important. Au niveau empirique, ces deux dimensions sont intercorrélées,
positivement et modérément3. Nous avons aussi choisi cet outil en raison de ses excellentes
qualités psychométriques (structure factorielle stable, consistance interne des échelles, fidélité
test-retest, non contamination par la désirabilité sociale) et de sa supériorité sur d’autres
mesures du soutien, qualités attestées par les nombreuses recherches de Sarason et de ses
collègues menées sur des sujets américains (voir par exemple, Sarason et al., 1983 ; Sarason,
Shearin, Pierce et Sarason, 1987a)4.

Une raison supplémentaire de choisir le SSQ6 tient à sa validité de critère. Ses


échelles de disponibilité et de satisfaction se sont avérées associées à divers aspects adaptatifs
de la personnalité : relations négatives avec l’affectivité négative, l’anxiété, la dépression, le
névrosisme et l’hostilité ; relations positives avec l’affectivité positive, l’extraversion et les
compétences sociales auto-évaluées (Sarason et al., 1983 ; 1987a ; 1987b)5.
2
Selon l’approche cognitive du stress de Lazarus et Folkman, les processus transactionnels sont des activités (cognitives, émotionnelles,
comportementales,…) qu’un sujet déploie face à une situation aversive, soit pour modifier la situation, soit pour se modifier lui-même. Ces
transactions (stress perçu, contrôle perçu, soutien social perçu, coping,…) joueraient un rôle médiateur très important entre antécédents
(caractéristiques de la situation et du sujet) et critères (issues).
3
D’après Sarason et al. (1987a), la disponibilité et la satisfaction sont positivement inter corrélées (sur 172 sujets des deux sexes, r = + 0.33,
p <. 001). Ceci signifie qu’un réseau relationnel minimal est nécessaire pour en être satisfait.
4
Il existe d’autres outils permettant d’évaluer le soutien social, comme la SNS (Social Network Scale) de Stokes (1983) ou l’ISSB
(Inventory of Socially Supportive Behaviors) de Barreira et Ainlay (1983), l’ISEL (Interpersonal Support Evaluation List) de Cohen et Wills
(1985), la FES (Family-Environment Scale) de Moos et Moos (1994), qui mesure le soutien d’origine familiale et l’échelle de Pinneau
(1976) qui mesure le soutien social organisationnel. Pour plus de précisions sur ces outils, consulter Bruchon-Schweitzer (2002, 328-352).
5
Le soutien social, quelle que soit la façon de la mesurer, s’est révélé associé à des caractéristiques « salutogènes » de la personnalité (faible
névrosisme, faible affectivité négative), à des processus transactionnels « fonctionnels » (faible stress perçu, contrôle perçu élevé, coping
« actif », comportements sains) et à des issues émotionnelles et somatiques favorables (meilleure santé émotionnelle et somatique). Les effets
Notre premier objectif était d’établir la validité de construit de la version française du
SSQ6, version courte du SSQ, validée par Sarason et al. (1987a). Pour cela, nous avons mis à
l’épreuve la stabilité de sa structure à deux facteurs (satisfaction et disponibilité) et vérifié les
qualités psychométriques de chaque échelle (fidélité test-retest, consistance interne, non
contamination par des tendances de réponse). Notre second objectif était d’étudier la validité
de critère de cet outil. Nous avons donc calculé les corrélations entre les scores de
disponibilité et de satisfaction, d’une part, et les scores obtenus sur des échelles de
personnalité, des échelles de coping et des critères de santé physique et psychologique,
d’autre part, ceci sur divers sous-groupes de sujets français6.

Méthode 
Sarason et ses collaborateurs (1983, 1987ab) ont construit un questionnaire de soutien
social perçu très souvent utilisé, le SSQ (Social Support Questionnaire) dont il existe une
version à 27 items et une version courte à 6 items, le SSQ6. Nous avons soumis les items du
SSQ6 à une double traduction avant d’aboutir à une version française de cet outil (présentée
en annexe). Pour chaque item, le répondant fait la liste des personnes sur lesquelles il peut
compter dans la situation décrite (maximum 9 personnes) et exprime son degré de satisfaction
(de 1 à 6) vis à vis de ce soutien. On calcule alors deux scores totaux, l’un de disponibilité
(N=nombre de personnes citées) et l’autre de satisfaction (S), qui correspondent
respectivement à la somme des scores "nombre" (score N) et "satisfaction" (score S) obtenus à
chacun des six items. Ainsi, le score N varie de 0 à 54 et le score S de 6 à 36.
Nous avons soumis le SSQ6 à différents groupes de sujets afin d’identifier les deux
dimensions qu’il est censé mesurer et de mettre à l’épreuve leur stabilité d’un groupe à l’autre
(validité de construit). D’autres outils ont été administrés à ces échantillons, afin d’étudier la
validité de critère des deux dimensions du SSQ6.

bénéfiques du soutien social sur la santé ont été démontrés (Bruchon-Schweitzer, 2002, 341-352 ; Furukawa et al., 1998).
6
Nous ne développerons ici que les résultats psychométriques de cette recherche (structure du soutien social, corrélations significatives entre
le soutien social et divers critères externes). L’étude présentée ici n’est qu’une partie d’une recherche plus vaste qui comprenait des
hypothèses explicatives. Nous avons mis à l’épreuve les effets du soutien social sur divers critères de santé émotionnelle et somatique, grâce
à des protocoles semi-prospectifs, où le soutien social est évalué en un temps T1, et les issues en un temps T2, de un à deux ans après (voir
infra, les protocoles des groupes G3). De plus, les effets du soutien social sur la santé ont été estimés soit par des régressions multiples
hiérarchiques, soit par des modèles en équations structurales (qui permettent de tester l’adéquation entre un modèle impliquant des chaînes
d’imputations causales et des données empiriques). La taille de cet article ne permet pas de formuler ces hypothèses explicatives ni de
présenter les résultats correspondants.
Sujets : Cette étude a concerné 869 adultes français des deux sexes (566 hommes,
âge moyen : 33 ans ; 303 femmes, âge moyen : 37 ans), le groupe total comprenant cinq sous-
groupes (voir tableau IV)7 :
- G1 (étudiants) : 348 étudiants en troisième année de psychologie ( 228 étudiantes et 120
étudiants) ont passé collectivement le SSQ6 et l'EPI (Eysenck Personality Inventory)
d'Eysenck et Eysenck (version française, 1971), évaluant l'extraversion, le névrosisme et
l'insincérité. Le SSQ6 a été administré une seconde fois 15 jours plus tard à certains de ces
sujets (150 étudiantes) afin de tester sa fidélité test-retest.
- G2 (chômeurs) : Nous avons évalué simultanément, chez 304 sujets masculins sans emploi
depuis 19 mois en moyenne, le soutien social perçu par le SSQ6 et l’état dépressif par la CES-
D (Center of Epidemiological Study) de Radloff (1977), version française de Führer et
Rouillon (1989).
- G3 (trois sous-groupes de patients : G3a, G3b, G3c) :
G3a : Une étude semi-prospective a été menée sur un groupe de 75 femmes atteintes d'un
cancer du sein aux stades II et III , ayant subi une chimiothérapie d'induction. Au cours d’un
entretien structuré, le SSQ6 était administré avec d'autres échelles, la WCC-R (Ways of
Coping Checklist Revised) de Vitaliano, Russo, Carr, Maiuro et Becker (1985), version
française de Cousson-Gélie, Bruchon-Schweitzer, Quintard, Nuissier et Rascle (1996), qui
permet d’évaluer les stratégies de coping de ces patientes et le STAI-Y (State-Trait Anxiety
Inventory form Y) de Spielberger, Gorsuch, Lushene, Vagg et Jacobs (1983), version
française de Bruchon-Schweitzer et Paulhan (1993), qui fournit une mesure de l’anxiété-état .
Deux ans plus tard, nous avons évalué la qualité de vie des patientes grâce au QLQ-C30
(Quality of Life Questionnaire for Cancer Patients) d’Aaronson (1993), ainsi que la durée de
leur survie.
G3b : Nous avons réalisé une étude semi-prospective sur 60 patients masculins atteints d’un
traumatisme médullaire et soumis à une rééducation fonctionnelle8. Six mois après le
traumatisme, divers processus transactionnels ont été évalués au cours d’un entretien structuré
(soutien social, stratégies de coping).Un an après le traumatisme, étaient estimés leur état
émotionnel (par la CES-D de Radloff et al., 1977) et leur état physique (complications,
évolution du handicap).

7
Ces groupes avaient été sollicités pour des recherches plus vastes qui ne seront pas décrites ici. Ces populations ont été choisies parce
qu’elles avaient à affronter des situations plus ou moins aversives (vie étudiante, chômage, maladie et handicap sévères). Or le soutien social
est un processus transactionnel (sujet-situation) qu’il convient de considérer comme une évaluation secondaire, élaborée pour faire face à des
événements stressants (dans cette situation, qui peut m’aider ? suis-je satisfait de cette aide ?), voir Bruchon-Schweitzer (2002, p.328-352).
8
Les traumatisés médullaires ont subi une lésion, partielle ou totale, de la moelle épinière, qui se traduit par une atteinte motrice et
sensorielle des membres supérieurs et du haut du corps (paraplégie), des quatre membres (tétraplégie) ou d’une moitié du corps (hémiplégie).
G3c : Une étude semi-prospective a été menée sur un groupe de 82 patients masculins
séropositifs, asymptomatiques (ou légèrement symptomatiques mais non au stade sida. Chez
ces patients, divers antécédents psychosociaux (anxiété-état, optimisme) et biomédicaux
(charge virale, nombre de lymphocytes CD4+) ont été évalués en T1 soit juste après le
diagnostic. Le SSQ6 leur était administré en T2 (12 à 18 mois après T1), moment où l’on
évaluait diverses autres variables transactionnelles comme les stratégies de coping de ces
patients (WCC-R de Vitaliano et al., 1985, version française de Cousson et al., 1996), ainsi
que divers indicateurs biologiques de l’évolution de l’infection (nombre de lymphocytes
CD4+, charge virale, nombre de traitements antirétroviraux). A T3, soit de 24 à 30 mois après
T2 ont été mesurées des issues psychologiques : la qualité de vie par la MOS-SF36 (Medical
Outcome Study, Short Form) de Ware et Sherbourne (1992), la dépression par la CES-D et
des issues biologiques (marqueurs de l’évolution de l’infection identiques aux précédents).

Hypothèses :
H 1 : La version française du SSQ6 mesure, comme la version originale, deux
facteurs positivement intercorrélés, la disponibilité et la satisfaction. Cette structure reste
stable d’un échantillon à l’autre. Les échelles de disponibilité et de satisfaction sont
homogènes, d’une bonne fidélité test-retest, et ne sont pas affectées par des tendances de
réponse.
H2 : La disponibilité et la satisfaction sont associées à des caractéristiques
salutogènes de la personnalité, à des processus transactionnels fonctionnels et à des issues
émotionnelles et somatiques favorables (voir supra, note 4). De plus, en réponse à certaines
normes de rôle on s'attend à ce que les femmes aient des scores plus élevés de soutien social
(disponibilité et satisfaction) que les hommes. Enfin, le soutien social perçu pourrait être plus
important chez les patients que dans les autres sous-groupes.

Procédure et analyse des données :


La validité de construit du SSQ6 implique que cet outil mesure deux dimensions
distinctes du soutien social, la disponibilité (items N1 à N6) et la satisfaction (items S1 à S6),
que cette structure soit stable d’un groupe à l’autre, et que les échelles obtenues aient des
qualités psychométriques satisfaisantes. Nous avons donc mis à l’épreuve la compatibilité de
nos résultats empiriques avec cette structure bidimensionnelle hypothétique sur l’échantillon
total en effectuant une analyse confirmatoire à l’aide de Lisrel 89. Différents indicateurs
d’adéquation ont été retenus ici : le c2, le GFI et le RMSEA et le ratio c2 /ddl. 10
Nous avons calculé la fidélité test-retest (coefficient r de Bravais-Pearson) et la
consistance interne ( de Cronbach) des deux dimensions de la version française du SSQ6,
ainsi que la corrélation de ces deux dimensions avec l’insincérité et la désirabilité sociale (r de
Bravais-Pearson) afin d’éprouver les qualités psychométriques de cet outil.
Pour vérifier l’égalité des structures factorielles du SSQ6 obtenues dans les différents
sous-groupes de notre population (étudiants (G1), chômeurs (G2), patients (G3), d’une part,
hommes (G4) et femmes (G5) d’autre part (voir tableau IV), nous avons testé l’égalité de
différents paramètres caractérisant les structures factorielles obtenues sur ces sous-groupes
par une analyse confirmatoire (Lisrel 8). Nous nous sommes référés, par étapes successives, à
des modèles de moins en moins contraignants : égalité complète entre les structures
factorielles, égalité des erreurs et de la corrélation entre les facteurs, égalité des saturations
factorielles et de la corrélation entre les facteurs, égalité des saturations factorielles, égalité
des corrélations entre les facteurs. Les mêmes indicateurs d’adéquation que ci-dessus ont été
utilisés ici : le c2, le ratio c2 /ddl le GFI et le RMSEA. Pour comparer les modèles successifs,
le test de signification des différences de c2a été utilisé. Un modèle est jugé meilleur lorsque
la réduction du c2 par rapport au modèle précédent est significative.

Résultats  :

1) Validité de construit du SSQ6:

a) Structure du SSQ6 observée sur l’ensemble des sujets

Insérer Table I ici

9
Cette méthode permet de déterminer le degré d’adéquation existant entre la matrice de variance-covariance calculée à partir des données
observées dans la population étudiée et la matrice de variance-covariance établie à partir d’un modèle théorique issu des résultats antérieurs
(ici, la structure factorielle du SSQ6 obtenue par Sarason sur des sujets américains). Ainsi sont testées différentes hypothèses concernant
l’adéquation entre les variables manifestes (résultats empiriques) et les variables latentes (structure factorielle hypothétique du SSQ6).
10
Lorsqu’il est non significatif, le c2 indique que les deux matrices ne diffèrent pas significativement. Cependant cet indicateur étant
particulièrement sensible à la taille de l’échantillon et aux écarts à la normalité dans la distribution des variables, il est préférable de prendre
en compte le RMSEA (Root Mean Square Error of Approximation) qui tient compte de ces erreurs. Un RMSEA £ à 0.05 indique une
adéquation satisfaisante, jusqu'à 0.08, elle est raisonnable (Browne et Cudeck, 1993). Le GFI (Goodness of Fit Index) peut être interprété
comme la proportion de covariance de la matrice observée qui peut être prédite à partir de la matrice théorique. Cet indicateur, qui varie entre
0 et 1, indique une bonne adéquation lorsqu’il est supérieur à 0.90. Enfin, le ratio c2 /ddl ne doit pas être supérieur à 3 (Kline, 1998,
Diamantopoulos et Sigaw, 2000).
L’analyse confirmatoire effectuée sur les données de l’ensemble des sujets de notre
échantillon (voir la matrice de variances-covariances en annexe) confirme la stabilité de la
structure factorielle du SSQ6 de la version américaine originale à la version française : le c2
est non significatif (c2 = 49.17, p=0.07, ddl= 36), le rapport c2 /ddl est inférieur à 2, le GFI est
élevé (GFI= 0.99), le RMSEA est inférieur à 0.05 (RMSEA=0.02). Les facteurs disponibilité
et satisfaction apparaissent bien comme deux dimensions générales et stables du soutien
social perçu (voir Figure 1).

Insérer Figure 1 ici

b) Stabilité de la structure du SSQ6 : les trois sous-groupes

Une analyse confirmatoire effectuée par étapes pour vérifier l’égalité des structures
factorielles des étudiants, des chômeurs et des patients (voir les matrices de variances-
covariances en annexe 2) montre que c’est le modèle 5 posant l’hypothèse de l’égalité des
corrélations entre les facteurs qui présente l’ajustement le plus satisfaisant (c2/ddl = 3.01, GFI
= 0.95 ; RMSEA = 0.08). Par contre, cette stabilité factorielle entre les trois groupes n’est pas
établie en ce qui concerne les saturations puisque les indicateurs d’ajustement des modèles 3
et 4 sont médiocres. (voir Table II).

Insérer Table II ici

c) Stabilité de la structure du SSQ6 : hommes et femmes


L’analyse confirmatoire effectuée par étapes à partir des données des sujets masculins
et féminins de l’échantillon (voir matrices de variances-covariances en annexe 2), montre que
c’est le modèle 3 posant l’hypothèse de l’égalité des saturations et de la corrélation entre
facteurs qui présente l’ajustement le plus satisfaisant (c2/ddl = 2.58, GFI=0.96,
RMSEA=0.06).

Insérer Table III ici

d) Corrélation entre les deux dimensions du SSQ6


Sur l’ensemble de l’échantillon, la corrélation observée entre disponibilité et
satisfaction est de 0.42 (p<0.001). Nos analyses montrent l’égalité des corrélations observées
entre facteurs dans les différents sous-groupes. Rappelons qu’une corrélation du même ordre
(0.33, p<0.001) a été observée sur les sujets américains soumis à la version originale du SSQ6
(Sarason et al., 1987a).

e) Fidélité test-retest, consistance interne et tendances de réponse


Nous avons administré deux fois le SSQ6 (intervalle : deux semaines) à des étudiants
en psychologie (N= 150), en passation collective. La fidélité test-retest du SSQ6 est de 0.89
pour la disponibilité et de 0.84 pour la satisfaction, ce qui est satisfaisant. Le coefficient de
consistance interne a de Cronbach, calculé sur l’échantillon total (N= 869), est de 0.86 pour la
disponibilité et de 0.87 pour la satisfaction. Les deux dimensions du SSQ6 sont donc
homogènes, ce qui autorise la sommation des items pour le calcul des scores d’échelle. Enfin,
les deux dimensions du SSQ6 ne sont pas affectées par des biais comme l’insincérité (échelle
L de l’EPI) ou la désirabilité sociale (échelle SD de Crowne et Marlowe, 1960)11.

2. Validité de critère12 

a. Disponibilité et autres variables


La disponibilité perçue du soutien est associée positivement mais modérément à
l’extraversion chez des étudiants (0.14, p<0.05). Elle est liée négativement à l’anxiété-trait,
chez les traumatisés médullaires (-0.37, p<0.01). Elle est associée à un état dépressif moindre
chez les séropositifs (-0.24, p<0.04) et les chômeurs (-0.18, p<0.01).
La disponibilité est associée positivement à l’utilisation d’un coping de recherche de
soutien social (0.26, p<0.05) chez les femmes atteintes d’un cancer du sein et à l’adoption de
plus de comportements sains (adhésion thérapeutique) et de moins de comportements à risque
(boire, consommer des drogues, ne pas s’informer,…) chez les patients séropositifs (0.27,
p<0.05). La disponibilité du soutien est associée à un recours moindre à des stratégies
d’impuissance-désespoir (cognitions de perte de contrôle, pessimisme) et d’évitement

11
Ces tendances de réponses ont été testées respectivement auprès de l'échantillon d'étudiants (N= 348) pour l'insincérité (r= -0.08 pour la
disponibilité et r= -0.008 pour la satisfaction) et des patients séropositifs (N= 82) pour la désirabilité sociale (r=-0.03 pour la disponibilité et
r=0.03 pour la satisfaction du soutien).
12
La validité de critère est le degré de liaison entre ce que mesure un outil (ici la disponibilité et la satisfaction) et des mesures
indépendantes effectuées sur les mêmes individus, prises soit simultanément, comme dans les groupes 1 et 2 de cette étude (validité
concourante), soit ultérieurement, comme dans les groupes 3a, 3b et 3c de cette étude (validité prédictive).
(opposition aux soins, absence de recherche d’information, …) chez les traumatisés
médullaires (-0.34, p<0.05 ; -0.27, p<0.05).
Enfin, la disponibilité est associée à un meilleur état des défenses immunitaires (plus
de lymphocytes CD4+, moins de charge virale et moins de traitements antirétroviraux) chez
les patients séropositifs (0.22, p<0.05).

b. Satisfaction et autres variables


La satisfaction vis-à-vis du soutien est associée à une moindre anxiété-trait chez les
traumatisés médullaires (-0.27, p<0.05). Evaluée après le diagnostic (et avant le traitement),
elle est associée négativement à l’anxiété-état (-0.25 p<0.05) et positivement à l’utilisation
d’une stratégie de coping de recherche de soutien (0.29, p<0.05) chez les femmes atteintes
d’un cancer du sein. La satisfaction est également associée à la durée de la survie (survie
calculée en mois deux années après le début du traitement) chez ces mêmes patientes (0.36,
p<0.002).

Insérer Table IV ici

c) Comparaison de moyennes entre les sous-groupes


Les hommes et les femmes de notre échantillon (voir table IV) diffèrent quant à leurs
moyennes de disponibilité (F = 4.46, ddl=1, p<0.03) et de satisfaction (F = 37.26,ddl=1,
p<0.0001). Les femmes citent un nombre plus important de personnes perçues comme leur
apportant un soutien et elles en sont plus satisfaites que les hommes. Toutefois, il convient
d’être prudent quant à l’interprétation de ces résultats dans la mesure où la répartition des
hommes et des femmes n’est pas équivalente dans les sous-groupes (étudiants, patients,
chômeurs). Le nombre de femmes est en effet plus important dans l’échantillon d’étudiants,
alors que le nombre d’hommes est plus élevé dans l’échantillon de patients. Une comparaison
des moyennes effectuée uniquement sur la population d’étudiants confirme la supériorité des
scores de satisfaction vis-à-vis du soutien dans la population féminine (F=17.95, ddl=1,
p=0.0001), mais ne permet pas d’observer de différence des scores de disponibilité selon le
genre (F=1.67, ddl=1, p=0.19).
Les moyennes des scores de disponibilité ne diffèrent pas significativement entre
étudiants, chômeurs et patients (F = 2.34, ddl= 2, p<0.09). Malgré une disponibilité
équivalente dans ces trois groupes, ce sont les patients qui sont les plus satisfaits vis-à-vis du
soutien dont ils disposent (F = 18.84, p<0.0001). Par ailleurs, on observe une forte variabilité
des scores de disponibilité à l’intérieur de chaque groupe. C’est dans le groupe de chômeurs
que la dispersion de ce score est la plus importante (écart-type= 14.7). Ceci peut expliquer la
non significativité des différences de moyennes de disponibilité entre les groupes.

Discussion :
Le premier objectif de cette étude est atteint : la version française du SSQ6 mesure
bien deux dimensions générales du soutien social perçu : la disponibilité et la satisfaction,
cette structure factorielle restant stable dans divers groupes. De plus, ces deux échelles
présentent de bonnes qualités psychométriques. Les facteurs de disponibilité et de satisfaction
sont positivement et modérément intercorrélés (ce qui est en accord avec les résultats
antérieurs).
Le soutien social s’avère associé ici à diverses caractéristiques dispositionnelles et
transactionnelles « adaptatives », comme dans les études précédentes. Dans notre échantillon
cependant, la disponibilité et la satisfaction ne sont pas tout à fait liées aux même aspects de
la personnalité : la disponibilité est liée à la fois à certaines caractéristiques dispositionnelles
comme l’extraversion (0.14, p<0.05, Rascle, Aguerre, Bruchon-Schweitzer, Nuissier,
Cousson-Gélie, Gilliard, Quintard, 1997) et à l’adoption de stratégies fonctionnelles face à
l’adversité, ce qui confirme les résultats observés avec la version originale du SSQ6 (Sarason,
1983). La satisfaction est liée négativement à l’anxiété (trait et état). Elle est associée à
certaines stratégies actives (comme la recherche de soutien social) chez les patientes atteintes
de cancers du sein. Ceci est en accord avec les résultats de la littérature : percevoir un soutien
social comme satisfaisant est associé à l’adoption de stratégies de coping plus efficaces
(Cohen et Wills, 1985 ; Thoits , 1995).
D’après nos résultats, le soutien (satisfaction et disponibilité) est associé à une
meilleure santé émotionnelle ultérieure : moindre anxiété (état et trait) ultérieure chez les
patientes atteintes de cancers et les traumatisés médullaires, état dépressif ultérieur moindre
chez les patients séropositifs et chez les chômeurs (disponibilité). Des recherches récentes ont
montré que le soutien social affecte le bien-être, ceci par plusieurs voies : il atténue le stress
perçu, il augmente les ressources perçues, il réduit l’affectivité négative, il facilite
l’élaboration de stratégies de coping « actives » généralement plus efficaces (Terry, Longe et
Callan, 1995).
Dans notre étude, le soutien social s’avère associé à une meilleure santé somatique
actuelle (meilleur état du système immunitaire chez des patients séropositifs) et future (plus
longue survie à deux ans de patientes atteintes de cancer du sein). Les études prospectives et
semi-prospectives menées de 1979 à 1997 sur l’effet éventuel du soutien social sur la survie
de patients cancéreux montrent que le soutien social perçu est associé à une évolution
favorable de la maladie (pour une synthèse de ces études, voir Tastet, 2001, p.92). Les études
semi-prospectives menées sur des patients séropositifs montrent l’effet bénéfique du soutien
social sur leurs défenses immunitaires (Theorell, Blomkvist, Jonsson, Schulman et Berntorp,
1995 ; Leserman, Jackson, Petitto, Golden, Silva et Perkins, 1999). Si le soutien affecte
favorablement la santé, c’est en partie parce qu’il optimise le fonctionnement de divers
systèmes physiologiques (Bruchon-Schweitzer, 2002, p.351 ; Thoits, 1995).
Le fait que le soutien social perçu soit plus important chez les femmes a déjà été
observé (Zimet, Dahlem, Zimet et Farley, 1988). Ceci pourrait s’expliquer en partie par l’effet
de certaines normes de rôle. Le fait de percevoir ou de solliciter le soutien d’autrui (et
notamment un soutien émotionnel, impliquant intimité et confidences) serait vu comme plus
conforme au rôle féminin qu’au rôle masculin (Sarason et al., 1987b).13
Dans notre étude, le soutien social s’avère associé à des traits de personnalité
« salutogènes », à des processus transactionnels « fonctionnels » et à la santé émotionnelle et
somatique actuelle (groupes 1 et 2) et future (groupes 3). Si nos résultats ne permettent pas
d’établir de relation causale entre soutien et issues adaptatives (car trois groupes seulement,
sur les cinq observés ici, ont été soumis à une étude semi-prospective), ils sont cependant
cohérents avec l’hypothèse selon laquelle le soutien social facilite l’élaboration de stratégies
de coping fonctionnelles, l’adoption de styles de vie sains et a donc des effets bénéfiques sur
la santé physique et émotionnelle (Bruchon-Schweitzer, 2002, p.341-348)14.

Conclusion
Cette étude montre que la disponibilité et la satisfaction sont deux dimensions stables
du soutien social et que ces dimensions sont associées à la fois à des dimensions salutogènes
de la personnalité, à des processus transactionnels fonctionnels et à la santé émotionnelle et
somatique actuelle et future. Notre étude, si elle n’avait pas pour objectif de démontrer l’effet
bénéfique du soutien social sur la santé, suggère cependant certaines pistes pour des
recherches explicatives ultérieures.

13
Nous n’avons pas trouvé de résultats antérieurs relatifs aux scores de soutien social perçu chez des patients. Etre atteint d’un cancer, d’une
infection par le VIH ou d’un traumatisme médullaire est une situation très angoissante. Dans ce contexte, un soutien social est sans doute
particulièrement apprécié (plus que par des sujets sains) ; on sait qu’il joue un rôle tampon, atténuant l’impact de stresseurs même sévères.
14
Le soutien social n’a pas toujours des effets bénéfiques. Il peut être vécu par certains sujets comme intrusif et insupportable (par certains
adolescents ou certains patients surprotégés). Il peut parfois renforcer l’utilisation de stratégies de coping dysfonctionnelles et « saboter » les
tentatives du sujet pour adopter un style de vie plus sain ou pour être plus autonome.
Le soutien perçu serait l’un des chaînons d’un processus d’ajustement séquentiel face
à l’adversité. Ce processus d’évaluation secondaire serait déterminé par divers antécédents
contextuels et individuels dont il modulerait l’impact sur certaines issues émotionnelles et
somatiques. Il exercerait ses effets bénéfiques sur la santé soit directement, soit en transitant
par divers processus médiateurs (Rascle, 1994 ; Rascle et al., 1997). Il faciliterait l’élaboration
de stratégies de coping « actives » et l’adoption de styles de vie sains, dont les effets sont en
général « fonctionnels ». Le soutien social serait en outre associé au fonctionnement optimal
de divers systèmes physiologiques.
Pour mettre en évidence les effets bénéfiques complexes du soutien social, il faudra
utiliser des protocoles respectant sa nature séquentielle (études prospectives ou semi-
prospectives), mener des études intégrant à la fois des prédicteurs (variables contextuelles,
comme le réseau social et les événements stressants ; variables dispositionnelles, comme
l’anxiété, la dépression et l’extraversion), des processus transactionnels (stress perçu,
contrôle perçu, soutien social, coping, styles de vie) et des critères d’ajustement émotionnels
(bien-être, qualité de vie) et somatiques (santé, état fonctionnel). Les modèles hypothétiques
intégrant ces diverses variables et leurs relations (effets directs, effets indirects, effets
modérateurs, effets médiateurs,…) devront être mis à l’épreuve par des analyses en pistes
causales. Tout ceci nous permettra de mieux comprendre comment le soutien social agit sur la
santé.15

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15
Pour les effets médiateurs et modérateurs, on consultera (Rascle et Irachabal, 2001), pour un modèle séquentiel du soutien social, voir
Bruchon-Schweitzer (2002, p.349).
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Figure 1 : Structure factorielle du SSQ6, calculée sur l’échantillon total de 869 sujets (variances d'erreurs.
saturations et corrélation estimée entre facteurs)

0.56 N1
0.66
0.47 N2
0.73

0.86 N3 0.38

0.67 N4 0.58

0.41 N5 0.77 SSQ


N
0.77
0.41 N6
0.42
0.45 S1 0.74
SSQ
0.44 S2 0.75 S
0.62
0.62 S3
0.69
0.53 S4
0.79
0.38
S5
0.78

0.40 S6
Tableau I : Matrice des corrélations entre tous les items du SSQ6 (N= 869)

N1 N2 N3 N4 N5 N6 S1 S2 S3 S4 S5 S6
N1 1.00
N2 .57 1.00
N3 .44 .33 1.00
N4 .54 .46 .53 1.00
N5 .49 .60 .39 .55 1.00
N6 .47 .57 .38 .54 .71 1.00
S1 .30 .21 .16 .24 .19 .19 1.00
S2 .28 .29 .17 .23 .23 .23 .53 1.00
S3 .22 .14 .29 .27 .21 .18 .47 .46 1.00
S4 .27 .13 .18 .25 .17 .18 .54 .50 .55 1.00
S5 .28 .27 .16 .21 .29 .22 .43 .62 .46 .50 1.00
S6 .29 .19 .14 .24 .22 .22 .47 .57 .47 .55 .68 1.00
Toutes les corrélations sont significatives au seuil de p<0.01
Légende : N1 à N6 représentent les items de disponibilité du soutien ; S1 à S6 correspondent aux items de
satisfaction.

Tableau II : Tableau récapitulatif de la comparaison des structures factorielles du SSQ6 de trois sous- groupes
(348 étudiants, 217 patients, 304 chômeurs). Indicateurs d’ajustement des modèles testés. du plus contraignant
au moins contraignant

2 p ddl 2/ddl 2 GFI RMSEA


Modèle 1 : Egalité complète des
1236.65 0.0001 195 6.34 0.81 0.14
structures factorielles
Modèle 2 : Egalité des erreurs et de la
1233.62 0.0001 171 7.21 3.3 0.77 0.14
corrélation entre facteurs
Modèle 3 : Egalité des saturations et
772.56 0.0001 166 4.65 464** 0.88 0.11
de la corrélation entre facteurs
Modèle 4 : Egalité des saturations 598.88 0.001 163 3.67 173.68** 0.92 0.09
Modèle 5 : Egalité de la corrélation
422.62 0.001 140 3.01 176.26** 0.95 0.08
entre facteurs
* p<0.05; ** p<0.01

Tableau III : Tableau récapitulatif de la comparaison des structures factorielles du SSQ6 des sujets masculins
(N= 566) et féminins (N= 303). Indicateurs d’ajustement des modèles testés du plus contraignant au moins
contraignant

2 p ddl 2/ddl 2 GFI RMSEA


Modèle 1 : Egalité complète des
710.86 0.0001 128 5.55 0.82 0.12
structures factorielles
Modèle 2 : Egalité des erreurs et de la
642.06 0.0001 116 5.53 68.8** 0.83 0.12
corrélation entre facteurs
Modèle 3 : Egalité des saturations et
263.63 0.001 102 2.58 378.4** 0.96 0.06
de la corrélation entre facteurs
Modèle 4 : Egalité des saturations 232.25 0.001 91 2.55 31.38** 0.97 0.06
Modèle 5 : Egalité de la corrélation
144.46 0.001 91 1.58 87.79** 0.97 0.05
entre facteurs
* p<0.05; ** p<0.01
Tableau IV : Moyenne des scores de disponibilité et de satisfaction du soutien des cinq sous-groupes et de
l’échantillon total

Sujets Age Disponibilité Satisfaction


Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type Moyenne Ecart-type
G1: Etudiants (sciences sociales)
(N=348) 26.9 3 21.8 11.1 28.4 4.9

G2: Chômeurs 35.2 9 18.6 14.7 27.5 6.4


(N= 304)
G3 :Patients 38.8 10 20.4 10.5 30.6 4.3
(N= 217)
G4 : Hommes 33 7.9 20.9 12.5 28.5 5.3
(N= 566)
G5 : Femmes 36 6.7 20 9.3 31.1 4
(N= 303)
G6 : échantillon total 34.2 7.5 20.6 11.4 29.4 4.8
(N= 869)

Légende : Le groupe 4 (G4) correspond à l’ensemble des sujets masculins. le groupe 5 (G5) à l’ensemble des
sujets féminins de cette étude et le groupe 6 (G6) à l'échantillon total.
ANNEXE 1

Le SSQ6 (Social Support Questionnaire) de I.G.


Sarason et al., version abrégée, 1987).

Instructions:
Les questions suivantes concernent les personnes de votre environnement qui vous procurent une aide ou un
soutien. Chaque question est en deux parties :

Dans un premier temps, énumérez toutes les personnes (à l'exception de vous-même) en qui vous
pouvez compter pour une aide ou un soutien dans la situation décrite. Donnez les initiales de la personne et le
lien que vous avez avec elle (voir exemple). A chaque numéro doit correspondre une seule personne.
Dans un second temps, entourez la réponse correspondant à votre degré de satisfaction par rapport au
soutien obtenu.
Si pour une question, vous ne recevez pas de soutien, utilisez le terme "aucune personne" mais évaluez tout de
même votre degré de satisfaction. Ne citez pas plus de neuf personnes par question.
Merci de répondre de votre mieux à toutes les questions.
Vos réponses resteront confidentielles.

1-Quelles sont les personnes disponibles en qui vous pouvez réellement compter quand vous avez besoin
d'aide? (N1)

Aucune personne 1) 4) 7)
2) 5) 8)
3) 6) 9)

Quel est votre degré de satisfaction par rapport au soutien obtenu? (S2)

1. Très 2. Insatisfait 3. Plutôt 4. Plutôt satisfait 5. Satisfait 6. Très satisfait


insatisfait insatisfait
2-En qui pouvez-vous réellement compter pour vous aider à vous sentir plus détendu lorsque vous êtes
sous pression ou crispé? (N2)

Aucune personne 1) 4) 7)
2) 5) 8)
3) 6) 9)

Quel est votre degré de satisfaction par rapport au soutien obtenu? (S2)

1. Très 2. Insatisfait 3. Plutôt 4. Plutôt satisfait 5. Satisfait 6. Très satisfait


insatisfait insatisfait

3-Qui vous accepte tel que vous êtes, c'est-à-dire avec vos bons et mauvais côtés? (N3)

Aucune personne 1) 4) 7)
2) 5) 8)
3) 6) 9)

Quel est votre degré de satisfaction par rapport au soutien obtenu? (S3)

1. Très 2. Insatisfait 3. Plutôt 4. Plutôt satisfait 5. Satisfait 6. Très satisfait


insatisfait insatisfait
4. En qui pouvez-vous réellement compter pour s'occuper de vous quoiqu'il arrive? (N4)

Aucune personne 1) 4) 7)
2) 5) 8)
3) 6) 9)

Quel est votre degré de satisfaction par rapport au soutien obtenu? (S4)

1. Très 2. Insatisfait 3. Plutôt 4. Plutôt satisfait 5. Satisfait 6. Très satisfait


insatisfait insatisfait

5-En qui pouvez-vous réellement compter pour vous aider à vous sentir mieux quand il vous arrive de
broyer du noir? (N5)

Aucune personne 1) 4) 7)
2) 5) 8)
3) 6) 9)

Quel est votre degré de satisfaction par rapport au soutien obtenu? (S5)

1. Très 2. Insatisfait 3. Plutôt 4. Plutôt satisfait 5. Satisfait 6. Très satisfait


insatisfait insatisfait

6-En qui pouvez-vous réellement compter pour vous consoler quand vous êtes bouleversé? (N6)

Aucune personne 1) 4) 7)
2) 5) 8)
3) 6) 9)

Quel est votre degré de satisfaction par rapport au soutien obtenu? (S6)

1. Très 2. Insatisfait 3. Plutôt 4. Plutôt satisfait 5. Satisfait 6. Très satisfait


insatisfait insatisfait

Cotation :
1. Pour calculer le score de Disponibilité, il faut noter le nombre de personnes sur qui les sujets déclarent
pouvoir compter (de 0 à 9) aux items 1, 2, 3 , 4 , 5 et 6, puis le score total de disponibilité, N (somme de ces
nombres) qui varie de 0 à 54
2. Pour calculer le score de Satisfaction, il faut noter le degré de satisfaction exprimé par le sujet sur chaque
item (de 1, très insatisfait à 6, très satisfait), puis calculer le score total de satisfaction, S (somme de ces scores)
qui varie de 6 à 36.

Normes : Pour les moyennes et écarts-types des scores de disponibilité et de satisfaction observées sur différents
groupes de sujets, voir Tableau IV ci-dessus.

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