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D’une part, celui visé par l’entretien semi-directif. D’autre part, l’échantillon
que nous allons sélectionner dans le cadre de l’enquête qualitative. Par ailleurs,
nous avons décrit le déroulement des enquêtes et les instruments exploités en
l’occurrence les questionnaires destinés aux présidents des associations œuvrant
dans le handicap et le récit de vie auprès PSH.
d’ordre juridique : les lois ne tiennent pas en compte leurs droits, comme
elles ne les protègent pas en cas de discriminations.
d’ordre économique lorsque la situation de handicap exige une charge
supplémentaire et que la majorité de ces personnes ne disposent pas de
ressources financières pour recouvrir leurs besoins de santé, d’éducation
…etc.
d’ordre de l’environnement physique : lorsque les personnes sont
confrontées l’infrastructure non accessible ce qui empêche leurs accès ou
réaliser les habitudes de vie.
d’ordre culturel lorsque les normes sociales sont porteuses de croyances,
de stéréotypes, de préjugés, d’attitudes négatives et de représentations
sociales péjoratives vis à vis du handicap qui mènent à la stigmatisation et
à l’exclusion de cette frange de la société.
Pour assimiler cette situation des PSH, aussi fragile qu’elle soit, nous
reprenons le terme de « rite de passage » de Arnold Van en 1909, un
concept-clé pour mieux saisir la mutation à laquelle subit les PSH dans le
processus de tentation de résilience. Pour lui, ce rite se subdivise en trois
phases principales :
-La phase de séparation : au fil de cette étape, l’individu vit séparé de
son environnement et sevré de ses occupations quotidiennes ; il est obligé
de se tenir isolé.
-La phase de « liminarité ou liminalité » : étymologiquement, ce terme
désigne « seuil ». On l’appelle aussi « période de marge ». Dans cette
phase, l’individu se situe entre deux états différents; il s’agit ici d’une
phase de passage et de transition durant laquelle l’individu vit entre deux
états ou identités ;
La phase d’incorporation :
Elle renvoie à un état de réintégration de l’individu dans son contexte
familial et social en reconstruisant une identité et un statut transformés. A
ce niveau-là, les PSH peuvent parvenir, grace aux facteurs familiaux,
sociaux et environnementaux, à un dépassement des complexes
psychiques et se trouver par conséquent dans la zone de la normalité dans
son environnement socio-culturel. Quelle fonction peut assumer donc la
médiation en contexte de handicap et dans quelle mesure cette médiation
peut parvenir à maintenir les PSH dans le lien social, indispensable pour
leur résilience ? Toutes ces différentes questions nous amènent à formuler
la problématique suivante.
1.2. Problématique :
1.3. Hypothèses
Comme nous l’avons signalé plus haut, le handicap est encore un sujet
tabou dans la société, puisque la plupart du temps, les personnes n’osent
pas en parler et ils se sont gênés d’en aborder les répercussions sur soi.
Même s’il y a des changements notables dans la vision de parler avec les
PSH, grâce aux médias et en l’occurrence aux réseaux sociaux, beaucoup
du travail reste à faire encore surtout dans les médias classiques comme la
télé ou les journaux électroniques suivis par une grande masse de gens.
Il est à souligner que nous n’avons pas pour objectif de travailler sur la
vie des PSH en elle-même mais plutôt d’examiner les facteurs favorisant
la résilience et du coup l’intégration des PSH dans la société. Nous
portons notre attention prioritairement sur le processus d’intégrations des
PSH en inféodant tacitement les facteurs intérieurs et extérieurs dans le
but de passer de la phase de la normalité à l’anormalité.
Autrement dit, nous voudrions examiner les enjeux liés à cette rupture sur
les plans personnel et pédagogique du vécu de l’étudiant en situation de
handicap. Le point de vue des parents peut être une source d’informations
précieuses concernant notre questionnement ; toutefois, tel n’est pas notre
choix. C’est une autre perspective de recherche qui mériterait d’être
exploitée. Pour mettre en évidence les enjeux qui sous-tendent le vécu des
PSH, nous avons construit notre investigation sur deux paradigmes qui
nous semblent nécessaires : le paradigme psychologique et socio-culturel.
Ces deux paramètres se complètent et élucident notre approche plurielle
qui prend en compte non seulement l’environnement et le microsystème
des PSH, mais également la dimension psychologique de la personne elle-
même. Autrement dit, la singularité de notre travail de recherche se traduit
par une approche de « dedans» via laquelle les PSH expriment ce qu’ils
ressentent vis-à-vis du monde qui les entoure.
1.5. Objectifs :
Déceler les enjeux qui sous-tendent l’expérience des PSH en tant que
stratégie contre le refoulement.
Ouvrir d’autres pistes de recherche sur l’accès des PSH aux services
publiques : santé, éducation, emploi, formation…et mettre en exergue
les obstacles qui bloquent leur accès et leur garantir l’accessibilité aux
services publics.
2.1. L’échantillonnage
Nous avons mené notre enquête dans les établissements que nous
présentons dans le tableau suivant:
A.S.P.H
Latifa 0666114002
Samira
Notre choix des associations qui s’occupent des handicaps est dicté à un
ensemble de variants. Tout d’abord, nous avons collecté les associations
qui se trouvent dans la région de Souss Massa, étant donné que notre
investigation se coïncide avec la crise sanitaire du Covid19 et ses
retombées négatives qui rendent nos déplacements quasiment impossible.
Ce qui réduit naturellement notre champ de recherche à la région dont
nous faisons partie.
1
Ibid, p. 321.
qu’il incombe de jouer un rôle acculturatif considérable : un homme de
religion, un enseignant »2
Signalons que les mesures sanitaires étaient pour nous un obstacle majeur,
qui, à cause des barrières sanitaires, nous a empêcher d’élargir le champ
au niveau national pour avoir une vision globale plus crédible et de se
contenter à l’aspect régional.
L’identité de l’interviewé :
Bref, cet entretien semi-directif avec les présidents des associations en question
vise essentiellement à mettre en relief le rôle médiateur que peuvent jouer ces
dernières entre les PSH d’une part, et la société à laquelle ces personnes
appartiennent d’autre part. Ce qui nous permettrait par la suite d’en faire le
contraste avec les récits de vie des personnes en situation de handicap.
Tout chercheur, après avoir défini les contours de son objet d’investigation et
clarifié son questionnement, est appelé à construire sa posture méthodologique
en arrêtant « sa boîte à outils ». A ce titre, Marc Bosch recommande « le
chercheur doit pouvoir clarifier ses propres préférences méthodologiques. Il ne
suffit pas d’écrire que l’on procède à une analyse interculturelle, encore faut-il
préciser « d’où l’on va parler » : du niveau de l’anthropologue, de celui du
sociologue, de celui du psychologue social ».3
Comme nous l’avons signalé plus haut (cf. Protocole méthodologique), nous
avons opté pour une double approche qui consiste d’une part, à examiner le
handicap en empruntant à l’anthropologie le concept de « liminarité » théorie
par Gennep. D’autre part, nous tenterons de mettre en évidence à la fois les
représentations que se font les étudiants en situation d’handicap à propos de leur
expérience et les pratiques auxquelles celle-ci a donné naissance. Par ailleurs, en
nous situant au plan sociologique, il s’agira d’interroger la démarche de la
médiation comme démarche tributaire aux associations œuvrant dans le
handicap.
Pour recueillir un corpus valide et consistant, nous avons fait appel à une
approche qualitative « C’est une méthode où le chercheur détermine sur la base
de réflexions théoriques ou d’enquêtes socio-structurelles préalables les
dimensions de comparaison. Leur croisement permettant de construire un
tableau des constellations qu’il prévoit d’étudier ».4
3
Marc, B.: Le management interculturel, 1993, Paris, Nathan, p127
4
BÜHLMANN & TETTAMANTI / Le statut de l’approche qualitative.p 195
Dans cette méthodologie, le processus de recherche suit généralement une
logique circulaire. Le chercheur alterne constamment entre la visite du terrain et
l’analyse du matériel récolté, dans le but d’utiliser les connaissances obtenues
pour réorienter la recherche (Strauss & Corbin, 1990).
Dans le cadre de notre investigation, nous avons opté pour cette double
démarche à la fois exploratoire par l’usage de l’entretien semi-directif, et
compréhensive en recourant au récit de vie. Notre ambition souscrit à ce
principe énoncé par De Ketele et Maroy (2006 :225 : « la vision la plus proche
de la réalité justifie l’association de ces deux paradigmes différents, mais
complémentaires ».
2.5 La préenquête
Travailler sur la question du handicap se présente comme un défi à relever voire
un pari à réussir pour diverses raisons. D’une part, nous avons choisi de mener
cette étude en pleine période « d’enfermement » généralisé. Se pose ainsi la
difficulté de savoir si notre choix est pertinent et faisable. D’autre part, nous
étions incertains d’obtenir l’implication des informateurs à parler de leurs
souffrances, de leurs vécus personnels.
Face à cette résistance de l’entourage familial, nous nous sommes trouvés dans
l’obligation de changer l’angle d’attaque en réorientant notre boussole vers les
associations qui s’occupent des personnes en situation d’handicap. Cette piste,
elle aussi, nous a amené nulle part, de par la complexité d’y accéder et prendre
contact avec les personnels de l’association afin d’organiser des rencontres avec
les PSH mais en vain. La plupart des présidents des associations ont montré leur
réticence vis-à-vis de notre demande, eu égard aux conditions pandémiques
qu’impose le Coronavirus d’une part, et d’autres considérations éthiques,
sociales et organisationnelles qu’ils préfèrent ne pas révéler en détail.
Pour ces considérations et bien d’autres, nous avons découvert les insuffisances
de l’approche formelle puisque ses résultats n’étaient pas tout-à-fait probants et
concrets. Par conséquent, nous avons reporté notre recherche-terrain à l’année
suivante(2021).
Notre deuxième tentative de rencontrer les PSH cette fois-ci a été brillamment
réussi grâce au recourt à l’approche informelle5 via personnes médiatrices (des
amis des PSH, des médecins, des professeurs universitaires…) par le truchement
desquelles les rencontres ont eu lieu. Cependant, il s’est avéré que notre
cheminement n’était pas aussi facile que l’on pense auparavant, car d’autres
défis d’ordre logistiques et organisationnels se posent avec acuité. En effet, Les
rencontres avec les PSH se sont déroulées dans des lieux publics qui respectent
au même temps leurs spécificités (passage des tapis roulants, les WC propres
aux personnes en situation d’handicap…). Dans cette perspective, beaucoup de
PSH ont voulu annuler notre rendez-vous sous prétexte des moyens du
transport. Nous nous trouvons obligés, par conséquent, de se déplacer chez eux
pour les amener au lieu du rendez-vous.
5
Nous entendons par l’approche informelle, des canaux indirects, des médiateurs qui nous ont facilité
d’organiser des rencontres avec les PSH sans pour autant que ceux-ci aient des contraintes psychologiques et
de leur garantir l’anonymat de leur témoignage.
L’analyse des données recueillies nous a été d’une grande utilité car elle nous a
permis de dégager les informations suivantes :
. L’enquête qualitative par le récit de vie nous a ainsi aidé à améliorer notre
instrument méthodologique en ajoutant d’autres questions, en reformulant
d’autres, voire à supprimer certaines qui s’avéraient inadéquates.
Il importe de rappeler que dans cette phase, ce récit de vie a été orienté par une
consigne qui invite les répondants à raconter leur expérience de vie et à décrire
en quoi cette expérience a transformé ou non leur vécu en indiquant s’ils ont été
accompagnés par des médiateurs pour favoriser la transition entre une situation
de perturbation inhabituelle et une situation d’équilibre recherché.
. Parle des personnes qui t'ont aidé et comment tu as pu faire face aux préjugés
de la société envers les personnes handicapées. Explique comment tu as appris
à t'accepter et à vivre avec ton handicap. Partage aussi les moments positifs que
tu as vécus et ce qui te rend fier d'être qui tu es aujourd'hui
Veuillez répondre aux questions suivantes pour nous aider à comprendre votre
expérience du handicap :
1. Quels sont les principaux défis auxquels vous avez été confronté en raison de
votre handicap ? 2. Quels sont les domaines où votre handicap vous a le plus
touché ? 3. Quelles sont les solutions que vous avez trouvées pour surmonter les
obstacles liés à votre handicap ?? 5. Quels sont les plus grands avantages que
vous avez tirés de votre handicap ? 6. Quels conseils donneriez-vous aux
personnes handicapées qui souhaitent surmonter leurs difficultés ?
…) »
Convaincue de l’intérêt que présente le récit de vie, nous l’avons choisi comme
deuxième outil méthodologique en vue d’approfondir les informations obtenues
par l’entretien semi-directif et saisir les différentes significations données à
l’expérience de résilience à travers une approche subjective qui met le point de
vue personnel au cœur de notre questionnement sachant que le récit de vie
favorise plutôt une approche individuelle.
Cette enquête exploratoire par récit de vie fut, pour nous, l’occasion de
découvrir combien cet instrument est délicat et combien c’est difficile de
mobiliser les répondants à se mettre à parler de soi. Cela nous a aidé à mettre en
évidence plusieurs aspects spécifiques soit au récit lui-même, soit à la nature du
phénomène que nous prétendons étudier, ou encore à la situation dans laquelle
s’inscrit cette étude.
Parler de soi pour révéler ses propres sentiments, ses souffrances, c’est mettre à
nu son monde intime ou sa sphère privée. Le dernier point est relatif à la
situation dans laquelle nous menons notre enquête : en effet, l’informateur est
convoqué à parler de son expérience personnelle de sa vie publique mais aussi
privée autant que faire se peut. A cet égard, le recul par rapport à l’expérience,
grâce à l’extériorité qu’il offre, peut favoriser une certaine prédisposition de
l’individu à raconter sa souffrance, à décrire l’épreuve, voire à l’analyser.
Or, ce qui nous a incité à mener les enquêtes sur la vie des PSH, c’est justement
pour dégager le processus de rupture engendrée par cette expérience
exceptionnelle et pouvoir répondre aux objectifs de notre investigation.
6
Nous présenterons cette consigne revue et réajustée dans la suite de ce chapitre
Le protocole méthodologique adopté emprunte donc une approche mixte. Car
d’une part, nous avons eu recours à l’entretien semi-directif ; d’autre part, pour
compléter et approfondir notre investigation, nous avons jugé pertinent et
nécessaire d’investir le récit de vie. Une telle complémentarité permettrait
d’enrichir la recherche et d’en déceler un contraste entre les déclarations des
présidents des associations des PSH et la réalité vécue et avouée grâce à
l’approche de « dedans »par les PSH. Il est à signalé que l’entretien semi-directif
que nous adoptons ici a un fait spécifique (entretien à réponses ciblées).
Nous nous attarderons ici sur le récit de vie en tant qu’outil méthodologique
permettant d’accéder selon une approche « introspective » aux différentes
dimensions de l’expérience vécue par les PSH. Nous exposerons ensuite, la
consigne qui propose le cadre général de « narration » ou de mise en récit aux
sujets sans pour autant les priver de leur liberté de s’exprimer ; condition
essentielle qui garantit au récit son authenticité.
En quoi consiste le récit de vie ? Quelle en est la fonction et quelle utilité peut-il
présenter en termes scientifiques ? Mais également, quels enjeux le sous-tendent
? Comment le chercheur peut-il l’exploiter en tant qu’outil permettant
d’appréhender la complexité du réel ? Sachant que le récit de vie initie une
approche de l’intérieur de l’objet scientifique, comment favoriserait-il une étude
de cet objet à partir du point de vue « personnel subjectif » ? Selon Legrand
(1993 :180) le récit de vie est « l’expression générique où une personne raconte
sa vie ou un fragment de sa vie à un ou plusieurs interlocuteurs » en recourant à
son choix personnel soit à l’oral soit à l’écrit.
D’ailleurs, dans ce sens, Juan (1999 :119) le présente comme « discours libre
par lequel se déroule le film de l’existence ». De ce fait, il est l’outil privilégié
par le sujet pour replonger dans le parcours que retracent ses expériences
subjectives ancrées dans la mémoire. Mais à travers ce récit, le narrateur initie sa
propre relecture de la réalité. En mettant en exergue cette relecture personnelle
du locuteur-narrateur, Lalive d’Epinay (1983) cité dans Juan 1999 :119,
explique qu’en puisant dans sa mémoire, « il raconte en sélectionnant, donc en
taisant; il ordonne, valorise, hiérarchise donc élague, écarte, dévalorise » C’est
dire toute l’importance de cet outil à aller en profondeur dans le vécu subjectif
du sujet narrateur : cela aiderait à comprendre les manipulations opérées, les
choix faits et les transformations que l’expérience personnelle apporte au sujet.
Le récit de vie n’est donc pas une copie de l’histoire vécue mais une mise en
discours organisée par un « je » conscient qui reconfigure cette histoire et lui
trouve un « nouvel agencement » qui souligne les apprentissages qui en sont
induits.
Leray (2000: 4) dans cette perspective, précise que l’individu, via son récit,
construit « sa version à la fois singulière et sociale de vivre son humanité ».
Delphine Burrick souligne, à ce propos, que ce récit « fondamentalement
subjectif, il nous confronte à l’analyse de données fortement ancrées dans les
perceptions de celui qui se raconte. »7 . C’est en cela qu’il présente un intérêt
particulier permettant au chercheur d’aller plus loin dans son investigation en
faisant émerger les dimensions subjectives, identitaires de celui qui relate le
souvenir ou l’expérience.
Car d’un côté, le sujet face au chercheur, est producteur et objet de la narration ;
et de l’autre, le chercheur est appelé à convaincre ce même sujet à accepter de se
raconter authentiquement en lui assurant anonymat et confidentialité. Le récit de
vie a plusieurs avantages. En l’occurrence, d’après Rappaport (1987) cité par
Rhéaume (2008 :71), « il favorise le développement personnel des individus qui
s’y prêtent, il est un fondement à la vie cognitive et émotive, il est agent de
mémoire, il génère du sens et, enfin, il soutient, porte le processus de
construction identitaire » Au titre de tous ces avantages qui sont à la fois liés au
développement des dimensions psychoaffectives et à la construction de soi, le
récit de vie aux yeux de Leray (Idem. p4) laisse voir également la place cruciale
du lien social pour cette construction « car c’est bien la relation sociale […]
entre les personnes qui permet […] de se construire […] jusqu’à élaborer le
sens de son action à la fois dans la temporalité courte et dans le continuum de
l’Histoire »
-Et « la validité subjective », qui réfère aux points de vue, aux ressentis du sujet
narrateur de l’expérience.
Cependant, ces quatre exigences ne sont pas toujours faciles à remplir. Selon
Legrand (1993) le récit de vie, en tant que corpus, est confronté à deux défis
majeurs : un récit de vie n’a aucune valeur en l’absence de détachement ou «
d’arrachement ». Le deuxième pose la distance réflexive comme condition sine
qua non en dehors de laquelle le récit de vie n’a aucune validité. Ainsi, le
détachement et la prise de distance réflexive constituent les fondements
indispensables du récit de vie et sa scientificité.
1. Définition du contexte Vous êtes une personne en Situer l’informateur dans le contexte général du
situation de handicap, vous demandé (comment on se perçoit et on perçoit la
combattez chaque jour société ?)
pour faire face aux normes
sociales « discriminants »
pour réussir votre
résilience
2. Etablissement du fait Ainsi, vous avez été On souligne à la fois les facteurs intrinsèques et
contraint(e) de façon extrinsèques qui influent son prise de décision
imprévue, de se mettre
face à un défi qui vous a
obligé de se cloitrer/ d’y
faire face»
5. Expression de la nouvelle Vous pouvez enfin, Définir, si possible, ce que le handicap a permis
vision exprimer la nouvelle construire comme vision future
vision que le handicap
vous a aidé à construire
pour la vie normale après
Etudiants
marocains en
situation de
handicap
Total
Comme le montre ce tableau, nous avions prévu au total X récits de vie. Or, en
dépit de nos rappels réitérés, malgré nos aller-retours auprès des informateurs
des PSH, nous n’avons pu récolter que X récits, soit X%. Après traitement
manuel des récits recueillis, nous avons été amené à n’en retenir que X au total.
Ce qui représente environ X/%. Le traitement appliqué à notre corpus a permis
de mettre en quarantaine X récits de vie. Ces Xrécits de vie ont été rejetés vu les
raisons suivantes :
Mener une recherche en plein contexte de crise sanitaire relève d’une gageure
difficile à réussir. En effet, d’une part, les mesures drastiques imposées par les
Autorités à tous les niveaux laissent au chercheur un accès limité aux terrains
pour effectuer ses enquêtes ; d’autre part, les conditions psychologiques et
morales liées aux risques épidémiques de la covid19 retiennent les informateurs
dans leurs bulles ou dans les limites de leurs zones de sécurité.
La question de l’accessibilité est encore plus sensible et plus délicate dans le cas
des étudiants en situation de handicap pour qui, la distanciation sociale s’ajoute
aux souffrances creusant ainsi un double fossé face au chercheur. Nous avons
ainsi été confronté à ce défi d’accéder au terrain pour rencontrer les étudiant(e)s
et effectuer nos enquêtes. Nos aller-retours, nos tentatives réitérées, ont pris
beaucoup de temps. Cela nous a pris presque 4 mois pour réussir à avoir
l’adhésion des étudiant(e)s à participer en acceptant de nous raconter leurs
expériences. Pour la majorité, nous avons eu recours à la technique de la
médiation : ainsi le pont a été établi avec les étudiant(e)s grâce à des médiateurs
qui jouissent d’un ascendant et d’une grande confiance auprès de nos
informateurs. Dans certains cas, la proximité de ces médiateurs par rapport aux
contextes de l’enquête a favorisé la collaboration des étudiants. Certaines PSH,
pour qui le déplacement serait difficile, nous leur facilitons la tâche en
réagissant via internet. Les récits nous sont parvenus ainsi sur notre courriel.
Déroulement de l’enquête
Comme le révèle ce tableau, l’enquête qualitative s’est étalée sur une durée plus
importante alors qu’elle n’a concerné initialement que 60 étudiant(e)s. Sur ce
nombre, 30 qui ont participé. Toutefois, pour l’entretien semi-directif, nous
avions eu 10 retours. Ces données montrent la difficulté liée à la nature de
l’enquête par récit de vie qui implique l’informateur dans un processus de va-et-
vient non seulement afin de mettre en narration son expérience mais qui plus,
l’introduit dans un travail de réflexion et d’introspection demandant une
disponibilité et une adhésion à l’idée d’écrire sa souffrance ou ses ressentis.
Comme nous l’avons susmentionné, il ne nous était pas aisé d’accéder ni aux
terrains d’enquêtes ni aux populations cibles. En plus du confinement, de la
distanciation sociale et des mesures hygiéniques. Face à cette réalité
décourageante, nous avons dû recourir à des médiateurs surtout des étudiants et
des enseignants pour établir les premiers contacts avec les PSH et celles qui se
porteraient volontaires à participer à notre enquête. Nous avons ainsi pu
identifier un premier effectif d’étudiants en situation de handicap à travers cette
médiation sans toutefois parvenir à l’échantillon souhaité (sur 60 nous avons
repéré 30seulement). Pour obtenir le nombre nécessaires, nous avons dû
diversifier les voies d’accès aux différents étudiants.
Pour cela, nous avons réélaboré l’entretien-semi directif sous Google meet pour
contourner les contraintes du confinement d’un côté, et pouvoir récolter un
échantillon important d’entretiens, de l’autre. Le tableau suivant présente les
types d’outils utilisés dans la collecte des informations par entretien semi-
directif :
Google meet 3
Watsup 7
Total 30
Toutefois, l’enquête par récit de vie auprès des étudiant(e)s était une vraie mise
à l’épreuve. Nous avons dû relancer maintes fois vainement. Beaucoup étaient
récalcitrants, d’autres n’y voyaient aucun intérêt ; des étudiants considéraient
notre demande comme une volonté d’intrusion dans leur vie intime. Bien plus,
nous avons été confronté à des étudiants qui demandaient à être récompensés
pour répondre à notre appel. Certains refusaient catégoriquement car leur état
affectif et moral ne les prédisposait point à raconter ou à parler. Devant cette
situation délicate, nous avons risqué d’abandonner cette démarche n’était
l’insistance de notre encadrant pour qui toutes ces réactions donnent déjà une
première idée sur l’importance cruciale de cette catégorie de personnes( les
PSH) et renseignent sur sa complexité et les enjeux qui le sous-tendent. Afin de
dépasser cet obstacle, il a donc fallu faire intervenir des personnes médiatrices
pour faire adhérer les étudiants étrangers à notre enquête. Grâce aux
intermédiaires, nous avons reçu 30 récits. Parvenir à ce corpus de récits n’était
pas une tâche aisée. Au-delà, de la situation épidémique et des mesures barrières
en vigueur, la nature de notre objet de recherche relative à l’expérience
personnelle des PSHse présente comme un défi à relever. C’est cette dimension
que nous allons traiter pour expliquer les enjeux de cet objet et les écueils de
l’enquête.
Réussir à faire parler des étudiants nécessite savoir-faire, doigté et tact. Mais
cela passe aussi par le respect de principes déontologiques qui garantissent un
rapport favorable entre l’enquêteur et les informateurs. Au fil de nos enquêtes
nous avons, par conséquent, souscrit aux principes que nous présentons ci-
après :
L’attitude de résistance
De nombreux étudiants même s’ils ont signifié leur accord de principe de
contribuer à l’enquête par récit de vie, affichaient une grande résistance face à
notre désir de les impliquer et considéraient le fait de relater leurs expériences
du comme un acte relevant de la vie privée. Un nombre important dont
l’expérience était dramatique (perte d’un parent ou d’un être cher, séparation
avec un (e) conjoint(e),...) n’osaient pas en parler même s’ils étaient dans le
besoin psychologique de raconter à une oreille bienveillante, nous expliquaient-
ils
b- Le manque de confiance :
Ceci dit, loin de nous est donc l’intention de verser dans une entreprise
comparatiste car comme le stipule Todorov « Théoriquement et
méthodologiquement, la comparaison est dangereuse »8 Le phénomène que nous
interrogeons appelle ainsi cette prise de conscience que la place qui revient au
chercheur dépend largement de la démarche que ce dernier adopte pour
comprendre ce phénomène. Alain Theres, à cet égard, se demande « Comment
découvrir alors ce qui est ou me serait caché ? Quelle démarche, quel outil
méthodologique pour me permettre cette exploration ? De nouveau, la question
de mon statut, ma place s’impose. Il faut pouvoir et vouloir bouger, se déplacer,
physiquement, culturellement, psychologiquement, en un mot se décentrer »9 .
Analyser l’expérience des PSH suppose l’accès à la sphère privée des individus
pour mettre en surface leurs difficultés, leurs souffrances. Rendre compte des
effets de la rupture engagée par cette expérience, c’est alors entreprendre une
action délicate et complexe qui pour « recueillir un discours sur ces objets,
8
Le Français dans le monde 181, 1983 : 41, cité par Todorov 1986, p 11
9
Thers, A. : Le chercheur en psychologie interculturelle: entre objectivité et subjectivité In Les Cahiers
Internationaux de Psychologie Sociale, Numéro 99-100 | pages 314 à 324, PUL, p7
requérait d’être invité chez les personnes et être autorisé à pénétrer leur
intimité. Cela signifie donc avoir avec la personne une relation qui (me) renvoie
à une place particulière » Laplantine (2001 : 194) insiste à ce propos sur « la
distance à prendre, car c’est le propre du langage, et en particulier du langage
scientifique, que d’agir dans le sens d’une séparation » Le chercheur, en effet,
quand il s’aventure à étudier un objet mêlant dimension culturelle symbolique et
dimension psychologique, est contraint à une double démarche : la première
consistant en « la compréhension par le dedans » ; la deuxième réside dans la
construction et le respect d’une distance ou de ce que l’anthropologue français
Laplantine appelle « la compréhension par le dehors » (Ibid.195)