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Chapitre 1 : Appropriation conceptuelle

1. Education
2. Santé
3. Promotion de la santé
4. Prévention
5. Education pour la santé
6. Education à la santé

Le concept d’éducation
Étymologiquement, le mot éducation dérive du mot latin Educare qui signifie dresser, cultiver,
former. Il s’agit de l’activité de dresser l’enfant à travers la formation du caractère et la
discipline de façon qu’il puisse mener une vie qui réponde aux standards de la société. De ce
point de vue, l’enseignant joue le rôle de jardinier qui connait à l’avance ce que la plante
deviendra. De ce fait, l’enseignant est doté des capacités nécessaires pour conduire à cette fin.
Le terme latin Educere peut prendre également le sens de conduire à, diriger vers. Il s’agit
alors de fournir des conditions qui vont aider l’enfant à se développer, qui vont l’aider à sortir
le meilleur de dedans lui-même. Dans cette perspective, l’enseignant ne connaît pas à l’avance
ce que l’enfant deviendra, il lui fournit simplement les conditions qui vont rendre l’enfant
capable de devenir tout ce qu’il est capable de devenir.
D’un autre point de vue, l’éducation apparaît comme une force majeure dans la vie de
l’individu et de sa société. En tant que tel, il s’agit de l’agrégat de tous les processus par
lesquels les gens développent des habiletés, des attitudes et des comportements qui ont une
valeur positive pour eux-mêmes et pour la société dans laquelle ils vivent (Good, 1973). C’est
le processus par lequel les gens développent leurs pouvoirs intellectuel, émotionnel,
spirituelle et physique et par conséquent devient plus pleinement membre participant de la
communauté à laquelle ils appartiennent. C’est dans cette perspective qu’Amadou Ahijo disait
que la finalité de l’éducation n’est pas d’instruire les gens pour le plaisir de les instruire, il
s’agit plutôt de leur permettre de participer de manière rentable au développement de leur pays.
En effet, le rôle de l’éducation est de promouvoir la participation au développement social,
d’influencer les manières de faire des gens pour être en accord avec les défis des temps
toujours changeants (ukeje, 1966).
Au total, quoique le terme éducation soit communément utilisé, il apparaît très difficile de dire
en un mot ce qu’elle est. Les philosophes et penseurs depuis Socrates, Dewey et jusqu’à nos
jours ont tenté d’en produire des définitions. De toutes ces tentatives de saisie conceptuelle, il
apparaît que l’éducation peut être envisagée comme l’influence délibérée et systématique
exercée par les plus âgés à travers l’instruction et la discipline. Il s’agit du développement
harmonieux de toutes les dimensions de la personne : physique, sociale, intellectuelle,
esthétique et spirituelle. De ce point de vue, les éléments essentiels dans le processus éducatif
semblent être un esprit créatif, un moi bien intégré, des visées sociales utiles, l’expérience
relative aux intérêts de la personne, les besoins et les habilités individuelles en tant que membre
du groupe social. L’action éducative a donc pour ambition de développer un ensemble de
connaissances et de valeurs physiques, morales, intellectuelles, conformément aux attentes
du contexte socioculturel d’appartenance. Au-delà de la participation harmonieuse à la vie de
son groupe d’appartenance (éducation socialisante), l’éducation doit permettre aussi à
l’individu d’acquérir la capacité de juger (soi-même et les autres) à partir de valeurs
universelles (éducation éthique).
Le concept de Santé
La santé est un concept historique et neutre que chacun peut tenter de définir. Une chose est
cependant certaine, il est impossible de dire ce qu’elle est de manière univoque, valable pour
tous, en tout lieu et en tout temps.
Pendant la période du Moyen-Âge par exemple, qui était caractérisée par les épidémies
d’occlusion due à l’appendicite et par la peste, l’expression de salutation était« Comment allez-
vous du ventre ?» (Mias, 1996). Cette expression entraînait une réponse de type « Bien, je ne
suis pas malade, grâce à Dieu ». A cette époque, assurer le salut de son âme était le but de la
vie. C’est pourquoi pour Canguilhem (1991), pouvait déclarait que la santé a remplacé le salut.
Actuellement la réponse au « Comment allez-vous ? » est devenue « Ça va, mais j’ai des soucis
professionnels...». La maladie n’est plus seule référence en matière de santé, de qualité de la
vie... L’homme bien portant est un malade qui s’ignore de moins en moins.
Depuis la nuit des temps le souci premier des hommes a été de se nourrir et de se mettre à l’abri
du danger. Pendant la période du néolithique par exemple, des savoirs pluriels, fonction des
lieux géographiques, se sont accumulés et transmis oralement (Mias, 1996). Ces savoirs étaient
orientés vers le prendre soin de la survie de l’individu et du groupe car la précarité des
ressources alimentaires était partout présente et la naissance était un passage à risque.
L’accumulation de l’expérience et des savoirs empiriques sur plantes dites médicinales,
transmis par tradition oro-familiale au début, ensuite à l’université a permis de dire en ces temps
là que, être en santé signifie bien se porter, c’est-à-dire, être sur ses jambes (Mias, 1996). Pour
cette raison, au 17ème siècle la santé était considérée comme l’état de celui qui est sain, qui se
porte bien.
Au 18ème siècle, la santé fut définie comme l’absence de maladie. L’ère pastorienne et la
découverte des microbes ont modifié l’approche des risques de la vie (Ibid.). Par la suite la
découverte de la pénicilline et autres antibiotiques a conduit l’Organisation Mondiale de la
Santé (OMS, 1946) à énoncer la santé comme un « état complet de bien-être physique, mental
et social qui ne consiste pas seulement en l’absence de maladie ou d’infirmité ».
Le fait que la population était surtout rurale en ces temps là, l’environnement naturel, n’a pas
été pris en compte dans cette définition de la santé (Mias, 1996). C’est l’urbanisation croissante
et les différences de développement économique en fonction des lieux géographiques du
monde, qui vont amener à reconsidérer le rôle de l’environnement dans la santé (Mias, 1996).
Dans cette perspective, les médecins ne sont plus les seuls acteurs en lice pour promouvoir la
santé. La santé devient une ressource individuelle et collective. Elle se définit d’abord
négativement, relativement aux notions de mal-être, maladie, morbidité, douleur, déficience, de
dépendance(Ibid.). C’est la vie dans le silence des organes. En effet lorsqu’on la possède on n’y
pense plus (Haut comité de la santé publique, 1994).
De plus, la santé comporte une dimension perceptuelle, plus positive, recouvrant les notions de
bien-être et d’adaptation à l’environnement physique et social. Cette approche se réfère au
«ressentir», à ce que Canguilhem (1990) appelle «la vérité du corps». Cette approche est
éminemment subjective et variable suivant l’époque, le lieu, le sexe, la catégorie sociale, l’âge
(Mias, 1996). Cette dimension perceptuelle est capitale, dans le sens où c’est à chacun de dire
comment il juge sa santé. Elle prend en compte l’influence du vécu de la maladie sur la maladie.
Ce qui donne de voir le grand fossé qui existe entre mesure objective de la santé et perception
subjective de la santé : des personnes âgées, handicapées, des malades chroniques jugent
souvent leur état de santé satisfaisant.
Aujourd’hui, la santé fait également référence à une recherche de mieux-être. La demande de
santé est devenue une demande de corps performant (Mias, 1996) beau, jeune, sportif,
intelligent... La médecine du « désir » (Mias, 1996) a fait son entrée en scène (procréation
médicalement assistée, chirurgie esthétique, diagnostic prénatal, diagnostic préimplantatoire..).
Le territoire de la santé s’étend avec l’apparition des «bien portants, médicalement traités»
(Ibid.) (femmes enceintes, jeunes enfants, femmes ménopausées, personnes âgées, malades
chroniques...).
La définition de la santé donnée par l’OMS (1946) présente l’intérêt d’insister sur les différentes
dimensions de la santé. Elle envisage l’aspect physique, psychique et social, et ne privilégie pas
l’aspect purement somatique sur lequel s’attarde trop souvent la biomédecine. Elle transporte
une vision holistique, multi-dimensionnalisante de l’homme. Une quatrième dimension (la
dimension spirituelle, c’est-à-dire le sens que l’on donne à sa vie) pourrait d’ailleurs être ajoutée
à cette définition de l’OMS (Mias, 1996). Cette définition donne de la santé, une vision positive
ne ramenant pas celle-ci à l’absence de maladie. Elle « démédicalise » la santé. Elle est
exigeante et dynamisante, car elle fixe un objectif très ambitieux. Elle pousse même la
démédicalisation très loin en insistant sur l’aspect purement subjectif de la santé. C’est un
inconvénient (Mias, 1996) dans la mesure où, c’est le sujet et lui seul qui se dit ou non en bonne
santé, puisque c’est de son «bien-être» personnel qu’il s’agit. Cette subjectivité peut conduire
à des incohérences. On peut se sentir en complet bien-être physique, psychique, social (et
spirituel) et être atteint de cancer, d’hypertension artérielle, de diabète… La démédicalisation
de la santé ne devrait donc pas être entendue dans le sens de dénormalisation. Ce qui pourrait
induire l’utopie, l’erreur. De plus, le bien-être complet peut-il exister ? Comment pourrait-on
le reconnaître, le mesurer ?
L’autre grosse limite de cette proposition de l’OMS (1946) consiste dans le caractère statique
qu’elle donne à la santé. Pourtant, la santé est moins un état, et plus un processus qui se déroule
dans le temps (Mias, 1996). L’idée d’état suppose la stabilité, l’exactitude, l’invariabilité,
l’inertie et même la végétativité. Or, la santé est essentiellement mouvante, changeante,
instable, dynamique, fragile, toujours à rechercher, toujours à l’horizon, jamais atteinte ;
précisément, dès qu’on semble s’en être rapproché, elle s’échappe davantage plus loin. C’est
pour cette raison que Bubois a tenté de compléter la définition de l’OMS en faisant forte
insistance sur le caractère adaptatif de la santé. Pour lui, la santé est précisément un état
physique et mental, relativement exempt de gêne et de souffrance, qui permet à l’individu de
fonctionner aussi efficacement et aussi longtemps que possible dans le contexte où le hasard
ou le choix l’ont conduit.
La santé devrait être perçue comme une ressource pour vivre et non comme un but de la vie ;
trop rechercher la santé risque donc de rendre hypocondriaque, l’excès de sa recherche peut lui
nuire (Claire Perrin, 2008). L’idée de santé devrait être plutôt envisagée, non seulement comme
un état, mais comme une réalité dynamique, inscrite dans les pratiques et les discours de la
société toute entière, une élaboration psychologique complexe où s’intègrent en une image
signifiante, l’expérience et l’historicité historicisable de chacun, ses valeurs et les informations
circulant dans la société (Mias, 1996).
En effet, les interprétations et les pratiques sociales autour du normal et du pathologique, du
sain et du malsain portent la marque des croyances et des idéologies (Foucault& Canguilhem).
Dans la société d’aujourd’hui, des visions cosmogoniques (relatives à la théorie de la formation
de l’univers) et religieuses de la maladie (malédiction divine, rédemption par la souffrance) et
des approches psychologisantes ou étroitement scientistes, se superposent (Mias, 1996). Pour
beaucoup de personnes, l’idée de qualité de la vie tend, aujourd’hui, à remplacer celle de bonne
santé. Fagot-Largeault (1991) suggère que la qualité de vie n’est pas seulement composée de
données mesurables par un observateur extérieur. Elle résulte d’un ensemble d’appréciations
objectives (le nombre de journées passées au lit, le revenu alloué par la Sécurité sociale pendant
la maladie…) et de données subjectives (l’impact de la maladie sur l’entourage perçu par le
malade, son besoin d’épanouissement personnel, ses attentes concernant son traitement) (Mias,
1996). L’OMS (1993) a tenté de dire ce que serait la qualité de vie. C’est la perception qu’a un
individu de sa place dans l’existence, dans le contexte de la culture et du système de valeurs
dans lesquels il vit en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes.
C’est un concept très large influencé de manière complexe par la santé physique du sujet, son
état psychologique, son niveau de dépendance, ses relations sociales ainsi que sa relation aux
éléments essentiels de son environnement. L’idée de qualité de vie permet de passer à une
relativisation de l’état physique, mental et social des individus. Chaque maladie présente ses
caractéristiques et donc ses conséquences sur la qualité de vie de la personne qui en est atteinte.
De façon qu’être en santé est devenu synonyme de pouvoir tomber malade et se relever. La
maladie est désormais normale et fait partie de la vie. La santé est désormais une valeur, une
norme, un droit (d’être non seulement soigné, mais guéri).

Pour conclure ce point, la santé doit être envisagée dans une perspective holistique de l’être
humain considéré comme un tout, et non comme un total, en osmose avec son environnement.
Cette idée d’holisticité n’est pas nouvelle. Elle est déjà retrouvée dans le concept oriental du
Yin et du Yang qui suggère que l’on soigne une personne malade, pas seulement l’organe
malade (Mias, 1996). Newman (1979), résume la vision holistique de la santé en six points :
1. la santé comprend des états longtemps décrits en termes de pathologie (un diabétique
qui a acquis la connaissance de sa maladie et qui arrive à la gérer sera considéré en
santé) ;
2. la plupart des états pathologiques peuvent être considérés comme des manifestations de
la manière d’être au monde d’une personne (influence du stress, du deuil, de l’absence
de communication) ;
3. la manière d’être au monde de la personne, qui se manifeste finalement en tant que
pathologie, existait déjà avant le changement fonctionnel ou structurel appelé maladie ;
4. la disparition de la maladie ne détermine pas nécessairement un changement dans la
manière d’exister de la personne. La maladie est un message qui prévient de la nocivité
de son comportement ;
5. être malade représente pour la personne la seule manière d’être au monde et de faire le
point ;
6. la santé est le cheminement vers une augmentation de l’état de conscience, de lucidité
d’harmonie avec soi, avec les autres et avec la société dans laquelle la personne vit.

Lien entre Education et Santé


« L’éducation et la santé sont des notions proprement humaines qui ne font que rarement
l’objet de consensus quant à leur définition, et ce, car elles sont avant tout des notions
vulgaires plus que des concepts scientifiques. Les relations qu’elles entretiennent sont de
ce fait complexes et leurs articulations ressemblent vite à un puzzle géant de modèles
orientés idéologiquement, théoriquement ou normativement.» (Klein, 2010).
Descarpentries attache une fonction sociale à l’éducation. Participant aux valeurs
d’une société contemporaine l’École forme des citoyens responsables, autonomes et
libres de faire des choix pour favoriser le développement durable de la santé. Ainsi, la
fonction sociale de l’éducation rejoint celle de la santé et partage les enjeux du
développement d’une éducation pour la santé tout au long de la vie (Descarpentries, 2008).
Pour Eymard, la qualité même de ces liens soulève de nombreuses interrogations au sein du
monde de la recherche jusqu’à débattre des diverses appellations langagières qui
caractérisent l’éducation à la santé (« pour la santé », « en santé », etc.) et déterminent ainsi
le champ (sanitaire ? social ? scolaire ?) auquel elle appartient. Quant aux conceptions de la
santé, Eymard distingue trois modèles qui permettent d’établir un parallèle entre les
modèles de santé et ceux de l’éducation.
Pour la santé :
1. le modèle linéaire ou organiciste ou traditionnel de la santé ;
2. le modèle global de la santé ;
3. le modèle de la santé conçue comme l’existence d’un sujet responsable ouvert sur le
monde (centré sur un sujet autonome).
Pour l’éducation :
1. le modèle de l’instruction (transmettre une culture scientifique) ;
2. le modèle du développement du sujet (centré sur le sujet) ;
3. le modèle de l’interaction sociale (Savoir-être, relation du soi au monde).
Le croisement de ces modèles sert à caractériser des liens théoriques et concevoir
concrètement des modèles d’éducation à la santé. Par exemple, l’association des théories
organiciste et d’interaction sociale se traduirait par un modèle qui amènerait « le sujet à
s’interroger par lui-même dans une perspective de maîtrise de la non maladie, pour le
bien de soi et celui des autres » en « développant une conscience individuelle des
problèmes de lutte contre la maladie. » Bien sûr, modéliser la relation entre santé et
éducation n’incite pas forcément le récepteur à agir d’une certaine façon mais cela permet
à l’éducateur de définir une action éducative personnalisée en fonction du public et des
attentes ou besoins de celui-ci (Eymard, 2004).
Pour Eide et Showalter (2011), économistes américains, le lien empirique entre santé et
éducation (un niveau d’éducation élevé améliore la santé) a été clairement démontré mais
l’impact causal de la santé sur l’éducation, beaucoup moins. Leur étude s’attache à mettre
en valeur ces liens et en particulier à montrer comment le niveau de santé ou les
particularités physiques liées à la grossesse et la naissance de l’enfant ou de l’adolescent
influent sur le bon déroulement de son éducation (le poids et la taille, les chocs physiques
ou psychologiques, les conditions de santé des parents,…). Leur analyse va jusqu’à
examiner les relations entre le capital humain, la santé et le marché du travail.
A contrario, selon une étude de l’OCDE (2010), la santé des enfants agit sur leur éducation
mais l’inverse s’avère également vrai. La question est posée en ces termes : en quoi
l’éducation peut-elle contribuer à réduire les risques et les inégalités en matière de santé ?
En effet, diminuer les problèmes de santé publique et les inégalités qui s’y rattachent
devient une des priorités des politiques publiques (la santé coûte cher). L’étude
considère les effets de l’éducation, et leurs mécanismes, afin d’identifier les approches les
plus efficaces pour la promotion de la santé. Il manque aujourd’hui de données suffisantes
pour déterminer le niveau d’enseignement qui aura le plus de répercussions sur la santé.
Par ailleurs, les recherches et les enquêtes réalisées jusque-là (Meara, Richards, and
Cutler, 2008 ; Brønnum- Hansen et Baadsgaard, 2008 ; Fer- rie et al., 2009 ; Denney,
et al., 2010) indiquent une forte corrélation entre le niveau d’instruction et trois
indicateurs de santé (tabagisme, alcoolisme et obésité) qui se traduisent par une espérance
de vie supérieure (de 3 à 7 ans en moyenne pour des individus de 25-30 ans ayant suivi
des études supérieures aux États-Unis et au Danemark), l’écart continuant d’augmenter, de
30% en moyenne depuis 20 ans.
De plus, les compétences cognitives des individus, en général développées dans le
contexte scolaire (littératie, numératie en particulier) semblent réduire les risques
liés à une mauvaise hygiène de vie. Également les personnes possédant un niveau de
connaissances de base limité souffrent plus souvent et plus tôt de maladies chroniques,
respiratoires et coronariennes (Ferrie, et al., 2009). Ces éléments sont confirmés
dans une enquête canadienne qui estime qu’il existe une forte incidence entre le niveau
de scolarité et les problèmes de santé, en particulier quand il s’agit d’identifier et
d’utiliser les sources d’information concernant la santé publique. L’étude conclue que
trois Canadiens sur cinq (60 %) n’ont pas le niveau de littératie en santé nécessaire pour
gérer adéquatement leurs besoins en santé et en soins de santé (Conseil canadien sur
l’apprentissage, 2008).
Ces tendances sont confirmées dans l’article de Cutler et Lleras-Muney (2010) qui ont
analysé la relation comportements « sains »/niveau d’éducation, à partir de données nord-
américaines et britanniques. Ils montrent comment le niveau de revenu, le contexte
familial et le type de mutuelle d’assurance influent sur les comportements en matière de
santé avec un gradient de 30% : plus le niveau d’éducation est élevé, moins l’individu
risque de devenir alcoolique, de conduire dangereusement, de devenir obèse, de
fumer. Il va au contraire utiliser des moyens de préventions efficaces et habiter dans un
environnement sécurisé. Enfin, le niveau d’éducation augmente les compétences
cognitives qui à leur tour permettent de mieux comprendre les enjeux : tout le monde sait
que fumer est mauvais pour la santé mais certaines personnes le conçoivent plus que
d’autres.
Un rapport récent de l’Organisation Mondiale pour la Santé (Suhrcke et de Paz Nieves,
2011) propose une revue de littérature des recherches (entre 1995 et 2008) qui
questionnent la relation inverse et évaluent les liens entre une mauvaise santé pendant la
période prénatale et la petite enfance avec les performances scolaires, ou encore l’impact
des comportements non sains pendant l’adolescence avec le niveau d’éducation atteint
(dans les pays développés).

Promotion de la santé
La promotion de la santé « vise à donner aux individus davantage de maîtrise sur leur propre
santé et de moyens pour l’améliorer ». Elle considère l’ensemble des individus et les
interactions entre l’individu et son environnement (Jourdan, 2010). Elle est souvent confondue
avec l’éducation à la santé. Or, elle englobe à la fois « l’éducation à la santé et les mesures qui
permettent de changer l’environnement et la réglementation dans le sens d’une bonne santé et
a pour but de rendre plus accessible des choix plus sains » (Larue, 2000). Elle est définie dans
la charte d’Ottawa comme le processus qui confère aux populations les moyens d’assurer un
plus grand contrôle sur leur propre santé, et d’améliorer celle-ci (OMS, 1986). Cette charte
prévoit cinq axes de travail pour promouvoir la santé des populations (ibid):
1. élaborer des politiques publiques saines pour la santé (mesures législatives, financières
et fiscales et changements organisationnels, notamment);
2. créer des environnements favorables (principalement dans le domaine de l’énergie, de
l’urbanisation, des technologies, tout en préservant l’environnement);
3. renforcer l’action communautaire (elle passe par un accès total et permanent à
l’information et aux possibilités d’acquisition de connaissances concernant la santé);
4. réorienter les services de santé (elle implique le partage des tâches entre les particuliers,
les groupes communautaires, les professionnels de la santé, les établissements de
services, et les gouvernements);
5. acquérir des aptitudes individuelles (elle vise le développement individuel et social,
grâce à l’information, à l'éducation pour la santé et au perfectionnement des aptitudes
indispensables à la vie.

Dans ce but, elle souhaite donner aux individus plus de possibilités de contrôle de leur propre
santé et de leur environnement et les rend plus aptes à faire des choix judicieux. Elle s’envisage
dans le cadre scolaire, familial, professionnel et communautaire...En agissant simultanément
sur les aptitudes individuelles et sur l'environnement, la promotion de la santé s'inscrit dans une
approche écologique de la santé (Muller et Mairiaux, 2008).

L’éducation à la santé vise surtout à « aider les personnes à se construire une image positive
d’elles-mêmes et de leur santé. Elle repose sur des méthodes et techniques qui permettent
d’apporter l’information à l’individu sous une forme qui soit appropriable sans le stigmatiser ni
le culpabiliser. » (Tessier cité par Broussouloux et Houzelle-Marchal, 2006). L’éducation à la
santé aide les individus à mieux gérer leur santé, à faire des choix favorables à celle-ci et à les
maintenir à partir de leurs besoins, de leurs connaissances et de leurs savoir-faire. Dans ce but,
elle utilise des démarches éducatives, participatives et positives en s’attachant particulièrement
à développer les compétences psychosociales des individus. Broussouloux et Houzelle-Marchal
(2006) précisent que les compétences psychologiques renvoient:

1. à l’estime de soi : confiance en soi, sentiment de son efficacité personnelle, sentiment


que les autres ont confiance en nous;
2. au rapport au corps : compréhension des sensations provenant du corps (douleur,
plaisir…), expression physique des sentiments (colère, peur…), besoins physiologiques
(nourriture, sommeil…).
Pour ces mêmes auteurs, les compétences sociales renvoient :

1. aux relations aux autres : le respect, l’acceptation des différences et des règles de la
2. vie en société …;
3. à la gestion des conflits : privilégier le dialogue en cas de désaccord …;
4. à la confiance en son propre jugement : résister à l’influence des pairs, des médias

Il s’agit donc de « la capacité d’une personne à répondre avec efficacité aux exigences et aux
épreuves de la vie quotidienne. C’est l’aptitude d’une personne à maintenir un état de bien-être
mental, en adoptant un comportement approprié et positif, à l'occasion des relations entretenues
avec les autres, sa propre culture et son environnement… » (OMS cité par Sandrin Berthon,
1997, p.75).

Prévention
La prévention concerne l’ensemble des mesures sanitaires, techniques et éducatives destinées à
éviter l’apparition d’un problème de santé (prévention primaire), sa transformation en maladie
déclarée (prévention secondaire) ou sa récidive ou ses complications (prévention tertiaire). Elle
a pour objet la maladie et le risque, et renvoie à une conception particulière de la santé comme
absence de maladie. Comme telle, elle présente des avantages indéniables: le centrage sur un
problème à éviter ou à résoudre, la vision prospective (prévoir et prévenir), mais aussi des
limites importantes.
Le concept de prévention est très utilisé en santé publique. Ce concept se développe avec au
moins deux approches différentes (Broussouloux et Houzelle-Marchal, 2006). Selon une
première approche, l’OMS (1948), définit la prévention comme l’ensemble des mesures visant
à éviter, à réduire le nombre et la gravité des maladies et des accidents. Trois notions clés la
caractérisent :

1. le risque : probabilité de survenue d’un problème;


2. les facteurs de risque : facteurs jouant un rôle dans la genèse des pathologies (causalité
statistique);
3. le caractère évitable.

Selon cette première approche, trois niveaux de prévention sont définis (Broussouloux
Houzelle-Marchal, 2006; OMS, 1946):

1. primaire : éviter l’apparition des maladies;


2. secondaire : réduire le développement, diminuer la prévalence des maladies et des
accidents par le dépistage (stade infra clinique) et les actions curatives (premiers stades
cliniques);
3. tertiaire : réduire les conséquences des maladies et accidents et éviter les complications.

Cette première approche de la prévention est centrée sur la maladie et se limite à des mesures
qui sont en accord avec un modèle biomédical de la santé.
Dans une deuxième approche de la prévention, celle-ci est orientée selon les populations. Cette
deuxième approche est définie par Gordon en 1983. Il établit à l’instar de l’OMS une
classification de la prévention en trois parties. Cependant, là où l’OMS établissait une
distinction fondée sur le stade de la maladie, Gordon prend appui sur le concept de population
cible des actions de prévention. Il distingue : la prévention universelle, la prévention sélective
et la prévention ciblée (Gordon, 1983).

La prévention universelle est destinée à l’ensemble de la population, quel que soit son état de
santé. La prévention sélective s’exerce en direction de sous-groupes de population spécifiques
: automobilistes, jeunes, population défavorisée, etc. Ainsi, des campagnes telles que la
promotion de la ceinture de sécurité, la promotion de l’activité physique ou encore de la
contraception constituent des exemples d’actions de prévention sélective. La prévention ciblée
se centre sur certains sous-groupes de la population mais elle se focalise surtout sur l’existence
de facteurs de risque spécifiques à cette partie bien identifiée de la population.

Dans la perspective de Gordon, la prévention ne se centre pas sur les maladies mais sur des
types de population cible. Le rapport Flajolet (2007), propose une nouvelle définition de la
prévention, « la prévention globale », inspirée des travaux de Gordon et San Marco. La
prévention globale est entendue comme la gestion par l’individu de son capital santé. Elle
correspond, selon Flageolet (2007) à la gestion active et responsabilisée par la personne de son
capital santé dans tous les aspects de la vie. L’action de promotion de la santé, de prévention
des maladies ou d’éducation thérapeutique est déclenchée par un ou des professionnels. Une
participation active de la personne, ou du groupe ciblé, est systématiquement recherchée.
Quatre actions types sont retenues pour une «prévention globale» :

1. par les risques, qui est celle mise en œuvre actuellement et concerne le champ sanitaire;
2. par les populations, dans une logique d’éducation à la santé entendue globalement;
3. par les milieux de vie, qu’il s’agit de rendre sains et favorables;
4. par les territoires, pour bénéficier de la connaissance et de la proximité du terrain et des
populations.

Cette définition de la prévention s'éloigne fortement de l’approche de l’OMS et elle est


indissociable du concept de promotion de la santé.

Education pour la santé


L’éducation pour la santé est un processus qui consiste à créer avec les personnes et les groupes
les conditions du développement de leurs capacités vis à vis de la santé, valorisant leur
autonomie et leur responsabilité. C’est un concept de santé publique qui se place en promotion
de la santé, dans une approche de santé positive et globalisante, grâce notamment au
développement de compétences psychosociales. C’est un concept également utilisé dans
prévention, quelle qu’en soit l’approche. Il s’agit d’un acte d’accompagnement de l’homme pris
dans ses trois dimensions : de sujet individuel, désirant et contradictoire ; de sujet inséré dans
une culture qui le modèle et le contraint ; de sujet politique, collectivement responsable et à la
fois dépossédé des choix de société qui conditionnent la qualité de la vie.
L’éducation à la santé
L’éducation à la santé est un moyen développé par les acteurs de santé pour atteindre plusieurs
objectifs en santé publique. La santé publique étant considérée comme la somme des efforts
communautaires organisés pour la prévention des maladies et la promotion de la santé (Masse,
2003). La santé publique a pour priorités:

1. réduire les décès évitables et ainsi, augmenter l’espérance de vie;


2. réduire les incapacités évitables et ainsi améliorer la qualité de la vie notamment par
l’absence de maladie ou d’incapacité;
3. réduire les inégalités face à la santé.

L’éducation à la santé et la prévention sont très souvent confondues. Or, ce sont deux termes
différents. La prévention désigne les mesures nécessaires qui visent à éviter l’apparition de
maladies ou à dépister ces dernières à un stade précoce. Elle intègre alors la dimension de
facteurs de risque qui pousse une personne à agir, en vain, car elle se sent frustrée et,
généralement, ne tient finalement pas compte des recommandations (Broussouloux, 2006).
Selon Jourdan, l’éducation à la santé, quant à elle, prend en compte une dimension préventive
des conduites à risque à laquelle s’ajoute celle qui renvoie « au prendre soin de soi et des autres
». Par ailleurs, il est important de souligner la confusion existante entre « éducation à la santé
», où la préposition « à » réfère aux autres éducations comme l’éducation à l’environnement, et
« éducation pour la santé ». Ces locutions diffèrent par leur sens. La première fait référence à
la santé comme « un état à atteindre » et la seconde à « une dynamique permanente d’adaptation
de la personne », traitant « des représentations, normes, croyances et valeurs, en amont des
comportements et en s’appuyant sur l’anthropologie et la sociologie». Or, les seules
connaissances ne suffisent pas, il convient « d’insister sur la dimension éducative de cette
mission pour atteindre l’état de santé » (Broussouloux, 2006). L’école, la famille et les
partenaires de l’éducation en sont les principaux acteurs.

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