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HISTOIRE

Exposition nationale
Suisse, 1896
Affiches Camis, Paris

Colonisation

C. Emery
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CEm HIS
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Références

 LES FRESQUES DU FORUM. PALAIS DE LA PORTE DORÉE. [CONSULTÉ LE 30 JUILLET 2020]. DISPONIBLE À
L’ADRESSE : HTTPS://WWW.PALAIS-PORTEDOREE.FR/FR/LES-FRESQUES-DU-FORUM

 BERSTEIN, SERGE ET MILZA, PIERRE, 1996. HISTOIRE DU XIXE SIÈCLE. PARIS : HATIER, 538P.

 BERSTEIN, SERGE ET MILZA, PIERRE, 2017. HISTOIRE DU XXE SIÈCLE, 1900-1945. PARIS : HATIER,
556P.

 BERSTEIN, SERGE ET MILZA, PIERRE, 2017. HISTOIRE DU XXE SIÈCLE, 1945-1973. PARIS : HATIER,
543P.

 BOURGEOIS, CLAUDE, 1999. HISTOIRE GÉNÉRALE, L’ÉPOQUE CONTEMPORAINE. LAUSANNE : LEP. VOL. 4.

 CLERC, JEAN-BENOÎT, 2011. LE XIXE SIÈCLE. FRIBOURG. VOL. 2.

 KECHICHE, ABDELLATIF, 2010. VÉNUS NOIRE. BELGIQUE, FRANCE, TUNISIE : MK2.

 LEMARCHAND, PHILIPPE (DIR.), 1994. L’AFRIQUE ET L’EUROPE, ATLAS DU XXE SIÈCLE. BRUXELLES :
COMPLEXE. 252P.

 BAIROCH, PAUL, 1976. COMMERCE EXTÉRIEUR ET DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DE L’EUROPE. PARIS : MOUTON.
355P.

 FERRO, MARC, 1996. HISTOIRE DES COLONISATIONS. PARIS : SEUIL. 624P.

 FERRO, MARC, 2016. LA COLONISATION EXPLIQUÉE À TOUS. PARIS : SEUIL. 208P.

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Les historiens actuels et la colonisation

Ventilation géographique des destinations


(1840-1914)

Structure géographique des exportations


françaises (en %)
Europe Amérique Asie Afrique
1850 65 19 5 11
1910 69.5 14 3.5 13
 CLERC, 2011, p. 140

 BOURGEOIS, 1999, P. 748 Education

Investissements à l’étranger vers 1913 (en %)


Origine du capital
UK France All.
Europe 5.2 51.9 44
d’investissement

Am. du N 35.2 5.5 19.8


Am. du S 18.5 17.8 15.5
Afrique 12.3 9.9 8.6
Région

Asie 17.8 13.8 12.1


 BAIROCH, 1976, P. 104

 LEMARCHAND, 1994, P. 50

Exercice
1. Listez les arguments des acteurs de la colonisation.
2. Comparez ces arguments aux documents de cette page et inscrivez à côté de chaque argument de la liste 1 vos
observations faites sur la base des documents de cette page.
3. Selon vous, quel est la réelle motivation des acteurs de la colonisation ?

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Un détracteur de la colonisation

Créée en 1910, l’Afrique-Equatoriale regroupe les quatre colonies d’exploitation du Gabon, du Moyen-Congo, de
l’Oubangui-Chari et du Tchad. Elle est placée sous l’autorité d’un gouverneur général résidant à Brazzaville, au
Congo.
La ligne de chemin de fer du Congo-Océan est entreprise en 1921 et achevée en 1934. Elle relie le port de Pointe-
Noire sur l’océan Atlantique à Brazzaville sur le fleuve Congo. Elle est longue de 510 km.
Dans son ouvrage Terre d’ébène, le journaliste français Albert Londres témoigne des conditions de travail
observées sur le chantier du Congo-Océan. Il dénombre 17'000 morts.

Le drame du Congo-Océan
Un drame se joue ici. Il a pour titre Congo-Océan. […]

J’ai vu construire des chemins de fer ; on rencontre du matériel sur les chantiers. Ici, que du nègre ! Le nègre
remplaçait la machine, le camion, la grue ; pourquoi pas l’explosif aussi ?

Pour porter les barils de ciment de cent trois kilos, « les Batignoles1 » n’avaient pour tout matériel qu’un bâton et la
tête de deux nègres ! […]

Epuisés, maltraités […], blessés, amaigris, désolés, les nègres mouraient en masse. […]

Les huit mille hommes promis aux « Batignoles » ne furent bientôt plus que cinq mille, puis quatre mille, puis deux
mille. Puis dix- sept cents ! Il fallut remplacer les morts, recruter derechef. A ce moment, que se passa-t-il ?

Ceci : dès qu’un Blanc se mettait en route, un même cri se répandait : « La machine ! » Tous les nègres savaient que
le Blanc venait chercher des hommes pour le chemin de fer ; ils fuyaient. […] Nous nous mettions à la poursuite des
fugitifs. Nos tirailleurs les attrapaient au vol, au lasso, comme ils pouvaient ! Ils les canguaient2 ! ainsi qu’on le dit ici.
 LONDRES, ALBERT, 1929. TERRE D’ÉBÈNE. PARIS, ALBIN MICHEL

Ligne du Congo-Océan

Afrique-Equatoriale française
1
Il s’agit de la société des Batignoles, chargée de la construction de la ligne.
2
Cangue : carcan qui enserre le cou et les poignets des prisonniers.

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Les acteurs de la colonisation

Ferry et la colonisation
La politique coloniale s’impose tout d’abord aux nations qui doivent recourir à
l’immigration soit parce que leur population est pauvre, soit parce qu’elle est
exubérante trop nombreuse. Mais j’ai lu, dans les livres savants, des calculs qui
chiffrent la perte pour chaque colon qui s’en va et quitte la mère-patrie. Il y a donc
une contestation possible sur ce point. Il est évident, en effet, qu’un pays qui laisse
échapper un large flot d’émigration n’est pas un pays heureux, un pays riche, et ce
n’est pas un reproche à faire à la France, ni un outrage à lui adresser que de
remarquer qu’elle est de tous les pays de l’Europe celui qui a le moins d’émigrants.
Mais il n’y a pas que cet intérêt dans la colonisation.

La politique d’expansion coloniale s’est inspiré d’une vérité sur laquelle il faut
pourtant appeler votre attention: à savoir qu’une marine comme la nôtre ne peut se
passer, sur la surface des mers, d’abris solides, de défenses, de centres de J. Ferry (1832-1893)
ravitaillement. Et c’est pour cela qu’il nous fallait la Tunisie; c’est pour cela qu’il nous politicien français
fallait Saigon et la Cochinchine … Est-ce qu’ils i.e. les adversaires de la politique
coloniale laisseront d’autres que nous s’établir en Tunisie, … d’autres que nous de disputer les régions de l’Afrique
équatoriale. … Messieurs, dans l’Europe telle qu’elle est faite, dans cette concurrence de tant de rivaux que nous
voyons grandir autour de nous, la politique de recueillement ou d’abstention, c’est tout simplement le grand chemin
de la décadence! …

Les nations, au temps où nous sommes, ne sont grandes que par l’activité qu’elles développent; ce n’est pas par le
rayonnement pacifique des institutions qu’elles sont grandes à l’heure qu’il est. Rayonner sans agir, sans se mêler
des affaires du mondes, … c’est abdiquer, et dans un temps plus court que vous ne pouvez le croire, c’est
descendre du premier rang au troisième ou au quatrième. Si la France veut rester un grand pays, exerçant sur les
destinées de l’Europe toute l’influence qui lui appartient, il faut qu’elle répande partout où elle le peut, sa langue,
ses mœurs, son drapeau, ses armes et son génie.

Les colonies sont, pour les pays riches, un placement de capitaux des plus avantageux. L’illustre Stuart Mill a
consacré un chapitre de son ouvrage à faire cette démonstration, et il le résume ainsi: « pour les pays vieux et riches,
la colonisation est une des meilleures affaires auxquelles ils puissent se livrer ». Je dis que la France, qui a toujours
regorgé de capitaux et en a exporté des quantités considérables à l’étranger—c’est par milliards, en effet, qu’on peut
compter les exportations de capitaux faites par ce grand pays qui est si riche—, je dis que la France a intérêt à
considérer ce côté de la question coloniale. Mais, messieurs, il y a un autre côté plus important de cette question,
qui domine de beaucoup celui auquel je viens de toucher. La question coloniale, c’est pour les pays voués par la
nature même de leur industrie à une grande exportation, comme la nôtre, la question même des débouchés... A ce
point de vue, je le répète, la fondation d’une colonie, c’est la création d’un débouché. L’expérience démontre en
effet, qu’il suffit... interruption à droite.

Messieurs, à ce point de vue particulier, mais de la plus haute importance, au temps où nous sommes et dans la crise
que traversent toutes les industries européennes, la fondation d’une colonie, c’est la création d’un débouché. On a
remarqué, en effet, et les exemples abondent dans l’histoire économique des peuples modernes, qu’il suffit que le
lien colonial subsiste entre la mère patrie qui produit et les colonies qu’elle a fondées, pour que la prédominance
économique accompagne et subisse, en quelque sorte, la prédominance politique.

 JULES FERRY, DISCOURS À LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS DU 28 JUILLET 1885

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Les acteurs de la colonisation

Léopold II et la colonisation
Le sujet qui nous réunit aujourd’hui est de ceux qui méritent au premier chef d’occuper les
amis de l’humanité. Ouvrir à la civilisation la seule partie de notre globe où elle n’ait point
encore pénétré, percer les ténèbres qui enveloppent des populations entières, c’est, j’ose le
dire, une croisade digne de ce siècle de progrès; et je suis heureux de constater combien le
sentiment public est favorable à son accomplissement; le courant est avec nous.

Messieurs, parmi ceux qui ont le plus étudié l’Afrique, bon nombre ont été amenés à penser
qu’il y aurait avantage pour le but commun qu’ils poursuivent à ce que l’on pût se réunir et
conférer en vue de régler la marche, de combiner les efforts, de tirer parti de toutes les
ressources, d’éviter les doubles emplois.

Il m’a paru que la Belgique, État central et neutre, serait un terrain bien choisi pour une
Léopold II (1835- semblable réunion … Je serais heureux que Bruxelles devînt en quelque sorte le quartier
1909)
général de ce mouvement civilisateur. Je me suis donc laissé aller à croire qu’il pourrait
Roi des Belges entrer dans vos convenances de venir discuter et préciser en commun, avec l’autorité qui
vous appartient, les voies à suivre, les moyens à employer pour planter définitivement l’étendard de la civilisation
sur le sol de l’Afrique centrale; de convenir de ce qu’il y aurait à faire pour intéresser le public à votre noble
entreprise et pour l’amener à y verser son obole.
 LÉOPOLD II, ANNALES PARLEMENTAIRES, 1890

L’histoire enseigne que les pays à territoire restreint ont un intérêt moral et matériel à rayonner au delà de leurs
étroites frontières... Plus que nulle autre, une nation manufacturière et commerçante comme la nôtre doit s’efforcer
d’assurer les débouchés à tous ses travailleurs, à ceux de la pensée, du capital et des mains. Ces préoccupations
patriotiques ont dominé ma vie. Ce sont elles qui ont déterminé la création de l’œuvre africaine.

Mes peines n’ont pas été stériles: un jeune et vaste Etat, dirigé de Bruxelles, a pris pacifiquement place au soleil
grâce à l’appui bienveillant des puissances, qui ont applaudi à ses débuts. Des Belges l’administrent, tandis que
d’autres compatriotes, chaque jour plus nombreux, y font déjà fructifier leurs capitaux. L’immense réseau fluvial du
Congo supérieur ouvre à nos efforts des voies de communication rapides et économiques qui permettent de
pénétrer directement jusqu’au centre du continent africain. La construction du chemin de fer de la région des
cataractes, désormais assurée grâce au vote récent de la législature, accroîtra notablement ces facilités d’accès. Dans
ces conditions un grand avenir est réservé au Congo, dont l’immense valeur va prochainement éclater à tous les
yeux.
 LÉOPOLD II, DISCOURS D’OUVERTURE DE LA CONFÉRENCE DE BRUXELLES, 1876

Chamberlain et la colonisation
Une nation est comme un individu: elle a ses devoirs à remplir et nous ne pouvons pas
déserter nos devoirs envers tant de peuples remis à notre tutelle. C’est notre domination
qui, seule, peut assurer la paix, la sécurité et la richesse à tant de malheureux qui, jamais
auparavant, ne connurent ces bienfaits. Et c’est en achevant cette œuvre civilisatrice que
nous remplissons notre mission nationale, pour l’éternel profit des peuples à l’ombre de
notre sceptre impérial.
 JOSEPH CHAMBERLAIN, DISCOURS, 1895 J. Chamberlain
(1836-1914)
Ministre des
Colonies, UK

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Les acteurs de la colonisation

Rhodes et la colonisation
J’étais hier dans l’East-End quartier ouvrier de Londres, et j’ai assisté à une réunion de sans-
travail. J’ai entendu des discours forcenés. Ce n’était qu’un cri: du pain! Du pain! Revivant
toute la scène en rentrant chez moi, je me sentis encore plus convaincu qu’avant de
l’importance de l’impérialisme …. L’idée qui me tient le plus à cœur, c’est la solution au
problème social, à savoir: pour sauver les quarante millions d’habitants du Royaume-Uni
d’une guerre civile meurtrière, nous les colonisateurs, devons conquérir des terres nouvelles
afin d’y installer l’excédent de notre population, d’y trouver de nouveaux débouchés pour les
produits de nos fabriques et de nos mines. L’Empire, ai-je toujours dit, est une question de
ventre. Si vous voulez éviter la guerre civile, il faut devenir impérialistes. CJ Rhodes
(1853-1902)
 CECIL JOHN RHODES, INTERVIEW PAR STEAD, 1895
Premier
Ministre de la
colonie du Cap
Leroy-Beaulieu et la colonisation (Afrique du
Sud), UK
Enfin une grande partie du monde appartient à des tribus barbares ou
sauvages, les unes adonnées à des guerres sans fin et à des coutumes meurtrières; les autres
connaissent si peu les arts, ayant si peu l’habitude du travail et de l’invention, qu’elles ne savent
tirer aucun parti du sol et des richesses naturelles, et qu’elles vivent misérables, par petits
groupes disséminés, sur des territoires énormes qui pourraient nourrir à l’aise des peuples
nombreux. Cette situation du globe et de ses habitants implique pour les peuples civilisés le
droit à une intervention, dont le caractère et l’intensité peuvent varier. Il n’est ni naturel ni
juste que les civilisés occidentaux s’entassent indéfiniment et étouffent dans les espaces
Leroy-Beaulieu restreints qui furent leur première demeure, qu’ils y accumulent les merveilles des sciences,
(1843-1916)
des arts, de la civilisation, qu’ils voient, faute d’emplois rémunérateur, le taux de l’intérêt des
Economiste capitaux tomber chez eux chaque jour davantage – la colonisation est l’un des moyens de
français
prévenir, par l’ouverture de nouveaux emplois aux capitaux, la rapidité de cet avilissement de
l’intérêt et ce n’est pas l’un de ses moindres bienfaits, quoiqu’aucun écrivain ne l’ait jusqu’ici signalé-, et qu’ils
laissent la moitié peut-être du monde à de petits groupes d’hommes ignorants, impuissants, vrais enfants débiles,
clairsemés sur des superficies incommensurables, ou bien à des populations décrépites, sans énergie, sans direction,
vrais vieillards incapables de tout effort, de toute action combinée et prévoyante. … En ce qui concerne
notamment les immenses territoires occupés par de petites tribus sauvages ou barbares, clairsemées, presque sans
développement intellectuel et sans organisation civile, il est certain que le rôle d’instructeurs et de guides qui
incombe aux peuples civilisés est tracé par la nature même des choses. Il est des pays où il semble que la civilisation,
à savoir la domination de l’homme sur lui-même et sur la matière, l’esprit d’entreprise et la discipline, le sens de la
capitalisation et l’aptitude aux inventions, ne peut se développer spontanément. … Il y a une certitude, c’est que
dans ces pays la civilisation doit être importée de l’extérieur. … La colonisation est une éducation des peuples
inférieurs par les peuples supérieurs ….

J’ai montré que cette assimilation était fausse. La colonisation comporte bien autre chose que la vente ou l’achat de
marchandises; elle entraîne une action profonde sur un peuple et sur un territoire, pour donner aux habitants une
certaine éducation, une justice régulière, leur enseignement, quand ils l’ignorent, la division du travail, l’emploi des
capitaux; elle ouvre un champ non seulement aux marchandises de la mère patrie, mais à ses capitaux et à ses
épargnes, à ses ingénieurs, à ses contremaîtres, à son émigration soit des masses, soit de l’élite. Une transformation
de ce genre d’un pays barbare ne peut s’effectuer par de simples relations commerciales. … Dans ces conditions, la
colonisation, au moment de l’histoire du monde où j’écris, rentre dans la mission des grands États occidentaux.
 PAUL LEROY-BEAULIEU, DE LA COLONISATION CHEZ LES PEUPLES MODERNES, 1874

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Histoire et actualité

D'emblématiques déboulonnements de statues par les antiracistes


La destruction de statues de figures historiques et politiques, comme celle d'un marchand d'esclaves par des
manifestants à Bristol (Royaume-Uni), est un symbole de libération ou de rébellion qui compte de nombreux
précédents dans le monde. A Neuchâtel, un collectif veut faire disparaître la statue de David de Pury.

Dimanche, lors d'une manifestation contre le racisme et en hommage à George Floyd – un Afro-Américain tué fin
mai par un policier blanc aux Etats-Unis – la statue d'Edward Colston, marchand d'esclaves de la fin du XVII e siècle
qui a financé de nombreuses institutions de Bristol, a été jetée à l'eau.

Le célèbre street-artist Banksy a émis l'idée que le piédestal de la statue de Colston soit réutilisé afin de marquer
l'événement.

Sur Instagram, il a proposé que son cadavre de métal soit repêché du port et réinstallé d'une façon particulière: "On
attache un câble autour de son cou et on fait faire des statues de bronze grandeur nature des manifestants en train
de le faire tomber. Tout le monde est content. Un jour grandiose commémoré", écrit-il facétieux sur le réseau social.

Cet acte a fait des émules ailleurs au Royaume-Uni. A Londres, dans le quartier des
Docklands, près des gratte-ciel du quartier d'affaires de Canary Wharf, la statue du
marchand esclavagiste Robert Milligan (XVII e-XVIIIe siècle) a été enlevée au moyen
d'un engin de chantier sous des applaudissements, selon une vidéo postée sur Twitter
par le conseil de Tower Hamlets: "Nous devons (...) parler de ce que nous pouvons
apprendre de ceci et comment ces événements peuvent rendre notre communauté
plus forte", a commenté le maire travailliste John Biggs.

Au Pays de Galles, des campagnes ont été lancées contre les monuments rendant hommage à un général de l'armée
britannique qui avait combattu lors des guerres napoléoniennes, Thomas Picton, tristement célèbre pour son
traitement des esclaves dans les Caraïbes.

A Edimbourg, en Ecosse, la statue de l'homme politique Henry Dundas, qui a œuvré pour retarder l'abolition de
l'esclavage, pose question. Comme à Oxford, des élus locaux de Cardiff et Edimbourg se sont prononcés en faveur du
retrait de ces monuments.

Léopold II, le pilleur du Congo


La mort de George Floyd a relancé le débat sur les violences de la colonisation belge au Congo et la responsabilité du
roi Léopold II, dont les statues sont la cible de la colère des militants antiracistes.

Mardi à Anvers (nord), une de ces statues a même été retirée d'un square, après avoir été vandalisée pour être
transportée dans les réserves du Musée Middelheim, où son état doit être "examiné", selon le musée anversois.

Elle restera "probablement" dans les collections de l'établissement, connu pour ses sculptures en plein air, a affirmé
pour sa part Johan Vermant, porte-parole du maire de la cité portuaire Bart De Wever.

La statue du roi avec sa longue barbe et sa veste à épaulettes a été vandalisée la semaine dernière, comme plusieurs
autres à travers le pays. Elle a été partiellement incendiée et recouverte de peinture rouge, couleur symbolisant le
sang versé par les Congolais.

Cette série de dégradations n'a pas été revendiquée mais elle survient sur fond de mobilisation en hommage à
George Floyd, et au moment où plusieurs pétitions initiées par des Belges d'origine africaine exigent le retrait des
statues de Léopold II.

Surnommé "le roi bâtisseur", celui qui a régné de 1865 à 1909 est "un héros pour certains, mais aussi un bourreau",
"il a tué plus de dix millions de Congolais", a accusé le groupe "Réparons l'Histoire", dont la pétition concernant les
statues de Bruxelles a recueilli mercredi à 16h presque 70'000 signatures.

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Pour les experts, cette mobilisation est le signe d'une soif de vérité sur ce que fut réellement l'occupation du Congo
jusqu'à l'indépendance de 1960, car le débat avance "trop lentement" en Belgique.

Dimanche à Bruxelles une manifestation contre le racisme sous le mot d'ordre "Black Lives Matter" (les vies des
Noirs comptent) avait rassemblé 10'000 personnes selon la police.

David de Pury et Neuchâtel


A Neuchâtel, près de 1200 signatures ont déjà été récoltées mercredi matin pour faire disparaître la statue de David
de Pury, qui avait fait fortune du temps de l'esclavage.

Le négociant a légué des centaines de millions à la Ville, qui ont permis la construction de nombreux bâtiments...
Mais lui rendre hommage aujourd'hui, ce n'est plus acceptable aux yeux de ces activistes.

Le collectif à l'origine de la pétition demande le remplacement de la statue par une plaque commémorative en
hommage aux victimes de racisme. La Ville de Neuchâtel se dit ouverte au dialogue.

Un débat similaire qui avait déjà eu lieu à Neuchâtel, alors que la ville renommait l'espace Louis Agassiz, glaciologue
aussi connu pour ses thèses racistes, en espace Tilo Frey, première Neuchâteloise sous la Coupole fédérale.

Des Confédérés déjà déboulonnés


Lors de l'été 2017, plusieurs statues de soldat de la Confédération des Etats du sud des Etats-Unis – qui défendaient
l'esclavagisme lors de la guerre de Sécession – sont renversées au grand dam de Donald Trump.

Le 12 août, une femme meurt à Charlottesville dans une attaque à la voiture-bélier conduite par un néo-nazi
s'opposant au déboulonnage d'une statue confédérée.

A Durham (Caroline du Nord), à Gaineville (Floride), Baltimore (Maryland) à la Nouvelle-Orléans (Louisiane) ou


encore à Austin (Texas), plusieurs statues érigées en l'honneur de généraux esclavagistes sont démolies les jours
suivants.

Même scénario samedi dernier à Richmond (Virginie) où la statue de Williams Carter Wikham, un autre général des
Confédérés, est mise à terre et taguée lors d'une manifestation contre les violences policières.

Christophe Colomb décapité


Une statue de Christophe Colomb a été décapitée à Boston, une autre vandalisée à Miami et une troisième jetée
dans un lac en Virginie.

La statue de Boston avait déjà été vandalisée auparavant, l'image de Christophe Colomb étant contestée aux Etats-
Unis depuis plusieurs années.

Le navigateur génois, longtemps présenté comme le "découvreur de l'Amérique", est désormais souvent considéré
comme une des figures du génocide des Amérindiens et des indigènes en général.

Il est dénoncé au même titre que les esclavagistes ou les généraux confédérés pendant la guerre de Sécession.

Des dizaines de villes américaines ont remplacé la célébration en octobre de "Columbus Day" – devenu jour férié
fédéral en 1937 – par une journée d'hommage aux "peuples indigènes". Mais pas Boston ni New York, qui comptent
de fortes communautés d'origine italienne auxquelles cette journée rend hommage.

D'autres déboulonnages historiques


Le 9 avril 2003, une centaine d'Irakiens épaulés par un blindé américain font chuter la statue de Saddam Hussein,
matérialisant la chute d'un régime dictatorial en place depuis 24 ans.

Le 25 mars 2011, une statue du président syrien défunt, Hafez al-Assad, est déboulonnée à Deraa. Près de 300
jeunes scandant des slogans hostiles au régime montent dessus, marquant le début du Printemps arabe syrien.

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Le 18 mars 2018, les combattants de l'offensive turque dans l'enclave kurde d'Afrine concentrent leur colère sur un
homme hors du commun: Kawa le forgeron, héros mythologique adulé par les Kurdes, dont la statue est
déboulonnée.

Le 17 novembre 1989, les habitants de Varsovie applaudissent l'explosion d'une statue de Felix Dzerjinski, le
fondateur de la Tcheka, ancêtre du KGB, et s'en partagent des fragments comme souvenirs de la chute du
communisme en Pologne.

Après la chute de Ceausescu, la Roumanie se débarrasse elle aussi des symboles de domination soviétique, en
démembrant en mars 1990 la statue de Lénine qui surplombait la place de l'Etoile de Bucarest.

Une autre statue de Felix Dzerjinski est déboulonnée le 22 août 1991, à Moscou cette fois place de la Loubianka,
devant le siège du KGB.

En Géorgie, il faut attendre 2010 pour que la statue de six mètres de haut de Staline soit déboulonnée en catimini,
de nuit, dans sa ville natale de Gori, où elle se trouvait depuis 1952. Mais le conseil municipal décide de la réinstaller
en 2013, devant le musée de la ville.

Le 8 décembre 2013 en Ukraine, une trentaine de manifestants renversent une statue de Lénine. En 2015, le
nouveau gouvernement interdit les monuments à la gloire de responsables soviétiques, qui sont démontés.

Le 23 mai 2020, deux statues de Victor Schoelcher ont été renversées en Martinique par des militants anti-béké et
hostiles à l'héritage colonial. Ces hommages à celui qui avait décrété l'abolition de l'esclavage le 27 avril 1848
empêchent, pour certains opposants, la reconnaissance des héros locaux de l'abolition.

 JACQUET, STÉPHANIE, 2020, HTTPS://WWW.RTS.CH/INFO/MONDE/11390296-DEMBLEMATIQUES-DEBOULONNEMENTS-


DE-STATUES-PAR-LES-ANTIRACISTES.HTML

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