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premiers chrétiens, éd. Labor & Fides, Genève, 1990, p. 17) : « Parabole d’un roi qui invita ses serviteurs à un banquet, mais sans
leur fixer un temps précis. Les sages parmi eux s’habillèrent et s’assirent à l’entrée du palais, disant : manque-t-il quelque chose dans
la maison du roi ? Les insensés parmi eux allèrent à leur travail en disant : Y a-t-il un banquet sans longue préparation ? Soudain, le
roi fit appeler ses serviteurs. Les sages se présentèrent devant lui comme ils étaient, bien habillés, et les insensés comme ils étaient –
sales ! Le roi se réjouit à la vue des sages et s’emporta contre les insensés. Il dit : Ceux qui sont habillés pour le banquet, qu’ils
s’assoient, qu’ils mangent et qu’ils boivent ; mais ceux qui ne se sont pas préparés pour le banquet, qu’ils restent debout et
regardent ! » (Mishna, traité Shabbat, 153a)
2
le perçoit pas – s'adressent aux disciples, et non à la foule indifférente, avide de se trouver un messie à la
mesure de ses aspirations charnelles. Elles parlent d’un Royaume paradoxal, dont la description était peu
propice à attirer les foules. Il y a effectivement un mystère du Royaume (c’est-à-dire qui ne découle pas
d’une observation ou d’une réflexion humaine, mais d’une révélation offerte à la foi).
Faut-il alors partager les paraboles en deux catégories : les paraboles d’"accrochage"et les paraboles
à usage interne qui seules seraient concernées par la troublante parole de Mc 4 ? Ce serait trop simplifier le
problème. Il est préférable de reconnaître que toute parabole est un récit que certains se contenteront
d’écouter comme une petite histoire touchante ou dramatique, sans approfondir ni se sentir interpellé
personnellement. Mais aussi toute parabole est destinée à déclencher une prise de conscience chez ceux qui
le veulent bien, une prise de conscience qui va les mener plus loin. Le profit qu’on tire d’une parabole est
toujours proportionnel au travail de réflexion et de remise en question qu’on est prêt à fournir. Avec la
parabole, plus encore qu’avec n’importe quel autre texte biblique, la superficialité et le refus de se laisser
prendre à partie condamne à repartir les mains vides. On pourrait aujourd’hui faire plus ou moins la même
remarque avec les cantates de Bach, les Gospels ou toute autre musique chrétienne : certains se contentent de
goûter une musique dont la tonalité ou le rythme leur plait, alors que d’autres y découvrent un message qui
les touche au plus profond de leur conscience. La parole de s. Augustin s’applique particulièrement aux
paraboles : « Crois pour comprendre ».
Le pasteur Alphonse Maillot apporte une utile clarification à cette question : « Ecartons le contresens
habituel et si néfaste selon lequel les paraboles sont des messages simplifiés du Christ, des paroles pour (...)
sous-développés spirituels. Marc 4.10 est péremptoire : la parabole est difficile, en tout cas inattendue. Son
vrai sens est réservé, non pas à l'intellectuel, mais au croyant. La parabole dissimule plus qu'elle ne révèle.
Plus exactement, d'abord elle dissimule la Parole de Dieu, pour mieux la révéler ensuite. Certes par elle Jésus
entend nous faire aller plus avant dans le mystère du Royaume de Dieu. Mais ce mystère est justement celui
qui est caché à l'homme naturel, fût-il le plus grand des philosophes et le plus avisé des savants. (...) Lorsque
Jésus a voulu nous faire entrer le plus loin possible dans le mystère de Dieu et le mystère de l'homme, il a
employé la parabole. Dans le fond, il ne connaît guère d'autre genre théologique que celui-ci. Alors que nous,
nous faisons de gros livres, employons des mots compliqués avec des phrases obscures, Jésus, quand il
faisait de la théologie, se contentait de nous raconter une histoire fort banale, mais infiniment plus riche que
nos livres les plus savants et les plus pesants. Si les paraboles sont "difficiles", c'est qu'elles vont séparer, non
pas les doués des imbéciles, mais les croyants des incroyants. Ce ne sont pas les plus malins qui vont
comprendre, mais les plus confiants4. »
Quant à la phrase très dure : « De peur qu’ils ne se convertissent et qu’il ne leur soit pardonné » elle
reste difficile et ce n’est pas en essayant d’en atténuer le sens en remplaçant "de peur que " par un terme plus
gentil qu’on va résoudre le problème ! Faut-il y voir une allusion au fait qu’Israël devait, selon le plan de
Dieu, rejeter son Messie, et que par conséquent Jésus a fait en sorte qu’ils ne se convertissent pas ? Pour ma
part, j’écarte cette hypothèse, incompatible avec trop de passages des Evangiles (à commencer par les larmes
de Jésus devant Jérusalem endurcie). N’est-ce pas plutôt parce que Jésus ne veut pas de conversion au rabais,
simple adhésion à la prédication éloquente d’un rabbi messianique décrivant le monde merveilleux et
séduisant que serait le Royaume de Dieu (ou les bénédictions et la prospérité terrestre que procurerait
l’Evangile…) – et cela sans un « cœur brisé et contrit » (Ps 51), sans obéissance ni intelligence renouvelée.
Cette parole, en tout cas, nous met en garde contre une forme de publicité démagogique pour la conversion,
motivée par l’attrait de statistiques flatteuses. Ainsi, même si elle reste déroutante, elle nous rend attentifs au
fait que l’homme naturel est retors, et qu’il parvient à s’emparer de la Parole de Dieu pour en faire un moyen
d’échapper à Dieu. Ce fut, dans l’histoire d’Israël, le cas de la loi, des sacrifices, de la royauté.
La parabole parle du Royaume, du Dieu du Royaume, de l’éthique du Royaume. Or le Royaume
n'est pas de ce monde. Ce qui ne veut pas dire qu’il est d'ailleurs, à l’horizon lointain ! Mais qu’il est
nouveau, autre. Paradoxal pour notre monde dénaturé. Ainsi, la parabole doit étonner. Elle n'est pas une
comparaison qui rendrait crédible une vérité invisible en montrant sa ressemblance avec une réalité visible
analogue. Au contraire ! Plutôt que comparaison, elle est métaphore. Elle remplace un élément par un autre
pour créer une dissonance, pour provoquer un choc qui oblige à regarder plus loin. La parabole n'argumente
pas, elle n'est pas démonstration logique. Elle est "image fracturée" qui nous fait regarder le monde
autrement. Ainsi la parabole ne fait pas appel au bon sens, au sens commun ; elle ne nous transporte pas non
plus dans le monde de l'apocalyptique qui dévoile l'au-delà au moyen du langage symbolique. Elle inscrit
dans ce monde le changement que provoque la proximité (cachée) du Royaume. En cela, Jésus est la
parabole par excellence5 !
4
Les Paraboles de Jésus aujourd’hui, Labor & Fides, Genève, 1973, p. 10s.
5
Ce paragraphe s’inspire de Marguerat, op. cit., p. 26-30.
3
Interprétation des paraboles
Sans entrer dans les détails, signalons qu’à part quelques cas (comme la parabole des quatre terrains, ou celle
de l’ivraie, interprétées par Jésus lui-même, Mt 13.1-9, 18-23 ; 24-30, 36-43), les paraboles ne sont pas des
allégories, où chaque élément a un sens en lui-même qui doit être décodé, transposé. (pour illustrer ce qu’est
une allégorie, on peut citer Ep 6.13-17, l’armure du chrétien selon l’apôtre Paul, ou les figures de Sara et
d’Agar, d’Isaac et Ismaël, dans Galates 4.21-30).
Interpréter les paraboles selon une méthode allégorique révèle plus l’imagination du prédicateur que
la vérité biblique ! Les Pères de l’Eglise ont souvent adopté cette méthode, soit pour l’Ancien Testament
(typologie parfois forcée) soit pour des paraboles, comme s. Augustin à propos de celle du bon Samaritain :
l’homme qui tombe aux mains des brigands, c’est, pour Augustin, Adam. Jérusalem, la cité céleste qu’il
n’aurait jamais dû quitter, et Jéricho le monde déchu et mortel. Les brigands, ce sont Satan et les démons qui
dépouillent l’homme de sa vie spirituelle et le roulent dans le péché et la mort. Le prêtre qui passe outre,
c’est la loi, le lévite, les prophètes. Le Samaritain, c’est Jésus ; son âne est son corps portant notre misère.
Panser la blessure, c’est dompter le péché, l’huile est l’espérance, le vin la ferveur. L’auberge, c’est l’Eglise,
l’aubergiste l’apôtre Paul, les deux deniers, la promesse de cette vie et de la vie future. La promesse du
retour du Samaritain c’est l’avènement du Christ. Sans doute, ce que dit Augustin concerne des vérités
spirituelles bonnes à entendre, mais cela n’a rien à voir avec la parabole, et passe à côté de l’enseignement
fondamental de l’amour du prochain qu’il s’agit d’entendre ! Cela prouve que l’interprétation allégorique est
une méthode étrangère au "genre littéraire" qu’est la parabole.
La parabole proprement dite est un récit figuratif dont le sens apparaît quand on le considère comme
un tout. Les détails sont au service de l'ensemble du "scénario", et non pour symboliser en eux-mêmes
quelque chose ou quelqu'un. Ces détails campent un décor vivant et vraisemblable, et vont créer une
atmosphère au service du message de la parabole. Ainsi, pour la parabole du bon Samaritain (Lc 10.25-37) :
huile et vin, monture, deniers donnés à l'aubergiste et promesse de revenir payer les frais supplémentaires ne
sont pas des éléments superflus, mais montrent une qualité d'amour qui illustre l'"extraordinaire" démontré
dans l'œuvre de Christ pour nous et l’"extraordinaire" (selon Mt 5.47) auquel sont appelés les fils du
Royaume que nous sommes. La parabole de l’économe infidèle (ou du gérant habile), Luc 16.1-13, serait
plutôt immorale si on s’attachait aux détails pour conclure que l’habileté valait mieux que l’honnêteté ! Le
juge impitoyable que la veuve supplie (« Qui ne craignait pas Dieu et n’avait d’égard pour personne », Luc
18.1-8) ne peut symboliser le Dieu auquel nous adressons nos supplications ! L’idée est donc que si nous
pensons qu’un juge corrompu et cynique finit quand même par accéder à la demande insistante de la veuve,
penser qu’il ne vaut pas la peine de persévérer dans la prière serait avoir de Dieu une image pire que celle de
ce juge !! Dodd conclut. « Il faut juger la situation imaginée et non pas déchiffrer les divers éléments du
récit6. » Il dit aussi (p. 21) : « La parabole (…) présente un seul point de comparaison. Les détails ne sont pas
là pour avoir une signification indépendante. »
Ainsi, il ne s’agit donc pas de déchiffrer chaque élément d'une parabole, mais nous demander où est
sa pointe, son point de contact avec une réalité spirituelle qu'elle éclaire. C’est en appréciant l'ensemble de
la situation décrite par le récit, qu’on peut en tirer un enseignement doctrinal ou éthique. « Une parabole sert
à faire passer essentiellement une vérité unique plutôt qu’un ensemble de vérités.7 » Et la force de la parabole
se cache souvent dans son élément insolite. Il n'est pas étonnant qu'elles nous étonnent, car elles présentent
l'irruption, dans des scènes de la vie quotidienne, d'une autre dimension. Elles sonnent aussi souvent comme
des avertissements sévères.
Mais il ne faut pas appliquer cette règle avec une rigidité excessive. Certains détails peuvent être
significatifs dans la mesure où ils sont mis en rapport avec la leçon globale de la parabole. La parabole des
quatre terrains (Mt 13.3-9), dans l’optique de Matthieu 13 (le mystère du Royaume), véhicule une idée-force
: toutes les graines ont le même potentiel de fertilité extraordinaire (celle qui tombe dans les ronces n’est pas
moins fertile que celle qui tombe dans la bonne terre !). Mais cette puissance de vie mystérieuse est
finalement livrée à l’accueil ou au refus de l’auditeur. L’échec (apparent) de la prédication de Jésus ne met
nullement en cause la puissance de sa Parole, mais la dureté de cœur de ceux qui l’écoutent. L’aspect
allégorique de l’interprétation que Jésus donne (v. 18-23), visant la dureté de cœur, la superficialité, les
soucis de la vie, nous interpellent quant à notre accueil de la Parole de Dieu et à l’impact qu’elle peut avoir
dans la vie de celui qui l’accueille avec un cœur droit et sincère. Mais c’est la semence plutôt que l’auditeur
qui constitue la Bonne Nouvelle au cœur de cette parabole.
6
Op. cit., p. 25
7
G.E. Ladd, Théologie du Nouveau Testament, édition révisée, Excelsis, 1999, p. 101.
4
En conclusion
Différentes tentatives ont été faites pour essayer de "classer" les paraboles en différentes catégories, selon le
thème et le but visé. Dans ce cas, il faut être très attentif au contexte rédactionnel immédiat dans lequel elle
s’insère. Cela apparaît clairement dans le cas des trois paraboles de Luc 15. Les v. 1-2 nous alertent sur
l’intention de Jésus et sur les destinataires des trois paraboles – et on remarque que Jésus s’adresse en fait à
des "fils aînés" plutôt qu’à des "prodigues". D’une façon générale, les paraboles de l’évangile de Luc ont un
caractère plutôt personnel et vise le comportement moral des auditeurs. Elles mettent l’accent sur la grâce de
Dieu et sur les fruits qu’elle doit porter dans la vie de chacun. Les paraboles de Matthieu sont plutôt centrées
sur Dieu lui-même, sur son autorité, sur la venue de son règne, donc sur le jugement et la responsabilité qui
échoit aux hommes de se préparer à cette échéance.
On peut suggérer des groupes de paraboles sous les rubriques suivantes :
Paraboles d’invitation
Paraboles révélant le mystère du Royaume de Dieu
Parabole visant un but éthique
Paraboles polémiques
Paraboles de vigilance
Mais dans presque tous les cas, la priorité va à la révélation du caractère et du dessein de Dieu, sa
grâce, son appel sans frontière, son jugement, son droit à nous faire rendre compte de notre vie et de notre
comportement.
Les paraboles présentent souvent une paire de deux personnes dont les attitudes différentes mettent
en relief un enseignement éthique (les deux fils, le prodigue et l’aîné, le pharisien et le péager, le riche et
Lazare). Il arrive aussi que les paraboles se présentent par paires, proches dans leur contenu sans pour autant
faire double emploi : drachme et brebis perdues, grain de sénevé et levain ; trésor et perle ; ivraie et filet de
pêche. Il y a aussi des paraboles qui ont été reprises par Jésus avec des modifications motivées par des
circonstances différentes : le festin et les noces (Lc 14.16ss et Mt 22.1ss), les talents et les mines (Mt 25.14ss
et Lc 19.12ss). La comparaison entre ces paraboles jumelles et la découverte de leurs différences peut être
très fertile.
Les paraboles nous révèlent le cœur de Dieu et le regard de Dieu sur le cœur de l’homme. Il n’est pas
surprenant qu’elles nous surprennent, car elles montrent l’irruption, dans des scènes de la vie de tous les
jours, d’une dimension autre. Il ne faut pas les banaliser, les neutraliser, en en gommant l'insolite. Elles
requièrent notre faculté de nous laisser surprendre. D'ailleurs, il y aura toujours une certaine fluidité
d'interprétation, et des interprétations quelque peu différentes ne s'excluent pas forcément. Notre
compréhension sera sans cesse à reprendre, car une parabole aura toujours quelque chose de nouveau à dire à
celui qui a des oreilles pour entendre.
***
Remarque préalable : lorsqu’on parle de miracles d’une façon générale, on doit naviguer entre deux
écueils : d’un côté le rationalisme, qui se méfie de ce qui échappe aux explications scientifiques et exclut
l’intervention directe de Dieu ; d’autre part l’attrait pour le surnaturel et l’esprit magique, qui ignore les
relations de cause à effet, et dérape vers le sensationnalisme ou la superstition. Une étude bibliquement
fondée sur les miracles de Jésus devrait nous permettre d’éviter ces écueils !
Ce n’est seulement la terminologie concernant les miracles qui présente une diversité. Ces œuvres de
Jésus offrent une grande diversité, qu’on a tenté de classer en catégories. Il y a les miracles qui touchent les
éléments naturels (tempête apaisée), les lois naturelles (Jésus marche sur les eaux)8, les choses matérielles
(l’eau changée en vain, les multiplications des pains). Ces actes montrent la souveraineté du Fils de Dieu sur
la création elle-même.
Il faudrait qualifier de miracles des vies transformées, comme celle de Zachée, de Lévi le péager
(Matthieu), de la prostituée qui répand du parfum sur les pieds de Jésus, ou de la femme au puits de Sychar
en Samarie, du brigand crucifié repenti, et de tant d’autres.
Mais les miracles auxquels on pense plus particulièrement ici sont les exorcismes et les guérisons.
Tous nous montrent que l’impact de l’œuvre du Christ touche la personne dans son entier, son corps et son
âme. La liste serait longue des maux dont la puissance et l’amour de Jésus ont eu raison : maladies de toutes
sortes, infirmités, maladies qu’on appellerait aujourd’hui « psychosomatiques », possessions démoniaques, et
même décès. Dans un monde où la médecine était fort primitive, où les lépreux et les handicapés étaient des
exclus, ou toute maladie psychique était considérée comme démoniaque, les actes de Jésus étaient vraiment
une proclamation de la Bonne Nouvelle et la promesse d’un monde restauré, purifié. En cela, quel que soit le
terme utilisé, guérisons et exorcismes sont des signes de la proximité du Royaume de Dieu. Des guérisseurs,
il y en avait bien d’autres dans la Palestine du premier siècle. Mais Jésus n’est pas un guérisseur (un
thaumaturge – un faiseur de miracles). Ses miracles authentifient sa parole, la parole de l’espérance du
Royaume de Dieu dont il nous ouvre la porte. Car, quelle que soit la discrétion avec laquelle Jésus guérit, ses
8
Alphonse Maillot relève que ces miracles sur la mer rappellent l’Ancienne Alliance. La traversée de la mer Rouge, la
tempête de Jonas, ou Ps 107.29-31, Ps 29.3… (A. Maillot, Ces miracles qui nous dérangent, Aubonne, éd. du Moulin
1986, p.29.
6
miracles ne sont pas clandestins ! Mt 9.8 et 31 ; 15.31 ; Lc 7.17 ; 9.43, etc.) Jésus fustige aussi les villes de
Chorazim, Bethsaïda Capernaüm parce que ses miracles accomplis chez elles ne les ont pas amenées à la
repentance (Mt 11.20-24). Les miracles ont certes attiré la foule, mais aussi excité l’animosité des chefs
religieux (cf. la résurrection de Lazare, Jn 11.45-48). On constate aussi que durant la semaine de la Passion, à
Jérusalem, il n’est mentionné aucun miracle que Jésus aurait accompli.
9
Une remarque en passant, pas dénuée d’importance : le verbe "sauver" qu’on rencontre dans divers récits de guérison, signifie en
général "sauver de la perdition", mais peut aussi vouloir dire "guérir", et il n’est pas toujours aisé de choisir entre ces deux sens.
7
Les "non-miracles" de Jésus
Il faut aussi noter qu’il est arrivé que Jésus ne puisse accomplir aucun miracle (ou presque), comme à
Nazareth, à cause de l’incrédulité de ses concitoyens (Mc 6.5). En Mt 12.39ss et 16.1-4, on voit des leaders
religieux demander à Jésus d’accomplir un miracle, et il refuse. Dans les deux cas, apparaît la référence au
miracle de Jonas, qui a conduit les Ninivites à la repentance. Sans aucun doute, les miracles authentifient sa
messianité aux yeux de la foi, mais ne la prouvent pas face au défi de l’incrédulité et au refus de la
repentance. C’est dans la même optique qu’il faut interpréter le triple refus d’accomplir un miracle lors de la
tentation au désert. Satan cherche à le faire entrer dans le rôle d’un messie sans la croix, c’est-à-dire
triomphant, mais dans la désobéissance à la mission que son Père lui a confiée (Mt 4.1-11). A Golgotha,
lorsque les gens le défient d’accomplir l’ultime miracle (« Descends de la croix ! ») en lui rappelant tous
ceux qu’il a accomplis, il ne répond pas (Mt.27-40). Paul écrira : « Les Juifs réclament des miracles (sèmeiä,
signes), les Grecs recherchent la sagesse. Nous, nous proclamons Christ crucifié. » (1 Co 1.22-23) Les
miracles étant étroitement liés au sacrifice de la Croix, c’est pourquoi il est hors de question que les
ministères de guérison passés ou actuels soient interprétés dans un sens triomphaliste.
***
Aperçu bibliographique
DODD C.-H., Les paraboles du Royaume de Dieu, déjà là ou pas encore ? Paris, Seuil, 1977
DJABALLAH A., Les paraboles aujourd’hui, coll. Sentier, Québec, éd. La Clairière, 1994
JEREMIAS J., Les paraboles de Jésus, Livre de vie, Le Puy, éd. Xavier Mappus, 1962
MAILLOT A., Les miracles de Jésus, Tournon, éd. Réveil, 1977
MAILLOT A., Ces miracles qui nous dérangent, Aubonne, éd. du Moulin, 1986
MAILLOT A., Les parabole de Jésus aujourd’hui, Genève, Labor & Fides, 1983
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