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TEMPLARIUM

9 Février - Mars Le premier Magazine des Moines-Chevaliers

Chevalerie mystique
Chronique d’une mort acceptée
Historique
Mémoire de l’Ordre du Temple
Les Ordres
- L’Ordre de Saint-Samson
de Constantinople
- L’ordre des Trinitaires
au Moyen-Âge

Les Te
Tem
mpli
pliers
ers
à Douai
Belgique 7 € - Luxembourg 7€ - Suisse : 12 FS - Italie 7€ - Andorre 6,10€
TEMPLARIUM N°9

SOMMAIRE
p. 4 X HISTORIQUE
MÉMOIRE DE L’ORDRE DU TEMPLE
Histoire critique et apologétique de l’Ordre
chevaleresque et religieux des Templiers

p. 10 X COMMANDERIE
LE TEMPLE NOTRE-DAME À DOUAI
maisons des Templiers fondées grâce aux
libéralités de Thierry d’Alsace, comte de
Flandre.

p. 14 X TEMPLI DOMORUM...
LES SCEAUX DES TEMPLIERS ET
LE TEMPLE DE JÉRUSALEM
À partir de l’ouvrage Éléments de paléographie
de l’historien M. de Wailly, quelques critiques
sur le sens donné à une légende des sceaux
de l’Ordre du Temple.

p. 24 X ORDRE DE CHEVALERIE
L’ORDRE DE SAINT-SAMSON DE
CONSTANTINOPLE DIT DE CORINTHE

p. 26 X ORDRE RELIGIEUX
L’ORDRE DES TRINITAIRES AU MOYEN-ÂGE
À une époque où le fracas des épées et des
guerres se faisait entendre, Jean de Matha
propose une alternative d’essence évangélique
bien différente, basée sur la charité, la tolérance,
la convivialité pacifique et la solidarité
chrétienne.
p. 28 X CHEVALERIE MYSTIQUE
CHRONIQUE D’UNE MORT ACCEPTÉE
Arrêté sur ordre du roi de France pour divers
chefs d’accusation, et après sept an d’instruction,
c’est alors la pragmatique sanction conforme aux
usages du droit médiéval : la mort pour relaps.
Pourquoi une mort acceptée ?

X PORTAIL DES CHEVALIERS JEAN-LUC SOUBEYRAS ET


LA FORGE MÉDIÉVALE p. 32 X VISITEUR INFORMATIONS p. 34
XABONNEMENT ANCIENS NUMÉROS et ANNONCES p. 35 et 36

TEMPLARIUM N°9
TEMPLARIUM N°9 - FÉVRIER / MARS 2004
LES TEMPLIERS
Directeur de publication
Jean-Luc.ALIAS
Des moines-soldats sur Douai
Tel 06 73 10 37 47

Rédacteur en chef Sept siècles après l’abolition de l’Ordre, précise l’historien


Sébastien BAUDRY Pierre Bachy, l’histoire des Templiers continue à susciter les
Tel 06 12 78 25 41 mêmes passions qu’en leur temps. Des rivières d’encre ont
Secrétariat coulé, en analyses, hypothèses, controverses en tout genre,
Gisèle DEMOULINGER en points de vue, des plus sérieux aux plus débridés. C’est
que la « vérité-vraie » des Templiers fluctue selon l’angle de
ATTACHÉS DE PRESSE: recherche, elle est noire ou blanche, comme le Baucéant, leur
- Nord
Roger AUGER
étendard. On y trouve le bien et le mal, le profane et le sacré,
Tel. 06 77 85 95 98 la fidélité et la trahison, la force et la faiblesse, le yin et le
- Nord et Ile de France yang. Le parcours des Templiers est tissé de tous ces ingré-
Michèle LEPRÊTRE dients qui fascinent. Il y a les apparences et les dessous, puis
Tel. 01 48 52 62 25 les dessous des dessous. Dans le chaudron de cette histoire
- SUD DE LA FRANCE
FRANÇOISE JASPART très particulière, il y a les secrets voulus ou perdus, l’élan et la
TEL 06 10 20 29 25 fin des croisades, des rois et des papes qui travaillent à leurs
intérêts, des transactions politiques, les méthodes de l’Inqui-
Maquettiste sition, une tragédie, un Baphomet à la tête barbue, un trésor
Info Graphiste
disparu, une malédiction… C’est beaucoup, c’est trop pour ne
Photographies pas exciter les imaginations et déclencher les curiosités.
Daeg sauf mention contraire Dans l’histoire officielle des Templiers, les zones d’ombre
appellent des questions dont les réponses donnent parfois le
Impression:
Imprimeries de Champagne à vertige. Étaient-ils trop puissants, ces banquiers de haut vol,
Langres pour ne pas gêner le roi ? La rafle magistralement organisée
Éditorial
par Philippe le Bel et le procès des Templiers ne sont-ils qu’un
Abonnements et publicité complot politique ou une volonté de découvrir un secret, une
Association DAEG réalité plus obscure, au-delà des apparences ? Par leurs aveux
Rédaction et correspondance
massifs, Les Templiers reconnaissent des pratiques insuppor-
DAEG Edition tables pour l’époque : reniement du Christ, idolâtrie, sodo-
BP 18 mie… Ces pratiques et ces rites ont-ils un fondement sym-
Rue de l’armurier bolique masquant autre chose ? Ont-ils tenté de fédérer les
84360 LAURIS religions juive, chrétienne et musulmane ? Ont-ils découvert
Tel 04 90 08 30 01
Portable 06 73 10 37 47 des secrets concernant la vie de Jésus ? Ont-ils été mandatés
daeg.presse@templarium.com pour retrouver l’arche d’alliance et les Tables de la Loi ? L’Or-
http://www.templarium.com dre des Templiers serait-il une émanation de l’ordre de Sion ?
Sa hiérarchie en dissimu-
Siège social :
DAEG Edition
lerait-elle une autre, exis-
Z. I. Plaisance terait-il un temple noir ?
Bâtiment Éole Et si l’Ordre des Templiers
10, avenue du Champs de Mars existait toujours…Des flots
11100 Narbonne d’encre... Sur l’échiquier
tél. 04 68 41 23 38
Fax 04 68 42 70 34 obscur du Temple, le roi
Portable 06 73 10 37 47 semble avoir gagné la
partie, mais non, car le jeu
Diffusion : NMPP est plus compliqué qu’il
Export : Export Press
n’y paraît : « échec et mat»
CPPAP : 0608 K 83219 pour Jacques de Molay,
ISSN : 1633-2105 pour mieux dire par Sha
mat, la mort du Roi. Les
TEMPLARIUM est une revue Templiers ont encore quel-
bimestrielle publiée par la
l’association DAEG © ques bottes secrètes en
réserve : les découvrir est
Dépôt légal à parution une tentation si vive... »
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Photo en couverture
Jan Hosten ©
Templarium - 3
Historique

Mémoire de l’Ordre du Temple


Histoire critique et apologétique

APRÈS TANT DE DOCTES OUVRAGES CONSACRÉS À CET ORDRE


par SI RÉPUTÉ, POURQUOI ENTREPRENDRE UNE BRÈVE ÉTUDE QUI
Jean-Pierre NE PEUT RESTER QU’INCOMPLÈTE ? LE MERVEILLEUX BAIGNE
Bayard L’HISTOIRE D’UN ORDRE CHEVALERESQUE RELIGIEUX QUI,
HONORÉ PAR TOUS, A ÉTÉ LOURDEMENT CONDAMNÉ PAR UN
Historien ROI FRANÇAIS SOUCIEUX DE SON POUVOIR ABSOLU ET PAR
UN PAPE QUI A FLÉCHI DEVANT LES VOLONTÉS TEMPORELLES.

L
’affreux supplice de ces moines-soldats en également se souvenir que des ordonnances de
a fait des martyrs et toute une littérature en Charlemagne en 769 interdisent le rassemble-
est née donnant naissance à un nombre ment de ces ouvriers turbulents, ce qui prouve
impressionnant de faux ordres chevaleresques qu’une sorte de Compagnonnage possédait
qui recrutent dans les milieux les plus divers ; de déjà une organisation pouvant inquiéter le
très nombreuses associations revendiquent une pouvoir royal ; les Templiers se sont formés
filiation fantaisiste, car on attribue à l’Ordre beaucoup plus tard, en 1118.

‘‘
du Temple d’imaginaires mérites : on dénom-
bre plus de 400 résurgences. Certains fidèles LE TEMPS DES CROISADES
cherchent un hypothétique trésor, scrutent le
sol d’anciennes commanderies ou de châteaux Au début du XIe siècle les relations entre Chré-
; d’autres veulent déchiffrer leurs graffiti et y tiens et Musulmans se détériorent ; l’accès aux
trouver un message spirituel ; on commémore Lieux Saints n’est plus possible pour les Occi-
plus sûrement leur mémoire comme victimes de dentaux : les Croisades ont pour but de les ren-
l’intolérance religieuse et politique. dre accessibles. En dehors de ce souci religieux,
À notre époque où la société bafoue les règles les marchands cherchent à retrouver les routes
Sergent. Compagnie morales, où la liberté de pensée est dictée par de leurs négoces et ils sont prêts à financer une
de reconstitution
des organismes multiples, certains rêvent de aide militaire ; les nobles entrevoient la posses-
médiévale des
pureté, de bravoure, de respect de la parole sion de nouveaux fiefs, de nouveaux titres. Les
Blancs Manteaux.
donnée sans avoir à s’inféoder à des idées trois centres d’intérêts s’allient et huit « saintes
prodiguées par la presse ; la chevalerie con- croisades » s’étagent du XIe au XIIIe siècle afin
serve encore à notre époque un certain sens de de délivrer Jérusalem.
l’honneur.

’’
Cherchons à cerner les faits historiques essentiels,
en éliminant l’organisation matérielle du Temple,
son enrichissement financier, son rôle de banquier.
Au siècle de la communication, nous restons Il faut ajouter les pénibles croisades des pau-
isolés les uns des autres, sans véritable échange vres en 1198 et celle des Enfants en 1212 où
intérieur. Les groupes chevaleresques modernes Étienne entraîne d’Auvergne (Cloyes) 30.000
veulent perpétuer un esprit qui ne correspond enfants tandis que Nicolas part de Cologne et
plus à nos règles de vie actuelle, mais nous de Basse-Lorraine avec 2.000 enfants, qui tous
rêvons à un monde meilleur, épuré. Alors nous périssent avant d’avoir pu atteindre les Lieux
prêtons à ces nobles chevaliers des qualités saints.
illusoires car, épris d’idéalisme, nous voulons De ces croisades, on rapporte le goût du luxe
naviguer à contre-courant. oriental, mais aussi des objets-souvenirs, des
Il est parfois enseigné que cet Ordre a construit reliques vendues à prix d’or et qui, exposées
nos cathédrales, qu’il a apporté la connaissance dans nos églises, en transforment le plan afin
du « trait » aux Compagnons du Tour de France, que chaque pèlerin puisse être imprégné de
alors que cette règle permettant de résoudre des leur fluide (création des absidioles et des bas-
problèmes techniques par la statique graphique côtés, la nef ne suffisant plus à l’exposition de
est déjà évoquée par l’architecte romain Vitruve ces reliques) ; on conserve l’attrait et le culte de
vivant vers -85 à +26 de notre ère. Ce serait la lumière facilitant le passage de l’art roman à
aussi méconnaître les constructions mérovin- l’art gothique, inventé en Ile-de-France (région
giennes où les principes de l’architecture sont de Morienval, puis Saint-Denis).
déjà rigoureusement exploités ; ne faut-il pas Les principes techniques de cette architecture

4 - Templarium
Mémoire de l’Ordre du Temple

qui rompt avec la voûte en plein cintre utilisée


par les Romains, autrefois ennemis du Christia- REPÈRES CHRONOLOGIQUES DES CROIDADES.
nisme, sont très particuliers par la répartition ► PREMIÈRE. PRÊCHÉE EN 1095 SOUS LE PAPE URBAIN II, LA
des tensions et des forces équilibrant l’édifice CROISADE VA DE 1096 À 1099. LA PREMIÈRE EXPÉDITION MENÉE
; ils n’ont aucun rapport avec les constructions
PAR PIERRE L’ERMITE EST ÉCRASÉE PAR LES TURCS ; LA SECONDE
des Musulmans, mais l’ogive, arc brisé, entre
plus largement dans nos constructions en lui PERMET DE S’EMPARER DE NICÉE, ÉDESSE, TARSE, ANTIOCHE ET
donnant une impression d’envol. JÉRUSALEM DONT GODEFROY DE BOUILLON DEVIENT ROI EN
1100.
LES MOINES-SOLDATS AU TEMPLE DE SALOMON ► SECONDE. PRÊCHÉE PAR BERNARD DE CLAIRVAUX À VÉZELAY
EN 1146, ELLE VA DE 1147 À 1149. ÉDESSE EST AUX MAINS
En général, on considère cinq grands ordres
DES TURCS ; CONRAD II ET LOUIS VII ASSIÈGENT VAINEMENT
de Chevalerie créés en Terre sainte ; ils ont
pour mission d’aider et de défendre les pèlerins DAMAS.
tout en étant de vocation à la fois religieuse et ► TROISIÈME. PRÊCHÉE À GISORS EN 1188 PAR L’ARCHEVÊ-
guerrière. QUE GUILLAUME DE TYR, PUISQUE LA VILLE DE JÉRUSALEM A ÉTÉ
Les couleurs des croix qui figurent sur les man- REPRISE PAR SALADIN EN 1187.
teaux sont : blanc pour Malte (sur fond rouge), ► QUATRIÈME. PRÊCHÉE EN 1201 PAR FOULQUES DE NEUILLY
rouge pour le Temple et le Saint-Sépulcre, vert (PONTIFICAT D’INNOCENT III). MENÉE DE 1202 À 1204 PAR
pour Saint-Lazare, noir pour les Teutoniques.
Godefroy de Bouillon, comte de Boulogne, BONIFACE II DE MONTFERRAT ET BAUDOUIN IX DE FLANDRE ;
duc de Brabant, a été élu le 22 juillet 1089 MISE À SAC DE CONSTANTINOPLE EN 1204. FONDATION DE L’EM-
roi de Jérusalem, mais il ne se déclare que le PIRE LATIN DE CONSTANTINOPLE QUI DURE JUSQU’EN 1261.
défenseur du Saint-Sépulcre. Son frère comte ► CINQUIÈME. MENÉE DE 1217 À 1221 PAR JEAN DE BRIEN-
d’Édesse est couronné roi de Jérusalem sous le NE, ROI DE JÉRUSALEM, ET ANDRÉ II, ROI DE HONGRIE.
nom de Baudouin Ier, le 25 décembre 1100, ► SIXIÈME. MENÉE DE 1228 À 1229 PAR L’EMPEREUR FRÉDÉRIC
et règne jusqu’à sa mort, le 2 avril 1118. À
Baudouin Ier, succède son cousin germain, II.
Baudouin II (14 avril 1118-21 août 1131). ► SEPTIÈME. MENÉE PAR LE ROI LOUIS IX DE 1248 À 1254.
L’ordre de la Sainte-Trinité, Ordre des Pauvres DÉFAITES SUCCESSIVES ; SAINT LOUIS ABANDONNE DAMIETTE
Chevaliers du Christ, est fondé à Jérusalem aux POUR RETROUVER SA LIBERTÉ.
environs du 27 décembre 1118 par Hugues ► HUITIÈME. MENÉE EN 1270 PAR LOUIS IX (SAINT LOUIS) ;
de Payens avec huit autres chevaliers francs. ÉCHEC ; ATTEINT DE LA PESTE, LE ROI MEURT À TUNIS EN 1270.
Baudouin Ier, roi de Jérusalem, leur ayant
donné pour siège des dépendances du Temple
de Salomon, cet ordre prend le nom de Ordre
du Temple. Une autre partie des bâtiments est
occupée par la mosquée d’Omar.

QUOI DE NEUF APRÈS TROYES ?


Le 14 janvier 1128, au concile de Troyes prési-
dé par le légat apostolique (le seigneur évêque
d’Albano), l’Ordre du Temple reçoit la règle de
saint Augustin, des mains de Bernard de Clair-
vaux, cousin ou oncle du fondateur. Bernard de
Clairvaux a très peu participé à cette rédaction
pour laquelle il n’est guère enthousiaste. Cet
Ordre doit servir Dieu dans la prière et l’amour

Templarium - 5
Historique

d’autrui et en même temps s’engager dans une profession considérablement altérée.


armée : « un double combat, à la fois contre la chair, et Depuis une trentaine d’années, ils n’ont plus de combats
contre les esprits de malice répandus dans les airs » ; « le à soutenir. En 1307, après une succession de vingt-deux
corps était recouvert d’une armure de fer et l’âme d’une grands maîtres, le pape Clément V, l’obligé du roi de
armure de foi ». La croix rouge à 8 pointes (croix des huit France Philippe IV le Bel, demande à Jacques de Molay,
Béatitudes), leur est octroyée par le pape Eugène III, le 22 alors grand maître, de procéder à la réforme de sa milice.
avril 1147. La règle est du type monacal cistercien ; la Les événements s’accélèrent : au matin du vendredi 13
robe est blanche. octobre 1307, les chevaliers français sur ordre de Phi-
Ces nouveaux moines-soldats se font remarquer par leur lippe le Bel sont arrêtés dans leurs commanderies. À la
courage, leur ténacité et ce petit groupe prospère rapi- suite de la procédure inquisitoriale, avec application de la
dement. D’après la Règle donnée au Concile de Troyes, torture, Philippe le Bel, conseillé par Nogaret, démontre
l’Ordre est dirigé par le Maître du Temple qui n’a cepen- l’opprobre d’un ordre religieux qui cracherait sur le cru-
dant qu’une voix dans le chapitre ; le Sénéchal peut rem- cifix, renierait Dieu, pratiquerait l’homosexualité, aurait
placer le Maître ; puis viennent le Maréchal responsable entretenu d’excellents rapports avec les Musulmans et les
de la discipline, des Commandeurs de province puis ceux troupes du Vieux de la Montagne. Effectivement, l’Ordre
des maisons et des chevaliers ; les chapelains relevant du Temple, s’il a combattu l’Ordre des Assassins com-
directement du pape célèbrent les offices religieux. Les mandé par Hussan Sabah, le Vieux de la Montagne, a eu
chevaliers ont un écuyer et trois chevaux. À la fin des durant les trêves des contacts avec des cavaliers défen-
croisades pour lesquelles l’Ordre avait été créé, les che- seurs de leur idéologie, un ordre bien semblable au leur
valiers ont perdu leur rigueur d’origine : ils perdent des ; ils ont connu la tradition des chevaliers musulmans ; ces
batailles, capitulent, vivent dans l’opulence de banquiers. deux Ordres vivent les mêmes rites de la chevalerie ; les
Après la chute de Jérusalem, ils s’installent à Saint-Jean Templiers deviennent les « chevaliers d’Orient et d’Occi-
d’Acre d’où ils sont chassés par les Sarrasins en 1291 ; ils dent » tout en paraissant être restés à l’écart du soufisme,
séjournent dans l’île de Chypre et placent finalement leur l’ésotérisme de la foi musulmane.
Maison-Mère à Paris. Les Templiers auraient été environ Au concile de Vienne, le 13 octobre 1311, l’Ordre est
15.000, dont 2.000 en France. aboli ; supprimé, il n’est cependant pas condamné, fait
confirmé le 3 avril 1312 (bulle Vox Clamantis) ; par la
UN ORDRE CONSTRUCTEUR ? Bulle Ad Providam Christi Vicarii du 2 mai 1312, les biens
des Templiers reviennent à l’Ordre de l’Hôpital (Che-
L’Ordre du Temple n’a pas eu la vocation d’un ordre cons- valiers de Rhodes en 1309) qui deviendra l’Ordre des
tructeur, mais il a fait entretenir et même construire églises Chevaliers de Malte en 1530 ; Clément V se réserve le
et châteaux par des spécialistes, les Compagnons du Tour droit juger les dignitaires de l’Ordre (6 mai 1312 , bulle
de France ; trop souvent, on leur prête le caractère de Considerantes).
maîtres d’œuvre. Leur mission est fort différente de celle Seuls les Templiers français sont poursuivis, alors que
des frères Pontifes, plus particulièrement réalisateurs du dans les autres pays ils ne sont pas inquiétés. Cependant,
pont d’Avignon dont les ruines font encore notre admira- Jacques de Molay, son grand maître, a reconnu tous les
tion pour sa technique fort aboutie. crimes qu’on leur impute, mais revenant sur ses déclara-
On a exprimé l’idée que les Templiers avaient fait établir tions, comme relaps, il est brûlé vif à Paris, dans l’île de la
des églises circulaires, comme à Londres, Laon, Metz, Cité, le 18 mars 1314, avec le précepteur de Normandie,
ce qui est sans doute un rappel du Saint-Sépulcre de Geoffroy de Charnay et quelques autres dignitaires, sur la
Jérusalem et dont le plus bel exemple figure à Neuvy-
Saint-Sépulcre (en Indre) construit en dehors de l’emprise
templière. L’église rayonne dans toutes les directions et
marque tous les individus ; elle symbolise un centre du
monde, le lieu sacré par excellence où tous les influx con-
vergent ; mais déjà Charlemagne à Aix-la-Chapelle avait
fait réaliser un lieu semblable, le « centre » de son empire.
Louis Hautecœur et surtout Élie Lambert ont apporté d’uti-
les précisions sur ces réalisations. Retenons aussi que la
remarquable et sensuelle Vera Cruz, près de Ségovie, sou-
vent classée dans l’architecture templière, a été construite
par les Arabes et seulement rénovée par les Templiers.
D’une manière générale, ceux-ci ne construisent pas, mais
font renforcer de nombreux ouvrages, principalement
militaires afin d’accomplir leur mission : sauvegarder les
pèlerins. Il se peut que parmi eux un membre, plus spécia-
lement attiré par les problèmes architecturaux, ait eu des
relations avec quelques spécialistes, ce qui ne peut nous
conduire à décréter que cet Ordre a possédé des métho-
des particulières dans l’art de construire, qu’il a édicté des
méthodes — dont le trait — ; les églises templières sont le
plus souvent des petites chapelles, fort simples, de petites
dimensions, des lieux établis pour le recueillement.

JUSTICE AUX SUSPECTS


Après la période des guerres saintes, abandonnant leur
mission spirituelle, les Templiers se consacrent à des
tâches profanes, la gérance des biens, des commande-
ries, des fermes ; souvent orgueilleux, arrogants, ils ne
sont guère estimés par le peuple. L’image de l’Ordre s’est

6 - Templarium
Mémoire de l’Ordre du Temple

LES CINQ GRANDS ORDRES


► L’ORDRE DE SAINT-LAZARE DE JÉRUSALEM, FONDÉ VERS
1060.
► L’ORDRE DES HOSPITALIERS DE SAINT-JEAN, DIT DE
MALTE, OU ORDRE DE SAINT-JEAN DE JÉRUSALEM, FONDÉ
VERS 1080.
► L’ORDRE DU SAINT-SÉPULCRE, FONDÉ VERS 1099.
► L’ORDRE DE LA MILICE DU CHRIST, DIT ORDRE DU TEM-
PLE, FONDÉ EN 1118, SUPPRIMÉ EN 1312, LE SUPPLICE DU
GRAND MAÎTRE MOLAY AYANT EU LIEU EN 1314.
► L’ORDRE DE SAINTE-MARIE DES TEUTONIQUES, FONDÉ
EN 1190 ET EXISTANT DE NOS JOURS SOUS UNE FORME
FORT ALTÉRÉE (NE RECRUTE QUE PARMI LA NOBLESSE ALLE-
MANDE).
ON PEUT Y AJOUTER LES ORDRES DE LA TOISON D’OR, DE
SAINT-MICHEL ET CELUI DE SION.

Croisé à cheval. étail d’une fresque du XIIe siècle.


Crypte de la basilique d’Aquileia. Italie.

Templarium - 7
Historique

seule décision du roi de France ; la justice pontificale n’a Ordre chevaleresque religieux, nous n’avons aucune trace
pas eu à se prononcer. Sont rendus responsables de cet d’un rituel initiatique secret, mais il est évident que, pour
affreux supplice Philippe IV le Bel, Guillaume de Noga- la bonne marche de leur groupe, les responsables avaient
ret et Bertrand de Got, ancien archevêque de Bordeaux des réunions en dehors des simples chevaliers et de leurs
devenu Clément V, le premier pape installé en Avignon. servants, ce qui n’implique pas des réunions ésotériques
Les dernières paroles de Jacques de Molay assignant avec un cérémonial particulier. De même, on cherche
ses bourreaux à comparaître devant le tribunal de Dieu encore en vain leur trésor matériel qui a été réparti entre
paraissent appartenir à la légende ; cette malédiction les ordres monastiques suivant les décisions papales. Ce
apocryphe se base sur les morts du roi, de son conseiller qui n’empêche pas que de nombreuses légendes affirment
et du pape, dans la même année. que des membres ont été mandatés pour poursuivre leurs
activités, « secrètes » bien entendu.
LES OPPOSANTS Albert Lantoine a montré que la charte dite de « Larme-
nius » était une fabrication de circonstance et prolongeait
Les successeurs de Clément V — et principalement le le mythe chevaleresque mêlant rêves et réalité. Trop de
pape français Jacques Duès devenu Jean XXII— se mon- légendes continuent de circuler à leur propos et il est
trent beaucoup plus indulgents envers l’Ordre abattu et regrettable que les Hauts Grades de la Maçonnerie
autorisent les Templiers à se faire oublier ou à rejoindre entretiennent quelque peu cette fiction qui ne repose
d’autres Ordres religieux en Écosse (dont l’Ordre protégé sur aucun fait historique ; dans le Compagnonnage,
par Robert I est supprimé lors de la Réforme) et au Portu- on assimile parfois Maître Jacques à Jacques de Molay,
gal (Ordre du Christ à Tomar). L’Espagne revendique avoir dernier Grand Maître de l’Ordre du Temple. Ce « Tem-
conservé des éléments dans l’Ordre militaire de Montessa plarisme » maçonnique continue cependant à marquer
en Aragon (10 juin 1317). certains Maçons. On se réfère au Discours de Ramsay
Ainsi, au Portugal, le roi Denis Ier a demandé le maintien (1686-1743) qui, cependant, en 1736, ne parle pas des
de l’Ordre du Temple sous le nom de Chevaliers du Christ Templiers, mais de « Nos ancêtres, les croisés, rassemblés
avec la règle de Calatrava, identique à celle du Temple ; en toutes les parties de la chrétienté dans la Terre-Sainte,
en 1366, leur siège est fixé à Tomar. Il en est de même en voulurent réunir dans une seule confraternité les sujets de
Espagne où le nouvel Ordre de Montessa devient hono- toutes les nations ». Ramsay après une Maçonnerie établie
rifique en 1542. En Écosse, le roi Robert Bruce l’intitule à partir des rites du métier de constructeur, aborde un
Ordre du Chardon de Saint-André d’Écosse ; en 1593, enseignement plus spirituel à partir de la chevalerie et du
trente-deux de ces chevaliers établissent la Rose-croix métier des armes.
Royale qui d’Invisible Collège devient, en 1662, la Royal
Society qui influence la formation moderne de la Franc- MOUVEMENTS DE STRICTE OBSERVANCE
Maçonnerie.
Dans une perspective maçonnique entretenue par les
LES POLÉMIQUES POST-TEMPLIÈRES loges, principalement avec les grades de vengeance

Cependant l’affreux supplice des Templiers connus pour


leur remarquable organisation, a fait naître bien des Chevalier. Compagnie de reconstitution
médiévale des Blancs Manteaux.
phantasmes qui venus à notre époque ont donné libre
cours à l’imaginaire sans support historique ; on a désiré
reconstituer cet Ordre dépendant du Saint-Siège de Rome.
La dissolution ayant été prononcée par le pape, seul le
Saint-Siège — et les Ordinaires dûment constitués par lui
— ont le droit d’estimer si tel groupe peut ressusciter ou
non. Clément XIV, dans son bref du 21 juillet 1773, a
rappelé la suppression de cette institution religieuse.
Si des Templiers échappés au massacre ont pu continuer
de vivre en communauté, ils n’ont pu constituer qu’un faux
Ordre, le vrai étant frappé d’interdit par la seule autorité
compétente en matière religieuse. L’Osservatore Romano
(n° 30 du 24 juillet 1970) nous met en garde contre les
associations qui se prévalent de filiations illusoires. Il
est fort possible que quelques Templiers se soient réfu-
giés individuellement près des Compagnons du Tour de
France, dans des grottes comme à Jonas en Auvergne, ou
qu’ils soient partis à l’étranger. Par contre, de nombreux
groupes constitués sans aucune filiation prétendent être
les héritiers légitimes du Temple, dont ils auraient conservé
un dépôt spirituel. Mais que savons-nous exactement de
leur pensée qui, depuis 1314, n’est guère comparable
à la nôtre, les conditions de l’environnement étant fort
diversifiées ?
Se ralliant à la connaissance traditionnelle, on a com-
menté une règle ésotérique secrète qui aurait été pra-
tiquée par les Templiers ; trouvée dans les archives de
la Grande Loge d’Hambourg, publiée par Mertzdorff en
1877, celle-ci s’est révélée être un faux. Probst-Biraben,
dans Les Mystères des Templiers, Albert Lantoine, René
Le Forestier, puis Dailliez, ont analysé ces documents trop
souvent interprétés selon une optique partisane ; de cet

8 - Templarium
Mémoire de l’Ordre du Temple
LES TROIS FILIATIONS LES PLUS EN VOGUE

(chevalier Kadosh), il est affirmé que Humbert Blanc, ► FILIATION DE BEAUJEU. JACQUES DE MOLAY AURAIT
Précepteur d’Auvergne, se réfugie en Angleterre ; Pierre COMMUNIQUÉ LES SECRETS DE L’ORDRE À SON NEVEU, LE
d’Aumont, Grand Maître provincial d’Auvergne, gagne
Heredown en Écosse, aide le roi Robert Bruce a gagner COMTE DE BEAUJEU ; IL LUI AURAIT REMIS LES TROIS CLEFS
l’indépendance de son pays par la bataille de Bonnoc- DES TRÉSORS DU TEMPLE ; CELUI-CI AVEC NEUF CHEVALIERS
kburn en 1314. En 1754, le chapitre de Clermont confir- (LES NEUF ARCHITECTES PARFAITS ?) AURAIT PERPÉTUÉ CET
me cette filiation templière également soutenue par l’obé-
dience maçonnique allemande constituée vers 1751 par ESPRIT ET À SA MORT AURAIT DÉSIGNÉ LE CHEVALIER PIERRE
le baron Karl von Hund (1722-1776) et qui émerge sous D’AUMONT COMME SON SUCCESSEUR.
le nom de Stricte Observance Templière, S.O.T. ; cette ► FILIATION D’AUMONT. LA STRICTE OBSERVANCE TEMPLIÈ-
Maçonnerie rectifiée proviendrait de l’Ordre du Temple,
mais également de la Maçonnerie Écossaise, œuvre des RE ET LE BARON DE HUND MÊLENT L’ACTION DU CHEVALIER
Stuarts détrônés (branche Jacobite). D’AUMONT À CELLE DE TROIS CHEVALIERS RÉFUGIÉS À HÉRO-
La S.O.T. a sans doute été également influencée par les DOWN EN ÉCOSSE, AVEC LES CHEVALIERS DE SAINT-ANDRÉ
Chevaliers Porte-Glaive et les Chevaliers teutoniques. Elle
veut restaurer l’Ordre du Temple, recouvrer ses trésors en DU CHARDON, CE QUI DONNERA NAISSANCE AU CHEVALIER
obéissant à ses chefs, les Supérieurs Inconnus. Certains BIENFAISANT DE LA CITÉ SAINTE (CBCS).
membres prirent ce programme à la lettre et quelques
imposteurs profitèrent de la situation. Elle conférait sept ► FILIATION LARMENIUS. JACQUES DE MOLAY AURAIT
grades (apprenti, compagnon, maître, maître écossais, INVESTI DE SA PUISSANCE LE FRÈRE JEAN-MARC LARMENIUS
novice, Templier, chevalier profès qui comprenait lui- EN 1324, UN VÉNÉRABLE CHEVALIER « NE SACHANT NI LIRE
même plusieurs classes). Hund, en 1772 au convent de
Kohlo (1772), allie son groupe au Cléricat de Johann NI ÉCRIRE » (COMME JACQUES DE MOLAY, MAIS N’EST-CE
August Starck. PAS LÀ UNE EXPRESSION TARDIVE MONTRANT L’HUMILITÉ DE
Ferdinand de Brunswick-Lunebourg-Wolfenbüttel (1721- L’ÊTRE ?). CETTE FILIATION A DONNÉ UNE SUITE IMPRESSION-
1792) (Eques a Victoria) en devient le Grand Maître
en 1777 (à ne pas confondre avec son neveu Char- NANTE DE NOMS CÉLÈBRES COMME BERTRAND DU GUESCLIN,
les-Guillaume de Brunswick qui commandait lors de la LES D’ARMAGNAC, MONTMORENCY, BOURBON, PHILIPPE
bataille de Valmy). Les accords de Kohlo sont dénoncés D’ORLÉANS, LE DUC DE COSSÉ-BRISSAC, POUR ABOUTIR
aux convents de Brunswick (1775), de Wolfenbüttel et de
Lyon (1778). À la mort de Hund en 1776, Charles de À BERNARD-RAYMOND FABRÉ-PALAPRAT (1773-1838,)
Sudermanie (futur Charles XIII de Suède) établit des rap- ANCIEN PRÊTRE, MÉDECIN, QUI RÉNOVE L’ORDRE DU TEMPLE
prochements avec la maçonnerie suédoise de Zinnendorf,
ET FONDE UNE ÉGLISE CHRÉTIENNE SE RÉFÉRANT À SAINT
appelée « École du Nord », influencée par l’hermétisme et
le rosicrucianisme. Le grade de Chevalier d’Écossais vert JEAN, DONT LA DOCTRINE DES CHRÉTIENS PRIMITIFS EST
n’était accessible qu’aux nobles. La filiation templière et IMPRIMÉE EN 1831 SOUS LE TITRE LÉVITIKON ; IL Y INTÈGRE
le mythe des Supérieurs Inconnus ne sont pas reconnus
UN COURANT MAÇONNIQUE. PRODUISANT DES DOCUMENTS
au Convent de Wilhelmsbad (16 juillet - 29 août 1782)
qui forme à sa place le Régime Écossais Rectifié dont les (FABRIQUÉS PAR SES SOINS), À LA SUITE DES NOMS LES PLUS
prieurés sont calqués sur l’organisation médiévale, et son ILLUSTRES, FABRÉ-PALAPRAT SE DÉCLARE LE 22ÈME GRAND
degré terminal Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte
(CBCS) est un grade plus chevaleresque que maçonnique. MAÎTRE LE 4 NOVEMBRE 1804 ; LE 18 MARS 1808, JOUR
Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824) confère cette dis- ANNIVERSAIRE DE LA MORT DE JACQUES DE MOLAY, IL ORGA-
tinction à Ferdinand de Brunswick et à Charles de Hesse. NISE UNE CÉRÉMONIE OFFICIELLE SOMPTUEUSE ET FORT PITTO-
L’ordre Templier a ainsi laissé des traces dans les Hauts
Grades de la Maçonnerie, principalement dans le Rite RESQUE DANS L’ÉGLISE SAINT-PAUL À PARIS ; IL BÉNÉFICIE
Écossais Rectifié, dans le Rite d’York, dans le Rite Écossais D’UN DÉTACHEMENT D’INFANTERIE IMPÉRIALE. NAPOLÉON
Ancien et Accepté (chevalier Kadosch 30ème mais aussi ET LOUIS XVIII RECONNAISSENT FABRÉ-PALAPRAT COMME
32ème et surtout 33ème),
Il est maintenant démontré, contrairement à une opinion GRAND MAÎTRE DE L’ORDRE.
trop répandue, que les Hauts Grades maçonniques,
pas plus que les rites maçonniques des trois premiers
degrés, ne sont les héritiers directs des Templiers, pas
plus d’ailleurs que les nombreuses sociétés profanes
qui s’en réclament. L’Ordre du Christ au Portugal, (15
mars 1319) est le seul successeur légitime. Le rituel du
30ème degré déclare « Notre grade commémore l’Or-
dre Templier et s’en inspire sans pour autant prétendre
en être le continuateur et l’héritier » ; de même au Rite
Écossais Rectifié « le grade de Chevalier Bienfaisant de
la Cité Sainte diffère de ce que pouvait être la pensée
templière non préoccupée de soufisme, d’alchimie ou
de magie...»
Par contre, l’imaginaire suscite les mêmes transports
idéologiques et il n’est pas rare de rencontrer hommes
ou femmes, aux pieds plats et à la démarche chance-
lante, se proclamer appartenir à la noble lignée des
chevaliers du Temple…

Templarium - 9
Commanderie

LES TEMPLIERS
À DOUAI

Après sa création en 1118, et sa confirmation par le concile de Troyes en 1128,


l’Ordre du Temple comptabilisa bientôt un grand nombre d’établissements dans les
provinces françaises. Au moment de sa suppression, il en possédait deux à Douai
qui ont laissé, malheureusement, peu de traces dans l’histoire. De ces deux mai-
sons, l’une était un modeste hôpital que les frères du Temple ont possédé au plus
quelques années ; l’autre, bien que plus importante, ne forma jamais qu’une suc-
cursale faiblement dotée, annexée à d’autres établissements plus considérables et
destinée seulement à recevoir les membres de l’Ordre dans leurs voyages ou à servir
d’asile à ceux d’entre eux que leur âge ou leurs infirmités empêchaient de guerroyer.

par Les frères Dominicains

L
a plus ancienne et la plus considérable de
ces deux maisons est celle de Notre-Dame. DIFFÉRENDS AVEC L’ÉCHEVINAGE
Thierry d’Alsace, comte de Flandre, la créa
au mois d’octobre 1155, au-delà de la Plusieurs difficultés relatives à la juridiction eurent lieu,
porte des Wetz, à côté des marécages formés par le vers cette époque, entre la maison de Notre-Dame et
débordement de la Scarpe et du ruisseau du Bou- l’échevinage. Le précepteur de Notre-Dame préten-
lenrieu, et que l’industrieuse activité des religieux ne dait exercer toute justice tant haute que basse, les
devait pas tarder à transformer. Il lui donna comme droits de domaine et de juridiction sur les hôtes, man-
dot une charrue de terre, soit 36 rasières, située à sionnaires et habitants qui occupaient des fonds de
Sin-le-Noble, village de son domaine, ainsi que sa censive, entre les portes de la ville et la maison du
plusieurs rentes foncières sur les courtils du marais Temple, ainsi que sur les fonds qui lui appartenaient
douaisien, restés longtemps sous l’eau, et que des tra-
vaux récents avaient rendus productifs. Les premiers
chevaliers du Temple de Douai vinrent sans doute de
la maison d’Arras, dont il semble être toujours resté
dépendant.
RECONSTITUTION DU LEURS BIENFAITEURS
COMTE DE FLANDRE,
THIERRY D’ALSACE, QUI, Philippe d’Alsace, fils et successeur de Thierry, fut le
D’APRÈS LA TRADITION
second bienfaiteur de la maison de Notre-Dame. À la
RAPPORTA LA RELIQUE
demande de son neveu, Bauduin de Gand, comman-
DU SAINT-SANG DE
deur de la baillie des maisons du Temple en Flandre,
TERRE SAINTE À L’ISSUE
il aurait donné tous les reliefs des fiefs mouvant du
DE LA DEUXIÈME
château de Douai, des terres à Dourges sur le Bou-
CROISADE (1150).
lenrieu et le dixième de la dîme du Forest.
APRÈS LA MORT DE
Le XIIIe siècle est largement représenté dans le
GUILLAUME DE NOR-
chartrier de la maison du Temple à Douai. En effet,
MANDIE LORS DE SIÈGE
D’AALST (ALOST), LE
plusieurs bourgeois joignirent leurs libéralités à celle
11 JUILLET 1128, SON des princes. En 1227, la veuve d’un chevalier ayant
ADVERSAIRE THIERRY
vendu à deux habitants de Douai des terres qu’elle
DE L’ALSACE DEVENAIT
tenait du seigneur de Lambres, celui-ci les déchargea
COMTE ET AFFIRMAIT
de tout service de fief en faveur des chevaliers et à
LE DON DU RELIEF DES
condition que les deux bourgeois leur paieraient une
FIEFS AUX TEMPLIERS. rente annuelle de cinq sols parisis. Une fille dévote,
IL EST DONC nommée Marie de Férin, leur laissa en 1293, par
CERTAIN QUE LES son testament, une somme de quarante livres pour
COMTES DE FLANDRE acheter chaque année, dix-huit rasières de blé, et une
COMPTAIENT SUR LA autre de cent pour fonder trois messes à dire chaque
PUISSANCE MILITAIRE ES semaine dans leur église, vingt sols au chapelain du
MOINES-CHEVALIERS. Temple et dix à son clerc pour un obit annuel. De plus,
elle laissait au commandeur de la baillie du Temple
© PHOTO FRANÇOIS DE une certaine somme d’argent avec laquelle il devait
SCHIETERE DE LOPHEM acheter une rente d’un demi marc pour cet obit.

10 - Templarium
Les templiers
à DOUAI

dans la ville. Suivant les échevins, au contraire, toute Selon la tradition, ce furent les Templiers qui facili-
justice, juridiction et domaine appartenaient, de plein tèrent l’établissement, à Douai, des Trinitaires qu’ils
droit, aux comtes de Flandre, et subsidiairement à avaient peut-être connus en Terre-Sainte.
eux, sur toutes les possessions du Temple, comme sur Peu après l’établissement de la maison de Notre-
tous les autres héritages compris dans l’échevinage ; Dame une grande partie du marais douaisien avait
et ils s’appuyaient, pour soutenir leurs prétentions, sur été entouré de palissades depuis cette maison, sur la
un précédent qui pouvait toutefois recevoir une autre ligne des fossés qui baignaient le pied des remparts
interprétation. Cependant, pour mettre ces querelles, jusqu’à une grosse tour, au pied de laquelle passait
une transaction intervint entre le magistrat, d’une part, le canal qui coulait derrière la rue Saint-Jean ; et ce
et , de l’autre, le précepteur Hugues de Pérault avec marais avait pris, dès lors, le nom de Neuve-Ville. Les
les frères de la Milice du Temple d’Arras, capitulaire- échevins ayant résolu de substituer des murs à cette
ment assemblés et agissant en tant que possesseurs clôture et de supprimer, pour n’en faire qu’une, ache-
de la maison de Douai qui n’est même pas mention- tèrent tous les terrains intermédiaires et prolongèrent
née dans l’acte. Par cette transaction, les propriétés la grande rue Saint-Jacques jusqu’à la porte, après
du Temple demeuraient soumises à la juridiction de que les Templiers eurent consenti à céder à la ville les
l’échevinage, à l’exception de la maison et de ses rentes qu’ils avaient sur ces propriétés. Nous n’avons
dépendances, contenant en totalité un peu plus de six pas le traité passé à cette occasion entre les frères
rasières, laquelle devait rester libre et indépendante à et les échevins, mais nous voyons que, en 1311, il y
perpétuité, sauf les droits de haut domaine, de garde avait déjà quatre ans que la ville avait aliéné ces ren-
et de ressort. Comme compensation et indemnité tes. Cet acte fut probablement le dernier de ce genre
des droits auxquels ils renonçaient dans l’intérêt de que firent les Templiers de Douai.
la paix, les frères du Temple reçurent une somme de Bientôt, en effet, éclata l’orage dans lequel ils devai-
cinquante livres parisis, avec laquelle ils achetèrent ent disparaître avec l’Ordre tout entier. Avant de
une rente à leur profit. Les échevins promirent avec reproduire les détails sur le procès des Templiers,
serment d’observer fidèlement ces conventions ; elles nous devons dire quelques mots de l’autre maison
furent ratifiées par une lettre du comte Guy de Dam- qu’ils occupèrent, dit-on, à Douai, de l’hôpital Saint-
pierre, du mois de janvier 1291. Samson.
Ce concordat ne dit rien du droit d’asile ; peut-être
n’en est-il pas fait mention, parce que l’usage l’accor- L’HÔPITAL SAINT-SAMSON
dait alors à toutes les maisons religieuses. La chapelle
du Temple jouissait de grands privilèges : ainsi l’inter- Voir page 23.
dit qui frappait le pays ou la ville ne l’atteignait pas à
moins qu’elle ne fût spécialement désignée. PROCÈS DES TEMPLIERS
En 1282 un combat eut lieu dans l’enclos du Temple,
entre Pierre de Douai, chevalier, et Jean de Wattines À cette époque l’Ordre de la sainte Milice du Temple
d’une part et, de l’autre, les frères de la maison. Jean avait atteint une prospérité extraordinaire. Il possé-
de Wattines fut tué. L’information de cette affaire fut dait, en Occident, neuf mille commanderies qui lui
confiée par le comte de Flandre, avec l’agrément rapportaient environ 8.000.000 de livres, c’est-à-dire
des religieux, aux échevins de Douai, qui entendirent 112.000 millions de notre monnaie.
les témoins dans la maison du Temple d’Arras. Frère Chassés de la Palestine, les Templiers se Templiers,
Raoul, templier de Douai, fut reconnu quitte de la trouvèrent dans l’impossibilité de remplir les devoirs
mort de Jean de Wattines, qu’il n’avait tué qu’à son de leur vocation et furent exposés à toutes les con-
corps défendant, et le chevalier Pierre de Douai, pour séquences d’une vie facile et inoccupée. De ces
avoir tiré son épée et poursuivi l’un des frères, fut habitudes d’oisiveté à une décadence morale com-
condamné à dix livres d’amende. plète, il n’y avait qu’un pas. Ce pas fut-il franchi ?
Les bourgeois de Douai, qui voyageaient en Terre- Tout semble l’indiquer. « Mais les accusations portées
Sainte, recevaient des frères du Temple toute espèce contre eux furent si diverses et la preuve en fut faite
de bons offices. Les religieux les protégeaient les par des moyens si iniques, qu’on hésite à croire les
assistaient dans leurs besoins et recevaient leurs der- faits les mieux démontrés. » Au reste, comme on l’a
nières volontés qui étaient ensuite exécutées par les dit avec raison, il ne faut pas se flatter de résoudre
soins des frères de la maison de Notre-Dame. Ainsi, les difficultés qui se présentent dans l’étude de cette
un Douaisien, Jean Legros dit le Croisé, ayant fait son grave affaire, et de trouver une réponse à toutes les
testament en Palestine, frère Jean du Temple délivra objections qu’elle provoque. Le procès des Templiers
l’argent aux enfants du défunt, en présence des éche- aura toujours ceci de commun avec plusieurs autres
vins, qui en donnèrent acte. grands procès inscrits dans l’histoire, d’être débattu Sergent. Compagnie
En 1281, frère Michel, chapelain des chevaliers du selon deux systèmes extrêmes et beaucoup de systè- de reconstitution
Temple, fut délégué pat l’official de Reims à l’effet de mes intermédiaires. La seule chose parfaitement claire médiévale des
révoquer des lettres accordées par la cour épiscopale au milieu de tant d’obscurités, c’est que la cupidité fut Blancs Manteaux.
d’Arras aux curés des paroisses du patronat de Saint- le grand mobile du zèle que Philippe-le Bel déploya
Pierre et contraires aux droits et privilèges des ordres dans cette affaire. Même en regardant comme
mendiants. démontrée la corruption générale des Templiers, on
Commanderie
BIEN QUE FORTEMENT TRANSFORMÉS AU COURS
DES SIÈCLES, LES BÂTIMENTS EN BRIQUES CUITES
AU FEU DE BOIS QUE L’ON PEUT VOIR AU NORD-EST
DE LA VILLE OFFRENT UN INTÉRÊT CERTAIN POUR
L’AMATEUR D’ARCHITECTURE MÉDIÉVALE.
DE L’ANCIENNE « MAISON DES TEMPLIERS »
APPELÉE ENCORE « TEMPLE NOTRE-DAME » NE
SUBSISTENT AUJOURD’HUI QUE L’ENTRÉE MONU-
MENTALE ET UN CORPS DE LOGIS (LA CHAPELLE A
ÉTÉ DÉTRUITE EN 1834), L’ENTRÉE, QUI COMPREND
PORTE CHARRETIÈRE ET PORTE PIÉTONNE, TOUTES
DEUX EN ARC BRISÉ, S’OUVRE SUR UNE COUR. JADIS
UN PASSAGE AU-DESSUS DU PORCHE RELIAIT ENTRE
EUX LES BÂTIMENTS FLANQUÉS DE TOURS. CE PAS-
SAGE A ÉTÉ REMPLACÉ AU XIXE SIÈCLE PAR UN MUR
À MERLONS CRÉNELÉ.

© PHOTO JAN HOSTEN


ne serait pas obligé d’en conclure la culpabilité des frères qui Wasquehal, du pays de Pévèle ; Simon Godin du Cambresis ;
habitaient dans les murs de Douai. Leur éloignement du centre Jean Dupont, de l’Ostrevent ; Melin Delpire du Tournaisis, tous
de l’Ordre et leur pauvreté les plaçaient dans des conditions quatre de la maison de Notre-Dame, et Henri Meerstraet, de
plus favorables à la moralité et à la vie religieuse. la maison de Bruges, qui, au moment de son arrestation, était
On sait que, en vertu des ordres donnés par le roi, tous les de passage à Douai, et se dirigeait vers la mer. Quatre frères
Templiers furent arrêtés le même jour. Le procès s’instruisit avaient été arrêtés dans la maison de Saint-Samson : c’étaient
lentement. Le pape qui, d’abord, avait suspendu les pouvoirs Hugues de Coligny, bourguignon, Jean Piau et Jean Potin, l’un
des archevêques, évêques, prélats et inquisiteurs, et avait évo- et l’autre de l’Artois, et Jacques le Felon, de la banlieue de
qué l’affaire à son tribunal, finit par lever cette défense et par Douai.
permettre aux ordinaires de procéder en toute diligence contre Après lecture des lettres apostoliques et des articles ci-dessus
les religieux en se réservant néanmoins le droit de faire le pro- mentionnés, l’évêque d’Arras fit aux accusés un discours sur la
cès au grand-maître et aux autres principaux officiers. Bientôt conduite qu’ils avaient à tenir : il insista en particulier sur l’obli-
il adressa des bulles aux prélats français, désignant ceux qui gation de dire la vérité, puis il les renvoya en prison.
devaient les assister dans l’instruction en chaque diocèse deux Le lendemain, 21 octobre, le tribunal fit venir frère Hugues
chanoines, deux dominicains, deux frères mineurs. de Coligny, maître de la maison du Temple de Saint-Samson,
lequel, après avoir prêté serment, interrogé sur les quatre
PROCÈS DE CEUX DE DOUAI premiers articles relatifs au reniement du Christ, nia tout leur
contenu.
Le 13 octobre 1307, dans la matinée, le bruit se répandit à
Douai que les Templiers, tant de la maison de Notre-Dame que RELATION DU P. WAUTHIER
celle de Saint-Sanson, avaient été arrêtés par le bailli de la ville,
son lieutenant et ses sergents, et qu’ils avaient été jetés dans la Voila les seuls détails qui nous aient été transmis sur le procès
Vieille Tour. On apprit, quelques jours après, que tous les Tem- des trois Templiers. Ils sont empruntés à une Relation qui fut,
pliers avaient été arrêtés le même jour dans toute la France. dit-on, écrite plusieurs années après l’évènement par le P. W.
La veille de la Saint-Amé, de l’an 1309, c’est-à-dire le 18 (Wauthier), dominicain, l’un des commissaires nommée par
octobre, l’évêque d’Arras, Gérard, arriva à Douai pour officier, l’évêque Gérard, et envoyés par le P. R. (Robert?), prieur des
suivant l’usage, le jour de la fête, et alla loger dans le cloître, Dominicains de Douai, à Pierre de Capis, évêque d’Arras, qui
chez Jean de Marigny prévôt de Saint-Amé, chanoine et chantre l’avait demandée. Le prieur, dit la lettre d’envoi jointe â la pièce,
de l’église de Paris. Le même jour, après souper, il manda deux avait eu une peine extrême à déterminer le P. Wauthier à écrire
dominicains, les plus savants du couvent de Douai, le R. Robert, cette Relation ; il lui semblait que c’était violer un secret ou du
lecteur en théologie et le P. Wauthier, inquisiteur de la foi. Ils moins renouveler la douleur de plusieurs. Cependant il avait fini
trouvèrent au près de lui Jean Mulet, chanoine de Saint-Pierre par accéder au désir manifesté par l’évêque, mais à condition
et de Saint-Amé et prévôt de Béthune, frère Venant de Dechy, que celui-ci ne communiquerait à personne son Mémoire. La
gardien des frères mineurs de Douai et Henri Lanoris, clerc du lettre d’envoi et le fragment contenant les détails auraient été
diocèse d’Arras, notaire impérial. Quand ils furent réunis, il retrouvés, à la fin du siècle dernier, par un P. Dominicain qu’on
leur annonça qu’il s’était rendu à Douai pour informer contre ne nomme point, chargé, après l’incendie de 1775, de mettre
les frères de la Milice du Temple, et que, d’après les pouvoirs en ordre les Archives du couvent et communiqués par lui à M.
qu’il avait reçus, il les choisissait pour l’assister et le suppléer au Guilmot, qui les fit entrer dans son intéressant Mémoire sur
besoin : il ajouta que l’instruction de l’affaire se ferait le 20 du les Templiers. Ces, documents doivent-ils être acceptés comme
même mois à une heure, dans la basse cour du château. authentiques, ou faut-il y avoir l’œuvre de quelque amateur,
Le 20, à l’heure marquée, l’évêque produisit des lettres de qui aura voulu suppléer au silence de l’histoire sur la destinée
Clément V qui lui ordonnaient d’informer les hommes pieux des Templiers de Douai ? II semble qu’un faussaire qui se serait
qu’il avait choisis, touchant les dérèglements (pravitate) des donné la peine de fabriquer ces documents ne serait pas arrêté
Templiers, dans toute l’étendue de son diocèse. On exhiba si tôt en chemin, et qu’il nous aurait fourni des renseignements
ensuite aux commissaires une longue série d’articles sur les- précis sur le cours et l’issue du procès. D’autre part, le domini-
quels ils devaient interroger les frères. Bientôt les sergents du cain, auteur de la découverte, n’est pas nommé ; on ne dit pas
bailli de Douai amenèrent devant le tribunal, les Templiers où les deux pièces étaient conservées, ni ce qu’elles sont deve-
retenus en prison depuis deux années entières : c’étaient Pierre nues ; en outre, on a relevé une ou plusieurs erreurs dans les
de Montigny (Hugues de Coligny), du pays d’Artois ; Jean de noms attribués aux membres de la commission épiscopale ; la

12 - Templarium
Les Templiers à Douai
LA PROPRIÉTÉ DE LA MAISON NOTRE-
DAME AVAIT UNE FORME ELLIPTIQUE;
ELLE ÉTAIT ENTOURÉE DE LARGES
FOSSÉS POISSONNEUX, COMBLÉS
ENSUITE PAR LES FORTIFICATIONS :
AU NORD-EST, LA CHAPELLE ET LE
BÂTIMENT PRINCIPAL À L’ASPECT DE
FORTERESSE, ET L’HABITATION PAR-
TICULIÈRE DU SUPÉRIEUR. À L’OUEST,
UNE PRAIRIE AVEC FERME ET MOULIN.
SEULS SUBSISTENT ACTUELLEMENT,
AU SUD-OUEST, L’ENTRÉE FLANQUÉE
DE DEUX TOURELLES ET ORNÉE, À LA
CLÉ DE VOÛTE DE LA PORTE, D’UNE
ARMOIRIE REPRÉSENTANT UNE CROIX
DE MALTE ET QUELQUES CONSTRUC-
TIONS, DONT L’UNE COMPORTE UNE
TOURELLE À L’EXTÉRIEUR ET UNE
BELLE CHEMINÉE À L’INTÉRIEUR.

© PHOTO PHILIPPE RINSVELDT LE PLAN DE LA MAISON DES TEMPLIERS


composition de cette commission n’est pas entièrement confor- en même temps que lui, et déclara qu’il réclamait le droit de
me aux instructions pontificales, puisqu’on n’y voit figurer qu’un la défendre par lui-même en personne et par tous moyens, tel
frère mineur au lieu de deux ; enfin, ce qui est un argument qu’il l’avait embrassé et que le Saint-Siège apostolique l’avait
beaucoup plus grave que les précédents, le document examiné approuvé.
suppose la présence à l’hôpital Saint-Samson des frères du L’ordre des Templiers fut supprimé dans le concile de Vienne,
Temple que les pièces vues et citées par l’abbé Canquelain ne le 3 avril 1312. On sait que le pape s’était réservé le jugement
nous permettent pas d’y placer. Malgré cette difficulté sérieuse, des principaux officiers de l’Ordre ; parmi eux, Hugues Péraud,
nous ne voulons émettre qu’un doute, et nous n’avons pas la avait pris part, en qualité de précepteur de la maison d’Arras,
prétention d’infirmer la valeur des documents, d’ailleurs intéres- à la convention passée en 1290 avec les échevins de Douai, et
sants, qui nous ont été transmis par M. Guilmot. était, à l’époque où il fut arrêté, visiteur du prieuré de France.
Ayant persisté dans ses aveux, il échappa à la mort, et fut con-
ISSUE DU PROCÈS damné à une prison perpétuelle.

Quel fut le sort des Templiers à Douai ? Plouvain, dans ses BIENS DES TEMPLIERS
Souvenirs, dit que, malgré les efforts de Jean de Marigny, qui
sans doute, avait reçu, en courtisan docile, les instructions de Le pape, par la bulle qui supprimait l’Ordre des Templiers (elle
Philippe le Bel, l’inquisiteur le P. Wauthier, secondé par les inten- ne fut expédiée que le 2 mai 1312), attribuait ses biens à l’Or-
tions bienveillantes de l’évêque Gérard, parvint, en mai 1309, dre de Saint-Jean de Jérusalem. Malgré l’interdit porté contre
à faire mettre en liberté les prisonniers qui furent ainsi à l’abri tous ceux qui auraient osé s’en emparer, ces religieux durent
des tortures et du bûcher réservés à un grand nombre de leurs faire de grands efforts pour les recouvrer.
confrères. Ces dires de M. Plouvain, qu’il n’est malheureuse- Des historiens prétendent que Philippe-le- Bel se contenta de
ment pas possible de contrôler, doivent être acceptés comme retenir une partie des biens immeubles des Templiers pour
vraisemblables. Ainsi que M. Guilmot le fait observer avec couvrir les frais du procès. Toutefois, grâce sans doute à la
raison, le supplice des Templiers, s’ils avaient été condamnés, connivence du vidame d’Amiens qu’il avait chargé de la garde
aurait laissé des traces dans les Registres de l’Hôtel-de-Ville et des biens que l’Ordre possédait en Flandre, il conserva d’abord
dans le Codex Argenteus de Saint-Amé, où l’on notait les évé- la jouissance des revenus de la maison de Notre-Dame. On
nements les plus remarquables arrivés en la ville et surtout ceux voit, en effet, que des bourgeois s’étant plaints aux chevaliers
qui se rattachaient à l’ordre religieux. de Saint-Jean de Jérusalem de ce que leurs rentes foncières
avaient été portées au-delà du taux ancien, il leur fut répondu
PHIL. DE DOUAI, TEMPLIER que cela s’était fait à l’époque où les biens des Templiers
étaient entre les mains du roi. Au reste, ils ne prirent possession
Outre les membres de l’Ordre qui se trouvaient à Douai â de la maison de Notre-Dame qu’après la mort de Philippe le
l’époque où les poursuites commencèrent, il en est quelques Bel, qui arriva le 29 novembre 1314.
autres dont on doit parler en raison des rapports qu’ils avaient Les maisons de Notre-Dame et de Saint-Samson ont continué,
avec la ville de Douai. Parmi les Templiers qui furent jugés à après la suppression des Templiers à appartenir à la con-
Paris figure un frère Philippe de Douai, (de Duaco), au diocèse grégation religieuse des frères hospitaliers de Saint-Jean de
d’Arras, ainsi nommé sans aucun doute parce qu’il était enfant Jérusalem.
de la cité. Il n’était que frère servant. Il comparut devant la
commission épiscopale le lundi 9 février 1310, avec un cer-
tain nombre de frères des diocèses de Tournai, de Cambrai
et d’Amiens. Interrogé tant séparément qu’avec ses frères, il
BIBLIOGRAPHIE
répondit qu’il voulait défendre son Ordre tel qu’il était lorsqu’il
y avait été reçu, et qu’il en avait toujours observé les règles, Mémoire sur les anciennes habitations rurales
et demanda qu’on lui permit de recevoir les sacrements de la du département du Nord
sainte Église, comme bon et fidèle chrétien. Au mois de mars, par Guilmot, Douai, 1806.
il comparut de nouveau devant la commission. Le jeudi 2 avril, Souvenirs à l’usage des habitans de Douai
on lui demanda s’il consentait à ce que des procureurs fussent par Pierre Plouvain, Notes pour servir à l’histoire de cette ville
nommés pour la défense de son Ordre : il s’y refusa conjointe- jusque et inclus l’année 1821. Deregnaucourt, Douai,1822. .
ment avec un certain nombre de ses frères qui comparaissaient

Templarium - 13
Templi domorum citra Francia

Les sceaux des Templiers


et le temple de Jérusalem
À PARTIR DE L’OUVRAGE ÉLÉMENTS DE PALÉOGRAPHIE DE L’HISTORIEN M. DE WAILLY PAR LEQUEL par Jean
IL AJOUTAIT LE POIDS DE SON ASSENTIMENT SUR LES PRINCIPES LONGUEMENT DÉVELOPPÉS PAR LES
Narbonne
BÉNÉDICTINS, QUELQUES CRITIQUES SUR LE SENS DONNÉ À UNE LÉGENDE DES SCEAUX DE L’ORDRE
DU TEMPLE, ET SUR L’EXPLICATION D’UN AUTRE SCEAU DU MÊME ORDRE SONT OBSERVÉES ICI. Historien

SCEAUX DES DEUX CAVALIERS à la fois plus gênante et plus nuisible aux exer-
Chevalier. Compagnie de cices, aux courses, aux combats, qui furent, dès
reconstitution médiévale La mémoire d’un ordre qui semble avoir été une l’origine de la nouvelle milice, la vie habituelle
des Blancs Manteaux. institution même de la France, d’où, il a reçu de ses membres ? Leur devoir essentiel n’était-il
dix-huit de ses grands-maîtres, vaut bien qu’on pas, en effet, de veiller à la sûreté des routes, de
remette plus d’une fois à l’étude les monuments protéger les voyageurs, et de voler, au premier
si rares de son histoire. avis, sur tous les points où les pèlerins pouvaient
Le sceau des chevaliers du Temple, selon les être attaqués par les maraudeurs arabes : Ut vias
Bénédictins, avait été donné sans explication et itinera, maxime ad salutem peregrinorum, con-
dans le recueil de l’historien Pérard, à la suite tra latronum et incursantium insidias, pro viribus
d’un acte de 1190, auquel il était appendu. Ce conservarent (Pour qu’ils protègent autant qu’ils
type représente deux cavaliers, montant un même le peuvent les routes et des chemins, surtout
cheval, avec cette inscription gravée autour : pour assurer la sécurité des pèlerins, contre les
SIGILLVM MILITVM XPISTI. « Le sceau des che- embûches des voleurs et des assaillants.). Il fallait
valiers du Christ. » C’était le nom qu’on donnait assurément, pour un tel, service, des hommes
souvent aux Templiers, et saint Bernard, dans l’ex- alertes, bien montés, et surtout libres de leurs
hortation chaleureuse qu’il adressa à la nouvelle mouvements.
milice, sous la forme d’un éloge, semble le pré- Les Bénédictins ont voulu dire, sans doute, que
férer à celui de chevaliers du Temple, en écrivant les premiers Templiers, manquant de chevaux,
à Hugues de Païens, leur premier grand-maître : étaient obligés d’alterner pour faire servir tour à
Hugoni, militi Christi et magistro militiœ Christi, tour la même monture à deux hommes. Eh bien,
Bernardus, Clarœ Vallis, solo nomine, abbas. arrêtée même à ce sens, l’interprétation ne sem-
Si la légende s’explique sans peine, il n’en ble pas encore se justifier.
est pas ainsi de l’emblème.
On voit généralement dans les SOURCE DE LEUR HUMBLE COMMUNAUTÉ
deux cavaliers à cheval sur
le même destrier l’image Matthieu Paris, dont les savants religieux invo-
de la pauvreté primitive de quent l’autorité, dit seulement que le sceau des
l’Ordre du Temple. Cette Templiers rappelle les humbles origines de leur
opinion des Bénédictins communauté : Unde, propter primitive pauperta-
repose sur un passage tis memoriam, et ad humilitatis observantiam, in
assez formel, il est vrai, sigillo eorum insculpti sunt duo unum equum equi-
de Matthieu Paris ; elle tantes (en mémoire de leur pauvreté primitive, et
est pourtant contesta- humble observance, le sceau oriental représente
ble. deux cavaliers chevauchant ensemble un che-
Les objections seraient, val). Ainsi, d’après le moine de Saint-Albans, le
sans doute, beaucoup sceau aux deux cavaliers exprimait un symbole,
moindres si on consi- memoria, et pas autre chose. Au reste, Matthieu
dérait l’image du sceau Paris écrivait plus de cent ans après la fondation
purement comme un de l’Ordre de Hugues de Païens ; témoignage
emblème. Mais les auteurs insuffisant pour interroger de plus près les usages
de la Diplomatique, de l’Art et les textes du temps même où l’association prit
de vérifier les dates, et plu- naissance.
sieurs écrivains après eux, ont tiré Hugues de Païens et ses compagnons n’étaient
du rapprochement de ce sceau et du point de riches seigneurs, cela paraît certain ;
témoignage du chroniqueur anglais, la consé- ils n’avaient à Jérusalem ni terres ni maisons où
quence positive que, « dans les commencements fonder leur communauté ; ils durent donc deman-
de leur institut, les chevaliers du Temple étaient si der l’hospitalité du roi Baudouin, qui leur donna
pauvres, qu’ils n’avaient qu’un cheval pour deux.» quelques dépendances de son palais: Quibus
Cette explication parait absolument inadmissible. quoniam neque ecclesia erat neque certum habe-
Les Bénédictins ont-ils en la pensée que les bant domicilium, rex in palatio suo, quod secus
premiers hommes d’armes affiliés en 1118 par templum Domini ad australem habet partem, eis
Hugues de Païens en aient été réduits, dans leur ad tempus concessit habitaculum (À tous ceux qui
dénuement, à monter quelquefois deux sur le n’ont pas d’église ni de domicile assuré, le roi
même cheval ? Concevrait-on une disposition accorde pour un temps l’habitat dans son palais,

14 - Templarium
Les sceaux des Templiers et le temple de Jérusalem

qui se trouve à côté du temple du Seigneur, dans SIGNE DE L’UNION ET DU DÉVOUEMENT JÉRUSALEM, CÔTÉ
la partie australe). Ce n’est pas étonnant : tous les
croisés, même les nobles, n’étaient pas devenus SUD-EST (EXTRAIT
Au lieu d’être l’emblème d’un état de gêne qui,
propriétaires terriens en Syrie, encore moins dans dans tous les cas, n’a pu jamais avoir les consé- DE LA LITHOGRA-
l’intérieur de la ville de Jérusalem, où il s’agissait quences impraticables qu’on lui donne, le cheval PHIE DE DAVID
d’établir le nouvel Ordre. Mais il faut pourtant aux deux cavaliers était plutôt le signe de l’union ROBERTS).
remarquer que Hugues de Païens et la plupart des et du dévouement, recommandés dans tous les À DROITE LE DÔME
hommes d’armes associés à son projet étaient ordres religieux, nécessaires surtout dans une DU ROCHER, À GAU-
chevaliers, cela est dit positivement par Guil- association d’hommes destinés à braver ensemble CHE, LA MOSQUÉE
laume de Tyr : Quidam nobiles viri de equestri les périls de la vie militaire. C’est pour entretenir D’AL-AQSA
ordine (Certains nobles de l’ordre équestre) ; et, ces sentiments d’égalité et de fraternité, vieilles
bien qu’ils aient dès le principe consenti à recourir vertus du christianisme, qu’on faisait manger les
à la piété publique pour subvenir à leurs besoins, Templiers, deux à deux, dans leurs réfectoires
il semble difficile d’admettre qu’ils n’aient pas « Duos et duos manducare generaliter oportet »
possédé ou sollicité, dès la première pensée de (il convient de manger en général deux par
leur réunion, les moyens d’acheter des chevaux deux) et méritaient ainsi les éloges de l’abbé de
dans un pays ou les chevaux sont à si bas prix. Clairvaux : Micas universae multitudinis esse cor
Enfin, la règle que leur donna le pape Honorius unum et animam unam. Persona inter eos minime
en cette année-là, dix ans après leur première accipitur; defertur meliori, non nobiliori. Honore
association, apporte une preuve décisive. Il est dit se invicem prœveniunt ; alterutrum onera portant,
dans ce règlement, où la pauvreté encore réelle ut sic adimpleant legem Christi (Tu t’étonnes
de l’Ordre est attestée à chaque article, non pas que toute cette multitude n’ait qu’un seul cœur
que les chevaliers devront faire servir un cheval à et qu’une seule âme. Chez eux, le statut social
deux hommes, mais que chaque chevalier pourra importe peu. On s’en remet au meilleur, non au
avoir jusqu’à deux ou trois chevaux, et même plus noble. C’est par l’honneur qu’ils cherchent à
davantage : Unicuique vestrorum militum tres se surpasser les uns et les autres. Ils prennent les
equos licet habere, quia eximia paupertas amplius charges l’un de l’autre, pour remplir ainsi la loi
non permittit impr¦sentiarum augere, nisi cum du Christ).
magistri licentia (À chacun de vos soldats, il est
permis de posséder trois chevaux, parce qu’une EMPREINTE DES SUPÉRIEURS
extrême pauvreté ne permet pas pour le moment
d’aller plus loin, sinon avec l’autorisation du maî- Le sceau aux deux cavaliers, dont on retrouve
tre). Et, en effet, les Templiers étaient renommés des empreintes apposées à diverses chartes
pour le nombre et la bonté de leur cavalerie ; on des archives nationales (Acte de 1202, acte de
disait déjà d’eux, du temps de Hugues de Païens, 1259, etc), tous ces documents, ainsi que l’acte
qu’ils aimaient à avoir de bons et vigoureux che- de 1190, publié dans le recueil de M. Pérard,
vaux : Equos habere cupiunt fortes et veloces (Ils émanent de commandeurs ou de lieutenants, du
veulent avoir des chevaux vigoureux et rapides). grand-maître, délégués en France ; mais le type
Il semble qu’en présence de ces textes positifs, qui les scelle n’était point réservé exclusivement
pris à une époque si voisine de la création de aux officiers exerçant leurs fonctions dans ce pays
l’Ordre, il est impossible d’admettre que les pre- ; il servait à tous les dignitaires de l’Ordre, tant
miers Templiers n’aient jamais été obligés de faire en Occident qu’en Orient. On le retrouve sur
servir le même cheval à deux hommes. Et dès lors le sceau de plomb, certifiant un accord conclu
l’interprétation qui fait de l’image représentée sur à Saint-Jean d’Acre, le 15 octobre 1221, entre
le sceau de 1190 le symbole de leur extrême les Templiers et les Hospitaliers. Le flan de métal
dénuement, perd son plus sûr appui. pendu à la charte a été frappé d’une double
empreinte d’égale dimension : l’une offrant les

Templarium - 15
Templi Domorum citra Francia
SCEAUX DE
L’ORDRE DU TEMPLE

1235►

◄1255

deux cavaliers, c’était le sceau du grand-maître Pierre munauté sous le nom de Domus Dei Templique Salomonis.
de Montaigu qui intervient nominativement dans l’acte La règle en français, rédigée plus tard par l’Ordre même,
; l’autre représentant un emblème qui servait de sceau leur donne aussi ce nom Art. 47: « Ils sont chevaliers en la
général à l’Ordre, quand il agissait en communauté. Un meson de Dieu et du temple Salomon... Art. 48 : A tous les
usage semblable s’observait dans l’expédition des chartes chevaliers seculiers qui desirent, o pur curage, servir a ter-
des monastères, où l’abbé et le couvent étaient toujours mine à Jhesu-Crist et à la meson dau temple Salomon, nos
nommés collectivement, bien qu’ils eussent presque tou- commandons achiter fealment cheval convenable » Une
jours des sceaux distincts. pièce du cartulaire de Champagne, de 1177, citée par du
Cange, les appelle aussi fratres militiœ Salomonis.
SPHRAGISTIQUE TEMPLIÈRE Quand au sceau de 1255 qui offre plus de difficulté que
tous les autres, l’acte auquel il pend est muni de deux
Les observations apportées aux sceaux des deux cavaliers, sceaux dont les sujets sont semblables, sauf quelques
concernent deux types que M. de Wailly a le premier modifications dans les légendes, à ceux du flan de 1221.
signalés, et qui dépendent d’actes de 1171 et 1255, con- La charte de 1221 et celle de 1255 sont scellées du
servés aux archives. type particulier des grands-maîtres et du type général de
Le sceau de 1171 n’a qu’une empreinte, rappelant ou l’Ordre du Temple, ou sceau aux deux cavaliers, que les
représentant le Temple de Jérusalem par une coupole éle- documents désignent quelquefois sous le nom de sigil-
vée au-dessus de deux arcades ; c’est le même sujet qui se lum consuetum. Sur l’acte de 1221, dressé en Syrie, les
trouve, bien mieux exécuté, au revers de la bulle de plomb empreintes sont contre apposées aux deux revers du sceau
de 1221. Le travail du coin de 1171 est extrêmement qui est en plomb, suivant un usage très fréquent dans
grossier, et le dessin de l’image si incorrect que le dôme, les chancelleries du midi de l’Europe et des états francs
confondu avec son soubassement en arcades, semble for- d’Orient ; sur la charte de 1255, rédigée en France, les
mer un globe ; mais c’est bien incontestablement une cou- deux types sont séparés et appliqués chacun sur une ron-
pole, la grande coupole du Temple, et par suite le Temple delle de cire sans revers. Ce sont, de part et d’autre, les
même, que le graveur a voulu figurer sur le sceau. mêmes emblèmes, avec une connexité évidente. Au droit
On sait que, dans la sphragistique, la particularité saillante du plomb de 1221, on voit les deux cavaliers montant le
de l’objet ou de la pensée que l’on veut rappeler équivaut cheval unique ; autour le commencement de la légende:
à sa représentation complète. La Tour ou le Donjon est le
signe du château et de la seigneurie ; la Porte ou le Beffroi,
le signe de la cité ; par l’application de la même idée, la
Coupole, qui est l’objet le plus apparent des édifices réu-
nis dans le grand espace qu’on appelait le Temple, où se
trouve aujourd’hui la mosquée d’Omar à Jérusalem. Cette
Coupole avait été adoptée et placée sur les sceaux par
l’Ordre du Temple, comme le signe qui indiquait le plus
naturellement son nom, son origine et sa première rési-
dence. Les chevaliers de Saint-Jean de l’Hôpital figuraient
de même sur leur sceau conventuel un malade alité, en
souvenir du but primitif de leur communauté.
Après ces détails, la traduction de la légende du sceau de
1171 ne laisse plus d’incertitude. L’inscription est compo-
sée de ces mots : + MIL. TEMPLI SAL., que M. de Wailly
pense avoir la signification de : + Militia Templi Salutis.
Le Temple du Salut, ce serait le Temple de la Résurrec-
tion, l’église du Saint-Sépulcre, où les frères de l’Ordre
de Hugues de Païens n’eurent jamais rien à prétendre ;
mais il s’agit évidemment ici du Temple même qu’habi-
taient ces chevaliers, et dès lors je crois devoir lire Militia,
ou Milites Templi Salomonis. Les frères tenaient à honneur
de conserver ce nom glorieux qu’ils avaient adopté dès la
création de leur Ordre. En 1128, Honorius II les appelait
dans leur première constitution : Pauperes commilitones
Christi, Templique Salomonici; l’article 30 désigne la com-

16 - Templarium
Les sceaux des Templiers et le temple de Jérusalem

Q
uelques observations de rectif leur relation, bien qu’il ait ailleurs soigneu- Templi dicuntur (Ceux qui ont une habitation dans
la description du Temple sement séparé l’El-Aksa de la Sakhra. Il est en le palais du roi, qui se trouve près du Temple du
de Jérusalem, monument effet essentiel de bien distinguer les deux édifices, Seigneur, comme nous venons de le dire, sont
confondu celui du Saint- si l’on veut, d’abord se représenter exactement le appelés, pour cette raison les frères de la milice
Sépulcre : Le Temple de Temple tel qu’il est, et en second lieu, se rendre du Temple.)
Jérusalem s’appelle, dans compte de certaines dénominations employées D’après Emal Eddin, secrétaire de Saladin, il
son ensemble, El-Haram, la Maison de Dieu, fréquemment dans les chroniques et les chartes parait que les Templiers occupaient l’étage infé-
dénomination antique que les musulmans ont du temps des croisades. rieur, le rez-de-chaussée du palais royal ; car cet
religieusement conservée, et qu’ils n’ont don- Dans le vaste enclos du Haram, ce qui frappe sur- historien, en faisant connaître les purifications
née qu’à un seul édifice autre que celui-ci, à la tout les regards, c’est la mosquée de la Sakhra, effectuées dans les édifices de la ville de Jéru-
grande mosquée de la Mecque. Le Haram de isolée sur une plate-forme, au milieu d’une vaste salem, reprise aux chrétiens par le sultan son
Jérusalem est situé sur le mont Moria, vis-à-vis cour, et couronnée par une superbe coupole, qui maître, rapporte que les Templiers avaient élevé
de la montagne des Oliviers, dont il est séparé domine tout l’enclos. On est naturellement porté un mur devant le mihrab de El-Aksa, c’est-à-dire,
par la vallée des Tombeaux et le Cédron, sur à croire que cette mosquée, ainsi disposée, est devant la niche qui est pratiquée dans la nef de
l’emplacement même où s’élevait autrefois le le monument principal du lieu. Toutefois, et si la mosquée, comme dans tous les autres temples
temple construit par Salomon avec les bois du majestueux que soit son emplacement, la Sakhra musulmans, pour indiquer aux fidèles la direction
Liban, renversé par les soldats de Nabuchodo- n’a dans la liturgie musulmane que le rang de de la Mecque, que doivent suivre leurs regards et
nosor, reconstruit par Hérode et détruit pour la chapelle ; ce n’est qu’une dépendance de la mos- leurs prières.
dernière fois par Titus. C’est là que, Marie avait quée d’Omar, comme les baptistères de Pise et de Jacques de Vitry décrit encore le Temple en ces
présenté le Sauveur à sa naissance, que Jésus Florence, dont elle rappelle la forme, dépendent termes : Templum autem Domini sanctum, quod
devenu enfant avait étonné les prêtres de sa des églises voisines. Son diamètre est de 29,7 m. in monte Moria a Salomone constructum est,
sagesse précoce ; c’est des degrés de cet édifice El-Aksa, la grande mosquée, la vraie mosquée, inter loca soncta nullatenus est prœtereundum.
qu’il chassa les marchands, et c’est le voile dont est un vaste vaisseau à sept nefs, de 66 m de In hoc loto supra rupem, quœ adhuc in eodem
le Saint des Saints y était couvert qui se déchira long sur 49,5 m de large à l’intérieur, et termine loco consistit, dicitur stelisse et apparuisse David
après la passion du Golgotha. le Haram vers le sud. exterminator angelus… inde Saraceni Templum
Le Temple, indépendamment de la vénération Pendant les croisades, l’enclos, avec tous ses bâti- dominicum usque hodie Rupem appellant (Le
qui s’y rattachait comme monument des rois de ments, s’appelait communément le Temple; mais Temple sacré du Seigneur, qui a été édifié sur le
l’Ancien Testament, avait donc pour la piété des il avait conservé aussi son autre nom antique de mont Moria par Salomon, ne doit être aucune-
chrétiens un caractère plus auguste encore ; il Maison de Dieu, Domus Dei, adopté successive- ment laissé de côté parmi les lieux saints. Dans
avait été fréquenté par Jésus, il avait été sanc- ment par les juifs, les musulmans et les chrétiens. ce lieu, au dessus de la roche qui se trouve là au
tifié par sa présence et celle de sa mère. Aussi La mosquée El-Aksa, c’est le Temple Salomon ; même endroit, s’est tenu l’ange exterminateur qui
les écrivains chrétiens l’ont-ils souvent appelé le la Sakhra, c’est le Temple Dominus ou Temple est apparu à David. Pour cette raison les Saraceni
Temple du Christ, comme les Templiers étaient Domini, noms qui reviennent si souvent dans appellent aujourd’hui le Temple du Seigneur la
quelquefois nommés les chevaliers du Christ, Guillaume de Tyr, dans Jacques de Vitry, dans Roche.)
bien que le tombeau du Rédempteur ne fut pas le cartulaire du Saint-Sépulcre, et dans le code Et plus loin, après avoir rappelé les divers prodiges
renfermé dans son enceinte. Le Saint-Sépulcre diplomatique de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusa- opérés dans ce lieu, il ajoute : Est prœterea Hie-
est situé à l’autre extrémité de la ville, près lem, publié par Paoli. rosolymis templum aliud, immensœ quantitatis et
de la route de Jaffa, et n’a rien de commun La Sakhra avait été convertie en une église, que amplitudinis, a quo frates militiœ Templi, Templarii
avec le Temple, ni par son histoire ni par son desservait un chapitre de chanoines; son chef nominantur, quod templum Salomonis nuncupatur,
architecture. L’église du Saint-Sépulcre est toute prenait le titre de prieur du Temple ou d’abbé forsitan ad distinctionem alterius quod specialiter
chrétienne, le Temple est d’une construction du Temple Domini; El-Aksa, et ses dépendances, Templum dominicum appellatur (Il y a en outre
entièrement arabe. transformé en palais, était devenu la résidence un autre temple à Jérusalem d’une taille et d’une
L’El-Haram, ainsi que l’ancien temple hébraï- des rois de Jérusalem. Guillaume de Tyr donne ampleur considérable, les frères de la milice du
que, forme dans Jérusalem un quartier à part, sur ces faits des renseignements très positifs qui Temple sont appelés les Templiers . Ce temple est
composé de mosquées, de chapelles, d’écoles, précisent un point essentiel de la topographie appelé le temple de Salomon, peut être pour le
de maisons, de cours et autres dépendances, de Jérusalem sous les princes croisés, auquel distinguer de l’autre qui est appelé précisément le
renfermées dans une vaste enceinte en paral- le silence des anciens voyageurs semble donner Temple du Seigneur).
lélogramme, qui rappelle la, disposition même quelque intérêt. « Dans mes promenades au Dans un tableau des événements d’Orient au
du tabernacle portatif des Israélites errants dans milieu de Jérusalem, écrivait l’un des auteurs de XIIIe siècle, qui semble extrait d’une lettre, et
le désert. la Correspondance d’Orient, en avril 1831, je que l’on attribue aussi à l’évêque de Saint-Jean
Les Arabes musulmans, devenus maîtres de la cherche les palais des rois francs, j’interroge toute d’Acre, se trouvent ces détails, d’où les citations
ville de David, dès le premier siècle de leur ère chose pour savoir où fut leur demeure ; mais rien précédentes reçoivent encore plus de précision :
et le sixième de J. C., laissèrent aux chrétiens ne me répond dans cette cité morne, où tout est In Templo Domini abbas est et canonici regulares.
les églises qui s’y étaient élevées depuis la con- muet, les hommes comme les ruines. » Et sciendum est, quod aliud est templum Domini,
version de Constantin ; mais ils se réservèrent Heureusement l’archevêque de Tyr le précise aliud templum militiœ. Isti clerici, illi milites (Dans
l’emplacement du Temple auquel se rattachaient dans le chapitre 3e du VIIIe livre de son histoire. le Temple du Seigneur, il y a un abbé et des
les traditions de l’Ancien Testament, acceptées Après avoir décrit le Golgotha et le mont Sion, réguliers canoniques. Et il faut savoir que le
et consacrées par Mahomet dans sa religion l’historien ajoute, au sujet du mont Noria, dont il temple du Seigneur et le temple de la milice sont
nouvelle. Omar jeta en ce lieu, couvert encore fait connaître les monuments In altero veto monte, différents. À l’un des clercs, à l’autre des soldats).
de ruines au sixième siècle, les fondements de qui in parte est orientali, in declivo ejus, Templum ce texte est cité, parce qu’appartenant à l’époque
la mosquée qui porte son nom ; les califes, ses Domini est .... ab austre vero domum habet où Jérusalem était définitivement retombée au
successeurs, élevèrent les divers édifices qui regiam, quœ vulgari appellation Templum Salo- pouvoir des musulmans, il montre les mêmes
l’entourent, et notamment la mosquée de la monis appellatur (Sur l’autre mont qui se trouve dénominations conservées à la fin du règne des
Roche ou de la Sakhra, dont la grande coupole sur la partie orientale, sur sa pente, se trouve le rois francs, comme elles ont été trouvées dès les
recouvre la pierre Vénérée où Jacob reposait sa temple du Seigneur. Au nord, il présente la maison premiers temps. Il est emprunté à la description
tête, lorsqu’il vit en songe l’échelle mystérieuse royale que l’on désigne communément comme de Jérusalem : « Entre le mur de la cité et le mur
communiquant de la terre au ciel. le Temple de Salomon). Le traducteur français des portes Oires (Portes dorées ; porte à l’est de la
Au XIe siècle, les croisés, en occupant tous ces connaissait Jérusalem, car il a très exactement mosquée El-Aksa, et murée dès le temps des rois
lieux, se bornèrent à faire les changements que rendu toute cette description : « El pendant, siet francs) si estoit li Temples. A mein destre, si come
nécessitaient le culte chrétien et la nouvelle li Temples que la laie gent apele le Temple Domi- en issoit de ces portes, estoit li Temples Salomon,
destination donnée à quelques édifices. Cela nus, là où David acheta place por mettre l’arche là où li frère du Temple manoient. A la droiture
résulte du témoignage concordant des historiens nostre Seigneur et Salomon i fist le temple par le des portes Précieusses et des portes Oires estoit li
chrétiens et des chroniqueurs arabes. commandement Dame Dieu .. Devers midi siet la moustiers du Temple Domini. Et si estoit en haut,
Au XIIIe siècle enfin, les musulmans, rentrés à meson reaux que l’on apele le Temple Salomon, si come il monta aus de grez haus. Et quant en
Jérusalem, rétablirent au Temple les ministres etc. » montoit ces degrez, si trouvoit on moult large ;
et les emblèmes de l’islamisme. Mais à travers C’est donc là, dans la mosquée El-Aksa, dans et cis pavement aaloit tout entour le moustier du
toutes ces révolutions, l’El-Haram resta, dans le Temple Salomon, qu’habitait, comme ses Temple. Li moustiers dou Temple estoit tout rons. »
son ensemble, ce qu’il avait été dès les premiers prédécesseurs, le roi Baudouin II, quand, en Ces mots semblent faire allusion à l’expulsion, des
califes et ce qu’il est encore aujourd’hui, sauf l’année 1118, il céda à la confrérie militaire de marchands du Temple par Jésus-Christ.
quelques additions faites par les Turcs. Hugues de Païens une partie de son palais, et Ce chroniqueur anonyme qui représente les lieux,
Dans le nombre de ces édifices, deux surtout quand les chanoines du Temple Domini, établis parait avoir écrit dans la seconde moitié du XIIIe
sont remarquables : ce sont la mosquée d’Omar, probablement à la Sakhra comme chapelains de siècle. L’édifice octogone de la Sakhra, l’ancienne
qu’on appelle aussi El-Aksa, on Mosquée d’oc- la demeure royale, louèrent aux frères, pour leurs église du Temple Domini, à laquelle il affecte plus
cident, relativement à celle de la Mecque, et la dégagements, une cour située près du temple. particulièrement le nom de Temple, paraît en effet
mosquée de la Sakhra, quelquefois nommée le Telles sont les circonstances qui firent donner aux tout rond, comme il le dit ; et la mosquée El-Aksa,
Dôme on la coupole Sakhra. Les anciens voya- nouveaux religieux le nom de Chevaliers de la ou Temple Salomon, a bien les vastes propor-
geurs ont souvent réuni ces deux monuments milice du Temple, ou Chevaliers du Temple : Qui, tions qu’indiquent ces mots de Jacques de Vitry :
sous le même nom, tout comme le savant auteur quoniam juxta Templum Domini, ut proediximus, Immenses quantitatis et amplitudinis templum.
de la Palestine, M. Munck, a reproduit sans cor- in palatio regio mansionem habent, fratres militioe

◄ PETITE COUPOLE DU SAINT-SÉPULCRE ÉDIFIÉE PAR LES CROISÉS


Templarium - 17
Templi Domorum citra Francia

SIGILLVM MILITVM ; au revers, la coupole du Temple, avec monument du Temple même qu’il faut nécessairement
la fin de la légende : DE TEMPLO CRISTI. Sur les sceaux chercher l’explication de cette inscription curieuse : Sigil-
de 1255, celui du grand-maître offre de même l’emblème lum tube templi Christi.
des deux cavaliers ; mais ce type étant destiné à servir sans M. Jal, auteur d’un mémoire relatif aux croisades de saint
contre-sceau, sa légende a un sens complet SIGILLVM Louis, a cité deux documents provenant des registres
MILITVM XPISTI ; le deuxième sceau, type de la commu- d’un notaire de Gènes, des années 1250 et 1253, dans
nauté, pareil au revers du sceau de Paoli, représente le lesquels il est question de chartes de l’Ordre du Temple
Temple avec cette inscription dont les signes d’abréviations scellées, sigillo tubœ domus Templi, ou sigillo tubœ Templi.
sont : S’. TVBE. TEMPLI XPI Ω Ces sceaux étaient évidemment pareils à celui qui scelle le
document de 1255 des archives de Paris. M. Jal, a signalé
LA MOSQUÉE DE LA ROCHE ce rapprochement et éloigné pourr de bonnes raisons,
les diverses explications que l’on a données an sujet de
La coupole du Temple ne s’offre plus ici, comme dans Tube.
le sceau de 1171, sous une forme grossière et presque Le savant M. Quatremère pense que ce mot doit se lire
méconnaissable ; c’est un beau dôme moresque, élevé au- turbe, et lui donnant le sens de militia, explique ainsi la
dessus de quatre pans en arcades qui rappellent évidem- légende du sceau Sigillum turbe Templi, le « Sceau de la
ment le pourtour octogonal du monument de la Sakhra. milice du Temple. » Mais turba avait-il bien le sens de mili-
La mosquée de la Roche était surmontée d’une croix, à tia, au Moyen-âge ou dans l’antiquité ? Les deux mots ne
l’époque où elle se nommait le Temple du Seigneur ou le représentaient-ils pas, au contraire, des idées opposées de
Temple du Christ, la croix figure sur nos sceaux à son som- corps réguliers et de foule désordonnée ? D’ailleurs, il n’y
met, et sert en même temps de sigle initial aux légendes. a aucun signe d’abréviation au-dessus du mot TVBE, ni
Tout s’explique donc aisément dans l’emblème ; et il ne dans le sceau de 1255 ni dans les copies des documents
reste plus qu’à trouver la signification de la légende. de Gênes, et cette circonstance, qui ne parait pas être
Si, comme le pense M. de Wailly, elle doit se lire ainsi : fortuite, s’oppose aussi bien à la lecture de sigillum turbe
Sigillum tumbe Templi Christi, elle aura le sens de ces mots templi Christi proposée par M. Quatremère, qu’à celle de
le sceau du tombeau du Temple du Christ, ou bien le sceau sigillum tumbe templi Christi, proposée par M. de Wailly. Il
de l’église du tombeau du Christ. Dans les deux cas, l’édi- est difficile d’admettre en effet que le graveur ait placé un
fice mentionné serait incontestablement le Saint-Sépulcre, signe d’abréviation (Ω) au-dessus de ce monogramme si
mais selon les « quelques observations de la description connu du nom du Christ – XPI – où il n’était pas nécessaire,
du Temple de Jérusalem… », il faut absolument écarter le et qu’il ait négligé de l’indiquer, quoiqu’il en eût la place,
Saint-Sépulcre de l’interprétation des monuments de l’Or- au-dessus d’un terme peu usité et employé ici dans un sens
dre du Temple. Les seuls personnages qui avaient le droit exceptionnel.
de placer sur leurs sceaux le tombeau du Christ dans le Il faut donc s’en tenir au mot TVBE, tel qu’il est écrit sur
royaume de Syrie étaient les chanoines du Saint-Sépulcre, les monuments, et chercher à l’expliquer comme il se
préposés à sa garde, ou le patriarche de Jérusalem, qui trouve, sans changement, sans addition, derniers moyens
demeurait dans ses dépendances et qui prenait quelque- d’interprétation auxquels on doit recourir.
fois le titre de patriarche de l’église, de la Résurrection. Les M. Jal a proposé les diverses explications de trompette,
sceaux de ce dignitaire, ceux des chanoines et du prieur du héraut, coupole, et quelques autres qu’il a rejetées comme
Saint-Sépulcre représentent, en effet, les uns et les autres, ne lui paraissant pas satisfaisantes.
le tombeau de Jésus-Christ, figuré tantôt comme une sim- Ceci dit, l’une d’entre elles renferme probablement la
ple cuve funéraire qu’entourent les anges témoins de la solution. TVBA a le sens de coupole, et il semble que ce
résurrection ; plus souvent comme un édicule à coupole, terme est venu, légèrement altéré par la prononciation,
isolé sous le dôme d’une église, imitation de l’intérieur de du radical qui a cette signification dans plusieurs idiomes
l’église du Saint-Sépulcre, avec ces légendes en abrégé: d’Orient.
Sigillum Willelmi patriarche ; au revers : Sepulcrum Domini Une circonstance nécessaire à rappeler sur la langue
nostri Jehsu Christi ; Willelmus Patriarcha, et le même arabe est celle-ci. Lors d’un voyage de Gaza vers l’Égypte
revers ; Sigillum canonicorum sanctissimi sepulchri ; Sigil- au milieu du XIXe siècle, l’érudit M. de Mas-Latrie raconte
lum Petri prioris Dominici sepulcri ; etc. que : « Il nous semblait que le Caire, vers lequel nous
nous dirigions, reculait toujours devant nous ; nous avions
LE TVBE DU MOYEN-ÂGE depuis longtemps dépassé l’oasis de Belbeis, où Amauri
1er rendit sa célèbre assise sur le service militaire, où je
Ces emblèmes ne peuvent, en aucune manière, s’appli- me rappelai avec bonheur mes travaux sur les croisades et
quer au Temple, et c’est dans l’histoire de l’Ordre ou du votre bienveillante direction, qui sera toujours pour moi si

18 - Templarium
Moulages des sceaux médiévaux
d’après l’Inventaire Douêt d’Arc des Archives de France
Ref. Arch. Nat. D.9870. Le Précepteur des Templiers en Pro- Ref. Arch. Nat. D.9868. Guillaume de l’Aigle, comman-
vence. Un Agnus Dei. Avers d’un sceau rond de deur du Temple en Normandie. Un aigle à
28mm.+ SIGILLUM PRECEPTORIS PRO- deux têtes. Avers d’un sceau rond de 25mm.
VINCIE. Appendu à un échange de bois + SIGILLUM FRATRIS WILLELMI DE
fait par FRATER RONCELINO DE FOS, AQUILA. Appendu à un acte concernant
MAGISTRO DOMORUM MILICIE TEMPLI les Templiers de Saint-Étienne de Renne-
IN PROVINCIA, le 3 des Ides d’octobre ville. Septembre 1227.
(13 octobre) 1269.
Ref. Arch. Nat. D.9872. Jean du Tour.
Écu à portant trois fleurs de lys. Tréso-
Ref. Arch. Nat. D.9866. Guillaume de BEAUJEU. Écu à lion rier de l’Ordre du Temple à Paris. Sceau
rampant. Sceau ovale de 20mm de haut. ovale de 30mm de haut. SIGILLUM
SIGILLUM FRATRIS GUILLELMI BELLIJOCI. FRATRIS JOHANNIS THESAURARII
Appliqué en contre-sceau, au revers du sceau TEMPLI PARISIUS. Appendu à une
du Temple, à un acte du 27 juin 1286 relatif charte de l’an 1295. Une pierre gravée
à une plainte de Henri de Lusignan, roi de représentant une aigle et un autel (?). L’in-
Chypre et de Jérusalem, sur ce que les gens du taille est accostée de deux tours et accompa-
Roi de France lui retenaient de force son palais. gnée de huit fleurs de lis, quatre en haut et quatre en bas.
Nota : la pièce est en français et trés curieuse.
Ref. Arch. Nat. D.9873. Frère GARIN. Une chimère. Avers
Ref. Arch. Nat. D.9871. Guillaume de Langeais, précepteur d’un sceau rond de 35mm. + SIGIL-
des Templiers de La Rochelle. Un aigle à LUM FRATRIS GERINI. Appendu
deux têtes. Avers d’un sceau rond de 22mm. à un accord entre l’evêque de Pa-
+ SIGILLUM FRATIS WILLELMI DE LENGEYO ris et l’abbé de Saint Germain-
Appendu à une promesse de FRATER des Prés, touchant les limites
GUILLELMUS DE LANGEYO, HUMILIS PRECEP- de leurs censives respectives.
TOR DOMUS, MILICIE DE RUPELLA, de payer Janvier 1210.
à Alfonse, comte de Poitiers, la somme de
1250 livres Tournois pour des droits de nouveaux acquêts dus par
les Templiers d’Aquitaine. 1269.
Ref. Arch. Nat. 9875.
Ref. Arch. Nat. D.9877. L’Hopital, jadis du Temple, près Écu à portant trois fleurs de lys. Arnaud de
MONDOUBLEAU. La tête de saint Visemale. Sceau rond de 16mm. SIGILLUM
Jean Baptiste dans un plat, entou- FRATRIS ERNAUDI DE WISEMALE. Appen-
rée de fleurs de lis, et comprise du à un traité entre le roi de France et le roi de
dans un encadrement à huit com- Navarre. Vittoria, le 7 des ides de novembre
partiments contenant chacun une (7 novembre) 1276.
rosace. Fragment de sceau rond
de 47mm. Il ne reste de la légende Ref. Arch. Nat. D.9876. Château à trois tours accompa-
que les lettres HO (HOSPITALS) gnées de deux fleurs de lys, et accostées
et OTE (MONTE). Appendu à une d’un croissant et d’une étoile. Vaour (En
charte de l’an 1406. Languedoc). Sceau rond de 27mm. + SI-
GILLUM VAORIS MONRICOS. Appendu
à une adhésion au procès de Boniface
Ref.Arch.Nat. 9877bis. L’Hopital, jadis du VIII. 1303.
Temple, près MONDOUBLEAU. Écu à la
croix pattée de Malte, dans un encadrement
triangulaire renfermant trois coquilles. Con-
tre-sceau - Sceau rond de 25 mm. CONTRA Ref. Arch. Nat. D.9867. Écu à la croix
SIGILON. Appendu à une charte de l’an 1406. pattée. Légende en capitale romane
entre deux filets. Maître du Poitou.
Avers d’un sceau rond de 24mm. +
Ref. Arch. Nat. D.9860. Maître de France SIGILLUM MILITUM TEMPLI. Utilisé
Un petit temple rond, à deux portes ouvertes. par Frère Amblard, preceptor humilis
Avers d’un sceau rond de 25mm. MIL’ TEM- domorum milicie templi in Aquitania. Acte
PLI SAL’ (MILITES TEMPLI SALOMONIS). relatif à une rente annuelle due à la maison templière de Roche,
Appendu à une charte de Frater Andreas de près de Poitiers. Octobre 1283.
Coloors, domorum templi in francia precep-
tor, par laquelle il reconnaît qu’il ne pourra
vendre, sans la permission du roi, le bois que les Tem-
pliers possèdent entre Senlis et Verneuil. Octobre 1214.

Templarium - 19
Templi Domorum citra Francia

BIBLIOGRAPHIE
Recueil de plusieurs pièces curieuses servant à l’histoire de Bourgogne par Estienne Pérard, 1664.
Lettre à M. Beugnot sur les sceaux de l’ordre du Temple par L. de Mas-Latrie, 1847
Mémoire sur quelques documents génois relatifs aux deux croisades de saint Louis par M. Jal, 1942.
Règles et statuts secrets des Templiers par Maillard de Chambre, ed Baudry Reprint 2003.
Correspondance d’Orient par Michaud et Poujoulat, 1831.
Éléments de paléographie par M. Natalis de Wailly, 1838.
Codice diplomatico del sacro ordine Gerosolimitano par P. A. Paoli, 1733.
Histoire des sultans mamelouks par E. M. Quatremère, 1837.

utile et si flatteuse ; quand enfin , quelques heures après, était en effet passé dans la latinité du Moyen-âge, et les
Hanka, un de nos guides, en apercevant le premier les sources où il se trouve indiquent bien sa provenance
grands tombeaux qui précèdent le Caire vers l’orient et arabe.
les mosquées qui dominent ses murs, se met à genoux en André Dandolo rapporte en ces termes, dans la Chronique
criant de joie, car il était aussi fatigué que nous-mêmes de de Venise, qu’en 1252, le doge Morosini enrichit d’une
notre rapide Voyage : Coba, Coba, Massr ! (les coupoles, mosaïque la grande coupole de l’église Saint-Sauveur, sa
les coupoles, voilà le Caire !). J’avoue que je fus loin de paroisse : Idem pies et devotus CVBAM majorem Sancti
songer alors à Hugues de Païens ou à son Ordre ; mais Salvatoris parochiœ suœ, opere mosaïco depingi fecit (Le
je n’ai jamais oublié ni le tableau splendide que nous même homme pieux et dévoué a fait peindre la plus gran-
avions sous les yeux, ni l’exclamation de notre scheik, et de Cuba du saint sauveur de sa paroisse, dans un ouvrage
en revoyant aujourd’hui les sceaux de l’Ordre du Temple, de mosaïque). En 1354, l’envoyé de la république de Pise
je fais un rapprochement d’où me paraît sortir le mot de conclut à Tunis un traité de paix et de commerce, dont le
notre légende. Coba, qui désignait les coupoles des mos- texte latin se termine par ces mots : Acta, facta, composita
quées du Caire, ne s’appliquerait-il pas aussi à la coupole et firmata sunt scripta omnia, ut supra peromnia conti-
de la Sakhra, et par conséquent à la coupole de notre nentur, in CVBA mediocri viridarii, Restabbi, scripti domini
sceau ? Et tuba, qui, prononcé plus correctement, devait regis positi juxta Tunicium ; ce qui doit se traduire ainsi :
être cuba, ou couba, ne serait-ce pas le nom de ce dôme « Lesdites conventions, telles qu’elles sont toutes contenues
sous une forme arabe? » ci-dessus, ont été arrêtées dans le petit pavillon du verger
Si la légende portait CVBE au lieu de TVBE, le sens en royal, appelé Restabbi, et situé près de Tunis. »
serait bien plus facilement rendu sensible ; mais, quelle Le mot cuba, ainsi que l’arabe coba, signifiait non seule-
que soit la confusion qui s’établit souvent dans les textes du ment un dôme, mais toute construction en dôme, comme
Moyen-âge entre le C et le T, il est important de conserver les kiosques, les pavillons et les tombeaux à coupole que
intact le mot TVBE, car les lettres en sont toutes bien dis- les musulmans élèvent dans leurs jardins ou à l’entrée de
tinctes et parfaitement lisibles sur le sceau de 1255. Mais leurs villes.
les copies des documents de Gènes portent tantôt tubae, Les langues vulgaires avaient adopté le nouveau mot,
tantôt jubae, ce qui semblerait indiquer que la première peut-être même avant qu’il ne fût passé dans le latin.
lettre n’était peut-être pas un T dans les rédactions origi- Sanuto le jeune, rappelant la juste fin d’Ottobono Terzi,
nales, dont les registres conservés à Gênes ne sont que dictateur de Parme, massacré à la Rubbiera, en 1409, dit
des copies. que son corps fut partagé entre les villes de Modène et de
Quoi qu’il en soit, et en respectant le mot de TVBA, on Crémone, et que sa tête, fixée au haut d’une pique, fut
ne peut l’expliquer d’une manière satisfaisante qu’en le placée sous la coupole de la cathédrale de Ferrare : la
considérant comme un emprunt fait aux Arabes, d’abord testa fu messa sopra una lancia nella CVBA della chiesa di
sous la forme de CVBA ou COBA, qui s’est conservée dans Ferrara del duorno. Dans les Villes d’Italie, le dôme, c’est
plusieurs langues modernes, et devenue alcôve, coupole, toujours la cathédrale du lieu ; la cuba del duomo, ici, ne
etc.; altérée ensuite et transformée en TVBA, par un acci- peut être évidemment que la coupole de Saint-Georges de
dent de prononciation facile à comprendre, car les lettres Ferrare, belle église en croix grecque et en rotonde. Le mot
T, D, C, permutaient souvent entre elles dans les langues se trouve également dans l’espagnol, où le b de roba s’est
néo-latines, avant que l’usage n’eut fixé l’articulation défi- transformé en p, pour conserver la prononciation ferme du
nitive de leurs mots. radical coba. Copa, qui veut dire dans cette langue « verre
L’on disait ainsi en italien et en français tarsenal ou darse- à pied, coupe » désigne aussi le sommet arrondi d’une
nale pour arsenal, qui seul est resté en France ; en latin, montagne, le haut d’une coiffure hémisphérique ; copado
targa et darca pour bouclier ; torcimanus et drogmanus, se dit encore d’un arbre dont la cime touffue forme un
pour drogman ; tarterium et carterium, pour un quart ou dôme, etc.
un quartier ; on a dit en français, tarquais et tarquois, On ne peut citer que ces exemples, mais une recherche
avant d’avoir dit carquois. Les deux derniers mots offrent plus suivie dans les anciens auteurs italiens et castillans
un exemple de transmutation des lettres T et C parfaite- peut aboutir à beaucoup d’autres. Ceux-là paraissent
ment analogue, quoique inverse, à celui de cuba et tuba. suffire, toutefois, pour établir l’origine du mot cuba, et sa
Carquois est, en effet, une altération de tarquois, et ce mot, signification dans les textes du Moyen-âge.
d’après le savant éditeur de l’Histoire des sultans mame-
louks, est la traduction incontestable du mot tarkasch, des TRADUCTION DU SCEAU DE 1255
langues orientales. Il est à remarquer que les Italiens ont
retenu dans leur mot turcasso, signifiant aussi carquois, le Coba ou cuba, c’est la coupole du Mokattam au Caire;
T du radical tartare. c’est le dôme de Saint-Sauveur de Venise, de Saint-Geor-
En démontrant la commune origine que semblent avoir les ges de Ferrare, de la Sakhra de Jérusalem et de notre
mots cuba et tuba, si le dernier de ces mots n’est qu’une sceau de 1255 ; Tuba, qui est probablement le même mot,
déformation de l’autre, et que tous les deux ont la même mal ou différemment prononcé, doit avoir absolument le
signification, le nœud principal des difficultés est résolu. Il même sens. La traduction de la légende est donc : S’.
ne reste plus qu’à prouver la signification donnée à cuba. TVBE. TEMPLI XPI Ω : « sceau de la coupole du Temple du
Ce mot, qu’on peut ajouter au Glossaire de Du Cange, Christ » c’est-à-dire du Temple de Jérusalem.

20 - Templarium
Les sceaux des Templiers et le temple de Jérusalem

Ref. Arch. Nat. D.9862. Grand Maître. Ref. Arch. Nat. D.9860. Maître de France Un petit tem-
Une coupole striée verticalement soute- ple rond, à deux portes ouvertes. Avers d’un sceau rond
nue par une galerie de quatre arcades. de 25mm. MIL’ TEMPLI SAL’ (MILITES
Légende en capitales romanes entre TEMPLI SALOMONIS). Appendu
deux filets et triple points de séparation. à une charte de Frater Andreas de
Grand Maître. Avers d’un sceau rond Coloors, domorum templi in francia
de 26mm. SIGILLUM TUMBE TEMPLI preceptor, par laquelle il reconnaît
CHRISTI. Réglement d’un litige avec Marguerite, « par la qu’il ne pourra vendre, sans la
grâce de Dieu reyne de Navarre, de Champagne et de Brie, permission du roi, le bois que les
comtesse palatine ». Octobre 1255. Templiers possèdent entre Senlis et
Verneuil. Octobre 1214.

Moulages des sceaux médiévaux Ref. Arch. Nat.


D.9860bis.
d’après l’Inventaire Douêt d’Arc des Archives de France Abraxas. Maî-
tre de France.
Revers d’un
Refs Dim.
Arch.Nat.
Désignation du Sigillant
du sceau
Prix de vente sceau rond de 15mm
SECRETUM TEMPLI
D9860 TEMPLE-Maître de France (Avers) 25 9,00 €
D9860bis TEMPLE-Maître de France (Revers) 15 9,00 €
D9862 TEMPLE-Grand Maître 26 9,00 € COPIE ARTISTIQUE DE
D9863 TEMPLE-Visiteur Cismarin 33 9,00 € SCEAUX TEMPLIERS ET
D9863AGR TEMPLE-Visiteur Cismarin - Agrandi ** 10,50 € AUTRES DE L’ÉPOQUE
D9866 TEMPLE-Guillaume de Beaujeu 20 9,00 € MÉDIÉVALE.
D9867 TEMPLE-Maître du Poitou 24 9,00 €
D9868 TEMPLE-Normandie 25 9,00 € MAGNIFIQUES PIÈCES
D9870 TEMPLE-Provence 28 9,00 € DÉCORATIVES RÉALISÉES
D9871 TEMPLE-La Rochelle 22 9,00 € EN RÉSINE QUI VOUS
D9872 TEMPLE-Jean Dutour 30 9,00 € SÉDUIRA ET ÉTONNERA
D9873 TEMPLE-Frère Garin 35 9,00 € VOS AMIS.
D9875 Arnaud de Visemale 16 9,00 €
D9876 Temple-Vaor 27 9,00 €
D9877 Mondoubleau 47 9,00 €
D9877bis Mondoubleau (revers) 25 9,00 €
D9878 HOSPITALIER (Avers) 37 9,00 €
D9878AGR HOSPITALIER (Avers) - Agrandi ** 10,50 €
D9878bis HOSPITALIER (Revers) 37 9,00 €
D9887 Villiers de l’Isle Adam 35 9,00 €
D9902 Méry d’Amboise 30 9,00 €
D9915 TEMPLE-Paris 48 9,00 €
D9952 Hospitalier Teutonique 35 9,00 €
D9952AGR Hospitalier Teutonique - Agrandi ** 10,50 €

BULLETIN DE COMMANDE ( à photocopier)

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DAEG - BP 18 - 84360 LAURIS (France) Date et Signature obligatoires
Ordre de chevalerie

L’Ordre de Saint-Samson
de Constantinople dit de Corinthe
LES FRÈRES DE CONSTANTINOPLE POSSÉDÈRENT ET ADMINISTRÈRENT PAISIBLEMENT

L’HÔPITAL SAINT-SAMSON. SELON LE CHRONIQUEUR JACQUES DE VITRY, CETTE MAISON

ÉTAIT MISE AU NOMBRE DES ÉTABLISSEMENTS « AGRÉABLES À DIEU, NON MOINS QU’UTI-

LES AUX VOYAGEURS ET AUX MALADES » par Les frères Dominicains

S
itué non loin de l’église Sainte-Sophie à Cons- tardèrent pas à se produire, puisque nous trouvons
tantinople, l’Hôpital de Saint-Samson avait une sentence, en date du lendemain de l’Épiphanie
pour fondateur un saint personnage du nom 1244 (7 janvier 1245), rendue par le même doyen de
de Samson Xenodochius alias «l’hospitalier» l’église cathédrale de Cambrai, qui relate et confirme
aussi distingué par sa vertu que par sa naissance. Les la promesse faite par le Maître du même hôpital de ne
croisés, à leur arrivée à Constantinople, s’emparèrent plus placer cloche ni grosse ni petite dans sa maison,
de l’hôpital, et substituèrent des latins aux grecs qui le de ne plus enterrer de personne étrangère, enfin de ne
desservaient ; ainsi naquit l’Ordre de Saint-Samson de plus recevoir ni dîmes ni offrandes dans les paroisses de
Constantinople. Une lettre d’Innocent III confirme la Saint-Amé et de Saint-Albin
donation par Henri, empereur de Constantinople, d’un
château au précepteur et aux frères de l’Hôpital Saint- DÉCADENCE DE L’HÔPITAL
Samson de cette ville.
Les frères de Constantinople possédèrent et adminis-
LES HOSPITALIERS DE SAINT-SAMSON À DOUAI trèrent paisiblement l’hôpital Saint-Samson pendant un
certain laps de temps. Mais, vers 1300, cet établisse-
Douai possédait, depuis un temps considérable, un ment souffrit des ravages de la guerre qui désolait la
hôpital situé sur la paroisse Saint-Albin. Il fut réorganisé Flandre. Ses revenus furent en grande partie absorbés
au commencement du XIIIe siècle, par un Douaisien, par des dettes que l’on avait dû contracter : on ne pou-
Garin, ancien chanoine de Saint-Amé qui, par un singu- vait plus trouver les moyens de subsister et de donner
lier concours de circonstances, était devenu archevêque l’hospitalité aux pauvres selon les règles de la maison.
de Thessalonique. Il appela dans cet hôpital les frères En outre, les frères se trouvaient privés de tout secours
de Saint-Samson de Constantinople, qui lui communi- du côté de leur grand-maître par suite du renversement
quèrent leur nom, et donna, soit à l’hôpital soit aux de l’empire latin de Constantinople et de l’interruption
frères, la maison qu’il occupait alors qu’il était chanoine des communications avec cette ville.
de Saint-Amé, plusieurs autres en différents quartiers de
la ville, des terres dans les environs et des rentes fon- CESSION DE L’HÔPITAL
cières. Le fondateur avait, parait il, décidé que l’hôpital
demeurerait toujours, au spirituel comme au temporel, En raison de tous ces embarras et sur l’avis de person-
soumis au chapitre de Saint-Amé. nes prudentes qu’ils consultèrent, les Maître et frères de
À la même époque ou peu après, les chanoines de l’hôpital Saint-Samson comprirent que, pour ne pas
Saint-Amé pour donner un nouveau développement compromettre les intérêts de la maison, ils devaient
à l’hôpital, achetèrent, le long de la rivière, un ter- s’unir à une autre société religieuse qui les aidât de ses
rain sur lequel ils firent bâtir une maison spacieuse, ressources et leur permit de se recruter. Si nous tenions
où l’on entretint un certain nombre de malades. compte uniquement de la tradition et des documents
relatifs au procès des Templiers, tradition et documents
PROCÈS AVEC SAINT-AMÉ qui placent les Templiers dans la maison de Saint-Sam-
son à l’époque de l’abolition de l’Ordre, nous dirions
Malgré cela, les hospitaliers de Saint-Samson ne tardè- que la société religieuse à laquelle ils s’agrégèrent est
rent pas à vouloir se soustraire à l’autorité du chapitre, celle de la sainte Milice du Temple. Il résulte des pièces
en raison de leurs privilèges ; ils allèrent même jusqu’à que les frères de Saint-Samson traitèrent, non pas avec
refuser de rendre au curé de Saint-Albin les oblations les Templiers, mais avec les chevaliers hospitaliers de
qu’ils percevaient dans leurs chapelles, et de payer au Saint-Jean de Jérusalem. Ils conférèrent à l’Ordre la
chapitre de Saint-Amé la dîme de leurs terres. L’affaire possession de leurs biens, avec promesse d’obéir tou-
alla si loin qu’elle fut portée au tribunal du souverain jours au grand-maître, tant au temporel qu’au spirituel,
pontife : Grégoire IX, par un bref du 6 novembre 1236, de changer leur habit religieux, et de faire des vœux
chargea le doyen de l’église de Cambrai d’informer perpétuels conformément aux statuts de ceux auxquels
et de prononcer sur ce différend. Le chapitre présenta ils s’agrégeaient. Le 7 mars 1300, le frère Jacques de
son Mémoire le 8 décembre de la même année. Le Calonne, procureur général de l’Ordre, consentit à cette
14 novembre 1237, Roger, doyen de la métropole de union par acte passé devant Adam de Valugon, notaire
SAINT-SAMSON Cambrai, déclara que le Maître et les frères hospitaliers apostolique au diocèse de Thérouanne. Cette union fut
© ASSOCIATION ORTHO- de Saint-Samson avaient restitué, en sa présence, les confirmée par lettres patentes de Philippe le Bel, datées
dîmes et les oblations réclamées par le chapitre et du même mois, et par une bulle de Clément V, du 10
DOXE SAINTE ANNE
par le curé de Saint-Albin, et qu’ils avaient reconnu mai 1310. Peu de temps après la conclusion de cette
le patronat de Saint-Amé. De nouveaux différends ne union éclata l’orage qui planait sur les Templiers.

22 - Templarium
Hôpital de Saint-Samson Chevalier de la Compagnie de reconstitution médiévale des Blancs Manteaux.

L’origine de cette maison, qui remonte au commen- devant échevins, par frère Herbert, commandeur de l’hospital, de le maison des
cement du XIIIe siècle, est parfaitement connue ; la maison do Saint-Samson, « por lui et por tous les sereurs, de le capièle et des
quant à ses archives, très incomplètes et en assez frères et les sereurs de le maison. » Nous savions déjà maisons qui sont aval le ville
mauvais état, elles n’offrent qu’un intérêt bien que les femmes aussi étaient admises dans l’hôpital de Douay ».
secondaire, Voici néanmoins l’indication de quel- du moins à cette époque. Du terrier de 1307, il ressort
ques actes du XIIIe siècle passés durant le temps Citons encore un échange fait, en présence d’échevins, qu’au mois de décembre de
que les frères de Saint-Samson de Constantinople entre notre hôpital et le couvent dès ffères mineurs, en cette année, l’hôpital était
possédaient et dirigeaient l’hôpital de Douai (de 1272, au mois de june au sujet de rentes foncières sur déjà passé de l’ordre de
1225 environ, jusqu’en 1306). des maisons. «Fière Hue de Cambray et frère Ansiaus Saint-Samson à celui de
C’est d’abord l’inventaire des reliques qui, vers de Cambray, frère de le maison de Saint-Sanson de Saint-Jean de Jérusalem.
1236, se trouvaient, dans la chapelle, renfermées Douay, ont quité et quite clamé, à le maison des frères Voici l’intitulé du regis-
dans une croix d’argent. L’acte, commençant ainsi: menus de Douay , les V (fertons) de parisis, par an, tre « Chest li briés des
« Nos A. preceptor hospitalis sancti Sampsonis in que li hospitaus Saint Sanson avoit de rente sour le rentes, des maisons... ke
Duaco, et frates nostri », se termine par la mention maison ki fu Robiert Ki tout vent (qui vend tout), ki li maisons del hospital
de l’apposition du sceau du chapitre (paqinam istarn siet dehors le porte de Canteleu », c’est-à-dire près S.-Jehan d’outremer
sigilo capituli nri voboratam), lequel manque mal- du couvent des frères mineurs. Et à son tour, « quite de Douay, ki jadis fu
heureusement. clame frère Willaurnes de Courières, gardyens des de S.-Sanson, a en
Au mois d’octobre 1251, Marguerite, comtesse de frères menus de Douay, à le maison de Saint-San- Douay… Si fu chis briés
Flandre et du Hainaut, confirme la donation (elemo- son, les v. f. de parisis de rente, que li Frère menut fais et renouvelés en lan
sina) que son cher cousin et féal Bauduin, empereur avoient sour le maison Willaurne Le Fiéron, ki siet à mil. ccc, et vij el mois de
de Constantinople (imperator imperii Romanie) et le fontaine au Havet, ki fu Bienart Criket, que Enmelos décembre… »
comte de Namur, avait faite à la maison de Saint- Crikès leur donna en se devise ». enfin le terrier de 1320
Samson en Douai d’une rente de quinze livres sur les Le contrat d’acquisition d’une maison joignant celle et une addition faite vers
deniers qu’elle devait à son parent à Valenciennes où résidaient les hospitaliers de Constantinople 1303 sur celui de 1265 nous
(in concambio ville Valencen.) relate les noms de cinq d’entre eux « Grars Li Leus donnent le nom du dernier
Ce même empereur, de la maison de France- et Emmelos Hadike, feme jadis maistre Baude de commandeur de l’hôpital de Douai,
Courtenai, avait donné aux frères de l’hôpital de Le Piere, ont vendu à frère Rumack, commandeur appartenant à l’ordre de Saint-Samson de Constanti-
Saint-Samson de Constantinople la maison de et frère de le maison les frères de Saint-Sansson de nople dit de Corinthe au moment de sa suppression :
l’hôpital de Namur, afin de soulager les infirmes, Douay, frère Huon de Braibant, frère Jehan Caudron, c’était frère Jehan d’Ippre, « Commanderés de Saint-
les pauvres et les passants ; étant en Italie, il avait frère Ansiel de Cambray et frère Huon de Cambray, Sanson », cité dans des actes de l’échevinage du jour
écrit, le 11 juillet 1244, au maire de Namur, en le frères de l’ordène de le maison de Saint-Sansson de S. Nicholai en yvier » 1303, du « lendemain de lan
chargeant d’exécuter ses intentions. Nous ignorons Douay, le maison ki fu maistre Baude de Le Piere, là renoef en lanée devant dite » (2 janvier 1303, vieux
si celles-ci ont été accomplies, et si l’on doit compter u cele Emrnelos maint au jour de hui, ki siet joingant style) et du « tierch jour de march » 1303 (v. st.) ; le
en Occident une seconde maison de l’ordre de Saint- le maison des frères devant dis, u il mainent, à iii) même « frère Jehan, de le maison de S.-Sanson »,
Samson, dont celle de Douai était jusqu’ici la seule mars vj coupes d’avaine de rente par an, sour toutes stipulait en l’an 1306 au nom de l’hôpital de Douai. Il
connue. rentes. » Passé devant échevins, en la Halle, l’an 1285 était remplacé, à la date du 26 mars 1307 (v. st.), par
La majeure partie de la fortune de l’hôpital de en octembre. « frère Rogiers dou Four, commanderes de le mai on
Douai consistait alors, outre quelques parcelles L’une des parties intéressantes de ce fonds d’archives, del hospital S.-Jehan de Jhérusalem à Douay. »
de terre disséminées dans les environs, en rentes pour le XllIe et le XIVe siècle, consiste dans cinq Il n’est plus possible, en présence de documents aussi
foncières sur un grand nombre de maisons de notre cœuilloirs de rente ou terriers ; l’un est en forme péremptoires, de ne pas ranger parmi les héros
ville, et les libéralités des bourgeois venaient conti- de rotulus et les autres sont de petits registres en de roman un prétendu « frère Hugues de Coligny,
nuellement accroître la somme de ces rentes. C’est parchemin, dont le plus ancien a été confectionné bourguignon, maître de la maison du Temple de
ainsi qu’en avril 1261, Wérin Mulet achète, « soes vers 1295, un au autre vers I 290, le troisième en Saint-Samson de Douai », qui aurait été arrêté, avec
le maison de Saint-Sanson, por le testament dame 1307 et le dernier vers 1320. Le principal mérite de trois autres frères, dans la maison de Saint-Samson,
Ghersent Mulet, se mère, à pitance faite », une rente ces sortes de documents se concentre d’ordinaire sur le 13 octobre 1307, et qui aurait comparu devant des
d’un marc sur une maison située « à Barlet ». l’ancienne topographie locale ; mais le nôtres, sans juges le 20 et le 21 octobre 1309, toujours d’après la
L’hôpital avait aussi ses parts de moulins, sortes de être absolument dénués d’intérêt, ne peuvent rivali- Relation de l’inquisiteur. Ajoutons que s’il eût jamais
propriété très recherchées au Moyen-âge et même ser, pour l’histoire des quartiers et des rues de Douai, existé, ce personnage aurait fait parler de lui, attendu
encore au siècle dernier ; comme l’une d’elles n’était avec les précieux cœuilloirs des archives des Hospices; qu’il niait « le reniement du Christ » tandis que ce
pas bien déterminée, une transaction fut conclue, au leur mérite est d’une autre nature, il consiste dans point était avoué par le grand-maître Jacques de
mois de février 1262 (vieux style), entre l’hôpital et une série de renseignements concernant l’hôpital Molay, lui-même, ainsi que par les autres dignitaires
le principal propriétaire du moulin de la Poterne. lui-même, ses habitants, ses bienfaiteurs. Ne voulant de l’Ordre, qui donnaient de cette horrible cérémonie
« Li frère de le maison Saint Sanson de Douay » pas multiplier outre mesure les citations, nous nous des motifs et des explications contradictoires.
prétendaient avoir, par an, quatre rasières de blé contenterons de mentionner les faits suivants. Nous terminerons cet article en donnant quelques
« sor le meulin de le Postne derrière, ki est Baude Du terrier de 1320, il résulte que les religieux possé- noms de commandeurs de l’hôpital Saint-Sam-
d’Estrées »; et ledit Baude « leur counissoit bien daient à Douai, outre l’hôpital et la chapelle, un hôtel son : A., « preceptor hospitalis sancti Sampsonis in
kil avoient le vintime de le mosnerie, sauf chou pour le commandeur de Saint-Samson qu’on appelait Duaco ». Vers 1236. ; Frère Herbert, 1262 ; Frère
kil devoient paier le vintime dou carpentage dou la Salle, une maison affectée aux femmes ainsi que Rumack, 1285 ; Frère Jehan de Le Bandiele ; Frère
meuLin, si ke coustume est. » Il fut convenu que diverses propriétés dans la ville. L’état des revenus et Jehan d’Ippre, 1302 1303, 1306.
« li maisons aura, sor le moulin, deux rasières de des charges mentionne en effet, au nombre de celles-
bleit, sans nul coust metre », ce qui fut reconnu ci : « le retenage de la maison dou cornmandeur, de

Templarium - 23
Ordre reliGIeux

L’ordre des Trinitaires


au Moyen-Âge
par
Jean-Luc Alias

À UNE ÉPOQUE OÙ LE FRACAS DES ÉPÉES ET DES GUERRES SE FAISAIT ENTENDRE, JEAN DE MATHA
PROPOSE UNE ALTERNATIVE D’ESSENCE ÉVANGÉLIQUE BIEN DIFFÉRENTE, BASÉE SUR LA CHARITÉ, LA

TOLÉRANCE, LA CONVIVIALITÉ PACIFIQUE ET LA SOLIDARITÉ CHRÉTIENNE. SON ŒUVRE REÇOIT UN

ACCUEIL TRÈS FAVORABLE DU PAPE INNOCENT III ET, EN PEU DE TEMPS, S’ÉTEND DANS L’EUROPE

ENTIÈRE. SA TÂCHE AVEC L’ORDRE DES TRINITAIRES OU MATHURINS QU’IL FONDA AVEC FÉLIX DE

VALOIS POUR LA RÉDEMPTION DES CAPTIFS PAR LES MAURES ET SARRASINS, PRÉSENTAIT DES DIFFI-

CULTÉS CONSIDÉRABLES.

O
rdonné prêtre à Paris en 1192, année ans par la tradition, principalement par l’esprit
même où Richard Cœur de Lion rentrait et l’œuvre du réformateur Jean Baptiste de la
en Occident, abandonnant en Terre Sain- Conception, elle se prolonge dans les Consti-
te de nombreux captifs aux mains des Sarrasins, tutions Trinitaires en vigueur approuvées par le
le provençal Jean de Matha s’informe des méfaits Saint Siège.
des pirates. Ces maîtres du Littoral méditerranéen Les frères de Jean de Matha, « Les frères de la
dépouillaient les navires et enlevaient le bétail Sainte Trinité et de la Rédemption des captifs »
humain pour en faire le trafique sur les marchés portent un habit, signe de leur consécration et
d’esclaves. Jean de Matha conçoit alors l’idée fraternité, qui comprend une tunique blanche
de fonder un Ordre voué au rachat des captifs. avec une ceinture noire, un scapulaire blanc
Son projet est approuvé par l’Évêque de Paris et sur lequel est placée une croix de couleur rouge
l’Abbé de Saint-Victor de Marseille. Ensuite, il se et bleue au niveau de la poitrine, et un capuce
retire dans les bois de Cerfroid près de Gandelu blanc selon la tradition reçue dans l’Ordre.
dans l’Aisne, pour y vivre avec des ermites. Les religieux étaient astreints à une sévère pau-
vreté. Il ne leur était même pas permis de possé-
FONDATION ET RÈGLE DES TRINITAIRES der une monture pour leurs longs déplacements.

Assisté de Félix de Valois, Jean de Matha fonde


un projet de vie religieuse dans l’Église, nouveau LES ÉTABLISSEMENTS
et original, dont la texture est profondément
évangélique : L’Ordre de la Très Sainte Trinité La tradition trinitaire voit en Félix de Valois, co-
(Trinitaires) qu’ils rattachent à la Rédemption des fondateur de cet Ordre le compagnon de Jean
Captifs, en 1198, pour racheter les chrétiens de Matha dans la solitude de Cerfroid. C’est en
maintenus en esclavage dans les états barbares- ce lieu que s’implante la première communauté
ques d’Afrique du Nord. C’est le premier en date trinitaire qui restera le Chef-d’ordre des Trinitai-
des Ordres rédempteurs. À la différence de la res jusqu’à la Révolution française. À Cerfroid
Merci, il ne fut jamais militaire. s’ajoutent Planels et Bourg- la-Reine : ce sont les
C’est la première institution officielle de l’Église trois fondations initiales.
qui se consacre au service de la rédemption sans Puis Philippe II Auguste aide les Trinitaires à
armes à la main, sans autre armure que la misé- construire un monastère à Paris près d’une cha-
ricorde et dans la seule intention de redonner pelle dédiée à saint Mathurin, d’où leur nom de
l’espérance à des frères dans la foi qui souffrent Mathurins.
sous le joug de la captivité. En Angleterre, la première maison des Trinitaires
La famille religieuse des Trinitaires suit alors une est fondée en 1224 à Mottenden, dans le Kent.
règle rédigée par Jean de Matha, selon celle En 1200, Jean de Matha fonde à Marseille l’hô-
de saint Augustin, et approuvée par la bulle pital Saint-Martin et le couvent de la Porte Galle
Operante divine dispositionis d’Innocent III, le pour accueillir les captifs rachetés. Peu après, il
17 décembre 1198. Elle est le principe et le établit un couvent à Arles et un hôpital à Saint-
fondement de l’esprit de l’Ordre Trinitaire. La Gilles.
règle primitive (1198) subit de nombreuses et En Catalogne, il installe des religieux à Lérida.
graves modifications exigées par les circonstan- En 1206, il crée des établissements à Tolède,
ces et l’expérience ; à signaler la règle de 1263 puis à Burgos et à Ségovie. L’Espagne comptait
et les statuts de 1319. Adaptée au cours de 800

24 - Templarium
L’Ordre des Trinitaires au Moyen-Âge
Jean Matha
Basilique de
San Crisogono
(Rome)

quinze couvents en 1209. La même année, Jean UN BUT : LE RACHAT DES CAPTIFS
se rend ensuite à Rome où il fonde un hôpital. Les
« voyages de Rédemption » avaient été inaugurés Les Trinitaires avaient un but : racheter les chré-
en 1203 au Maroc, à Valence et à Tunis. Pendant tiens emmenés captifs en pays barbaresques
la quatrième croisade (1202-1204), il crée un par les pirates musulmans. Comment le rem-
hôpital à Saint Jean d’Acre. plissaient-ils ? Il fallait, pour cela, se créer des
ressources.
ORGANISATION Les revenus de l’Ordre étaient partagés en trois
portions égales. Deux tiers étaient affectés à
Il fallait tout d’abord dégager les quelques faits l’entretien des religieux et à l’exercice de l’hos-
certains disséminés dans les récits légendaires où pitalité. Le reste était destiné à la rançon des
sont racontées la vie de saint Jean de Matha et captifs. Les Trinitaires étaient pauvres. L’argent
les origines de son œuvre. Le critique a su faire nécessaire pour le rachat des esclaves provenait
ce triage avec un pieux respect. L’historien Paul de la charité.
Deslandres s’est consacré à l’organisation de La faible dotation des couvents ne suffisait pas,
l’Ordre des Trinitaires, Ordre clérical, de droit bien qu’on prélevait le tiers des revenus à cet
pontifical qui avait à leur tête un ministre géné- effet. Ce tiers fut bientôt remplacé par une taxe
ral. La résidence du ministre est fixée à Cerfroid. fixe. Les religieux recouraient à des quêtes, et s’il
Il précise que les convents, gouvernés chacun le fallait, en attendant que la somme nécessaire
par un ministre, étaient groupés en provinces soit recueillie, ils se constituaient prisonniers à la
que régissait un ministre provincial. Le chapitre place de ceux qu’ils voulaient faire libérer. Ils se
général avait pouvoir de légiférer et de contrôler rendaient eux-mêmes dans les bagnes du Maroc,
le gouvernement des supérieurs. Chacun de ces d’Alger, de Tunis ou de Constantinople, et négo-
couvents a une histoire particulière. Paul Deslan- ciaient avec les caïds l’affranchissement du plus
dres l’a résumé sommairement pour s’étendre grand nombre possible de chrétiens.
davantage sur l’histoire générale de l’Ordre. Les Pour mieux assurer le succès régulier, les Rédemp-
relations avec les papes, les rois, les évêques et teurs s’établissent dans les villes où ils n’avaient
les principaux bienfaiteurs, la diffusion de l’Ordre pas de maison. Ainsi la rédemption avait pour
en France, en Espagne, en Italie, la biographie complément la création d’hôpitaux à Alger et à
de quelques ministres généraux, le développe- Tunis. Dès que les sommes nécessaires étaient
ment des diverses réformes, suffisent à donner réunies, ils ne s’engageaient pas à l’aventure. Il
une idée exacte de ce passé. leur fallait la protection royale, qui donnait à leur
mission un caractère officiel ; la rédemption finit

La Canonisation des deux fondateurs des Trinitaires. Après la mort


de son ami ermite, appelé Félix de Valois trois siècles plus tard sans savoir qui il fut, Jean se retire à
Rome et y meurt. Son corps est déposé dans un mausolée de marbre. Si durant les premiers siècles
de son existence l’Ordre Trinitaire n’a développé aucun culte particulier envers Jean de Matha, il
faudra attendre le XVIIe siècle pour que les Trinitaires tentent une canonisation. En 1665, le père
Jean Baptiste de la Conception présente une requête au vicariat de Rome avec des arguments
prouvant que Jean de Matha et Félix de Valois avaient été qualifiés de saint par plusieurs papes.
Le 31 juillet, le cardinal vicaire de Rome rend un décret constatant le culte accordé de temps
immémorial aux deux fondateurs de l’Ordre Trinitaire. La sentence est confirmée par la Sacrée
Congrégation des rites, le 14 août 1666, et par le pape Alexandre VII, le 21 octobre. Leurs noms
sont insérés dans le martyrologe romain depuis le 27 janvier 1671, par un décret d’Innocent XI. À
partir du 14 mars 1694, les fêtes des deux saints étendent à l’Église universelle : glorificateur de
l’Auguste Trinité, dans tous leurs comportement, en se consacrant à la Très Sainte Trinité par la pratique des conseils évangéliques, de
la vie liturgique, de l’ascèse et de l’oraison ; rédempteur du genre humain, en s’occupant avec zèle du bien matériel et spirituel des
opprimés, des abandonnés, des indignes, de ceux qui souffrent un préjudice dans leur foi, quelle qu’en soit la raison.

Templarium - 25
Ordre reliGIeux
même par revêtir un caractère diplomatique.
Des milliers de chrétiens sont ainsi rachetés aux musul-
mans du Maroc, d’Algérie et de Tunisie dont ils étaient
devenus esclaves.
M. Deslandres les suit dans leur voyage ; il raconte les
processions des captifs, donne le prix du rachat, les con-
ditions du marché, le nom de quelques-uns des Rédemp-
teurs et des captifs délivrés les plus célèbres.

UN ESPRIT DE CHARITÉ
Les Trinitaires ont le souci également de conserver ce qui
est prescrit dans la Règle et contenu dans les saintes tradi-
tions : la simplicité, l’humilité, l’égalité entre les frères, la
joie de vivre, l’hospitalité, le travail assidu, le partage des
biens, la pratique du silence et de l’oraison, l’honnêteté,
une certaine austérité, la correction mutuelle selon l’Évan-
gile, et enfin, l’esprit de charité et de service, marque
distinctive de toute la vie religieuse trinitaire.
La spiritualité trinitaire se compose d’éléments théologi-
ques, ascétiques, mystiques et apostoliques qui appar-
tiennent à l’Église ; toute choses cependant, que l’Ordre
reçoit, vit, met en œuvre, conformément au don qu’il a
reçu de Dieu, selon un mode particulier.
Une vie spécialement vouée à la Trinité constitue dès l’ori-
gine, l’élément essentiel et caractéristique du patrimoine
de l’Ordre que la tradition a enrichi au cours des siècles.

La Chronologie de l’Ordre
jusqu’à Jean Baptiste de la Conception

1154 Naissance de Jean de Matha à Faucon (Pro-


vence)

1194 Fondation de Cerfroid, maison-mère de l’Or-


dre

1198 Approbation de la Règle Primitive (17/12)

1213 Mort de Saint Jean de Matha à Rome

1236 Fondation du premier couvent de moniales


trinitaires en Espagne

1248 Implantation de l’Ordre Trinitaire en France,


Espagne, Italie, Portugal, Angleterre, Écosse
et Palestine.

1534 Henri VIII supprime les maisons trinitaires


d’Angleterre, d’Écosse et d’Irlande. Beaucoup
de Trinitaires sont mis à mort.

1545 Le Concile de Trente appuie les réformes en


Espagne, au Portugal et en France

1569 Le bienheureux Marc Criado est martyrisé à


Grenade

1580 Juan Gil et Antonio de la Bella rachètent


Miguel de Cervantes

1599 Réforme de l’Ordre en Espagne par saint


LE GRECO C.1605. PORTRAIT DE FRÈRE FÉLIX HORTENSIO Jean Baptiste de la Conception
PARAVICINO (1580 1633). MUSEUM OF FINE ARTS, BOSTON

26 - Templarium
L’Ordre des Trinitaires au Moyen-Âge

Jean de Matha
parmi les
prisonniers

La Trinité, fruit de sainteté. JEAN DE MATHA. MAIS COMMENT ? REGARDONS LE VEUX, PARCE QUE JE LE VEUX ET PARCE QUE J’AI

EN 1154, À FAUCON DE BARCELONNETTE, NAÎT LA MOSAÏQUE ET FAISONS-NOUS VIOLENCE L’ES- LA POSSIBILITÉ DE LE FAIRE. LA LIBERTÉ QU’EST DIEU,
JEAN DE MATHA ; C’EST L’ÉPOQUE DES RAZZIAS. LES PACE D’UN MOMENT. CET ESCLAVE NOIR QUI TIENT C’EST LA LIBERTÉ DE DONNER ET DE SE DONNER, C’EST

SARRAZINS FONT DES INCURSIONS DANS LES VALLÉES. SON PROPRE LIEN, C’EST NOUS. CET ESCLAVE NOIR LA CAPACITÉ D’AIMER. ÊTRE LIBRE, C’EST AIMER ;
ILS REPARTENT AUSSI VITE QU’ILS SONT VENUS, MUNIS DONT LA MAIN EST RAIDE ET CRISPÉE DANS CELLE DU AIMER, C’EST ÊTRE LIBRE. DIEU EST AMOUR, DIEU EST

DE LEUR BUTIN : OBJETS, BÉTAIL ET PERSONNES. LES CHRIST, C’EST ENCORE NOUS DANS NOTRE RELATION LIBERTÉ. LE CHRIST RÉDEMPTEUR NOUS LIBÈRE, NOUS

PRISONNIERS SONT DE PRÉCIEUSES MARCHANDISES, AU CHRIST, DANS NOTRE RÉBELLION À TOUT CE QUI REND CAPABLE D’AIMER, D’ENTRER LIBREMENT DANS

NÉGOCIABLES DANS UN COMMERCE ALORS TRÈS NOUS SEMBLE ENTRAVER NOTRE LIBERTÉ. SI NOUS SA- L’AMOUR DONT NOUS SOMMES PÉTRIS, AUQUEL

ÉTENDU ET TRÈS LUCRATIF. LA MER ÉGALEMENT N’EST VIONS QUI EST POUR NOUS LE CHRIST RÉDEMPTEUR, NOUS ASPIRONS, VERS LEQUEL NOUS ALLONS. LE
PAS SÛRE. LE VOYAGEUR SCRUTE ANXIEUSEMENT NOUS ENTRERIONS EN CONFIANCE À LA MANIÈRE CHRIST RÉDEMPTEUR NOUS REND CAPABLE DE VIVRE

L’HORIZON ET REDOUTE D’APERCEVOIR LA MENACE DE L’AUTRE ESCLAVE DONT LA MAIN S’ABANDONNE DE L’AMOUR TRINITÉ. DEVENIR LIBRE, C’EST ADORER

D’UNE VOILE HOSTILE. LES CROISADES ONT ÉGA- DANS CELLE DU CHRIST. LE LIEN QUI LUI ENTRAVE LES ET IMITER LA TRINITÉ.

LEMENT ALIMENTÉ LES GEÔLES DES BARBARESQUES. PIEDS SE DESSERRE CAR ÊTRE CHRÉTIEN, C’EST, AVEC AUTOUR DE FÉLIX, DES COMPAGNONS VIVENT ÉGALE-
BON NOMBRE DE CHRÉTIENS S’Y ENTASSENT DANS LE CHRIST LÂCHER PRISE, SE LIBÉRER DE TOUT CE QUI MENT LA VIE ÉRÉMITIQUE. D’ERMITES QU’ILS ÉTAIENT,

DES CONDITIONS ÉPOUVANTABLES. QUI N’A PAS EN NOUS ATTACHE À NOTRE PROPRE ÉGOÏSME : DÉSIR ILS DEVIENNENT FRÈRES TRINITAIRES, CONSTITUANT

EUROPE UN PROCHE, UN AMI, EN PÉRIL DE TOUT FRÉNÉTIQUE DE POSSÉDER, VELLÉITÉ DE PUISSANCE ET AINSI AUTOUR DE JEAN ET DE FÉLIX LA PREMIÈRE

PERDRE? QUI NE S’INQUIÈTE PAS POUR LA SANTÉ, LA DE POUVOIR, SOIF IMMODÉRÉE DE RECONNAISSANCE. COMMUNAUTÉ TRINITAIRE À CERFROID.
VIE ET LA FOI DE CES CHRÉTIENS ? JEAN DE MATHA, ACCEPTER D’ÊTRE DE PLUS EN PLUS AU CHRIST, C’EST SE LAISSER SAISIR PAR LE CHRIST RÉDEMPTEUR ET

DANS SA VALLÉE DE L’UBAYE, VA GRANDIR MARQUÉ ENTRER PROFONDÉMENT EN LIBERTÉ. VOILÀ NOTRE ENTRER DANS LE MOUVEMENT DE L’AMOUR TRINITÉ,
PAR LES HISTOIRES QUE L’ON RACONTE À PROPOS PÂQUE, NOTRE PASSAGE À LA SUITE DU CHRIST. C’EST ENTENDRE LES PLAINTES ET LES CRIS DE LIBERTÉ

DES CONDITIONS DE VIE DE CES CHRÉTIENS EMPRI- NOUS SOMMES APPELÉS À LA LIBERTÉ DES ENFANTS DE L’HOMME CAPTIF ET PAUVRE.

SONNÉS. DE DIEU. LA PREMIÈRE COMMUNAUTÉ TRINITAIRE DE CERFROID


DEVENU ADULTE, IL PART À PARIS POUR ÉTUDIER. IL EST DIFFICILE DE DEVENIR LIBRE DE CETTE LIBERTÉ. INITIE ALORS UNE VIE RELIGIEUSE TOUTE PRÉOCCUPÉE

APRÈS SON DOCTORAT DE THÉOLOGIE, IL N’A À MOINS D’ACCEPTER DE NOUS METTRE EN MARCHE DES CAPTIFS ET EN PARTICULIER DE CEUX QUI SONT

TOUJOURS PAS TROUVÉ SA PLACE SUR LA CARTE DE À LA SUITE DU CHRIST RÉDEMPTEUR. CET EXODE À AU LOIN, EN DANGER DE PERDRE LEUR LIEN AVEC LE

L’EGLISE. SANS RÉPONSE PRÉCISE À LA QUESTION DE LA SUITE DU NOUVEAU MOÏSE, NOUS AMÈNE VERS CHRIST RÉDEMPTEUR, EMPÊCHÉS DE VIVRE L’AMOUR

SA VOCATION, IL ACCEPTE D’ÊTRE ORDONNÉ PRÊTRE LA TERRE PROMISE. MAIS QUELLE EST DONC CETTE TRINITÉ.
EN 1193. C’EST LORS DE SA PREMIÈRE MESSE QU’IL TERRE PROMISE ? DEPUIS HUIT SIÈCLES, TOUTE COMMUNAUTÉ TRINI-

AURA CLAIREMENT L’INTUITION DE SA MISSION. LE JEAN DE MATHA, EN ROUTE VERS CERFROID À 80 TAIRE PORTE LE NOM DE MAISON DE LA TRINITÉ ET

CHRIST RESSUSCITÉ VA LUI APPARAÎTRE TENANT À KILOMÈTRES AU NORD EST DE PARIS CHERCHE LA DES CAPTIFS. EN EFFET, DANS CHAQUE MAISON, SE

SA GAUCHE UN ESCLAVE NOIR ET À SA DROITE UN RÉPONSE À CETTE QUESTION. IL COMPTE POUR CELA VIVENT TROIS PRÉOCCUPATIONS : UNE COMMUNAUTÉ
ESCLAVE BLANC. CETTE VISION FONDATRICE, SYM- SUR LA CLAIRVOYANCE DE L’ERMITE FÉLIX DE VALOIS DE VIE ET DE PRIÈRE ; L’ACCUEIL ; LE SOUCI DE LA

BOLE DE NOTRE CHARISME EST PARVENUE JUSQU’À DONT LA RÉPUTATION DE SAINTETÉ EST ARRIVÉE LIBÉRATION.

NOUS. À ROME, SUR LE FRONTON DE L’ÉGLISE JUSQU’À SES OREILLES. DE CETTE RENCONTRE, VA LA PRÉOCCUPATION DU CAPTIF ET DU PAUVRE

SAINT-THOMAS IN FORMIS, ON PEUT CONTEMPLER JAILLIR LA LUMIÈRE. DANS LA PRIÈRE, JEAN ET FÉLIX SUSCITE DANS LA COMMUNAUTÉ UNE EXIGENCE DE

UNE MOSAÏQUE. L’ARTISTE, CONTEMPORAIN DE JEAN INTÉRIORISENT LA VISION. ILS COMPRENNENT QUE SIMPLICITÉ ET D’AUSTÉRITÉ, DE SOBRIÉTÉ, DE PAUVRETÉ

DE MATHA A TRAVAILLÉ SOUS SA DICTÉE. CHAQUE CHRIST LIBÈRE, QUE LA SOURCE ET LE LIEU MÊME ET DE TRAVAIL. C’EST CETTE MÊME EXIGENCE QUI

RELIGIEUX OU LAÏC TRINITAIRE, DE TOUT TEMPS, A DE CETTE LIBERTÉ, C’EST DIEU LUI-MÊME. IL S’AGIT STRUCTURE L’ACCUEIL ET C’EST AU CŒUR MÊME DE

PU MÉDITER LE DON FAIT À SAINT JEAN DE MATHA. D’ÊTRE LIBRE DE LA LIBERTÉ MÊME DE DIEU ; TOUT CETTE ATTENTION AUX CAPTIFS ET AUX PAUVRES QUE

CETTE MOSAÏQUE EST LA PARABOLE DE NOTRE PROPRE L’OPPOSÉ DE LA LIBERTÉ DU TRUAND QUI CONSISTE LE CHRIST LIBÈRE.

LIBÉRATION. CHRIST LIBÈRE, VOILÀ L’INTUITION DE À FAIRE CE QUE JE VEUX À QUI JE VEUX, QUAND JE P. BERNARD-MARIE GEFFROY O.S.T.

Templarium - 27
chevalerie Mystique

Chronique d’une mort acceptée


ARRÊTÉ SUR ORDRE DU ROI DE FRANCE POUR SORCELLERIE ET TRAFIC DE GESTION, LE
GRAND-MAÎTRE DE L’ORDRE DU TEMPLE AVOUE SES ERREURS SUR LA MORALE ET LA par
FOI (SOUS LA TORTURE ?). APRÈS SEPT ANNÉES D’INSTRUCTION, DURANT LESQUELLES Sébastien
JACQUES DE MOLAY NE CONTESTA QUE DES POINTS DE PROCÉDURE, AVOUANT LES Baudry
VICES GÉNÉRAUX DE L’ORDRE, IL NIE LE JOUR DE SA CONDAMNATION. C’EST ALORS
LA PRAGMATIQUE SANCTION CONFORME AUX USAGES DU DROIT MÉDIÉVAL : LA MORT Rédacteur
en
POUR RELAPS. LE 19 MARS 1314, IL EST CONDUIT SUR LE BÛCHER EN COMPAGNIE
chef
DU PRÉCEPTEUR DE NORMANDIE. POURQUOI UNE MORT ACCEPTÉE ?

L
e 13 Octobre 1307 la nouvelle
tombe comme un couperet. Il en sera
fini des Templiers. Ainsi l’a décidé
Philippe le Bel et il n’accordera nulle
clémence. Il faut qu’ils disparaissent
quelque soit le prix à payer ou les moyens à em-
ployer. Peu de temps auparavant il écrivait dans
des missives « ces choses ont délaissé Dieu, leur
créateur… non seulement par leurs actes et leurs
œuvres détestables, mais même par leurs dis-
cours imprévus, ils souillent la Terre de leur saleté,
suppriment les bienfaits de la rosée, corrompent
la pureté de l’air et déterminent la confusion de
notre Foi.» Ce vil personnage qui maîtrisait fort
bien le langage n’en était pas à son premier coup
d’essai puisque, un an auparavant, les prêteurs
Juifs connurent un destin similaire. Mais au fond, parent de Jérusalem. Mais les Rois Chrétiens ne
était-ce le destin de cet Ordre de s’éteindre de les aident point et les Turcs reprirent la ville deux
cette façon ? Comment et pourquoi en est-on ans plus tard... Puis, en 1303, sur les conseils
arrivé là ? Certes, même si des enjeux politico- et l’approbation du Pape, les Templiers partent
financiers entrent en ligne de compte, pourquoi en croisade ; ils prennent la Thessalonique et se
ceux qui se battirent en Terre sainte en prenant laissent aller au pillage... Nous l’avons compris,
nombre de places fortifiées n’opposèrent aucune les Templiers manquent d’activité. Alors pour pal-
résistance aux soldats du Roi ? Ce mystère reste lier à l’ennui qui conduit l’homme à plonger son
entier mais donnons à chacun le plus d’éléments être dans les plaisirs du vin, Jacques de Molay
possible pour en tirer les arcanes profonds qui le comprend que ces expéditions militaires étaient
composent. nécessaires pour occuper ses soldats.
1303... Philippe le Bel est songeur. Les Templiers
LE TEMPLE EN SURSIS : LES ANNÉES JACQUES DE MOLAY sont inoccupés. Cette dernière croisade placée
sous les bons augures du Pape l’inquiète. Les
1292... Raymond Lulle conseille vivement au Templiers ne pourraient-ils pas devenir une ar-
Pape Nicolas IV de fusionner les trois Ordres mi- mée au service du Pontife ? Pire ne pourraient-ils
litaires en un et que le Grand-maître soit nommé pas devenir des mercenaires et envisager un jour
Roi du Sépulcre... Les années passent, Nicolas IV de le détrôner ? D’autant plus que les Templiers
meure et rien n’avance. sont de riches propriétaires terriens exemptés de
1298... Beaucoup le surnomme le niais. Son la plupart des redevances. Et que se passerait-
poste est tout sauf important, et en plus il n’est il s’ils venaient à acheter des terres en grandes
pas brillant. Pourtant qui aurait cru que celui qui quantités ? Posséderaient-ils un royaume qui soit
fût reçu en 1265 deviendrait Grand-maître ? Cet- équivalent à celui de la couronne de France ?
te année là, Jacques de Molay lance les Templiers Mais au moins on ne les aime pas! Selon Lavo-
dans une expédition contre l’Égypte et ils s’em- cat, « on leur reprochait leur âpreté aux gains,

28 - Templarium
Chronique d’une mort acceptée
l’emploi de certains moyens d’acquérir, l’usage
de contrats usuraires.... L’Ordre du Temple était
détesté du clergé, de la noblesse, et du tiers état
et du peuple…» Mais qu’en faire ?
Clément V reprend l’idée de Nicolas IV et décide
de fusionner les Templiers avec les Hospitaliers.
Jacques de Molay refuse et lui fait comprendre
qu’il n’avait pas de leçons à recevoir d’un Pape
qui préférait les plaisirs que lui prodiguait sa maî-
tresse à la spiritualité à laquelle il devait vouer sa
dévote vie.
Les richesses du Temple attirent, et chacun con-
voite une part de cette fortune. Les Templiers ne
sont pas des hommes à se laisser faire ; il faudra
alors manœuvrer finement. Utilisons ces gens.
Telle fût l’approche première de Philippe le Bel.

LES MANŒUVRES DU ROI PHILIPPE LE BEL


Quel beau prétexte que celui de la défense de la
Foi... Alors, sur ces pieux motifs, Philippe le Bel
demande à être reçu templier. Mais cet honneur
lui est refusé.
Janvier 1307... Philippe le Bel demande à faire
admettre son second fils comme chevalier Tem-
plier. Second refus.
Soulignons le fait que la couronne de France
est peu riche, endettée et que si un membre de
la famille Royale entrait au Temple il aurait été
facile par la suite de faire sien cette grande for-
tune... Insistons sur ce point. En fait, la couronne
de France devait entre autre 500.000 livres aux
Templiers. Il fallait alors trouver n’importe quel
moyen pour remplir les caisses royales. La ma-
nière douce n’ayant eu que peu d’impact, qu’à
cela ne tienne, employons la force.

UNE FIN IMMINENTE


12 Octobre 1307... Les instructions sont don-
nées.
13 Octobre 1307... On fait emprisonner les Tem-
EXÉCUTION DES TEMPLIERS
pliers. Guillaume de Nogaret salit les Templiers
COTE : FRANÇAIS 127,
auprès du peuple pour les faire détester et leur
FOL. 302
couper ainsi toute possibilité d’être soutenu. Et
BOCCACE, DES CAS DES
avec l’aide des inquisiteurs et de la torture, on
NOBLES HOMMES ET FEMMES
arrache les premiers aveux. On leur promet la li-
(TRADUCTION LAURENT
berté contre vérité, on les torture, on les terrorise,
DE PREMIERFAIT), FRANCE,
on les menace... Pas à pas, on brise ces hommes
PARIS, XVE
valeureux qui jadis offrirent leur vie au service du
Christ. Ceux qui ne meurent pas de souffrance
sont à jamais détruits. Peu importe la vérité, les
inquisiteurs doivent obtenir les preuves qu’ils ont
besoins. Pas de défense possible, pas de procès
équitable, seul le mot « destruction » est présent.
Et eux, fiers Templiers, ils subissent et endurent
les pires châtiments. Et les pauvres de ceux qui
avouent, se rétractèrent par la suite.
Pendant ce temps là....
Philippe le Bel s’installe dans la Tour du Temple.
Compte-il mettre la main sur le trésor financier
du Temple ?

Templarium - 29
chevalerie Mystique

‘‘
EXÉCUTION DES TEMPLIERS, BOCCACE, FRANCE, PARIS, XVE

27 Novembre 1307... La bulle Pastoralis Præminen- maîtres. Là, diverses théories s’affrontent. Certains
tiæ. Il est demandé à tous les souverains de procéder racontent que cet écrin renfermait le doigt de Jean-Bap-
à l’arrestation des Templiers. tiste, et que, dans l’un des cercueils (en l’occurrence ce-
Clément V ne croyait guère aux preuves collectées par lui de Guillaume de Beaujeu), se trouvait une caisse en
l’inquisition et demande en secret une contre enquête. argent dans laquelle se situeraient les trésors secrets de
1309... Le Pape est régulièrement diffamé par Nogaret. l’Ordre. (On retrouve des similitudes avec les chercheurs
De plus il est bloqué à Poitiers. Après deux tentatives, il de la commanderie d’Argigny située dans le Beaujolais)
gagne Avignon mais, surveillé par des hommes du Roi, L’Histoire raconte que François de Beaujeu y trouva cette
ne se sent guère en sécurité. caissette et la fit transporter à Chypre. (cf. Templarium
Les années suivantes... Fin et destruction de l’Ordre du n°7). Il restitua l’Ordre et institua de nouveaux rituels en
Temple, mais le mystère demeure. utilisant ces emblèmes.

’’
Jacques de Molay révéla à son neveu le précieux contenu d’un
écrin de cristal en forme triangulaire, monté en argent : il s’agis-
sait de la relique de l’index de la main droite de Jean-Baptiste.
On dit que cet Ordre fut repris par un Templier écos-
LES ARCANES DE L’ARRESTATION sais d’Aumont, ce qui donne à certains chercheurs la
possibilité d’étayer la thèse d’une origine templière de
Les Templiers n’offrent aucune résistance lors de leur ar- la Franc-Maçonnerie. Je n’entrerais pas dans ce sujet
restation. Et les commanderies sont trouvées vides. Pas qui caractérise une recherche d’origine légitime, mais
ou peu de biens. Pour les hommes, certains sont pris par il est forcé de reconnaître que des points communs ont
surprises ou massacrés sur place, mais beaucoup dispa- existés.
raissent. Que sont-ils devenus ? Comment l’ont-ils su ?
D’autre part, en Provence, Charles II attend le début de
l’année 1308 pour faire arrêter les Templiers. Pendant
ce temps, nombre d’entre eux ont eu le temps de s’exiler
ou rentrer dans la clandestinité. À l’Etranger, l’Ordre
n’est pas anéanti, c’est le cas en Catalogne, en Italie
et au Portugal pour ne citer que ces pays. Des ordres
successeurs sont crées : l’ordre militaire de la Milice du
Christ au Portugal et l’ordre de Notre-Dame-de-Monte-
sa dans la région de Valence en Espagne ; les Templiers
s’incorporent aussi dans les ordres existants tels l’Ordre
de Calatrava, et parfois chez les Hospitaliers de Saint-
Jean de Jérusalem.
En ce qui concerne les derniers jours du Temple, on re-
late une histoire entre Jacques de Molay et la famille des
Beaujeu. Jacques de Molay suspectait certains mauvais
jours dûs aux vagues d’arrestations. Il demande alors au
Comte de Beaujeu de récupérer un écrin de cristal de
forme triangulaire monté en argent. Selon de Molay, cet
écrin se serait trouvé sous l’un des cercueils des Grand-

30 - Templarium
Chronique d’une mort acceptée

LA TÊTE RELIQUAIRE DE
SAINT JEAN-BAPTISTE DE L’ÉGLISE
D’ANZEGHEM (FLANDRE OCCIDENTALE)
DONT LES TEMPLIERS AVAIENT LA CURE.

CETTE ÉPREUVE PASSÉE, IL LE CHARGE DE FAIRE IV LE BEL LA PERMISSION D’ÔTER DU TOMBEAU DES

GRAND-MAÎTRES :

Un texte mystérieux
SORTIR DE PARIS, LES ARCHIVES, LES TROPHÉES ET LE LE CERCUEIL EN QUESTION LE

TRÉSOR DE L’ORDRE DU TEMPLE. EN EFFET, JACQUES ROI ACCEPTE D’AUTANT PLUS QU’IL S’AGISSAIT DE

DE MOLAY REMET À SON NEVEU TROIS CLÉS EN LUI L’ONCLE PATERNEL DE BEAUJEU, PRÉDÉCESSEUR DE

RÉVÉLANT UN AUTRE SECRET : SOUS LE CERCUEIL RÉ- JACQUES DE MOLAY.


L’HISTORIEN G. A. SCHIFFMAN S’ÉVERTUE À LÉGITI- PUTÉ CONTENIR LES CENDRES DE SON PRÉDÉCESSEUR BEAUJEU PREND POSSESSION DES TRÉSORS CON-

MER LA CONTINUITÉ DU TEMPLE APRÈS SA DISPARITION (THIBAUD GAUDIN), JACQUES DE MOLAY Y AURAIT TENUS DANS LES DEUX COLONNES ET TRANSPORTE

DANS SON LIVRE LA CHEVALERIE À L’ORIGINE DE LA PLACÉ UNE CAISSE D’ARGENT DANS LAQUELLE SONT L’ENSEMBLE PROBABLEMENT VERS CHYPRE.
FRANC-MAÇONNERIE DU MILIEU DE XVIIIÈME SIÈCLE. ENFERMÉS LES REGISTRES ET LA CORRESPONDANCE TOUJOURS SELON CE MÊME DOCUMENT, L’ORDRE

SELON LUI, PLUSIEURS TEMPLIERS ÉCHAPPENT À LA CONFIDENTIELLE (ANNALES ET ANCIENNES LETTRES N’A JAMAIS CESSÉ UN INSTANT D’EXISTER ; ET SI LE

PRISON ET AU BÛCHER, ABANDONNENT LEURS BIENS DES PRINCIPALES CONNAISSANCES SUBLIMES DE NOM ET LA RÉSIDENCE DES VÉRITABLES GRANDS-MAÎ-
ET SE RÉFUGIENT SOIT EN ÉCOSSE, SOIT DANS LES L’ORDRE), LA COURONNE DES ROIS DE JÉRUSALEM, TRES EST UN MYSTÈRE, C’EST PARCE QUE L’HEURE DE

LIEUX RETIRÉS POUR FINIR LEURS JOURS EN ERMITES. LE CHANDELIER À SEPT BRANCHES, ET LES QUATRE L’ORDRE N’EST PAS REMPLIE.

IL PRÉCISE DANS SON DOCUMENT QU’À LA VEILLE DU STATUES D’OR QUI ORNAIENT LE SAINT-SÉPULCRE
COUP DE FILET DE 1307, JACQUES DE MOLAY AVAIT (LES QUATRE ÉVANGÉLISTES).
COMPRIS LE SORT QU’ON RÉSERVAIT AUX SIENS BIEN JACQUES DE MOLAY AJOUTE QU’IL AVAIT RAMENÉ
AVANT SON SUPPLICE ET AURAIT FAIT VENIR PRÈS DE CE TRÉSOR DE JÉRUSALEM EN LE CACHANT DANS LE
LUI SON NEVEU, GUICHARD VI DE BEAUJEU : «IL PRIT CERCUEIL ALORS QUE TOUT LE MONDE PENSAIT QUE
SON PARTI ET NE SONGEA QU’AUX MOYENS DE CON- LES SARRAZINS S’EN ÉTAIENT EMPARÉS.
SERVER, DE PROPAGER ET DE PERPÉTUER LES SUBLIMES ENFIN, IL RÉVÈLE QUE LES DEUX COLONNES QUI
CONNAISSANCES ET LES PRINCIPES FONDAMENTAUX DE ORNAIENT LE CHŒUR DU TEMPLE À L’ENTRÉE DU
L’ORDRE. C’EST ALORS QU’IL PENSA À SON NEVEU, TOMBEAU ÉTAIENT CREUSÉES, ET RENFERMAIENT LES
LE COMTE DE BEAUJEU. QUELQUES JOURS AVANT LA GRANDS TRÉSORS ACCUMULÉS PAR L’ORDRE ET VER-
DATE DE SON SUPPLICE, IL LE PRIA DE VENIR AUPRÈS SÉES SUCCESSIVEMENT DANS LES COLONNES DONT
DE LUI ET LUI EXPOSA SES INTENTIONS. BEAUJEU ON POUVAIT MONTER LES CHAPITEAUX ET EN TIRER LES
REÇUT AVEC RECONNAISSANCE LES PROPOSITIONS FONDS. LE GRAND-MAÎTRE FAIT JURER À BEAUJEU DE
DE SON ONCLE, QUI EXIGEA DE LUI POUR PREUVE SAUVER L’ENSEMBLE ET DE LE CONSERVER À L’ORDRE
DE FIDÉLITÉ DE DESCENDRE DANS LE TOMBEAU DES JUSQU’À LA FIN DU MONDE.
BIBLIOGRAPHIE
GRANDS-MAÎTRES, D’Y PRENDRE SOUS L’UN DES APRÈS LA MORT DE JACQUES DE MOLAY, LE COMTE
CERCUEILS, QU’IL LUI INDIQUA, UN ÉCRIN DE CRISTAL S’EMPRESSE DE TENIR SES ENGAGEMENTS. IL S’ASSURE
Procès des frères et de l’Ordre du
EN FORME TRIANGULAIRE, MONTÉ EN ARGENT, ET DE
temple par M. Lavocat , 1888.
NEUF INFORTUNÉS CHEVALIERS DU TEMPLE, ÉCHAPPÉS
Le dossier de l’affaires des Tem-
LE LUI APPORTER. » AUX FUREURS DES PERSÉCUTIONS, AVEC LESQUELS pliers par M. Lizerand , ed belles lettres
POUR S’ASSURER DE SON DÉVOUEMENT, IL DEMANDE IL MÊLE SON SANG, PUIS FAIT VŒU DE PROPAGER 1989.
DONC DE LUI RAMENER L’OBJET PRÉCIEUX EN DÉVOI-
La doctrine secrète des Templiers
L’ORDRE SUR TOUT LE GLOBE TANT QU’ILS SE TROU-
par M. Loiseleur, ed Belisane 1999.
LANT SON CONTENU : IL S’AGISSAIT DE LA RELIQUE VERAIENT NEUF ARCHITECTES PARFAITS.
DE L’INDEX DE LA MAIN DROITE DE JEAN-BAPTISTE. PUIS LE COMTE DE BEAUJEU DEMANDE À PHILIPPE

Templarium - 31
Le Portail des Chevaliers

JEAN-LUC SOUBEYRAS
ET LA FORGE MÉDIÉVALE
par L’UTILISATION DES MÉTAUX A PRIVILÉGIÉ LES TECHNIQUES ET LES
Jean-Luc Alias STYLES TRANSMIS D’UNE CIVILISATION À L’AUTRE, D’UN PEUPLE À
L’AUTRE. LES RÉACTIONS CHIMIQUES DE LA TRANSMUTATION DES
MÉTAUX FURENT EXPLOITÉES PAR UN MAÎTRE EN LA MATIÈRE : LE
FORGERON. CET AFFILIÉ DE L’ALCHIMIE, INITIÉ AUX TECHNIQUES DE
LA TREMPE, OFFRAIT UN RÉSULTAT SURPRENANT : LA NAISSANCE EN
AUTRE D’UNE RAPIÈRE, D’UN SABRE, D’UNE ÉPÉE, D’UN CIMETERRE,
D’UN COUTELAS OU D’UNE DAGUE, D’UNE FRANCISQUE, D’UNE BAR-
DICHE, D’UN ÉPIEU OU D’UNE POINTE DE LANCE. AUJOURD’HUI DANS
SA FORGE, JEAN-LUC SOUBEYRAS INCARNE CE PERSONNAGE

suivant : trois torons et un torsadé pour le centre de la lame, plus des tran-
chants rapportés en acier très dur. Le creusage est accentué dans la matière.
Par la torsion des barres, il obtient des croix damassées situées au centre du
toron. C’est la technique propre aux forgerons qui grattent en profondeur au
milieu d’un centimètre d’acier pour révéler ces motifs particuliers, retrouvés sur
certaines épées ou autres armes, comme les pointes de javeline. Comme ces
ancêtres de métier, il utilise une certaine technique et un matériel adéquat pour
tailler dans les lames en créant des motifs. L’utilisation de la meule associée à
l’usage des pâtes à polir donne un aspect uni et luisant. Ces épées étaient très
puissantes sur les tranchants rapportés, voire incassable, et bénéficiaient d’une
TRAVAIL DE FORGE esthétique relative à la notoriété : ce sont les armes des chefs.
La photo ci-contre montre une simple épée du XIIIe siècle (des
Templiers) reconstituée par Jean-Luc Soubeyras. Malgré les moyens LES MATÉRIAUX EMPLOYÉS
d’aujourd’hui, il continue à travailler sur les mêmes principes de Le forgeron emploie essentiellement du fer pur. Cette matière est très rare puis-
la forge ancienne, avec le marteau et l’enclume. Chaque fois qu’il qu’il n’existe en France qu’une maison qui en fabrique, et il est très difficile de
fabrique une lame large sur les tranchants, ces derniers sont forgés. se procurer du fer pur avec les hauts fourneaux. Les différents types d’acier sont
La structure des molécules est écrasée et augmentée en densité sur les composés d’un mélange de fer avec divers pourcentages de carbone. Dès que
tranchants, renforçant ainsi la résistance et la résilience de l’épée : Jean-Luc a réuni les différentes parties de la lame, il ressoude le tout en un
c’est la technique du forgeage manuel. Le métal forgé est plus robuste bloc appelé « trousse ». Les trousses très lourdes sont difficiles à travailler en
et plus ductile que celui coulé ; il montre une résistance considérable raison de leur poids car le réchauffement est très long, et entraîne un contrôle
à l’usure et aux coups. laborieux de la température. Cela ne l’empêche pas de faire des trousses en
Selon Jean-Luc, le fer, l’acier et la fonte étaient mal dosés en raison damasse de 2,5 kg, ce qui est assez rare. La photo à la page 33 montre les
de la méconnaissance du taux employé (taux de carbone, etc.); la restes de trousses : un toron, deux torsadés, une lame centrale en fer et des
connaissance relative à la propriété de chaque métal n’était qu’expé- tranchants rapportés. L’ensemble n’a plus aucun intérêt puisqu’il ne peut rien
rimentale. Pour résoudre les problèmes d’hétérogénéité dans l’acier, en faire.
le fer et l’acier très dur étaient soudés ensemble au sein de la forge, La petite trousse en damasse est soudée au bout d’une barre en métal pour
puis torsadés pour homogénéiser les différentes forces et tensions sur faciliter le passage au four. Le forgeage de cette pièce aboutit, soit en garde
leur barre, auxquels étaient rapportés des tranchants en acier très dur. d’épée, soit à une dague damasse, etc. Tout ce travail préalable de soudure à
Il en résultait des épées à la fois souples et dures, qui ne se tordaient la forge est important avant de faire une arme quelconque. La forge normale
et ne se cassaient pas, procurant ainsi une certaine suprématie guer- d’une lame se situe entre 750° et 950°; pour obtenir un effet moiré (à la
rière. Elles étaient capables de combattre plus longtemps que toutes manière damassée), la soudure se fait au-delà de 1400°. La lame d’épée en
les autres épées avec des impacts beaucoup plus forts : ce sont les acier damasquiné est exceptionnellement dure et résistante.
épées de légende, Excalibur, Durandal, Joyeuse, Gramm (chez les
nordiques). FORGE À GAZ OU FORGE À CHARBON
L’épée représentée à la page 33 est une reproduction du VIIe et Xe C’est dans cette partie de l’atelier où se passe toute l’alchimie des soudures,
siècle que Jean-Luc a réalisée selon le même principe de construction étant précisé tout de même qu’on ne peut pas carburer de l’acier. Suivant ce
ÉPÉE DES TEMPLIERS DU XIIIE SICÈCLE

32 - Templarium
UNE TROUSSE dRESTES DE TROUSSE

LE FORGERON ÉCRASE LA TROUSSE CHAUFÉE PAR SES COUPS DE MARTEAU SUR L’ENCLUME - ÉPÉE AVEC CROIS DAMASSÉES SUR LA LAME (VIE / XE SIÈCLE)

UNE LAME CHAUFFÉE À LA FORGE


qu’il fait, par exemple s’il a besoin du fer, il le carbure avec une forge à charbon : prin-
À GAZ QUE JEAN-LUC VA ÉCRASER
cipe des sédimentations superficielles (acier de Tolède) réalisable aussi avec une forge PAR SES COUPS DE MARTEAU SUR
à gaz. La technique idéale de Jean-Luc pour finir une lame est de la laisser traîner dans L’ENCLUME.
une forge à charbon de manière à faire une petite sédimentation superficielle. Ensuite,
usant du marteau et de l’enclume, il va pratiquement jusqu’à la finition, expliquant
qu’il peut faire ce type de sédimentation supplémentaire, petit plus irréalisable à la
forge à gaz. La pointe finie, il entame les tranchants. L’estampage prend forme et
l’arête centrale apparaît en même temps d’un côté comme de l’autre. En frappant,
il oriente de manière à réaliser simultanément les deux tranchants puis augmente la
densité moléculaire de l’acier pour obrenir une meilleur résistance et résilience de ce
métal malléable. Les phases répétées du forgeron sont les suivantes : enclume, borax,
forge à gaz ou à charbon.

LA FINITION DE L’ÉPÉE
La lame commence a prendre forme lorsque Jean-Luc commence à écraser les pentes
de manière à renforcer la dureté. Ensuite, il nettoie la pièce et l’abrase. Quand tout tique, patron des forgerons et des orfèvres.
le crassier est enlevé, il réalise les opérations thermiques en aboutissant à la trempe Marteau et enclume associés au feu évoquent le travail du forgeron et des métaux.
et à la dureté optimale. Ensuite, il reprend la pièce métallique aux abrasifs. À partir Autrement dit, ces outils suggèrent le travail alchimique. À plus forte raison aujourd’hui,
de là, la phase du polissage est finie et la lame apparaît. Il monte ensuite la garde lorsque des principes tels que les températures de liaison, les procédés de préparation
à chaud en l’ouvrant sans la fraiser. Pourquoi cette méthode de montage pour la des surfaces, les techniques de traitement thermique, la température et le milieu de
garde ? Premièrement, cela prend plus de temps à fraiser que de l’ouvrir avec un burin trempe qui sont parmi les éléments essentiels dans la conception de la lame, restent
; deuxièmement, l’adaptation est meilleure quand elle est faite à chaud sur la lame, relativement méconnus à ce jour malgré toutes les études réalisées sur la forge.
la garde s’adapte parfaitement, et il en est ainsi pour le pommeau. Une fois que la Mettre en forme des lames par le travail du marteau et de l’enclume, voilà qui
composition est terminée, et que la lame est fixée sur le pommeau, l’épée est prête à s’accorde entièrement avec Jean-Luc le damasquineur. Ce dernier donne réellement
combattre. Outre les pouvoirs surnaturels qui abondent dans la mythologie et la litté- l’impression d’avoir son véritable rang dans la conception de l’œuvre.
rature, une importance symbolique était aussi souvent attachée à l’épée : l’homme fort Évoquons alors les premières œuvres du forgeron qui étaient principalement des
qu’est le forgeron. Les épées représentaient la force et la distinction personnelle : elles armes, épées et sabres, donc des lames ! D’autre part, pour que les lames soient com-
appartenaient ou avaient été acquises par des héros et des guerriers exceptionnels. plètement formées, l’enclume est indispensable ! Avec « l’en plume » (Langage des
Les serments d’honneur et de loyauté étaient couramment prononcés sur l’épée et les oiseaux) qui se dissimule derrière les bruits de la forge, il s’aperçoit jusqu’à quel point
souverains confèrent encore aujourd’hui le titre de chevalier en tapant les épaules avec il peut percevoir les authentiques formes créées par le Marteau. D’une certaine façon,
une épée. Rendre son épée a toujours été un signe de défaite ou de soumission et sa la lame ne montre son aspect réel que par un travail sur l’en plume, sur la perception
rupture une cérémonie de dégradation. des bruits dans l’élaboration de la lame ! Le martelage qui façonne la matière est
provoqué par « les desseins selon les ordres », les mots qui prennent formes à partir
MARTEAU ET ENCLUME : L’ÉNIGME des images. Maîtriser ainsi la connaissance de l’univers de la matière sans se soucier
des conséquences ni des aspects positifs ou négatifs que l’on nomme le Bien et le Mal,
La profession de forgeron est le plus souvent héréditaire, et la connaissance se transmet voilà les moyens de s’approprier la puissance !
avec l’accord des ancêtres. En effet, inspirés de Tubalcaïn père des forgerons et source Enfin, pour conclure sur les formes du métal, on peut deviner que chez Jean-Luc Sou-
de l’alchimie sacerdotale, les forgerons primitifs liaient de près la magie à leur travail. beyras l’esprit préexiste à la substance au delà de la matière, habite chaque atome
Ils ne transmettaient leur savoir qu’à leurs disciples, formant ainsi de petites confréries et particule, est le mode d’emploi de l’univers du forgeron : La force immatérielle
avec des visions aussi pratiques que thaumaturgiques. Nicodème est leur patron ainsi qui forge la réalité concrète. Au rang de « maître du feu », celui-ci exploite l’énergie
que l’évêque français saint Éloi qui avait fabriqué par son habileté deux trônes royaux primitive libérée, la chaleur et la puissance d’action dite « magico cérémonielle ».
avec l’or prévu pour un seul. Sa bonté légendaire en a fait un personnage embléma- L’esprit ne souffle-t-il pas sans soufflet de forge ?

Templarium
Templarium
- 33- 33
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