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Addiction et spiritualité
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L'auteur
Jacques Besson
Jacques Besson est addictologue, professeur ordinaire à la Faculté de biologie et de
médecine à l’université de Lausanne et chef du Service de psychiatrie
communautaire du CHU vaudois, en Suisse. Il s’intéresse depuis plus de 30 ans aux
rapports entre psychanalyse et religion, et entre neurosciences et spiritualité.
Ta ble des m a tièr es
Préambule
Introduction
La Suisse
Les scènes ouvertes de la drogue en Suisse
Un traumatisme organisateur
La politique des quatre piliers
La Société suisse de médecine de l’addiction
Du jugement moral au jugement clinique
Une nouvelle science au sein de la psychiatrie
communautaire
Vignettes cliniques
Cannabis
Alcool
Benzodiazépines
Cocaïne
Héroïne
Jeu pathologique
Place de la spiritualité
Définition
Spiritualité et santé
Quelques données sur les addictions
Aspects théoriques et scientifiques
Substances et civilisation
À l’aube de l’humanité, les drogues
Dans l’Antiquité, le cannabis
Dans le christianisme, le vin
La Némésis des temps modernes
Psychiatrie et religion
Une tension fondamentale
Réductionnismes
Des zones frontières
En psychanalyse
Le scientisme de Freud
Le schisme avec Jung
La correspondance Freud-Pfister
Viktor Frankl et le Dieu inconscient
Neurosciences de l’addiction
Les modèles animaux
Le cerveau des émotions
Le stress et l’addiction
L’anxiété et l’addiction
La génétique de l’addiction
Les neurosciences sociales
La plasticité neuronale
Neurosciences et spiritualité
Les origines
La neurothéologie
Imagerie et génétique
Cartes et circuits
La méditation et la prière
Trois ordres en médecine
Platon et les Grecs
Pascal
Teilhard de Chardin
Zundel
Le dalaï-lama
Conclusion et perspectives
Bibliographie
Préambule
Notes du chapitre
Un traumatisme organisateur
Notes du chapitre
[1] ↑ Cable News Network (CNN) est une chaîne de télévision américaine
d'information en continu, à diffusion internationale.
[2] ↑ Dans le cadre de la démocratie directe, la population peut lancer des initiatives
pour modifier des lois et des articles de la Constitution. Lorsque le nombre de
signatures recueillies est suffisant, le peuple est amené à voter sur les amendements
proposés (votations populaires).
Cannabis
Benzodiazépines
Catherine est caissière dans un grand supermarché. Elle a
35 ans et souffre à la fois de stress et d’ennui, en raison de la
monotonie de ses journées. Elle consomme des tranquillisants
(des benzodiazépines) pour tenir le coup. Elle en prend tous les
jours dès le matin et en est devenue dépendante. Le week-end,
elle sort en boîte et prend des stimulants (amphétamines,
ecstasy) pour se « lâcher ». Le problème est que, mère de
famille monoparentale, elle abandonne ses deux enfants de 3 et
5 ans dans son appartement de banlieue, au 7e étage, sans
surveillance.
Cocaïne
Héroïne
Jeu pathologique
Notes du chapitre
DSM, CIM
Les comorbidités
La motivation
La crise
Notes du chapitre
Définition
Spiritualité et santé
Ici, c’est le vin qui prend une place centrale. L’alcool, comme
substance psychoactive anxiolytique, euphorisante à petite
dose, est un symbole de la bonne humeur, de la fête et du
rapprochement entre les gens. De plus, l’analogie avec le sang
que permet sa robe rouge se prêtera au symbole chrétien du
sang du Christ. En effet, le pain et le vin de la sainte Cène
symbolisent le corps et le sang du Christ donnés pour la
communion entre Dieu et l’humanité réconciliée. Cette fête, ces
Noces mystiques avaient été préfigurées par le premier miracle
du Christ, aux noces de Cana. Sur injonction de sa mère, Jésus
transforme de l’eau en vin, pour que la fête ne soit pas gâchée
et puisse continuer dans la joie. Ce miracle peut être associé à
celui de la multiplication des pains, symbole de la générosité
divine. Lors du jeudi saint, le pain et le vin prendront leur
dimension mystique, le Christ annonçant qu’il ne boira plus de
ce vin avec ses disciples, mais qu’ils se retrouveront pour boire
le vin du Royaume. Ce rituel, qui se perpétue depuis plus de
deux mille ans, montre le chemin d’une humanité transfigurée
par le don et la réconciliation avec son Créateur. Cet état de
conscience supérieur est symbolisé par la joie procurée par le
vin, métaphore du sang du sacrifice divin, libérant l’humanité
de son angoisse.
On est donc bien loin des doux hippies Peace and love dont
l’usage de drogues était ritualisé en termes de valeur
communautaire. On assiste bien plutôt à un recours chaotique à
toutes sortes de substances psychoactives, licites et illicites,
pour se défoncer, soit dans des naufrages urbains pour les plus
vulnérables, soit dans une fuite en avant pour la compétition et
la performance à tout prix, chez ceux qui restent socialement
insérés et qui abusent de psychostimulants telles la cocaïne et
les amphétamines. Ils ne tarderont d’ailleurs pas à rejoindre
après épuisement les marges des grandes villes, junkies
cumulant les dégâts médico-psycho-sociaux, dont de graves
comorbidités psychiatriques.
Les drogues ont donc bel et bien perdu leur caractère
initiatique et, en dehors des plaisirs liés à la transgression chez
les adolescents, les rituels ont disparu, dans une désacralisation
du monde. Car finalement, pourquoi ne sommes-nous pas tous
drogués, à rechercher l’efficacité des substances psychoactives
pour moduler nos états cognitifs et affectifs ? L’addiction aux
drogues n’est-elle pas finalement qu’un avatar de notre
civilisation ? Notre volonté de tout contrôler de manière
comptable nous fait basculer dans une Némésis quantitative,
dans une horreur économique, une furie administrative. Il faut
sortir de cette addiction générale, en rappelant nos finitudes,
notre rapport au manque, nos devoirs de fraternité. La
fraternité, ce troisième emblème des Droits de l’homme, a été
un peu oublié après la liberté revendiquée par les droites
libérales, et l’égalité revendiquée par les gauches sociales. Faut-
il voir dans l’intérêt des Occidentaux pour le bouddhisme une
prise de conscience des limites de notre civilisation ? La
méditation, nous rapprochant davantage de l’être que de
l’avoir, oriente aussi vers la compassion, cet envers de
l’addiction. Méditation et compassion sont des constituants
universels des spiritualités.
Les Alcooliques Anonymes
Un peu d’histoire
Enjeux et perspectives
Notes du chapitre
[1] ↑ En anglais « The Big Book », le Gros Livre, est le texte de référence du
mouvement des Alcooliques anonymes. Il en contient tous les principes utiles pour le
rétablissement.
Psychiatrie et religion
Réductionnismes
Le scientisme de Freud
psychiatrie et religion.
La correspondance Freud-Pfister
[1] ↑ Pour Jung, la « coincidentia opositorum », l’opposition des contraires, est une
particularité du sacré, à l’image des spiritualités orientales qui voient dans la dualité
un accès à une dimension supérieure, la non-dualité.
Les effets de la spiritualité sur la
santé
Quelques hypothèses
Eugen Drewermann
Rudolf Otto
Paul Tillich
Aaron Antonovsky
Si les capacités sont bonnes sur les trois axes, alors la cohérence
est haute, qui mesure la capacité de salutogenèse : en effet, les
médecins sont habitués à évaluer et à étudier la pathogenèse
selon le passé du patient, mais qu’en est-il de la salutogenèse,
dans l’avenir du patient, à la recherche d’attracteurs de santé
dans le futur du patient ?
George Lakoff
Né en 1941, George Lakoff est professeur de linguistique
cognitive à l’université de Californie, à Berkeley. Ses thèses
concernent la métaphore conceptuelle au cœur de la pensée
humaine, c’est-à‑dire l’inconscient cognitif. Sa théorie concerne
la cognition incarnée et a été un best-seller aux États-Unis
(Philosophy in the Flesh: The Embodied Mind and Its Challenges
to the Western Thought). Il voit une spiritualité incarnée, via
une connexion empathique avec l’univers, via le corps. Ainsi,
Dieu ineffable apparaît vivant à travers les métaphores : Être
suprême, Tout-Puissant, Créateur, Père, Souffle, Berger,
Source…
Neurosciences de l’addiction
Le stress et l’addiction
L’anxiété et l’addiction
La génétique de l’addiction
La plasticité neuronale
Notes du chapitre
Les origines
La neurothéologie
Imagerie et génétique
Cartes et circuits
Les Romains ont traduit en latin ces trois niveaux par corpus,
spiritus et intellectus, ce dernier concept renvoyant à
l’intelligible, c’est-à‑dire à ce qui peut être discerné dans
l’invisible.
Toujours chez les Grecs, les gnostiques vont retenir ces trois
étages en termes de catégories de préoccupation des êtres
humains. La première catégorie, le « hylique », s’occupe
uniquement du corps et constitue un degré inférieur, voué à la
destruction, dans une optique dualiste. La deuxième catégorie,
le « psychique », a une âme mais pas encore d’esprit, toutefois il
peut acquérir le salut par l’instruction. La troisième catégorie,
le « pneumatique », est constituée d’individus qui se savent et se
sentent pourvus d’une perfection innée dont la nature est
esprit. Ce sont les spirituels prédestinés au salut.
Pascal
Teilhard de Chardin
Zundel
Le dalaï-lama
Le 15 avril 2013, le dalaï-lama a été invité par l’université de
Lausanne. Il s’agissait d’organiser une rencontre avec les
scientifiques de l’université, autour d’un sujet convoquant à la
fois le bouddhisme et la science. Le thème de la journée se
déclinait en deux parties : « Vieillir en paix » et « Mourir en
paix ». Après une longue préparation de plusieurs mois, des
scientifiques ont présenté leurs recherches sous forme
synthétique avec une question au dalaï-lama. Chaque
chercheur conduisait une recherche soit sur le vieillissement,
soit sur la mort, que ce soit au niveau cellulaire, tissulaire,
personnel ou social. Les questions de type scientifique
recevaient une réponse bouddhiste de la part de Sa Sainteté.
Par exemple, le thème de la mort à l’hôpital, ou celui du suicide
assisté ont fait vibrer l’assistance par l’aspect spontané et
inattendu des réponses. Nous avons ainsi appris, par exemple,
que le suicide peut être altruiste, s’il s’agit d’épargner la famille
d’une longue fin de vie coûteuse en peines et en souffrances
partagées.
Il n’y a pas que pour la santé publique que nous avons besoin
du troisième ordre. Car l’addiction n’est qu’un aspect de notre
modernité. Elle préfigure les besoins non couverts de notre
civilisation contemporaine. Addiction au quantitatif, dans un
monde d’avoir et de prendre, alors qu’on pourrait se
représenter un monde adulte dans l’être et le donner. Cette
question va devenir critique sur le plan écologique. En effet,
nous consommons les ressources de notre planète sur un mode
parfaitement addictif. L’addictologie est un bon modèle pour
l’écologie. Nous avons tous besoin de sens pour nos
communautés et de lien entre les humains, au-delà des
frontières. La mondialisation ne pourra pas réussir sans
cohérence communautaire, humanitaire et planétaire. C’est
sans doute pour cette raison qu’apparaît aujourd’hui un
important mouvement d’écospiritualité, aspirant à un rapport
équilibré entre les humains et leur Terre nourricière.
Il nous reste visiblement encore beaucoup de chemin à
parcourir pour passer de l’inaccompli à l’accompli, pour
embellir le monde. Une chose est sûre : mettons-nous à l’œuvre
pour passer de l’addiction à la compassion.
Bibliographie
Wiley, Blackwell.
ZUNDEL, M. 1964. Dialogue avec la Vérité, Paris, Desclée de
Brouwer.
Sources vidéo