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Cours d’Algèbre I

Augustin P. SARR
Oumar D. MBODJ

Université Gaston Berger


Saint–Louis, Sénégal
Année 2019–2020
Table des matières

1 Éléments de logique mathématique 4


1.1 Propositions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
1.2 Composition de propositions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.3 Méthodes de démonstration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
1.3.1 Preuve directe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
1.3.2 Preuve par contraposition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
1.3.3 Preuve par l’absurde (ou par contradiction) . . . . . . . . . . . 11
1.3.4 Preuve par cas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.3.5 Preuve par récurrence. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
Tests de connaissances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
Correction des tests de connaissances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

2 Ensembles et relations 18
2.1 Appartenance, inclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
2.2 Opérations sur les ensembles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
2.3 Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
2.3.1 Partitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2.4 Relations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2.4.1 Filières de l’UVS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2.4.2 Congruence dans Z . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
2.4.3 Relation associée à une application . . . . . . . . . . . . . . . . 25
2.4.4 Relation d’ordre, relation d’équivalence . . . . . . . . . . . . . 27
2.4.5 Décomposition canonique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
Tests de connaissances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
Correction des tests de connaissances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

3 Introduction aux groupes 37


3.1 Lois de composition internes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
3.2 Lois quotient . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
3.3 Groupes et sous–groupes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
3.4 Homomorphismes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
3.5 Sous–groupe engendré par une partie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
3.6 Groupe quotient . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
3.6.1 Classes selon un sous–groupe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
3.6.2 Groupe quotient . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
3.6.3 Décomposition canonique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
Indications de solutions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49

2
Table des matières

4 Le groupe symétrique 50
4.1 Définitions et généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
4.2 Propriétés d’une permutation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
4.2.1 Signature d’une permutation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
Indications de solutions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

5 Introduction aux anneaux et corps 57


5.1 Structure d’anneau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
5.1.1 Anneau intègre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
5.2 Idéal d’un anneau, morphisme d’anneau . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
5.3 Caractéristique d’un anneau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
5.4 Propriétés des idéaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
Indications de solutions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

6 Le corps des nombres complexes 68


6.1 Défintions et propriétés immédiates . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
6.2 Équations algébriques de degré 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
6.3 Argument d’un nombre complexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
Indications de solutions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76

3
Chapitre 1

Éléments de logique mathématique


Nous usons de la logique pour raisonner aussi bien sur notre environnement que sur
notre existence. Il apparaît que nous sommes naturellement dotés de la faculté de
mener un argumentaire logique, toutefois l’exercice de cette faculté s’accompagne très
souvent d’erreurs de raisonnement.
Au delà de son aspect fondamental pour la rédaction et la compréhension des démons-
trations mathématiques, la logique trouve de nombreuses applications en informatique
et en électronique ; en particulier, dans la vérification de programmes informatiques.
Dans ces notes, nous proposons les fondamentaux de la logique des prédicats du pre-
mier ordre, essentiels au raisonnement mathématique.

1.1 Propositions
Considérons la suite d’arguments ci–dessous :
a) S’il y a coupure d’électricité alors la lampe ne s’allume pas.
b) La lampe ne s’allume pas,
donc
c) il y a coupure d’électricité.

Nous menons quotidiennement (parfois inconsciemment) ce genre de raisonnements.


Des deux premières assertions ou propositions, on déduit la troisième « il y a coupure
d’électricité ». Précisons que le raisonnement ci–dessus est incorrect (parce que la
lampe peut être grillée tout simplement).

Définition 1 (Assertion, Proposition).


a) Une assertion est un énoncé qu’on peut qualifier, sans ambiguïté et sans information
supplémentaire de vrai ou de faux.
b) Une proposition est un énoncé qui vérifie les principes suivants :
— tiers–exclu : l’énoncé est soit vrai soit faux ;
— non–contradiction : l’énoncé ne peut être à la fois vrai et faux ;
— identité : dans un même contexte, l’énoncé ne peut changer de valeur de vérité.
Une proposition qui est toujours vraie est dite tautologie ; une proposition qui est
toujours fausse est dite contradiction.

Exemple 1. Les énoncés ci-dessous sont des propositions.



(1) Le nombre 2 est irrationnel.
(2) Matam est la capitale du Gabon.
(3) 2 + 2 = 3.
(4) vrai.
Les propositions (1) et (4) sont vraies, alors que les autres sont fausses. Les énoncés

4
1.2. Composition de propositions

(a) Lisez ce cours attentivement.


(b) x > 2.
(c) x + y = z ;
(d) Quelle heure est–il ?
ne sont pas des proposition, car on ne peut leur attribuer de valeurs de vérité.

Définition 2. Si P est une proposition, la négation de P , notée ¬P — qu’on lit


« non P »— est la proposition qui est vraie lorsque P est fausse, et qui est fausse
lorsque P est vraie. La négation d’une tautologie, est dite contradiction.

Exemple 2.
— Si P est la proposition « 15 est un nombre premier », ¬P est alors la proposition
« 15 est composite ».
— ¬(2 + 2 6 3) est (2 + 2 > 3).

1.2 Composition de propositions


De la même manière qu’étant donnés deux entiers, x et y, on peut construire d’autres
entiers (x + y, xy , etc.) à partir de ceux–ci, étant données deux propositions, on peut
former d’autres propositions par composition.

Conjonction et disjonction.

Définition 3. Soient P et Q deux propositions.


— On appelle conjonction de P et Q, notée P ∧ Q (qu’on lit « P et Q ») la propo-
sition qui est vraie lorsque P et Q sont vraies, et qui est fausse sinon.
— La disjonction de P et Q, notée P ∨ Q (« P ou Q ») est la proposition qui est
fausse lorsque P et Q sont fausses, et qui est vraie sinon.
— Le ou exclusif de P et Q, noté P ⊕ Q, est la proposition qui est vraie si et
seulement si une et une seule des proposition P et Q est vraie, et qui est fausse
sinon.
√ √
Exemple 3. Soient P et Q les propositions « 3 est un entier » et « 4 est un entier »,
respectivement. La proposition P est fausse, alors que Q est vraie. Ainsi,
— P ∧ Q est fausse ;
— ¬P ∧ Q est vraie ;
— P ∨ Q est vraie ;
— P ∨ ¬Q est fausse ;
— P ⊕ Q est vraie ;
— P ⊕ ¬Q est fausse ;
— ¬P ⊕ ¬Q est fausse.
— Pour toute proposition R, ¬(R ∧ ¬R) est une tautologie.

Table de vérité. Il est commun de résumer les valeurs de vérité d’une proposition au
travers d’un tableau récapitulatif dit table de vérité. Les tables de vérité des proposition
P ∧ Q, P ∨ Q, P ⊕ Q et (P ∧ Q) ∧ (P ∨ Q) ∧ (P ⊕ Q) sont données dans le tableau 1.1.

5
1.2. Composition de propositions

P Q P ∧Q P ∨Q P ⊕Q (P ∧ Q) ∧ (P ∨ Q) ∧ (P ⊕ Q)
vrai vrai vrai vrai faux faux
vrai faux faux vrai vrai faux
faux vrai faux vrai vrai faux
faux faux faux faux faux faux

Table 1.1 – Tables de vérité de P ∧ Q, P ∨ Q, P ⊕ Q et (P ∧ Q) ∧ (P ∨ Q) ∧ (P ⊕ Q).

Notons que dans les constructions de tables de vérités, on utilise parfois les lettres V
et F (ou les minuscules correspondantes) à la place de vrai et faux ; l’important est
d’avoir une notation cohérente.

Implication et équivalence. Les implications sont omniprésentes en mathéma-


tique ; l’essentiel des théorèmes sont des implications.

Définition 4 (implication). Étant données deux propositions P et Q, la proposition


« P implique Q » notée P ⇒ Q, est la proposition qui est fausse lorsque P est vraie
et Q fausse, et qui est vraie sinon. Dans une implication P ⇒ Q, les propositions P
et Q sont dites respectivement thèse et conséquent.

Remarque 1.
Une implication P ⇒ Q se lit aussi :
— Q est (une condition) nécessaire pour P ;
— P est (une condition) suffisante pour Q ;
— Q résulte de P ;
— il faut Q pour avoir P ;
— il suffit de P pour avoir Q ;
— si P , alors Q.

Exemple 4. Soit x un réel, n un entier et h un homme.



— (x > 2) ⇒ (x2 > 2) est une implication vraie ;
— (2|n2 ) ⇒ (2|n), où 2|n signifie « 2 divise n », est une implication vraie ;
— (h est sénégalais) ⇒ (h est africain) est une implication vraie ;
— (h est africain) ⇒ (h est sénégalais) est une implication fausse ;
— (π = 67) ⇒ (x = 54) est une implication vraie.
— « Si la lampe ne s’allume pas, alors il y a coupure d’électricité » est une impli-
cation fausse.

L’avant dernier item dans l’exemple ci–dessus mérite qu’on s’y attarde un peu. En
accord avec la définition 4, une proposition P ⇒ Q est fausse si P est vraie et Q
fausse ; elle est vraie sinon. Quand la proposition P , ici (π = 67), est une contradiction
(toujours fausse), on ne peut avoir P vraie et Q fausse. Ainsi, on ne peut avoir P ⇒ Q
fausse, d’où la véracité de l’implication (π = 67) ⇒ (x = 54).
La confusion entre P ⇒ Q et l’implication réciproque Q ⇒ P est courante. On notera
que P ⇒ Q peut être vraie alors que Q ⇒ P est fausse ; en exemple, la proposition

6
1.2. Composition de propositions

— « (le quadrilatère S est un carré) ⇒ (les quatre cotés de S ont la même lon-
gueur) » est vraie, alors que
— « (les quatre cotés de S ont la même longueur) ⇒ (le quadrilatère S est un
carré) » est fausse ; en contre–exemple, on pensera au losange.
Définition 5 (équivalence). Deux propositions P et Q sont dites équivalentes si (P ⇒
Q) ∧ (Q ⇒ P ) ; on note P ⇔ Q.
Remarque 2. L’équivalence P ⇔ Q se lit aussi :
— P si et seulement si Q ;
— pour avoir P , il faut et il suffit d’avoir Q ;
— P est nécessaire et suffisant pour Q.
Exemple 5. Soit a un réel et n un entier, les équivalences suivantes sont vraies.
— (a2 = 25) ⇔ (a = 5 ou a = −5).
√ √
— (a2 > 2) ⇔ (a > 2 ou a < − 2).
— (2|n) ⇔ (2|n2 ).
Les tables de vérité des propositions P ⇒ Q et P ⇔ Q sont données dans le tableau 1.2

P Q P ⇒Q P ⇔Q
vrai vrai vrai vrai
vrai faux faux faux
faux vrai vrai faux
faux faux vrai vrai

Table 1.2 – Tables de vérité de P ⇒ Q et P ⇔ Q.

Exercice 1.1. En utilisant des tables de vérité, montrer les équivalences ci–dessous :
— ¬¬P ⇔ P ;
— ¬(P ∧ Q) ⇔ (¬P ∨ ¬Q) ;
— ¬(P ∨ Q) ⇔ (¬P ∧ ¬Q).

Quantificateurs
En supposant que x soit une variable réelle, considérons l’énoncé « (x < 5) ». On ne
peut attribuer une valeur de vérité à un tel énoncé tant que la valeur de x n’est pas
fixée. Cependant, pour chaque valeur de x, on peut attribuer une valeur de vérité. Un
tel énoncé est dit prédicat de variable libre x. L’objet de cette section est la construction
de propositions à partir de tels prédicats, notamment au travers de l’utilisation des
quantificateurs.
Définition 6 (quantification universelle). Soit P (x) un prédicat de variable libre x,
la quantification universelle de P (x) est la proposition « pour tout x de l’univers du
discours, P (x) est vraie » ; on note ∀x, P (x).
Remarque 3. Si P (x) est un prédicat de variable libre x, la quantification universelle
de P (x) se lit aussi :

7
1.2. Composition de propositions

— pour tout x, P (x) (est vraie) ;


— pour chaque x, P (x) (est vraie) ;
— pour tous les x, P (x) (est vraie) ;
— quel que soit x, P (x) (est vraie).

Exemple 6. Soit x une variable réelle :


— (∀x, cos(x) ∈ [−5, 2]) est une proposition vraie ;
— (∀x, sin(x) 6= x) est une proposition fausse ;
— (∀x, |x| =
6 x) est une proposition fausse ;
— (|x| > 1) n’est pas une proposition.

Définition 7 (quantification existentielle). Soit P (x) un prédicat de variable libre x,


la quantification existentielle de P (x) est la proposition « il existe x tel que P (x) soit
vraie » ; on note « ∃x, P (x) » ou « ∃x : P (x) » ou encore « ∃x/P (x) ».

Remarque 4. Si P (x) est un prédicat de variable libre x, la quantification existentielle


de P (x) se lit aussi :
— il existe au moins un x tel que P (x) est vraie ;
— pour au moins un x, P (x) est vraie ;
— pour un certain x, P (x) est vraie.

La notation « ∃ ! x, P (x) » est utilisée pour signifier l’existence et l’unicité de x ; elle


se lit :
— il existe un unique x tel que P (x) ;
— il existe un et un seul x tel que P (x) ;
— pour un et un seul x, P (x).

Exemple 7. Soit x une variable réel et n une variable entière :


— la proposition (∃x ∈ R, x = x + 1) est fausse ;
— la proposition (∃n ∈ N, n2 = 2) est fausse ;
— la proposition (∃x ∈ R, 2 = cos x) est fausse ;
— la proposition (∀x ∈ R, ∃n ∈ N, n 6 x < n + 1) est vraie ;
— la proposition (∃n ∈ N, ∀x ∈ R, n 6 x < n + 1) est fausse.

On notera que dans le cas d’un prédicat avec plusieurs variables libres, il est commun
d’utiliser plusieurs quantificateurs. Dans un tel cas, l’ordre d’écriture des quantifica-
teurs est important. La proposition de l’avant dernier item indique que « pour tout
réel x, il existe un entier n, qui dépend éventuellement de x, tel que n 6 x < n + 1 » ;
cette proposition est dont vraie (il suffit de prendre la partie entière de x pour valeur
de n). A contrario, la proposition du dernier item « il existe un entier n tel que pour
tout réel x, n 6 x < n+1 » est fausse ; en contre–exemple, il suffit de prendre x = n−1.

Remarque 5.
— (∀x, P (x)) est vraie si P (x) est vraie pour tout x de l’univers du discours.
— (∀x, P (x)) est fausse, s’il existe au moins un x de l’univers du discours tel que
P (x) soit fausse.
— (∃x, P (x)) est vraie si P (x) est vraie pour au moins x de l’univers du discours.

8
1.3. Méthodes de démonstration

— (∃x, P (x)) est fausse si P (x) est fausse pour tout x de l’univers du discours.
— La négation de (∀x, P (x)) est (∃x, ¬P (x)).
— La négation de (∃x, P (x)) est (∀x, ¬P (x)).

Exemple 8. Soit Q(x, y) le prédicat (x + 2y = 0) de variables libres réelles x et y :


— la proposition (∀x, ∃y, Q(x, y)) est vraie ;
— la proposition (∃y, ∀x, Q(x, y)) est fausse ;

Lorsque plusieurs quantificateurs sont utilisés, on prendra garde à l’ordre dans lequel
ils sont écrits. En résumé, si P (x, y) est un prédicat de variables libres x et y :
— la proposition (∀x, ∀y, P (x, y)) est vraie si P (x, y) est vraie pour tout couple
(x, y) de l’univers du discours ;
— la proposition (∀x, ∀y, P (x, y)) est fausse s’il existe au moins un couple (x, y) de
l’univers du discours tel que P (x, y) soit fausse ;
— la proposition (∀x, ∃y, P (x, y)) est vraie si pour tout x de l’univers du discours,
il existe au moins un y tel que P (x, y) soit vraie ;
— la proposition (∀x, ∃y, P (x, y)) est fausse s’il existe un x tel que pour tout y
de l’univers du discours P (x, y) est fausse ;
— la proposition (∃x, ∀y, P (x, y)) est vraie s’il existe un x tel que pour tout y
de l’univers du discours P (x, y) est vraie ;
— la proposition (∃x, ∀y, P (x, y)) est fausse si pour tout x de l’univers du discours,
il existe y tel que P (x, y) soit fausse ;
— la proposition (∃x, ∃y, P (x, y)) est vraie s’il existe un couple (x, y) tel que P (x, y)
soit vraie ;
— la proposition (∃x, ∃y, P (x, y)) est fausse si pour tout couple (x, y), P (x, y) est
fausse.

Remarque 1. La précédences des opérations permet de calculer sans ambiguïté


2 + 3 × 4. De manière similaire, on classe les opérateurs logique par ordre de prio-
rité décroissante comme suit : ¬, ∧, ∨, ⇒, puis ⇔. De plus, lorsque le même opérateur
est présent plusieurs fois, il appliqué de la droite vers la gauche. Ainsi, P ⇒ Q∨R ⇒ S
doit être interprété comme P ⇒ ((Q ∨ R) ⇒ S). De manière générale l’utilisation de
parenthèses permet de lever toute ambiguïté.

1.3 Méthodes de démonstration


Une démonstration (au sens mathématique) est une chaîne d’argument (corrects) par-
tants d’hypothèses admises et aboutissant à une proposition finale, objet de la dé-
monstration. Nous proposons dans cette section quelques une des structures de de
démonstrations les plus courantes. Les éléments proposés dans cette section sont de
nature à faciliter aussi bien la rédaction que la lecture de démonstrations.

1.3.1 Preuve directe


Une bonne partie des résultats que vous avez déjà rencontrés sont formulés sous la
forme d’implications. En exemple, « si f est un polynôme de degré n à coefficients

9
1.3. Méthodes de démonstration

dans R, alors f admet au plus n zéros ».


Dans une preuve directe, on part des hypothèses, d’où on déduit une chaîne d’argu-
ments qui mène à la conclusion (le résultat souhaité). La structure générale d’une
preuve directe est la suivante :
✬ ✩

Énoncé clair des hypothèses et de l’objectif de la preuve.


..
.
chaîne d’arguments
..
.
Conclusion.
✫ ✪
Exemple 9. Montrer que pour tout entier n > 2, si 4n > 4n+1 alors 4(n+1) > 4(n + 1) + 1.

Preuve
Commentaires

Soi n > un entier, et supposons 4n > 4n + 1. Mon-


trons que 4(n+1) > 4(n + 1) + 1. Une rappel clair et concis des
hypothèses et de l’objectif de la
preuve.

Puisque 4n+1 = 4 · 4n et 4n > 4n + 1, on déduit


4n+1 = 4 · 4n > 4(4n + 1). Une utilisation directe des hypo-
thèses.

Ainsi, 4n+1 > 16n + 4 = 4n + 4 + 12n.


Une simple réécriture

Ainsi, puisque 12n > 1 (puisque n > 2), on déduit


4n+1 > 4(n + 1) + 1. On utilise l’hypothèse n > 2, et
le résultat précédemment obtenu
pour aboutir à la conclusion.

1.3.2 Preuve par contraposition


La construction de preuves directes n’est pas toujours aisée. Lorsqu’on éprouve des
difficultés à construire une preuve directe, il peut être utile d’essayer de construire une
preuve indirecte (preuve contraposition ou preuve par l’absurde). Dans une preuve par
contraposition, on utilise l’équivalence (P ⇒ Q) ⇔ (¬Q ⇒ ¬Q).
La structure générale d’une preuve par contraposition est la suivante :

10
1.3. Méthodes de démonstration

✬ ✩

Montrons que P ⇒ Q. Supposons ¬Q. Montrons ¬P


..
.
chaîne d’arguments
..
.
Donc ¬P .
Ainsi P ⇒ Q.
✫ ✪
√ √
Exemple 10. Montrer que pour tous n, a, b ∈ N∗ , si n = ab alors a 6 n ou b 6 n.

Pour une preuve par contraposition (qui semble plus aisée qu’une preuve directe), nous
√ √
avons à montrer que pour tous n, a, b, ∈ N∗ si a > n et b > n alors n 6= ab.

Preuve
Commentaires

√ √
Supposons a > n and b > n
On suppose ¬Q.

Montrons que n 6= ab
Si ¬Q alors ¬P

√ √ √ √
Puisque a > n, on a a · n > n · n = n.
propriétés élémentaires des
réels
√ √
De même, de b > n, on déduit a·b > a· n > n.

D’où ab 6= n.
On a abouti à ¬P .


On conclut alors que si n = ab alors a 6 n ou
√ Proposition initiale dont la
b 6 n.
preuve est visée.

Exercice 1.2. Montrer par contraposition que pour tout entier n, si n2 est pair alors
n l’est aussi.

1.3.3 Preuve par l’absurde (ou par contradiction)


Une contradiction est la négation d’une tautologie. Une preuve par contradiction peut
être utilisée lorsqu’une stratégie de preuve directe est infructueuse. Dans une telle
preuve, pour montrer P , on suppose ¬P et on montre que ¬P ⇒ Q où Q est une
contradiction. Ainsi, ¬P ⇒ Q est vraie et puisque Q est fausse, on déduit que ¬P est
fausse, d’où la véracité de P . La structure générale d’une preuve par l’absurde est la
suivante :

11
1.3. Méthodes de démonstration

✬ ✩

Montrons P par contradiction. Supposons ¬P .


..
.
chaîne d’arguments
..
.
Une contradiction Q.
Conclusion : P est vraie.
✫ ✪
Exemple 11. Considérons la proposition P « il y a une infinité de nombres premiers. ».
Une preuve directe P peut être assez délicate, alors que comme montré ci–dessous, une
preuve par l’absurde de cette proposition est assez aisée.

Preuve
Commentaires

Supposons par l’absurde qu’il n’existe qu’un


nombre fini de nombres premiers et notons S On considère ici ¬P
l’ensemble des nombres premiers.

Ainsi, il existe n ∈ N∗ tel que S = {p1 , · · · , pn }


où les pi sont premiers Une reformulation de ¬P

Soit p0 = (p1 p2 · · · pn ) + 1 ∈ N. Pour tout i ∈


{1, · · · , n} on a p0 > pi et donc p0 ∈
/ S. On construit un nombre premier
(sous l’hypothèse ¬P ) qui permet-
tra d’exhiber une contradiction

De plus, aucun élément de S ne divise p0 . En


effet, si pour un certain i ∈ {1, · · · n} pi | p0 , pour cette étape, on utilise une « pe-
puisque pi | −(p1 p2 · · · pn ), on déduit p1 | p0 − tite » preuve par contraposition.
(p1 p2 · · · pn ) = 1, ce qui est impossible.

Puisque S est l’ensemble des premiers et aucun


élément de S ne divise p0 , p0 est donc premier, On utilise juste la définition d’un
et donc p0 ∈ S. nombre premier.

Ainsi, p0 ∈ S et p0 ∈
/ S.
¬P ⇒ Q où Q est une contradiction.

On conclut qu’il existe une infinité de nombres


premiers. ¬P ⇒ Q est vraie et Q est fausse,
donc ¬P est fausse, d’où P est vraie.

12
1.3. Méthodes de démonstration

1.3.4 Preuve par cas


Il peut arriver qu’une proposition de la forme P ⇒ Q puisse s’écrire sous la forme
(P1 ∨ P2 ) ⇒ Q. Dans une telle situation, il peut être judicieux de montrer P1 ⇒ Q et
P2 ⇒ Q. Ce type de preuve est usuellement utilisé pour des propositions de la forme
∀x ∈ S, P (x) où il est difficile de trouver un argumentaire qui s’applique à tout x ∈ S.
La structure générale de la preuve est la suivante :
✬ ✩

Montrons que (P1 ∨ P2 ) ⇒ Q.


Montrons que P1 ⇒ Q
..
.
Donc P1 ⇒ Q
Montrons que P2 ⇒ Q
..
.
Donc P2 ⇒ Q
On conclut (P1 ∨ P2 ) ⇒ Q is true.
✫ ✪
Exemple 12. Considérons la proposition ∀n ∈ Z, n2
+ n est paire. Soient P et Q les
2
prédicats (n ∈ Z) and (2 | n + n). Nous avons à montrer que ∀n, P ⇒ Q. Soient P1 et
P2 respectivement les prédicats “n ∈ 2Z” et “n ∈ 2Z + 1”. Puisque ∀n, P ⇔ P1 ∨ P2 ,
il suffit de montrer que ∀n, P1 ⇒ Q et ∀n, P2 ⇒ Q. On déduit la preuve par cas ci-
dessous.

Preuve
Commentaires

Pour montrer que ∀n ∈ Z, n2 +n est pair, il suffit


de montrer que (1) si n est pair alors n2 + n l’est Identification de P1 et P2 .
aussi, et (2) si n impair alors n2 + n est pair

Supposons que n soit pair. On a alors n2 qui est


pair, d’où n2 + n est pair. Preuve de ∀n, P1 ⇒ Q

Supposons que n soit impair, ainsi n = 2n′ +


pour un certain n′ ∈ Z Preuve de ∀n, P2 ⇒ Q
D’où n2 = (2n′ + 1)2 est impair
Et donc n2 + n est pair
∀n, P2 ⇒ Q est montré

On conclut que pour tout n ∈ Z, n2 + n est pair


P ⇒ Q est prouvé.

13
1.3. Méthodes de démonstration

1.3.5 Preuve par récurrence.


La preuve par récurrence est souvent utilisée pour montrer qu’une proposition P (n)
de variable libre n ∈ N est vraie. Pour cela, on montre que :
— P (n0 ) est vraie, pour un certain n0 ∈ N ;
— Pour tout n > n0 , P (n) ⇒ P (n + 1) est vraie.
On peut alors conclure ∀n > n0 , P (n) est vraie.
La validité de la conclusion tient au fait que s’il existait des entiers n > n0 pour
lesquels P (n) est fausse, en considérant le plus petit de ces entiers, on aboutirait à une
contradiction. En effet, supposons nf = min{n|n > n0 ∧ ¬P (n)} défini. Si nf = n0 ,
alors on obtient P (n0 ) ∧ ¬P (n0 ) , ce qui est impossible ; on a donc forcément nf > n0 .
Mais alors nf −1 > n0 et P (nf −1) est vraie. Mais, si P (nf −1) est vraie, cela implique
que P (nf ) est vraie, ce qui est en contradiction avec la définition de nf .

Exercice 1.3. Montrer par récurrence que pour tout n > 1,


n
n(n + 1)(2n + 1)
i2 =
X
Sn = .
i=1
6

14
Tests de connaissances

Questions Réponses
1. Une proposition est une assertion qui ❒ vraie et fausse
peut, sans ambiguïté, être ❒ ou vraie, ou fausse
❒ fausse
❒ ni vraie, ni fausse
2. Une tautologie est une proposition qui est ❒ une contradiction
❒ toujours vraie
❒ vraie
❒ toujours fausse
❒ la négation d’une contradiction
3. Soient P et Q deux propositions. La ❒ Q⇒P
proposition P ⇒ Q équivaut à ❒ ¬Q ⇒ P
❒ ¬P ⇒ ¬Q
❒ ¬Q ⇒ ¬P
❒ ¬P ∨ Q
4. La proposition ❒ vraie
∀x ∈ N, ∀y ∈ N, ∃z ∈ Z : x = y + z est ❒ fausse
5. La proposition ❒ vraie
∀x ∈ N, ∃y ∈ N, ∃z ∈ Z : x = y + z est ❒ fausse
6. La proposition ❒ vraie
∀x ∈ N, ∃y ∈ N, ∀z ∈ Z : x = y + z est ❒ fausse
7. La proposition ❒ vraie
∃x ∈ N, ∃y ∈ N, ∀z ∈ Z : x = y + z est ❒ fausse
8. La négation de la proposition ❒ ∀x ∈ R+ , ∃y ∈ R : x 6= exp(y)
∀x ∈ R+ , ∃y ∈ R : x = exp(y) est ❒ ∃x ∈ R+ , ∃y ∈ R : x = exp(y)
❒ ∃x ∈ R+ , ∃y ∈ R : x 6= exp(y)
❒ ∃x ∈ R+ , ∀y ∈ R : x 6= exp(y)
❒ ∃x ∈ R+ , ∀y ∈ R : x = exp(y)
9. Soient P et Q deux propositions. ¬(P ∧ Q) ❒ ¬P ∧ ¬Q
équivaut à ❒ ¬P ∧ Q
❒ ¬P ∨ ¬Q
❒ P ∧ ¬Q
10. Soient P et Q deux propositions. ❒ ¬P ∧ ¬Q
¬(P ∨ Q) équivaut à ❒ ¬P ∧ Q
❒ ¬P ∨ ¬Q
❒ P ∧ ¬Q

15
Correction des tests de connaissances

Questions Réponses
1. Une proposition est une assertion qui ❒ vraie et fausse
peut, sans ambiguïté, être  ou vraie, ou fausse
 fausse
❒ ni vraie, ni fausse
2. Une tautologie est une proposition qui est ❒ une contradiction
 toujours vraie
 vraie
❒ toujours fausse
 la négation d’une contradiction
3. Soient P et Q deux propositions. La ❒ Q⇒P
proposition P ⇒ Q équivaut à ❒ ¬Q ⇒ P
❒ ¬P ⇒ ¬Q
 ¬Q ⇒ ¬P
 ¬P ∨ Q
4. La proposition  vraie
∀x ∈ N, ∀y ∈ N, ∃z ∈ Z : x = y + z est ❒ fausse
5. La proposition  vraie
∀x ∈ N, ∃y ∈ N, ∃z ∈ Z : x = y + z est ❒ fausse
6. La proposition ❒ vraie
∀x ∈ N, ∃y ∈ N, ∀z ∈ Z : x = y + z est  fausse
7. La proposition ❒ vraie
∃x ∈ N, ∃y ∈ N, ∀z ∈ Z : x = y + z est  fausse
8. La négation de la proposition ❒ ∀x ∈ R+ , ∃y ∈ R : x 6= exp(y)
∀x ∈ R+ , ∃y ∈ R : x = exp(y) est ❒ ∃x ∈ R+ , ∃y ∈ R : x = exp(y)
❒ ∃x ∈ R+ , ∃y ∈ R : x 6= exp(y)
 ∃x ∈ R+ , ∀y ∈ R : x 6= exp(y)
❒ ∃x ∈ R+ , ∀y ∈ R : x = exp(y)
9. Soient P et Q deux propositions. ¬(P ∧ Q) ❒ ¬P ∧ ¬Q
équivaut à ❒ ¬P ∧ Q
 ¬P ∨ ¬Q
❒ P ∧ ¬Q
10. Soient P et Q deux propositions.  ¬P ∧ ¬Q
¬(P ∨ Q) équivaut à ❒ ¬P ∧ Q
❒ ¬P ∨ ¬Q
❒ P ∧ ¬Q

16
Exercices
Exercice 1.4. Déterminer si les implications ci–dessous sont vraies ou fausses :
— (1 + 1 = 2) ⇒ (2 + 2 = 5) ;
— (1 + 1 = 3) ⇒ (2 + 2 = 3) ;
— (1 + 1 = 3) ⇒ (2 + 2 = 6).

Exercice 1.5.
1) Construire les tables de vérité des propositions ci–dessous :
— p ⇒ ¬q ;
— (p ⇒ ¬q) ∨ (¬p ⇒ q) ;
— (p ⇔ ¬q) ∨ (¬p ⇔ q) ;
2) Montrer que ¬(p ∨ (¬p ∧ q)) ⇔ ¬p ∧ ¬q.

Exercice 1.6. Soit Q(x, y) le prédicat (x + y = x − y) le prédicat de variables libres


réelles x et y. Quelles sont les valeurs de vérité des propositions
1) Q(1, 1) ;
2) ∀y, Q(1, y) ;
3) ∃x, ∃y, Q(x, y) ;
4) ∀x, ∀y, Q(x, y) ;
5) ∀x, ∃y, Q(x, y) ;
6) ∃x, Q(x, 2).

Exercice 1.7. Soient P (x, y) et Q(x, y) deux prédicats de variables libres x et y.


Déterminer les négations des propositions suivantes :
1) ∃x, ∃y, P (x, y) ;
2) ∃x, ∃y, P (x, y) ∧ Q(x, y) ;
3) ∀x, ∃y, P (x, y) ;
4) ∃x, ∀y, P (x, y) ∨ Q(x, y) ;
5) ∀x, ∀y, P (x, y).

Exercice 1.8. Montrer qu’il existe deux nombres irrationnels a et b tels que ab soit
rationnel.

Exercice 1.9.

— Montrer que 2 ∈
/ Q.

— Montrer que 3 ∈
/ Q.

Exercice 1.10. Montrer que pour qu’un entier naturel soit un carré, il est nécessaire
que le dernier chiffre de son écriture en base 10 appartienne à S = {0, 1, 4, 5, 6, 9}.

Exercice 1.11. Déterminer les valeurs de vérité des propositions suivantes :


1) x ∈ {x} ;
2) {x} ∈ {x} ;
3) ∅ ∈ {x} ;
4) ∅ ⊂ {x} ;

17
Chapitre 2

Ensembles et relations
Nous structurons notre connaissance de notre environnement en regroupant les objets
d’un « type » sous une même appellation (étudiant, salle, table, etc.). De manière
similaire, en mathématiques, lorsque les objets étudiés partagent des « propriétés »
communes, ceux–ci sont souvent regroupés en collections, dites ensemble.

2.1 Appartenance, inclusion


Définition 8. Un ensemble est une collection d’objets. Les membres d’un ensemble
sont aussi dits éléments de l’ensemble. Si a est un élément d’un ensemble A, on note
a ∈ A ou A ∋ a. L’ensemble vide, noté ∅ ou {}, ne contient aucun élément.

Exemple 13.
— L’ensemble des voyelles de l’alphabet français est V = {‘a’, ‘e’, ‘i’, ‘o’,
‘u’, ‘y’} ;
— l’ensemble des entiers positifs inférieurs à 5 est E = {0, 1, 2, 3, 4, 5} ;
— ‘m’ ∈/ V, ∅∈ /V;
— 10 ∈/ E; 2∈E;
— ∅ ∈ {∅, {∅}} ; ∅ ∈/ {{∅}, {∅, ∅}}.

Remarque 2. Il n’est pas toujours possible de lister les éléments d’un ensemble,
dans ce cas on utilise la propriété P qui définit l’appartenance à l’ensemble : {x :
x verifie la propriété P }. En exemple, l’ensemble des irrationnels est {x : x ∈ R \ Q}.

Définition 9. Soient A et B deux ensembles.


— A est dit inclus dans B ou sous–ensemble de B si tout élément de A est aussi
élément de B i.e. ∀a ∈ A, a ∈ B ; on note A ⊂ B ou B ⊃ A. Si A n’est pas inclus
dans B, on note A 6⊂ B ou B 6⊃ A.
— Les ensembles A et B sont dits égaux si A ⊂ B et B ⊂ A ; on note A = B. Si A
et B ne sont pas égaux, on note A 6= B.
L’ensemble A est dit strictement inclus dans B si A ⊂ B et A 6= B ; on note
A B ou B ! A.
— Si A contient un nombre n ∈ N d’éléments, A est dit fini et n est dit cardinal
de A ; non note Card(A) = n. Un ensemble qui n’est pas fini est dit infini.

Exemple 14.
— L’ensemble N des entiers naturels est infini.
— N ! J = {1, 2, 3, 4, 5} ! ∅ ; le cardinal de J est Card(J) = 5 ; le cardinal de ∅
est 0.
— Le cardinal de {∅} est 1.
— ∅ ⊂ {{∅}} ; ∅ ∈ / {{∅}}.

18
2.2. Opérations sur les ensembles

Définition 10. Soit A un ensemble, l’ensemble des sous–ensembles de A est dit en-
semble des parties de A ; on le note P(A).

Exemple 15.
— Si A = {a, b}, P(A) = {∅, {a}, {b}, {a, b}}.
— P(∅) = {∅}.
— P({∅}) = {∅, {∅}}.

2.2 Opérations sur les ensembles


Définition 11.
— Une suite ordonnée de p éléments, qui n’appartiennent pas nécessairement au
même ensemble, (a1 , · · · , ap ) est dite p–uplet ; les ai sont dits composantes du p–
uplet. Les 2–uplets, 3–uplets, 4–uplets, 5–uplets sont dits respectivement couples,
triplets, quadruplets, et quintuplets.
— Si A et B sont deux ensembles, le produit cartésien de A et B est

A × B = {(a, b), a ∈ A, b ∈ B};

c’est l’ensemble des couples d’éléments de A et de B.

Exemple 16.
— {1, 2} × ∅ = ∅ ;
— ∅ × {1, 2} = ∅ ;
— {1, 2} × {a, b} = {(1, a), (1, b), (2, a), (2, b)} ;
— {a, b} × {1, 2} = {(a, 1), (a, 2), (b, 1), (b, 2)} ; ainsi, (a, 1) ∈ {a, b} × {1, 2} mais
(a, 1) 6∈ {1, 2} × {a, b}.

Définition 12. Le produit cartésien de n ensembles A1 , A2 , · · · , An noté A1 × A2 ×


· · · × An est l’ensemble des n–uplets (a1 , a2 , · · · , an ) tels que ai ∈ Ai , ∀i ∈ {1, · · · , n}.

Exercice 2.1. Soient A = {1, 5, 7}, B = {⊤, ⊥} et B = {x, y}.


— Quel est le produit cartésien de A et B ?
— Quel est le cardinal de A × B ;
— Quel est le cardinal de A × B × C ;

Définition 13. Soient A et B deux ensembles.


— L’union de A et B notée A ∪ B est

A ∪ B = {x : x ∈ A ou x ∈ B}.

— L’intersection de A et B, notée A ∩ B, est

A ∩ B = {x : x ∈ A et x ∈ B}.

Exemple 17.
— Si A = {1, 2, 3} et B = {5, 1, 2}, alors A ∪ B = {1, 2, 3, 5} et A ∩ B = {1, 2}.

19
2.3. Applications

— Si A = ∅, pour tout ensemble B, A ∪ B = B et A ∩ B = ∅.

Définition 14. Soient A et B deux ensembles, la différence de A et B, noté A \ B est


A \ B = {x : x ∈ A ∧ x ∈
/ B}.

Exemple 18.
— Soit A = {1, 2, 3} et B = {5, 1, 2}, alors A \ B = {3}.
— Pour tout ensemble A, A \ ∅ = A et ∅ \ A = ∅.

Définition 15. Soient E un ensemble et A un sous–ensemble de E, le complémentaire


de A dans E noté Ā est Ā = {x ∈ E : x 6∈ A}.

Remarque 6. On suppose de manière implicite l’existence d’un ensemble qui contient


tout les ensembles référencés dans un contexte donné ; cet ensemble est dit ensemble
référentiel.

Exercice 2.2. Soient A et B deux sous–ensembles d’un ensemble E, montrer les


égalités suivantes :
— A ∪ A = A, A ∩ A = A ;
— A ∩ (B ∪ C) = (A ∩ B) ∪ (A ∩ C) ;
— A ∪ (B ∩ C) = (A ∪ B) ∩ (A ∪ C) ;
— A ∪ B = Ā ∩ B̄, A ∩ B = Ā ∪ B̄.

2.3 Applications
Définition 16. Soient E et F deux ensembles. Une partie R de E ×F est dite relation
binaire ou correspondance de E à F . Une correspondance R de E avers F est dite
— interne si F ⊂ E ;
— externe sinon.
L’ensemble {a ∈ E : ∃b ∈ F, (a, b) ∈ R} est dit domaine de R ; il est noté Dom(R).
L’ensemble {b ∈ F : ∃a ∈ E, (a, b) ∈ R} est dit image de R, on note Im(R).

Définition 17. Soit E et F deux ensembles. On appelle application de E dans F ,


toute correspondance R de E dans F telle que qui à tout a de E, il existe un et un
seul b ∈ F tel que (a, b) ∈ R. On note b = R(a) ; b est dit image de a par R, et a
est dit pré–image ou antécédent de b. Les ensembles E et F sont dits respectivement
ensembles de départ et d’arrivée.

Remarque 3.
— La notation R : E −→ F est utilisée pour signifier que R est une application de
E dans F .
— On notera que pour une application R : E −→ F , tout élément de E admet une
et une seule image. Par contre, un élément de F n’admet pas nécessairement de
pré–image, et s’il en admet, celui–ci n’est pas nécessairement unique. Ainsi, si
R(a) = b, on dira que b est l’image de a et b est un antécédent de a.

20
2.3. Applications

Exemple 19. La correspondance R : R −→ R qui à x associe |x| est une application.


— L’image de −7 est 7 ;
— −2 n’admet pas d’antécédents ;
— 1 admet −1 et 1 comme antécédents.
Remarque 7. Une fonction de E vers F est une correspondance de E vers F qui à
tout élément de E associe au plus un élément de F . Toute application est donc une
fonction, mais une fonction n’est pas nécessairement une application.
1
Exemple 20. La correspondance de R dans R qui à x associe est une fonction ;
x+1
elle n’est pas une application.
Définition 18. Soient E et F deux ensembles et f une application de E vers F :
— pour toute partie S de E, l’image de S par f est f (S) = {f (s), s ∈ S} ;
— pour toute partie V de F , l’image réciproque de V est f −1 (V ) = {x ∈ E : f (x) ∈
V } ; on notera que cette dernière peut être vide.
Exemple 21. Soit f l’application de R vers R qui à x associe |x| :
— l’image de S = {−1, 1} est f (S) = {1} ;
— l’image réciproque de V = {0, −1} est f −1 (V ) = {0} ;
— l’image réciproque de V ′ = {−1, −7} est f −1 (V ′ ) = ∅.
Définition 19. Une application de E dans F est dite injective si pour tout a, b ∈ E,
si f (a) = f (b) alors a = b. Ou encore, pour tout a, b ∈ E, si a 6= b alors f (a) 6= (b).
Exemple 22.
— L’application de R vers R qui à x associe 2x + 7 est injective.
— L’application R vers R qui à x associe x2 + 7 n’est pas injective.
Définition 20. Une application de E dans F est dite surjective si pour tout élément
y de F , il existe un élément x de E tel que f (x) = y.
Exemple 23.
— L’application de R vers [0, 1] qui à x associe sin x est surjective.
— L’application de Z vers Z qui à x associe x + 7 est surjective.
— L’application de Z vers R qui à x associe x + 7 n’est pas surjective ; elle n’est
pas injective non plus.
Définition 21. Une application de E dans F est dite bijective si elle est à la fois
injective et surjective.
Exemple 24.
— Pour tout a ∈ R, l’application de R dans R qui à x associe x + a est bijective ;
— Pour tout ensemble A, l’application IdA qui à A ∋ a associe a est bijective.
Remarque 8. Si f une bijection de E dans F , alors la correspondance qui à tout y
de F associe l’unique x de E tel que f (x) = y est une application bijective ; elle est
dite application réciproque ou inverse de f et est notée f −1 .
Définition 22. Soient E, F et G trois ensembles, f une application de F vers G et g
une application de E vers F , la composée de f et g, notée f ◦ g, est l’application de E
dans G, qui à x ∈ E associe f (g(x)) ∈ G.

21
2.4. Relations

2.3.1 Partitions
Définition 23. Soit E et I deux ensembles. On appelle famille d’éléments de E
indexée par I, toute application u de I dans E.

Remarque 4. Pour une application u : I −→ E qui définit une famille d’éléments


de E indexée par I,
— l’image u(i) d’un élément i de I est notée ui et se lit « u indice i », la famille est
notée (ui )i∈I ;
— une famille indexée par une partie de N est dite suite.

Définition 24. Soient E un ensemble et (Ai )i∈I une famille de parties de E indexée
par I. [
1) Si la réunion des Ai est égale à E, i. e. si Ai = E, alors la famille (Ai )i∈I est
i∈I
dite recouvrement de E.
2) Si de plus pour tout i ∈ I, Ai 6= ∅ et pour tout j ∈ I \ {i} Ai ∩ Aj = ∅, alors la
famille (Ai )i∈I est dite partition de E.
a) L’image A(I) = {Ai , i ∈ I} de I par A est dite ensemble quotient associé à la
partition ;
b) La surjection s : E −→ A(i) qui à tout x de E associe l’unique Ai qui contenant
x est dite surjection canonique associée à la partition.

Exemple 25. Soit E l’ensemble des étudiants de la filière MPI1 promotion 27 et


F = {1900, 1901, 1902, · · · , 2016, 2017, 2018}.
Soit ϕ l’application de E dans F qui à un étudiant x associe son année de naissance.
ϕ est une application, puisque chaque étudiant (élément de E) admet une et une seule
année de naissance dans F (aucun étudiant n’est né avant 1900 ou après 2018). Ainsi,
si Gnilane KA, étudiante de la filière MPI, est né en 2000, alors ϕ(Gnilane KA) = 2000.
Pour tout y ∈ F , posons Ay = {x ∈ E : ϕ(x) = y} ; ainsi, en exemple, Gnilane KA ∈
A2000 et A1900 = ∅. L’ensemble Ay n’est autre que l’image réciproque du singleton {y}
(l’ensemble des étudiants dont l’année de naissance est y).
La famille (Az )z∈ϕ(E)=Imϕ constitue une partition de E. En effet, soit x un étudiant
et y = ϕ(x) son année de naissance. De la définition de Ay , on a x ∈ Ay 6= ∅. Puisque
x est quelconque dans E, la famille (Az )z∈ϕ(E) constitue un recouvrement de E. Par
ailleurs, si y ′ ∈ ϕ(E) et y ′ 6= y alors Ay ∩ Ay′ = ∅. La partition ainsi construite est
dite partition de E associée à l’application ϕ.

2.4 Relations
Les éléments développés dans cette section sont très importants pour la suite du cours.
Nous proposons trois exemples préalables.

2.4.1 Filières de l’UVS


Considérons l’ensemble des étudiants de l’UVS et regroupons les suivant qu’ils appar-
tiennent ou pas à une même filière. C’est à dire, on « définit », dans cet ensemble,

22
2.4. Relations

la relation « deux étudiants x et y sont en relation s’ils sont dans la même filière ».
On répartit ainsi l’ensemble des étudiants de l’UVS suivant cinq classes (les cinq fi-
lières) : les étudiants de la filière ANG, les étudiants de la filière MAI, les étudiants
de la filière SCO, les étudiants de la filière SEG, les étudiants de la filière SJP. Si
les étudiants représentant de ces filières (les délégués de classe) sont respectivement :
Oumar Diagne, Oumou Sow, Ali Bodian, Fatou Sy et Samba Diop, on peut alors
désigner, par exemple, la classe des étudiants de la filière SEG par Ali Bodian. On lira
classe de Ali Bodian. Ce n’est qu’une notation, on aurait pu la noter par classe(Ali
Bodian), cela n’y changerait rien. Toutefois, pour ce qui est des notations, en dépit de
la liberté de définir ses propres notations, il vaut toujours mieux respecter les notations
standardisées et chercher à être simple et cohérent.

Remarque 9.
(a) Si deux étudiants x et y sont de la même classe (même filière), la classe x̄ et la
classe ȳ désignent la même chose. Bien entendu, il est préférable de s’accorder sur
l’élément de la classe à choisir comme représentant.
(b) Chaque étudiant est dans une et une seule classe (filière) et aucune classe n’est
vide. L’ensemble des classes (filières) constitue une partition de l’UVS.
(c) La correspondance représentée ci–dessous qui, à chaque étudiant associe sa classe
(filière) est une surjection dite surjection canonique ; elle est notée s.
(d) L’ensemble des classes UVS est dit ensemble quotient ; cette notion sera précisée
un peu plus loin.

UVS

Irène Gaye UVS

Ali Bodian
Angl
Awa Kâ
Mai
Ali Sow
Seg
Mama Dieng
Sjp
Sanou Faye
Socio
Dame Ly

Fama Diouf

..
.

Figure 2.1 – surjection naturelle

23
2.4. Relations

2.4.2 Congruence dans Z


Vers 300 ans avant notre ère, le mathématicien Euclide montre dans son livre intitulé
Éléments mathématiques qu’étant donné un nombre naturel non nul n fixé, pour tout
entier relatif x, il existe un couple unique (q, r) de nombres relatifs tels que x = qn + r
avec 0 6 r < n. Ce résultat, a été défini par Euclide pour les entiers naturels et géné-
ralisé par la suite aux entiers relatifs. La preuve de ce résultat dit division euclidienne,
sera abordée en TD.
En dépit de sa simplicité, la division euclidienne est très importante ; en effet, elle fonde
par exemple RSA , l’un des système de cryptographie asymétrique les plus utilisés.

Remarque 10. Cette opération est en fait la division naturelle, où il est banni d’uti-
liser les décimaux quitte à avoir un reste non nul, que vous connaissez bien. Nous vous
présentons ci–dessous quelques exemples simples en guise de rappel.
— 11 oies partagées entre 4 fermiers, donne 2 oies par fermier et il reste 3 oies ;
— 17 stylos partagés entre 5 élèves, donne 3 stylos par élève et il reste 2 stylos ;
— 2 500 F partagés entre 10 personnes, donne 250 F par personne et il reste 0 F.

Dans le cas où le reste de la division euclidienne de x par n est égale à 0 comme dans
le dernier exemple ci–dessus, on dit que x est divisible par n. On note cela par n | x
et on lit n divise x.
Supposons maintenant que l’on fixe un nombre naturel non nul n et que l’on classe
les éléments de Z suivant la relation suivante, dite congruence dans Z : deux entiers
relatifs x et y sont en relation si et seulement si n divise x − y.
Cela revient à affirmer que le reste de la division euclidienne de x par n et celui de y par
n sont égaux. Nous savons d’après ce qui précède que ce reste r satisfait 0 6 r < n, ce
équivaut à r ∈ {0, 1, . . . , n − 1}. De cette relation, on obtient la répartition suivante,
en sous–ensembles de Z :
— le sous–ensemble des éléments de Z dont le reste par la division par n est 0 ;
— le sous–ensemble des éléments de Z dont le reste par la division par n est 1 ;
— le sous–ensemble des éléments de Z dont le reste par la division par n est 2 ;
..
.
— le sous–ensemble des éléments de Z dont le reste par la division par n est n − 1.
En exemple, pour n = 3, nous avons trois sous–ensembles :
(a) le sous–ensemble des éléments de Z dont le reste par la division par 3 est 0, i.e.
{· · · , −9, −6, −3, 0, 3, 6, 9, · · · } ;
(b) le sous–ensemble des éléments de Z dont le reste de la division euclidienne par 3
est 1, i.e. {· · · , −8, −5, −2, 1, 4, 7, 10, · · · } ;
(c) le sous–ensemble des éléments de Z dont le reste de la division euclidienne par 3
est 2, i.e. {· · · , −10, −7, −4, −1, 2, 5, 8, 11, · · · }.
Il est important de donner un nom à chacun de nos sous–ensembles pour l’identifier.
Pour faire simple, on les désigne par r̄ où r est le reste de la division euclidienne de
n’importe lequel des éléments du sous-ensemble considéré, par n. Ainsi, si n = 3 alors
les sous–ensembles sont désignés respectivement par 0̄, 1̄, 2̄. En fait, en y regardant

24
2.4. Relations

de près, on remarque que r̄ est l’ensemble des éléments de Z en relation avec r. C’est
pour cette raison, le sous–ensemble r̄ s’appelle classe de r modulo n.

2.4.3 Relation associée à une application


Soit C = {a, b, c, . . . , 0, 1, 2, . . . , 9} l’ensemble des caractères alphanumériques.
On considère l’application f de N dans C qui à tout entier naturel x associe le pre-
mier chiffre de sa représentation en base décimale. On suppose que les nombres sont
représentés sans zéros superflus à gauche, c’est–à–dire, qu’on écrit 25 et non 025 par
exemple. Ainsi, en exemple, on a f (25) = 2, f (789) = 7, f (0) = 0, f (11) = 1.
On continue dans le même esprit de classification comme dans les exemples précédents.
Ici, nous regroupons les éléments de N ayant la même image par f dans le même sous-
ensemble. On définit ainsi une relation entre les éléments de N par : x et y sont relation
si et seulement si f (x) = f (y).
Comme précédemment, pour tout a ∈ N, on appelle classe de a, le sous–ensemble
des éléments de N en relation avec a. Autrement dit, la classe de a est égale au sous–
ensemble des éléments x ∈ N tels que f (x) = f (a) c’est–à–dire {x ∈ N : f (x) = f (a)}.
Nous savons bien que ce sous–ensemble est l’image réciproque de f (a) par f et se note
f −1 {f (a)} . On le note aussi, comme dans l’exemple précédent, ā. Ce type de relation


s’appelle relation associée à f .


On voit simplement que les différentes classes sont :
— le sous–ensemble des nombres naturels dont le premier chiffre est égal à 0, qui
est réduit au singleton {0} ;
— le sous–ensemble des nombres naturels dont le premier chiffre est égal à 1, dans
cette classe, on retrouve p. ex. les entiers 1, 10, 19902 et 129875 ;
— le sous–ensemble des nombres naturels dont le premier chiffre est égal à 2 ;
..
.
— le sous-ensemble des nombres naturels dont le premier chiffre est égal à 9.
Dans la suite de cet exemple, ces classes sont naturellement notées 0̄, 1̄, 2̄, . . ., 9̄.

Remarque 11.
(a) Chaque élément de N est dans une et une seule classe, aucune classe n’est vide
et elles sont deux à deux disjointes. L’ensemble des classes constitue donc une
partition de N. Notons le, pour l’instant, N ;
(b) La correspondance représentée ci–dessous qui à tout entier naturel associe sa classe
est une surjection, on l’appelle surjection canonique ou surjection naturelle ; on la
note s.

25
2.4. Relations

1

2

3

4

..
.

9
..
.
10
.. 9̄
.

27

Figure 2.2 – surjection naturelle

(c) La correspondance, notée g, de N dans C qui à tout x̄ associe f (x) définit une
injection. En effet, si x̄ et ȳ sont deux éléments distincts (x̄ 6= ȳ), ils ne sont donc
pas en relation c’est à dire f (x) 6= f (y). D’où g(x̄) 6= g(ȳ).
C

..
0̄ .

1̄ z

2̄ 0

1

2

3
..
.
4

..
.

Figure 2.3 – injection canonique

Nous allons construire à partir de cette injection g : N −→ C une application bijective,


notée f¯, ayant presque les mêmes caractéristiques :
(i) f¯ et g ont même ensemble de départ : N ;

26
2.4. Relations

(ii) f¯ et g ont même définition, c’est à dire pour tout x̄ appartenant à N, nous avons
g(x̄) = f¯(x̄). N’oublions pas que c’est aussi égale à f (x) ;
(iii) Mais, comme nous voulons que f¯ soit bijective, son ensemble d’arrivée doit être
égal à g(N), c’est à dire le sous-ensemble de C constitué uniquement d’éléments
ayant un antécédent par l’application g. Autrement dit, on se débarrasse de
tous les éléments de C qui empêchent g d’être surjective. Ainsi, l’application
f¯ : N −→ g(N) est bien bijective.

2.4.4 Relation d’ordre, relation d’équivalence


Nous avons vu qu’une relation binaire d’un ensemble E vers un ensemble F est une
partie de E × F . Une relation R ⊂ E × F est dite interne sur E si F = E.

Définition 25. Soit R un relation sur un ensemble E.


a) La relation est dite réflexive si tout élément de E est en relation avec lui même,
i. e. ∀x ∈ E, xRx. Elle est dite antiréflexive si aucun élément de E n’est en relation
avec lui même, i. e. ∀x ∈ E, ¬(xRx).
b) La relation est dite symétrique si pour tous x, y ∈ E, si xRy alors yRx, i. e.
∀x, y ∈ E, xRy ⇒ yRx. Elle est dite antisymétrique si pour tous x, y ∈ E si xRy
et yRx alors x = y.
c) La relation est dite transitive si pour tous x, y, z ∈ E, si xRy et yRz alors xRz.
d) La relation est dite totale si pour tous x, y ∈ E, xRy ou yRx.

Exemple 26.
— Les trois exemples de relations que nous avons vues dans les sections 2.4.1, 2.4.2
et 2.4.3 sont toutes réflexives, symétriques et transitives.
— La relation < définie dans R est antiréflexive et transitive.
— La relation 6 définie dans R est réflexive, antisymétrique, transitive et totale.

Définition 26. Soit R une relation binaire sur un ensemble E.


— La relation est dite relation d’équivalence sur E si elle est réflexive, symétrique
et transitive.
— Elle est dite relation d’ordre sur E si elle est réflexive, antisymétrique et transi-
tive.
— Une relation d’ordre sur E est dite ordre total si elle est totale i. e. pour tous
x, y ∈ E, xRy ou yRx.
— Une relation d’ordre sur E qui n’est pas totale est dite ordre partiel

Remarque 12. Soit R une relation d’équivalence définie dans E. Si x est en relation
avec y, on écrit parfois x ≡ y (mod R) ou x ≡ y mod R, ce qui se lit « x est congru
à y modulo R ».

Exemple 27. Soit E = Z.


— L’égalité = est un une relation d’équivalence sur E ; c’est aussi un ordre partiel
sur E.

27
2.4. Relations

— L’infériorité au sens large 6 n’est pas une relation d’équivalence sur E (elle n’est
pas symétrique) ; elle est par contre un ordre total sur E.
— L’inclusion ⊂ est un ordre partiel sur P(E). Elle n’est toutefois pas une relation
d’équivalence sur P(E) (elle n’est pas symétrique).

Définition 27. Soit R une relation d’équivalence définie dans E et soit a un élément
fixé de E. Le sous–ensemble des éléments x de E qui sont en relation avec a s’appelle
classe de a modulo R, et se note ā. Autrement dit ā = {x ∈ E : xRa}.

Exercice 2.3. Montrer que deux classes d’équivalence sont égales ou disjointes. On
partira de deux classes distinctes et on montrera qu’elles sont obligatoirement disjointes

Proposition 1. Soit E un ensemble. Alors à toute relation d’équivalence R on peut


associer une partition A = (Ai )i∈I dont les éléments (la parties constituant cette
partition) sont les différentes classes d’équivalence suivant R. Et, réciproquement,
à toute partition A on peut associer une relation d’équivalence R dont les classes
coïncident avec les éléments de la partition.

Preuve. L’exercice ci–dessus précise que les différentes classes sont deux à deux dis-
jointes. Aussi, nous savons que tout élément a de E appartient à la classe ā. Par suite,
l’ensemble des classes est une partition de E.
L’apprenant est invité à vérifier en exercice que la relation R définie dans E par :

xRy ⇐⇒ ∃i ∈ I tel que x, y ∈ Ai

est une relation d’équivalence.

Cette proposition montre que d’une partition on peut déduire une relation d’équiva-
lence et vice versa. Nous pouvons donc définir pour les partitions tous les objets que
nous avons définis pour les relations d’équivalence. Il s’agit notamment d’ensemble
quotient, de surjection canonique et relation d’équivalence associée à une application
donnée.

Définition 28. Soit E un ensemble et R une relation d’équivalence définie dans E.


L’ensemble des classes d’équivalence suivant R s’appelle ensemble quotient et se note
E/R et la surjection s, qui à tout x de E associe sa classe x̄ dans E/R, s’appelle
surjection canonique.

Exercice 2.4. Vérifier que les exemples donnés dans les sous–sections 2.4.1, 2.4.2 et
2.4.3 sont des relations d’équivalence. Pour chacune d’elles, déterminer (i) les classes
d’équivalence, (ii) l’ensemble quotient et (iii) la surjection canonique.

Proposition 2. Soit f une application d’un ensemble E dans un ensemble F . Soit A


la partition associée à f . La relation d’équivalence associée à A est aussi dite associée
à f . Elle est définie par :
x R y ⇐⇒ f (x) = f (y).

28
2.4. Relations

Cette relation d’équivalence est fondamentale pour la suite, surtout au chapitre sur les
groupes. Il est indispensable de s’y attarder pour bien l’assimiler. Sa preuve doit être
discutée en TD et vous êtes invité à déterminer ses différentes classes d’équivalence,
son ensemble quotient et la surjection canonique associée. Nous avons déjà abordé un
exemple de ce type de relation au début de la présente section.
Exercice 2.5. Donnez trois exemples d’applications et déterminez pour chacune
d’elles les différentes classes d’équivalence, l’ensemble quotient et la surjection ca-
nonique de la relation d’équivalence associée.

2.4.5 Décomposition canonique


On considère une application f d’un ensemble E dans un ensemble F et R la relation
d’équivalence associée à f . Nous savons que pour toute classe ā ∈ E/R fixée, pour tout
x ∈ ā, f (x) = f (a). Par suite, la correspondance g de E/R dans F qui’ à tout x̄ associe
f (x) est une application, elle est même injective. En effet, soit X et Y deux classes
d’équivalence telles que g(X) = g(Y ). Soit a et b deux éléments de E appartenant
respectivement à X et Y . On a ā = X et b̄ = Y et donc g(X) = g(ā) et g(Y ) = g(b̄).
Et puisque g(X) = g(Y ), on a aussi g(ā) = g(b̄). D’où f (a) = f (b). Par suite a R b,
c’est–à–dire X = Y .
Exercice 2.6. Vérifier que les applications f et g ◦ s sont égales. Cela revient sim-
plement à vérifier qu’elles ont les mêmes ensembles de départ et d’arrivée et la même
définition.

Soit f¯ la bijection de E/R dans f (E) = g(s(E)) qui coïncide avec g dans E/R et soit
j l’injection canonique de f (E) dans F . Nous avons g = j ◦ f¯ et donc f = j ◦ f¯◦ s. Ceci
est dit décomposition canonique de f ; elle est résumée dans le diagramme commutatif
suivant :
f
E F

s j

E/R f (E)

Exemple 28. Considérons l’ensemble des étudiants de l’UVS, que nous notons E.
Supposons que les différentes filières, ouvertes et non–encore ouvertes, de l’UVS soient
ANG, MAI, SCO, SEG, SJP, BIO et ESP ; les filières BIOlogie et ESPagnol ne sont pas
encore ouvertes. Soit F l’ensemble {ANG, MAI, SCO, SEG, SJP, BIO, ESP}. Consi-
dérons l’application f de E dans F , qui à x ∈ E (un étudiant) associe sa filière y ∈ F .
Ainsi, l’image par f de Awa Kâ est Mai, i.e. Awa Kâ est inscrite dans le filière Mai
(cf. sous–section 2.4.1 sur les filières de l’UVS). Considérons à présent la relation R
associée à f . Autrement dit, R est définie sur E par

xRy ⇐⇒ f (x) = f (y);

ce qui signifie que x est en relation avec y si et seulement si x et y sont dans la même
filière. La décomposition canonique de f s’effectue alors de la manière suivante.

29
2.4. Relations

1) L’ensemble quotient associé à R qui est

E/R = {Irène Gaye, Awa Kâ, Ali Bodian, Mama Dieng, Ali Sow}.

En effet, les étudiants Irène Gaye, Awa Kâ, Ali Bodian, Mama Dieng et Ali
Sow sont inscrits dans des filières deux–à–deux distinctes, et chaque filière ouverte
accueille un de ces étudiants. Ils sont donc dans des classes d’équivalence deux–à–
deux distinctes et toute classe d’équivalence correspond à la classe de l’un d’entre
eux.
2) L’image de f est
Imf = {ANG, MAI, SCO, SEG, SJP};

en effet, ces filières sont les seules qui admettent un étudiant (un antécédent par f ),
on se « débarrasse » de BIO et ESP qui n’ont pas d’étudiants. La bijection f¯ est
donnée par le diagramme ci–dessous.

E/R

f (E) = Imf

Irène Gaye
Angl

Ali Bodian
Mai

Awa Kâ
Seg

Ali Sow Sjp

Mama Dieng Socio

3) Enfin, le diagramme commutatif de la décomposition canonique de f est


f
E F

s j

E/R f (E)

où f (E) = {AN G, M AI, SCO, SEG, SJP }
E/R = {Irène Gaye, Awa Kâ, Ali Bodian, Mama Dieng, Ali Sow}, s et j sont
respectivement la surjection et l’injection canoniques.

Exercice 2.7. En s’inspirant de l’exemple précédent, faire une étude analogue pour
la relation de congruence modulo n ∈ N∗ dans Z. On considérera l’application f de
E = Z dans F = Nn = {0, 1, 2, · · · , n − 1} qui, à tout x ∈ Z associe f (x) = r, le reste
de la division euclidienne de x par n.

30
Tests de connaissances

Questions Réponses
1. Soient A et B deux parties d’un ensemble ❒ de A qui sont dans B
E. La différence symétrique entre A et B ❒ de B qui ne sont pas dans A
contient les éléments
❒ de A qui ne sont pas dans B
❒ de E qui ne sont pas dans B
❒ de A qui sont dans E \ B
2. Pour tous ensembles A, B et C ❒ (A ∪ B) ∩ C = (A ∩ C) ∪ (C ∩ B)
❒ (A ∪ B) ∪ C 6= C ∪ (A ∪ B)
❒ A ∩ (B ∪ C) = (A ∩ B) ∪ C
❒ (A ∪ B) ∪ C = (A ∩ B) ∪ C
3. Pour toutes parties A et B d’un ensemble ❒ ∀x ∈ E, x ∈ B ⇒ x ∈ A
E, A ⊂ B équivaut à ❒ ∀x ∈ E, x ∈ E \ B ⇒ x 6∈ A
❒ B ⊂E\A
❒ ∀x ∈ E, x 6∈ B ⇒ x ∈ E \ A
4. Toute fonction est une application ❒ vrai
❒ faux
5. Toute application est une fonction ❒ vrai
❒ faux
6. L’application f : [0, 1] ←→ [0, 1], qui à x ❒ injective
associe x2 est ❒ surjective
❒ bijective
7. L’application f : [0, 1] ←→ [−1, 1], qui à x ❒ injective
associe x2 est ❒ surjective
❒ bijective
8. L’application f : [−1, 1] ←→ [−1, 1], qui à ❒ injective
x associe x2 est ❒ surjective
❒ bijective
❒ ni injective, ni bijective, ni surjective
9. L’application f : [−1, 1] ←→ [0, 1], qui à x ❒ injective
associe x2 est ❒ surjective
❒ bijective
10. Si f : E −→ F est une application ❒ x peut avoir deux images
surjective, x, x′ ∈ E et y, y ′ ∈ F avec x 6= x′ ❒ y peut avoir deux antécédents
et y 6= y ′ , alors ❒ y et y ′ peuvent avoir un même
antécédent
❒ y a au moins un antécédent
❒ x et x′ peuvent avoir une même image
11. Si f : E −→ F est une application ❒ x peut avoir deux images
injective, x, x′ ∈ E et y, y ′ ∈ F avec x 6= x′ et suite sur la page suivante. . .
y 6= y ′ , alors

31
Questions Réponses
❒ y et y ′ peuvent avoir un même
antécédent
❒ y a au moins un antécédent
❒ x et x′ ne peuvent pas avoir une même

image
❒ y a nécessairement un antécédents

32
Correction des tests de connaissances

Questions Réponses
1. Soient A et B deux parties d’un ensemble ❒ de A qui sont dans B
E. La différence symétrique entre A et B  de B qui ne sont pas dans A
contient les éléments
 de A qui ne sont pas dans B
❒ de E qui ne sont pas dans B
 de A qui sont dans E \ B
2. Pour tous ensembles A, B et C  (A ∪ B) ∩ C = (A ∩ C) ∪ (C ∩ B)
❒ (A ∪ B) ∪ C 6= C ∪ (A ∪ B)
❒ A ∩ (B ∪ C) = (A ∩ B) ∪ C
❒ (A ∪ B) ∪ C = (A ∩ B) ∪ C
3. Pour toutes parties A et B d’un ensemble ❒ ∀x ∈ E, x ∈ B ⇒ x ∈ A
E, A ⊂ B équivaut à  ∀x ∈ E, x ∈ E \ B ⇒ x 6∈ A
❒ B ⊂E\A
 ∀x ∈ E, x 6∈ B ⇒ x ∈ E \ A
4. Toute fonction est une application ❒ vrai
 faux
5. Toute application est une fonction  vrai
❒ faux
6. L’application f : [0, 1] ←→ [0, 1], qui à x  injective
associe x2 est  surjective
 bijective
7. L’application f : [0, 1] ←→ [−1, 1], qui à x  injective
associe x2 est ❒ surjective
❒ bijective
8. L’application f : [−1, 1] ←→ [−1, 1], qui à ❒ injective
x associe x2 est ❒ surjective
❒ bijective
 ni injective, ni bijective, ni surjective
9. L’application f : [−1, 1] ←→ [0, 1], qui à x ❒ injective
associe x2 est  surjective
❒ bijective
10. Si f : E −→ F est une application ❒ x peut avoir deux images
surjective, x, x′ ∈ E et y, y ′ ∈ F avec x 6= x′  y peut avoir deux antécédents
et y 6= y ′ , alors ❒ y et y ′ peuvent avoir un même
antécédent
 y a au moins un antécédent
 x et x′ peuvent avoir une même image
11. Si f : E −→ F est une application ❒ x peut avoir deux images
injective, x, x′ ∈ E et y, y ′ ∈ F avec x 6= x′ et suite sur la page suivante. . .
y 6= y ′ , alors

33
Questions Réponses
❒ y et y ′ peuvent avoir un même
antécédent
❒ y a au moins un antécédent
 x et x′ ne peuvent pas avoir une même

image
❒ y a nécessairement au deux antécé-
dents

34
Exercices
Exercice 2.8. Soient A et B deux sous–ensembles d’un ensemble E.
1) Donner le résultat des opérations suivantes :
a) A ∪ A ∪ ∅ ;
b) A ∩ A ∩ ∅ ;
c) A ∩ E ;
d) A ∪ E ;
e) A ∪ (E \ A) ;
f) A ∩ (E \ A) ;
2) Montrer que A ⊂ B ⇔ B̄ ⊂ Ā.
3) Montrer que les relations ci–dessous sont équivalentes.
a) A ∩ B = ∅ ;
b) A ⊂ B̄ ;
c) B ⊂ Ā.

Exercice 2.9.
1) Trouvez deux ensembles A et B tels que A ∈ B et A ⊂ B.
2) Quel est le cardinal de l’ensemble E = {∅, {∅}, {∅, {∅}}}.
3) Déterminer P(E).

Exercice 2.10. Soient A, B et C des ensembles. Montrer que :


1) (A \ B) \ C = (A \ C) \ (B \ C) ;
2) (A \ C) ∩ (C \ B) = ∅ ;
3) (B \ A) ∪ (C \ A) = (B ∪ C) \ A.

Exercice 2.11. Soit E un ensemble et A et B deux sous–ensembles de E. Montrer


que :
1) E \ (E \ A) = A ;
2) A∆B = (A ∪ B) \ (A ∩ B) ;
3) A∆B = (A \ (A ∩ B)) ∪ (B \ (A ∩ B)) ;
4) (A∆B) ∩ A = A \ (A ∩ B) ;

Exercice 2.12. Soit f : X −→ Y une application, A ⊂ X et B ⊂ Y . Montrer que :

A ⊂ f −1 (f (A)) et que f (f −1 (B)) ⊂ B.

Exercice 2.13. 1) Définir ce qu’est : une application, une bijection.


1
2) La correspondance de R vers R, qui à x associe est–elle une application ?
x+2
Justifiez.
3) Soient f et g deux applications telles que g ◦ f soit définie. Montrer que :
a) g ◦ f surjective ⇒ g surjective ;
b) g ◦ f injective ⇒ f injective.

Exercice 2.14. Soit f : E −→ F une application. Montrer que ∀ A, B ∈ P(E),


1) f (A ∪ B) = f (A) ∪ f (B).

35
2) f (A ∩ B) ⊂ f (A) ∩ f (B).
Montrer si f est injective, ∀ A, B ∈ P(E), f (A ∩ B) = f (A) ∩ f (B).

Exercice 2.15. Soit f : E −→ F une application. Montrer que ∀ A, B ∈ P(F ),


1) A ⊂ B =⇒ f −1 (A) ⊂ f −1 (B) ;
2) f −1 (A ∩ B) = f −1 (A) ∩ f −1 (B) ;
3) f −1 (A ∪ B) = f −1 (A) ∪ f −1 (B) ;
4) f −1 (A \ B) = f −1 (A) \ f −1 (B).

Exercice 2.16. Soient A et B deux ensembles.


1) Montrer que (A ⊂ B) ⇔ (P(A) ⊂ P(B)).
2) Donner un exemple d’injection de A vers P(A).
3) Montrer que A ne peut être en bijection avec P(A). On pourra, en supposant
l’existence d’une bijection f : A −→ P (A), considérer l’ensemble B = {x ∈ A, x 6∈
f (x)} et montrer qu’il n’admet pas d’antécédent.

Exercice 2.17. (Tiré du devoir de l’année 2015–2016)


Soient A et B deux ensembles.
1) Définir ce qu’est : (i) une correspondance entre A et B, (ii) une application de A
vers B, (iii) une surjection de A vers B, (iv) une injection de A vers B.
2) On suppose A ⊃ B et on considère l’application

ψ : P(A) −→ P(B)
.
X 7−→ X ∩ B

Procéder à la décomposition canonique de ψ.

Exercice 2.18. (Tiré du devoir de l’année 2015–2016)


Soit E un ensemble.
1) Définir ce qu’est : (i) une relation binaire sur E, (ii) une relation d’équivalence
sur E (on explicitera chacun des termes clefs utilisés).
2) Montrer que la relation R définie sur Z par xRy si 7 | (x − y) est une relation
d’équivalence.
3) Montrer que pour tous q, r ∈ Z, 7 | (10q + r) ⇐⇒ 7 | (q − 2r).
4) En utilisant la question précédente montrer, sans faire de division, que 7 divise
1796144.

Exercice 2.19. Soit f : R −→ R, l’application de qui à x ∈ R associe E(x)2 , où E(x)


est la partie entière de x.
1) Quel est l’ensemble quotient de la relation d’équivalence associée à f ?
2) Procéder à la décomposition canonique de f .

36
Chapitre 3

Introduction aux groupes


Une structure algébrique est un ensemble dans lequel est définie une (parfois plusieurs)
opération avec des propriétés intéressantes. Une des structures algébriques de base dont
l’étude suscite beaucoup d’intérêt est le groupe. Un groupe est un ensemble muni d’une
opération interne telle que toute équation du premier degré admet une solution. Ainsi,
N muni de l’addition n’est pas un groupe alors que Z l’est. Dans ce chapitre, nous
aborderons les propriétés élémentaires des groupes, ainsi que des applications qui leur
sont souvent associées. Dans la suite, pour des questions de commodité, sauf mention
contraire, la loi de groupe sera notée multiplicativement.

3.1 Lois de composition internes


Définition 29. Soit E non vide. On appelle loi de composition interne définie dans
E toute application ⊤ de E × E dans E. L’image d’un couple (x, y) se note x ⊤ y et
s’appelle composé de x et de y.

Exemple 29. L’addition et la multiplication usuelles sont des lois de composition


internes dans Z, Q, R et C.

Exemple 30. Soit E un ensemble muni d’une loi de composition interne ⊤. On définit
une loi de composition interne ⊤ dans P(E) en posant pour toutes parties A et B de
E:
A ⊤ B = {a ⊤ b : a ∈ A et b ∈ B}

Exercice 1. Donner trois autres exemples de lois de composition internes.

Exercice 2. L’intersection et la réunion sont-elles des lois de composition internes ?


Si oui, donner leurs propriétés. Qu’en est-il pour l’inclusion ?

On suppose que E est muni d’une loi de composition interne ⊤ :


— Si pour tous x et y on a x ⊤ y = y ⊤ x, on dit la loi est commutative.
— Si pour tous x, y et z de E on a x ⊤ (y ⊤ z) = (x ⊤ y) ⊤ z. On dit que la loi
est associative.
— Si la loi possède un élément e tel que pour tout x de E on a x ⊤ e = e ⊤ x,
on dit que e est un élément neutre. Dans ce cas si x est un élément de E tel
qu’il existe un élément x′ satisfaisant x ⊤ x′ = x′ ⊤ x = e, on dit que x est
symétrisable et x′ est son symétrique. Si la loi est notée additivement (respec-
tivement multiplicativement) on dit opposé (respectivement inverse) au lieu de
symétrique.

37
3.2. Lois quotient

Exercice 3. Parmi les exemples précédents, donner les lois qui sont associatives,
commutatives et celles qui possèdent un élément neutre.

Exercice 4. On considère l’ensemble G de tous les couples réels (a, b) avec a non nul
et on définit dans G la loi de composition (a, b)(c, d) = (ac, bc + d). Vérifier qu’elle est
interne, associative, possède un élément neutre et que tout élément est symétrisable.

Exercice 5. Dans N2 les lois qui à tout couple (a, b) font correspondre le pgcd ou le
ppcm de a et de b ont-elles un élément neutre.

3.2 Lois quotient


On considère un ensemble E dans lequel sont définies une loi de composition interne
⊤ et une relation déquivalence R. On se propose d’examiner s’il est possible de définir
une loi de composition interne dans l’ensemble quotient E/R.
Soit alors la correspondance de E/R × E/R dans E/R qui à tout couple de classes
(x̄, ȳ) associe naturellement x ⊤ y. Cette correspondance est une loi de composition
interne si est seulement si c’est une application c’est à dire si et seulement si pour tous
x et y la classe x ⊤ y ne dépend que des classes x̄ et ȳ et non de leurs représentants
x et y. cela se traduit comme suit :

(x̄, ȳ) = (ā, b̄) =⇒ x ⊤ y = a ⊤ b

ce qui équivaut encore à :


 
xRa et yRb =⇒ x ⊤ y R a ⊤ b

C’est ce qu’on appelle la compatibilité de R avec ⊤ et cette loi définie dans E/R est
˙ ou simplement ⊤ si
appelée loi quotient de la loi ⊤ par la relation R. On la notera ⊤
aucune confusion n’est à craindre.

Remarque 13. a) Si la loi ⊤ est associative alors ⊤ ˙ est aussi associative ;


b) Si la loi ⊤ est commutative alors ⊤˙ est aussi commutative ;
c) Si la loi possède un élément neutre e alors ē est un élément neutre ;
d) Si x est un élément symétrisable de symétrique x′ alors x̄ est un élément symétrisable
de symétrique x′ .

Remarque 14. Un avantage important de la loi quotient ⊤ ˙ est qu’elle peut admettre
un élément neutre alors que ⊤ n’en possède pas ; aussi, un élément x̄ de E/R peut
être symétrisable alors que son représentant x ne l’est pas. Cela est illustré dans la
deuxième table de l’exemple ci-dessous.

Exemple 31. La congruence modulo un entier naturel n ∈ N∗ est compatible avec


l’addition et la multiplication dans Z (à vérifier en exercice). Les lois quotient associées
sont alors définies comme suit :

x̄ + ȳ = x + y et x̄ ∗ ȳ = x ∗ y

38
3.3. Groupes et sous–groupes

Exemple 32. On va dresser la table d’addition de Z/4Z et la table de multiplication


de (Z/5Z)∗ :

+̇ 0̇ 1̇ 2̇ 3̇
0̇ 0̇ 1̇ 2̇ 3̇
1̇ 1̇ 2̇ 3̇ 0̇
2̇ 2̇ 3̇ 0̇ 1̇
3̇ 3̇ 0̇ 1̇ 2̇

Table 3.1 – Table addition

∗˙ 1̇ 2̇ 3̇ 4̇
1̇ 1̇ 2̇ 3̇ 4̇
2̇ 2̇ 4̇ 1̇ 3̇
3̇ 3̇ 1̇ 4̇ 2̇
4̇ 4̇ 3̇ 2̇ 1̇

Table 3.2 – Table de multiplication

Exercice 6. On dit que R est compatible à gauche (respectivement à droite) sur E


si pour tous x, y et a appartenant à E, si xRy alors (a⊤x) R (a⊤y) (respectivement
(x⊤a) R (y⊤a)) Montrer que R est compatible si et seulement si elle est à la fois
compatible à gauche et à droite.

3.3 Groupes et sous–groupes


Définition 30. Un groupe est un ensemble muni d’une loi de composition interne
possédant les propriétés suivantes :
a) la loi est associative ;
b) la loi possède un élément neutre ;
c) tout élément est symétrisable.

— Si la loi est commutative, le groupe G est dit abélien ou commutatif.


— Si la loi est additive (resp. multiplicative) on dit que G est additif (resp multi-
plicatif) et son élément neutre est noté 0 (resp. e ou 1).
— Un groupe réduit à un seul élément est dit trivial.
— Un groupe dont le cardinal est fini est dit fini ; son cardinal est appelé ordre
de G.

Exemple 33. Les ensembles Z, Q, R, C muni de l’addition usuelle sont des groupes
commutatifs. Déterminer leur élément neutre et le symétrique de tout élément.

Exercice 7. Soit E un ensemble. La réunion et l’intersection confèrent-elles des struc-


tures de groupe à l’ensemble P(E) des parties de E ?

Exercice 8. Soit n un nombre naturel non nul. Justifier que l’ensemble quotient Z/nZ
muni de l’addition est un groupe commutatif. Qu’en est-il pour la multiplication ?

39
3.4. Homomorphismes

Définition 31. Une partie non vide H d’un groupe G est dite sous–groupe de G si
elle est un groupe pour la loi induite par celle de G.

Exemple 34. L’ensemble Z est un sous-groupe des groupes additifs Q, R et C.

Théorème 1. Une partie non vide H d’un groupe G est un sous-groupe si et seulement
si :
(x ∈ H et y ∈ H) =⇒ xy −1 ∈ H (3.1)

ce qui équivaut encore à :


(
H est stable (i)
(3.2)
x ∈ H ⇒ x−1 ∈ H (ii)

Preuve. Si H est un sous–groupe alors nous avons évidemment (3.1).


Montrons que de (3.1) nous pouvons déduire (3.2). En prenant x = y dans (3.1), on
obtient e = yy −1 ∈ H. Par suite H contient e. Ensuite, en prenant x = e dans (3.1),
il vient y −1 = ey −1 ∈ H. Il s’ensuit que tout élément de H est inversible (symétrisable)
dans H. Si y ∈ H on a bien y −1 ∈ H d’après (3.1) ; par suite xy = x(y −1 )−1 ∈ H d’où
la stabilité de H.
Supposons que (3.2) soit vraie. Puisque H est non vide, il existe un élément a ∈ H.
D’après (ii), a−1 ∈ H. D’après (i), e = aa−1 ∈ H. Donc H contient l’élément neutre e.
De plus H est stable, et tout élément de H est inversible dans H et la loi est associative
dans H. Il s’en suit H est un groupe pour la loi induite par celle de G.

Exercice 9. Déterminer tous les sous–groupes du groupe additif Z.

Solution. Soit H un sous-groupe de Z. Si H = {0} alors H est un sous-groupe de Z.


Sinon, soit H + l’ensemble des entiers strictement positifs appartenant à H. H + possède
un plus petit élément n strictement positif car si x ∈ H alors −x ∈ H.
Soit x un élément quelconque de H. D’après la division euclidienne, il existe un unique
couple (q, r) d’éléments de Z tels que x = qn + r avec 0 6 r < n. De la stabilité de H,
on a r = x − qn ∈ H. Par suite r = 0 car n est le plus petit élément de H strictement
positif. Il s’en suit que x = qn d’où H = nZ. Les sous–groupes de Z sont donc de la
forme nZ, n ∈ N.
Pour tout n ∈ N, la partie nZ de de Z est un sous-groupe. En effet, une telle partie
n’est pas vide car elle contient 0 et si x et y sont des éléments de nZ, il existe a et b
de Z tels que x = na et y = nb. Par suite x − y = n(a − b) est aussi un élément de nZ.

3.4 Homomorphismes
Définition 32. Une application f d’un groupe G dans un groupe G′ est un homo-
morphisme de groupes si pour tout x, y ∈ G, f (xy) = f (x)f (y). En notation additive
on aura f (x + y) = f (x) + f (y).
— Un homomorphisme bijectif est dit isomorphisme.
— Un isomorphisme de G dans G est dit automorphisme.
— Un homomorphisme de G dans G, est dit endomorphisme

40
3.4. Homomorphismes

— Le noyau d’un homomorphisme f , noté Ker(f ), est l’ensemble des éléments x de


G tel que f (x) = e′ où e′ est l’élément neutre de G′ .
— L’image de f est l’ensemble des images des éléments de E, soit f (E). On la
note Im(f ).
Exemple 35. L’application exponentielle :

f : R −→ R∗+
x −→ ex

est un isomorphisme du groupe additif des nombres réels dans le groupe multiplicatif
des nombres réels strictement positifs. En effet, elle est bijective, et pour tout x et y
de R :
f (x + y) = ex+y = ex ey = f (x) ∗ f (y).

Son application réciproque, le logarithme népérien, est aussi un isomorphisme de


groupes.
Exemple 36. On vérifie aisément que l’application ϕ du groupe additif Z/4Z dans
le groupe multiplicatif des racines quatrièmes de l’unité dans C, U(4)= {1, −1, i, −i},
qui à ẋ associe exp(2iπx/4) est un isomorphisme de groupes. Un fait surprenant, mais
tout à fait justifié, est qu’à partir de la table de Z/4Z on retrouve la table du second
groupe U(4) par application de l’isomorphisme ϕ (voir les tables 2.1 et 2.2 ci-dessous).
Cela est illustré dans la traduction anglaise du terme isomorphisme : isomorphic copy.

En fait d’un point de vue purement algébrique, on peut considérer que deux groupes
isomorphes sont identiques. Ainsi, par exemple nous verrons qu’il existe exactement
deux groupes d’ordre 4 ... à isomorphisme près.

+̇ 0̇ 1̇ 2̇ 3̇
0̇ 0̇ 1̇ 2̇ 3̇
1̇ 1̇ 2̇ 3̇ 0̇
2̇ 2̇ 3̇ 0̇ 1̇
3̇ 3̇ 0̇ 1̇ 2̇

Table 3.3 – Table addition

∗˙ 1̇ i̇ ˙
−1 −̇i
1̇ 1̇ i̇ ˙
−1 −̇i
i̇ i̇ ˙
−1 i̇ 1̇
−1˙ ˙
−1 −̇i 1̇ i̇
−̇i −̇i 1̇ i̇ ˙
−1

Table 3.4 – Table addition

La dernière table est obtenue à partir de la première en calculant l’image de chaque


élément. La deuxième table peut être vue comme étant la première colorée avec l’iso-
morphisme ϕ.

41
3.5. Sous–groupe engendré par une partie

Proposition 3. Le composé de deux homomorphismes de groupes est un homomor-


phisme et le composé de deux isomorphismes de groupes est aussi un isomorphisme.

La preuve de cette proposition est à faire en exercice.

Proposition 4. Soient G et G′ deux groupes d’éléments neutres respectifs e et e′ , et


f un homomorphisme de G dans G′ . Alors,
a) f (e) = e′ ;
b) f (x−1 ) = (f (x))−1 ;
c) le noyau de f est réduit au singleton {e} si et seulement si f est injective ;
d) l’image de f , notée f (G), est un sous groupe de G′ .

Preuve.
a) Puisque f est un homomorphisme de groupes on a f (e) = f (ee) = f (e)f (e). En
multipliant chaque membre de l’égalié f (e) = f (e)f (e) par l’inverse de f (e), il s’en-
suit que f (e) = e′ .
b) Puisque f est un homomorphisme e′ = f (e) = f (xx−1 ) = f (x)f (x−1 ). En multi-
pliant chaque membre de l’égalité e′ = f (x)f (x−1 ) par f (x)−1 , on arrive au résultat.
c) D’après a), f (e) = e′ . Si f est injective, pour x ∈ G, f (x) = e′ implique x = e.
Ainsi, si f est injective, Ker(f ) est réduit au singleton {e}.
Supposons que Ker(f ) soit réduit à {e}, et montrons que f est injective. Soient x
et y deux éléments de G tels que f (x) = f (y) ; montrons que x = y. Si f (x) = f (y),
alors
f (x)(f (y))−1 = f (x)f (y −1 ) = e′ ,

ou encore,
f (xy −1 ) = e′ ,

c’est–à–dire, xy −1 ∈ Ker(f ) = {e}, et donc x = y.


d) D’après a) l’image de f est non vide. Soit x′ et y ′ deux éléments de f (G). Il existe
x et y appartenant à G tels que f (x) = x′ et f (y) = y ′ . Puisque

x′ y ′ = f (x)f (y) = f (xy),

l’image de f est stable. De plus, d’après b), x′−1 appartient à Im(f ). Par suite
Im(f ) est un sous–groupe de G′ .

3.5 Sous–groupe engendré par une partie


Dans cette partie, nous introduisons la notion de sous–groupe engendré par une partie
d’un groupe. Cette notion permet notamment d’introduire les groupes cycliques. Un
groupe est cyclique s’il est fini et engendrable par un seul élément.
Soient G un groupe et (Gi )i∈I une famille de sous–groupes de G. On vérifie que J =
i∈I Gi est un sous–groupe de G.
T

Soit A = {a1 , a2 , . . . , ap } une partie non vide de G de cardinal p. Soit (Hi )i∈I la
famille des sous–groupes G contenant A. Nous venons de voir que H = i∈I Hi est
T

42
3.6. Groupe quotient

un sous–groupe de G. Il est clair que H est le plus petit sous–groupe de G (au sens
de l’inclusion) contenant A. H est dit sous–groupe de G engendré par A ; on note
H = hAi.

Proposition 5. Soit G un groupe, et A une partie non vide de G. Le sous-groupe


engendré par A est l’ensemble des produits x1 x2 ...xn,n∈N , tels que pour tout i ∈
{1, 2, · · · , n} l’élément xi ou x−1
i appartient à A. Autrement dit,

hAi = x1 x2 ...xn : n ∈ N∗ , pour tout i ∈ {1, · · · , n} xi ∈ A ou x−1



i ∈A .

Preuve. On vérifie sans peine que H est un sous–groupe de G contenant A. D’autre


part, puisque tout sous–groupe est stable, H est contenu dans tout sous–groupe
contenant A. Il est donc le plus petit sous–groupe contenant A. En d’autres termes
H = hAi.

Si A = {a}, on écrit hai à la place de h{a}i. En notation multiplicative hai = {ak :


k ∈ Z} où pour k 6= 0, ak = aa · · · a ; en notation additive hai = {ka : k ∈ Z} où
pour k 6= 0, ka = a + a + · · · + a (k fois).

Si G = hai, on dit qu’il est monogène engendré par a. Si de plus il est fini, on dit
qu’il est cyclique ; l’ordre de G est aussi appelé ordre de a.

Exemple 37. Les sous–groupes non nuls du groupe additif Z sont monogènes.

3.6 Groupe quotient


Dans cette section, nous introduisons la notion de groupe quotient. De tels groupes
« reflétent » la structure d’un groupe à travers un de ses sous–groupes. Nous verrons
aussi comment établir une structure de groupe dans l’ensemble quotient d’une groupe
par une relation d’équivalence. Cette méthode est très utilisée Algèbre. Nous verrons
par exemple, dans le cours d’Arithmétique, que c’est par cette voie que sont construits
l’anneau Z et le corps Q.

3.6.1 Classes selon un sous–groupe


Soit R une relation d’équivalence compatible à gauche sur G. Alors nous avons :

xRy ⇐⇒ x−1 xRx−1 y (compatibilité à gauche),

ou encore
xRy ⇐⇒ x−1 yRe;

i. e.
xRy ⇐⇒ x−1 y ∈ ē.

Ainsi, xRy si et seulement si x−1 y ∈ ē. En outre, ē est un sous–groupe de G. En


effet, ē est non vide car il contient e ; et si x et y appartiennent à ē, on a xRe et yRe.

43
3.6. Groupe quotient

La compatibilité à gauche assure alors que xyRxe. De la transitivité, on obtient xyRe.


D’où la stabilité de ē. Par ailleurs, si xRe alors de la compatibilité à gauche on obtient
eRx−1 , c’est à dire x−1 ∈ ē. Ainsi, ē est un sous–groupe.
La réciproque de ce qui précède est vraie ; c’est à dire si H est un sous–groupe de G,
la relation R définie par xRy si et seulement x−1 y ∈ H est une relation d’équivalence
compatible à gauche sur G. En effet :
Réflexivité : Pour tout x ∈ G, on a H contient e = x−1 x, d’où xRx.
Symétrie : Pour tout x, y ∈ G, xRy équivaut à x−1 y ∈ H. Puisque H est un sous–
groupe on a (x−1 y)−1 ∈ H or (x−1 y)−1 = y −1 x ; d’où la symétrie.
Transitivité : Pour tout x, y et z de G, tels que xRy et yRz, nous avons x−1 y ∈ H et
y −1 z ∈ H. Puisque H est un groupe, (x−1 y)(y −1 z) = x−1 (yy −1 )z = x−1 z ∈ H,
ou encore xRz.
Compatibilité à gauche : Soit x, y et a des éléments de G tels que xRy c’est à dire
x−1 y ∈ H. Puisque H ∋ x−1 y = x−1 (a−1 a)y = (ax)−1 ay, nous avons axRay ; la
relation est donc compatible à gauche.
Nous pouvons résumer ce qui précède dans la proposition ci–dessous.

Proposition 6. Soit G un groupe. Une relation d’équivalence R est compatible


à gauche sur G si et seulement si, il existe un sous–groupe H de G tel que :

xRy ⇐⇒ x−1 y ∈ H.

Une telle relation R est dite congruence à gauche modulo H.

Proposition 7. Soient G un groupe, H un sous–groupe de G et R la congruence à


gauche modulo H. La classe d’un élément x suivant la relation déquivalence R est
x̄ = xH = {xh : h ∈ H}.

Preuve. Soit y ∈ x̄ ;
y ∈ x̄ ⇐⇒ xRy ⇐⇒ x−1 y ∈ H.

Dire que x−1 y ∈ H équivaut à dire qu’il existe h ∈ H tel que x−1 y = h. Ce qui
équivaut encore à y = xh ; ou encore y ∈ xH.

Les preuves des propositions qui suivent s’obtiennent de façon analogue aux précé-
dentes ; elles sont laissées en exercice au lecteur.

Proposition 8. Soit G un groupe. Une relation d’équivalence R est compatible


à droite sur G si et seulement si, il existe un sous–groupe H de G tel que :

xRy ⇐⇒ x−1 y ∈ H.

La relation R est dite congruence à droite modulo H.

Proposition 9. Soient G un groupe, H un sous–groupe de G et R la congruence


à droite modulo H. La classe d’un élément x suivant la relation déquivalence R est
x̄ = Hx = {hx : h ∈ H}.

44
3.6. Groupe quotient

Lemme 1. Soient G un groupe et H un sous–groupe de G. Alors pour tout élément


a de G les parties aH (respectivement Ha) et H sont équipotentes.

On vérifie simplement que l’application x 7→ ax est une bijection de H dans aH.

Le résultat qui suit est connu sous le nom de Théorème de Lagrange.

Corollaire 1. Soient G un groupe fini et H un sous–groupe de G. Alors :

Ord(G) = [G : H] × Ord(H)

où [G : H] est le nombre de classes à gauche (ou à droite) suivant H. On l’appelle


indice de H dans G.

Preuve. Puisque chaque classe possède le même nombre d’éléments que H, et l’en-
semble des classes à gauche (respectivement à droite) constitue une partition de G,
le résultat s’ensuit immédiatement.

3.6.2 Groupe quotient


Si G est un groupe commutatif et H un sous–groupe de G, les deux relations d’équi-
valence à gauche et à droite associées à H sont égales. Si G n’est pas commutatif,
les deux relations peuvent être différentes, tout comme elles peuvent être identiques.
Elles sont identiques si et seulement si toute classe à gauche est une classe à droite
et vice versa. C’est à dire pour tout x ∈ G, on a xH = Hx. Dans ce cas, H est dit
sous–groupe distingué de G, et la relation associée à H est dite congruence modulo H.

Proposition 10. Soit G un groupe. Un sous–groupe H est distingué si et seulement


une des trois assertions équivalentes suivantes est satisfaite :
a) la congruence à gauche modulo H est compatible ;
b) la congruence à droite modulo H est compatible ;
c) pour tout x ∈ G, xHx−1 = H.

Exercice 10. Montrer que le noyau d’un homomorphisme de groupes est un sous–
groupe distingué.

Nous verrons aussi que la réciproque de cette assertion est vraie.

Proposition 11. Soit G un groupe et H un sous–groupe distingué de G. Alors en


posant
x̄ȳ = xy,

on définit une loi de composition interne dans l’ensemble quotient de G par la congruence
modulo H. Cette loi lui confère une structure de groupe dit groupe quotient de G par H,
noté G/H.

Preuve. Il suffit de remarquer que la loi est bien définie, car H étant distingué,
la congruence modulo H est compatible sur G. Cette loi est donc la loi quotient
associée à la loi de G. Nous avons vu qu’elle est associative, qu’elle admet ē comme

45
3.6. Groupe quotient

élément neutre et que tout élément est symétrisable puisque la loi de G définit une
structure de groupe sur H.

Exercice 11. Démontrer la Proposition 11 en passant par la définition ensembliste


d’une classe ā = aH = {ah ; h ∈ H} et en posant si A et B sont des parties de G,
AB = {ab : a ∈ A et b ∈ B}.

3.6.3 Décomposition canonique


Proposition 12. Soit G un groupe et H un sous–groupe distingué de G. Alors la
surjection canonique s de G dans G/H, qui à tout x associe x̄, est un homomorphisme
de groupes de noyau H.

Preuve. L’application s est bien un homomorphisme d’après la définition de la loi


quotient. Soit x un élément du noyau de s, alors xH = H. Par suite x = xe appartient
à H. D’autre part si x ∈ H on a xH = H d’où x ∈ Ker(s). L’égalité Ker(s) = H est
donc vérifiée.

Théorème 2. Soit f : G 7→ G′ un homomorphisme de groupes de noyau H, soit s


l’homomorphisme canonique de G dans G/H et soit j l’injection canonique de f (G)
dans G′ . Alors il existe un unique isomorphisme de groupes f¯ de G/H dans f (G) tel
que f = j ◦ f¯ ◦ s.

Preuve. Soit e et e′ les éléments neutres respectifs de G et G′ . Si R est la relation


d’équivalence associée à f , nous avons :

xRy ⇐⇒ f (x) = f (y)


⇐⇒ f (x−1 )f (x) = f (x−1 )f (y)
⇐⇒ f (e) = f (x−1 y)
⇐⇒ x−1 y ∈ H

Par suite R est exactement la congruence à gauche modulo H. On montre de façon


similaire que R est aussi égale à la congruence à droite modulo H. On retrouve ici le
fait que H est distingué. Nous avons vu dans le chapitre Ensembles, Applications et
Relations qu’il exite une bijection f¯ de G/R = G/H dans f (G) telle que f = j ◦ f¯◦ s.
Il reste donc à vérifier que cette bijection est un homomorphisme de groupes. Soit x̄
et ȳ deux éléments de G/H. On a :

f¯(x̄ȳ) = f¯(xy)
= f (xy)
= f (x)f (y)
= f¯(x̄)f¯(ȳ);

f¯ est bien un homomorphisme de groupes.

46
Exercices
Exercice 3.1. Soit (Ai )i∈I une partition d’un ensemble E et R la relation définie sur
E par xRy si et seulement si, il existe i ∈ I tel que x ∈ Ai et y ∈ Ai .
1) Montrer que R est une relation d’équivalence sur E. Déterminer les classes d’équi-
valence de la relation R.
2) Montrer que toute relation d’équivalence sur R sur E peut être définie de cette
manière.

Exercice 3.2. Soit A un ensemble et B un sous–ensemble de A. Soit R la relation


définie sur E par XRY si et seulement si X ∩ B = Y ∩ B.
1) Montrer que R est une relation d’équivalence sur P(A).
2) Construire une bijection de l’ensemble quotient P(A)/R vers P(B).

Exercice 3.3. Soient X et Y deux ensembles et R et S deux relations d’équivalences


sur X et Y respectivement. Soit f une application de X vers Y . Considérons le dia-
gramme suivant où p et q sont respectivement les projections canoniques de X vers
X/R et Y vers Y /R respectivement.
f
X Y

p q

X/R Y /S
1) Montrer que les deux assertions ci–dessous sont équivalentes.
(a) Il existe une application f¯ : X/R −→ Y /S telle que f¯ ◦ p = q ◦ f .
(b) Pour tout x, x′ ∈ X, xRx′ =⇒ f (x)Sf (x′ ).
2) Montrer que si la condition (b) est satisfaite, alors l’application f¯ est unique.

Exercice 3.4. 1) Soit E un ensemble. Montrer que l’ensemble SE des bijections de


E dans E muni de la composition des applications est un groupe.
2) Montrer que l’ensemble M2 (R) des matrices carrées inversibles à coefficients dans
R muni de la multiplication des matrices est un groupe.
3) Les groupes (SE , ◦) et (M2 (R), · ) sont–ils abéliens ?

Exercice 3.5. Montrer que toute partie non vide et stable d’un groupe fini est un
sous–groupe.

Exercice 3.6. Un groupe est dit monogène s’il est engendré par un seul élément, un
groupe monogène fini est dit cyclique.
1) Montrer qu’un groupe monogène infini est isomorphe à Z.
2) Montrer qu’un groupe cyclique d’ordre n est isomorphe à Z/nZ.
3) Soit G = hai un groupe cyclique d’ordre n. Montrer que pour k ∈ Z, G = hak i si
et seulement si pgcd(k, n) = 1.
4) Montrer que tout sous–groupe d’un groupe cyclique est cyclique.

Exercice 3.7. 1) Soit (G, ·) un groupe. Montrer que l’ensemble des homomorphismes
de (Z, +) and (G, ·) est en bijection avec G.

47
2) Montrer que le groupe multiplication (C∗ , ·) n’est pas isomorphe au groupe additif
(C, +).

Exercice 3.8. Soient F et H deux sous groupes d’un groupe G.


1) Montrer que F H = {f h : f ∈ F, h ∈ H} est un sous–groupe de G si et seulement
si F H = HF .
2) Montrer que si d est un diviseur n, Z/nZ a exactement un sous–groupe et un
quotient d’ordre d.

Exercice 3.9.
1) Montrer que dans la table d’un groupe fini, l’élément neutre est situé sur la diago-
nale principale ou occupe des positions symétriques par rapport à cette diagonale.
2) Montrer que dans un groupe fini d’ordre pair, il y a un nombre impair d’éléments
égaux à leur propre inverse et distincts de e.

Exercice 3.10. Soient m et n deux entiers naturels non nuls.


1) Montrer que mZ+nZ est un sous–groupe monogène de Z. Déterminer un générateur
de ce sous–groupe en fonction de m et de n et rappeler le nom de ce générateur.
2) Montrer que mZ∩nZ est un sous–groupe monogène de Z. Déterminer un générateur
de ce sous-groupe en fonction de m et de n et rappeler le nom de ce générateur.

Exercice 3.11. Soit G un groupe. Pour tout a ∈ G on définit l’homomorphisme ϕa


de Z dans G par ϕa (x) = ax .
1) Montrer que pour tout a ∈ G, il existe un nombre naturel p unique tel que ker(ϕ) =
pZ. Que représente ce nombre p pour l’élément a ∈ G. Peut-il être nul ?
2) Soit un élément b ∈ G d’ordre fini m. Montrer que le sous–groupe engendré par b
est exactement {e, b, b2 , . . . , bm−1 }.

Exercice 3.12. Soit f un morphisme d’un groupe fini G vers un groupe H. Montrer
que
Card(G) = Card(Imf ) × Card(ker f ).

Exercice 3.13. Soit G un groupe commutatif fini d’élément neutre e et d’ordre n.


1) On suppose que n = rs où r et s sont premiers entre eux. Soit

M = {x ∈ G : xr = e} et N = {x ∈ G : xs = e}.

Montrer que l’application f de M × N vers G définie par f (x, y) = xy est un


isomorphisme de groupes.
2) On suppose que n = prh1 · · · prhh où les pi , i ∈ {1, · · · , h}, sont premiers et distincts.
Soit qi = pri i pour i ∈ {1, · · · , h} et Mi le sous–groupe composé des éléments x
ri
de G tels que xpi = e. Montrer que G est isomorphe au produit direct des Mi ,
i ∈ {1, · · · , h}.

Exercice 3.14. Soit G un groupe et H un sous–groupe de G. On définit le normali-


sateur NorG (H) de H dans G par NorG (H) = {g ∈ G : gHg−1 } = H.
1) Montrer que NorG (H) est le plus grand sous–groupe de G dans lequel H est dis-
tingué.

48
2) Montrer que le nombre de sous–groupes distincts conjugués de H dans G est égal
à l’indice [G : NorG (H)] et qu’en particulier c’est un diviseur de l’ordre de G.

Exercice 3.15. Soit G un groupe, H et K deux sous–groupes de G tels que H soit


inclus dans le normalisateur de K.
1) Montrer que H ∩ K est un sous–groupe distingué de H
2) Montrer que H/(H ∩ K) est isomorphe à HK/K

Exercice 3.16. Soit G un groupe, H et K deux sous–groupes distingués de G tels


que K ⊂ H.
1) Montrer que K est distingué dans H.
2) Montrer que (G/K)/(H/K) est isomorphe à G/H.

Indications de solutions

49
Chapitre 4

Le groupe symétrique
Rappelons qu’une bijection d’un ensemble E vers lui même est dite permutation de E.
L’ensemble permutations de E muni de la composition des applications est un groupe,
dit groupe des permutations de E, noté SE ; lorsque E = {1, · · · , n}, le groupe SE est
dit groupe symétrique d’ordre n, noté Sn . Dans ce chapitre, nous nous intéressons au
cas particulier où E est fini. Nous établirons notamment que si un ensemble E est de
cardinal n, alors SE est isomorphe à au groupe symétrique Sn ; ceci nous permettra
de focaliser plus spécifiquement notre étude sur le groupe symétrique.

4.1 Définitions et généralités


Tout comme dans le premier chapitre, l’opérateur de composition d’applications est
noté ◦. Ainsi, si SE est l’ensemble des permutations d’un ensemble E, la loi ◦ est
définie de SE × SE vers SE .

Proposition 13. Pour tout ensemble E, SE muni de la composition d’applications ◦


est un groupe. De plus, si Card(E) > 2 alors le groupe SE est non–abélien et si E et
F sont deux ensembles de même cardinal, alors SE et SF sont isomorphes.

Preuve. Il est clair que si f, g ∈ SE , alors f ◦ g ∈ SE ; l’identité de E, IdE vérifie


f ◦ IdE = IdE ◦ f = f . De plus la composition d’applications est associative et tout
élément de SE est inversible dans SE . Ainsi, (SE , ◦) est un groupe.
Si Card(E) > 2, alors il existe au moins trois éléments dans E. Soient donc a1 , a2 , a3 ∈
E avec a1 6= a2 6= a3 6= a1 . Considérons f, g ∈ SE telles qu’elles laissent fixes tous les
éléments de E excepté a1 , a2 et a3 et

f (a1 ) = a2 , f (a2 ) = a3 , f (a3 ) = a1 ,

g(a1 ) = a2 , g(a2 ) = a1 et g(a3 ) = a3 .

On alors f (g(a1 )) = f (a2 ) = a3 et g(f (a1 )) = g(a2 ) = a1 ; ainsi f ◦ g 6= g ◦ f et (SE , ◦)


est non commutatif.
Si E et F sont de même cardinal, il existe une bijection σ : E −→ F . On définit alors
ϕ : SE −→ SF qui à f ∈ SE associe σ ◦ f ◦ σ −1 ∈ SF . On vérifie sans peine que ϕ est
bijective, de plus ϕ(f ◦ g) est égal ϕ(f ) ◦ ϕ(f ). Par suite, ϕ est bien un isomorphisme
de groupes.

D’après la proposition 13, l’étude d’un groupe symétrique à n éléments se ramène à


celui de Sn . Une permutation p ∈ Sn sera représentée par :
!
1 2 ··· n
.
p(1) p(2) · · · p(n)

50
4.1. Définitions et généralités

Si p est une permutation, on note p0 la permutation identité de N∗n = {1, 2, . . . , n}


et pour tout ℓ ∈ N∗ , on pose pℓ = pℓ−1 ◦ p.

Exemple 38. Soit S3 l’ensemble de permutations de N3 = {1, 2, 3}. S3 muni de la


composition d’applications est un groupe de cardinal 6, dont les éléments sont
! ! !
1 2 3 1 2 3 1 2 3
1S3 = , α= , α2 = ,
1 2 3 2 3 1 3 1 2
! ! !
1 2 3 1 2 3 2 1 2 3
β= , αβ = et α β = .
1 3 2 2 1 3 3 2 1
!
1 2 3
On notera que βα = = α2 β 6= αβ ; S3 n’est donc pas abélien.
3 2 1
Remarque 15. La composée de f par g, avec f, g ∈ Sn , sera souvent notée gf à la
place de g ◦ f ; on parlera alors du produit de g et f .

Définition 33. Soit σ ∈ Sn . L’ensemble des éléments i ∈ {1, · · · , n} tels que σ(i) 6= i
est dit support de σ.

En exemple, le support de l’identité est ∅.

Proposition 14. Deux éléments de Sn de supports disjoints commutent.

Preuve. Soient σ1 , σ2 ∈ Sn de supports disjoints et i ∈ {1, · · · , n}. Si i appartient


au support de σ1 , alors σ1 (i) appartient aussi au support de σ1 ; car sinon, on aurait
σ1 (σ1 (i)) = σ1 (i), ce qui implique σ1−1 (σ1 (σ1 (i))) = σ1−1 (σ1 (i)), ou encore σ1 (i) = i.
Puisque les supports de σ1 et σ2 sont disjoints, i et σ1 (i) n’appartiennent pas au
support de σ2 . Ainsi,
σ2 (σ1 (i)) = σ1 (i) = σ1 (σ2 (i)).

Si i appartient au support de σ2 , on montre de même que

σ2 (σ1 (i)) = σ1 (i) = σ1 (σ2 (i)).

Et, si i n’appartient ni au support de σ1 ni à celui de σ2 , alors

σ2 (σ1 (i)) = σ2 (i) = i,

et
σ1 (σ2 (i)) = σ1 (i) = i.

Ainsi, pour tout i ∈ {1, · · · , n}, σ2 (σ1 (i)) = σ1 (σ2 (i)) ; il est donc montré que σ1 et σ2
commutent.

Définition 34. Soit σ ∈ Sn . S’il existe V = {i1 , · · · , ik } ⊂ {1, · · · , n} tel que σ(i1 ) =
i2 , σ(i2 ) = i3 , · · · , σ(ik ) = i1 et si pour tout i 6∈ V σ(i) = i, alors σ est dit cycle
de longueur k ou k–cycle. Un 2–cycle est dit transposition.
Si σ une cycle de support {i1 , i2 , . . . , iℓ }, on note σ = i1 , i2 , . . . , iℓ .


51
4.2. Propriétés d’une permutation

Exercice 12.
1) Trouver un contre–exemple qui montre que la réciproque de la proposition 14 est
fausse.
2) Montrer qu’une permutation de longueur ℓ engendre un sous–groupe d’ordre ℓ.

4.2 Propriétés d’une permutation


Dans cette section, nous présentons des propriétés fondamentales des permutations.

Proposition 15. Toute permutation de Sn se décompose en produit de cycles de


supports disjoints.

Preuve. Soit α ∈ Sn et a1 ∈ Nn = {1, · · · , n}. Soient a2 = α(a1 ), a3 = α2 (a1 ), a4 =


α3 (a1 ), · · · . Puisque Nn est fini, soit k le plus petit entier positif tel qu’il existe j ∈ N∗
tel que αk (a1 ) = aj avec j < k. Ainsi, αk (a1 ) = αj−1 (a1 ) et donc αk−j+1 (a1 ) = a1 .
Notons que si j 6= 1, alors k − j + 1 < k et l’égalité αk−j+1 (a1 ) = a1 contredit le choix
de k. On a donc j = 1 et αk (a1 ) = a1 . Ainsi, α agit comme une permutation circulaire
sur {a1 , · · · , ak }.
Si k 6= n, soit b1 ∈ Nn \ {a1 , · · · , ak } et b1 = α(b1 ), b3 = α2 (b1 ), · · · . Les mêmes argu-
ments montrent qu’il existe l ∈ Nn tel que α agit comme une permutation circulaire
sur {b1 , · · · , bl }.
Une répétition du procédé conduit à un nombre fini de sous ensembles de Nn {a1 , · · · , ak }, {b1 , · · · , bl }, · · ·
tels que leur réunion constitue un recouvrement de Nn . De plus, les permutations
(a1 , · · · , ak ), (b1 , · · · , bl ), · · · , (h1 , · · · , ht ) sont de supports disjoints et comme pour
tout i ∈ Nn ,
(a1 , · · · , ak )(b1 , · · · , bl ) · · · (h1 , · · · , ht )(i) = α(i),

on a (a1 , · · · , ak )(b1 , · · · , bl ) · · · (h1 , · · · , ht ) = α.


!
1 2 3 4 5 6 7 8
Exemple 39. Soit f = .
2 4 6 5 1 7 3 8
Choisissons un élément de N8 , disons 1. On a f (1) = 2, f (2) = 4, f (4) = 5 et f (5) = 1.
Choisissons à présent un élément de N8 \ {1, 2, 4, 5}, disons 3. On a f (3) = 6, f (6) = 7
et f (7) = 3.
Puis que N8 \ {1, 2, 4, 5} ∪ {3, 6, 7} = {8} et f (8) = 8, on a la décomposition suivante


de f en produit de cycles de supports disjoints.

f = (1, 2, 4, 5)(3, 6, 7)(8).

Noter que le cycle (8) est l’application identité ; on préférera donc l’écriture

f = (1, 2, 4, 5)(3, 6, 7).

Proposition 16. Toute cycle se décompose en produit de transpositions.

Preuve. Soit (a1 , · · · , ak ) un cycle. On a (a1 , · · · , ak ) = (a1 , ak )(a1 , ak−1 ) · · · (a1 , a2 ).


La proposition est ainsi démontrée.

52
4.2. Propriétés d’une permutation

En utilisant les deux propositions ci–dessus, on obtient le corollaire suivant.


Corollaire 2. Toute permutation se décompose en produit de transpositions.
Exemple 40.
(1, 2, 4, 5) = (1, 5)(1, 4)(1, 2) et (3, 6, 7) = (3, 7)(3, 6).
De l’exemple, 39, on déduit que
!
1 2 3 4 5 6 7 8
= (1, 5)(1, 4)(1, 2)(3, 7)(3, 6).
2 4 6 5 1 7 3 8

4.2.1 Signature d’une permutation


Il est déjà montré que toute permutation se décompose en produit de transpositions.
Un telle décomposition n’est cependant pas unique, en exemple, on peut voir que

(1, 5)(1, 4)(1, 2)(3, 7)(3, 6) = (1, 5)(1, 4)(1, 2)(3, 7)(3, 6)(2, 3)(2, 3),

car (2, 3)(2, 3) = 1Sn . Toutefois, nous verrons, dans cette section, que pour une per-
mutation donnée, la parité du nombre de transpositions dans une décomposition en
produit de transpositions est invariante. Pour établir ce résultat, nous aurons besoin
du lemme suivant.
Lemme 2. Si β1 , · · · , βr ∈ Sn sont des transpositions telles que 1Sn = β1 · · · βr , alors
r est pair.
Preuve. Puisqu’une transposition est différente de l’identité, on a nécessairement r 6= 1.
De plus, il est clair que la proposition est vraie pour r = 2.
Supposons que pour tout k < r et pour toute famille {γ1 , · · · , γk } de transpositions,
si 1Sn = γ1 · · · γk , alors k est pair.
Puisque (i, j) = (j, i), le produit βr−1 βr s’écrit nécessairement sous l’une des formes
suivantes : (a, b)(a, b), (a, c)(a, b), (b, c)(a, b) ou (c, d)(a, b). Or,

(a, b)(a, b) = 1Sn ,

(a, c)(a, b) = (a, b)(b, c),

(b, c)(a, b) = (a, c)(c, b),

et (c, d)(a, b) = (a, b)(c, d).

Et donc, si βr−1 βr = (a, b)(a, b), on obtient 1Sn = β1 · · · βr−2 . Sinon, on peut écrire le
produit β1 · · · βr sous la forme β1′ · · · βr′ tel que la transposition la plus à droite dans
laquelle apparaît a soit celle d’indice r − 1.
On répète le procédé avec βr−2 ′ ′
βr−1 ; ainsi, on obtient ou un produit de r − 2 trans-
positions égal à l’identité ou un produit de r transpositions tel que la transposition la
plus à droite dans laquelle a apparaît soit celle d’indice r − 2.
Comme 1Sn laisse tous les éléments de {1, · · · , n} fixes, en répétant le procédé, au
bout d’au plus r itérations, on arrive à une décomposition de 1Sn en produit de r − 2
transpositions. Et puisque par hypothèse r − 2 est pair, r l’est aussi.

53
4.2. Propriétés d’une permutation

Du lemme, on déduit la proposition suivante.

Proposition 17. Soit α une permutation de Nn . Si dans une décomposition de α


en produit de transpositions le nombre de transpositions est pair (resp. impair), alors
dans toute autre décomposition de α en produit de transpositions, le nombre de trans-
positions est pair (resp. impair).

Preuve. Il suffit de remarquer que si β1 · · · βk et γ1 · · · γl sont deux décompositions


en produit de transpositions de α ∈ Sn , alors 1Sn = β1 · · · βk γ1−1 · · · γl−1 . Et puisque
qu’une transposition est son propre inverse, on a 1Sn = β1 · · · βk γ1 · · · γl et le lemme 2
permet de conclure (k + l) est pair, ce qui implique que k et l sont de même parité ;
la proposition est ainsi démontrée.

Définition 35. Une permutation est dite paire si elle peut être décomposée en un
nombre pair de transpositions ; elle est dite impaire sinon.
On définit ε : Sn −→ {−1, 1} telle que ε(σ) = 1 si σ est paire et ε(σ) = −1 sinon.
Pour σ ∈ Sn , ε(σ) est dit signature de σ.

Proposition 18. L’application ε de Sn vers le groupe multiplicatif {−1, 1} est un


morphisme de groupe.

Preuve. Il suffit de noter que si f et g sont des permutations paires, alors f g est aussi
paire et donc ε(f g) = ε(f )ε(g). De même si f et g sont de parités différentes, f g est
impaire et ε(f g) = ε(f )ε(g).

Corollaire 3. L’ensemble de éléments de Sn de signature 1 est un sous groupe dis-


tingué de Sn dit groupe alterné de degré n noté An .

Preuve. Il suffit de remarquer que An est le noyau de l’application signature ε.

54
Exercices
Exercice 4.1. Calculer l’ordre de chacun des cycles suivants
1) (1, 8),
2) (5, 7, 8, 11),
3) (6, 7, 11, 23, 2),
4) (a1 , a2 , · · · , ak ).

Exercice 4.2. Écrire chacune des permutations suivantes en produit de transpositions


1) (1, 2, 3, 5, 8)(4, 1, 3, 6),
2) (1, 3, 2, 5, 6)(2, 3, 12)(4,
! 6, 5, 14),
1 2 3 4 5 6
3) .
2 1 5 4 6 3
! !
1 2 3 4 5 6 1 2 3 4 5 6
Exercice 4.3. Soit α = et β = .
2 1 5 4 6 3 6 1 2 4 3 5
Calculer :
1) α−1
2) αβ
3) βα

Exercice 4.4. Montrer que l’application signature d’une permutation, ε : Sn −→


{−1, 1} définie dans le cours, vérifie
Y σ(j) − σ(i)
ε(σ) = .
16i<j6n
j−i

En utilisant la formule ci–dessus, montrer que ε(σ1 σ2 ) = ε(σ1 )ε(σ1 ).

Exercice 4.5.
1) Soit α = (1, 3, 5, 7, 9)(2, 4, 6)(8, 10) et m ∈ N ; si αm est un 5–cycle, que peut on
dire de m.
2) Soit β = (1, 3, 5, 7, 9, 8, 6)(2, 4, 10) ; calculer le plus petit entier positif n tel que
β n = β −5 .
3) Soit γ un 10–cycle. Pour quels éléments x ∈ {2, · · · , 10}, γ x est-il un 10–cycle.

Exercice 4.6.
1) Montrer que l’ordre d’un produit de cycles de supports disjoints est le plus petit
multiple commun des ordres des cycles.
2) Calculer l’ordre de permutations
! suivante :
1 2 3 4 5 6
a) α = ,
2 1 5 4 6 3
!
1 2 3 4 5 6
b) β = ,
6 1 2 4 3 5
!
1 2 3 4 5 6 7 8
c) γ = ,
2 3 4 5 1 7 8 6

55
!
1 2 3 4 5 6 7 8
d) δ = .
1 3 8 7 6 5 2 4

Exercice 4.7.
1) Montrer que l’ensemble des permutations impaires de Sn n’est pas un groupe.
2) Soient α, β ∈ Sn . Montrer que α−1 β −1 αβ est une permutation paire.

Exercice 4.8. Soit G le groupe des permutations d’un ensemble X et a ∈ X. On


définit le stabilisateur de a par stab(a) = {α ∈ G : α(a) = a}. Montrer que pour tout
a ∈ G, stab(a) est un sous–groupe de G.

Exercice 4.9. Soit H = {α ∈ S5 : α(1) = 1 et α(3) = 3}.


1) Montrer que H est un sous–groupe de S5 .
2) Peut–on généraliser ce résultat pour n > 3 et un sous– ensemble quelconque de
Nn ? Justifiez.

Indications de solutions

56
Chapitre 5

Introduction aux anneaux et corps


Nous avons considéré jusque là des ensembles munis d’une seule loi de composition
interne. Toutefois, on peut toutefois que les structures les plus courantes sont munies
de lois de composition internes. En exemple, les structures de Z, Q et R sont munies
d’une addition et d’une multiplication et vérifie un certain nombre de propriétés ; elles
sont dites anneaux. Dans ce chapitre, nous proposons une exploration de la théorie
des anneaux ; nous nous intéresserons également aux corps qui sont des anneaux avec
quelques spécificités.

5.1 Structure d’anneau


Définition 36. Un ensemble A muni de deux lois de composition internes + et · est
dit anneau (unitaire) si
a) (A, +) est un groupe abélien ;
b) la loi · : A × A 7→ A, dite loi multiplicative, est associative et admet un élément
neutre, généralement noté 1A ;
c) pour tout x, y, z ∈ A, x · (y + z) = x · y + x · z et (y + z) · x = y · x + z · x.
Un anneau A est dit commutatif si ∀a, b ∈ A, a · b = b · a.

Remarque 16.
— Certains auteurs, anglophones notamment, définissent un anneau sans exiger
l’existence de l’élément neutre pour la loi · . Dans ce document, nous ne consi-
dérons que les anneaux munis d’un élément neutre pour la loi multiplicative.
— Pour un anneau A et x, y ∈ A, on utilisera souvent la notation xy à la place
de x · y.
— Afin d’alléger l’écriture, nous ferons souvent l’abus de dire « soit A un anneau »
à la place de « soit (A, +, ·) un anneau ».

Exemple 41.
— L’ensemble Z muni de l’addition et de la multiplication usuelles est un anneau
commutatif.
— Pour tout ensemble X et tout anneau A, l’ensemble des applications de X vers A,
muni des lois + et · définies par (f + g)(x) = f (x) + g(x) et (f g)(x) = f (x)g(x)
est un anneau.

Définition 37. Soit (A, +, ·) un anneau. Une partie S de A est dite sous–anneau de
A si (S, +) est un sous–groupe de (A, +) et S est stable pour la loi multiplicative de A.

Exemple 42.
— Si A est un anneau, {0} et A sont des sous anneaux de A. Un sous anneau de A
distinct de {0} et de A est dit sous anneau propre, strcit ou non–trivial.

57
5.1. Structure d’anneau

— Z est un sous–anneau de Q.
— Q est un sous–anneau de R.

La proposition suivante permet de caractériser un sous–anneau ; la preuve est laissée


en exercice.

Proposition 19. Soit (A, +, ·) un anneau. Une partie S de A est un sous–anneau si


∀ a, b ∈ S, a − b ∈ S et ab ∈ S.

5.1.1 Anneau intègre


Définition 38. Soit (A, +, ·) un anneau ; un élément a ∈ A non nul est dit diviseur
de zéro s’il existe b ∈ A non nul tel que ab = 0. Un anneau commutatif sans diviseur
de zéro est dit anneau intègre ou anneau d’intégrité.

Exemple 43.
— Z, Q et R sont des anneaux intègres.
— Z/6Z est un anneau non–intègre.

Proposition 20. Soit n ∈ N, Z/nZ est un anneau intègre si et seulement si n est


premier.

Preuve. Commençons par rappeler que m ∈ Z, avec m 6= 0 vérifie m̄ = 0̄ si et seule-


ment si n|m. De plus, si n est premier, pour tout a, b ∈ Z, n|ab implique n|a ou n|b.
Supposons n premier et montrons que Z/nZ est intègre. Soient ā, b̄ ∈ Z/nZ tels que
āb̄ = 0̄. Puisque āb̄ = ab, on a n|ab. Comme n est premier, cela implique que n|a
ou n|b, ce qui équivaut à ā = 0̄ ou b̄ = 0̄ ; Z/nZ est donc sans diviseur de zéro et
comme Z/nZ est commutatif, il est intègre.
Réciproquement, si n est composite (non–premier), il existe a, b ∈ N avec 1 < a, b < n
tels que ab = n. Dans ce cas, on a āb̄ = n̄ = 0̄ et ā 6= 0̄ 6= b̄ ; Z/nZ n’est donc pas
intègre.

Définition 39. Soit A un anneau, a ∈ A est dit inversible s’il existe b ∈ A tel que
ab = ba = 1.

Exemple 44.
— Dans Q, tout élément non nul est inversible.
— Dans M2 (R), l’anneau des matrices carrées à deux lignes et deux colonnes, les
inversibles sont les matrices dont le déterminant est non nul.

Définition 40. Un anneau commutatif dans lequel tout élément non–nul est inversible
est dit corps.

Exemple 45. Les anneaux Q, R et C sont des corps.

Remarque 17. Tout corps est un anneau intègre. En effet, si K est un corps, pour
tout a, b ∈ K tels que ab = 0, si a 6= 0, alors b = a−1 ab = a−1 0 = 0.

Théorème 3. Tout anneau intègre fini est un corps.

58
5.2. Idéal d’un anneau, morphisme d’anneau

Preuve. Soit A un anneau intègre fini, il suffit de montrer que tout élément non–nul
de A est inversible. Posons
A = {0, 1, a1 , · · · , an }.

Notons que pour ai 6= 0, si ai aj = ai ak , alors ai (aj −ak ) = 0, ce qui implique aj −ak = 0,


ou encore aj = ak .
Ainsi, pour tout ai ∈ A, A = {0, 1, a1 , · · · , an } = ai A = {0, ai , ai a1 , · · · , ai an }. Il existe
donc un élément aj de A tel que ai aj = 1 ; ai est donc inversible dans A. Comme ai
est quelconque dans A \ {0}, on conclut que A est un corps.

Du théorème 3, on déduit le résultat ci–dessous dont la preuve est laissée en exercice.

Corollaire 4. Pour n ∈ N∗ , Z/nZ est un corps si et seulement si n est premier.

5.2 Idéal d’un anneau, morphisme d’anneau


Dans cette section, nous nous intéressons aux idéaux d’un anneau ; les idéaux jouent
un rôle « similaire » à celui des sous–groupes distingués. Nous verrons notamment que
le noyau d’un morphisme d’anneau est un idéal, et que tout idéal est le noyau d’un
morphisme d’anneau.

Définition 41. Soient A un anneau et I ⊂ A ; I est dit idéal (bilatère) de A si :


a) I 6= ∅ ;
b) pour tout i1 , i2 ∈ I, i1 ± i2 ∈ I ;
c) pour tout a ∈ A et tout i ∈ I, ai ∈ I et ia ∈ I.

On remarquera qu’un idéal est nécessairement un sous–anneau. Un idéal d’un anneau


A distinct de A et de {0} est dit non trivial.

Proposition 21. Soit A un anneau commutatif et a ∈ A. L’ensemble

hai = aA = {ar, r ∈ A}

est un idéal de A ; un tel idéal est dit idéal principal engendré par a.

Preuve. L’ensemble hai est non–vide car a ∈ hai. Soient x = ar1 , y = ar2 ∈ hai ; on a
x ± y = a(r1 ± r2 ) ∈ hai et pour tout r ∈ A, xr = (ar1 )r = a(r1 r) ∈ hai. Il est donc
vérifié que hai est un idéal de A.

Proposition 22.
— Les sous–anneaux de Z sont de la forme nZ avec n ∈ N.
— Tout sous–anneau de Z est un idéal principal de Z.

Preuve. Soit S un sous–anneau de Z. Si S = {0}, alors S = 0Z. Sinon, soit S +


l’ensemble des éléments strictement positifs de S. Puisque S 6= {0}, il existe donc
x ∈ S avec x 6= 0 et comme −x ∈ S, on a forcement x ∈ S + ou −x ∈ S + ; S + est donc
non–vide. Soit
n = min{x, x ∈ S + }.

59
5.2. Idéal d’un anneau, morphisme d’anneau

Puisque n ∈ S, nZ ⊂ S. Soit m ∈ S ; par la division euclidienne, il existe r, q ∈ Z tels


que 0 6 r < n et m = nq + r. Ainsi, r = m − nq ∈ S. Puisque n est le plus petit
élément strictement positif de S, la relation 0 6 r < n implique que r = 0. Ainsi,
m = nq ∈ nZ. Et comme m est quelconque dans S, il vient S ⊂ nZ. On peut donc
conclure que nZ = S ; comme nZ = hni, la proposition est démontrée.

Proposition 23. Soient A un anneau commutatif et V = {a1 , · · · , an } ⊂ A. L’en-


semble ha1 , · · · , an i = {r1 a1 + · · · + rn an : ri,i∈{1,··· ,n} ∈ A} est un idéal de A dit idéal
engendré par V .
Preuve. L’ensemble ha1 , · · · , an i est non–vide car a1 ∈ ha1 , · · · , an i. Si x = r1 a1 +· · ·+
rn an ∈ ha1 , · · · , an i et y = r1′ a1 + · · · + rn′ an ∈ ha1 , · · · , an i, alors x ± y = (r1 ± r1′ )a1 +
· · · + (rn ± rn′ )an ∈ ha1 , · · · , an i. Et pour tout t ∈ A, tx = (tr1 )a1 + · · · + (trn )an ∈
ha1 , · · · , an i. Ainsi, ha1 , · · · , an i est un idéal de A.

Théorème 4. Soit A un anneau commutatif ; A est un corps si et seulement si les


seuls idéaux de A sont {0} et A.
Preuve. Soit A un corps et I un idéal de A, montrons que I = {0} ou I = A. Si I 6= {0},
alors il existe a ∈ I avec a 6= 0. Puisque A est un corps, a est inversible et a−1 a = 1 ∈ I.
Ainsi, pour tout b ∈ A, b.1 = b ∈ I ; donc A ⊂ I ce qui implique A = I.
Réciproquement, soit A un anneau commutatif tel que ses seuls idéaux soient {0} et
A et montrons que A est un corps. Si A = {0}, alors A est un corps. Sinon, soit a ∈ A
avec a 6= 0. Puisque a 6= 0 et a ∈ hai = aA et les seuls idéaux de A sont {0} et A, on a
hai = A. Il existe donc b ∈ A tel que ba = 1 ; autrement dit, a est inversible. Comme
a est quelconque dans A \ {0}, on peut conclure que A est un corps.

Définition 42. Soit A un anneau et I un idéal de A. Une classe d’équivalence modulo


I est un sous–ensemble de A de la forme

r + I = {r + i, i ∈ I}

où r est un élément fixé de A.


Lemme 3. Soit I un idéal d’un anneau A. L’ensemble des classes d’équivalences
modulo I forme une partition de A.
Preuve. Soit C l’ensemble des classes d’équivalences modulo I.
Pour tout a ∈ A, a ∈ a + I ; ainsi,
[
A⊂ J
J∈C

et donc [
A= J.
J∈C

Soient a + I, b + I ∈ C deux classes d’équivalences telles que (a + I) ∩ (b + I) 6= ∅.


Il existe i1 , i2 ∈ I tels que a + i1 = a + i2 . Ainsi, a − b = i2 − i1 ∈ I et donc a ∈ b + I,
ce qui implique a+I ⊂ b+I. On montre de même que b+I ⊂ a+I, et donc a+I = b+I.

60
5.2. Idéal d’un anneau, morphisme d’anneau

Ainsi, l’ensemble des classes d’équivalences modulo I constitue un recouvrement de A


et deux classes d’équivalences sont égales ou disjointes, on a bien une partition.

Théorème 5. Soient I un idéal d’un anneau A et A/I l’ensemble des classes (à gauche)
modulo I, i. e., A/I = {r + I, r ∈ A}. On définit l’addition et la multiplication sui-
vantes :
(r1 + I) + (r2 + I) = (r1 + r2 ) + I, et

(r1 + I)(r2 + I) = r1 r2 + I.

L’ensemble A/I muni de l’addition et de la multiplication ci–dessus est un anneau,


dit anneau quotient de A par I.

Preuve. Montrons que l’addition et la multiplication sont bien définies, c’est–à–dire si


r1 + I = r1′ + I et r2 + I = r2′ + I alors (r1 + r2 ) + I = (r1′ + r2′ ) + I et r1 r2 + I = r1′ r2′ + I.
Si r1 + I = r1′ + I, alors r1 ∈ r1′ + I et donc r1 = r1′ + i1 pour un certain i1 ∈ I.
On montre de même que r2 = r2′ + i2 pour un certain i2 ∈ I. Ainsi, (r1 + I) + (r2 + I) =
(r1′ + i1 + I) + (r2′ + i2 + I) = (r1′ + I) + (r2′ + I) = (r1′ + r2′ ) + I.
De façon similaire, (r1 +I)(r2 +I) = (r1′ +i1 +I)(r2′ +i2 +I) = (r1′ +I)(r2′ +I) = (r1′ r2′ )+I.
Il est aisé de montrer que les axiomes de la définition 36 sont satisfaits ; cette partie
de la preuve est laissée en exercice.

Définition 43. Soient A et B deux anneaux ; une application ϕ de vers B est dite
homomorphisme ou morphisme d’anneau si pour tout a1 , a2 ∈ A,

ϕ(a1 + a2 ) = ϕ(a1 ) + ϕ(a2 ) et

ϕ(a1 a2 ) = ϕ(a1 )ϕ(a2 ).

De plus, l’application ϕ est dite :


— épimorphisme si elle est surjective ;
— monomorphisme si elle est injective ; et
— isomorphisme si elle est bijective.

Proposition 24. Soient A et B deux anneaux et ϕ un morphisme de A vers B. Alors


ϕ(0A ) = 0B et pour tout a ∈ A, ϕ(−a) = −ϕ(a).

Preuve. On a ϕ(0A ) = ϕ(0A + 0A ) = ϕ(0A ) + ϕ(0A ) ce qui implique ϕ(0A ) = ϕ(0A ) −


ϕ(0A ) = 0B .
Aussi, 0B = ϕ(0A ) = ϕ(a − a) = ϕ(a) + ϕ(−a), ce qui implique ϕ(−a) = −ϕ(a).

Définition 44. Soient A et B deux anneaux et ϕ un morphisme de A vers B. On définit


le noyau de ϕ par ker ϕ = {a ∈ A : ϕ(a) = 0} et l’image de ϕ par Im ϕ = {ϕ(a), a ∈ A}.

Théorème 6. Soient A et B deux anneaux et ϕ un morphisme de A vers B :


a) ker ϕ est un idéal de A ;
b) Im ϕ est un sous–anneau de B ;
c) A/ ker ϕ est isomorphe à Im ϕ ; et

61
5.2. Idéal d’un anneau, morphisme d’anneau

d) si I est un idéal de A, l’application s : A −→ A/I qui à a associe a + I est un mor-


phisme d’anneau dont le noyau est I et l’image A/I.

Remarque 18. D’après le théorème 6, tout idéal est le noyau d’un morphisme d’an-
neau, et réciproquement le noyau d’un morphisme d’anneau est un idéal.

Preuve du théorème 6.
a) Soit ϕ : A −→ B un morphisme d’anneau et I = ker ϕ. Montrons que I est un idéal
de A.
Soient r1 , r2 ∈ I, on a ϕ(r1 ) = ϕ(r2 ) = 0B . Ainsi, ϕ(r1 ± r2 ) = ϕ(r1 ) ± ϕ(r2 ) =
0B ± 0B = 0B ; I = ker ϕ est donc un sous–anneau de A.
Soient r ∈ I et a ∈ A ; on a ϕ(ra) = ϕ(r)ϕ(a) = 0B ϕ(a) = 0B et ϕ(ar) =
ϕ(a)ϕ(r) = 0B et donc ra ∈ I et ar ∈ I. On conclut que I est un idéal de A.
b) Montrons que Im ϕ est un sous–anneau de B.
0B ∈ Im ϕ, donc Im ϕ 6= ∅. Soient b1 , b2 ∈ Im ϕ ; il existe r1 , r1 ∈ A tels que
ϕ(r1 ) = b1 et ϕ(r2 ) = b2 . Puisque ϕ est un morphisme, on a alors b1 ± b2 =
ϕ(r1 ) ± ϕ(r2 ) = ϕ(r1 ± r2 ) ∈ Im ϕ et b1 b2 = ϕ(r1 )ϕ(r2 ) = ϕ(r1 r2 ) ∈ Im ϕ. Ainsi,
Im ϕ est un sous–anneau de B.
c) Montrons que A/ ker ϕ est isomorphe à Im ϕ.
Considérons l’application ϕ∗ : A/ ker ϕ −→ Im ϕ qui à r + ker ϕ associe ϕ(r). L’ap-
plication ϕ∗ est bien définie car si r1 , r2 ∈ A sont tels que r1 + ker ϕ = r2 + ker ϕ,
alors r1 − r2 ∈ ker ϕ, et donc ϕ(r1 − r2 ) = 0B , ou encore ϕ(r1 ) = ϕ(r2 ), ce qui
équivaut à ϕ∗ (r1 + ker ϕ) = ϕ∗ (r2 + ker ϕ) ; ϕ∗ est donc bien définie.

— Montrons que ϕ∗ est un morphisme d’anneau.


ϕ∗ (r1 + ker ϕ) + (r2 + ker ϕ) = ϕ∗ ((r1 + r2 ) + ker ϕ) = ϕ(r1 + r2 ) = ϕ(r1 ) +


ϕ(r2 ) = ϕ∗ (r1 + ker ϕ) + ϕ∗ (r2 + ker ϕ). Et ϕ∗ (r1 + ker ϕ)(r2 + ker ϕ) =


ϕ∗ ((r1 r2 ) + ker ϕ) = ϕ(r1 r2 ) = ϕ(r1 )ϕ(r2 ) = ϕ∗ (r1 + ker ϕ)ϕ∗ (r2 + ker ϕ).
Ainsi, ϕ∗ est un morphisme d’anneau.
— Montrons que ϕ∗ est injective, i.e., pour tout r1 + ker ϕ, r2 + ker ϕ ∈ A/ ker ϕ,
si ϕ∗ (r1 + ker ϕ) = ϕ∗ (r2 + ker ϕ) alors r1 + ker ϕ = r2 + ker ϕ.
L’égalité ϕ∗ (r1 + ker ϕ) = ϕ∗ (r2 + ker ϕ) implique ϕ(r1 ) = ϕ(r2 ), ou encore
r1 − r2 ∈ ker ϕ, ce qui équivaut à r1 + ker ϕ = r2 + ker ϕ ; ϕ∗ est donc injective.
— Montrons que ϕ∗ est surjective.
Soit b ∈ Im ϕ. Il existe r ∈ A tel que ϕ(r) = b, donc ϕ∗ (r + ker ϕ) = b ; ϕ∗ est
donc surjective.
Ainsi, il est montré que ϕ∗ est un isomorphisme d’anneau de A/ ker ϕ de vers Im ϕ.
d) Soit I un idéal d’un anneau A et A/I l’anneau quotient de A par I. Soit ε : A −→
A/I qui à a associe a + I. De la définition de l’addition et de la multiplication
de A/I, on montre sans difficulté que ε est un morphisme d’anneau.
Il est clair que I ⊂ ker ε. Réciproquement, si r ∈ ker ε, ε(r) = r + I = 0A/I = I.
Ainsi, r ∈ I ; on peut donc conclure que ker ε = I. On montre sans peine que
Im ε = A/I.

62
5.3. Caractéristique d’un anneau

5.3 Caractéristique d’un anneau


Définition 45. Un corps est dit premier s’il ne contient aucun sous–corps non trivial.

Proposition 25. Tout corps contient un sous–corps premier.

Preuve. Soit K un corps. Si K est premier, alors K est un sous–corps premier de K.


Sinon, soit F l’intersection de tous les sous–corps stricts de K. On montre sans difficulté
que F est un sous–corps de K et que F n’admet pas de sous corps non trivial (un sous–
corps non trivial de de F serait un sous–corps strict de K et contredirait la définition
de F ). Le sous–corps F est donc premier.

Définition 46. Soit A un anneau ; s’il existe, le plus petit entier strictement positif
tel que n1A = 1A + · · · + 1A (n fois) est dit caractéristique de A. Si un tel entier
n’existe pas, l’anneau A est dit de caractéristique 0. La caractéristique d’un anneau A
est notée char(A).

Exemple 46.
— Les anneaux Z et Q sont caractéristique 0.
— Pour n ∈ N∗ , Z/nZ est de caractéristique n.

Proposition 26. Soit A un anneau intègre ; la caractéristique de A est 0 ou un nombre


premier. En particulier, la caractéristique d’un corps est 0 ou un nombre premier.

Preuve. Soit A un anneau intègre de caractéristique n. Montrons que si n 6= 0, alors


n est premier.
Supposons n composite, i.e. il existe n1 , n2 ∈ N \ {1} tels que n = n1 n2 . On a alors
0A = n1A = (n1 1A )(n2 1A ). Puisque A est intègre, donc sans diviseurs de zéros, on
a forcément n1 1A = 0 ou n2 1A = 0, ce qui contredit la définition de n comme le
plus petit entier strictement positif tel que n1A = 0A . L’entier n est donc forcément
premier.

5.4 Propriétés des idéaux


Rappelons que les idéaux de Z sont de la forme nZ, avec n ∈ N ; de plus pour n ∈ N∗ ,
Z/nZ est un anneau intègre si et seulement si n est premier.

Lemme 4. Soit a, b, p ∈ Z tels que p soit premier ; si p|ab alors p|a ou p|b.

Preuve. Si p ∤ a, alors pgcd(a, p) = 1 ; donc d’après Bezout, il existe x, y ∈ Z tels que


ax + py = 1. Ainsi, abx + bpy = b. Puisque p|ab et p|bp, p|(abx + bpy) donc p|b.

Du lemme, on déduit le corollaire ci–dessous ; la preuve est laissée en exercice.

Corollaire 5. Soit p ∈ Z.
— Si p est premier, alors pour tout a, b ∈ Z, ab ∈ pZ si et seulement si a ∈ pZ ou
b ∈ pZ.
— Si p est premier et pZ ⊂ nZ alors n = 1 ou n = p ; autrement dit, les seuls idéaux
de Z contenant pZ sont Z et pZ.

63
5.4. Propriétés des idéaux

Définition 47. Soit A un anneau ; un idéal propre I de A est est dit premier si pour
tout a, b ∈ A, ab ∈ I alors a ∈ I ou b ∈ I.

Théorème 7. Soit A un anneau commutatif et I un idéal propre de A. L’idéal I est


premier si et seulement si A/I est intègre.

Preuve. Soit A un anneau commutatif et I un idéal propre de A ; supposons I premier


et montrons que A/I est intègre.
Il est clair que si A est commutatif, A/I l’est aussi ; reste à montrer que A/I n’admet
pas de diviseur de zéro. Soient a + I, b + I ∈ A/I tels que (a + I)(b + I) = 0A/I = I. On
alors ab + I = I, ce qui équivaut à ab ∈ I. Puisque I est premier, a ∈ I ou b ∈ I, ou
encore a + I = I = 0A/I ou b + I = I = 0A/I . Il est ainsi montré que si I est premier,
A/I est intègre.
Réciproquement, supposons A/I intègre et montrons que I est premier.
Soient a, b ∈ A tels que ab ∈ I ; montrons que a ∈ I ou b ∈ I. Si ab ∈ I, alors
(a + I)(b + I) = I = 0A/I . Puisque A/I est intègre, a + I = I ou b + I = I, ou encore
a ∈ I ou b ∈ I. Ainsi, si A/I est intègre, I est premier ; le théorème est démontré.

Définition 48. Soient A un anneau commutatif, I et J deux idéaux de A. On définit


IJ comme étant l’ensemble des sommes finies de produits ij, i ∈ I et j ∈ J. Autrement
dit, IJ = {i1 j1 + · · · + in jn , avec ik,k∈{1,··· ,n} ∈ I jk,k∈{1,··· ,n} ∈ J et n ∈ N}.

Proposition 27. Soient A un anneau commutatif, si I et J sont deux idéaux de A


alors IJ est un idéal de A.

Preuve. Soient r1 , r2 ∈ IJ. Il existe i1 , · · · , in , i′1 , · · · , i′n ∈ I, j1 , · · · , jn , j1′ , · · · , jn′ ∈ J,


tels que r1 = i1 j1 + · · · + in jn et r2 = i′1 j1′ + · · · + i′n jn′ . Et donc,

r1 ± r2 = i1 j1 + · · · + in jn ± i′1 j1′ ± · · · ± i′n jn′ ∈ IJ

et
r1 r2 = i1 j1 i′1 j1′ + · · · + in jn i′n jn′ = (i1 i′1 )(j1 j1′ ) + · · · + (in i′n )(jn jn′ ) ∈ IJ.

Ainsi, IJ est un sous–anneau de A.


Pour r ∈ A, rr1 = (ri1 )j1 + · · · + (rin )jn ∈ IJ car rik ∈ I. Le sous–anneau IJ est
donc un idéal de A.

Lemme 5. Soit A un anneau commutatif, I, J et P des idéaux de A. Si P est premier


et IJ ⊂ P , alors I ⊂ P ou J ⊂ P .

Preuve. Supposons IJ ⊂ P i.e. pour tout i ∈ I et tout j ∈ J, ij ∈ P . Montrons que si


J 6⊂ P alors I ⊂ P . Si J 6⊂ P , il existe j0 ∈ J tel que j0 6∈ P . Comme pour tout i ∈ I,
j0 i ∈ IJ ⊂ P et P est premier, on conclut que I ⊂ P ; ce qui prouve le résultat.

Définition 49. Soient A un anneau et I un idéal de A. L’idéal I est dit maximal si


si I 6= A et pour tout idéal J de A, I J implique J = A.

Proposition 28. Soit A un anneau commutatif et I un idéal de A ; I est maximal si


et seulement si A/I est un corps.

64
5.4. Propriétés des idéaux

Preuve. Soit A un anneau commutatif et I un idéal de A ; supposons I maximal et


montrons que A/I est un corps.
Puisque A est commutatif, A/I l’est aussi. Il suffit donc de montrer que tout élément
non nul de A/I est inversible. Soit r̄ = r + I un élément non–null de A/I. Puisque
r + I 6= I, r 6∈ I. Considérons l’ensemble B = {rx+ i : x ∈ A et i ∈ I}. On montre sans
difficulté que B est un idéal de A. De plus I ⊂ B, car pour tout i ∈ I, i = r0 + i ∈ B.
Puisque I est maximal, et I 6= B (car r ∈ B et r 6∈ I), on a B = A, donc 1 ∈ B. Il
existe donc x ∈ A et i ∈ I tels que 1 = rx + i. On a alors 1 ∈ (r + I)(x + I), ce qui
implique 1 + I = (r + I)(x + I). La classe (r + I) est donc inversible dans A/I ; (r + I)
étant quelconque dans A/I \ {0A/I }, A/I est donc un corps.
Réciproquement, supposons que A/I soit un corps et montrons que I est maximal.
Soit I1 un idéal de A tel que I I1 ; montrons que I1 = A. Puisque I I1 , il existe
r ∈ I1 tel que r 6∈ I. Puisque A/I est un corps (r + I) est inversible ; il existe donc
x ∈ A tel que (r + I)(x + I) = rx + I = 1 + I. Il existe donc x ∈ A et i ∈ I tels que
rx + i = 1. On a alors 1 ∈ I1 ; comme pour tout a ∈ A, a = a.1 ∈ I1 , il vient I1 = A.
Il est montré que l’idéal I est maximal.

Corollaire 6. Tout idéal maximal d’un anneau commutatif est premier.

Preuve. Soit I un idéal maximal d’un anneau commutatif A. Puisque I est maximal,
A/I est un corps, donc intègre, ce qui implique que I est premier.

Définition 50. Soit A un anneau commutatif


— a ∈ A est dit diviseur de b ∈ A s’il existe c ∈ A tel que b = ac, on note a|b ;
— un idéal I de A est dit principal s’il est monogène, c’est–à–dire s’il existe a ∈ A
tel que hai = I ;
— deux élément a, b ∈ A sont dits associés si hai = hbi.

La preuve de la proposition ci–dessus est laissée en exercice.

Proposition 29. Soit A un anneau ; a ∈ A et b ∈ A sont associés si et seulement si il


existe un inversible u ∈ A∗ tel que a = bu.

Définition 51. Sot A un anneau intègre ; A est dit principal si tout idéal de A est
principal

Exercice 5.1. Montrer que Z est un anneau principal.

65
Exercices
Exercice 5.2.
1) Montrer que si A est un anneau commutatif, pour tout a ∈ A, Ia = {x ∈ A : xa = 0}
est un idéal de A.
2) Montrer qu’une intersection d’idéaux d’un anneau B est un idéal de B.

Exercice 5.3. !
√ a 2b
Soit R = {a + b 2 : a, b ∈ Z} et R′
l’ensemble des matrices 2 × 2 de la forme .
b a
1) Montrer que R est un sous–anneau de R et R′ est un sous–!anneau M2 (Z).
√ a 2b
2) Montrer que ϕ : R −→ R′ telle que ϕ(a + b 2) = est un isomorphisme
b a
d’anneaux.

Exercice 5.4.
Soient ϕ : A −→ A′ un morphisme d’anneaux, I et I ′ des idéaux respectifs de A et A′ .
1) Montrer que ϕ(A) est un sous–anneau de A′ .
2) Montrer que si S est un sous–anneau de A′ , alors ϕ−1 (S) est un sous–anneau de A.
3) Montrer que si I est un idéal de A, alors ϕ(I) est un idéal de ϕ(A).
4) Montrer que si I ′ est un idéal de A′ , alors ϕ−1 (I ′ ) est un idéal de A

Exercice 5.5.
1) Soit ϕ : K −→ A′ un morphisme d’anneaux d’un corps K vers un anneau A.
Montrer que ϕ(x) = 0 pour tout x ∈ K ou ϕ est un monomorphisme.
2) Montrer qu’un anneau commutatif A n’a d’autres idéaux que {0} et l’idéal unité
1A = A si et seulement si c’est un corps.
3) Montrer qu’un anneau intègre fini est un corps.

Exercice 5.6.
Soit A un anneau. Un idéal I de A est dit premier si pour tout a, b ∈ A, si ab ∈ I alors
a ∈ I ou b ∈ I. Montrer que si I est un idéal premier de A et si I1 , · · · , In sont des
idéaux de A tels que I1 I2 · · · In−1 In ⊂ I, alors il existe k ∈ {1, · · · , n} tel que Ik ⊂ I.

Exercice 5.7.
Soit A un anneau non commutatif.
1) Montrer que si x, y ∈ A commutent, i.e. xy = yx, alors

xn − y n = (x − y)(xn−1 + xn−2 y + · · · + xy n−2 + y n−1 ).

2) Un élément x ∈ A est dit nilpotent s’il existe un entier n > 1 tel que xn = 1.
Montrer que si x ∈ A est nilpotent, alors 1 − x est inversible dans A.
3) Montrer que si x, y ∈ A sont nilpotents, alors x + y est nilpotent.

Exercice 5.8.
Soient U un ensemble non–vide de nombres premiers et
a
QU = { : tous les diviseurs premiers de b sont éléments de U }.
b

66
1) Montrer que QU est un sous–anneau de Q.
a 1
2) Soient A un sous anneau de Q et ∈ A. Montrer que ∈ A.
b b
3) Déterminer les sous–anneaux de Q.

Exercice 5.9.
Soit A un anneau non commutatif fini. Montrer que tout idéal premier de A est maxi-
mal.

Exercice 5.10.
Montrer que tout idéal maximal d’un anneau (unitaire) commutatif est premier.

Exercice 5.11.
Soient A un anneau commutatif, I et J deux idéaux de A. On définit le quotient de I
et J par I : J = {a ∈ A : ab ∈ I, ∀b ∈ J}. Montrer que I : J est un idéal de A.

Indications de solutions

67
Chapitre 6

Le corps des nombres complexes


L’équation x2 = 2 n’a pas de solutions dans Q, mais elle en admet dans R. Toutefois,
l’équation x2 = −1 n’admet pas de solution dans R ; dans ce chapitre, nous proposons
une étude du corps C, qui contient R, dans lequel cette équation admet une solution.
Rappelons ! que M2 (R), l’anneau des (2 × 2)–matrices à coefficient dans ! R, admet
1 0 a11 a12
I2 = comme élément unité. De plus, pour λ ∈ R et M = ∈ M2 (R),
0 1 a21 a22
! !
λa11 λa12 0 −1
on définit le produit de λ et de M par λM = . Posons i =
λa21 λa22 1 0
et notons C̃ le sous–ensemble de M2 (R) constitué des matrices de la forme
! ! !
1 0 0 −1 a −b
A(a, b) = aI2 + bi = a +b = .
0 1 1 0 b a

On vérifie sans peine que pour tous a, b, u, v ∈ R,

A(a, b) + A(u, v) = A(a + u, b + v),

A(a, b)A(u, v) = A(au − bv, av + bu) = A(u, v)A(a, b).

Par ailleurs, si A(a, b) 6= 0M2 (R) , ou encore si (a, b) 6= (0, 0), A(a, b) est inversible et

−1  a −b 
A(a, b) =A , .
a2 + b2 a2 + b2

De ces propriétés, on déduit le sous–ensemble C̃ est un corps. Aussi, on vérifie que


i2 = −I2 ; de plus, tout élément z ∈ C̃ s’écrit de façon unique sous la forme z = aI2 +bi.
D’autre part, l’application de R dans C̃ qui à λ associe λI2 est un morphisme de corps,
donc est injective. On peut donc identifier R par son image à travers ce morphisme et
le corps C̃ (qu’on notera C) par l’ensemble des a + bi avec a, b ∈ R et i2 = −1.

6.1 Défintions et propriétés immédiates


Définition 52. On appelle nombre complexe tout élément de z de la forme z = a + bi
où a, b ∈ R et i vérifie i2 = −1. Le réel a est dit partie réelle de z et b est dit partie
imaginaire de z ; on note a = Re(z) et b = Im(z). Un nombre complexe est dit
imaginaire pur si sa partie réelle est nulle.

Remarque 19. De la discussion introductive, on déduit que deux nombres complexes


z1 et z2 sont égaux si Re(z1 ) = Re(z2 ) et Im(z1 ) = Im(z2 ). De plus pour tout couple

68
6.1. Défintions et propriétés immédiates

de nombres complexes z1 = a1 + b1 i et z2 = a2 + b2 i,

z1 + z2 = (Re(z1 ) + Re(z2 )) + (Im(z1 ) = Im(z2 ))i = a1 + a2 + (b1 + b2 )i

et

z1 z2 = (Re(z1 )Re(z2 ) − Im(z1 )Im(z2 )) + (Re(z1 )Im(z2 ) + Re(z2 )Im(z1 ))i

= (a1 a2 − b1 b2 ) + (a1 b2 + a2 b1 )i.


La proposition ci–dessous découle aussi de la discussion ; la preuve est laissée en exer-
cice.
Proposition 30.
a) Pour tous z1 , z2 ∈ C, z1 + z2 = z2 + z1 .
b) Pour tous z1 , z2 , z3 ∈ C, (z1 + z2 ) + z3 = z1 + (z2 + z3 ) et (z1 z2 )z3 = z1 (z2 z3 ).
c) Pour tout z ∈ C \ {0}, il existe z ′ ∈ C tel que zz ′ = z ′ z = 1.

Conjugué et module d’un nombre complexe


Définition 53. Soit z = a + bi ∈ C ; le nombre complexe z̄ = a − bi ∈ C est dit
conjugué de z.
On déduit les propriétés suivantes.
Proposition 31. a) Pour tout z ∈ C, z + z̄ = 2Re(z) et z − z̄ = 2Im(z).
b) L’application ψ de C vers C qui à z associe z̄ est un automorphisme involutif du
corps C.
Preuve.
a) Ce point est immédiat.
b) Rappelons qu’une application est dite involution si elle est bijective et égale à son
inverse. Notons que ψ est bijective ; en effet pour tout z = a + bi, z = ψ(a − bi) = z̄¯
(ψ est donc surjective) et si z1 et z2 sont tels que ψ(z1 ) = ψ(z2 ), on alors Re(z¯1 ) =
Re(z¯2 ) et Im(z¯1 ) = Im(z¯2 ) ce qui équivaut à Re(z1 ) = Re(z2 ) et Im(z1 ) = Im(z2 ),
ou encore z1 = z2 , ψ est donc bijective. Puisque ψ ◦ ψ coïncide avec l’identité de C,
ψ est une involution.
Montrons à présent que ψ est un morphisme de corps. Soient z1 , z2 ∈ C,

ψ(z1 + z2 ) = Re(z1 ) + Re(z2 ) + (Im(z1 ) + Im(z2 ))i


= Re(z1 ) + Re(z2 ) − (Im(z1 ) + Im(z2 ))i
= Re(z1 ) − Im(z1 )i + Re(z2 ) − Im(z2 )i
= z¯1 + z¯2 = ψ(z1 ) + ψ(z2 );

de plus,
 
z1 z2 = Re(z1 )Re(z2 ) − Im(z1 )Im(z2 ) + Re(z1 )Im(z2 ) + Im(z1 )Re(z2 ) i
 
= Re(z1 )Re(z2 ) − Im(z1 )Im(z2 ) − Re(z1 )Im(z2 ) + Im(z1 )Re(z2 ) i
 
= Re(z1 ) − Im(z1 )i Re(z2 ) − Im(z2 )i
= z¯1 z¯2

69
6.1. Défintions et propriétés immédiates

on peut donc conclure que ψ est un morphisme de corps.

√ √
Définition 54. Soit z = a + bi un nombre complexe ; le réel |z| = zz̄ = a2 + b2
est dit module de z.

On remarquera que si z est réel, le module de z est la valeur absolue de z.

Proposition 32. Soit z = a + bi ∈ C.


a) |z| = 0 si et seulement si z = 0 ;
b) |z̄| = z ;
c) l’application C ∋ α −→ |α| ∈ R est un morphisme du groupe multiplicatif de C
vers le groupe multiplicatif R+∗.

Preuve.
a) Dans R, les équivalences suivantes sont vérifiées
p
( a2 + b2 = 0) ⇐⇒ (a2 + b2 = 0) ⇐⇒ (a = 0 et b = 0);

ce qui démontre ce premier point.


√ p
b) |z| = a2 + b2 = a2 + (−b)2 = |z̄|.
c) Soient z, z ′ ∈ C, par définition, |z|2 = zz̄ |z ′ |2 = z ′ z¯′ . De la commutativité de la
multiplication dans C, on a |zz ′ |2 = zz ′ z̄z ′ = zz̄z ′ z ′ = |z|2 |z ′ |2 = (|z||z ′ |)2 ; en
prenant les racines carrées, on obtient le résultat.

Remarque 20.
1 z̄
1) De l’égalité zz̄ = |z|2 , on déduit que si z 6= 0, alors
= 2.
z |z|
1 z 1 1
2) Si z =
6 0, de l’égalité |z| = = |1| = 1 on déduit = .
z z z |z|
Théorème 8. Pour tous nombres complexes z, z ′ ,
a) |z + z ′ |2 = |z|2 + 2Re(zz ′ ) + |z ′ |2 ;
b) Re(zz ′ ) 6 |z||z ′ | ;
c) |z + z ′ | 6 |z| + |z ′ |.

Preuve.
a) Posons z = a + bi et z ′ = a′ + b′ i. On a |z + z ′ |2 = (a + a′ )2 + (b + b′ )2 =
a2 + b2 + 2(aa′ + bb′ ) + a′2 + b′2 = |z|2 + 2Re(zz ′ ) + |z ′ |2 .
b) Commençons par remarquer que pour tout z = a + bi ∈ C, Re(z) = a 6 |z| =

a2 + b2 . Ainsi, Re(zz ′ ) 6 |zz ′ | = |z||z ′ | = |z||z ′ |.
c) On a |z + z ′ |2 = |z|2 +2Re(zz ′ )+|z ′ |2 et Re(zz ′ ) 6 |z||z ′ |, ce qui implique |z + z ′ |2 6
|z|2 + 2|z||z ′ | + |z ′ |2 = (|z| + |z ′ |)2 . Puisque |z + z ′ | > 0 et |z| + |z ′ | > 0, on conclut
|z + z ′ | 6 |z| + |z ′ |.

De ce résultat on déduit le corollaire ci–dessous.

70
6.2. Équations algébriques de degré 2

Corollaire 7. Pour tous nombres complexe z, z ′ ,

|z| − |z ′ | 6 |z − z ′ | 6 |z| + |z ′ |.

Preuve. Notons que |z − z ′ | = |z + (−z ′ )| 6 |z| + | − z ′ | = |z| + |z ′ |.


Par ailleurs des relations

|z| = |z − z ′ + z ′ | 6 |z − z ′ | + |z ′ |

et
|z ′ | = |z ′ − z + z| 6 |z ′ − z| + |z|

qui s’écrivent encore


|z| − |z ′ | 6 |z − z ′ |

et
− |z| − |z ′ | 6 |z ′ − z| = | − (z − z ′ )| = |z − z ′ |,


on déduit
|z| − |z ′ | 6 |z − z ′ |.

Le corollaire est ainsi démontré.

Groupe des nombres complexes de module 1


Soit U l’ensemble des nombres complexes de module 1 i.e.,

U = {z ∈ C : |z| = 1}.

De la proposition 32 (item (c)), on déduit que pour tous z1 , z2 ∈ U, z1 z2 ∈ U car


|z1 z2 | = |z1 ||z2 | = 1 ; ainsi U est stable pour la multiplication. D’autre part, si z ∈ U,
1 1 1
alors ∈ U car = = 1.
z z |z|
Ainsi U est un sous–groupe du groupe multiplicatif C∗ ; c’est le noyau du morphisme
z −→ |z| du groupe multiplicatif C∗ vers le groupe multiplicatif R∗+ .

6.2 Équations algébriques de degré 2


Rappelons qu’une équation algébrique est une équation de la forme

an xn + an1 xn1 + · · · + a0 = 0;

elle est dite de degré 2 si n = 2. Commençons par noter qu’une équation algébrique
de degré 2 admet au plus deux solutions dans C. En effet, si z1 et z2 sont solutions de
x2 + bx + c = 0, des égalités
z12 + bz1 + c = 0 (6.1)

et
z22 + bz2 + c = 0 (6.2)

71
6.2. Équations algébriques de degré 2

on déduit (en faisant (6.1)−(6.2))

(z1 − z2 )(z1 + z2 + b) = 0. (6.3)

Ce qui donne z1 = z2 ou z1 = −z2 − b.


Le résultat ci–dessous, qui découle du fait que i et −i sont solutions de l’équation
x2 + 1 = 0.

Proposition 33. Pour tout réel non nul a, l’équation x2 + a = 0 admet exactement
deux solutions dans C.

Preuve. Si a est négatif, l’équation équivaut à x2 = −a avec −a > 0, elles admet



donc x = ± −a comme solutions réelles. Et si a est positif, l’équation équivaut à
√ 2 √
x2 = (i)2 a , elle admet pour solutions x = ±i a.

Définition 55. Soit z ∈ C un nombre complexe ; r ∈ C est dit racine carrée de z si


r 2 = z.

Du résultat précédent, nous savons que tout réel non nul admet deux racines carrées
dans C ; dans le résultat suivant, nous généralisons cette propriétés aux complexes.

Proposition 34. Tout complexe non nul β ∈ C∗ admet exactement deux racines
carrées.

Preuve. Posons β = x + yi. Nous avons à montrer que l’équation z 2 = x + iy admet


deux racines.
Si y = 0, on est ramené à la proposition 33 déjà traitée. Sinon, du fait que l’équation
admet au plus deux solutions et que si z est solution, alors −z l’est aussi, il suffit d’en
trouver une.
L’équation z 2 = x + iy équivaut à
(
Re(z)2 − Im(z)2 = x
2Re(z)Im(z) = y.
En utilisant le fait que |z 2 | = |z|2 , nous obtenons le système
(
Re(z)2 − Im(z)2 = x
Re(z)2 + Im(z)2 = |β| = x2 + y 2 .
p

De ce dernier système on déduit


p
2x + |β| x+ x2 + y 2
Re(z) = = ,
2 2
ou encore s p
x+ x2 + y 2
Re(z) = ± .
2

72
6.3. Argument d’un nombre complexe

On déduit Im(z) de l’égalité 2Re(z)Im(z) = y (rappelons que y 6= 0). Au final,


l’équation z 2 = x + iy admet pour solutions
s p
x+ x2 + y 2 yi
z1 = + s
2 p
x + x2 + y 2
2
2
1 x + yi + |β|
= √ p
2 x + |β|

et
z2 = −z1 .

On déduit le corollaire suivant.

Corollaire 8. Toute équation de la forme az 2 + bz + c = 0 avec a, b, c ∈ C et a 6= 0


admet deux solutions (pas forcément distinctes) dans C.

Preuve. Il suffit de noter que l’équation az 2 + bz + c = 0 s’écrit aussi


2 !
b b2 − 4ac

a z+ − = 0;
2a 4a2

ce qui équivaut à
2 !
b b2 − 4ac

z+ − = 0.
2a 4a2
Ce qui nous ramène à l’équation

b2 − 4ac b
t2 = 2
où t = z + (6.4)
4a 2a

qui a deux solutions qui sont distinctes si b2 −4ac 6= 0 et confondues si b2 −4ac = 0.

De la relation 6.4, on déduit la proposition suivante dont la preuve est laissée en


exercice.

Proposition 35. Pour tous complexes a, b, c ∈ C avec a 6= 0, si z1 et z2 sont solutions


b c
de l’équation ax2 + bx + c = 0, alors z1 + z2 = − et z1 z2 = .
a a

6.3 Argument d’un nombre complexe


Nous supposerons ici les fonctions sin et cos et leurs propriétés déjà connues.

Proposition 36. Pour tout nombre complexe z de module 1, il existe un unique réel
θ ∈ [−π, π[ tel que z = cos θ + i sin θ.

Preuve. Soit z = x + iy de module 1 i.e., x2 + y 2 = 1 ; ainsi x ∈ [−1, 1]. Il existe


donc α ∈ [0, π] tel que x = cos α. Comme y 2 = 1 − x2 = 1 − cos2 α = sin2 α, on a

73
6.3. Argument d’un nombre complexe

y = ± sin α = sin(±α). De la parité de la fonction cos, on a x = cos α = cos(±α).


Ainsi, z = x + iy = cos θ + i sin θ avec θ ∈ [−π, π[ (si z = −1, on prend θ = −π).
Montrons l’unicité d’un tel θ. Soit θ ′ 6= θ tel que z = cos θ ′ + i sin θ ′ . De l’égalité
cos θ = cos θ ′ , on déduit que θ = ±θ ′ . Puisque θ 6= θ ′ , on a forcément θ ′ = −θ ; on en
déduit sin θ ′ = sin(−θ) = − sin θ et donc cos θ ′ + i sin θ ′ = cos θ − i sin θ = cos θ + i sin θ,
ce qui est absurde car θ ∈ [−π, π[.

Corollaire 9. Pour tout complexe z 6= 0, il existe un réel θ ∈ [−π, π[ tel que

z = |z|(cos θ + i sin θ).


z
Preuve. Puisque z 6= 0, on a |z| =
6 0. Il suffit donc de considérer qi est de module 1
|z|
et d’appliquer la proposition 36.

On notera que si 0 6= z = |z|(cos θ + i sin θ) alors, pour tout k ∈ Z et tout θ ′ = θ + 2kπ,


on a z = |z|(cos θ ′ +i sin θ ′ ) ; cela tient au fait que cos(θ+2kπ) = cos θ et sin(θ+2kπ) =
sin θ.

Définition 56. Une réel θ est dit argument d’un nombre complexe non nul z si
z = |z|(cos θ + i sin θ) ; on note arg(z) = θ. Le réel θ sera dit argument principal du
complexe z s’il est argument de z et s’il appartient à l’intervalle [−π, π[.

Un nombre complexe a une infinité d’arguments, mais la différence entre deux argu-
ments distincts d’un même complexe sera toujours égale à 2kπ pour un certain k ∈ Z∗ .
Ainsi, si θ et θ ′ sont deux arguments d’une même complexe, on a θ = θ ′ mod 2π.

Proposition 37. Pour tous nombres complexes non nuls z et z ′ , on a :


a) arg(z̄) = − arg(z) mod 2π ;
′ ′
 )= arg(z) + arg(z ) mod 2π ;
b) arg(zz
z
c) arg ′ = arg(z) − arg(z ′ ) mod 2π ;
z
d) arg(zz ′ ) = arg(z) − arg(z ′ ) mod 2π.
z
 
Preuve. Puisque arg(z) = arg , on peut supposer que |z| = |z ′ | = 1.
|z|
a) Si z = cos θ + i sin θ, alors z̄ = cos θ − i sin θ = cos(−θ) + i sin(−θ) ; ainsi arg(z̄) =
− arg z mod 2π.
b) Si z = cos θ + i sin θ et z ′ = cos θ ′ + i sin θ ′ , alors

zz ′ = cos(θ) cos(θ ′ ) − sin(θ) sin(θ ′ ) + i sin(θ) cos(θ ′ ) + cos(θ) sin(θ ′ ) .


 

Or
cos(θ) cos(θ ′ ) − sin(θ) sin(θ ′ ) = cos(θ + θ ′ )

et
sin(θ) cos(θ ′ ) + cos(θ) sin(θ ′ ) = sin(θ + θ ′ ),

d’où
zz ′ = cos(θ + θ ′ ) + i sin(θ + θ ′ )

74
6.3. Argument d’un nombre complexe

et l’égalité
arg(zz ′ ) = arg(z) + arg(z ′ ) mod 2π.
z zz ′ z
 
c) On a ′ = ′ ′ , or z ′ z ′ = |z ′ |2 = 1. Ainsi, arg ′ = arg(zz ′ ) = arg(z) + arg(z ′ )
z zz   z
z
mod 2π. Puisque arg(z ) = − arg(z ), arg ′ = arg(z) − arg(z ′ ) mod 2π.
′ ′
z
d) Déjà démontré dans l’item (c).

Notation exponentielle
Considérons l’application Ψ de R dans U, l’ensemble de complexes de module 1, qui à
θ ∈ R associe cos θ + i sin θ. L’application Ψ est surjective, mais elle n’est pas injective
(considérer θ et θ + 2π).
La proposition suivante découle de la proposition 37, sa preuve est laissée en exercice.

Proposition 38. L’application Ψ vérifie les propriétés suivantes


a) Ψ(0) = 1 ;
b) pour tous θ, θ ′ ∈ R, Ψ(θ + θ ′ ) = Ψ(θ)Ψ(θ ′ ).

Remarque 21. Les propriétés listées dans la proposition ci–dessus sont vérifiées par
l’exponentielle réel, ce qui justifie la notation

eiθ = cos θ + i sin θ.

On vérifie notamment que pour tous θ, θ ′ ∈ R,


′ ′
— ei(θ+θ ) = eiθ eiθ ;
1
— iθ = e−iθ = eiθ ;
e ′
— eiθ = eiθ ⇐⇒ θ = θ ′ mod 2π ;
eiθ + e−iθ
— cos θ = Re(eiθ ) = ;
2

e −e −iθ
— sin θ = Im(eiθ ) = .
2
On notera aussi que tout complexe z s’écrit sous la forme z = |z|eiθ pour un certain
θ ∈ R. Cette notation est dite notation polaire ou trigonométrique ; rappelons que θ
et |z| sont dits respectivement argument de z et module de z.

75
6.3. Argument d’un nombre complexe

Exercices
Exercice 6.1.
√ !27  √ 4
7−i 1+i 3
1) Écrire sous la forme a+bi les complexes suivants u = √ ,v = .
1+i 3 (1 + i)3
2) Calculer in pour tout entier relatif n.

Exercice 6.2.
Soient x, y, a, b, u, v ∈ Z tels que x = a2 + b2 et y = u2 + v 2 . Montrer qu’il existe
s, t ∈ Z tels que xy = s2 + t2 .

Exercice 6.3.
1+z
1) Montrer que si z ∈ C est un complexe de module 1, alors i est réel.
1−z
2) Montrer que si z, z ′ ∈ C sont des complexes de module 1 tels que zz ′ 6= 1, alors
z + z′
est réel.
1 + zz ′
3) Déterminer l’ensemble de nombres complexes z tels que |z − i| = |z − iz|.

Exercice 6.4.
Soient un entier n > 2 et des complexes non nuls z1 , · · · , zn ∈ C. montrer que
n
X n
X
zk 6 |zk | .
k=1 k=1

Exercice 6.5.
Montrer que les applications de C vers R, ψ1 : z −→ Re(z) et ψ2 : z −→ Im(z) sont
des morphismes du groupe additif de C dans le groupe additif de R. Ces morphismes
sont-ils injectifs, surjectifs ?

Exercice 6.6.
Factoriser dans C le polynôme x4 +1 (indication : on commencera par une factorisation
dans R).

Exercice 6.7.

1) Calculer les racines carrées des complexes u = 17 + 12i et v = 7 + 14i.
2) Résoudre dans C les équations

z 2 + (1 + 2i)z + 25 + i = 0,

iz 2 + (1 + 7i)z + 2 + i = 0,

(2 + i)z 2 + (1 + 7i)z + 2 + i = 0.

Indications de solutions

76

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