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ET LE CHIRURGIEN
1
DU MÊME AUTEUR
Aux Éditions du Rocher
Guérir enfin du cancer. Oser dire quand et comment, 2010.
Cancer de la prostate. Enrayer l’épidémie et les récidives, avec le Dr Meng Hour
Hay, 2011.
tress et cancer du sein, 2011.
es abeilles et le chirurgien, 2012.
Changez d’Alimentation, 7e édition, 2013.
a pilule contraceptive. Les dangers, les nouvelles alternatives, avec Dominique
Vialard, à paraître.
e chocolat et le chirurgien, avec Jean Claude Berton, à paraitre.
2
Pr. Henri Joyeux
et Guillaume Bouguet
LE THYM
ET LE CHIRURGIEN
3
Tous droits de traduction,
d’adaptation et de reproduction
réservés pour tous pays.
www.editionsdurocher.fr
ISBN : 978-2-268-07523-5
ISBN epub : 978-2-268-08381-0
4
REMERCIEMENTS
5
AVANT-PROPOS
E
nfant, que de kilomètres parcourus dans les garrigues du
Sud de la France, avec mon père à la poursuite des
lièvres et lapins, des perdreaux et des cailles ! La
garrigue exhalait ses odeurs caractéristiques et surtout celle du
thym. Il guérissait déjà les égratignures des broussailles, qu’on
acceptait avec joie quand il fallait trouver la perdrix tombée du
ciel.
Mon père en ramenait toujours, quelques bottes dans sa
gibecière fenêtrée, pour relever les civets et parfumer les repas de
famille. Pendant les grandes vacances, une trentaine d’enfants de
tous les âges, personne n’était malade. À la moindre toux,
l’infusion de thym était prescrite sans ordonnance, consommée
par le petit malade et tout rentrait dans l’ordre.
Son odeur ne m’a jamais quitté.
C’est Guillaume Bouguet qui a ravivé mes souvenirs d’enfance.
Tout s’est passé au bloc opératoire tandis que je l’opérais sous
anesthésie locale. Pour le déstresser, je lui demandai de me parler
de ce qu’il faisait dans la vie. Sans s’en rendre compte, il a stimulé
ma mémoire olfactive. « Je suis – me dit-il – cueilleur et ingénieur
écologue spécialiste du thym, j’ai créé une boîte et je cherche à
valoriser les plantes aromatiques et médicinales des garrigues. »
Je lui ai immédiatement proposé de travailler ensemble pour
valoriser un de ces métiers qui était tombé dans l’oubli et de
m’instruire… Après Les abeilles et le chirurgien, nous allions
développer logiquement Le Thym et le chirurgien : « tu t’occupes
de tout l’aspect écologique, je m’occupe de la santé. » Accord
conclu sur un billard !
6
d’Écologie Fonctionnelle et Évolutive à Montpellier (UMR 5175
CEFE-CNRS). Depuis 2007 il se passionne pour la cueillette et
l’écologie des plantes aromatiques, en particulier du thym.
Il a créé en 2012 avec Philippe Gaultier et Sonia Augrain la
société Flore en Thym dont il est le président (www.flore-en-
thym.com). Devenu cueilleur professionnel de plantes
aromatiques des garrigues, il collabore avec le CEFE-CNRS pour
améliorer les méthodes de prélèvement afin d’assurer une
intégration harmonieuse de l’activité de cueillette dans
l’environnement méditerranéen. Sa thèse de sciences, Cueillette,
interactions mycorhiziennes et chémotypes de Thym, devrait
permettre d’améliorer les méthodes de prélèvement et les
processus de revégétalisation en zone méditerranéenne.
Le thym en effet est une des plantes aromatiques et
médicinales les plus utilisées et les plus étudiées, avec des milliers
de recherches.
La première étude scientifique qui a démontré le
polymorphisme chimique du thym date de 1963, il y a juste
cinquante ans, et a été publiée par des chercheurs de la Faculté
de Pharmacie de Montpellier. Elle a été relayée au début des
années soixante-dix par le laboratoire du CEFE, qui ne cesse de
chercher et de publier les articles fondamentaux qui permettent
de mieux connaître cette plante exceptionnelle.
À un moment où la santé est devenue le souci numéro un des
familles, où la phytothérapie est remise à l’honneur face aux abus
des laboratoires pharmaceutiques, le thym, « les thyms » du
Languedoc-Roussillon ont toute leur place dans les thérapeutiques
à la fois les plus écologiques et les plus économiques.
Ce livre à quatre mains est une ode à la biodiversité et à la
santé que peuvent nous procurer toutes les vertus médicinales
des thyms de chez nous.
7
PRÉFACE
SAVOIR-FAIRE
ET CONNAISSANCE SCIENTIFIQUE
L
’homme et la plante, quelle histoire ! En région
méditerranéenne c’est une histoire vieille comme les
civilisations humaines qui se sont sédentarisées pour
cultiver et domestiquer les plantes céréalières, les arbres fruitiers,
les légumes et les fleurs. C’est une histoire rythmée par les
transformations des plantes pour l’usage ; les roseaux ou d’autres
cannes en armes pendant les guerres des civilisations anciennes
en sont une illustration parmi tant d’autres. C’est aussi une
histoire de savoir-faire associé aux propriétés chimiques des
plantes. C’est cette histoire de plantes aromatiques que Henri
Joyeux et Guillaume Bouguet nous reconstituent avec l’œil pour le
plus petit des détails. Parmi la grande diversité de plantes
aromatiques qui ont enrichi notre savoir-faire, les auteurs en ont
choisi une en particulier, le thym, qui n’a jamais cessé d’être au
cœur des usages.
C’est d’abord cette histoire associée aux plantes aromatiques
qu’ils nous décrivent. Pour les auteurs, la présence des garrigues
odoriférantes et l’implantation d’une École de médecine ont
permis, dès le XIIIe siècle, l’émergence d’un savoir-faire dans le
domaine des préparations médicinales dans la ville de Montpellier.
Mais aussi, dès cette époque, autour de l’ambitieux Jacques Cœur
qui a installé son comptoir dans la ville, un certain nombre de
gens commencent à regarder vers l’Est en vue de développer un
commerce qui intègre des usages des plantes venant de partout
en Méditerranée. Odeurs et épices commencent ainsi à parfumer
la ville. La médecine, la cuisine, la parfumerie… entre santé et
commerce la ville de Montpellier était déjà en plein essor. Ainsi on
apprend dans ce livre que les plantes aromatiques auraient
largement contribuées au développement de la renommée de
8
Montpellier en matière de santé. La richesse des plantes
conditionnait une diversité impressionnante d’usages et de savoir-
faire.
L’étonnante diversité de plantes aromatiques qui caractérise la
région méditerranéenne est en effet au cœur du récit. Parmi cette
richesse, une plante, le thym, espèce typique des garrigues du
Midi, est prise pour cible par les auteurs. Non sans raison. Au sein
de cette espèce il existe une diversité surprenante de fragrances
qui a fait du thym une plante très utile pour l’homme. On apprend
que chez cette seule espèce il existe des types chimiques, ou
chémotypes, très distincts. Chaque chémotype possède sa propre
odeur et fragrance, et peut avoir alors des usages différents.
L’odeur vient de l’huile essentielle produite par les plantes et
gardée dans des toutes petites structures qui émaillent les
feuilles. Cette huile remplit de nombreuses fonctions
indispensables à la survie des plantes. Dans la nature, les
molécules qui permettent de distinguer les chémotypes ont aussi
des fonctions différentes, par exemple, vis-à-vis la tolérance aux
gels, amis aussi pour l’attraction de pollinisateurs, la résistance
aux herbivores divers et variés (escargots, chenilles, …) et dans la
protection contre des petites mouches, des bactéries, des
champignons. Certains chémotypes résistent bien aux attaques
des mouches, d’autres aux escargots et encore d’autres aux
champignons. Autrement dit, ce n’est pas toujours le même
chémotype qui résiste le mieux partout, c’est la diversité qui
compte ! La biodiversité est faite de telles interactions, qui
inspirent parfois l’homme dans ses usages des plantes.
Ce livre nous fait découvrir cette fascinante diversité de
fonctions, d’interactions et d’usages, qui vont même jusque dans
nos assiettes lors de grands repas. Les auteurs prolongent
l’histoire à nos jours pour nous faire découvrir comment les
chercheurs en écologie, qui en étudiant les changements de
l’abondance des différents chémotypes autour du Pic Saint-Loup
depuis les années 1970, ont adopté le thym en tant que bio-
indicateur des changements climatiques en cours.
9
longtemps été aussi un modèle parfait pour l’étude des
adaptations des plantes au milieu méditerranéen. Tout au long de
l’histoire, c’est la connaissance des plantes qui détermine notre
savoirfaire. On se gardera bien de ne pas l’oublier.
John D. Thompson
Directeur de recherches, CNRS
Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive
Montpellier, mars 2013
10
Première partie
11
La Nature se suffit.
Hegel
12
1
I
l y a un millénaire, évidemment, la médecine n’était pas
très évoluée. On soignait avec les moyens du bord. Déjà
nos aïeux avaient remarqué les vertus de ce que la nature
mettait à leur disposition. Dans le Midi, sur les coteaux arides des
garrigues méditerranéennes on ramassait, stockait, déterrait et
plantait dans les plus petits jardins ces petits arbrisseaux
odoriférants aux fleurs finement teintées, de blanchâtres à
pourpre pâle : le thym.
Dans le langage des fleurs, il signifie « rester pré-sent dans les
souvenirs » ou « émouvoir ».
Les Sumériens l’auraient utilisé à des fins thérapeutiques il y a
plus de cinq mille ans. Les Égyptiens et les Étrusques
embaumaient leurs morts avec la propolis qui tapissait les ruches
des abeilles, laquelle était parfumée de thym.
Les Grecs parfumaient les temples et l’eau des bains en
brûlant les rameaux. Dans la mythologie grecque, le thym serait
né d’une larme versée par Hélène lors de la Guerre de Troie, et
transformée par les Dieux en plante bénie. Voilà pourquoi il
symbolisait le courage. La déesse Hécate en profitait pour son
culte1 et le médecin et botaniste Dioscoride, dès le premier siècle,
le conseillait à ses patients2.
13
militaires prenaient un bain au thym. Pour mieux dormir ils en
emplissaient leurs couches. Dans la Rome antique, les dames
brodaient une branche de thym entourée d’abeilles sur les
écharpes des guerriers.
14
2
15
dernières trouvailles de la médecine qui accueillait des patients de
partout.
Les Guilhem, avisés et entreprenants, profitèrent de cet atout
pour développer la puissance commerciale de la ville en obtenant
des privilèges royaux.
La présence toute proche de garrigues odoriférantes,
abondamment parsemées de plantes aromatiques et médicinales
d’une qualité exceptionnelle constitua également un atout majeur
pour le développement de la ville. Le thym, le romarin et la
lavande formaient le trio emblématique gagnant parmi toutes les
plantes naturellement disponibles.
Au XIIe siècle, Montpellier est une ville cosmo-polite, où le
commerce prospère. On y trouve une grande diversité de matières
premières provenant aussi bien des garrigues que d’Orient. La
ville devenue un lieu favorable aux échanges matériels et
intellectuels accueille en son sein le premier noyau d’un centre
médical composé d’un certain nombre d’écoles particulières.
Attestée dès 1150 par un édit du Seigneur Guilhem VIII,
l’École de Médecine renforce le partage des connaissances et
permet l’émergence de savoir-faire uniques notamment dans le
domaine des préparations : parfums et eaux de senteur,
cosmétiques et médicaments.
Le Cardinal Conrad, légat du pape Honorius III reconnaît en
1220 l’École de Médecine de Montpellier qui rend raduc l’Edit de
Guilhem VIII. Elle obtient dès lors le monopole de l’enseignement
de la pratique de la Médecine. La Cour pontificale d’Avignon
proche de Montpellier augmente évidemment le rayonnement de
l’École de Médecine et en 1229 le Languedoc est enfin rattaché au
Royaume de France.
L’Évêque de Maguelone devient Chancelier des Écoles en 1242
et l’Université de Montpellier est créée le 26 octobre 1289 par la
Bulle Papale « Quia Sapientia » de Nicolas IV (189e Pape (1288 –
1292) qui en fait un Studium generale pour toutes les études de
médecine, lettres et théologie.
L’université est relativement indépendante du pape et du roi.
Celui-ci ne crée qu’un Collège royal, doté de quatre maîtres de
médecine seulement. Elle jouit d’un grand prestige, notamment
pour la médecine, réputée pour accueillir en très bonne entente
16
les médecins des trois religions monothéistes, elle reste très
attachée au père de la médecine Hippocrate, s’opposant à toutes
les autres écoles de médecine à l’état embryonnaire3.
Considéré comme un des plus fameux médecin de son siècle,
Arnaud de Villeneuve ou Arnau de Vilanova (1238-1311 ou
1313) fut non seulement médecin mais aussi alchimiste,
théologien et même astrologue, trilingue avec le latin, l’hébreu et
même l’arabe. À Montpellier où il se fixe, toute l’Europe vient
entendre ses enseignements en médecine et chirurgie.
Il est considéré comme le plus éminent médecin de son siècle.
À Montpellier où il se fixe, toute l’Europe vient entendre ses
enseignements en médecine et chirurgie. Parmi ses patients, on
compte trois papes et trois rois.
Il se consacre notamment à l’étude de la distillation. Les effets
excitants de l’alcool lui inspirent le nom « d’eau de vie » pour
désigner le produit obtenu par la distillation du vin. Puis en y
mêlant des plantes aromatiques, il obtient diverses eaux
spiritueuses ou de senteur employées en médecine et en
cosmétique.
17
Les « especiayres » confectionnent collyres et pilules, des
tablettes, des poudres, huiles et onguents, emplâtres et opiats,
cérats et mellites des ruches sauvages et artisanales, des
électuaires5, des trochisques6, des loochs7.
18
« Mont des Pucelles » ou des « Trois vierges » ou encore le
« mont du Pastel ».
3. Paris n’aura son école de Médecine que bien plus tard en 1460
par une Bulle du pape suivant Nicolas V datée du 23 mars. Ce
pape était lui même fils de médecin, diplômé de l’Université de
Bologne, il fonda la Bibliothèque Vaticane.
4. Le nom d’« especiayres » provient de la langue d’Oc. Ce terme
ne possède pas de traduction littérale en français, il désigne un
mélange entre le métier d’épicier et celui d’apothicaire.
5. Préparation pharmaceutique de consistance molle, composée
de poudres et de substances diverses incorporées à du miel ou à
un sirop.
6. En vieux français une « forme de remède, faite pour être tenue
dans la bouche et s’y dissoudre peu à peu ». L’équivalent actuel
de la dragée ou tablette ou pastille.
7. Nom d’origine arabe donné autrefois à des médicaments dont
on enduisait des bâtons de réglisse effilés en pinceau pour qu’ils
fussent sucés lentement, utiles pour « exciter l’expectoration »,
adoucissant des maladies de poitrine…
19
3
De tout côté, dans les boutiques, on pilait des épices. La rue était
au loin embaumée de ces aromates, dont la vertu suave eût pu
rappeler à la vie un mourant.
T
outes ces compositions minutieuses nécessitent de
nombreuses et savantes manipulations ainsi qu’une
importante surveillance ; c’est pourquoi certains
« especiayres » ne souhaitent pas pratiquer ces transformations,
se contentant de la fonction d’épicier.
À défaut d’école spécialisée, les savoirs et savoirfaire sont
transmis de génération en génération dans les familles
d’« especiayres ». Cette corporation montpelliéraine, dont
quarante-cinq membres furent recensés au XIIIe et au XIVe siècle,
jouissent alors d’une grande renommée, dépassant de loin les
frontières de la région.
En témoigne la promotion de Robert de Montpellier, qui acquit
à Londres une maison et divers magasins en 1246 et même une
officine située entre la cathédrale Saint-Paul et l’église Sainte-
Marie-le-Bow. En 1262, il fut nommé un des deux sheriffs (préfets
de Londres). Il mourut en 1278. Un autre Montpelliérain, Pierre de
20
Montpellier, devint « apothicaire » du roi d’Angleterre Édouard III,
qui régna entre 1327 et 1377…
21
discipline d’une très grande renommée : Marguerite de Provence,
alors épouse du roi saint Louis, se parfumait avec l’eau de rose de
Montpellier.
22
En retour, la Compagnie des Maîtres apothicaires fait
démonstration des drogues aux « écoliers » en médecine.
Les maîtres apothicaires, plus cultivés et mieux instruits,
constituent rapidement une corporation bien organisée et d’une
impressionnante renommée, si bien qu’entre 1574 et 1736, pas
moins de 2 282 compagnons apothicaires, de toutes origines, sont
inscrits à Montpellier. Ils y suivent des enseignements uniques,
aussi bien théoriques, comme la chimie, que pratiques, comme la
préparation de la célèbre Thériaque.
Soulignons enfin que la corporations des apothicaires a mis en
place divers rituels (costume, cérémonie de remise de diplôme…)
pour bien montrer son appartenance à l’École de Médecine et se
placer au-dessus des simples marchands.
23
ne contiennent pas du thym, mais cette plante est toujours
présente chez l’apothicaire de l’époque.
Il est à noter que la quantité de produits contenue dans une
boutique d’apothicaire différait nettement entre la ville et la
campagne : les apothicaires citadins disposent de beaucoup plus
de produits que les apothicaires des campagnes7.
24
devant leurs pairs qui accordent le diplôme, des chirurgiens dits à
robe courte ou barbiers, auxquelles restent les interventions
minimes.
4. Le statut d’apothicaire s’obtenait après deux stages
successifs : l’apprentissage (initiation) et le compagnonnage
(perfectionnement). À Montpellier, on exigeait une période
d’apprentissage de sept ans à la fin du XVIe siècle, puis de
trois ans à partir de 1731. La durée du compagnonnage était
du même ordre, mis à part que les compagnons allaient de ville
en ville pour apprendre dans chacune d’elles les diverses
méthodes de ce que l’on appelait déjà au XVIe
siècle « l’art de la pharmacie » Les statuts d’apothicaire ont joué
un grand rôle dans l’évolution de la profession, faisant passer le
métier de « mécanique » à métier d’« art ».
5. Souhaitant développer la santé par les plantes, le roi Henri IV
confia à Pierre Richer de Belleval la création d’« un jardin pour y
mettre les simples et toutes sortes de plantes que l’on pourra
recouvrer, tant estrangères que domestiques » (Lettre patente du
8 décembre 1593, rédigée par Henri IV).
6. Au XVIIe et XVIIIe siècle, l’Orviétan est l’antidote le plus utilisé. Il
serait du à un certain natif d’Orviéto Jérôme Ferrante et d’un
autre natif du même lieu qui se fit appeler d’abord Lorvietano,
puis Lorviétan ou l’Orviétan. Vingt-sept ingrédients composaient la
substance dont le fameux Miel de Thym des Corbières. Molière
le cite comme une panacée dont il se moque : « Holà ! Monsieur,
je vous prie de me donner une boîte de votre orviétan, que je
m’en vais vous payer », dit Sganarelle dans L’amour médecin
(acte II).
7. Bourdiol (voir bibliographie) nous apprend que les apothicaires
des campagnes disposaient souvent d’une deuxième
compétence : celle de chirurgien. Il faut imaginer les transports à
cette époque ! En 1390 existaient à Beaucaire quatre barbiers,
tandis qu’aucun médecin n’était répertorié.
25
4
M
alheureusement, la prospérité de l’apothicairerie attise
la convoitise des coquins. Les fraudeurs ne tardent pas
à se multiplier, comme le dénonce le témoignage
suivant en 1626 : « Ces simples charlatans qui ne font point de
difficulté de rançonner pour quelques petits remèdes… et qui
dressent de petites tasnières, je veux dire des boutiques, à tout
bout de champ et de petits villages et lieux puants. »1
Le cas de la foire de Beaucaire2, qui se tint chaque année
durant six jours à la fin du mois de juillet entre le XIIIe et le XIXe
siècle, est à ce sujet tout à fait intéressant.
Bénéficiant de la franchise douanière ainsi que de la liberté
d’accès et de trafic, la foire de Beaucaire devient rapidement un
haut lieu de commerce en France et en Europe. Elle est
fréquentée par de très nombreux visiteurs (souvent près de deux
cent mille) venant de tous les pays d’Europe et des bords de la
Méditerranée.
Pour Jean-Marie Mercier, conservateur du musée de Beaucaire,
« au début du XVIIIe siècle, Beaucaire grâce à sa foire est
considérée comme l’une des plus importantes places financières
du royaume et de l’Europe, aux cotés de Francfort et de Leipzig ».
Un Beaucairois écrit : « Il nous vient des marchands de l’autre
hémisphère et il ne nous manque certainement plus que d’y voir
quelques habitants de la lune. » « Elle tint un des premiers rangs
dans la république des lettres » et « la célébration fraternelle des
mânes de Bacchus » n’était pas oubliée avec « le repas de la
26
grappe donné par le prieur de Beaucaire ». « On buvait la razade
en chanson. » Les drogues dites « médicinales » y sont à foison,
aves les épices, les aromates et même des diamants. Le thym des
garrigues languedociennes est présent partout. Il embaume les
espaces mélangés à toutes les senteurs de l’Orient.
Rabelais dans ses vies de Gargantua et de Pantagruel cite la
foire de Beaucaire « vers laquelle y convenoyent les plus riches et
fameux marchands d’Africque et d’Asie ». De passage à Istanbul,
un pasteur nîmois décrit le grand bazar de cette ville comme
« une sorte de Beaucaire en permanence ».
Dans cet immense bazar de l’Occident se mélangent les Juifs
du Comtat Venaissin (dits Comtadins), les Grecs, les Turcs et les
Arméniens3, jusque dans les années 1830, où elle commence à
décliner. Stendhal en 1837 dans Mémoires d’un touriste, ou
Mistral, dans le Poème du Rhône, en parlent désormais avec
nostalgie et fierté.
Au milieu du XVIIIe siècle, le montant des affaires traitées à
la foire de Beaucaire est considérable, puisque d’après J. Caillé il
s’élève à « 40 ou 41 millions de livres, soit plus de 160 millions de
nos francs de 1970 ». Les apothicaires montpelliérains y tiennent
boutique jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, où ils proposent quelques
compositions en nombre limité (le Thériaque).
Leurs produits sont grandement appréciés des acheteurs, car
« garantis » par l’École de Médecine de Montpellier, dont plusieurs
représentants surveillent la phase de préparation et délivrent
ensuite des certificats pour attester de la régularité des
opérations.
Toutefois lieu d’exportation renommé, cette foire devient
également le foyer d’une importante fraude : « C’est là que les
principaux droguistes de tout les pays achètent à des prix qui
démontrent la fraude la plus criminelle, toute sorte de
préparations de pharmacie et de chimie ; et nous nous voyons
forcés par la vérité, de dénoncer ici beaucoup de maîtres
apothicaires des environs, qui se rendent annuellement
coupables, en portant à cette foire des préparations dont le plus
grand mérite, après le prix très avantageux à l’acheteur, consiste à
réunir souvent toutes les apparences du meilleur médicament ; et
cela quelquefois à un tel degré de perfection, qu’il serait
27
impossible de les soupçonner de falsification, sans la considération
du vil prix auquel elles sont livrées. »
Conscients et soucieux de leur réputation, les apothicaires de
Montpellier tentent d’agir pour que leur profession ne soit pas
déshonorée par les charlatans, notamment en déléguant des
collègues pour assurer le contrôle des préparations et en
dénonçant les falsificateurs. Mais ces mesures n’empêchent pas le
commerce parallèle de se développer, puisqu’il était depuis
toujours toléré, sans le moindre contrôle, au sein de la foire de
Beaucaire.
Fraude et dumping sont encore aujourd’hui bien connus. Le
plus ancien est le dumping fiscal qui consiste à réduire l’imposition
de ceux qui se débrouillent pour être proches du pouvoir ou qui
ont le pouvoir. Il fonctionnait à Beaucaire pour les protégés du roi.
Les liens entre Beaucaire et Barcelone furent étroits. Entre
1730 et 1789, l’accroissement général du mouvement des affaires
est de près de 400 %. La foire devient « le thermomètre du
commerce intérieur ». Beaucaire attire « dans ses murs et sur les
rives du Rhône des dizaines de milliers de marchands, visiteurs,
curieux, drainant dans leur sillage tout un monde interlope, formé
de gens sans aveu, mendiants, voleurs, aventuriers et filles
faciles »…
En 1793 sous la Terreur, le capitaine Napoléon Bonaparte4 est
envoyé dans le Midi, et notamment à Toulon, par le
gouvernement pour réprimer les révoltes locales. Son passage à
Beaucaire laisse des traces. Conversant avec quatre marchands de
la région, il dit être parvenu à dissiper toutes leurs craintes. Cette
conversation fut ensuite éditée sous forme d’une conversation en
un petit pamphlet, appelant à la fin de l’insurrection.
28
1. Témoignage de Jean de Renou qui fut conseiller et médecin du
roi Henri IV. Nous remarquons l’utilisation du terme
« pharmaceutique » dans le titre de son ouvrage œuvres
pharmaceutiques, en 1626.
2. Du nom de Belcaire, « beau château », sur les rives du Rhône
– magnifique voie de distribution des marchandises. Beaucaire est
la première sénéchaussée royale du Midi en 1226, relevant du
seul roi de France.
3. On les distingue à la couleur de leur turban : jaune safrané
pour les Juifs, bleu bigarré de blanc et de rouge pour les
Arméniens, blanc pour les Musulmans, bleu pour les Grecs.
4. Un certain souper, servi dans une de ces auberges de fortune le
dernier soir de la foire de 1793, sera l’occasion inespérée pour le
jeune capitaine Bonaparte de proclamer ses convictions
montagnardes, en réponse à l’agitation fédéraliste, et d’entrer
ainsi dans l’histoire.
29
5
L
es apothicaires conservent depuis le temps des
« especiayres » des savoir-faire en matière de confection
de parfums, comme nous le rapportait M. Leblanc en
1669 : « Les boutiques des apothicaires sont tout à fait belles et
parfumées, remplys de sirops, particulièrement celuy de Capillaire,
d’Eaux de Reyne dongrie […], poudre de Chypre, des liqueurs et
parfums de toutes sortes de toilette, sachets de senteur et de
mille autres sortes de choses. »
Au fil des siècles les marchands d’eaux et de poudres
odoriférantes deviennent fort nombreux à Montpellier :
distillateurs, droguistes, gantiers, limonadiers, liquoristes,
barbiers-perruquiers, baigneurs-étuvistes, merciers, vendeurs
d’étoffes et de rubans.
À partir de la deuxième moitié du XVIIe siècle, les apothicaires
s’éloignent de la préparation des parfums pour se concentrer
pleinement à celle des médicaments.
La parfumerie se délivre alors doucement de la « tutelle
hiérarchique » imposée par les apothicaires pour devenir une
discipline à part entière, si bien qu’entre 1669 et 1723, quatorze
titres de « Maître Gantier-Parfumeur » sont officiellement
attribués à des Montpelliérains.
Dès la fin du XVIIe et au XVIIIe siècle, les échoppes de
parfumeur fleurissent un peu partout dans les rues du quartier
Ouest de Montpellier. À partir de 1738, la présence d’une centaine
de parfumeurs (en comptant le père, la veuve qui prend la relève
au décès de celui-ci, puis le fils) sont ainsi recensés dans la ville.
Parmi eux, notons la présence de véritables dynasties connues
au-delà des frontières languedociennes et dont la réputation est
30
parvenue jusqu’à nous. Par exemple, la famille Fargeon, dont le
plus illustre membre est très certainement Jean-Louis Fargeon,
qui devint parfumeur officiel de Marie-Antoinette.
Les marchandises proposées par les parfumeurs sont très
diverses : « Eau de la Maréchale, de rose, de coriandre, de
tubéreuse, de girofle, de fleurs d’oranger, de noyer, de lavande, de
bergamote, de jasmin… Huile de cédrat, d’aspic, de girofle,
d’anis… Esprit de menthe, de noyau, de citron, d’angélique,
d’orange, de marasquin, de framboise, de genièvre… Essence de
thym, de citron, de lavande… Infusion de citron, de vanille, d’iris
de Florence… Vinaigre de toilette, pommade à la frangipane,
graines d’ambrette… Poudre de millefleurs, d’ange, de Chypre, à
la violette, à la frangipane… Crème de rose, de cédrat, de
cannelle, aux ” herbes fortes ”, de menthe… »
Enfin, rappelons, même si elle ne contient que du romarin,
l’une des plus anciennes et célèbres spécialités de Montpellier :
l’eau de la Reine de Hongrie, le plus ancien parfum connu à base
d’alcool.
31
la concurrence déloyale. De nombreux marchands se
revendiquent sciemment ou inconsciemment parfumeurs sans
disposer de la maîtrise, engendrant des soucis de fraude. La mise
en place d’arrêtés royaux qui taxent excessivement les produits1
suscite de vives réactions de la part des corporations locales.
En effet, les parfumeurs montpelliérains, sûrs de leur bon
droit, se mobilisent pour défendre leur activité et en particulier
pour éviter la taxation des produits à base de thym, de
lavande et de romarin, qui ont largement participé à leur
prospérité. Toutefois, malgré leurs nombreuses tentatives, les
parfumeurs n’ont pas gain de cause auprès du Roi et l’arrêté royal
du 30 décembre 1755 porte en quelque sorte le coup de grâce à
la parfumerie montpelliéraine. Bon nombre de dépôts de bilan et
de faillites touchent alors la profession, tandis que certains
parfumeurs préfèrent quant à eux déserter la ville.
32
6
L
es produits montpelliérains sont de plus en plus taxés,
tandis que les parfumeurs grassois bénéficient de la
faveur royale, du fait du rattachement de la Provence à la
France au XVIe siècle, ce qui leur permet de vendre aisément leurs
produits sur Paris.
Le joli livre publié en juin 2008 par la maison Fragonard, du
nom du fameux peintre Jean-Honoré Fragonard (1732-1806)
d’origine grassoise, précise : « La demande croissante de produits
parfumés, stimulée par l’importante Faculté de pharmacie de
Montpellier, et pour lesquels la France dépendait de son voisin
transalpin, est à la base du développement de la production de
matières premières de parfumerie à Grasse. »
Il est à noter que la famille Fargeon joue très certainement un
rôle important dans le développement de la ville de Grasse. En
effet, au moment où le commerce des parfums ralentit à
Montpellier, Jean-Louis Fargeon part s’installer à Paris, tandis que
son frère Joseph-Mathieu part s’allier avec les grands négociants
et parfumeurs grassois.
La distillation d’essence parfumée perdure tout de même
autour de Montpellier, où l’on dénombre encore six distilleries
sédentaires dans la deuxième moitié du XIXe siècle. À côté de ces
installations à l’appareillage élaboré, il existe également de
nombreuses petites unités nomades, précaires, installées dans un
coin abrité à proximité d’un point d’eau. Elles appartiennent
presque toutes aux négociants ou fabricants de la ville, qui les
louent aux paysans.
Mais ces installations vagabondes au matériel facile à déplacer
font l’objet de toutes sortes de plaintes : elles dégagent de la
33
fumée, des odeurs et des risques d’incendie. Force est donc aux
distillateurs/fabricants d’installer des distilleries sédentaires. La
moitié d’entre eux vendent leurs produits à Montpellier qui se
charge aussi des expéditions. Les autres vendent aux grands
fabricants du Var et des Alpes-Maritimes, participant ainsi à la
prospérité de Grasse.
La parfumerie montpelliéraine perdure jusqu’au milieu du XXe
siècle, notamment grâce à la famille Monternier, dernier grand
représentant de cette industrie jadis florissante.
Il est à noter que l’effondrement de l’industrie de la parfumerie
montpelliéraine engendre logiquement de grandes difficultés dans
d’autres secteurs d’activité, notamment la verrerie, car les
parfumeurs de Montpellier consommaient de grandes quantités de
flacons, qui provenaient des verreries situées en garrigues.
34
7
C
ontrairement au terme pharmacie dont les premières
utilisations remontent au MoyenÂge, la création du
terme pharmacien est beaucoup plus tardive.
Elle est révélée clairement grâce à un cahier appartenant à un
étudiant de l’École de Médecine de Montpellier. Les notes prises
par cet étudiant sont datées d’avril 1615 et concernent des cours
donnés par le professeur Catelan.
On apprend là une théorie des « menstrues » et de la
« copulation charnelle », l’explication du bâillement et de la
rotondité de la tête, mais le plus intéressant c’est que le tout est
placé dans une rubrique intitulée Questions pharmatiènes. Cet
adjectif forgé à partir du mot « pharmacie » est ensuite
substantivé lorsqu’il concerne les personnes. Le pharmacien est
alors celui qui a une compétence en pharmacie, l’apothicaire est le
diplômé.
À la fin du XVIIIe siècle, à la demande du Comité de salubrité
publique, institué au sein de l’Assemblée Constituante, les
apothicaires montpelliérains remettent un cahier de doléances
dans lequel ils dressent le constat suivant à propos de leur
profession : « personnages sans titre qui tiennent les bureaux de
remèdes ; droguistes exécutant des ordonnances et vendant à
petits prix ; gestion des apothicaireries hospitalières par des
sœurs non qualifiées dans ce domaine ; abus par les veuves de
pharmaciens confiant la gestion de leur officine à des élèves non
confirmés ; abus de vente de remèdes comme les grandes
compositions (Thériaque, confection d’Alkermès…) souvent
adultérés et donc à bas prix à la foire de Beaucaire. »
Dans leur cahier de doléances, les maîtres font les propositions
de réformes salutaires suivantes : « (a) Proscription de l’exercice
35
de la pharmacie par toute personnes étrangère à la profession ;
(b) Abolition des privilèges touchant les remèdes secrets ; (c)
Prohibition de vente à petits poids de toute drogue médicinale par
les droguistes ; (d) Obligations pour les médecins de dater et de
signer leur ordonnance qui doit être écrite en latin ; (e) Obligation
de prépa-ration publique de toute composition afin d’éviter les
falsifications ; (f) Vente par les pharmaciens des eaux minérales ;
(g) Gestion gratuite des apothicaireries des hôpitaux et des
œuvres de charité par les pharmaciens ; (h) Nécessité d’une
réglementation pour les cas particuliers des veuves de
pharmaciens ; (i) Nécessité d’uniformiser les poids et mesures sur
tout le territoire ; (j) Ainsi que la formation des futurs
pharmaciens. »
Pour aller plus loin dans leurs propositions et assurer la mise
en place des réformes, les apothicaires proposent l’établissement
d’une école ou d’un collège pour l’éducation uniforme des élèves.
S’en suit une restructuration de la profession, avec en 1791
l’abolition des maîtrises d’apothicairerie pour toute la France, puis
via la loi du 21 Germinal de l’an XI (11 avril 1803), la création
d’écoles de pharmacie à Paris, Strasbourg et Montpellier, ainsi que
la mise en place de diplômes de pharmaciens. Le projet des
apothicaires montpelliérains se voit ainsi en partie réalisé.
La loi de 1803 est d’une importance majeure, car elle permet à
l’apothicairerie de se différencier définitivement de toutes les
autres professions qui vendaient des drogues et lui faisaient
jusque-là concurrence.
36
Les herboristes sont également contraints de ne vendre que
des plantes médicinales indigènes, le commerce des plantes
exotiques et/ou vénéneuses leur est dorénavant interdit par
l’Arrêté du 25 Thermidor de l’an XI (13 août 1803).
Malheureusement, malgré ces mesures, de nouveaux conflits
opposent pharmaciens et herboristes. La raison de ces conflits : la
délimitation des prérogatives des herboristes.
Au début du XXe siècle, le commerce de l’herboristerie est
presque nul à Montpellier, alors qu’il est prospère à Nîmes. Cette
prospérité s’explique par la présence de la voie ferrée reliant
Clermont-Ferrand à Nîmes, qui dévie le courant d’affaires
qu’entretenait Montpellier avec la région montagneuse des
Cévennes (Aveyron, Lozère…).
Mais aussi, parce que les coutumes locales héraultaises et
gardoises sont différentes. En effet, les Héraultais s’adressent plus
volontiers aux pharmaciens qu’aux herboristes, alors qu’à
l’inverse, comme observait L. Planchon en 1896 : « Les habitants
de la ville [Nîmes] et surtout de la campagne [gardoise] viennent,
de longue date, chercher les drogues du pays dans les boutiques
d’herboristerie dont quelques-unes sont fort anciennes. »
Pourtant, malgré l’attachement des populations à leurs
coutumes locales, diverses tentatives pour fixer le statut des
herboristes, ainsi que la mise en place d’un encadrement et d’un
enseignement scientifique de la profession, le diplôme
d’herboriste est supprimé par la loi du 11 septembre 1941 sous la
pression certainement d’un pré-ordre des médecins. L’Ordre de
pharmaciens ne sera créé que quatre ans plus tard.
Cette décision condamne dès lors la profession d’herboristes à
disparaître au fur et à mesure du décès de ses représentants.
Enfin, face au renforcement de la concurrence espagnole
produisant des produits à meilleur marché et au développement
de la chimie de synthèse, le commerce de l’herboristerie
s’effondre encore un peu plus.
37
CONCLUSION
38
Deuxième partie
Biologie
et Écologie du thym
39
1
Description botanique
40
Thymus vulgaris L., aussi appelé farigoule (de l’occitan
farigola), frigoule ou encore pote, est un petit ligneux buissonnant
(5-60 cm), possédant un feuillage variant d’un vert blanchâtre à
grisâtre. La section de ses jeunes tiges est quadrangulaire, puis
circulaire lorsqu’elles sont plus âgées. Portées par des pétioles
courts, les feuilles sont petites, de forme lancéolée à ovale (3-
8mm de long et 0,5-2,5mm de large) et présentent une nervure
centrale marquée et des bords enroulés. Les feuilles, les calices et
les jeunes tiges sont recouverts de poils. Les fleurs peuvent être
de couleur blanchâtre à pourpre pâle. Elles sont regroupées en
inflorescence sur la partie terminale des axes longs. Les fruits,
groupés par quatre, sont secs et indéhiscents (c’est-à-dire qu’ils
ne s’ouvrent pas).
Chaque espèce se caractérise par une architecture
particulière, c’est-à-dire la façon dont le tronc et les branches se
répartissent dans le temps et dans l’espace. Thymus vulgaris
possède trois catégories de branches (aussi appelés axes) : le
tronc (A1), les branches (A2) et les rameaux courts (A3). Le
nombre et les propriétés (morphologiques et fonctionnelles) de
ces catégories de branches sont caractéristiques à l’espèce (cf.
tableau 1). L’ensemble de ces axes et leurs propriétés constituent
ce que l’on appelle l’unité architecturale (figure 2, schéma A).
41
– Premier stade (A) : l’unité architecturale
Cette étape correspond au moment où le thym a mis en place
son unité architecturale. Il possède donc toutes ses catégories
d’axes.
– Second stade (B) : l’individu mature
42
Durant cette partie de son développement le thym a entamé
un processus de réitération totale4. C’est ainsi qu’apparaissent
les branches maîtresses de l’individu. Ces dernières sont pérennes
à long terme et constituent les axes structurants de l’individu.
– Troisième stade (C) : l’individu âgé
À ce stade, les branches maîtresses du thym s’individualisent
par le biais d’une scission longitudinale au niveau du tronc. Une
fois séparées de la plante mère, ces branches, appelées des
torons, forment des individus complètement autonomes. À ce
stade, la plante présente une structure plus ou moins « éclatée »,
formée par l’ensemble des torons séparés.
43
épithète désignant l’espèce à l’intérieur du genre. Dans le cas du
thym commun le nom de genre est Thymus et l’épithète est
vulgaris. Le nom scientifique d’une plante est validé via une
publication comprenant le binôme choisi, une description de la
plante en latin et la citation d’un échantillon conservé dans un
grand herbier officiellement répertorié. Une fois qu’il a été validé
qu’aucun autre nom déjà existant ne peut s’appliquer à la plante
décrite, l’espèce est alors désignée par le binôme suivi du nom de
l’auteur de la publication. Dans le cas du Thym vulgaire, l’auteur
de la première publication à son sujet fut le célèbre Linné, dont le
nom est abrégé par la lettre L.
2. Les lamiacées sont des plantes herbacées ou arbustives (très
rarement des arbres) dont les jeunes tiges sont à section
quadrangulaire. Elles sont caractérisées par la présence de
glandes épidermiques aromatiques.
3. Souvent cultivé dans les jardins, Thymus vulgaris fait partie de
la pharmacopée caribéenne et c’est un ingrédient nécessaire pour
la préparation de certains plats traditionnels.
4. La réitération totale est le mécanisme par lequel la plante
étoffe sa forme en mettant en place des axes ou en différenciant
d’anciennes branches, qui reprennent l’intégralité de l’unité
architecturale sur une unité antérieure (partie plus ancienne de la
plante).
44
2
HABITAT ET RÉPARTITION
L
e thym apprécie généralement les milieux ouverts,
rocailleux, secs et ensoleillés. Il dispose de multiples
atouts grâce auxquels il peut constituer des populations
assez denses. L’espèce Thymus vulgaris se rencontre
fréquemment dans la moitié est de l’Espagne, le sud de la France
et la partie ouest de l’Italie.
45
3
Michel de Montaigne
Fabrication
L
es plantes aromatiques et médicinales sont caractérisées
par la production d’huiles essentielles. Les huiles
essentielles sont des composés secondaires1, c’est-à-
dire des molécules qui ne participent pas directement au
développement de la plante. Elles sont sécrétées et concentrées
dans de petites glandes appelées trichomes (cf. figure 3). Ces
glandes sont situées sur les parties vertes de la plante et
ressemblent à des petites bulles de couleur ambrée. Elles sont
très facilement observables à la surface des feuilles de thym à
l’aide d’une loupe binoculaire (cf. photo 1 et 2).
46
Figure 3 : Anatomie d’un trichome de thym
47
Photo 2 : Trichomes de thym. (grossissement × 160)
D.R.
48
Ainsi, en plus de structures physiques (épines, aiguilles…), les
plantes ont développé tout un arsenal d’armes chimiques pour se
protéger.
Intervenant dans les relations entre la plante et son
environnement biotique (organismes vivants) et abiotique (climat,
sol…), les composés secondaires ont une importance cruciale pour
les plantes qui les fabriquent.
Voici leurs principaux rôles :
– Les interactions entre plantes : compétition et facilitation
Au sein d’une communauté végétale2, il existe de nombreuses
interactions entre les plantes. Ces interactions sont complexes, car
entre des plantes voi-sines il peut exister des phénomènes à
effets négatifs sur la persistance d’une espèce (compétition) et
des phénomènes à effets positifs sur l’installation d’une espèce
(facilitation).
– La compétition et l’allélopathie
La compétition entre plantes, de même espèce ou non,
consiste pour une plante à surpasser ses voi-sines, c’est-à-dire à
réaliser une meilleure croissance, disposer d’un meilleur accès aux
ressources (nutriments, lumière…) ou faire une meilleure
utilisation de celles-ci. La compétition implique donc un effet
négatif sur la croissance, la survie et la reproduction des plantes
qui sont voisines.
D’autre part, par le biais des molécules qu’elles fabriquent, les
plantes peuvent avoir une influence négative sur leurs voisines,
ainsi que sur la flore microbienne du sol. Cette influence s’exerce
sou-vent suite à la dégradation des feuilles mortes de la plante,
mais aussi par le biais des racines. Ce mécanisme, appelé
allélopathie, a une influence sur la formation et le maintien des
communautés végétales, la germination et la croissance d’autres
espèces, ou encore sur les processus d’infection par les
pathogènes. Toutefois, il est important de remarquer que même si
les résultats des études réalisées en conditions contrôlées peuvent
être assez nets, ce phénomène reste difficile à quantifier en milieu
naturel.
Cas du thym : l’allélopathie est un mécanisme utilisé par le
thym. Lors de la dégradation des feuilles de thym, celles-ci
libèreraient leurs composés chimiques qui réduiraient le
49
développement des espèces végétales concurrentes et
inhiberaient le développement de diverses espèces micro-biennes
du sol. En effet, la présence du thym aurait un impact sur
l’établissement et le développement des autres plantes poussant
dans le même milieu que lui. Pour se développer, ces dernières
devraient s’adapter aux sols modifiés par le thym. L’allélopathie
permettrait au thym de coloniser rapidement certains milieux
jusqu’à former des populations quasiment pures, assurant ainsi à
son espèce une forte dominance territoriale sur le long terme.
Il est intéressant de noter que les huiles essentielles du thym
pourraient aussi inhiber la germination de ses propres graines.
Cette inhibition serait levée par les pluies automnales et
hivernales, permettant ainsi au thym de ne pas germer avant ou
pendant les sécheresses estivales.
– La facilitation : plantes « nurses »
La compétition entre les plantes d’une communauté végétale
est forte, mais il existe aussi des phénomènes appelés
facilitation. La facilitation décrit des situations où la présence
d’une espèce bénéficie à l’installation, la vie ou la survie d’autres
espèces. Ce phénomène joue un rôle particulièrement important
dans les environnements difficiles (stressants) et les plantes qui
jouent ce rôle sont appelées des plantes nurses.
Par le biais de la création de ce que l’on appelle des « îlots de
fertilité », les plantes nurses offrent de multiples avantages aux
autres plantes moins adaptées qu’elles : enrichissement de la
composition du sol, création de « taches de végétation » où les
conditions hydriques sont plus favorables, transferts de nutriments
entre plantes par le biais des mycorhizes et des réseaux
mycéliens3, favorisation de la multiplication des champignons
mycorhiziens dans le sol ou encore limitation de la présence de
certains pathogènes grâce aux composés secondaires. Toutefois,
comme toutes les bonnes choses ont une fin, les plantes qui ont
bénéficié d’un coup de pouce finissent par remplacer celles qui les
ont aidé. C’est ce que l’on appelle le processus de succession
végé-tale.
Cas du thym : le thym est une espèce pionnière, c’est-à-dire
qu’elle fait partie des premières espèces capables de coloniser des
milieux de garrigue perturbés (feu, sangliers…) où les conditions
50
sont particulièrement stressantes et où il y a peu de concurrence.
La présence du thym permet la formation d’îlots de fertilité, au
sein desquels les conditions peuvent être favorables au
développement de certaines espèces.
Au sein de ces îlots, les huiles essentielles peuvent jouer un
rôle tout à fait intéressant. En effet, une microflore spécifique
capable de dégrader le carbone contenu dans les huiles
essentielles est sélectionnée dans le sol proche du thym. Parmi
ces espèces : des bactéries. Ces dernières peuvent favoriser
l’établissement d’une symbiose entre plantes et champignons.
Ceci peut se faire par le biais d’une dégradation des huiles
essentielles aux propriétés antifongiques, en améliorant la
nutrition des champignons ou en améliorant l’extension du
mycélium par la production de facteurs de croissance.
On trouve ainsi, dans le sol prélevé sous un pied de thym, une
plus grande quantité de champignons mycorhiziens que dans un
sol nu. La plus forte abondance dans le sol de ces derniers permet
de favoriser l’association entre des jeunes plantules d’arbres (par
exemple de cyprès) et leurs partenaires mycorhiziens. Cette
association améliore les chances de survie des jeunes arbres, leur
permettant de s’établir et de se développer plus facilement.
Sans la présence de plantes pionnières, d’autres espèces
végétales comme les arbres éprouveraient de plus grandes
difficultés lors de leurs premiers stades de développement. Les
îlots de fertilité formés par les plantes nurses offrent donc de
belles perspectives à une époque où de nombreux écosystèmes
ont subi des dégradations majeures. En effet, ces plantes sont un
élément clé pouvant être intégré dans les processus de
revégétalisation, par exemple dans le cadre de la lutte contre la
désertification ou la prévention de l’érosion des sols.
– La défense contre les herbivores, les parasites et les
pathogènes
Les plantes capables de fabriquer des composés secondaires
disposent d’un moyen de défense efficace contre leurs agresseurs.
Il existe deux modes de défense : directe et indirecte.
La défense directe correspond à l’utilisation de composés
chimiques ayant des propriétés toxiques ou répulsives.
L’apparition de ces composés au cours de l’évolution aurait lancé
51
un processus où les organismes en interaction seraient engagés
dans un combat coévolutif sans fin, où chacun serait confronté
aux inventions de l’autre. Une sorte de « course aux
armements », aussi appelée hypothèse de la reine rouge.
L’environnement concurrentiel d’un groupe d’organismes se
modifierait donc en permanence : l’apparition d’une nouvelle
molécule de défense chez une plante provoquerait la sélection
d’herbivores, de compétiteurs, de parasites ou de pathogènes
résistants, qui en retour favoriseraient la sélection de nouveaux
composés de défense chez la plante, et ainsi de suite.
La défense indirecte pourrait être définie par le célèbre
adage « les ennemis de mes ennemis sont mes amis ». En effet,
elle correspond à l’utilisation des composés secondaires pour
attirer les prédateurs ou parasites des herbivores.
Cas du thym : de part son abondance, le thym est une plante
incontournable dans certains milieux. Bon nombre d’espèces
pourraient donc en tirer profit pour se nourrir ou pour effectuer
leur cycle de vie. Mais le thym n’est pas facilement accessible. En
effet, grâce à son huile essentielle, le thym dispose d’une
arme chimique efficace pour repousser ou intoxiquer les
agresseurs. En conséquence, certains herbivores ou parasites
préfèrent s’orienter vers d’autres espèces végétales moins
contraignantes, quant aux autres il leur faut s’adapter au thym.
Toutefois, malgré sa production d’huile essen-tielle, les
espèces capables de profiter du thym sont assez nombreuses.
Durant certaines périodes de l’année, lorsque la disponibilité
en plantes à fort intérêt nutritif est réduite, les ruminants comme
les moutons ou les chèvres peuvent consommer des plantes
aroma-tiques. En effet, ces animaux herbivores disposent d’un
système digestif complexe dans lequel est contenu une flore
microbienne (dans le rumen). Cette particularité leur permet de
digérer une large variété de plantes, y compris des espèces
toxiques. En conséquence, même s’il n’est pas des plus agréables
à manger, le thym permet aux moutons et aux chèvres de
bénéficier d’apports nutritionnels intéressants.
Diverses espèces d’insectes sont également capables de
s’attaquer au thym : chenilles, pucerons, coléoptères, cicadelles,
cochenilles, escargots, limaces… Pour certaines l’objectif est
52
d’effectuer leur cycle de vie, pour les autres c’est de se nourrir.
Comme nous le verrons plus tard, certaines espèces comme
Janetiella thymifolia sont même de véritables spécialistes du
thym.
Le cas des pucerons est tout à fait intéressant. Ces insectes
sont équipés de pièces buccales conçues pour percer les végétaux
et en sucer la sève. L’espèce (Aphis serpylli) est spécifique du
thym. Les pucerons de cette espèce peuvent être présents en
grandes quantités sur le thym, provoquant une diminution de sa
croissance et de sa floraison. La production d’huile essentielle est
inefficace face à ces parasites envahissants. Mais le thym dispose
d’alliés de choix : les araignées et les coccinelles. En effet, en
réduisant les populations de pucerons, ces prédateurs favorisent
la croissance et la floraison du thym. Un bel exemple de défense
indirecte.
– L’amélioration de l’efficacité de reproduction
Les huiles essentielles servent à protéger les plantes contre les
espèces qui leur sont néfastes. Mais ces mêmes huiles essentielles
peuvent aussi leur permettre d’attirer des espèces qui leurs sont
bénéfiques. Par exemple, lors d’une belle et chaude journée de
printemps, les plantes en fleur exhalent abondamment leurs
arômes. Ceux-ci attirent irrésistiblement certains insectes, qui
recevront une récompense en échange de leur travail de
pollinisation.
Cas du thym : le thym est une plante à fleur, il a donc besoin
d’être pollinisé pour se reproduire. Son huile essentielle puissante
et volatile lui permet d’être facilement détecté et d’attirer les
insectes pollinisateurs. Cet aspect sera développé plus en détail
dans le paragraphe consacré à la pollinisation du thym.
– La réponse aux contraintes de l’environnement
Les huiles essentielles constituent également une adaptation
des plantes face aux conditions climatiques sévères. Le climat
méditerranéen est caractérisé par des étés très chauds où l’eau se
fait rare. Les stratagèmes permettant aux plantes d’économiser
l’eau sont donc précieux. Disposer de feuilles à la surface réduite
est une première façon de s’adapter à la sécheresse. Mais les
plantes aromatiques ont une seconde adaptation : l’évaporation
des composés secondaires volatils contenus dans les glandes. En
53
effet, elle permettrait d’abaisser de quelques degrés la
température à la surface de la plante, limitant ainsi le phénomène
d’évapotranspiration (perte d’eau).
Cas du thym : disposant de toutes petites feuilles aux bords
enroulés, dont la surface est couverte de poils et de glandes
gorgées d’huile essentielle volatile, le thym semble être
particulièrement bien adapté aux conditions extrêmes de
sécheresse.
54
3. Une mycorhize est un organe symbiotique formé par un
champignon et une racine, permettant des échanges entre les
deux organismes. Le champignon, appelé champignon
mycorhizien (c’est le cas des cèpes, des lactaires ou des truffes,
pour les plus connus), procure de l’eau et des sels minéraux à la
plante, qui fournit en retour des sucres issus de la photosynthèse.
La majorité des plantes des écosystèmes terrestres ont besoin des
champignons mycorhiziens pour survivre et cette association est
particulièrement essentielle dans les milieux difficiles comme
l’écosystème méditerranéen. Il est à noter qu’une plante peut être
associée à plusieurs dizaines d’espèces de champignons
mycorhiziens, euxmêmes reliés à d’autres plantes. Un formidable
réseau d’échanges formé de racines et de mycélium existe donc
dans le sol.
55
4
A
u sein de certaines espèces de plantes aromatiques, la
composition de l’huile essen-tielle peut varier d’un
individu à l’autre. Quand une telle variation est due à
une variation génétique elle est appelée polymorphisme
chimique. Parmi les nombreux composés chimiques présents
dans l’huile essentielle du thym, six d’entre eux (qui sont des
monoterpènes) déterminent l’expression de la variabilité de la
composition de l’huile dans les populations sauvages de la région
Languedoc-Roussillon.
Un individu de thym contient, dans la quasi-totalité des cas,
l’un ou l’autre des ces six composés comme constituant
majoritaire de l’huile essentielle. Le composé majoritaire permet
de différencier les différents types chimiques appelés
chémotypes.
L’observation de plantes à essence (l’odeur qui émane de
l’huile) différentes, et donc la possibilité d’un polymorphisme
chimique, fut mentionnée pour la première fois chez le thym dans
un ouvrage publié en 1963 par des chercheurs de la Faculté de
Pharmacie à Montpellier. Il y a très exactement cinquante ans !
56
- Les chémotypes phénoliques (avec une structure moléculaire
comprenant un cycle benzénique) : le Thymol et le
Carvacrol.
- Les chémotypes non phénoliques (avec une structure
moléculaire sans cycle benzénique) : le Linalol, le Thuyanol,
l’Alpha-terpinéol et le Géraniol.
57
soulève la question de la nature adaptative de la variabilité
chimique chez le thym.
Quel intérêt pour le thym de disposer d’une telle diversité de
chémotypes ?
Comprendre pourquoi il existe une telle diver-sité de
chémotypes chez le thym n’est pas chose facile et visiblement
cette plante n’a pas fini de nous surprendre. Toutefois, même si la
compréhension des mécanismes responsables de cette diversité
chimique est difficile, celle-ci offre des avantages certains au
thym.
58
« The thymes they are changin’ »
Mais il semble que tout cela soit en train de changer. L’étude
récente de l’équipe du CEFE qui a repris les anciennes données
sur la distribution des chémotypes de 1974 pour les comparer
avec des échantillons de 2010 montre une modification de la
répartition des chémotypes de thym autour du Pic Saint-Loup
(Hérault). Ce phénomène s’est produit en l’espace d’une
quarantaine d’années seulement.
Le réchauffement climatique observé ces dernières décennies
se traduit notamment par une diminution de la fréquence et de la
sévérité des gelées hivernales. Comme nous l’avons vu, ce facteur
a une influence majeure dans la distribution des chémotypes de
thym dans la nature. En conséquence, les chémotypes
phénoliques qui sont plus compétitifs que les chémotypes non
phénoliques, mais qui étaient jusque-là limités par leur sensibilité
aux gelées, ont pu coloniser des zones où ils étaient jusqu’alors
faiblement présents ou absents.
Cette modification de la répartition des chémo-types de thym
s’est clairement opérée en réponse au réchauffement climatique.
Il y a donc une évolution conjointe entre les variations du climat
et la répartition des chémotypes. Cette observation suggère que
le thym pourrait être considéré comme un indicateur
biologique du changement climatique.
59
Un exemple tout à fait remarquable de la capacité d’adaptation
du thym concerne le chémotype Linalol. Certains prédateurs
apprécient particulièrement ce chémotype (cf. tableau 2). Lors des
premiers mois de leur développement, les plantules de linalol
seraient donc un met de choix pour les escargots et le coléoptère
Arima marginata. Pour se protéger de l’appétit de ces derniers, les
jeunes individus de ce chémotype passeraient d’abord par une
composition chimique de type Thymol ou Carvacrol. Ce n’est
qu’après quelques mois que leur composition chimique évoluerait
définitivement en Linalol. En adoptant une composition chimique
plus répulsive, la prédation sur les plantules serait donc limitée,
améliorant ainsi les chances de survie de ce chémotype.
Nous noterons également que les chémotypes jouent un rôle
majeur dans la structuration des communautés végétales. En
effet, par le biais de son huile essentielle, le thym peut modifier la
composition du sol. Pour survivre près du thym les espèces
végétales doivent donc s’adapter à sa présence. Cette adaptation
est visible au niveau des chémotypes. On peut ainsi observer des
communautés végétales aux compositions floristiques différentes
en fonction du chémotype auxquelles elles sont associées.
60
Tableau 2 : Effet des chémotypes sur différentes espèces
d’herbivores, compétiteurs et microorganismes (Thymol (T),
Carvacrol (C), Linalol (L), Thuyanol (U), Alpha-terpiénol (A) et
Géraniol (G).
61
5
C
hez le thym toutes les fleurs ne sont pas de la même
taille. Il existe des individus avec de grandes fleurs et
des individus avec de petites fleurs.
- Les pieds de thym avec de grandes fleurs sont les individus
hermaphrodites (aussi appelés mâles fertiles). Leurs fleurs, qui
possèdent à la fois des organes mâles (anthères1) et des
organes femelles (ovules), peuvent produire du pollen et des
graines.
- Les pieds de thym avec de petites fleurs sont les individus
femelles (aussi appelés mâles stériles). Leurs fleurs, qui ne
possèdent que les organes femelles (pas d’anthères), ne
produisent donc pas de pollen, mais sont capables de produire
des graines.
Cette coexistence au sein de l’espèce d’individus femelles et
d’individus hermaphrodites est appelée gynodioécie. Celle-ci
repose sur une variabilité génétique au sein de l’espèce. En
d’autres termes, chaque individu ne porte qu’un seul type de fleur,
qui ne change ni avec la localisation ni avec l’âge.
En plus de limiter les risques potentiels de consanguinité liés à
l’autofécondation2, la gynodioécie procure un avantage non
négligeable au thym lors de la colonisation d’un milieu après une
perturbation (par exemple après un incendie). En effet,
contrairement aux hermaphrodites, les individus femelles peuvent
concentrer leur énergie sur la production de graines. Les femelles
produisent ainsi en moyenne deux à cinq fois plus de graines que
les hermaphrodites. Elles ne produiront quasiment que des
femelles dans leur descendance, favorisent ainsi la colonisation du
milieu par l’espèce. Alors qu’en moyenne les populations de thym
comportent environ 60 % d’individus femelles, les jeunes
62
populations de thym peuvent comporter jusqu’à 90 % de
femelles.
63
6
L
es plantes de la famille des Lamiacées ont un rôle vital
dans les milieux ouverts méditerranéens comme les
garrigues. En effet, les plantes de cette famille sont de
loin les plus importantes productrices de nectar, tant au niveau du
volume que de la teneur en sucre, un élément essentiel pour la
survie de diverses espèces d’insectes pollinisateurs. Le thym
n’échappe pas à cette règle, bien au contraire, lui qui peut
coloniser de manière très dense de grandes étendues. Sa floraison
étant plutôt tardive (avant l’été), il constitue aussi une source non
négligeable d’apports en eau face à la longue période de
sécheresse estivale dans l’écosystème méditerranéen.
Même si des espèces de papillons ou de diptères (mouches)
participent à la pollinisation du thym, celle-ci est essentiellement
assurée par les abeilles. Elles peuvent représenter de 60 % à
90 % de l’ensemble des pollinisateurs du thym. Ce dernier étant
une excellente plante mellifère, il constitue une importante source
d’énergie pour les abeilles.
Chaque visite dure en moyenne un peu moins de deux
secondes. Une abeille peut ainsi visiter plusieurs centaines de
fleurs lors d’une sortie.
Le miel de thym produit par les abeilles est d’une grande
qualité1, il est réputé et très recherché. Il était d’ailleurs privilégié
par les apothicaires comme ingrédient pour confectionner
certaines préparations comme la célèbre Thériaque de Montpellier.
Toutefois, en conséquence de la fermeture du milieu2, ce miel
typique des garrigues devient de plus en plus rare.
Abeilles et chémotypes
64
Les abeilles sont capables de distinguer, d’apprendre et de
choisir des odeurs. Elles peuvent ainsi distinguer l’odeur émise par
les feuilles de celle émise par les fleurs. Cette différenciation leur
permet de détecter à distance les plantes qui leur fourniront une
récompense. Cette communication olfactive a un rôle clé dans la
relation entre les plantes et les insectes pollinisateurs, puisqu’elle
leur permet de se synchroniser (pollinisation contre nectar).
Les chémotypes de thym proposent une gamme variée d’huiles
essentielles aux compositions chimiques distinctes. Cependant,
dans la nature les abeilles visitent de manière indifférente les
fleurs des différents chémotypes, leur choix étant plutôt guidé par
des facteurs géographiques (proximité de la ruche). Néanmoins,
lors de tests réalisés en jardin, où les abeilles avaient le choix
entre plusieurs chémotypes, elles ont montré qu’elles avaient une
préférence pour le chémotype Géraniol (suivi par le Thymol, le
Carvacrol et enfin l’Alpha-terpinéol). La préférence pour le
Géraniol pourrait s’expliquer par le fait que ce composé chimique
soit le composant majeur de la phéromone de Nasonov. La
phéromone de Nasonov est sécrétée par les abeilles ouvrières et a
plusieurs rôles : marquer l’entrée de la ruche, repérer une source
d’eau ou de nourriture, guider les abeilles lors de l’essaimage.
Abeilles et gynodioécie
Diverses études ont montré que la taille des fleurs améliore
l’attraction des pollinisateurs. Dans le cas du thym, les fleurs
hermaphrodites ont particulièrement besoin d’être visitées par des
pollinisateurs pour que leur pollen soit dispersé sur d’autres fleurs.
En revanche, le besoin de visite pour la fécondation des ovules est
moins important. Ainsi, en produisant des fleurs plus grandes et
donc plus visibles, les individus hermaphrodites augmenteraient
leur taux de visite par les abeilles. En outre, les hermaphrodites
produiraient plus de nectar afin d’attirer les pollinisateurs qui
recevraient une récompense plus importante et donc plus
intéressante.
65
1. Pour plus d’informations, voir Les abeilles et le chirurgien,
édition du Rocher, 2012.
2. Depuis les années 1950, suite à l’exode rural, la diminution du
pastoralisme ou encore le changement d’utilisation des terres, les
milieux se ferment : les garrigues disparaissant au profit de la
forêt à chêne vert.
66
7
A
près la fécondation des ovules, les fleurs produisent les
graines. C’est au début de l’été que les graines arrivent à
maturité et qu’elles sont donc prêtent à être disséminées
pour assurer la survie de l’espèce.
La dissémination des graines de thym se fait sur de
relativement courtes distances (de quelques mètres à quelques
dizaines de mètres). Après être tombées sur le sol au pied des
plantes mères, la dissémination des graines se fait essentiellement
par le biais des eaux de ruissellement (lors de pluies) et des
fourmis. En effet, durant l’été les graines de thym représentent
une ressource alimentaire non négligeable pour les fourmis. Ces
dernières récupèrent les graines tombées sur le sol, pour les
ramener et les stocker dans leurs fourmilières. Cependant, lors du
transport des graines sont égarées par les fourmis, qui participent
ainsi à la dissémination de l’espèce sur de petites distances.
Malgré la quantité produite1, le nombre de graines de thym qui
donneront des individus adultes est relativement faible. Ceci
s’explique du fait de la prédation par les récolteurs de graines
comme les four-mis, de mortalité de graines suite à des attaques
de pathogènes ou encore du sol trop dur qui empêche certaines
plantules de s’établir.
67
8
La cuscute du thym
C
omme son nom le suggère, la cuscute du thym (Cuscuta
epithymum) est un parasite végétal du thym. Cette
plante ne dispose pas de feuilles et est non
chlorophyllienne (c’est-à-dire qu’elle ne réalise pas la
photosynthèse). Composée de tiges de couleur orange rougeâtre
qui s’enlacent autour des branches du thym, la cuscute se nourrit
à l’aide de suçoirs grâce auxquels elle prélève de la sève
directement dans son hôte.
68
Thymol et de Carvacrol exerceraient vis-à-vis du moucheron des
galles.
Le lapin
Bien entendu, nous ne manquons pas de mentionner le lapin.
Celui-ci adapte son régime alimentaire en fonction de la qualité et
de la quantité des ressources disponibles autour de lui. Le lapin
consomme une grande diversité d’espèces végétales tout au long
de l’année. Parmi toutes ces espèces, le thym tient une place
particulièrement importante l’été et peut constituer jusqu’à 30 %
de son alimentation. La chair du lapin prend d’ailleurs un goût
particulier après avoir mangé du thym.
L’humain
Il est incontestable que les hommes font partie des amoureux
du thym. Les nombreuses vertus que nous offre cette plante l’ont
depuis longtemps placée au cœur de nos traditions. Cependant,
cet amour est parfois tellement fort qu’il nous fait oublier que le
thym est une ressource naturelle épuisable. Ses nombreux atouts
sont alors bien peu de choses face à nos techniques de
prélèvement qui peuvent engendrer des phénomènes de
surexploitation jusqu’à la disparition des populations sauvages de
thym. Bien plus qu’une nécessité, gérer durablement cette
ressource naturelle, comme toutes les autres d’ailleurs, est un
devoir.
69
9
LA CUEILLETTE ET LA TRANSFORMATION DU
THYM
C’est là que je vis pour la première fois des touffes d’un vert
sombre qui émergeaient de cette baouco et qui figuraient des
oliviers en miniature. Je quittais le chemin, je courus toucher les
petites feuilles.
Un parfum puissant s’éleva comme un nuage, et m’enveloppa tout
entier. C’était une odeur inconnue, une odeur sombre et
soutenue, qui s’épanouit dans ma tête et pénétra jusqu’à mon
cœur.
C’était le thym, qui pousse au gravier des garrigues : ces quelques
plantes étaient descendues à ma rencontre, pour annoncer au
petit écolier le parfum futur de Virgile. 1
70
équipes plus importantes qui leurs rachetaient le fruit de leur
travail.
Les cueilleurs récoltaient dix à quinze espèces de plantes, à
une distance de quelques dizaines de kilomètres maximum de leur
lieu d’habitation. De part leur abondance naturelle et la forte
demande en provenance des apothicaires, parfumeurs eu autres
marchands montpelliérains, le thym, le romarin et la lavande
constituaient les plantes socles de l’activité de cueillette en
garrigue.
La récolte se faisait manuellement à l’aide d’une faucille et
d’un sac en toile, que l’on remplissait de plantes au fur et à
mesure de la cueillette. Après leur récolte, les plantes étaient soit
séchées, battues, puis triées afin d’obtenir de la feuille mondée
(utilisée par les herboristes ou comme condiments), soit distillées
pour obtenir de l’huile essentielle.
Entre le XIIIe et le début du XXe siècle, l’essentiel du commerce
des plantes était concentré vers la ville de Montpellier. En 1768, le
témoignage d’un observateur anonyme nous résume la situation
en ces mots : « Nos campagnes sont remplies de thym, serpolet,
lavande… qu’on n’a que la peine de cueillir et envoyer. Les
essences de ces choses ne manquent pas et ceux qui font ce
commerce gagnent beaucoup, puisqu’avec rien, ils peuvent
remplir un magasin, qui, par la débite, donne des gains
immenses. »
N’étant pas propriétaires terriens, des autorisations devaient
être délivrées aux cueilleurs. Les auto-risations de ramassage
étaient bien souvent délivrées à titre gratuit, mais sous certaines
conditions fixées par le service forestier : « Les plantes
aromatiques ne devront pas être arrachées ; elles devront être
coupées à la faucille ou au moyen de ciseaux », « les produits
seront portés à dos d’hommes jusqu’aux chemins ordinaires »,
« l’extraction et l’enlèvement des produits concédés ne pourront
avoir lieu que du lever au coucher du soleil ». La cueillette était
surveillée par les gardes forestiers communaux, qui faisaient
régulièrement des comptes rendus.
Malgré le déclin de la parfumerie montpelliéraine, au début
du XXe siècle la cueillette du thym était encore bien
présente en garrigue, trouvant des débouchés notamment du
71
coté de Nîmes pour l’herboristerie ou de Grasse pour la
parfumerie. Pour l’année 1910, la production d’huile essentielle
dans les garrigues héraultaises s’élevait à dix tonnes pour le
thym. La production d’un kilo d’huile essentielle de thym
nécessitant 250 kg de plante fraîche, environ 2 500 tonnes de
thym frais furent récoltées cette année-là pour produire ces dix
tonnes d’huile essentielle de thym !
Mais après la Première guerre mondiale, cette activité connut
une importante phase de récession. En 1919 la production dans
l’Hérault n’était plus que de 300 kilos d’huile essentielle pour le
thym et le romarin confondus. Cette diminution fut la
conséquence du renforcement de la concurrence espagnole
produisant à meilleur marché, de la plantation de vignes (alors
plus rentables que les plantes aromatiques et médicinales) ou
encore du développement de la chimie de synthèse.
Malgré la forte diminution de l’industrie des plantes
aromatiques et médicinales en garrigue, des groupes de cueilleurs
étaient toujours en activité au début des années cinquante. Une
étude de 2010 permit d’identifier qu’entre 1950 et jusqu’au milieu
des années 1960, en moyenne une trentaine de cueilleurs
professionnels récoltaient le thym dans les garrigues.
Suite à l’exode rural, à la mise en place de règlementations
contraignantes, à la disparition du diplôme d’herboriste en 1941, à
la pénibilité du métier et au manque de jeunes pour reprendre les
activités, le nombre de cueilleurs s’est effondré en l’espace de
quelques années.
Au début des années soixante-dix, les garrigues héraultaises
ne comptaient plus qu’une petite poignée de cueilleurs
professionnels de thym.
72
et l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).
Le CRIIRAD (Commission de Recherche et d’Information
Indépendantes sur la Radioactivité) a contesté un communiqué de
l’Agence France Presse du 25 juillet 1986, affirmant que pour le
thym, en basant le calcul sur une radioactivité de césium de 3000
becquerels par kilo, il faudrait qu’une personne consomme 100
kilos de thym par an pour atteindre un risque.
Les risques potentiels pour la santé associés à la
consommation de thym installèrent le doute dans les esprits.
Après cinq ans, la consommation et la production de thym
reprirent, mais sans les cueilleurs traditionnels des garrigues qui
avaient pour la plu-part changé d’activité.
73
prélever que les 2/3 de la partie feuillue3, en évitant de
couper la partie ligneuse (bois) et surtout sans arracher
les racines ! De plus, selon la qualité du milieu dans lequel le
thym pousse, sa capacité de régénération peut être plus ou moins
importante. Ainsi, selon la qualité du milieu, il est préférable
d’effectuer un prélèvement par an ou tous les deux ou trois ans.
La récolte peut être réalisée à l’aide d’une faucille, d’un
sécateur ou d’un couteau le cas échéant, afin de réaliser une
coupe nette.
La transformation du thym
Après récolte, le thym peut être soit consommé frais, soit
transformé sous forme d’huile essentielle ou sous forme mondée.
Pour obtenir de l’huile essentielle de thym, la récolte se fait au
printemps, lorsque la plante est en fleur. Les sommités fleuries
fraîches sont placées directement dans un alambic dans les trois
jours suivant la récolte. Le processus de distillation dure plusieurs
heures. Pour obtenir un kilo d’huile essentielle, il faut dis-
tiller en moyenne 250 kg de thym frais !
Pour obtenir du thym mondé, c’est-à-dire débarrassé des
branches, tiges et des impuretés comme les poussières, le thym
se récolte après les épisodes pluvieux d’automne, de novembre à
mars (feuilles mondées) ou au printemps (feuilles et fleurs
mondées). Après récolte, le thym doit être séché en couche mince
d’une dizaine de centimètres d’épaisseur (plus la couche est
mince, plus le séchage sera rapide), dans un endroit aéré, chaud
et sec, afin d’éviter le développement de moisissures. Attention, la
température de séchage ne doit pas être trop élevée, car cela
ferait évaporer l’huile essentielle du thym. Il faut compter entre
trois et sept jours de séchage par beau temps.
Une fois séché, soit le thym est conservé en l’état, soit le
processus de transformation se poursuit. Dans ce cas le thym doit
être battu, pour séparer les feuilles des branches, puis tamisé afin
d’obtenir un produit débarrassé des impuretés (herbes, tiges,
poussières…). De nombreux facteurs, comme la teneur en eau du
produit frais, le chémotype ou encore la période de récolte,
influencent le rapport de transformation. Celui-ci peut ainsi varier
74
de un pour cinq (5 kg de thym frais pour obtenir 1 kg de feuilles
mondées) à un pour huit.
75
actuellement et devrait à terme permettre de fournir des éléments
précis pour la compréhension du mode de développement des
différents chémotypes, ainsi que leur régénération après récolte.
Une démarche complexe mais nécessaire pour assurer une
gestion la plus respectueuse possible du thym dans toute sa
diversité. Affaire à suivre…
76
Troisième par tie
77
L
es passionnés d’écologie savent bien que la santé passe
d’abord par l’alimentation. Ils ont retrouvé le célèbre
aphorisme d’Hippocrate, que ton aliment soit ta
médecine. Ils ont redécouvert, face aux excès de la grande
bouffe, les vertus, les finesses de l’alimentation méditerranéenne1
et ses merveilleuses conséquences pour la santé. Ils ont même
rejoint la célèbre phrase du grand biologiste Jean Rostand : « Il
vaut mieux un bon menu qu’une ordonnance » !
Au-delà de ces qualités nutritionnelles reconnues et
retrouvées, les chercheurs ont isolé d’authentiques vertus médico-
chirurgicales à de nombreux trésors que la nature du pourtour de
Mare Nostrum nous procure.
Je les livre une par une à mes collègues les plus éloignés de
l’écologie, enfermés dans les certitudes des laboratoires
pharmaceutiques, lesquelles, si justes soient-elles, ne doivent pas
nous détourner de l’héritage de siècles d’expérience, qui
appartient aussi à la science et à la santé.
Le thym est passé de son état d’herbe tradition-nelle à une
utilisation médico-chirurgicale avec des indications précises,
surtout comme médication familiale. La grande Hildegarde de
Bingen (1098-1179) – devenue Docteur de l’Église en 2012 – le
préconisait déjà.
De nombreux effets pharmacologiques ont ainsi pu être
identifiés, avec l’huile essentielle de thym et à partir d’extraits
divers. Ainsi le thym appartient-il à la phytothérapie
moderne, car ses effets empiriques sont entrés dans le vaste
champ des découvertes des grands laboratoires de recherche.
Ses avantages hors de la médecine ne sont pas moindres, vu
son utilisation dans l’alimentation et dans l’industrie des arômes,
la parfumerie (où il n’est plus utilisé actuellement) et la
cosmétique.
78
1
79
L’essence de thym avec le thymol, sera même utilisée par
Meyer et Gottlieb comme antiseptique mieux que le phénol, l’eau
oxygénée, ou le permanganate de potassium.
Novi en Italie aurait démontré, d’après notre collègue Jean
Valnet, l’action activatrice sur les globules blancs. Elle serait donc
intéressante dans les suites des chimiothérapies « aplasiantes »
(qui détruisent les globules blancs qui ont une durée de vie
normalement d’une semaine).
Au XXIe siècle, donc récemment, le thym rejoint ce qu’on
appelle pompeusement Evidence Based Medicine. En effet des
chercheurs grecs du Technological Educational Institute des Îles
Ioniennes, lors de la réunion de printemps 2010 de la Society for
General Microbiology à Edimbourg, affirment que « l’huile
essentielle de thym serait la plus efficace qui soit contre les
staphylocoques, capable de détruire presque 100 % d’un
inoculum de ces bactéries en moins d’une heure, et ce pour de
nombreuses espèces du genre ».
Ainsi les huiles essentielles, ou certains de leurs composants,
devraient être largement incorporés à des crèmes et autres gels
destinés au traitement d’infections cutanées et autres, quand elles
sont facilement accessibles.
Ces chercheurs vont encore plus loin, évoquant évidemment
des indications dans l’industrie alimentaire, en packaging ou pour
remplacer des composés chimiques utilisés comme conservateurs.
On sait maintenant que le thym est un allié du système
immunitaire, que notre alimentation entretient ou perturbe selon
les cas. Il peut être intégré partout où il nous semble
appétissant… Tarte aux oignons et thym, muffins au thym, sauce
tomate au thym, huile assaisonnée au thym, omelette au thym…
80
2
COMPOSITION DU THYM
O
n retrouve dans la plante du thym, issu de la terre des
zones sauvages du pourtour méditerranéen, une forte
proportion (pour 100 g) de vitamine K et de calcium,
tous deux indispensables à la coagulation du sang. Ainsi les
écorchures des ronces et autres piquants des garrigues peuvent
être traitées aisément avec quelques feuilles de thym.
81
les premières sensations de picotement et d’amertume.
MINÉRAUX
Magnésium 110 mg 29 %
Phosphore 134 mg 19 %
Potassium 541 mg 27 %
Calcium 1260 mg 158 %
82
OLIGO-ÉLEMENTS
Fer 82 mg 19.2 %
Manganèse 7,87 mg 11 %
Cuivre 0,86 mg 86 %
Zinc 6,19 mg
VITAMINES
A (Béta-carotène) 2270 microgr 284 %
E 9.15 mg 76%
K 0.48 mg 60 %
C 16.7 mg
B1 0.34 mg
B2 0.26 mg
B3 3.28 mg
B6 0.31 mg 22 %
B9 Acide Folique 91.3 microgr
Les flavonoïdes
La feuille de thym contient des flavonoïdes (pigments jaunes)
aux propriétés anti-inflammatoires, antioxydantes et
antispasmodiques. Ce sont des dérivés de la quercétine, de
l’apigénine, la naringenine, la thymonine et de la lutéoline. On les
retrouve dans beaucoup d’autres plantes mais ici, dans la feuille
de thym, ils ne sont associés ni à des alcaloïdes ni à d’autres
composés plus ou moins toxiques (toxiques pour le foie ou à
risque de créer des mutations cancérigènes).
Les polyphénols
83
Ils sont présents dans la feuille de thym : caféique,
chlorogénique, lithospermique, rosmarinique, et leurs dérivés sont
d’importants antioxydants. Ils possèdent aussi d’autres
potentialités intéressantes : ce sont des inhibiteurs enzymatiques
(ex : anti-inflammatoire ou antiallergique), également antiviraux
et cytostatiques (protection des cellules qui peuvent mener une
vie normale et ne pas se multiplier à l’infini comme les cellules
cancéreuses).
84
3
L
e thymol est le premier constituant volatile du thym. Ses
effets ont été très documentés expérimentalement chez
les petits animaux, rats et souris. Chez des rats âgés,
supplémentés en thym par voie orale, on observe une protection
et une augmentation significative du pourcentage de graisses
dans la membrane des cellules, en particulier la quantité de DHA,
c’est à dire d’acides gras oméga 3, dans les tissus du cerveau, des
reins et des membranes des cellules du cœur. Ces effets sont
augmentés quand le thym est apporté précocement dans la vie de
l’animal.
Il ne s’agit pas d’en tirer des conclusions outrancières pour
l’humain, simplement de comprendre les vertus expérimentales
des extraits de thym.
85
4
L
es composés volatils ont aussi des effets dits
« bactéricides » capables de neutraliser des bactéries
telles que Staphylococcus aureus, Bacillus subtilis,
Escherichia coli et Shigella sonnei.
Depuis des milliers d’années, le thym est utilisé avec d’autres
épices pour préserver et conserver les aliments périssables des
contaminations micro-biennes.
En février 2004, des chercheurs ont publié dans la revue Food
Microbiology que l’huile essentielle de thym est capable de
décontaminer de la bactérie Shigella les salades (laitue)
responsables de diarrhées aiguës, toxiques pour la muqueuse
intestinale.
Ces recherches ont amené à démontrer que le thym peut être
considéré comme un excellent conservateur naturel des aliments
frais qui ne passent pas par la phase de cuisson. En plus du goût
donné à l’aliment consommé frais, s’ajoute l’effet protecteur pour
la santé. Les marchands de légumes devraient « arroser » de
poudre de thym leurs salades sur les étalages. Ils en vendraient
davantage.
86
conseille dans les quarante-huit heures précédant l’utilisation une
application au pli du coude.
87
5
À
la place d’une tasse de café l’infusion de thym, de bon
matin, réveille l’esprit, libère l’estomac en facilitant la
digestion du petit-déjeuner, supprime les toux et
expectorations matinales, donne le tonus pour la matinée.
Le thym a des effets antimicrobiens : antiviral, antibactérien et
même antifongique (contre les champignons), il est utile pour
traiter les attaques de rhume, grippe, bronchite. Il faut donc le
considérer comme un élément de prévention, pour stopper le tout
début de ces affections. Point besoin de médecin à ce stade
évidemment.
On le retrouve pour stimuler l’appétit, il fait partie de la poudre
lénifiante de Nicolas de Salerne1 pour adoucir, apaiser, destinée à
traiter l’abattement mélancolique pour réjouir et recréer les sens.
Le vin aromatique, en plus du romarin, de la sauge, de la
lavande et de l’origan, contient du thym et des feuilles de laurier.
L’usage de ce vin est « extérieur » et s’applique avec des
compresses pour fortifier les muscles. On l’applique chaud pour
résoudre les contusions.
On utilise de la même façon la teinture ou eau vulnéraire
rouge composée des sommités sèches de sauge, d’absinthe, de
fenouil, de sarriette, de lavande, de mélisse, de thym et de
romarin… mélangées à de l’eau de vie à 22°C.
Le thym est présent dans l’eau vulnéraire spiritueuse qui
s’emploie extérieurement ou dans l’eau de Cologne de Jean-
Antoine Féminis ou Farina, et dans les alcoolats d’herbes
odorantes, de même que dans l’eau impériale, associée à la
cannelle, aux girofles, aux écorces d’orange et de citrons…
88
1. Les médecins et les chirurgiens, qui rédigeaient des
ordonnances de préparations que l’on qualifie aujourd’hui de
magistrales, se devaient par ailleurs d’avoir des connaissances
approfondies sur la manière de préparer les médicaments. Ces
connaissances étaient présentées dans des livres de recettes
qualifiés d’antidotaires puis de pharmacopées au milieu du XVIe
siècle.
La principale pharmacopée médiévale, l’antidotaire de Nicolas de
Salerne (XIIe siècle) est un ensemble de cent quarante recettes
classées par ordre alphabétique avec les indications résumées de
leur utilisation.
89
6
90
chémotypes à phénols sont caustiques, irritants de la peau et a
fortiori des muqueuses.
Notre ami Dominique Baudoux, passionné d’aromathérapie, a
publié en 2002 toute une collection pour se soigner avec les huiles
essentielles, sous le titre Douce alternative2.
Il y consacre six pages au thym :
– Deux pages au Thujanol ou Thuyanol, aux propriétés anti-
infectieuses importantes, qui a une action stimulante et
régénératrice des cellules hépatiques, dépourvue d’effets
secondaires, elle peut être utilisée pour stimuler la régénération
du foie après chirurgie hépatique ou dans la phase de
reconstruction d’une hépatite virale.
Au quotidien, dès que l’angine s’annonce ou menace,
deux gouttes sur un quart de morceau de sucre à sucer
balaient l’infection virale ou bactérienne en trois ou
quatre prises par jour. L’odeur de la garrigue envahit le
palais des saveurs et favo-rise à la fois l’expectoration et
la respiration.
91
par notre consœur le docteur Anne-Marie Giraud, excellente
aromathérapeute d’Aix-en-Provence.
Les terpénoïdes, constituants majeurs des huiles essentielles,
peuvent pénétrer facilement dans l’organisme soit par absorption
orale, soit par diffusion à travers la peau, soit par inhalation.
Différentes enzymes présentes dans tous les organes, mais en
particulier dans le foie, vont les rendre plus solubles dans l’eau
pour en éliminer une part importante dans les urines. Ce sont les
enzymes de phase I (cytochrome P450) et de phase II qui sont
responsables de ces réactions et transforment ces composés, en
particulier, en sulfates et en glucuronides qui seront éliminés par
la bile dans le tube digestif.
Dans des modèles animaux comme chez l’homme de
nombreux produits de la métabolisation active des terpènes ont
été identifiés et retrouvés dans le sang et les urines (jusqu’à 75 à
95 %) mais le temps de métabolisation peut s’étaler sur un à trois
jours, ce qui donne le temps d’agir.
92
En 1937, il écrivait : « De cet immense domaine encore vierge,
nous avons commencé le défrichement. En dehors de leurs
propriétés antiseptiques et microbicides largement utilisées à
l’heure actuelle, les huiles essentielles possèdent des propriétés
anti-toxiques, antivirus, une action énergétique puissante, un
pouvoir cicatrisant incontestable, des propriétés thérapeutiques
étendues… »
L’autre grand maître de l’aromathérapie est le docteur Jean
Valnet avec ses nombreux livres, dont Docteur Nature aux éditions
Fayard, en 1980, et son Aromathérapie en poche (1964 à 1990).
Pour éviter toute causticité, les huiles essentielles doivent
impérativement être diluées dans une huile végétale (noisette,
amande douce, olive), en particulier pour leur utilisation chez
l’enfant, en friction, massage, bain, crème ou onguent. On peut
même les utiliser en association avec d’autres huiles, per os (à
avaler), ou pour inhalation, gargarisme ou dans la composition
d’un dentifrice.
1. Définition classique.
2. Éditions Amyris (2002).
3. René-Maurice Gattefossé (1881-1950) est l’un des pères
fondateurs de l’aromathérapie contemporaine : chercheur fécond
et compilateur minutieux, il est également l’inventeur du mot
« aromathérapie ». Ingénieur chimiste de formation, il a dirigé les
Établissements Gattefossé pendant la première moitié du XXe
siècle. Délaissant progressivement la parfumerie, son métier
d’origine, il a réorienté l’entreprise vers les secteurs de la
dermatologie et de la cosmétologie. Croyant profondément en la
science, au progrès et à la modernité, il s’est aussi passionné pour
ce qu’il appelait les « techniques oubliées » : les traditions
« archi-millénaires », les para-sciences. Son ambition, tout au
long de sa vie, a été de parvenir à concilier ces deux pôles. Il a
publié en 1906 le Guide pratique et formulaire du parfumeur
moderne, de nombreuses fois réédité.
93
7
LE THYM EN RECHERCHE
J
ean-François Lesgards apporte des données fort
intéressantes qui ouvrent des perspectives thérapeutiques
parfois originales, en particulier en cancérologie.
En pharmacologie expérimentale
Chez des rats, l’extrait éthanolique à 95 % de la plante
entière, administré dans l’estomac, à la dose de 500 mg/kg réduit
l’hyperthermie expérimentale.
Chez le cobaye, l’extrait alcoolique à 30 % de feuille et de
fleur a réduit in vivo le spasme expérimentalement induit sur une
anse intestinale isolée.
Chez le chat, l’extrait à 30 % de feuille se montre antitussif
administré par voie orale à la dose de 1 ml/kg, et favorise les
expectorations à la dose de 0,25 ml/kg.
Chez des lapines et des rates en gestation, on n’a pas
trouvé d’effets embryotoxique ou tératogénique sur la
descendance avec un extrait éthanolique à 40 % de parties
aériennes séchées, administré par voie orale à la dose de 1,6
ml/kg.
Chez des souris l’extrait de thym au thymol, in vitro, a un
effet anticoagulant en empêchant l’agrégation des plaquettes.
C’est l’effet pharmacologique qui s’inverse à fortes doses, ce que
tous les pharmacologues savent.
94
composés phénoliques seraient à l’origine de ces effets, dont le
thymol.
95
8
L’action phyto-œstrogénique ou
progestéronique du thymol
À la ménopause le thymol éviterait de consommer les
traitements hormonaux substitutifs (THS). Il s’ajouterait
96
positivement au soja, au trèfle des prés, plantes bien connues
pour leur richesse en phyto-hormones.
Quant à son action de réduction du traitement substitutif
thyroïdien elle est improbable, car le thym ne contient ni hormone
thyroïdienne ni iode, indispensable à sa formation par la thyroïde.
97
9
N
ous ne résistons pas à citer le petit livre de notre amie
Nelly Grosjean, L’aromathérapie naturellement1, où elle
raconte à la Pagnol : « Chaque soir, petits et grands
avaient droit, dans notre bar à thym, à la dégustation d’un
savoureux grog aroma-tique que nous préparait amoureusement
maman et qu’elle m’apprit vite à faire. »
Le thym en dermatologie
Contre la séborrhée2, le thym peut être prescrit pour
neutraliser les peaux grasses, ralentir la calvitie et faciliter la
repousse après les alopécies de la chimiothérapie. Il peut aussi
être à petites doses antiprurigineux.
98
Position des glandes sudoripares (11, couleur orange) dans la
peau. (selon wikipedia)
A. Épiderme
B. Derme
C. Hypoderme
D. Vaisseaux sanguins et lymphatiques
E. Stratum germinativum (couche basale)
1. Poil
2. Stratum corneum (couche cornée)
99
3. Couche pigmentée
4. Stratum spinosum (cellules cubiques)
5. Stratum basale (couche basale)
6. Muscle érecteur du poil
7. Glande sébacée
8. Follicule pileux
9. Papille du poil
10. Fibre nerveuse
11. Glande sudoripare 12. Corpuscule de Pacini (récepteur
sensoriel)
13. Artère
14. Veine
15. Terminaison nerveuse libre (récepteur sensoriel)
16. Papille dermale
17. Pore
100
Contre les brûlures, l’huile essentielle de thym à thujanol ou
thuyanol avec du miel pour adoucir, est un excellent antibiotique,
y compris pour des brû-lures assez importantes. L’application de
quelques gouttes d’infusion de thym soulage des piqûres de taon.
Le thym en gastro-entérologie
Le thym aide à la digestion en réduisant les dyspepsies, les
fermentations, flatulences et participe à la cicatrisation des
inflammations et ulcérations gastriques. Il doit être utilisé en
premier avant toute consultation gastro-entérologique et devrait
réduire les symptômes, en étant associé à la propolis mâchée en
101
gomme, qui se mélange à la salive et neutralise les brûlures de
reflux gastrique vers l’œsophage.
Une étude menée in vitro par des chercheurs iraniens de
l’Université de Yazd a démontré en 2006 que le Gastrolic drop,
contenant 4,1 mg/ml d’extrait de thymol, avait des effets
bactéricides sur l’Helicobacter pylori, considéré comme
responsable de gastrites et d’ulcères de l’estomac, capables de
dégénérer en cancer. Le thymol a également de forts effets
bactéricides contre les bactéries salmonelles et klebsielles.
Face à des troubles digestifs hauts, type « gastro », ou bas du
type « diarrhée », une infusion de thym joue un rôle antiseptique,
ouvre le pylore pour aider à la vidange gastrique et peut réguler
le transit intestinal en participant à l’équilibre de la flore digestive.
Il a pu être proposé comme un excellent vermifuge, pris en
infusion, mais aussi en lavement chez l’enfant : les vers partent
avec…
Dans le cas d’une détérioration de l’intestin grêle installée,
notre collègue le Dr Bruno Donatini, gastro-entérologue spécialisé
en immunologie et cancérologue, recommande : un traitement
antiviral ou anti-Helicobacter pylori dont l’objectif est de diminuer
la flore du côlon ou de l’estomac grâce à des mycélia de
champignons (le Coriolus versicolor, le Ganoderma lucidum ou le
Hericium erinaceus). On prendra également des huiles essentielles
pendant les repas (Thym vulgaire riche en linalol, menthe
poivrée, Origan, Cannelle de Ceylan, Clou de Girofle ou encore
Citrus officinalis, Gingembre, Tea tree) contre les clostridium
ou les acinetobacters surabondants. Ces huiles sont fixées
sur des fibres d’écorces et sur un mycélium de Laetiporus
sulfureus qui inhibent la lipase pancréatique des huiles
essentielles et empêchent qu’elles soient absorbées dans
l’estomac ou les anses jéjuno-iléales. Ces huiles essentielles se
libèrent dans le côlon où elles auront toute leur efficacité pour
lutter contre la pullulation bactérienne. Ce mycélium est aussi un
bon immunostimulant. Ce traitement désinfecte peu à peu
l’intestin, surtout sa partie basse, et stimule l’immunité antivirale
et antitumorale du grêle.
Le thym en urologie
102
Le thym joue un rôle diurétique et anti-infectieux, dans la
mesure où il est associé à des boissons abondantes (trois grands
bols par jour, soit au moins un litre et demi par jour). Il
n’empêche pas de consommer en fin de repas un verre de bon vin
rouge qui ajoutera son effet antiseptique urinaire, très utile dans
les cystites à répétition.
Le thym en rhumatologie
Le docteur J. Valnet recommande, contre les algies
rhumatismales, de hacher le thym, de le faire chauffer dans un
récipient, de le mettre dans une gaze et de l’appliquer chaud sur
l’articulation douloureuse.
Le thym en homéopathie
L’homéopathie a été initiée par Samuel Hahneman (1755-
1843) qui enseignait à Leipzig. Le thym ne semble pas
recommandé dans ce type de médecine depuis 1989, date à
laquelle la pharmacopée homéopathique germanique n’a pas
trouvé de substances issues du thym qui puisse être efficace en
homéopathie.
103
massage est nécessaire car il va permettre au principe actif de
pénétrer directement dans la peau et d’aller ensuite dans la
circulation sanguine pour produire son effet. L’action est moindre
quand l’huile est utilisée dans le bain.
104
essentiellement par contact buccal.
105
10
106
cortex cerébral (MA) et/ou une démence sous-corticale, au niveau
des noyaux gris centraux (MP).
D’une manière générale, les patients atteints de la maladie de
Parkinson ont plus de difficulté à percevoir les odeurs, alors que
ceux qui souffrent de la maladie d’Alzheimer les perçoivent mieux
mais en oublient les caractéristiques.
L’absence de différence entre MA et MP pourrait être la
conséquence d’une atteinte précoce des structures anatomiques
impliquées dans les processus de traitement de l’information
olfactive, qui rendrait impossible, à un stade plus évolué de la
maladie, de différencier l’atteinte olfactive de ces deux maladies.
L’atteinte des structures olfactives serait donc identique dans les
deux maladies. Des déficits en choline acétyltransférase et en
dopamine sont décrits dans les lobes olfactifs des deux types de
patients.
C’est donc la mauvaise reconnaissance des odeurs qui pourrait
être un symptôme de la maladie du vieillissement de la mémoire.
« Mais, ce n’est pas de la vanille que vous sentez, c’est du
chocolat ! » Si cette « faute de goût » peut dans un premier
temps faire sourire, elle permet d’établir une nouvelle hypothèse
en matière de dépistage de la maladie d’Alzheimer. En effet, si
aucun traitement n’a été à ce jour mis au point pour éradiquer la
dégénérescence des cellules cérébrales, on peut néanmoins
ralentir ses effets d’autant plus efficacement qu’elle est
diagnostiquée précocement. Selon le docteur Laurent Vazel,
spécialiste ORL, « on s’est aperçu que des patients se trompant
sur l’identification des odeurs étaient plus sujets à développer la
maladie ».
C’est donc l’un des premiers et des plus importants symptômes
à se manifester et qui affecte de 80 à 90 % des personnes
atteintes de l’une ou l’autre de ces deux maladies, affirme
Johannes Frasnelli, stagiaire postdoctoral au Centre de recherche
en neuropsychologie du Département de psychologie de
l’Université de Montréal.
Le fait est connu depuis vingt ou trente ans, mais a reçu peu
d’attention de la part des chercheurs, sans doute parce que ce
symptôme est considéré comme moins incommodant que les
autres manifestations de ces maladies. Johannes Frasnelli estime
107
toutefois que sa détection peut permettre un dépistage hâtif et
distinctif des maladies d’Alzheimer et de Parkinson.
Plusieurs causes peuvent expliquer l’atténuation de l’odorat et
l’âge en est une, explique le chercheur. Dans l’ensemble de la
population, 15 % ont un odorat réduit et 5 % n’en ont plus du
tout. Mais dans le cas des maladies d’Alzheimer et de Parkinson,
ce symptôme peut se manifester dès cinquante ans, au stade
préclinique des maladies.
108
La maladie d’Alzheimer se caractérise par une atteinte
neurodégénérative qui perturbe gravement mémoire, attention,
langage et jugement. Elle touche aujourd’hui environ 25 millions
de personnes dans le monde, selon l’Organisation mondiale pour
la santé (OMS), un nombre qui devrait dramatiquement s’accroître
à plus de 80 millions, d’ici 2040, d’après les spécialistes de la
santé.
109
En comparant les performances selon le type de maladie
dégénérative, il ressort que les patients parkinsoniens ont un seuil
de détection des odeurs plus faible que ceux souffrant de la
maladie d’Alzheimer. « Les mécanismes neurologiques touchés ne
sont donc pas les mêmes », en conclut Johannes Frasnelli. « Les
effets de la maladie d’Alzheimer se font surtout sentir dans les
tâches nécessitant la mémorisation, alors que ceux de la maladie
de Parkinson réduisent la sensibilité de la perception des odeurs,
ce qui a des conséquences sur les trois autres tâches. »
À son avis, les tests de dépistage de ces deux maladies
auraient donc avantage à inclure des tests olfactifs, puisque
l’odorat est l’un des premiers sens altéré et qu’il l’est de façon très
nette. La détermi-nation du seuil de détection permettrait en
outre d’établir de façon précoce si la perte neurodégénérative est
due à la maladie d’Alzheimer ou à celle de Parkinson.
« Plus ces maladies sont détectées de bonne heure, plus on
est en mesure de freiner leur évolution avant le stade clinique »,
souligne-t-il.
Les médecins ont testé 589 personnes, âgées de 54 ans à plus
de 90 ans, en leur demandant d’identifier douze odeurs très
communes comme celles du citron, du chocolat, du poivre noir, de
la banane, de l’essence de voiture et de savon, de thym… Pour
chacune de ces odeurs, les participants devaient choisir entre
quatre réponses : pour la cannelle, par exemple, s’agit-il de bois,
de noix de coco, de cannelle ou de fruit ?
Au début de l’étude, en 1997, aucun des sujets ne souffrait de
troubles cérébraux. Les mêmes personnes ont ensuite été testées
pour leurs capacités mentales et soumises à vingt tests cognitifs.
Elles ont fait l’objet d’examens cliniques et neurologiques réguliers
tous les ans, jusqu’en 2002. Il a été constaté, au cours de ces
cinq années écoulées que les personnes ayant fait au moins
quatre erreurs de reconnaissance lors des tests olfactifs avaient
50 % de plus de risques de souffrir de problèmes cérébraux que
les personnes n’ayant fait aucune erreur. Un tiers d’entre elles ont
développé des formes modérées de troubles de la mémoire.
Les chercheurs américains ont pondéré les résultats des tests
en fonction de l’âge, du sexe, du niveau d’éducation, des
110
antécédents médicaux (attaque cardiaque, cérébrale) et de leur
passé de fumeur ou non.
111
En conclusion, les résultats relatifs à la discrimination et à la
reconnaissance olfactives se sont montrés en corrélation plus
étroite avec les résultats obtenus aux tests neuropsychologiques
que les seuils de détection. Pour les chercheurs, la déficience
olfactive apparaît tôt dans les légers TCM ; ils conseillent
d’appliquer systématiquement, en clinique, le test d’olfactifs fins
pour repérer précocement des patients chez qui l’évolution de la
diminution olfactive pourrait être révélatrice du passage de légers
TCM à la MA.
Dans le cas de la maladie d’Alzheimer, retarder de cinq ans
l’apparition des symptômes de la maladie réduirait de 50 % sa
prévalence4.
112
développeront une pathologie de ceux qui resteront stables. L’état
à risque est communément appelé « troubles cognitifs légers »
On parle aujourd’hui des mémoires5 plutôt que de la mémoire.
En effet, la notion de systèmes mémoriels multiples est
globalement acceptée à l’heure actuelle. Dès le milieu du XXe
siècle, la distinction entre deux types de mémoire s’est opérée :
– la mémoire déclarative : représentationnelle, elle correspond à
la capacité à détecter et coder ce qui est unique dans chaque
événement ; chez l’homme, elle peut s’exprimer au travers du
langage ;
– la mémoire non déclarative : la capacité à extraire les
informations communes à une série d’événements. Elle
correspond globalement au savoir-faire.
113
Le lobe ou bulbe olfactif (BO), donne les informations
olfactives en provenance de neurones spécialisés
chémorécepteurs olfactifs. Il y a deux bulbes olfactifs –
légèrement détachés du cerveau et très proches de la cavité
nasale.
114
l’odorat8. Les patients dépressifs distinguent moins bien les
différents niveaux d’intensité des odeurs, identifient moins bien
celles qui sont présentes dans des mélanges et sont peu sensibles
aux odeurs agréables.
Une étude réalisée chez dix-huit patients hospitalisés pour
dépression sévère, comparés à cinquante-quatre témoins en
bonne santé conclut : « De façon surprenante, la vanille, la
cannelle ou l’amande amère étaient classées comme des odeurs
déplaisantes. »
Des zones du cerveau impliquées dans la sensation agréable
provoquée par les odeurs présentent des dysfonctionnements
dans la dépression. Ces troubles sont-ils spécifiques à la
dépression ? C’est ce que les chercheurs s’efforcent de
déterminer.
La « pyramide olfactive »
Selon les spécialistes, elle définit la structure d’un parfum,
décrivant les notes que l’on sent au fur et à mesure de l’évolution
du parfum dans le temps de perception. On distingue ainsi trois
notes :
– la note de tête qui peut durer du moment où l’on vaporise à
deux heures dans le temps, et constitue 5 % de la flagrance ;
– la note de cœur, qui va diffuser de quinze minutes à quatre
heures ;
– la note de fond, qui va diffuser d’une à vingtquatre heures, et
constitue 15 % de la fragrance.
115
comprendre les mécanismes et passionné par la possibilité de
reculer de plusieurs années les méfaits des maladies de Parkinson
et/ou d’Alzheimer.
Le lendemain de la conférence, les organisateurs nous
faisaient savoir que nombre de personnes âgées se promenaient
dans les garrigues, penchées sur les thyms et romarins, pour en
distinguer les parfums différents. C’est cette anecdote qui nous a
décidé à mettre au point la Thyme Olfactive Stimulation, à utiliser
très simplement par les personnes concernées de plus en plus
nombreuses au-delà de la soixantaine.
L’équipe de Flore en Thym prépare un kit contenant différents
chémotypes de thym destinés à tester l’odorat et à le stimuler
régulièrement. Ces coussi-nets sollicitent mieux les lobes olfactifs,
plus que les huiles essentielles dont l’odeur est trop forte.
116
comme images (vécues, vues, entendues…) liées plus ou moins
fortement à la sexualité. Les spécialistes des médias exploitent
parfaitement ce filon mémoriel inconscient par les publicités,
scènes sexuelles dans les films ou magazines, audiovisuels.
6. Nos globules blancs au bout de 7 jours, les cellules intestinales
tous les 4 à 5 jours, les globules rouges 120 jours, celles du foie
une année.
7. Il y a 12 paires de nerfs crâniens.
8. M. Naudin et coll., Inserm UMR930, Université François
Rabelais, Tours.
117
11
C
haque chémotype de thym possède une saveur typée.
Ils peuvent donc être utilisés de manière différente en
cuisine. Voici quelques conseils d’utilisation :
– Le thymol : à utiliser en fleurs sur des finitions, sur des
tomates, ananas en carpaccio, huile d’olive. Huile de pépin de
raisin à aromatiser. Pâté de foie de volaille.
– Le carvacrol : pour marinade crue, décoction, en
remplacement du Zatar (mélange d’épices) dans le taboulé.
– Le linalol : à utiliser pour les viandes blanches, veau, poulet,
fricassées. Dans des plats à base de légumes (ex : brocoli,
lentilles). Pour des desserts.
– le thuyanol : pour sauces à base de vin rouge, braisage de
viande rouge, canard au sang. Aromatisation de baîaldi
(recette orientale d’aubergines farcies).
– Le géraniol (ou l’alpha-terpinéol) : pour la pâtisserie,
madeleine, sorbet, tuile au thym, guimauve, gaufres mais aussi
sur des poissons blancs pochés.
118
Battre deux œufs par personne additionnés d’une cuillère à soupe
d’eau pour quatre œufs, ajouter sel et poivre et une grosse
cuillère à soupe de feuilles de thym, laisser reposer une bonne
demi-heure.
Mettre dans une poêle chauffée à feu doux une cuillère à soupe
d’huile d’olive, puis verser le mélange après l’avoir battu à
nouveau.
Retourner régulièrement dans la poêle pour répartir la cuisson, et
ne pas laisser attacher, couper le feu avant que l’ensemble ne soit
trop cuit : une omelette doit toujours être servie baveuse, c’est la
condition de sa saveur et de sa biodisponibilité.
Quiche au thym
Suggestion de chémotype : linalol ou thymol
Farine de petit épeautre ou sarrasin, 1 oignon blanc, 1 cuillère à
café de feuilles de thym, 3 yaourts de brebis ou chèvre, 3 œufs,
tomme de brebis, huile d’olive, sel, poivre.
Préparer une pâte à tarte avec la farine de petit épeautre (ou
sarrasin pour les fortes intolérances au gluten), huile d’olive, sel,
eau, et une cuillère à café de feuilles de thym. Étaler dans un
moule à tarte, puis mettre à four doux pour sécher la pâte.
Faire un mélange avec 3 yaourts de brebis ou chèvre, trois œufs,
sel, poivre, 1 c à soupe rase de feuilles de thym, battre ; ajouter
un oignon blanc coupé en dés, et une grosse poignée de tomme
de brebis râpée.
Verser dans le moule et remettre à four moyen pour cuire le tout
sans excès, il n’est pas besoin de griller le dessus : il suffit que le
mélange soit pris comme un flan, les parfums n’en seront que
plus délicats ! Mettre un plat d’eau dans le fond du four pour
adoucir la cuisson.
Soupe de thym
Suggestion de chémotype : thymol ou géraniol
1 cuillère à soupe de thym en feuilles, 2 œufs, lait d’amandes en
poudre, 1 cuillère à soupe d’huile d’olive, sel et poivre.
119
Mettre à chauffer dans une casserole un litre d’eau, quand l’eau
frémit verser une bonne cuillère à soupe de thym, sel et poivre,
baisser le feu pour faire infuser. Dans un bol, battre deux œufs,
puis laisser de côté.
Ajouter dans la casserole deux cuillères à soupe de lait d’amandes
en poudre, délayer, puis verser les œufs en remuant vivement
jusqu’à ce que le mélange épaississe, sans laisser bouillir, ajouter
l’huile d’olive, remuer et couper le feu.
Crème de courgettes au thym
Suggestion de chémotype : thymol ou carvacrol
Quatre courgettes, un gros oignon, tomme de brebis ou pecorino,
1 cuillère à soupe de thym en feuilles, 1 grosse gousse d’ail, sel et
poivre, huile d’olive.
Laver quatre courgettes et un gros oignon. Enlever la queue des
courgettes et sans les éplucher, les couper en dés. Peler et couper
l’oignon.
Mettre au cuit vapeur cinq minutes, verser dans une casserole ;
tout de suite verser dessus une bonne cuillère à soupe de thym
feuilles, une gousse d’ail écrasée, sel et poivre.
Passer au mixer en ajoutant un demi verre d’eau et quatre
cuillères à soupe d’huile d’olive, servir avec des copeaux de
tomme de brebis ou pecorino.
Purée d’ail au thym
Suggestion de chémotype : thymol ou carvacrol
Une à deux têtes d’ail, feuilles de thym, sel, poivre, huile d’olive.
Éplucher une à deux têtes d’ail, mettre les gousses à cuire à la
vapeur douce 5 minutes, les verser dans un bol un peu profond.
Verser dessus 1 cuillère à café de feuilles de thym, sel et poivre, 1
ou 2 cuillères à soupe d’eau selon volume, et quatre cuillères à
soupe d’huile d’olive.
Mixer avec un plongeur en crème, puis couvrir d’huile d’olive.
Délicieuse en condiment sur viandes ou légumes, et en apéritif
comme la tapenade avec des bâtonnets de légumes.
120
Cuit à la vapeur douce, l’ail perd ses inconvénients olfactifs.
Flan de poireaux au thym
Suggestion de chémotype : thymol ou géraniol
Deux beaux poireaux bio, 1 oignon blanc doux, 4 cuillères à soupe
de lait d’amande bio en poudre, 4 œufs ; tomme de brebis, sel,
poivre, thym, huile d’olive.
Laver les poireaux, les couper en fines rondelles ; passer au cuit
vapeur cinq minutes, verser dans un plat à soufflet ; dans une
casserole, verser un demi-litre litre d’eau filtrée, ajouter le thym,
monter en chauffe et baisser lorsque l’eau frémit ; laisser cinq
minutes puis couper le feu, ajouter sel et poivre et verser le lait
d’amandes en poudre progressivement en remuant avec un fouet.
Râper en copeaux 100 grammes de tomme de brebis.
Battre les œufs et les verser sur les poireaux cuits, mélanger puis
verser petit à petit l’eau et le thym en délayant, ajouter la moitié
des copeaux, mélanger puis déposer le plat dans le cuit vapeur
puis couvrir et laisser cuire environ 30 minutes jusqu’à ce que le
mélange soit pris.
Servir chaud avec les copeaux restants répartis sur le dessus.
Crème anglaise au thym
Suggestion de chémotypes : géraniol ou linalol ou alpha-terpinéol
1/2 litre d’eau filtrée, 5 cuillères à soupe de lait d’amandes en
poudre, 4 jaunes d’œuf, 4 cuillères à soupe de sucre complet, 1
cuillère à soupe de thym
Faire chauffer l’eau jusqu’à ce qu’elle frémisse, ajouter le thym,
remuer, couvrir et laisser infuser au moins 5 minutes. Filtrer avec
une passoire fine, ajouter le lait en poudre d’amandes, une pincée
de sel, mélanger.
Battre les jaunes d’œuf avec le sucre dans un saladier, puis
ajouter progressivement le « lait » obtenu en battant avec un
fouet, reverser le mélange dans la casserole et remettre à feu
doux, tout en remuant régulièrement ; dès que la crème
commence à épaissir, avant qu’elle ne frémisse, enlever du feu,
121
continuer à remuer doucement quelques instants puis verser
doucement dans le saladier.
Servir tiède ou frais selon vos goûts, avec strudel, tarte tatin, pain
d’épices ou biscuit.
Huile au thym
Suggestion de chémotype : tous
Dans un flacon d’huile d’olive, glisser quelques branches de thym
frais, laisser macérer une semaine ou deux au soleil, avant
d’utiliser pour agrémenter légumes vapeur ou viandes, fromages
frais ou secs, ou sur des tartines de pain de petit épeautre ou
sarrasin. Peut s’utiliser sur la peau pour traiter brûlures
superficielles ou eczéma.
Infusion de thym
Suggestion de chémotype : tous
Avec de l’eau bouillante, chauffer votre théière, puis y verser 1
cuillère à soupe de thym, verser l’eau dessus et laisser infuser
cinq à dix minutes. Sucrer avec du miel.
À boire tout au long de la journée mais pas trop après 16 ou 17h,
car le thym est très tonique.
SORBET AU THYM
122
Eau pure (type
675 g Monter en température l’eau à
Volvic nature)
95°C rapidement afin d’éviter
Sucre semoule 600 g
l’évaporation. Infuser le thym à
Glucose atomisé 180 g couvert 20 minutes, ajouter le
Trimoline (sucre jus de citron. Filtrer.
75 g
inverti)
Mélanger à sec le sucre
semoule, le glucose atomisé
Fleurs de thym
20 g (faute de glucose atomisé
séchées
remplacer par de la trimoline).
Ajouter l’infusion, bien
mélanger. Porter à 85°C sans
ébullition, ajouter la trimoline.
Jus de citron
30 g Refroidir et stocker au froid.
jaune
Laisser maturer 12 heures
(facultatif) et turbiner.
COULIS D’ABRICOT Mélanger le sucre et la purée
d’abricot, porter à ébullition et
Purée d’abricot 150 g
cuire 2 mn. Laisser refroidir à
Sucre 50 g température ambiante puis
Huile d’olive CS incorporer l’huile d’olive à l’aide
d’un mixer jusqu’à obtention
Sirop à 25°B CS d’un équilibre de saveur.
MACARONS
123
Broyer puis tamiser la poudre
Poudre d’amande 350 g d’amande et le sucre glace.
Mélanger les blancs d’œufs et
les blancs déshydratés, les
Sucre glace 575 g monter fermement et les serrer
avec le sucre. Mélanger les
deux masses et incorporer la
Blanc d’œuf 25 cl
gelée de thym dans un peu
d’appareil et l’ajouter en
Blanc déshydraté 2g macaronnant (opération qui
consiste à retravailler l’appareil
pour le faire retomber, à le
Gelée de thym 25 g rendre presque coulant).
Coucher les macarons avec une
douille n° 10 sur 8 cm de
Sucre semoule 70 g diamètre, laisser croûter et
cuire à 180 °C
CRÈME AU THYM
Lait 20 cl Porter le lait de thym à
ébullition, laisser infuser
Fleurs de thym 20 g quelques minutes, passer au
chinois pour retirer les petites
œufs 50 g
sommités de thym. Blanchir
Sucre 50 g les œufs, le sucre et la
maïzena, verser le lait chaud,
Maïzena 25 g mélanger et cuire l’ensemble
comme une pâtissière puis
Gélatine feuille 4g
ajouter les feuilles de gélatine.
Glucose 25 g Monter les blancs en meringue
italienne et incorporer à la
Sucre 125 g pâtissière.
124
9. Christine Bouguet-Joyeux, Guide pratique de Gastronomie
familiale, L’Art et le Plaisir pour la Santé et Tout à la vapeur douce
100 nouvelles recettes, Éditions François-Xavier de Guibert.
10. Georges Rousset et Thierry Rousset, Aimer la cuisine du
Languedoc-Roussillon, éditions Ouest-France, 2013. Voir aussi
Cuisine du Languedoc-Roussillon d’hier et d’aujourd’hui, édition
Ouest-France, 2006.
125
CONCLUSION
S
i simple en apparence, mais si complexe lorsque l’on si
intéresse d’un peu plus près, le thym est une plante des
plus surprenantes. Nous retiendrons sans aucun doute sa
diversité d’odeurs. En constante évolution, elle lui permet de
s’adapter à différentes conditions environnementales ainsi qu’à
leurs variations ou de repousser les attaquants tout en attirant ses
pollinisateurs.
Nous retiendrons aussi sa capacité à former des populations
sauvages très denses. Une particularité qui, associée aux
nombreuses vertus de son huile essentielle, fit du thym une des
plantes socles du développement de la cueillette dans les
garrigues. Cette activité permit de fournir, pendant plusieurs
siècles, des volumes considérables de plantes réputées pour leur
grande qualité, participant ainsi à l’essor de Montpellier.
Pour de multiples raisons, la production de plantes
aromatiques et médicinales régressa fortement au XXe siècle. Mais
aujourd’hui, face à une demande en constante augmentation
depuis plusieurs décennies, le (re)développement de filières
locales de production est à l’ordre du jour. Ce développement
autour des plantes aromatiques et médicinales doit se faire de
manière être cohérente et durable. La recherche d’un équilibre
entre cueillette et culture, la mise en place de méthodes de
gestion et de préservation des ressources naturelles ou encore la
connaissance scientifique fine des plantes et de leur écologie, sont
quelques-unes des clés qui permettront de favoriser un
développement socio-économique local intégré harmonieusement
dans son environnement.
L’histoire nous a montré combien les spécialistes
montpelliérains de la santé furent liés aux ressources naturelles
locales. Ils impliquèrent des herboristes, des apothicaires, des
126
pharmaciens, des médecins à renommé internationale, jusqu’aux
chirurgiens, qui avec de solides connaissances en pharmacopée,
firent les bases et l’essor de la Faculté de Médecine de Montpellier.
Avec ses chémotypes, le thym appartient à la phytothérapie et
à l’aromathérapie qui prennent aujourd’hui une place respectable
dans les alternatives thérapeutiques considérées comme
médecines douces.
Dans les pathologies bénignes, tous les organes peuvent en
profiter à la fois pour les soulager lorsqu’ils sont malades et même
pour prévenir leurs atteintes. Les thérapies utilisant le thym
méritent d’être mieux connues des médecins et du grand public
pour leur efficacité. Ils peuvent se substituer alors à des
médications coûteuses aux effets secondaires souvent
indésirables.
Au delà de ces effets thérapeutiques re-découverts, le thym
nous livre sa vertu princeps, capable de stimuler énergiquement
et agréablement nos lobes olfactifs. On sait aujourd’hui combien,
dans les maladies neurodégénératives les plus fréquentes,
Alzheimer et Parkinson, la stimulation de l’odorat va devenir un
des exercices les plus recherchés pour tous ceux qui veulent
prévenir ou retarder ces handicaps qui en 2020 en France
atteindraient 2 millions de personnes.
La thyme-therapy en médecine quotidienne, la thyme olfactive
stimulation pour la rééducation et la prévention dépendent de la
qualité naturelle et de la bonne gestion du patrimoine
exceptionnel que représentent nos garrigues méditerranéennes.
127
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132
TABLE DES MATIÈRES
REMERCIEMENTS
AVANT-PROPOS
Première partie
Plus de mille ans en Languedoc
CONCLUSION
133
Deuxième partie
Biologie et Écologie du thym
2. HABITAT ET RÉPARTITION.
134
Quand et comment récolter le thym ?
La transformation du thym.
Comment conserver le thym ?
Les différents chémotypes de thym se récoltent-ils tous de la
même manière ?.
Troisième partie
La santé par le thym
2. COMPOSITION DU THYM
Nutriments du thym sec, valeurs moyennes et pourcentage des
besoins quotidiens pour 100 g
Les flavonoïdes.
Les polyphénols.
7. LE THYM EN RECHERCHE
En pharmacologie expérimentale
En recherche cancérologique in vitro.
135
9. LE THYM AU JOUR LE JOUR ET EN MÉDECINE QUOTIDIENNE
Le thym en dermatologie
Le thym en pathologie buccale, ORL et pneumologie
Le thym en gastro-entérologie
Le thym en urologie.
Le thym en cardiologie et pathologie vasculaire
Le thym en rhumatologie
Le thym en homéopathie
Le thym pour le bien-être
CONCLUSIONS
136
Achevé d’imprimer par XXX
en avril 2015
N° d’imprimeur : XXX
137