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Cahier de texte de l’année 2023-2024

Terminale HLP

Septembre

Semaine du 11 au 15

Présentation du programme et du cours.

Présentation des exposés du premier semestre .

Cours 1 : La recherche de soi

Introduction

a- Le paradoxe de la recherche de soi.


→ La lettre volée de Edgard Poe comme paradigme de la quête de soi .

b- Le problème de la connaissance de soi.


Nous sommes obscurs à nous même : thème de l’inquiétante étrangeté.

C- Le problème de l’identité
Identité et temporalité → Existe t-il une identité qui perdure

I- La recherche de soi n’est-elle pas illusoire ?

A- « Connais toi toi même » : contresens et malentendus sur cette formule socratique.

→ Pourquoi cette formule n’a rien à voir avec les pratiques de développement personnel.

1- L’origine religieuse du « connais toi toi même ».


→ Invitation à connaître sa place dans le monde entre les dieux et les bêtes.
Exemple d’Ulysse et Calypso

Vocabulaire : identité, substance.

Pour le 18 septembre
Etre guidé pour devenir authentique, libre et heureux, n’est-ce pas le paroxysme de la
contradiction ? Si cela peut paraître réconfortant pour l’individu seul face à lui même de se
raccrocher aux brindilles du développement personnel, ce dernier fait du « moi » et de la
subjectivité la plus intime la chose la plus généralisable et impersonnelle qui soit ! Au lieu de
réconforter, elle abîme. Le « moi » devient par cette généralisation un « moi » commun, un
« moi » de tout le monde et donc de personne. En quoi serait-ce authentique de suivre une
méthode applicable à tous ? Etre authentique, c’est suivre son propre chemin. Comment l’être si
l’on nous dit quel chemin prendre ? Cela revient à dire : faites ce que je vous dit (ou dicte) et vous
serez enfin vous même ! N’est-ce pas le summum de l’absurde car être soi-même suppose agir à
partir de soi même et de personne d’autre. Etre soi même suppose une forme d’autonomie.
L’autonomie se définit par le fait de se fixer à soi-même sa propre loi. Si la loi vient d’ailleurs,
c’est que la loi n’est pas « propre », au sens où elle n’est pas « sienne », et aucune autonomie ne
peut advenir. Le raisonnement est fallacieux car il invite à chercher dans une forme
d’hétéronomie les sources de l’autonomie et de l’authenticité. Etre vrai en suivant une méthode
de développement personnel revient à adopter un code, suivre des règles, jouer un jeu, tout en
pensant et prétendant se rapprocher de sa propre vérité. Etre vrai tout en étant codifié, voilà
en quoi consiste l’authenticité inauthentique du développement (im)personnel. La rencontre
véritable avec soi même suppose au contraire une certaine forme de « naturel » ou de
spontanéité, d’ouverture à l’autre, de passion, d’involontaire.

Julia de Funès, Le développement (im)personnel

Répondez aux questions suivantes :

1- Que signifie le mot : authentique ? (faites des recherches dans le dictionnaire). Cherchez des
synonymes et des antonymes.

Demandez vous par exemple ce que signifie ce terme quand on parle d’un objet (ex : un tableau
authentique), une histoire authentique ou une personne.

3- En quoi la démarche du développement personnel est-elle contradictoire selon Julia de Funès ?

Donnez au moins deux raisons.

→ Faites bien ici attention aux concepts de :


• général par opposition à singulier (qui est ici implicite)
• et d’autonomie par opposition à l’hétéronomie.

3- En quoi consisterait la véritable authenticité selon Julia de Funès ?


4- En quel sens l’art pourrait-il nous permettre de devenir authentiques ?

Semaine du 18 au 22

II- La recherche de soi n’est-elle pas qu’une illusion ?

A- « Connais toi toi même » : contresens et malentendus sur cette formule socratique.

a- L’origine religieuse du « connais toi toi même ».


→ Connaître sa place dans le monde pour ne pas sombrer dans l’hubris (démesure, orgueil).
→ Exemple du voyage d’Ulysse (quête intérieure).
→ Exemple du stoïcisme : ce qui dépend de moi et ce qui n’en dépend pas.

b- Son interprétation socratique.


Cf : L’Apologie de Socrate
→ Socrate noue invite à distinguer en nous même entre savoir et ignorance.
→ Point de départ de la recherche socratique : « je sais que je ne sais rien ».
→ Le « connais toi toi même » n’est pas une concentration narcissique sur soi mais au
contraire un dépassement de soi vers l’universel de la vérité. Le souci de soi est un souci de la
vérité.

Questions posées aux élèves :


• En quel sens le « connais toi toi même » de Socrate se distingue t-il de son sens
originel ?
• En quoi la pensée socratique est-elle révolutionnaire ?
• Ecrivez une conclusion de quelques lignes afin de montrer en quoi la pensée socratique
ne saurait être associée à la démarche de développement personnel (résumez votre
analyse en trois points).

B- L’invention du moi.

1- A la recherche d’un point fixe : le cogito.


a- Le doute méthodique

→ Distinction entre le doute méthodique et le doute sceptique.


→ Nature et fonction du doute : radical, hyperbolique afin de trouver une certitude.

Première étape : le doute porte sur la connaissance sensible (les illusions des sens sont ici un
premier argument pour douter).

Vocabulaire : hubris, savoir/ ignorance, docte ignorance, maïeutique, doute méthodique


(radical, hyperbolique).

Semaine du 24

B- L’invention du moi (suite)

Les étapes du doute.

a- Les connaissances acquises par la tradition car elles ne sont pas


fondees en raison (la simple memoire ne saurait fonder un savoir). Ces
connaissances sont vraisemblables mais incertaines.
b- La connaissance sensible car elle repose sur des apparences
douteuses. Rien ne permet de distinguer entre illusion et realite.
Le doute ne porte pas ici sur les sens mais sur le jugement que je porte sur
mes sensations (perceptions). Je n'ai pas de moyen de savoir a partir de
mes sens si le monde qui est en face de moi est vrai.
→ Deux arguments pour douter : les illusions perceptives et l’argument du
reve (ma vie n’est peut-etre qu’un reve).
c- La connaissance rationnelle car rien ne me garantit que je ne suis pas
trompe lorsque je pense que 2+2=4.
→ Deux arguments pour douter (le doute devient hyperbolique) :
l’argument du Dieu trompeur et celui du malin génie.

Conséquence : le solipsisme.
Ainsi, le monde a l'exterieur de moi n'existe plus, je n'ai plus de corps. Je
suis par consequent seul au monde (la notion meme de monde est
douteuse). Cette situation s'appelle le solipsisme.

→ Le solipsisme (du latin solus, seul et ipse, soi-meme) est une ≪ attitude ≫
generale d'apres laquelle il n'y aurait pour le sujet pensant d'autre realite
que lui-meme.
Ce qui met fin au doute : le cogito.
Le malin genie peut-il me tromper sur ma propre existence ? Non car s'il y a
un trompeur, il faut une victime ≪ je ≫ existe comme objet de tromperie.
Le ≪ je pense ≫ conditionne le doute lui meme ainsi que tous les autres
actes de l'esprit : entendre, imaginer, concevoir, vouloir et meme percevoir.
Descartes definit ainsi la conscience : « par le nom de pensée, je
comprends tout ce qui est tellement en nous que nous en sommes
immédiatement connaissant ».

« Je suis une chose qui pense »


"Je connus de là que j'étais une substance dont toute l'essence ou la nature
n'est que de penser »
Substance : terme utilisé par la philosophie scolastique pour désigner une
réalité permanente dans les choses changeantes (Sous entendu que l'on ne
peut connaître que ce qui est permanent et ne change pas)
Je suis la même personne par dela les changements qui m’affectent, y
compris les changements corporels qui n’affectent pas mon essence.

Vocabulaire : doute méthodique/doute sceptique, doute ontologique, solipsisme, substance,


dualisme.

Correction du devoir sur le texte de Julia de Funès : Le développement (im)personnel


1- Qu’est-ce que l’authenticité ?

Notre époque individualiste se distingue par l'affirmation de soi, l’injonction à être soi même.
Il existe notamment toutes sortes de techniques « de réalisation de soi », de coaching.
Certains ouvrages de développement personnel ou magazines féminins prétendent détenir la
clé du bonheur. Que nous disent-ils ? « Découvrez la personne que vous êtes vraiment » ,
« devenez les uniques agents de votre bonheur ». La clé du bonheur réside dans l'authenticité,
dans l'acceptation de soi ou dans le désir de coïncider avec soi même.
Mais qu'est-ce qu'être authentique ? L'est-on de façon spontanée et naturelle ou doit-on
apprendre à le devenir par un effort sur soi même ? S'agit-il d'un travail ou faut-il se contenter
d'être ?

On peut distinguer trois sens de l'authenticité.

• On qualifie d'authentique l'original par opposition à la copie comme lorsqu'on parle


d'un authentique tableau. L'authentique s'oppose alors à l'imitation, au produit frelaté.
Un tableau est authentique lorsqu’il est ce pour quoi il se donne. On oppose ici l’être et
l’apparence. L’authenticité a aussi un rapport avec ce qu’on appelle les origines. Ce qui
est authentique est ce qui n’a pas rompu avec les origines. Ce tableau est authentique,
cela veut dire encore : il est bien sorti des mains de peintre-là ; il a bien cette origine-
là ; en lui, l’origine ne s’est pas perdue. Bien plus, en lui, on retrouve l’origine qu’on
pensait avoir perdue. L’authenticité comme vérité des choses ne concerne donc pas
seulement leur rapport aux apparences, mais encore leur rapport aux origines ou à
l’origine ; d’où l’épithète « original » pour dire « authentique ». Cela veut dire que ce en
quoi l’origine continue est vrai, que la vérité, c’est de conserver et de ne pas perdre
l’origine. Ainsi nous sommes impressionnés devant un authentique Caravage : on se
dit, c’est bien Caravage qui l’a peint ; il vient de cette illustre origine.

• Par extension, sera dit authentique ce dont la vérité ne peut être contestée. Le récit
d'un historien est authentique s'il nous raconte des faits qui ont vraiment eu lieu.
L'authenticité est ce dont la vérité ne peut être contestée au contraire par exemple
d'un faux témoignage qui est un récit fabriqué en vue de tromper autrui.

• On parle enfin de l'authenticité pour des sujets, des personnes et non pas simplement
pour des objets. On perçoit souvent l'authenticité chez une personne sans savoir à quoi
elle tient. On peut dire cependant qu'elle se caractérise par une forme de spontanéité ,
de sincérité. Quelqu'un d'authentique est fidèle à soi même, il exprime la vérité
profonde de son être au lieu d'adopter des attitudes empruntées, artificielles. On se
révèle tel qu'on est et non tel qu'on voudrait paraître. La fausseté du mensonge s’y
oppose. Le menteur produit de lui-même et de manière intentionnelle une fausse
apparence. Le menteur produit des paroles qui sont éloignées de leur origine. Mais il
faut alors dépasser la considération du mensonge individuel. On établit souvent un lien
entre vérité et nature, fausseté et culture, car, en effet, on reproche souvent à la société
de nous obliger à porter un masque, à dissimuler nos pensées, à vivre non seulement
en masquant la réalité de ce que nous sommes, mais encore en construisant des
apparences trompeuses destinées à autrui. Le mensonge serait une règle imposée par
la vie en société. L’authenticité consisterait alors en une vie qui ne serait plus marquée
par les contraintes sociales en guise d’étiquette, de formes, de précautions de toutes
sortes destinées à rendre possible la vie en commun, mais en réalité aliénantes pour
les individus. D’où l’aspiration à une vie sans détours, sans masque, dans laquelle tout
se dit et se montre, une vie authentique. On retrouve aussi dans ce cas l’idée de
proximité avec l’origine, puisque cette vie authentique serait une vie plus naturelle, qui
n’aurait pas été dénaturée par la société. L’origine, ici, c’est la nature profonde de
l’individu, son « moi profond ». Bien entendu, cette authenticité est discutable. Une
telle origine existe-t-elle ? Ce « moi profond » existe-t-il ?

2- En quoi la démarche de développement personnelle est-elle contradictoire ?

Est contradictoire un jugement qui affirme d’une même chose elle même et son contraire.

Or, le développement personnel se contredit au moins pour deux raison :


→ La première est qu’elle consiste à parler à tous de la même manière tout en prétendant
permettre à chacun de révéler sa vérité la plus intime et profonde : on fait de « la subjectivité
la plus intime la chose la plus généralisable ». Le général est ce qui s’applique à une majorité
ou une totalité de personnes alors que l’individu est censé être singulier, c’est à dire que son
existence , son histoire sont censées être uniques, incomparables. Il y a bien des points
communs entre les hommes, des communautés de vie ou de pensée mais la manière dont
nous vivons notre vie de l’intérieur est absolument singulière tout comme notre rapport à la
mort. Ainsi, la manière dont on vit un deuil peut-il se réduire à un cheminement en sept
étapes que tous devraient suivre invariablement ? On demande ainsi à tous d’être soi même
en suivant des modèles, des règles pré-déterminées.
→ La deuxième consiste dans une injonction extérieure à être autonome. Or, l’autonomie
consiste à se donner à soi même sa propre loi, à être à l’origine de la loi à laquelle on obéit.
Attention, l’autonomie ne consiste pas à se retrancher en soi même en refusant tout conseil
venant de l’extérieur. Julia de Funès montre par ailleurs que nous avons besoin des autres
pour nous construire nous même, par exemple à travers la relation amoureuse ou amicale. Le
refus des autres peut relever de l’orgueil narcissique qui est une autre forme d’hétéronomie
(fait de dépendre de quelque chose d’étranger à soi même). L’homme qui est soumis à des
passions comme l’orgueil ou l’égocentrisme n’est pas libre. C’est pourquoi Julia de Funès
montre que l’authenticité suppose aussi l’ouverture à l’autre (fin du texte). En revanche, cet
autre ne saurait être un coach dictant des règles générales à suivre de telle sorte que l’on finit
par se fondre dans un certain conformisme social.

3 En quoi consisterait la véritable authenticité ?

Justement, il s’agit de s’ouvrir aux autres, à l’imprévu là où le développement personnel


semble nous donner un programme à suivre. Cela suppose que l’authenticité ne consiste pas à
retrouver un soi qui serait enfoui en nous avec de supposées valeurs mais être ouverts au
devenir. Le moi n’est pas une donnée originaire mais quelque chose qui doit advenir dans le
temps. Etre soi consiste à s'éprouver comme une existence en cours de création, une existence
liée aux éléments du monde et aux autres. Dans ce sens, l'existence ne s'appartient pas elle
même. L'illusion est justement de croire que l'on est une liberté souveraine, que l'on se
construit dans un pur rapport de soi à soi. Autrui vient donc désarmer toutes mes certitudes,
ébranler ma subjectivité pleine d'elle même. Ni l'autre, ni moi ne saurions être réduits à des
identités connaissables. Le sujet authentique est le lieu de l'accueil de l'autre et de l’imprévu.

4- En quel sens l’art pourrait-il nous permettre de devenir authentiques ?

Le rapport avec l’art est ici évident dans la mesure où il est question justement de création.
L’artiste, nous dit le philosophe Henri Bergson, voit la réalité mieux que les autres car il la
regarde sans le voile des conventions sociales, des généralités liées au langage qui réduit tout
à des concepts abstraits. Le poète s’affranchit d’ailleurs de cette contrainte du langage en
créant des images, en se rapprochant également de la musique dont l’essence même consiste
dans le devenir. L’artiste ne se contente pas d’exprimer des émotions, il accepte justement de
se mettre en danger de se dessaisir de lui même en créant quelque chose d’absolument
nouveau. Cela suppose justement une attention au monde plus qu’une attention au moi au
sens narcissique du terme.

Vocabulaire : authentique, développement personnel, général/singulier

Octobre

Semaine du 2-10

Echange autour du questionnaire de Proust.


Visite du CDI et présentation d’ouvrages ayant un lien avec le programme.

Exposé de Niana Carret et Thelma Alvity : « Les mécanismes de l’aliénation sectaire ».

Suite du cours sur la recherche de soi :

Analyse critique : Difficultés soulevées par cette conception du moi cartésien :

→ Le problème du corps
Le dualisme cartésien pose le problème du lien entre l’â me et le corps.
Il pose aussi la question de savoir pourquoi nous nous sentons étroitement unis à ce corps :
« je ne suis pas dans mon corps comme un pilote en son navire » Descartes.

→ Nous sommes des êtes temporels ( analyse d’un texte de Hume)


Débat entre Descartes et les empiristes : La substance pensante censée me définir n’est-elle
pas une notion abstraite, métaphysique et introuvable ? Et surtout, elle ne prend pas en
compte une donnée essentielle de notre expérience vécue : le changement !

« Il est des philosophes qui imaginent que nous sommes à chaque instant intimement conscients
de ce que nous appelons notre MOI, que nous en sentons l’existence et la continuité d’existence, et
que nous sommes certains, avec une évidence qui dépasse celle d’une démonstration, de son
identité et de sa simplicité parfaites(…) Pour moi, quand je pénètre le plus intimement dans ce
que j’appelle moi-même, je tombe toujours sur une perception particulière ou sur une autre, de
chaleur ou de froid, de lumière ou d’ombre, d’amour ou de haine, de douleur ou de plaisir. Je ne
parviens jamais, à aucun moment, à me saisir moi-même sans une perception et je ne peux
jamais rien observer d’autre que la perception. Quand mes perceptions sont absentes pour
quelque temps, quand je dors profondément, par exemple, je suis, pendant tout ce temps, sans
conscience de moi-même et on peut dire à juste titre que je n’existe pas ».
David Hume, Traité de la Nature Humaine, livre I, 4ème partie, section V I
→ Analyse de la notion de substance sous tendue dans ce que nous appelons le MOI.
→ Lorsque nous nous analysons, nous ne trouvons jamais ce moi mais seulement des
perceptions particulières.

Vocabulaire:Moi, substance, â me/corps.

Semaine du 9-10
Suite de l’analyse du texte de Hume :
→ Exemple de la madeleine de Proust.
→ Contre épreuve de Hume : le sommeil comparé à une mort momentanée à soi même.
2- Le moi est haïssable.
Cf : Analyse du texte de Pascal

Un homme qui se met à la fenêtre pour voir les passants ; si je passe par là, puis-je dire qu’il s’est
mis là pour me voir ? Non ; car il ne pense pas à moi en particulier ; mais celui qui aime
quelqu’un à cause de sa beauté, l’aime-t-il ? Non : car la petite vérole, qui tuera la beauté sans
tuer la personne, fera qu’il ne l’aimera plus.
Et si on m’aime pour mon jugement, pour ma mémoire, m’aime-t-on, moi ? Non, car je puis
perdre ces qualités sans me perdre moi-même. Où est donc ce moi, s’il n’est ni dans le corps, ni
dans l’âme ? et comment aimer le corps ou l’âme, sinon pour ces qualités, qui ne sont point ce qui
fait le moi, puisqu’elles sont périssables ? car aimerait-on la substance de l’âme d’une personne,
abstraitement, et quelques qualités qui y fussent ? Cela ne se peut, et serait injuste. On n’aime
donc jamais personne, mais seulement des qualités. Qu’on ne se moque donc plus de ceux qui se
font honorer pour des charges et des offices, car on n’aime personne que pour des qualités
empruntées.

Pascal, Pensées, "Qu’est-ce que le moi ?" Laf. 688, Sel. 567.
Ce que n’est pas le moi-même

→ Une silhouette (un passant ou quidam)

=> On doit se demander ce qu’il y a de singulier et pour cela interroger cette notion à partir de
la relation amoureuse ( opposé de la démarche réflexive de Descartes).

« Qui aime t-on quand on dit qu’on m’aime moi ? »

Problème : le moi reste introuvable (nos qualités étant changeantes et éphémères)

Conclusion : « On aime jamais personne que des qualités empruntées)

Cf : Le moi est haïssable » (nous accordons trop d’importance au moi!)

Vocabulaire : Amour propre, moi, substance/accident, général/particulier/singulier, personne


(persona).

3-Amour de soi et amour propre


Cf : Rousseau, L’origine et les Fondements de l’Inégalité Parmi les Hommes.
→ Image de la statue de Glaucus.
→ L’état de nature permet de mesurer la distance qui nous sépare de notre moi originaire.
→ Comment l’amour de soi et la pitié ont dégénéré en amour propre.
« Il ne faut pas confondre l’amour-propre et l’amour de soi-même ; deux passions très différentes
par leur nature et par leurs effets. L’amour de soi-même est un sentiment naturel qui porte tout
animal à veiller à sa propre conservation et qui, dirigé dans l’homme par la raison et modifié par
la pitié, produit l’humanité et la vertu. L’amour-propre n’est qu’un sentiment relatif, factice et né
dans la société, qui porte chaque individu à faire plus cas de soi que de tout autre, qui inspire aux
hommes tous les maux qu’ils se font mutuellement et qui est la véritable source de l’honneur ».
Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes, 1755

Vocabulaire : amour de soi, amour propre, état de nature.

Exposé :

Vincent Colomb : Le voyage d’Ulysses est-il un voyage intérieur ?


Enzo Roux et Anouk Chelle-Deforges : Le narcissisme.

Semaine du 16 au 20

Cérémonie de commémoration de l’assassinat de Samuel Paty et de recueillement


après l’assassinat de Samuel Bernard.

→ Réflexion en commun à partir d’une conférence de Delphine Horvileur : « La spiritualité est-


elle compatible avec la laïcité ? »
https://www.youtube.com/watch?v=dlBxa4EgBS4
II- Le rôle de l’éducation dans la recherche de soi. (É ducation, transmission et
émancipation)

1- La maïeutique socratique comme modèle.

→ Analyse de la maïeutique socratique à partir de l’exemple du Ménon.

2- L’éducation négative selon Rousseau : éducation à la liberté.

→ Problématique : Mais comment l'éducation qui détermine à la fois le but, la méthode et la


nature des connaissances transmises, peut-elle en même temps accroître la liberté ? N'y a t-il
pas enfin un paradoxe à vouloir éduquer à une liberté que nous sommes censés tous déjà
posséder en droit ?

Vocabulaire : Education, maïeutique, autonomie/hétéronomie.

Exposés :

Marie Prat Marin : Une longue contemplation de soi dans le miroir peut-elle être dangereuse ?

Elsa Mara et Clarence Lunneau Chavanne : Présentation du portrait de Dorian Gray.

Lounna Moulin et Alix de Saint Afrique : Le moi est-il haïssable ?

Pour le 6-11

Votre petite madeleine de Proust

« Et tout d'un coup le souvenir m'est apparu.


Ce goût, c'était celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin à Combray (parce
que ce jour-là je ne sortais pas avant l'heure de la messe), quand j'allais lui dire bonjour dans sa
chambre, ma tante Léonie m'offrait après l'avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul. La
vue de la petite madeleine ne m'avait rien rappelé avant que je n'y eusse goûté ; peut-être parce
que, en ayant souvent aperçu depuis, sans en manger, sur les tablettes des pâtissiers, leur image
avait quitté ces jours de Combray pour se lier à d'autres plus récents ; peut-être parce que, de ces
souvenirs abandonnés si longtemps hors de la mémoire, rien ne survivait, tout s'était désagrégé ;
les formes - et celle aussi du petit coquillage de pâtisserie, si grassement sensuel sous son plissage
sévère et dévot - s'étaient abolies, ou, ensommeillées, avaient perdu la force d'expansion qui leur
eût permis de rejoindre la conscience. Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la
mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus
immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps,
comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans
fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir ».
Marcel Proust , Du côté de chez Swann (1913)

En vous inspirant de cet extrait de la Recherche du Temps Perdu , montrez comment une
expérience sensible (odeur, saveur, musique) peut avoir le pouvoir de faire remonter des
souvenirs involontaires nous donnant accès à notre moi profond.

→ Confrontez cette analyse à celles de Hume et de Descartes sur la recherche de soi .

Novembre

Semaine du 6

II- Le rôle de l’éducation dans la recherche de soi. (Suite)


2- L’éducation négative selon Rousseau : éducation à la liberté.

a- Distinction entre éducation et instruction

→ Importance du modèle stoïcien :


Vivre est le métier que je lui veux apprendre. En sortant de mes mains il ne sera, j’en conviens, ni
magistrat, ni soldat, ni prêtre : il sera premièrement homme ; tout ce qu’un homme doit être, il
saura l’être au besoin tout aussi bien que qui que ce soit, et la fortune aura beau le faire changer
de place, il sera toujours à la sienne. […]
Notre véritable étude est celle de la condition humaine. Celui d’entre nous qui sait le mieux
supporter les biens et les maux de cette vie est à mon gré le mieux élevé : d’où il suit que la
véritable éducation consiste moins en préceptes qu’en exercices. Nous commençons à nous
instruire en commençant à vivre ; notre éducation commence avec nous ; notre premier
précepteur est notre nourrice. Aussi ce mot éducation avait-il chez les anciens un autre sens que
nous ne lui donnons plus : il signifiait nourriture. […] Ainsi l’éducation, l’institution, l’instruction
sont trois choses aussi différentes dans leur objet que la gouvernante, le précepteur et le maître.
Mais ces distinctions sont mal étendues ; et pour être bien conduit, l’enfant ne doit suivre qu’un
seul guide ».

b- Que veut dire, « éduquer selon la nature ? »


Trois états de l’enfant auxquels correspondent trois sortes d’éducation (par la nature, par les
choses, par les hommes)
Important : L’éducation par les hommes doit être au service de la nature.
L’éducation selon Rousseau se présente comme une éducation négative consistant à laisser
l’enfant se développer selon sa nature propre.
Pour résumer : L’éducation doit s’appuyer sur l’expérience, sur la nécessité des choses et
empêcher la naissance des passions négatives, non pour instruire du bien mais pour
empêcher les causes qui font naître le désir du mal.
Vocabulaire : éduquer selon la nature, amour propre, état de nature, transparence, autonomie,
éducation négative, stoïcisme.
Analyse critique du modèle éducatif de Rousseau
La pédagogie de Rousseau repose sur l’idée d’un moi originel, authentique qu’il s’agirait de
retrouver en ne se laissant pas corrompre par la considération du regard d’autrui. L’idée est
de faire naître une conscience sans intériorité qui serait dans un rapport immédiat aux
choses.
L’école telle que nous la connaissons aujourd’hui apparaîtrait évidemment aux yeux de
Rousseau comme un obstacle à ce développement naturel de l’enfant. Autrui n’est pas ici
considéré comme un élément essentiel de cette éducation car il doit s’effacer comme tel.

1- Elle impose des règles et contraint la volonté.


2- Elle s’adresse à une collectivité et non à des individus en particulier.
3- Elle propose le même enseignement pour tous.
4- Elle n’éduque pas mais instruit à travers des connaissances qui peuvent apparaître difficiles
et abstraites.

Mais on peut aussi défendre ce modèle éducatif qui ne repose pas sur la même conception de
l’individu.

1- Hegel montre notamment que la contrainte est le début de l’apprentissage de la liberté.


Etre libre, ce n’est pas en effet suivre ses désirs, cela suppose aussi d’aller contre ses désirs
pour se donner à soi même sa propre loi.
Hegel distingue trois moments dans l’apprentissage de la liberté :
→ Une première phase où le sujet vit spontanément dans l’immédiateté de son désir, où il est
entièrement tourné vers lui même.
→ Une phase de soumission qui force l’individu à sortir de son vouloir capricieux.
→ Le moment où l’individu se réalise comme lettre libre et autonome, c’est à dire apte à se
commander.

2- Cela suppose que l’enfant soit en quelque sorte arraché à lui même, à son milieu familial qui
est le règne du sentiment pour se frotter aux autres à l’école qui est le règne de la loi. Dans le
vocabulaire de Hegel, cela signifie que la volonté particulière doit être brisée pour accéder à la
conscience de l’universel. Dans l’école, l’enfant n’est pas aimé pour lui même (ce qui est le cas
de la famille), mais il est respecté pour ce qu’il fait.

Exposé
Quentin Garnier et Laura Metrat : Commentaire de cette affirmation de Beethoven : « La
musique est plus haute que toute sagesse et toute philosophie ».

Semaine du 13- 11

Dernière critique de l’école et réponse : Elle n’éduque pas mais instruit à travers des
connaissances qui peuvent apparaître difficiles et abstraites.

→ Les connaissances acquises sont plus grandes que nous.


→ Elles nous apprennent à nous déprendre de nous même à nous arracher à nous même pour
penser avec les autre.

Cf : Delphine Horvilleur
L’école laïque, Républicaine pour tous est un lieu d’émancipation dans la mesure où elle nous
ouvre à une forme de transcendance permanente contre les replis identitaires.
→ Nous sommes en effet le produit de la rencontre avec ce qui n’est pas nous, la rencontre
avec un monde extérieur qui créer en nous de l’intérieur.
→ L’éducation est une conscience de ce qu’on doit à l’autre dans ce que l’on est devenu.
Vocabulaire : liberté /autonomie, émancipation, altération/identité, identitarisme.

III- Le rôle de l’art dans la recherche de soi. (Expressions de la sensibilité)

On est donc jamais soi même mais on le devient par un processus d’altération, c’est à dire par
une expérience de l’altérité. Tel est justement le rô le de l’art, particulièrement dans le rapport
qu’il nous permet d’entretenir avec la beauté.

A- La fonction de l’art est d’exprimer la conscience de soi.

Cf : Analyse de la pensée de Hegel dans l’Esthétique.

« Cette conscience de lui-même, l’homme l’acquiert de deux manières : théoriquement, en


prenant conscience de ce qu’il est intérieurement, de tous les mouvements de son âme, de toutes
les nuances de ses sentiments, en cherchant à se représenter à lui-même, tel qu’il se découvre par
la pensée, et à se reconnaître dans cette représentation qu’il offre à ses propres yeux. Mais
l’homme est également engagé dans des rapports pratiques avec le monde extérieur, et de ces
rapports naît également le besoin de transformer ce monde, comme lui-même, dans la mesure où
il en fait partie, en lui imprimant son cachet personnel. Et il le fait pour encore se reconnaître lui-
même dans la forme des choses, pour jouir de lui-même comme d’une réalité extérieure. On saisit
déjà cette tendance dans les premières impulsions de l’enfant : il veut voir des choses dont il soit
lui-même l’auteur, et s’il lance des pierres dans l’eau, c’est pour voir ces cercles qui se forment et
qui sont son œuvre dans laquelle il retrouve comme un reflet de lui-même. Ceci s’observe dans de
multiples occasions et sous les formes les plus diverses, jusqu’à cette sorte de reproduction de soi-
même qu’est une œuvre d’art ».
[G.-W Hegel, Introduction à l’esthétique, 1832, Aubier]

1- La prise de conscience théorique de soi.

Analyse de la notion de conscience réflexive (retour de la pensée sur elle même).


Pb : Cette contemplation de soi par soi ne nous donne pas une image stable de nous même.

Vocabulaire : Conscience de soi, réflexivité.

Exposés :

Ly-Sinn Noun : « Dans quelle mesure l’art est-il un reflet de la conscience de soi ? »
Clémence Ferlay : « Le selfie est-il un narcissisme d’un nouveau genre ? »

Semaine du 20-11

Corrigé du devoir proustien :

En vous inspirant de l’extrait de la Recherche du Temps Perdu (petite madeleine) , montrez


comment une expérience sensible (odeur, saveur, musique) peut avoir le pouvoir de faire
remonter des souvenirs involontaires nous donnant accès à notre moi profond.
→ Confrontez cette analyse à celles de Hume et de Descartes sur la recherche de soi .

La quête du moi véritable est-elle possible ? Celle-ci se heurte à de nombreux obstacles


comme le temps qui passe et nous transforme irrémédiablement, la société qui nous façonne
ainsi que l’éducation ou d’autres formes de conditionnements. Qui suis-vraiment ? Comment
trouver l’authentique, le « coeur » ou ce que les philosophes nomment « essence »? N’est-il
pas illusoire de prétendre répondre à cette question ? Le moi peut-il notamment s’atteindre
au moyen d’une représentation intellectuelle qui serait délivrée de toute représentation
sensible ou n’est-ce pas cette dernière qui rendrait possible l’unification du moi par delà la
multiplicités des choses qui nous affectent ? Comme le dit le narrateur de la Recherche du
Temps perdu : « j’avais douté bien des fois de la réalité actuelle de ce moi ».
Il est cependant des expériences qui semblent nous donner miraculeusement ou par une
grâ ce particulière, accès à ce qui nous constitue en propre, à la manière d’une révélation. Cette
expérience n’est pas intellectuelle ni volontaire mais au contraire sensible et involontaire. La
mémoire involontaire peut ainsi nous donner accès à la réalité vivante de notre être dans la
qualité d’un moment vécu. C’est ainsi que Marcel Proust découvre à travers le goû t d’une
petite madeleine trempée dans son thé l’essence de son pays (Combray) où il passait ses
vacances mais surtout de lui même. Toute la grandeur de la littérature est qu’elle raconte des
histoires singulières, irréductibles, propres à un individu dans lesquelles on peut cependant
tous se reconnaître. Qui n’a pas vécu sa petite madeleine ?

Pour ma part, il s’agit de l’odeur des roses, le parfum enivrant qui embaume mon jardin au
printemps. J’aime particulièrement m’y promener en fin de journée lorsque le paysage, baigné
dans une lumière pleine et cristalline exhale une quiétude apaisante. Je me sens alors
transportée comme par magie dans la maison de mon enfance à Brunoy où j’ai vécu jusqu’à
l’â ge de 17 ans. Bien loin de la Haute-Loire, il s’agit d’une petite ville de la banlieue parisienne
aujourd’hui transformée en cité dortoir pour la classe bourgeoise. A cette époque, Brunoy
était une ville à taille humaine caractérisée par son charme provincial. Le jardin était mon
terrain de jeu mais aussi celui de mon amie d’enfance et voisine où je me rendais au moyen
d’échelles que nous avions disposées de chaque cô té d’un vieux mur en pierre surmonté de
tuiles. Nous jouions des heures entières, parfois jusqu’à la tombée du jour, à la fermière dans
une vieille cabane de jardin, au détective ou à la balançoire. Le moment précis auquel me
renvoie l’odeur de mon jardin est justement celui d’une fin de journée de printemps, juste
avant le coucher du soir. Je revois très clairement l’immense massif de roses (c’est du moins la
façon dont il m’apparaissait) qui m’enveloppait de sa merveilleuse fragrance. J’étais vêtue
d’une robe de chambre molletonnée bleue-ciel que j’adorais car elle était longue et me faisait
ressembler à une princesse. C’est ainsi que je vivais ce moment enchanteur, suspendu dans le
temps, comme une enfant aimée et choyée. La douceur du soir, l’odeur des roses, le chant des
oiseaux : tout me ravissait et m’enchantait. Est-ce un mythe personnel, une fiction produite
par mon imagination ? La mémoire peut nous jouer des tours et réinventer certains souvenirs
à la lumière de ce que nous sommes devenus. Cela est bien possible, et pourtant, je crois bien
que ce moment à décidé, par delà tous les autres, de mon rapport au monde et à la vie. Les
grecs appelaient Kairos, ce moment décisif qu’il faut savoir saisir. Le kairos est un temps qui
se situe hors de la durée; c'est l'instant fugitif mais essentiel, soumis au hasard mais aussi lié à
l'absolu. C'est le moment parfait, le moment de l'immédiat, le "maintenant". Cette expérience
sensible, presque anecdotique est donc en même temps une expérience de l’éternité qui nous
permet de saisir l’essentiel au-delà de tous les éléments accidentels de notre vie.

Une sensation ancienne se superpose à une sensation actuelle et donne ainsi le sentiment
d’une continuité, d’une cohérence. Comme le montrait déjà Hume, le soi nous est ainsi donné à
travers une sensation et non une idée théorique. La notion de substance telle que Descartes
nous la présente au terme d’un doute méthodique et hyperbolique apparaît en effet comme
une vision abstraite du moi, purement métaphysique et désincarnée. Le sentiment de soi ne
s’atteint pas par une intelligence rationnelle ni une volonté introspective mais sur un mode
involontaire qui suppose néanmoins une certaine disponibilité aux circonstances, une
ouverture au monde, une curiosité face aux impressions qui nous assaillent. Cette expérience
semble donc anticartésienne dans la mesure où elle ne saurait se faire en étant purement et
simplement enfermé en soi même dans le monde clos du solipsime. Il y a cependant du
Descartes dans cette recherche de l’essentiel par delà ce qui est accidentel ou simplement
anecdotique, de l’universel au-delà du particulier. Le narrateur de la Recherche du Temps
Perdu fait advenir un moment qu’il perçoit avec l’acuité d’une idée claire et distincte saisie par
un acte d’intuition, idée devenue éternelle car elle échappe à la temporalité, au changement.
Cependant , cette saisie de l’essentiel dans le cas de l’expérience proustienne se fait au dépend
de l’intelligence et de la conscience. Comme nous le dit Proust dans Le temps retrouvé :
« l’impression est pour l’écrivain ce qu’est l’expérimentation pour le savant, avec cette différence
que pour le savant, le travail de l’intelligence précède et chez l ‘écrivain vient après ». Le
narrateur laisse advenir une expérience qui entre en lui comme par effraction là où le savant
enferme la réalité dans des concepts.

Ainsi, la recherche de soi suppose ouverture et disponibilité au réel , l’accueil à ce qui peut
perturber notre lecture notre vision souvent conventionnelle des choses. Or, c’est
paradoxalement sous des petites choses que notre réalité peut être contenue.

Vocabulaire :

Substance :
Support permanent des attributs, des qualités ou accidents qui se caractérisent par la capacité
à exister de soi même.

Essence / accident :
➢ L’essence est ce qui constitue la nature permanente d’une chose indépendamment de
ce qui lui arrive. En ce sens, le terme d’essence est proche de celui de substance.
➢ L’accident est ce qui appartient à une chose de manière contingente. Est accidentel ce
qui pourrait ne pas être.

Singulier/universel/particulier :
➢ Est singulier ce qui est unique en son genre, qui est incomparable.

➢ Est particulier ce qui ne concerne qu’un individu ou une partie des individus d’une
même espèce.

➢ Est universel ce qui est vrai partout et toujours ; Employé comme substantif,
l’universel désigne ce qui a une valeur supérieure, un type idéal (comme le beau, le
bien…). Une valeur universelle serait susceptible d’orienter , de donner une
perspective à l’humanité toute entière.

Suite du cours sur la recherche de soi :


III- Le rôle de l’art dans la recherche de soi.
Texte de Hegel

1- La prise de conscience théorique de soi.

Cette conscience de soi se définit comme réflexivité (capacité de la pensée de faire retour sur
elle même).

Mais la conscience enfermée en elle même ne peut évoluer et devient une conscience
malheureuse.

2- La prise de conscience de soi par la pratique.

La conscience a besoin de se reconnaître dans ce qu’elle fait.


→ Exemple de la technique

L’homme spiritualise la nature en lui imprimant sa marque.


Il faut cependant distinguer cette contemplation de soi par le travail et le narcissisme.

3- Exemple de l’enfant et de l’art.

→ L’enfant qui fait des ricochets dans l’eau jouit de cette contemplation de soi dans ce qu’il
fait.

Exemple de l’expressionnisme

→ L’artiste également représente dans ses œuvres ses états de conscience .


=> L’art n’est pas une simple reproduction de la nature
=> L’art est supérieur à la nature.

B- Les trois types d’art

Le premier stade : l’art symbolique.


→ Le symbole fait signe vers un au-delà de lui-même, il semble trouver sa vérité non dans le
sensible , mais dans une essence qui lui est supérieure, une idée qui se représente en lui.

Vocabulaire : conscience de soi, réflexivité, spriritualiser la nature, narcissisme, conscience


malheureuse, symbole.

Exposés :

Silas Dimitriou : Aimer, est-ce fusionner avec l’autre ?

Mathilde Dhenain : Peut-on vraiment aimer quelqu’un ?

Semaine du 26-11

Suite du cours
L’art symbolique suscite le sentiment du sublime
→ Le sublime est la marque d’un esprit qui n’est pas parvenu à la conscience de lui même,
incapable d’exprimer clairement l’idée qu’il sent naître en lui.

→ Cependant, le symbolisme ne doit pas être confondu avec la superstition présente dans le
fétichisme.

→ Le symbole renvoie à une transcendance.

Deuxième stade : l’art classique.


Cet art se caractérise par l’harmonie des formes et surtout, une parfaite adéquation entre le
fond et la forme.

Exemple : l’art grec.


→ Beauté caractérisée par la perfection formelle qui reflète l’harmonie du cosmos.

Exemple du classicisme au XVIIème

→ Art de la convenance : est beau ce qui plaît à la raison.


Ex : Raphaël.

→ Le Caravage se distingue en ce qu’il exprime davantage la violence des sentiments.

Troisième stade : l’art romantique

A travers l’art romantique, l’esprit reconnaît l’infinité qui l’habite. Cela se traduit par la
conscience d’un divorce avec le monde extérieur.

L’art romantique est un art de l’introspection et de l’analyse des passions.

→ Importance du négatif, de la souffrance : la subjectivité trouve son expression la plus haute


dans la souffrance, le malheur.

Cf : Thème de la conscience malheureuse.


→ Sentiment d’un déchirement intérieur qui nous fait éprouver une absence d’unité avec nous
même.

Exemple : le Faust de Goethe.


sentiment d’un déchirement intérieur qui nous fait éprouver une absence d’unité avec nous
mêmePhilosophie, hélas ! jurisprudence, médecine, et toi aussi, triste théologie !… je vous ai donc
étudiées à fond avec ardeur et patience : et maintenant me voici là, pauvre fou, tout aussi sage
que devant. Je m’intitule, il est vrai, maître, docteur, et, depuis dix ans, je promène çà et là mes
élèves par le nez. — Et je vois bien que nous ne pouvons rien connaître !… Voilà ce qui me brûle le
sang ! J’en sais plus, il est vrai, que tout ce qu’il y a de sots, de docteurs, de maîtres, d’écrivains et
de moines au monde ! Ni scrupule, ni doute ne me tourmentent plus ! Je ne crains rien du diable,
ni de l’enfer ; mais aussi toute joie m’est enlevée. Je ne crois pas savoir rien de bon en effet, ni
pouvoir rien enseigner aux hommes pour les améliorer et les convertir. Aussi n’ai-je ni bien, ni
argent, ni honneur, ni domination dans le monde : un chien ne voudrait pas de la vie à ce prix ! Il
ne me reste désormais qu’à me jeter dans la magie. Oh ! si la force de l’esprit et de la parole me
dévoilait les secrets que j’ignore, et si je n’étais plus obligé de dire péniblement ce que je ne sais
pas ; si enfin je pouvais connaître tout ce que le monde cache en lui-même, et, sans m’attacher
davantage à des mots inutiles, voir ce que la nature contient de secrète énergie et de semences
éternelles ! Astre à la lumière argentée, lune silencieuse, daigne pour la dernière fois jeter un
regard sur ma peine !… j’ai si souvent la nuit, veillé près de ce pupitre ! C’est alors que tu
m’apparaissais sur un amas de livres et de papiers, mélancolique amie ! Ah ! que ne puis-je, à ta
douce clarté, gravir les hautes montagnes, errer dans les cavernes avec les esprits, danser sur le
gazon pâle des prairies, oublier toutes les misères de la science, et me baigner rajeuni dans la
fraîcheur de ta rosée !
Introduction de Faust de Goethe

Vocabulaire : Art symbolique (symbole), art classique, art romantique, conscience


malheureuse.

Pour le 4-11 : comparer le texte de Goethe avec ce texte de Kant :

« Au fait, nous remarquons que plus une raison cultivée s'occupe de poursuivre la jouissance de
la vie et du bonheur, plus l'homme s'éloigne du vrai contentement. Voilà pourquoi chez
beaucoup, et chez ceux-là mêmes qui ont fait de l'usage de la raison la plus grande expérience, il
se produit, pourvu qu'ils soient assez sincères pour l'avouer, un certain degré de misologie, c'est-
à-dire de haine de la raison. En effet, après avoir fait le compte de tous les avantages qu'ils
retirent, je ne dis pas de la découverte de tous les arts qui constituent le luxe ordinaire, mais
même des sciences (qui finissent par leur apparaître aussi comme un luxe de l'entendement),
toujours est-il qu'ils trouvent qu'en réalité ils se sont imposé plus de peine qu'ils n'ont recueilli de
bonheur; aussi, à l'égard de cette catégorie plus commune d'hommes qui se laissent conduire de
plus près par le simple instinct naturel et qui n'accordent à leur raison que peu d'influence sur
leur conduite, éprouvent-ils finalement plus d'envie que de dédain »

Kant, Critique de la Raison Pratique

Exposés :

Romane Bonnard : « S’aimer soi même, est-ce être en conflit avec les autres ? »

Ly-lou Marcon et Mélina Periol : « Peut-on faire de sa vie une œuvre d’art ? »

Décembre
Semaine du 4 au 8

Analyse comparative des textes de Faust et de Kant :

→ Le texte de Kant met bien en lumière ce drame romantique de Faust déchiré entre deux
choix impossibles : renoncer à la raison pour trouver le bonheur ou vivre une vie vertueuse et
rationnelle en renonçant au bonheur.

→ Cela explique la misologie : haine de la raison dont font preuve les personnes qui ont été
confrontées à ce choix.

→ Lorsque Faust fait le compte des joies retirées de cette existence ascétique (ascétisme:
renoncement aux désirs matériels) comparée aux peines endurées, il exprime son regret
d'avoir cultivé une raison incapable de lui procurer la joie qui devait récompenser tous ses
efforts.
→ C’est pourquoi Faust fait le choix de vendre son â me au diable

Conclusion : La conscience romantique est incapable de se retrouver elle même car elle
éprouve ce déchirement intérieur.
Le moi est exalté mais ne se retrouve pas lui même car il est condamné au malheur et à
l’errance.

Vocabulaire : misologie, conscience malheureuse.


IV- Exister pleinement.
A- Art et existence.
Comment l’art peut-il alors nous donner le sentiment d’exister pleinement et de nous
retrouver nous même sans nous enfermer dans la conscience malheureuse des romantiques ?

→ L’art influence en effet notre vision du monde.


Cf : Oscar Wilde
« Qu’est-ce donc que la Nature ? Elle n’est pas la Mère qui nous enfanta. Elle est notre création.
C’est dans notre cerveau qu’elle s’éveille à la vie. Les choses sont parce que nous les voyons, et ce
que nous voyons, et comment nous le voyons, dépend des arts qui nous ont influencés. Regarder
une chose et la voir sont deux actes très différents. On ne voit quelque chose que si l’on en voit la
beauté. Alors, et alors seulement, elle vient à l’existence. A présent, les gens voient des
brouillards, non parce qu’il y en a, mais parce que des poètes et des peintres leur ont enseigné la
mystérieuse beauté de ces effets. Des brouillards ont pu exister pendant des siècles à Londres.
J’ose même dire qu’il y en eut. Mais personne ne les a vus et, ainsi, nous ne savons rien d’eux. Ils
n’existèrent qu’au jour où l’art les inventa ».

→ Paradoxalement, l’art ne consiste pas à reproduire la nature mais il la créer.

B- Peut-on vivre sa vie comme une œuvre d’art ?


→ Exemple de Sophie Calle.
→ Difficultés de cette conception de l’art et de la vie.
Semaine du 11-12
Suite du cours : peut-on vivre sa vie comme une œuvre d’art ?

Difficultés de cette théorie :


→ L’idée que l’on devrait esthétiser sa vie se heurte à ce qui en fait aussi la teneur (le mal, la
souffrance, mais aussi sa banalité).
→ Illusion de croire que l’on peut être créateur de sa vie tel un dieu, que l’on pourrait la
modeler selon ses désirs.

Est-ce nous qui faisons notre vie ou la vie qui nous fait ?
C- L’expérience de soi comme auto-création selon Bergson.
1- La conscience et la vie.
La conscience est étroitement liée à la vie.
On ne peut définir la conscience mais on peut la caractériser comme une expérience vécue.
La conscience est mémoire du passé et anticipation de l’avenir.
En ce sens, elle ne cesse de changer, elle n’est jamais identique à elle même et s’enrichit sans
cesse du passé pour tendre vers un avenir incertain.

=> La conscience est essentiellement créatrice.


CF : Comparaison avec la musique de Debussy

2- Critique de la notion de sujet et définition de la liberté


On ne saurait réduire la conscience à cette notion de sujet qui suppose fixité et identité. Or la
conscience est altération et changement.
La conscience est libre justement en vertu de cette capacité d’altération. Elle implique le
pouvoir de s’opposer aux mécanismes, aux habitudes et aux conventions.
3- La conscience comme auto-création.
Pour Bergson, la création est à comprendre plutô t comme une maturation. La création n’est
pas ex-nihilo au sens où elle est liée au temps (durée).
Il s’agit de partir du passé, gardé en mémoire, pour l’amener de manière innovante à produire
quelque chose de nouveau.
Ex : Picasso filmé par Clouzot.
→ La création de soi par soi est présentée par Bergson comme une émergence, on comme un
phénomène de choix.

3- Joie et création
« Les philosophes qui ont spéculé sur la signification de la vie et sur la destinée de l'homme n'ont
pas assez remarqué que la nature a pris la peine de nous renseigner là-dessus elle-même. Elle
nous avertit par un signe précis que notre destination est atteinte. Ce signe est la joie. Je dis la
joie, je ne dis pas le plaisir. Le plaisir n'est qu'un artifice imaginé par la nature pour obtenir de
l'être vivant la conservation de la vie ; il n'indique pas la direction où la vie est lancée. Mais la
joie annonce toujours que la vie a réussi, qu'elle a gagné du terrain, qu'elle a remporté une
victoire : toute grande joie a un accent triomphal. Or, si nous tenons compte de cette indication
et si nous suivons cette nouvelle ligne de faits, nous trouvons que partout où il y a joie, il y a
création : plus riche est la création, plus profonde est la joie. La mère qui regarde son enfant est
joyeuse, parce qu'elle a conscience de l'avoir créé, physiquement et moralement. [...] celui qui est
sûr, absolument sûr, d'avoir produit une œuvre viable et durable, celui-là n'a plus que faire de
l'éloge et se sent au-dessus de la gloire, parce qu'il est créateur, parce qu'il le sait, et parce que la
joie qu'il éprouve est une joie divine ».

→ La destination de la vie est la création.

→ La nature nous en donne un signe : la joie.

→ Il faut cependant prendre soin de distinguer le plaisir (utilitaire) et la joie (gratuite).

Vocabulaire : Création, conscience, durée, joie, plaisir.

Semaine du 18-12

D- La métamorphose et la vie
Cf : Emanuele Coccia : Métamorphose

Introduction : Métamorphose et transformation

La métamorphose est involontaire et inconsciente alors que la transformation est l’illusion qui
consiste à croire que nous avons un pouvoir absolu sur nous même ou sur le monde

1- La continuité de la vie.
→ Notre vie est dans la continuité d’autres vies et se continuera également dans d’autres.

2- Qu’en est-il du moi ?


Le moi ne serait qu’un véhicule qui transporte avec lui une infinité d’autres moi qui l’ont
précédé.
« Je suis né. La matière dont je suis fait n’a rien d’un pur présent. Je véhicule du passé ancestral et
je suis destiné au futur inimaginable ».

« Il y a un moi seulement pour des êtres de naissance ou, à l’inverse, le moi n’est qu’un véhicule : il
est quelque chose qui transporte toujours autre que lui ».

3- Conversion et révolution

→ Deux conceptions illusoires de la notion de transformation.

Vocabulaire : Métamorphose, transformation, conversion, révolution.

Pour le 15-01-2024
Réviser tout le cours sur la recherche de soi (voir fiches 1 à 4 et relire attentivement le
cours)

Janvier 2024
Semaine du 8-01

L’humanité en question

Introduction

Selon Kant, toutes les questions que nous nous posons peuvent se résumer à trois : « Que puis-
je savoir ? » « Que dois-je faire ? » « Que m’est-il permis d’espérer ? ».

➢ La première consiste à se demander quelles sont les limites de notre pouvoir de


connaître (par exemple, la raison a t-elle le pouvoir de connaître des objets qui se
situent hors de l’expérience sensible?).

➢ La deuxième concerne la question morale : à quelle conditions une action peut-elle être
définie comme morale ? (Suffit-il par exemple qu’elle soit conforme au devoir ou faut-il
scruter les profondeurs de notre â me pour savoir si elle a été effectuée par devoir ) ?

➢ La dernière question concerne principalement la question du bonheur et se pose


particulièrement pour un être conscient de sa finitude, conscient qu’il va mourir .
Sachant cela, peut-on être heureux ici et maintenant ou devons nous entretenir l’espoir
d’une vie après la mort ? L’homme a t-il finalement une destination particulière ? Le
bonheur est-il une fin en soi ou ne devons nous pas plutô t tâ cher de nous rendre dignes
du bonheur ?

Mais toutes ces questions peuvent finalement se résumer à une seule : « Qu’est-ce que
l’homme ? »
L’homme en effet, n’est pas un animal comme les autres selon Kant. Il a la capacité de se
représenter des fins, de se donner à lui même des buts alors que les animaux sont déterminés
par leurs instincts. La nature assigne aux êtes naturels des fins bien déterminées comme
manger, se reproduire, elle a donné aux hommes la possibilité de se libérer des fins de la
nature afin de se donner à lui même ses propres fins (ex : recherche du sens).
Cette conception de l’homme est résolument moderne dans la mesure où elle s’inscrit dans
une vision du monde radicalement différente de celle des grecs par exemple. Le monde était
en effet représenté par les grecs comme un cosmos harmonieux, hiérarchisé et finalisé. Dans
la tradition stoïcienne, par exemple, la contemplation de l’harmonie cosmique (théorie)
permettait de trouver des règles de vie (éthique) et de donner un sens à l’existence (salut).
L’homme connaissait sa place et son rô le dans cette nature dont il faisait partie. Au XVII, sous
l’impulsion de Galilée, cette belle harmonie cosmique vole en éclat au profit de la
représentation d’un univers infini, obéissant à des lois purement mécaniques (il n’y a plus de
finalité mais seulement des relations de cause à effet entre les phénomènes, comme dans une
machine). Newton achève de « désenchanter » le monde en n’y voyant plus qu’un chaos de
forces antagonistes sans signification ni finalité. Comment, dans cet univers infini et
mécanique, espérer trouver un savoir solide, une morale acceptable et un sens à la vie ?
Tout cela serait encore facile si l’on ne constatait en plus que l’homme ne semble pas être
spontanément un être raisonnable et doux. Si tout est bien réglé dans la nature, nous assistons
avec l'homme au spectacle du désordre, du dérèglement des passions. Dans ce sens, le désir
joue ici un rô le déterminant. La vie animale est réglée par les instincts alors que l'homme
désire au delà de ses besoins des choses qui lui sont ni naturelles, ni nécessaires. Ainsi, la
gloire, le pouvoir, les honneurs sont des passions qui dressent les hommes les uns contre les
autres.
Ainsi, l'homme ne fait pas la guerre : « ce fléau du genre humain », pour survivre ou pour
dominer instinctivement l'autre homme, il la fait parce qu'il choisit d'agir en fonction de ses
peurs, de ses ambitions, de sa convoitise.
L’homme est donc bel et bien une énigme sur laquelle nous allons nous interroger tout au long
de ce second semestre. Il ne sera plus ici question de l’homme comme sujet individuel
s’interrogeant sur son identité personnelle mais de l’homme comme sujet collectif, ayant un
destin commun, une histoire.

Nous commencerons à interroger ce propre de l’homme de façon paradoxale à travers la


question du mal, de la déviance, du monstrueux, de la violence (deux premières parties). Nous
poursuivrons par la question de savoir dans quelle mesure l’homme ne cherche pas sans cesse
à dépasser les limites de l’humanité elle même. Pour finir, nous envisagerons l’humain à
travers la notion de création : devons nous créer pour être ? Nous serons notamment guidés
par la question du progrès . L’histoire de l’homme peut-elle se comprendre comme un
progrès ou devons nous nous résigner au constat du désordre, du chaos des actions humaines
et finalement, de l’absence de sens ?(deux dernières parties)

I- L’humanité monstrueuse. (L’humain et ses limites, histoire et violence)

A- Le monstre et la monstruosité.
1- Le monstre inquiète et fascine.
2- Evolution du concept de monstruosité.
3- Le monstre et la norme.

B- Le monstre révèle notre capacité de métamorphose : l’humain peut être inhumain.


La question de la monstruosité morale
1- On peut partir de l’analyse de certains comportements pour voir comment l’humain
pourrait dériver de l’inhumain.
2- Humanité et perfectibilité.
3- « Le sommeil de la raison engendre des monstres » : le monstre moral peut être rationnel.

Vocabulaire : Humanité, monstre, norme, perfectibilité, raison/rationalité.

Semaine du 15-01

Interrogation sur le cours :


1- Définissez et distinguez : le moi et le soi. (3 pts)
Précisez ce qui rend difficile voire paradoxale l’idée d’une « recherche de soi ».

2- Qu’est-ce que l’inquiétante étrangeté ? (2 points)


Donnez un exemple

3- Que signifiait à l’origine le précepte inscrit sur le frontispice du temple de Delphes : « Connais toi toi
même ? » (4 pts)

Précisez les significations religieuse et philosophique de ce précepte.


En quel sens peut-on dire que le développement personnel repose sur une conception erronée de ce précepte ?

4- Que signifie cette phrase de Pascal : « Le moi est haïssable » ? (3 pts)


En quel sens cette phrase peut être reliée à la conception rousseauiste de l’amour propre ?

5- Qu’est-ce que l’éducation négative selon Rousseau ? (3 pts)


En quel sens cette éducation peut-elle permettre d’échapper aux dangers de l’amour propre que les hommes
développent en société ?

6- Qu’est-ce que la conscience malheureuse ? (3 pts)


Expliquez en quel sens Faust illustre bien la conscience malheureuse telle que Hegel l’analyse.

7- Qu’est-ce qu’une métamorphose ? (2 pts)

Suite du cours
3- « Le sommeil de la raison engendre des monstres » : le monstre moral peut être rationnel.

→ Analyse de la notion de banalité du mal par Hannah Arendt dans son ouvrage : Eichmann à
Jérusalem.

4- Le monstre qui sommeille en nous .


Cf : Freud : Malaise dans la Civilisation.
« L’homme n’est point cet être débonnaire, au cœur assoiffé d’amour, dont on dit qu’il se défend
quand on l’attaque, mais un être, au contraire, qui doit porter au compte de ses données
instinctives une bonne somme d’agressivité. Pour lui, par conséquent, le prochain n’est pas
seulement un auxiliaire et un objet sexuel possibles, mais aussi un objet de tentation. L’homme
est, en effet, tenté de satisfaire son besoin d’agression aux dépens de son prochain, d’exploiter son
travail sans dédommagements, de l’utiliser sexuellement sans son consentement, de s’approprier
ses biens, de l’humilier, de lui infliger des souffrances, de le martyriser et de le tuer ».
.

Quelques remarques préalables sur le psychisme humain selon Freud :


→ Présentation de la première topique (inconscient/préconscient:conscience)
Vocabulaire : Banalité du mal, inconscient, préconscient, conscience.

Semaine du 22-01

Correction de l’interrogation du 15-01

Suite et fin de l’analyse du texte de Freud.

→ Suite de la présentation de la psychanalyse freudienne : deuxième topique.

Analyse du texte :
→ Sexualité humaine et sexualité animale : l’homme est fondamentalement agressif.
→ Le rô le de la civilisation est donc le contrô le des pulsions humaines (la morale est ici une
fonction du surmoi).
→ La guerre est ce qui permet aux hommes de trouver un prétexte pour laisser libre cours à
leurs pulsions.

Vocabulaire : Moi/ça/surmoi, pulsion (de vie ou de mort), principe de plaisir/principe de


réalité.

Semaine du 29-01

Fin de l’analyse du texte de Freud :

→ Importance de la civilisation pour contenir la violence humaine.

Projection du film « A History of Violence »

Pour le 13 février : répondre au questionnaire

1- Expliquez le titre : A history of violence.


→ Précisez ici le sens du mot histoire.

a. Comment le film aborde-t-il la manière dont la mémoire collective, que ce soit au niveau familial
ou communautaire, influe sur la perpétuation de la violence?

b. Les personnages sont-ils prisonniers de leur propre histoire, incapables de se libérer du cycle de
la violence?

c. Le titre peut-il être interprété comme une allusion à des thèmes plus larges liés à la société ou à
l'histoire américaine?

d. La violence apparaît-elle selon vous dans ce film comme une étape nécessaire à la construction
de la société américaine ?

2- Sur la mise en scène de la violence.

a. Quelles différences feriez-vous entre la représentation de la violence dans ce film et celle que
l’on trouve dans les films de violence aujourd’hui (ex : Saw).
b. Cronenberg cherche t-il à esthétiser la violence en en faisant un spectacle ?

3- Sur la question de l’identité.

a. Comment le personnage principal définit-il son identité ?

b- En quel sens la société contribue t-elle à définir cette identité ?

c. D’après vous, le personnage principal est-il schizophrène comme le suggère sa femme ?

4- Sur la notion de métamorphose du moi.

a. Analysez une scène où l’on assiste à une véritable métamorphose du personnage principal.

b. Quel rôle joue la violence dans cette métamorphose ?

5- Sur la violence.

a. Comment le film aborde-t-il la question de l'origine de la violence chez les personnages


principaux?
b. La violence est-elle présentée comme inhérente à la nature humaine, ou est-elle influencée par
des facteurs externes?
c. Le film suggère-t-il l'existence d'un cycle de violence, où les actions passées influent sur les
événements futurs?
d. En quel sens peut-on dire que la violence est présentée par Cronenberg comme une
contamination ?

6- Dimension mythologique et religieuse.


a. Identifiez-vous des éléments ou des symboles religieux dans le film? Comment ceux-ci
contribuent-ils à la compréhension des thèmes centraux?
b. Y a-t-il des moments dans le film qui évoquent des rituels ou des actes sacrificiels? Quelle est
leur signification dans le contexte de l'histoire?

c. La notion de sacrifice est-elle liée à la recherche d'une identité plus profonde ou à la rédemption
du personnage principal?

Février 2024

Semaine du 5-02

La violence est-elle inhérente à l’homme ?


Introduction

→ Réflexions autour de la question : « qu’est-ce que l’homme ? »


→ La violence est-elle une caractéristique essentielle de l’humanité ou ce qui s’oppose à elle ?
→ Réflexions sur l’étymologie du mot violence (elle suggère que cela est une dimension
essentielle de l’homme).

I- Aux origine de la violence : la rivalité, la défiance et la fierté.


Analyse d’un texte de Hobbes sur l’état de nature qui illustre la citation de Plaute « l’homme
est un loup pour l’homme ».

« Si deux hommes désirent la même chose alors qu’il n’est pas possible qu’ils en jouissent tous les
deux, ils deviennent ennemis: et dans leur poursuite de cette fin (qui est, principalement, leur
propre conservation, mais parfois seulement leur agrément), chacun s’efforce de détruire ou de
dominer l’autre. Et de là vient que, là où l’agresseur n’a rien de plus à craindre que la puissance
individuelle d’un autre homme, on peut s’attendre avec vraisemblance, si quelqu’un plante, sème,
bâtit, ou occupe un emplacement commode, à ce que d’autres arrivent tout équipés, ayant uni
leurs forces, pour le déposséder et lui enlever non seulement le fruit de son travail, mais aussi la
vie ou la liberté. Et l’agresseur à son tour court le même risque à l’égard d’un nouvel agresseur.

Du fait de cette défiance de l’un à l’égard de l’autre, il n’existe pour nul homme aucun moyen de
se garantir qui soit aussi raisonnable que le fait de prendre les devants, autrement dit, de se
rendre maître, par la violence ou par la ruse, de la personne de tous les hommes pour lesquels
cela est possible, jusqu’à ce qu’il n’aperçoive plus d’autre puissance assez forte pour le mettre en
danger. Il n’y a rien là de plus que n’en exige la conservation de soi-même, et en général on
estime cela permis. […]
Et de cette défiance de l’un envers l’autre, [il résulte qu’] il n’existe aucun moyen pour un homme
de se mettre en sécurité aussi raisonnable que d’anticiper, c’est-à-dire de se rendre maître, par la
force ou la ruse de la personne du plus grand nombre possible d’hommes, jusqu’à ce qu’il ne voit
plus une autre puissance assez importante pour le mettre en danger ; et ce n’est là rien de plus
que ce que sa conservation exige, et ce qu’on permet généralement. Aussi, parce qu’il y en a
certains qui, prenant plaisir à contempler leur propre puissance dans les actes de conquête, qu’ils
poursuivent au-delà de ce que leur sécurité requiert, si d’autres, qui autrement seraient contents
d’être tranquilles à l’intérieur de limites modestes, n’augmentaient pas leur puissance par
invasion, ils ne pourraient pas subsister longtemps, en se tenant seulement sur la défensive. Et
par conséquent, une telle augmentation de la domination sur les hommes étant nécessaire à la
conservation de l’homme, elle doit être permise.
De plus, les hommes n’ont aucun plaisir (mais au contraire, beaucoup de déplaisir) à être
ensemble là où n’existe pas de pouvoir capable de les dominer tous par la peur. Car tout homme
escompte que son compagnon l’estime au niveau où il se place lui-même, et, au moindre signe de
mépris ou de sous-estimation, il s’efforce, pour autant qu’il l’ose (ce qui est largement suffisant
pour faire que ceux qui n’ont pas de pouvoir commun qui les garde en paix se détruisent l’un
l’autre), d’arracher une plus haute valeur à ceux qui le méprisent, en leur nuisant, et aux autres,
par l’exemple.
De sorte que nous trouvons dans la nature humaine trois principales causes de querelle :
premièrement, la rivalité; deuxièmement, la défiance; et troisièmement la fierté « .
Thomas Hobbes, Léviathan (1651)

1) La rivalité ou concurrence.
Le désir humain porte principalement sur deux sortes d’objets à l’état de nature :
→ Ce qui assure la survie.
→ Ce qui provoque de la jouissance.
Se défendre et attaquer sont ici des droits naturels.
=> Peur généralisée car on vit dans une menace permanente.

2) La méfiance ou défiance.
L’homme est doté de raison (faculté de calculer et d’anticiper). Il transforme la peur (que l’on
peut trouver chez les animaux comme une réaction face à un danger) en défiance (qui
suppose une anticipation rationnelle).

3) La fierté.
L’homme éprouve du plaisir dans sa propre puissance et cherche à être reconnu par les
autres : c’est la vaine gloire.
« Cette passion, si elle est fondée, chez un homme, sur l’expérience de ses propres actions passées,
est la même chose que l’assurance, mais si elle est fondée sur la flatterie d’autrui, ou seulement
forgée mentalement par l’homme en question à cause du plaisir qui s’attache à ses conséquences
elle est appelée VAINE GLOIRE ». (chap. VI, p. 53)

→ Nous nous regardons nous même avec le prisme de l’amour propre.


Vocabulaire : Violence, état de nature, passion, appétit/désir, vaine gloire, Rivalité,
méfiance/défiance, fierté.

Exposés :
Mathilde Dhennain : « En quoi les monstres représentent-ils les aspects sombres ou refoulés
de la nature humaine » ?
Quentin Garnier : présentation du film : A history of violence.
Semaine du 12-02
Suite du cours sur la violence

→ Fin de l’analyse du texte de Thomas Hobbes extrait du Léviathan


La fierté comme origine principale de la violence (« vaine gloire »)
Exemple des duels qui reposent sur une violence principalement symbolique où l’on place le
sentiment de sa valeur au dessus de sa vie biologique.

Méthodologie : Question d’interprétation et Essai philosophiques. (voir polycopié)

Exposé :
Elsa Mara et Clarence Luneau : Peut-on se passer de la violence ?

Mars

Semaine du 4-03
➢ Correction du questionnaire : A history of violence

➢ Fin de l’analyse du texte de Hobbes sur l’origine de la violence


→ La fierté ou vaine gloire comme origine humaine de la violence.

Conclusion sur le désir mimétique chez René Girard

Semaine du 11-03

II- Trois figures de la violence :


1- L’agressivité
Cf : Freud, Malaise dans la civilisation.
L’homme est fondamentalement agressif et la civilisation a été bâtie sur la base d’un renoncement
pulsionnel.
2- La haine
Exemple d’Achille dans son combat qui l’oppose à Hector.
La haine cherche l’annihilation de l’autre comme tel.

3- La colère
La colère est une passion qui peut avoir une valeur positive car elle est ouverture aux autres.
→ Distinction entre la colère humaine et la colère divine (sainte colère).

Vocabulaire : Agressivité, haine colère, pulsions, moi/ça/surmoi


Exposés :
Ly-lou Marcon et Marie Prat-Marin : Un enfant peut-il être méchant ?
Alix Bernard de saint Afrique et Louna Moulin : La banalité du mal.

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