Vous êtes sur la page 1sur 13

UNIVERSITÉ PAUL VALÉRY – MONTPELLIER 3

ème
LICENCE DE PSYCHOLOGIE 1 Année, Semestre 2

PSYCHOLOGIE CLINIQUE EMPIRIQUEMENT FONDEE : Études de cas

TRAVAUX DIRIGÉS

Responsable : Pr. Aude Michel

2023-2024
JULIE

Julie a 30 ans. Elle consulte pour la première fois un psychothérapeute en libéral. Lors de ce premier
rendez-vous, elle a le regard inquiet, vérifie plusieurs fois qu’elle a bien éteint son téléphone, et
essuie ses mains moites sur sa jupe. Elle est mariée et mère de deux enfants en bas âges. Elle
travaille comme secrétaire médicale dans un cabinet de cardiologie.

Julie explique être sans arrêt sur le qui-vive, à redouter toutes sortes de choses, et ce depuis
l’enfance. Elle a toujours pensé que cette vigilance avait l’avantage de la maintenir sur ses gardes,
prête à réagir au plus vite aux éventuels aléas de la vie, et éviter ainsi les ennuis et les complications.
Mais aujourd’hui, elle se sent épuisée. Jusqu’à présent, elle a cru qu’il n’y avait pas grand chose à
faire à cette façon d’être, d’autant qu’elle a toujours vu sa propre mère inquiète en permanence,
une boîte de Lexomyl posée sur sa table de nuit. L’autre jour cependant, à la radio, elle a entendu
un psychiatre évoquer les troubles anxieux et leur traitement. Une patiente témoignait de ses
difficultés, et de la façon dont elle les avait surmontées grâce à la psychothérapie qu’elle avait
entreprise. Julie s’était sentie proche de cette femme, en proie à la même souffrance. Cette émission
avait fait naître en elle l’idée qu’une autre vie était possible, plus apaisée. C’est ce qui l’avait
décidée à consulter.

Julie exprime avoir peur de tout, en permanence, et ces peurs lui empoisonnent littéralement
l’existence. Quand elle se rend au travail, elle est assiégée par la crainte d’arriver en retard, du fait
d’une grève inopinée ou des embouteillages par exemple. Du coup, elle quitte chaque jour son
domicile avec une demi-heure d’avance, qui ne suffit pourtant pas à la mettre complètement à
l’aise. Une fois à son poste, lorsque le téléphone commence à sonner, elle sent les battements de
son cœur qui s’accélèrent. Entre les courriers à expédier, les comptes- rendus à préparer, et les
prises de rendez-vous, elle se sent souvent débordée, peine à s’organiser, court dans tous les sens,
se met à douter de sa compétence et craint alors de « perdre les pédales ». Vers 10 heures, ses
collègues se retrouvent pour partager un café, mais elle évite de se joindre à elles pour gagner un
peu de temps et vérifier son travail. Son patron la trouve trop perfectionniste, et lui reproche parfois
de passer trop de temps à des vérifications qu’il juge inutiles. Ces reproches ne font qu’augmenter
le stress de Julie, qui imagine le pire et craint de perdre son travail. Comment pourraient-ils alors
se débrouiller, privés de son salaire ? Que penseraient son mari et leurs amis ? La nuit, elle rêve
souvent qu’elle se fait licencier, se réveille en sursaut, ne retrouve le sommeil que beaucoup plus
tard. En famille, Julie se reproche souvent de manquer de patience avec ses enfants : elle s’agace
rapidement dès qu’ils s’agitent un peu. Souvent, ils lui parlent, et sa tête est ailleurs. Je pense à la
liste des choses à faire, ou je ressasse mes inquiétudes à n’en plus finir. A table, le soir, elle a du
mal à se détendre. Elle a parfois la gorge serrée au point de ne rien pouvoir avaler. Après le repas,
elle tombe de fatigue, et se couche habituellement tôt, pensant ainsi remédier à sa sensation d’être
à bout. Cet épuisement en vient à l’inquiéter, elle redoute d’être malade, peut-être gravement
malade. D’ailleurs, elle a souvent des douleurs dans le bas du dos. Elle a même consulté son
médecin généraliste, qui l’a trouvée tendue et lui a conseillé de faire un peu de sport. Et si ce
médecin était passé à côté du diagnostic ? Et si elle avait une hernie, une tumeur ? Julie n’est pas
décidée pour le sport : elle est déjà assez débordée comme ça. Elle s’en veut beaucoup, elle qui
voudrait offrir l’image d’une femme posée et efficace à son mari et ses enfants.
Mots clés relevés dans le texte Signe correspondant
Regard inquiet Inquiétude/soucis/anxiété
Vérifie plusieurs fois Vérification
Mains moites Inquiétude/soucis/anxiété
Sans arrêt sur le qui-vive Hypervigilance
Redouter toute sorte de chose Peur anticipatoire, anxiété
Prête à réagir au plus vite Hypervigilance
Epuisée Asthénie
Peur de tout en permanence Souci excessif, anxiété
Assiégée par la crainte d’arriver en retard Peur anticipatoire, anxiété

Quitte chaque jour son domicile avec une Anticipation


demi-heure d’avance
Elle sent les battements de son cœur Symptôme neurovégétatif de l’anxiété
Se sent débordée, Peine à s’organiser Trouble/perturbation des fonctions
exécutives/cognitives
Court dans tous les sens Agitation
Doute de sa compétence Doute
Elle évite de se joindre à elles Évitement
Vérifier son travail Vérification
Passe trop de temps …perfectionniste Perfectionnisme
Reproches ne font qu’augmenter le stress Sensibilité au jugement
Imagine le pire, craint de perdre son travail Peur anticipatoire, anxiété
Que penseraient son mari, ses amis Sensibilité au jugement
Rêve, réveil en sursaut, sommeil plus tard Hypervigilance
Éveils nocturnes
Se reproche Autodépréciation, dévalorisation/ dépréciation
S’agace rapidement Irritabilité
Sa tête est ailleurs Distractibilité/Trouble de la concentration
Ressasse inquiétudes à n’en plus finir Ruminations
Du mal à se détendre Tension
Gorge serrée Symptôme neurovégétatif de l’anxiété
Elle tombe de fatigue asthénie
Inquiétude, redoute d’être malade Hypocondrie

Souvent douleurs… et si médecin passé à


côté Soucis/inquiétudes/ruminations anxieuses
Elle s’en veut beaucoup Autodépréciation, dévalorisation/ dépréciation -
culpabilité
Offrir l’image d’une femme posée et Sensibilité au jugement
efficace

3
MME D.

Mme D a pris rendez-vous à l’hôpital de jour du centre de gérontologie sur les conseils de son
médecin traitant. Le gériatre qu’elle a rencontré a alors prescrit un ensemble d’examens, dont un
bilan neuropsychologique. Le jour de la consultation avec la psychologue, Mme D vient seule. Elle
est arrivée avec beaucoup d’avance car elle ne connaissait pas le quartier, mais elle s’est finalement
très bien repérée grâce aux indications données par la secrétaire. Elle se présente avec les résultats
du bilan sanguin qui ne retrouve rien de particulier, sa dernière ordonnance (Provastatine et Amlor)
et le compte rendu de l’IRM qui précise que le volume du cortex hippocampique est normal pour
l’âge et qu’aucune lésion vasculaire n’est retrouvée.

La tenue de Mme D est soignée, mais cela lui a visiblement demandé beaucoup d’efforts pour se
préparer ce matin afin d’honorer ce rendez-vous. Elle déplore elle-même son manque d’entrain et
s’excuse de ne pas être aussi joviale que d’habitude. Elle parvient toutefois à sourire à une ou deux
reprises pendant l’échange. Son discours est cohérent mais le ton assez triste et monocorde.

Lors de l’entretien, elle explique sans attendre la raison de sa venue : elle oublie tout. Sa plainte
mnésique est spontanée et détaillée : elle ne cesse de perdre des objets, entre dans une pièce sans
se souvenir de ce qu’elle est venue y chercher, cherche ses mots et parfois le nom de certaines
personnes... Elle dit être obligée de tout noter ces derniers mois. Parmi ses antécédents familiaux,
Mme D précise d’emblée que sa mère avait « une maladie de la mémoire » et que c’est surtout cela
qu’elle redoute. Elle vient d’ailleurs de fêter il y a quelques mois son 79ème anniversaire, âge que
sa mère avait lorsqu’elle est décédée. Elle ressasse beaucoup de vieux souvenirs ces derniers temps
et ne cesse d’avoir des idées noires et de penser à sa propre mort.

Lors du recueil anamnestique, Mme D est capable de se souvenirs d’événements très anciens, son
visage s’illumine soudain lorsqu’elle rapporte une anecdote de l’enfance, le nom de certains
enseignants... A propos des faits sociaux, elle est en mesure de restituer les événements de
l’actualité récente. Questionnée sur son entourage familial, elle peut donner avec facilité les dates
de naissance de tous ses petits-enfants et raconter comment se sont déroulés les derniers
anniversaires... Elle raconte également la dernière sortie effectuée avec le club du 3ème âge de son
quartier, une conférence qui lui a beaucoup plu, même si celle-ci date de plusieurs mois car elle
n’a pas eu envie de se joindre au groupe ces derniers temps et a décliné toutes les invitations qui
lui ont été faites. En effet, elle ne se sent pas à la hauteur. Elle, qui aime beaucoup la lecture,
n’arrive plus à se concentrer suffisamment, ni à lire plus de 3 pages d’affilées. Comme elle ne
réfléchit plus assez vite et « se sent tellement nulle », elle ne veut plus jouer au bridge. Elle ne
tricote plus et n’a pas sorti sa machine à coudre depuis noël. Elle a déjà vécu un épisode similaire
après la naissance de sa fille.

Ses 2 enfants n’habitent pas dans la région. Elle les a très souvent au téléphone et garde
régulièrement ses petits-enfants pendant les vacances. Sa fille est d’ailleurs venue chercher les 2
plus petits il y a 3 semaines. Eliot a 8 ans et Clémentine a 6 ans. Depuis qu’ils sont partis, elle passe
tout son temps au lit. Elle se sent triste et avoue avoir pleuré toute la journée d’hier. Elle regrette
en effet de ne pas avoir assez profité de la présence de ses petits- enfants tellement elle se sentait
fatiguée. Elle n’a pas eu l’énergie de les accompagner au parc comme elle le fait d’habitude. Par

4
ailleurs, elle s’en veut d’inquiéter sa fille qui ne cesse de lui reprocher de ne pas se nourrir
suffisamment et d’avoir encore perdu un peu de poids.

Lors de l’évaluation, Mme. D se montre coopérante et participe à la passation des différentes


épreuves. Il est à noter de nombreux propos autodépréciateurs dès que Mme D se croit en échec.
Elle répond facilement par des réponses « je ne sais pas ». On relève également un certain
ralentissement lors des épreuves chronométrées. Toutefois, tous les tests réalisés font état de
performances dans la norme, voire supérieures à celles-ci.

5
MADAME D

Mots clefs relevés dans le texte Signe correspondant


…A demandé beaucoup d’effort… manque Diminution de l’élan vital
d’entrain, pas aussi joviale…
Ton assez triste et monocorde Humeur triste/tristesse
Elle oublie tout Trouble de la mémoire/mnésique/plainte
mnésique
Perdre ses objets, entre dans une pièce sans se Trouble de l’attention, de la
souvenir de ce qu’elle est venue y chercher, concentration, de la mémoire/plainte
cherche ses mots…obligée tout noter… mnésique

Elle redoute Peur/anxiété


Ressasse vieux souvenirs Ruminations
Idées noires et pense à sa propre mort Idées noires/mortifères/ de
mort/suicidaires
N’a plus eu envie de se joindre au groupe Anhédonie
N’arrive plus à se concentrer Trouble de la concentration/hypoprosexie
Se sent tellement nulle, pas à la hauteur… Autodépréciation, dévalorisation/
dépréciation
Ne veut plus jouer au bridge, Ne tricote plus, N’a Apathie
pas sorti sa machine à coudre…
Passe tout son temps au lit Clinophilie
Triste, a pleuré Humeur triste/tristesse
N’a pas eu l’énergie Asthénie
S’en veut Autodépréciation, dévalorisation/
dépréciation Culpabilité
Ne se nourrit pas suffisamment, Perdu du poids Perte de poids
Ralentissement aux épreuves chronométrées Ralentissement psychomoteur

6
LAURA

Laura a 31 ans et consulte pour la première fois un psychologue parce qu’elle a de fortes
contractures et malgré les séances de kinésithérapie elle n’arrive pas à se remettre et ceci la
préoccupe beaucoup.

Elle est mariée depuis 8 ans avec Jean, et n’a pas encore d’enfants, cela fait pourtant trois mois
qu’ils ont arrêté les moyens de contraception. Elle craint avoir des kystes ou bien de
l’endométriose malgré des examens effectués qui se sont révélés rassurants. À cause de ses
craintes, elle dort de plus en plus mal, et se réveille plusieurs fois par nuit.

Il y a deux ans, elle a fait une fausse couche et depuis elle a l’impression d’avoir changé. «Je
ne me reconnais pas. Parfois le week-end, je me couche et je reste là des heures à ne plus
bouger dans mon lit ». Elle avait commencé à faire du sport, cela l’aidait beaucoup, mais
aujourd’hui elle a arrêté car elle n’éprouve plus autant de plaisir. Elle ne parvient plus à lire et
elle dit en pleurant « Je ne peux plus me concentrer, je m’installe pour lire et ma tête reste en
blanc... ».

Elle décrit être peu à peu moins sûre d’elle, à tout re-vérifier sans cesse pour éviter d’oublier
ou de se tromper. Elle a tendance à se replier sur elle-même, moins communiquer avec ses amis
qu’elle voyait pourtant régulièrement. Ses journées sont marquées par une difficulté à faire des
choses, même les plus simples, elle procrastine et culpabilise de laisser ses papiers s’entasser
sans parvenir à s’en occuper. Et elle s’agace de perdre la mémoire.

Ces derniers temps, elle souffre énormément du mal-être qu’elle ressent et cela affecte sa
relation avec son conjoint. « Jean est intéressant et mignon, mais j’ai perdu tout intérêt à être
à ses côtés, et à faire des choses avec lui ». Elle dit douter d’elle, penser que c’est peut-être de
sa faute si elle ressent cela. Elle ne veut pas sentir ce rejet, mais elle ne peut pas s’empêcher d’y
penser, et ressasse la scène dans laquelle Jean la quitterait. Elle regarde au moins trois fois par
jours de vieilles photos pour ne pas avoir ces images horribles dans la tête.

Laura reconnait avoir eu plusieurs discussions avec Jean sur la situation. Mais il ne comprend
pas ce qui lui arrive et il pense qu’elle ne l’aime plus. À la fin de l’entretien, nous proposons à
Laura de venir avec son mari lors de la prochaine consultat

7
LAURA

Laura a 31 ans et consulte pour la première fois un psychologue parce qu’elle a de fortes
contractures et malgré les séances de kinésithérapie elle n’arrive pas à se remettre et ceci la
préoccupe beaucoup (anxiété/soucis/inquiétude/angoisse). Elle est mariée depuis 8 ans avec
Jean, et n’a pas encore d’enfants, cela fait pourtant trois mois qu’ils ont arrêté les moyens de
contraception. Elle craint avoir des kystes ou bien de l’endométriose malgré des examens
effectués qui se sont révélés rassurants (obsessions/hypochondrie). À cause de ses craintes,
elle dort de plus en plus mal, et se réveille plusieurs fois par nuit (insomnie/avec éveils
nocturnes). Il y a deux ans, elle a fait une fausse couche et depuis elle a l’impression d’avoir
changé. «Je ne me reconnais pas. Parfois le week-end, je me couche et je reste là des heures à
ne plus bouger dans mon lit » (clinophilie). Elle avait commencé à faire du sport, cela l’aidait
beaucoup, mais aujourd’hui elle a arrêté car elle n’éprouve plus autant de plaisir (anhédonie).
Elle ne parvient plus à lire et elle dit en pleurant « Je ne peux plus me concentrer, je m’installe
pour lire et ma tête reste en blanc... » (hypoprosexie/trouble de la concentration). Elle décrit
être peu à peu moins sûre d’elle (doute/perte de confiance), à tout re-vérifier sans cesse pour
éviter d’oublier ou de se tromper (vérifications). Elle a tendance à se replier sur elle-même,
moins communiquer avec ses amis qu’elle voyait pourtant régulièrement (repli sur soi). Ses
journées sont marquées par une difficulté à faire des choses, même les plus simples, elle
procrastine et culpabilise de laisser ses papiers s’entasser sans parvenir à s’en occuper. Et elle
s’agace de perdre la mémoire (Trouble cognitif/de la mémoire/mnésique). Ces derniers
temps, elle souffre énormément du mal-être qu’elle ressent (douleur morale/tristesse/humeur
triste/dépressive) et cela affecte sa relation avec son conjoint. « Jean est intéressant et mignon,
mais j’ai perdu tout intérêt à être à ses côtés, et à faire des choses avec lui » (apathie). Elle dit
douter d’elle, penser que c’est peut-être de sa faute si elle ressent cela (Culpabilité). Elle ne
veut pas sentir ce rejet, mais elle ne peut pas s’empêcher d’y penser, et ressasse la scène dans
laquelle Jean la quitterait (rumination/anxiété/peur anticipatoire). Elle regarde au moins trois
fois par jours de vieilles photos pour ne pas avoir ces images horribles dans la tête
(évitement/neutralisation). Laura reconnait avoir eu plusieurs discussions avec Jean sur la
situation. Mais il ne comprend pas ce qui lui arrive et il pense qu’elle ne l’aime plus. À la fin
de l’entretien, nous proposons à Laura de venir avec son mari lors de la prochaine consultation.

8
VALENTIN

Valentin est un homme de 38 ans qui consulte pour la première fois en service hospitalier de
psychiatrie. Il est envoyé par son médecin généraliste pour dépression d’intensité moyenne. Le
patient a du mal à dormir, dort le soir mais se réveille tôt, n’arrive pas à se rendormir et se lève
le matin avec « la boule au ventre ». Valentin avait précédemment consulté un psychiatre en
secteur privé, suivi que le patient avait arrêté assez tôt car « ça remuait trop de choses dans sa
tête ». Actuellement, le patient est angoissé le matin, reste préoccupé en permanence, n’arrive
pas à se rassurer. Cela dure depuis 6 mois.

Dans les antécédents familiaux on retrouve, il y a une dizaine d’années, un père décédé à 60
ans d’un accident vasculaire cérébral. Celui-ci était anxieux et « hypocondriaque » d’après son
fils. Sa grand-mère maternelle est morte d’une maladie de Charcot à 90 ans. Il est l’aîné d’une
fratrie de deux enfants ; son frère est plus jeune d’une dizaine d’années sans trouble
psychologique ou somatique particulier.

Valentin a obtenu un BTS action commerciale sans avoir jamais redoublé et a toujours été bon
élève. Il relate cependant des difficultés à l’école, notamment parce qu’il n’arrivait jamais à
finir à temps lors des examens, préférant que tout ce qu’il rendait soit juste, sans erreurs « besoin
que tout soit correct ». On disait alors de lui qu’il était lent mais appliqué. On ne retrouve pas
de problème particulier de comportements à l’école, même si on le décrivait « rêveur ». Il a des
amis avec qui il aime bien faire la fête ou faire du sport. Il est avec sa compagne depuis 5 ans
et avec qui cela va très bien. Il présente des antécédents somatiques d’asthme quand il était
jeune avec des allergies au pollen et de la spasmophilie. Le patient rapporte avoir eu une
éducation rigide, ses parents étant très sévères en ce qui concernait la scolarité et les sorties.
Pour eux, la réussite professionnelle est fondamentale. Actuellement Valentin se sent triste et a
perdu du poids. Il présente des crises d’angoisses avec l’impression de perdre le contrôle,
seulement avant d’aller au boulot. Il ne se sent plus le courage d’aller faire du sport deux fois
par semaine comme il le faisait jusqu’alors et n'en éprouve plus de plaisir à faire cette activité.

Son médecin généraliste lui a prescrit de l’Anafranil (25mg/jour) et du Lexomil (1/4 le soir).
Valentin date ses problèmes d’anxiété depuis une garde à vue traumatisante. Il avait bu et a été
arrêté en état d’ivresse entraînant une garde à vue de 24 heures. Ses problèmes psychologiques
s’aggravent à la naissance de son enfant (un garçon âgé de 5 mois quand il vient consulter), le
patient « ne dort plus » afin de pouvoir mieux surveiller son fils. Un ensemble d’idées a alors
envahi son esprit : il a peur que son enfant soit « mal mis » dans son lit. Il n’arrive pas à savoir
s’il faut le mettre sur le ventre ou sur le dos. Ainsi il craint qu’il arrive quelque chose à son fils,
qu’il s’étouffe et ne se réveille pas. Il se lève jusqu’à 20 fois par nuit, regarde longuement son
fils pendant parfois une demi-heure pour vérifier qu’il respire bien. Il évoque au bout de
quelques séances qu’il a aussi peur de blesser son fils par négligence. Il évite ainsi en sa
présence de toucher des couteaux et ne s’approche plus des fenêtres quand il le tient dans les
bras. Quand il est trop angoissé à cette idée de faire du mal à son fils, il « passe en boucle »
dans sa tête les événements de la journée pour s’assurer qu’il a été un bon père. Cependant cela
ne le rassure pas tout de suite car il n’est jamais sûr qu’il a fait le « bon geste ». Alors il
recommence. Cela peut durer des heures et entraine une fatigue importante même si après cela
il se sent « rassuré ». Depuis quelque temps, il demande à sa compagne de lui « confirmer »
qu’il n’a pas eu de gestes agressifs envers son fils dans la journée.

Au travail, il a toujours peur de faire une erreur, notamment d’avoir oublié de faire signer un
papier à un client. Quand on lui demande ce qui pourrait se passer si cela était effectivement le

9
cas, Valentin répond qu’il a peur que le client s’en aperçoive, qu’il vienne se plaindre et l’accuse
d’avoir voulu l’arnaquer. Que le client pourrait même porter plainte, il s’imagine alors perdre
son travail et aller en prison. Même si Valentin reconnaît le caractère exagéré de ses pensées, il
ne peut se les enlever de la tête, même en essayant de se raisonner, « ça tourne en boucle ».

Lors des entretiens préliminaires, quand il lui est demandé depuis quand il avait des idées
inquiétantes qui envahissent ses pensées sans pouvoir les contrôler, le patient se rappelle qu’à
l’adolescence, avant chaque examen, il était préoccupé par la peur d’avoir une mauvaise note
et que cela pouvait porter malheur à ses parents. Il craignait notamment qu’ils aient un accident
en voiture. Il essayait immédiatement alors de penser à quelque chose de positif les concernant
pour « annuler cette pensée ». Valentin finit tous ses entretiens en demandant systématiquement
et en répétant plusieurs fois « Docteur, on va y arriver hein ? ».

10
Valentin

Mots clés relevés dans le texte Signe correspondant


Du mal à dormir, dort le soir mais se réveille tôt Insomnie avec difficultés
d’endormissement et éveils précoces
Boule au ventre Signe neurovégétatif de l’anxiété
Anxiété-Préoccupé en permanence, N’arrive Inquiétude/soucis excessif/anxiété
pas à se rassurer chronique
Besoin que tout soit correct Perfectionnisme
Spasmophilie Attaques de panique
Triste Humeur triste/tristesse
Perdu du poids Perte de poids
Crises d’angoisse Attaque de panique
Plus le courage d’aller faire du sport /Plus de Anhédonie
plaisir /sport
Ne dort plus pour surveiller son fils Hypervigilance, insomnie
Peur enfant mal mis dans son lit Obsession
Se lève jusqu’à 20 fois par nuit… pour vérifier insomnie: éveils nocturnes
Conduite de vérification
Hypervigilance
Peur de blesser son fils par négligence Phobie d’impulsion
+ +
Evite de toucher des couteaux et de s’approcher Conduite d’évitement
des fenêtres
Idée de faire du mal à son fils Obsession idéative/phobique
Passe en boucle dans sa tête Compulsions mentales/rituels mentaux

Jamais sûr du bon geste Doute obsessionnel


Recommence Compulsions
Fatigue Asthénie
Demande à sa compagne de lui confirmer qu’il Phobie d’impulsion
n’a pas eu de geste agressif Vérification

Toujours peur de faire une erreur Doute (obsession)


Peur que client l’accuse de vouloir l’arnaquer Obsession
Peur de porter malheur à ses parents Pensée magique
Positif pour annuler ses pensées Evitement (compulsion)
Demande systématiquement, répète plusieurs Vérification (compulsion)
fois

11
Aline
Aline est une jeune femme de 40 ans, chirurgien-vétérinaire à Montpellier. Elle est célibataire
depuis de nombreuses années, sans enfant, et a une sœur dont elle est très proche. Elle est une
grande passionnée d’histoire, et passe la plupart de son temps libre dans les musés ou bien à
lire des livres ou à suivre des conférences sur l’histoire ancienne. Elle vit seule, dans une maison
située à 1 heure de son lieu de travail.

Aline vient consulter en libéral suite à une recommandation d’un médecin spécialiste du
sommeil avec qui elle a eu récemment rendez-vous à l’hôpital de Montpellier. Elle ne dort plus
depuis plusieurs mois maintenant, se sent submergée par son travail qui lui prend beaucoup de
temps et la stresse énormément (anxiété). Elle a perdu quelques kilos ces dernières semaines
(perte de poids), se plaint de quelques oublis au travail ces derniers temps (troubles de la
mémoire/mnésiques/difficultés de concentration), et se rend au travail avec une boule au
ventre tous les matins (anxiété/symptôme neurovégétatif de l’anxiété). Aline nous explique
avoir toujours été plus ou moins anxieuse, mais aujourd’hui cela prend de telles proportions,
qu’elle ne sait plus quoi faire pour « se débarrasser de ce stress incessant ». Interrogée un peu
plus sur ses antécédents, Aline rapporte avoir souffert d’un épisode dépressif majeur, il y a
deux, ans suite à des relations conflictuelles au travail avec un ancien associé de la clinique
vétérinaire. Aline explique avoir toujours eu du mal a dire ce qu’elle pense ou ce qu’elle ressent,
et préfère se taire plutôt que devoir affronter une conversation avec quelqu’un (manque
d’affirmation de soi/comportement inhibé). D’après Aline, ses difficultés ont commencé très
jeune, au collège, déjà à cette époque elle « n’osait pas ». Plus précisément, elle rapporte des
souvenirs très douloureux pour elle lorsqu’il s’agissait d’aller présenter, par exemple, un exposé
à l’oral devant sa classe. Lors de ces exercices, elle se sentait brutalement très anxieuse, la
bouche sèche, la gorge nouée, avait le cœur qui s’emballait très vite, elle transpirait
énormément, et elle restait sans rien dire (Symptômes neurovégétatifs de l'anxiété), craignant
qu’on lui fasse une remarque sur son travail (idées anxieuses sociales). Ne voulant plus subir
cela, Aline nous explique qu’elle finissait par ne pas aller en cours, inventant un prétexte,
comme être malade par exemple, lorsqu’elle savait qu’un exercice oral était à réaliser
(évitement). Aline rapporte que toute son adolescence a été marquée par la peur de sortir,
notamment de rencontrer de nouvelles personnes, de devoir engager une conversation lorsque
cela était obligé (Idées anxieuses sociales). Même aujourd’hui, cela perdure. Bien qu’Aline dit
« être une autre à son travail et pouvoir s’exprimer auprès de ses clients », elle n’ose pas,
certaines fois, revendiquer ses choix et ses décisions thérapeutiques, particulièrement si celles-
ci sont critiquées par son supérieur hiérarchique. Elle se sent illégitime et doute toujours de ses
compétences professionnelles, elle craint toujours ne pas avoir fait le bon choix pour ses
patients (doute/anxiété). À la fin de la journée, une fois rentrée chez elle et que le calme est
revenu, elle se sent très triste, et pleure (tristesse/ expression de la tristesse), seule sur son
canapé : et si j’étais passé à côté de quelque chose, un diagnostic qui m’aurait échappé, mon
collègue aurait-il fait mieux ? (Ruminations). Elle s’en veut alors énormément, et se dit
« qu’elle n’est certainement pas à la hauteur, qu’elle n’est pas faite pour ce genre de job ! »
(Auto-dévalorisation, auto-dépréciation). Aujourd’hui Aline explique que son manque de
confiance en elle et sa peur de l’autre l’empêche de rencontrer quelqu’un avec qui partager sa
vie. Elle craint finir seule, avec ses deux chats, sans enfant et personne pour l’aimer ; cela
l’angoisse beaucoup (anticipation anxieuse/anxiété/angoisse). Aline évite de se rendre chez
sa sœur lorsque celle-ci l’invite pour un repas et qu’elle sait que d’autres personnes seront
présentes. Cet été elle a même refusé de partir en vacances avec elle et son mari et leur couple
d’amis (évitement). Elle s’est déjà retrouvée dans ce genre de situations et cela la met très mal
à l’aise. Elle rapporte que plusieurs heures avant de se rendre à un repas, elle réfléchit à la façon

12
de s’habiller, de ce qu’elle va bien pourvoir dire pour ne pas paraître ridicule (Anticipation).
Ce qui la rend la plus anxieuse est de devoir s’exprimer devant des inconnus et que toute
l’attention soir portée sur elle (Idées anxieuses spécifiques de performance). Si quelqu'un
rigole, elle est persuadée que c'est de elle qu’on se moque. Quand quelqu'un la regarde, elle
s’imagine que les gens ont des pensées négatives sur elle, qu’ils la trouvent idiote ou laide
(idées anxieuses sociales). Elle a beau essayé de se contrôler, elle n'y arrive pas et s’imagine
commencer à parler, rougir, les autres la regarderaient intensément, elle bafouillerait et, en
quelques minutes, serait pris d’une angoisse incontrôlable (Idées anxieuses sociales
d'anticipation / Anxiété anticipatoire).

13

Vous aimerez peut-être aussi