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SECRÉTARIAT D’ÉTAT AU COMMERCE EXTÉRIEUR

L E S E N J E U X É C O N O M I Q U E S I N T E R N AT I O N AU X
Octobre 2001

L’OMC et
la gouvernance
commerciale

Dans un récent ouvrage, l’association ATTAC les, d’environnement, de santé publique ou


suggère de Remettre l’OMC à sa place. de sécurité alimentaire ? En quoi l’OMC
Quelle est cette place dans la gouvernance est-elle, ou peut-elle être une institution uni-
mondiale ? Quel partage s’esquisse verselle et démocratique ?
aujourd’hui entre la poursuite du mouve-
ment de libéralisation des échanges, la prise Le présent numéro de DREE-Dossiers apporte
en compte des besoins du développement, un certain nombre d’éclairages et d’analy-
et la mise en cohérence de l’action de ses sur ces questions de fond, qui alimen-
l’OMC avec celle d’autres institutions mul- tent à juste titre un débat public relancé
tilatérales, qu’il s’agisse de normes socia- par la conférence ministérielle de Doha.

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Depuis deux siècles, le niveau de vie de la Il n’attirent pas non plus assez d’investisse-
population mondiale, prise dans son ensem- ments étrangers. La question du développe-
ble, s’est nettement amélioré, comme l’indique ment, ou plutôt celle de sa généralisation aux
l’allongement général de l’espérance de vie ou pays les plus pauvres, ne pouvait, dès lors,
les avancées de la scolarisation. Ce progrès n’a manquer de se poser à l’OMC, pour figurer au
toutefois pas été partagé de façon équitable. premier plan des travaux de préparation des
Les inégalités internationales de revenu se conférences ministérielles de Seattle puis de
sont fortement creusées au XIXe et pendant la Doha.
première moitié du XXe siècle. Elles se sont Mais un nouveau cycle, pourquoi ? Durant toutes
stabilisées depuis. Elles auraient même pour ces années, la libéralisation des échanges et leur
certains observateurs légèrement décru. Mais régulation n’ont pas emprunté la seule voie du
elles demeurent à un niveau très élevé, et qui multilatéralisme. L’Union européenne, comme
cache des mouvements opposés. D’un côté, bon nombre de ses partenaires, a mis en place
le rattrapage des pays émergents : l’écart de des partenariats bilatéraux et régionaux, qui ont
revenu par tête entre les pays d’Asie en déve- contribué, au même titre que les accords mul-
loppement rapide et celui des États-Unis a été tilatéraux, à structurer le système commercial
divisé par deux en 25 ans. De l’autre, la margi- international. L’OMC, pierre angulaire de ce sys-
nalisation de certains pays en développement, tème, en garantit la cohérence, en contenant
africains notamment : l’écart de PIB par tête (à les risques de fractionnement et de discrimina-
parité de pouvoir d’achat) entre l’Afrique Sub- tions. Elle mérite d’être renforcée, à l’heure où
saharienne et les États-Unis est passé de 1 à 12 se multiplient les initiatives régionales (projet
à 1 à 20 sur la même période. d’accord de libre échange des Amériques,
Ces pays marginalisés en termes de croissance accord en cours de négociation entre l’Union
sont également marginalisés en termes de com- européenne et le Mercosur, initiatives multiples
merce, avec un déclin de leurs parts de marché. en Asie, plus ponctuelles).

Consolider le système
commercial international
Une OMC plus Depuis la signature de des échanges mondiaux). La règle du consen-
universelle et l’Accord général en 1947 par sus qui y prévaut, source de complexité, joue
démocratique 25 pays, les huit cycles de avant tout comme un puissant facteur de légi-
négociation ont rassemblé un timité des décisions prises par les États qui en
nombre croissant de participants: 48 pour le sont membres . De ce point de vue, l’OMC se
« Kennedy round » ouvert en 1964, 99 lors du distingue à la fois du système du Conseil de
cycle de Tokyo ( 1973-79), 120 à l’occasion sécurité de l’ONU, dans lequel un nombre limité
de cycle d’Uruguay clôturé en 1994. L’augmen- de pays disposent du droit de veto, et de celui
tation progressive du nombre de ses membres des institutions financières (FMI, Banque Mon-
- 142 à ce jour -, et l’entrée prochaine de la diale), qui fonctionne selon un système de
Chine et d’une vingtaine d’autres pays candidats pondération des voix proportionnelle à la parti-
- dont la Russie- rapprochent désormais l’OMC cipation des États au capital de ces institutions.
de l’universalité. Contestée pour son manque de transparence,
L’organisation offre à tous les pays membres, comme d’autres organisations internationales,
quel que soit leur poids dans le commerce l’OMC renforce depuis deux ans l’accès à l’in-
mondial, une voix égale dans la décision (alors formation, et travaille à rendre son fonctionne-
qu’une dizaine d’entre eux représentent 80 % ment interne plus démocratique.
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Un règlement Mais, avant tout, l’OMC est née contre les sanctions unilatérales et les rapports
des différends de la conviction européenne de force du passé. Les Membres se sont en
plus légitime que seule une organisation effet engagés, s’ils veulent faire arbitrer leurs
internationale forte serait à conflits commerciaux, à les porter devant le
même d’imposer la règle de droit à tous les mécanisme de règlement des différends de
partenaires de l’échange international. Parfois l’OMC. Les pays en développement y ont de
décrié, efficace et certainement perfectible, plus en plus largement recours. À ce jour,
l’organe de règlement des différends mis en ils ont gagné à l’OMC plus de panels que les
place à l’OMC offre la seule garantie possible États-Unis et autant que l’Union européenne.

Le règlement des différends de l’OMC


Bilan au 30 septembre 2001 (source OMC)

Affaires jugées Nombre Part dans Part dans les exportations


par l’ORD le total mondiales (y compris intra UE)

Marchandises Services

Gagnées par l’Union européenne 19 32 % 35 % 40 %

Gagnées par les États-Unis 16 27 % 12 % 19 %

Gagnées par les pays 18 31 % 30 % 15 %


en développement

Gagnées par le Japon 6 10 % 8% 5%

Total 59 100 %

Le cycle de négociation doit être l’occasion ment des dispositifs d’arbitrage ou celui de
de renforcer ce mécanisme. Accroître sa la coopération institutionnelle dans d’autres
transparence, clarifier ses procédures, pro- domaines. Appelée à coopérer avec l’OMC
fessionnaliser les groupes spéciaux chargés lors de la première conférence ministérielle
de juger en première instance et réexaminer de cette organisation, en 1996 à Singapour,
le mécanisme des sanctions constituent dans l’OIT a depuis lors durci son attitude à l’égard
ce domaine, avec le renforcement nécessaire de ses Membres ne respectant pas leurs
de l’assistance technique au bénéfice des pays engagements (cas récent du Myanmar). Dans
en développement, les principales proposi- le domaine de l’environnement, la prise de
tions européennes pour la prochaine négo- conscience de l’efficacité des normes com-
ciation. merciales a relancé l’idée d’une Organisa-
Loin de desservir l’objectif de régulation de la tion mondiale de l’environnement. Elle a pu
mondialisation, l’existence d’un mécanisme pousser, au lendemain de l’échec de Seattle,
de règlement des différends efficace à l’OMC à la conclusion du protocole de Carthagène
peut favoriser, par ricochet, un renforce- sur les mouvements transfrontières d’OGM.
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Un approfondis- Lorsque 23 Parties contrac- Depuis les années soixante-dix, le champ des
sement et un tantes ont signé l’accord du accords s’est considérablement élargi. Agri-
élargissement GATT en 1947, elles lui ont culture, textiles, services et propriété intel-
des règles assigné une mission décou- lectuelle ont ainsi été intégrés dans le cycle
lant directement du contexte d’Uruguay, et dans les accords de Marrakech
de l’époque : organiser et consacrer par le qui en ont résulté en 1994. Les travaux engagés
droit international une libéralisation des depuis lors sur les relations entre le commerce
échanges rendue nécessaire par les exi- d’une part, l’investissement, la concurrence et
gences de la reconstruction. Réduction l’environnement d’autre part, ouvrent la voie
des tarifs douaniers et élimination des à l’inclusion de ces sujets dans le prochain
barrières non tarifaires ont ainsi nourri cycle, la mondialisation appelant le renfor-
les premiers cycles de négociation mul- cement du cadre multilatéral de règles dans
tilatéraux. La transparence et le principe ces domaines encore mal couverts. Retenue
de non-discrimination continuent de régir comme objectif en 1996, lors de la première
les échanges commerciaux internationaux, conférence ministérielle de l’OMC, la transpa-
d’organiser les négociations commercia- rence dans les marchés publics devrait égale-
les et de structurer le fonctionnement de ment faire l’objet d’engagements dans le cadre
l’organisation. des prochaines négociations.

Des règles multilatérales pour l’investissement et la concurrence

Investissement Concurrence
Objectif : négocier un cadre de Objectif : définir un cadre
principes et de règles multilatéra- multilatéral de principes visant à :
les, pour : - définir des principes de base communs
- assurer transparence et non discrimina- à tous les Membres,
tion, - éviter le contournement ou la neutrali-
- accorder un niveau de protection sation des engagements de libéralisation
adéquat à l’investissement étranger, par des pratiques anti-concurrentielles,
- permettre l’accès au marché pour les - inciter à la mise en place de législations
secteurs offerts, nationales,
- en intégrant les pays en développement - en prenant en compte, par des engage-
dans une négociation conduite selon ments en matière d’assistance technique
l’approche retenue pour les services et de coopération inter-institutionnelle,
(seulement listes positives d’engage- les besoins des pays en développement.
ments librement consentis).

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Confirmer dans les textes
la spécificité agricole

Jusqu’au lancement du cycle d’Uruguay en par le dépôt et la discussion des propositions


1986, l’agriculture est restée en marge des de négociation des membres de l’OMC. 125
négociations internationales sur les échan- membres (les Communautés comptant pour 16
ges. L’accord de Marrakech sur l’agriculture membres) ont présenté, au total, 44 proposi-
a introduit, en 1994, des règles et disciplines tions de négociation.
spécifiques à l’agriculture, portant sur l’accès
au marché, le soutien interne et les subven- Le programme de travail pour la deuxième
tions à l’exportation. phase des négociations - d’une durée d’un an-,
qui vise à mener des « travaux approfondis
Les négociations multilatérales sur l’agriculture sur toutes les questions et options pour la
ont repris en janvier 2000, conformément à réforme des politiques énoncées dans les
l’article 20 de l’Accord de Marrakech. La pre- propositions des Membres », a été adopté le
mière étape de la négociation a été marquée 27 mars 2001 par le Comité de l’agriculture.

La poursuite des L’accord agricole de Marra- ment les services d’intérêt général (recherche,
engagements kech a étendu à l’agriculture formation…), l’aide alimentaire intérieure,
le régime de droit commun le soutien au revenu découplé, les program-
en matière d’accès, reposant sur des droits de mes de protection de l’environnement. De
douane fixes (équivalents tarifaires). Une fois même, les versements directs au titre de
établis, ces droits ont été réduits de 36 % en programme de limitation de la production
moyenne sur les six années de mise en œuvre (« boîte bleue ») ont été exemptés de tout
de l’accord. engagement de réduction.

En matière de subventions, les Membres de L’accord de Marrakech a, enfin, imposé deux


l’OMC ont décidé de réduire de 20 %, en six contraintes sur les subventions aux exporta-
ans, les soutiens considérés comme ayant des tions. La première a consisté en un engage-
effets de distorsion sur la production ou les ment de réduction des dépenses (engagement
échanges. Ne sont, en revanche, pas soumis à budgétaire) de 36 %. La seconde a porté sur
engagement de réduction les soutiens qui ont un engagement de réduction de 21 % des volu-
été classés en « boîte verte », visant notam- mes de produits exportés avec subventions.
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L’Union européenne considère par ailleurs tés de riz ou de thé. C’est pourquoi l’Union
la protection des indications géographiques européenne propose d’étendre la protection
comme un élément de la négociation sur additionnelle que l’accord ADPIC réserve aux
l’accès aux marchés, et de promotion de la vins et spiritueux à l’ensemble des produits
qualité des produits agricoles et alimentaires. agricoles et alimentaires. L’objectif reste de
Les pays en développement peuvent y trouver créer un registre multilatéral des dénomina-
un intérêt, par exemple pour certaines quali- tions protégées.

La réaffirmation La négociation agricole à Dans cette seconde logique, qui est celle de
de la spécificité l’OMC oppose, traditionnel- l’Union européenne, le secteur agricole génère
du secteur lement, deux visions : un des « externalités positives » au-delà de la seule
premier groupe de pays production de produits agricoles : contribution
(dit « groupe de Cairns ») est partisan d’une au développement durable, au maintien ou à
approche axée exclusivement sur le marché l’augmentation du nombre d’emplois dans les
et d’une banalisation du traitement réservé zones souffrant de handicaps structurels, à la
par l’OMC à l’agriculture. Le second groupe protection de l’environnement, au maintien de
(les pays défendant la multifonctionnalité) la vitalité des zones rurales ou à la lutte contre la
soutient l’idée qu’une orientation par le pauvreté. Contestée par des pays tels que l’Aus-
marché ne saurait suffire pour atteindre les tralie, l’Argentine ou l’Uruguay, cette approche
multiples objectifs que la société assigne à justifie pour l’Europe le maintien d’un accord
l’activité agricole. spécifique pour ce secteur à l’OMC.

L’intégration Au delà de la spécificité de puisse être utilisée pour imposer sur le


des préoccupa- l’agriculture en tant que marché des produits dont la sûreté suscite
tions non secteur économique, l’Union des interrogations. L’Union européenne
commerciales européenne souhaite que propose, en conséquence, de clarifier les
l’accord agricole de l’OMC conditions dans lesquelles les pays mem-
permette également de répondre à trois préoc- bres peuvent répondre à ces préoccupa-
cupations essentielles. tions en prenant les mesures appropriées,
La première concerne la sûreté alimen- y compris en ayant recours au principe de
taire. L’opinion publique craint que l’OMC précaution.
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L’Union européenne et le principe de précaution

Au niveau communautaire, la résolution sur le principe de précaution adoptée, sous prési-


dence française, lors du Conseil européen de Nice en décembre 2000, définit six critères à
respecter pour pouvoir prendre une mesure de précaution :

 proportionnalité de la mesure en tenant  réexamen en fonction de l’évolution scienti-


compte des risques à court et à long terme, fique et nécessité d’effectuer des recherches

 non-discrimination et recherche de la mesure complémentaires,

la moins restrictive pour le commerce,  possibilité de déterminer, au cas par cas, à

 cohérence avec les mesures déjà prises dans qui il incombe de fournir les éléments man-

des conditions similaires, quants pour réaliser une évaluation complète


du risque.
 examen des avantages et des charges résul-
tant de l’action ou de l’absence d’action,

Ces critères visent à encadrer les possibilités de recours au principe de précaution, afin d’en
renforcer la légitimité et d’éviter une utilisation abusive et injustifiée.

L’accord sur les mesures sanitaires et phyto- émanent des organisations internationales
sanitaires (SPS) de l’OMC permet de prendre compétentes ainsi que ceux qui découlent
en compte le principe de précaution dans des mesures sanitaires ou phytosanitaires
le cadre de l’élaboration de mesures visant appliquées par d’autres Membres. Dans de
à protéger la santé. Son article 5.7 dispose telles circonstances, les Membres s’effor-
ainsi que : « Dans le cas où les preuves ceront d’obtenir des renseignements addi-
scientifiques pertinentes seront insuffi- tionnels nécessaires pour procéder à une
santes, un Membre pourra provisoirement évaluation plus objective du risque et
adopter des mesures sanitaires ou phyto- examineront en conséquence la mesure
sanitaires sur la base des renseignements sanitaire ou phytosanitaire dans un délai
pertinents disponibles, y compris ceux qui raisonnable ».

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L’accord SPS de l’OMC

L’accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires (accord SPS) conclu en 1994 à Marra-
kech détermine les conditions dans lesquelles les pays membres de l’OMC peuvent adopter
et mettre en oeuvre des mesures sanitaires (santé animale, sécurité sanitaire des aliments) ou
phytosanitaires (protection des végétaux) ayant une incidence directe ou indirecte sur le com-
merce international. Il renvoie aux normes définies dans trois enceintes internationales :

- le Codex alimentarius (organe sous la double - l’Office international des épizooties (OIE), qui
tutelle de l’Organisation des Nations Unies élabore des normes, directives et recomman-
pour l’Alimentation et l’Agriculture - OAA - dations concernant les maladies animales,
et de l’Organisation mondiale de la santé - y compris celles transmissibles à l’homme
OMS), qui élabore des normes, directives, (zoonoses),
codes d’usage et recommandations concer- - la convention internationale de la protection
nant notamment l’innocuité des produits ali- des végétaux (CIPV), qui élabore des normes
mentaires, internationales concernant la santé végétale.

Les normes définies par ces organismes ne sont pas obligatoires, puisque l’accord SPS
reconnaît le droit souverain des Membres de fixer le niveau de protection qu’ils jugent appro-
prié pour protéger leur territoire sur le plan sanitaire, en adoptant si besoin des normes plus
sévères que celles fixées au niveau international. Ces normes nationales, pour être considérées
comme conformes au droit de l’OMC, doivent respecter un certain nombre de principes : néces-
sité, justification scientifique, non-discrimination des mesures, transparence, cohérence.

La deuxième préoccupation concerne dans la définition d’un cadre juridique inter-


l’information des consommateurs sur national, qu’il s’agisse de transparence ou
la production et la transformation des pro- de précaution.
duits agricoles. L’Union européenne recom- La troisième préoccupation concerne le
mande la clarification des règles de l’accord bien-être des animaux, et la demande
sur les obstacles techniques aux échanges dans plusieurs pays européens de réglemen-
applicables à l’éco-étiquetage. La contro- tations plus contraignantes en matière de
verse transatlantique actuelle sur l’étique- protection animale. L’Union a donc proposé
tage et sur la traçabilité des organismes à ses partenaires que, dans ce cas encore,
génétiquement modifiés témoigne de l’actua- des règles en matière d’étiquetage soient
lité et de la forte sensibilité politique de ce débattues et que des compensations puissent
dossier. La conclusion du protocole de Car- être versées aux producteurs pour couvrir
thagène sur la bio-sécurité, en février 2000 les coûts additionnels requis pour satisfaire
à Montréal a marqué une étape majeure aux normes édictées dans ce domaine.

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Poursuivre la libéralisation maîtrisée
des échanges de services

L’accord de l’OMC sur les services ( AGCS) clair aux négociateurs), de services énergéti-
n’a pu être stabilisé dans toutes ses compo- ques, de distribution, de tourisme ou de cons-
santes à la fin du cycle d’Uruguay. Les négo- truction, l’Union peut faire valoir des intérêts
ciations, poursuivies sur une base sectorielle, importants dans la plupart des secteurs. C’est
ont débouché fin 1997 sur des accords de le cas en particulier pour la France, troisième
libéralisation pour les télécommunications de exportateur mondial de services, qui réalise
base et les services financiers. Ces négocia- dans ce secteur plus de 55 % de son PIB, et
tions sectorielles, construites sur le principe en tire environ 75 milliards d’euros d’expor-
d’un échange d’offres et de demandes de tations.
libéralisation, ont repris en janvier 2000.
Marché parmi les plus ouverts, ayant déposé
L’unification du marché unique européen, plus d’une centaine d’offres de libéralisation
soumis à un droit élaboré de la concurrence, en 1994, l’Union européenne cherchera la
placent l’Union en position favorable. Qu’il poursuite du mouvement de libéralisation et
s’agisse de services de télécommunications un rééquilibrage des offres. Elle veillera à un
ou de services financiers, de services postaux approfondissement des disciplines communes
(pour lesquels la révision récente de la direc- respectueux de ses intérêts et de ceux des
tive européenne fournit un point d’ancrage autres États membres.

L’élargissement L’AGCS prévoit la poursuite contournés, ou neutralisés par des disposi-


des disciplines des négociations pour définir tions d’inspiration protectionniste.
des disciplines applicables
aux soutiens publics de nature à fausser les
conditions de l’échange international, et aux
marchés publics dans ce secteur. Complexes La plupart des membres de Le traitement
en raison de la nature réglementaire de la l’OMC entendent maintenir, des sensibilités
plupart des dispositions relatives aux activités dans certains secteurs, des sectorielles
de services, ces travaux progressent lente- politiques dérogeant aux
ment. Il en va de même pour ceux engagés principes de l’OMC. C’est le cas de la France
sur les dispositifs de sauvegarde permettant, et de l’Europe, qui considèrent en particulier
en cas d’afflux imprévisible et déstabilisateur l’audiovisuel comme un secteur d’activité
d’importations, de s’affranchir des engage- économique spécifique. L’intensification des
ments contractés à l’OMC. Des disciplines échanges, la multiplication des modes de dif-
doivent enfin être arrêtées sur les réglemen- fusion des programmes audiovisuels et la
tations intérieures, en application d’une dis- domination du marché par un petit nombre
position de l’accord conclu en 1994, pour d’entreprises peuvent en effet conduire à
garantir que les engagements de libérali- une uniformisation culturelle et linguistique
sation pris par les membres ne seront pas et à une perte des identités nationales.

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Mobilisation internationale en faveur de la diversité culturelle

Replaçant le débat du commerce et de la culture sur le terrain de la gouvernance internatio-


nale, la France considère que l’OMC n’est pas l’enceinte compétente pour définir la notion de
diversité culturelle, ni pour identifier et encadrer les mesures propres à la promouvoir. Elle a
donc encouragé des travaux sur ce thème au sein de la Francophonie, du Conseil de l’Europe,
du Réseau International sur la Politique Culturelle (RIPC) et de l’UNESCO. Cette mobilisation
s’est traduite notamment par :

- l’adoption du rapport final de la IIe réunion Comité des ministres du Conseil de l’Europe
annuelle ministérielle du RIPC (21 septembre (décembre 2000),
1999), - la déclaration de la Conférence ministérielle
- la déclaration sur la diversité culturelle du de la Francophonie le 15 juin 2001

La Conférence générale de l’UNESCO devrait adopter une déclaration universelle portant sur la
diversité culturelle au début de novembre 2001.

C’est pourquoi la France a, de longue date, marge de manœuvre au plan communautaire


soutenu la mise en oeuvre de politiques com- et national, l’Union européenne n’a pris à
munautaires en matière audiovisuelle, repo- l’OMC aucun engagement de libéralisation, et a
sant sur l’instauration de quotas de diffusion déposé des dérogations à la clause de la nation
d’oeuvres européennes (directive Télévision la plus favorisée dans ce secteur, lors du der-
Sans Frontière) et l’octroi de soutiens publics nier cycle de négociations. Pour le prochain
(programme MEDIA). Afin de préserver cette cycle, cette ligne de fermeté est maintenue.

Le mandat communautaire sur la culture

L’objectif fixé dans le mandat de négociation pour l’OMC adopté par le Conseil en octobre
1999 est clair : « Lors du prochain cycle de négociation, l’Union européenne veillera, comme
dans le cycle d’Uruguay, à garantir la possibilité pour la Communauté et ses États membres
de préserver et de développer leur capacité à définir et mettre en œuvre leurs politiques
culturelles et audiovisuelles pour la préservation de leur diversité culturelle ».

La défense des La négociation sur les servi- À l’origine de ce débat, le constat que la notion
services publics ces de l’OMC retient comme de service public n’est pas explicitée, ni expli-
principe l’élévation progres- citement reconnue en tant que telle dans les
sive du niveau de libéralisation et l’accrois- dispositions de l’Accord Général sur le com-
sement du niveau général des engagements merce des services. Celui ci ne fait référence
de libéralisation contractés par les Membres. (article 1-3-b) qu’aux « services gouverne-
Dans cette perspective, est apparue dans de mentaux », exclus du champ de l’accord et
nombreux pays développés une préoccupa- définis comme les services n’étant fournis ni
tion sur le traitement à l’OMC des services sur une base commerciale, ni en concurrence
publics. avec un ou plusieurs fournisseurs de services.
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Si ces formulations peuvent nourrir des inter- d’Uruguay dans les domaines de la santé et
rogations légitimes, la protection des services de l’éducation par l’Union européenne n’ont
publics continue, en pratique, de reposer sur concerné que les prestataires privés. La France
la méthode de négociation par listes positives tirera tout le parti de cette méthode et des
d’offres de libéralisation, qui permet de déci- procédures internes à l’Union pour que les
der librement ce qui est proposé aux pays par- services publics ou d’intérêt général soient
tenaires dans la négociation. C’est sur cette préservés dans les prochaines négociations.
base que les engagements pris lors du cycle

Remettre en cohérence
commerce et développement

L’actualité Les accords de l’OMC finalité, en cinq catégories : octroi de pério-


du traitement contiennent aujourd’hui près des de transition, possibilité de moindres
spécial et d’une centaine de dispo- niveaux d’engagements de la part des PED,
différencié sitions relatives au traite- assistance technique, sauvegarde et promo-
ment spécial et différencié tion des intérêts des PED, amélioration de
(cf. encadré) classées, en fonction de leur l’accès au marché pour les produits des PED.

Le GATT et le traitement spécial et différencié

En 1965, la demande des pays en dévelop- au commerce des parties contractantes peu
pement d’un statut spécial dans le dispositif développées » (art. XXXVI.8 du GATT).
multilatéral a trouvé sa traduction dans la En 1971, une dérogation a autorisé, de façon
nouvelle partie IV (« commerce et développe- provisoire, les préférences tarifaires sous la
ment «) du GATT, qui introduit le concept de forme de systèmes de préférences généra-
non réciprocité en faveur des pays en déve- lisées (SPG). Ce dispositif dérogatoire a été
loppement : « les parties contractantes déve- rendu permanent par l’adoption, à la fin du
loppées n’attendent pas de réciprocité pour Tokyo Round en 1979, de la clause d’habili-
les engagements pris par elles dans des négo- tation, intitulée traitement différencié et plus
ciations commerciales de réduire ou d’élimi- favorable, réciprocité et plus ample participa-
ner les droits de douane et autres obstacles tion des pays en développement .

Ils prévoient par ailleurs des dispositions D’autres catégories de pays à statut déroga-
dérogatoires en faveur des pays les moins toire sont reconnues par les textes : les pays
avancés (PMA), dont la liste est établie par importateurs nets de produits alimentaires,
les Nations Unies. Ainsi, l’accord sur les dans le cadre de l’accord sur l’agriculture, les
aspects des droits de propriété intellectuelle petits producteurs de textiles dans l’accord
qui touchent au commerce (ADPIC) retient ATV (article 6.6 b), ou les pays dont le PIB
une transition de dix années (soit jusqu’au est inférieur à 1000$ par habitant, à l’annexe
1er janvier 2006), avant l’entrée en vigueur VII de l’accord sur les subventions et sur les
de l’accord dans les PMA. droits compensateurs.
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Pour autant, les PED considèrent que les sistance technique trop dépendantes des
objectifs assignés au traitement spécial et contributions volontaires des Membres, des
différencié n’ont pas été atteints, notamment périodes de transition trop courtes pour per-
en raison de l’insuffisance des dispositions mettre de satisfaire aux obligations nouvel-
comprises dans les accords de Marrakech. les énoncées dans les accords, l’absence
Ils dénoncent le caractère non contraignant d’amélioration significative de l’accès au
de nombreuses clauses se limitant à « de marché pour leurs principaux produits
meilleurs efforts » de la part des pays déve- d’exportation, qu’il s’agisse des produits
loppés, les ressources financières de l’as- textiles ou agricoles.

La mise Afin de répondre aux prendre dans ce domaine, y compris dans


en œuvre préoccupations des pays en le contexte de négociations multilatérales
des accords développement sur la mise ultérieures.
existants en œuvre des accords de Le Président du Conseil général a présenté le
Marrakech, les Membres de 26 septembre dernier un projet de décisions
l’OMC ont, en mai 2000, décidé de lancer un sur les questions et préoccupations liées à
processus de restauration de la confiance, la mise en œuvre. Ce texte a été examiné
via un « mécanisme de réexamen de la mise par les Membres de l’OMC début octobre
en œuvre » dont les travaux devront être pour adoption éventuelle lors de la prochaine
achevés avant la tenue de la quatrième con- conférence ministérielle. Les questions qui ne
férence ministérielle. Ce processus s’exercera pourront être réglées à cette échéance seront
sans préjuger des décisions futures que le renvoyées aux futures négociations.
Conseil général de l’OMC sera conduit à

L’assistance L’OMC doit être en mesure taires. La France a apporté une contribution
technique et d’apporter une assistance volontaire au Fonds global d’affectation spé-
la coopération technique suffisante aux pays ciale de l’OMC. Cette aide est dédiée en prio-
internationale en développement, afin de rité aux pays africains, dont la part dans les
leur permettre de mettre en exportations mondiales (en valeur) est passée
œuvre leurs engagements et de tirer avantage de 5 % en 1970 à 2 % environ en 2000.
des accords existants.
Mais l’OMC ne peut, seule, faire face au
À titre d’illustration, la conférence organisée défi du développement. Pour jouer pleine-
par l’OMC à Libreville en novembre 2000 a ment leur rôle, les organisations internatio-
montré que les exportations africaines, très nales en charge du développement (Banque
concentrées sur quelques secteurs, étaient Mondiale, FMI, CNUCED et PNUD, notam-
vulnérables aux réglementations techniques ment) doivent resserrer leur coopération
appliquées dans les pays développés. Ces pays avec l’OMC. Une plus grande cohérence
doivent bénéficier d’une assistance technique des actions des organisations internationales
renforcée pour les questions liées à la cer- est en effet essentielle dans le domaine de
tification et aux normes industrielles et sani- l’assistance technique.

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Développement et cohérence

Le développement est une priorité internatio- Conformément à l’article 10 de l’accord de


nale à laquelle toutes les organisations peu- coopération entre l’OMC et le FMI, les Secré-
vent apporter leur pierre. tariats des deux organisations veillent à éviter
toute contradiction éventuelle entre les disci-
L’article III.5 de l’accord instituant l’Organisa- plines de l’OMC et les obligations contractées
tion Mondiale du Commerce prévoit qu’« en au titre du FMI.
vue de rendre plus cohérente l’élaboration
des politiques économiques au niveau mon- Les questions commerciales sont, depuis avril
dial, l’OMC coopérera, selon qu’il sera appro- 2000, systématiquement intégrées aux straté-
prié, avec le Fonds monétaire international et gies de réduction de la pauvreté présentées
avec la Banque internationale pour la recons- par le FMI et la Banque Mondiale. Les méca-
truction et le développement et ses institu- nismes d’examen de politique commerciale
tions affiliées ». consacrés à des PMA membres de l’OMC
devraient permettre de nourrir ces stratégies.

Le cadre intégré en faveur des PMA, lancé évitant contradictions ou double emplois-
en 1997 après la conférence ministérielle de et d’intégrer la dimension commerciale
l’OMC de Singapour, et réformé en 2000, dans les stratégies de développement et de
pourrait constituer un dispositif précur- lutte contre la pauvreté. Ces principes pour-
seur. Ce cadre intégré réunit six agences raient être utilement repris pour définir des
internationales - OMC, Banque Mondiale, « programmes intégrés » d’assistance tech-
FMI, PNUD, CNUCED et CCI - afin de coordon- nique en faveur des autres pays en dévelop-
ner leurs actions d’assistance technique en pement.

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Donner corps à l’objectif
du développement durable

L’environnement : Conçues dans des enceintes diversité ou la convention CITES de protection


l’articulation différentes (OMC, accords des espèces), les règles commerciales et envi-
des normes multilatéraux sur l’environ- ronnementales peuvent entrer en résonance.
internationales nement, comme le protocole Elles sont le produit de logiques différentes,
de Kyoto, la convention bio- parfois divergentes.

Articulation AME - OMC : le cas de la convention biodiversité

La Convention Bio-Diversité (CBD), adoptée autorisations et le partage des bénéfices ? Qui


en 1992, retient plusieurs grands principes, est compétent pour ce faire ? Pour être direc-
parmi lesquels la souveraineté des États tement applicables, ces principes doivent être
sur leurs ressources génétiques (article 3), traduits en dispositions opérationnelles ;
l’obtention du consentement d’un pays préa- - les conditions de la brevetabilité n’ont pas
lablement à tout prélèvement de matériel été élaborées par l’accord sur la propriété
génétique sur son sol (article 15§5) et un intellectuelle de l’OMC (ADPIC) adopté en
partage équitable avec le pays d’origine des 1994, mais par la Convention de Paris et les
bénéfices tirés de son exploitation (article différents textes adoptés depuis lors, notam-
15§7). ment dans le cadre de l’Organisation Mon-
diale de la Propriété Intellectuelle (OMPI).
Dès la préparation de la Conférence de Seattle L’ADPIC reprend, en y faisant référence, les
en 1999, de nombreux pays en développe- textes existants.
ment ont demandé que l’octroi d’un brevet Dans ces conditions, l’articulation entre la
utilisant une ressource génétique soit subor- CBD et les autres textes de droit international
donné à la présentation par l’inventeur de est évolutive, car la CBD a elle-même vocation
la preuve du respect des dispositions de la à être complétée, et complexe, car la question
CBD. de l’articulation ne se pose pas d’abord avec
l’OMC, mais avec l’OMPI ; elle doit respecter
L’articulation de la CBD avec les autres règles les principes du droit international, et notam-
du droit international soulève plusieurs diffi- ment celui selon lequel un État ne peut se voir
cultés : imposer le respect d’une règle que lorsqu’il
- la CBD pose des principes, mais ne définit l’a expressément acceptée (CBD : 181 pays
pas leurs modalités pratiques de mise en ayant ratifié la Convention ; OMPI : 177 Mem-
œuvre : comment s’organise la délivrance des bres ; OMC : 142 Membres).

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La jurisprudence de l’OMC reconnaît les ou d’importations - utilisées pour restreindre
accords multilatéraux d’environnement (cf. ou prohiber le commerce de produits spéci-
le cas du panel « tortues-crevettes »). Mais fiques. L’insécurité juridique liée à un éven-
la relation entre les réglementations environ- tuel conflit entre les accords multilatéraux sur
nementales et commerciales mériterait d’être l’environnement (AME) et l’OMC est recon-
clarifiée. C’est un des enjeux importants du nue. L’Union européenne propose de la lever
prochain cycle de négociation. Parmi les par la négociation. Les États-Unis s’accom-
180 accords environnementaux, une quin- moderaient de réponses apportées par la
zaine contiennent en effet des dispositions jurisprudence. Les pays en développement
commerciales - interdiction du commerce s’inquiètent des arrière-pensées protection-
d’un produit, quotas, permis d’exportations nistes qu’ils prêtent aux pays européens.

La prise en compte de l’environnement dans le règlement des différends


à l’OMC : l’exemple du panel « tortues-crevettes »

La réglementation américaine imposant aux


pêcheurs l’utilisation de dispositifs empêchant
la pêche simultanée de tortues marines, espè-
ces protégées, et les modalités d’application
de ces mesures (notamment leur application à
tous les pays étrangers non certifiés à comp-
ter du 1er mai 1996) ont été attaquées devant mesures américaines étaient discriminatoires,
l’OMC, en 1996, par l’Inde, la Malaisie, le puisque ne tenant pas compte des mesures
Pakistan et la Thaïlande. équivalentes prises par les pays exportateurs.

Dans son rapport d’octobre 1998, l’Organe Les États-Unis ont, en conséquence, amendé
d’appel de l’OMC a pris en compte les argu- leur réglementation. À nouveau saisi par la
ments environnementaux présentés par les Malaisie, l’Organe d’appel, en octobre 2001, a
États-Unis. Prenant appui sur l’annexe de confirmé que les États-Unis pouvaient subor-
la convention CITES régissant le commerce donner l’accès à leur marché à l’adoption, par
international des espèces menacées d’extinc- les pays exportateurs, de programmes com-
tion, il a estimé que les tortues sont une parables, du point de vue de l’efficacité, à
ressource naturelle épuisable, dont la con- leurs mesures nationales. L’Organe d’appel a
servation est un objectif légitime au sens de toutefois rappelé que cette liberté de légiférer
l’article XX-g du GATT. Ce faisant, il a reconnu était conditionnée à la recherche (mais pas à
la pertinence des objectifs poursuivis par la conclusion) d’un accord international sur la
les États-Unis, tout en considérant que les protection des tortues marines.

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La question La Conférence ministérielle latéral (à l’OMC et à l’OIT), un volet bilatéral
sociale : de l’OMC de Singapour, en (inclusion d’un volet social dans les accords
le dialogue décembre 1996, a abordé ce bilatéraux conclus par l’Union) et un volet de
inter-institutionnel thème pour la première fois. décisions autonomes (les régimes spéciaux
Elle a souligné la compétence d’encouragement du Schéma de préférences
de l’OIT, la nécessité de ne pas utiliser les généralisées, SPG).
normes sociales à des fins protectionnistes et
le besoin d’une coopération entre les Secréta- Les pays en développement demeurent hos-
riats de l’OMC et de l’OIT. tiles par principe à l’évocation de ce sujet
L’OIT a depuis lors créé un Groupe de travail à l’OMC. L’idée de recourir aux sanctions
sur la dimension sociale de la globalisation, commerciales pour inciter au respect des
dont le Directeur général souhaite désormais conventions de l’OIT, avancée par le Prési-
renforcer l’action. Alors que l’OIT n’a pas dent américain durant la conférence de l’OMC
encore demandé le statut d’observateur à à Seattle en 1999, avait précipité l’échec de
l’OMC , cette dernière est, avec la Cnuced, cette réunion. L’Union européenne, réaffir-
observateur dans ce groupe de l’OIT. mant le rejet des sanctions commerciales,
appelle depuis lors à mettre en place un
Pour sa part, la Commission a proposé aux forum permanent de dialogue entre l’OMC et
États membres de l’Union européenne une l’OIT, élargi aux autres organisations inter-
approche globale sur la dimension sociale de nationales concernées par le développement
la mondialisation, reposant sur un volet multi- social.

Santé et L’accès aux médicaments explorée, soulève la difficulté d’éventuelles


médicaments : essentiels, nécessaires à la réexportations. La question la plus sensible,
l’exigence de prévention ou au traitement en terme de politique commerciale, concerne
cohérence des pandémies, est au cœur la protection de la propriété intellectuelle,
du débat international sur la souvent désignée comme le principal obstacle
mondialisation. Le programme d’action global à l’accès aux médicaments des pays en déve-
présenté par la Commission concerne l’OMC loppement.
à plusieurs titres. Si la suppression des droits
de douane peut conduire à une réduction des L’OMC, dans son accord ADPIC sur la pro-
coûts pour l’utilisateur, les protections tarifai- priété intellectuelle intègre les dispositions sur
res sont d’ores et déjà le plus souvent rédui- les brevets définies par l’OMPI. Elle permet
tes. La voie des prix différenciés, également la négociation de licences volontaires avec
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le détenteur d’un brevet, et l’article 31 de Les pays en développement jugent ces disposi-
l’ADPIC encadre l’octroi de licences obligatoi- tions insuffisantes, difficilement mobilisables,
res, au travers desquelles un État peut priver et imprécises, notamment quant à la possibi-
momentanément le détenteur du titre de pro- lité de faire appel à des fabrications hors de
priété industrielle de son droit exclusif sur leur territoire propre, quand le pays ne dis-
ce dernier. Il faut pour cela qu’une tentative pose pas de capacités de production locale. La
de négociation avec le détenteur du droit France a proposé que ce point soit clarifié à
ait échoué ou que le pays soit confronté à l’occasion de la quatrième conférence minis-
« des circonstances d’urgence nationale ou térielle de l’OMC, dans la déclaration spé-
d’autres circonstances d’extrême urgence ». cifique consacrée aux médicaments, afin de
La portée de la mesure doit être limitée dans permettre la production de médicaments sous
le temps, et le détenteur du droit doit recevoir licences obligatoires à destination de pays
une rémunération adéquate. tiers.

Le débat public sur la mondialisation a for- relèvement des niveaux de vie, la réalisa-
tement influencé, depuis trois ans, la pré- tion du plein emploi [ …] et l’accroisse-
paration du nouveau cycle de négociations ment de la production et du commerce de
commerciales multilatérales. Il exerce sur les marchandises et de services, tout en per-
États membres de l’OMC une pression crois- mettant l’utilisation optimale des ressour-
sante, à laquelle les pays européens sont par- ces mondiales conformément à l’objectif
ticulièrement sensibles, pour que soient tout de développement durable, en vue à la fois
à la fois : de protéger et préserver l’environnement et
de renforcer les moyens d’y parvenir d’une
- pris en charge l’impératif de transparence manière qui soit compatible avec leurs
à l’égard de la société civile, qui s’impose à besoins respectifs à différents niveaux de
l’OMC plus qu’à toute autre en raison notam- développement économique »,
ment de la portée des règles qui y sont négo-
ciées, adossées à un mécanisme de règlement - reconnu le fait que la contribution de l’OMC
des différends contraignant. au développement durable requiert plus de
cohérence et de coopération avec les autres
- intégrés dans les négociations les objectifs organisations internationales et une clarifica-
et préoccupations d’ordre non commercial, tion de l’articulation des normes internatio-
au premier rang desquels le développement nales, auxquelles l’Union européenne appelle
durable inscrit au Préambule de l’accord ins- ses partenaires. L’entreprise sera de longue
tituant l’OMC : « Reconnaissant que leurs haleine, notamment pour les liens entre com-
rapports dans le domaine commercial et merce et environnement. L’accord ADPIC de
économique devraient être orientés vers le l’OMC sur la propriété intellectuelle donne

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une illustration du temps de maturation de de transition accordées aux pays les moins
ces problématiques nouvelles, dans lesquel- avancés (2006).
les l’OMC doit se positionner face à d’autres
organisations ou accords spécialisés (l’OMPI Des réponses apportées sur ces différents
en l’espèce) : il aura fallu vingt ans pour points dépendra pour une large part la capa-
passer de l’inclusion, en 1986, de la pro- cité de l’OMC à restaurer, auprès des opinions
priété intellectuelle - pour ses aspects liés publiques et des pays en développement, une
au commerce - dans le programme du cycle image durement malmenée à Seattle, pour
d’Uruguay, à la mise en œuvre de leurs être reconnue demain comme l’instrument
engagements dans ce domaine par tous les privilégié et légitime de la gouvernance com-
membres de l’OMC au terme des périodes merciale internationale.

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