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PLAN SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE
Paragraphe 2. La réception des crimes contre l’humanité par le droit positif aujourd’hui
[2]
Section 3 : Les crimes de guerre
[3]
2- Le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (T.P.I.R.)
A- La détermination de la compétence
1- La compétence matérielle
2- La compétence personnelle
B- L’exercice de la compétence
1- Les conditions d’exercice
b- L’irrecevabilité de l’affaire
1- La présidence
2- Les sections
3- Le bureau du procureur
4- Le greffe
5- L’Assemblée des Etats parties
B- La procédure devant la C.P.I.
1- L’enquête
a- L’ouverture de l’enquête
[4]
b- La conduite de l’enquête
2- Les poursuites
3- Le procès
1- Les Etats
2- L’individu réclamé
A- La demande d’extradition
[5]
b- La cessation de l’arrestation provisoire
B- L’examen de la demande d’extradition
1- La phase judiciaire
a- L’étape préliminaire
b- La procédure devant la Cour d’appel.
c- La décision donnant lieu à l’extradition
d- Le contentieux de la mise en liberté
2- La phase administrative
a- L’hypothèse d’un avis défavorable (Cf article 661, 662 et 664 du CPP)
b- L’hypothèse d’un avis favorable
Section 2. Les effets de l’extradition
[6]
BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE
1- ASCENSIO (H), DECAUX (E) et PELLET (A) (Sous la direction de), Droit
international pénal, 2ème édition révisée, Paris, Pedone, 2012.
2- BASSIOUNI, (M.C.), Introduction au Droit pénal international, Bruxelles, Bruylant,
2002.
3- BAUCHOT (B.), Sanctions pénales nationales et droit international, Thèse de Doctorat
en Droit Privé et Sciences Criminelles, Université Lille 2, Lille, 2007.
4- BAZELAIRE (J.P.), CRETIN (T.), La justice pénale internationale : son évolution, son
avenir : de Nuremberg à La Haye, Paris, P.U.F., 2000.
5- CABRILLAC (R.) (Sous la direction de), Dictionnaire du vocabulaire juridique, 7ème
édition, Paris, Litec, 2015.
6- COHEN (D.), « Aspects récents du droit de l'extradition », in Travaux du Comité
français de droit international privé, 2000-2002, 2004.
7- CORNU (G.), Vocabulaire juridique, 11ème édition, Association Henri Capitant, Paris,
P.U.F., Quadrige, 2016.
8- DAVID, (E.), Les éléments de droit pénal international, 1èrepartie, Bruxelles, U.L.B.,
1998.
9- FRONZA (E.) et MANACORDA (S.) (Sous la direction de.), La justice pénale
internationale dans les décisions des tribunaux ad hoc. Etudes des laws clinics en droit
pénal international, Paris, Dalloz, 2003.
10- FOUCHARD (I.), Le crime international entre internationalisation du droit pénal et la
pénalisation du droit international, Thèse de Doctorat en Droit Privé et Sciences
Criminelles, Université de Paris 1, Panthéon-Sorbonne, Paris, 2008.
11- GUINCHARD (S.) et DEBARD (T.), Lexique des termes juridiques, 22ème édition,
Paris, Dalloz, 2014-2015.
12- HENZELIN (M.) ROTH (R.), (Sous la direction de), Le droit pénal à l’épreuve de
l’internationalisation, Paris/Genève/Bruxelles, L.G.D.J./Georg Editeur/Bruylant, 2002.
13- HUET (A), KOERING –JOULIN (R), Droit pénal international, 3ème édition, Paris,
P.U.F., collection Thémis, 2005.
14- KESSEDJIAN (C.) et LOQUIN (E.), (Sous la direction de), La mondialisation du droit,
Paris, Litec, 2000.
[7]
15- KEUBOU (P.), Le droit pénal camerounais et la criminalité internationale, Thèse de
Doctorat/PhD en droit privé, Université de Poitiers, Poitiers, 2012.
16- LANOTTE, (O.), Répression des crimes de guerre: espoir ou utopie?, G.R.I.P.,
Bruxelles, 1995.
17- LOMBOIS (C.), Droit pénal international, Paris, Dalloz, 1979.
18- MASSE, (M.), « La cour pénale internationale: l'humanité trouve une place dans le droit
international », in Revue des Sciences Criminelles, n°3 juillet-septembre 2001.
19- MASSE (M.), JEAN (J.-P.) et GUIDICELLI (A.), (Sous la direction de), Un droit pénal
postmoderne ? Mise en perspective des évolutions et ruptures contemporaines, Paris,
P.U.F., collection « Droit et justice », 2009.
20- MEOUCHY TORBEY (M-D.), L’internationalisation du droit pénal, Bruxelles,
Bruylant, 2008.
21- NGUELE MBALLA (F.), La protection pénale du patrimoine immatériel en droit
camerounais : le cas des biens de la propriété intellectuelle, Thèse de Doctorat / Ph.D
en Droit Privé et Sciences Criminelles, Université de Yaoundé II, Soa, 2019.
22- NTONO TSIMI (G.), Le paradigme du crime contre l’humanité et la renaissance du
pluralisme juridique dans les droits pénaux africains, Contribution à une théorie sur
l’internormativité des systèmes pénaux nationaux en transition, Thèse de Doctorat/
Ph.D en droit, Université de Yaoundé II-Soa, 2012.
23- PETREQUIN (G.), Le crime contre l'humanité : Histoire d'une prise de conscience, Le
monde juif, Paris, 1994.
24- REBUT (D.), Droit pénal international, 2ème édition, Paris, Dalloz, 2015.
25- SAINT-PAU (J.-C.), « L’internationalisation du droit pénal », in Dr. Pen., n°9,
septembre 2006.
26- TEANI (A-L), Formation et développement du droit pénal international, recherche sur
la naissance d’un ordre juridique, Thèse de Doctorat en Droit, Université de
Bourgogne, 2009.
27- YAWAGA (S.), (Sous la direction de), Crises humanitaires et responsabilités,
Yaoundé, L’Harmattan, 2018.
28- ZAPATERO (L. A.), « L’harmonisation internationale du droit pénal », in Revue des
Sciences Criminelles, 2011.
29- ZOLLER, (E.), La définition des crimes contre l'humanité, in Journal du droit
international, Paris, Seuil, 1993.
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INTRODUCTION GENERALE
Ainsi que s’accorde à l’admettre la doctrine, la réaction des Etats face aux phénomènes
criminels, est aujourd’hui fortement empreinte d’internationalité, les agissements anti sociaux
affectant de plus en plus des espaces et intérêts communs, voire des valeurs et biens juridiques
supra nationaux. En fait, avec l’internationalisation de certaines catégories juridiques, l’on
assiste de plus en plus à l’émergence de comportements criminels considérés comme dépassant
le cadre strictement territorial de l’Etat. En raison de cette tendance contemporaine, le droit
pénal, discipline par essence nationale, s’est vu peu à peu tout aussi émancipé de sa
circonspection territoriale pour davantage s’internationaliser, flirtant de la sorte avec les
préceptes essentiels du droit international. Toutes choses qui, s’agissant spécialement des
comportements ici concernés, ont convergé à l’entretien de l’adjonction de l’épithète
international à cette discipline et, ont suggéré l’essor d’une discipline à la complexité avérée,
le droit pénal international.
En effet, l’internationalisation du droit pénal, ne s’est pas faite sans heurt si l’on se place
sous le prisme de l’intégrité des principes sacro-saints qui gouvernent les disciplines ici
convoquées. A la réalité, situé au carrefour de deux branches du droit fondamentalement
distantes, le droit pénal international se singularise par sa complexité. Le premier versant de
cette complexité est constitué par les principes irrépétibles du droit pénal, et le second par ceux
inhérents au droit international également connu sous le vocable de jus cogens (droit des gens).
Entendu de tradition comme l’ensemble des règles juridiques qui organisent la réaction
de l’Etat face au phénomène criminel, le droit pénal est classiquement bâti sur trois piliers
fondamentaux : la territorialité, la souveraineté, et la légalité étatique des normes incriminantes.
D’un autre côté, le droit international quant à lui postule justement pour le dépassement de la
territorialité, l’émancipation de la souveraineté et la discussion de la normativité strictement et
uniquement étatique comme base de l’incrimination. Aussi ces éléments combinés, augurent
d’ores et déjà, la configuration des difficultés qui peuvent se présenter à l’occasion de la
conjonction du droit pénal et du droit international, et qui portent entre autre sur la
problématique ici fondamentale de la conjugaison des paradigmes de la souveraineté des Etats
et de l’internationalisation de la matière pénale.
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cette discipline et celle de la précision de ses sources, lieux d’inscription ou et mieux
d’extraction des normes qui la constituent. Ainsi envisageons nous tour à tour, l’identification
du droit pénal international par sa définition (section 1), et la clarification de ses sources
(section 2).
En d’autres termes soulignait -il, que recouvre la discipline, selon que cette épithète est
ante posé ou post posé ? qu’est ce qui est international ? Est-ce le droit ou la matière pénale
dont il est l’objet, c’est-à-dire le comportement répréhensible. Aussi, il importe d’apporter des
clarifications afin d’élaguer ce risque de confusion et ainsi d’aboutir à la définition du droit
pénal international.
En fait, le droit international pénal, s’entend par essence de l’ensemble des règles
(conventionnelles ou non) issues de l’ordre juridique international et qui ont pour dessein de
réprimer ce que les auteurs retiennent sous le vocable d’infractions « internationales »,
notamment parce que d’origine internationale c’est-à-dire érigée comme telle
(consensuellement ou non) par une norme internationale. Il est parfois dit « droit des infractions
internationales ». Selon le Professeur Alain PELLET, il a pour objet l’analyse de la façon dont
l’ordre juridique international réagit face à des crimes et autres infractions comportant un
élément d’« internationalité ». A cet égard, d’après les auteurs, sont grossomodo considérés
comme crimes ou infractions présentant un élément d’ « internationalité » les crimes contre la
[10]
paix et la sécurité de l’humanité d’après le jus cogens, infractions internationales par nature
(crimes de guerres, génocides, crimes contre l’humanité, crimes d’agression inter étatiques), et
les autres infractions strictement définies comme telles par les instruments
internationaux, infractions internationales par leur seul mode d’incrimination (les
infractions relatives à la protection des individus et des peuples – traite des hommes, esclavages
et pratiques assimilés, torture, prises d’otages, violations de la bioéthique…etc ; celles relatives
à la protection de l’Etat, des organisations internationales et de leurs agents – terrorisme, faux-
monnayage, mercenariat, atteintes à la sécurité du personnel des nations unies et assimilés,
outrage au tribunaux internationaux et autres atteintes à l’administration de la justice pénale
internationale …etc ; celles relatives aux espaces et à l’environnement - la piraterie et autres
infractions liées aux activités maritimes et d’aviations internationales, la pollution
internationale…etc, celles relatives aux échanges internationaux (le commerce illicite des
biens culturels, le trafic illicite des stupéfiants, la corruption transnationale…etc). On est en
présence ici d’un droit interétatique ou qui relève d’organisations créées par les Etats. Le
Professeur Antonio CASSESE en donne la définition suivante ; il s’agirait de :
Ainsi compris le droit international pénal doit être nuancé du droit pénal international
stricto sensu même si les deux disciplines rendent compte des deux facettes d’une même
préoccupation, la répression des comportements dépassant le cadre étatique. A la réalité, alors
que le droit international tient son assise sur des normes et instruments juridiques issus de
l’ordre international, le droit pénal international quant à lui concerne l’ensemble des règles
juridiques issues de l’ordre juridique pénal interne et destiné à réprimer les infractions
[11]
présentant un caractère d’ « extranéité ». la différence entre les deux disciplines se situe donc à
un double niveau :
Cette intégration conduit à donner une définition large du droit pénal international qu’il
convient de retenir ici et, de l’entendre comme la branche du droit pénal qui régit la répression
des infractions ayant un caractère d’extranéité ainsi que compris supra et, des infractions qui
sont définies comme « internationales », consensuellement ou non, par le droit international.
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Au-delà des préoccupations liées aux critères d’identification du droit pénal
international, qui ici touchent à la précision de la matière pénale et de l’ordre juridique
incriminant, il n’est pas inopportun dans une perspective de compréhension notionnelle et
définitionnelle de rappeler l’évolution historique du droit pénal international. Toutes choses qui
permettra d’étayer avec davantage de clarté la question de son objet et augurera celle des
sources de cette discipline.
En fait l’évolution historique du droit pénal international révèle que cette discipline s’est
constituée en trois phases, ainsi que les auteurs le relèvent (H. Ascensio, E. Decaux, A. Pellet).
Initialement, il s’agissait de s’intéresser aux compétences pénales des Etats sur les espaces
territoriaux communs. La discipline était concernée par les litiges intervenus sur ses espaces
territoriaux communs à différents Etats. Ainsi la piraterie dans ce cadre a été érigée en première
infraction internationale et la matière pénale du droit pénal international était constituée par
toute infraction commise en haute mer et pour laquelle toute juridiction pénale nationale pouvait
exercer sa compétence.
Dans la deuxième phase, les Etats sont passés des espaces communs aux intérêts
communs pour reconnaitre la matière pénale internationale. En effet, ainsi qu’il a pu être
observer par les auteurs, dans le développement des relations interétatiques, les Etats ont
identifié des domaines d’intérêts communs sur différents plans économique, sécuritaire ou
culturel. Aussi il s’agissait de se protéger contre toute forme d’atteinte portée aux dits intérêts.
Dans ce sens, ont été par exemple conclues des conventions internationales en matière de lutte
contre le terrorisme, de lutte contre le trafic de stupéfiant voire de lutte contre la corruption
transfrontalière etc…dans ce sens même on peut citer de nombreux aspects du droit pénal
communautaire.
Dans la troisième phase, les Etats ont évalué les intérêts communs pour les valeurs
communes dans l’identification de la matière pénale internationale. Ils sont partis de
l’hypothèse qu’il existe ou il devrait exister un ordre pénal international constitué par un
ensemble de valeurs élémentaires qui habilite les Etats à exercer leur compétence pénale, soit
parce qu’un état de paix et de stabilité internationale a été rompu, soit lorsqu’un acte commis a
choqué la conscience universelle. Ce sont ces critères qui, de nos jours constituent la substance
de l’infraction internationale. Dans cet esprit, des instruments juridiques internationaux furent
établis pour ériger des incriminations protectrices de ces valeurs sociales et consacrés de la sorte
la matière pénale contemporaine du droit pénal international. Ces instruments juridiques
internationaux constituent pour ainsi dire, l’un des lieux d’inscription ou et mieux d’extraction
[13]
des règles permettant de résoudre les problèmes pénaux qui se posent au plan international, et
subodore déjà la question des sources du droit pénal international, question sur laquelle il
importe de s’appesantir à présent.
A la réalité l’interrogation sur les sources du droit pénal international suit le courant de
sa problématique définitionnelle, celle-ci renseignant de facto sur les normes qui constituent la
discipline. Dans ce sens, une distinction doit être faite parmi ces sources, selon qu’il s’agisse
des instruments juridiques empreints de la souveraineté étatique, et ceux qui en sont dénués,
affranchis, exempts.
En effet on peut d’abord envisager les normes juridiques qui trahissent la marque de la
souveraineté notamment pénale de l’Etat, monopole suprême de la puissance et de la contrainte
publique dans la définition et/ou la sanction des agissements attentant ses valeurs et biens
juridiques, en l’occurrence lorsque ceux-ci présentent un élément d’extranéité ou
d’internationalité. Dans cet esprit, la souveraineté pénale des Etats peut se manifester tantôt à
l’interne dans les législations nationales en matière pénale, tantôt à l’international dans les actes
consensuellement consentis par les Etats sur les questions concernées par la réponse pénale aux
agissements qui présentent un caractère d’extranéité. Aussi une subdivision peut être envisagée
ici entre les instruments juridiques pénaux essentiellement nationaux et ceux internationaux.
Les premiers concernent les textes de l’ordre interne notamment ceux pénaux tels le
code pénal, le code de procédure pénal…etc, dans leurs dispositions concernées par les
infractions présentant un élément d’extranéité. En fait, le droit pénal international conserve de
nombreuses sources nationales même si elles sont assurément en recul. Ces sources nationales
peuvent être exclusives quand elles régissent seules le domaine qui en est l’objet ou alternatives
voire complémentaires de sources internationales. La détermination de la compétence de la loi
pénale camerounaise participe, par exemple, de la première catégorie, étant donné qu’elle est
fixée par la seule loi pénale camerounaise. Les solutions afférentes se trouvent dans le Chapitre
III du Livre premier du code pénal relatif à l’application de la loi pénale dans l’espace. En
revanche, les articles 635 et suivants du code de procédure pénale relatifs à l’extradition
relèvent de la seconde catégorie, puisqu’ils ont pour objet de régir l’extradition en cas d’absence
de conventions internationales ou de compléter celles-ci sur les points qu’elles ne traitent pas.
Dans le cadre des sources essentielles, il peut tout aussi s’agir du texte constitutionnel dans ses
[14]
dispositions qui apportent des solutions aux problèmes de conflits de normes entre celles
pénales celle nationales et celles internationales. Le texte de l’article 45 de la constitution peut
être cité dans ce sens.
S’agissant d’un autre côté des instruments juridiques non empreints de souveraineté, il
s’agit pour l’essentiel des normes issues des principes généraux du droit international et de la
coutume internationale tels qu’émanant du jus cogens, et qui s’imposent erga omnès en ce que
ce sont des normes impératives du droit des gens. Ce jus cogens admet par tradition qu’un
instrument juridique international puisse être imposé à l’Etat alors que celui-ci n’y a pas
consenti. C’est en l’occurrence sur cette base que le statut de Rome portant création de la Cour
Pénale internationale peut être appliqué à un Etat alors que celui-ci ne l’a pas ratifié. L’on peut
dans ce sens se demander si sur la base du jus cogens un Etat qui n’a pas ratifié un traité peut
saisir la cour ; nous y reviendrons.
En tout état de cause, dans le cadre du présent enseignement, toutes ces questions et
d’autres seront amplement abordées. Mais les principales interrogations qui peuvent retenir
notre attention ici sont relatives au point de savoir, qu’est ce qui constitue la matière pénale
internationale, et quel est l’autorité qui en fait l’érection en cette qualité ? Autrement dit quelle
est la substance de l’incrimination pénale internationale, en termes tant de comportements visés
comme infraction internationale, que d’autorité, mieux de techniques d’incriminations ici
appliquées ?
De même et non moins pertinemment, l’on doit s’interroger sur les déterminantes et les
contours de la responsabilité pénale internationale à la suite de l’incrimination sus évoquée. La
pertinence de ce second questionnement s’apprécie aisément lorsqu’on a en souvenir le principe
de droit pénal qui détermine la sanction pénale à l’existence de la responsabilité pénale de
l’agent. D’ailleurs l’actualité de cette préoccupation s’apprécie fort bien à l’aune des florissants
débats qui animent la doctrine, aussi bien pénaliste qu’internationaliste, tant sur la question de
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la responsabilité des chefs militaires, chef d’Etat et autres supérieures hiérarchiques, que sur la
théorie des immunités et l’engagement de la responsabilité pénale internationale devant les
juridictions internationales.
C’est dire que, si par souci d’originalité et dans une grille d’analyse ayant la typologie
de la matière pénale comme matrice, l’enseignement de droit pénal international peut fort
pertinemment être réparti entre l’étude de la répression des infractions internationales par les
juridictions pénales internationales et celles par les juridictions internes, il nous semble plutôt
judicieux d’opter pour une étude minutieuse de la répression des infractions aussi bien
internationales que celles empreintes d’extranéité, en ses différents moments, s’agissant tant
des règles qui gouvernent leur incrimination, que celles encadrant la responsabilité pénale
internationale y relative et, enfin celles qui organisent et régissent le système judiciaire pénal
international. Nous envisageons ainsi tour à tour l’incrimination pénale internationale ou et plus
simplement l’incrimination internationale (Titre 1), la responsabilité pénale internationale
(Titre 2), et le système judiciaire pénal international (Titre 3).
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TITRE I : L’INCRIMINATION INTERNATIONALE
La tendance générale de la doctrine pénale en tout cas celle francophone est d’après les
auteurs à la simplification de la compréhension du terme incrimination. A la suite du Professeur
Stéfano MANACORDA, l’on considère l’incrimination comme :
Il s’agit de toute action ou omission que la société interdit sous la menace d’une sanction
pénale. L’infraction pénale est donc l’attitude du citoyen qui transgresse les interdits édictés par
un texte normatif en matière répressive. C'est dire qu’une infraction pénale est constituée
lorsqu’une attitude interdite par un texte répressif initié par une autorité incriminante sous la
menace d’une sanction pénale a été matériellement et moralement réalisée au sens dudit texte.
Ainsi l’incrimination en droit pénal international n’est rien moins que l’érection d’un
agissement en infraction internationale. La doctrine internationaliste distingue ici deux types
d’incriminations internationales ; celle par détermination de la loi nationale et celle issue de la
doctrine des obligations positives consécutive à l’affirmation de biens juridiques supra
nationaux, c’est-à-dire de valeurs et catégories juridiques qui dépassent le cadre étatique et qui
touchent tantôt à des considérations tenant à la menace d’un état de paix et de stabilité
internationale (crime de guerre, crime d’agression…etc) ou alors qui concerne des
considérations élémentaires de l’humanité (tels les droits et libertés fondamentaux de l’homme,
la conscience universelle…). Dans le premier cas l’on utilise généralement le vocable
d’incrimination internationale formelle, et dans le second celui d’incrimination internationale
par nature ou matérielle.
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comportements ainsi incriminés, c’est-à-dire des infractions internationales objet de
l’incrimination internationale en question.
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CHAPITRE I : LES TECHNIQUES D’INCRIMINATION INTERNATIONALE
Ainsi qu’il a été observé plus haut, le droit pénal international, se singularise par le fait
qu’il est au confluent de deux disciplines : le droit pénal et le droit international. Aussi, s’il est
constant que le procédé de l’incrimination requiert l’existence d’une autorité incriminante,
l’absence de législateur international impose la question de savoir qui en droit pénal
international détient la prérogative de procéder à l’incrimination. Autrement dit quel est
l’autorité incriminante en matière d’incrimination internationale ?
Cette question est susceptible de recevoir deux réponses selon qu’il s’agisse des
incriminations formelles ou de celles matérielles. Dans la première hypothèse, cette prérogative
appartient aux Etats, alors que dans la seconde, le droit de définir et de punir ne saurait lui
appartenir en raison de ce que dans cette hypothèse l’incrimination est internationale de par sa
nature liée à la menace d’un état de paix ou de stabilité internationale ou alors à des
considérations inhérentes à la conscience universelle, non rattachable à un Etat en particulier.
De la sorte, l’incrimination internationale procède non pas d’une autorité incriminante
uniquement étatique ou supra étatique, mais de la mise en œuvre de techniques spécifiques
tantôt incluant les deux types d’acteurs des deux ordres (nationaux et internationaux), tantôt
uniquement d’un seul. On parle de technique bilatérale (section 1) et de technique multilatérale
(section 2) d’incrimination internationale.
[19]
pour laquelle la doctrine s’est souvent fondamentalement interroger sur la nature internationale
de cette incrimination. Ils lui ont souvent préféré la terminologie d’incrimination transnationale.
C’est dire que le droit international édicte l’obligation d’incriminer dont les Etats sont
les destinataires. Cette obligation internationale d’incriminer présente certaines caractéristiques
(A) et une forme spécifique (B).
[20]
issue d’un engagement consensuellement pris par l’Etat. Dans ce sens elle trahit fortement la
souveraineté de l’Etat. A titre d’illustration, nous pouvons citer les engagements pris par les
Etats dans le cadre de la convention des nations unies contre la corruption du 31 octobre 2003.
Son article 15 dispose que :
« chaque Etat adopte les mesures législatives et autres nécessaires pour conférer le caractère
d’infraction pénale …. »
De même on citera aussi la convention, celle de new York contre la torture et autres
peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984, qui contient des
dispositions emportant obligation internationale d’incriminer.
[21]
« Tout Etat veille à ce que tout acte de torture constitue une infraction au regard de son droit
pénal »
Mais elle va plus loin en définissant de façon précise et explicite le terme « torture ».
C’est l’office en son article premier qui dispose que :
« Aux fins de la présente Convention, le terme "torture" désigne tout acte par lequel
une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement
infligées à une personne aux fins notamment d'obtenir d'elle ou d'une tierce personne des
renseignements ou des aveux, de la punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis
ou est soupçonnée d'avoir commis, de l'intimider ou de faire pression sur elle ou d'intimider
ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme
de discrimination qu'elle soit, lorsqu'une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées
par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son
instigation ou avec son consentement exprès ou tacite. Ce terme ne s'étend pas à la douleur
ou aux souffrances résultant uniquement de sanctions légitimes, inhérentes à ces sanctions
ou occasionnées par elles ».
Il s’agit du fait pour l’Etat d’être obligé d’exécuter son obligation internationale
d’incriminer. En traduisant normativement et en exprimant cette obligation, dans son dispositif
répressif. Il importe de s’attarder sur les modalités de l’exécution de cette obligation et sur les
latitudes et pouvoirs que l’Etat dispose, la formulation et l’écriture normative de cette obligation
d’incriminer. Nous examinons tour à tour les mécanismes d’exécution de l’obligation
internationale d’incriminer (A) et le pouvoir du législateur national dans la formulation de
l’obligation d’incriminer (B).
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A- Les mécanismes d’exécution de l’obligation internationale d’incriminer
Ces mécanismes sont contingents du type de rapport que l’Etat en question entretient
entre son ordre juridique interne et l’ordre international. La question flirte ici avec celle des
rapports hiérarchiques entre les ordres juridiques nationaux et internationaux, dans un contexte
de pluralité juridique. Comment les deux se posent t- ils ? Lequel prime t- il sur l’autre ? Ou
alors se confondent- ils ?
Pour y apporter une réponse, deux théories prévalent en droit positif. Celle du dualisme,
soutenue par le Pr ANZILOTTI, et qui prévoit qu’il y ait une différence entre le droit national
et celui international de sorte qu’une règle de droit international ou imposée par ce droit, n’est
valable que si elle fait l’objet d’une incorporation dans l’ordre juridique national. Dans ce sens,
la seule ratification de la norme internationale ne suffit pas ; il faut encore qu’elle soit intégrée
et insérée dans le corpus normatif de l’ordre juridique national en question dans les formes et
procédures que ce dernier prévoit.
Ce renvoi peut être explicite ou implicite. Pris ainsi au sens large, cette définition vise
donc la simple référence d’un texte principal à un autre. Appliquée à la doctrine des obligations
internationales d’incriminer, la technique de leur intégration par renvoi (ou par référence),
consiste au fait pour le législateur de se référer à la définition de l’incrimination par le texte de
[23]
la convention, sans le reproduire, et de fixer la peine correspondante. Ce procédé est susceptible
de générer des difficultés pratiques d’application de la loi, car il faut chaque fois consulter le
texte de la convention pour déterminer les éléments constitutifs de l’infraction. Le renvoi
désigne ainsi la technique par laquelle le législateur fait implicitement ou explicitement
référence au droit international dans le texte national. Ce dernier se limite à édicter la sanction
qui sera appliquée au comportement internationalement défini. Le renvoi est dit explicite
lorsque le droit national reprend textuellement la définition du droit international ou fait
référence aux dispositions du droit international. C’est le cas en droit des affaires O.H.A.D.A.
au sens de la loi de 2003 portant répression des infractions contenues dans certains actes
uniformes. Le renvoi est en revanche implicite lorsque le législateur national utilise les
qualifications pénales internationales sans les définir ou sans les faire référer au droit
internationale. Tel est le cas de l’article 8 de la loi de 2017, portant code de justice militaire qui
dispose que :
« …Le Tribunal militaire est seul compétent pour connaitre …des crimes de guerre, des crimes
contre l’humanité, du crime de génocide ».
2- L’incorporation
Il s’agit ici pour le législateur national d’intégrer une incrimination internationale dans
une loi nationale. La technique de l’intégration par incorporation consiste en la
reproduction intégrale dans la disposition nationale de la norme internationale relativement au
comportement visé. C’est la plus pratique, la plus utilisée et la plus achevée des techniques
d’exécution de l’obligation internationale d’incriminer d’après les auteurs. Elle procède de
l’internalisation de l’instrument international dans la norme nationale. A la différence de la
première technique, celle-ci satisfait entièrement les exigences de la légalité criminelle
beccarienne. Dans ce sens et à titre illustratif, on peut citer le cas du législateur camerounais
qui, à travers le Code Pénal de 2016, a internalisé l’infraction de corruption passive en son
article 134-1, comme faisant suite à la ratification de la convention des nations unies contre la
corruption.
[24]
Intéressons-nous à présent au pouvoir du législateur national dans sa formulation de
l’incrimination internationale.
Le principe ici est que les législateurs nationaux disposent d’une liberté dans cette
entreprise de formulation. Seulement dans leur exécution de l’obligation internationale
d’incriminer, certains législateurs procèdent à une internalisation sélective des infractions
internationales. Tel est le cas de celui camerounais qui dans l’internationalisation de la
convention des Nations Unies contre la corruption n’internalise pas l’enrichissement illicite
comme infraction comme constitutive de corruption. A la réalité, l’on peut se demander si l’Etat
est tenu par une obligation de conformité dans son exécution de l’obligation internationale
d’incriminer, ou alors simplement d’une obligation de compatibilité. En raison de la
souveraineté étatique, il est admis que l’Etat n’est tenu que d’une obligation de compatibilité
en ce sens qu’il suffit que sa formulation de l’incrimination internationale soit simplement
compatible, conciliable avec l’orientation envisagée par la disposition internationale. D’ailleurs
dans la définition de la peine de l’incrimination, et sauf référence par le texte international, le
législateur national dispose d’une totale liberté. On parle de marge totale d’action. Le danger
est alors celui du risque d’incriminations internationales disparates, considération étant de ce
qu’en Droit Pénal International, il n’y a pour ainsi dire quasiment pas de contrôle de conformité
par une instance supra étatique, de la norme nationale par celle internationale.
[25]
incrimination est entièrement laissée au soin de la norme internationale. Cette technique de
l’unilatéralisme magnifie en effet l’émergence des biens et catégories juridiques supra
nationaux, et dépasse le cadre étatique de l’incrimination internationale. Il n’est pas inopportun
de relever que, si la technique bilatérale est traditionnellement appliquée dans les conventions
internationales classiques, celle du bilatéralisme est davantage prévue dans les instruments
juridiques internationaux portant création des instances juridictionnelles internationales ou
internationalisées. On dit de cette technique qu’elle est intimement liée à l’établissement des
compétences juridictionnelles en Droit Pénal International. Aussi se pose-t-on la question de
l’internationalisation de cette technique unilatérale. Autrement dit, des poursuites peuvent - elle
être engagées dans l’ordre juridique interne contre un citoyen, sur le fondement d’une
incrimination définie de façon unilatérale en Droit Pénal International ?
La réponse de principe à cette interrogation est négative. La question se pose avec une
certaine acuité s’agissant de la Cour Pénal International dont le Statut n’est pas ratifié par
certains Etats, ratification qui implique de jure la souscription à la compétence de cette
juridiction pénale internationale. Nous y reviendrons.
[26]
CHAPITRE II : LES PRINCIPALES INFRACTIONS INTERNATIONALES
Ainsi entendu, trois incriminations retiennent ici notre attention. Les crimes contre
l’humanité, (section 1), les crimes de génocides (section 2) et les crimes de guerre (section 3).
Qu’est-ce qu’un crime contre l’humanité ? La réponse à cette question est peu évidente,
eu égard aux dérives et débats à propos desquels le concept a pu – et continue de – faire l’objet
en droit positif. Pour mieux cerner cette interrogation, il convient d’en remonter aux origines,
afin d’en comprendre les raisons d’être et le contenu. Et c’est alors que l’on pourra en restituer
la position contemporaine sur son identification et sa substance, en tant qu’infraction pénale.
Nous nous attardons ainsi principalement sur l’historique du concept de crimes contre
l’humanité (Paragraphe 1) et sa réception par le droit positif aujourd’hui (Paragraphe 2).
[27]
Paragraphe 1. L’historique du concept de crimes contre l’humanité
Les origines du concept de crime contre l’humanité révèlent en fait son appartenance au
Droit International et précisément au Droit Pénal International. C’est en effet pour le procès de
Nuremberg que ce concept trouve sa première tentative de codification juridique officielle. Le
tribunal des nations alliées y a entendait en effet juger les actes causés pendant la Seconde
Guerre mondiale par le régime nazi, dans un cadre discriminatoire, en plus des crimes de guerre
et des crimes contre la paix. Cela dit, déjà en 1868, la Déclaration de Saint-Pétersbourg
condamnait les souffrances inhumaines infligées à l’ennemi et l’utilisation des projectiles
explosifs et incendiaires comme étant contraires aux lois de l’humanité. En 1899, la Clause de
MARTENS, concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre, parlait des lois de l’humanité
; mais la référence à ces « lois » servait à condamner les « crimes de guerre » et non les « crimes
contre l’humanité ». C’est en 1915, pendant la Première Guerre mondiale, que l’expression de
« crime contre l’humanité » apparaît en fait pour la première fois, au moment du génocide des
Arméniens de Turquie. La Russie, la France et la Grande-Bretagne dénoncent en effet à cette
occasion les massacres commis, comme étant des « crimes contre l’humanité et la civilisation
» ou des « crimes de lèse-humanité ».
L’idée de crime contre l’humanité est alors formulée en réaction à des actes inhumains
qui ne correspondent pas à une dérive militaire (crimes de guerre), mais qui visent la mort ou
la persécution de populations civiles embarrassantes pour le pouvoir. Les génocides,
Arméniens d’abord et Juifs plus tard, sont donc à l’origine de l’apparition de la notion, laquelle
est pourtant plus large que le génocide à sa genèse, et en est encore plus extrême et plus grave.
En fait l’idée de juger les crimes nazis à l’encontre des juifs est apparue rapidement au
cours de la seconde guerre mondiale. Dans la Déclaration de Saint-James signée à Londres, le
13 janvier 1942, les Alliés prévoient en effet de réprimer les forfaits commis à l’encontre des
populations civiles :
« qui n’ont rien de commun ni avec la notion d’actes de guerre, ni avec celle de crimes
politiques telles que les conçoivent les nations civilisées. ».
[28]
qui fixe le statut du Tribunal de Nuremberg, et la première définition juridique du crime contre
l’humanité. Sa compréhension de ce concept a longtemps fait l’objet de vifs débats dans la
doctrine et la jurisprudence contemporaine notamment s’agissant du Tribunal Pénal
International de l’ex-Yougoslavie (TPIY) et ce jusqu’à la création et à la mise en place de la
Cour Pénal International, dont la position rend aujourd’hui compte de la réception de ce concept
en Droit Pénal International contemporain.
Paragraphe 2. La réception des crimes contre l’humanité par le droit positif aujourd’hui
Entendu prosaïquement comme des crimes qui couvrent des faits graves de violence qui
lèsent l’être humain en l’attaquant dans ce qui lui est le plus essentiel, sa vie, sa liberté, son
intégrité physique, sa santé ou sa dignité, les crimes contre l’humanité sont constitués par des
actes inhumains qui de par leur ampleur ou leur gravité, outrepassent les limites tolérables par
l’humain et par la société internationale qui doit en réclamer la sanction. En fait, les crimes
contre l’humanité transcendent aussi l’individu puisqu’en y procédant c’est l’homme est visé,
et niée est son humanité. C’est l’identité de la victime, l’humanité visée, qui marque la
spécificité du crime contre l’humanité. Ainsi peut être compris ce concept de crime contre
l’humanité, en tout cas au sens de la jurisprudence et plus précisément de l’arrêt DRZAEN
ERDEMOVIC de la chambre de première instance du T.P.I.Y. dans un contenu juridique de
son jugement du 1er novembre 1996.
En effet aucune situation particulièrement orientée de guerre n’a pas gouvernée la mise
en place de la C.P.I. par le Statut de Rome. Il a d’ailleurs été souligné à son crédit que ce statut
est le dernier état de la codification du crime contre l’humanité. Son article 7 ose une définition
internationale assez aboutie de ce concept en y comprenant onze actes constitutifs de crimes
contre l'humanité, lorsqu’ils sont commis :
[29]
Il s’agit :
- Du meurtre ;
- De l'extermination ;
- De la réduction en esclavage ;
- De la déportation ou du transfert forcé de population ;
- De l'emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation
des dispositions fondamentales du droit international ;
- De la torture ;
- Du viol, l'esclavage sexuel,
- De la prostitution forcée,
- De la grossesse forcée,
- De la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité
comparable ;
- De la persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs
d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste, ou en fonction
d’autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international,
en corrélation avec tout acte ou tout crime relevant de la compétence de la Cour ;
- De la disparition forcée de personnes ;
- Du crime d’apartheid ;
- D'autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes
souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou
mentale.
Malgré cette énumération exhaustive, le crime contre l’humanité reste une incrimination
de type « ouvert ». C’est pour cela que la doctrine a parlé à son propos d’incrimination en
extension. C’est sur le fondement de la notion « autres actes inhumains » que le crime de
terrorisme peut aujourd’hui faire l’objet de poursuites sur le fondement de crimes contre
l’humanité sans qu’il soit besoin de modifier le Statut de Rome.
[30]
7 de la résolution 69-118 de l’Assemblée Générale des Nations Unies. Son état actuel résulte
du rapport de la C.D.I. présenté à sa 3496ème et 3499ème séance du 31 juillet au 05 août 2019.
Ce projet dans son écriture de 2019, porte actuellement 15 articles et son intérêt est
d’inscrire le crime contre l’humanité dans une convention internationale classique comme c’est
le cas pour les autres « crimes internationaux » (crimes de génocide ou encore crime de guerre).
En effet, il s’agit de sortir le crime contre l’humanité de son histoire liée au statut des
juridictions internationales. L’un des enjeux est de penser le crime contre l’humanité dans une
dimension horizontale, c’est-à-dire inter étatique du droit international. Il en va tout
différemment pour ce qui du crime de génocide.
[31]
Depuis sa première formulation en 1948, à l’article 2 de la convention pour la prévention
et la répression du crime de génocide, la définition de ce crime est demeurée sensiblement la
même. En effet cette disposition énonce que :
« le génocide s'entend de l'un quelconque des actes ci-après, commis dans l'intention de
détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel :
Sont au demeurant visés dans ce sens, outre le génocide lui-même, l'entente en vue de
commettre le génocide, l'incitation directe et publique à commettre le génocide, la tentative de
génocide et la complicité dans le génocide.
[32]
La mens rea, disposition psychologique ou morale relativement à cette infraction,
renvoie aux éléments subjectifs de la définition et comprend l’intention générale d’adopter un
comportement interdit et l’intention précise de détruire le groupe protégé, en tout ou en partie.
Il s’agit pour ainsi le dire d’un dol spécial.
« les personnes ayant commises le génocide (…) seront punies qu’elles soient
des gouvernants, des fonctionnaires ou des particuliers ».
En tant que convention internationale multilatérale, la convention des nations unies sur
la prévention et la répression du génocide prévoit à l’endroit des Etats parties, une obligation
d’incriminer ainsi formulée :
L’autre spécificité relative au génocide dans le cadre cette convention est qu’elle
prévoyait déjà la mise en place d’une juridiction pénale internationale. Le texte dispose en effet
que :
« les personnes accusées de génocide (…) seront traduites devant les tribunaux
compétents de l’Etat sur le territoire duquel l’acte a été commis ou devant la cour criminelle
internationale qui sera compétente à l’égard de celle des parties contractantes qui en auront
reconnues la juridiction ».
Toute chose qui nous conduit à nous intéresser aux développements à propos du crime
de génocide dans le droit des juridictions pénales internationales.
Le crime de génocide n’a pas évolué dans le droit des juridictions pénales
internationales : il n’y a été que systématisé. C’est le sens de l’article 4 du T.P.I.Y. et de l’article
[33]
2 du Tribunal Pénal du Rwanda. Du point de vue de la jurisprudence, la notion de génocide a
été précisée dans l’affaire KARADZICH du T.P.I.Y. qui a conclu que :
Au total, ainsi se trouve identifié l’infraction de crime de génocide dans ses éléments
constitutifs aussi bien par les instruments juridiques internationaux que par la jurisprudence
internationale. Il convient à présent de nous appesantir sur une autre catégorie de crimes
internationaux, les crimes de guerre.
Le concept de crimes de guerre est aussi ancien que les lois dites « de la guerre » qu'on
trouve aussi bien chez les peuples antiques que chez les peuples primitifs. C’est une notion
juridique centrale du droit de la guerre. Il désigne la catégorie pénale permettant de juger non
[34]
pas les raisons pour lesquelles les Etats font la guerre – jus ad bellum (droit de la guerre), mais
la façon dont les hostilités sont conduites – jus in bellum ( le droit dans la guerre).
[35]
TITRE II. LA RESPONSABILITE PENALE INTERNATIONALE
[36]
CHAPITRE I. LES FORMES DE LA RESPONSABILITE PENALE
INTERNATIONALE
Dire que la responsabilité internationale est individuelle, signifie que les suites que le
droit positif réserve à la commission d’une infraction internationale sont supportées
personnellement par l’agent en question, en qualité tantôt d’auteur, de co-auteur ou de complice
à la double condition de culpabilité et d’imputabilité. C’est le sens de l’article 25 du Statut de
Rome en son aliéna 3. D’ailleurs au titre de la responsabilité pénale internationale individuelle,
cet alinéa en son paragraphe 4 introduit la notion d’entreprise criminelle. Toute chose qui
confirme la conception extensive de la responsabilité pénale internationale par cet instrument
juridique international. Cet article dispose en effet que :
[37]
est le partage de la connaissance de l’intention du groupe. L’on en déduit que le Droit Pénal
International, à défaut d’admettre une véritable responsabilité pénale des personnes morales,
développe une théorie spécifique de la responsabilité pénale d’un groupe criminelle.
Néanmoins, il importe d’observer qu’à la différence du droit pénal général, les règles
qui organisent la responsabilité pénale individuelle en Droit Pénal International, en l’occurrence
s’agissant de l’imputabilité des crimes internationaux, élargissent le champ des personnes
susceptibles de se voir imputer leur responsabilité. En effet, l’article 25 du Statut de Rome, qui
entre autre évoque les faits justificatifs en matière de crimes internationaux, en a une conception
restrictive. Toute chose qui élargie le champ des personnes potentiellement responsables en
cette matière.
Les crimes internationaux étant souvent commis en masse, ceux qui y participent sont
généralement plus nombreux que ceux qui s’y salissent les mains. Aussi afin de prévenir la
commission de tels crimes, la communauté internationale souhaite dissuader et réprimer non
seulement les exécutants, mais également les commanditaires et autres ordonnateurs, chefs
civils ou militaires. D’ailleurs le Droit Pénal International permet de retenir leur responsabilité
même dans l’hypothèse où elles n’ont pas ordonné, mais pouvais empêcher où prévenir de tels
crimes internationaux mais ne l’ont pas fait. C’est le sens de la responsabilité pénale
internationale des supérieurs hiérarchiques dont il faut restituer ici l’origine (paragraphe 1) et
en examiner l’expression en droit positif (paragraphe 2).
[38]
de leurs subordonnées, soit codifié. En fait, c’est un instrument juridique international annexé
à la 4ème convention de la Haye, qui a énoncé pour la première fois que
Ces idées novatrices, issues déjà de la première guerre mondiale, furent reprises et
appliquées aux tribunaux militaires internationaux de Nuremberg et de Tokyo, au terme de la
seconde guerre mondiale. Dans ce sens, le procès du général japonais TOMOYUKI
YAMASHITA est le premier cas de condamnation dans l’histoire pour responsabilité pénale
du fait de ses subordonnés. A propos de cette condamnation, la cour suprême américaine a eu
à déclarer que :
« les commandants militaires sont tenus de prendre des mesures appropriées en leur
pouvoir pour protéger les prisonniers de guerre et la population civile. En effet, l’omission de
le faire, engage leur responsabilité criminelle pour les crimes de guerre commis par leur
troupe ».
[39]
« les crimes commis par un subordonné ne dégagent pas son supérieur de sa
responsabilité pénale, s’il avait su ou avait des raisons de savoir que le subordonnée
s’apprêtait à commettre ces crimes et que le supérieur n’a pas pris des mesures
nécessaires pour empêcher me crime ou pour punir les auteurs ».
L’article 6 du statut du T.P.R. reprend d’ailleurs cette formulation qui sera ratifiée par
le statut de Rome, exprimant ainsi véritablement la consécration de cette originale
responsabilité en Droit Pénal International.
Elle est issue du Statut de Rome instituant la Cour Pénale internationale, ayant pour
mission de juger les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les génocides commis
après le 1er juillet 2002. Cette institution, maintenant centrale de la justice pénale internationale,
a innové à plusieurs égards, notamment dans sa conception de la responsabilité du supérieur
hiérarchique. Il convient d’examiner ici la consécration de cette responsabilité pénale
internationale (A) dans ce texte et, d’en faire ressortir les déterminantes (B).
C’est l’office de l’article 28 du Statut de Rome, article intitulé « responsabilité des chefs
militaires et autres supérieurs hiérarchiques ». Cette disposition énonce que :
« Outre les autres motifs de responsabilité pénale au regard du présent Statut pour des crimes
relevant de la compétence de la Cour :
a) Un chef militaire ou une personne faisant effectivement fonction de chef militaire est
pénalement responsable des crimes relevant de la compétence de la Cour commis par des forces
placées sous son commandement et son contrôle effectifs, ou sous son autorité et son contrôle
effectifs, selon le cas, lorsqu'il ou elle n'a pas exercé le contrôle qui convenait sur ces forces
dans les cas où :
[40]
i- Ce chef militaire ou cette personne savait, ou, en raison des
circonstances, aurait dû savoir, que ces forces commettaient ou allaient
commettre ces crimes ; et
ii- Ce chef militaire ou cette personne n'a pas pris toutes les mesures
nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher
ou en réprimer l'exécution ou pour en référer aux autorités compétentes
aux fins d'enquête et de poursuites ;
[41]
D- Les déterminantes de la responsabilité pénale internationale du supérieur
hiérarchique
La forme de responsabilité sur laquelle nous nous attarderons est la responsabilité indirecte,
ou la réelle responsabilité du supérieur, celle qui naît sans que le supérieur ait donné des ordres
à ses subordonnés, les ait encouragés ou aidés, mais en raison de son omission de prévenir ou
de punir leur participation à des crimes internationaux. Cette forme de responsabilité est basée
sur la présence de trois critères :
[43]
après son arrivée en position hiérarchique avec ses subordonnés malfaisants, soit après
l’obtention de ce contrôle effectif.
[44]
CHAPITRE II : LES OBSTACLES A L’ENGAGEMENT DE LA RESPONSABILITE
PENALE INTERNATIONALE
[45]
fonction. Cette immunité a permis l’introduction en Droit Pénal International, de la théorie des
actes d’Etat qui a elle-même permis la distinction entre les actes publics du dirigeant et ceux
privés. L’immunité personnelle cesse avec la fonction. L’immunité fonctionnelle demeure
malgré la cessation de la fonction. On distingue aussi en Droit Pénal Internationale, la situation
de la responsabilité pénale internationale du dirigeant en exercice de celle du dirigeant déchu.
« la qualité officielle même de chef de d’Etat n’a aucune pertinence devant cette cour »
C’est cette règle qui a justifié le mandat d’arrêt lancé contre l’ex-president Omar El
BECHIR alors même qu’il était en fonction.
[46]
poursuivi devant une juridiction nationale (paragraphe 1), ou lorsqu’une juridiction nationale
est requise par la C.P.I. (paragraphe 2).
Devant la juridiction nationale, il convient de relever d’abord que certains pays ont
adopté des législations nationales sur les immunités. Il en est ainsi à travers le state immunity
act de 1978 et le foreign immunity souvereign act de 1976.
De façon générale, les juges nationaux ont des tendances contradictoires, et l’on
distingue des juges contre les immunités et d’autres pour.
Dans la première catégorie, on peut citer le juge belge qui a lancé un mandat
international le 11 avril 2000 contre un ministre congolais accusé de crimes contre l’humanité
(affaire Herodiade NDOGBATI). On peut également citer le juge anglais dans l’affaire
PINOCHET, relative à la demande d’extradition de la chili, qui a affirmé que la demande
d’extradition était recevable même si dans l’arrêt finalement rendu, le 24 mars 1997, il a
souligné que le General PINOCHET avait encore assumé les fonctions d’un chef d’Etat, il aurait
joui d’une immunité totale et absolue, mais en tant que chef d’Etat. Pareillement, la cour
suprême espagnole , par la voie du juge Baltzar GARZON estime que :
Parmi les juges en faveur de l’immunité des chefs d’Etat en fonction, on peut citer le
juge sénégalais qui, dans l’affaire Hisseine HABRE, a annulé par une décision de la Cour de
Cassation, le mandat d’arrêt délivré par le Doyen, juge d’instruction de Dakar. L’on peut
également citer le juge français qui s’est appuyé sur le caractère coutumier des immunités dans
l’affaire MOUAMMAR KHADAFI. La Cour de Cassation française a ainsi affirmé en termes
suffisamment clair que :
[47]
Paragraphe 2. La situation d’une juridiction nationale requise par la C.P.I.
Lorsqu’une juridiction nationale est requise par la C.P.I. pour la mise en œuvre de la
responsabilité pénale internationale, la situation est différente. Dans la décision rendue le 5
septembre 2017, dans l’affaire OMAR El BECHIR, la Cour a ainsi condamné l’Etat sud –
africain pour manque de coopération, alors que le gouvernement sud-africain a basé son
raisonnement sur l’existence coutumière de l’immunité des Chefs d’Etats en exercice devant
les juridictions étrangères. La Cour a dans ce dessein interprété l’article 27 en l’occurrence en
son alinéa 2. D’après l’article 27 du statut de Rome :
« 1. Le présent Statut s'applique à tous de manière égale, sans aucune distinction fondée
sur la qualité officielle. En particulier, la qualité officielle de chef d'État ou de gouvernement,
de membre d'un gouvernement ou d'un parlement, de représentant élu ou d'agent d'un État,
n'exonère en aucun cas de la responsabilité pénale au regard du présent Statut, pas plus qu'elle
ne constitue en tant que telle un motif de réduction de la peine.
[48]
TITRE III . LE SYSTEME JUDICIAIRE PENAL INTERNATIONAL
Après avoir envisager les règles qui gouvernent l’incrimination pénale internationale et
les déterminantes de la responsabilité pénale qui s’ensuit, il s’agit à ce dernier niveau
d’examiner les normes juridiques, en l’occurrence d’ordre procédurale, qui gouvernent
l’administration de la justice pénale internationale. Concrètement nous nous intéressons ici sur
le point de savoir quelles sont les instituions et les procédés par lesquels sont rendus la justice
en matière d’infraction internationale ou présentant un caractère d’extranéité ? La pertinence
de ce questionnement est avérée lorsqu’on a en souvenir l’actualité des débats et
développements doctrinaux sur la problématique d’une juridiction pénale supra nationale
s’agissant notamment de son rapport à la « compétence des compétences » de l’Etat, c’est-à-
dire à sa souveraineté spécialement en matière judiciaire.
Pour ainsi répondre à la question sus posée, c’est le lieu ici de souligner que s’il est
constant qu’au plan national il existe de façon disparate des règles internes à certains états qui
gouvernent leur compétence universelle en matière de crimes internationaux, notre attention se
porte ici spécialement sur celles qui à l’international régissent le rendu et l’administration de la
justice à la suite la commission de crimes internationaux.
De la sorte nous nous attardons ici principalement sur les juridictions pénales
international (chapitre 1) de même que sur la coopération judiciaire inter étatique ou
internationale (chapitre 2).
[49]
CHAPITRE I. LES JURIDICTIONS PENALES INTERNATIONALES
L’élaboration d’une justice pénale internationale s’est faite en réaction aux massacres
commis au cours du XXe siècle. La Première Guerre mondiale, la Seconde Guerre mondiale,
les conflits en ex-Yougoslavie et la guerre au Rwanda ont constitué les épisodes les plus
marquants de ce processus. Si la première théorie d’une justice internationale apparait déjà au
XIIIe siècle, grâce au théologien politique Francisco de Vitoria qui énonce les fondements d'un
droit international nécessaire à la régulation des rapports entre États, ce n’est qu’au début du
XXe siècle que la communauté internationale va vraiment prendre conscience de la nécessité
de mettre en place une instance judiciaire internationale. Entre-temps, certaines conventions
engagent déjà les États parties à réprimer les actes constitutifs de crimes de guerre sans
mentionner explicitement la mise en place de juridictions pénales internationales (Cf. La
Convention de Genève du 6 juillet 1906 et la Convention de Genève du 27 juillet 1929 pour
l’amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne.) La
découverte de l’extermination de millions de personnes par le régime nazi en 1945 a conduit à
la création du Tribunal militaire international de Nuremberg (pour juger les principaux
responsables du régime nazi) et du Tribunal militaire international pour l’Extrême-Orient (pour
juger les principaux responsables japonais). Ces juridictions étaient compétentes pour juger des
crimes contre la paix, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. Les procès devant
des tribunaux militaires internationaux ont permis de poser les bases de la justice pénale
internationale. Ces deux tribunaux ne reflètent toutefois que la justice des vainqueurs suite aux
procès tenus devant ces deux tribunaux militaires, l’Assemblée générale des Nations unies a
reconnu la nécessité de créer une cour internationale permanente pour juger les criminels de
guerre et les auteurs de crimes de masse, quelque soit la nationalité des auteurs ou le lieu de
commission des crimes. Dans un premier temps, une base juridique se crée pour définir les
incriminations et prévoir leur répression avant tout sur le plan national. Celle-ci est prévue dans
des conventions internationales (droit international humanitaire et droit international pénal) et
dans de nombreuses législations internes. De manière générale, ces conventions internationales
engagent les États parties à ériger plusieurs crimes internationaux en infractions pénales dans
le droit national et à établir leurs compétences pour poursuivre et juger les auteurs devant leurs
propres juridictions. En 1948, la Déclaration universelle des droits de l’homme et la Convention
pour la prévention et la répression du crime de génocide sont alors adoptées. En 1949, les quatre
[50]
Conventions de Genève sont adoptées afin d’assurer notamment la protection des personnes qui
ne participent pas aux hostilités (les civils, les membres du personnel sanitaire ou
d’organisations humanitaires) ainsi que celles qui ne prennent plus part aux combats (les
blessés, les malades, les naufragés, les prisonniers de guerre). Enfin, la Convention des Nations
unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est
adoptée en 1984. Cependant, malgré l’adoption de ces textes, le déclenchement de la guerre
froide bloque toute mise en place d’une instance internationale de justice pénale. Ce processus
ne reprend qu’au moment de la création de Tribunaux pénaux internationaux pour l’ex
Yougoslavie et le Rwanda et suite aux décisions de plusieurs juridictions d’États européens de
poursuivre les personnes responsables de crimes restés impunis, comme Augusto Pinochet. La
mise en place d’une juridiction permanente réellement indépendante s’est alors concrétisée lors
de la conférence de Rome qui s’est tenue du 15 juin au 17 juillet 1998 et a donné naissance à la
C.P.I. dont le Statut est entré en vigueur le 1er juillet 2002. La justice pénale internationale a
donc pour mission de juger les auteurs des crimes les plus graves du Droit Pénal International
en essayant de prévenir ces crimes internationaux. À l’inverse des juridictions pénales
internationale ad hoc (Section 1), la C.P.I. (Section 2) donne une place aux victimes dans le
processus judiciaire, aidant ainsi à l’établissement de la vérité historique, au-delà de la vérité
judiciaire, sur les crimes commis. Elle a également une mission de protection à l’égard de ces
victimes.
A la suite des violations flagrantes du droit humanitaire international qui ont eu lieu au
début des années 1990 et en l’absence de juridiction pénale internationale permanente, le
[51]
Conseil de sécurité des Nations unies a décidé de créer des tribunaux pénaux internationaux ad
hoc. Le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et le Tribunal pénal international
pour le Rwanda sont donc des institutions des Nations unies. Ces deux tribunaux étaient chargés
d’identifier et de punir les responsables de ces violations. Etant limités dans le temps, ces
tribunaux ont achevé leurs activités et sont aujourd’hui fermés (le TPIY a officiellement fermé
en décembre 2017 et TPIR a quant à lui officiellement fermé en décembre 2015). Sommes toutes
Il convient de présenter ces deux tribunaux pénaux internationaux (A), hypothèse de juridiction
pénale internationale ad hoc, et d’en décrire le fonctionnement (B).
Il s’agit du Tribunal pénal international pour la répression des violations graves du droit
humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie et dans les pays voisins (1) et du
Tribunal pénal international chargé de la répression des actes de génocide commis au Rwanda
et dans les Etats voisins (2).
[52]
2- Le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (T.P.I.R.)
Le Tribunal pénal international pour le Rwanda a quant à lui été créé par la résolution
955 du Conseil de sécurité des Nations unies du 8 novembre 1994 et avait pour siège Arusha,
en Tanzanie. Il était uniquement chargé de juger les personnes présumées responsables d’actes
de génocide ou d’autres violations graves du droit international humanitaire commis sur le
territoire du Rwanda et les citoyens rwandais présumés responsables de tels actes ou violations
commis sur le territoire d’États voisins, entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994. Plus de 90
personnes ont été mises en accusation : certaines ont été reconnues coupables de crimes
internationaux et d’autres affaires sont encore en cours. Une stratégie d’achèvement des travaux
a également été mise en place pour ce tribunal depuis 2003.
D’après les statuts des T.P.I., les juridictions nationales et les T.P.I. pouvaient se saisir
des mêmes infractions mais les T.P.I. avaient la primauté sur les juridictions nationales et
pouvaient demander à ces dernières de se dessaisir en leur faveur.
[53]
Paragraphe 2- Les juridictions mixtes ou Tribunaux Pénaux Internationalisés
[54]
Paragraphe 1- La compétence de la C.P.I.
A- La détermination de la compétence
1- La compétence matérielle
La C.P.I. a compétence « pour les crimes les plus graves ayant une portée internationale
» ou « pour les crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale
». Ces crimes sont déterminés comme étant le génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes
de guerres et le crime d’agression. La C.P.I. est, à ce titre, la première juridiction pénale
internationale dont la compétence porte sur les quatre crimes internationaux recensés. Sa
compétence porte ainsi sur le génocide dont l’incrimination n’était pas formalisée à l’époque
des tribunaux militaires internationaux de Nuremberg et Tokyo. Elle intègre aussi le crime
d’agression, lequel n’a pas été prévu dans les statuts des tribunaux pénaux internationaux. Il est
vrai que sa compétence pour connaitre le crime d’agression suit un régime qui en diminue très
largement la portée. Il n’empêche que cette définition est prévue, pour la première fois, dans le
statut d’une juridiction pénale internationale. Elle consacre l’évolution du droit internationale
après la définition des crimes contre la paix dans les statuts des tribunaux de Nuremberg et de
Tokyo. La compétence de la cour procède à la seule commission des crimes en cause sans qu’il
soit nécessaire que celle-ci est eu un caractère transnational. Il en découle qu’un crime commis
sur le territoire d’un seul Etat par des auteurs et contre des victimes qui en ont la nationalité
peut entrer dans la compétence de la C.P.I.. Cela montre que la compétence de la Cour résulte
de la seule nature des crimes en cause. Cela confirme aussi que la qualification de crime
international n’exige pas une commission transnationale du fait qui le constitue. Elle se suffit
de commission matérielle de ce fait.
[55]
2- La compétence personnelle
La C.P.I. est compétente à l’égard des personnes physiques âgées de plus de 18 ans au
moment des faits. Les modes d’attribution de la responsabilité pénales individuelles sont la
commission directe ou par l’intermédiaire d’une personne, l’ordre, la sollicitation,
l’encouragement, l’aide, le concours ou tout autre d’assistance à la commission ou la tentative
ou à la contribution de tout autre manière à la commission ou à la tentative de commission par
un groupe de personnes agissant de concert. Il s’y ajoute l’incitation directe et publique à
commettre le génocide qui est spéciale à ce crime. L’énumération rend compte de l’ensemble
des modes d’attribution de la responsabilité pénale individuelle en droit international en y
incluant même l’entreprise criminelle commune telle qu’elle a défini par les tribunaux pénaux
internationaux. Le statut reprend aussi les solutions applicables au cas particuliers des officiels,
supérieurs hiérarchiques et exécutants. Il prévoit ainsi que la qualité officielle du participant ne
l’exonère pas de sa responsabilité et pose le principe de la responsabilité de l’exécutant d’un
ordre d’un gouvernement ou d’un supérieur. Il formule aussi le principe de la responsabilité du
supérieur hiérarchique pour les crimes commis par les subordonnés. Il sépare le cas du supérieur
hiérarchique civil dont les conditions d’attribution de la responsabilité pénale sont plus strictes
que pour le supérieur hiérarchique militaire. C’est une différence avec le statut des tribunaux
pénaux internationaux qui ne distingue entre les supérieurs hiérarchiques militaires et civils. Le
statut de la C.P.I. prévoit aussi des motifs d’exonération de la responsabilité pénale qui sont la
transposition des causes traditionnelles d’irresponsabilité pénale. C’est ainsi qu’il prévoit que
la maladie ou la déficience mentale, l’intoxication involontaire, la légitime défense ou la
contrainte peuvent, à certaines conditions, exonérer son de sa responsabilité pénale. Il en va de
même pour l’erreur de fait ou l’erreur de droit. Cette prévision n’avait pas été faite dans les
statuts des juridictions pénales internationales précédentes.
B- L’exercice de la compétence
La C.P.I. exerce sur renvoi d’une situation par un Etat partie, sur renvoi d’une situation
par le conseil de sécurité de l’ONU agissant en vertu du chapitre VII de la charte des Nations
Unies ou à l’initiative du procureur. Mais cet exercice est soumis à des conditions et peut se
heurter à des obstacles.
[56]
1- Les conditions d’exercice
Il faut distinguer entre les conditions générales et les conditions propres au crime
d’agression.
Ces conditions ont trait au crime commis, lequel doit présenter certains caractères
déterminés pour entrer dans la compétence de la cour.
Crime commis après l’entrée en vigueur du statut : Il convient, d’une part, que ce crime
ait été commis après l’entrée en vigueur du statut de la C.P.I.. Celle-ci n’a pas de compétence
rétroactive à la différence de juridictions pénales internationales qui l’ont précédé. Dans le
même sens, la compétence de la C.P.I. ne s’exerce pas à compter de l’entrée en vigueur de son
statut pour les Etats qui l’ont ratifié ultérieurement. Elle ne s’exerce alors pour les crimes
commis après que ces Etats ont ratifié son statut. Il en va autrement si ces Etats ont fait une
déclaration par laquelle ils acceptent que la cour exerce sa compétence à compter de l’entrée en
vigueur du statut de Rome.
Crime commis sur le territoire d’un Etat partie ou par un ressortissant d’un Etat
partie : La création de la C.P.I. par une convention internationale en limite la compétence aux
Etats parties. On sait que ce choix a été fait à dessein de respecter la souveraineté des Etats
auxquels la juridiction de la C.P.I. ne peut pas être imposée s’ils n’y ont pas consenti. Il en
découle que la compétence de la C.P.I. ne peut s’exercer qu’à l’encontre des crimes qui relèvent
de la compétence des Etats parties. C’est le cas s’ils ont été commis sur le territoire d’un autre
Etat partie, à bord d’un navire battant son pavillon ou d’un aéronef qui y est immatriculé. C’est
aussi le cas s’il a été commis par un ressortissant d’un Etat partie. Ces deux situations donnent
compétence à la C.P.I., puisqu’elle relève de la compétence pénale interne des Etats parties. Il
s’agit en effet de situations qui entre dans leur compétence territoriale ou dans leur compétence
personnelle active. Il convient d’observer que ces deux cas de compétence peuvent conduire la
C.P.I. à connaitre de crimes commis par des ressortissants d’un Etat non partie ou sur le
territoire d’un Etat non partie. Il en va ainsi si les ressortissants d’un Etat non partie ont agi sur
le territoire d’un Etat partie ou si les ressortissants d’un Etat partie ont agi sur le territoire d’un
Etat non partie. La compétence de la C.P.I. n’est donc strictement limitée aux seuls Etat qui ont
ratifié son statut. En revanche, elle ne peut pas exerce sa compétence sur le seul fondement
[57]
qu’un crime a été commis contre des ressortissants d’un Etat partie. Cette impossibilité traduit
la portée internationale de la compétence personnelle, laquelle n’est pas considéré comme un
cas général de compétence pénale. Les conditions relatives à la commission du crime sur le
territoire d’un Etat partie ou par un ressortissant d’un Etat partie ne sont pas applicables quand
la cour est saisie par le conseil de sécurité.
Possibilité de report de sept ans à compter de l’adhésion : L’article 124 du statut prévoit
qu’un Etat qui devient partie peut faire une déclaration par laquelle il n’accepte pas que la
compétence de la cour s’exerce, pendant une période de sept ans à compter de son adhésion, à
l’égard des crimes de guerre commis sur son territoire ou par ses ressortissants.
[58]
n’accepte pas cette compétence. Cette compétence ne pourra pas davantage s’exercé à l’égard
de crimes d’agression commis sur le territoire ou par des ressortissants d’un Etat qui n’est pas
partie. Il en découle que la Cour ne sera pas compétente pour juger le crime d’agression commis
par des ressortissants d’un Etat non partie sur le territoire d’un Etat partie. C’est une différence
avec la compétence prévue pour les autres qui peut s’exercer dans ses deux hypothèses.
Exercice en cas de renvoi par le conseil de sécurité : Ces restrictions ne sont pas
applicables en cas de renvoi par le conseil sécurité. Il s’ensuit que le procureur peut, dans cette
hypothèse, ouvrir une enquête à réception de ce renvoi. Cette enquête peut indifféremment
porter sur un Etat partie ou sur un Etat non partie.
Ainsi que relever supra, le statut de la C.P.I. dispose que les crimes entrant dans sa
compétence ne se prescrivent pas. Les obstacles à la poursuite devant cette juridiction peuvent
tenir à un sursis à enquêter ou à poursuivre ou à l’irrecevabilité de l’affaire.
Sursis après ouverture d’une enquête par un Etat compétent : Le procureur qui est
saisi d’un renvoi par un Etat partie ou qui a ouvert une enquête de sa propre initiative le notifie
à tous les Etats parties et aux Etats qui auraient normalement compétente pour connaitre du
crime en cause. L’Etat qui ouvre ou à ouvert une enquête sur ses ressortissants ou sur d’autres
personnes sous sa juridiction en informe le procureur dans le délai d’un mois. A sa demande,
le procureur lui défère le soin de l’enquête et sursoit à sa propre enquête. Le procureur peut
cependant solliciter la chambre préliminaire pour qu’elle l’autorise à continuer son enquête
malgré la demande de sursis d’un Etat. Ce sursis à enquêter à la demande d’un Etat qui ouvre
[59]
ou a ouvert une enquête témoigne des relations unissant la C.P.I. et les justices pénales
nationales à la différence des tribunaux pénaux internationaux. Ce sont les juridictions
nationales qui priment au contraire la cour, puisque leur enquête arrête celle du procureur. Il
n’en autrement qu’en cas d’insuffisance, de manque de diligence ou de complaisance des
justices pénales nationales. La C.P.I. est une juridiction subsidiaire qui n’intervient que pour
pallier l’absence de justice pénale.
b- L’irrecevabilité de l’affaire
Ne bis in idem : L’affaire est aussi irrecevable quand la personne concernée a été déjà
condamnée ou acquitté. La C.P.I. peut, par exception, rejuger une personne qui a été jugée par
une cour pénale nationale s’il apparait que cette procédure avait pour but de le soustraire à sa
responsabilité pénale ou s’il apparait qu’elle a été menée d’une manière qui était incompatible
avec l’intention de la traduire en justice.
[60]
Paragraphe 2- L’organisation et le fonctionnement de la C.P.I.
A- L’organisation de la C.P.I.
1- La présidence
2- Les sections
Les juges sont affectés à trois sections : la section des appels qui comprend le président
et quatre autres juges ; la section de première instance et la section préliminaire qui sont
composés chacune de six juges au moins. Les fonctions judiciaires de la Cour sont exercées
dans chaque section par des chambres : la Chambres d’appel, la chambre de première instance
et la chambre préliminaire.
3- Le bureau du procureur
[61]
la majorité absolue par l’Assemblée des Etats parties sur une liste de candidats présentés par le
procureur. Le mandat des Procureurs adjoints est de neufs ans comme celui du procureur. Le
Bureau du procureur est un organe distinct de la Cour qui ne sollicite ni n’accepte aucune
instruction d’aucune source extérieure. Il est dirigé par le procureur qui a autorité sur son
personnel, ses installations et ses autres ressources.
4- Le greffe
La procédure peut être divisée en trois phases : l’enquête, les poursuites, et le procès.
1- L’enquête
L’enquête est ouverte et conduite par le procureur. Mais sa décision et son action sont
très encadrées.
[62]
a- L’ouverture de l’enquête
L’ouverture d’une enquête formalise la saisie de la C.P.I.. C’est pourquoi elle ne doit
intervenir qu’après un examen préliminaire portant sur l’existence d’une base raisonnable pour
croire qu’un crime entrant dans la compétence de la Cour a été ou est en voie d’être commis et
sur la recevabilité de l’affaire. Cet examen amène le procureur à prendre la décision d’ouvrir
ou de ne pas ouvrir une enquête. Cette décision est dans les deux cas susceptible d’être contrôlée
et contestée.
Décision d’ouverture sur renvoi par Etat partie : Le procureur, qui est saisi d’une
affaire par renvoi d’un Etat partie, décide d’ouvrir une enquête s’il existe une base raisonnable
en ce sens. Il prend sa décision sur le fondement des informations qu’il reçoit et des
investigations conduites par ses services. La décision d’ouvrir une enquête est notifiée aux Etats
parties et aux Etats normalement compétents. Ceux-ci peuvent dans un délai d’un mois,
informer le procureur qu’ils ont ouvert ou qu’ils ouvrent une enquête et lui demander de sursoir
à enquêter.
[63]
poursuites ou par l’Etat qui a accepté la compétence de la cour. Cette exception d’incompétence
ou d’irrecevabilité est porte devant la chambre préliminaire avant la confirmation des charges
et devant la chambre de première instance après celle-ci. Elle est soulevée au plus tard à
l’ouverture d’un procès. Les victimes peuvent soumettre des observations devant la chambre
saisie d’une exception d’irrecevabilité ou d’incompétence.
Le procureur décide de ne pas ouvrir d’enquête s’il conclut n’y a pas de base suffisante
pour demander un mandat d’arrêt ou une citation à comparaitre. Il en fait de même s’il conclut
que l’affaire est irrecevable ou que des poursuites ne serviraient pas les intérêts de la justice. Il
informe la chambre préliminaire de sa décision et de ses motifs. L’Etat ayant procédé au renvoi
ou le conseil de sécurité peuvent saisir la chambre préliminaire pour qu’elle examine la décision
de ne pas poursuivre et demande au procureur de la reconsidérer. La chambre peut se saisir
d’office si la décision de ne pas ouvrir d’enquête intervient au motif que des poursuites ne
serviraient pas les intérêts de la justice. En revanche, les victimes n’ont aucun droit de contester
la décision du procureur.
b- La conduite de l’enquête
Droits des personnes : Les personnes suspectes sont informées, avant leur
interrogatoire, qu’elles sont suspectées d’avoir commis un crime relevant de la compétence de
la cour. Elles sont aussi informées de leur droit de garder e silence et de leur droit d’être assisté
d’un avocat. De leur choix ou d’un avocat commis d’office. Elles sont interrogées en présence
de leur conseil sauf si elles y ont renoncé volontairement. La personne remise à la Cour en
exécution d’un mandat d’arrêt comparait devant elle aux fins de vérification qu’elle a été
informées des crimes qui lui sont imputés et des droits qui lui sont reconnu par le statut de
Rome. La personne placée en détention peut demander sa mise en liberté provisoire en attendant
d’être jugée.
[64]
2- Les poursuites
3- Le procès
L’audience : Le procès a lieu en présence de l’accusé et est public. Les victimes sont
admises à assister et à participer aux audiences par l’intermédiaire de leurs représentants légaux.
Le Jugement : Le jugement est mis en délibéré à une date qui est fixée à l’issue de
l’audience. Le jugement est prononcé en audience publique à cette date et, si cela est possible,
en présence de l’accusé, du procureur, des victimes. Les peines encourues sont
l’emprisonnement a temps d’une durée de trente ans au plus, une peine d’emprisonnement à
perpétuité, l’amende et la confiscation des biens, produits et avoir tires directement ou
indirectement du crime. La peine est fixée en tenant compte des considérations usuelles sur la
gravite du crime et la situation du condamne. La chambre peut rendre contre une personne
condamnée une ordonnance indiquant la réparation qui convient d’accorder aux victimes ou à
leurs ayants droit.
[65]
CHAPITRE II. LA COOPERATION ET L’ENTRAIDE JUDICIAIRE PENALE
INTERNATIONALE : L’EXTRADITION
Il est constant que l’activité délinquante et criminelle a de tout temps été difficile à
confiner dans les limitations en l’occurrence spatiales de la norme pénale nationale. De façon
sans cesse évoluée, le crime n’a en effet eu de cesse de s’adapter sinon de s’employer à
s’affranchir des barrières notamment territoriales des différents ordres juridiques nationaux. Les
lois pénales étant par essence restreintes au cadre territorial de l’Etat, un certain nombre de
comportements qui portent atteintes aux intérêts, valeurs et biens juridiques protégés par des
Etats sont susceptibles d’échapper à la répression par ceux-ci pour diverses raisons, notamment
lorsqu’ils présentent un ou plusieurs éléments d’extranéité. L’extranéité en question désigne
l’élément dans l’infraction qui met en contact deux ou plusieurs systèmes juridiques nationaux
et exige le règlement d’un conflit de lois et/ou de juridictions (ex. : nationalités de l’agent, lieu
de situation territoriale d’un bien etc…). Aussi, pour surmonter l’obstacle de la souveraineté
inhérent à ce rattachement à un ordre juridique étranger, l’efficacité de la répression des
infractions internationales présentant un caractère d’extranéité à l’échelle internationale ne peut
être obtenue sans la mise en œuvre d’adroits mécanismes de coopération, de collaboration voire
d’entraide judiciaire pénale, entre les différents ordres juridiques nationaux.
[66]
doctrine majoritaire en cette matière, on distingue deux types d’entraide répressive judiciaire
internationale, celle verticale et celle horizontale, la représentation verticale ou horizontale de
la figure de ces mécanismes de collaboration étant déterminée par la nature étatique ou supra
étatique des acteurs internationaux ici en présence. La première et la plus contemporaine des
formes d’entraide répressive judiciaire, celle verticale, correspond à la coopération entre des
juridictions ou des instances pénales internationales et les États (entre la C.P.I. et) un Etat), afin
de lutter contre la criminalité à l’échelle internationale. Elle se distingue de la seconde,
davantage classique, qualifiée d’entraide judiciaire répressive horizontale. C’est un mécanisme
de collaboration notamment judiciaire pénale entre deux ou plusieurs États qui s’engagent par
des traités ou des conventions bi ou multilatérales à s’aider mutuellement dans la lutte contre la
criminalité internationale. L’extradition est ainsi dite active ou passive selon que l’Etat
concerné est requérant ou requis. Il s’agit d’un instrument essentiellement politique parce que
le droit à l’extradition est influencé par le degré de confiance qui existe entre tous les Etats. Au
Cameroun, l’extradition est régie par la loi n°64/LF du 26 juin 1964 modifiée par la loi n°97/010
du 10 janvier 1997, ainsi que par le Code de Procédure Pénale (articles 635 à 675) dont les
dispositions ne sont applicables qu’en l’absence de traités ou dans un cas qui n’a pas été réglé
par le traité. Le Cameroun est en outre lié en matière d’extradition par de nombreux traités soit
bilatéraux, soit multilatéraux. S’agissant des traités bilatéraux, on cite la Convention Générale
de Coopération en matière de justice avec le Mali du 06 mai 1964, ratifiée le 19 juin 1964 et
l’Accord de coopération en matière de justice entre le Cameroun et l’ex-Zaïre (R.D.C.) signé le
11 mars 1967, ratifié le 23 juin 1967. En ce qui concerne les traités multilatéraux, on peut citer
l’Accord de coopération en matière de police criminelle entre les Etats de l’Afrique Centrale,
adopté par le Règlement N°04/C.E.M.A.C.-069-CM-04, signé par le Président du Conseil des
Ministres à Bangui le 21 juillet 2000, et surtout par l’Accord de coopération judiciaire entre les
Etats membres de la C.E.M.A.C., adopté à Brazzaville le 28 janvier 2004, et de l’Accord
d’extradition entre les mêmes Etats adopté également Brazzaville le même jour.
On examinera d’une part les conditions (Section 1) avant d’envisager les effets que
produit l’extradition (Section 2). Nous raisonnons sur le cas de camerounais.
Deux types de conditions doivent être étudiés : Celles de fond (Paragraphe 1) et celles
de forme (Paragraphe 2).
[67]
Paragraphe 1. Les conditions du fond
Leur étude nous amène à traiter des faits pouvant donner lieu à extradition (A), des
personnes pouvant faire l’objet d’une extradition (B) et les condamnations prononcées (C).
Toutes les infractions dont l’Etat peut souhaiter la poursuite ne permettent pas le recours
à une procédure internationale aussi lourde que l’extradition. Il faut qu’elles soient d’une
gravité suffisante et que de par leur nature, elles n’échappent pas l’extradition.
Dans les textes anciens, les faits sortant de base à l’extradition étaient limitativement
énumérés et l’exigence de la gravité de la peine était rarement requise. Les traités actuels ont
abandonnés le système de l’énumération d’où la nécessité de fixer le seuil extraditionnelle. Dès
lors que toutes les infractions sont bénigne, il faut que les faits dont il s’agit soient punissable
à la fois par l’Etat requérant et celui requis.
Notre droit consacre tantôt l’exigence classique d’une double incrimination, tantôt
l’exigence inhabituelle d’une triple incrimination. La première permet de tenir compte de
l’ordre public camerounais qui serait heurté si notre pays devait prêter main forte à la répression
des faits qu’il estime non punissables. Cette exigence est mentionnée dans toutes les
conventions conclues par le Cameroun ; il en est de même de l’art 642 al 1er C.P.P.
S’agissant de l’exigence d’une triple incrimination, elle suppose que le fait servant de
base à l’extradition doit être qualifié d’infraction à la fois par l’Etat du lieu de perpétration,
l’Etat requérant et l’Etat requis. Ce qui nous ramène à l’hypothèse classique d’une double
incrimination dans la mesure où dans la plupart des cas l’Etat requérant est aussi celui du lieu
de perpétration.
[68]
au moins égale à deux (02) ans et dont la poursuite n’est pas rendue impossible par la
prescription, l’amnistie ou toute autre cause légale, soit une peine privative de liberté encore
légalement susceptible d’exécution de six (06) mois au moins sans tenir compte de la contrainte
par corps.
D’après l’art 643 CPP, sont considérées comme infraction politiques et ne peuvent
justifier l’extradition : Les crimes ou délits dirigés contre la constitution, la souveraineté d’un
Etat ou les pouvoirs publics. L’appréciation des faits ou caractère politique, religieux ou racial
d’un mobile ou du mobile tenant à la nationalité en ce qui concerne la demande, appartient au
gouvernement de l’Etat requis (voir C.A de Grenoble, 13 janvier 1947, JCP 1947, 2e partie, n°
3664, note Pagnol).
Toutefois, le développement dans les années 1970 d’une violence terroriste Européenne
menaçant directement les fondements de la démocratie occidentale a conduit la jurisprudence à
retenir la conception subjective de l’infraction politique. C’est ainsi que dans l’affaire Klaus
CROISSANT, le Conseil d’Etat déclare :
[69]
« la circonstance que des crimes qui ne sont pas politique par leur objet, aurait eu pour
but (…) de renverser l’ordre établi en République Fédérale d’Allemagne ne suffit pas, compte
tenu de leur gravité, à les faire regarder comme ayant un caractère politique »
(Cf. Conseil d’Etat; Assemblée, 07 juillet 1978, Recueil Lebon 1978, p. 92 ; JCP, 1985,
2e partie, n° 20346, note Jean didier).
D’après l’art 645 CPP, l’extradition n’est pas appliquée au transfert temporaire des détenus
aux fins d’audition ou de confrontation, aux simples citations auxquelles peuvent, en
application d’une convention internationale, déférées certaines personnes détenues au
Cameroun. Il en est de même lorsque l’extradition est demandée pour des opérations de remise
qui ne s’attachent ni à la répression d’une infraction ni à l’exécution d’une peine ou d’une
mesure de sûreté prononcée par une juridiction pénal étrangère. Ici l’Etat requis est confronté à
un véritable détournement de procédure de l’Etat requérant qui réclame l’auteur présumé d’une
infraction de droit commun en réalité pour des raisons politique. Il n’y a pas de jurisprudence
camerounaise en cette matière. Toutefois, faisant appel .au droit comparé, on notera qu’en
France, il est admis que l’individu réclamé doit fournir la preuve que l’Etat requérant poursuit
un but politique, ensuite le juge doit prendre en considération la nature du régime politique de
l’Etat requérant pour exclure l’extradition (Cf. C.E, 03juillet 1996, affaire KONE, Dalloz, 1996
p. 509, note Julien LAFFERIERE)
[70]
La diversité des systèmes idéologique ou leur convergence influence les rapports
d’extraditionnel entre les Etats. Ainsi, pour un même type d’infraction connexe ou complexe,
l’extra sera accordé à un Etat respectueux du droit de l’homme et refusée à un ordre jugé
autoritaire.
En droit camerounais, l’art 29 al 1er de la loi de 1964, modifiée par celle de 1997 énonce
à cet effet :
« qu’aucune personne ne peut être extradés vers un pays où il y a des motifs sérieux de
croire qu’elle risque d’être soumise à la torture ».
Cette disposition a été reprise par l’art 642 (d) CPP . Ces dispositions qui résultent de
la mise en application de la convention contre la torture ont été rapidement mise en œuvre à
l’occasion de l’affaire des sept Rwandais réfugiés au Cameroun, poursuivis dans leur pays pour
génocide. Pour des raisons tenant aux droits fondamentaux au Rwanda au moment de la
demande, la C.A du Centre a émis un avis défavorable à la demande d’extradition. Ils ont plutôt
été transférés au TPIR à ARUCHA (Cf. CA du Centre, arrêt n° 337/COR du 02 février 1997,
inédit).
Le refus d’extradition en cette matière se justifie pour les mêmes raisons qu’en matière
d’infraction politique. Les infractions concernées ici sont celles purement militaire et punie par
le Code de justice militaire à savoir, le manquement à la discipline des armés tel que la
destruction, l’insoumission, les voies de faits envers le supérieur ou même le vol des effets
militaires.
[71]
celui requérant à propos de chaque type d’infraction économique. C’est ainsi que l’art 48 de la
Convention franco-camerounaise précise qu’en matière d’impôt et taxe de douane et d’échange,
l’extradition n’est accordée que s’il en a été ainsi décidé par échange de lettres, entre les
gouvernements des parties contractantes pour chaque infraction ou catégorie d’infraction. La
même condition est mentionnée à l’article 41 de la Convention camerouno-malienne et 47 de
la Convention d’Antananarivo.
Les personnes concernées par l’extradition sont les Etats et l’individu réclamé.
1- Les Etats
Il s’agit d’une part de l’Etat requis c’est-à-dire de celui sur le territoire duquel se trouve
actuellement l’individu recherché, et d’autre part de l’Etat requérant. En principe, elle ne peut
être accordée que si le fait pour lequel elle a été demandée a été commis sur le territoire de
l’Etat requérant ou constitue une infraction dont la loi autorise la poursuite au Cameroun si elle
a été commise à l’étranger. En tout état de cause, quatre Etats sont compétents pour réclamer
l’extradition d’un individu à savoir :
De ce qui précède, il résulte qu’il peut y avoir conflit de compétences entre ces différents
Etats. En pareil hypothèse, l’article 648 CPP a prévu un ordre à suivre. Il ressort en effet de
cette disposition que si l’extradition est demandée concurremment par plusieurs Etats pour une
même infraction, elle est accordée de préférence à l’Etat contre l’intérêt duquel l’infraction était
dirigée ou à celui sur le territoire duquel elle a été commise.
2- L’individu réclamé
Il découle de la combinaison des articles 636 et 637 CPP que toute personne peut être
livrée à l’Etat requérant dès lors qu’elle est auteur ou complice d’une infraction ou d’une
tentative d’infraction que l’Etat a vocation à réprimer. Cependant, ce principe est
[72]
considérablement réduit par des exceptions dont certaines sont très importantes. Il s’agit
notamment de la non extradition des nationaux et la non extradition des justiciables
camerounais.
Cette première dérogation découle de l’article 641 CPP aux termes duquel le Président
de la République peut par décret ordonner l’extraction au gouvernement étranger qui lui en fait
la demande de tout étranger trouvé sur le territoire national objet d’une poursuite nationale ou
d’une condamnation à une peine privative de liberté dans l’Etat requérant La qualité d’étranger
s’apprécie au moment de la commission des faits. Il en découle que cette disposition exclut
l’extradition des nationaux comme le prévoit de manière expresse l’article 42 de la convention
D’ANTANANARIVE énonçant que « les hautes parties contractantes n’extradent pas leurs
nationaux respectifs ».
Le Cameroun refuse de livrer aux Etats étrangers ses justiciables même s’ils ne
possèdent pas la nationalité Camerounaise. Deux hypothèses se présentent ici :
- si l’individu réclamé a commis une infraction qui motive la demande de son extradition
sur le territoire camerounais, le refus de l’extrader est absolu et se justifie par
l’expression du principe de la territorialité de la répression ;
- si l’infraction a été commise en territoire étranger, le refus apposé à l’extradition n’est
possible que si l’infraction a déjà été poursuivie et jugée définitivement par les tribunaux
camerounais sur le fondement de la règle « non bis in idem ».
c- Le statut des refugies
[73]
D’après l’article 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 sur la protection des
réfugiés :
L’extradition n’est possible que si la condamnation a été prononcée à des fins pénales
et à l’issue d’un procès régulier. Ainsi, l’exception d’ordre publique permet de refuser
l’extradition dans le cas d’une condamnation par défaut alors que cette condamnation n’était
pas susceptible de recours (Cf. C.A de Douai 1er juillet 1951, JCP, 1951, 2e partie n° 6433,
note Magnol).
L’extradition est également refusée si elle est demandée pour l’exécution d’une simple
mesure de sûreté (Cf. Chambre Crim., 22 juillet 1954, JCP, 1954, 2e partie, n° 8359, note
Brouchot). L’extradition est enfin exclue si la condamnation prononcée dans l’Etat requérant
est insusceptible d’exécution en raison d’un obstacle de fond tel que la prescription (art 649
CPP), l’amnistie, la grâce.
Pour ce qui est de l’amnistie, lorsqu’elle est intervenue dans l’Etat requérant, elle
constitue inéluctablement un obstacle à l’extradition. L’amnistie étant une mesure de pardon
prise dans le cadre d’un Etat souterrain et n’ayant d’effet que dans cet Etat elle ne doit en
principe pas s’appliquer aux faits commis et poursuivis dans un autre pays. C’est pour cette
raison que l’amnistie intervenue dans l’Etat requis est difficilement un obstacle à l’extradition.
De facto, les traitées conclus par le Cameroun ne font de l’amnistie intervenue dans l’Etat requis
un obstacle à l’extradition que si cette infraction est au nombre de celles qui peuvent être
poursuivies de cet Etat lorsqu’elles ont été commises hors du territoire de cet Etat par un
étranger au dit Etat. S’agissant de la grâce, on sait qu’elle peut consister en une remise totale
au partielle des peines. Dans la première hypothèse l’extradition devient sans objet. Par contre,
s’il s’agit d’une remise partielle, l’extradition demeure possible si le reliquat de la peine à
exécuter atteint le seuil extraditionnel. Il s’agit dans ce cas de la grâce prononcée par les
autorités de l’Etat requérant car, en principe une décision de grâce ne peut être prise par l’Etat
requis ou tout autre Etat à l’égard d’un individu qui n’a pas été condamné par ses juridictions.
Toutefois ce cas de figure peut se présenter lorsque l’individu condamné est livré
à l’Etat dont il est ressortissant afin de purger sa peine.
[75]
A- La demande d’extradition
Parce qu’elle est assez longue, la demande d’arrestation provisoire accompagne très
souvent la demande d’extradition proprement dite dans l’optique d’assurer le maintien sous
main de justice de la personne recherchée.
Elle diffère selon que l’extradition est demandée par le gouvernement camerounaise ou
celui étranger.
Il s’agit de l’extradition active. L’article 674 CPP énonce à cet effet que, l’extradition
demandée par le gouvernement camerounais est soumise à la procédure suivante :
Cela est la synthèse des dispositions découlant des conventions internationales sur
l’extradition ; synthèse rappelée à l’article 675 CPP qui énonce que l’étranger objet d’une
première extradition au bénéfice du Cameroun ne peut faire l’objet d’une extradition par le
Cameroun au profit d’un Etat tiers sans le consentement du premier Etat. Toute fois ce
consentement n’est pas nécessaire si l’extradé a eu pendant un délai de 30 jours suivant son
élargissement, la possibilité de quitter le territoire Camerounais.
[76]
formée par voie diplomatique à laquelle sont jointes selon les cas, les pièces énumérées à
l’article 1er , notamment dans les paragraphes (a, b et c).
Cette procédure admise en cas d’urgence par la loi de 1964 et toutes les conventions à
été reprise par les articles 652 et suivant du CPP. Elle exige certain conditions de forme
manifestant le lieu entre la demande d’extradition et la demande d’arrestation elle-même.
L’arrestation étant provisoire elle pose le problème de sa cessation.
Selon l’article 652 CCP et toute les conventions, cette demande peut être faite
directement de l’autorité judiciaire étrangère à l’autorité camerounaise à condition qu’elle laisse
une trace écrite. A l’instar de l’article 652 susvisé, toutes les conventions exigent que cette
demande indique l’existence des pièces requises pour la demande d’arrestation proprement dite.
En outre, toutes les conventions soulignent le lien existant entre la demande d’arrestation et
celle d’extradition ou vice-versa et exigent que la demande d’arrestation fasse clairement par
de l’intention
et cela pour bien montrer que la demande d’extradition est bien tributaire d’une demande
d’arrestation.
Selon l’article 666 CPP, l’individu arrêté provisoirement est mis en liberté et
l’extradition ne peut être demandé à son égard par le même Etat pour les mêmes faits, si
dans le délai de trois (03) mois suivant la notification du décret d’extradition a l’Etat
requérant, sa remise effective n’est pas demandée par ce dernier. La Cour d’appel qui est la
juridiction compétente en la matière n’a donc aucun pouvoir d’appréciation ; et si
d’aventure elle refuse d’accorder la liberté de plein droit alors que les conditions en sont
remplies, l’intéressé devrait pouvoir contester cette décision devant la Cour d’Appel
compétente qui statue dans 8 jours et la décision rendue par cette Cour est susceptible de
pourvoi devant la Cour suprême (seuls peuvent former le pourvoi, le ministère public et
l’intéresser). Quant-aux conventions, elles prévoient également la mise en liberté si au cours
[77]
d’un certain délai, il n’y a pas de demande proprement dite d’extradition accompagnée des
pièces requises. Ces conventions se répartissent en deux groupes :
- D’après le premier groupe, l’individu provisoirement arrêté est de plein droit remis en
liberté à l’expiration d’un délai qui varie de 30 à 45 jours. C’est le cas des conventions
franco-camerounaise et camerouno-zaïroise ;
- Le second quant à lui (convention d’Antananarivo, camerouno-malienne) ne prévoit
qu’une simple faculté de mise en liberté en cas d’arrestation non suivi d’une demande
d’extradition dans les délais. Toutes les conventions précisent que la remise en liberté
n’empêche pas la reprise de la procédure d’extradition si une demande remplissant les
conditions est produite ultérieurement.
1- La phase judiciaire
a- L’étape préliminaire
Après que le dossier ait été transmis par le garde des sceaux au procureur de la
République dans le ressort duquel la personne réclamée a été localisée, cette dernière est arrêté
si elle ne fait pas l’objet d’une arrestation provisoire. Dans les 24 H de cette arrestation, un
magistrat du parquet du dit Tribunal (l’article 654 CPP prévoit le TPI) procède à un
interrogatoire d’identité de l’intéressé qui est transféré dans les meilleurs délais dans la maison
d’arrêts du siège de Cour d’Appel dans le ressort duquel il a été arrêté. Il lui notifie le titre en
vertus duquel il a été arrêté. Le Procureur Général peut à tout moment procéder où faire
procéder par un magistrat du parquet à un autre interrogatoire dans les formes indiquée à
l’article 653 CPP. L’intéressé peut se faire assister d’un avocat dès le premier interrogatoire.
[78]
b- La procédure devant la Cour d’appel.
D’après les articles 656 CPP et 21 de la loi de 1964, la Cour d’Appel est saisie sur le
champ des procès-verbaux d’interrogatoires et d’autres pièces et l’individu doit comparaître
devant elle dans les 8 jours suivant la notification officielle du titre d’arrestation. Lors de cette
comparution, la personne réclamée dispose d’une option :
autorisent les articles 659 CPP et 23 de la loi de 1964 et consentir formellement à être livré aux
autorités du pays requérant. En pareil hypothèse, la Cour lui donne acte de sa déclaration dans
un PV qui est transmis par le procureur ou Ministre de la justice qui soumet s’il y a lieu à la
signature du président de la République un décret ordonnant l’extradition. Aucun recours
n’étant possible contre cette décision de donner acte, la procédure judiciaire est achevée ; elle
produit tous les effets de l’extradition.
- Ensuite, l’individu peut accepter de jouer le jeu de l’extradition tel que règlementé
par la loi de 1964 ou par une convention. Dans ce cas, la procédure est publique (Cf. C.A de
Douala, arrêt n° 1/P DU 06 octobre 1987, affaire AMINE SABRA, inédit). En vertu de l’article
657 CPP, cette procédure est publique sauf décision du huis-clos. Elle est orale et presque
contradictoire car elle nécessite la présence effective de la personne réclamée (Cf. article 22 al
1er de la loi de 1964). Si celle-ci, laissée en liberté ne comparait pas, la procédure doit être
suspendue (Cf. Chambre Criminelle 08 novembre 1956, Gazette du palais 1957, 1ere partie, p.
194. RSC ; 1957, 391, aobs. PATIN). L’unique exception à la présence effective du délinquant
survient lorsqu’après l’extraction effective, l’Etat requérant sollicite une extension. La Cour
d’Appel devrait par la force des choses statuer sur cette demande en l’absence du délinquant
qui a été déjà extradé (Cf. art 30, loi 1964). Toutefois, la contradiction ne concerne que la
personne poursuivie et le M.P. En aucun cas, l’Etat requérant ne peut être représenté dans la
procédure (chambre crim 11février 1965, Dalloz 1965, 1ere partie p 354). Pendant le
déroulement du procès, le Cour d’Appel peut sursoir à statuer jusqu’à ce qu’elle ait reçu des
renseignements complémentaires. Elle ne peut pas rendre un avis défavorable au seul motif
qu’elle manque d’informations. Elles sont demandées par voies diplomatique et hiérarchique
(CA. Douala, Arrêt Avant dire droit n°1225, 16 juin 1987, Aff, AMINE SABRA).
[79]
c- La décision donnant lieu à l’extradition
La Cour d’Appel. a pour seul rôle de vérifier s’il n’ y a pas eu erreur évidente notamment
sur l’identité de l’individus et s’assurer que les conditions légales sont réunies en vertu des
articles 657 CPP, 22 et 25 de la loi de 1964. Elle n’est donc pas habilitée à scruter l’opportunité
de l’extradition, les bien fondés de la poursuite, ni même la qualification que les autorités
étrangères ont attaché aux faits au regard de leur loi. Il s’agit d’un contrôle de régularité externe.
Toutefois, les limites ainsi imposées à la Cour d’Appel sont plus claire sur le papier que
dans la pratique. Le problème est celui de poser une frontière étanche entre le contrôle
d’opportunité et celui de légalité lorsqu’il s’agit d’apprécier le bût politique d’une demande et
plus largement, la volonté prêtée à l’Etat requérant de poursuivre ou de punir quelqu’un pour
des considérations de race, religion, nationalité et d’opinion politique. A la fin de son
intervention, la Cour d’Appel rend une décision qualifiée d’avis. Cet avis motivé qui n’est
communiquée qu’à la Chancellerie n’était pas susceptible de voie de recours dans la loi de 1964
(article 22 de ladite loi). Actuellement il ne peut faire l’objet que d’un seul recours (article 660
CCP). Seul le Procureur-Général a qualité pour attaquer cet avis devant la C.S. Au regard de la
loi de 1964, l’avis de la Cour d’Appel ne pouvait pas faire l’objet d’un pourvoi en cassation du
fait de la nature d’acte consultatif et non juridictionnel. Toutefois, deux atténuations à ce
principe devraient être admissent :
Lorsque l’individu réclamé fait l’objet non d’une arrestation provisoire mais d’une
arrestation consécutive à l’ouverture de la procédure d’extradition, la Cour d’Appel étant saisi
du dossier, on applique l’article 658 CPP sur la mise en liberté provisoire et l’article 27 al 1e
de la loi 1964 qui dispose que : « jusqu’à notification au parquet général des effets prévus par
les articles 23, la cour peut, le procureur général entendu, admettre les étrangers au bénéfice
de la liberté provisoire ». Avec ces dispositions, la législation répond à la question de savoir si
[80]
après avoir rendu son avis, la Cour d’Appel reste encore compétente pour statuer sur la mise en
liberté ? (voir C.A de Douala, Arrêt n°46/CC du 03 Octobre 2007, Affaire Véronique
FETTWEIS, inédit). S’agissant de la procédure, la loi prévoit que le Procureur Général est
entendu, mais elle ne dit rien sur le rôle de l’intéressé. C’est certain, ce dernier ne doit pas être
entendu, il doit simplement pouvoir saisir la Cour d’Appel par requête et déposer les mémoires.
2- La phase administrative
Une fois l’avis de la Cour d’Appel rendu, le dossier est transmis au garde des sceaux
par l’intermédiaire du P.G dans les meilleurs délais (article 659 al 2 CPP et 25 al 2 loi de 1964).
La suite de la procédure dépend alors du caractère favorable ou défavorable de l’avis rendu par
la Cour d’Appel.
a- L’hypothèse d’un avis défavorable (Cf article 661, 662 et 664 du CPP)
Lorsque l’avis de la Cour d’Appel est défavorable, l’individu réclamé ne peut plus être
extradé. Cet avis lie le Gouvernement et la personne détenue doit être remise en liberté
immédiatement si elle n’est pas détenue pour une autre cause.
Lorsque l’avis de la Cour d’Appel est favorable, le Gouvernement peut à son gré
accorder au non l’extradition en toute opportunité politique ou diplomatique (tout au moins
dans le cadre non contraignant de l’article 24 de la loi de 1964). Par contre, toutes les
conventions affirment l’engagement de l’Etat requis à livrer la personne réclamées dans le
respect des conditions qu’elles posent et exigent que tout refus d’extradition même partielle soit
motivé. Toutefois, même en pareil hypothèse, il appartient au gouvernement de choisir entre
l’exécution des obligations internationales et l’engagement de leur responsabilité. La décision
accordant l’extradition prend la forme d’un décret du président de la République sur proposition
du garde des sceaux. Il n’est pas susceptible de recours (Cf. art 659 al 3 CCP). En tant que acte
administratif, ce décret peut être déféré au juge de l’excès de pourvoi en droit français (voir
l’arrêt Decerf C.E., 28 mai 1937, SIREY 1937, 2e partie, n°73 ; Affaire Dame Kirkwod, C.E
30 mai 1952, Dalloz 1953, 2e partie, p.33, note Bouzat, confirmé par le C.E le 18 novembre
1955, JCP, 1956, 2e partie, n°9184, Aff. Petalas). Il faut tout simplement souligner que le
recours pour excès de pouvoir contre le décret d’extradition n’ayant pas d’effet suspensif,
[81]
l’individu réclamé a intérêt à demander le sursis à l’exécution dudit décret. Ce sursis dont
l’octroi par le juge administratif est facultatif obéit à trois conditions :
- la première est toujours remplie en l’espèce. La décision querellée doit entrainer une
modification de la situation de droit ou de fait du requérant ;
- l’exécution immédiate doit causer un préjudice grave à l’intéressé ;
- Le moyen invoqué pour obtenir l’annulation du décret doit avoir un caractère sérieux.
Il faut distinguer selon qu’elle est demandée par le gouvernement camerounaise ou celui
étranger. Dans la première hypothèse, le Cameroun est l’Etat requérant tandis que dans la
seconde, il est l’Etat requis.
L’extradition est limitée par le principe général de la spécialité. Toutefois, d’autres limites
peuvent être imposées à l’Etat requis en vertu de sa souveraineté.
1- la règle de la spécialité
Cette règle qui découle de l’article 29 de loi de 1964 limite la partie de l’extradition aux
seuls faits pour lesquels elle a été accordée. Sa justification est évidente car il serait très facile
à un Etat de réclamer un individu pour une infraction quelconque puis celui-ci une fois livré, le
faire juger ou l’incarcérer pour des infractions ou des peines pour lesquelles l’extradition
n’aurait pu être accordée.
[82]
rien n’empêche de profiter de la présence de l’individu réclamé sur le territoire pour procéder
à des actes d’instruction sur des faits antérieurs à l’extradition et non visées dans l’acte à
condition que le jugement ne soit pas contradictoire car à l’égard de ceux –ci, l’individus est
sensé ne pas être présent sur le territoire (chambre crim, 12 juillet 1939, Bull n° 178). Deux
exceptions sont néanmoins apportées à cette règle :
- d’abord, un jugement peut intervenir dans les conditions normales si l’on obtient de
l’Etat requis une prorogation de l’extradition ;
- ensuite, lorsque l’individu est resté volontairement au Cameroun plus 30 jours après
le jugement de la procédure valablement diligenté contre lui ou bien que l’ayant quitté, il revient
toujours volontairement (Cf. article 29 al 3 de la loi de 1964).
L’Etat requis peut soumettre l’extradition accordée à des conditions particulière, par
exemple, réextrader l’intéressé, ne pas le traduire devant une juridiction d’exception, l’épargner
du châtiment contraire à l’ordre publique. Le non-respect de ces conditions semble a priori ne
pouvoir être sanctionné que sur le plan politique ou diplomatique. La procédure d’annulation
est prévue par l’article 669 al 1 et 2 CPP.
1- La procédure à suivre
[83]
recevable jusqu’à l’expiration de la peine lorsqu’il s’agit d’une extradition à fin d’exécution
d’une peine (article 32 al 2 de la loi de 1964). Par contre, lorsqu’il s’agit d’une extradition à fin
de poursuite, la loi est muette ; il faut alors se référer aux délais de prescription de droit
commun.
L’extradé ne peut se prévaloir que des causes de nullité qui tiennent à l’observation de
la loi (loi de 1964) Ex : le fait pour lequel l’extradition a été obtenu ne remplit pas les conditions
de gravité exigées par la loi. Par contre, l’intéressé ne peut s’appuyer sur l’argument de nullité
entachant la procédure suivie sur le territoire de l’Etat requis car nos Tribunaux ne sont pas les
gardiens de la loi étrangère. Dans le même ordre d’idée, les circonstances d’arrestation et de
livraison à l’autorité camerounaise sont différentes. Des problèmes peuvent surgir de la
violation de la convention d’extradition existant entre l’Etat requérant et celui requis. Si l’on
estime qu’une telle convention n’est pas self executing, l’extradé peut demander la nullité de la
mesure prise à son encontre. Le juge camerounais ne s’est pas encore prononcer sur cette
question.
L’individu réclamé étant détenu, il revient à l’Etat requérant de faire diligence pour en
prendre possession (l’extradé étant quérable et non portable). Cette expression découle de
l’article 28 de la loi de 1964 qui prévoit que : « si la remise n’a pas été faite dans le délai d’un
mois à compter de la notification du décret d’extradition au parquet général, l’individu sera
remis en liberté et ne pourra plus être redemandé pour la même causer ».
[84]
Des difficultés peuvent cependant se présenter. Il peut arriver que l’individu réclamé
soit en train d’exécuter une peine pour des faits qui font l’objet de poursuites au Cameroun. Si
la C.A a émis un avis favorable à l’extradition, le gouvernement a toute liberté de manœuvre
quant à l’exécution. Il peut soit livrer immédiatement l’individu à charge pour l’Etat requérant
de le lui rendre, soit différer la livraison jusqu’à la conclusion de la procédure en cour.
En vertu de la loi de 1964, c’est la Cour d’Appel qui décide sans recours s’il y a lieu de
transmettre au gouvernement requérant :
« tout ou partie des titres, valeurs ou objets saisis même si la demande d’extradition est
irrecevable, rejetée ou ne peut plus recevoir de suite pour quelques causes que ce soit » (articles
21 al 1er, 26 al.2 loi 1964).
S’agissant des documents et objets ne se rapportant pas aux faits imputés à l’étranger,
la Cour d’Appel ordonne leur restitution sans recours. Quant aux différentes conventions
auxquelles le Cameroun est partie, elles comportent des dispositions à peu près identiques à
ceci près que, la remise des objets « doit et non peut » être faite par l’Etat requis à la demande
l’Etat requérant (voir Convention camerouno-malienne, article 47).
[85]