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VÉRITÉ DES MYTHES

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Bernard Deforge
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© 2022, Société d’édition Les Belles Lettres,
95, boulevard Raspail 75006 Paris.

ISBN : 978-2-251-91771-9
INTRODUCTION

ORIGINES DES SLAVES

Lorsqu’au ve siècle les Slaves apparaissent dans l’histoire, ils semblent


sortir de nulle part. Ils sont pourtant nombreux, au point de susciter
l’étonnement : on parle de leurs foules immenses, divisées en trois peuples,
Antes, Sclavènes et Vénètes, réservoir inépuisable de troupes pour les
diverses nations barbares qui déferlent sur l’Empire romain d’Orient. Ils
accompagnent ainsi des Germains, en particulier les Goths, mais aussi des
peuples turcophones tels que les Bulgares, qui finiront par se slaviser
totalement à leur contact. Dans le courant du Moyen Âge, ils ont occupé
plus de la moitié de l’Europe, de ce qui est actuellement la partie orientale
de l’Allemagne aux campagnes de Grèce.
Curieusement, ils n’apparaissent dans aucune source écrite antérieure au
ve siècle. À défaut de disposer de textes, les chercheurs se sont donc tournés

vers l’archéologie. Or l’Europe « barbare », à l’époque romaine, est assez


mal connue, même si, depuis une cinquantaine d’années, de nombreuses
fouilles ont été menées. Diverses cultures ont été identifiées : certaines ne
posent guère de problème d’attribution. Ainsi la culture de Jastorf, très
influencée par celle de La Tène (celle des Gaulois), est germanique. La
culture que l’on trouve sur l’actuel territoire polonais, culture dite de
Przeworsk, pose plus de problèmes, même si le plus souvent maintenant, on
la pense aussi germanique. Celle de Wielbark, sur la rive sud de la Baltique,
est due aux Goths. Plus à l’est, celle de Milograd est vraisemblablement
balte. Et coincée entre tout cela, il s’en trouve une autre, la culture de
Zarubinets, qui doit son nom à une nécropole d’Ukraine et qui s’est étendue
dans les bassins du Dniepr et du Pripet (actuelles Ukraine et Biélorussie),
entre le iie siècle av. J.-C. et le iie siècle après. Cette culture possède une
particularité remarquable : elle est profondément celtisée.

La culture de Zarubinets

On trouve dans les anciens manuels d’archéologie quelques mentions de


découvertes d’objets celtiques en plein cœur de l’Ukraine. Ainsi, Joseph
Déchelette (1862-1914), indique la découverte d’une nécropole de La Tène
non loin de Kiev, dans une localité nommée Zarubinets1. Le même
renseignement se retrouve chez Henri Hubert (1872-1927), qui, bien que
renvoyant à Déchelette, utilise une autre source et parle du site de
« Jarubinetz »2. En fait, ce sont des dizaines de sites de ce type, dans les
bassins du haut Dniepr et du Pripet, qui ont été recensés concernant cette
culture quasi inconnue de l’historiographie francophone3.
Et les nombreuses découvertes montrent une laténisation très poussée de
cette culture, qui se manifeste par les bijoux (et notamment les fibules), la
vaisselle et certains types d’outils. Il s’agit bien d’une laténisation, car tous
ces objets sont en général de fabrication locale, et on n’a trouvé, à l’heure
actuelle, qu’une seule fibule, dans le district de Borodianki (région de
Kiev), qui pourrait provenir directement des Balkans4.
Certains chercheurs, au cours du xxe siècle, ont bien essayé de minimiser
cette laténisation, mais sans succès5. Pour Marija Gimbutas, qui suit une
hypothèse déjà formulée anciennement par l’archéologue soviétique
V. V. Sedov, cette culture serait « baltique », se rattachant au complexe
poméranien qui serait, selon elle, un ensemble appartenant aux Baltes de
l’Ouest6. Il n’y a rien de moins certain, car le seul élément baltique de la
culture de Zarubinets tient en la présence d’épingles à tête spiralée,
manifestement héritées de la culture de Milograd.
La culture de Zarubinets s’est en effet installée, de façon allogène, en lieu
et place d’une culture qui est, elle, bel et bien baltique, la culture de
Milograd7. La question de l’origine même de la culture de Zarubinets se
pose donc, et elle a suscité de nombreuses hypothèses8.

Origines de la culture de Zarubinets

On a invoqué les Bastarnes, dont on sait maintenant grâce à l’archéologie


qu’ils sont des Germains, porteurs de la culture celtisée de Jastorf (mais
cette culture n’est absolument pas semblable à celle de Zarubinets : leurs
fibules, par exemple, appartiennent bien à la culture de La Tène, mais sont
de types différents), ou bien donc des peuples du complexe poméranien.
Pour Kasparova, il n’y a pas eu migration directe des Bastarnes dans ces
régions, mais en fait un passage d’abord par le secteur danubien (d’où une
celtisation tardive), avant un retour vers le nord-est9. Cependant, on est
certain que les Bastarnes ont eux-mêmes formé une culture localisée juste
au nord du delta du Danube, la culture de Poieneşti-Lukashevka, qui, bien
qu’influencée par La Tène, n’entretient que peu de rapports avec celle de
Zarubinets puisqu’elle mixe des éléments issus de la culture germanique de
Jastorf avec d’autres gèto-daces et sarmates10.
D’autres chercheurs, comme Maksimov, se sont attachés à rechercher les
diverses influences qui se sont exercées sur cette culture, et c’est sans
surprise donc qu’on y a retrouvé quelques éléments des cultures
poméraniennes, de Jastorf et de Przeworsk, sans toutefois que cela
démontre autre chose que l’existence d’un commerce11.

Les enclaves « celtiques » du sud de la Pologne

La solution se trouve peut-être dans le sud de la Pologne. Entre les faciès


purement celtiques et ceux de la culture laténisée de Przeworsk12, on a
identifié des noyaux culturels profondément celtisés, antérieurs à
La Tène C113. Ces noyaux sont localisés en Basse-Silésie, sur le plateau de
Głubczyce, dans le bassin du haut San et dans la Petite Pologne. Or les
établissements prétendument celtiques de Basse-Silésie ont disparu à
La Tène C1, soit entre 250 et 180 av. J.-C.14. Sur le plateau de Głubczyce,
l’occupation dite « celtique » apparaît au ive siècle av. J.-C. et persiste,
quoique faiblement, jusqu’à la charnière de La Tène C-D (vers 120 av. J.-
C.). Dans le haut bassin du San, l’occupation « celtique » apparaît au début
de La Tène C et persiste jusqu’à la fin de cette période, peut-être même
jusqu’au début de La Tène D. Le groupe de Tyniec, autour de Cracovie en
Petite Pologne, est un groupe mixte, mêlant éléments celtiques et éléments
de la culture de Przeworsk. Il est cependant précédé d’un faciès purement
celtique remontant à La Tène B2. Ce groupe culturel se fond petit à petit
dans la culture de Przeworsk.
Mais globalement, ces enclaves « celtiques », relativement éphémères,
disparaissent alors même que se forme la culture de Zarubinets puisqu’on
admet comme période d’apparition de celle-ci La Tène C1a/C1b à
La Tène C2, dates basées sur l’étude des fibules15. On peut mettre en
relation ces deux événements avec le passage des Bastarnes et des Skires,
attesté en Pologne par la présence, lors de La Tène C1, d’objets appartenant
à la culture de Jastorf16. Cependant, il faut tout de même voir là un
phénomène relativement lent, puisqu’il s’étale, dans les deux cas, sur
l’ensemble de La Tène C.
Les points d’accord archéologiques entre les deux ensembles existent. Il
se trouve que si les habitats de la culture de Milograd se font au niveau du
sol, les maisons de celle de Zarubinets sont semi-enterrées avec, dans un
angle, un four ou foyer en pierre17, exactement comme celles que l’on a
retrouvées sur le site « celtique » polonais de Nowa Cerekiew (l’habitat de
ces enclaves n’a été que très peu étudié, à la différence de celui de la culture
de Zarubinets)18. De même, en ce qui concerne les rites funéraires observés
dans la culture de Zarubinets, on a pu montrer qu’ils étaient très proches de
ceux des cultures laténiennes des Carpathes et des Balkans, et donc du sud
de la Pologne, plus que de toute autre culture19. Il s’agissait d’incinération
suivie du dépôt des cendres soit dans des urnes, soit en pleine terre, le tout
étant accompagné d’offrandes (bijoux, céramiques). Le même constat a pu
être fait en ce qui concerne les fibules les plus anciennes, qu’on a
rapprochées de découvertes faites en Bohème, Moravie et Bavière20. En fin
de compte, si la culture de Zarubinets possède quelques affinités avec sa
voisine occidentale de Przeworsk, elles ne sont dues qu’à des influences
celtiques communes, et non à d’éventuels échanges directs21.
On note par ailleurs que le contact avec le monde celtique n’a pas été
rompu après la formation de la culture de Zarubinets, puisqu’on peut suivre
une évolution parallèle de certains modèles de fibules, notamment avec
l’apparition de fibules ressemblant à celles du type de « Nauheim »
(La Tène D1), modèle qui poursuivra d’ailleurs son évolution
indépendamment du monde celtique22.

Évolution de la culture de Zarubinets

Dès la fin du ier siècle apr. J.-C. et dans le courant du iie siècle, les Goths,
descendant de la Baltique, s’installent au nord de la mer Noire et de la
Crimée, créant un complexe nommé « culture de Tcherniakhov ». Cette
culture recycle des éléments d’origine germanique, les mêlant à d’autres
issus de la culture de Przeworsk et à quelques autres encore de la culture de
Zarubinets, dont elle occupe la partie sud23.
La partie nord de l’aire géographique de la culture de Zarubinets échappe
à l’emprise de la culture de Tcherniakhov. Certains sites biélorusses ont
ainsi été datés par 14C24 et les dates sont intéressantes : 190 apr. J.-C. pour
Obidnya ; 280 pour Adamenka ; 330 pour Radyševa Gora. La culture qu’on
nomme maintenant « post-Zarubinets » s’avère donc être
chronologiquement parlant la dernière culture de type La Tène. Ainsi, le
site emblématique de Koločin montre une quasi-continuité d’occupation de
180 apr. J.-C. jusqu’au viie-viiie siècle apr. J.-C., date de sa destruction
définitive25. Toutefois, même si cette partie de la culture échappe à
l’emprise gothique, elle a dû subir des troubles importants, car on a alors
noté l’apparition de plus en plus fréquente d’inhumations avec armes26.
Plus tard, ces deux cultures, celle de Zarubinets et celle de Tcherniakhov,
vont entrer en expansion. Ce sont pour finir trois cultures archéologiques
slaves qui apparaîtront au vie siècle : la culture de Prague-Kortchak, à
l’ouest, attribuable aux Sclavènes, la culture de Penkovka, au sud-ouest,
attribuable aux Antes, et la culture de Koločin-Tušemlija, au nord-est, qui
serait alors attribuable aux Vénètes. C’est sous ces trois noms que les
Slaves sont alors connus dans les sources byzantines et latines. L’expansion
slave atteint son maximum aux viiie-ixe siècles, si l’on ne tient pas compte
de la colonisation tardive, à partir du xvie siècle, par les Russes, de la
Sibérie et de l’Asie centrale.
Cette histoire, ici très brièvement résumée, est fort mal connue en
Occident. En français, nous disposons certes de livres de vulgarisation, mais
ils sont anciens et peu aisés à trouver. Un ouvrage de l’archéologue tchèque
Zdeněk Váňa donne ainsi une présentation générale grand public, très
illustrée27. Pourtant plus récent, celui de son homologue Bohuslav
Chropovský, quoique tout aussi illustré, est à éviter car son propos est plus
idéologique28. Des errances plus graves se retrouvent chez l’académicien
soviétique Boris Rybakov, qui voit des Slaves au Néolithique, ce qu’aucun
archéologue sérieux ne saurait affirmer. Pavel Dolukhanov se place dans la
continuité de Boris Rybakov et tâche de retrouver les ancêtres des Slaves
depuis le Paléolithique29. Une démarche pour le moins hasardeuse.
D’autres travaux sont autrement plus sérieux. Le petit essai de Frank
Kmietowicz est toujours utile mais vieilli30. En anglais, l’ouvrage récent de
Florin Curta, pour beaucoup basé sur les sources byzantines, concerne plus
directement les Balkans31. Côté russe, les travaux de l’académicien
V. V. Sedov sont incontournables32. En français, la synthèse de Michel
Kazanski, basée sur des travaux récents, est sans doute la meilleure
disponible33. S’appuyant sur les précédents, l’étude de Iaroslav Lebedynsky
se focalise sur les rapports entre les premiers Slaves et les diverses
populations iranophones (Scythes, Sarmates…) qui les ont côtoyés34. Une
place à part doit être accordée à l’important ouvrage du Polonais Karol
Modzelewski, qui délaisse l’histoire événementielle pour s’intéresser à la
structure sociale et politique des Slaves, comparée à celle des derniers
Germains païens35.

LES RAISONS D’ÊTRE DE CE LIVRE

La conversion des Slaves au christianisme commence vers le milieu du


viii siècle, en Carantanie, une principauté qui a précédé l’actuelle Carinthie.
e

Mais elle est surtout active à partir du siècle suivant, et elle s’achèvera
officiellement au xiie siècle. Elle est le fait à la fois des Byzantins, qui
convertissent d’abord les peuples sous domination bulgare, puis l’ensemble
des Slaves de l’Est, et des Latins, notamment des Francs et des Bavarois,
qui toucheront une partie des Slaves du Sud et l’ensemble des Slaves de
l’Ouest.
C’est une conversion sans appel, sans maintien du moindre souvenir du
paganisme antique. Alors qu’en Irlande et en Scandinavie, autres régions
d’Europe christianisées tardivement, des pans entiers de la poésie ancienne
et de la mythologie sont conservés, chez les Slaves, rien de tout cela ne
subsiste. Il ne reste que des fragments : des dénonciations du paganisme par
des prêtres chrétiens, quelques rares idoles, et des réminiscences de mythes
dans des légendes plus récentes. De ce fait, la religion slave païenne s’avère
particulièrement difficile à appréhender. Et sur le plan historiographique, la
survenue de la révolution d’Octobre en Russie, puis la bipartition de
l’Europe en 1945, ont fait qu’en Occident, les questions de l’origine des
Slaves et de leur culture ancienne ont été singulièrement ignorées.
Le paganisme des anciens Slaves ne fait plus l’objet de publications
sérieuses en français depuis longtemps. Le seul et unique ouvrage de grande
ampleur est celui de Louis Leger, La Mythologie slave, publié en 1901.
Mais cet essai est plus une compilation d’articles plus anciens mis à jour
qu’un tout cohérent : il manque donc au sommaire des pans entiers du sujet.
Et évidemment c’est un ouvrage qui ne peut tenir compte de plus d’un
siècle de recherches nouvelles. Cet essai fondateur est suivi en 1948 par la
partie consacrée aux Slaves de Les Religions des Celtes, des Germains et
des anciens Slaves, rédigée par Boris Unbegaun. Ce dernier se livre alors à
un examen particulièrement critique des sources, qui ne laisse finalement
plus grand-chose à étudier. Un examen excessif, relevant quasiment de
l’hypercritique.
Depuis cette époque, il n’y a eu d’ouvrage en français consacré à la
mythologie slave que la traduction par Lise Gruel-Apert d’un livre
de l’académicien soviétique Boris Rybakov, Le Paganisme des anciens
Slaves. Mais le travail de Rybakov est particulièrement dogmatique, orienté
du point de vue idéologique : il a fait l’objet, en Russie, d’une sévère
critique après la Perestroïka36.
Par la suite, il n’y a eu que des ouvrages traitant du folklore moderne et
contemporain, essentiellement en Russie. Citons Vladimir Propp, Les Fêtes
agraires russes (1995) ; André Siniavski, Ivan le Simple. Paganisme, magie
et religion du peuple russe (1990) ; Francis Conte, L’Héritage païen de la
Russie, 1, Le paysan et son univers symbolique (199737) ; Nadia Stangé-
Zhirovova, Une autre Russie. Fêtes et rites traditionnels du peuple russe
(1998) ; Elizabeth Warner, Mythes russes (2005) ; Lise Gruel-Apert, Le
Monde mythologique russe (2016).
Tous, donc, ne traitent que du folklore russe, et tous souffrent de défauts
plus ou moins rédhibitoires. L’ouvrage de Nadia Stangé-Zhirovova
considère que l’idée de double foi en Russie (la persistance du paganisme
après la christianisation) implique une séparation réelle des païens et des
chrétiens, alors qu’il s’agit d’idées païennes qui continuent à être véhiculées
par des chrétiens. Celui d’Elizabeth Warner est si court (153 p. très aérées
au format poche) qu’au final il ne dit pas grand-chose. Celui de Lise Gruel-
Apert est une synthèse parfois très maladroite des travaux de Propp et de
Rybakov (qu’elle a traduits en français), des travaux qui ont vieilli et ont
donc été largement critiqués. L’autrice ne tient d’ailleurs pas compte des
autres thèses parallèles, comme celles de l’archéologue V. V. Sedov,
contemporain de Rybakov, ou des mythologues V. Ivanov et V. Toporov,
dont les apports ont pourtant été considérables.
Que reste-t-il pour finir ? Un numéro spécial de la revue Slavica
Gandensia (7/8, 1980/1981), qui publie les actes du Symposium
international et pluridisciplinaire sur le paganisme slave (Bruxelles, Gand,
21-24 mai 1980). Mais il ne s’agit pas d’une synthèse, juste d’un recueil de
travaux. Et ma thèse, Perun, dieu slave de l’orage, publiée en 2015.
Cependant, c’est une monographie consacrée à une seule divinité.
Il n’y a donc aucune synthèse en français concernant l’ensemble des
Slaves, et la slavistique francophone semble s’être totalement détournée de
ce sujet. Le domaine slave est le seul champ d’études mythologiques à être
ainsi aussi négligé.
Pourtant, la recherche n’a jamais cessé, que ce soit en Russie (ou avant en
URSS) ou dans les autres pays slaves. Elle connaît même un renouveau
important depuis les années 1990, avec certes nombre d’errements liés à
l’apparition de mouvement néopaïens, mais aussi avec l’apparition de
nouveaux chercheurs on ne peut plus sérieux dans l’ensemble des pays
slaves. Une synthèse de ces travaux restait à faire.
LES PRINCIPAUX PEUPLES SLAVES VERS LE Xe SIÈCLE

Tous les noms sont donnés dans leur forme française


Crédit : DAO Patrice Lajoye

1. Déchelette, 1927, p. 588, et fig. 389, p. 429.


2. Hubert, 1974, p. 52.
3. Pour une présentation rapide de cette culture, basée sur la bibliographie soviétique : Widera,
1971.
4. Pačkova, 2000.
5. Pačkova, 2000, qui cite notamment Maksimov.
6. Gimbutas, 1971, p. 66-67.
7. Gimbutas, 1963, p. 107 ; Kuxarenko, 1960, p. 289-290.
8. Voir la synthèse de Pačkova, 2000.
9. Kasparova, 1981 ; Pačkova, 2000. Kasparova a essayé de rajeunir la chronologie des fibules de
La Tène pour identifier les Bastarnes (et leur retour au nord du Danube) avec la culture de
Zarubinets. Cette vision des faits n’a pas été acceptée.
10. Babeş, 2003.
11. Maksimov, 2000.
12. Sur cette culture, voir : Dąbrowska et Mączyńska, 2003.
13. Bochnak, 2006, carte 1.
14. Bochnak, 2006, p. 162.
15. Pačkova, 2000. Pour une publication récente d’un site biélorusse précoce (La Tène C1) bien
fouillé : Beljavec, 1999-2001.
16. Bochnak, 2006, p. 170. L’arrivée des Bastarnes dans le Bas Danube semble avoir d’ailleurs
déclenché le déplacement des Daces dans la plaine carpatique où, là aussi, les communautés celtiques
disparaissent : Sîrbu, 2006, p. 150.
17. Delmaire, 1974, p. 152.
18. Bochnak, 2006, p. 165.
19. Pačkova, 2000, avec un dénombrement précis des critères utilisés.
20. Beljavec, 1999-2001.
21. Dąbrowska, 1995-1998.
22. Pačkova, 2000, figure 1.
23. Kojak et Terpilovski, 1986, p. 35.
24. Dolukhanov et al., 1970, p. 132-133.
25. Le site a seulement subi un incendie, suivi d’une reconstruction immédiate : on ne peut donc
pas parler de rupture d’occupation.
26. Kasparova, 2000.
27. Váňa, 1983.
28. L’auteur y combat encore la « science bourgeoise » : Chropovský, 1989.
29. Dolukhanov, 1996.
30. Kmietowicz, 1976.
31. Curta, 2004.
32. Par exemple Sedov, 1994 et 2002. On y ajoutera des monographies plus restreintes, portant sur
des cultures particulières, comme celles de Kuxarenko (1964) ou de Maksimov (1982) sur la culture
de Zarubinets, ou celle de Prixodnjuk (1998) sur celle de Penkovka.
33. Kazanski, 1999.
34. Lebedynsky, 2009.
35. Modzelewski, 2006.
36. Voir aussi le compte rendu sévère de Roberte Hamayon, L’Homme, 36/140, 1996, p. 151-154.
37. Le t. II n’est jamais paru.
PREMIÈRE PARTIE

RELIGION
LES RITES

Les rites sont intimement mêlés au rythme de la vie des anciens Indo-
Européens, et donc des Slaves, avant comme après leur christianisation.
Mais si le christianisme a su récupérer nombre de ces rites, il les a le plus
souvent condamnés. Ainsi, dans la Rus’ ancienne, le Récit des temps
passés1, dont l’auteur est évidemment chrétien, condamne, à l’année 1068
de sa chronique, les anciens rites des païens, et notamment les rites festifs :
« Ainsi le diable se manifeste par de tels procédés et bien d’autres pour nous éloigner de Dieu
par toutes sortes de ruses, par des trompettes et des jongleurs, des harpes et des rusalia. Nous
voyons en effet ces lieux de plaisir encombrés par une foule nombreuse où l’on s’entasse l’un
sur l’autre pour voir ces spectacles inventés par les démons […]2. »

Au-delà de cette très brève mention, nous disposons de diverses sources,


tant textuelles qu’archéologiques, qui nous permettent de décrire au moins
sommairement les rites des Slaves païens, qu’ils soient particuliers
(notamment les rites de passage) ou collectifs.

RITES PARTICULIERS

Naissance et enfance

Aucun rite réellement ancien associé à la naissance n’a été conservé par
les textes. On retrouve un peu partout dans le monde slave traditionnel les
mêmes gestes et les mêmes coutumes, mais cet ensemble de pratiques ne se
distingue que peu de tout ce qui se faisait dans le reste de l’Europe3. Après
sa naissance l’enfant était confié pendant quelques années à sa mère, puis,
s’il s’agissait d’un garçon, son père prenait le relais lors d’une cérémonie
particulière : la tonsure (en vieux russe postrigy, polonais postrzyżyny),
c’est-à-dire la coupe, par le père, un parent ou un hôte de marque, de
quelques mèches sur la tête du garçon4. Cette coutume n’est attestée qu’à
partir du xe siècle, auprès de populations déjà chrétiennes, mais un texte
polonais au moins la présente comme un rite relevant du paganisme5. La
date de la cérémonie est très variable : chez les Polabes, la tonsure avait lieu
lors de la septième année, chez les Tchèques, plus tard, et chez les Russes,
lors de la troisième ou de la quatrième année.

Mariage

Le mariage n’est pas nécessairement une notion religieuse. Il semble


cependant que chez les Slaves païens, il ait été accompagné de rites dont la
nature même est religieuse. Le Récit des temps passés russe y fait allusion,
au sujet des différentes tribus des Slaves de l’Est :
« Toutes ces tribus avaient chacune leurs coutumes et les lois de leurs pères, leurs traditions et
leurs mœurs. Les Polianes ont les mœurs douces et calmes de leurs pères ; ils respectaient leurs
belles-filles, leurs sœurs, leurs mères et leurs parents ; pour leurs belles-mères et leurs beaux-
frères, ils avaient un grand respect. Voici leurs coutumes de mariage : le fiancé n’allait pas
chercher sa fiancée, mais on la lui amenait le soir, et le lendemain on lui apportait ce qu’on
devait lui donner. Les Drevlianes vivaient dans les bois, à la manière des bêtes sauvages : ils se
tuaient les uns les autres, ils mangeaient toutes sortes de choses impures ; ils ne connaissaient
pas le mariage, mais enlevaient les jeunes filles parties chercher de l’eau. Les Radimitchi, les
Vjatitchi et les Sévérianes avaient les mêmes coutumes : ils vivaient dans la forêt comme des
bêtes sauvages, mangeaient des choses impures et tenaient des propos obscènes devant leurs
pères et leurs belles-filles ; le mariage n’existait pas chez eux ; mais ils organisaient des jeux
entre les villages et ils participaient à ces jeux : on y dansait, on y jouait des jeux obscènes et là
chacun enlevait la femme avec laquelle il s’était entendu ; ils avaient deux et même trois
femmes6. »

La coutume indo-européenne du rapt nuptial, qui veut que le prétendant


enlève ‒ au moins symboliquement ‒ sa promise, est ici bien attestée. Son
aire de répartition ne se limite pas aux Slaves de l’Est. Une allusion à cette
coutume subsiste en Bohême dans l’homiliaire d’Opatovice (xiie siècle). De
nombreuses survivances sont aussi attestées dans l’ensemble du monde
slave.
L’achat d’une femme n’est attesté qu’en Russie : le Juif espagnol Ibrahim
ibn Ia’qub l’a cependant aussi vu faire en Pologne7.
La cérémonie elle-même a pu avoir une connotation pleinement
religieuse : en Russie, le Sermon d’un certain adorateur du Christ se plaint
de ces mariages accompagnés de chants et de divers rites, disant que c’est
un culte rendu aux idoles8. Il observe d’ailleurs qu’on se sert alors de
figures phalliques pour accomplir « diverses obscénités ».
Le mariage n’est pas uniquement monogame : la polygamie est attestée.
Au viie siècle, Samo, un Franc qui prit le pouvoir en Bohême et fut à la tête
du premier État slave attesté, avait douze épouses9. La Vie de saint Adalbert
et le Perse Ibn Rustah signalent cette pratique dans le courant du
xe siècle10 ; de fait, en Pologne, le duc Mieszko a sept femmes : cela est
considéré comme typique du paganisme11. À Kiev, le prince Vladimir
disposait d’un véritable harem12. La polygamie existe, de fait, dans
l’ensemble du monde slave païen13.
La polyandrie a dû exister. Le Règlement ecclésiastique de Jaroslav
interdit à deux frères de vivre avec une seule femme14. Il en subsistait
encore au xixe siècle des traces chez les Slaves du Sud. Mais ceux qui se
partageaient la même femme sont le plus souvent de la même famille,
parfois même ce sont le père et le fils, comme dans ce qu’en Russie on a
appelé le snoxačestvo ‒ quand l’époux est marié trop jeune, c’est le père de
celui-ci qui couche avec l’épouse et lui fait des enfants qui seront ensuite
reconnus par son fils. Cette pratique est attestée depuis le xie siècle15.

Décès

Concepts généraux

Selon le chroniqueur Thietmar de Mersebourg, pour les Slaves, « tout


s’achève avec la mort du corps16 ». Peut-être a-t-il voulu dire que les Slaves
ne croyaient pas en la réincarnation ‒ dogme autrement bien connu d’autres
Indo-Européens ‒ ni en la résurrection des corps telle que prêchée par le
christianisme. Les témoignages anciens sont plutôt contradictoires pour ce
qui concerne les idées anciennes des Slaves sur la mort. Le même Thietmar
rapporte ainsi des histoires de fantômes, preuve que l’âme pouvait survivre
à son corps en restant sur terre17.
Du point de vue linguistique, le mort, dans bien des langues slaves, est
« celui qui navigue » (cf. russe navšij)18. En Tchèque, le mot nav lui-même
a pris le sens d’« Autre-Monde », comme on le voit dans la Chronique de
Dalimil au tout début du xive siècle19. Cependant, le mot slave commun
pour « paradis » est raj. C’est un emprunt aux langues iraniennes20.

Des corps exposés ?

Dans certains secteurs du monde slave, aucun cimetière n’a été clairement
identifié alors même que l’habitat peut y être abondant. Cela pourrait
montrer que d’autres pratiques que la crémation ou l’inhumation ont été en
usage21, par exemple l’abandon des corps en plein air, comme le faisaient
les anciens Iraniens et de nos jours les Zoroastriens22, ou encore les
Gaulois23.

La crémation

Le Récit des temps passés donne pour l’ancienne Rus’ une description des
rituels en usage à l’époque du paganisme :
« Et quand l’un d’eux [les Radimiči, les Vjatiči et les Severjane] mourait, ils célébraient pour lui
une fête [tryzna] et ensuite ils faisaient un grand bûcher, déposaient le cadavre sur le bûcher et
l’allumaient ; après ils rassemblaient les ossements, les déposaient dans un petit vase qu’ils
plaçaient sur une colonne le long de la route. Telles étaient aussi les coutumes des Kriviči et des
autres païens qui ne connaissaient pas la loi de Dieu et faisaient leurs propres lois pour eux-
mêmes24. »

Les éléments ici donnés se retrouvent chez presque l’ensemble des Slaves.
La crémation est largement répandue dans les temps les plus anciens. On
note cependant des disparités territoriales : la crémation est très fréquente
en Bohême et en Moravie, dans les Basses Carpates occidentales, le sud de
la Pologne ; elle est plus rare en Grande Pologne, en Mazovie et en
Silésie25. Diverses offrandes sont offertes au mort à cette occasion26 : elles
peuvent être brûlées avec le corps, ou simplement déposées dans la fosse
avec l’urne. On trouve aussi régulièrement des œufs ou des coquilles, mais
aussi des chiens sacrifiés, qui sont enterrés cependant dans des fosses
séparées de celles des humains27. Dans une nécropole à inhumations
fouillée près de Uherské Hradiště (Moravie) et datée du ixe siècle, on a
découvert cinq tombes (sur 92) contenant les restes d’hommes
accompagnés de cornes d’animaux, ce qui a été interprété comme un
vestige de totémisme28. Cette coutume, rare chez les Slaves, a pu être
empruntée aux Avars, alors installés sur le territoire de l’actuelle Hongrie29.
On note aussi en Slovaquie la présence régulière, non justifiée par des
aspects pratiques, d’objets d’époque laténienne ou romaine dans les tombes,
sans doute à titre superstitieux30. La coutume largement attestée en domaine
germanique d’enterrer les morts avec un seau, est connue aussi chez les
Slaves31. On notera toutefois qu’en Pologne, les offrandes sont rares dans
les tombes les plus anciennes32.
Certaines sépultures peuvent être monumentales, prenant la forme de
vastes tumuli, comme celui de Krakus près de Cracovie, construit
vraisemblablement entre le viiie et le xe siècle33. Le mont de Przemysław,
près de Przemysł, attribué au fondateur mythique de la ville, fait
actuellement 10 m de haut, pour une base ovale de 100 × 60 m. Il y avait
tout autour d’autres tumuli plus petits34. Ces tumuli apparaissent en Bohême
au viiie siècle35. Ils ne dépassent généralement pas 2 m de haut pour 4 à
12 m de diamètre : ils sont régulièrement regroupés en nécropoles. Diverses
structures (pierres ou poteaux) peuvent être implantées au sommet36.
Curieusement, en Pologne, on note l’apparition des tumuli aux vie-
vii siècles, puis ils disparaissent temporairement avant de réapparaître au
e
xe siècle37.Selon le Perse Ibn Rustah, qui écrivait au début du xe siècle et a
laissé une description détaillée des coutumes funéraires des Slaves, l’urne
cinéraire n’était pas placée sous le tumulus, mais au sommet de celui-ci38.
Un an après la crémation, la famille revenait sur les lieux et offrait un
banquet39. À la fin du xe siècle, Mas’ūdī donne des renseignements très
proches : le mort est incinéré avec ses animaux, ses armes et ses bijoux. Sa
femme se suicide pour l’accompagner (mais la réciproque n’est pas
vraie)40.
L’idée d’un banquet funéraire est connue chez l’ensemble des Slaves
païens. Son nom était sans doute tryzna ou strava41. Il est attesté dès le
vi siècle : on sait que le roi slave Musokios fut pris par les Byzantins alors
e

que lui et ses troupes étaient totalement ivres après avoir donné un banquet
funéraire en l’honneur du frère du roi42. Ce festin était accompagné de
divers jeux43. En 1092, un prince tchèque publie un décret interdisant les
rituels funéraires organisés près des carrefours selon l’usage païen, durant
lesquels on dansait le visage couvert d’un masque44. En 1207, le pape
Innocent II se plaint auprès de l’archevêque de Gniezno (Pologne) de
l’existence de jeux impies en l’honneur des morts, avec masques et
danses45. Deux masques en bois, de forme triangulaire, datés de la seconde
moitié du xie siècle et de la fin du xiie, ont d’ailleurs été découverts à
Ostrówek (Opole)46.
Le voyageur arabe Ibn Fadlân a décrit en détail l’enterrement d’un chef
rus’, durant lequel on organise un banquet, tandis que les proches du chef
couchent avec une esclave qui est ensuite sacrifiée, placée près du mort
dans un bateau auquel on met ensuite le feu. Cette cérémonie a longtemps
été considérée comme typiquement scandinave47. Elle trouve en effet ses
principaux parallèles dans le monde scandinave, tant au niveau des
découvertes archéologiques, que dans la littérature, avec notamment le récit
de l’enterrement du dieu Baldr. Le corps du dieu est placé dans son bateau,
que l’on lance en mer afin d’y allumer un bûcher. C’est lorsque son corps
est porté à bord que sa femme, voyant cela, meurt de chagrin48. Nous
disposons d’un autre exemple, lui aussi littéraire, et lui aussi dû à la plume
de Snorri Sturlusson. On le trouve dans le chapitre xxvii de l’Ynglinga Saga
et il concerne le roi Hake de Suède, qui a dû vivre au moins cinq siècles
avant Snorri49. Il n’est cependant ici pas question d’une femme sacrifiée ou
morte avec lui, mais des guerriers du roi, morts au combat en même temps
que lui. Reste enfin une citation de Saxo Grammaticus, concernant le roi
Frodo, qui indique que « le corps d’un centurion ou d’un gouverneur se doit
d’être incinéré sur un bûcher construit avec son propre navire50 ». Nous
avons là trois exemples littéraires, largement confirmés par l’archéologie51.
Une large partie de ce qu est décrit par Ibn Fadlan peut bien être d’origine
scandinave.
Mais en Russie ancienne52 comme en Poméranie53, les enterrements les
plus prestigieux pouvaient aussi se faire dans un bateau. Il pourrait s’agir là
encore d’une influence scandinave. Cependant, dès 1924, un article
d’Albany Major aurait dû attirer l’attention des scandinavistes. Avant
d’étudier ce type de cérémonie chez les Scandinaves, étude durant laquelle
il fait bien entendu appel au témoignage d’Ibn Fadlân, il rappelle que la
coutume n’est toutefois pas spécifique au monde germanique ancien. Les
exemples qu’il donne sont particulièrement intéressants.
Dans l’est de la Finlande, on a pu fouiller des tombes dans lesquelles le
défunt était inhumé dans un tronc évidé ayant la même forme qu’une
barque à fond plat. Au xixe siècle, en Carélie, les cercueils étaient aussi
taillés dans un tronc appelé runki (« barque à fond plat, pirogue »).
Les Lapons (Sami) et les Tchérémisses (Mari) ont aussi connu cette
coutume, et largement plus à l’est, les Ostiaks (Khanty) plaçaient leurs
morts dans de petits bateaux54. Il note aussi qu’en Carélie russe, il était
d’usage de couvrir la tombe avec un vieux bateau retourné. Nous sommes
dans le monde finno-ougrien. Les Caréliens, les Lapons et les Finnois ont
pu subir anciennement l’influence scandinave, mais cela est plus douteux
pour les Tchérémisses et les Ostiaks. Enfin, Ibn Fadlân note que ça n’est pas
seulement les chefs que l’on inhume ainsi, mais même les hommes pauvres,
que l’on place dans une embarcation fabriquée pour l’occasion, puis que
l’on brûle, alors qu’en Scandinavie, la sépulture avec bateau reste semble-t-
il un privilège.
Par ailleurs, on sait grâce à une source du xive siècle que saint Gleb aurait
été enterré entre deux troncs évidés, « sous un nasad », c’est-à-dire une
embarcation monoxyle à bords surélevés55. Le Récit des temps passés, à
l’année 945, qui montre aussi comment la princesse Olga de Kiev venge
son mari Igor, en enterrant vivant des ambassadeurs du peuple slave des
Drevlianes dans des bateaux56. Mais le témoignage est délicat à interpréter :
Olga, qui est d’ascendance varègue, agit-elle selon un rituel scandinave, ou
slave, ou les deux ? L’archéologie, en revanche, ne livre pas d’attestation de
cette pratique pour cette époque. On note toutefois que durant le bas Moyen
Âge (xiie, principalement xive-xve siècle) dans la région de Novgorod, on a
découvert des sarcophages naviculaires monolithiques dont deux
renfermaient chacun un corps en position aberrante : sur le côté, les
membres repliés57. On a aussi découvert trois cercueils monoxyles
naviculaires datant du xvie siècle : leur forme s’inspire clairement de celle
d’une pirogue58. Eux non plus ne proviennent pas du cœur historique de la
Russie, mais de régions en contact prolongé avec des populations finno-
ougriennes. L’archéologue Tatiana Panova hésite quant à l’origine de ces
sarcophages et cercueils naviculaires, et pense que leur modèle est issu de
cercueils en bois plus anciens (et donc a priori non conservés). Leur
présence dans la région de Novgorod inciterait à penser à une importation
scandinave, mais le plus ancien n’étant que du xiie siècle, l’écart
chronologique avec les tombes en bateau ou en forme de bateau nordiques
est trop important et permet d’écarter tout lien avec le monde norois. L’idée
d’une importation finno-ougrienne (des Finnois ou des Estoniens ont bien
évidemment fréquenté Novgorod où ils ont même laissé des documents
dans leur langue, sur écorce de bouleau59) reste encore la meilleure
solution, même si d’autres origines, plus lointaines (européennes ou
byzantines), sont possibles.

L’épouse sacrifiée

Dans le récit d’Ibn Fadlân se trouve aussi une donnée qu’on peine donc à
retrouver dans le monde scandinave : une jeune esclave est sacrifiée après
que les principaux compagnons du chef ont couché avec elle. On la tue
après l’avoir allongée à côté de son maître, à coups de poignard et en
l’étranglant à l’aide d’une cordelette. Sa position, allongée à côté du maître,
et le fait que sa mort soit volontaire rend très claire sa fonction posthume :
elle fait office d’épouse au défunt. Certes, on a retrouvé à Birka, en Suède,
des tombes contenant des couples. Mais on a constaté bien souvent que les
corps n’avaient pas été enterrés en même temps, et quand bien même l’ont-
ils été, que le sacrifice de la femme n’a pas été mis en évidence. Cependant,
le sacrifice d’hommes a bien été remarqué dans certaines tombes du
Danemark60. Bien souvent, les sacrifiés sont décapités. Un cas, retrouvé sur
l’île de Man, pourrait se rapprocher de la description d’Ibn Fadlân : à
Ballateare, une jeune femme a été sacrifiée, sa tête a été quasiment détachée
du corps par un coup d’épée61. Cependant, tout comme dans les autres cas
de sacrifices humains à vocation funéraire découverts dans le monde
scandinave, le corps de la victime est placé en position secondaire, ici au
sommet du tumulus qui recouvrait la tombe62. Tandis que chez Ibn Fadlân,
la jeune femme est placée aux côtés de l’homme, comme son égale.
Là encore, on peut sans doute trouver des parallèles hors du monde
scandinave. Dans un article déjà ancien, N. B. Jopson fait le détail des
connaissances de l’époque (1927) sur les plus anciennes coutumes
funéraires des Slaves. Et quelques-uns de ses exemples sont éloquents. Ils
concernent le fait que le défunt ne parte pas seul dans l’autre monde.
Ainsi, saint Boniface, l’apôtre des Germains, dit des femmes des Wendes
(Slaves de l’Ouest) qu’
« elles refusent de continuer à vivre lorsque leur mari meurt. Et ces femmes sont par eux
considérées comme louables si elles se tuent de leur propre main, puis brûlées sur le bûcher de
leur mari63. »

Au vie siècle, l’empereur byzantin Maurice rapporte au sujet des femmes


des Slaves du sud que :
« beaucoup d’entre elles considèrent la mort de leur mari comme leur propre mort, et
s’étranglent volontiers elles-même, ne trouvant aucune joie dans le veuvage64. »

L’empereur Léon le Sage reprend cette idée dans son traité d’art
militaire65. Cette information se retrouve encore, concernant les Bulgares
du Danube, donc des Slaves, dans un récit arabe romanesque du xe siècle :
« Notre coutume, ô Grec, est que deux époux ne sont jamais séparés, même si la mort atteint
l’un des deux. Si le mari meurt avant la femme, nous la plaçons sur son lit, nous mettons son
mari à côté d’elle, et nous les descendons tous les deux ensemble dans un puits66. »

Chez Ibn Rustah, toujours au xe siècle, l’épouse favorite du défunt se


pend, puis elle est incinérée avec le défunt67. L’auteur perse anonyme du
traité Hudud al’Alam (xe siècle) indique aussi : « Lorsqu’un homme meurt,
sa femme, si elle l’aimait, se tue68. » Plus tard, le géographe arabe Mas’ūdī
rapportera la même chose des femmes de la Rus’, qui sont brûlées avec leur
mari lorsque celui-ci meurt.
La concordance de ces témoignages avec le récit d’Ibn Fadlân est forte :
chez le voyageur arabe, l’esclave est volontaire, elle meurt poignardée et
étranglée, et sert vraisemblablement d’épouse au maître. Chez Maurice, la
mort de l’épouse est volontaire, elle meurt étranglée. Cette description faite
par l’empereur se rapportant aux Slaves du Sud, on voit bien qu’il n’est
nullement nécessaire d’opérer un rapprochement, comme l’a fait Jens Peter
Schjødt, avec l’auto-sacrifice du scandinave Odin, lequel est d’ailleurs une
pendaison et non un simple étranglement69.
Cet autosacrifice de l’épouse, bien attesté par des textes chez les Slaves,
ne se retrouve pas en Scandinavie, en dehors du témoignage, tardif et
littéraire, de Snorri Sturluson (xiiie siècle) sur la mort du dieu Baldr, dont la
femme ne meurt d’ailleurs pas volontairement, mais de chagrin. À ma
connaissance, aucune des tombes scandinaves avec bateau, ou même des
tombes en forme de bateau, n’a livré de couple. On notera toutefois que
chez les Slaves, du moins sur le territoire polonais, les tombes doubles
restent cependant exceptionnelles70.

L’essor de l’inhumation

La crémation est progressivement remplacée par l’inhumation durant le


haut Moyen Âge, peut-être par influence du christianisme (mais pas
nécessairement par christianisation directe) ou de la culture carolingienne71,
cependant elle peut perdurer jusque très tard. Ainsi, à Plisnesk, dans l’ouest
de l’Ukraine, la crémation est encore en usage dans deux nécropoles ayant
fonctionné durant les ixe-xe siècles72. Selon Thietmar, en Pologne au
xi siècle, on incinérait encore les morts73. En Mecklembourg oriental et en
e

Poméranie, la crémation reste dominante jusqu’à la fin du xe siècle74. Ce


changement de mode funéraire a dû être vécu comme un bouleversement
théologique majeur.
La coutume de placer une monnaie avec le mort, quoique très répandue
dans le monde slave au Moyen Âge, apparaît tardivement75. Ce n’est donc
pas une pratique initialement connue des Slaves, mais elle traduit bien
l’idée d’un passage vers l’Autre Monde.
On note, chez les Slaves de l’Ouest, que lorsque l’inhumation est
pratiquée, il arrive encore qu’on installe un foyer sur la tombe. La
persistance de feux funéraires pourrait être liée à des rites de protection
contre les mauvais morts76. Enfin il existe un usage répandu dans tout
le monde slave : celui de pleureuses professionnelles qui officiaient durant
les funérailles77.
Rites domestiques

Si les rites funéraires sont particulièrement bien documentés, les rites liés
à la maison ou au foyer le sont bien moins. Les habitats des premiers Slaves
sont d’ailleurs très simples : tout comme leurs voisins germaniques, ils
vivent dans de petites maisons en bois semi-enterrées, dont un angle est
occupé par un foyer ou un four. L’accomplissement de rites dans des
structures d’habitat aussi simples est particulièrement difficile à révéler du
point de vue archéologique.
Sur la partie du territoire ukrainien correspondant aux anciens Severianes,
on a pu mettre en évidence la coutume, entre les viie et ixe siècle, de placer
près ou dans le four de la maison, un vase miniature, sans doute pour se
rendre propice un esprit domestique78. On note aussi l’existence, sur des
sites slaves en République tchèque et en Moldavie, de figurines miniatures
en terre cuite représentant des animaux ou des ustensiles liés à ces animaux,
comme des selles79. En Ukraine, encore, la fouille d’une maison incendiée
datant du xiie ou du début du xiiie siècle, à Sofijvs’ka Borščagivka (région de
Kiev) a montré qu’on a placé dans un coin une offrande de céréales, comme
cela se pratique encore régulièrement dans les campagnes après la
moisson80.
Il s’agissait sans doute, dans tous les cas, de se rendre propices des dieux
domestiques, qui ont pu être représentés par des idoles miniatures telles
qu’on en a trouvé à Novgorod ou à Wolin81. Ces dieux domestiques sont
vraisemblablement les ancêtres directs du « génie de la maison » bien
connu du folklore slave moderne82.

RITES PUBLICS

L’existence de rites publics et collectifs est majoritairement attestée par le


biais de témoignages chrétiens des xie-xiie siècles, voire plus tardifs, et de
découvertes archéologiques. De ce fait, si nous disposons de quelques
descriptions de rites, ou de leurs vestiges matériels, nous ignorons bien
souvent dans quel contexte ils prenaient place, quel était leur but et quelle
était la théologie qui les sous-tendait.

Rites calendaires

Le calendrier festif des Slaves a longtemps retenu l’attention des


folkloristes, notamment pour ce qui concerne les nombreuses fêtes agraires
printanières, visant à assurer la fertilité des champs, du bétail, mais aussi
des gens eux-mêmes83. Dès le Moyen Âge, certaines de ces fêtes sont
attestées sous le nom qu’elles portent encore. Ainsi en est-il des Rusalia,
mentionnées par le Récit des temps passés russe et diverses sources
médiévales84. Le nom de cette fête vient cependant du latin rosalia/rusalia,
et elle est liée à la fête chrétienne de la Pentecôte85. En Bohême au
xii siècle, les paysans offraient encore des sacrifices aux sources le mardi
e

ou le vendredi précédent la Pentecôte86. La même date revient pour la


condamnation de rites païens dans des statuts synodaux de Cravocie datés
du xive ou du xve siècle87.
Koleda est le nom d’une fête hivernale (qui se tenait dans le temps de
Noël) encore largement attestée dans le folklore des Slaves de l’Est. De
nombreux chants traditionnels liés à cette fête ont été collectés. Elle est
cependant attestée dès les temps du paganisme et condamnée dans des
sources russes du xie siècle. Son nom n’est pas slave : il dérive des calendae
(calendes) latines88.
Ces deux exemples corroborent ce que pensait le Polonais Aleksander
Gieysztor, pour qui « les démarches magiques n’ont pas été qu’un héritage
de l’Antiquité païenne slave. Il y en avait d’emportées, toutes neuves, par le
premier clergé missionnaire89 ».
La difficulté est donc de savoir si les fêtes qui nous sont connues
remontent bien au paganisme slave, ou bien si elles ont été importées par
les premiers chrétiens. Il existe un peu partout dans les Balkans et en
Europe centrale et orientale des rituels printaniers (mais qui peuvent
prendre place jusqu’à la Saint-Jean, comme la kupalo russe) visant à tuer
symboliquement la mort, notamment en fabriquant une figurine
anthropomorphe (dont le nom peut être très variable selon l’endroit : l’un
des plus connus étant German), et en la laissant ensuite dériver librement
sur une rivière ou couler dans un plan d’eau90. Il n’existe pas de preuve de
l’ancienneté de ces rituels91 mais ils ont été rapprochés par Alexander
Haggerty Krappe de la façon dont, dans les chroniques russes, ont été
détruites les idoles de Perun à Kiev et à Novgorod : ces idoles ont toutes les
deux été abandonnées aux eaux d’un fleuve, où on les a laissé flotter
jusqu’à ce qu’elles s’échouent sur la berge92.
Au Moyen Âge, divers rituels collectifs ont aussi été notés chez les Slaves
de la Baltique. Herbert de Clairvaux, au milieu du xiie siècle, indique qu’ils
ont lieu chaque année, à date fixe93. De même, chez les Rani de l’île de
Rügen, chaque année à la même date, après la moisson selon Saxo
Grammaticus, un chrétien tiré au sort était sacrifié à Svantovit94. Le même
auteur précise que le rituel commençait par un nettoyage méticuleux du
sanctuaire par le prêtre, qui se retenait alors de respirer à l’intérieur.
S’ensuivait une séance de divination à l’aide de la corne à boire du dieu,
visant à déterminer si l’année à venir connaîtrait l’abondance ou non.
La date de cette célébration, après la moisson, permet un rapprochement
avec des détails donnés par le Perse Ibn Rustah :
« Ils [les Slaves] sèment généralement du millet. Quand les jours de la moisson sont arrivés, ils
placent quelques grains de millet sur une pelle, les élèvent au ciel et disent : ‘Ô Seigneur, tu es
celui qui nous nourrit, complète ainsi ta bonté envers nous95 ! »

Banquet

Chez les Slaves de l’Ouest, nombre des rites décrits ci-dessus se terminent
par un banquet : nous en verrons quelques exemples ci-dessous. Les sources
des Slaves de l’Est sont moins nombreuses à ce sujet, mais les banquets
sacrés y sont bien attestés. Un confesseur russe du Moyen Âge pouvait
demander : « N’as-tu pas vénéré les Vily, ou Rod et les Rožanicy, et Perun
et Xors et Mokoš, et n’as-tu pas bu et mangé en leur honneur96 ? »

Sacrifices (humains et animaux)

Un nom slave du sacrifice est trěba97. Il apparaît vers 918 dans un texte
carolingien sous la forme trebo98. Ce sacrifice pouvait prendre la forme
d’une offrande, notamment alimentaire, mais il arrivait aussi qu’on tue des
victimes, animales ou humaines.
Les attestations textuelles de sacrifices humains sont nombreuses. Selon
Adam de Brême, l’évêque Jean de Mecklembourg a été sacrifié au dieu
Redigost à Rethra99. Le Récit des temps passés mentionne des sacrifices
humains accordés au sanctuaire récemment créé par Vladimir à Kiev100.
Selon un chroniqueur du Moyen Âge tardif, Jan Dąbrówka, Wanda, après la
mort de Krakus, son père, s’est volontairement sacrifiée aux dieux en se
jetant dans la Vistule. Un autre chroniqueur, du xvie siècle, la montre faire
cela en se jetant à cheval d’un pont101.
Selon le chroniqueur Helmold de Bosau, les Rani, sur l’île de Rügen,
sacrifiaient à Svantovit, une fois par an, un chrétien tiré au sort102. Le même
Helmold mentionne aussi des sacrifices de bétail et des sacrifices humains
chez les Obodrites :
« À savoir, d’après le sort, un prêtre annonce une célébration pour honorer les divinités, puis
hommes, femmes et enfants se rassemblent. Ils tuent des bœufs et des moutons en offrande à
leurs dieux, certains tuent même des chrétiens, prétendant que les dieux savourent le sang
chrétien. Après avoir tué l’animal sacrifié, le prêtre goûte son sang afin de devenir plus sensible
à l’inspiration oraculaire. Quand le sacrifice est accompli de la manière habituelle, les gens
commencent à manger et à danser103. »

Un passage de l’historien byzantin Procope de Césarée montre comment


les prisonniers de guerre peuvent être exécutés :
« Ils tuèrent les gens qu’ils avaient affrontés ni avec l’épée, ni avec la lance, ni d’aucune autre
manière habituelle, mais ils plantèrent fermement en terre des pieux qu’ils avaient rendus
extrêmement acérés, ils y assirent violemment ces pauvres gens, et, introduisant la pointe de ces
pieux entre leurs fesses, ils appuyèrent jusqu’à ce qu’elle atteigne leurs entrailles. Ils avaient
jugé appropriée cette façon de les tuer. Ces barbares avaient aussi l’habitude de planter quatre
gros morceaux de bois et d’y attacher les mains et les pieds de leurs prisonniers ; ensuite ils ne
cessaient de les frapper à la tête jusqu’à les tuer comme des chiens, des serpents ou toute autre
bête. Ils en enfermèrent d’autres dans leurs cabanes avec les bœufs et les moutons qu’ils ne
pouvaient transporter avec eux dans leur patrie et ils y mirent sans pitié le feu. Ainsi les
Sclavènes mirent à mort ceux qu’ils avaient affrontés104. »

Ces façons de faire ont été assimilées à de véritables sacrifices


humains105. Le fait de brûler quelqu’un dans sa demeure est un mode de
sacrifice royal attesté en Irlande et en Inde. Plusieurs rois irlandais ont subi
ce supplice, en premier lieu Muirchertach mac Erca, tué dans son palais
incendié106, tandis qu’en Inde, les Pandava, héros de l’antique épopée du
Mahābhārata y échappent de justesse.
On a pu comparer ce passage de Procope avec un témoignage de Léon le
Diacre datant du xe siècle :
« [Après une bataille] la nuit vint, avec la pleine lune : ainsi ils [les Slaves] se rendirent sur la
plaine et examinèrent leurs propres morts. Ils les rassemblèrent au-devant des fortifications et,
après avoir mis le feu aux bûchers, ils les brûlèrent, et par-dessus ils massacrèrent des hommes
et des femmes, suivant leur loi107. »

Dans l’est de la Pologne, les plus anciens habitats fortifiés montrent que
l’occupation n’y était pas permanente : ces lieux apparaissent souvent vides
de mobilier usuel. En revanche on y a régulièrement découvert des
ossements humains épars. L’un de ces sites, Kowalowa Góra, possédait un
système de défense particulièrement faible, n’encadrant aucun habitat
réellement défini. En revanche, on y a découvert une série de fosses
contenant des ossements partiellement brûlés, des squelettes incomplets
voire partiellement détruits volontairement. Ces sites ont pu être à la fois
des centres de pouvoir et des sanctuaires dans lesquels on a pratiqué des
sacrifices humains108. Chez les Slaves de la Baltique, des animaux et
parfois des êtres humains ont été sacrifiés puis enterrés à l’emplacement de
la construction d’un nouveau bâtiment109. À Mikulčice, importante
agglomération médiévale de Moravie, une structure rectangulaire, formée
d’une palissade enfermant un espace divisé en trois bandes, a été fouillée :
la bande centrale était occupée par deux foyers, tandis que les deux bandes
encadrantes ont été des espaces d’inhumations. L’une de ces bandes
s’achevait par la tombe de trois chevaux, et un peu partout autour des
tombes ordinaires étaient enterrés des individus porteurs d’anomalies
physiques, telles des amputations110. Cet assemblage de sépultures
ordinaires et d’individus possiblement sacrifiés rappelle les sacrifices
funéraires montrés par Léon le Diacre.
Plusieurs sources médiévales indiquent que la décapitation a pu être un
mode de sacrifice ordinaire chez les Slaves de l’Ouest111. Une lettre de
Bruno de Querfurt adressée à l’empereur Henri II lui reproche d’avoir fait
alliance avec des païens pratiquant le sacrifice humain, et notamment
l’offrande de têtes de chrétiens à l’étendard de leur dieu112. De fait, Jean de
Mecklembourg a été décapité, et sa tête enfilée sur un fer de lance et offerte
à Radigost. Une lettre d’Adelgott de Magdebourg contre les Slaves païens
dit qu’« ils coupent la tête des chrétiens et les offrent en sacrifice113 ». De
même, on trouve régulièrement sur divers sites la tête d’animaux sacrifiés,
et notamment de chevaux114. Selon Helmold, les chrétiens sacrifiés étaient
tirés au sort : on retrouve l’idée de tirage au sort de chrétiens à sacrifier
dans l’ancienne Rus’115.

Offrandes aux lacs et aux sources

Thietmar de Mersebourg rapporte un curieux rituel de divination lié à un


lac chez les Slaves de l’Ouest :
« Glomuzi [Lommatzch, Saxe] est une source localisée à pas plus loin de deux miles de l’Elbe et
qui est à l’origine d’un lac où prennent place des miracles, que les habitants de la région tiennent
pour véritables et qui ont été vérifiés par beaucoup. Quand une paix, bonne pour les natifs du
lieu, approche, et que la terre n’est pas avare de ses fruits, le lac se remplit de blé, d’avoine et de
glands, et élève les esprits des riverains qui y viennent souvent. Mais quand les temps difficiles
de la guerre arrivent, il montre le vrai signe du futur à venir avec du sang et des cendres. Tous
les habitants du lieu le vénèrent et le craignent plus que toute église, même si l’espoir est
incertain116. »
On trouve peut-être un souvenir d’un fait similaire, là encore chez
Thietmar, concernant les Slaves de Poméranie : celui-ci indique que
Reinbern, évêque de Kolberg, « détruisit et brûla des temples avec des
idoles, et purifia la mer, habitée de mauvais esprits, en y jetant quatre
pierres ointes d’huile sainte et aspergées d’eau bénite117 ». Saxo
Grammaticus signale un rite de type ordalique concernant la sincérité de
ceux qui signent un traité : l’interprétation des vagues suscitées par le jet
d’une pierre dans l’eau permettait de savoir si l’un des signataires était en
passe de trahir le traité118.
Juan Antonio Álvarez-Pedrosa a comparé le lac de Glomuzi avec le lac
Hāmūn vénéré par les Zoroastriens en Iran, et supposé contenir la semence
de Zoroastre119. Il le compare aussi avec les sacrifices de nourriture fait
dans un lac chez les Gabales, un peuple du centre de la Gaule, sacrifices
mentionnés par Grégoire de Tours :
« Il y avait dans le pays de Gévaudan, sur une montagne nommée Helanus, un grand lac. Là, à
une certaine époque, une multitude de gens de la campagne faisait comme des libations à ce
lieu ; elle y jetait des linges ou des pièces d’étoffe servant aux vêtements des hommes ;
quelques-uns des toisons de laine ; le plus grand nombre y jetaient des fromages, des gâteaux de
cire et chacun, suivant sa richesse, divers objets qu’il serait trop long d’énumérer. Ils venaient
avec des chariots, apportant de quoi boire, et manger, abattaient des animaux, et pendant trois
jours se limaient à la bonne chère. Le quatrième jour, au moment de partir, ils étaient assaillis
par une tempête accompagnée de tonnerre et d’éclairs immenses, et il descendait du ciel une
pluie si forte et une grêle si violente qu’à peine chacun des assistants croyait-il pouvoir
échapper120. »

Les traductions françaises mentionnent ordinairement de la grêle, quand le


texte latin parle d’une pluie de pierres (« cum lapidum »). On retrouve ici
liées l’idée d’offrandes alimentaires et de jets de pierres dans l’eau.
Toujours en Gaule, ce type de sacrifice à un plan d’eau a par ailleurs été
attesté archéologiquement au Mans durant l’Antiquité121.
Plus tard, Cosmas de Prague parle encore, concernant la Bohême, de
sacrifices offerts aux sources le mardi ou le vendredi avant la Pentecôte122.

Divination sacrée
Le chroniqueur anglo-normand Guillaume de Malmesbury nous informe,
d’après une source allemande perdue123, que :
« les Vindelici vénèrent Fortuna, et plaçant son idole sur le lieu le plus élevé, ils mettent une
corne dans sa main droite, remplie d’un breuvage fait de miel et d’eau que les Grecs appellent
« hydromel ». […] Ensuite, le dernier jour de novembre, assis en cercle, ils y goûtent tous. Et
s’ils trouvent la corne pleine, ils applaudissent avec force clameurs, car dans l’année qui
s’ensuivra, beaucoup, avec sa corne débordante, verront leurs souhaits s’accomplir. Mais s’il en
est autrement, ils se lamentent124. »

Ce passage, découvert récemment, a posé le problème de l’identification


des Vindelici : de quel peuple slave s’agit-il exactement125 ? Pour Roman
Zaroff, ce sont les Rani de l’île de Rügen, autrement dit, le même peuple
que celui dont parle Saxo. Pour Leszek Słupecki, ce sont les Liutici, une
confédération de Slaves de l’Ouest, et donc la description de Guillaume
peut concerner la ville de Rethra126.
De fait, Saxo Grammaticus donne une description très détaillée d’un rituel
de ce type à Arkona, sur l’île de Rügen :
« Dans sa [l’idole à quatre faces] main droite, elle tient une corne décorée à l’aide de métaux
variés, que le prêtre habilité au culte remplissait chaque année d’une boisson, afin de prévoir les
récoltes de l’année suivante à partir de l’état de la liqueur. […] Le jour suivant, le peuple restait
à regarder dehors, et il prit la coupe de l’image, et l’inspecta attentivement. Si la quantité de
liqueur qu’il y avait mise avait disparu, il pensait que cela signifiait la venue d’une disette dans
les années à venir. […]127. »

Sur cette base, le prêtre indique aux gens s’ils peuvent consommer la
récolte à venir à volonté ou non. Ensuite le prêtre verse le reste de la coupe
au pied de la statue, et chante une incantation afin d’assurer la santé et la
victoire, à lui, à son pays et à son peuple. Puis il vide définitivement la
coupe et la remet dans la main de la statue après l’avoir remplie. Un énorme
gâteau au miel est ensuite préparé. Enfin le peuple célèbre une grande fête,
en mangeant la viande des animaux sacrifiés et considérant que l’ivresse est
un acte pieux128. Des rituels similaires prenaient place à Rethra (Riedigast).
On notera l’importance de la corne à boire ou de la coupe, et de l’action de
boire, dans ces rituels. Il subsiste un vestige de cette action dans un texte
tchèque du xe siècle montrant saint Venceslas porter un toast à saint
Michel129.
D’autres rituels de divination devaient exister. Un traité bulgare du
x siècle, indique : « Auparavant, les Slaves n’avaient pas d’écriture, mais
e

c’est avec des traits et des entailles qu’ils comptaient et faisaient des
sortilèges, étant païens130. » Ces entailles, sans doute réalisées sur des
baguettes, ressemblent fort aux oghams d’Irlande, dont l’utilité première
était la magie.

Hippomancie

À Arkona, à Stettin et à Rethra, le sanctuaire du dieu principal (Svantovit


pour le premier, Triglav pour le second, Radigost/Svarožič pour le
troisième) possède un cheval qui sert à l’hippomancie, une forme de
divination basée sur l’interprétation des déplacements de l’animal131. Le
cheval blanc de Svantovit était gardé dans une écurie spéciale132. On
conserve d’ailleurs dans le sanctuaire une selle ‒ à Stettin, elle est ornée
d’or et d’argent ‒ à proximité de l’idole. À Arkona, ce mode de divination
était employé avant de partir en guerre.
Pour cela on disposait sur le sol un certain nombre de lances (ou plutôt
des fers de lance à Rethra133), et le cheval devait les enjamber. Si, à Stettin,
il touchait les lances, ou si, à Arkona, il y allait d’abord du pied gauche,
cela était considéré comme un mauvais présage134. À Rethra, le cheval finit
volé par Burchard d’Halbertstat en 1068135.
Il subsiste peut-être une allusion à cette pratique dans un passage de
Liutprand de Crémone (fin du xe siècle), qui parle de « poupées que les
Slaves posent sur le dos d’un poulain, avant de le laisser sans rênes suivre
sa mère136 ». Une autre allusion se trouve sans doute dans le Récit des
temps passés : le prince Oleg possédait un cheval qu’il entretenait, mais ne
montait jamais. Il avait en effet consulté des sorciers et des magiciens
(volxvy et kudesniki), qui lui avaient prédit que ce cheval causerait sa mort.
Bien des années après, le cheval vint à mourir. Oleg se moqua alors des
magiciens. Mais tandis qu’il marchait près du crâne du cheval, un serpent
en sortit et le mordit, ce qui entraîna sa mort. Il s’agit là d’une légende qui
est largement répandue par ailleurs, mais la version de Kiev contient un
élément inédit : partout ailleurs le cheval est tué aussitôt après la prophétie,
tandis qu’à Kiev, Oleg demande qu’il soit gardé en vie et bien traité. Il peut
s’agir ici d’un souvenir du cheval sacré tel qu’attesté chez les Slaves de
l’Ouest137.
L’hippomancie est une pratique connue chez l’ensemble des Indo-
Européens. C’est cependant chez les Germains que l’on trouve les rites les
plus proches de ceux observés chez les Slaves de l’Ouest. Tacite indique
ainsi :
« Un usage qui leur est particulier, c’est de demander même aux chevaux des présages et des
révélations. L’État nourrit, dans les bocages et les forêts dont j’ai parlé, des chevaux blancs que
n’avilit jamais aucun travail profane. On les attelle au char sacré, et le prêtre, avec le roi ou le
chef de la cité, les accompagne en observant leurs hennissements et le bruit de leurs naseaux. Il
n’est pas d’augure plus décisif, non seulement pour le peuple, mais pour les grands, mais pour
les prêtres, qui croient que ces animaux sont les confidents des dieux, dont eux ne sont que les
ministres138. »

On retrouve l’idée de chevaux qui n’ont pas d’autre usage que le culte
religieux, et dont les mouvements sont interprétés pour prévoir l’avenir.

Ordalie

On a vu plus haut le rite ordalique est mentionné par Saxo Grammaticus


concernant la sincérité des signataires d’un traité par l’interprétation des
vagues suscitées à l’aide d’un jet de pierre dans l’eau139. Cosmas de Prague
indique qu’en 1039 le duc Břetislav, à Gniezno, ordonna qu’on soumette les
meurtriers à l’ordalie du fer chaud et de l’eau140. L’ordalie par l’eau est
encore mentionnée par le code de loi tchèque du xive siècle et à la même
date par les lois de Stefan Dušan en Serbie141. Chez les Slaves de l’Est, les
versions tardives de la Pravda Rous’skaja mentionnent aussi les ordalies par
le fer et l’eau142. Ce ne sont pas cependant pas des pratiques spécifiquement
slaves.

Rites guerriers

Les armées des Liutici vont au combat précédées d’étendards (en slave
commun stanica) ornés d’une déesse143. Au xie siècle, ces étendards sont
déposés dans le temple de Radigost144. Un étendard similaire, honoré
comme une idole, fut placé par les Rani à la porte d’Arkona lorsque les
Danois vinrent assiéger le sanctuaire145. Selon une chronique polonaise du
xiiie siècle, à l’année 1209, une armée part au combat précédée d’une

sorcière (phitonissa), portant de l’eau dans un crible146.


Les Rani reversent une partie de leurs prises de guerre au temple
d’Arkona147. Les Liutici font de même avec Radigost : « Quand ils partent
à la guerre, ils le saluent toujours ; quand ils reviennent après une victoire,
ils l’honorent avec les dons dus148. » Il ne s’agit pas nécessairement d’un
impôt religieux, mais cela pourrait confirmer le témoignage plus ancien de
Procope de Césarée, qui dit des Sclavènes et des Antes :
« Ils n’admettent en aucune façon qu’il [le dieu suprême] ait un pouvoir quelconque sur les
hommes, mais chaque fois que la mort se tient près d’eux, s’ils sont frappés d’une maladie ou,
s’ils se lancent dans une guerre, ils font la promesse que, s’ils s’en sortent, ils offriront aussitôt
un sacrifice au dieu en échange de leur vie ; et s’ils s’en sortent, ils sacrifient juste ce qu’ils ont
promis, et considèrent que leur sécurité a été achetée avec ce même sacrifice. »

Lors du conflit lui-même, les Slaves connaissent la coutume du combat


singulier, bien attestée dans l’ensemble du monde indo-européen. Il s’agit
d’une forme d’ordalie visant à opposer deux champions plutôt que deux
armées. Un texte islandais, la Bjarnar Saga Hitdoelakappa, composée à la
fin du xiie siècle, en parle. La saga montre Vladimir de Kiev se choisir un
champion islandais, qu’il oppose à celui d’un usurpateur nommé Kaldimarr.
Cet épisode semble cependant relever de la fiction149. Le Récit des temps
passés mentionne bien, cependant, à l’année 992, un combat entre un
champion de Vladimir et un champion des Petchénègues. Alexander
Haggerty Krappe n’y a toutefois vu qu’un décalque du combat biblique de
David contre Goliath150. Mais un autre cas est mentionné à l’année 1022,
lorsque le prince Mtislav engage une campagne contre les Kasoges au nord
du Caucase : une bataille est évitée grâce au combat singulier des deux
princes151.

1. Aussi connu sous le titre de Chronique de Nestor.


2. Trad. Arrignon, 2008, p. 190.
3. Niederle, 1926, p. 8-9.
4. Niederle, 1926, p. 11-12.
5. Gallus Anonymus, Cronicae et gesta ducum sive principum Polonorum, I, 1 : « Et comme on
devait leur couper les cheveux à la manière des païens […]. »
6. Trad. Arrignon, 2008, p. 44-45.
7. Niederle, 1926, p. 14.
8. Mansikka, 1922, p. 149-150. Trad. anglaise partielle dans Cross, 1946, p. 77. Trad. italienne
dans Simi, 2003, p. 67-69. Texte antérieur au xive siècle.
9. Frédégaire, IV, 48.
10. Passio sancti Adalberti martiris Christi, 12 ; Meyer, 1931, p. 93.
11. Gallus Anonymus, Gesta principum polonorum, I, 5.
12. Tokareva, 2016.
13. Niederle, 1926, p. 18-19.
14. Niederle, 1926, p. 19.
15. Dordević, 1924.
16. Thietmar, Chronicon, I, 14 = Meyer, 1931, p. 9.
17. Leger, 1901, p. 200-201.
18. Niederle, 1926, p. 49-50 ; Ivanenko, 2012 ; Razauskas, 2011.
19. Leger, 1901, p. 8.
20. Lebedynsky, 2009, p. 121.
21. Barford, 2001, p. 113 et 201.
22. Boyce, 1979, p. 156-162.
23. Brunaux, 2000, p. 218-220.
24. Trad. Arrignon, 2008, p. 45.
25. Kostrzewski, 1949, p. 404.
26. Kajkowski, 2015, p. 18 et suiv.
27. Kajkowski, 2015, p. 26 ; Kajkowski, 2015b, p. 204.
28. On verra cependant qu’un idole cornue a été découverte près de Pskov : cf. infra.
29. Marešová, 1970.
30. Kraskovská, 1971.
31. Niederle, 1926, p. 230.
32. Kurasiński, 2015, p. 138.
33. Słupecki, 1994 ; Buko, 2008, p. 150-154.
34. Buko, 2008, p. 144-147.
35. Sommer, Třeštík et Žemlička, 2007, p. 217.
36. Niederle, 1926, p. 59.
37. Buko, 2008, p. 99.
38. Ce fait est archéologiquement attesté en Pologne : Buko, 2008, p. 100.
39. Meyer, 1931, p. 92-93.
40. Meyer, 1931, p. 95.
41. Ce dernier terme est connu dès 453 : c’est avec lui que Jordanès désigne le banquet funéraire
qui fut donné en l’honneur d’Attila, ce qui montre qu’une bonne part de ses troupes devait être slave :
Leger, 1901, p. 42 et 206 ; Niederle, 1926, p. 53.
42. Théophylacte Simocatta, Histoire, VI, 9.12.
43. Niederle, 1926, p. 51-53.
44. Cosmas de Prague, Chronica Boemorum, III, 1.
45. Meyer, 1931, p. 58 = Dynda, 2017, F1. Ces jeux sont encore dénoncés dans un statut synodal
de Uniejów en 1326 : Meyer, 1931, p. 62 = Dynda, 2017, F3. Sur l’usage des masques rituels chez les
Slaves de l’Ouest : Szczepanik, 2013.
46. Cehak-Hołubowiczowa, 1965.
47. Lajoye, 2014.
48. Snorri Sturluson, Gylfaginning, 49 ; Dillmann, 1991, p. 89-93.
49. Snorri Sturluson, Ynglinga saga, XXVII ; Laing et Foote, 1961, p. 24.
50. Saxo Grammaticus, Gesta Danorum, V ; Troadec et Dillmann, 1995, p. 212.
51. Andrén, 1993, p. 43. Pour une distribution de ce type de sépulture de part et d’autre de la
Baltique : Gerds, 2006, p. 153-158.
52. Koptev, 2010.
53. Kajkowski, 2015, p. 22.
54. Major, 1924, p. 113-150, p. 116. L’usage est aussi connu du peuple apparenté des Mansi :
Barkalaja, 2002, p. 78.
55. Kolchin, 1989, p. 105 ; Panova, 2009, p. 40 ; d’après la copie par Sylvestre du Récit sur Boris
et Gleb, Rossijckij gosudarstvennyj arxiv drevnix aktov, F. 381, no 53.
56. Récit des temps passés, trad. Arrignon, 2008, p. 82-83. Koptev, 2010a et b.
57. Panova, 2009, p. 63 et 92-93.
58. Panova, 2009, p. 73-75.
59. Arcixovskij et Borkovskij, 1963 ; Haavio, 1964 ; Vermeer, 1991 (avec bibliographie
antérieure). Leurs remarques portent sur Novgorod 292, 56 et 403. Trois documents seulement, mais
l’un d’eux, le n° 292, datant du xiiie siècle, est particulièrement remarquable en ce sens qu’il s’agit
d’un document païen, charme ou fragment d’épopée mentionnant le dieu tonnant du ciel Jumala et sa
flèche (la foudre).
60. Jesch, 1991, p. 24-26.
61. Bersu et Wilson, 1966 ; Price, 2008, p. 266.
62. Price, 2008, p. 266-267.
63. Boniface de Mayence, Lettres, XXXII, 124, d’après Talbot, 1954, p. 120-126 ; Donnert, 1980-
1981, p. 37-38.
64. Maurice, Strategikon, XI, 4, 18-22 ; Gamillscheg, 1984, p. 120.
65. Léon VI le Sage, Constitutiones tacticæ, XVIII, 102-105.
66. Tânûkhi, in Marius Canard, « Les aventures d’un prisonnier arabe et d’un prince byzantin à
l’époque des guerres bulgaro-byzantines », Dumbarton Oaks Papers, vol. 9, 1956, p. 49-72, p. 59
67. Meyer, 1931, p. 93.
68. Meyer, 1931, p. 94-95.
69. Schjødt, 2007, p. 141.
70. Kostrzewski, 1949, p. 409-410.
71. Kostrzewski, 1949, p. 407 ; Urbańczyk et Rosik, 2007, p. 273-274 ; Biermann, 2009, p. 332-
333. En Moravie, les premières inhumations apparaissent au viiie siècle : Sommer, Třeštík et
Žemlička, 2007, p. 217. Elles montrent, comme en Carinthie, l’importante influence culturelle des
royaumes francs, tant sur le plan spirituel que sur le plan matériel : Macháček, 2017. En
Mecklenburg et en Poméranie, les inhumations apparaissent à partir du xie siècle. On compte parmi
elles des inhumations de personnages de très haut rang : Biermann, 2008.
72. Filipčuk et Solovij, 2014.
73. Thietmar, Cronicon, IX, 2.
74. Biermann, 2008.
75. Niederle, 1926, p. 49 ; Kajkowski, 2015, p. 20-21.
76. Biermann et Jungklaus, 2013.
77. Niederle, 1926, p. 46-47.
78. Gorbanenko et Puholobok, 2016.
79. Novotný, 1970.
80. Gotun, Gorbanenko et Sergeeva, 2016.
81. Váňa, 1988 ; Kajkowski et Szczepanik, 2013, p. 56.
82. Russe domovoj, biélorusse damavik, ukrainien domovik, polonais domowik ou domowoj,
slovaque domovik, bulgare domovik, serbo-croate et bosniaque domaći, slovène domovoj.
83. Voir par exemple Propp, 1995.
84. Théodore Balsamon, patriarche d’Antioche, Commentari = Meyer, 1931, p. 82 (mais cet auteur
semble plus parler d’une fête romaine que slave) ; Demetrios Chomatianos, métropolite d’Ochrid
(Bulgarie), Ponemata diaphora, 120.
85. Niederle, 1926, p. 132-133 et p. 167 ; Dynda, 2017, p. 96.
86. Cosmas, Chronica Boemorum, III, 1 = Meyer, 1931, p. 20.
87. Meyer, 1931, p. 65-66 = Dynda, 2017, F5. En Pologne au début du xve siècle, cette
condamnation des rituels de Pentecôte se retrouve aussi dans les sermons de Stanisław de
Skarbimierz : Dynda, 2017, F4.
88. Niederle, 1926, p. 164.
89. Gieysztor, 1979, p. 320.
90. Niederle, 1926, p. 165-166 ; Mikov, 1991.
91. Une description en est toutefois donnée à Prague en 1384 : Dynda, 2017, E3, p. 265
92. Krappe, 1937, p. 212-218.
93. Herbert de Clairvaux, De miraculis libri, cité par Łuczynski, 2013.
94. Helmold, Chronica Slavorum, I, 52.
95. Meyer, 1931, p. 93.
96. Vyncke, 1970, p. 706.
97. Leger, 1901, p. 39 ; Kahl, 2004.
98. Kahl, 2008.
99. Adam de Brême, Gesta Hammaburgensis ecclesiae pontificum, III, 51 = Meyer, 1931, p. 14
100. Récit des temps passés, sub anno 980.
101. Słupecki, 1999, p. 84. Sur les rapports entre la légende de Wanda et les récits de type
mélusinien : Karlowicz, 1876.
102. Helmold, Chronica Slavorum, I, 52.
103. Helmold, Chronica slavorum, I, 52.
104. Procope, De bello Gothico, III 38.17-23.
105. Luján, 2008.
106. Guyonvarc’h, 2005, p. 123-186.
107. Léon le Diacre, Histoire, IX, 6.
108. Urbańczyk et Rosik, 2007, p. 270.
109. Schmidt, 2001. À Gdańsk, un chien a été enterré lors de la construction du rempart :
Kajkowski, 2015b, p. 208 et Fig. 5.
110. Turčan, 2001, p. 99.
111. Słupecki, 1994, p. 63. La décapitation rituelle est particulièrement bien attestée autrement
chez les Celtes, mais aussi maintenant chez les Scythes : Daragan, 2017.
112. Epistula St. Brunonis ad imperatorem Henricum II = Meyer, 1931, p. 8.
113. Leger, 1901, p. 152.
114. Wenska, 2015.
115. Récit des temps passés, s. a. 963.
116. Thietmar, Cronicon I, 2-3 = Meyer, 1931, p. 8.
117. Thietmar, Cronicon VII, 72.
118. Sielicki, 2017, p. 35.
119. Álvarez-Pedrosa, 2012, p. 164.
120. Grégoire de Tours, De la Gloire des confesseurs, II. Sur cette histoire, voir Raydon, 2013,
p. 77-80.
121. Chevet et al., 2014. On notera que dans les Alpes Maritimes, près de la frontière italienne, les
Laghi d’Inferno étaient considéré comme si profonds qu’ils devaient communiquer avec l’enfer : si
l’on y lançait une pierre, des milliers de démons remontaient à la surface (Sébillot, 1905, p. 436).
122. Cosmas, Chronica Boemorum, III, 1 = Meyer, 1931, p. 20.
123. Słupecki et Zaroff, 1999, p. 12
124. Guillaume de Malmesbury, Gesta regum anglorum, II, 12.
125. Słupecki et Zaroff, 1999, p. 12.
126. Le rapprochement a été opéré par Michał Łuczyński (2014), entre cette source et un texte de
l’Antiquité tardive sans rapport avec les Slaves, mais il n’est guère convaincant.
127. Saxo Grammaticus, Gesta Danorum, XIV, 39.
128. Álvarez-Pedrosa, 2012.
129. Niederle, 1926, p. 39-40.
130. Chrabr le moine, Sur les lettres, dans Vaillant, 1968, p. 47.
131. Dynda, 2016.
132. Słupecki, 1994, p. 40.
133. Thietmar, Cronicon, VI, 23-25 = Meyer, 1931, p. 10.
134. Unbegaun, 1948, p. 418.
135. Annales Augustani, s. a. 1068 = Meyer, 1931, p. 56-57.
136. Łuczyński, 2016. Le folklore slave du cheval est abondant : voir déjà Tobolka, 1894. Voir
aussi Reiter, 1980-1981.
137. Słupecki, 1994, p. 141-142.
138. Tacite, Germanie, X, trad. Burnouf (1859). À la fin du viiie siècle, la divination par les
chevaux est encore condamnée par l’Indiculus superstitionum et paganiarum (MGH, Legum, I, 1835,
p. 20).
139. Sielicki, 2017, p. 35.
140. Cosmas, II, 4.
141. Sielicki, 2017, p. 40-43.
142. Sielicki, 2017, p. 43.
143. Thietmar, Chronicon, VIII, 64 = Meyer, 1931, p. 11. Ailleurs, Thietmar dit que les Liutici
vont au combat en « suivant leurs dieux » : Thietmar, Chronicon, VI, 22 = Meyer, 1931, p. 9.
144. Thietmar Chronicon, VI, 23-25 = Meyer, 1931, p. 10.
145. Saxo Grammaticus, Gesta Danorum, XIV.
146. Chronicon Montis Sereni, s. a. 1209 = Meyer, 1931, p. 61.
147. Helmold, Chronica Slavorum, I, 6 et 36.
148. Thietmar, Cronicon, VI, 23-25 = Meyer, 1931, p. 10.
149. Cross, 1931, p. 137-141.
150. Krappe, 1937, p. 210.
151. Blankoff, 1991.
SANCTUAIRES ET IDOLES

SANCTUAIRES

Comme chez la plupart des Indo-Européens, le culte, chez les Slaves,


s’organise majoritairement autour de sanctuaires, au sujet desquels nous
avons de nombreuses attestations textuelles. La destruction des sanctuaires
et des idoles en Rus’ sous Vladimir est mentionnée par Hilarion1. Plus à
l’ouest, un ecclésiastique de l’évêché de Brandebourg indique avoir détruit
avant 1114 un grand nombre d’idoles et construit à la place des églises
consacrées à la Vierge2. En Bohême, un texte du xie siècle indique que le
duc Zpitigneus y a détruit beaucoup de temples avec des idoles,
construisant à la place des sanctuaires chrétiens3. Auparavant, au xe siècle,
saint Venceslav aurait lui aussi détruit des temples païens4. Selon Thietmar,
les temples étaient particulièrement nombreux chez les Liutici : il y en
aurait eu un par district5.
Jusqu’à la fin du paganisme des temples ont été construits chez les Slaves
de Poméranie. À Gützkow, au xiie siècle, des païens implorent Otton de
Bamberg de ne pas détruire leur temple, car il venait tout juste d’être bâti6.
Les textes anciens ne sont cependant pas toujours crédibles. Ainsi, si
Mas’ūdī est précis concernant les rituels funéraires, la description qu’il
donne d’un temple slave est absolument fantaisiste7. Du point de vue
archéologique, deux sanctuaires ont été découverts à Ralswiek, sur le
littoral de l’île de Rügen. Le premier, daté du viiie siècle, a été abandonné
suite à une montée du niveau marin. Le deuxième, qui lui a succédé, a été
détruit par le feu vers le xe siècle8.
Aucun sanctuaire païen n’a pour l’instant été découvert chez les Slaves du
Sud. On a pendant un temps pensé que quelques vestiges mal étudiés près
de Ptuj (Slovénie) pouvaient en être un, mais il s’agit plus probablement
d’un élément de fortification de la fin de l’Antiquité ou du Moyen Âge9.
On ignore totalement si ces sanctuaires pouvaient avoir des statuts
différents : sanctuaire privé, sanctuaire public, royal, etc. La seule
possibilité que nous ayons à l’heure actuelle de classer ces structures repose
sur leur forme et leur architecture. On distingue essentiellement deux
formes : des sanctuaires quadrangulaires couverts et des sanctuaires
circulaires à ciel ouvert.

Sanctuaires quadrangulaires couverts

Le nom de ces temples pouvait être xram10. Un autre terme est connu par
les sources latines médiévales : contina (cf. serbe kuća, bulgare kŭšča :
« maison »11) peut-être étymologiquement lié au polonais kąt : « angle »12.
Avant de désigner des sanctuaires (c’est-à-dire « maisons des dieux »13),
ces termes devaient désigner des bâtiments quadrangulaires. Les sources
latines parlent autrement de fanum, templum, delubrum : des termes que
l’on retrouve ordinairement dans les descriptions de l’ancien paganisme. En
russe, le terme kapišča est employé dans certaines sources anciennes.
Le sanctuaire d’Arkona sur l’île de Rügen est décrit par Saxo
Grammaticus comme étant de forme carrée, de 20 m de côté, construit en
bois et dont les parois sont ornées de figures sculptées et peintes. Le toit
était peint de couleur rouge. Il n’avait qu’une seule entrée. À l’intérieur se
trouvaient quatre poteaux éloignés de six mètres auxquels étaient suspendus
des rideaux. Derrière ces rideaux se trouvait l’idole de Svantovit, d’une
hauteur de 8 m environ. On a cru pouvoir confirmer cette description par
des fouilles effectuées au début des années 192014. Mais on sait maintenant
que la partie de la péninsule qui accueillait le temple est sans doute tombée
dans la mer.
Le sanctuaire conservait aussi le trésor des Rani, constitué du tribut versé
par les peuples soumis, par les offrandes des marchands, ainsi autorisés à
commercer sur l’île, et par l’or et l’argent ramené lors des raids de
piraterie15 : il fut pillé par le roi du Danemark Waldemar16. Le testament
d’Absalon, archevêque de Lund sous l’ordre de qui Arkona fut détruite,
mentionne deux coupes probablement prises dans ce trésor17. Ce trésor
semble avoir servi de réserve financière ‒ les Rani ne connaissaient pas
l’usage de la monnaie18.
À Stettin, le temple de Triglav (en fait deux ou quatre bâtiments construits
l’un à côté de l’autre et renfermant les statues des dieux), bâti sur une
colline au milieu de la ville, contenait lui aussi un trésor, alimenté par le
dixième des prises de guerre, et par les armes des ennemis vaincus19. Le
bâtiment principal renfermait l’idole et le trésor, tandis que les autres,
devant servir aux réunions de conseils, étaient meublés de tables et de
chaises20.
Le sanctuaire de Radigost (Rethra), construit au sein d’une fortification21,
était bâti en bois sur des fondations posées sur des cornes d’animaux. À
l’intérieur étaient placées des idoles ornées de casques et de cuirasses, et
dont le nom aurait été gravé dessus22. Le temple renfermait aussi des
étendards qui n’étaient sortis qu’en temps de guerre. On y trouvait aussi un
lit pourpre préparé pour le dieu principal23. Ce dieu est Zuarasici
(Svarožič), qui prendra dans les sources plus tardives le nom de Radigost.
Le temple de Radigost (Rethra) fut probablement détruit par une expédition
menée par l’évêque Burchardt d’Halberstadt en 1067 ou 106824.
D’autres temples, non attestés par les textes, ont été découverts à la suite
de fouilles archéologiques. À Wolin, un temple en bois, plusieurs fois
reconstruit, a été découvert au cœur de l’agglomération médiévale25.
À Gross-Raden, sur une péninsule en bordure du lac Binnen
(Mecklemburg), sur le territoire des Varni, une branche des Obodrites, un
village daté des ixe-xe siècles a été fouillé26. À l’écart des maisons se
trouvait un grand bâtiment quadrangulaire27. Ce bâtiment était entouré
d’une palissade de planches terminées de têtes humaines stylisées, formant
une sorte de déambulatoire. Une coupe en terre cuite, six crânes de chevaux
et un crâne de bœuf, deux fers de lance et une poignée de bouclier ont été
découverts dans le bâtiment. Le nom du lieu (Radim en 1256 ; Magna
Radem en 1271) a été rapproché de Radigost. Un bâtiment du même type,
mais moins bien conservé, a été découvert à Parchim, dans le même
secteur28. À Wrocław, en Pologne, un sanctuaire lui aussi partiellement
construit de planches terminées de têtes humaines, a été découvert et daté
par dendrochronologie de l’automne 1032 au printemps 1033. Un crâne de
cheval y a servi d’offrande de fondation. Ce sanctuaire a été rasé peu avant
105029.
Chez les Slaves de l’Ouest, ces sanctuaires peuvent être implantés au
cœur d’une ville, comme à Brandenburg30, à Rostock31, à Garz32 ou à
Stettin33. Il est possible que des sanctuaires du même genre aient existé
aussi chez les Slaves de l’Est. L’une des versions de la saga d’Olaf
Tryggvason mentionne la présence d’un temple à Kiev, près du palais, sous
le règne du prince Vladimir, qui était encore païen. Le terme employé est le
scandinave hof, qui désigne un sanctuaire fermé34. Si l’on doit accepter ce
témoignage tardif, cela montrerait qu’il a bien existé au moins un sanctuaire
de ce type chez les Slaves de l’Est35.

Sanctuaires circulaires à ciel ouvert

Le voyageur arabe Ibn Fadlan, au xe siècle, a donné une description


particulièrement détaillée d’un sanctuaire slave de plein air, qu’il a vu chez
les Rus’ de la Volga :
« Dès que les navires sont arrivés à leur ancrage, chaque Rûs débarque avec du pain, de la
viande, des oignons, du lait et de la boisson fermentée pour se diriger vers un grand poteau
dressé là, qui a un visage humain et est entouré de petites idoles, elles-mêmes cernées de pieux
fichés en terre. Chaque Rûs se dirige donc vers la grande idole et se prosterne en disant :
« Seigneur, je viens d’un pays lointain avec tant et tant de jeunes filles esclaves et tant et tant de
peaux de martre », et il se met à mentionner toutes les marchandises qu’il a apportées. Il ajoute
alors : « Je t’offre ce présent. » Puis il dépose ses offrandes devant le poteau. Il dit encore : « Je
désire que tu m’accordes la faveur de m’envoyer un commerçant couvert de nombreux dinars et
dirhams, qu’il m’achète tout ce que je désire lui vendre, et qu’il ne soit pas en désaccord avec
moi sur ce que je dirai. » Puis il se retire. Si cet homme a des difficultés à écouler ses
marchandises et que son séjour se prolonge, il apporte une deuxième, puis une troisième
offrande. S’il ne peut pas parvenir à ses fins, il fait une offrande à chacune des petites idoles et
leur demande d’intercéder : « Ces idoles sont les femmes de notre Seigneur, ses filles et ses
fils. »
Ainsi il continue à prier, idole après idole, quémandant, sollicitant leur intercession, suppliant.
Cependant, parfois, la vente lui est facile. Il dit alors : « Mon Seigneur a exaucé mes vœux, il
faut donc que je le récompense. » Il sacrifie plusieurs moutons et bœufs, fait aumône d’une
partie de la viande et emporte le reste qu’il dépose devant cette grande idole et les petites qui
l’entourent. Il suspend la tête des bœufs et des moutons aux pieux fichés en terre. La nuit, les
chiens viennent manger tout cela et celui qui a fait cette offrande dit alors : « Mon Seigneur est
satisfait de moi car il a mangé les offrandes que je lui ai faites »36. »

La description du sanctuaire rus’ donnée par Ibn Fadlân a été rapprochée


d’un type de structure sacrée scandinave nommé stav37. Le stav est un
bâton en bois (ou peut-être en pierre pour certains) planté en terre38 et
entouré d’une barrière, l’ensemble formant le stavgard39.
Malheureusement, aucun stavgard n’a été retrouvé et fouillé dans le monde
scandinave ‒ et donc leur structure reste largement hypothétique ‒, alors
que d’autres types de sanctuaires y sont bien connus40. En revanche, dès
1953, l’archéologue soviétique Boris Rybakov proposait une restitution du
sanctuaire vu par Ibn Fadlân : une idole centrale placée sous un auvent
supporté par quatre piliers, puis un cercle d’idoles, enfin une palissade
basse41.
C’était bien sûr très hypothétique et certains détails, comme le toit ou
l’auvent couvrant l’idole principale, sortaient tout droit de l’imagination de
Rybakov. Peu de temps après, l’archéologie des sanctuaires slaves allait
progresser de façon spectaculaire avec la découverte de structures dont le
plan ressemble de près à celui suggéré par Ibn Fadlân. Les plus connus
(en tout cas les mieux publiés) sont celui du mont Bogit (une idole centrale
entourée de huit fosses dont deux renfermant des corps humains)42, celui du
sanctuaire-gorodišče (habitat de hauteur) de Tušemlja (une idole centrale
entourée d’une palissade)43, celui de Xodosovičy (une idole centrale
entourée d’une palissade, puis de quatre fosses)44, celui de Pskov (une idole
centrale accompagnée d’une fosse, et entourée d’autres idoles)45, ce dernier
se trouvant au sein d’un « champ » de kourganes, donc de tumuli funéraires,
ou encore, le plus connu, celui de Peryn à Novgorod (une idole centrale sur
un monticule, entouré de huit fosses dans lesquelles un foyer a été entretenu
si ce n’est de manière permanente, du moins sur de longues durées)46. Cette
structure « en fleur » daterait au plus tard du ixe ou du xe siècle, ce qui pose
problème sachant que, selon la Chronique de Novgorod, le culte de Perun
n’y aurait été implanté qu’en 98047. La chronique semble justifier a
posteriori l’existence d’un sanctuaire dont elle attribue la fondation à un
prince varègue, alors qu’il préexistait et était le fait d’une population slave
locale. Toujours est-il qu’il fut en définitive arasé, la terre de son sommet
comblant le fossé.
Deux structures tout à fait similaires à celle de Xodosovičy ont été
découvertes sur les bords du Dniepr, à 8 km de Rogačev (région de Gomel).
La première, d’un diamètre de 7 m, se composait d’un poteau central,
entouré d’un fossé peu profond, puis de quatre fosses formant des
« sépales » en forme de faucille. L’autre, plus petite (5 m), est aussi
entourée d’un fossé, mais seulement de deux « sépales ». À proximité de la
plus grande se trouvait une nécropole des viiie-xe siècles. On a mis en
relation ces deux structures avec deux poteaux de chêne, découverts dans le
Dniepr respectivement en 1909 et 1975, et conservé par immersion. Ces
poteaux étaient ornés de mâchoires de sangliers, placées à la base des
premières branches du vivant des arbres puis partiellement enchâssées dans
le bois au fil de sa croissance48.
Un sanctuaire circulaire, daté des viiie-ixe siècles, d’un peu plus de 5 m de
diamètre, fait d’une palissade en bois entourant un gros poteau qui devait
être une idole, a été fouillé sur l’habitat de hauteur de Gorodok dans la
région de Smolensk49. Auprès du poteau central, à l’intérieur du cercle, on a
découvert des fragments du crâne et la mandibule d’un grand ours50.
En Ukraine, c’est à Gnilopjat, près de Žitomir, que les archéologues ont
fouillé un sanctuaire dans lequel les couches de cendres sont si épaisses et
régulières qu’on pense que le feu y était permanent. Des ossements de
taureaux y ont aussi été découverts51. Ce sanctuaire n’est pas circulaire,
mais possède une forme symétrique avec un poteau en position quasi
centrale. Son principal intérêt est qu’on y a découvert un fossile de
bélemnite, autrement dit une « flèche de foudre ».
Si récemment on a mis en doute la nature de sanctuaire des sites de Pskov
et de Peryn52, force est de reconnaître cependant que ces structures existent
et ne sont même pas propres aux Slaves de l’Est. On retrouve la description
d’un probable sanctuaire de ce genre chez les biographes d’Otto de
Bamberg, évangélisateur des Slaves de l’Ouest au xiie siècle. Ainsi la Vie de
ce saint par Ebbo nous parle de la ville de Wolin (actuellement en
Allemagne), qu’il nomme Julin et qui fut « fondée et nommée par Jules
César, et où sa lance, plantée dans un poteau de taille remarquable, est
honorée en sa mémoire ». Un peu plus loin, le même Ebbo nous informe
que « les grandes et petites idoles, qui se trouvaient en plein air, furent
brûlées par le pieux évêque »53.
Ce sanctuaire de plein air était donc fait d’un poteau gigantesque et
d’idoles. Cependant, certains chercheurs pensent que l’île de Wolin a été le
temps de quelques décennies le siège d’une colonie de Viking, Jomsborg,
détruite en 1043 par le roi danois Magnus le Bon54. On ne peut donc être
tout à fait sûr que le sanctuaire décrit un siècle plus tard par Ebbo soit slave.
Toutefois, Herbert de Clairvaux, au milieu du xiie siècle, nous montre bien
un sanctuaire de plein air situé sur l’île de Rügen, sanctuaire formé
notamment d’une énorme statue de bois recouverte de goudron55.
Près de Trzebiatów en Pologne, deux structures ovales datées des ixe-
xe siècles ont été fouillées. L’une d’entre elles mesurait 10 × 13 m, et
renfermait deux foyers et trois poteaux. La deuxième, de 8 × 10 m, était
centrée sur un foyer. Le nom même du lieu peut dériver de treba :
« sacrifice »56. Plus connu et mieux étudié est le sanctuaire circulaire de
Pohansko près de Břeclav (République tchèque) : ce sanctuaire, daté du
xe siècle, est formé d’un gros poteau central, entouré de poteaux plus petits,

puis d’une demi-palissade. Il a été établi dans le cimetière lié à une église
du ixe siècle, vraisemblablement ruiné au siècle suivant57. Enfin, un
ensemble de structures circulaires associé à une agglomération, datant du
viii et du ix siècle a été fouillé et interprété comme un sanctuaire à
e e

Hradsko, toujours en République tchèque58.


Ce type de sanctuaire n’est pas resté propre aux Slaves. Dans la région de
Riazan, Rozenfel’dt a découvert une trace évidente de l’influence slave sur
les Finno-Ougriens dès le ier siècle apr. J.-C., grâce à un sanctuaire situé sur
le gorodišče de Staraja Rjazan’. Les objets découverts sur ce site
appartiennent tous à une culture finno-ougrienne. Pourtant, la structure se
présente comme un cercle de sept (peut-être huit, la surface fouillée ne
permettant pas de le préciser) fosses ovales, orientées nord-sud, et entourées
chacune d’une ligne de poteaux serrés les uns auprès des autres. Chaque
fosse était remplie de charbons et de cendres, ainsi que de céramiques
brisées et d’ossements de chevaux et de bovidés. L’une d’elles avait sur son
fond une mandibule de sanglier. On ignore s’il y avait au milieu de ce cercle
de fosses un poteau central, car l’endroit a été remanié lors de l’installation
des Slaves sur le site au xe siècle (le sanctuaire lui-même a fonctionné dès le
i siècle apr. J.-C., avec un maximum de fréquentation aux iv -ix siècles)59.
er e e

Étant donné le nombre et la vaste aire de diffusion de ces sanctuaires


circulaires, il est possible de se demander si ce n’est pas l’existence même
de ces structures qui a rendu particulièrement populaires au Moyen Âge les
églises en forme de rotonde. On compte encore de nos jours vingt-cinq
églises de cette forme en République tchèque. La construction de celles-ci
s’étale du ixe au début du xiiie siècle. Mais la plus ancienne, celle de saint
Vit à Prague, est princière et a pu servir de tombeau. Pour certains, le
modèle serait italien60. Pour Piort Skubiszewki, elles n’auraient pas de
modèle direct61. Pour d’autres, elles seraient influencées, via le diocèse
d’Aquilée, par des modèles de la côte Adriatique62. De Bohème et de
Moravie, elles sont passées en Pologne. On en trouve aussi de nombreuses
sur la côte dalmate63. La transition d’un site païen à une rotonde chrétienne
a bien été mise en évidence dans le cas du tumulus de Krakus près de
Cracovie. Celui-ci fait 60 m de diamètre pour 16 m de haut64. L’église
Saint-Benoît située sur la pente de la colline où il se trouve a livré les
vestiges d’une rotonde du xie siècle65.
Il paraît vraisemblable que ces sanctuaires circulaires ont été dédiés
principalement à Perun. Ibn Fadlan ne nomme pas le dieu, mais il l’identifie
au poteau central, les autres étant « les femmes de notre Seigneur, ses filles
et ses fils ». À Novgorod, le sanctuaire est bien associé à Perun. Et de fait,
Procope de Césarée nous dit bien que ce dieu, maître de la foudre, est le
principal chez les Slaves.
Il est possible que ces sanctuaires soient apparentés à ce qui a existé chez
les Saxons continentaux. Selon les sources, Irminsûl serait soit une idole
(idolum), soit le sanctuaire entier (fanum)66. Raoul de Fulda nous le décrit
comme étant un pilier en bois, érigé sur une hauteur, et qui serait une
« colonne universelle » soutenant presque le monde entier67. Cependant,
nous sommes en droit de nous demander si ce type de représentation était
réellement courant chez les Germains.
Il a pu exister aussi des structures très proches à Rome et en Italie. Il
existe plusieurs sanctuaires circulaires à Rome, dont celui, très tardif, de
Romulus, ou celui d’Hercule sur le Forum Boarium. Ces sanctuaires sont
relativement récents et semblent prendre pour modèle celui de Vesta. Le
culte de Vesta est attesté en plusieurs lieux du Latium, et le plan de ses
temples est connu pour Rome et pour Tivoli (Tibur). Seul celui de Tivoli est
toujours debout ; une partie de celui de Rome a été reconstituée durant la
première moitié du xxe siècle. Selon Ovide, le sanctuaire de Rome, avant
d’être bâti en pierre, avait des parois d’osier tressé, mais il était déjà rond68.
Ovide semble interpréter cette rotondité par le fait que Vesta est la terre,
semblable à une balle69. Selon lui, la flamme éternelle qu’on entretenait
dans le temple est la déesse elle-même70.
C’est cependant en domaine celtique que l’on trouve les meilleurs
parallèles architecturaux. À Gournay-sur-Aronde, à Saint-Maur, à Tintignac
(sur la commune de Naves), à Allonnes, des sanctuaires circulaires ou semi-
circulaires, liés à des fosses sacrificielles et parfois à des foyers, ont été
identifiés. En Grande-Bretagne, c’est à Hayling Island qu’une structure du
même type a été fouillée71. Quelque chose de similaire, mais en pierre, a pu
exister en Irlande72.
Georges Dumézil a pu comparer l’architecture du temple de Vesta avec
l’organisation des feux sacrificiels védiques et notamment le feu nommé
gārhapatya, dont le mode d’allumage et d’entretien est très proche de celui
de Vesta, et qui, comme à Rome, est rond et identifié à la terre73. Ces feux
ou sanctuaires circulaires, sans intervention de phénomènes célestes, ne
peuvent avoir d’orientation possible sur la terre, toutes les directions s’y
valant. Si les sanctuaires slaves ont tous une idole centrale, celle-ci peut être
entourée soit d’idoles plus petites, soit de fosses sacrificielles. C’est
l’inverse qui se produit avec les sanctuaires gaulois laténiens : l’entourage
est toujours fait de poteaux, tandis que le centre peut être ou bien un poteau
(une idole ?) ou bien une fosse sacrificielle. Cela dénote la grande
importance qui a été accordée à la notion de verticalité. Cependant, ce n’est
pas parce que les sanctuaires de Gournay, de Saint-Maur et de Hayling
Island sont organisés autour d’une fosse qu’il faut penser à un culte adressé
à une divinité chtonienne. À Gournay, les victimes animales sacrifiées sont
abandonnées au fond de la fosse pour y laisser couler leurs fluides dans le
sol74. En Irlande, le sang de victimes était versé autour de Crom Cruaich,
l’idole centrale du sanctuaire, donc sur le sol, de même que le sang des
victimes sacrifiées à Perun, divinité céleste de l’orage, souille, selon le
Récit des temps passés, la terre du sanctuaire. Des sacrifices humains sont
avérés à Gournay-sur-Aronde75, au sanctuaire de Crom Cruaich et à celui
de Perun à Kiev (d’après les textes), et sans doute aussi au mont Bogit.
Les rites associés à ce type de sanctuaires ont pu être royaux et liés à la
fertilité : en effet, le sanctuaire de Perun à Kiev est institué par le prince
Vladimir ; celui de Crom Cruaich l’est par Tigernmas, l’un des premiers
hauts rois d’Irlande, et celui de Vesta l’est par Numa, deuxième roi de
Rome et organisateur principal des choses sacrées dans la ville ; le
sanctuaire d’Hayling Island est peut-être lié à l’installation de Commios
comme roi, puis à celle de Cogidubnus, qui a régné au début de l’époque
romaine sur le sud de la Bretagne76. Il peut y avoir une ou plusieurs
divinités par sanctuaires, mais celles-ci, à qui l’on offre des sacrifices
parfois sanglants, ne sont que des intercesseurs auprès de la grande divinité,
le maître du panthéon, auquel on s’adresse dans l’espoir que la terre soit
fertile.

Autres sanctuaires

Diverses propositions ont été faites pour interpréter certains sites


médiévaux polonais comme étant des sanctuaires. On en est réduit le plus
souvent à des conjectures, faute d’éléments fiables77. L’un des plus
probables est un ensemble de structures découvertes au mont Chełmska,
près de Koszalin : une série de fosses datées des ixe-xie siècles entoure le
sommet du mont. L’une d’elles a livré un vase rempli d’os d’animaux. Non
loin, un bâtiment construit en contrebas d’un cimetière du haut Moyen Âge
a été interprété comme étant une contina78. À Mikulčice, en République
tchèque, une structure rectangulaire, associée à une agglomération, formée
d’une palissade enfermant un espace divisé en trois bandes : la bande
centrale était occupée par deux foyers, tandis que les deux bandes
encadrantes ont été des espaces d’inhumations. L’une de ses bandes
s’achevait par la tombe de trois chevaux, et un peu partout autour des
tombes ordinaires étaient enterrés des individus porteurs d’anomalies
physiques, telles des amputations79.
À Uherské Hradiště (République tchèque), le sanctuaire consiste en un
gros poteau (vraisemblablement une idole), entouré de deux foyers. Juste à
côté se trouvait un espace quadrangulaire couvert d’un toit porté par quatre
poteaux : un bucrâne devait orner ce toit80.
En Pologne, certaines montagnes ont pu être considérées comme des lieux
de culte. Le site de Łysa Góra, dans la région de Sandomierz, se présente
comme un mont chauve, actuellement couronné par un monastère fondé au
xiie siècle. Des murs en pierre entourent partiellement le sommet : on a

découvert à proximité des poteries datées d’entre le ixe et le xiiie siècle81. Le


mont Ślęża (aussi nommé Siling ou Zobten, de sobota : « samedi »), lui, est
clairement mentionné par Thietmar comme lieu vénéré par les païens82. Lui
aussi voit son sommet entouré de murs de pierre sèche, dont la construction
d’une partie au moins remonte à l’Âge du Bronze. Dans les deux cas, des
statues en pierre, représentant notamment des animaux, ont été découvertes,
mais aucune n’est datée avec précision : elles peuvent être aussi bien
protohistoriques que médiévales83.

IDOLES

Il est difficile d’attribuer un nom aux figures anthropomorphes


découvertes sur le territoire russe84. Les termes employés dans les langues
slaves anciennes sont variés et certains sont empruntés au turc85.
Les représentations d’idoles dans les manuscrits médiévaux russes sont
toutes d’inspiration byzantine et n’ont donc aucune valeur86. Du point de
vue archéologique, les idoles slaves sont nombreuses, mais souvent
grossières et peu porteuses d’éléments permettant l’identification de la
divinité.
À Bogovo près de Pskov, les restes d’une idole en pierre ornée d’une paire
de cornes brisées ont été découverts au début du xxe siècle. Cette sculpture
est maintenant perdue. Elle n’est pas datée, et l’idée qu’elle soit due à des
éléments celtiques liés aux Bastarnes, et donc qu’il s’agisse de Cernunnos a
été émise87.
Les idoles sont souvent décrites comme gigantesques dans les sources
latines. Ainsi, pour tirer au-dehors celles du sanctuaire de Gützkow, il fallut
plus d’une douzaine de paires de bœufs88. À Wolin, on l’a vu, une énorme
colonne en bois faisait office d’idole de « Jules César »89. Nombre d’idoles,
comme la Jaromirstein d’Altenkirchen, sont ornées d’une corne à boire,
trait que l’on retrouve sur des idoles prussiennes90. Le bois est la matière la
plus couramment employée pour leur fabrication. Il arrive souvent qu’elles
se résument alors à un poteau ou une planche surmontée d’une tête
humaine91. Chez les Slaves de l’Est, ce sont essentiellement des idoles en
pierre qui ont été retrouvées. La plupart se présentent comme un simple
pilier surmonté d’une tête. Mais à Kiev, les sources anciennes indiquent que
l’idole de Perun était en bois, avec une tête d’argent et une barbe d’or.
Diverses représentations anthropomorphiques interprétées comme étant
des idoles ont été sculptées sur des plaques de pierre à Altenkirchen, à
Bergen, à Wolgast : en ce dernier lieu, ce sont deux dalles ornées d’un
homme armé d’une lance. L’une d’entre elles a été nommée Gerovitstein
(« pierre de Gerovit »)92. Certaines peuvent être féminines, comme
une idole en bois découverte à Fischerinsel (Allemagne)93. Enfin, en
Poméranie, diverses figures anthropomorphes ont été interprétées comme
étant des idoles païennes, mais elles ont souvent été retrouvées hors
contexte et sont indatables94.

Les idoles polycéphales

L’un des traits les plus frappants des idoles slaves, du moins de celles
décrites dans les sources latines, est leur polycéphalie. La tricéphalie, à
laquelle répond le nom du dieu Triglav (« Trois Têtes »), est un modèle
iconographique fréquent en Gaule et en Thrace antique. Mais elle n’est pas
appliquée à n’importe quel dieu : en Gaule il s’agit de Mercure ou de
Cernunnos, le dieu aux bois de cerf, et en Thrace, du célèbre « Cavalier
thrace », dont le nom est variable d’un monument à l’autre95.
À St. Martin am Silberberg (Carinthie) on a découvert une idole en pierre
montrant une face aux traits épais, ornée d’un visage sur la pommette droite
(et peut-être d’un autre sur la pommette gauche). Deux yeux et un nez
apparaissent aussi dans le cou. Une croix a été gravée sur la nuque96.
À Fischerinsel (Allemagne), on a découvert une idole en bois faite d’un
poteau au sommet duquel deux têtes masculines moustachues sont
accolées97. En Ukraine, à Jarovka près de Tchernivtsi, on a découvert une
idole bifaciale, qui se présente comme un pilier de pierre de 1,7 m de haut.
Les deux faces sont dos à dos98. Près de l’église de Tesnovka, dans les
environs de Radomyšl (Ukraine), existait jusque vers 1850 une idole
appelée familièrement par les habitants Četyrebog (« Quatre-Dieu »)99. Une
autre existait sur une colline dans la vallée du Dniepr entre Režica et
Bobruisk100. La localité de Vieille-Riazan a livré une idole à quatre faces,
l’une d’entre elles, dont les seins sont marqués, étant féminine101.
L’idole dite du Zbruč est assurément la plus célèbre des idoles slaves. Il
faut dire qu’elle est particulièrement bien conservée, et qu’elle montre des
figures dotées d’attributs variés, dont on peut tenter l’interprétation.
Découverte au tout début du xixe siècle dans les eaux du Zbruč, en une
localité d’Ukraine nommée Husjatyn, elle est à présent exposée à Cracovie.
L’idole est régulièrement considérée comme un faux d’époque
romantique102, mais la plupart des chercheurs la tiennent pour authentique.
Elle se présente comme un pilier de pierre, à quatre faces. Les figures
s’organisent en trois niveaux. La partie basse ne montre qu’un seul
personnage, vu de face et de côté. Celui-ci est à genoux, et il porte, les bras
relevés, le reste du pilier. Son dos est orné d’une roue. Chaque vue de côté
montre son visage, ce qui pourrait laisser penser qu’il a trois têtes ou trois
visages.
Au-dessus de lui se trouvent quatre personnages, un par face. Tous se
tiennent de face, les bras écartés orientés vers le bas. Il s’agit là de deux
femmes et de deux hommes. L’une des femmes a au-dessus de l’épaule
gauche un petit personnage secondaire à peine esquissé (un enfant ?). Au-
dessus encore se trouvent quatre grands personnages, un par face, et encore
deux femmes et deux hommes. L’une des femmes tient une corne, l’autre un
anneau. L’un des deux hommes n’a pas d’ornement particulier. L’autre en
revanche est clairement un guerrier. Sous sa ceinture se trouve un cheval en
mouvement. Un sabre pend à cette ceinture, sabre du même type que le
« sabre de Charlemagne », un type d’arme commune en Europe orientale au
x siècle. Les quatre visages sont surmontés d’un unique bonnet, typique
e

des Slaves de l’Est médiévaux, d’une forme qui se retrouve sur les idoles en
granite de Novgorod et de Sebež, qui, elles n’ont qu’une seule face103.
L’idole du Zbruč montre qu’en fait plusieurs divinités étaient représentées
sur le fût. Le pilier peut très bien être, dans son ensemble, Perun, avec sur
ses flancs les représentations d’autres divinités. De même, si l’on suit
partiellement le travail de Boris Rybakov104, le dieu souteneur serait Veles,
identifiable à l’anguipède des colonnes gallo-romaines. Ce genre de
suggestion peut permettre de résoudre une certaine ambiguïté du Récit des
temps passé. En effet, si celui-ci nous dit que : « Vladimir commença à
régner seul dans Kiev ; puis il établit en dehors du palais du donjon, sur une
éminence, plusieurs idoles : Perun en bois, avec une tête d’argent et une
barbe d’or, et aussi Xors, Dažbog, Strybog, Simargl et Mokoš » ; il ajoute
plus loin que, lors de la christianisation, on fit détruire « les » idoles, tout en
n’en mentionnant réellement qu’une seule, celle de Perun105. On a pu donc
avoir, à Kiev, un pilier, une idole unique, représentant Perun, avec, sur ses
flancs, les images des autres divinités.
Très régulièrement, l’idole du Zbruč a été appelée « Svantovit ». Mais la
description que donne Saxo Grammaticus de l’idole de ce dieu à Arkona ne
correspond pas. Celle-ci était plus large qu’un homme. Elle possédait quatre
têtes regardant chacune dans une direction différente. Les têtes avaient la
barbe et la chevelure coiffées à la mode des Rani. Le corps tenait dans sa
main droite une corne faite de métaux variés, utilisée par le prêtre, corne qui
était amovible. Le bras gauche, placé sur le côté, formait un arc106. L’idole
de Triglav à Stettin devait être similaire : elle était aussi en bois mais
n’avait que trois têtes argentées107.
Une idole miniature fragmentaire en pierre, de 17 cm de haut dans son
état actuel, a été trouvée non loin d’une fontaine nommée U Libuše, sur
l’habitat fortifié de Kouřim (République tchèque). Datée du ixe ou du début
du xe siècle, elle se présente sous la forme d’un cylindre entouré de deux
rangs de visages. Le rang du dessus est fait de cinq grands visages, celui du
dessous, de six108.
À Wolin, c’est une idole miniature en bois, à quatre faces, datant du
x siècle, qui a été découverte dans une maison109. Des idoles miniatures
e

similaires, à quatre têtes ou à quatre faces, proviennent deSuède ou de Riga


en Lituanie. Ce sont ce que Joachim Herrmann a appelé des « dieux de
poche110 ». Certains chercheurs en ont conclu à la présence de Slaves sur
les lieux où elles ont été découvertes111. Cependant, un objet très similaire,
qu’on a appelé la pierre à aiguiser de Sutton Hoo (Suffolk), a été découvert
dans le célèbre navire saxon. Sauf à considérer qu’il provienne d’un pays
slave, il est plus prudent de penser que ce type de petite idole polycéphale
est un trait culturel circum-baltique, partagé entre les Germains
continentaux, les Scandinaves, les Baltes et les Slaves.

1. Hilarion, Slovo o zakone i blagodati, trad. Franklin, 1991, p. 19.


2. Meyer, 1931, p. 24.
3. Oportet nos fratres, I = Meyer, 1931, p. 12.
4. Christianus, Vita et passio sancti Wenceslai et sancte Ludmile avie eius = Meyer, 1931, p. 6-7.
5. Thietmar, Chronicon, VI, 25.
6. Herbord, III, 7.
7. Meyer, 1931, p. 96-97.
8. Słupecki, 1994, p. 102-108 ; Kahl, 2000.
9. Janžekovič, 2017.
10. Russe xram : « temple », puis église ; bulgare xram : « temple » ; slovène hram : « maison,
maison de Dieu » ; tchèque chram : « église » ; vieux polonais et polonais dialectal chromina :
« cabane » (Słupecki, 1994, p. 12).
11. Leger, 1901, p. 136.
12. Słupecki, 1994, p. 12-13.
13. Leger, 1901, p. 37.
14. Saxo Grammaticus, Gesta Danorum, XIV, 564 ; Schmittlein, 1960, p. 182.
15. Helmold, Chronica Slavorum, I, 6 et 36.
16. Annales Magdeburgenses, s. a. 1169 = Meyer, 1931, p. 58.
17. Meyer, 1931, p. 48 ; Słupecki, 1994, p. 34.
18. Helmold, Chronica Slavorum, I, 38 ; Słupecki, 1994, p. 41.
19. Vie anonyme, II, 11 ; Herbord, II, 31-33.
20. Herbord, II, 32-33.
21. La description des lieux varie d’une source à l’autre, ce qui bloque de nos jours sa localisation.
22. Thietmar, Chronicon, VI, 23-25.
23. Adam de Brême, Gesta Hammaburgensis ecclesiae pontificum, II, 21 = Meyer, 1931, p. 13.
24. Słupecki et Zaroff, 1999, p. 12.
25. Słupecki, 1994, p. 87-89.
26. Herrmann, 1980-1981, p. 44.
27. Słupecki, 1994, p. 95-101.
28. Słupecki, 1994, p. 101.
29. Urbańczyk et Rosik, 2007, p. 278 ; Buko, 2008, p. 302-303.
30. Chronica principum saxoniae, s. a. 940.
31. Saxo Grammaticus, Gesta Danorum, XIV.
32. Ibid.
33. Vies d’Otton de Bamberg.
34. Saga Olafs Konnungs Tryggvasonar, 57 ; trad. Sephton, 1895, p. 67.
35. Słupecki, 1994, p. 135-137.
36. Trad. dans Charles-Dominique, 1995, p. 59-60.
37. Duczko, 2004, p. 90.
38. Et le terme stav signifie bien « bâton », « pieu », voire « sceptre », pas « poteau » ni « pilier ».
39. Notre meilleure source sur le sujet reste la Guta Lag, un texte de loi tardif destiné aux Gauti,
laquelle interdit les coutumes anciennes, et notamment de sacrifier « aux dieux païens, aux
sanctuaires, et aux stavgardar ». Voir sur ce sujet Olsson, 1992.
40. En revanche, le terme stav entre couramment en composition dans des toponymes : Brink,
1990, p. 478.
41. Rybakov, 1953, p. 87.
42. Rusanova et Timoščuk, 1993, pl. 22. Ce site a été critiqué et on a émis l’idée qu’il s’agisse
simplement de fosses à usage domestique du Moyen Âge central, réemployées par la suite comme
tombes de rituel chrétien : Komar et Chamajko, 2013.
43. Tret’jakov, 1958 ; Tret’jakov et Šmidt, 1963, p. 11-25 et surtout 42-71. Ce sanctuaire, sans
doute détruit avant le viie siècle, est probablement balte à l’origine, même si l’on y a découvert du
matériel de la culture post-Zarubinets, laquelle est la première culture archéologique slave
assurément identifiée : Kazanski, 1999, p. 10-19.
44. Sedov, 1982, p. 287.
45. Labutina, 1989, p. 102.
46. Sedov, 1953 et 1954.
47. Pascal, 1956, p. 94.
48. Conte, 1997, p. 113-115 ; Lavrov, 1951, p. 63-64 ; Ivakin, 1979, notamment fig. 1 et 2.
49. Tret’jakov et Šmidt, 1963, p. 25-37 et surtout p. 93-103 ; Krasnova, 1997, 1034, p. 75.
50. Tret’jakov, 1958, p. 184
51. Rusanova, 1966 ; Conte, 1997, p. 86.
52. Klejn, 1995.
53. Ebonis Vita S. Ottonis episcopi Babenbergensis, III, 1 ; Słupecki, 1994, p. 85.
54. Sur Jomsborg, voir Morawiec, 2009.
55. Herbert de Clairvaux, De miraculis libri, cité par Łuczynski, 2013 ; Słupecki, 1994, p. 126.
56. Słupecki, 1994, p. 127-129 ; Buko, 2008, p. 123-124.
57. Kalousek, 1971 ; Dostál, 1975 et 1985 ; Vignatiová, 1992 ; Macháček et Pleterski, 2000 ;
Turčan, 2001, p. 101.
58. Turčan, 2001, p. 98-99.
59. Rozenfel’dt, 1969.
60. Guth, 1925. Contra : Birnbaum, 1927. Skubiszewski, 1983, p. 774-780.
61. Skubiszewski, 1983, p. 777.
62. Sommer, Třeštík et Žemlička, 2007, p. 223.
63. Rapanić, 1983.
64. Słupecki, 1999, p. 78.
65. Słupecki, 1999, p. 79.
66. Grimm, 1854, p. 104-108.
67. Grimm, 1854, p. 106 ; De Vries, 1957, II, p. 386 ; West, 2007, p. 345-346.
68. Ovide, Fastes, VI, 260 et suiv.
69. Ovide le répète plus tard (Fastes, VI, 460) : « Tellus et Vesta ne sont qu’une même divinité ».
Cf. Denys d’Halicarnasse, Antiquités romaines, II 66, 3.
70. Ovide, Fastes, VI, 290 et suiv.
71. Lajoye, 2016, p. 148-151.
72. Lajoye, 2016, p. 151.
73. Dumézil, 1974, p. 318-332.
74. Cette interprétation de la structure du premier sanctuaire de Gournay a été récemment remise
en cause par Matthieu Poux (2019), qui pense qu’au centre devait se trouver une idole, et non une
simple fosse.
75. Poplin, Brunaux et Méniel, 1985.
76. King et Soffe, 2013, p. 16-17.
77. Buko, 2008, p. 117-126.
78. Buko, 2008, p. 125-126.
79. Turčan, 2001, p. 99.
80. Turčan, 2001, p. 102-103.
81. Buko, 2008, p. 107-110.
82. Thietmar, Chronicon, VII, 59 ; Unbegaun, 1948, p. 430 ; Słupecki, 1994, p. 172-184.
83. Urbańczyk et Rosik, 2007, p. 269-270 ; Buko, 2008, p. 110-117.
84. Panova, 1989.
85. Leger, 1901, p. 37-38.
86. Chernetsov, 1980-1981, p. 99-112.
87. Aleksandrov, 2005-2009.
88. Ebbo, III, 10.
89. Ebbo, II, 1.
90. Słupecki, 1994, p. 199, fig. 77.
91. Słupecki, 1994, p. 206-209.
92. Słupecki, 1994, p. 210-211.
93. Słupecki, 1994, p. 205.
94. Kajkowski, 2019.
95. Pettazzoni, 1946.
96. Kahl, 2005, p. 32-34.
97. Słupecki, 1994, p. 205.
98. Sedov, 1980-1981, p. 74.
99. Pettazzoni, 1946, p. 144.
100. Pettazzoni, 1946, p. 144.
101. Panova, 1989, p. 92, fig. 5.
102. Komar et Chamajko, 2013.
103. Sedov, 1980-1981, p. 73.
104. Les interprétations de Boris Rybakov de l’idole du Zbruč ont été largement critiquées : Klejn,
1993.
105. Alexandre Haggerty Krappe rapproche le mode de destruction de l’idole, par immersion puis
flottaison dans un fleuve, de rituels très répandus dans le monde slave et ses périphéries, pour obtenir
de la pluie : on fabriquait une petite idole qu’on laissait ensuite aller sur l’eau : Krappe, 1937, p. 212-
216. C’est ingénieux mais indémontrable.
106. Saxo Grammaticus, Gesta Danorum, XIV.
107. Vie anonyme, II, 12.
108. Profantová, 2012.
109. Kajkowski et Szczepanik, 2013, p. 56.
110. Herrmann, 1980-1981, p. 46-47 ; Kajkowski et Szczepanik, 2012.
111. Kajkowski et Szczepanik, 2013, p. 63-64.
LE CLERGÉ

On sait par les sources latines que les sanctuaires des Slaves de l’Ouest
sont servis par des prêtres. On a longtemps cru que cette classe sacerdotale
s’était formée sous l’influence allemande et chrétienne1. Lubor Niederle
distingue d’ailleurs les prêtres des sorciers, aussi attestés par les textes2.
Cependant les Slaves de l’Est ont vraisemblablement eu aussi des prêtres,
même si les sources leur donnent des noms (volxvi) qui les rapprochent plus
des sorciers des époques ultérieures. Ainsi, au début du xe siècle, le prince
de Kiev Oleg consulte des sorciers et des magiciens, dont l’un lui prédit sa
mort, selon le Récit des temps passés3. Mais cette histoire concernant Oleg
n’est probablement qu’une légende. Toutefois, la même chronique nous
donne d’autres témoignages. Ainsi, à l’année 1024 :
« Cette même année, des sorciers apparurent à Souzdal, tuant un vieillard par des prophéties et
des moyens diaboliques, disant qu’ils empêcheraient les récoltes. Il y eut de grands troubles et
une grande famine dans toute cette région. Tout le peuple se rendit alors chez les Bolgars de la
Volga, en ramena du blé et ainsi il put vivre. Entendant parler de ces sorciers, Jaroslav se rendit à
Souzdal ; s’étant saisi de ces sorciers, il chassa les uns, et punit les autres […]4. »

À l’année 1044 :
« Il [Vseslav fils de Brjačeslav] était né de sa mère par des pratiques magiques. Quand sa mère
le mit au monde, il avait une marque à sa tête ; les sorciers dirent à sa mère : « Vois cette marque
sur sa tête ; et il la portera sa vie durant. » Vseslav porte encore cette marque sur lui aujourd’hui,
c’est pourquoi il n’aime pas l’effusion de sang5. »

Et à l’année 1071 :
« En ce même temps, apparut un sorcier inspiré par le diable. Il vint à Kiev et raconta au peuple
qu’au bout de cinq ans le Dniepr remonterait son cours et que les pays changeraient de place,
que la Grèce prendrait la place de la Rus’ et la Rus’ celle de la Grèce et que les autres pays
changeraient aussi. Les ignorants le crurent ; les croyants rirent et lui dirent : « Le démon se
moque de toi pour te perdre. » Et il en fut ainsi : au cours d’une seule nuit il disparut sans que
l’on sût ce qu’il était devenu6. »

La même année, une famine sévit à Rostov. Deux sorciers de Jaroslavl


arrivèrent et déclarèrent savoir qui gardait la nourriture. Ils sacrifièrent
plusieurs femmes de l’aristocratie et en tirèrent des grains de blé, du miel,
du poisson, etc. Un collecteur d’impôt nommé Jan passa par là, et les
captura, après bien des soucis, et non sans les avoir interrogés. Toujours en
1071, un magicien arriva à Novgorod, alors gouvernée par le prince Gleb, et
prétendit tout savoir. Il suscita une émeute du peuple contre l’évêque et
l’aristocratie. Au cours de l’affrontement, Gleb défia le sorcier de prédire
son avenir, puis le prince tua son adversaire sans que celui ait deviné ce qui
allait lui arriver7.
Un texte de très basse époque ‒ il est consigné par écrit seulement
en 1771 ‒ mentionne le clergé du sanctuaire de Volos qui est supposé avoir
existé à Jaroslavl. Au sein de ce clergé, un prêtre a la charge d’entretenir un
feu perpétuel. Mais si le feu venait à s’éteindre, le prêtre était sacrifié et
remplacé par un nouveau qui brûlait son corps8. Cependant, il s’agit là d’un
texte particulièrement tardif, et on ne peut exclure qu’il ne soit qu’un faux
romantique.
On voit dans ces attestations chez les Slaves de l’Est que la question des
récoltes et des éventuelles famines est la cause principale de l’intervention
des « sorciers ». Or on a vu que chez les Slaves de l’Est, les rituels de
divinations servaient essentiellement à prédire l’abondance ou non des
récoltes de l’année à venir.
Le recoupement de divers témoignages anciens et des sources
ethnographiques plus récentes laisse à penser que les acteurs et poètes
impliqués dans le culte devaient s’appeler *jьgrьcь9. Les termes
ordinairement employés dans les sources latines sont : flamen (culte de
Prove/Prone à Oldenburg en Poméranie, selon Helmold), ministri (à
Riedigast, selon Thietmar), pontifex (à Stettin, selon les Vies d’Otton) et
sacerdotes (à Stettin et à Arkona, selon les Vies d’Otton et Saxo
Grammaticus). Au xiie siècle, en Bohême, l’Homiliaire d’Opatovice et son
glosateur condamnent encore « les sorciers [glosé herbarios vel
imprecarios], les devins, les incantateurs10 ». Divers termes slaves sont
attestés dans les sources du Moyen Âge final, donc à une époque où le
paganisme n’existe plus. Certains, désignant des sorciers, des enchanteurs,
peuvent remonter à des temps antérieurs à la christianisation11.
De toute l’histoire des Slaves, on ne connaît le nom que d’un seul prêtre
païen : Mike, au milieu du xiie siècle, à Oldenburg/Starigrad12. Mais il se
pourrait que ce ne soit pas simplement un anthroponyme, mais plutôt un
titre mal compris. Mike pourrait en effet être rapproché du vieux
russe mekat’ : « penser, réfléchir », que Max Vasmer a rapproché du
lituanien mė́klinti : « mesurer, considérer, penser », tous deux sans
étymologie claire13. Mike était peut-être un « Penseur », et le chroniqueur
Helmold aura pris un titre pour un nom propre.
Ces prêtres, attachés à des sanctuaires chez les Slaves de l’Ouest,
disposent de prérogatives qui leur sont propres. Chez les Rani de Rügen, le
prêtre principal du temple d’Arkona a un statut supérieur à celui du roi14. À
Redigost, lors des cérémonies, seuls les prêtres ont le droit de s’asseoir15.
Le poids politique des prêtres slaves de la Baltique a été discuté. Certains
pensent qu’une véritable théocratie existait. Mais il est possible que le seul
pouvoir de ces prêtres résidait dans l’acte de divination16.
On dispose de peu d’éléments de description physique de ces prêtres. On
sait qu’à Arkona, ils portaient la barbe et avaient les cheveux longs, à la
différence des autres hommes. Un prêtre païen de Stettin est décrit comme
étant « grand et obèse17 ».

1. Par exemple : Niederle, 1926, p. 160.


2. Niederle, 1926, p. 160.
3. Trad. Arrignon, 2008, p. 67.
4. Trad. Arrignon, 2008, p. 166-167.
5. Trad. Arrignon, 2008, p. 175.
6. Trad. Arrignon, 2008, p. 194-195.
7. Trad. Arrignon, 2008, p. 200.
8. Skazanie o postroenii grada Jaroslavlja : Lebedev, 1877, p. 6-10 ; Blankoff, 1980-1981, p. 21.
9. Golema, 2010.
10. Dynda, 2015 = Dynda, 2017, E1, p. 256-257.
11. Leger, 1901, p. 40-41.
12. Helmold, Chronica Slavorum, I, 69 = Meyer, 1931, p. 44.
13. Vasmer, 1953-1958, sv. Мекать.
14. Helmold, Chronica Slavorum, I, 36.
15. Thietmar, Chronicon, VI, 23-25 = Meyer, 1931, p. 10.
16. Wichert, 2010.
17. Herbord, III, 18.
LA ROYAUTÉ

Chez l’ensemble des Indo-Européens, le roi n’est pas seulement le chef


des guerriers, celui qui gouverne. Son statut est souvent aussi religieux, et
son rôle peut prendre alors un caractère sacré. Pour ce qui concerne les
Slaves, certains auteurs, notamment soviétiques, ont voulu croire que les
premiers slaves n’avaient pas de notion d’État, qu’ils vivaient en petites
communautés de paysans libres. Pourtant les sources les plus anciennes
nous renseignent sur la présence quasi systématique de monarques.
On trouve des princes en Bohême et en Moravie (parfois nommés
« ducs » dans les sources latines). Les Rani de l’île de Rügen ont un roi1.
Dès le vie siècle, les Slaves des Balkans ont un chef suprême Daurentios,
dont l’autorité s’étend sur d’autres chefs (en grec hegemones)2. De même,
le pseudo-Maurice, dans son Strategikon, signale que les Sclavènes et les
Antes ont de nombreux rois. On connaît les noms de certains, tels
Ardagastos ou Musokios, mentionnés par Théophilacte Simocatta3.
Le terme employé par ces deux sources est rex, un mot donné comme slave
par Théophilacte, mais qui pourrait être un emprunt au latin4. Musokios
régnait sans doute sur la région de Buzău, actuellement en Roumanie, dont
le nom grec était Mousaios. Il est possible que son nom dans la source
grecque qui le mentionne ne soit qu’une épithète tirée du nom de la ville5.
D’autres sources grecques parlent aussi d’archontes. Il est donc exagéré de
dire que les Slaves étaient primitivement gouvernés par des principes
démocratiques6. Le concept de royauté sacrée était probablement connu des
Slaves païens7.

L’ACCESSION À LA ROYAUTÉ

On l’a vu, les auteurs anciens parlant des Slaves de l’Ouest hésitent quant
aux termes à employer pour désigner les souverains. Beaucoup utilisent
« duc ». Plus tard, les termes « roi » et « prince » sont employés. Les deux
semblent avoir été primitivement élus par les hommes libres, mais seul le
roi obtenait la reconnaissance de l’empereur germanique ou du pape8.
Le prince tchèque, pour être légitime, faisait l’objet d’un rituel qui
l’obligeait à s’asseoir sur un trône de pierre situé au milieu du château de
Prague. Ce prince, qui était donc élu, était avant tout le garant de la paix9.
En Carinthie, le prince était indirectement élu par les paysans libres : ils
choisissaient l’un d’entre eux qui devenait alors juge et qui vérifierait si le
candidat était bon pour le pays. Celui-ci était alors revêtu d’une robe grise à
ceinture rouge, puis il lui était donné un sac rempli de provisions et il était
monté sur un cheval qui n’avait encore jamais travaillé, et mené jusqu’à un
trône de pierre dont la base est faite d’un chapiteau de colonne romaine. Un
chroniqueur du xive siècle indique que le premier à s’y être assis était un
paysan libre tenant par une main un bœuf, et par l’autre une jument. Le
nouveau prince devenait alors garant de la justice10.
Přemysl, le fondateur de la première dynastie tchèque, était lui-même un
paysan laboureur. La même légende se retrouve en Pologne, associée à
Piast, le fondateur de la première dynastie princière de Gniezno. L’idée d’un
roi laboureur se retrouve en Irlande, où c’est cependant le contraire des
légendes slaves qui arrive : Tairdelbach, roi du Thomond en Munster, et
père de saint Flannán, abandonna son trône et se fit laboureur11.

LA DRUŽINA
Le voyageur arabe Ibn Fadlân nous donne une description particulière de
l’organisation qui entourait le roi des Rus’ au xe siècle :
« Le roi des Rûs a pour coutume d’avoir dans son palais quatre cents hommes parmi ses
compagnons les plus braves et les hommes de confiance. Ils doivent mourir quand le roi
disparaît et sont exécutés après sa mort. […] Ce roi a un lieutenant qui commande les troupes,
livre combat aux ennemis et le remplace auprès de ses sujets12. »

Nous avons là, même si elle n’est pas nommée, très clairement la
description d’une družina, la troupe de guerriers qui, traditionnellement,
entoure les princes russes13. Le terme comme l’institution sont bien connus,
et on les retrouve encore dans les récits légendaires qui sont l’objet des
bylines, ces grands chants épiques collectés au xixe siècle. Il s’agit là d’une
forme particulière de Männerbund, institution guerrière indo-européenne14,
mais ici attachée à un roi. Le mot russe lui-même a un équivalent
scandinave, *drótt, cependant ce dernier est un terme déduit à partir de
noms composés, comme dróttinn, « seigneur, chef de guerre », dans
lesquels il survit comme archaïsme. En effet, sans doute dès l’an Mil, la
*drótt est remplacée par une autre institution, au sens plus large, la hirð,
laquelle a une fonction qui n’est plus totalement guerrière puisqu’elle inclut
des femmes, des fonctionnaires et des scaldes15. Ce parallèle étymologique
ne doit donc pas laisser à penser que l’un dérive de l’autre : le mot družina
est en effet panslave, avec anciennement le même sens partout16. De même,
tout comme le monde scandinave est passé d’une *drótt à une hirð plus
complexe et plus nombreuse, la družina s’est elle-aussi plus tard étendue et
complexifiée, voire divisée entre Malaja Družina, en quelque sorte la garde
d’élite, et la Grid’ Družina, laquelle incorpore d’autres soldats, de simples
suivants ou des serviteurs17. Cependant, alors que le changement s’est fait
vers l’an Mil en Scandinavie, il faut attendre le tournant du xie et du
xiie siècle pour qu’il se fasse en Russie18.

Le nombre de membres de cette troupe donné par Ibn Fadlân, est


remarquable : 400, une valeur que, là encore, on ne retrouve pas dans le
monde scandinave, mais qui entre dans l’ordre d’idées de ce qui existe
ailleurs dans le monde indo-européen. Romulus, premier roi légendaire de
Rome, a pour compagnons les 300 Celeres ; le roi de Sparte est entouré de
300 Hippeïs (« chevaliers ») ; les rois achéménides ont une garde de
365 jeunes gens ; le roi légendaire irlandais Conchobar est accompagné de
365 jeunes gens, de même que le roi bien historique des Francs, Clovis, se
fait baptiser avec 364 de ses hommes19. Le nombre de membres d’une hirð
est bien supérieur à cela.
Le fait que ces hommes doivent mourir avec leur roi n’est pas non plus un
élément scandinave : au contraire, les membres de la hirð se doivent de le
venger, si la mort est violente. En revanche on retrouve cette idée de
comportement suicidaire chez les Celtes, avec les soldures mentionnés par
César :
« Tandis que cette reddition [celle des Sotiates] occupait l’attention de tous nos soldats, d’un
autre côté de la ville, parut Adiatuanus, leur chef suprême, avec deux cents hommes à lui tout
dévoués ‒ on les appelle des soldures. Leur condition est la suivante : partager avec celui à qui
ils ont voué leur amitié, tous les avantages de la vie ; mais si quelque malheur lui arrive,
supporter le même sort ou se tuer eux-mêmes ; il ne s’est trouvé aucun d’eux, de mémoire
d’homme, pour refuser de mourir, quand meurt celui à qui ils ont voué leur amitié20. »

Là encore, on trouve donc dans la description faite par Ibn Fadlan des
éléments qui ne sont pas caractéristiques des Scandinaves, pas plus qu’ils
ne le sont des seuls Slaves : ils sont indo-européens en général.
Cette družina n’était pas nécessairement attachée au seul roi. À Arkona,
sur l’île de Rügen, trois cents cavaliers en armes formaient la garde du
sanctuaire de Svantovit. Toutes leurs prises de guerre étaient rapportées au
prêtre du temple21. En 1005, des Liutici païens ont secondé l’empereur
allemand lors d’une guerre contre la Pologne. Sur place, ils perdent dans
une rivière leur étendard à l’image d’une déesse et les cinquante guerriers
qui la gardaient22. Ces deux groupes de guerriers attachés à un temple ou à
une image divine pourraient être une forme de družina.

1. Helmold, Chronica Slavorum, I, 36.


2. Ménandre le Protecteur, dans Migne, Patrologia Graeca, 113, 1864, col. 908.
3. Théophylacte Simocatta, Histoire, VI, 9.1.
4. Whitby, 1982.
5. Iorga, 1925, p. 175.
6. Sur ces questions : Curta, 2004, chap. 7.
7. Proxorov, 2001 ; Sommer, Třeštík et Žemlička, 2007, p. 218. Pour une synthèse de la question,
avec liste des différents termes employés par les Slaves pour désigner leurs souverains : Lajoye,
2019.
8. Urbańczyk et Rosik, 2007, p. 263.
9. Sommer, Třeštík et Žemlička, 2007, p. 238-239.
10. Jean de Victring, Liber certarum historiarum, II, 13, cité par Słupecki, 1994, p. 167-168. Sur
l’histoire de ce trône : Geary, 2008.
11. Swift, 2013.
12. Trad. de Charles-Dominique, 1995, p. 64.
13. Lubor Niederle, 1925, p. 477-490, dresse la liste des témoignages littéraires sur l’organisation
guerrière des Slaves. Il n’insiste toutefois pas assez sur la différence qui existe entre la družina et une
simple armée.
14. Elle est aussi cependant connue des peuples turcs d’Asie centrale, mais dans des zones où
préexistaient des peuplades nomades iraniennes (Scythes, Saces, etc.).
15. Boyer, 1992, p. 96. En dehors de quelques textes littéraires qui mentionne la hirð comme une
suite, une cour, nos principales sources à son sujet, norvégiennes, sont très tardives : le Hirðskrá
(Livre de la hirð) et le Konungs skuggsjá (Mirroir du roi), tous deux du xiiie siècle. Pour l’ensemble
de ce dossier, voir : Orning, 2008.
16. Vasmer, 1953-1958, sv. « Družina » : vieux-bulgare družina, serbocroate drùžina, slovène
družína, tchèque družina, polonais drużyna. Localement, le mot a pu prendre le sens d’« équipe »,
« société », « compagnie ».
17. Nicolle, 1999, p. 18-20.
18. On aperçoit, dans les traités passé entre les Rus’ et les Byzantins au xe siècle, une ébauche de
družina. Cependant, il n’est question que de bojars, indifférenciés, entourant le prince de Kiev :
Sorlin, 1961.
19. Sergent, 1995, p. 277. Grégoire de Tours, sur le baptême de Clovis (Historia Francorum, II,
31), donne cependant le chiffre de 3000. Pour d’autres exemples, souvent tirés de la mythologie :
Sergent, 2003.
20. César, Guerre des Gaules, III, 22. Cf. aussi VII, 40, pour la même structure autour du chef
Litaviccus à Gergovie ; Plutarque, Sertorius, 14, 5, et Valère Maxime, Des Dits et faits mémorables,
II, 6, 10-11, pour la même pratique chez les Celtibères.
21. Sergent, 1994, p. 37-38, qui compare cela avec une structure équivalente à Sparte.
22. Thietmar, Chronicon, VIII, 64 = Meyer, 1931, p. 11.
DEUXIÈME PARTIE

MYTHOLOGIE
DIVINITÉS

L’organisation du panthéon chez les Slaves, et notamment dans la Rus’ de


Kiev, a longtemps fait l’objet de débats, certains pensant que ce panthéon
s’est structuré de façon tardive, sous l’influence des Varègues, les Slaves
étant parfois même supposés avoir été, avant la venue de ces Scandinaves,
de simples animistes1. Cependant, l’ensemble des sources sur la religion des
Slaves nous montre un panthéon riche, qui a vraisemblablement été bien
organisé, même si nous peinons à en percevoir les détails.
Il est très probable qu’une forme de dualisme, opposant un dieu clair,
bénéfique, à un dieu noir, maléfique, a existé chez les Slaves païens2. Selon
la Knytlingasaga, il y avait sur l’île de Rügen un dieu nommé Tjarnaglofi,
autrement dit « Tête noire ». On a rapproché ce nom d’un passage
d’Helmold mentionnant un Zcerneboch, « c’est-à-dire le dieu noir »,
autrement dit un *Černobog3. Helmold précise que ce dieu noir et le maître
du panthéon reçoivent bien tous deux un culte. Pour Boris Unbegaun, ce
dieu noir serait juste le diable des chrétiens4.
À ce dieu noir, on a cru bon d’opposer un *Belbog, nom qui apparaît dans
des textes allemands du xvie siècle et dans des toponymes. Il semble bien
que ce soit un fantôme historiographique5. Un monastère a bien été fondé
en un lieu-dit Bialoboki (« Dieu blanc »), à proximité du sanctuaire païen
de Trzebiatów6, mais cette appellation peut très bien désigner le dieu
chrétien.
Le dualisme est une forme d’organisation du panthéon qui a été
particulièrement bien implantée chez les anciens Iraniens, dont la principale
religion, le zoroastrisme, repose précisément sur l’opposition d’un grand
dieu, Ahura Mazda, et d’une divinité maléfique, Angra Mainyu.
Le fait est que le vocabulaire sacré des Slaves a subi une profonde
influence iranienne venant soit des Scythes, soit plus tard des Sarmates et
de leurs descendants. Ainsi le mot slave commun *svęt, « saint », qu’on
retrouve dans le nom de Svantovit (« Saint Seigneur »), vient de l’avestique
spǝnta-7. De même, le terme slave pour « dieu », bogъ (féminin boginija)
est directement corrélé au védique bhága (« richesse », « dieu de la
richesse ») et à l’iranien baga- (« dieu »)8. Le terme slave est un calque fait
sur l’iranien, mais pas nécessairement un emprunt direct9. Ce mot a
remplacé l’indo-européen *deiwos, « dieu (céleste) », lequel a été, comme
chez les Iraniens, démonisé : le terme div, qui existe toujours, désigne
divers monstres10. Le nom même du ciel, *dyu- ne survit plus dans
l’ensemble des langues slaves que dans celui de la pluie11.
Pour Václav Machek, les Slaves auraient connu une forme de panthéisme,
avec un dieu supérieur, dont Perun, Svantovit, Triglav, Rugievit entre autres
ne seraient que des épithètes locales12. Au début du xxe siècle, Louis Leger
pouvait affirmer que les dieux slaves n’avaient pas plus de sœurs que
d’épouses13, mais cela est bien contredit par diverses sources.
Ainsi, Ebbo, biographe d’Otton de Bamberg, nous dit que les Slaves ont
un « dieu suprême qui est glorieux et plein de toutes richesses ». Ce dieu est
déjà décrit, au vie siècle, par Procope de Césarée :
« Ils [les Sclavènes] estiment qu’il y a un dieu unique, producteur de la foudre et seul maître de
l’univers. Ils lui sacrifient des taureaux et toute espèce de victimes. Ils ne croient pas au destin et
ne lui admettent aucun rôle dans les affaires humaines. Quand ils se voient menacés de la mort
par la maladie ou dans le combat, ils promettent s’ils échappent de faire aussitôt un sacrifice. Ils
le font dès qu’ils ont échappé et ils pensent avoir racheté leur vie par cette offrande. Ils adorent
en outre les fleuves et les nymphes et d’autres divinités et pendant ces sacrifices ils font des
divinations14. »
Le voyageur arabe Ibn Fadlan décrit quelque chose d’assez proche : le
sanctuaire qu’il visite est composé d’« un grand poteau dressé là, qui a un
visage humain et est entouré de petites idoles, elles-mêmes cernées de pieux
fichés en terre ». Il ajoute : « Ces idoles sont les femmes de notre Seigneur,
ses filles et ses fils. »
Ces informations peuvent être complétées par ce que nous dit Helmold :
« Ici se trouvent des simulacres d’idoles situées devant les temples, par exemple l’idole de
Plune, nommée Podaga, ou une autre localisée dans les forêts et bois sacrés, c’est-à-dire Prove,
dieu d’Aldenburg, dont les représentations n’étaient nullement fidèles. Parmi les dieux divers
auxquels ils attribuent les champs, les forêts, les tristesses et les plaisirs, ils ne contestent pas
qu’un dieu domine les autres du haut des cieux. Ce dieu tout-puissant ne s’occupe que des
affaires célestes. Les autres ont chacun leurs fonctions et lui obéissent. Ils procèdent de son sang
et sont d’autant plus éminents qu’ils sont plus proches de ce dieu des dieux15. »

Certes, Helmold parle de plusieurs divinités, et le fait de savoir lequel est


le « dieu qui domine les autres » n’est pas clair. Cependant, nous sommes
dans la région d’Aldenburg, pour laquelle le même Helmold n’a eu de cesse
de répéter que le dieu le plus important est Prove (ou Prone), c’est-à-dire
Perun. De fait, chez les Slaves de l’Est, dans le Récit des temps passés, seul
Perun est clairement mis sur un pied d’égalité avec le dieu des chrétiens
dans les traités passés avec Byzance.
Ce Perun « Père de Tous », que l’on peut alors aisément conjecturer, n’est
pas une notion isolée : cette épithète est en effet régulièrement portée par
les maîtres de plusieurs panthéons indo-européens. Ainsi, le nom de Jupiter
inclut en lui-même cette notion : il est le « Ciel Père ». En Irlande, le Dagda
est aussi nommé Eochaid Ollathair (Eochaid « Père de Tous »), tandis que
chez les anciens Scandinaves, c’est Odin, et non Thor, qui est Allfadr ou
Alfadir (« Père de Tous »). Le maître du panthéon est régulièrement
« Père ». Que Perun le soit aussi ne serait donc pas surprenant. Ce qu’il est
important de noter est que cette hiérarchie familiale a aussi pris corps dans
le culte, dans les sanctuaires, au travers d’une hiérarchisation des idoles.
La structure de ce panthéon a-t-elle pu évoluer dans le temps ?
La possibilité a été évoquée à l’étude d’un sermon russe du Moyen Âge,
Sermon de saint Grégoire racontant comment les païens adoraient les
idoles et leur sacrifiaient. Ce sermon explique comment les cultes païens se
sont développés chez les Slaves. Il présente alors des divinités regroupées
en trois ensembles que sont Rod et Rožanicy, puis Perun, puis les Vampires
et les Bereginy. La question est de savoir dans quel ordre exactement ces
groupes se sont succédés. Une bonne part de l’historiographie soviétique a
retenu l’ordre Vampires et Bereginy puis Rod et les Rožanicy puis Perun16.
Cette succession montrerait le passage d’une religion manistique à une
religion clanique puis à une religion étatique, ceci s’accompagnant d’une
mise en place de la féodalisation. Mais pour Vladimir Vodoff déjà, ce
sermon, construit à partir d’éléments à la fois grecs et russes,
particulièrement hétéroclite, ne doit pas être pris au pied de la lettre17.
De plus la compréhension de la chronologie interne de cette succession
pose problème. La conjonction employée en vieux russe est preže ou
pereže, autrement dit : « auparavant ». On peut alors penser que le texte dit :
« Alors ils vinrent aux Slaves, et ces Slaves commencèrent aussi à sacrifier à Rod et aux
Rožanici. Auparavant, ils sacrifiaient à Peroun, leur dieu ; encore avant, ils sacrifiaient aux
Vampires et aux divinités des grèves [Bereginy]18. »

L’ordre des divinités serait alors Vampires et Beregyni puis Perun puis
Rod et les Rožanici. Cette succession de générations pourrait alors trouver
un parallèle, plus complexe cependant, en Irlande. Les textes médiévaux
irlandais nous disent en effet que l’île fut habitée d’abord par diverses
populations légendaires et primordiales, antédiluviennes (les « invasions »
de Partholon puis de Cessair), puis par trois générations divines dont les
Tuatha Dé Danann ‒ les dieux proprement dits ‒, et enfin par les fils de Míl,
c’est-à-dire les hommes. Et de tout temps, depuis l’origine, l’île est peuplée
de créatures démoniaques, les Fomoire19. Une pseudo-histoire en trois
étapes a vraisemblablement existé au Pays de Galles, où une triade (petit
texte mnémotechnique médiéval) nous dit que l’île de Bretagne portait le
nom de « Clos de Myrddin » avant d’être prise, puis d’« Île de Beli », une
fois prise pour la première fois, et enfin d’« Île de Prydain » quand elle fut
prise une seconde fois. Myrddin est Merlin, être protéiforme primordial
dont le nom est possiblement lié à la mer20, Beli est l’ancêtre des dieux
selon les généalogies galloises médiévales, quant à Prydain, il est l’ancêtre
des hommes et il a donné son nom à la Bretagne21.
On pourrait établir le tableau de correspondance suivant :

Irlande Pays de Galles Russie


Vampires
Fomoire, Partholon, Cessair Myrddin
et Beregyni
(êtres primordiaux) (être primordial)
(divinités des berges)
Nemed, Fir Bolg,
Beli
Tuatha Dé Danann Perun
(ancêtre des dieux)
(dieux)
Fils de Míl Prydain Rod et les Rožanici
(hommes) (ancêtre des hommes) (divinités de la famille)

On notera d’ailleurs qu’en Irlande, chacune des populations successives, y


compris et surtout celle des fils de Míl, vient d’Orient et de Grèce, tandis
que le sermon russe indique que le culte de Rod et des Rožanici vient de ces
mêmes régions.
S’il y a bien eu évolution du panthéon, il ne s’agit donc pas d’une
évolution réelle, mais d’une évolution mythologique, semblable à celle qui
est attestée chez les Celtes.

DIVINITÉS MINEURES

Comme tous les peuples indo-européens, et plus généralement les peuples


eurasiatiques, les Slaves ont divinisé et parfois voué un culte aux éléments
de la nature. L’Homiliaire d’Opatovice, du xiie siècle, condamne les Slaves
de Bohême qui vénèrent le soleil, la lune et les étoiles, les fleuves et les
feux, les montagnes et les arbres22. La même condamnation se retrouve
chez le Russe Kirill de Turov au xiie siècle et dans un sermon plus tardif23.
Fleuves et rivières ont pu être divinisés. Un cas est bien attesté chez les
Slaves de l’Ouest : Gutdraccus, mentionné par Arnold de Lübeck dans le
Mecklenburg, chez les Kessini, n’est sans doute qu’un nom de rivière (le
Warnow, anciennement Goderak non loin de Rostock) déformé24. De fait,
Saxo Grammaticus signale à Rostock une « divinité céleste » honoré sous la
forme d’une idole : il pourrait s’agir du même culte25.

Culte des pierres et des arbres

Le culte des pierres est attesté en Biélorussie depuis le xvie siècle, mais il
est assurément bien plus vieux puisque certaines des pierres consacrées
portent le nom d’anciennes divinités païennes26. Au xe siècle en Bohême, le
culte des pierres et des arbres est encore bien vivant27. Ce même culte des
arbres, en Russie, a sans doute des sources très anciennes28. Lorsque les
Rus’ descendaient le Dniepr en direction de la mer Noire, ils s’arrêtaient sur
une île pour rendre un culte à un arbre :
« Ayant dépassé ce lieu, ils [les Rôs] arrivent à une île portant le nom de Saint-Grégoire ; dans
cette île ils accomplissent leurs sacrifices, car un chêne énorme se dresse là ; ils sacrifient des
coqs vivants. Ils plantent des flèches tout autour [du chêne ?], d’autres [déposent] des morceaux
de pain et de viande, et une part de ce que chacun possède, comme le veut leur coutume. Ils
tirent aussi au sort à propos des coqs, soit pour les égorger, soit pour les manger, soit pour les
laisser en vie29. »

De nombreux arbres sacrés, païens comme christianisés, ont été


inventoriés en Biélorussie30. Cosmas de Prague indique que sous
Vratislav Ier (début du xe siècle), de nombreux bosquets et arbres sacrés
furent brûlés31. Chez les Slovènes de la vallée de l’Isonzo, à
Caporetto/Kobarid, le culte d’un arbre et de la source qui coulait à son pied
était encore attesté au xive siècle. Cette population est d’ailleurs qualifiée de
païenne par ses voisins italiens, au point qu’une croisade est ordonnée en
1331 : l’arbre est abattu et la source bouchée avec des pierres32.
Il y avait à Stettin près du sanctuaire de Triglav un énorme chêne avec une
source coulant à son pied33. Plus tard, on parle aussi, pour le même lieu,
d’un noyer sacré, au pied duquel s’écoulait aussi une source34.
Thietmar mentionne un bois sacré, Zutibure (variante : Zudibure,
cf. polonais Święty Bór : « saint bois ») chez des Slaves voisins de l’Elbe35.
Chez les Vagri, Prove, donc Perun, était honoré dans un bois sacré :
« Nous rencontrâmes sur notre chemin un bois qui était le seul du pays. Là, parmi les arbres très
vieux, nous vîmes des chênes consacrés à Prove, dieu de ce pays. Ils étaient entourés d’un enclos
en bois où l’on pénétrait par deux portes. Tous les villages de ce pays abondent en pénates et en
idoles, mais ce lieu est le sanctuaire de toute la région, avait son propre prêtre, ses célébrations et
divers rituels. Chaque lundi, les habitants de toute la contrée, avec le prince lui-même,
s’assemblaient pour rendre la justice. L’accès du sanctuaire n’était permis qu’aux prêtres et à
ceux qui voulaient sacrifier ou à ceux qui étaient en péril de mort et auxquels le droit d’asile
n’était pas refusé, car les Slaves ont tant de respect pour leurs sanctuaires qu’ils ne veulent
même pas laisser souiller du sang d’un ennemi le pourtour du temple36. »

Sur l’île de Rügen, le roi danois Valdemar a détruit un bois sacré nommé
Böku37.

Des nymphes

Ces éléments naturels divinisés ont été régulièrement désignés comme


étant des nymphes dans les sources chrétiennes grecques ou latines38.
La reine tchèque mythique Tetka est supposée, d’après Cosmas, avoir
honoré les oréades, des dryades et les hamadryades39. On ignore leur nom
slave primitif, même si le folklore ultérieur connaît nombre de personnages
féminins qui pourraient en être le prolongement. En Russie, il pourrait
s’agir des Beregyni ou des Vily, déjà attestées dans les sources médiévales.

PANTHÉON

Divinités non identifiables

Diverses divinités, dans les sources latines, ne sont désignées que sous un
nom classique, par interpretatio romana. Cela rend leur identification
particulièrement délicate. On a vu que Guillaume de Malmesbury
témoignait du culte rendu à Fortuna chez les Slaves de l’Ouest40. D’autres
cas peuvent être signalés. Cosmas de Prague montre le prince Vlastislav
jurer par Mars et Bellona41. Selon Widukind, dans son histoire des Saxons
écrite au xe siècle, le duc Hermann combattit les Waari (Wagri), les vainquit,
et prit chez eux une statue de bronze de Saturne qu’il fit fondre42. Les
Annales de Magdebourg signalent qu’il existait en ce lieu un temple et une
idole de Diane qui furent détruits par Charlemagne et remplacés par un
oratoire Saint-Étienne43. Une continuation anonyme de la chronique de
Richard de Poitiers, datant du xiie siècle, nous informe du culte rendu à
Mercure et Venus chez les Liutici, « non dans des temples, mais dans les
bois ou près de sources44 ».
Une fois seulement, des divinités slaves sont désignées sous des noms
germaniques. Le chroniqueur normand (d’origine anglo-saxonne) Orderic
Vital donne aux Liutici un panthéon qui est purement scandinave, et
vraisemblablement emprunté à Adam de Brême. Il mentionne « Guodenem
et Thurum Freamque »45, autrement dit les dieux d’Uppsala Odin, Thor et
Freyr46.

Bendil ou Hennil

Selon Thietmar de Mersebourg, c’est le nom d’un bâton représentant un


esprit domestique auquel des Slaves de l’Ouest rendaient un culte. Ce bâton
était couronné d’une main tenant un anneau. Il était mené de maison en
maison par un berger, et à chaque fois, il était salué au cri de « Veille,
Bendil (ou Hennil), veille47 ! ». L’édition courante du texte porte la forme
« Hennil », tandis qu’un manuscrit conservé à Bruxelles donne « Bendil »
nom que l’on peut rapprocher de l’indo-européen *bhendh- : « lier »48. La
forme Hennil a cependant été rapprochée du balte Goniglis, dieu des
bergers49.

Bereginy

Divinités féminines des berges ou des rives, mentionnées dans des textes
russes du Moyen Âge. Un sermon indique que comme les Vily, elles
seraient trois fois neuf sœurs50. L’étymologie proposée par Boris Rybakov,
sur la base du russe bereč : « protéger »51, est fantaisiste. Il n’y a pas lieu de
faire de ces divinités des « protectrices ». Il est en revanche possible que
Beregyni soit une déformation de Peregynija, nom du lieu d’échouage de la
statue de Perun à Kiev52.

Bojan

Voyant et poète légendaire mentionné dans le Dit de la campagne d’Igor.


Il est désigné comme « petit-fils de Veles »53. Bojan est un nom bulgare
courant. Un lien avec le verbe bajat’ : « dire, raconter » est possible.

Dažbog

Dieu mentionné dans diverses sources russes médiévales. Son nom


viendrait de *dadj’bog > « Dieu distributeur »54. Václav Blažek a
cependant proposé un rapprochement avec le dieu irlandais le Dagda (le
« Bon Dieu »)55, qui peut être intéressant du point de vue phonétique, mais
pose des problèmes sémantiques, puisque le Dagda est un équivalent local
de Jupiter/Zeus, tandis que Dažbog est mentionné comme étant le soleil (il
traduit le grec Hélios) et comme fils de Svarog (Hephaistos) dans
l’adaptation russe de la chronique byzantine de Jean Malalas56. Cette
assimilation à des dieux grecs eux-mêmes considérés dans cette chronique
comme des souverains égyptiens ne s’est pas faite gratuitement : une base
mythologique commune est possible57. La question de l’identité de Dažbog/
Hélios avec Xors, autre forme possible du soleil, se pose58. Dans le Dit de
la campagne d’Igor, les Rus’ sont les petits-fils de Dažbog59.
Dažbog apparaît en toponymie en Serbie sous la forme Dajbog, qui est le
nom d’une colline où se trouvait une mine d’or exploitée au Moyen Âge60.
Des toponymes polonais apparaissent au xvie siècle sous les formes
Daczbogy/Daczbogi, et du xiiie au xve siècle, on trouve encore dans la même
région l’anthroponyme Dadźbóg61. Au xive siècle, un boyard ukrainien de
Galicie porte le patronyme Dažbovič : « fils de Dažbog »62. Cela montre
bien que Dažbog a subsisté comme anthroponyme.
En Biélorussie, près de Lahoïsk (voblast de Minsk), il existe encore une
pierre nommée « pierre de Daždz’bog63 ».
Une légende serbe collectée au xixe siècle oppose un certain Dabog à
Dieu. Dieu règne sur le ciel, tandis que Dabog est le prince de la terre. Les
âmes des pécheurs étaient données à Dabog, seules les bonnes âmes allaient
à Dieu. Mais il n’y en avait pas beaucoup, aussi Dieu se résolut à régler ce
problème. Cependant Dabog était aussi puissant que Dieu et ne pouvait être
tué. Aussi ce dernier envoya Thomas étudier Dabog et voir comment sa
force pouvait être diminuée. Il apparut que Dieu ne pouvait vaincre que s’il
avait un fils. Quand Dabog entendit parler du fils de Dieu, sa mâchoire
s’ouvrit, au point de toucher à la fois la terre et le ciel, de façon à pouvoir
avaler son adversaire. Mais le fils de Dieu, à l’aide d’une lance, perça les
mâchoires de Dabog et les fixa. Alors les âmes que Dabog avait avalées
s’échappèrent64. Ce récit, dont il est difficile de savoir s’il contient encore
quelque chose de païen, est proche des croyances bogomiles concernant la
lutte entre Dieu et Satanaël (Satan). Il appartient à un type de légendes très
répandu chez les Slaves du Sud et de l’Est65. Il montre en tout cas une
conception dualiste du monde.

Div

On l’a vu, l’indo-européen *Deiwos a été, comme chez les Iraniens,


démonisé66. Aussi le terme Div sert-il, dans diverses sources médiévales et
modernes, à désigner des créatures le plus souvent maléfiques. Il est
supposé faire l’objet d’un culte païen avec les autres divinités, selon un
sermon russe ancien67. Div est un oiseau au sommet d’un arbre dans le Dit
de la campagne d’Igor. C’est aussi sous cette apparence qu’il existe dans le
folklore du gouvernement d’Olonec68. Div apparaît sans doute sous la
forme Dyj dans un apocryphe russe du xve-xvie siècle, au côté de Perun,
Xors et Trojan69. En dialecte bulgare de la région de Salonique, on connaît
la forme dev, def : « esprit malin, monstre ». Le bulgare standard est div, de
même sens. Un texte bulgare du xve siècle semble cependant lui donner le
sens de « gryphon ». Dans le folklore bulgare moderne, on connaît toujours
les diva et samodiva, sorte de rusalka70, tandis que les Slovaques et les
Moraves connaissent la diva žena ou divížena, désigant une « femme de la
forêt71 ». En monténégrin, on connaît les divovi : « ogres », et en serbo-
croate le div : géant.
Il subsiste un vestige possible de Div en tant que divinité et non démon,
dans le nom de la Dziwna, bras de l’Oder qui sépare l’île de Wolin du
continent. Dziwna est attestée au xiiie siècle sous les formes Divenow ou
Dyvennow, ce qui montre bien son rattachement à l’indo-européen
*deiwos72. Ce nom de rivière n’est pas sans rappeler les diverses Dive,
Divine ou Divette attestées dans les anciens territoires celtiques en tant
qu’hydronymes.

Gerovit

Dieu honoré à Wolgast et à Havelberg73. Selon l’un des biographes


d’Otton de Bamberg, un de ses prêtres, se faisant passer pour le dieu,
déclara : « Je suis ton dieu, je suis celui qui couvre les prés d’herbe et les
forêts de feuilles, celui qui fait fructifier les champs et les arbres et accorde
la fertilité au bétail. Tout ce que les gens utilisent vient de mon pouvoir74. »
Pour accomplir cette supercherie, ce prêtre s’était habillé comme le dieu : il
portait la cape et les restes de la robe de l’idole75. Il était considéré comme
le dieu de la guerre, et son sanctuaire renfermait un bouclier, suspendu à un
mur76. Ce bouclier était grand, plaqué d’or, et il était interdit de le déplacer
en dehors des périodes de guerre77. À Havelberg, des festivités avaient lieu
en son honneur au début du mois de mai. Ce Gerovit a donc une fonction
pleinement similaire à celle, plus tard dans le folklore chrétien, de saint
Georges.
Pour Schmittlein, ce nom est germanique et dériverait de gairu-, que l’on
retrouve dans les anthroponymes Kerwito et Gervida78. Pour beaucoup,
cependant, Gerovit doit être une transcription latine du slave *Jarovit79. Or
il existe encore chez les Slaves de l’Est un personnage qui porte un nom
très proche : Jarilo80. En Biélorussie, on considérait Jarilo comme un beau
jeune homme qui, au printemps, à l’aube, allait sur son cheval blanc à
travers les champs pour les féconder81. Jarilo est l’objet, au printemps, d’un
rituel qui ne lui est pas propre, mais qui lui est le plus souvent attribué. On
fabriquait un mannequin (parfois deux, l’autre personnage étant alors
féminin), souvent ithyphallique. Ce mannequin était ensuite brûlé, mis en
morceaux ou, souvent, noyé. Puis on l’enterrait solennellement82. En
Biélorussie, le rituel rejoint la légende, puisqu’au printemps, les jeunes
filles choisissaient l’une d’entre elles, qui incarnerait Jarilo. Elles
l’habillaient comme un garçon, avec un manteau blanc (comme le prêtre de
Gerovit), une couronne de fleurs et, dans la main gauche, une poignée
d’épis. Jarilo avait les pieds nus (comme la Dodola balkanique, personnage
central des rituels printaniers locaux)83. Elles le mettaient ensuite sur un
cheval blanc et, s’il faisait beau, le conduisaient dans les champs. Arrivées
sur les lieux, en présence des anciens, les jeunes filles l’entouraient et
chantaient :
« Il circule, Jarilo,
Par tout le monde,
Faisant pousser le blé au champ,
Aux hommes multipliant les enfants.
Et où il pose le pied,
Il y a blé par meules,
Et partout où il regarde,
L’épi fleurit84. »

On retrouve ici le type de chant attribué autrement à saint Georges, avec


la même idée de passage fertilisateur à travers les champs85. Jarilo n’est
qu’un nom parmi d’autres pour ce type de personnage : on connaît aussi en
Russie Kostroma, en Ukraine Kostrubon’ka, dans les Balkans, German (une
poupée qui était laissé à dériver sur une rivière), en Lusace et en Silésie,
Smjertnica86. Le sens principal de cette fête est la célébration de
l’enterrement de l’hiver et du renouveau du printemps87. Pourtant sa date
est incertaine ou variable. On a noté la Saint-Jean (Ivan Kupala), mais aussi
le Semik (le septième jeudi après Pâques88), dont la date primitive est elle-
même incertaine, ou d’autres dates encore plus précoces (quatrième
dimanche de Carême ou troisième avant Pâques en Lusace, en Silésie et en
Bohême). Cette diversité de formes provoquait l’étonnement de Vladimir
Propp : « Pourquoi, en dépit de toute la diversité des noms, des attributs,
des dates, des détails, les rites accomplis sont-ils aussi uniformes et
pourquoi cette uniformité est-elle à ce point déterminée que l’on pourrait
passer d’une fête à une autre par simple permutation des noms89 ? » Le
dossier concernant Gerovit nous apporte un élément de réponse : à
Havelberg, selon Ebbo, ce dieu faisait l’objet de rituels au début du mois de
mai90.

Lada

Le nom de Lada est mentionné en 1607 dans le brouillon d’un sermon qui
devait être prononcé à Ljubljana, en compagnie de deux autres divinités :
Plejn et Poberin91. Ce sermon les donne comme des divinités de l’ancienne
Carniole (Slovénie). Si ces deux derniers noms sont totalement inconnus
par ailleurs, Lada apparaît en Pologne dans des listes de noms supposés
païens mentionnées dans le cadre de rituels liés à la Pentecôte92. Mais les
sources sont toutes tardives et il est difficile de savoir si, dans ces listes qui
ressemblent à des formules rituelles mal comprises, on n’aurait pas, non pas
une divinité, mais un personnage intervenant en contexte carnavalesque.

Mokoš

Mokoš (variante Mokaš) est la seule divinité féminine connue par les
textes anciens à Kiev93, mais elle apparaît dans divers toponymes
notamment balkaniques94. Elle est aussi connue en toponymie chez les
anciens Polabes, où un village actuellement nommé Muuks s’appelait
encore Mukus en 131095. Au nord-ouest de Dresde, un lieu actuellement
nommé Mobschatz s’appelait Mococize en 109196. Dans les environs
Pegnitz (nord-est de la Bavière), Moggast s’appelait encore Mochcus ou
Mokoš au xive siècle97. Elle est donc bien une divinité panslave.
Diverses tentatives ont été faites pour expliquer son nom, qui a par
exemple été rapproché de celui de la tribu mordve (donc finno-ougrienne)
des Mokša98. Cependant, les textes russes l’ont aussi rapproché son nom du
grec μαλακία : « langueur, langueur sexuelle, onanisme », ce qui fait qu’on
pensé à un étymon mok- : « humide »99, et qu’on a fait de Mokoš une sorte
d’Aphrodite ou d’Astarté slave100. Depuis on a quasiment toujours identifié
cette déesse à la Terre Mère Humide du folklore des Slaves de l’Est.
Cependant une étymologie plus satisfaisante, à la fois du point de vue
linguistique et du point de vue mythologique, a été proposée. Elle prend
pour base l’étymologie du nom de la déesse irlandaise Macha, déesse-mère
par excellence. Macha dérive en effet de *Makisia101, après spirantisation
du k102. Cela placerait alors le nom slave dans un ensemble bien concret de
déesses-mères : l’irlandaise Macha (<*Makisia) ; les gauloises Magiseniae
(divinités féminines plurielles attestées à Strasbourg)103 ; la latine
Maia/Maiia (mère de Mercure après assimilation à la Maia grecque) : ce
nom viendrait d’un primitif *Magia, et la variante Maiesta (= *Magiesta)
est attestée104. Les celtisants opteront pour le sens « Plaine », les latinistes
pour « Grande »105, les slavistes pour « Humide », mais tous se rapportent
sans doute primitivement à la Terre.
Macha est une déesse triple, et surtout trifonctionnelle106. Elle est
prophétesse ou voyante, elle est reine et guerrière, et surtout, elle est garante
de la prospérité. De la prophétesse et de la guerrière, nous n’avons qu’une
seule attestation, un seul texte garant à chaque fois107. Ce sont donc des
rôles qui ne sont sans doute pas primordiaux, bien que solidement établis.
En revanche, l’aspect de troisième fonction est attesté par les multiples
variantes d’un même récit et a donc dû être le plus populaire. Deux des
versions disent :
« Il y avait un riche paysan des Ulates sur le sommet des montagnes et dans le désert. Son nom
était Crunnchu, fils d’Agnoman. En tant qu’habitant du désert, il augmenta beaucoup sa
richesse. Il était entouré de nombreux fils. La femme qui était avec lui mourut, à savoir la mère
de ses enfants. Il fut longtemps sans femme. Un jour qu’il était sur sa couche, seul dans sa
maison, il vit une belle jeune femme dans la grande maison, venant vers lui avec une excellence
de forme, de vêtement et d’aspect. La femme s’assit sur une chaise près du foyer et elle attisa le
feu. Ils furent là jusqu’à la fin du jour sans se parler. Elle prit alors un plat de cuisine et un tamis
et elle prépara la nourriture dans la maison. Quand vint la fin du jour elle prit des vases et elle se
mit à traire les vaches sans demander la permission.
Après être entrée dans la maison, elle fit un tour vers la droite et elle entra dans la cuisine. Elle
donna des ordres aux gens, elle s’assit sur une chaise à côté de Crunnchu. Chacun alla alors à
son lit. Elle resta après tout le monde, elle couvrit [?] le feu et elle fit un tour à droite. Elle vint à
lui sous sa couverture et elle lui mit la main au côté. Ils furent ensemble jusqu’à ce qu’elle fut
enceinte de lui. Sa richesse augmenta par son union avec elle. Elle se plaisait à sa prospérité et à
son équipement108. »

« Crunniuc, fils d’Agnoman, des Ulates, était un aubergiste riche. Il était dans les déserts et dans
les montagnes et il avait des fils. Sa femme mourut alors. Un jour qu’il était seul dans sa maison,
il vit une femme entrer chez lui. La femme lui parut distinguée. La femme se mit tout de suite,
quand elle s’assit, à préparer la nourriture, comme si elle avait été auparavant dans la maison.
Quand la nuit vint, elle s’occupa des gens sans rien demander. Elle dormit avec Cruinniuc cette
nuit-là. Elle fut longtemps avec lui après cela et, par elle, il ne manquait ni fruit ni nourriture, ni
équipement ni vêtement109. »

Ainsi, Macha s’avère donc être une véritable fée du logis, et la suite de
l’histoire sera typiquement mélusinienne : incapable de résister à la
transgression d’un interdit, le « mari » de Macha voit celle-ci partir, avec la
fortune, et l’ensemble des hommes du peuple est condamné à souffrir
durant cinq jours et quatre nuits, et pendant neuf générations, des douleurs
de l’accouchement.
Chez les Slaves, il ne subsiste de traces de Mokoš, en dehors de la
toponymie, qu’en Russie, sous le nom de Mokoša ou Mokuša. Cette
dernière n’est jamais guerrière. Elle a pu être prophétesse. En tout cas, à
partir du xvie siècle, et sans doute avant, son nom sert à désigner
des sorcières, des guérisseuses : « Es-tu allée chez Mokuša ? » est une des
questions que doivent poser les confesseurs aux femmes dans un recueil de
règles religieuses de ce même siècle110.
Mokoša est elle aussi une véritable fée du logis. Pour les habitants de
Vologodčina, elle est une femme avec une grande tête et des longs bras. Elle
apparaît les nuits, dans les maisons, et file la filasse laissée sans
bénédiction. Des légendes de la région d’Oloneck donnent une image plus
détaillée de Mokoša :
« Quand le lainage tombe beaucoup on dit : « Oh, c’est Mokuša qui a tondu un mouton. » Quand
on entend la nuit le bruit de la quenouille on dit que Mokuša file, qu’elle va d’une maison à
l’autre et file la filasse pendant les nuits, et aussi tond des moutons ; si, en sortant d’une maison
elle frappe avec une quenouille contre la soupente, cela signifie qu’elle est mécontente et peut
même couper un peu de cheveux des maîtres de la maison111. »

Ainsi, même si Mokoša semble particulièrement liée à la laine et au


filage, elle n’en reste pas moins un esprit domestique112. Selon Barsov, qui
a bien étudié les croyances qui lui sont liées dans la région d’Oloneck,
Mokoša est la « protectrice de l’élevage des moutons, du filage et de tout ce
qui concerne des affaires des femmes », c’est-à-dire le ménage. On retrouve
là les principales caractéristiques de la Macha de Crunnchu.
Macha et Mokoš disposent ainsi de quelques points communs forts, à
commencer par leurs noms113.

Pereplut

Divinité condamnée dans divers textes russes médiévaux114. Ce n’est plus


qu’un nom.

Perun

Dieu de l’orage, principal dieu du panthéon des Slaves. Perun a été partie
prenante du débat entre normannistes et anti-normannistes, débat qui visait
à savoir qui était à la base de l’État kiévien : les Slaves, ou les Scandinaves.
De ce fait, on a parfois voulu faire de Perun un simple décalque de Thor
apporté par les Varègues115. Mais c’est plutôt l’inverse qui s’est passé : les
Varègues venus en Russie ont d’eux-mêmes reconnu en Perun leur Thor.
Pour Lubor Niederle le simple fait que le nom slave existât ainsi que sa
grande expansion parmi les peuples slaves constituaient des preuves
suffisantes de son antériorité à l’installation des Varègues116.
B. O. Unbegaun adopte une solution intermédiaire en expliquant que le
culte de Perun a été important en Russie (au point de n’être réellement
attesté que là par des sources anciennes), uniquement parce qu’il a été
ravivé par les élites scandinaves au pouvoir117. On note d’ailleurs que c’est
seulement après l’arrivée des Varègues en Russie et que les Slaves ont
commencé à porter des amulettes en forme de hachette, sur le modèle du
marteau de Thor. Cette pratique a duré du xe au xiiie siècle118. La hache est
en effet une possible alternative au marteau dans l’iconographie de
Perun119.
Chez les Slaves de l’Ouest et du Sud, le nom de Perun peut parfois être
singulièrement déformé. Il peut être ainsi Prove (var. Prone) chez les Slaves
de l’Ouest120. Le nom du premier prince chrétien des Croates, Porga ou
Porin, pourrait être un dérivé de Perun, le prince lui-même pouvant être
légendaire, version évhémérisée du dieu devenu ancêtre d’une lignée121.
On a parfois rapproché un nom balkanique de l’Iris germanica, perunika,
de celui du dieu de l’orage. Cela semble n’avoir pas de fondement
crédible122.
Lorsqu’au début du xe siècle, les Rus’ signent des traités avec Byzance, les
païens jurent « par leurs armes, par Perun leur dieu, et par Volos, dieu du
bétail ». Et en cas de violation du traité : « Que ceux qui ne sont pas
baptisés n’aient aucun secours de Dieu ni de Perun, et qu’ils ne puissent se
protéger avec leurs boucliers, et qu’ils soient massacrés avec leur propre
épée, avec leurs flèches ou toute autre de leurs armes, et qu’ils soient
esclaves dans tous les siècles123. » Ces traités montrent bien que Perun et
Volos sont les principaux dieux de Kiev. À peine huit ans avant le baptême
de Vladimir, celui-ci implante un nouveau sanctuaire dans la ville, et son
oncle fait de même à Novgorod :
« Et Vladimir commença à régner seul dans Kiev ; puis il établit en dehors du palais du terem,
sur une éminence, plusieurs idoles : Perun en bois, avec une tête d’argent et une barbe d’or, et
aussi Xors, Dažbog, Strybog, Simargl et Mokoš. On leur offrit des sacrifices. Le peuple offrit ses
fils, ses filles comme victimes aux démons : ils souillèrent la terre de leurs sacrifices, et la terre
russe et cette hauteur furent souillées de sang. Mais le Dieu très bon ne voulut pas la mort des
pécheurs. Sur cette éminence est aujourd’hui l’église de saint Basile dont nous parlerons plus
bas. Mais revenons à notre récit. Vladimir établit alors Dobrynja son oncle à Novgorod.
Dobrynja vint à Novgorod et il éleva une idole de Perun sur le fleuve Volxov. Et le peuple lui
offrit des sacrifices comme à Dieu124. »

Mais huit ans plus tard, donc, l’idole est abattue :


« Comme présent nuptial pour la princesse, il rendit Xerson aux Grecs et revint lui-même à
Kiev. Quand il arriva, il ordonna de renverser les idoles. Il fit débiter les unes et jeter les autres
au feu. Il ordonna d’attacher Perun à la queue d’un cheval et de le traîner du haut en bas au-
dessous de Boryčev jusqu’au ruisseau ; et il enjoignit à douze hommes de le battre avec des
bâtons, non pas qu’il estimât que le bois eût quelque sentiment ; mais pour faire affront au
démon qui, sous cette forme, avait trompé les hommes, et pour le punir de ses tromperies. « Tu
es grand, Seigneur, et tes actions sont merveilleuses. » Hier il était honoré par les hommes,
aujourd’hui le voici insulté. Tandis qu’on le traînait le long du Ručaj [un ruisseau] jusqu’au
Dniepr, les païens pleuraient sur lui, car ils n’avaient pas encore reçu le saint baptême. Or, après
l’avoir traîné, ils le jetèrent dans le Dniepr. Vladimir disait à ses serviteurs : « S’il s’arrêtait
quelque part, repoussez-le du rivage jusqu’à ce qu’il ait passé les cataractes : alors vous le
laisserez. » Le vent le jeta sur une grève qui depuis a été appelée la grève de Perun, nom qu’elle
porte encore aujourd’hui. […] Il bâtit l’église Saint-Basile sur l’éminence où se trouvait l’idole
de Perun et d’autres, et où le prince et le peuple leur faisaient des sacrifices. »

La même chose a lieu à Novgorod :


« L’archevêque Akim, de Korsun, vint à Novgorod et il détruisit les lieux de sacrifices et il
frappa Perun, qui se tenait à Novgorod sur Perynia, et il ordonna de le jeter dans le Volxov. Et
après qu’ils l’eurent fait tomber avec des cordes, ils le traînèrent dans la boue, en le fouettant de
verges et en le frappant ; et un démon sortit Perun et se mit à crier : « Oh ! malheur à moi ; je
suis tombé en ces mains impitoyables ! » Et il flotta sous un grand pont et il jeta sa massue sur le
pont ; et aujourd’hui encore avec cette massue, des insensés se battent les uns les autres pour
faire plaisir aux démons. Et il leur interdit à tous de le recueillir quelque part. Et un riverain de la
Pidba alla le matin au bord de la rivière au moment où Perun échouait sur le bord et il le
repoussa avec une perche : « Mon petit Perun [Perušice] tu as jusqu’ici assez bu et mangé.
Maintenant va loin d’ici, continue de flotter de ce monde jusqu’en enfer, et disparaît dans
l’impénétrable noirceur »125. »
Perun apparaît plus tard dans des textes folkloriques, notamment deux
chansons slovaques :
« Le dieu Parom derrière les nuages
Vit cela irrité.
Soudain il lance la foudre sur son front.
Aussitôt avec son enfant elle est pétrifiée126. »

« Dans ces temps-là,


Au temps des dieux anciens,
Du dieu Parom. »

Selon une légende de Polésie sur l’origine du feu :


« Le feu parut pour la première fois de la main de Perun. Cela se passa ainsi… Le diable se
démenait ne sachant pas où se cacher ; enfin il se réfugia sous un arbre mort (sec) ; pour tuer le
diable, Perun frappa l’arbre avec une telle force que celui-ci s’enflamma… Puis chaque fois
qu’il eut besoin de feu, il frotta un morceau de bois sec contre un autre et en tira une
flamme127. »

Ailleurs en Biélorussie, on disait encore au xixe siècle que Piarun était une
très grande personne, avec une grande tête, les yeux noirs, et une barbe en
or. Il tenait un arc dans la main droite et un carquois dans la gauche. Il
voyageait sur un char dans le ciel et lançait des flèches ardentes128.
Dans un conte polonais recueilli en Galicie, il est dit :
« Un seigneur allait chasser tous les dimanches avant la messe. Un jour, il y alla, il marcha
jusqu’à ce qu’il ne puisse plus chasser : il était temps d’aller à la messe. Mais voilà qu’un nuage
noir arrive, et qu’il commence à tonner au loin. Le seigneur regarde et voit sur la rivière un
grand oiseau laid posé sur une pierre. Alors il pense en lui-même : « Je n’ai encore rien pris. » Il
se souvint que pendant sept ans il avait porté dans son sac une balle bénite. Et sans trop réfléchir,
il enleva les munitions de son fusil pour y placer la balle bénite, il fit feu et l’oiseau tomba de la
pierre sur le sol. Alors il se rapprocha de lui, le souleva et le regarda, car il n’avait jamais vu de
semblable oiseau, et il se dit : « Quel dommage d’avoir utilisé cette balle sur un oiseau si
moche. » Alors quelqu’un cria derrière lui : « Ne te tracasse pas, j’ai couru après cet oiseau
pendant sept ans sans pouvoir l’atteindre. Pendant que tu le visais, je te visais, toi. Si tu ne
l’avais pas tué, je t’aurais tué. » Alors, le seigneur fut effrayé, regarda autour de lui, et vit devant
lui un homme immense, comme un arbre, tenant un fusil gros comme une bûche. C’était Ṕeron
(Pieron), qui prit le seigneur par la main et parla longtemps avec lui. Ils ont examiné leurs fusils,
puis il (Ṕeron) lui dit de ne pas chasser le dimanche et il envola comme le vent129. »
Quelques proverbes et incantations sont aussi connues : pour faire face à
un vent tourbillonnant, les Biélorusses s’asseyaient par terre et criaient :
« Que Perun te frappe130 ! » En Ukraine, pour maudire quelqu’un, on
pouvait dire : « Que perun te tue ! » En Russie et en Slovénie, la même
imprécation existait sous la forme « Que perun t’emporte ! » ou « Que
l’éclair de perun te frappe ! »131. Chez les Tchèques, on connaît encore
« Puisse perun te foudroyer132 ». Le mot perun, ici, peut aussi bien
s’entendre comme le dieu, ou comme la foudre. Les mêmes formes existent
chez les Slovaques où l’on dit : « Que parom soit sur toi ! » ou « Que parom
te tue ! »133.
En Biélorussie, on dit que « quand la foudre [piarun] éclate, c’est que
Dieu bat le diable134 ». En Bulgarie, on répond à la devinette : « Perucan
sauta et sauta encore et choqua le monde entier » par « le tonnerre »135.
Parfois, en Russie, le mot se retrouve dans des expressions plus anodines :
« Quel perun cliquette là-bas ? » (c’est-à-dire : « quel est ce bruit ? ») ou
encore : « Il tourbillonne comme si perun le faisait avec lui136. » Dans
l’ouest de la Biélorussie, les potiers considèrent que si une de leurs
productions s’est fendue dans le four lors de la cuisson, c’est qu’elle a été
frappée par la foudre (piarun bijeć)137.
Perun fait partie des rares divinités slaves à avoir été empruntées par des
populations non-slaves. On le retrouve ainsi chez divers peuples finno-
ougriens138.
Il existe un nombre important de toponymes dérivés de Perun dans les
Balkans139. En Russie, Peryn est le lieu où se trouvait le sanctuaire de
Perun, au-dessus du Volxov, près de Novgorod140. Perunovo est un lieu-dit
du bassin de la Volga141. En Pologne, diverses localités portent le nom de
Peruny ou Piorunow. Il pourrait s’agir simplement d’endroits où la foudre
est tombée142. Marija Gimbutas signale une Perunowa gora :
« colline de Perun » (non localisée)143. En Bulgarie, Perin ou Piren planina
est une montagne du sud-est du pays, entre les fleuves Struma et Mesta144.
Perin ou Pirin est un lieu-dit au sud de Petstera (dans les Rhodopes),
identique à un Perunova Gora (« Montagne de Perun ») attesté par
ailleurs145. La ville de Pernik, au sud-ouest de Sofia, est sans doute un
ancien Perin-grad146. En Slovénie, Perunja ves est le village
« de Perun147 », et Perunji vrh, le pic « de Perun148 ». Une colline s’appelle
aussi Porun, non loin d’un endroit nommé Trebišče (« lieu de
sacrifice149 »). En Bosnie, près de la ville de Stolac, se trouve un lieu
nommé Peringrad150. En Croatie, le bois de Perun est un lieu situé près de
Poljica, sur le littoral151. En Serbie, il existe une Perun gora : « colline de
Perun » (non localisée)152, ainsi qu’un lieu nommé Perunovac153. En
Macédoine, au nord-est de la ville de Kriva-Palanka, se trouve un lieu-dit
Perin154. En Albanie, au sud du pays se trouve une localité nommée
Përrenjas155. Un lieu-dit au nom slave, Gora Perun : « colline de Perun » a
été recensé en Roumanie (non localisé)156. Enfin, en Allemagne, une colline
de Saxe, sur l’Elbe, porte le nom de Pirna, alors qu’un village s’appelle
Pronstorf dans le Holstein, région de Segeberg (Perone en 1199)157. Un
lieu-dit de la région de Stralsund (ancienne région de la Hanse), portait le
nom de Prohn (Perun en 1240)158. Ce relevé démontre bien que le nom de
Perun est attesté chez la plupart des Slaves.
Le nom de Perun signifie « le Frappeur ». Il est apparenté à l’anglo-saxon
Fercal (« éclair »)159, avec un changement de suffixe qui n’est pas résolu ;
au norois Fjörgynn (amant de Frigg), dont la mythologie semble totalement
perdue160 ; à l’irlandais Erc (héros, tueur de Cuchulainn)161 ; sans doute au
grec Keraunos (épithète de Zeus « tonnant »)162 ; au thrace Perkos (épithète
du Héros cavalier thrace)163 et au phrygien Perkos, anthroponyme fréquent
dans le monde hellénistique, attesté par l’épigraphie, mais
vraisemblablement originaire de Phrygie ; au lituanien Perkunas (dieu du
tonnerre, « tonnerre »)164 ; au letton Perkons (dieu du tonnerre,
« tonnerre »)165 ; au prussien Percunis (dieu du Tonnerre)166 ; au sanscrit
Parjanya (probable synonyme d’Indra, dieu du Tonnerre)167 ;
enfin à l’iranien ancien Piran (démon, chef de guerre d’Afrasiab)168. Perun
est donc indissociable du chêne, dont il est étymologiquement proche169.
Dans les diverses langues indo-européennes, le même étymon a servi de
base à des noms désignant la terre ou une colline boisée. Ils se retrouvent
dans les langues slaves avec le slavon Pregynja (« colline boisée ») ; le
russe ancien Peregynja (« colline boisée ») mais aussi Perynja (colline du
sanctuaire de Perun à Novgorod) ; et le polonais Przeginia
(« colline boisée »)170.
Dans les textes russes médiévaux, Perun est régulièrement assimilé au
grec Zeus171. Beaucoup d’idoles (ou du moins de figures anthropomorphes)
ont été identifiées à Perun. La seule pour laquelle cette identification soit
fiable se trouve sur une plaque-boucle découverte dans la nécropole morave
de Mikulčice (République tchèque), datant du ixe siècle172. Le personnage
d’orant qui s’y trouve figuré porte une corne, comme nombre d’idoles
slaves et baltes, et surtout dans la main droite un marteau, ce qui suffit à
l’identifier173. Il pourrait certes s’agir d’une représentation de saint Éloi
(dont l’un des attributs est aussi un marteau), mais ce saint n’est jamais
montré avec une corne.
Si l’on en croit quelques vestiges conservés dans le folklore moderne,
Perun a pu être aurige. Le biélorusse Piarun l’est, mais cela peut très bien
être un emprunt au lituanien Perkunas. Les Mordvins gardent l’idée que
leur Purgine-pas, emprunté aux Slaves, est un aurige. C’est un dieu armé de
la flèche (la foudre) et d’une massue ou d’un marteau (le tonnerre). En
Russie, au xviiie siècle encore, les pierres à foudre ‒ les haches polies
néolithiques ou bien les bélemnites (fossiles de céphalopodes de forme
allongée et pointue) ‒ étaient appelées perun ou « traits de perun », ou
encore « doigts du diable »174. En Pologne on appelait ces fossiles strzałka
piorunowa, « flèche du tonnerre » ou « flèche de Pieron », et en Ukraine
hromova strilka, « flèche tonnante »175. En Pologne encore, les pierres de
foudre sont aussi appelées piorunek ou « baguettes sacrées » en Mazovie176.
En slovaque, on connaît l’expression paromova strela : « flèche de Parom »
ou « flèche du tonnerre »177. En Biélorussie, ce sont les haches et couteaux
en silex que l’on nomme « flèches de Perun178 ».
Il subsiste, essentiellement dans le folklore balkanique, une fête
printanière liée à la fertilité et nommée (avec de multiples variantes selon
les régions) Perperuna ou Dodona. Ce nom pourrait être un vestige de celui
d’une éventuelle parèdre de Perun179. Il reste un souvenir très net de ce duo
« dieu tonnant/déesse terre » dans un conte biélorusse collecté par
Alexandre Afanassiev, où il est question d’un tsar Serpent (car Zmiulan)
qui craint, au point de se cacher sous un arbre, le tsar Feu et la tsarine
Foudre180. Cela n’est pas fortuit car une invocation notée au xixe siècle dans
la région d’Arkhangelsk mentionne le même couple :
« Comme le tsar Tonnerre et la tsarine Éclair nos ennemis, les démons, s’enfuient… tous nos
ennemis et démons doivent aussi s’enfuir… vers leurs propres lieux de résidence, ne jamais
réapparaître, ne jamais revenir, pour toujours et toujours, Amen181. »

Ainsi, jusque dans le folklore moderne, et à l’instar du Thor scandinave,


le dieu de l’orage semble être resté indissociable de sa mère la terre182.
Chez l’ensemble des Slaves, une part importante de la mythologie de Perun
a été transférée aux saints Élie et Georges183.

Pizamar

Divinité honorée par les Rani, à Asund (aujourd’hui Jasmund) sur l’île de
Rügen. Pour Schmittlein, ce nom est germanique184. Louis Leger l’a
toutefois rapproché du slave bes : « diable »185.

Podaga

Divinité mentionnée par Helmold à Plön chez les Obodrites. Ce nom est
écrit Pogaga dans un manuscrit. Sa statue était conservée dans un temple186.
Ce n’est plus qu’un nom, lequel a été rapproché de Pogoda, soi-disant
déesse de la température dans le panthéon imaginaire du polonais Jan
Długosz187.

Porenut

Dieu honoré par les Rani, sur l’île de Rügen, dans leur ville de Carintia
(Garz). Il avait son propre sanctuaire. Son idole avait quatre visages, un
cinquième visage était tenu entre les mains du dieu au niveau de sa
poitrine188. Il pourrait être le « fils de Perun189 ».

Porevit

Dieu honoré par les Rani, sur l’île de Rügen, dans leur ville de Carintia
(Garz). Il est appelé Puruvit par la Knytlingasaga, Il avait son propre
sanctuaire. Son idole avait cinq visages, « mais ses mains étaient vides190 »,
précise Saxo Grammaticus. Il pourrait être le « Seigneur qui frappe »,
autrement dit une autre forme de Perun.

Pripegala

Adelgot, évêque de Magdebourg, appelle en 1108 à la croisade contre les


Slaves païens, dénonçant un dieu nommé Pripegala, qu’il assimile à
Priape191. Son nom est assurément déformé, et a donné lieu à diverses
hypothèses192. Une des plus récentes et des plus intéressantes le fait dériver
de *pribygolva : « chasseur de têtes193 ».

Redigast, Radigost

Voir Svarožič, infra.

Rod

Rod est régulièrement accompagné dans les sources russes anciennes de


divinités secondaires, les Rožanicy194. Il apparaît encore dans certains
dialectes russes avec le sens de « fantôme ». De fait, les offrandes accordées
aux Rožanicy (pain, laitages ou miel) étaient les mêmes que celles faites
aux morts195. Rod pourrait être un équivalent chez les Slaves de l’Est de ce
que sont Toutatis pour les Gaulois ou Vofionus pour les Ombriens, c’est-à-
dire le dieu de la tribu, du peuple (cf. le russe rodina : « patrie »)196. Un
texte médiéval russe tardif le localise dans le ciel et fait de lui celui par qui
les enfants naissent197. Il est peut-être lié à un culte phallique198. Lubor
Niederle suppose, mais sans certitude, que Rod et les Rožanicy ont pu
favoriser les bonnes couches199. Pour Vittore Pisani, les Rožanicy
pourraient être les Parques locales200. L’origine livresque, chrétienne, de
Rod et des Rožanicy, qui traduisent parfois les grecs genesis et genealogia
dans les textes russes, est aussi possible201. Boris Rybakov a voulu faire de
Rod un « dieu suprême des cieux et de la terre », commandant aux
éléments, au soleil, à la pluie, etc.202. Cela n’a pas de base avérée203.

Rugievit

Nommé Rugieuithus par Saxo et Rinvit par la Knytlingasaga, c’est le dieu


éponyme des Rugiens anciens habitants germaniques de Rügen, remplacés
par le peuple slave des Rani au haut Moyen Âge. Son nom peut signifier
« Seigneur de Rügen204 ». Il était honoré à Carintia (Garz/Korenica). Son
idole avait sept faces, et sa tête accueillait le nid d’hirondelles. L’idole
portait une ceinture à laquelle étaient attachées sept épées, le dieu en tenant
une huitième dans la main droite. Saxo Grammaticus l’assimile à Mars205.
Pour Schmittlein, ce nom serait uniquement d’origine germanique206. Il est
possible qu’il soit synonyme de Gerovit207 ou de Perun208.

Simargl

Simargl ou Semargl est une divinité du panthéon de Vladimir à Kiev.


D’autres sources russes scindent parfois son nom en deux : Sim et Regl209.
Ce n’est plus qu’un nom. Il semble que ce soit un emprunt aux langues
iraniennes, et qu’il faille y reconnaître un oiseau fabuleux de la mythologie
iranienne : Sīmurğ (avestique Saēna-marǝga)210. On peut invoquer à l’appui
de cette théorie l’arménien siramarg : « paon », qui est aussi un emprunt à
l’iranien. Sur cette base, il a été proposé que Simargl soit synonyme de Div,
lequel était dans les textes les plus anciens un oiseau fabuleux, mais cela
pose un problème de cohérence, car Simurg est une créature bénéfique
tandis que Div est un démon211.

Siwa

Déesse mentionnée par Helmold chez les Polabes. Son nom exact était
peut-être *Živa : « déesse de la vie212 ». Mais Vittore Pisani a proposé un
rapprochement avec le gotique heiwa : « famille213 ». Un manuscrit de
Copenhague précise qu’elle était honorée par les habitants de Ratzeburg214.
Une déesse nommée Żywie est mentionnée dans le panthéon fantaisiste de
Jan Długosz, chroniqueur polonais du xve siècle215. On notera toutefois
qu’un manuscrit d’Helmold porte la forme Synna : le nom même de Siwa
n’est donc pas assuré.

Stribog

Dieu nommé dans le panthéon de Vladimir à Kiev, dans une homélie


attribuée à Jean Chrysostome et dans le Dit de la campagne d’Igor216. Dans
ce dernier texte, les vents sont désignés comme étant ses petits-fils. Une
personne nommée Strzyboga est connue en Pologne au Moyen Âge217. Il
existe deux hypothèses anciennes concernant l’origine de son nom. La
première le fait venir de stri-, impératif du verbe *sterti : « étendre,
répandre », stri- : correspondant à l’iranien srī ou au sanscrit Ṣrī218. Stri-
pourrait être aussi une forme tabouée de sitr’ : « tourbillon, abysse219 ».
Plus récemment, Thomas Gamkrelidze et Vjačeslav Ivanov ont proposé de
rapprocher stri- du russe moderne stroj (cf. vieux russe stryj, ukrainien strij,
bulgare stryj) : « oncle paternel », mot comparable au sanscrit pítṛvyas ou
au latin patruus. Stribog serait ainsi un « Dieu Père »220. Il serait alors
l’équivalent du sanscrit Dyáuṣ Pitā, du latin Jupiter, du germanique Tīwaz
ou du grec Zeus Pater, désignant tous un dieu du ciel diurne, qualifié de
père221. Enfin, Alexander V. Ivanenko a proposé un rapprochement avec le
scythique *S(t)rī-baγa, désignant un dieu du vent, de la tempête222. Ce dieu,
primitivement différent du dieu de l’orage, a pu parfois fusionner avec
celui-ci, comme à Rome ou en Grèce, tandis qu’en Inde ou chez les Slaves,
le dieu de l’orage, Indra d’un côté, Perun de l’autre, en sont venus à occuper
une place prééminente, aux dépens du dieu ciel.

Svantobog

Voir Svantovit, infra.

Svantovit

Dieu principal des Rani sur l’île de Rügen. Il est brièvement mentionné
dans un Diplôme de l’empereur Frédéric (sous la forme Szuentevit)223, mais
il est surtout connu par Saxo Grammaticus. Si son principal sanctuaire était
à Arkona, Saxo précise bien qu’il avait d’autres temples.
Svantovit, combinant des aspects des première et deuxième fonctions
indo-européennes, pourrait être une forme locale de Perun224. Pour Roman
Zaroff, il serait similaire à Gerovit, et serait plus un dieu associé à la fertilité
agraire, qui n’aurait acquis des fonctions guerrières que lors de l’installation
des Slaves dans les régions baltiques225. Pour Lubor Niederle, c’est une
forme locale de Svarog : il aurait donc été un dieu solaire avant de devenir
dieu de la guerre226.
Svantovit apparaît sous la forme Svantobog (Suentebueck) dans un
fragment de la Passion des martyres d’Ebbekestorp (xive siècle), ce qui
pourrait montrer que vit (terme peut-être emprunté à l’iranien) doit être
considéré comme un synonyme de bog : « dieu227 ». Svanto-, du slave
commun *svętъ, est lui-même un reflet de l’avestique spǝnta : « saint ».
Svantovit serait donc le « Saint Seigneur ».
Svarog

Le nom de Svarog apparaît dans un passage de la version russe de la


Chronique de Jean Malalas, intégré à la Chronique hypatienne à
l’année 1114. Svarog y est comparé à Hephaistos, aurait été le premier à
forger des armes et il serait à l’origine d’une loi prescrivant la monogamie
(ce qui n’est pas un trait slave)228.
Svarok apparaît comme anthroponyme sur une céramique du xiiie-
xive siècle découverte à Tsarevets, forteresse localisée par de Veliko

Tarnovo, en Bulgarie229. En Pologne, chez les Kachoubes, existent les


toponymes Swarożyno siodło et Twarożna góra. La substitution de l’initiale
et son remplacement par un « t » relève sans doute d’un tabou. On la
retrouve dans divers toponymes de Bohême et de Moravie du type
Tvarožna. En Styrie, des montagnes sont nommées Twarog et
Tbaraschitzberg dans des documents des xive-xve siècles230. En
anthroponymie, dès le vie siècle, on trouve la mention d’un mercenaire slave
au service des Byzantins, portant le nom de Suarunas, sans doute bâti sur le
même étymon231.
Dans le folklore tchèque et slovaque, il existe un démon nommé Rároh,
Raroh, Rároch, Raroch, Rarách, Rarach, etc., et en Pologne un démon
similaire nommé Raróg. C’est un personnage qui peut être aussi bien
généreux que vindicatif, et qui peut prendre la forme d’oiseaux, d’animaux
ou de dragons. Son corps brille, lance des étincelles, et un rayonnement sort
de sa bouche. Il lui arrive de s’en aller par la cheminée et de se transformer
en tourbillon de feu ou de vent232. On connaît les expressions Boh svàrycsa
(Polésie) ou Bóg się swarzy (Pologne) pour désigner le tonnerre233. Mais
svàrycsa ou swarzy pourraient plutôt dériver de Svarožič.
Au xixe siècle, le slaviste V. Jagić a émis que le nom de Svarog a été
transmis par les Slaves de la Baltique aux Russes234. On notera l’existence
d’un dieu du soleil nommé Suaixtix/Swayxtix dans des sources prussiennes.
Les rapprochements opérés entre le nom et la fonction de Zvarog et ceux de
l’iranien Zurvan sont très critiquables235. Roman Jakobson a tenté un
rapprochement avec Varhaγn, forme en moyen iranien de l’avestique
Vǝrǝθraγna236. Un autre rapprochement avec le védique svarāj-, « qui règne
par soi-même », épithète de diverses divinités majeures, a été suggéré237.
Le rapprochement avec le sanscrit svar : « soleil, soleil levant », et svarga :
« ciel, paradis, domaine d’Indra », a aussi été envisagé238. S’il devait se
vérifier, Svarog serait alors un nom basé sur le même étymon indo-
européen que Xors.
Plus intéressant du point de vue phonétique et mythologique est le
rapprochement opéré par François Cornillot avec l’iranien *Aspa-wāragan :
« coursier de Wāragan » (Vǝrǝθraγna sous sa forme de faucon), nom qui
survit dans celui de l’Ossète Æfsūrǧ, cheval de Wasturgi (saint Georges), et
qu’on retrouve dans divers noms de souverains scythes sous les formes
grécisées de Spargapeithès ou Spargapisès239. Le Rároh des traditions
tardives des Slaves de l’Ouest ne serait alors pas un dérivé direct de Svarog,
mais plutôt de l’équivalent slave de wāragan (« faucon »)240. Enfin, un
dernier rapprochement, à partir de l’iranien *svāra- : « fort, puissant,
seigneur », a été envisagé241.

Svarožič

Svarožič est présent dans un texte russe ancien, le Sermon d’un adorateur
du Christ, qui condamne ceux qui adorent le feu nommé Svarožič, et lui
vouent un culte sous le séchoir à blé242. Pour Boris Unbegaun, ce n’est
qu’un diminutif de Svarog243.
Selon Thietmar de Mersebourg, dans la ville de Riedegost, sur le territoire
du Mecklembourg, on honorait un dieu nommé Zuarasic244, équivalent du
russe Svarožič : « fils de Svarog », ou, selon Schmittlein, forme
hypocoristique de Svarog245. Un des manuscrits de la Knytlinga saga
remplace le nom de Svantovit par Svaraviz246, ce qui montre que le copiste
connaissait le nom de Svarožič. Le nom, sous la forme Zuarasiz, se retrouve
dans une lettre de l’archevêque Bruno de Querfurt adressée à son frère
Henri II, lui reprochant son alliance avec des Slaves païens247. Cinquante
ans plus tard, Adam de Brême appelle la ville Rethra, et nomme son dieu
principal non plus Zuarasic mais Redigast, précisant que son idole est faite
d’or248. Radegast est aussi mentionné dans une liste de divinités de la
région d’Ebstorf249. Radegast/Radigost apparaît tant en toponymie que dans
l’onomastique chez l’ensemble des Slaves250. Mais il existe aussi dans
l’anthroponymie germanique. Le remplacement de Zuarasic par ce nom
trahirait alors une germanisation des populations slaves de l’Ouest251.
François Cornillot a tenté un rapprochement de Radigost avec le nom d’un
prince slave attesté par des sources grecques : Ardagastos252. Si ce dernier
nom est bien d’origine iranienne, rien n’est moins sûr pour Radigost.
Radigost a laissé son nom au mont Radhošt’, à l’est de la République
tchèque, où les gens venaient très nombreux à la Saint-Jean. Une légende
collectée au tout début du xviiie siècle veut qu’une idole et un temple avec
un bois sacré y aient été édifiés253. Dans le Mecklembourg, diverses
légendes collectées au début du xxe siècle, avec pour personnage Schöne
Reda ou Reda, une idole d’or qui échappe à des envahisseurs germaniques
en étant transférée dans une autre ville ou plongée dans un lac254. On notera
que le lieu s’appelle successivement Riedigast, puis Rethra, et enfin Reda
dans les sources anciennes, que c’est la capitale des Redari/Ratari, c’est-à-
dire les « Guerriers », étymologiquement les « Conducteurs de char »255.
Radigost pourrait donc être l’« Hôte du Char ».
Radigost n’est clairement qu’une épithète locale de Svarožič256. Il a de
toute évidence été associé à une déesse guerrière257. Cependant, comme le
note Słupecki, jamais il n’est question d’un feu associé au temple de
Radigost.
La question d’un culte du feu est importante car on notera que pour le
voyageur perse Ibn Rustah, qui écrivait au début du xe siècle, « tous les
Slaves sont adorateurs du feu258 ». L’expression « adorateurs du feu » a pu
prendre par la suite le sens large de « païens »259, mais ici, l’auteur est
précoce, et perse : il sait ce qu’étaient les adorateurs du feu, autrement dits
les Zoroastriens, encore présents de son temps en Iran.

Trajan

Trajan ou Trojan, mentionné dans diverses sources médiévales et


modernes, est identique à l’empereur romain260. La « terre de Trojan »,
mentionnée dans le Dit de la campagne d’Igor, désigne cependant la terre
russe elle-même261.
Régulièrement Trajan ou Trojan a été rapproché de Triglav. De fait, dans
certaines légendes des Balkans, il est tricéphale262. Le folklore de Trajan est
très important dans l’ensemble des Balkans263. Il y est d’ailleurs associé au
motif international propre autrement à Midas aux oreilles d’âne.

Triglav ou Triglov

Ce nom est attesté chez Herbord sous la forme Triglaus, et chez Ebo sous
la forme Trigelawus. Dieu attesté à Stettin (Szczecin), à Wollin, et à
Brandebourg264. Son nom signifie simplement « tricéphale », et de fait sa
statue possédait trois têtes. Ce n’est qu’une épithète265.
Plusieurs toponymes dérivés de Triglav ou Troglav existent dans les
Balkans266. En Slovénie, près de Divače, un rituel automnal lié à la fertilité
avait lieu jusqu’à début du xixe siècle dans une grotte située au lieu-dit
Triglavca267. En Pologne, un village portait le nom de Trzygłów près de
Gryfice (Greifenberg, Poméranie)268.
La Vie d’Otton de Bamberg par Ebbo nous raconte comment, après que le
missionnaire eut détruit un temple, une idole de Triglav fut secrètement
préservée et confiée à une veuve. L’idole était en or ; elle était couverte
d’un manteau et cachée dans un tronc d’arbre creux. Les offrandes étaient
données au dieu par le trou dans l’arbre. Pour s’approcher de l’idole, un
disciple d’Otton prétendit vouloir remercier le dieu qui l’aurait sauvé d’une
tempête en mer. Il vit alors que le tronc était placé dans un sanctuaire, et
que la selle de Triglav y était fixée à un mur269. L’association d’une selle à
Triglav est due au fait que comme Svantovit à Arkona, Triglav avait son
cheval.
On note aussi la présence à Stettin près du sanctuaire de Triglav d’un
énorme chêne avec une source coulant à son pied. Cet arbre était considéré
par le peuple comme le siège du dieu270. À Wolin, c’est un pilier en bois,
dans lequel est plantée une lance, qui est honoré271.
La présence du dieu dans un tronc d’arbre le rapproche de fait de
nombreux personnages malfaisants (des dragons ou des diables) connus par
des légendes slaves et baltes, qui se cachent dans un arbre pour échapper
aux coups du héros ou du dieu de l’orage272. Ces dragons ont alors souvent
un lien avec la mer273. Ebbo nous indique qu’à Stettin, où se trouvait un
temple de Triglav, on donnait trois têtes au dieu parce qu’il régnait sur trois
royaumes : le ciel, la terre et les enfers Ses yeux et sa bouche étaient
couverts de bandes d’or pour qu’il ne puisse voir les péchés des hommes et
pour qu’il reste silencieux274. Adam de Brême signale à Wolin un dieu dont
il ne donne pas le nom slave, mais qu’il appelle « Neptune aux trois
natures », parce que l’île de Wolin serait entourée de trois variétés d’eau :
une verte, une blanchâtre, une furieuse et tempestaire275. De fait, Triglav
semble avoir eu un certain pouvoir sur la mer, puisque Herman, disciple
d’Otton de Bamberg, voulant s’approcher de l’idole, déclara vouloir rendre
grâce pour avoir reçu l’aide du dieu lors d’un voyage en mer276. Il est
possible aussi que Triglav ait été un dieu dispensateur de maladies : alors
que Stettin est en passe d’être convertie au christianisme, une épidémie
éclate, et les prêtres païens arguent que c’est l’effet de la colère de
Triglav277. Ces points de descriptions le rapprochent particulièrement de
Veles, auquel il s’identifie sans doute.

Turupit
Dieu mentionné par la Knytlingasaga à Garz sur l’île de Rügen : il s’agit
probablement d’un emprunt à des populations finno-ougriennes de Livonie :
des sources latines estoniennes attestent de l’existence sur l’île de Oesel
d’un dieu nommé Tarapita ou Tharapita278.

Vampires

L’existence de vampires est régulièrement attestée dans le monde slave à


partir du moment où l’usage de l’inhumation se généralise. Le mot
« vampire » (ou les mots apparentés) peut cependant n’apparaître que
tardivement : ainsi, en Pologne, ce n’est qu’à partir du xive siècle279. Du
point de vue archéologique, le fait pour un mort d’être enterré sur le ventre
ne suffit pas pour en faire un vampire : d’autres critères supplémentaires
sont attendus280. On ne sait en tout cas pas ce que pouvaient être ces
vampires avant que la pratique de l’inhumation se répande. Il peut paraître
curieux que les vampires apparaissent dans une liste de divinités, mais le
culte de ces créatures (upiry), est dénoncé dans diverses homélies russes
médiévales281. On peut alors se demander si les vampires n’étaient pas un
tout autre type de créature, pas nécessairement liée aux morts, possiblement
malfaisante mais pouvant faire l’objet d’un culte.

Veles

Le Récit des temps passés, l’une des principales sources sur ce dieu, lui
donne le surnom de skotij bog, ce qui peut être interprété directement
comme « dieu du bétail » ou « dieu de la richesse, de l’abondance » (le
bétail étant considéré, dans diverses langues indo-européennes occidentales,
comme une monnaie, une richesse282. Dans les sources anciennes, le lien
entre Veles et Perun, dont on ne connaît pas directement la nature, est très
fréquent : les deux dieux sont souvent cités ensemble283. Le voyant et poète
Bojan est désigné comme « petit-fils (descendant) de Veles » dans le Dit de
la campagne d’Igor.
Pour P. Zlobin, il n’y aurait rien à tirer du Récit sur la fondation de
Jaroslav, dans lequel il est fait mention du culte de Veles. Ce récit serait est
une création du xviiie siècle basée uniquement sur la topographie locale,
laquelle connaissait un lieu nommé « vallon de Volos284 ».
Dans des sources tchèques du xve et xvie siècle, Veles apparaît comme un
démon285. En Russie, autour de la région de Kostroma, le mot dialectal els :
« diable », et elisna, elso’vka : « diablesse », pourraient être issus d’une
forme tabouée de Veles286. Un personnage nommé Volot’ Volotovič
apparaît dans diverses sources tardives russes. Il est mentionné dans une
incantation recueillie au xviie siècle : le dieu y est considéré comme un
géant mort et enterré. Ses os y sont considérés comme incassables287 :
« Je me lève, moi le serviteur de Dieu (nom de la personne), je fais mes bénédictions et je vais
en signant sur la vaste plaine sous le beau soleil, sous la jeune lune brillante, sous les
nombreuses étoiles, jusqu’au tombeau des os de Volot. […]288. »

Volot Volotovič est le personnage principal d’un apocryphe tardif qui le


montre discuter à Jérusalem avec le roi David. Pour Michel Gorlin, le nom
même de Volot Volotovič est dérivé de celui de Ptolémée, qui lui-même
remplace ici Pharaon (Salomon, fils de David épousera la fille d’un
pharaon, tout comme dans l’apocryphe il épousera la fille de Volot
Volotovič)289. Mais il n’est pas nécessaire d’invoquer une déformation
populaire du nom. Ptolémée, roi païen très sage, a pu être remplacé par un
souvenir de l’ancienne divinité : ce type de superposition entre un
personnage mythique issu d’une source grecque, et une divinité russe
ancienne a régulièrement eu lieu, comme on l’a vu dans les cas de Dažbog
et de Svarog.
On a recherché d’éventuelles traces archéologiques du culte de Veles. Un
médaillon daté des xie-xiie siècles, orné sur chaque face d’une tête de
taureau, a été découvert dans un village nommé Vlasovič, près de
Tchernihiv (Ukraine)290. À Novgorod se trouvait une église Saint-Blaise,
qui apparaît dans les textes à la fin du xiie siècle, rue Volosova. On a pensé à
partir de ce nom qu’il devait se trouver là un temple de Veles, mais cela n’a
pas été démontré291.
En Biélorussie, plusieurs pierres portent encore le nom de « pierre de
Volas292 ». Une trentaine de toponymes dérivés de Veles existent dans les
Balkans293. Une chaîne de montagnes des Tatras (Carpathes polonaises)
s’appelle Wołoszyn. Ce nom a été rapproché de celui de Volos en raison
d’une légende locale de dragon294. Cependant, Wołoszyn vient en fait de
« Valaques » (en polonais wołoskich), en raison de l’installation sur place au
xviie siècle de bergers valaques.

Il a été proposé que Volos et Veles, les deux formes attestées du nom du
dieu, désignent deux dieux jumeaux bien différenciés295. Mais les
arguments présentés ne sont pas satisfaisants : jamais Volos et Veles ne sont
présentés comme deux dieux dans les sources anciennes296. En revanche
Volos est toujours apposé à bog : « dieu », tandis que la forme Veles
apparaît isolément297.
Veles semble avoir été remplacé par saint Blaise : certains auteurs anciens
ont même pensé que Veles dérivait directement de Blaise298.
Le nom de Veles semble directement connecté à celui de divinités baltes
telles que le lituanien moderne Vēlinas, Vélnias, Véls (« démon »), du
lituanien ancien Velionìs, Veliónis (« dieu des âmes »), dont la possible
parèdre est Veliuonà, et de leurs corrélats lettons299. Dans un des traités
russes avec Byzance, les parjures sont supposés être punis par Volos et
devenir « jaunes comme l’or ». Dans les traditions populaires lituaniennes,
les personnes punies par Veles deviennent jaunes. Roman Jakobson a
rapproché cela de divers noms slaves des scrofules300.
Pour Frans Vyncke, Veles est « celui qui statue, qui ordonne » (du verbe
velěti : « vouloir, établir, décider »)301. Roman Jakobson a remis au goût du
jour une vieille hypothèse de Ferdinand de Saussure rapprochant Velinas (et
par contrecoup Veles) du dieu indien Varuna302. Il opère aussi un
rapprochement avec les noms celtiques du poète : gaulois Veleda, irlandais
ancien fili, plur. filid303. En complément, M. A. Vasil’ev a proposé que les
relations entre Perun et Veles aient été du type Mithra-Varuna tel que défini
par Georges Dumézil304. Pour Vladimir Vodoff, les deux dieux se
complètent en ce sens qu’ils sont vénérés par les deux principales classes de
la société russe ancienne : Perun par les guerriers, et Veles par les
marchands305.
On remarquera qu’en russe ancien, les Pléiades, groupe d’étoiles de la
constellation du Taureau, s’appellent Volosyni (nom attesté jusqu’au
xvii siècle dans le dialecte de Pskov sous la forme Vollosini)306. On connaît
e

aussi les variantes Vlasoželišči ou Vlasoželišči et divers dérivés307. Ce


terme a été emprunté par les Mordvins (de la même manière qu’ils ont
emprunté Perun), avec Vele : « Pléiades ». Il est vraisemblablement
panslave d’origine car les Biélorusses nomment les Pléiades Velisažar,
Volosožary ou encore Vlasoželets dans une bible imprimée en 1517 ; les
Slovènes les nomment Vlastovice, les Serbo-Croates Vlàšići, les Bulgares
Vlasici308. Par contre, le terme ukrainien pour Pléiades, Volosožar peut
aussi désigner Orion309. Chez les Serbes, les Pléiades sont tenues pour être
sept frères310. En Biélorussie, « les Volosožary indiquent la pluie à venir ».
On y dit encore : « si les Volosožary restent basses, l’automne sera
pluvieux ; si elles s’élèvent, l’automne sera sec »311.
Il a été noté par ailleurs que le beurre apporté à l’église en offrande le jour
de la Saint-Blaise (Vlasij), s’appelle Voložnoe dans la région de Vologda.
Ce beurre était placé devant l’icône du saint, puis les vaches étaient
conduites devant l’église pour y être aspergées d’eau bénite312. Chez les
Serbes, le gâteau que l’on prépare pour la fête des bœufs, à la Vlasovdan
(Saint-Blaise) s’appelle volovarnik. On plaçait ce gâteau sur les cornes du
bœuf, puis on le lui donnait à manger313.

Vily (singulier Vila)


Divinités féminines panslaves, attestées par des sources anciennes russes
et balkaniques et dans un texte de Bohême du xve siècle. Dans un texte
russe, Le Sermon d’un certain adorateur du Christ, il est dit qu’elles sont
trente (ou trois fois neuf) sœurs314. Elles ont disparu du folklore de Russie
et d’Ukraine, mais elles existent encore sporadiquement dans celui des
Slaves de l’Ouest, tandis qu’elles sont des personnages centraux, en tant
que fées, dans le folklore des Balkans315. Leur nom pourrait dériver du
slave commun viliti : « s’agiter, courir follement » (cf. vieux-tchèque vila :
« fou »)316. En Pologne et en Slovaquie, elles étaient les âmes de jeunes
femmes décédées (ce qui les rapproche des rusalki). Dans le folklore
contemporain des Balkans, ce sont des fées.

Vitelubbe

Nom mentionné dans une liste de divinités attestées dans la région


d’Ebstorf317. Ce nom peut signifier le « Seigneur aimé ».

Xors

Dieu mentionné par diverses sources médiévales russes,


systématiquement associé à Dažbog, le soleil fils de Svarog, dont il est sans
doute l’épithète confirmant l’aspect solaire du dieu318. Ce nom n’est
clairement pas russe, il résulte d’un emprunt à une langue iranienne. On
peut le comparer au perse Xuršēt : « soleil », à l’avestique Hvarǝ-Xšaētǝm :
soleil personnifié et divinisé319. Ce lien étymologique est établi depuis le
début du xixe siècle320. Xors ne peut être emprunté directement de
l’avestique, pour des raisons phonétiques : il ne peut venir que des Scythes
ou des Sarmates. Le nom semble être étymologiquement lié à xorošij :
« bon », et pourrait alors remonter à un étymon de type *ĝhers-/ *ghers :
« se hérisser ».
Xors pourrait très bien être apparenté au xᵛarənah avestique (pehlevi
xwarrah, perse moderne ḵorra) : « gloire (royale) » (de *hvar : « briller »),
associé à Ahura Mazdā et aux aməṧa spəṇtas, y compris Mithra, qui est
qualifié de xᵛarənaŋuhastəma- : « le plus doté en gloire321 ».
Un rapprochement a été proposé avec le mansi Kworēs, surnom du dieu
du ciel322. Ce rapprochement est plausible car les populations finno-
ougriennes du sud de l’Oural ont elles-mêmes subi une influence iranienne.
Il est en tout cas difficile de comprendre une phrase incluse dans un texte
chrétien tardif, qui veut que : « il y a deux anges du tonnerre, l’hellène
Perun et le juif Xors323 ». Un autre texte russe tardif indique qu’il était
honoré à Chypre324. Cela se passe comme si les auteurs de ces textes
avaient conscience que Xors n’est originellement pas un dieu slave325.

Zelu

Nom d’idole mentionné par Neplach, abbé d’Opatovice, au xive siècle. Il


place son existence à la fin du ixe siècle en Bohème326.
TENTATIVE DE RECONSTRUCTION
DE GÉNÉALOGIES DIVINES

En italiques : équivalences grecques données par les sources slaves


Crédit : DAO Patrice Lajoye

1. Voir la critique argumentée de Zaroff, 1999 contre ces allégations finalement fantaisistes.
2. Pisani, 1950, p. 49-52.
3. Helmold, I, 52.
4. Unbegaun, 1948, p. 422.
5. Leger, 1901, p. 154 ; Nehring, 1903.
6. Słupecki, 1994, p. 127-128.
7. Toporov, 1995, p. 441 et suiv.
8. Leger, 1901, p. 35 ; Edel’man, 2002, p. 157 et suiv. ; Lebedynsky, 2009, p. 120-121.
9. Mladenov, 1924, p. 191-192 ; Benveniste, 1967. Cornillot, 1994, p. 97 pense malgré tout à un
emprunt compensant la démonisation de div.
10. Voir infra.
11. Vaillant, 1927.
12. Machek, 1947, p. 54-55.
13. Leger, 1901, p. 45.
14. Procope, De Bello gothico, III, 14 = Meyer, 1931, p. 5.
15. Helmold, I ? 83.
16. Grekov, 1947, p. 38 ; Vyncke, 1970, p. 704 ; et surtout Rybakov, 1994, p. 15-27.
17. Vodoff, 1988, p. 41.
18. Sermon de saint Grégoire racontant comment les païens adoraient les idoles et leur
sacrifiaient : Mansikka, 1922, p. 160-165. Trad. partielle dans Rybakov, 1994, p. 16, qui l’appelle
« Sermon sur les idoles ». Trad. italienne dans Simi, 2003, p. 70-71.
19. Sur ces traditions : Oudaer, 2017.
20. Koch, 2006, p. 1325-1326.
21. Sterckx, 2005, p. 115.
22. Meyer, 1931, p. 20-24 ; Vaux-Phalipau, 1935, p. 74.
23. Unbegaun, 1948, p. 425 ; Slovo sv. Otca našego Ioanna Zlatoustago, Arxiepiskopa Kostjanina
grada… (Mansikka, 1922, p. 174-175).
24. Arnold de Lübeck, Chronica Slavorum, II, 21 = Meyer, 1931, p. 59.
25. Saxo Grammaticus, Gesta Danorum, XIV.
26. Lyaukou, Karabanau, Dučyc, Zajkousky, Vinakurau, 2000. Pour un équivalent en Russie :
Zolotov, 1981.
27. Jean Canaparius, Vita sancti Adalberti episcopi Pragensis, I.
28. Ivakin, 1979.
29. Constantin VII Porphyrogénète, De Admnistrando imperio, IX, trad. Sorlin, 1965.
30. Dučyc, 2000.
31. Cosmas de Prague, Chronica Boemorum, III, 1 = Meyer, 1931, p. 20.
32. Leicht, 1925.
33. Herbord, II, 32-33.
34. Vie anonyme, III, 11 ; Ebbo, Vita Ottonis episcopi Bambergensis, III, 18.
35. Thietmar, Chronicon, VI, 37 = Meyer, 1931, p. 10.
36. Helmold, Chronica Slavorum, I, 52, 69 et 84 = Meyer, 1931, p. 44-46. Słupecki, 1994, p. 159-
161.
37. Knytlingasaga, 121 = Meyer, 1931, p. 83.
38. Procope, De Bello gothico, III, 14 = Meyer, 1931, p. 5 ; Homiliaire d’Opatovice, sermon 5 ;
Helmold, Chronica Slavorum, I, 47.
39. Cosmas, Chronica Boemorum, I, 3 ; Unbegaun, 1948, p. 427.
40. Guillaume de Malmesbury, Gesta regum anglorum, II, 12.
41. Cosmas, Chronica Boemorum, I, 10 = Meyer, 1931, p. 19.
42. Widukind, Res gestae Saxonicae, III, 68 = Meyer, 1931, p. 7.
43. Annales Magdeburgenses, s. a. 938 = Meyer, 1931, p. 57.
44. Meyer, 1931, p. 58.
45. Meyer, 1931, p. 24.
46. Adam de Brême, Gesta Hammaburgensis ecclesiae pontificum, IV, 26.
47. Thietmar, Chronicon, VII, 69 = Meyer, 1931, p. 11.
48. Álvarez-Pedrosa Núñez, 2012-2014.
49. Mikhailov, 2006.
50. Slovo sv. Otca našego Ioanna Zlatoustago, Arxiepiskopa Kostjanina grada… (Mansikka, 1922,
p. 174-175).
51. Rybakov, 1966, p. 70.
52. Jakobson, 1985b, p. 21.
53. Prince, 1917, p. 158.
54. Pisani, 1950, p. 55-56 ; Rudnyc’kyj, 1982, p. 4 ; Derksen, 2008, p. 95.
55. Blažek, 2006, p. 75-77.
56. Jagić, 1881. Le texte ajoute que Sir (Osiris) lui succéda.
57. Voir les tentatives dans ce sens de Zubov, 2012.
58. Jagić, 1881, p. 9.
59. Prince, 1917, p. 153.
60. Loma, 1998, p. 45-46.
61. Toporov, 1989, p. 40.
62. Jakobson, 1985b, p. 29.
63. Lyaukou, Karabanau, Dučyc, Zajkousky, Vinakurau, p. 49-50.
64. Jagić, 1881, p. 11-12 ; Jagić, 1881b.
65. Dragomanov et Dragomanova, 2015, p. 35-36 et 45. Déjà, la version slave d’un récit
apocryphe, La Vie d’Adam et Ève, Satan passe un pacte avec Adam : « Mienne et la terre et à Dieu
sont les cieux et le paradis » (Ivanov, 1976, p. 208).
66. On a parfois pensé à un emprunt direct aux langues iraniennes : Edel’man, 2002, p. 162 et suiv.
Il semble cependant que seul le concept de démonisation relève de l’emprunt : Menges, 1956, p. 88 ;
Lebedynsky, 2009, p. 121-122.
67. Sermon de saint Grégoire racontant comment les païens adoraient les idoles et leur
sacrifiaient : Mansikka, 1922, p. 162.
68. Jakobson, 1966, p. 228.
69. L’interprétation de Petrjašin, 2016, voulant que Dyj soit Zeus, est possible mais n’est pas
suffisamment étayée. Les noms attestés par les sources russes tardives sont souvent déformés.
70. Georgiev, 1967.
71. Valentsova, 2019, p. 102.
72. Rozwadowski, 1948, p. 56.
73. Niederle, 1926, p. 149-150.
74. Herbord, III, 4.
75. Ebbo, III, 8.
76. Ebbo, III, 8.
77. Herbord, III, 6.
78. Schmittlein, 1960, p. 190.
79. Unbegaun, 1948, p. 413 ; Reiter, 1976, p. 182 ; Ivanov et Toporov, 1974, p. 180-216 ;
Gieysztor, 1982, p. 108-115.
80. On trouvera une synthèse des opinions anciennes sur Jarilo dans D’jačenko, 2007, sv. Jarilo,
jar, jarun, jarovit.
81. Abramtchik, 1999, p. 170. Cet auteur ne donne malheureusement pas de références.
82. Famincyn, 1884, p. 223. Pour une description très brève : Sokolov, 1945, p. 97. Le mannequin
est parfois remplacé par un arbre ou par une branche de bouleau. La biographie de saint Tixon de
Zadonsk montre celui-ci croiser, le 25 mai 1765, le cortège de Jarilo, joué par un homme orné de
rubans et de clochettes et portant une cape en papier blanc : Gorodetsky, 1976, p. 52-53.
83. Ce qui oblige à un rapprochement avec la très obscure cérémonie romaine des Nudipedalia
(« Pieds nus »), effectuée en l’honneur de Jupiter en cas de sécheresse : Evans, 1974, p. 102.
84. Afanas’ev, 1869, vol. I, p. 441-442. Trad. dans Dumézil, 1970, p. 39-40.
85. Ces notions de cheval blanc, de personnage primitivement guerrier, ont fait qu’on a
régulièrement tenu Svantovit pour un nom local de Perun.
86. Ce dernier nom, dérivé du mot désignant la mort, apparaît régulièrement et avec d’autres
variantes dans les rituels printaniers des Slaves de l’Ouest. Sur toutes ces figurines anthropomorphes
faisant l’objet d’un simulacre de sacrifice : Mikov, 1991.
87. Sur l’ensemble de ces rituels au niveau européen, on peut toujours se référer à Mannhardt,
1875, même s’il faut se méfier de ses interprétations. Ainsi pour cet auteur, Jarilo et ses équivalents
sont des « démons de la végétation ».
88. Pour une description ancienne de cette fête : Kefeli-Clay, 1990. Une description plus complète,
du xixe siècle, mais malheureusement non localisée se trouve dans Vend, 1896, p. 41-56. D’une
manière générale, on peut trouver des renseignements disparates sur les fêtes de ce type en Russie
dans Stangé-Zhirovova, 1998, p. 107-176. On trouvera quelques éléments aussi chez Conte, 1997,
p. 118-131.
89. Propp, 1995, p. 109.
90. Słupecki, 1994, p. 93, d’après Ebonis Vita S. Ottonis episcopi Babenbergensis, III, 3.
91. Visočnik, 2010.
92. Dynda, 2017, F7 à F13, textes du xve siècle.
93. Ivanov et Toporov, 1983.
94. Filipović, 1961 ; Boskovic, 2006, n. 12.
95. Witkowski, 1971, p. 182.
96. Eichler, 1980-1981, p. 205.
97. Eichler, 1980-1981, p. 205.
98. Schmittlein, 1960, p. 170.
99. Ivanov et Toporov, 1983, p. 194.
100. Niederle, 1926, p. 144 ; Unbegaun, 1948, p. 408.
101. Arthurs, 1952-1953, suivi par Le Roux et Guyonvarc’h, 1983, p. 135-143, a proposé
*Magosia.
102. Blažek, 2006.
103. AE 1980, 653a. Peut-être à mettre en relation avec les Matres Mageiae de Anduze (France) :
AE 1963, 116.
104. Ernout et Meillet, 1932, sv Maia.
105. Pokorny, 1958-59, sv. Meĝ(h).
106. Dumézil, 1954 ; suivi par Le Roux et Guyonvarc’h, 1983, p. 45-60.
107. Le manuscrit d’Édimbourg du Dindshenchas pour la prophétesse ; un recueil intitulé Incipit
de Fhlathiusaib Herend 7 dia hamseraib o ré Mac Miled co hamsir Tuathail Techtmair (Des
souverainetés d’Irlande depuis les temps des fils de Mile jusqu’au temps de Tuathal Techtmar) dans
le Livre de Leinster : Le Roux et Guyonvarc’h, 1983, p. 45-47.
108. Ces Ulad, trad. dans Le Roux et Guyonvarc’h, 1983, p. 48-49.
109. Livre de Leinster, fos 125b-126a ; trad. dans Le Roux et Guyonvarc’h, 1983, p. 50.
110. Gal’kovskij, 1916, t. I.
111. Barsov, 1894.
112. Le filage ou le tressage, notamment des cheveux ou des crinières de chevaux, reste une des
activités favorites des esprits du foyer comme le domovoj en Russie ou le gobelin en France.
113. Lajoye, 2012, p. 197-228.
114. Sermon de saint Grégoire racontant comment les païens adoraient les idoles et leur
sacrifiaient : Mansikka, 1922, p. 162 ; Slovo sv. Otca našego Ioanna Zlatoustago, Arxiepiskopa
Kostjanina grada… : Mansikka, 1922, p. 174-175.
115. Roźniecki, 1901, p. 468. Il est partiellement suivi par Vernadsky, 1948, p. 54, qui pense que
les deux (Perun et « Tur ») ont coexisté. Turov vient probablement de tur : « auroch, taureau, bœuf »,
et non de Thor : Menges, 1956, p. 94.
116. Niederle, 1926, p. 137-139. Il est suivi par Filipović, 1948, qui, voyant les toponymes dérivés
de Perun dans les Balkans, en déduit justement qu’il ne peut s’agir d’une importation normande.
117. Unbegaun, 1948, p. 401-402. Pierre Pascal (1956, p. 93) pensait lui aussi que le culte était
nouveau à Kiev. Voir aussi les doutes de Meriggi, 1952, p. 150. L’idée d’une réaction païenne à
l’époque de Vladimir est souvent évoquée dans les ouvrages historiques consacrés à la Russie
kiévienne. Voir par exemple dans Arrignon, 1991, p. 85-94.
118. Atanassov, 1994 ; Kucypera et Wadyl, 2011.
119. Kulakov, 2003. Ce qui n’a toutefois pas empêché certains chercheurs de comparer Perun à
Odin : Gieysztor, 1980, p. 16-17 ; Strumiński, 1996, p. 113-118.
120. Pisani, 1950, p. 53.
121. Constantin VII Porphyrogénète, De Admnistrando imperio, XXX-XXXI. Milošević, 2013 ;
Alimov, 2015.
122. Radenković, 2013.
123. Récit des temps passés, s. a. 912 et 945, éd. Lixačev, 1950. Traduction de Sorlin 1961.
Extraits du texte original dans Mansikka, 1922.
124. Récit des temps passés, s. a. 980.
125. 3e rédaction de la Chronique de Novgorod, Mansikka, 1922, p. 60-63.
126. Il s’agit d’une mère qui s’est permis de nettoyer son enfant avec un morceau de pain et qui a
profané ainsi le don le plus précieux de la divinité : Leger, 1901, p. 61, n. 1.
127. Ivanov et Toporov, 1974, p. 1193-1194. Ces deux auteurs notent un autre fragment de conte
de la même région où il est dit : « Alors Perun frappa le chêne, et avec une telle force qu’il fendit le
chêne de haut en bas. » Ailleurs ils notent que quand le bois s’enflamme, « de la main de Perun, on
ne peut l’éteindre qu’avec du lait, tandis qu’avec de l’eau, il ne fait que brûler de plus belle ».
128. Dal’, 1903-1909, sv. Perun.
129. Matusiak 1881, p. 641-642. La traduction de Leger, 1901, p. 64-65 est à abandonner.
130. Gimbutas, 1967, p. 749.
131. Dal’, 1903-1909, sv. Perun ; Gimbutas, 1967, p. 746.
132. Dans l’un des Slovenské Povesti de Bogéna Nemçova, publié en 1857 et traduit dans
Chodzko, 1864, p. 26. Il est possible qu’ici la forme perun soit abusive, remplaçant un primitif
parom.
133. Meriggi, 1952, p. 150.
134. Ivanov et Toporov, 1970, p. 1181.
135. Jakobson, 1985b, p. 17.
136. Dal’, 1903-1909, sv. Perun.
137. Raxno, 2011.
138. Lajoye, 2015, p. 40-41.
139. Duridanov, 1955 ; Boskovic, 2006, n. 6.
140. Leger, 1901, p. 56 ; Duridanov, 1955, p. 100-101.
141. Leger, 1901, p. 56.
142. Leger, 1901, p. 64.
143. Gimbutas, 1967, p. 742.
144. Leger, 1901, p. 60 ; Duridanov, 1955, p. 99, avec toutes les formes anciennes.
145. Duridanov, 1955, p. 100.
146. Duridanov, 1955, p. 100.
147. Leger, 1901, p. 60.
148. Leger, 1901, p. 60 ; Reiter, 1976, p. 191, qui le localise en Carinthie.
149. Gimbutas, 1967, p. 742.
150. Duridanov, 1955, p. 100.
151. Leger, 1901, p. 60.
152. Gimbutas, 1967, p. 742.
153. Reiter, 1976, p. 191.
154. Duridanov, 1955, p. 100.
155. Duridanov, 1955, p. 100.
156. Gimbutas, 1967, p. 742.
157. Reiter, 1976, p. 191 ; Eichler, 1980-1981, p. 204-205 ; Witkowski, 1971, p. 180.
158. Witkowski, 1971, p. 180.
159. Nagy, 1974, n. 33. Le mot se trouve dans le poème Heliand, v. 5773. Contra : Sehrt, 1925,
qui y voit le latin vericulum ; et Schwartz, 1947, p. 42, qui le rapproche de l’islandais ancien frakka,
« lance » et du slavon prag, « rayon ».
160. Krappe, 1932, p. 87. Strumiński, 1996, p. 117 a considéré que Fjörgynn n’est qu’un des noms
d’Odin, ce qui est impossible étant donné que sa fille, Frigg, est elle-même l’épouse d’Odin :
Skáldskaparmál, 19.
161. Lajoye et Oudaer, 2014.
162. Ce rapprochement n’est pas reconnu par les spécialistes de l’étymologie grecque, qui optent
généralement pour Κερα(F)ίζω : « dévaster, massacrer, écraser » (West, 2007, p. 244 ; Chantraine,
2000, sv. Κεραυνος). Vasmer, 1953, t. II, sv. Перунь, le rejette aussi. Bader, 1988, le mentionne mais
n’en fait pas la critique, ce qui peut être compris comme une acceptation tacite. Cependant, Roman
Jakobson pense à un primitif *Peraunós (Jakobson, 1985a et b) et Gregory Nagy admet un étymon
*per(kw)aunos, avec une métathèse due à un tabou, donnant *kwer(p)aunos (Nagy, 1974, p. 128 ;
Watkins, 1995, p. 343, n. 1). Pour West, 2007, p. 243-244, la similarité de structure entre Keraunos et
*Per(k)aunos est trop grande pour n’être qu’une seule coïncidence. Enfin, l’hypothèse semble être
admise par Jackson, 2002, p. 76, n. 25 ; Delamarre, 1984, p. 75 ; et Evans, 1974, p. 101-102, qui
opère d’ailleurs à un autre rapprochement avec le grec korunè : « bâton, massue ».
163. IG Bulg. I, 283 et 283bis, à Galata (Bulgarie) et Kajalâka (Bulgarie).
164. Krappe, 1932, p. 87 ; Nagy, 1974, p. 114.
165. Krappe, 1932, p. 87 ; Nagy, 1974, p. 114.
166. Krappe, 1932, p. 87 ; Nagy, 1974, p. 114.
167. Krappe, 1932, p. 87.
168. Lajoye, 2012.
169. Lajoye, 2015, p. 77-78.
170. Jakobson, 1985a, p. 6.
171. Lajoye, 2015, p. 62.
172. Gimbutas, 1971, pl. 69 ; Chropovský, 1989, p. 129. Pour Vladimír Denkstein, cependant,
cette figure montrerait des symboles d’origine byzantine : Denkstein, 1961. Cette nécropole a
fonctionné, semble-t-il, autour d’un sanctuaire païen en bois du ixe siècle, lequel était détruit au xe
(une église fut alors construite) : Słupecki, 1994, p. 114-116.
173. La position d’orant et la tête radiée se rencontrent régulièrement sur les figures
anthropomorphes d’époque mérovingienne et carolingienne dans le monde catholique. Ces deux
éléments ne peuvent donc pas être considérés comme étant caractéristiques du personnage figuré ici.
174. Yermoloff, 1907, p. 350-351 ; Mongaït, 1959, p. 12, en note ; Gimbutas, 1973, p. 475 ; Conte,
1997, p. 87. On plaçait ces bélemnites dans le grenier, afin de détourner de la maison les éclairs
« poursuiveurs de diables ».
175. Gieysztor, 1982, p. 65.
176. Leger, 1901, p. 64 ; Kostrzewski, 1949, p. 421. Notons que les Slovènes emploient encore
l’expression gromska strela pour dire « tonnerre de Dieu » ou « sacré nom de Dieu » !
177. Reiter, 1976, p. 190.
178. Yermoloff, 1907, p. 345 (pour le seul gouvernement de Minsk) ; Ivanov et Toporov, 1974,
p. 1195.
179. Lajoye, 2015, p. 107-114.
180. Af. 164/99 ; trad. dans Gruel-Apert, 2000, p. 242-246. Sur ce conte, voir Ivanov et Toporov,
1970. Les Moldaves connaissent une version de ce conte particulièrement proche. Pourtant, le motif
du tsar Tonnerre et de la tsarine Éclair est singulièrement absent : Botézatou, 1981, p. 96-109.
181. Maikov, 1869, p. 578.
182. Un semblable duo a pu exister chez les Celtes de l’Antiquité, mais il n’en reste que peu de
traces. On note toutefois une inscription dédiée à IOVI ET TER(r)AE MATRI à Nice : CIL XII,
3071.
183. Lajoye, 2015, p. 121-216 pour Élie, et p. 217-213 pour Georges.
184. Schmittlein, 1960, p. 192-193.
185. Leger, 1901, p. 156.
186. Helmold, Chronica Slavorum, I, 84.
187. Leger, 1901, p. 152.
188. Saxo Grammaticus, Gesta Danorum, XIV.
189. Jakobson, 1985a, p. 6 ; Słupecki, 1994, p. 49.
190. Saxo Grammaticus, Gesta Danorum, XIV.
191. Epistola Adelgoti archiepiscopi Magdeburgensis = Meyer, 1931, p. 15-16. Brückner, 1882.
192. Leger, 1901, p. 153.
193. Álvarez-Pedrosa Núñez (dir.), 2017, p. 96, n. 146.
194. Slovo Isaija proroka, istolkovano svjatym Ioanom Zlatoustom… (Mansikka, 1922, p. 142-
144).
195. Vyncke, 1970, p. 702 ; Cornillot, 1994b, p. 93.
196. Vyncke, 1970, p. 703 ; Jakobson, 1985b, p. 31.
197. Dynda, 2019, p. 10-11.
198. Vernadsky, 1959, p. 117.
199. Niederle, 1926, p. 135.
200. Pisani, 1950, p. 68.
201. Mansikka, 1922, p. 145 ; Unbegaun, 1948, p. 443.
202. Rybakov, 1966, p. 72.
203. Kutarev, 2019.
204. Pisani, 1950, p. 64 ; Słupecki, 1994, p. 49.
205. Saxo Grammaticus, Gesta Danorum, XIV ; Niederle, 1926, p. 149.
206. Schmittlein, 1960, p. 190-191.
207. Ivanenko, 2017.
208. Słupecki, 1994, p. 49.
209. Sermon d’un certain adorateur du Christ : Mansikka, 1922, p. 149-150.
210. Toporov, 1989, p. 27 ; Lebedynsky, 2009, p. 150.
211. Toporov, 1989, p. 28.
212. Máchal, 1907, p. 139. Un manuscrit de Stettin, maintenant perdu, donnait la forme Synna :
Meyer, 1931, p. 44.
213. Pisani, 1950, p. 65.
214. Słupecki, 1994, p. 67.
215. Słupecki, 1994, p. 67.
216. Niederle, 1926, p. 143.
217. Reiter, 1976, p. 194.
218. Jakobson, 1966, p. 291 ; Menges, 1956, p. 88-89 ; Jakobson, 1985b, p. 30.
219. Kregždys, 2010.
220. Gamkrelidze et Ivanov, 1995, vol. 1, p. 455, 667, n. 44.
221. Gamkrelidze et Ivanov, 1995, vol. 1, p. 692.
222. Ivanenko, 2019.
223. Diplôme daté de vers 1170 : Meyer, 1931, p. 47-48. On note les variantes Szuenterit,
Suenterit, Szunevit et Suantevit : Dynda, 2017, D5.
224. Słupecki, 1994, p. 40-41.
225. Zaroff, 2002.
226. Niederle, 1926, p. 148.
227. Fragmentum ex Martyrum in Ebbekestorp quiescentium Passione, tiré d’un manuscrit du
e
xiv siècle = Meyer, 1931, p. 65. Cornillot, 1994, p. 238-239.
228. Jakobson, 1985b, p. 26.
229. Mijatev et Angelov, 1974, p. 11.
230. Jakobson, 1985b, p. 26. Pour d’autres toponymes polonais : Kostrzewski, 1949, p. 432.
231. Agathias, Histoires, IV, 18.
232. Jakobson, 1985b, p. 26-27. Il semble cependant que ce nom doive être rapproché de l’iranien
*vāragna- : « (Dieu) tueur de dragon » (Gołąb, 1992, p. 323), terme qui désigne Vǝrǝθraγna.
233. Moszyński, 1957, p. 87-88.
234. Jagić, 1880.
235. Čausidis, 1998 et 1999.
236. Jakobson, 1985b, p. 27.
237. Machek, 1947, p. 60.
238. Vernadsky, 1959, p. 111 ; Lebedynsky, 2009, p. 150 ; Borissoff, 2014, p. 14.
239. Cornillot, 1994, p. 199 et suiv.
240. Gołąb, 1992, p. 323.
241. Gołąb, 1992, p. 323.
242. Jakobson, 1985b, p. 26.
243. Unbegaun, 1948, p. 403.
244. Thietmar, Chronicon, VI, 17-23 = Meyer, 1931, p. 9-10.
245. Schmittlein, 1960, p. 173.
246. Jómsvíkíngasaga ok Knylínga, 1828, p. 384.
247. Epistula St. Brunonis ad imperatorem Henricum II = Meyer, 1931, p. 8.
248. Adam de Brême, Gesta Hammaburgensis ecclesiae pontificum, II, 21 = Meyer, 1931, p. 13.
Rethra est resté longtemps un lieu non localisé avec précision : Schmidt, 1999.
249. Fragmentum ex Martyrum in Ebbekestorp quiescentium Passione, tiré d’un manuscrit du
e
xiv siècle = Meyer, 1931, p. 65.
250. Słupecki, 1994, p. 60 ; Cornillot, 1994b, p. 46 ; Cornillot, 1998, p. 117-119.
251. Schmittlein, 1960, p. 177-178.
252. Cornillot, 1994b, p. 46-54.
253. Leger, 1901, p. 150-151 ; Pédarriosse, 1998.
254. Słupecki, 1994, p. 57-58.
255. Lajoye, 2016b.
256. Niederle, 1926, p. 147.
257. Słupecki, 1994, p. 64.
258. Meyer, 1931, p. 92-93. Cette expression se retrouve chez un géographe perse anonyme, auteur
du traité Hudud al-’Alam.
259. Niederle, 1926, p. 134, s’oppose à ce qu’on utilise cette expression pour rapprocher la religion
slave de l’ancienne religion iranienne.
260. Niederle, 1926, p. 146 ; Schmittlein, 1960, p. 170. Un sermon russe du Moyen Âge final le dit
bien : « Trojan était tsar de Rome » (Slovo i otkrovenie svjatyx apostol : Mansikka, 1922, p. 201).
261. Prince, 1917, p. 153 ; Vaillant, 1948.
262. Trkanjec, 2013, p. 17-18.
263. Leger, 1901, p. 126-133.
264. Pour cette dernière localisation : Fragmentum genealogiae ducum Brunsvicensium et
Luneburgensium, s. a. 1157 = Meyer, 1931, p. 61-62 ; Chronicae principum saxoniae, s. a. 940 ;
Henri d’Anvers, Tractatus de captione urbis Brandenburg, s. a. 1150 ; Chronicae episcopatus
brandenburgensis fragmenta. Voir aussi la chronique de Přibík Pulkava, à l’année 1156 : Dynda,
2017, C5.
265. Unbegaun, 1948, p. 412 ; Schmittlein, 1960, p. 179.
266. Boskovic, 2006, n. 7.
267. Placer, 2010. Ce culte s’adressait à un personnage nommé Deva, dont on a trop vite fait une
déesse quand il peut simplement s’agir de la Vierge.
268. Erben, 1857, p. 270.
269. Ebbo, Vita Ottonis episcopi Bambergensis, II, 13.
270. Herbord, II, 32.
271. Ebbo, III, 1.
272. Trkanjev, 2013, p. 11-14.
273. Trkanjev, 2013, p. 14.
274. Ebbo, Vita Ottonis episcopi Bambergensis, III, 1.
275. Adam de Brême, Gesta Hammaburgensis ecclesiae pontificum, II, 22 = Meyer, 1931, p. 13-
14. Ce passage est plus tard repris par Helmold.
276. Ebbo, Vita Ottonis episcopi Bambergensis, II, 13.
277. Vie anonyme, III, 5.
278. Schmittlein, 1960, p. 184-185.
279. Gardeła, 2015, p. 101-102.
280. Gardeła, 2015.
281. Sermon de saint Grégoire racontant comment les païens adoraient les idoles et leur
sacrifiaient : Mansikka, 1922, p. 162-164.
282. Unbegaun, 1948, p. 402 ; Vodoff, 1988, p. 44.
283. Jakobson, 1985c, p. 34.
284. Zlobin, 2014.
285. Jakobson, 1985c, p. 36.
286. Zlobin, 2013, qui pense cependant à un emprunt à une langue balte.
287. Plas et Yudin, 2009, p. 7.
288. Majkov, 1869, p. 56, n° 130.
289. Gorlin, 1938.
290. Rybakov, 1953, p. 68.
291. Zlobin, 2014.
292. Lyaukou, Karabanau, Dučyc, Zajkousky, Vinakurau, 2000, p. 50.
293. Boskovic, 2006, n. 8.
294. Reiter, 1976, p. 202, d’après Alexandre Brückner.
295. Shapiro, 1982.
296. Jakobson, 1985c, p. 33.
297. Jakobson, 1985c, p. 34.
298. Krek, 1876.
299. Jakobson, 1985c, p. 37-39.
300. Jakobson, 1985c, p. 38.
301. Vyncke, 1970, p. 709.
302. Jakobson, 1985c, p. 39-40.
303. Jakobson, 1985c, p. 40.
304. Vasil’ev, 1999.
305. Vodoff, 1988, p. 44.
306. D’jačenko, 2007, sv. Volosyni ; Ivanov et Toporov, 1973, p. 25.
307. Sreznevskij, 1958, t. 1, col. 270.
308. Copeland, 1931, p. 438 ; Arrignon, 1991, p. 57 ; Božić et Ninković, 2003, p. 277 ; Božić,
2006, p. 252 ; Avilin, 2009.
309. Vasmer, 1953, p. 221. Il s’agit vraisemblablement d’une erreur de cet auteur.
310. Božić, 2006, p. 277.
311. Avilin, 2009.
312. Ivanov et Toporov, 1973, p. 27.
313. Antonijević-Pajić, 1984, p. 122-123.
314. Mansikka, 1922, p. 149-150.
315. Leger, 1901, p. 166-175.
316. Niederle, 1926, p. 133-134.
317. Fragmentum ex Martyrum in Ebbekestorp quiescentium Passione, tiré d’un manuscrit du
e
xiv siècle = Meyer, 1931, p. 65.
318. Jakobson, 1985b, p. 29. Cette identification est aussi postulée par Boris Rybakov (1966,
p. 79), qui pensent à une provenance géographique différente des deux dieux, Xors étant supposé
venir des tribus du sud. Ils sont suivis par d’autres : Lebedynsky, 2009, p. 150. Selon une hypothèse
récente, Xors ne serait pas un dieu soleil, mais un héros solaire et dionysiaque, lié à la fertilité :
Borissoff, 2014, p. 16 et suiv.
319. Jakobson, 1966, p. 291.
320. Borissoff, 2014, p. 10.
321. Gnoli, 1999.
322. Asbóth, 1900, p. 481
323. Dialogue des trois saints : Leger, 1901, p. 58-59.
324. Slovo i otkrovenie svjatyx apostol : Mansikka, 1922, p. 201.
325. Mais le second de ces textes dit que Perun était honoré par les Grecs !
326. Neplach, Summula Chronicae tam Romanae quam Bohemicae = Meyer, 1931, p. 62.
MYTHOLOGIE

Si l’on dispose de nombreux renseignements concernant les lieux de culte,


le clergé, quelques rites et les divinités vénérées, les sources anciennes ne
nous ont livré que peu de choses concernant la mythologie, autrement dit
les récits liés aux divinités et au culte. Aussi la plupart des chercheurs se
sont-ils tournés vers le folklore pour aborder cette question. De fait, les
collectes dans la plupart des pays slaves ont été nombreuses et souvent de
qualité. Mais ce recours au folklore pose lui-même de nombreux problèmes.
On a vu plus haut que certaines fêtes ne sont pas slaves d’origine et que leur
nom même est latin. La christianisation a pu apporter tout un folklore
étranger. De plus, il n’existe guère de frontières, tant culturelles que
physiques, qui ne peuvent être franchies par des contes, des chants, des
formules. C’est ainsi, par exemple, qu’une incantation contre les maux de
ventre ou les pertes de sang, dont la première attestation nous vient de
Gaule et date du ve siècle, a pu être retrouvée en Russie, dans la région de
Novgorod, dans le courant du xxe siècle. Il s’agit là d’un emprunt sans doute
récent, via des versions allemandes1.
Certains emprunts peuvent être plus anciens et remonter à l’installation
des Slaves sur des territoires anciennement germaniques ou celtiques. On
note par exemple que dans une tradition recueillie à la fin du xixe siècle dans
la région de Tolmin (Slovénie), Belin est un personnage fabuleux considéré
comme un guérisseur, capable notamment de soigner la cécité. Il s’agit
vraisemblablement d’une survivance locale du dieu gaulois Belenos,
particulièrement vénéré dans la ville proche d’Aquilée et dans l’ancien
Norique2. Dans les Carpathes, le souvenir de la déesse gauloise des
chevaux, Epona, s’est peut-être perpétué dans les légendes de Pohan-
Divča3. De même, le mythe celtique de Nuadu Airgetlám (« à la Main
d’Argent ») ou de son équivalent continental est sans doute à l’origine d’un
type d’icône de la Vierge apparu initialement en Serbie : Panagia
Tricherousa, une Vierge à trois mains, dont une d’argent4.
Tout cela montre que cette matière folklorique est difficile à manier pour
ce qui est de déterminer ce qui est typiquement slave. Aussi, je ne
m’attarderai que sur des mythes essentiels, sur lesquels nous disposons
d’études sérieuses ‒ il s’agit principalement des mythes cosmogoniques et
étiologiques ‒ avant de revenir aux textes anciens, lesquels contiennent
divers récits d’origines de peuples qui sont vraisemblablement tous
mythologiques.

COSMOGONIE

Création du monde à partir du géant démembré

Il existe plusieurs versions indo-européennes d’un mythe qui veut que le


monde a été créé à partir des fragments du corps d’un géant démembré. Ce
géant est par exemple Ymir en Scandinavie, ou le Puruṣa en Inde. Ce géant
est tué par les dieux, puis découpé. Ses cheveux donnent alors la végétation,
son sang, les eaux, ses os, les pierres, etc.5. Nous disposons de quelques
témoignages slaves tous issus du folklore. Ainsi, une légende
cosmogonique russe nous dit que :
« Au temps où il n’y avait ni terre, ni ciel, il y avait une clôture, entourée d’une palissade, au
milieu de laquelle vivait un vieillard. Le vieillard dit à son petit-fils :
‒ Petit, nous ne pouvons pas vivre ainsi, construisons-nous une maison. Faisons mieux qu’une
maison, bâtissons plutôt un palais en os. Tu apporteras les os et tu les jetteras dans ce fossé.
J’apporterai de l’eau et je mouillerai les os.
Ils se mirent à l’ouvrage : le petit-fils apporta les os et les disposa dans le fossé, le grand-père
apporta de l’eau et mouilla les os. Une fois les os trempés, ils façonnèrent un palais avec et s’y
installèrent. Ils accumulèrent du bien, engendrèrent des enfants et c’est d’eux que descendent
tous les hommes6. »

Les os qui permettent le façonnage du palais ne peuvent appartenir qu’à


une créature antérieure au vieillard et à son petit-fils, qui sont eux-mêmes
donnés comme ancêtres de l’humanité. Il est possible alors de penser que
nous avons là la trace d’un récit de démembrement d’un géant cosmique. Le
meilleur témoignage venant de Russie reste les Vers sur le Livre de la
Colombe (Stixi o Golubinoj Knige), un chant mystique collecté au
xixe siècle dans lequel une assemblée de tsars interroge le « tsar » David sur

diverses questions, et notamment sur l’origine du monde, pour laquelle


voici sa réponse :
« Il est écrit dans le Livre de la Colombe :
Notre monde prend naissance
Du Saint Esprit de Sabaoth ;
Le soleil rouge, du visage de Dieu,
Du Christ même, Tsar Céleste ;
La nouvelle lune, de la poitrine de Dieu ;
Les étoiles drues, de la chasuble de Dieu ;
L’aurore et le crépuscule
Des yeux de Dieu, du Christ, tsar céleste ;
Les vents prennent naissance sur notre terre ‒
Du Saint Esprit de Sabaoth,
Du souffle de Dieu :
Les tonnerres prennent naissance sur notre terre ‒
Des paroles de Dieu ;
Les tsars prennent naissance sur notre terre
De la tête sainte d’Adam ;
Les princes et les boyards prennent naissance ‒
Des reliques saintes d’Adam ;
Les paysans orthodoxes ‒
D’un genou saint d’Adam7. »

La mention de la sociogonie semble n’apparaît que dans quatre versions


du chant, dont celle citée ci-dessus. S’agissant d’une tradition
essentiellement orale, la variabilité est importante d’une version à l’autre.
Ainsi, une des variantes les plus anciennes, notée par Kirša Danilov durant
la seconde moitié du xviiie siècle, indique :
« Le monde lumineux vient de la face de Dieu
Le soleil de justice vient de Ses yeux
La lune resplendissante vient de Son crâne
La nuit obscure de Sa nuque
Le crépuscule du soir et du matin viennent des sourcils de Dieu,
Les étoiles multiples viennent de ses cheveux. »

Il est très probable qu’il faille identifier ces textes avec un ouvrage
considéré comme « hérétique » au xiiie siècle et mentionné dans la
Vie de saint Abraham de Smolensk, le Livre des Profondeurs (Glubinnyja
Kniga), dont le texte est malheureusement perdu8.
On notera une curieuse légende étiologique collectée récemment en
Biélorussie :
« Autrefois il y avait une statue, bon, comme Staline chez nous, dans le temps. On a dressé une
statue, de plâtre, et on l’a cassée. […] Enfoncée dans un canon : elle a explosé. Et aux endroits
où on a trouvé quelque chose, on a fait des villages, un à chaque endroit. C’était il y a très, très
longtemps. Et donc il y a Rukovičy où on a trouvé un bras [ruka], Grudkovičy : la poitrine
[grudki], il y a eu un Puzovo [puzo : « ventre »], Cyckovičy [cyc’ka : « téton »]. C’était selon ce
qu’ils ont trouvé. Čerepy : on a trouvé un crâne [čerap], Golovači, une tête [golova], il y a aussi
Zubki [zub : « dent »], c’est nos voisins d’à côté9… »

Un souvenir du mythe du géant cosmique se retrouve peut-être dans une


légende slovène qui veut qu’après la création du monde, Dieu vivait parmi
les hommes. Mais ceux-ci étaient pauvres car il n’y avait pas de sol fertile
sur la terre : Dieu les nourrissait de la manne céleste. Alors Dieu les prit en
pitié : il se sépara de son corps et monta aux cieux. Quant au corps lui-
même, il se décomposa et forma un sol fertile10. Une variante indique que,
alors que le monde n’était que roc stérile, Dieu envoya son coq changer
cela. L’oiseau descendit sur terre et pondit un œuf, qui se craquela : des
fissures coulèrent sept rivières qui fertilisèrent le monde. Le déluge a lieu le
jour où, oubliant les commandements divins, les hommes brisèrent l’œuf11.
Or dans certaines versions indo-européennes du mythe, notamment en
Grèce ou en Inde, le géant cosmique est sorti d’un œuf.

Création dualiste et mythe du plongeon cosmogonique


L’autre grand type de mythe cosmogonique particulièrement bien
implanté chez les Slaves est celui du plongeon. C’est un mythe
essentiellement dualiste, qui montre un premier personnage, parfois
initialement endormi12. Celui-ci se réveille, et pris d’ennui, voit surgir un
deuxième personnage qu’il envoie au fond des eaux primordiales y chercher
de quoi fabriquer la terre13. Ce type de récit, qui n’est pas slave à
proprement parler (il est attesté dans toute l’Eurasie et dans les Amériques),
a été très étudié dès le xixe siècle14. Chez les Slaves chrétiens, le démiurge
est Dieu lui-même, le plongeur étant le diable : ailleurs, nous avons un
démiurge et un oiseau. Il arrive qu’un troisième personnage soit présent,
associé à Dieu. Un des récits les plus complets, parmi les dizaines de
versions connues, a été collecté chez les Houtsouls :
« Au commencement, il n’y avait que de l’eau autour de laquelle Dieu marchait, et des nuages
sur lesquels l’Esprit de Dieu, Alej [Élie], dormait. Un endroit sur l’eau se couvrit alors d’écume.
À cette écume, Dieu donna la force et la vie, alors Aridnyk [Satan], le compagnon de Dieu, fut
créé. Sur le commandement de Dieu, Aridnyk ramena du fond des eaux un peu d’argile, avec
laquelle Dieu fabriqua une mince terre qui devait leur servir de lieu de repos. Dieu s’y allongea
et s’endormit bientôt. Aridnyk, cependant, désirait être le maître du monde : il décida de pousser
le Dieu endormi dans l’eau. Il commença à pousser, mais quelle que soit la direction vers
laquelle il le faisait, la terre s’étendait. Quand, s’étant étendue dans toutes les directions, elle eut
atteint sa taille actuelle, Dieu se réveilla, et, furieux de cette tromperie, lança Aridnyk dans l’eau,
qui se congela instantanément autour de lui. Aridnyk frappa alors sa tête contre la glace, la brisa,
et revint sur terre. Depuis ce temps, Dieu ne le considéra plus comme son ami, mais comme son
ennemi. Après quelque temps, Alej se réveilla, et surpris par la terre, s’effraya et la frappa avec
un tel pouvoir que cela forma les montagnes et les vallées. Dans le but de prévenir de nouvelles
catastrophes de ce genre, Dieu enchaîna un des bras d’Alej à un rocher. N’ayant qu’une seule
main de libre, il ne pouvait plus que secouer les nuages15. »

La plupart des versions ont été collectées à partir du xixe siècle. Il en


existe toutefois une autre, archaïque, conservée dans un apocryphe dont les
manuscrits (un bulgare et trois russes) les plus anciens, sont datés des xve-
xvie siècles : il s’agit de la Légende sur la mer de Tibériade :

« Et Dieu dit : que soient sur la terre la mer de Tibériade et l’eau salée. Et le Seigneur descendit
dans les airs jusqu’à la mer de Tibériade et il vit un plongeon qui flottait là ; s’arrêtant devant lui,
il lui dit : Plongeon, qui es-tu ? Et celui-ci répondit : Je suis Satan. Et le Seigneur dit à Satan :
Plonge dans la mer et ramène de la terre et une pierre. Et le Seigneur partageant en deux
morceaux la pierre donna de sa main gauche une moitié à Satan et frappa l’autre de son sceptre.
Des étincelles de feu jaillissant sur la pierre, le Seigneur créa les archanges Michel et Gabriel et
les anges s’envolèrent. Satan fit avec la pierre l’incommensurable force démoniaque des dieux.
Et le Seigneur dit : Que sur la mer de Tibériade soient trente-trois baleines et que sur ces
baleines soit la terre16. »

Le fait que le plongeur, bien qu’appelé Satan, soit ici toujours un oiseau,
montre que ce récit, bien que porté par des manuscrits récents, remonte à
des sources anciennes.

Division du monde

Dans ce récit apocryphe, le monde est posé sur des baleines. C’est un
motif qui est encore bien attesté dans les Balkans. En Slovénie par exemple,
le monde peut être posé sur un poisson, sur un dragon ou sur un taureau17.
Ce monde dans les croyances slaves, semble, comme chez les Celtes18,
formé de trois étages : un monde supérieur, divin, un monde central, le
nôtre, et un monde inférieur, assimilé après la christianisation aux enfers.
Cette division apparaît bien, par exemple, dans une ballade populaire
slovène :
« La première énigme dit ceci :
‒ Où se trouve le monde le plus élevé [narviši svet] ?
‒ Le monde le plus élevé se trouve
Là où Christ est crucifié.
La deuxième énigme dit ceci :
‒ Où se trouve le monde le plus large [narširi svet] ?
‒ Le monde le plus large se trouve
Là où le soleil se lève le matin
Et se couche après la gloire de Dieu le soir.
La troisième énigme dit ceci :
‒ À quelle distance le paradis se trouve de l’enfer ?
‒ La femme du pope le sait bien,
Elle a été en enfer,
Comme Dieu l’a jetée du ciel,
Au fond de l’enfer, elle a dû voler19. »

Cette tripartition apparaît déjà dans des sources anciennes. Ebbo,


biographe d’Otton de Bamberg, nous informe qu’à Stettin, on donnait trois
têtes à Triglav parce qu’il régnait sur le ciel, la terre et les enfers20. Adam
de Brême signale à Wolin un dieu dont il ne donne pas le nom slave, mais
qu’il appelle « Neptune aux trois natures », parce que l’île de Wolin serait
entourée de trois variétés d’eau : une verte, une blanchâtre, une furieuse et
tempestaire21. L’eau blanche symboliserait le ciel (le blanc étant la couleur
du sacré), la verte, la terre (le vert étant évidemment la couleur de la
végétation), et la tempestaire (c’est-à-dire la noire), les enfers22. On notera
d’ailleurs que l’idole du Zbruč est divisée en trois niveaux, qui sont peut-
être les trois mondes23. Le plus haut niveau est composé de grandes figures
divines, le niveau intermédiaire de figures plus petites, et le niveau
inférieur, d’un seul personnage (Veles ?) qui porte l’ensemble. L’idole de
Kouřim, incomplète, n’est plus composée que de deux rangs de visages,
ceux du plus élevé étant plus grands que ceux du rang d’en-dessous.

Façonnage du monde

Le sanglier ou la laie avec ses petits est considéré dans diverses légendes
polonaises comme l’animal qui façonne le monde en créant lacs et rivières.
On trouve sans doute un écho de cela dans un passage de Thietmar
concernant les Obodrites, qui signale que lorsque ceux-ci vont s’engager
dans une guerre civile, un énorme sanglier sort d’un lac et vient secouer la
terre avec ses défenses24.
Dans le folklore moderne, on dispose de plusieurs versions d’un même
récit dans lequel Dieu, se sachant comment faire les montagnes, en obtient
le secret, souvent grâce à une abeille, auprès du hérisson, cet animal étant
lui-même symboliquement un équivalent du sanglier25. Ce type de récit
possède des parallèles chez les Celtes, en Irlande et au Pays de Galles, mais
aussi en Inde : Viṣṇu, identifié à Brahma, y prend l’apparence d’un sanglier,
Varāha, pour aller chercher la terre au fond de l’eau primordiale. Il y
parvient (parfois après un combat contre un démon) et la fixe sur l’eau et la
dote de montagnes. Puis il s’accouple avec elle, et il obtient d’elle trois fils
démoniaques. Ensemble, ils menacent l’équilibre de l’univers. Les dieux
s’en plaignent mais ne savent que faire. Śiva prend l’apparence d’un
Śarabha (un monstre ailé à huit membres), et poursuit les quatre sangliers.
Cette poursuite est violente et menace de détruire le monde. Alors Viṣṇu
accepte de dire ce qu’il faut faire pour que lui-même abandonne son
apparence de sanglier : il faut le sacrifier lui et ses trois fils. Ils sont tués par
Śiva et leurs dépouilles tombent dans la mer26.

CRÉATION DE L’HOMME

Nous disposons d’un mythe ancien de création de l’homme. Celui-ci a été


inséré dans le Récit des temps passés. Lorsqu’en 1071 des sorciers furent
capturés à Rostov, ceux-ci déclarèrent ‒ sous la torture :
« Nous savons comment l’homme a été créé. […] Dieu était dans son bain et il transpirait, puis il
se sécha avec un bouchon de paille et le jeta du ciel sur la terre. Puis Satan se querella avec Dieu
pour savoir lequel des deux créerait l’homme à partir de ce bouchon de paille. Le diable fit
l’homme et Dieu y mit une âme27. C’est pourquoi, quand l’homme meurt, son corps va à la terre
et son âme près de Dieu28. »

Ce type de récit dualiste sur la création de l’homme est connu de l’Europe


orientale (donc chez les Slaves) à l’ouest à la Sibérie à l’est. Au sud, il est
attesté au Caucase, dans l’arc himalayen et en Inde orientale, dans les
régions occupées par les peuples munda (donc non-indo-européens). La
seule origine possible de ces récits semble pouvoir être les anciens peuples
iraniens des steppes, sans doute dès l’Âge du Bronze29.
Cela montre bien qu’il est vain, comme le pensait déjà John Fine, de
penser que les deux « sorciers » puissent être des Bogomiles, membres
d’une secte chrétienne au dogme dualiste apparue au Moyen Âge dans les
Balkans, le terme servant à les désigner dans le Récit des temps passés
n’étant d’ailleurs pas utilisé pour qualifier des hérétiques. Le Bogomilisme
ne semble pas avoir atteint la Rus’30. Et selon Aničkov, le manichéisme des
Bogomiles n’est même pas d’origine slave31.
D’autres motifs ont pu se greffer sur ce récit, pour le compléter et former
une anthropogonie complexe. Chez les Houtsouls, on pensait qu’il y avait
eu d’abord sur le monde une race de nains à longue barbe (lektoborody), qui
finit par disparaître, remplacée par des géants, si forts qu’ils pouvaient
déraciner un arbre. Dieu mit fin à leur existence avec le Déluge, qui
n’épargna que Noé et sa famille32. L’idée de géants primordiaux détruits par
le déluge existe aussi en Slovénie33. En Bulgarie, on croit que Dieu fabriqua
d’abord des géants, puis des nains, et enfin les hommes. C’est Dieu lui-
même qui a ordonné la disparition des deux premières générations, voyant
leur imperfection34. Les légendes de géants antédiluviens sont nombreuses
aussi en Biélorussie35. S’agit-il d’une idée qui remonte au paganisme, ou
simplement d’un souvenir des Nephilim de la Bible ?

LES MYTHES DE PERUN

Dans l’état actuel de nos connaissances aucun mythe directement lié aux
divinités slaves n’a été conservé dans les textes anciens. Nous n’en avons
plus que des bribes, ainsi que des récits folkloriques, qu’il est parfois
possible de considérer comme des vestiges de mythes en raison le plus
souvent de la nature de leurs personnages : on peut par exemple penser
qu’une bonne part des récits mettant en œuvre saint Élie ou saint Georges
peuvent avoir un rapport avec Perun s’ils ne sont pas présents dans les
textes chrétiens originels. Deux tentatives de reconstitutions des anciens
mythes du dieu de l’orage ont toutefois été faites. La première, due à
Viačeslav Ivanov et Vladimir Toporov, a durablement marqué les études sur
la mythologie slave.

Le combat de Perun contre Veles

Les tentatives sérieuses de reconstruction du mythe du dieu de l’orage


chez les Slaves sont relativement peu nombreuses. Au xixe siècle, Alexandre
Afanassiev, suivant les théories de Max Müller, et avant cela celles de Jacob
Grimm, a voulu voir en Perun un héros solaire combattant et maîtrisant la
nuée, le chaos, incarné sous la forme du dragon. Mais dès la fin de ce même
siècle, ces théories ont été battues en brèche et la mythologie comparée s’en
est retrouvée pour un temps discréditée.
Bien plus tard, les chercheurs russes Viačeslav Ivanov et Vladimir
Toporov ont à plusieurs reprises étudié les contes et mythes lituaniens, en
corrélation avec des légendes biélorusses, considérant que ces récits sont
parmi les plus conservateurs tant chez les Slaves que chez les Baltes36. On
peut ainsi résumer à grands traits le schéma qu’ils ont obtenu : le dieu de
l’orage, Perkunas, se trouve en haut (sur une montagne, dans le ciel, etc.),
au sommet de l’arbre cosmique. Le serpent se trouve en bas, au niveau des
racines de l’arbre, sur de la laine noire. Le serpent dérobe des bêtes à cornes
et les caches dans une grotte ou sous un rocher. Le dieu de l’orage brise
cette cachette et délivre les bêtes. Le serpent essaie de se cacher, sous
l’arbre ou sous une pierre. Le dieu de l’orage avec sa foudre brûle l’arbre ou
brise la pierre. Après cette victoire, il pleut et le serpent disparaît dans les
eaux souterraines.
Si les versions biélorusses utilisées en parallèle par Ivanov et Toporov
opposent simplement Pjarun (équivalent local de Perun) au Zmej (ou ses
dérivés), c’est-à-dire au « Dragon », les versions lituaniennes donnent bien
Velinas comme nom à cet adversaire (mais le nom Aitvaras apparaît aussi),
comme forme d’ennemi ordinaire de Perkunas37. Velinas, dans les mythes
lituaniens, peut prendre de multiples formes, mais la principale est celle
d’un serpent.
Le mythe reconstitué par Ivanov et Toporov est encore présent de façon
allusive dans certains chants lettons, où il est question de foudroyer le chêne
et de trancher la tête du diable (Velns)38 :
« Perkons frappa dans le chêne
Avec neuf éclairs.
Trois éclairs fendent le tronc,
Six fendent la cime (438). »
« Le forgeron forge dans le ciel.
Les charbons tombèrent dans la Daugava
J’étendis mon châle,
De l’argent tomba pour moi.
Je forgeai une épée
À neuf lames.
Je tranchai la tête du diable [Velns]
En neuf morceaux […] (462). »

Le lituanien Velinas, dieu borgne, ou du moins au gros œil, est donc


clairement l’adversaire du dieu de l’orage. Velinas/Velns apparaît aussi
comme protecteur du bétail, y compris dans des formules magiques39. Son
rôle n’est donc pas totalement négatif, et l’on peut penser que dans les
versions slaves, l’adversaire a dû être Veles/Volos.
Selon la reconstitution proposée par Ivanov et Toporov, Perun serait donc
primitivement un cavalier ou un aurige. Il tue avec son arme, la foudre, un
ennemi semblable à un serpent qui serait Veles ou Volos ‒ dans les
attestations plus récentes Zmjulan ou autre dérivé de zmej. Veles se cache
de lui d’abord dans un arbre, puis sous une pierre, dans des animaux, dans
l’eau, etc. Perun foudroie son ennemi, et de ce fait les eaux (ou les vaches,
ou la femme qui avait été enlevée) sont libérées : il pleut. Pour ces deux
chercheurs, l’interprétation la plus évidente du mythe de Perun est de nature
étiologique, correspondant à l’origine du tonnerre, de l’orage et de la pluie
fertilisatrice40. On reste très proche des idées d’Afanassiev.
Ce schéma mythique est essentiellement reconstitué par analogie avec les
mythes d’autres peuples, et par regroupement d’éléments venus de contes
populaires, essentiellement biélorusses. De plus, il ne tient qu’assez peu
compte des données issues du folklore, du calendrier agropastoral qui
pourtant permettent de préciser nombre de faits. Mais une véritable école
informelle s’est mise en place à la suite de ces travaux et d’autres
chercheurs les ont complétés, notamment en ce qui concerne les Slaves du
Sud41. D’autres encore l’ont adapté, comme Boris Uspenskij, qui a fait de
saint Nicolas le successeur de Veles, alors qu’en définitive, en dehors d’une
relative opposition entre Élie et Nicolas, peu de choses permettent d’aller
dans ce sens42. D’autres enfin, l’ont réfuté, comme Elizabeth Warner, qui a
déclaré à ce sujet : « Il doit être dit que cette théorie est purement matière à
hypothèse43. »
En faisant la synthèse de l’ensemble des données disponibles sur Perun,
j’ai tenté pour ma part de compléter une fois encore le schéma proposé par
Ivanov et Toporov, en l’insérant dans le calendrier agro-pastoral44.
En hiver, les précipitations (neige, pluie) sont constantes, mais faibles en
valeur relative. Les vaches sont à l’étable, sous la protection de saint
Blaise : ces vaches (les eaux) sont donc gardées par Volos/Veles, encore
appelé localement Badnjak, le serpent (ou dragon) du monde souterrain.
Ces vaches sont probablement nommées Volosyni, nom qui a été attribué
plus tard en vieux russe aux Pléiades, groupe d’étoiles de la constellation du
Taureau.
À la fin du mois d’avril, Sirius se couche. Les précipitations augmentent
fortement et régulièrement. Les paysans procèedent à la première sortie des
vaches, sous la protection de saint Georges (= Perun), qui apprivoise les
loups (= le Chien, Sirius). Perun attaque Veles, avec le concours des vents
dont le nom reprend celui du monstre dans les contes (zmej : « serpents »),
ou d’un aigle : il tue son adversaire alors que celui-ci est sous un chêne, en
le frappant de sa foudre45. C’est la nouvelle année.
Juste après, vers la mi-mai, les Pléiades se lèvent et on entre dans le signe
du Taureau. Les vaches (les eaux = Volosyni) sont donc libérées. De mai à
juillet, pour se garantir de bonnes récoltes, on effectue divers rituels visant à
faire tomber la pluie, ou tout au moins à garantir la fécondité (Perperuna,
Dodola, German, Jarilo, Kostroma, Kupalo, etc.). Ces rituels ont parfois
lieu, localement, dès qu’un épisode de sécheresse arrive.
À la fin du mois de juillet, Sirius se lève. Les précipitations connaissent
leur maximum d’intensité sous la forme, non plus de pluies continuelles,
mais d’orages. On prie saint Élie (= Perun) de ne plus faire tomber trop de
pluie, de façon à ne pas ravager les champs. On commence ou on finit les
moissons (selon les régions) et on entre dans l’automne. Perun et Veles se
battent à nouveau. Nul n’est vainqueur, et le monde est brûlé par la chaleur
de l’étoile Sirius, qui arrive de l’est. S’ensuit une inondation régénératrice.
Novembre : les Pléiades se couchent. Les vaches (les eaux) sont à nouveau
sous la coupe de Veles.
Cette reconstitution, largement basée sur des matériaux folkloriques de
loin postérieurs à la christianisation, est bien sûr hypothétique : aucun texte
ancien ne permet d’en assurer la solidité. Seule l’utilisation de
comparaisons avec d’autres mythologies indo-européennes permet de
penser qu’elle est malgré tout très vraisemblable.

Le don d’une arme à un chasseur

Un autre fragment de mythe lié à Perun a été identifié essentiellement par


comparaison avec des données baltes : celui du don d’une arme
merveilleuse à un chasseur46. Nous avons vu plus haut comment, dans une
légende polonaise, Pieron, forme locale de Perun, donne à un chasseur un
fusil en récompense d’une action précise : le chasseur a tué un oiseau
monstrueux que le dieu pourchassait depuis des années47. Il existe une
version russe de cette même légende, collectée dans la région de Samara.
Le dieu y est toutefois remplacé par son successeur chrétien Élie. Et à la fin,
le chasseur, incité par un sorcier commet un acte impie (il tire sur croix),
qui pousse Élie à l’aveugler et à lui faire perdre l’arme, donnée au sorcier48.
Or il existe de stricts parallèles lituaniens, avec pour protagonistes un
chasseur, un démon (velnias), et le dieu de l’orage Perkūnas. Ici, le diable se
cache sous une pierre ou sous un arbre avant d’être abattu par le chasseur49.
Il est possible que ce fragment de mythe appartienne au cycle de combats
entre le dieu de l’orage et son adversaire démoniaque (Perun et Veles chez
les Slaves). Cependant, l’ajout d’un personnage secondaire, le chasseur, qui
aide le dieu de l’orage et reçoit une arme en récompense, incite à classer ces
récits à part. Le motif du don d’une arme fabuleuse, d’un dieu à un héros,
est relativement rare, du moins dans le domaine indo-européen. Héraclès
reçoit diverses armes et vêtements de dieux, dont un arc et des flèches, par
Apollon, qui deviendront avec la massue ses armes principales50. Le même
Apollon donne un arc à Oreste, fils d’Agamemnon, afin de lui permettre de
chasser les Érynies qui l’assaillent51. Au Caucase, dans un conte ossète, le
Narte Soslan reçoit une épée de Uastyrdži, nom local de saint Georges52. En
France, Dieu, par l’intermédiaire d’un ange puis de Charlemagne, a remis
Durandal à Roland53. L’idée d’une arme donnée par un dieu (Ishtar, Adad,
Ashur ou Yahweh) à un roi semble être une idée particulièrement commune
au Proche Orient et en Mésopotamie54, mais il s’agit plus d’un mode de
désignation du roi légitime que d’une récompense. Il s’agit donc d’un motif
plutôt rare (lorsque l’origine de l’arme d’un héros est connue, on apprend
qu’elle est le plus souvent déjà l’arme du père ou, plus rarement, d’une
arme fabriquée ou faite fabriquée par la mère55. Il y a cependant
l’exception, en Inde, que constitue Arjuna, lequel est un véritable
collectionneur d’armes divines : il en reçoit d’Agni, d’Indra, de Śiva et
d’autres encore. La façon dont Arjuna acquiert son arme principale, l’arc
Gāṇḍīva, est sans doute ce qu’il y a de plus proche des textes balto-slaves.
L’action prend place dans le Mahābhārata56. Arjuna, en compagnie de son
cocher Kṛṣṇa, se trouve dans une forêt quand un homme affamé, un
brahmane, apparaît devant lui. Cet homme est le dieu du feu, Agni, qui a
perdu toute sa force et est sur le point de mourir. Pour empêcher cela, il faut
brûler la forêt de Khāṇḍava et tuer toutes les créatures qui s’y trouvent, y
compris des démons qui ont à leur tête un ami d’Indra, Takṣaka. Arjuna
accepte d’accomplir cet acte, et pour y parvenir, il reçoit diverses armes,
dont l’arc Gāṇḍīva et deux carquois qui ne se vident jamais. Après avoir
brûlé la forêt, Arjuna peut conserver les armes.
Même si entre la version indienne et les versions balto-slaves, il y a
inversion de motif, on retrouve une structure commune. Certains détails
montrent aussi que l’on a bien affaire au même récit, d’origine indo-
européenne. Ainsi, dans une des versions lituaniennes, le chasseur reçoit
deux cornes, l’une de poudre, l’autre de plomb, toutes deux étant, comme
les deux carquois d’Arjuna, inépuisables. Enfin, tout comme le chasseur
balto-slave doit abandonner son arme, Arjuna finira par rendre Gāṇḍīva aux
dieux. Cela incite à penser que ces légendes balto-slaves sont peut-être
d’ultimes vestiges d’un récit épique perdu.

MYTHES DE FONDATION

Les ultimes vestiges de la mythologie slave concernent surtout les récits


de fondation. Il peut s’agir ici de fondation d’un peuple, d’un État, ou d’une
ville. Nous avons conservé à ce sujet des éléments concernant les Polianes,
à Kiev, les Polonais, les Tchèques et les Croates. Ces récits médiévaux, tout
en étant différents les uns des autres, présentent cependant des analogies qui
permettent de les regrouper en types précis.

La fondation par des frères et une sœur

Ce type de récit, dont on verra qu’il n’est pas spécifiquement slave, est
surtout connu par l’histoire de la fondation de Kiev contenu dans le Récit
des temps passés :
« En ces temps-là les Polianes vivaient séparément et chacun dirigeait sa famille. Et jusqu’alors
chacun vivait avec sa famille, dans sa résidence, chacun dirigeait sa famille. Et il y avait trois
frères : l’un s’appelait Kii, l’autre Šček et le troisième Xoriv, et une sœur qui s’appelait Lybed.
Kii s’installa sur la colline où maintenant se trouve Boritchev ; Šček s’établit sur une colline qui
s’appelle maintenant Ščekovica et Xoriv sur la troisième colline à laquelle il donna le nom de
Xorivica. Et ils bâtirent une ville au nom de leur frère aîné ; et ils lui donnèrent le nom de Kiev.
Et autour de la ville il y avait une forêt et un grand bois ; et là ils chassaient les bêtes sauvages ;
et c’étaient des hommes sages et intelligents ; et ils s’appelaient Polianes ; et c’est d’eux que
descendent les Polianes qui sont jusqu’à maintenant à Kiev. Quelques-uns, ne sachant pas cela,
disent que Kii était un passeur ; car en face de Kiev, il y avait alors un bac de l’autre côté du
Dniepr. De là on disait « le bac de Kii ». Mais si Kii n’avait été qu’un passeur, il ne serait pas
allé à Tsargrad. Mais Kii régnait sur sa tribu et, dit-on, s’étant rendu près de l’empereur, il reçut
de grands honneurs de cet empereur près duquel il s’était rendu. Alors qu’il revenait et se
trouvait sur le Danube, il aima l’endroit et y bâtit une petite ville et voulut s’y établir avec sa
famille. Mais ceux qui vivaient alentour ne le lui permirent pas. Encore aujourd’hui les habitants
de cette région du Danube appellent cette petite ville Kievets. Kii retourna donc dans sa ville de
Kiev et il y acheva sa vie. Ses frères, Šček et Xoriv ainsi que sa sœur, Lybed, y moururent57. »

On a régulièrement cherché de l’histoire réelle derrière ce témoignage.


Imre Boba, par exemple, pense que Kii, Šček et Xoriv ne sont pas slaves
mais khazars58. Mais s’il avance des arguments tirés d’une structure
corrigée du texte, il ne donne rien de concret du point de vue linguistique.
De plus, nous sommes clairement en droit de penser qu’il s’agit ici d’un
mythe, surtout lorsque l’on découvre quelque chose de très similaire dans
les récits que Constantin VII Porphyrogénète nous a conservés de
l’installation des Croates en Dalmatie :
« Mais à cette époque les Croates étaient installés au-delà de la Bavière, où se trouvent
aujourd’hui les Croates blancs. De là, ils se séparèrent, et une famille de cinq frères, Kloukas,
Lobelos, Kosentzes, Moukhlo et Khrobatos, et de deux sœurs, Touga et Bouga, vinrent avec ses
gens en Dalmatie, et ils trouvèrent les Avars sur cette terre. Après s’être battus pendant de
nombreuses années, les Croates prirent le dessus, tuèrent une partie des Avars et forcèrent le
restant à être leurs sujets. [s’ensuit une lutte contre les Francs]. Depuis lors, ils restèrent
indépendants et autonomes, demandèrent le saint baptême à l’évêque de Rome qui envoya des
évêques pour les baptiser à l’époque de leur prince [arkhonte] Porinos59. »

« Les Croates qui vivent actuellement dans la région de Dalmatie descendent des Croates païens,
également appelés « Blancs », qui vivent au-delà de la Turquie et à côté de la Francie ; ils ont
pour voisins slaves les Serbes païens. « Croates » en langue slave veut dire « ceux qui occupent
un vaste territoire ». Ces mêmes Croates vinrent réclamer la protection de l’empereur des
Romains Héraclius avant que les Serbes ne fassent de même, à l’époque où les Avars avaient
combattu et expulsé les colonies de Romani que l’empereur Dioclétien avait transféré de Rome ;
ils furent appelés Romani pour être venus de Rome dans ces régions, je veux dire celles appelées
de nos jours Croatie et Serbie. Les Avars avaient expulsé ces Romani à l’époque d’Héraclius,
empereur des Romains, et ces contrées étaient alors ruinées. Aussi l’empereur Héraclius ordonna
aux mêmes Croates de vaincre et d’expulser les Avars de ces régions, et par mandat impérial ils
s’installèrent dans le même pays que les Avars avant eux. Ces mêmes Croates avaient pour
prince à cette époque le père de Porga60. »

Porinos et Porga sont deux noms pour le même personnage : il s’agit


vraisemblablement d’un avatar de Perun.
Un texte bulgare du xiie siècle que Jordan Ivanov a appelé Chronique
apocryphe bulgare, mais dont le titre originel est Récit sur Isaïe le prophète
et comment il fut emmené par les anges au septième ciel, nous donne le
récit légendaire de l’ethnogenèse des Bulgares des Balkans. Ce récit débute
en fait par un apocryphe bien connu dans le monde slave, à savoir la Vision
d’Isaïe. Puis il enchaîne sur une curieuse chronique des premiers rois
bulgares, une chronique qui est en réalité une compilation de légendes, et
qui n’a quasiment aucune valeur historique. L’histoire du premier roi y est
aussi celle de l’installation des Bulgares en Bulgarie :
« Donc, il [Isaïe] entendit une autre voix qui s’adressait à lui : ‘Isaïe, mon bien aimé prophète,
va à l’ouest vers l’endroit le plus haut [le plus au nord] du pays de Rome, sépare un tiers des
Coumans, appelle-les Bulgares, et peuple la terre de Karvona, qui est libérée des Romains et des
Hellènes’. Alors moi, frères, sur ordre de Dieu, je suis venu à gauche du pays de Rome et j’ai
séparé le tiers des Coumans et leur ai montré le chemin, je les ai amenés jusqu’à la rivière
Zatnousa, et vers l’autre rivière qui s’appelle Ereousa. Alors, elles seront ainsi de grandes
rivières. Et le pays de Karvona, qui s’appellera Bulgarie, pour qu’il soit libre d’Hellènes pendant
130 années. Et il fut peuplé par beaucoup de gens du Danube jusqu’à la mer. Et un tsar fut choisi
parmi eux. Et il s’appelait le tsar Slav. Et ce tsar peuplait des villes et des villages. Certains de
ces gens étaient païens. Et le tsar bâtit cent tertres sur la terre bulgare, alors on l’appela le tsar
aux cent tertres. Et durant ce temps-là, tout était en abondance. Et ces cent tertres étaient son
royaume. Et ce tsar fut le premier à régner sur les terres bulgares, et son règne dura cent et dix-
neuf années jusqu’à sa mort61. »

On voit bien avec ce passage à quel point les Bulgares résultent de la


fusion de plusieurs peuples différents dont le souvenir est encore présent.
Ainsi, les Romains et les Hellènes représentent les populations
autochtones : Thraces, Daces, Gètes, etc. Les Bulgares historiques eux-
mêmes sont issus d’une aristocratie vraisemblablement turque, bien que les
premiers rois aient porté des noms iraniens, et d’une masse populaire slave.
Très vite l’élément turc a disparu, mais son souvenir est conservé dans notre
texte par le recours aux Coumans, un autre peuple turc qui se localisait au
nord de la mer Noire et au sud de l’ancienne Russie jusqu’au xive siècle.
Enfin, donc, l’élément slave est le plus important, et c’est sans doute de ce
fait que le premier roi légendaire, mentionné par cette chronique, porte le
nom de Slav.
Dans les trois récits, nous avons un peuple s’installe sur une terre qui
n’étaient pas la sienne, et se dote d’un roi éponyme (Kii à Kiev, Khrobatos
chez les Croates, Slav chez les Bulgares). Dans le Moyen Âge central, ce
type de légende est courant (on se souviendra par exemple de Brutus pour
les Bretons, Francus pour les Francs). Cependant, on notera que l’essentiel
de ces migrations légendaires, le plus souvent littéraires, seraient dues à une
fuite, notamment après la guerre de Troie. Ici, tel n’est pas le cas : la
migration, pour ce qui concerne les Bulgares, se fait suite à un songe, à une
vision.
Quelques motifs présents dans le texte bulgare se retrouvent ailleurs. Par
exemple la division en trois du peuple originel : l’apocryphe dit que l’on
prendra un tiers des Coumans, et que ce tiers se donnera pour roi un nommé
Slav. C’est là une information que l’on retrouve abondamment dans le
monde iranien, comme l’a montré en dernier lieu Éric Pirart : le premier roi
des Scythes, Targitaos a pour successeur Kolaxais (*(s)kuda-xšaya- :
« Celui qui a le pouvoir sur les Scythes »), cadet de ses trois fils ; Héraklès
a pour successeur Scythès, cadet de ses trois fils ; Feridun a pour successeur
Iraǰ (éponyme de l’Iran), cadet de ses trois fils62. Dans tous les cas, le
maître du tiers est éponyme du nouveau peuple central. Sachant la
proximité qu’il y a eue entre les peuplades iraniennes, les anciens Slaves et
les proto-Bulgares, est-ce à dire que Slav était le cadet de trois frères ? Pas
nécessairement, car dans quelques cas de fondation de ville (et non plus de
peuple) on retrouve bien trois frères, comme on l’a vu pour la Kiev chez les
Polianes. Kii, éponyme de la nouvelle ville, est ici l’aîné. On notera que les
trois frères sont dotés d’une sœur, Lybed, dont le nom se rapporte au russe
moderne lebed : « cygne ». Cette femme appartient de toute évidence à
l’autre monde, comme toutes les femmes-cygne russes et européennes63.
Ce récit trouve peut-être, selon certains, sa source dans une vieille
chronique arménienne, du viie siècle, l’Histoire de Taron, attribuée à Zenob
de Glak (ive siècle) :
« Au bout de quinze ans, le roi [Vagharshag/Valarshag], mit à mort les deux frères pour un motif
inconnu, et partagea leurs domaines entre leurs trois fils : Govar [Kouar ou Kuar]64, Meghdès
[Meltes] et Horian. Govar construisit le village du même nom, ainsi dénommé à cause de lui ;
Meghdès éleva dans une plaine une bourgade appelée de son nom Meghdi ; Horian fonda un
bourg dans le canton de Balounik et l’appela aussi de son propre nom. Au bout d’un certain
temps Govar, Meghdès et Horian s’étant concertés ensemble se rendirent sur le mont Karké
qu’ils trouvèrent fort agréable et bien situé parce qu’il offrait un vaste terrain pour la chasse des
lieux couverts d’ombrage des pâturages et des bois en abondance. Ils y élevèrent des villages
érigèrent deux idoles, l’une sous le nom de Kisané, l’autre sous celui de Témèdre, et
consacrèrent les membres de leur famille à leur service65. »

Le récit étant censé avoir lieu sur le territoire de Balounik, on ne peut


qu’être étonné par cette triple coïncidence que sont les noms de Kii/Kouar,
Xoriv/Horian et Poliani/Balounik. Le débat a encore court chez les
spécialistes pour savoir laquelle des deux légendes tire son origine de
l’autre66. On peut comparer à ces deux légendes, celle de l’origine des
Croates, vue plus haut, qui parle non pas de trois frères et une sœur, mais de
cinq frères et deux sœurs ‒ lesquelles sont quasiment homonymes. Parmi
les cinq frères, seul le dernier cité est homonyme de son peuple : Khrobatos
(plus exactement Khrovatos), dont le nom assone là encore avec
Xoriv/Horian.
En Italie, c’est la ville de Tibur (Tivoli) qui est dite fondée par trois frères,
selon Virgile :
« Puis deux jumeaux, venus des remparts de Tibur, pays ainsi nommé du nom de Tiburtus, leur
frère : Catillus et l’impétueux Coras, jeunes guerriers argiens, s’élancent au premier rang
[…]67. »

Solin nous précise un peu plus cette information :


« Tibur, d’après Caton, [fut fondée] par Catillus, chef arcadien de la flotte d’Évandre, et, d’après
Sextius, par les Argiens. En effet, Catillus, fils d’Amphiaraüs, après la mort surnaturelle de son
père au siège de Thèbes, partit, sur l’ordre d’Aeclée son aïeul, et, venu en Italie avec toute sa
récolte de l’année pour la consécration du printemps, y donna naissance à trois enfants, Tiburtus,
Coras, Catillus, qui, après avoir chassé d’une ville de Sicile les anciens Sicaniens, appelèrent
cette ville Tibur, du nom de Tiburtus leur frère aîné68. »

On notera dans la liste la présence d’un certain Coras, dont le nom semble
bien proche de celui de Xoriv, de Khrovatos et de Horian, ce qui laisse
soupçonner l’existence d’un prototype grec (et avant cela scythique ?) de
cette légende, prototype hélas semble-t-il perdu. Mais il ne faut pas en
conclure que toutes les légendes de fondation de ville par trois (ou cinq)
frères dérivent de ce prototype puisque, selon Strabon, la ville de Nysa en
Ionie fut aussi fondée par trois frères, mais selon un protocole un peu
différent :
« L’histoire parle de trois frères, Athymbros, Athymbrados et Hydrelos, qui, venus de
Lacédémone, auraient fondé aux environs trois villes, auxquelles ils auraient donné
respectivement leurs noms ; mais, la population de ces villes ayant peu à peu diminué, les trois
se seraient fondues en une seule et auraient ainsi formé Nysa. Il est de fait qu’aujourd’hui encore
les Nyséens proclament Athymbros comme leur archégète ou premier fondateur69. »

Fidènes70 et Troie71, encore, sont fondées suivant des récits assez proches.
Mais en définitive, l’équivalent le plus exact du texte bulgare se trouve bien
plus à l’ouest, en Irlande, dans le Livre des conquêtes, dont la mise à l’écrit
remonte aussi au xiie siècle72. Il s’agit ici de la cinquième conquête, celle
qui a trait à l’installation des humains, les fils de Mil, dans l’île, et au retrait
des dieux.
Mettons les deux récits en parallèle :

Chronique apocryphe bulgare Livre des conquêtes de l’Irlande

Isaïe a une vision Ith a une vision

Il doit mener un tiers des Koumans vers une Il voit une terre d’abondance, qu’il décide
terre d’abondance d’explorer avec quelques hommes

Après l’exploration, il tente de retourner en


Espagne et meurt

La migration se fait Les fils de Mil (au nombre de huit) se lancent


dans la migration pour le venger

Contre les Romains et les Hellènes Contre les dieux (Tuatha de Danann)

Les Bulgares s’installent Les fils de Mil s’installent

Ils se choisissent un roi : Slav Après de multiples luttes, ils n’ont plus qu’un
seul roi : Eremon

Ce roi fait construire cent tertres Dès leur débarquement, les fils de Mil enterrent
leurs morts sous des tertres.
Les dieux se réfugient dans l’Autre Monde,
c’est-à-dire dans les sidh, des tertres.
Le récit irlandais est ici très simplifié, réduit à sa trame : le texte est en
effet beaucoup plus circonstancié73. Mais il n’empêche que les structures
sont similaires. Cela permet même d’expliquer un détail qui est autrement
incompréhensible dans le texte bulgare : la construction de cent tertres. Le
terme employé est bien ici mogil, c’est-à-dire « tertre funéraire ». Dans
certaines langues slaves, son sens a pu se réduire à celui de colline.
De même, le texte bulgare éclaire, quant à lui, un élément de l’irlandais :
le roi finalement choisi (à force de combats) pour les Goidels est Eremon.
Eremon est le seul des fils de Mil à pouvoir régner sur l’île. Certes, au
départ ils sont huit : Eber Donn (l’aîné), Erech Febria, Eber Finn, Amorgen,
Ir, Colptha, Eremon et enfin le cadet Erennan. Amorgen est en effet poète
et, appartenant à la classe sacerdotale, il ne peut prétendre à la royauté. Ir et
Erennan, sans doute des doublets assonants d’Eremon, disparaissent en
cours de route, et cette disparition entraîne la disqualification d’Eber Donn.
Erech Febria et Colptha ne jouent aucun rôle et semblent être des ajouts
tardifs (Erech Ferbia n’apparaît pas dans certaines versions, et Colptha
donne juste son nom à l’embouchure de la Boyne). Il reste alors deux
candidats : Eber Finn, qui règne d’abord sur la partie méridionale et est
finalement battu et éliminé par son frère cadet (sans doute le véritable cadet
de la fratrie) Eremon. Eremon, on le sait depuis longtemps, est le strict
équivalent linguistique de l’indien Aryaman (iranien Airyaman). Or
Aryaman a été défini par Georges Dumézil comme le troisième dieu
souverain, aux côtés du sombre Varuna et du clair Mitra74. Ces éléments
incitent à mettre en doute la position de Clémence Ramnoux, suivie par
Bernard Sergent, pour laquelle le couple Eber Finn-Eremon correspondrait
au couple Varuna-Mitra, ce dernier remplacé par Aryaman75. En effet dans
les deux cas, nous fonctionnons bien par trois, avec Eremon/Aryaman ; sans
doute Eber Finn (Eber le Clair)/Mitra et Eber Donn (Eber le
Sombre)/Varuna.
Cette succession de luttes dans le cadre d’une émigration trouve sans
aucun doute un écho dans la première des légendes croates rapportées par
Constantin VII Porphyrogénète, qui montre bien une fratrie, dont l’un des
membres est éponyme du peuple, combattre d’abord contre les Avars, puis
contre les Francs, avant d’obtenir la souveraineté sur le territoire convoité,
le tout sans doute sous l’égide du dieu Perun (si celui-ci se manifeste bien
dans Porga/Porin).
Ce dossier trouve un appui dans le domaine germanique avec l’équation
*ermina et Aryaman76. L’étymon *ermina possède une riche famille de
dérivés dans toutes les langues germaniques et ayant tous des sens plus ou
moins religieux, liés au monde et à sa structure (par exemple avec Irminsul,
l’axis mundi des Saxons). Mais un cas précis, pourtant détaillé mais
singulièrement ignoré de tous, s’avère ici intéressant. Lorsque Tacite, dans
sa Germanie, nous donne la légende d’origine des Germains, il le fait selon
une structure remarquable. La Terre aurait enfanté un dénommé Tuisto (le
« Jumeau ») lequel a son tour a eu pour fils Mannus (l’« Homme »), et ce
Mannus a eu trois fils qui ont chacun donné leur nom à trois tribus
primordiales, les Inguaeones, les Istaevones et les Erminones (var.
Irminones, Herminones). Nous ne savons pas l’ordre de naissance de ces
trois fils, mais gageons que ce Ermino77, d’où viennent les Erminones, était
le troisième, le cadet.
Ainsi, dans toutes ces histoires de fondation de peuples, lorsque le roi
correspondant ne porte pas le nom de son peuple, il porte un nom dérivé
d’un terme correspondant à arya-. Ce fait est bien avéré dans le monde
indo-iranien, mais aussi finalement en Germanie et en Irlande (bien que
dans ce dernier cas Eremon ne donne pas son nom ‒ qui est apparenté à
celui de l’île ‒ à un peuple). Le fait de passer du correspondant d’arya- à un
autre terme (Slav, Scythès, etc.) ne peut être que secondaire78.

L’appel à un roi étranger


Le Récit des temps passés raconte une étonnante histoire concernant la
fondation de la ville de Novgorod. Les peuples ‒ slaves ou non ‒ occupant
la côte de la Baltique proche du territoire de la ville actuelle, étaient soumis
aux Scandinaves. Mais finalement, ils se révoltèrent et les chassèrent.
Livrés à eux-mêmes, ils furent cependant incapables de s’organiser. Ils
firent alors appel à trois Scandinaves, trois frères, qui purent régner sur eux.
Le dernier survivant des trois, Rjurik, étant appelé à fonder la première
dynastie princière de la Rus’79.
On a longtemps cru en cette histoire, et nombre de familles nobles de
Russie se sont prétendues issues de Rjurik. Cependant, l’appel aux
Varègues trouve un parallèle exact en Irlande médiévale, dans un récit
(Audacht Morainn) qui relate comment les Irlandais se révoltèrent contre
leurs nobles, qui les surchargeaient de taxes. Ils les tuèrent tous, sauf trois
qui purent franchir la mer et se réfugier en Écosse. Une fois libres, les
Irlandais, tout comme les Slovènes de la région de Novgorod, se
retrouvèrent incapables de se gouverner. Aussi firent-ils appel aux trois
frères, qui revinrent d’Écosse, après qu’on leur eut promis l’ensemble des
riches terres de l’île80.
Selon la comparaison opérée par Dmitry Nikolayev, on aurait une
population dirigée par une classe qui n’appartient pas au même lignage
qu’elle. Cette population se révolte et massacre la classe dirigeante ou bien
la chasse au-delà des mers. Elle essaie ensuite de se diriger elle-même, sans
succès. Il est alors fait appel à trois frères de la classe dirigeante, qui
reviennent en échange des richesses du peuple. Cette comparaison avec
l’Irlande montre bien que l’on a affaire à un mythe, que l’on peut sans doute
retrouver ailleurs.
Le chroniqueur mérovingien connu sous le nom de Frédégaire raconte que
les Slaves occupant le territoire de ce qui deviendra la Bohême était soumis
aux Avars, qui leur prenaient régulièrement leurs femmes, et faisaient des
hommes des soldats aisément sacrifiables. Ces Slaves se révoltèrent, et finir
par vaincre. Ils auraient alors choisi pour les gouverner non pas l’un d’entre
eux, mais un Franc, Samo, qui aurait participé aux combats et s’y serait
distingué81. On retrouve ici l’idée du choix d’un suzerain étranger après une
révolte.
Samo était-il réellement un Franc ? Toutes les sources postérieures à
Frédégaire ignorent ce fait et font de lui un Slave82. Samo serait-il alors un
nom slave ? Il est remarquable de constater que le nom du premier prince
de Pologne, fils de Piast le laboureur (voir infra), est Semovit, un nom
qu’on a pu traduire par le « Seigneur de la Famille », autrement dit la
source du lignage. Cependant, la chronique de Gallus Anonymus porte en
titre la variante Samovithay83, autrement dit le « Seigneur par Lui-même ».
Samo pourrait être alors une forme hypocoristique de *Samovit, terme qui
lui-même, rapproché du sanscrit samrāj, « souverain (supérieur au roi)84 »,
désignerait simplement celui qui règne par lui-même, le roi principal,
suzerain de tous les autres princes. Ce serait alors le seul terme slave nom
emprunté à une autre langue désignant un roi ou un prince.

Le roi laboureur

Le chroniqueur polonais anonyme nous informe donc de l’existence en


Pologne, à Gniezno, d’une légende montrant comment un laboureur est à
l’origine de la première dynastie princière. Il y avait à Gniezno un duc
nommé Popel dont les deux fils devaient être tonsurés. On prépara alors un
grand festin, mais lorsque deux inconnus s’y présentèrent, ils furent chassés
de la ville. Ceux-ci se réfugièrent dans un faubourg, où ils arrivèrent à la
cabane d’un laboureur qui préparait lui aussi un repas pour ses fils. Le
laboureur les reçut volontiers, alors même qu’il était pauvre. Et tandis qu’il
n’avait presque plus de bière pour cette festivité, les deux voyageurs la lui
rendirent inépuisable par miracle. Le duc et ses convives furent invités. Le
fils du laboureur fut alors tonsuré et il reçut le nom de Semovit. Ce garçon
grandit, et finalement il fut nommé duc de Pologne, évinçant la famille de
Popel85.
Une légende similaire existait en Bohême. Un prince avait trois filles,
toutes plus ou moins magiciennes, et l’une d’elles, Libuše, dut se choisir un
mari, appelé à régner sur le peuple. Et celui qu’elle désigna fut le laboureur
Přemysl, fondateur de la lignée princière tchèque86.
Ce type de récit est aussi associé à saint Étienne et à Matej Korvín dans
des légendes hongroises87. Dans des légendes ukrainiennes collectées au
xix siècle, le futur roi Salomon, rejeté par sa mère et vagabondant dans la
e

campagne, est reconnu par son père qui a fait fabriquer une charrue d’or
avant d’ordonner qu’on la promène partout jusqu’à ce que quelqu’un en
devine le prix88.
Bien qu’attesté dans toute l’Europe avec de nombreuses variantes89, le
mythe du roi laboureur est donc solidement ancré en terre slave : il pourrait
donc avoir fait partie de la mythologie slave la plus ancienne.

Cracovie

Il existe un récit, plus légendaire que mythologique à proprement parler,


concernant la fondation de la ville de Cracovie. La première version date de
la fin du xiie ou du début du xiiie ; elle se trouve dans la Chronica
Polonorum de Wincenty Kadłubek. Un personnage nommé Krakus y est
présenté comme le fondateur de l’État de Cracovie, mais pas de la ville elle-
même. La ville a été fondée après le meurtre d’un dragon par les fils de
Krakus, et c’est ensuite qu’elle reçut le nom de Cracovie en l’honneur du
prince Krakus. Après la mort du dragon, l’un des fils de Krakus tua
secrètement l’autre et règne un temps sur le trône de son père. Puis il fut
découvert et tué ou chassé90.
Krakus, ou Krak, est vraisemblablement l’équivalent polonais du prince
légendaire de Bohême Krok (ou Croccus), héros civilisateur des Tchèques
et, selon Cosmas de Prague, père de Libuše (future épouse de Přemysl le
laboureur) et de ses deux sœurs.
Le nom de Krak ou Krok a donc pu être celui d’un héros ancestral,
fondateur, chez les Slaves de l’Ouest.

1. Lajoye, 2017.
2. Šašel Kos, 2001.
3. Kazakevič, 2016.
4. Lajoye, 2010.
5. Lajoye, 2013.
6. Kabakova, 2005, p. 24.
7. Bessonov, 1861, p. 285-292. 58 versions de ce chant ont été recensées par Dudko, 2008.
8. Schayer, 1935, p. 319 ; Mouchard, 2013, p. 254-256.
9. Volodina, 2013, p. 186, enregistré à Cyckoviči, dans la région de Minsk. On notera qu’il est très
curieux qu’une statue ait eu un crâne et des dents : il devait s’agir primitivement d’un géant.
10. Trdina, 1881, p. 165 ; Kropej, 2012, p. 18.
11. Trdina, 1858, p. 61-62 ; Kropej, 2012, p. 25.
12. Par exemple en Slovénie : Trdina, 1958, p. 60 ; Kropej, 2012, p. 16.
13. En Slovénie, le dualisme s’est atténué, et c’est Dieu lui-même qui plonge : Trdina, 1958, p. 60-
61 ; Kropej, 2012, p. 16.
14. Voir déjà Dragomanov, 1961.
15. Szuchiewicz, 1902-1908, IV, p. 1 ; Onatsky, 1932, p. 436-437 ; Koenig, 1936, p. 370-371.
16. Ivanov, 1976, p. 255-256.
17. Kropej, 2012, p. 19-21.
18. Delamarre, 1999.
19. Šmitek, 1999, p. 161-162.
20. Ebbo, Vita Ottonis episcopi Bambergensis, III, 1.
21. Adam de Brême, II, 22.
22. Dynda, 2014, p. 63.
23. Dynda, 2014, p. 62.
24. Thietmar, Chronicon, VI, 24. Kajkowski, 2012.
25. Lajoye, 2013b.
26. Viṣṇu purāṇa, I, 4, 3-49 ; Kalika purāṇa, 30, 7, 42 ; 31, 1-3 ; 18-71, 82-93, 134-53 ; trad.
anglaise dans Doniger, 1975, p. 184-197 ; références d’autres variantes p. 330.
27. En Slovénie, le premier homme est bien apparu d’une goutte de sueur tombé des sourcils de
Dieu alors que celui-ci venait de parcourir le monde récemment créé : Trdina, 1858, p. 60 ; Kropej,
2012, p. 17. Voir l’analyse de Dynda, 2019, p. 13-14.
28. Trad. Arrignon, 2008, p. 196-197.
29. Berezkin, 2012.
30. Fine, 1980. Contra : Le Guillou, 1994, p. 266.
31. Aničkov, 1928.
32. Koenig, 1936, p. 371 ; Kaindl, 1894, p. 95-96.
33. Kropej, 2012, p. 126-127.
34. Ortenzio, 2008, p. 29-31.
35. Belova, 2004, p. 29-34.
36. Ivanov et Toporov, 1970.
37. Greimas, 1985, p. 55.
38. Jonval, 1929, n° 438 et 462. Voir aussi les n° 444, 445 et 452.
39. Jakobson, 1985, p. 37-38 ; Gimbutas, 1974, p. 90-91.
40. Voir leur résumé succinct dans Ivanov et Toporov, 2002.
41. Voir en premier lieu Katičić, 1987, 1988, 1989, 1990 et 1992. Il a été largement suivi, par
exemple par Kropej, 1998, pour la Slovénie, ou par Matasović, 1996, qui introduit des comparaisons
avec la Grèce, ce qui fait que la théorie d’Ivanov et Toporov, même très largement modifiée par
l’introduction d’un « frère » ou d’un « fils » de Perun (pourtant réellement attesté nulle part, même si
certains ont pensé qu’il pouvait s’agir de Jarilo et de son « successeur » saint Georges) est tenue
comme un fait acquis, que chacun peut retrouver dans ses croyances locales. Voir les exemples de
Vinšćak, 2005, ou Kropej, 2000, qui montrent bien les limites de ces « applications forcées » d’un
schéma mythique sur des données folkloriques qui n’en demandait pas forcément autant. La Bulgare
Ivanichka Georgieva, 1985, est, quant à elle, restée dans la droite ligne des idées d’Ivanov et
Toporov. En Croatie, il faut compter sur les travaux de Marjanić, 2010.
42. Uspenskij, 1982. Le travail monographique de ce chercheur sur le culte de saint Nicolas en
Russie est néanmoins incontournable. Il a été suivi par Martynov, 1993, qui, arguant que Nicolas est
devenu dans les bylines Mikula, en profite pour identifier Svjatogor à Perun, du fait là aussi de leur
relative opposition. Cela n’est guère convaincant.
43. Warner, 2002, p. 251. Il faut dire que cet auteur ne semble pas admettre les travaux des
sémanticiens tels que Lévi-Strauss ou Greimas, dont s’inspirent Ivanov et Toporov.
44. Lajoye, 2015.
45. Il est possible que le chêne, chez les Russes, soit le refuge habituel des démons. On trouve ainsi
dans un des contes d’Afanassiev, la mention de démons qui se réunissent sous un chêne, la nuit : Af
115/66a, région de Tchistopol (ancienne province de Kazan) ; Gruel-Apert, 2000, p. 119. On note
dans le gouvernement de Viatka (Russie) le fait que si, durant un orage, une personne se met à l’abri
sous un arbre sans faire le signe de croix, un démon fuyant la flèche de l’éclair se réfugiera en elle et
la flèche tuera cette personne : Magnitskij, 1883, p. 133. Ici, l’arbre est vraisemblablement un chêne.
46. Lajoye, 2018.
47. Matusiak, 1881, p. 641-642.
48. Sadovnikov, 1884, n° 93, p. 282. D’autres versions, plus récentes dans leur fonds car mettant
en œuvre un héros hutsul du xviiie siècle, Oleksa Dovbuš, ont aussi été collectées en Ukraine et dans
les Carpathes : Czerny, 2018, par exemple p. 188-189.
49. Davainis-Silvestraitis, 1894, t. II, p. 62-63 ; Balys, 1938, p. 53 ; Slančiauskas, 1975, p. 160 ;
Vėlius, 2010, p. 59-61.
50. Diodore de Sicile, Bibliothèque, II, 4, 11 ; Apollodore, Bibliothèque, IV, 14, 3.
51. Euripide, Oreste, 268-271.
52. Dumézil, 1965, p. 71-73.
53. Chanson de Roland, CLXXIII.
54. Lang, 2002, p. 54-57.
55. Allen, 2010 ; Lajoye, 2016, p. 51.
56. I, 214-225.
57. Trad. Arrignon, 2008, p. 40-41.
58. Boba, 1967, p. 47-55.
59. Constantin VII Porphyrogénète, De Admnistrando imperio, XXX.
60. Ibid., XXXI.
61. Ivanov, 1976, p. 250-251. Trad. française : Viktoriya Lajoye.
62. Pirart, 2003. Pour le dossier des fils de Feridun, l’étude la plus complète reste celle de
Dumézil, 1995, p. 614-616, d’après les travaux de Molé, 1952. Notons dès maintenant que la forme
avestique d’Iraǰ semble être Aryu : Pirart, 2003, p. 191, n. 52. Autre cas légendaire mais dans lequel
l’éponymie est absente, celui de la fondation du royaume de Macédoine, par trois frères, Gavanès,
Aéropos et Perdiccas. Devant fuir le roi de Lébaia qui les poursuit en raison d’un miracle favorisant
Perdiccas, ils s’installent en Macédoine ou le cadet, Perdiccas donc, devient l’ancêtre de la lignée
royale : Hérodote, VIII, 137 et suiv. ; Desnier, 1995, p. 36-40. C’est là de toute façon, comme l’avait
déjà remarqué Georges Dumézil, un motif extrêmement fréquent dans les contes populaires
européens, pour lesquels, des trois frères, seul le cadet peut devenir souverain. On peut d’ailleurs dire
que Geoffroy de Monmouth, dans son Histoire des rois de Bretagne, 31, ne fait que suivre ce
modèle : il fait de la cadette des trois filles du roi Leir l’unique héritière du royaume, la seule digne
de ce rang.
63. La présence régulière d’un personnage ornithomorphe dans les légendes de fondation ou
d’ethnogenèse a été notée : Ščavelev, 2010.
64. Ce nom est vraisemblablement un emprunt à l’iranien, et notamment à l’alain *xwar- (ossète
xur) : « soleil » : Lebedynsky, 2002, p. 190. Il serait alors un équivalent du vieux russe Xors.
65. Langlois, 1867, p. 350.
66. Ščavelev, 2014, p. 240.
67. Virgile, Énéide, VII, 660-661.
68. Solin, Polyhistor, II.
69. Strabon, Géographie, XIV, 1, 46.
70. Denys d’Halicarnasse, II, liii, 4.
71. Le récit le plus circonstancié à ce sujet est celui d’Apollodore, Bibliothèque, III, 2-3. Voir aussi
Dumézil, 2003, p. 138-149 et 555-562. Dans le même ordre d’idées, dans les chants serbes, lorsque
trois frères fondent la ville de Scutari (Albanie), seul l’aîné, qualifié de roi, est appelé à y régner :
Dozon, 1888, p. 136-141. Une légende qui fut sans doute très proche, mais recueillie de façon très
lacunaire au xixe siècle concerne la ville de Crest (Drôme, France) : celle-ci aurait été fondée par
trois frères ; l’aîné aurait construit la tour (le donjon, siège du pouvoir), le second le grand escalier
(qui mène au donjon), et le troisième le pont : Perrossier, 1870, p. 216.
72. Pour une présentation générale : Oudaer, 2017.
73. Lebor Gabála Érenn, éd. Macalister, 1932-1942.
74. Dumézil, 1949.
75. Ramnoux, 1954, p. 209-211 ; Sergent, 1995, p. 443.
76. De Vries, 1952 ; suivi en dernier lieu par West, 2007, p. 142-143. Jan de Vries avoue de lui-
même que du point de vue strictement linguistique, cette équation ne fonctionne pas, mais : « les lois
phonétiques sont certainement des directives utiles pour la comparaison de faits linguistiques, mais
elles ne donnent que les grandes lignes de l’évolution d’une langue, ce qui n’exclut nullement
beaucoup d’exceptions, qu’on ne peut pas expliquer par une logique rigoureuse. Les faits réfractaires
abondent notamment dans le domaine religieux ». Il ne s’agit pas là d’un avis de faiblesse de l’auteur
quand on connaît le travail considérable qu’il a accompli dans le domaine de l’étymologie des
langues germaniques.
77. Le nom même du personnage, absent de Tacite, est donné par un tableau des peuples d’Europe
occidentale rédigé vers le vie siècle, repris plus tard par Nennius, 17. Le tableau mérovingien parle
d’Istio, Erminus et Inguo ; Nennius lui, de Hessitio, Armenon et Neguo : Lot, 1934, p. 50-52.
78. On notera qu’à partir du xiiie siècle, des textes slaves d’Europe centrale (Kronika wielkopolska,
mais aussi les chroniques de Dalimil, de Václav Hájek, de Přibík Pulkava) font mention d’une triple
ethnogenèse, dans laquelle trois frères, Lech, Čech et Rus sont les fondateurs respectivement des
peuples polonais, tchèque et russe.
79. Récit des temps passés, à l’année 862.
80. Nikolayev, 2012.
81. Frédégaire, IV, 48.
82. Geary, 2008, p. 246.
83. « De duce Samouithay qui dicitur Semouith » : Gallus Anonymys, Gesta principum polonum, I,
3.
84. Macdonell et Keith, 1912, p. 432.
85. Gallus Anonymys, Gesta principum polonum, I, 1-3.
86. Cosmas, Chronica bohemorum, I, 6.
87. Golema, 2007.
88. Dragomanov et Dragomanova, 2015, p. 106-118.
89. Krappe, 1919, 1922, 1923 ; Oexle, 1968 ; Delpech, 2015.
90. Słupecki, 1999, p. 78-79.
CONCLUSION

Le livre que vous venez de lire est issu du travail d’un historien des
religions spécialisé dans le domaine de la mythologie comparée. Il ne s’agit
donc pas de l’œuvre d’un slaviste. Comme cela a été rappelé en
introduction, plus aucun slaviste francophone, et même anglo-saxon, ne
s’intéresse à l’étude du paganisme depuis des décennies. Tout au plus a-t-on
vu paraître des essais sur la christianisation.
Durant longtemps, la mythologie celtique a été mon seul centre d’intérêt.
Mais, inspiré par les travaux de comparatistes tels que Georges Dumézil ou
plus récemment Bernard Sergent, j’ai toujours eu à cœur de comparer ce
que j’observais chez les Celtes avec ce qui existait dans d’autres cultures.
Or il ne m’a pas fallu longtemps pour constater que si je voulais utiliser des
matériaux slaves, je devais me contenter de travaux très anciens,
notamment ceux de Louis Leger. Un pan entier du monde indo-européen
était donc quasi totalement absent des études de mythologie comparée, qui
se focalisent principalement sur l’Inde, la Grèce, Rome, la Scandinavie, et,
dans une moindre proportion, les Celtes et le domaine iranien.
J’ai voulu par ce livre apporter de nouveaux matériaux, de nouvelles
théories et donc accomplir un travail d’autant plus nécessaire que dans les
pays slaves eux-mêmes, un nouvel élan est donné à la recherche. Mais,
comme je l’ai dit, je ne suis pas slaviste : je ne lis pas toutes les langues
slaves, de même que je n’ai pas eu accès à toutes les bibliothèques
nécessaires. Je ne peux donc au terme de cette aventure qu’appeler de mes
vœux l’apparition de jeunes chercheurs qui sauront mieux que moi
s’emparer de ces questions, qui oseront mêler l’étude des textes ‒ et il n’y a
rien d’improbable à ce que l’on en découvre de nouveaux ‒ à l’archéologie,
qui régulièrement met au jour de nouvelles idoles, de nouveaux sanctuaires.
BIBLIOGRAPHIE

SOURCES ANCIENNES

Corpus

Juan Antonio Álvarez-Pedrosa Núñez (dir.), Fuentes para el estudio de la


religión eslava precristiana, Saragosse, Libros Pórtico, 2017.
Jiří Dynda, Slovanské pohanství ve střdověkých latinských pramenech,
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DANS LA MÊME COLLECTION

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Les Deux Cathédrales. Mythe et histoire à Chartres.
Louis Bardollet,
Les mythes, les dieux et l’homme. Essai sur la poésie homérique.
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Pour une histoire de l’imaginaire.
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La Mort chez les anciens Scandinaves.
Les Valkyries
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Titanic. Mythe moderne et parabole pour notre temps
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Pierre Sineux,
Amphiaraos. Guerrier, devin et guérisseur.
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Dictionnaire du paganisme grec. Notions et débats autour de l’époque classique.
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Phèdre à Hippolyte. Scènes d’aveux antiques et contemporaines
Pascal Thiercy,
Aristophane. Fiction et dramaturgie.
Joël Thomas,
Mythanalyse de la Rome antique.
Robert Triomphe,
Le Lion, la vierge et le miel.

SOURCES
Le Papyrus de Derveni, traduit et présenté par Fabienne Jourdan.
Régis Boyer,
Deux sagas islandaises légendaires.
Les sagas légendaires.
Les sagas miniatures.
Luc Brisson,
Le Sexe incertain. Androgynie et hermaphrodisme dans l’Antiquité gréco-romaine.
Peter Kingsley,
Dans les Antres de la sagesse. Études parménidiennes.
Alain Marez,
Petites sagas islandaises.
Giovanni Pugliese Carratelli,
Les Lamelles d’or orphiques.
Instructions pour le voyage d’outre-tombe des initiés grecs.
Cette édition électronique du livre
Mythologie et Religion des Slaves païens
de Patrice Lajoye
a été réalisée le 3 juin 2022
par Flexedo.
Elle repose sur l’édition papier du même ouvrage
(ISBN 978-2-251-45312-5).

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