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anticiper et gérer
Coordination scientifique
Franck Renouard
Editions ESPACE id
40 avenue Bugeaud - 75784 Paris cedex 16
LE STRESS Anticiper et Gérer
1 L’impact du stress
st ress sur le cerveau 6
Bernard Sablonnière
5 La bonne attitude 24
Jean-Gabriell Charrier
Jean-Gabrie
7 L’anticipation
’anticipation…
… Exemple du pilotage d
d’un
’un réacteur nucléaire 32
Philippe Pons
2
INTRODUCTION
Pourquoi
le stress ?
Dr Franck Renouard
Docteur en Chirurgie Dentaire
Pratique exclusive
de l’ implantologie
implantologie chirurgicale,
chirurgicale, Paris
après une étude générée par meilleure capacité à anticiper les aléas d’une
AmericanWay,
Express et réalisée par procédure
plus grandenesérénité.
donnentAlors
pas une
quesensation de
D’
Opinion 88 % des chirur- la pratique
giens-dentistes pensent que leur métier est médicale reste une activité humaine à haut
plus stressant aujourd’hui qu’il y a dix ans. pouvoir stressant, la notion de stress n’est pas
Cela peut paraître surprenant quand on a ou est très peu abordée dans les formations
conscience de l’incroyable avancée technolo- médicales et paramédicales. La part humaine,
gique de la dentisterie en dix ans. L’image- le facteur humain, n’
n’est
est que très rarement
ra rement cor-
rie médicale est plus précise et d’accès plus rélée à la complexité d’une procédure et à ses
facile, les techniques se sont simplifiées dans éventuelles complications. Il est admis impli-
de nombreuses spécialités, la diffusion des citement que le
le succès est
e st uniquement basé sur
connaissances est plus rapide et plus efficace. une bonne appréhension théorique et tech-
Cette sensation de plus grand stress est pro- nique d’un problème. Il suffit au bon étudiant
bablement vraie pour toutes les spécialités de reproduire consciencieusement ce que le
médicales, alors que, là encore, les avancées bon enseignant a dit ou montré pour que le
techniques sont majeures. succès soit au rendez-vous.
Cela paraît antinomique d’admettre qu’une Les complications et les échecs sont souvent
meilleure connaissance des protocoles et une considérés comme étant le résultat de mauvaise
3
LE STRESS Anticiper et Gérer
Tout
Tout professionnel
l’origine, la gestiondeetsanté ssee doit de connaître
la prévention conna ître
du stress. L’humain
conscience adeacquis au lui
soi. Cela fil ade
perlamis
permisphylogenèse la
de se projeter
Rares sont les personnes qui peuvent se targuer dans l’avenir, avec, en corollaire, la crainte ou la
de ne pas connaître cet état qui n’est ni plus ni peur de ce qui pourrait
pou rrait arriver. Il es
estt aujourd’h
aujourd’hui
ui
moins qu’une réaction physiologi
physiologique que et compor- admis que 90 % du stress chez l’homme est créé
tementale normale destinée
desti née à protéger l’individu par l’esprit et non plus par une situation dange-
(ou l’anima
l’animal).l). À l’o
l’origine,
rigine, le stress a le même rôle reuse réelle. Aujourd’hui, le stress est souvent le
protecteur que la douleur. Face à une situation résultat de pressions ou stimuli supposés, et la
dangereuse, l’individu doit mobiliser instanta- pratique médicale ne déroge pas à cette cet te règle.
nément ses ressources soit pour se défendre, soit
pour fuir.
f uir. Le corps et l’l’esprit
esprit s’adaptent
s’adaptent immédia- Wetzel et coll. en 2006 répertorient les dif-
tement pour favoriser cette réaction de protec- férentes raisons d’être stressé dans un bloc
tion. Les modifications cérébrales commencent opératoire (Wetzel CM et coll. The effects
à être comprises grâce aux progrès de l’imagerie of stress on surgical performance. Am J Surg
médicale. Certaines
activées alors zones du
que d’autres, cerveau
et pas vont être
des moindres, 2006;191(1):5-10).
de choisir au hasardIlun
suffit
itemdedans
prendre la liste
quelques et
caté-
seront déconnectées. Les conséquences sur l’ac- gories pour définir un environnement rappelant
tivité humaine peuvent être graves. une situation vécue.
4
INTRODUCTION
Les mêmes causes du stress peuvent Cette édition est consacrée au stress aigu, celui
être partagées entre les différentes que l’on ressent subitement face à une situation
pratiques médicales et les différentes nouvelle ou avant une chirurgie
chiru rgie qui semble com-
spécialités. pliquée. Le stress chronique, qui potentialise le
stress aigu, ne sera pas abordé. Cette revue réu-
Stresseur peropératoire : urgence
nit un panel de spécialistes dont la plupart tra-
chirurgicale.
vaillent sur ce problème
problème depuis des années. La
chirurgicales
Complications c hirurgicales : erreur première partie décrira le stress sous son aspect
opératoire, saignement non prévu, physiologique. Il est important de comprendre
difficulté à trouver la raison du problème, pourquoi nous pouvons nous sentir stressés. La
absence de progression dans la chirurgie. connaissance des modifications comportemen-
Situation complexe : procédure tales et physiologiques inhérentes au stress est
complexe, patient à risque, procédures importante à connaître, ne serait-ce que pour en
à paramètres multiples, pression appréhender les signes précurseurs.
temporelle, nécessité de prendre Ensuite, nous verrons comment nous pouvons
des décisions rapidement. réduire le stress au quotidien en changeant
5
LE STRESS Anticiper et Gérer
1
L’impact du stress
sur le cerveau
Pr Bernard Sablonnière
Professeur de Biochimie, Faculté de Médecine de Lille
Neurobiologiste au Centre de Recherches Jean-Pierre Aubert,
INSERMU1
INS ERMU11
172, Lille
Lill e
6
Chapitre 1
7
LE STRESS Anticiper et Gérer
LA RÉPONSE HORMONALE
AU STRESS : Le cerveau, une cible du stress
UNE FUSÉE À TROIS ÉTAGES
L’hypothalamus est le premier étage,
D’autres neurotransmetteurs interviennent dans la
réponse au stress. Libérés dans différentes régions du
recevant ses ordres du cerveau. Il libère cerveau, ils permettront de moduler le comportement
la corticolibérine, par l’intermédiaire volontaire et le ressenti conscient de l’
l’état
état d’
d’alerte
alerte sus-
d’une petite glande, l’hypophyse. cité par l’événement stressant. Souvent, sans s’en rendre
La corticostimuline secrétéeau deuxième compte, on peut ressentir les effets bénéfiques du stress,
étage (hypophyse)est véhiculée dans le sang utiles alors au maintien de l’équilibre corporel. Ainsi,
et active la production du cortisol lorsqu’on monte un escalier de 15 marches rapide-
par les glandes surrénales. ment, le changement de rythme de l’effort déclenche
Les glandes surrénales (troisième étage) un stress, quoique léger, pour le cœur. La libération de
stimulent de nombreuses cellules par l’action noradrénaline par le système nerveux autonome adapte
du cortisol, l’une des hormones majeures alors le rythme cardiaque à cet effort. De même, lors
de la réponse au stress qui prend le relais des moments qui précèdent un examen scolaire ou une
de l’adrénaline.
rencontre d’embauche
de l’amygdale cérébrale professionnelle, unedu
facilite la réactivité activation
cerveau
préfrontal : les capacités
c apacités de vigilance,
vigi lance, de concentration
et de mémorisation sont stimulées pendant plusieurs
minutes. Cela est
e st très positif et doit faciliter l’adaptation
l’adaptation
Les acteurs multiples du stress du comportement qu’exige le challenge de l’examen ou
Les clés chimiques du cerveau vont décider quel type de de l’entretien. Souvent, le déséquilibre de l’effet béné-
réponse il doit utiliser face à une situation qui déclenche fique de ces réactions au stress survient chez beaucoup
un stress. S’il s’agit d’un stress violent, mettant immé- d’entre nous. L’amygdale, le locus coeruleus et le cer-
diatement en jeu la survie corporelle, toute réaction veau limbique expriment une peur peu r ou une émotion trop
pouvant mobiliser nos forces vitales sera inhibée
inh ibée : c’est forte, ce qui va modifier les effets des clés chimiques
le comportement d’inhibition de l’action si bien décrite stimulantes, comme la noradrénaline. L’inondation par
par Henri Laborit en 1966. Dans ce cas, la libération de l’angoisse ou la peur réduisent l’activité de la dopamine,
sérotonine dans le cerveau inhibe
inh ibe toute réaction
réaction de fuite. activent la libération de sérotonine et perturbent notre
Le sujet est littéralement « tétanisé et cloué » sur place, comportement.
sous l’effet du choc subi par l’événement
l’événement stressant.
stres sant. Les effets du stress sur le cerveau seront variables selon
Lors d’un stress aigu qui ne met pas en cause la sur- les âges de l’existence. Dans la petite enfance, la suc-
vie immédiate de l’individu, c’estc’est la noradrénaline qui cession d’événements stressants façonne fortement le
inonde le cerveau et active ce comportement de fuite développement et le conditionnement de la réponse émo-
en avant annoncé souvent par la peur voire la panique. tionnelle liée au cerveau des émotions. Pendant l’adoles-
l’adoles-
Parfois, ce type de réaction est initié également par une cence, alors que les connexions continuent de s’établir
émotion violente, que celle-ci soit d’ailleurs positive ou entre le cerveau frontal et le cerveau limbique, la pro-
négative. duction accrue des hormones sexuelles modifie
modi fie la réacti-
Le troisième type de comportement utilisé face au stress vité au stress. Chez l’adulte,
l’adulte, les épisodes répétés de
de stress
est celui d’une réaction volontaire, adaptée, rapide mais modifient fortement le fonctionnement de la mémoire,
contrôlée, typiquement celle utilisée quand on garde son en activant la mémoire immédiate et la mémoire émo-
« sang-froid
sang-f roid » : dans ce cas, le cerveau
cer veau utilise surtout
sur tout une tionnelle, mais en réduisant les capacités de rappel de
autre clé chimique : la dopamine. On agit positivement, la mémoire épisodique. Heureusement, tout au long
tout en échappant à la situation stressante. de la vie adulte, les capacités de réparation des circuits
Face à ces trois types de réaction, notre cerveau a le modulés par l’effet du stress restent intactes à condition
choix : en général, il adapte au mieux son comportement de ménager des périodes de repos et de conserver une
selon l’intensité
l’intensité du danger perçu.
perç u. bonne qualité de sommeil. Chez le sujet âgé, notamment
8
Chapitre 1
9
LE STRESS Anticiper et Gérer
2
La haute fiabilité
contre le stress
Christian Morel Éviter les erreurs est une arme puissante contre
Sociologue le stress. Or quantité d’erreurs sont dues
à des facteurs humains. Les erreurs de pilotage
sont un facteur contributif dans au moins
70 % des accidents d’avion. Selon une étude,
sur 146 accidents en chirurgie à Boston,
43 % ont été provoqués par des interactions
défectueuses (problèmes de transmissions,
défaut de clarté des informations, flou
sur les tâches dévolues à chacun, etc.) [1].
[1].
Les guides de haute montagne jugent que
les problèmes de communication entre eux jouent
un rôle majeur dans les accidents d’alpinisme.
Chasser le stress suppose donc d’anticiper les erreurs
et donc de s’attaquer aux facteurs humains.
10
Chapitre 2
Collégialité, débat
contradictoire
et communication qu’elles appellent « le gra-
sont les trois principes dient d’autorité dans le cock-
portant sur les interactions pit ». Le rôle du copilote est
constitutifs de la culture renforcé. En cas d’incident,
de la haute fiabilité. il est le premier à donner
son avis pour
pou r qu’il ne soit pas
influencé par son supérieur.
S’il n’est pas « aux manettes », il joue le rôle de suivi
du commandant de bord (monitoring). Cela peut aller
jusqu’à déclarer
exécuter. Sur les une remise des
porte-avions gaz que son nucléaires,
et sous-marins chef devra
dev ra
le travail d’équipe est privilégié
privi légié et l’organisation
l’organisation formelle
militaire mise de côté (les officiers sous-mariniers fran-
çais enlèvent leurs galons quand ils partent en mission).
Dans un autre domaine, une étude a montré que la col-
ier légialité dans des équipes chirurgicales avait réduit la
y
be mortalité opératoire [2].[2].
a
L
. La collégialité réduit le stress
st ress parce qu’elle
qu’elle donne l’assu-
L
© rance à chacun que son avis sera pris en compte, que les
décisions seront vérifiées par d’ d’autres
autres et qu’il ne sera pas
seul en cas
c as de problème. En aéronautique, la collégialité
va très
t rès loin. Un commandant de bord, perdu devant un
incident, doit exprimer son stress au copilote (« je n’y
comprends plus rien » par exemple) et ce dernier doit
La prise en compte des facteurs humains nécessite des prendre en main la situation sans être
êt re choqué ni déstabi-
principes forts qui
qu i forment une culture
cultu re de la haute fiabi- lisé par l’aveu de faiblesse de son chef. Alors que, dans la
lité. Les activités à risque l’ont démontré. Pour prévenir culture traditionnelle de management, le supérieur doit
les erreurs de pilotage, l’aéronautique a développé une cacher ses états d’âme. On peut supposer qu’un chirur-
doctrine des relations humaines (le cockpit synergique gien sera moins tendu s’il sait que les infirmières ose-
par exemple).
exemple). Selon l’école
l’école américaine
américai ne des organisations
orga nisations ront le corriger s’il oublie une compresse dans le corps
hautement fiables,
fiables, la sécurité
sécur ité des porte-avions nucléaires du patient ou s’il fait passer le fil de suture à un endroit
repose plus sur des fondamentaux de comportements absurde.
collectifs que sur des éléments comme la discipline mili-
taire ou des systèmes techniques. Un autre principe est le débat contradictoire. De grands
dirigeants américains, exposés à des situations généra-
trices de stress
st ress considérable, ont fait le choix d’introduire
d’introduire
Le collectif contre le stress des processus contradictoires pour les aider à prendre de
Un premier principe de la culture de la haute h aute fiabilité est bonnes décisions. Lors de la crise des missiles de Cuba,
la collégialité qui consiste à favoriser
f avoriser le travail d’
d’équipe
équipe et John Kennedy a confié à son frère Robert
Robert le rôle d’
d’avocat
avocat
à limiter le poids de la hiérarchie. Ainsi, les compagnies du diable dans le comité constitué autour de lui. Il ne
aériennes travaillent aujourd’hui à une réduction de ce voulait pas renouveler
renouveler la situation de stress vécue lors du
11
LE STRESS Anticiper et Gérer
La non-punition
fiasco de la Baie des
de s Cochons à Cuba l’année
l’année précédente, et l’information contre le stress
parce que l’opération
l’opération avait été élaborée selon un u n consen- En complément des principes portant sur les interac-
sus mou sans
san s vrai
vra i débat [3].
[3]. De même, le patron de l’US tions, il convient de prendre en compte des principes
Navy, l’amiral
l’amiral Rickover, exigeait que tout projet de déci- relatifs au contrôle social. L’un d’entre eux est la non-
sion majeure soit opposé à un contre-projet. Confronté à punition des erreurs non intentionnelles pour faciliter la
l’immense stress du choix de la filière nucléaire pour les remontée des informations et éviter les comportements
moteurs de la marine américaine,
américa ine, il l’a géré par les garan- défensifs contre-productifs. L’immunité, à condition
ties apportées
processus par ce
d’avocat duprocessus contradictoire.
diable apporte
diable une forme Certes,
de st le
stress.
ress. qu’elle
puissantneréducteur
cautionnedepas des fautes
stress. Savoirinadmissibles, est un
qu’on sera jugé de
Mais il s’
s’agit
agit d’un
d’un bon stress destiné à éviter le stress aigu façon juste et qu’on pourra expliquer librement ce qui
des mauvaises décisions par absence de vrai débat. s’est passé en cas de dysfonctionnements permet de
ne pas polluer le bon stress par du stress
Un troisième principe est la communi- toxique. Des infirmières
infirm ières de bloc opératoire
cation intensive et continue, latérale et Pour être utiles, peuvent être paralysées par une inquiétude
verticale,
vert icale, formelle
formel le et infor melle. Dans Dan s
les retours d’expérience destructrice si elles savent que la moindre
les organisations hautement fiables, on se erreur sera durement sanctionnée par un
parle en permanence. Chacun échange doivent
doiven t i
intégrer
ntégrer chirurgien trop autoritaire. Une dimen-
avec l’autre
l’autre aux instants
insta nts critiques, les temps les facteurs humains. sion de la punition est la sanction psycho-
morts sont utilisés pour transmettre des logique sous la forme d’une attitude hostile
hosti le
expériences, les briefings et débriefings ou intimidante. Ainsi, pour les guides de
se succèdent, formation et interactions opérationnell
opérationnelles
es haute montagne, un facteur de stress est le jugement
sont fusionnées dans un flux continu d’échanges d’infor- des collègues quand une décision difficile doit être prise
mations. Un général américain, après avoir observé un devant un grand danger : manque d’audace, défaut d’ex-
exercice de tir de char israélien impressionnant d’effi- périence, etc. Ils ont introduit dans leurs valeurs l’exclu-
cacité, demanda à l’équipage combien il avait dû tirer sion de la punition psychologiqu
ps ychologique,
e, même implicite.
d’obus pour atteindre un tel niveau. Le tireur lui répon-
dit : « Oh, peut-être 6 ou 8, mais rappelez-vous
rappelez-vous que nous Un principe qui découle de la non-punition est le retour
sommes ensemble dans un char depuis au moins quinze d’expérience (REX). L’immunité, en libérant la parole,
ans. » Ils échangeaient depuis quinze
qu inze ans
a ns [4]. Cette permet de faire remonter les informations sur les inci-
communication, facteur de sécurité et de performance, dents et accidents. L’organisation peut ainsi tirer les
réduit le mauvais stress. Un auteur a étudié le travail de enseignements de ses erreurs et devenir résiliente. Encore
policiers et d’infirmières. Il a observé que les policiers faut-il que ces REX ne se contentent pas d’une descrip-
d’une patrouille de sécurité urbaine échangeaient beau- tion superficielle et intègrent les facteurs humains, et
coup entre eux en raison de nombreux temps morts ou tout particulièrement le stress. En aéronautique, le
déplacements collectifs à la différence des infirmières, stress intense des pilotes, en cas de perte des informa-
plus souvent dans des activités isolées. Il a constaté que, tions consécutive à un givrage, a été généralement omis
grâce à la communication, ces policiers, non seulement dans les REX, alors qu’il peut conduire l’équipage à des
appréhendaient mieux leur travail que les infirmières, comportements absurdes. Chaque randonneur à ski
mais aussi souffraient moins du stress [5]. possède un détecteur de victimes d’avalanche (DVA).
12
Chapitre 2
13
LE STRESS Anticiper et Gérer
3
Impact du stress
sur l’environnement de travail
Gestion d’
d’une équipe m
médicale
édicale
14
Chapitre 3
I
l est évident qu’une personne ayant un niveau poser des capacités suffisantes, alors notre cerveau va
d’étude très élevé et une expérience nous inciter à fuir ou à nous cacher
importante aura accumulé un plus afin de nous protéger.
protéger.
Alors que l’environnement
l’environnement
grand nombre
jeune qui débutede; leconnaissances qu’un
contenu du cerveau de l’homme des cavernes Ces
des trois attitudes physiques,
symptômes se traduisentémo-
par
sera plus complet, mais, néanmoins, le et celui du chirurgien tionnels et cognitifs différents. Il
contenant, la structure
structu re du cerveau, seront e
du XXI siècle n’ont que peu p eu peut être particulièrement utile de
identiques. Ainsi, le fonctionnement du de points communs, les reconnaître afin de savoir dans
cerveau, notamment au niveau des méca- quel mode nous sommes (fuite, lutte
la structure du système
nismes de défense, sera sensiblement le ou inhibition). Sans les énumérer
même pour tout être
êt re humain.
humai n. Pourquoi ?
cérébral est restée tous, on peut constater qu’au niveau
Simplement parce que, devant une situa- sensiblement identique… émotionnel, un état de stress lié à la
tion imprévue et complexe, devant une fuite a pour conséquence de créer
personne qui met en doute nos compétences, ou à la de l’anxiété, de l’angoisse, alors que quelqu’un en lutte
suite d’un contretemps remettant en cause notre emploi est tendu, en colère, agressif. Le découragement ou une
du temps, nous sommes programmés pour répondre à vision négative sont des symptômes de l’inhibition.
cette “agression” selon des mécanismes ancestraux. En En tant que membre d’une équipe, il peut être bon d’être
effet, notre mode de fonctionnement face à un événe- attentif aux changements d’attitude de nos collègues et
ment que nous considérons comme une menace, date du de le leur signaler ; avec tact et délicatesse,
délicatesse , car leur réac-
temps de l’homme préhistorique ; quand qua nd celui-ci était tion sera d’autant plus tranchée que leur niveau de stress
réellement en danger de mort et que sa survie relevait sera élevé ! La première réaction sera donc le plus sou-
d’une réaction rapide. Les mécanismes de défense que vent le déni, le rejet ou encore l’ l’agressiv
agressivité,
ité, c’est-à-dire
nous mettons en place en cas de stress sont donc ancrés une réaction destinée à se protéger. Heureusement, par
dans notre cerveau depuis nos premiers jours sur terre. la suite, cette réaction instinctive peut être raisonnée,
Ils sont principalement gérés par la zone la plus ancienne car nous restons des êtres pensants. Il faudra peut-être
du cerveau, le territoire reptilien, celui qui assure notre un peu de temps, car tenter de raisonner quelqu’un qui
survie.
surv ie. Or, le monde complexe
complexe dans lequel nous évoluons est en mode survie revient à s’adresser à une personne
génère, lui, un stress et exige en même temps des ré- dont les parties “raisonnables” du cerveau sont tempo-
ponses adaptées à cette complexité. Les zones anciennes rairement inaccessibles.
de notre cerveau ne sont pas les plus adaptées pour gérer
au mieux les difficultés liées à notre activité. L’environ-
nement de l’homme des cavernes et celui du chirurgien Difficile deles“faire le vide”…
du XXIe siècle n’ont que peu de points communs, mais Avant d’illustrer conséquences du stress sur une
la structure de notre système cérébral est restée sensi- équipe, il faut avoir en mémoire trois points. Le pre-
blement identique
identique à ce qu’elle était durant la préhistoire. mier est que les événements, même positifs (mariage,
15
LE STRESS Anticiper et Gérer
16
Chapitre 3
17
LE STRESS Anticiper et Gérer
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Chapitre 3
19
LE STRESS Anticiper et Gérer
4
Les protocoles,
une parade au stress
Rencontre avec Franck
Franck L
Lai
aig
g neau
Pouvez-v
Pouvez-vous
ous vous présenter communs entre ces deux métiers sont
en quelques mots ?
J’ai été dip
diplômé
lômé à l’un ive
ivers
rsité
ité de majeurs.
les deux En
sur effet, ils sont fondés
des procédures plustous
ou
chirurgie
chiru rgie dentaire de Paris 5 en 1990, moins complexes qu’il faut mettre
et exercé la profession de chirurgien- “bout à bout” pour mener à bien une
dentiste durant dix ans. mission de vol tout comme un plan
Parallèlement, passionné par l’avia- de traitement. Il s’agit de réaliser
tion dès la première année de méde- des actes manuels qui demandent de
cine, et à la suite d’une sélection, je la réflexion dans un contexte où le
suis rentré au sein d’une compagnie temps est compté. Ce trio “manuel,
aérienne major en 199
1998.
8. réflexion et pression du temps”
Je suis actuellement commandant de Franck Laigneau
constitue une source de stress et sa
bord sur Airbus A320, instructeur et Ancien chirurgien-dentiste
gestion est un enjeu majeur pour les
expert en facteurs humains. Pilote de ligne pilotes et pour les chirurgiens/prati-
chirurgiens/prati-
Responsable Facteurs ciens. Cet état d’esprit commun m’a
Ce changement peut paraître Humains dans poussé à mener une réflexion depuis
surprenant à première
première vue… une compagnie aérienne quelques années. Ainsi, j’accom-
À première vue oui, mais en réalité pagne des praticiens dans l’amélio-
l’état d’esprit est le même et les points ration de leur pratique quotidienne
20
Chapitre 4
avec pour outil l’utilisation de procé- procédures que j’ai acquis cette dis- en répondant de façon appropriée
dures. À travers un regard nouveau, ponibilité et cette sérénité. Bien aux situations rencontrées des plus
je constate comme ef effet
fet bénéfique la entendu, l’apprentissage ne s’est pas variées. L’utilisation de procédures
diminution du stress chez le praticien fait en une fois. existe bien entendu dans le monde
et son équipe. D’abord, ce furent les procédures médical, mais le praticien n’y voit
liées au pilotage de base, puis celles bien souvent que le côté “rigide” et
Pourriez-vous
Pourriez-vous nous dire en quoi pour apprendre à voler dans les “l’absence de liberté dans son utili-
l’utilisation
l’utilisation d’une procédure nuages, à l’aide des instruments. Par sation”.
permet de baisser le niveau la suite, ce fut l’apprentissage d’un Avoir cette vision, c’eest
st oublier qu
quee la
de stress
str ess ? avion aux procédures plus compli- procédure nous permet de travailler
J’ai commencé à voler à l’âge de dix- quées, qui, de part sa vitesse élevée, en mode routinier, et elle permet éga-
huit ans. À cette époque, l’avion- demande encore plus d’expertise. lement, en cas d’imprévu, d’avoir les
école sur lequel j’apprenais était très À chaque étape, chaque procédure ressources, la disponibilité pour pas-
rudimentaire,
Néanmoins, il me et fallait
fasimple à utiliser.
llait beaucoup de nouvelle,
se réduire,jeilsentais maconcentrer,
fallait se disponibilité
le ser en mode “gestion de l’imprévu”.
concentration pour mener à bien ma stress montait, lié à la peur de ne pas Pourriez-vous développer
Pourriez-vous
mission et le vol ne durait pas plus de maîtriser. Puis cette phase d’acquisi- cette notion de ressources
vingt minutes, faute de quoi je com- tion passée, je passais dans un mode et d’imprévus ?
mençais à commettre des erreurs plus routinier, le stress devenait plus En réalité, nos capacités pour com-
pouvant mettre ma vie en danger. faible, ma performance avait aug- prendre et pour agir font vase
Mon constat initial
in itial ffut
ut que le couple menté, me permettant la réalisation communiquant, mais ce n’est pas
performance et pression du temps de tâches plus complexes sur des extensible à l’infini. Par exemple, si
engendre des erreurs et du stress. avions toujours plus rapides et exi- je demande à une personne de des-
Aujourd’hui, lorsque
lorsque je suis aux com- geants. cendre les escaliers très rapidement
mandes d’un Airbus A320, qui est On comprend que l’utilisation de “quatre à quatre”, il va agir et réali-
un avion fort sophistiqué et dont procédures permet de faire face à ser cette tâche parfaitement. Dans
l’utilisation demande beaucoup d’ex- des demandes toujours plus grandes, un deuxième temps, je lui mets des
pertise, je ne ressens pas un stress en augmentant ses compétences par écouteurs reliés à un téléphone par
particulièrement
particu lièrement éélevé,
levé, ce qui est ras- l’apprentissage. La procédure est lequel je vais lui demander de cal-
surant, car j’y travaille au quotidien. donc bien un outil qui prévient et culer la somme de deux chiffres. A
C’est à travers l’apprentissage de participe à la régulation de son stress priori, cette personne va choisir de
21
LE STRESS Anticiper et Gérer
22
Chapitre 4
bénéfique
Leur mise de
en réguler le niveau
place dans de stress.
stress
un cabinet .
dentaire
est donc intéressante. Elles doivent alors
être simples, avoir du sens et recueillir
l’adhésion
l’adhésion de chacun.
chacu n.
23
LE STRESS Anticiper et Gérer
5
La bonne attitude
Jean-Gabriel Charrier
Consultant en sécurité aérienne Le stress est souvent uniquemen
uniquementt relié
Ancien piloteCivile
de l’Aviation inspecteur à la Direction Générale à des facteurs externes indépendants de l’opérateur :
une chirurgie risque d’être difficile, un patient
est agressif et tente d’imposer son point
de vue, il y a trois urgences dans la journée
déjà bien remplie, etc. Mais c’est oublier
que pour un même environnement, l’attitude
du praticien va influencer sa perception
puis sa réponse aux situations inhabituelles
inhabituelles
potentiellement
potentiel lement stressantes. Il existe en réalit
réalité
é
une relation très étroite entre l’attitude d’un
individu et sa performance dans l’accomplissement
des risques,
il est pour
possible soi ou pour
de classer les autres,attitudes
les différentes
suivant quatre profils professionnels, en allant Si vous êtes dans la catégorie macho. Vos col-
laborateurs, que vous deviez récupérer, vous appellent
des plus risqués aux plus sûrs.
pour vous dire qu’il serait plus prudent d’annuler le
voyage. Face aux autres, vous n’allez quand même pas
Profil 1 - Peu mieux faire ! vous dégonfler : « Pas de problèmes,
problèmes, ne vous inquié-
tez pas, je sais conduire sur des routes glissantes. »
Pour ce premier profil, le comportement n’est souvent Les machos veulent montrer leur supériorité, quitte à
que peu compatible avec une bonne gestion des risques. prendre des risques pour impressionner les autres. S’il
Il existe six attitudes qui prédominent et qui amènent à s’agit
s’agit d’un schéma plutôt masculin, les ffemmes
emmes peuvent
prendre des décisions inappropriées, voire dangereuses. aussi y être exposées. Dans cet exemple, ce comporte-
Ces attitudes
attit udes ont été retrouvées comme étant
éta nt à l’origine
l’origine ment va induire du stress,
stres s, peut-être pour le conducteur,
de beaucoup d’accidents en aéronautique. Elles s’ap- mais certainement pour les passagers. Les machos ont
pliquent également à toute autre activité humaine. En tendance à assumer leurs décisions et à refuser toute
médecine et en dentisterie, elles peuvent être à l’origine remise en question.
quest ion. C’est l’attitude
l’attitude négative qui
qu i dépasse
de beaucoup de stress pour le praticien et/ou son équipe. largement les autres.
Il est possible de les analyser au travers d’une situation
banale : vous vous apprêtez à prendre votre voiture pour Si vous vous résignez facilement. « Et zut ! C’est
vous rendre à un colloque sur
s ur la gestion du stress à une toujours à moi que ces choses-là arrivent. Je sens que la
centaine de kilomètres de votre domicile, quand, en journée commence mal. ma l. » La personne résignée ne se
écoutant les informations, vous apprenez que les routes sent pas capable d’évaluer les situations qu’elle
qu’elle est aame-
me-
sont verglacées dans toute la région. née à rencontrer. Elle a tendance à attribuer ses réus-
sites à la chance, et ses échecs à la malchance. Elle laisse
les autres agir et prendre des décisions à sa place, pour
le meilleur et pour le pire. Ce type
ty pe de personne accepte
parfois des demandes peu raisonnables, juste pour être
très rapidement,
rapidement, et ce de façon plus agréable et ne pas avoir à affronter la contradiction.
ou moins consciente : « On a pris du retard, « Tu crois vraiment qu’on peut prendre la route ? Si tu
pas le temps de consulter son dossier, le dis… on y va. » Il est facile de faire le parallèle avec
les cliniciens qui peuvent se laisser guider par les désirs
ça devrait aller. » L’attitude, qui influence des patients au détriment de la sécurité la plus élé-
la capacité à faire face efficacement mentaire. Cette attitude est rapidement génératrice de
à des situatio
situations
ns génératrices de stress, résult
résulte
e stress. Le praticien subit les décisions des autres et peut
en grande partie de la propre personnalité ne pas sentir à la hauteur pour finalement faire face.
de l’opérateur, elle-même forgée par le parcours
Si vous détestez l’autorité. « Du verglas ? Restez
personnel. Elle peut varier en intens
intensité
ité chez vous si vous le pouvez ? Non mais je fais ce que je
et en fonction des circo
circonstances
nstances du moment. veux. Ce n’
n’est pas bison
bison givré qui va me dire ce que j’j’ai
ai à
Elle possède également une composante faire. » Les personnes anti-autorité
anti-autorité estiment que les lois,
affective. Et finalement, pour une même les règles, les procédures, ici un
u n simple conseil, ne sont
pas utiles ou pas faites pour elles. Elles pensent que per-
situation, des attitudes différentes peuvent
situation, sonne n’a à leur dicter leur conduite. Une étude réalisée
entraîner
entraî ner des conséquences négatives auprès de 240 chirurgiens orthopédiqu
ort hopédiques
es a montré que
ou positives : « Tant pis si on prend un peu presque 30 % d’entre eux avaient une attitude potentiel-
de retard, mais je vais vérifier son dossier. » lement dangereuse pour leur patient. En s’engouffrant
25
LE STRESS Anticiper et Gérer
26
Chapitre 5
fréquente dans le milieu aéronautique qui traque depuis - ils sont très motivés par leur métier et donc curieux de
des décennies tout ce qui peut affecter la performance tout ce qui s’y rattache ;
de ses pilotes. Ces derniers sont formés dans l’
l’optique
optique de - ils connaissent bien leurs limites.
réduire
aux les àerreurs
pilotes et leursaux
être attentifs conséquences. On apprend
menaces qui peuvent être Celatermes
en sembledesimpliste,
simp liste, mais
sécurité et dece bonnes
qui distingue
distipratiques
ngue les meilleurs
est leur
à l’origine
l’origine d’erreurs et éventuellement de complications. capacité à mettre en œuvre ces pratiques plus souvent
La base de cette approche est d’accepter que les erreurs que les autres. On comprend aisément que cette manière
font partie de la pratique, qu’elle soit aéronautique ou d’agir, cette attitude, permet de réduire au maximum les
médicale. Une fois l’origine de l’erreur identifiée, la inconnues… donc le stress.
bonne pratique impose de développer des barrières de « Finalement, avec ces routes glissantes, j’ai bien fait de
protections qui peuvent être comportementales ou tech- partirr hier soir. No stress ! »
parti
niques. L’expérience montre qu’une fois ces connais-
sances acquises, certains pilotes peuvent diviser par deux
leurs erreurs de jugement. Quelle que soit la qualité de Que nous soyons médecins ou pilotes,
la formation ou la sensibilisation dans tous ces domaines la fatigue, le stress et de nombreux autres
qui touchent à la performance, le catalyseur reste l’atti- facteurs peuvent être à l’origine d’un événement
tude. Et ceux qui lisent cet article ne sont probablement indésirable. Cette prise de conscience est
pas ceux qui en auraient
aura ient le plus besoin ! primordiale.
fait partie duNous s ommes
sommes
quotidien, lesvulnérables. L’erreur
pilotes en commettent
Profil 4 - Vous faites partie en moyenne trois par vol. C’est pourquoi
la manière d’agir des pilotes ou des médecins
des meilleurs n’est pas ou ne devrait pas être celle de Monsieur
Lorsque l’on commence son activité professionnelle, Tout le Monde. Elle s’appuie
s’appuie sur des connaissances
on a généralement peu conscience des enjeux de sécu- qui apprennent à se méfier de soi-même. Le but
rité et de l’impact que peuvent avoir des comportements est de transformer cette manière d’agir en savoir
inappropriés sur les performances. Le stress n’est qu’un agir. Plus les individus sont expérimentés, plus
ressenti désagréable que l’on cherche à fuir autant que ils deviennent prudents, vigilants, rigoureux,
faire se peut. Toute
Toute l’activité
l’activité professionnelle se fonde sur parce qu’ils perçoivent de mieux en mieux
des connaissances et des protocoles. C’est une approche l’importance de l’attitude. C’est en recherchant
essentiellement technique. Par la suite, au contact des pour chacune de ces attitudes leurs côtés
pairs, et en prenant conscience des erreurs
erreu rs que l’on
l’on peut positifs – humilité, pugnacité, respect des règles,
27
LE STRESS Anticiper et Gérer
6
Check-list de sécurité
en chirurgie orale
et maxil
maxilllo-f
o-fac
aciale
iale aambulato
mbulatoire
ire
Dr Christian Schmitt Pr Friedrich W. Neukam
Service de chirurgie orale Chef du service de chirurgie orale
et maxillo-faciale et maxillo-faciale
Université d’Erlangen-Nuremberg, Université d’Erlangen-Nuremberg,
Erlangen, Allemagne Erlangen, Allemagne
L
a sécurité des patients subissant un traitement
susceptibles
suscepti bles de mettre en jeu la vie chirurgical est d’intérêt général. Les erreurs
des patients à la suite d’erreu
d’erreursrs médicales humaines peuvent en principe être à l’origine
est d’intérêt général.
général. Il es
estt essentiel pour tous de complications locales mineures ou majeures géné-
les praticiens du service de santé rales pouvant aller
al ler jusqu’à provoquer
provoquer le décès du patient.
Cela a déjà conduit l’Organisation Mondiale de la Santé
et des disciplines médicales de se familiariser,
(OMS) à proposer des check-list chirurgicales de façon
dans leur exercice quotidien, avec le contexte à diminuer les complications et améliorer la sécurité du
général de la santé des patients de façon patient [1, 2]. Leur utilisation améliore manifestement
à diminuer le taux de complications le partage des informations médicales concernant le pa-
provoquées par l’intervention humaine. tient entre les membres de l’équipe
l’équipe soignante et diminue
d iminue
28
Chapitre 6
de manièrepostopératoires
plications conséquente le [1
nombre
, 2]. des décès et des com-
[1, tion, le contexteambulatoire
à la chirurgie et la structure d’une check-list
buccale, adaptée
maxillo-faciale et
Une politique de la santé du patient est apparue dans implantaire basée sur celle proposée par l’OMS. Elle
de nombreuses disciplines [3-5]. C’est particulièrement est également utilisée au sein du service ambulatoire du
le cas des disciplines médicales comme l’anesthésiolo- Département de chirurgie buccale et maxillo-faciale de
gie et la chirurgie (interventions réalisées en général l’Université de Erlangen-Nuremberg.
Erlangen-Nuremberg. Le but de ce pro-
sous anesthésie générale) [6, 7]. Cependant, de petites jet est de proposer un dispositif facile à utiliser qui ne
interventions comme les traitements dentaires peuvent requiert que peu de temps et fournit une systématisa-
être concernées par des erreurs humaines et conduire tion ordonnée, logique, augmentant le niveau de sécu-
à des dommages. Lors de soins dentaires courants, les rité dans le cadre des chirurgies buccale, maxillo-faciale
résultats concernant l’incidence des complications en et implantaire. Un intérêt particulier est porté au suivi
pratique quotidienne comme des rap- des instructions pré- et postopératoires
ports sur l’application des mesures de du traitement chirurgical en raison de
sécurité est rare et l’amélioration de la Une check
check-list
-list doit être son importance pour le traitement des
santé du patient est un concept relative- un instrument patients ambulatoires.
ment nouveau avec un manque évident facile à utiliserde
quitravail
ne Le document est divisé en deux parties
de preuves [8]. La dentisterie moderne réclame pas
pas de temps suivante). La première
(voir figure page suivante).
est devenue très sophistiquée, ce qui supplémentaire
supplém entaire pour doit être complétée avant le début de la
augmente les risques pour le patient, et l’équipe chirurgicale. chirurgie et la seconde doit être véri-
sa sécurité peut être considérée comme fiée après le traitement, mais avant le
une discipline relativement nouvelle départ du patient. Ces deux parties sont
[8, 9]. Bien que les risques de blessure iatrogéniques divisées en deux sections
se ctions : l’une pour l’assistante/infir-
existent en dentisterie, les mesures de sauvegarde en mière et l’autre pour le chirurgien-dentiste/chirurgien.
pratique quotidienne ne sont pas si fréquentes. Une Chacune doit être visée par la personne responsable
revue de la littérature concernant les incidents sur des avant la suite du traitement sécurisé. La partie suivante
patients en dentisterie révèle que les complications dans de la vérification n’est entamée qu’après signature de la
ce domaine sont très peu nombreuses [9]. Cela peut être partie précédente. Le protocole peut être interrompu à
dû à un recueil insuffisant de données tout comme au tout moment si l’un des éléments de la check-list n’est
refus des praticiens de communiquer ces incidents de pas vérifié. La chirurgie
chiru rgie ne doit
doit pas être commencée tant
peur de perdre des patients et des revenus. Parmi tous que les deux sections de la première partie ne sont pas
les incidents connus, les blessures (10 %), les urgences remplies, vérifiées et terminées. Le chirurgien doit être
médicales (6 %), les inhalations/ingestions
inhalations/i ngestions (4 %), les sûr que le patient a bien compris ce qui va être réalisé,
effets indésirables (4 %) et les erreurs de sites d’extrac- pour quelles raisons et quelles sont les complications
tion (2 %) sont les complications essentielles [9]. Il est possibles. De plus, le chirurgien doit percevoir la nature
intéressant de noter que la plupart de ces complications et l’importance de l’intervention et doit être capable de
sont dues à des erreurs humaines (36 %) et qu’une part gérer les complications possibles. Il s’agit du dernier
importante des blessures iatrogéniques n’intervient pas moment où il pourra demander de l’aide et annuler le
pendant les traitements mais lors des contrôles pré- traitement s’il se révèle incertain, évitant une situation
et postopératoires [9]. Il est temps, par conséquent, que dans laquelle il serait poursuivi.
les professionnels dentaires se familiar
f amiliarisent
isent avec l’état
l’état de La chirurgie débute immédiatement après que le prati-
santé général du patient et qu’une politique de sécurité
sécu rité de cien a énoncé à haute voix, devant le patient et l’assistante,
celui-ci soit établie en pratique quotidienne. En chirur- le type d’intervention devant être réalisée, à quel niveau
gie buccale, il existe déjà une check-list. Les auteurs en et sur quelles dents. Ceci est appliqué
appliqué comme un disposi-
concluent que c’est un dispositif clairement positif pour tif de sécurité
séc urité supplémentaire
supplémentaire que le chirurgien-dentiste
chir urgien-dentiste
l’équipe dentaire, et concourant à l’amélioration de la va réaliser précisément.
précisément. L’assistante dentaire sait quand
santé du patient [10]. interrompre
interromp re la chirurgie
chiru rgie si une erreur est commise.
29
CHECK-LIST pour traitements ambulatoires de chirurgie buccale et maxillo-faciale. Elle consiste en deux parties :
pré et postopératoires. Chacune est divisée en
e n deux sections
sec tions : l’une pour l’assistante
l ’assistante dentaire/infirmière et l’autre
pour le chirurgien-dentiste/chirurgien. Le traitement et le processus de contrôle de sécurité sont poursuivis après
Après l’intervention, la seconde partie de la check-list février 2014. Tous les collaborateurs de ce département
contient les mesures et conseils donnés au patient avant ont été informés lors d’une réunion précédant l’actuali-
de quitter le service. Cette partie est également divisée sation sur les principes de base de la sécurité chirurgi-
en deux sections : la première à compléter par le chirur- cale avant et après l’intervention. Les responsabilités de
gien-dentiste/chirurgien et la seconde par l’assistante chaque étape pré- et post-chirurgicale ont été précisées
dentaire/infirmière avant que le patient ne quitte la salle ainsi que la progression du protocole, lequel dépend de
de soins. La chek-list complète est incluse dans la fiche la réalisation complète de la section précédente (vérifiée
clinique du patient pour pouvoir être consultée
cons ultée ultérieu- après signature).
rement et servir de référence les suites découlant du trai- À part
partir
ir de ce moment, tous les traitements chirchirurgi-
urgi-
tement chirurgical. caux ont été réalisés en utilisant la check-list. Depuis le
début, celle-ci a été reconnue comme un dispositif posi-
Retour d’ex
d ’expérience
périence tif qui améliore le professionnalisme de toute l’équipe
La check-list a été conçue dans le service ambulatoire et optimise l’organisation des mesures pré- et post-
du département de chirurgie orale et maxillo-faciale en chirurgicales.
30
Chapitre 6
C’est un gain automatique de sécurité pour soit incluse dans la fiche clinique du patient peut être
le patient grâce à la prise en compte de quelques intéressant si des questions concernant la chirurgie se
facteurs pertinents
per tinents : posent dans la suite du traitement.
1. La confirmation du consentement
du patient pour subir la chirurgie et le contrôle
supplémentaire de l’anamnèse.
Conclusion
Les auteurs concluent que la check-list mise en œuvre
2. Les informations concernant le patient conduit à une meilleure prise en charge du patient avec
et les étapes du plan de traitement. des mécanismes simples. Jusqu’à présent, il est diffi-
3. L’affectation
L’affectation des tâches aux membres cile de savoir si d’autres facteurs pertinents de sécurité,
de l’équipe. comme le professionnalisme de l’équipe et la communi-
4. Le chirurgien doit percevoir le type cation interprofessionnelle, peuvent être améliorés par
et l’ampleur de l’intervention
l ’intervention chirurgicale. cette mesure. Il faudrait rechercher si la mise en œuvre
5. La préparation et la vérification du matériel d’une telle check-list conduit à moins d’inconvénients et
chirurgical et des implants nécessaires avant échecs du traitement. Une révision et l’adaptation de la
la chirurgie. check-list sont nécessaires pour s’assurer qu’elle satisfait
Très important, le seul fait que le matériel les demandes courantes. L’objectif serait d’établir une
et les implants aient été vérifiés complètement politique médicale permettant aux utilisateurs d’avoir un
avant l’intervention conduit à une diminution retour d’informations sur la valeur des mesures spéci-
fréquente de la demande d’un autre instrument fiques par l’implication d’autres
d’autres méc
mécanismes
anismes de contrôle.
pendant l’intervention.
Bibliographie
1. Helmio P et al. Towards better patient safety: WHO Surgical
Safety Checklist in otorhino
otorhinolaryngology.
laryngology. Clin Otolaryngol 2011 ;
36 (3) : 242-247.
La mise en œuvre de cette check-list diminue automa- 2. Braham DL, Richardson AL, Malik IS. Application of the WHO
tiquement le stress des membres de l’équipe et l’atmos- surgical safety checklist outside the operating theatre : medicine
phère est plus calme
ca lme et détendue en salle
sa lle d’opération.
d’opération. Le can learn from
fr om surgery. Clin Med 2014; 14 (5 (5)) : 468-47
468- 474. 4.
fait que le praticien qui réalisera
réa lisera l’intervention l’ait
l’ait répé- 3. Kapur A, Potters L . Six sigma tools for a patient safety-oriented,
tée (avec l’assista
l’assistante
nte et le patient) est généralement perçu quality-checklist driven radiation medicine department. Pract
Radiat Oncol 2012. 2 (2) : 86-96.
de manière positive. Le confort des patients
pat ients s’accroît,
s’accroît, ils
4. Wischet W, Schusterschitz C. Quality management and safety
sont plus détendus, et les éventuelles erreurs commises culture in medicine - Do standard quality reports provide
par l’équipe peuvent être évitées. Le fait que le contrôle insights into the human factor of patient safety ? Ger Med Sci
postopératoire soit réalisé directement après le traite- 2009 ; 7 : Doc30.
ment, quand le patient est encore présent, garantit qu’il 5. Buerschaper C, Hofinger G. Patient safety and training in human
factor-challenge for anaesthesia training. Z Arztl Fortbild
quitte le service dans de bonnes conditions cliniques Qualitatssich 2004 ; 98 (7) : 6601-607
01-607..
après avoir reçu des conseils postopératoires,
p ostopératoires, qu’il a bi
bien
en 6. Brichant JF. The Helsinki declaration on patient safety in
compris ce qu’il faudra faire en cas de complications et anaesthesiology. Acta Anaesthesiol Belg 2010 ; 61 ((2) 2) : 49.
quand et comment le suivi postopératoire intervient. 7. Arfanis K, Fioratou E, Smith A. Safety culture in anaesthesio-
L’assistante confirme l’étiquetage correct des biopsies logy: basic concepts and practical application. Best Pract Res
après l’intervention (si c’est possible), ce qui évite toute Clin Anaesthesiol 2011 ; 25 (2) : 229-238.
erreur. En vérifiant que la documentation est complète, 8. Bailey E, Tickle M, Campbell S. Patient safety in primary care
dentistry:
dentistr y: where are we now ? Br Dent J 2014 ; 217 217 (7) : 339-34 4.
le chirurgien est automatiquement assuré que tous les
9. Thusu S, Panesar S, Bedi R. Patient safety in dentidentistry
stry - state of
événements (erreurs, complications, implants et maté- play as revealed by a national database of errors
errors.. Br Dent J 20122012 ;
riaux utilisés) ainsi que le protocole thérapeutique ont 213
213 (3)
(3 ) : E3.
été documentés. En termes de coopération interdisci- 10. Perea-Perez B et al. Proposal for a ‘surgical
‘s urgical checklist’ for ambu-
plinaire avec d’autres spécialités, les informations sont latory oral surgery. Int J Oral Maxillofac Surg 2 01 0111 ; 40 (9
(9)) : 949-
954.
consignées dans une lettre donnée au patient ou postée
directement après la chirurgie. Le fait que la check-list
31
7
L’anticipation…
Exemple du pilotage
d’un réacteur nucléaire
Philippe Pons La première fois
Groupe EDF - CNPE de Cruas-Meysse Imaginez : vous venez de fêter vos dix-huit ans et venez
Chef d’Exploitation sur 2 des 4 réacteurs du CNPE d’obtenir votre permis de conduire. C’est le grand jour,
vous allez vous lancer au volant de votre voiture pour
avaler l’asphalte. C’est la première fois que vous allez
prendre le volant seul. Vous avez répété ce geste avec
le moniteur de l’auto-école, mais là, ce n’est pas pareil,
Il est difficile d’imag
d’imaginer
iner que les équipes vous êtes seul… Dès le démarrage de la voiture,
voiture, le stress
en charge du pilotage d’un réacteur nucléair
nucléaire
e monte. Il ne faut pas caler, ne pas heurter le poteau en
soient stressées. Pourtant, lorsque l’l’on
on voit sortant de la maison…
des images d’accidents
d’accidents nucléaires, on se rend Depuis, vous répétez ce geste quotidiennement et vous
avez oublié ce premier moment. Vous êtes guidé par
bien compte que ces personnes doivent être
des automatismes et gardez votre attention pour les élé-
préparées et prêtes à travai
travailler
ller dans toutes ments nouveaux qui pourraient survenir.
sur venir. La conduite du
les conditions et à affronter toutes véhicule n’est
n’est plus source de stress pour vous.
les situations. Le pilotage d’une centrale nucléaire requiert un peu le
même principe. Il est important que les acteurs puissent
le gérer en toute sérénité sans ajouter du stress si une
anomalie venait à se produire. Pour cela, à l’identique
de la voiture, il faut s’entraîner à gérer les situations et
pratiquer.
32
Chapitre 7
L’effet tunnel
En phase d’app
d’apprentissa
rentissage,
ge, “l
“l’’appr
apprenti”
enti” a te
tenda
ndance
nce à pre
prendr
ndree
pourr argent
pou arg ent comp
comptant
tant les pro
propos
pos du prof
professeur.
esseur. Ce derni
dernier
er
connaît déjà les
Pour autant, untechniques,
techn iques,
œil neuf estlatoujours
discipline, et a de l’expérience.
intéressant l’expérience.
pour noter
le détail sur lequel tout le monde “passe”. On en prend
conscience avec les enfants et leur sempiternelle question :
« Et pourquoi ? ». Les choses que nous considérons comme
acquises, évidentes,
év identes, ne le sont pas pour quelqu’un qui n’a pas
notre vécu. Parfois, répondre à la question « pourquoi ? »
conduit à se reposer des questions fondamentales dont on a
oublié la justification et à détecter le détail important.
Dans le même esprit, lorsque le chef d’exploitation délégué ryi
e
Chapitre 7
35
8
La formation par simulation
pour faire face au stress
Dr Morgan Jaffrelot Les activités de simul
simulation
ation dans le domaine
Médecin urgentiste des sciences de la santé sont actuellement
Chargé des programmes de simulation
simulation
au Collège des Hautes Études en plein essor, et reconnues par la Haute
en Médecine (CHEM), Brest Autorité
Autorit é de Santé (HAS) comme une méthode
de développement professionne
professionnell contin
continu
u
à part entière
entière.. Pourtant, au même titre
que tous les outils au service
ser vice de l’enseignem
l’enseignement
ent
et de l’apprentissage, la mise en œuvre
de ces activités
ac tivités ne peut être indépendante
d’objectifs liés au développement de compétences
Chapitre 8
souvent
Les compétences émotionnelles sont très souv ent oubliées dans les cursus
de formation des professionnels de santé dans le monde francophone.
Que faut-il enseigner sur le stress ? inattendue, et, d’autre part, qu’ils permet aux participants d’agir. Mais
Le stress, défini dans les articles pré- acquièrent des automatismes afin l’action n’est pas automatiquement
cédents, peut être abordé sous l’angle de diminuer la charge de travail de formatrice, l’analyse et la rétroac-
des compétences dites « émotion- réflexion (« charge de travail cogni- tion par un enseignant ou des pairs
nelles ». En effet, si le stress est un tif »). En situation
sit uation de stress,
stress , ces sont nécessaires pour identifier les
mécanisme de réponse, il peut pro- automatismes permettront de mettre éléments qui ont déterminé l’action.
voquer différentes émotions dont en place immédiatement certaines Cette phase d’analyse et de rétroac-
l’anxiété, la peur, la colère… Ces actions, en libérant la mémoire tion tient place lors du débriefing, qui
qu i
compétences émotionnelles sont mal- immédiate pour élaborer de nou- succède à la mise en situation.
heureusement très souvent oubliées velles stratégies.
str atégies. Au mêmêmeme t it re qu e de s co mp é -
dans les cursus de formation des pro- tences liées à la résolution de pro-
fessionnels de santé dans le monde Pourquoi mettre en place blème thérapeutiques, les praticiens
francophone. Pourtant, elles sont des enseignements par simulati
simulation,
on, doivent être capables de faire face à
mobilisées quotidiennement lorsqu’il ciblés sur le stress ? des situations de stress. En faisant
s’agit de résoudre un problème de La simulation est une activité d’en- l’expérience du stress, dans un envi-
santé, en particulier en situation seignement qui permet aux appre- ronnement propice à l’apprentissage
inhabituelle ou d’incertitude. nants de mettre en œuvre des actions et en respectant une méthodologie
En contexte, les émotions sont des dans un environnement reconstruit. dans l’
l’encadrement
encadrement pédagogique, des
ressources qui permettent, selon les Les actions réalisées peuvent être de compétences peuvent être dévelop-
situations, de s’ajuster (niveau indivi- l’ordre d’habiletés techniques, telles pées en simulation.
duel), d’optimiser la communication que la répétition de gestes, ou en lien
(niveau interpersonnel) et de facili- avec la résolution de problèm
problèmes. es. Comment mettre en place
ter la coordination sociale (niveau Lorsqu’il s’agit d’un premier appren- des activités
ac tivités de simulatio
simulation
n?
groupal). Les individus diffèrent tissage, l’exposition à une situation L’enseignement par simulation n’est
dans la manière dont ils identifient, permet d’acquérir des automatismes pas une méthode nouvelle. Les
comprennent,
compre nnent, expriment, régulent avant d’être confronté la première sciences de la didactique profession-
et utilisent leurs émotions et celles fois avec un patient. La dimension nelle – fondées sur l’analyse des pra-
d’autrui.
d’autrui. Pour chacune de ces compé- éthique est alors au premier plan. tiques en situation – et la pédagogie
tences, il faut alors identifier s’il s’agit Un autre avantage des activités de – qui s’intéresse aux apprentissages,
de ses propres émotions ou de celles simulation est la possibilité de s’exposer à leurs réutilisations appropriées
appropriées –
de personnes qui nous entourent. à des événements rares et/ou critiques. ont permis d’identifier les conditions
En situation de stress, les émotions Enfin, une dernière dimension fait favorables à l’utilisation de la simu-
influencent la décision et par consé- directement référence aux concep- lation. On peut ainsi distinguer des
quent la nature même des actions qui tions modernes de la pédagogie, activités essentiellement ciblées sur
en découlent. Il est donc important promouvant la construction des l’acquisition d’automatismes, l’appli-
que, d’une part les professionnels apprentissages à partir des connais- cation de procédures ou la répétition
reconnaissent et régulent les émo- sances antérieures et de l’analyse de de gestes. Nous pourrions alors
tions, en particulier en situation l’expérience. En effet, la simulation qu al if ie
ierr ces séances « d’
d’app
applica-
lica-
37
Chapitre 8
mise
En situation de stress, les automatismes permettent la m ise en place
immédiate de certaines actions, libérant la mémoire immédiate
pour élaborer de nouvelles stratégies.
9
La préparation mentale
au service des chirurgiens-dentistes
en situation de stress aigu
Dr Édith Perreaut-Pierre
Perreaut-Pierre Des outils de préparati
préparation
on mentale peuvent
Ancien médecin militaire être très utiles et adaptés pour gérer le stress
A développé une technique de réduction
de stress pour les pilotes de chasse
d’une intervention
intervention difficile. Il est important
et les contrôleurs aériens, régulièrement de commencer par définir ce qu’est
enseignée dans la Chasse française la préparation mentale et de détermine
déterminerr
quels outils peuvent apporter une aide
précieuse pour se préparer psychologiquement
à une intervention délicate et/ou gérer
le stress au cours d’une intervention
stressante.
40
Chapitre 9
* Attention, il est important de s’entraîner avant, tout particulièrement pour ce type de respiration, car elle peut entraîner des vertiges
si votre cerveau n’est pas habitué à l’hyperoxygénation. De même, éviter de forcer les inspirations ou expirations, car vous obtiendrez les ef
effets
fets
inverses. Par exemple, une expiration très lente et forcée va être suivie par une grande inspiration réflexe et vous serez dynamisé. Mais ça peut
être une manière
manièr e de faire de la respiration dy
dynamisante
namisante !
41
Selon
orientée les vers
butstrois
recherchés, l’imagerie
axes principaux : mentale est manifeste souvent par
calgies, lombalgies, des s,tensions
crampe
crampes, musculaires
etc.). Donc, (cervi-
pour retrouver
- la détente et la récupération ; la détente mentale nécessaire
néces saire à l’l’équilibre
équilibre psychologique
- la dynamisation
dy namisation ou préparation à l’action ; et émotionnel permettant de s’adapter à la situation
- la régulation du niveau d’activation en cours d’action. stressante,
stressa nte, il faut idéalement savoir relâcher les muscles.
Il s’agit de réguler son niveau énergétique (cognitif et Il existe de nombreuses méthodes de relaxation. Il est pos-
physiologique) en fonction des exigences de la situation sible de les classer schématiquement en trois catégories [1].
rencontrée. Par exemple, respiration relaxante associée à
de l’imagerie mentale relaxante (imaginer une musique • Les relaxations à point de départ musculaire.
douce, un endroit calme…) pour faire baisser la pression
press ion On relâche les muscles zone par zone, de la tête aux pieds
psychologique et gérer son anxiété. (ou des pieds à la tête, en fonction des tropismes
t ropismes person-
L’imagerie mentale est toujours posi- nels). On terminera par une détente
tive : im ages de réu ssites, d’actions La relaxation se fonde globale de tout le corps. Pour obtenir
efficaces, de procédures correctement cette détente musculaire, il existe trois
réalisées, etc. Si, en cours de visualisa-
tion, des images négatives surgissent
surg issent (ce sur
quela le constata
constatation
tion
tonus musculaire
options :
- inaction : « ne rien faire », porter son
qui peut être le cas si vous anticipez un attention sur les différentes zones en
acte difficile et très stressant), il faudra est en étroite relation laissant faire
f aire ;
tout simplement
simplement recommencer le travail
t ravail avec les émotions - relâchement : décontracter les muscles
mental jusqu’à ce que cela soit juste, en volontairement ;
gérant ces stimuli négatifs.
et le mental. - contracter-relâcher pendant quelques
Il est également important d’associer secondes les muscles puis les relâcher.
l’expérience émotionnelle liée à l’anticipation ou la
reproduction d’une action. • Les relaxations sensorielles à point de départ
mental.. Il en
mental e n existe plusieurs dont :
- la relaxation sensorielle qui consiste à faire le tour
Le dialogue interne du corps en laissant venir des sensations agréables de
La pensée est accompagnée par la verbalisation intériori- détente ;
sée ou Dialogue Interne. La caractéristique essentielle du - le training autogène de Schultz dont la première par-
Dialogue Interne lors d’un travail mental réside dans le fait tie est une technique d’autohypnose obtenue à l’aide de
que, pour avoir des effets bénéfiques, il doit être positif. six exercices : sentir la lourdeur et la chaleur dans diffé-
On utilise alors des phrases positives mais également des rentes parties du corps, sentir son cœur et sa respiration
mots valorisants et encourageants. Les effets bénéfiques calmes, la lourdeur au niveau du plexus solaire diffusant
du Dialogue Interne sont les mêmes que ceux de l’Ima- dans tous le corps et enfin sentir le front frais ;
gerie Mentale. Il participe au développement de l’estime - l’image de détente : termes utilisés en sophrologie [7]
de soi, renforce la confiance en soi, favorise le contrôle de ou « lieu de confort » ou « safe place » (formulations
l’attention et permet le contrôle de l’anxiété. Il joue donc souvent utilisées en hypnose) [8] ou paysage ressource
un rôle particulièrement pertinent dans les domaines de la (formulation retrouvée en PNL) [9] : s’imaginer par
motivation et de la gestion
ges tion du stress
stres s [3,4,5].
[3,4,5]. exemple dans un endroit apaisant et prendre le temps de
« se promener » dedans.
Chapitre 9
Lorsque
viser trois l’on se relaxe,
grands on peut
objectifs :
- la récupération : se détendre pro-
fondément pendant dix minutes
au moins pour récupérer en fin de
journée ou après un acte long et
stressant ;
- la détente : pour évoluer dans un
état psychologique, entre veille et
sommeil, propice au travail men-
tal. Cet état particulier s’obtient
à l’aide de différentes procédures :
relaxation, hypnose, méditation,
sophrologie, etc. ;
- la gestion d’un « hyperstress »
(énervement, agitation fébrile,
colère, anxiété…
anx iété…)) : pour revenir
e
dans une « zone optimale de per- ryi
eb
formance » [4, 5]. Le plus pratique a
L
étant de faire quelques respirations .
L
relaxantes associées à des images ©
mentales et un dialogue interne de
calme.
Chapitre 9
45
10
L’hypnose au service
du chirurgien-dentiste
Dr Bruno Marciano Les changements des politiques sanitaires
Docteur en chirurgie
c hirurgie dentaire et l’évolution
l’évolution comportementale des patients
Praticien à Saint-Louis (Haut-Rhin)
Chargé d’enseignement à l’Ecole Centrale
expliquent sûrement
sûrement pourquoi le Bureau
d’Hypnose International du Travail place les chirurgiens-
dentistes en 4e position des métiers à stress,
derrière les policiers, les gardiens de prison
et les pilotes d’d’avions,
avions, dans ses publication
publicationss
de 1997 et 2003. Un grand nombre de chirurgiens-
dentistes montrent
montrent ainsi des signes de « burn-out »,
réaction ultime face à l’accumulation de stress
professionnel.
professi onnel. Les facteurs stressant dans
les cabinets dentaires sont multiples et ont fait
l’l’objet
objet d’études. Face
Face à ce stress import
important,
ant, l’hypnose
peut représenter une aide essentielle pour
permettre de surmonte
surmonterr ou empêcher l’appa
l’apparition
rition
d’un syndrome d’épuisement.
46
Chapitre 10
GAUCHE DROIT
Acquis Inné
CONSCIENT INCONSCIENT
Concret Abstrait
Logique Rêve
Raison Intuition
Ecriture Poésie
Mathématiques Conception
Qu’est-ce
Qu’est-ce que l’hypnose ? Langage Intonation
Détail des formes Perception globale
Parmi les différentes définitions de l’hypnose, Dany Analyse Synthèse
Dan Debeix (1973) la décrit comme un état élargi Rationalité Imagination
de la conscience (EEC) permettant une plus grande Description Créativité
réceptivité aux suggestions, dans le but de provoquer Perception des sens Symboles
des changements psychiques, physiques, comporte- Ego Émotions
mentaux et même neurobiologiques.
Pratiquer l’auto-hypnose ou se faire hypnotiser par
un praticien, c’est reproduire intentionnellement cet
état particulier de conscience en le mettant à profit 1. Les deux cerveaux.
dans le cadre de soins (hypno-sédatio
( hypno-sédation,
n, hypno-anes-
thésie, traitement des patients phobiques, préparation
mentale du praticien). L’hypnose peut également être
utilisée pour modifier les habitudes comportemen- tions logiques et analytiques et il est impliqué dans le
tales (arrêt tabagique) ou pour une simple relaxation. phénomène de conscience.
Contrairement aux idées reçues, hypnotiser ce n’est Si l’éducation acquise enrichit l’individu, elle peut
pas endormir, mais au contraire obtenir un état par- également entraîner des distorsions entre les valeurs
ticulier de vigilance et de conscience, grâce auquel la qui lui sont intrinsèques et celles qu’il se voit ensei-
personne hypnotisée perçoit le monde différemment. gnées, donnant naissance à des troubles comporte-
Le but est de permettre l’accès à beaucoup plus de mentaux.
ressources personnelles. Ainsi,
Ain si, la confiance
c onfiance en soi et l’image de soi s oi dépendent
Pierre Rainville, avec son équipe de Montréal, a pu de la balance entre l’inné et l’acquis (bon et mauvais).
identifier et caractériser cet état en imagerie céré- Bien entendu, le bien-être professionnel et la capa-
brale (IRM fonctionnelle et PET-Scan), attestant cité à réagir positivement en toutes circonstances
circonstance s sont
ainsi de son existence réelle [1] et lui conférant une également liés à cette dualité cognitive.
réalité scientifique, même si ses mécanismes ne sont Cette complémentarité ou cet équilibre entre le cer-
pas encore connus. veau droit (inconscient)
(inconscient) eett le cerveau gauche (conscient)
(conscient)
vont être
être au centre des techniques d’hypnose.
d’hypnose.
Hypnose et cerveaux Ainsi,
Ain si, Milton Erikson
Erik son (1901
(1901-1
-1980),
980), promoteur de
l’hypnose moderne, définit comme inconscient tout
Les cerveaux ce qui n’est pas conscient.
Pour une compréhension simple de l’action de l’hyp-
nose sur le cerveau, il faut considérer les deux hémis- La puissance de l’inconscient
phères cérébraux (théorie née dans les années 70) Lors d’un événement traumatisant, l’inconscient réa-
(fig. 1) : git au premier degré et le grave sur son disque dur. Il
- le cerveau droit est le centre des fonctions abstraites,
abst raites, y écrit « traumatisme
traum atisme » et s’en rappellera toute sa vie,
créatives et émotionnelles. En rapport avec l’incons- la nôtre.
cient, il contient notre
not re inné ; Avec le
le temps, le cerveau conscient lui, sait prendre de
- le cerveau gauche se construit principalement la distance en disséquant, analysant et digérant l’évé-
autour de l’acquis. Il est plutôt responsable des fonc- nement. Il le relativise,
relat ivise, il peut même l’oublier.
l’oublier.
47
Mais, même
même effacé au niveau de la mémoire consciente, C’est en saturant le patient d’informations au niveau
le traumatisme est donc toujours actif au niveau de ses cinq sens (visuel, auditif,
auditif, kinesthésiqu
k inesthésique,
e, olfac-
inconscient. tif, gustatif ) que le thérapeute inactive le contrôl
contrôlee du
Il suffit que l’inconscient trouve quelque similitude cerveau gauche et le fait passer
pas ser du rôle d’acteur
d’acteur à celui
entre un événement à vivre et un traumatisme gravé de spectateur.
en lui, pour rendre la situation stressante alors que Les messages (mots, musiques, sons, silences, langage
consciemment elle est reconnue sans non verbal) peuvent alors s’adresser direc-
danger. En fait, le cerveau gauche, tement au cerveau droit. Les suggestions
malgré sa volonté consciente de s’en « Toute pensée émises par le thérapeute rendent ainsi
sortir, n’arrive pas à lutter face au cer- se réalise tant qu’elle possible le changement comportemental
veau droit émotionnel
é motionnel qui ne veut pas n’est pas remplacée physique, psychique ou même biologique
ou ne peut pas l’aider. harmonieux du patient.
par une autre plus
La réaction du cerveau émotion- puissante » En thérapie, le corps du patient semble
nel domine la volonté du cerveau en sommeil tandis que son esprit est
conscient. Le cerveau émotionnel est (Frank Hatem) totalement éveillé et peut recevoir toutes
surpuissant. les suggestions appropriées aux change-
Il en est ainsi pour tout trouble comportemental, ments comportement recherchés.
addiction, phobie, trouble de comportement alimen-
taire, perte de ses moyens dans certaines
certa ines circonstances
comme lors d’une visite chez le chirurgien-dentiste. Le stress du chirurgien-
En réalité, le « je veux, donc je peux » ne fonctionne
que si le cerveau émotionnel est d’accord. dentiste et l’hypnose l ’hypnose
Les traumatismes physiques ou affectifs dans l’en- Le stress apparaît dès que l’individu évalue un évé-
fance engendrent une ou plusieurs de ces cinq bles- nement comme menaçant et dépassant ses capacités
sures : abandon,
abandon, trahison,
tra hison, injustice, humiliation, rejet. à y faire face. Lors d’un incident opératoire, le stress
En réaction, l’individu acquiert des valeurs imposées : du chirurgien-dentiste dépend donc de son niveau de
sécurité, contrôle, justice, loyauté, reconnaissance. préparation technique et de son mental.
Ces valeurs imposées peuvent mettre la personnalité La gestion et la prévention des situations à stress
en danger. requièrent un environnement matériel idéalement
Par exemple, le sentiment d’abandon entraîne le adapté, une parfaite organisation professionnelle et
besoin de reconnaissance qui peut donner naissance l’acquisition de la gestion émotionnelle.
aux perfectionnistes. Ceux-ci, toujours stressés à L’hypnose, avec ses différents outils, met en place des
force de ne jamais être assez satisfaits, deviennent des stratégies qui relèvent le seuil de perception du stress
candidats parfaits au burn-out. et donne la clairvoyance
clair voyance nécessaire pour réagir serei-
Les thérapies sous hypnose consistent à adresser à nement au danger.
l’inconscient des suggestions pour remplacer les L’individu ne subit plus ses émotions, il maîtrise ses
idées négatives et les comportements inadaptés par réactions.
des pensées et des réactions en adéquation avec la
réalité.
Les outils hypnotiques
Le fonctionnement de l’hypnose Le thérapeute souhaitant utiliser l’hypnose peut
L’hypnose a donc pour but de passer des suggestions mettre en œuvre différentes “techniques”,
“techniques”, dif
différents
férents
au cerveau droit sans passer par
pa r le contrôle du
du cerveau “outils” pour permettre
permet tre à son patient
pat ient d’atteindre
d’atteindre l’état
gauche. de vigilance hypnotique.
hypnotique.
48
Chapitre 10
Se recentrer
Les sociologues mettent en garde face
aux technologies modernes d’informa-
tion comme les Smartphones qui, tou-
jours plus intrusives
intru sives dans la vie privée,
entraînent un mélange des plages de
travail et de repos, appelé en anglais
« weisure » (contraction des mots
« work » = travail
trava il et « leisure » = loisir).
Le « weisure » conduit vers le burn-out. au sol, jambes sur une chaise, écouter une musique
Au cabinet, il est
es t préférable d’utiliser les temps morts calme ou des sons de cascade d’eau ou le chant de la
pour se concentrer, par exemple, sur la respiration mer, fermer les yeux et laisser les pensées traverser
abdominale, fermer les yeux et laisser l’esprit vaga- l’esprit sans les accrocher, ce qui fait baisser la pres-
bonder. sion artérielle et le pouls.
Même le temps de prise d’une empreinte peut être
mis à profit pour refaire le plein d’énergie physique et Une communication appropriée
émotionnelle. L’apprentissage
’apprentissage de l’hypnose inclut l’acquisition d’une
Avant une intervention délicate ou un rendez-vous
rendez-vous communication qui développe la confiance avec l’en-
important, 5 minutes d’auto-hypnose peuvent être semble de ses interlocuteurs et également avec soi-
programmées pour s’isos’isoler
ler dans son bureau, s’allonger même.
La suppression des phrases à consonance négative au
profit des termes et des tournures de phrases positives
Tableau 1 - La communication rassure les patients et apporte un éclairage différent
Ce que le chirurgien- Ce que le patient sur notre propre vie (tableau 1).
dentiste dit comprend L’autocritique dévalorisante et répétitive finit par
« Ne vous inquiétez « Je peux vraiment créer chez l’individu une mauvaise image de lui-
surtout pas » m’inquiéter » même. Il se met à douter de ses capacités à réagir face
« Vous n’aurez « Ah, je risque d’avoir aux événements. Puisque son seuil de résistance au
pas mal ! », mal » stress baisse, il voit logiquement le nombre de situa-
« Je vais essayer » « Il risque de rater » tions à stress augmenter.
50
Chapitre 10
Le changement comportemental
Les chirurgiens-dentistes sont-ils des personnes
“normales” ?
Selon Hill, la chirurgie dentaire attirerait générale-
ment des individus avec des personnalités compul-
RÉAPPRENDRE À RESPIRER
Pour retrouver la respiration naturelle
sives, des attentes irréalistes, des normes inutilement du bébé qui à chaque inspiration gonfle
élevées de performance et qui ont besoin d’avoir une bien son ventre pour remplir efficacement
approbation sociale [9]. ses poumons, un exercice consiste
Selon Meyer Friedman et Ray Rosenman, ces per- à s’allonger sur le dos, jambes relevées
sonnes se caractérisent par le besoin de contrôler sur un siège. Seule la respiration
leur environnement afin de réduire leurs incerti- abdominale, qui est la plus efficace
tudes [10]. en situation normale, est alors possible.
Cet exercice est à faire au moins pendant
Leurs exigences sont souvent très élevées, augmen-
28 jours pour parfaitement ressentir
tant par rapport à la moyenne le risque de conflits les effets bénéfiques
interpersonnels. Leur capacité d’autocritique par rap-
port à leur accomplissement est des plus fortes. Ainsi,
leurs attentes de perfection sont alors irréalistes et
incompatibles avec le droit
d roit à l’erreur.
l’erreur.
Leur risque de maladies cardio-vasculaires semble
multiplié par deux par rapport aux personnalités nor-
males et il augmente en présence d’autres facteurs
comme le tabagisme, l’hypertension artérielle, l’obé- L’hypnose et ses thérapies brèves recentrent l’indi-
sité, etc. vidu sur lui, sur ses vrais besoins,
besoins , sur sa vraie per-
Perpétuels insatisfaits, ces individus sont plus à risque sonnalité. Elle permet de retrouver le vrai « moi »,
en dentisterie, car ils ont plus de mal réagir aux situa- celui d’origine et de quitter la coquille de celui que les
tions de stress. autres ont voulu formater à leur manière.
Ils sont les meilleurs candidats au burn-out ! Elle permet de retrouver l’estime de soi qui facilite la
La gestion du stress ne peut éliminer certains fac- réaction en face d’une situation stressante [11].
teurs de stress extérieurs. Elle réapprend à ne plus rester passif, mais à exprimer
L’accompagnement par un hypno-thérapeute permet positivement et sans agression ses propres besoins et
alors de changer les stratégies qui se sont jusqu’alors ses sentiments. Elle réapprend à écouter les besoins
révélées inefficaces en face d’une situation
situation stressante,
stressa nte, de son interlocuteur et à accepter sans jugement ses
d’augmenter le seuil de résistance au stress et d’éviter propos.
d’entamer ses réserves d’énergie. C’est se faire respecter, sans nuire à l’autre.
51
Conclusion
Il est possible de penser que l’évolution des règle-
Bibliographie
ments imposés aux professions médicales et que la
1. Rainville P, Duncan GH, Price DD, Carrier B, Bushnell MC.
dégradation de leur statut contraignent de plus en Pain affect encoded in human anterior cingulate but not
plus les praticiens. somatosensory cortex. Science 1997 ; 277 (5328) : 968-
Le chirurgien-dentiste, mais également tous les 971.
membres des professions médicales, est soumis à 2. Ayers KM, Thomson WM, Newton JT, Rich AM. Job stres-
des situations stressantes aiguës qui peuvent devenir sors of New Zealand dentists and their coping strategies.
Occup Med ( Lond) 2008 ; 58 (4 ) : 275-28
275-281.
1.
chroniques et aboutir à un burn-out.
3. Kay EJ, Lowe JC. A survey of stress levels, self-perceived
Pour y pallier, l’hypnose aide à se recentrer sur soi et health and health-related behaviours of UK dental practi-
à trouver les bonnes stratégies pour contrer le stress tioners in 2005. Br Dent J 2008 ; 204 (11) : E19 ; discussion
aigu ou chronique et donc prévenir le burn-out. 622-362.
Elle corrige les acquis qui ne correspondent pas à la 4. Murtomaa H, Haavio-Mannila E, Kandolin I. Burnout
and its causes in Finnish dentists. Community Dent Oral
vraie personnalité
personn alité du praticien
prat icien et lui permet de pré-
pré - Epidemiol 1990
199 0 ; 18 (4
(4)) : 208-212.
208-212.
server son énergie pour son bien, tout en soignant ses 5. Mellor AC, Milgrom P. Dentists’ attitudes toward frustrating
f rustrating
patients. patient visits : relationship to satisfaction and malpractice
Le chirurgien-dentiste peut se faire assister par un complaints. Community Dent Oral Epidemiol 1995 ; 23 (1) :
hypno-thérapeute pour se recentrer, évaluer ses vrais 15-19.
besoins et mettre en place les stratégies pour parvenir 6. Tigrid D, Sintes JR. Bien gérer son stress : notre qualité de
vie en dépend ! Journal Of
Officiel
ficiel de la SSociété
ociété de Médecine
à s’accomplir sereinement. Dentaire ABSL. 2009 : 214-21
214-219.9.
Utiliser l’hypnose pour traiter une situation de stress 7. Wolfe GA. Burnout of therapists : inevitable or preven-
aigu n’est possible qu’après
qu’après l’acquisition de techniques
tech niques table ? Phys Ther 1981 ; 61 (7) : 1046-1050.
hypnotiques qui en réalité transforment et renforcent 8. Kircanski K, Lieberman MD, Craske MG. Feelings into
la personne. Cette transformation réduit la percep- words : contributions
contributions of language to e xposure therapy.
Psychol
Psyc hol Sci 2012 ; 23 (10) : 1086-1091.
1086-1091.
tion du niveau de stress lors d’un incident.
9. Hill KB et coll. Dental practitioners and ill health retire-
Elle permet le lâcher-prise et améliore la relation ment : a qualitative investigation into the ccauses auses and
interindividuelle et intra-individuelle. Elle devient effects.. Br Dent J 2010 S ; 209 ((5)
effects 5) : E8.
redoutablement efficace quand elle est associée à une 10. Rascle N, Irachabal S. Médiateurs et modérateurs : impli-
mise en place d’une bonne organisation profession- cations théoriques et méthodologiques dans le domaine du
nelle. stress et de la psychologie de la santé. Le travail humain
2001/2 (Vol. 64), p. 97-118.
L’hypnose permet de ne plus voir le verre à moitié
plein ou à moitié vide (vision émotionnelle opti- 11. Malenfant
pour mieux N.a gir.L’
L’épuisement
agir. épuisement professionnel
Métiers de la petite
pe tite enfa:nce
enfancecomprendre
2011 ; 17
miste ou pessimiste), mais de constater que le verre (169) : 16-20.
est simplement deux fois trop grand (objectivité du
jugement).
Bienvenue dans le monde de l’hypnose !
Les informations
inform ations de cet article sont iss
issues
ues pour parties
des cours de l’École Centrale d’Hypnose
(www.ecole-centrale-hypnose.fr) et des références ci-contre.
52
Chapitre 10
53
11
Diminuer le stress
du praticien
par l’utilisation du MEOPA
Clément Alméras Découvert par Priestley en 1776, l’oxyde nitrique resta inexploité
Infirmier anesthésiste pendant de nombreuses années. Davy, à la fin du XVIIIe siècle,
Hôpital Necker Enfants-malades mis en évidence ses effets euphorisants lors de foires
Samu de Paris
où les arracheurs de dents, présents entre le stand
des monstres et celui du gazier
gazier,, s’aperçu
s’aperçurent
rent que les patients
qui se présentaient pour l’ablation d’une dent ne ressentaient
pas de douleur contrairement à ceux qui n’étaient pas passés
par le « stand qui fait rire ». Les effets analgésiques du protoxyde
d’azote en dentisterie furent mis en évidence par Morton
vers la fin du XIXe siècle. Lors d’une démonstration
sur les pouvoirs hilarants du protoxyde d’azd’azote,
ote, il s’aper
s’aperçut
çut
que certains patients s’étant blessés lors de leur transe
ne ressentaient pas la douleur suite à l’inhalation du gaz.
Fort de ce constat, il s’intéressa à ses propriétés. Plus tard,
Wells reprit les travaux de Morton pour une application concrète
en anesthésie dentaire.
54
Chapitre 11
Les propriétés intrinsèques du MEOPA (Mélange nue peut être diminuée si l’on informe le patient des
Équimolaire d’Oxygène et de Protoxyde d’Azote) per- sensations qu’il pourrait ressentir pendant son inhala-
mettent une utilisation optimale lors de soins dentaires. tion. Il est important d’être “préparé” à l’administra-
Utilisé lors d’une
thésie indolore ou «deinduction
manière »prolongée
permettant uneunanes-
pour soin tion de MEOPA
ont besoin ; les patients
de “garder de nature
le contrôle” aurontanxieuse
plus de etmalquià
plus compliqué en présence d’un patient pusillanime, se détendre et accepter les effets anxiolytiques du gaz.
le MEOPA peut être adapté au besoin du patient et en Un conditionnement préalable avec des précisions sur
adéquation avec les temps opératoires. En effet, son le déroulement de la technique ainsi qu’une explication
coefficient de partage sang/gaz est le plus faible des gaz sur la manière de respirer permettra non seulement
médicaux. Peu soluble dans le sang, ne se combinant pas d’augmenter l’efficacité de la thérapeutique, mais égale-
à l’hémoglobine
l’hémoglobine et bénéficiant d’une fa faible
ible captation tis- ment de limiter les effets secondaires.
sulaire, il permet l’obtention en quelques minutes d’une
forte concentration alvéolaire tout en étant éliminé de Utilisation dans de multiples domaines
la même façon. Il est de fait particulièrement maniable De nos jours le MEOPA est utilisé dans de nombreux
et procure une aptitude au retour à la normale des plus domaines et, entre autres, en chirurgie dentaire. De
rapides pour les patients qui en ont bénéficié. pratique courante aux États-Unis et dans les pays du
nord de l’Europe, il est sorti de la réserve hospitalière
Mode d’action, effets indésirables en 2009 avec une modification de l’autorisation de mise
sur le marché (AMM)
(AMM ) permettant une utilisation en ville
et contre-indications pour les praticiens ayant suivi une formation spécifique.
Le protoxyde d’azote est un agent anti NMDA L’Ordre national des chirurgiens-dentistes impose éga-
(N-Méthyl-D-Aspartate, acide aminé post-synaptique lement aux praticiens d’être titulaires d’une formation
qui imite l’action du glutamate, jouant un rôle dans la aux gestes d’urgence datant de moins de cinq ans. Cet
mémoire synaptique) qui permet une diminution de la enseignement consistera en des rappels de physiologie
sensibilisation à la douleur. Il active également les récep- respiratoire, de pharmacocinétique, de pharmacody-
teurs du système GABA (Acide Gama-Aminobutyrique, namie du N2O, présentera le matériel, son montage et
principal neurotransmetteur inhibiteur du système ses particularités de stockage et d’utilisation. Une infor-
nerveux central), entraînant une réduction de l’hype- mation sur la physiopathologie du stress et des conseils
ractivité neuronale liée à l’angoisse. Anxiolytique et pour son administration
adminis tration seront aussi présentés. Il est for-
amnésiant, il est idéal pour une relaxation de qualité tement conseillé aux assistantes dentaires de participer
durant un geste anxiogène. Les contre-indications sont également à ces formations car,
c ar, au quotidien, elles jouent
rares mais à connaître, particulièrement à cause de sa un rôle important lorsqu’il s’agit de gérer, informer et
diffusion dans les cavités closes ou aériennes avec élé- participer à l’administration
l’administ ration du protoxyde d’azote.
vation de pression. E Enn effet, les pat
patients
ients souf
souffrant
frant d’un Le MEOPA est également très largement utilisé en
pneumothorax, d’une occlusion intestinale, d’une hyper- pédiatrie. En effet, administré aux enfants en même
tension intracrânienne, d’un accident de plongée récent temps qu’un ensemble de “stratagèmes” (stylos parfu-
ou d’une injection de gaz ophtalmique datant de moins més, histoires, distractions…), il procure une analgésie
de 3 mois ont une contre-indication formelle à l’admi- de surface et une anxiolyse permettant de réaliser un
nistration de protoxyde d’azote. De plus, la sécurité lors certain nombre de gestes douloureux (pose de voie vei-
de son utilisation impose de pouvoir garder le contact neuse, pansements, réduction de fractures, sutures, etc.).
avec son patient, il faudra alors envisager l’arrêt de son La qualité des soins ainsi prodigués permet au médecin
administration en cas de troubles de la conscience ou de ou à l’infirmier réalisant le geste de travailler de manière
man ière
somnolence trop importante. plus sereine. Il est en effet agréable de pouvoir réaliser
Les effets indésirables sont également rares et sur- une pose de voie veineuse chez unu n enfant détendu, qui rit
viennent
15 minutes.en On
général
retrouve
lors d’une
un risque
utilis
utilisation
deation
nausées,
supérieure
de ver-à est
et qui
répété
ne bouge
à de nombreuses
presque pas.reprises
reprise
À l’inverse,
s alors lorsque
que l’enfant
le geste
est
tiges, d’angoisse, d’agitation paradoxale ou de céphalées en pleurs et les parents désemparés et inquiets, la situa-
bénignes. Ces effets disparaissent rapidement après tion peut générer un stress pour le soignant, sans parler
l’arrêt de l’administration et leur fréquence de surve- de l’inconfort évident du patient et de son entourage.
55
Chapitre 11
12
Intégrer les facteurs humains
à la pratique quotidienne
des équipes soignantes
Dr Franck Renouard Dr Noïc
Docteur enGouhizoun
Chirurgie Dentaire Dr Caroline
Docteur Fouque
en chirurgie dentaire,
Docteur en Chirurgie Dentaire
Pratique exclusive Omnipraticien, pratique privée Marseille
de l’implantologie chirurgi
chirurgicale,
cale,
Paris
Chapitre 12
D
evoir faire face à une situation non anticipée pourquoi ces situations spécifiques sont susceptibles de
peut générer un inconfort pour les différents générer cet état. Enfin, il faut développer des barrières de
membres de l’équipe soignante. Cet protections individuelles pour en limiter
état peut être à l’origine d’un cercle vicieux l’impact. Réorganiser son agenda, discu-
qui peut aller jusqu’à la tunnellisation men-
Prendre conscience ter avec des confrères plus expérimentés
tale. La gestion individuelle du stress peut de ses propres qui peuvent relativiser le danger de cer-
être faite par des techniques dérivées de la faiblesses est taines situations,
situat ions, limiter son exercice à un
sophrologie, mais il existe des “outils” qui un premier pas certain niveau de complexité technique,
peuvent également réduire le niveau de stress indispensable renforcer ses compétences dans des sec-
en limitant l’imprévu et en augmentant le teurs d’activité mal maîtrisés, sont autant
niveau de vigilance de l’opérateur et de son d’
d’exemple
exemple qui peuvent aider à limiter l’in-
équipe. Tout
Tout protocole ou action
act ion qui permet d’anticiper tensité et les conséquences du stress. L’aide
’aide de personnes
personne s
ne peut être que bénéfique pour la sécurisation des pra- extérieures à son activité peut être efficace.
tiques médicales.
Le but de cet article est de proposer quelques attitudes et
2
actions qui permettent d’aborder
d’aborder des situations nouvelles
et/ou complexes dans de bonnes dispositions. Beaucoup Pensez aux TEM (Threads
d’entre
d’entre elles sont issues
is sues de l’aviation et ont largement fait
leurs preuves dans d’autres activités humaines à risque. and Errors Management)
Ce concept a été développé dans dan s le monde aéronautique.
1
Cela se traduit par la gestion des erreurs et des menaces,
auxquelles ont été ajoutés récemment les « événements
de l’inconfort
infinité d’être en
d’être
de situations quiretard. Bien
peuvent entendu,
pertu rber leilcomporte-
perturber existe
ex iste rte-
compo une qu’il
reux,est préférable
vivons cachés d’appliquer
d’a
». ppliquer le principe
Pour reporter « Vivons
des erreurs, heu-
c’est-à-
ment des cliniciens. dire des actions non répétitives et non intentionnelles il
Dans un premier temps, il faut identifier les situations faut être certain qu’il n’y
n’y a pas de risque d’être poursuivi,
poursuiv i,
stressantes. Ensuite, il faut essayer de comprendre soit de façon administrative, soit de façon judiciaire.
59
C’est ce que l’on appelle la culture juste. Il s’agit d’une faut pas faire confiance à sa mémoire pour garder à
approche très novatrice qui normalement s’applique à l’
l’esprit
esprit ces informations.
in formations. Le st ress généré par l’acte cli-
tous les établissements
établiss ements reliés à l’AP-HP depuis le 14 jan- nique limite en effet la capacité à se concentrer. Il est
vier 2014
2014.. Sans doute de nombreux lecteur
lecteurss de ces lignes facile d’oublier
d’oublier quand l’l’esprit
esprit doit se concentrer sur des
travaillant
travai llant pour l’AP-HP
l’AP-HP n’ont-ils
n’ont-ils jamais
jama is entendu parler points anxiogènes. C’est pourquoi, lors de la consul-
de cette directive. Il n’empêche que le tation, il est important de noter de
report et le partage des erreurs afin façon très claire dans le dossier du
de développer des barrières de pro- patient tous les éléments qui peuvent
tection sont une étape incontournable
La consultation est un moment constituer une source de problèmes.
de la sécurisation des pratiques médi- privilégié pour identifier Les notes doivent être faciles à com-
cales. La mutualisation des pratiques les facteurs ou les situations prendre par l’ensemble de l’équipe et
permet d’augmenter de façon expo- à risque. être rapidement indentifiables. De
nentielle l’expérience d’une profes- cette façon, même si le praticien est
sion. C’est
C’est un gain
ga in de temps énorme et préoccupé par l’acte qu’il a à exécu-
cela doit permettre de réduire le temps entre l’app
l’apparition
arition ter, il lui suffit d’un rapide coup d’œil dans le dossier
d’une complication
complication récurrente et la mise en œuvre
œuv re d’une du patient pour se souvenir de telle ou telle caractéris-
carac téris-
adaptation technique ou de son abandon pure et simple. tique à risque.
compliquée. L’examen
du patient peut favoriserduune
dossier hors
analyse deobjective
plus la présence
de dérouter
mais quandet la
écourter sondevient
situation vol. Cela peut paraître
stressante, simple,
l’analyse de la
la situation. situation et le changement d’objectif peuvent se révéler
La consultation est un moment privilégié pour iden- difficiles. Il peut alors se mettre en place un phénomène
tifier les facteurs ou les situations à risque. Mais il ne appelé « objectif destination » qui fait
f ait continuer sa route
60
Chapitre 12
ou poursuivre sa procédure bien que tous les paramètres les communications dans le cockpit sont interdites ou
passent au rouge. C’est une cause bien connue d’
d’accident
accident réduites à leur strict minimum.
m inimum. Le but est d’éviter
d’éviter que la
en aviation légère. prise de décision soit parasitée par des informations
in formations inu-
Afin de pouvoir prendre des décisions en situations tiles ou que les pilotes soient
soient distraits lors de manœuvres
stressantes
stressa ntes – l’essence
l’essence qui diminue
d iminue ou le saignement plus qui nécessitent toute leur attention. Cela est basé sur les
important que prévu –, il ne faut pas hésiter à utiliser études en neurosciences
neu rosciences qui montrent que le cerveau n’est
le concept « Et si… » avant de commencer son vol ou capable de gérer en même temps que quelques items ou
sa chirurgie. Cela revient à envisager la survenue d’un une seule et unique idée. L’illusion
L’illusion de pouvoir faire
fai re plu-
problème particulier avant de débuter la procédure. Le sieurs choses en même temps est erronée. En réalité, les
but est de se préparer à faire
fa ire face au cas où : et si le patient informations sont traitées par vagues et non simultané-
saigne ? Et si ce patient pusillanime
pusil lanime refait une crise ment. Pour ne pas être en surcharge,
su rcharge, la plupart du temps
d’angoisse ? Le plus souvent, les décisions sont faciles à le cerveau filtre les informations, telles que les informa-
prendre à froid et les protocoles sont connus, mais ils tions sonores, pour les réduire à un bruit de fond non
peuvent se nicher profondément dans la mémoire à long préjudiciable avec la concentration nécessaire à la prise
terme, difficile d’accès en période de stress. Se poser de décision. Il faut cependant savoir que l’environnement
la question « Et si… » permet de rechercher les solu- sonore de travail de spécialité comme la dentisterie peut
tions disponibles en les plaçant dans la mémoire de être particulièrement stressant. Le chirurgien-dentiste
travail plus rapide d’accès. Ainsi, en cas de est exposé tout au long de la journée à un
problème, l’opérateur pourra facilement niveau sonore d’environ 85 dB [2], ce qui
Le stress qui est généré
mettre en œuvre la procédure appropriée, équivaut au niveau de bruit d’un camion
car elle est prête à l’emploi et immédiate- par l’acte clinique limite roulant à 50 km/h
km /h à 20 mètres !
ment accessible. Attention cependant à ne la capacité du praticien Quand une secrétaire interrompt un pra-
pas surcharger le cerveau avec trop de « Et à se concentrer ticien en train de réaliser un acte minu-
si… ». Il faut réserver cette approche aux tieux, le cerveau de ce dernier doit utiliser
quelques situations que l’opérateur
l’opérateur ressent
res sent comme com- de nouvelles ressources pour traiter une information
plexes ou potentiellement stressantes lors de son inter- aussi simple que : « Le patient suivant risque d’avoir du
vention. retard. » Cette phrase est facile à comprendre et semble
Dans le même esprit, la répétition de procédures en bien anodine. Mais son traitement
tr aitement va, lui, demander une
dehors du contexte clinique peut également être un analyse précise. Qui
Q ui est le patient suivant ? Quel soin doit
doit--
excellent moyen de diminuer le stress des équipes. Par il recevoir ? Quinze minutes en moins sont-elles préju-
exemple, mettre en œuvre une fois par an la procédure diciables pour la réalisation de ce soin ? Quelles sont les
d’urgence face à un patient en détresse respiratoire peut conséquences en cas d’annulation de son rendez-vous ?
diminuer l’anxiété enfouie de ne pas savoir quoi faire Le patient va-t-il l’accepter ? N’avait-il pas un problème
au cas où la situation se présenterait. Il est normal que de départ
dépar t en vacances ? Voilà autant d’informations
d’informat ions à
les pilotes passent par les simulateurs de vol régulière- traiter, à remettre dans un contexte, qui peut devenir
ment, cela est également bénéfique pour les membres émotionnel. Tout cela peut perturber la concentration
des équipes de santé, non seulement pour rafraîch
rafraîchir ir leurs du clinicien et risque de lui faire prendre des décisions
connaissances, mais aussi pour renforcer le mental des malheureuses et/ou de lui faire sauter des étapes du pro-
opérateurs. Cela explique pourquoi la simulation médi- tocole. Cela s’appelle les troubles de la mémoire source.
cale est en train de devenir une étape incontournable Des études en chirurgie
chir urgie ont montré qu’appliquer
qu’appliquer le prin-
dans la formation des professions de santé. cipe du « cockpit stérile » [3] pendant les interventions
permet de réduire de façon significative les erreurs de
5
communication. Certains
Certai ns vont même jusqu’à restreindre
Mettre en œuvre le principe l’utilisation d’une source sonore en bruit de fond dans
Les check-list prennent une part importante dans la gereusement. Les erreurs d’interprétation générant des
sécurisation
sécurisat ion des pratiques humaines. Il peut s’agit de « to actions ou réponses erronées peuvent avoir des consé-
do » listes (suite d’actions à faire) ou des check listes dites quences graves pour la sécurité des patients. C’est pour-
de sécurité. Ce sont principalement ces dernières qui quoi il faut accepter d’apprendre à se parler en utilisant
intéressent les équipes qui veulent diminuer
dimi nuer le stress lors des phrases préétablies.
préétablies.
des soins. La check-list doit être considérée Un exemple bien connu en aviation est celui
comme un verrou qui permet de commen- du contrôleur qui dit au pilote : « Descendez
cer un acte en ayant la conscience tranquille. Adopter deux mille
mil le pieds » ; il donne un
u n niveau de vol
Les items de sécurité ont bien été contrôlés. le principe au pilote qui peut aussi comprendre « des-
Une check liste ne doit pas comporter plus de du « cockpit cendez de mille pieds ». Bien entendu, les
dix items, sinon elle est trop longue et risque stérile » pendant conséquences d’un mauvais niveau de vol
de ne pas être utilisée. Un item se choisit en les interventions sont énormes. Il a donc été décidé que le
fonction de sa fréquence et/ou de sa dange- contrôleur devait
deva it dire
di re « descendez niveau
n iveau
rosité. Cela définit sa gravité. Se tromper de 2 000 » quand ili l s’agissait du niveau de vol.
patient est très grave mais
m ais très rare, alors qu’avoir
qu’avoir oublié C’est clair et non interprétable.
de vérifier le stock de matériel est plus fréquent mais Un exemple de mauvaise phraséologie, cette fois en
moins grave dans la mesure où l’intervention (même médecine, est de demander à un u n patient s’il s’appelle
s’appelle bien
commencée) peut être reportée. Monsieur XX au lieu de lui demander de dire son nom.
En fonction des spécialités médicales, de nombreuses Dans le premier cas, le fait d’être stressé ou prémédiqué
check-list existent et on ne peut qu’encourager les peut faire répondre le patient
pat ient par l’affir
l’affirmative
mative alors qu’il
équipes à les intégrer à leur pratique quotidienne. ne s’agit pas de son nom. Divers accidents médicaux aux
Diminuer le risque d’imprévus est l’une des étapes fon- conséquences importantes ont été reportés à la suite de
damentales dans la réduction du stress dans da ns les pratiques cette erreur.
quotidiennes.
prendre,
quand la de l’interpréter
situation génèreet du
ensuite d’yil faire
stress, peutface.
être Mais
plus contredire le commandant
faire une erreur fatale. Le de
trèsbord
fortqui était en
gradient train de
d’autorité
difficile de communiquer de façon efficace. En effet, le s’est révélé être à l’origine d’accidents pourtant facile-
stress a comme effet négatif de limiter l’accès au cerveau ment évitables. Consciente de cette faiblesse, la compa-
préfrontal que l’on peut qualifier de cerveau “intelli- gnie aérienne incriminée a développé des protocoles et
62
Chapitre 12
des formations spécifiques des équipes afin de permettre Les personnes interrogées conseillent de s’inspirer de
à chacun des membres de l’équipage, et ce quelle que la culture de sécurité d’autres industries, comme l’aéro-
soit sa position hiérarchique, d’intervenir quand la sécu- nautique (NASA). Il faut créer des mécanismes incitatifs
rité du vol est en jeu. Ainsi, aujourd’hui, dans la plupart pour la prévention des risques et créer des mécanismes
des compagnies aériennes le copilote peut d’apprentissage. Ces pratiques nous aideraient
remettre les gaz sans
sa ns l’accord
l’accord du commandant très certainement à diminuer une part de notre
de bord s’il considère que la sécurité du vol Pas plus stress chronique au travail.
l’impose. de 10 items par Réduire le gradient d’autorité ne veut pas dire
Dans le monde médical, il existe bien sou- partager la responsabilité
re sponsabilité de l’organisation
l’organisation d’un
check-list.
vent un gradient d’autorité
d’autorité très fort. Cert
Certains
ains cabinet ou d’un service. Cela veut dire que tous
pays comme la France sont particulièrement les membres de l’équipe doivent pouvoir inter-
exposés à ce risque du fait de leur culture. Le simple venir s’ils pensent que la sécurité des patients est mise
fait d’appeler l’organisme qui gère, en autres, la sécu- en cause. Cela doit être clairement énoncé à tous les
rité médicale : Haute Autorité de Santé, témoigne de ce membres de l’équipe thérapeutique.
biais dans les rapports hiérarchiques en médecine fran-
çaise. Haute : qui est
e st au-dessus, Autorité : qui possède
po ssède le
savoir. Tout
Tout est dit. Cependant,
C ependant, la sécurité
séc urité des pratiques
humaines passe forcément par le partage de responsabi- Conclusion
lités et par la possibilité de rapporter des témoignages
La sécurisation des pratiques
sans crainte de la hiérarchie. Tous les membres des
médicales et dentaires passe
équipes médicales doivent pouvoir intervenir quand la
nécessairement par la prise
sécurité des patients est mise en jeu. Cela nécessite un
en compte des facteurs humains.
bouleversement des attitudes et comportements basés Le stress est
es t bien souvent à l’origine
sur la confiance. Un exemple simple en médecine peut d’erreurs de diagnostic ou de
être celui du praticien qui est persuadé de tout savoir procédure. La diminution du stress
gérer et qui ne considère ses collaborateurs, assistants peut être faite par des techniques
que comme des subalternes qui doivent faire que ce issues de la sophrologie,
sophrologie, mais il faut
qu’on leur demande. Chaque fois qu’un collaborateur également prendre en compte
tente d’intervenir, il se fait rabrouer. Un jour, ce même un certain nombre d’outils faciles
collaborateur voit son “patron”
“patron” faire une gr
grave
ave erreur de à mettre en œuvre.
prescription d’un médicament auquel le patient est aller-a ller-
gique ou de l’utilisation d’un mauvais matériel. La pra-
tique montre que le collaborateur ne dira rien, non pas
pour punir le “patron”, mais parce qu’il imagine que ce
dernier a certainement une bonne raison pour agir de la
sorte. Cette attitude est un simple réflexe de défense. Ce Bibliographie
type de comportement a été rapporté à de nombreuses 1. http://www.assproscientifique.fr/actualites/juridique/
reprises dans
dan s l’étude d’accidents
d’accidents ou d’incidents en méde- stress-burnout-et-praticiens-quelle-realite
cine. 2. Caron A. Les différents facteurs de stress du chirurgien-
Dans une étude comparative en milieu hospitalier entre dentiste : concepts généraux et spécificités. Thèse d’exer-
cice de chirurgie dentaire, Toulouse
Toulouse 3, 200
2004.4.
la France et l’étranger sur la gestion des risques iatro-
3. Wadhera RK et al. Is the “sterile cockpit” concept appli-
gènes, Sophie Gaultier-Gaillard (LASI,
(L ASI, Sorbonne, Paris) cable to cardiovascular surgery critical intervals or critical
et Nathalie de Marcellis-Warin (CIRANO, Montréal) events ? The impact of protocol-driven communication
constatent que la culture actuelle est composée d’une during cardiopulmonary
cardiopulmonary bypass. J Thorac Cardiovasc Surg
2010 ; 139 (2) :312-319.
part d’opacité, de fausse
d’opacité,
de culpabilisation, pudeur, de
de mesures gène et,etd’autre
punitives d’ade
utre part
part,,
blâme.
Elles en concluent qu’il faut amener les mentalités à
changer vers une culture de sécurité avec plus de trans-
parence, de communication et de confiance mutuelle.
63
ou Cette
de sesreprésentation
ayants droit ououayants cause etpar
reproduction, de l’éditeur
l’édite
quelqueur,, procédé
est illicite”
que(alinéa
(alinéa 1 constituerait
ce soit, de l’l’article
article 40).
donc une contrefaçon sanctionnée par les articles
ar ticles 425 et suivants du Code Pénal.
64