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Langages

Études de sémantique
et pragmatique
en synchronie et diachronie
Hommage à
Amalia Rodríguez Somolinos

Textes réunis et édités par


Marta Saiz-Sánchez
et Sonia Gómez-Jordana Ferrary

23

Presses Universitaires Savoie Mont Blanc


Laboratoire LLSETI
Études de sémantique
et pragmatique en synchronie
et diachronie

Hommage à
A malia Rodríguez Somolinos

Textes réunis et édités par


M arta SAIZ-SÁNCHEZ
Sonia GÓMEZ-JORDANA FERARY
L aboratoire langages, littératures, sociétés,
études transfrontalières et internationales

L angages

N° 23

© Université Savoie Mont Blanc


UFR Lettres, Langues, Sciences Humaines
Laboratoire Langages, Littératures, Sociétés,
Études Transfrontalières et Internationales – LLSETI
Rue du Sergent Revel
BP 1104
F – 73011 CHAMBÉRY CEDEX
www.llseti.univ-smb.fr

Réalisation : Presses Universitaires Savoie Mont Blanc,


C. Brun
Tél. 04 79 75 85 14
btk.univ-smb.fr/livres
Illustration de couverture : Chroniques sire Jehan Froissart, ms. Paris BnF
fr. 2646, Fol. 14v.
ISBN : 978-2-37741-089-7
ISSN : 1952-0891
Dépôt légal : septembre 2023
Directrice du laboratoire
Emma BELL

Comité éditorial du laboratoire


Laurence AUDEOUD (Università degli Studi del Piemonte Orientale)
Nathan BADOUD (Université de Fribourg)
Alain BECCHIA (Université Savoie Mont Blanc)
Maria CANDEA (Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3)
Dario CECCHETTI (Università degli Studi di Torino)
Max DUPERRAY (Université Aix - Marseille)
Françoise GADET (Université Paris - Nanterre)
Stéphane GAL (Université Grenoble Alpes)
Dominique GLASMAN (Université Savoie Mont Blanc)
Christian GUILLERÉ (Université Savoie Mont Blanc)
Dominique JEANNEROD (Queen’s University Belfast)
Jean KEMPF (Université Lumière - Lyon 2)
Sabine LARDON (Université Jean Moulin - Lyon 3)
Véronique LAURENS (Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3)
Sophie MARNETTE (Balliol College, University of Oxford)
Michele MASTROIANNI (Università degli Studi del Piemonte Orientale)
Barbara MEAZZI (Université Côte d’Azur)
Claudine MOISE (Université Grenoble Alpes)
Franck NEVEU (Université Paris - Sorbonne)
Geneviève PIGNARRE (Université Savoie Mont Blanc)
Daniel RAICHVARG (Université Bourgogne - Franche-Comté)
Françoise RIGAT (Università della Valle d’Aosta)
Paolo TORTONESE (Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3)
Sommaire

Présentation
Marta SAIZ-SÁNCHEZ et
Sonia GÓMEZ-JORDANA FERARY..................................................... 7
Liste de publications d’Amalia Rodríguez Somolinos classées par date
Tabula gratulatoria
I. Marqueurs du discours................................................................21
Emplois discursifs et pragmatiques des formes du verbe écouter
Observations sur les corpus 88milSMS et Les Vocaux
Nicolas MAZZIOTTA et Julie GLIKMAN .......................................... 23
Apparemment endophrastique revisité en diachronie et synchronie actuelle
Patrick DENDALE & Anne VANDERHEYDEN................................. 43
Are general extenders a type of discourse markers?
Margarita BORREGUERO ZULOAGA ............................................... 77
La vitesse de changement des marqueurs discursifs :
le cas de par conséquent
Bernard COMBETTES........................................................................ 103
Au commencement était le texte ou les marqueurs
discursifs propositionnels comme traces de textualisation
Sabine LEHMANN ............................................................................ 123
Les adverbes honnêtement (fra.)
et honestamente (esp.) en synchronie et en diachronie
Emma ÁLVAREZ PRENDES.............................................................. 145

II. Pragmatique historique............................................................169


L’ impératif, mode de langue ou mode de discours ?
Olivier SOUTET ................................................................................. 171
Pragmatique historique et ponctuation :
le meilleur usage de mauvaises données ?
Gabriella PARUSSA.............................................................................. 187
La pragmatique des interrogatives totales en français ancien
Pierre LARRIVÉE ............................................................................... 209
Pragmatique du jurement et genres textuels
Pierre VERMANDER ......................................................................... 223
Il est droit que je vous die verité :
observations sur un type de complétives sujet en français médiéval
Daniéla CAPIN ................................................................................... 241
De nennil à non : l’ évolution des marqueurs de réfutation
à travers les grammaires et traités de langue française
(XVe - XVIIe siècles)
Marta SAIZ-SÁNCHEZ ..................................................................... 261

III. Énonciation et politesse..........................................................291


Représentations de l’expression de l’avis du locuteur comme imaginée
Patrick HAILLET ................................................................................ 293
De la déférence à la moquerie : usages dérogatoires des titres de politesse
en moyen français
Dominique LAGORGETTE............................................................... 309
Analyse pragmatique et littéraire
des compliments dans quelques romans courtois des XIIe et XIIIe siècles
Corinne DENOYELLE........................................................................ 339
Les propriétés du discours collectif
de l’ancien français au français préclassique : de l’ échange verbal
à la modalisation en discours second
Évelyne OPPERMANN-MARSAUX .................................................. 363

IV. Énoncés sentencieux................................................................381


Le conte du troubadour et du savetier de Juan Manuel.
Réflexion sur les notions d’autorité et d’exemplarité
Bernard DARBORD ........................................................................... 383
Quelques observations sur la morphosyntaxe et la sémantique verbale
dans les proverbes castillans médiévaux
Alexandra ODDO ............................................................................... 399
Les tautologies en français et en espagnol :
évolution diachronique d’une sous-classe sentencieuse
Sonia GÓMEZ-JORDANA FERARY ................................................ 417
Proverbes, dictons, sentences. Inscriptions de l’oral au XVIe siècle
Elena LLAMAS POMBO .................................................................... 437
Proverbes, dictons, sentences.
Inscriptions de l’oral au XVIe siècle

Elena Llamas Pombo


Universidad de Salamanca – IEMYRhd

Τον πλούτο πολλοί μίσησαν, τη δόξα όμως κανένας


Pour Amalia Rodríguez Somolinos,
dans le souvenir du Professeur
Francisco Rodríguez Adrados.

1. Introduction, à propos de l’« oralité » des proverbes1


Dans son étude sur « Le statut des proverbes en diachronie »,
Amalia Rodríguez Somolinos (2012) présente une histoire du prestige
linguistique des proverbes et des énoncés sentencieux en français,
à travers la terminologie des anciens proverbiers, ainsi que par les
témoignages des intellectuels, des compilateurs, des écrivains et des
normalisateurs de la langue. Cette histoire a montré l’autorité didactique
et morale dont jouissaient les proverbes durant tout le Moyen Âge, un
crédit qui s’étend au XVIe siècle, aussi bien dans l’enseignement de la
langue que dans la formation morale ou dans la préparation des sermons
religieux par les prêtres. En ce siècle, les proverbes continuent d’être liés
à la culture savante et sont prisés par les élites (ib. : 229, 234), ce dont
témoigne l’essor éditorial des recueils de proverbes publiés en français :
environ une centaine entre les dernières années du XVe siècle et le milieu
du XVIIe siècle (d’après Rivière 1982 : 96).
L’historien Daniel Rivière (1982 : 94-95) a souligné l’oralité
foncière des proverbes. Pour lui, en tant que « condensé » de l’expérience

1 Ce travail a bénéficié du soutien du projet de recherche PID2020-113017GB-I0,


intitulé Énonciation et pragmatique historique du français, du Ministerio de
Ciencia e Innovación d’Espagne. Nous écrivons conformément aux Rectifications
orthographiques approuvées par l’Académie française (Journal Officiel de la
République française, 6 décembre 1990).

437
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

collective, le proverbe appartient « à une culture orale » et se trouve au


centre du dialogue et de la vie en société pendant tout le Moyen Âge
et jusqu’au XVIe siècle. Rivière décrit l’engouement très vif du public
cultivé envers les proverbes dans la France de la Renaissance, tant dans
les milieux populaires que parmi les classes les plus cultivées. Pour
cet historien, proverbes, dictons, adages et expressions proverbiales
constituent, par leur origine, les témoins d’une « culture orale ». Leur
création collective répondrait à un « chant polyphonique », à un ensemble
de « voix inspiratrices » qui auraient été reconnues et valorisées par les
élites. Jean Le Bon, par exemple, affirme en 1577 que « le populaire
adagie en toute façon et en tous lieux » (cité par Rivière ib. : 101). Et
le grand imprimeur Plantin, dans la préface d’un recueil de proverbes
publié en 1568, fait l’éloge de la délectation qu’inspire la « naïfveté des
sentencieuses manières de parler des anciens », expression qui affirme
l’appartenance originaire des proverbes à la langue parlée (cité ib. : 105).
Les élites consacrent le proverbe comme figure de la rhétorique
mondaine, familière aux prêtres, aux écrivains et aux pédagogues (ib. :
102). Le professeur de langues Gabriel Meurier résume dans l’avis
aux lecteurs de son Recueil de Sentences de 1568, la valeur morale et
esthétique des proverbes, ainsi que leur double circulation, dans les
textes écrits et dans la conversation :
[…] ce present liure, lequel comme estimons, seruira aux vns de
vif exemplaire tant pour mener vne vie correcte & pour recreer
ou soulager les esprits à la fois encombrés d’ennuis & de festides :
comme aussi pour former les meurs des ieunes, mesmement aguiser
leurs esprits, & outre ce que les agés s’en poürront prevaloir &
servir pour polir & orner leurs langues, ensemble former escripts
& missiues, & non moins pour les rendre plus accorts habiles &
advisés à promptement respondre à tous propos, voir, captiuer la
beneuolence des gens de bien, tant en voyageant ou cheminant
comme en bonne compagnie (Meurier 1568 : 3v).
Meurier semble invoquer ici le sens étymologique grec du terme parémie,
du latin pӑrœmĭa, « proverbe », et celui-ci du grec ancien, παροιμία,
« sagesse partagée tout au long du chemin ». Il s’agit d’un topos dans les
proverbiers humanistes ; l’espagnol Pedro Vallés l’évoque aussi dans son
Libro de Refranes de 1549 (Llamas Pombo 2022 : 464).
Une telle attribution des proverbes au registre oral et à la langue
parlée constitue également une idée linguistique courante parmi les
locuteurs actuels, aussi bien dans le domaine francophone que dans
le domaine hispanophone. Or du point de vue de la Linguistique
diachronique, en tant que science du langage, cette oralité doit être

438
Proverbes, dictons, sentences

définie et décrite dans ses rapports avec l’écriture. Une perspective


nécessaire, étant donné que les proverbes ont été incorporés aux œuvres
littéraires et parémiologiques écrites en langues romanes du Moyen Âge
et de la Renaissance. Le transfert de formes et de motifs entre la tradition
orale et la littérature écrite marque les origines médiévales de la langue
française. Ainsi, quelle « oralité » peut-on déceler dans les recueils de
proverbes de la Renaissance ?

2. Caractère composite des recueils de proverbes du XVIe siècle


Les compilateurs de la phraséologie française et hispanique ont
rassemblé, au XVIe siècle, plusieurs types d’énoncés sentencieux. Les
répertoires français spécifient souvent leur caractère composite dans
leurs titres, comme le fait Meurier (1577), par exemple, dans le Tresor
de sentences dorees, dicts, Prouerbes et Dictons communs, reduits selon
l’ordre alphabetic.
Les refraneros hispaniques les plus importants cachent sous leurs
titres des listes alphabétiques de phraséologie de plusieurs types. C’est
bien le cas du Libro de Refranes o Sentencias muy buenas y provechosas
du grand parémiologue Pedro Vallés (1549), un fin chercheur de la langue
parlée à son époque : son livre recense, dans un ordre alphabétique plus ou
moins exact, toute sorte de phraséologie et de collocations : des proverbes,
des locutions adverbiales, des mots composés, des onomatopées, etc. Le
recueil célèbre de Gonzalo Correas (1627) héritera le même principe
d’amalgame lexicographique (Llamas Pombo 2021, 2022).
Sans doute, la linguistique parémiologique doit-elle déceler par
des critères opératifs une typologie phraséologique parmi ces amalgames
(voir, par exemple, Anscombre 2000, Gómez-Jordana 2012). Or nous
pouvons également penser à la raison d’être de tels assemblages, sans
les critiquer, pour déceler quelle est la raison du caractère composite
des proverbiers ou quelle est la caractéristique commune aux différents
types d’énoncés compilés. Nous avons essayé de démontrer, dans le cas
des livres de refranes espagnols du XVIe siècle, que l’élément commun à
toutes les unités lexicales recensées par les parémiologues est l’existence
d’un patron rythmique sous-jacent, qui possède l’une ou toutes les
propriétés de bimembrisme, isosyllabisme, symétrie syntaxique et
symétrie phonétique ou allitération. Par exemple, la graphie et la
ponctuation du répertoire de Pedro Vallés (1549) nous laissent percevoir
que cet auteur distinguait clairement différentes matrices rythmiques et
que leur présence dans une unité lexicale était le critère de sélection
d’entrée dans son livre, parmi tout autre critère linguistique.

439
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

Étudier ces patrons rythmiques dans les séquences graphiques


originelles des livres imprimés s’est avéré être une riche source pour
déterminer, en termes graphématiques, quelles étaient les unités
phrastiques ou rythmiques qui faisaient partie de la grammaire des
compilateurs ou de leurs imprimeurs (Llamas Pombo 2016, 2018, 2021,
2022). Dans le domaine hispanique, la phraséométrie diachronique est
même devenue une sous-discipline à part entière de la phraséologie,
consacrée à la relation entre la métrique et la fixation diachronique
des unités phraséologiques (voir, parmi les nombreuses études de Pla
Colomer, les fondements de cette nouvelle approche de 2014 et 2017).

3. Quatre rapports entre oralité et écriture dans la phraséologie


historique
Comme nous venons de l’illustrer, il y a deux facteurs qui inscrivent
les proverbes dans le registre de l’oralité : leur attribution intuitive à la
langue parlée par les locuteurs et la présence de matrices rythmiques
dans leur formation. Ces deux facteurs nous invitent à en établir un
classement fondé sur les implications de l’oralité et de l’écriture, comme
contribution aux différentes typologies de la phraséologie historique
(sujet en essor dans la théorie parémiologique, comme en témoigne,
par exemple, le volume collectif récemment dirigé par Gómez-Jordana
2022).
Cet objectif nous semble d’autant plus pertinent que la supposée
« oralité foncière » des proverbes est l’un des traits qui ont été mis en
question pour une définition strictement linguistique de la classe
d’énoncés que recouvre le terme proverbe, en particulier, par Anscombre
(2000 : 7). Sans oublier non plus que, essentiellement, « l’insertion
proverbiale est une activité d’écriture » dans la littérature française de la
fin du Moyen Âge, comme l’ont prouvé J. et B. Cerquiglini (1976 : 360),
dans une analyse de la création proverbiale chez Machaut, Deschamps
et Froissart.
Dans cet article, nous proposons un modèle linguistique de
description de certains faits linguistiques d’oralité observables dans
les registres écrits de proverbes de la fin du XVe et du XVIe siècle. Un
modèle de classement des rapports oralité-écriture que nous avons
appliqué à d’autres corpus et qui se trouve fondé sur différents plans
de la langue, ainsi que sur une discrimination des différentes notions
linguistiques attribuées aux termes oral et oralité (Llamas Pombo 1996,
2001, 2017, 2022).

440
Proverbes, dictons, sentences

Nous apporterons une série d’exemples tirés des proverbiers de La


Véprie (1492, 1495), La Véprie et Nucérin (1550-1589), Meurier (1568,
1577) et Bovelles (1557), sans nullement prétendre à l’exhaustivité.

3.1. « Oralité » [1] comme substance de l’expression de nature vocale


Le terme « oralité », dans son sens strict, désigne un médium, la
substance de l’expression de la langue de nature vocale et sonore. Son
rapport avec l’écriture est un rapport de « représentation », rapport qui
est étudié spécifiquement par la graphématique. D’après ce concept [1]
de l’« oralité », la linguistique peut décrire les modes de représentation
de la substance vocale par la substance graphique, des faits de parole par
rapport aux faits de langue, tels que :
a) La graphie phonique : variantes graphiques et notation de
phénomènes de phonétique syntaxique ou de phonèmes
« instables ».
b) Les phénomènes de phonétique syntaxique en rapport avec la
séquenciation graphique.
c) L’écriture des onomatopées.
d) La ponctuation et son rapport aux structures prosodiques (par
opposition aux usages autonomes de la ponctuation et de la mise
en page, par exemple, dans les listes alphabétiques).
Nous traiterons ici les questions (a), (c) et (d).

3.1.1. La notation de « e caduc »


3.1.1.1. Certains linguistes ont employé les termes d’« oralisation de
l’écrit » ou d’« intégration par l’écrit » de phénomènes oraux, afin de
caractériser les procédés de notation de faits de parole que l’orthographe
normalisée ne reflète pas. Par exemple, Vigneau-Rouayrenc (1991 : 20)
a analysé, dans la littérature en français moderne, le traitement de « e
caduc », une voyelle qui, selon l’entourage et le registre de langue, peut
apparaitre ou disparaitre. La norme orthographique ne prend pas en
compte la variation à l’oral de cette voyelle, puisque elle régit la présence
de <e> graphique, correspondant aussi bien aux voyelles obligatoirement
prononcées à l’oral qu’à celles qui ne le sont pas. Or certains écrivains
altèrent cette norme orthographique afin de restituer dans la graphie la
non prononciation de « e caduc ». En voici quelques exemples classés par
Vigneau-Rouayrenc (1991 : 24-25) :
(1) Exemple de disparition de « e caduc » à l’intérieur d’un groupe
rythmique dans des monosyllabes précédés d’une voyelle :

441
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

I’ s’démerde l’habitant
(H. Barbusse, Le Feu, Paris, Flammarion, 1965 : 63)

(2) Exemple de disparition du graphème <e> à l’intérieur d’un groupe


rythmique, lorsqu’une ou plusieurs consonnes sont purement
graphiques :

et tout l’bazar à la voile


(ib. : 84)

(3) Exemple de disparition du graphème <e> dans des mots


polysyllabes, en syllabe initiale ou en syllabe intérieure :

ça f’sait
(H. Poulaille, Le pain quotidien, Paris, Grasset, 1934 : 110)
ça m’épat’rait
(ib. : 113)

(4) Exemples de suppression du graphème <e> en fin de mot, lorsqu’il


termine des déterminants ou des adjectifs antéposés qui, par
conséquent, ne sont pas accentués. Ce ne sont donc pas des e de fin
de groupe rythmique, mais des e intérieurs, qui suivent les règles
de disparition de « e caduc » intérieur.

Vous m’donnez quarant’sous


y rester tout’la vie…
(ib. : 51, 148)
ma petit’ voix
(R. Queneau, Le chiendent, Paris, Gallimard, 1974 : 303)
Pour une analyse diachronique de ce type de variantes graphiques, nous
avons adopté le concept de graphie phonique, tel qu’il a été défini par
le linguiste Emilio Alarcos ([1965] 2011 : 59-60), un concept qui nous
semble encore tout à fait opératoire. Les systèmes d’écriture des langues
romanes constitués au Moyen Âge ont – selon le mot de Alarcos – une
orientation essentiellement phonologique, puis qu’ils n’enregistrent
pas la variation infinie du matériau phonique de la parole. Cependant,
il existe des cas exceptionnels de graphies phoniques, c’est-à-dire de
variantes graphiques dont la fonction dominante est de refléter de simples
éléments phoniques, dépourvus de valeur distinctive2.

2 L’article de Emilio Alarcos sur la grafía fónica fut publié pour la première fois en
espagnol et fut édité en français par André Martinet en 1968. Nous avons appliqué

442
Proverbes, dictons, sentences

Dans les pratiques d’écriture peu standardisées ou volontairement


déviantes par rapport à la norme, les variantes graphiques permettent
aux scripteurs de refléter des faits de prononciation, autrement
dit des faits phoniques, des faits de parole. C’est ce que certains
linguistes désignent par les termes – qui nous semblent moins précis –
d’« oralisation de l’écrit » ou de « transcription de l’oralité ». Ce type
de « sensibilité phonographique » est récurrent dans les manuscrits en
français, espagnol ou italien : par exemple, les variantes du type français
*emprison (pour en prison), ou du type espagnol *empaz (pour en paz)
ou encore les graphies italiennes avec des géminées du type ebbene
devenues normatives témoignent toutes d’une notation phonique3.
Les répertoires de phraséologie sapientiale de la fin du XVe et
du XVIe siècle présentent sporadiquement des occurrences de graphie
phonique, intéressantes dans la mesure où le traitement phonique de « e
caduc » dépend de la structure métrique des parémies. Les proverbes
participent des mêmes critères métriques et graphiques que la poésie de
la Renaissance. Nous en donnerons quelques exemples.
3.1.1.2. Gabriel Meurier, dans son Recueil de sentences (1568), adopte
les licences graphiques des poètes de son siècle par la suppression
sporadique d’un <e> en fin de mot et par une apostrophe qui note
l’amuïssement de « e caduc », ainsi que la bonne lecture d’un distique de
3+2 syllabes :
(5a) qui femm’a nois’a
(Meurier 1568 : 102)
La graphie phonique joue toujours sur une variation graphique. Le
français standardisé qui caractérise, par exemple, les dictionnaires,
transmettra plus tard les formes toujours invariables femme et noise. Par
exemple, chez Cotgrave :
(5b) Qui femme a noise a
(Cotgrave 1611, s.v. femme et 1650, s.v. femme)

ce concept à plusieurs corpus de textes médiévaux français et espagnols (Llamas


Pombo 2009, 2017, 2021, 2022). Le terme graphie phonique appliqué aux langues
médiévales correspond à ce que Mahrer (2017 : 129-212) désigne par le terme
général de phonographie et à ce que cet auteur appelle les effets d’écoute dans
l’écriture du français contemporain (ib. : 13, 162-165).
3 La plus récente contribution à l’histoire de la notation de la prononciation du
français, une étude de Gabriella Parussa (2023 : 232-233) sur le théâtre médiéval
français, démontre que la transcription « phonographique » du français médiéval
reste encore un domaine à explorer (comme le prouvent les exemples d’élisions, de
réductions graphiques et d’amuïssement de consonnes relevés par l’auteure dans
les dialogues dramatiques médiévaux).

443
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

La suppression du graphème <e> en fin de mot est conforme à la


prononciation du XVIe siècle et assure la lecture en 3+2 syllabes d’une
structure métrique bimembre rimée. Le procédé est bien connu des
traités de versification française, qui désignent par le terme d’apostrophe
typographique la suppression de <e> final. « Cette pratique – affirme,
par exemple, Gouvard (2015 : 19) – s’observe tout d’abord au XVIe siècle,
par exemple chez Ronsard, qui écrit dans La Franciade : « Or’plein de
joye, ores plein de douleur (10 syllabes) ». On la rencontre alors en ce
siècle dans les textes « qui cherchent à imiter l’oralité », chez les auteurs
qui ont « le souci de peindre l’oralité du discours » (ib. : 19-20).
3.1.1.3. La compilation de proverbes et dits sententieux de Charles
de Bovelles (1557) contient seulement des unités phraséologiques qui
forment des distiques rimés. La mise en texte en deux lignes précédées
toutes les deux par une majuscule traduit la conception rythmique des
parémies ; une telle disposition versifiée reste effacée dans l’écriture
actuelle la plus habituelle des proverbes comme formes phrastiques.
(Comparons l’exemple (8a) à l’écriture habituelle du proverbe actuel En
grande beauté rarement loyauté).
Bovelles respecte l’écriture normalisée de tous les <e> en fin de
mot :
(6) Aux yeux de la lune.
Bonne fortune.
(Bovelles 1557 : 4v)

(7a) Fumee aux yeux.


Messagers tardieux.
(Bovelles 1557 : 5r)

(7b) Femme en maison.


Au marché le baron.
(Bovelles 1557 : 10v)
Or Bovelles fait un usage exceptionnel de l’apostrophe en fin de mot dans
un seul cas, qui témoigne du soin porté à la notation de la prononciation.
Le distique du proverbe (8a) comporte deux quadrisyllabes rimés (a4 +
a4) :
(8a) En grand’ beauté,
N’est loyauté
(Bovelles 1557 : 34r)

(8b) En grand beauté, rarement loyauté.


(Meurier 1577 : 77)

444
Proverbes, dictons, sentences

La graphie grand’ recouvre en réalité une prononciation, archaïsante, de


l’adjectif épicène invariable grant (de la même façon que l’épicène reste
sous-jacent dans la forme grand des mots actuels grand-mère, grand-
mères, grand-messe, grand-messes). Le proverbe (8a) semble bien avoir
été généré par l’une des matrices proverbiales médiévales formées avec
l’adjectif épicène grant :
(9a) En grant escuele put en fere male part
(655, Moravski 1925 : 24)

(9b) En grant hutille ce c’on vuet…


(656, Moravski 1925 : 24)

(9c) Grant convoitise fait petit mont


(815, Moravski 1925 : 29)

(9d) Grant honte fait sa mere qui ne semble son pere.


(819, Moravski 1925 : 30)

(9e) De grant maladie vient on en sancté.


(504, Moravski 1925 : 18)
En 1557, Meurier édite une variante du proverbe (8b), tout en écrivant
simplement la forme épicène grand. Quel est donc le rôle de l’apostrophe
de Bovelles (8a) ? La forme épicène grand répugne à la présence d’un
<e> qui pourrait comporter une syllabe numéraire. Puisque la forme
féminine grande est d’usage commun à son époque, Bovelles utilise
l’apostrophe afin d’assurer une lecture fidèle à la diction et au rythme du
distique isosyllabique (En / grand’ / beau / té + N’est / lo / yau / té).
3.1.1.4. De telles licences graphiques sporadiques sont décelables avant le
XVIe siècle. Le proverbier incunable de Jean de La Véprie, par exemple,
présente des graphies non standardisées dans un énoncé à l’impératif
(Aíde toy/díeu te aydra), dont nous avancerons une hypothèse de lecture.
Voici plusieurs témoignages de la forme parémique en question :
(10a) Aíde toy díeu te aidera.
(La Véprie 1492, fol. a.ii.r)

(10b) Aíde toy/díeu te aydra.


(La Véprie 1495 : fol. A.ii.r)

(10c) Ayde toy, dieu te aydera.


(La Véprie & Nucerin 1550 : fol. Aiiir)

445
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

(10d) Aide toy, dieu t’aydera.


(Nucerin 1558 : 9r)

(10e) Aide toy & Dieu t’aidera,


fay bien & mal ne t’en prendra
(Meurier 1568 : fol.10r)

(10f) Aide-toi, le Ciel t’aidera


(La Fontaine, Fables, VI, 18, Le Chartier embourbé)

(10g) Aide-toi, Dieu t’aidera


(Duplessis 1860 : 11)

Aide-toi, le Ciel t’aidera


(Duplessis 1860 : 224)

Aide-toi, le ciel t’aidera


(Duplessis 1860 : 454)
La seconde édition des Proverbes communs de La Véprie, – publiée à Paris
en 1495, trois ans après la première, de 1492 – apporte des corrections et
des ajouts : la dernière comporte 1115 proverbes, par rapport aux 782 de
la première édition.
La graphie aydra (10b) de 1495, avec suppression de « e caduc »
à l’intérieur du mot, corrige la forme normalisée attendue aidera (10a)
présente dans la première édition, de 1492 : la variante sans <e> est donc
bien le résultat d’une correction volontaire et traduit un mot conforme à
sa prononciation en deux syllabes [ay / dra] dans le français parlé.
Le proverbe ayant été corrigé pour la seconde édition, on peut
considérer que le traitement graphique de <e> a également été choisi par
La Véprie, dans le cas du pronom personnel te non élidé devant voyelle
(te aydra). Sa présence dans trois éditions (10a, 10b, 10c) semble prouver
qu’il s’agit de la notation d’un e numéraire. Les formes graphiques de
(10b) représentent la lecture d’une unité métrique de trois bissyllabes,
avec allitération ou répétition d’un phonème dental à l’initiale de la
deuxième syllabe (/t/, /t/, /d/) :
(10b) aide / toi
Dieu / te
ay /dra
Le distique constitue une phrase bimembre du point de vue sémantique,
mais elle est générée par un schéma métrique trimembre. En effet, le
bimembrisme sémantique propre à certaines unités parémiques ne

446
Proverbes, dictons, sentences

comporte obligatoirement pas de rythme binaire (comme l’a souligné


Anscombre 2004 : 77, 79, 80).
La non-élision de « e caduc » devant voyelle, bien que rare, était
admise dans la versification en Moyen Français. Dans les Ballades
anonymes d’un manuscrit daté de 1406-1407, on trouve, par exemple, le
refrain :
(11a) Car en amours ie ai tous diz du pire
(Ms. Cambridge, Trinity Hall Library, 12, fol. 87r)

(11b) Car en amours jë ai tousdiz du pire


(Selon la transcription modernisée de Stuip (1975 : 31), qui marque
par le tréma la non-élision du pronom je)
En outre, la présence d’un e numéraire en fin de monosyllabe pourrait
être confortée par la versification médiévale car, à la rime, te compte
pour une syllabe en rime féminine (Buridant 2019 : 624). Par exemple :
(12) Si a dit a son vallet : « Os te ?
Je cui que nos avons un oste. »
(Le Jongleur Gautier le leu, p. 60, cité par Buridant 2019 : 624).
À notre avis, le schéma métrique de trois bissyllabes sans élision du
pronom te est le plus ancien témoin d’une forme parémique (10b) qui
a évolué vers la prononciation normalisée ; dès 1558, les proverbiers
enregistrent l’élision du pronom dans t’aidera (10d, 10e, 10f, 10g).

3.1.2. L’onomatopée
Si les onomatopées consistent dans la réduction d’un son non
linguistique à des phonèmes d’une langue, leur structure entraine souvent
la réduplication de phonèmes (comme dans tictac, pingpong ou tamtam).
Les interjections primaires émotionnelles du type français aïe ont une
origine onomatopéique, mais « au moment de leur émission effective
sont déjà des signes linguistiques codés. Onomatopée et interjection sont
deux catégories différentes, entre lesquelles il y a parfois intersection »
(Kleiber 2006).
C’est le cas de la forme ha dans la langue française. Le tlfi
l’enregistre à deux entrées différentes : d’une part, l’onomatopée
ha2, « généralement répétée, représente les sons vocaux produits par
quelqu’un qui rit aux éclats » (par exemple, Ha, ha, ha ! ou Ha-ha-
ha-ha…) ; d’autre part, l’interjection ha1, variante de ah, aha, exprime
« divers mouvements affectifs très vifs ».
La présence dans les onomatopées d’un patron rythmique, avec
des propriétés d’isométrie, de bimembrisme ou d’allitération, a favorisé

447
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

leur insertion dans certains proverbes populaires espagnols, tels que A


perro viejo no cuz cuz, bien présent chez les parémiologues ou dans les
œuvres littéraires de la Renaissance espagnole (Llamas Pombo 2022 :
469).
C’est cette même propriété d’isométrie qui semble avoir invité
Charles de Bovelles (1557) à introduire parmi les dits sententieux un
distique formé de monosyllabes, contenant une onomatopée que le
parémiologue explique en termes phonétiques :
(13) A A A Vox lugentium,
Ha Ha Ha. Vox ridentium.
(Bovelles 1557 : 2v-3r)
Ce dit illustre à quel point la phraséologie sentencieuse renferme un
entrelacement indissociable entre la langue parlée et la tradition écrite
savante. La glose de Buvelles en témoigne : « Il est écrit au Premier
chapitre du Livre du Prophète Jérémie qu’il fut effrayé la première
fois que Dieu lui a parlé […]. Il répondit A A A […]. C’est-à-dire a a
a, Seigneur Dieu, je ne sais parler […] Quand un dolent dit a a a, j’ai
tout perdu, c’est comme dire hélas, j’ai tout perdu […]. Mais quant on
profère de la bouche, fort et par aspiration Ha ha ha, […] ce cri vient
du rire fou […] Car le Sage dit : In risu cognoscitur stultus. Au rire on
connait le fou » (Bovelles 1557 : 3r, nous modernisons et abrégeons son
explication).

3.1.3. La ponctuation, entre la notation prosodique et les usages


autonomes
Le premier plan des rapports oralité-écriture, celui de la
représentation de la substance sonore par la substance graphique,
concerne la ponctuation dans la mesure où le système de signes
« suprasegmentaux » possède une double propriété : d’une part, sa
correspondance avec les pauses ou avec d’autres éléments prosodiques ;
d’autre part, son fonctionnement autonome, sans correspondance avec
des éléments de phonétique suprasegmentale.
3.1.3.1. La notation des matrices rythmiques sous-jacentes aux parémies
est constante dans les proverbiers de la Renaissance. Et l’on peut
constater que la représentation des unités métriques l’emporte sur la
logique syntaxique.
Suivant une tradition graphique médiévale (Llamas Pombo 2016),
la structure bipartite ou quadripartite des proverbes détermine leur
ponctuation et la mise en lignes de ses unités.
Chez Meurier, une hiérarchie établie par l’alternance de signes
permet parfois la notation de la structure métrique des proverbes. Par

448
Proverbes, dictons, sentences

exemple, dans (14), l’alternance entre la virgule <, >, au premier degré,
et le comma < : >, au deuxième degré :
(14) Coucher de nuit : du matin seoir,
droit à midy : aller du soir.
(Meurier 1577 : 35)
Le procédé d’alternance de signes pour une structure quadripartite
n’étant pas systématique chez ce parémiologue – voir, par exemple,
(15) –, sa présence (dans 14) témoigne d’autant plus d’une perception de
la structure rythmique.
(15) Bonne femme & bon renom,
patrimoine sans parangon.
(Meurier 1577 : 32)
Le recueil de Bovelles (1557) – comme nous l’avons signalé ci-dessus,
§ 1.1.1.3 – présente les unités parémiques dans une écriture versifiée, en
deux lignes précédées toutes deux par une majuscule. Leur ponctuation
alterne entre la virgule, le point et l’absence de signe ; une telle alternance
ne marque pas une supposée gradation des pauses. Les signes ne servent
qu’à marquer la structure rythmique bipartite qui engendre les parémies.
(16) La ponctuation la plus fréquente est une virgule à la fin du premier
composant :

Bruler ne peut coeur,


Qui par venin meurt.
(Bovelles 1557 : 6v)

(17) 20% des parémies présentent un point final dans les deux
composants :

En l’eau endormie.
Que nul ne se fie.
(Bovelles 1557 : 3r)

(18) La ponctuation finale manque dans un petit nombre de parémies :

Que pain brulé


Soit chapilé
(Bovelles 1557 : 3r)

449
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

Détraction.
Vit d’estiron
(Bovelles 1557 : 11r)
3.1.3.2. Les usages autonomes de la ponctuation ne manquent pas dans le
stockage alphabétique de parémies, de façon très évidente dans les œuvres
du professeur de langues Gabriel Meurier. Les propriétés pragmatiques
de la ponctuation, en tant qu’instructions de lecture matérialisent parfois
certaines distinctions pour l’œil qui ne trouvent pas forcément de corrélat
à l’oral. On peut rappeler à ce propos le mot de Claude Hagège (1985 :
102), « l’écriture constitue une analyse linguistique à des degrés divers
de conscience ».
En bon grammairien, Meurier matérialise et distingue par
l’alternance entre l’absence de signe et l’emploi de la virgule les deux
valeurs de la conjonction et. La première porte sur l’énoncé ; la deuxième
porte sur l’énonciation.
a) Lorsque et est une simple conjonction de coordination entre deux
lexèmes d’un énoncé, la ponctuation ne figure pas entre les éléments
coordonnés :
(19) Argent fait perdre & pendre gent
(Meurier 1577 : 13)

(20) Bourse sans argent & sans denier,


est l’arme d’un chetif escuyer.
(Meurier 1577 : 32)

(21) Bien iuger & comprendre,


despend de bien entendre.
(Meurier 1577 : 32)
b) Par contre, lorsque le on-locuteur produit deux énoncés, la virgule
sépare ceux-ci ; et fonctionne alors, pragmatiquement, comme connecteur
entre deux énoncés, le deuxième comportant une ellipse :
(22) Argent fait rage, & amour mariage
(Meurier 1577 : 13)

(23) Bien seruir fait amis,


et vray dire ennemis.
(Meurier 1577 : 32)

(24) Brides à veaux, & bran a porceaux


(Meurier 1577 : 33)

450
Proverbes, dictons, sentences

Voici donc une distinction grammaticale pour l’œil, qui ne correspond


pas à une opposition pause/absence de pause. Comparons les pauses
marquées par la virgule à l’intérieur de (22, 23, 24) aux pauses après
chacun des quatre membres de (20 et 21) : le rythme binaire dans les
deux types de parémies est le même.
De façon sporadique, le pédagogue Meurier utilise également la
typographie afin de marquer visuellement son analyse linguistique des
mots et, concrètement, pour souligner des effets rythmiques. Les petites
majuscules apparaissent pour privilégier visuellement la présence d’une
rime (25) ou d’une paronomase (26a, 26c). (Voir Figures 1, 2, 3).
(25) qui femm’a nois’a
(Meurier 1568 : 102r)

(26a) Chacun n’a pas son molinet.


Chacun ne dort pas en molitnet.
(Meurier 1568 : 25v)

(26b) Chacun n’a pas son molinet.


Chacun ne dort pas en mol lit net
(édité par Le Roux de Lincy 1842 : 189)

(26c) noztables,
sont larrons notables.
(Meurier 1568 : 78v)
De telles distinctions font appel au lecteur silencieux et relèvent de la
communication différée que permet le livre imprimé d’usage individuel
(dont nous traiterons plus tard ; voir § 3.4).

3.2. Énonciation et « Oralité » [2] comme mimesis de la parole en


présence
Les termes d’oral et d’oralité sont employés dans un deuxième
sens énonciatif, restreint et dérivé par synecdoque du premiers sens. On
entend par « oralité » [2] « la représentation dans l’écriture d’un discours
au style direct proféré fictivement en présence ». Ce concept d’« oralité »
[2] recoupe partiellement le concept d’oral représenté, tel qu’il a été
formulé par Marchello-Nizia (2012) et Lefeuvre et Parussa (2020).
Les diverses formules d’enchâssement des discours déterminent
une typologie énonciative de la phraséologie sententieuse, qui complète
les autres typologies formelles, métriques, sémantiques, etc. Les parémies
des recueils du XVIe siècle peuvent illustrer une telle classification.

451
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

a) Dans les unités d’énonciation primaire, le on-locuteur formule la


généricité de l’énoncé sans les marques d’un acte de parole en présence.
(27) A grant cheval / grant gue
(La Véprie 1495 : A.i.r)

(28) Ce quon donne luit : ce quon menge puyt.


(La Véprie 1495 : B.i.r)

(29) On fait bien mal pour puys abatre


(La Véprie 1492 : b.iiiiv)
b) Dans un certain nombre de phrases parémiques (moins nombreuses
chez La Véprie et chez Meurier, tout comme dans la tradition médiévale
du français et de l’espagnol), la généricité se présente avec les traits
linguistiques du discours au style direct en présence d’un on-locuteur
qui s’adresse à une deuxième personne (30, 31, 32, 33, 34) et qui peut
s’exprimer à la première personne (34) :
(30) Aide toy / Dieu te aydra
(La Véprie 1492 : 2r)

(31) Va ou tu peulx / meux ou tu dois


(La Véprie 1492 : C. iii.r)

(32) Vous me faictes croire de vessíes que son lanternes


(La Véprie : ib.)

(33) Se tu ne metz raíson en toy / elle sí mettra maulgre toy


(La Véprie 1492 : c.i.v)

(34) I’ayme mieulx vn raisin pour moy,


que deux figues pour toy.
(Meurier 1568 : 50v)
c) Les dialogismes ou wellerismes (selon le terme anglo-saxon),
jouissaient d’une longue tradition dans la phraséologie latine, mais sont
devenus plus rares dans les traditions parémiques française et espagnole ;
en outre, ils présentent différents degrés de généricité par rapport aux
proverbes (Oddo 2013 : 173-174). Ils présentent une interaction verbale
en présence, mais le on-locuteur attribue le discours à un deuxième
locuteur fictif, qui intervient à la première personne. Par exemple, chez
Meurier :

452
Proverbes, dictons, sentences

(35) Ie suis vostre (dit l’auare) ancien,


aimant le vostre comme le mien.
(Meurier 1568, 50 v)
d) Une quatrième catégorie de parémies présente une mention explicite
du on-locuteur, la marque d’insertion de la phrase parémique dans le
discours des énonciateurs (du type l’on dit...) :
(36) Lon dit par bourgs villes & villages,
vin & femmes attrapent les plus sages
(Meurier 1568, 65r)
e) Une dernière catégorie intègre des propos au style direct substantivés,
comme composants grammaticaux de la phrase (c’est le type Il ne faut
jamais dire : fontaine, je ne boirai pas de ton eau) :
(37a) Mieulx vault un tenez que deux vous l’aurez.
(Meurier 1568 : 68r)

(37b) Mieulx vault dire veulx tu du mien,


que dire donne moy du tien.
(Meurier 1568 : 72v)

3.3. Variation diaphasique, registre familier et « oralité » [3]


Le terme « oralité » est parfois employé dans un sens diaphasique
comme synonyme de registre familier (registro coloquial en espagnol)
ou même vulgaire ou populaire. Bien que censuré par les linguistes
spécialistes de la langue parlée, comme Blanche-Benveniste et Jeanjean
(1986 : 20) pour le français ou Lamíquiz (1994) pour l’espagnol, ce
glissement sémantique est encore présent dans certaines études sur
la représentation de la langue orale dans l’écriture, puisque le lexique
dialectal, familier, voire vulgaire a souvent servi à caractériser les
personnages de la fiction dans le théâtre ou dans la littérature narrative4.
Les proverbiers français de la Renaissance qui rassemblent
proverbes et sentences témoignent habituellement d’un registre
commun, dépourvu de marques de style vulgaire, à l’exception de ceux
qui comportent un lexique malsonnant (par exemple, 38 à 43), dont la

4 Par exemple, dans une étude sur « La variation dans les dialogues de Bel-Ami
de Maupassant », Maguy Sillam (1991) analyse « l’oral dans l’écrit » chez le seul
écrivain du XIXe siècle dont les dialogues de romans son utilisés in extenso dans
les films réalisés à partir de ses œuvres. L’auteure énonce le lien entre registre
populaire et oralité : « l’imbrication des registres de langue populaire, familier et
standard contribue à l’oralité du discours de même que l’utilisation de certaines
tournures archaïques » (ib. : 43, l’italique est nôtre).

453
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

présence est minoritaire, ou bien des comparaisons teintées de misogynie


(par exemple, 44-45) :
(38) Chantes a lasne / il te fera des pets
(La Véprie 1495 : Aiii)

(39) Fy de la pute medicine,


qui l’homme à la mort enchemine.
(Meurier 1568 : 44-45)

(40) a l’enprunter cousin germain


mais au rendre filz de putain
(Meurier 1568 : 10r)

(41) Pour fouhaiter pour peter ne vessir


il n’est besoin hors de son lict issir.
(Meurier 1577 : 169)

(42) La putain aussy la corneille,


tant plus se laue plus noire est elle.
(Meurier 1568 : 64v)

(43) a putains des noix.


(Meurier 1568 : 5v)

(44) a femme sotte, nul ne se frotte


(Meurier 1568 : 6r)5

(45) Belle femme mauuaise teste,


bonne mule mauuaise beste,
Bon païs mauuais chemin
Bon aduocat mauuais voisin
(Meurier 1577 : 27)

3.4. Variation communicationnelle : l’opposition immédiateté /


distance
Les collections de phraséologie sentencieuse peuvent être
analysées sous une quatrième variable, celle de la communication,
suivant le modèle distal conçu par Kock et Oesterreicher (2001). Il s’agit

5 Le verbe à la forme pronominale se frotter à est encore caractérisé comme


argotique dans les dictionnaires du Français moderne : Se frotter à qq’un :
argotique, « avoir des rapports intimes » (tlfi).

454
Proverbes, dictons, sentences

de l’opposition entre les structures propres à la communication immédiate


et les structures propres à la communication à distance, opposition qui
remplace dans ce modèle linguistique l’opposition médiale oralité/
écriture et l’opposition diaphasique langue parlée/langue écrite comme
registres de langue.
La communication différée dans le temps que permet le livre
imprimé favorise l’emploi de ressources orthotypographiques destinées
à la lecture, mais sans équivalent dans le discours oral.
La liste alphabétique d’unités lexicales, habituelle pendant tout le
Moyen Âge, en tant que stockage des unités de la langue, constitue un
usage autonome de l’écriture qui va au-delà des propriétés technologiques
de la graphie pour enregistrer la parole. Selon Jack Goody (1979 : 143-
148-151), la liste alphabétique a été historiquement la première fonction
de l’écriture après son invention. Dans ses premières manifestations, la
liste n’est pas la représentation de la parole ; au contraire, elle « s’oppose
même à la fluidité, à la connexité propres aux formes ordinaires du langage
parlé ». Séparée du contexte dans lequel s’insèrent les énoncés oraux, la
liste de proverbes répond à une pure raison graphique. Les éditions de
1568 et de 1577 de Gabriel Meurier nous offrent un cas exemplaire de
modèle distal ; en tant que grammairien et que professeur de langues,
il sait bien donner à lire les principes structurels de la grammaire (par
exemple, dans ses tableaux paradigmatiques sur la conjugaison ou le
lexique verbal, voir Figure 4).
En transcrivant les parémies, Meurier établit des paradigmes
phrastiques et en visualise la grammaire. Ainsi, il témoigne de sa
conscience d’un fait capital qui a été signalé par la parémiologie
linguistique actuelle : l’existence d’une liste close de matrices lexicales
dans la formation des proverbes, une quarantaine approximativement
(Gómez-Jordana 2012 : 138, 140 ; Anscombre 2017 : 18-23). Le
grammairien et parémiographe décontextualise les proverbes et en
donne la matrice lexicale qui les engendre par le moyen de schémas
formés par des accolades (voir, par exemple, les figures 5, 6, 7) : Fol est
qui… ; Faulte de… ; Il faut… ; Il ne faut pas… ; Qui dit… ; Qui moult… ;
Qui mal… ; Qui trop… ; Tel… tel…, etc.
La décontextualisation des énoncés se manifeste dans l’emploi
d’une ponctuation dépourvue de toute fonction pausale. Les mots des
parémies adoptent le statut d’entête d’une entrée de dictionnaire et une
telle valeur métalinguistique est marquée occasionnellement par des
points (47, 48). (Voir Figures 8, 9, 10, 11).
(46) Tu

455
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

(47) A.

(48) A la sainct.

(49) Lon
Le sujet Tu se trouve écrit au milieu de la phrase avec une majuscule et le
sujet Lon apparait sans apostrophe : ce qui intéresse dans ces séquences
c’est leur indexation en tant que formes répétées d’une matrice lexicale.
Un tel soin dans l’édition de la « grammaire du proverbe » nous permet
de postuler que la ponctuation de ses deux éditions, de 1568 et 1677,
est bien celle de la main de Gabriel Meurier et non pas celle de son
imprimeur.
La lecture schématique de la tradition phraséologique trouve son
essor parmi les intellectuels du XVIe siècle : Meurier en fait un usage
linguistique ; le philosophe et mathématicien Charles de Bovelles (1557 :
3r) l’utilise également pour dévoiler la solution d’une série de devinettes
latines (voir Figure 12).

Conclusion 
La parémie (παροιμία), dans son sens étymologique grec, est « une
sagesse partagée tout au long du chemin ». Par leur rythme et par leurs
origines, les proverbes en langues romanes font certainement partie du
patrimoine verbal transmis oralement pendant des siècles. Or pendant
le Moyen Âge, et de façon enthousiaste pendant la Renaissance, les
intellectuels les ont collectés, réécrits et diffusés amplement, surtout à
travers le livre imprimé. Analyser par le moyen de concepts linguistiques
actuels un tel patrimoine nous permet de mieux percevoir les rapports
indissociables entre l’oral et l’écrit dans la tradition proverbiale française.

456
Proverbes, dictons, sentences

Figures

Figure 1. (Meurier 1568 : 102r)

Figure 2. (Meurier 1568 : 25v)

Figure 3. (Meurier 1568 : 68v)

Figure 4. (Meurier 1558 : 12v)


457
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

Figure 5. (Meurier 1577 : 220)

458
Proverbes, dictons, sentences

Figure 6. (Meurier 1577 : 169)

Figure 7. (Meurier 1577 : 153)

459
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

Figure 8. (Meurier 1577 : 51)

Figure 9. (Meurier 1568 : 13v)

Figure 10. (Meurier 1577 : 21)

460
Proverbes, dictons, sentences

Figure 11. (Meurier 1577 : 121)

Figure 12. (Bovelles 1557 : iiir)

461
Études de sémantique et pragmatique en synchronie et diachronie

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