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C hirurgie
ambulatoire
générale
et digestive
Rapport présenté au
119 e congrès français de chirurgie 2017
CHIRURGIE AMBULATOIRE
GÉNÉRALE ET DIGESTIVE
Rapport présenté au 119e Congrès français de chirurgie
Paris, 27-29 septembre 2017
Arnette
Éditions John Libbey Eurotext
127, avenue de la République
92120 Montrouge
contact@jle.com
http://www.jle.com
CHIRURGIE AMBULATOIRE
GÉNÉRALE ET DIGESTIVE
Rapport présenté au 119e Congrès français de chirurgie
Paris, 27-29 septembre 2017
Coordination chirurgien-anesthésiste
Jeûne ................................................................................................................................. 34
Vincent Compère
Heure et durée de l’intervention....................................................................................... 35
Marc Beaussier
Gestion des nausées-vomissements .................................................................................. 36
Didier Sciard
Analgésie après chirurgie ambulatoire ............................................................................ 38
Laurent Delaunay
Introduction................................................................................................................... 38
Différents traitements.................................................................................................... 39
Moyens non médicamenteux......................................................................................... 42
Conclusion .................................................................................................................... 42
Remplissage vasculaire..................................................................................................... 44
Marc Beaussier
Gestion des anticoagulants pris au long cours................................................................. 45
Sébastien Bloc
Anticoagulants oraux .................................................................................................... 45
Antiagrégants plaquettaires........................................................................................... 46
Conclusion .................................................................................................................... 47
Thromboprophylaxie après chirurgie ambulatoire ......................................................... 49
Marc Beaussier
Chambres implantables en ambulatoire........................................................................... 50
Aline Albi-Feldzer
Charte d’une Unité de chirurgie ambulatoire.................................................................. 52
Michel Fiani
Signature de sortie ............................................................................................................ 53
Didier Sirieix
Éligibilité des patients...................................................................................................... 55
Nicolas Dufeu, Thomas Lanz
Introduction................................................................................................................... 55
Pour quels patients ........................................................................................................ 55
Quels actes ?.................................................................................................................. 58
Facteurs liés à la structure ............................................................................................. 60
Conclusion .................................................................................................................... 60
Conclusion........................................................................................................................ 175
INTRODUCTION
Corinne Vons
Introduction
La chirurgie ambulatoire est définie en France par le décret 92-1101 du 2 octobre 1992
par la formule suivante : « les structures pratiquant l’anesthésie ou la chirurgie ambulatoire
permettent d’effectuer dans des conditions qui autorisent le patient à rejoindre sa résidence le
jour même, des actes médicochirurgicaux nécessitant une anesthésie ou le recours à un secteur
opératoire ». Elle sera complétée par la conférence de consensus organisée en mars 1993 : « la
chirurgie ambulatoire et l’ensemble des actes chirurgicaux et/ou d’explorations programmées
réalisés dans les conditions techniques nécessitant impérativement la sécurité d’un bloc opé-
ratoire, sous anesthésies de modes variables et suivies d’une surveillance postopératoire pro-
longée permettant sans risque majeur la sortie du patient le jour même de son admission ».
On a coutume de faire remonter le début de la chirurgie ambulatoire au 18 septembre
1909 avec une publication de Nicoll, chirurgien de Glasgow dans le British Medical Journal
rapportant avoir opéré 8 988 enfants dans les dix années précédentes en ambulatoire, sortis le
soir, dont 220 hernies et 18 sténoses du pylore.
Prémices
Le vrai développement de la chirurgie ambulatoire, en particulier chez les adultes, a débuté
dans les années 1960 aux États-Unis. La problématique à l’époque était le désengorgement
des lits hospitaliers, puis la nécessité de diminuer les coûts dans les années 1980 n’a fait
qu’amplifier le phénomène. Dillon JB et Cohen DD ont créé en Californie en 1962 le premier
centre ambulatoire indépendant, puis ce furent Levy ML et Coakley CS en 1966 à Washington,
et ensuite Providence (Rhode Island) en 1968 et Phoenix (Arizona) en 1970. Les deux équipes
pionnières ont publié leurs résultats respectivement dans le Journal American Of Medical
Association en 1966 et le South Medical Journal en 1968. En 1992, il existait 1 700 centres
indépendants de chirurgie ambulatoire aux États-Unis. On estime que 11 millions de patients
ont été opérés aux États-Unis en ambulatoire pendant l’année 1990. Une incitation financière
a favorisé ce développement : Medicare remboursait 100 % des soins en chirurgie ambulatoire
mais seulement 80 % des honoraires du chirurgien si le patient n’était pas ambulatoire. La
Health Maintenance Organisation ne remboursait pas certains actes s’ils n’étaient pas réalisés
en ambulatoire.
2 H. Johanet
Crise
De quoi s’agit-il ? À l’époque, c’était leur nombre de lits qui faisait la fierté des établis-
sements : plus on avait de lits, plus on pouvait accueillir de patients, plus on pouvait réaliser
d’actes et de soins rémunérés par la sécurité sociale. C’est le nombre de lits qui assurait la
valeur marchande d’un établissement, mais ce nombre de lits attribués par la carte sanitaire,
était figé, soumis à autorisation et les autorisations de lits supplémentaires étaient rares. Pour
augmenter l’offre de soins, de plus en plus d’établissements, en particulier privés, ont réalisé
deux actes le même jour « dans le même lit » : c’était la chirurgie ambulatoire avant l’heure.
La sécurité sociale a vu rouge devant ce contournement de la carte sanitaire et a produit la
circulaire du 26 novembre 1990 instituant le non-paiement du prix de journée et des frais de
salles d’opération pour des actes entraînant des séjours de moins de 24 heures. La crise est
immédiate. D’un côté, on faisait valoir que la chirurgie ambulatoire était très en retard en
France comparée aux autres pays, et que l’on devait assurer une offre de soins complète. De
l’autre, le développement de la chirurgie ambulatoire était conditionné par la fermeture paral-
lèle de lits d’hospitalisation : « le taux de change » était le suivant : fermeture de 2 à 2,25 lits
d’hospitalisation conventionnelle pour une place ambulatoire créée.
Tout cela s’est mis en place ensuite : la loi no 91-743 du 31 juillet 1991 sur la réforme
hospitalière précisait que les établissements de santé publics ou privés devaient dispenser, avec
ou sans hébergement, des soins de courte durée. Elle a été complétée par le décret du 2 octobre
1992, l’arrêté du 7 janvier 1993 et l’accord tripartite sur la tarification du 27 janvier 1993. La
réglementation, les conditions de fonctionnement, la tarification, tout a été enfin mis en place.
L’Association française de chirurgie ambulatoire (AFCA) a été fondée en 1994 et a défini
des actes marqueurs pour suivre l’évolution du développement de la chirurgie ambulatoire. En
1993, a été créé le journal Ambulatory Surgery : dans l’éditorial du premier numéro, le chi-
rurgien anglais Jarrett écrit : « d’ici le siècle prochain, la question ne sera pas de savoir si un
patient doit être pris en charge en ambulatoire, mais s’il a une quelconque raison d’être hos-
pitalisé », on y reviendra. En 1996, à l’initiative de l’AFCA a été créé l’International
Définition et historique 3
Association for Ambulatory Surgery. En 1998, Bernard Kouchner, secrétaire d’État à la Santé,
a déclaré que la chirurgie ambulatoire était une priorité de santé publique. Des chirurgiens et
anesthésistes, convaincus de l’efficience de leurs centres, ont opéré de plus en plus de patients
en ambulatoire qui rentraient chez eux le soir en vainqueur, aidés par une sécrétion endogène
augmentée de corticoïdes. Mais les chiffres de l’OCDE de 1996-1997 ont montré que les
débuts français en chirurgie ambulatoire étaient lents : le taux de cures de hernie inguinale en
ambulatoire en France était de seulement 6 % comparé à 22 % aux Pays-Bas, 35 % au
Royaume-Uni, 37 % en Nouvelle-Zélande, 43 % au Canada, 53 % au Danemark et 79 % aux
États-Unis. Néanmoins, la première cure de hernie inguinale par cœlioscopie a été réalisée en
1993, la première cholécystectomie par cœlioscopie en 1998, les recommandations de la Société
française d’anesthésie réanimation sur l’anesthésie ambulatoire ont été publiées dès
décembre 1993, et les premières recommandations professionnelles interviendront en 2010
sous l’égide de la Société française de chirurgie digestive.
Intérêts convergents
Le développement de la chirurgie ambulatoire s’est poursuivi sous l’impulsion des pra-
ticiens et des patients qui adhèrent à ce type de prise en charge, des établissements qui y
trouvent leur intérêt, des mesures de la sécurité sociale et de la DGOS :
– abandon du taux de change en 2003 ;
– adoption de 18 gestes marqueurs en 2004 ;
– début du mandat de F. Van Roekeghem comme directeur de la Caisse nationale d’Assu-
rance maladie en 2004, marqué par la publication d’un rapport sur « l’évolution des parts de
marché en chirurgie » dont la conclusion est simple : « la structure qui n’a pas développé
l’ambulatoire alors qu’elle en possède le potentiel, est une anomalie qui met en jeu à moyen
terme sa survie chirurgicale » ;
– développement à partir de 2005 des mises sous accord préalable (MSAP) : la sécurité
sociale contrôle avant l’hospitalisation le dossier d’un établissement pour un type de procédure.
Si elle estime que le patient est opéré en hospitalisation complète alors qui devait l’être en
ambulatoire, elle ne prend en charge ni les frais de séjour ni les honoraires du chirurgien. Au
début seulement 5 gestes pouvaient être mis sous MSAP, actuellement il y en a 55. La cure
de hernie inguinale et la cholécystectomie par laparoscopie sont les gestes qui ont été mis le
plus souvent sous MSAP. La mesure semble efficace (Figure 1) ;
– modification de la tarification des séjours chirurgicaux en ambulatoire à partir de 2005
à visée incitative. Mais c’est la suppression des bornes basses en 2014 avec pour les GHM de
niveau un tarif identique entre l’hospitalisation conventionnelle et ambulatoire qui a été la plus
importante
Ainsi le taux d’ambulatoire pour la cure de hernie inguinale est passé de 6 % en 1997 à
52,8 % en 2013.
Introduction
La réglementation de la chirurgie ambulatoire en France mérite d’être déclinée selon deux
approches complémentaires qui sont porteuses de nombreux enseignements sur les causes du
retard français, ses leviers et ses freins :
– d’une part, l’étude de l’évolution de la législation et de la réglementation française sur
la chirurgie ambulatoire témoigne bien des nombreuses volte-faces effectuées par les pouvoirs
publics depuis 50 ans, illustrant leur difficulté de s’approprier cette thématique, tant elle
constitue une innovation de rupture. Elle bouscule l’ordre établi et les modes de pensée. Elle
transgresse ces « acquis mortifères » que sont l’organisation du soin autour du professionnel
de santé et la culture des lits et des services, traits dominants du mode de pensée des hôpitaux
et des cliniques depuis la réforme Debré de 58 ;
– d’autre part, l’étude de la jurisprudence concernant ce qui est dénommée la « hiérarchie
des normes juridiques », confirme la nécessité de compléter l’approche réglementaire stricto
sensu avec des éléments relevant des bonnes pratiques comme les recommandations des
sociétés savantes ou des institutions nationales.
Il s’est déroulé exactement 37 ans entre la loi portant sur la réforme hospitalière du
31 décembre 1970 introduisant pour la première fois l’hospitalisation de jour et la loi de
financement de la Sécurité sociale 2008 qui donne à la chirurgie ambulatoire son statut de
norme de prise en charge au travers de la procédure de Mise sous accord préalable (MSAP).
6 G. Bontemps
lieu dans notre pays (...) pour 1995-1996, il est demandé à chaque autorité sanitaire d’atteindre
au minimum la proportion de 50 % de chirurgie ambulatoire sur la totalité de la chirurgie
programmée » ;
– la confusion entre 2004 et 2012 dans les textes ministériels français entre vraie chirurgie
ambulatoire (chirurgie de jour) et chirurgie de courte durée (moins de 48 heures), puis sa
traduction dans les tarifs (même tarif entre chirurgie de jour et de moins de 48 heures entre
2004 et 2012), a en fait freiné le développement de la chirurgie ambulatoire. Ce schéma d’une
tarification identique calculée à la moyenne de ces séjours, avait pour objectif initial de reva-
loriser mécaniquement la rémunération des séjours ambulatoires. Il a en fait ralenti le déve-
loppement de la chirurgie ambulatoire car les durées moyennes de séjour se sont rallongées
(les vrais ambulatoires rebasculant en moins de 48 heures) ;
– la persistance d’une tarification défavorable pour la chirurgie ambulatoire par rapport
à la chirurgie traditionnelle a duré 20 ans, alors que l’on souhaitait favoriser justement son
développement. La mise en place du tarif identique pour tous les GHM de chirurgie entre
l’ambulatoire et le premier niveau de sévérité des séjours conventionnels, seule vraie mesure
tarifaire incitative, n’a été appliquée qu’à partir de mars 2014, alors que les premières mesures
financières incitatives pour la chirurgie ambulatoire datent de plus de 20 ans pour le secteur
privé (arrêté de mars 1993 sur la classification des actes en ambulatoire pouvant donner lieu
à tarification pour les établissements privés) et de 15 ans pour le secteur public (logiciel AMBU
1999 redressant les points ISA ambulatoires) ;
– la publication du décret du 20 août 2012 [3] a maintenu le statut d’alternative à la
chirurgie complète, alors même que l’instruction ministérielle aux Agences régionales de santé
(ARS) du 27 décembre 2010 [4] évoque le changement de paradigme « la chirurgie ambula-
toire devenant la référence » ;
– le décret du 20 août 2012 laisse penser qu’étaient remis en cause les locaux dédiés et
le personnel dédié à la chirurgie ambulatoire (recul par rapport aux textes fondateurs de 1992).
La protestation de deux sociétés savantes (Association française de chirurgie ambulatoire
[AFCA] et Société française d’anesthésie réanimation [SFAR]) a amené ensuite le ministère
à expliciter le décret avec envoi d’une information complémentaire aux ARS. L’instruction
DGOS du 28 septembre 2015 relative aux objectifs et orientations stratégiques du programme
national de développement de la chirurgie ambulatoire 2015-2020 [5] a enfin confirmé (mais
trois ans après le décret) que les locaux et le personnel doivent bien être dédiés ;
– les débats parlementaires autour de l’article 53 de la loi de décembre 2014 (hôtels
hospitaliers avec hébergements temporaires non médicalisés de patients) ont conclu sur une
expérimentation d’hôtels hospitaliers pendant 3 ans en vue de favoriser le développement de
la chirurgie ambulatoire, alors même que l’instruction DGOS du 27 juillet 2015 précise que
ce n’est pas son objectif premier : « prestations d’hébergement temporaire non médicalisé, en
amont ou en aval de l’hospitalisation (...) n’ont pas pour objectif premier le développement
de l’activité de CA, même si elles peuvent y contribuer dans certaines situations ».
Nonobstant ces atermoiements qui ont rendu plus difficile le portage des messages en
faveur du développement de la chirurgie ambulatoire tant auprès des professionnels de santé
que des patients, trois textes peuvent être considérés comme des jalons importants de cette
évolution inéluctable de la prise en charge vers la norme :
– la MSAP, introduite dans la loi du Financement de la Sécurité sociale 2008, apparaît
comme le premier jalon de cette évolution inéluctable, puisque, pour la première fois dans la
loi, la chirurgie ambulatoire devient la norme. En effet, les établissements de santé, soumis à
cette procédure, doivent demander, avant toute hospitalisation, l’accord préalable à l’Assurance
maladie pour prendre en charge leurs patients en chirurgie traditionnelle, alors qu’ils sont
dispensés de le faire dans le cas où ces patients sont pris en charge en chirurgie ambulatoire.
8 G. Bontemps
1. Directive du ministère de la santé du 19 juillet 2010 fixant les 10 priorités de gestion du risque, Lettre-circulaire
DGOS/RH4 no 2011-210 du 6 juin 2011 relative aux axes et actions de formation nationales prioritaires, circulaire
DGOS/PF3/2012/09 du 10 janvier 2012 relative au guide d’élaboration des contrats pluriannuels d’objectifs et de
moyens (CPOM), circulaire DGOS/RH4/2012/206 du 22 mai 2012 relative aux axes et actions de formation nationales
prioritaires, circulaire interministérielle DGOS/PF1/DSS/DGFiP/2013/271 du 5 juin 2013 relative à la mise en place
Réglementation en France 9
la gestion du risque, la performance de l’offre de soins, ainsi que plusieurs rapports de la Cour
des comptes et des Inspections générales 2.
L’ambition portée par la France sur la chirurgie ambulatoire est donc forte, au travers
notamment du virage ambulatoire. Tous les éléments sont donc disponibles pour faciliter la
mise en œuvre de cette ambition.
Les recommandations professionnelles publiées à ce jour portent le plus souvent sur les
conditions médicales d’éligibilité des patients à la chirurgie ambulatoire, parfois sur leurs
conditions psycho-socio-environnementales et plus rarement sur l’organisation des circuits et
des flux ambulatoires :
– Recommandations SFAR 1990 puis SFAR 2009 « prise en charge anesthésique des
patients en hospitalisation ambulatoire » ;
– Recommandations CNCE/ADARPEF 2010 « chirurgie ambulatoire de l’enfant » ;
– Recommandations SFCD/ACHBT 2010 « pratique de la chirurgie digestive et endo-
crinienne en ambulatoire de l’adulte » ;
– Recommandations AFU/SFAR/AFCA/ANAP 2013 « chirurgie ambulatoire en
urologie » ;
– Recommandations proctologie SNFCP 2015 « chirurgie ambulatoire en proctologie ».
Hormis la SFAR, qui a effectué un important travail depuis 25 ans sur la chirurgie ambu-
latoire en passant d’une approche restrictive en 1990 basée sur les contre-indications à l’ambu-
latoire vers une approche plus large en 2009 basée sur la notion indicative de bénéfice-risque,
les travaux des sociétés savantes ont été assez limités alors que la pratique ambulatoire est
maintenant majoritaire en France. Il est à signaler néanmoins les démarches intéressantes de
deux sociétés savantes : l’Association française d’urologie qui a publié des recommandations
pluriprofessionnelles soulignant le caractère transversal pluridisciplinaires de la démarche et
la Société nationale française de coloproctologie qui a publié tout un corpus autour des recom-
mandations (observatoire national, livret ambulatoire, film de présentation...).
Les recommandations organisationnelles ont été publiées en 2013 par l’ANAP et la HAS
[8] dans le cadre de leur programme de travail commun pluriannuel sur la chirurgie ambulatoire
2012/2016. Ce programme s’est décliné en 6 axes : socle de connaissance, patients, organisa-
tion, économie, indicateurs et certification. L’ensemble des éléments de l’axe organisation se
retrouve dans l’outil documentaire en ligne « itinéraire chir ambu » [9], qui comporte, outre
les recommandations organisationnelles, des outils de diagnostic, des check lists, des fiches
de mise en œuvre, des débats d’experts et des retours d’expérience d’établissements perfor-
mants français et européens.
Conclusion
L’encadrement de la pratique chirurgicale ambulatoire en France repose à la fois sur une
législation et réglementation riche et ancienne et sur des recommandations professionnelles et
organisationnelles émanant de sociétés savantes et d’agences nationales. La législation et la
réglementation, même si elles ont été confuses par le passé tant elles ont semblé par moment
contradictoires, sont maintenant bien stabilisées et conformes aux standards internationaux.
Les recommandations professionnelles et organisationnelles complètent ce dispositif et per-
mettent de conceptualiser le processus de prise en charge et de rendre opérationnels les stan-
dards de bonnes pratiques.
Bibliographie
[1] Circulaire Cnamts no 54/90 du 26 novembre 1990.
[2] Directive du ministère de la santé du 19 juillet 2010 fixant les 10 priorités de gestion du risque.
Réglementation en France 11
[3] Décret no 2012-969 du 20 août 2012 modifiant certaines conditions techniques de fonctionnement des structures
alternatives à l’hospitalisation.
[4] Instruction DGOS/R3/2010/457 du 27 décembre 2010 aux ARS relative à la chirurgie ambulatoire : perspectives
de développement et démarche de gestion du risque.
[5] Instruction DGOS/R3/2015/296 du 28 septembre 2015 relative aux objectifs et orientations stratégiques du
programme national de développement de la chirurgie ambulatoire pour la période 2015-2020.
[6] Abécédaire chirurgie ambulatoire, Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés et Ministère
de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et de la Vie Associative, janvier 2009.
[7] Décret d’anesthésie de 1994, chirurgie ambulatoire et responsabilité médicale : nécessaires réflexions sur l’iné-
vitable conciliation entre réglementation et recommandations, G. Bontemps, C. Daver, C. Ecoffey, AFAR 33
(2014) 655-663 (texte court), Elsevier Masson et Médecine et Droit 132 (mai 2015) 63-76 (texte long), Elsevier
Masson.
[8] ANAP HAS. Ensemble pour le développement de la chirurgie ambulatoire. Recommandations organisation-
nelles ; mai 2013 (www.anap.fr).
[9] ANAP Itinéraire chir ambu ; http://www.anap.fr/l-anap/programme-de-travail/promouvoir-la-performance-
interne-des-organisations-des-es-et-esms/itineraire-chir-ambu/
LE VIRAGE AMBULATOIRE
EN FRANCE : PRATIQUES, OUTILS
ET RECOMMANDATIONS
Gilles Bontemps
Introduction
Le virage ambulatoire prôné par les pouvoirs publics dans la Stratégie nationale de santé
trouve son origine dans les actions de sensibilisation menées par l’Agence nationale d’appui
à la performance des établissements (ANAP) et la Haute autorité de Santé (HAS) au tournant
des années 2010. L’instruction du ministère de la Santé aux Agences régionales de santé du
27 décembre 2010 a évoqué pour la première fois le changement de paradigme « la chirurgie
ambulatoire devenant la référence ». Qu’en est-il cinq ans après ? Un état des lieux des pra-
tiques chirurgicales ambulatoires et une revue des outils et recommandations disponibles per-
mettent d’en brosser les contours.
Au-delà de l’objectif fixé pour 2016, un nouvel objectif a été retenu par le ministère dans
l’instruction du 28 septembre 2015, à savoir le taux de 62,6 % sur l’ancien périmètre ou de
66,2 % sur le nouveau périmètre pour 2020. Ce nouvel objectif nécessitera une dynamique
d’augmentation encore plus importante que par le passé, de l’ordre de 3,3 points/an entre 2016
et 2020. Il sera difficilement atteignable en l’absence de mesures fortes d’accompagnement,
au niveau des pouvoirs publics et/ou des établissements de santé.
Figure 1. Évolution du taux de chirurgie ambulatoire des 18 gestes marqueurs entre 2008 et 2015
(source PMSI).
16 G. Bontemps
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Outils et recommandations
Programme de travail pluriannuel ANAP/HAS
Le programme de travail commun pluriannuel ANAP/HAS mis en place en 2011 a abouti à
la production d’un important corpus documentaire : recommandations organisationnelles, outils
de diagnostic et de suivi, outils de mise en œuvre, retours d’expériences françaises et étrangères...
Il a été décliné en 6 axes :
– axe 1 (état des lieux) avec la publication d’un socle de connaissance en avril 2012 ;
– axe 2 (éligibilité des patients) avec la publication d’un rapport d’évaluation en mai 2014 ;
– axe 3 (organisation) avec la publication de recommandations organisationnelles et
d’outils de diagnostic et de mise en œuvre en mai 2013 et d’un outil documentaire en ligne
« Itinéraire chir ambu® » [6] en novembre 2014 ;
– axe 4 (économique) avec la diffusion des outils Opeera et Microcosting et la publication
de recommandations sur la tarification de la chirurgie ambulatoire en France et à l’étranger
en juin 2013 ;
– axe 5 (indicateurs) avec la diffusion par l’ANAP et l’Agence technique de l’information
sur l’hospitalisation (ATIH) d’un Indicateur de performance en chirurgie ambulatoire [7] en
décembre 2015 ;
– axe 6 (certification) avec la diffusion de la grille d’analyse du patient traceur ambula-
toire en mars 2015.
Ces travaux ANAP/HAS ont été repris dans de multiples publications (rapport de la Cour
des comptes sur la Sécurité sociale de septembre 2013, 4e comité interministériel de la moder-
nisation de l’action publique de décembre 2013, rapport de la Cour des comptes sur la situation
et perspectives des finances publiques de juin 2014, rapport IGAS/IGF sur les perspectives du
développement de la chirurgie ambulatoire en France de juillet 2014). Ils ont été aussi intégrés
dans plusieurs textes ministériels (instruction DGOS du 28 septembre 2015 relative aux objec-
tifs et orientations stratégiques du programme national de développement de la chirurgie ambu-
latoire 2015-2020, fiches méthodologique performance DGOS de mai 2016) et dans plusieurs
recommandations professionnelles (Association française d’urologie, Société française de colo-
proctologie). Ils constituent la base documentaire du virage ambulatoire prôné par les pouvoirs
publics dans la stratégie nationale de santé.
Elles confirment qu’en chirurgie ambulatoire, l’acte chirurgical et l’acte anesthésique sont
les mêmes qu’en hospitalisation traditionnelle, qu’il n’y a pas de maîtrise des risques spécifique
à l’ambulatoire. Seule l’organisation change : elle est centrée sur le patient et non plus sur les
professionnels de santé.
L’organisation en chirurgie ambulatoire a un concept proche du Lean management, qui
a été développé dans les années 1970 dans l’industrie automobile. Le Lean est parfaitement
transposable dans les établissements de santé. Une bonne organisation en chirurgie ambulatoire
passe par l’identification et la maîtrise de tous les flux (patients, médecins, infirmiers, admi-
nistratifs, brancardiers, secrétaires, logistiques...) en repérant et réduisant toutes les sources de
gaspillage, en anticipant, en coordonnant et en synchronisant les différents acteurs...
L’optimisation des flux peut passer par différents modèles :
– flux tirés (aval qui commande) plutôt que poussés (amont qui commande) : ce n’est
pas l’Unité de chirurgie ambulatoire (UCA) qui envoie le patient au bloc, mais c’est le bloc
en capacité d’accueillir le patient qui demande sa venue ;
– marche en avant : le patient ne revient jamais sur ses pas ;
– circuits courts : l’UCA est « collé » au bloc, voire dans le bloc, réduisant les distances
et temps d’attente ;
– circuits autonomes : les circuits autonomes sont préférables aux circuits intégrés qui
mélangent tous les flux (ambulatoire, endoscopies, chirurgie traditionnelle, urgences..) et désor-
ganisent les structures. L’autonomie peut aller jusqu’aux centres autonomes ;
– flux anticipés : prescription des antalgiques dès la consultation d’anesthésie... ;
– flux au fil de l’eau : arrivée décalée des patients dans la journée... ;
– flux continus : l’arrivée des patients à pied au bloc évite les ruptures de circuits... ;
– court-circuits : la possibilité de by-passer la SSPI pour des patients à faible risque
postopératoire sous anesthésie locorégionale, après vérification du score d’Aldrete à la sortie
de salle de bloc, permet d’optimiser l’organisation.
Conclusion
Le virage ambulatoire prôné par les pouvoirs publics ne s’est pas encore totalement maté-
rialisé, puisque, à périmètre constant en 2015, la majorité des pratiques relève encore de
l’hébergement avec nuitée. Mais le changement de paradigme se fera très prochainement, avec
un ambulatoire qui deviendra majoritaire. On devra en tirer pleinement les conséquences en
termes d’organisation sanitaire, de financement, de dimensionnement architectural et d’accom-
pagnement social. Cela pose enfin la question du déploiement des actions à mener en vue
20 G. Bontemps
d’accompagner cette évolution. Des outils et des recommandations sont disponibles et mis à
disposition des professionnels de santé pour les aider dans leurs projets de développement de
chirurgie ambulatoire. Les actions de communication, d’information ou de formation (initiale
ou continue) restent essentielles pour sensibiliser tous les acteurs, qu’ils soient chirurgiens,
anesthésistes-réanimateurs, médecins, directeurs ou soignants.
Bibliographie
[1] Instruction DGOS/R3/2010/457 du 27 décembre 2010 relative à la chirurgie ambulatoire : perspectives de déve-
loppement et démarche de gestion du risque.
[2] Instruction DGOS/R3/2015/296 du 28 septembre 2015 relative aux objectifs et orientations stratégiques du
programme national de développement de la chirurgie ambulatoire pour la période 2015-2020.
[3] RFE « prise en charge anesthésique des patients en hospitalisation ambulatoire », SFAR 2009.
[4] CNAMTS, CCMSA, CANAM, « Conditions de développement de la chirurgie ambulatoire Évaluation du
potentiel de substitution pour les 18 gestes marqueurs en juin 2001 » Programme national inter-régimes, Paris,
octobre 2003 : www.ameli.fr
[5] ANAP HAS. Ensemble pour le développement de la chirurgie ambulatoire. Recommandations organisation-
nelles ; mai 2013 : www.anap.fr
[6] Itinéraire chir ambu® : http://www.anap.fr/les-projets/promouvoir-la-performance-interne-des-organisations-
des-es-et-esms/itineraire-chir-ambu/
[7] Indicateur de performance chirurgie ambulatoire : http://www.scansante.fr/applications/Indicateur-de-
performance/
[8] Hospi Diag® : http://hospidiag.atih.sante.fr/
[9] Le Figaro « Hôpital chirurgie ambulatoire : le palmarès des établissements » édition du 29 décembre 2016 :
http://sante.lefigaro.fr/article/chirurgie-ambulatoire-premier-classement-des-meilleurs-hopitaux
UNITÉ DE CHIRURGIE
AMBULATOIRE
Guy Bazin
Introduction
La typologie des Unités de chirurgie ambulatoire (UCA) a toujours été abordée par le
versant architectural, qui privilégie la surface aux flux. Depuis la publication du livre le plus
consensuel et fondateur, de Bernard Wetchler en 1985, Anesthesia for Ambulatory Surgery
suivi, en 1986, de son article princeps et causatif, Ambulatory surgery : futur is now, on
distingue quatre types de centres. Leur définition respective est simple et inchangée. Pourtant,
elle a donné lieu à toutes les confusions et toutes les interprétations.
L’accueil, le séjour et le bloc opératoire sont les trois composantes du circuit ambulatoire.
Centre intégré
Localisé dans l’hôpital, le modèle intégré dispose de locaux d’accueil et de séjour dédiés
à la chirurgie ambulatoire. Par contre le bloc opératoire est commun aux activités tradition-
nelles et ambulatoires (Figure 1).
j:\2000\image\190346\bazin\1
Plus facile et moins onéreux à mettre en œuvre à partir de l’existant, il répond exactement
au décret fondateur de 1992. C’est le modèle le plus simple, érigé, en France, en modèle
unique. Vingt-cinq ans plus tard, il est encore quasi exclusif, immuable, et probablement
responsable du faible développement de la chirurgie ambulatoire.
22 G. Bazin
Parfaitement autorisée, leur mise en œuvre, plus onéreuse, plus risquée, repose sur un
projet élaboré qui tient compte de tous les flux avec une marge de progression réaliste. Ce
centre vise une indépendance fonctionnelle.
Avec la suprématie du modèle unique, les centres autonomes ont intéressé peu de monde
en première intention. Ceux qui ont vu le jour furent mono- ou bidisciplinaires, portant surtout
sur le traitement de la cataracte, la chirurgie de la main et l’endoscopie... Dans l’ensemble, ils
ont plutôt bien fonctionné, sachant que leur développement est directement fonction de leur
capacité à augmenter le volume des actes.
Par contre, un centre autonome, pluridisciplinaire de première intention a rarement la
même évolution. On a remarqué qu’un tel centre, plus isolé qu’indépendant, n’a pas favorisé
d’emblée l’innovation. Les acteurs ont gardé le modèle antérieur, autant dans l’agencement
des locaux que dans la gestion des flux en tuyaux d’orgue. Les seuils d’activité par spécialité
se sont avérés trop bas pour amortir les doublons de personnels et de matériels. La concurrence
s’est immédiatement installée avec le circuit traditionnel. Les ratios financiers n’ont pas été
bons. Les comportements ont peu changé, les unités n’ont pas décollé et ont stagné. À cela
se sont ajoutées des conceptions architecturales figées, insuffisamment dimensionnées, qui ont
bloqué le développement. Ces expériences ont refroidi les velléités. Ce n’est pas pour autant
que ces centres autonomes pluridisciplinaires sont à jeter définitivement. Ils ont été conçus
trop tôt avec des concepts peu novateurs, isolés dans des centres majoritairement intégrés. Le
modèle intégré unique adopté par la France a marqué les consciences pour longtemps et reste
encore trop prégnant.
24 G. Bazin
Centre satellite
Localisé hors des bâtiments de l’hôpital mais à l’intérieur du campus hospitalier, le modèle
satellite dispose de locaux d’accueil, de séjour et d’un bloc opératoire dédiés à la chirurgie
ambulatoire (Figure 3).
j:\2000\image\190346\bazin\3
Principes essentiels
– La chirurgie ambulatoire est indissociable de la chirurgie dans sa globalité. La chi-
rurgie ambulatoire ne se fait pas. Elle fait partie d’un tout médical, organisationnel, adminis-
tratif, politique, financier...
– Évaluation du nombre de patients et les répartir en fonction de leurs besoins.
Nombre de patients hospitalisés (chirurgie lourde et de recours, avec facteurs de comorbidité),
nombre de patients ambulatoire avec surveillance prolongée (cholécystectomie, arthroplastie
du genou sous arthroscopie, prothèse totale de la hanche, sans facteur de comorbidité), nombre
de patients dans un circuit très court.
– Tout est subordonné au temps. Le temps n’est pas réduit à celui de la salle d’opé-
ration, ou celui du chirurgien. Le temps doit être élargi au circuit, à un matériel, aux ressources
humaines, à un moment de la journée et dédié différemment à un autre moment. Cette tem-
poralité est une ressource, comme une autre, naturelle, non renouvelable, qu’il faut savoir
utiliser, tordre et gérer.
– Les modes de prises en charge doivent être ajustés, adaptatifs, diversifiés. Nous
souffrons de la persistance du principe, toujours renouvelé et centralisé du modèle unique qui ne
peut pas répondre à la disparité des moyens, des ressources et des comportements liés à la
pluridisciplinarité. On s’attache à la voie unique et rigide du circuit patient sans imaginer que de
très nombreux autres circuits cohabitent, avec de multiples aiguillages possibles, permettant de
réguler la variation permanente des flux. On s’accroche aux salles identiques sans voir que
chaque patient consomme des ressources différentes le plus souvent du simple au double. Les
supports subissent la loi du tout ou rien et de l’unicité (tout chariot ou tout fauteuil, ou tout lit...).
– Aucune construction définitive. Il faut pouvoir suivre l’évolution et s’adapter sans
avoir à répondre systématiquement par l’augmentation des ressources.
– Hiérarchisation de la notion de proximité (immédiate, plus éloignée mais au même
étage, à un étage différent...). Les circuits sont d’autant plus courts que les interventions sont
courtes et fréquentes.
– Autonomisation d’un circuit court. La chirurgie réglée, standardisée, sans facteur de
comorbidité et de très courte durée (moins de 30’) touche plus de 40 % des patients.
– Hiérarchisation des surfaces. Une enceinte de bloc opératoire est coûteuse autant par
la surface construite que par son coût de fonctionnement. Les surfaces de stockage, d’attente,
les vestiaires, la stérilisation, y compris la SSPI, doivent être repoussés en périphérie ou à un
étage différent pour réduire la circulation de tous ordres et ne pas écarteler les surfaces utiles
et spécialisées. Les trajets du personnel et du matériel se comptent en km.
– Autorisation des bornages moins traditionnels pour améliorer la fluidité. Pouvoir
positionner, selon les besoins, les zones de préparation ou de pré anesthésie. De même, une
partie de la zone de récupération des patients de l’unité de chirurgie ambulatoire pourrait être
indifféremment à l’intérieur ou à l’extérieur du bloc pour limiter les attentes telles les visites
médicales de sortie des patients qui se font par pool, très frénatrices de flux.
– Privilégier les flux tirés.
– Calibrage des entrées et des sorties de l’enceinte chirurgicale en fonction des flux.
– Assemblage des flux de même nature. L’accueil, la préparation du patient et la préa-
nesthésie, en flux tiré, sont les mêmes, que le patient soit hospitalisé ou en ambulatoire. Les
secteurs de la préanesthésie seraient au centre et équidistants des sites opératoires et des circuits.
Unité de chirurgie ambulatoire 27
Centres indépendants
Le modèle dispose de locaux d’accueil, de séjour et d’un bloc opératoire dédiés à la
chirurgie ambulatoire en dehors d’un établissement de soins (Figure 5).
j:\2000\image\190346\bazin\5
Conclusion
Bien évidemment, nous sommes très loin du Far Ouest américain, du désert australien,
ou des montagnes du Yukon. Mais au regard du coût de la santé et du cumul des déficits, bien
malin celui qui peut affirmer que le barrage que nous avons soigneusement érigé, depuis tant
d’années, pour protéger nos organisations un peu dépassées et gâcheuses, ne sautera jamais.
L’effet sera brutal et dévastateur. Nous avons probablement un besoin urgent de diversifier
l’offre et d’isoler les circuits en fonction des volumes. Les maillons manquants des modèles
indépendants ne pourront pas être éternellement repoussés et interdits.
D’autant que les tutelles sont parfaitement informées de l’existence d’OBS, en France,
dans lesquels des actes sont couramment pratiqués, sans autorisation, ni contrôle d’hygiène et
sans sécurité anesthésique : l’implantologie et les comblements de sinus par les chirurgiens-
dentistes.
En termes d’organisation de la prise en charge chirurgicale, notre Far West, très spéci-
fique, ne promet pas, dans l’immédiat, la Silicon Valley !
Bibliographie
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Congress, Paris, June, 1987.
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Unité de chirurgie ambulatoire 29
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Bontemps G, Comment utiliser la tarification pour favoriser les processus de soins les plus efficaces ?, Actes des
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Bontemps G, Sales JP. La chirurgie publique peut-elle rebondir ? Le Nouvel Hospitalier SNCH, mai 2007.
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Jouffroy L, N’Guyen Roux S Les nouveaux défis de l’ambulatoire : les dispositions réglementaires. Actes des journées
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ANAP, HAS, Recommandations organisationnelles Chirurgie Ambulatoire, 2013.
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ANAP, ATIH, HOSPIDIAG, mise à jour 2016.
RÉSULTAT
DES ENQUÊTES
Hubert Johanet
Dans le cadre de ce rapport, deux enquêtes ont été menées : l’une qualitative, pour évaluer
par les réponses à 59 questions la prise en charge des patients en ambulatoire, l’autre quanti-
tative par l’analyse des patients pris en charge en ambulatoire du 1er au 31 octobre 2016.
Concernant, l’enquête qualitative, 60 équipes ont répondu ; il s’agissait de 28 centres hos-
pitaliers généraux, 17 centres hospitalo-universitaires, 12 établissements privés, 3 établisse-
ments privés non lucratifs. Plusieurs conclusions apparaissent.
Les équipes qui ont répondu disposent d’une Unité de chirurgie ambulatoire (UCA) depuis
moins de 5 ans dans 31,6 % des cas, moins de 2 ans dans 10 % des cas. Une majorité de
63,3 % des unités a moins de 15 places ; compte tenu de l’évolution des prises en charge, il
est à prévoir que nombre d’UCA devront être redimensionnées à moyen terme. Parmi ces
équipes, les appels de la veille et du lendemain sont réalisés dans 75 % des cas, témoignant
d’un souci de qualité dans la prise en charge. Si ces appels ne sont pas réglementairement
obligatoires, 46,6 % des équipes pensent qu’il s’agit d’une obligation réglementaire ; c’est le
cas dans 76,6 % pour les appels du lendemain.
Si l’UCA doit être réglementairement individualisée, le choix du bloc est libre : seules
8,4 % des équipes ont un bloc dédié à la chirurgie ambulatoire. Dans 70 % des cas, les pro-
tocoles de prise en charge ont été réalisés en commun par les chirurgiens et les anesthésistes.
On retrouve cette appropriation commune de la chirurgie ambulatoire par les chirurgiens et
les anesthésistes puisque pour 50 % des équipes le coordinateur médical est un chirurgien et
dans 50 % des cas un anesthésiste. De même, l’autorisation de sortie de l’UCA est pour 58,3 %
des équipes, signée conjointement par le chirurgien et l’anesthésiste.
L’information préopératoire est délivrée oralement, mais aussi par un document écrit dans
90 % des cas ; 10 % des équipes utilisent internet. Nous regrettons de ne pas avoir détaillé cet
item ; en effet, s’agit-il d’une information sur l’intervention et/ou l’anesthésie, sur la prépara-
tion à l’intervention, sur les règles de retour, sur les signes d’alerte, sur le maniement et les
possibles effets secondaires des antalgiques, sur la conduite automobile, sur les numéros de
téléphone de recours ? Le document écrit a-t-il été lu ? A-t-il été compris ? En effet, si certains
éléments d’information sont communs à une prise en charge en hospitalisation, d’autres sont
très spécifiques à une prise en charge ambulatoire. Des précisions utiles sur ces points ont été
apportées par les Recommandations formalisées d’experts (RFE) de la Société française d’anes-
thésie réanimation (SFAR).
La prise en charge est évolutive ; en effet, si l’arrivée au bloc se fait majoritairement en
brancard (pour 60 % des équipes), dans certains cas, les patients arrivent en fauteuil ou même
à pied ; le mode d’arrivée est variable selon les interventions pour 31,6 % des équipes. De même,
la distance hôpital-domicile pour une prise en charge en ambulatoire varie selon les interventions
pour 46,6 % des équipes. Cette distance n’est pas un dogme ; elle est de une heure pour 56,6 %
Résultat des enquêtes 31
des équipes, de 30 minutes pour 31,6 % et de deux heures pour 11,6 %. La présence d’un
accompagnant est systématique au domicile la première nuit pour 85 % des équipes (15 % en
fonction de l’intervention) ; en revanche, la présence d’un accompagnant pour le trajet de retour
au domicile est beaucoup plus partagée : pour 53,3 % des équipes, un chauffeur de taxi ou un
ambulancier ne peuvent jamais tenir lieu d’accompagnant, pour 23,3 % des équipes, un chauffeur
de taxi est un accompagnant, la proportion est la même pour un ambulancier. Les RFE de la
SFAR précisent que l’accompagnement par un tiers est une nécessité. Soixante-cinq pour cent
des équipes ne recourent pas à une consultation infirmière préopératoire pour l’information et
l’éducation du patient, 21,6 % y recourent toujours, 13,3 % selon les interventions. La prise en
charge de pathologies de plus en plus lourdes en ambulatoire par le biais de la réhabilitation
améliorée en chirurgie devrait voir se développer le rôle d’infirmières coordinatrices.
La préparation cutanée reste aléatoire ; si pour 98,3 % des équipes, tous les patients ont
une douche antiseptique en préopératoire, dont 94,9 % au domicile, une dépilation, non recom-
mandée par la Société française d’hygiène hospitalière ou la Société française de chirurgie
digestive est encore réalisée dans 50 % des cas ; dans 18 % des cas, il est encore réalisé un
rasage, clairement proscrit par les recommandations. De même, l’ordonnance de pansements
à la sortie est systématique pour 46,6 % des équipes, sélective pour 48,3 % des équipes.
Quatre-vingt pour cent des équipes réalisent la check-list, les infiltrations des incisions
par des produits anesthésiques à résorption lente sont systématiquement pratiquées par 48,3 %
des équipes, sélectivement par 46,6 % d’entre elles, plutôt en fin d’intervention, l’instillation
de produits anesthésiques à résorption lente dans la cavité péritonéale est systématique dans
18,3 % des cas, sélective dans 23,3 % des interventions. Dans 66,6 % des cas, les patients ne
sortent pas déperfusés de la salle de réveil. Si 76,6 % des équipes connaissent les durées de
séjour en fonction des interventions en UCA, 70 % ignorent les durées de séjour en Salle de
surveillance postinterventionnelle.
La sortie de l’UCA est validée par un score pour 63,3 % des équipes ; pour respecti-
vement 91,6 et 78,3 % des équipes, le patient doit manger et uriner avant la sortie. On observe
que ces éléments ne figurent pas dans les RFE de la SFAR. Les patients disposent toujours
du numéro de téléphone direct du chirurgien pour 51,6 % des équipes, pour certaines inter-
ventions pour 10 % des équipes, du numéro de téléphone direct de l’anesthésiste pour 25 %
d’entre elles. 86,6 % des équipes donnent à la sortie un questionnaire de satisfaction, 68,3 %
un compte rendu opératoire, 25 % un compte rendu d’anesthésie. Vingt pour cent des équipes
disposent d’un réseau Ville-Hôpital. Dans 23,3 % des cas, des équipes ont mis en place des
mesures spécifiques pour le suivi après l’hospitalisation, ces mesures sont mises en place de
façon sélective pour certaines interventions par 26,6 % des équipes. Il s’agit le plus souvent
d’infirmière à domicile, de permanence téléphonique, les objets connectés ne sont utilisés
que par une seule équipe. Dans 13,3 % des cas, des équipes ont mis en place des protocoles
en concertation avec des médecins urgentistes et 8,3 % avec les médecins traitants. On rap-
pelle que l’article D. 6124-304 du Code de santé publique précise que le patient doit disposer
à sa sortie d’un bulletin de sortie, signé par un des médecins, comportant l’identité des per-
sonnes ayant participé à l’intervention, les recommandations concernant la conduite à tenir
pour la surveillance postopératoire et anesthésique et les coordonnées de l’établissement de
santé assurant la permanence et la continuité des soins.
Quarante pour cent des équipes ne disposent pas de marqueurs qualité quant à leur prise
en charge en ambulatoire. Pour les autres, les marqueurs utilisés sont le taux et la nature des
réhospitalisations (43,3 % des équipes concernées), les retards à la sortie d’UCA (36,6 %),
l’évaluation de la satisfaction des patients (36,6 %), les déprogrammations (31,6 %), les admis-
sions non programmées (23,3 %), les réinterventions (16,6 %), les consultations téléphoniques
imprévues (5 %), les consultations physiques imprévues (3,3 %).
32 H. Johanet
L’ensemble des réponses à cette enquête montre une appropriation et une étroite colla-
boration entre chirurgiens et anesthésistes pour la prise en charge ambulatoire, une adaptabilité
des pratiques dans le flux des patients, avec des améliorations possibles dans la gestion du
flux, la préparation cutanée, et l’utilisation de marqueurs qualité. Il est à noter qu’il existe une
étude en cours (Opera) sur la prise en charge ambulatoire portant sur 300 centres, réalisée par
la SFAR en collaboration avec l’Inserm.
Concernant, l’étude quantitative, les résultats sont les suivants.
278 patients ont été opérés en ambulatoire moins de 12 heures entre le premier et le
31 octobre 2016, dans un centre hospitalier général dans 49,6 % des cas, dans un centre hos-
pitalo-universitaire dans 41,3 % des cas, dans un centre privé dans 9 % des cas.
Ont été réalisées :
– 97 cures de hernies inguinales ;
– 50 cholécystectomies, dont une cholécystite aiguë ;
– 49 poses de chambre implantable ;
– 37 interventions proctologiques ;
– 17 cures de hernies antérieures ou éventrations ;
– 15 drainages d’abcès des parties molles ;
– 5 lobectomies thyroïdiennes ;
– 2 parathyroïdectomies ;
– 1 sleeve gastrectomie ;
– 1 ablation d’anneau de gastroplastie ;
– 1 geste sur un boîtier d’anneau de gastroplastie ;
– 1 colectomie gauche ;
– 1 cure de prolapsus du rectum par voie basse ;
– 1 appendicectomie.
Le détail des cures de hernies inguinales est résumé dans le tableau I ; parmi les 17 cures
de hernies antérieures ou éventration, 13 ont été opérées avec prothèses (11 par voie convention-
nelle et 2 par voie cœlioscopique) et 4 par suture. Parmi les interventions proctologiques, on
relève 11 cures d’hémorroïdes, 11 excisions de kyste pilonidal, 7 cures de fistule anale, 3 drai-
nages d’abcès, 3 drainages de kyste pilonidal, 2 exérèses de condylomes. Parmi les 5 lobecto-
mies thyroïdiennes, figurent trois traitements percutanés. Seize patients ont été des échecs de la
prise en charge en ambulatoire (5,7 %). Treize patients ont été gardés le soir (4,7 %) pour :
– 3 horaires tardifs, après une pose de chambre, une cure d’hémorroïde, une cure de
hernie inguinale ;
– 2 douleurs après une cholécystectomie et une cure d’hémorroïdes ;
– 1 calcul de la voie biliaire principale lors d’une cholécystectomie ;
– 1 drainage après cure d’éventration ;
– 1 conversion pour cholécystectomie ;
– 1 échec d’abord vidéoscopique pour parathyroïde intrathyroïdienne ;
– 1 agrafage du canal cystique lors d’une cholécystectomie ;
– 1 vomissement après cholécystectomie ;
– 1 malaise vagal après cure de hernie inguinale ;
– 1 absence d’accompagnant après cure de fistule anale.
Trois patients ont été réhospitalisés avant la consultation postopératoire (1,1 %) : une
hémorragie après cure d’hémorroïde, une hémorragie après cure de prolapsus du rectum par
voie basse, ces deux patients ont été réopérés, une fièvre après cholécystectomie non réopérée.
Dans cette série, quatre patients ont été réopérés (1,4 %) : deux des trois patients réhos-
pitalisés, l’agrafage du canal cystique lors d’une cholécystectomie, et la patiente convertie
pour exérèse de parathyroïde intrathyroïdienne.
Résultat des enquêtes 33
Tableau I
Cures des hernies inguinales
Cures unilatérales
Voies conventionnelles
Voie cœlioscopique 18 8
Cures bilatérales
Voies conventionnelles
Voie cœlioscopique 5 1
Total 97 46
Parmi les 50 patients pris en charge pour cholécystectomie, le taux d’échec de la prise
en charge ambulatoire a été de 10 % ; parmi les 97 cures de hernies inguinales, le taux d’échec
a été de 2 %.
Il n’existe pas de spécificité concernant les règles de jeûne en chirurgie ambulatoire. Elles
ont été initialement éditées pour l’objectif sécuritaire de prévenir l’inhalation bronchique de
liquide gastrique qui est un accident grave. L’objectif est également d’éviter un jeûne pré-
opératoire trop prolongé, responsable, outre l’inconfort du patient (il s’agît d’un facteur prouvé
d’anxiété préopératoire), d’instabilité hémodynamique, de nausées-vomissements et de séda-
tion postopératoires. En absence d’altération de la vidange gastrique, la prise de liquide clair
(eau, café, thé, jus de fruit sans pulpe et boissons sucrées non gazeuses) est permise jusqu’à
2 heures avant une anesthésie [1-3]. Des données récentes, obtenues chez le volontaire sain
après un jeûne solide de 6 heures, montre que l’absorption de 175 mL de café avec du lait non
écrémé à 20 ou 50 % n’augmente pas le résidu gastrique à 2 h mesuré par résonance magné-
tique nucléaire par rapport à un groupe contrôle sans lait [4]. Il est à noter que les solutions
de préparation colique sont assimilées à des liquides clairs et répondent donc au même délai
de jeûne que ces derniers [5, 6].
Le délai entre la dernière prise alimentaire pour les autres aliments solides et l’anesthésie
doit être de 6 heures [1-3]. Il pourrait même être prolongé jusqu’à 8 heures (recommandations
nord-américaines) lorsqu’il s’agit d’aliments gras, fris ou pour la viande [2]. Pour le lait maternel,
la durée de jeûne préconisée est de 4 heures [1, 2]. La prise de solution enrichie en carbohydrate
est permise jusqu’à deux heures avant l’anesthésie [7]. Elle diminue le remplissage peropératoire,
le risque de nausées vomissements postopératoires, le risque de rétention d’urines [8].
En absence de troubles de la déglutition, la reprise postopératoire d’une alimentation
(d’abord liquide) doit se faire dès que le patient le souhaite sans qu’il existe un délai minimal
réglementaire à respecter après la fin de l’anesthésie [1].
Bibliographie
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Heure et durée de l’intervention 35
[4] Larsen B, Larsen L, Sivesgaard K, Juul S. Black or white coffee before anaesthesia ? : A randomised crossover
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outcome after day care laparoscopic cholecystectomy. Surg Endosc 2015 ; 29 : 3267-72.
doivent faire l’objet d’une attention spécifique, notamment sur le choix des produits, la pré-
vention de l’hypothermie ou encore le remplissage vasculaire. Elles doivent être planifiées le
plus tôt possible dans le programme opératoire afin de pouvoir assurer une surveillance pos-
topératoire de durée suffisante.
Bibliographie
[1] Beaussier M, Marchand-Maillet F, Dufeu N, Sciard D. Organizational aspects to optimize patient’s ambulatory
pathway. Curr Opin Anaesthesiol 2015 ; 28 : 636-41.
[2] Beaussier M, Dufeu N, Niccolai P, Theissen A. Chirurgie ambulatoire : aspects organisationnels. Arnette Éd.
2016.
Malgré toutes ces recommandations, l’incidence des NVPO reste élevée. En effet, une
grande variabilité existe en fonction du terrain, du poids du patient, de l’ethnicité (moitié moins
de NVPO chez les Noirs comparés aux Caucasiens en Afrique du sud) et de la chirurgie [6].
Deux études récentes ne montrent pas de différence significative quant à l’incidence et
la sévérité des NVPO et PDNV lorsque TIVA est comparée à une anesthésie avec halogénés
et une prévention des NVPO par sétron après thyroïdectomie ou TIVA est comparée avec ou
sans prévention par ondansétron et dexaméthasone en chirurgie bariatrique. Dans ces deux
études l’incidence des NVPO et PDNV est élevée et sans différence significative entre les
groupes [7, 8]. Les protocoles retenus doivent donc tenir compte de la spécificité de la chirurgie
et ajuster les doses en fonction du poids.
L’approche doit être multimodale. En dehors de la dexaméthasone et du droperidol (à
faible dose compte tenu du risque de torsade de pointe), il semble que le midazolam à faible
dose ait un effet favorable dans la prévention des NVPO [9, 10]. Le métopimazine (Vogalène®)
présente l’intérêt d’être administrable par voie orale dispersible (Lyoc) et suppositoire. Bien
que son efficacité dans ce contexte n’ait pas été formellement démontrée, sa prescription peut
s’envisager dans certains cas.
La gabapentine et la prégabaline ont aussi un effet positif sur la prévention des NVPO
mais au prix d’une sédation postopératoire souvent incompatible avec une procédure en
ambulatoire.
De nouvelles recherches sur le développement de nouveaux antiémétiques tels que les
antagonistes de la neurokinin-1, de la dopamine et des cholinergiques semble porteuses d’espoir
[11]. La scopolamine transdermique est très utilisée outre-atlantique. L’aprepitant (Emend®)
est un antagoniste NK-1 particulièrement efficace et qui a été évalué en période postopératoire.
Son effet serait plus efficace que l’ondansétron et pourrait être additif à ce dernier en cas de
prescription simultanée. Sa durée d’action pourrait couvrir plus de 24 heures postopératoires
et sa tolérance semble excellente. Il est actuellement réservé aux épisodes sévères et résistants
aux traitements habituels.
Dans le contexte de l’ambulatoire, compte tenu des conséquences de la survenue d’un
épisode de NVPO, l’utilisation systématique en prophylaxie de la dexamethasone (qui n’aug-
mente pas l’incidence d’infection du site opératoire) et du droperidol (à une dose inferieure à
1 mg) se justifie avant une anesthésie générale [12, 13]. Chez les patients les plus à risques,
une trithérapie par adjonction de l’ondansétron peut être justifiée. La survenue de NVPO sera
traitée par l’ondansétron dont le profil pharmacocinétique caractérisé par une action rapide en
fait une molécule bien adaptée au curatif. Certaines molécules utilisées en cancérologie pour-
ront avoir un rôle dans le traitement des NVPO prolongées comme le palonosétron qui a une
durée d’action pouvant aller jusqu’à 72 heures [14]. La prescription de sétrons en ville doit se
faire sur ordonnances spéciales ce qui complique parfois la délivrance.
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Introduction
La douleur après chirurgie ambulatoire est un symptôme fréquent dont on sait qu’il est
responsable de la plupart des retards de sortie et des hospitalisations secondaires. La douleur
retentit significativement sur la vie quotidienne et ralentit la reprise d’une activité normale.
Le développement de l’ambulatoire vers des chirurgies de plus en plus lourdes impose une
stratégie avec une prise en charge dès la consultation préopératoire. Les molécules et techni-
ques antalgiques disponibles sont nombreuses. En effet, les trois paliers d’antalgiques et les
anesthésiques locaux permettent une approche multimodale de prise en charge de la douleur
adaptée au type de chirurgie et au patient. De meilleures préparation et information des patients
permettent des avancées significatives dans ce domaine et font partie intégrante de la prise en
charge.
Les données épidémiologiques sont anciennes mais concordantes et mettent le doigt sur
les carences dans ce domaine. L’incidence globale de la douleur est de l’ordre de 30 % dont
5 et 10 % pour les douleurs sévères [1-6]. Cette douleur peut persister quelques jours à une
semaine [1, 6, 7]. Elle serait responsable de près d’un tiers des causes de réhospitalisations
secondaires [1]. Rawal et coll. ont montré qu’un nombre important de patients présentait des
douleurs considérées comme modérées à sévères après leur retour à domicile. Ces douleurs
persistaient sans diminuer pendant les 48 premières heures postopératoires et étaient respon-
sables de troubles de sommeil et d’une fatigabilité importante [2]. Une autre étude a retrouvé
Analgésie après chirurgie ambulatoire 39
des résultats comparables chez 89 patients opérés en ambulatoire suivis sur une semaine : 40 %
de ces patients ont présenté des douleurs modérées à sévères durant les 24 premières heures
postopératoires et après une semaine, 44 % des patients décrivaient une douleur suffisamment
importante pour perturber leur activité quotidienne [3]. Les auteurs de ces deux études
concluaient sur l’insuffisance des traitements antalgiques et la nécessité d’une « éducation »
des patients sur la façon de gérer leur douleur. De plus, dans l’étude de Beauregard et coll.,
les auteurs ont mis en évidence une sous-utilisation des antalgiques par les patients. Un tiers
des patients n’avait pris aucun traitement antalgique alors que la moitié d’entre eux présentait
des intensités douloureuses 6 40 mm/100. Cette attitude semble principalement liée à la crainte
des effets secondaires : toxicité gastrique pour les anti-inflammatoires, nausées/vomissements
et risque de dépendance pour les morphiniques [3]. Ces données sont objectivement anciennes
mais il est probable qu’elles sont toujours pertinentes avec l’élargissement des indications de
l’ambulatoire. Il est donc indispensable d’une part, de définir clairement une stratégie de prise
en charge pour chaque type de chirurgie et d’autre part, de s’assurer qu’elle a bien été comprise
par le patient.
Différents traitements
Chacun des trois paliers doit avoir sa place dans la prise en charge de la douleur. Le
concept « d’épargne morphinique » ne doit pas exclure les morphiniques de la stratégie mais
faire en sorte d’en réduire l’usage à un traitement de secours. C’est l’idée du concept d’anal-
gésie multimodale défini dans les années 1990 par Henrik Kehlet. Celui-ci propose une combi-
naison d’antalgiques morphiniques et non-morphiniques agissant de façon complémentaire à
différents niveaux des voies de la douleur [8]. Sa finalité est d’obtenir une analgésie optimale
en réduisant les effets secondaires, particulièrement ceux liés aux morphiniques.
L’efficacité des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) n’est plus à démontrer. De
nombreuses études et plusieurs méta-analyses confirment un effet d’épargne morphinique
associé à une diminution des effets secondaires. Cet effet a été mis en évidence tant avec les
AINS non sélectifs qu’avec les inhibiteurs sélectifs des COX 2 (ISCOX2) [9]. Après cholé-
cystectomie sous cœlioscopie en ambulatoire, la prescription systématique d’un AINS de type
inhibiteur sélectif des COX 2 réduit significativement la consommation totale de morphinique
à la demande. Le gain en équivalent morphine est en moyenne d’environ 4 à 6 mg/j entre J1
à J4. Cet effet « d’épargne morphinique » a permis une diminution significative des effets
secondaires (nausées, vomissements, sédation) et notamment de la sensation de fatigue.
L’intensité de la douleur était également plus faible dans le groupe coxib [10]. Cet effet
d’épargne morphinique est également retrouvé avec le paracétamol et le nefopam mais sans
réduction des effets secondaires [11]. L’association de paracétamol et d’un AINS est intéres-
sante avec un effet additif [12]. En revanche, le respect des contre-indications est indispensable,
il s’agit principalement des effets gastro-intestinaux et rénaux. Les risques de saignement sont
toujours débattus, par exemple après amygdalectomie où ils n’ont plus été recommandés pen-
dant longtemps mais des données récentes ont montré finalement qu’ils ne majoraient pas le
risque de saignement. Les risques cardiovasculaires thrombotiques existent pour tous les AINS
mais uniquement pour des traitements prolongés. C’est pour cette raison qu’il n’est pas recom-
mandé de dépasser 7 jours de traitement pour les patients à risque [9].
40 L. Delaunay
En ce qui concerne les paliers II, trois molécules sont disponibles en France, ce sont
l’opium, le tramadol et la codéine. Ce sont tous les trois des opioïdes avec en plus une action
sur les voies sérotoninergiques pour le tramadol. De fait, ils présentent les mêmes effets secon-
daires que les paliers III et probablement avec la même fréquence à doses équi-analgésiques.
La principale limite pour le tramadol et la codéine est qu’il s’agit de prodrogues qui doivent
être tout, ou en partie, métabolisées par le foie pour être efficaces. L’efficacité de ces produits
est donc dépendante de la capacité du cytochrome P450 à produire un métabolite actif. Elle
est variable selon les individus avec un grand polymorphisme génétique [13]. Par exemple, la
codéine n’est pas métabolisée en morphine chez 15 % de la population caucasienne, elle est
donc inefficace chez ces patients [13]. À l’opposé, il existe des « métaboliseurs » rapides qui
vont présenter un risque important de mauvaise tolérance. Des cas de dépressions respiratoires
sévères après prise orale d’une dose habituelle ont été décrits. La poudre d’opium évite cette
variabilité liée au métabolisme et permet l’administration de faibles doses qui suffisent dans
un bon nombre de cas. La poudre d’opium correspond environ à 10 % de morphine base. Les
conditionnements avec de la caféine n’apportent rien. En revanche, l’association avec le para-
cétamol peut être intéressante. Il a été montré qu’elle était plus efficace (25 mg d’opium
correspondant à 2,5 mg de morphine) et mieux tolérée que l’association tramadol/paracétamol.
Ces molécules sont largement utilisées seules ou en association avec du paracétamol et
il existe de nombreuses formes galéniques. Elles semblent être intéressantes en ambulatoire
en permettant de prendre en charge des chirurgies dont le niveau prévisible de douleur est
modéré à peu sévère. Néanmoins comme tout ce qui est « intermédiaire », leur place est dif-
ficile à standardiser. Les choses sont plus faciles quand le patient connaît ces produits et peut
dire s’ils sont efficaces ou pas, ou mal tolérés chez lui. Pour les autres, c’est un choix d’équipe,
au cas par cas, soit en traitement systématique mais avec une majoration du risque de NVPO
soit comme traitement de secours mais en se posant la question du choix d’un palier III en
alternative.
En ce qui concerne les paliers III (opiacés forts), il est important de rappeler que les
opioïdes sont les médicaments les plus efficaces sur la douleur postopératoire par excès de
nociception. Ils présentent un certain nombre d’effets secondaires bien connus : nausées et
vomissements, sédation, hallucinations et un risque de dépendance, en sachant que ce dernier
est limité avec des prescriptions à la demande et sur des durées courtes. Ces effets secondaires
ont conduit à définir le concept, déjà évoqué d’épargne morphinique. De nombreuses études
ont montré que, même avec une analgésie efficace et des EVA moyennes entre 0 et 2 cm/10,
un certain nombre de patients avaient à un moment ou un autre besoin d’un traitement de
secours [14]. L’utilisation de la forme per os pour prendre en charge la douleur postopératoire
est validée depuis plusieurs années et fait partie des recommandations de la SFAR de 2008
[9]. Les formes à libération immédiate sont les plus adaptées en première intention, notamment
en ambulatoire, dans la mesure où il s’agit d’un traitement de secours nécessitant un pic
d’action rapide [15]. La prescription d’antalgiques de palier III est soumise à des règles strictes
qu’il faut connaître. L’utilisation d’ordonnances sécurisées, la prescription en toutes lettres et
la délivrance d’un nombre limité de gélules par la pharmacie sont des mesures faciles à mettre
en place. Par contre, la prescription anticipée quinze jours ou un mois avant la chirurgie est
plus compliquée à organiser avec la législation actuelle. Une discussion est indispensable avec
nos collègues pharmaciens pour faire évoluer les textes.
Tous les patients doivent bénéficier d’une analgésie locorégionale. L’utilisation des anes-
thésiques locaux (de préférence de longue durée d’action), que ce soit dans un bloc tronculaire
(TAP bloc, bloc des droits, bloc ilio-inguinal/ilio-hypogastrique, bloc paravertébral, bloc
pudendal...) ou en infiltration (orifices de trocarts, plaie opératoire ou intrapéritonéale) participe
efficacement au concept d’analgésie multimodale. Néanmoins leur durée d’action, en injection
Analgésie après chirurgie ambulatoire 41
unique, dépasse rarement 12 à 18 heures. Des additifs ont été proposés, notamment la dexa-
méthasone, qui prolonge significativement le bloc sensitif [16, 17]. Mais, même si une anal-
gésie est possible jusqu’à 72 heures après l’injection, la moyenne reste toujours inférieure à
24 heures. De plus, pour les blocs périphériques un effet « rebond » est possible et doit être
anticipé [18, 19]. Pour les chirurgies les plus douloureuses, la mise en place d’un cathéter avec
un suivi à domicile peut être envisagée [20]. Les patients en ayant bénéficié ont eu une bien
meilleure analgésie et une diminution de la consommation d’antalgiques de secours associée
à une amélioration de la « qualité de vie » et de la qualité du sommeil [21]. Cette modalité de
prise en charge peut nécessiter le suivi par un prestataire de soins à domicile.
Il existe une littérature extensive concernant l’utilisation des infiltrations dans diverses
chirurgies. Pour la chirurgie du sein en ambulatoire, le bloc paravertébral a été comparé favo-
rablement à l’anesthésie générale avec une réduction des douleurs, de la consommation d’antal-
giques et des nausées vomissements. Qui plus est, on observe également une diminution des
durées d’hospitalisation [22, 23]. Néanmoins, c’est une technique, dont la balance bénéfice-
risque mérite réflexion pour une chirurgie peu invasive. De description plus récente, les blocs
de la paroi thoracique sont une alternative intéressante. Ils permettent de bloquer les nerfs
pectoraux (PECI) et les nerfs intercostaux de façon plus ou moins étendue (PECII et Serratus
block) et sont de réalisation beaucoup plus simple que le bloc paravertébral [24].
Les blocs de la paroi abdominale (TAP block) peuvent être recommandés. Une méta-
analyse récente a confirmé leur intérêt pour réduire la douleur postopératoire précoce et retarder
ainsi que la consommation d’opioïdes après chirurgie digestive laparoscopique [25]. Le bloc
des nerfs ilio-inguinal et ilio-hypogastrique associé à une sédation est efficace dans la chirurgie
de la hernie inguinale en permettant de réduire l’intensité de la douleur, les effets indésirables,
la durée d’hospitalisation et le coût global par rapport à une approche conventionnelle [26].
La réalisation de ce bloc à l’aide des ultrasons en améliore son efficacité [27]. L’infiltration
en fin d’intervention par le chirurgien est également efficace [28]. À ce propos, il n’y a
actuellement pas d’élément objectif pour recommander une infiltration correctement effectuée
en fin d’intervention plutôt qu’un TAP bloc. Un travail récent montre l’équivalence de ces
2 stratégies pour couvrir les douleurs pariétales après cholécystectomie en ambulatoire [29].
Enfin, le bloc des droits est très efficace pour toutes les réparations pariétales médianes (hernie
ombilicale par exemple) [30].
L’instillation intrapéritonéale d’anesthésiques locaux a fait la preuve de son efficacité
pour réduire la douleur après laparoscopie. Même si le bénéfice analgésique paraît limité en
durée, son impact sur les premières heures postopératoires n’est pas négligeable et ses additifs
de l’infiltration isolée des orifices de trocarts [31].
La lidocaïne intraveineuse est une alternative intéressante en chirurgie digestive lourde
pour réduire la douleur postopératoire [32]. Elle a été proposée en chirurgie gynécologique et
urologique laparoscopique ambulatoire. Elle a permis, non seulement de réduire significative-
ment la douleur et la consommation d’opioïdes, mais également d’obtenir plus rapidement les
critères de sortie [33]. Son intérêt a été montré pour l’analgésie après cholécystectomie par
cœlioscopie en ambulatoire [34].
Au total, l’utilisation large des anesthésiques locaux ne peut être que recommandée. Pour
les blocs périphériques, il ne peut y avoir de standardisation et leur utilisation doit s’accom-
pagner d’une réflexion stratégique. Les infiltrations en revanche peuvent être utilisées large-
ment en restant vigilants sur les doses maximales. Les modalités retenues doivent être des
réflexions d’équipe en rapport aux impératifs d’analgésie nécessaires et prévisibles en fonction
du patient, de la chirurgie voire même de la technique chirurgicale. La qualité de la dissection
et de l’hémostase est évidemment un facteur à prendre en compte. D’autres éléments dépen-
dront du patient, comme une consommation morphinique préopératoire par exemple. Tout cela
42 L. Delaunay
justifie de réaliser des évaluations locales pour choisir la technique la plus adaptée comme,
par exemple, le choix de réaliser une infiltration par le chirurgien plutôt qu’un TAP bloc en
préopératoire par l’anesthésiste. Le choix d’une sédation plutôt qu’une anesthésie générale ou
une rachianesthésie oriente vers un TAP bloc, une rotation rapide des patients sera plutôt en
faveur d’une infiltration mais en rappelant qu’elle doit être soigneuse et intéresser les différents
plans. Par ailleurs, les techniques ne sont pas contradictoires et peuvent être associées, en
faisant bien sûr attention aux doses maximales.
Conclusion
La douleur mal contrôlée est un facteur limitant du développement de la chirurgie ambu-
latoire. Sa prise en charge nécessite une réflexion à la fois, stratégique sur le choix des tech-
niques, organisationnelle et éducationnelle. La littérature est importante mais, compte tenu des
nombreux facteurs qui interviennent, elle doit être confrontée aux expériences locales. En
pratique, la prise d’antalgiques de palier I doit être systématique en dehors des contre-indica-
tions et associée aux techniques d’anesthésie locorégionale et/ou d’infiltrations qui peuvent
être employées dans tous les cas. Pour les chirurgies les plus douloureuses, il est possible de
laisser les patients rentrer chez eux avec une perfusion continue d’anesthésique local en péri-
neural ou en infiltration mais cela nécessite une organisation que peu d’équipes ont réussi à
mettre en place à ce jour. Enfin, la prescription d’un traitement de secours avec un palier
antalgique supérieur doit toujours être envisagée.
Analgésie après chirurgie ambulatoire 43
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Remplissage vasculaire
Marc Beaussier
Le remplissage vasculaire est un paramètre très important pour réussir une prise en charge
ambulatoire. L’objectif est d’assurer aux patients une volémie « optimale », c’est-à-dire la
mieux adaptée possible à son système cardiovasculaire. Il a été montré que tant le déficit que
l’excès de remplissage vasculaire sont associés à une augmentation de la morbidité postopé-
ratoire [1]. L’hypovolémie expose à l’hypoperfusion tissulaire. Il a été montré qu’en ambula-
toire elle augmentait l’incidence des nausées-vomissements postopératoires, l’intensité dou-
loureuse et la sédation résiduelle, entraînant un retard à l’aptitude à la rue et à la récupération
fonctionnelle, significatif jusqu’au troisième jour postopératoire [2, 3]. À l’inverse, l’excès de
remplissage vasculaire est à l’origine d’une part d’œdèmes tissulaires, compromettant l’oxy-
génation, et d’autre part d’une augmentation du risque de rétention urinaire aiguë
postopératoire.
La stratégie de remplissage vasculaire doit tenir compte du respect des règles de jeûne
préopératoires modernes. Ainsi un patient qui a pu avoir accès aux boissons (au mieux sucrés)
jusqu’à 2 heures avant son acte opératoire a toutes les chances d’arriver normovolémique au
bloc et ne nécessite la plupart du temps aucun apport volémique peropératoire supplémentaire
(outre la compensation d’éventuelles pertes sanguines) Dans ce cas, il faudra préférer une voie
veineuse « obturée » à la connexion systématique à une perfusion qui augmente toujours, même
involontairement, les volumes administrés. À l’inverse, le déficit hydrique d’un patient à jeun
depuis la veille au soir de l’intervention chirurgicale est entre 200 et 600 mL et nécessite une
compensation volémique peropératoire [4]. Ceci sera d’autant plus important que l’intervention
prévue a des répercussions hémodynamiques comme par exemple pour une cœlioscopie
abdominale.
Il est important de noter qu’à part certains cas particuliers les patients peuvent reprendre
très vite les apports liquidiens après l’intervention, même après une anesthésie générale.
Gestion des anticoagulants pris au long cours 45
Bibliographie
[1] Bellamy M. Wet, dry, or something else ? Br J Anaesth 2006 ; 97 : 755-7.
[2] Maharaj C, Kallam S, Malik A, et al. Preoperative intravenous fluid therapy decreases postoperative nausea
and pain in high risk patients. Anesth Analg 2005 ; 100 : 675-82.
[3] Yogendran S, Asokumar B, Cheng D, Chung F. A prospective randomized double-blinded study of the effect
of intravenous fluid therapy on adverse outcomes on outpatient surgery. Anesth Analg 1995 ; 80 : 682-6.
[4] Bundgaard-Nielsen M, Jorgensen C, Secher N, Kehlet H. Functional intravascular volume deficit in patients
before surgery. Acta Anaesthesiol Scand 2010 ; 54 : 464-9.
Gestion
des anticoagulants
pris au long cours
Sébastien Bloc
Anticoagulants oraux
Antivitamines K
La Haute autorité de Santé (HAS) a proposé en 2008 des recommandations profession-
nelles sur la prise en charge des antivitamines K (AVK) [1] (Figure 1).
Le schéma proposé établit, en fonction des risques hémorragiques et thrombotiques,
l’interruption ou non du traitement ainsi que la nécessité ou non d’un relai par héparine. Les
sociétés de chirurgie orale et d’endoscopie digestive ont établi des listes d’actes à faible risque
hémorragique autorisant le maintien du traitement par AVK [2, 3].
46 S. Bloc
j:\2000\image\190346\bloc\1
Figure 1. Prise en charge d’un patient traité par AVK d’après les recommandations de l’HAS.
Dans le cas particulier des valves mécaniques, alors que les recommandations américaines
valident l’utilisation des héparines de bas poids moléculaire (HBPM) comme des héparines
non fractionnées (HNF) en relai des AVK, les recommandations de la société européenne de
cardiologie ne retiennent uniquement que les héparines non fractionnées [4, 5]. La prise en
charge de ses patients à haut risque est donc difficilement compatible avec la chirurgie ambu-
latoire, en dehors d’actes pouvant être réalisés sans interruption du traitement.
Après instauration d’un relai par HBPM à dose curative, la chirurgie est envisageable
24 heures après l’injection. En postopératoire, les HBPM peuvent être administrées au moins
6 heures après la fin de l’acte invasif afin d’éviter toute complication hémorragique.
Antiagrégants plaquettaires
L’arrêt des antiagrégants plaquettaire expose les patients à la survenue d’événements
athérothrombotiques (accidents artériels coronariens, cérébraux ou des membres inférieurs).
Des règles simples permettent de prévenir tout accident clinique :
– maintien de l’aspirine autant que possible ;
– arrêt des antiagrégants plaquettaires le moins longtemps possible (reprise postopératoire
rapide) ;
Gestion des anticoagulants pris au long cours 47
Tableau I
Prise en charge d’un patient traité par AOD d’après les recommandations du SIHP
Avant Pas de prise la veille au soir ni le matin Rivaroxaban Dernière prise à J-3
le geste de l’acte invasif Apixaban
Edoxaban
Pas de relais
Pas de dosage
Après Reprise à l’heure habituelle et au moins Anticoagulant à dose « prophylactique » au moins 6 heures
le geste 6 h après la fin de l’acte invasif après l’acte invasif, si une thromboprophylaxie veineuse est
indiquée
Conclusion
La prise en charge périopératoire des anticoagulants est actuellement bien formalisée.
Une étroite collaboration entre médecins anesthésistes et chirurgiens est indispensable afin
d’établir le schéma de prise en charge le plus adapté au patient dans le cadre d’une prise en
charge ambulatoire.
48 S. Bloc
Tableau II
Prise en charge des agents antiplaquettaires (AAP) dans la période périopératoire
selon les recommandations de la SFAR
sans substitution
Dans tous les cas, reprise
postopératoire dès que
l’hémostase est jugée
satisfaisante
Intermédiaire 1. Réaliser le geste sous Réaliser le geste sous Réaliser le geste sous
Prévention secondaire 1 AAP clopidogrel ou aspirine clopidogrel ou aspirine
sous monothérapie 2. Remplacer
le clopidogrel par
de l’aspirine en l’absence
de CI
3. Arrêt de l’aspirine < 3 J
Dans tous les cas, reprise
postopératoire dès que
l’hémostase est jugée
satisfaisante
Tableau III
Durée recommandée d’arrêt des agents antiplaquettaires
Aspirine 3 jours
Clopidogrel 5 jours
Prasugrel 7 jours
Ticagrelor 5 jours
Thromboprophylaxie après chirurgie ambulatoire 49
Bibliographie
[1] Prise en charge des surdosages, des situations à risque hémorragique et des accidents hémorragiques chez les
patients traités par antivitamines K en ville et en milieu hospitalier – Recommandation pour la pratique clinique,
HAS 2008.
[2] SFCO. Gestion péri-opératoire des patients traités par antithrombotiques en chirurgie orale/Recommandations/
juillet 2015.
[3] www.sfed.org
[4] Vahanian A, Alfieri O, Andreotti F, Antunes MJ, Barón-Esquivias G, Baumgartner H, et al. Guidelines on the
management of valvular heart disease (version 2012) : the Joint Task Force on the management of valvular
heart disease of the European Society of Cardiology (ESC) and the European Association for Cardio-Thoracic
Surgery (EACTS). Eur J Cardiothorac Surg 2012 ; 42 (4) : S1-44.
[5] Nishimura RA, Otto CM, Bonow RO, Carabello BA, Erwin JP, Guyton RA, et al. 2014 AHA/ACC guideline
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American Heart Association task force on practice guidelines. J Am Coll Cardiol 2014 ; 63 : e57-185.
[6] Gestion des anticoagulants oraux directs pour la chirurgie et les actes invasifs programmés : propositions réac-
tualisées du groupe d’intérêt en hémostase périopératoire (GIHP)-Septembre 2015.
[7] Société française d’anesthésie et de réanimation (Sfar) ; Société française de cardiologie (SFC) Prise en charge
du coronarien opéré en chirurgie non cardiaque. Ann Fr Anesth Reanim 2011 ; 30 (7-8) : e5-29.
[8] Levine GN, Bates ER, Bittl JA, Brindis RG, Fihn SD, Fleisher LA, et al. 2016 ACC/AHA Guideline focused
update on duration of dual antiplatelet therapy in patients with coronary artery disease : a report of the American
College of Cardiology/American Heart Association Task Force on clinical practice guidelines. Circulation
2016 ; 134 (10) : e123-55.
Thromboprophylaxie
après chirurgie ambulatoire
Marc Beaussier
Il est clairement admis que la prise en charge ambulatoire réduit le risque thrombo-
embolique postopératoire [1]. Ceci tient d’une part à la mobilisation précoce, mais aussi au
caractère mini-invasif de la chirurgie pratiquée. Dans une très large population de femmes
exposées à la phlébite postopératoire, la prise en charge ambulatoire réduit son incidence
d’environ 10 fois par rapport à une prise en charge conventionnelle [2]. Dans une série de
569 cholécystectomie en ambulatoire, aucun événement thrombo-embolique n’a été retrouvé
malgré l’absence de thromboprophylaxie [3]. Il en a été de même dans une étude portant sur
355 arthroscopies du genou [4]. Le port de bas de contention adaptés permet de réduire encore
plus ce risque [1]. La prophylaxie doit par conséquent être réservée aux patients ayant au
moins un facteur de risque thromboembolique, dont les plus importants sont le cancer, l’âge
avancé, les antécédents de phlébite, l’obésité et les pathologies thrombotiques héréditaires.
50 A. Albi-Feldzer
Bibliographie
[1] Squizzato A, Venco A. Thromboprophylaxis in day surgery. Int J Surg 2008 ; 6 Suppl 1 : S29-30.
[2] Sweetland S, Green J, Liu B, Berrington de González A, Canonico M, Reeves G, Beral V ; Million Women
Study collaborators. Duration and magnitude of the postoperative risk of venous thromboembolism in middle
aged women : prospective cohort study. BMJ 2009 ; 339.
[3] Blake AM, Toker SI, Dunn E. Deep venous thrombosis prophylaxis is not indicated for laparoscopic chole-
cystectomy. JSLS 2001 ; 5 (3) : 215-9.
[4] Hoppener MR, Ettema HB, Henny CP, Verheyen CC, Büller HR. Low incidence of deep vein thrombosis after
knee arthroscopy without thromboprophylaxis : a prospective cohort study of 335 patients. Acta Orthop 2006 ;
77 (5) : 767-71.
Chambres implantables
Aline Albi-Feldzer
Une chambre implantable (CCI) permet d’administrer les traitements intraveineux au long
court, de façon continue ou séquentielle, en préservant le capital veineux périphérique. Elle
est conçue pour supporter environ 1 500 ponctions avec une aiguille de Huber (1 000 ponctions
par cm2 de septum siliconé). Les traitements sont principalement : les chimiothérapies anti-
cancéreuses (produits irritants et vésicants), les antibiotiques, les antiviraux, la nutrition paren-
térale. En préservant le capital veineux périphérique, elle apporte confort, sécurité et permet
au patient une vie quasi normale dans les intercures. Dans certains cas la CCI peut être utilisée
pour effectuer des prélèvements sanguins répétés.
La mise en place d’une CCI doit s’intégrer dans le parcours du patient avec ses spécifi-
cités : annonce et information, consultation d’anesthésie si nécessaire, adaptation des traite-
ments pour le geste invasif, programmation au bloc opératoire.
L’annonce et l’information sont délivrées au cours d’une consultation d’annonce, intégrée
dans le parcours du patient : présentation du matériel ; type d’anesthésie ; type d’implantation ;
déroulement de l’intervention ; suites opératoires ; remise d’un document sous forme d’un
livret d’utilisation et de surveillance.
Le consentement éclairé sur la balance bénéfices-risques est assuré dans la mesure du
possible. Pour les mineurs, l’autorisation d’opérer doit être signée.
Au décours de cette consultation, une consultation d’anesthésie sera demandée si le geste
est réalisé sous anesthésie générale ou sédation.
Le bilan sanguin incluant numération formule sanguine (NFS) et taux de prothrombine/
taux de céphaline activé (TP/TCA) ne doit pas être systématique et sera prescrit selon les
antécédents et la pathologie du patient. Les traitements personnels seront adaptés, le relais des
traitements anticoagulants suivant les recommandations (cf. supra).
La pose du site implantable est réalisée dans un bloc opératoire. La douche au savon
doux la veille ou le matin du geste est requise et doit faire partie des recommandations données
aux patients. Le jeûne opératoire est impératif pour les poses se réalisant sous anesthésie
générale ou sédation.
Le plus souvent, le patient est convoqué environ une heure avant le geste.
Il est accueilli dans le service ambulatoire pour validation de son dossier (jeûne opératoire
si anesthésie générale ou sédation, bilan sanguin si nécessaire, douche préopératoire la veille
ou le matin de l’acte, zone opératoire éventuellement dépilée).
Chambres implantables 51
Au bloc opératoire, l’existence d’une checklist doit être réalisée pour assurer la sécurité
du patient [1]. Le geste peut être réalisé sous anesthésie locale seule ou associée à une sédation
ou sous anesthésie générale. La sédation par midazolam, sufentanil, remifentanil apporte un
confort pour le patient mais elle requiert les mêmes conditions que l’anesthésie générale (moni-
torage, jeune opératoire...).
En France, la pose de site implantable est un geste réglementairement médical. Il peut
être réalisé par les chirurgiens, les anesthésistes ou les radiologues. Certains centres (Léon-
Bérard à Lyon) ont mis en place une procédure de coopération interprofessionnelle, inscrite
dans le cadre de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires », avec délégation de compétence
formalisée, basée sur une organisation et une formation spécifiques. Il est probable que cette
pratique se généralise dans l’avenir.
Il existe deux techniques :
– abord chirurgical par dénudation de la veine jugulaire externe ou céphalique ;
– abord percutané par repérage échographique, échoguidage ou repérage anatomique des
veines jugulaires interne, sous-clavière, basilique ou fémorale [2-4].
La voie sous-clavière exposait auparavant au risque de cisaillement du cathéter au croi-
sement de la clavicule et la première côte, survenant en moyenne au bout de 300 jours. Le
cisaillement (pinch off) ne survient que lorsque l’abord en sous-clavier est fait sans l’usage de
l’échographie, la ponction étant alors beaucoup plus interne qu’un abord sous échographie.
Ceci n’arrive jamais quand la ponction est à distance de ce croisement.
Il est donc recommandé, quel que soit l’abord et encore plus particulièrement pour la
sous-clavière, de faire la pose sous échographie.
Les complications sont définies comme précoces ou tardives (> 30 jours) [5-8].
Les complications au cours de la procédure sont généralement des traumatismes des
structures périnerveuses ou des malpositions du cathéter. Les taux de complications sont infé-
rieurs quand le geste est réalisé sous contrôle de l’imagerie par rapport aux techniques utilisant
des repères anatomiques. L’usage de l’échographie réduit les complications de 71 % : ponc-
tions artérielles, nombre de tentatives, hématomes, pneumothorax.
La position de l’extrémité distale du cathéter peut être vérifiée par différentes méthodes
d’imagerie. Le contrôle radiologique est systématique et permet de s’assurer de l’absence de
complications (pneumothorax, hémothorax, malpositions).
Une traçabilité et un compte rendu (informatique ou écrit) de la pose doivent être conservés
dans le dossier médical du patient.
Une ordonnance de sortie comporte des antalgiques et, selon les cas, les modalités de
reprise des traitements habituels, les soins de cicatrices et les modalités d’hygiène.
Un livret doit être remis au patient, l’informant qu’il est porteur d’un dispositif veineux
implanté et des risques infectieux et mécaniques inhérents.
Selon les établissements, un compte rendu opératoire est délivré mentionnant la nature
du dispositif ainsi que les contacts téléphoniques et les modalités d’appel en cas d’urgence.
Bibliographie
[1] Check-list-pose d’un cathéter veineux central (CVC) ou autre dispositif vasculaire http://www.hassante.fr/
portail/upload/docs/application/pdf/2011-01/11_01_check-list-cvc-dv.pdf. In : 2011.
[2] Brass P, Hellmich M, Kolodziej L, Schick G and Smith AF. Ultrasound guidance versus anatomical landmarks
for subclavian or femoral vein catheterization. Cochrane Database Syst Rev 2015 ; 1 : CD011447.
[3] Brass P, Hellmich M, Kolodziej L, Schick G and Smith AF. Ultrasound guidance versus anatomical landmarks
for internal jugular vein catheterization. Cochrane Database Syst Rev 2015 ; 1 : CD006962.
52 M. Fiani
[4] Rupp SM, Apfelbaum JL, Blitt C, et al. Practice guidelines for central venous access : a report by the American
Society of Anesthesiologists Task Force on Central Venous Access. Anesthesiology 2012 ; 116 : 539-73.
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Australian intensive care units : Time-trends in infection rates, etiology, and antimicrobial resistance using a
comprehensive Victorian surveillance program, 2009-2013. Am J Infect Control 2015 ; 43 : 848-52.
Diffusée et connue de tous les acteurs, la charte de l’unité d’anesthésie chirurgie ambula-
toire est actualisée en fonction de l’évolution des prises en charge et validée en instances (CME).
La gouvernance doit être clairement identifiée et organisée afin d’assurer la meilleure
communication et le partage d’information entre les différents acteurs, sous forme d’un comité
de pilotage se réunissant périodiquement.
Bibliographie
[1] Recommandations formalisées d’experts : Prise en charge anesthésique des patients en hospitalisation ambula-
toire. Société française d’anesthésie et de réanimation, AFAR no 29 (2010), p. 70.
[2] Indications de la chirurgie digestive et endocrinienne pratiquée en ambulatoire chez l’adulte. Recommandations
de la Société française de chirurgie digestive (SFCD) et l’association de Chirurgie hépatobiliaire et transplan-
tation (ACHBT). Journal de chirurgie 2010 ; 147 : 4, p. S105.
[3] Recommandations AFU/SFAR/AFCA/ANAP, Chirurgie ambulatoire en urologie, Argumentaire, novembre
2013, p. 44.
[4] Décret no 2012-969 du 20 août 2012 modifiant certaines conditions techniques de fonctionnement des structures
alternatives à l’hospitalisation www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2012/8/20/AFSH1222673D/jo/texte
[5] HAS-ANAP, Mai 2013, recommandations organisationnelles Sécurité des patients en chirurgie ambulatoire,
Guide méthodologique.
[6] HAS-ANAP « abécédaire » Chirurgie ambulatoire – CNAMTS / Ministère de la Santé de la jeunesse et de la
vie associative, janvier 2009, consultable sur http://www.sante-sportgouv.fr
Signature de sortie
Didier Sirieix
Le score de sortie fait par l’infirmière de l’UCA prend en compte l’aptitude à la rue, et
ne peut être évidemment donné si tous les critères ne sont pas obtenus. Cependant, l’autori-
sation définitive de sortie comprend d’autres paramètres, tels que la compréhension des infor-
mations, les prescriptions médicamenteuses, la date du rendez-vous postopératoire fixé...
L’anticipation d’une autorisation de sortie (par exemple au moment de la sortie de SSPI)
ne peut s’entendre que si le médecin juge, au moment où il signe le document et après avoir
examiné le patient, que ce dernier peut sortir de l’établissement en toute sécurité. Dans ce cas,
un éventuel séjour en unité de chirurgie ambulatoire après cette signature pourra être proposé
mais ne pourra être considéré médicalement utile. Il conviendra toutefois de compléter la
procédure par la possibilité laissée à l’infirmière de l’UCA de redemander un avis médical si
elle le juge nécessaire. Dans le cas contraire (avis signé en sortie de SSPI alors qu’une sur-
veillance est jugée nécessaire), cette anticipation sort du cadre réglementaire et doit être évitée.
Dans l’avenir, les outils informatiques pourraient donner la possibilité de valider la sortie
d’ambulatoire, à distance et en temps réel (horodatée et signature électronique), après connais-
sance du score d’aptitude à la rue et des autres éléments de surveillance postopératoire.
Bibliographie
Recommandations formalisées d’expert, Société Française d’anesthésie réanimation. Ann Fr Anesth-Réanim 2010 ;
29 : 67-72.
Socle de connaissance pour la chirurgie ambulatoire, ANAP, avril 2012.
Beaussier M, Dufeu N, Niccolai P, Theissen A. Chirurgie ambulatoire : aspects organisationnels. Montrouge : Arnette
Éd. 2016.
ÉLIGIBILITÉ DES PATIENTS
Nicolas Dufeu, Thomas Lanz
Introduction
En considérant que le mode de prise en charge ambulatoire doit être privilégié dès que
les conditions de sa réalisation sont réunies [1], tout patient devrait pouvoir bénéficier d’une
prise en charge ambulatoire [2, 3]. La définition des critères d’éligibilités doit ainsi renforcer
l’accessibilité du plus grand nombre aux procédures ambulatoires afin de garantir la sortie du
patient le soir même de l’intervention sans risque surajouté [2].
Le principe d’éligibilité est fondé sur l’analyse du triptyque patient-acte-structure. Cette
décision d’éligibilité est basée sur l’analyse du rapport bénéfice/risque concernant le patient,
mais aussi sur la prévisibilité de sa prise en charge et de l’organisation mise en place, en
particulier la permanence et la continuité des soins, qui doit être évaluée avant toute inclusion.
Critères médicaux
État clinique du patient
En aucun cas, l’éligibilité ne devrait être arbitrairement limitée par l’âge, l’IMC, le statut
ASA, les comorbidités ou les risques anesthésiques [2].
Le mode de prise en charge ambulatoire doit pouvoir s’appliquer à condition que cette
dernière n’entraîne pas une déstabilisation de l’état clinique du patient, rendant impossible sa
sortie ou sa prise en charge à domicile. L’évaluation d’une possibilité de déstabilisation devient
donc primordiale, plus que le respect stricto sensu de la classification ASA. Ce risque doit
être évalué dès la consultation de chirurgie. L’objectif de cette sélection est d’éviter le risque
d’hospitalisation non programmée ou de réadmission en urgence.
56 N. Dufeu, T. Lanz
Comorbidités
La stabilité de l’état clinique est le critère le plus important. L’éligibilité dépend du couple
acte-patient et de l’analyse de la balance bénéfice/risque pour le patient. Tout patient avec une
comorbidité diagnostiquée, traitée et équilibrée reste éligible à une prise en charge ambulatoire.
Si cela n’était pas le cas, cette évaluation est à faire, patient par patient.
Différents scores permettent un dépistage de certaines comorbidités et d’affiner l’éligibi-
lité potentielle (STOP BANG pour le syndrome d’apnée obstructif du sommeil (SAOS), etc.).
Ainsi, à titre d’exemple, les patients porteurs d’un SAOS diagnostiqués, traités et équi-
librés, sont éligibles si l’intervention chirurgicale ne nécessite pas l’utilisation d’opioïdes en
postopératoire [4]. En cas de suspicion chez un patient non diagnostiqué ou non traité, une
attention particulière doit être portée au cours de l’évaluation car la prise en charge est spé-
cifique. L’utilisation du score STOP-BANG est une aide au dépistage. La programmation de
l’intervention doit intégrer une durée adéquate de surveillance et comme pour les patients
diagnostiqués et non appareillés, l’intervention chirurgicale doit éviter autant que possible
l’utilisation d’opioïdes en postopératoire [2]. Dans ce contexte, la présence d’un accompagnant
restant au domicile du patient est fortement recommandée.
Âge
L’âge n’est pas un facteur d’exclusion [1, 2]. La prise en charge en hospitalisation ambu-
latoire est particulièrement adaptée aux patients qu’un éloignement du cadre de vie habituel
perturbe. Aux âges extrêmes de la vie, la prise en charge ambulatoire doit prendre en compte
aussi bien la vulnérabilité du patient que la spécificité de son environnement [1]. L’éligibilité
selon des critères médicaux et environnementaux suit les mêmes principes que pour les patients
d’âge non extrême de la vie.
Chirurgie pédiatrique
L’hospitalisation ambulatoire est à privilégier en pédiatrie dès que les conditions de sa
réalisation sont réunies, notamment, une équipe médicale expérimentée, des locaux et res-
sources adaptés et un retour et une surveillance à domicile en toute sécurité [1].
Des recommandations françaises existent quant à l’âge minimum d’éligibilité des nour-
rissons [1], mais l’âge limite doit être fixé en fonction de la structure en tenant compte de
l’expérience de l’anesthésiste, de sa spécification et de l’actualisation de ses connaissances.
Toutefois l’Association des anesthésistes réanimateurs pédiatriques d’expression française
(ADARPEF) et le Conseil national de chirurgie de l’enfant (CNCE) recommandent la non-
éligibilité des nourrissons nés à terme âgés de moins de trois mois ainsi que ceux nés préma-
turés âgés de moins de 60 semaines post-conceptionnelles.
Compte tenu de la fréquence élevée des infections respiratoires hautes chez l’enfant,
l’information délivrée inclut le risque possible de report de l’intervention en fonction de l’état
clinique de l’enfant [1].
cognitif et confusion postopératoires) [5]. Les techniques d’anesthésie locorégionale, dont les
infiltrations, peuvent s’avérer utiles dans une démarche d’épargne morphinique et d’antalgi-
ques à effets secondaires sur cette population particulièrement vulnérable sur le plan
pharmacologique.
Le contexte environnemental est fondamental, et pour qu’une telle prise en charge soit
possible, il faut que l’organisation mise en place s’adapte au niveau du handicap (problèmes
de déplacement, d’audition, de vision, de concentration, existence de troubles cognitifs ou de
troubles du comportement, etc.) en faisant en sorte que l’information délivrée soit suivie d’effet.
La solution la plus simple consiste en ce que le sujet âgé soit accompagné tout le long de son
circuit ambulatoire d’une seule et même personne qui connaisse le patient sous ses aspects à
la fois médicaux, psychologiques et environnementaux [3].
Environnement psychosocial
Information, compréhension, consentement
Le patient doit accepter les règles conditionnant sa prise en charge en ambulatoire et
s’engager à les respecter [3]. Le patient pourra recevoir, dès la consultation de chirurgie, un
document résumant toutes les consignes et informations délivrées. La signature par le patient
de ce document n’a pas valeur juridique mais peut objectiver la prise en compte des informa-
tions et contribuer à le responsabiliser [3].
L’information, la compréhension et le recueil de consentement sont interdépendants. Les
patients doivent être informés de la possibilité d’admission en hospitalisation conventionnelle
si besoin. La décision doit être prise en colloque singulier avec le patient et avec les repré-
sentants légaux pour les mineurs et les majeurs sous tutelle.
Problèmes de compréhension
Ne pas exclure de facto un patient ayant des problèmes de compréhension (barrière de la
langue, illettrisme, malvoyant, malentendant, mineur, sujet âgé et/ou troubles cognitifs, etc.),
leur retour rapide dans un environnement familier est en effet conseillé [2]. Le seul moyen de
ne pas les exclure est de les faire accompagner, tout au long du circuit ambulatoire, par une
même et seule personne qui connaît le patient dans ses aspects à la fois médicaux et
58 N. Dufeu, T. Lanz
Accompagnant
Le terme « accompagnant » désigne le ou les personnes de l’entourage du patient, sans
distinction (famille, ami, voisin, aidant, personne de confiance, etc.) qui l’accompagne(nt) tout
au long de sa prise en charge [2].
En aucun cas le patient ne doit rentrer seul à son lieu de résidence, a fortiori en conduisant
son véhicule [3]. Le transport en taxi est possible si ce dernier vient chercher le patient dans
l’UCA et l’accompagne jusqu’à son domicile (et non sur le trottoir devant le domicile, comme
c’est souvent le cas).
A contrario, la présence systématique d’un accompagnant la nuit de l’intervention n’est
pas obligatoire. C’est l’équipe médicale, en se basant sur des principes de sécurité et de qualité
de prise en charge (« pas de risque majoré »), qui doit déterminer, en fonction de l’acte pratiqué
et de l’organisation ambulatoire existante, quels patients tireront bénéfice de la présence d’un
accompagnant durant la nuit.
La décision d’une non-présence d’un accompagnant la nuit ne doit pas être définitive et
doit être réévaluée de façon régulière [3]. Les principes de choix de non-accompagnant la
première nuit au domicile doivent figurer dans la charte de fonctionnement de l’unité.
En pédiatrie spécifiquement, la présence d’un accompagnant en plus du conducteur est
recommandée arbitrairement à la sortie d’un enfant de moins de 10 ans pris en charge en
chirurgie ambulatoire [1], indépendamment de l’acte. Il s’agit d’une exigence de sécurité pour
le trajet de retour [2].
Transport et éloignement
La durée du transport et la distance d’éloignement de la structure ne sont pas de principe
des facteurs d’exclusion à condition qu’une structure de soins avec un service d’urgence soit
à proximité du lieu de résidence du patient [2]. Dans certains cas, notamment à l’étranger,
pour ce qui concerne des actes à hauts risques hémorragiques (chirurgie thyroïdienne, prothèse
endoaortique, etc.), un trajet de plus d’une heure avec la structure l’ayant pris en charge reste
une contre-indication à l’ambulatoire [3].
Précarité et solitude
La précarité et la solitude peuvent être des obstacles à une prise en charge en ambulatoire [2].
Quels actes ?
Critères généraux
Les risques liés à l’intervention chirurgicale doivent être connus et limités, notamment
les risques minimes de complications graves nécessitant une surveillance médicale immédiate.
Les douleurs postopératoires doivent être contrôlables, la prise alimentaire solide et liquide
par voie orale doit pouvoir se faire rapidement et les soins postopératoires doivent être gérables
par le patient et son entourage, ou éventuellement avec le soutien d’une infirmière libérale
(IDE) ou d’un réseau de soins à domicile [2].
Éligibilité des patients 59
La durée de l’intervention n’est pas un critère d’éligibilité ; il s’agit toutefois d’un élément
à prendre en compte puisque la durée doit être compatible avec la sortie du patient le jour de
son intervention [2].
Il n’existe pas de stratégie anesthésique spécifique. Le choix de la technique anesthésique
s’effectue en fonction de l’évaluation du couple acte-patient et de l’analyse du rapport béné-
fice/risque pour le patient [1].
Listes d’actes
Bien qu’en théorie la grande majorité des actes médicaux ou chirurgicaux puissent être
réalisés en ambulatoire, en pratique les praticiens n’y réalisent que des actes maîtrisés en
fonction du triptyque « acte/patient/structure ».
Depuis 2008, pour pousser les établissements à développer l’ambulatoire, l’Assurance
maladie, par le biais de la loi de financement de la Sécurité sociale, crée le concept d’acte
marqueur (encore appelé « acte traceur ») et de mise sous accord préalable (MSAP).
Les listes validées par les sociétés savantes concernées désignent des actes pouvant être
réalisés en ambulatoire. Elles s’accroissent tous les ans, passant du nombre initial de 5 en
2008 à 17 en 2009, à 38 en 2012, à 43 en 2012-13 et à 55 en 2015. L’objectif est d’atteindre
un taux d’ambulatoire global de 85 % pour l’ensemble de ces actes marqueurs. La procédure
de MSAP a été instaurée par de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2008 (article
L. 162-1-17 du code de la Sécurité sociale) pour les établissements dont le développement de
la chirurgie ambulatoire est insuffisant. Pour un établissement placé sous MSAP, la prise en
charge par l’Assurance maladie de la réalisation en hospitalisation complète de certains gestes
marqueurs (actes réalisables normalement en ambulatoire) est subordonné à l’accord préalable,
rendu sous 48 heures, du service du contrôle médical de l’organisme local d’Assurance maladie.
L’accord de la caisse conditionne la prise en charge de l’acte en hospitalisation.
À titre d’exemple, pour savoir si un nouvel acte est justifiable d’une prise en charge
ambulatoire au sein d’une structure, il est possible d’évaluer rétrospectivement son taux de
complications en hospitalisation conventionnelle et déterminer si ces dernières sont acceptables
et maîtrisables en ambulatoire [3].
D’autres critères peuvent être pris en compte. Ainsi, indépendamment du type d’actes,
l’éligibilité en ambulatoire peut être établie selon l’analyse des critères locaux de durées
moyennes de séjours (DMS) [6]. Ainsi, un tableau de conversion potentiel à l’ambulatoire
(en %), prenant en compte la DMS et la sévérité des patients, développé par l’IGF/IGAS, peut
aider à fixer des objectifs de développement propres à chaque institution [6].
Urgences
Il est possible d’intégrer des actes urgents à condition d’avoir le même niveau d’exigence
(comparé à un patient programmé), en termes d’inclusion, de qualité et de sécurité de prise en
charge pré-, per- et postopératoire. L’inclusion d’un patient provenant des urgences ne doit
pas perturber le fonctionnement de l’unité ambulatoire et/ou du circuit mis en place.
Conclusion
La chirurgie ambulatoire doit être approchée comme une chirurgie de première intention,
il est important lors de l’évaluation du patient que les professionnels de santé s’interrogent sur
ce qui motive l’hospitalisation conventionnelle et non sur ce qui motive la prise en charge
ambulatoire [2]. L’éligibilité d’un patient à un processus ambulatoire doit ainsi pouvoir se
justifier par une évaluation positive d’une pratique quotidienne maîtrisée dans sa réalisation
et dans ses suites [3].
Qu’il s’agisse des critères d’ordre médical, chirurgical ou anesthésique ou des critères
liés aux aspects environnementaux psychosociaux, l’anticipation et l’organisation sont les mots
d’ordre en chirurgie ambulatoire, garants d’une prise en charge de qualité sans exposer le
patient à des risques prévisibles. La sélection des patients doit être facilitée par un protocole
local et adapté à chaque structure avec une liste évolutive des critères de sélection et d’inéli-
gibilité établie localement [2].
Enfin, plus les techniques chirurgicales, anesthésiques et analgésiques s’affinent pour
aboutir, dans un esprit de RAAC, à des procédures simples, et génératrices d’un minimum
d’effets secondaires, plus l’éventail des prises en charge en ambulatoire s’élargit. L’avenir est
aussi à l’organisation de la continuité des soins au domicile du patient grâce au développement
de réseaux de soins ville-hôpital et à l’utilisation de nouveaux moyens de communication
(SMS, alertes informatisées...).
Bibliographie
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talisation ambulatoire. Recommandations formalisées d’experts. Ann Fr Anesth Reanim 2010 ; 29 : 67-722.
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[6] Rapport http://www.igas.gouv.fr/IMG/pdf/2014-039R_-_Rapport.pdf
[7] ????
ACTIVITÉS
CHIRURGICALES
Introduction
Selon le Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI), la cure de
hernie inguinale et de l’aine (HI) représente 140 000 procédures chirurgicales en France chaque
année, effectuées le plus souvent en hospitalisation ambulatoire, définie par un séjour hospi-
talier d’une durée de moins de 12 heures. Évaluée comme sûre, reproductible et économique,
ce type de prise en charge s’étend sur tout le territoire sous la pression des pouvoirs publics,
suivant ainsi le modèle des pays anglosaxons et d’Europe du Nord [1]. Certains freins, qui
peuvent être médicaux, organisationnels ou psychosociaux, ralentissent toutefois cette évolu-
tion. En analysant les données du PMSI enrichies de celles du registre du Club Hernie, le but
de ce travail a été d’identifier ces facteurs prédictifs d’échec.
Méthode
Recueil des données
Grâce au recueil épidémiologique que permettent les saisies des actes au sein du PMSI,
il est possible d’avoir chaque année, avec un an de décalage, un regard global sur l’évolution
des pratiques chirurgicales en France. Les limites de l’outil de codage restreignent toutefois
la profondeur de vue et d’analyse de ce registre de santé publique, simple observateur de
l’ensemble des actes réalisés et des facteurs de comorbidité associée.
Depuis septembre 2011, à l’initiative du Club Hernie, il existe en France un registre de
saisie prospective nationale des cures de HI. Le Club Hernie est une association de chirurgiens
seniors à forte activité de chirurgie pariétale qui ont décidé de mettre en commun leur expé-
rience afin de conduire des travaux multicentriques assis sur une prise en charge chirurgicale
de qualité homogène. Outre le principe d’une présentation par deux parrains, chaque chirurgien
doit, pour intégrer le groupe, pouvoir démontrer une activité supérieure à 100 procédures de
chirurgie pariétale réalisées personnellement chaque année. Il s’engage ensuite en signant une
charte de qualité à une saisie de données prospectives, continues et exhaustives pour chacun
de ses patients opérés, sur un portail informatique dédié. Un contrôle de qualité est effectué
par une attachée de recherche clinique salariée de l’association.
Quarante et un chirurgiens ont rejoint progressivement cette association et contribué au
remplissage en temps réel du registre avec des données médicales approfondies, pré-, per- et
postopératoires sur chacune de leurs cures de HI quelle que soit la technique opératoire utilisée.
Les données collectées ont concerné :
Hernies inguinales et de l’aine 63
– les patients (âge, sexe, indice de masse corporelle, activité professionnelle et sportive,
histoire de la maladie et antécédents, grade ASA) ;
– les hernies (symptômes préopératoires, type anatomique, caractère uni- ou bilatéral,
primaire ou récidivé) ;
– les procédures (technique chirurgicale retenue, durée opératoire, hospitalisation ambu-
latoire ou conventionnelle, durée de séjour, complications) ;
– les causes de non-programmation ou d’échec de la procédure en ambulatoire.
Par définition, une hospitalisation ambulatoire incluait une entrée et une sortie de l’hôpital le
même jour et était laissée librement au choix du patient avec son chirurgien. Les causes de non-
réalisation étaient distinguées en fonction de leur origine (liée au patient, à l’acte, à l’organisation
ou à l’environnement psychosocial). Les complications étaient réparties selon une étiologie médi-
cale ou chirurgicale, en isolant spécifiquement les collections infectées ou non du site opératoire.
Analyse statistique
La comparaison des données qualitatives et quantitatives a été réalisée en utilisant le test
du X2 et le test-T de Student. Un modèle de régression linéaire multivariée a été utilisé pour
identifier les facteurs prédictifs d’échec de la procédure ambulatoire. L’analyse statistique s’est
appuyée sur le programme R, version 3.2.3 du logiciel (R : un langage et un environnement
pour l’informatique statistique. Fondation R pour l’informatique statistique, Vienne, Autriche).
Le seuil de significativité retenu a été valeur de p < 0,05.
Résultats
Entre le 1er septembre 2011 et le 31 août 2015, les données de 9 726 patients opérés ont
été saisies dans le registre, avec une moyenne de 237 patients par chirurgien. L’âge moyen
était de 61,9 ans (extrêmes 1-100 ans), avec une nette prédominance masculine (8 578 hommes
soit 88,2 %). Un total de 1 401 patients (14,4 %) était classé ASA 6 III, 694 hernies opérées
étaient des récidives herniaires (7,1 %) et 2 111 patients (21,7 %) présentaient des hernies
bilatérales. Les hernies observées étaient à prédominance oblique externe (50,5 %). Les carac-
téristiques des patients sont détaillées dans le tableau I.
Les cures de HI ont été effectuées avec un abord laparoscopique chez 4 407 patients (45,3 %)
et avec un abord antérieur chez 5 319 patients (54,7 %). Parmi les cures laparoscopiques, 2 355
(53 %) ont été menées par une voie trans-abdomino-pré-péritonéale (TAPP) et 2 042 (46 %) par
une voie totalement extrapéritonéale (TEP) ; 725 patients (7,5 %) ont développé une complication.
Un total de 6 974 patients (71,7 %) a bénéficié d’une cure de hernie en ambulatoire et
2 752 patients (28,3 %) ont eu hospitalisation conventionnelle. La durée moyenne de séjour a
été dans ce groupe de 2,07 jours.
Les résultats sont présentés dans le tableau II.
Tableau I
Caractéristiques des patients
Tableau II
Caractéristiques des procédures
p < 0,001), un score ASA 6 III (OR 0,151, p < 0,001), une hernie inguinale récidivée (OR
0,71, p = 0,002), une hernie inguinale bilatérale (OR 0,478, p < 0,001), la durée opératoire
(OR 0,984, p < 0,001) et la survenue d’une complication médicale (OR 0,329, p < 0,001).
La comparaison entre les patients pris en charge en hospitalisation ambulatoire et ceux
pris en charge en hospitalisation conventionnelle est faite dans le tableau III.
Tableau III
Comparaison en analyse multivariée des patients selon le type d’hospitalisation
Hospitalisation Hospitalisation OR p
ambulatoire conventionnelle
n (%) n (%)
Score ASA 6 III 412 (6) 989 (36) 0,151 < 0,001
Durée opératoire moyenne 27,2 min 29,8 min 0,984 < 0,001
Complications :
– médicales 65 (0,9) 130 (4,7) 0,329 < 0,001
– chirurgicales 50 (0,7) 44 (1,6) 0,854 0,562
– collections site opératoire 261 (3,7) 175 (6,4) 1,119 0,433
La rétention aiguë d’urines et la veinite superficielle ont été les complications médicales
les plus fréquentes. La rétention aiguë d’urines a été plus fréquemment observée chez les
patients pris en charge en hospitalisation conventionnelle (2,4 vs 0,16 % en ambulatoire,
p < 0,001).
Les plaies de vessie ont été la principale complication chirurgicale observée, sans diffé-
rence significative selon le type d’hospitalisation (ambulatoire 0,27 vs conventionnelle 0,4 %,
p NS). Les plaies vasculaires ont concerné uniquement des patients pris en charge en hospi-
talisation conventionnelle (4 patients, 0,15 %).
Les collections du site opératoire ont été plus fréquemment observées chez les patients
en hospitalisation conventionnelle, plus spécifiquement les collections non infectées sous-
cutanées (séromes) et prépéritonéales.
La mortalité hospitalière a été nulle.
66 J.-P. Cossa, J.-F. Gillion
Tableau IV
Complications per- et postopératoires précoces
Médicales :
– rétention aiguë d’urines 11 (0,16) 67 (2,4) < 0,001
– veinites/lymphangites 19 (0,27) 10 (0,36) 0,45
– compl. bronchopulmonaires 2 (0,03) 12 (0,44) < 0,001
Chirurgicales :
– plaie de vessie 19 (0,27) 11 (0,4) 0,3
– plaie vasculaire 0 4 (0,15) 0,006
– orchite ischémique 10 (0,14) 7 (0,25) 0,23
Seules les complications les plus fréquemment observées sont rapportées et distinguées en complications médicales,
chirurgicales et collections du site opératoire. SC : sous-cutanée ; PP : prépéritonéale.
Échec de l’ambulatoire
Parmi les patients programmés pour une cure de HI en ambulatoire, 262 (2,7 %) ont
finalement eu une hospitalisation conventionnelle. Les causes d’échec de l’ambulatoire sont
dominées par des problèmes médicaux tels que la douleur ou les malaises et céphalées obser-
vées respectivement chez 41 (15,7 %) et 54 (20,6 %) patients. La rétention aiguë d’urines est
en cause chez 26 (9,9 %) patients. Des problèmes d’accompagnement ou de sortie tardive de
salle d’opération représentent les autres causes d’échec.
Tableau VI
Causes d’échec de l’hospitalisation ambulatoire
Tableau VII
Résultats selon l’âge
Nombre de patients 139 (1,5) 911 (9,4) 2 982 (30,7) 4 515 (46,5) 1 151 (11,9)
Hospit. ambulatoire 135 (97,1) 754 (82,8) 2 411 (80,9) 3 173 (70,3) 485 (42,1)
Abord laparoscopique 7 (5) 459 (50,3) 1 506 (50,5) 2 063 (45,7) 358 (31,1)
Selon le sexe
La cure de HI était plus fréquemment réalisée en ambulatoire chez les hommes que chez
les femmes (respectivement 73 et 62,3 %, p < 0,001) et l’abord laparoscopique plus représenté
(respectivement 46 et 40,8 %, p < 0,001). Chez les femmes, il existait plus de hernies crurales
(17,2 %) et plus de hernies étranglées opérées en urgence (4,6 vs 1,1 % chez l’homme,
p < 0,001). Le taux de complications postopératoires n’était pas statistiquement lié au sexe.
Tableau VIII
Résultats selon le sexe
Homme Femme p
n (%) n (%)
NS : non signalé.
Selon l’urgence
270 patients (2,8 %) ont fait l’objet d’une prise en charge en urgence différée après réduc-
tion par taxis et 148 (1,5 %) ont eu besoin d’une cure de HI en urgence pour étranglement non
réductible. Le risque de survenue d’un étranglement herniaire augmentait avec l’âge et chez la
femme. Moins fréquemment réalisées en ambulatoire et avec un abord laparoscopique, les cures
de HI étranglées étaient associées à une durée opératoire et moyenne de séjour plus longue.
Tableau IX
Résultats selon l’urgence
Tableau X
Cures de hernies inguinales bilatérales
Complications :
– médicales 46 (2,2) 147 (1,9) 0,46
– chirurgicales 24 (1,1) 69 (0,9) 0,33
– collections site opératoire 91 (4,3) 342 (4,5) 0,72
Discussion
Il y a peu de données disponibles dans la littérature concernant la cure de HI en ambu-
latoire. La plupart des études, parfois anciennes, qui ont promu la cure de HI en ambulatoire
ont mis en exergue le bénéfice d’une technique chirurgicale [2, 3] ou anesthésique [4, 5]. Notre
travail s’appuie sur une série de près de 10 000 patients afin d’évaluer l’état des lieux de la
pratique ambulatoire en France ainsi que les causes d’échec dans cette indication précise.
Les données concernant la cure de HI, réalisées ou non en ambulatoire, ont été collectées
à partir d’un registre de patients opérés par 41 chirurgiens à forte activité de chirurgie pariétale
répartis dans tout le territoire français. La saisie des données a été consécutive sur une période
de quatre ans. Il n’y a eu aucun critère de sélection des patients.
La définition d’une hospitalisation ambulatoire varie selon les pays. En France, la Haute
autorité de Santé (HAS) la définit comme une hospitalisation d’une durée de moins de 12 heures
avec admission et sortie du patient le même jour. En accord avec cette définition, nous avons
considéré comme ambulatoires les patients admis à l’hôpital le matin, opérés et surveillés
jusqu’au recouvrement d’un état clinique jugé satisfaisant pour un retour à domicile le même
jour, précisé par le score d’Aldrete modifié [6] intégrant la gestion de la douleur, de la réali-
mentation, de la marche et de la reprise d’une miction normale. Les patients ne répondant pas
positivement à cette validation de « mise à la rue » ont été hospitalisés pour la nuit avant une
nouvelle réévaluation le lendemain et ont été comptabilisés comme échecs de l’ambulatoire.
Les experts de l’European Hernia Society ont reconnu la cure de HI en ambulatoire sûre,
reproductible et plus économique, et ont émis la recommandation de grade B que chaque
patient doit être évalué d’emblée dans cette éventualité [1]. Les bénéfices attendus d’une prise
en charge ambulatoire sont une mobilisation plus précoce et une plus grande satisfaction du
70 J.-P. Cossa, J.-F. Gillion
patient avec une diminution des risques infectieux et thromboembolique et une réduction des
coûts. Le recours à l’hospitalisation ambulatoire se développe partout dans le monde, à vitesse
variable comme en attestent les taux des séries publiées dans la littérature. Au début des années
2000, ceux-ci étaient respectivement de 33 et de 35 % en Espagne et aux Pays-Bas [1]. Au
Danemark, ce taux a augmenté de 55 à 70 % entre 1998 et 2005. En Suède, le registre national
fait état d’un taux de 75 % [7]. Dès 1996 en France, la voie transabdominale prépéritonéale
(TAPP), utilisée par Johanet et coll. [8] chez un patient sur deux, avait permis la cure de HI
en ambulatoire dans 89,4 % des cas. Jacquet et coll. en 2004 [9] puis Ngo et coll. en 2010
[10] ont conclu tous deux que respectivement 80,3 et 90 % des cures de HI devraient pouvoir
être conduites dans le cadre d’une hospitalisation ambulatoire. Plus récemment, une étude
Italienne a rapporté un taux de 76 % cures de HI unilatérale en ambulatoire comparé à un taux
de 43 % observé dans les cures de hernie crurale [11]. Dans notre série, 6 974 patients (72 %)
ont pu bénéficier d’une cure de HI en ambulatoire. Ce taux a augmenté progressivement de
65 à 75 % entre 2011 et 2015 mais tend à se stabiliser probablement du fait des restrictions
imposées par la HAS (par exemple ambulatoire non recommandé en cas de score ASA 6 III,
de problème d’accompagnement ou d’éloignement du domicile). En 2014, les données natio-
nales du PMSI ont rapporté des taux d’ambulatoire respectivement de 56 et de 68 % pour la
cure de HI unilatérale par abord antérieur et par abord laparoscopique. Le taux d’ambulatoire
pour la cure de HI bilatérale par abord laparoscopique était de 56 %.
Nous avons mis en évidence que plusieurs facteurs pouvaient conditionner l’aboutisse-
ment d’une hospitalisation ambulatoire. Dans notre série, les hommes ont une plus grande
probabilité de prise en charge en ambulatoire (OR 2,156, p < 0,001). Les femmes ont eu plus
de cures de HI par abord antérieur avec plus de hernies crurales (17,2 vs 0,6 % pour les
hommes, p < 0,001) ; ce peut être une explication du moindre taux d’ambulatoire, même si les
taux de complications ont été similaires pour les hommes et pour les femmes (respectivement
7,3 et 8,3 %, p NS).
Un âge élevé et un score ASA 6 III ont été identifiés comme des facteurs prédictifs d’échec
de l’ambulatoire (OR 0,979 et 0,151 respectivement, p < 0,001). Dans la classe d’âge des plus
de 80 ans, représentée par 1 151 patients, le taux d’ambulatoire a été de 42 %, en rapport avec
plus de comorbidités rencontrées, d’ordre médical ou social. Dans une étude comparant les
résultats postopératoires après cure de HI selon Lichtenstein avec encollage de la prothèse sous
anesthésie locale, Palombo et coll. ont isolé les patients de plus de 80 ans et de moins de 45 ans.
Les scores de sortie de salle de réveil et les taux de complications postopératoires n’étaient pas
différents entre les deux groupes et la conclusion des auteurs était que l’âge seul n’est pas un
critère de contre-indication à la cure de HI en ambulatoire [12]. En dépit d’une comorbidité plus
fréquemment observée avec l’âge, Amato et coll. ont observé eux aussi des taux de complica-
tions et d’échecs de l’ambulatoire comparables chez les patients âgés avec le même type de
procédure mais en conditionnant la profondeur de la sédation (associée à l’anesthésie locale) au
grade ASA des patients [13]. En France, les patients de grade ASA III instable ou IV ont
longtemps été considérés comme inéligibles à une prise en charge ambulatoire. Pourtant, Sanjay
et coll. ont rapporté dès 2006 des taux de complications postopératoires (rétention d’urines,
collection sérohématique, infection) et des taux de réadmission identiques entre les groupes de
grade ASA I-II et ASA III-IV, particulièrement lorsque la cure de HI avait été réalisée sous
anesthésie locale [14], et la discrimination n’est plus aussi stricte.
L’allongement de la durée opératoire a également été isolé comme facteur prédictif
d’échec de l’ambulatoire, tout comme le caractère récidivé et le caractère bilatéral des HI
opérées. Le taux d’ambulatoire pour une cure de HI unilatérale est en effet de 73,5 et de 65 %
en cas de cure de HI bilatérale (p < 0,001), avec un abord laparoscopique majoritaire dans ce
dernier groupe (60 %). Ce type d’abord n’a cependant pas été identifié comme un facteur
Hernies inguinales et de l’aine 71
Conclusion
L’analyse de notre registre multicentrique portant sur un échantillon de 9 726 patients
opérés, conduite avec succès chez 6 974 (72 %) d’entre eux, permet de valider en France la
cure de HI en ambulatoire. Un âge avancé, un grade ASA 6 III, le sexe féminin, une cure de
HI récidivée ou bilatérale, l’allongement de la durée opératoire et la survenue de complications
médicales sont des facteurs prédictifs d’échec de l’ambulatoire. L’abord laparoscopique semble
favoriser la cure de HI en ambulatoire. Les contre-indications à l’ambulatoire doivent être
réévaluées.
Hernies inguinales et de l’aine 73
Remerciements
Aux Dr Farouk DRISSI et Florent JURCZAK pour leur participation active à ce travail
et à Corine Baayen pour l’exploitation statistique de nos données.
Aux membres du Club Hernie pour leur assiduité et leur rigueur dans le remplissage du
registre-patients :
Ain J-F (Polyclinique Val-de-Saône, Mâcon) ; Beck M (Clinique Ambroise-Paré, Thion-
ville) ; Barrat C (Hôpital universitaire Jean-Verdier, Bondy) ; Berney C (Bankstown-Lidcombe
Hospital, Sydney, Australie) ; Berrod J-L (Groupe hospitalier Paris-Saint-Joseph, Paris) ;
Binot D (MCO Côte d’Opale, Boulogne-sur-Mer) ; Blazquez D (Clinique Jeanne d’Arc, Paris) ;
Bonan A (Hôpital privé d’Antony, Antony) ; Cas O (Centre médico-chirurgical – Fondation
Wallerstein, Arès) ; Dabrowski A (Clinique de Saint-Omer, Saint-Omer) ; Champault-Fezais
A (Groupe hospitalier Paris-Saint-Joseph, Paris) ; Chastan P (Bordeaux) ; Cardin J-L (Poly-
clinique du Maine, Laval) ; Chollet J-M (Hôpital privé d’Antony, Antony) ; Cossa J-P (CMC
Bizet, Paris) ; Durou J (Clinique de Villeneuve-d’Ascq, Villeneuve-d’Ascq) ; Dugue T (Cli-
nique de Saint-Omer, Saint-Omer) ; Faure J-P (CHRU Poitiers, Poitiers) ; Framery D (CMC
de la Baie de Morlaix, Morlaix) ; Fromont G (Clinique de Bois-Bernard, Bois-Bernard) ;
Gainant A (CHRU Limoges, Limoges) ; Gauduchon L (CHRU Amiens) ; Genser L (CHU
Pitié-Salpêtrière, Paris) ; Gillion J-F (Hôpital privé d’Antony, Antony) ; Guillaud A (Clinique
du Renaison, Roanne) ; Jacquin C (CH du Prado, Marseille) ; Jurczak F (Clinique mutualiste,
Saint-Nazaire) ; Khalil H (CHRU Rouen, Rouen) ; Lacroix A (CH de Auch, Auch) ; Ledaguenel
P (Clinique Tivoli, Bordeaux) ; Lepère M (Clinique Saint-Charles, La Roche-sur-Yon) ;
Lépront D (Polyclinique de Navarre, Pau) ; Letoux N (Clinique Jeanne-d’Arc, Paris) ; Loriau
J (Groupe hospitalier Paris-Saint-Joseph) ; Magne E (Clinique Tivoli, Bordeaux) ; Ngo P
(Hôpital américain, Neuilly) ; Oberlin O (Croix Saint-Simon Diaconesses, Paris) ; Paterne D
(Clinique Tivoli, Bordeaux) ; Pavis d’Escurac X (Strasbourg) ; Potiron L (Clinique Jules-
Verne, Nantes) ; Renard Y (CHRU Reims, Reims) ; Soler M (Polyclinique Saint-Jean, Cagnes-
sur-Mer) ; Rignier P (Polyclinique des Bleuets) ; Roos S (Clinique Claude-Bernard, Albi) ;
Thillois J-M (Hôpital privé d’Antony, Antony) ; Tiry P (Clinique de Saint-Omer, Saint-Omer) ;
Verhaeghe R (MCO Côte d’Opale, Boulogne-sur-Mer) ; Vu P (Brie-sur-Marne) ; Zaranis C
(Clinique de la Rochelle, La Rochelle)
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ÉVENTRATIONS DE LA PAROI
ABDOMINALE ANTÉROLATÉRALE
À propos de 2 159 cures d’éventration
issues du registre du Club Hernie
Jean-François Gillion, Jean-Pierre Cossa
Introduction
Les éventrations, ou hernies incisionnelles, représentent une situation fréquente dans les
suites d’une chirurgie abdominale puisqu’on estime qu’elles compliquent environ 12,8 % des
laparotomies médianes [1]. Environ 35 000 cures d’éventrations sont réalisées chaque année
en France [2]. L’émergence de la chirurgie laparoscopique et les incisions ciblées ont permis
de diminuer considérablement la survenue de larges éventrations laissant place aux éventrations
sur orifices de trocarts et abords électifs. Parallèlement, en 1993, LeBlanc et al. publie la
première série de cures d’éventrations réalisées par voie laparoscopique [3]. Depuis, le déve-
loppement d’implants prothétiques double-face a permis de limiter les phénomènes adhésio-
gènes en lien avec les prothèses mises en place en position intrapéritonéale. Les résultats
émanant de nombreuses séries de cures d’éventrations laparoscopiques ont aujourd’hui permis
de valider cette pratique jugée comparable aux interventions effectuées par abord direct [4, 5].
Au cours des années 2000, les premières publications de cures d’éventration réalisées en
ambulatoire ont vu le jour [6-11]. Composés pour la plupart de petits effectifs, les résultats de
ces travaux sont centrés sur la voie laparoscopique. Il semble possible de proposer une prise
en charge en ambulatoire aux patients opérés par voie laparoscopique ou présentant une éven-
tration de petite taille. Cependant, il n’existe pas, à l’heure actuelle, de recommandations
encadrant cette pratique.
Le but de cette étude a été d’évaluer la pratique ambulatoire des cures d’éventrations en
France, au travers d’un registre national, et ainsi identifier les situations et facteurs prédictifs
d’échec de prise en charge ambulatoire. L’analyse des situations et facteurs d’échec devrait
permettre de proposer des recommandations concernant la prise en charge en ambulatoire des
patients opérés d’une cure d’éventration.
Méthodes
Collecte des données
À l’initiative du Club Hernie, un registre national concernant les actes de chirurgie parié-
tale a été établi. Le Club Hernie est un groupe de chirurgiens expérimentés ayant un intérêt
particulier pour la chirurgie pariétale et exerçant sur l’ensemble du territoire français dans des
76 J.-F. Gillion, J.-P. Cossa
Analyse statistique
Les variables qualitatives et quantitatives ont été comparées en utilisant respectivement
un test du Chi-2 ou de Student. L’identification des facteurs prédictifs d’échec des procédures
ambulatoires a été réalisée à l’aide d’un modèle de régression logistique multivariée. Afin de
faciliter l’interprétation des variables du modèle, celles-ci étaient exprimées en valeur moyenne.
En cas de variables manquantes, les pourcentages ont été calculés sur le total des données
disponibles.
Les analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logiciel de statistiques R version
3,3.1 (R : A language and environment for statistical computing. R Foundation for Statistical
Computing, Vienne, Autriche). Le seuil de significativité de 0,05 a été utilisé.
Résultats
2 159 patients ont été opérés d’une cure d’éventration entre le 8 septembre 2011 et le
22 avril 2016. L’âge et l’IMC moyens des patients étaient respectivement de 62,9 ans et
29,4 kg/m2. 1 129 (52,3 %) femmes ont été opérées. 675 (31,3 %) patients avaient un score
ASA 6 III. La plupart des patients présentaient une éventration de taille inférieure à 10 cm
(Tableau I).
Éventrations de la paroi abdominale antérolatérale 77
Tableau I
Caractéristiques des patients
Sexe (n, %) :
– masculin 1 030 (47,7)
– féminin 1 129 (52,3)
L’âge et l’IMC sont exprimés par leur valeur moyenne, écart type et extrêmes. Les variables qualitatives sont résumées
par leur valeur absolue et le pourcentage correspondant.
272 (12,6 %) patients ont été opérés selon une procédure ambulatoire (Tableau II). 1 560
(73,3) patients ont été opérés par abord direct alors que 567 (26,7 %) patients ont bénéficié
d’un abord laparoscopique. La durée opératoire moyenne était de 64,8 minutes.
Tableau II
Caractéristiques opératoires
La durée opératoire est exprimée par sa valeur moyenne, écart type et extrêmes. Les variables qualitatives sont
résumées par leur valeur absolue et le pourcentage correspondant.
Tableau III
Motifs pour lesquels la chirurgie ambulatoire n’a pas été proposée
Total 1 151
Tableau IV
Échec de l’ambulatoire
Échec de l’ambulatoire
Total 60
Douleur 13 (21,6)
Rétention aiguë d’urines 1 (1,7)
Malaise, céphalées 3 (5)
Nausées, vomissements 7 (11,6)
Saignement 1 (1,7)
Tableau V
Comparaison entre les patients pris en charge en ambulatoire et en hospitalisation conventionnelle
(analyse univariée)
Ambulatoire Hospitalisation p
Complication (n, %) :
– Médicale 4 (1,5) 131 (7,1) 0,0008
– Site opératoire 10 (3,7) 153 (8,2) 0,01
– Chirurgicale 2 (0,8) 89 (4,8) 0,0039
L’âge et l’IMC sont exprimés par leur valeur moyenne. Les variables qualitatives sont résumées par leur valeur absolue
et le pourcentage correspondant.
Tableau VI
Comparaison ambulatoire et hospitalisation conventionnelle en analyse multivariée
389 (18,4 %) patients ont présenté une complication postopératoire dans les 30 jours.
Moins de complications ont été observées dans le groupe ambulatoire que dans le groupe des
patients hospitalisés (5,9 vs 19,8 % respectivement, p < 0,001). Les complications les plus
fréquentes étaient les collections superficielles non infectées (séromes), les complications
broncho-pulmonaires, les occlusions intestinales et les hématomes de paroi (Tableau VII).
Le score de gravité des complications selon Clavien-Dindo a été renseigné chez
224 patients, précisant essentiellement les complications chirurgicales ou pariétales, sans néces-
sité de réintervention chez 182 (81 %) patients (Tableau VIII). Dans le groupe des patients pris
en charge en hospitalisation conventionnelle, 3 patients ont présenté un syndrome du compar-
timent abdominal et 2 patients ont eu une récidive précoce de leur éventration. 4 (0,2 %)
patients sont décédés suite à une complication postopératoire. Aucune complication grave ou
ré-hospitalisation non programmée n’a été rapportée dans le groupe des patients ambulatoires.
Tableau VII
Complications postopératoires (< 30 jours)
Tableau VIII
Score de gravité des complications
Discussion
Notre étude multicentrique nationale, portant sur la saisie prospective et exhaustive de
2 159 cures d’éventrations réalisées par des chirurgiens séniors impliqués dans la chirurgie
pariétale, montre que la cure des éventrations en ambulatoire est faisable et sûre sous réserves
d’une bonne sélection des cas : 272 (12,6 %) de nos opérés l’ont été en ambulatoire et ont eu
des suites opératoires plus simples avec moins de complications médicales et chirurgicales
(Tableau VI) que les patients hospitalisés en hospitalisation classique.
Les patients opérés en ambulatoire étaient significativement plus jeunes (57,5 vs 63,7 ans,
p < 0,0001), plus minces (IMC 27,1 vs 29,7, p < 0,0001), avaient moins de comorbidités (score
ASA 6 3 11,1 vs 34,4 %) et présentaient des éventrations de plus petite taille (65,3 vs 40,8 %
d’éventrations < 4 cm, p < 0,0001) comparativement aux patients pris en charge en hospitali-
sation conventionnelle. Aucune réadmission non programmée n’était rapportée et il existait
moins de complications médicales ou chirurgicales chez les patients opérés en ambulatoire.
Le taux de succès de l’ambulatoire dans cette série (272 des 332 patients programmés en
ambulatoire ont effectivement été opérés en ambulatoire) était de 82 %. Une étude parallèle
issue du même registre, concernant 7 236 patients initialement sélectionnés pour une cure de
hernie inguinale en ambulatoire (cf. chapitre précédent), rapporte un taux de succès de l’ambu-
latoire supérieur, avec 6 974 (96,4 %) de patients sélectionnés et effectivement opérés selon
cette modalité. Le taux d’échec de la prise en charge en ambulatoire des éventrations était
donc de 18 %, à comparer à un taux d’échec de l’ordre de 3,6 % dans le volet hernie inguinale
de la même étude, avec les mêmes chirurgiens et les mêmes anesthésistes. La chirurgie des
hernies de l’aine est plus réglée que celle des éventrations, où l’on peut être amené à réaliser
un geste plus lourd que prévu. Il serait probablement plus exact de parler de taux de conversion
en hospitalisation classique que d’échec de l’ambulatoire : ce taux traduit l’adaptation en temps
réel de l’équipe (médicale et administrative) à une chirurgie plus lourde que prévue, garante
de la qualité des suites (aucune complication grave ou réadmission non programmée dans le
groupe ambulatoire).
Lorsque l’on compare maintenant les causes d’échec de l’ambulatoire dans le volet éven-
tration et dans le volet hernie de l’aine de la même étude, on note respectivement 25 % (15/60)
et 11 % (29/262) de causes liées à un défaut de prise en charge par l’entourage ou le stress
du patient. On explique mal cette différence dans les mêmes populations, prises en charge par
les mêmes équipes, uniquement par des raisons purement sociales, mais possiblement comme
le reflet d’une chirurgie plus lourde que prévu qui peut apparaître difficile à gérer à domicile
par l’entourage du patient ou le patient lui-même et qui mériterait une préparation, une infor-
mation et une éducation du patient plus poussée.
82 J.-F. Gillion, J.-P. Cossa
rapportées est assez spécifique des cures d’éventration laparoscopiques (plaie digestive, sai-
gnement, conversion en laparotomie, iléus postopératoire, hématome). Deux réadmissions pré-
coces ont été nécessaires pour hématome intrapéritonéal ou fistule colocutanée. Quarante
(15,7 %) séromes sont survenus mais n’ont pas été inclus dans le taux de complications
rapporté.
Moreno-Egea et al. ne retrouvaient, quant à eux, pas de différence en termes de récidive
d’éventration après cure d’éventration effectuée en ambulatoire ou en hospitalisation conven-
tionnelle [10].
Dans notre série, environ un quart des interventions a été mené par voie laparoscopique,
en proportion équivalente dans les groupes ambulatoire et hospitalisation conventionnelle. La
technique chirurgicale employée n’a pas été identifiée comme facteur prédictif d’échec de
prise en charge ambulatoire (abord laparoscopique vs direct OR 0,76, p = 0,098). Ces résultats
corroborent les données de la méta-analyse de Awaiz et al. dans laquelle 4 des 6 essais ran-
domisés sélectionnés ne retrouvaient aucune différence significative en terme de durée de
séjour entre cures d’éventration par abord direct ou laparoscopique [4].
En revanche, les cures d’éventration menées par abord laparoscopique étaient volontiers
employées pour le traitement d’éventrations de plus petite taille que celles effectuées par abord
direct (éventration < 4 cm 53,8 vs 37,9 % respectivement). Deux méta-analyses récentes ne
retrouvent pas de différence quant à la taille des éventrations opérées entre abord direct et
laparoscopique [4, 5]. L’emploi de l’abord laparoscopique pour le traitement des éventrations
de taille moyenne constitue une voie de développement potentiel des procédures ambulatoires
notamment si l’on parvient à diminuer l’incidence des séromes en réparant le défect pariétal
[18]. Les abords combinés (résection du sac et raphie pariétale par voie ouverte puis mise en
place de la prothèse par voie laparoscopique) représentent également une option en ce sens.
Outre les contre-indications absolues ou relatives d’ordre médico-chirurgical, un quart
environ des causes de renoncement à l’ambulatoire provenait de causes sociales et réglemen-
taires. Un assouplissement des conditions requises pour la prise en charge en ambulatoire se
dessine et devrait permettre d’augmenter le nombre de patients pouvant bénéficier de l’ambu-
latoire. L’obligation d’accompagnement pour le retour à domicile et/ou pour la première nuit
est actuellement en débat. Des solutions de télé-accompagnement sur smartphone de type
« Ambucare » [19], pourraient être très utiles dans un avenir proche.
Les contre-indications d’ordre chirurgical (éventrations de grande taille, nécessité de drai-
nage...) n’étaient pas explorées dans le volet ambulatoire du questionnaire. Celles-ci comptent
probablement parmi les causes non précisées de renoncement à l’ambulatoire ou alors figurent
dans la rubrique « autres causes ».
Les échecs de nature médicale, causés par la douleur, la gestion de la douleur, les nau-
sées-vomissements postopératoires, pourraient être limités par l’établissement de protocoles
anesthésiques stricts dans la gestion de la douleur et des nausées-vomissements postopératoires
(antalgie précoce, proscription des drogues émétisantes, infiltration des cicatrices par anesthé-
siques locaux, utilisation de TAP blocks) [20]. Les causes chirurgicales d’échec n’étaient pas
explorées de manière exhaustive par le questionnaire et peuvent également figurer dans la
rubrique « autres causes ».
Cette étude comporte quelques limites : il ne s’agit pas d’une étude randomisée, mais ce
type d’étude paraît difficile à mettre en place en regard des contre-indications à l’ambulatoire
existantes. Le recueil multicentrique porte sur de grands effectifs, sur 5 ans, sur un grand
nombre d’opérateurs, ce qui en fait sa force mais peut aussi s’accompagner de saisies man-
quantes, d’items oubliés ou non saisis. Le taux moyen de remplissage des items dépasse
cependant largement 90 %. En cas d’items manquants, les pourcentages sont calculés sur les
items complétés.
84 J.-F. Gillion, J.-P. Cossa
Conclusion
À l’aide d’une base de données nationale, colligeant les résultats de 2 159 cures d’éventra-
tion, nous avons pu analyser la pratique ambulatoire française et ainsi identifier les situations et
facteurs de risque d’échec de telles procédures. L’âge avancé, l’indice de masse corporelle élevé,
un score ASA 6 3, une éventration de plus 4 cm et la survenue d’une complication médicale ou
chirurgicale ont été identifiés comme facteurs d’échec d’ambulatoire après cure d’éventration.
Sous réserves d’une sélection médicosociale rigoureuse, la prise en charge ambulatoire des
éventrations représente une pratique sûre. Elle devrait être systématiquement envisagée chez
tout patient jeune, à faibles comorbidités, présentant une éventration de petite taille.
Claude-Bernard, Albi) ; Thillois J-M (Hôpital privé d’Antony, Antony) ; Tiry P (Clinique de
Saint-Omer, Saint-Omer) ; Verhaeghe R (MCO Côte d’Opale, Boulogne-sur-Mer) ; Vu P (Brie-
sur-Marne) ; Zaranis C (Clinique de la Rochelle, La Rochelle).
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CHOLÉCYSTECTOMIE
PAR LAPAROSCOPIE
Hubert Johanet
Introduction
L’année 1990 a marqué l’histoire de la chirurgie biliaire avec la publication en janvier
par Dubois de l’article référent sur la cholécystectomie par cœlioscopie [1] puis en novembre
de la même année par Ledet de la première série de 200 cholécystectomies en ambulatoire,
par laparotomie [2].
Vingt-cinq ans plus tard, la cholécystectomie est communément réalisée en ambulatoire.
Les données PMSI 2015 ont montré qu’en France 28 141 cholécystectomies par cœlioscopie,
soit 24,5 %, ont été réalisées en ambulatoire. Il existe depuis 2010 des recommandations sur
la chirurgie ambulatoire réalisées par la Société française de chirurgie digestive et l’Association
de chirurgie hépatobiliaire, labellisées par la Haute autorité de Santé : « pour les patients
répondant aux critères médicaux et socio-économiques de la prise en charge en ambulatoire
et dans le cadre d’une organisation adaptée, la cholécystectomie par cœlioscopie en hospita-
lisation de moins de 12h est recommandée (grade A) » [3].
Néanmoins, de nombreuses questions persistent sur le sujet.
Résultats
L’analyse de 41 séries indépendantes de plus de 100 cholécystectomies réalisées en ambu-
latoire, (moins de 12h) (de 100 à 1 313 patients) [4-44] et de 14 méta-analyses [45-58]) nous
aide à y répondre.
La méta-analyse de Tang confirme celles de Gurusamy et Vaughan [46, 49, 57], regrou-
pant douze études prospectives contrôlées comparant la cholécystectomie en ambulatoire à la
cholécystectomie gardée une nuit. Elle montre qu’il n’y a pas de différence entre les deux
groupes sur le taux d’admissions une nuit (13,1 contre 12,1 %), le taux de réadmissions (2,4
contre 2 %), le taux de complications (5,2 contre 6 %), le taux de patients revenus en consul-
tation, le niveau de douleurs et de nausées-vomissements à J1, et le délai au retour d’activité.
Dans les 36 études qui précisent les causes des patients admis une nuit, les taux varient
de 0,6 à 38,9 %, la moyenne est de 16,5 %. Parmi les 1 742 patients détaillés et analysés, ces
patients sont restés :
– par décision opératoire dans 20,1 % des cas ;
– pour inaptitude « à la rue » dans 14,6 % ;
– nausées vomissements dans 14,2 % ;
– douleurs dans 11,4 % ;
– pour horaire tardif ou longueur d’intervention dans 10,9 % ;
Cholécystectomie par laparoscopie 87
Conclusion
En conclusion, un patient :
– bien sélectionné par une analyse de ses comorbidités et une vérification préopératoire
de la vacuité de la voie biliaire principale, l’analyse des conditions chirurgicales locales ;
– bien éduqué par une visibilité de son parcours, bénéficiant d’un jeûne moderne ;
– chez lequel un maniement correct des antalgiques a été réalisé, opéré avant 14 h ;
– recevant 8 mg de dexaméthasone en début d’intervention avec éventuellement une infil-
tration des orifices de trocarts, avec un pneumopéritoine bien évacué ;
– bénéficiant d’une bonne coordination chirurgien-anesthésiste avec un parcours de soin
réactif, un tel patient devrait faire approcher le taux d’échec de la cholécystectomie en ambu-
latoire à moins de 5 %, ce que certaines équipes font déjà.
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CHIRURGIE
DE L’ŒSOPHAGE
Yannick Deswysen, Guillaume Piessen,
Jean-Pierre Triboulet, Christophe Mariette
Introduction
Les indications habituelles de prise en charge ambulatoire en chirurgie digestive sont la
chirurgie pariétale, proctologique et la cholécystectomie. La nécessité de réduire les listes
d’attente et de diminuer les coûts hospitaliers impose un élargissement de ses indications. Dans
le domaine de la chirurgie œsophagienne, la prise en charge du reflux gastro-œsophagien par
fundoplicature cœlioscopique est la seule intervention largement rapportée en ambulatoire [1, 2]
et considérée comme faisable dans les recommandations de la Société française de chirurgie
digestive (SFCD) et de l’Association de chirurgie hépatobiliaire et de transplantation (ACHBT)
labellisées par la Haute autorité de Santé (HAS) [3]. En 2013, une étude de cohorte appariée
française a démontré que la fundoplicature par voie cœlioscopique ambulatoire et convention-
nelle donnait des résultats similaires en termes de suites postopératoires, de qualité de vie. De
plus, la prise en charge ambulatoire était associée à une réduction des coûts [4].
Concernant les autres procédures chirurgicales œsophagiennes, la prise en charge des diver-
ticules de Zenker par cervicotomie et de l’achalasie par voie cœlioscopique sont des candidats
potentiels à une prise en charge en ambulatoire, ces deux procédures étant associées à une récu-
pération postopératoire rapide, la possibilité d’une réalimentation précoce et un faible taux de
complications [5, 6]. Deux études ont rapporté une expérience limitée pour la myotomie de Heller
par laparoscopie [4, 7] et une seule a décrit la cure de diverticule de Zenker par cervicotomie [4].
Le but de ce chapitre est de présenter les résultats des études concernant la chirurgie
œsophagienne ambulatoire avec une analyse critique de ceux-ci.
Méthodologie
Nous avons effectué une recherche bibliographique entre 1995 et 2017 dans Pubmed.
Pour le reflux gastro-œsophagien les mots suivants ont été utilisés : day-case surgery ;
ambulatory surgery ; outpatient surgery ; reflux ; laparoscopic fundoplication. Dix-huit études
ont été identifiées, toutes de niveau de preuve 4 [1, 2, 4, 8-21] à l’exception d’une étude
cas-témoins de niveau de preuve 3 [22].
Pour l’achalasie, les mots suivants ont été utilisés : day-case surgery ; ambulatory sur-
gery ; outpatient surgery ; achalasia ; laparoscopic heller myotomy. Trois études ont été iden-
tifiées, toutes de niveau de preuve 4 [4, 7, 23].
Pour le diverticule de Zenker, les mots suivants ont été utilisés : day-case surgery ; ambu-
latory surgery ; outpatient surgery ; Zenker. Une seule étude rapportant des résultats de chi-
rurgie par cervicotomie a pu être identifiée de niveau de preuve 4 [4].
94 Y. Deswysen, G. Piessen, J.-P. Triboulet, C. Mariette
Reflux gastro-œsophagien
En 1956, Nissen décrivit la technique chirurgicale de fundoplicature dans le traitement de
l’œsophagite sur reflux [24]. Cette technique a été modifiée en « floppy Nissen » [25] par voie
ouverte puis par voie cœlioscopique en 1991 par Dallemagne [26]. D’autres techniques ont par
la suite vu le jour, comme le « Nissen-Rossetti » [27], préservant les vaisseaux courts de la petite
courbure ou encore les valves partielles comme celle, postérieure de 270o décrite par Toupet
[28]. Du fait du succès de la laparoscopie permettant un bénéfice notamment en terme de durée
de séjour hospitalier, de récupération postopératoire et permettant une diminution des comorbi-
dités, une augmentation de la satisfaction des patients et une amélioration des résultats fonction-
nels au long cours [29], certains auteurs ont développé la procédure en chirurgie de jour avec les
premiers cas décrits en 1997 sur les bases du travail de chirurgiens de la Mayo Clinic [8].
Aucune étude randomisée n’a été retrouvée dans la revue de la littérature sur le sujet. Une
méta-analyse [1], 8 études prospectives [4, 9-14, 22] et 9 rétrospectives [2, 8, 15-21] ont montré
la faisabilité et la sécurité de la procédure de cure antireflux par voie laparoscopique en chirurgie
ambulatoire chez les patients sélectionnés porteur d’un reflux gastro-œsophagien (Tableau I).
Dans ces études, les critères de sélection des patients éligibles à la chirurgie ambulatoire
du reflux étaient :
– un score ASA I et II, voire un score ASA III pour certains patients selectionnés ;
– un indice de masse corporelle n’excédant pas 35 à 40 kg/m2 ;
– des patients vivant à proximité du milieu hospitalier ou séjournant dans un hôtel proche
de l’hôpital ;
– la présence d’une personne adulte pour la première nuit postopératoire ;
– les patients informés et adhérents au projet ;
– un consentement écrit ;
– un suivi rapproché des patients par le médecin généraliste ;
– un accès au téléphone [18].
Les critères d’exclusion les plus fréquents rapportés dans la littérature étaient :
– l’existence d’une large hernie hiatale (contre-indication relative) sans que la taille limite
soit précisée ;
– un brachyœsophage ;
– un antécédent de chirurgie abdominale par laparotomie (contre-indication relative) ;
– un antécédent de chirurgie antireflux (contre-indication relative) ;
– une comorbidité nécessitant une hospitalisation : ASA III et IV, diabète, coronaropa-
thie, épilepsie, BPCO, obésité morbide [11, 21].
La procédure chirurgicale était réalisée par laparoscopie. Aucun drainage ou cathéter
n’était utilisé en postopératoire. Le plus souvent était réalisé le rapprochement des piliers du
diaphragme et une fundoplicature selon Nissen-Rossetti [2, 10-18, 20, 21]. D’autres techniques
étaient utilisées, comme la valve postérieure selon Toupet [18, 20], la fundoplicature selon
Lind [2] ou la technique de gastroplastie selon Collis-Nissen [21].
Les protocoles d’anesthésie étaient adaptés à la chirurgie ambulatoire avec une attention
particulière aux antiémétiques et antidouleurs, en évitant les opioïdes en périopératoire et en
favorisant les anti-inflammatoires non stéroïdiens en l’absence de contre-indication. L’admi-
nistration d’anesthésique local au contact des coupoles diaphragmatiques [12] et/ou au niveau
des orifices de trocarts était souvent proposée [2, 9, 10, 12, 18-22]. La réalimentation était
réintroduite sous forme liquide, mixée ou normale avant la sortie. Aucun examen de contrôle
morphologique œsophagien n’était réalisé avant la sortie de l’hôpital. Les patients étaient
contactés au soir de la chirurgie par téléphone et une consultation de suivi précoce était orga-
nisée dans les 5 à 30 premiers jours postopératoires [10, 18].
Tableau I
Séries publiées de chirurgie antireflux par laparoscopie en ambulatoire chez l’adulte
Référence Nombre Mortalité Morbidité Conversion Réoperation Temps Taux Consultation Réadmission Satisfaction
de patients (%) (%) (%) (%) opératoire d’admission non prévue (%) (%)
moyen (min) à l’hôpital (%) (%)
Bailey [10] 20 0 0 0 0 90 0 5 0 95
Hospitalisation < 24 h
Cohn [8] 40 0 0 0 0 NR 0 NR 0 NR
95
Deux mille quatre-vingt-seize patients ont été opérés [2, 4, 8-22]. La médiane du temps
opératoire était comprise entre 54 et 90 minutes [2, 4, 9-12, 14, 16, 18, 19, 21, 22].
Le taux d’admission non programmée le soir même de l’intervention oscillait entre 0 et
23 % [2, 4, 8-22]. Les principales causes étaient des douleurs ou des nausées non contrôlées
[2, 4, 8-22]. D’autres complications, plus rares, ont été relevées comme une perforation œso-
phagienne ou gastrique, une brèche pleurale, une hémorragie au niveau des vaisseaux courts,
une lacération splénique et un emphysème sous cutané. La plupart des patients admis le soir
même de l’intervention quittaient l’hôpital dans les 24 heures suivant le geste opératoire répon-
dant à la définition de la chirurgie ambulatoire anglosaxonne (< 24 heures). Le taux de consul-
tations non programmées oscillait entre 1,7 et 32 % [4, 10, 18, 20, 22]. Le taux de réadmission
non programmée était entre 0 et 12,2 % [2, 4, 8-22]. Les causes les plus fréquentes étaient les
douleurs, les nausées et vomissements, la dysphagie [2, 4, 9, 11-17, 19, 20, 22]. Certaines
complications sévères étaient relevées de façon rare comme la migration de la valve en intra-
thoracique occasionnant une dyspnée, la nécrose gastrique, l’hémorragie sur orifice de trocart,
la distension gastrique, la perforation œsophagienne, les abcès sous phrénique ou médiastinaux,
le chylopéritoine et les abcès de paroi [2, 9, 11, 13, 14, 16, 18, 21].
Un seul cas de mortalité était décrit dans une seule étude ; il n’était pas en relation avec
l’intervention mais lié à un infarctus du myocarde [11]. La morbidité était comprise entre 0
et 22,7 % [4, 8-12, 14, 16, 18, 19, 21-22]. Les taux de conversion et de reprise chirurgicale
étaient respectivement de 0 à 4,5 % [2, 4, 8-12, 14, 16, 18-22] et de 0 à 4,5 % [2, 4, 8-12, 14,
19, 20].
Les résultats fonctionnels étaient difficilement analysables du fait de la période de suivi
court, du faible nombre d’articles relatant de ces différents paramètres. Une étude récemment
publiée rapportait les résultats chez 114 patients avec une durée de suivi supérieur ou égal à
deux ans. Le score de Visick a pu être calculé chez 98 d’entre eux avec une durée médiane
de suivi de 63 [24-132] mois. On observait un résultat excellent ou très bon (Visick 1 et 2)
chez 79,6 % (n = 78) d’entre eux, acceptable (Visick 3) chez 12,2 % (n = 12), et non satisfai-
sant (Visick 4) chez 8,2 % % (n = 8) [4].
Le taux de récidive de reflux, de dysphagie et la qualité de vie étaient proches de ceux
rapportés dans la littérature après chirurgie laparoscopique conventionelle. Une étude de
cohorte appariée (cas-témoins) a montré l’absence de différence en terme de morbidité pos-
topératoire, de résultats fonctionnels et de qualité de vie entre les groupes pris en charge en
ambulatoire et en conventionnel avec un bénéfice sur le plan financier en faveur de l’ambu-
latoire [22]. À noter que le taux de réadmission à 30 jours était plus élevé dans le groupe
ambulatoire (8 vs 0 %) mais que le taux de réoperation au cours du suivi de l’étude était
similaire entre les 2 groupes (11,9 vs 10,9 %, p = 0,618).
En chirurgie pédiatrique, une seule étude a traité de chirurgie antireflux selon Nissen en
ambulatoire chez 21 enfants. L’âge moyen était de 4 ans. La prise en charge périopératoire
était similaire à celle des adultes. Le taux de réadmission était de 9,5 % et le taux de compli-
cations était nul. Ce travail suggérait la faisabilité de la chirurgie antireflux en ambulatoire
chez les enfants [30].
Les recommandations de la SFCD et de l’ACHBT de 2010 concernant la chirurgie du
reflux gastro-œsophagien concluaient en la faisabilité du geste en ambulatoire pour les patients
répondant aux critères de médicaux et socioéconomiques [3] (Grade C). Selon les données
nationales du PMSI de l’année 2015, seuls 87 patients ont été opérés d’une cure antireflux par
voie cœlioscopique en ambulatoire sur un nombre total de 4 069 patients soit 2,1 % des pro-
cédures suggérant une marge de progression importante (www.scansante.fr).
Chirurgie de l’œsophage 97
Achalasie de l’œsophage
Dans la prise en charge de l’achalasie de l’œsophage, la chirurgie reste parmi les différentes
options thérapeutiques un traitement de choix. Décrite pour la première fois par laparotomie en
1914 par Heller [31], la cardiomyotomie chirurgicale est réalisée le plus souvent par voie cœlios-
copique depuis 1991, date à laquelle elle fut rapportée par Shimi [32]. Cette voie d’abord permet
de réduire les douleurs postopératoires ainsi que la durée d’hospitalisation. La complication la plus
redoutée est la perforation de la muqueuse sur le site de la myotomie avec une fréquence de 6,9 %
(0-25 %) [5]. La prise en charge endoscopique de l’achalasie a également été décrite et repose sur :
– l’injection de toxine botulique moins efficace que la chirurgie sur le long terme [5] ;
– la dilatation pneumatique récemment suggérée comme équivalente à la chirurgie en
terme d’efficacité mais au prix d’un nombre plus élevé de procédures et avec un risque de
perforation [33] ;
– plus récemment, la technique de POEM (Per Oral Endoscopic Myotomy), d’efficacité
proche de la chirurgie mais pourvoyeuse de reflux gastro-œsophagien [34].
Une étude prospective et deux études rétrospectives (issues de la même équipe) ont à ce
jour rapporté la réalisation d’une cardiomyotomie de Heller sous cœlioscopie en ambulatoire
pour au total 41 patients [4, 7, 23]. Dans la première étude publiée en 2008, les critères
d’éligibilité étaient la réalisation d’un transit œsogastroduodénal et/ou d’une endoscopie diges-
tive haute associée à une manométrie confirmant le diagnostic. La procédure consistait en une
œsocardiomyotomie de 8 cm par laparoscopie associée à une fundoplicature antérieure. Aucune
conversion n’a été réalisée, de même qu’aucune reprise chirurgicale. Le taux de complications
postopératoires rapporté était de 0 %. La mortalité était nulle. Sur 7 patients opérés en ambu-
latoire, 2 ont pu quitter l’hôpital dans les 12 heures suivant la chirurgie répondant à la définition
française de l’ambulatoire et 5 patients ont pu quitter l’hôpital dans les 23 heures suivant la
chirurgie répondant à la définition anglosaxonne de l’ambulatoire. Aucune réadmission n’a été
notée. Trois patients ont développé une récidive de dysphagie nécessitant une dilatation pneu-
matique [7]. Dans la seconde étude rétrospective, les mêmes auteurs rapportent en plus des
7 patients précédemment décrits (2000-2007), leurs résultats entre 2008 et 2014 après mise en
place d’un chemin clinique ambulatoire dédié pour cette pathologie dans leur établissement.
Au total, 27 patients ont été opérés en ambulatoire comparativement à 33 patients en hospita-
lisation conventionnelle. Les auteurs ne comparaient pas les groupes en termes de complica-
tions. Il était signalé une complication grave à type de plaie muqueuse de l’œsophage avec
médiastinite ayant nécessité une œsophagectomie en postopératoire. Dans le groupe ambula-
toire, un patient s’est représenté dans les 30 jours pour une symptomatologie de douleur tho-
racique spontanément résolutive d’étiologie non identifiée. Enfin, 6 patients ont nécessité une
dilatation pneumatique par endoscopie en postopératoire. Aucune réintervention chirurgicale
n’a été nécessaire. Les auteurs observaient une augmentation de la proportion de patients pris
en charge en ambulatoire au fil du temps avec un taux 7,7 % entre 2000 et 2007 versus 73,5 %
entre 2008 et 2014 et concluaient en la faisabilité de cette procédure en ambulatoire [23].
Dans la troisième étude prospective, les critères d’éligibilité étaient :
– une manométrie de l’œsophage confirmant le diagnostic d’achalasie ;
– une endoscopie digestive haute permettant d’exclure une pseudoachalasie ;
– une opacification digestive haute pour éliminer un mégaœsophage (diamètre
> 7 cm) [12].
Les critères de non-éligibilité à l’ambulatoire étaient :
– la présence d’un mégaœsophage ;
– un antécédent de chirurgie abdominale par laparotomie ;
– ou un diverticule de l’œsophage.
98 Y. Deswysen, G. Piessen, J.-P. Triboulet, C. Mariette
Diverticule de Zenker
La prise en charge chirurgicale du diverticule de Zenker par cervicotomie avec résection
ou non du diverticule associé à une myotomie du muscle cricopharyngien a longtemps été
considérée comme un standard. Récemment l’approche endoscopique a été montrée comme
efficace et sûre avec une réduction de la morbidité, du taux de complications et de la durée
du séjour hospitalier par rapport à l’approche chirurgicale [35, 36]. La faisabilité du geste
endoscopique en ambulatoire a été démontrée par plusieurs études pour des patients sélec-
tionnés (ouverture de bouche permettant le passage de l’endoscope, taille de diverticule suf-
fisamment grande, visualisation satisfaisante du diverticule en endoscopie, absence d’argument
préopératoire pour une hospitalisation conventionnelle) [36-40] avec des taux de sortie le jour
de l’intervention (< 12 heures) de 52,4 à 93,3 % ou dans les 24 heures de 84 à 93,4 % [40,
41]. Une seule étude prospective a à ce jour rapporté la prise en charge chirurgicale des
diverticules de Zenker en ambulatoire chez 20 patients [4].
Les critères d’éligibilité étaient :
– un diverticule de Zenker symptomatique ;
– confirmé par transit pharyngo-œsophagien ;
– et ils bénéficiaient d’une endoscopie digestive haute pour éliminer une autre cause
organique de dysphagie et d’un examen ORL pour vérifier la bonne mobilité des cordes vocales.
Les critères de non-éligibilité étaient :
– un antécédent de chirurgie cervicale ;
– une paralysie de corde vocale ;
– un diverticule plongeant dans le médiastin ou orienté à droite de l’œsophage ;
– une suspicion de diverticule dégénéré.
Les autres critères de non-éligibilité étaient non spécifiques à la procédure incluant :
– un score ASA III non stabilisé ;
– un score ASA IV ;
– ou des comorbidités incompatibles avec l’ambulatoire, comme le diabète, l’insuffisance
coronarienne, l’épilepsie, l’insuffisance respiratoire chronique.
Après dissection du diverticule jusqu’au collet et individualisation et section du muscle
cricopharyngien, le diverticule était agrafé à la pince linéaire coupante (agrafes vasculaires).
La zone de section diverticulaire était enfouie par des points séparés de monobrin résorbable.
Un test coloré au bleu était réalisé de manière systématique avec en cas de positivité des points
de renforts. Vingt patients ont été opérés. La durée opératoire moyenne était de 49 minutes
[23-94]. Le taux d’admission non programmée le soir de l’intervention était de 10 %, lié dans
un cas à des douleurs mal contrôlées et dans l’autre cas une reprise chirurgicale le même jour
pour la survenue d’un hématome, complication rare observée dans 0 à 5 % des cas [6, 42].
Aucune consultation non programmée n’était notée. Le taux de réadmission non programmée
était de 10 %, lié dans les 2 cas à une fistule œsophagienne cervicale pauci-symptomatique
tardive (J9 et J14). Ces patients étaient traités médicalement (antibiothérapie et nutrition enté-
rale) avec une évolution favorable. Des taux allant jusque 8 à 14 % rapportés dans la littérature
[6, 41, 42]. Une étude de registre récente aux États-Unis rapportait une durée moyenne de
séjour en conventionnel de 5,8 jours [43]. Les deux réadmissions ayant eu lieu au-delà du
7e jour, une prise en charge en conventionnel n’aurait pas modifié le devenir des patients. La
morbidité globale à 30 jours était de 20 % [4]. Le taux de reprise chirurgicale était de 5 %. Le
résultat fonctionnel chez les patients opérés était excellent à 1 mois (aucun symptôme résiduel)
et après une durée médiane de suivi de 37,6 [5-60] mois, les résultats se maintenaient. Seul
un malade décrivait une dysphagie occasionnelle aux solides [4].
100 Y. Deswysen, G. Piessen, J.-P. Triboulet, C. Mariette
Aucune recommandation n’a à ce jour été formulée en en faveur d’une prise en charge
chirurgicale ambulatoire du diverticule de Zenker mais cette étude en suggère la faisabilité.
Les données PMSI de 2015 concernant cette intervention ne retrouvent aucune prise en charge
en ambulatoire du diverticule de Zenker (www.scansante.fr).
Conclusion
La chirurgie ambulatoire en pathologie œsophagienne est à l’heure actuelle peu déve-
loppée en France. La prise en charge du reflux gastro-œsophagien par fundoplicature cœlios-
copique est la seule intervention largement rapportée en ambulatoire [1, 2] et a été considérée
comme faisable dans les recommandations de la SFCD et de l’ACHBT labellisées par l’HAS
(grade C). La prise en charge en ambulatoire des diverticules de Zenker par cervicotomie a
été décrite comme faisable par une équipe experte [4]. La réalisation d’une cardiomyotomie
de Heller par laparoscopie ne peut être à ce jour recommandée du fait d’un taux important de
perforations secondaires dans une étude [4].
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CHIRURGIE HÉPATIQUE MINEURE
PAR LAPAROSCOPIE
Hadrien Tranchart, Martin Gaillard
Introduction
La chirurgie hépatique laparoscopique (CHL) a connu un essor important dans le monde
[1]. Cette voie d’abord, en comparaison à la laparotomie, permet une diminution des pertes
sanguines peropératoires, de la douleur, de la morbidité postopératoires et de la durée de séjour,
sans modifier les résultats oncologiques [1-3]. Une diminution significative du coût de la prise
en charge a par ailleurs été suggérée [4].
La première conférence de consensus sur la CHL a eu lieu aux États-Unis en 2008 [5]
et a été actualisée en 2014 [6]. Les meilleures indications de CHL ont été définies comme des
lésions tumorales uniques, de moins de 5 cm, situées dans les segments antérieurs (II, III, IVb,
V et VI) (Figure 1), à distance du futur plan de section hépatique, du hile hépatique et de la
veine cave. Les fenestrations de kystes biliaires constituent également de très bonnes indica-
tions à l’abord laparoscopique [7].
En parallèle, des protocoles de récupération améliorée après chirurgie, initialement déve-
loppés en chirurgie colique, ont été mis en place en chirurgie hépatique. Ils ont permis une
diminution de la morbidité postopératoire et de la durée d’hospitalisation [8]. La plupart de
ces protocoles insistent sur l’absence de sondage (urinaire et gastrique) et de drainage post-
opératoires, sur une analgésie multimodale utilisant notamment la voie péridurale et associant
des anti-inflammatoires non stéroïdiens [9, 10], ainsi que sur une réalimentation et une mobi-
lisation précoces.
Pour certaines interventions sélectionnées, ayant une morbidité proche de celle d’une
cholécystectomie laparoscopique, une prise en charge ambulatoire pourrait être envisagée.
Situation actuelle
À ce jour, une seule série concernant 20 patients très sélectionnés a rapporté spécifique-
ment la réalisation en ambulatoire d’une CHL [11]. Ces patients représentaient 11,6 % de
l’ensemble des patients opérés par laparoscopie au cours de la période de l’étude. Les indica-
tions étaient des kystes hépatiques dans 10 cas, un angiome hépatique dans 3 cas, une hyper-
plasie nodulaire focale dans 3 cas, ou une métastase hépatique unique de cancer colorectal
dans 4 cas. Les gestes réalisés étaient des fenestrations de kyste hépatiques, des résections
atypiques de tumeurs superficielles (< 2 cm) ou de tumeurs pédiculées. Étaient exclus d’une
prise en charge ambulatoire les patients dont l’indice de masse corporelle (IMC) était supérieur
à 35 kg/m2, dont le score de l’American Society of Anesthesiologists (ASA) était supérieur
ou égal à 3, lorsqu’il existait un antécédent de chirurgie sus-mésocolique, en cas de foie
pathologique (cirrhose, fibrose [metavir F1-F3] ou stéatose 6 10 %) ou de prise au long cours
d’un traitement antiagrégant ou anticoagulant. La durée opératoire médiane était de 92 minutes
(dispersion : 50-240 minutes). La perte sanguine médiane était de 35 mL (dispersion :
20-150 mL). Il n’a pas été observé de complication postopératoire. Tous les patients ont pu
104 H. Tranchart, M. Gaillard
quitter l’établissement 5 à 7 heures après la fin de la chirurgie et il n’a pas été rapporté de
réhospitalisation par la suite. Le score médian de douleur postopératoire à la sortie était de 3
(échelle visuelle analogique à 10 niveaux, dispersion : 0-4).
Évolution possible
La lobectomie gauche laparoscopique est aujourd’hui réalisée en routine par de nom-
breuses équipes [16, 17]. Cette intervention représente un candidat potentiel pour la chirurgie
ambulatoire, de même que la destruction de lésions solides par radiofréquence assistée par
laparoscopie [18]. La chirurgie robotique pourrait faciliter la chirurgie dans les segments pos-
térieurs du foie et rendre accessible à l’ambulatoire certains patients sélectionnés [19]. De
nouvelles techniques de chirurgie minimale invasive, telles que la chirurgie à trocart unique
[11, 20], en diminuant l’agression pariétale, pourraient encourager le développement de
l’ambulatoire.
Conclusion
Certaines interventions de CHL pourraient devenir accessibles à une prise en charge
ambulatoire. Cependant, ce mode d’hospitalisation nécessite une forte sélection préopératoire,
et il est peu probable qu’il devienne à moyen terme un standard pour l’immense majorité des
patients qui nécessitent une hépatectomie. Par ailleurs, en dehors d’une expérience forte en
chirurgie ambulatoire, cette prise en charge ne peut être envisagée que dans des centres ayant
une double compétence en chirurgie laparoscopique et hépatique. Le nombre limité de ces
centres semble être une barrière réelle au développement de ce mode d’hospitalisation.
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CHIRURGIE COLORECTALE
Benoît Gignoux, Philippe Chasserant
Introduction
Avec plus de 60 000 actes par an en France, la chirurgie colorectale représente la plupart
des interventions majeures en chirurgie digestive. La première réalisation d’une colectomie en
ambulatoire date de 2013 [1]. Actuellement, ce mode de prise en charge reste confidentiel, en
cours d’évaluation et restreint à quelques équipes [2]. Ce mode de prise en charge s’est appuyé
sur 2 révolutions en chirurgie colorectale : le développement de la laparoscopie puis celle de
la récupération améliorée après chirurgie (RAAC).
RAC et ambulatoire
Dès 1995, Henrik Kehlet [3, 4] a posé les bases de la RAAC dont l’objectif était de
réduire l’agression de l’intervention chirurgicale entraînant une optimisation de la convales-
cence postopératoire et une réduction de la morbidité postopératoire. Grâce à une récupération
plus précoce des fonctions physiologiques (respiration, transit, alimentation, mobilisation) cette
procédure permet aussi et c’est un objectif secondaire de raccourcir le séjour hospitalier. Le
programme initial comportait 4 mesures clés pour lutter contre l’iléus post opératoire : lapa-
roscopie, anesthésie péridurale thoracique, mobilisation précoce et alimentation précoce. La
série préliminaire comportait 8 patients d’âge moyen 78 ans permettant une sortie à J2 pour
6 patients et à J3 pour les 2 autres. Depuis, de nombreuses équipes se sont fédérées autour de
ces principes sous l’égide de la société ERAS (Enhanced Recovery After Surgery) ou du
Groupe francophone de réhabilitation améliorée après chirurgie (GRACE) [5].
Le programme RAAC actuel définit un parcours de soins centré sur le patient faisant
intervenir l’ensemble des acteurs de sa prise en charge (chirurgien, anesthésiste, infirmier,
aide-soignant, kinésithérapeute, nutritionniste, personnel administratif). Ce programme
comporte 20 mesures appliquées aux différentes phases préopératoire, peropératoire et posto-
pératoire [6, 7]. Les objectifs développés ainsi que l’application rigoureuse de l’Evidence Based
Medicine (EBM) ont remis en cause de nombreux dogmes chirurgicaux (préparation mécanique
du colon, sonde nasogastrique, drainage vésical, drainage chirurgical, reprise lente de l’ali-
mentation, morphiniques systématiques à fortes dose) entraînant une démédicalisation péri-
opératoire libérant le patient de nombreuses attaches.
Les progrès combinés des techniques de chirurgie, d’anesthésie et de gestion péri-opéra-
toire en général permettent une optimisation de la récupération postopératoire des patients et
rendent envisageable, dans un cadre organisationnel strict, une prise en charge en ambulatoire.
Il s’agit ainsi d’hospitalisation ambulatoire rendue possible par l’application de procédures de
RAAC, dont les modes de prise en charge sont deux aspects d’une même démarche. Le résultat
Chirurgie colorectale 107
attendu en est une hospitalisation réduite au minimum avec des suites opératoires simples et
maîtrisées. Grâce à ces programmes de RAAC, des actes chirurgicaux de plus en plus
complexes peuvent être réalisés en ambulatoire par des équipes très spécialisées, rodées à la
chirurgie ambulatoire et disposant d’une organisation optimisée. Cela préfigure une substitu-
tion progressive vers l’ambulatoire de ces « gestes innovants » [8, 9].
Rappelons les principes fondateurs de la RAAC : EBM, chemin clinique centré sur le
patient, prise en charge multidisciplinaire, approche organisationnelle et managériale, antici-
pation et gestion a priori des risques. Ces fondamentaux s’appliquent aussi pour la chirurgie
ambulatoire. Nous émettons l’hypothèse que RAAC et chirurgie ambulatoire répondent
à la même philosophie et ne sont qu’un seul et même concept. La réalisation de procédure
en ambulatoire étant simplement dépendante de la maturation du triptyque « patient/acte/
structure » définit dans le rapport de la HAS 2014 sur les éléments d’appréciation en vue de
la prise en charge d’un patient [10].
Tableau I
Activité de chirurgie colorectale et taux d’ambulatoire en France (Données PMSI 2015)
RC : rétablissement de la continuité ; AIP : anastomose infrapéritonéale ; ACA : anastomose coloanale ; AAP : ampu-
tation du rectum par laparotomie ou cœlioscopie avec abord périnéal.
Méthode
Tous les patients éligibles présentant une indication de chirurgie colorectale par laparos-
copie se sont vus proposer une prise en charge en ambulatoire. Après consentement éclairé,
les patients ont reçu des documents spécifiques personnalisés expliquant leur pathologie, le
parcours de soin, un algorithme de solution en cas de problème et les ordonnances post
opératoires.
Chirurgie colorectale 109
Résultats
Il s’agit d’une étude prospective de cohorte historique regroupant l’expérience indépen-
dante de deux centres : CS, période d’inclusion de février 2013 à décembre 2016, 72 patients
(31 F/41 H) inclus consécutivement et HPE, période d’inclusion de décembre 2014 à décembre
2016, 85 patients (39 F/46 H) inclus consécutivement.
Ainsi au total, 157 patients ont été inclus de février 2013 à décembre 2016 : 70 F/87 H,
d’âge moyen 59 ans (25-82) et de BMI moyen 26,5 (16-45).
Les types de colectomie et les indications opératoires sont présentés dans le tableau II.
Tableau II
Indication opératoire et type de colectomie
Discussion
Les avancées en réhabilitation améliorée ont progressivement permis de réduire la durée
moyenne de séjour après chirurgie colorectale [14]. Cependant la chirurgie colorectale en
ambulatoire reste une procédure exceptionnelle (0,14 %) en France. Elle résulte principa-
lement de l’expérience de deux centres CS et HPE dont l’activité représente les trois quarts
112 B. Gignoux
des patients opérés de résection colorectale en ambulatoire. Dans les deux centres, cette activité
ne s’est pas improvisée mais s’est appuyée sur trois axes principaux :
– une expérience en réhabilitation améliorée après chirurgie colorectale avec réduction
progressive de la durée moyenne de séjour à 48 heures ;
– le développement de la chirurgie ambulatoire en routine pour la majorité des interven-
tions de chirurgie digestive ;
– l’organisation d’un suivi spécifique postopératoire des patients à domicile.
Cette série montre le caractère reproductible et fiable de la prise en charge des colectomies
en ambulatoire. À mesure que l’expérience augmentait, chaque centre a élargi les indications
tant sur le type de colectomie que sur les comorbidités associées. Cet élargissement des indi-
cations ne s’est pas accompagné d’une augmentation des complications confirmant la notion
que l’ambulatoire dépend du patient et non du geste réalisé. Pour les deux équipes, la part
d’ambulatoire ne cesse d’augmenter atteignant 65 % en 2016 pour le centre HPE et 35 % pour
le centre CS. Les bons résultats et la dynamique positive chez les patients en terme de satis-
faction poussent les équipes à inverser leur mode de pensée passant de : « le patient est-il
éligible pour une prise en charge ambulatoire ? » à : « y a-t-il une contre-indication à
l’ambulatoire ? ».
L’implication du chirurgien dans les démarches RAAC puis ambulatoire joue un rôle
fondamental dans la réussite de la procédure. Le patient a souvent peu d’a priori par rapport
à un geste chirurgical dont il ne connait rien, c’est la subjectivité et l’engagement des personnes
qui l’informent qui vont forger ou pas son adhésion. La capacité de l’équipe (chirurgien,
anesthésiste, assistante chirurgicale, infirmière d’ambulatoire, etc.) à avoir un discours clair,
coordonné et cohérent a une place primordiale. Les intervenants ne doivent pas sous-estimer
le risque d’une complication mais expliquer le risque de survenue de celle-ci et proposer des
solutions adaptées et efficaces (appel sur numéro dédié, consultation non programmée, possi-
bilité d’une réhospitalisation) pour chaque éventualité.
Conclusion
Avec seulement 87 procédures sur 62 000 actes en 2015, la chirurgie colorectale en ambu-
latoire est actuellement une procédure exceptionnelle. Elle est principalement le fait de deux
centres qui enregistrent 3/4 des procédures. L’expérience de ces deux centres totalisant plus
de 150 patients s’appuie sur une double expertise en chirurgie ambulatoire et en RAAC. La
prise en charge en ambulatoire constitue ainsi la forme optimale de réhabilitation améliorée
après chirurgie colorectale.
114 B. Gignoux
Les points clés de cette procédure sont : un engagement fort des équipes médico-soi-
gnantes, l’organisation d’un parcours de soin, l’éducation des patients et la gestion a priori
des risques avec organisation spécifique d’une surveillance post opératoire à domicile. Avec
des taux de consultations non programmées et de réhospitalisations respectivement de 19 et
6 %, cette expérience prouve que la procédure ambulatoire en chirurgie colorectale n’expose
pas les patients à une augmentation de la morbidité et de la mortalité.
Bibliographie
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LIMITES DE LA PRISE EN CHARGE
AMBULATOIRE POUR RECTOPEXIE
AU PROMONTOIRE PAR VOIE
CŒLIOSCOPIQUE
Jean-Luc Faucheron, Bertrand Trilling, Pierre-Yves Sage,
Sandrine Barbois, Fabian Reche
Introduction
La rectopexie ventrale au promontoire par voie cœlioscopique est indiquée chez les
patients présentant un prolapsus extériorisé du rectum ou une colpocèle postérieure sympto-
matique [1]. Il s’agit d’une intervention bien codifiée, d’environ une heure, réalisée par l’inter-
médiaire de 3 ou 4 trocarts, qui représente un traumatisme minime pour le patient. La grande
majorité des patients peut sortir rapidement, le plus souvent dès le lendemain de l’intervention
[2, 3]. Notre expérience dans la rectopexie au promontoire par voie cœlioscopique, l’applica-
tion systématique des règles de la réhabilitation améliorée dans la chirurgie colorectale et
l’investissement dans le développement de la chirurgie ambulatoire nous ont incités à réaliser,
chez des patients sélectionnés, une rectopexie au promontoire par voie cœlioscopique en mode
ambulatoire.
Notre expérience
Du 18 janvier 2011 au 30 juin 2016, 200 cas de rectopexie ventrale au promontoire par
voie cœlioscopique éventuellement assistée par robot ont été réalisés dans notre centre.
Soixante-douze patients ont été éligibles à une prise en charge ambulatoire sur des critères
médicaux, chirurgicaux, sociaux et de motivation personnelle. L’âge médian, l’index de masse
corporelle médian, le score ASA, la durée opératoire médiane et le degré de douleurs au
premier jour selon l’échelle EVA étaient significativement plus bas dans le groupe ambulatoire.
Le taux d’antécédents chirurgicaux pelviens, la distance du domicile à l’hôpital, le taux d’uti-
lisation du robot, le taux d’échec de la rectopexie, le taux de conversion (aucune), le taux de
gestes associés et le taux de complications n’étaient pas différents entre les deux groupes. Le
taux d’échec de la prise en charge ambulatoire était de 14 % (patients restés hospitalisés une
nuit) essentiellement pour des raisons d’effets secondaires de l’anesthésie. Nous avons ainsi
pu démontrer que la rectopexie ventrale au promontoire par voie cœlioscopique [4] ou robot-
assistée [5] était faisable et sûre en mode ambulatoire.
116 J.-L. Faucheron, B. Trilling, P.-Y. Sage, S. Barbois, F. Reche
Tableau I
Études publiées sur la réalisation de rectopexie en ambulatoire (12 heures) et résultats immédiats
Powar [7] 27 23 % 0
Étude de la littérature
En plus de nos deux publications récentes, nous n’avons identifié que 3 articles publiés sur
ce thème dans la littérature au 31 décembre 2016 (6-8), dont une simple lettre à l’éditeur [8].
Aucun ne décrit la rectopexie au promontoire robot-assistée en ambulatoire. Vijay et al. ont
conclu, à partir de 5 patients présentant un prolapsus extériorisé du rectum traités par rectopexie
au promontoire par voie cœlioscopique, que cette technique était faisable, sûre et acceptable en
ambulatoire pour des patients motivés [6]. Ces auteurs ont argumenté qu’il s’agissait du premier
article sur le sujet, mais ils n’ont pas cité notre article en français, publié en 2006, mentionnant
4 patients sur 54 traités par rectopexie ventrale cœlioscopique en mode ambulatoire [9]. De plus,
un des patients de la série de Vijay et al. est resté 18 heures à l’hôpital, ce qui ne correspondrait
pas en France à une prise en charge ambulatoire classique. Powar et al. ont publié une série de
27 patients, traités par rectopexie ventrale cœlioscopique pour prolapsus extériorisé du rectum,
prolapsus rectal interne et rectocèle pris en charge en mode ambulatoire [7]. Ces auteurs ont noté
qu’un jeune âge et une assurance privée étaient des facteurs associés à une prise en charge
ambulatoire. Ils ont aussi démontré à partir de leur étude que l’indication chirurgicale, l’absence
d’hystérectomie dans les antécédents et l’utilisation de prothèse biologique étaient associées à
une prise en charge ambulatoire, tout en reconnaissant que ces facteurs étaient confondus avec
l’âge. Dans notre étude en cours de publication concernant 72 patients, nous n’avons pas réalisé
d’analyse multivariée comme ces auteurs, puisque l’âge des patients, comme certains facteurs
médicaux et sociaux maintenant classiques, sont pour nous une indication systématique à une
prise en charge ambulatoire. Nous ne pratiquons pas d’activité privée dans notre service, mais
un patient avait à payer son hospitalisation et avait demandé une prise en charge ambulatoire,
qui lui avait été bien sûr accordée à l’époque [2]. Cet exemple soulève d’ailleurs une question
politiquement incorrecte qui s’applique également à la réhabilitation améliorée après chirurgie :
les patients payant leur hospitalisation ont tendance à sortir plus rapidement à domicile que les
autres... Cette remarque est lourde de conséquence et doit notamment être prise en compte
lorsqu’il s’agit de comparer les résultats de la chirurgie ambulatoire entre différents pays. Nous
n’avons jamais utilisé de bandelette biologique résorbable lors de rectopexie par voie cœliosco-
pique [10], mais nous ne comprenons pas pourquoi la nature des bandelettes serait un facteur
favorable à la prise en charge ambulatoire, comme l’ont montré Powar et al. [7]. Comme George
et al. qui ont rapporté 13 patients traités par rectopexie cœlioscopique ayant pu sortir dans les
16 heures suivant le geste [8], nous considérons que les patients traités par une rectopexie
ventrale cœlioscopique pour prolapsus rectal peuvent être pris en charge en mode ambulatoire
dans un service public, qu’il soit anglais ou français, pourvu qu’ils soient bien sélectionnés selon
des critères médicaux, sociaux, environnementaux et de motivation personnelle, récemment
rappelés par la Société nationale française de coloproctologie [11].
Limites de la prise en charge ambulatoire pour rectopexie au promontoire par voie cœlioscopique 117
Conclusion
La rectopexie par voie cœlioscopique est un acte bien codifié qui peut être réalisé en
mode ambulatoire chez des patients sélectionnés, en appliquant un protocole d’anesthésie qui
permet une sortie le soir même dans près de la moitié des cas.
Bibliographie
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CHIRURGIE
PROCTOLOGIQUE
Antonio d’Alessandro, Marie-Line Barussaud, Béatrice Vinson-Bonnet
Introduction
La prise en charge en ambulatoire de la chirurgie proctologique a pris un certain retard par
rapport aux autres types de chirurgie, puisqu’elle concernait en 2013, date du début de la réflexion
de la Société nationale française de coloproctologie (SNFCP) au niveau national, seulement 31 %
des patients contre 42 % pour toutes les autres spécialités confondues. En revanche, le taux de
prise en charge ambulatoire était à la même date, largement supérieur (près de 80 %) pour la
chirurgie proctologique dans certains pays d’Europe du Nord. Devant ce constat, la SNFCP a
décidé d’accompagner les praticiens, chirurgiens digestifs et gastro-entérologues ayant une
compétence en chirurgie proctologique, vers une prise en charge périopératoire optimisée et
sécurisée. La première étape fut une enquête auprès des membres de la société savante pour
connaître d’un côté les freins et de l’autre la volonté d’adhésion à cette évolution vers l’ambula-
toire. Les freins étaient liés à une inquiétude quant à la possibilité de contrôle de la douleur
postopératoire (DPO) et des complications précoces, à une réserve sur la lourdeur organisation-
nelle et à la crainte d’une possible dépréciation financière. La volonté d’aller vers une améliora-
tion de la pratique et de la satisfaction des patients était pourtant présente.
Un groupe de travail, composé de membres de la SNFCP exerçant dans les secteurs
public, privé et universitaire, d’un anesthésiste représentant de la Société française d’anes-
thésie-réanimation et d’un représentant de l’Agence nationale d’aide à la performance (ANAP),
s’est constitué avec trois objectifs : établir des recommandations, créer un observatoire national
de la chirurgie proctologique et éditer un livret pédagogique.
La Société nationale française de chirurgie proctologique a rédigé un texte court, consen-
suel et applicable, de « Recommandations pour la chirurgie proctologique en ambulatoire »
consultable sur le site www.snfcp.org, publié dans le Journal de chirurgie viscérale [1]. Ces
recommandations sont inspirées de celles de la Haute autorité de Santé et de la société d’Uro-
logie (Association française d’urologie).
Une revue systématique de la littérature concernant la prise en charge ambulatoire des
patients ayant une chirurgie hémorroïdaire a été faite au préalable, cette intervention étant celle
qui nécessitait le plus une réflexion préalable à la prise en charge ambulatoire [2]. La revue
de la littérature a permis de préciser que les trois complications postopératoires principales
que sont la douleur postopératoire, la rétention aiguë d’urines et le saignement, étaient celles
qui avaient le plus d’impact potentiel sur la prise en charge ambulatoire. Les recommandations
se sont donc attachées à la prévention et à la gestion de ces trois complications [1].
Les préconisations concernant les critères d’inéligibilité à l’ambulatoire en chirurgie proc-
tologique n’ont rien de spécifique. L’inéligibilité relève principalement des conditions socioé-
conomiques des patients (15 % selon l’ANAP). La prise d’un traitement anticoagulant est
Chirurgie proctologique 119
peut-être dans ce contexte un facteur plus spécifique d’inéligibilité compte tenu du risque
hémorragique.
Les recommandations portent également sur l’organisation du parcours patient depuis la
consultation préopératoire jusqu’au retour à domicile et à la visite de contrôle postopératoire
(J15-J30). Lors de la consultation chirurgicale préopératoire en plus des explications orales
sur le bénéfice risque de l’acte opératoire, les suites habituelles et la prévention et la gestion
des complications spécifiques, le chirurgien remet au patient les ordonnances pour le post-
opératoire, d’antalgiques, laxatifs et soins locaux. Dans ce cadre, il est recommandé d’identifier
le médecin traitant, l’infirmière libérale, et les personnes susceptibles d’intervenir dans la prise
en charge ambulatoire (personnes ressources) : accompagnant, personne de confiance. Lors de
la consultation chirurgicale, outre les explications sur le bénéfice-risque de l’intervention, le
chirurgien remet et explique au patient les ordonnances pour le postopératoire, concernant en
particulier les antalgiques, les laxatifs et les soins locaux. Le médecin-anesthésiste apporte les
explications complémentaires nécessaires. Une consultation de programmation opératoire par
une infirmière dédiée et formée aux spécificités de la chirurgie proctologiqueest importante.
Elle permet de vérifier que les informations médicales et organisationelles ont bien été
comprises. Elle permet de remettre le livret-patient décrivant le parcours ambulatoire, la gestion
des soins au retour à domicile et la conduite à tenir en cas de signes évoquant une complication.
Lors de l’appel de la veille, on vérifie en particulier l’achat des médicaments (traitement
antalgiques notamment), la prise éventuelle de laxatifs, le délai du jeûne (soit jusqu’à deux
heures avant l’intervention pour les boissons claires et 6 heures pour les aliments solides) et
l’horaire de la douche à domicile. On peut réitérer les explications sur l’utilité des antalgiques
et des laxatifs, et annoncer l’appel du lendemain.
Un livret d’aide à la prise en charge de la chirurgie ambulatoire de la chirurgie procto-
logique (www.snfcp.org) établi par le groupe de travail de la SNFCP a été conçu comme un
guide pratique en deux parties, pour les soignants et pour les patients. Il est adaptable dans
chaque établissement pour réaliser la chirurgie proctologique en ambulatoire. Le support des-
tiné à l’équipe soignante (chirurgiens, anesthésistes, paramédicaux) a pour objectif d’élaborer
un « parcours patient » standardisé depuis la consultation initiale avec le chirurgien jusqu’à sa
consultation postopératoire. Ce document définit les conduites à tenir pour la prévention et le
traitement de la DPO précoce et lors de la première selle, pour la gestion de la rétention urinaire
et du risque de saignement.
La spécificité de la prise en charge de la douleur postopératoire en proctologie, repose
sur la réalisation d’un bloc analgésique des nerfs pudendaux en plus de l’analgésie systémique.
Ce protocole permet d’obtenir un réel confort postopératoire dans les 24 premières heures, et
de ce fait une approche plus sereine du traitement de la douleur [3]. L’analgésie systémique
associe par voie orale anti-inflammatoires non stéroïdiens, paracétamol et métronidazole
(ordonnance type dans le livret et téléchargeable sur le site) [3, 5, 6]. Les opiacés qui favorisent
la rétention d’urine et les vomissements, ne sont prescrits qu’à la demande après la levée du
bloc, si l’analgésie procurée par les non opiacés pris systématiquement, est insuffisante. Les
techniques de chirurgie hémorroïdaire mini-invasive par ligature artérielle guidée par Doppler
avec mucopexie ou par hémorroïdopexie par agrafage circulaire ne comportant pas de plaie
anale sont moins douloureuses, mais le protocole antalgique reste le même. La consommation
d’antalgiques sera modulée par le patient bien informé [7, 8].
Le principal frein à la sortie des patients est la rétention aiguë d’urine en particulier après
chirurgie hémorroïdaire et de la fissure anale. Il faut identifier les patients les plus à risque
(sexe masculin, patients âgés, antécédents de pathologie urétroprostatique ou de neuropathie
vésicale) [9]. Pour prévenir la rétention d’urines, il est recommandé d’obtenir une miction
avec vidange complète de la vessie avant le bloc opératoire et diminuer le volume des
120 A. d’Alessandro, M.-L. Barussaud, B. Vinson-Bonnet
perfusions en peropératoire qui doit rester inférieur à 500 mL. Le risque est moins élevé sous
anesthésie générale que sous rachianesthésie (qui ne doit pas comporter d’opiacés mais privi-
légier l’utilisation des produits anesthésiques de courte durée). Le bloc pudendal, n’est pas un
facteur de risque de dysurie ; au contraire la qualité de l’analgésie postopératoire est un préa-
lable nécessaire pour éviter une rétention urinaire. La sortie du patient ambulatoire nécessite
l’obtention d’une miction postopératoire qui doit être complète. Le mieux est de vérifier
l’absence de résidu par une échographie vésicale tout particulièrement après chirurgie hémor-
roïdaire et de la fissure anale. Un algorithme décisionnel est consultable et téléchargeable sur
le site snfcp.org et dans le livret.
Le risque d’hémorragie postopératoire très précoce s’avère être rare (1-3 %) et de diagnostic
facile [4]. La prévention du risque de saignement précoce repose sur la qualité de l’hémostase
peropératoire. Il existe un risque de saignement secondaire (3-10 %) avec un pic de fréquence
entre le cinquième et le vingtième jour postopératoire [4]. Le saignement secondaire n’impacte
pas le mode de prise en charge ambulatoire puisqu’en hospitalisation conventionnelle la durée
de séjour était en moyenne de 2 à 3 jours. Le risque de saignement secondaire dépend de la
reprise du transit sans effort défécatoire (laxatifs) et du respect des consignes d’éviction d’une
activité physique intense. Chez un patient sous traitement modificateur de l’hémostase, ce risque
hémorragique différé doit être communiqué aux correspondants, anesthésistes, médecins traitants,
cardiologues et/ou neurologues afin de discuter des modalités de relais au cas par cas. Plus
particulièrement après chirurgie hémorroïdaire, il est demandé au patient de rester proche de
l’établissement qui l’a pris en charge dans les trois semaines qui suivent l’intervention.
La reprise du transit reste un évènement douloureux et appréhendé par le patient. Les
explications concernant l’utilisation des laxatifs et des antalgiques doivent être orientées sur
ce sujet et seront à nouveau abordées lors de l’appel du lendemain.
Le support patient ou livret pédagogique remis au patient s’intitule « vous allez être opéré de
l’anus en ambulatoire ». Il comporte les explications sur les soins locaux, les suites opératoires et les
consignes en cas de complication avec les numéros d’appel d’urgence. Il décrit également un
ensemble de questions-réponses (FAQ), qui peut être fourni séparément au patient en postopératoire
après la collation, pour répondre au mieux à ses préoccupations au moment du retour à domicile.
Un observatoire national de la chirurgie proctologique et du prolapsus rectal, (en excluant
le cancer du rectum) a été mis en place en 2013. Cet observatoire permet d’évaluer le volume
des actes de chirurgie proctologique, le mode de prise en charge ambulatoire ou conventionnel
et la durée moyenne de séjour, par établissement de soins et selon les régions. Pour une analyse
au plus près de la réalité de l’exercice de la chirurgie proctologique, les actes ont été regroupés
en 11 groupes d’actes CCAM selon le type de pathologie et de prise en charge.
Le volume global des actes de chirurgie proctologique dans cet observatoire était de
115 553 en 2013. Il a progressé à 119 917 en 2015. Au vu des relevés annuels PMSI analysés
(grâce à l’aide de l’ATIH), on constate une augmentation significative du taux de la chirurgie
proctologique en ambulatoire de 33 en 2013 à 45 % en 2015. Cette progression est superposable
entre le secteur public et le secteur privé qui ont des pourcentages comparables d’activité
ambulatoire dans ce domaine bien que les volumes soient supérieurs en secteur privé. Dans
le cas de la chirurgie hémorroïdaire, le taux ambulatoire de la technique mini-invasive par
ligature artérielle guidée par Doppler avec mucopexie, a augmenté de 40 % à 53 %. Alors que
l’hémorroïdectomie classique reste encore à un taux de 24 % en 2015 mais elle n’était qu’à
18 % en 2013 (Figure 1). Le succès des techniques mini invasives, plus facilement réalisables
en ambulatoire se traduit également par l’augmentation du volume de ces actes qui est passé
de 54 537 en 2013 à 55 728 en 2015. Cependant l’absence de codification dédiée pour les
nouvelles procédures mini invasives représente une difficulté pour une analyse exacte de ces
résultats au sein de notre observatoire pourtant spécialisé.
Chirurgie proctologique 121
En ce qui concerne la chirurgie des suppurations anales, le taux en ambulatoire en 2015 était
de 43 % pour les suppurations simples et de 32 % pour les suppurations complexes, reflétant l’hété-
rogénéité des pathologies et de leur mode de prise en charge, programmé ou en urgence (Figure 2).
En revanche, la prise en charge en ambulatoire des kystes pilonidaux et de la maladie de
Verneuil a progressé de 14 % en 2 ans et atteignait en 2015 un taux de 50,5 % pour un volume
de 33 775 actes.
Par ailleurs, l’analyse de l’activité de chirurgie proctologique ambulatoire selon les régions
met en évidence une forte hétérogénéité avec des pourcentages variant de 20 à 60 %. Cela
traduit probablement des différences concernant le développement des unités de soins de chi-
rurgie ambulatoire sur le territoire national.
j:\2000\image\190346\alessandro\1
Figure 1. Progression des taux de chirurgie hémorroïdaire ambulatoire en en France entre 2013
et 2015 en fonction des techniques pratiquées sur 146 patients (93 %)
j:\2000\image\190346\alessandro\2
Figure 2. Progression de l’activité ambulatoire des suppurations anales et extra-anales entre 2013 et 2015.
122 A. d’Alessandro, M.-L. Barussaud, B. Vinson-Bonnet
Conclusion
La gestion des risques de complications précoces en chirurgie proctologique a permis
d’encadrer le développement de la chirurgie en ambulatoire sans pour autant modifier les
indications chirurgicales. Les nouvelles techniques chirurgicales proctologiques mini-inva-
sives, associées à la diffusion de la réalisation du bloc pudendal pour le contrôle de la douleur
postopératoire et à des protocoles spécifiques pour réduire le taux de rétention urinaire, ont
optimisé les possibilités de prise en charge de ces interventions en ambulatoire. Le soutien et
le moteur des sociétés savantes (SNFCP-SFAR-AFCA) et des organismes de tutelles accom-
pagnants (ANAP-HAS) ont largement contribué à cette progression spectaculaire de 12 points
en 2 ans de la chirurgie proctologique en ambulatoire sur le plan national et quel que soit le
mode d’exercice.
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CHIRURGIE BARIATRIQUE
Lionel Rebibo, Jean-Marc Regimbeau
Introduction
En France et dans le monde, la prévalence de l’obésité morbide augmente [1]. Il s’agit
d’un problème de santé publique, ce d’autant plus que l’obésité touche une population de plus
en plus jeune et affecte toutes les classes sociales. Il s’agit d’une pathologie chronique associée
à une augmentation du risque de morbidité et de mortalité par rapport à une population géné-
rale. Le seul traitement de l’obésité ayant montré un gain en termes d’espérance de vie est la
chirurgie [2].
Différentes techniques de chirurgie bariatrique existent (restrictive, malabsorptive ou
mixte). La chirurgie de l’obésité est en pleine expansion ces dernières années [3, 4] et actuel-
lement la gastrectomie longitudinale (GL) et le gastrique bypass (GBP) sont les procédures
les plus réalisées tandis que la mise en place d’anneau ajustable périgastrique (AG) est en
diminution. Plusieurs éléments expliquent l’émergence de telles procédures telles que le faible
taux de complication et l’efficacité sur la perte de poids et la correction de comorbidités
associées à l’obésité. La majeure partie de ces procédures chirurgicales ont des durées opéra-
toires courtes et les durées d’hospitalisation qui entourent ce type de chirurgie se sont vues
raccourcies liées à une modification de la prise en charge périopératoire [5, 6].
Les recommandations de l’Association française de chirurgie ambulatoire concernant le
type d’actes chirurgicaux pouvant bénéficier d’une prise en charge ambulatoire sont assez
simples et concernent des actes chirurgicaux de courte durée, à faible risque et à suite opéra-
toires simples. Les procédures de chirurgie de l’obésité répondent parfaitement à ces critères
et pourraient donc rentrer dans le cadre d’une prise en charge en ambulatoire. Quelques séries
de chirurgie de l’obésité en ambulatoire ont été publiées, la majeure partie concernant la pose
d’AG et plus récemment dans le cadre de la GL ou du GBP.
Nous faisons un état des lieux des pratiques chirurgicales concernant la chirurgie de
l’obésité en ambulatoire en 2015 en se basant sur les données PMSI, ainsi qu’une revue de la
littérature des séries publiées en focalisant sur la gestion du risque lié à la chirurgie ambulatoire
et les résultats des séries de chirurgie bariatrique en ambulatoire.
Données PMSI
En 2015, 55 163 procédures de chirurgies de l’obésité ont été réalisées parmi lesquelles
la majeure partie concernait la réalisation de GL (55,1 % des actes). Seulement 2 891 actes
ont été fait en ambulatoire représentant à peine 5 % des actes, la majeure partie de ces actes
s’agissant de pose ou d’ablation d’AG (Tableau I). De tels résultats peuvent s’expliquer par
le faible taux de complications après pose d’AG, cette procédure étant la plus rapide et la
moins morbide des actes de chirurgie de l’obésité [7]. Paradoxalement, les deux procédures
124 L. Rebibo, J.-M. Regimbeau
Tableau I
Procédures de chirurgie de l’obésité (données PMSI 2015)
les plus pratiquées actuellement en France que sont la GL et le GBP, sont les moins réalisées
en ambulatoire (0,25 à 0,26 %). Plusieurs explications sont possibles pour expliquer de tels
résultats. Les publications concernant ce type de procédure dans le cadre d’une prise en charge
en ambulatoire sont plus récentes et donc moins nombreuses. Également la gestion de certaines
complications postopératoires comme la fistule gastrique postopératoire après sleeve gastrec-
tomy peut s’avérer être compliquée et nécessitant le recours à des endoscopies thérapeutiques
pour lesquels la disponibilité est réduite et nécessitant une certaine expertise [8, 9]. Concernant
le GBP, il s’agit d’une procédure considérée comme plus complexe techniquement et plus
longue en termes de durée opératoire et pour lequel le risque hémorragique est plus important
que dans le cadre de la GL [10].
Références Année publication Type de procédure Type étude Critères d’exclusion Nombre de patients Taux ambulatoire
De Waele [12] 2004 AG Rétrospectif Non 10 NP
Monocentrique
Kormanova [15] 2004 AG Prospectif Non 20 NP
Monocentrique
Montgomery [16] 2007 AG Rétrospectif Non 320 22,1
Monocentrique
Wasowicz-Kemp [17] 2006 AG Prospectif Comorbidités importantes 25 NP
Monocentrique
Randomisée
Watkins [18] 2008 AG Rétrospectif Pathologies cardiorespiratoires 2027 87
Monocentrique Anticoagulants
Diabète instable
Elli [19] 2013 AG Rétrospectif IMC 6 55 kg/m2 348 82
Bicentrique Antécédent de chirurgie périgastrique
Apnée du sommeil non traitée
Billing [20] 2014 GL Rétrospectif Poids 6 200 kg 250 NP
L. Rebibo, J.-M. Regimbeau
Les techniques opératoires étaient standardisées quel que soit le nombre d’opérateur en
dehors de la série publiée sur le GBP. Dans le cadre de la pose d’AG, la technique utilisée
était la technique « pars flacida ». La durée opératoire moyenne allait de 54 à 91 min (32-180).
Concernant la GL, le calibre de la bougie utilisé, le type d’agrafes ou l’utilisation de
renfort était similaire au sein d’une même étude et quel que soit le nombre d’opérateur. La
durée opératoire moyenne allait de 58 à 60 minutes (30-161). Dans une des séries, une durée
opératoire prévisible de plus de deux heures était considérée comme un critère d’exclusion
préopératoire alors que dans cette même série, un patient a une durée opératoire de 161 minutes
et n’est pas exclu pour une prise en charge en ambulatoire [20]. Une seule série fait mention
de patients sortis en ambulatoire avec un drainage abdominal en place [20] alors que pour les
autres études, la mise en place d’un drainage abdominal est un critère d’exclusion pour une
prise en charge en ambulatoire [21, 22].
Résultats
Morbi-mortalité
Le taux de mortalité va de 0 à 0,8 %. Seulement deux études ont une mortalité postopé-
ratoire : une dans le cadre de l’AG [18] et une autre dans le cadre du BPG [23]. Aucune
mortalité n’est retrouvée dans le cadre de la GL en ambulatoire (Tableau III).
Le taux de complications globales est acceptable allant de 0 à 10 % (Tableau III), la
majeure partie étant des complications médicales considérées comme non majeures. Le taux
de chirurgies non programmées est assez faible allant de 0 à 5 %.
Tableau III
128
Références Gestion du risque Complications Mortalité Admissions non Consultations non Hospitalisations Chirurgies non
postopératoire programmées programmées non programmées programmées
Rebibo [21] Oui (Visite à J4) 9 (9) 0 8 (8) 6 (6) 7 (7) 3 (3)
NP : non précisé.
Chirurgie bariatrique 129
Conclusion
La chirurgie bariatrique en ambulatoire est faisable avec de bons résultats concernant
l’AG et la GL mais la majorité des études concernent des études rétrospectives. Des études
comparatives sont nécessaires afin de comparer les prises en charge en ambulatoire à une prise
en charge conventionnelle et ainsi montrer qu’une bonne sélection des patients n’augmente
pas la morbi-mortalité et permettre éventuellement un élargissement des critères d’inclusions
pour l’ambulatoire. Concernant le BPG, aucune conclusion ne peut être faite et des études
prospectives avec des protocoles spécifiques sont nécessaires pour l’évaluation d’une telle
procédure en ambulatoire.
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CHIRURGIE ENDOCRINIENNE
Fabrice Menegaux, Nathalie Chereau, Muriel Mathonnet,
Claire Nomine-Criqui, Laurent Brunaud
Introduction
La chirurgie endocrinienne est dans la majorité des cas un acte de courte durée, peu
algique, peu hémorragique, et qui ne nécessite pas d’hospitalisation prolongée. La chirurgie
ambulatoire s’est beaucoup développée ces dernières années avec une forte demande des pou-
voirs publics et, de plus en plus, des patients eux-mêmes compte tenu des excellents résultats
de cette prise en charge, notamment en termes de réduction de la morbidité postopératoire et
de la période de convalescence. Cette évolution a bien sûr également impacté la chirurgie
endocrinienne, tout particulièrement dans le cadre du traitement de l’hyperparathyroïdie pri-
maire. L’ambulatoire commence en chirurgie surrénalienne dans certaines indications, mais
reste controversée en chirurgie thyroïdienne. Nous développerons successivement ces diffé-
rentes chirurgies, en excluant la chirurgie pancréatique pour tumeur endocrine qui ne se prête
pas à une prise en charge ambulatoire.
Chirurgie parathyroïdienne
L’hyperparathyroïdie primaire (HPP) est une maladie bénigne à potentialité maligne. Non
traitée, elle double le risque de survenue de certains cancers, tels les cancers du sein et du
côlon [1, 2], majore le risque de cardiopathie, d’hypertension artérielle, et diminue de manière
significative l’espérance de vie [3]. Dans 80 % des cas, l’HPP est en rapport avec un adénome
unique, les pathologies multiglandulaires (adénomes doubles ou les hyperplasies, parfois d’ori-
gine génétique comme dans les néoplasies endocriniennes multiples de type NEM1 ou NEM2a)
représentant moins de 20 % des cas [4]. Le taux de cancers est inférieur à 1 % [5]. Dans plus
de 90 % il s’agit d’une maladie sporadique. Le traitement curatif repose sur la chirurgie. À
partir des années 1990, la mise au point des scintigraphies de localisation au sestamibi et du
dosage sérique de la parathormone (PTH) rapide, a permis de développer les techniques d’abord
focalisé, unilatéral, et les exérèses sous anesthésie locale. Depuis les premières publications
en France de Chapuis et coll. en 1996 [6] et aux États-Unis de Norman et coll. en 1997 [7],
plus de 1 000 articles consacrés à l’abord parathyroïdien focalisé, ont été publiés à ce jour.
L’innocuité et les bénéfices ont ainsi été démontrés [8]. La durée d’hospitalisation a également
diminué pour les abords bilatéraux, mais les publications concernant l’intérêt des hospitalisa-
tions de courte durée et l’ambulatoire sont plus récentes. Dans ce chapitre, nous analyserons
la faisabilité, l’innocuité et les résultats à long terme de la chirurgie parathyroïdienne en
ambulatoire.
132 F. Menegaux, N. Chereau, M. Mathonnet, C. Nomine-Criqui, L. Brunaud
Faisabilité
La faisabilité de la chirurgie parathyroïdienne en ambulatoire a été prouvée par plusieurs
séries. En 2012 Norman et coll. a publié une série personnelle de 15 000 parathyroïdectomies
réalisées sous anesthésie générale [9]. Il s’agissait d’un abord bilatéral dans 80 % des cas. La durée
opératoire moyenne était de 16,4 ± 3,3 mn pour un abord unilatéral et 22,3 ± 7,4 mn pour un abord
bilatéral. La durée moyenne de séjour a été de 100 mn, et seulement 212 des 15 000 patients opérés
(1,4 %) ont été hospitalisés. L’auteur souligne toutefois que la durée opératoire et la durée de
séjour ont commencé à décroitre à partir de la 500e opération. L’expérience de Norman ne peut
cependant pas être valable pour toutes les équipes chirurgicales. En 2007, Stavrakis et coll.
démontraient qu’en chirurgie endocrinienne le taux de chirurgie ambulatoire et le taux de morbi-
dité postopératoire dépendait directement de l’expérience du chirurgien, les chirurgiens réalisant
plus de 100 parathyroïdectomies par an ayant à la fois le taux de chirurgie ambulatoire le plus élevé
et le taux de complications le plus bas [10]. La chirurgie parathyroïdienne est donc faisable en
ambulatoire mais ne devrait être réalisée que par les centres à fort volume.
Résultats postopératoires
En 2013 l’Association francophone de chirurgie endocrinienne (AFCE) a recommandé
de garder au moins 24 heures en hospitalisation les patients ayant bénéficié d’une thyroïdec-
tomie totale, et ce en raison du risque d’hématome compressif pouvant mettre en jeu le pro-
nostic vital, survenant dans plus de 90 % des cas au cours des 24 premières heures mais
seulement dans la moitié des cas avant 6 heures [11]. Une centaine de décès surviennent ainsi
tous les ans en France au décours d’une chirurgie thyroïdienne, dont une grande partie par
hématome suffocant [12].
En ce qui concerne la chirurgie parathyroïdienne, le taux d’hématome après abord bilatéral
est estimé à environ 1 %, comparable à celui rapporté après thyroïdectomie totale [13]. Les
gestes de dissection pour abord bilatéral étant similaires à ceux réalisés pour la chirurgie
thyroïdienne, les risques d’hématome compressif sont identiques. L’ambulatoire ne peut donc
pas être recommandé en routine après abord et exploration complète et bilatérale des sites
parathyroïdiens, et une surveillance de 24 heures doit être respectée en postopératoire.
L’abord focalisé, unilatéral, pour exérèse d’un adénome parathyroïdien, réalisé sous anes-
thésie locale ou générale, n’expose pas au risque d’hématome compressif, contrairement aux
explorations bilatérales. Toutefois, les trois seules études randomisées comparant abord foca-
lisé et abord bilatéral n’ont pas noté d’hématome de loge, probablement du fait d’un nombre
relativement faible de patients (100 ou moins pour chacune de ces études) [14-16]. Il est donc
impossible de tirer une leçon indiscutable de ces séries en ce qui concerne le risque d’héma-
tome. Les seuls résultats incontestables sont une diminution (pas une suppression) du risque
lésion récurrentielle en cas d’abord focalisé, 0,1 vs 1,9 % pour Schneider et coll. [14], un taux
d’hypocalcémie supérieur en cas d’abord et de résection bilatérale, et un échec de l’abord
focalisé imposant une conversion en exploration bilatérale dans moins de 10 % des cas, direc-
tement corrélé à l’expérience des équipes prenant en charge le patient.
progressivement dans le temps pour atteindre 6 % à 10 ans en cas d’abord focalisé [9]. Celui-ci
ne doit toutefois pas être abandonné car les taux de guérison sont élevés, y compris en ambu-
latoire. En 2011, Starker et coll. publiait une revue de la littérature colligeant 28 articles sur
la chirurgie parathyroïdienne focalisée en ambulatoire [17]. La faisabilité et les résultats à long
terme plaidaient en faveur de cet abord avec des taux de guérison supérieurs à 95 % des cas
dans la grande majorité de ces études.
Conclusion
L’abord focalisé diminue la durée opératoire, les douleurs postopératoires, la morbidité
et les rançons cicatricielles. La morbidité postopératoire après abord focalisé permet de réaliser
dans des conditions optimales de sécurité le geste en ambulatoire. Les abords bilatéraux en
ambulatoire doivent être réservés aux équipes ayant une grande expérience de la chirurgie
parathyroïdienne.
Chirurgie thyroïdienne
La thyroïdectomie peut être considérée comme une chirurgie relativement sûre, rarement
source de complications. Elle est rapide, peu algique (les protocoles d’analgésie postopératoire
sont actuellement très efficaces), et peu hémorragique. Elle serait donc accessible, au moins
en théorie, à une prise en charge ambulatoire. La définition retenue d’une prise en charge
ambulatoire est un retour à domicile le jour même de la chirurgie. De notre discussion sera
donc exclue la sortie du patient après une hospitalisation de moins de 24 heures comprenant
la première nuit postopératoire (le 23-hour stay des Anglosaxons) car il est maintenant commu-
nément admis qu’une telle durée de séjour est sans danger si, bien sûr, les conditions de
surveillance sont respectées.
Trente ans après la première description d’une chirurgie thyroïdienne ambulatoire [18],
la diffusion de cette prise en charge reste très faible avec, selon les chiffres fournis par la
CPAM en 2014, des taux d’ambulatoire de 3,5 % pour les lobo-isthmectomies (n = 355/10 018)
et de 0,2 % pour les thyroïdectomies totales (n = 28/29 348).
Ce faible taux de prise en charge ambulatoire des patients opérés de la thyroïde est la
conséquence d’une grande réticence de la part des chirurgiens. Ce qui la justifie aux yeux de
beaucoup est la particularité des suites opératoires immédiates d’une thyroïdectomie qui, outre
la paralysie récurrentielle et l’hypocalcémie qui ne mettent pas en jeu le pronostic vital immé-
diat, peuvent être marquées par la survenue brutale d’un hématome cervical compressif pouvant
être responsable du décès du patient ou de séquelles neurologiques gravissimes en l’absence
d’une évacuation immédiate [19].
Cette complication est rare (1 %) mais elle est impossible à prévoir de façon indiscutable
et ne survient dans les 6 premières heures postopératoires que dans moins de la moitié des cas
[19-21]. Les signes cliniques précurseurs d’un hématome cervical sont parfois très discrets,
voire totalement absents et l’hématome asphyxique survient alors brutalement. Au cours des
heures suivant la chirurgie, l’examen de la cicatrice doit être soigneux, à la recherche d’un
gonflement anormal. De même, doivent être étudiés la qualité de la voix et les troubles, même
minimes, de la déglutition qui pourraient être les premiers symptômes d’un hématome de loge
(ou de paralysie récurrentielle unilatérale).
L’hématome cervical compressif est imprévisible car tous les facteurs de risque ont été
étudiés et aucun ne ressort de façon indiscutable. Aucune étude prospective randomisée n’a
cependant été conduite sur ce sujet, et les niveaux de preuve des études, toutes rétrospectives,
134 F. Menegaux, N. Chereau, M. Mathonnet, C. Nomine-Criqui, L. Brunaud
sont donc faibles. Parmi ces facteurs, seul un traitement anticoagulant au long cours est une
contrindication absolue à une prise en charge ambulatoire, même si la relation entre anticoa-
gulants et hématome de loge reste discutée [21-25]. De même, une insuffisance cardiaque ou
pulmonaire décompensées, un traitement antiagrégant, une épilepsie, une anxiété pathologique,
un syndrome d’apnée du sommeil, une surdité, une vue déficiente, une retard mental, une
grossesse, une paralysie récurrentielle unilatérale préopératoire, une hyperthyroïdie ou un
cancer invasif, une obésité morbide (indice de masse corporelle, IMC > 40 kg/m2), ou encore
des difficultés de réveil après une anesthésie générale antérieure, doivent être considérées
comme autant de contrindications à l’ambulatoire. Des contre-indications d’ordre non médical
doivent être également éliminées : un patient peu motivé, des difficultés de communication,
un trajet long et difficile entre le domicile et la structure chirurgicale (longue distance, embou-
teillages en zone urbaine), l’absence de moyen de transport disponible en urgence, l’absence
de moyen de communication (le téléphone portable est indispensable) ou encore un isolement
familial ou social. En l’absence de ces facteurs préopératoires, peropératoires ou sociaux,
certains facteurs postopératoires immédiats et peu prévisibles semblent particulièrement impli-
qués, notamment une toux ou une poussée hypertensive au réveil, au moment de l’extubation
[26, 27].
Par ailleurs, une hypocalcémie, souvent transitoire, peut survenir chez 15 à 25 % des
patients après thyroïdectomie totale. Le dosage de la PTH sérique en postopératoire immédiat
d’une thyroïdectomie totale est un indicateur précoce d’hypocalcémie lorsqu’il est bas
(< 15 ng/L). Le moment optimal de la mesure de la PTH sérique a été évalué entre 20 minutes
et 2 heures après la thyroïdectomie totale. Chez un patient bien informé, l’hypocalcémie symp-
tomatique peut être gérée à domicile à l’aide de supplémentation vitaminocalcique orale (cal-
cium et alfacalcidol). La supplémentation doit débuter dès les premiers symptômes (paresthé-
sies péribuccales ou aux extrémités) afin d’éviter une progression vers des symptômes plus
prononcés tels que des contractions musculaires et des crampes, et être répétée après deux
heures si le patient n’est pas assez soulagé.
Plusieurs sociétés savantes spécialisées en chirurgie thyroïdienne ont publié des recom-
mandations ou des avis, aucune ne conseillant clairement une prise en charge ambulatoire. La
British Association of Endocrine Surgeons (BAETS) est extrêmement prudente [28, 29] : elle
confirme que la thyroïdectomie ambulatoire (0 nuit) est réalisable mais elle ne la recommande
pas spécifiquement et insiste sur l’expérience du chirurgien et des équipes paramédicales pre-
nant en charge ces patients dans les unités d’hospitalisation ambulatoire, ainsi que sur les
difficultés à établir des critères prédictifs des complications les plus graves. L’American Thy-
roid Association (ATA) a rédigé une « déclaration » sur la thyroïdectomie ambulatoire (« out-
patient thyroidectomy ») [30] : les conclusions sont similaires, une thyroïdectomie ambulatoire
est faisable chez des patients sélectionnés selon des critères qui sont difficiles à établir faute
d’étude fiable. L’ATA insiste sur la responsabilité du chirurgien et sur l’importance de l’infor-
mation préalable, très chronophage, du patient et de sa famille sur les modalités et les risques
spécifiques de cette prise en charge. Enfin, l’AFCE a publié en 2013 des recommandations
similaires [11]. L’AFCE s’est en outre penchée sur le risque médicolégal pour le chirurgien
des conséquences d’un hématome de loge conduisant à un décès ou à des séquelles neurolo-
giques gravissimes par asphyxie. Il en ressort que la responsabilité du chirurgien ou de l’éta-
blissement peut être engagée, au minimum sur la notion d’une « perte de chance ».
L’étendue de la chirurgie intervient cependant dans la pertinence d’un traitement ambu-
latoire. Une lobo-isthmectomie unilatérale expose à un risque plus faible de paralysie récur-
rentielle par rapport à une thyroïdectomie totale, et ne peut être responsable d’une hypocal-
cémie. De plus, l’hématome de loge est très rare, et habituellement non compressif. La
lobo-isthmectomie peut donc être discutée dans le cadre d’une prise en charge ambulatoire [31],
Chirurgie endocrinienne 135
en respectant impérativement les règles de prudence. Dans une série récente française (limitée)
de 32 patients opérés d’une lobo-isthmectomie en ambulatoire, Lacroix et al. [32] ne retrouve
aucune complication postopératoire et seulement 2 conversions en hospitalisation convention-
nelle (prise d’antiagrégants, nausées).
Pour conclure, si une prise en charge ambulatoire est proposée le chirurgien doit être
expérimenté en chirurgie thyroïdienne et travailler au sein d’une équipe entraînée disposant
d’une structure identifiée de chirurgie ambulatoire. Il doit s’assurer de la qualité de l’infor-
mation du patient et de ses proches (famille, amis) décrivant, outre des complications poten-
tielles d’une thyroïdectomie, les particularités de l’ambulatoire. Il doit également vérifier le
respect des contre-indications, le bon déroulement de la chirurgie et de la surveillance post-
opératoire qui doit être adaptée, et des conditions de sortie du patient. L’établissement de soins
doit en outre disposer de toutes les ressources nécessaires pour une éventuelle réhospitalisation
en urgence.
On peut donc considérer que si une thyroïdectomie ambulatoire est possible, au sein d’une
population sélectionnée, cette prise en charge ne peut pas encore être recommandée à grande
échelle en l’absence de critères indiscutables prédictifs de la survenue d’un hématome cervical
compressif.
Chirurgie surrénalienne
Depuis les années 1990, la laparoscopie est devenue la technique de référence pour réaliser
l’exérèse de la plupart des lésions surrénaliennes même si aucune étude randomisée la compa-
rant à la chirurgie ouverte n’a été réalisée. Plusieurs abords sont possibles. Les deux principaux
sont l’abord laparoscopique transpéritonéal latéral (vraie « laparoscopie ») et l’abord postérieur
rétropéritonéal en décubitus ventral (rétropéritonéoscopie »). Des variantes techniques moins
fréquentes ont aussi été rapportées : un abord rétropéritonéal latéral, un abord mixte hand-
assisted, une chirurgie à un seul trocart single-port surgery, et enfin la chirurgie robotique.
Par ces abords, il est possible de réaliser selon les indications, une surrénalectomie unilatérale
ou bilatérale avec résection surrénalienne totale ou partielle.
L’abord latéral transpéritonéal a comme caractéristiques une bonne exposition de la région
opératoire due à la gravité, la présence d’une anatomie familière pour les chirurgiens de
l’abdomen, et un diamètre tumoral maximal de 8 à 15 cm. L’abord postérieur rétropéritonéal
permet un accès direct à la glande (sans la nécessité d’une adhésiolyse si le malade a eu une
chirurgie abdominale antérieure), avec une installation du patient qui ne nécessite pas de
repositionnement en cas de surrénalectomie bilatérale, mais le diamètre tumoral maximal est
plus petit, de 4 à 8 cm et un index de masse corporelle supérieur à 40 kg/m2 est une contre-
indication relative. Aucun consensus n’existe entre ces deux voies d’abords et le choix se fait
en fonction de l’expérience et de la préférence des groupes chirurgicaux [33-35].
La durée moyenne d’hospitalisation des patients après chirurgie surrénalienne laparosco-
pique varie actuellement de 2,5 à 4,4 jours [35-39]. En 2006, une revue de la littérature incluant
2 565 patients opérés d’une surrénalectomie laparoscopique a montré une durée opératoire de
137 minutes en moyenne, une perte sanguine moyenne de 81 mL, un taux de conversion en
laparotomie de 2 %, une morbidité de 8,9 %, une durée d’hospitalisation moyenne de 3,3 jours
et un taux de mortalité de 0,2 % [36]. En 2012, une méta-analyse incluant 1 966 patients
montrait que la durée opératoire pouvait varier de 75 à 423 minutes, avec un taux de conversion
de 4,0 à 6,4 %, un risque de complications postopératoires de 6,4 à 9,0 %, et un risque de
décès de 0 à 1 % [35]. Cette étude concluait qu’aucune différence significative n’était retrouvée
136 F. Menegaux, N. Chereau, M. Mathonnet, C. Nomine-Criqui, L. Brunaud
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CHIRURGIE DU SEIN
François Dravet
Introduction
La chirurgie du sein en ambulatoire, notamment la chirurgie oncologique, est relativement
récente en France en dehors de quelques équipes [1, 2]. Elle est un fait établi et ancien dans les
pays anglosaxons et nord-européens (Tableau I). L’intérêt médical et financier de la chirurgie
ambulatoire a été mis en évidence dans différents rapports nationaux tant par l’HAS [3] et par
le Groupe UNICANCER [4]. En 2013, seulement 10 % des cancers du sein étaient pris en charge
en ambulatoire en France [4]. Toutefois ce taux ne cesse de progresser depuis 3 ans notamment
dans les structures spécialisées comme les Centres régionaux de lutte contre le cancer [5].
Tableau I
Taux de chirurgie ambulatoire sénologique dans les pays anglosaxons et en France
États-Unis 2002 78 % 18 %
États-Unis 2016 - 45 %
Royaume-Uni 2015 70 % 4%
Canada 2011 72 % 20 %
Faisabilité
Pour la chirurgie du sein, notamment oncologique : on peut distinguer trois types d’actes
réalisables en ambulatoire, dont les taux de faisabilité sont variables et corrélés à leur
complexité et/ou à leur impact psychologique [1, 2].
– Chirurgie conservatrice du sein : tumorectomies, mastectomies partielles, chirurgie
mamelonnaire, chirurgie oncoplastique avec ou sans geste axillaire : détection du ganglion
sentinelle, curage axillaire.
– Mastectomie totale avec ou sans geste axillaire associé.
– Reconstruction mammaire à proprement parler : elles sont actuellement peu dévelop-
pées en ambulatoire en France et restent des indications au cas par cas.
Les autres gestes en dehors de l’oncologie sont les reconstructions mammaires (GARM),
que ce soient les changements de prothèses, les liporemodelages complémentaires, les retou-
ches diverses, les cures de ptose, les réductions mammaires ou la chirurgie de symétrisation.
140 F. Dravet
Coordination interservices
C’est le problème essentiel dans ce contexte de cette prise en charge pluridisciplinaire
des patientes opérées d’un cancer du sein [6]. À la différence de nombreuses interventions
chirurgicales où n’interviennent que l’anesthésiste et le chirurgien, la prise en charge des
cancers du sein notamment infracliniques nécessite l’intervention et la coordination de 5 à
6 praticiens lors de la réalisation de l’acte opératoire, qui complexifie la prise en charge et
rend la prise en charge ambulatoire plus difficile (Figure 1). En effet, en plus de l’anesthésiste
et du chirurgien, doivent intervenir :
– le radiologue pour le repérage préopératoire ;
– le médecin nucléaire pour l’injection du produit isotopique pour la détection du gan-
glion sentinelle ;
– le pathologiste pour les examens histologiques extemporanés ;
– parfois, le radiothérapeute si on envisage une irradiation partielle du lit tumoral glan-
dulaire en peropératoire [7, 8].
L’organisation et surtout l’anticipation sont la base de la réussite du séjour hospitalier en
moins de 12 heures. Leurs absences sont source de dysfonctionnement responsable d’un retard
au bloc opératoire avec un risque de conversion (patiente restant dormir une nuit) plus élevé.
Selon l’éloignement du patient par rapport au centre hospitalier, le repérage radiologique et
l’injection du produit isotopique peuvent très bien être réalisés la veille en consultation externe.
Ceci permet d’une part de pouvoir opérer la patiente en première position et de lisser l’activité
des services de radiologies et médecine nucléaire et de se mettre à « l’abri » d’un repérage
difficile source de retard.
nuit) pour surveillance. En effet, il est très important de minimiser le risque de réhospitalisation
nocturne toujours mal vécu par la patiente, son entourage mais aussi le médecin de ville.
La gestion du risque de lymphocèle est réalisée sous deux modes : soit délégation au
médecin traitant après son accord, soit mise en place, au sein de l’établissement, d’une consul-
tation infirmière de « pansement » avec, après accord avec l’ARS, demande d’un transfert de
compétence à ces infirmières pour qu’elles puissent réaliser les ponctions de lymphocèle si
besoin.
La gestion de la douleur passe par une anticipation : l’ordonnance des antalgiques est
donnée et l’éducation de la patiente à ce propos est réalisée dès la consultation préopératoire
d’anesthésie. La réalisation de blocs antalgiques en pré- ou peropératoire de type bloc para-
vertébraux ou les PECS block II [10], permettent une meilleure gestion de douleur en post-
opératoire précoce, entrant dans un processus de réhabilitation précoce.
Chirurgie du sein 143
Figure 3. Taux de chirurgie ambulatoire en chirurgie sénologique oncologique en 2016, service ICO
NANTES (extrait rapport d’activité service chirurgie ambulatoire ICO NANTES 2016).
Taux ambulatoire programmée : somme Taux réel de chirurgie (en gris) + taux de conversion (en noir).
Taux d’ambulatoire réel.
CC/SGA : chirurgie conservatrice sans geste axillaire.
CC/AGA : chirurgie conservatrice avec geste axillaire (ganglion sentinelle ou curage).
Mastec : mastectomie ± geste axillaire.
GARM : geste associé en reconstruction mammaire : liporemodelage, chirurgie symétrisation, reduction,
changement prothèse, retouches diverses.
Figure 4. Taux de satisfaction après chirurgie du sein en ambulatoire. : Enquête réalisée en 2000
(ICO Nantes) [15].
CC : chirurgie conservatrice du sein, CC globale = CC/SGA + CC/AGA.
CC/SGA : chirurgie conservatrice sans geste axillaire.
CC/AGA : chirurgie conservatrice avec geste axillaire (ganglion sentinelle ou curage).
j:\2000\image\190346\dravet\5
Figure 5. Taux de satisfaction des malades après chirurgie du cancer du sein ambulatoire
(Congrès SFC, juin 2014, Paris).
Chirurgie du sein 145
Conclusion
La chirurgie du sein se prête bien à une prise en charge en ambulatoire avec une forte
acceptation des patientes. Elle est encore peu développée en France. En effet, sa progression
reste limitée car elle nécessite un parcours de soin interdisciplinaire complexe. Une amélio-
ration de la coordination interservices, associée au développement de supports avec des consul-
tations paramédicales, d’annonce, psychologique, de kinésithérapie, peut permettre une pro-
gression plus rapide.
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URGENCES
Thevy Hor
Introduction
Si les indications opératoires pour la chirurgie digestive à froid sont en plein essor, celles
des urgences sont également en cours d’évaluation et peu de données sont disponibles dans la
littérature. Certaines conditions intrinsèques, en plus des critères habituels de chirurgie ambu-
latoire classique sont à prendre en compte : une durée opératoire prévisible, une morbidité
faible en routine, des effets secondaires contrôlables (douleurs post opératoires, nausées, vomis-
sements...). Un des obstacles actuels à la prise en charge ambulatoire en urgence est celle de
l’organisation. La pathologie et l’intervention sont-elles compatibles avec une sortie le jour
même avec une hospitalisation de moins de 12 heures ? Peuvent-elles être intégrées au pro-
gramme du jour ou être reportées au lendemain ? Si le patient consulte tôt le matin et est opéré
immédiatement, l’organisation reste simple. Mais si le patient consulte la veille, l’urgence doit
être intégrée au programme du lendemain. En ce qui concerne les patients consultant le week-
end, la prise en charge ambulatoire est compromise.
Appendicite aiguë
L’appendicectomie est une intervention fréquente. On note 85 000 appendicectomies par
an, classant cet acte comme le 15e acte le plus codé en France. Elle est réalisée chez des sujets
jeunes, socialisés, en bonne santé. Il s’agit d’une intervention de courte durée dont les risques
sont faibles. Ainsi, toutes les conditions sont réunies pour une prise en charge en ambulatoire.
Plusieurs études avaient déjà montré que retarder la prise en charge d’une appendicite aiguë
non compliquée de 6 à 12 heures n’était pas dangereuse et n’augmentait pas le taux de per-
foration [1-7]. La forme compliquée l’est d’emblée. Il s’agit donc d’une intervention reportable
au lendemain permettant au patient d’être opéré dans un service de chirurgie ambulatoire. Le
traitement antibiotique peut être initié en première ligne en attendant l’intervention, qui peut
alors être programmée en ambulatoire. Ce traitement, de première intention, est efficace dans
77 % des cas [8].
Urgences 147
Jusqu’à présent, trois études prospectives ont montré uniquement la faisabilité d’une sortie
le jour même, mais sans préciser le jour d’arrivée des patients, avec un succès variant de 66
à 85 % sans surmorbidité. Cash et al. avait montré un délai entre la chirurgie et la sortie de
2,8 heures [9]. Dans la série de Dubois et al., la durée de séjour moyenne était de 4,7 heures
[10]. Par ailleurs, même s’il ne s’agit pas du même système de santé, ces auteurs canadiens
avaient rapporté une économie de 323 dollars canadiens par patient pour une prise en charge
ambulatoire [10]. Dans la série de Sabbagh et al., les patients sortaient le jour même mais la
durée de séjour moyenne était de 13 heures. Cependant, aucune de ces études ne répondait
aux critères d’ambulatoire [11].
Mais seules trois études ont montré la faisabilité d’une prise en charge totale en moins
de 12 heures, deux seulement sans nuit passée à l’hôpital.
Lefrançois et al. a déterminé des critères préopératoires de prise en charge des appendi-
cites aiguës non compliquées. Il s’agit d’un score simple et fiable permettant de prédire en
préopératoire une sortie précoce [12]. Ces critères sont :
– IMC < 28 kg/m2 ;
– Leucocytes < 15 000/mm3 ;
– CRP < 30 mg/L ;
– Pas de signe radiologique de perforation ;
– Diamètre de l’appendice ^ 10 mm.
Pour établir et valider ces critères, ils ont inclus rétrospectivement 468 patients ayant eu
une appendicectomie sous cœlioscopie entre janvier 2010 et décembre 2012 et ont déterminé
les critères associés à une sortie à J1. Il a été constaté que 72 % de ces patients étaient sortis
à J+1, avec un score de 5 points et que 45 % des patients étaient également sortis à J+1 avec
un score de 4 points. Le score de Saint-Antoine a été validé sur une étude prospective incluant
184 patients qui s’étaient présenté aux urgences à partir de janvier 2013 avec appendicite
aiguë. Une appendicectomie en ambulatoire était proposée aux patients ayant 4 ou 5 points.
38 patients ont ainsi pu être pris en charge sans passer une nuit à l’hôpital, avec une durée
totale d’hospitalisation de moins de 9 heures. L’opération en ambulatoire était programmée en
fonction de l’heure du diagnostic ; le jour même si le patient est diagnostiqué avant 13 h, sinon
le lendemain. Le patient était alors autorisé à rentrer à son domicile avec une prescription
d’antibiotiques oraux. Le délai moyen entre la chirurgie et la sortie était de 4,6 heures et la
durée moyenne de séjour de 8,5 heures. Le délai de prise en charge (8,5 h vs 7,4 h) était
comparable dans ces 2 groupes, de même que les taux de morbidité (9 vs 10 %) et de réhos-
pitalisation (3 vs 6 %). Le score a été également validé prospectivement sur les 146 patients
pris en charge conventionnellement confirmant son intérêt dans la sélection des patients. Le
taux de succès de l’appendicectomie sous cœlioscopie en ambulatoire a été de 97 % en appli-
quant ce score. Seul un patient a été admis le soir même.
Dans la série d’Alkhoury et al., rapportant une cohorte d’enfants avec appendicites aiguës,
39 % avait été admis le soir même. Mais, les auteurs n’ont pas essayé d’identifier en préopé-
ratoire les appendicites non compliquées, et en cas de découverte peropératoire, les patients
étaient hospitalisés pour la nuit [13].
Enfin, Frazee et al. a publié une série de 345 patients avec appendicite aiguë non compli-
quée avec un protocole de sortie 24 heures sur 24. Il y a eu 12 % d’admissions non prévues.
Les patients sortaient de jour comme de nuit avec une durée de séjour post opératoire de
2,85 heures. Cette prise en charge ne relève cependant pas d’une prise en charge ambulatoire
telle qu’elle est définie de façon internationale, et selon la réglementation française, c’est-à-dire
de jour et dans une unité dédiée à l’activité de chirurgie ambulatoire [14] (Tableau I).
148 T. Hor
Tableau I
Séries rapportant des appendicectomies avec une durée d’hospitalisation de moins de 12 heures
Urgences proctologiques
Elles sont constituées de la prise en charge des abcès de la marge anale, des drainages
de fistule anale et des kystes pilonidaux.
Ces urgences peuvent s’effectuer sous rachis anesthésie ou sous une courte anesthésie
générale permettant une prise en charge rapide périopératoire.
Kystes pilonidaux
Plusieurs techniques chirurgicales sont possibles et le type d’intervention peut condi-
tionner la prise en charge en ambulatoire. En 2000, 17 832 gestes chirurgicaux non ambula-
toires ont été enregistrés selon les données du programme de médicalisation des systèmes
d’information (PMSI) [1]. Cette chirurgie représente près de la moitié des gestes chirurgicaux
entrepris pour suppuration chronique. Les actes enregistrés par le PMSI en 2015, sont une
mise à plat ou exérèse à ciel ouvert avec cicatrisation dirigée pour 6 237 patients dont
2 176 patients opérés en ambulatoire et une excision pour 32 484 patients dont 16 269 patients
effectués en ambulatoire. Thompson et al. ont montré dans une revue de la littérature que les
techniques de Lord Miller (excision des puits pilonidaux) et de Bascom (excision des puits
pilonidaux et drainage de l’abcès) sont les plus faisables en ambulatoire. Le taux de réadmis-
sions n’était pas rapporté. Un simple drainage peut être réalisé en un temps avec une excision
mais risquant un large défect avec une cicatrisation longue, un drainage dans un premier temps
suivi dans un deuxième temps de l’excision de la coque pilonidale [18].
Conclusion
La prise en charge ambulatoire des urgences digestives est toujours étudiée et débattue
mais malgré tout, reste limitée dans ses indications. Le premier obstacle à la prise en charge
des urgences en ambulatoire est la nature de la pathologie et la nécessité d’une intervention
en urgence non différable. Le deuxième obstacle est organisationnel. Peut-on intercaler l’inter-
vention au programme du jour ? Peut-on reporter l’intervention au lendemain ? Qu’en est-il
de la prise en charge le week-end ? Cette prise en charge est complexe car nécessite de prendre
en compte en plus des facteurs classiques, le délai de prise en charge de l’urgence, la sécurité
du patient d’un retour à domicile (que ce soit en pré ou post opératoire), la disponibilité et
l’organisation des services ambulatoires.
150 T. Hor
D’autres indications vont probablement être développées dans l’avenir telle que la cho-
lécystite aiguë. Cependant, il reste à déterminer des critères de gravité compatibles avec une
prise en charge ambulatoire comme cela a été effectué pour l’appendicite aiguë.
Bibliographie
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ORGANISATION DE LA PRISE
EN CHARGE DES PATIENTS
Corinne Vons
Introduction
Qui n’a pas entendu ou lu que la chirurgie ambulatoire n’était qu’un problème d’organi-
sation puisque « l’intervention chirurgicale réalisée était la même, tout comme l’anesthésie »
que celle réalisée en hospitalisation complète.
Ce concept ne peut cependant être pris à la lettre, car on ne peut faire de la chirurgie
ambulatoire sans maîtriser la Réhabilitation améliorée après chirurgie (RAAC) et la gestion
des risques, et ce qui n’est pas toujours le cas en chirurgie avec hospitalisation complète. Mais
on ne peut faire de la chirurgie ambulatoire sans organiser les soins, c’est-à-dire anticiper,
planifier, coordonner, ordonner, orchestrer, programmer, concerter, structurer, les soins pour
tous les acteurs.
Et cette organisation a deux objectifs :
– permettre la sortie du patient le soir même pour son domicile ;
– assurer une qualité des soins et de sécurité des patients identiques à celle de l’hospi-
talisation complète, avec l’assurance de la continuité des soins par l’unité de chirurgie ambu-
latoire (UCA) et le chirurgien.
Il n’est plus question de remettre au lendemain, plus question d’« à peu près » ; le circuit
du patient doit être parfaitement fluide, pour que sa durée soit la plus courte possible, tout en
restant sécurisé.
Toute faille devient immédiatement visible car le patient ne peut sortir le soir comme prévu.
Alors le maître mot est « anticiper », avoir tout planifié à l’avance la prise en charge du patient.
Le modèle classique lors de l’hospitalisation complète ne peut être reproduit. Il faut
trouver un autre outil.
complète des fonctions préopératoires) pour obtenir le fameux score de Chung > 9/10, incontour-
nable [2, 3].
– L’organisation doit être centrée sur le patient. Cela veut dire que :
• le regard est transversal et le suit ;
• l’on considère comme primordial non seulement les objectifs des soignants, mais
aussi du patient, c’est-à-dire son bien-être et sa satisfaction, qui, bien qu’empreints
d’une subjectivité évidente, deviennent des objectifs à part entière [4-6].
– Le travail doit être réalisé en équipe. L’ensemble des acteurs doit se coordonner sur
un programme préétabli. La conception et la formalisation de ce programme préétabli oblige
à la réflexion et à des choix qui doivent être définis de façon multidisciplinaire (les différentes
spécialités entre elles) et pluriprofessionnelle (les différents métiers entre eux). La mise en
œuvre également [1].
– Un travail d’anticipation, de coordination, et d’orchestration des rôles de chaque
acteur est réalisé.
Cette organisation décrit à l’avance le circuit du patient d’un intervenant à l’autre de son
circuit, et d’un endroit à l’autre, définissant, le rôle de chacun. Elle s’appuie sur l’identification
et la description, par anticipation, de toutes les étapes par lesquelles le patient doit passer au
cours de sa prise en charge en chirurgie ambulatoire, du début à la fin et afin de répondre à
ses objectifs. Chaque étape de la prise en charge peut correspondre à l’intervention d’un ou
de plusieurs acteurs distincts, qui doivent être listés.
– Les objectifs de chaque étape doivent être affichés, réfléchis, pertinents, reflétant
les meilleures pratiques, et définis et validés par l’équipe.
Les objectifs de chaque étape, pour les professionnels de soins (ou administratifs) mais
aussi pour le patient, doivent être précisément définis. La conception des programmes pré-
établis interroge nécessairement sur les meilleurs choix en matière d’indication, de techniques,
de modalités, de recours à la biologie, à l’imagerie et sur l’ensemble des prescriptions qui
doivent être envisagées (déambulation, alimentation, mobilisation, surveillance, etc.). Ces pro-
grammes doivent être pertinents et refléter la meilleure pratique du moment en cohérence
avec l’Evidence Based Medecine : les références partagées doivent relever des données les
plus actuelles de la science et des consensus professionnels validés (recommandations) (SFAR
2009). En outre, au-delà de la réflexion sur les meilleures pratiques c’est ainsi leur mise en
œuvre systématique qui est garantie, limitant les variations interindividuelles chez les
prescripteurs.
– Le chemin clinique se soumet à l’évaluation continue. Que ce soit au sein d’une
même équipe ou en ayant recours à des parangonnages (benchmark) au travers de bases de
données nationales ou internationales, des indicateurs simples et transversaux (complications,
durée moyenne de séjour, indicateurs spécifiques pour la chirurgie ambulatoire) permettent de
vérifier l’atteinte des objectifs. Donc, non seulement les meilleures pratiques sont recherchées,
mais un mécanisme d’amélioration continue se met en place [7-9]. Le chemin clinique n’est
pas un simple protocole ou parcours de soins. La mise en place de chemins clinique en hos-
pitalisation complète a permis de diminuer la durée d’hospitalisation complète [10-13] et
d’amener certaines interventions à une prise en charge ambulatoire [14, 15]. De nombreux
chemins cliniques sont accessibles sur internet notamment ceux des Anglais [16-18] et des
Australiens [19].
Figure 1. Représentation graphique d’un chemin clinique de chirurgie ambulatoire. Il manque sur ce
chemin la partie postopératoire dans le cadre de la continuité des soins.
Bibliographie
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ÉVALUATION DE L’ACTIVITÉ
DE CHIRURGIE AMBULATOIRE
DANS UN ÉTABLISSEMENT DE SOIN
Corinne Vons
Introduction
L’évaluation continue de l’activité de chirurgie ambulatoire fait partie intégrante de son
concept et consiste à suivre des indicateurs permettant de déterminer si les objectifs qu’elle
vise sont bien atteints. Rappelons que ses objectifs sont à la fois ceux des professionnels de
soins et administratifs et ceux du patient, ce mode de prise en charge restant centré sur le
patient. Aux indicateurs de quantité et de performance, s’ajoutent donc les indicateurs de
qualité des soins et de sécurité des patients et l’évaluation de la satisfaction des patients.
Volume ambulatoire
Calcul du volume ambulatoire « brut » pour chaque établissement de santé. Le volume
compte pour 50 % dans le calcul de l’IPCA. Le « volume d’actes réalisés en ambulatoire est
corrélé à une performance organisationnelle pluriprofessionnelle (médicale, soignante...) : plus
le volume ambulatoire est important, plus l’organisation a dû mettre en œuvre une politique
de gestion des risques et des flux (distinction, anticipation, optimisation et coordination de ses
flux induisant une réduction des gaspillages). »
Si nombre de séjours réalisés > nombre d’attendus, alors IO > 1 (plus performant)
Si nombres de séjours attendus < nombre de réalisés, alors IO < 1 (moins performant)
Ainsi, « une pratique ambulatoire plus fréquente que la moyenne nationale à case-mix
comparable traduit une performance de l’organisation de la chirurgie ambulatoire ». Cet indice
d’organisation est l’écart à la moyenne nationale des pratiques ambulatoires à case-mix d’actes
CCAM identiques ».
Tableau I
Valeurs brutes des variables permettant de calculer l’indice de performance en CA
Benchmark
Volume ambulatoire 2 761 1 052 4 540 827 4 676 895 4 439 1 267 4 550
Indice d’organisation 0,890 0,900 1,089 0,902 1,147 0,809 1,001 0,878 1,074
Sont en expérimentation :
– cinq indicateurs de processus, évaluant des points clés du processus de prise en charge
des patients en chirurgie ambulatoire ;
– deux indicateurs de résultats mesurant le taux de conversions en hospitalisation
complète et le taux de réadmissions à 3 jours après la sortie.
Déroulement de l’expérimentation des indicateurs de processus et de résultat
L’expérimentation des indicateurs de processus et de résultats est réalisée dans 67 établis-
sements de santé MCO volontaires. L’expérimentation porte sur la population de patients admis
pour une chirurgie ambulatoire, hors urgence et hors provenance d’un établissement de santé.
– Indicateurs de processus : l’expérimentation des indicateurs de processus en chi-
rurgie ambulatoire s’est déroulée de décembre à avril 2016. Le recueil des indica-
teurs de processus porte sur un échantillon aléatoire de 80 séjours de patients.
j Les indicateurs de processus validés feront l’objet d’une campagne nationale de
recueil à partir du dossier patient en 2018.
– Indicateurs de résultats : l’expérimentation des indicateurs de résultats en chirurgie
ambulatoire s’est déroulée de mars à juillet 2016. Elle portera sur un échantillon
aléatoire de 20 séjours détectés dans le PMSI « avec conversion en hospitalisation
complète » et de 15 séjours « avec réadmission dans les 3 jours après la sortie ».
j Les indicateurs de résultats validés seront calculés automatiquement à partir du
PMSI et restitués aux établissements de santé concernés en 2017.
Figure 2. Suivi de l’activité (et de la rotation) d’une unité de chirurgie ambulatoire sur 26 semaines,
soit un semestre d’activité. ©APSIS Santé, Philippe Devillers.
Figure 3. Suivi des indicateurs de qualité en chirurgie ambulatoire d’une unité de chirurgie
ambulatoire sur 26 semaines, soit un semestre d’activité. ©APSIS Santé, Philippe Devillers.
Les causes des admissions la nuit imprévues (ou transfert en HC) peuvent être détaillées
(somnolence, douleur, complication chirurgicale, bloc tardif.
L’activité de chirurgie ambulatoire « non qualifiée », y est aussi monitorée : l’activité de
chirurgie ambulatoire foraine et les hébergements dans l’UCA d’activités qui ne sont pas de
la chirurgie ambulatoire.
Ainsi l’évaluation de la qualité d’une activité de chirurgie ambulatoire peut être réalisée
de façon continue, intégrée à la pratique. L’analyse des points faibles doit faire l’objet de
mesures d’amélioration.
À noter que, selon les recommandations, l’objectif est moins de 1 % d’admissions de nuit
imprévues (ou transfert en HC) et de moins de 5 % de déprogrammations.
L’évaluation de la satisfaction des patients est souvent réalisée, en France, à J1 lors de
l’appel du lendemain, mais cette méthodologie ne permet pas une évaluation avec suffisamment
de recul, pour les patients. Il n’existe pas de modèle de questionnaire de satisfaction en chi-
rurgie ambulatoire en France.
Conclusion
Une évaluation continue d’une activité de chirurgie ambulatoire fait partie de ses concepts
fondateurs pour parvenir à une amélioration de la qualité des soins et de la sécurité des patients.
Cette évaluation ne peut être que quantitative (activité, rotation, index de performance). Cepen-
dant, une évaluation à l’aide des indicateurs internationaux de qualité n’est réalisable actuellement
en France que sur des initiatives locales. Le codage PMSI ne permet pas de suivre ces indicateurs,
qui, à l’échelon national, pourtant, permettraient de déterminer si la qualité et la sécurité des soins
sont maintenues pendant le développement de la chirurgie ambulatoire en France.
164 C. Vons
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GESTION
DES RISQUES MÉDICOLÉGAUX,
OBLIGATIONS MÉDICALES
ET RESPONSABILITÉ JURIDIQUE
Alexandre Theissen, Didier Legeais
Information
La base même du devoir d’information loyale remonte au serment d’Hippocrate, 400 av.
J.-C : « J’informerai les patients... Je ne tromperai jamais »... L’arrêt Mercier de la Cour de
cassation (CC) le 29 mai 1936 confirmait que le « devoir d’information était un prérequis à
un recueil du consentement libre et éclairé », lui-même nécessaire à la validité du contrat entre
le médecin et son patient, mais la Cour concluait néanmoins qu’« il appartenait au malade de
rapporter la preuve que le médecin avait manqué à son devoir contractuel d’information ». Ce
n’est que le 25 février 1997 (arrêt Hédreuil), que la Cour de cassation estimait dorénavant que
« c’est à celui qui est légalement ou contractuellement tenu d’une obligation particulière
d’information de rapporter la preuve de l’exécution de cette obligation ». Ce principe étant
même rétroactif ! Pour l’anecdote, M. Hedreuil ne sera jamais indemnisé car la Cour d’appel
d’Angers estimera le 11 septembre 1988 que, même informé, il n’aurait pas refusé le traitement
(coloscopie) eu égard à l’évolution de son état. Cependant « l’inversion de la charge de la
preuve » était actée. Cela marque le début de la « charge législative » (code de déontologie,
code de Santé publique (CSP), loi Kouchner, convention européenne pour la protection des
droits de l’homme à l’égard de la médecine, loi HPST, HAS, jurisprudence...).
Ainsi « le médecin doit-il à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille une
information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui
propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ses
explications et veille à leur compréhension ». Il doit s’assurer que les informations données
aient été suffisamment claires pour être comprises et exécutées par le patient et par son entou-
rage sauf en cas de pronostic grave (R. 4127-34 et 35 du CSP).
« Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. Cette information porte
sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur
utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normale-
ment prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les consé-
quences prévisibles en cas de refus » (article L. 1111-2 du CSP). Ainsi en chirurgie ambulatoire
comme pour tout acte médical, le patient doit être informé de tous les risques y compris
exceptionnels s’ils sont connus (comprendre publiés) (CC 15 juillet 1999, articles L. 710-2,
L. 1111-2 du CSP) et dans une logique bénéfices/risques tout doit être exposé y compris les
alternatives thérapeutiques même si la chirurgie ambulatoire est la norme (CC 18 juillet 2000).
166 A. Theissen, D. Legeais
Dans toutes les obligations professionnelles et dans toute la jurisprudence il n’y a pas
d’obligation plus forte que le devoir d’information, qui est la clef de voute de la « perte de
chance » responsable aujourd’hui de la plupart des voies d’indemnisations parfois jusqu’à
hauteur de 100 % des préjudices (CC 18 septembre 2008, CA Aix 4 avril 2006, CA Aix 10 sep-
tembre 2008 ONIAM/GOMEZ/SCONAMIGLIO).
La Cour de Cassation (2010) puis le Conseil d’État (2012) ont voulu autonomiser cette
obligation en créant un préjudice dit « d’impréparation » en dehors de tout autre préjudice,
voulant ainsi et par sagesse réaffirmer si cela était encore nécessaire qu’il ne peut y avoir de soin
en dehors d’une information de qualité, même si le soin réalisé ne prête pas à la critique. En
chirurgie ambulatoire, l’information est particulièrement importante car le patient est un acteur
majeur de sa prise en charge. L’information doit être précoce (dès la consultation de chirurgie puis
d’anesthésie), donnée par oral et complétée par un document écrit, réitérée à chaque étape de la
prise en charge (tout au long du chemin clinique) et tout en veillant à sa bonne compréhension.
Il faut enfin distinguer l’information et le consentement éclairé (CE). Le droit précise de
façon bien logique qu’une information exhaustive spécifique à la chirurgie ambulatoire doit
venir compléter l’information habituelle avec l’exposé de tous les risques connus même raris-
simes, avec annonce et commentaire de la balance bénéfices/risques.
Cette information doit donner place à un temps de réflexion en particulier en chirurgie
esthétique (15 jours incompressible) (articles D. 6322-30 et L. 6322-2 du CSP).
En cas de prise en charge d’un enfant mineur, les parents doivent être informés, sauf si
l’enfant refuse et se fait accompagner par une personne adulte de son choix (articles R. 4127-42,
-43, -44 et L. 1111-5 du CSP).
Une fois l’information délivrée, il faut matérialiser le consentement du patient qui doit
être recherché systématiquement et en conserver la trace (article R. 4127-36 du CSP) sauf dans
le cadre de l’urgence (articles L. 1111-4 du CSP, et R. 4127-42 du CSP) ou pour sauvegarde
d’une personne mineure (article L. 1111-5 du CSP). La Cour de cassation reconnaît dans sa
sagesse qu’on ne peut pas informer d’un risque exceptionnel non connu (CC. 15 juillet 1999,
TGI de Marseille 14 septembre 2006 (LAMBOT/GIRY)). Néanmoins, l’information doit, elle,
être complète. Ce devoir d’information reste une obligation orale.
L’utilisation de documents d’information exhaustifs dont la remise peut être tracée, sera
suivie de la récupération d’un consentement éclairé signé. La fiche d’information datée et
signée par le patient est de plus en plus demandée par la jurisprudence (CA juin 2007), les
documents trop généralistes étant décriés (CA d’Aix 10 septembre 2008, TGI Toulon 25 sep-
tembre 2008 Berret/Nicolas, TGI Nanterre 10 octobre 2008 Staub/Turpen, TGI Toulouse
18 novembre 2008 Bourse/Nicolas).
Il est donc impératif de compléter l’information en lien avec l’intervention et l’anesthésie
par une documentation spécifique à la chirurgie ambulatoire.
Cette information peut être rassemblée au sein d’un dossier appelé « passeport ambula-
toire » avec l’ensemble des consignes pré per et postopératoires, les dates de consultations, les
éventuelles ordonnances pré et postopératoires et tout élément qui pourra guider le patient tout
le long de son parcours. Les documents doivent être exhaustif mais pas trop (TGI 10 avril
2007 Bataille/Catrier).
L’information dans le cadre de la chirurgie ambulatoire devra préciser le cadre et l’envi-
ronnement en insistant tout particulièrement sur les mesures à prendre en préopératoire (notam-
ment le jeûne, la gestion des traitements et les exigences liées aux différentes techniques
d’anesthésie) et en postopératoire (conditions de sortie, nécessité d’être accompagné par un
tiers pour le retour au lieu de résidence, consignes liées aux suites éventuelles de la prise en
charge, méthodes d’analgésie postopératoires, modes de recours en cas d’événements non
prévus). Les modalités de sortie doivent également être expliquées aux accompagnants. Un
Gestion des risques médicolégaux, obligations médicales et responsabilité juridique 167
document synthétique précisant l’intervention, les suites habituelles, les constantes importantes
à surveiller et surtout la conduite à tenir en cas d’apparition de complications (douleurs, sai-
gnement, sepsis...) doit être remis au patient. Il faut insister tout particulièrement sur l’orga-
nisation de la permanence des soins pour permettre une continuité des soins de qualité et sans
faille. L’absence de consignes étant considérée par les juridictions comme un abandon. Afin
d’assurer la continuité des soins après la sortie, le médecin traitant doit avoir été informé dès
la phase préopératoire et doit pouvoir avoir accès à un compte rendu de sortie.
Il est nécessaire d’assurer la traçabilité de tout ce qui est fait et prescrit dans le dossier
médical du patient. Il ne faut en effet pas oublier que 40 % de ce qui est dit est oublié à la
fin de la consultation [1].
Enfin, dans le cadre de la chirurgie ambulatoire, l’information doit circuler entre les
professionnels de santé. Son absence est la source d’un certain nombre de mise en cause et
d’accidents médicaux fautifs.
Pour les sujets âgés, la prise en charge ambulatoire est particulièrement bénéfique car un
éloignement de quelques jours du cadre de vie habituel peut les perturber.
La durée du transport et la distance d’éloignement de la structure ne sont pas des facteurs
d’exclusion, une complication pouvant être prise en charge par un autre établissement dans le
cadre d’une convention de soins établie préalablement.
La présence de l’accompagnant pour la sortie est nécessaire (un taxi est possible s’il
prend soin de raccompagner le patient jusqu’à son domicile) et permet d’éviter que le patient
ne conduise son véhicule. Par contre, la présence d’un accompagnant au lieu de résidence
postopératoire n’est pas forcément nécessaire la première nuit doit être évaluée en fonction du
couple acte/patient.
Les patients non francophones doivent être accompagnés d’un traducteur lors de la
consultation préopératoire et doivent bénéficier des documents d’information écrits dans la
mesure du possible dans leur langue. Les mineurs sont accompagnés d’un de leurs parents
(ou représentant légal) ou de l’adulte de leur choix. Les patients atteints d’un trouble du
jugement sont accompagnés d’un tiers pouvant garantir la compréhension et le bon respect
des recommandations. Ce tiers doit être le tuteur légal si le patient est sous tutelle par décision
de justice.
Quoi qu’il arrive la continuité des soins doit être assurée (article R. 4127-47 du CSP), il
faut donc remettre au patient un document de surveillance postopératoire avec des critères de
ré-hospitalisation ou tout au moins de prise de contact avec une structure clairement établie.
La gestion de l’infection, de la douleur, de la maladie thromboembolique doivent faire
l’objet d’une information et d’un suivi particulier.
Chaque intervenant dans l’établissement ou à domicile assume personnellement ses res-
ponsabilités (articles R. 4127-64 et 69 du CSP), ils doivent donc mettre en place des documents
de communications permettant à chacun d’être informé et de prendre des décisions profes-
sionnelles de qualité.
Chaque intervenant doit « tracer » son ou ses interventions, si possible dans un dossier
unique qui permet la coordination et la cohérence des soins mais il doit conserver une copie
dans son dossier personnel. La mise en commun d’informations ne justifie pas la disparition
d’un dossier personnel conservé dans l’intérêt du patient par chaque soignant.
Le risque médicolégal est anticipé en chirurgie ambulatoire par la capacité des équipes à
coordonner et organiser la continuité des soins.
La responsabilité individuelle de chaque soignant ne se diluera pas dans la responsabilité
d’équipe qui aujourd’hui n’existe devant aucune juridiction.
Conclusion
Afin de limiter les risques d’accidents médicaux dans la pratique de la chirurgie ambu-
latoire, les équipes doivent s’appuyer sur des recommandations, des référentiels des sociétés
savantes et des publications. L’information doit être renforcée sur les risques spécifiques de
la prise en charge en ambulatoire avec remise de documents d’information clairs et exhaustifs.
Le recueil du consentement éclairé symbolisé par le document d’information signé et daté
avec une phase de réflexion est un argument fort pour affirmer que le patient n’a pas perdu
de chance de choisir une autre alternative thérapeutique. L’information reste orale mais le
recueil du consentement éclairé par un document signé est fortement recommandé, et même
indispensable dans certains cas particuliers (IVG, recherche biomédicale, stérilisation contra-
ceptive, prélèvements d’organes, etc.).
La place de la personne de confiance et l’évaluation de l’environnement matériel et affectif
du patient doivent faire l’objet d’une évaluation spécifique et d’une information accessible à
tous les professionnels soignants.
La communication entre professionnels est indispensable à la qualité de la prise en charge
et des documents seront édités dès la sortie pour permettre une collaboration optimale des
équipes appelées à intervenir auprès du patient. La télémédecine après accord des tutelles
pourra permettre de développer des outils de sécurisation du suivi patient à condition qu’elle
ne se substitue pas à une offre de soignants déjà existante sur le terrain (article L. 6316-1 du
CSP).
Bibliographie
[1] Ley P. Memory for medical information. Br J Soc Clin Psychol 1979 ; 18 (2) : 245-55.
[2] Guida A, Société Française d’Anesthésie et de Réanimation. Prise en charge anesthésique des patients en
hospitalisation ambulatoire. Recommandations formalisées d’experts. Ann Fr Anesth Reanim 2010 ; 29 : 67-722.
170 A. Theissen, D. Legeais
Articles généraux
Theissen A, Fuz F, Catineau J, Sultan W, Beaussier M, Carles M, Raucoules-Aimé M, Niccolai P. Epidemiology of
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Theissen A, Beaussier M, Bouregba M, Rouquette-Vincenti I, Niccolai P, Lienhart A. The liability of the anaesthe-
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testinal surgery. J Visc Surg 2016 ; 153 (1) : 55-60.
HISTORIQUE DES INCITATIONS
TARIFAIRES AU DÉVELOPPEMENT
DE LA CHIRURGIE AMBULATOIRE
Michèle Brami
Introduction
Les incitations tarifaires au développement de la chirurgie ambulatoire dans les établis-
sements d’hospitalisation de court séjour, ont été le reflet de la politique hospitalière depuis
de nombreuses années. Les institutions, prises entre le souci d’inciter à développer des
méthodes plus efficientes de prise en charge, et celui de maitriser l’évolution des dépenses de
l’Assurance maladie, n’ont cessé de louvoyer entre mesures incitatives (ou supposées telles)
et injonctions contradictoires.
1. Calculés selon l’ancien périmètre : n total de séjours groupés dans un GHM en C avec durée de séjour = 0 /
nombre total de séjour groupé dans un GHM en C, hors CMD 14 et 15 et avec mode d’entrée = mode de sortie =
domicile).
174 M. Brami
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Tableau I
Évolution du nombre d’actes innovants réalisés en ambulatoire en chirurgie générale et digestive