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Dr A.

Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Chirurgie en obstétrique
Chirurgie de la femme enceinte et de l'accouchement
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Chez le même éditeur

Dans la collection Techniques chirurgicales


Chirurgie de l'incontinence urinaire et du prolapsus, par M. Cosson, J.-N. Cornu, R. de Tayrac, B. Deval, F. Haab, G. Meurette,
2e ­édition, 2019, 448 pages.
Hystérectomies, par M. Cosson, A. Wattiez, P. Collinet, 2016, 256 pages
Chirurgie des cancers gynécologiques, par D. Querleu, E. Leblanc, P. Morice, G. Ferron, 2e édition, 2014, 216 pages.
Chirurgie vaginale, par M. Cosson, D. Querleu, 2e édition, 2014, 280 pages.
Hystéroscopie et fertiloscopie, par H. Fernandez, O. Garbin, A. Gervaise, 2013, 264 pages.
Chirurgie coelioscopique en gynécologie, par G. Mage, 2e édition, 2013, 279 pages.

Autres ouvrages
Prise en charge de l'IVG. Recommandations CNGOF pour la pratique clinique, Collège national des gynécologues et obstétriciens
français (CNGOF), 2020, 240 pages.
Gynécologie-obstétrique. Réussir les ECN, par le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), G. Body,
X. Deffieux, P. Deruelle, O. Graesslin, C. Huissoud, 4e édition, 2020, 768 pages.
Endocrinologie en gynécologie et obstétrique, par B. Letombe, S. Catteau-Jonard, G. Robin, 2e édition, 2019, 360 pages.
Protocoles en gynécologie obstétrique, Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), 4e édition, 2018,
352 pages.
Gynécologie pour le praticien, par J. Lansac, H. Marret, 9e édition, 2018, 656 pages.
La pratique chirurgicale en gynécologie-obstétrique, par J. Lansac, G. Body, G. Magnin, 2011, 560 pages.
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Chirurgie en obstétrique
Chirurgie de la femme enceinte
et de l'accouchement

Philippe Deruelle
Pôle d'obstétrique Femme, mère et nouveau-né, CHRU de Strasbourg

Gilles Kayem
Service de gynécologie-obstétrique, hôpital Trousseau, AP-HP Paris
Sorbonne Université, Paris

Loïc Sentilhes
Service de gynécologie-obstétrique, CHU de Bordeaux

Dessins de Cyrille Martinet


Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Elsevier Masson SAS, 65, rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux cedex, France
Chirurgie en obstétrique – Chirurgie de la femme enceinte et de l'accouchement, 2e édition, de Phlippe Deruelle, Gilles Kayem et Loïc
Sentilhes.
© 2020, Elsevier Masson SAS
ISBN : 978-2-294-76722-7
e-ISBN : 978-2-294-76774-6
Tous droits réservés.

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tion, méthodes, composés ou expériences décrits ici. Du fait de l'avancement rapide des sciences médicales, en particulier, une vérifica-
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Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Liste des auteurs

Deruelle Philippe pôle Femme, mère et nouveau-né, CHRU Foulon Arthur centre de gynécologie-obstétrique et méde-
de Lille. cine de la reproduction, CHU Amiens-Picardie, université
Picardie Jules-Verne, Amiens
Kayem Gilles service de gynécologie-obstétrique, hôpital
Armand-Trousseau, Paris ; Sorbonne Université. Froeliger Alizée service de gynécologie-obstétrique, CHU de
Bordeaux.
Sentilhes Loïc service de gynécologie-obstétrique, CHU de
Bordeaux. Fuchs Florent service de gynécologie-obstétrique, hôpi-
tal Bicêtre, CHU du Kremlin-Bicêtre, Inserm U1018 CESP
« Reproduction et développement de l'enfant », université
Avec la collaboration de Paris-Sud.
Goffinet François service de gynécologie, maternité de Port-
Arvieux Catherine clinique universitaire de chirurgie diges- Royal, Paris.
tive et de l'urgence, CHU de Grenoble ; université Joseph-­
Fourier, Grenoble.
Hamidouche Amina hôpital Armand-Trousseau, AP–HP,
Paris
Barranger Emmanuel directeur général du Centre Antoine Hourbracq Melissa service de gynécologie-obstétrique, CHU
Lacassagne (UNICANCER), Université Côte d'Azur, Nice.
de Bordeaux.
N. Barry Delongchamps service d'urologie, hôpital Cochin, Houssin Clémence service de gynécologie-obstétrique, CHU
Paris.
de Bordeaux.
Benachi Alexandra service de gynécologie-obstétrique
Le Dref Olivier service de radiologie interventionnelle, hôpi-
et médecine de la reproduction, hôpital Antoine-Béclère,
tal Lariboisière, Paris.
­Clamart, faculté de médecine, université Paris-Sud, Orsay.
Brot Amaury service de gynécologie-obstétrique, CHU de Leroy Audrey pôle Femme, mère et nouveau-né, CHU de Lille.
Bordeaux. Leroy Véronique Arras. (© dessins réalisés chapitre 4).
Cabrol Dominique gynécologue-obstétricien, ancien chef Louis-Sylvestre Christine département Mère-Enfant, Insti-
de service de la maternité de Port-Royal, Paris. tut mutualiste Montsouris, Paris.
Coatleven Frédéric service de gynécologie-obstétrique, CHU Madar Hugo service de gynécologie-obstétrique, CHU de
de Bordeaux. Bordeaux.
Deffieux Xavier service de gynécologie-obstétrique et méde- Marcellin Louis service de gynécologie, maternité de Port-
cine de la reproduction, hôpital Antoine-Béclère, Clamart, Royal, Paris.
faculté de médecine, université Paris-Sud, Orsay.
Mattuizzi Aurélien service de gynécologie-obstétrique, CHU
Defline Alix département Mère-Enfant, Institut mutualiste de Bordeaux.
Montsouris, Paris
Mignon Alexandre maternité de Port-Royal, Paris.
Delorme Pierre hôpital Armand-Trousseau, AP–HP, université Raiffort Cyril CHU Louis Mourier, Colombes.
Pierre et Marie Curie, Paris.
Deruelle Philippe chef de pôle, hôpital de Hautepierre, Reche Fabian clinique universitaire de chirurgie digestive et
de l'urgence, CHU de Grenoble.
Strasbourg.
Fernandez Hervé chef du service de gynécologie obsté- Resch Benoît unité de chirurgie gynécologique et chirurgie
du sein, clinique Mathilde, Rouen.
trique, hôpital Bicêtre, CHU du Kremlin-Bicêtre, Inserm U1018
CESP « Reproduction et développement de l'enfant », univer- Sarrau Marie service de gynécologie-obstétrique, CHU de
sité Paris-Sud. Bordeaux, France.

VII
Drauteurs
Liste des A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Senat Marie-Victoire service de gynécologie-obstétrique Ricbourg Aude service de gynécologie obstétrique, hôpital
et médecine de la reproduction, hôpital Antoine-Béclère, Lariboisière, Paris.
Clamart ; service de gynécologie obstétrique, hôpital Bicêtre,
CHU du Kremlin-Bicêtre.
Toumi Myriam service de gynécologie-obstétrique, CHU de
Bordeaux.
Sergent Fabrice service de gynécologie-obstétrique, CHU Vignaux Olivier service de radiologie, hôpital Cochin,
d'Amiens.
Paris.
Silvera Stéphane service de radiologie, hôpital Cochin, Paris. Vincienne Marie service de gynécologie-obstétrique, CHU de
Soudan Marie-Charlotte service de gynécologie-obsté- Bordeaux.
trique, CHU de Bordeaux.

VIII
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Table des compléments en ligne

Accédez à l'ensemble des vidéos signalées dans l'ouvrage par l'icône en vous connectant à l'adresse suivante : http://www.
em-consulte.com/e-complement/476722
Chapitre 3 Cette vidéo est extraite du film Prise en charge chirurgicale des
Vidéo e3.1
hémorragies de la délivrance, réalisé par Resch B, Sergent F, Blanc S,
Technique «un fil/un nœud». Baron M, Roman H, Sentilhes L, Diguet A, Verspyck E, Marpeau L
pour les 30es Journées nationales du Collège national de gynécologie-
Chapitre 4 obstétrique (2006).
Vidéo e4.1 Chapitre 10
Suture d'une déchirure périnéale de stade IV.
Vidéo e10.1
Chapitre 9 Compressions utérines (B-Lynch, Haymann) ou capitonnage utérin
(Cho).
Vidéo e9.1 Cette vidéo est extraite du film Prise en charge chirurgicale des
Ligature bilatérale des artères hypogastriques (artères iliaques hémorragies de la délivrance, réalisé par Resch B, Sergent F, Blanc S,
internes). Baron M, Roman H, Sentilhes L, Diguet A, Verspyck E, Marpeau L
Vidéo e9.2 pour les 30es Journées nationales du Collège national de gynécologie-
Triple ligature de Tsirulnilkov avec une ligature étagée (doublée) de obstétrique (2006).
l'artère utérine.

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Abréviations

AINS anti-inflammatoires non stéroïdiens


AIP atteinte inflammatoire pelvienne
CIVD coagulation intravasculaire disséminée
CNGOF Collège national des gynécologues
obstétriciens français
FCT fausses couches tardives
FP fenêtre péritonéale
HELLP hemolysis, elevated liver enzyme levels
and low platelet
HPP hémorragie du post-partum
HSCF hématome sous-capsulaire du foie gravidique
IC intervalle de confiance
IRM imagerie par résonance magnétique
KIP kystectomie intrapéritonéale
KO kyste ovarien
KTP kystectomie transpariétale
LB ligature basse
LH ligature haute
LOSA lésions obstétricales du sphincter anal
LR ligament rond
OMS organisation mondiale de la santé
ORa odds ratio ajusté
OR odds ratio
PFC Pplasma frais congelé
RCF rythme cardiaque fœtal
RR risque relatif
SA semaines d'aménorrhée
TDM tomodensitométrie
VIH virus de l'immunodéficience humaine

XI
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Chapitre 1
Cerclage du col utérin
F. Fuchs, H. Fernandez

PLAN DU C HAPITRE
Indications du cerclage 2
Contre-indications du cerclage 3
Différentes techniques chirurgicales
du cerclage du col 3
Complications des cerclages 10
Surveillance des cerclages 13
Ablation du cerclage 13
Conclusion 13

Chirurgie en obstétrique
© 2020, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Points forts du chapitre téroscopie, hystérosalpingographie [8] ou test à la bougie


Le cerclage est indiqué dans les incompétences de Hegar n° 8. Cependant, la normalité de ces examens ne
cervicales. permet pas d'éliminer une incompétence cervicale fonc-
L'âge gestationnel du cerclage dépend de l'histoire des tionnelle. Ainsi, les recommandations pour la pratique cli-
patientes : nique du Collège national des gynécologues obstétriciens
▶ trois antécédents de fausse couche tardive (FCT) français (CNGOF) ont indiqué qu'aucun examen (hysté-
ou accouchement prématuré : cerclage préventif à rographie, hystéroscopie, test à la bougie) à la recherche
13–15 semaines d'aménorrhée (SA) ; d'une insuffisance cervicale n'est recommandé [6].
▶ un antécédent de fausse couche tardive + col inférieur Le traitement chirurgical a d'abord été réalisé par voie
à 25 mm (échographie entre 14 et 24 SA) : cerclage transabdominale en dehors de la grossesse [9] puis par voie
thérapeutique vers 18-19 SA) ; transvaginale pendant la grossesse, par les techniques de
▶ aucun antécédent mais menace de FCT : cerclage à Shirodkar [10] et de McDonald [7] et, enfin, de nouveau
chaud avant 24 SA ; par voie transabdominale [11]. Depuis, de nombreuses
▶ antécédent de FCT malgré un cerclage préventif : variantes de ces techniques ont été proposées [12–14], de
cerclage cervico-isthmique à 15 SA. façon à simplifier cette chirurgie.
La technique de McDonald-Hervet est à privilégier (pour L'intérêt et les indications du cerclage ont récemment
les cerclages préventifs et thérapeutiques) par rapport été reprécisés [6, 15]. Plusieurs situations se dégagent
au cerclage de Shirodkar qui est plus lourd et plus donc et c'est dans ce contexte d'incompétence cervicale,
morbide sans réel bénéfice démontré. connue ou suspectée par les antécédents ou bien décou-
Le cerclage à chaud est un cerclage difficile, nécessitant verte en urgence, que l'on va être amené à proposer la
un apprentissage et un matériel adapté. Il permet réalisation d'un cerclage du col utérin soit prophylactique,
cependant une amélioration nette du pronostic de ces soit thérapeutique, soit cervico-isthmique, soit, enfin, en
patientes. urgence.
Le cerclage cervico-isthmique sera de manière
préférentielle, à notre sens, réalisé par voie vaginale à
l'aide d'une bandelette de polypropylène.
Le taux global de complications est faible à l'exception
Indications du cerclage
des cerclages à chaud pour lesquels il existe un risque
On distingue quatre types de cerclage :
de rupture de la poche des eaux. ●
le cerclage prophylactique qui est destiné à des patientes
ayant au moins trois antécédents de FCT ou d'accou-
L'incompétence cervicale, autrefois appelée béance cervico- chements très prématurés [16]. Ce cerclage est pratiqué
isthmique, est connue depuis le milieu du xviie siècle [1]. au mieux entre 13 et 15 SA, après la période critique des
Palmer et Lacomme en ont décrit la cure chirurgicale, en avortements spontanés précoces et, idéalement, après le
1948, même si celle-ci avait été antérieurement réalisée [2]. dépistage prénatal du 1er trimestre (échographie obstétri-
Elle touche 0,5 % de la population des femmes enceintes, cale du 1er trimestre et marqueurs sériques maternels de la
est responsable de 15 à 25 % des pertes fœtales du 2e tri- trisomie 21 au 1er trimestre) ;
mestre [3, 4] et représente une cause majeure d'accouche- ●
le cerclage thérapeutique qui est indiqué chez les
ment prématuré (odds ratio [OR] : 4,3 [2,7–6,8]) [5]. patientes ayant un antécédent de FCT ou d'accouchements
Il n'existe pas de définition internationalement reconnue très prématurés et un col raccourci, de moins de 25 mm à
de l'incompétence cervicale. Le diagnostic est clinique, le l'échographie réalisée entre 14 et 24 SA [17]. Ce cerclage est
plus souvent posé de manière rétrospective devant des donc habituellement proposé vers 18-19 SA et, au plus tard,
antécédents de FCT à répétition ou d'accouchements jusqu'à 24 SA ;
très prématurés, évoluant rapidement, avec une dilatation ●
le cerclage en urgence (ou «à chaud»), destiné aux
asymptomatique typiquement sans contraction utérine, patientes présentant une menace de FCT du 2e trimestre
sans saignement, avec rupture prématurée des membranes de la grossesse et qui est supposée être liée à une incom-
ou protrusion de la poche des eaux et naissance d'un fœtus pétence cervicale. Elle se présente habituellement par une
vivant [1, 6, 7]. dilatation cervicale indolore et progressive, sans contrac-
En dehors de la grossesse, il a été suggéré que le diag­ tion utérine, associée à une protrusion de la poche des
nostic d'incompétence cervicale puisse être posé par hys- eaux dans le vagin, le plus souvent chez des femmes nul-

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1. Cerclage du col utérin

ligestes ou sans aucun antécédent obstétrical. Ce sont donc Différentes techniques


des patientes a priori à bas risque, pour lesquelles les autres
types de cerclages précédents n'avaient pas lieu d'être envi- chirurgicales du cerclage du col
sagés [18]. Ce cerclage est pratiqué le plus souvent entre 20
et 24 SA ; Généralités

les cerclages cervico-isthmiques, destinés aux patientes
ayant au moins deux antécédents de FCT ou d'AP inférieurs Position de la patiente
à 34 SA, dont un malgré la présence d'un cerclage vaginal La patiente est placée en position gynécologique, en léger
préventif ou thérapeutique [19]. Ce cerclage peut être posé Trendelenburg.
avant ou en début de grossesse, par voie laparotomique
[12], cœlioscopique [20] ou par vaginale [13]. La voie vagi- Matériel (en fonction du type de cerclage)
nale semble être la moins invasive [6].
Les indications de cerclages sont résumées dans le Il comporte :
tableau 1.1 [6]. ●
une sonde vésicale évacuatrice (non indispensable en
cas de cerclage McDonald-Hervet pour lesquels on peut
faire uriner la patiente avant) ;
un spéculum ;
Contre-indications du cerclage


des valves vaginales type Bresky ;
Ce sont :

de longues pinces en «cœur» ;

le travail actif, qu'il faut différencier d'une incompétence

un porte-aiguille ;
cervicale diagnostiquée tardivement ;

une pince à disséquer à griffe longue ;

les anomalies fœtales ;

une paire de ciseaux ;

un saignement d'origine endo-utérine inexpliqué ;

la ligature choisie et des compresses ;

une infection locale ou une chorioamniotite (dans le

pour les cerclages «à chaud» : un ballonnet de trocart
premier cas, la date du cerclage est différée après un traite- cœlioscopique ou de sonde vésicale à demeure, ou un
ment local). tampon monté fait de compresses non tissées humidifiées
par du sérum physiologique positionnées sur une pince
longuette.

Tableau 1.1. Indications de cerclages (d'après [6]).


Type de cerclage Cerclage prophylactique Cerclage écho-indiqué Cerclage en urgence ou
«à chaud»
Recommandé Pour les grossesses monofœtales En cas d'antécédent de FCT ou Au deuxième trimestre :
en cas d'antécédent d'au moins 3 FCT d'accouchement très prématuré en cas de modification clinique
ou d'accouchement très prématuré spontané < 34 SA majeure du col en présence ou
(grade A) Et de mesure de la longueur non de protrusion de la poche
du col < 25 mm avant 24 SA des eaux
(grade C) en cas de grossesse monofœtale
mais en l'absence de rupture
prématurée des membranes ou de
chorio-amniotite (grade C)
Non recommandé Du fait du seul antécédent de conisation En cas de col court au 2e
(grade C), de malformation utérine quel trimestre sans antécédent
qu'en soit le type (accord professionnel) gynéco-obstétrical (grade B)
En cas de grossesse gémellaire En cas de col court et de
En prévention primaire (grade B) ou grossesse gémellaire (grade C)
secondaire (grade C)
En cas d'un ou deux antécédents de
FCT ou d'accouchement très prématuré
(accord professionnel)

3
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Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Anesthésie placé par du fil non résorbable type Mersutures® n° 3 ou


n° 5. L'entrée se fait à la face antérieure du col, à la jonction
Tous les types d'anesthésie (générale, locorégionale et
exocol-vagin rugueux. Le cerclage du col est fait en cinq à
locale) ont été utilisés dans le cerclage, voire l'absence
six prises «mordant» le col profondément sans atteindre le
d'anesthésie [21]. L'anesthésie générale de courte durée
canal cervical. Le nœud est placé à 12 h 00, en laissant les
sans intubation ou l'anesthésie locorégionale par péridurale
chefs assez longs. McDonald recommandait de «mordre»
sont les plus couramment utilisées.
profondément en postérieur car c'est le lieu privilégié des
déplacements de suture.
Techniques chirurgicales La variante de Hervet utilise un trajet strictement sous-
muqueux et fait entrer et sortir l'aiguille par les mêmes
À l'heure actuelle, les trois principales techniques de cer- points passant en séton aux quatre points cardinaux. Il est
clage [22] qui sont réalisées en France sont la technique également possible de placer deux sutures parallèles dis-
de McDonald [7] modifiée par Hervet [14], la technique tantes de 1 cm [27, 28].
de Shirodkar [10] et le cerclage cervico-isthmique [12, 13, Le cerclage de McDonald-Hervet est le cerclage le plus
23–26]. couramment pratiqué en France en raison de sa simplicité,
de sa facilité d'apprentissage et de sa bonne efficacité.
Technique de McDonald, secondairement Des études ont comparé la position du fil de cerclage
modifiée par Hervet dans les deux techniques (McDonald et Shirodkar) et
retrouvent un fil significativement plus haut avec la tech-
La technique de McDonald ne nécessite aucune dissection
nique de Shirodkar [29]. Cependant, aucune différence en
paracervicale (figure 1.1) ; le fil monté sur aiguille de Mayo
termes d'accouchements très prématurés ni de survie néo-
initialement utilisé par McDonald en 1957 [7] a été rem-
natale entre les deux techniques n'a été démontrée [3, 29].

A B
Figure 1.1.
Cerclage du col utérin selon la technique de McDonald modifiée par Hervet (d'après [22]).
A. Entrée de l'aiguille du Mersutures® n° 5 à la face antérieure du col à la jonction exocol-vagin, puis faufilage sous-muqueux du col
(5 à 6 prises). B. Nœud à 12 h 00 en laissant les chefs assez longs.

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Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED
1. Cerclage du col utérin

L'essor de la technique de McDonald-Hervet a donc été ●


repoussement des membranes au doigt ou à l'aide
plus important, étant plus simple, plus rapide, et tout aussi d'un tampon monté de compresses stériles non tissées
efficace. humidifiées ;

suspension-traction du col par des points simples non
Cerclage à chaud noués à 3, 6, 9 et 12 h 00 [30] selon la technique du «para-
chute» (figure 1.2) ;
Dans les cas où il existe une protrusion de la poche des ●
introduction d'une sonde de Foley n° 16 dont l'extrémité
eaux dans le vagin, plusieurs artifices techniques ont été
est coupée au ras du ballonnet que l'on gonfle avec 30 ml.
décrits pour le réduire et faciliter le cerclage :
Le ballonnet sera dégonflé à la fin de l'intervention [31] ;

position de Trendelenburg ; ●
remplissage de la vessie par 800 à 1000 ml [30] ;

A B C

D E
Figure 1.2.
Cerclage du col utérin à chaud selon la technique de McDonald modifiée par Hervet avec suspension-traction du col par des points
simples non noués à 3, 6, 9 et 12 h 00 [30] selon la technique du «parachute».
A. Gonflage du ballon en rapport avec l'ouverture du col. B. Insertion du ballonnet permettant de refouler la poche des eaux. C. Cerclage
autour du mandrin qui est ensuite retiré, ballonnet dégonflé. D. Passage du fil de cerclage. E. Nœud à 12 h 00.

5
Dren A.Amine
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utilisation d'un ballonnet initialement employé en réalisées au niveau du repli vaginal du col, après instillation
endoscopie pour la dissection prépéritonéale (référence de lidocaïne à 1 % adrénalinée, diluée dans 20 ml de sérum
OMS-PDB1000, AutoSuture, France) permettant de refou- physiologique dans le but de réaliser une vasoconstriction
ler les membranes [32] ; locale et de faciliter le décollement. La dissection paracer-

amniocentèse à travers la hernie cervicale des mem- vicale peut être réalisée à l'aide de ciseaux et on utilise un
branes [33]. Cette technique est peu recommandée en dissecteur pour passer un Crinoruban® sous les ponts ainsi
raison du risque important de provoquer une rupture des réalisés. Le Crinoruban® est alors noué à 12 h 00. On ferme
membranes. les quatre incisions avec un fil résorbable 2/0 en points
Le col est saisi par de longues pinces en «cœur» à 3 et inversés qui permettent d'enfouir les nœuds dans la paroi
9 h 00. Les membranes sont refoulées dans la cavité utérine vaginale. Une antibioprophylaxie est réalisée de façon sys-
à l'aide du dispositif préférentiellement choisi. Un cerclage tématique en peropératoire par 1 g d'amoxicilline-acide
type McDonald-Hervet est alors réalisé autour du man- clavulanique.
drin à l'aide d'un fil non résorbable type Mersutures® n° 3 Un cerclage de type McDonald-Hervet peut être associé,
ou n° 5. Le système de refoulement de la poche des eaux permettant de fixer le Crinoruban® et d'éviter son déplace-
est ensuite dégonflé et/ou retiré progressivement, tout en ment secondaire.
serrant le fil de cerclage (figure 1.3). Si les membranes sont La sortie se fait à J1 après réalisation d'une échographie
toujours visualisées, un deuxième cerclage est placé au-des- du col pour vérifier la position du cerclage, la longueur du
sus du premier. Dans certains cas, il peut être nécessaire de col, la fermeture de l'orifice interne et la vitalité fœtale.
réaliser un deuxième cerclage 48 heures après le premier Une variante décrite par Mann et al. [34] consiste en un
afin de permettre de placer un fil plus haut sur le col, cette cerclage cervico-isthmique qui pousse plus loin la dissec-
fois sans transfixier le col mais en faufilant celui-ci, après tion antérieure et postérieure du col, jusqu'à la réflexion
contrôle échographique de la persistance d'une protrusion. péritonéale. La suture transfixie les ligaments utérosacrés au
Une antibioprophylaxie est réalisée de façon systéma- niveau de l'orifice interne. Le nœud est antérieur et serré
tique en peropératoire par 1 g d'amoxicilline- acide cla- sur une bougie de Hegar n° 4, une deuxième suture est
vulanique. Les patientes sont traitées 48 heures par des réalisée, plus distale de 1 à 2 cm par rapport à la première.
anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) de façon systé- Cette technique n'est que rarement utilisée et a été décrite
matique, à visée tocolytique. en dehors de la grossesse ; c'est une alternative au cerclage
cervico-isthmique par voie transabdominale, lorsque le col
Technique de Shirodkar est très court et cicatriciel.
La technique de Palmer diffère de celle de Shirodkar par
Décrite en 1955, cette technique de cerclage par voie vagi-
le fait qu'après la colpotomie antérieure horizontale, un fil
nale utilisait à l'origine une bandelette de fascia lata de la
de nylon serti est passé autour du col dans le tissu paracer-
patiente. Deux incisions étaient réalisées sur la paroi vagi-
vical en six fois, en repassant dans l'orifice par lequel il vient
nale : une transversale antérieure permettant le refoulement
de sortir.
vésical, puis une verticale sur la paroi vaginale postérieure
Ce cerclage, dont l'efficacité a bien été démontrée [35],
permettant le refoulement du fascia rectovaginal vers le
reste une technique chirurgicale assez lourde, à la fois par
bas. Ces dissections avaient pour but de rester au plus près
son temps opératoire de dissection paracervicale pouvant
de l'orifice cervical interne. Une fois la dissection réalisée, les
mener à des complications hémorragiques mais aussi par
deux bandelettes de fascia lata précédemment disséquées
la nécessité, en cas de cerclage par bandelette Crinoruban®,
étaient passées puis nouées et, enfin, les incisions de la dis-
d'un accouchement par césarienne. Ce type de cerclage
section primitive étaient refermées.
complique par là même les modalités d'expulsion des fausses
De nombreuses variantes chirurgicales de cette tech-
couches précoces, tardives et des interruptions de grossesses.
nique ont été décrites, avec notamment l'utilisation d'une
bandelette de Crinoruban® à la place du fascia lata. Une de
ces variantes est présentée figure 1.4.
Technique de cerclage cervico-isthmique
Au bloc opératoire, sous anesthésie générale, la patiente Le cerclage cervico-isthmique décrit initialement en 1965
est installée en position gynécologique, en léger Tren- par Benson et Duffee est réalisé en dehors de la grossesse et
delenburg. Deux valves vaginales (antérieure et postérieure) consiste à placer un cerclage entre les branches ascendantes
sont mises en place. Le col est saisi par deux pinces de Bab- et descendantes de l'artère utérine au niveau de la jonction
cock. Quatre incisions longitudinales à 12, 3, 6 et 9 h 00 sont cervicocorporéale.

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Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED
1. Cerclage du col utérin

A B

C
Figure 1.3.
Cerclage du col utérin à chaud selon la technique de McDonald modifiée par Hervet avec refoulement de la poche des eaux à l'aide d'un
ballonnet (d'après [22]).
A. Gonflage du ballon en rapport avec l'ouverture du col. B. Insertion du ballonnet permettant de refouler la poche des eaux. C. Cerclage
autour du mandrin qui est ensuite retiré, ballonnet dégonflé.

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Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

A B

C D
Figure 1.4.
Cerclage du col utérin selon une variante de la technique de Shirodkar (d'après [22]).
A. Instillation de lidocaïne 1 % adrénalinée diluée dans 20 ml de sérum physiologique. B. Incisions longitudinales au niveau du repli vaginal du
col à 12, 3, 6 et 9 h 00. C. Dissection paracervicale aux ciseaux. D. Passage du Crinoruban® sous les ponts à l'aide d'un dissecteur.
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1. Cerclage du col utérin

3 6

E
4
Figure 1.4. Suite.
E. Nœud à 12 h 00.

La technique princeps de Benson (figure 1.5), bien


décrite récemment [36], consiste en une canulation utérine
première à la bougie de Hegar n° 6. L'abord intra-abdominal Figure 1.5.
et sa fermeture sont sans particularité, la voie d'abord est Position de la bandelette dans le cerclage cervico-isthmique selon
indifférente : laparotomie par Pfannenstiel ou Mouchel, ou Benson (d'après [22]).
1. Branche ascendante de l'artère utérine ; 2. espace avasculaire ;
cœlioscopie. L'abord de l'isthme nécessite une dissection 3. branche descendante de l'artère utérine ; 4. bandelette de
en regard de l'orifice interne, ce qui correspond au taurus Mersilène ; 5. ligament cardinal ; 6. ligament utérosacré.
uterinum en arrière. L'ouverture du péritoine vésico-utérin
et son décollement sont réalisés transversalement en res- La principale variante technique a été décrite par
tant très médian, pour limiter le saignement de cet espace ­Mahran [39], plus simple et possible pendant la grossesse
richement vascularisé pendant la grossesse. L'aide facilite la puisqu'elle ne nécessite aucune mobilisation de l'utérus et
dissection au dissecteur mousse de l'espace compris entre ne dissèque pas l'espace intervasculaire mais repousse les
les branches ascendante et descendante de l'artère utérine, branches artérielles latéralement au doigt pour passer une
au niveau de la jonction cervicocorporéale [37] en tractant bandelette montée sur aiguille mousse.
l'utérus vers le haut pour exposer la région et mettre les Ce type de cerclage était réalisé historiquement par lapa-
vaisseaux en tension. Cet espace est tunnellisé sous les vais- rotomie [12, 26] puis de plus en plus par voie cœlioscopique
seaux latéralement vers le conjonctif de l'isthme. L'aiguille [20, 40] permettant sa réalisation en cours de grossesse et
pénètre ensuite le feuillet postérieur du ligament large sous donc une approche moins agressive. On notera enfin la
contrôle de la vue, sous le feuillet péritonéal postérieur au publication de cas récents de cerclages cervico-isthmiques
niveau de la jonction des ligaments utérosacrés et ressort réalisés par cœlioscopie assistée par le robot Da-Vinci avant
dans l'espace disséqué opposé. La bandelette est nouée par [41], ou en début de grossesse [42].
un seul nœud antérieur dont les chefs sont suturés à la ban- Une dernière technique de cerclage cervico-isthmique
delette par un fil fin non résorbable [36–38]. a vu le jour récemment sous le nom de technique de
9
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

F­ ernandez [13, 23]. Elle consiste en un cerclage cervico-isth- avec leurs conséquences propres. La technique vaginale de
mique avec une bandelette de polypropylène mais réalisé Fernandez limite le nombre d'interventions abdominales à
par voie vaginale, diminuant ainsi les risques opératoires une césarienne. L'avantage de laisser le cerclage en place est
par rapport à la voie abdominale (figures 1.6, 1.7). Le col qu'il peut être utile pour une autre grossesse.
de l'utérus est saisi par deux pinces de Pozzi qui sont pla-
cées sur les berges antérieure et postérieure. Tout d'abord, Autres techniques de cerclage
on réalise une infiltration des tissus vaginaux paracervicaux
Le procédé de Wurm est une occlusion cervicale à l'aide
avec 10 ml d'un mélange sérum physiologique/lidocaïne
de deux points de Nylon transfixiant le col et passés
(5 %). La colpotomie est réalisée de façon semi-circulaire en
perpendiculairement.
avant et en arrière au niveau de la jonction cervico-vaginale.
Saling a proposé en 1984 une technique de fermeture
Les incisions mesurent 2 à 3 cm de longueur et ne sont pas
cervicale après désépidermisation de l'orifice externe et
confluentes. La vessie est disséquée, puis réclinée de la face
réalisation de points inversés de fils résorbables [43]. À elle
antérieure du col grâce à une valve vaginale étroite. Cette
seule, cette technique n'empêche pas un accouchement
dissection vésicale est poursuivie sur toute la hauteur de la
par voie vaginale. Elle a été reprise par Dargent pour cercler
ligne médiane jusqu'à ce que la jonction cervico-isthmique
les patientes enceintes après trachélectomie. Cette tech-
soit exposée. En arrière, après une brève dissection, le cul-
nique de fermeture cervicale, encore peu développée en
de-sac de Douglas est ouvert aux ciseaux, ce qui expose les
France, est surtout utilisée en Allemagne et le plus souvent
ligaments utérosacrés et la face postérieure de la jonction
en complément d'un cerclage vaginal.
cervico-isthmique. La bandelette synthétique est ensuite
La technique de Lash et Lash [44] est indiquée en cas
mise en place de part et d'autre de la jonction cervico-isth-
d'incompétence cervicale avec déchirure antérieure impor-
mique, au-dessus de l'insertion des ligaments utérosacrés et
tante du col. Une incision longitudinale est pratiquée sur la
en dessous du niveau de la crosse de l'artère utérine. La ban-
muqueuse du col jusqu'à 2 cm au-dessus de l'orifice externe,
delette est mise en place grâce à une aiguille d'Emmet, ou
en repoussant la vessie si nécessaire. En cas d'incompétence
grâce aux introducteurs courbes spécifiques fournis avec la
cervicale très importante, on peut réséquer une portion
bandelette. Une fois passée, autour de l'isthme, la bande-
triangulaire du col. Une plicature de cette muqueuse est
lette est serrée et fixée sur l'isthme par un fil non résorbable
ensuite pratiquée par des points séparés de fil résorbable
de polypropylène. Le péritoine du cul-de-sac de Douglas
2/0, réduisant le diamètre du canal cervical.
est suturé ainsi que la muqueuse vaginale au fil résorbable.
On citera enfin une technique de cerclage non invasif
Cette technique avait déjà partiellement été décrite
par utilisation de dispositif pessaire cervical en cas d'incom-
auparavant par Golfier et al. [24] et Katz et Abrahams [25]
pétence cervicale [45–50].
mais utilisait un simple fil non résorbable à la place d'une
bandelette synthétique. Les données récentes tendent à
montrer une supériorité des bandelettes de polypropylène
par rapport au fil non résorbable en termes de réduction Complications des cerclages
des accouchements prématurés [13, 23–25].
Les cerclages cervico-isthmiques, outre leur efficacité Complications précoces [51, 52]
très prometteuse, restent des cerclages dont la technique
chirurgicale est lourde de conséquences. En effet, ces cer- Le principal risque immédiat, en dehors du risque anes-
clages nécessitent quasiment tous un accouchement par thésique, est l'hémorragie qui est plus fréquente avec la
césarienne, ce qui peut compliquer la prise en charge des technique de Shirodkar [1]. La rupture traumatique ou
grossesses arrêtées du 1er et du 2e trimestre. Toutefois, Katz réactionnelle des membranes survient dans 1 à 9 % des cer-
et Abrahams ont décrit une technique de cerclage cervico- clages toutes techniques confondues [38], mais elle peut
isthmique que l'on retire à l'accouchement [25]. Dans le cas atteindre jusqu'à 30 % dans les cerclages «à chaud» [53].
des cerclages cervico-isthmiques réalisés par cœlioscopie, il Des contractions utérines peuvent être prévenues par une
s'agit de techniques difficiles, ayant une durée opératoire tocolyse sans qu'aucune étude contrôlée n'ait démontré
importante et donc réservées à certains chirurgiens expéri- l'efficacité de cette thérapeutique sur des contractions qui
mentés. Dans le cas des cerclages cervico-isthmiques réalisés seraient spontanément résolutives [1]. Les autres compli-
par laparotomie, la patiente acceptant cette chirurgie s'ex- cations notées sont des douleurs abdominales, des plaies
pose donc à deux laparotomies (cerclage puis césarienne) vésicales et des déchirures cervicales.

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Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED
1. Cerclage du col utérin

A B

C D
Figure 1.6.
Technique du cerclage cervico-isthmique par voie vaginale selon la technique de Fernandez (d'après [13, 23]).
A. Après colpotomie antérieure semi-circulaire, la vessie est disséquée et réclinée grâce à une valve vaginale. B. Mise en place de la bandelette
synthétique autour de la jonction cervico-isthmique, au-dessus de l'insertion des ligaments utérosacrés. C. Après colpotomie postérieure
et ouverture du cul-de-sac de Douglas, les ligaments utérosacrés et la face postérieure de l'isthme utérin sont exposés. D. Après serrage, la
bandelette est fixée sur la face antérieure de l'isthme et les colpotomies sont refermées.

11
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

A B C

D E F

G H I
Figure 1.7.
Technique du cerclage cervico-isthmique par voie vaginale selon la technique de Fernandez (d'après [13, 23]).
A. Infiltration à la lidocaïne adrénaline diluée. B. Colpotomie antérieure semi-circulaire. C. Décollement vésical. D. Ouverture du cul-de-sac de
Douglas. D. Introduction du guide. E. Retrait du guide avec bandelette fixée. F. Positionnement de la bandelette. H. Section de l'excédent de
bandelette après fixation. I. Fermeture vaginale après enfouissement du nœud.
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Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED
1. Cerclage du col utérin

Complications tardives Le fil de cerclage doit être adressé pour examen bactério-
logique car son ablation peut révéler et/ou disséminer un
Elles sont dominées par le risque infectieux qui peut se foyer infectieux latent, a fortiori si celle-ci est réalisée dans
manifester jusqu'à un mois après l'intervention. Celui-ci un contexte fébrile. Dans le cas d'un cerclage utilisant une
est d'autant plus précoce que le cerclage est tardif. Tous bandelette synthétique, celui-ci peut être laissé en place
les types d'infection post-cerclage ont été décrits, depuis pour une grossesse ultérieure. En cas de rupture prématu-
la vulvovaginite et l'endométrite jusqu'à l'abcès placentaire rée de la poche des eaux avec cerclage en place, aucune
[54, 55]. Une chorioamniotite survient dans 1 à 8 % des cas donnée de la littérature ne donne de réponse quant au
si le cerclage est précoce et jusqu'à 40 % s'il est tardif [56]. terme optimum de décerclage. Dans ces situations, il est
Des septicémies maternelles, des phlébites pelviennes et habituel, sauf contexte de chorioamniotite patente, de lais-
des péritonites [57] ont été rapportées. Les conséquences ser le cerclage en place pendant les 48 heures de la cure de
de ce geste simple peuvent donc être graves et soulignent corticoïdes puis de réaliser un décerclage au-delà de 28 SA
la nécessité d'une asepsie rigoureuse. Les signes d'appel de afin de limiter les risques d'infection.
l'infection peuvent être frustes et se résumer à l'apparition
de contractions utérines retardées [1, 27]. La plupart des
chorioamniotites sont cliniquement muettes [54].
Les autres complications, plus rarement rapportées, sont
Conclusion
le déplacement de la suture qui peut occasionner des plaies Le cerclage du col utérin constitue un des moyens permet-
du col (1 à 13 %) [1] et des douleurs cervicales [58]. Les tant de lutter contre l'incompétence cervicale. Son indica-
déchirures cervicales, décrites au cours du début de travail tion doit donc être précédée d'un interrogatoire précis de la
en cas de prématurité, existent et sont exceptionnelles et ne patiente concernant son histoire obstétricale. Une informa-
justifient en rien un changement quant au terme de décer- tion claire et objective sur les bénéfices et les risques d'un
clage habituel. Dans ces circonstances, un décerclage devra éventuel cerclage doit être apportée à la patiente.
être réalisé en début de travail. Les dystocies dynamiques ou
la fibrose du col [1] peuvent conduire à l'extraction par césa-
rienne dans 2 à 5 % des cas [1, 38] ou à la dilacération du col. Références
Enfin, des cas de nécrose du trigone et de fistule vésico- ou
utérovaginale [59, 60] ont été décrits [6, 61]. Enfin, des morts [1] Harger JH. Cervical cerclage: patient selection, morbidity, and suc-
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Chapitre 2
Particularités techniques de la
chirurgie chez la femme enceinte
F. Sergent, F. Reche, A. Foulon, C. Arvieux

PLAN DU C HAPITRE
Grands principes de la chirurgie non
obstétricale au cours de la grossesse 18
Particularités des différentes pathologies
chirurgicales 23

Chirurgie en obstétrique
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Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Points forts du chapitre enceinte, dans un second temps de décrire les particularités
Quel que soit le terme de grossesse, une urgence techniques rencontrées en fonction du type de pathologie
chirurgicale ne devrait jamais être différée. chirurgicale et, du fait de la grossesse, nous nous limiterons
Malgré le manque d'études spécifiques, certaines aux principales pathologies.
recommandations peuvent être énoncées dans le cas
général :
▶ le geste chirurgical doit être encadré par une Grands principes de la chirurgie
surveillance obstétricale stricte dans un établissement
capable de prodiguer une prise en charge obstétricale et non obstétricale au cours
néonatale adaptée si nécessaire ; de la grossesse
▶ la durée opératoire doit être la plus courte possible

pour réduire le risque d'hypoxie materno-fœtale ; La question de la chirurgie non obstétricale pendant la
▶ la corticothérapie prénatale et la tocolyse grossesse n'est pas dénuée de crainte pour le fœtus qui y
postopératoire ne sont pas systématiques ; est soumis tant d'un point de vue anesthésique qu'opéra-
▶ l'approche cœlioscopique est à privilégier. Les toire mais cette crainte doit être confrontée au risque que
principales pathologies chirurgicales non obstétricales : la pathologie maternelle fait courir à ce fœtus. En raison de
kystectomie ovarienne, appendicectomie, la difficulté de mener à grande échelle des essais cliniques
cholécystectomie, splénectomie et prise en charge randomisés dans cette population, il n'existe pas à l'heure
d'un hématome sous-capsulaire du foie présentent des actuelle de données qui permettent d'élaborer des recom-
spécificités techniques liées à la grossesse. mandations spécifiques, même si les études observation-
Les principales pathologies chirurgicales non obstétricales : nelles qui s'accumulent sont plutôt rassurantes [1].
kystectomie ovarienne, appendicectomie, cholécystecto- Quel que soit le trimestre de grossesse, une urgence
mie, splénectomie et prise en charge d'un hématome sous- chirurgicale ne devrait jamais être différée. Pour autant, une
capsulaire du foie présentent des spécificités techniques chirurgie non urgente ou non à risque sérieux de le devenir
liées à la grossesse. devrait être reportée après l'accouchement.
Les urgences abdominales représentent une situation
rare chez la femme enceinte. Elles concernent 0,5 à 1 % des Environnement chirurgical
grossesses. Elles sont dominées dans 90 % des cas par les
complications des kystes ovariens (torsion, hémorragie), Bien que certains agents anesthésiques soient tératogènes
l'appendicite et la cholécystite. D'autres situations sont pos- chez l'animal et dans certaines conditions, aucune drogue
sibles comme les complications d'un léiomyome, la rupture anesthésique n'a un effet tératogène prouvé chez l'homme.
splénique et l'hématome sous-capsulaire du foie où le pro- Les études cliniques suggèrent que les produits anesthé-
nostic vital du couple mère-fœtus est engagé. siques utilisés à des concentrations standard, et ce quel
En dehors de l'urgence, demeure la problématique des que soit l'âge gestationnel, n'augmentent pas le risque de
kystes ovariens organiques bénins, pour lesquels il semble malformation congénitale. Les risques de fausse couche, de
souhaitable d'intervenir avant la survenue de la compli- retard de croissance et d'accouchement prématuré sont
cation, qui constitue en soi un facteur de risque d'accou- significativement augmentés dans le contexte de la chirur-
chement prématuré, ou par crainte de laisser évoluer une gie en cours de grossesse, mais le rôle de l'anesthésie est très
tumeur ovarienne maligne. difficile à isoler de celui lié à la chirurgie, ou encore du risque
Les situations de la chirurgie chez la femme enceinte lié à la pathologie en elle-même [2].
sont donc très différentes en fonction du terme de la gros- En tout état de cause, quand ils sont rendus nécessaires,
sesse elle-même, du type de chirurgie et de sa voie d'abord les gestes chirurgicaux doivent être encadrés par une sur-
mais aussi de la pathologie rencontrée et de sa gravité avec veillance obstétricale avec monitorage du rythme car-
d'un côté les urgences chirurgicales classiques (on connaît diaque fœtal (RCF) et en fonction du terme, par Doppler,
le caractère favorisant de la grossesse sur la survenue de ou par cardiotocographe, dans un établissement qui sera
lithiases vésiculaires), de l'autre la pathologie cancéreuse capable de prodiguer une prise en charge obstétricale et
évolutive. néonatale adaptée en cas de besoin.
L'objectif de notre propos sera dans un premier temps Il n'existe pas de consensus pour l'utilisation d'une
de décrire les grands principes de la chirurgie de la femme tocolyse postopératoire, systématique pour certains, à la

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de la chirurgie chez la femme enceinte

demande pour d'autres seulement en cas de contractions limitant le risque de complication pariétale, notamment
utérines. Il faudra cependant être prudent avec l'utilisa- infectieuse, réduction de l'immobilisation de la femme
tion des inhibiteurs calciques qui renforcent l'hypotension enceinte et ainsi de la survenue de thrombose veineuse
maternelle. L'atosiban ne présente pas cet inconvénient. profonde. Cependant, l'existence d'un utérus gravide modi-
De même, la corticothérapie prénatale à partir de 24 SA fie les repères anatomiques habituels de la cœlioscopie et
dans un contexte de chirurgie non obstétricale n'est pas occasionne un certain nombre de contraintes techniques
consensuelle. Avant l'acte chirurgical, si celui-ci est réalisé qu'il est indispensable de prendre en compte.
en urgence, l'effet de la corticothérapie sera inopérant sur le En cas de chirurgie pelvienne, la canulation endo-utérine
cerveau et le poumon fœtal, rendant inutile sa prescription. est évidemment proscrite. Au besoin, l'opérateur pourra
Après la chirurgie, une discussion au cas par cas, en fonction s'aider d'un toucher vaginal doux ou d'un tampon monté
du risque d'accouchement prématuré, semble préférable à pour mobiliser l'utérus, dégager le cul-de-sac de Douglas ou
une prescription systématique. une fosse iliaque.
Dans l'intérêt de la mère comme de son fœtus, le chirur-
gien devra être rompu à la prise en charge de la pathologie
chirurgicale rencontrée.
Pneumopéritoine et mise en place
des trocarts
Voie d'abord La création du pneumopéritoine et la mise en place des
trocarts se feront à distance de l'utérus pour ne pas le bles-
Quand c'est possible, et le plus souvent ça l'est, en particu- ser. La taille de l'utérus étant normalement proportion-
lier pour les kystes ovariens, l'appendicite et la cholécystite, nelle au terme de la grossesse, la distance du fond utérin
parfois même à des termes avancés de grossesse, en fonc- par rapport à la symphyse pubienne et donc sa position
tion de la pathologie et de l'habilité du chirurgien, l'approche est en général connue. De façon mnémotechnique, de
cœlioscopique de la chirurgie devra être privilégiée [3]. Ainsi trois à sept mois, la distance symphyse pubienne – fond
la cœlioscopie peut encore être envisagée à six ou sept mois utérin correspond au nombre de mois de grossesse mul-
de grossesse pour réaliser une cholécystectomie, moins pour tiplié par 4. Ensuite, cette distance augmente de 2 cm par
un kyste ovarien ou une appendicectomie bien que certains mois les deux derniers mois (figure 2.1). En cas d'obésité
auteurs aient pu rapporter leur expérience à ce sujet [4, 5].
Avec l'avancée du terme de la grossesse, au cours d'un
acte chirurgical réalisé en décubitus dorsal, la diminution du
retour veineux liée à la compression cave se traduit par une
réduction significative du débit cardiaque avec hypotension
maternelle concomitante et diminution de la perfusion pla-
centaire. La prévention de l'hypotension liée à la compres-
sion cave repose sur l'utilisation du décubitus latéral gauche
(15°), en laparotomie comme en cœlioscopie mais par
sécurité pour cette dernière seulement, quand les trocarts
auront été mis en place et les organes concernés exposés.
Comme toujours, la prévention de la pneumopathie
d'inhalation repose la préoxygénation en O2 pur, la vidange
gastrique et sur les mesures pharmacologiques destinées à
augmenter le pH gastrique (anti-H2 notamment).
À ce jour, il n'existe aucune démonstration de niveau
de preuve élevé du caractère délétère de la cœlioscopie
sur la grossesse. Au contraire même, les avantages bien
connus que la cœlioscopie procure par rapport à la lapa-
rotomie sont particulièrement appréciables chez la femme
enceinte : retour rapide à une activité de vie quotidienne,
réduction des douleurs pariétales à l'origine d'une activité Figure 2.1.
contractile de l'utérus, réduction de la taille des cicatrices Variation de la hauteur utérine en fonction du terme.

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ou si le fond utérin est mal perçu, le recours à l'échogra- De façon générale, les trocarts seront positionnés
phie sera facile pour le localiser précisément. plus haut qu'à l'accoutumée pour éviter l'utérus gravide
En cas de cœlioscopie fermée à l'aiguille de Veress ou (figure 2.4).
de Palmer, un tracé préopératoire au niveau de la peau en Il n'y a pas de règle stricte pour la création du pneu-
regard du fond utérin, par dermomarqueur, avant l'insuffla- mopéritoine, même si certains préconisent la technique
tion du pneumopéritoine peut être utile (figure 2.2). Une de cœlioscopie ouverte (open laparoscopy des auteurs
distance minimum de sécurité de deux à trois travers de anglo-saxons) avec un abord de toute façon à distance
doigt au-dessus du fond utérin pour l'introduction du 1er du fond utérin (figure 2.5). Cependant, en cas de cœlio-
trocart est souhaitable, même si cela conduit à placer ce scopie fermée, lorsque le fond utérin approche l'ombilic, il
1er trocart au-dessus de l'ombilic (figure 2.3). Si nécessaire, est nécessaire d'effectuer la création du pneumopéritoine
l'optique pourra être ensuite replacée grâce à l'introduction au niveau de l'hypocondre gauche, aiguille introduite per-
d'un autre trocart plus haut situé ou latéralisé par rapport pendiculairement à la paroi abdominale, estomac vidé
au premier. préalablement par une sonde d'aspiration gastrique. Les
repères pour l'introduction de l'aiguille de Veress ou de Pal-
mer se font au niveau du tiers externe de la ligne joignant
l'ombilic au rebord costal gauche, décalé de deux travers

Figure 2.2. Figure 2.4.


Tracé préopératoire du fond utérin avant insufflation. Positionnement haut de l'ensemble des trocarts opératoires.

Figure 2.3. Figure 2.5.


Introduction haute du 1er trocart, largement au-dessus de Création du pneumopéritoine selon la technique de cœlioscopie
l'ombilic afin d'éloigner le fond utérin. ouverte.

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2. Particularités bibliographique
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de la chirurgie chez la femme enceinte

de doigt vers l'extérieur, soit grossièrement dans l'hypo-


condre gauche à mi-distance entre l'ombilic et l'apophyse
xiphoïde (figure 2.6). L'aiguille est insérée à 90° par rapport
à la paroi. Trois ressauts doivent être perçus pour affirmer
que l'extrémité de l'aiguille se situe bien dans la cavité péri-
tonéale (figures 2.7, 2.8). Ils correspondent au franchisse-
ment des feuillets antérieur et postérieur de l'aponévrose
puis du feuillet péritonéal lui-même. L'impression de liberté
de l'extrémité de l'aiguille dans la cavité péritonéale lors
de sa mobilisation nous conforte sur son bon position-
nement. La validation de la bonne position de l'aiguille
dans la cavité péritonéale, qui est une enceinte à pression
Figure 2.6.
négative, se fait par les trois étapes du test à la seringue :
Point d'introduction de l'aiguille de Veress dans l'hypocondre gauche.
aspiration-injection-aspiration.

Figure 2.7.
Ressauts perçus lors de l'introduction de l'aiguille de Veress au niveau de l'hypocondre gauche.
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Figure 2.8. Figure 2.9.


Traction sur la paroi abdominale au moment de l'introduction de Mobilisation de la patiente permettant de dégager l'utérus.
l'aiguille de Veress dans l'hypocondre gauche.

Il semble raisonnable de proposer l'insufflation du pneu-


mopéritoine à l'aiguille de Veress-Palmer dans l'hypocondre
gauche pour les cœlioscopies pratiquées au cours des 1er
et 2e trimestres. À la fin du 2e et au décours du 3e trimestre,
il paraît préférable de réaliser une cœlioscopie ouverte au
niveau sus-ombilical ou dans l'hypocondre gauche.
Le pneumopéritoine est insufflé et maintenu à
10–12 mmHg, jamais au-delà afin d'éviter la compression
de la veine cave inférieure responsable d'une hypotension
maternelle et de son possible retentissement fœtal. Quand
c'est possible (grossesse peu avancée, pathologie simple et
morphotype de la patiente facile), l'idéal serait de travailler
à la pression de pneumopéritoine la plus basse possible.
À l'étage pelvien, le Trendelenburg et surtout le roulis per- Figure 2.10.
mettront d'éloigner le gros utérus mou, gravide (figure 2.9), Utérus gravide dont la mobilisation directe doit être prudente.
pour faciliter l'introduction des trocarts opératoires mais
aussi pour dégager la région à explorer, annexe gauche ou
droite, région appendiculaire. Autant que possible, les chan-
gements de position devront être lents du fait du souci
constant de limiter le risque d'hypotension, source d'hypoxie.
La mobilisation de l'utérus par un instrument endosco-
pique est possible, là encore, se fera de la façon la plus douce
possible afin d'éviter un saignement au niveau de sa séreuse
naturellement hyperhémiée pendant la grossesse (figure 2.10).
Les trocarts latéraux devront être eux aussi haut situés,
à distance l'un de l'autre, de façon à obtenir un angle avec
l'optique facilitant la triangulation des instruments cœliosco-
piques. Cependant, au-delà du 1er trimestre, la règle de trian-
gulation devient difficile à respecter du fait de l'interposition
de l'utérus gravide en plein milieu des instruments. Il est alors
parfois plus commode de placer deux trocarts du même côté Figure 2.11.
de la ligne médiane ou de la pathologie à traiter (figure 2.11). Multiplication des trocarts facilitant la gestuelle opératoire.

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2. Particularités bibliographique
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de la chirurgie chez la femme enceinte

Durée opératoire et énergies conversion pour difficulté technique ; intentionnellement,


nous ne répéterons pas les techniques par laparotomie.
Aucune durée opératoire ne peut être imposée, mais le Bien qu'il s'agisse d'événements très rares, la rupture splé-
bon sens voudrait qu'elle soit la plus courte possible pour nique ou l'hématome sous-capsulaire du foie au cours de
réduire le risque d'hypoxie maternofœtale. la grossesse représentent des événements d'une extrême
Le bon sens voudrait aussi qu'en cas d'utilisation d'éner- gravité. Aussi, une équipe obstétricale doit être capable de
gie, les sources à faible risque de diffusion soient favorisées, faire face à ces situations si un chirurgien viscéral n'est pas
ce qui est d'ailleurs plus souvent le cas en cœliochirurgie. rapidement accessible. Nous rappellerons quelques points
Il est vrai que nous ne disposons pas actuellement techniques de base.
de publication ayant étudié précisément les énergies
employées au cours de procédures chirurgicales laparosco-
piques chez les femmes enceintes. Il n'y a donc pas de preuve Ablation de kyste ovarien
tangible que l'électrochirurgie chez la femme enceinte, dans L'incidence des kystes ovariens (KO) est de 0,2 à 5 % pen-
des conditions d'utilisation standard soit nocive pour l'em- dant la grossesse. La grande majorité n'a pas de traduction
bryon ou le fœtus. Pour autant, les courants monopolaires, clinique, leur découverte étant fortuite, notamment au
plus à même d'occasionner théoriquement des brûlures cours de la réalisation de l'échographie du 1er trimestre de
tissulaires, soit directement au contact par effet Joule, soit grossesse.
à distance et en profondeur par arc électrique, devraient Cependant, la principale complication de ces KO pré-
être utilisés à notre sens avec prudence, c'est-à-dire avec sents pendant la grossesse est la torsion annexielle, notam-
une intensité modérée, si possible dans une ambiance non ment au 1er trimestre et au début du 2e trimestre, risque
sursaturée par des liquides de lavage et certainement pas lui-même majoré dans un contexte d'hyperstimulation
sur l'utérus gravide lui-même. En outre, il est recommandé ovarienne suite au recours à une assistance médicale à la
que le retour de plaque ne soit pas placé de telle sorte que procréation.
l'utérus se retrouve entre l'électrode et la plaque [6]. Pendant la grossesse, les KO sont le plus souvent fonc-
Pour les courants bipolaires, le risque de diffusion ther- tionnels. Il s'agit principalement de kystes lutéiniques ou
mique est limité, ce qui constitue un avantage certain. Le de kystes du corps jaune. Parfois, ce sont des kystes follicu-
recul concernant leur utilisation est maintenant ancien. Il laires. La plupart de ceux de moins de 5 à 6 cm de diamètre
n'y a pas de publication faisant état d'incident les impli- demeurent asymptomatiques. Ils disparaissent générale-
quant dans cette situation de chirurgie de femme enceinte. ment au début du 2e trimestre de grossesse.
Ce sont par conséquent eux qui offrent les meilleures Pour les masses ovariennes persistantes, nous retrouvons
garanties de sécurité. Pour la thermofusion tissulaire, tout jusque dans la moitié des cas des tératomes bénins matures
comme pour l'énergie à ultrasons, étant donné leur action (kystes dermoïdes) mais aussi des cancers avec une inci-
localisée, elles ne devraient pas interférer sur l'utérus gra- dence avoisinant les 4 et 5 %.
vide. Nous disposons d'ailleurs de quelques observations En cas de masse échographiquement suspecte, l'ima-
rassurantes [7, 8]. gerie par résonance magnétique (IRM) pelvienne au deu-
xième trimestre permet d'affiner le diagnostic [9].
D'un point de vue pratique, au 1er trimestre, devant
Particularités des différentes le fort taux de régression spontanée des KO et le faible
pathologies chirurgicales risque de torsion ou de malignité, notamment pour les
KO uniloculaires mesurant moins de 5 à 6 cm, l'absten-
Les principales techniques opératoires décrites ici le tion thérapeutique est recommandée en l'absence de
seront par cœlioscopie et ce sont celles-ci qui devront symptomatologie. En cas d'abstention au 1er trimestre, un
être privilégiées. Elles sont applicables aux pathologies contrôle échographique est effectué au début du 2e tri-
non obstétricales les plus fréquentes qui requièrent une mestre. En cas de persistance sans augmentation de taille
chirurgie, c'est-à-dire le kyste de l'ovaire, l'appendicite et la du KO, le risque de complication est faible et l'expectative
cholécystite. Ces techniques ne sont que la reproduction semble légitime.
cœlioscopique de celles développées en laparotomie en En cas de tumeur ovarienne présumée bénigne asympto
cas d'impossibilité de réaliser une cœlioscopie, ou en cas de matique de plus de 6 cm, d'emblée ou au cours de la surveillance,

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les données de la littérature sont actuellement insuffisantes pour Si la lésion est suspecte, une laparotomie doit être réali-
conclure entre chirurgie et expectative [10]. sée préférentiellement. Le risque de diffusion de la maladie
À partir du 2e trimestre, après 20 SA, chez une patiente même pour les stades débutants de cancer ovarien est sans
jusqu'alors totalement asymptomatique, le risque de tor- doute accentué par les difficultés techniques inhérentes à
sion devient faible. L'accessibilité pelvienne devient égale- la taille de l'utérus gravide. Si aucun signe de malignité n'est
ment moins aisée rendant la chirurgie cœlioscopique plus mis en évidence, le traitement peut être réalisé par voie
difficile. Par conséquent, les complications obstétricales endoscopique.
postopératoires deviennent plus fréquentes, surtout en cas Le diagnostic macroscopique d'un KO fonctionnel n'est
de conversion en laparotomie du fait de difficultés tech- pas toujours simple et il n'est pas rare de considérer un KO
niques. Par prudence, la chirurgie de ces masses ovariennes séreux comme un kyste fonctionnel. Pour cette raison, il
asymptomatiques et non suspectes diagnostiquées au faut proposer, en cas de doute, une tentative de kystecto-
milieu du 2e trimestre doit raisonnablement être reportée mie intrapéritonéale (KIP) possible pour près de la moitié
après l'accouchement ou dans le même temps opératoire des kystes fonctionnels. Si la kystectomie est impossible et
qu'une césarienne indiquée pour motif obstétrical. s'il n'existe aucun signe de malignité, le diagnostic de kyste
Mais quel que soit le trimestre de la grossesse, un KO fonctionnel est quasi certain devant une paroi friable, jau-
symptomatique, notamment associé à des douleurs pel- nâtre et hémorragique (figure 2.14). Pour être de taille suf-
viennes, est une indication chirurgicale formelle. fisante et fiable, la biopsie se fait à la pince et aux ciseaux
La confrontation à des lésions malignes ou borderline de cœlioscopiques.
l'ovaire n'étant pas exceptionnelle, la cœlioscopie doit être Si elle est nécessaire, l'hémostase est réalisée avec une pince
réalisée selon les modalités et les précautions habituelles de bipolaire fine. Elle peut être complétée soit par compression
la chirurgie carcinologique. à la pince atraumatique, soit par irrigation au sérum chaud.
Dès lors, l'évaluation cœlioscopique comporte une cyto- La KIP d'un kyste organique utilise deux ou trois instru-
logie péritonéale (prélèvement du liquide et/ou lavage), ments introduits dans des contrevoies positionnées selon
l'inspection de l'ovaire kystique et de l'ovaire controlatéral le volume utérin. Sont nécessaires des pinces grip type
(figure 2.12), du pelvis, des gouttières pariétocoliques, du Manhès, une canule d'aspiration, une pince bipolaire, un
diaphragme, du foie, de l'épiploon et du tube digestif. ciseau endoscopique (figure 2.15).
Les principaux signes de malignité sont la présence Deux techniques possibles : kystectomie après ponction et
de zones plus opaques observées à travers la paroi très kystectomie sans ponction qui limite le risque de dissémina-
fine d'un kyste pouvant correspondre à des végétations tion carcinologique ou de péritonite granulomateuse en cas
intrakystiques, de façon plus évidente, la présence de végé- de kyste dermoïde ou mucineux. La taille et la nature du kyste
tations extrakystiques ou de très nombreux vaisseaux d'as- peuvent rendre illusoire la KIP sans ponction. Par exemple,
pect anarchique à la surface du kyste, et bien sûr un aspect un endométriome sera rarement disséqué sans entraîner une
de carcinose péritonéale (figure 2.13). rupture de sa paroi (figure 2.16), rendant dans ces conditions
la ponction préalable de son contenu plus adaptée.
Pour autant, il n'existe pas de données dans la littérature
permettant de savoir s'il existe un risque élevé de récidive
ou de dissémination de la maladie endométriosique en cas
d'ouverture non contrôlée d'un endométriome [11].
Dans la technique avec ponction, la procédure débute
en général au niveau du bord antimésial de l'ovaire par
une ponction étanche du kyste dans un endosac avec
une aiguille ou un trocart en fonction de la taille du kyste
(figure 2.17). Une cytologie du contenu du KO est réalisée.
Une kystoscopie est effectuée à la recherche de végéta-
tion intrakystique. Il peut être nécessaire d'agrandir l'ori-
fice de ponction pour introduire l'optique de l­'endo­scope
(figure 2.18). L'inspection de l'incision ovarienne permet
Figure 2.12. d'identifier le plan de clivage (figure 2.19). Une pince grip
Évaluation systématique de l'ovaire controlatéral à l'ovaire est placée de chaque côté de ce plan et des tractions
pathologique. divergentes sur les deux pinces amorcent la dissection
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2. Particularités bibliographique
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de la chirurgie chez la femme enceinte

A B

C D
Figure 2.13.
A. Kyste ovarien droit d'aspect bénin. B. Ovaires fortement suspects avec lésions végétantes à leur surface. C. Tumeur ovarienne droite
solide, hypervascularisée, suspecte. D. Galette épiploïque associée à une carcinose péritonéale.

Figure 2.14. Figure 2.15.


Paroi du kyste fine, fragile avec corps jaune associé, compatible Tractions divergentes et aspiration du contenu d'un kyste
avec le diagnostic de kyste ovarien fonctionnel. ovarien.

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Figure 2.16.
Figure 2.18.
Contenu d'un kyste ovarien compatible avec un diagnostic
Ouverture d'un kyste ovarien pour réalisation d'une kystoscopie
d'endométriome.
à la recherche de végétation ou d'une vascularisation atypique.

A B

C
Figure 2.17.
A. Introduction d'un ovaire kystique dans un endosac. B. Ponction étanche à l'aiguille fine d'un kyste ovarien dans un endosac.
C. Ponction directe d'un kyste ovarien avec un trocart laparoscopique.

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2. Particularités bibliographique
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Figure 2.19.
Identification du plan de clivage entre le parenchyme ovarien sain et le kyste lors d'une kystectomie.

Figure 2.20.
Figure 2.21.
Tractions divergentes exercées par les grip-pinces entre le
Kyste ovarien introduit dans un endosac avant extraction.
parenchyme ovarien et le kyste.

(figure 2.20). La kystectomie est poursuivie de proche en L'ovaire se remodelant spontanément, sa reconstruction
proche. Les changements de prise doivent être fréquents n'est pas nécessaire, au contraire même, elle augmenterait
afin d'exercer des prises au plus près du plan de clivage. En le risque adhérentiel annexiel du fait des fils de sutures lais-
effet, une traction à distance du plan de clivage est moins sés en place.
efficace en termes de force de traction exercée sur le kyste Dans la technique sans ponction, la surface de l'ovaire
à libérer, et expose plus volontiers au risque de fragmenter (qui correspond au parenchyme ovarien) est saisie par
le kyste, voire d'emporter du parenchyme ovarien sain que son côté antimésial avec une pince grip de façon à réali-
l'on s'efforcera de préserver. ser un pli. Ce pli est ensuite incisé au ciseau endoscopique
Pendant toute la dissection, l'opérateur doit pouvoir (figure 2.22). Le clivage entre le KO et le cortex ovarien peut
comprendre où est situé le plan de clivage. Quand ­celui-­ci ainsi être amorcé (figure 2.23). Une large ovariotomie à la
est respecté, le saignement est généralement minime. Si coagulation bipolaire fine et au ciseau est réalisée, préparée
une hémostase est nécessaire, elle est réalisée au fur et à par des mouvements de diffraction des mors de la pince
mesure de la dissection avec une pince bipolaire, complé- entre le KO et le cortex pour libérer le kyste du paren-
tée si besoin par une irrigation au sérum chaud pour avoir chyme ovarien, limitant ainsi le risque de rupture du kyste
en permanence une vision nette du plan de dissection. (figure 2.24). Ensuite, le clivage entre le kyste et le paren-
Le kyste définitivement libéré est ressorti sans contact chyme est poursuivi perpendiculairement et de part et
direct avec la paroi au moyen d'un endosac (figure 2.21). d'autre de la ligne d'ovariotomie mais avec des instruments

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orientés tangentiellement à la surface du kyste pour ne pas


le rompre (figure 2.25).
Ces gestes, qui sont facilités par la pneumodissection de
la cœlioscopie, peuvent être optimisés grâce à l'artifice de
l'hydrodissection auquel il faut savoir recourir.
Quand plus de la moitié de la surface du kyste a été dis-
séquée, la dissection devient plus évidente. Il est alors pos-
sible de la poursuivre en soulevant le parenchyme ovarien
restant et en s'aidant du poids du kyste. Il faut néanmoins
éviter de saisir directement la paroi du kyste pour ne pas la
déchirer.
Une fois le kyste libéré, sa ponction dans un endosac est
Figure 2.22. le plus souvent nécessaire pour pouvoir l'extérioriser.
Incision du cortex ovarien avec des ciseaux endoscopiques. La kystectomie transpariétale (KTP) est une méthode
de kystectomie assistée par cœlioscopie. Elle s'applique aux
volumineux KO ou aux kystes difficiles à cliver comme les
tératomes bénins. Dans ces cas précis, elle réduit le risque
d'ovariectomie du fait de la difficulté de dissection. Elle
combine l'intérêt d'une cœlioscopie pour poser le diagnos-
tic à celle d'une minilaparotomie pour effectuer la ponc-
tion du kyste de la manière la plus étanche possible, réduire
sa taille avant l'extraction, réaliser sa dissection et conserver
ainsi le maximum de parenchyme ovarien (figure 2.26).
Les suites opératoires sont proches de celles d'une cœlio­
scopie. L'utilisation d'un anneau rétracteur en polyuréthane
(écarteur de type Alexis) est intéressante dans les KTP pour
réduire le risque de contamination pariétale (figure 2.27).
C'est aussi un dispositif avantageux, une fois le kyste retiré,
pour reconstituer facilement le pneumopéritoine et pour-
Figure 2.23. suivre l'exploration du pelvis si celle-ci avait été gênée par le
Kystectomie à kyste intact, sans ponction préalable. volume du kyste (figure 2.28).
Dix à 15 % des masses annexielles peuvent être intéres-
sées par une torsion [12]. La cœlioscopie est la méthode
de choix chez la femme enceinte pour à la fois confirmer le
diagnostic et effectuer le traitement de la torsion d'annexe.
Notre attitude est systématiquement conservatrice en
cas de torsion d'annexe. Cette complication impose la
détorsion et, si possible, l'exérèse du kyste mais en laissant
en place l'annexe, même si elle paraît nécrotique ; en effet,
son potentiel de récupération est parfois surprenant [13].
S'il n'y a pas de kystectomie possible, avec un ovaire qui
reste volumineux, une ovariopexie au niveau d'une gout-
tière pariétocolique limite le risque de récidive (figure 2.29).
La distinction clinique et échographique, même avec
l'apport du Doppler couleur, entre torsion d'annexe et
nécrobiose aseptique d'un myome est difficile dans certains
Figure 2.24. cas. Quoi qu'il en soit, l'existence d'un syndrome abdomi-
Tractions divergentes, diffraction tissulaire, coagulation et nal aigu associé à une masse latéro-utérine, sans pouvoir
section du cortex ovarien permettant de libérer progressivement formellement éliminer une pathologie annexielle, doit
le kyste sans rupture de celui-ci.

28
Dr A.Amine Recherche
2. Particularités bibliographique
techniques SCI-MED
de la chirurgie chez la femme enceinte

Figure 2.25.
Tractions divergentes lors d'une kystectomie sans ponction du kyste (A, B).

Figure 2.26.
Ponction à la paroi d'un volumineux kyste ovarien lors d'une
kystectomie transpariétale.

Figure 2.27.
A. Écarteur d'Alexis. B. Extraction d'un kyste ovarien à travers l'écarteur d'Alexis.

29
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

conduire à une chirurgie exploratrice. Seule la découverte


d'un léiomyome pédiculé, qui plus est si son pédicule est
tordu, peut conduire à l'exérèse du myome (figure 2.30).
Dans les autres cas, il est exclu d'aborder chirurgicalement
un myome chez une femme enceinte du fait d'un risque
hémorragique maximal dans cette situation et par consé-
quent du risque de perte fœtale. La section du pédicule
se fera avec des ciseaux endoscopiques après coagulation
bipolaire de celui-ci voire agrafage-section au moyen d'une
pince automatique type Endo GIA™.
Figure 2.28.
Occlusion de l'écarteur d'Alexis permettant de reconstituer le
pneumopéritoine. Appendicectomie
L'incidence de l'appendicite chez la femme enceinte varie
de 0,5 à 1 ‰ ; elle est superposable à celle de la population
générale [14]. La gravité de l'appendicite est corrélée au
retard diagnostique et à un taux élevé d'appendicites per-
forées ou gangrenées diagnostiquées lors de la grossesse. La
mortalité fœtale varie de 9 à 14 %. Les accouchements pré-
maturés et les avortements restent élevés, estimés entre 10
et 15 %. En revanche, la mortalité maternelle est quasiment
devenue nulle.
Il s'agit d'une installation cœlioscopique classique de
type chirurgie pelvienne, l'opérateur est placé à gauche de
la patiente, l'écran dans l'axe du pied droit de la patiente et
l'assistant en face de l'opérateur à la droite de la patiente
(figure 2.31). La mise en place des trocarts correspond à ce
qui a été décrit dans les grands principes de la chirurgie gra-
Figure 2.29. vidique, adaptée au volume de l'utérus gravide.
Fixation de l'ovaire gauche à la paroi par des points Si l'appendice est abcédé, un prélèvement bactério-
intracorporels.
logique du pus sera effectué (figure 2.32). La pointe de
l'appendice est saisie et tendue par une pince fenêtrée
atraumatique de façon à exposer le méso appendiculaire
(figure 2.33). La coagulation à la pince bipolaire du méso
appendiculaire est réalisée dans un axe perpendiculaire
à celui de l'appendice lui-même en se dirigeant vers la
base appendiculaire juste en dessous du bas-fond cæcal
(figure 2.34). Le méso appendiculaire est alors sectionné
dans le même axe jusqu'au contact de la base appendicu-
laire (figure 2.35). Un endoloop ou un nœud cœlioscopique
extracorporel de type nœud de pêcheur est placé à la base
de l'appendice et serré. Il est ensuite doublé de façon à ce
que la section de l'appendice soit étanche (figure 2.36). La
section est effectuée au ciseau endoscopique de façon à
ménager un moignon appendiculaire de sécurité par rap-
port au bas-fond cæcal (figures 2.37, 2.38).
Figure 2.30. La coagulation de la muqueuse du moignon reste
Myomes sous-séreux pédiculés. classique. En revanche, l'application de Bétadine® sur le

30
Dr A.Amine Recherche
2. Particularités bibliographique
techniques SCI-MED
de la chirurgie chez la femme enceinte

Figure 2.31.
Installation de l'équipe pour une appendicectomie laparoscopique. L'opérateur est situé à gauche de la patiente.

Figure 2.32.
Figure 2.33.
Épanchement péritonéal purulent. Ponction du pus avec une
Exposition du méso appendiculaire.
aiguille cœlioscopique.

31
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 2.34. Figure 2.37.


Coagulation à la pince bipolaire du méso appendiculaire à Section au ciseau endoscopique de la base de l'appendice entre
proximité du bas-fond cæcal. deux ligatures.

Figure 2.35. Figure 2.38.


Section au ciseau endoscopique du méso jusqu'à la séreuse Moignon appendiculaire.
appendiculaire.

moignon n'est pas nécessaire. De même, il n'est pas utile


d'enfouir le moignon par une bourse avec la séreuse du
bas-fond cæcal.
Si la base de l'appendice est perforée ou gangrenée, il
faudra privilégier un agrafage à l'Endo GIA™A (figure 2.39).
L'extraction de la pièce d'appendicectomie est réalisée
au moyen d'un sac endoscopique (endobag) de façon à ce
qu'il n'y ait pas de contact direct avec la paroi, afin de limi-
ter le risque d'infection pariétale (figure 2.40). Un lavage de
la cavité péritonéale termine l'intervention.
L'exsufflation de la cavité péritonéale et le retrait des tro-
carts se font sous contrôle de la vue. La fermeture de l'apo-
Figure 2.36. névrose est systématique pour les trocarts de 10 mm au
Ligature de la base de l'appendice par des nœuds extracorporels fil 0 de Polyglactine®. Sauf contexte de gangrène vésiculaire
de type nœud de pêcheur ou bien par des endoloops. ou de péritonite, un drainage n'est pas nécessaire.

32
Dr A.Amine Recherche
2. Particularités bibliographique
techniques SCI-MED
de la chirurgie chez la femme enceinte

Figure 2.39. Figure 2.41.


Agrafage et section de la base de l'appendice à la pince Abord de l'appendice par laparotomie chez la femme enceinte.
automatique endoscopique. Il faut privilégier une incision de Mac Burney plus haut située,
adaptée à l'âge de la grossesse.

de la cholécystite aiguë est comprise entre 0,1 et 1 pour


1000 accouchements [14].
On privilégiera la technique chirurgicale française avec l'opé-
rateur placé entre les jambes de la patiente, l'écran au niveau de
son épaule droite et l'assistant à sa gauche (figure 2.42).
Le 1er trocart de 10 mm destiné à l'optique est placé au
niveau ombilical, plus haut selon la hauteur utérine de l'utérus
gravide avec repérage éventuel préalable de l'utérus par écho-
graphie, mais toujours sur la ligne médiane, jamais à gauche.
Trois trocarts opérateurs sont placés, l'un de 10 mm au
Figure 2.40. niveau de l'hypocondre gauche, l'autre de 5 mm au niveau
Extraction de l'appendice et de son méso dans un endosac. du flanc droit et le dernier de 5 mm au niveau de l'épigastre
(figure 2.43).
En cas de nécessité de réaliser une laparotomie, l'utérus gra- Pour l'exposition de la vésicule, une pince fenêtrée par le flanc
vide refoulant le cæcum vers le haut, une incision de Mc Bur- droit saisit le collet vésiculaire afin de verticaliser le canal cystique
ney horizontale est la plus adaptée au contexte de grossesse, (figure 2.44). L'ouverture du péritoine se fait sur la face anté-
plus haut située en fonction de l'âge gestationnel (figure 2.41). rieure du canal cystique au crochet monopolaire (figure 2.45).
L'incision de Jalaguier entre muscles grand droit et larges La dissection de l'artère cystique a lieu au niveau du triangle de
de l'abdomen n'est plus pratiquée, tout comme l'incision Calot et sa section se fait entre deux clips (figures 2.46, 2.47).
médiane sous-ombilicale. Classiquement, la cholangiographie peropératoire est à
éviter chez la femme enceinte, éventuellement ­remplacée
Cholécystectomie par une échographie des voies biliaires peropératoire.
Cependant, en cas de doute sur l'intégrité de la voie biliaire
Les estrogènes sont responsables d'une augmentation de la principale, la cholangiographie peropératoire, avec protec-
saturation biliaire en cholestérol et la progestérone diminue tion de l'utérus gravide par un tablier de plomb, est néces-
la sensibilité aux entéro-hormones favorisant l'apparition de saire pour établir une cartographie biliaire fiable.
lithiases vésiculaires. De ces deux mécanismes résulte une La cholécystectomie est réalisée de façon rétrograde avec
augmentation de la formation de calculs biliaires dont l'in- hémostase complémentaire du lit vésiculaire (figures 2.48,
cidence est proportionnellement croissante avec le terme 2.49). L'extraction de la pièce de cholécystectomie se fait par
de la grossesse. La fréquence des interventions biliaires au un endobag (figure 2.50). L'exsufflation de la cavité péritonéale
cours de la grossesse varie entre 0,008 et 0,8 %. L'incidence et le retrait des trocarts se font sous contrôle de la vue. La
33
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 2.42.
Installation de l'équipe pour une cholécystectomie laparoscopique. L'opérateur est situé entre les jambes de la patiente.

Figure 2.43. Figure 2.44.


Répartition des trocarts lors d'une cholécystectomie Traction sur le canal cystique avec une pince atraumatique.
laparoscopique.

34
Dr A.Amine Recherche
2. Particularités bibliographique
techniques SCI-MED
de la chirurgie chez la femme enceinte

Figure 2.45. Figure 2.48.


Incision du péritoine sur la face antérieure du canal cystique au Dissection a retro de la vésicule.
crochet monopolaire.

Figure 2.46. Figure 2.49.


Section de l'artère cystique entre deux clips. Coagulation hépatique au niveau du lit vésiculaire.

Figure 2.47. Figure 2.50.


Artère cystique sectionnée suivie de la section du canal cystique. Introduction de la vésicule dans un endosac avant extériorisation.

35
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

fermeture de l'aponévrose est systématique pour les trocarts Sur le plan technique, la patiente est installée en décubitus
de 10 mm au fil 0 de Polyglactine®. Sauf contexte de gangrène dorsal. Un billot peut être placé au niveau de la pointe des
vésiculaire ou de péritonite, un drainage n'est pas nécessaire. omoplates pour ouvrir l'angle costo-iliaque. Une sonde naso-
gastrique est mise en place afin d'affaisser l'estomac. L'opérateur
est placé à droite de la patiente. Un seul aide est générale-
Splénectomie ment suffisant si l'on dispose d'un piquet placé à gauche de la
La rupture splénique est surtout observée au 3e trimestre patiente pour y fixer une valve de Rochard (figure 2.52).
de la grossesse. L'erreur diagnostique est classique avec les La voie d'abord est une médiane sus-ombilicale, suscep-
grandes urgences obstétricales communes comme l'héma- tible d'être agrandie par une sous-costale (figure 2.52).
tome rétroplacentaire, la rupture utérine, voire l'embolie L'exploration de l'abdomen est complète. La lésion splé-
amniotique [15]. nique supposée est confirmée par la présence de sang et de
Quatre circonstances peuvent en être responsables : caillots dans l'hypocondre gauche. À ce stade, le rebord cos-
la rupture traumatique, la rupture sur rate pathologique tal gauche est rétracté par une valve sous-costale et la table
(pathologie hématologique, tumorale ou infectieuse), la est légèrement inclinée vers l'opérateur. Si l'hémodynamique
rupture sur rate de prééclampsie ou idiopathique, la rup- le permet, on peut incliner la table en procubitus. Si la lésion
ture d'un anévrisme de l'artère splénique. est très hémorragique et l'hémodynamique de la patiente
Dans l'urgence, la prise en charge est double : réanima- précaire, il peut être nécessaire de réaliser une hémostase
tion pour stabiliser le choc hémorragique et chirurgie pour temporaire. Le geste le plus efficace, même sur une rate très
traiter la cause. Le plus souvent, il s'agira d'une splénecto- lésée, consiste à empaumer la rate de la main gauche et de la
mie chez la femme enceinte précédée, en fonction des cir- plaquer contre le rachis (figure 2.53), tout en disposant trois
constances de survenue de la rupture, de l'état d'instabilité ou quatre compresses insérées à l'aide d'une pince tenue
hémodynamique de la patiente et du terme de la grossesse, dans la main droite qui vont permettre, dans la majorité des
par une césarienne. cas, une hémostase temporaire et une réinstallation.
Les deux principaux risques chirurgicaux de la splénec- Le premier temps de l'intervention va consister en
tomie sont l'atteinte accidentelle de l'angle colique gauche la mobilisation de la rate. La main gauche empaume
et de la portion caudale du pancréas [16]. Ces accidents la convexité de la rate et exerce une traction douce
sont en grande partie évités par une mobilisation première vers la ligne médiane (figure 2.53), de façon à inciser le
du bloc pancréatosplénique (figure 2.51). péritoine pariétal postérieur (ou ligament liénorénal)

Figure 2.51.
L'angle colique gauche et la queue du pancréas constituent les rapports anatomiques à risque au moment de la splénectomie.
36
Dr A.Amine Recherche
2. Particularités bibliographique
techniques SCI-MED
de la chirurgie chez la femme enceinte

Figure 2.54.
Section des attaches péritonéales inférieures de la rate.

Figure 2.52.
Installation de l'opérée.

Figure 2.53.
La main gauche de l'opérateur réalise une hémostase temporaire Figure 2.55.
en empaumant la rate.
Exposition du péritoine pariétal postérieur.

(figure 2.54). Il est important de sectionner le péritoine au sous la valve tenue par l'aide, tandis que la main gauche de
ras de la rate pour limiter au minimum la zone dépéritoni- l'opérateur présente le pôle inférieur entre pouce et index
sée (figure 2.55). La libération du pôle inférieur est réalisée (figure 2.56). Des compresses tassées dans la loge splénique
en exerçant une légère traction vers le haut. L'angle colique font remonter la rate vers la surface (figure 2.57). Pour la
gauche est maintenu à distance par une compresse repliée libération du pôle supérieur, le péritoine est sectionné au
37
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

ras de la rate en prenant garde de ne pas léser les vaisseaux


courts venus de la grande courbure gastrique. Le décolle-
ment du mésogastre postérieur est réalisé en insinuant les
doigts de la main gauche qui comprime toujours la rate
dans l'espace rétropancréatique et en tirant vers le haut,
permettant à la main droite de sectionner les quelques
attaches postérieures aux ciseaux ou à l'aide d'un tampon
monté ; la face antérieure du rein gauche et la surrénale
gauche apparaissent. La rate et la queue du pancréas sont
ainsi extériorisées dans l'incision. Les vaisseaux spléniques
peuvent éventuellement être clampés au niveau du pédi-
cule à ce moment pour limiter les pertes sanguines. Il ne
reste plus qu'à sectionner le ligament gastrosplénique : une
pince de Babcock peut être placée sur la grande courbure
gastrique (figure 2.58) (mais ce n'est pas indispensable) et
les vaisseaux courts sont clampés et sectionnés entre deux
pinces de type Bengoléas. Ils peuvent être immédiatement
liés par l'opérateur ou son aide si l'état hémodynamique
est correct, ou laissés sur les pinces et liés secondairement
après l'ablation de la pièce pour réduire les pertes sanguines
(figure 2.59). Au bord inférieur du ligament, l'anastomose
avec la veine gastroépiploïque est sectionnée, ouvrant tota-
lement l'arrière-cavité des épiploons où l'on a directement
accès au pédicule splénique (figure 2.60).
Figure 2.56.
Section du péritoine pariétal postérieur le plus près possible de
la rate.

Figure 2.58.
Figure 2.57. Splénectomie en urgence : présentation du ligament
Mise en place de compresses pour empêcher la rate de retomber. gastrosplénique.

38
Dr A.Amine Recherche
2. Particularités bibliographique
techniques SCI-MED
de la chirurgie chez la femme enceinte

La ligature du pédicule splénique est réalisée au fil non


résorbable serti (Prolène® 3/0) en attirant la rate et en abor-
dant les vaisseaux indifféremment par leur face postérieure
ou antérieure (figure 2.61). Lors de ce temps, il est essentiel
d'identifier parfaitement la queue du pancréas qui ne doit
pas être intéressée par les ligatures.
Après l'ablation de la rate, il faut vérifier soigneusement
l'hémostase de la loge en retirant progressivement les
compresses ou le champ qu'on y avait tassés. La grande
courbure gastrique est inspectée avec attention ; toutes les
ligatures des vaisseaux courts doivent être vérifiées. Il en est
de même de la région surrénalienne et de l'angle colique
gauche.
La péritonisation par rapprochement direct de la zone
cruentée diaphragmatique et prérénale n'est pas utile dans
ce contexte. La loge splénique est plutôt comblée par le
grand épiploon, l'angle colique gauche ou le lambeau res-
tant du ligament gastrosplénique.
La majorité des auteurs s'accordent, même si l'hé-
mostase est parfaite, pour mettre en place un drainage
aspiratif type drain de Redon-Jost qui a en outre l'avan-
tage de drainer une éventuelle fistule pancréatique
(figure 2.62).
Figure 2.59.
Splénectomie en urgence : ligature des vaisseaux courts de la rate.

Figure 2.61.
Figure 2.60. Splénectomie en urgence : ligature et clampage du pédicule
Splénectomie en urgence : accès direct du pédicule splénique. splénique. Artère et veine sont liées par des ligatures appuyées
Après section des vaisseaux courts, l'arrière-cavité des épiploons avec un fil serti non résorbable de type Prolène® 3/0, ensemble ou
est totalement ouverte. La queue du pancréas est bien visible. séparément, et en plusieurs prises si le pédicule est étalé.
39
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 2.63.
Exposition chirurgicale large par laparotomie médiane
permettant de visualiser correctement un hématome sous-
capsulaire du foie.

[TDM]). En cas de rupture de la capsule de Glisson, l'inter-


vention au niveau hépatique s'impose. Après évacuation de
l'hématome, mise en place d'un drainage, il est préférable
d'obtenir l'hémostase par des moyens aussi conservateurs
que possible, en pratiquant notamment un tamponne-
ment par packing temporaire, si besoin complété par l'ap-
Figure 2.62. position de colle biologique ou de compresse de collagène.
Splénectomie en urgence : comblement de la loge splénique par On retiendra que l'hépatectomie partielle aggrave le
le grand épiploon et drainage aspiratif. pronostic.
La patiente est ensuite transférée en hépatologie
Hématome sous-capsulaire du foie médico-chirurgicale. Ultérieurement, dès que les conditions
cliniques le permettent, l'hémostase peut être obtenue par
L'hématome sous-capsulaire du foie gravidique (HSCF) embolisation des artères responsables via une angiographie
est une complication rare et gravissime de la prééclamp- hépatique.
sie, donc survenant plutôt à la fin du 3e trimestre de la Dans les cas gravissimes avec insuffisance hépatique
grossesse, voire dans le post-partum immédiat. Généra- majeure, la transplantation hépatique constitue l'ultime
lement, l'hématome représente la complication ultime solution thérapeutique [17].
d'un hemolysis, elevated liver enzyme levels and low plate-
let (HELLP) syndrome. Il intéresse le plus souvent le lobe
droit (75 %).
La fréquence globale de l'HSCF se situe entre 1/45 000 Références
et 1/225 000 accouchements. Lorsque le diagnostic d'HSCF [1] ACOG Committee on Obstetric Practice. ACOG Committee
est posé en ante-partum, l'extraction fœtale par césarienne Opinion No. 474: nonobstetric surgery during pregnancy. Obstet
est recommandée. Dans ce cas, il est préférable de pratiquer Gynecol 2011;117:420–1. 474.
une laparotomie médiane afin de pouvoir procéder à une [2] Bonnet MP. Sedation and anaesthesia for non-obstetric surgery.
Anaesth Crit Care Pain Med 2016;35:S35–41.
exploration hépatique adéquate (figure 2.63). [3] Liu YX, Zhang Y, Huang JF, Wang L. Meta-analysis comparing the
La conduite à tenir devant un HSCF dépend de l'inté- safety of laparoscopic and open surgical approaches for suspected
grité ou non de la capsule de Glisson. En cas d'intégrité de adnexal mass during the second trimester. Int J Gynaecol Obstet
la capsule, l'abstention chirurgicale au niveau hépatique 2017;136:272–9.
est la règle avec comme objectif la stabilisation de la pres- [4] Cohen SB, Watad H, Shapira M, Goldenberg M, Mashiach R. Urgent
Laparoscopic Surgeries during the Third Trimester of Pregnancy:
sion artérielle pour éviter les pics tensionnels pouvant être A Case Series. J Minim Invasive Gynecol 2019 ;S1553–4650.
responsables de rupture secondaire et une surveillance cli- [5] Iwamura S, Hashida H, Yoh T, Kitano S, Mizumoto M, Kitamura K,
nique et radiologique (échographie et tomodensitométrie et al. Laparoscopic appendectomy during the third trimester:

40
Dr A.Amine Recherche
2. Particularités bibliographique
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de la chirurgie chez la femme enceinte

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41
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Chapitre 3
Épisiotomie
P. Deruelle, A. Leroy, V. Leroy

PLAN DU C HAPITRE
Rappel sur l'anatomie du périnée 44
Technique de l'épisiotomie 44

Chirurgie en obstétrique
© 2020, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Points forts du chapitre ­ ajorité des cas non suturée pour limiter les risques infec-
m
La pratique de l'épisiotomie a beaucoup régressé depuis tieux, et faciliter les accouchements ultérieurs.
15 ans. En France, en 2016, 34,9 % des primipares et 9,8 % des
Il s'agit d'un acte chirurgical à réaliser dans des multipares ont eu une épisiotomie. Ce chiffre est en nette
conditions strictes d'asepsie. diminution par rapport à 1998 (71,3 % des primipares et
Ce geste douloureux requiert une analgésie assurée par 36,2 % des multipares) et par rapport à 2010 (44,8 % des
l'anesthésie péridurale le cas échéant ou par anesthésie primipares et 14,4 % des multipares) grâce aux recomman-
locale. dations du CNGOF parues en 2005 qui visaient à en limiter
La variante médio-latérale est la plus fréquemment la pratique systématique, notamment chez la primipare. En
réalisée en France. réalité, les données publiées montrent clairement que l'épi-
L'opérateur est généralement installé à gauche ou du siotomie est un geste qui ne prévient pas les lésions obsté-
côté où il est le plus à l'aise. tricales du sphincter anal et dont les indications doivent
Il est mieux de la réaliser à l'acmé d'une contraction et
rester très limitées.
d'un effort expulsif.
Les complications de l'épisiotomie sont l'hémorragie Principes techniques
(saignements à surveiller), les infections secondaires et
le défaut de cicatrisation. Matériel et réalisation
Deux techniques de suture existent : classique en trois
L'épisiotomie est un geste chirurgical, elle doit être réali-
plans et « un fil/un nœud » ; chacune impose à son issue
un toucher vaginal pour ne pas laisser de compresses
sée dans un contexte le plus aseptique possible. Pour cela,
intravaginales. l'opérateur doit porter un masque et des gants stériles après
avoir effectué un lavage chirurgical des mains. Une toilette
périnéale avec un antiseptique doit être réalisée avant le
Rappel sur l'anatomie du périnée début des efforts expulsifs. Le rasage ou la tonte du périnée
ne sont pas nécessaires.
Le périnée est divisé en deux parties : en avant le périnée
La réalisation de l'épisiotomie, tout comme sa réfec-
urogénital (traversé par l'urètre et le vagin) et en arrière le
tion, nécessite la préparation du matériel chirurgical sur
périnée anal. Le périnée urogénital est composé de plusieurs
une table recouverte d'un champ stérile. On retrouve une
parties. Tout d'abord, l'espace superficiel, qui encadre l'orifice
paire de ciseaux droits ou angulés, des compresses, et le
vulvaire, contient le clitoris, les glandes vestibulaires majeures,
nécessaire pour clamper le cordon (pince Kocher, pince à
les muscles ischiocaverneux, bulbospongieux et transverse
clamp). Avant de commencer l'accouchement, il faut sys-
superficiel. C'est la partie la plus exposée aux déchirures obs-
tématiquement vérifier la présence des ciseaux droits sté-
tétricales. Ensuite, la membrane périnéale qui correspond
riles sur la table qui sont indispensables pour la réalisation
à une épaisse lame fixatrice des corps érectiles est fixée
d'une épisiotomie. Les ciseaux doivent être testés (sur une
­latéralement sur la face interne des branches ischiopubiennes
compresse par exemple) pour vérifier qu'ils coupent suffi-
et adhère au centre tendineux du périnée. Elle forme en avant
samment bien pour pouvoir sectionner en un seul coup les
le ligament transverse du périnée. Enfin, l'espace profond
tissus périnéaux.
du périnée contient le diaphragme urogénital composé du
Il existe deux types d'épisiotomies : la médiane, notam-
muscle sphincter de l'urètre et du muscle transverse profond.
ment réalisée aux États-Unis, et la médiolatérale réalisée
dans la majorité des cas en France et recommandée par le
CNGOF. L'épisiotomie médiane est responsable dans 20 %
Technique de l'épisiotomie des cas d'atteinte du sphincter anal, suite à une extension
vers l'anus par section du raphé médian, créant alors une
Objectifs de l'épisiotomie zone de faiblesse ainsi qu'une augmentation du taux de
fistules vésico-vaginales à distance de l'accouchement.
et épidémiologie L'épisiotomie médiane semble être plus douloureuse en
L'épisiotomie a probablement été réalisée pour la première postopératoire et souvent hémorragique.
fois par Felding Ould en 1742. Elle avait pour but de faci- La réalisation d'une épisiotomie est douloureuse, c'est
liter les expulsions difficiles. Initialement, elle était dans la pourquoi il est nécessaire d'effectuer une analgésie. Actuel-

44
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED
3. Épisiotomie

lement, la plupart des patientes en cours de travail ont une Technique


analgésie péridurale, en l'absence de celle-ci, on peut réaliser
Il en existe deux types.
une anesthésie des nerfs pudendaux ou locale avec de la
lidocaïne non adrénalinée.
Technique dite « classique » en trois plans
L'épisiotomie médiolatérale doit partir de la fourchette
(figures 3.1, 3.2)
vulvaire et se diriger à 45° au moins vers la région ischia-
tique environ sur la distance jugée nécessaire de 2 cm Elle se réalise donc en trois plans, tout d'abord par un
jusqu'à 6 cm environ. L'incision sectionne la peau, le muscle surjet vaginal, avec un fil serti à résorption rapide 2.0
puborectal et la muqueuse vaginale. Il ne faut pas section- ou 0 (décimale 3,5 ou 2), aiguille 36 mm, débutant au
ner les glandes de Bartholin, ce qui implique d'être parfaite- sommet de l'incision vaginale et se terminant au bord
ment positionné à la fourchette vulvaire et non 1 ou 2 cm de l'incision hyménéale. L'utilisation d'un fil résor-
au-dessus, ce qui pourrait amener à sectionner le canal des bable ainsi que la réalisation d'un surjet permettent
glandes. Elle se réalise en principe à droite pour les droitiers de diminuer les douleurs en post-partum. Ensuite,
et à gauche pour les gauchers. En réalité, elle est plus cou- le plan musculaire est fermé par des points séparés
ramment effectuée à gauche et surtout du côté où l'opéra- simples ou en X, par du fil serti à résorption rapide 0
teur est le plus à l'aise. ou 1 (décimale 3,5 ou 4) aiguille 36 mm, en vérifiant par
Il vaut mieux la réaliser à l'acmé d'une contraction et un toucher rectal en fin de suture du plan musculaire
d'un effort expulsif, lorsque la tête fœtale se trouve au petit l'absence de point transfixiant, auquel cas, il faudrait
couronnement. À ce stade, le périnée postérieur s'allonge. enlever ces points qui peuvent être source d'infections
De plus, le faisceau puborectal du muscle releveur de l'anus secondaires (abcès ou cellulites pelviens) et de défaut
est mis en tension, ce qui l'amincit et l'intègre dans le plan de cicatrisation. Enfin, un surjet intradermique (ou des
superficiel du périnée. En revanche, lorsque l'épisiotomie points cutanés séparés) est réalisé à l'aide d'un fil serti
est réalisée précocement, sur un périnée moins amplié ou à résorption rapide 2.0. Le surjet intradermique permet
en cas de forceps, elle est alors plus large et expose à un de réduire les douleurs en post-partum en diminuant
risque d'hémorragie plus important. Il convient alors d'avoir la tension.
une direction des ciseaux plus horizontale.
Technique « un fil/un nœud »
Matériel et installation Elle a été promue dans les années 1990 par le Pr Dallay
La suture de l'épisiotomie est une intervention chirurgicale, et le Dr Théry (CHU de Bordeaux). Elle consiste à effec-
il faut donc des conditions de réalisations strictes, notam- tuer un surjet, avec un seul fil à résorption rapide 2.0 ou
ment des bonnes conditions d'asepsie avec une désinfec- 0.0 (décimale 3,5 ou 3), débutant au sommet de l'inci-
tion vulvo-périnéale. Tout d'abord, la patiente doit être sion vaginale jusqu'en arrière de la cicatrice hyménéale.
installée correctement et sous analgésie suffisante. Ensuite, Ce surjet se poursuit sur le plan musculaire jusqu'au
l'opérateur doit porter un masque, un calot et des gants point d'angle cutané puis du plan sous-cutané en remon-
stériles après une désinfection chirurgicale des mains. Il doit tant de l'angle de la peau jusqu'à la cicatrice hyménéale.
être installé confortablement et avec un éclairage adapté. Il est parfois nécessaire de réaliser la suture du plan
Enfin, il doit vérifier la présence, sur sa table recouverte d'un musculaire par un surjet descendant puis montant afin
champ stérile, d'un porte-aiguille, d'une pince à disséquer à d'effacer l'espace mort sous-cutané et d'absorber les
griffes, d'une paire de ciseaux à fil courbes, de compresses tensions pouvant s'exercer sur le plan cutané. Le plan
stériles, d'un tampon vaginal (disposé dans le fond du vagin sous-cutané se termine en avant de l'hymen et l'aiguille
pour éviter d'être gêné par les saignements endo-utérins) et ressort du plan muqueux. Pour finir le surjet intrader-
d'un doigtier stérile permettant de réaliser le toucher rectal. mique au niveau du point d'angle de la peau, il faut
L'épisiotomie peut s'associer à une déchirure controlaté- piquer en sous-cutané dans la fesse pour faire ressortir
rale ou homolatérale qui peut être étendue jusqu'au cul-de- l'aiguille à 1–2 cm de l'angle puis couper le fil au ras de
sac vaginal. Il est nécessaire d'avoir une bonne exposition. la peau qui sera alors enfoui (vidéo e3.1).
Un aide avec des valves peut permettre de faciliter le geste. À la fin de la suture, quelle que soit la technique réalisée,
Par ailleurs, durant sa suture, l'opérateur ne doit surtout pas un toucher vaginal doit impérativement être réalisé pour
oublier d'évaluer et de surveiller la quantité des saignements. ne pas laisser de compresses intravaginales.

45
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Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

A B

C D

E F

G
Figure 3.1.
Suture d'une épisiotomie de grande taille (technique en trois plans).
A. Différents plans de l'épisiotomie : plan vaginal, plan musculaire et plan cutané écartés par la main de l'opérateur. B. La suture du plan
vaginal est débutée au niveau de l'angle situé entre les deux doigts de l'opérateur. C. Poursuite du surjet vaginal. D. Fin du surjet vaginal
avec affrontement des brides hyménéales. E, F. Suture du plan musculaire par des points séparés avec du fil à résorption lente permettant le
rapprochement des muscles du périnée. Le point d'entrée se fait à la jonction entre le muscle et le tissu sous-cutané et doit prendre le muscle
dans toute son épaisseur. G. Suture du plan cutané par des points séparés simples avec du fil à résorption rapide.

46
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3. Épisiotomie

B C

D E
Figure 3.2.
Suture d'une épisiotomie de petite taille (technique en trois plans).
A. Différents plans de l'épisiotomie avant suture. Mise en place d'une mèche intravaginale pour éviter la gêne liée au saignement d'origine
intra-utérine. B. Suture de la muqueuse vaginale par un sujet avec un fil à résorption rapide. C. Fin de la suture vaginale. Le nœud se trouve à
la jonction muqueuse vaginale – peau de la vulve. D. Suture musculaire. La réalisation des points musculaires permet un rapprochement des
berges cutanées. E. Suture cutanée par des points séparés.

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Pour en savoir plus


Recommandations du CNGOF : indications
de l'épisiotomie Vardon D, Reinbold D, Dreyfus M. Épisiotomie et déchirures obs-
L'indication d'une épisiotomie au cours d'un accouchement tétricales récentes. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris) – Techniques
est fonction de facteurs de risque individuels et des condi- chirurgicales – Gynécologie 2013;41–897.
tions obstétricales (accord professionnel). Il est recom- Verspyck E, Sentilhes L, Roman H, Sergent F, Marpeau L. Tech-
mandé d'expliquer l'indication et de recueillir l'accord de niques chirurgicales de l'épisiotomie. J Gynecol Obstet Biol Reprod
la femme avant de pratiquer une épisiotomie. Il n'y pas de 2006;35:1S40–51.
bénéfice reconnu à la pratique de l'épisiotomie dans l'ac- Riethmuller D, Ramanah R, Mottet N. Quelles interventions au
couchement normal (NP1) ; comparé à une pratique libé- cours du dégagement diminuent le risque de lésions périnéales ?
RPC Prévention et protection périnéale en obstétrique CNGOF.
rale de l'épisiotomie, le nombre de périnées intacts est plus
Gynecol Obstet Fertil Senol 2018;46(12):937–47.
grand en cas de pratique restrictive sans augmentation du
nombre de lésions obstétricales du sphincter anal (LOSA).
Au cours d'un accouchement normal, la pratique d'une
épisiotomie n'est pas recommandée pour réduire le ``Compléments en ligne
risque de LOSA (grade A).
Il n'existe pas de preuve pour indiquer une épisiotomie en Des compléments numériques sont associés à ce chapitre
cas de présentation du siège, de grossesse gémellaire, ou (ils sont indiqués dans le texte par un picto ). Pour voir
de variété postérieure afin de prévenir une LOSA (NP3). ces compléments, connectez-vous sur http://www.em-
La pratique libérale de l'épisiotomie n'est pas recom-
consulte.com/e-complement/476722. et suivez les instructions.
mandée dans ces cas particuliers (grade C).
La pratique de l'épisiotomie au cours d'un accouchement
instrumental semble associée à une réduction du risque Vidéo e3.1.
de LOSA (NP3). En cas d'accouchement instrumental, Technique «un fil/un nœud».
une épisiotomie peut être indiquée pour éviter une
LOSA (grade C). La formation à la protection périnéale
des professionnels de la naissance réduit le risque de
LOSA au cours d'un accouchement instrumental (NP2).
Elle est donc recommandée (grade B).

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Chapitre 4
Déchirures

PLAN DU C HAPITRE
Déchirures du col et du périnée 50
Déchirures cervicales 53

Chirurgie en obstétrique
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Points forts du chapitre Réparation


Les déchirures obstétricales sont fréquentes au cours des Stade II (figure 4.1)
accouchements.
Les lésions obstétricales du sphincter anal sont sous- La muqueuse vaginale ainsi que les muscles releveurs de
diagnostiquées (un tiers des cas). l'anus sont atteints. Ce stade correspond à celui d'une
La classification distinguant quatre stades de déchirures épisiotomie (cf. chapitre 3). La suture débute donc
doit être utilisée. comme une épisiotomie ; en commençant par un sur-
Les stades III et IV nécessitent une antibioprophylaxie jet vaginal partant de l'angle vaginal jusqu'aux reliefs
systématique. hyménéaux par un fil à résorption rapide. Les muscles
Une déchirure cervicale doit être recherchée en cas
périnéaux sont ensuite suturés par des points en X. Enfin,
d'hémorragie de la délivrance ; elle peut résulter d'un la peau est suturée par des points séparés simples avec
geste délibéré de section en cas d'accouchement très un fil à résorption rapide. La suture peut aussi s'effectuer
prématuré par le siège. par la technique « un fil/un nœud », qui permet de dimi-
nuer les douleurs périnéales en post-partum. Pour cela, il
faut que la déchirure ne soit pas trop importante ni trop
Déchirures du col et du périnée asymétrique.
A. Leroy, V. Leroy, P. Deruelle
Stades III et IV
Déchirures obstétricales Avant de commencer la suture, comme pour les épisio-
tomies, la patiente doit être correctement installée et
Diagnostic les règles d'asepsie respectées. Il est important de dis-
poser de petites pinces à préhension (pinces d'Alice ou
Les déchirures obstétricales concernent 20 à 60 % des
de Kelly) pour le sphincter, de valves vaginales et d'anti-
accouchements. Dans 0,3 à 0,4 % des cas il existe une
septiques dans une cupule. Il ne faut surtout pas hésiter
atteinte du sphincter ou de la muqueuse rectale. En cas de
à demander à être exposé par un ou plusieurs aides
déchirure périnéale, il faut toujours et plus particulièrement
pour réaliser la suture dans d'excellentes conditions
rechercher des lésions sphinctériennes car elles ne sont pas
d'exposition. Tout d'abord, il faut repérer à l'aide d'un
diagnostiquées dans 33 % des cas. La réalisation systéma-
toucher rectal, avec palpation bidigitale et bimanuelle,
tique d'un toucher rectal permet d'étudier le sphincter en
le sphincter interne de couleur blanche, qui est entouré
réalisant tout d'abord une palpation bidigitale du sphincter
par le sphincter externe plus rose ou rouge. Ensuite, il
externe entre le pouce et l'index et ensuite une évaluation
faut, à l'aide du toucher rectal, vérifier les limites supé-
des sphincters externe et interne en exposant ceux-ci en
rieures de l'atteinte anale ; une atteinte de la muqueuse
intravaginal à l'aide d'une compresse tout en maintenant
rectale est en effet possible à la partie haute du vagin, il
un doigt en intrarectal permettant de relever le sphincter.
convient donc d'examiner toute la longueur de la
déchirure (vidéo e4.1)
Classifications Nous décrivons la suture d'une déchirure stade IV, la
La classification qui distingue quatre stades est celle qu'il est suture d'une déchirure de stade III étant identique sans la
recommandé d'utiliser (tableau 4.1) (figures 4.1 à 4.4). suture de la paroi rectale.

Tableau 4.1. Classification des déchirures périnéales.


Stade Type d'atteinte
Déchirure stade I Atteinte de la muqueuse vaginale
Déchirure stade II Atteinte des muscles périnéaux superficiels
(figure 4.1)
Déchirure stade III Atteinte du sphincter anal
(figure 4.2) < 50 % du sphincter externe
IIIa > 50 % du sphincter externe Lésions
IIIb Atteinte du sphincter anal interne obstétricales du
IIIC (figure 4.3) sphincter anal
(LOSA)
Déchirure stade IV Atteinte de l'épithélium anal
(figure 4.4)

50
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4. Déchirures

B C

D E
Figure 4.1.
Suture d'une déchirure simple (grade II).
A. Suture de la muqueuse vaginale par surjet. La déchirure s'est faite dans le plan médian entre la fourchette vulvaire et l'anus sans atteindre ce
dernier.
B. Suture musculaire par des points séparés.
C. Réalisation d'un point en X qui permet de prendre le muscle dans toute son épaisseur.
D, E. Fermeture du plan cutané par réalisation d'un surjet intradermique qui permet un affrontement des berges avec une cicatrice moins visible.

51
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Figure 4.2.
Suture bout à bout.

Figure 4.4.
Déchirure périnéale stade IV.

poursuit par celle du sphincter interne à l'aide d'un surjet


avec un fil résorbable 2.0 ou 3.0 (décimale 3 ou 2). Puis le
sphincter externe est suturé par un fil résorbable 0 (déci-
male 3,5) ; une pince de Kelly ou d'Alice est mise sur les deux
extrémités sectionnées du sphincter (celles-ci sont recher-
chées latéralement de part et d'autre le long du canal anal)
Figure 4.3. puis on réalise soit un point en U mis bout à bout – tech-
Suture en paletot. nique termino-terminale (figure 4.2), soit une technique
en Paletot pour laquelle les deux berges du sphincter sont
Une fois les limites repérées et les structures anato- suturées l'une au-dessus de l'autre (figure 4.3) par un fil à
miques individualisées, le sphincter est saisi à l'aide des résorption lente. Il n'existe pas de supériorité d'une tech-
pinces à préhension. On réalise la suture de la paroi rec- nique l'une par rapport à l'autre mais les recommandations
tale par un surjet anal extra-muqueux (prenant la sous-­ pour la pratique clinique du CNGOF conseillent les tech-
musculeuse et la musculeuse) avec le nœud à l'extérieur, niques termino-terminales en cas de déchirure partielle
en commençant par la partie supérieure de la déchirure du sphincter anal externe. Pour les déchirures complètes,
vers la partie inférieure du canal anal avec un fil résor- les deux techniques sont équivalentes sur les symptômes
bable 3.0 (décimale 2). à 36 mois. Les points en X doivent être évités car ils sont
La suture de la paroi rectale sera toujours réalisée par un ischémiants.
surjet pour diminuer la tension et donc les risques d'isché- Enfin, la réparation se poursuit comme pour le stade II,
mie. Une fois la muqueuse anale suturée, la réparation se c'est-à-dire comme pour une épisiotomie (cf. chapitre 3).

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4. Déchirures

Un toucher vaginal est fait en fin de geste pour s'assurer Déchirures cervicales
qu'il n'existe pas de point transfixiant la muqueuse.
En cas de stade III ou IV, il faut instaurer systéma- P. Deruelle
tiquement pendant la suture une dose intraveineuse
d'antibiotiques en prophylaxie, actifs sur les germes
digestifs. Diagnostic
En cas d'hémorragie de la délivrance, une déchirure cervi-
Soins en post-partum cale doit être recherchée.
Quel que soit le stade, des soins locaux au savon doux L'exposition est capitale avec un aide et deux valves
puis un séchage avec une serviette une fois par jour sont vaginales, l'une placée en avant et décalée latéralement en
suffisants. Ils sont réalisés par la patiente elle-même ou fonction de la partie du col examinée et l'autre postérieure.
le personnel de suite de naissance. Il n'est pas nécessaire Il est nécessaire de disposer d'instruments suffisamment
d'utiliser des antiseptiques ou de sécher la cicatrice avec un longs pour saisir le col. Nous préférons des pinces triangu-
sèche-cheveux. laires moins traumatiques (pinces d'Alice) que des pinces
En cas de douleur, les AINS sont les antalgiques à de Pozzi ou de Museux.
utiliser en première intention. En cas d'inefficacité, les
opioïdes peuvent être proposés. Cependant, leur ten-
dance à la constipation doit les faire éviter en cas de
Réfection
déchirure III ou IV. Le plus souvent, la déchirure se trouve sur le bord latéral du col
Concernant le transit, les laxatifs osmotiques et des et mesure de 2 à 3 cm. Elle sera suturée par un surjet à l'aide d'un
règles hygiéno-diététiques sont souvent instaurés sans fil résorbable 0 (décimale 3,5) en commençant par le haut de la
étude réalisée sur l'efficacité de ces mesures. En revanche, déchirure. De petites déchirures de l'ordre du centimètre sont
l'allaitement favorise la constipation, une bonne hydrata- physiologiques et ne nécessitent généralement pas de suture.
tion doit donc être maintenue. Les mucilages ne doivent Exceptionnellement, la déchirure peut être plus impor-
pas être prescrits de façon systématique. tante, atteignant l'isthme utérin, ce qui peut nécessiter une
En cas de stade III–IV, une antibioprophylaxie efficace conversion par laparotomie quand la suture complète par
sur les germes d'origine digestive est systématiquement voie vaginale n'est pas possible.
mise en place pendant cinq à sept jours, sans réelle preuve
scientifique de l'intérêt de prescrire une antibiothérapie
prolongée. Section volontaire du col
En cas d'accouchement très prématuré (en général avant
28 SA) par le siège, le col peut se rétracter autour du cou du
Déchirures vulvaires nouveau-né. Il est alors nécessaire de le sectionner. C'est pour
Lésions des petites lèvres cette raison qu'il est toujours indispensable d'avoir à disposi-
tion des valves prêtes ainsi que des ciseaux dans cette situation.
Il peut s'agir d'une désinsertion de la petite lèvre ou d'une Les deux valves vaginales sont placées à 2 et 10 h 00 à la
déchirure plus ou moins grande. Les lésions peuvent être partie antérieure du vagin, le col est alors sectionné longi-
suturées à l'aide d'un fil à résorption rapide 3.0 (décimale 2). tudinalement sur environ 3 cm, à sa partie médiane, per-
Lorsqu'elles sont de petite taille et sans saignement, elles mettant de lever la tension cervicale autour du cou et de
peuvent être laissées en l'état. terminer l'accouchement. Le col sera ensuite suturé à l'aide
d'un fil résorbable 0 ou 2.0 (décimale 3,5 ou 3).
Déchirures antérieures
Elles peuvent être clitoridiennes ou périurétrales. Elles
seront suturées par un surjet à l'aide de fil à résorption Pour en savoir plus
rapide 2.0 ou 3.0 (décimale 3 ou 2). Il peut être nécessaire
Simon E, Laffon M. Soins maternels après accouchement voie basse
de mettre temporairement une sonde vésicale pour réaliser et prise en charge des complications du post-partum immédiat:
la suture lorsque la déchirure est proche du méat urétral et recommandations pour la pratique clinique. J Gynecol Obstet Biol
afin d'éviter une atteinte de ce dernier. Reprod (Paris) 2015;44:1101–10.

53
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``Compléments en ligne
Des compléments numériques sont associés à ce chapitre (ils
sont indiqués dans le texte par un picto ). Pour voir ces
compléments, connectez-vous sur http://www.em-consulte.
com/e-complement/476722. et suivez les instructions.

Vidéo e4.1.
Suture d'une déchirure périnéale de stade IV.

54
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Chapitre 5
Réparations des complications
obstétricales vulvo-périnéales
C. Louis-Sylvestre, A. Defline

PLAN DU C HAPITRE
Introduction 55
Grands principes de la chirurgie
vulvo-périnéale 55
Rappels anatomiques 55
Lésions antérieures 55
Périnée postérieur 55

Chirurgie en obstétrique
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Points forts du chapitre Grands principes de la chirurgie


L'accouchement peut provoquer des lésions vulvo-
périnéales immédiates ou à distance. Un certain
vulvo-périnéale
nombre de mesures non chirurgicales (massage,
kinésithérapie, etc.) peuvent être mises en place

La zone vulvo-périnéale est une zone humide, à flore
en première intention. Lorsque le résultat n'est pas riche et potentiellement pathogène (flores anale et vagi-
suffisant et lorsque les lésions retentissent sur la nale), c'est également une zone soumise à contraintes (pres-
qualité de vie, une prise en charge chirurgicale doit être sion et traction), et ces deux caractéristiques expliquent les
envisagée. difficultés de cicatrisation. En conséquence :
▶ La zone vulvo-périnéale est une zone dont la – des soins locaux consciencieux biquotidiens doivent
cicatrisation est parfois difficile. Les indications être recommandés, réalisés par la patiente elle-même ou
chirurgicales doivent donc être bien pesées et les par une infirmière selon la localisation. Ils comportent :
patientes informées des bénéfices de la chirurgie mais détersion douce (éventuellement sous la douche) avec
aussi de la possibilité d'une évolution défavorable. le savon habituel, rinçage, séchage par tapotement avec
▶ Pour faciliter les phénomènes de cicatrisation, il faut
une serviette propre (qui n'a pas besoin d'être stérile
opérer des tissus les moins œdématiés et les moins mais ne doit pas être partagée avec d'autres membres de
infectés possibles, quitte à repousser la prise en charge. la famille), application d'un antiseptique aqueux (polyvi-
▶ Des soins locaux prolongés et soigneux favorisent
done iodée ou chlorhexidine aqueuse) puis d'une crème
l'obtention de bons résultats, une prise en charge cicatrisante et antiseptique dont l'application peut être
supplémentaire par massage des cicatrices peut être répétée plusieurs fois dans la journée ;
nécessaire.
– des massages de cicatrice peuvent être nécessaires
▶ La douleur et le retentissement psychologique/
une fois la cicatrisation obtenue pour retrouver une
sexuel de ces complications doivent faire l'objet d'une
bonne souplesse des tissus ;
prévention, et leur prise en charge doit être instituée
– la patiente doit être prévenue de la possibilité de
rapidement s'ils surviennent.
défaut de cicatrisation.
Introduction ●
Cette zone est à haut potentiel de développement de
douleurs chroniques. On doit donc apporter un soin tout
Lors de l'accouchement, l'élasticité vaginale protège ce tissu particulier à la prise en charge des douleurs postopératoires.
du traumatisme lié à la distension et aux frottements par le Une analgésie multimodale est recommandée associant
mobile fœtal. par exemple un bloc pudendal peropératoire ou infiltration
Les tissus vulvaires antérieurs, peu élastiques, sont locale à la ropivacaïne, antalgiques type paracétamol et AINS.
particulièrement fragilisés par l'œdème et souvent écra- ●
Cette zone est à fort impact émotionnel, et derrière une
sés entre la tête fœtale et l'os pubien. Urètre et sphincter douleur devenue chronique ou derrière un aspect esthé-
sont soumis aux pressions mais partiellement protégés tique détérioré peuvent apparaître des troubles de la libido,
par l'ogive pubienne. Les lésions antérieures sont donc une détérioration de l'image de soi, voire une dépression
fréquentes mais principalement à type de déchirures réactionnelle. Ces éléments, s'ils apparaissent, doivent faire
superficielles. proposer une prise en charge psychologique ou sexologique.
Le périnée est la seule zone susceptible de se distendre
lors de l'accouchement, c'est donc lui qui va subir les plus
grandes contraintes per partum et être le siège de la majo- Rappels anatomiques
rité des lésions.
Des lésions vulvo-périnéales secondaires à l'ischémie Le périnée est constitué d'aponévroses et de muscles orga-
par compression peuvent apparaître à distance, certaines nisés en quatre plans :
lésions peuvent ne pas être diagnostiquées sur le moment ●
un plan cutané (figure 5.1) avec les organes génitaux externes :
et, enfin, des lésions reconnues immédiatement à l'accou- clitoris avec son capuchon, petites lèvres dont la face interne
chement peuvent être difficiles à réparer en raison de délimite avec la fourchette vulvaire l'introït, grandes lèvres ;
l'existence d'œdème ou d'hématomes des tissus. Tout ceci ●
un plan superficiel (figure 5.2), qui comprend quatre
explique qu'il puisse y avoir apparition ou persistance de muscles (le muscle ischio-caverneux, le muscle bulbo-
symptômes à long terme et nécessité de prise en charge spongieux, le muscle transverse superficiel, le muscle
secondaire, voire de reprise chirurgicale. constricteur de la vulve) et l'aponévrose périnéale superfi-
56
Dr A.Amine 5.Recherche
Réparations desbibliographique SCI-MED
complications obstétricales vulvo-périnéales

Figure 5.1.
Plan cutané du périnée.

Figure 5.2.
Plan musculaire superficiel du périnée.
57
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

cielle (loge des organes érectiles) dans sa partie antérieure pression prolongée peut se produire au détroit moyen ou
et le sphincter externe de l'anus dans la partie postérieure ; au détroit inférieur. Elle est alors plus grave car il y a une

un plan moyen (figure 5.3), qui n'existe que dans la partie atteinte de la région cervico-urétrale, ce qui peut compro-
antérieure du périnée. Il est compris entre les fascias supérieur mettre la continence. Plus rarement, les lésions peuvent
et inférieur de l'aponévrose moyenne. Cet espace moyen être la conséquence de manœuvres d'extraction fœtale.
est constitué du muscle transverse profond et du sphincter L'évaluation clinique précise de la fistule nécessite sou-
externe de l'urètre qui forment le diaphragme uro-génital ; vent un examen sous anesthésie générale. Elle doit détermi-

un plan profond (figure 5.4) appelé diaphragme pelvien, ner les différents caractères de la fistule (siège, en particulier
qui est formé de deux muscles pairs qui délimitent la par- localisation par rapport aux méats urétéraux, diamètre, état
tie basse de l'excavation pelvienne : le muscle élévateur de du tissu avoisinant).
l'anus qui est constitué de plusieurs faisceaux, et le muscle Pour aboutir à une amélioration de la qualité de vie, le traite­
coccygien. Le diaphragme pelvien sépare la cavité pelvienne ment de la fistule vésico-vaginale doit procurer la restitution
du périnée. intégrale de l'étanchéité, mais aussi de la continence. Il existe
de nombreuses techniques de réparation en rapport avec une
très grande hétérogénéité de la taille et de la localisation des
Lésions antérieures fistules. Nous avons choisi de décrire l'opération de Latzko qui
est l'intervention la plus fréquemment pratiquée [1, 2] :
la patiente est placée en position gynécologique avec
Fistules vésico-vaginales

mise en place d'une sonde de Foley dans l'orifice fistuleux


Les fistules vésico-vaginales postobstétricales restent encore permettant d'exposer la fistule (figure 5.5) ;
fréquentes dans les pays en voie de développement, elles ●
hydro-dissection par injection de sérum physiologique
sont rares dans les pays développés où la durée du travail au pourtour de la fistule entre tissu vésical et tissu vaginal ;
est limitée. ●
résection en quatre quadrants d'un cercle d'environ
Dans la majorité des cas, elles sont la conséquence d'une 20 mm de diamètre de tissu vaginal périfistuleux, procu-
dystocie avec compression prolongée du bas appareil uri- rant un avivement des berges vaginales d'une part, et une
naire par la tête du fœtus, laquelle entraîne une ischémie bonne exposition de la partie vésicale de la fistule d'autre
des tissus qui vont secondairement se nécroser. Cette com- part (figures 5.6, 5.7) ;

Figure 5.3.
Plan musculaire moyen du périnée.
58
Dr A.Amine 5.Recherche
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complications obstétricales vulvo-périnéales


fermeture de l'orifice fistuleux vésical après avivement a ●
suture des berges vaginales par points séparés de fil
minima des berges (figure 5.8). Ceci peut se faire par une bourse résorbable ;
ou par surjet de fil résorbable selon la taille du défect. Cette ●
en cas de tissus très dégradés, il est possible d'interposer
suture est réalisée en deux plans dans la technique originale ; entre les deux sutures un lambeau musculo-graisseux de

Figure 5.4.
Plan musculaire profond du périnée.

Figure 5.5.
Exposition du trajet fistuleux par mise en place d'une sonde Figure 5.6.
de Foley. Incision périorificielle en quadrants.
Source : Cortese A, Colau A, Fistules vésicovaginales. Encyclopédie Médico-Chirurgicale - Source : Cortese A, Colau A, Fistules vésicovaginales. Encyclopédie Médico-Chirurgicale -
Techniques chirurgicales - Urologie (2004) [Article : 41-175] Techniques chirurgicales - Urologie (2004) [Article : 41-175]
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Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 5.7. Figure 5.8.


Désépidermisation périorificielle. Fermeture de l'orifice fistuleux vésical.
Source : Cortese A, Colau A, Fistules vésicovaginales. Encyclopédie Médico-Chirurgicale - Source : Cortese A, Colau A, Fistules vésicovaginales. Encyclopédie Médico-Chirurgicale -
Techniques chirurgicales - Urologie (2004) [Article : 41-175] Techniques chirurgicales - Urologie (2004) [Article : 41-175]

type Martius prélevé aux dépens de la grande lèvre [3, 4].


Le lambeau de Martius est un lambeau musculo-graisseux
de 8 à 12 cm, prélevé aux dépens de la grande lèvre. Il com-
porte le muscle bulbo-caverneux et le tissu graisseux qui
l'entoure. Les avantages de ce lambeau sont sa proximité
et sa faible rançon cicatricielle [4, 5].
Une incision verticale est réalisée sur la grande lèvre
droite, puis il est pratiqué une dissection du tissu adipeux
latéralement jusqu'au plan ostéo-aponévrotique profond,
puis enfin vers l'avant. (figure 5.9).
Le lambeau musculo-graisseux est ainsi pédiculé sur
son pédicule vasculaire honteux externe qui l'aborde
à son extrémité inférieure. Le lambeau prend ainsi la
forme d'un cylindre de 10 cm de long et de 3 cm de
diamètre.
On met ensuite en communication le décollement
inter-vésico-vaginal avec la zone de dissection du lambeau Figure 5.9.
(figure 5.10), puis ce dernier est tiré et positionné dans le Incision et pédiculisation du pannicule adipeux de la grande lèvre
droite (lambeau de Martius).
décollement inter-vésico-vaginal (figure 5.11). Source : Cortese A, Colau A, Fistules vésicovaginales. Encyclopédie Médico-Chirurgicale -
Le lambeau peut être fixé par un ou deux points Techniques chirurgicales - Urologie (2004) [Article : 41-175]

de fil résorbable dans l'angle opposé à son point de


pénétration. Déchirures vulvaires antérieures
Le vagin est alors refermé comme précédemment
décrit par-dessus le tissu adipeux puis il est posé une
En post-partum immédiat
sonde urinaire à demeure pendant deux semaines Ces déchirures surviennent lors de la déflexion de la tête
(figure 5.12). fœtale au grand couronnement : la partie antérieure de la
60
Dr A.Amine 5.Recherche
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complications obstétricales vulvo-périnéales

Figure 5.10. Figure 5.11.


Mise en communication entre l'espace de décollement vésico- Positionnement du lambeau dans l'espace de décollement
utérin et la zone de dissection du pannicule graisseux. vésico-utérin.
Source : Cortese A, Colau A, Fistules vésicovaginales. Encyclopédie Médico-Chirurgicale - Source : Cortese A, Colau A, Fistules vésicovaginales. Encyclopédie Médico-Chirurgicale -
Techniques chirurgicales - Urologie (2004) [Article : 41-175] Techniques chirurgicales - Urologie (2004) [Article : 41-175]

vulve et les petites lèvres se retrouvent écrasées entre la


symphyse pubienne et l'occiput du nouveau-né.
Il s'agit le plus souvent d'éraillures qui sont responsables
de brûlures mictionnelles si elles sont situées à proximité du
méat urétral. Dans ce cas, au décours de la délivrance, la réali-
sation d'un ou deux points de rapprochement permettra une
occlusion plus rapide de l'éraillure et apportera un confort à la
patiente. Si des points semblent inutiles, on conseillera l'appli-
cation d'un topique épais avant chaque miction, topique qui
fera écran au contact avec l'urine. Il n'est pas indispensable de
réaliser un soin vulvaire après chaque miction.
S'il existe une réelle déchirure des petites lèvres, de la
région clitoridienne ou de la zone inter-clitorido-méatique,
la réparation est faite après la délivrance. L'analgésie est
assurée par l'anesthésie péridurale lorsque celle-ci a été ini-
tiée pour le travail, ou par anesthésie locale à la lidocaïne
ou à la ropivacaïne. Figure 5.12.
Comme pour tout geste chirurgical, il est recommandé Fermeture vaginale.
de pratiquer une préparation du champ opératoire par une Source : Cortese A, Colau A, Fistules vésicovaginales. Encyclopédie Médico-Chirurgicale -
Techniques chirurgicales - Urologie (2004) [Article : 41-175]
nouvelle détersion et désinfection, et de réaliser un cham-
page stérile. L'opérateur sera habillé stérilement. Une anti-
bioprophylaxie n'est pas nécessaire. ment et l'étirement, il est plus judicieux de les réséquer et
En cas de déchirure jouxtant le méat urétral, une sonde de rapprocher des berges nettes.
urinaire sera posée pendant le temps de réparation. Elle Les sutures sont réalisées au fil à résorption rapide 3/0
pourra être retirée à la fin de la réparation si aucun point ne ou 4/0, par points séparés ou par surjet selon la taille de la
touche l'urètre ou le méat. déchirure ou sa localisation.
La réparation vise à restituer l'anatomie ad integrum. Elle En cas de désinsertion d'un fragment d'hymen, il faut le
est souvent difficile en raison de l'œdème ou de l'ecchy- réséquer et non chercher à le réappliquer. Ce type de suture
mose des tissus. Quand ils ont été déchiquetés par l'écrase- tient rarement et la patiente constate ultérieurement l'issue
61
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

mis en balance avec le risque réel (de l'ordre de 1 %) d'aboutir


à une cicatrice définitivement dyspareuniante. Enfin, l'objec-
tif chirurgical doit être réaliste, les tissus très fins des petites
lèvres, dont de surcroît la vascularisation a été perturbée,
rendent une réparation ad integrum aléatoire.
Si une chirurgie était néanmoins décidée, il est préférable
de ne la pratiquer que lorsque l'équilibre hormonal a été
parfaitement rétabli, soit après le retour de couches et au
moins trois mois après l'accouchement, de manière à mettre
de son côté toutes les chances de bonne cicatrisation.
La réfection chirurgicale secondaire peut s'effectuer de
deux manières différentes [6] :

un avivement des berges, suivi d'une suture en trois plans
à l'aide de fils résorbables de 4 ou 5/0, le risque de lâchage
de suture est réel ;
Figure 5.13. ●
en cas de tissus trop fins et/ou trop fragiles, on peut procé-
Hymen désinséré, un lambeau étiré par le passage de la tête
fœtale et désinséré fait saillie hors de la vulve.
der à une section longitudinale emportant la partie désinsérée
et faire une symétrisation controlatérale, comme lors d'une
en dehors de la vulve du fragment d'hymen désinséré. Dans nymphectomie de réduction classique. La réussite de l'inter-
ce cas de découverte à distance, la résection du fragment vention est, dans ce cas-là, moins aléatoire, étant donné qu'il
peut se faire sous anesthésie locale avec suture au fil résor- n'y a pas de risque de récidive de désinsertion (figure 5.16).
bable 4/0 (figure 5.13).
En cas de déchirure ou de désinsertion des petites lèvres,
la réparation doit être réalisée si possible en trois plans : un
plan conjonctif réalisé dans l'épaisseur de la petite lèvre et
Périnée postérieur
permettant d'amarrer les deux fragments l'un à l'autre puis
deux plans muqueux externe et interne. L'usage de colle Béance vulvaire
biologique n'est pas validé sur les muqueuses.
La béance vulvaire est une plainte fréquente en post-par-
Ces réparations, réalisées en post-partum immédiat, sur
tum. Elle se manifeste par une sensation de vulve ouverte,
des tissus œdématiés, et qui vont rester dans une atmos-
par des bruits vaginaux lors des changements de position,
phère humide en raison des lochies, peuvent ne pas suffire,
lors du sport ou lors des rapports et par la diminution des
et une désunion secondaire peut se produire. Cette possi-
sensations vulvo-vaginales.
bilité ne doit pas empêcher de tenter la réparation mais la
Il faudra bien faire préciser le symptôme car la correction
patiente doit en être prévenue.
chirurgicale peut être source de dyspareunies secondaires.
Derrière le «c'est trop large» peuvent se cacher une réelle
À distance de l'accouchement béance anatomique ou une sensation de béance liée à une
À distance, les déchirures non suturées des petites lèvres dénervation de la zone. Il importe aussi de distinguer qui
ou les désunions secondaires peuvent donner lieu à une est à l'origine de la demande : la patiente qui a une perte de
perforation de la petite lèvre, voire une section ou une sensations, parfois par dénervation sans béance vraie, ou le
désinsertion labiale (figures 5.14, 5.15). Au-delà du préjudice conjoint qui a une sensation d'ouverture trop grande.
esthétique, il peut exister une réelle gêne au quotidien, voire La vulve est ouverte de deux manières :
une dyspareunie d'intromission. ●
soit postéro-latérale par désunion d'une épisiotomie ou
Il faut donc avant toute chose bien peser l'avantage et de la réparation d'une déchirure ;
les inconvénients d'une tentative de réparation ainsi que les ●
soit globale de manière ovoïde, symétrique, par diastasis
motivations de la patiente. des faisceaux élévateurs des muscles releveurs (figure 5.17).
Si la zone est responsable de dyspareunie, ou de gêne quo- La béance peut être associée à un prolapsus génital qu'il
tidienne (le segment désinséré peut se prendre dans les sous- ne faudra traiter que s'il génère des symptômes en lui-même.
vêtements, etc.) l'indication ne se discute pas. Si le motif de la La correction chirurgicale d'une béance ne doit être
demande de réparation est purement esthétique, il doit être envisagée qu'après échec d'une rééducation périnéale bien
62
Dr A.Amine 5.Recherche
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complications obstétricales vulvo-périnéales

Figure 5.14. Figure 5.16.


Petite lèvre déchirée horizontalement : il persiste deux fragments Petite lèvre déchirée : après résection réduisant les deux
céphalique et caudal. fragments et symétrisation par réduction controlatérale.

Figure 5.15.
Petite lèvre déchirée : vue latérale. Figure 5.17.
Vulve béante : le diastasis des releveurs et la faiblesse du noyau
conduite et prolongée, et en cas de retentissement impor- fibreux central du périnée expliquent l'aspect trop ouvert de la vulve.
tant sur la qualité de vie de la patiente.
Colpo-périnéo-myorraphie
Reprise d'épisiotomie Lorsqu'un diastasis des faisceaux élévateurs des releveurs est
Lorsqu'il s'agit d'une désunion d'épisiotomie, la correction responsable de la béance, une colpo-périnéo-­myorraphie
chirurgicale consiste en une reprise de cette dernière : postérieure peut être indiquée. Elle vise à réséquer du tissu

avivement de la zone de désunion (zone souvent losan- vaginal excédentaire et à reconstituer un noyau fibreux
gique et recouverte d'une réépithélialisation fine) ; central du périnée par adossement des muscles releveurs

réapproximation des plans vaginal, musculaire, conjonc- de l'anus. Cette intervention est potentiellement dyspareu-
tif sous-cutané puis cutané en trois plans de fil 2 ou 3/0 niante (d'une part, en raison de la nouvelle cicatrice vulvo-
à résorption lente, suivant la technique un fil un nœud périnéale et, d'autre part, car on peut dépasser l'objectif et
comme classiquement dans une réfection d'épisiotomie refermer trop l'orifice vulvaire) et cela doit avoir été discuté
immédiatement après l'accouchement. avec la patiente.
63
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

L'intervention doit être menée en dehors d'une période


de règles pour éviter toute greffe endométriosique. Une
antibioprophylaxie est recommandée. Une infiltration des
nerfs honteux à la ropivacaïne pour la prévention des dou-
leurs postopératoires est utile.
La technique décrite ci-dessous s'effectue par abord
vaginal, patiente en position de la taille [6] :

incision losangique cutanéomuqueuse. La taille du
losange dépend de l'excès tissulaire. Les deux angles laté-
raux du losange vont en fin d'intervention se trouver au
niveau de la future fourchette, c'est ce qui permet de déci-
der de leur situation (figures 5.18–5.20) ;

dissection de l'espace recto-vaginal. Le risque est bien
évidemment de faire une plaie rectale. Cette dissection
peut être menée sous contrôle d'un doigt intrarectal et être Figure 5.18.
facilitée par une infiltration préalable inter-recto-vaginale Colpo-périnéo-myorraphie : repérage par deux fils des deux
angles latéraux du losange de résection. En fin d'intervention, ces
(figure 5.21) ; deux angles seront réunis sur la ligne médiane et constitueront la

abord limité des espaces para-rectaux inférieurs jusqu'aux nouvelle fourchette vulvaire.
muscles releveurs ;

myorraphie des releveurs par un ou deux points de fil à
résorption lente n° 1 (type polyglactine) selon l'importance
de la béance. Il est primordial de ménager une ouverture
vaginale admettant facilement deux doigts en largeur
(figures 5.22, 5.23) ;

suture verticale partant de l'angle supérieur vaginal avec
un surjet simple au niveau du vagin jusqu'au niveau de l'hy-
men puis un plan sous-cutané périnéal qui descend jusqu'à
la pointe inférieure du losange et, enfin, un plan intrader-
mique qui remonte de la pointe anale jusqu'à la fourchette.
L'ensemble de cette dernière suture peut se faire avec une
technique «un fil un nœud» superposable à celle de la Figure 5.19.
réfection d'épisiotomie. Colpo-périnéo-myorraphie : découpe du losange de résection
partie périnéale.

Béance vaginale
Il n'existe pas de définition objective de la béance vaginale.
Il s'agit d'une gêne ressentie par la patiente au quotidien
(impossibilité de garder un tampon, un ovule, etc.), et lors
des rapports sexuels. À l'examen au spéculum, on observe
un important bombement latéral dans l'espace d'ouverture
du spéculum.
Le traitement curatif comporte une première phase de
rééducation périnéale afin de renforcer les muscles du plan-
cher pelvien.
Si la patiente n'est pas améliorée par une rééducation
bien conduite, on peut lui proposer dans un deuxième
temps différentes techniques, dont le lipomodelage, le trai-
tement vaginal par laser fractionné ou la résection d'une Figure 5.20.
partie du vagin en excès (colpectasie). Colpo-périnéo-myorraphie : découpe du losange de résection
partie vaginale.

64
Dr A.Amine 5.Recherche
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complications obstétricales vulvo-périnéales

Figure 5.21.
Colpo-périnéo-myorraphie : résection du losange de tissu excédentaire. Figure 5.23.
Colpo-périnéo-myorraphie : aspect final.

jonction entre tiers moyen et tiers supérieur du vagin (soit


6 à 10 cm de long suivant les cas). Les culs-de-sac vaginaux
doivent être respectés, on risque sinon une perte d'amplia-
tion du dôme vaginal, dommageable pour la qualité des
rapports (figure 5.24) ;

résection des fuseaux en ne prenant que la muqueuse
vaginale et en longeant la face profonde du vagin dans la
lamina propria afin de limiter les saignements. L'hémostase
doit être parfaite pour éviter le risque d'hématome dissé-
quant secondaire (figure 5.25) ;

colporraphie de chaque côté, par un surjet de fil 0 ou 2/0
à résorption lente, en appuyant chaque passage sur le plan
profond pour éviter tout espace mort (figure 5.26).
Figure 5.22. On peut associer à ce geste une colpo-périnéo-myorra-
Colpo-périnéo-myorraphie : début de la myorraphie, le point est
passé sous contrôle d'un doigt intrarectal. Si besoin, un deuxième
phie si une béance vulvaire est associée.
point peut être placé plus haut. Le surjet vaginal a été démarré. En postopératoire, il n'existe pas de soins locaux parti-
culiers. Les bains et rapports sexuels sont interdits pendant
La technique chirurgicale décrite ci-dessous est la plus quatre semaines, temps nécessaire à la cicatrisation du vagin.
fréquemment utilisée pour réduire chirurgicalement le dia-
mètre du cylindre vaginal. Sténose de la vulve
Elle consiste en l'excision d'un losange de muqueuse
vaginale sur chaque face latérale du vagin. Le geste se fait Il s'agit de séquelles d'une réfection excessive d'une déchi-
en ambulatoire, sous anesthésie générale ou locorégionale, rure périnéale ou d'une épisiotomie, ou de la conséquence
patiente en position de la taille, sondée à demeure. Les d'une cicatrisation scléreuse avec perte d'élasticité. Ces deux
étapes sont les suivantes : situations aboutissent à une dyspareunie d'intromission.

exposition par deux valves vaginales antérieure et Cependant, une dyspareunie d'intromission peut être due à
postérieure ; une vestibulodynie ou à une lésion du nerf pudendal, et toute

incision au bistouri électrique d'un fuseau longitudinal intervention serait alors dommageable. Il faut donc impéra-
sur chaque paroi vaginale latérale. Ceux-ci sont situés à 3 et tivement éliminer ces deux causes qui pourraient coexister
9 h 00, ils partent quasi de l'hymen et vont jusqu'à environ la avec la sténose vulvaire avant d'envisager une intervention.

65
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 5.24.
Cure de béance vaginale : découpe d'un losange sur chaque face Figure 5.26.
latérale du vagin. Cure de béance vaginale : suture par surjet.

massages peuvent être pris en charge par une sage-femme


ou un kinésithérapeute mais c'est leur répétition qui assure
un résultat positif et la coopération de la patiente avec pra-
tique d'automassages est primordiale.
En cas de non-progression en quelques semaines, une
prise en charge chirurgicale peut être proposée. Là encore,
il ne faut pas oublier que la cicatrice générée par cette répa-
ration peut être source en elle-même de cicatrice vicieuse
dyspareuniante et la patiente doit en être informée.
Effectuée sous anesthésie générale, péridurale ou rachia-
nesthésie, l'intervention consiste en :

découpe d'un segment cutané périnéal triangulaire à som-
met arrondi préanal, levée du segment (figures 5.27, 5.28) ;

dans la continuité, clivage entre canal anal et la paroi pos-
Figure 5.25. térieure du vestibule puis entre rectum et vagin. On expose
Cure de béance vaginale : résection superficielle concernant ainsi la zone fibreuse responsable de la gêne (figure 5.29) ;
uniquement la muqueuse du vagin. ●
résection ou incisions multiples de cette zone cicatri-
cielle sous contrôle d'un doigt intrarectal ;
Il existe deux techniques chirurgicales correctrices de ●
découpe sur trois côtés d'un lambeau vaginal postérieur
sténose vulvaire [6, 7]. quadrangulaire délimité par des incisions longitudinales au
niveau des gouttières latérales du vagin sur 3–4 cm (figure 5.30) ;
Vulvo-périnéoplastie ●
résection de la peau périnéale et de la muqueuse vesti-
Elle est principalement indiquée en cas de bride cicatricielle rétro- bulaire postérieure ;
hyménéale tendue transversalement. La vulve peut paraître

abaissement du lambeau vaginal qui vient couvrir la
normale mais l'intromission est douloureuse, voire impossible perte de substance et est ensuite suturé à la peau périnéale
avec une sensation de rétrécissement ressenti par la patiente. par des points séparés de fil résorbable 3/0 (figure 5.31).
On palpe derrière l'hymen une zone scléreuse dont la mise sous
tension génère la douleur. On peut reproduire les symptômes Périnéotomie médiane
décrits par l'introduction et l'ouverture d'un spéculum. Cette technique est intéressante lorsque seule une bride de
Si ce diagnostic est fait dans les mois qui suivent l'accou- la muqueuse de la fourchette vulvaire est responsable de
chement, la première chose à faire est de tenter d'assouplir la gêne et que le tissu profond sous-jacent est lui-même
la cicatrice par des massages répétés. Une partie de ces souple (figure 5.32).
66
Dr A.Amine 5.Recherche
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complications obstétricales vulvo-périnéales

Figure 5.27-28.
Vulvo-périnéoplastie : découpe cutanée périnéale en U, ce tissu sera réséqué.

Figure 5.30.
Figure 5.29. Vulvo-périnéoplastie découpe du lambeau vaginal postérieur
Vulvo-périnéoplastie : abord de la zone cicatricielle scléreuse qui quadrangulaire qui viendra combler la perte de substance
se trouvait à hauteur de l'hymen. périnéale.

On réalise : ●
une suture transversale en deux plans par des points

une incision verticale de la fourchette vulvaire jusqu'à séparés de fil résorbables 3/0 ou 4/0 (figure 5.34).
hauteur du démarrage du vagin avec résection de la zone
fibrosée dyspareuniante (figure 5.33) ;

une libération des berges muqueuses et cutanées sur Fistule recto-vaginale
quelques millimètres pour permettre une mobilisation des Les fistules recto-vaginales postobstétricales sont rares dans
tissus et un bon affrontement ; les pays développés. Elles surviennent le plus souvent après
67
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 5.33.
Périnéotomie médiane : incision verticale de la bride jusqu'à
l'ouvrir complètement.

Figure 5.31.
Vulvo-périnéoplastie : abaissement et suture du lambeau vaginal
postérieur qui couvre la perte de substance périnéale.

Figure 5.34.
Périnéotomie médiane : aspect final après la suture horizontale
de l'incision qui avait été faite verticalement.

doit être recherchée car elle conditionne le choix de la technique


Figure 5.32. de réparation. On considère qu'une fistule est simple lorsqu'elle
Périnéotomie médiane : bride de la fourchette qui barre l'accès au touche les deux tiers inférieurs du vagin, lorsqu'elle mesure moins
vagin et génère une dyspareunie. de 2 cm et lorsque les tissus sont sains, non infectés.
un accouchement par voie basse compliqué d'un périnée Le choix de la technique n'est pas évident, les risques de
complet. Dans certains pays en voie de développement, où récidive après ces réparations sont importants, il est donc
l'accès aux unités de soins est difficile, elles sont souvent d'une conseillé de faire appel aux compétences d'un proctologue
taille plus importante et secondaires à une nécrose des tissus dès le début de la prise en charge.
par rétention de la tête fœtale, selon un mécanisme identique
à celui des fistules vésico-vaginales décrites plus haut. Techniques de première intention
Elles sont localisées classiquement au niveau des deux tiers Lorsque la fistule est simple, qu'il s'agit de la première répa-
inférieurs du vagin. Étant donné leur origine obstétricale, elles ration et que le sphincter est intact, on peut proposer une
peuvent être associées à des lésions du sphincter. Cette atteinte réparation en un temps. Pour les fistules de très petit dia-

68
Dr A.Amine 5.Recherche
Réparations desbibliographique SCI-MED
complications obstétricales vulvo-périnéales

mètre, un encollage (colle de fibrine ou colle synthétique)


ou la mise en place d'un plug (bioprothèse conique résor-
bable qui bouche la fistule à sa partie interne) peuvent se
discuter avec le proctologue.
Pour les fistules de quelques millimètres, on peut pro-
poser une réparation avec dissection locale entre vagin
et rectum, excision des berges, et fermeture en plusieurs
plans avec interposition de fascia entre les sutures vagi-
nales et rectales. Un lambeau de glissement rectal prati-
qué par voie endorectale peut permettre de décaler les
sutures vaginales et rectales, mais en cas de défaut de
cicatrisation, on se trouve alors face à une fistule de plus
grande taille [8].

La technique de Musset
En cas d'échec d'une première réparation ou en cas d'at-
teinte du sphincter, on aura recours à l'intervention de
Musset qui consiste en une mise à plat par périnéotomie
médiane, suivie d'une reconstruction complète plan par
plan [5, 8–10].
Elle peut être réalisée en un seul temps quand les tissus
sont sains, non infectés. Figure 5.35.
Elle a été décrite initialement en deux temps et ces deux Technique de Musset : repérage de la fistule.
temps sont nécessaires en cas de tissus très inflammatoires
et infectés. Un simple lavement la veille de l'intervention
suffit, une antibioprophylaxie est nécessaire. La patiente
est en position de la taille sous anesthésie générale ou
locorégionale :

1er temps : cathétérisme et mise à plat de la fistule par
section complète verticale du corps périnéal. La plaie cica-
trise spontanément en six à huit semaines en formant une
bride transversale. (figures 5.35 à 5.37).

2e temps : effectué environ deux mois plus tard (ou
d'emblée en cas de tissus sains) :
– pose de fils repères : deux fils sont posés au niveau des
extrémités postérieures des grandes lèvres et deux au
niveau des fossettes cutanées qui repèrent les extrémités
du sphincter externe sectionné lors du premier temps
opératoire (figure 5.38). Un autre moyen de repérer ces
fossettes est d'observer la zone de disparition des plis
radiés de l'anus et de se porter en dehors ;
– traction sur les fils à 45°, ce qui tend la bride cicatri-
cielle à concavité postérieure puis incision arciforme sur
la bride poursuivie par une dissection inter-recto-vagi-
nale sur 2 à 3 cm au-delà de la fistule de manière à pou-
voir mobiliser les tissus. Cette incision peut être étendue
latéralement si besoin pour atteindre les tissus muscu-
laires qui seront interposés entre les deux plans anorectal Figure 5.36.
et vaginal (figure 5.39) ; Technique de Musset : mise à plat du trajet fistuleux.

69
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 5.37. Figure 5.39.


Technique de Musset : aspect des tissus à six semaines de Technique de Musset : traction des fils repères et incision
cicatrisation dirigée. périnéale transversal arciforme.

– résection économe des bords de la fistule et avive-


ment des berges anales et vaginales-reconstruction
du canal anal par des points séparés (ou pour cer-
tains un surjet) de fil à résorption lente, chargeant
muqueuse et musculeuse. Il ne semble pas néces-
saire de réaliser des points extramuqueux. Le dernier
point est mis en place au niveau de la marge anale
(figure 5.40) ;
– rapprochement du sphincter interne et du fascia pré-
rectal (figure 5.40) ;
– reconstruction du sphincter externe : un fil repère est
placé sur chaque extrémité du sphincter externe sans
dissection excessive qui risquerait de perturber la vascu-
larisation du sphincter. L'aiguille (fil résorbable résorption
lente n°1) est introduite de dedans en dehors. Elle suit
une direction latérale au canal anal et vers l'arrière puis
est retournée en dehors et en haut pour être récupérée
après avoir ainsi chargé l'extrémité du sphincter. La mise
en tension des fils vérifie le bon affrontement des extré-
mités sphinctériennes. Le sphincter est suturé en paletot
par deux ou trois points séparés en U de fil résorbable.
Le manque de tissu sain empêche souvent de réaliser
Figure 5.38.
une suture en paletot, elle est alors réalisée bout à bout
Technique de Musset : pose des fils repères sur les grandes lèvres
et en regard du sphincter anal externe. (figures 5.41, 5.42) ;

70
Dr A.Amine 5.Recherche
Réparations desbibliographique SCI-MED
complications obstétricales vulvo-périnéales

Figure 5.40. Figure 5.42.


Technique de Musset : reconstruction du canal anal et du Technique de Musset : suture du sphincter externe.
sphincter interne.

– reconstruction vaginale après avivement des bords,


jusqu'à atteindre la commissure postérieure de la vulve
(figure 5.43) ;
– rapprochement des muscles périnéaux et des tissus
sous-cutanés, ce qui reconstitue le corps périnéal et sup-
prime l'espace mort ;
– suture cutanée (figure 5.44).

Les Lambeaux
Dans les fistules complexes ou récidivantes, il faut
interposer un lambeau de tissu vascularisé entre plan
vaginal et plan rectal. Les deux lambeaux les plus sou-
vent utilisés sont le lambeau de Martius et le lambeau
de gracilis.
Le lambeau de gracilis, une fois prélevé aux dépens
de la face interne de la cuisse, est passé dans un tunnel
sous-cutané réalisé depuis la partie proximale de l'inci-
sion jusqu'à la cloison recto-vaginale. Le muscle placé
entre le rectum et le vagin est alors fixé sur la tubérosité
ischiatique controlatérale à l'aide d'une incision sup-
plémentaire. Les conséquences fonctionnelles et cica-
tricielles de ce lambeau le font pratiquer en deuxième
Figure 5.41. intention seulement, ou quand la zone à couvrir est
Technique de Musset : repérage du sphincter externe de l'anus importante.
par des fils repères.

71
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Références
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nique de Musset. SNFCP.
Figure 5.43. [10] Musset R. Fistule rectovaginale. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),
Technique de Musset : reconstitution de la fourchette vaginale Techniques chirurgicales - Urologie-Gynécologie 1978.
par des points séparés.

Figure 5.44.
Technique de Musset vue finale : reconstitution de la zone
vulvo-périnéale.

72
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Chapitre 6
Prise en charge des femmes
victimes de mutilations sexuelles
en salle de naissance
A. Hamidouche

PLAN DU C HAPITRE
Introduction 74
Rappel anatomique 74
Différents types des mutilations sexuelles
féminines 75
Conséquences obstétricales de l'excision 75
Technique de désinfibulation 75
Conclusion 76

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Points forts du chapitre Rappel anatomique


▶ Augmentation du nombre de femmes victimes de
mutilations sexuelles féminines en France. Le clitoris est formé de deux corps érectiles, les corps caver-
▶ Importance de les identifier en cours de grossesse. neux et des bulbes vestibulaires. Il comprend trois parties :
▶ Permettre à ces femmes d'accoucher par voie basse les piliers, le corps et le gland (figure 6.1). Sa longueur varie
en diminuant le risque de lésions périnéales sévères. de 9 à 11 cm environ.
▶ Formation des obstétriciens au geste de Le corps du clitoris monte devant la symphyse pubienne,
désinfibulation. puis s'infléchit pour former le coude du clitoris. Il est soli-
dement maintenu au niveau de son coude par le ligament
Introduction suspenseur du clitoris. Il est recouvert par le prépuce. Son
extrémité distale, appelée le gland clitoridien, est constituée
Les mutilations sexuelles féminines constituent, du fait de de tissu érectile provenant des bulbes vestibulaires.
leur fréquence et leurs complications, un véritable pro- Les piliers du clitoris s'attachent sur la partie moyenne de
blème de santé publique. Leur nombre s'élève aujourd'hui la face interne des branches ischio-pubiennes et s'adossent
à environ 200 millions dans le monde [1]. Elles se ren- sous la symphyse pubienne pour former le corps du clitoris.
contrent dans plus de 62 pays (Afrique subsaharienne Ils sont recouverts par les muscles ischio-caverneux.
essentiellement), et dans les pays d'immigrations (en Les bulbes vestibulaires cernent les bords latéraux et
Europe et en Amérique du Nord). On estime à près de antérieurs de l'orifice vaginal. Leurs extrémités antérieures
61 000 les femmes excisées vivant en France [2]. Ces pra- amincies s'unissent pour former la commissure bulbaire qui
tiques sont pénalement condamnées en France et dans 24 est solidarisée au corps du clitoris par un plexus veineux
des 29 pays d'Afrique et du Moyen-Orient où elles sont intermédiaire.
pratiquées. La vascularisation du clitoris est assurée par l'artère
L'OMS définit les mutilations sexuelles féminines comme pudendale interne qui donne les artères dorsale et pro-
«toute intervention consistant à enlever tout ou une par- fonde du clitoris. Le drainage veineux du clitoris, des bulbes
tie des organes génitaux externes féminins pour des motifs vestibulaires et de la partie postérieure des lèvres se fait par
culturels ou tout autre motif non thérapeutique». les veines pudendales internes.
Les mutilations s'effectuent sans anesthésie à l'aide Le nerf pudendal innerve le bulbe, le clitoris ainsi que les
de n'importe quel instrument tranchant : ciseaux, cou- deux tiers postérieurs des grandes et petites lèvres.
teaux, lames de rasoir, éclats de verre. De ce fait, les lésions
peuvent être très aléatoires et variables en fonction des
mouvements des fillettes. La sévérité des complications est
proportionnelle à l'importance de la mutilation.
Les complications immédiates les plus graves sont le
décès par hémorragie, les infections généralisées comme
les gangrènes gazeuses, les septicémies et le tétanos ainsi
que le risque de transmission du virus de l'immunodéfi-
cience humaine (VIH). À plus long terme, les complications
sont multiples : cicatrices chéloïdes, algies pelviennes chro-
niques, névrome du nerf dorsal du clitoris, hématocolpos et
stérilité. Par ailleurs, des complications urologiques peuvent
survenir à type de rétentions d'urines aiguës ou chroniques,
pyélonéphrites et insuffisance rénale. Les fistules, vésico-
vaginales essentiellement, sont des complications plus rares
mais plus graves.
Les complications obstétricales surviennent lors
de l'accouchement et sont décrites plus loin dans ce Figure 6.1.
chapitre. Anatomie du clitoris.

74
Dr A.Amine Recherche
6. Prise en charge des femmes bibliographique
victimes de SCI-MED
mutilations sexuelles en salle de naissance

Figure 6.2.
A. Type I : atteinte du prépuce avec ou sans excision du gland clitoridien. B. Type II : Atteinte du gland clitoridien, prépuce avec ablation
partielle ou totales des petites lèvres. C. Type III : Infibulation avec fermeture quasi complète de la vulve par ablation et accolement des
petites lèvres et ou des grandes lèvres, avec ou sans excision du clitoris.

Différents types des mutilations au type II, et nous ne retrouvons pas d'augmentation du
risque de complications obstétricales dans les mutila-
sexuelles féminines tions de type I.
Ces données concernent les pays d'Afrique dont la prise
L'OMS a établi une classification des mutilations sexuelles en charge et les moyens utilisés sont différents de notre pays.
féminines en quatre types. Les types I à III sont classés Néanmoins, sur les deux études rétrospectives réalisées au
en fonction de l'atteinte des organes génitaux externes Royaume-Uni [8] et en Australie [9], on n'a pas démontré
(figure 6.2). Un quatrième type regroupe toutes les formes de différence significative sur le taux de césarienne, le taux
non classées : piercing, élongation des petites lèvres, cauté- de déchirures périnéales, d'hémorragie de la délivrance et
risation par brûlure et introduction de substances corro- de morbidité néonatale. Il y a néanmoins un taux plus élevé
sives dans le vagin par exemple. d'épisiotomie.

Conséquences obstétricales Technique de désinfibulation


de l'excision
L'infibulation est responsable de nombreuses complications
Les conséquences obstétricales des mutilations sexuelles obstétricales. La vulve est cicatricielle, scléreuse et occluse
féminines varient en fonction du type de mutilation. De constituant un obstacle mécanique à la progression de la
nombreuses études ont été menées dans les pays africains présentation. Les déchirures périnéales peuvent ainsi sur-
et montrent une augmentation significative du taux de venir malgré une épisiotomie prophylactique. Elles peuvent
césarienne, de déchirures périnéales, d'hémorragie du être antérieures avec une atteinte de l'urètre et postérieures,
post-partum, de la durée de la phase d'expulsion, ainsi pouvant atteindre le sphincter anal [10].
qu'une augmentation de la morbi-mortalité néonatale La réalisation d'une césarienne prophylactique ne peut
[3–7] (tableau 6.1). Ces complications sont plus impor- être recommandée sauf en cas d'antécédent de déchirures
tantes dans le cas de mutilation de type III, comparées périnéales complexes au précédent accouchement [10].

75
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Tableau 6.1. Complications obstétricales maternelles et néonatales chez les patientes excisées.
Étude Type Nombre de patientes Déchirures Taux de HPP Morbidité
d'étude périnéales césarienne néonatale
Banks Meirik [3] Cas-témoin n = 6856 type I Type II : RR = 1,29 Type II : RR = 1,21 Type II :
n = 7771 type II (1,09–1,52) (1,01–1,43) RR = 1,28
n = 6595 type III Type III : Type III : (1,10–1,49)
n = 7171 non excisées RR = 1,31 RR = 1,69 Type III :
(1,01–1,70) (1,34–2,12) RR = 1,66
(1,33–2,10)
Anikwe [5] Transversale n = 260 excisées a OR = 0,76 p = 0,64 p > 0,05
n = 260 non excisées (0,63–0,91)
Théra [6] Cas-témoin n = 140 excisées a RC = 8,9 RC = 3,72 RC = 9,7
n = 140 non excisées (1,9–57,2) (1,36–10,74) (4,3–22,3)
p < 0,001 p < 0,05 p < 0,001
Millogo-Traore Cas-témoin n = 227 excisées a RR = 1,77 RR = 5,18
[7] n = 227 non excisées p = 0,008 p < 0,01
Balachandran [8] Cas-témoin n = 121 excisées a 27,2 % 26% excisées 7,4 % excisées
n = 121 non excisées excisées versus versus 29,75 % versus 10,7 %
29,7 % p > 0,05 p = 0,30
p > 0,05
Davis [9] Cas-témoin n = 141 excisées* p > 0,05 p > 0,05 p > 0,05
n = 142 non excisées
RR (IC 95 %) : risque relatif. RC (IC 95 %) : rapport de cote. OR (IC 95 %) : odds ratio. HPP : hémorragie du post-partum.
a
Excision de types I à III.

Description de la technique Il n'y a à ce jour pas de consensus sur la meilleure période


pour réaliser ce geste chez les patientes victimes de muti-

Les patientes concernées présentent une infibulation lations sexuelles de type III. Une méta-analyse [11] n'ayant
(figure 6.3A, B) ou des excisions de type II avec une ouver- inclus que deux études (63 et 45 patientes, Royaume-Uni)
ture vulvaire limite, après fusion partielle des petites lèvres. n'a pas montré de différence significative entre la désinfibu-

Sous anesthésie péridurale pendant le travail ou rachia- lation en cours de travail ou en dehors du travail concer-
nesthésie si celle-ci est réalisée au 2e trimestre de la grossesse. nant : la durée du travail, le taux des déchirures périnéales,

Installation de la patiente en position gynécologique. des épisiotomies, des césariennes, des hémorragies de la

Pose d'une sonde urinaire à demeure (figure 6.3C). délivrance et du score d'Apgar à la naissance.

Libération des petites lèvres : introduction des ciseaux
ou d'une autre pince par l'orifice de l'infibulation. Celle-
ci est dirigée en arrière jusqu'au sommet du vestibule, au Conclusion
contact de la face profonde de l'accolement.

Traction des ciseaux en avant, permettant de faire saillir Les mutilations sexuelles féminines de type III restent rares
la cicatrice médiane et d'éviter le méat urinaire (figure 6.3D). comparées aux mutilations de type II. La technique de

Incision de la cicatrice d'arrière en avant aux ciseaux, désinfibulation est une technique simple et facile à repro-
jusqu'est ce que le méat urinaire soit visible, et que l'ouver- duire. Chaque obstétricien doit être formé à sa réalisation.
ture vulvaire soit suffisante (figure 6.3E). Le clitoris peut être La réalisation de l'épisiotomie en cas de mutilation de
complet et non atteint dans certain cas d'infibulation. Il type II doit rester à l'appréciation de la sage-femme et du
faut le préserver dans ce cas lors de l'incision de la zone clinicien et ne doit pas être réalisée systématiquement.
adhérentielle. La prise en charge de ces patientes reste pluridisciplinaire

Les bords libres sont suturés séparément à l'aide d'un et il faut profiter de la période d'hospitalisation en suites de
surjet au Vicryl® 3/0 (figure 6.3F, G). couches pour instaurer le suivi ultérieur.
76
Dr A.Amine Recherche
6. Prise en charge des femmes bibliographique
victimes de SCI-MED
mutilations sexuelles en salle de naissance

Figure 6.3.
Technique de désinfibulation. A. Patiente 2e pare, infibulation. B. Ouverture vulvaire limite, méat urinaire non visualisé. C. Pose d'une
sonde urinaire à demeure. D. Traction par des ciseaux sur la cicatrice médiane. E. Incision de la cicatrice médiane. F. Suture par deux
surjets de chacune des berges libérées. G. Même patiente, après réparation clitoridienne associée.

77
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

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78
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Chapitre 7
Les techniques chirurgicales
de la césarienne
G. Kayem, C. Raiffort, P. Delorme

PLAN DU C HAPITRE
Introduction 80
Rappel anatomique 80
Préparation de l'intervention et installation 80
Intervention 81
Particularités techniques : revue
de la littérature détaillant les différents
éléments techniques 88
Cas particuliers 90
Conclusion 94

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Actuellement, le risque est très faible avec une mortalité


Points forts du chapitre attribuable à la césarienne inférieure à 1/10 000.
La technique de la césarienne a évolué ces 20 dernières La technique de la césarienne a continué à évoluer ces
années vers une simplification des gestes opératoires. dernières années vers une simplification des gestes et une
Parallèlement, des études de grande ampleur ont été réduction du temps opératoire. Ses complications immé-
réalisées pour tester différentes variantes techniques et diates sont hémorragiques ou infectieuses. À long terme,
leur impact sur le risque de complication maternelle à les principaux risques sont, d'une part, la survenue d'adhé-
court ou à long termes. L'incision de Joël-Cohen adaptée
rences postopératoires et, d'autre part, le risque de rupture
par Stark est une technique qui a fait la preuve de son
efficacité. utérine lors des grossesses ultérieures. C'est l'ensemble de
ces complications que les différentes évolutions techniques
La technique de Mouchel est particulièrement utile
de réalisation de la césarienne tentent de réduire. Récem-
en cas d'utérus cicatriciel et de tissus adhérentiels.
La réalisation, pour l'asepsie préopératoire, d'un ment, la littérature médicale s'est enrichie de plusieurs
badigeonnage vaginal en cas de césarienne pendant le méta-analyses et d'un très vaste essai randomisé, l'essai
travail ou de rupture des membranes permet de réduire CORONIS, pour tenter d'analyser les avantages et inconvé-
le risque d'endométrite postopératoire. Le décollement nients des différentes séquences opératoires [2, 3].
vésico-utérin n'est, sauf cas particulier, pas nécessaire.
Le sondage urinaire est préférable et doit être de durée
inférieure à 24 heures. La réalisation de l'hystérotomie Rappel anatomique
est faite au bistouri puis aux doigts au mieux dans le
sens céphalo-caudal. La délivrance placentaire doit Il existe de nombreuses modifications anatomiques pen-
être dirigée mais spontanée pour réduire le risque dant la grossesse dont il faut tenir compte et qui rendent
hémorragique. La fermeture de l'utérus est réalisée en l'intervention différente d'une autre laparotomie.
un plan. La fermeture du péritoine n'est pas nécessaire. Parmi celles-ci on notera :
Une fermeture cutanée par un surjet intradermique en ●
la présence de varices pelviennes plus ou moins impor-
comparaison aux agrafes est associée à une réduction du tantes au niveau du ligament large, des annexes et parfois
risque de désunion de la cicatrice.
de l'utérus ;
Enfin, des cas particuliers (obésité, placenta praevia, ●
la dextro-rotation du corps utérin expose le pédicule
placenta accreta, etc.) impliquent des prises en charge
utérin gauche ;
adaptées à chaque cas. ●
l'ascension de la vessie ;

les modifications des rapports des artères utérines et
des uretères au cours de la grossesse en fonction du terme.
Introduction Plus le segment inférieur s'amplie, plus l'artère utérine tend
à s'éloigner de l'uretère et du fornix vaginal. Lorsque le seg-
En France, le taux de césarienne est de 20,2 % d'après les ment inférieur est bien formé, la crosse de l'artère utérine se
résultats de la dernière enquête périnatale réalisée en 2016, trouve à 2,5 cm environ du fornix ;
en élévation en comparaison au 15,5 % rapportés en 1995 ●
la création au 3e trimestre du segment inférieur entre le
[1]. Parallèlement, la prévalence de l'utérus cicatriciel a col et le corps utérin, zone peu vascularisée qui sera le siège
augmenté de 8 à 11 % des parturientes, et de 14 à 19 % privilégié de l'hystérotomie
des multipares, entre 1995 et 2016. La césarienne est donc
l'intervention la plus pratiquée en France. Pourtant, ses
modalités techniques de réalisation et leur impact sur la Préparation de l'intervention
santé maternelle ont été peu étudiés. et installation
La césarienne, depuis le premier cas décrit au XVIe jusqu'à
la fin du XIXe siècle a été associée à une mortalité de 50 à
80 % (42 décès sur 73 opérées dans la série de Baudeloque
Préparation de la patiente
dans les années 1800). C'est à partir de 1880, avec les pro- La césarienne peut avoir lieu soit dans le cas d'une interven-
grès de l'asepsie et de l'anesthésie que la mortalité chute. tion programmée, soit en urgence. Dans le premier cas, une
À partir de 1920, l'intervention devient moins risquée, en consultation d'anesthésie est prévue au moins 48 heures
particulier grâce à l'avènement des antibiotiques et au ren- avant le geste et une information sur la technique opéra-
forcement des mesures d'asepsie entre les deux guerres. toire, les bénéfices et les risques sont exposés aux patientes
80
Dr A.Amine Recherche7. bibliographique SCI-MED
Les techniques chirurgicales de la césarienne

afin d'obtenir leur consentement éclairé. La réalisation d'un sus-pubiennes de tailles différentes, deux bistouris à lame
enregistrement du RCF ou du contrôle des bruits du cœur froide, deux écarteurs de Farabeuf, deux écarteurs de Hart-
fœtal avant l'incision est en général pratiquée. mann, deux ciseaux et une paire de ciseaux à fil ;
Le rasage est réalisé avec une tondeuse pour limiter les ●
deux ou trois fils sertis résorbables type Vicryl® 1 ;
micro-effractions cutanées qui augmenteraient le risque ●
un forceps de Pajot ou un de Suzor ainsi qu'une ven-
infectieux et comprend uniquement les poils gênant la touse doivent être disponibles dans la salle ;
suture de la peau. ●
l'écarteur abdominal est peu utilisé.
Une sonde urinaire à demeure dans des conditions
aseptiques est posée avant l'installation des champs. Une
préparation pariétale avec double badigeonnage avec un Intervention
produit iodé en allant de l'apophyse xiphoïde au bas du
tiers supérieur des cuisses est réalisée et permettrait de Plusieurs techniques opératoires ont été rapportées pour
réduire le risque septique [4]. réaliser une césarienne et celles-ci ont évolué dans le
La patiente est installée sur la table de césarienne avec temps. Celle de référence a longtemps été la technique
des bas de contention pour diminuer le risque throm- de Pfannenstiel qui a introduit l'incision transversale. Une
boembolique et légèrement en décubitus latéral gauche version simplifiée utilisant une incision transversale, intro-
(15°) pour faciliter le retour veineux jusqu'au moment de duite par Joël-Cohen, située légèrement plus haut sur
la naissance, même si les bénéfices sur le fœtus ne sont pas une ligne joignant les épines iliaques et réalisée presque
démontrés. Un abord vaginal doit être possible, si néces- exclusivement aux doigts a été diffusée à l'hôpital Misgav
saire en cas de survenue d'une hémorragie. Ladach (Israël) par Michael Stark et est actuellement la plus
L'anesthésie doit s'adapter au degré d'urgence du geste répandue.
et peut être générale ou locorégionale. Cette dernière doit
être privilégiée car sa morbidité est inférieure et peut être,
selon les équipes, par voie rachidienne, par voie péridurale Choix du type de l'incision
ou par l'association des deux techniques. abdominale
Elle doit permettre d'assurer une extraction fœtale facile,
Matériel ne pas être traumatisante pour les tissus maternels et être
L'opérateur doit avoir à sa disposition un matériel chirurgical satisfaisante sur le plan esthétique.
de base ainsi que, en cas de besoin, une boîte d'hystérectomie. Les deux différentes voies d'abord sont les incisions
Le matériel de base est constitué de (figure 7.1) : médianes sous-ombilicales et les incisions transversales

une ou deux portes aiguilles, deux pinces Kocher, sus-pubienne (figure 7.2). Ces dernières peuvent être de
deux pinces plates, deux pinces Bingolea, deux valves type Pfannenstiel, de type Joël-Cohen, de type transrectale
avec (Morley) ou non ligature des vaisseaux épigastriques
(Mouchel).
Le choix de l'incision dépend de nombreux cri-
tères : qualité de l'exposition, obésité de la patiente, délai
d'accès à l'utérus, antécédents chirurgicaux. Une incision
verticale a été associée à un temps d'accès plus rapide à
la cavité abdominale en comparaison avec une technique
classique de césarienne mais au prix d'un allongement de
la durée opératoire totale et sans bénéfice néonatal signi-
ficatif [5]. Chez des femmes obèses, le risque infectieux et
d'éventration est plus élevé en cas d'incision verticale [6].
Le mode d'entrée dans l'abdomen (type «Pfannenstiel»
ou «Joël-Cohen», a été étudié par cinq essais analysés
dans une revue de la Cochrane et montre un bénéfice
en termes de temps opératoire, de douleurs et de fièvre
Figure 7.1. postopératoires [7]. Cependant, les risques d'adhérences
Les instruments utiles à la réalisation d'une césarienne. postopératoires et de rupture utérine ou de placenta
81
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 7.2.
Type d'incision.

accreta lors de la grossesse suivante n'étaient pas éva- arciforme après relâchement de la peau. L'incision cutanée
luables. La médiane sous-ombilicale a été abandonnée, sauf peut se faire de gauche à droite si l'opérateur (droitier) est à
cas particuliers, au profit des incisions transversales et ce gauche de la patiente avec un bistouri à lame arrondie tenu
même en cas d'antécédent de laparotomie médiane pour comme un archet.
certains auteurs [8]. Les raisons de ce succès sont multiples : Le tissu cellulaire sous-cutané est incisé de manière légè-
la solidité de la cicatrice, la morbidité moindre, la rapidité rement oblique vers le haut pour aborder perpendiculai-
d'accès à l'utérus, les résultats esthétiques. rement l'aponévrose. L'incision aponévrotique est médiane
Les indications de la médiane sous-ombilicale restent et paramédiane. L'exposition de toute l'aponévrose étant
indiquées par certains pour quelques cas particuliers : l'obé- ensuite aisée par traction divergente des écarteurs de Fara-
sité, les troubles de la coagulation, les antécédents de lapa- beuf chargeant le tissu sous-cutané en prenant contact
rotomie médiane, les suspicions documentées de placenta avec l'aponévrose. Cette procédure permet de récliner sans
accreta ou percreta. léser les vaisseaux et nerfs latéraux sous-cutanés.
L'incision transversale est plus esthétique que l'incision Sur l'aponévrose, on réalise une boutonnière centrale
médiane et comporte l'avantage majeur d'être plus solide au bistouri froid ou au bistouri électrique élargie latérale-
avec un risque d'éventration postopératoire moins important. ment de part et d'autre de la ligne médiane sur 3–4 cm.
Les écarteurs de Farabeuf, tractant légèrement vers le haut
permettent d'exposer l'aponévrose dont la section est
Technique de Pfannenstiel
poursuivie latéralement aux ciseaux de Mayo ou au bistouri
C'est la technique traditionnelle d'incision transversale. électrique selon un trajet oblique en haut et en dehors.
L'incision est réalisée 3 cm (ou deux doigts) au-dessus du L'incision réalisée est plus arciforme que celle de la peau et
rebord supérieur du pubis, légèrement arciforme sur envi- atteint une longueur totale d'environ 16 cm.
ron 12–14 cm suffisamment large pour éviter une extrac- L'aponévrose est ensuite décollée vers le haut. Deux
tion fœtale difficile. Elle peut suivre le pli cutané qui adopte pinces (Kocher ou J.-L. Faure) sont posées de part et d'autre
spontanément cette disposition, ce qui permet d'améliorer de la ligne médiane. La gaine aponévrotique n'est pas adhé-
encore l'aspect esthétique postopératoire. En pratique, si rente aux muscles droits et ceux-ci sont faciles à cliver au
on tend la peau en tractant légèrement vers le haut, on doigt de part et d'autre de la ligne médiane sur 5–6 cm.
peut réaliser une incision horizontale qui sera légèrement L'attache médiane au niveau de la ligne blanche entre

82
Dr A.Amine Recherche7. bibliographique SCI-MED
Les techniques chirurgicales de la césarienne

l­'aponévrose et le muscle est ensuite sectionnée progres- plus haut possible. Celle-ci est agrandie transversalement
sivement vers le haut au bistouri électrique ou aux ciseaux en exerçant une traction divergente. Habituellement, cette
de Mayo. ouverture est non hémorragique et ne nécessite pas l'utili-
La même procédure est réalisée vers le bas. Les pyrami- sation du bistouri électrique. La description habituelle de
daux qui sont repérés doivent être si possible laissés acco- l'intervention comprend une hystérotomie segmentaire
lés aux muscles grands droits qui sont ensuite totalement sans incision préalable du péritoine viscéral ni décollement
séparés aux ciseaux jusqu'à leur insertion pubienne. vésico-utérin. L'hystérotomie est réalisée par l'opérateur au
L'ouverture du péritoine pariétal s'effectue le plus haut moyen de ses deux index en étirant latéralement les fibres
possible après saisie par deux pinces plates, réalisation d'un musculaires pour obtenir une hystérotomie transversale
pli transversal et vérification digitale de l'absence de vessie dite «par digitoclastie». Après l'extraction fœtale, la suture
ou d'anses digestives dans le pli. Une incision prudente du de l'hystérotomie se fait en un plan et le péritoine (pariétal
péritoine est alors réalisée aux ciseaux puis élargie vers le et viscéral) n'est pas suturé (figure 7.4).
haut dans la limite du décollement musculo-­aponévrotique
et vers le bas jusqu'à 1 cm de la vessie.
L'exposition du segment inférieur utérin ne nécessite en
Incision transversale selon Mouchel
général pas d'écarteur abdominal mais certains préfèrent Cette technique peut être très utile en cas d'antécédents
faciliter l'exposition par un écarteur de Gosset. La technique chirurgicaux (utérus uni- ou multicicatriciel, myomecto-
le plus souvent utilisée est celle de la mise en place d'une mie, etc.) lorsque l'abord est difficile en raison des nom-
valve sus-pubienne pour écarter la paroi vers le bas tandis breuses adhérences ou bien encore lorsqu'une très grande
qu'un écarteur de Hartmann réclinant le bord supérieur exposition est nécessaire.
permet d'avoir un jour suffisant sur le segment inférieur. L'abord jusqu'à l'aponévrose est le même que pour
l'incision de Pfannenstiel. L'incision est ensuite poursuivie
Incision transversale de Joël-Cohen transversalement sans décoller l'aponévrose des muscles
grands droits. Ce point est fondamental car la rétraction
adaptée par Stark des muscles gênerait ensuite leur cicatrisation.
Initialement décrite par Joël-Cohen dans les hystérecto- Les grands droits sont sectionnés au bistouri électrique
mies, elle a été adaptée en 1984 par Stark pour la césarienne (en coagulation) de dedans en dehors sur leur moitié
dans l'hôpital Misgav Ladach à Jérusalem. Ses avantages interne. L'abord du péritoine est réalisé avec les précautions
sont sa rapidité, sa simplicité et sa courbe d'apprentissage habituelles, le plus haut possible pour éviter la vessie et de
facile. Une revue de la Cochrane et une méta-analyse manière transversale.
incluant quatre essais randomisés trouvait une diminution La réparation est identique à celle des autres techniques.
des pertes sanguines, des infections du post-partum et des La suture des muscles droits n'est pas nécessaire en l'ab-
douleurs postopératoires [9]. De plus, aucune différence sence de décollement aponévrotique.
significative n'était observée concernant la survenue d'une
plaie vésicale d'un événement morbide postopératoire. Extraction
L'opérateur est placé à droite de la patiente et l'incision
se fait sur une largeur de 13 à 15 cm et à 3 cm au-dessous L'extraction du fœtus est le temps le plus délicat de l'inter-
de la ligne joignant les épines iliaques antéro-supérieures vention, car elle doit permettre une naissance atraumatique
soit, dans la description de l'intervention, un peu plus haut rapide sans agrandir involontairement l'hystérotomie ou
qu'en cas de Pfannenstiel. En pratique, une incision dans le générer un trait de refend ou une plaie vésicale.
pli permet aisément de réaliser l'intervention. Des traumatismes fœtaux sont rapportés dans envi-
L'incision est poursuivie dans sa région médiane hori- ron 1 % des césariennes : avec des fractures du fémur, de
zontalement sur 3 cm sur la graisse puis l'aponévrose l'humérus, des décollements épiphysaires, mais aussi des
(figure 7.3). On réalise alors une divulsion de la graisse et de paralysies du plexus brachial.
l'aponévrose par écartement digital avec, d'un côté, l'index L'extraction fœtale par césarienne peut nécessiter des
et le majeur de l'opérateur et, de l'autre, ceux de son aide. manœuvres particulières, cependant, lorsque le pôle fœtal
En miroir de nouveau on réalise une divulsion des muscles se présente au-dessus ou au niveau de l'incision, il n'y a en
grands droits en partant de la ligne blanche. Le péritoine général aucune difficulté pour extraire le fœtus après retrait
est ensuite crocheté pour réaliser une petite ouverture le de l'écarteur ou la valve sus-pubienne.

83
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

B
A

C
D

E
F
Figure 7.3.
L'incision de Joël Cohen modifiée par Starck (A à F).

84
Dr A.Amine Recherche7. bibliographique SCI-MED
Les techniques chirurgicales de la césarienne

A
Figure 7.4.
La suture de l'hystérotomie en un plan (A, B).

Présentation occipitale d'accès facile Application de forceps


Il n'y a pas de «disproportion» entre le pôle céphalique et Il suffit de disposer d'un petit forceps à branches croisées
l'incision d'hystérotomie : la main droite de l'opérateur, si celui- (Pajot ou Smellie) ou à branches convergentes (Suzor). Un
ci est à la droite de la parturiente, ou la main gauche dans le forceps doit être disponible dès le début de l'intervention
cas contraire, va contourner le pôle céphalique par le bas, tout dans la salle de césarienne.
en le soulevant vers l'avant et réalisant ensuite un véritable plan Les deux branches du forceps sont appliquées de façon
incliné que va emprunter le fœtus propulsé par la poussée fun- symétrique sur les joues (lorsqu'il s'agit d'une face) et sur les
dique transpariétale généralement exercée par l'aide (figure 7.5). bosses pariétales (lorsqu'il s'agit d'un sommet).
L'extraction est le plus souvent facile et permet, com-
Extraction d'un siège binée avec des mouvements d'asynclitisme se succédant
alternativement sur la droite et sur la gauche, d'arriver à
Quels que soient sa variété et son degré d'engagement, elle extraire la tête fœtale sans dommage utérin.
s'effectue selon le manuel opératoire classique d'une grande
extraction du siège. Les bras sont parfois relevés, nécessi- Application d'une ventouse
tant leur abaissement successif et le dégagement de la tête
peut exiger une manœuvre de Bracht ou de Mauriceau. Cette technique simple à utiliser permet de ne pas aug-
menter le volume de la présentation, diminuerait le risque
Aide instrumentale d'élargissement de l'hystérotomie et peut être utilisée
même quand la présentation est basse. La ventouse Kiwi,
Certaines difficultés d'extraction peuvent être résolues par qui est stérile, résout les problèmes d'asepsie posés par la
l'application d'un instrument. pompe à vide.

A B
Figure 7.5.
L'extraction du fœtus en présentation céphalique (A, B).

85
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Version podalique
Elle est utilisée en cas de présentation transverse ou en
cas de difficultés d'extraction fœtale en présentation
céphalique. Lorsque l'hystérotomie se trouve par exemple
au niveau du plan des épaules, il peut paraître beaucoup
plus facile et moins risqué d'extraire le fœtus par version :
la recherche des deux pieds est en général facile et l'ex-
traction du siège est suivie du dégagement aisé de la tête
(figures 7.6). Dans l'éventualité d'un oligoamnios ou d'une
rupture prolongée des membranes avec utérus moulé sur
le fœtus, une utérorelaxation à l'aide de dérivés nitrés peut A
être utile.

Délivrance
La délivrance placentaire peut comprendre une révision
utérine, ou une délivrance dirigée associant l'injection
d'ocytociques, le massage utérin et la traction du cordon.
La délivrance implique la perfusion d'ocytocine et inclut
souvent une traction du cordon et un massage utérin. Elle
est associée à un risque plus faible d'HPP [10].

Exploration de la cavité
B
et de la fermeture
La qualité de la rétraction utérine est vérifiée manuellement
et peut nécessiter l'adjonction d'ocytociques. Une toilette
péritonéale est réalisée au niveau des gouttières pariéto-
coliques à l'aide d'un champ et/ou d'une aspiration en
s'aidant d'un écarteur de Hartmann.
La toilette péritonéale au sérum physiologique n'est pas
recommandée. On réalise un compte des champs et des
compresses.
Il est possible de réaliser un rapprochement musculaire
dans les incisions de type Pfannenstiel et dérivés mais la suture
musculaire en cas de technique de Mouchel est inutile.
La fermeture des feuillets aponévrotiques est réalisée
avec un point d'angle du côté de l'opérateur et un surjet C
de Vicryl® 1 en partant de l'angle opposé. Cette suture
doit être soigneuse pour éviter les risques d'éventration. Figure 7.6.
La paroi supérieure et inférieure peuvent être alors infil- L'extraction du fœtus en présentation podalique (A à C).
trées par un anesthésiant de longue durée d'action type
Naropéine®.
la technique utilisée, les difficultés rencontrées, le poids
Le compte-rendu opératoire et l'état de l'enfant ainsi que tous les renseignements
pouvant être utiles pour la prochaine grossesse. Des
L'opérateur réalise à la fin de l'intervention un compte- formats types de compte-rendu ont été proposés par
rendu opératoire précisant l'indication de la césarienne, le CNGOF.

86
Dr A.Amine Recherche7. bibliographique SCI-MED
Les techniques chirurgicales de la césarienne

Compte-rendu opératoire ■
Fermeture aponévrotique : type de suture et
type CNGOF type des fils ;

Drainage sous-aponévrotique :
Données administratives obligatoires devant figurer – absence de drainage sous-aponévrotique ;
dans le compte-rendu opératoire de la césarienne – drainage sous-aponévrotique par des redons
Le compte-rendu doit comporter le nom et les aspiratifs ou non.
coordonnées de l'établissement. ■
Fermeture cutanée : agrafes ou suture (surjet
Le compte-rendu doit être concis et précis. ou points séparés de Blair-Donati, surjet intrader-
Il doit comporter par ailleurs : mique) et types de fils (marque et calibre).

les noms (dont nom de naissance), prénom et ■
Aspect des urines en fin d'intervention.
date de naissance de la patiente ; ■
Volume total des pertes sanguines estimées en

la date d'intervention ; fin de césarienne. Transfusion (oui, non. Si oui,

le nom du ou des opérateurs/anesthésistes (avec types et quantité des produits).
leur grade ou statut) et des aides. ■
Qualité du globe utérin.

Aspect macroscopique du placenta et du cor-
Données médicales devant figurer dans le compte-
rendu opératoire de la césarienne don (notamment anomalie de longueur).
Indication, gestité, parité

Examen anatomopathologique ou bactériolo-

Le nombre de cicatrices utérines éventuelles. gique demandé.

Le terme au moment de la césarienne (en SA et Horodatage
jours selon la convention du CNGOF). ■
Heure de la décision en cas de césarienne en

Le type de césarienne (programmée/en travail/ urgence, de l'incision cutanée de la naissance et de
en urgence), la dilatation du col si en travail. la fin d'intervention ou durée d'intervention (en

L'indication. minutes).
Description de la césarienne Proposition éventuelle pour une prochaine

Type et moment de l'antibioprophylaxie. grossesse

Type d'anesthésie. Noter éventuellement une conduite à tenir préco-

Type du sondage vésical (à demeure ou non). nisée pour la grossesse suivante.

Type d'abord pariétal : Joël Cohen, Pfannenstiel, Validation du compte-rendu opératoire
Mouchel (transversale avec section des muscles Tout compte-rendu opératoire diffusé ou archivé
grands droits), médiane sous-ombilicale, doit être validé via une signature de l'opérateur.
vaginale. (Signature manuscrite ou électronique).

Préciser les éventuelles difficultés ou particulari- Une copie validée doit être remise à la patiente.
tés de l'abord utérin et si un décollement vésical a
été réalisé.

Type d'hystérotomie, refends, difficultés éventuelles. Césarienne selon la technique de

Liquide amniotique (aspect, quantité). Stark

Extraction : présentation, difficultés, manœuvres.
L'enfant : sexe, Apgar, poids, pH artériel. Opérateur à droite de la patiente

Délivrance : dirigée ou manuelle. Révision utérine. Incision sur une largeur de 13 à 15 cm et à 3 cm
Si dirigée : produit, dose et voie d'administration. au-dessous de la ligne joignant les épines iliaques

Hystérorraphie : type de suture et sur les déchi- antéro-supérieures.
rures éventuelles (surjet, points en X, simples sépa- Divulsion de la graisse et de l'aponévrose par écar-
rés ; un ou deux plans), type de fils utilisés (marque tement digital avec d'un côté l'index et le majeur
et calibre). de l'opérateur et de l'autre ceux de son aide

Décrire les annexes et l'utérus. Divulsion des muscles grands droits en partant de

Toilette péritonéale. la ligne blanche.

Fermeture du péritoine (oui/non). Une ouverture la plus haute possible est réalisée

Qualité de l'hémostase en fin d'intervention. en crochetant le péritoine. Elle est agrandie trans-

Compte des compresses. versalement en exerçant une traction divergente.

87
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Mise en place d'une valve sus-pubienne pour avoir ­ ostopératoire, abcès de paroi, endométrite et réhos-
p
accès au segment inférieur. On réalise une courte pitalisation (6,5–9 % ; risque relatif [RR] : 0,55 ; IC 95 % :
incision à 2 cm au niveau du repli vésico-utérin 0,26–1,11) [12]. Une méta-analyse de la Cochrane a repris
jusqu'au bombement des membranes. les résultats de quatre essais randomisés et montré que
L'hystérotomie transversale est poursuivie par l'antisepsie vaginale réduisait par deux le risque d'endo-
digitoclastie. métrite postopératoire (9,4–5,2 % ; RR : 0,57 ; IC 95 % :
Après extraction de l'enfant et une délivrance de 0,38–0,87) et par huit pour le groupe des patientes qui
préférence dirigée, l'utérus est extériorisé hors de avaient une rupture des membranes (15,4–1,4 % ; RR :
la cavité abdominale. 0,13 ; IC 95 % : 0,02–0,66) [13].
L'hystérorraphie est réalisée en un plan avec un
surjet de fil résorbable 1, auquel on peut rajouter
des points en X ou en U si l'hémostase n'est pas Décollement vésico-utérin
satisfaisante. La réalisation d'un décollement vésico-utérin est discu-
L'exposition peut, rarement, être insuffisante pour tée. Deux essais ont été réalisés portant respectivement
l'extraction aisée du fœtus et il peut être néces- sur 102 et 258 femmes sans [14], ou avec un antécédent
saire de compléter l'ouverture par une section de césarienne [15]. L'absence de décollement était asso-
musculaire partielle. ciée à un temps opératoire plus court, à une diminution
La fermeture est réalisée sans suture des feuillets des douleurs postopératoires et à une réduction des
péritonéaux ni point de rapprochement muscu- saignements.
laire. L'aponévrose est fermée avec un surjet de fil
résorbable type Vicryl® 1 en commençant avec un
point d'arrêt du côté de l'opérateur avec un point Type d'hystérotomie
inversant de sorte que le nœud se retrouve sous
l'aponévrose. Il est nécessaire avant de réaliser une césarienne de
En dehors des pédicules adipeux importants, le connaître la localisation placentaire pour pouvoir antici-
tissu sous-cutané n'est en général pas suturé. La per les placentas bas insérés ainsi et le risque de placenta
peau est affrontée avec au choix de l'opérateur du accreta.
fil ou des agrafes. Classiquement, l'incision est segmentaire transversale,
dans la direction des fibres et des vaisseaux myométriaux et
adaptée à la hauteur du pole fœtal. Une incision trop basse
peut rendre la suture difficile et expose à une plaie vésicale
Particularités techniques : revue en cas de trait de refend.
La réalisation de l'hystérotomie est initiée avec pré-
de la littérature détaillant les caution au bistouri froid. L'introduction dans la cavité
différents éléments techniques utérine peut être réalisée au bistouri, ou à la pince, ou
encore au doigt quand le myomètre incisé devient suf-
Antisepsie préopératoire fisamment fin pour le permettre. L'élargissement de
l'incision est réalisé par traction latérale par un doigt
L'antisepsie cutanée chirurgicale est systématique. L'anti- de chaque côté de l'incision ou aux ciseaux. Cela dimi-
sepsie vaginale est moins souvent pratiquée dans les nuerait le risque hémorragique en comparaison avec la
services alors qu'il existe plusieurs essais qui montrent section aux ciseaux [16]. Ces résultats n'ont cependant
son intérêt pour prévenir le risque d'infection postopé- pas été confirmés par l'essai CORONIS [2, 3]. Ce large
ratoire, en particulier d'endométrite. Un essai réalisé chez essai international randomisé ouvert a testé cinq inter-
300 femmes a montré que l'antisepsie vaginale rédui- ventions dont l'hystérotomie au ciseau (n = 4628) ou
sait le risque d'endométrite postopératoire (7–14,5 % ; aux doigts (n = 4619). Les auteurs n'ont pas trouvé de
adjusted odds ratio [ORa] : 0,44 ; intervalle de confiance différence entre les groupes pour tous les critères de
[IC] 95 % : 0,19–0,99) mais pas le risque d'abcès de paroi jugement étudiés incluant les taux d'HPP (transfusion,
ou d'hyperthermie postopératoire [11]. Un autre essai chirurgie de seconde ligne pour HPP), d'infection du
montrait une diminution non significative du risque de post-partum. De même, les temps opératoires étaient
survenue d'un indice composite incluant hyperthermie très proches dans les deux groupes.
88
Dr A.Amine Recherche7. bibliographique SCI-MED
Les techniques chirurgicales de la césarienne

Une méthode d'hystérotomie utilisant la traction Hystérorraphie


céphalo-caudale aux doigts plutôt que latérale a récem-
ment été testée à l'aide d'un essai randomisé incluant Extériorisation de l'utérus
811 femmes et a montré une diminution du risque de trait
La réalisation de la suture utérine doit garantir une bonne
de refend et d'hémorragie du post-partum [17].
solidité pour les grossesses futures. Les deux berges mus-
En cas de difficultés d'extraction, il est parfois nécessaire
culaires doivent être parfaitement jointives et il ne doit pas
de réaliser une incision segmento-corporéale vers le haut
exister d'interposition de muqueuse ou de séreuse, ce qui,
en T ou en J dont il ne faudra pas omettre de le mettre
selon certains auteurs, fragiliserait la cicatrice et exposerait
dans le compte-rendu opératoire en raison de la fragilité
au risque d'endométriose. Elle peut être réalisée avec ou sans
potentielle de la cicatrice lors des grossesses suivantes.
extériorisation de l'utérus. Ce choix dépend des équipes et
L'incision corporéale verticale possède de rares indica-
n'avait été que très peu évalué avant l'étude Coronis [2,
tions (prématurité, utérus polyfibromateux) et doit être
25]. Il permettrait d'avoir un bon contrôle de la rétraction
évitée car sa solidité n'autorise pas une voie basse pour la
utérine et d'avoir une exposition plus satisfaisante mais
grossesse suivante. Ce type d'incision garde cependant des
augmenterait les vomissements en cas d'anesthésie locoré-
indications et des incisions utérines corporéales sont encore
gionale. Dans la technique de Stark, l'utérus est extériorisé.
réalisées en cas de grande prématurité lorsque le segment
L'exposition est assurée par deux pinces en cœur placées
inférieur n'est pas amplié, ou dans les situations avec des
sur les berges supérieures et inférieures. On débute par la
présentations transverses, en siège, ou un placenta praevia
réalisation de deux points en X au niveau des angles.
ou, enfin, lorsque certaines malformations utérines ou un
Néanmoins, l'étude CORONIS a permis récemment
contexte adhérentiel rendant l'accès au segment inférieur
d'évaluer un peu mieux cette pratique. Elle montre que
impossible [18]. Lorsque l'incision corporéale est nécessaire
la vitesse de réalisation opératoire, le risque d'hémorragie
parce que le segment inférieur n'est pas du tout amplié, le
du post-partum ou d'infection postopératoire est compa-
point de départ de l'incision est alors souvent segmentaire
rable, que les patientes aient une extériorisation de l'utérus
vertical avec une extension dans le corps utérin. Néanmoins,
(n = 4899) ou non (n = 4896) [2, 3].
des études anciennes ont montré un risque de 4 à 9 % de
rupture utérine lors d'une grossesse ultérieure [19–21].
Même si les conditions dans laquelle le travail était conduit
Fermeture de l'hystérorraphie par suture
ne sont pas clairement précisées dans ces publications, ce simple ou suture double
surrisque conduit à proposer une césarienne itérative en La fermeture utérine peut utiliser un surjet simple, passé ou
cas d'antécédent de césarienne corporéale. Cette pratique non et être réalisée en un ou deux plans.
semble d'autant plus justifiée que le pronostic d'une rup- L'impact de la suture utérine (simple versus double) a été
ture utérine corporéale semble associée à un plus mauvais étudié par un large essai [26] et une méta-analyse [27]. Le
pronostic néonatal et maternel que lorsqu'il s'agit d'une pronostic à court terme incluant la morbidité infectieuse,
rupture utérine sur une cicatrice segmentaire transversale l'hémorragie du post-partum ou la réhospitalisation étaient
[22] (NP4). comparables quel que soit le type de suture réalisé. L'essai
En cas d'antécédent de césarienne corporéale, des tra- CORONIS qui incluait respectivement 4639 (une suture)
vaux récents ont exploré l'aspect de la cicatrice de césa- et 4647 (double suture) femmes confirmait ces données et
rienne lors de la césarienne itérative suivante [23, 24]. trouvait un temps médian de réalisation de la césarienne
L'étude la plus récente a inclus 157 femmes qui ont eu une comparable dans les deux groupes (40 min [IQ : 30-47] ver-
césarienne itérative après un antécédent de césarienne sus 40 min [IQ : 30-50]) [2, 3].
avec incision corporéale [23]. Les auteurs ont trouvé 15 Le risque de rupture utérine ultérieur a également été
(9 %) déhiscences. Dans cette série, les complications pero- évalué. Neuf études rétrospectives observationnelles et
pératoires survenues lors des césariennes itératives étaient deux essais randomisés ont analysé le risque de rupture
essentiellement une effraction digestive dans trois cas utérine lors de la grossesse suivante en fonction du type de
(2 %). Une rupture utérine spontanée est survenue à 29 SA fermeture de l'hystérotomie [28–34] (CORONIS). Les élé-
et a entraîné le décès néonatal. ments analysés ont été le nombre de plans (un versus deux),
L'incision segmentaire verticale (incision de Krönig) le type de fil utilisé (catgut ou acide polyglycolique ou poly-
est abandonnée. Elle nécessite un décollement vésical capron) et la fermeture par des points fermés (points en X
beaucoup plus important et exposerait à un risque de plaie ou surjets passés) versus points ouverts (surjets non passés,
vésicale supérieur. points simples). Les neuf études rétrospectives présentent
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Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

des faiblesses méthodologiques (effectifs réduits, biais que le taux de patientes algiques à six semaines (2 versus
d'indications comme celui de la réalisation en un plan qui 2 %). Le suivi à trois ans a également été évalué en cas de
peut dépendre de l'épaisseur du segment inférieur ou du fermeture versus non fermeture du péritoine. Respective-
chirurgien) et ne permettent pas de conclure sur la tech- ment, les taux de douleurs pelvienne (5 versus 6 % ; ORa :
nique à utiliser. Deux essais randomisés ont été publiés [2, 0,9 ; IC 95 % : 0,75–1,08), de complications digestives (deux
34]. L'objectif était de comparer les suites immédiates en cas versus un cas) ou d'infertilité secondaire (2 versus 3 % ;
comparant la fermeture en un plan versus en deux plans ORa : 0,80 ; IC 95 % : 0,61–1,06) étaient comparables selon
puis le pronostic obstétrical lors de la grossesse suivante que les patientes aient eu une fermeture (n = 4036) ou
[34]. Aucune rupture utérine complète n'est survenue dans non du péritoine (n = 4087).
les deux groupes, respectivement de 70 et 75 femmes, mais
la puissance de l'essai n'était pas suffisante pour montrer
une différence entre les deux groupes. Plus récemment, les
Fermeture de la paroi
résultats du suivi à trois ans de l'étude CORONIS ont été Chez les patientes présentant une paroi épaisse, il peut être
publiés [2]. Le taux d'accouchement par voie basse n'était envisagé des points de rapprochement du fascia superficia-
que de 19 et 18 % respectivement dans les deux groupes lis pour éviter une désunion.
suture simple (n = 1611) versus suture double (n = 1623). Un surjet intradermique, des agrafes, des points séparés,
Les risques de complication obstétricale incluant rupture voire une colle biologique peuvent être utilisés pour la fer-
utérine, déhiscence, placenta praevia, hématome rétropla- meture de la paroi. Néanmoins, une méta-analyse publiée
centaire, hémorragie du post-partum étaient comparables en 2014 et incluant 3112 femmes montre que si la suture
dans les deux groupes. Une rupture utérine est survenue cutanée par un surjet intradermique rallonge le temps opé-
dans le groupe suture simple versus deux dans le groupe ratoire, il semble qu'elle soit associée à moins de désunions
suture double. cutanées (RR : 0,29 ; IC 95 % : 0,20–0,43) [38].
En conclusion, l'utilisation des deux techniques (suture
simple ou double) pour fermer l'hystérotomie sont possibles
et présentent des résultats à court et à long termes équivalents.
Cas particuliers
La césarienne est une intervention simple et bien standar-
Suture du péritoine viscéral disée. Cependant, dans certaines conditions, la réalisation
On ne réalise en général plus la suture du péritoine viscéral technique peut être difficile et nécessite un opérateur averti
qui provoque une ascension de la vessie. La non-­fermeture et expérimenté.
du péritoine pariétal est préconisée par de nombreux
opérateurs. Elle est associée à une diminution du temps Césarienne à dilatation complète
opératoire et du risque de fièvre du post-partum [35].
Sur le long terme, une étude prospective comparative La césarienne à dilatation complète est une césarienne dif-
trouvait un risque plus élevé d'adhérences [36]. Ce résul- ficile car il y a un continuum entre le segment inférieur, le
tat n'a cependant pas été confirmé par un essai rando- col et le vagin.
misé portant sur 97 femmes pour lesquelles la présence L'hystérotomie doit être réalisée en prenant garde de
d'adhérence était évaluée lors de la deuxième césarienne ne pas être trop bas pour éviter de se situer sur le col,
[37]. Plus récemment, ont été publiés les résultats de l'essai voire le vagin avec des risques d'extension vers le liga-
CORONIS [2]. Les groupes « suture du péritoine pariétal ment large, les pédicules ou la vessie. Le risque est de
et viscéral » (n = 4824) ont été comparés à l'absence de se retrouver sur l'épaule ou le thorax, d'avoir éventuel-
fermeture (n = 4851) avec un suivi à court terme et à lement une procidence du bras difficile à réintégrer et
trois ans. À court terme (<6 semaines), les auteurs n'ont l'extraction peut alors se révéler difficile. Il est possible à
observé aucune différence entre les groupes pour les taux dilatation complète de demander à un aide de remonter
d'infection du post-partum, d'hémorragie du post-partum la présentation par voie vaginale sous les champs. L'opé-
ou la réalisation d'une reprise opératoire quelle qu'en soit rateur peut y associer un appui sur l'épaule d'une main
la cause. Le taux de patientes qui nécessitait une analgé- en glissant délicatement l'autre main pour remonter la
sie additionnelle à 48 heures du post-partum était com- tête sans mouvement de levier pour prévenir un trait de
parable dans les deux groupes (5 versus 5 %), de même refend.
90
Dr A.Amine Recherche7. bibliographique SCI-MED
Les techniques chirurgicales de la césarienne

Il est préférable dans cette situation de réaliser un décol-


lement vésico-utérin systématique en raison de la fréquence
des traits de refend verticaux.

Césarienne en cas d'obésité morbide


L'épaisseur de la paroi graisseuse abdominale rend l'expo-
sition difficile et peut poser de réelles difficultés lors de
l'extraction fœtale même pour des nouveau-nés de petit
poids. De plus, la morbidité maternelle est augmentée
dans la période postopératoire avec une augmentation
du risque d'infections de paroi et d'éventrations. La table
opératoire doit pouvoir supporter le poids de la patiente
qui est placée en décubitus latéral gauche de 15° avec un
léger proclive.
L'incision médiane sous-ombilicale n'est pas recomman-
dée car elle expose aux risques d'éventration, est plus dou-
loureuse et majore les complications respiratoires.
Trois techniques sont le plus souvent décrites. Si l'opé-
rateur veut procéder à une incision au niveau des repères
anatomiques classiques, il faut envisager alors de mainte-
nir le tablier graisseux en réalisant une contention par des A
bandes collantes élastiques de type Élastoplaste®. Deux
bandes sont placées sur les flancs latéraux de la patiente et
maintenues par une bande circulaire située à distance de la
zone opératoire. On pratiquera la désinfection une fois les
bandes posées.
Certaines équipes évitent de choisir les repères clas-
siques d'incisions car la peau y est plus fine et souvent le
siège d'un intertrigo qui expose à des complications de
cicatrisation. Une incision transversale sous-ombilicale
(voire sus-­ombilicale en cas de ptose du tablier graisseux
très importante) quelques centimètres au-dessus de la
ligne qui passe par les deux épines iliaques antéro-supé-
rieure est utilisée [39] (figure 7.7). Dans cette incision,
l'épaisseur du tissu adipeux est plus faible et les soins B
de cicatrices sont facilités. En suivant ces repères, l'opé- Figure 7.7.
rateur obtient un accès direct au segment inférieur de Cas particulier de l'obèse (A, B).
l'utérus.
Enfin, une aide précieuse lorsque le matériel est dis- plus important de désunion et d'infection de cicatrices lors
ponible est d'utiliser un écarteur à usage unique circu- de l'utilisation d'agrafes par rapport au fils [15, 40].
laire autostatique. Ce type d'écarteur permet d'élargir de
manière circonférentielle l'incision et permet un meilleur Placenta praevia antérieur
accès à la cavité abdominale.
Le risque de macrosomie incite à la réalisation d'un La particularité de la césarienne en cas de placenta praevia
abord large et d'avoir à disposition un forceps ou une ven- antérieur tient à l'hystérotomie. Elle suppose d'avoir repéré
touse dans le bloc. avec soin la position du placenta qui peut être antérieur
La suture cutanée est réalisée à l'aide de points séparés. avec une languette qui descend sur le trajet de l'hystéroto-
Deux méta-analyses publiées en 2011 retrouvent un risque mie ou recouvrant avec une partie qui remonte sur le t­ rajet

91
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Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

de l'hystérotomie. Deux techniques sont alors possibles.


Soit une incision transplacentaire est réalisée suivie rapide-
ment d'une extraction de l'enfant. Cette technique expose
à un risque d'hémorragie fœtomaternelle. Le placenta
est décollé vers le bas ou vers le haut, selon la position
du placenta permettant l'accès aux membranes. Celles-ci
peuvent alors être rompues au doigt, permettant l'accès au
fœtus. Ward a décrit sur trois cas une technique permet-
tant de réduire le risque de saignement [41] (figure 7.8).
Elle consiste à repérer par échographie préopératoire
­l'insertion ­placentaire avec précision puis, lors de l'hystéro-
tomie, à décoller rapidement le placenta en direction des
membranes qui sont alors attirées à la pince vers l'hysté-
rotomie puis incisées permettant l'extraction de l'enfant.
Une étude rétrospective française historique a comparé
­successivement un p ­ rotocole chirurgical transplacentaire
(n = 43) puis par refoulement du placenta (n = 41). Les
auteurs ont montré que l'utilisation d'une technique par
refoulement était associée à une réduction du risque
hémorragique maternel (delta hémoglobine de 2,4 versus A
1,6 g/dl ; p < 0,01) et du risque d'anémie néonatale (18,6
versus 0 % ; p < 0,01) (NP3) [42].

Placenta accreta
L'attitude consensuelle concernant le placenta accreta est
de ne pas tenter une délivrance forcée qui peut provo-
quer une hémorragie cataclysmique [43]. Deux types de
prise en charge sont possibles : la césarienne associée à
une hystérectomie et un traitement conservateur consis-
tant en l'abandon du placenta dans la cavité utérine sans
hystérectomie. La difficulté de ces prises en charge est
qu'il n'existe pas de technique diagnostique qui permette
d'avoir l'assurance totale de la présence ou non d'un pla-
centa accreta.
Quelle que soit la méthode utilisée, le plateau technique
doit être suffisant. Les équipes anesthésique et chirurgicale
doivent être adaptées à la difficulté potentielle de l'interven-
tion. Le centre hospitalier doit être équipé d'une banque du
sang, d'un plateau de radiologie interventionnelle et d'une B
réanimation maternelle.
Figure 7.8.
L'information de la patiente et de sa famille des risques
Abord de la cavité amniotique par décollement placentaire en
de complication du placenta accreta est nécessaire. cas de placenta praevia (technique de Ward) (A, B).
L'âge gestationnel de l'accouchement est discuté
selon la symptomatologie, au cas par cas. Les auteurs patiente est totalement asymptomatique, il semble pré-
anglo-saxons proposent un accouchement à partir de férable de ne pas dépasser le terme de 38 SA pour que
34–35 SA pour diminuer le risque d'hémorragie sévère l'accouchement puisse être programmé dans des condi-
[44]. Mais ces recommandations reposent sur des études tions techniques optimales et éviter le risque d'hémor-
rétrospectives et de faible niveau de preuve. Lorsque la ragie sévère [45].
92
Dr A.Amine Recherche7. bibliographique SCI-MED
Les techniques chirurgicales de la césarienne

Césarienne et hystérectomie avec une augmentation du risque infectieux maternel


(figure 7.9). Cette prise en charge conservatrice a égale-
Ce thème est détaillé dans un chapitre dédié.
ment été décrite dans de nombreux « case report », qui
permettaient de souligner en particulier le risque de com-
Prise en charge du placenta accreta plications hémorragiques et infectieuses [51]. Deux autres
sans hystérectomie séries françaises ont décrit les cas de placenta accreta pris
L'hystérectomie entraîne une stérilité définitive. De plus, sa en charge par un traitement conservateur. Bretelle et al.
réalisation dans un contexte de placenta accreta/percreta obtiennent, avec cette prise en charge chez 26 femmes,
peut s'accompagner d'une morbidité élevée et comporter un taux d'hystérectomies de 19 % [48]. Sentilhes et al.
un risque vital. Pour tenter de minimiser ces complications, ont repris dans une étude nationale 167 cas de placenta
particulièrement quand un désir de grossesse ultérieur accreta rapportés par les centres et traités de manière
est exprimé par la patiente, une alternative thérapeutique conservatrice. Le taux d'hystérectomie est de 22 % et celui
conservatrice peut être proposée [46–49]. de morbidité maternelle sévère de 6 %. Une mort mater-
nelle a été observée chez une patiente présentant un
tableau d'aplasie, de néphrotoxicité et de choc septique
Traitement conservateur avec abandon
(péritonite) trois mois après l'injection de méthotrexate
du placenta dans la cavité utérine
dans le cordon ombilical. La vacuité utérine était obtenue
Une étude a comparé une stratégie extirpative et un trai- spontanément dans 75 % des cas après un délai médian
tement conservateur réalisés consécutivement sur deux de 13,5 semaines (4–60 semaines). Une résection hystéros-
périodes différentes [43, 47, 50]. Elle montre une diminu- copique et/ou un curetage ont dû être réalisés pour obte-
tion du risque hémorragique et du taux d'hystérectomie nir une vacuité utérine dans 25 % des cas avec un délai
en comparaison avec une prise en charge extirpative, mais médian de 20 semaines (2–45 semaines) [49].

Suspicion prénatale de placenta accreta


(placenta praevia + antécédent de césarienne)
+ échographie ± IRM

Discussion avec la patiente, staff

Césarienne
Désir maternel de fertilité Non et hystérectomie
Placenta percreta avec réalisation d'une césarienne en cas de confirmation
Hystérectomie semblant dangereuse diagnostique
peropératoire

Césarienne :
Localisation échographique précise du placenta
Hystérotomie verticale à distance du placenta
Extraction fœtale

Essai prudent de délivrance placentaire avec l'injection Succès : placenta


de 5 UI d'ocytocine et une traction modérée du cordon normalement inséré

Échec : confirme le diagnostic de placenta accreta

Section du cordon ombilical


Fermeture de la cavité utérine

– Sulprostone (8,3 mL/h)


– Antibiothérapie pendant 10 jours
– Au moindre doute sur un saignement, même peu important,
embolisation des artères utérines

Suivi régulier jusqu'à résorption complète du placenta :

– Examen clinique (saignements, température, douleurs pelviennes)


– Taux d'hémoglobine, leucocytose, C Reactive Protein, prélèvement
vaginal à visée bactériologique
– Échographie (taille de la rétention utérine)

Figure 7.9.
Prise en charge conservatrice du placenta accreta.

93
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Une description de la procédure a été proposée (uni- [2] Abalos E, Addo V, Brocklehurst P, El Sheikh M, Farrell B, Gray S,
quement à titre indicatif) [52] : et al. Caesarean section surgical techniques: 3 year follow-up of the
CORONIS fractional, factorial, unmasked, randomised controlled

en cas de découverte lors de la délivrance, la révision trial. Lancet 2016;388(10039):62–72.
utérine n'est pas forcée. Le placenta adhérent est laissé en [3] Abalos E, Addo V, Brocklehurst P, El Sheikh M, Farrell B, Gray S,
place partiellement ou en totalité, si l'état hémodynamique et al. Caesarean section surgical techniques (CORONIS): a frac-
est stable et qu'il n'y a pas de signes cliniques ou biologiques tional, factorial, unmasked, randomised controlled trial. Lancet
2013;382(9888):234–48.
d'infections ;
[4] Weed S, Bastek JA, Sammel MD, Beshara M, Hoffman S, Srinivas SK.

quand le placenta accreta est fortement suspecté avant Comparing postcesarean infectious complication rates using two
l'accouchement sur l'existence de facteurs de risque et different skin preparations. Obstet Gynecol 2011;117(5):1123–9.
d'une imagerie en faveur du diagnostic, la prise en charge [5] Wylie BJ, Gilbert S, Landon MB, Spong CY, Rouse DJ, Leveno KJ,
inclut alors les étapes suivantes. La position du placenta et al. Comparison of transverse and vertical skin incision for emer-
gency cesarean delivery. Obstet Gynecol 2010;115:1134–40.
est déterminée avec précision par échographie. Une césa- [6] McLean M, Hines R, Polinkovsky M, Stuebe A, Thorp J, Strauss R.
rienne est programmée comportant une incision cutanée Type of skin incision and wound complications in the obese partu-
médiane élargie en sus-ombilical si cela était nécessaire. rient. Am J Perinatol 2012;29:301–6.
L'abord utérin se fait par une incision médiane à distance [7] Hofmeyr GJ, Mathai M, Shah A, Novikova N. Techniques for cae-
sarean section. Cochrane database of systematic reviews (Online)
du lit placentaire. Après l'extraction de l'enfant, une tenta-
2008;(1).
tive prudente de délivrance du placenta est réalisée en cas [8] Querleu D. Technique chirurgicales en gynécologie. 1998. Paris.
de doute, son échec permettant de confirmer le diagnostic. [9] Mathai M, Hofmeyr GJ, Mathai NE. Abdominal surgical incisions
Dans ce cas, le cordon est sectionné au ras de l'insertion for caesarean section. Cochrane database of systematic reviews
placentaire et la cavité utérine est refermée. Pour tenter de (Online) 2013;(5).
[10] Anorlu RI, Maholwana B, Hofmeyr GJ. Methods of delivering the
diminuer le risque infectieux, une antibiothérapie posto- placenta at caesarean section. Cochrane database of systematic
pératoire (amoxicilline et acide clavulanique) pendant dix reviews (Online) 2008;(3).
jours à titre prophylactique peut être administrée, en parti- [11] Starr RV, Zurawski J, Ismail M. Preoperative vaginal preparation with
culier en cas de rupture prématurée des membranes ; povidone-iodine and the risk of postcesarean endometritis. Obstet
Gynecol 2005;105(5 Pt 1):1024–9.

le suivi ultérieur de ces patientes est ensuite réalisé de
[12] Haas DM, Pazouki F, Smith RR, Fry AM, Podzielinski I, Al-Darei SM,
manière hebdomadaire jusqu'à la résorption complète du et al. Vaginal cleansing before cesarean delivery to reduce posto-
placenta. Il comprend un examen clinique, une échogra- perative infectious morbidity: a randomized, controlled trial. Am J
phie pelvienne et un bilan biologique à la recherche d'une Obstet Gynecol 2010;202. 310.e1-6.
infection débutante (prélèvement vaginal et C reactive [13] Haas DM, Morgan S, Contreras K. Vaginal preparation with anti-
septic solution before cesarean section for preventing postopera-
protein). Une prise en charge psychologique peut aussi être tive infections. Cochrane database of systematic reviews (Online)
proposée dans ce contexte très anxiogène. 2014;(12).
[14] Hohlagschwandtner M, Ruecklinger E, Husslein P, Joura EA. Is the
formation of a bladder flap at cesarean necessary ? A randomized
trial. Obstet Gynecol 2001;98:1089–92.
Conclusion [15] Tuuli MG, Odibo AO, Macones GA. Utility of the bladder flap at
cesarean delivery: a randomized controlled trial. Obstet Gynecol
La césarienne est en principe une intervention simple et bien 2012;120:709.
[16] Magann EF, Chauhan SP, Bufkin L, Field K, Roberts WE, Martin Jr.
codifiée. Le risque d'hémorragie du post-partum, les rapports JN. Intra-operative haemorrhage by blunt versus sharp expansion
anatomiques avec la vessie et l'uretère, l'impact des techniques of the uterine incision at caesarean delivery: a randomised clinical
utilisées sur le pronostic obstétrical utilisé impliquent de la trial. BJOG 2002;109:448–52.
part de l'opérateur une réelle vigilance. Enfin, certains aspects [17] Cromi A, Ghezzi F, Di Naro E, Siesto G, Loverro G, Bolis P. Blunt
expansion of the low transverse uterine incision at cesarean deli-
techniques ont réellement fait la preuve d'une efficacité pour
very: a randomized comparison of 2 techniques. Am J Obstet
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95
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Chapitre 8
Rupture utérine
X. Deffieux, H. Fernandez, M.-V. Senat, A. Benachi

PLAN DU C HAPITRE
Diagnostic 97
Décision thérapeutique 97
Techniques de réparation 97
Devenir obstétrical 97
Conclusion 97

Chirurgie en obstétrique
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Dren A.Amine
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Points forts du chapitre maternelle liée à ces ruptures utérines sur utérus cicatriciel
La réparation chirurgicale d'une rupture utérine est une est très basse dans les pays développés, bien inférieure à
circonstance rare. celle qui serait associée à une politique de césarienne sys-
Il existe une multiplicité des types de rupture (étiologie, tématique de toutes les femmes ayant un utérus cicatriciel
localisation, épaisseur de la paroi utérine restante, etc.). [2]. En dehors de l'utérus cicatriciel et des manœuvres, les
Compte tenu de la multiplicité de ces types de rupture et autres facteurs de risque sont la grande multiparité, l'âge,
de leur rareté, les différentes techniques de réparation une dystocie dynamique (durée du travail dépassant
possibles (surjet versus points séparés, un plan versus 15 heures) ou de présentation (épaule, transverse, front),
deux plans, type de fil, etc.) n'ont pas été comparées les une disproportion fœtopelvienne (macrosomie, hydro-
unes par rapport aux autres. céphalie, etc.) et l'usage d'utérotoniques (ocytocine) [3].
La ligature des artères hypogastriques ou utérines ne
doit pas être systématique dans le cas d'une réparation
de rupture utérine. Diagnostic
L'hystérectomie ne doit plus être systématique après
rupture utérine.
Il ne faut pas réaliser de technique hémostatique
Classification
complémentaire « systématique » car celle-ci peut en La définition d'une rupture utérine complète (vraie) cor-
théorie altérer la vascularisation et donc le phénomène respond à l'existence d'une déchirure de l'ensemble des
de cicatrisation au niveau de la suture de la rupture. couches tissulaires (péritoine, myomètre et endomètre).
Le risque de récidive de la rupture utérine est de Elle peut s'étendre à la vessie ou au ligament large (rupture
l'ordre de 10 % lors d'une prochaine grossesse (rupture latérale à risque de plaie du pédicule utérin), survenant
spontanée ou lors de la mise en travail). Une césarienne pendant la grossesse ou le travail (figure 8.1A). Une rup-
systématique avant mise en travail sera donc proposée
ture utérine incomplète (déhiscence) est une déchirure
si une nouvelle grossesse survient.
ou une solution de continuité qui touche l'endomètre
et le myomètre sans atteinte de la séreuse péritonéale
Dans le monde, la prévalence des ruptures utérines est
(figure 8.1B) [4].
estimée à 0,05 % des grossesses en population générale [1].
Cette prévalence est beaucoup plus élevée, de l'ordre de
0,1 %, dans les pays en voie de développement où ce sont Facteurs de risque
surtout des dystocies qui en sont la cause (stagnation du
travail pendant de nombreuses heures) et où seulement Pour ne pas «passer à côté» du diagnostic, la priorité est
un tiers des ruptures surviennent sur des utérus cicatri- d'en connaître les facteurs de risque et d'être vigilant lors
ciels, alors que, dans les pays «développés», ces ruptures du travail chez ces femmes à risque (utérus cicatriciel, anté-
surviennent dans la très grande majorité des cas sur un cédent de perforation utérine ou de myomectomie, usage
utérus cicatriciel (antécédent de césarienne ou de chirurgie de prostaglandines, grande multiparité, travail très long).
utérine). Le risque de rupture utérine augmente avec le nombre
Les ruptures spontanées précoces (avant six mois de d'antécédents de césariennes, une cicatrice corporéale,
grossesse) sont très rares et surviennent au niveau d'une un intervalle court entre deux césariennes (< 6 mois) et le
corne utérine (grossesse cornuale), ou sur utérus malformé déclenchement ou la direction du travail [4, 5]. Le risque
(bicorne avec corne hypoplasique ou pseudo-unicorne), est plus important avec les prostaglandines E2 qu'avec
soit au niveau de l'isthme (perforation négligée lors d'une l'ocytocine ou les méthodes mécaniques. Le misoprostol
interruption de grossesse). est contre-indiqué en raison d'un risque majeur de rup-
Les ruptures en cours de travail sont les plus fréquentes. ture [6]. Récemment, Harper et al. ont essayé de déter-
Elles sont spontanées, ou traumatiques (lors de manœuvres miner quels pourraient être les paramètres du travail qui
utérines internes ou externes) et elles peuvent survenir sur seraient annonceurs de la survenue d'une rupture utérine
utérus cicatriciel (antécédent de césarienne, de myomec- [7]. Toutefois, cette étude a montré que le profil évolutif
tomie ou de perforation utérine) ou exceptionnellement de dilatation aboutissant à une rupture utérine n'a rien de
sur utérus sain. L'incidence de la rupture utérine sur utérus particulier par rapport à celui aboutissant à un échec de
cicatriciel (antécédent de césarienne) est de l'ordre de 1 %. voie basse sans complication (ayant résulté en une césa-
Cette incidence est donc faible. Par ailleurs, la mortalité rienne ne montrant pas de rupture utérine). En revanche,
98
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED
8. Rupture utérine

Figure 8.1.
Définition d'une rupture utérine complète.
A. Rupture utérine complète corporéale.
B. Rupture incomplète (déhiscence) alors que la poche des eaux est intacte. La poche des eaux contenant le liquide amniotique fait donc
saillie sous le péritoine.

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Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

cette étude a une nouvelle fois souligné le fait qu'un travail siment toujours associée à d'autres signes évocateurs (dou-
déclenché, l'usage de l'ocytocine et une dilatation cervicale leur, saignement vaginal). D'autres modifications contractiles
qui progresse lentement après 7 cm de dilatation sont asso- ont été décrites lors de rupture utérine : contracture, hyper-
ciés à une augmentation du risque de rupture utérine (avec cinésie, modification de l'amplitude et/ou de la fréquence
toutefois une valeur prédictive médiocre). des contractions. En cas d'utilisation d'une tocométrie
interne, les anomalies sont souvent discordantes. Les cap-
teurs de pression intra-utérine ne permettent pas d'anticiper
Symptômes et signes de rupture le diagnostic. Ainsi, leur utilisation systématique sur utérus
utérine cicatriciel n'est pas recommandée [6].
Un saignement vaginal est rapporté dans 30 à 40 % des
Le diagnostic est évoqué en cours de travail dans 75 à 80 % cas de rupture utérine. La prévalence de l'hémopéritoine
des cas (le plus souvent en 1re phase du travail) [4]. Les signes n'est pas connue dans ce contexte. Un état de choc mater-
cliniques ont une faible valeur diagnostique. La douleur nel et/ou un hémopéritoine important sont rares, car la
en regard d'une cicatrice de césarienne est bien entendu plupart des ruptures concernent le segment inférieur cica-
évocatrice mais elle n'est pas pathognomonique, de même triciel donc fin, scléreux, peu vascularisé. C'est dans le cas où
que la survenue d'une violente douleur abdominale ou la déchirure s'étend (myomètre adjacent plus vascularisé,
pelvienne, brutale et d'apparition secondaire, surtout si elle vessie, etc.) ou s'il s'agit d'une rupture sur utérus «sain»
est associée à des anomalies brutales du rythme cardiaque (non cicatriciel) que l'hémorragie peut être plus sévère.
fœtal (figure 8.2), des saignements extériorisés par le vagin Les anomalies du rythme cardiaque fœtal survenant
et/ou à un collapsus qui sont les autres symptômes décrits lors d'une rupture utérine n'ont rien de spécifique (bra-
dans ce contexte. L'anesthésie péridurale peut toutefois dycardie sévère, tachycardie, diminution de la variabilité,
masquer une grande partie des douleurs associées à la décélérations variables sévères, etc.) et elles doivent donc
rupture utérine en per partum. Dans ces conditions, toute toutes être suspectes de rupture utérine dès lors qu'elles
douleur nouvelle ou inhabituelle doit faire évoquer le diag­ sont observées chez une femme en travail ayant un utérus
nostic, comme par exemple une douleur irradiant dans les cicatriciel [9]. Des anomalies du RCF sont retrouvées dans
épaules (fréquente en cas d'hémopéritoine) [8]. 50 à 90 % des cas de rupture utérine.
La disparition complète de l'activité contractile utérine Certains auteurs décrivent des déformations utérines
(enregistrée en tocométrie externe ou interne) n'est obser- survenant avant la rupture ou concomitantes à la rupture,
vée que dans 5 % des cas de rupture utérine [9]. Bien que en particulier une forme en sablier (figure 8.3) avec un
rare, elle est très évocatrice, mais il faut noter qu'elle est qua- anneau de striction médian (Bandl's ring), un fond utérin

Figure 8.2.
Exemple d'enregistrement cardiotocographique observé lors d'une rupture utérine. Il existe une hypercinésie de fréquence des
contractions (et même une hypertonie au début) et l'apparition d'anomalies du RCF avec des décélérations profondes résiduelles. La
césarienne réalisée en urgence confirmera l'existence d'une rupture utérine complète. Il s'agissait d'une femme ayant un utérus cicatriciel
qui avait une maturation cervicale par dispositif intravaginal délivrant un utérotonique (prostaglandines).

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Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED
8. Rupture utérine

Figure 8.3.
Utérus en sablier.
Modification de forme de l'utérus et donc de l'abdomen, survenant en prérupture pour certains (signe de dystocie et de lutte utérine) ou lors
d'une rupture utérine du segment inférieur pour d'autres. Anneau de striction médian, fond utérin rétracté sur lui-même et segment inférieur
distendu (A à C).

rétracté sur lui-même et un segment inférieur distendu Le diagnostic peut être porté, moins fréquemment, en
par la « lutte » témoignant d'une dystocie. Il est à noter post-partum immédiat lors d'une révision utérine réalisée
que, pour certains auteurs, c'est un signe de pré-rupture en présence de signes évocateurs de rupture utérine en fin
alors que, pour d'autres, un signe de rupture avérée. Au de travail (métrorragies, troubles du RCF).
final, la valeur diagnostique réelle de ce signe de l'utérus
déformé « en sablier » (sensibilité, spécificité, etc.) n'a
jamais été étudiée. Il aurait même été rapporté que cet Décision thérapeutique
anneau utérin de rétraction pourrait causer des lésions
fœtales cérébrales [10]. De façon anecdotique, on peut
aussi signaler que quand le fœtus a été expulsé dans la
Expectative (abstention
cavité péritonéale lors de la rupture, ses membres sont thérapeutique)
alors palpables directement sous la peau de l'abdomen
En cas de déhiscence asymptomatique (diagnostic de déhis-
de la patiente.
cence lors d'une révision utérine) lors d'un accouchement
L'échographie abdominopelvienne au moment de la
par voie vaginale chez une femme ayant un utérus cicatri-
suspicion de rupture utérine peut montrer un hémopé-
ciel, il est possible de simplement surveiller la patiente. Si
ritoine ou exceptionnellement un membre fœtal extra-
elle est complètement asymptomatique (absence de dou-
utérin, mais la valeur diagnostique réelle de cet examen
leur, d'hémorragie extériorisée, d'hémopéritoine à l'écho-
(sensibilité, spécificité, etc.) n'a pas été évaluée dans cette
graphie, de troubles hémodynamiques), il est possible de
circonstance.

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Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

ne rien faire car il n'a jamais été montré que le fait de réaliser l'installation car ces tables d'accouchement sont en général
une suture changeait le pronostic de ces patientes, or cette très larges et le chirurgien se retrouvera mal à l'aise, penché
suture nécessiterait une laparotomie. Les dernières recom- en avant, dans une salle parfois mal conçue pour la chirur-
mandations du CNGOF indiquent que la pertinence du gie (asepsie, matériel pour l'anesthésie et la surveillance de
diagnostic clinique de déhiscence par la révision utérine est l'opérée, scialytique, table, bistouri électrique, etc.). Une
faible (avis d'experts). Une suspicion de déhiscence utérine étude récente portant sur 36 ruptures utérines montre que
asymptomatique lors d'une révision utérine ne nécessite si l'extraction a lieu dans les 18 minutes qui suivent la suspi-
pas de correction chirurgicale (accord professionnel) [6]. Il cion de rupture utérine, le pH de l'enfant à la naissance est
est à noter que ce ne sont que les déhiscences qui sont cen- supérieur à 7,00 [12]. Il est donc recommandé de procéder
sées être asymptomatiques. Les ruptures complètes sont, à l'extraction dans les 15–20 minutes suivant la suspicion.
sauf exception, symptomatiques. Au final, la laparotomie sur table d'accouchement doit être
La crainte d'une rupture utérine passée inaperçue après réservée à des cas exceptionnels.
un accouchement par voie basse d'une patiente porteuse
d'un utérus cicatriciel a entraîné de nombreuses équipes
à réaliser systématiquement une révision manuelle immé- Traitement conservateur ou radical ?
diatement après l'accouchement, de façon à « vérifier » la
L'hystérectomie pour rupture utérine doit rester exception-
cicatrice. Toutefois, la plupart des ruptures complètes sont
nelle. Jusque dans les années 1960, les chirurgiens interve-
symptomatiques et une révision utérine peut être iatro-
nant sur des ruptures utérines optaient, dans 50 à 75 % des
gène et provoquer une rupture utérine complète en déhis-
cas, pour l'hystérectomie et, sinon, réalisaient une ligature
cence ou favoriser une endométrite. De plus, le diagnostic
tubaire stérilisante dans de nombreux cas de traitement
de déhiscence de la cicatrice ou de rupture complète à
conservateur. Les données rassurantes sur le devenir obsté-
la révision utérine est subjectif (valeur diagnostique non
trical des femmes ayant eu une suture pour rupture utérine
étudiée). En outre, l'existence d'une déhiscence asympto-
permettent depuis de proposer un traitement conserva-
matique n'impose pas de traitement particulier et son diag­
teur (hystérorraphie) dans la plupart des cas.
nostic pourrait être à l'origine d'indications abusives de
césarienne ultérieure.
Dans une étude rétrospective portant sur une durée
de dix ans (période au cours de laquelle cette équipe Techniques de réparation
pratiquait une révision utérine systématique), Perrotin
et al. ont montré qu'aucune des 14 déhiscences utérines La prise en charge réanimatoire (remplissage vasculaire,
(2 % des accouchements) diagnostiquées à la révision transfusion de dérivés sanguins et correction des troubles
utérine n'avait nécessité de traitement chirurgical. Plu- de la coagulation) ne sera pas abordée dans ce chapitre car
sieurs de ces patientes chez qui avait été notée une elle n'a pas de spécificité par rapport aux autres circons-
« déhiscence asymptomatique » avaient par la suite tances d'hémorragies du post-partum. Seuls les points
accouché par voie vaginale sans rupture utérine et sans chirurgicaux et stratégiques seront traités. Rappelons
nouvelle déhiscence utérine lors de la nouvelle révision simple­ment qu'il existe des différences importantes dans la
utérine [11]. gravité et la prise en charge des ruptures utérines selon le
Au final, dans le cadre de l'accouchement sur utérus niveau de développement des pays. Le recours à la trans-
cicatriciel, le CNGOF recommande de réserver la révision fusion de culots globulaires et autres dérivés sanguins en
utérine uniquement aux patientes symptomatiques [6]. cas de rupture utérine est de 14 à 44 % dans les pays déve-
loppés [13–15] et de 80 à 90 % dans les pays en voie de
développement [16, 17].
Degré d'urgence
Dans tous les autres cas, dès que la patiente suspecte de rup- Exposition
ture utérine est symptomatique, une laparotomie sera réa-
lisée en (extrême) urgence. La laparotomie est parfois faite Elle est importante et souvent difficile. Une fois le fœtus
directement sur la table d'accouchement quand le RCF est extrait (la vraie urgence n° 1 est là), il faut prendre le
très inquiétant ou absent, mais si cette option a le mérite de temps de s'exposer correctement, si besoin en élargissant
la rapidité, il faudra alors faire abstraction de l'inconfort de ­(largement) la précédente cicatrice cutanée et en incisant

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8. Rupture utérine

éventuellement les muscles droits. Un écarteur de Gosset sée pour suspicion de rupture utérine et si l'examen simple
est placé pour écarter la paroi abdominale, des champs ne met pas en évidence de déchirure évidente sur le seg-
abdominaux sont disposés en haut pour refouler les anses ment inférieur, une palpation manuelle intra-utérine devra
digestives et une valve carrée refoulant ces champs est soli- être réalisée à la recherche d'une solution de continuité, la
darisée sur l'écarteur de Gosset (figure 8.4). face postérieure de l'utérus devra être examinée (au besoin
Les berges d'une cicatrice de césarienne saignent peu en extériorisant l'utérus) et tout hématome du ligament
dans la plupart des cas, et le saignement provient plutôt large devra faire évoquer l'existence d'une rupture latérale.
des déchirures secondaires (la déchirure sur la cicatrice a
«filé»). La déchirure file souvent latéralement ou vers la
vessie, mais des déchirures complexes sont aussi observées.
Suture de la déchirure myométriale
Il faut prendre des repères anatomiques nets au niveau Les plus grandes séries et revues de cas sur le sujet sont
de la vessie, du paramètre et du vagin. Comme il s'agira dans celles de Agüero et Kizer et de Sheth rapportant respective-
la plupart des cas d'une rupture en cours de travail, le col ment 462 et 41 cas de suture de rupture utérine, mais elles
est dilaté, raccourci, ramolli, en tout cas il ne constitue plus datent de 1968, elles comportent beaucoup de déhiscences
un repère solide évident. Il faut donc demander à un aide simples et ne donnent aucun détail sur les techniques de
(expérimenté) de placer une main dans le vagin de façon à suture utilisées [18, 19].
repérer la limite entre le vagin et le col. Le nombre de plans peut faire débat, puisqu'une étude
cas-témoin ne semblait avoir mis en évidence qu'une
Inspection suture myométriale en un seul plan lors d'une première
césarienne augmenterait le risque de rupture utérine lors
Le premier temps consiste à faire une inspection de la d'une grossesse ultérieure par rapport à une suture en deux
déchirure, c'est-à-dire de son étendue, de ses limites, de ses plans (OR : 2,69 ; IC 95 % : 1,37-5,28) [20]. Par extension, on
berges, des organes proches éventuellement concernés. La pourrait donc se poser la question concernant la suture
localisation de la rupture peut ne pas être évidente si la myométriale en cas de rupture utérine. Toutefois, une des
déchirure est limitée, en particulier si elle siège en posté- principales limites à cette étude (et aux autres portant sur
rieur ou dans le ligament large. Si une laparotomie est réali- cette thématique « suture myométriale en un plan versus
en deux plans ») est qu'il n'est jamais précisé pourquoi les
opérateurs ont fait une ou deux sutures (choix délibéré,
impossibilité de faire deux plans ou choix de faire deux
plans car le premier n'était pas satisfaisant) et que de nom-
breux facteurs confondants ne sont pas pris en compte.
Seul un essai randomisé permettrait de répondre à cette
question. Par ailleurs, l'équipe canadienne qui prône cette
suture en deux plans rapporte des taux de rupture utérine
bien supérieurs à ceux observés par bon nombre d'équipes
occidentales pratiquant la suture en un seul plan. Enfin,
d'autres auteurs ont indiqué des résultats opposés. Dans
une étude également rétrospective, Durnwald et Mercer
n'ont pas mis en évidence d'augmentation du risque de
rupture utérine après une suture myométriale en un plan
par rapport à une suture en deux plans. Ils avaient en
revanche observé une diminution de la durée opératoire
et de la prévalence des endométrites après suture en un
seul plan [21]. Les dernières recommandations pour la
pratique clinique du CNGOF rappellent qu'il n'existe pas
d'étude ayant une valeur méthodologique suffisante pour
Figure 8.4.
affirmer la ­supériorité d'un type de suture utérine lors de
L'écarteur de Gosset est en place, ainsi que la valve carrée la césarienne pour réduire le risque de rupture utérine
refoulant les anses digestives. (accord professionnel) [22].

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Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Il n'existe pas de règle non plus concernant le type de Suture vésicale complémentaire en
suture à utiliser. Pour les cas simples, un surjet unique peut
être suffisant (figure 8.5A) mais, dans beaucoup de cas, des cas de déchirure vésicale associée
points séparés (en U ou en X) seront nécessaires. Aucune Les ruptures utérines se compliquent fréquemment de
étude n'a pu montrer la supériorité de l'une ou l'autre de ces déchirures au niveau de la vessie. L'apparition d'une héma-
types de suture. Il faut faire un surjet «non passé» (unlocked turie sera d'emblée évocatrice. Toute rupture proche de la
single layer suture) car les surjets passés (locked single layer vessie devra donc être suspecte d'une plaie vésicale asso-
suture) pourraient altérer la qualité de la cicatrisation par un ciée. Les déchirures vésicales associées sont de taille et de
effet de dévascularisation plus important (figure 8.5B) [23]. gravité variables. Il nous est arrivé une fois de retrouver
La suture est réalisée avec des fils résorbables (à résorption la tête de l'enfant passée à travers la rupture utérine et
lente) type Vicryl® 0. dans la vessie, cette dernière s'étant déchirée en trois
La question de la résection des berges fait également lambeaux.
débat, sans qu'il n'existe aucune étude publiée sur ce point. La suture vésicale est réalisée par un surjet en un plan
Quand les bords de la déchirure sont dévascularisés et (plan total incluant la muqueuse) ou en deux plans (un
déchiquetés ou nécrosés, il est logique de faire une exérèse plan muqueux et un plan détrusorien) grâce à des fils
limitée de ces berges, de façon à favoriser une cicatrisation à résorption lente type PDS® ou Vicryl® 3/0 ou 4/0. Il est
optimale. Dans les autres cas, il n'y a pas lieu de faire cette possible de faire une épiploplastie pour les sutures vésicales
exérèse de façon systématique. complexes, afin de limiter le risque de fistulisation à travers
En fin d'intervention, un drainage n'est pas nécessaire, la suture utérine toute proche.
mais il faudra en revanche faire une épreuve de remplissage La mise en place de sondes JJ et surtout un contrôle
vésical au bleu de méthylène afin d'être certain qu'il n'y échographique (± uroscanner) à J1 et J4 sont indispen-
avait pas de déchirure vésicale associée à la rupture utérine. sables dès que la déchirure et/ou la suture vésicale sont

Figure 8.5.
Technique de suture déchirure utérine : surjet continu, non passé, pour la suture de la déchirure utérine.
A. Suture idéale où les plans sont identifiables, ce qui est exceptionnel en cas de rupture utérine. Cela est vrai uniquement pour les ruptures
sur utérus sain ou dans le cas où la déchirure file vers le corps utérin, les plans sont alors souvent plus facilement identifiables. On peut ainsi se
permettre de faire une suture extra-muqueuse ou en prenant aussi la muqueuse en cas de doute sur les plans. B. Cas le plus fréquent pour les
ruptures du segment inférieur sur utérus cicatriciel. Le tissu utérin déchiré est fin, scléreux et un seul plan est visible, souvent sans muqueuse. La
suture est alors la plus simple possible, en prenant un maximum de tissu.

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Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED
8. Rupture utérine

proches des méats urétéraux (les sondes JJ sont facile- n'est qu'en cas d'hématome très rapidement progressif et
ment mises en place lorsque la vessie est « ouverte »). quand une embolisation n'est pas possible très rapidement
Un contrôle de l'étanchéité vésicale en fin d'intervention que le chirurgien devra se risquer à ouvrir le rétropéritoine
sera bien entendu réalisé (remplissage de la vessie par un pour tenter une ligature hypogastrique et une tentative
colorant bleu). La suture doit être étanche. Il faudra garder d'hémostase des vaisseaux du ligament large. Un autre point
la sonde urinaire 10 à 14 jours au minimum. Un contrôle potentiellement délétère de cette ligature hypogastrique est
d'étanchéité par cystographie peut être réalisé avant abla- qu'elle gênera une éventuelle embolisation complémentaire.
tion de la sonde. Par ailleurs, la ligature de l'artère hypogastrique va entraîner
le développement de collatérales parfois très difficiles à
traiter en embolisation. Par conséquent, la règle en cas d'hé-
Prise en charge d'un hématome du matome du ligament large est plutôt de ne pas tenter de
ligament large associé à une rupture l'ouvrir et de plutôt s'orienter vers une embolisation rapide.
Si la déchirure utérine se situe dans le ligament large, elle
utérine peut être parfois suturée par voie endo-utérine, ce qui peut
En cas de constatation d'un hématome du ligament à l'ins- éviter de devoir entrer dans le ligament large pour la suturer.
pection initiale (figure 8.6), il faut immédiatement essayer Dans tous les cas, il faudra vérifier si une dilatation urété-
de comprimer cet hématome (packing temporaire pour rale n'apparaît pas dans les suites opératoires (échographie
limiter son évolution). Si l'hématome n'est pas encore très rénale systématique à J1 et éventuellement à J4). Elle peut
étendu et si les vaisseaux iliaques sont facilement acces- être liée à la compression par l'hématome ou par les sutures
sibles, une ligature des artères hypogastriques est possible. réalisées.
Celle-ci peut arrêter ou limiter le saignement dans le liga-
ment large et il peut parfois être moins dangereux de faire
une ligature hypogastrique que de passer des «gros points
Hémostase complémentaire
à l'aveugle» dans le ligament large. Il faut toutefois se rap- Il n'y a donc pas d'indication à réaliser une ligature vascu-
peler que l'ouverture du péritoine postérieur va transformer laire systématiquement associée à la suture d'une rupture
l'hématome rétropéritonéal (donc en partie comprimé) en utérine dès lors que la suture stoppe l'hémorragie. Un des
hémorragie intrapéritonéale. Il nous semble donc que ce objectifs étant que cette cicatrice soit solide, il est préférable

Figure 8.6.
Hématome du ligament large compliquant une rupture utérine. Ce schéma illustre une rupture du segment inférieur s'étant étendue
(ayant «filé») au ligament large gauche provoquant un hématome rétropéritonéal.

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Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

d'éviter une hypoperfusion de la zone suturée, une bonne trial est important. Les ruptures utérines représentent plus
vascularisation des berges étant un des points cruciaux d'un quart des indications d'hystérectomie obstétricale
pour favoriser une cicatrisation optimale. (tableau 8.1) [29–32]. Dans les cas d'utérus cicatriciel, qui
En cas d'atonie associée avec hémorragie du post- représente la majorité des cas de rupture utérine, l'hysté-
partum, il faudra recourir aux ligatures vasculaires rectomie pour rupture «non suturable» est assez peu fré-
(hypogastriques ou utérines) et/ou à des techniques de quemment pratiquée (5 %) [33]. La nécessité de recourir à
contention/tamponnement par suture type B-Lynch une hystérectomie (hémostase ou utérus non suturable) en
(appelées encore parfois techniques de « saucissonnage » ; cas de rupture utérine est inférieure à 10 % dans les pays
cf. chapitres 8, 9). Dans le millier de cas rapportés de développés [14, 34] contre 50 à 80 % dans les pays en voie
technique de B-Lynch, 25 ont utilisé cette technique de de développement [15, 16]. La mortalité maternelle dans les
façon concomitante à une suture de rupture utérine [3]. pays développés est inférieure à 0,5 % [14, 33, 34] alors qu'elle
Il n'existe pas de données sur le devenir obstétrical de ces est de 10 % dans les pays en voie de développement [17].
cas de B-Lynch associé à une suture de rupture utérine. En
revanche, il faut bien comprendre que cette technique de
Compte-rendu opératoire
saucissonnage utérin est elle-même pourvoyeuse d'une
certaine hypoperfusion et que ses effets sur la cicatrisa- Il devra comporter tous les détails concernant la locali-
tion ne sont pas connus. Plusieurs cas de rupture utérine sation et l'étendue de la rupture et les gestes réalisés sur
lors d'une grossesse ultérieure après technique de B-Lynch l'utérus (résection des berges, type de matériel de suture,
sur utérus sain ont été décrits [24–26]. type de suture, etc.), la vessie et les éventuelles techniques
L'utilisation d'un ballon de Bakri comme technique d'hémostase complémentaires. L'opérateur pourra donner
d'hémostase complémentaire lors de la réparation d'une son avis concernant une éventuelle future grossesse (auto-
rupture utérine a été décrite [27] mais, là encore, il n'existe risation sous réserve d'une césarienne systématique ou
pas de données sur le devenir de ces patientes et il est contre-indication).
quand même fortement probable que la distension du bal-
lon puisse entraîner une traction importante sur les sutures,
ce qui ne doit pas favoriser le phénomène de cicatrisation.
Nous avons-nous même observé un cas de migration d'un
ballon de Bakri dans le ligament large alors qu'une rupture
utérine latérale était méconnue (figure 8.7). Il n'est pas exclu
dans ce cas que l'inflation du ballon de Bakri ait provoqué
l'agrandissement de la rupture utérine.
Une technique d'embolisation est toujours possible, sur-
tout si le saignement ne réapparaît qu'après la fermeture
de la laparotomie. Quand le chirurgien est encore en train
d'opérer, il semble plus logique de procéder à des ligatures
vasculaires (hypogastriques ou utérines) plutôt que de
refermer la laparotomie et d'envoyer la patiente en embo-
lisation, sauf dans les cas où il existe un hématome du liga-
ment large ayant diffusé en rétropéritonéal (cf. supra).

Hystérectomie pour rupture utérine


La rupture utérine est un facteur de risque indéniable d'hé-
morragie grave (nécessité de transfusion de plus de cinq
culots globulaires) mais dans des proportions nettement Figure 8.7.
moindres que les placentas accreta [28]. En revanche, indé- Migration d'un ballon de Bakri dans le ligament large. On voit
le ligament large soufflé par le ballon de Bakri accidentellement
pendamment de la gravité de l'hémorragie, l'hystérectomie passé et gonflé dans une rupture utérine méconnue dans le
est parfois la seule solution quand le délabrement myomé- ligament large.

106
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED
8. Rupture utérine

Tableau 8.1. Indications des hystérectomies d'hémostase obstétricales.


Auteur, année n Pays Atonie Placenta accreta Placenta praevia Rupture
Yalinkaya, 2010 [30] 140 Turquie 48 (34 %) 23 (16 %) 43 (31 %)
Varras, 2010 [29] 12 Grèce 4 (33 %) 2 (16 %) 3 (25 %)
Orbach, 2011 [31] 125 Israël 30 (24 %) 7 (6 %) 42 (34 %) 32 (25 %)
Tapisiz, 2012 [32] 30 Turquie 13 (43 %) 12 (40 %) 5 (17 %)
Total 307 – 95 (31 %) 129 (42 %) 83 (27 %)

Tableau 8.2. Devenir obstétrical après suture d'une rupture utérine.


Auteur, année Méthode n Épreuve travail Récidive de rupture Placenta accreta ou percreta
Okafor, 2011 [39] Série 5 0 1 0/5

Al Qahtani, 2010 [40] Série 7 1 1 0/7
Chibber, 2010 [38] Série 22 0 2 ND
Usta, 2007 [37] Série 12 0 5 1/12

Lim, 2005 [36] Revue 1971–2005 84 4 8 1/5
Ritchie, 1971 [35] Revue 1932–1971 253 ND 20 ND
Total – 383 5/383 (3 %) 37/383 (9,6 %) 2/29 (6,9 %)
ND : données non disponibles.

Série de l'auteur.

Devenir obstétrical il peut aussi arriver de faire cette césarienne en urgence


devant la survenue de symptômes pouvant faire évoquer
Le tableau 8.2 donne les principaux résultats de la lit- une rupture imminente ou constituée (douleurs abdomi-
térature concernant le devenir obstétrical des femmes nopelviennes, anomalies du RCF, etc.).
ayant eu une rupture utérine [35–40]. Les principaux Outre le risque de récidive de rupture, c'est celui d'ano-
facteurs de risque de récidive sont l'existence d'une rup- malie d'insertion placentaire qui inquiète le plus (placenta
ture corporéale (déchirure verticale : longitudinale), une praevia, accreta ou percreta). L'incidence des anomalies de
survenue de la première rupture à un âge gestationnel placentation type accreta ou percreta est de l'ordre de 7 %
avant 35 SA, un délai de nouvelle grossesse trop précoce mais les données à ce sujet sont très peu nombreuses dans
(supérieur à deux ou trois ans) après la rupture, un utérus la littérature.
malformé (pseudo-unicorne, corne utérine rudimentaire, Au final, les dernières recommandations pour la
hypotrophie utérine) et l'utilisation d'ocytociques [37, pratique clinique du CNGOF indiquent que les don-
41–47]. nées disponibles ne permettent pas de contre-indiquer
Globalement, le risque de récidive de rupture utérine une grossesse après survenue d'une rupture utérine [4,
est de 10 % lors d'une prochaine grossesse mais de nom- 48]. En cas de nouvelle grossesse, les patientes doivent
breuses équipes ne laissent pas ces femmes entrer en travail être clairement informées du risque de récidive de rupture
lors d'une grossesse ultérieure. Personnellement, nous réa- utérine et une césarienne programmée avant le début du
lisons une césarienne systématique avant la mise en travail. travail est recommandée (grade B). La date de réalisation
Nous ­programmons cette césarienne entre 37 et 39 SA de la césarienne doit être décidée au cas par cas (accord
selon la date de survenue de la rupture. Certaines condi- professionnel). En cas de déhiscence de cicatrice utérine
tions particulières nous ont parfois amenés à proposer une découverte au cours d'une césarienne, il est recommandé
césarienne plus tôt (grossesse multiple, utérus hypopla- de programmer une césarienne itérative en cas de nouvelle
sique, antécédent de rupture très précoce). Bien entendu, grossesse (accord professionnel) [4, 48].

107
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Conclusion [14] Yap OW, Kim ES, Laros Jr RK. Maternal and neonatal outcomes after
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109
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Chapitre 9
Ligatures vasculaires
A. Mattuizzi, B. Resch, H. Madar, A. Froeliger, A. Brot, M. Sarrau,
M. Vincienne, C. Houssin, F. Coatleven, L. Sentilhes

PLAN DU C HAPITRE
Ligature bilatérale des artères hypogastriques
(artères iliaques internes) 112
Ligature bilatérale des artères utérines 115
Triple ligature de Tsirulnikov 116
« Stepwise uterine devascularization » 117
Ligature des ligaments lombo-ovariens 118
« Triple ligature étagée » 118
Ligature des artères utérines par voie
vaginale 118
Quelle ligature vasculaire utiliser
en première intention ? 119
Conclusion 119

Chirurgie en obstétrique
© 2020, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Points forts du chapitre [oxytocine ± sulprostone], estimation des pertes san-


Toutes les ligatures vasculaires doivent être réalisées de guines par un sac de recueil, monitorage de la pression
façon bilatérale. artérielle et de la fréquence cardiaque de la patiente, mise
Les gestes impliquant une ligature bilatérale des artères en place d'une sonde urinaire à demeure, massage uté-
utérines (ligature bilatérale simple de l'artère utérine rin externe, prise en charge multidisciplinaire avec l'aide
selon O'Leary, triple ligature de Tsirulnikov, stepwise des anesthésistes et sages-femmes, respect du protocole
uterine devascularization d'AbdRabbo, « triple ligature de prise en charge de l'HPP qui doit être affiché en salle
étagée ») ne sont pas de réalisation difficile. Elles sont de naissance, etc.) ne seront pas détaillées ici et ont fait
associées à un fort taux de succès (environ 90 %) et à l'objet de recommandations pour la pratique clinique par
un très faible taux de complications. le CNGOF en 2014 [4].
La ligature du ligament lombo-ovarien ne doit pas être Une récente enquête nationale, réalisée à l'aide d'un
réalisée. questionnaire anonyme auprès de 286 gynécologues-­
La ligature bilatérale des artères hypogastriques obstétriciens thésés, a montré que ces spécialistes décla-
(artères iliaques internes) semble moins facile à réaliser raient ne pas maîtriser la ligature bilatérale des artères
et moins efficace (environ 70 %) que les ligatures utérines dans 33 % des cas, la triple ligature de Tsirulnikov
impliquant une ligature bilatérale des artères utérines. dans 40 % des cas, la ligature des artères hypogastriques
Elle est associée à un faible taux de complications, mais
dans 62 % des cas, les techniques de cloisonnement utérin
ses complications sont le plus souvent graves.
dans 37 % des cas et l'hystérectomie d'hémostase dans
Pour ces raisons, les gestes impliquant une ligature
47 % des cas [5]. Ces chiffres sont fortement majorés
bilatérale des artères utérines, en particulier la « triple
lorsque la même question est posée auprès des internes
ligature étagée », ont notre préférence en première
intention. de gynécologie-obstétrique ayant la capacité de prendre
des gardes [6]. Il est donc important de diffuser ces tech-
La ligature des artères utérines ou hypogastriques ne
semble pas altérer la fertilité et le pronostic obstétrical
niques chirurgicales de prise en charge de l'HPP sévère, en
ultérieurs des patientes. particulier les ligatures vasculaires, par tous les supports
possibles.
Le but de ce chapitre est de détailler les différentes tech-
L'HPP est encore aujourd'hui responsable du décès niques de ligatures vasculaires pour contrôler et traiter une
de 150 000 femmes par an, soit 25 % des 600 000 décès HPP sévère à l'aide de schémas, photos et films didactiques,
maternels annuels dans le monde [1]. L'HPP reste la pre- ainsi que d'exposer les avantages et inconvénients de ces
mière cause de mortalité maternelle dans les pays en techniques.
voie de développement. Dans les pays développés, elle
n'est maintenant qu'en deuxième ou troisième position,
les complications hypertensives et thromboemboliques Ligature bilatérale des artères
apparaissant au premier plan [1, 2]. À ce jour, l'HPP reste
cependant toujours la première cause de mortalité mater- hypogastriques (artères iliaques
nelle en France, puisqu'elle est responsable d'environ 11 % internes)
des décès maternels [3]. Il semblerait que 90 % des cas de
mortalité maternelle par HPP soient évitables, puisque ces
décès seraient secondaires en grande partie à un retard
Technique chirurgicale
de diagnostic, un retard de prise en charge ou une insuf- Sa première description dans la prise en charge de l'hémor-
fisance du traitement [2]. Les facteurs de risque des HPP ragie du post-partum remonte à 1898 [7] (vidéo e9.1).
sont aujourd'hui bien identifiés [4], mais l'HPP est le plus Elle a été considérée comme la technique de référence
souvent un événement imprévisible chez une patiente pendant de nombreuses années. Réalisée par voie abdomi-
sans facteurs de risque connus. Il est donc indispensable nale (incision transversale de Pfannenstiel ou incision de
que tous les obstétriciens sachent identifier et traiter rapi- Mouchel), cette technique peut être résumée par les
dement une HPP. La prévention primaire de l'HPP (admi- étapes suivantes [7, 8] :
nistration de 5 à 10 UI d'Oxytocine® au dégagement des ●
extériorisation de l'utérus en le tractant en avant
épaules) et sa prise en charge médicale (révision utérine et latéralement à l'opposé du côté concerné, puis
ou délivrance artificielle/révision utérine, examen sous mise en place de valve ou d'un écarteur orthostatique
valves de la filière génitale, administration ­d'utérotoniques (figure 9.1) ;
112
Dr A.Amine Recherche bibliographique9.SCI-MED
Ligatures vasculaires

Figure 9.1. Figure 9.2.


Exposition : l'utérus est extériorisé et tracté vers le pubis, des Passage du dissecteur après dissection de l'artère hypogastrique
valves écartent la paroi, d'après [8]. (AH), l'uretère (U) est refoulé en dedans, la valve malléable
protège la veine (VIE) et l'artère iliaque externe (AIE), d'après
[8]. La ligature sera réalisée systématiquement de façon

abord par voie transpéritonéale de la bifurcation iliaque bilatérale [7]. En effet, une ligature unilatérale peut être source
d'échec du fait de l'existence de nombreuses anastomoses entre
sur 5–6 cm. Cette zone est repérée par la palpation au doigt l'artère hypogastrique et d'autres axes vasculaires à destinée
de la bifurcation iliaque commune qui se divise en regard pelvienne [7].
du promontoire en artères iliaques externe et interne. Du
côté gauche pour mieux exposer l'axe vasculaire, un décol-
lement colopariétal et du fascia de Toldt est souvent néces-
saire afin de mobiliser la boucle sigmoïdienne ; À retenir

identification et contrôle des uretères sur lac. Ce geste
permet d'éviter toute lésion urétérale et d'exposer au mieux ■
Tracter l'utérus en haut et en avant, ce qui faci-
la zone opératoire ; lite la mise en tension des plans.

ouverture large de la chemise vasculaire des vaisseaux ■
Sécuriser l'uretère qui devra toujours être isolé
iliaques avec repérage en dehors de l'artère iliaque externe sur lac ou refouler le lambeau péritonéal interne le
puis en profondeur de la veine iliaque externe et, enfin, de contenant, ce qui permet de le protéger et d'expo-
l'artère hypogastrique (en dedans). L'artère hypogastrique ser la zone vasculaire.
(artère iliaque interne) est disséquée sur 3 à 4 cm après ■
Disséquer le vaisseau dans sa chemise et
ouverture de l'adventice pour éviter les plaies veineuses. passer le dissecteur entre la paroi artérielle et
Lors de ce temps opératoire, il ne faut pas hésiter à saisir sa gaine, ce qui le protège de toute blessure
l'artère à l'aide d'une pince vasculaire, ce qui facilite sa mobi- veineuse.
lisation et le refoulement des structures adjacentes ; ■
Repérage non systématique du tronc postérieur

passage en profondeur au contact de l'artère hypogas- de l'artère hypogastrique, ce qui majore le risque
trique, sous contrôle de la vue, d'un carré dissecteur intro- opératoire. La ligature peut être réalisée à 2 cm de
duit perpendiculairement au vaisseau afin de ne pas léser la la bifurcation sans conséquence.
veine sous-jacente (figure 9.2) ; ■
Ne pas hésiter à solliciter la présence d'un

réalisation de la ligature 2 cm sous la bifurcation iliaque autre collègue senior lors des premières
pour éviter de lier les branches postérieures à destinée procédures.
fessière. La ligature sera réalisée grâce à un fil tressé résor- ■
Toujours réaliser une ligature bilatérale.
bable type Vicryl® 1. Il n'est pas nécessaire de repérer cette ■
Éviter de passer le dissecteur en force sans
branche, cette dissection pouvant être associée à une contrôle de la mobilisation de l'artère du plan
majoration du risque opératoire [7, 8] ; veineux sous-jacent et/ou de pratiquer un

vérification de la persistance d'un pouls pédieux après la aiguillage direct de l'artère. Ces deux gestes sont
ligature afin de s'assurer de l'absence de ligature de l'artère à proscrire car ils majorent le risque de plaie
iliaque externe. vasculaire.
113
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Tableau 9.1. Études ayant évalué l'efficacité de la ligature des artères hypogastriques dans la prise en charge de l'hémorragie
du post-partum (d'après [10]).
Auteurs Année Pays Taux de succès (%)
Evans et McShane [11] 1985 États-Unis 42,9 (6/14)
Clark et al. [12] 1985 États-Unis 42,1 (8/19)
Fernandez et al. [13] 1988 France 100 (8/8)
Thavarasah et al. [14] 1989 Malaisie 64,3 (9/14)
Chattopadhyay et al. [15] 1990 Arabie Saoudite 65,5 (19/29)
Likeman [16] 1992 Australie 100 (9/9)
Allahbadia [17] 1993 Inde 76,5 (13/17)
Das et Biswas [18] 1998 Inde 90,9 (10/11)
Ledee et al. [19] 2001 France 89,6 (43/48)
Papp et al. [20] 2005 Hongrie 39,3 (11/28)
Total 69,0 (136/197)

Résultats L'intérêt principal de la ligature des artères hypogastriques


semble résider dans la prise en charge des lésions déla-
L'efficacité de la ligature des artères hypogastriques brantes obstétricales telles que les plaies cervico-­vaginales,
semble inférieure à celle supposée initialement [9]. En les thrombus vaginaux ou pelviens. Cependant, dans ces
2007, Doumouchtsis et al. ont réalisé une revue de la lit- indications, en cas de disponibilité de la technique, l'embo-
térature concernant l'efficacité de ce geste [10]. Son taux lisation est actuellement souvent préférée au traitement
d'efficacité varie selon les auteurs entre 39,3 et 100 % avec chirurgical (cf. infra) [7]. Enfin, la ligature des artères hypo-
un taux moyen de succès de 69 % (tableau 9.1) [10–20]. gastriques pourrait apporter un bénéfice devant un saigne-
Cependant, une étude portant sur une large cohorte ment persistant après une hystérectomie d'hémostase [7].
(n = 84) rapportait un taux de succès encore inférieur, de Les inconvénients principaux de cette technique sont les
60,4 %, alors que toutes les ligatures étaient réalisées par suivants :
des chirurgiens expérimentés spécialisés dans l'oncochi- ●
il s'agit d'un geste difficile, réalisé ponctuellement, géné-
rurgie gynécologique [21]. Le détail des résultats de cette ralement dans un contexte de grande urgence et inté-
étude en fonction des indications est présenté dans le ressant une zone de dissection rarement abordée par les
tableau 9.2 [21]. gynécologues-obstétriciens ne pratiquant pas la chirurgie
carcinologique ;

la morbidité de la technique peut être sévère : plaie
Tableau 9.2. Efficacité de la ligature des artères veineuse iliaque, ligatures urétérales ou de l'artère iliaque
hypogastriques en fonction de l'étiologie de l'hémorragie externe, claudication fessière et lésion veineuse périphé-
du post-partum (d'après [21]).
rique [10] :
Indication Total (n) Taux de succès (%) ●
ce geste, s'il est bien effectué, rend potentiellement dif-
Atonie utérine 36 63,8 (23/36) ficile la réalisation d'une embolisation secondaire en cas
Placenta praevia 21 85,7 (18/21) d'échec [22].
Enfin, la ligature bilatérale des artères hypogastriques
Rupture utérine 19 21,0 (4/19)
ne semble pas altérer la fertilité et le pronostic obstétrical
Hématome rétroplacentaire 4 100 (4/4) ultérieur des patientes [23]. Les grossesses décrites après
Inversion utérine 3 66,6 (2/3) un antécédent de ligature des artères hypogastriques ont
HELLP syndrome 1 0 (0/1) été sans particularités et ont permis la naissance à terme
d'enfants eutrophes. Chez ces patientes, le risque de réci-
Total 84 60,7 (51/84)
dive d'HPP serait d'environ 25 % [23].

114
Dr A.Amine Recherche bibliographique9.SCI-MED
Ligatures vasculaires

Ligature bilatérale ●
une ligature-section du ligament rond qui peut faci-
liter l'accès au pédicule utérin en ouvrant latéralement
des artères utérines l'espace paravésical. Cependant, ne présentant pas de
conséquence fonctionnelle ultérieure, cette ligature-
Technique chirurgicale section du ligament rond peut être le plus souvent
évitée ;
Elle a été initialement décrite par Waters en 1952 [24]. ●
un repérage au doigt de l'artère utérine le long du corps
D'après cet auteur, cette ligature permettrait de dimi- utérin par son caractère pulsatile, puis une incision sous
nuer l'apport sanguin vers l'utérus d'environ 90 % (contre contrôle de l'index de la zone avasculaire du feuillet pos-
48 % seulement pour la ligature des artères hypogas- térieur de la pars flaccida, au bistouri électrique, verticale-
triques) [24] (vidéo e9.2) . Réalisée par voie abdominale ment sur 3–4 cm ;
(incision transversale de Pfannenstiel ou incision de ●
une ligature en masse, réalisée au fil résorbable (fil
Mouchel), elle consiste à lier en masse la branche ascen- tressé résorbable type Vicryl® 1, aiguille 37 mm [Ethicon,
dante des artères utérines avec le paquet veineux qui Jonhson et Jonhson]), en s'appuyant sur le myomètre,
l'accompagne en profondeur. Pour chaque pédicule, 2 à 3 cm en dessous du niveau de l'hystérotomie, de la
cette ligature pourra être étagée (figure 9.3). Cette tech- branche ascendante des artères utérines avec le paquet
nique doit être systématiquement bilatérale, comme veineux qui l'accompagne en profondeur. Cette ligature
pour toutes les ligatures, compte tenu de l'important en masse doit être réalisée d'arrière en avant pour éviter
réseau collatéral de suppléance développé durant la toute lésion digestive et faciliter la récupération de l'ai-
grossesse. Elle consiste en [7, 8] : guille (figure 9.4) ;

une extériorisation de l'utérus qui est tracté vers le haut ●
une deuxième ligature dite «basse» ou étagée éventuel-
et du côté opposé au côté concerné, et la mise en place lement réalisée 2 à 3 cm sous la précédente afin de lier les
d'un écarteur orthostatique ; branches à destinée cervicale (figures 9.3, 9.4) ;

une préparation de la ligature en incisant le péritoine ●
après réalisation de la ligature, vérification de l'absence
vésico-utérin ou en poursuivant son décollement 3 à de pouls au niveau du pédicule utérin, en aval de la ligature
4 cm sous l'hystérotomie dans le cas d'une césarienne. [7, 8].
La vessie sera protégée par la mise en place d'une valve
sus-pubienne ;

Figure 9.4.
Ligature étagée du pédicule utérin du côté droit. Utérus tracté
en haut et en dehors par l'aide, le ligament rond (LR) a été
Figure 9.3. sectionné et la vessie refoulée par la valve vaginale. Ouverture
Ligature étagée distale du pédicule utérin. Ligature bilatérale d'une fenêtre péritonéale (FP) puis, aiguillage d'arrière en
des artères utérines 2 à 3 cm sous l'hystérotomie si elle existe avant prenant largement le myomètre permettant de réaliser
(1). Ligature basse des artères utérines prenant les branches une ligature haute (LH) puis, basse (LB) du pédicule utérin
cervicales 2 à 3 cm sous la ligature précédente, d'après [7] (2). (d'après [8]).

115
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

À retenir Tableau 9.4. Études ayant évalué l'efficacité de la ligature


des artères utérines dans la prise en charge de l'hémorragie

L'utérus est tracté vers le haut et du côté opposé du post-partum (d'après [10]).
au côté concerné pour éloigner l'uretère en dehors. Auteurs Année Pays Taux de succès

La section du ligament rond peut permettre de (%)
faciliter le décollement vésico-utérin. O'Leary et O'Leary [26] 1966 États-Unis 80,0 (8/10)

L'ouverture du feuillet postérieur de la pars Fahmy et al. [27] 1987 Koweït 80,0 (20/25)
flacida (fenêtrage du ligament large) sur le doigt
O'Leary [25] 1995 États-Unis 97,8 (138/141)
permet de refouler l'uretère en dehors.

Le large aiguillage permet de prendre en masse le Hebisch et Huch [28] 2002 Suisse 92,3 (12/13)
pédicule artérioveineux et le myomètre en regard Penney et al. [29] 2004 Écosse 40,0 (2/5)
afin de limiter le risque de lésion vasculaire, ce qui Total 92,8 (180/194)
pourrait avoir comme conséquence l'apparition
secondaire d'une fistule artérioveineuse.

En l'absence d'hystérotomie, la technique sera lisée par Doumouchtsis, le taux moyen d'efficacité de la
équivalente, l'incision du péritoine vésico-utérin ligature des artères utérines était de 92,8 % (tableau 9.4)
guidant le niveau de ligature sur le segment infé- [10, 25–29].
rieur, 2 à 3 cm sous l'hystérotomie théorique. La ligature bilatérale des veines et des artères utérines

Pour la ligature basse, la technique consiste à est une technique simple, rapide, facilement reproductible.
bien tracter l'utérus vers le haut et à réaliser un Elle est toujours envisageable avant de réaliser une hysté-
large décollement vésico-utérin vers le bas (refou- rectomie ; elle consiste d'ailleurs en sa première séquence
ler éventuellement l'uretère en dehors à l'aide opératoire. Par conséquent, elle ne saurait être tenue pour
d'une valve vaginale ou malléable grâce à la fenêtre responsable d'une quelconque perte de chance dans le
créée dans la pars flaccida). contrôle de l'hémorragie en différant la réalisation d'une
hystérectomie d'hémostase [7]. Les anomalies de l'insertion
Résultats placentaire semblent être la principale cause d'échec de la
technique.
O'Leary a rapporté son expérience de la ligature des artères
La seule complication actuellement rapportée après
utérines dans une étude rétrospective de 265 cas, recen-
ligature bilatérale des artères utérines est un hématome du
sés pendant une période 30 ans [25]. Le taux de succès
rétropéritoine, complication qui serait survenue dans deux
moyen était de 96,6 %. Les résultats en fonction des dif-
cas (0,8 %) dans la série d'O'Leary [25]. Aucune lésion uré-
férentes étiologies sont rapportés dans le tableau 9.3 [25].
térale n'a été rapportée à ce jour. Enfin, cette ligature ne
Il est important de noter, pour pondérer l'exceptionnel
semble pas altérer la fertilité et le pronostic obstétrical ulté-
taux d'efficacité observé dans l'étude d'O'Leary, qu'aucune
rieur des patientes [25, 30].
ligature pour placenta accreta/percreta n'a été effectuée
dans cette série [25]. Dans la revue de la littérature réa-

Triple ligature de Tsirulnikov


Tableau 9.3. Efficacité de la ligature des artères utérines
en fonction de l'étiologie de l'hémorragie du post-partum Cette technique est une variante de la ligature bilatérale
(d'après [25]). des artères utérines(vidéo e9.2) . Elle a été décrite pour la
Indication Total (n) Taux de succès (%) première fois dans une revue française en 1974, et s'est
donc considérablement diffusée en France, bien qu'elle
Atonie utérine 135 99,3 (134/135)
reste peu évaluée [31]. Elle associe systématiquement à la
Placenta praevia 36 88,9 (32/36) ligature bilatérale des artères utérines une ligature bilaté-
Hématome rétroplacentaire 27 100 (27/27) rale des ligaments ronds et des utéro-ovariens (figure 9.5).
Lacération cervico-vaginale 31 100 (31/31) Pendant la grossesse, la vascularisation utéroplacentaire
est majoritairement assurée par les artères utérines. Toute-
Autres 36 88,9 (32/36)
fois, dans 4 % des cas, ce sont les artères ovariennes qui
Total 265 96,6 (256/265) assureraient la majeure partie de la vascularisation placen-
116
Dr A.Amine Recherche bibliographique9.SCI-MED
Ligatures vasculaires

Figure 9.5. Figure 9.6.


Triple ligature de Tsirulnikov [17] : ligature des artères utérines Ligature étagée ou stepwise uterine devascularization d'AbdRabbo :
(1), ligature des ligaments ronds (2), et ligature des ligaments ligature uni puis bilatérale des artères utérines (1 + 2), ligature
utéro-ovariens (3) (d'après [7]). Dans l'article décrivant cette basse des deux artères utérines (3), ligature unilatérale puis
technique, Tsirulnikov rapporte 24 cas, uniquement d'atonies bilatérale des pédicules lombo-ovariens (4 + 5), d'après [21].
utérines, traités par triple ligature avec un taux de succès de
100 % [31].

étape n° 1 : ligature unilatérale de la branche ascen-
taire. L'artère du ligament rond n'interviendrait que de dante d'une seule artère utérine comme précédemment
façon anecdotique [32]. La ligature-section du ligament décrit ;
rond permet d'améliorer l'accès au pédicule utérin sans

étape n° 2 : ligature de l'artère utérine controlatérale ;
retentissement fonctionnel ultérieur [7]. De plus, les liga-

étape n° 3 : ligature basse des deux artères utérines et
tures des artères des ligaments ronds et des arcades infra- de leurs branches cervico-vaginales, 2 cm sous les ligatures
ovariques (ligaments utéro-ovariens) permettraient précédentes après décollement vésico-utérin ;
d'éviter une reprise en charge de la vascularisation utérine

étape n° 4 : ligature unilatérale d'un pédicule ovarien ;
par les différents réseaux de suppléance existants (anasto-

étape n° 5 : ligature du pédicule ovarien.
moses transversales droite/gauche entre les branches des Il est important de rappeler que, contrairement à
artères utérines ; arcades infratubaires et infra-ovariques AbdRabbo, nous ne conseillons pas de réaliser une ligature
formées par les anastomoses des branches terminales des unilatérale (étape n° 1). Au contraire, nous conseillons de
artères tubaires et ovariques ; rameau du ligament rond réaliser pour toute ligature vasculaire une ligature bilatérale.
naissant de l'artère utérine anastomosée à l'artère du liga- Par ailleurs, dans la publication princeps, AbdRabbo utilise
ment rond) [32]. le terme ovarian vessel ligation [33]. Il existe donc une ambi-
guïté puisque les étapes n° 4 et 5 peuvent correspondre à la
ligature du ligament utéro-ovarien (la ligature étagée étant
alors une triple ligature étagée avec une double ligature de
« Stepwise uterine chaque artère utérine), ou à la ligature du ligament lombo-
devascularization » ovarien. AbdRabbo utilisant à plusieurs reprises le terme
d'ovarian vessels, il est probable qu'il s'agisse de la ligature
Technique chirurgicale du ligament lombo-ovarien.
Cette technique a l'avantage de préconiser une double
AbdRabbo a décrit en 1994 une nouvelle technique de liga- ligature de chaque artère utérine (la première, 1 cm sous
ture étagée par dévascularisation progressive des vaisseaux l'hystérorraphie ; la deuxième, 3 cm sous la première
afférents de l'utérus [33] (vidéo e9.2). Chaque étape n'est ligature). Elle permet donc de diminuer le risque d'avoir
réalisée que si l'étape précédente n'assure pas, dans un délai une ligature inefficace n'obturant pas ou que partiel-
de 10 minutes, l'arrêt de l'hémorragie (figure 9.6) : lement l'artère utérine, inefficacité qui peut ne pas être
117
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

diagnostiquée par le chirurgien malgré la vérification de échec de la triple ligature de Tsirulnikov, puisse avoir un
l'absence de pouls au niveau du pédicule utérin, en aval quelconque intérêt dans le contrôle de l'HPP. En revanche,
de la ligature [22]. La persistance de la perméabilité de le risque de faillite ovarienne et/ou de synéchie semble,
l'artère utérine (objectivée par artériographie) peut être d'après cette étude, important après un tel geste [30]. Nous
responsable d'un échec de la procédure avec l'absence de pensons donc que la ligature des ligaments lombo-ovariens
contrôle de l'HPP [22]. Elle a même été décrite après une ne doit pas faire partie de l'arsenal chirurgical pour contrô-
double ligature étagée de chaque artère utérine [22]. De ler l'HPP.
plus, contrairement à la ligature simple des artères uté-
rines, la ligature étagée dévascularise le segment inférieur
et la partie haute du col. Elle permettrait donc de prendre « Triple ligature étagée »
en charge la pathologie du segment inférieur [3]. Comme
pour la ligature isolée des artères utérines, un fil résorbable Cette ligature combine les avantages de la triple ligature de
sera impérativement utilisé. Tsirulnikov et ceux de la stepwise uterine devascularization
d'AbdRabbo. Elle consiste à réaliser systématiquement, en
Résultats cas d'HPP sévère :

une triple ligature selon la technique de Tsirulnikov [31] ;
AbdRabbo a reporté sur une série de 103 patientes un ●
et une ligature basse des deux artères utérines, 2 cm sous les
taux de succès de 100 % [33]. La simple double ligature ligatures précédentes après décollement vésico-utérin, comme
étagée bilatérale des artères utérines (étapes n° 1 à 3) a décrit dans la technique d'AbdRabbo (étape n° 3) [33].
permis de contrôler l'HPP chez 96 d'entre elles (93,2 %) La ligature bilatérale de l'artère utérine est double et dite
[33]. Les étapes n° 4 et 5 ont été nécessaires essentielle- «étagée».
ment chez des patientes présentant une afibrinogéné- Cette «triple ligature étagée» présente l'avantage théo-
mie ou un utérus dit « couvelaire » [33]. Dans la seule rique de contrôler les artères cervicovaginales, de diminuer
autre série ayant évalué la ligature étagée d'AbdRabbo, le risque d'échec de ligature des artères utérines, tout en
le taux de succès était de 70,2 % (17/57) [30]. Ce taux contrôlant le flux sanguin au niveau des ligaments ronds
est étonnamment peu élevé, en comparaison avec celui et utéro-ovariens. Elle a notre préférence, même si aucune
observé dans la série d'AbdRabbo [30, 32], ou avec ceux étude n'a spécifiquement évalué ses résultats.
des auteurs ayant évalué la ligature simple bilatérale
de l'artère utérine (procédure incluse dans la ligature
­étagée) [24, 25]. Ligature des artères utérines
Par ailleurs, la simple ou double ligature bilatérale des
artères utérines associée ou non à la ligature bilatérale des
par voie vaginale
ligaments utéro-ovariens ne semble pas altérer la fertilité
Philippe et al. ont décrit pour la première fois en 1997 la
et le pronostic obstétrical ultérieur des patientes [30, 33].
possibilité de réaliser la ligature des artères utérines par voie
En revanche, la double ligature bilatérale des artères uté-
vaginale [34]. Nous soulignons que nous n'avons aucune
rines associée à la ligature bilatérale des ligaments lombo-
expérience de cette technique. Selon Philippe et al., la dis-
ovariens semble altérer la fertilité des patientes (dans 30 %
section par voie vaginale est facilitée du fait de la présence
[4/12] des cas) [30].
d'un œdème tissulaire lié à la grossesse. Elle consiste en :

une colpotomie antérieure circonférentielle ;
une section du fascia vésico-utérin ;
Ligature des ligaments


une ligature bilatérale de l'artère utérine au niveau de son
lombo-ovariens point le plus déclive («boucle») situé en regard de l'isthme
utérin (figure 9.7) ;
Une équipe a réalisé, dans un nombre très limité de cas, des ●
une fermeture de la colpotomie antérieure.
ligatures des ligaments lombo-ovariens en cas d'échec de Philippe et al. préconisent d'introduire une valve vaginale
la triple ligature de Tsirulnikov pour contrôler l'HPP, la liga- dans l'espace vésico-utérin pour limiter le risque de plaies
ture du lombo-ovarien étant proposée par AbdRabbo [33]. urétérales [34].
Il n'y a cependant aucune donnée dans la littérature sug- Dans sa description princeps, cet auteur reporte le cas
gérant que la ligature des ligaments lombo-ovariens, après de seulement deux patientes dont l'HPP a été contrôlée
118
Dr A.Amine Recherche bibliographique9.SCI-MED
Ligatures vasculaires

donc encourager la réalisation d'études de cohorte observa-


tionnelles qui peuvent être utile pour renforcer le niveau de
preuve de la littérature, en particulier pour les composantes
du traitement de l'HPP qui sont difficiles ou impossibles à
évaluer par des essais cliniques randomisés [35]. En l'absence
d'une étude randomisée, aucune société savante n'a recom-
mandé de réaliser en première intention telle procédure plu-
tôt qu'une autre. Cela reste actuellement largement débattu
dans la littérature, et la place de ces différentes techniques
reste dépendante de la culture du pays et de chaque service
[36] ; par exemple, la triple ligature de Tsirulnikov, publica-
tion française [31], s'est très largement diffusée depuis de
nombreuses années dans toutes les maternités françaises,
alors qu'elle reste quasi inconnue à l'étranger.
Il est important de rappeler que le premier objectif du
traitement de l'HPP sévère est de préserver la vie de la
patiente, par la procédure la moins invasive et la moins
morbide, et que cet objectif doit toujours rester au premier
plan. Ainsi, la réalisation d'une (des) ligature(s) vasculaire(s)
ne doit donc en aucun cas retarder la réalisation d'une
hystérectomie d'hémostase en cas d'instabilité hémodyna-
mique de la patiente, surtout si cette dernière est «âgée»,
multipare et n'a a priori pas de désir de grossesse ultérieure.
Figure 9.7.
Chez une patiente hémodynamiquement stable, l'hysté-
Ligature bilatérale de l'artère utérine droite au niveau son point
rectomie d'hémostase ne doit pas être privilégiée puisque
le plus déclive («boucle») situé en regard de l'isthme utérin, cette procédure ne semble pas être la moins morbide [37]
d'après [34]. et, par définition, elle prive la patiente de la possibilité
d'avoir d'autres enfants.
avec succès et sans complications par une ligature des Contrairement à certains auteurs [19], nous ne pensons
artères utérines par voie vaginale [34]. Un seul autre auteur pas que la ligature des artères hypogastriques doit être la
a publié son expérience concernant cette technique en procédure à proposer en première intention [22, 30, 38,
2002. Parmi les 13 patientes concernées, une hystérectomie 39] : son taux d'efficacité semble inférieur aux autres tech-
ne fut nécessaire que dans un cas (8 %) [28]. niques conservatrices (69 versus 90 %) (tableaux 9.1 à 9.4),
N'ayant aucune expérience de la ligature des artères uté- pour une morbidité semblant supérieure [9, 21]. De plus,
rines par voie vaginale, nous ne pouvons pas recommander il s'agit d'une procédure difficile, surtout dans un contexte
cette technique pour le contrôle des HPP, ce d'autant plus d'urgence, nécessitant un réel apprentissage, peu repro-
que le nombre de cas et d'études reportés avec cette tech- ductible, car la majorité des obstétriciens ne sont pas des
nique est extrêmement faible. chirurgiens spécialisés dans l'oncologie gynécologique.
Nous privilégions en première intention la réalisation
d'une triple ligature de Tsirulnikov [31]. Celle-ci pouvant
Quelle ligature vasculaire utiliser être complétée, d'emblée ou secondairement, par une liga-
ture bilatérale basse des artères utérines afin d'obtenir une
en première intention ? «triple ligature étagée».

Actuellement, il n'existe aucune étude prospective ou


rétrospective ayant comparé l'efficacité et la morbidité Conclusion
de deux techniques chirurgicales entre elles (ligature des
artères utérines versus ligature des artères hypogastriques, L'HPP reste la première cause de mortalité maternelle en
etc.). En effet, le caractère urgent de l'HPP rend les essais France. Sa prise en charge doit être multidisciplinaire (anesthé-
contrôlés randomisés difficiles sur le plan logistique. Il faut siste, gynécologue-obstétricien, radiologue ­interventionnel,
119
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

sage-femme). Les clés de la prise en charge résident dans la [9] Committee on Practice Bulletins-Obstetrics. Practice bulletin No.
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soit associée à un taux de morbidité plus élevé ; Obstet Gynaecol 1989;29:22–5.

et soit de réalisation moins aisée en comparaison avec [15] Chattopadhyay SK, Deb Roy B, Edrees YB. Surgical control of obste-
tric hemorrhage: hypogastric artery ligation or hysterectomy ? Int J
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Gynaecol Obstet 1990;32:345–51.
Pour ces raisons, nous privilégions de réaliser en pre- [16] Likeman RK. The boldest procedure possible for checking the
mière intention une triple ligature de Tsirulnikov ou une bleeding — a new look at an old operation, and a series of 13
«triple ligature étagée», c'est-à-dire une double ligature cases from an Australian hospital. Aust N Z J Obstet Gynaecol
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Dr A.Amine Recherche bibliographique9.SCI-MED
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1997;56:267–70. rhage? Fertil Steril 2011;95:e71.

``Compléments en ligne Vidéo e9.2


Triple ligature de Tsirulnilkov avec une ligature étagée (doublée)
de l'artère utérine.
Des compléments numériques sont associés à ce chapitre Cette vidéo est extraite du film Prise en charge chirurgicale des hémorragies de la
(ils sont indiqués dans le texte par un picto ). Pour voir délivrance, réalisé par Resch B, Sergent F, Blanc S, Baron M, Roman H, Sentilhes L, Diguet
A, Verspyck E, Marpeau L pour les 30es Journées nationales du Collège national de
ces compléments, connectez-vous sur http://www.em- gynécologie-obstétrique (2006).
consulte.com/e-complement/476722 et suivez les
instructions.

Vidéo e9.1
Ligature bilatérale des artères hypogastriques (artères iliaques
internes).

121
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Chapitre 10
Compressions utérines
A. Mattuizzi, B. Resch, H. Madar, A. Froeliger, M. Hourbracq, M.-C. Soudan,
M. Toumi, C. Houssin, F. Coatleven, L. Sentilhes

PLAN DU C HAPITRE
Technique chirurgicale 124
Résultats 133
Quelle procédure utiliser en première
intention : compressions utérines ou
ligatures vasculaires ? 134
Quelle procédure proposer en deuxième
intention ? 135
Conclusion 136

Chirurgie en obstétrique
© 2020, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Points forts du chapitre


Il existe de multiples techniques de compressions
utérines et de capitonnages utérins.
Il n'est pas nécessaire de toutes les connaître mais il
semble important d'en maîtriser au moins deux : une
variante de B-Lynch (pouvant être réalisée hystérotomie
fermée), et les sutures multipoints en carré selon Cho.
Aucune technique de compression utérine n'a montré de
supériorité par rapport à une autre.
Les compressions utérines ont une efficacité d'environ
75 % après échec du traitement médical et d'environ 80 %
en seconde ligne après échec d'une ligature vasculaire.
Figure 10.1.
Le risque de survenue d'une synéchie après la réalisation
d'une compression utérine est encore mal évalué, mais Vue opératoire d'un B-Lynch [1].
se situe probablement entre 5 et 20 %.
Une hystéroscopie ambulatoire est conseillée à distance
chapitre n'a pas l'ambition de l'exhaustivité car il existe
en cas d'oligo-aménorrhée en post-partum s'il existe un
désir ultérieur de grossesse afin de vérifier l'absence de
presque autant de compressions utérines que d'auteurs,
synéchie. ces séries étant souvent limitées à un très faible nombre
de cas.
Quand aucune synéchie ne survient, et bien que les
données soient limitées, il ne semble pas que les
compressions utérines altèrent le pronostic obstétrical
en cas de nouvelle grossesse. Technique chirurgicale
Les techniques de compressions utérines (uterine compres-
Plicatures ou compressions utérines
sion sutures, brace sutures, hemostatic multiple square sutu-
ring, etc.) se sont développées depuis la publication princeps (B-Lynch)
de , B-Lynch et al. [1] et ont été très rapidement adoptées
dans le monde entier, malgré le faible niveau de preuves
Le B-Lynch [1]
initial quant à leur efficacité et le faible niveau de preuve B-Lynch est le premier auteur, en 1997, à avoir proposé chez
concernant leurs complications à court et long termes [2]. cinq patientes une technique de compression utérine pour
La principale raison à la diffusion rapide et mondiale de ces contrôler l'HPP [1]. Depuis, de nombreuses variantes de pli-
techniques réside en leur simplicité chirurgicale, ayant pour cature ou compression utérine ont été décrites.
conséquence une courbe d'apprentissage extrêmement Le B-Lynch consiste à réaliser une suture médio-latérale
courte [3, 4]. Ainsi, ces techniques sont accessibles à tous en bretelle autour du corps utérin ayant pour but de rap-
les gynécologues-obstétriciens, contrairement à la liga- procher les parois antérieure et postérieure de l'utérus afin
ture des artères hypogastriques qui est restée longtemps, de le comprimer durablement pour qu'il ne puisse se rem-
sur le plan international, la technique de référence pour plir de sang (figures 10.1, 10.2). Dans la technique princeps,
le contrôle chirurgical des hémorragies sévères du post-­ une hystérotomie est nécessaire [1].
partum. Ce n'est que récemment que le taux d'efficacité de La technique décrite ici débute par le côté gauche. Elle
ces techniques a été clairement déterminé ; en revanche, la est simple (figures 10.1, 10.2), même si le détail écrit de
prévalence des complications à court et long termes reste cette procédure peut paraître au prime abord complexe
incertaine bien qu'elle semble non négligeable [2]. (vidéo e10.1).
Ces techniques de compressions utérines ont en com- 1. L'aiguille (par exemple aiguille droite de Vicryl® 0) tra-
mun la réalisation d'un «saucissonnage» de l'utérus en rap- verse la face antérieure de l'utérus environ 3 cm sous l'hysté-
prochant les parois antérieure et postérieure de l'utérus afin rotomie (cette dernière étant restée ouverte, non suturée) à
d'exercer une pression sur ce dernier pour qu'il ne puisse se 3 cm du bord latéral de l'utérus gauche.
remplir de sang (figure 10.1). 2. Elle retraverse la face antérieure de l'utérus, pour res-
Nous présentons dans ce chapitre les principales tech- sortir 3 cm au-dessus de l'hystérotomie, toujours à environ
niques de compressions utérines décrites à ce jour. Ce 3 cm du bord latéral gauche de l'utérus.
124
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MEDutérines
10. Compressions

de l'aide, afin de pouvoir appliquer les faces antérieure et


postérieure de l'utérus l'une à l'autre. Les deux fils sont alors
noués ensemble au niveau du segment inférieur sous l'hys-
térotomie (suturée).
Cette procédure peut être réalisée sans difficultés à l'aide
d'une aiguille de Reverdin si l'opérateur ne dispose pas
d'une aiguille droite.
B-Lynch préconise d'utiliser comme fil un n° 1 Monocryl®
(polyglecaprone 25) monofilament, serti à une aiguille semi-
circulaire de 70 mm, dont le profil d'absorption est de 60 % à
sept jours, 20 % à 14 jours, la résorption étant complète entre
90 et 120 jours [5]. Bien que cela n'ait jamais été démontré,
selon B-Lynch, ce fil serait susceptible de réduire le risque de
nécrose utérine, pyométrie ou de synéchie en post-partum
en comparaison avec un fil Vicryl® [5]. C'est le seul auteur
ayant insisté sur la nécessité d'un tel fil. Nous avons pour
Figure 10.2. habitude d'utiliser pour cette procédure un Vicryl® 0.
Compression utérine en bretelle selon B-Lynch et al. [1]. Enfin, toujours d'après B-Lynch, préalablement à la réa-
lisation du geste chirurgical, une compression bimanuelle
Les étapes (1) et (2) décrivent le premier «passage» de de l'utérus active sur l'hémorragie augurerait de l'efficacité
l'aiguille. ultérieure de la technique [1].
3. Le fil chemine vers le fond utérin pour descendre le
long de la face postéro-latérale gauche de l'utérus.
4. L'aiguille transperce la face postérieure de l'utérus pour Variantes du B-Lynch
entrer dans la cavité utérine, au niveau du point d'entrée Le B-Lynch, dans sa description princeps, présente un
précédent (3 cm au-dessus de l'hystérotomie), c'est-à-dire inconvénient majeur : la nécessité d'une hystérotomie res-
à la partie supérieure de la jonction corps-isthme utérin, tée ouverte. Or le diagnostic d'HPP résistante au traitement
toujours environ à 3 cm du bord latéral gauche de l'utérus. médical (utérotoniques) est le plus souvent porté quand
5. L'aiguille transperce de nouveau la face postérieure de l'hystérotomie est suturée. De plus, le «véritable» B-Lynch
l'utérus, au même niveau que le point d'entrée précédent ne semble pas adapté en cas d'HPP survenant après un
sur une ligne horizontale, mais cette fois-ci à environ 3 cm accouchement par les voies naturelles : il ne semble pas rai-
du bord latéral droit de l'utérus (côté opposé). sonnable dans cette situation de réaliser une hystérotomie
Les étapes (4) et (5) décrivent le deuxième «passage» (résultant en un utérus cicatriciel pour pouvoir appliquer le
de l'aiguille. B-Lynch). Ainsi, certains auteurs ont proposé des variantes
6. Le fil, situé à la face postérieure de l'utérus, chemine du B-Lynch, qui ne nécessitent pas, le plus souvent, une hys-
alors vers le fond utérin, le long du bord latéral droit de térotomie ouverte.
l'utérus, pour descendre le long de la face antérolatérale
droite de l'utérus.
Variante d'Hayman [6]
7. L'aiguille pénètre la face antérieure de l'utérus, 3 cm au-
dessus de l'hystérotomie, toujours à environ 3 cm du bord Hayman et al. ont modifié la technique initiale en substi-
latéral droit de l'utérus. tuant à la suture unique deux bretelles droite et gauche
8. L'aiguille traverse de nouveau la face antérieure de médio-latérales verticales indépendantes (chacune dou-
l'utérus, cette fois-ci environ 3 cm au-dessous de l'hystéro- blée) pouvant être positionnées hystérotomie fermée [6].
tomie (non suturée). Hayman et al. ont aussi voulu reporter, sur seulement deux
Les étapes (7) et (8) décrivent le troisième «passage» de cas, une procédure plus simple, avec moins d'étapes que
l'aiguille. le B-Lynch. Le résultat et le principe sont identiques : il
9. L'hystérotomie est ensuite suturée selon la technique s'agit d'un saucissonnage de l'utérus avec des points trans-
habituelle. fixiants au niveau de la cavité utérine permettant un rap-
10. Les deux brins du fil (aiguille droite Vicryl® 0) sont prochement des parois antérieure et postérieure de l'utérus
alors mis en tension, assistés par la compression manuelle (figures 10.3, 10.4).
125
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

2. Ce premier fil est «doublé», c'est-à-dire qu'un deu-


xième fil traverse de nouveau les faces antérieure et pos-
térieure de l'utérus environ 2–3 cm sous l'hystérotomie
suturée ou sous la place théorique de l'hystérotomie si elle
n'a pas été réalisée, à 3–4 cm du bord latéral gauche.
3. L'aiguille d'un troisième fil traverse les faces antérieure
et postérieure de l'utérus environ 2–3 cm sous l'hystéroto-
mie suturée ou sous la place théorique de l'hystérotomie si
elle n'a pas été réalisée, à 3–4 cm du bord latéral droit.
4. Ce troisième fil est lui aussi «doublé», c'est-à-dire
qu'un quatrième fil traverse de nouveau les faces antérieure
et postérieure de l'utérus environ 2–3 cm sous l'hystéroto-
mie suturée ou sous la place théorique de l'hystérotomie si
elle n'a pas été réalisée, à 3–4 cm du bord latéral gauche.
5. Les deux brins du premier fil sont alors mis en tension,
assistés par la compression manuelle de l'aide, afin de pou-
voir appliquer les faces antérieure et postérieure de l'utérus
Figure 10.3.
l'une à l'autre. Les deux fils sont alors noués ensemble au
Compression utérine selon Hayman [6]. Présence de
deux bretelles médio-latérales droite et gauche verticales niveau du fond utérin (figure 10.4).
indépendantes, chacune doublée, pouvant être positionnées 6. La même procédure est répétée pour les deux brins
hystérotomie fermée. des deuxième, troisième et quatrième fils.
Pour notre part, nous pensons que le «doublage» des
deux bretelles droite et gauche est inutile (figure 10.5). Si
l'on ne double pas les bretelles, le nombre de passages
transfixiants est réduit de quatre à deux, ce qui peut éven-
tuellement être un avantage (cf. infra) (figure 10.5).

Figure 10.4.
Vue latérale de la technique d'Hayman et al. [6] (visualisation que
d'un seul fil sur les quatre).

1. L'aiguille (par exemple aiguille droite de Vicryl® 0) tra-


verse les faces antérieure et postérieure de l'utérus environ Figure 10.5.
2–3 cm sous l'hystérotomie suturée ou sous la place théo- Compression utérine selon une variante de Hayman [6]. Présence
rique de l'hystérotomie si elle n'a pas été réalisée (HPP après de deux bretelles médio-latérales droite et gauche verticales
indépendantes, non doublées, pouvant être positionnées
un accouchement par les voies naturelles), à 3–4 cm du hystérotomie fermée. Le nombre de passages transfixiants n'est
bord latéral gauche. alors que de deux.

126
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MEDutérines
10. Compressions

Notre variante du B-Lynch


Nous sommes attachés à la technique princeps du B-Lynch
qui peut tout à fait être réalisée à l'aide d'une grande
aiguille courbe de Vicryl® 0, hystérotomie fermée. La pro-
cédure en est alors légèrement simplifiée : les trois passages
de l'aiguille sertie, décrits dans la technique princeps du
B-Lynch (cf. supra) peuvent être réalisés «à l'aveugle» hys-
térotomie fermée (figure 10.6). Il est possible que lors de ces
trois passages à l'aveugle le fil ne soit pas complètement ou
pas du tout transfixiant, et qu'il soit alors intramyométrial,
en particulier au niveau de la paroi postérieure de l'utérus
(deuxième passage de notre variante). Cela ne pose pas de
problème particulier pour la réalisation de la procédure. Il
se pourrait même que ce soit un possible avantage puisque
nous pensons, comme d'autres, que les points transfixiants
pourraient avoir une responsabilité dans la survenue ulté-
rieure de synéchie intra-utérine observée après compres-
sions utérines (cf. infra) [5, 7].

Variante de Bhal [8]


Bhal et al. ont décrit dès 2005 une variante du B-Lynch dans
un souci d'économie de fil (sic) chez onze patientes. Leur
technique présente l'avantage de proposer une compres-
sion utérine fondée sur les principes du B-Lynch (bretelles)
et qui peut être réalisée hystérotomie fermée (figure 10.7).
Elle combine deux bretelles droite et gauche médio-laté-
rales verticales, indépendantes. Pour chaque bretelle, il n'y a
que deux passages d'aiguille : le premier passage de l'aiguille

Figure 10.7.
Variante de Bhal [8].
A. Elle présente l'avantage de proposer une compression utérine
fondée sur les principes du B-Lynch (bretelles) et qui peut être
réalisée hystérotomie fermée.
B. Les brins des premiers points de sortie (3 et 6) des deux
bretelles sont alors noués entre eux (formant une première
suture transversale au niveau du segment inférieur, 3 cm sous
l'hystérotomie) ; tandis que les brins des deux points d'entrée (1 et
4) des deux bretelles sont noués entre eux (formant une deuxième
suture transversale au niveau du segment inférieur, 4 cm sous
l'hystérotomie).

sertie (A) consiste à transfixier la paroi antérieure et posté-


Figure 10.6.
rieure de l'utérus 3 cm sous l'hystérotomie (fermée). Le fil
Notre variante du B-Lynch. Les trois passages de l'aiguille sertie,
décrits dans la technique princeps du B-Lynch (figure 10.1) sont remonte alors le long de la face postéro-latérale de l'utérus,
réalisés «à l'aveugle» hystérotomie fermée. se dirige vers le fond utérin puis redescend le long de la
127
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

face antéro-latérale de l'utérus. L'aiguille transperce ensuite donc aucun point transfixiant [9]. Cependant, cet avan-
la face antérieure de l'utérus, 3 cm au-dessus de l'hystéro- tage semble limité par la complexité de la procédure, la
tomie (qui est fermée) pour ressortir 2 cm au-dessous de mémoire pouvant faire défaut en urgence au moment
l'hystérotomie (point de sortie B), soit 1 cm au-dessus du de la réalisation de la technique. Selon Pereira, un autre
premier point d'entrée (A). La même procédure est réali- avantage théorique de sa procédure est d'exercer une
sée pour la deuxième bretelle (figure 10.7A). Les brins des compression sur les branches ascendantes des artères uté-
premiers points de sortie (B) des deux bretelles sont alors rines, résultant en une réduction du flux sanguin au niveau
noués entre eux (formant une première suture transversale utérin.
au niveau du segment inférieur, 3 cm sous l'hystérotomie) ;
tandis que les brins des deux points d'entrée (A) des deux Variante de Rudigoz [10]
bretelles sont noués entre eux (formant une deuxième
L'équipe de l'hôpital Croix-Rousse de Lyon a publié en 2012
suture transversale au niveau du segment inférieur, 4 cm
chez 30 patientes une technique de compression utérine
sous l'hystérotomie) (figure 10.7B). Les deux bretelles sont
non transfixiante, fondée uniquement sur quatre bretelles
donc solidarisées.
transversales (aucune bretelle longitudinale), pouvant
être considérée comme une variante de Pereira puisque
Variante de Pereira [9] les bretelles exercent une compression sur l'utérus et son
Pereira et al. ont proposé une autre technique de com- segment inférieur mais aussi sur les vaisseaux nourriciers de
pression utérine à l'aide de trois sutures transversales puis l'utérus (artères utérines, artères ovariennes, ligament rond)
de deux sutures longitudinales appliquées à l'aide d'un fil (figure 10.10) [10] :
serti de Vicryl® 1/0 [9] (figure 10.8). Cette technique n'a été ●
les bretelles supérieures circulaires traversent le corps
décrite initialement que sur une série de sept cas. utérin au niveau des parois latérales de l'utérus sans péné-
Les bretelles transversales au nombre de trois passent trer dans la cavité utérine et sans exercer de compression
dans le ligament large droit et gauche en zone avasculaire extrinsèque au niveau des artères utérines :
(juste sous les deux cornes utérines) de haut (figure 10.8A) – la première bretelle est placée dans la partie supé-
en bas (au niveau du segment inférieur) et une troisième rieure de l'utérus à travers les parois utérines d'avant en
à mi-distance entre les deux premières. Elles sont toutes arrière d'un côté puis d'arrière en avant du côté opposé
les trois nouées à la face antérieure de l'utérus. Elles réa- sous les cornes utérines. Les deux brins du fil sont noués
lisent un saucissonnage transversal de l'utérus sans points aussi forts que possible,
transfixiants. Dans un deuxième temps, sont appliquées – une deuxième bretelle supérieure identique est pas-
les deux sutures longitudinales qui correspondent aux sée d'arrière en avant toujours dans les parois latérales
deux bretelles médio-latérales verticales droite et gauche de l'utérus en englobant latéralement le ligament utéro-
de Hayman [6], sauf que ces bretelles ne sont pas trans- ovarien puis le ligament rond, et en prenant garde de
fixiantes. Elles sont nouées en postérieur à la suture trans- respecter les vaisseaux utérins et la trompe. Du côté
versale située au niveau du segment inférieur. Puis le fil opposé, le même trajet est réalisé d'avant en arrière. Il
se dirige vers le fond utérin, cheminant le long de la face faut faire très attention d'éviter les vaisseaux utérins
postérieure de l'utérus, qui est transfixiée superficiellement latéralement, en particulier les veines qui peuvent être
(en intramyométrial), à l'aide de l'aiguille sertie, à sa partie extrêmement dilatées. Les deux brins sont ensuite noués
supérieure (figure 10.9) avant d'atteindre le fond utérin. afin de comprimer le corps utérin ainsi que les vaisseaux
Arrivé au niveau du fond utérin, le fil se dirige en antérieur issus du ligament rond et du ligament utéro-ovarien,
pour cheminer le long de la face antérieure de l'utérus qu'il – une troisième bretelle circulaire est positionnée selon
va aussi traverser superficiellement (en intramyométrial) à le même principe au niveau de la moitié du corps utérin,
sa partie supérieure pour être finalement noué en anté- ●
la quatrième bretelle circulaire inférieure a pour but de
rieur à la suture transversale située au niveau du segment comprimer le segment inférieur et la branche ascendante
inférieur (figure 10.8B). des deux artères utérines. Elle est donc passée à travers le
Ces deux sutures longitudinales réalisent donc un sau- ligament large dans une zone avasculaire de façon bilaté-
cissonnage longitudinal de l'utérus et sont solidarisées, rale légèrement en dessous de l'hystérotomie ; cette suture
en arrière et en avant au niveau du segment inférieur, à la n'englobe pas le ligament rond. Les deux brins sont alors
suture transversale la plus basse située, par l'intermédiaire noués, exerçant une compression sur les artères utérines et
d'un nœud simple. Dans la technique de Pereira, il n'y a le segment inférieur (figure 10.10).

128
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 10.8.
Compression utérine de Pereira [9] : vue antérieure.
A. La suture transversale supérieure passe dans le ligament large droit et gauche de haut, en zone avasculaire (juste sous les deux cornes
utérines) et est nouée à la face antérieure de l'utérus. 1 : début de la suture transversale supérieure ; 2 : la suture transversale supérieure
passe dans le ligament large gauche de haut, en zone avasculaire ; 3 : fin de la suture transversale supérieure ; 4 : la suture transversale
supérieure est nouée à la face antérieure de l'utérus ; 5 : repli vésico-utérin ; 6 : ligament rond ; 7 : trompe ; 8 : ovaire.
B. Les trois sutures transversales (1, 2, 3) sont en place et nouées à la face antérieure de l'utérus. Les deux sutures longitudinales (4) sont
nouées en antérieur (5) à la suture transversale située au niveau du segment inférieur (3), après avoir traversé superficiellement (en
intramyométrial) la face antérieure de l'utérus à sa partie supérieure.

129
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 10.9.
Compression utérine de Pereira [9] : vue postérieure. Les trois sutures transversales sont en places et nouées à la face antérieure
de l'utérus (1, 2, 3). Une suture longitudinale (4) est nouée en postérieur à la suture transversale (3) située au niveau du segment
inférieur. Le fil se dirige vers le fond utérin, cheminant le long de la face postérieure de l'utérus, qui est transfixiée superficiellement
(en intramyométrial), à l'aide de l'aiguille sertie, à sa partie supérieure avant d'atteindre le fond utérin. Arrivé au niveau du fond
utérin, le fil se dirige en antérieur pour cheminer le long de la face antérieure de l'utérus qu'il va aussi traverser superficiellement (en
intramyométrial) à sa partie supérieure pour être finalement noué en antérieur à la suture transversale située au niveau du segment
inférieur.

Limites
de la cavité
utérine

Figure 10.10.
Compression utérine de Rudigoz [10] : vue postérieure (A, B). Les trois bretelles transversales circulaires supérieures traversent les parois
latérales de l'utérus sans pénétrer dans la cavité utérine. La seconde bretelle supérieure englobe de façon bilatérale les ligaments ronds
et utéro-ovariens mais respecte les trompes. La bretelle inférieure passe à travers le ligament large dans une zone avasculaire de façon
bilatérale légèrement en dessous de l'hystérotomie, en respectant le ligament rond afin de comprimer le segment inférieur et la branche
ascendante des deux artères utérines. 1 : fil passé en dedans de l'artère utérine ; 2 : fil passé en dehors de l'artère utérine.

130
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MEDutérines
10. Compressions

À retenir Pour réaliser une suture carrée en multiples points,


il est nécessaire à l'aide d'une aiguille droite (ou aiguille
Quelle que soit la technique utilisée (B-Lynch, à Reverdin) Vicryl® 0 de réaliser quatre points d'entrée
B-Lynch modifié, Hayman, Pereira, etc.), afin d'ob- (figures 10.11, 10.12) :
tenir la meilleure compression utérine possible ●
le premier point d'entrée (A) est réalisé en transfixiant la
(et donc potentiellement une meilleure effica- paroi antérieure puis postérieure de l'utérus ;
cité), il est important que l'aide opératoire réalise ●
le deuxième point d'entrée (B) est réalisé en retransfixiant
une compression bimanuelle de l'utérus afin de la paroi postérieure vers la paroi antérieure de l'utérus, sur
réduire le volume utérin avant de serrer les sutures une même ligne horizontale 2–3 cm à distance du premier
(ou bretelles) sur l'utérus. point d'entrée (à gauche de ce dernier) ;

le troisième point d'entrée (C) est réalisé en transfixiant
Capitonnage ou cloisonnement la paroi antérieure puis postérieure de l'utérus, sur une
même ligne verticale 2–3 cm à distance et en dessous du
utérin ou sutures multipoints deuxième point d'entrée ;
L'objectif est également d'assurer l'hémostase par com-

le quatrième point d'entrée (D) est réalisé en transfixiant
pression en appliquant, entre elles, les parois antérieure et la paroi postérieure puis antérieure de l'utérus, sur une
postérieure de l'utérus par des multiples points de suture même ligne horizontale 2–3 cm à distance du troisième
simples transfixiants [11, 12], ou par des sutures multipoints point d'entrée, mais vers le premier point d'entrée, c'est-à-
en cadre (figure 10.11) [13]. dire à droite du troisième point d'entrée de façon à former
un carré ;
Sutures multipoints en carré selon

enfin, les deux chefs de fils issus des points A et D sont
noués ensemble afin de former un carré.
Cho [13]
Cho et al. furent les premiers à décrire en 2000 une tech- A B (2)
nique de sutures par multiples points en carré appelée
A B
hemostatic multiple square suturing (figure 10.11) [13]. La
technique consiste à repérer une zone qui est le siège d'un
saignement actif et de suturer la séreuse de la paroi anté-
(3)
rieure à la séreuse de la paroi postérieure par des points en
carré. L'opération est répétée autant de fois que nécessaire.
C

A B

(4)

D C

A B

(5)

D C
Figure 10.12.
Figure 10.11. Capitonnage utérin en cadre selon Cho et al. [13] : les quatre
Capitonnage utérin en cadre selon Cho et al. [13]. points d'entrée.

131
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Cette technique a été proposée par Cho et al. aussi bien morts avec un risque de nécrose endométriale [7]. Leur
sur les atonies utérines qu'en cas de placenta praevia, voire technique propose de réaliser les deux premières étapes
accreta [2, 13]. Pour nous, cette technique semble surtout de Cho [13] puis de nouer les chefs du fil ensemble. Cette
intéressante pour les saignements en nappe et diffus du procédure consistant à accoler la paroi antérieure à la paroi
segment inférieur. Cette technique depuis sa description postérieure de l'utérus par des points simples est réalisée
princeps sur 23 cas s'est, comme le B-Lynch, largement plusieurs fois sur tout le corps utérin (créant forcément de
diffusée dans le monde. Elle est très probablement la multiples espaces morts).
technique de capitonnage utérin la plus réalisée à l'heure
actuelle. Comme pour de nombreux auteurs, il s'agit de la Capitonnage utérin selon Oury [12]
procédure de capitonnage utérin qui a notre préférence,
L'équipe de Robert Debré (Paris) a proposé une tech-
surtout lors de saignements du segment inférieur rencon-
nique de capitonnage reposant sur quatre points simples,
trés en cas de placenta praevia [2].
identiques sur le principe à ceux d'Hackethal et al. [7],
transfixiant complètement les parois antérieure et posté-
Capitonnage utérin selon Hwu [11] rieure de l'utérus [12]. Dans cette série de 20 patientes, ces
Hwu et al. [11] ont proposé une variante de la technique quatre points étaient toujours disposés de la même façon
de Cho [13] avec le souci de simplifier la procédure car (figure 10.13) :
Hwu et al. considèrent que la procédure décrite par Cho

une suture en regard de la corne utérine droite ;
est difficile à mémoriser. Cette variante présente l'incon-

une suture en miroir en regard de la corne utérine
vénient de ne pouvoir être réalisée qu'hystérotomie gauche ;
ouverte. Pour la réaliser, il est nécessaire à l'aide d'une

une suture transversale au milieu du corps utérin ;
aiguille sertie Vicryl® 0 de réaliser seulement deux points

une suture transversale au niveau du segment inférieur,
d'entrée (au lieu de quatre pour Cho). Le premier point sous l'hystérotomie suturée.
d'entrée est réalisé en transfixiant la paroi antérieure puis
postérieure de l'utérus. Contrairement à Cho et al. [13],
la paroi postérieure n'est pas transfixiée totalement ; la
transfixion est superficielle à travers le myomètre (res-
pect de la séreuse de la paroi postérieure de l'utérus).
Puis l'aiguille transfixe de nouveau la paroi antérieure du
même côté de la berge d'hystérotomie que le premier
point d'entrée, autrement dit, les points d'entrée et de
sortie sont au niveau du segment inférieur (berge infé-
rieure de l'hystérotomie), ou au niveau du corps utérin
(berge supérieure de l'hystérotomie). Les deux chefs du
fils sont alors noués pour accoler la paroi antérieure à la
paroi postérieure de l'utérus. L'opération peut être répé-
tée autant de fois que nécessaire. L'hystérotomie est fer-
mée une fois l'hémorragie contrôlée.
Bien que Hwu et al. aient décrit cette technique avec
succès chez 14 patientes ayant un placenta praevia [11],
nous pensons qu'elle présente l'inconvénient majeur de
nécessiter une hystérotomie ouverte.

Capitonnage utérin selon Hackethal [7]


Hackethal et al. [7] ont décrit chez sept patientes, toujours Figure 10.13.
dans le but de simplifier la technique, une procédure enfan- Capitonnage utérin selon Oury [12] fondé sur quatre sutures.
tine, transfixiante, bien qu'ils conviennent que les points Une suture en regard de la corne utérine droite (1), une suture
en miroir en regard de la corne utérine gauche (2), une suture
transfixiants sont susceptibles d'engendrer ultérieurement transversale au milieu dsu corps utérin et une suture transversale
des synéchies, en particulier du fait de l'existence d'espaces au niveau du segment inférieur, sous l'hystérotomie suturée.

132
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MEDutérines
10. Compressions

Résultats Tableau 10.1. Nombre de patientes ayant eu une


compression utérine pour hémorragie du post-partum
et nombre d'hystérectomies réalisées selon le type de
À retenir compressions utérines (d'après [28]).
Type de Patientes Patientes ayant eu une
L'indication reine des techniques de compression compression (n = 211) hystérectomie (n = 52)
ou de capitonnage utérin est l'atonie utérine. utérine
B-Lynch 79 (37 %) 19 (24 % [IC 95 % : 15–35 %])
Les différentes techniques de compression utérine se sont
Variante de B-Lynch 48 (23 %) 17 (35 % [IC 95 % : 22–51 %])
multipliées, alors que peu de données étaient disponibles
quant à leur efficacité et leur morbidité, puisque toutes ces Capitonnage, 32 (15 %) 4 (13 % [IC 95 % : 4–29 %])
techniques ont été essentiellement rapportées sur de très cloisonnement ou
sutures multipoints
faibles cohortes [2, 14–18]. L'inconnue était encore plus
grande concernant la fertilité et le pronostic obstétrical Non précisé 52 (25 %) 12 (23 % [IC 95 % : 12–37 %])
ultérieur des patientes chez qui l'utérus a pu être préservé Total 211 52 (25 % [IC 95 % :
[19–21] même si, depuis, plusieurs séries rassurantes sont (100 %) 19–31 %])
à notre disposition concernant le devenir de ces patientes
[22–24]. Il est important de souligner la faible validité de
toutes ces séries concernant les compressions utérines du Tableau 10.2. Cause des hémorragies sévères du
fait des faibles effectifs des études, de l'hétérogénéité des postpartum chez les patientes traitées par compression
séries (association inconstante à des ligatures vasculaires) utérine et nombre d'hystérectomies réalisées selon la cause
et surtout du peu de précision sur l'étiologie et la sévérité de l'HPP (d'après [28]).
des HPP ayant amené à réaliser ce geste [15]. En particu- Cause de l'HPP Patientes Patientes ayant eu une
lier, bien que certains auteurs aient rapporté une efficacité (n = 211) hystérectomie (n = 52)
du B-Lynch dans les ruptures utérines [25] ou les accreta Atonie utérine 129 (61 %) 33 (26 % [IC 95 % : 18–34 %])
[11, 26], il semble que ces techniques aient été réalisées
Placenta praevia 15 (7 %) 2 (13 % [IC 95 % : 2–40 %])
dans la grande majorité des cas uniquement en cas d'ato- sans accreta
nie utérine résistante au traitement médical [15]. En 2005,
Placenta accreta 18 (9 %) 7 (39 % [IC 95 % : 17–64 %])
B-Lynch rapportait dans une courte lettre à l'éditeur avoir
connaissance de 948 procédures réalisées dans le monde Déchirure utérine 27 (13 %) 9 (33 % [IC 95 % : 17–54 %])
avec seulement sept échecs (soit une efficacité de 99,3 %). Autres a
22 (10 %) 1 (5 % [IC 95 % : 0–23 %])
Il faut considérablement se méfier de ce type d'assertions a
Autres incluant hématome rétroplacentaire (n = 15), embolie
non étayées, d'autant plus que les auteurs (ainsi que les édi- amniotique (n = 2), infection (n = 2), saignement du ligament large
teurs de revue) ont tendance à publier leurs succès, mais gauche (n = 1), cause non précisée (n = 3).
beaucoup plus rarement leurs échecs [26]. En effet, Knight
a rapporté que parmi les 348 patientes ayant eu une hysté- selon l'étiologie de l'HPP (tableau 10.2). Cette étude a donc
rectomie d'hémostase en 2005 au Royaume-Uni, 50 avaient permis d'étayer de façon robuste que les techniques de
été traitées auparavant sans succès par un B-Lynch ou une compression utérine, quelles qu'elles soient, étaient effi-
autre technique de compression utérine [27]. caces dans environ 75 % des cas [28].
En fait, l'efficacité des compressions utérines n'est connue Dans cette large série de 211 compressions utérines,
réellement que depuis 2011 grâce à une large série prospec- malheureusement aucune information n'était disponible
tive de 211 compressions utérines réalisées au Royaume- concernant les complications à court et long termes ; leur
Uni (registre United Kingdom Obstetric Surveillance System prévalence exacte reste donc à ce jour inconnue. Nous fûmes
[UKOSS]) [28]. Dans cette étude, le taux d'efficacité était une des premières équipes à alerter les gynécologues-obsté-
de 75 % (IC 95 % : 69–81 %), et le taux d'hystérectomie ne triciens sur les complications possibles à long terme de ces
différait pas selon la compression utérine utilisée (B-Lynch, compressions utérines, en particulier quand elles sont trans-
variante de B-Lynch, capitonnage, cloisonnement ou fixiantes, notamment avec le risque de survenue ultérieure
sutures multipoints, etc.) (tableau 10.1) [28]. L'indication de synéchie [14,19]. Nos inquiétudes ont été confirmées
était dans la grande majorité des cas une atonie utérine et depuis par d'autres auteurs essentiellement français qui ont
le taux d'hystérectomie n'était pas statistiquement d ­ ifférent eux aussi observé un risque de synéchie anormalement élevé
133
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

après compression utérine [18, 29–31]. La prévalence de ces nombre de compressions utérines (n = 199) suggère un
synéchies utérines pourrait être de l'ordre de 5 à 20 % [18, biais d'indication évident. Cela a été confirmé à la lecture
29–31]. La revue de la littérature d'Amorin-Costa et al. [32] des dossiers car une ligature vasculaire avait tendance à
portant sur 29 études observationnelles ou séries de cas col- être réalisée quand la situation clinique était plus grave et
lige d'autres complications : huit cas de nécrose utérine, deux plus complexe [31].
cas de pyométrie, un cas d'hématométrie et un cas d'érosion Chez une patiente hémodynamiquement instable, l'hys-
du mur utérin. En ce qui concerne le pronostic obstétrical térectomie d'hémostase doit être fortement envisagée,
ultérieur et la fertilité, une revue de la littérature incluant surtout si la patiente est «âgée», multipare et n'a a priori
125 femmes estime que 91 % des femmes retrouvent un pas de désir de grossesse ultérieure. Il ne faut cependant
cycle menstruel normal six mois après une procédure de pas oublier que cette intervention est associée à une mor-
compression utérine et que 75 % des femmes ayant un nou- bidité maternelle potentiellement non négligeable [34].
veau désir de grossesse ont obtenu une naissance vivante Pour cette raison, il peut être légitime de réaliser rapide-
(21/28 femmes) [23]. De plus, les données d'une étude cas- ment une ligature des artères utérines (première étape de
témoins portant sur 42 grossesses obtenues spontanément l'hystérectomie d'hémostase) ou une compression utérine
après avoir bénéficié d'une technique de compression uté- (procédures le plus souvent faciles et rapides à réaliser), afin
rine lors de la précédente grossesse ne rapportaient pas de d'éviter la morbidité liée à l'hystérectomie d'hémostase et/
différence sur le taux de fausses couches et d'accouchements ou de diminuer le volume des pertes sanguines.
à terme en comparaison avec le groupe sans antécédent de Chez une patiente hémodynamiquement stable, l'hysté-
compression utérine (appariement sur l'âge et la parité) [24]. rectomie d'hémostase ne doit pas être privilégiée puisque
En conclusion, quand aucune synéchie ne survient, il ne cette procédure ne semble pas être la moins morbide [34]
semble donc pas que les compressions utérines altèrent le et que, par définition, elle prive la patiente de la possibilité
pronostic obstétrical en cas de nouvelle grossesse [22–24]. d'avoir d'autres enfants.
Mais des complications graves de ces techniques ont été Nous ne pensons pas que la ligature des artères hypo-
décrites, pouvant se solder par une hystérectomie secon- gastriques doit être la procédure à proposer en première
daire [32]. intention. Notre ligature vasculaire privilégiée est la «triple
ligature étagée», c'est-à-dire la réalisation d'une triple liga-
ture de Tsirulnikov [35] mais avec une double (normale
Quelle procédure utiliser et basse) ligature bilatérale des artères utérines, comme le
en première intention : décrit AbdRabbo (figure 10.14) (cf. chapitre 8) [36].
Entre les techniques de compression ou de capitonnage
compressions utérines utérins et la «triple ligature étagée», nous privilégions en
ou ligatures vasculaires ? première intention la «triple ligature étagée», contraire-
ment à certains auteurs anglo-saxons [1, 37, 38] ou français
Actuellement, il n'existe aucune étude prospective ou (figure 10.14) [10, 12]. Ce choix ne résulte pas d'une croyance
rétrospective ayant comparé l'efficacité et la morbidité que le taux d'efficacité des ligatures vasculaires impliquant
des compressions utérines avec celles des ligatures vas- une ligature des artères utérines (environ 90 %) soit signi-
culaires. En l'absence d'une étude randomisée, dont la ficativement supérieur à celui des compressions utérines
mise en place semble difficile, aucune société savante (environ 75 %), car du fait de tous les biais possibles énoncés
n'a recommandé de réaliser en première intention telle précédemment, cette comparaison n'est bien entendu pas
procédure plutôt qu'une autre [33]. Dans une série pros- valide. Ce choix est essentiellement guidé par l'inquiétude
pective provenant toujours du Royaume-Uni (registre que l'on peut avoir avec les compressions utérines concer-
UKOSS) incluant 199 compressions utérines et 20 ligatures nant le risque de complications à court comme à long
vasculaires, le taux d'hystérectomie était supérieur dans termes, en particulier sur l'altération de la fertilité (pyomé-
le groupe ligature (64 % [IC 95 % : 35–87 %] versus 25 % trie, nécrose utérine, synéchies, etc.) [32] ; alors que pour
[IC 95 % : 19–33 %]) [31]. Le très faible taux de succès les ligatures vasculaires impliquant les artères utérines, nous
des ligatures vasculaires retrouvé dans cette étude inter- disposons de données à court et long termes qui sont ras-
pelle. Cela est probablement dû à l'existence de biais dans surantes. Actuellement, à l'exception de deux hématomes
cette étude prospective non contrôlée : le faible nombre du ligament large, aucune complication n'a été rapportée
de ligatures vasculaires (n = 20) en comparaison avec le après une «triple ligature étagée» [35, 36, 39, 40]. Enfin, il

134
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MEDutérines
10. Compressions

Voie basse Césarienne

HPP
HPP
Ocytocine IV
Délivrance artificielle/Révision utérine.
Révision sous valves ± suture des déchirures cervicovaginales HPP persistante
Massage utérin
Ocytocine IV Sulprostone IV (Nalador)

HPP persistante
HPP persistante
Triple ligature de Tsirulnilkov [34]
Sulprostone IV (Nalador) avec une ligature étagée (doublée) de l'artère utérine

HPP persistante HPP persistante

Patiente hémodynamiquement stable Variante de B-Lynch [2]

HPP persistante
Oui Non
Ligature des artères hypogastriques
si l'opérateur en a l'expérience
Embolisation artérielle Laparotomie exploratrice
Sinon, étape suivante

HPP persistante

Hystérectomie d'hémostase
HPP persistante

Figure 10.14.
Algorithme de la prise en charge des HPP, résistantes au traitement médical.

existe de nombreuses données suggérant que la fertilité et le Chez une patiente hémodynamiquement stable, il est
pronostic obstétrical ultérieur des patientes ne sont pas alté- possible de proposer si elle est jeune, nullipare, ayant un
rés après une «triple ligature étagée» [36, 40]. Une étude de désir de grossesse ultérieure, une deuxième procédure
cohorte française portant sur 109 maternités confirme d'ail- conservatrice (plutôt qu'une hystérectomie d'hémostase).
leurs que ce choix est privilégié par de nombreux centres En cas d'échec de la «triple ligature étagée» au décours
en cas de décision de chirurgie utérine conservatrice : 0,2 % d'une césarienne, du fait d'un manque de données dispo-
[0,1–0,4] des HPP traitées par compression utérine contre nibles autrefois concernant le B-Lynch, nous privilégions en
1,2 % [1,0–1,5] par ligature utérine [41]. deuxième intention la ligature des artères hypogastriques si
le praticien maîtrisait cette technique [14, 40, 42]. Les résul-
tats de cinq séries associant une compression utérine type
B-Lynch après échec de ligature utérine – rapportant un
Quelle procédure proposer arrêt de l'HPP entre 44 et 100 % des cas [14, 30, 43–45] –
en deuxième intention ? nous encouragent à privilégier le B-Lynch en deuxième
intention ; la ligature des artères hypogastriques n'est alors
Chez une patiente hémodynamiquement instable, quelle réalisée qu'en troisième intention, si l'hémodynamique le
que soit la procédure conservatrice réalisée en première permet (figure 10.14). Par ailleurs, en cas d'association de
intention («triple ligature étagée», ligature des artères deux techniques, le taux de synéchie est évalué entre 0 et
hypogastriques, compression utérine), l'hystérectomie 44 % en fonction des séries et six grossesses sont rappor-
d'hémostase doit être réalisée sans délai et absolument non tées dont cinq de déroulement normal [14, 30, 43–45].
retardée par les procédures conservatrices. En cas d'association de deux techniques chirurgicale, une

135
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

évaluation de la cavité utérine en cas de désir de grossesse [7] Hackethal A, Brueggmann D, Oehmke F, Tinneberg HR,
ultérieur ou de modification du cycle menstruel semble ­Zygmunt MT, Muenstedt K. Uterine compression U-sutures in
primary postpartum hemorrhage after caesarean section : fertility
cependant nécessaire [2]. preservation with a simple and effective technique. Hum Reprod
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Conclusion suture – a valuable approcach to control major haemorrhage at
lower segment caesarean section. J Obstet Gynaecol 2005;25:10–4.
[9] Pereira A, Nunes F, Pedroso S, Saraiva J, Retto H, Meirinho M. Com-
Il existe de multiples techniques de compressions utérines pressive uterine sutures to treat postpartum bleeding secondary to
et de capitonnages utérins. Les deux techniques les plus uti- uterine atony. Obstet Gynecol 2005;106:569–72.
lisées et les plus étudiées sont probablement les compres- [10] Huissoud C, Cortet M, Dubernard G, Tariel O, Fichez A, Escalon J,
et al. A stitch in time : layers of circular sutures can staunch postpar-
sions utérines selon B-Lynch et les sutures multipoints en tum hemorrhage. Am J Obstet Gynecol 2012;206:177. e1-2.
carré selon Cho. Il n'est pas nécessaire de connaître toutes [11] Hwu YM, Chen CP, Chen HS, Su TH. Parallel vertical compression
les techniques de compressions utérines et de capitonnages sutures : a technique to control bleeding from placenta praevia or
utérins mais il semble important d'en maîtriser au moins accreta during caesarean section. BJOG 2005;112:1420–3.
[12] Ouahba J, Piketty M, Huel C, Azarian M, Feraud O, Luton D, et al.
deux : une variante de B-Lynch (réalisable hystérotomie
Uterine compression sutures for postpartum bleeding with uterine
fermée), et les sutures multipoints en carré selon Cho. Le atony. BJOG 2007;114:619–22.
taux d'efficacité de ces procédures est élevé, d'environ 75 %, [13] Cho JH, Jun HS, Lee CN. Hemostatic suturing technique for
mais le risque de complications à court (pyométrie, nécrose uterine bleeding during cesarean delivery. Obstet Gynecol
utérine) et long termes (synéchie) semble non négligeable, 2000;96:129–31.
[14] Sentilhes L, Gromez A, Razzouk K, Resch B, Verspyck E,
entre 5 et 20 %, faisant privilégier pour notre équipe les Marpeau L. B-Lynch suture for persistent massive post-
ligatures des artères utérines («triple ligature étagée») en partum hemorrhage following vessel ligation. Acta Obstet
première intention. Les recommandations du CNGOF sur Gynecol Scand 2008;87:1020–6.
la prise en charge de l'hémorragie du post-partum [2, 46] [15] Sentilhes L, Gromez A, Descamps P, Marpeau L. Why stepwise ute-
rine devascularization should be the first-line conservative surgical
ne privilégient cependant pas une technique plutôt qu'une
treatment to control severe postpartum hemorrhage ? Acta Obstet
autre et stipulent que «Le choix de la technique chirurgicale Gynecol Scand 2009;88:490–2.
conservatrice (ligature des artères utérines, ligature bilaté- [16] Sentilhes L, Descamps P. Which surgery should be the first-line ute-
rale des hypogastriques ou compression utérine) dépendra rine-sparing procedure to control severe postpartum hemorrhage ?
des habitudes de chacun (accord professionnel)» [2, 46]. Fertil Steril 2011;95:e71.
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[29] Poujade O, Grossetti A, Mougel L, Ceccaldi PF, Ducarme G, Luton D. tion for postpartum haemorrhage. Hum Reprod 2008;23:1087–92.
Risk of synechiae following uterine compression suture in the [41] Kayem G, Dupont C, Bouvier-Colle M, Rudigoz R, Deneux-Tha-
management of postpartum hemorrhage. BJOG 2011;118:433–9. raux C. Invasive therapies for primary postpartum haemorrhage : a
[30] Rathat G, Do Trinh P, Mercier G, Reyftmann L, Dechanet C, population-based study in France. BJOG : An International J Obstet
­Boulot P, et al. Synechia after uterine compression suture. Fertil Gynaecol 2016;123(4):598–605.
­Steril 2011;95:405–8. [42] Sentilhes L, Gromez A, Clavier E, Resch B, Verspyck E, Marpeau L.
[31] Kayem G, Kurinczuk JJ, Alfirevic Z, Spark P, Brocklehurst P, Knight M. Predictors of failed pelvic arterial embolization for severe postpar-
Specific second-line therapies for postpartum haemorrhage : a tum hemorrhage. Obstet Gynecol 2009;113:992–9.
national cohort study. BJOG 2011;118:856–64. [43] Blanc J, Desbriere R, Bretelle F, Boubli L, D'Ercole C, Carcopino X.
[32] Amorin-Costa C, Mota R, Rebelo C, Tiago Silva P. Uterine compression Uterine-sparing surgical management of postpartum hemorrhage :
sutures for postpartum hemorrhage : is routine postoperative cavity is it always effective ? Arch Gynecol Obstet 2012;285:925–30.
evaluation needed ? Acta Obstet Gynecol Scand 2011;90:701–6. [44] Gezginç K, Yazici F, Koyuncu T, Mahmoud AS. Bilateral uterine
[33] Sentilhes L, Goffinet F, Vayssière C, Deneux-Tharaux. Comparison and ovarian artery ligation in addition to B-lynch suture may be
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our ignorance. BJOG 2017;124:718–22. Exp Obstet Gynecol 2012;39:168–70.
[34] Shellhaas CS, Gilbert S, Landon MB, Varner MW, Leveno KJ, Hauth JC, [45] Akbayir O, Ekiz A, Akca A, Guraslan B, Akagunduz B. Single square
et al. The frequency and complication rates of hysterectomy accom- hemostatic suture for postpartum hemorrhage secondary to ute-
panying cesarean delivery. Obstet Gynecol 2009;114:224–9. rine atony. Arch Gynecol Obstet 2013;287:25–9.
[35] Tsirulnikov MS. La ligature des vaisseaux utérins au cours des [46] Sentilhes L, Vayssière C, Deneux-Tharaux C, Aya AG, Bayoumeu F,
hémorragies obstétricales. J Gyn Obst Biol Reprod 1979;8:751–3. Bonnet MP, et al. Postpartum hemorrhage : guidelines for clinical
[36] AbdRabbo S. Stepwise uterine devascularization : a novel tech- practice from the French College of Gynaecologists and Obstetri-
nique for management of uncontrollable postpartum hemorrhage cians (CNGOF). Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 2016;198:12–21.
with preservation of the uterus. AJOG 1994;171:694–700.

``Compléments en ligne Vidéo 10.1


Compressions utérines (B-Lynch, Haymann) ou capitonnage
utérin (Cho).
Des compléments numériques sont associés à ce chapitre Cette vidéo est extraite du film Prise en charge chirurgicale
(ils sont indiqués dans le texte par un picto ). Pour voir des hémorragies de la délivrance, réalisé par Resch B, Sergent F,
ces compléments, connectez-vous sur http://www.em- Blanc S, Baron M, Roman H, Sentilhes L, Diguet A, Verspyck E,
consulte.com/e-complement/476722 et suivez les Marpeau L pour les 30es Journées nationales du Collège national de
gynécologie-obstétrique (2006).
instructions.

137
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Chapitre 11
Thrombus vaginaux
A. Ricbourg, O. Le Dref, E. Barranger

PLAN DU C HAPITRE
Définition 140
Facteurs de risque 140
Diagnostic 141
Traitement 142
Complications 144

Chirurgie en obstétrique
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Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Points forts du chapitre Différents types d'hématomes en fonction de leur locali-


Complication rare mais potentiellement gravissime, sation sont décrits (figure 11.1) [5] :
le thrombus vaginal ou l'hématome périgénital ●
l'hématome vulvaire : tuméfaction unilatérale d'une
est une complication de l'accouchement dont la grande lèvre devenue oblongue ;
symptomatologie peut être retardée. ●
l'hématome vaginal : tuméfaction palpée au toucher
Il faut l'évoquer devant toute symptomatologie vaginal refoulant la paroi opposée ;
douloureuse et/ou hémorragique du post-partum. ●
l'hématome vulvovaginal (le plus fréquent) : il s'agit
Son traitement est chirurgical après un bilan lésionnel de l'association des deux précédents, dont la pathogénie
initial précis et une réanimation appropriée. et le pronostic sont similaires. En effet, l'hématome inté-
Une embolisation artérielle peut être associée ou plus resse la vulve, les tissus paravaginaux, le périnée, la fosse
rarement une ligature des artères hypogastriques. ischiorectale. Les vaisseaux le plus souvent concernés sont
les branches de l'artère pudendale ou honteuse interne et
Définition l'artère vaginale longue ou bien les vaisseaux périnéaux et
labiaux ;
L'hématome périgénital est aussi nommé hématome puer-

l'hématome supravaginal ou sous-péritonéal : situé
péral ou improprement «thrombus génital». Le terme au-dessus des aponévroses pelviennes dans la région
d'hématome semble plus approprié que celui de thrombus rétropéritonéale ou intraligamentaire. Toujours grave,
qui évoque l'idée d'une coagulation intravasculaire [1]. il est la conséquence d'une lésion traumatique du col,
Il correspond à un décollement du tissu conjonctif para- du segment inférieur ou du cul-de-sac vaginal. Les vais-
vaginal, paracervical ou paramétrial par des lésions vascu- seaux concernés sont l'artère utérine ascendante ou
laires généralement dues à un traumatisme direct lors de la vaginale longue ou les vaisseaux cervicovaginaux ou
l'accouchement. De rares cas ont été décrits d'hématomes vésicovaginaux.
durant le travail avant l'accouchement pouvant être à l'ori-
gine de dystocie mécanique [2].
La cause immédiate est une rupture vasculaire de capil-
laires avec une rapide extension dans le tissu adipeux car Facteurs de risque
aucun élément anatomique ne s'oppose à la progression
de la collection entraînant potentiellement une spoliation Des facteurs favorisants ont été incriminés comme la
sanguine importante plus ou moins associée à une coagu- primiparité, la macrosomie, les grossesses multiples, les
lation intravasculaire disséminée. Cette spoliation sanguine varices vulvovaginales, les anomalies de la coagulation,
est potentialisée par l'hypervascularisation pelvienne due à la prééclampsie. L'extraction instrumentale, a fortiori
l'imprégnation progestéronique gravidique [3]. accompagnée d'une rotation, pourrait augmenter le
Bien que la pathogénie soit encore discutée, il semblerait risque de survenue d'hématome périgénital mais l'analyse
que la rotation intrapelvienne de la tête fœtale, qu'elle soit de la littérature est rendue difficile du fait de l'absence
spontanée ou manuelle, puisse être incriminée. d'analyse spécifique de cette complication particulière et
L'hématome périgénital est unilatéral car sa diffusion est de la variabilité d'utilisation de forceps selon les pays. Le
limitée par le raphé médian et il est le plus souvent droit du CNGOF contre-indique formellement la rotation instru-
fait, d'une part, du rôle potentiel de l'épisiotomie et, d'autre mentale [6].
part, de la plus grande fréquence de présentation occipito- D'autres facteurs sont plus controversés comme : l'épi-
iliaque postérieure droite que gauche (qui nécessitera sou- siotomie, «protectrice» pour certains, facteur de risque, à
vent une rotation manuelle). part entière, pour d'autres. Elle est dans la littérature obser-
Il apparaît généralement dans les heures qui suivent l'ac- vée dans 85 à 93 % des cas d'hématome périgénital. Il peut
couchement (le plus souvent dans les 12 premières heures survenir suite à une réparation insuffisante d'une épisioto-
[4]) car, pendant le travail, la tête fœtale assure l'hémostase mie ou d'une déchirure dont l'angle d'incision n'a pas été
en comprimant les parois vaginales et le périnée. suturé [2, 3].
Son incidence est variable dans la littérature mais sem- En pratique, ces hématomes peuvent apparaître après
blerait être de 1/1000 accouchements. Cette imprécision des accouchements normaux sans qu'aucun de ces fac-
s'explique par un défaut de reconnaissance et une défini- teurs de risque ne soit retrouvé. Leur survenue est donc
tion non unanime dans la littérature. imprévisible.

140
Dr A.Amine Recherche bibliographique11.SCI-MED
Thrombus vaginaux

A B
Fig11-01a Fig11-01b

C D
Fig11-01c Fig11-01d

Fig11-01a : Hématome vulvaire, Fig11-01b : Hématome vaginal, Fig11-01c : Hématome valvovaginal,


Fig11-01d : Hématome supravaginal ou sous péritonéal.
Figure 11.1.
Classification d'après Vybiral [5] : de gauche à droite : hématome vulvaire, hématome vaginal, hématome vulvovaginal, hématome
supravaginal ou sous-péritonéal. 1. Péritoine ; 2. col de l'utérus ; 3. vagin ; 4. plan des releveurs ; 5. petite lèvre ; 6. grande lèvre.

Diagnostic (figures 11.2 à 11.5) ­ ypovolémique peut survenir. Lorsque l'hématome est
h
strictement intravaginal, il faudra s'aider du toucher
Il est exclusivement clinique avec la survenue d'une vaginal et éventuellement du toucher rectal pour faire
douleur ou l'apparition d'une tuméfaction, dont la le diagnostic.
taille est variable et repousse latéralement la fente L'hématome sous-péritonéal provoque une douleur
vulvaire. La tuméfaction est de forme oblongue et abdominale ou lombaire, parfois un psoïtis associé à une
la muqueuse qui la recouvre est violacée, amincie défense et un choc hypovolémique beaucoup plus fré-
comme prête à se fissurer. L'hémorragie est rarement quent que dans sa forme localisée. Pathologie rare, le
extériorisée. L'hématome peut provoquer un ténesme ­diagnostic est parfois retardé car non suspecté devant des
dans les formes étendues. Secondairement, un choc signes cliniques peu évocateurs [7, 8].

141
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 11.5.
Figure 11.2. Hématome extensif vulvovaginal droit.
Volumineux hématome vulvovaginal gauche. Photo Dr O. Poujade.

Figure 11.6.
Figure 11.3. TDM de la patiente de la figure 11.3 à J3 du traitement chirurgical
Hématome du fond vaginal après un accouchement d'un enfant et de l'embolisation bilatérale des troncs hypogastriques :
en position occipitosacrée. thrombus bien circonscrit en paravaginal droit.
Photo : Loïc Sentilhes. Photo : Loïc Sentilhes.

L'IRM ou le scanner abdominopelvien peuvent évaluer


l'extension en profondeur de l'hématome et ne se dis-
cutent qu'en cas d'hématome sous-péritonéal suspecté
(figures 11.6 à 11.9).

Traitement
S'apparentant à une hémorragie du post-partum, le traite-
ment doit être rapide et multidisciplinaire (gynécologue-
obstétricien, radiologue interventionnel, anesthésiste
réanimateur). Le pronostic est double: vital et fonctionnel.
La majorité des auteurs s'accordent à être rapidement inter-
ventionnistes [9–11].
Après correction de l'hypovolémie et d'éventuels
troubles de la coagulation, un bilan lésionnel précis est
Figure 11.4.
indispensable.
Hématome vulvovaginal gauche.
Photo : Dr O. Poujade.

142
Dr A.Amine Recherche bibliographique11.SCI-MED
Thrombus vaginaux

Réalisée au bloc opératoire ou, plus rarement, en salle


de naissance après avoir complété l'analgésie péridurale
ou sous anesthésie générale, une exploration complète de
la filière cervico-vaginale est nécessaire. Dans un premier
temps, une révision utérine est à réaliser ; cette dernière
est indispensable pour ne pas sous-estimer une rétention
placentaire associée et risquerait en étant réalisée dans un
deuxième temps de compromettre les sutures. Puis un
examen sous valves permet d'établir un bilan lésionnel
complet.
Le traitement est ensuite avant tout chirurgical, associé
ou non à l'embolisation artérielle.

Figure 11.7.
TDM en coupe transversale d'une patiente X. Accouchement Traitement chirurgical [2, 12]
voie basse, grossesse gémellaire ; ventouse sur J1 pour anomalies
du RCF et version grande extraction de J2. Hématome Il consiste à :
pelviabdominal rétropéritonéal associé à un hémopéritoine. ●
inciser largement l'hématome à son point le plus bas,
en cas d'hématome vulvaire et à son point culminant dans
le sillon nymphohyménéal dans la forme vaginale. En cas
d'épisiotomie, cette dernière est à ouvrir ;

puis évacuer les caillots au doigt prudemment afin
de ne pas créer des décollements qui n'existaient pas
jusqu'alors ;

puis faire l'hémostase, si nécessaire avec des aiguilles
rondes ou des clips vasculaires. La recherche du saigne-
ment actif peut être rendue difficile par l'importance
des saignements. Il s'agit malheureusement rarement
d'un vaisseau unique mais plus souvent d'un saigne-
ment en nappe dont l'origine est difficile à détermi-
ner au sein de tissus friables, œdématiés et remaniés.
Figure 11.8.
L'exploration doit rester malgré tout limitée en surface
TDM en coupe coronale de la patiente X.
afin de ne pas s'exposer à des complications hémor-
ragiques difficiles à maîtriser. Il paraît « raisonnable »
de ne pas poursuivre la dissection au-delà du ligament
sacro-épineux ;

réaliser une fermeture plan par plan (à discuter) en
limitant au maximum les espaces virtuels ; pour d'autres,
il paraît plus souhaitable de privilégier une compression
mécanique, par compresses par exemple ;

procéder à un drainage, controversé mais qui semble,
selon notre expérience, à privilégier. Une lame de Del-
bet paraît plus appropriée qu'un système de drainage
clos. Cela permet théoriquement l'extériorisation de
saignements ;

effectuer un tamponnement vaginal par compresses
intravaginales, qui impose une sonde urinaire à demeure.
Son intérêt théorique est de diminuer au minimum les
Figure 11.9. espaces morts et de contrôler les hémorragies à faible
TDM de la patiente X : visualisation du saignement actif (flèche). pression.
143
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Embolisation artérielle [13, 14] après une hémostase chirurgicale la plus exhaustive pos-
sible. Cependant, certains centres la proposent en première
Il s'agit d'une ponction percutanée de l'artère fémorale intention avec évacuation secondaire chirurgicale de l'hé-
commune droite selon la technique de Seldinger. On matome constituée à 48 heures de l'embolisation avec des
obtient après avoir monté un cathéter une angiographie. Le résultats intéressants. Le but est de réaliser l'hémostase par
cathéter est alors dirigé vers l'artère iliaque interne concer- embolisation, cette dernière pouvant s'avérer difficile, voire
née. Des particules de gélatine résorbables sont utilisées. périlleuse par abord chirurgical, surtout en cas d'héma-
L'embolisation doit être en principe bilatérale compte tenu tome supravaginal [14, 15]. L'embolisation en cas d'héma-
des collatéralités. Plus l'embolisation sera sélective, plus le tome pelvien a l'avantage de préserver l'effet compressif de
développement de collatérales sera limité. l'hématome laissé en place [8]. D'autres auteurs ont décrit
Elle nécessite bien entendu un plateau technique parti- le recours à l'embolisation en cas de récidive d'hématome
culier et une équipe radiologique rompue à ces techniques, périgénital après drainage chirurgical [7] ou en cas de visua-
disponibles 24 h/24. lisation d'un saignement actif au scanner [8].
La place du transfert interhospitalier, en vue d'une éven- Les complications de ce geste sont surtout l'hématome
tuelle embolisation, est limitée aux patientes stables hémo- du point de ponction et les complications ischémiques.
dynamiquement, ce qui est le cas le plus fréquent [15].
L'embolisation artérielle peut parfois permettre de
visualiser le saignement (figure 11.10). Son efficacité est Ligature des artères hypogastriques
d'au moins 90 %. Elle est à envisager dans un deuxième Elle est à envisager en cas de saignement incoercible et
temps après bilan lésionnel chirurgical et évacuation de d'absence de plateau d'embolisation à proximité [13].
l'hématome. Une ligature des artères utérines peut lui être associée.
L'intérêt de l'embolisation nous semble majeur dans les Cette indication n'est à retenir qu'en cas d'hémorragie
situations où l'hémostase (type CIVD) est perturbée, ren- incoercible avec altération de l'hémodynamique mater-
dant l'exploration et l'hémostase chirurgicale impossibles, nelle. La morbidité de ce geste associée à ses difficultés de
ou lorsque l'étiologie de l'hémorragie du post-partum est réalisation ne permet pas, selon nous, de l'envisager en pre-
mixte (association avec une atonie utérine). Elle n'est pas mière intention.
réalisée en première intention, dans notre expérience, mais À l'ablation des mèches, il a été décrit des récidives de
saignement ; l'équipe doit donc se tenir prête à une nouvelle
intervention, mais le plus souvent l'évolution est favorable.

Antibiothérapie prophylactique
Elle est à prescrire systématiquement du fait du risque d'in-
fection de l'hématome et doit couvrir les bacilles à Gram
négatif, les streptocoques et les anaérobies.
L'abstention thérapeutique est rare et ne peut être envi-
sagée qu'en cas d'hématome de petite taille dont la traduc-
tion clinique est discrète.

Complications
Quasiment aucun cas de mortalité maternelle n'a été rap-
porté. En revanche, la morbidité maternelle est non négli-
geable, avoisinant les 30 % [2]. Les complications les plus
Figure 11.10. fréquemment rapportées sont :
Artériographie préembolisation d'une patiente ayant un ●
l'anémie et les troubles de l'hémostase ;
hématome vaginal dont l'hémostase chirurgicale s'est révélée ●
les complications infectieuses avec les abcès de la fosse
impossible. Visualisation du saignement actif d'une branche
artérielle à destinée pelvienne (flèche). ischiorectale et les difficultés de cicatrisation ;

144
Dr A.Amine Recherche bibliographique11.SCI-MED
Thrombus vaginaux


la récidive de l'hémorragie ; [8] Genre L, Tanchoux F, Parant O. Hématome puerpéral pelvien:

les douleurs, avec notamment des dyspareunies séquel- étude sur cinq années de suivi. J Gynecol Obstet Biol Reprod
2012;41:290–7.
laires, sources de réintervention ; [9] Ridgway L. Puerperal Emergency: vaginal and vulvar hematomas.

les thromboses veineuses profondes ; Obstet Gynecol Clin N Amer 1995;22:275–82.

les fistules rectovésicales ou utérovaginales. [10] Zahn M, Hankins G, Yeomans E. Vulvovaginal hematomas
­complicating delivery- Rationale for drainage of the hematoma cavity.
J Reprod Med 1996;41:569–74.
[11] Resch B, Ricbourg A, Gromez A, Sentilhes L, Sergent F, Roman H,
Références et al. Prise en charge chirurgicale des hémorragies graves du
post partum: quelles techniques, quels résultats, quelle stratégie?
[1] Merger R, Lévy J, Melchior J, editors. Précis d'obstétrique. 6e éd. La Lettre du Gynécologue 2010;353:.
Paris : Masson; 2001. [12] Riethmuller D, Peguenot-Jeannin C, Rabenja CA, Koerberle P,
[2] Jacquetin B, Boukllerte C, Fatton B. Mises à jour en gynécologie obs- Schaal JP, Maillet R. Une cause rare d'hémorragie du postpartum: le
tétrique. CNGOF 1998;347–9. thrombus génital. J Gynecol Obstet Biol Reprod 1997;26:154–8.
[3] Bienstman-Paileux J, Huissoud C, Dubernard G, Rudigoz RC. Prise [13] Fargeaudou Y, Soyer P, Morel O, Sirol M, le Dref O, Boudiaf M,
en charge des hématomes puerpéraux. J Gynecol Obstet Biol et al. Severe primary postpartum haemorrhage due to geni-
Reprod 2009;38:203–8. tal tract laceration after operative vaginal delivery: successful
[4] Philippe HJ, de Blay P, Vaucel E, Le Borgne H, Esbelin J. Prise en treatment with transcatheter arterial embolization. Eur Radiol
charge des Thrombus génitaux. CNGOF 2011;491–9. 2009;19:2197–203.
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à la réalisation d'une extraction instrumentale: quand, ­comment et tum hemorrhage. Obstet Gynecol 2009;113:992–9.
où ? J Gynecol Obstet Biol Reprod 2008;37:S188–201. [15] Sentilhes L, Resch B, Gromez A, Clavier E, Ricbourg-Schneider
[7] Baruch A, Clark Stentz N, Wallet SM. Retroperitoneal hemorrhage A, Trichot C, et al. Traitements chirurgicaux et alternatives non
presenting as a vaginal hematoma after a spontaneous vaginal ­médicales des hémorragies du post-partum. EMC (Elsevier Masson
­delivery. Int J Gynaecol Obstet 2015;130:201–2. SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Gynécologie, 41-905, 2010.

145
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Chapitre 12
Hystérectomie d'hémostase
(sur utérus gravide)
L. Marcellin, D. Cabrol, F. Goffinet

PLAN DU C HAPITRE
Généralités 147
Bases anatomiques spécifiques de l'utérus
gravide 147
Environnement et principes 147
Technique chirurgicale 147
Complications chirurgicales spécifiques
de l'hystérectomie d'hémostase 147
Conclusion 147

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Points forts du chapitre nie utérine (28–53 %), les anomalies d'insertion placentaire
▶ L'hystérectomie d'hémostase doit être décidée (placenta praevia, accreta) (35–38 %), les ruptures utérines
en dernier recours en cas d'échec des traitements compliquées ou extensives (8–10 %), les complications de
conservateurs mais elle ne doit pas être retardée en cas l'hystérotomie liées à l'extraction (6–10 %), plus rarement les
de risque vital imminent. déchirures cervico-vaginales, les utérus polymyomateux et
▶ Une réanimation chirurgicale « agressive » doit être les troubles de la coagulation [4, 5]. La distribution des indi-
associée simultanément au traitement chirurgical. cations a évolué au cours des dernières décennies en raison,
▶ L'hystérectomie est inter-annexielle et, si possible, d'une part, de l'augmentation des troubles d'insertion pla-
totale d'emblée centaire (placenta accreta, percreta) liés à l'augmentation
▶ L'hystérectomie subtotale est techniquement du taux de césariennes et, d'autre part, au recours croissant,
plus facile et plus rapide mais expose au risque de dans les pays industrialisés, des traitements conservateurs
persistance de zones hémorragiques. (prostaglandines et radiologie interventionnelle) en cas
▶ Un drainage chirurgical est indiqué pour dépister un d'atonie utérine. Dans une méta-analyse récente de 2016
saignement abdominal secondaire en postopératoire portant sur plus de 7500 cas d'hystérectomie d'hémostase,
immédiat. la première cause était les troubles de l'insertion placentaire
▶ Les principales complications sont l'hémorragie (38 %) devant l'atonie utérine (27 %) et la rupture utérine
secondaire, les plaies vésicales et urétérales. (26 %) [6]. Enfin, une surveillance mieux codifiée du travail
obstétrical et la pratique de césariennes itératives en cas
d'utérus cicatriciel ont limité le taux de rupture utérine et
La décision de pratiquer une hystérectomie d'hémostase
les hystérectomies d'hémostase dans cette indication [7, 8].
doit être prise lorsqu'elle paraît inéluctable pour garantir
la survie de la patiente. Elle survient en dernier recours
après l'échec des méthodes conservatrices, mais peut être
décidée d'emblée en cas d'hémorragie cataclysmique. La Bases anatomiques spécifiques
décision de pratiquer une hystérectomie d'hémostase de l'utérus gravide
est rendue délicate par son caractère radical et définitif.
Lorsque l'indication est justifiée, l'hystérectomie d'hémos- Les modifications volumétriques et structurales de l'utérus
tase ne doit pas être différée et doit être envisageable par gravide perturbent les rapports anatomiques habituels du
tout gynécologue-obstétricien. Si sa réalisation technique pelvis féminin au décours de la naissance. En particulier,
est simple, elle est en général effectuée dans un contexte de c'est la formation du segment inférieur qui va être res-
grande urgence obstétricale. Ainsi, la maîtrise des rapports ponsable des principales modifications anatomiques dont
anatomiques pelviens et de la technique chirurgicale est l'opérateur devra tenir compte dans sa technique chirur-
essentielle pour ne pas retarder un geste salvateur, et éviter gicale. Bien que l'utérus soit en cours de rétraction juste
les complications d'une chirurgie faite dans des conditions après la naissance, il pèse au décours de l'accouchement en
d'exécution difficile. moyenne 1,5 kg, mesure entre 20 et 24 cm de grand axe
le 1er jour et 11 à 13 cm le 6e jour du post-partum [9].
Pendant les six premiers mois de la grossesse, l'accrois-
Généralités sement du volume utérin se fait au dépend du corps de
l'utérus. Au cours du troisième trimestre chez la nullipare
L'hystérectomie d'hémostase sur utérus gravide, au décours (et plus tardivement chez la multipare) se forme le seg-
d'un accouchement par les voies naturelles ou après une ment inférieur de l'utérus : il correspond à la partie amin-
césarienne est associée à un risque de mortalité et de morbi- cie de l'utérus gravide située entre le corps et le col qui
dité maternelle. Sa fréquence est variable à travers le monde se développe aux dépens de l'isthme utérin et de la par-
et, dans les pays développés, les études en population tie supérieure du col. Au cours du travail obstétrical, son
montrent qu'elle complique en moyenne trois à huit cas allongement s'accentue, et associé à la dilatation cervicale,
pour 10 000 accouchements [1, 2]. Comparé à celui d'une il entraîne avec lui les éléments anatomiques qui lui sont
femme primipare ayant accouché par voie basse, le risque mitoyens.
de pratiquer une hystérectomie d'hémostase augmente La séreuse péritonéale s'hypertrophie par l'infiltration
avec le nombre d'antécédents de césarienne [3]. Ses princi- gravido-puerpérale. Elle recouvre l'utérus jusqu'aux culs-
pales indications sont l'hémorragie de la délivrance par ato- de-sac vaginaux et génito-rectaux et tapisse le segment
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Dr A.Amine Recherche bibliographique
12. Hystérectomie d'hémostaseSCI-MED
(sur utérus gravide)

inférieur duquel elle est facilement décollable dans un plan distendu. L'artère utérine perd alors ses contacts avec l'ure-
avasculaire, contrairement au reste de l'utérus. Le fascia tère (figure 12.2). La dextrorotation de l'utérus positionne
présegmentaire est un tissu solide d'aspect nacré sous le l'artère utérine droite plus en arrière que la gauche. Après
péritoine viscéral présegmentaire [10]. la délivrance, la rétraction de l'utérus débute immédiate-
En avant, le repli vésico-utérin s'ascensionne en rapport ment et les trajets des vaisseaux tendent à reprendre leurs
avec l'ampliation progressive du segment inférieur, de telle
sorte qu'à la fin du travail obstétrical, la face postérieure de
la vessie recouvre la moitié du segment inférieur [10].
Latéralement, l'artère utérine et l'uretère sont les deux
éléments essentiels dont la connaissance anatomique
permettra d'éviter certaines complications. En dehors de
la grossesse, l'artère utérine naît de l'artère iliaque interne,
rejoint l'utérus vers le bas et latéralement à 1,5 cm de
l'isthme utérin et à 1,5 cm au-dessus du cul-de-sac vaginal.
Elle croise l'uretère en avant, décrit une crosse concave en
haut, remonte sur le bord latéral de l'utérus et se termine
vers la corne en trois branches terminales. La portion pel-
vienne des uretères débute après leur croisement avec les
vaisseaux iliaques (1,5 cm au-dessus de la bifurcation de
l'artère iliaque commune à gauche et 1,5 cm en dessous
de l'artère iliaque commune à droite) (figure 12.1). Il passe
dans l'espace pelvi-rectal supérieur, latéro-rectal pelvien, le
long de la terminaison de l'artère iliaque interne, puis croise
l'artère utérine par l'arrière, à 1,5 cm en dehors du cul-de-sac
Figure 12.1.
vaginal latéral avant de pénétrer la base de la vessie [11].
Rapports anatomiques des uretères pelviens : la portion
En fin de grossesse, l'étirement du segment inférieur induit pelvienne des uretères débute après leur croisement avec les
un accolement de l'artère utérine contre la paroi latérale vaisseaux iliaques 1,5 cm au-dessus de la bifurcation de l'artère
de l'utérus, et un éloignement de la crosse de l'artère uté- iliaque commune à gauche et 1,5 cm en dessous de l'artère iliaque
commune à droite. 1. Aorte abdominale ; 2. uretère ; 3. artère
rine du cul-de-sac vaginal, ainsi que de l'uretère pelvien qui iliaque commune ; 4. artère iliaque externe ; 5. artère iliaque
entre en contact latéralement avec le dôme vaginal qui est interne (hypogastrique) (d'après [9]).

Figure 12.2.
Modification des rapports entre les uretères et les artères utérines, au cours de la grossesse. A. Utérus non gravide. B. Utérus gravide.
1. Utérus ; 2. vessie ; 3. col ; 4. vagin ; 5. artère utérine ; 6. Uretère ; 7. artère cervico-vaginale.

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Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

r­ apports habituels avec de nouveau un risque de lésion uré- pour quantifier les saignements. Dans certains cas, cet accès
térale en cas de geste chirurgical [10]. pourra permettre une mobilisation utérine par un aide si
Enfin, la grossesse est associée à une augmentation nécessaire. Un sondage vésical à demeure par une sonde
importante de la vascularisation artérioveineuse intrin- de Foley est nécessaire.
sèque et extrinsèque de l'utérus. Le pédicule utéro-annexiel Dans de nombreux manuels, la voie d'abord préconisée
est hypertrophié avec un réseau vasculaire étalé en hauteur. est l'incision médiane. En fait, tout dépend du contexte et
Le ligament large peut être le siège d'une vascularisation elle doit être adaptée à l'état hémodynamique et aux condi-
accrue, notamment d'un réseau variqueux pelvien pouvant tions techniques a priori. L'incision médiane est privilégiée
être la source d'une hémorragie difficilement contrôlable en prévision d'une intervention difficile : utérus pluricica-
en cas d'effraction intempestive. triciel ou troubles de la placentation. Lorsque la décision
d'hystérectomie est prise en cours d'une césarienne, la voie
d'abord est alors imposée (le plus souvent transversale).
Environnement et principes Lorsque la décision est prise après un accouchement par
voie basse, sans risque de difficultés opératoires ni instabilité
L'hystérectomie d'hémostase peut se pratiquer après un hémodynamique, nous réalisons une incision transversale.
accouchement par les voies naturelles, ou pendant ou En cas de reprise de l'incision de la césarienne, l'ouverture
après une césarienne. Elle se pratique en général dans un pariétale peut être élargie, pour les besoins d'exposition, par
contexte d'urgence vitale et la technique de réalisation une section partielle des muscles grands droits (incision de
doit être rapide. Elle est simple techniquement car les dis- Mouchel). L'incision de Pfannenstiel nous paraît être moins
sections et la traction de l'utérus sont aisées. Malgré cela, adaptée à cette chirurgie où les troubles d'hémostase fré-
des complications sévères peuvent survenir, en particulier quemment associés peuvent entraîner des hématomes
lorsque certains principes ne sont pas respectés. dans les plans de décollement pariétaux inhérents à cette
Le geste chirurgical doit être associé à une réanima- incision.
tion intensive sans retarder les éventuelles transfusions de
produits sanguins labiles pour conserver un bon contrôle
hémodynamique et limiter les troubles de la coagulation. Technique chirurgicale
La communication entre l'équipe d'anesthésie-réanimation
et l'équipe obstétricale est fondamentale ; elle doit être La boite d'instrument est celle de l'hystérectomie abdomi-
régulière avant et pendant l'intervention car chacun peut nale qui doit toujours être disponible dans un bloc obs-
être amené à adapter sa prise en charge en fonction des tétrical. Pratiquée chez une femme jeune, l'hystérectomie
informations de l'autre. Ainsi, un obstétricien non informé sera inter-annexielle. L'extériorisation de l'utérus, après une
de l'aggravation de l'état hémodynamique ne pensera pas levée d'éventuelles adhérences, facilite l'accès aux diffé-
aux gestes d'urgences potentiellement salvateurs (change- rentes structures. Schématiquement, les ligatures doivent
ment de stratégie chirurgicale, accélération des étapes, etc.) être électives, appuyées, serrées et doublées. L'ordre des
et peut se retrouver en situation d'arrêt cardiaque sans avoir différentes étapes est décrit de manière variable selon les
pressenti la gravité de la situation. A contrario, l'information auteurs. Nous proposons ici notre technique habituelle,
régulière que l'état hémodynamique est stable permet à en précisant à chaque étape les variantes décrites qui nous
l'obstétricien de procéder étape par étape à l'hystérecto- paraissent intéressantes.
mie, sans se précipiter et en limitant les risques chirurgicaux
peropératoires. L'anesthésie locorégionale est possible, Ligature des ligaments ronds
néanmoins, devant toute situation d'aggravation de l'état
maternel et du risque d'hypotension, il paraît raisonnable
et pédicules utéro-ovariens
de pratiquer une anesthésie générale. Dans la mesure du Quelques principes généraux pour ce temps : l'utérus est
possible, la patiente et son conjoint doivent être prévenus tracté par deux longues pinces de Kocher qui sont mises
du caractère radical du geste et des risques associés. en place verticalement et plaquées latéralement à l'utérus
La patiente est installée en décubitus dorsal en ména- de part et d'autre ; elles enserrent les ligaments ronds, les
geant un abord vaginal pour permettre une évaluation trompes et les pédicules utéro-ovariens. Elles permettront
peropératoire des saignements. Si la table du bloc opéra- de diminuer les pertes sanguines au moment des ligatures-
toire le permet, un sac de recueil peut être mis en place sections des pédicules et de mobiliser l'utérus, toujours en

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Dr A.Amine Recherche bibliographique
12. Hystérectomie d'hémostaseSCI-MED
(sur utérus gravide)

traction, pour exposer correctement les ligaments ronds, ­ ifficiles. Même s'il est techniquement possible de prendre
d
les annexes et la face postérieure du ligament large. Même le pédicule utéro-ovarien et la trompe en une seule prise,
si cela peut apparaître comme un conseil bienvenu et pru- nous préférons recommander la prise en deux temps afin
dent, nous ne préconisons pas d'isoler sur lac les uretères d'éviter de surcharger la pince de Jean-Louis Faure et risquer
de façon systématique. En cas de rapports anatomiques un lâchage de la suture. À noter que certains débutent par
habituels, le simple repérage visuel permet d'être rassuré le pédicule utéro-ovarien puis le ligament rond.
sur le risque de lésion urétérale si les étapes suivantes sont
respectées.
Compte tenu du volume et de l'infiltration des vaisseaux
des éléments de l'appareil génital en cas d'utérus gravide,
un certain nombre de précautions sont nécessaires. Les
pinces de Jean-Louis Faure sont préférentiellement utilisées.
Pour toutes les ligatures-sections, il est indispensable de ne
pas sectionner trop près de la pince du côté distal (ce qui
«reste») afin de ménager un moignon de sécurité de 1 cm
environ. Les ligatures sont débutées au versant pelvien et
sont faites par un fil serti tressé résorbable de bon calibre
(diamètre 1) qui «appuie» la ligature en étant transfixiant
dans les tissus. Toutes les ligatures du côté pelvien sont
doublées à l'aide d'un fil non serti de même calibre. Même
si les grandes pinces de Kocher sont laissées en place, il est
préférable aussi de lier les «retours» proximaux afin de ne
pas surcharger le champ opératoire de pinces et conserver
une bonne accessibilité.
Le ligament rond est lié et sectionné dans sa partie Figure 12.3.
moyenne afin de garder la partie distale sur un fil avec pince Prise des deux cornes utérines à l'aide de grandes pinces de
de Kocher après avoir doublé la ligature (nous n'utilisons Kocher puis section du ligament rond et ouverture du péritoine
pas de fil serti en général pour le ligament rond). Cette pré- antérieur. Décollement vésico-utérin.
caution simple permet d'exposer le paramètre ouvert pen-
dant l'intervention et après l'hystérectomie, au moment de
la vérification des hémostases. D'emblée, on incise le péri-
toine viscéral jusqu'au péritoine vésico-utérin en dedans et
jusqu'à la partie médiane (certains ne réalisent cette étape
que lorsque les annexes et les ligaments ronds ont été sec-
tionnés liés des deux côtés) ; puis on progresse en incisant
le péritoine en haut et en dedans vers la partie proximale de
la trompe (figure 12.3).
La partie proximale de la trompe ainsi exposée et libé-
rée, on passe en dedans des ciseaux de Mayo fermés ou
un dissecteur sous la trompe, et on ressort en dehors entre
la trompe et le pédicule utéro-ovarien, après avoir identifié
une zone avasculaire. La ligature section de la trompe est
alors réalisée à 1 ou 2 cm du bord latéral de l'utérus afin
d'éviter les veines du pédicule utérin qui «courent» sur le
bord latéral.
Le pédicule utéro-ovarien est lié et sectionné de la
même manière que la trompe (figure 12.4). Il ne faut pas
appliquer la pince de Jean-Louis Faure sur le tissu ovarien Figure 12.4.
qui se déchirerait et rendrait la ligature et l'hémostase Section des pédicules utéro-ovarien et tubaire.

151
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Ces trois ligatures sections réalisées, on expose l'inté- Ce repérage peut être rendu difficile en cas de dilatation
rieur du ligament large. En arrière, le péritoine du ligament cervicale avancée quand il ne persiste plus qu'un canal cer-
large est incisé aux ciseaux de façon oblique en bas et en vico-segmentaire. Certains utilisent un champ intravaginal
dedans vers le torus utérin. Les annexes sont éloignées du mais cela nous semble une perte de temps. On peut repérer
corps utérins et placées dans la gouttière pariéto-colique de le col entre deux doigts par la face interne du segment infé-
chaque côté après avoir vérifié l'hémostase. Le paramètre rieur lorsque l'utérus est ouvert. Un autre repère souvent
est alors dégagé aux doigts ou aux ciseaux, éventuellement utile est le niveau d'insertion des ligaments utérosacrés.
après quelques hémostases de petits vaisseaux, jusqu'à La section des pédicules utérins est encadrée par deux
dégager le pédicule utérin. pinces de Jean-Louis Faure. Une première pince est placée 1
L'opération est répétée à l'identique de l'autre côté. à 2 cm au-dessus du col perpendiculairement au mur uté-
rin, les mors devant dépasser l'artère utérine et atteindre le
myomètre. Une autre pince est positionnée au-dessus de
Libération vésico-utérine la précédente, pour barrer la circulation de retour du côté
et latéro-pelvienne utérin. La section du pédicule est réalisée en respectant un
moignon de sécurité sur le versant pelvien du pédicule sec-
Le péritoine vésico-utérin est déjà sectionné (voir étapes
tionné. Il faut prendre soin de dégager le bec de la pince
précédentes). S'il n'a pas été réalisé précédemment, le
de Jean-Louis Faure afin de permettre une ligature appuyée
décollement vésico-utérin est débuté de proche en proche,
et doublée du pédicule, mais aussi, une fois sectionnée,
après préhension de la vessie par une pince en cœur, en
de pouvoir l'abaisser puis l'éloigner du dôme vaginal [10]
commençant au niveau de la ligne médiane, dans un plan
(figure 12.5).
intra-facial, la courbure des ciseaux orientée vers l'utérus. À
L'opération est répétée à l'identique de l'autre côté.
la main, on tente de percevoir le col afin de ne pas descendre
À ce stade de l'intervention, deux possibilités se pré-
trop bas dans la dissection vésico-utérine. Ce décollement
sentent alors à l'opérateur : pratiquer une hystérectomie
ne doit pas être extensif, d'une part, car les uretères sont
totale, ou subtotale. La première est plus difficile à réali-
anatomiquement éloignés de leur site habituel et, d'autre
part, car il convient de limiter le risque hémorragique. Si
le dégagement latéro-pelvien du ligament large n'a pas été
suffisant lors des étapes précédentes, on peut être amené à
le compléter au cours de cette étape.
Les artères utérines peuvent alors être abordées
sereinement.

Ligature des pédicules utérins


La traction utérine vers le haut et latéralement du côté
opposé à la ligature par l'aide doit être maintenue au maxi-
mum afin de permettre à l'opérateur de placer un pince
de Jean-Louis Faure sur les vaisseaux utérins, à angle droit
par rapport au mur utérin. La hauteur du positionnement
de cette pince sur les pédicules utérins est guidée par le
repère du relief cervical. Il ne peut y avoir d'atteinte uré-
térale si cette pince reste au-dessus du col [10]. Même si
la crosse de l'artère utérine et l'uretère sont moins proches
en cas d'utérus gravide, les repères anatomiques tendent à
redevenir habituels après la délivrance et le risque de lésion
urétérale ne doit pas être négligé. L'erreur serait de placer la
pince de Jean-Louis Faure trop bas (sous la crosse de l'artère
utérine), en raison de l'ascension facile de l'utérus gravide Figure 12.5.
et de la difficulté à percevoir le col, en particulier lorsque la Section des pédicules utérins entre deux pinces de Jean-Louis
dilatation était complète. Faure.

152
Dr A.Amine Recherche bibliographique
12. Hystérectomie d'hémostaseSCI-MED
(sur utérus gravide)

ser dans le contexte de l'urgence. La seconde, plus rapide, La section vaginale précédente entraîne souvent une
nécessite un contrôle hémostatique parfait du moignon zone hémorragique entre le vagin et le péritoine viscéral
utérin au risque de laisser des tissus potentiellement hémor- pelvien. En cas de saignement de la tranche vaginale, un
ragiques. Cependant, il nous paraît raisonnable lorsque cela godronnage peut être réalisé de la totalité de la tranche de
est possible de réaliser une hystérectomie totale d'emblée. section vaginale, par un surjet hémostatique circulaire. Les
berges vaginales sont alors rapprochées par un point en X.
Nous ne mettons pas en place de drainage vaginal. Il
Hystérectomie totale ne nous paraît pas opportun dans ce contexte d'amarrer
les ligaments ronds à la suture vaginale en prévention des
À l'issue de la section ligature des pédicules utérins, nous troubles de la statique pelvienne ultérieur.
préconisons une hystérectomie intra-fasciale qui est sou-
vent aisée car à l'aide d'une traction vers le haut l'utérus
«monte» bien et le fascia présegmentaire est très faci- Hystérectomie subtotale
lement clivable. La dissection (ou le clivage) du fascia est
L'hystérectomie subtotale a l'avantage d'être de réalisation
réalisée au bistouri électrique et un aide réalise l'hémostase
plus simple et de permettre une ablation rapide du corps
progressivement à l'aide d'une pince à hémostase. Nous
utérin. Après avoir ligaturé les artères utérines, une hystéro-
précédons parfois cette dissection par deux points au
tomie est pratiquée au-dessus du col, la section latérale de
niveau des angles du dôme vaginal afin de lier préventive-
l'utérus se fait au-dessus de la ligature des pédicules utérins
ment les pédicules cervico-vaginaux.
sectionnés précédemment et elle est terminée en arrière de
L'utérus est désormais désolidarisé de ses pédicules
façon circulaire.
vasculaires et le cylindre utérovaginal bien individualisé.
Le moignon cervico-vaginal est alors fermé par des
L'hystérectomie totale va pouvoir être pratiquée. L'incision
points en X au fil résorbable tressé de calibre 1, ce qui per-
vaginale est réalisée juste sous le col qui est repéré entre
met en même temps d'assurer un contrôle de l'hémostase
pouce et index, si besoin par voie endo-utérine haute à
de la tranche de section. Une péritonisation secondaire
travers l'hystérotomie (rarement à l'aide d'un examen par
du moignon cervico-vaginal qui rapproche, par un surjet
voie vaginale en cas de doute). L'incision vaginale est circu-
de fils résorbable tressé de type Vicryl® 2/0, les péritoines
laire au ciseau de Mayo ou au bistouri électrique ; la tranche
postérieurs et antérieurs peut être pratiquée. Nous ne la
vaginale est mince alors que le massif cervical est épais et
recommandons pas car elle expose au risque d'hématomes
difficile à couper. L'incision vaginale débute en arrière. Dès
cloisonnés pouvant secondairement diffuser dans les
l'ouverture du vagin, la berge vaginale est saisie à l'aide d'une
espaces rétropéritonéaux, plus fréquents dans ce contexte
grande pince de Kocher, et la colpotomie poursuivie laté-
de trouble de l'hémostase.
ralement et en avant en vérifiant de préserver une tranche
Si le saignement ne paraît pas être suffisamment
de section du vagin suffisante pour sa fermeture. La pièce
contrôlé, il faut pouvoir totaliser secondairement l'hysté-
d'hystérectomie est alors extraite et adressée pour un exa-
rectomie, en tractant le moignon cervico-isthmique par
men anatomopathologique.
des pinces de Jean-Louis Faure ou des fils de traction, et en
L'exposition du vagin à l'aide de quatre pinces de Kocher
reprenant les étapes décrites précédemment. La «totalisa-
doit permettre de repérer facilement la tranche de section
tion» est cependant plus difficile que l'hystérectomie totale
vaginale qui devra être impérativement prise dans la suture.
d'emblée.
Il faut veiller à ce que la berge antérieure soit suffisamment
décollée de la paroi postérieure de la vessie. Le risque, si
la vessie n'est pas suffisamment décollée du vagin, est de Fin de la procédure
l'enfouir dans la suture au moment de la fermeture vaginale,
pouvant être la source de fistule vésico-vaginale. La fin de l'intervention consiste en un lavage abondant de
Après désinfection de la tranche vaginale, les angles laté- la cavité pelvienne et un contrôle soigneux de l'hémostase.
raux du vagin sont suturés par un point en X au fil tressé Toutes les ligatures des pédicules pelviens doivent être véri-
résorbable de calibre 1, en prenant soin de ne pas inclure fiées l'une après l'autre. Il est essentiel d'avoir veillé à bien
les pédicules précédemment liés qui doivent rester extra- serrer les nœuds des ligatures vasculaires, car au décours de
péritonéaux. Le vagin peut être suturé par des points en X la chirurgie, la régression de l'œdème tissulaire gravido-
totaux de fils tressé résorbable de calibre 1 ou à l'aide d'un puerpéral peut contribuer à un relâchement des liga-
surjet réunissant les deux berges. tures pouvant conduire à des saignements ­secondaires.
153
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Le ­drainage de la cavité abdominopelvienne nous paraît tressé de calibre 2/0. Une dérivation des urines par une
légitime dans ce contexte de chirurgie à haut risque hémor- sonde de Foley doit alors être maintenue pour une durée
ragique. Il n'a pour seul but que celui de pouvoir dépister de cinq à sept jours selon la taille de la suture. Une brèche
une reprise des saignements intra-abdominal dans les 24 vésicale doit être suspectée à distance de l'intervention
ou 48 premières heures. devant l'apparition d'un épanchement liquidien abdomi-
La fermeture pariétale se fait plan par plan, avec un nal qui peut être pris à tort pour une ascite. Si elle venait
contrôle de l'hémostase rigoureux pouvant justifier un drai- à être ponctionnée, un dosage de la créatinine confirmera
nage sous-aponévrotique lorsqu'il existe des troubles de la le diagnostic d'urinome. Enfin, ces plaies vésicales peuvent
coagulation. évoluer à long terme vers des fistules urogénitales.

Complications chirurgicales Complication urétérale


spécifiques de l'hystérectomie Bien que l'uretère soit positionné plus à distance des pédi-
cules utérins en raison de la distension utérine, une ligature
d'hémostase d'un pédicule vasculaire utérin peut se compliquer d'une
atteinte urétérale dans 4,5 à 6,5 % des cas [1, 4, 12, 14]. S'il
Les complications de l'hystérectomie d'hémostase sont ne paraît pas justifié d'isoler systématiquement les uretères,
liées au degré d'urgence de sa réalisation et au contexte dont le mouvement caractéristique de reptation peut être
chirurgical, médical et réanimatoire. observé en transpéritonéal, il est parfois nécessaire de réali-
ser une urétérolyse et de mettre l'uretère sur lac dans le cas
Complication hémorragique où les rapports anatomiques sont difficiles à identifier au
contact du pédicule utérin à lier. Si une atteinte urétérale
La surveillance postopératoire s'attachera à dépister une est suspectée, une évaluation spécialisée par un urologue
reprise des saignements extériorisés ou occultes qu'il faut doit être demandée.
rechercher s'il persiste une instabilité hémodynamique,
un drainage anormalement abondant de sang rouge,
une baisse du taux d'hémoglobine ou une augmentation
d'un épanchement liquidien à l'échographie. Une reprise
Conclusion
chirurgicale doit être envisagée en cas de mauvais contrôle Le développement des techniques conservatrices dans la
d'une hémorragie. Elle doit être associée à une réanimation prise en charge des hémorragies de la délivrance a réduit
chirurgicale intensive s'attachant à corriger d'éventuels le recours à l'hystérectomie d'hémostase. Cependant, dans
troubles de l'hémostase par des transfusions appropriées certains cas, elle peut être la seule issue thérapeutique. C'est
de produits dérivés du sang. La mortalité suite à une hysté- une intervention dont l'exécution technique est simple et
rectomie d'hémostase, lorsque qu'elle est rapportée, varie- qui doit être réalisable par tout obstétricien. Toute la diffi-
rait de 1 à 6 % [1, 12–14]. culté est de prendre cette décision au bon moment, ni trop
tôt en raison de l'infertilité définitive, ni trop tard pour ne
Complication vésicale pas engager le pronostic vital maternel.

Les complications vésicales sont plus fréquentes en cas


d'hystérectomie totale (8,3–12,2 %) [1, 12, 13], surtout
lorsque la dissection vésico-utérine a été difficile (notam- Références
ment en cas d'antécédent d'utérus cicatriciel). Une plaie
[1] Kwee A, Bots ML, Visser GH, Bruinse HW. Emergency peripartum
vésicale doit être recherchée en peropératoire au moindre hysterectomy : A prospective study in The Netherlands. Eur J Obs-
doute par une épreuve au bleu de méthylène vésical par tet Gynecol Reprod Biol 2006;124:187–92.
voie rétrograde via la sonde urinaire (au moins 200 cc). [2] Stivanello E, Knight M, Dallolio L, Frammartino B, Rizzo N, Fan-
Une brèche vésicale pourra être mise en évidence par la tini MP. Peripartum hysterectomy and cesarean delivery : a popula-
tion-based study. Acta Obstet Gynecol Scand 2010;89:321–7.
présence de bleu dans la cavité pelvienne. À défaut, une [3] Whiteman MK, Kuklina E, Hillis SD, Jamieson DJ, Meikle SF,
plaie séreuse pourra être identifiée. Une effraction vésicale Posner SF, et al. Incidence and determinants of peripartum hyste-
est suturée par des points séparés totaux de fil résorbable rectomy. Obstet Gynecol 2006;108:1486–92.

154
Dr A.Amine Recherche bibliographique
12. Hystérectomie d'hémostaseSCI-MED
(sur utérus gravide)

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155
Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Chapitre 13
Hystérectomie en cas de placenta
accreta et percreta
L. Marcellin, A. Mignon, S. Silvera, O. Vignaux, N. Barry Delongchamps,
D. Cabrol, F. Goffinet

PLAN DU C HAPITRE
Introduction 157
Diagnostic préopératoire 157
Stratégie opératoire en cas de suspicion
de placenta accreta 157
Stratégie opératoire en cas de suspicion
de placenta percreta 157
Technique chirurgicale de la césarienne
hystérectomie 157
Surveillance postopératoire 167
Conclusion 167

Chirurgie en obstétrique
© 2020, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Points forts du chapitre


▶ Les anomalies de la placentation sont en
augmentation.
▶ Elles doivent être recherchées très attentivement à

l'échographie chez les patientes ayant des facteurs de


risque.
▶ Le diagnostic est clinique et histologique.

▶ La césarienne hystérectomie est le traitement

privilégié, mais peut être réalisée en excès en cas de


faux positif des examens anténataux.
▶ La gestion préopératoire et l'élaboration d'une

stratégie de prise en charge multidisciplinaire réduit les


risques opératoires.
▶ La pose de ballonnets occlusifs intravasculaires et de

sondes urétérales est réalisée avant la césarienne en cas


de placenta percreta extensif dans le but de réduire le
saignement et de faciliter les dissections.
▶ Dans les cas de placenta percreta extensif, il

est préférable de ne pas tenter une césarienne


hystérectomie en première intention. Figure 13.1.
Différentes formes d'anomalies d'insertion placentaire : elles se
Introduction produisent quand un défaut de la caduque permet l'invasion de
villosités choriales dans le myomètre (d'après [3]).
Le placenta accreta, terme générique qui regroupe les
troubles invasifs du placenta, est la conséquence d'une
pénétration anormale des villosités placentaires dans Diagnostic préopératoire
le myomètre (liée à un défaut de contrôle décidual au
moment de l'implantation) appelé aussi anomalie d'inser- Les anomalies d'insertion placentaires doivent être recher-
tion placentaire [1]. Cette invasion anormale peut siéger sur chées très soigneusement chez les femmes ayant des anté-
toute la surface d'insertion placentaire ou seulement être cédents de césarienne, de geste endo-utérin ou de chirurgie
focalisée sur un ou plusieurs cotylédons. utérine, en particulier dans les cas d'insertion placentaire
Le placenta est «accreta» lorsque cette invasion est antérieure ou de placenta praevia. Même si les techniques
limitée au myomètre, «increta» lorsqu'elle atteint tout le d'imagerie sont associées à des faux positifs et faux néga-
myomètre, sans accéder à la séreuse utérine, et «percreta» tifs, il est plus aisé d'organiser la prise en charge des ano-
lorsqu'elle touche la séreuse utérine ou les organes de voisi- malies d'insertion placentaires de manière programmée et
nage [2] (figure 13.1) [3]. Il s'agit d'une maladie hétérogène avec la préparation qui convient, plutôt que d'en faire la
caractérisée par un taux élevé de morbidité et de mortalité découverte peropératoire. Elles sont recherchées au cours
maternelle. d'échographies répétées [9], complétées si besoin d'une
La fréquence de survenue des placentas accreta ne cesse IRM afin d'apprécier les zones d'extension et de détecter
d'augmenter depuis ces trente dernières années, où elle a d'éventuelles atteintes des organes de voisinage [10]. En cas
quasiment triplé, pour atteindre une fréquence de 1/500 à de forte suspicion de placenta percreta, nous complétons
1/2500 grossesses [4-7]. Le risque augmente avec le nombre cette imagerie par une injection de gadolinium afin d'obte-
d'antécédent de césariennes et en cas de placenta praevia. nir une cartographie du réseau vasculaire abdominopelvien
À l'heure où la pratique de la césarienne est en augmen- et d'identifier d'éventuelles anastomoses artérioveineuses
tation, les anomalies de la placentation sont désormais ou des troncs vasculaires aberrants. Cette cartographie vas-
devenues la première cause d'hystérectomie dans les pays culaire en préopératoire peut être utile pour le chirurgien
industrialisés [8]. Elles sont associées à une morbi-morta- lors des dissections et pour le radiologue en cas de recours
lité maternelle élevée, et constituent un nouveau challenge à l'embolisation secondaire. Les risques du gadolinium en
médico-chirurgical pour les obstétriciens et les anesthé- cours de grossesse sont discutés et certaines équipes ne
sistes réanimateurs. recommandent pas son utilisation, mais le bénéfice attendu
158
Dr A.Amine Recherche bibliographique
13. Hystérectomie SCI-MED
en cas de placenta accreta et percreta

de cette angio-IRM nous semble justifié. Enfin, il faut garder peut justifier d'une embolisation si le plateau technique est
à l'esprit que les faux négatifs de l'imagerie ne sont pas rares proche. En cas d'hémorragie cataclysmique, l'hystérectomie
et que, parfois, c'est seulement au moment de la délivrance d'hémostase doit être pratiquée d'emblée ;
que le diagnostic pourra être infirmé ou non. ●
en cas d'accouchement par césarienne, s'il n'y a pas de sai-
gnements anormaux, la ligature prophylactique des artères
hypogastriques nous paraît discutable car son intérêt dans
Stratégie opératoire en cas de la prévention primaire de l'hémorragie dans ce contexte
n'est pas établi et la technique n'est pas sans risque (liga-
suspicion de placenta accreta ture de l'artère iliaque externe, plaie vasculaire ou urétérale).
Dans les situations de saignements modérés, le recours aux
Le choix de la stratégie opératoire dépend du degré d'inva- mesures non chirurgicales et chirurgicales conservatrices
sion placentaire suspecté à l'imagerie faite en ante-partum, est envisageable en fonction des antécédents de la patiente
des constatations peropératoires, et du désir du couple. et de la situation clinique. En cas d'hémorragie grave ou
Nous ne traiterons pas dans ce chapitre de l'alternative au persistante, la décision d'hystérectomie d'hémostase ne
traitement radical, appelée traitement «conservateur» qui doit pas être retardée.
consiste, en l'absence de délivrance spontanée, à ne pas La technique du traitement conservateur en cas de
tenter de délivrance «appuyée» mais de laisser le placenta placenta accreta est détaillée dans le chapitre précédent
in situ après la naissance. En fonction du diagnostic attendu (cf. chapitre « Hystérectomie d'hémostase (sur utérus gra-
en préopératoire, ce traitement conservateur peut être vide) »). La technique d'hystérectomie en cas de placenta
proposé dans but de préservation de l'utérus dans des cas accreta ne diffère pas de la technique décrite dans le cha-
de placenta accreta pour désir maternel, ou par nécessité pitre « Hystérectomie d'hémostase (sur utérus gravide) ».
en cas de placenta percreta extensif pour limiter le risque
hémorragique au cours de la césarienne première (détaillé
dans le chapitre «Césarienne»). Placenta accreta suspecté
avant l'accouchement
Placenta accreta découvert Le traitement recommandé par l'American Society of Obs-
au moment de la délivrance tetric and Gynecology est la pratique, de façon program-
mée, d'une césarienne puis hystérectomie dans le même
Dans certaines situations, le diagnostic de placenta accreta temps en cas de placenta accreta diagnostiqué dans la
n'a pas été posé plus tôt. Or il peut être fait au décours d'un période prénatale afin de limiter le risque hémorragique
accouchement par les voies naturelles ou d'une césarienne, lié à la tentative d'extirpation du placenta (souvent réfrac-
au moment de la délivrance, en l'absence de plan de clivage taire aux techniques d'hémostase médicale ou chirurgicale
retrouvé entre le placenta et l'utérus au cours d'une déli- conservatrice). Ce traitement consiste à pratiquer une hys-
vrance artificielle : térectomie d'emblée, juste après la naissance, sans tentative

en cas d'accouchement par voie basse, si une délivrance d'extirpation placentaire (en dehors de toute délivrance
est tentée, elle doit être réalisée prudemment et sans insis- spontanée).
tance en cas de difficulté. En l'absence d'hémorragie sévère, Ces recommandations sont discutables et nous ne pro-
associée à une bonne tolérance clinique, les mesures thé- cédons pas de cette manière. En effet, ce traitement radical
rapeutiques non chirurgicales de traitement de l'hémorra- ne permet pas d'éviter l'hystérectomie inutile en cas de faux
gie de la délivrance sont entreprises et peuvent suffire. En positifs des investigations échographiques et radiologiques
cas de persistance de l'hémorragie, il ne nous semble pas prénatales. De plus, la zone accreta est parfois de très petite
raisonnable de proposer une embolisation compte tenu taille (1 à 2 cm2), et l'ablation de la quasi-totalité du pla-
du risque d'aggravation rapide et extrêmement sévère de centa est possible sans hémorragie importante. Dans ce cas,
l'hémorragie qui peut conduire à une situation d'instabilité la conservation utérine est légitime.
hémodynamique. Le recours à la laparotomie semble pré- Plus que toute autre intervention en obstétrique, la
férable et les mesures chirurgicales conservatrices peuvent césarienne hystérectomie, en cas de placenta accreta/per-
être tentées sans pour autant retarder la décision d'un trai- creta, est une intervention qu'il faut absolument tenter
tement radical. Cependant, cette décision se prendra au de programmer car elle relève d'une prise en charge mul-
cas par cas et une hémorragie persistante, mais modérée, tidisciplinaire (gynécologues-obstétriciens expérimentés,
159
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

a­ nesthésistes-réanimateurs, radiologues et néonatolo- Stratégie opératoire en cas de


gistes, aidés éventuellement par des chirurgiens urologues
et digestifs). Cette intervention doit se pratiquer dans un suspicion de placenta percreta
centre disposant d'une réanimation, d'un établissement de
transfusion et d'un plateau technique de radiologie vascu- Dans les situations de placenta percreta, la question du
laire [11]. La préparation préopératoire dépend du degré de choix entre la césarienne hystérectomie d'emblée et l'hysté-
sévérité anatomique et conditionne en partie le pronostic rectomie différée avec placenta laissé en place n'est pas tran-
peropératoire. Cette préparation est moins invasive en cas chée. Seule des études randomisées pourraient permettre
de placenta accreta qu'en cas de placenta percreta (cf. infra). d'y répondre, mais ces dernières sont peu réalisables, voire
Après discussion avec la femme et son conjoint, en pre- irréalisables. Il a été montré que la morbidité maternelle
nant en compte l'âge et la parité de la femme, mais aussi le grave, telle que les hémorragies et le besoin de transfusion
souhait du couple, il peut être décidé de ne pas conserver massive, était diminuée en cas de réalisation d'une hysté-
l'utérus en cas de placenta accreta. Dans ce cas, si le dia- rectomie retardée pour les cas les plus graves d'AIP. Elle per-
gnostic est confirmé en peropératoire, l'hystérectomie est met de laisser du temps pour que le débit sanguin utérin
pratiquée, qu'il y ait ou non un contexte hémorragique. diminue et que le placenta régresse par rapport aux struc-
La stratégie opératoire est la suivante : tures environnantes [13]. Notre expérience nous pousse

bien que 40 % des femmes accouchent avant 38 SA dans à proposer le traitement conservateur systématiquement
cette situation, il ne semble pas légitime de pratiquer sys- dans les cas de placentas percreta, en particulier extensifs.
tématiquement la césarienne élective avant 37 SA comme En effet, une tentative de chirurgie radicale au moment de
le suggère les recommandations anglo-saxonnes [12]. La la césarienne peut engager le pronostic vital de la femme :
césarienne est organisée vers 37–38 SA selon l'évolution il s'agit d'une chirurgie à risque hémorragique majeur en
de la grossesse. Ce terme néanmoins plus précoce qu'une raison des réseaux vasculaires péri-utérins, particulière-
césarienne programmée «ordinaire» est justifié pour éviter ment développés en fin de grossesse, d'une vascularisation
d'être confronté aux situations d'urgence, même s'il expose parfois extra-anatomique, et de l'invasion imprévisible le
le nouveau-né à un risque accru de détresse respiratoire ; plus souvent d'organes de voisinage parfois très vasculari-

nous réalisons une incision transversale (selon Joël Cohen sés (cf. chapitre «Hystérectomie d'hémostase (sur utérus
ou de Pfannenstiel) compte tenu de la décision anténatale gravide)» ). Cependant, la morbidité maternelle sévère est
d'hystérectomie, et ce même si l'extraction est transplacen- beaucoup plus fréquente chez les femmes atteintes de pla-
taire. Cependant, en cas de difficultés opératoires prévi- centa percreta que de placenta accreta, malgré la planifica-
sibles (liées aux antécédents chirurgicaux, paroi, etc.), il est tion multidisciplinaire, la gestion dans un centre spécialisé,
peut être nécessaire de réaliser une incision médiane ; une meilleure suspicion prénatale et le recours à un traite-

en cas d'extraction fœtale non transplacentaire, une déli- ment conservateur [14]. Une hystérectomie secondaire est
vrance dirigée est tentée en associant une injection de 5 mg souvent nécessaire à cause d'un saignement, ou de compli-
d'ocytocine en intraveineuse directe à la naissance et une cations infectieuses générales ou locales. Cette dernière est
traction contrôlée du cordon, afin d'affirmer le caractère pratiquée au mieux plusieurs semaines après la césarienne.
accreta du placenta. Il n'est pas exceptionnel de constater Elle semble moins à risque que la césarienne hystérectomie
l'absence de placenta accreta alors que l'échographie, voire réalisée dans un premier temps, d'une part, parce qu'elle
l'IRM, présentaient des signes positifs ; est potentiellement facilitée par l'involution de l'utérus et,

en cas d'extraction fœtale transplacentaire liée à un d'autre part, parce que la potentielle régression des réseaux
placenta antérieur bas inséré, l'extirpation du placenta est vasculaires péri-utérins peut limiter l'abondance des saigne-
tentée sans «forcer» ; s'il s'avère que le placenta est accreta, ments peropératoires. Néanmoins, elle peut être décidée
la tentative d'extirpation du placenta est interrompue, et en urgence en cas d'hémorragie d'emblée majeure ou de
l'hystérectomie débutée. complications septiques. En cas de traitement conservateur
L'hystérectomie sur placenta accreta ne présente pas de dans les situations de placenta percreta, la grande majorité
spécificités techniques, et l'on peut se reporter au chapitre des femmes auront in fine une hystérectomie, qu'elle soit
correspondant (cf. chapitre «Hystérectomie d'hémostase d'emblée ou secondaire [14].
(sur utérus gravide)»). La seule particularité est l'hémor- Ainsi, à tout moment pendant la césarienne, il peut être
ragie qui peut être massive et qui nécessite le contrôle nécessaire de réaliser un traitement radical en urgence, en
hémostatique premier des artères utérines. cas d'hémorragie qui peut être cataclysmique. C'est donc

160
Dr A.Amine Recherche bibliographique
13. Hystérectomie SCI-MED
en cas de placenta accreta et percreta

dans l'hypothèse d'un échec du traitement conservateur de médicaments antifibrinolytiques (acide tranexamique).
que nous réalisons systématiquement la prise en charge Avant de débuter l'intervention, un monitorage invasif est
préopératoire immédiate et peropératoire décrite ici. souhaitable (le plus souvent avec une voie artérielle pour
monitorage continu et réalisations de prélèvements répé-
tés), ainsi que la mise en place d'abords veineux de bon
Stratégie préopératoire calibre. Les moniteurs d'optimisation hémodynamique
Organisation multidisciplinaire peuvent être envisagés, même si les voies périphériques
sont à recommander pour limiter les complications iatro-
Plus encore qu'en cas de placenta accreta, l'intervention gènes. Enfin, un séjour en réanimation doit être anticipé,
pour suspicion de placenta percreta relève donc d'une prise même s'il n'est pas systématique [15].
en charge multidisciplinaire comportant des gynécologues- La césarienne hystérectomie peut se pratiquer au cours
obstétriciens expérimentés, des anesthésistes-réanimateurs, d'une anesthésie locorégionale, comme une rachi-péridu-
des radiologues vasculaires, et des néonatologistes prêts rale combinée. Néanmoins, le risque de saignement brutal
à accueillir le nouveau-né parfois sédaté par l'anesthésie et abondant, pouvant conduire à une hypotension majeure,
générale maternelle. Le concours de chirurgiens urologues, ainsi qu'une durée d'intervention potentiellement longue,
digestifs et/ou vasculaires peut être requis. Cette inter- stressante et inconfortable pour la patiente, nous incitent le
vention doit se pratiquer dans un centre disposant d'une plus souvent à réaliser une anesthésie générale au moment
­réanimation adulte, d'un centre de transfusion pouvant faire de la décision d'hystérectomie. On peut en revanche débu-
face avec tous les produits en qualité et quantité, et d'un ter la procédure chirurgicale par une anesthésie locorégio-
plateau technique de radiologie vasculaire [11]. Il est essen- nale (rachi-péridurale combinée idéalement) pour quatre
tiel qu'une stratégie globale, du moins ses grandes lignes, raisons :
ait été fixée en réunion multidisciplinaire, à partir princi- ●
les gestes préopératoires, que nous préconisons parfois
palement des paramètres d'évaluation du degré d'invasion (ballonnets intravasculaires, pose de sondes urétérales),
placentaire par l'imagerie, en particulier extra-utérine. peuvent prendre du temps et sont réalisés sous cette
modalité anesthésique. Cela permet d'éviter l'exposition
Information du couple parfois longue du fœtus à l'anesthésie générale maternelle,
Il est primordial d'exposer au couple, de façon répétée, les par ailleurs parfois réalisée en dehors du bloc opératoire
risques possibles, notamment les conséquences hémorra- pour les gestes vasculaires. C'est tout l'intérêt de réaliser
giques et transfusionnelles, urologiques, digestives, réani- l'ensemble de la prise en charge dans un seul endroit, dans
matoires, avec le risque de mise en jeu du pronostic vital une salle hybride. Ce type de structure existe dans quelques
dans les formes très sévères. La présence du conjoint est centres en France, et surtout aux États-Unis, au Canada, ou
indispensable dans ces rencontres d'information. Sauf cas en Suisse, où peuvent être conduits de manière combinée
particulier ou difficultés anatomiques, nous proposons une et sans déplacement les gestes chirurgicaux et sous scopie ;
ligature tubaire aux femmes porteuses d'un utérus multici-

la procédure chirurgicale, comportant aussi l'hystérec-
catriciel compliqué d'un placenta percreta, si l'hystérecto- tomie en l'absence de saignement majeur ou d'instabilité
mie n'était pas réalisée. hémodynamique, peut être conduite sous anesthésie
locorégionale seule. Cela permet à la maman d'être «pré-
sente» lors de la naissance, du premier cri d'un nouveau-né
Prise en charge anesthésique
en bonne santé, et de le voir, établissant ainsi un premier
En préopératoire, la prise en charge anesthésique doit être contact mère-enfant important pour la suite ;
anticipée au cours d'une consultation spécifique, avec la ●
l'injection intrathécale de morphiniques, associée aux
réalisation d'un bilan prétransfusionnel et la mise en réserve anesthésiques locaux, éventuellement prolongée plusieurs
de produits sanguins labiles appropriés (en coordination jours en postopératoire, permet une excellente analgésie ;
avec l'Établissement français du sang). La patiente a idéale- ●
enfin, certaines études de faible valeur méthodologique,
ment bien suivi une supplémentation martiale, pour partir indiquent un saignement moindre en cas de placenta prae-
d'un niveau d'hémoglobine et d'une réserve en fer les plus via opéré sous anesthésie locorégionale que sous anesthésie
hauts possibles. Une stratégie d'épargne transfusionnelle a générale, notamment à cause de l'utilisation d'agents hyp-
été discutée, comportant éventuellement l'utilisation d'un notiques halogénés qui sont utéro-relaxants, et peuvent
récupérateur de sang (de type Cell Saver®) et l'utilisation induire atonie et saignement accru.

161
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

En cas d'anesthésie générale, toutes les techniques uti- Cathétérisme artériel préopératoire
lisées pour la chirurgie lourde à haut risque hémorragique et ballonnets artériels
sont utiles, comportant le maintien de la normothermie,
le monitorage de la profondeur de l'anesthésie, et l'optimi- Dans certaines situations où l'extension du placenta per-
sation de l'hémostase et de l'euvolémie, surtout bien sûr creta est importante ou associée à un réseau vasculaire
en cas d'hémorragie massive qui s'accompagne vite de la particulièrement développé, l'équipe de radiologie inter-
triade létale (hypothermie, acidose, CIVD). ventionnelle positionne par cathétérisme fémoral des
sondes à ballonnet dans les artères iliaques primitives juste
avant la césarienne (figure 13.3).
Prise en charge urologique Les ballonnets pourront alors être gonflés de façon
Préserver l'intégrité des uretères est l'un des enjeux de l'hysté- temporaire en peropératoire en cas d'hémorragie mas-
rectomie. Leur repérage peut se révéler difficile, car l'anatomie sive, et ce afin d'occlure les artères iliaques. Elle présente
pelvienne est souvent modifiée, surtout lorsque le placenta est un double intérêt théorique : celui de pouvoir réduire
praevia : le segment inférieur est alors totalement «soufflé» vers le débit sanguin pelvien en cas d'hémorragie massive,
l'extérieur avec un réseau vasculaire latéro-utérin important ren- et celui de pouvoir garantir un accès vasculaire rapide
dant l'individualisation des uretères difficile. Par ailleurs, en cas de en postopératoire immédiat si une embolisation en
d'hémorragie importante justifiant une exécution rapide, les ure- urgence était indiquée (figure 13.3, 13.4). Cependant,
tères doivent pouvoir être repérés rapidement. Ainsi, la mise en l'efficacité de cette méthode invasive reste débattue [16,
place de sondes urétérales avant de débuter la césarienne pourra 17] et elle n'est pas sans risque de complications (un
guider le chirurgien dans la dissection et l'accès aux axes vascu- cas de dissection artérielle dans notre centre mais avec
laires hypogastriques et utérins. Les uretères pourront alors être des ballons semi-compliants double lumière utilisés au
facilement repérés, que ce soit au moment de la césarienne ou début de notre expérience en cathétérisme sélectif sur
lors d'une hystérectomie secondaire dans les jours ou semaines guide dans les artères iliaques internes, choix initial fait
qui suivent. Les sondes urétérales sont mises en place sous cys- pas les radiologues interventionnels pour privilégier
toscopie et sous contrôle scopique en début d'intervention un accès endovasculaire facile pour une embolisation
(figure 13.2A). Elles sont fixées à une sonde vésicale par un fil et en urgence). En outre, les études rétrospectives sur le
seront enlevées par simple traction après l'hystérectomie si elle sujet sont biaisées par la forte corrélation qu'il existe
est réalisée. Si la période entre la césarienne et l'hystérectomie entre le recours au cathétérisme fémoral prénatal et la
excède une semaine, les sondes urétérales pourront être rempla- sévérité de l'invasion placentaire suspectée au cours du
cées par des sondes en double J (figure 13.2B), qui sont internes bilan d'imagerie. Bien que nous utilisions ces ballonnets
et mieux tolérées. Cependant, le recours aux sondes en double dans les formes de placenta percreta les plus graves,
J en première intention est envisageable sans que le choix préfé- les bénéfices, en termes d'épargne sanguine, restent à
rentiel entre l'une ou l'autre technique ne soit validé. démontrer.

Figure 13.2.
A. Sonde double J.
B. Sonde urétérale.

162
Dr A.Amine Recherche bibliographique
13. Hystérectomie SCI-MED
en cas de placenta accreta et percreta

Figure 13.3.
Ballonnet endovasculaire (type : cathéter monolumière avec ballon non compliant – Lemaitre® Vascular, Paris, France). Dégonflé (A),
gonflé (B, C). Ils sont placés par cathétérisme artériel fémoral (technique de Seldinger) en position iliaque primitive en amont de la
bifurcation artère iliaque externe et interne (hypogastrique). Après repérage anatomique de la bifurcation aorto-iliaque avec les guides
utilisés pour le cathétérisme fémoral, ces ballons sont montés sans guide (monolumière) et un contrôle scopique le plus bref possible
confirme le bon positionnement des ballons (gonflés avec du produit de contraste) (D). Le caractère non compliant caractérise des
ballons dont le diamètre ne peut pas dépasser le diamètre maximal nominal quelle que soit la pression d'insufflation, ce qui limite les
risques de traumatisme de l'artère iliaque primitive (un ballon semi-compliant utilisé couramment en angioplastie pour écraser les
plaques d'athérome au contraire expose à un risque de surdilatation et donc de rupture ou de dissection artérielle).

Figure 13.4.
Cathétérisme fémoral bilatéral (A, B).

Technique chirurgicale de la avant l'incision, par un marquage cutané, l'extrémité


supérieure de l'insertion placentaire. Elle permettra
césarienne hystérectomie d'adapter l'incision cutanée afin de réaliser l'hystéroto-
mie à distance du placenta (incision utérine corporéale
Terme de réalisation et voie d'abord ou fundique, car le placenta est souvent antérieur bas
inséré). Par ailleurs, une installation en double voie nous
En fonction de l'évolution de la grossesse, l'intervention paraît nécessaire afin, d'une part, d'évaluer les saigne-
sera programmée aux alentours de 37 SA. Néanmoins, dans ments peropératoires par voie vaginale et, d'autre part,
les cas fréquents de métrorragies au début du troisième tri- d'avoir un accès pour un éventuel repérage du col au
mestre, on peut être amené à programmer l'intervention moment de l'hystérectomie.
dès 34 SA.
La voie d'abord sera systématiquement une laparoto-
mie médiane sous- et péri-ombilicale. Il est indispensable Hystérotomie et extraction fœtale
de repérer la localisation placentaire en préopératoire
immédiat à l'aide d'un échographe qui sera dans la L'hystérotomie est réalisée à distance de la zone d'insertion
salle. Cette échographie a pour but de repérer juste placentaire (figure 13.5).

163
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Figure 13.5.
Laparotomie médiane : l'extériorisation, partielle et prudente,
de l'utérus est parfois justifiée afin de réaliser l'hystérotomie à
distance de l'insertion placentaire.
Figure 13.6.
Hystérotomie fundique. Repérage des limites de l'incision utérine
L'hystérotomie est une étape décisive de l'intervention. en dehors et à distance de l'insertion placentaire (A). Incision au
bistouri et aux ciseaux (B, C). Extraction fœtale prudente évitant
Après une exploration minimale de la cavité abdominale, toute atteinte placentaire et une extension non maîtrisée de
pour éviter de provoquer un saignement intempestif, il est l'hystérotomie (D).
important de prendre le temps de repérer les limites de
l'hystérotomie, et ce afin de pouvoir élargir l'incision initia- Avant de pratiquer l'hystérectomie, l'exposition pel-
lement prévue ou d'anticiper son extension provoquée par vienne doit être optimale. Il convient de réaliser un refou-
l'extraction fœtale. Cette hystérotomie doit rester stricte- lement des anses digestives au-dessus du promontoire à
ment extraplacentaire pour éviter une hémorragie secon- l'aide de champs humides maintenus par une valve fixée
daire à un décollement induit, même minime, du placenta sur un écarteur de Gosset. L'utilisation de l'écarteur d'Alexis
(figure 13.6). Elle peut alors nécessiter une extension vers la peut être une alternative satisfaisante. La situation est habi-
face postérieure de l'utérus justifiant, au cas par cas, l'exté- tuellement instable en per-césarienne ; l'intervention doit
riorisation partielle et prudente de ce dernier. Après la nais- être rapide mais sans précipitation, et les premières étapes
sance du nouveau-né, le cordon est vidangé complètement chirurgicales visent à diminuer les pertes sanguines. L'opé-
et la ligature au ras de son insertion est laissée à la discrétion rateur doit avoir à l'esprit que, à tout moment, la patiente
de l'opérateur. peut se mettre en choc hémorragique. La communication
C'est en cas d'échec de cette tentative de traitement avec l'équipe d'anesthésie est fondamentale. Cette dernière
conservateur qu'une hystérectomie sur placenta percreta doit être expérimentée afin d'anticiper les pertes sanguines
peut être décidée. importantes en peropératoire. Cela implique qu'un disposi-
tif de transfusion et réchauffement est disponible, et qu'une
personne est dédiée à cette tâche (vérification des produits
Hystérectomie
sanguins, comptage, et utilisation optimisée de plasma
Les conditions sont très différentes selon qu'elle est réalisée frais congelé (PFC), fibrinogène, et acide tranexamique)
au moment de la césarienne ou à distance de celle-ci. Dans exclusivement. Le nombre de culots globulaires et PFC
le premier cas, les risques de choc hémorragique sont très peut facilement dépasser la dizaine d'unités en moins de
élevés, même si des ballonnets intra-artériels ont été pla- 30 minutes. La correction de l'acidose, de l'hypothermie et
cés. Dans le deuxième cas, l'intervention est souvent moins de l'éventuelle hypocalcémie est essentielle. Il n'y a que très
hémorragique (même si les ballonnets ont été enlevés dans peu de situations au bloc opératoire avec un tel débit de
les heures qui ont suivi la césarienne) et les différents temps saignement (le débit utérin à terme peut atteindre jusqu'à
opératoires peuvent se dérouler sans précipitation. un litre par minute).

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Dr A.Amine Recherche bibliographique
13. Hystérectomie SCI-MED
en cas de placenta accreta et percreta

Après avoir suturé rapidement l'hystérotomie, placenta avoisinants, notamment des plexus veineux paramétriaux
en place, l'utérus est tiré en avant afin de tendre les pédi- dont l'hémostase peut se révéler impossible, précipi-
cules utérins et tenter de réduire les flux vasculaires utérins tant la patiente vers une hémorragie possiblement fatale
(figure 13.7). (figure 13.8 à 13.10).
En cas d'hémorragie très importante rendant complexe
la dissection et la vision du champ opératoire, les ballonnets,
s'ils ont été posés en préopératoire, sont gonflés. Sinon (cas
de l'hystérectomie secondaire à distance de la césarienne),
il nous paraît légitime de commencer par une ligature vas-
culaire première des artères hypogastriques, sans que celle-
ci ne retarde l'hystérectomie si les saignements devenaient
anormaux et mal tolérés par la patiente. À chaque instant,
il est impératif de contrôler l'abondance des saignements
par voie vaginale. La ligature des artères hypogastriques se
fait selon la technique habituelle (cf. le chapitre «Ligature
vasculaires»). En cas d'hémorragie massive non contrôlée, il
peut être envisagé de réaliser une compression ou un clam-
page temporaire de l'aorte. L'hystérectomie se pratique
selon la technique précédemment décrite (cf. le chapitre
«Hystérectomie d'hémostase (sur utérus gravide)») avec
quelques spécificités.

Pédicules vasculaires de l'utérus


Il est impératif de ne pas porter atteinte aux différentes Figure 13.8.
structures vasculaires annexes aux pédicules utérins. Pour Ligament rond gauche (a) pris entre deux pinces de Jean-Louis
Faure. La pose des pinces est réalisée sous contrôle permanent de
cela, plus que jamais, les dissections doivent être minu- la vue pour éviter l'atteinte du pédicule annexiel en arrière (a).
tieuses et parfaitement contrôlées. Le positionnement
des différentes pinces doit être fait sous contrôle perma-
nent de la vue, au risque d'induire des plaies des vaisseaux

Figure 13.7.
Placenta percreta après la naissance. Fond utérin et Figure 13.9.
hystérorraphie (a). Pédicule annexiel gauche (b). Ligament rond Ligature du pédicule annexiel gauche par un nœud de Meunier à
gauche (c). Segment inférieur soufflé par le placenta et recouvert l'aide d'un fil sertis (Vicryl® 1). Chaque ligature est doublée par un
par la vessie (d). fil de même calibre.

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Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

Sup
Fond utérin
Ext (hystérorraphie)

Ligament rond et
pédicule annexiel
gauche liés

Placenta percreta
latéralisé à droite
envahissant l’isthme
utérin

Col

Figure 13.12.
Pièce opératoire d'une hystérectomie pour placenta percreta.
Figure 13.10.
Décollement du péritoine latéro-utérin droit. Le segment
inférieur est soufflé vers l'extérieur et est le siège d'un réseau n'existe pas et est hautement hémorragique. Le degré
vasculaire latéral étendu (a). d'envahissement vésical peut nécessiter une résection
vésicale partielle emportant la zone atteinte, associée ou
non, à une résection urétérale. Dans certains cas de résec-
tion vésicale extensive, une réimplantation urétéro-vési-
cale peut se révéler nécessaire. La sonde urinaire est laissée
quelques jours et au minimum cinq jours en cas de plaie
vésicale ou de réimplantation urétérale. Elle vise à dépister
d'éventuel saignement de la vessie envahie et d'assurer une
vidange vésicale pour permettre la cicatrisation en cas de
geste urologique.
En fin de procédure, la pièce d'hystérectomie est adres-
sée pour un examen anatomopathologique qui confirmera
le diagnostic (figure 13.12).
Après l'hystérectomie, toutes les ligatures vasculaires
doivent être vérifiées et doublées selon la technique pré-
cédemment décrite (cf. le chapitre «Ligature vasculaires»).
L'hémostase doit être contrôlée. Il peut s'avérer nécessaire
d'avoir recours à des substituts hémostatiques pour contrô-
ler certains saignements diffus ou en nappe (figure 13.13).
Un drainage est systématiquement mis en place pour
Figure 13.11. une courte durée (limitée à 48 heures) afin d'évaluer la
Décollement vésico-utérin en cas de placenta percreta au cours reprise éventuelle d'un saignement intrapéritonéal en pos-
de l'hystérectomie. Face antérieure de l'isthme utérin (a), face
postérieure de la vessie (b) et sillons inter-vésico-utérins (c). topératoire immédiat. La fermeture pariétale est réalisée
plan par plan.
Dans certaines situations hautement hémorragiques,
Vessie et uretères et malgré les transfusions importantes, des troubles de
Le décollement vésico-utérin est une étape souvent difficile l'hémostase peuvent persister, rendant tout contrôle
(figure 13.11) qui permettra d'accéder à la berge supérieure chirurgical vain. Il peut être envisagé de réaliser un packing
du col. En cas de placenta percreta avec atteinte vésicale, abdominopelvien après l'hystérectomie, à l'aide de champs
qui est la forme la plus fréquente, le plan de décollement et d'un drainage de type Mikulicz. Cette stratégie transitoire

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Dr A.Amine Recherche bibliographique
13. Hystérectomie SCI-MED
en cas de placenta accreta et percreta

chirurgie parfois complexe et atypique. Les enjeux sont


alors de réduire le risque hémorragique, et de ne pas géné-
rer de complications iatrogènes relatives aux modifications
anatomiques. À cette stratégie radicale, parfois pratiquée
en excès, s'opposent des approches dites «conservatrices»
pour le désir du couple, ou par nécessité. Cette alternative
n'est pas non plus sans risques et nécessite une surveillance
contraignante et de longue durée.

Références
Figure 13.13.
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Vue supérieure du pelvis au décours de l'hystérectomie pour
placenta percreta. Calda P, et al. Evidence-based guidelines for the management of
Les pédicules annexiels sont liés et ont été doublés (a et b). Vessie en abnormally invasive placenta: recommendations from the Interna-
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accreta: diagnosis and management in a French type-3 maternity
hospital. J Gynecol Obstet Biol Reprod (Paris) 2008;37:499–504.
La surveillance postopératoire est réalisée en unité de soins [6] Kayem G, Anselem O, Schmitz T, Goffinet F, Davy C, Mignon A,
continus ou en réanimation pour une durée adaptée à la et al. Conservative versus radical management in cases of placenta
sévérité et à la tolérance postopératoire de la patiente. Elle accreta: a historical study. J Gynecol Obstet Biol Reprod (Paris)
doit s'attacher à poursuivre la correction des troubles de 2007;36:680–7.
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vaginale, par le drainage pelvien, ou par la sonde urinaire. Changing trends in peripartum hysterectomy over the last 4
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Nous ne réalisons pas d'embolisation systématique pré-
[9] Collins SL, Ashcroft A, Braun T, Calda P, Langhoff-Roos J, Morel O,
ventive. En dehors de l'antibioprophylaxie peropératoire, le et al. Proposal for standardized ultrasound descriptors of abnor-
recours à une antibiothérapie au décours de la césarienne mally invasive placenta (AIP). Ultrasound Obstet Gynecol
hystérectomie ne paraît pas justifié. Lorsque la surveillance 2016;47:271–5.
postopératoire le permettra, à distance de toute compli- [10] Morel O, Collins SL, Uzan-Augui J, Masselli G, Duan J, Chabot-
Lecoanet AC, et al. A proposal for standardized magnetic reso-
cation hémorragique et en l'absence de contre-indication nance imaging (MRI) descriptors of abnormally invasive placenta
hématologique, un traitement anticoagulant préventif (AIP) - From the International Society for AIP. Diagn Interv Imaging
devra être débuté. 2019;100:319–25.
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Conclusion Vasa Praevia : Diagnosis and Management. Green-top Guideline
n° 27; 2011.
La césarienne hystérectomie est le traitement privilégié des [13] Zuckerwise LC, Craig AM, Newton JM, Zhao S, Bennett KA,
­Crispens MA. Outcomes following a clinical algorithm allowing
placentas accreta. Souvent associés à un placenta praevia, for delayed hysterectomy in the management of severe placenta
les rapports anatomiques sont perturbés, et les remanie- accreta spectrum. Am J Obstet Gynecol 2019 Aug 27.
ments vasculaires qui peuvent être associés rendent cette

167
Dren A.Amine
Chirurgie obstétrique Recherche bibliographique SCI-MED

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paradox. Am J Obstet Gynecol 2012;207(216):e1–5.

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Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

Index

A D
Appendicectomie, 30 Déchirure, 49–54
Appendicite, 30 –– cervicale, 53
Atonie utérine, 117 –– périnéale, 50
–– vulvaire, 53
B
Déhiscence, 98, 101
Bakri (ballon de), 106
B-Lynch, 135 E
–– aiguille de Reverdin, 125 Embolisation, 114
–– variante, 133 Épisiotomie, 43–48
–– médiane, 44
C
–– médiolatérale, 45
Capitonnage utérin, 133 –– technique un fil/un nœud, 45
–– selon Hwu, 132
Cerclage, 1–16 H
–– à chaud, 5 Hématome
–– cervico-isthmique, 3 –– périgénital, 140
–– en urgence, 2 –– puerpéral, 140
–– prophylactique, 2 Hématome sous-capsulaire du foie, 40
–– technique HPP. Voir Hémorragie du post-partum
–– – cervico-isthmique, 6 Hystérectomie
–– – de Benson, 9 –– d'hémostase, 116, 134–135
–– – de Fernandez, 9 –– pour rupture utérine, 102
–– – de McDonald, 4
I
–– – de Palmer, 6
–– – de Shirodkar, 6 Incompétence cervicale, 2
–– thérapeutique, 2 K
Chirurgie non obstétricale, 18
Kyste ovarien
Cholangiographie, 33
–– ablation, 23
Cholécystectomie, 33
Cholécystite aiguë, 33 L
Cloisonnement utérin, 133 Ligature(s)
Compressions utérines –– des artères hypogastriques, 124, 134–135
–– atonie utérine, 133 –– – fertilité, 114
–– B-Lynch, 124 –– des artères iliaques externe
–– brace sutures, 124 et interne, 113
–– fertilité, 133–134 –– des artères hypogastriques, 114
–– hemostatic multiple square suturing, 124 –– des artères utérines, 134, 144
–– nécrose utérine, 134 –– – hystérotomie, 115
–– pyométrie, 134 –– – ligament rond, 115
–– synéchie, 134 –– – péritoine, 115
–– uterine compression sutures, 124 –– – simple selon O'Leary, 116

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Index Dr A.Amine Recherche bibliographique SCI-MED

–– des ligaments lombo-ovariens Stepwise uterine devascularization


–– – faillite ovarienne, 118 –– AbdRabbo, 117
–– – synéchie, 118 –– fertilité, 118
–– triple étagée, 134 Sutures multipoints, 133
–– vasculaires, 112, 134 –– selon Cho, 132
–– – aiguille à Reverdin, 131
M
–– – atonie utérine, 132
Muqueuse anale, 52 –– – placenta accreta, 132
P –– – placenta praevia, 132
Paroi rectale, 52 T
Placenta Thrombus, 114
–– accreta, 116 Thrombus vaginal
–– percreta, 116 –– épisiotomie, 140
Pneumopéritoine, 19 –– examen sous valves, 143
R –– extraction instrumentale, 140
–– filière cervico-vaginale, 143
Rudigoz (variante de)
–– hématome, 141–142
–– hystérotomie, 128
–– hématome périgénital vaginal, 140
Rupture
–– hématome périgénital vulvaire, 140
–– splénique, 36
–– hématome périgénital vulvovaginal, 140
–– utérine, 97–110
–– hématome sous-péritonéal, 140–141
–– – hématome du ligament, 105
–– hématome supravaginal, 140, 144
–– – hystérectomie, 106
–– hémorragie du post-partum, 142, 144
–– – inaperçue, 102
–– imagerie par résonance magnétique, 142
–– – incomplète, 98
–– scanner abdominopelvien, 142
–– – suture vésicale, 104
Triple ligature étagée, 134
S Tsirulnikov (triple ligature de)
Sphincter –– artères ovariennes, 116
–– externe, 52 –– ligament rond, 116
–– interne, 52 –– ligaments utéro-ovariens, 116
Splénectomie, 36

Elsevier Masson SAS


65, rue Camille-Desmoulins
92442 Issy-les-Moulineaux cedex
Dépôt légal : octobre 2020
Composition : SPI
Imprimé en Italie par Printer Trento

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