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~4I
dans la liturgie
Conférences Saint-Serge
XVIIe Semaine
d Etudes Liturgiques
W
ROMA
BIBLIOTHECA «EPHEMERIDES LITURGICAE.
«SUBSIDIA»
25----
DE LrCENTIA SUPERIORUM
L'ÉCONOMIE DU SALUT
DANS LA LITURGIE
CONFÉRENCES SAINT-SERGE
XVII' SEMAINE D'ÉTUDES LITURGIQUES
Page
Il s'agit là d'une tâche qui n'en est qu'à ses débuts. Il faut tenIr
compte que, surtout de nos jours, l'étude du rapport entre liturgie
et économie du salut est activée tantôt par le progrès de ['herméneu-
tique biblique et de la recherche théologique, tantôt par les problè-
mes qui ressortent des relations entre histoire du salut et histoire
empirique: coïncidence ou divergence? coordination ou subordina-
tion? en quel sens, de quelle manière et à quel degré possède-t-on
l'une et ['autre? etc. Pour ce qui concerne la liturgie, on sait qu'elle
se constitue comme médiation sacramentelle-rituelle entre ['une et
l'autre histoires; on ne pourra pas nier alors que la théologie litur-
gique soit poussée par tout cela à approfondir la nature de ce rôle
propre à la liturgie et à contribuer ainsi d'une façon originale à une
meilleure intelligence du thème de l'économie du salut. On sait,
d'un côté, qu'il n'y a pas d'authentique théologie liturgique si l'on
ignore la dimension qui est propre à la liturgie et qui consiste dans
le fait qu'elle est (( action célébrative ». On aura alors à chercher
avant tout ce que la liturgie dit de l'histoire du salut et comment
elle le dit, étant donné que l'action liturgique, pendant qu'elle réa-
lise une telle histoire par voie symbolique-sacramentelle, en donne
par là même une certaine interprétation. C'est, partant, en vue de
cela qu'il est de très grande importance de questionner les témoigna-
ges fournis par la tradition liturgique tout au long des siècles.
***
***
A. Parcours historique
Une lecture très linéaire est représentée par la succession des
points de vue touchant d'abord le sens de l'objet à examiner (une
espèce de {{ status quaestionis »), ensuite les témoignages des diver-
ses traditions liturgiques et, enfin, la réflexion théologique et pasto-
rale. En détail:
1. Qu'est-ce que 1'« économie du salut»: ce qui doit être entendu
sous le mot «oikol1omia» par rapport au domaine révélé et spécifique-
ment liturgique, nous est éclairé par B. BOTTE, qui met en lumière
l'évolution toujours plus riche du vocabulaire «économique »: le
sens primitif et générique d'après la Septante subit une transforma-
tion substantielle dans le NT; cette nouveauté reprise et approfondie
par les Pères, est exprimée au plus haut degré par la liturgie moyen-
nant l'anamnèse eucharistique.
En reprenant la perspective biblique, A. M. DUBARLE situe l'éco-
nomie du salut à l'intérieur de la typologie, c'est-à-dire dans l'ana-
logie qui régit d'une façon cohérente les diverses étapes de l'œuvre
de Dieu et qui permet soit d'en percevoir la présence là même où
elles sauraient échapper à la connaissance directe, soit de préciser
leur articulation avec le mystère du Christ.
2. La voix des traditions liturgiques: il s'agit de voir non seule-
ment la donnée de la présence dans la liturgie d'une conception
« économique» du salut, mais aussi et surtout le comment de cette
présence, ce qui d'ailleurs comprend diverses aspects: les «lieux li-
turgiques» - très significatifs en eux-mêmes - où telle présence
s'exprime; et après: la fonnulation, le langage, les images, les sym-
boles, etc. Ce seront plusieurs Auteurs qui nous piloteront dans ce
voyage à travers un panorama très varié et florissant: C. ANDRO-
NIKOF s'occupe de l'économie du salut dans le rite baptismal d'après
PRÉSENTATION 9
***
A. PISTOIA - A. M. TRIACCA
A
BAPT:ËME
baptisé) comme une plante de vérité dans ton Eglise sainte, catholi~ (Dise. XXXIX, 17).
que et apostolique ... afin que s'il prospère dans la piété, ton saint En l'occurrence" dan~
nom par là aussi soit glorifié ... )}. C'est la notion paulinienne de l'édi- baptismale est la même
fication de l'Eglise par la croissance de ses membres. Le salut, ou~ Christ pour le sanctifier
vert par le baptême, passe par l'Eglise et il est dans l'Eglise. Saint Esprit, lequel est ph
Et c'est aussi le thème eschatologique. La nouvelle naissance épiclétiques. Pour l'œuvr,
du baptisé est «un symbole de cette naissance qui aura lieu à la est demandée. Ce sera pr
fin des temps; et sa conduite dans la vie, un symbole de la façon Néanmoins, et contrai
de vivre qui sera celle du royaume du ciel)} (NarsaÏ, Romél. 21; à la Théophanie mentionr:
trad. Gignoux, in L'Initiation chrétienne, Paris 1963, p. 202). Le salut déluge, la Mer Rouge, le
est donc commencé, l'économie est engagée: {( Par ce signe, dit baptême, l'Eglise, tout oc
l'Aréopagite, le catéchumène est reçu dans la communion de ceux entièrement plongée dan:
qui ont mérité la déification et qui constituent l'assemblée des saints» Testament, semble ne pa:
(Hier. Eccles.). lues de la réalité actuelle.
la suite des rites. Dans CI
duite au minimum.
BÉNÉDICTION DES FONTS L'exorcisme qui suit (
son signe écrase toutes 1
Jusqu'à la formule: ({ Fais que (cette eau) soit inaccessible aux n'est pas définitif. Que l',
forces ennemies et remplie de la puissance angélique», la prière de qui va être baptisé)} dans
la sanctification des fonts est la même que les trois quarts de la et des hérétiques (manichi
deuxième partie de la prière de Sophrone, patriarche de Jérusalem le baptême parce qu'elle
(1 er tiers du VII' s.), à la fête du Baptême (la Théophanie). Les mal, la matière mauvaise
fonts sont assimilés au Jourdain. «L'eau est le commencement du est pour l'Aréopagite hè r
cosmos et le Jourdain est le commencement de l'Evangile», dit S. sim); pour Augustin, vult
Cyrille (lIr Catéchèse, n. 5). Il nous faudra revenir sur le parallèle d'Alexandrie, mètra huda
entre la Genèse et la palingénésie. Est-il besoin de rappeler ici tout la Didachè, Hudôr zôn (\
18 COSTANTIN ANDRONIKOF DANS LE RITE
délivré par celui~ci (de toute attaque, etc., de l'ennen1i). Il semble le sens de l'eau dont il
que svoboda, eleutheria, permettent les deux interprétations. La Pères, et dont Cyprien di
première est plus intéressante du point de vue théologique. Elle cor- saintes il est question d'c;:
respond à la connaissance de la vérité à laquelle il avait été fait n. 8), de l'eau qui est loutl
allusion avant le baptême. La seconde semble plus vraisemblable du IV, 25; il reprend le loutra
point de vue grammatical, dans le contexte. tra hudatos). Et l'on sait
Le deuxième élément que nous trouvons dans la secrète est la symbolisme scripturaire. 1
sphragis: le prêtre demande à Dieu: «Reproduis l'image de ton au bain est le symbole
Christ dans celui qui veut naître à nouveau, voobrazi Christa tvoef?.o, :lVP.r. réJérp.nce à l'huile
20 COSTANTI}! ANDRONIKOF
qui ne baptisaient pas que des hérétiques qui baptisaient avec d'autres
noms (que ceux de la Trinité) (De bapt. contra Donat. IV, 25,47)?
L'onction est précédée d'une ecphonèse qui se réfère à ln. I, 9:
« Béni est Dieu qui illumine et sanctifie tout homme qui vient dans
le monde ». A première vue, une contradiction apparaît. J'y fais alIuM
sion en passant parce qu'elle a trait à la nécessité du baptême dans
l'économie du salut: si la Lumière touche tout homme qui naît, le
baptême serait-il surérogatoire dans cette économie? On sait le parti
qu'en ont tiré des hérétiques et la controverse célèbre qui suivit,
avec les caÏnÎtes, quintiliens, manichéens, archontiques, ascodrutes,
séleuciens, hermiens, messaIiens et pélagiens; il faut malheureuse-
ment y ajouter la valeur purement syn1bolique qu'y attribue, imma-
tériellement, abstraitement, une certaine tendance rationnelle parmi
des protestants. Récemment encore, un pasteur de la région pari-
sienne ne voyait dans le baptême qu'une péripétie sociologique. Or il
s'agit bien d'acquérir «la puissance de la sainteté, dunamin hagiotè-
tas », dont parle Cyrille (Ca.tech. III, 3, enzundatio spirit ua lis, novum
natale (Tertullien, De bapt. 4,20), l'initiation et l'illumination, ph6-
tiS1110S (Justin, Apol. I, 61; Aréopagite, Hier. Ecc/es. II, 1,2), par ce
sacrement qui est celui du salut éternel (Augustin, Contra Cresco-
niu111, II, 13,16; Cyprien, Epist. LXIX), la cause de l'obtention du
Royaume (Cyrille, Procatech. 16), le chrisme, chrisma, de la filiation
divine (Grégoire Naz., Disc. XL, 4).
Et c'est seulement après la chrismation que les baptisés de-
viennent proprement chrétiens: ({ con-corporels et consanguins au
Christ, participants de la nature divine, christophores, sussômoi kai
sunaimoi tau Christau, theias koinônoi phuseôs, christophoroi»
(Catech. XXI, XXI). Y aurait-il une autre fin à l'existence humaine,
voulue par le Créateur?
A cet égard, il y a peut-être lieu de rappeler aussi l'analogie
nécessaire entre l'ensemble du mystère de l'initiation chrétien-
ne et la Genèse. Celle-ci traite de la création, celui-là de la recréa-
tion. Si la créature était restée dans l'état originel, édénique et
n'avait pas connu la déchéance et la mort. il n'y aurait certes pas
eu besoin de la régénérer pour la sauver. Et la palingénésie bap-
tismale, c.à.d. le départ de l'économie du salut, reprend les étapes
mystérieuses de la Genèse: enfantement à partir des eaux par la
profération du Verbe et la descente de l'Esprit, imposition de la
marque de la Deuxième et de la Troisième Hypostases (là-bas, l'ima-
ge, la ressemblance et le souffle; ici, l'imlnersion, la Croix et l'onction
DANS LE RITE BAPTISMAL D'APRÈS LE TREBNIK 23
CHRISMATION
par la puissance du Créateur ... Cet ordre que Dieu exprima, et les
créatures raisonnables et sensibles existèrent, il le donne à nouveau
et l'homme devient un être nouveau» (loc. cil., p. 199·200).
Les deux prières pour la tonsure qui conclut l'ensemble du rite
font ressortir un nouvel élément qui s'inscrit dans l'économie: la glori-
fication de Dieu par le corps euprepos, blagolepnoie, serviteur de
l'âme raisonnable, logikè, slovesnaia. C'est aussi la consécration à
Dieu, en remplacement de la figure révolue de la circoncision: le
sacerdoce n'est plus sanglant, il est spirituel (comme l'indique 1 Pier.).
La deuxième prière fait d'ailleurs directement allusion à la bénédic-
tion du roi David par le prophète SmTIuel. Les cheveux coupés sont
présentés comme ({ les prémices, aparchèn, natchatok» du nouveau
serviteur sur la voie du salut. La finalité de l'acte est nettement
eschatologique: cc afin que le néophyte voie les biens de Jérusalem
tous les jours de sa vie ». Ainsi que Narsaï le commente: «Symboli-
quement .. , la voix des prêtres est comme le son de la trompette
qu'on entendra à la fin des temps» (ib., p. 201).
Dans ce dernier rite, il est aussi intéressant de noter que le
parrain est associé au nouveau chrétien dans la demande de béné-
diction. La filiation spirituelle est inscrite dans l'économie du salut
au sein de l'Eglise, Royaume de prêtres, communauté des saints sau-
vés. L'initiation chrétienne est aussi l'introduction à la société ec-
clésiale.
C'est ainsi que l'ensemble des rites du sacrement baptismal tel
que le formulent aujourd'hui l"Euchologe grec et le Trebnik slave
récapitule et résume (<< télescope» même, dirions-nous familièrement)
cette initiation chrétienne qui, alors que l'Eglise dite primitive pre-
nait le temps de son impatience eschatologique, se déroulait pen-
dant des mois ou des annés, depuis la naissance de l'enfant ou l'élec-
tion du candidat, pour le conduire par l'humble catéchuménat jus-
qu'au triomphe de la nuit pascale où i1 intégrait l'Eglise en deve-
nant vraiment lui-même, car celle-ci «est à l'image et à la ressem-
blance de l 'homme créé à l'image et à la ressemblance de Dieu»
(Maxime le Confesseur, Mystagogie, PG XCI, 660); et la fin du bap-
tême est aussi « que nous ne soyons tous qu'Un seul corps, que
nous soyons tous frères» en Jésus Christ (Jean Chrysostome, In
Joan. Hamel. XXV).
Costantin ANDRONIKOF
L'ÉCONOMIE DU SALUT
DANS LA PRIÈRE DU « POST-SANCTUS ..
DES ANAPHORES DE TYPE ANTIOCHÉEN
par la puissance du Créateur ... Cet ordre que Dieu exprima, et les
créatures raisonnables et sensibles existèrent, il le donne à nouveau
et l'homme devient un être nouveau» (Zoe. cit., p. 199-200).
Les deux prières pour la tonsure qui conclut l'ensemble du rite
font ressortir un nouvel élément qui s'inscrit dans l'économie: la glori-
fication de Dieu par le corps euprepos, blagolepnoie, serviteur de
l'âme raisonnable, logikè, slovesnaia. C'est aussi la consécration à
Dieu, en remplacement de la figure révolue de la circoncision: le
sacerdoce n'est plus sanglant, il est spirituel (comme l'indique 1 Pier.).
La deuxième prière fait d'ailleurs directement allusion à la bénédic-
tion du roi David par le prophète Samuel. Les cheveux coupés sont
présentés comme ({ les prémices, aparchèn, natchatok» du nouveau
serviteur sur la voie du salut. La finalité de l'acte est nettement
eschatologique: « afin que le néophyte voie les biens de Jérusalem
tous les jours de sa vie ». Ainsi que NarsaÏ le commente: « Symboli-
quement ... la voix des prêtres est comme le son de la trompette
qu'on entendra à la fin des temps» (ib., p. 201).
Dans ce dernier rite, il est aussi intéressant de noter que le
parrain est associé au nouveau chrétien dans la demande de béné-
diction. La filiation spirituelle est inscrite dans l'économie du salut
au sein de l'Eglise, Royaume de prêtres, communauté des saints sau-
vés. L'initiation chrétienne est aussi l'introduction à la société ec-
clésiale.
C'est ainsi que l'ensemble des rites du sacrement baptismal tel
que le formulent aujourd'hui l'Euchologe grec et le Trebnik slave
récapitule et résume «{ télescope » même, dirions-nous familièrement)
cette initiation chrétienne qui, alors que l'Eglise dite primitive .pre-
nait le temps de son impatience eschatologique, se déroulait pen-
dant des mois ou des annés, depuis la naissance de l'enfant ou l'élec-
tion du candidat, pour le conduire par l'humble catéchuménat jus-
qu'au triomphe de la nuit pascale où il intégrait l'Eglise en deve-
nant vraiment lui-même, car celle-ci « est à l'image et à la ressem-
blance de l'homme créé à l'image et à la ressemblance de Dieu)
(Maxime le Confesseur, Mystagogie, PG XCI, 660); et la fin du bap-
tême est aussi ({ que nous ne soyons tous qu'un seul corps, que
nous soyons tous frères) en Jésus Christ (Jean Chrysostome, In
Joan. H ornel. XXV).
Costantin ANDRONIKOF
L'ÉCONOMIE DU SALUT
DANS LA PRIÈRE DU « POST·SANCTUS "
DES ANAPHORES DE TYPE ANTIOCHÉEN
aussi sous le nom du même auteur, on trouve des choses qui n'ont
rien de commun.
1 D.c., p. 204.
DANS LE « POST-SANCTUS» DE TYPE ANTIOCHÉEN 31
1
ANAPHORES INSPIRÉES PAR GAL 4, 4-5 ET AUTRES TEXTES
(P,E, JO 3,17) PARLANT DE LA MISSION DU FILS FAIT HOMME
Suit l'institution.
'P. 135.
l D.c., p. 147.
4 Anaphorae Syriace, Pont. lnst. Oriental, Rome 1939, \'01, l, p. 243.
5 M. HAYEK, Liturgie Maronite, Tours 1964, p. 336.
34 MIGUEL ARRANZ
« Saint es-tu Roi des siècles ... saint est ton Fils unique NSJC
par qui tout a été fait. Saint aussi cst ton Esprit
• A. HANGGY-J. PAHL, Prex Eucharistica, Fribourg 1968, pp. 246, 270, 342.
7 D.c., vol. II, p. 143.
Suit l'institution:
E) Une anaphore qui porte chez les Syriens le nom de Saint Jean
Chrysostome, en usage chez les Maronites et se trouvant dans leur
missel de 1716, avait été éditée par Renaudot 22; elle se trouve aussi
dans Al'laphorae S.vriacae 23; elle constitue un vrai recueil de tex-
tes du NT.
Elle suit presqu'au pied de la lettre les anaphores dites de
Jacques de Saruga en ajoutant à la fin Hebr 1,3 et 1 Petr. 1,2:
« Il vint ... ton Fils unique lui-même
et il fit la purification de nos péchés
par son sang, répandu pour nous ».
2( a.c., p. 112.
a.c.,
2.'i vol. II, p. 227.
26 a.c., p. 304.
40 MIGUEL ARRANZ
nent cette petite anaphore 27, Renaudot 28 et A. Raes 29 dans Prex Eu-
charistica nous donnent le texte latin:
« Alors que nous n'étions pas dignes,
vous avez envoyé votre Fils en ce monde,
il est apparu d'une femme,
et à nous, dans notre condition de mortels,
par sa mort il a donné la vie ».
II
ANAPHORES INSPIRÉES PAR JO 3,16 ET FONDÉES
SUR LA NOTION DE L'AMOUR DU PÈRE POUR L'HUMANITÉ
Texte évangélique:
{( En effet, Dieu a tellement aimé le monde
qu'il a donné son Fils unique,
afin que quiconque croit en lui ne périsse point,
mais ait la vie éternelle».
27 D.c., p. 119.
25 a.c., vol. II, p. 235.
29 a.c., p. 306.
J{lD.c., pp. 10, 27, 37.
~1 D.c., p. 67.
DANS LE {( POST-SANCTUS» DE TYPE ANTIOCHÉEN 41
« Saint es tu ...
qui par amour pour les hommes
nous as faits semblables aux étres du ciel,
et tu nous as aimés
au point d'envoy(!r ton Fils unique pour notre salut,
il s'est incarné ...
et s'est fait homme comme il l'a voulu et su,
et a pris tout ce qui nous appartenait, à part le péché.
Lui aussi a accompli toute la dispensation salvatrice pour nous
et a démontré par ses souffrances
la vérité de sa venue dans la chair.
La nuit de la Pâque ... ».
III
39 D.c., p. 369.
4l D.c., p. 124.
oU D.c., p. 286.
Suit l'institution:
«Avant de subir sa passion salvatrice, il prit du pain ... ».
•, D.c.• p. 327.
U D.c., p. 338.
DANS LE « POST-SANCTUS» DE TYPE ANTIOCHÉEN 45
49 D.c., p. 321.
50 D.c., p. 106.
51 D.c., p. 376.
46 MIGUEL ARRANZ
Et voici l'institution:
et on passe à l'institution.
IV
ANAPHORES DONT LE POST-SANCTUS,
S'INSPIRANT DE HÉBR. 1, ENGLOBE TOUT LE MYSTÈRE
DU CHRIST COMME RÉVÉLATION DU PÈRE
Une série d'anaphores, dont les chefs de file sont celle du VIII'
livre des Constitutions des Apôtres ou {( Messe Clémentine» et celle
surtout de Saint Basile dans ses deux rédactions alexandrine et an-
tiochéenne, vont nous faire parcourir dans la prière POST-SANCTUS
tout le mystère du salut. Si nous prenons comme point de départ
l'anaphore de Saint Basile dans sa rédaction alexandrine, nous cons-
tatons que tout le POST-SANCTUS est bâti sur les premiers versets de
l'épître aux Hébreux:
EpUre aux Hébreux:
« Après avoir à plusieurs reprises et en diven:.es manières,
parlé autrefois à nos pères par les prophètes,
~'D.c., p. 141.
48 MIGUEL ARRANZ
64 a.c., p. 90.
DANS LE « POST-SANCTUS» DE TYPE ANTIOCHÉEN 51
70 D.c., p. 333.
DANS LE ({ POST-SANCTUS» DE TYPE ANTIOCHÉEN 55
plus, l'économie réalisée par le Christ par son incarnation, est mise
dans les mains des croyants par l'eucharistie, qui devient l'instru-
ment de lutte, l'arme, dans notre combat avec l'enfer.
Voici finalement une anaphore syra-égyptienne comme celle de
Timothée d'Alexandrie, mais où les idées se concentrent davantage
autour du noyau de Hebr. 1; elle est attribuée soit à Sévère d'Antioche
soit au même Timothée d'Alexandrie. Le texte syriaque est dans
Anaphorae Syriacae 71 au début du 1er volume, après l'autre de Ti-
mothée; il est aussi en latin dans Renaudot 72 et dans Prex Eu-
charistica 73:
« ..• Qui pourrait contempler la profondeur
de ton amour pour les hommes?
lorsque nous étions coupables
de la transgression de ton commandement,
il te plut que le Verbe de Dieu,
Fils unique et splendeur de la gloire,
fût le dispensateur de notre salut.
Par ton bon plaisir et par son propre conseil
entreprenant pour nous l'économie (rndabronuto)
il s'est incarné de la ... vierge .. ,
sanctifié par la descente du Saint Esprit,
conçu, âme, intelligence, assimilé à tout Adam.
Lequel, ayant accompli J'économie,
comme prémices il a fait pour nous son ascension au ciel »,
Et on passe à l'anamnèse:
CONCLUSION
Miguel ARRANZ
OIKONOMIA
du Temple (Isaïe 22, 19-21) qui est menacé de perdre sa charge d'éco-
nome (o~xov0tLl<X.). Quant au verbe obw'JOflfw, il vient dans le Ps 112,
5, dans un passage assez obscur: « le juste disposera (otxO'JO[J.1j(J!;:~)
ses paroles (j,oroue;) avec jugement». Le latin a suivi littéralement:
disponet sernzones suas in iudicio. Mais s'agit-il bien de paroles?
L'hébreu emploie dabar qui a un sens assez vague de « chose» et
ÀOyoC; signifie aussi ({ compte» en grec. On pourrait donc comprendre:
<: il règlera ses comptes avec justice Qu'il y ait ou non contresens
)J.
rappelé que cela s'est fait par l'évangile dont il est le serviteur, il
ajoute: « A moi il a été donné cette grâce d'annoncer aux nations la
bonne nouvelle des richesses insondables du Christ, et de mettre en
lumière quelle est l'économie du mystère caché depuis des siècles en
Dieu qui a créé toutes choses, afin de faire connaître maintenant
aux principautés et aux puissances, par le moyen de l'Eglise, la mul-
tiple sagesse de Dieu »).
Je ne puis faire ici un commentaire détaillé de ces textes, et il
faut me borner à quelques remarques essentielles. Tout d'abord, l'éco-
nomie n'est plus la fonction d'un serviteur. Elle a été révélée à l'apô-
tre, mais c'est une disposition de Dieu lui-même. Ensuite, il y a un
rapport étroit entre l'économie et le mystère. Ils concernent tous
deux la même réalité, mais sous deux aspects différents. Le mystère
n'appartient pas au temps, mais à l'éternité: il est caché en Dieu
depuis les siècles. Nous avons la confirmation dans un passage paral-
lèle de Col. 1, 26: « Le mystère qui est caché depuis les siècles et les
générations ). L'économie, au contraire, apparaît dans le temps: c'est
l'économie de la plénitude des temps. On pense au résumé de la pré-
dication de Jésus dans Marc (l, 15): «Le temps est accompli et le
royaume de Dieu est proche ». De même dans Gal. 4, 4: ({ Quand
est venue la plenitude des temps, Dieu a envoyé son Fils »). Cependant,
si elle commence dans le temps, l'économie est orientée vers l'avenir.
Elle a pour fin la réconciliation de toutes choses dans le Christ.
Elle se continue dans l'Eglise et elle a une portée cosmique: ({ afin
de faire connaître aux principautés et aux puissances, par l'Eglise, la
multiple sagesse de Dieu ). En résumé on peut dire que l'économie
est la réalisation dans le temps du plan éternel de Dieu de tout
récapituler dans le Christ. C'est toute l'œuvre du Fils de Dieu incarné.
Comme nous aurons affaire dans la suite à des textes latins et
syriaques, il n'est pas inutile de signaler ici les traductions des
versions bibliques du groupe OLXOVOtLOç. En latin, ce groupe n'a pas
été latinisé, comme c'est souvent le cas chez les chrétiens. Dans le
sens littéral, par ex. Rom. 16, 23, le personnage nommé Eraste porte
le titre de arcarius [civitatis]; et dans la parabole de Luc 16, on
trouve le groupe villicus, villicare, villicatio. Mais dans Luc 12, 42-47
(au sens figuré), c'est le groupe dispensare, dispensator, dispensatio.
Cependant cc dernier mot est parfois remplacé par dispositio. En
syriaque, OLXOVOtLOç est régulièrement traduit par rabbaythâ et en
Luc 16, 2 oI:xo\lo(1.([.( est rendu par rabbaytuthâ; mais partout ailleurs
c'est mdabrânutâ, dérivé de la racine DER qui évoque l'idée de di-
rection.
Abordons maintenant l'emploi du vocabulaire économique chez
les anciens Pères.
OIKONOMIA 63
2 Pour les citations de saint Irénée, je donne les références aux chapitres de
l'édition de Massuet, reproduite dans P.G. 7 et, entre parenthèses, l'indication
du tome et de la page dans celle de Harvey. Sur l'emploi d'économie chez saint
Irénée, voir A. BENOîT, Saint Irénée, introduction à l'étude de sa théologie, Paris
1960, p. 219·227.
64 BERNARD BOTTE
.3 Sur l'économie dans la gnose valentinienne, voir le lexique donné par F.M.
SAGNARD, La gnose valentinienne, Paris 1947, p. 649.
OIKONOMIA 65
12 Cf. B. BOTIE, Le canon de la messe romaine, Louvain 1935, p.4O (dans l'appa-
rat) et 63.
OIKONOMIA 69
***
Bernard BOTTE
APERÇU DE LA THÉOLOGIE DES MYSTÈRES ET DE L'ANAMNÈSE
CHEZ LUTHER, CALVIN ET LEURS SUCCESSEURS IMMÉDIATS
REMARQUES PRÉLIMINAIRES
4 Le terme anamnesis et ses dérivés traduisent dans les LXX les termes de
la famille zkr.
74 JEAN DE VIlA TTEVILLE
***
1 lb., p. 13855.
Plus loin Luther relève que Saint Paul dans l Timothée 3,16 9
appelle le Christ luiMmême sacrement, puisque par {( sacrement et
mystère, Paul entend la sagesse mystérieuse de l'Esprit elleMmême,
comme il le dit dans 1 Corinthiens II. Christ est cette sagesse».
{( C'est pourquoi, ajoute Luther 10, le sacrement est un mystère et
une chose secrète qui est annoncée par des paroles mais qui est
saisie par la foi du cœur». {( Ainsi, ditMil encore 11, Christ et l'Eglise
sont un mystère ».
En résumé nous pouvons dire que pour Luther tout sacrement
est un mystère, mais que tout mystère n'est pas un sacrement. Pour
qu'un mystère soit un sacrement il faut: « l'institution et la pro-
messe divine qui font l'intégrité du sacrement» 12. Reprenant dans
son Grand Catéchisme 13, à propos du baptême, la formule de Saint
Augustin, Luther déclare: {( accedat verbwn ad eZementum et fit
sacramentum 14, c'est à dire: que la parole se joigne à l'élément ou
substance naturelle, et celà fait un sacrement, autrement dit, une
chose et un signe saints et divins ». Dans le même ouvrage au chaM
pitre consacré au sacrement de J'autel 15, il cite le même texte de
Saint Augustin en soulignant que c'est en effet: «la Parole qui fait
ce sacrement et qui le distingue, de telle sorte qu'il n'est pas simple M
ment et qu'il n'est pas appelé simplement du pain et du vin, mais
le corps et le sang du Christ ».
En bref, nous pouvons dire que pour Luther le mystère par
excellence c'est le Christ, puisqu'Il est l'accomplissement et la révé M
lation du grand dessein rédempteur de Dieu; nos sacrements sont
les signes qui par l'action de la Parole nous transmettent ce mystère,
ils sont les occasions de célébrer le mystère du Christ.
Ceci dit, voyons quelques textes qui précisent bien ce qu'est la
théologie eucharistique de Luther; nous les grouperons sous six
Il lb., p. 234.
11 lb., p. 234.
1) La Présence réelle
2) Efficacité de l'Eucharistie
Plus loin 21, s'élevant contre les erreurs de ses adversaires, Luther
ajoute:
3) Préparation à l'Eucharistie
Pour bénificier de ces fruits de la Cène il faut une préparation.
Comme le montre la suite du Grand Catéchisme 22, celui qui croit
aux paroles sacramentelles obtient ce qu'elles expriment: la rémission
des péchés qui est offerte et pronlise ne peut être reçue que par la
foi. Cette foi,
5) La théologie de l'anamnèse
Si Calvin s'est particulièrement intéressé aux liens unissant la
Cène et le Sacrifice de la Croix, au point de consacrer à ce sujet
une part importante de son catéchisme, il semble par contre que
Luther ne se soit guère préoccupé de la question. Non seulement
son Petit Catéchisme ne s'y arrête pas mais également ce livre du
maître que constitue le Grand Catéchisme. Cela mérite d'être relevé.
Luther aborde pourtant le sujet dans son traité De l'abus de la Messe:
« Le Christ s'est offert lui même une fois, il ne veut plus être
offert par aucun autre, il veut qu'on fasse mémoire de Son sacrifice.
Comment êtes vous donc assez téméraires pour faire de la mémoire
un sacrifice? ... Puisque vous faites ainsi de la mémoire de Son
sacrifice un sacrifice et que vous l'immolez encore une fois, pourquoi
ne faites vous donc pas de la mémoire de Sa naissance une autre
naissance, de sorte qu'Il naisse encore une fois? .. Renouvelez donc
toutes les œuvres du Christ en en faisant mémoire ».
6) Le Sacrifice eucharistique
La notion de sacrifice eucharistique est étroitement liée à celle
d'anamnèse puisqu'elle relève essentiellement des rapports unissant
la Cène et la Croix. On répète volontiers que les réformateurs ont
radicalement rejeté l'idée que l'Eucharistie pouvait être un rite sacri-
ficiel; malgré le peu de place que tient la notion d'anamnèse dans
la théologie de Luther, cette affirmation est pour le moins un peu
rapide en ce qui concerne notre auteur 26.
Dans les Articles de Smalkalde, par exemple, texte où résumant sa
pensée il parle abondamment de la messe 27, Luther attaque les hono-
raires de messe et les trafiques qu'elles entraînent; il dénonce dans
la messe une œuvre à prétention de mérité; il rejette son caractère
expiatoire; il s'élève contre la célébration de la messe à l'intention
de vivants ou de morts, contre les messes sans communion; mais,
comme dans ses Catéchismes, il ne traite ni de l'anamnèse, ni des
rapports unissant la Cène et le Sacrifice de la Croix.
Pour autant Luther ne dénie pas tout caractère sacrificiel à la
Sainte Cène. Voilà par exemple ce qu'il dit au cours de l'été 1520
dans son Sermon sur le Nouveau Testament, c'est-à-dire, sur la Sainte
Messe 28:
«Nous devons employer le mot sacrifice avec prudence et ne
pas nous imaginer que dans le sacrement nous donnons quelque
chose à Dieu, alors que c'est lui qui nous y donne toutes choses.
Qu'est-ce que nous devons sacrifier? nous-mêmes et tout ce que
nous avons ... en plus nous devons Lui offrir en sacrifice, louanges
et action de grâces ... Ces prières, louanges, actions de grâces, et ce
sacrifice par lequel nous nous sacrifions nous·mêmes, nous ne
devons pas les porter par nous·mêmes devant les yeux de Dieu, mais
les poser sur le Christ et les faire offrir par Lui ... ».
Et Luther poursuit:
« Ce n'est pas nous qui offrons le Christ, mais c'est le Christ
qui nous offre. Et dans ce sens on peut accepter, il est même utile
de nommer la messe un sacrifice, non à cause d'elle-même mais
parce que nous nous offrons en sacrifice avec Christ... Il nous porte
nous-mêmes, notre prière et notre louange devant Dieu... Il se
donne aussi Lui-même pour nous dans le Ciel. Si on appelait la
messe un sacrifice de cette manière là et si on l'entendait dans ce
sens, ce serait certainement bien; non pour dire que nous offrons
le sacrement, mais que, par notre louange, notre prière, notre sacri-
fice nous incitons et déterminons le Christ à se donner Lui-même
pour nous en sacrifice dans le cie] et nous avec Lui» 29.
propos du baptême: «sachant qu'on sc fie bien plus sûrement aux yeux qu'aux
oreilles l> (Cat. Myst. 1.1).
82 JEAN DE WATTEVILLE
«( Cette vision n'était pas une vaine figure, mais un signe certain
J2 IRC 4.14.2.
)J IRC 4.14.3.
J.I 1Re 4.14.4; In Ev. loh. Tr. 80,3; MIGNE, PL XXXV, col. 1840.
J~ Traité de la Sainte Cène (TSC), Ed. «Je sers », Paris 1934, p. 111.
~ Corn. 1 Cor 2,7; IRC 2.11.6.
J7IRC 1.7.5; cf. aussi 32.34.
lB Corn. à Mat 26,26.
CHEZ LUTHER, CALVIN ET LEURS SUCCESSEURS 83
1) La Présence réelle
3~ Catéchisme de Calvin {CC), Sect. 53. Question 353; cf. aussi TSC, p. 112,141;
IRC 4.17.10; Confession de La Rochelle, art. 37.
4°IRC 4.17.24; Corn. 1 Cor 11,24.
41 Corn. 1 Cor 11,24.
2) Efficacité de l'Eucharistie
La présence du Christ dans l'Eucharistie relève donc du miM
racle de la présence réelle. Comme l'a relevé J.MJ. von Allmen 48,
étant grandement efficace. Dans son Traité de la Sainte Cène il énuM
mère trois fruits principaux de la communion:
- Nous pouvons dire que Jésus nous y est offert afin que nous
le possédions et en Lui toute la plénitude des grâces que nous pOUM
vons désirer."
- La Cène nous retire d'ingratitude et ne permet pas que nous
oublions le bien que nous a fait le Seigneur Jésus en mourant pour
nous, mais nous induit à lui rendre action de grâces et quasi par
confession publique protester combien nous sommes attachés à lui.
- La troisième utilité git en ce que nous y avons une véhémente
exhortation à vivre saintement 49.
Calvin considère aussi la Sainte Cène comme un pharmacon:
{{ une médecine pour les pauvres malades 50; un remède que Dieu
nous a donné pour subvenir à notre faiblesse, fortifier notre foi,
TSC, p. 141.
46
CC S 53 Q 354; cf. aussi IRC 4.17.10.
47
~s J.-J. von ALLMEN: Essai sur le. !'epas du Seigneur, Neuchâtel 1966, p. 32.
4~ TSC, p. lBs.
50 La Forme des prière.s et chantz ecclésiastiques, 1542, p. 34 (FPC); cf. aussi
IRC 4.14.1.
CHEZ LUTHER, CALVIN ET LEURS SUCCESSEURS 85
C'est aussi un gage que nous donne le Christ pour nous certifier
« que la vertu de sa mort et passion nous est imputée à justice tout
ainsi que si nous l'avions souffert en nos propres personnes 52. Elle
nous rend certains et assurés de l'immortalité de notre chair laquelle
déjà vient à être vivifiée par la chair de Jésus Christ immortelle 53
qui par la Cène vit en nous» 54.
3) Préparation à l'Eucharistie
51 TSC, p. 1195.
52 FPC, p. 35.
"1Re, 4.17.32.
54 FPe, p. 11; CC S 53, Q 353. Calvin aime à parler de la vie chrétienne comme
d'une vie en Christ, à relever que Christ vit en nous par le Sacrement.
55 TSC, p. 116; cf. aussi CC S. 54.
5) La théologie de l'anamnèse
~ cc
S. 54.
59 TSC, p. 121.
60 FPC, p. 34.
61 IRC 4.18.12.
61 TSC, p. 108s.; cf. aussi IRC 4.17.4; 4.17.37; CC S. 52, Q. 349; Com. 1 Cor 11,24.
CHEZ LUTHER, CALVIN ET LEURS SUCCE?C_S"E::.,\j.:c'.cR:::S'-_ _ _--:8:..:7
«Sur la Croix Christ ... s'est donné à nous, mais cela ne suffit
pas si de notre part nous ne le recevons, pour sentir en nous-mêmes
le fruit et la vertu de sa mort» 64.
Et plus loin:
« L'alliance qui a une fois été ratifiée par l'immolation du corps:
et est encore aujourd'hui ratifiée en mangeant: asçavoir quand les
fidèles sont nourris de ce sacrifice» 67.
6) Le sacrifice eucharistique
~9 1Re 4.17.11; cf. aussi Conf. Belgica. art. 35; TST, p. 108s: ce. S. 52, O. 349.
'" CC S. 52, Q. 347.
71 ce S. 53, Q. 356.
13 1Re 4.18.3.
74 IRC 4.18.16.
CHEZ LUTHER, CALVIN ET LEURS SUCCESSEURS 89
368,1ss.
CHEZ LUTHER, CALVIN ET LEURS SUCCESSEURS 91
II. Les écrits de Calvin de leur côté nous montrent que la doc-
trine eucharistique de ce dernier est des plus nuancées, qu'elle a
connu également une évolution ou pour le moins des changements
de tonalité. Par exemple Calvin signa la Confession d'Augsbourg de
1530, mais il signa aussi en 1549 le Consensus Tigurinus 05 et, quoique
ces deux traités diffèrent sur plus d'un point, il écrivit pourtant en
1557: je ne répudie pas la Confession d'Augsbourg à laquelle j'ai
souscrit volontiers et de plein gré, comme S011 auteur l'a interprété 86.
réalise le sacrement mais le sacrement Qui engendre la foi: la foi est conçue et
confirmée par l'absolutiol1, ['audition de l'Evangile, l'usage des sacrements. Mé-
lanchton distingue deux espèces de sacrifice: le sacrifice propitiatoire apaisant
la colère de Dieu, offert seulement sur la croix, et le sacrifice eucharistique
pour rendre grâce à Dieu de ses bienfaits, offert par les fidèles (Apol. Conf. Aug.,
art. 12, 13, 24 ... ). De même Jacques Andreae et ses corédacteurs inscrivent dans la
Formule de Concorde (1580) que le corps et le sang de Jésus sont véritablement
et substantiellement présents, réeliement distribués et reçus avec le pain el le
vin . de bouche ... d'une façon surnaturelle ". même par ceux qui en sont
indignes.
as OC VIII, 689-748. Texte français de 1551: «Calvin homme d'Eglise », Ge-
nève 1936, p. 131-142 .
• OC XVI, 430.
92 JEAN DE WATTEVILLE
« Le corps du Christ nous est offert ... nous sommes faits parti-
cipants de la rédemption ... le bénéfice du sacrifice nous est ap-
pliqué» 91.
{{ la coupe est dédiée pour nous certifier que Notre Seigneur Jésus
Christ se donne à nous et que le sang qu'il a une fois épandu pour
notre rédemption est fait notre lavement et que nos macules en
sont purgées devant Dieu ... 92 cc sacrifice là par lequel nous sommes
reconciliés à Dieu, aujourd'hui nous est imputé et attribué comme
si nous l'avions offert nous mêmes en nos propres personnes» 93.
92 OC XLIX, 664.
9lOC XLIX, 665; cf. aussi FPC, OC VI, 199; CC S. 52, Q. 343.
"CC S. 53. Q. 353.
95 Q. 78.
96 Q. 76.
94 JEAN DE WATTEVILLE
La réédition porte:
OC VI.
rn
Par la suite, dans l'édition de 1743, ce passage sera encore plus affaibli
91
et portera: «Jésus nous y est représenté comme le véritable agneau qui a été
immolé pour nous &.
CHEZ LUTHER, CALVIN ET LEURS SUCCESSEURS 95
1) La présence réelle
«la sainte promesse ne regarde pas au pain mais aux fidèles ... ce
n'est ni le pain ni le vin qui se transforment, mais bien plutôt les
fidèles y sont unis, convertis et transformés en Christ par la sainte
manducation» 101.
Sainte Cène ... durant ['Assemblée de Poissy 1561, dans: Mémoires de Condé,
Londres et Paris 1743, t. II, p. 513s.
10l Jean DAILLÉ (1594-1670), Sermoll sur 1 Cor 10,16, dans: La Saine Doctrine
tirée des écrits des plus célèbres docteurs de l'Eglise Réfonnée, 2e ed., Neuchâ-
tel 1804, p. 387.
CHEZ LUTHER, CALVIN ET LEURS SUCCESSEURS 97
2) Efficacité de l'Eucharistie
Dans sa Communion Sainte loti Basnage a une expression qui
mériterait d'être plus connue et de retenir l'attention de tous les
communiants chaque fois qu'ils s'approchent du sacrement:
« Il ne faut pas nier l'efficace des sacrements parce que nous
ignorons la manière dont ils opèrent ».
Ces fruits, comme il l'explique dans son Histoire de l'Eglise, sont:
l'apaisement de Dieu, la rémission des péchés, les fruits du véritable
sacrifice qui est celui de la Croix 107,
à dire de dignité, nous renvoyons aux nombreuses citations que donne l'ouvrage
La Saine Ductrine, p. 3945S.
III Nous retrouvons la même expression sous la plume de Jean Daillé qui
dit dans sor. sermon sur 1 Cor 10,16, Saine Ductr., p. 387, que la Cène est 1!OIl
seulement la commémoration mais aussi la communication du sacrifice du Christ.
112 De l'institution, usage et doctrine du saint sacrement de l'Eucharistie, en
4) Le sacrifice eucharistique
Plusieurs des textes que nous venons de voir prouvent que nom-
breux sont les successeurs de Calvin qui ont considéré l'Eucharistie
comme un sacrifice. Nous avons cité, entre autre, un passage de
l'Institution de du Plessis-Mornay 118 qui déclare explicitement que
dans la Cène on offre la Passion du Christ. Plus loin dans le même
ouvrage, l'auteur résume sa pensée sur ce point en une phrase qu~il
convient de relever:
quelque sorte le même vocabulaire que le Synode du Latran de 1059 dans son
jugement de Bérenger: «scilicet panem et vinum, quae in altari ponuntur, post
consecrationcm non solum sacramcntum, sed etiam verum corpus et sanguinem
Domini nostri Jesu Christi esse, et sensualiter non solum sacramento, sed in
veritate manibus sacerdotum tractari, frangi et fidelium dentibus atteri». Cf.
HÉFÉLÉ, Hist. des Conciles, Paris 1871, VI, p. 384.
116 Comm. Ste, p. 318s.
de la Rocque, Basnage ... ont eu une vision bien plus exacte des liens
unissant la Cène et la Croix, que leurs prédécesseurs du temps de
la Réforme. Ces derniers, comme d'une manière général leurs con-
temporains, s'étaient achoppés à l'opposition trop célèbre {( repré-
sentation-réitération ~~. Par contre il senlble bien que pour les géné-
rations suivantes, celles d'un du Moulin, d'un Basnage, le problème
ne s'est plus posé ou du moins sans la nlême acuité. En effet les
nombreux textes que nous venons de voir laissent bien entendre que
leurs auteurs percevant toute la portée du terme anamnèse qu'em-
ploie le récit évangélique, ont saisi ce qu'est le mystère de ré-actua-
tion, réactualisation que comporte le mémorial eucharistique. Pour
eux comme pour les Pères de l'Eglise ancienne 129, l'Eucharistie est
incontestablement un mystère de l'action de Dieu, le lieu d'un méta-
bolisme miraculeux qui fait du sacrement un rite plein de puissance,
plein de la Puissance salvatrice du Christ. Pour eux par la commu-
nion le fidèle ne peut être que transformé, transfiguré même, et
de fait être transporté de reconnaissance, reconnaissance qu'il exprime
pas ses louanges, ses actions de grâces, en s'offrant lui-même en sa-
crifice vivant à son Seigneur .
•••
En résumé nous pouvons dire que non seulement les doctrines
luthériennes et calviniennes ont évolué au cours des ministères des
deux grands réformateurs, par suite surtout des combats qu'ils du-
rent mener, mais aussi que cette évolution s'est poursuivie après eux
et cela, en grande ligne, dans deux directions divergentes.
Nous pouvons en effet constater, en particulier dans le calvi-
nisme, qu'à côté du courant dit libéral d'influence zwinglienne, un
courant orthodoxe s'est développé avec vigueur affirmant:
129 Cette similitude n'est pas étrange. En effet, afin de prouver qu'ils étaient
Jean DE W ATTEVILLE
ÉCONOMIE DU SALUT ET SENS SPIRITUEL DE L'ÉCRITURE
Introduction
1 Pour cette définition très compréhensive du salut, on peut voir J.P. JOSSUA,
« L'enjeu de la recherche théologique actuelle sur le salut ll, dans Rev. Sc. ph. th.
54 (1970) 24-45, qui renvoie lui-même à Y. CONGAR, Vaste monde, ma paroisse,
1959, en particulier pp. 44-75.
106 ANDRÉ-MARIE DUBAR::LE=_ _ _ _ _ _ _ _ __
2 Cf. A.M. DUBARI.E, «Le sens spirituel de l'Ecriture », dans Rev. Sc. ph. th.
31 {1947) 41-72. Dans cet article j'ai précisé ce que peut être un usage légitime
du sens spirituel d'après les exemples que l'Ecriture elle-même nous en donne.
G. von RAD, Theologie des Alten Testaments, t. II, 1960, pp. 329-424, a montré
longuement la présence d'une typologie dans l'Ancien Testament lui-même, ce
qui justifie en principe la lecture typologique chrétienne, qui en sera faite ulté-
rieurement.
EN RAPPORT AVEC LA TYPOLOGIE BIBI .IOUE 107
J 1 Cor 10, 1-13. L'emploi du mot typos dans ce passage a donné occasion
4 Sur les rapports entre la foi au Dieu Sauveur et la foi au Dieu Créateur
dans l'Ancien Testament, voir E. BEAUC.<\MP, La Bible et le sens religieux de l'uni-
vers (Lectio divina, n. 25) 1959. Cette étude, qui montre comment la première
foi a donné naissance à la seconde, complète heureusement G. von RAo, « Das
theologische Problem des alttestamentlichen Schopfungsglaubens» (1936), repris
dans Gesammelte Studien zum A. T., 1958.
EN RAPPORT AVEC LA TYPOLOGIE BIBLIQUE 109
fête des Tentes (Zac 14, 16). Jean reprend littéralement ces divers
traits, en les insérant délicatement dans la trame formée par les
descriptions d'Isaïe et d'Ezéchiel. Il ne parle pas du pèlerinage de la
fête des Tentes, mais précéden1ment il a montré une grande foule
se tenant devant le trône de Dieu et devant l'Agneau: tous sont en
costume de fête et portent des palmes à la main, comme il était
prescrit pour la fête des Tentes (Lev 23, 40; Ap 7, 9).
Ainsi des réalités concrètes, la ville de Jérusalem, le temple, une
solennité liturgique ont servi aux prophètes de l'Ancien Testament
pour exprimer l'œuvre future de Dieu dans une restauration qui
comporterait encore bien des éléments terrestres. Et ces descriptions,
déjà épurées et spiritualisées, ont été synthétisées par l'Apocalypse
et portées à un plus haut degré de pureté spirituelle. Ce qui est lié
de trop près à une territoire géographique, à un rituel, à un calen-
drier disparaît finalement, pour laisser place à l'évocation d'une réa-
lité ineffable. Tout ce qui est transitoire, tout ce qui finit par la
mort, tout ce qui comporte la douleur s'efface devant la vie et l'allé-
gresse sans fin.
Dans cette béatitude les élus de Dieu « le servent et voient son
visage» CAp 22, 4) 6. Ce qui est promis ici, après plusieurs textes du
Nouveau Testament (Mat 5, 8; 18, la; 1 Cor 13, 12; 2 Cor 5, 7; Heb 12,
14; 1 ln 3, 2), c'est la réalisation avec une densité nouvelle de ce qui
s'ébauchait ou se souhaitait dans les célébrations liturgiques de
l'ancienne alliance. « Voir la face de Dieu », c'est se présenter de-
vant lui dans un sanctuaire, le rencontrer à l'occasion d'un pèlerinage
de fête, venir consulter un interprète de sa volonté 7, On vient voir
cette face avec des présents (Gen 33, la; Ex 23, 15; Sir 35, 4). Dans
les psaumes chercher la face de Dieu (Ps 24, 6; 27, 8; 105, 4) est le
devoir du fidèle; la voir est le bonheur des hommes pieux (Ps 11, 7;
16, 11; 17, 15; 42, 3; cf. Job 33,26; Is 38, 11).
CONCLUSION
André-Marie DUBARLE
L'ÉCONOMIE DU SALUT DANS LES TEXTES LITURGIQUES
DE LA SAINTE RENCONTRE
C'est surtout dans les textes liturgiques que l'on trouve en Orient
les exposés théologiques des grands problèmes qui se rapportent à
l'Economie du Salut.
L'Orient Chrétien a été de tous temps nourri de théologie litur~
gique qui formait le centre de sa vie spirituelle. C'est dans les
textes récités ou chantés à l'Eglise, vraie Bible auditive, tout comme
en Occident il y avait une Bible visuelle dans les scènes en pierre
des cathédrales, que se trouve le développement des problèmes soté-
riologiques. Cela s'explique en partie par le fait que le pourcentage
des illettrés était très élevé et que le peuple apprenait l'histoire
sainte par l'intermédiaire du canonarche: un chantre proposé à
cet effet se mettait au milieu de l'Eglise et annonçait phrase par
phrase le texte des chants du jour que le peuple répétait à sa suite.
Dans les textes des grandes fêtes telle que la Sainte Rencontre,
est donnée non seulement l'histoire de l'événement biblique, mais
également son implication dans la vie de l'Eglise et des croyants.
Dans l'exposé que nous présentons on verra que la fête du 2 Février
a pris en Occident une signification différente de celle qu'elle avait
primitivement et que l'Orient, lui, avait gardée.
Dans le cycle des 12 Grandes Fêtes de l'Eglise Orthodoxe qui
portent le nom générique de {( Les douze Fêtes », la {( Sainte Ren-
contre », célébrée le 2 Février tant en Occident qu'en Orient, est peut-
être celle qui montre avec le plus de relief et une netteté extraordi-
naire le passage entre l'Ancien et le Nouveau Testament dans l'Eco-
nomie du Salut.
C'est vraiment la festivité du changement, de la fin de l~ pré-
paration et du début de l'Accon1plissement, de l'achèvement de la
Loi et de l'Avènement de la Grâce.
C'est dans les textes liturgiques orthodoxes du 2 Février, de son
Octave et de la fête des Sts Siméon et Anne, que nous voyons s'épa-
118 PIERRE KOVALEVSKY
nouir ce que les prophtes et les justes ont attendu et ce qui a ouvert
la voie pour la vie nouvelle.
Notre exposé comporte une étude sur l'origine de la fête tant en
Orient qu'en Occident, son sens liturgique et sa place dans l'Eco-
nomie du Salut et, enfin, une présentation de textes liturgiques
occidentaux et orientaux qui expliquent et glorifient cette étape im-
portante dans l'édification du royaume de Dieu.
La date du 2 Février, tant en Occident qu'en Orient, fut choisie
parce qu'elle correspond au quarantième jour après la naissance du
Sauveur, si l'on place cette dernière le 25 Décembre. La loi mosaïque
enjoignait aux parents d'apporter leur premier-né au Temple le 40 e
jour après sa naissance, si c'était un garçon, et le 80" jour, sÏ c'était
une fille (Lévitique XII, 2 à 8).
L'origine de la fête ou plutôt sa célébration solennelle à Jéru-
salem remonte très probablement au 3e siècle. Dans le Pèlerinage
d'Ethérie qui date du 4 e siècle, « la Sainte Rencontre» est men-
tionnée comme une fête instituée déjà depuis longtemps.
Originaire de Jérusalem elle fut adoptée par les autres Eglises
d'Orient entre le 5" et le 6~ siècles. A Constantinople elle fut solen-
nellement célébrée depuis l'année 542. Une épidémie de peste d'une
très grande violence s'était déclarée dans la capitale en 541. Elle
emportait chaque jour des milliers de victimes et fut suivie d'une
tremblement de terre très fort qui coïncida avec la fête du 2 Février.
Un {( Te Deum» qui rassembla une grande foule fut célébré alors
pour implorer la fin des fléaux et ceux-ci cessèrent. L'Empereur
Justinien institua alors des offices d'action de grâce le 2 Fé~rier
avec des cérémonies sur les places publiques, ce qui contribua à
rehausser la solennité de la fête déjà existante.
En Occident on attribue ordinairement l'institution de la fête
au Pape Gélase (492-496) ou à saint Grégoire le Grand (590-604).
Le premier problème qui se pose à propos de la fête du 2
Février se rapporte à son appellation. Tandis qu'en Occident son nom
officiel est « la purification de la Bienheureuse Vierge Marie », l'Orient
l'a toujours nommée « la Rencontre », en grec « l'Hypapante », parce
que la Vierge Marie n'avait pas besoin d'ète purifiée à cause de sa
conception virginale et que la fête avait pour elle un tout autre
sens.
Quoique fêtée à Rome au vrr siècle presqu'autant que l'Assomp-
tion, elle- n'est plus maintenant qu'une fête de deuxième classe et
DANS LES TEXTES DE LA SAINTE RENCONTRE 119
en enseignant que Marie était sans péché quand elle enfanta Jésus,
l'Eglise réserve un jour pour rappeler un acte qui prouverait qu'elle
n'était pas pure, mais imparfaite, comme tous les descendants
d'Adam ».
On peut donc affirmer que la fête du 2 Février en Occident a
un double sens: celui de la purification et celui de la glorification
de la lumière que le Christ apporte dans le monde.
Le Missel explique ainsi les cérémonies de la fête:
«La procession de la Chandeleur rappelle le voyage de Marie
et de Joseph montant au Tcmple pour y présenter l'Angc de l'Alliance,
comme l'avait prédit Malachie. La cire des cierges signifie la chair
virginale du divin enfant ».
sait en affirmant que saint Luc n'était pas un élève direct du Seigneur
et~ par conséquent, n'était pas témoin de la résurrection du Christ.
Trois textes semblent prouver le contraire. Le premier est dans
le préambule de l'Evangile. Luc y parle d'un ({ récit des événements
tels que nous les ont transmis ceux qui en ont été dès l'origine les
témoins oculaires et sont devenus les ministres de la Parole », L'évan-
géliste souligne que ce sont ceux qui étaient dès le début avec Jésus,
ce qui ne veut nullement dire qu'il ne fut un disciple de la dernière
période.
Le deuxième texte est celui des disciples d'Emmaüs. La liturgie
orthodoxe est formelle et dit: «Toi, qui a accompagné Luc et Cléopas
à Emmaüs» (prière pour les voyageurs). Qui hormis Luc pouvait
faire le récit de cette rencontre? Ce n'est pas lui seul, qui, en par~
lant de soi~même, dit cc et un autre élève». Saint Jean le fait cou~
ramment. Saint Luc avec son soin de noter tous les noms, aurait
certainement nommé le second disciple, si ce n'était pas lui.
Le troisième texte est celui du retour d'Emmaüs. Seul Luc parle
de la présence avec les onze apôtres d'autres disciples dont lui et
Cléopas faisaient partie: cc Ils trouvèrent réunis les onze et leurs
compagnons» (et d'autres disciples, d'après une autre traduction).
Luc est à notre avis un témoin des derniers moments de la vie du
Seigneur et de sa résurrection, tout en n'étant pas de ceux qui
ont suivi le Maître dès le début de sa prédication.
On pourrait même suggérer que saint Paul l'a adjoint non seu~
lement comme compagnon de ses voyages missionnaires, mais aussi
comme témoin de la résurrection dont il faisait le centre et la
condition de la foi chrétienne.
Les trois lectures de l'Ancien Testament aux vêpres sont les sui-
vantes:
1) Ex. 13,1-16 et Lév. 12 qui parlent de la consécration à Dieu
des premiers nés.
2) Is. 6,1-12 où le prophète donne la vision de Dieu sur son
trône entouré des puissances célestes.
3) Is. 19,1-21: Dieu siégeant sur une nuée légère.
Dans la deuxième partie des vêpres, lors de la {( Litie» (proces-
sion vers les portes de l'église) on chante la stichère suivante
d'Anatole:
« Vieux par son âge, lui qui a donné jadis la Loi à Moïse sur
le Sinaï, l'enfant est visible et selon la Loi, comme auteur de la Loi,
observant la Loi est apporté au Temple et est remis au vieillard.
L'ayant accepté, Siméon le Juste en voyant l'accomplissement des
promesses s'écrie avec joie: Mes yeux ont vu le mystère caché
depuis des siècles et apparu à la fin de ces temps, lumière qui
détruit les ténèbres des peuples infidèles et gloire pour Israël le
nouvellement élu. libère Ton serviteur des liens de cette chair vers
la vie qui ne vieillit pas, qui n'a pas de fin ct est merveilleuse, en
accordant au monde une grande miséricorde ».
Pierre KOVALEVSKY
ANAMNÈSE, ACTUALISATION ET ANTICIPATION
COMME LIEUX DE LA CATHÉCHÈSE LITURGIQUE
CONNAISSANCE DE DIEU,
RÉVÉLATION ET ÉCONOMIE DU SALUT
même qu'il disait, à savoir les fidèles vivant dès maintenant, par
ce sang, la vic dans le Christ, dépendant réellement de cette Tête,
et étant revêtus de ce corps, il n'est donc pas hors de propos de
voir là l'Eglise signifiée par les divins mystères ».
Mais cela ne vaut-il pas la peine qu'on accepte les conventions tra-
ditionnelles pour autant qu'elles sont la condition d'un témoignage
eschatologique? En fait, les icônes sont particulièrement aptes à
réaliser la formule de la catéchèse liturgique: le ciel sur la terre.
Grande est la valeur catéchétique de l'icône: elle enseigne au peuple
tout entier, aux gens les moins instruits, grâce à l'intuition esthé-
tique ou, à son défaut, à la puissance de l'image, non seulement les
événements de l'Economie du Salut qu'elle représente, mais aussi leur
dimension et leur valeur à la fois actuelles et eschatologiques. L'icône
initie le peuple orthodoxe au sens transfigurant et eschatologique de
la foi chrétienne, de l'engagement personnel de chacun et de la desti-
née éternelle commune à tous.
Elie MÉLIA
LA THÉOLOGIE DES MYSTÈRES DE DOM CASEL
DANS LA TRADITION CATHOLIQUE
Il y a ensui te la trilogie:
•••
L'œuvre de Casel veut être comprise comme une contribution à
l'exégèse de ce qu'est la liturgie. Il en a donné cette définition:
« est une action sacrée et cultuelle, dans laquelle une œuvre rédemp-
trice du passé est rendue présente sous un rite déterminé; la
communauté cultuelle, en accomplissant ce rite sacré, entre en par-
ticipation du fait rédempteur évoqué et acquiert ainsi son propre
salut» 3.
enrichies, dès lors, par maintes recherches: voir, par exemple, celles
de Mme. Ch. Mohrmann) restent en marge et ne peuvent pas trouver
place dans ce bref exposé.
Quelle que soit la réponse donnée à ces problèmes, la perspective
théologico-liturgique telle que Casel l'a développée spécialement dans
ses réponses aux critiques à lui adressées, n'est pas touchée dans
l'essentiel.
Cette perspective peut être décrite de la manière suivante:
La liturgie, dans ses différentes manifestations - c'est-à-dire:
bain baptismal, onction, imposition des mains, proclamation de la
Parole de Dieu et, surtout, l'Eucharistie - , est une action sacrée.
Elle est, de manière toujours différente, action anamnétique, à sa-
voir action exercée en mémoire de la mort et de la résurrection du
Christ, ( anamnesis» d'une telle surabondance que l'œuvre du salut
commémorée, l'action salutaire ({ agie », est réactualisée, rendue pré-
sente, afin que nous puissions y participer. Tout cela doit être dit
d'une manière spéciale de l'Eucharistie, du sacrifice de la Messe.
Celui-ci est, dans son essence sacramentelle, la grande prière eucha-
ristique dite en mémoire - eis tèn anàmnesin - du mystère pascal
du Christ, de son passage de la mort à la vie, prononcée sur les
éléments d'un repas. En tant que mémorial réel, cette prière nous
rend présent l'acte sacrificiel unique du Christ, acte qui reste dans son
unicité historique, de sorte que tous ceux qui participent à cette
action ou célébration (c'est-à-dire la communauté agissante, l'ekkle-
s1a) participent aussi à l'action sacrificielle du Christ, se l'approprient
et passent ainsi, en et avec le Christ, au Père, en commémorant le
passé, mais également en l'accomplissant dans le présent, dans l'espé-
rance d'un dernier accomplissement eschatologique. Le sommet sacra-
mentel de cette action mémoriale se concrétise dans le repas qui a été
préparé au cours de la prière eucharistique; dans ce repas on mange
les aliments sacrificiels, le Corps et le Sang du Christ, vraie commu-
nion de repas par laquelle l'Eglise s'édifie toujours de nouveau.
Ce qu'on fête ainsi dans le mystère du culte, s'étend donc dans
le temps, dans les actions festives, dans la célébration du jour du
Seigneur, qui est, dans la semaine, le signe sacramentel global de la
présence de l'œuvre du salut du Christ: célébration hebdomadaire,
tout comme la célébration annuelle de Pâques en est le signe sacra-
mentel dans l'année. L'année liturgique tout entière, aussi bien dans
les célébrations des fêtes du Seigneur que dans les commémorations
des martyrs et des autres saints, ne se propose que de célébrer ou -
148 BURKHARD NEUNHEUSER
***
voir l'interpréter dans ce sens. C'est seulement dans les siècles après
Trente que cette théologie a pâli de plus en plus, tandis qu'on peut
parler de nos jours d'un «retour au mystère}) 6.
Or, contre la majorité de ces positions on a dressé des protesta-
tions, sans pourtant que Casel ait jamais admis d'être battu.
C'est contre l'interprétation de la doctrine paulinienne que R,
SCHNACKENBURG a écrit, fournissant une argumentation considérable,
son livre Das HeiZsgeschehen bei der Taufe nach dem AposteZ Pau-
lus 7, A son avis, l'interprétation casélienne est une exagération hyper-
réaliste (<< eine überspitzung }}) de la pensée de l'Apôtre; tout au plus,
on la trouverait dans les siècles postérieurs, par exemple chez les
Alexandrins. La réponse à Schnackenburg a été donnée par notre cher
confrère V. WARNACH dans deux travaux remarquables 8. Au cours de
leur dialogue les deux théologiens se sont quelque peu rapprochés,
sans aboutir néammoins à un accord complet. C'est pour cela qu'un
critique a pu très bien dire: l'insuccès de ce dialogue fait justement
soupçonner que la doctrine de l'Apôtre est encore très réservée; elle
ne se prononce pas encore avec une clarté parfaite, permettant ainsi
une évolution ultérieure dans l'une ou l'autre direction 9.
A notre avis, il nous semble que de toute cette controverse on
peut dégager la position suivante: les formulations de Casel, c'est
vrai, nous offrent une interprétation un peu accentuée (même exa-
gérée: «überspitzt }}) qui, con1me telle, n'est pas si clairement pro-
posée dans le texte; mais eIIe en donne une version qui, tout en dé-
passant la lettre et en l'explicitant ultérieurement, en rend parfai-
tement l'intention la plus intime.
Cela vaut, par exemple, contre la critique de la doctrine eucha-
ristique casélienne récemment avancée par N. NEUENZEIT: Das Rer-
renmaJû. Studien zur palllinische Eucharistieauffassung 10. Cet auteur
souligne fortement, et en polémique contre Casel, la relation avec
le judaïsme contemporain. Mais c'est précisément ici qu'il trouve
11 L.c., 144.
12 Cf. ({ Archiv. f. Lit. wiss. 8/2 (1964) 463.
J)
***
16 Cf. l.c. (à la note 14), p. 411. Cf., en outre, notre communication d'Oxford:
Mysteriellgegenwart. Das Anliegen Casels und die neueste Forschung, dans « Stu-
dia Patristica» 2 (1957) 54-63 (Texte und Untersuchungen, Band 64), spéciale-
ment 55-60.
17 Cf. B. POSCHMANN, «Mysteriengegenwart" im Licht des hl. Thomas, dans
«Theo!. Ouartalschr.» 116 (1935) 53-116; cf. aussi JLw 15 (1941) 221-231.
18 Le m)'stère liturgique d'après saint Léon le Grand (LOF 24), 1958.
19 Sacramentum et mysterium chez S. Léon le Grand, Lille 1959: cf. aussi
ma récension dans ALw 7/2 (1962) 559-564.
20 Cf. O. CASEL, Das Mysteriengeddchtnis der Messliturgie im Licht der Tradi-
tiOl1, dans lLw 6 (1926) 113-204: traduit en fr.: Faites ceci en mémoire de moi,
Lex Orandi 34, Paris 1962.
21 La liturgie, mystère chrétien, dans «La Maison-Dieu» 14 (1948) 30-64.
2.2 L.c., 43-47.
2.3 L.c., 47-57.
152 BURKHARD NEUNI-IEUSER
24 Cf. mon article: Mysterium Paschale. Das osterliche Mysterium in der Kon-
zilskonstitution « Uber die Liturgie », dans" Liturgie und Monchtum» 36 (1965)
12-33.
LA THÉOLOGIE DES MYSTÈRES DE DOM CASEL 153
25 Surtout dans: Die Eucharistie in der Darstellung des Joh. Eck, Münster
LW. 1950; Der Kampf wn die Messe in den ersten Jahren der Auseinandersetzung
mit Luther, Münster LW. 1952.
26 ISERLOH, Der Kampf ... , p. 59.
27 IDEM, Die Eucharistie ... , p. 345.
UI Cf. J. BETZ, s.v. Eucharistie, dans LThK.2 3 (1959) 1150 s.
154 BURKHARD NEUNHEUSER
211 Mysterium fidei, Paris 21924; 31931. L'œuvre, très remarquable et bien
acceptable dans plusieurs points, néanmoins est, dans sa thèse centrale, tout à
fait différente de celle de Case!.
30 Le sacrifice du Chef, Paris 1932.
31 A Key ta the Dùctrine of the Eucharist, London 1925.
32 Kathalische Dagmatik nach den Grundsiitzen des hl. Thomas, vol. III,
Münster i.W., 61932, § 36, p. 195-208.
33 Cf. B. NEUNHEUSER (éd.), Opfer Christi und Opfer der Kirche. Die Lehre
corn Messopler aIs Mysteriengediichtnis in der Theologie der Gegenwart, Düssel-
dorf 1960, passim.
34 Cf. Kathalische Dogmatik, citée à la note 32.
3.> La Messe. Présence du sacrifice de la croix, Paris 1957.
36 Heilsgegenwart. Das Heilswerk Christi Ulld die «virtus divina» in den
Sakramenten (LQF 33), Münster i.W. 1958.
LA THÉOLOGIE DES MYSTÈRES DE DOM CASEL 155
***
Burkhard NEUNHEUSER
L'ÉCONOMIE DU SALUT DANS L'OFFICE DIVIN BYZANTN
• ••
Commençons notre étude par le cycle diurne.
Ayant considéré comme début de l'économie divine du salut la
promesse messianique de Genèse 3,15, nous allons laisser de côté ce
qui dans ce cycle a trait à la création, commémorée par le chant ou
la lecture du Psaume 103 au début des vêpres. Nous nous arrêterons
en revanche sur ce qui est lié au mémorial de l'Incarnation.
Comme nous le voyons dans la Tradition apostolique, un diacre
apportait une lampe à la réunion cathédrale du soir. C'est après l'intro-
duction de cette lampe qui, croyons-nous, symbolisait le Christ-Lu-
mière du monde (Jean 8,12), que l'évêque commençait l'action de
grâce pour la révélation de la Lumière incorruptible, qui est évidem-
ment le Christ lui-même. Cette présentation de la lumière se fait
actuellement pendant la liturgie byzantine des Présanctifiés avec
l'exclamation du prêtre: {( La lumière du Christ illumine tous ». Par
suite de l'influence de la liturgie du Saint-Sépulcre conditionné par
158 VSÉVOLOD PALAClIKOVSKY
• **
***
échappe. Notons que de ce cycle il ne nous est resté que deux mé-
moires: celle d'Adam, ou plutôt de son exil, et celle de S. Joseph.
Si la liturgie byzantine a perdu cette série des saints de l'Ancien
Testament, elle a pourtant actuellement deux dimanches avant la
Nativité dédiés aux saints de l'Ancien Testament. Quant au Carême,
il s'est enrichi de leçons scripturaires de l'Ancien Testament: Isaïe à
Sexte, Genèse et Proverbes aux Vêpres. La lecture de Proverbes fai-
sant suite aux Présanctifiés à l'exclamation du prêtre: « La lumière
du Christ illumine tous », celle-ci peut servir d'introduction au chant
de la Sagesse, qui occupe les neuf premiers chapitres de Proverbes.
N'oublions pas que l'ordo studite avait la célébration des Présancti-
fiés à toutes les féries du Carême et non pas uniquement les mercredis
et les vendredis, comme cela a lieu dans l'ordo sabaïte_
La Semaine Sainte ces leçons sont remplacées par celles du pro-
phète Ezéchiel, de l'Exode et de Job. Cependant elles sont fort écour-
tées par suite du peu de jours qui leur sont attribués. En effet, les
leçons d'Ezéchiel s'arrêtent au Mercredi Saint et les autres au Ven-
dredi Saint.
Les leçons évangéliques des Matines et des Vêpres de la Semaine
Sainte nous permettent de suivre le Christ dans son cheminement
douloureux depuis son entrée à Jérusalem jusqu'à sa Passion, cela
surtout d'après Matthieu, qui est lu presque sans interruption du
chap_ 21,1 au chap. 27,4. En outre, aux Heures des trois premiers
jours on lit tout le tétraévangile, sauf l'évangile de Jean, qui n'est
lu que jusqu'au chap. 13,32. Aux Matines du Jeudi Saint la Sagesse-
Christ nous invite, par la bouche de S. Cosme ]'Agiopolite, au ban-
quet qu'elle a préparé. En effet son canon est inspiré par PrO'yerbes
8,22 - 9,11.
Enfin, une double lecture de la Passion - par péricopes aux
Matines anticipées du Vendredi Saint et par évangélistes aux Gran-
des Heures du même jour - nous permettent d'assister à la Passion
salutaire de notre Rédempteur, rendue visible par la sortie de la
Croix à la 15 ème antiphone. Nous trouvons déjà l'ébauche de ces deux
offices dans le Lectionnaire Arn1énien de 464468, dans cette veillée
processionnelle qui avait lieu à Jérusalem le Jeudi Saint au soir, et
dans un autre office le Vendredi Saint au matin. Leur développement
ultérieur est attesté par le Canonarion des Ibères du VIre siècle,
édité par Kékélidze. Enfin, dans l'acolouthia tôn pathôn de 1122 ils
acquièrent presque leurs formes actuelles. Le premier de ces offices,
qui a gardé encore sa forme processionnelle avec Iities aUX différen-
-----~.::::...':~.
DANS L'OFFICE DIVIN BYZANTIN 163
***
Toutes les autre fêtes ont, mais peut-être d'une façon moins
riche, les mêmes éléments, c'est-à-dire des leçons de l'Ancien Testa-
ment soit de nature prophétique, soit de nature typologique en tant
que préfigurations des événements ou des personnes qui sont fêtés.
Des leçons néo testamentaires - épître et évangile - les accom-
pagnent.
***
«La pierre ayant été scellée par les Juifs et les soldats gardant
ton corps immaculé, Tl.! es ressuscité le troisième jour, ô Sauveur,
en donnant la vie au monde, C'est pourquoi les puissances célestes
te crient à Toi qui donnes la vie: "Gloire à ta résurrection, ô Christ,
gloire à ta royauté, gloire à ta providence, seul Ami de l'homme!" ».
Vsévolod PALACHKOVSKY
LE TRIDUUM PASCAL DANS LE RITE ARMÉNIEN
ET LES HYMNES DE LA GRANDE SEMAINE
Le jeudi saint
Après un rite d'absolution des pénitents, puis la liturgie commé-
morative de la Cène du Seigneur et le lavement des pieds, le triduum
pascal proprement dit commence avec la vigile de la nuit du jeudi
au vendredi saint.
Ce long office, qui s'ouvre par une hymne rappelant la trahison
de Judas et l'arrestation du Christ 2, est caractérisé par la répétition,
six fois, d'un même ensemble de textes:
1. Ps. II, III, IV; antienne, Ps. II, 2.
Hymne de Nersès Snorhali: Aujourd'hui
Evangile, Jean XIII, 16 ·XIV, 1.
Prière avec agenouillement 4.
ILe Tonac'oy' édité à Jérusalem en 1915 a été pris pour base de cette étude;
les hymnes sont celles de l'Hymnaire édité à Venise en 1907.
2 Voir p. 193 ss.
5 Voir p. 199 s.
6 Voir p. 201 s.
7 Selon la LXX.
8 Voir p. 202 s.
9 Voir p. 204 s.
cet office du rite arménien apparaît donc clairement: c'est une Ion·
gue méditation, à travers les psaumes et les évangiles, sur les der·
niers instants de la vie du Seigneur, de la trahison de Judas au
procès devant le grand prêtre. Les hymnes de Nersès Snorhali, sur
lesquelles nous reviendrons, commentent chacun de ces événements.
Le vendredi saint
13 Cet office comprend, après les hymnes (Hare', Mecac'usG"e, Olonnea, Ter
Yerknic(, Mankunk', voir pp. 195·197), le chant du Ps. CVIII et la lecture de ln.
XVIII, 28 - XIX, 16 qui, à Jérusalem. au Ve siècle, constituaient le dernier temps
du très long ordo processionnel ùe la nuit du jeudi au vendredi (RENOUX, ibid.,
nO XLII. p. 140-143). A la fin de l'office du matin a lieu l'adoration de la croix, ainsi
que le prévoient l'Itinerarium Egeriae, c. XXXVIII (éd. FRANCESCHINI-WEBER, p. 80-
81) et les lectionnaires arméniens conservant les rites hagiopolites du début du
v e siècle (RENOUX, ibid., nO XLIIII, p. 142s.).
14 RENOUX, ibid., p. 142-155.
Hi On notera que la série des douze idiomèles des Heures du grand vendredi,
au rite byzantin, textes que la tradition syro-jacobite attribue à Cyrille de Jéru-
salem (A. BAUMSTARK, Liturgie comparée, 3e édition, Chèvetogne. 1935, p. 105) ne
se trouve ni dans le rite arménien, ni dans les typica hiérosolymitains. Les
hymnes des sections 5, 6, 7, 8 de l'office de la Crucifixion sont de Nersès Snor-
hali (l102-!173).
172 CHARLES RENOUX
18 Voir p. 207 S.
Voir p. 208.
17
18 Cette antienne accompagne le Ps. LXXXVII, et non le Ps. CI, dans les lec-
tionnaires arméniens de Jérusalem (RENOUX, ibid., nO XLVIII, p. 151), ct dans le
Tonac'oyc' des Pères Mékhitaristes de Venise et de Vienne.
19 Voir p. 209.
2Q Le Ps. CLXII n'est pas employé dans l'office hagiopolite.
21 Voir p. 210.
DANS LE TRIDUL'M PASCAL DU RITE ARMÉNIEN 173
Le samedi saint
La vigile de la nuit du vendredi au samedi saint et l'office du
matin retrouvent leur structure habituelle 2.2.
C'est dans la soirée du samedi, à la neuvième heure, prévoit le
typicon arménien, aux environs de trois heures de l'après-midi par
conséquent, qu'a été avancée la solennelle vigile pascale, le cragluc(i,
l'office des lumières. Les textes de cet office sont les mêmes que
ceux de la liturgie de Jérusalem au Ive et au Ve siècle:1.3, seules les
hymnes du canon de Pâques ayant été ajoutées 24.
Le dimanche de Pâques
Ps. LXIV.
Actes I, 1-8.
Alleluia, Ps. eXI.
Evangile, Marc XVI, 2-8.
Retour au sanctuaire:
Hymne: Christ, Dieu, toi qui as étendu sur la croix . .. 33,
Ps. IV, antienne, Ps. IV, 7.
Evangile, Jean XIX, 16-22.
A la messe:
Introït: Le Christ est ressuscité des morts; par la mort il a foulé
aux pieds la mort, et par la résurrection il nous a donné
, la vie. A lui, gloire à jamais.
Hymne: Le Christ est ressuscité des morts ... 84.
Psaumes l, II, III 35.
Actes l, 15-26.
Alleluia, Ps. CXLIX.
Evangile, Marc XVI, 2-8.
Le soir:
Ps. LXIV.
Actes l, 1-8.
Alleluia: Ressuscité, tu auras compassion de Sion; elle
est venue l'heure de sa compassion.
Evangile, Luc XXIV, 13·36.
Procession:
Hymne: Aujourd'hui, c'est notre Pâque se
Evangile, ln XX, 1-18.
Hymne: Toi qui t'es humilié ...
Psaume CXXIX.
Evangile, ln V, 24-30.
Hymne à la croix.
Psaume IV.
Evangile, ln XIX, 31-37.
Psaume de renvoi: Ps. CXLVII.
Evangile, ln XX, 19-25.
Tel est l'ensemble des rites du triduum pascal dans l'Eglise ar-
ménienne. De nombreuses transformations ont été effectuées dans ce
qui fut reçu de Jérusalem au début du V· siècle, mais sous ces
développements le rite arménien conserve encore vivantes les struc-
tures liturgiques avec lesquelles étaient célébrées, à l'époque de Cy·
rille de Jérusalem, la mort et la résurrection du Seigneur.
84 Voir p. 214.
35 Début d'une lecture continue du psautier.
36 Voir p. 215.
176 CHARLES RENOUX
37 Nous laissons de côté la sixième section de cet office ajoutée plus tard
(voir p. 170).
38 La description de cette vigile dans les lectionnaires arméniens amène à
penser qu'à Jérusalem, au V" siècle, le psautier était divisé en sections. Le gobala
dont parlent les Iectionnaires arméniens conservant les rites de la Ville Sainte
(RENaux, Le codex arménien Jérusalem 121. II Edition cûmparée, n. XXXIXter,
DANS LE TRIDUUM PASCAL DU RITE ARMÉNIEN 177
p. 133), est une unité psalmique qui comprend trois psaumes. Les lectionnaires
plus tardifs et le Tonac'oyc' de 1915 dont nous nous servons ici donnent les
premiers mots de chacun des trois psaumes.
39 La variante est citée dans la Bible de Zohrab.
40 PG 27, col. 649-1344.
41 Ibid., col. 653.
42 La deuxième partie de l'antienne utilisée pour ce psaume: «Ils ont placé
une parole injuste contre moi, Seig1leur, Seigneur ne m'abwldonne pas », est em-
pruntée au Ps. XXXVII, 22 (dans les LXX). La liturgie byzantine et la liturgie armé-
nienne ont conservé ce procédé de centonisation en usage à Jérusalem au
début du V" siècle.
43 PG 27, col. 809.
178 CHARLES RENOUX
44 PG 33, col. 785, traduction BOUVET, Saint Cyrille de Jérusalem (Les Ecrits
des Saints), Namur, 1962, p. 268.
45 Jean XVIII, 6.
46 PG 33, col. 793, traduction BOUVET, loc. cit., p. 274.
DANS LE TRIDUUM PASC:\L DU RITE ARMÉNIEN 179
L'office de la crucifixion
Ce que le rite arménien appelle l'office de la crucifixion est un
long office composé de psaumes, de lectures et de prières qui, à
Jérusalem au IV~ et au v~ siècle 48, avait lieu de la sixième à la neu-
vième heure, les trois heures durant lesquelles le Christ fut sur la
croix. Ce sont ces ultimes moments du Crucifié et les souffrances
qui les accompagnèrent que l'on a voulu faire revivre aux fidèles
en composant cet office. Le rite arménien l'a conservé tel quel, n'y
ajoutant que des hymnes; les liturgies byzantine et copte ont aussi
les lectures de cet office hiérosolymitain, mais les ont distribuées
entre les diverses Heures de la journée, fragmentant ainsi l'admi-
rable fresque que constitue l'ensemble de ces seize péricopes.
Comment l'Eglise de Jérusalem et l'Eglise arménienne présen-
tent-elles les souffrances du Christ à leurs fidèles? La division de
cet office en huit parties, composées chacune d'un psaume et de
deux ou trois lectures, permettait là aussi d'évoquer les divers
temps de la passion, dans un but et selon une méthode chers à
Cyrille de Jérusalem d'après sa treizième catéchèse: fortifier dans la
foi, en montrant que les prophéties de l'Ancienne Alliance concer-
nant la passion se réalisent dans la Nouvelle. Aussi à chaque péricope
de l'Ancien Testament fait suite dans cet office un texte de l'Apôtre 49.
nières sections de cet office ne paraissent pas s'enchaîner aux deux lectures
précédentes {voir plus haut p. 172). Dans les trois lectionnaires arméniens anciens
(RENOUX, ibid.), ces lectures ne sont pas comptées: vg. de la dixième lecture (Hébr.
II, 11-18) on passe à la onûème (Isaïe LXIII, 1-6), sans tenir compte de Matthieu
180 CHARLES RENOUX
XXVII, 1·56 qui fait suite à Hébreux. Il ne faudrait pas en conclure cependant
que ces lectures évangéliques ne faisaient pas partie de l'office primitivement:
l'ltinerarium Egeriae (c. XXXVII, 5--6, éd. FRANCESCHINI-WEBER, p. 81) y fait allusion
de façon explicite.
50 Cyrille de Jérusalem cite ce texte dans sa treizième catéchèse, (PG 33,
col. 788), afin de montrer la réalisation, en Judas, de ce qu'avait dit le prophète,
51 Pour Cyrille aussi, la fierté des fiertés, c'est la croix (PG 33, col. 772).
52 Isaïe III, 9-15.
DANS LE TRIDUUM PASCAL DU RITE ARMÉNIEN 181
ou des années, durant lesquelles fut prêché le corpus cyriIlien. Les trois vieux
lectionnaires arméniens, témoins de la liturgie de Jérusalem, ne prévoient pas
la péricope de 4 Rois pour le dimanche des Palmes. La présence, ce jour-là, du
texte d'Ephésiens l, 3-10, n'aUlorise pas à dire que Cyrille a prêché sur l'Ascen-
sion à partir de ce texte.
113 Dans sa cinquième Homélie de l'Ascensiûn, saint Jean Chrysostome op-
pose l'ascension du Christ à celle d'Elie (PG 50, col. 450).
64 RENOUX, Le codex arménien Jérusalem 121. II, nos 44-46, p. 175-177.
65 Cette péricopc d'Actes a été ramenéc à Actes l, 1-8, déjà dans la version
géorgienne du lectionnaire hagiopolite (M. TARCHNISVILI, Le grand lectionnaire
de l'Eglise de Jérusalem (VU_VIlle s.), CSCO, 189, n. 748, p. 115). Le typicon armé-
nien actuel prévoit aussi la lecture d'Actes l, 1-8 seulement. L'année liturgique se
développant et se précisant, on nc pouvait plus garder ce récit de l'Ascension à
Pâques.
61l RENOUX, L'Hymne de l'Office nocturne du rite arménien durant la grande
semaine, dans Bulletin de Littérature Ecclésiastique, 1968, p. 115-126.
DANS LE TRIDUUM PASCAL DU RITE ARMÉNIE:-.l 185
--'---=-=
tradition constamment reprise, les textes de la grande semaine au-
raient été composés au V'" siècle par le catholicos Sahak le Grand
(t 438) ". Au XII" siècle, le catholicos Nersès ;;norhali (1102-1173) y
ajouta de nombreuses hymnes de sa composition, complétant ainsi
un hymnaire antérieur beaucoup plus simple 68.
Qu'ils soient de Sahak le Grand ou de Nersès ;;norhaIi, ces
textes chantés au cours de la liturgie s'accordent aux thèmes et
aux faits rappelés dans les autres textes de l'office. Ainsi le jeudi
saint, l'institution de l'eucharistie et le lavement des pieds sont
commentés dans chacune des pièces du canon, tant les plus ancien-
nes que les plus récentes 69. Le vendredi saint au contraire, alors que
les hymnes plus anciennes (Harc l , Olormea, Tër Yerknic', Mankunk',
Hambarji), envisagent l'enselnble des événements du vendredi saint
(arrestation-jugement-insuItes-crucifixion, etc ... ,) 70, Nersès Snorhali,
dans les nombreuses hymnes qu'il a composées pour ce jour, a souci
de rappeler les seuls épisodes qui correspondent à l'heure de l'of-
fice ou au texte biblique qui vient d'être lu ou que l'on va lire 71.
Le samedi saint, tous les textes évoquent la demande faite à Pilate
par Joseph d'Arimathie et l'ensevelissement dans le tombeau creusé
dans le roc. Le jour de Pâques, les hymnes sont aussi discrètes que
les évangiles sur le fait de la résurrection; ce sont ses effets pour
l'humanité qu'elles chantent: naissance de l'Eglise, illumination
baptismale, délivrance des captifs, rejet des ténèbres du péché 72.
Prolongeant les thèmes évoqués dans les lectures bibliques, ces
textes hymnodiques sont composés de façon très simple. Fréquem-
ment, surtout dans les textes anciens, ce sont de simples gloses,
sans éclat, des versets bibliques 73; les hymnes composées par Nersès
SnorhaIi possèdent au contraire une note lyrique plus prononcée 74.
Toi qui par (ta) parole as dit d'exister à toute terre, sur la
terre les créatures (te) virent traduit au tribunal.
Toi devant qui tremblent les anges du ciel, aujourd'hui tu es
venu volontairement à la croix, tu as été percé par la lance.
***
Pour compléter notre étude, nous allons donner ici tout de suite,
et en entier, les textes qui ont fait l'objet de notre exposé.
TI Par exemple, le Barc' du vendredi saint (p. 195 s.), le Hard du samedi saint
(p. 212).
CANON DU GRAND JEUDI'
ORNHUT(IWN
1 Le canon est attribué au catholicos Sahak, mais l'Orhnut'iwn est une com-
position du catholicos Nersès Snorhali.
, Ps. CIl!, 2.
3 C'est le mot que supplée le Pète AVEDICHIAN, Bac'atrut'iwn Sarakanoc',
Venise, 1814, p. 217. Il semble que cc soit tout à fait légitime ici, l'hymne ayant
été composée par Nersès Snorhali qui emploie fréquemment dans ce sens le
mot bnut'iwn.
4 Jean XV, 3.
5 Jean XIV, 23.
6 Le XXII. 19.20.
7 Romains V, 12 5S.
190 CHARLES RENOUX
8 Ps. LXXIX, 2.
9 Marc XIV, 15; Luc XXII, 12.
10 Les sacrifices de la Loi ancienne.
11 IPierre I, 19.
12 ROI11.ains VIII, 3.
13 Philippiens II, 7.
14 Le rite du lavement des pieds, rite d'hospitalité dans la Loi ancienne. Mais
on peut aussi comprendre que le Christ est le vrai sacrifice et qu'il y prépare
ses disciples en les purifiant.
DANS LE TRIDUU1\:1 PASCAL DU RITE ARMÉNIEN 191
RARe r
MECAC'USC'E 19
15 Jean l, 18.
16 Litt.: les chœurs lumineux.
17 Psaume CVJII, 18.
18 Hébreux J, 3; Colossiens l, 15; Sagesse VII, 26.
19 Ce mecac'usc'e et ceux du vendredi saint et du samedi saint ne font pas
allusion au mystère du jour. Ils sont absents du canon de nombreux manuscrits
anciens (vg. Paris, Bibliothèque Nationale, nos 65 à 78 et 82 à 85) et paraissent
avoir été composés pour d'autres circonstances.
20 Litt.: les chœurs des anges spirituels.
192 CHARLES RENOUX
OLORMEA
TER YERKNIC'
21 Tite II.l1.
22 Ps. CIII, 2.
23 Genèse III, 15.
24 Genèse III, 21.
25 Jean XIII, 15.
25bis Apocalypse XIX, 4.
DANS LE TRIDUUM PASCAL DU RITE ARMÉNIEN 193
ton corps et ton sang immaculés. Béni soit celui est venu pour le
salut du genre humain.
MANKUNK'
P HYMNE 31
Aujourd'hui, à la fin du banquet divin de ta nouvelle (et) véri·
table alliance , Judas se sépara du petit troupeau 32 dans la chambre
haute du mystère, d'où toi aussi, Agneau de Dieu sa, tu partis volon-
tairement à la mort de la croix afin d'enlever les péchés du monde.
C'est pourquoi, ô Christ, aie pitié de nous, en raison de tes souf-
frances volontaires.
Aujourd'hui, Verbe (de Dieu), toi qui es constamment loué et
adoré par les armées fulgurantes des cieux, en (ton) corps tu adres-
sais au Père pour moi des supplications 34 que tu recevais avec Lui.
Cependant, connaissant volontairement la peur, tu étais réconforté
par les anges 35, toi qui réconfortes les créatures du ciel et de la
26 Le lavement des pieds est présenté ici comme une préfiguration du rite du
baptême (voir DTC, Lavement des pieds, t. 9/1, col. 16-36).
27 Jean XIII, 14-17.
28 Jean XIII, 21.
%9 Jean XIII, 24.
30 Matthieu XXVI, 22; Marc XIV, 19.
31 De Nersès SnorhaIi.
32 Lu.c XII, 32.
sa Jean l, 29.
34 Hébreux V, 7.
35 Luc XXII, 43.
194 CHARLES RENQUX
scribes et les pharisiens t'ont assiégé 47, des chiens nombreux, sol-
dats de Pilate et d'Hérode, t'ont environné 48. C'est pourquoi nous
fadorons dans ton indicible humilité.
ORHNUT'IWN
Egaré par son avarice, Judas livra aux juifs son maître incom-
parable pour trente pièces d'argent 49.
Celui auquel je donnerai un baiser 50, dit-il, saisissez-le. 0 baiser
de trahison, signal et cause de mort!
Il s'est dévêtu lui-même du divin Esprit Saint et il a revêtu Sa-
tan, comme d'un vêtement il s'en est habillé.
La nuit où notre Sauveur se livra 51 à la mort de la croix 52, il
monta à la montagne des Oliviers 53; dans sa prière il disait ces
paroles: « Père, éloigne de moi cette coupe» 54.
Tandis que le disciple impie renonçait à la tendresse de son
amour, se hâtait vers les prêtres et (leur) disait: «Que voulez-vous
me donner pour que je livre le Maître? » 55,
Les Juifs assemblés pesèrent une grande quantité d'argent. L'ayant
pris, ils le menèrent chez Pilate 50 à qui ils dirent: «En croix, cru-
cifie-le, car il est blasphémateur de la Loi}) 57.
RARe'
Toi qui, par (ta) parole, as dit d'exister à toute terre 59, sur la
terre les créatures (te) virent traduit au tribunal. Nous te bénissons.
Toi devant qui tremblent les anges 60 du ciel, aujourd'hui tu es
venu volontairement à la croix, tu as été percé par la lance 61, Nous te
bénissons.
Bénissez le Seigneur. Exaltez-le éternellement.
De là jaillit une source de vie 62, elle lava du péché l'univers.
Exaltez-le éternellement.
MECAC'USC'E 63
OLORMEA
TER YERKNIC'
59 Psaume XXXII, 9.
60 Litt.: les veilleurs.
61 Jean XIX, 34.
62 Jean VII, 38.
as Voir plus haut, 'p. 191, note 19.
Golo Luc l, 48.
65lsaïe IX, 1; Luc l, 79.
ee Colossiens II, 14.
DANS LE TRIDUUM PASCAL DU RITE ARMÉNIEN 197
MANKUNK'
HAMBARJI
74 Ces hymnes tirées d'un long poème de Nersès Snorhali, le Yisus Ordi
(Jésus Fils .. .), abrégé de l'histoire de l'Ancien et du Nouveau Testament, sont
chantées avant chacun des évangiles de la nuit du jeudi au vendredi saint (voir
p. 169 s.). Les vers de ces strophes sont octosyllabiques. Nous n'indiquons pas les
références bibliques de ces textes qui renvoyent constamment au Nouveau Testa-
ment.
DANS LE TRIDUUM PASCAL DU RITE ARMÉNIEN
~~~~-~-"'--'-
199
'15 Nersès Snorhali qui emploie ici le mot bnut'iwn (= nature) au sens de
nature concrète, existant dans le Christ, adopte la terminologie de Chalcédoine.
202 CHARLES RENOUX
83 L'apocryphe signalé plus haut (note 81) fait mourir Adam un venl
à la troisième heure.
84 Allusions à l'apocryphe annénien Histoire de la création et de la
d'Adam {YOVSEP'EANC' op. cit., p. 307-311).
Ils Allusion à l'Evangile de Nicodème.
DANS LE TRIDUUM PASCAL DU RITE ARMÉNIEN 207
86 De nouveau, Nersès Snorhali fait appel ici au terme bnut'iwn, pour désigner
la nature humaine.
B7 Ces hymnes pour l'office du soir (voir p. 208) ont été composées par Ner-
sès Snorhali.
208 CHARLES RENOUX
Au larron bienheureux
Tu as ouvert la porte du jardin de l'Eden;
Selon la croyance de son cœur,
Tu as accompli sa demande.
Donne-moi aussi, comme à lui, Seigneur,
D'entendre la même réponse:
« Aujourd'hui, tu seras avec moi au paradis,
Dans ta première patrie».
En sources pures,
Après la mort qui (nous) donna l'immortalité,
Un double ruisseau jaillit de Toi
Pour régénérer celle qui naquit de la côte.
Ouvre ma bouche, pour que je boive
Ton sang qui donne la vie;
lave-moi de nouveau dans la piscine,
Sinon dans celle de la grâce, du moins dans celle des larmes 811,
ORHNUT'rWN 89
HARC'
MECAc'uSC'E 104
OLORMEA
TER YERKNIC'
MANKUNK'
piège de l'arbre nous avions goûté la mort, mais par l'arbre de vie 122
nOUs avons tous été rendus à la vie. Gloire à ta résurrection, Seigneur.
Avec les myrophores nous venons de bonne heure près de toi,
ô Christ, éternellement vivant; reçois nos louanges à la place des
parfums. Au lieu de l'ange, saint messager de la bonne nouvelle,
que ta compassion vienne à notre rencontre en attendant de te con-
naître, afin de consoler et d'illuminer nus âmes. Avec la bonne nou-
velle qu'il leur annonça, proclamons aussi tes merveilles sans égales,
Roi tout-puissant et immortel, toi qui es ressuscité des morts.
Toi qui dans ton être ineffable es l'égal en gloire du Père, tu
as accepté pour nous de souffrir dans ton corps; en une louange
éternelle, Seigneur, tu es béni par les anges. Toi qui es consubstan-
tiel au Père et au Saint-Esprit, tu as été crucifié et enseveli pour
nous selon la volonté du Père; en une louange éternelle, Seigneur,
tu es béni par les anges. Toi qui reviendras dans la gloire du Père,
pour faire à l'univers le don divin de la résurrection, par toutes les
créatures, Seigneur, tu es béni éternellement.
Gloire au Père et au Fils et au Saint-Esprit.
Celui qui est mort pour avoir goûté l'arbre du péché, tu l'as
ressuscité par l'arbre de vie; protège par lui notre vie
Maintenant et toujours et dans les siècles des siècles.
Aujourd'hui, appelés dans le Christ nouvel Israël, délivrés par
le sang de l'Agneau 123 de Dieu, dansons avec les anges en disant:
«Le Christ est ressuscité des morts».
RARe'
MECAC'USC'E
OLORMEA
TER YERKNIC'
CHARLES RENOUX
ns, 1966.
220 WILLY RORDORF
4 Dans un sens affirmatif: F.-J. DOLGER, Sol salutis, Münster, 2" éd. 1925:
w. RORDORF, Der Sonntag, Zürich 1962, p. 256s.; 284s. {arrière-fond juif). Par con·
tre, E. PETERSON, «Die geschichtliche Bcdeutung der jüdischen Gebetsrichtung»,
in: FrüTlkirche, Judentum und Gnosis, RomjFreiburg/Wien 1959, p. 1-14, estime
qu'il s'agit d'une innovation par opposition aux Juifs.
~ La citation de Matth. 24,27 (texte qui est la base néotestamentaire de cette
attente) se trouve déjà dans le texte éthiopien de l'Apocalypse de Pierre, chap. 1
(assez semblable d'ailleurs à l'Epistula a]XJstalarum 16). Il y a la même perspec-
tive eschatologique chez CYPRIEN, De oratiane dam. 35.
LITURGIE ET ESCHATOLOGIE 221
6 On le faisait, bien entendu, aussi dans des milieux sectaires: chez les mon-
tanistes, mais aussi dans d'autres groupuscules (cf. HIPPOLYTE, Comm. in Dan..
IV,18-19).
7 On pourrait mentionner également PIERRE d'ALEXANDRIE, ean. 15; AUGUSTIN,
Epistula 55,28; ISIDORE DE SÉVILLE, De ecc1. off. 1,24, et d'autres; voir la documen-
tation dans DOLGER, op. cil. (note 4), p. 198-220.
S CYRILI.E DE JÉRUSALEM, Cal. mysl. 1,9: AMBROISE, Myst. 7
222 WILLY RORDORF
dentum und GrlOsis, 1959, p. 15-35; E. DINKLER, Das Apsismosaik von S. Apollinare
in Classe, 1964, p. 77ss.: C. VOGEL, «La croix eschatologique ll, in: Noël, Epipha-
nie, retour du Christ (Lex orandi 40), Paris 1967, p. 85-108.
12 TERTULLIE!\, Ad nationes 1,13; Apùlageticum 16,9s. Ce n'est pas un hasard
que Tertullien parle de la prière vers l'est dans la suite immédiate de ces deu."{
textes.
Il Cf. les textes cités plus haut, en note 5, et TERTULLIEN, De aratiane 29;
1941. . Le plus que l'on puisse dire c'est que l'ère de la « paix de l'Eglise» a
amené la tentation pour l'Eglise de s'installer dans ce monde, tentation à
laqueUe elle a pourtant résisté, en règle générale.
I! Cf. son ouvrage cité en note 3. en particulier p. 167ss.
({ De même que ce pain rompu, d'abord semé sur les collines, une
fois recueilli est devenu un, qu'ainsi ton Eglise soit rassemblée des
extrémités de la terre dans ton Royaume» (9,4).
«Souviens-toi, Seigneur, de ton Eglise, pour la délivrer de tout mal
et la parfaire dans ton amour. Rassemble-la des quatre vents, cette Eglise
sanctifiée 21, dans ton Royaume que tu lui as préparé ~~ (l0,5).
« Et de même que ce pain, d'abord semé sur les collines, une fois
recueilli est devenu un, ainsi rassemble également ta sainte Eglise de
chaque peuple, de chaque pays, de chaque ville, village et maison, et
fais d'elle une seule Eglise vivante et catholique» 24.
Cf. pour les autres exemples, l'ouvrage de L. CLERICI, cité en note 20, p. l04ss.
21
ceux que tu m'as donnés, je veux que là où je suis, ils soient aussi
avec moi, pour qu'ils contemplent la gloire que tu m'as donnée ... » 26.
La prière de SérapÏon, loin d'abandonner la perspective escha-
tologique, l'inscrit donc simplement dans une nouvelle situation de
l'Eglise, dans un nouveau kairos de l'histoire du salut, de cette histoire
qui ne s'arrête pas, mais qui, d'une manière dynamique, sous l'action
du S. Esprit, va toujours du {( déjà» de la grâce vers le ({ pas en-
core» de sa plénitude. Nous pourrions mentionner d'autres exemples
de l'Eglise ancienne qui témoignent de cette optique 27. Mais venons-
en directement à l'application concrète, dans notre situation actuelle,
de ce que nous avons constaté.
Ne vivons-nous pas dans un nouveau kairos de l'histoire du sa-
lut? Dans toutes les Eglises, il y a un tel mouvement œcuménique,
un tel désir de l'unité de tous les chrétiens, qu'il est impossible de
ne pas y reconnaître l'action du S. Esprit qui nous pousse, tous
ensemble, à retrouver enfin l'intégrité du Corps unique du Christ.
Or, ce mouvement, ce désir devraient se refléter dans toutes nos
liturgies. Dans nos prières actuelles pour l'unité de l'Eglise, nous
devons, certes, rendre grâce pour ce qui est « déjà}) une réalité en
Christ, mais ce ({ déjà)) devrait augmenter notre désir de voir s'ac-
complir ce qui n'est « pas encore ») une réalité: à savoir l'unité complè-
te, dans la foi et dans la charité, de tous ceux qui invoquent le
même Seigneur.
On me dira peut-être qu'on a toujours prié pour l'Eglise, dans
nos liturgies. Oui, certainement. Mais on le faisait dans une perspec-
tive rétrécie: on priait surtout pour sa propre Eglise et ses membres.
Et si on priait pour l'unité de l'Eglise universelle, il s'agissait là d'une
prière plutôt marginale 28. Aujourd'hui, on devrait prendre conscience
Willy RORDORF
L'HISTOIRE DU SALUT DANS LA THÉOLOGIE
ET LA LITURGIE DE LUTHER
2 Deutsche Messe, édition de Weimar, Tome XIX, pp. 44 ss; en traduction fran-
çaise, dans les Oeuvres de Martin Luther, édition Labor et Fides, Genève, tome
VI, pp. 205 ss. Nous citons cette traduction.
DANS LA THÉOLOGIE ET LA LrrURGIE DE LUTHER 233
salut, voir Gustav WETH, Die Heilsgeschichte. Ihr universeller und ihr indivi-
dueller Sinn Ù1 der offenbarungsgeschichtlichen Theologie des 19. lahrhunderts.
Kaiser, Munich 1931.
236 THÉOBALD SÜSS
Deux ans plus tard, il dira: Les exégèses de cet évangile par
les Pères d'Eglise,
« je ne les vante ni ne les repousse. Néanmoins, que quelques-uns
murmurent, cela n'a pas lieu dans le royaume des cieux. Quant à
moi, je resterai dans le sens simple. Cette parabole a été composée
de telle manière par le Seigneur qu'H n'est pas nécessaire de l'in-
terpréter dans un sens spirituel; mais, pour le dire d'un mot: quoi
que Dieu fasse aux hommes, c'est juste; mais dans les yeux des
hommes, cela ne paraît pas juste, mais contraire à la justice ».
texte. Cette parabole, dit-il, est une parabole du royaume des cieux;
elle concerne donc ce royaume tel qu'il a été révélé ouvertement par
Jésus-Christ, à partir du moment où commence le ministère public
de Jésus. Elle concerne le christianisme, depuis Jésus et les apôtres
jusqu'à la fin du monde; mais elle ne dit rien sur les époques anté-
rieures de l'histoire du salut. Cependant, parfois, Luther la fait por-
ter également sur l'histoire juive, depuis Abraham ou Moïse. Elle
ne se rapporte donc pas à l'histoire du salut d'une manière absolue,
en ce sens que tout ce qui est histoire du salut devrait aussi être
objet de ce texte évangélique. Et pourtant, pour Luther, elle con·
cerne l'histoire du salut, à savoir la partie principale de celle-ci,
Jésus·Christ et l'Eglise. Ce qui importe à Luther, ce n'est donc pas
le fait de l'histoire du salut, mais sa nature, son essence, son con~
tenu. Ce n'est pas son « que }), mais son {( quoi ». L'histoire du salut,
pour Luther, c'est Jésus·Christ et ce qu'est Jésus-Christ. C'est la
justification par la foi. C'est la parole de Dieu comme puissance qui
tue et ressuscite, qui damne et justifie, qui abaisse et exalte, qui
plonge dans le désespoir et remplit d'une consolation éternelle. Dans
l'histoire du salut ainsi entendue, la réalité des faits de cette histoire
n'est pas indifférente; c'en est un aspect indispensable et inaliénable.
Mais les faits comme tels ne sont rien sans la parole de Dieu qui
met en lumière leur signification éternelle.
Dans son Sermon de la méditation de la sainte passion du Christ,
de 1519, Luther écrit:
Théobald Süss
L'ESCHATOLOGIE DANS L'OFFICE COMMUN MARONITE
I. PRÉLIMINAIRES
Avant de passer en revue les différentes étapes de l'eschatologie
telles qu'elles se dégagent de l'office, nous voudrions attirer l'atten-
tion du lecteur sur le fait suivant:
La tension vers le Royaun1e céleste et le désir impatient de son
avènement sont deux notes dominantes de l'office commun maro-
nite. La simple lecture des textes nous laisse deviner combien l'assem-
blée liturgique maronite se sent fortement orientée vers la Jérusalem
céleste et attirée par la communauté rassemblée autour de l'Agneau
dans une éternelle liturgie de glorification. Cette conscience escha-
tologique de l'assemblée liturgique s'exprime clairement dans les
nombreux textes qui mettent en relation les deux communautés
céleste et terrestre:
Une fois paru ({ un char de feu, au mont jébuséen qui est J éru-
salem », le Roi céleste enverra ses forces rassembler, en un clin d'œil,
de tous les coins du monde, la poussière d'Adam; il viendra pour le
jugement, l'épreuve, le compte et la punition 11.
a) Un dimanche
vie, par l'Esprit qui habite en nous (Rm 8, 11); nous serons rendus
conformes au corps de gloire du Christ (Ph 3, 21).
L'évènement de la résurrection de Jésus signifie donc pour le
monde entier un tournant dans le temps, embryon de quelque chose
d'entièrement nouve:lU et définitif. La situation fondamentale du mon-
de a changé, la vie humaine apparaît comme métamorphosée: la ré-
surrection de Jésus est le commencement de la résurrection générale
des morts; elle est le début du règne de la vie. « De même, dit Saint
Paul, que tous meurent en Adam, tous aussi revivront dans le Christ»
(1 Cor 15, 22). Le Christ est le "prince de la vie (Act 3, 15), " le Pre-
mier-Né d'entre les Inorts}} (Coll, 12). Jésus est mort pour tous et à
la place de tous; sa résurrection aussi a eu lieu pour tous et anti-
cipe celle de tous.
Dans cette strophe, le dimanche de la résurrection du Christ est
précurseur du dimanche eschatologique, jour de notre propre résur-
rection. De là naît, en plus de la connexion intime entre les deux
dimanches, une véritable tension vers le second.
D'autres textes font allusion au dimanche eschatologique:
b) Le matin
(première strophe):
Lors de ton Grand Matin, quand tu viendras, Seigneur, viendront
avec toi les Vigilants du ciel et seront séparés les justes des pécheurs;
puissions~nous alors voir la tendresse?
~- -
(deuxième strophe):
(troisième strophe):
Voici arriver le matin de Notre Seigneur; allumez, mes frères,
vos lampes, afin que, lorsque les justes seront recompensés pour
leur travail, vous entriez avec eux dans le thalame de lumière 24.
Le matin resplendit et apporte l~s vêtements à ceux qui vont les
porter; en lui est préfigurée la résurrection des morts dans une
grande stupeur.
Sache que ce que le soir t'arrache, le matin te le rendra pour
que tu le portes sur tes membres 25.
(. .. ) Sois pour nous, ô Dieu, le grand Jour qui n'est pas soumis
aux vicissÎ,tudes, et dans le soir obscur, fais briller ta lumière dans
nos cœurs 29.
IV. LE JUGEMENT
a) Parousie et Jugement
~o Id., pp. 575 (475) - 576 (476); quelques strophes de cette bo'uta se retrouvent
dans l'Add. 17.130 {a. D. 877) qui contient des offices funèbres jacobites, aux
ff. 36 v-37 r (cf. W. WRIGHT, Catalogue of Syriac manuscripts in the British Mu-
seum, part l, London 1870, pp. 392-3).
DANS L'OFFICE COMMUN MARONITE 253
Le tri opéré entre les bénis et les maudits est un thème fonda-
mental du jugement eschatologique. Jésus l'a repris plusieurs fois,
dans les paraboles de l'ivraie et du filet (Mt 13, 24-30, 47, 50), des
vierges et des talents (Mt 25, 1-30), dans l'annonce de la venue des
gentils au festin du Royaume (Mt 8, 11-12), dans ses instructions aux
missionnaires (Lc 10, 9, 11), dans ses exhortations à lui rendre té-
moignage (Mt 10, 32-33).
bl La peur du jugement
Le chrétien syrien en évoquant la perspective du jugement éprouve
tout d'abord la terreur de l'enfer provoquée par la conscience de
sa culpabilité:
Seigneur! J'ai peur de mes péchés qui risquent d'être un obstacle
qui m'empêcherait d'entrer au paradis des délices préparé pour tous
les saints. Délivrez-moi de l'enfer, Seigneur, et mets-moi là où tu
voudras 42.
V. LA RÉSURRECTION
Bénissez Celui qui est venu pour notre salut et qui viendra
pour notre résurrection; il appellera les morts et les ressuscitera,
incorruptibles, de leurs tombeaux ... 50.
Gloire au Père par l'ordre de qui les morts ressusciteront,
Adoration au Fils qui, au son de la trompette, ressuscitera ceux
qui sont dans les tombes (1 Thes 4, 16),
Action de grâce à l'Esprit qui répandra sur eux la rosée de miséri·
corde, et les revêtira du manteau de gloire au jour de la résurrection
(Ap 3, 5) 51.
Que la mort ne se glorifie pas au sujet des bons et des justes
emprisonnés dans les tombeaux, car voici venir la résurrection, périr
la mort et ressusciter les morts 52.
a) Noms de Dieu
Que nous soyons dignes de rendre gloire (...) à Celui qui ressu-
scite les morts et renouvelle les endormis de la poussière; à Celui qui
est la bonne Espérance, la Résurrection de justice, la Vie, le Gage
réjouissant, le sûr Espoir qui ne trompe point; la Résurrection bénie
d'entre les morts de ceux qui, dans la vraie foi, dorment et dormiront
dans l'espoir de sa Divinité; à Celui qui est le Bonheur Eternel, la
Joie véritable et spirituelle ... 51.
c) L'Eucharistie
1. Le fondement évangélique
Ton corps et ton sang sont enfouis dans les membres des défunts
comme les Arrhes de la vie 60.
sa Allusion à rn 6, 51.
59 S, Safro du mercredi, p. 368.
60 Id., Ramso du samedi, p. 546 (446); texte parallèle au Safro du lundi, p. 245.
61 Id., Safro du dimanche, p. 104.
o Vivant Immortel! Fais mémoire aux défunts qui t'ont pris aux
autels; ressuscite dans la gloire leurs corps de la poussière, au grand
Jour de ta venue, alléluia, et ils entreront avec toi dans le thalame,
et t'élèveront des chants de gloire 6J.
Voici que l'océan des flammes me fait peur (Ap 19, 20; 20, 10, 14,
15; 21, 8) (...) Que ton corps enfoui en moi et ton sang caché dans
mes membres me soient une voie et un pont, alléluia, par eux je tra·
serai le lieu de la peur, et je m'écrierai: gloire à toi Seigneur 71.
MId., Suttorô du lundi, pp. 2()6...7; te.xte parallèle à Sexte du mardi, p. 317.
69 Id., Safro du jeudi, p. 447.
70 S, Lilyô du dimanche, p. 95; Lilyo du lundi, p. 224; Safro du mardi, p. 303.
3. La récompense
La récompense future est souvent mise en relation, non seule-
Inent avec les bonnes œuvres, mais aussi avec la vie liturgique or-
donnée autour de l'Eucharistie 76.
Dans cette perspective, il faudrait situer les textes qui parlent
de la rémunération des prêtres dont le service sacerdotal est centré
sur l'autel. Ainsi s'exprime, par exemple, une bo'utô du lilyô du mer-
credi attribuée à Saint Jacques de Sarüg:
4. La résurrection du corps
VI. LE BAPT~ME
Bienheureux, ô vOUS les endormis, qui êtes partis dans la foi, car
vous vous êtes revêtus de signe de la vie, à partir de l'eau; bienheu-
reux êtes-vous, car le corps et le sang que vous avez pris ressuscite-
ront de la poussière vos membres E9.
Les baptisés sont des hommes signés. Ils sont séparés. Ce signe
est parfois appelé {{ Empreinte du myron », ta'vo dmurün 90, « Sceau
du baptême », rllsmo dma'muditho 91. La notion d'arrhes appliquée
plus haut à l'Eucharistie reparaît ici:
Fais, Seigneur, bonne mémoire (... ) de tous les défunts fidèles
qui sont partis avec le gage du saint baptême, afin qu'ils arrivent à la
résurrection de la vie qui ne passe point 92.
81 Ibidem.
~9 S, Lilye du dimanche, p. 9l.
90 Id., Lilye du mardi, p. 287.
Moïse inscrivit les noms des tribus d'Israël sur des tablettes en
pierre. Le Christ inscrivit la mémoire de ses adorateurs dans le
Livre de Vie; et quand aura lieu la résurrection, il les placera à sa
droite 101.
celles qu'on fait dans les dyptiques de la Messe maronite. Ces dyptiques étaient,
en effet, des tablettes doubles sur lesquelles on inscrivait, pour être lus par
le diacre, les noms des vivants et des morts.
DANS L'OFFICE COMMUN MARONITE 265
Voici que mes œuvres, sans oublier même une parole, sont
inscrites pour la justice; mes actions et mes péchés sont inscrits dans
le Grand Livre du Juge ... 1{17.
VII. LA CROIX
VIII. LA VIERGE
Jean TABET
Ils Pâque ayant lieu le 14 Nisan, ce soleil qui brille «sur les morts» est le
Christ lui-même dont la Vierge est la parfaite Image.
116 S, Tierce du jeudi, p. 452.
111 Id., Ramso du dimanche, p. S.
L'ÉCONOMIE DU SALUT DANS LE NOUVEAU CALENDRIER
DE L'ÉGLISE D'ANGLETERRE
! Liturgia Sanctorum Apostolorum Adaei et Maris, S.P .e.K., London 1893, p. 53.
2 Anaphorae Synacae, t. I, p. 20·21.
268 DOUGLAS WEBB
'Ibid., p. 117·118 .
• J.A. ASSEMANI, Codex litllrgicus Ecclesiae universae, t. VII, p. 96-97, Ro-
mae 1754.
S The Calendar and Lessons for the Church's Year. A Report of the Church
8 The Homily on the Passion by Melito Bishop of Sardis, and sorne Frag·
ments of the Apocryphal Ezechiel. (Studies and Documents edited by K. LAKE
and S. LAKE, XII) London·Philadelphia 1940. Voir aussi: Une homélie inspÎrée
du traité sur la Pâque d'Hippolyte (Sources Chrétiennes, 27), Paris 1950.
272 DOUGLAS WEBB
La question pascale au ze siècle, dans L'Orient Syriell, vol. IV, 1961. Cet article
a été lu le 6 juillet 1960, à la 7e Semaine d'Etudes Liturgiques de l'Institut de
Théologie Orthodoxe de Paris.
10 Quelques critiques modernes ont suggéré que ces leçons ne sont pas en
réalité l'œuvre de CY1'ille, mais plutôt celle de son successeur Jean, qui devint
évêque en l'an 386. Cf. SWAANS, L'authenticité ... , dans Muséon LV, Louvain
1942, p. 1-13.
DANS LE CALENDRIER RÉVISÉ DE L'ÉGLISE D'ANGLETERRE 273
crivant les différences qui régnaient à son époque vers 400. «Les jeûnes précé-
dant Pâques se trouvent observés de façon dIfférente selon les peup]cs. Ceux
de Rome jeûnent trois semaines successives avant Pâques, sauf les samedis et
les dimanches. En Illyrie et dans toute la Grèce et à Alexandrie on observe un
jeûne de six semaines, qu'on appelle le jeûne de la Quarantaine. D'autres com-
mencent leur jeûne la 7ème semaine avant Pâques, ne jeûnant que trois ou
cinq jours et à certains intervalles. Cependant ils appellent ce temps le jeûne
des 40 jourS»: SOCRATES, Hist. Eccl .• v. 22.
274 DOUGLAS WEBB
Il Les épîtres et les évangiles de ces dimanches dans le Prayer Book de 1662
étaient: pour la Septuagésime, l Cor. IX, 24-27, Matth XX, 1-16: pour la Sexa-
gésime, II Cor. XI, 19-31, Luc VIII, 4-15; pour la Quinquagésime, l Cor XIII,
1-13, Lue XVIII, 31-43. Ces textes proviennent des missels du Moyen-Age, mais
les épîtres de la Septuagésime et de la Sexagésime ont été abrégées.
DANS LE CALENDRIER RÉVISÉ DE L'ÉGLISE D'ANGLETERRE 275
Les deux autres collectes usitées jadis étaient « pour toutes les
conditions des hommes dans l'Eglise» et {( pour la conversion des
non-chrétiens». Cette dernière collecte contenait la prière suivante:
({ Aie pitié de tous les Juifs, des Turcs, des infidèles et des
hérétiques ... et ramène-les, ô Dieu béni, vcrs ton troupeau, afin
qu'ils soient sauvés avec le reste des vrais Israélites et qu'ils devien-
nent un sem troupeau sous un seul pasteur».
276 DOUGLAS WEBB
justice, afin que nous recherchions les choses qui sont d'en haut, où
il vit et règne avec toi et le Saint-Esprit, un seul Dieu dans les
siècles des siècles ».
dans la forme classique d'une collecte) sont les suivantes: 1er dimanche de
Pâques, McNurr, The Prayer Manual, 398 (corrigé): 2ème dimanche de Pâques,
COLQUHOUN, Parish Prayers, 324 (corrigé); 3ème dimanche de Pâques, Series Il,
Proposed BuriaI Office (corrigé): 4ème dimanche de Pâques, Book of Common
Pmyer, St. Philip et St. James (corrigé).
15 BOùk of Common Prayer, Collecte de Trmity XII.
278 DOUGLAS WEBB
la fête n'aurait pas été en vigueur dans cette cité avant le milieu
du 6 ème siècle 18.
Certaines Eglises d'Orient instituèrent le 6 Janvier une fête de
la Naissance de Notre-Seigneur, qu'elles appelèrent sa cc manifesta-
tion », Il est très probable que l'usage en remonte à la fin du 2ème
siècle, et qu'il passa rapidement dans les Eglises d'Occident, pro-
bablement par la Gaule méridionale, car c'est à propos de cette
région qu'on en trouve la première référence 19.
A l'époque de St. Augustin, la fête de l'Epiphanie était célébrée
par l'Eglise Orthodoxe d'Afrique, mais non par les Donatistes, dont
St. Augustin fait remarquer qu'ils ne l'observaient pas cc parce qu'ils
n'aiment pas l'unité, et qu'ils ne communiquent pas avec l'Eglise
d'Orient )). En ce qui concerne l'Eglise de Rome, la fête de Noël
était apparemment déjà instituée à l'époque du Pape St. Léon, dont
huit sermons sur l'Epiphanie nous ont été transmis.
Mais en parvenant en Occident, la fête changea d'accent. En
Orient, l'idée dominante avait été la manifestation de la divinité du
Christ dans son baptêlne. En Occident, l'accent principal allait porter
sur la Visite des Mages. La fête était souvent désignée sous le nom
de «fête des trois Rois n.
Le rapport de la Commission liturgique indique que la 2nde moi-
tié de l'année chrétienne est autrement construite que la première
laquelle est déjà entièrement organisée. Les épîtres et les évangiles du
Prayer Book pour cette seconde période sont tirés d'un fonds com-
mun de sélections qu'on trouva appropriées, et qui avaient été ratta-
chées arbitrairement à certains dimanches au 7ème siècle. Cette sé-
lection particulière existe sous deux formes dont l'une était courante
en Europe Septentrionale; elle est aujourd'hui représentée dans les
« Ordines )) modernes comme dans ceux du Moyen-Age. L'autre forme
se retrouve dans le Missel Romain. II n'y a, en aucun cas, de véritable
coordination entre l'épître et l'évangile, ni aucun enchaînement d'un
dimanche à l'autre.
La réorganisation de la période qui précède Noël s'accomplira
donc sans aucune difficulté. Le Calendrier est aujourd'hui construit
1~ Cosmas rapporte que les fidèles de Jérusalem, se basant sur Luc UI, 23
(où, d'après lui, il est dit que Jésus commençait à avoir 30 ans à son baptême),
célébraient la nativité en même temps que le baptême, le 6 Janvier. CoSMAS
INDICOPLEVSTES, Christian Topography, V. 194: MIGNE, P.G. 88, 197.
[9 Ammianus Marcellinus rapportant une visite de l'Empereur Julien à une
église chrétienne de Vienne relate qu'elle eut lieu le jour du mois du janvier
que les chrétiens nomment «l'Epiphanie» (Rist. XXI, 2).
280 DOUGLAS WEBB
Pour la première année, Ex. III, 1-15, Hébr. III, 1-6, Jean VI, 27-35.
22
Pour la 2ème année, Ex. VI, 2-8, Hébr. XI, 17-29, Marc XIII, 5-13.
282 DOUGLAS WEBB
Les textes de l'Ancien Testament sont ls. LII, 1-10 et Is. LI, 4-11.
Ceux de l'épître sont nouveaux et très appropriés. La 1ère année 1
Thess. V, 1-11, et la 2èm" le texte traditionnel de l'Avent, Rom. XIII,
8-14, le même que dans la liturgie romaine. L'évangile traditionnel
est le passage apocalyptique de Luc XXI, 25-33, pour la 1ère année,
et Matth. XV, 31-46, sur le jugement dernier pour la 2èm,.
Dans l'Eglise d'Angleterre, le 2èm, dimanche de l'Avent s'appelle
désormais ( le dimanche de la Bible )), car c'est le thème de la col-
lecte et de l'épître. La collecte, qui date de 1549, est directement
basée sur l'épître, tirée de Rom. XV, 4-13. Selon les nouvelles dispo-
sitions pour ce dimanche, désormais nommé le 3ème avant Noël,
l'accent continue à porter sur le témoignage de l'Ecriture à la venue
de Notre-Seigneur. Le thème est « la Parole de Dieu dans l'Ancien
Testament». L'ancienne collecte a été conservée:
« Seigneur, qui as fait rédiger les anciennes Ecritures pour
notre instruction: accorde-nous de les entendre, lire, saisir, appren-
dre et assimiler intérieurement, de telle manière que, par la patience
et le réconfort de ta sainte parole, nous puissions embrasser et
maintenir fortement l'espérance bienheureuse de la vie éternelle.
que tu as donnée par notre Sauveur Jésus-Christ».
XI, 2~10, servira la 2ème année avec, comme épître, Phil. IV, 4~9. C'est
l'épître du rite romain pour le 3èrne dimanche de l'Avent et dans le
Prayer Book, pour le 4èrnc . Les textes de l'Ancien Testament sont Is.
XL, 1-11, et Mal. III, 1-5.
La Commission a donc reporté les textes scripturaires du 4ème
dimanche de l'Avent au dimanche précédent. Le nouveau Propre
qui en résulte, portant sur le thème du ministère, est apparemment
destiné à introduire aux Quatre Temps de Noël. A propos de ce choix
pour les 2ème et 3ème dimanches avant Noël, on pourrait mentionner
que l'Eglise étant eschatologique dans sa conception, et qu'ayant elle
pour tâche de préparer les voies à la venue du Royaume, la Bible
et le ministère y ont leur rôle à jouer.
A la suite de ce transfert de l'ancien Propre à l'avant-dernier-
dimanche avant Noël, la voie était libre pour l'introduction au der-
nier dimanche d'un thème entièrement nouveau, et la Commission
s'est proposé d'orienter nos pensées vers l'Annonciation. Soulignons
de nouveau que cette innovation ne met aucunement obstacle à la
fête de l'Annonciation à sa date traditionnelle du 25 mars, pour la-
quelle il a été prévu un Propre. « Historiquement et théologiquement »,
dit la Commission, ({ ce thème convient, bien entendu, à une date
proche de Noël ». La nouvelle collecte est empruntée au fonds de
prières modernes. La voici:
Quant aux lectures, le même évangile, Matth. II, 1-12, pour les
deux années 27.
27 1ère année: Is. LX, 1-6, Hébr. l, 1-14; 2ème année: Is. XLIX, 7-13, Ephés.
II, 1-6.
DANS LE CALENDRIER RÉVISÉ DE L'ÉGLISE D'ANGLETERRE 285
Le 6èrne
dimanche après Noël a aussi deux thèmes: « L'Ami des
pécheurs» et {( La Vie pour le monde », l'un et l'autre des thèmes
d'Epiphanie, bien appropriés. La collecte et les textes de l'Ecriture
s'y harmonisent 32.
Pour les deux derniers dimanches de ce cycle, aucun thème par-
ticulier n'est proposé, sans doute parce que ces dimanches ne se-
ront pas souvent célébrés. On ne peut donc que regretter que deux
belles collectes du Prayer Book leur aient été attribuées, de sorte
qu'on ne les entendra que rarement.
A juger de l'organisation générale de ces matériaux pour les di-
manches qui suivent Noël, il semblerait que la Commission, guidée
par des considérations historiques, ait réalisé une esquisse rapide des
principaux événements de la vie de Notre-Seigneur, avant d'entrer
dans le cycle de la Rédemption, le 9èm, dimanche avant Pâques. De
la sorte, elle établit un lien avec ce cycle qui est à la fois historique
et théologique.
Ici s'achève notre étude sur l'Economie du Salut, telle qu'elle
est présentée dans le Calendrier révisé de l'Eglise d'Angleterre. Il
convient de laisser le dernier mot à la Commission, qui résume le
but qu'elle s'est proposé en ces termes: {( On verra que nous n'avons
rien projeté de révolutionnaire, mais nous espérons avoir fourni une
présentation plus rationnelle de l'année chrétienne, dans l'intérêt
pastoral des fidèles» 33.
Douglas WEBB
ll1b, année, Ex. XXXIII, 12-23, l Jean l, 14, Jean II, 1-11; 2ème année: l
Rois VIII, 22·33, 1 Cor. III, 10.17, Jean II, 13·22.
II «Accorde, nous t'en supplions, ô Dieu miséricordieux, à ton peuple fidèle
le pardon et la paix, afin qu'il soit purifié de toutes ses fautes et qu'il te serve
sans inquiétude »: B.e.p., TrinitY XXI. - 1ère année: Os XlV, 1-7, Philém. 1-16,
Marc II, 13-17; 2ème année: l Rois X, 1-13, Ephés III, 8-19, Jean IV, 7-14.
3.J The CaZendar and Lessons ... , p. 7.