Explorer les Livres électroniques
Catégories
Explorer les Livres audio
Catégories
Explorer les Magazines
Catégories
Explorer les Documents
Catégories
DE LA CINQUANTAINE PA SC A LE
AU COURS
DES CINQ PREMIERS SIÈCLES
BIBLIOTHÈQUE DE LITURGIE
ROBERT CAB1É
LA PENTECÔTE
L ’évolution de la Cinquantaine pascale
au cours des cinq premiers siècles
DESCLÉE
Bibliothèque de Liturgie
sous la direction de
A.-G. MARTIMORT
N ih il obstat :
A. G . M a r tim o r t
prof, in Facultate theol, Tolosan,
I m prim atur :
Prlnted in Belgium
INTRODUCTION
1 L e Deutêronome prescrit les trois solennités qu'il nomme fête des Azymes,
fête des Semaines et fête des Tentes. L e livre a connu des rédactions successives;
la mention de Jérusalem, par exemple, «lieu choisi par le Seigneur pour y faire habiter
son nom », manifeste une intention centraliste qui ne peut venir du document primitif
C'est cependant à la couche la plus ancienne qu'il faut attribuer, semble-t-il, la mention
des trois grandes solennités.
* H. C a z e lle s , Études sur le Code de VAlliancey Paris, Letouzey et Ané, 1946,
p. 99 »
* Il est possible que la fête ait une origine chananéenne, mais elle a pris en
Israël un sens proprement yahwiste.
* * Peut-être aussi les incertitudes du calendrier ont-elles joué un rôle avec le
décalage qu’il produit entre le cours des étoiles et le temps de la moisson, proprement
solaire » (H. C a z e lle s , ibid.).
La Pentecôte juive, fête de la moisson 17
1 Bikkurim, III, trad. M . Sch w ab, Le Talmud de Jérusalem, II, Paris, Maison-
neuve, i960, p. 382-390. Pour toutes les indications concernant la tradition rabbinique,
nous sommes tributaires de K . Hrubi, d’après des notes polycopiées du cours qu’il
a donné à l’Institut Supérieur de Liturgie en 1963 sur « Les Cycles des fêtes de l’année
juive. »
* P h ilo n , De Decalogo, 160, éd. L . C o h n , Berlin, 1906, p. 304. « ...x a l t?)v
ànb TaÔT7)ç xaTapiO[xoi)(jLévrjv èrera êpSopuxatv 7revr/)xooT^v 7)|iépav èv 7upoaàyeiv
à'prouç ëOoç, ol xaXouvTai 7rp<0T0yevve|iàTG>v êrùpMDç, è7uei8r)7rep elatv àTcapx*?}
ysvvepuÉTaiv x a l xap^ôv fjfxépou Tpo<pyjç, ■
Jjv àv 0 ptù7rCî> ^[zepcoTaTCp Çcjxov arcévetpiev
ô 0e6ç... *
La Pentecôte juive, fête de la moisson 19
1 Notons que ce terme devait être d'un usage récent ou du moins peu généralisé,
puisqu’il est expliqué en Tob.y II, i (èv tj} 7revT/)xocnrïj êopTjj, ècmv à y la
ércrà êpSofxà&cov) et en quelque sorte excusé en 2 M a c c X II, 32 (Mexà XeyoïAévTQV
7rev'n)xoaT7)v).
1 F. Josèphe, La Guerre des Juifs, I I , iii, 15 éd. B. N iese, Berlin, 1887, t. 6,
p. 162. « ...èvcTàcnjç 8k TÎjç TrevrrçxoaTÎjç, oütg> xaXoualv tlvûc èopr^v 'Iou&aïot
Trap' èirvà yivo|x£vy]v êp8op.à8aç xal t 6v àpiôp.6v t û v ^(xepcov TrpoarjYoplav ë^oucav... »
* Antiquités Judaïques, III, x, 65 op. cit., t. I, p. 208. « 'Ep86fx7)ç èpBojxàBoç
SieYeYsvTjfxévrçç p,erà vaérqv r?)v Oualav, aQxat 8'elalv al tg>v épBojxàSwv ^[xépat
Tcaaapàxovra xal èwéa, [vf) 7uevT7)xoaTfl], ‘Eppatoi àaapOà xaXouaiv, <T7jfxalvei
8è touto 7revT7)xoaT7)V, xaô’vjv repodayouat t ü Oeqî fipTOv àXçtTOV... »
4 H. L . S t r a c k et P. B ille r b e c k , Kommentar zur neuen Testament aus Taîmud
und Midraschy II, München, 1924, p. 597.
8 Notons que les Septante traduisent le terme par des mots différents. Cf. :
,
Jer.y IX , 1 (aévoBoç), Am.y V, 21 (7wcvY)yéptç), 4 Rois X , 20 (lepeta), Lev.y X X III, 36,
Nomb.y X IX , 35 (èÇéStov), etc...
6 Josèphe, op. cit.y X V II, x , 2; t. 4, p. 118 « ... 7ràvu rcoXXal TaXiXalwv t c x a l
TBoufzalwv, Tepixotmlow t s 9jv 7tX7)0ùç x al ôtt6coi 7repàaavTi 'Iop&àvrjv TCOTafièv
otxoücriv, aÛT<ov Te TouBalov ttXyJOoç Trpèç 7càvTaç auveiXéxavo... » cf. aussi 1 La
Guerre des JuifsyII, iii, 1, op. d t ., t. 6, p. 162.
20 La Pentecôte juive au temps du Christ
2 . LA PENTECÔTE JUIVE,
COMMÉMORAISON DE L ’ALLIANCE DU SINAÏ
C’est donc à une institution divine que la solennité est ici attribuée,
avec sa signification de fête du renouvellement de l’alliance, puisque
depuis toujours elle est inscrite sur les «tablettes du ciel », c’est-à-dire
sur le texte original de la Loi que Moïse a reçue du Seigneur. Mais,
avant même la théophanie du Sinaï, Dieu avait révélé aux hommes ce
qui concerne la Pentecôte, y compris la date de sa célébration. C’est
après le déluge, en effet, que Noé avait entendu, pour ses «fils », cet
ordre du ciel, le jour où le Seigneur avait conclu avec lui son
«alliance éternelle », qui allait être renouvelée plusieurs fois, au cours
de l’histoire d’Israël, et devait trouver dans le don de la Loi son
expression la plus solennelle.
Ce lien étroit entre la fête de la Moisson et une fête de l’Alliance
renouvelée chaque année, qui était l’occasion des serments solennels,
a amené certains exégètes à y voir la signification primitive de
la Pentecôte. Selon ces auteurs, il faudrait même y chercher l’origine
du nom sous lequel la solennité est le plus connue : c’était
la «fête des serments» (ni»atf in) qui serait devenue la «fête des
semaines » (ni»ntf in), la même racine hébraïque ayant une double
acception. Mais, sans prétendre trancher la question encore controversée
mais aussi son carré : ils savent que c’est le nom bre de la pureté et de la
virginité perpétuelle. C ’est le prélude à une très grande fête* qui a lieu tous
les cinquante jours, car c’est le plus saint de tous les nom bres et le plus
important dans la nature : il est obtenu en faisant la somme des carrés des
côtés du triangle rectangle, somme qui est le principe de la génération
u n iversellel. »
1 Règle* I* 16-18; trad. A, D upont-Som m er* Les Écrits essêniens découverts près
de la Mer Morte, Paris, Payot, 1959* p. 89-90.
* Ibid., I, 18-II* 18; p. 90-91. La cérémonie comporte une louange de Dieu
par les prêtres et les lévites, l’Amen répété de la communauté* la proclamation par
les prêtres des hauts-faits du Seigneur* l’annonce par les lévites des péchés d’Israël*
la confession des péchés de la communauté, la bénédiction des prêtres sur « les hommes
du lot de Dieu » avec l’Amen de la communauté* la malédiction des lévites sur « les
hommes du lot de Bélial » avec l’Amen de la communauté* la malédiction des prêtres
et des lévites sur les apostats, avec l’Amen de la communauté.
8 J. T . M ilik* Dix ans de découvertes dans le désert de Juda, Paris* Cerf* 1957*
P. 77 *
4 A . Dupont-Som m er* op. cit., p. 176.
6 Ibid., p. 245-246.
6 A. Arens* op. cit., p. 104.
La Pentecôte juive, commémoraison de Valliance du Sinaï 27
Les études en cours sur les manuscrits qui ont été découverts
nous réservent sans doute d’autres attributions à la liturgie essénienne
de la Pentecôte.
Au temps du Christ, la fête du cinquantième jour après la Pâque
était donc célébrée dans le judaïsme officiel comme une fête de la
moisson, mais elle avait déjà pris, dans certains cercles religieux,
le sens d’une commémoraison de la théophanie du Sinaï. L ’accent
était d’ailleurs mis sur l’alliance entre Dieu et son peuple, beaucoup
plus que sur le don de la Loi. Cette conception, semble-t-il, s’est
développée dans une ambiance sacerdotale. Ex., XIX appartient au
Priesterschrift, I I Chron. se rattache à la même tradition et les
Esséniens constituaient une assemblée de prêtres. La secte de Qumran
et les Thérapeutes d’Ëgypte sont pour nous les témoins d’un courant
de pensée qui devait sans doute dépasser les frontières étroites de leurs
communautés, puisque le rabbinisme tardif en a recueilli l’héritage.
3. LA PENTECÔTE JUIVE
Ces mots ont une résonance assez étrange. Outre la façon même
dont l’événement est daté (lorsque le centième et le vingtième seront
accomplis), il est remarquable que la Parousie, si elle est présentée
dans un autre passage du livre comme le retour du Christ, est ici
désignée comme le jour de l’avènement du Père. D ’autre part,
l’expression « entre la Pentecôte et la fête des azymes » n’est guère
compréhensible, à moins d’admettre que les termes ont été inversés.
Mais le problème le plus important pour nous est de savoir ce que
recouvre exactement le mot de Pentecôte. Si l’on pouvait établir
qu’il désigne, comme aujourd’hui, une fête chrétienne célébrée au
cinquantième jour après Pâques, nous aurions un précieux témoignage
de la haute antiquité de cette institution. Malheureusement, YEpistula
Apostolorum ne semble pas nous permettre une telle conclusion.
En parlant de la «fête des azymes », ne nous place-t-elle pas plutôt
dans un contexte juif, où le mot irevTrçxoa-nj aurait la même signification
que dans le livre de Tobie ou celui des Maccabées?
1 II n ’est pas impossible que certains textes nous aient échappé, bien que
nous nous soyons efforcé de parcourir cette littérature et tout particulièrement les
Actes apocryphes publiés par R. A . Lipsius-M . B o n n e t, Acta Apocrypha, Leipzig,
1891.
2 C . S ch m id t, Gespràche Jesu mit seinen Jùngern nach der Auferstehnng, (T U 43),
Leipzig, 1919, p. 361-402 (Ort und Zeit der Epistula); cf. J. Q u a ste n , Initiation aux
Pères de VÉglise (trad. J. L a p o rte ), Paris, Cerf, 1955, p. 171-172.
8 Epistula Apostolorum nach dem âthiopischen und koptischen Text herausgegeben,
éd. H. D u en sin g , (Kleine Texte 152), Bonn, 1925, p. 14. « Und wir sprachen aber
zu ihm : Herr, nach noch wieviel Jahren wird dies geschehen? Er sprach zu uns :
Wenn das Hundertstel und das Zwanzigstel vollendet sein wird, zwischen Pfingsten
und dem Fest der Ungesaüerten, wird stattfinden die Ankunft meines Vaters. »
(La traduction a été faite sur l’allemand, mais nous l ’avons fait vérifier sur le texte
copte donné par C. S ch m id t, op. cit., p. 6*.)
30 La Pentecôte juive au temps du Christ
Notons que le texte nous est aussi parvenu dans une seconde
recension qui est assez différente sur ce point. Il s’agit de la version
éthiopienne, publiée par L. Guerrier en 1913 :
« E t nous lui dîmes : « Seigneur, com bien d ’années encore [attendra-
t-on] ? E t il nous dit : « Quand sera écoulée la cent cinquantièm e année.
entre la Pentecôte et la Pâque *. »
LE TEMPS DE LA JOIE
(Laetissimum Spatium)
« Cum complerentur dies pentecostes... » Ce sont les premiers mots
du chapitre II des Actes, selon la version de la Vulgate qui nous est
familière. Bède le Vénérable1 avait déjà remarqué, au début du
vin® siècle, que la traduction latine emploie le pluriel, alors que le
texte grec est au singulier : Kal èv tÇ> aufijtXrçpoOcôai tvjv •Jjjjiépav TTjç
tovt7)xoctt7)ç. C’est déjà poser un des principaux problèmes de Thistoire
de la Pentecôte chrétienne. Cette modification d’ordre grammatical
a certainement une signification plus profonde; pour mieux en voir
la portée, il est bon de regarder de plus près la tradition littéraire de ce
verset de la Bible latine. On peut trouver dans l’ouvrage de
Wordsworth-White * les principales variantes de ce qu’on a coutume
d’appeler la Vêtus latina. Notons que saint Augustin emploie toujours
le singulier dans les citations de ce verset : tempore quo supletus est
dies pentecostesa. Il y a cependant une exception dans VEpistula ad
catholicos4, mais l’authenticité de cette œuvre est très controversée
et il faut peut-être voir là une nouvelle raison de la rejeter. C’est aussi
le singulier que nous trouvons dans le Liber de promissionïbus attribué
à Quodvultdeus, un disciple de l’évêque d’Hippone : die autem pen
tecostes 6. Malheureusement, nous ne pouvons pas remonter plus
haut; les œuvres de saint Cyprien permettent de reconstituer une
grande partie de la Bible qu’il utilisait, mais on n’y trouve pas ce verset ®.
S’il est permis d’estimer —• comme c’est probable — que le texte le
plus ancien est au singulier, nous pouvons dire que Grégoire d’Elvire
est le premier témoin du pluriel. G’est à lui en effet qu’il semble légitime
d’attribuer les X X Tractatus du pseudo-Origène, où le verset est cité
LA «PENTECÔTE » CHRÉTIENNE
A LA FIN DU IIe SIÈCLE ET AU IIIe SIÈCLE
I. — SAINT IRÉNÉE
3. — TERTULLIEN
1 T e r t u l li e n , De Bapiismo> X V II, éd. E. D ekk ers (CC. ser. lat. I), 1954,
p. 291-292. «... quae Acta Pauli quae perperam scripta sunt [exemplum Theclae]
ad licentiam mulierum docendi tinguendique defendunt, sciant in Asia prcsbyterum
qui eam scripturam construxit quasi titulo Pauli de suo cumulans convictum atque
confessum id se amore Pauli fecisse loco decessisse... »
2 üpàÇetç IlaéXou, éd. W. S ch u b a rt et C. S ch m id t, Hambourg, 1936,27, p. 1,
30-32 du texte. « Ol pèv ouv dc&eX<p[ol o>ç ty)ç] üevTTQXoaTYjç otiaiqç, otfre &cXauaav
oùSè y6[vava &cXi]vav, àXXà aYaXXta>p.ev[o]t 7rpoa7)u^ovTO [êawTeç]. »
La Pentecôte chrétienne à la fin du I I 9 s. et au I I P s. 39
à conclure qu’il s’agit bien d’un ,temps assez long (spatium) qui,
loin de faire nombre avec une fête de la Résurrection, célèbre, dans
son unité, toute l’économie de la rédemption réalisée par le Christ
le jour de Pâques et les semaines suivantes. Les mystères du Sauveur
ressuscité n’y sont pas vécus, comme aujourd’hui, selon leur succession
chronologique et aucune journée particulière n’est consacrée à
commémorer la montée du Seigneur au ciel ou la descente du Saint-
Esprit. C’est toute la Cinquantaine qui fait revivre aux fidèles tous
les aspects à la fois du mysterium salutis et prolonge la joie pascale.
Comme l’agenouillement, le jeûne, évidemment, en est exclu :
«N ous estimons qu’il n ’est pas perm is de jeûner le dim anche n i
d ’adorer à genoux. L a m êm e exemption s’applique à la joie qui s ’étend
de Pâques à toute la Pentecôte (in Pentecosten usque) *. »
4. — HIPPOLYTE
Il s’agit donc, ici aussi, d’une période qui suit Pâques, puisqu’il
faut attendre qu’elle soit terminée pour suppléer au jeûne que l’on
n’a pu accomplir. Cela correspond bien à ce que nous savons déjà de
la Pentecôte *.
5. — ORIGÈNE
et nous n’en recevons que les arrhes, les primitia. Nous avons la réalité
et non plus seulement l’image, mais cette réalité ne sera complète
que dans le «face à face » éternel. Au fond, nous ne sommes pas dans
la perspective de la logique classique, qui se renferme star elle-même
dans la dualité «vrai » et «faux ». La réalité peut être plus ou moins
participée. Cette conception platonicienne et mystique, fondée sur une
exégèse allégorique de l’Ancien Testament, se retrouve dans maints
passages des œuvres d’Origène, notamment dans le Contra Celsum.
C’est vers le milieu du m e siècle que le docteur alexandrin
écrivit sa grande apologie, pour répondre aux attaques d’un philosophe
païen contre le christianisme. Après avoir essayé de ruiner la religion
de la Bible, Celse, le brillant adversaire de l’Église, invitait les chrétiens
à participer à la vie politique de Rome; il les exliortait en particulier
à s’associer aux fêtes publiques. Au livre VIII de son ouvrage, dans un
texte sur lequel nous reviendrons *, Origène répond qu’un fidèle de
l’Évangile n’a que faire des solennités impériales; pour lui, toute la vie
est orne fête, puisqu’il fait sans cesse son devoir et prie en tout temps.
Il est, par exemple, toujours « dans les jours de la Pentecôte », celui
qui est ressuscité avec le Christ. Le pluriel : èv tocïç tï)ç Tcevrrçxocrojç
vjjjipouçj manifeste que la Pentecôte est considérée comme orne fête
s’étendant sur plusieurs jours. Si l’homélie sur le Lévitique mentionnait
le dies Pentecostes, c’est qu’il était question de l’institution juive.
Le docteur alexandrin vient ainsi corroborer par son témoignage
la tradition qui nous est parvenue des autres Églises. Nous retrouvons
cependant dans le Contra Celsum ce qui est propre à sa théologie. La
vie entière du chrétien est orne communion aux fêtes de 1’ «Évangile
éternel ». C ’est pourquoi, pouvant se dire réellement ([ast1 àXi)0e(ocç) et
non plus seulement en ombre et en image, uni aux mystères célestes,
il est ressuscité avec le Christ, assis avec lui à la droite du Père et
dépositaire de l’Esprit. Aussi est-il toujours «dans les jours de la
Pentecôte ». La prière est d’ailleurs ce qui manifeste et renforce cette
union à la vérité invisible.
nous pouvons les interpréter les uns par les autres, pour contempler
l’universalité de la fête sur tout le pourtour de la Méditerranée.
Partout la Pâque inaugurait un temps de fête qui s’étendait sur sept
semaines. Partout cette solennité était assimilée au dimanche et on lui
donnait le nom de t o v t t j k o c t t t ).
Une telle affirmation ne peut que soulever dans un esprit moderne
une foule de points d’interrogation qui semblent autant de sérieuses
objections : Quel est l’événement du salut que commémorait cette
grande fête? Comment une appellation forgée chez les Juifs hellénisés
pour désigner le cinquantième jour peut-elle, en dépit de la grammaire,
s’appliquer à toute une période? etc... De telles questions ne peuvent
être résolues que si l’on approfondit d’abord, d’après l’ensemble des
textes que nous avons cités, la signification liturgique et la résonance
spirituelle qu’avait dans la foi et dans la vie des communautés
chrétiennes le laetissimun spatium de la solemnitas exsultationis.
CHAPITRE II
LE «GRAND D IM AN CH E1 »
Ce n’est donc qu’à la fin du IIe siècle et au début du IIIe que nous
trouvons les premiers témoignages d’une fête chrétienne de la Pentecôte.
Si le mot lui-même se trouvait dans les écrits antérieurs, sa signifi
cation, semble-t-il, demeurait encore attachée aux coutumes du rituel
mosaïque que de nombreuses communautés chrétiennes connaissaient
encore et qu’elles pouvaient même continuer à pratiquer. Mais dès
qu’apparaît la tovt/)xootŸ| nouvelle, elle présente des caractères propres :
c’est une période de cinquante jours de joie, ce qui a pu influencer
rétrospectivement la traduction latine des Actes des Apôtres, imposant
le pluriel : Cum complerentur dies pentecostes. On ne peut comprendre
la signification profonde de cette organisation liturgique qu’en la
rapportant à la célébration dominicale, à laquelle la tradition primitive
unanime la réfère explicitement. Cette perspective est donc essentielle
et elle révèle toute la nouveauté de l’Évangile par rapport à la pensée
juive : la vie chrétienne s’y manifeste tout entière comme participation
au mystère pascal.
I. — LE « HUITIÈME JOUR »
1 Pour ce chapitre, nous sommes dans une très large mesure tributaire de
J. H ild , Dimanche et vie pascale, Brepols, Turnhout-Paris, 1949.
Le « Grand Dimanche * 47
2. — LA « SEMAINE DE SEMAINES »
« Q u ’on ne prenne rien à Pâques, avant que l ’oblation n ’ait lieu ...
Cependant, si une fem m e est enceinte et (si quelqu’un) est malade et
ne peut jeûner deux jours, il jeûnera le samedi (seulement) par nécessité,
se contentant de pain et d ’eau. Si quelqu’u n ... a ignoré le jour, ...il
s’acquittera du jeûne après la cinquantaine 4. »
Et l’auteur expose que, pour celui dont toute la vie est unie au
Seigneur, tous les jours sont dimanche, comme pour celui qui renonce
à la «sagesse de la chair » tous les jours sont vendredi; de même, c’est
une Pâque perpétuelle pour celui dont l’existence n’est qu’un «passage »
à la cité de Dieu. Et il ajoute :
Dans ce texte, qui suit de très près les écrits bibliques puisque,
outre la citation de VEpître aux Éphésiensles mots mêmes des Actes
* Eph., II, 6.
Le « Grand Dimanche » 55
4. — DU DIMANCHE A LA 7TCVTY]X05TY)
★
* *
I. — SAINT ATHANASE
LETTRES F E S T A L E S D E S A IN T A T H A N A S E
1 C ’est à tort que l’on a attribué à saint Athanase un texte qui insiste sur cette
assimilation au dimanche, même dans l’horaire des synaxes. Cette pièce provient sans
doute du Panonarion de saint Épiphane (cf. infra, p. 138), auquel on pourra utilement
la comparer : « ... Kocl 8t ’ ôXoo [jtèv tou ëxouç *r) vrçaxsla (puXàxxexai èv Tyj aÙTyj à y Icl
x al xaOoXtxfj ’ExxXrjala, q>Tr}pii xexpàSt xal TCpoaappàxco ëcoç cupaç èvvàx7)ç, Slxoc
jiévrjç TTjç llevTyjxocrrrjç GXyjç tû v xevxrjxovxa Y)[xcpcovt èv alç oüte yovuxXtolat
ylvovxat, oüxe VTjaxelat TrpoaxéxaxTar àvxl xûv rcpè; x/)v èvvàxrçv ouvà;ecov
xexpaSwv xal Trpoaappàxcov à ç èv *f)(iépa xuptaxyj xaxà xàç 7rpcoïvàç al auvdcÇetç
èTTixeXouvxai. ''Ext xal èv xatç 7cevx7)xovxa ^ é p a iç , alç 7rpoet7cov xîjç xevxTf)-
xoaxîjç, oûx elolv ouxe vY)oxetat oüxe yovoxXiotai... » (Ex Sermone De Fide,
P G 26,1292).
La persistance de la « Pentecôte » en Égypte 65
9151. — 5
66 Le temps de la joie
2. — THÉOPHILE D’ALEXANDRIE
3. — CYRILLE D’ALEXANDRIE
lisons dans deux compilations coptes qui ont sûrement utilisé des
documents très anciens :
« A u x jours de la Pentecôte, il était toujours m alade; trois jours
avant son décès, il manda et réunit près de lui tous les Grands parmi
les frères... il se signa trois fois de la m ain, puis im m édiatem ent il
ouvrit la bouche et rendit l’âme, le 14 du mois de paSons, à la dixième
heure du jour K »
Si les solennités liturgiques ne sont pas ignorées des cénobites
égyptiens, elles ne tenaient pas, dans leurs monastères, la même place
que dans les Églises locales. Nous pouvons en avoir quelque idée grâce
à un texte d’Évagre le Pontique, qui passa dans le désert de Nitrie les
dernières années de sa vie, de 383 environ à 399. Dans un poème
adressé «aux moines qui vivent dans les communautés », il s’exprime
ainsi :
« N e dis pas : aujourd’hui c’est fête et je bois du v in ; demain, c’est
la Pentecôte et je mange de la viande, parce qu’il n ’y a pas de fête chez
les moines, ni de tem ps donné à l ’hom m e pour rem plir son ventre. L a
Pâque du Seigneur, c’ est le passage qui fait sortir du vice. Sa Pentecôte,
c’est la résurrection de l’âme. L a fête de D ieu , c’ est le pardon des péchés,
et la douleur sera le lot de celui qui garde rancune. L a Pentecôte du
Seigneur, c’est la résurrection de l ’am our; celui qui hait son frère fera
la pire des chutes. L a fête de D ieu est la connaissance vraie; celui qui
s’applique à la connaissance m ensongère finira honteusem ent \ »
nec necessarium, cum aliqua uel festiuitas temporum uel interueniens caritatis occasio
indulgentiam refectionis admittit, numquid possunt, inquiens, filii sponsi lugere
quamdiu cum illis est sponsus ? uenient autem dies cum ab eis auferetur sponsus, et
tune ieiunabunt, quae uerba, licet ante resurrectionem dixerit corporis sui, tamen
proprie Quinquagensimae tempus ostendunt, in quo post resurrectionem per quadra-
ginta dies domino cum discipulis epulante ieiunare illos cotidie eius praesentiae
gaudium non sinebat. » Pour la traduction des Conférences de Cassien, nous avons
suivi de près l’édition de E. P ic h e r y (SC 64), Paris, Cerf, 1959, p. 94 sq.
1 Conlatio X X I , 20, ibid., p. 594-595. « ... Et idcirco hi quoque decem dies
cum superioribus quadraginta pari sollemnitate sunt ac laetitia celebrandi. Cuius
festiuitatis traditio per apostolicos uiros ad nos usque transmissa eodem tenore
seruanda est. Ideo namque in ipsis diebus nec genua in oratione curuantur, quia
inflexio genuum uelut paenitentiae ac luctus indicium est. Unde etiam per omnia
eandem in illis sollemnitatem quam die dominica custodimus, in qua maiores nostri
nec ieiunium agendum nec genu flectendum ob reuerentiam resurrectionis dominicae
tradiderunt. »
* H. L e c le r c q , D A C L , art. Pentecôte, t. X IV , 1,1939 , c. 268.
La persistance de la « Pentecôte » en Égypte 75
* Conlatio X X I , 23, op. cit., p. 598. « ... Cibus qui hora diei nona fuerat
capiendus, paulo citius id est sexta hora pro festiuitate temporis capiatur. » Cette
pratique est aussi attestée par saint Jérôme qui écrit, à propos des moines d’Égypte :
« Pentecoste, cenae mutantur in prandia, quo et traditioni ecclesiasticae satisfaciat et
ventrem cibo non onerent duplicato » (Epist. X X I I ad Eustochium, 35, éd.
J. L a b o u r t , Paris, Belles Lettres, I, 1949, p. 152).
* Institutionum Liber II, éd. M . P e t s c h e n i g (C SEL 17), 1888, p. 22-23.
« In die uero sabbati uel dominico utrasque de nouo recitant testamento, id est unam
de apostolo uel actibus apostolorum et aliam de euangeliis. Quod edam totis Q u in q u a-
gensimae diebus faciunt hi, quibus lectio curae est... »
76 Le temps de la joie
nENTHKOSTH
I. — LE NOM DE LA CINQUANTAINE
2. — CÉLÉBRATION DE LA CINQUANTAINE
ET COMMÉMORAISON DES ÉVÉNEMENTS DU SALUT
1 Plusieurs des textes que nous avons cités font explicitement allusion au récit
des Actes, par exemple celui de Tertullien (De Bapthmo, X IX , 2) ou ceux d’Origène
(In Le v. II, 2; Contra Celsum, V III, 22).
go Le temps de la joie
les anciens, unis par le lien que nous y voyons aujourd’hui Si nous
pouvions les interroger, ils nous feraient sans doute la réponse de
l’abbé Théonas : une fête est tout simplement une période de joie,
d’où la pénitence est exclue; c’est un temps où, plus que jamais, l’Époux
est avec les siens. Le commoratus est des Actes des Apôtres applique
tout particulièrement à la «Pentecôte» cette parole de l’évangile.
Sans doute, personne n’ignore que, selon saint Luc, Jésus n’est resté
que quarante jours avec ses disciples, mais qu’importe? il ne s’agit pas
de cela; la joie du grand dimanche se développe sur cinquante jours,
accomplissant le symbolisme déjà exprimé par la Tora, dans le temps
fixé pour l’offrande des prémices. Pour les ascètes d’Égypte, la question
ne se pose pas; c’est la tradition des anciens : pendant cinquante jours,
les amis de l’Époux ne peuvent pas jeûner.
N® 9151. — 6
82 L e temps de la joie
4. — GLORIFICATION DU CHRIST
Nous voici donc amenés à une double conviction dont il faut bien
comprendre qu’elle n’a rien de contradictoire. D’une part, ce n’est pas
pour pouvoir commémorer les événements rapportés par l’Écriture
que les chrétiens des premiers siècles lisaient le Nouveau Testament.
D ’autre part, la célébration de la Cinquantaine est tout entière nourrie
des textes scripturaires, regardés comme la Parole de Dieu se réalisant
dans l’ «aujourd’hui » de la liturgie.il importe par conséquent que nous
regardions de plus près les pages de la Bible qui ont été la source dont
a jailli la «Pentecôte » nouvelle.
Ce qui frappe tout d’abord, c’est que l’effusion de l’Esprit
apparaît comme étroitement liée à la glorification du Sauveur,
manifestée surtout par son ascension vers le Père; elle en est comme le
corollaire immédiat : «Il n’y avait pas encore d’Esprit, car Jésus
n’avait pas été glorifié » (Jn., VII 39), « Si je ne m’en vais pas, le
Consolateur ne viendra pas à vous; si je m’en vais, je vous l’enverrai. »
(Jn., XVI, 7). Il faut encore citer ce verset du discours de Pierre, le
jour de la Pentecôte : « Une fois élevé à la droite de Dieu et mis par
son Père en possession du Saint-Esprit, il (Jésus) est l’auteur de ces
effusions que vous êtes en train de voir et d’entendre » (Act., II, 33).
Le don de l’Esprit est donc inséparable de l’exaltation du Seigneur
comme constituant ensemble l’achèvement de l’œuvre rédemptrice et
l’inauguration de l’ère nouvelle qui prépare la Parousie.
Mais une difficulté surgit des textes du Nouveau Testament, à
propos de la date de l’ascension. Les synoptiques, en effet, semblent
la placer au soir de la résurrection *. Saint Jean nous montre même le
Seigneur donnant alors l’Esprit a ses apôtres : «Il souffla sur eux et
leur dit : Recevez le Saint-Esprit... » (jn., XX, 22), ce qui suppose
6. — DE LA PENTECÔTE JUIVE
A LA PENTECÔTE CHRÉTIENNE
Nous avons pu constater, dans les pages de saint Luc, de saint Jean
ou de saint Paul qui ont servi de base à la tradition chrétienne de la
TOV'npccxn-if), plusieurs éléments qui semblent autant d’allusions à
l’alliance du Sinaï. Ce rapprochement n’est jamais exprimé de manière
explicite par les auteurs inspirés, mais il semble difficile de nier qu’ils
aient eu présentes à l’esprit, en rédigeant leur texte, des idées courantes
dans le milieu où ils vivaient. Nous savons, par ailleurs, que les mots
de l’Écriture sont rarement de simples dénominations; ils s’entourent
en général d’un halo d’évocation et de symbolisme servant de véhicule
aux thèmes bibliques qui s’étendent de l’Ancien sur le Nouveau
Testament. Dans ces conditions, peut-on encore penser que la solennité
chrétienne ne doit rien à celle d’Israël, sauf son nom, qui vient de
l’occurrence (qu’on pourrait penser fortuite) de la venue du Paraclet à
la date de la Pentecôte juive?
Sans doute faut-il souligner le profond hiatus qui sépare deux
conceptions absolument différentes de la célébration liturgique. La
Cinquantaine est trop différente du rite d’action de grâces pour la
moisson ou du cérémonial de renouvellement de l’Alliance pour qu’elle
90 Le temps de la joie
Sancti dcscensione conpletur : ut sicut priori populo quinquagesima die, uero iubilaeo,
et uero anno remissionis, et ueris quinquaginta et quingentis denariis, qui debitoribus
dimittuntur, lex data est : ad apostolos quoque, et qui cum eis erant, in centum
uiginti Mosaicae aetatis numéro, constitutis, descendent Spiritus Sanctus, et diuisis
linguis credentium, totus euangelica praedicatione mundus expletus sit. » Cf. aussi :
A m b ro sia ste r, infra, p. 121.
92 Le temps de la joie
1 O rigè n e, In Numéros, 23, 8 ; P G 12, c. 753. « Post hanc sequitur sexta festivi-
tas, quae dicitur Novorum, id est, cum primitiae de novis fructibus offeruntur.
Ubi enim seminatus fuerit et diligenter excultus, atque ad maturitatem pervenerit
seges, tune in fructum perfectione festivitas Domini geritur. Si ergo et tu vis Novo
rum diem festum agere cum Domino, vide quomodo semines, aut ubi seminas,
ut possis taies metere fructus, ex quibus laetari facias Deum et agere diem festum.
Quod aliter implere non poteris, nisi audias Apostolum dicentem : « Qui seminat in
spiritu, de spiritu metet vitam aeternam. » Si sic semines et sic metas, vere diem festum
âges Novorum. Propterea denique et propheta admonet dicens : Innovate vobis
novalia et nolite seminare super spinas. Qui ergo cor suum et interiorem hominem
Solution de quelques difficultés 93
rénovât de die in diem, iste sibi innovât novalia, et non seminat super spinas, sed
super terram bonam, quae reddat ei fructum tricesimum, aut sexagesimum, aut
centesimum. Iste ergo est qui in spiritu seminat, et colligit fructum spiritus. Fructus
autem spiritus, primum omnium est gaudium. Et merito diem festum novorum
fructuum agit, qui gaudium m etit; praecipue si simul metat et pacem et patientiam
et bonitatem et mansuetudinem, aliosque horum similes fructus si colligat, dignissime
novorum fructuum festivitatem Domino aget * (trad. J. M e h a t , SC 29,1951, p. 45°)*
* C f. supra, p. 43.
* In Iohannem, éd. P reu sch bn , 1 ,2 , n (G S C IV) p. 5. «”Exo|zev dpx^P6*
p é y a v , S ie X ijX u O é T a t o ù ç o ù p a v o u ç , ’ I y jo o ü v r è v u l è v t o u O so ô . *
94 Le temps de la joie
Il faut remarquer que tous les témoignages que nous avons cités
concernent une époque où la Cinquantaine avait déjà perdu son unité
primitive. Il semble cependant que la coutume de lire les Actes pendant
la «Pentecôte »remonte à une date antérieure à cette nouvelle organisa
tion du Temps pascal. L ’attribution des premiers versets du livre à la
messe de la Résurrection n’a pu se faire qu’à un moment où l’on ne
célébrait encore aucune fête de l’Ascension du Seigneur. C’est ce qui
explique qu’Augustin et Chrysostome aient pu parler d’une consuetudo
ecclesiae ou d’une tradition des anciens.
On ne saurait en conclure cependant que cette coutume vient des
origines de la solennité des cinquante jours, ni qu’il s’agit là d’un
usage universellement admis. L ’ordonnance byzantine dont nous
avons parlé suppose une synaxe quotidienne, ce qui ne peut pas être
le cas du temps où nous avons recueilli les premiers témoignages sur la'
tc£uty)xo(tty], à moins d’admettre que la lecture se faisait à un office
cathédral sans eucharistie. Et, si de nombreux lectionnaires comportent
des péricopes des Actes pendant les sept semaines qui suivent Pâques,
il n’est pas toujours possible d’y voir l’attestation d’une organisation
primitive. Il semble, par exemple, que, dans la tradition romaine,
It Cornes de Würzburg (vie siècle) ait remplacé par des péricopes tirées
de l’ouvrage de saint Luc des listes plus anciennes empruntées aux
Epîtres catholiques3. Et, sans entrer dans une étude des divers lection
naires, qui s’avère difficile en raison du caractère lacunaire et tardif
des documents que nous avons, nous pouvons signaler que le rite
syrien jacobite, tel au moins que le décrit, au XIVe siècle, le patriarche
Athanasios V, ignore totalement la lecture des Actes des Apôtres
Il semble donc que Baumstark a dépassé, dans ses conclusions,
la portée des témoignages qu’il utilisait, lorsqu’il a considéré la lectio
continua du TcevrYptocrràpiov byzantin comme un « phénomène aussi
ancien que largement répandu (eine ebsenso uralte me weitverbreitete
Erscheinung *) ». Peut-être faut-il dire plutôt, avec J. Boeckh, qu’en
se diffusant dans un grand nombre d’Ëglises, cette coutume a contribué
à donner un nouveau visage à la Cinquantaine déjà existante *. Il n’en
demeure pas moins que nous avons là une tradition bien attestée à une
certaine époque dans la plupart des Églises, nourrie à des sources
vénérables et capable d’avoir une profonde résonance dans la
conscience chrétienne; la justification que s’est efforcé d’en donner
saint Jean Chrysostome n’a rien perdu de sa valeur. C ’est ce qui lui
a permis fort heureusement de survivre au laetissimum spatium dans un
grand nombre de liturgies. Le bréviaire romain, s’il en était besoin,
serait là pour nous le rappeler.
2. — LA MI-PENTECÔTE