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COURS DE CHIRURGIE

DIGESTIVE
Pour les étudiants de Médecine,
RDC

Dr. AHUKA ONA LONGOMBE


Agrégé de l'Enseignement Supérieur en Médecine
Professeur de Chirurgie
Faculté de Médecine
Université de Kisangani

Année Académique: 2001-2002


Chirurgie digestive 2

TABLE DES MATIERES


Introduction : LES GENERALITES

Chapitre I: LES AFFECTIONS DE LA PAROI ABDOMINALE

1. Herniologie
2. Eventration

Chapitre II: LES GRANDS SYNDROMES CHIRURGICAUX DU TUBE DIGESTIF

1. Le drame abdominal
2. Les traumatismes abdominaux
3. Les péritonites aiguës
4. L'occlusion intestinale aiguë
5. Les pathologies chirurgicales de l’appendice
6. Le diagnostic et traitement des hémorragies digestives

Chapitre III: LES PATHOLOGIES CHIRURGICALES REGIONALES

1. Le péritoine et ses pathologies


- La physiopathologie du péritoine
- Les adhérences

2. L’œsophage

- Les notions générales de l'anatomie, l'histologie et la physiologie de l’œsophage


- Les pathologies:
- Cancer de l’œsophage
- Reflux gastro œsophagien
- Oesophagites
- Hernies hiatales
- Megaoesophage
- Maladies rares et syndromes à nom propre

3. L'estomac-duodénum

- Rappels
- Maladies ulcéreuses gastroduodénales
- Hypergastrinémies
- Gastrites aiguës, gastrite hémorragiques et lésions aiguës hémorragiques
- Pathologie gastroduodénale iatrogène
- Tumeurs gastriques
- Complications après chirurgie gastrique

4. L’intestin grèle

- Ischémie intestinale chronique


- Infarctus du mésentère
- Obstruction intestinale du grèle
- Affections inflammatoires en dehors du Crohn
- Ischémie intestinale aigue
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- Fistules intestinales du grèle
- Tumeurs de l’intestin
5.La vesicule biliaire et les voies biliaires

- Rappels anatomo-physiologiques
- Moyen de diagnostic des voies biliaires
- Lithiase biliaire
- Angiocholite

6. Le foie

- Traumatisme
- Abcès hépatique

7. Pancréas et rate
- Pancréas
- Malformations congénitales
- Pancréatite
- Tumeurs
- Rate
- Anatomie
- Splénectomie
- Autres techniques

8. Le colon
- Cancer du colon
- Cancer de l’ampoule rectale
- Prolapsus du rectum
- Les diverticules du côlon

9. Chirurgie des hypertensions portales

10. La proctologie
- Sémiologie
- Hémorroïdes
- Prurit anal et dermite péri-anale
- Maladie pilonidale
- Syphilis
- Anorectites sexuellement transmissibles
- Fissure anale

Chapitre IV. L’ANTIBIOTHERAPIE PROPHYLACTIQUE (ABP) EN CHIRURGIE DIGESTIVE


Chapitre V. LES COMPLICATIONS EN CHIRURGIE DIGESTIVE
Chapitre VII. LE DRAINAGE EN CHIRURGIE DIGESTIVE

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INTRODUCTION
Le Cours de Pathologie chirurgicale digestive que nous présentons dans ces pages est
certainement une des parties les plus importantes des spécialités chirurgicales dans le contexte qui est
le nôtre. La Chirurgie Digestive est riche en rebondissements et elle réserve des surprises même à un
chirurgien chevronné. C'est une des raisons pour qu'elle mérite le plus grand nombre d'heures de toutes
les spécialités chirurgicales enseignées dans nos Facultés de Médecine. Certes, ce temps accordé est
minime quand on regarde la richesse de ses pathologies. Nous allons donc essayer de dire l'essentiel
dans les cours magistraux en insistant sur les affections couramment rencontrées dans nos conditions
de travail. Par exemple les péritonites d'origine typhique ou amibienne ne sont plus détaillées dans les
Traités chirurgicaux en Occident à cause de leur rareté et pourtant chez nous elles sont fréquemment
rencontrées dans notre pratique quotidienne et elles sont ainsi dignes d'intérêt.

Nous avons ainsi parcouru diverses maladies pour donner à nos étudiants un large spectre que
mérite la Chirurgie Digestive. Nous avons cependant insisté sur les maladies fréquentes comme les
hernies et surtout sur les drames chirurgicaux abdominaux. Ce dernier chapitre est sûrement le chapitre
le plus important dans cette spécialité vu sa grande fréquence et la mise en jeu du pronostic vital au
moindre retard de diagnostic et de prise en charge. A côté des pathologies régionales du système
digestif, nous avions exposé les complications en Chirurgie Digestive, les principes
d'antibioprophylaxie et les modalités de drainage dans cette spécialité.

Fidèle à notre conception de l'exercice de la chirurgie chez nous, nous avions cité les examens
paracliniques de pointe sans nous étaler (par exemple le Scanner, la tomodensitométrie, l'échographie,
etc…) à cause de leur inaccessibilité dans les hôpitaux ruraux des pays sous développés.

Ainsi exposées ces notes de cours, nous avions voulu qu'à la fin l'étudiant soit capable de:
1. Faire le diagnostic des pathologies chirurgicales digestives courantes
2. Connaître la conduite à tenir devant ces affections
3. Faire face aux urgences chirurgicales digestives en procédant aux actes salutaires
pouvant sauver le patient: réanimation, etc. …
4. Orienter précocement le patient dans la bonne direction par son examen physique
suffisamment précis et ces connaissances de la symptomatologie et de l'évolution des
affections chirurgicales digestives
5. Connaître les difficultés et les possibilités de complications des affections
chirurgicales digestives et comment les prendre en charge.

Une chose que je regrette, et pour laquelle je dois des excuses aux lecteurs, c'est de n'avoir pas
cité la référence de nombreux ouvrages consultés pour mettre au point ces notes. Ce sacrifice m'a été
imposé par les limites du volume. Je n'ai cependant rien avancé qui ne soit dûment prouvé ou qui ne
puisse être vérifié ; même mes statistiques personnelles.

Nous pensons qu'avec ces notes de Chirurgie Digestive, nos étudiants pourront valablement se
débrouiller dans leur pratique médio-chirurgicale future où les conseils d'un aîné, les moyens de
communication, les examens complémentaires, etc.… font défaut. Nous vous souhaitons une bonne
chance dans l'exploitation de ce syllabus. Que Dieu vous bénisse.

Prof. Dr AHUKA ONA LONGOMBE

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CHAPITRE I :

AFFECTIONS DE LA PAROI ABDOMINALE

I. HERNIES

1. Généralités

2. Etranglement herniaire

3. Variétés topographiques des hernies

- Hernies inguinales

- Hernies crurales

- Hernies ombilicales acquises

- Hernies de la ligne blanche

II. EVENTRATIONS

1. Eventrations spontanées

2. Eventrations traumatiques

3. Indications thérapeutiques

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I. HERNIES

GENERALITES

Définition.- Caractérisée par l’issue des viscères abdominaux et pelviens hors des parois
abdomino-pelviennes, la hernie typique ou spontanée survient en dehors de tout traumatisme par suite
de dispositions spéciales congénitales ou acquises.

Est dite congénitale non seulement la hernie qui existe à la naissance, mais encore toute hernie
qui, aussi tardive que soit sa date d’apparition, peut être considérée comme en rapport avec un arrêt de
développement de la paroi.

Est dite acquise la hernie qui se crée elle-même un chemin dans une région plus spécialement
affaiblie.

Les hernies se localisent en certaines régions qui prennent le nom de zones herniaires. On
désigne la hernie par le nom de son territoire anatomique (hernie inguinale, crurale, etc.). Chacune de
ces variétés de hernies présente des caractères propres qui en imposent l’étude individuelle. De même,
le contenu de certaines hernies fera l’objet de paragraphes distincts (gros intestin, vessie, annexes,
etc...). Mais il est indispensable, pour la clarté du sujet, d’étudier tout d’abord les caractères généraux
qui se retrouvent dans toutes les hernies.

Nos statistiques personnelles au Centre Médical Evangélique de Nyankunde montrent sur une
série de 1.815 herniorraphies les faits suivants après une brève introduction.

INTRODUCTION

Les hernies constituent une des causes les plus fréquentes de consultation en pratique médicale
générale. Dans les milieux les moins favorisés sur le plan médical, leur incidence est élevée et on
rencontre de nos jours des formes historiques allant au-delà de genoux en Afrique comme il y a 20 ans

En Afrique Noire et plus particulièrement en République Démocratique du Congo, plusieurs


publications font état d’une fréquence remarquable des hernies dans des services de chirurgie générale.
Elles font effectivement partie de la pathologie chirurgicale journalière et il nous a semblé intéressant
de rapporter notre expérience à ce sujet.

Cette étude porte sur une série de 1663 patients hernieux reçus et opérés au C. M. E.
Nyankunde pendant une période de 20 ans; allant du 1er janvier 1980 au 31 décembre 1999. Nous
avons ainsi colligé 1815 hernies (un patient pouvant être porteur de deux ou trois hernies de sièges
différents) pendant cette période.

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1. FREQUENCE GLOBALE

Tableau N° I : Fréquence annuelle des hernies

ANNEE NOMBRE DE CAS TOTAL DES INTERVENTIONS


DE HERNIES MAJEURES.

1980 175 1215


1981 166 1720
1982 138 1273
1983 130 1274
1984 126 1800
1985 107 1535
1986 96 1540
1987 87 1305
1988 67 1310
1989 50 951
1990 61 646
1991 46 534
1992 88 642
1993 61 587
1994 91 721
1995 79 945
1996 65 779
1997 24 567
1998 37 530
1999 41 536
____ _____
TOTAL 1663 20410

Pendant une période de 20 ans, nous avons opéré 1815 hernies soit une moyenne de 90,7
herniorraphies chaque année. La herniorraphie représente ainsi 11,2 % de toutes nos interventions
majeures (1815 hernies sur 20410 opérations majeures).

Le tableau N° I nous permet de remarquer que le nombre de hernies dimunue d’une année à
l’autre depuis 1986. Cela peut s’expliquer par l’implantation progressive autour de Nyankunde des
praticiens capables de prendre en charge ce genre de malades.

2. AGE.
Tableau N° II. Repartition suivant l’Age

AGE NOMBRE DE MALADES POURCENTAGE


0 – 15 ANS 297,00 17,89
Plus de 15 ans 1366,00 82,01
TOTAL 1663,81 100,00

Ce tableau nous conduit à constater que la hernie est une maladie frappant éventuellement les
patients au-delà de 15 ans. Ceci reste classique car c’est une pathologie des sujets au cours de leur vie
active.

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3. SEXE.

Tableau N° III : Sexe

Sexe Nombre de cas Pourcentage

Masculin 1321 79,40


Féminin 342 20,60
Total 1663 100,00

La prédominance du sexe masculin est notable dans le rapport de 4 : 1 (M/F)

4. TYPES DES HERNIES


Tableau N° IV : Répartition suivant le type de hernies

TYPES NOMBRE DE CAS POURCENTAGE

H. inguinale 1474 81,2


H. ombilicale 149 8,2
H. épigastrique 110 6,0
H. fémorale 58 3,2
H. incisionnelle 17 0,9
H. de spigel 7 0,4
H. lombaire 2 0,1
TOTAL 1815 100,00

De ce tableau, on note que la hernie inguinale occupe la première place avec 81,2 % des cas.
Elle est suivie en deuxième position par la hernie épigastrique dans 8,2 % des cas et la hernie
ombilicale dans 6 % des cas. Les autres variétés herniaires sont relativement peu rencontrées.

5. ASSOCIATIONS HERNIAIRES

159 associations herniaires ont été rencontrées selon la répartition suivante :


Hernie inguinale bilatérale…………….……………………....96
Hernie inguinale et ombilicale………………………………...10
Hernie inguinale et épigastrique………………………….….....6
Hernie inguinale et hydrocele………….…………………......33
Hernie inguinale bilatérale et ombilicale……………………....2
Hernie fémorale bilatérale …………………………………….3
Hernie fémorale et inguinale…………………………………..3
Hernie ombilicale et épigastrique……….…….……………….3
Hernie fémorale et épigastrique………………………………..1
Hernie inguinale bilatérale et épigastrique…………………….1

La hernie inguinale bilatérale est l’association herniaire la plus fréquente. Nous l’avons
retrouvée dans 96 cas. Elle a été associée chez quatre patients dont deux avec une hernie ombilicale et
les deux autres avec une hernie épigastrique :toutes ces hernies ont été opérées en une seule séance
opératoire.

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6. ETRANGLEMENT HERNIAIRE

ANNEE NOMBRE DE CAS DE TOTAL DES POURCENTAGE


HERNIES ETRANGLEES MALADES
1980 9 160 5,6
1981 7 159 4,4
1982 7 123 5,7
1983 7 121 5,8
1984 9 119 7,6
1985 5 100 5,0
1986 7 94 7,5
1987 8 81 9,9
1988 7 63 11,1
1989 4 50 8,0
1990 2 61 3,2
1991 2 46 4,3
1992 15 88 17,0
1993 11 61 18,0
1994 5 91 5,4
1995 6 79 7,5
1996 5 65 7,6
1997 3 24 12,5
1998 2 37 5,4
1999 3 41 7,3

TOTAL 124 1663 7,4

7,4 % de malades arrivent dans un tableau de hernie étranglée.

Les hernies traumatiques, les éventrations post-opératoires ne sont pas au sens strict du mot des
hernies (cf. Eventrations).

Nous éliminerons aussi du cadre de cette étude les hernies internes (hernies rétro-péritonéales,
hernies à travers l’hiatus de Winslow), qui appartiennent au chapitre de l’occlusion intestinale.

Chez certains sujets, les hernies constituent une infirmité génante, mais ne donnent lieu à aucun
accident appréciable: on les dit alors simples ou réductibles. Chez d’autres hernieux, des complications
apparaissent qui dépendent soit de l’irréductibilité de la hernie, soit de lésions atteignant les différents
plans de la région malade: la hernie est dite compliquée.

Remarquons que hernie compliquée ne signifie pas forcément hernie irréductible, encore que
les deux termes soient pris assez souvent l’un pour l’autre.

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HERNIE SIMPLE (OU REDUCTIBLE)

Toute hernie présente des caractères communs anatomiques aussi bien que cliniques et se
trouve soumise à des règles générales de thérapeutique.

Anatomie pathologique.

La dissection opératoire montre qu’une hernie est constituée par un trajet anatomique, des
enveloppes et un contenu.

Trajet.- Le trajet est tantôt réduit à un simple orifice, à un anneau musculo-aponévrotique,


comme dans les hernies de la ligne blanche, tantôt c’est un véritable canal, comme pour les hernies
inguinales et les hernies crurales: dans ce cas, le trajet présente deux orifices placés l’un profond ément
du côté du péritoine (orifice interne), l’autre à la surface sous la peau (orifice externe). La hernie,
lorsqu’elle parcourt un trajet véritable, peut traverser la paroi soit obliquement (hernie oblique interne
ou externe),soit perpendiculairement à elle (hernie directe).

Le point rétréci au niveau duquel la hernie quitte l’abdomen est le pédicule.


On distingue: la pointe de hernie (engagement dans l’anneau interne), la hernie intertistitielle
(située dans l’épaisseur de la paroi), la hernie complète (où l’orifice externe est franchi).

Enveloppes.- Il faut décrire l’enveloppe propre de la hernie, le sac et les enveloppes externes,
qui représentent les plans anatomiques plus ou moins modifiés refoulés par le sac et se disposant
autour de lui.

Le sac herniaire.- Il est formé par le diverticule péritonéal qui s’est engagé dans le trajet
herniaire et qui renferme les organes prolabés. Dans les hernies acquises, le sac est dû à la locomotion
du péritoine, qui glisse facilement sur la face profonde de la paroi grâce à la laxité du tissu cellulaire
sous-séreux. Dans les hernies congénitales, c’est avant la naissance que le sac péritonéal a déjà glissé
au dehors, où il formait une poche annexée à la grande poche péritonéale. Dans certaines variétés de
hernies (hernies ombilicales, par exemple), on admet que le sac adhérant à l’anneau fibreux se
constitue surtout par distension du diverticule péritonéal primitif, ce qui explique sa minceur et sa
fragilité.

La MORPHOLOGIE du sac herniaire est variable (rond cylindrique, conique, etc...), mais le
sac présente toujours une partie rétrécie et profonde par laquelle il se continue avec le péritoine: le
collet, une partie terminale renflée, le fond, une partie intermédiaire plus ou moins étendue, le corps.
La surface externe du sac est entourée d’une enveloppe celluleuse plus ou moins épaisse et
vasculaire, surtout au niveau du collet.
La surface interne, de couleur blanc rosé, analogue à celle du péritoine normal, se modifie, du
fait de la sclérose, dans les vieilles hernies, où elle apparaît blanchâtre ou grisâtre et se revêt
d’adhérences qui l’unissent aux viscères herniés. La paroi du sac s’épaissit, et des taches noires ou
brunâtres, parfois même des plaques fibro-calcaires s’y forment.

Au niveau du collet, la séreuse se fronce pour s’engager dans l’anneau inextensible de la paroi.
Progressivement, dans les hernies anciennes, le collet, de souple et déplissable devient rigide, fibreux,
inextensible et adhère à l’anneau fibreux avoisinant.

La structure du sac est celle du péritoine. Le sac est composé d’une seule couche séreuse; la
couche cellulo-fibreuse qui lui est juxtaposée n’en fait pas partie. C’est une couche adventice qui est
toujours séparée de la couche séreuse par un plan de clivage, que l’on doit utiliser dans la dissection du
sac pour éviter tout suintement sanguin.

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Il est classique de décrire les anomalies du sac:

1 ANOMALIES PAR DEFAUT: absence complète ou partielle du sac. L’absence du sac est
de règle dans les hernies ombilicales du type embryonnaire qui se produisent à un stade du
développement où le péritoine n’est pas encore formé. Les sacs incomplets s’observent dans les
hernies des organes sous-péritonéaux (vessie, par exemple) et dans les hernies des portions
normalement fixes du gros intestin.

2 ANOMALIES PAR EXCES: ce sont les sacs à collets multiples (en sablier, en chapelet), qui
se voient souvent dans les hernies inguinales congénitales; les sacs à cloisonnements longitudinaux,
rares, qui aboutissent à la formation de sacs secondaires parallèles au sac principal.

Assez souvent s’observent des bosselures à la surface du sac, amorces de véritables diverticules
qui forment des logettes accessoires communiquant avec la cavité principale du sac par des orifices
rétrécis, causes possibles d’étranglements à l’intérieur du sac. Ceci se voit surtout dans les hernies
ombilicales de l’adulte.

Enfin, on peut observer des sacs multiples. Il s’agit alors de deux sacs munis chacun d’un collet
comme c’est le cas dans la hernie inguinale congénitale du type propéritonéal.

3 ANOMALIES PAR MODIFICATIONS PATHOLOGIQUES SPECIALES.- Ce sont les


sacs déshabités. Tantôt le sac est petit, étroit et, bien que communiquant avec le péritoine, ne contient
rien: il est fréquent de le trouver caché par un important lipome préherniaire qui le masque. Tantôt le
sac est déshabité parce que le collet s’est oblitéré par des adhérences. Rarement, dans ce cas, le sac
s’oblitère totalement. Le plus souvent, les adhérences ne s’établissent qu’au niveau du collet, et, les
parois sécrétant un liquide séreux (analogue à la sérosité péritonéale), un kyste sacculaire se
développe.

Enveloppes externes.- Elles sont constituées par les différents plans anatomiques de la région
plus ou moins modifiés, épaissis et fusionnés dans les vieilles hernies.

Les couches celluleuses et aponévrotiques sont souvent infiltrées de graisse (lipome pré-
herniaire), et des bourses séreuses, véritables hygromas, peuvent se développer dans le tissu cellulaire.

Contenu.- L’intestin grêle, ou le côlon, l’épiploon constituent le contenu habituel des hernies.
Dans les hernies ombilicales embryonnaires, tous les viscères, sauf le pancréas peuvent se rencontrer.
En dehors de l’intestin et de l’épiploon, d'autres organes comme la vessie, les annexes, peuvent
pénétrer dans les sacs herniaires.

Fréquence.- Infirmité très commune, la hernie est plus fréquente chez l’homme que chez la
femme (quatre hommes pour une femme), et la proportion des hernies varie avec les différents âges de
la vie: très fréquente pendant la première année de la vie, la hernie se raréfie ensuite jusqu’à
l’adolescence, puis suit une progression constante au cours de l’âge moyen de la vie pour atteindre son
maximum à la vieillesse et décroitre ensuite pendant l’extrême vieillesse.

Tous les facteurs susceptibles de provoquer l’affaiblissement de la paroi abdominale et la ptose


des viscères sont autant de causes prédisposantes à l’apparition des hernies; c’est ainsi qu’agissent les
grossesses répétées, l’obésité, les maladies aiguës ou chroniques, qui s’accompagnent
d’amaigrissement rapide et de déficience musculaire.

Dans la période de restrictions alimentaires que nous avons traversée pendant toutes les guerres
civiles, on a remarqué une augmentation importante du nombre des hernies: on a incriminé

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l’amaigrissement, la fonte musculaire et graisseuse et certaines altérations de la qualité des muscles
d’ordre vitaminique.
Les pulmonaires chroniques, les constipés, les prostatiques, chez qui l’effort s’ajoute à un état
général souvent précaire, sont prédisposés aux hernies.
Il n’est pas rare de noter, chez les sujets atteints de ces différentes affections, un aspect
particulier du ventre: ventre plat et mou des gens fatigués, ventre en besace des obèses, ventre à triple
saillie de Malgaigne ou double distension de l’aine de Berger des prédisposés héréditaires.

Cause déterminante.- Il n’y en a qu’une: l’effort, qui résulte de la contraction énergique du


diaphragme et des muscles de la paroi. L’effort peut être brusque et violent. Il est parfois atténué mais
répété, et souvent il s’effectue dans une fausse position. Sous l’influence de l’effort, la pression
s’accroît à l’intérieur de la cavité abdominale, principalement dans la région sous-ombilicale; l’intestin
fuit dans les parties déclives et s’il rencontre un canal préformé, ou un point faible quelconque, il
s’extériorise.

Mécanisme.- Le mécanisme est variable suivant qu’il s’agit d’une hernie congénitale ou d’une
hernie acquise.

Dans la hernie congénitale, il existe un sac préformé et le rôle de ce sac est capital. Habité
parfois dès la naissance, ce sac peut rester vide pendant longtemps, jusqu’à ce que, sous l’influence
d’un effort, les viscères viennent s’y engager: ceci explique que des hernies peuvent ne se manifester
que tard dans la vie tout en étant des hernies congénitales.

Dans ce type de hernies, la paroi musculo-aponévrotique est souvent de bonne qualité: c’est la
malformation congénitale qui est, avant tout, responsable de la hernie.

Les hernies acquises sont de mécanisme plus complexe en apparence.

La hernie acquise est le plus souvent ce qu’on appelle une hernie de faiblesse, survenant chez
des sujets à paroi déficiente, et l’effort ne joue dans son apparition qu’un rôle occasionnel. C’est la
hernie des vieillards, des affaiblis, des malades: c’est une maladie et non point un accident.

ETUDE CLINIQUE

Les hernies se traduisent en clinique avant tout par des signes physiques.
En effet:
LES SIGNES FONCTIONNELS sont, en général, très discrets. La plupart des hernies sont
même absolument indolentes, et c’est le plus souvent pour une saillie anormale apparue dans une zone
herniaire que le malade vient consulter. Toutefois, certaines hernies sont douloureuses: c’est le cas des
hernies épigastriques, ainsi que de certaines pointes de hernie. Les hernies d’un certain volume sont
souvent les mieux tolérées.

Ces phénomènes douloureux s’accentuent dans la station debout prolongé, au cours de l’effort
de la marche.

Les signes physiques ne font, en pratique, jamais défaut. Il est nécessaire de pratiquer l’examen
du hernieux, d’abord debout puis couché.

L’examen en position debout est indispensable, car certaines hernies se réduisent spontanément
dans le décubitus. Il est même parfois utile de faire marcher un peu le sujet, de le faire tousser pour que
le sac se remplisse et que la hernie apparaisse.

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La tumeur herniaire, dans les cas typiques, forme une saillie, sessile et arrondie, régulière ou
bosselée.

L’examen du sujet couché permet de palper la hernie, d’en apprécier la consistance rénitente et
élastique (contenu intestinal), molle et irrégulière (épiploon).

Sonore à la percussion lorsqu’elle contient de l’intestin, la hernie est mate dans les cas où le sac
ne renferme que de l’épiploon.

Fait capital, la tumeur herniaire se continue dans le ventre par une portion rétrécie, le pédicule,
que l’on palpe aisément.

On recherche ensuite la réductibilité de la hernie. Les hernies de moyen volume se réduisent


aisément, mais, pour les grosses hernies, la réduction nécessite certaines précautions; on doit essayer
de réduire lentement et progressivement en commençant non pas par le fond, mais par le segment
herniaire voisin du pédicule, où se trouvent les parties engagées les dernières. Il est souvent utile
d’utiliser la position déclive de Trendelenburg:on arrive ainsi fréquemment à réduire de grosses
hernies que le malade croyait irréductibles.

Au cours de la réduction, on obtient parfois quelques notions utiles sur la nature du contenu;
gargouillement qui atteste la présence d’intestin, sensation de frémissement au palper qui témoigne de
la fuite de l’épiploon.

Lorsque la hernie est réduite, il faut, en invaginant le doigt dans le sac herniaire à travers les
parties molles, arriver à sentir l’anneau pour en apprécier les dimensions et la résistance.

On fera ensuite tousser le malade, en laissant le doigt engagé dans l’anneau: on constate
aussitôt une impulsion des plus nettes. Cette impulsion fait ressortir la hernie et s’accompagne en
même temps d’une véritable expansion de celle-ci. Impulsion et expansion à la toux sont des caractères
essentiels de la tumeur herniaire. C’est surtout dans les pointes de hernie que la recherche de
l’impulsion est utile.

L’examen d’un hernieux ne doit pas se limiter à l’examen de la hernie. Il faut apprécier l’état
de la musculature pariétale, de façon à prévoir les possibilités de cure chirurgicale: on demandera au
sujet de contracter ses muscles abdominaux pour juger de leur qualité. Puis, le faisant mettre debout,
on recherchera s’il existe le classique ventre à double saillie, témoin de la déficience de la paroi.

Enfin, un examen complet est indispensable: examen de l’appareil respiratoire, de l’appareil


génito-urinaire, etc... Ce n’est qu’après avoir établi le bilan du malade qu’on pourra poser l’indication
thérapeutique.

Diagnostic.

Le diagnostic de hernie est en général très facile et, dans ce chapitre de généralités, nous nous
bornerons à indiquer d’une façon très théorique les erreurs possibles: ou bien la hernie est de petit
volume, peu accessible (pointe de hernie), et l’on risque de la méconnaître; ou bien la tumeur herniaire
est visible et palpable, mais, du fait de son irréductibilité, on la prend à tort pour une tumeur
superficielle (lipome); ou bien, par une erreur inverse et lourde de conséquences, on croit à une hernie
alors qu’il s’agit d’un abcès froid symptomatique d’une lésion vertébrale ou pelvienne latente.

Evolution.

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La plupart des hernies, abandonnées à elles-mêmes, augmentent de volume avec l’âge et
mettent les malades sous la menace de nombreux accidents et notamment de l’étranglement herniaire.

Peut-on parler de guérison pour les hernies ? Jamais, en tout cas, chez l’adulte, où seul le
traitement chirurgical peut amener la guérison.

Mais, chez l’enfant, il semble que certaines hernies puissent guérir par le port d’un bandage: le
fait n’est pas contestable pour les petites hernies ombilicales du jeune enfant. On a dit aussi que
certaines hernies inguinales congénitales pouvaient guérir chez l’enfant au-dessous de dix ans, par
oblitération du canal péritonéo-vaginal. Mais ce n’est pas là une éventualité fréquente, et l’on demeure
sceptique sur ces soi-disant guérisons, à en juger par le nombre de ces sujets dits guéris et qui, à
l’occasion du moindre effort, font, quelques années plus tard, une hernie inguinale.

Traitement.

Dans le traitement des hernies, une seule possibilité thérapeutique se présente: on traite
chirurgicalement la hernie par résection du sac et réfection de la paroi; c’est la cure opératoire (terme
préférable à celui de cure radicale).

ETRANGLEMENT HERNIAIRE

Définition.- La complication la plus grave qui puisse survenir au cours de l’évolution des
hernies, l’étranglement herniaire, est caractérisée par la constriction serrée de l’intestin ou de
l’épiploon à l’intérieur d’un sac herniaire; beaucoup plus rarement d’autres organes, trompes, ovaires,
peuvent être étranglés.

C’est une constriction permanente qui gêne la circulation sanguine et arrête le cours des
matières: elle entraîne, si la réduction opératoire n’est pas pratiquée d’urgence, des accidents de
sphacèle (gangrène intestinale ou épiploïque) et des accidents d’occlusion qui aboutissent à la mort par
péritonite ou par septicémie.

Toutes les hernies peuvent s’étrangler, mais ne rentrent pas dans cette étude les étranglements
des hernies internes, qui seront étudiés à un autre chapitre.

Etiologie.

Fréquence.- C’est l’accident le plus fréquent de l’évolution des hernies. 7,4 % des malades
arrivent dans notre service dans ce tableau d'étranglement herniaire.

Causes prédisposantes tenant au porteur de la hernie.- Age.- C’est surtout chez l’adulte et
le vieillard que l’étranglement s’observe. Cependant il n’est pas rare avant la vingtième année. Chez
l’enfant, il s’agit le plus souvent d’étranglements légers du fait de la souplesse des anneaux séreux du
canal péritonéo-vaginal. L’étranglement vrai existe cependant, il se voit presque exclusivement chez le
nourrisson et surtout dans les six premiers mois de la vie.

Sexe.- L’étranglement herniaire est plus fréquent chez la femme (deux tiers des cas). Cette
différence peut s’expliquer par la plus grande fréquence, chez la femme, des hernies crurales, dont on
sait la tendance à s’étrangler.

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Causes prédisposantes tenant à la hernie.- Siège de la hernie,- Ce sont les hernies crurales
qui donnent le plus pourcentage d’étranglements (50 à 60 p. 100), car ce sont des hernies peu
volumineuses et présentant un anneau fibreux serré, toutes conditions favorables.

L’étranglement est à peu près d’égale fréquence dans les hernies inguinales et ombilicales

Age de la hernie.- La hernie peut exister déjà depuis plus ou moins longtemps quand
l’étranglement apparaît. Mais on a insisté sur la fréquence relative des étranglements d’emblée: c’est
surtout le cas des hernies inguinales congénitales et des hernies crurales, ces dernières existant souvent
sous forme de petites hernies à sac déshabité et méconnues de leur porteur avant que ne survienne la
complication.

Volume de la hernie.- Ce sont les petites hernies qui s’étranglent le plus facilement, car ce
sont celles qui répondent à des anneaux fibreux encore résistants. L’étranglement est plus rare dans les
grosses hernies et reconnaît alors le plus souvent un mécanisme particulier d’occlusion intrasacculaire
par brides.

Causes déterminantes.- Il n’y a qu’une cause déterminante: l’effort (sous toutes ses formes),
mouvement violent, soulèvement d’un fardeau, etc ... Rappelons que, chez le vieillard, les efforts de
toux sont parfois responsables de l’étranglement.

Anatomie pathologique.

Nous envisagerons d’abord les causes anatomiques de l’étranglement, puis les lésions du sac
herniaire et de son contenu.

Causes anatomiques de l’étranglement.- Il en existe deux principales: 1 les anneaux fibreux


naturels; 2 le collet du sac.

1 Les anneaux fibreux.- Ils jouent un rôle plus ou moins important suivant le siège de la
hernie.

Dans les hernies crurales, le rôle de l’anneau fibreux est essentiel: l’arcade crurale, le ligament
de Gimbernat et le ligament de Cooper forment un anneau fibreux très rigide et difficilement
extensible.

C’est sur le bord tranchant du ligament de Gimbernat que l’intestin vient se couder et former un
éperon.

Le rôle de l’anneau fibreux semble secondaire dans les hernies inguinales: il est rare qu’il soit à
lui seul responsable des accidents. Le plus souvent, l’anneau inguinal superficiel s’est laissé distendre
et n’a plus grande action sur les viscères. Toutefois, chez les sujets jeunes, à paroi solide, à anneau
inguinal étroit, il est possible de voir une petite hernie, sous un effort violent, s’étrangler au niveau de
l’anneau.

Les anneaux fibreux exercent en principe une compression circulaire; mais, en fait, la striction
souvent ne s’effectue que par une partie de l’anneau: c’est le cas dans la hernie crurale, où les
vaisseaux n’offrent pas de résistance en dehors, et c’est également le cas lorsque l’épiploon hernié
forme matelas et s’interpose d’un côté entre l’intestin et l’anneau.

2 Collet du sac.- Son rôle est capital dans certains cas, notamment dans les hernies inguinales.
C’est ainsi que, dans les hernies congénitales, l’orifice profond du canal péritonéo-vaginal forme un
diaphragme qui est responsable de la striction, diaphragme serré, très difficile à dilater. Parfois à la

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striction par le collet s’ajoutent des étranglements multiples intrasacculaires à travers plusieurs
anneaux de Ramonède.

Dans les hernies acquises, ce n’est qu’à la longue que le collet devient un agent d’étranglement.
Sous l’influence du port du bandage, se développe une sclérose qui épaissit le collet, le rétracte et le
rend inexistensible et rigide.

Souvent, ailleurs, le collet du sac et l’anneau fibreux deviennent solidaires en adhérant l’un à
l’autre, et l’étranglement résulte de leur action combinée.

3 Causes plus rares d’étranglement.- Nous rappellerons la possibilité, rare d’ailleurs,


d’étranglement dans un sac propéritonéal; dans certaines hernies congénitales, le sac développé entre
le péritoine et les muscles peut être seul étranglé, tandis que le sac occupant la place habituelle dans le
trajet ne l’est pas.

ETRANGLEMENTS INTRASACCULAIRES.- Ils sont dus à des diaphragmes qui mettent en


communication la cavité principale du sac avec un diverticule, soit, plus souvent, à une agglutination
d’anses dans le sac. Ces agglutinations d’anses sont fréquentes dans les grosses hernies ombilicales et
inguinales. Il s’agit de hernies anciennes, irréductibles, qui ont présenté des poussées d’étranglements
incomplets: des brides se sont développées entre les anses incarcérées, des adhérences sont venues
souder les anses les unes aux autres, et, finalement, ce sont de véritables occlusions par brides ou par
agglutination qui se développent dans ce type de hernie.

Lésions du sac herniaire.- Lorsqu’on opère une hernie étranglée, après incision des plans
superficiels, on tombe sur un sac globuleux, tendu, de coloration rougeâtre, brun foncé ou ardoisé, se
disséquant facilement.

Quelquefois, on trouve, avant de tomber sur le sac, un lipome préherniaire plus ou moins
enflammé ou de faux kystes présacculaires.

Mais, fait essentiel, dans l’immense majorité des cas, le sac contient du liquide. Il faut donc
inciser les parois du sac avec prudence, mais arriver jusqu’au liquide interposé entre les parois du sac
et l’intestin.

Ce liquide est d’abord citrin, puis brun, roussâtre, sanglant. On se souviendra que c’est un
liquide septique, et qu’il convient de protéger les parties molles voisines au moment de l’ouverture du
sac. Ce liquide devient de plus en plus septique à mesure que les lésions intestinales s’aggravent. Il
devient puriforme, fécaloïde, et se charge de gaz: c’est le classique phlegmon pyostercoral, qui
annonce la gangrène de l’anse herniée. Dans de tels cas, la peau présente déjà une teinte cuivrée et de
l’oedème. L’inflammation modifie les différents plans anatomiques et rend plus difficile la découverte
du sac, qui peut déjà être affaissé.

Lésions de l’intestin.- Phénomènes macroscopiques.- Lésions in situ.

A l’intérieur du sac d’une hernie étranglée, se trouve de l’intestin, le plus souvent de l’intestin
grêle, beaucoup plus rarement du gros intestin.

La longueur de l’anse étranglée est en règle assez réduite (10 à 20 centimètres dans la hernie
crurale, 20 à 30 dans la hernie inguinale).

Parfois seul le bord de l’intestin est étranglé (pincement latéral).

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Dans les grosses hernies inguinales ou ombilicales, la quantité d’intestin contenue dans le sac
est parfois considérable (1 mètre ou davantage).

La gravité des lésions de l’intestin dépend, bien entendu, de l’horaire de l’intervention, mais il
dépend surtout du mode d’étranglement. C’est ainsi que la gangrène intestinale apparaît rapidement
dans les étranglements serrés (hernie inguinale congénitale) ou dans les cas de coudure sur vive arête
(hernie crurale avec intestin coudé sur l’arête tranchante du ligament de Gimbernat). Elle sera plus
longue à apparaître dans les vieilles hernies inguinales, où l’étranglement, d’abord peu serré, se
complète à la longue sous l’influence de l’oedème et de la distension de l’intestin. Elle sera plus rapide
dans les cas où l’intestin seul se hernie que dans les entéro-épiplocèles, l’épiploon, par sa spasticité,
protégeant un certain temps l’intestin contre une striction trop serrée.

On décrit schématiquement trois périodes évolutives à ces lésions de l’intestin.

PREMIER PERIODE: stade de congestion.- La gêne de la circulation de retour entraîne de la


distension veineuse et de l’oedème des parois intestinales. En même temps, l’anse étranglée est le siège
d’une hypersécrétion intense et très rapidement présente une distension paralytique.

A l’ouverture du sac; l’anse est tendue, de couleur rouge vineux: ses parois sont épaissies par
l’oedème. La séreuse est dépolie, d’aspect poisseux. Dans le sac, on trouve un liquide citrin ou rosé.
Au niveau même du siège de l’étranglement, un sillon se dessine marquant une transition entre
l’intestin sus-jacent et l’anse étranglée. Au niveau du sillon d’étranglement, la paroi présente souvent
des suffusions sanguines sous-séreuses, car les lésions, en ce point, sont toujours en avance sur celles
de l’anse elle-même.

A ce stade, les lésions sont réversibles: après la levée de l’agent d’étranglement et l’aspersion
au sérum chaud, l’anse revient’ bien, et on peut sans crainte la réintégrer.

Toutefois, on a pu, rarement il est vrai, observer, dans des cas où les lésions paraissaient
bénignes, des infarctus post-herniaires continuant à évoluer vers la nécrose après la levée de
l’étranglement.

DEUXIÈME PERIODE.- Elle correspond à l’aggravation des lésions et notamment à la


formation, au niveau du sillon d’étranglement, de grave dégâts anatomiques.

La distension et la congestion de l’anse s’accentuent. L’intestin prend une couleur violette ou


noirâtre, par suite des suffusions hémorragiques sous-séreuses. De fausses membranes apparaissent par
endroits à la surface de l’anse. Le liquide du sac prend une teinte franchement hémorragique. Mais,
surtout au niveau du sillon d’étranglement, apparaît un cercle gris noir de mauvais aloi, tandis que la
paroi semble très amincie au toucher et presque réduite à la séreuse.

Une ulcération circulaire de la muqueuse progresse vers le péritoine au niveau de la striction,


préparant la rupture de l’anse en ce point faible.

TROISIÈME PERIODE: stade ultime de gangrène et de perforation.- C’est au niveau du sillon


d’étranglement que débute la gangrène: c’est toujours là qu’elle est maxima.

L’intestin sur le point de se gangréner présente une coloration brun noirâtre piquetée de points
jaunâtres; après l’épreuve longtemps prolongée du sérum chaud, de telles anses suspectes ne
reprennent pas une couleur rouge vif de bon aloi; elles restent flasques minces, et le péristaltisme ne
s’y rétablit pas.

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Au stade de gangrène confirmée, la paroi intestinale est d’un aspect qui ne trompe pas: la
coloration feuille-morte ou irisé verdâtre caractérise la gangrène confirmée; cette gangrène peut être
localisée ou diffuse. Localisée, elle se voit avant tout au niveau des sillons d’étranglement, sous forme
d’une rale circulaire intéressant en partie ou en totalité la circonférence de l’intestin. Sur le reste de
l’anse, on peut voir de petites plaques de sphacèle de dimensions variables et plus ou moins
rapprochées les unes des autres.

Enfin, au stade évolutif ultime, ces plaques escarrifiées tombent et entraînent une rupture
partielle ou totale de l’anse. La perforation est tantôt unique et large, tantôt ce sont des perforations
multiples et punctiformes en écumoire.

Lésions du mésentère et de l’épiploon.- Le mésentère est plus ou moins épaissi par l’oedème,
les veines en sont dilatées, puis thrombosées. Il est friable, ce qui explique les désinfections
mésentériques que l’on peut observer: soit spontanées, soit provoquées par des manoeuvres brutales.

Les mêmes lésions s’observent sur l’épiploon: congestion, oedème avec thrombose, puis
sphacèle s’y succèdent.

Lésions de l’intestin en amont et leur retentissement sur le péritoine abdominal.- Peu modifié
dans les premiers instants de l’étranglement, le segment intestinal afférent se laisse distendre, après
une phase plus ou moins longue de lutte. Ce segment intestinal est alors dilaté, congestionné,
contrastant avec le segment sous-jacent à l’étranglement, qui est pâle et affaisé.

A côté de ces phénomènes qu’on retrouve dans toutes occlusions aiguës, il importe de retenir
qu’au niveau de l’anse afférente se développent très vite des ulcérations sus-stricturales qui favorisent
la migration des bactéries dans la cavité péritonéale et qui peuvent aboutir à des véritables
perforations. Ce fait est lourd de conséquences: en présence d’une anse gangrenée, il ne faut pas
limiter l’étendue de la résection au segment sphacélé, mais on doit toujours réséquer un segment plus
ou moins long du bout afférent, de façon à emporter tout le territoire suspect.

Le péritoine réagit, au contact de l’intestin distendu et ulcéré, par un épanchement péritonéal


séreux (mais souvent déjà microbien) et, plus tard, par une véritable péritonite purulente (perforation
de l’intestin).

Nous décrirons rapidement deux variétés spéciales et rares d’étranglement herniaire.

Le pincement latéral.- Etranglement dans un orifice herniaire du bord libre de l’intestin sans
obstruction complète de sa lumière, le pincement latéral ne se voit que dans les hernies à orifice étroit
et à sac de faible volume. Le pincement latéral constitue en somme une hernie partielle étranglée, et
l’étranglement se fait d’emblée dans un sac qui, normalement, était vide. Dans l’immense majorité des
cas, le pincement latéral s’observe dans les hernies crurales; on en a quelquefois trouvé dans des
hernies inguinales.

C’est le plus souvent l’iléon, puis le jéjunum, rarement le gros intestin, qui subissent un
pincement latéral.

Les lésions observées sont sensiblement les mêmes que dans les hernies complètes: congestion,
formation d’un sillon, plaque ecchymotique occupant toute la surface pincée, puis gangrène et
perforation. Mais on n’observe que rarement des lésions à distance, et la circulation des matières et des
gaz n’est pas interrompue. A l’ouverture du sac, le pincement latéral se caractérise par une masse
sphérique rouge vineux ou noirâtre, qu’on prendrait facilement pour un deuxième sac. Lorsque
l’anneau est débridé et l’anse extériorisée, on a l’impression qu’il s’agit d’un diverticule de l’anse,

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mais très vite, le picement latéral réduit, l’intestin reprend son aspect normal, et le pseudo-diverticule
disparaît.

Le pincement latéral évolue comme un étranglement habituel, mais on a beaucoup insisté sur
la rapidité de la gangrene dans cette forme d’étranglement, que l’on peut attribuer à l’absence, dans le
sac, de mésentère jouant le rôle de coussinet élastique.

Etranglement rétrograde de l’intestin. – C’est une éventualité très rare: une anse en W est
engagée dans le sac herniaire et s’étrangle. La partie intermédiaire reste dans le ventre et peut être
seule sphacélée, alors que les deux anses situées dans le sac paraissent peu malades.

Physiologie pathologique.

La nécessité d’intervenir d’urgence en présence d’un étranglement herniaire s’explique par les
données suivantes:

1. Il s’agit d’une occlusion.

Occlusion haute le plus souvent (iléon ou jéjunum), d’où un retentissement rapide sur l’état
général: on connait le syndrome humoral de l’occlusion intestinale aiguë et la véritable intoxication qui
en résulte. Dans l’occlusion par hernie étranglée, les troubles humoraux sont toujours importants et
justifient une rééquilibration électrolytique correcte.

2. A côté de l’intoxication de l’organisme, il se produit une véritable septicémie à point de


départ intestinal se propageant surtout par voie lymphatique. Le colibacille, les anaérobies passent dans
la circulation générale, et on peut ainsi expliquer les complications infectieuses pulmonaires observées
après l’opération (congestion, broncho-pneumonie) et les lésions rénales et hépatiques qui peuvent
entraîner la mort de l’opéré, surtout lorsque l’intervention a été tardive.

3 Il ne faut pas oublier, enfin, qu’une hernie étranglée évolue fatalement vers la gangrène et la
perforation, d’où péritonite généralisée ou, plus rarement, phlegmon pyostercoral.

Mécanisme de l’étranglement herniaire.

La mésentère pénétrant avec la hernie se plisse au niveau du pédicule, formant un coin à base
intestinale et un coin à base abdominale s’opposant par leurs sommets au niveau du collet; le coin à
base intestinale, sous l’influence de l’élasticité du méso, tendrait à rentrer dans l’abdomen et
déterminerait ainsi l’occlusion des deux bouts intestinaux au niveau du collet.

En réalité, à côté des phénomènes mécaniques, interviennent des phénomènes vasculaires dont
le rôle est prédominant. Une anse plus volumineuse que d’habitude franchit le collet sous l’influence
d’un effort. Elle reste dans le sac (aucune force ne tendant à la ramener dans le ventre). Les
phénomènes vasculaires interviennent alors dans cette anse incarcérée par une striction modérée au
niveau du collet.

D’abord, gêne de la circulation de retour (par aplatissement des veines), d’où oedème qui
exagère la striction, puis gêne de la circulation artérielle, qui explique l’acheminement vers la
gangrène.

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Symptômes.
Début.- Il s’agit:
1 Soit d’un malade qui se savait porteur d’une hernie: réductible ou irréductible;
2 Soit d’une hernie qui se produit et s’étrangle d’emblée.

Dans tous les cas: une douleur vive au niveau de la hernie est le premier symptôme.
Rapidement, des coliques, des nausées apparaissent, parfois un vomissement.

Stade d’étranglement confirmé.- c’est la phase de phénomènes mécaniques et réflexes, où les


signes locaux existent seuls et attirent l’attention.

Signes fonctionnels.- La douleur qui siège au niveau de la hernie est vive, pénible. Le sujet
accuse souvent, en outre, des coliques abdominales.

Vomissements et nausées sont précoces et constants dans les premières heures. Alimentaires et
muqueux d’abord, puis verdâtres et bilieux, ils deviennent fécaloïdes tardivement.

L’arrêt des matières et des gaz est un signe important, mais il peut manquer: soit qu’il y ait eu
une selle par vidange de bout inférieur, soit qu’il y ait de la diarrhée (pincement latéral).

De toute façon, la douleur combinée à l’arrêt des gaz constitue le signe capital de
l’étranglement.

Signes généraux.- La température est normale ou basse; le pouls rapide, bien frappé, régulier;
le facies un peu anxieux, et le sujet présente souvent une légère agitation. Dans l’ensemble, l’état
général est excellent.

Signes physiques.- A l’inspection de la région herniaire, on note, d’emblée, une voussure plus
ou moins nette au niveau de la hernie; l’abdomen est rétracté au début mais rapidement il se ballonne.
Le péristaltisme est rarement observé.

A la palpation, la tumeur herniaire est dure, tendue, douloureuse, irréductible. Il n’y a ni


gargouillement, ni impulsion à la toux.

La douleur est plus nette au niveau du pédicule.

A la percussion de la hernie, on note une matité due au liquide épanché.


A cette période, n’existent que des signes locaux; c’est la période chirurgicale qu’il ne faut pas
laisser passer, car, dans certaines hernies, les lésions intestinales se constituent très rapidement (hernies
crurales).

Evolution.

Les accidents vont progresser rapidement si on n’opère pas.


L’évolution vers la mort se fait soit par septicémie, au milieu du tableau classique (hoquet,
vomissements fécaloïdes, altération du facies, troubles cardiaques), en deux ou trois jours dans
l’algidité et le collapsus, soit par péritonite généralisée fréquente dans les hernies crurales (péritonite
putride, avec un minimum de signes abdominaux).

L’évolution vers la guérison est la règle, à condition qu’on opère précocement. Mais il faut
savoir que des complications peuvent survenir après l’intervention:
- Complications générales (pulmonaires surtout, phlébites, etc.);
- Complications locales (hémorragies intestinales: précoces ou tardives)

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Chirurgie digestive 21
- Accidents d’occlusion: soit précoce (bride oubliée, persistance du sillon,
adhérences); tardive: par sténose intestinale.

Exceptionnellement, la guérison d’une hernie étranglée peut survenir par réduction spontanée
(surtout chez le nourrisson, sous l’influence du bain chaud).

Quant au phlegmon pyostercoral, il ne constitue pas une guérison vraie, car l’anus spontané
comporte deux dangers considérables;

Si les adhérences au niveau du collet ne sont pas suffisantes: c’est la péritonite.

Si l’anus siège sur le grêle, il entraîne une dénutrition rapide. De plus, la difficulté de la cure de
cet anus vient encore aggraver le pronostic.

Formes cliniques.

A côté de la forme typique, il y a place pour un certain nombre de variétés cliniques. On peut
décrire:

a) Suivant l’évolution.- Des formes suraiguës.- Ces cas répondent aux petites hernies
marronnées avec étranglement très sérré, généralement crurales.

D’emblée, des symptômes graves apparaissent (douleurs vives, vomissements rapidement


fécaloïdes, intoxication générale précoce).

La mort en trente-six ou quarante-huit heures est fatale si on n’opère pas.


Parmi ces formes suraiguës, il faut isoler:

) Le choléra herniaire.- Les symptômes gastro-intestinaux sont ici très marqués


(vomissements incessants, diarrhée incoercible avec hypothermie, urines rares, pouls rapide).

L’intoxication et la désydratation sont extrêmes.

La mort dans l’algidité survient rapidement (vingt-quatre à trente-six heures). Ce tableau


correspond le plus souvent aux cas de pincement latéral.

) Les formes nerveuses.- Formes hypertoxiques où dominent le délire, les crampes


musculaires, les contractures tétanoformes des extrémités; parfois de véritables crises convulsives
réalisent la forme éclamptique.

Des formes subaiguës.- Elles sont assez rares et réalisent le tableau classique de l’engouement
ou de la péritonite herniaire des classiques. Elles se voient surtout dans les hernies volumineuses
(ombilicales, inguinales) et répondent à des étranglements de type anormal (étranglement
intrasacculaire, volvulus herniaire, etc).

Le type en est la grosse hernie ombilicale chez une femme obèse qui, de temps en temps,
ressent une sensation de pesanteur au niveau de la hernie, avec nausées, vomissements.

La hernie devient plus tendue et un peu douloureuse au palper; il y a arrêt des matières et des
gaz.

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Chirurgie digestive 22
Sous l’influence du repos, de la glace, les accidents cessent, mais ils vont se répéter, et un jour
survient un étranglement serré qui nécessitte l’intervention d’urgence.

Des formes latentes.- Ce sont des formes souvent très graves, car elles risquent d’être
méconnues, et leur étranglement est serré.

Elles se voient chez les sujets affaiblis et les vieillards.

Les signes fonctionnels sont vagues (constipation tenace, quelques vomissements, arrêt des gaz
peu net).

Il est indispensable d’explorer systématiquement les orifices herniaires, car le malade ne


souffre pas spontanément de sa hernie.

En outre, il s’agit souvent de petites hernies peu visibles (surtout si l’individu est gras).

b) Des formes suivant le contenu.- Si l’intestin grêle se rencontre habituellement dans la


hernie étranglée, on peut voir du gros intestin occuper le sac herniaire ou l’épiploon, et, dans ce cas, les
symptômes sont moins accentués, l’évolution plus lente, la gravité moindre.

Néanmoins, il faut toujours opérer d’urgence, sous peine de voir l’épiploon se sphacéler.

c) Des formes suivant le siège.- L’étude en sera faite avec les différentes variétés des hernies.

Diagnostic.

Toute hernie douloureuse qui ne rentre pas doit être considérée comme étranglée et opérée.

Il faut ne pas méconnaître une hernie qui existe.

En présence d’une occlusion, il convient de penser à la possibilité d’une hernie étranglée, et il


faut explorer les trajets herniaires et penser à la possibilité d’une hernie crurale, d’une hernie inguinale
réduite par taxis ou d’une hernie de siège rare.

Il ne faut pas prendre pour une hernie ce qui n’est pas, c’est-à-dire croire à une hernie crurale
alors qu’il s’agit d’une adénite de Cloquet ou d’une varice enflammée de la saphène interne, d’un
testicule en ectopie avec orchite.

Il faut distinguer; un varicocèle douloureux avec phlébite, un kyste du cordon et un testicule en


ectopie avec orchite, d’une hernie inguinale.

Nous rappelons que, dans l’engouement, il existe une légère impulsion à la toux, pas de douleur
nette au pédicule et une tension moindre.

Mais pratiquement, en cas de doute, on doit toujours opérer avec la crainte qu’il ne s’agisse
d’un étranglement vrai.

Traitement.

Toute hernie devenue brusquement irréductible avec douleur et vomissements doit être opérée
d’urgence. Tout au plus, chez le nourrisson, peut-on donner, si l’on voit l’enfant au début des

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Chirurgie digestive 23
accidents, un grand bain chaud. Mais on ne doit pas s’attarder, et, si la hernie ne se réduit pas au bout
de quelques minutes, il faut opérer. Jamais le taxis ne doit être tenté.

I.- Traitement chirurgical.

Il comporte quatre temps principaux:


- La découverte du siège de l’étranglement;
- La levée de l’étranglement;
- Le traitement des lésions viscérales déjà produites;
- La cure opératoire de la hernie qui a causé l’étranglement.

ANESTHESIE.

Avec les progrès actuels, il est possible d'utiliser différents types d'anesthésies avec les réserves
suivantes :
L’anesthésie générale non maîtrisée favorise le shock et les complications pulmonaires, la
rachianesthésie (à cause de l’hypotension), on préférera, surtout chez les vieillards et les obèses,
l’anesthésie locale à la novocaïne, précédée d’une injection de morphine.

TECHNIQUE.

1 La découverte du siège de l’étranglement.- Après incision habituelle pour chaque variété


de hernie et découverte du sac, on procède à la libération du sac et on fait une incision prudente de sa
paroi.

Le sac ouvert, du liquide s’échappe qu’on éponge pour protéger les parties molles avoisinantes
(parfois la hernie est sèche et il faut faire attention de ne pas blesser l’intestin en ouvrant le sac).

2 Levée de l’étranglement.- Il faut alors poursuivre la section du sac de proche en proche,


sectionner le collet à ciel ouvert.

Dans certains cas: hernie crurale, par exemple, on peut être obligé de débrider en sectionnant le
Gimbernat ou l’arcade crurale.

S’il s’agit d’un hernie ombilicale, on doit passer par le péritoine au delà du collet, ce qui permet
de s’attaquer à la cause de l’étranglement par voie rétrograde.

3 Traitement du contenu de la hernie.- C’est le temps le plus délicat et le plus important.

a) L’épiploon, congestionné et infarci, parfois gangrené, sera réséqué largement.

b) L’intestin.- Il faut l’examiner avec soin et juger de sa vitalité. L’anse intestinale sera bien
extériorisée, afin de voir non seulement le sillon d’étranglement, mais aussi l’intestin en amont et en
aval. L’anse enveloppée dans un champ intestinal imbibé de sérum chaud sera aspergée de façon
continuelle par un filet de sérum chaud. On la maintiendra ainsi sous champs humides pendant cinq à
dix minutes.

On a préconisé aussi les aspersions alternées de sérum et d’éther, et l’injection de novocaïne


(sans adrénaline) dans le mésentère.

Quel que soit le procédé utilisé, trois cas peuvent se présenter:


- L’intestin n’est sûrement pas gangréné;
- L’intestin est gangréné;

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- L’anse est seulement suspecte.

a) L’intestin n’est pas gangréné.- La région du collet est rougeâtre.

L’anse est rouge vineux, rouge noirâtre, mais elle n’est pas dépolie, et surtout elle se recolore,
se contracte sous l’influence du sérum. Ses parois sont épaisses.

Il faut réintégrer simplement cette anse et terminer par la cure opératoire de la hernie.

) L’intestin est gangréné.- La plaque de gangrène se reconnaît à son dépoli, à sa coloration


grisâtre ou feuille-morte, à l’absence de toute réaction vitale après irrigation chaude.

Le traitement variera avec l’étendue de la gangrène.

1 La gangrène est limitée à une ou plusieurs petites plaques distantes les unes des autres.

On les enfouira sous une suture séro-musculaire, faite perpendiculairement au grand axe de
l’intestin pour ne pas rétrécir son calibre.

2. La gangrène est étendue.- l’opération logique est la résection intestinale (l’entérectomie)


suivie d’entérorraphie immédiate. Elle supprime la lésion infectée, rétablit le cours des matières et
permet de guérir en un seul temps le malade.

Si l’on fait une résection, il faut donc toujours rétablir immédiatement la continuité intestinale.
Voici les points essentiels de la technique:
- Résection large (surtout en amont) pour suturer en tissus sains.
- Entérorraphie termino-terminale ou latéro-latérale par sutures.

La résection avec entérorraphie est une opération grave du fait de l’état des malades (de 30 à 40
p. 100 de mortalité).

Aussi certains chirurgiens pensent-ils que la résection sans entérorraphie (avec anus contre
nature) peut être indiquée dans certains cas exceptionnels:
- Grand âge du malade;
- Très mauvais état général;
- Longue durée de l’étranglement;
- Impossibilité d’estimer les limites de la gangrène;
- Les cas où la gangrène intéresse le côlon.

) L’intestin est simplement suspect de gangrène.- On ne peut le réduire sans danger.

On estime que ces anses suspectes doivent être traitées comme si elles étaient gangrénées.

L’entérectomie suivie d’entérorraphie immédiate est la méthode de choix.

) Il existe un phlegmon pyo-stercoral.- Il faut débrider largement ce phlegmon.

Si l’état général le permet, on peut faire précéder cette incision d’une entéro-anastomose de
dérivation (faite par laparotomie) pour faciliter la cure spontanée de l’anus contre nature, qui est ici
inévitable.

VARIETES TOPOGRAPHIQUES DES HERNIES

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1. HERNIES INGUINALES

Définition et variétés.- La hernie inguinale, la plus fréquente de toutes les hernies est formée
par l’issue des viscères abdominaux à travers le canal inguinal.

Il faut en distinguer deux types qui s’opposent au point de vue pathogénique, anatomo-
pathologique, clinique et thérapeutique: la hernie oblique externe, hernie acquise ou congénitale, et la
hernie directe, hernie acquise.

1 La hernie oblique externe, la plus fréquente, sort de l’abdomen par la fossette inguinale
externe et parcourt le trajet oblique de dehors en dedans, du canal inguinal, trajet creusé dans la paroi
et qui répond à la voie suivie par le testicule lors de sa migration vers le scrotum.

Tantôt la hernie se fait à l’intérieur du canal péritonéo-vaginal resté en totalité ou en partie


perméable: le sac est par conséquent inclus au centre du cordon. C’est la hernie congénitale vraie, celle
du premier âge.

Tantôt les viscères repoussent devant eux l’infundibulum péritonéal, qui, au niveau de l’orifice
inguinal profond, représente le vestige du canal péritonéo-vaginal. C’est la hernie oblique dite acquise
parce qu’apparue tardivement, mais, en réalité, c’est là aussi une variété de hernie congénitale,
puisqu’elle s’amorce à la faveur d’une disposition congénitale du péritoine.

Ces hernies congénitales vraies et congénitales apparues tardivement sont des hernies obliques
externes, intrafuniculaires, qui, au point de vue clinique, peuvent descendre dans les bourses et qui, au
point de vue thérapeutique, nécessitent l’isolement et la résection du sac, temps opératoire
indispensable qui doit précéder la réfection de la paroi.

2 La hernie acquise, hernie directe ou hernie de faiblesse, caractérisée:


- au point de vue anatomique: par sa production au niveau d’un point faible: son collet
est situé en dedans de l’artère épigastrique, au niveau du point faible de la paroi postérieure:
la fosse inguinale moyenne;
- au point de vue clinique: c’est une hernie de l’adulte; elle ne descend jamais dans les
bourses; elle est souvent bilatérale;
- au point de vue thérapeutique: le sac étant sessile, on se borne à la réfection de la paroi
inguinale.

La hernie tout à fait exceptionnelle qui se fait au niveau de la fossette inguinale interne (hernie
oblique interne ou vésico-pubienne) mérite une simple mention.

Etiologie.- Nous n’insisterons pas sur l’étiologie de la hernie inguinale: l’étiologie générale des
hernies lui est applicable, c’est dire qu’une série de facteurs jouent un rôle dans son apparition:
insuffisance musculaire de la paroi abdominale, d’où la fréquence de la hernie chez les obèses à
mauvaise paroi, au ventre en besace, aux anneaux inguinaux élargis, amaigrissement, altérations
muscuculaires (liées peut-être à des carences en protéines et en vitamines).

Nous rappellerons le rôle nocif de la pression abdominale exagérée par l’effort (travaux de
force, grossesses répétées, affections pulmonaires chroniques, lésions prostatiques, etc...).

A côté de cette étiologie commune à toutes les variétés de hernies, nous signalerons la
fréquence relative des hernies inguinales droites après appendicectomie: ces hernies seraient dues
surtout à la poussée abdominale anormale par l’épiploon adhérent (adhérences épiploïques
contemporaines de la crise appendiculaire ou consécutives à elle) et, en second lieu, à l’affaiblissement

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de la paroi par le traumatisme musculo-aponévrotique direct créé par l’opération et à la parésie des
muscles par lésion nerveuse.

Anatomie pathologique.

Il faut étudier : la hernie oblique externe, la hernie directe, et réserver un chapitre à l’étude de
la hernie inguinale chez la femme.

1 Hernie oblique externe

Nous envisagerons: son trajet, ses connexions, le sac.

Trajet.- Il revêt plusieurs variétés répondant aux stades successifs de son évolution:
- Pointe de hernie; qui siège à l’orifice profond;
- Hernie intrapariétale ou interstitielle, qui est dans le canal inguinal;
- Hernie inguino-pubienne, ou bubonocèle, qui fait saillie à l’orifice inguinal superficiel;
- Hernie funiculaire, qui descend à la racine des bourses avec le cordon;
- Hernie inguino-scrotale, qui occupe le scrotum,

Dans ces deux derniers cas, la hernie a deux collets:


- l’un, interne, répondant à l’orifice profond du canal inguinal;
- l’autre, externe, à son orifice superficiel.

Telle est la hernie des jeunes.

Mais, dans le cas de hernie ancienne et volumineuse:


- le trajet herniaire se dilate, se redresse;
- les deux orifices se trouvent en regard l’un de l’autre;
- les deux collets tendent à se superposer par disparition du trajet en chicane normal.

Ces vieilles hernies obliques externes sont des hernies secondairement directes à trajet rectifié.

De toute façon, fait capital: le collet du sac est toujours situé en dehors de l’artère épigastrique.

Ses connexions.- AVEC LES PAROIS DU TRAJET INGUINAL, il se produit: un


agrandissement de l’orifice superficiel du canal par écartement des pilliers; un réfoulement vers le haut
du bord inférieur en arceau du tendon conjoint.

AVEC LES ELEMENTS DU CORDON, en règle, le sac est intrafuniculaire, à l’intérieur de la


fibreuse commune, en plein cordon.

- Il est toujours infrafuniculaire, dans la hernie congénitale vraie, où le sac n’est autre que le
canal péritonéo-vaginal, et il contracte des rapports fixes avec les autres éléments du cordon.

- Il est presque toujours intrafuniculaire dans la hernie oblique externe de l’adulte où le sac est
constitué par le refoulement graduel de l’infundibulum péritonéal correspondant à l orifice profond
du canal, mais parfois il est extrafuniculaire.

Dans le cs de hernie congénitale vraie, les éléments du cordon, dans la partie extra-inguinale,
sont situés sur le flanc postéro-interne du sac; dans le trajet inguinal, ils sont en bas et en arrière,
parfois faisant saillie dans l’intérieur du sac qui leur forme un véritable méso.

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D’où la nécessité d’une dissection soigneuse pour éviter de blesser le déférent.

Dans les variétés tardives, le sac est dans une position variable vis-à-vis des éléments du
cordon qu’il dissocie ou rejette à la périphérie.

Le sac.- Nous envisagerons:


- le sac de la hernie congénitale vraie et ses variétés;
- le sac de la hernie oblique externe acquise.

a) Le sac des hernies congénitales.- C’est le conduit péritonéo-vaginal resté complètement ou


partiellement perméable.

Ce sac séreux sera toujours très mince, souvent adhérent aux éléments du cordon.

Deux facteurs viendront déterminer la variété et l’aspect de la hernie:


Les anomalies du canal péritonéo-vaginal;
Les anomalies de la migration testiculaire.
RAPPEL ANATOMIQUE.- Cul-de-sac de la grande séreuse prolongé jusqu’aux bourses, le
canal paritonéo-vaginal s’oblitère après la naissance. Passé le premier mois, l’oblitération est la règle.
Mais des anomalies fréquentes s’observent: persistance de la perméabilité partielle ou totale
chez l’enfant et même chez l’adulte:
- soit canal complet: anomalie péritonéo-vaginale;
- soit canal incomplet ne communiquant pas avec la vaginale: anomalie
péritonéo-funiculaire;
- soit cul-de-sac infundibuliforme.

D’où deux variétés principales de hernies:

1/- la hernie testiculaire, où les viscères viennent au contact du testicule;


2/- la hernie péritonéo-funiculaire, où l’intestin n’occupe que la portion haute du canal péritonéo-
vaginal.

De plus, l’accolement du canal péritonéo-vaginal ne se fait pas d’emblée dans toute son
étendue.

Il se resserre par points, ce qui qui détermine des rétrécissements valvulaires compartimentant le canal:
Un rétrécissement à l’anneau interne;
Un rétrécissement à l’anneau externe;
Un rétrécissement au tiers moyen de la partie funiculaire;
Un rétrécissement à l’union de la partie funiculaire et de la vaginale testiculaire.

Ces rétrécissements ont une grande influence: sur la forme du sac herniaire; sur l’évolution
clinique de la hernie. Chez l’enfant, le canal est large, les valvules peu résistantes, l’étranglement est
donc rare; chez l’adulte, les rétrécissements sont résistants et l’étranglement d’emblée est
d’observation courante.

Entre les rétrécissements se trouvent des espaces libres dilatables: le vestibule rétro-pariétal;
l’ampoule funiculaire et la poche péritesticulaire.

Trois faits caractéristiques de la hernie congénitale en découlent:

a) La coexistance fréquente de la hernie avec des kystes du cordon;


b) La forme bi ou multiloculaire que peut revêtir la hernie;

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c) La production de variétés nombreuses dans cette classe de hernies:

1 Hernie péritonéo-vaginale (testiculaire); l’intestin est au contact du testicule.


2 Hernie enkystée de la vaginale : le sac proémine dans la vaginale
distendue par une hydrocèle;
3 Hernies funiculaires: ici, la vaginale est close et le cul-de-sac péritonéo-
vaginal est oblitéré plus ou moins haut.

De nombreuses sous-variétés peuvent s’observer.


- soit hernie funiculaire reliée à la vaginale par un cordon cellulo-fibreux (ligament de Cloquet)
ou par un cordon volumineux et creux;

- Soit hernies avec kystes intermédiaires à la vaginale et au sac, pouvant donner les types
suivants: kyste funiculaire relié à une hernie par un canal; hernie tangente à un kyste ou plongeant dans
son intérieur; séries de kystes en chapelet au-dessous du sac; sac descendant sur la paroi antérieure ou
postérieure du kyste et kystes secondaires inclus dans le kyste principal ou dans le sac.

VARIETES EXCEPTIONNELLES.- Elles coïncident généralement avec l’ectopie du testicule.


Ce sont les hernies avec clivage des plans pariétaux.

1 Hernie inguino-superficielle, avec son sac entre téguments et grand oblique liée souvent à
l’existence d’un testicule ectopique bloquant l’orifice inguinal superficiel;

2 Hernie inguino-interstitielle; le sac se développe entre grand oblique et petit oblique.

Ce sac est formé par la dilatation de l’ampoule intra-inguinale du canal péritonéo-vaginal, liée
le plus souvent à la position ectopique du testicule retenu dans le trajet inguinal;

3 Hernie inguino-propéritonéale; le sac est bilobé, deux poches le constituent; l’une


superficielle, occupant le trajet inguinal; l’autre profonde, pro ou sous-péritonéale interposée entre la
paroi et le péritoine décollé.

Cette poche propéritonéale résulte de la distension du vestibule du canal péritonéo-vaginal, le


testicule en ectopie bloquant l’orifice profond du canal.

b) Le sac de la hernie oblique externe acquise.- Il est soit intrafuniculaire (cas de beaucoup le
plus fréquent), soit extrafuniculaire (cas rare).

De toute façon, le sac est beaucoup plus épais que dans la hernie congénitale et surtout on
n’observe jamais de hernie testiculaire.

Le sac peut être plus ou moins développé, réalisant:

- la pointe de hernie; la hernie interstitielle; le bubonocèle; la hernie funiculaire.

2 Hernie inguinale directe.

C’est une hernie se faisant à travers la fossette inguinale moyenne, en dedans des vaisseaux
épigastriques, en dehors du cordon fibreux de l’artère ombilicale, juste en regard de l’anneau inguinal.

Hernie acquise, apparaissant tardivement (après quarante ans).

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Trajet.- La hernie se produit au point faible par suite de l’insuffisance musculaire et de
l’abondance de la graisse sous-péritonéale, qui viennent affaiblir une zone d’interruption normale des
plans musculaires.

Le point faible est tantôt peu étendu, tantôt très large, suivant que le tendon conjoint est très ou
peu étalé.

Trois caractères anatomiques distinguent la hernie directe:


1 Le sac et ses enveloppes;
2 Le pédicule;
3 Les rapports avec l’artère épigastrique et cordon.

1 Le sac.- Il est comparable à celui de la hernie crurale. Ses enveloppes sont constituées de trois
couches;

Le péritoine; le plan du tissu cellulo-adipeux sous-séreux; une couche externe fibreuse formée
par le fascia transversalis.

2 Le collet.- Il est remarquable par sa largeur. Le sac est globuleux, sessile, d’où la rareté de
l’étranglement dans ce type de hernie:

3 Les vaisseaux épigastriques sont en dehors du collet du sac, ce qui permet de distinguer à
coup sûr la hernie directe des vieilles hernies obliques externes à trajet rectifié.

Le cordon n’a pas de connexions étroites avec le sac: le sac est toujours extrafuniculaire; le
cordon s’en sépare très aisément, mais la vessie peut lui adhérer.

Evolution anatomique.- La hernie inguinale a une évolution anatomique variable suivant son
contenu: l’étranglement est toujours à craindre. Rare chez l’enfant, dont le canal péritonéo-vaginal est
large et souple, il est fréquent chez l’adulte et causé soit par le collet, soit par l’anneau inguinal.

En dehors de l’étranglement (intestinal ou épiploïque), les lésions de mésentérite, d’épiploïte,


les adhérences rendant la hernie irréductible sont d’observation courante.

3 Hernie inguinale chez la femme.

Le canal inguinal chez la femme est conformé sur le même modèle que celui de l’homme, mais
il est de dimensions plus réduites, et il contient, au lieu du cordon, le ligament, qui peut, sans danger,
être supprimé au cours de la cure radicale de la hernie.

Normalement, le canal inguinal est fermé au niveau de son orifice externe par un bouchon
adipeux.

Chez certains sujets, le péritoine qui passe devant l’orifice inguinal profond se déprime, forme
un cul-de-sac qui peut descendre jusqu’à la grande lèvre; c’est le canal de Nuck, homologue du
processus vagino-péritonéal de l’homme.

Trajet de la hernie.- C’est toujours une hernie oblique externe.

Sac herniaire.- Il est très variable: on retrouve la hernie complète ou hernie de la grande lèvre,
la hernie inguino-intestitielle, la hernie inguino-propéritonéale et la hernie enkystée de Cooper, où
l’intestin plonge dans un vestige kystique du canal de Nuck.

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Le ligament rond adhère toujours intimement au sac.

Contenu.- L’intestin grêle et l’épiploon se rencontrent le plus souvent dans ces hernies.
Parfois, l’ovaire, la trompe occupent le sac.

Symptomatologie.

Nous prendrons pour type: une hernie congénitale inguino-scrotale, vue chez un adulte jeune.

Symptômes fonctionnels.- Le hernieux vient, se plaignant d’une grosse tuméfaction dans la


région inguino-scrotale.

Un peu de gêne, un peu de pesanteur, quelques troubles digestifs vagues sont les seuls signes
que le sujet accuse.

Examen.- Il doit être pratiqué d’abord sur le malade debout, puis couché. Il faut préciser le
type de la hernie et l’état de la paroi.

A l’inspection, on remarque, soulevant le trajet inguinal, une tuméfaction qui présente une
obliquité en bas et dedans et qui continue dans la région scrotale, distendant plus ou moins dans la
bourse correspondante.

La palpation permet de délimiter une tumeur qui est de consistance variable:


tantôt molle, dans le cas de contenu intestinal; tantôt pâteuse, si le contenu est épiploïque.

Cette tuméfaction présente à la palpation une limite inférieure arrondie, nette.

Au contraire, en haut et en dehors, à la partie supérieure, elle se continue par un pédicule plus
ou moins épais vers l’orifice inguinal profond.

A la percussion, elle est habituellement sonore, fait dû à la présence d’intestin.


Cette sonorité peut manquer si le contenu est constitué par de l’épiploon.
On recherchera les signes caractéristiques de la hernie:

1 LA REDUCTIBILITE: par manoeuvres, sur le sujet couché, on tentera de réduire dans le


ventre le contenu de la hernie par des pressions digitales au niveau du collet. On voit, peu à peu, le
contenu rentrer dans le ventre et la tuméfaction diminuer de volume; cette réduction s’accompagne
d’un gargouillement caractéristique si la hernie contient de l’intestin.

2 L’IMPULSION ET L’EXPANSION A LA TOUX.- Si, la hernie réduite, on fait tousser le


malade, on la voit se reproduire: quand elle est reproduite, si on fait tousser, elle augmente de volume
(expansion).

Il faut vérifier ensuite le type de la hernie: pour cela, la hernie une fois réduite, on coiffe le
doigt de la peau du scrotum, et on pénètre dans l’orifice inguinal superficiel. On doit sentir l’épine
pubienne qui en est le repère.

On se rend compte ainsi que la hernie est bien inguinale.

Le tracé de la ligne de Malgaigne confirme ce fait. La hernie se trouve au-dessus de l’arcade


crurale.

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Chirurgie digestive 31
Il faut essayer de voir et de contrôler le trajet oblique du sac herniaire et surtout d’apprécier
l’état de la paroi (pour pouvoir poser une indication thérapeutique et un pronostic).

Pour cela: mettre le doigt dans l’anneau; apprécier sa largeur (parfois l’orifice est si large que
deux doigts peuvent y pénétrer); faire tousser pour voir si le grand oblique se contracte. Surtout, mettre
la main à plat sur la région inguinale, faire contracter la paroi en faisant asseoir le malade; on peut
ainsi juger de l’état de la musculature abdominale (muscles larges et grand droit).

Il est nécessaire de terminer par l’examen de l’appareil épididymo-testiculaire et par l’examen


de la région inguinale opposée, car il est possible d’observer des hernies bilatérales.

Avant de prendre une décision thérapeutique, on doit s’assurer que le sujet n’est pas un
tousseur habituel (bronchite chronique, emphysème, etc.) et qu’il ne présente pas d’affection urinaire
(rétrécissement urétral, hypertrophie prostatique) l’obligeant à pousser.

Evolution.

Progressivement, si la hernie n’est pas maintenue par un bandage, elle augmente de volume,
remplissant tout le scrotum, et elle peut descendre à mi-cuisse et même plus bas. Des lésions d’oedème
chronique pseudo-éléphantiasique du scrotum apparaissent alors, et des ulcérations cutanées déclives
ne sont pas exceptionnelles aux points de frottement des vêtements.

Ce sont des hernies qui, suivant l’expression classique, ont perdu droit de domicile dans
l’abdomen. Encore, y a-t-il la matière à discussion et, en dehors des cas où un âge trop avancé et une
déchéance organique très grave contre-indiquent tout intevention, l’opération doit être proposée dans
ces hernies géantes. Au prix de quelques petits artifices de technique, on parvient à opérer facilement
ces malades et à leur refaire une paroi suffisamment solide.

Mais, le plus souvent, des complications interviennent au cours de l’évolution des hernies.

Complications.

a) Irréductibilité.- Elle s’explique soit par des phénomènes inflammatoires intra-sacculaires,


soit par des adhérences au niveau du collet.

Il est bon d’examiner debout et couché, au besoin en position de Trendelenburg, ces hernies
irréductibles.

A ces variétés de hernies irréductibles appartiennent:

1 Les grosses hernies, dont le contenu a perdu droit de domicile dans l’abdomen et dont
la cure est une opération délicate;
2 Les hernies dites par glissement: contenant du gros intestin.

b) Engouement.- Il se caractérise par des troubles digestifs, mais sans douleur nette au collet
du sac. Il est sage d’opérer de façon préventive, d’urgence, comme s’il s’agissait d’un étranglement.

c) Etranglement.- C’est la grosse complication de la hernie inguinale. Nous nous bornerons à


faire mention des particularités de l’étranglement des hernies inguinales.

Une hernie inguinale peut s’étrangler à tout âge.

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Chirurgie digestive 32
Chez l’enfant, il s’agit, le plus souvent, d’étranglements légers (cédant à l’anesthésie ou au bain
chaud), en raison de la souplesse des diaphragmes séreux du canal péritonéo-vaginal. Toutefois,
l’étranglement vrai existe; il se voit presque exclusivement chez le nourrisson et surtout dans les six
premiers mois de la vie.

Chez l’adulte, l’étranglement s’observe, en général, chez des sujets qui connaissent l’existence
de leur hernie, mais il n’est pas rare de rencontrer des étranglements d’emblée, notamment dans les
hernies congénitales.

Ce sont, en général, des hernies de petit volume qui s’étranglent. L’étranglement est plus rare
dans les grosses hernies. Certaines hernies directes peuvent s’étrangler, mais le fait est exceptionnel.

Rarement, c’est un étranglement par anneau fibreux; ceci ne se voit que dans les petites hernies
chez des sujets jeunes, à paroi musclée, à anneau inguinal étroit.

Le plus souvent, l’étranglement est dû au collet du sac; soit par un des diaphragmes de
Ramonède dans les hernies congénitales, soit par sclérose et rétraction du collet dans les hernies
acquises.

Plus rarement, l’étranglement se produit par des brides ou des adhérences agglutinant à
l’instant: ceci ne se voit que dans les vieilles et volumineuses hernies inguinales.

Dans l’ensemble, les lésions intestinales ou épiploïques évoluent moins rapidement dans
l’étranglement des hernies inguinales que dans les étranglements par anneau fibreux dont le type est
représenté par l’étranglement crural.

Par ailleurs, l’épiploon est souvent engagé en même temps que l’intestin dans le sac et
contribue à rendre moins sévère la constriction exercée par le collet.

En clinique, l’étranglement d’une hernie inguinale se reconnait aisément: rares sont les formes
suraiguës qui restent l’apanage des hernies crurales; les formes latentes ne s’observent pour ainsi dire
jamais.

Chez l’enfant, il est fréquent d’obtenir la réduction spontanée par bain chaud.
Chez l’adulte, les formes subaiguës se voient dans les grosses hernies: la hernie devient plus
tendue et un peu douloureuse au palper, en même temps qu’il y a arrêt des matières et des gaz. Sous
l’influence du repos, de la glace, on peut voir ces accidents disparaître au bout de vingt-quatre ou
trente-six heures, mais leur répétition est la règle, et, un jour, survient l’étranglement serré que rien ne
semblait faire prévoir.

d) Contusion herniaire.- Les hernies inguinales peuvent, au cours d’une contusion de


l’abdomen, être atteintes par le traumatisme (cf. Contusions de l’abdomen et Généralités sur les
hernies).

FORMES CLINIQUES.

DES HERNIES OBLIQUES EXTERNES.

1 Suivant le degré .- Tous les degrés de hernie peuvent s’observer; de la simple pointe de
hernie souvent difficile à percevoir (même en engageant le doigt dans l’anneau inguinal et en faisant
pousser) jusqu’à l’énorme hernie scrotale.

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Chirurgie digestive 33
2 Suivant le contenu: grêle, épiploon, gros intestin, appendice, tels sont les viscères que l’on
rencontre le plus souvent.

3 Nous signalerons quelques variétés spéciales: la hernie avec hydrocèle; parfois hernies
enkystée de la vaginale: la hernie avec kyste du cordon; la hernie avec diverticule herniaire:
superficiel, intertitiel, propéritonéal et la hernie inguinale coexistant avec une hernie crurale.

4 Hernie inguinale de la femme.- Elle est relativement rare. Il s’agit d’une hernie
intrapariétale, souvent difficile à distinguer d’une hernie crurale, soit d’une hernie descendant dans la
grande lèvre. De toute façon, le pronostic post-opératoire est excellent: après cure radicale, on
n’observe pas de récidives.

5 Suivant l’âge.- a) HERNIE DU NOURRISSON.- Il s’agit soit d’un prématuré (d’où retard
de développement), soit d’un enfant né à terme, qui, au bout de deux à trois mois, présente une
tuméfaction dans l’aine; celle-ci peut se prolonger jusque dans les bourses. En règles, elle est assez
facilement réductible. Il faut faire porter à l’enfant un bandage: sinon, en laissant la hernie libre de
sortir du ventre, on observe des troubles qui retentissent sur l’état général (mauvaises digestions,
vomissements fréquents).

Parfois la hernie est irréductible: il s’agit alors souvent de grosses hernies avec aplasie de la
paroi qu’il faudra opérer en sachant d’ailleurs que les récidives sont fréquentes.

La hernie du nourrisson peut se compliquer d’étranglement.


L’agent d’étranglement est le collet du sac.

Avant d’opérer, on doit mettre l’enfant dans un bain chaud et l’y laisser de vingt à trente
minutes; en pressant doucement sur la hernie, on obtient souvent la réduction.

b) CHEZ L’ENFANT, il convient de signaler la coexistence fréquente de la hernie avec


l’ectopie testiculaire.

A partir de l’âge de six ans, le bandage ne guérira plus la hernie, il faudra donc opérer.

c) CHEZ L’HOMME AGE, nous rappellerons les énormes hernies inguino-scrotales,


secondairement directes, dont la cure est particulièrement délicate.

HERNIE DIRECTE

Elle s’oppose à la hernie congénitale oblique externe, non seulement par ses caractères
anatomiques, mais encore par ses caractères cliniques.

En effet, elle ne forme pas un relief allongé et cylindrique au niveau du trajet inguinal,
parallèlement à l’arcade crurale et descendant plus ou moins bas vers le scrotum.

C’est une saillie globuleuse arrondie, demeurant, malgré son développement, au-dessus et sur
les côtes de la racine de la verge, vers l’épine du pubis, et atteignant presque la ligne médiane.

Souvent bilatérale, elle encadre la base du pénis de deux saillies hémisphériques.


En explorant le trajet herniaire, le doigt refoule la hernie dans le ventre directement d’avant en
arrière (la réduction se fait d’habitude sans gargouillement); si l’on fait pousser le malade, la tumeur se
reproduit d’arrière en avant.

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Chirurgie digestive 34
C’est une hernie de faiblesse apparaissant chez l’adulte d’un certain âge après quarante ans, à
mauvaise paroi, chez les obèses.

Elle ne tend pas à s’étrangler.

HERNIE OBLIQUE INTERNE

C’est une hernie de faiblesse, très rare: elle se voit chez le vieillard. Elle se fait dans la fossette
inguinale interne entre ouraque et artère ombilicale.

Elle nécessite une déficience musculo-aponévrotique considérable.

DIAGNOSTIC.

Il se pose dans des conditions différentes, suivant la variété de hernie.

1 Une hernie intestitielle sera aisément différenciée d’un testicule en ectopie, d’une tumeur du
cordon, d’un kyste du cordon.

Chez la femme, il importe de reconnaître un kyste du canal de NÜCK, un lipome de la grande


lèvre. Rappelons que chez la femme, surtout lorsqu’elle est obèse, la discrimination entre hernie
inguinale et hernie crurale n’est pas toujours aisée.

2 La hernie est inguino-scrotale.- On reconnaît aisément l’hydrocèle vaginale à sa


consistance, à sa limite supérieure nette, qu’aucun pédicule ne relie au trajet inguinal, à sa translucidité
enfin.

Parfois, il y a coexistence de hernie et d’hydrocèle: de toute façon, l’aspect clinique est


caractéristique.

Pour les hernies irréductibles, le diagnostic de la nature du contenu herniaire est important.

Il est intéressant pour le chirurgien de savoir, avant d’opérer, si les adhérences responsables de
l’irréductibilité sont de nature inflammatoire et imposeront un pénible travail de libération.

TRAITEMENT CHIRURGICAL

Il convient de l’envisager :
- dans la hernie inguinale simple chez l’homme; dans la hernie de l’enfant, associée ou non à
une ectopie; dans la hernie de la femme; dans les hernies volumineuses; dans les hernies étranglées.

a) Hernie inguinale simple.- Le traitement chirurgical est le traitement de choix.

Chez l’enfant au-dessus de six ans, on doit opérer. Chez l’adulte et chez le vieillard, les
indications sont basées sur la résistance générale du sujet, sur le volume de la hernie et sur la qualité de
la paroi.

Constituent des contre-indications à l’opération: un mauvais état général (cardiopathie, diabète,


néphrite chronique, etc...), les affections pulmonaires chroniques (bronchite, tuberculose, etc...),
certaines maladies urétro-vésicales ou prostatiques (rétrécissement de l’urètre, adénome prostatique,

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Chirurgie digestive 35
etc...). De même, l’âge du sujet entre en discussion: on n’opèrera pas les grands vieillards, surtout
lorsque l’état de la paroi est tel que la récidive apparaisse comme fatale.

Des raisons locales peuvent également constituer une contre-indication à l’intervention:


mauvais état de la paroi (double distension de l’aine, ventre à triple saillie), adiposité excessive qui
complique l’intervention.
Mais, en dehos de ces cas bien spéciaux, on devra toujours proposer la cure opératoire de la
hernie.

PRINCIPES DE LA CURE OPERATOIRE.- Pour avoir la chance d’être radicale, la cure


opératoire doit porter:

1 Sur le sac, qu’il faut toujours supprimer en liant le pédicule le plus haut possible afin d’éviter
la persistance d’un infundibulum. Toutefois, dans la hernie directe, il n’y a pas de sac à réséquer;
2 Sur le trajet: il est impossible de le supprimer chez l’homme, puisqu’il faut laisser la place au
cordon qui le traverse, mais on doit s’arranger pour ne laisser au cordon que le minimum de place
indispensable.

Intervention facile et sans danger, la cure opératoire de la hernie inguinale exige néanmoins une
asepsie impeccable, une minutieuse hémostase et une parfaite connaissance des plans anatomiques.
Rappelons que l’anesthésie loco-régionale est largement suffisante dans la plupart des cas.

PROCEDES OPERATOIRES.- Ils sont multiples, mais, en fait, les divergences ne portent que
sur des détails de technique.

Dans la hernie inguinale congénitale (oblique externe), après ouverture large du canal inguinal,
de bout en bout, on dissèque le sac mis à nu par l’incision de la fibreuse commune. Le sac doit être
disséqué soigneusement des éléments du cordon, auquel il peut adhérer assez intimement. Lorsqu’il est
entièrement libéré, aussi haut que possible et sous le contrôle de la vue, on le transfixe par un fil que
l’on noue de part et d’autre au ras du collet. Puis on résèque la portion du sac sous-jacente à la ligature.
Il peut y avoir intérêt, dans le cas où le moignon du sac n’a pas tendance à rentrer spontanément, à le
fixer en haut et en dehors à la face profonde de la paroi (manoeuvre de Barker).

Il faut alors reconstituer un canal inguinal solide en deux plans. Il est nécessaire de refaire la
paroi postérieure en abaissant le tendon conjoint sur l’arcade de Fallope et la paroi antérieure en
suturant les deux lèvres du grand oblique.

Mais où doit-on mettre le cordon spermatique? On peut le mettre tout à fait en avant des deux
plans reconstitués: c’est le procédé de Halsted, où le cordon est sous-cutané. On peut, à l’instar de
Forgue, faire passer le cordon en arrière du conjoint. En fait, ces deux procédés aboutissent à faire
sortir directement par un seul orifice le cordon de l’abdomen; la poussée viscérale, s’exerçant
directement en ce point, amorce la récidive.

Seul le procédé de Bassini, qui rétablit le trajet en chicane du canal inguinal, refait un trajet
résistant d’autant mieux à la poussée des viscères abdominaux qu’il est plus oblique. Il consiste à
abaisser le conjoint à l’arcade, puis le cordon spermatique est remis en place, et devant lui la suture de
l’aponévrose du grand oblique reconstitue la paroi antérieure.

En faisant le Bassini, il faut avoir soin de ne pas traumatiser le cordon, pour éviter les
hématomes. Il faut, par ailleurs, fermer aussi serré que possible l’orifice inguinal superficiel.

Dans la hernie directe, la conduite à tenir varie suivant qu’il y a un sac muni d’un pédicule,
auquel cas on doit réséquer ce sac en ayant soin d’en fermer au besoin par un surjet la base souvent

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Chirurgie digestive 36
large, ou qu’il n’y a pas de sac (cas habituel); dans cette seconde éventualité, on se borne à reconstituer
la paroi. La reconstitution de la paroi doit, comme dans la hernie oblique externe, être faite par le
procédé de Bassini.

Dans la cure opératoire de la hernie inguinale, l’usage de fils non résorbables est
recommandable notamment pour le plan profond.

FAUTES OPERATOIRES.- Nous ne ferons que les rappeler; une mauvaise dissection du sac,
surtout dans les hernies congénitales, a pu être cause de la section du déférent.

La blessure des vaisseaux (artères et veine fémorale, vaisseaux épigastriques) est possible lors
de la réfection de la paroi postérieure du canal. Elle s’évite facilement si l’on prend soin de tendre
l’arcade avant de la charger sur l’aiguille.

La vessie a pu être blessée, surtout dans les hernies directes. En tirant trop sur le sac, on risque
de l’attirer et de la prendre dans la ligature du pédicule.

b) Hernie de l’enfant (avec ou sans ectopie).- Dans la hernie de l’enfant, c’est le traitement
du sac qui diffère de ce que l’on fait chez l’adulte. Le sac est, en effet, intimement adhérent aux
éléments du cordon; si l’on veut l’en séparer, on risque de blesser des vaisseaux. Aussi Ombrédanne
recommande-t-il de se borner à fermer l’orifice supérieur du sac (soit par ligature directe, soit par
fermeture en bourse au moyen de points faufilés) et à oblitérer le sac (sans le décortiquer), en le
retournant comme on retourne une vaginale dans la cure de l’hydrocèle vaginale.

Le coexistence d’une ectopie ne complique pas le traitement de la hernie: il faut disséquer le


sac aussi haut que possible, puis procéder à l’orchidopéxie.

c) Hernie de la femme.- Chez la femme, la cure opératoire est très simplifiée. Le ligament
rond peut être réséqué en même temps que le sac herniaire: il faut alors en fixer l’extrémité à la paroi
profonde du canal inguinal. Si on respecte le ligament rond, on peut néanmoins fermer complètement
et hermétiquement le canal inguinal en deux plans.

d) Hernies volumineuses et hernies du gros intestin.- Dans ces hernies volumineuses, qui
peuvent contenir une partie du gros intestin, le chirurgien peut se trouver aux prises avec des difficultés
importantes. La hernie contient, en général, une énorme masse d’épiploon enflammé qu’il faudra
réséquer. Cette résection permettra de diminuer d’ne façon notable le volume du contenu et favorisera
grandement la réduction du reste. Mais il ne faut pas hésiter, si les adhérences épiploïques sont serrées,
à s’aider d’une hernio-laparotomie (c’est-à-dire: à ouvrir le péritoine au delà du collet) pour placer les
ligatures assez haut dans l’abdomen: on peut alors sectionner l’épiploon haut et enlever la partie
adhérente par voie rétrograde.

Les adhérences intestinales sont fréquentes: tantôt il s’agit d’adhérences charnues naturelles,
tantôt d’adhérences inflammatoires. Les adhérences charnues naturelles qui fusionnent le gros intestin
hernié et le sac ne constituent pas un obstacle sérieux: il suffit de chercher le plan de clivage; on
effectue ainsi un véritable décollement colo-pariétal de haut en bas et de dehors en dedans qui permet
de mobiliser le segment de gros intestin hernié et adhérant au sac.

Lorsqu’il s’agit d’adhérences inflammatoires, les difficultés de réduction peuvent être grandes:
il faut essayer de libérer les anses agglutinées. On y parvient, en général, sans dégâts, à condition
d’être prudent: toutefois, certains cas d’adhérences extrêmement serrées peuvent rendre nécessaire une
résection intestinale.

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Chirurgie digestive 37
Pour toutes ces manoeuvres de réduction, la position inclinée en Trendelenburg est d’un grand
secours.

La libération du sac risque d’être très hémorragique en raison des adhérences avec la fibreuse
scrotale, et on peut observer d’énormes hématomes des bourses. On évitera ces hématomes en
supprimant le temps de libération du sac et en laissant celui-ci dans les bourses. On se bornera à liberer
la partie supérieure, inguinale, du sac, aussi haut que possible et à la fixer par un point de Barker.

Il faut reconstituer une paroi solide, ce qui n’est pas toujours facile. Le procédé de Bassini
s’impose et on s’assure que le cordon est à l’étroit. S’il s’agit d’un malade âgé et consentant, on peut
fermer complètement le canal, après section du cordon (avec ou sans castration complémentaire).

Pour reconstituer une paroi solide, il est nécessaire, dans de tels cas, de prendre un point
d’appui inférieur solide; en l’espèce, le ligament de Cooper. On amarrera au Cooper le tendon conjoint
à l’aide de fils non résorbables.

Quand les tissus de la paroi sont tout à fait insuffisants, on est obligé d’avoir recours à une
autoplastie: le mieux est d’utiliser un fragment ou une lanière de fascia lata pour combler la déficience
pariétale. Actuellement des mèches synthétiques sont d'usage courant.

Si nous avons insisté sur les difficultés de la cure de ces volumineuses hernies, c’est qu’en fait
il peut être indiqué de les opérer. D’une part, l’étranglement, lorsqu’il se produit dans ces hernies
géantes, est un accident redoutable. D’autre part, la plupart de ces hernies sont irréductibles; le
bandage ne peut donc leur être appliqué, et elles constituent une très pénible infirmité.

Il semble donc qu’il y ait intérêt à opérer à froid de telles hernies, sous réserve, bien entendu,
qu’il n’y ait pas de contre-indication majeure (âge très avancé, malades obèses, tousseurs, prostatiques,
etc...).

e) Hernies étranglées.- Il s’agit presque toujours de hernie oblique externe. Il faudra donc
débrider le collet du sac, en dehors, pour éviter l’épigastrique. Ce débridement doit, en principe, se
faire après ouverture première du sac.

L’opération simple dans la hernie inguinale banale devient laborieuse et grave quand la hernie
est volumineuse, surtout lorsque des résections intestinales étendues s’imposent (gangrène
intestinale).

Résultats de la cure opératoire.- Ils sont bons: toutefois il ne faut pas oublier la possibilité de
récidives, surtout chez les malades âgés, ou en cas de paroi déficiente.

Chez les enfants, les résultats éloignés sont excellents, et l’on est autorisé à parler à cet âge de
cure radicale.

Chez l’adulte jeune, les résultats éloignés sont aussi très bons quand l’opération a été bien faite
et que l’on a reconstitué avec soin le canal inguinal après résection haute du sac. Les récidives sont
plus fréquentes dans les hernies directes (14 p. 100) que dans les hernies obliques externes (2 p. 100).
En fait, les récidives sont le plus souvent dues à des malfaçons évidentes: insuffisance de la suture
profonde, emploi de fils de suture à résorption trop rapide, suppuration de la plaie opératoire. Chez les
sujets âgés, surtout lorsqu’ils sont obèses, la récidive est fréquente, même si l’on a fait une suture
soignée et aseptique: c’est, en effet, de la qualité des tissus que dépend le succès opératoire.

HERNIE CRURALE

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Chirurgie digestive 38
La hernie crurale sort de l’abdomen au-dessous de l’arcade crurale, à travers la partie interne de
l’anneau crural.

Rappel anatomique.- L’espace compris entre l’arcade crurale en avant, le ligament de


Gimbernat en dedans, le bord supérieur du pubis tapissé par le ligament de Cooper en arrière et en
dehors la bandelette, constitue l’anneau crural et est occupé de dehors en dedans par l’artère, la veine
fémorale et les lymphatiques profonds (vaisseaux et ganglions de Cloquet). De la gaine vasculaire se
détachent les cloisons sagittales qui séparent les unes des autres: l’artère, la veine et les lymphatiques.

La loge lymphatique entonnoir crural est obturée à la partie supérieure, au niveau de l’anneau
crural, par le fascia transversalis, qui descend jusqu’à la crête pectinéale.

En pratique, les hernies crurales se font par l’entonnoir crural: les viscères abdominaux ne
peuvent s’engager dans les loges artérielle ou veineuse parce que ces loges sont entièrement remplies
par l’artère et la veine fémorales et aussi parce que ces vaisseaux adhèrent assez étroitement par
l’intermédiaire de la gaine vasculaire aux parties correspondantes de l’anneau crural. Mais l’intestin
peut soit refouler, soit déchirer le septum crural et descendre dans la loge lymphatique.

Anatomie pathologique

Il faut étudier le trajet herniaire, le sac et son contenu, enfin, les rapports du sac.

HERNIES COMMUNES.

Orifice.- C’est la partie interne de l’anneau crural.

Trajet.- La hernie sort par cet orifice et chemine sous le fascia cribriformis dans
l’infundibulum crural, puis, en général, elle traverse le fascia cribriformis et, se coiffant du fascia
superficialis, elle s’étale dans le triangle de Scarpa. Parfois, elle suit un trajet rétrograde remontant vers
l’arcade crurale, au-dessus de laquelle elle va se loger: parfois, elle descend, au contraire, plus ou
moins bas, vers la cuisse.

Mais, de toute façon, elle conserve toujours un pédicule étroit.

On distingue classiquement: la pointe de hernie, qui dépasse à peine l’anneau crural; la hernie
incomplète ou interstitielle, qui est sous-jacente au fascia cribriformis; la hernie complète, qui a passé à
travers ce fascia.

Sac.- Il est formé par le péritoine.

Il est arrondi, mais toujours bien pédiculé; le pédicule répond à l’anneau crural. Le sac est
coiffé du tissu fibreux du septum crural, qu’il refoule et déprime. Dans la hernie complète, le fascia
superficialis forme autour du sac un second feuillet engainant. Mais surtout il existe très fréquemment
en avant du sac, des formations capables d’induire en erreur: d’une part, un lipome préherniaire;
d’autre part, un ou plusieurs kystes (hygroma préherniaire).

Contenu.- L’intestin grêle, l’épiploon souvent adhérents, sont les hôtes habituels de cette
hernie. Parfois, c’est une partie seulement d’une anse grêle qui est herniée dans le sac.

Exceptionnellement, on y rencontre le caecum, l’appendice, les annexes.

Rapports du sac.- Il faut insister sur les rapports vasculaires du collet du sac. Des vaisseaux
l’entourent: la grosse veine fémorale en dehors, qui risque d’être blessée, soit au cours de la libération

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Chirurgie digestive 39
du sac si on ne le dissèque pas de près, soit au cours de la fermeture de l’anneau si l’on n’a pas soin de
la récliner en dehors; les vaisseaux épigastriques en haut; derrière le ligament de Gimbernat se trouve
l’anastomose épigastrique, obturatrice parfois volumineuse.

Enfin le sac lui-même est parfois proche de la crosse de la veine saphène interne.

Par ailleurs, on ne doit pas oublier la proximité du collet du sac et de la vessie; il est fréquent,
lorsqu’on attire le pédicule de la hernie, d’entraîner la corne vésicale qui se trouve exposée.

Telle est la hernie crurale commune. On peut observer quelques variétés légèrement
différentes: les hernies de gros volume (souvent retrouvées en milieu rural), les hernies de petit volume
(fréquentes), les hernies déshabilées, qui peuvent s’oblitérer et se transformer en kystes.

HERNIES RARES.

Elles ne diffèrent de la forme banale que par l’anomalie de leur trajet et de leur orifice de sortie.
1 Anomalies de l’orifice de sortie.- a) Hernie crurale prévasculaire.- Dans ce cas, la hernie
s’engage par la partie externe de l’anneau en avant des vaisseaux fémoraux;

b) Hernie à travers le ligament de Gimbernat (hernie de Laugier).

2 Anomalies du trajet.- a) Hernie pectinéale. - Située tout d’abord dans le canal crural, cette
hernie perfore l’aponévrose pectinéale et se loge entre celle-ci et le muscle pectiné;

b) Hernie multidiverticulaire, dans laquelle le sac multilobé forme plusieurs prolongements,


traversant des orifices distincts du fascia cribriformis;

c) Hernie en bissac

Le sac offre ici un diverticule sous le fascia cribriformis et un autre sous la peau au niveau du
fascia superficialis.

Il faut enfin rappeler la coexistence fréquente d’une hernie crurale avec une hernie inguinale
[distension de l’aine de Paul Berger].

De toutes ces hernies rares, seule la hernie prévasculaire mérite une courte description.

Encore appelée hernie crurale externe ou hernie de la gaine des vaisseaux, la hernie
prévasculaire se caractérise au point de vue anatomique par un orifice herniaire très large et
prévasculaire, qui contraste avec le collet toujours étroit de la hernie commune.

Le sac est dans la gaine des vaisseaux et, après dissection, les vaisseaux sont à nu dans la plaie.
Parfois, d’ailleurs, le sac est amarré aux vaisseaux par de courtes branches artérielles ou veineuses.

La fermeture de l’anneau crural offre dans cette variété de hernie des difficultés sérieuses.

Etude clinique.

Fréquence.- La hernie crurale est bien moins fréquente classiquement que la hernie inguinale
(3.2% des hernies dans nos statistiques personnelles). Toutefois, actuellement, la fréquence de cette
hernie s’est accentuée, et proportionnellement le nombre des hernies crurales s’est accru plus que celui
des hernies inguinales.

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Chirurgie digestive 40
Sexe.- C’est surtout une hernie de la femme; elle est plus rare chez l’homme.

Age.- C’est une hernie de l’âge adulte, et c’est de quarante à cinquante ans qu’on l’observe le
plus souvent.

Etiologie.- Toutes les causes de relâchement de la paroi abdominale seront autant de causes
favorisantes (obésité, grossesses).

C’est une hernie acquise, de faiblesse. Aucune disposition congénitale ne favorise sa formation.

Symptomatologie.

Au point de vue clinique, on peut distinguer deux éventualités:

1 La hernie passe inaperçue et ne se révèle cliniquement que lors de sa grande complication:


l’étranglement herniaire;

2 La hernie se manifeste cliniquement sans être compliquée, et on peut alors en décrire deux
types cliniques, suivant qu’elle est réductible ou irréductible.

a) Hernie réductible.- C’est la hernie crurale banale de moyen volume. En général, aucun
symptôme fonctionnel ne la révèle; la hernie est silencieuse. Parfois, la malade se plaint de vagues
douleurs à la racine de la cuisse, douleurs qui s’accroissent par la mise en extension de la hanche.

Pour l’examen de la hernie, on doit placer la cuisse en légère abduction et en extension.

Dès l’inspection, à moins que la malade ne soit très grasse, on remarque une tuméfaction
ovalaire ou arrondie siégeant à la partie supérieure et interne du triangle de Scarpa, sous l’arcade
crurale.

La palpation en précise: la consistance molle ou pâteuse, suivant la nature du contenu


(entérocèle ou épiplocèle); la forme arrondie, bien limitée; l’indolence à la pression et à la mobilisation
latérale.

Ce qui est essentiel, c’est de rechercher l’existence du pédicule herniaire; on le perçoit, en


général, sous forme d’un gros cordon à direction postérieure, et le doigt qui l’entoure va sentir
immédiatement en dehors de lui les battements de l’artère fémorale.

On recherchera également l’impulsion et l’expansion à la toux, puis on essaiera de réduire. La


réduction dans ce type de hernie s’effectue, en général, facilement avec ou sans gargouillement,
suivant que le sac contient de l’intestin ou de l’épiploon.

La hernie une fois réduite, on engagera le doigt aussi loin que possible, et on percevra l’orifice
de l’anneau crural sous l’arcade de Fallope, en dedans des battements de l’artère fémorale.

Théoriquement, la hernie est sonore si elle contient de l’intestin; elle est mate à la percussion si
elle recèle de l’épiploon. Ce signe est d’ailleurs souvent difficile à apprécier en raison du petit volume
de la tumeur herniaire.

b) Hernie irréductible.- Fréquemment, en clinique, la hernie crurale, bien que non étranglée,
va se présenter sous la forme de hernie irréductible. Chez une femme se plaignant de l’existence d’une
petite tumeur au niveau de l’aine, l’examen montre que cette tumeur est arrondie avec un pédicule
situé au contact des battements de la fémorale. Mais elle ne se réduit pas. Il s’agit soit d’épiplocèle

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Chirurgie digestive 41
adhérente et, dans ce cas, on a pu noter l’existence de quelques petites poussées aiguës et d’une
sensibilité au niveau du collet, soit de lipome préherniaire, soit de petits kystes présacculaires, soit
d’une hernie déshabitée.

c) Variétés rares de hernies crurales.- Elles sont le plus souvent une découverte opératoire.
Toutefois, la hernie prévasculaire mérite une courte description clinique.

Elle s’observe, en général, après les maladies longues et cachectisantes qui favorisent
l’hypotrophie des muscles de la paroi abdominale. On a signalé aussi, dans les antécédents de ces
malades, l’existence de luxation congénitale de la hanche, de séquelles de coxalgie.

C’est une hernie qui se voit plus souvent chez l’homme et qui coexiste souvent avec une hernie
inguinale.

Les troubles fonctionnels sont absents ou très minimes. On a pourtant signalé des troubles de
compression veineuse (oedème, cyanose), ainsi que des crampes et des fourmillements dans le membre
inférieur.

Cliniquement, la tuméfaction herniaire est nettement visible: elle est volumineuse et étalée en
largeur. La réduction, en raison des grandes dimensions de l’orifice herniaire, est habituellement facile.
Après réduction, on s’aperçoit que le pédicule est directement en avant des vaisseaux.
Ces hernies sont ordinairement très bien supportées, et l’étranglement y est rare et tardif.

Evolution.

L’accident le plus commun et le plus grave que l’on puisse observer est l’étranglement. La
mortalité de la hernie crurale étranglée (10 à 20 p. 100) est supérieure à celle de la hernie inguinale.
C’est également d’ailleurs la hernie crurale qui donne le plus gros pourcentage d’étranglement (50 à 60
p. 100), parce qu’il s’agit de hernies peu volumineuses et présentant un anneau fibreux serré. C’est
dans ces hernies que s’observe le plus souvent le pincement latéral de l’intestin.

Caractères particuliers à l’étranglement herniaire crural, la hernie est petite et risque d’être
méconnue à l’examen clinique; les lésions intestinales se développent rapidement, car l’étranglement
est serré (striction par arête fibreuse).

L’étranglement se déclare tantôt au niveau d’une hernie dont l’existence était connue, tantôt au
niveau d’une hernie méconnue, comme cela est fréquent chez les femmes grasses, tantôt, enfin, la
hernie se produit et s’étrangle d’emblée.

Des symptômes, nous ne retiendrons que la difficulté chez les obèses de percevoir la hernie
lorsqu’elle est de petit volume et la nécessité de soigneusement rechercher la douleur au niveau du
collet, car elle peut manquer au niveau du fond du sac.

L’évolution est très rapide; ce sont des hernies où la gangrène se constitue très vite. Le
phlegmon pyo-stercoral et la péritonite diffuse emportent rapidement les malades si l’opération n’est
pas pratiquée d’urgence.

C’est dans les hernies crurales que s’observent les formes suraiguës de l’étranglement herniaire
qui répondent souvent à des pincements latéraux de l’intestin (choléra herniaire).

Les formes subaiguës sont assez rares, mais importantes à connaître, car elles sont insidieuses.
Ce sont des formes véritablement ambulatoires. Il s’agit, en général, de malades qui depuis plusieurs
semaines ou plusieurs mois, se plaignaient de douleurs abdominales survenant par crises avec nausées,

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Chirurgie digestive 42
et qui viennent consulter pour des phénomènes analogues à peine plus accentués. On trouve à
l’examen clinique une petite hernie marronnée, et il faut songer à la possibilité d’un étranglement,
rechercher l’existence de constipation, d’un arrêt des gaz et surtout d’une douleur au niveau du
pédicule herniaire. De telles hernies doivent être opérées d’urgence: on aura souvent la surprise de
découvrir à l’ouverture du sac un intestin gravement lésé, voire même une anse en voie de perforation.
Retarder la décision opératoire, c’est s’exposer au risque de voir des accidents très graves évoluer
brutalement (phlegmon pyo-stercoral, péritonite, etc...).

Diagnostic.

Il se pose différemment suivant que la hernie est ou n’est pas étranglée.

1 Hernie non étranglée.- La première question qui se pose est la suivante.

Est-ce une hernie ?- Si la tumeur du Scarpa est molle et réductible, le diagnostic de hernie est,
habituellement, facile. On distinguera aisément un abcès froid qui est mat, fluctuant, et dont l’origine
iliaque ou pottique est, en général, facilement mise en évidence.

La dilatation ampullaire de la crosse de la saphène, molle, sans pédicule se réduisant par simple
pression du doigt sans gargouillement, se reproduisant dès que la compression cesse, est facile à
reconnaître. Elle coexiste souvent avec d’importantes varices du membre inférireur.

Si la tumeur est irréductible, en pratique, le seul diagnostic à éliminer est celui d’adénopathie
crurale: il est parfois difficile et la recherche d’une cause locale ou générale susceptible d’expliquer
l’adénopathie reste souvent infructueuse. En cas de doute, le risque de laisser évoluer un étranglement
insidieux justifie l’intervention exploratrice.

Est-ce une hernie crurale ? - Telle est la seconde question qui se pose. Il n’est pas toujours
facile, surtout chez la femme, de distinguer le siège exact de la hernie. On écartera le diagnostic de
hernie inguinale en se basant: sur le siège de la tumeur herniaire par rapport à la ligne de Malgaigne
qui joint l’épine iliaque antéro-supérieure à l’épine du pubis, sur la direction du pédicule qui se dirige
en arrière (tandis qu’il est oblique en haut et en dehors dans la hernie inguinale), sur la perception des
battements de l’artère fémorale en dehors du collet de la hernie.

2 Hernie étranglée .- Le diagnostic n’est pas toujours facile.

Sans parler de l’exceptionnelle orchite d’un testicule en ectopie crurale, la phlébite de


l’ampoule de la saphène et l’adénite aiguë du ganglion de Cloquet peuvent être parfois discutées; dans
la phlébite de la saphène, il n’y a pas de pédicule prolongeant, sous l’arcade, la masse perçue.
L’adénite aigue sera diagnostiquée par les signes inflammatoires (fièvre, frissons, empâtement local) et
l’existence d’une porte d’entrée dans le territoire lymphatique correspondant. Mais certains signes
parfois surajoutés, tels que la présence d’un cordon lymphangitique douloureux simulant un pédicule
herniaire, peuvent induire en erreur, erreur d’ailleurs inoffensive puisqu’elle pousse à l’intervention.

TRAITEMENT.

Le bandage est inapplicable à la hernie crurale, en raison de la mobilité de la région et de la


fréquence des hernies irréductibles. Seul le traitement chirurgical permet la cure de cette hernie.
L’indication d’opérer est pour ainsi dire constante. La tactique opératoire varie suivant que la hernie
est ou n’est pas étranglée; aussi envisagerons-nous séparément chacune de ces éventualités.

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Chirurgie digestive 43

Traitement chirurgical de la hernie crurale non étranglée.

On a proposé de très nombreux procédés. Le point technique essentiel, celui qui décide de la
stabilité du résultat, c’est l’oblitération parfaite du canal crural. La seconde indication qui conditionne
le succès de la cure opératoire, c’est la résection haute du sac.

L’oblitération parfaite du canal crural est l’indication la plus difficilement réalisable, et ceci
explique la multiplicité des procédés opératoires imaginés. Il faut parvenir, pour obturer l’anneau, à
affronter la paroi antérieure et l’arcade crurale à la surface pectinéale.

Les procédés anciens (Berger, Delagenière) ont cédé le pas aux procédés modernes, qui sont
basés sur la nécessité de prendre comme point fixe le ligament de Cooper et de réaliser un double plan
pour obturer l’anneau crural:
1 un plan fibreux superficiel (arcade crurale fixée à l’aponévrose pectinéale);
2 un plan musculaire profond (tendon conjoint abaissé et suturé à la crête fibreuse du Cooper). Cette
méthode du double plan peut être réalisée par voie haute, inguinale ou par voie basse, crurale.

Voie basse (voie crurale).- Il faut, pour avoir un bon jour opératoire, inciser le Gimbernat en
totalité, ce qui permet de lier le sac très haut.

Après incision des plans superficiels, on isole le sac herniaire, qu’on dissèque jusqu’à l’anneau.

Puis, après section de l’arcade ou incision du Gimbernat, la région devient accessible; on peut
isoler le sac au delà de son collet, l’ouvrir, traiter son contenu, l’exciser après ligature.

Réclinant l’arcade fémorale en haut, il est facile de refouler le péritoine, de dégager aux ciseauz
courbes la crête pectinéale mettant à nu les fibres nacrées du Cooper. Le tendon conjoint bien dégagé
peut alors être abaissé et suturé sur le Cooper; la seule précaution à prendre, mais capitale, c’est que
l’opérateur maintienne pendant le passage des fils et notamment du fil le plus externe, la veine
fémorale écartée et protégée par l’index. La suture conjoint-Cooper a tout intérêt à être faite avec des
fils non résorbables (crins, lin). Le plan superficiel sera réalisé en abaissant l’arcade sur l’aponévrose
du pectiné.

Voie haute (inguinale).- Ses avantages.- Elle est plus apte à permettre une résection haute du
sac; elle rend plus facile le traitement du contenu du sac; elle permet enfin une fermeture solide de
l’anneau fibreux sous le contrôle de la vue.

Technique.- Incision du trajet inguinal parallèle à l’arcade: ouverture du canal par incision du
grand oblique. Découverte du bord postérieur de l’arcade crurale.

Puis incision du fascia transversalis parallèlement au bord postérieur de l’arcade, après avoir
récliné en haut le cordon; la graisse sous-péritonéale traversée, on tombe sur le péritoine.

Ouverture du sac. Il faut alors attirer le sac dans la place inguinale. Manoeuvre qui d’ailleurs
n’est pas toujours aisée (sac adhérent, anneau fibreux serré, épiploon adhérent au fond du sac). En
pareil cas, on a le recours de manoeuvre de part et d’autre de l’arcade en disséquant la lèvre inférieure
de l’incision cutanée.

Pour obturer l’anneau, une suture à deux plans permet de fixer au ligament de Cooper, le point
d’amarre résistant: 1 le bord inférieur des muscles petit obliqe et transverse abaissés; 2 le bord
postérieur de l’arcade.

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Que choisir ? Ce choix se subordonne, pour une part, aux données anatomiques de la hernie et,
pour une autre, à l’expérience technique de l’opérateur.

La méthode inguinale qui permet une résection haute du sac et une fermeture à double plan de
l’anneau présente, dans certains cas, des difficultés sérieuses: chez les femmes très obèses, on travaille
en profondeur, la recherche et l’ouverture du péritoine sont malaisées, l’abondance de la graisse sous-
péritonéale et l’hémorragie des veinules gênant la netteté de ce temps, l’extraction du sac est contrariée
par sa surcharge graiseuse, ses adhérences et l’étroitesse du collet.

La voie crurale élargie n’a pas ces inconvénients et semble devoir s’adapter à la majorité des
cas, notamment aux cas défavorables (obésité, sac volumineux, etc ...)

Nous ne dirons qu’un mot de certains procédés, qui ne trouvent leur indication que dans les
hernies très volumineuses ou de trajet atypique (hernies prévasculaires, par exemple). Dans de telles
éventualités, la fermeture de l’anneau par la suture en double plan peut paraître insuffisante, et on a
préconisé des myoplasties (par lambeau emprunté au pectiné ou au moyen adducteur), etc….

Résultats.- Les résultats éloignés sont très bons, en général. On note à peine 1 à 2 p. 100 de
récidives. La récidive, en pratique, ne s’observe que dans les hernies d’un certain volume ou dans les
hernies prévasculaires, toutes hernies à large pédicule s’observant surtout chez les sujets âgés ou dans
des cas de distension de l’aine.

Traitement chirurgical de la hernie crurale étranglée.

Bien que certains restent partisans de la voie d’abord inguinale dans la hernie étranglée en
raison des facilités qu’elle donne pour la libération des organes herniés et le traitement du contenu du
sac, la majorité des auteurs ont recours à la voie crurale, élargie qui, bien menée techniquement,
permet l’ouverture première du sac sans que le liquide septique pénètre dans le ventre, le maintien de
l’anse étranglée, la levée de l’agent d’étranglement et une réfection solide de la paroi en double plan.

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LES HERNIES OMBILICALES ACQUISES

Sous ce titre, sont à étudier les hernies de l’enfant et les hernies de l’adulte.

Hernies ombilicales de l’enfant.

Il n’y aurait pas lieu de décrire ces hernies isolément si elles ne présentaient pas une évolution
toute différente des hernies de l’adulte.

Etiologie.- C’est, en général, dans les premiers mois qui suivent la naissance qu’apparaissent
ces hernies. Elles sont un peu plus fréquentes chez les garçons que chez les filles.

Des causes prédisposantes les favorisent: le mauvais état général, le rachitisme; c’est ainsi que
les enfants rachitiques à gros ventre présentent souvent des hernies ombilicales. Elles sont, on le sait,
particulièrement fréquentes chez les enfants de race noire à abdomen proéminent.

On a incriminé aussi un mauvais état local: amaigrissement, relâchement de la paroi.

La cause déterminante, c’est l’existence du point faible ombilical, dont l’occlusion complète ne
se fait que trois ou quatre mois après la naissance.

Anatomie pathologique et pathogénie.- Au niveau de la hernie, le revêtement cutané est


complet et normal et la hernie est due à l’absence d’occlusion de l’anneau fibreux. Il s’agit d’une
aplasie limitée au plan musculo-aponévrotique. L’anneau est congénital: il existe dès la naissance.
Puis, au bout d’un temps variable, il se laisse forcer par les viscères sous l’influence de la poussée
abdominale incessante du nourrisson.

Rappelons que, chez l’enfant, l’ouraque et les vaisseaux ombilicaux transformés en cordons
fibreux s’engagent jusqu’au centre de l’anneau ombilical et se terminent dans la cicatrice cutanée de
l’ombilic.

L’anneau ombilical est grillage dans sa moitié inférieure par un trident protecteur constitué par
l’ouraque flanqué des deux artères ombilicales.

La moitié supérieure de son aire ne laisse passer que le cordon de la veine ombilicale. La hernie
ombilicale s’engage , en général, au centre de la moitié supérieure de l’anneau, où elle forme une
saillie arrondie et lisse.

Si le trident inférieur et la veine ombilicale sont entraînés par la progression de la hernie, la


tumeur herniaire prend un aspect multilobé.

Rarement, on observe chez l’enfant la hernie oblique apparaissant au-dessus de la veine


ombilicale (équivalente à la hernie ombilicale de l’adulte engagée par le canal de Richet).

Dans la poche herniaire constituée par la peau de l’ombilic et le péritoine qui lui adhère
intimément, on ne trouve, en général, que de l’épiploon. L’intestin ne s’y rencontre que si la hernie est
volumineuse.

Etude clinique.- La hernie ombilicale de l’enfant est une petite tumeur, plus ou moins
hémisphérique, déplissant la cicatrice ombilicale, du volume d’une noisette.
La hernie sort à l’occasion des cris, des efforts et se tend à ce moment.
Elle est facilement réductible.

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Etiologie.

Beaucoup moins fréquentes que les hernies inguinales et plus fréquentes chez nous (8 %) que
les hernies crurales, les hernies ombilicales, qui représenteraient 8,2 % des hernies, viennent au
deuxième rang des statistiques personnelles des hernies. On les observe plus souvent chez la femme
que chez l’homme. Chez l’homme, la hernie ombilicale est souvent associée à des hernies inguinales
congénitales doubles. Il est probable que ces hernies de l’adulte sont des hernies de l’enfance que l’on
croyait à tort guéries.

Chez la femme, ces hernies sont l’apanage des femmes grasses, à parois abdominales relâchées
par des grossesses multiples, à tissus déficients. Ce sont des hernies de faiblesse.

Etude clinique

Schématiquement, on peut décrire deux types de hernies:

1 Les petites hernies, qui sont souvent mal tolérées, entraînant des troubles réflexes divers:
douleurs, élancements à la pression, coliques, pesanteur gastrique, constipation, etc... Il est possible
que ces phénomènes douloureux, lorsqu’ils apparaissent par crises, soient dus à des pincements ou à
des irritations du ligament rond du foie.

Les petites hernies, lorsqu’elles se développent chez une femme grasse, ne sont pas toujours
visibles, et seule une palpation soigneuse peut les déceler.

Si la hernie est plus volumineuse, elle se traduit par une saillie arrondie, nettement visible en
position debout et de profil. Au pôle inférieur de cette saillie, se remarque la cicatrice ombilicale
déplissée.

D’habitude, ces petites hernies sont réductibles, mais très rapidement l’irréductibilité partielle
ou totale apparaît. A la longue, elles augmentent de volume.

2 Les hernies volumineuses forment des tumeurs souvent énormes, à contours irréguliers, à
revêtement cutané aminci, rougeâtre ou violacé, unilobées ou bilobées, le plus souvent incomplètement
ou pas du tout réductibles. Elles peuvent atteindre des proportions monstrueuses et retomber en besace
plus ou moins bas sur le ventre (hernies en tablier).

La palpation permet d’y reconnaître des zones de consistance inégale, les unes molles, les
autres bosselées et dures, qui répondent à des noyaux d’épiploïte.

Complications.

Aucune hernie n’est plus sujette à des complications variées. En dehors de l’étranglement qui
constitue la plus fréquente complication, il en est d’autres que nous passerons en revue: complications
cutanées, péritonite herniaire, rupture spontanée des enveloppes, etc...

1 Etranglement.- Moins fréquent que dans les hernies inguinales, l’étranglement s’observe
surtout dans les hernies volumineuses chez des femmes obèses et âgées. Parfois étranglement sur arrête
vive par la partie inférieure de l’anneau, c’est le plus souvent un étranglement endo-sacculaire: car le
sac forme un véritable assemblage de diverticules et de poches secondaires séparés par des orifices
étroits à bords tranchants. L’intestin adhérent est coudé, pincé ou tordu entre ces orifices et les brides
épiploïques.

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Dans les hernies de petit volume, c’est un étranglement aigu, à marche rapide, par l’anneau
ombilical. Tous les signes classiques de l’étranglement herniaire (hernie dure, tendue, douloureuse,
vomissements, arrêt des gaz) s’y observent: la gangrène s’installe vite et, si l’on n'opère pas, la mort
survient rapidement.

Plus souvent, il s’agit de hernies volumineuses où les accidents d’étranglement se déroulent


suivant un type très particulier: chez une femme obèse, la hernie devient tendue et irréductible, en
même temps qu’apparaissent des nausées et qu’il existe de la constipation. Le repos, la glace sur le
ventre calment souvent cet orage. On dit: engouement, on accuse un processus adhérentiel
intrasacculaire, la torsion temporaire d’une anse herniée. Ces accidents peuvent se répéter: un jour
arrive où les symptômes d’engouement ne s’amendent pas et l’étranglement se constitue lentement. La
tumeur devient dure, luisante, tendue, empâtée. La douleur n’est pas très vive, les vomissements sont
tardifs.

L’évolution devient alors rapide, l’état général s’affaiblit et le pronostic est très sombre.

Si l’engouement est plus fréquent dans les hernies ombilicales que dans les autres hernies, on
se souviendra qu’il conduit presque sans transition à l’étranglement et qu’on ne doit pas différer
l’intervention.

2 Complications cutanées.- L’eczéma, voire même de véritables ulcérations, peuvent


s’observer. Des poussées de lymphangite, des phlegmons de la région se développent parfois. C’est
dire la nécessité de préparer soigneusement la peau avant d’opérer les grosses hernies ombilicales.

3 Péritonite herniaire.- Ce qu’on désigne sous ce nom, c’est, en réalité, la poussée d’épiploïte
herniaire très fréquente dans les volumineuses hernies ombilicales.
Rougeur de la peau, oedème et empâtement de la tumeur dont l’irréductibilité s’accuse, telle en est la
traduction clinique.

4 Rupture spontanée des enveloppes.- Par suite de la distension extrême du sac herniaire, la
peau et le sac mal vascularisés deviennent très friables et l’on peut, rarement d’ailleurs, observer la
rupture spontanée des enveloppes. Cette rupture se réalise soit par ulcération du sac consécutive à des
excoriations de la peau, soit par éclatement au cours d’un effort sur un sac herniaire surdistendu.

C’est une complication redoutable qui s’accompagne d’une péritonite rapidement mortelle si
l’on n’intervient pas.

5 Néoplasmes herniaires.- Un cancer du côlon ou de l’estomac propagé à l’épiploon peut


compliquer une hernie ombilicale, et, chez un sujet présentant des symptômes de néoplasie colique ou
gastrique, la présence dans la hernie d’une masse dure, irrégulière, est particulièrement éloquente.

Pronostic.

Si le pronostic dépend en partie du volume et de l’irréductibilité de la hernie, il dépend surtout


de l’état général du malade et de son adiposité. Chez les femmes grasses, à mauvais coeur, à
fonctionnement rénal déficient, le pronostic d’une hernie ombilicale doit toujours être réservé.

Traitement.

Il convient de l’envisager successivement pour les hernies non compliquées d’étranglement,


puis pour les hernies étranglées.

1 Hernies non étranglées.

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Le bandage ne constitue qu’un mauvais palliatif. Il ne peut s’appliquer qu’à une hernie
entièrement réductible, et il ne la maintient qu’imparfaitement.
On ne le prescrira qu’en cas de contre-indication opératoire: âge avancé, état général médiocre.

Avant de se décider à l’opération, un examen complet du futur opéré s’impose: on s’assurera de


l’état du coeur, des poumons, des reins. On choisira le mode d’anesthésie en fonction de l’état général
du malade.

Principes de l’intervention.- En raison de l’adhérence du sac à la peau, le sacrifice de la peau


et donc de l’ombilic s’impose (omphalectomie). La hernie elle-même étant souvent irréductible, il est
dangereux d’aborder directement le sac, car on risque de blesser les viscères adhérents. Il faut ouvrir le
sac par voie rétrograde après ouverture du péritoine à distance, ce qui rend beaucoup plus facile la
libération du contenu.

Une vaste incision elliptique à grand axe transversal circonscrit à distance la hernie. On incise,
suivant ce tracé, peau et graisse jusqu’à l’aponévrose. Puis, progressivement, au ras de l’aponévrose,
on détache la graisse en se dirigeant vers le collet herniaire. Lorsqu’on a ainsi circonscrit et pédiculisé
le collet, on n’ouvre pas le sac d’emblée. On incise d’abord l’aponévrose sur la ligne médiane à
quelque distance au-dessus (ou au-dessous) de l’anneau, puis le péritoine est ouvert. Sous le contrôle
de la vue, on peut alors ouvrir le sac de la profondeur à la superficie. On traite ensuite le contenu
comme pour toute hernie, puis on résèque le sac au ras de l’anneau.

Il reste à fermer la brèche. C’est facile dans les hernies de petit et de moyen volume.
L’obturation de l’anneau s’obtient par suture transversale des lèvres de l’incision péritonéale, puis
suture transversale ou verticale de l’incision aponévrotique. Il est prudent d’utiliser pour cette suture
des fils non résorbables, et il est préférable de pratiquer une suture en paletot.

Dans certains cas, la brèche à obturer peut être d’un diamètre considérable. Certains artifices
ont été utilisés: greffes de fascia lata, prothèses perdues (plaques de caoutchouc, filet souples à mailles
d’argent, etc...) et actuellement des mèches synthétiques.

Résultats.- Les résultats immédiats sont bons, à condition de n’opérer que des cas
judicieusement choisis. Toutefois, il existe une faible mortalité opératoire due surtout à des
complications pulmonaires.

Les résultats éloignés sont très bons quand la suture de la paroi a été faite avec des fils non
résorbables et qu’il n’y a pas eu d’accidents infectieux du côté de la paroi.

2 Hernies étranglées.

L’anesthésie loco-régionale est, bien entendu, préférable.


Les principes directeurs de la cure opératoire sont les mêmes. L’omphalectomie s’impose.

Le pédicule de la hernie sera soigneusement isolé par section circonférencielle de la paroi


autour de l’anneau. On peut ainsi extérioriser d’un bloc le sac et son contenu avant même de l’ouvrir.
Puis on ouvre le sac prudemment après protection soigneuse et en quelque sorte hors du ventre.

S’il existe des lésions de l’intestin, on les traitera comme il a été dit au chapitre Etranglement
herniaire.

La fermeture de la brèche comporte une suture du péritoine et de l’aponévrose en un plan.

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Le pronostic de ces hernies étranglées est grave: car toutes les manoeuvres opératoires se font
au milieu de l’abdomen: s’il y a infection au cours de ces manoeuvres, la péritonite diffuse sera
difficilement évitable.

L’âge des malades, leur obésité, leurs tares organiques pèsent lourdement dans la balance. Par
ailleurs, on peut être amené à faire une résection large du grêle ou du côlon. Cette résection impose
dans le cas du côlon, l’anus artificiel in situ, et cela en un siège peu favorable.

Cette gravité de l’opération au stade d’étranglement doit inciter à opérer plus précocement les
malades et à intervenir notamment devant la simple menace d’étranglement.

HERNIES DE LA LIGNE BLANCHE

Définition.- On désigne sous ce nom les hernies produites à travers les fibres d’entre-
croisement de la ligne blanche. Il est classique de les diviser en trois groupes d’après leur siège:
1 les hernies épigastriques;
2 les hernies juxta-ombilicales;
3 les hernies sous-ombilicales, qui sont exceptionnelles.

1 Hernies épigastriques.

Sont à éliminer de cette étude les éventrations spontanées ou traumatiques, ces dernières
accidentelles ou post-opératoires.

Données anatomiques.- Les hernies épigastriques sont de beaucoup les plus fréquentes des
hernies de la ligne blanche: ceci se comprend aisément, car c’est au-dessus de l’ombilic que les
muscles droits ont leur écartement maximum et que la ligne blanche est large, tandis qu’au-dessous de
l’ombilic la ligne blanche est très étroite.

Formée par un entrecroisement très complexe des tendons aponévrotiques des muscles larges
de l’abdomen dans son segment xipho-ombilical, par une intrication plus simple au-dessous des
arcades de Douglas, la ligne blanche présente surtout dans son segment xipho-ombilical des orifices de
nombre et de dimensions variables. Les uns (4 à 5 de chaque côté) siègent sur le bord interne des
muscles droits et laissent passer des vaisseaux et des filets nerveux provenant des cinq derniers
espaces. Les autres sont dus à l’issue de simples pelotons adipeux sous-péritonéaux.

Toutes ces déhiscences des fibres de la ligne blanche constituent autant de points faibles,
amorces possibles de hernies.

Anatomie pathologique.- Siège .- La hernie, unique le plus souvent, siège au niveau du tiers
inférieur de la ligne blanche (dans son segment susombilical).

Orifice.- L’anneau répond à l’un de ces orifices que nous avons décrits. Quadrilatère à l’état
normal, il ne tarde pas à s’arrondir, se transformant en véritable anneau fibreux, qui n’atteint que
rarement la dimension de la pulpe de l’index.

Cet orifice n’est pas situé exactement sur la ligne médiane: il est légèrement latéralisé et le plus
souvent à gauche.

Le sac est le plus souvent précédé d’un lipome sous-péritonéal à pédicule mince et dont la
portion élargie s’étale dans le tissu cellulaire sous-cutané. Ce lipome, qui paraît jouer un grand rôle

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Chirurgie digestive 50
dans l’amorce de la hernie en lui préparant la voie par distension de l’orifice aponévrotique, peut
exister seul: il constitue alors toute la hernie (hernie graisseuse), dont le sac est absent.

Le contenu est le plus souvent représenté par de l’épiploon. Ce n’est que très rarement que l’on
peut rencontrer dans ces hernies de l’intestin ou un segment de côlon transverse.

Le ligament rond du foie entre très souvent dans la constitution de ces hernies; son tiraillement,
son pincement sont souvent responsables des douleurs observées.

Etiologie.- La hernie épigastrique est relativement rare: on la rencontre surtout chez l’homme,
à l’âge adulte. Le rôle du lipome sous-péritonéal préherniaire est capital dans sa production, mais la
malformation congénitale représentée par une aplasie plus ou moins marquée de la ligne blanche
favorise le développement de la hernie.

Il s’agit donc de hernies acquises, mais dont une dispostion congénitale facilite l’apparition.

Etude clinique.- Deux aspects bien différents se rencontrent:

Forme non douloureuse.- Ce sont des malades qui viennent consulter parce qu’ils ont
découvert une tumeur épigastrique, qui tend à augmenter de volume.

On constate alors l’existence d’une saillie épigastrique souvent de petit volume masquée par un
pannicule adipeux qui peut la dissimuler, et c’est la palpation qui permet de la reconnaître et de
percevoir, un peu en dehors de la ligne médiane, un petit orifice à bords tranchants. Le malade debout,
la hernie se voit mieux. Souvent la hernie est irréductible et facilement palpable.

Forme douloureuse.- C’est le cas le plus fréquent. Le malade vient consulter pour des troubles
fonctionnels. Il se plaint de phénomènes douloureux: pesanteur, tiraillements épigastriques, parfois
douleurs en ceinture avec ou sans irradiations à la base du thorax. Exacerbées par la pression, les
efforts, ces douleurs, qui surviennent parfois par crises, s’exagèrent après les repas et peuvent
s’accompagner de nausées et de vomissements.

Localement, il s’agit de petites hernies, passant parfois inaperçues, non réductibles. Seule une
palpation attentive permettra de découvrir la petite nodosité sessile, fixe et irréductible, au niveau du
creux épigastrique.

Si bien qu’en fait ces douleurs semblent pouvoir être rapportées à trois causes:
1 Tantôt le lipome se comporte comme un véritable tubercule sous-cutané douloureux;
2 Tantôt, et c’est la cause la plus fréquente, le ligament rond, tiraillé, attire le foie en bas
et entraîne les phénomènes douloureux:
3 Tantôt, enfin, une affection gastrique concomitante (ulcère, néoplasme) est responsable
des douleurs.
En somme, tout malade porteur d’une hernie épigastrique devenue douloureuse devra être
soigneusement examiné au point de vue d’une lésion possible des viscères de la partie supérieure de
l’abdomen.

L’évolution de ces hernies est rarement compliquée: l’étranglement y est exceptionnel.

Diagnostic.- il peut être difficile pour les petites hernies graisseuses qui risquent d’être
méconnues chez un sujet adipeux.

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Chirurgie digestive 51
Par ailleurs, on se rappelera, en présence d’une hernie épigastrique douloureuse, la possibilité
d’une lésion gastrique concomitante et l’intérêt d’un examen radiologique de l’estomac et du
duodénum.

Traitement.- La contention par bandage est illusoire: aussi doit-on proposer l’intervention
dans les hernies douloureuses et dans les hernies d’un certain volume. Il est prudent, surtout s’il existe
des phénomènes douloureux, de vérifier l’état de l’estomac et du duodénum au cours de l’opération.

Principes de l’intervention.- Il faut enlever le lipome préherniaire, réséquer le sac quand il en


existe un. Il est nécessaire, lorsque le ligament rond a glissé avec la hernie, de le libérer et de le
refouler en évitant de le prendre dans les sutures.

L’anneau, en général, étroit, est ensuite fermé facilement par suture directe des bords avec des
fils non résorbables.

Ce ne serait que dans le cas de hernies très volumineuses qu’on serait obligé de recourir à des
procédés autoplastiques (transplantations aponévrotiques notamment).

2 Hernies juxta-ombilicales.

La hernie juxta-ombilicale est celle qui se fait par un orifice voisin de l’ombilic, mais
cependant distinct de l’orifice ombilical.

L’orifice peut être sus ou sous-ombilical ou latéral: il siège à moins de deux centimètres de la
cicatrice ombilicale.

Parfois simple hernie graisseuse, cette hernie acquiert souvent un gros volume.

Au point de vue clinique et thérapeutique, la hernie juxta-ombilicale se confond avec la hernie


ombilicale: elle peut en présenter toutes les complications, et son traitement consiste en la cure radicale
dont la technique ne diffère pas de celle utilisée pour les hernies de la ligne blanche.

3 Hernies sous-ombilicales.

Ce sont des hernies exceptionnelles, ce qui tient à ce que les muscles droits, en cette zone, sont
très rapprochés l’un de l’autre. Ne rentrent pas, en effet, dans ce cadre, les éventrations sous-
ombilicales par diastasis des droits si fréquentes après des grossesses répétées et les éventrations post-
opératoires.

Les hernies sous-ombilicales ont un orifice analogue à celui des hernies épigastriques. Cet
orifice siège le plus souvent à 4 centimètres de l’ombilic, point faible de la ligne blanche sous-
ombilicale. Elles ne se développent jamais plus bas.

Ce sont, au point de vue clinique, des hernies qui ne s’accompagnent pas de symptômes
fonctionnels bien marqués.

Leur traitement s’inspire des mêmes règles que celui des hernies des autres orifices de la ligne
blanche.

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Chirurgie digestive 52

2. EVENTRATIONS

Toutes les lésions décrites sous ce terme ont un point commun: la déficience de la paroi
permettant la protrusion des viscères abdominaux.

On distingue deux types d’éventration:

1 Les éventrations spontanées, véritables affaissement de la paroi;


2 Les éventrations traumatiques (accidentelles ou chirurgicales).

Nous étudierons également dans ce chapitre l’éviscération aiguë post-opératoire.

1. EVENTRATIONS SPONTANEES

Elles peuvent être congénitales ou acquises. Elles sont dues à des aplasies de la paroi
abdominale qui se révèlent soit dès la naissance, soit plus tard dans l’enfance ou à l’âge adulte.

a) Eventration du nouveau-né.- Nous nous bornerons à rappeler que de véritables arrêts de


développement de la paroi abdominale antérieure peuvent s’observer chez le nouveau-né; ce sont les
hernies ombilicales du nouveau-né (type embryonnaire ou foetal) et l’écartement congénital de la ligne
blanche.

b) Eventration de l’enfance.- Elles revêtent trois types cliniques différents: ou bien elles
surviennent au cours d’un syndrome rachitique; ou bien elles apparaissent à la suite d’une
poliomyélite; ou bien c’est sans cause apparente que l’éventration se manifeste, et on la rattache à une
lésion congénitale.

1 Eventration rachitique.- Elle apparait soit chez les tout petits, soit chez des enfants de cinq
à dix ans.

Elle siège au niveau de la ligne blanche; elle est sus-ombilicale, sous-ombilicale ou xipho-
pubienne.

Chez ces enfants rachitiques à abdomen distendu et mou, on peut déprimer la ligne médiane
entre les muscles droits, dont les bords internes sont écartés par une fente plus ou moins large.

2 Eventrations paralytiques.- Consécutives à une poliomyélite aiguë de l’enfance, ces


éventrations sont rares. Elles siègent sur l’une quelconque des parois antéro-latérales de l’abdomen.

Lorsque l’enfant pousse ou crie, une partie de l’abdomen se gonfle comme un ballon, et au
cours des mouvements respiratoires, se soulève plus fortement que l’autre. La région paralysée est
nettement flaccide à la palpation. L’examen électrique fait la preuve de la paralysie.

L’évolution de cette forme d’éventration, liée à celle de la maladie causale, relève de son
traitement.

3 Eventrations congénitales.- Il est habituel de les décrire sous le nom de hernies ventrales par
arrêt de développement ou laparocèles. Il s’agit d’une aplasie d’un segment musculo-aponévrotique de
la paroi dont l’origine congénitale semble vraissemblable.

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Chirurgie digestive 53
Elles siègent au niveau des parties latérales de l’abdomen, en dehors des droits, dans l’espace
limité par le rebord costal, l’arcade crurale, la masse sacro-lombaire et le bord externe des droits.

Ces éventrations sont volumineuses, sessiles. A leur niveau, la paroi est très mince, les muscles
ont presque complètement disparu: on sent, au niveau de leur base, un rebord saillant qui limite
l’orifice de sortie de l’éventration.

Le contenu de ces laparocèles est formé d’épiploon et d’intestin. En raison de la largeur de


l’orifice, l’étranglement intestinal y est exceptionnel.

c) Eventrations de l’adulte et du vieillard.- En dehors des éventrations paralytiques par


lésions radiculo-médullaires (tabès) ou par atteinte des nerfs périphériques (paludisme, goutte,
diabète), qui sont très rares, l’éventration s’observe surtout chez les vieillards ou chez les femmes
ayant eu de nombreuses grossesses.

Chez les vieillards ptosiques ou obèses, des éventrations parfois énormes peuvent apparaître en
rapport avec une déficience de la paroi et coexistant avec des hernies multiples.

L’éventration des femmes multipares, véritable diastasis des muscles droits, survient le plus
souvent après des grossesses multiples (souvent gémellaires ou compliquées d’hydramnios). Ces
éventrations sont dues à ce qu’après l’accouchement la paroi musculo-aponévrotique, distendue par la
grossesse, ne reprend ni sa tonicité, ni son épaisseur normales.

Cette lésion s’observe surtout chez les femmes grasses à parois flasques, à tissus de mauvaise
qualité, comme le prouve la coexistence habituelle de prolapsus génital ou de ptoses multiples.

Cliniquement, ces malades accusent des douleurs, des sensations de pesanteur, de distension et
parfois des troubles gastro-intestinaux.

L’examen couché montre un abdomen flasque, tantôt gros, tantôt mince et vergeturé.

Si l’on fait asseoir la malade sur son lit, sans lui laisser prendre d’appui avec ses mains, on voit
apparaître, tendue du xiphoïde au pubis, une tumeur allongée verticalement plus ou moins saillante,
sonore le plus souvent.

On peut insinuer les doigts sur la ligne médiane, dans une véritable tranchée dont les berges
sont formées par les droits: le diastasis entre ces deux muscles peut atteindre 8 à 10 centimètres.

L’évolution en est variable. On assiste parfois à une véritable stabilisation des lésions et le port
d’une ceinture permet à la malade de mener une vie normale.

Parfois, l’évolution est progressive: l’éventration augmente de volume et les troubles


fonctionnels s’accroissent.

2. EVENTRATIONS TRAUMATIQUES

De loin les plus fréquentes, elles peuvent être: accidentelles, opératoires ou mixtes.

Eventrations accidentelles.

Elles sont consécutives à l’effraction de la paroi musculo-aponévrotique. Les plaies pénétrantes


de l’abdomen, les plaies pariétales en séton, non explorées, fournissent un important contingent
d’éventrations.

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Les éventrations accidentelles peuvent apparaître aussi à la suite de plaies avec vaste perte de
substance (plaies de l’abdomen par éclat d’obus) ou à la suite de contusions abdominales avec rupture
sous-cutanée de la paroi.

Il faut isoler une variété très spéciale: l’éventration paralytique, qui peut aussi s’observer à la
suite de certaines opérations. Accidentelle, elle succède à des plaies qui ont entraîné la section des
derniers nerfs intercostaux (plaies pénétrantes de la base du thorax ou de la région lombaire).

Anatomie pathologique.- Dans l’éventration accidentelle, l’épiploon, sous l’influence de la


poussée abdominale, s’introduit à travers l’hiatus pariétal: il est bientôt suivi de l’intestin.
Progressivement, les viscères refoulent les plans sus-jacents, les dissocient, les écartent et finissent par
soulever la peau. Ces éventrations ont tantôt un sac péritonéal, tantôt pas de sac, et l’intestin est alors
directement situé sous des téguments souvent très amincis.

Dans l’éventration paralytique, on observe une dégénérescence des muscles larges de


l’abdomen, qui, au niveau du territoire paralysé, sont flasques et amincis.

Etude clinique.- L’éventration accidentelle se reconnaît facilement: sous une cicatrice mince,
aplatie, on remarque une saillie plus ou moins volumineuse, réductible le plus souvent avec ou sans
gargouillement et, à sa place, le doigt s’engage dans un anneau plus ou moins large.

Parfois la réduction est difficile ou impossible et on a la sensation d’une tumeur dure, mate, un
peu irrégulière.

Les complications et notamment l’étranglement, qui n’est pas rare, doivent faire proposer au
porteur de l’éventration l’intervention chirurgicale.

Les éventrations paralytiques ont un aspect différent: elles se traduisent dans la position debout
ou à l’effort par une voussure, parfois très étalée, dans l’hypochondre, la fosse iliaque ou le flanc. La
palpation permet de sentir une large zone dépressible circonscrite par un anneau musculaire net formé
par les fibres non touchées par la paralysie.

Eventrations post-opératoires

Elles sont très fréquentes. On les observe aussi bien dans la pratique civile qu’en temps de
guerre.

Elles se rencontrent en chirurgie de guerre avec prédilection, pour les raisons suivantes:
septicité des plaies, délabrements pariétaux importants avec sections musculaires et nerveuses,
incisions de débridement atypiques, fréquence des accidents pulmonaires, évacuations hâtives, etc...

Dans la pratique civile, elles sont devenues relativement rares, depuis que l’on apporte plus de
soin à la réfection des parois. Elles s’observent encore à la suite de réparations pariétales importantes
(mauvais affrontement des différents plans, résorption rapide du catgut, etc...)

Mais, surtout, on les voit survenir après suppuration de la plaie opératoire (hématomes
pariétaux infectés) et particulièrement à la suite d’opérations septiques qui ont nécessité un drainage
prolongé: le drainage par mèches, par Mickulicz, semble particulièrement nocif.

Certaines incisions paraissent jouer un rôle favorisant: incisions transversales ou verticales de


l’hypochondre pour la chirurgie hépatique, incision du type Jalaguier pour appendicite à chaud,
médianes sous-ombilicales pour lésions suppurées du petit bassin. En pratique, l’éventration est due à

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l’écartement des lèvres pariétales par le système de drainage utilisé et à la sclérose de la paroi
consécutive à la suppuration. Cette bande de tissu fibreux n’offre qu’une barrière insuffisante à la
poussée des viscères et, dès que le malade se lève, l’éventration est fatale.

Anatomie pathologique.- La cicatrice cutanée est mince, étalée, blanchâtre. Elle fait une
saillie plus ou moins importante.

Sur la peau, on trouve un tissu cicatriciel qui est soit fibro-séreux lorsque le péritoine double le
sac, soit uniquement fibreux lorsque le péritoine s’arrête au niveau du collet.

A l’intérieur du sac, on trouve l’intestin et l’épiploon, qui sont soit libres, soit adhérents.
Parfois des brides cicatricielles en pont cloisonnent la poche et constituent l’amorce de futurs
étranglements par brides.

Le volume de l’éventration est très variable: à côté des larges éventrations qui intéressent toute
la longueur de la cicatrice et dont le sac est sessile, à large ouverture, il en est de petites (noix, noisette)
qui ont un sac à pédicule circonscrit par un anneau souvent étroit.

Etude clinique.- C’est dans les semaines ou les mois qui suivent une opération que
l’éventration se manifeste. Parfois elle apparaît brusquement à la suite d’un effort violent par rupture
des plans profonds de la cicatrice. La peau cicatricielle est mince. L’éventration est plus ou moins
apparente suivant son volume. Au repos, elle fait en général une légère saillie, mais, à l’occasion d’un
effort, d’une secousse de toux, la saillie s’accentue et soulève la peau. La réduction de cette masse est
le plus souvent possible. Parfois elle est incomplète, voire impossible (intestin et épiploon adhérents).

Lorsqu’on a pu réduire l’éventration, on engage les doigts dans l’anneau et on apprécie la


largeur du collet, qui est toujours dur et inextensible.

Dans les éventrations de petite taille, on ne note pas de saillie, même à l’effort; mais les doigts
dépriment facilement la cicatrice et pénètrent dans un hiatus plus ou moins étendu.

La présence d’une éventration provoque presque toujours des troubles fonctionnels [douleurs
abdominales, troubles intestinaux (subocclusion, constipation, ballonnement)]; des troubles
sympathiques (angoisse post-prandiale, etc.).

La complication majeure est l’étranglement soit intra-abdominal par coudure d’une anse sur
bride, soit intrasacculaire par bride ou par agglutination.

Signalons les ulcérations de la cicatrice avec l’infection pariétale qui en résulte et la possibilité
de perforation ou de rupture.
Rappelons, enfin la possibilité d’éventrations paralytiques post-opératoires après néphrectomie,
par exemple lorsque l’incision n’a pas ménagé le douzième nerf intercostal et l’abdomino-génital, ou
après incision verticale antéro-latérale de la paroi abdominale qui énerve le droit.

Indications thérapeutiques.

Le traitement médical ne vit que des contre-indications du traitement opératoire: âge avancé,
état général déficient, tares organiques, etc.

1 Les éventrations spontanées.- Chez l’enfant rachitique, le traitement habituel du rachitisme


suffit à amener la guérison.

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L’éventration paralytique relève de la gymnastique médicale, de l’électrothérapie. Le port
d’une ceinture abdominale est indispensable.

L’éventration congénitale doit être traitée chirurgicalement par la suture plan par plan de la
paroi. Dans certaines hernies très volumineuses, on peut être obligé de recourir à une myoplastie, une
greffe aponévrotique ou la mise en place d'une mèche synthétique.

L’éventration des multipares relève, tout au moins au début, du traitement médical


(gymnastique abdominale, massages, cure d’amaigrissement chez les obèses ptosiques) et du port
d’une ceinture. Le traitement chirurgical sera réservé aux femmes jeunes à tonicité musculaire
satisfaisante. On ne l’entreprendra qu’après s’être assuré que les troubles ressentis ne sont pas sous la
dépendance d’une autre affection.

L’opération consiste, sans ouvrir le péritoine, à ramener les muscles droits écartés au contact
l’un de l’autre en suturant leur bord interne avec des fils non résorbables.

2 Les éventrations traumatiques.- Le traitement prophylactique par l’exploration des plaies,


la réfection soignée des parois, permettrait d’éviter bon nombre d’éventrations.

Une éventration constituée doit être traitée par exérèse du sac (s’il existe), traitement du
contenu, puis réfection des plans pariétaux.

Seule l’éventration paralytique est justiciable d’un traitement spécial: la plicature de la zone
paralysée par des anses de crins en U prenant point d’appui sur la zone saine du muscle et faufilant la
zone dégénérée. Dans toute éventration, l’indication opératoirre est absolue, sauf chez les malades
âgés, obèses, avec tares organiques et affaiblissement pariétal généralisé.

Il est inutile d’insister sur les soins pré-opératoires: cure d’amaigrissement, préparation des
téguments, mise en état des poumons, du coeur, etc. Il est bien évident qu’il faut toujours tenir compte
du microbisme latent de ces incisions, qui ont en général suppuré, et on doit attendre au minimum six
mois après cicatrisation complète de l’incision primitive avant de réintervenir.

Rappelons quelques modalités techniques. Si l’éventration est de petites dimensions il y a


intérêt à réséquer toute la zone malade cicatricielle (y compris le péritoine), à disséquer les différents
plans pariétaux, à les séparer et à reconstituer la paroi plan par plan en utilisant de préférence le catgut
chromé ou des fils non résorbables.

Si l’éventration est importante, il faut conserver le maximum d’étoffe et garder le tissu fibreux
très solide qui borde l’éventration: c’est en suturant ce plan fibreux bord à bord ou en paletot qu’on
parviendra à refaire une paroi solide.

Les éventrations très volumineuses posent des problèmes techniques délicats: on peut être forcé
d’avoir recours, pour obturer la brèche, à des plasties musculaires, à des transplants aponévrotiques, à
des prothèses en nylon, etc ...

Les éventrations étranglées, qui ont beaucoup de points communs avec les hernies ombilicales
étranglées, nécessitent l’opération d’urgence.

Il y a intérêt à circonscrire largement la peau par une incision en côte de melon, puis on ouvrira
le sac en allant de la profondeur à la superficie, c’est-à-dire en commençant par ouvrir le péritoine en
zone saine et en incisant progressivement ensuite le pourtour du collet.

Il faudra traiter le contenu (épiploon, intestin) selon les lésions qu’il présente.

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Le pronostic de ces éventrations étranglées est en général très grave.

HERNIE CICATRICIELLE: Il s'agit en fait d'une petite éventration telle qu'on le comprend
dans la littérature anglosaxonne.

EVISCERATION AIGUE POST-OPERATOIRE

Définition.- C’est l’issue des viscères abdominaux consécutive à la désunion d une plaie
opératoire suturée.

Etiologie.- L’éviscération post-opératoire n’est pas exceptionnelle. Elle s’observerait dans une
proportion de 1,5 p. 100 à 2 p. 100 des laparotomies. Aussi fréquente chez l’homme que chez la
femme, elle se produirait avec prédilection aux âges extrêmes de la vie (enfants, vieillards).

Certaines causes générales favorisent cette désunion: les maladies débilitantes, l’anémie, la
cachéxie, la syphilis, le diabète, l’obésité sont relevées dans un certain nombre d’observations.

L’éviscération se produit surtout après certaines variétés d’actes opératoires: perforation


d’ulcère gastro-duodénal, plaies de l’abdomen et surtout interventions pour néoplasies viscérales.

Trois facteurs d’ordre biologique ont été incriminés: ils peuvent d’ailleurs se combiner entre
eux, ce sont:

1 La déficience en vitamine C (acide ascorbique), qui perturbe les phénomènes de réparation et


de régénération du tissu conjonctif;

2 L’hyoprotéinémie, qui entraîne une diminution de la prolifération fibro-plastique et de


l’activité cellulaire: l’hypoprotéinémie est habituelle chez les néoplasiques; elle semble responsable en
partie de la fréquence, chez ces sujets, du lâchage des sutures;

3 La sensibilité au catgut, véritable état allergique qui aboutit à une résorption trop rapide des
fils de catgut.

Des causes locales favorisent également l’éviscération post-opératoire.

Certaines incisions de la paroi abdominale, notamment les incisions verticales et latérales


parallèles au bord externe des muscles droits, qui sectionnent au maximum les pédicules vasculaires et
nerveux, sont plus dangereuses que les incisions obliques ou transversales et les incisions médianes.

Le matériel de suture: au catgut simple ou chromé qui offre l’inconvénient d’une résorption
rapide (par allergie ou simplement par exsudation sérique et par inflammation locale), il faut
évidemment préférer, lorsque cela est possible, les fils non résorbables (soie, lin, crin, etc). En fait, ce
qui compte dans la cicatrisation d’une plaie peut-être plus que la nature des fils, c’est l’affrontement
rigoureux des différents plans sans serrage excessif et en veillant à ne pas étrangler par le serrage du fil
une trop grande épaisseur de tissus.

L’éviscération est favorisée par un mauvais affrotement du péritoine, qui permet à l’épiploon et
à l’intestin de s’insinuer entre les lèvres péritonéales, créant ainsi une amorce à la future éviscération.

Mais c’est surtout le drainage qui joue un rôle important en augmentant la fréquence de
l’infection pariétale et en favorisant la hernie de l’épiploon et de l’intestin.

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L’infection locale, par l’importance de l’exsudation qu’elle détermine, par le retard qu’elle
apporte à la réparation tissulaire, par la résorption accélérée du catgut qu’elle entraîne, est une cause
importante d’éviscération post-opératoire.

La cause détereminante de l’éviscération est l’effort, qu’il s’agisse de secousses, de toux


(complications pulmonaires), de vomissements ou de distension abdominale.

Etude clinique.- C’est du cinquième au dixième jour que se produit le plus souvent
l’éviscération. On en a vu de plus précoces (premier jour) et de plus tardives (seizième jour). Elle se
produit habituellement sous le pansement: l’opéré ressent une douleur brusque au niveau de l’incision;
il a l’impression qu’à la suite d’un effort de toux ou de vomissement quelque chose vient de craquer
dans son ventre.

Quelquefois, des symptômes tels qu’un abondant écoulement séro-sanguin par l incision ou la
constatation d’oedème et de fluctuation le long de sutures attirent l attention avant que la poussée des
viscères n’ait écarté les berges cutanées.

Parfois, l’éviscération ne se traduit que par des signes peu nets de subocclusion (nausées,
vomissements).

L’examen, dans les cas typiques, montre, entre les fils de suture qui ont encore tenu, une issue
des viscères abdominaux: tantôt un paquet épiploïque, tantôt des anses grêles, plus rarement l’estomac,
les côlons transverse ou sigmoïde sortent par la plaie: ils sont congestionnés et recouverts de placards
fibrineux, c'est l'éviscération complète ou totale.

Parfois l’éviscération est moins nette: les viscères sont restés sous le plan cutané, et c’est en
écartant les fils qui suturent la peau qu’on aperçoit les viscères prolabés qui forment sous les plans
cutanés une saillie sonore et gargouillante, c'est l'éviscération incomplète ou partielle.

L’éviscération s’accompagne d’un cortège de signes généraux où dominent les signes de choc.

Le pronostic en est grave: les organes éviscérés sont menacés par l’infection qui les dépolit, les
recouvre de concrétions fibrineuses, et qui se trasmettra rapidement à la grande cavité 1péritonéale; par
le sphacèle (pincement de leur pédicule vasculaire); par l’occlusion précoce (faible dimension de
l’orifice) ou tardive (sténoses cicatricielles après réduction). La précocité du traitement peut seule
atténuer la gravité du pronostic: aussi, dans les cas douteux, doit-on explorer chirurgicalement
l’incision opératoire.

Traitement.- Il faut réopérer: l’anesthésie locale est souvent préférable chez ces sujets, qui
sont fatigués.

Après préparation de la peau, il faut laver au sérum chaud l’intestin éviscéré, réséquer
l’épiploon, puis réintégrer les viscères dans l’abdomen. S’il y a soupçon d’infection, on drainera.

La suture de la paroi sera pratiquée en un seul (de préférence) ou en plusieurs plans, suivant
l’état du malade. La suture en un plan total aux fils métalliques (bronze, acier) semble d’ailleurs
préférable. Un pansement par adhésif consolidé par un bandage de corps bien ajusté sera ensuite
appliqué.

Les antibiotiques ainsi que la vitamine C, les transfusions post-opératoires et si besoin


l’aspiration duodénale continue seront utilisées.

Les éviscérations post-opératoires sont grevées d’une lourde mortalité.

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CHAPITRE II

GRANDS SYNDROMES CHIRURGICAUX DU TUBE DIGESTIF

I. Le drame abdominal
1. Anamnèse
2. Examen abdominal
3. Examens de laboratoire
- Biologie
- Amylase
- Analyse d'urines
4. Ponction péritonéale
5. Examen radiologique
6. Quelques règles d'or
7. Causes médicales des abdomens aigus
8. Diagnostic différentiel des abdomens aigus en Pédiatrie
9. Syndrome douloureux aigus de l'abdomen.

II. Les traumatismes abdominaux :


Plaies et contusion de l'abdomen

III. Les péritonites aiguës


IV. L'occlusion intestinale aiguë
V. Pathologies chirurgicales de l'appendice
VI. Diagnostic et traitement des hémorragies digestives

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Chirurgie digestive 60
1. LE DRAME ABDOMINAL

Le drame abdominal est certainement le chapitre le plus important de ce cours de pathologie


chirurgicale digestive.
Nous allons tâcher de le définir ici à partir de l’anamnèse, des examens cliniques et
paracliniques, des règles fondamentales aux quelles nous ne le savons que trop; il existe des
nombreuses exceptions, mais les règles fondamentales dont le respect et la totale connaissance
permettent de limiter à un strict minimum le nombre des faux diagnostics.

En dépit des progrès effectués par la médecine dans pas mal d’autres domaines, en dépit des
améliorations apportées par la prolifération des explorations paracliniques, le diagnostic correct d’un
abdomen aigu et par conséquent de choix fondamental que réalise le médecin praticien entre une bonne
décision qui entraine la survie et l’erreur qui entraine le décès dépend entièrement de l’intelligence et
de l’expérience du médecin.

Je vous demande instamment d’apprendre ces notes avant de commencer vos stages cliniques
et de les relire ensuite durant ceux-ci afin de confronter déjà à la théorie votre jeune expérience
personnelle.

Quelque soient les pièges et les déceptions que nous causent parfois le diagnostic d’abdomen
aigu, obtenir par la simple anamnèse, l’examen clinique et le raisonnement, un diagnostic correct est
une des plus grandes satisfactions, de la profession des médecins.

On regroupe sous l’appellation générale de drame abdominal un certain nombre des situations
qui impliquent une décision clinique urgente, faute de quoi l’évolution se fait rapidement vers des
complications extrêmement menaçantes et le plus souvent le décès. Pour vous guider dans ce dedale
nous disposons de l’anamnèse directe ou obtenue auprès de la famille, de l’examen clinique, enfin et
secondairement des examens paracliniques.

1. ANAMNESE

L’anamnèse est souvent, par elle seule, déterminante. Elle contribue en tout cas à déterminer
dans quelles directions doivent se porter les investigations et les examens complèmentaires. Elle
s’attache à définir quelques symptômes comme la douleur, la nausée, la modification du régime des
selles.

MODE D’INSTALLATION DE LA DOULEUR ABDOMINALE

a) Si le patient qui était bien en un moment donné devient quelques secondes plus tard, l’objet d’une
douleur excurciante, le diagnostic le plus probable est :
- Soit la rupture d’un viscère creux
- Soit un accident vasculaire.
Une colique rénale ou biliaire peut être en effet très brutale dans son début mais en général ne cause
pas de douleurs semblables en intensité à celle provoquée par la perforation de l’estomac ou la
thrombose mésentérique.

b) Si la douleur d’installation rapide est modérement sévère au début et devient rapidement plus
marquée, il faut envisager une autre cause :
- Pancréatite aiguë
- Thrombose mésentérique
- Etranglement de l’intestin grêle

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Chirurgie digestive 61

c) Un début très progressif de la douleur et une augmentation progressive est caractéristique d’une
affection péritonéale ou d’une inflammation.
- L’appendicite et la diverticulite commencent souvent de cette façon.

LES CARACTERES DE LA DOULEUR

Nature de la douleur une fois qu’elle est installée :


a) Une douleur excurciante qui est pratiquement insensible aux morphiniques indique une lésion
vasculaire tel un infarctus massif de l’intestin ou une rupture de l’aorte abdominale.

b) Une douleur extrêmement intense, mais contrôlée aisément par des médications est plus typique
d’une pancréantite aiguë que de la péritonite associée à une rupture des viscères creux.
- Un étranglement de l’instestin grêle sans infarctus extensif produit à peu près la même
douleur.

b) Si la douleur est sourde, vague et mal localisée, il est clair qu’elle a également commencé de
façon très graduelle. Ces données de l’anamnèse suggèrent fortement un processus inflam-
matoire ou une infection modérée. L’appendicite se présente très souvent de cette façon là.

c) Une douleur intermittente avec des accès crampoïdes se voit fréquemment dans la gastro-
entérite. Toute fois si la douleur revient à cycle régulier, augmentant crescendo pour ensuite
diminuer jusqu’à un espace libre de durée variable, le diagnostic le plus vraissemblable est celui
d’obstruction mécanique de l’intestin grêle. Exceptionnnellement ce type de douleur apparaît dans le
début de la pancréatite subaiguë.
Si l’auscultation abdominale révèle des vagues de péristaltisme intermittentes qui vont
crescendo et qui décroissent avec la douleur, nous sommes presque sûrs, d’avoir affaire à une
obstruction du grêle.

- Dans la colique ou la gastro-entérite les bruits péris taltiques n’ont que peu de relation avec
les douleurs abdominales.

IRRADIATION DE LA DOULEUR OU MODIFICATION DE SA LOCALISATION

- Une douleur dans l’épaule signifie souvent une irritation diaphragmatique due à l’air, au
contenu péritonéal ou au sang. La douleur biliaire est également très rapportée à l’épaule gauche
faisant penser à l’angine de poitrine.

- De façon classique, la douleur de l’appendicite commence dans l’épigastrre et s’installe dans


le quadrant inférieur droit. Une modification de cette propagation douloureuse ou une contamination
de tout l’abdomen signifie souvent un processus de péritonite.

L’ANOREXIE, NAUSEES, VOMISSEMENTS

Sans aucun doute, des symptômes tels que l’anoréxie, les nausées, les vomissements sont très
importants dans l’évolution du drame abdominal. Toutefois, les choses peuvent être très avancées au
point de vue abdominal sans qu’il ait eu production d’anoréxie, nausées et vomissements. En effet, si
le péritoine est bien protégé de l’infection, de l’inflammation comme c’est le cas de l’appendicite
rétrocaecale ou lorsque l’appendice est complétement isolé par le grand épiploon, le patient, non
seulement, n’a pas d’anoréxie, mais peut même avoir très faim. La chronologie de ces évenements est
également très importante. En effet, s’ils précèdent le début des douleurs, il faut suspecter une gastro
entérite ou une maladie du système tandisque dans le drame abdominal chirurgical, la douleur précède
généralement l’installation de ces symptômes.
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- Lorsque les nausées, vomissements sont extrêmement marqués, il faut évoquer les possibilités
comme la gastro-entérite, la gastrite aiguë, la pancréatite aiguë, la lithiase cholédocienne ou
l’obstruction intestinale haute.

DIARRHEE ET CONSTIPATION

- Lorsqu’on peut être sûr que le patient n’a produit ni gaz ni matières fécales pendant une
période de 24-48 h, on peut affirmer qu’il y a un certain degré d’occlusion intestinale.
- Dans ces circonstances, toutefois, il devrait y avoir aussi une distension marquée ou des
vomissements persistants s’il n’y a ni vomissements ni distension, l’obstruction intestinale n’est pas un
diagnostic à retenir en première main. La diarrhée, bien sûr, est une manifestation classique de la
gastro-entérite, mais elle peut se présenter comme symptôme dominant lorsque l’appendice est en
position pelvienne.Une diarrhée répétée, sanglante indique une ulcération du côlon. Il faut penser à la
rectocolite hémorragique, à la maladie de Crohn et à la dysenterie bacillaire ou amibienne. Une
diarrhée franchement sanglante est un signe commun d’ischémie colique, mais est seulement absente
dans la thrombose mésentérique supérieure avec gangrène extensive du petit et du gros intestins.

FRISSONS ET TEMPERATURE

-Un certain degré de température est commun à toutes les urgences chirurgicales. Dans
l’appendicite, la température n’est toutes fois pas habituellement très élevée. Une température très
élevée devrait suggérer alors des complications liées à la pyléphlébite ou un autre diagnostic. Une
température très élevée avec des signes péritonéaux chez une femme qui n’a pas apparemment des
maladies systémiques est caractéristique d’une annexite aiguë.

- Des accès répétés de température et des frissons sont caractéristiques d’une pyléphlébite et
d’une bactériémie.
- En présence d’autres signes qui suggèrent une appendicite,la contracture suggère une
perforation.
- Frissons et température sont très fréquents dans les infections biliaires ou rénales. C’est ainsi
que l’angiocolite et la pyélonéphrite aiguë se présentent souvent avec des alternances des frissons et
température.
- Température, frissons, ictère ainsi qu’une certaine hypotension indique une angiocolite
suppurée. C’est une urgence chirurgicale.

2. EXAMEN CLINIQUE

Les modalités de l’examen clinique en cas d’abdomen aigu ont dû être vues dans le cours de
sémiologie chirurgicale. Rappellons toutefois les élements qu’il faut examiner en routine lors d’une
palpation de l’abdomen aigu :
1) Inspection
2) Sensibilité à la toux. Examen des orifices herniaires et de
testicules dans l’abdomen aigu
3) Recherche d’une contracture
4) Palpation à un doigt
5) Palpation profonde
6) Douleur ou rebound
7) Auscultation
8) Signes particuliers
9) Examens rectal et pelvien

1) Recherche de la sensibilité abdominale

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La recherche de la sensibilité abdominale doit être faite avec un doigt non avec la main tout
entière. Il est impossible de localiser de façon précise une inflammation péritonéale si on pratique avec
un doigt en commençant aussi loin que possible de la zone où la toux a provoqué une douleur
spontannée. On se dirige ensuite graduellement vers le centre.
- Dans le stade précoce de l’appendicite, la région douloureuse n’est souvent pas plus large
qu’une pièce de 20 Francs. Lorsqu’il y a une contracture abdominale diffuse sans rigidité associée des
muscles considerés, on doit suspecter une gastroentérite ou une autre maladie inflammatoire de ce type
sans péritonite. La gastro-entérite est acompagnée de façon caractéristique par une sensibilité diffuse
abdominale sans rigidité musculaire.
- Lorsqu’il existe une sensibilité diffuse de l’abdomen sans contracture associée des muscles
grands droits il faut suspecter une gastro-entérite par un autre processus inflammatoire de l’intestin
sans péritonite associée. C’est une caracteristique de la gastro-entérite que de montrer une sensibilité
abdominale diffuse sans contracture musculaire.

2) La percussion

Dans la perforation à péritoine libre d’un viscère creux, il y a de l’air sous le diaphragme et la
percussion de la région du foie peut montrer du tympanisme. Le tympanisme latéralement dans la ligne
médio axillaire à 5cm ou plus au dessus de rebord costal est due à la présence de l’air libre ou
simplement à des anses grêles distendues.

3) Palpation des masses

On va maintenant palper profondément à la recherche des masses caractéristiques. On le


trouvera dans la cholécystite, l’abcès périappendiculaire, le gateau sigmoïdien de diverticulite et
l’anévrysme de l’aorte abdominale en voie de rupture.

4) Auscultation abdominale

L’auscultation est une part essentielle de l’examen abdominale. L’absence du péristaltisme


audible signifie une péritonite diffuse.Il faut, pour l’affirmer, avoir écouté au moins pendant 3 minutes.
Aussi, il faut toutefois signaler qu’il peut y avoir une péristaltique audible conservée en présence d’une
péritonite établie. Des vagues de péristaltiques intermittentes allant crescendo avec des intervalles
libres réguliers font diagnostiquer une obstruction du grêle dans son milieu. Il faut toutefois signaler
que ce type d’auscultation se rencontre dans les phases précoces de la pancréatite aiguë et
correspondent à l’anse sentinelle dilatée qui est soumise à des contractions péristaltiques régulières
simulant celles de l’obstruction intestinale aiguë.

5) Signes particuliers

a) Signe du Psoas
b) Signe de l’obturateur
c) Signe de la percussion du rebord costal
d) Signe de Murphy

3. EXAMENS DE LABORATOIRE

Biologie

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L’hématocrite élevé signifie une déshydratation due à des vomissements excessifs ou à une
perte de liquide dans la cavité péritonéale. Un hématocrite bas peut signifier une anémie préexistante
ou un saignement actif. La leucocytose peut aider si elle est significativement élevée. Toutefois des
taux normaux ou même bas peuvent être obtenus en présence d’une péritonite établie. Une leucocytose
basse avec lymphocytose relative peut suggérer une infection virale ou une gastro-entérite.
- Une leucopénie marquée peut suggérer une dyscrasie sanguine
ou un sepsis sévère.
- Une augmentation progressivement croissante des globules blancs
signifie une progression d’un processus inflammatoire ou septique.
- La détermination des électrolytes est nécessaire pour se
rendre compte de l’importance et de la nature des liquides
perdus.

Amylase

Elle peut être élevée dans la pancréatite aiguë, mais peut être normale ou basse dan la
pancréatite hémorragique. Elle est souvent élevée en cas de thrombose mésentérique, d’obstruction
intestinale ou d’ulcère duodénal perforé.

- Un taux d’amylase élevé est souvent vue en présence d’un pseudokyste du pancréas.

- la pancréatite aiguë peut se voir en association avec l’hyperlipémie de type I et V, mais


l’activité d’amylase peut être réduite à une valeur normale ou basse dans ces cas particuliers.

Analyse d’urine

L’analyse d’urine permet d’éliminer une infection urinaire et le diabète.

4. Ponction péritonéale

Le liquide péritonéal examiné met en évidence la présence du sang ou de pus.

5. Examen radiologique

L’examen radiologique de l’abdomen est extrêmement important pour arriver au diagnostique


dans le drame abdominal.
- Il faut demander une radio de l’abdomen sans préparation en position couchée et debout (si le
patient en est capable) éventuellement une urographie intraveineuse (U I V) et une radio du thorax. En
voyant ensemble toutes ces radio, on doit se poser les questions suivantes :
1. les contours du foie, de la rate, des reins et du
muscle psoas sont-ils bien définis ?
2. les images gazeuses dans l’estomac, dans l’intestin
grêle et dans le côlon sont-elles dans les limites
normales ?
3. y a-t-il du gaz, de l’air en dehors de la lumière
intestinale ou en dessous du diaphragme ?
4. y a-t-il de l’air dans les voies biliaires ?
5. y a-t-il des opacités anormales telles que lithiase
vésiculaire, fécalome, calcifications des ganglions
lymphatiques, calcifications pancréatiques, aortiques ?
- Dans certains cas bien précis, on pourra s’aider éventuellement d’un lavement baryté réalisé
prudemment et lorsqu’on suspecte la présence d’une masse dans la profondeur, la réponse aux simples

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Chirurgie digestive 65
questions énoncées plus haut permet déjà d’obtenir des renseignements très importants dans un certain
nombre de cas. Ainsi la disparition de l’ombre des psoas indique un hématome ou un abcès
rétropéritonéal (rupture d’anévrysme, appendicite rétrocoecale)
- Une ombre rénale élargie ou déplacée indique une lésion urologique. Un élargissement de
l’ombre splénique avec un dépla-cement de l’estomac et du côlon suggère une hémorragie par rupture
de la rate et refoulement des structures adjacentes.
- La présence d’anses grêles dilatées avec des niveaux hydroaériques, une absence de gaz dans
le côlon sont quasi-indicatives d’une obstruction au niveau de l’intestin grêle.
- Le réperage du caecum dans une position inhabituelle peut permettre de faire le diagnostic
d’appendicite dans cette situation inhabituelle. Une dilatation et une rotation marquées du caecum ou
sigmoïde sont typiques du volvulus (voir plus haut)
- Une dilatation marquée de l’entièreté du gros intestin suggère une obstruction colique; une
dilatation massive du côlon dans la rectocolite indique le développement d’un côlon toxique.
- Enfin lorsque c’est l’ensemble de l’intestin grêle et du gros intestin qui est distendu par l’air,
nous avons une image caractéristique d’un iléus, d’une péritonite ou d’une pseudo-obstruction non
chirurgicale de l’intestin.
- La présence d’air en dessous du diaphragme indique une perforation des viscères creux, par
ex. ulcère gastro-duodénal.
- Lorsque la quantité d’air en dessous du diaphragme est particulièrement importante, on
pensera plûtot à une perforation colique.
- La présence d’air dans les voies biliaires est caractéristique d’une communication entre une
portion du tube digestif et les voies biliaires (fistule cholédoco-duodénale).
- Si à ce dernier signe s’ajoute en outre la présence d’obstruction intestinale, il peut s’agir d’un
iléus biliaire et l’on pourra voir éventuellement la lithiase calcifiée.
- La présence d’air dans le système porte est indicative d’une pyléphlébite avec des bactéries
qui forment du gaz (appendicite compliquée, infarctus mésentérique au stade terminal). Très rarement,
la prise de quelques ml de gastrografine peut être nécessaire pour confirmer un diagnostic
d’obstruction intestinale haute ou une perforation de l’estomac.
- De même s’il est de règle d’éviter de recourir à un lavement baryté en présence des signes de
péritonite, dans certains cas on le fera toutefois pour établir définitivement un diagnostic de
diverticule, de volvulus sigmoïdien ou d’obstruction colique basse sur carcinome. N’oublier pas bien
sûr le rôle essentiel de l’angiographie dans l’insuffisance vasculaire mésentérique et aussi dans
certaines conditions où l’on suspecte une rupture ou encore une hémorragie sur le trajet de l’intestin
grêle ou du gros intestin.

6. Quelques règles d’or

1° Tout patient qui présente une douleur abdominale aiguë durant depuis plus de 6 heures doit être
considéré comme ayant un problème chirurgical jusqu’à ce que l’on ait prouvé le contraire.

2° Dans les situations chirurgicales, la douleur précède généralement l’anoréxie et les vomissements
tandis que dans les abdomens médicaux, la douleur suit le phénomène d’anoréxie et de vomissement.

3° Le drame abdominal chez des sujets âgés est beaucoup plus suspect d’être de nature chirurgicale
que chez les sujets plus jeunes.

4° La leucocytose en réponse à l’inflammation est généralement plus marquée chez le jeune que chez
le vieillard.

5° Les drames abdominaux chirurgicaux sur lesquels on pose le plus fort pourcentage des diagnostics
faussement négatifs sont
l’appendicite aiguë et l’obstruction intestinale.

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Chirurgie digestive 66
6° A l’opposé, l’affection médicale sur laquelle on porte souvent un diagnostic faussement positif de
drame abdominal est la salpingite.

7° Lorsque devant un tableau clinique troublant difficile à interpréter, on ne sait exactement quelle
hypothèse formuler; on ne peut jamais perdre de vue que l’appendicite aiguë peut
toujours être en cause.

8° L’appendicite en position pelvienne peut se présenter avec un tableau de vomissement, de diarrhée,


de douleurs abdominales légères qui peuvent la faire confondre avec la gastro-entérite.

9° La présence d’une douleur excurciante et d’un minimun de découvertes à l’examen clinique doit
toujours soulever la possibilité d’un infarctus mésentérique.
10° La cause la plus habituelle d’obstruction intestinale chez une femme de plus de 65 ans qui n’a
jamais été opérée auparavant est la hernie crurale étranglée. Envisager ensuite l’iléus bilaire.

11° Un épisode de douleurs épigastriques suivies quelques heures ou quelques jours plus tard de signes
d’obstruction intestinale doit faire évoquer le diagnostic d’iléus biliaire.

12° Une maladie caractérisée par l’ictère modéré, une température élevée, des frissons et des signes
d’hypotension signifie une angiocolite suppurée.

13° Attention à l’appendicite durant le 1er trimestre de grossesse. Elle se présente de façon atypique en
raison du déplacement du grand épiploon. L’essentiel de la mortalité foetale et maternelle est dû au
diagnostic trop tardif.

14° Enfin et par-dessus tout, nous voudrions surtout pour ceux d’entre vous qui s’occuperont de
Médecine de Soins Intensifs, souligner le piège diagnostique que présente les patients âgés ayant
présenté une longue période d’état de choc qui sont hospitalisés depuis longtemps pour une maladie
systémique et qui, dans le décours d’une affection médicale compliquée, développe une cholécystite
aiguë, appendicite aiguë ou une perforation d'ulcère gastrique.
Redoutons le risque de faire un diagnostic trop tard parce que le raisonnement clinique est braqué sur
l’affection initiale (infarctus du myocarde) parce que le patient sous respirateur est incapable de
s’exprimer et de signaler la présence de la douleur.

Diagnostic différentiel du drame chirurgical


- L’infarctus du myocarde
- L’hépatite aiguë
- Le rhumatisme articulaire
- La périartérite noueuse
- La porphyrie aiguë
- La pleurodynie épidémique
- Le pneumothorax spontané
- La pneumonie, l’épanchement pleural
- Les lésions de la colonne

7. Causes médicales des abdomens aigus

Métaboliques
Acidocétose diabétique Urémie
Porphyrie Hypercalcémie
Insuffisance surrénalienne
Toxiques
Morsures d'insectes

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Morsure vénimeuses (scorpions et serpents)
Empoisonnement
Drogues
Diverses
Crises hémolytiques
Hématome du muscle grand droit
Neurogéniques
Herpes zoster (zona), forme abdominale de l'épilepsie,
Tumeurs et infection de la moelle épinière, compression des
nerfs

Cardio pulmonaires
Pneumonie, Infarctus du myocarde, Myocardite, Empyème

8. Diagnostic différentiel des abdomens aigues en Pédiatrie

Nourrissons:

Entérite virale Pneumonie Tumeurs rupturées


Invagination Appendicite Pancréatite
Pyélonéphrite Sténose du pylore Diverticulite de Meckel
Reflux gastro oesophagien Torsion testiculaire Maladie de Hirschsprung
Entérocolite bactérienne Kystes mésentériques Hernie étranglée
Empoisonnement
Traumatisme
Enfants :

Diverticulite de Meckel Traumatisme


Cystite Pneumonie
Entérite virale Pancréatite
Maladie de Crohn: Tumeurs rupturées
. Bactériemies Empoisonnement
. Entérocolite Pyélonéphrite

Adolescents :
Infection pelvienne Pancréatite Maladie psychosomatique
Entérite virale Pneumonie Ulcère peptique
Mittelschmertz Hématocolpos Empoisonnement
Maladie de Crohn Entérocolite bactérienne Trauma
Grossesse ectopique
Grossesse
Cholélithiase

Les urgences abdominales se manifestent par un ensemble de symptômes groupés


différemment selon l'affection en cause. On peut les classer schématiquement en trois syndromes de
base:

1) Syndrome péritonéal se traduit par les signes suivants:

- La douleur violente, brutale, au début localisée puis diffusant rapidement,


permanente.
- les vomissements plus ou moins abondants, traduisant l'irritation péritonéale

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- la fièvre témoigne d'un état infectieux, de la septicité de l'affection.
- la contracture des muscles de la paroi abdominale
- l'épanchement douloureux du cul-de-sac de Douglas

2) Le syndrome occlusif se manifeste par les signes suivants:


- l'arrêt des matières et des gaz
- les vomissements, répétés, sont d'abord gastriques puis bilieux, pouvant devenir
fécaloïdes
- la douleur survient par crises paroxystiques sur un fond continu, le ballonnement
abdominal, bien visible, parfois animé d'ondulations péristaltiques, est élastique,
sonore à la percussion comme un tambour. Ce ballonnement est dû à l'accumulation
des gaz dans l'intestin en amont de l'obstacle. On dit qu'il y a météorisme abdominal.
- des niveaux liquides avec images hydro-aériques seront décelés par des
radiographies.

3) Le syndrome d'hémorragie interne se traduit par des syncopes, la chute de la T.A.,


l'accélération du pouls et une douleur au Douglas si l'hémorragie est intra-péritonéale.

9. SYNDROME DOULOUREUX AIGU DE L’ABDOMEN

La majorité des urgences de pathologie digestive se manifestent par une douleur aiguë de
l’abdomen. Leur évolution dépend essentiellement de la rapidité de la mise en oeuvre du traitement;
c’est ainsi que la mortalité des péritonites aiguës croit selon une courbe exponentielle avec le temps
écoulé entre le début des troubles et le traitement chirurgical. Le délai se mesure en heures; c’est dire
l’importance d’un diagnostic précoce.

L’examen clinique, et plus particulièrement l’interrogatoire, permettent dans la majorité des cas
d’établir un diagnostic précis, mais, pour être efficace, cet examen doit être rigoureux, c’est-à-dire, il
va comporter successivement:
- la recherche systématique de tous les troubles que ce type de malade est susceptible de
présenter selon un plan d’examen préétabli;
- la synthèse des troubles constatés.

Plan d’examen

Valable dans tous les syndromes douloureux aigus, le plan d’examen doit être toujours le même de
façon à éviter les oublis. Il doit être répété de façon à noter les modifications.

Interrogatoire

Il permet de préciser : l’âge du malade, ses antécédents chirurgicaux, ses antécédents médicaux, la
prise de médicaments: corticothérapie, aspirine (risque de perforation), anti-coagulants, absorption de
chlorure de potassium, etc.

Il permet d’apprécier surtout les caractéristiques de la douleur très évocatrices du viscère responsable
de la gravité et du mécanisme des lésions.

Le siège de la douleur est, en règle général, en regard du viscère intéressé. L’appendicite donne une
douleur dans la fosse iliaque droite, la cholécystite dans l’hypochondre droit etc. Cependant il faut
connaître certaines exceptions, c’est ainsi qu’une appendicite peut débuter par une douleur
épigastrique, et que inversement une perforation d’ulcère peut donner une douleur de la fosse iliaque
droite parce que le liquide gastrique s’écoule dans la gouttière pariéto-colique droite; de même
certaines douleurs d’origine cardiaque peuvent siéger au niveau de la région épigastrique et alors que

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Chirurgie digestive 69
des douleurs d’origine pulmonaire peuvent se manifester au niveau des hypochondres.
L’intensité de la douleur est en général proportionnelle à la gravité des lésions; c’est ainsi que les
douleurs les plus violentes correspondent aux lésions les plus graves, nécessitant le traitement le plus
urgent (ischémie digestive aiguë, perforation, strangulation) mais à l’inverse des douleurs modérées ne
correspondent pas toujours à des lésions mineures.
Le type de la douleur dépend du mécanisme des lésions. Deux types de douleurs sont particulièrement
caractéristiques:
Les douleurs très brutales, très intenses et permanentes correspondent à des lésions graves nécessitant
un traitement chirurgical immédiat (péritonite, infarctus du mésentère, mais aussi pancréatite aiguë).

Les douleurs d’installation progressive, à type de crampe, survenant par vague, augmentant
progressivement , puis diminuant avec périodes d’accalmie, traduisent la lutte de l’intestin contre un
obstacle (obstruction intestinale).

La position antalgique. L’appendicite, lorsqu’elle est de siège rétrocaecal, détermine une flexion
antalgique de la cuisse, relâchant le muscle psoas irrité. Lors d’une péritonite, le malade est immobilisé
car les mouvements mobilisant le péritoine augmentent la douleur. Lors des poussées de pancréatite
aiguë, le malade est couché sur le côté, les genoux repliés sur la poitrine, pour relâcher les muscles
paravertébraux et le psoas irrités.

La remission de la douleur n’est pas nécessairement un signe d’amélioration. Elle peut correspondre à
une période d’accalmie ou même à l’épuisement des défenses de l’organisme.

L’interrogatoire doit rechercher enfin un arrêt des matières et des gaz (voir occlusion), des
vomissements caractéristiques (fécaloïdes, incoercibles), une diarrhée.

Examen clinique

L’inspection permet d’apprécier les mouvements respiratoires de la paroi abdominale; leur


signification est importante: si leur amplitude est normale et s’ils n’augmentent pas la douleur, il y a
vraisemblablement pas de lésion abdominale grave.

Elle permet également de constater une augmentation de volume de l’abdomen qui, associée à une
sonorité à la percussion, constitue le météorisme signant l’occlusion intestinale.

La palpation de l’abdomen permet de rechercher une masse, une douleur provoquée, et surtout une
contraction anormale de la musculature: soit contracture (contraction spontanée existant en l’absence
de la palpation), traduisant une péritonite, soit défense (contraction déclenchée par la palpation, au
moment où elle devient douloureuse) traduisant une souffrance viscérale. La palpation doit être
effectuée avec les deux mains, l’une de chaque côté, de façon comparative.

La percussion est utile au diagnostic des occlusions et des péritonites.

L’auscultation est à tort peu utilisée dans l’examen de l’abdomen, elle permet en effet de préciser le
mécanisme des occlusions: lorsqu’il s’agit d’une obstruction on note une augmentation des bruits
hydroaériques qui deviennent intenses, fréquents, et qui, lorsqu’ils sont perçus au moment des vagues
douloureuses, permettent de faire un diagnostic de certitude.

Dans le cas des occlusions paralytiques, les bruits hydro-aériques sont par contre absents.

L’examen doit être systématiquement complété par un toucher rectal et un toucher vaginal, la palpation
des orifices herniaires, et l’examen des régions lombaires.

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ETAT GENERAL
L’appréciation de l’état général peut se faire sur l’observation de certains signes cliniques:

Le pouls dont l’accélération inexpliquée, et persistante après un traitement antalgique, est un signe de
gravité présent en cas de lésions viscérales graves nécessitant une intervention chirurgicale.

L’accélération du rythme respiratoire, qui s’aggrave sous traitement médical, a la même signification.

La fièvre est un signe relativement fréquent au cours des syndromes abdominaux. Cependant au début
elle peut être soit absente, soit modérée, ne dépassant pas 38°, 38°5, ce n’est que par la suite qu’elle
augemente du fait de lésions telles que perforation ou gangrène viscérale. Une température d’emblée
élevée, à 39° - 40°, est en général le fait d’une affection médicale telle que infection pulmonaire,
infection urinaire, typhoïde. Des frissons accompagnant la fièvre doivent être recherchés, ils peuvent
traduire une bactériémie.
La recherche des signes de choc cardio-vasculaire.

EXAMENS DE LABORATOIRE

Ils doivent être bien sûr demandés mais ne remplacent nullement les données essentielles apportées par
l’examen clinique. En effet l’hyperleucocytose n’est pas un signe formel d’infection et son absence
n’élimine pas obligatoirement une infection vis-
cérale; toutefois l’augmentation progressive du taux de leucocytes est en faveur d’une lésion suppurée
nécessitant un drainage. L’augmentation du nombre des globules blancs et des globules rouges au
culot urinaire n’a qu’une valeur d’orientation. Les variations de l’hématocrite peuvent être souvent
retardés par rapport aux signes cliniques.

L’hyperamylasémie, par contre lorsqu’elle est très élevée, est en faveur d’une pancréatite aiguë.

Abdomen sans préparation

De tous les examens complémentaires la radiographie de l’abdomen sans préparation est celui qui est
le plus utile au diagnostic des syndromes abdominaux aigus. Il est notamment essentiel dans le
diagnostic des péritonites et des occlusions.

Cet examen qui doit être effectué, le malade en position debout, peut aussi être réalisé, lorsque le
malade ne peut pas être mobilisé, en demandant des clichés en décubitus latéral gauche (recherche
d’un pneumopéritoine entre paroi et foie, lors d’une suspicion de péritonite) et des clichés en décubitus
dorsal, de face (recherche d’une aéro-iléie, en cas de suspicion d’occlusion).

Type de syndromes douloureux

Au terme de tous ces examens, plusieurs éventualités peuvent être envisagées :

LA DOULEUR EST ISOLEE

Sans signe de choc, ni troubles septiques, l’examen de l’abdomen est normal et il s’agit en général
d’une douleur relativement modérée. Ce syndrome algique n’est habituellement pas dû à une affection
grave nécessitant un traitement urgent, il peut parfois être exploré par des examens réalisés en
ambulatoire. Il peut s’agir: de coliques hépatiques, ou néphrétiques, d’un syndrome ulcéreux
hyperalgique, d’une pancréatite chronique... et le plus souvent d’une colopathie spasmodique ou d’un
syndrome douloureux abdominal accompagnant une intoxication alimentaire.

Il convient toutefois de s’assurer que l’état du malade ne s’aggrave pas (la surveillance du pouls, du

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Chirurgie digestive 71
rythme respiratoire sont deux témoins de valeur) et d’être particulièrement vigilant en présence de
douleurs de la fosse iliaque droite, surtout chez le vieillard et l’enfant.

LA DOULEUR EST ASSOCIEE

A un syndrome d’infection viscérale caractérisé par l’association d’une hyperthermie, parfois d’une
hyperleucocytose, et à l’examen clinique d’une douleur provoquée et surtout d’une défense
abdominale. L’état général est en règle normal. Ce syndrome traduit l’infection d’un viscère
abdominal.

Selon le siège de la douleur et de la défense on évoque une appendicite, une cholécystite, une
sigmoïdite, une salpingite, une pyélonéphrite, une infection du diverticule de Meckel.

A des signes abdominaux. La présence d’une contracture signe une péritonite et justifie un traitement
chirurgical immédiat.

La présence d’un météorisme est en faveur d’une occlusion intestinale, la décision chirurgicale dépend
du type de l’occlusion.

A un état de choc cardio-vasculaire. En réalité il ne faut pas attendre que cet état de choc soit
réellement installé et l’on doit rechercher une tendance au collapsus par la mise en évidence d’une
accélération du pouls et d’une diminution de l’indice oscillométrique. La chute de la tension artérielle
et l’oligurie sont en effet plus tardives.
Lors des “ventres aigus” l’”état de choc” est toujours d’origine hypovolémique. Si on ne peut mesurer
la pression veineuse centrale et constater qu’elle est abaissée, on peut cependant noter que les
jugulaires sont vides.

Schématiquement les syndromes abdominaux aigus avec hypovolémie sont dus :


- soit à une déshydratation extracellulaire (hématocrite augmentée), c’est le cas des pancréatites
aiguës, des occlusions évoluées, des péritonites évoluées;
- soit à une hémorragie (diminution de l’hématocrite), c’est le cas des ruptures de grossesses
extra-utérines, des fissurations d’anévrismes, des ruptures secondaires de la rate.

Erreurs de diagnostic

Douleurs abdominales et urgences chirurgicales ne sont pas synonymes.


Une maladie chirurgicale peut se traduire fréquemment par des manifestations peu évocatrices d’aspect
médical car la douleur est absente; c’est la péritonite asthénique. Elle détermine un tableau de
septicémie à gram négatif dont la manifestation clinique est le choc cardio-vasculaire. Il faut souvent
porter à tort le diagnostic de “collapsus médical” (infarctus du myocarde). Le diagnostic peut être
redressé en raison de l’existence d’une hyperesthésie cutanée et d’un toucher rectal douloureux.

A l’inverse diverses maladies médicales peuvent avoir un aspect chirurgical en raison de la présence de
douleurs abdominales. C’est le cas d’une occlusion intestinale par coliques néphrétiques, de douleurs
abdominales avec collapsus cardiogénique secondaire aux péricardites, aux infarctus du myocarde, et
même au foie cardiaque (le collapsus est ici provoqué par une incompétence myocardique, la pression
veineuse centrale est augmentée et les jugulaires turgescentes), de certaines affections hépatiques
associant d’ailleurs ictère et température (hépatite virale de forme atypique, foie alcoolique aigu,
nécrose de métastase hépatique); c’est plus rarement le fait des pneumonies, de la fièvre typhoïde de la
crise aiguë de la porphyrie, du diabète, du tabès, de la colique de plomb, de la maladie périodique du
purpura rhumatoïde.

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REGLES THERAPEUTIQUES

L’utilisation d’antibiotiques, de corticoïdes, de morphiniques est strictement contre-indiquée. Ces


produits provoquent une diminution des symptômes, c’est-à-dire des signes d’alarme, mais pas de leur
cause. Seuls les antispasmodiques sont justifiés, à visée antalgique.
La diète hydrique, ou le jeûne complet dans le cas justifiant une hospitalisation, doivent être institués.
Lorsqu’un traitement chirurgical est nécessaire, le résultat dépend de la précocité de ce
traitement.

Il n’y a pas de ventre chirurgical imposant l’abstention.

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Chirurgie digestive 73

II. LES TRAUMATISMES ABDOMINAUX:


PLAIES ET CONTUSION DE L’ABDOMEN

PLAN :

I- DEFINITION
A. CONTUSION
B. PLAIE

II- ETIOLOGIE – MECANISME


A. CONTUSIONS
- Causes déterminantes
- Causes prédisposantes
- Production des lésions
B. PLAIES
- de pratique civile
- de guerre

III- ANATOMIE PATHOLOGIQUE


A. PLAIES
- Plaies non pénétrantes
- Plaies pénétrantes
- Plaies mixtes
B. CONTUSIONS
- Lésions pariétales
- Lésions viscérales

IV- CLINIQUE
A. PLAIE ABDOMINALE PURE
- Diagnostic :
- Interrogatoire
- Examen abdominal
- Examen général
- Radio sans préparation
- Intervention
- Horaire et choc.
B. CONTUSIONS ABDOMINALES
- Interrogatoire
- Etat général
- Examen :
- Abdomen
- Lésions associées
- Evolution :
- Aggravation :
- Syndrome d’hémorragie interne
- Syndrome péritonéal
- Syndromes mixtes
- Amélioration :
- Symptômes
- Accidents secondaires.

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Chirurgie digestive 74
V- FORMES CLINIQUES

A. FORMES TOPOGRAPHIQUES
- Thoraco-abdominales
- Abdomino-pelviennes
- Lombo-abdominales
- En fait le diagnostic est difficile
- Examens complémentaires
B. FORMES ETIOLOGIQUES
- Plaies
- Contusions sur abdomen pathologique
- Lésions par air comprimé
- Lésion par souffle
C. SELON LA GRAVITE ET L’HORAIRE
- Formes graves d’emblée
- Formes vues tardivement
- Formes en deux temps

VI- TRAITEMENT
A. PREPARATION
B. VOIE D’ABORD
C. EXPLORATION
- Liquides découverts
- Hémorragie
- Réparation
D. LESIONS ET TRAITEMENT
- Estomac
- Intestin grêle
- Côlon
- Voies biliaires
- Vessie
- Rate
- Foie
- Rein
- Diaphragme
E. PERITONISATION ET DRAINAGE

VII- RESULTATS

VIII- CONCLUSIONS

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Chirurgie digestive 75

PLAIES ET CONTUSIONS DE L’ABDOMEN

I. DEFINITION

A. ON APPELLE:

1. Contusion: une lésion traumatique ne s’accompagnant pas d’effraction pariétale. C’est donc
un traumatisme fermé.
2. Plaie: Une lésion traumatique s’accompagnant d’effraction pariétale :
- dans les plaies pénétrantes le péritoine est blessé
- dans les plaies non pénétrantes le péritoine est intact.

II. ETIOLOGIE – MECANISME

A. CONTUSIONS

Elles se voient surtout chez l’adulte :

1- Causes déterminantes

a) Pression :
Il s’agit d’un choc appuyé de type écrasement (par exemple: entre deux tampons de
wagons).

b) Percussion:

Il s’agit d’un coup direct qui ne persiste pas et qui donne moins de dégats en
principe.

c) Contre-coup:

La chute d’une grande hauteur entraîne des viscères et la cavité abdominale.


L’arrivée du sujet au contact du sol arrête l’abdomen mais les viscères ayant une
certaine force se tassent provoquant des lésions.

2- Causes prédisposantes : au nombre de trois :

a) Anatomiques
Le rachis faisant saillie dans l’abdomen peut léser les anses intestinales sous l’action
d’une poussée antéro-postérieure.

b) Physiologiques
Le degré de réplétion de l’abdomen et le relâchement musculaire de la paroi sont
des facteurs favorisant l’éclatement des viscères (par exemple: un sujet qui a bien
mangé ou qui a une vessie pleine lors de l’accident).

c) Pathologiques:

Une splénomégalie éclate plus facilement (affections parasitaires), un foie


cirrhotique, un intestin adhérent sont lésés aisément.
La contusion d’une hernie peut léser des viscères intra-herniaires.

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Chirurgie digestive 76
3- Production des lésions: on incrimine:

a) Pour les viscères creux:

Essentiellement l’écrasement, plus rarement l’éclatement,


exceptionnellement l’arrachement de mésos.

b) Pour les viscères pleins:

La déchirure surtout, entraînant un écoulement liquidien.

B. PLAIES

Elles se voient surtout chez l’homme, on oppose :


• les plaies de “pratique civile” à associer aux plaies des guerres tribales ou ethniques:
arme blanche ou projectile,
peu souillées et vues tôt, donc:
- plaie unique
- traitement précoce
• Les plaies de guerre : souvent plusieurs projectiles (éclats ou rafales). Lésions
multiviscérales, septiques, vues tardivement donc :
- plaies multiples
- traitement tardif.

III- ANATOMIE PATHOLOGIQUE

PLAIES
1. Plaies non pénétrantes: péritoine intact
- Possibilité d’hématome important (artère épigastrique)
- Que le trajet soit borgne ou en séton, il peut contenir des corps étrangers et doit être
exploré et traité chirurgicalement.
- Parfois lésion des viscères sous-péritonéaux ou accolés : reins, côlon, face
postérieure du foie.
- Enfin l’importance de la perte de substance (cutanée ou musculaire) peut poser un
difficile problème de réparation.

2. Plaies pénétrantes

a) Simples, sans lésions viscérales, mais le grèle ou l’épiploon peuvent faire hernie par
l’orifice.
b) Avec lésions viscérales: "plaies perforantes"
La plaie peut intéresser le viscère lui-même ou son méso, les lésions sont souvent
multiples (37 % en cas de plaies de guerre) toutes conditions qui imposent lors de
l’intervention une exploration douce et minutieuse de tous les viscères intra-
abdominaux et de leurs vaisseaux.

3. Plaies mixtes

Il est possible qu’un viscère abdominal soit lésé par un projectile dont le point de
pénétration ne siège pas forcément au niveau même de la paroi abdominale. Aux limites
supérieures et inférieures de l’abdomen peuvent s’observer des atteintes mixtes.

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a) Plaies thoraco-abdominales
Associant une lésion de la paroi thoracique, de la plèvre et du poumon d’un ou
plusieurs viscères abdominaux et surtout du diaphragme.

b) Plaies abdomino-pelviennes:
Associant une lésion du rectum ou de la vessie à des dégâts ostéo-musculaires
pelviens souvent importants et parfois à des plaies vasculaires.

1) Les lésions pariétales: ont lieu au niveau des muscles de la paroi abdominale.
Bénignes: ecchymoses, hématomes,
Assez particulier un épanchement de MOREL LA VALLEE
(accumulation de lymphe) dans la gaine du grand droit. Il
est très long à cicatriser.

Plus graves: rupture musculaire survenant électivement au niveau du


grand droit. Il faut signaler la possibilité de déchirure ou
rupture du diaphragme (hernie diaphragmatique traumatique)
par éclatement surtout à gauche, souvent méconnue sur le
moment.

2) Les lésions viscérales seront décrites lors du traitement. Mais il faut savoir qu’elles
sont multiples (guerre) et souvent disséminées surtout lors d’atteinte vasculaire
risquant d’aboutir à des péritonites secondaires.

IV- CLINIQUE

A. PLAIE ABDOMINALE PURE

Le diagnostic est habituellement évidente. L’important est de savoir si la plaie est ou non
pénétrante.

1 –Diagnostic

a. L’interrogatoire précisera (blessé et entourage)


- son horaire et la proximité d’un repas
- la nature et la direction de l’agent vulnérant
- l’existence de : douleurs
vomissements

b. L’examen de l’abdomen :
Montrera : - le siège
- la taille
- l’aspect issue de viscère- lesquels ?
- le nombre des plaies (entrée et sortie)
Recherchera:
- la contracture
- la matité dans les flancs
- la disparition de la matité préhépatique
- une sensibilité du douglas au toucher rectal ou vaginal
c. Un examen complet :
- dépistera une autre lésion :
- thorax

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- pelvis
- crâne
- notera les signes de choc :
- pouls, T.A.
- hématocrite
- numération globulaire

d. Le blessé sera radiographié, à la recherche :


- d’un projectile
- d’un pneumopéritoine
- de lésions osseuses

On pourra même demander : Une UIV


Une angiographie

2- Mais il faut de toute façon intervenir :


“Toute plaie pénétrante de l’abdomen doit être opérée”.
a. ou bien la pénétration est certaine et seule l’exploration chirurgicale par incision
médiane permettra le bilan exact des lésions.
b. Ou bien l’on hésite: il faut commencer par explorer chirurgicalement la plaie
abdominale et si elle est pénétrante ouvrir par incision médiane.

3-Horaire et choc
a. De l’intervention en fonction de la réanimation et du déchoquage, il ressort que les
résultats sont d’autant meilleurs que l’acte opératoire est plus précoce. La réanimation est
d’autant plus efficace :
- que le blessé est endormi
- que l’hémostase est faite et le péritoine nettoyé.

b. il faut donc intervenir aussi tôt que possible, même et surtout si le blessé est choqué.
L’aspiration gastrique continue, l’oxygénation et la réanimation par voie veineuse
doivent précéder l’acte opératoire pour éviter tout risque anesthésique à l’intervention
mais il n’est pas souhaitable de perdre un temps précieux dans le fallacieux espoir d’un
déchoquage complet.

B. CONTUSION ABDOMINALE

Le problème est de savoir s’il faut intervenir ou non c’est-à-dire s’il y a lésion viscérale.
Donc l’examen est important et servira de référence pour les examens ultérieurs.
Les blessés d’urgence après un traumatisme abdominal.

1- L’interrogatoire renseigne sur :


- Horaire et modalités de l’accident
- Contusion appuyée ou non
- Sa force, sa direction, son point d’application
- La protection de la paroi: relâchée ou contractée
- L’état de réplétion intestinale
- L’évolution depuis l’accident: vomissements, émission de matières, urines.

2- L’état général
Du blessé est souvent altéré et il existe un choc plus ou moins important: pâleur, sueurs
froides, pouls petit et accéléré, tension basse.

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Il est nécessaire de noter sur une feuille les chiffres du pouls, de la tension artérielle, de
l’hématocrite, de la température, afin de commencer les courbes qui suivront
l’évolution, pendant que l’on détermine le groupe sanguin du blessé. “L’intensité du
choc n’est pas l’annonce exacte de l’intensité des lésions”.
3- L’examen

Après que le blessé complètement déshabillé, ait été couché dans un lit chaud, permet
rarement en effet, de prendre une décision immédiate.

a) Localement sur l’abdomen


- on peut parfois retrouver la marque cutanée de la contusion
- mais surtout on doit rechercher :
- si le ventre respire
- si la paroi est contractée.
- Il faut beaucoup de douceur et de patience pour apprécier la “résistance” de la
paroi abdominale chez ce blessé qui souffre.
Il faut différencier une contracture localisée à une région lésée, de la contracture
de la péritonite.

- La percussion peut découvrir une sonorité pré-hépatique (pneumo-péritoine) ou une


matité dans les flancs, déclive (épanchement sanguin ou liquidien). On en fait un
schéma pour suivre l’évolution.
- Le toucher rectal ou vaginal : une sensibilité du Douglas.

b. Il faut rechercher d’éventuelles lésions associées


- Palper le thorax et le bassin
- Examiner le crâne et les membres
- Savoir si le blessé peut uriner (et combien en cas de choc)
- Demander des radiographies sans préparation de l’abdomen

c. Au terme de cet examen initial, il est rare que la reconnaissance d’une lésion viscérale
impose l’intervention immédiate :
- hématémèse ou rectorragie importante
- signes d’hémorragie interne abondante
- péritonite par perforation avec contracture et pneumo-péritoine.

Habituellement, il faut instituer d’emblée la réanimation en évitant les corticoïdes et les


opiacés, surveiller le blessé de demi-heures en demi-heure en notant les variations de :
pouls, T.A., température, état de l’abdomen et guider la tactique sur l’évolution.

4. Evolution

a) Dans un certain nombre de cas, on va noter une aggravation et schématique-ment


deux tableaux peuvent être décrits :

• Syndrome d’hémorragie interne :

- La pâleur du blessé augmente, les muqueuses se décolorent, les extrémités sont


refroidies, couvertes de sueurs, l’angoisse et l’agitation s’associent à la soif vive et à
la respiration précipitée, le pouls devient de plus en plus petit, rapide, fuyant, la
tension artérielle s’abaisse progressivement, l’examen peut retrouver une matité
déclive dans les flancs.

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- Un signe important est l’absence d’amélioration malgré la réanimation, ou une
rechute après une amélioration passagère. “Elle résiste au traitement”.
- L’intervention d’urgence pour hémostase s’impose.

• Syndrome péritonéal :
- Les douleurs persistent, des vomissements peuvent apparaître
- L’abdomen est plat, immobile, ne respirant plus, ce qui traduit le blocage du jeu
diaphragmatique.
- La contracture s’est étendue sur la paroi abdominale qui peut devenir “dure comme
du bois”, ce “signe révélateur” traduit la péritonite.
- La radiographie au lit du blessé de préférence si possible(profil en position couchée)
peut montrer un pneumopéritoine: croissant sous la paroi.
- Il faut intervenir.

V- FORMES CLINIQUES

A. FORMES TOPOGRAPHIQUES avec lésions mixtes:

1. Thoraco-abdominales:

a) La plaie intéresse habituellement la plèvre, le poumon et le diaphragme. Si


l’hémopneumothorax est important, l’hémorragie et l’asphyxie aggravent
considérablement le choc et doivent être traitées en premier.
b) Dans l’abdomen, le foie, la rate, l’estomac peuvent être lésés et il faut signaler le danger
de certaines plaies vasculaires (veines sus-hépatiques, veine cave inférieure).

2. Abdomino-pelviennes :

a) Aux plaies du rectum et de la vessie qui sont intra ou sous-péritonéales peuvent


s’associer une fracture de la ceinture pelvienne (risque d’ostéite) et des dégats vasculo-
nerveux dans la région de l’échancrure sciatique.
b) Les plaies par empâlement associent une lésion de l’anus ou du périnée à une déchirure
du rectum parfois difficile à retrouver.
c) Des hématomes sous-péritonéaux de 1 à 2 litres peuvent exister et expliquer un
syndrome d’hémorragie intense.

3. Lombo-abdominales:

a) Les plaies par arme à feu dans cette région peuvent se compliquer de lésions
médullaires (paraplégies).
b) Une hématurie traduit une atteinte du parenchyme rénal mais n’impose pas
l’intervention, par contre, un hématome périnéal qui s’accroît peut obliger à intervenir
surtout si l’on suspecte une plaie du pédicule rénal.
c) Enfin les gros vaisseaux pré-vertébraux peuvent être atteints.

4. C’est dans ces formes mixtes qu’il peut être le plus difficile de savoir si l’agent vulnérant a
lésé un viscère abdominal :
- Une plaie pleuro-pulmonaire basse, en séton, va-t-elle imposer une exploration
chirurgicale de l’abdomen ?
- La contracture au voisinage d’une fracture de côte ou du bassin ne masque-t-elle pas
une plaie de l’estomac ou de la vessie ?
- Cette balle perdue dans le petit bassin, a-t-elle perforé le rectum sous péritonéal ?
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Autant de difficultés qui ne pourront se résoudre qu’à la lumière d’examens successifs et
comparatifs : valeur d’une contracture qui s’étend, d’un choc qui résiste à la réanimation
(courbe du pouls et de la tension artérielle).

5. On aura recours aux examens complémentaires radiographiques répétés de l’abdomen,


parfois urographie ou même angiographie, cathétérisme vésical.
La décision est d’autant plus difficile à prendre que les lésions sous péritonéales ne sont pas
non plus faciles à reconnaître lors de l’exploration chirurgicale.

B.FORMES ETIOLOGIQUES
1. Les plaies par armes blanches sont en général moins graves que les plaies par armes à
feu.
2. Contusion sur abdomen pathologique :
- Contusion herniaire: pouvant donner un tableau de perforation, ou d’hémorragie
interne ou même de hernie étranglée.
- Foie cirrhotique ou les risques hémorragiques sont considérablement accrus.
- Rate paludéenne qui par sa pesanteur, sa fragilité, ses lésions éventuelles de péri-
splénite est beaucoup plus exposée au cours des traumatismes de l’hypochondre
gauche.
- Anses agglutinées, par des adhérences qui ne peuvent pas échapper à l’écrasement.
3. Lésions par air comprimé :
Une brusque détente d’air comprimé au voisinage de l’anus (“plaisanterie” entre
ouvriers d’usine) peut distendre le rectum par hyperpression et se compliquer de
déchirure ou d’éclatement siégeant électivement dans la région recto-sigmoïdienne.
4. Lésions par souffle
“Quant au “blast injury” il comporte entre autres lésions des éclatements de viscères
creux sous l’effet de variation brusque et importante de la pression gazeuse
environnante (souffle de bombe ou d’explosifs).

C. SELON LA GRAVITE ET L’HORAIRE

1. Formes très graves d’emblée :


L’obstacle est insurmontable et le traitement désespérant, souvent le malade meurt
avant les premiers soins.
- plaie de l’abdomen avec éviscération
- plaies multiples intéressant plusieurs viscères,
- plaie de l’abdomen associée à d’autres lésions: du thorax, du bassin, etc …

2. Formes graves parce que vues tardivement :

- En effet, si le blessé n’est pas promptement transporté en milieu chirurgical on peut


voir apparaître :
- Un syndrome de péritonite par perforation
- Un syndrome d’hémorragie interne.
- Ces deux syndromes étant souvent intriqués et expliquant le choc rapidement
apparu.
- Se rappeler que le taux de mortalité était de (avant les antibiotiques):
- 40 % dans les 6 premières heures
- 90 % dans les 24 premières heures.

3. Formes en deux temps :

- touchent surtout la rate,

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- lors d’un traumatisme parfois peu important surtout s’il s’agit d’une rate pathologique.
- Durant la mise en observation à l’hôpital, le malade se plaint de douleurs de
l’hypochondre irradiant vers l’épaule gauche.
- On doit alors demander en plus d’une NFS :
- Une angiographie IV montrant :
- Un refoulement de la veine splénique
- Une augmentation de volume de la rate
- Un lavement baryté :
- Un refoulement du côlon.

- Angle colique

- Sinon vers le 8è ou le 21è jour, déclenché par un effet minime :


- Toux
- Défécation
Apparaîtra l’hémorragie interne brutale nécessitant une splénectomie d’urgence.

VI. TRAITEMENT

Il est chirurgical.

La qualité de l’anesthésie, la perfection de la réanimation en ont amélioré les résultats mais répétons
que les statistiques récentes ont démontré qu’il n’y avait pas intérêt à retarder l’acte chirurgical sous
prétexte d’un déchoquage insuffisant.

A. LA PREPARATION du blessé est capitale :


- Meilleures conditions pour le blessé
- L’oxygénation
- L’injection d’antibiotiques et des sérums ou vaccins nécessaires (anti-tétanique, anti-
gangréneux).
- Correction de la volémie :
• sang conservé de préférence
• plasma
• soluté à grosses molécules
• sérum glucosé hypertonique

A ces perfusions, on pourra adjoindre des thérapeutiques anti-choc: analeptiques cardio-


vasculaires, novocaïne intra-veineuse, extraits surrénaux, cortisone, vaso-presseurs dont les
plus puissants sont les Lévofed et l’Aramine. Mais il faut insister sur le fait que ces derniers ne
peuvent, en aucun cas, remplacer la transfusion dans le traitement du choc hémorragique .

Enfin, dès que l’acte opératoire est décidé, il est important de calmer la douleur par la morphine
ou ses dérivés.

Cette préparation peut être rapide et même être installée et poursuivie pendant l’anesthésie et
l’intervention lorsque cette dernière paraît très urgente.

B. LA VOIE D’ABORD

Hormis le cas particulier de certaines plaies par armes blanches qui associent la certitude de dégâts
seulement locaux et la possibilité d’une incision régionale passant par la plaie, il faut toujours
employer l’incision médiane à cheval sur l’ombilic qui permet seule une exploration commode de

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tout l’abdomen et qui peut si besoin être agrandie vers le haut ou vers le bas ou si nécessaire, par
une incision oblique vers les hypochondres et même le thorax.
L’incision médiane est donc, commode, facile à exécuter et à refermer.

C. L’EXPLORATION
- est méthodique et systématique
- doit être douce en évitant de tirailler les mésos en protégeant les anses intestinales avec des
champs imbibés de sérum chaud.
1. Liquides

- S’il ya du sang dans le péritoine, il faut examiner dans l’ordre , le foie, la rate, le
mésentère.
- S’il y a du liquide :
- le grèle, l’estomac, le côlon si ce liquide est stercoral.
- La vessie s’il s’agit d’urines.

- S’il y a de la bile ;

- les voies biliaires,


- le duodénum

2. En cas d’hémorragie :

L’hémostase est assurée d’emblée, par contre la réparation éventuelle des viscères ne sera
entreprise qu’après exploration complète qui doit suivre l’hémostase ou être d’emblée
lorsqu’il n’y a pas d’épanchement abdominal.

3. Réparation :
a) Dans l’étage sus-mésocolique : on explore successivement, foie, pédicule hépatique,
estomac, rate, coupole diaphragmatique, duodénum et pancréas (en effondrant le petit
épiploon si nécessaire et parfois même en amorçant un décollement duodéno-
pancréatique).
Les reins peuvent être palpés et reconnus à travers le péritoine pariétal postérieur.

b) Dans l’étage sous-mésocolique:


Le côlon (et il est parfois difficile de s’assurer de son intégrité dans certaines zones
accolées) et le grêle que l’on “devidera”, doucement en vérifiant à la fois l’intestin et le
mésentère.

c) Dans le pelvis : vessie, utérus, rectum.

D. LES LESIONS ET LEUR TRAITEMENT

Il faut insister sur leur multiplicité éventuelle qui impose parfois un “plan directeur” (résection du
grèle par exemple) et aussi sur le fait qu’une seule perforation méconnue entrainera la mort du
blessé.

1- Estomac :

Peut être ponctionné (couteau) ou perforé (balle) et dans ce dernier cas, il faut souvent
rechercher le 2è orifice sur la face postérieure.
Après l’hémostase et parage éventuel les orifices sont suturés en un ou deux plans.

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2- Intestin grèle :

Il est le plus souvent atteint. Les perforations sont en général en nombre pair mais seule
l’exploration complète permet de n’en pas méconnaître. Les orifices simples sont suturés
perpendiculaire à l’axe (pour ne pas diminuer la lumière de l’intestin). Les déchirures ou les
perforations multiples rapprochées obligent à une résection segmentaire.

3- Côlon :

Une perforation simple en zone péritonisée sera suturée d’emblée après recoupe des berges
pour coudre des tissus sains et bien vascularisés.

En zone sous-péritonéale et en particulier au niveau du rectum, il peut être nécessaire de


protéger la suture par un anus de dérivation temporaire en amont.

Enfin, devant des lésions graves, plutôt que la simple extériorisation du segment atteint, il faut
préférer la résection segmentaire d’emblée. Si les conditions sont très bonnes, la continuité
peut être rétablie dans le même temps par suture idéale termino-terminale mais le plus souvent
les deux bouts ne sont suturés que sur l’hémi-circonférence postérieure et abouchés ainsi à la
peau créant un anus temporaire en canon de fusil.

4- Voies biliaires

Si une plaie canalaire est reconnue, il faut la réparer aussi minutieusement que possible;
l’utilisation d’un drain tuteur temporaire est disctutable.

Mais parfois une perforation est difficile à reconnaître, et dans le doute, une cholecystos-tomie
de drainage pourra permettre un contrôle secondaire par cholangiographie.

5- Vessie

Suture en deux plans au catgut chromé avec sonde à demeure. Il est parfois nécessaire d’ouvrir
la vessie pour rechercher un orifice sous-péritonéal ou pour repérer les orifices urétéraux (afin
de ne pas les léser lors de la suture).

6- Rate

La splénectomie totale ou partielle et la splénorraphie sont les différentes alternatives


thérapeutiques. Il est possible aussi de faire une greffe du tissu splénique (au niveau de
lépiploon ou dans le muscle grand droit).

7- Foie

Le parenchyme doit être ménagé au maximum. Dans les cas simples, hémostase directe ou par
points de gros catgut en U ou en V et imbriqués, complétés éventuellement par thrombose +
éponge de spongel ou SORBACEL.
Certaines lésions graves peuvent imposer une hépatectomie partielle, réglée ou non.

Les plaies associées des veines sus-hépatiques ou de la veine cave inférieure sont le plus
souvent mortelles.

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Enfin, une séquelle particulière: l’hémobilie traumatique si la plaie a mis en communication
dans le parenchyme un vaisseau et un canalicule biliaire faisant comprendre l’intérêt du
drainage biliaire dans les grosses plaies hépatiques.

8- Rein :

Il peut être perforé, fissuré, éclaté ou rompu; son pédicule peut être sectionné.
Il faut essayer d’être conservateur au maximum: suture, néphrectomie partielle.
On ne se résout à la néphrectomie totale que si elle est indispensable et après vérification de
l’existence de l’autre rein.

9- Diaphragme

Les déchirures diaphragmatiques ne sont faciles à réparer que par voie thoracique, aussi devant
des lésions abdominales assez importantes, peut-on envisager de reporter cette suture par voie
thoracique à un temps ultérieur.

Une voie d’abord thoraco-abdominale en cas de lésions mixtes ne doit être utilisée qu’en cas de
nécessité car elle est plus choquante.
E. PERITONISATION ET DRAINAGE

1. Il faut s’assurer que la péritonisation est aussi parfaite que possible et drainer les espaces
celluleux qui ont pu être contaminés.
2. Les orifices pariétaux sont parés et éventuellement refermés ou drainés.
3. L’antibiothérapie, l’aspiration duodénale continue ainsi que la réanimation seront poursuivies
dans la période post-opératoire.

VII- RESULTATS

La différence étant liée d’après les auteurs à l’abandon d’une réanimation pré-opératoire
prolongée pour l’intervention immédaite sous transfusion de sang aussi importante que
nécessaire.

IX- LES CONCLUSIONS

Que l’on peut tirer de divers travaux, sont les suivantes :

A. Il faut transporter le blessé aussi vite que possible et sans aggraver le choc initial (avantage
considérable du transport par un moyen de transport médicalisé).
B. Il faut traiter ces blessés dans un centre bien équipé en anesthésistes, réanimateurs,
chirurgiens et où il pourra être suivi jusqu’à la guérison sans nouvelle évacuation.
C. Enfin et surtout si la préparation pré-opératoire est un temps essentiel il ne faut pas vouloir
réanimer “jusqu’à efficacité” avant d’opérer.
D. Seule L’INTERVENTION AUSSI PRECOCE QUE POSSIBLE
Et dans de bonnes conditions (anesthésie – réanimation) permet d’améliorer les résultats.

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3. PERITONITES AIGUES

1. Péritonites aiguës généralisées (diffuses) [PAG]


- Rappels physiologiques du péritoine
- Etiologie
- Anatomie pathologique
- Physio pathologie de la PAG
- Symptomatologie
- Diagnostic
- Traitement
- Soins post-opératoires
- Evolution post-opératoire des PAG

2. Péritonites aiguës localisées: Abcès sous-phréniques


- Aperçu anatomique
- Etiologies
- Anatomie pathologique
- Etude clinique
- Evolution
- Formes cliniques
- Diagnostic
- Traitement

A. PERITONITES AIGUES GENERALISEES (DIFFUSES)

1. Rappels physiologiques du péritoine

Le péritoine est une membrane semi-pérméable polarisée dont les principales propriétés
physiologiques sont la sécrétion, la résorption, la défense et la régénération.

a) La sécrétion péritonéale

Le filtrat du plasma sanguin sécrété par le péritoine est légèrement visqueux et sa viscosité moyenne
est de 1,4 unité. Cette sécrétion facilite le glissement des anses intestinales entre elles.

La circulation de ce fluide intrapéritonéal se produit à partir du pelvis et du centre de la cavité


abdominale en direction centrifuge et ascendante. Le péristaltisme intestinal dirige ce liqude à la
périphérie, vers les gouttières paracoliques, tandis que la pression négative intrathoracique et
l'aspiration créée par les mouvements réguliers du diaphragme l’aspire dans les lymphatiques sous
diaphragmatiques.

b) La résorption du péritoine

La superficie du péritoine est estimée à plus ou moins 2 m² . Cette large surface lui permet de résorber
d’importantes quantités de liquide, allant jusqu’à 8 % du poids du corps par heure.

Ce pouvoir de sécrétion et résorption, combiné à l’action de la pesanteur, des mouvements du


diaphragme, des muscles de la paroi abdominale, de l’état de réplétion ou non des organes internes,
déterminent la pression de la cavité abdominale. Avec une respiration calme, la pression
intrapéritonéale est de 8 centimètres d’eau à l’inspiration et en décubitus dorsal. L’expiration crée une
pression négative dans les hypochondres surtout à droite, mais dans le cul-de-sac de Douglas la
pression est de 30 à 40 centimètres d’eau. La pression de 150 centimètres d’eau efficace aux drainages
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non aspiratifs est atteinte lorsque le malade tousse ou vomit.

c) La défense du péritoine

Hormis les facteurs systémiques de défense de l’organisme, le péritoine se protège localement par la
formation des adhérences qui limitent la propagation de l’infection, par l’agglutination des anses
intestinales, du grand épiploon et des appendices épiploïques autour du foyer infectieux ou d’un corps
étranger. A ce mécanisme de défense s’ajoute le fluide intrapéritonéal qui draine les germes et les
corps étrangers de petite taille dans le canal thoracique. La réponse cellulaire participe aussi à cette
lutte anti-infectieuse par l’afflux des macrophages péritonéaux, associé à la production locale de
substances à action antibactérienne et inflammatoire.

d) La régénération

Ce pouvoir de régénération est très rapide et se manifeste quelques heures après le dommage. Il se fait
sur toute l’étendue de la surface endommagée.

2. Etiologie.

Il faut étudier: 1) la voie de pénétration du germe pathogène; 2) sa nature et sa virulence; 3) la


résistance du terrain.

1º Voies de pénétration du germe pathogène

a) Par effraction du péritoine pariétal (blessure par arme blanche, par coup de feu, etc);
b) Par effraction du péritoine viscéral (ruptures des viscères creux au cours de contusion
de l’abdomen, perforations par ulcère, par cancer, etc...);
c) Par effraction du péritoine pariétal et du péritoine viscéral (projectile, instrument pla-
quant ou tranchant);
d) Par propagation de proche en proche d’une inflammation viscérale. C’est le cas de la
péritonite aiguë diffuse au cours de l’évolution d’une appendicite aiguë, d’une
salpingite aiguë; il n’y a pas de perforation, de rupture de l’organe, mais l’infection
partie de la muqueuse du viscère gagne par voie lymphatique la musculeuse, puis la
séreuse;
e) Soit enfin par l’infection sanguine. Ce sont les péritonites qui succèdent à des
phénomènes de septicémie (péritonite à pneumocoques, péritonite à streptocoques,
etc...).

2º Nature et virulence du ou des germes pathogènes.- Les germes pathogènes sont, en général,
associés. Les plus fréquemment rencontrés sont le colibacille, le staphylocoque, l’entérocoque, le
gonocoque et les anaérobies.

3º Nature du terrain sur lequel les germes pathogènes prolifèrent (résistance du terrain).- Les sujets
jeunes, sains, résistent beaucoup mieux, à l’infection péritonéale diffuse que les sujets âgés ou
débilités.

3. Anatomie pathologique

Il faut étudier successivement: 1º d’une part, les modifications réactionnelles de la séreuse péritonéale
dans sa lutte contre l’infection; 2º la sécrétion de sérosité ou de pus par le péritoine infecté; 3º
l’exsudation muco-fibrineuse à point de départ péritonéal.

1º Les modifications réactionnelles de la séreuse péritonéale en lutte avec l’inflammation.- Le

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péritoine viscéral réagit presque immédiatement et toujours plus vivement que le péritoine pariétal.
Dès le début de l’atteinte infectieuse, il rougit, s’épaissit, perd son aspect brillant et devient dépoli. Cet
aspect de réaction péritonéale tend, au fur et à mesure, à s’étendre à la presque totalité du péritoine
viscéral. Très rapidement, sous le péritoine viscéral enflammé, l’intestin se distend et se paralyse,
illustrant la loi de Stockes qui veut que, sous une séreuse enflammée, les muscles lisses de l’organe
sous-séreux soient paralysés. Le grand épiploon, organe essentiellement plastique, tend, dès le début, à
s’approcher du foyer infectieux, à la circonscrire et même à l’isoler complètement. Le péritoine
pariétal réagit plus tard et d’une façon plus discrète.

2º Sécrétion de sérosités et de pus par le péritoine enflammé.- Quel que soit le viscère d’où part
l’infection et quel que soit le microbe responsable, le péritoine réagit par sécrétion d’un liquide dont
les caractères sont variables suivant le degré de la virulence microbienne et l’horaire de l’infection.
L’abondance de l’épanchement est variable et sans rapport immédiat avec la gravité de la péritonite.
Certaines péritonites hypertoxiques et très graves donnent uniquement une sécrétion minime de liquide
louche, mal lié, tandis que certaines péritonites avec épanchement purulent abondant peuvent se
terminer par la guérison. Les épanchements de ces péritonites diffuses tendent toujours à se collecter
en partie en des zones qui correspondent aux limites anatomiques constituées par les mésos, soit au-
dessus du mésocôlon transverse, soit à droite du mésentère, soit entre mésentère et côlon gauche. De
toute façon, le Douglas, bas-fond de la cavité péritonéale, contient toujours une quantité plus ou moins
abondante de liquide qu’il faudra évacuer aussi complètement que possible et qu’il importera de
drainer toujours.

Au liquide sécrété par la séreuse péritonéale peut s’ajouter, en cas de perforation viscérale, le
contenu du viscère malade (liquide filant, visqueux, sans odeur dans les perforations sus-mésocoliques
du tube digestif, liquide d’odeur stercorale dans les lésions du grêle, de l’appendice, du côlon).

3º L’exsudation muco-fibrineuse.- Le péritoine se défend non seulement par une exsudation de


liquide, mais encore par une exsudation de fibrine qui donne naissance à des fausses membranes
blanchâtres, adhérentes à la séreuse. Ces fausses membranes favorisent l’accollement des anses
intestinales et contribuent par des agglutinations à constituer une véritable barrière à l’infection.

4º PHYSIOPATHOLOGIE DE LA PERITONITE AIGUE GENERALISEE

La physiopathologie de la péritonite aiguë généralisée est dominée par un certain nombre de


faits. D’une part, l’immense surface péritonéale et la puissance de résorption de la séreuse vont
entraîner une intoxication massive de l’organisme. D’autre part, l’irritation des plexus nerveux, si
nombreux dans ces régions, va entraîner toute une série de troubles réflexes. Enfin, l’iléus intestinal
s’ajoute à l’intoxication microbienne et crée un grand déséquilibre humoral.
Du point de vue physiopathologique, il convient de distinguer les péritonitess chimiques des
péritonites bactériennes et des péritonites combinées. Cette distinction offre en effet l’avantage de
préciser les modes de formation de véritables “cercles vicieux” qui sont à la base de toute la gravité de
l’affection.

1. Péritonites chimiques
Elles sont le fait des péritonites à liquide à action errosive: acide chlorydrique, pepsine,
chymotrypsine, acides biliaires, pigments biliaires, etc... Elles réalisent des “véritables brûlures
internes” particulièrement graves parce qu’étendues, rendant d’ailleurs compte de la symptomatologie
et des désordres humoraux souvent importants. Le choc réalisé par ces péritonites est semblables au
choc des brûlés. La perforation d’un ulcère gastro-duodénal représente le meilleur exemple.

2. Péritonites bactériennes
Les péritonites bactériennes sont souvent l’apanage des germes Gram négatif dont les
endotoxines sont responsables en partie de l’état de choc. Elles sont souvent causées par les germes

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Gram négatif. L’infection locale se complique d’une septicémie. Les toxines libérées, responsables du
choc,ont un pouvoir cytolytique et inhibiteur de l’activité leucocytaire et plaquettaire. L’inondation
toxinique entraîne une chute de débit systolique qui entraîne à son tour une insuffisance cardiaque.
L’illustration en est la péritonite appendiculaire.

a) Action des germes

Les germes se répandent dans la cavité péritonéale et peuvent passer dans le sang provoquant
une bactériémie et une septicémie qui aggravent considérablement le pronostic; ces mêmes germes
libèrent leurs endotoxines cytolytiques (pour les leucocytes et les plaquettes) qui diffusent dans le
sang.

b) Troubles hémodynamiques et humoraux

Ces états infectieux sévères vont s’accompagner d’une baisse de résistance périphérique. Le
coeur doit s’adapter aux perturbations métaboliques et circulatoires, sous l’action des baro et
chémorécepteurs. Cette variation touche les tissus non directement atteints par l’infection, sous l’action
du système nerveux sympathique. Il en résulte donc une hypo-perfusion de la peau, des reins et du
système circulatoire. Ce défaut provoque la mise en action de la glycolyse anaérobie, avec une
élévation du taux d’acide lactique et des autres métabolites menant à une ACIDOSE
METABOLIQUE.

Plusieurs autres facteurs interviennent dans la physio-pathologie des perturbations humorales et


hémodynamiques lors d’une péritonite, notamment le système Kininoformateur, le rôle des
microagglutinations érythrocytaires amenant à envisager l’importance des coagulopathies de
consommation et les amines vasoactives (bradykinine, histamine, sérotonine) dont le rôle essentiel
dans ces états de choc est de mieux en mieux connu.

La défaillance cardiaque droite, souvent rencontrée dans cette pathologie, est généralement une
conséquence du poumon de choc. Les troubles de ventilation pulmonaire sont aggravés par la gène du
jeu diaphragmatique à cause de la distension abdominale.

c) Le rôle des troubles préexistants

Ces péritonites surviennent de façon caractéristique au cours des péritonites par perforation. Il existe
alors le plus souvent un déséquilibre hydroélectrolytique préalable, dû à des phénomènes occlusifs ou
subocclusifs, à un état fébrile, à une aspiration digestive, ou stockage liquidien dans le tube digestif. Si
bien que les modifications du volume plasmatique sont susceptibles d’évoluer et de créer à elles seules
un véritable état de choc. Cette hypovolémie en outre, diminue la résistance à l’infection, que ce soit
par son rétentissement sur la perfusion tissulaire ou par son rôle sur la phagocytose et l’agglutination
des germes.

3. Péritonites combinées

Elles sont caractérisées par l’évolution simultanée et intrinquée des manifestations de la


péritonite chimique et de la péritonite bactérienne. Ce sont celles qui associent l’innondation par des
liquides agressifs et l’invasion toxinique hyperseptique chez un sujet préalablement déséquilibré du
fait de l’occlusion. L’exemple type est la perforation sphacélique d’une anse intestinale étranglée sous
une bride, sous le collet d’une hernie interne ou par la torsion d’un volvulus serré. Le choc résultant ne
peut être que gravissime et complexe.

Ces perturbations hydroélectrolytiques aboutissent à la création d’un troisième secteur liquidien


constitué par:

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- la cavité péritonéale elle-même dans laquelle s’amasse le liquide exsudé;
- l’espace conjonctif sous-péritonéal qui est le siège d’un oedème important;
- enfin la lumière de l’intestin paralysé et distendu se remplit de liquide que la muqueuse n’est
plus capable de réabsorber.
Il se crée alors une véritable séquestration hydroélectrolytique. Ces différents phénomènes
entraînent donc une spoliation hydroélectrolytique avec chute du débit cardiaque, hypotension et
oligurie. A la fin nous aurons un choc hypovolémique. Dans le sang, à part cette hémoconcentration,
on peut noter une hypochlorémie, une augmentation de l’azote protéique et une baisse de la réserve
alcaline.

Les infections sévères du péritoine provoquent des perturbations locales qui entraînent à leur
tour des troubles fonctionnels de différents systémes.
Ces perturbations fonctionnelles, particulièrement importantes sont susceptibles de dominer
l’évolution et de déterminer le pronostic.

4.1. Perturbations locales

L’hypertonicité intra-luminale, l’iléus paralytique et l’inflammation du péritoine provoquent


des pertes liquidiennes riches en ions et en protéines pour l’organisme. Ces liquides non échangeables
et non mobilisables en dehors des vomissements réflexes, sont stockés dans les intestins dilatés et
paralysés, dans le tissu conjonctif sous - péritonéal et dans la cavité péritonéale. L’ensemble de ces
milieux est désigné sous le terme imagé de troisième “secteur”.

4.2. Troubles fonctionnels

1) Une faillite cardiovasculaire:

Elle peut s’installer à n’importe quelle étape du choc si la perfusion tissulaire tombe trop bas.
Sous l’action des baro-récepteurs et des chémorécepteurs, le coeur doit d’abord s’adapter aux
perturbations métaboliques et circulatoires. L’hypoperfusion tissulaire mène à une acidose métabolique
par le biais de la glycolyse anaérobique, avec apparition d’un pH artériel acide et une élévation de la
lactacidémie au-dessus de 9 méq/litre. Plusieurs autres facteurs interviennent dans la physiopathologie
des perturbations humorales et hémodynamiques lors d’une péritonite aiguë, notamment les amines
vaso-actives (bradykinine, histamine, sérotonine) dont le rôle essentiel dans ces états de choc est
actuellement établi.

2) Une faillite respiratoire


La cinétique du thorax est contrariée par la douleur, la distension abdominale et la paralysie du
diaphragme. L’infection généralisée entraîne une pneumopathie diffuse. L’hypoxie qui en découle
empêche les pneumocytes de sécréter le surfactant. Ainsi s’installe le poumon de choc, accompagné de
troubles de la coagulation et de troubles des échanges alvéolocapillaires.

3) Une faillite rénale


Elle est toujours possible du fait du maintien prolongé des troubles circulatoires auxquels
s’ajoutent des substances toxiques et d’une greffe microbienne sur les reins.

4) Une défaillance hépatique


Elle se manifeste par un ictère variable, de formule biologique mixte. L’état du choc aggrave
l’atteinte hépatique qui peut aboutir au “foie de choc”. Ces lésions sont susceptibles d’entraîner une
insuffisance hépatique.

5) Une défaillance nutritionnelle


Au cours des péritonites aiguës, la dénutrition se développe vite. Elle occasionne une perte

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pondérable considérable, d’environ 1000 g par jour. Cette perte de poids entraîne une augmentation
massive des besoins énergétiques, estimés à plus de 90 calories/kg/jour dont 18 % au moins en
protides.

De haute gravité et justiciables, en principe, du traitement chirurgical, les péritonites diffuses


s’opposent aux péritonites localisées par leurs caractères de diffusion à toute la séreuse péritonéale.

5. Symptomatologie

Il faudrait passer en revue toute la pathologie abdominale si l’on voulait faire un tableau exact des
péritonites aiguës diffuses. Mais on peut se contenter d’un aperçu schématique où les symptômes
essentiels seront isolés et mis en valeur.

La douleur.- Elle ne manque jamais, spontanée, exacerbée par la palpation; elle est d’abord localisée
dans l’une des régions de l’abdomen et il est de la plus haute importance d’essayer de préciser la zone
d’où est partie cette douleur (fosse iliaque droite, hypochondre, épigastre), car presque toujours le
point initial correspond à l’organe malade générateur de la péritonite. Toutefois, la douleur est parfois
un signe trompeur. C’est alors qu’un interrogatoire bien conduit, faisant préciser au malade certains
points de son histoire pathologique, permettra en général d’orienter le diagnostic causal. C’est le cas,
par exemple, pour les perforations ulcéreuses où la douleur initiale siège dans la fosse iliaque droite et
où la recherche des antécédents ulcéreux permet de redresser l’indication erronée donnée par le siège
de la douleur.

D’abord localisée, la douleur tend ensuite à diffuser en suivant en général la marche que suit
l’épanchement séro-purulent à l’intérieur de l’abdomen.

La contracture.- Le second signe essentiel est la contracture des muscles abdominaux. Signe majeur
de l’atteinte du péritoine, cette contracture est d’abord localisée et, si l’on examine le malade à ce stade
de début, on pourra, par la palpation, mettre en évidence une contracture segmentaire soit de la région
épigastrique, soit de la fosse iliaque droite. D’abord passagère, simple défense pariétale contre la main
qui palpe, la contracture est très rapidement permanente, ne cède plus. Les muscles dessinent sur la
paroi abdominale ce classique ventre de bois tendu, rigide, ne respirant plus.

La contracture pariétale de l’abdomen, quelle que soit son degré ou sa localisation voire sa durée, est le
signe le plus sûr, le plus constant, le plus précoce, de l’infection péritonéale commençante.

Le pouls.- L’état de pouls permet d’apprécier la gravité de l’infection, de porter également un


pronostic. Toujours accéléré, il bat entre 100 et 130; au delà de 140, il comporte un pronostic très
réservé.

D’autres signes, signes mineurs en vérité, doivent être rappelés. Les vomissements: associés à la
douleur, à la contracture, à l’accélération du pouls, ils viennent renforcer la preuve de l’existence d’une
péritonite aiguë. Ils peuvent manquer, notamment dans les péritonites, par perforation de l’estomac ou
du duodénum. D’abord alimentaires, puis bilieux, ils sont ensuite porracés. Le hoquet, signe très
inconstant, est tantôt précoce, par irritation diaphragmatique, tantôt tardif; il est alors l’indication d’une
extension grave du processus péritonéal.

L’arrêt des matières et des gaz.- Il est dû à la paralysie de l’intestin par suite de l’infection de la
séreuse viscérale. Cet arrêt des matières et des gaz est un signe presque constant. Toutefois, dans
certaines péritonites diffuses, on peut observer de la diarrhée.

Le facies.- Au cours de l’évolution d’une péritonite aiguë, très rapidement l’expression du visage se
modifie, le teint est terreux, puis, si le malade entre dans la phase de péritonite dite asthénique, le

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Chirurgie digestive 92
facies devient foncé et livide; l’oeil est terne, enfoncé dans l’orbite, le regard anxieux, les ailes du nez
pincées, les lèvres sèches : c’est le classique facies péritonéal.

Tels sont les symptômes essentiels qui marquent l’évolution clinique d’une péritonite aiguë
généralisée. A ces signes cardinaux il convient d’ajouter la courbe thermique, très variable d’ailleurs,
suivant le type de péritonite. En général, la fièvre varie entre 38º et 39º, mais il y a des péritonites
aiguës diffuses avec une température ne dépassant pas 38º, notamment certaines formes
hyperseptiques. De même dans les péritonites avec perforation gastro-duodénale, la fièvre est toujours
peu élevée.

Formes cliniques des péritonites aiguës diffuses.- - Il est classique de distinguer, suivant la
qualité de la réaction péritoniale : 1º d’une part, la péritonite aiguë avec épanchement purulent, dite
encore péritonite aiguë franche; 2º la péritonite à forme toxique (péritonite septique).

1º La péritonite aiguë diffuse avec épanchement purulent.- C’est la forme la plus fréquente,
c’est celle qui succède aux perforations de l’appendice, aux perforations des ulcères, aux lésions
inflammatoires des annexes. Les signes cliniques en sont toujours nets : douleur, contracture, élevation
thermique sont les symptômes essentiels. L’évolution, si l’on n’intervient pas, aboutit à une issue
fatale du quatrième au cinquième jour de la maladie. Mais l’intervention précoce, traitant la cause de la
péritonite et drainant la cavité péritonéale, donne un gros pourcentage de succès.

2º Péritonites à forme toxique.- Il s’agit de péritonites à forme aiguë diffuse, à évolution


suraiguë, avec un cortège de signes physiques très discrets, s’opposant à la richesse des signes
généraux. On se trouve en présence de malades affaiblis, en état de moindre résistance, chez qui le
péritoine ne se défend pas contre l’assaut des germes infectieux. L’épanchement intrapéritonéal est peu
abondant, louche. La séreuse péritonéale ne limite pas le processus infectieux. Localement, le ventre
est peu ballonné et presque indolore à la palpation. Par contre, il faut noter : la dissociation rapide du
pouls et de la température (pouls très accéléré, température presque normale); la dyspnée toxique, le
facies péritonéal avec yeux excavés, nez pincé, traits tirés, le refroidissement des extrémités, l’agitation
et l’angoisse de ces malades. Ce sont des formes à évolution suraiguë qui peuvent tuer en vingt-quatre
heures.
En fait, l’étude des péritonites aiguës devrait comporter un chapitre consacré aux formes
étiologiques. Nous avons déjà montré la variété des causes qui pouvaient expliquer l’infection de la
séreuse (traumatismes, perforation de viscères creux, propagation lymphatique, etc).

Nous nous bornerons à décrire plus loin les péritonites à pneumocoques et les péritonites à
streptocoques, dont l’aspect clinique, l’évolution et le traitement offrent des particularités dignes
d’intérêt.

6. Diagnostic

Il en est question chaque fois qu’on se trouve en présence d’un malade présentant : douleurs
abdominales, vomissements, constipation. C’est dire que toute la pathologie abdominale pourrait être
passée en revue. Toutefois, nous pouvons schématiser et indiquer rapidement les principaux
diagnostics.

1º Il faut reconnaître qu’il s’agit d’une péritonite aiguë. Il faudra donc éliminer les points de
côté abdominaux que l’on observe au début de certaines affections pulmonaires aiguës. Il faudra
également éliminer les syndromes médicaux : coliques hépatiques, coliques néphrétiques, coliques de
plomb, grippe gastro-intestinale. Dans toutes ces éventualités, la contracture manque ou n’est que très
discrète ou que très passagère (simple défense pariétale). Ayant éliminé ces syndromes médicaux, on
reconnaîtra facilement l’occlusion intestinale avec son météorisme, son absence de contracture. Il
faudra enfin reconnaître les péritonites localisées, comme celles que l’on observe au cours de

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Chirurgie digestive 93
l’évolution d’une cholécystite aiguë suppurée, d’une appendicite aiguë où la contracture reste
localisée dans la zone du viscère responsable, tandis que le reste de l’abdomen demeure souple.

2º Lorsque le diagnostic de péritonite aiguë diffuse a été porté, il importe de rechercher quel est
l’organe qui a donné naissance à cette péritonite, car il faut, en principe, supprimer l’organe en cause si
l’on veut que l’opéré guérisse, le simple drainage de la cavité péritonéale étant notoirement insuffisant.
C’est ici qu’il faudra, par l’interrogatoire qui précisera les antécédents pathologiques du malade, par un
examen clinique très minutieux, essayer de reconnaître le point de départ gastro-duodénal,
appendiculaire ou génital, de la péritonite, de façon à se porter sur l’organe malade. Rappelons que,
dans le diagnostic des péritonites aiguës, la radiographie n’est un appoint que dans les cas de
perforation d’un viscère creux laissant suffisamment filtrer l’air dans la cavité péritonéale. Le pneumo-
péritoine sera recherché sur des clichés pris sur les malades debout ou en décubitus latéral gauche
(image de croissant gazeux interhépato-phrénique droit, décollement pariétal de l’ombre hépatique).
Certains examens de laboratoire peuvent aussi être utiles (numération, formule, examen des urines,
amylasémie etc.).

7. Traitement

Il convient de rappeler : 1º qu’il n’y a pas de traitement médical de la péritonite aiguë diffuse; 2º que le
drainage simple de la cavité péritonéale est insuffisant et que l’on doit rechercher et traiter à tout prix
la cause de la péritonite. Il est bien évident que cette suppression du foyer infectieux doit être réalisée
aussi précocement que possible.

Les principes de l’intervention.- 1º L’opération doit être précoce et rapide chez ces sujets
fatigués, intoxiqués.- Toutefois, une courte préparation préalable peut être utile dans certains cas (toni-
cardiaque, injections de sérum intraveineux, lavage d’estomac ou aspiration continue). L’opération
doit être rapide, l’anesthésie générale est le plus souvent nécessaire; la rachianesthésie est contre-
indiquée, en raison des phénomènes de dépression qu’elle entraîne.

2º L’opération doit être menée rapidement et simplement.- On évitera les manipulations et


l’extériorisation des anses grêles. On abordera par le plus court chemin l’organe responsable et, la
lésion viscérale originelle étant découverte, on la supprimera (ablation de l’appendice, suture et
enfouissement d’une perforation gastrique ou duodénale, ablation d’un pyosalpinx rompu, taille d’une
vésicule biliaire pleine de pus et de calculs). Ceci fait, le péritoine sera asséché à l’aspirateur,
notamment au niveau du Douglas, où le pus tend toujours à s’amasser. Se pose ensuite le problème du
drainage. La question demeure entière; certains, faisant confiance aux qualités de défense du péritoine,
ont nié l’utilité du drainage après ablation de l’organe malade et asséchement de la cavité péritonéale.
En fait, la prudence semble exiger un drainage, d’une part, du foyer infectieux et souvent, d’autre part,
du Douglas (pour éviter les abcès résiduels de ce cul-de-sac).

8. Soins post-opératoires

Ils comportent: l’application d’une vessie de glace sur l’abdomen, la réhydratation par de hautes doses
de sérum glucosé et salé intraveineux ainsi que de plasma, l’emploi judicieux des toni-cardiaques,
l’aspiration duodénale continue et bien entendu les antibiotiques à fortes doses (Ampicilline,
Gentamycine, …, et des anti infectieux comme le Métronidazole).

9. Evolution post-opératoire des péritonites aiguës diffuses

L’opération précoce est très souvent suivie d’une évolution favorable, mais, lorsque l’intervention a été
pratiquée tardivement, c’est-à-dire plus de dix heures après l’apparition des premiers symptômes, deux
complications peuvent s’observer, l’une très grave, l’occlusion intestinale paralytique, l’autre moins
sérieuse, l’abcès résiduel du cul-de-sac de Douglas.

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Chirurgie digestive 94

a) L’occlusion intestinale paralytique.- Elle s’explique par la persistance de la paralysie intestinale.


On peut la prévoir lorsque, au cours de l’opération, les anses dilatées sont inertes. En fait, cette
occlusion intestinale paralytique, si elle s’observe immédiatement après l’intervention, est
essentiellement justiciable de l’aspiration duodénale continue et de la rééquilibration hydro-
électrolytique. Lorsqu’elle s’observe un peu plus tard, elle est en général mixte, à la fois
paralytique et mécanique, et, là encore, le traitement de fond reste l’aspiration continue.

b) L’abcès du cul-de-sac de Douglas.- Il apparait en général aux environs du septième jour. La


température remonte, quelques signes rectaux et vésicaux apparaissent; le toucher rectal met en
évidence un bombement du cul-de-sac. De toute façon, l’évacuation de cet abcès par voie rectale ou
par voie vaginale chez la femme procure aisément la guérison.
En résumé, plus l’intervention sera précoce, plus nombreuses seront les chances de guérison et
meilleure sera la qualité de la guérison, dans la péritonite aiguë.

B. PERITONITES AIGUES LOCALISEES : LES ABCES SOUS-PHRENIQUES

Définition.- On décrit sous ce nom les suppurations circonscrites développées dans l’étage sus-
mésocolique de l’abdomen entre diaphragme en haut et mésocôlon en bas. On y adjoint d’habitude une
série de suppurations rétro-péritonéales qui ne sont que des abcès lombaires supérieurs, très proches
parents des abcès péri-néphrétiques de par leur évolution et leur thérapeutique.
Caractérisés au point de vue anatomique par leur limitation à l’une des loges sous-diaphragmatiques,
au point de vue clinique par des symptômes obscurs (collections profondes peu accessibles aux
investigations cliniques) et souvent trompeurs, ces abcès sous-phréniques posent aussi des problèmes
thérapeutiques délicats (question de la voie d’abord).
Aperçu anatomique.- Sous le diaphragme se trouvent limitées trois loges, qui sont réellement des
loges sous-phréniques.

1º La loge hépato-phrénique droite, qui s’inscrit entre la coupole diaphragmatique en haut, la face
supérieure du lobe droit du foie en bas, le ligament coronaire en arrière, le ligament falciforme, la paroi
à droite.

2º Les abcès sous-phréniques à développement antéro-inférieur, qui sont soit sous-hépatiques


antérieurs droits, soit périspléniques. Ces abcès auront une sémiologie abdominale;

3º Les abcès sous-phréniques à développement postérieur ou lombaire, qui sont rétro-péritonéaux et


absolument analogues aux phlegmons périnéphrétiques;

4º Les abcès de l’arrière-cavité, qu’il est classique d’étudier avec les abcès sous-phréniques, quoiqu’ils
ne rentrent pas exactement dans le cadre de ces abcès.

Etiologie.- Fréquence.- C’est essentiellement chez l’adulte, entre vingt et quarante ans, que
s’observent ces abcès.

Sexe.- Ils sont un peu plus fréquents chez l’homme que chez la femme.

Causes déterminantes.- Ce sont les germes habituels: streptocoques, staphylocoques, colibacilles,


souvent associés à des anaérobies, qui sont à l’origine de ces suppurations.

Causes occasionnelles.- Il y a, en fait, trois catégories d’abcès sous-phréniques; les abcès primitifs,
secondaires, traumatiques. De beaucoup, les plus fréquents sont:

1º Les abcès sous-phréniques secondaires.- A leur origine, on trouve:

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a) Les lésions gastro-duodénales (ulcères gastro-duodénaux, cancers gastriques), qui représentent un


tiers des cas d’abcès sous-phréniques;

b) L’appendicite est la seconde grande cause d’abcès sous-phréniques. Il s’agit d’appendicites


suppurées et assez souvent d’appendices en position haute...

c) Les affections hépatiques et vésiculaires; abcès du foie, cholécystites suppurées, kystes hydatiques
suppurés.

A ces trois causes essentielles, qui représentent 75 p. 100 des cas, on peut ajouter des causes rares:
abcès ou kystes de la rate, du pancréas, des reins, inflammation intestinale (fièvre typhoïde,
dysentérie), inflammations pelviennes chez la femme. Par ailleurs, certaines inflammations suppurées
intrathoraciques, pleurésies, broncho-pneumonies, abcès du poumon, peuvent être parfois en cause.

2º Les abcès sous-phréniques primitifs.- Ils étaient très nombreux dans les statistiques anciennes; ils
sont devenus beaucoup plus rares dans les observations modernes. Cela tient à ce que l’appendicite a
pris pour elle la plus grande partie de ces cas réputés jadis de cause inconnue, parce que l’on n’opérait
pas, ou parce qu’au cours de l’intervention le chirurgien, ne trouvant pas de lésion d’un organe
adjacent, ne savait pas rapporter à l’appendice la cause de l’envahissement sous-phrénique. Il existe
toutefois des abcès primitifs, mais ils sont très rares et consécutifs à une infection générale de
l’organisme (septicémie ou pyohémie).

3º Les abcès sous-phréniques traumatiques s’observent assez fréquemment en temps de guerre à la


suite de plaies (par armes à feu ou par armes blanches), intéressant foie ou rate.

Anatomie pathologique.- Il faut étudier successivement: les caractères généraux des abcès sous-
phréniques et les caractères propres à chacune de leurs variétés.

1º Les caractères généraux des abcès sous-phréniques.

a) Le contenant.- Les parois de l’abcès sous-phrénique sont constituées par les organes de la région et
les replis péritonéaux normaux, complétés et agglutinés par des néo-membranes inflammatoires. On
peut parfois, sur l’une des parois, voir une perforation qui met en communication l’abcès avec le
viscère sous-jacent (estomac, duodénum, vésicule, etc.). Ces abcès sont de volume très variable (poing,
tête d’enfant). Certains contiennent de deux à trois litres de pus.

b) Le contenu.- Il est constitué par du pus ou par du pus mélangé à des gaz. Lorsqu’il s’agit d’abcès
gazeux, le point de départ est en général gastrique, les gaz provenant d’une perforation de cet organe.
Toutefois, il peut arriver que les gaz se développent sur place par suite de la fermentation du pus due
aux anaérobies.

Lorsque l’abcès n’est pas gazeux, il contient du pus classique, crémeux, bien lié, parfois simplement
du liquide louche.

c) Propagation.- Les abcès sous-phréniques tendent à se propager vers le thorax ou vers l’abdomen.
- Vers le thorax, la propagation peut se faire sans perforation du diaphragme, et l’on trouve alors à
l’intervention soit une pleurésie sèche adhésive de la base, soit une pleurésie séro-fibrineuse. Parfois la
propagation se fait par une perforation mettant alors en communication à travers le diaphragme l’abcès
sous-phrénique et le poumon, d’où pneumonie septique, gangrène pulmonaire ou, si la plèvre n’est pas
symphysée, pleurésie purulente ou pyo-pneumothorax;
- Vers l’abdomen.- certains de ces abcès peuvent se rompre brusquement dans la grande cavité
péritonéale (éventualité rare); dans d’autres cas, c’est par une extension progressive et lente que le pus

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Chirurgie digestive 96
envahit l’étage sous-mésocolique.

2º Caractères spéciaux aux différentes variétés d’abcès sous-phréniques.- On a pu décrire quelques


caractères particuliers aux abcès sous-phréniques suivant leur origine. Si l’abcès est consécutif à une
appendicite aiguë, il s’agit d’abcès siégeant à droite, souvent reliés au foyer suppuré appendiculaire par
une coulée purulente ininterrompue ou par des foyers étagés et indépendants. Ce sont souvent des
abcès pyo-gazeux. Ils se propagent fréquemment à la cavité thoracique.

Les abcès sous-phréniques d’origine gastrique occuperaient le plus souvent la loge phréno-hépatique
gauche. Ils seraient d’abord sous-hépatiques, avant de devenir sous-phréniques. Ils contiendraient
souvent des gaz.
Enfin, les abcès d’origine biliaire auraient un pus coloré en jaune par la bile, et on trouverait assez
souvent, dans leurs parois, la perforation du fond de la vésicule biliaire qui leur a donné naissance.

Pathogénie.- Le mécanisme de l’enkystement est facile à comprendre. Le péritoine sous-phrénique,


très résistant à l’infection, réagit par des adhérences inflammatoires qui enkystent la suppuration.
Quant au mécanisme de la propagation de l’infection à l’espace sous-phrénique, il est évident lorsque
le point de départ est un organe contigu (estomac, foie, etc.). Il est plus difficile à saisir lorsqu’il s’agit
d’organes éloignés, mais on comprendra la possibilité d’abcès sous-phréniques à point de départ
appendiculaire, en se rappelant que, dans les appendicites qui sont à leur origine, on trouve le plus
souvent des appendices sous-hépatiques ou des appendices ascendants (latéro-coliques ou rétro-
caecaux). L’infection se ferait par voie péritonéale latéro-colique ou par voie sous-péritonéale
(propagation par continuité ou propagation lymphatique).

Etude clinique.- Prodromes.- L’abcès sous-phrénique étant, dans la majorité des cas, une complication
de maladies locales de voisinage, c’est dire que les antécédents des sujets qui en sont atteints sont en
général chargés et qu’il sera de règle d’y retrouver des histoires d’ulcère gastro-duodénal,
d’appendicite ou de lithiase biliaire. Mais ces prodromes à longue portée ne sont pas constants et
parfois même l’infection causale reste latente.

Début.- Il est très variable, classiquement, c’est un début brutal, dramatique analogue à celui d’une
péritonite par perforation. Mais une rémission ne tarde pas à se produire. Les signes fonctionnels
s’atténuent, les signes physiques se localisent à la partie haute de l’abdomen. Il est beaucoup plus
fréquent de voir la maladie débuter de façon insidieuse par des douleurs vagues, dans l’hypochondre
droit des poussées fébriles et une altération rapide de l’état général. Parfois, c’est à la façon d’une
maladie thoracique, par des frissons, de la fièvre et des points de côté que se révèle la formation de
l’abcès. Enfin, autre éventualité, c’est après une opération intra-abdominale (appendicite aiguë, par
exemple) que va apparaître la suppuration sous-phrénique.

Période d’état.- Lorsqu’il est constitué, l’abcès sous-phrénique se traduit par des symptômes généraux
d’infection communs à tous les types d’abcès et par des signes fonctionnels et des signes physiques qui
vont varier avec chaque forme. Il faut d’abord décrire les signes généraux communs à toutes les
formes. Ils sont en règle très accentués; il s’agit d’un sujet au teint terreux, à la langue saburrale,
asthénique et amaigri; la température élevée oscille de 38 à 39º, avec frissons et sueurs; le pouls est
accéléré, les urines rares, la polynucléose sanguine élevée. Toutefois, certains abcès, notamment les
abcès gazeux à anaérobies, peuvent ne donner aucune élévation thermique.

Les signes fonctionnels et les signes physiques demandent à être décrits isolément pour les abcès sous-
phréniques à développement supérieur ou thoracique, pour les abcès sous-phréniques à développement
inférieur ou abdominal, et enfin pour les abcès sous-phréniques à développement postérieur ou rétro-
péritonéal.

a) Les abcès sous-phréniques à développement supérieur (interhépato-diaphragmatiques).- Leur

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sémiologie est essentiellement thoracique: point de côté postérieur, bas situé, dyspnée, parfois un peu
de hoquet; à l’examen, on peut remarquer de l’immobilité de la base thoracique, quelquefois un léger
bombement des derniers espaces et souvent une respiration à type costal supérieur. La palpation
provoque parfois, en un point très précis, une douleur très vive (signe qui a une valeur certaine pour
préciser le point exact où siège la collection). On appréciera, en outre, le refoulement des organes
(abaissement du foie, élévation de la pointe du coeur). Si l’abcès ne contient pas de gaz, c’est une
matité étendue qui, à droite, prolonge la matité hépatique, à gauche, masque l’espace sonore de
Traube. Si l’abcès contient des gaz, c’est une zone de sonorité tympanique qui surmonte une zone de
matité. Parfois, d’ailleurs, un épanchement pleural peut
venir donner une matité au-dessus de la zone sonore due aux gaz de l’abcès sous-phrénique. A
l’auscultation, ce sera une zone silencieuse si l’abcès ne contient pas de gaz, au contraire des signes de
pyo-pneumothorax s’il s’agit d’un abcès gazeux (tintement métallique, bruit d’airain, souffle
amphorique), et, ce qui est frappant, c’est le siège exceptionnellement bas de ce pyo-pneumothorax
(“pyo-pneumothorax dans le ventre”).

b) Les abcès sous-phréniques à développement antéro-inférieur.- Ces abcès qui sont en fait des
péritonites circonscrites de l’étage supérieur de l’abdomen, ont une sémiologie essentiellement
abdominale et se traduisent par une douleur à la base du thorax, par une voussure de l’épigastre ou de
l’hypochondre, mais voussure minime, et qui ne peut être appréciée qu’à jour frisant. La palpation
révèle soit une paroi contractée et douloureuse, un plastron de consistance variable, dur ou pâteux, ou
mou et fluctuant, à contours mal limités. Parfois, si l’abcès est gazeux, un bruit de clapotement. Fait
important, la palpation est très douloureuse. On recherchera toujours le point douloureux maximum.
Au-dessous de l’ombilic, le ventre reste souple et indolore. A la percussion, la zone de l’abcès est
mate, sauf si l’abcès contient des gaz, car, dans ce cas, la matité déclive est surmontée par une zone
tympanique que l’on apprécie en faisant alternativement mettre le sujet debout, couché, puis en
position génu-péctorale, où toute la surface redevient mate.

c) Les abcès sous-phrénique rétro-péritonéaux à évolution postérieure.-Ce sont, en fait, des abcès
périnéphrétiques haut situés. La symptomatologie en est obscure, leur début insidieux est marqué
essentiellement par des signes d’infection générale. Lorsqu’ils sont constitués, ils se traduisent par une
atteinte importante de l’état général, une douleur postérieure haute, une douleur à la palpation de la
partie haute de la région lombaire.

Evolution des abcès sous-phréniques.- On ne saurait compter sur la résorption spontanée, pas
davantage sur l’évacuation du pus au dehors. La guérison ne peut être acquise que par l’intervention
chirurgicale. Abandonné à lui-même, l’abcès sous-phrénique donne plus de 90 p. 100 de morts. Opéré
en temps voulu, la mortalité tombe aux environs de 20 p. 100.

Complications.- Ce sont des complications locales: ouverture spontanée dans le thorax donnant soit
une réaction pleurale (pleurésie sèche, ou plus souvent pleurésie purulente), soit une infection
pulmonaire. Des foyers pneumoniques apparaissent au niveau des bases. Dans d’autres cas, l’ouverture
directe se fait dans une bronche et aboutit à une vomique. Lorsque l’abcès est à évolution abdominale,
l'évolution se fait par rupture des adhérences dans le péritoine, donnant une péritonite généralisée.

L’ouverture spontanée à la peau ne s’observe plus en pratique à l’heure actuelle.


A côté de ces complications locales, des complications générales peuvent s’observer (septicémie,
pyohémie, etc.).

Formes cliniques des abcès sous-phréniques.- 1º Formes suivant le siège.- En dehors des trois
formes classiques, abcès supérieur, antéro-inférieur, postérieur, nous rappellerons la possibilité d’abcès
mixtes thoraciques et abdominaux et d’abcès de l’arrière-cavité des épiploons.

2º Formes séméiologiques.- On peut observer des formes frustes, des formes atténuées et des formes

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Chirurgie digestive 98
latentes.

3º Formes étiologiques.- L’abcès sous-phréniques, d’origine gastrique, est rarement consécutif à une
péritonite généralisée. Le plus souvent, c’est un abcès enkysté d’emblée, la perforation de l’ulcère se
faisant dans un foyer d’adhérences. Le début est toujours brusque, par douleur, contracture, puis tourne
court. Il s’agit, le plus souvent, d’abcès gazeux à évolution inférieure.

Les abcès sous-phréniques consécutifs à des appendicites apparaissent le plus souvent à la suite d’une
péritonite enkystée appendiculaire. L’abcès appendiculaire a été drainé, mais, au bout de quelques
jours, la température remonte, se met à osciller, quelques signes pulmonaires et pleuraux du côté droit,
parfois un peu de hoquet et de l’oedème lombaire attirent l’attention.
Diagnostic.- Habituellement très difficile, ce diagnostic devra toujours se baser non seulement sur
l’examen clinique, mais encore sur des examens complémentaires, radiologiques, sanguins, etc...

Le diagnostic différentiel varie avec le début de l’abcès. Dans le cas d’abcès à développement
abdominal, il faut éliminer le simple plastron périvésiculaire, l’appendicite haute avec abcès, l’abcès
du foie, etc... Dans le cas d’abcès à développement thoracique, on écartera une pneumonie de la base,
un abcès du poumon, une gangrène pulmonaire.

En réalité, toute la difficulté consiste à distinguer un abcès sous-phrénique d’une pleurésie purulente
ou putride, et le problème consiste à préciser si l’épanchement est au-dessus ou au-dessous du
diaphragme.
Les signes cliniques ne permettent qu’un diagnostic approximatif, et c’est à la radiologie qu’il faudra
demander des précisions nécessaires. A l’écran, on constate la surélévation d’un hémi-diaphragme,
l’immobilité de cette coupole diaphragmatique en raison de la paralysie du muscle, une opacité à
convexité supérieure. Mais ces signes ne sont nets que si le sinus costo-diaphragmatique est libre, ce
qui est rare; le plus souvent, il y a une pleurésie réactionnelle sous-jacente, et il devient très difficile,
même sous le contrôle de l’écran, de distinguer un abcès sous-phrénique d’un épanchement pleural.
Mais, si l’abcès sous-phrénique est gazeux, les gaz rendent nettement visible la coupole
diaphragmatique et dessinent un large espace clair entre le diaphragme en haut et une zone sombre en
bas. Cette zone claire est d’ailleurs parfois réduite à un simple croissant si les gaz sont peu abondants.
Des radiographies prises sous de multiples incidences, le malade debout et couché, permettent le plus
souvent de confirmer les impressions fournies par l’examen radioscopique.

La ponction exploratrice.- C’est le moyen ultime de diagnostic, mais, en principe, on ne devra la faire
que sous le contrôle de l’écran et immédiatement avant l’intervention chirurgicale; au point culminant
de la voussure ou bien au point douloureux maximum, à la base du thorax, on enfoncera lentement une
aiguille en aspirant à chaque pas. On pourra affirmer qu’il existe un abcès sous-phrénique lorsque la
ponction pratiquée dans ces conditions ramènera d’abord du liquide séreux (d’origine pleurale), plus
profondément du pus avec ou sans gaz (signe de Scheuerlein).
L’injection d’une substance de contraste avec injection d’air peut, dans certains cas faciliter la
localisation et le repérage exacts de l’abcès.
Enfin, lorsqu’il s’agit d’abcès sous-phréniques postérieurs rétro-péritonéaux qui ne se traduisent
pratiquement que par des signes généraux d’infection, le diagnostic se pose avec une septicémie, une
typhoïde, et c’est là que la formule sanguine, montrant une forte leucocytose (au-dessus de 20000)
avec polynucléose, est un argument en faveur d’une suppuration profonde.

Traitement.- Devant la rareté des observations récentes, il est difficile de se faire une opinion précise
sur l’efficacité du traitement médical: sulfamides, antibiotiques (pénicilline, gentamycine, terramycine,
etc.), même à très hautes doses et répétées longtemps, en surveillant l’évolution de la polynucléose. On
a pu, dans certains cas, guérir des abcès sous-phréniques par les antibiotiques associés à un drainage
aspiratif, réalisé au moyen d’un trocart spécial (trocart de Monod) et d’un drain ordinaire ou en
polythène. Mais le traitement chirurgical garde tous ses droits.

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Lorsque l’abcès a été diagnostiqué et localisé, il faudra évacuer le pus, mais on préférera l’anesthésie
locale chez ces malades fatigués; on se bornera à l’incision et au drainage sans curetter la poche, sans
s’attarder à chercher la cause de l’abcès.

La voie d’abord varie suivant le siège de l’abcès,


Les abcès à évolution antérieure s’abordent par coeliotomie médiane ou latérale.
Les abcès à évolution thoracique peuvent être abordés soit par incision parallèle au rebord costal (avec,
si besoin, résection extrapleurale de ce rebord) lorsque l’abcès donne une voussure nette dans
l’hypochondre, soit par voie transthoracique, qui convient à la majorité des cas. Ici, un gros écueil à
éviter: l’inoculation de la plèvre. Très souvent, d’ailleurs, elle est symphysée et on ne s’aperçoit que
lorsqu'on la traverse quand on a atteint la collection sous-phrénique. Si elle était libre, il faudrait
solidariser le diaphragme à la paroi thoracique par des points en couronne avant d’inciser le muscle.
Puis, après évacuation de l’abcès, il serait bon de fixer les lèvres de l’incision diaphragmatique aux
lèvres cutanées de l’incision thoracique (marsupialisation qui exclut complètement la plèvre).

Les abcès à évolution postérieure seront ouverts par voie lombaire postérieure: on aura soin de refouler
le cul-de-sac pleural pour éviter l’ouverture de la plèvre.
Il faut savoir d’ailleurs que l’incision de l’abcès ne suffit pas toujours à amener la guérison, et qu’une
fistule persistante venant de l’estomac, du duodénum, du côlon, de la vésicule biliaire peut nécessiter
par la suite une cure opératoire spéciale.

4. LES OCCLUSIONS INTESTINALES

1. Définition
2. Causes d'occlusion
- Occlusions mécaniques et classification
- Occlusions fonctionnelles
3. Anatomie pathologique
4. Physiopathologie de l'occlusion
5. Diagnostic
- Diagnostic positif de l'occlusion
- Diagnostic clinique
- Diagnostic radiologique
6. Les grands syndromes
7. Diagnostic différentiel de l'occlusion
8. Diagnostic étiologique
9. Traitement de l'occlusion intestinale
- Traitement dit "médical" des occlusions
- Traitement des occlusions mécaniques du grêle
- Traitement des occlusions du côlon

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- Traitement des occlusions fonctionnelles
- Traitements des occlusions post-opératoires
10. Résultats.

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1. Définition

L’arrêt complet et persistant du cours des matières et des gaz, dans un segment de l’intestin,
telle est la caractéristique de l’occlusion intestinale, qu’il est convenu d’appeler également iléus de
l’intestin par abus, puisqu’en grec iléus signifie: tourner.

Selon que cet arrêt survient brusquement, ou se confirme peu à peu, mettant un terme à une
longue période de constipation sans arrêt des gaz, qualifiée parfois d’obstruction, on dit qu’il y a
occlusion aiguë ou occlusion subaiguë.

2. Causes de l'occlusion

L’occlusion peut apparaitre à tous les âges, du premier au dernier jour de l’existence. Sa
fréquence s’est nettement accrue depuis que se sont multipliées, parallèlement au développement de la
chirurgie abdominale, les occlusions post-opératoires de variétés diverses.

Les causes de l’occlusion sont multiples, mais il faut distinguer deux grands types essentiels:

1 Les occlusions mécaniques;


2 Les occlusions fonctionnelles.

1 Occlusions mécaniques.

Dans les occlusions mécaniques, il y a un obstacle anatomique réel au cours des matières et des
gaz. Cet obstacle peut jouer par trois mécanismes distincts: l’obturation, la strangulation et la striction.

1 Les occlusions par obturation relèvent de facteurs divers. Tantôt, dans un segment d’intestin
sain, la lumière est oblitérée par la présence et l’arrêt d’un corps étranger. Les plus fréquents de ceux-
ci sont les calculs biliaires (iléus biliaire), les vers intestinaux (iléus ascaridiens), les amas pileux (iléus
par bézoard), alimentaires (iléus alimentaires), mucilagineux (iléus médicamenteux). On a décrit des
iléus par boutons métalliques anastomotiques migrateurs à la suite d’interventions chirurgicales. Enfin,
des matières trop épaisses peuvent jouer le rôle de bouchon. Ceci surtout aux deux pôles de la vie;
iléus méconial du nouveau-né (témoignant d’une altération fibro-kystique du pancréas, dont la
sécrétion manque pour fluidifier le méconium), iléus par fécalome des vieillards atteints d’atonie
colique.

Tantôt l’obstacle est lié à la présence sur la paroi de l’intestin pathologique d’une tumeur,
bénigne ou maligne, devenue peu à peu sténosante, par bourgeonnement intra-cavitaire, ou d’une
sténose chronique: tuberculeuse, inflammatoire banale (iléite), cicatricielle; post-traumatique, post-
opératoire (anastomose imparfaite) ou secondaire à un étranglement herniaire. Il existe chez le
nouveau-né des rétrécissements congénitaux par anomalies de développement, des atrésies limitées ou
étendues.

Tantôt, enfin, ce n’est ni libre dans la lumière, ni implanté sur la paroi de l’organe qu’est
l’obstacle, il est extrinsèque. Ainsi sont les obturations par compression extérieure, plus ou moins
large, du fait d’une néoformation développée sur un organe de voisinage (fibrome utérin calcifié,
tumeur du mésentère); celles par coudure aiguë du grêle ou du côlon, fixé en un point, par une bride,
parfois par un diverticule de Meckel, ou par l’appendice. On en rapproche les agglutinations d’anses
symphysées (plastron inflammatoire banal ou bacillaire).

Ces divers mécanismes peuvent s’associer: sténose et compression, coudure aiguë et corps
étrangers, coudure aiguë et symphyse, et l’existence sur l’intestin de différents facteurs étagés
d’occlusion n’est pas rare.

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Chirurgie digestive 102

D’une façon générale, le côlon est plus fréquemment frappé d’obturation que le grêle, car à son
niveau siègent souvent des cancers en virole, d’autant plus occlusifs qu’ils apparaissent volontiers dans
les zones de stase physiologique et au niveau des angles coliques.

2. Les occlusions par strangulation ont pour type le volvulus: torsion d’une anse sur son axe
vasculaire mésentérique ou mésocolique. On rencontre au niveau du grêle, dans la toute première
enfance, des volvulus primitifs favorisés par un défaut congénital de rotation et d’accolement du
mésentère, et chez l’adulte des volvulus secondaires à l’existence d’un obstacle au péristaltisme: soit
bride coudant l’intestin en un point, soit tumeur développée sur lui. Cette dernière éventualité est un
nouvel exemple d’occlusion à causes multiples provoquée ici par une obturation et une strangulation
associée. Sur le côlon, les volvulus les plus fréquents intéressent le sigmoïde et le caeco-côlon droit,
ceux du transverse sont exceptionnels.

L’invagination intestinale, véritable hernie de l’intestin dans l’intestin, surtout observée dans la
région iléo-caecale, réalise un type assez singulier de strangulation.Elle est primitive et fréquente dans
la toute première enfance, plus rare et habituellement secondaire à la présence d'une tumeur sur le
boudin invaginé chez l’adulte.

Dans ces deux derniers modes d’occlusion, l’étranglement des vaisseaux mésentériques ou
mésocoliques est contemporain de celui de l’intestin et crée une menace souvent très rapide pour la
vitalité de tout le segment grêle ou colique intéressé.

3. Les occlusions par striction sont représentées par les étranglements internes. A l’intérieur de
la cavité abdominale (les hernies étranglées, étranglements externes, ne sont jamais étudiées dans le
chapitre de l’occlusion), le grêle surtout, le côlon très rarement, peuvent s’étrangler dans divers offices.

Certains de ces orifices sont normaux: étranglement dans l’hiatus de Winslow (hernie de
Treitz), dans une fossette paraduodénale, ou intersigmoïdienne, dans une loge rétro-caecale (hernie de
Rieux). D’autres sont anormaux, tantôt congénitaux: brèche congénitale du mésocôlon transverse par
exemple; tantôt acquis. Tels sont les orifices du mésentère ou de l’épiploon, consécutifs aux fontes
tissulaires chez les malades amaigris lors des périodes de famine. Tels sont surtout les orifices
constitués par une bride contingente, conséquence d’une inflammation antérieure ou d’une intervention
chirurgicale.

Il n’est pas possible de schématiser toutes les dispositions des cordages souvent multiples qui
peuvent relier l’intestin au mésentère, à la paroi, à un viscère voisin, et qui sont parfois créées par un
viscère tel que le diverticule de Meckel, l’appendice, ou une trompe. Certaines interventions
chirurgicales exposent plus que d’autres à l’apparition d’anneaux susceptibles de devenir agents de
striction. Rappelons les orifices du mésocôlon insuffisamment oblitérés après une gastro-entérotomie
transmésocolique, ceux du ligament large après rétro-fixation utérine des ligaments ronds
transligamentaires, l’hiatus mésentérico-mésocolique après anastomose iléo-colique.

L’anneau dit “de la mort” consécutif à une ligamentopexie pariétale et limité par les ligaments
ronds, l’utérus et la paroi abdominale, est bien classique.

Dans les strictions, les lésions anatomiques n’intéressent pas également toute la portion prise au
piège. Elles peuvent rester, en effet, plus ou moins longtemps électivement limitées à la zone de
striction et souvent linéaire. Ce n’est que si la striction est très serrée, et que le mésentère en souffre,
que la totalité de l’anse intéressée peut être menacée comme dans une strangulation. Il y a donc une
parenté étroite entre strangulation et striction, puisque dans les deux cas l’intestin peut avoir deux
raisons de sphacèle: l’écrasement de ses tuniques et celui de ses vaisseaux.

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Chirurgie digestive 103

Classification des occlusions mécaniques

(1) Occlusions intraluminales


Corps étrangers
Pénétration barytée du côlon
Bézoar
Fécalomes
Méconium (fibrose kystique)
Parasites
Invagination
Polypes (lésions exophytiques)

(2) Occlusion intramurales


Congénitales
Atrésie, sténose
Duplication intestinale
Diverticule de Meckel
Processus inflammatoires
Maladie de Crohn
Diverticulite
Ischémie intestinale chronique ou sténose postischémique
Entérite post irradiation
Néoplasmes
Primitifs: Tumeurs malignes ou bénignes
Secondaires: métastases (mélanomes)
Traumatique
Hématome intramural du duodénum

(3) Occlusions d'origine extrinsèque


Adhérences
Congénitales
Bandes de Ladd ou de Meckel
Post-opératoires
Post-inflammatoires
Hernies
Externes
Internes
Volvulus
Effet des masses externes
Abcès
Pancréas annulaire
Carcinomatose
Endométriose
Grossesse
Pseudokyste de pancréas

2 Occlusions fonctionnelles.

Aux occlusions mécaniques s’opposent les occlusions fonctionnelles. Elles sont provoquées par
le dérèglement du système nerveux moteur de l’organe, sous des influences diverses, et sont souvent
paralytiques (dilatation progressive et inactive des anses, sans occlusion proprement dite), et très

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exceptionnellement spasmodiques: contracture localisée et élective du grêle, ou du côlon, siégeant
alors de préférence à la partie moyenne du descendant ou à la jonction recto-sigmoïdienne.

En principe, la paralysie des anses traduit l’excitation du sympathique, la contracture par


spasme, celle du pneumogastrique, mais le fait que chacun de ces nerfs possède des fibres à double
destination s’oppose à une schématisation aussi parfaite.

La cause précise de ces troubles moteurs est parfois facile à identifier. On connait bien, par
exemple, la paralysie réflexe des anses baignant au centre d’une péritonite généralisée, circonscrivant
un foyer inflammatoire, siégeant en regard d’un hématome, ou d’une collection purulente rétro-
péritonéale (occlusions inflammatoires).

On connait aussi les occlusions déclenchées par des lésions locales de voisinage: présence dans
le mésentère d’une tumeur maligne ou bénigne irritant les filets nerveux destinés à l’intestin, celles
liées à des affections générales (tabès, lésions médullaires infectieuses ou traumatiques) ou à une
brusque surcharge alimentaire provoquée par un repas trop copieux. Mais bien souvent le mystère de
leur étiologie reste entier.

En fait, les occlusions mécaniques et les occlusions fonctionnelles ne sont pas aussi dissemblables que
pourrait le faire croire cette classification. Lorsqu’un obstacle interrompt brusquement le cours des
matières, cet arrêt soudain retentit sur le système de commande de l’intestin, et soit un certain degré de
spasme, soit un certain degré de paralysie aggrave les phénomènes mécaniques. C’est ainsi que
l’obturation du côlon par une tumeur n’est le plus souvent complète que si le spasme s’y ajoute. Il y a
presque toujours un élément fonctionnel surajouté dans les occlusions mécaniques, c’est la raison pour
laquelle on observe parfois des dilatations paradoxales au-dessous de l’obstacle. Inversement, une
occlusion fonctionnelle qui se prolonge se voit presque constamment compliquée d’un facteur
mécanique: capotage et coudure, adhérences ou torsion des anses alourdies par la rétention liquidienne.
C’est pourquoi une occlusion fonctionnelle au départ nécessite souvent, secondairement, une action
directe sur l’intestin.

C’est en ce sens que l’on peut dire que beaucoup d’occlusions sont mixtes: mécanique et
fonctionnelle.

ANATOMIE PATHOLOGIQUE

L’immense variété des causes d’occlusion explique qu’on ne puisse donner une description
uniforme des lésions anatomiques, car elles prennent divers aspects essentiellement fonction du
mécanisme occlusif: obturation, strangulation, striction, phénomènes dynamiques.

Dans les obturations, le fait le plus frappant est, quelle que soit la lésion, il y a la dilatation des
anses en amont de l’obstacle. Cette dilatation peut atteindre un degré considérable: anse grêle plus
grosse que le côlon normal, de la taille d’un avant-bras parfois; côlon du calibre d’une chambre à air
d’automobile. Dans les occlusions du grêle, le nombre des anses dilatées dépend du niveau de
l’obstacle. Dans celles du côlon, les segments coliques d’amont peuvent être seuls intéressés, si la
valvule iléo-caecale de Bauhin (occlusion colique en vase clos) joue un rôle de soupape hermétique.
Lorsque ce rôle n’est pas assuré, que la valvule est forcée, il y a dilatation associée du grêle terminal,
sur une plus ou moins grande hauteur. La plupart du temps, les anses occluses baignent dans un
épanchement intrapéritonéal de liquide clair (ascite des occlusions) et ont une paroi mince, poisseuse,
congestionnée, de couleur rouge, ou violacée. Sur certains segments particulièrement distendus, les
parois peuvent même être menacées de perforation, ou en être le siège. Ces perforations, dites
diastatiques, sont rencontrées presque exclusivement sur le côlon, et électivement sur le caecum. Elles
sont liées à un trouble trophique des tuniques intestinales dont les vaisseaux intrapariétaux sont
comprimés in situ, par le contenu hydro-aérique en rétention.

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Chirurgie digestive 105

Dans les occlusions par strangulation, souvent opérées tôt, du fait de l’intensité des symptômes
cliniques, la dilatation des anses en amont du segment volvulé est fréquemment au second plan et
l’élément le plus remarquable est l’anse étranglée elle-même. Elle baigne habituellement dans un
épanchement liquide, de caractère séro-sanglant, ou même purement hématique, et tranche par son
aspect violacé, ses parois infiltrées, infarcies, sur le reste de l’intestin. Dans les cas opérés tardivement,
c’est une anse flasque, noirâtre, inerte, en imminence de perforation ou perforée que l’on découvre
entre des segments d’intestin distendus en amont, aplatis en aval.

Il peut en être de même dans les occlusions par striction, mais ici, habituellement l’anse
enserrée violacée n’est vite menacée de sphacèle qu’aux zones linéaires de striction. Nous décrirons,
dans un chapitre particulier, les lésions de l’invagination.

L’aspect des anses frappées d’occlusion fonctionnelle paralytique se rapproche beaucoup de


celui décrit dans l’obturation, avec cette différence qu’ici la dilatation s’étend assez uniformément au
côlon et au grêle, tous deux soumis aux mêmes phénomènes moteurs. Un aspect très particulier est
celui de l’exceptionnel iléus spasmodique. On voit sur le grêle, ou sur le côlon transverse ou
descendant, soit en un, soit en plusieurs segments, des zones de contracture étagées, de longueur
variable, et contrastant avec la dilatation des portions sus et parfois sous-jacentes. L’intestin est là, gros
comme un doigt, un crayon, d’une pâleur remarquable; c’est l’intestin de poulet. Cette contracture
n’est pas permanente, elle est variable. Spontanément ou sous l’influence du palper, de la
novocaïnisation du mésentère, elle disparaît pour reparaître ailleurs.

PHYSIOPATHOLOGIE DE L’OCCLUSION

Les travaux récents ont modifié considérablement les conceptions anciennement admises quant
aux causes de la mort dans l’occlusion.

Frappés de longue date par la fréquence des décès post-opératoires inopinés, en dépit d’un acte
chirurgical parfaitement correct, et apparemment satisfaisant, les chirurgiens ont longtemps cru que le
mécanisme des accidents généraux toujours graves, souvent mortels, était soit d’ordre infectieux, soit
d’ordre toxique.

L’expérience a prouvé que l’absorption des liquides au niveau d’une anse occluse est sinon
nulle, du moins extrêmement réduite, et que ni le liquide d’exsudat péritonéal ni le produit
d’hydrolysat de la paroi intestinale, s’il a été débarrassé au préalable des éventuels microbes qu’il
contient, n’ont de propriété toxique.

C’est l’étude des perturbations humorales engendrées par l’état occlusif qui a jeté un jour nouveau sur
ce problème. Elle a permis de conclure que le syndrome général de l’occlusion est tout proche de celui
du shock traumatique, et qu’il est dominé par la notion de l’exhémie plasmatique.

On sait maintenant que les malades atteints d’occlusion aiguë peuvent, même une fois supprimé
l’obstacle et écarté tout danger péritonéal, mourir de déshydratation, de déséquilibre hydro-
électrolytique suivant un mécanisme où la part prépondérante revient à l’exagération de la perméabilité
capillaire dans les segments intestinaux occlus permettant une fuite considérable de la masse sanguine
et des électrolytes, de conséquences éventuellement fatales.

Quand on fait le bilan humoral d’un malade atteint d’occlusion depuis déjà plusieurs heures et non
traitée, on recueille les données suivantes:

Un des éléments les plus frappants est l’habituelle constatation d’une augmentation de la concentration
sanguine: hémoconcentration traduite par une hyperglobulie avec hyperleucocytose, par l’élévation de

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Chirurgie digestive 106
l’hématocrire (rapport du volume globulaire au volume plasmatique), l’accroissement du taux des
protides dosés dans le sang.

Ainsi est objectivée une déshydratation qui, si elle prend des proportions importantes, peut avoir des
conséquences redoutables et explique l’état de collapsus des occlus.

Aux troubles du métabolisme de l’eau s’ajoutent de façon constante ceux des électrolytes dont trois
sont essentiels: le chlore, le sodium, le potassium. L’hypochlorémie, l’hyponatrémie, l’hypokaliémie,
les modifications de la réserve alcaline sont constantes à des degrés divers. Elles objectivent les
processus qui se passent dans l’intimité des tissus, la filtration des liquides et des ions du compartiment
intracellulaire (potassium essentiellement), vers le compartiment extracellulaire plasmatique, celle du
liquide et des ions normalement extracellulaires (chlore et sodium essentiellement), hors des vaisseaux
qui les contiennent. Les changements ainsi apportés à la composition du plasma en modifient les
propriétés physiques: en particulier, la résistivité électrique ou le point de congélation (delta
cryscopique) dont les mesures prendront un intérêt majeur lors de la constitution du bilan hydro-
électrolytique.

Pour saisir le mécanisme qui déclenche l’exhémie plasmatique dans l’occlusion, il faut suivre pas à pas
les phénomènes qui se produisent dans une anse - grêle de référence, - soumise à une obturation aiguë,
où le facteur striction vasculaire surajoutée ne joue pas comme dans une strangulation.
Quel que soit l’obstacle qui s’oppose soudain ou progressivement au cours des matières et des gaz,
l’intestin en amont réagit d’emblée d’abord en se contractant avec plus ou moins d’énergie et
de fréquence (péristaltisme), puis en se dilatant sous la pression aéro-liquidienne. La dilatation est
essentiellement un phénomène réflexe, qui cherche à protéger l’intestin des effets de la distension, en
diminuant l’hyperpression. Elle va de pair avec des phénomènes de paralysie progressive qui
immobilisent l’intestin. Elle peut atteindre des dimensions considérables et dépasser largement la zone
où pourrait jouer logiquement le phénomène mécanique exclusif de dilatation en amont d’un obstacle.

Les gaz en rétention ont des origines diverses .- A ceux peu abondants, préexistant dans l’intestin,
s’ajoute avant tout l’air continuellement dégluti par le malade.
La déglutition massive des occlus est telle que les deux tiers environ des gaz bloqués (azote
essentiellement) en dépendent. Le reste est fourni par les fermentations bactériennes, et le passage dans
la lumière du grêle ou du côlon, des gaz normalement en dissolution dans les vaisseaux intrapariétaux.
Le contenu fluide a, lui aussi, ds sources multiples. Dans les heures qui suivent le début de
l’occlusion, la sécrétion digestive habituellement s’exagère passagèrement; il y a hypersécrétion
digestive réflexe (effet de la distension sur le plexus d’Auerbach) et parallèlement diminution des
possibilités de résorption. D’une part, parce que les liquides sécrétés ne peuvent plus atteindre le
secteur libre sous-jacent à l’obstacle; d’autre part, parce qu’une anse occluse voit sa capacité de
résorption passer de 90 p. 100 à 10 ou 20 p. 100.

Plus tard, à la sécrétion normale, à l’hypersécrétion réflexe passagère s’ajoute, puis se


substitue, la transsudation.

Cette dernière joue un rôle capital dans la production des liquides qui filtrent de la paroi
intestinale en dedans vers la lumière de l’intestin, en dehors vers la cavité péritonéale (ascite des
occlusions). Le liquide d’exhémie, c’est le plasma lui-même, sorti des capillaires qui le renferment à
l’occasion d’une brusque modification de leur perméabilité. On sait que l’anoxie tissulaire déclenchée
par la stase veineuse dont sont le siège les parois de l’intestin, et elle-même provoquée par l’arrêt de la
colonne aéro-liquidienne bloquée, est une cause majeure d’exagération de la perméabilité des
capillaires.

Si on réfléchit que la distension a déclenché l’exhémie, que l’exhémie, en augmentant la


pression liquidienne à l’intérieur de l’intestin, exalte la distension, on saisit aussitôt le cercle vicieux

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Chirurgie digestive 107
dans lequel tournent, à partir d’un certain stade, les phénomènes physio-pathologiques de l’occlusion
et l’intérêt fondamental qu’il peut y avoir à rompre cette réaction en chaîne, en brisant un de ses
anneaux.

L’aspiration gastro-duodénale continue, qui lutte contre la distension progressive des anses, en
pompant leur contenu, sera, de ce fait, une arme thérapeutique essentielle. Par ce mécanisme
d’exhémie, la circulation générale peut se trouver spoliée d’une quantité liquidienne importante et on
sait qu’une baisse de 50 p. 100 de la masse sanguine est presque un arrêt de mort.

Une réduction très marquée du débit sanguin rend en effet insuffisantes l’irrigation et
l’oxygénation des parenchymes glandulaires (foie, rate, surrénales) et des centres cérébraux.

La distension des anses a d’autres conséquences que ces désordres profonds. Elle détermine, en
particulier, des modifications dans le régime circulatoire de la paroi intestinale, susceptibles de retentir
sur la vitalité de celle-ci. L’aspect congestif des anses occluses est le reflet fidèle d’une stase
circulatoire pariétale, d’abord veineuse, puis artérielle, dont la conséquence inéluctable, si elle se
prolonge, sera une nécrose plus ou moins rapide. Ainsi, par ce jeu singulier, l’intestin occlus, et non
étranglé, pourra se sphacéler à l’ultime période.

Avant même d’être perforée, sa paroi deviendra perméable aux microbes qui l’habitent
(staphylocoques, streptocoques, colibacilles, perfringens, clostridias), ou à leurs toxines. A l’agression
microbienne, le péritoine réagira par une péritonite; s’il absorbe les toxines, une toxémie pourra
résulter dont les effets peuvent être redoutables.

Habituellement, dans les obstructions abandonnées à elles-mêmes, les modifications de


l’hydraulique circulatoire, les désordres hydro-électrolytiques entrainent la mort, avant que les
altérations pariétales ou que la nécrose aient pu avoir une influence décisive. Ceci d’autant plus qu’au
passif de l’extrême distension abdominale s’ajoutent les troubles circulatoires et respiratoires qu’elle
peut provoquer en comprimant la veine porte et la veine cave, en refoulant le diaphragme, et déplaçant
le coeur, ainsi que les bases pulmonaires.

Lors d’occlusion par strangulation ou striction très serrée, compromettant vite la circulation de
l’anse volvulée ou incarcérée, l’ordre des phénomènes responsables de la mort est presque toujours
différent. La distension des anses en amont de l’obstacle occlusif est, en règle, en retard sur les
phénomènes locaux se produisant au niveau de l’anse intéressée, qui se trouve en quelque sorte
garrottée, et on voit presque toujours les accidents de nécrose pariétale prendre le pas sur tous les
autres et entraîner très vite une péritonite par perméation ou perforation.Celle-ci est d’autant plus
redoutable qu’elle apparaît chez un sujet parfois d’emblée en état de shock, shock réflexe, d’une part
(traumatisme du pédicule nerveux de l’anse), et lié, d’autre part, à la spoliation sanguine précoce
qu’entraîne l’exsudation hématique dont l’anse menacée est le siège. Nous verrons qu’à ces shocks
précoces la transfusion sanguine d’urgence et importante peut apporter la parade.

A la lumière des connaissances actuelles, nous pouvons résumer la physiopathologie des


occlusions intestinales aiguës de la manière suivante.

CONSEQUENCES PHYSIOPATHOLOGIQUES

Elles sont redoutables.

A. L'OBSTACLE crée une augmentation de la distension intestinale par:


- l'absorption d'air ingéré surtout 70 %
- l'apparition de gaz de putréfaction 20 %
- le fait d'une hypersécrétion modérée.

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Chirurgie digestive 108

B. CONSEQUENCE DE LA DISTENSION

C'est la stase vasculaire source d'anoise et de perméabilité capillaire.

C. LA STASE ENTRAINE :

1. Une petite perméation de l'intestin vers la cavité péritonéale : ascite de l'occlusion.

2. Surtout une exhémie plasmatique très importante (6 - 7 - 8 litres par jour). Les liquides
viennent des espaces intercellulaires par l'intermédiaire de la circulation sanguine.

D. L'EXHEMIE PLASMATIQUE est la cause de :

1. déshydratation importante
2. fuite des électrolytes du plasma
(l'exhémie plasmatique peut être remplacée parfois par du sang surtout dans les phénomènes de
strangulation).

E. UN CERCLE VICIEUX est créé

1- le passage des liquides favorise la stase


2- la stase favorise le passage des liquides

F. CONSEQUENCES DE L'EXHEMIE

- Le coeur droit peut se désamorcer. Ce qui va entraîner un collapsus cardio-vasculaire. Alors un


état de choc va s'installer. On remarquera en passant que le choc est identique à celui obtenu
dans les hémorragies par exemple.
- La chute de la tension artérielle va entraîner des troubles rénaux qui se traduiront par une
oligurie.

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Chirurgie digestive 109
DIAGNOSTIC

DIAGNOSTIC POSITIF DE L’OCCLUSION

Plus qu’une entité pathologique à caractères cliniques bien précis, l’occlusion est un syndrome
de description complexe, dont il est impossible de tracer schématiquement un tableau sommaire, car
les aspects en sont variables.Ces aspects diffèrent avec le siège de l’obstacle (sur le grêle ou le côlon),
son niveau (haut ou bas sur chacun de ces segments), le terrain sur lequel éclatent les accidents, leur
mécanisme d’apparition. Il a été longtemps classique d’écrire: Quatre symptômes essentiels
caractérisent l’occlusion intestinale, ils forment ce qu’il est convenu d’appeler: le carré de tradition, de
l’occlusion; ce sont les douleurs, les vomissements, l’arrêt des matières et des gaz, le météorisme
abdominal. Au vrai, cette conception trop traditionnelle de la symptomatologie de l’occlusion ne
répond pas à la réalité des faits. Elle ne peut servir de viatique dans la pratique de chaque jour, car elle
fait graviter autour du météorisme, du ballon symptôme, la séméiologie pratique de l’occlusion.
Conception indéfendable, car autant rayer aussitôt du cadre des occlusions toutes celles sans
ballonnement précoce, c’est-à-dire la plupart des occlusions haut situées, les plus graves, celles en
particulier par volvulus ou incarcération interne.
C
Sans doute finiront-elles à un moment donné par provoquer du météorisme,mais il sera alors
habituellement le fait d’une atteinte péritonéale complémentaire du pus de mauvais pronostic.

Nous abandonnerons donc l’étude du carré soi-disant symptomatique de l’occlusion et


décrirons un syndrome occlusif formé de signes fonctionnels divers, parmi lesquels les douleurs et
l’arrêt des gaz tiennent une place de choix, de signes physiques éminement variables, selon le
mécanisme et le siège de l’occlusion, et de signes généraux, fonction eux aussi, au début surtout, de la
cause et du type des accidents.

DIAGNOSTIC CLINIQUE.

C’est en règle générale, par une douleur abdominale que commence le syndrome occlusif, et
c’est l’étude de cette douleur qui devra, en premier lieu, retenir l’attention. Son début a parfois été
progressif, mais il a pu aussi être violent, soudain, clouant sur place le sujet atteint. Le siège initial ou
maximum actuel n’a qu’une valeur de localisation restreinte en ce qui concerne la localisation de
l’obstacle; par contre, les modalités de la souffrance doivent être analysées avec soin, car chacune
d’elles peut avoir une signification.

Sans conteste, les coliques intermittentes et paroxystiques, classiques coliques de misère, sont,
de toutes les douleur, les plus caractéristiques de l’occlusion. On les a comparées à des vagues
douloureuses, de rythme plus ou moins précipité, atteignant leur acmée en deux ou trois minutes, et
cédant lentement pour disparaître et faire place à une accalmie de durée variable. La traduction visible
de ces vagues douloureuses sera parfois le péristaltisme apparent et l’anxiété passagère du visage. Il
n’est pas rare, quand c’est à ce type de douleurs que l’on a affaire, d’apprendre par l’interrogatoire que
des épisodes comparables, atténués, souvent spontanément et vite avortés, ont fait une ou plusieurs fois
leur apparition dans les mois ou les semaines qui précèdent, et les présomptions d’occlusion par
obturation sans menace immédiate pour la vitalité de l’anse, sont alors grandes.

L’absence d’intermittence de la douleur n’est, en aucune façon, un élément susceptible


d’inciter à repousser l’hypothèse d’occlusion.

Il ne faut jamais oublier qu’à l’inverse de cette douleur type, certaines occlusions peuvent
déclencher un véritable état de mal suraigu, évoluant d’un seul tenant sans pauses, à paroxysmes
éventuels, survenant toutes les minutes, plusieurs fois par minute parfois. De telles atroces douleurs à
maximum abdominal, mais à irradiations dorsales ou lombaires, volontiers électives, obligeant le

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Chirurgie digestive 110
malade aux attitudes antalgiques les plus diverses, ne sont nullement l’apanage des perforations
viscérales, des infarctus pancréatiques ou mésentériques. Elles s’accompagnent presque toujours d’une
altération du facies, d’une accélération du pouls, instable, et révèlent souvent une occlusion avec
menace immédiate de la vitalité de l’anse, une striction ou un volvulus aigu.

En fait, ce ne sont ni les grands accès douloureux paroxystiques, ni les états de mal qui risquent
de conduire aux graves erreurs, car l’un et l’autre font, en règle, aussitôt craindre une affection
chirurgicale de l’abdomen. Le point sur lequel on n’insiste jamais assez, et que nous avons tous vu
responsable de retards extrêmement préjudiciables, c’est la faible intensité des douleurs accompagnant
les plus graves occlusions: vague état de malaise douloureux abdominal, sensation de tension
désagréable, coliques fugaces vite atténuées, remarquablement calmées parfois par une drogue banale
(atropinée en général), à laquelle le malade a souvent eu recours de son propre chef.

Pour ne pas s’exposer à de si grave erreurs, l’analyse d’autres symptômes fonctionnels


éventuels est primordiale. S’il est un signe banal entre tous, et peu significatif en fait ce sont les
vomissements survenant chez un sujet qui, soudain, se plaint de douleurs ou d’un malaise abdominal.
On sait fort bien que l’occlusion la plus authentique peut évoluer pendant longtemps sans provoquer
d’états nauséeux, et l’heure tardive d’apparition des vomissements lors d’occlusion colique est une
notion bien ancienne. On sait aussi que la moindre colique hépatique peut s’accompagner aussitôt d’un
ou deux vomissements alimentaires ou bilieux.

On n’attachera vraiment d’importance, dans les premières heures, qu’à un véritable état de mal
nauséeux, avec rejets rapprochés presque incessants. Il traduit souvent une des occlusions hautes du
grêle, riches en signes fonctionnels et pauvres, comme nous le verrons, en signes physiques et
radiologiques.

Au fond, l’élément qui doit avant tout retenir l’attention et susciter l’analyse la plus
attentive,c’est le moindre trouble de transit intestinal. Ici, c’est, avant tout, l’arrêt des gaz qu’il faut
rechercher et faire préciser avec soin. C’est lui qui distingue l’occlusion des grands accès de
constipation, susceptibles de se prolonger des jours parfois, et face auxquels le spectre de l’occlusion
est souvent trop vite agité. Pratiquement, l’impossibilité de toute émission gazeuse peut être
authentifiée dès les premières heures de l’accès douloureux, bien avant qu’on ait eu le droit de parler
d’arrêt des matières, et par ce seul fait d’horaire elle prend le pas sur ce dernier. Souvent, d’ailleurs,
l’arrêt des matières est moins net que celui des gaz. On souligne toujours que l’intestin sous-jacent à
l’obstacle, et c’est souvent un long segment, peut encore évacuer son contenu pendant les premières
heures, et donner le change. Il y a des diarrhées réflexes contemporaines de la survenue de l’occlusion,
surtout si celle-ci est d’apparition soudaine (volvulus par exemple) qui, elles aussi, sont trompeuses.
La vacuité de l’ampoule rectale,enfin, est loin d’être constatée régulièrement au toucher rectal qu’il
faut faire systématiquement: on trouve celle-ci parfois encombrée de matières, alors que, loin en amont
sur le grêle, s’installe le plus absolu des obstacles.

On le voit, la variabilité fréquente des manifestations fonctionnelles de l’occlusion fait que,


dans l’ensemble, leur étude ne peut guère apporter plus que des présomptions.

Un soigneux examen physique peut alors venir les confirmer dans la majorité des cas, s’il est
mené sans idée préconçue, si l’on consent en particulier à oublier les schémas classiques trop rigides et
qu’on se répète:

Que le météorisme est un signe possible d’occlusion, mais qu’il n’est ni constant ni nécessaire,
pour en poser le diagnostic;

Qu’il est d’authentiques syndromes occlusifs, et parfois des plus sévères, où le ventre reste plat
pendant de longues heures;

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Chirurgie digestive 111

Que, fait non absolument exceptionnel, une contracture précise, localisée, voire diffusée, peut
être le seul élément dénonciateur précoce d’une strangulation.

En ce qui concerne le météorisme, il faut se convaincre que, s’il est un excellent signe
d’occlusion, il n’en est pas le plus fidèle, et qu’il existe de faux météorismes trompeurs.

La façon qu’a le météorisme de se manifester est des plus variables. Tantôt il est d’emblée
apparent. Rien de plus évident, chez un sujet maigre, qu’un ballonnement localisé: voussure
perceptible en un secteur de l’abdomen, y déterminant, si elle est latérale, une asymétrie plus ou moins
précise, ne prêtant à discussion, si elle est médiane et basse, qu’avec une tumeur abdomino-pelvienne
kystique ou d’autre nature, ou une rétention d’urine facile à éliminer par sa matité et l’évacuation
spontanée ou provoquée par cathétérisme de la vessie - qui est de bonne règle au début de tout examen
abdominal. Cette voussure est en principe sonore, voire tympanique, et donne au palper une sensation
de tension à plein, d’élasticité gazeuse comparée à celle d’un cylindre membraneux rempli d’air. Si,
par ailleurs, elle reste immobile sous la main qui palpe, on est en présence de ce qu’il est classique de
considérer comme un des meilleurs signes d’occlusion, et ajoutons de strangulation: le signe de von
Wahl.

En pratique, le ballon symptôme localisé est bien rarement rencontré.

Le ballonnement le plus habituellement observé est en effet, sans conteste, représenté par une
distension diffuse, soulevant de façon plus ou moins accentuée la paroi abdominale, et proche de celle
que pourrait donner une ascite.

C’est pourquoi la percussion est essentielle pour déceler la présence d’une sonorité. Percussion qui
devra être faite également si possible dans la région lombaire sur le malade assis, où l’existence de
sonorité doit être nette. La coexistence d’une occlusion et d’une ascite (météorisme central sonore,
matité des flancs) rend d’ailleurs parfois le diagnostic difficile, et la fausse ascite réalisée par
l’épanchement liquidien massif, stocké, le cas échéant, dans quelques anses, peut encore compliquer le
problème.

Pour diffus qu’il soit, un tel ballonnement n’est pas toujours symétrique, ce qu’est régulièrement un
épanchement liquidien. L’asymétrie avec météorisme électif dans la fosse iliaque droite n’est pas rare
dans les obstructions coliques lors de distension caecale prédominante.

Là où le météorisme prend une valeur significative de premier ordre, c’est lorsqu’il est accompagné de
péristaltisme. Que celui-ci soit visible sous forme d’ondes de reptation dont on guettera l’apparition,
ou perceptible à la main sous forme d’un durcissement intermittent, qu’il soit spontané ou délenché par
des chiquenaudes sur la paroi abdominale, il reste le meilleur des signes physiques d’occlusion, un des
plus fréquents aussi. Il affirme, en principe, l’obstruction, mais les observations ne se comptent plus où
on l’a vu coexister avec un volvulus (colique ou grêle) à la période initiale de son évolution.

Immobile, le météorisme diffus a moins de valeur significative.

L’auscultation de l’abdomen, qu’on omet trop souvent de pratiquer, peut apporter un appoint essentiel
au diagnostic. Il n’y a guère d’obturation avec météorisme, qui ne soit le siège de bruits hydro-aériques
se succédant à intervalles plus ou moins réguliers, avec glouglou de filtration, parfois. Le silence
évoquera soit une strangulation, dont l’urgence est extrême, soit une occlusion paralytique, dont
l’urgence est moindre.

Il s’en faut de beaucoup que tout ventre d’occlusion soit le siège d’un météorisme appréciable. Dans
beaucoup d’observations d’occlusions, l’absence de toute distension abdominale est en effet affirmée

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Chirurgie digestive 112
sans ambage, sans doute faut-il compter ici avec les météorismes non perçus, faute d’examen assez
attentif, chez les malades obèses ou à paroi très musclée, ou faute d’interpréter au toucher rectal une
sensation très spéciale de comblement du Douglas, répondant à un ballon plus pelvien qu’abdominal.

Ces circonstances mises à part, il est sans conteste relativement fréquent de se trouver en face dans les
phases initiales du syndrome tout au moins, d’occlusions à ventre plat, et pour cause, puisque l’intestin
lui-même n’est pas distendu.

Au lieu d’être déconcerté, ou malencontreusement rassuré par cette constatation, on doit rechercher s’il
n’existe pas alors des signes dénonciateurs de souffrance d’une anse intestinale.En effet, à peine pris
au piège d’un volvulus, ou d’un étranglement interne, l’intestin peut trahir sa souffrance par deux
signes de valeur:

L’existence, d’une part, en un secteur limité de la cavité abdominale, d’une douleur précise éveillée
par un palper profond, exagérée parfois à la décompression subite, et qui évoque la douleur du collet
bien classique des étranglements herniaires; l’existence, d’autre part, en regard de cette zone
douloureuse, d’un certain degré de défense pariétale qui peut avoir attiré l’attention de la main qui
palpe.

Il n’est pas impossible que, malgré la défense, celle-ci perçoive plus ou moins confusément, également
dans la profondeur,une tuméfaction: boudin d’invagination, ou anse volvulée? En tout état de cause,
loin de faire rejeter l’occlusion, c’est aux plus graves d’entre elles que ces signes de souffrance
viscérale doivent faire songer. Il faut les considérer comme plus alarmants qu’un météorisme précis.

C’est une constatation plus troublante encore, lorsqu’on pense dès l’interrogatoire se trouver
devant un syndrome occlusif, que celle d’une véritable contracture pariétale, d’un ventre de bois. On a
très judicieusement attiré récemment l’attention sur ce point et montré qu’une telle éventualité est loin
d’être exceptionnelle dans les volvulus d’emblée très serrés du grêle en particulier. Quoi de surprenant
à cela, d’ailleurs, si on réfléchit à l’importance de l’irritation péritonéale que peut entrainer la torsion
brusque du mésentère et du grêle, sa congestion aiguë, son sphacèle vite menacant et l’épanchement
ascitique séro-sanglant qui les accompagne ? A la souffrance extrême de l’anse occluse répond ici
alors, plus qu’une douleur localisée et qu’une défense segmentaire, une contracture vraie sans
météorisme. Signe d’alarme entre tous, elle fera souvent prononcer d’abord le mot de péritonite par
perforation d’un viscère creux, jusqu’à ce que l’absence de pneumopéritoine sur la radiographie en
fasse douter.

L’examen physique d’un malade suspect d’occlusion n’est pas terminé, tant que n’a pas été
effectuée la révision minutieuse des orifices herniaires, non seulement de ceux de la région inguinale,
mais aussi de ceux de la région crurale et obturatrice.

S’il n’a pas déjà été pratiqué, un toucher rectal et, le cas échéant, vaginal sera fait. L’ampoule
rectale est –elle vide ou pleine ? Le Douglas est-il libre ou comblé ? Sent-on directement une
néoformation rectale ou, à travers la paroi rectale, une néoformation sans doute sigmoïdienne, le doigt
revient-il souillé de sang ? L’appareil génital féminin paraît-il normal? Ou pathologique? Autant de
questions dont les réponses peuvent étayer un diagnostic.

Le rétentissement général d’une occlusion se mesure avant tout au pouls, au facies, à la diurèse.
Si ces éléments restent normaux ou presque, on peut dire le retentissement général nul. Si le facies est
anxieux, les traits tirés, le pouls petit et rapide, la tension basse ou effondrée, la diurèse vite ralentie, on
peut dire le shock imminent, la déshydratation certaine.

Soulignons qu’entre un état général peu modifié et un état brusquement alarmant, le temps peut
être court.

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Chirurgie digestive 113

Retenons qu’avec un pouls parfait, un facies rassurant, le malade a parfois une strangulation
dont il peut mourir rapidement par péritonite si on ne la traite pas vite.

Lorsque l’occlusion est abandonnée à elle-même, le delai dans lequel survient la mort est
variable de deux jours à une semaine. Le siège de l’occlusion, son type, l’âge et l’état général du
malade sont autant de facteurs conditionnant cette évolution.

Au stade terminal, toutes les occlusions se ressemblent. L’arrêt des matières et des gaz est
absolu, les vomissements souvent fécaloïdes confirment malgré l’habituelle atténuation des douleurs,
la gravité du pronostic. Le ballonnement est devenu considérable, et l’abdomen tendu, tympanique.
L’altération du facies (yeux excavés), l’oligurie voisinan l’anurie, la dyspnée (les complications
pulmonaires sont fréquentes) annoncent l’imminence du collapsus. Mais l’agonisant, couvert de sueurs
froides, souvent atteint de hoquet garde parfois une lucidité parfaite.

S’il survient une perforation diastatique, ou le sphacèle d’une anse, la péritonite ajoute ses traits
à l’occlusion, la température s’élève (39º, 40 º), l’abdomen devient douloureux dans son ensemble et se
défend plus ou moins intensément. C’est alors qu’on découvre à la radiographie un pneumo-péritoine,
et que parfois des ombres pariéto-coliques, pelviennes, entre les anses, attestent l’épanchement
purulent intrapéritonéal de la péritonite confirmée.

LE DIAGNOSTIC RADIOLOGIQUE
L’examen radiographique est désormais un des temps essentiels de l’enquête qui doit être menée
lorsqu’on se trouve en face d’un malade suspect d’occlusion.

Il permet, en effet, d’objectiver par des images qu’il faut apprendre à interpréter, la rétention
gazeuse, puis la rétention liquidienne qui lui fait suite, à condition d’être fait dans de bonnes conditions
techniques après transport du malade dans un centre hospitalier.

Notions générales et techniques.

C’est environ trois à six heures après le début du syndrome occlusif qu’apparaissent les
premiers ballons gazeux (peut-être de meilleure heure dans les obturations que dans les strangulations).
Alors qu’il n’y a aucun ballonnement perceptible, alors qu’il y a encore émission de quelques gaz
(occlusion progressive), des images de rétention aérique ou des niveaux liquides peuvent être visibles
sur les clichés. On admet qu’en moyenne la distension hydro-aérique suit d’une heure la distension
gazeuse isolée.

L’examen doit débuter par une radioscopie de centrage, si possible sur le malade debout,
vérifiant la transparence générale de l’abdomen, et étudiant particulièrement l’étage sus-mésocolique
et la région frontière thoraco-abdominale.

A ce niveau seront vérifiés successivement : la mobilité diaphragmatique, l’aspect général de


l’estomac et de sa poche à air (songer aux dilatations gastriques aiguës spontanées et isolées avec
météorisme simulant l’occlusion, connaître leur image de large opacité diffuse surmontée d’une calotte
gazeuse barrant l’abdomen), la clarté pulmonaire des bases, dont l’obscurcissement peut être lié à la
présence d’une hernie diaphragmatique étranglée, donc occlusive.

La prise de plusieurs clichés sans préparation (5 à 8) de grand format, intéressant toute la cavité
abdominale du pelvis au diaphragme, flancs compris, sera ensuite effectuée. Les clichés les plus
démonstratifs sont en général ceux pris de face, le malade debout; de profil, le malade en décubitus
dorsal; ou encore de face, le malade successivement en décubitus latéral, droit et gauche, puis en
décubitus dorsal, puis ventral. On a suggéré également de prendre parfois une radiographie sur le

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Chirurgie digestive 114
malade en position de Trendelenburg, tête en bas, pour accumuler le liquide endo-intestinal dans les
anses sous-diaphragmatiques désormais déclives et permettre alors aux gaz de se cantonner dans les
anses voisines de l’obstacle, susceptible d’être ainsi mieux objectivé dans certains cas. Cette bascule
est à éviter au moindre soupçon de réaction péritonéale associée.

Certaines notions générales sont nécessaires à l’interprétation des images.

A moins d’aérophagie importante, le tube digestif normal ne présente pas de distension


gazeuse. A part la poche à air gastrique, avec son niveau liquide horizontal, n’existent normalement
qu’une bulle au genu superius duodénal, quelques bulles duodénales et termino-iléales, un peu
d’aérocolie dans les zones fixes (ascendant, angles, côlon iliaque gauche).

L’apparition d’images gazeuses claires en d’autres segments, ou d’images hydro-aériques avec


niveau liquide, est donc en principe pathologique. Une seule image hydro-aérique nette, cadrant avec
le contexte clinique, peut même emporter la conviction dans certains cas.

Avant d’émettre une conclusion, on devra toujours chercher à préciser si le malade n’a pas reçu
tout récemment une purge, un lavement (faux niveaux liquides possibles), et s’il n’est pas
sous l’influence de drogues telles qu’atropine, barbituriques, morphine, susceptibles de provoquer un
stockage gazeux endo-intestinal.

Il convient de se rappeler, par ailleurs, que chez le jeune enfant, ainsi que volontiers chez le
vieillard grabataire, des bulles gazeuses avec ou sans niveau liquide sont de constatation banale.
Au moindre doute, l’examen radiographique devra être répété à quelques heures d’intervalle, car, au
début de l’occlusion, la pauvreté des images est fréquente : savoir que l’enquête radiologique, malgré
qu’il y ait occlusion authentique, peut rester muette ou trompeuse (opacité diffuse de l’abdomen quand
la rétention liquidienne l’emporte sur la rétention gazeuse, ou qu’existe une ascite importante; aspect
de pneumo-péritoine lors d’occlusion compliquée de perforation intestinale) et que le désaccord entre
des signes cliniques nets et des signes radiologiques absents peut et doit inciter à la laparotomie
exploratrice. Tenir compte, bien entendu, de l’éventuelle visibilité d’un corps étranger, peut-être
migrateur et occlusif : calcul biliaire, bouton métallique anastomotique.

Les images

Quand il y a occlusion du grêle, en général on se trouve en présence d’images hydro-aériques


ayant l’aspect soit de bulles gazeuses, soit d’arceaux à deux jambages, dessinant un U à concavité
inférieure, soit de cornue (arceau gazeux à extrémité effilée en pointe d’un côté). Ces trois aspects
différents peuvent d’ailleurs se côtoyer sur les films.

Habituellement, ces images hydro-aériques sont multiples, de volume modéré, de siège central
ou abdomino-pelvien, à l’inverse des images coliques périphériques. Certaines peuvent néanmoins être
de grandes dimensions, une anse grêle très dilatée dépassant parfois le double du calibre d’un côlon
normal. Les taches hydro-aériques sont en général indépendantes les unes des autres; indépendance qui
ne signifie d’ailleurs pas anarchie. En effet, sur le malade debout, elles se superposent habituellement
de l’hypochondre gauche à la fosse iliaque droite, simulant des « tuyau d"orgue », des « terrasses
étagées », des « marches d"escalier ».

Quand les anses contiennent peu de liquide et suffisamment de gaz, on peut chercher à repérer
leur niveau par l’étude des valvules conniventes formant plus au niveau du jéjunum, où elles sont
surtout développées : cercles plus ou moins complets perpendiculaires aux parois donnant les aspects
dits de « feuille de fougère », de « barbes de plumes », ou, mieux , de « spires de ressort à boudin ».

A l’accoutumée, les anses jéjunales sont hautes et horizontales, les anses iléales basses et

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Chirurgie digestive 115
verticales. L’accumulation d’un grand nombre de petites bulles peut réaliser un semblant de damier,
témoignant souvent du siège bas de l’obstacle près de la jonction iléo-caecale.

Aux images multiples, habituellement provoquées par la distension des anses en amont de
l’obturation jéjunale ou iléale, s’oppose l’image unique, isolée, d’une anse dilatée, se détachant en
croissant hydro-aérique clair, sur un fond uniformément sombre. De tels aspects n’impliquent en
aucune façon la bénignité de la lésion responsable et doivent faire soupçonner le mécanisme de
strangulation.

Il est impossible d’entrer dans le détail des images atypiques susceptibles d’être rencontrées,
telles que l’aérogastrie isolée des obturations très hautes du grèle, ou que l’opacité en forme de boucle
d’une anse fortement étranglée, exclue du circuit gazeux, et ne renfermant que du liquide hématique.

Les signes radiologiques d’une occlusion colique ne sont pas essentiellement différents de ceux
observés sur le grêle et ne s’en distinguent que par des nuances.

On rencontre également, lorsqu’il y a obstruction, des images hydro-aériques; celles-ci,


d’autant plus nombreuses (mais guère plus de quatre) que l’obstacle est bas situé, sont faites de
vésicules hydro-aériques en règle volumineuses dans les deux sens, théoriquement plus hautes que
larges, de parois épaisses et de plafond bosselé.

Ces bulles gazeuses surmontent fréquemment une ligne de niveau liquide très longue, pouvant
s’étendre du diaphragme au pelvis, sur les clichés pris de profil, le sujet étant en décubitus latéral. Si
l’obstacle siège sur le transverse, les images sont cantonnées dans l’épigastre et à droite, et c’est en
décubitus latéral qu’apparaît la longue ligne de niveau liquide bloquée dans le côlon droit.

D’une façon générale, les images hydro-aériques sont surtout périphériques, ou barrent
transversalement l’abdomen, en se raccordant au dessin général du cadre colique dont sont
reconnaissables, s’ils sont distendus, les segments fixes (angles ascendant et descendant) et le caecum.

Dans les volvulus coliques, si le volvulus est sigmoïdien, il y a en principe une très large image
hydro-aérique. Elle est en forme de grand arceau, à hauts jambages plus ou moins rapprochés,
dessinant un U à concavité inférireure.

Les lignes horizontales des niveaux liquides sont souvent décalées dans les branches. Si le
volvulus intéresse le caecum, c’est une image gazeuse unique sans jambages, uniforme, le plus
souvent en ectopie gauche haute, à ligne de niveau horizontal qui attire l’attention.

Dans tous ces cas, l’intestin sus-jacent (côlon ou grêle), s’il est distendu, peut, par superposition
de clartés parasites, gêner la lecture des clichés.

L’association occlusion du grêle et occlusion colique n’est pas rare, soit qu’une occlusion
colique retentisse sur le grêle (valvule de Bauhin perméable de bas en haut), soit que le même obstacle
(ou deux obstacles différents) provoque simultanément une occlusion du grêle et une occlusion
colique, soit que, lors d’iléus paralytique, le trouble fonctionnel frappe à égalité tous les étages du tube
intestinal. Dans cette dernière éventualité, il y a une dilatation gazeuse diffuse et importante de
l’intestin sans niveau ou avec niveau modéré, portant en règle sur le grêle et le côlon (parfois
seulement sur le côlon, jamais isolément sur le grêle). Rechercher alors une opacité homogène avec ou
sans niveau liquide témoin d’une péritonite localisée.

Malgré les caractères distinctifs précités, il n’est pas toujours possible, au vu de ces différentes
images, d’affirmer le siège de l’occlusion sur le grêle ou le côlon.

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Chirurgie digestive 116
Pour résoudre le problème, on administrera un lavemnt baryté.

S’il injecte rapidement, sans difficulté, en totalité, le cadre colique et le dessine en encerclant
les zones hydro-aériques suspectes : l’occlusion est sur le grêle. Le refoulement vers le haut du
transverse, son trajet en courbe à concavité inférieure mesurent en quelque sorte l’importance de la
distension jéjuno-iléale.

Si le lavement s’arrête nettement, il y a des chances que là soit l’obstacle, mais ce n’est pas une
certitude. Un arrêt n’a toute sa valeur que s’il y a rétro-dilatation sus-jacente associée. Une lésion du
caecum ou du grêle, par exemple, adhérente au sigmoïde, détermine parfois l’arrêt sigmoïdien
trompeur de la colonne barytée. La forme de la tête de la colonne immobilisée sera étudiée avec soin
(amorce de spire dans le volvulus du côlon pelvien, image en cupule, en trident dans l’invagination,
aspect de bouffant de culotte de golf dans les cancers).
Si, enfin, le lavement hésite, s’attarde en un point, le doute persiste aussi. S’agit-il d’un
spasme? D’un défilé réel, mais partiellement perméable ? le mode de remplissage du segment sus-
jacent tout à coup élargi, s’il se fait peu à peu, bosselure par bosselure, lac par lac (effet de gouttière)
dans un côlon dilaté, la densité faible de l’image colique (la sténose ne laissant que filtrer faiblement la
baryte) sont en faveur de cette dernière hypothèse.

En résumé, si l’injection parfaite du cadre colique permet d’affirmer le siège sur le grêle de
l’occlusion, son injection imparfaite, incomplète, n’autorise aucune occlusion formelle, et c’est en se
référant aux autres caractères radiologiques, au contexte clinique, qu’on résout le problème.

En dépit de toute la documentation clinique et radiologique, recueillie, il arrive que la certitude


de l’existence d’un état occlusif ne puisse être affirmée. Dans ces cas, la surveillance du malade dans
les heures et les jours qui suivent permettra parfois de trancher le débat, et l’intérêt d’examens
radiologiques répétés ne saurait être trop souligné. Voit-on en effet, un blocage aéro-liquidien
discutable s’aggraver sur les films, c’est que l’occlusion se confirme, se complète. Voit-on , au
contraire, les gaz se débloquer, s’éparpiller dans le côlon qui en était privé plus ou moins, voilà un
élément favorable qui permet l’espoir d’éviter l’intervention.

LES GRANDS SYNDROMES

Les symptômes cliniques et radiologiques disparatas sur lesquels on se base pour poser le
diagnostic positif d’occlusion se groupent habituellement en syndromes dont la connaissance permet
de répondre, en face d’un état occlusif, aux questions suivantes : l’occlusion est-elle sur le grêle ? sur
le côlon ? à la fois grêle et colique ? Dépend-elle d’une obturation de la lumière intestinale ? de la
strangulation d’une anse ? de sa paralysie ?

D’une façon générale, les occlusions du grêles ont des signes fonctionnels précis : douleurs
franches, vomissements précoces souvent répétés, arrêt des matières et des gaz encore que ce dernier
symptôme puisse tarder quelque peu à apparaître dans toute sa netteté si l’obstacle est haut situé, et
laisse libre au-dessous de lui un long secteur d’intestin. Elles ont aussi, en règle, un retentissement
général vite manifeste traduit par les modifications du facies, du pouls, de la tension, de la diurèse.

Leurs signes physiques sont, par contre, dans l’ensemble discrets. S’il existe un météorisme, il
est pratiquement toujours modéré qu’il soit diffus, plutôt central, ou localisé (ballon tympanique de
von Wahl). Il n’est pas rare que tout météorisme soit absent et le ventrelat. Il peut exister
paradoxalement une défense pariétale douloureuse, tantôt localisée, tantôt diffuse, simulant une
perforation viscérale.

Sur les films, les images les plus démonstratives sont les bulles hydro-aériques, multiples, à
niveaux liquides étagés, de dimensions réduites, encadrées par un côlon perméable au lavement baryté.

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Chirurgie digestive 117
Mais un arceau hydro-aérique solitaire retiendra tout autant l’attention.

Les occlusions du côlon ont schématiquement une allure plus subaiguë : tension douloureuse
progressive tardifs remplacés au début par des nausées, arrêt souvent très rapide et absolu des matières
et des gaz, pas de retentissement général précoce. Mais, à l’opposé de ces manifestations
fonctionnelles atténuées et générales quasi absentes, existent en règle des signes physiques nets :
important météorisme, diffus et en cadre, ou localisé, provoquant une asymétrie abdominale.
Sur les films, les images hydro-aériques sont dans l’ensemble de grandes dimensions; si elles
sont multiples, elles ne sont jamais très nombreuses (guère plus de quatre). Ici aussi un ballon aéro-
liquidien unique peut avoir une nette signification. L’arrêt du lavement baryté est fréquent (non
constant), tenir compte de son siège, de l’aspect de la tête de la colonne de baryté.

Il ne s’agit là bien entendu que de notions très générales sans caractère d’absolu. On connait,
en effet, les occlusions subaiguës du grêle, suraiguës du côlon; les occlusions mixtes à la fois grêle et
colique; association d’une occlusion du grêle et du côlon, sous l’influence d’un même mécanisme, ou
de deux obstacles différents.

Les syndrome d’obturation (que celle-ci siège sur le grêle ou sur le côlon) a pour
caractéristique les traits suivants :
-Début assez progressif des accidents douloureux qui vont se répéter à intervalles plus ou moins
proches et n’évoluent pas d’une seule tenue, fréquence relative dans les antécédents de crises de
coliques intermittentes, terminées par émission de gaz (syndrome de Koenig des sténoses progressives
de l’intestin), altération sans doute moins soudaine de l’état général, encore que celle-ci soit surtout
fonction du siège en hauteur de l’obstacle. Météorisme habituel plus souvent diffus que localisé, en
cadre dans les occlusions coliques, central dans les occlusions du grêle, animé des contractions
péristaltiques spontanées ou aisément provoquées. Elément majeur du diagnostic à l’auscultation :
bruits de glouglou, particulièrement nets dans les syndromes d’occlusion où l’intestin lutte. A la
radiographie, la multiplicité des niveaux liquides étagés plaide pour l’obstruction.

Les syndrome de strangulation a toujours un caractère assez dramatique, en opposition avec le


précédent : début brusque, douleur très vive, évoluant d’un seul tenant avec paroxysmes éventuels
surajoutés, obligeant parfois le malade à se plier en deux en décubitus latéral : retentissement général
précoce, en particulier dans les strangulations hautes du grêle, avec état de shock extrême
éventuellement. Signes physiques éminemment variables : habituellement très important météorisme
localisé, donnant une asymétrie du profil abdominal dans les strangulations coliques, souvent aucun
météorisme dans les strangulations du grêle, mais, bien au contraire : ventre plat, avec défense
localisée, ou ventre en bateau contracturé, attestant la réaction pariéto-
péritonéale à la souffrance de l’anse. En tout cas, en règle quand il y a météorisme lors d’un
étranglement du grêle, c’est un météorisme discret, localisé, hypertympanique (signe de von Wahl). En
principe : pas de péristaltisme; silence anormal à l’auscultation de l’abdomen. Sur les films, l’image
d’un ballon hydro-aérique unique, isolé, est en faveur d’une strangulation, mais elle peut aller de pair
avec des niveaux multiples étagés dans l’intestin en amont de l’obstacle.

L’existence d’une élévation discrète de la température aux environs de 38º et de la leucocytose


est donnée aussi comme un signe en faveur de l’étranglement ou du volvulus.

Le syndrome d’iléus paralytique est peut-être de tous les moins douloureux, le plus discret
quant à sa symptomatologie fonctionnelle. Il faut insister sur l’importance habituelle du météorisme
qui le traduit (il s’agit presque toujours d’une paralysie frappant le côlon et le grêle simultanément),
sur son immobilité rigoureuse (pas de péristaltisme), sur le relatif silence à l’auscultation.

Sur les films : dispersion de la rétention hydro-aérique, sur le côlon et le grêle : parfois
rétention essentiellement gazeuse.

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Chirurgie digestive 118
On sait avec quel soin toute occlusion d’apparence paralytique doit faire rechercher un foyer
inflammatoire latent : douleur élective en un secteur de la cavité abdominale, perception d’un
empâtement au palper et au toucher, leucocytose élevée.

Tels sont les grands syndromes occlusifs.


Rappelons que, grosso modo, l’occlusion du grêle est plus souvent par strangulation ou
striction que par obturation; l’occlusion du côlon, à l’inverse, plus souvent par obturation que par
strangulation.
DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL DE L’OCCLUSION

Les perfectionnements apportés à l’étude clinique et radiologique de l’occlusion mettent de


plus en plus à l’abri des erreurs classiques :
Qualifier syndrome médical banal (embarras gastrique, crise biliaire, néphrétique,
entérocolitique, urémie digestive) une occlusion authentique;
Affirmer l’existence certaine d’une occlusion là où évoluent seulement une affection médicale
ou chirurgicale pseudo-occlusive.
Combinée à la clinique, la radiographie systématique de tout syndrome abdominal douloureux,
tant soit peu suspect, évitera habituellement de méconnaître une vraie occlusion. Seules risquent
d’échapper les occlusions hautes, sans ballonnement, mais elles ont le plus souvent des signes
fonctionnels alarmants et ne sont pratiquement jamais à la fois cliniquement et radiologiquement
muettes. Rappelons à ce propos que la constatation sur un cliché d’une anse isolée distendue à contenu
aérique ou hydro-aérique peut suffire, corroborée au contexte clinique, à décider une intervention.

La radiographie permettra aussi d’éviter avec certitude de déclarer atteint d’occlusion un


malade à l’abdomen distendu par une ascite aiguë, par une tumeur abdominale kystique en poussée,
par un mégacôlon sans réel arrêt du transit. Certains pseudo-météorismes chez des femmes gravides ou
ayant eu plusieurs grossesses, chez des sujets obèses à sangle abdominale
relâchée, ne prêteront plus au doute une fois passés au crible de l’examen radiographique. Les fausses
occlusions des simulateurs projetant leur abdomen en avant en bloquant leur diaphragme
s’accompagnent à la radioscopie d’une immobilité des coupoles bien significatives. (Leur météorisme
s’affaisse au surplus d’un seul coup sous anesthésie).

La dilatation gastro-duodénale aiguë spontanée n’est, à tout prendre, qu’une occlusion haute,
mécanique ou fonctionnelle, de la partie initiale du tractus. Elle ne rentre cependant pas dans le cadre
de l’occlusion intestinale, qu’elle simule par sa douleur aiguë, ses vomissements, sa précoce altération
de l'état général et son météorisme vite surprenant, et volontiers asymétrique. Le fait qu’elle survient
surtout après un repas trop copieux, chez un sujet famélique ou chez un opéré récent, n’est pas un
argument formel. C’est encore sur les clichés et à la radioscopie qu’on en fera le diagnostic à la vue
d’un estomac énorme contenant un seul niveau liquide horizontal, barrant largement la cavité
abdominale, surmonté d’une poche à air sous – phrénique gauche. L’aspiration gastrique affaissant le
météorisme est à la fois un test diagnostique et le procédé thérapeutique d’élection.

Les problèmes qui ont le plus de chance de rester encore en suspens sont ceux posés par les
multiples variétés pseudo-occlusives de certaines affections médicales ou chirurgicales, qui à leurs
signes cliniques, ajoutent volontiers des signes radiographiques d’occlusion réflexe, diffus et modérés,
sans doute, mais quand même troublants.
Au nombre de ces affections, figure, en premier chef, la colique néphrétique, pour laquelle on
saura rechercher l’hématurie macro ou microscopique et surtout demander des clichés sans préparation
à la recherche de l’ombre révélatrice d’un calcul sur le trajet pyélo-urétéral, ou, mieux encore, une
urographie d’urgence. L’absence d’apparition unilatérale de l’image pyélo-calicielle dans les délais
habituels étant un argument considérable en faveur d’une colique néphrétique.
Même éventualité pour certaines coliques hépatiques ou poussées de cholécystite calculeuse
volontiers occlusive chez le vieillard, si les calculs biliaires ne sont pas visibles. On peut en rapprocher

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Chirurgie digestive 119
les syndromes occlusifs satellites des appendicites des sujets âgés, des salpingites, des sigmoïdites
inflammatoires non sténosantes, de quelques affections pulmonaires aiguës décelées parfois par
l’immobilité d’un hémidiaphragme, l’absence de clarté d’une base pulmonaire.

Enfin, chez la femme, les torsions d’annexes, la rupture d’une grossesse extra-utérine, chez
tous, la pancréatite aiguë hémorragique et l’infarctus intestinal (longtemps considéré comme une
occlusion de mécanisme particulier) peuvent simuler de très près l’occlusion suraiguë. L’existence de
signes cliniques et radiologiques propres à chacune de ces affections, le fait que l’élément occlusif y
passe dans l’ensemble au second plan, le secours de certains examens de laboratoire (valeur d’une
amylasémie élevée en faveur d’une pancréatite aiguë hémorragique) feront parfois rectifier un
diagnostic erroné au départ. Parfois encore, seule l’intervention apportera la certitude. On ne regrettera
pas d’y avoir eu recours dans ces cas chirurgicaux, où elle est, sauf peut-être en cas de pancréatite,
nécessaire.

Quant au diagnostic différentiel classique entre la péritonite et l’occlusion, répétons qu’il ne se


pose guère qu’au stade d’occlusion confirmée. A ce moment, d’ailleurs, la péritonite s’ajoute
habituellement à l’occlusion, de même que l’occlusion complique la péritonite à sa phase terminale. Il
est souvent impossible de dire lequel l’emporte et a précédé l’autre. Débat sans intérêt puisqu’il faut de
toute évidence opérer.

Cependant, différencier une péritonite progressive d’une occlusion paralytique et fébrile,


développée au voisinage d’un foyer inflammatoire, secondaire ou non à une laparotomie, peut être
important. Dans l’un et l’autre des cas, il y a dispersion au côlon et au grêle des signes radiologiques,
ballonnement progressif, vomissements, arrêt du transit. C’est sur l’intensité, la diffusion ou la
limitation de la défense et de l’hyperesthésie pariétale qu’on jugera habituellement, ainsi que sur les
résultats d’un traitement médical bien conduit (aspiration, réanimation, antibiotiques) : l’échec de
celui-ci rendant suspect le diagnostic d’occlusion, probable celui de péritonite. Débat capital, puisque,
dans un cas (occlusion inflammatoire), la laparotomie est souvent une erreur, alors qu’elle est
indispensable s’il y a péritonite.

DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE
Le diagnostic étiologique d’une occlusion est parfois évident au terme de l’examen clinique et
radiologique. Dans le cas contraire, une enquête étiologique complémentaire est nécessaire. Pour
qu’elle porte ses fruits, il est toujours très utile de tenir compte de l’âge du malade examiné : chaque
étape de l’existence ayant ses causes électives d’occlusion.

Occlusion du nouveau-né et nourrisson

Chez le nouveau-né, on doit savoir que le syndrome clinique d’occlusion est souvent décapité
par l’absence fréquente de l’arrêt du transit et du météorisme, et que les vomissements constituent le
meilleur syndrome d’alarme.

Dès que l’occlusion est soupçonnée, il faut en chercher la cause dans une malformation
congénitale. Elle peut être ano-rectale : imperforation ano-rectale dont nous verrons les variétés au
chapitre qui lui est consacré. Elle peut être colique par mégacôlon congénital d’emblée occlusif,
exceptionnellement par aplasie colique plus ou moins étendue. Intérêt de l’examen local, inspection de
la région ano-rectale, toucher rectal, et de l’exploration radiologique avec lavement baryté très fluide.
Le plus souvent, l’origine des accidents occlusifs se situe au niveau du grêle, et on doit penser alors
aux atrésies régionales ou aux sténoses congénitales frappant le duodénum, le jéjunum ou l’iléon, et
dont les signes radiologiques sont souvent précis.

L’iléus méconial (méconium demeurant comme de la colle, adhérent aux parois du grêle et
l’oblitérant faute de sécrétion pancréatique active) relève d’un mécanisme singulier. Il faut compter

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Chirurgie digestive 120
aussi avec les accidents de volvulus précoces, liés à la présence d’un mésentère commun; avec
l’existence éventuelle d’une duplication intestinale segmentaire fermée, aboutissant à la constitution
d’un entéro-kystome occlusif.

Il existe, chez le nouveau-né, d’exceptionnelles occlusions fonctionnelles associant


habituellement vomissements, météorisme, niveaux liquides radiologiques, à une diarrhée paradoxale –
et allant souvent de pair avec une infection parentérale : ombilicale, pulmonaire, otomastoïdienne. On
n’y pensera qu’en dernière analyse.

Chez le nourrisson, l’occlusion survenant au terme d’une longue période de constipation, avec
météorisme monstrueux parfois, est aisément rattachée au mégacôlon et aux fécalomes durs qui
encombrent la lumière colique. Il s’agit, en règle, d’un mégacôlon essentiel (Hirschsprung), mais
parfois aussi d’un mégacôlon secondaire à une malformation congénitale ano-rectale non reconnue à la
naissance (étroit abouchement rectal anormal, entéro-vaginal en général).

La survenue brusque en pleine santé d’une crise d’occlusion aiguë a, par contre, toutes chances
d’être liée à une invagination iléo-caecale, ou iléo-colique. Les présomptions peuvent se transformer
en certitude si coexistent : signes d’occlusion et d’hémorragie intestinale, signes d’occlusion et boudin
perceptible, ou image radiologique démonstrative lors de l’administration d’un lavement baryté.

Si l’occlusion est reconnue être le grêle (côlon parfaitement perméable à la radiographie), elle
peut être due aussi à une invagination, mais également à d’autres causes parmi lesquelles citons : le
volvulus (rôle éventuel d’un mésentère commun), les brides, les duplications enkystées
(entérokystome comprimant l’intestin).

Il existe enfin chez le nourrisson des iléus fonctionnels (spasmes purs) avec météorisme
souvent important, susceptibles de céder à un traitement médical (aspiration par tube nasal,
compensation hydro-électrolytique). Dans le doute, on dispose souvent de quelques heures pour faire
la preuve de l’échec ou du succès de cette thérapeutique.

Occlusions de l’enfance

Dans l’enfance, jusqu’à l’âge adulte, le problème du diagnostic étiologique devient infiniment
plus complexe. Néanmoins, dans l’écheveau des causes dont l’occlusion peut dépendre, il est classique
de retenir, en raison de la fréquence à cet âge, plusieurs hypothèses.

N’y a-t-il pas invagination aiguë ? – La preuve peut en être formellement donnée s’il y a,
comme chez le nourrisson, occlusion avec hémorragie ou boudin, ou radiographie évocatrice.

N’y a-t-il pas, à l’origine de l’occlusion, une inflammation appendiculaire ou du diverticule de


Meckel ? – La preuve ici est difficile à apporter. Si, cependant, il y a occlusion fébrile et plastron
iliaque perceptible, l’hypothèse est vraisemblable. S’il y a occlusion fébrile sans plastron, on doit tenir
compte d’une douleur élective, d’une défense en un point. L’existence dans les antécédents plus ou
moins lointains d’une hémorragie intestinale, d’une anomalie ombilicale (fistule ou kyste), est un bon
argument pour établir l’origine meckélienne des accidents.

Une autre supposition qu’il faut faire dans la seconde enfance est celle d’une tuberculose
intestinale avec ou sans participation péritonéale. Pour l’étayer, on cherchera l’existence éventuelle
d’antécédents pulmonaires, ganglionnaires, d’une masse perceptible au palper ou au toucher. Si la
responsabilité de ces différentes causes ne peut être prouvée, si l’interrogatoire ne permet pas de
suspecter l’arrêt dans le grêle d’un corps étranger dégluti (amas pileux, trichobézoard) ou amas
d’origine vermineuse, s’il n’existe aucune manifestation clinique particulière orientant les soupçons
(cicatrice abdominale ancienne, tumeur palpable), il reste à procéder par déduction, comme chez

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Chirurgie digestive 121
l’adulte.

Occlusions aux âges avancés

Aux âges avancés, il n’est pas rare que l’on puisse affirmer avec certitude la cause d’un
syndrome occlusif.

Le volvulus du côlon pelvien, quoiqu’on puisse l’observer à tout âge, est plus fréquent après
cinquante ans. Il est une des occlusions dont on a le plus de chance de faire le diagnostic
exact, car, à son singulier météorisme oblique et monstrueux, il joint une image radiographique
fréquemment caractéristique : immense anse claire à deux jambes réunies à leur pied, au niveau duquel
le lavement baryté objective une spire de torsion démonstrative.

Quand le côlon est parfaitement perméable, le siège sur le grêle de l’occlusion est certain. On
peut rencontrer, chez l’homme âgé, les mêmes causes d’occlusion du grêle que chez l’adulte. Il faut
penser ici plus particulièrement à l’iléus biliaire. Son histoire est souvent évocatrice si on sait
l’analyser : déclenchement douloureux en deux étapes (l’une plus ou moins lointaine : constitution
d’une fistule cholécysto-duodénale; l’autre plus proche : migration du calcul vésiculaire dans le grêle) ;
antécédents possibles de lithiase vésiculaire; évolution par poussées des accidents occlusifs actuels; et
enfin, signes décisifs mais rares : perception directe au palper abdominal, au toucher rectal ou vaginal,
d’un calcul chez une malade maigre; visibilité radiologique de son ombre ou d’un pneumo-cholédoque
(colonne claire sous-hépatique bifurquée en haut). S’il y a de la température, l’appendicite, plus
rarement la cholécystite, toutes deux si volontiers occlusives chez le vieillard, et ceci qu’il y ait ou non
plastron perceptible, seront évoquées. En l’absence de signes en faveur de ces affections, on cherchera
à déduire la cause en raisonnant comme chez l’adulte.

Occlusions de l’adulte.

Le diagnostic d’occlusion chez l’adulte a parfois l’évidence que nous avons rencontrée aux
âges extrêmes de la vie, car il peut procéder des mêmes causes. Guère d’hésitations permises devant
les signes cliniques et radiologiques d’un volvulus pelvien, d’un iléus biliaire à calcul visible et
pneumo-cholédoque apparent, d’une invagination, d’une tumeur intestinale. Pas d’hésitation non plus
si on découvre les symptômes d’une carcinose péritonéale diffuse, ou d’une tuberculose.

La perception d’une hernie, celle d’une tumeur abdominale ou pelvienne retiendront l’attention,
mais il faut signaler qu’il n’y a pas fatalement de cause à effet entre l’occlusion et ces lésions.

L’expérience a prouvé que l’occlusion chez une malade porteuse d’un gros fibrome abdomino-
pelvien était exceptionnellement liée au fibrome (sauf s’il est calcifié) et relevait pratiquement toujours
d’une autre cause associée : tumeur colique surtout.

S’il y a cicatrice abdominale, ou thoraco-abdominale, d’une intervention ancienne, il est


logique de présumer l’existence d’une occlusion post-opératoire tardive, si souvent liée à une bride ou
à un étranglement interne (penser à la hernie diaphragmatique étranglée), à moins qu’il n’existe au
palper abdominal et au toucher une masse dure bloquant le pelvien, témoignant de la récidive d’un
néoplasme (utérin ou intestinal) autrefois opéré. Dans ce dernier cas, l’occlusion post-opératoire
tardive a plus de chance d’être par obturation que par striction.

La coexistence d’un syndrome d’occlusion et d’une poussée fébrile évoque aussitôt l’occlusion
inflammatoire (nous en avons vu les signes théoriquement distinctifs). L’examen doit alors comporter
la recherche minutieuse d’un foyer de suppuration : plastron sous-hépatique, iliaque droit, sus-pubien,
pelvien, et de la leucocytose. Se rappeler qu’une simple crise d’appendicite, de diverticulite sans
plastron, peut être occlusive et réclamer d’emblée l’inter-

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Chirurgie digestive 122
vention d’appendicectomie, de diverticulectomie, en raison de son double danger (péritonéal et
occlusif). Chercher les signes propres à chacune d’elles.

Toutes ces éventualités analysées, il reste que, dans un grand nombre de cas, la cause de
l’occlusion semble échapper à la première analyse.

Il faut alors reprendre l’examen à son début et s’attacher à distinguer ce qui est en faveur d’une
occlusion du grêle ou du côlon, ce qui est en faveur d’une strangulation, ou d’une obturation.

Des signes certains de strangulation inciteront à rechercher ceux propres aux volvulus, aux
étranglements internes (ballon épigastrique médian, par refoulement de l’estomac en avant, dans les
cas de hernie de l’hiatus de Winslow; masse pâteuse et douloureuse du flanc droit, lors de la hernie
rétro-caecale), aux invaginations (en particulier hémorragie intestinale au toucher rectal).

Des signes certains d’obturation incitent à scruter les antécédents plus ou moins lointains;
terrain tuberculeux, amaigrissement récent et hémorragie intestinale liée au développement d’un
néoplasme; notions de parasitose intestinale, d’ingestion alimentaire massive toute récente (carottes,
figues).

Un problème très particulier est posé par les occlusions post-opératoires.


Il va sans dire que, bien souvent, la cause et le mécanisme exacts de l’occlusion ne sont
découverts qu’au moment de la laparotomie. Ce n’est cependant pas un vain jeu de l’esprit que de
vouloir les préciser d’avance, car une occlusion dont on connaît la genèse a plus de chances d’être
correctement traitée.

Si elles sont très précoces, les occlusions post-opératoires sont pratiquement toujours
mécaniques; l’étranglement interne dans une brèche créée par l’opération en est la cause habituelle.

Bien entendu, il faut éliminer, avant de conclure, deux diagnostics différentiels : la dilatation
gastrique aiguë et la simple rétention gazeuse, conditionnée par le trouble qu’apporte toute intervention
à la dynamique intestinale. Dans ces deux cas, l’aspiration duodénale ou gastrique amène vite un
soulagement net. La radiographie est souvent d’interprétation difficile, car des niveaux liquides
peuvent persister dans le grêle après une laparotomie sans qu’il y ait véritable occlusion.

Les occlusions post-opératoires secondaires précoces sont presque toujours mixtes et


inflammatoires, et plus paralytiques que mécaniques.

Les occlusions tardives sont, comme les très précoces, mécaniques.

Ce sont, en pratique, nous l’avons déjà vu, des occlusions par brides, sur lesquelles il faut agir
directement, et vite.

Notons cependant que, si des attaques d’occlusions tardives se répètent et nécessitent plusieurs
interventions itératives, elles sont parfois le fait d’une symphyse d’anses par péritonite plastique et
susceptibles éventuellement de céder sans traitement chirurgical (voir Traitement).

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Chirurgie digestive 123
TRAITEMENT DE L’OCCLUSION INTESTINALE

Exposer le traitement de l’occlusion intestinale est complexe, car, comme nous l’avons déjà
répété plusieurs fois, s’il n’y a pas une occlusion, mais des occlusions de types divers posant chacune
un problème thérapeutique un peu particulier.

Nous ne tracerons ici que les grandes lignes du traitement des occlusions, réservant certains
détails au chapitre traitant à part chaque grande cause d’occlusion : volvulus, invagination ou
strangulation du grèle, volvulus colique, caecal ou sigmoïdien, néoplasme du côlon.

Malgré les considérables progrès apportés au traitement dit médical des occlusions, il est
incontestable que l’acte opératoire garde la place essentielle, la place de choix. Rares sont, en effet, les
syndromes occlusifs susceptibles de céder à la mise en oeuvre de moyens médicaux. Ils se résument
aux occlusions mixtes fonctionnelles plus que mécaniques (anses simplement agglutinées), aux
occlusions purement spasmodiques ou paralytiques, souvent alors d’origine inflammatoire, et
fréquemment post-opératoires.

Dans l’immense majorité des cas, l’occlusion est mécanique, et seule l’intervention peut la
guérir, soit en supprimant ou contournant l’obstacle, soit en dérivant les matières en amont de lui. Au
fond, le véritable intérêt du traitement médical, c’est d’avoir transformé du tout au tout le pronostic des
occlusions qu’on opère et d’avoir réduit la mortalité dans des proportions considérables.

Depuis qu’on a compris la nécessité de mettre en oeuvre la thérappeutique dite 'médicale"


aussitôt en face de tout syndrome occlusif intense, en particulier du grêle, et de le continuer
systématiquement plusieurs jours après l’intervention quelle qu’en ait été la modalité, l’amélioration
des statistiques est flagrante. En particulier, les morts par shock au cours ou au lendemain de l’acte
opératoire ont pratiquement disparu.

Après avoir précisé en quoi consiste la thérapeutique médicale des états occlusifs, nous
envisagerons les directives générale qui président au traitement des diverses occlusions et le schéma
des indications opératoires.

TRAITEMENT DIT « MEDICAL » DES OCCLUSIONS

En quoi consiste le traitement médical des occlusions ?

Il comporte quatre éléments essentiels :


1º l’aspiration digestive continue; des sorties liquidiennes journalières et la confrontation des
ingestions (par voies buccale, veineuse, sous-cutanée, rectale) et des pertes mesurées en tenant compte
des vomissements, des liquides aspirés, des urines, de la diarrhée éventuelle, des évaporations
insensibles (sudation , respiration) estimées aux environs de 1000 à 1200, mais varaibles selon la
température du malade et la température extérieure.
2º C’est en connaisance de ces bilans que seront estimées la quantité et la qualité des liquides à
injecter par perfusion intraveineuse, en n’oubliant pas qu’on connaît ainsi les dettes de la veille, et, non
celles du jour même, qu’on ne connaîtra que le lendemain.

Chez l’adulte, plusieurs litres par jour sont habituellement nécessaires. Il n’y a ni dose, ni
solution standard. Le sérum glucosé isotonique que l’on charge de sel à la demande est en principe
préféré au sérum salé isotonique.

Chez le nourrisson, chez l’enfant, on tiendra compte des mêmes données et du poids du
malade. Chez les sujets âgés, on craindra toujours de surcharger malencontreusement le système

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Chirurgie digestive 124
cardio-vasculaire et on admettra un certain déficit.

Le calcul du chlorure de sodium à administrer peut être fait selon une règle simple nécessitant
de connaître le poids du sujet. On sait que l’eau entre pour 70 p. 100 dans le poids du corps humain et
que cette eau occupe pour 50 p. 100 le compartiment intra-cellulaire, pour 20 p. 100 (1/5 du poids
total) le compartiement extracellulaire. En divisant par cinq le poids du corps, on aura un chiffre
représentant l’eau extracellulaire qui, multiplié par celui du déficit en sel, calculé en grammes,
représentera la quantité nécessaire à l’obtention de l’équilibre.

Il n’existe pas de règler comparable pour l’administration du potassium. Celle-ci devra toujours
être prudente, en particulier si l’oligurie est marquée – craindre des accidents d’arrêt cardiaque.

En principe, la dose limite est de 15 grammes de chlorure de potassium par jour, représentant
environ 5 grammes de potassium.

Pour remédier à la dénutrition également contemporaine d’un état d’occlusion qui se prolonge,
des perfusions d’hydrolysats de protéine, des transfusions (sang ou plasma), des vitamines seront
utilisées.

En ce qui concerne la transfusion, elle a, par ailleurs, une indication d’élection et d’extrême
urgence dans la période pré-opératoire : le shock très marqué, qui accompagne habituellement les
strangulations du grêle. Il est parfois alors nécessaire de la faire massive, voire intra-artérielle le cas
échéant.

3º L’injection d’antibiotiques à hautes doses (ampicilline le plus souvent) représente le


troisième élément indispensable de la thérapeutique, en raison du développement rapide de la septicité
du liquide en rétention et des menaces péritonéales que nous avons vues. On commencera cette
thérapeutique anti-infectieuse dès l’occlusion reconnue, et la continuera pendant environ cinq jours
après l’acte opératoire.

4º L’oxygénothérapie (par voie nasale, ou sous tente) sera également de rigueur.

Répétons que ce traitement parachirurgical de l’occlusion, si perfectionné qu’il soit à l’heure


actuelle, ne dispense pas d’opérer la majorité des états occlusifs. S’il n’est pas niable qu’il peut guérir
certaines occlusions à signes cliniques et radiologiques nets, il n’est pas niable qu’il risque aussi par
son efficacité de faire retarder une intervention indispensable.
Sous aspiration, perfusion dosée, antibiotiques, que de désastres peuvent se préparer à bas bruit,
que de nécrose se faire, que de péritonite s’installe! On ne saurait assez mettre en garde médecins et
chirurgiens contre une telle éventualité, et il faut redire inlassablement que la thérapeutique médicale
des occlusions ne peut et ne doit être tentée qu’en milieu hospitalier, et
sous surveillance chirurgicale rigoureuse; qu’elle ne doit jamais être indûment prolongée, si le meilleur
des critères de la reprise d’un transit normal – le passage spontané des gaz par les voies naturelles –
n’est pas nettement observé.

TRAITEMENT DES OCCLUSIONS MECANIQUES DU GRELE

Aussitôt reconnnues ou fortement soupçonnées, les occlusions mécaniques du grêle doivent


être opérées sans tarder, sous anesthésie générale par inhalation, avec intubation trachéale facilitée par
l’induction au pentothal-curare. L’oxygénothérapie maxima est conseillée.

Certains malades peuvent être opérés d’emblée, tels sont ceux dont l’état de shock est
pratiquement nul, et l’abdomen à peine ou non météorisé. Conditions qui ne sont guère réalisées que
chez les malades vus de très bonne heure.

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Chirurgie digestive 125

D’autres doivent bénéficier d’un certain délai toujours court, de préparation, du fait de leur état
de shock ou du météorisme important qu’ils présentent.

Attention, ici une distinction capitale : si le diagnostic de strangulation est posé ou fortement
présumé (ventre plat souvent), on ne dispose que de peu d’heures (deux ou trois) pour traiter le shock,
mais il est indispensable de le faire par transfusion qui sera continuée pendant l’intervention. Le délai
étant habituellement insuffisant pour mettre en marche une aspiration duodénale continue efficace, on
se contentera d’une simple aspiration gastrique, qui affaissera du moins l’estomac. Si, au contraire,
c’est au diagnostic d’obturation qu’on s’arrête, outre le traitement éventuel du shock on installera
l’aspiration duodénale. Il faut six heures au moins pour que, bien conduite, elle ait un rôle net. Elle
peut provoquer des affaissements remarquables, mais souvent elle ne fait qu’atténuer le ballonnement.

La laparotomie médiane large, à cheval sur l’ombilic, est la voie d’abord de choix, sauf chez le
nourrisson et le jeune.
L’exploration du grêle dévidé à la filière est indispensable, car il faut s’assurer qu’il n’y a pas
plusieurs obstacles étagés. Elle oblige parfois à l’éviscération totale. La plus grande douceur est de
mise dans ces manoeuvres et on évitera de laisser les anses extériorisées se refroidir, en les baignant
sous du sérum chaud.

Tantôt l’anse siège de l’occlusion est saine, et on peut supprimer l’obstacle. Ce sont les bons
cas. Cette suppression est parfois très facile. C’est ainsi que, s’il y a occlusion par bride, la section de
la simple bride suffit. S’assurer, avant d’y procéder, que cette bride n’est pas un viscère creux :
appendice, diverticule de Meckel, trompe, auquel cas c’est son ablation et non sa section qui s’impose.

Un volvulus du grêle sera détordu : brides et volvulus coexistent souvent . Contrôler s’il n’y a
pas volvulus en amont d’une bride parfois lointaine, ou bride au contact ou au pied d’une torsion.

En cas d’étranglement interne, la désincarcération de l’anse s’impose. Elle n’est délicate que si
l’anneau est en partie vasculaire. Le débridement de l’hiatus de Winslow, par exemple, sera fait en
décollant vers le bas le duodénum qui en est le plancher pour respecter la veine porte et la
veine cave; celui de la fossette paraduodénale, en incisant vers le haut pour éviter l’artère colique
supérieure gauche et la veine mésentérique inférieure. Quant aux invaginations, si elles sont simples et
récentes, leur réduction par expression est souvent facile. S’assurer qu’elle est totale, qu’il n’y a pas
plusieurs boudins étagés.

Il est des cas où la suppression de l’obstacle est plus complexe. Telles sont les occlusions par
brides multiples, par adhérences étagées. Elles peuvent conduire à libérer et dépéritoniser une grande
partie du grêle. Le danger de voir récidiver l’occlusion est alors grand. C’est pour éviter une telle
éventualité qu’on a proposé de réaliser, en terminant l’accolement hiérarchisé des anses entre elles.
Cette plicature totale du grêle, désignée sous le nom d’opération de Noble, ou plicature mésentérique
(opération de Child Philips) sont particulièrement indiquées dans les occlusions récidivantes.

Les obstructions par corps étranger nécessitent, pour extraire celui-ci, l’ouverture de l’intestin
par entérotomie longitudinale ou transversale, temps septique qui aggrave l’intervention.

Aussi, chaque fois que l’agent occlusif s’arrête non loin du caecum, on devra chercher à le
refouler à travers la valvule de Bauhin, en particulier lors d’iléus alimentaire ou ascaridien, car, une
fois franchie la valvule, le transit dans le côlon et l’issue spontanée par les voies naturelles sont
presque assurés.

Les occlusions par compression du fait d’une tumeur de voisinage ne cèdent souvent qu’à

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Chirurgie digestive 126
l’ablation de celle-ci : hystérectomie pour fibrome calcifié, exérèse de tumeur mésentérique.

Les sténoses intestinales tumorales ou inflammatoires relèvent d’une résection intestinale avec
anastomose immédiate rétablissant la continuité. En fait, lorsque l’anse a gardé sa vitalité, cette
résection ne s’impose pas de façon absolue, et l’on peut préférer en occlusion aiguë, pour des motifs
techniques, des raisons de résistance générale, établir une dérivation interne par anastomose entre
l’anse sus-jacente et l’anse sous-jacente, ou entre le grêle et le côlon suivant la hauteur de la lésion.

Il est des cas où l’anse occluse a gardé toute sa vitalité, mais où l’obstacle est inenlevable :
magma inextricable d’anses agglutinées, groupées souvent autour d’un foyer inflammatoire, banal ou
tuberculeux; néoformation maligne du grêle inextirpable avec carcinose péritonéale, ascite et
importante réaction ganglionnaire. La solution la meilleure est ici encore la dérivation interne.

Il arrive parfois, en cas de lésions échelonnées, que deux courts circuits soient nécessaires.

Il est des cas où l’anse est sphacélée ou en imminence de sphacèle, peu importe alors que
l’obstacle puisse être ou non supprimé, puisqu’on ne peut conserver le segment d’intestin qui en est
porteur. Une réaction intestinale large est indispensable. Elle sera faite en tissus sains, bien irrigués, et
terminée par une anastomose rétablissant d’emblée la continuité. Suivant le degré de réaction
péritonéale (purulente ou putride) on pourra être amené à drainer simultanément la grande cavité et à y
laisser des antibiotiques après toilette méticuleuse. Il y aura toujours intérêt, à la fin des telles
interventions, à pratiquer une dilatation anale pour faciliter l’émission post-opératoire des gaz.

Autrefois, avant de fermer l’abdomen, la question de l’iléostomie complémentaire se discutait


fréquemment. Ses indications se sont singulièrement réduites depuis que l’on poursuit
systématiquement, pendant plusieurs jours après l’intervention, l’aspiration digestive.

TRAITEMENT DES OCCLUSIONS MECANIQUES DU GROS INTESTIN

Elles offrent souvent des problèmes moins urgents puisque, ici, l’occlusion est toujours
relativement basse et que, sur le côlon, l’obturation est plus fréquente que la strangulation.

1º Le diagnostic ferme de strangulation (volvulus du côlon pelvien et du caecum) est souvent


posé, car le tableau clinique et radiologique est très particulier. Il implique en principe, une décision
opératoire précoce et un abord large par laparotomie médiane. Dans le volvulus du côlon pelvien vu
tôt, certains auteurs préconisent cependant un traitement parachirurgical un peu spécial : l’évacuation
des matières et des gaz en rétention dans l’anse volvulée par introduction sous rectoscopie dans cette
anse d’une longue sonde poussée à travers l’orifice anal. Cet artifice, s’il réussit à affaisser l’anse et à
la détendre, permet d’envisager une colectomie secondaire à froid, sur un malade préparé par
antibiotiques.

Quand on intervient d’urgence, si l’anse est saine, la détorsion complétée ou non par colopéxie
peut suffire à droite, mais certains préfèrent, si les conditions générales sont satisfaisantes,
l’hémicolectomie droite d’emblée.

A gauche, la détorsion simple laisse en place un sac énorme qui a tellement tendance à se
volvuler à nouveau qu’on aura bien souvent avantage à en faire aussitôt la résection. Celle-ci sera
terminée en général par la mise à la peau en canon de fusil des deux extrémités coliques. La continuité
devra être rétablie dans un temps ultérieur, deux à trois mois après. Son rétablissement immédiat par
anastomose colo-colique d’emblée a pu être exécuté avec succès, mais n’est guère acceptable que si on
peut l’extrapéritoniser aisément.

Si l’anse est sphacélée, la résection immédiate est obligatoire : hémicolectomie droite pour les

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Chirurgie digestive 127
volvulus caeco-coliques, avec anastomose iléo-transverse d’emblée; colectomie gauche segmentaire à
la demande des lésions avec, ici, abouchement cutané systématique des deux extrémités de la zone
réséquée, pour les volvulus sigmoïdiens.

Il y a d’autres causes d’étranglement, beaucoup plus rares : invagination, incarcération. On leur


appliquera les mêmes principes généraux en se souvenant que, si une résection du grêle ou de
l’hémicôlon droit doit être terminée en règle par une anastomose immédiate, celles du côlon transverse
ou gauche doivent l’être habituellement par la mise à la peau des extrémités coliques en anus artificiel
temporaire.

2º Quand le diagnostic ferme d’obturation est posé (occlusion par cancer du gros intestin, par
exemple), il a été longtemps classique de répéter en leitmotiv, qu’il faut faire le minimum, c’est-à-dire,
par une incision pariétale latérale et limitée, souvent sous anesthésie locale, la dérivation en amont de
l’obstacle. Le choix était alors à faire suivant le siège de celui-ci, entre l’anus iliaque gauche
sigmoïdien, l’anus transverse droit ou gauche et l’anus caecal.

Il est admis aujourd’hui que cette chirurgie sans visibilité directe de la lésion expose à trop de
déboires pour qu’on puisse l’ériger en dogme formel. Elle expose en effet à méconnaître un
volvulus colique à symptomatologie clinique ou radiologique trompeuse, à méconnaitre une occlusion
du grêle associée à une authentique occlusion colique (anse jéjunale ou iléale adhérente et coudée au
contact d’un cancer du côlon), à choisir mal à propos, la place de la colostomie en ignorant
l’opérabilité de la lésion.

Des nuances multiples doivent donc être apportées dans le choix de la tactique à suivre en face
d’une occlusion colique par obturation. En premier lieu, l’étude attentive de la radiographie cherchera
à préciser si la rétention gazeuse est cantonnée au côlon ou reflue dans le grêle inférieur. Dans cette
dernière éventualité, il y a intérêt à placer d’emblée l’aspiration, car elle peut amener une amélioration
nette, voire la disparition nette, voire la disparition, des accidents si l’élément spasmodique surajouté
est important.

TRAITEMENT DES OCCLUSIONS FONCTIONNELLES

Le diagnostic de l’occlusion spasmodique pure n’est pratiquement jamais porté avant la


laparotomie; nous en avons vu l’aspect en zones de contractures étagées, souvent multiples. Aspect
variable d’un instant à l’autre d’ailleurs, puisque, en manipulant l’intestin, on voit souvent se dilater un
segment contracté, et vice versa. Il faut explorer avec soin tout le grêle et le côlon, vérifier l’intégrité
des mésos, s’assurer de l’absence de lésions rétro-péritonéales (hématome, tumeur). La gravité de tels
accidents ne doit pas être sous-estimée : s’il en est de bénins, il en est aussi de mortels lors d’une
première crise ou d’une rechute. On conseille de ne leur opposer ni l’iléostomie, ni la dérivation
interne, certains ont eu recours aux infiltrations splanchniques, mais on a fait remarquer l’illogisme de
cette conduite, attendu qu’en principe c’est l’hyperexcitation du pneumo-gastrique qui est en cause. Il
faut donc faire l’anesthésie directe du plexus solaire et recouvrir, dans les soins post-opératoires, aux
injections d’atropine combinées à l’aspiration continue et à la réhydratation.
Les occlusions paralytiques sont presque toujours des occlusions inflammatoires, provoquées
par l’existence, en un secteur de la cavité abdominale ou pelvienne, d’un foyer plus ou moins
circonscrit. C’est là un type d’occlusion très particulier où la décision thérapeutique est toute en
nuances.

En principe, l’urgence n’est pas extrême, et l’on cherchera tout d’abord à guérir l’occlusion par
l’aspiration duodénale et en agissant sur le foyer par les thérapeutiques antiphlogistiques (glace ou
chaleur), antibiothérapie, etc … Si un abcès paraît collecté, on l’ouvrira par la voie la plus directe, en
évitant d’inoculer la grande cavité. L’erreur, ici serait d’interpréter mal le mécanisme de l’occlusion,

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Chirurgie digestive 128
de vouloir libérer à tout prix les anses au contact du foyer inflammatoire et de la rompre.

Si le syndrome occlusif ne cède pas, on agira directement en principe à distance du foyer, soit
en pratiquant une dérivation externe (anus caecal ou colique, en cas d’occlusion du côlon), soit une
dérivation interne par anastomose iléo-iléale ou iléo-colique, en cas d’occlusion du grêle. Dans
certaines circonstances : foyer abcédé, sans doute refroidi, réduit de volume, provoquant une occlusion
mixte, plus mécanique que paralytique, la libération des anses agglutinées est à envisager, complétée
par une opération de Noble ou de Child Philips, associée à l’administration locale et générale
d’antibiotique, et peut donner de beaux succès.

TRAITEMENT DES OCCLUSIONS POST-OPERATOIRES

Très précoces, survenant le jour même ou le lendemain de l’intervention, ou très tardivement,


les occlusions post-opératoires sont pratiquement toujours mécaniques.

Ce sont essentiellement des occlusions par strangulation du grêle, et, comme telles, on doit les
traiter par laparotomie médiane et suivant les lésions par levée de l’obstacle, dérivation interne, ou
résection de l’anse occluse.

Lorsqu’on se trouve en présence d’un malade atteint d’une occlusion tardive itérative, ayant
déjà nécessité plusieurs interventions, l’hypothèse d’agglutination large accolant entre elles de
multiples anses doit être soulevée. Un loyal essai d’aspiration digestive est alors légitime. Son échec
conduit à l’intervention. On réalisera soit une anastomose interne, soit une complète libération
terminée, le cas échéant, par une opération de Noble ou de Child Philips.
Le gros problème particulier aux occlusions post-opératoires est celui posé par les occlusions
secondaires précoces, qui s’installent sournoisement après quelques jours de bien-être et l’émission
spontanée de quelques gaz.
Telles sont les données thérapeutiques qu’un chirurgien doit avoir à l’esprit en présence de
toute occlusion. Il arrive encore, il est vrai que l’on soit appelé auprès d’un malade au stade
d’occlusion terminale : météorisme considérable et douloureux au palper, pneumopéritoine sur les
films, pouls rapide à 140, oligurie extrême, vomissements fécaloïdes. Après la mise en oeuvre d’une
réanimation aussi énergique et brève que possible (transfusion intra-artérielle le cas échéant, continuée
pendant l’opération), il faut explorer par laparotomie large la cavité péritonéale. Elle contient souvent
alors, outre les anses occluses, du pus, voire des gaz et des matières. S’il y a rupture intestinale, l’anse
rompue devra être réséquée ou extériorisée selon le siège de la lésion grêle ou colique, et la cavité
péritonéale drainée après aspersion d’antibiotiques.

RESULTATS

Une récente statistique portant sur 1 100 cas a montré que la mortalité, qui, de 1935 à 1947,
oscillait entre 29 et 36 p. 100 est brusquement tombée à 15 p. 100, lors de l’aspiration digestive
systématique, puis à 11 p. 100, grâce au meilleur rétablissement de l’équilibre hydro-électrolytique.

Bien entendu, l’âge des malades, leur état général préalable entrent en jeu dans le pronostic, et
il faut souligner combien celui-ci est souvent meilleur chez les enfants, à poumons, reins et coeur
sains.

Il ne semble pas que la résection intestinale aggrave nettement par elle-même le pronostic.
Contrairement à ce qu’on a coutume de croire, c’est actuellement l’occlusion du gros intestin qui
compte la plus grande mortalité. Elle est en effet, dans plus de 80 p. 100 des cas, liée à l’évolution d’un
cancer et évolue chez des sujets souvent âgés, anémiques, dénutris, aisément exposés à des
complications cardio-circulatoires (phlébite), pulmonaires et rénales. Chez eux, la compensation
hydro-électrolytique est plus délicate : danger de surcharge, et la surveillance post-opératoire,

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Chirurgie digestive 129
rigoureuse, devra comporter l’étude particulière de la coagulation (taux de prothrombine et test à
l’héparine), commandant l’éventuelle administration des anticoagulants usuels.
Une des complications post-opératoires qui reste la plus fréquente est l’occlusion secondaire ou
persistante, comme si l’intervention première avait été sans effet. Elle pose un problème bien difficile,
et le choix de l’attitude à avoir vis-à-vis d’elle est des plus délicats.

Il peut, en effet, s’agir d’une occlusion mécanique soit par obstacle méconnu, soit récidivante
(volvulus, striction par brides réformées), ou d’une occlusion purement fonctionnelle. Cette dernière
dépend de deux causes : tantôt d’un déséquilibre hydro-électrolytique mal corrigé (méconnaissance
d’une hypokaliémie en particulier), tantôt d’une réaction péritonéale associée, plus ou moins franche,
plus ou moins diffuse, qui peut ne pas céder aux antibiotiques et même être masquée par eux.

C’est sur des nuances qu’il faudra se baser pour discerner ces différentes formes d’occlusion.

L’intérêt de la radiographie répétée à différents intervalles n’est pas niable.


On admet que la présence de niveaux liquides dans le grêle et la vacuité du côlon sont en faveur
d’une occlusion mécanique, que l’association aéro-iléale, aéro-colie, traduit plutôt une occlusion
paralytique. Mais il faut bien savoir que, lorsqu’un traitement médical post-opératoire, bien conduit,
échoue, on ne doit pas hésiter à réintervenir de nouveau.

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Chirurgie digestive 130

5. PATHOLOGIES CHIRURGICALES DE L’APPENDICE

1. Anatomie

2. Appendicite aiguë

3. Appendicite chronique

1. ANATOMIE

L’appendice est un diverticule de 5 à 10 cms situé à la base du caecum, 2,5cms en-dessous de


la valvule iléo-caecale. Les bandelettes du colon convergent vers la base de l’appendice. Cette
localisation du bas-fond caecal, dans la fosse iliaque droite, est cependant variable: caecum le plus
souvent pelvien chez la femme, caecum plus haut chez l’homme, quelquefois caecum haut situé
pratiquement sous le foie.

L’appendice lui-même peut prendre une disposition rétro-caecale ou intra-abdominale.


Chez le jeune, l’appendice est caractérisé par une concentration importante de follicules lymphoïdes.
Au-delà de 15 ans, il apparait une atrophie progressive du tissu lymphoïde en même temps qu’une
fibrose de la paroi de l’appendice, voire une obstruction progressive de sa lumière.

Le rôle physiologique de cet appendice est méconnu, il est probablement en relation avec la
richesse du tissu lymphoïde présent dans le jeune âge.
L’appendicectomie n’expose cependant à aucune affection notamment de type néoplasique.

La recherche de l’appendice peut être quelquefois difficile si l’incision est courte.

2. APPENDICITE AIGUE

Environ 7 % de l’ensemble des individus des pays industrialisés développent, à un moment ou


l’autre de leur vie, une appendicite. Cependant, chaque année, environ 150 à 200 appendicectomies
sont réalisées dans notre salle d'opération.

2.1. Pathogénie.

Trois fois sur quatre, l’appendicite est en relation avec une obstruction de la lumière
appendiculaire par une cicatrice fibreuse, par un stercholite, par une tumeur, des parasites ou un corps
étranger.
Dans les autres cas, c’est-à-dire une fois sur quatre, on découvre une hyperplasie lymphoïde de
la région, d’origine virale, bactérienne.
L’obstruction de la lumière appendiculaire, quelle que soit son origine, provoque une stase et une
infection des sécrétions muqueuses. La lumière se distend et provoque des thromboses au niveau de la
micro-vascularisation appendiculaire. Il s’en suit une nécrose et une perforation de la paroi
appendiculaire responsables d’une péritonite d’abord localisée et pouvant se généraliser.

2.2. Symptomatologie

-Douleurs abdominales, surtout dans la fosse iliaque droite


-Anoréxie, nausées, voire vomissements.
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-Sensibilité ou défense de la fosse iliaque droite
-Température modérée (37º5)
-Leucocytose.

Ce tableau idéal n’est pas toujours réalisé et il faut admettre que l’appendicite aiguë peut prendre
les manifestations les plus diverses. Il peut évoquer un tout autre problème abdominal ou, plus grave,
sous-estimé et évoluer vers une péritonite.
Le chirurgien est souvent consulté pour des enfants qui présentent des douleurs abdominales. Les
parents sont inquiets d’un problème appendiculaire et sollicitent très souvent un geste chirurgical
considéré comme bénin. Il faut savoir calmer l’appréhension des parents et ne poser une indication
d’appendicectomie qu’à bon escient.

Dans le doute, le moyen de diagnostic le plus certain est une anamnèse précise, un examen
complet qui sera répété avant de prendre la décision.

Appendicite typique : apparition dans la nuit ou le matin, d’une douleur persistante et continue
mais modérée au niveau de l’épigastre. Inconfort abdominal avec nausées et inappétence. Gênes
douloureuses lors des mouvements de la marche et des efforts de toux. Impression de ballonnement.
Un court épisode de diarrhée peut cependant survenir.

L’examen clinique démontre une sensibilité à la toux et un point électif douloureux dans la
fosse iliaque droite (point de Mac Burney). Il peut exister une douleur au rebond lors de la dépression
brutale. La péristaltique est normale ou légèrement réduite. La température est modérée à 37º5.

Appendicite rétro-caecale : l’appendice est situé derrière le caecum et remonte dans la gouttière
pariéto-colique droite. La symptomatologie abdominale est donc frustre. La douleur est surtout latérale
voire postérieure pouvant évoquer un problème de colique urétérale. Si l’appendice remonte très haut,
la symptomatologie peut évoquer un problème de cholécystite ou rénal, si dans la région du psoas,
psoïtisme (flexion antalgique de la cuisse droite).

Appendicite pelvienne : appendice intra-péritonéal et qui, par l’inflammation, tombe dans le


petit bassin. Les symptômes intestinaux (nausées, vomissements, diarrhée) sont plus marqués, une
symptomatologie pelvienne ou gynécologique peut survenir: faux besoins, mictions fréquentes. Le
toucher rectal ou vaginal sera douloureux.
Appendicite gauche : le caecum est en malrotation et se situe dans le flanc gauche ou est
mobile dans la cavité abdominale. La symptomatologie peut donc se situer dans la région médiane
voire à gauche du bas abdomen.
Appendicite de la grossesse: complication chirurgicale non obstétricale la plus fréquente de la
grossesse. Celle-ci n’expose pas la femme à une appendicite. Le diagnostic est cependant difficile car
l’utérus a refoulé le caecum du petit bassin et la position de cet appendice est incertaine.
La symptomatologie peut être mal interprétée et le risque est élevé de mortalité foetale (10 %)
par diagnostic tardif.
Appendicite du vieillard : les personnes âgées sont moins attentives à une symptomatologie
quelconque et temporisent souvent longtemps avant de consulter. Le cortège des symptômes habituels
est modéré et, enfin, l’affection est exceptionnelle au 3ème âge. Cette appendicite a donc un diagnostic
tardif et il est fréquent d’opérer ces vieillards à un stade de péritonite. La mortalité en est élevée.

2.3. Biologie.

La leucocytose doit être systématiquement recherchée. Se situe habituellement entre 10 et


15.000. On peut cependant voir une appendicite aiguë en voie de perforation avec 6.000 blancs. Au-
delà de 15.000 blancs, évoquer un autre diagnostic ou déjà, la survenue de complications de type
perforation.

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2.4. Radiologie.

Doit être utilisée mais elle ne posera pas le diagnostic d’appendicite. Elle permet d’exclure une
autre affection.
L’abdomen à blanc recherche un pneumo-péritoine ou des niveaux hydro-aériques.
L’échographie verra rarement l’appendice infecté mais permettra d’éliminer une lithiase
vésiculaire, une lésion gynécologique ou pelvienne.
L’urographie intra-veineuse sera pratiquée lorsqu’il y a un doute avec une affection urétérale.

2.5. Diagnostic différentiel.

L’appendicite aiguë est surtout fréquente chez l’enfant, particulièrement entre 7 et 20 ans. Le
diagnostic en est surtout difficile chez le nourrisson, l’enfant de moins de 5 ans et le vieillard.
Il faut également admettre un taux d’environ 20 % d’erreurs de diagnostic en excès, c’est-à-dire
de réaliser une appendicectomie inutile. Au-delà de ces taux, le chirurgien doit se poser quelques
questions, mais il est parfois préférable d’enlever un appendice normal que d’ignorer une appendicite
en voie de perforation.
C’est également pour ces raisons que certains chirurgiens plaident en faveur de l’appendicectomie de
principe ou de passage au cours d'une laparotomie.

Quelques affections susceptibles d’être confondues avec l’appendicite :

1º La gastro-entérite :

Les nausées, vomissements ou diarrhées prédominent. La douleur est diffuse dans tout l’abdomen et
surtout colicative.

2º L’adénite mésentérique du jeune enfant donne un tableau plus spectaculaire; pharyngite,


adénopathique cervicale et température élevée.

3º Problèmes gynécologiques :
- Rupture de follicule ovarien: douleur au milieu du cycle menstruel; douleurs spectaculaires
au départ et diminuant progressivement, symptômes gastro-intestinaux modérés ou absents.
- Salpingite aiguë : démarre souvent dans la semaine qui suit les règles; température élevée et
leucocytose. L’examen gynécologique et l’échographie peuvent apporter une information.
Suspecter la salpingite dans les jours ou semaines qui suivent la mise en place d’un stérilet.
- Torsion d’un kyste ovarien: douleurs importantes et précises. Echographie utile.
- Grossesse ectopique: l’anamnèse et la biologie peuvent apporter une infor-
mation ainsi que l’échographie.

4º Problèmes urologiques:

- Calcul urétéral: douleurs colicatives irradiées depuis le dos vers l’aine. Présence d’une
hématurie et l’urographie intra-veineuse peut aider au diagnostic.
- Pyélonéphrite: température très élevée et frisson fréquents.

5º Autres urgences chirurgicales :

L’ulcère perforé, la cholécystite aiguë, la pancréatite, la diverticulite sigmoïdienne,


l’obstruction intestinale, le diverticule de Meckel, la perforation colique peuvent simuler une
appendicite.
L’anamnèse et la réflexion, aidées de la clinique, permettront une différenciation.
Chaque chirurgien se souviendra cependant d’avoir, une fois dans sa vie, opéré pour appendicite aiguë

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et avoir dû réaliser une laparotomie à la recherche d’un autre diagnostic: ulcère perforé, cholécystite ou
sigmoïdite perforée.

6º Maladie de Crohn :

Les premières manifestations cliniques d’une maladie de Crohn peuvent évoquer un tableau
d’appendicite aiguë. Si le chirurgien découvre l’iléite spécifique d’une maladie de Crohn, il est souvent
conseillé de ne pas enlever l’appendice car cette ablation peut favoriser l’apparition d’un abcès ou
d’une fistule. Il est conseillé dans ces cas de laisser l’appendice en place et de démarrer le traitement
médical de la maladie de Crohn.

7º Crise d’acidocétose chez l’enfant corrigée par la prise de sucre.

2.6. Complications.

La perforation et péritonite: la symptomatologie persiste et s’accentue; la douleur diffuse vers


le bas-ventre puis vers l’abdomen. La température s’élève à 38,5 et plus. Des signes de péritonite
microbienne apparaissent. Cette perforation peut survenir rapidement en moins de 8 heures. Elle
concerne surtout une population en-dessous de 10 ans et au-dessus de 50 ans. Cette perforation peut
rester cloisonnée et limitée à la fosse iliaque droite par enkystement de la perforation par les anses
grêles, le grand épiploon ou un organe gynécologique.

Abcès appendiculaire: la perforation localisée de l’appendice conduit à la formation d’un abcès


limité par l'épiploon et les anses grêles. Ces abcès peuvent rester “quiescents” de nombreuses semaines
voire de nombreux mois. Une antibiothérapie, donnée par erreur, refroidira partiellement l’abcès et
postposera le problème. Certaines écoles ont proposé l’antibiothérapie de principe dans cette forme
d’appendicite; nous ne l’admettons pas et le traitement doit rester chirurgical.
Autres localisations abcédées: si l’appendicite est pelvienne, l’abcès se formera au niveau du
Douglas et peut créer une vaste collection pelvienne qui sera confondue, durant un certain temps, avec
un problème gynécologique, par exemple de type salpingite.
L’abcès sous-phrénique est exceptionnel et est le plus souvent un résidu d’une péritonite
généralisée.

L’abcès de paroi: apparaît souvent dans le postopératoire d’une appendicite perforée par
infection des plans musculaires et sous-cutanés. Signalons des cas exceptionnels de fistulisation d’un
abcès appendiculaire vers une trompe, vers la vessie ou le rectum.

2.7. Traitement.

A notre sens, le traitement doit toujours rester chirurgical.


Appendicectomie classique, courte incision dans la fosse iliaque droite, permettant d’extérioriser le
caecum et de réaliser l’ablation de l’appendice. Le pédicule vasculaire est ligaturé et le moignon de
l’appendice ligaturé. Le dernier mètre d’intestin grêle est toujours vérifié à la recherche d’un
diverticule de Meckel.

Chez la jeune fille ou la femme, on prône de plus en plus la laparoscopie. Elle permet en effet
de mieux vérifier la sphère gynécologique notamment du côté gauche. L’appendice peut être aisément
enlevé par laparoscopie. S’il y a perforation ou liquide septique dans l’abdomen, toujours réaliser un
drainage de la fosse iliaque droite.

Si appendicite perforée avec réaction péritonéale, préférer une laparotomie médiane qui
permettra, en plus de l’appendicectomie, de laver toute la cavité abdominale et d’éradiquer des foyers
d’abcéssion secondaires.

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Chirurgie digestive 134
Traitement médical :

Il n’y a pas, à notre sens, de traitement médical de l’appendicite. Eviter l’antibiothérapie


lorsqu’il y a doute diagnostique. Cette antibiothérapie peut camoufler le tableau clinique.

L’antibiothérapie ne sera prescrite que chez des patients opérés et qui ont une perforation, un
abcès ou une péritonite.

Le postopératoire de l’appendicectomie est en général aisé et permet la prise de liquides puis


d’aliments dans les 24 heures. A un stade plus avancé, notamment de péritonite, il faut considérer ces
patients comme étant à haut risques: nécessité d’un drainage gastrique, rééquilibration hydro-
électrolytique, liquidienne etc.

Morbidité – mortalité:

Affection bénigne en soi mais, chaque année, nous connaissons un accident dramatique sur
appendicite aiguë. Il survient, le plus souvent, sur un diagnostic tardif ou dans les complications d’une
péritonite mal drainée.
La morbidité est surtout liée à un abcès de paroi sur appendicite mal drainée.
Les accidents par brides ou adhérences peuvent survenir dans les mois qui suivent une
appendicite qui était compliquée et perforée.

3. APPENDICITE CHRONIQUE.

Douleurs abdominales chroniques, surtout de la fosse iliaque droite. Nombre de cliniciens


n’acceptent pas cette entité; il faut néanmoins admettre qu’un appendice peut être pathologique et
donne, épisodiquement, des poussées de congestion voire d’infection.
Le chirurgien est régulièrement consulté pour ce type de pathologie douloureuse chronique,
notamment chez l’enfant ou l’adolescent. Il faut savoir distinguer cette symptomatologie d’autres
affections: constipation, problèmes gynécologiques, colopathie fonctionnelle, problèmes urinaires.

Le diagnostic se fera davantage par exclusion: exploration de la voie biliaire à la recherche


d’une lithiase, urographie intra-veineuse, examen gynécologique, échographie du pelvis voire examen
par scanner de la cavité abdominale.

Nous recommandons l’examen baryté par lavement et par transit. Ces deux examens permettent
d’exclure une pathologie chronique de l’iléon terminal (Crohn) ou une iléite aspécifique ou une
pathologie colique.

Si l’appendice n’est pas injecté lors de ces examens, on peut vraissemblablement conclure qu’il
existe une pathologie obstructive, responsable de la symptomatologie. Dès lors, on est en droit de
proposer une appendicectomie à froid.

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6. DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT DES HEMORRAGIES DIGESTIVES

1. HEMORRAGIES DIGESTIVES HAUTES

Une hémorragie digestive d’origine haute peut se présenter soit sous la forme d’une
hématémèse: rejet de sang d’origine digestive par la bouche, soit sous la forme d’un meloena isolé:
émission par l’anus de sang digéré. Quelle que soit son abondance, une hémorragie digestive haute
peut évoluer spontanément, de façon favorable, ou au contraire vers l’aggravation et la mort, sans qu’il
soit possible au premier examen d’affirmer vers laquelle de ces deux directions évolutives s’engage le
malade. C’est pourquoi, une fois l’hémorragie digestive reconnue, l’hospitalisation du malade en
milieu spécialisé s’impose obligatoirement dans tous les cas, et cela quelle que soit l’apparence de son
état, ou l’abondance du saignement.

La conduite à tenir aura pour but de mettre en oeuvre d’une part, des mesures non spécifiques
de lutte contre le choc hémorragique, conditionnées alors par le diagnostic étiologique.

Appréciation de la spoliation sanguine

Critères cliniques

La quantité de sang émise est un sujet à des grossières erreurs. L’hypotension artérielle
constitue le signe le plus classique du choc mais peut être absente un certain temps dans les
hypovolémies dites compensées. Il ne faudra donc pas attendre ce signe pour entreprendre une
thérapeutique active; il est préférable d’apprécier la spoliation sanguine sur la tachycardie, la pâleur, la
soif et la chute de la diurèse horaire. Ces signes constituent les témoins cliniques les plus fidèles de
l’importance de la déplétion sanguine.

Critères biologiques

La numération globulaire et l’hématocrite sont bien sûr des tests plus précis. Cependant ils
présentent un inconvénient majeur car leur perturbation est souvent retardée de plusieurs heures par
rapport à l’épisode hémorragique.

La thérapeutique active devra donc être entreprise autant que possible avant l’apparition de leur
perturbation.

Compensation de la perte sanguine.

Les fractions déglobulisées de sang et les perfusats synthétiques de grosses molécules ne


constituent que des solutions de remplacement imparfaites ne devant être utilisées que dans les cas de
force majeure et/ou en attendant le groupage du malade qui aura été demandé dès son admission. Le
traitement est dominé par la transfusion sanguine après mise en place dans une grosse veine d’un
cathéter de calibre suffisant pour transfuser, si nécessaire, avec un débit important et sous contrôle de
la pression veineuse centrale. Ainsi la transfusion sanguine pourra être adaptée aux signes de choc et
ne comporter aucun risque de surcharge. Lorsque l’hypovolémie est corrigée, il faut essayer
d’apprécier l’arrêt ou la reprise de l’hémorragie. Pour cela il est nécessaire d’établir une feuille de
surveillance horaire du pouls, de la tension artérielle, de la pression veineuse centrale et de la diurèse.
On notera également toutes les 4 heures, le chiffre de l’hématocrite en sachant que 100cc de sang total
sont nécessaires pour remonter l’hématocrite de 1 point. En cas d’arrêt de l’hémorragie, les signes de
choc disparaissent sous transfusion et ne réapparaissent pas malgré l’arrêt de cette dernière. La sonde
gastrique mise en place systématiquement ne ramène plus de sang. Si l’hémorragie persiste ou
récidive, les signes de choc ne disparaissent pas sous transfusion bien conduite ou réapparaissent à
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Chirurgie digestive 136
l’arrêt de cette dernière, et la sonde gastrique ramène du sang.

Recherche de la lésion responsable de l’hémorragie.

Une fois le traitement de la déplétion sanguine mis en oeuvre de façon efficace, il est nécessaire
de rechercher l’étiologie de l’hémorragie.

Les causes des hémorragies digestives sont très nombreuses et variées. Le plus souvent les
éléments de l’interrogatoire et de l’examen clinique permettent d’envisager trois éventualités.
L’existence de signes d’éthylisme et d’hypertension portale avec sur le plan biologique une altération
des fonctions hépatiques, permet d’évoquer le diagnostic d’hémorragie par rupture de varices
oesophagiennes. Par contre, chez un malade présentant des antécédents douloureux épigastriques, le
diagnostic d’ulcère gastro-duodénal est plus probable. Enfin, chez un malade sans antécédent, chez
lequel l’interrogatoire retrouve la prise récente de médications agressives pour la muqueuse gastrique,
l’éventualité de lésions aiguës hémorragiques gastro-duodénales doit être envisagée.

En fait si les varices oesophagiennes, l’ulcère gastro-duodénal, et les lésions aiguës constituent
les trois grandes causes d’hémorragie digestive, l’anamnèse est loin d’être toujours fiable en raison de
la grande fréquence de leur association. Il faut donc avoir recours à des investigations complémentaires
et en particulier à la fibroscopie oeso-gastro-duodénale.

La gastroscopie effectuée en urgence va avoir pour but de préciser la persistance ou l’arrêt de


l’hémorragie, mais surtout le siège et le type de la lésion responsable. Elle peut être effectuée dans les
heures qui suivent l’hospitalisation au lit d’un malade non mobilisable tout en poursuivant une
surveillance très stricte. Dans les cas d’hypertension portale, elle va préciser si l’hémorragie est bien
provoquée par la rupture des varices oesophagiennes et non en rapport avec la présence d’un ulcère
dont la fréquence est particulièrement élevée chez le cirrhotique. La persistance de l’hémorragie par
rupture de varices oesophagiennes permettra d’envisager à bon escient la mise en place d’une sonde à
ballonnet unique avec traction (type sonde de Linton ou de Bertrand-Michel).
Dans les ulcères gastro-duodénaux, l’endoscopie apporte une notion sur le degré de l’urgence en
fonction du caractère térébrant ou non de l’ulcère et de sa situation: petite courbure gastrique avec
risque d’érosion de la coronaire stomachique, face postérieure
du bulbe avec risque d’érosion de la gastro-duodénale. Elle permet de visualiser des lésions aiguës
gastro-duodénales secondaires à la prise de médicaments, de faire le diagnostic de gastrite
hémorragique en montrant un moucheté purpurique, fugace, diffus à toute la muqueuse. Enfin elle
permet de reconnaître des causes plus rares telles le syndrome de Mallory-Weiss, les oesophagites
peptiques, les hernies hiatales, les tumeurs bénignes ou malignes.
Tous ces avantages ont relégué au deuxième plan le transit oeso-gastro-duodénal dont la
rentabilité diagnostique est très modérée.

L’artériographie n’est indiquée qu’en seconde intention après l’endoscopie et dans deux
situations bien précises, lorsque l’endoscopie met en évidence un écoulement de sang par la papille
(l’artériographie permet alors de préciser l’étiologie d’une hémobilie ou d’une wirsungorragie) ou
lorsque l’endoscopie n’a pas permis de poser un diagnostic lorsque l’hémorragie persiste.

Contrôle de l’hémorragie et traitement de la lésion

Le traitement étiologique et en particulier le recours à la chirurgie est conditionné par la


persistance ou l’arrêt de l’hémorragie, son abondance, son risque de récidive, l’âge et les affections
associées du patient.

Schématiquement, en cas de varices oesophagiennes, la mise en place d’une sonde de Linton,


de Blake Moore ou de Bertrand-Michel permet de réaliser momentanément une hémostase mécanique

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Chirurgie digestive 137
efficace. Cependant lors de son retrait, elle ne met pas le malade à l’abri d’une récidive hémorragique.
Dans ce cas, s’il s’agit d’un cirrhotique de moins de 60 ans,sans encéphalopathie porto-cave chronique
et qui a déjà saigné à plusieurs reprises, on peut envisager après étude phlébographique de l’axe
spléno-portal l’indication d’une anastomose posto-cave. Certaines thérapeutiques telles que la
vasopressine intra-veineuse ou intra-artérielle, la sclérose des varices oesophagiennes, l’embolisation
artérielle et la photo-coagulation par laser ne sont que des méthodes palliatives qui peuvent être
efficaces à court terme mais qui n’apportent pas une solution définitive.

En cas d’hémorragie ulcéreuse mis à part les lésions saignant en jet, les moyens médicaux
doivent être utilisés en première intention: cimétidine intra-veineuse à la dose de 200mg 5 fois par
jour, mélange hémostatique per os (Phosphalugel ® : 5 sachets, thrombase ® : 10 ampoules, Levophed
® : 4 ampoules, Capramol ® : 5 amp., sulfate d’atropine: ½ mg, le tout dans 1 litre d’eau froide).

Des moyens d’hémostases per-endoscopiques telles que l’électrocoagulation et la photo-


coagulation peuvent être utilisés dans certains cas avec succès. Lorsqu’il s’agit d’une hémorragie
ulcéreuse persistante (nécessitant plus de 10 flacons de sang par exemple) ou récidivante, l’indication
chirurgicale est alors envisagée. Elle peut aboutir à une suture de l’ulcère associée à une vagotomie, ou
à une gastrectomie plus ou moins élargie emportant l’ulcère gastrique.

En cas de lésions aiguës, gastro-duodénales et de gastrites hémorragiques, le traitement sera


aussi conservateur que possible, associant traitement anti-ulcéreux (cimétidine) et mélange
hémostatique. Chez les sujets à haut risque (voir estomac ) un traitement préventif par la cimétidine a
été proposé systématiquement.

NOTES PRATIQUES SUR LES HEMATEMESES

I. RAPPELS PHYSIOLOGIQUE ET CLINIQUE

1. Le terme d'hématémèse désigne toute hémorragie d'origine digestive extériorisée par voie haute.
Elle se traduit par un vomissement de sang reconnaissable à sa couleur rouge vif, rouge foncé ou
noirâtre et pouvant contenir des caillots et/ou être mêlé à de débris alimentaires.
2. Elle possède une valeur sémiologique considérable car elle traduit une lésion de la partie initiale
du tube digestif, située, en règle, en amont de l'angle duodéno-jéjunal: c'est-à-dire au niveau de
l'oesophage, de l'estomac et du duodénum.
3. La présence de sang dans le liquide gastrique possède la même signification physiopathologique
qu'une hématémèse; la pose d'une sonde gastrique doit être systématique devant:
- tout méléna, pour en affirmer éventuellement l'origine haute,
- tout collapsus (surtout hypovolémique),
pour en rechercher éventuellement la nature
hémorragique.

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Chirurgie digestive 138

PRINCIPALES CAUSES D'HEMATEMESE


Hypertension Blocs intra-hépatiques
portale (rupture Cirrhotiques Non cirrhotiques
De varices oeso- Alcoolique Schistosomiase hépatique
gastriques) Post-hépatique Fibrose hépatique congénitale
Hémochromatose, m. de Wilson Sclérose hépato-portale
"cirrhose" biliaire primitive (et hypertension portale essentielle)
"cirrhose" biliaire secondaire transformation nodulaire partielle du
cirrhose d'étiologie indéterminée foie
… hépatite alcoolique aiguë…
Blocs infra-hépatiques
Malformation congénitale de la veine porte, thromboses portales
- primitive et secondaire à un hépatome ou à une affection de voisinage
compression extrinsèque de la veine porte.
Blocs supra-hépatiques
Thromboses des veines sus hépatiques
- primitive (syndrome de Budd-Chiari) ou secondaire
maladie veino-occlusive.
Affections de Gastro-duodénite érosive hémorragique et/ou ulcère aigu:
l'estomac et du - primitive
duodénum - secondaire (médicaments, alcool, "stress"…)
ulcère chronique de Cruveilhier (gastrique ou duodénal)
tumeurs bénignes de l'estomac (schwanomme)
tumeurs malignes de l'estomac
ampullome vaterien
Affections Traumatisme du foie
hépato-biliaires Tumeurs du foie et des voies biliaires
(par Fissuration d'un anévrysme de l'artère hépatique dans la voie biliaire
l'intermédiaire
d'une
hémobilie)
Affections Pancréatite aiguë
pancréatiques Pancréatite chronique
Causes rares Maladies vasculaires
Maladie télangiectasique de Rendu-Osler, pseudo-xanthome élastique
(maladie de Gronblad-Strandberg), hémangiomatose…
Maladies de système
Périartérite noueuse, sclérodermie, amylose, sarcoïdose …
Hémopathies
Syndromes myéloprolifératifs (maladie de Vaquez), leucémie aiguë
Réticulosarcome, lymphosarcome, anémie de Biermer,
Purpuras thrombopéniques primitif et secondaire …

4. Les principales affections responsables d'hématémèse figurent dans le tableau ci-dessus. Mais les
étiologies les plus fréquemment retrouvées sont:
- les ruptures de varices oesophagiennes ou gastriques au cours des syndromes d'hypertension
portale,
- les gatro-duodénites érosives hémorragiques et/ou les ulcères aigus (notamment d'origine
médicamenteuse),
- les ulcères chroniques de Cruveilhier, gastriques ou duodénaux.

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Chirurgie digestive 139
5. Chez le cirrhotique, l'hématémèse n'est pas toujours due à une rupture de varices oesogastriques;
les gastro-duodénites érosives, hémorragiques, diffuses ou localisées, sont aussi fréquentes (30 à
50 % des malades); l'ulcère chronique de Cruveilhier (10 à 20 % des malades) ou le syndrome de
Mallory Weiss sont plus rarement en cause.
Chez les malades recevant un traitement anticoagulant, l'hématémèse révèle habituellement une
lésion préexistante du tube digestif à rechercher systématiquement.

II. Le praticien au chevet du malade

1. L'hématémèse doit toujours être considérée comme une urgence impérative


imposant l'hospitalisation immédiate du malade. En effet sa vie peut être
mise en jeu:
- soit immédiatement, du fait de l'abondance même du saignement initial,
- soit à court terme, du fait de la fréquence des récidives hémorragiques, dont le délai et
l'importance sont imprévisibles.

Dans la mesure du possible, cette hospitalisation devra être faite dans un centre spécialisé,
comportant une équipe permanente de médecins gastro-entérologues (réanimateurs, endoscopistes,
radiologues) et de chirurgiens digestifs, capables dans les délais les plus brefs, à la fois:
- de corriger par une réanimation adaptée les conséquences d'une spoliation sanguine
importante, et /ou de faire face à une hémorragie persistante ou récidivante,
- de conduire une enquête étiologique énergique afin qu'en un maximum de 6 à 12 heures, la
cause de l'hématémèse puisse être affirmée.

Actuellement, grâce à la réalisation en urgence des examens radiologiques et surtout


endoscopiques, le nombre des hématémèses "cryptogénétiques" est devenu inférieur à 5 %.

2 . La lettre de transfert adressée au service hospitalier devra indiquer:


- les éléments permettant à postériori, d'authentifier l'hématémèse et d'en apprécier le
retentissement immédiat;
- les antécédents digestifs du malade;
- la possibilité ou non d'une intoxication éthylique.
Les ordonnances des traitements en cours et les radiographies digestives
antérieures, mêmes anciennes, devront accompagner le malade.
L'administration d'un hémostatique n'a qu'une action "placebo", à l'exception
de l'administration de vitamine K (100 mg en I.V.) chez les malades qui
recevaient des antivitamines K.
3. En l'absence de collapsus circulatoire, le transport peut se faire en ambu-
lance normale vers le Centre Hospitalier le plus proche. Le transfert dans un
service spécialisé se fera éventuellement dans un deuxième temps, utilisant
un véhicule équipé pour la réanimation.

Pour éviter des accidents graves, un malade atteint d'insuffisance circulatoire aiguë - pression
artérielle (P.A) inférieure à 75 % des chiffres habituels - doit être transporté après mise en route d'une
réanimation circulatoire.

III.- A L'HOPITAL

Trois gestes sont indispensables dès l'admission du malade :

pose d'une sonde digestive par voie nasale (sonde duodénale de Levin,
charrière nº 18) et lavage de l'estomac à l'eau glacée.
En utilisant une séringue de 50 ml. Habituellement il faut 2 à 5 litres
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Chirurgie digestive 140
d'eau glacée pour que le liquide gastrique devienne clair;

pose d'une ou de deux voies veineuses


permettant à la fois la mesure de la pression veineuse centrale et la
transfusion rapide de sang. On utilise habituellement un cathéterisme
transcutané introduit de préférence au niveau de la veine basilique
(longueur 50 ou 75 cm), de la veine sous-clavière (longueur 30 cm) ou
de la veine fémorale (longueur 75 cm). La simple aiguille ou l'épicrâ-
nienne est à proscrire formellement.

détermination du groupe sanguin et demande prévisionnelle d'une


quantité minimum de sang iso-groupe à transfuser immédiatement ou à
tenir en réserve (en règle 1500 à 2000 ml). La mesure du taux
d'hémoglobine (ou de l'hématocrite ou la numération érythrocytaire)
sera également faite. Il est indispensable de pouvoir disposer d'un
appareil permettant la transfusion accélérée de sang (pompe électrique
à galets ou, à la rigueur, tubulure à débit rapide). Tant que l'on ne
dispose pas de sang iso-groupe des colloïdes artificiels pourront être
perfusés.

Ces gestes faits, il reste à :

Affirmer l'origine digestive du saignement.

- la méconnaissance de ce problème expose à des erreurs lourdes de conséquences. Le sang


rejeté au cours des efforts de vomissement et/ou présent dans l'estomac peut avoir une origine
extra-digestive; sang dégluti, principalement au décours d'une épistaxis, plus rarement d'une
hémorragie bucco-pharyngée voire d'une hémoptysie;
- l'interrogatoire, précisant les circonstances exactes de l'accident et l'examen systématique des
fosses nasales de la cavité buccale et des champs pulmonaires doivent permettre de résoudre
ce problème.

Evaluer l'importance du saignement

Il n'est pas possible de se fonder sur le volume de sang rejeté, car ce


faisant, on néglige le sang éliminé par voie intestinale;

L'existence des manifestations générales (pâleur, sueurs abondantes, soif vive, impossibilité de
rester assis) et/ou d'anomalies du pouls (accéléré et filant) et/ou d'anomalies de la pression
artérielle (PA): maxima abaissée et différentielle pincée, sont habituellement l'indice d'un
saignement important (40 % au moins de la masse sanguine chez un sujet jeune ayant saigné
brutalement).

Mais pour une spolliation sanguine identique, le retentissement circulatoire est fonction:
- de la vitesse de production de l'hémorragie (d'autant plus marqué que le saignement est plus
rapide)
- du terrain, c'est-à-dire, de l'âge et de l'état vasculaire (d'autant plus important qu'il s'agit d'un
sujet âgé et athéroscléreux).

Le taux d'hémoglobine (ou l'hématocrite ou la numération érythrocytaire)


est un bon élément d'appréciation de l'intenstié du saignement.
Toutefois, dans les premières heures d'une hémorragie, même importante, il n'est que peu
diminué car l'hémodilution ne s'est pas encore produite.
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Chirurgie digestive 141

En pratique, pour l'importance et surtout la persistance du saignement, on se fonde sur


l'évolution de la PA, après transfusion sanguine.
La transfusion rapide (15 ml/min) de 2000 à 3000 ml de sang à des malades ayant saigné
massivement, mais dont l'hémorragie est stoppée, entraîne le retour à la normale des chiffres de
PA et du pouls et ce, de façon stable.

En l'absence de correction de ces paramètres (à fortiori, en cas d'aggravation), on peut conclure


à la persistance ou à la reprise du saignement dont peuvent également témoigner:
- l'instabilité et/ou l'effondrement de la pression veineuse centrale,
- la coloration du liquide de lavage gastrique.

Première éventualité

Liquide gastrique clair,


P.A. stable.

1. Reconnaître la cause de l'hématémèse

Devient le problème primordial. Il doit être résolu en plusieurs étapes, se succèdant dans un ordre
rigoureux et avec le maximum de célérité:
- interrogatoire,
- examen clinique,
- examens biologiques
- examen endoscopique,
- examen radiologique.

Interrogatoire du malade (et/ou de son entourage)

Circonstances de survenue de l'hématémèse:


- prise récente de médicaments (acide acétyl-salicylique, corticoïdes, phénylbutazone,
indométacine, réserpine…) ou de boissons alcoolisées,
- troubles digestifs ayant précédé l'hématémèse: épigastralgies, vomissements répétés
- autres syndromes hémorragiques (purpura, épistaxis, hématurie…)

Antécédents
- hémorragies digestives antérieures,
- antécédents cliniques pouvant évoquer un ulcère (syndrome douloureux périodique) ou une
cirrhose (éthylisme),
- dossiers radiologiques digestifs antérieurs,
- antécédents personnels et familiaux d'affections hémorragiques (épistaxis, en particulier).

Examen clinique

Recherche d'une splénomégalie

Recherche d'une cirrhose :


- taille du foie et surtout, caractère de son bord inférieur,
- signes témoignant d'une insuffisance hépato-cellulaire (subictère, angiomes stellaires, lame
d'ascite),

Recherche de lésions cutanées et/ou muqueuses pouvant évoquer une malformation vasculaire
(télangiectasie, angiomes, …)
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Chirurgie digestive 142
Examens biologiques

Leur apport est rarement décisif, mais il est toutefois souhaitable:

d'éliminer une anomalie majeure de l'hémostase (en urgence, par la mesure du temps de Quick, du
fibrinogène et par la numération des plaquettes; ultérieurement, par une étude complète de la
coagulation);

de rechercher une hyperammoniémie artérielle


(en cas de méléna associé) en faveur d'une cirrhode, sans préjuger toutefois du mode de
saignement (rupture de varices, gastrite érosive, ulcère chronique).

Examen endoscopique

Il est pratiquement toujours possible et sans danger depuis que l'on dispose d'appareils souples et
orientables (fibroscopes) qui permettent d'explorer la totalité de l'oesophage, de l'estomac et le
bulbe duodénal.

L'endoscopie doit être pratiquée dans les premières 24 heures pour ne pas méconnaître certaines
gastrites hémorragiques fugaces et toujours avant l'examen radiologique, pour ne pas être gêné par
la présence de baryte dans l'estomac.

L'endoscopie permet :

- de voir directement la lésion.


- d'en préciser la nature et le siège (bien que le repérage topographique soit quelquefois
difficile),
- d'en affirmer le caractère hémorragique (lorsqu'il existe des lésions associées telles des varices
oesophagiennes et une gastrite érosive ou un ulcère chronique),

En outre,

- certaines lésions ne sont décélables qu'en endoscopie (gastrite érosive, ulcère aigu).
- certains malades ne peuvent bénéficier d'autres explorations (polytraumatisés, brûlés, …)

Les conditions nécessaires à sa réalisation sont les suivantes :


- la réanimation transfusionnelle doit avoir été mise en route,
- le liquide gastrique doit être redevenu clair,
- le malade doit être parfaitement coopérant (une encéphalopathie hépatique même débutante
doit faire surseoir l'examen).

Examen radiologique

Il exige les mêmes conditions que l'examen endoscopique, en particulier un état circulatoire
parfaitement stable.
On doit en règle attendre 4 à 6 heures après l'endoscopie pour éviter les fausses routes
bronchiques, dues à la persistance de l'anesthésie de voies digestives supérieures.

L'enquête radiologique sera guidée par les données de l'endoscopie, mais le contrôle scopique de
la progression de la bande doit permettre à tout moment de déceler une anomalie qui aurait
précédemment été méconnue.

Le premier cliché sera un cliché sans préparation afin :


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Chirurgie digestive 143
- de choisir les constantes et,
- d'éliminer un pneumopéritoine (l'association d'une hémorragie et d'une perforation ulcéreuse
est rare mais possible).

L'examen débutera en station verticale et sera constamment surveillé sur amplificateur de


brillance. Les clichés seront pris, d'abord en couche mince, puis en réplétion sous diverses
incidences avec compression duodénale et, au besoin, après modificateurs du comportement.
Les régions ainsi explorées sont le bulbe, le cadre duodénal, la petite courbure, les faces de
l'estomac et la région cardio tubérositaire. L'examen sera poursuivi en décubitus dorsal ce qui
permet l'étude des anomalies du bas oesophage, de malformations cardio-tubérositaires et du
reflux gastro-oesophagien.

2. Quel que soit le mécanisme responsable, la conduite est identique si le liquide gastrique reste
clair et la P.A,. stable.

Durant les premières 48 heures, la sonde digestive est laissée en place et le liquide gastrique
régulièrement vérifié. La voie veineuse est également conservée.

La PA et la fréquence cardiaque sont fréquemment contrôlées.


L'administration par la sonde digestive de pansements gastriques et d'antisécrétoires (atropine) est
habituellement conseillée.

Au bout de 48 heures, l'alimentation est reprise.


Le taux d'hémoglobine sera régulièrement contrôlé la première semaine.

Habituellement, les hématémèses des gastrites érosives et/ou des ulcères aigus d'origine
médicamenteuse, ne récidivent pas et les lésions endoscopiques disparaissent rapidement (1 à 4
jours).

En cas de reprise du saignement, il est conseillé d'intervenir car on découvre fréquemment une
artériole en position anormale dans la sous-muqueuse et saignant en jet (ulcération simple de
Dieulafoy). L'hémostase est facile à assurer par la suture ou l'exérèse isolée de la lésion, à laquelle
on associe parfois une vagotomie avec pyloroplastie.

L'ulcère de Cruveilhier sera toujours médicalement traité lorsqu'il est de découverte récente
chez un adulte jeune. En révanche, lorsque l'ulcère est connu de longue date et/ou survient chez un
sujet âgé, un traitement chirurgical peut parfois être envisagé à distance de l'épisode
hémorragique.

En cas de récidive hémorragique, l'indication opératoire est justifiée: une gastrectomie subtotale
est habituellement pratiquée en cas d'ulcère gastrique, mais s'il s'agit d'une localisation duodénale,
de nombreux auteurs préfèrent réaliser une exérèse de l'ulcère avec vagotomie et pyloroplastie.

La rupture de varices oesogastriques pose le problème d'une éventuelle anastomose porto-cave,


à distance de l'accident hémorragique:
- chez le cirrhotique, les études contrôlées ne semblent pas avoir démontré que cette
intervention prolonge de façon significative la survie des malades, bien qu'elle supprime
pratiquement le risque de récidive hémorragique;
en cas d'hypertension portale non cirrhotique (rare) l'indication à distance d'un shunt porto-
cave est, en revanche, habituellement justifiée.

En cas de récidive immédiate, un tamponnement par sonde de Sengstaken-Blakemore ou de


Linton-Warren doit être mis en place.
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Chirurgie digestive 144

Deuxième éventualité :

Liquide gastrique sanglant (malgré le lavage à l'eau glacée), et/ou P.A. instable (malgré les
transfusions sanguines).

Dans cete situation de pronostic grave, on ne peut pas pratiquer d'examens endoscopique et/ou
radiologique. Le problème le plus urgent est d'obtenir l'arrêt du saignement.

1. S'il s'agit vraissemblablement d'un cirrhotique, on doit mettre en place un tamponnement


oesophagien ou oeso-gastrique dans l'éventualité d'une rupture de varices (environ 30 à 50 % des
hématémèses cirrhotiques):

Soit par sonde de Sengstaken-Blakemore comportant deux ballonnets. Cette sonde est
introduite par voie nasale. Lorsqu'elle est parvenue dans l'estomac, 60 à 100 ml d'air (jamais de
liquide) sont injectés dans le ballonnet inférieur et une traction est exercée afin de bloquer ce
ballonnet au niveau du cardia; la sonde est alors solidement fixée de manière que la traction ne
puisse se relâcher.
Puis, on introduit dans le ballonnet supérieur (oesophagien) la quantité d'air nécessaire pour
qu'il y règne une pression d'environ 50 mm Hg (60 à 80 ml d'air suffisent habituellement). La
sonde de Sengstaken-Blakemore agit par compression directe des varices par le ballonnet
oesophagien.

Elle est inefficace en cas de varice cardiale rompue.


Sa mise en position correcte doit toujours être vérifiée radiologiquement.

Soit par sonde de Linton-Warren comportant un ballonnet unique et volumineux. Cette sonde
est introduite comme la précédente. Une fois parvenue dans l'estomac, 500 ml d'air environ
sont injectés dans le ballonnet.

Puis, en tirant la sonde, on bloque ce ballonnet au niveau du cardia:


La sonde de Linton-Warren agit indirectement en comprimant les anastomoses alimentant les
varices oesophagiennes et directement en comprimant les varices cardiales.

2. En l'absence de cirrhose ou en cas d'échec du tamponnement chez les cirrhotiques, on a récemment


proposé de perfuser, dans le territoire artériel correspondant au siège du saignement, une solution
contenant un puissant vaso-constricteur (vasopressine ou octapressine).

Dans un premier temps, on réalise une artériographie sélective coeliaque et/ou mésentérique
supérieure (selon la technique de Seldinger).

L'extravasation du produit de contraste permet de repérer le siège du saignement.

Par le cathéter laissé en place (et, éventuellement, poussé dans une position encore plus
sélective), on débute une perfusion continue de vasopressine, à la dose de 0,2 à 0,5 u/min. L'arrêt
du saignement, contrôlé sur de nombreux clichés artériographiques, est habituellement obtenu en
20 minutes. La perfusion est généralement maintenue pendant 12 à 24 heures; elle est
éventuellement reprise en cas de récidive hémorragique, bien qu'il soit alors préférable de confier
le malade au chirurgien.

La perfusion intra-veineuse de vasopressine avait été initialement proposée (20 unités de


vasopressine dans 100 ml de sérum glucosé à 5 % à perfuser en 10 à 40 min).

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Chirurgie digestive 145
Mais la survenue d'un certain nombre de décès par vaso constriction coronarienne avait conduit à
déconseiller cette voie d'administration.
Ce fait est actuellement contesté.

3. En cas d'échec ou d'impossibilité des deux méthodes précédentes, le seul recours est la laparotomie
exploratrice d'urgence. Les risque en sont considérables, puisque l'on doit confier au chirurgien un
malade en état circulatoire critique et avec tous les aléas d'une exploration per-opératoire gênée par
la persistance du saignement.
De telles situations dramatiques correspondent fréquemment soit à l'érosion d'une grosse artère par
un volumineux ulcère "calleux", soit à la rupture de varices oesocardiales échappant au
tamponnement de la sonde de Blakemore ou de Warren. Même si le chirurgien parvient à réaliser
l'hémostase, le pronostic immédiat reste grave, compte tenu de la fréquence des complications
post-opératoires immédiates; ainsi la mortalité des malades ayant subi une anastomose porto-cave
en urgence, dépasse 50 % dans le mois suivant l'intervention.

2. LES HEMORRAGIES DIGESTIVES BASSES

Lorsqu'un individu passe du sang rouge au niveau des selles, celui-ci peut prendre origine dans
n'importe quel endroit depuis l'estomac jusqu'à l'anus car, lorsque le transit est accéléré, du sang
produit en grande quantité au niveau d'un ulcère duodénal, par exemple, peut arriver jusqu'à l'anus
sans avoir été digéré. Lorsque le saignement rouge apparaît en-dehors de conditions de choc
hémogénique (autrement dit quand il n'y a pas de perte aiguë importante de sang), la présence de
sang rouge sur les selles doit toujours faire suspecter une lésion au niveau du côlon et cette lésion
est, à parts égales un cancer colique, soit une maladie diverticulaire, soit une angiodysplasie;
l'ulcère solitaire du rectum, la rectocolite hémorragique et la colite ischémique sont d'autres causes
de rectorragies.

Depuis un certain nombre d'années, nous voyons apparaître d'autres causes liées à des
thérapeutiques lourdes. C'est ainsi que des rectorragies peuvent être la conséquence de troubles de
la coagulation, spontanés ou induits, de lésions post-radiques ou encore de toxicité liée à une
chimiothérapie.

Le tableau qui va suivre vous montre la façon pratique de procéder en face d'une hémorragie basse.

Mise en place d'une sang


Sonde gastrique

Pas de sang--------------------------------------> Origine de l'hémorragie


dans la partie haute
de l'intestin grêle ou
de l'estomac-duodénum

Anuscopie et On trouve un endroit


Colonoscopie de saignement:
Traitement approprié

Le sang vient Le saignement cesse


d'en haut

Le saignement Colonoscopie
continue
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Chirurgie digestive 146

Angiographie On trouve l'endroit de


Saignement

Négatif Traitement spécifique

Colonoscopie Le saignement persiste

Laparotomie

Ou réapparaît

Pas de site de
saignement mis
en évidence

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Chirurgie digestive 147
CHAPITRE III : PATHOLOGIES CHIRURGICALES REGIONALES
I. Le péritoine et sa pathologie
1. Physiopathologie du péritoine
2. Les adhérences

II. L'oesophage
1. Notions générales sur l'anatomie, l'histologie et la physiologie de l'oesophage
2. Pathologies:
- Cancer de l'oesophage
- Reflux gastro oesophagien
- Oesophagite
- Hernies hiatales
- Mégaoesophage
- Maladies rares et syndromes à nom propre

III. L'estomac - duodénum


- Rappels
- Explorations fonctionnelles gastriques
- Maladies associées au reflux
- Maladies ulcéreuses gastroduodénales
- Hypergastrinémies
- Gastrites aiguës, gastrites hémorragiques et lésions aiguës hémorragiques
- Pathologie gastroduodénale iatrogène
- Tumeurs gastriques

IV. L'intestin grêle


- Ischémie intestinale chronique
- Infarctus du mésentère
- Obstruction de l'intestin grele
- Affections inflammatoires en dehors du Crohn
- Ischémie intrestinale aigue
- Fistules intestinales greles
- Tumeurs de l'intestin

V. Les voies biliaires


- Rappels anatomo-physiologiques
- Moyens de diagnostie des voies biliaires
- Lithiase biliaire
- Angiocholite

VI. Le foie
- Traumatismes
- Abcès

VII. Le pancréas et la rate


- Pancréas:
Malformations congénitales
La pancréatite
- La rate
Physiologie
Splénectomie

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Chirurgie digestive 148

VIII. Le côlon - rectum


- Cancer du côlon
- Cancer de l'ampoule rectale
- Prolapsus rectal
- Diverticules du côlon

IX. La chirurgie des hypertensions portales

X. La proctologie
- Semiologie protologique
- Hémorroides
- Prurit anal et dermite péri-anale
- Maladie pilonidale
- Syphilis
- Anorictites sexuelles transmissibles
- Fissure anale

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Chirurgie digestive 149

1. LE PERITOINE ET SA PATHOLOGIE

1. PHYSIOPATHOLOGIE DU PERITOINE

Péritonisation - Drainage

Le péritoine est une membrane séreuse tapissant la paroi de la cavité abdominale et recouvrant
totalement ou partiellement les viscères qui y sont contenus. Entre ses deux feuillets se trouve une
cavité virtuelle: la cavité péritonéale.

Cette importante séreuse occupe une place importante en pathologie abdominale.


- sa grande étendue, entre 1,7 et 2 m2, donne d'emblée aux différentes agressions: chimiques,
infectieuses, mécaniques, un rétentissement important qui perturbe l'équilibre hémodynamique de
l'organisme;
- son pouvoir de résorption en fait une ligne de défense capitale vis-à-vis de toute infection péritonéale,
tandis que ses capacités de plasticité permettent au chirurgien de réaliser les différentes interventions
de chirurgie viscérale.

Physiopathologie et fonctionnement du péritoine

STRUCTURE:

Comme toute séreuse, le péritoine est constitué par un mésothélium reposant sur une couche de
tissu conjonctif mince ou lamina propria. Le mésothélium est formé par une couche de cellules aplaties
à contour polygonal reposant sur une membrane basale qui est au contact immédiat du stroma
conjonctif.

Au microscope électronique, ces cellules apparaissent pauvres en mitochondries avec un


système ergastoplasmique peu développé et présentant deux caractères particuliers:
- des microvillosités consituées par des évaginations cytoplasmiques hautes de 0,8 micron et
larges de 0,1 micron soutenues par des filaments centraux; ces villosités plongent dans la cavité
péritonéale et sont l'équivalent de la bordure en brosse des cellules intestinales;
- des vésicules de pinocytose abondantes et souvent confluentes, qui occupent la plus grande
partie du cytoplasme tout en prédominant au niveau de la base des microvillosités; ces
vésicules s'ouvrent soit vers la cavité péritonéale, soit vers le pôle basal de la cellule.
Les jonctions cellulaires ne sont pas occlusives, mais discontinues, ménageant entre deux
cellules contiguës un espace d'environ 40 angströms dont les dimensions varient en fonction des
conditions physiologiques ou pathologiques.
Le stroma conjonctif sous-cellulaire contient les éléments vasculaires, lymphatiques et nerveux.
Son épaisseur varie selon les endroits, c'est ainsi qu'au niveau des mésos les couches cellulaires du
mésothélium apparaissent pratiquement accolées. L'innervation du péritoine pariétal dépend des fibres
sensitives rachidiennes, tandis que celle du péritoine viscéral dépend des voies sympathiques. Cette
innervation est irrégulière, très riche en certaines zones de perception sensitive et de phénomènes
réflexes. Il en est ainsi du cul-de-sac de Douglas, du péritoine pelvien,…

2. LE PERITOINE ET SA PATHOLOGIE

Problème des adhérences

Chaque fois que la séreuse péritonéale est traumatisée, des adhérences vont se former. Il s’agit
d’un mécanisme de défense locale très important qui a pour objectif de limiter les conséquences de
l’agression et de contenir l’extension d’un éventuel foyer infectieux.
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Chirurgie digestive 150

Lorsque la séreuse est traumatisée, les mastocytes péritonéaux vont libérer de l’histamine et
d’autres “facteurs de perméabilité”, tels des nucléosides et des polypeptides qui vont entraîner une
augmentation de la perméabilité vasculaire, principalement au niveau des petites veines et la libération
dans la cavité péritonéale d’un plasma riche en fibrinogène. Comme les cellules mésothéliales lésées
vont également libérer de la thromboplastine, le fibrinogène sera transformé en fibrine. La séreuse
péritonéale a une activité fibrinolytique due à la présence dans les cellules mésothéliales et sous-
mésothéliales d’un activateur de plasminogène. Ainsi, les dépôts de fibrine résultant de l’agression
péritonéale sont rapidement soumis à une fibrinolyse.

Malgré le fait que les cellules mésothéliales qui régénèrent aient des propriétés fibrinolytiques
augmentées, tout traumatisme de la séreuse péritonéale va dans un premier temps entraîner une
dépression de cette activité fibrinolytique. C’est cette dépression qui permet la persistance des
adhérences fibreuses jusqu’à ce que celles-ci soient colonisées par des fibroblastes et transformées en
adhérences fibreuses. La présence de sang frais dans la cavité péritonéale favorise la formation des
adhérences vraissemblablement en augmentant la quantité de fibrine formée.

Prévention des adhérences

La prévention des adhérences péritonéales postopératoires a suscité un nombre important de


travaux tant cliniques qu’expérimentaux. La prévention des adhérences péritonéales doit être envisagée
selon quatre modalités différentes:
- prévention des dépôts de fibrine;
- ablation des dépôts de fibrines de la cavité péritonéale;
- dissociations “mécaniques” des anses grêles;
- inhibition de la prolifération fibroblastique.

Prévention des dépôts de fibrine

Toutes les variétés d'anticoagulants ont été utilisées afin d'éviter la survenue de dépôts de
fibrine. Les différents travaux cliniques et/ou expérimentaux ont montré leur peu de valeur et surtout
ont souligné le risque d'hémorragie postopératoire, voire de décès survenus après administration
intrapéritonéale d'héparine.

Ablation des dépôts fibrineux

L'étape initiale de la formation des adhérences semble être l'adhésion des anses grêles entre
elles due à un exsudat de fibrine. Il a semblé donc logique d'essayer de prévenir la formation de ces
adhérences, par l'ablation de cet exsudat fibrineux. Différents types de lavages utilisant des solutions
salines ou des macromolécules (Dextran ®) ont été utilisés, mais leur rapidité d'absorption limite leur
efficacité. Des enzymes telles que la pepsine ou la trypsine ont été employées avec des résultats
variables et souvent contradictoires. Plus intéressant semble être l'emploi d'agents fibrinolytiques tels
que la streptokinase ou l'urokinase. Enfin, une objection théorique à l'usage des agents fibrinolytiques
semble être la possibilité pour ces produits d'entraîner un retard de cicatrisation et/ou d'être
responsables d'hémorragie. En fait, ces différentes complications n'ont jamais été observées en
pathologie expérimentale.

Dissociations "mécaniques" des anses grêles

En 1982, Ellis propose, pour éviter un contact prolongé des anses grêles entre elles, la
distension de la cavité abdominale par insufflation d'oxygène, ou l'administration de prostigmine de
façon à augmenter le péristaltisme intestinal. L'utilisation de la noxytiolime , si elle n'évite pas

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Chirurgie digestive 151
totalement la survenue des adhérences, permet d'en diminuer le nombre et l'importance, les adhérences
étant alors plus fines, plus facilement clivables et nos vascularisées.

Inhibition de l'activité fibroblastique

Des antihistaminiques, des stéroïdes et des agents cytotoxiques ont été utilisés pour inhiber la
prolifération fibroblastique. Les différentes substances entrainent indubitablement, à haute dose, une
inhibition de l'activité fibroblastique, mais cette action s'accompagne malheureusement d'un effet
délétère sur les phénomènes de cicatrisation.
En conclusion, le problème de la prévention des adhérences péritonéales postopératoires
demeure et aucune drogue et/ou technique n'a jusqu'à présent fait la preuve de son efficacité.

Réactions péritonéales à une infection

Tout stimulus inflammatoire entraine immédiatement une vaso-dilatation et une augmentation


de la perméabilité des vaisseaux sous-péritonéaux provoquées par une libération d'histamine et de
prostaglandine à partir des mastocytes et macrophages. Cela est suivi par une exsudation de grandes
quantités de liquides riches en complément, immoglobuline, facteurs de coagulation et fibrinogène.
Durant les premières 4 à 6 heures qui font suite à une infection, l'on constate un afflux important de
neutrophiles dû essentiellement à la libération de leucotriène B4 à partir des macrophages, des
mastocytes et des neutrophiles eux-mêmes. Tout ceci aboutit à la constitution d'un milieu
inflammatoire, dans lequel les cellules phagocytaires pourront travailler et contrôler l'infection.
Dans le déroulement d'une péritonite bactérienne, trois mécanismes majeurs interviennent très
rapidement pour nettoyer la cavité péritonéale: les lymphatiques diaphragmatiques, les macrophages
péritonéaux, l'afflux de neutrophiles. Le rôle des lymphatiques diaphragmatiques et des macrophages
représente la première ligne de défense.
Après contact avec un stimulus inflammatoire, les stomatas diaphragmatiques s'élargissent
rapidement du fait de la rétraction des cellules mésothéliales. Cette augmentation de la taille des
stomatas qui persiste environ 3 jours va favoriser le passage des bactéries. Les lymphatiques
diaphragmatiques jouent un rôle important dans la clairance bactérienne et c'est ainsi que l'on retrouve
des bactéries dans le canal thoracique au bout de 6 minutes et dans le sang au bout de 30 minutes.
Dans les premières phases de la péritonite, l'absorption diaphragmatique a un effet négatif sur
les conséquences de la péritonite car elle permet rapidement le passage des bactéries vers la
circulation.
L'afflux des polynucléaires neutrophiles est indépendant de l'importance de l'inoculation
bactérienne que celle-ci soit faite de bactéries vivantes ou mortes. Cette constatation suggère que
l'afflux des neutrophiles répond à la loi du tout ou rien, et que cette ligne de défense est de ce fait
insuffisante en présence d'une contamination bactérienne trop importante qui nécessite alors la mise en
oeuvre d'autres mécanismes de défense.
On peut schématiser la réponse du péritoine à une agression infectieuse de la manière suivante.
- La première ligne de défense est représentée par les lymphatiques diaphragmatiques. Les
mouvements du diaphragme vont provoquer une circulation ascendante du contenu péritonéal pour
l'amener au contact du péritoine diaphragmatique, dont la structure particulière permet un rapide
passage dans les lymphatiques. Les microbes passent ensuite dans la circulation générale où ils
vont être détruits par les mécanismes de défense systémique.
- Une deuxième ligne de défense est représentée par l'afflux de polynucléaires, de macrophages,
ainsi que par l'exsudation de substances qui favorisent la phagocytose et la destruction des
bactéries (opsonine, anticorps, compléments). Ces différentes substances sont également
responsables d'une vaso-dilatation et d'une augmentation de la perméabilité vasculaire.
- Une troisième ligne de défense est représentée par la localisation des phénomènes inflammatoires à
l'apparition d'adhérences formées par la transformation du fibrinogène en fibrine.

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Chirurgie digestive 152

Agression péritonéale

Cellules mésothéliales Cellules mésothéliales Cellules mésothéliales

Blocage

Libération d'histamine,
Sérotonine… Thromboplastine Activateur

Augmentation de la perméabilité Thrombine Prothrombine Plasmine Plasminogène


des veinules mésothéliales

Exsudation de substances riches


en protéines, fibrinogène Fibrine Dépôts de fibrine

Adhésions fibrine

Adhésions fibreuses

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2. L’OESOPHAGE

A. NOTIONS GENERALES SUR L’ANATOMIE, L’HISTOLOGIE ET LA PHYSIOLOGIE


DE L’OESOPHAGE.-

Rappel anatomique

L’oesophage est un conduit musculo-membraneux fermé à ses deux extrémités, reliant le pharynx à
l’estomac et traversant donc successivement la région cervicale, le thorax et la partie haute de
l’abdomen.

L’oesophage supérieur (jonction pharyngo-oesophagienne) est formé par un muscle strié: le muscle
crico-pharyngé qui constitue le prolongement du muscle constricteur du pharynx. Ce muscle fait partie
du sphincter supérieur de l’oesophage.

Les premiers centimètres de l’oesophage moyen sont formés uniquement de fibres striées, puis les
fibres lisses deviennent de plus en plus abondantes et prédominent nettement à partir du milieu de
l’oesophage. La transition entre les fibres lisses et striées est située plus haut dans la couche circulaire
que dans la couche longitudinale.

L’oesophage inférieur traverse le diaphragme au niveau du hiatus oesophagien et comporte par


conséquent un segment abdominal. Le complexe oesophagien inférieur est un sphincter physiologique
mais sans véritable individualité anatomique. On distingue de haut en bas, le segment légèrement
dilaté: l’ampoule épiphrénique, puis le vestibule, enfin la jonction de l’oesophage avec l’estomac ou
cardia anatomique. Le vestibule correspond du point de vue fonctionnel au sphincter du bas
oesophage. A ce niveau, la couche musculaire est épaissie, grâce à une augmentation de la couche
circulaire et à la présence des fibres situées immédiatement dans la sous-muqueuse. Le vestibule
oesophagien est amarré au hiatus par la membrane phréno-oesophagienne, issue du fascia sous-
diaphragmatique. A cheval entre l’abdomen et le thorax, sa position varie légèrement selon les
mouvements respiratoires: à l’inspiration, il est presque totalement intra-abdominal, tandis qu’à
l’expiration, il déborde dans le thorax.

L’innervation de l’oesophage reçoit de nombreuses fibres parasympathiques venant des nerfs vagues et
pendant leur trajet intrathoracique, les nerfs accolés à la paroi oesophagienne distribuent des rameaux
oesophagiens. L’oesophage reçoit également quelques filets d’origine sympathique.

L’innervation intrinsèque est constituée par le plexus intra-musculaire d’Auerbach et le plexus sous-
muqueux de Meissner.

Rappel histologique

La motricité oesophagienne assure la dernière étape de la déglutition dont les différents actes moteurs
sont synchronisés par une organisation nerveuse extrinsèque et intrinsèque complexe. Le rôle du
sphincter du bas oesophage comme obstacle au reflux gastro-oesophagien a été récemment souligné
grâce aux techniques manométriques.

Sphincter oesophagien supérieur (S.O.S)

L’orifice oesophagien supérieur est fermé entre les déglutitions par une activité tonique et permanente
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Chirurgie digestive 154
des muscles de la paroi pharyngienne empêchant l’air inspiré de pénétrer dans l’oesophage. Il existe,
en effet, une zone de haute pression, intra-luminale, entre la 4è et la 7è vertèbre cervicale. Lors de la
déglutition, l’activité tonique des muscles de cette région cède, la pression s’abaisse. Les muscles mis
en jeu sont des muscles striés, innervés directement par des fibres d’origine bulbaire contenues dans le
nerf vague.

Corps de l’oesophage

Au repos, la lumière de l’oesophage est virtuelle. La pression intra-luminale moyenne oscille selon les
phases respiratoires autour de moins 5 cm d’eau. La pression diminue à l’inspiration et augmente à
l’expiration pour atteindre 6.5 cm d’eau. L’activité motrice oesophagienne se traduit par des ondes
péristaltiques qui se déplacent tout le long de l’oesophage. L’onde contractile passe ainsi de la
musculature striée à la musculature lisse. On distingue classiquement deux types de péristaltisme
oesophagien :

- le péristaltisme primaire : onde contractile qui suit l’ouverture du sphincter oesophagien supérieur et,
par conséquent, la déglutition;
- le péristaltisme secondaire survient en l’absence de déglutition. Il est déclenché par un reflux gastro-
oesophagien ou par la non-évacuation d’un bol restant suspendu dans l’oesophage. C’est un
mécanisme important puisqu’il en permet la vidange totale.

Du point de vue mécanique, le mouvement péristaltique comprend deux éléments: l’un est la
contraction circulaire qui pousse devant elle le bol alimentaire, l’autre le raccourcissement de
l’oesophage au-dessus du bol. Ces deux mouvements conjugués permettent la progression des
ingestats.

Les innervations extrinsèques et intrinsèques coopèrent pour créer les mouvements péristaltiques. Dans
l’oesophage supérieur, dont la musculature est striée, l’innervation vagale l’emporte. Dans l’oesophage
moyen et inférieur, dont la musculature est lisse, l’innervaton vagale ne fait qu’amorcer la contraction.
La propagation est assurée par l’innervation intrinsèque qui est responsable du caractère harmonieux
des mouvements.

Sphincter oesophagien inférieur (S.O.I)

Un sphincter se définit sur le plan physiologique comme un segment capable de maintenir au repos un
gradient de pression par rapport au segment adjacent et de réagir
à des stimuli nerveux, hormonaux ou pharmacologiques. Cette définition permet de parler de sphincter
au niveau de bas oesophage bien qu’aucune structure sphinctérienne spécifique n’ait pu être
individualisée sur le plan anatomique.

Le sphincter oesophagien inférieur (S.O.I) est fermé en permancence en période de repos. Il joue un
rôle physiologique très important puisqu’il protège la muqueuse oesophagienne des sécrétions
gastriques acides et, dans certains cas, bilio-pancréatiques (gastrectomie). Son incontinence est
responsable de la pathologie oesophagienne la plus fréquente: le reflux gastro-oesophagien et ses
conséquences. Dans les conditions normales, et quelles que soient les phases de la respiration, il règne
à son niveau une pression élevée comprise entre 10 et 15 cm d’eau nettement différente de la pression
intra-oesophagienne (moins 5 cm d’eau) et de la pression intra-gastrique (8 cm d’eau).
Le tonus de ce S.O.I. est soumis à une régulation qui fait intervenir les mécanismes hormonaux et
nerveux. Par ailleurs, son efficacité n’est complète que s’il est maintenu en position normale au niveau
de l’orifice hiatal.

Les facteurs hormonaux: alors qu’une instillation d’acide dans le bas oesophage provoque une
augmentation de la contraction du S.O.I., la même instillation faite au niveau de l’antre diminue sa

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Chirurgie digestive 155
pression. L’inverse est obtenu par alcalinisation. De telles variations suggèrent l’intervention de la
gastrine en tant que stimulant du S.O.I., ou peut-être même en tant que responsable de l’activité
contractile basale de ce sphincter. La Motiline joue un rôle également très important, ses effets étant
identiques à ceux de la gastrine. L’augmentation de la pression est inhibée par un repas riche en lipides
ou en acides, et par l’administration de sécrétine et de glucagon .

SUBSTANCES DIMINUANT LA PRESSION DU SPHINCTER INFERIEUR


DE L’OESOPHAGE

Sécrétine Bêta-stimulants Acidification gastrique


Cholécystokinine Alpha-bloquants Repas gras
Glucagon Anticholinergiques Chocolat
Progestérone, oestrogènes ? Théophylline Alcool
Prostaglandines E1, E2, A2 Caféine Tabac

SUBSTANCES AUGMENTANT LA PRESSION DU SPHINCTER INFERIEUR


DE L’OEOSPHAGE
Gastrine, Pentagastrine Bétazole
Prostanglandine F2 stimulants adrénergiques Alcalinisation gastrique
Alpha-stimulants Métoclopramide
Cholinergiques Repas protéique
Anticholinestérases

Les facteurs nerveux: l’élévation de la pression abdominale entraîne une augmentation de la


contracture du SOI avec conservation d’un gradient de pression par rapport au bas oesophage et du
cardia. Ces constatations suggèrent l’existence d’un mécanisme réflexe.

Les facteurs mécaniques: outre l’influence des facteurs hormonaux et nerveux, l’intégrité des
facteurs extrinsèques: ligament phréno-oesophagien, anneau hiatal du diaphragme, valvule de
Gubaroff, angle de His, semblent jouer un grand rôle (du moins chez l’homme) dans la continence de
ce sphincter.

B. PATHOLOGIES

I. Cancer de l’oesophage

Le cancer de l’oesophage présente une fréquence relativement élevée et en augmentation permanente.


C’est un cancer chirurgical, surtout dans ses localisations inférieures, mais sa découverte, trop souvent
tardive du fait de sa longue latence clinique, explique son pronostic très sombre.

Données épidémiologiques.

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Chirurgie digestive 156
Epidémiologie descriptive.

L’étude de la répartition mondiale du cancer de l’oesophage permet de dégager une fréquence élevée
au niveau d’une zone en ceinture parcourant toute l’Asie Centrale (en particulier certaines régions
d’Iran), en Inde, dans plusieurs régions d’Afrique du Sud et de l’Est, dans les Caraïbes, et aux Etats-
Unis. Le risque de cancer de l’oesophage augmente avec l’âge et en France les hommes sont 9 à 10
fois plus fréquemment atteints que les femmes.

Epidémiologie analytique

L’alcool et le tabac jouent un rôle prédominant et la combinaison de ces deux facteurs obéit à un
modèle de type multiplicatif. Cependant, si ces constatations s’appliquent bien aux cancers de
l’oesophage rencontrés en France, les autres zones à haut risque sont situées le plus souvent dans des
pays musulmans où la consommation d’alcool et de tabac est nulle. L’absorption de boissons très
chaudes (thé) est alors mise en cause. Enfin la possibilité de dégéneréscence de certaines lésions
bénignes (sténose caustique, oesophagite peptique, méga-oesophage) est admise et s’expliquerait par la
survenue des dysplasies épithéliales sévères.

Epidémiologie métabolique

Un déficit en riboflavine a été avancé; il faciliterait sur le plan expérimental l’action des carcinogènes.

Anatomie pathologique

Il s’agit, le plus souvent, d’un épithélioma malpighien, spino-cellulaire, mais on observe parfois des
épithéliomas glandulaires à îlots gastriques aberrants au tiers inférieur de l’oesophage. L’aspect
macroscopique, au début, peut être bourgeonnant, ulcéré ou infiltrant, mais la propagation à la fois
circulaire et longitudinale détermine assez rapidement une sténose végétante, enraidissante et
nécrosante plus ou moins étendue. Du fait de l’absence de la séreuse, l’extension se fait précocement et
fréquemment vers
les tissus et les organes de voisinage: bronches, trachée, aorte, veine azygos, plèvre, péricarde, nerfs
récurrents. L’extension se fait également par voie lymphatique vers les ganglions médiastinaux et plus
loin, vers les ganglions sus-claviculaires et coeliaques. Enfin, le cancer de l’oesophage donne des
métastases à distance, en particulier hépatiques.

Circonstances de diagnostic

La dysphagie constitue le signe clinique majeur mais hélas trop tardif. Elle domine, très largement, la
symptomatologie du cancer de l’oesophage. Elle est d’abord marquée pour les solides. Elle concerne
ensuite, les aliments semi-liquides, puis les liquides eux-mêmes. Malheureusement, lorsqu’elle
survient, les lésions sont, généralement, très évoluées. Au début de l’évolution, et pendant un temps
assez long, la dysphagie peut être discrète, capricieuse, transitoire et sensible aux traitements
antispasmodiques banals car, à la gène mécanique que provoque la tumeur, s’ajoute un élément
spasmodique ou inflammatoire. Ainsi, si on veut avoir des chances de faire le diagnostic à un stade
précoce, le moindre trouble dysphagique doit être pris en considération (oesophagoscopie).
Les autres manifestations possibles (éructations, hoquet, sialorrhée, fétidité de l’haleine) sont
contingentes et retrouvées de façon inconstante. Elles présentent peu d’intérêt pour le diagnostic.
Des signes d’extension (adénopathies sus-claviculaires, métastases hépatiques, dysphonie, avec
paralysie récurrentielle, adénopathie etc) ou des signes de dénutrition (amaigrissement par difficulté
d’alimentation) peuvent être au premier plan du tableau clinique.

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Chirurgie digestive 157
Eléments de diagnostic

Examen radiologique

Dans la grande majorité des cas, le transit oesophagien objective des images caractéris-tiques
traduisant un cancer évolué: rétrécissement tortueux, irrégulier, excentré, correspondant à une forme
infiltrante, lacune irrégulière marécageuse, témoignant de l’existence du bourgeon néoplasique, ou
niche souvent cernée d’un mécanisme à fond plat représentant une ulcération.

Ces aspects, souvent intriqués, sont d’autant plus évocateurs qu’ils s’accompagnent d’une perte du
liséré de sécurité et d’une rigidité segmentaire de l’oesophage.

Dans quelques cas les lésions moins évoluées (rigidité segmentaire minime ou accrochage discret du
produit de contraste par ulcération superficielle) nécessitent un examen très minutieux.

L’exploration radiologique doit également s’attacher à préciser l’étendue en hauteur de la sténose, sa


limite supérieure et son siège exact, par rapport à la crosse aortique. Ceci permettra de distinguer les
cancers du tiers inférieur (du cardia au bord inférieur de la bronche), du tiers moyen (de la bronche au
bord supérieur de la crosse aortique) et du tiers supérieur de l’oesophage.

Examen endoscopique (indispensable)

Dans les formes évoluées l’endoscopie, grâce aux biopsies, précise le type histologique et l’extension
en hauteur du processus tumoral. Le cancer se présente alors sous forme d’une lésion bourgeonnante
ou ulcérée, à contours indurés saignant au moindre contact, plus rarement sous forme d’une infiltration
focalisée.

L’intérêt diagnostique de l’endoscopie est infiniment plus important pour les lésions de petite taille,
infiltrantes ou associées à une affection bénigne (diverticule, sténose cicatricielle, endo-brachy-
oesophage…).

Dans les sténoses serrées, des biopsies peuvent être faites en introduisant la pince à travers l’orifice du
rétrécissement. Dans ces cas, il peut être utile de compléter l’examen par un prélevement cytologique à
l’aide d’une brosse spéciale (cytologie exfoliatrice).

En fait, malgré les perfectionnements de l’endoscopie, et contrairement aux progrès réalisés dans le
diagnostic du cancer de l’estomac, le diagnostic de cancer au stade intra-épithélial demeure rarissime
au niveau de l’oesophage. Les signes cliniques motivant l’endoscopie sont toujours trop tardifs. C’est
pourquoi, il convient de souligner l’importance de l’observation systématique et attentive du conduit
oesophagien lors d’examens endoscopiques motivés pour des maladies gastriques ou duodénales et
surtout le dépistage des populations à haut risque. L’opérateur devra avoir le souci d’une exploration
de surface concernant la régularité, la couleur de la structure épithéliale et pas seulement la recherche
d’éventuelles images additionnelles ou soustractives. L’utilisation de la cytologie exfoliatrice peut
apporter ici des résultats intéressants.

Evolution et pronostic

En l’absence de traitement à visée radicale, l’évolution du cancer de l’oesophage se fait rapidement


vers la cachéxie et la mort. La survie dépasse rarement deux ans après le début des symptômes. Les
traitements palliatifs sont souvent les seuls possibles. Ils évitent la mort par inanition mais exposent le
malade à la survenue de complications liées à l’extension tumorale.

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Chirurgie digestive 158

L’extension aux tissus de voisinage peut être responsable d’une dysphonie par atteinte récurrentielle.
Paralysie récurrentielle peut favoriser les accidents infectieux de broncho-pneumopathie par inhalation
de particules alimentaires.

Ces “fausses-routes” doivent être distinguées des fistules oesophago-respiratoires, qui sont
responsables, elles aussi, d’accès de suffocation et de quintes de toux lors de tentatives d’alimentation,
en particulier pour les liquides. La distinction repose sur les données de l’examen ORL qui, dans
certains cas, confirmera une paralysie récurrentielle et de l’examen radiologique qui, dans d’autres cas,
mettra en évidence une fistule.

Il est possible d’observer des métastases hépatiques, pulmonaires ou osseuses. Toutes ces
manifestations témoignent de l’extension du cancer, et elles doivent être recherchées systématiquement
avant de décider du choix de la thérapeutique (examen ORL, bronchoscopie, bilan hépatique,
laparoscopie…)

La fréquence des cancers multiples doit être signalée: 10 % des malades environ présentent une
seconde localisation (souvent dans la sphère ORL) contemporaine ou non de la lésion oesophagienne.

Traitement

Actuellement, le seul traitement à visée curatrice est le traitement chirurgical, éventuellement complété
par les agents physiques et la chimiothérapie.

Moyens therapeutiques

Les méthodes palliatives s’adressent à des malades inopérables ou qui ont une extension néoplasique
trop importante (métastases, ganglions de Troisier, envahissement de la bronche, paralysie
récurrentielle à tumeur inextirpable). On a alors recours à la gastrostomie d’alimentation qui constitue
une infirmité effroyable ou à des anastomoses palliatives au moyen de l’estomac ou du côlon.
Actuellement ces modes palliatives peuvent être remplacées dans certains cas par la mise en place sous
endoscopie d’endroprothèse de Célestin.

Les méthodes d’exérèse consistent à enlever une partie ou tout l’oesophage et à le remplacer par
l’estomac préalablement libéré (gastroplastie) ou par le côlon (coloplastie) en général le côlon gauche.
En fait, le croisement de la crosse de l’aorte et de l’oesophage pose un problème pratique de voie
d’abord: lorsque les tumeurs siègent à la partie inférieure de l’oesophage et au niveau du cardia, la voie
thoracique gauche, avec phrénotomie, permet à la fois d’enlever l’oesophage et d’utiliser un transplant
gastrique ou colique.

Lorsque les tumeurs siègent au tiers moyen ou au tiers supérieur de l’oesophage thoracique, il vaut
mieux alors avoir recours à la thoracotomie droite qui évite le décroisement entre l’aorte et
l’oesophage. Cette thoracotomie droite est précédée d’une laparotomie qui permet la recherche de
métastases hépatiques ou ganglionnaires et la libération d’un transplant gastrique ou colique. Une
éventuelle cervicotomie gauche peut succéder à la thoracotomie pour, après résection totale de
l’oesophage, faire une anastomose cervicale.

Grâce à une préparation respiratoire et nutritionnelle, la mortalité opératoire a bien regressé, elle reste
surtout dominée par le risque de fistule anastomotique.

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Chirurgie digestive 159
Les résultats éloignés restent décevants puisque les survies moyennes n’atteignent pas deux ans. Seul
un dépistage systématique des cancers et éventuellement une association entre la chirurgie et la
radiothérapie peuvent tenter d’améliorer le pronostic.
La cobaltothérapie peut être utilisée isolément et améliorer souvent la dysphagie, mais la récidive des
symptômes est généralement rapide. En pré-opératoire, elle permettrait d’augmenter le taux de
résécabilité. En post-opératoire, elle aurait un intérêt dans les exérèses palliatives. La radiothérapie
isolée est basée sur le fait que les cancers étant malpighiens sont potentiellement curables par cette
méthode. Cependant, la situation profonde de la tumeur, au sein d’organes sensibles, l’envahissement
péri-oesophagien et l’atteinte des chaînes lymphatiques médiastinales parfois cervicales ou coeliaques,
implique l’élargissement des volumes irradiés et l’utilisation de techniques à portes d’entrée multiples.
Elle est contre-indiquée en cas d’extension en hauteur trop importante ou de l’envahissement de
certains organes du voisinage comme l’aorte ou les voies aériennes. Globalement, ses résultats restent
modestes, mais elle permet souvent d’améliorer le confort des malades.

La chimiothérapie peut être utilisée comme adjuvant de la chirurgie. De nombreuses drogues ont été
proposées en assaciations diverses (Endoxan), Oncovin ou Bléomycine. Cette dernière ayant fait la
preuve d’une certaine efficacité, mais sa toxicité rend son utilisation difficile. Très récemment, le Cis-
Dichlorodiamine Platinum parait avoir entrainé des régressions tumorales objectives, mais là encore la
toxicité rend son maniement délicat.
L’endoscopie. Les progrès techniques permettent actuellement, de mettre en place, à travers le
rétrécissement néoplasique, des prothèses (prothèse de Célestin), qui ont pour but de pallier à la
dysphagie. Elles sont surtout utilisées dans les cancers du tiers moyen et du tiers inférieur.

Indications

Le choix de la thérapeutique dépend du type histologique, du siège du cancer, de son étendue, et du


terrain.

En fait, devant les résultats décevants apportés par les moyens thérapeutiques actuels, il semble
raisonnable, loin d’opposer la chirurgie à la radiothérapie ou à la chimiothérapie, de mieux préciser
leur place respective et de mieux étudier l’intérêt éventuel de leur association.

Schématiquement, les cancers du tiers supérieur sont actuellement l’apanage du radiothérapeute, alors
que les cancers du tiers inférieur sont le plus souvent confiés au chirurgien pour une résection
anastomose en un temps, et que les cancers du tiers moyen peuvent être traités soit par radiothérapie
soit par la chirurgie avec malheureusement les résultats les plus décevants. Les nombreux échecs sont
expliqués par l’âge élevé des malades, l’état de dénutrition, les tares liées à l’alcoolisme et au
tabagisme, et surtout de diagnostic trop tardif. Des espoirs sont actuellement fondés sur l’association
chirurgie-cobalthérapie en pré- et post-opératoire.

En effet, même pratiquée dans d’excellentes conditions, la chirurgie d’éxerèse n’apporte guère de
résultats satisfaisants (15 % de survie à 5 ans en moyenne).

De plus, de très nombreux cancers sont inopérables en raison de l’envahissement de la musculeuse et


de leur extension lymphatique. Lorsque la radiothérapie palliative n’est même pas permise, le recours à
la mise en place d’une prothèse de Célestin, permettant d’assurer temporairement la fonction
d’alimentation, doit être envisagé. Lorsque la radiothérapie est possible, elle peut précéder la pose
d’une prothèse de Célestin.

Contre-indications

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Chirurgie digestive 160

Autres tumeurs de l’oesophage

Voir tableau ci-dessous:

CARCINOME • 2,5 % de l’ensemble des cancers


PRIMITIF • 7 % des cancers digestifs

SARCOMES • Très rares


• Ce sont des léiomyosarcomes, fibrosarcomes,
Rhabdomyosarcomes

NOEVO- • Très rare


CARCINOME • Tumeur exophytique volumineuse, brun-noirâtre faite de
PRIMITIF mélanoblastes
• Généralisation métastatique rapide
TUMEURS • Métastases: sein, testicules, pancréas, prostate
SECONDAIRES • Extension d’un cancer de voisinage: hypo-pharynx, bronches

Les principaux types anatomo-pathologiques des tumeurs bénignes de l’oesophage.

T. EPITHELIALES PAPILLOMES • Rares


• Formés d’un axe conjonctif ramifié
ADENOMES • Exceptionnels
• Développés sur des foyers ectopiques
glandulaires du bas-oesophage
T. CONJONCTIVES • Tous les types de tumeurs conjonctives
peuvent se voir
• Fibrome, lipome, angiome,
neurofibrome, ostéochondrome,
granulome éosinophile.
KYSTES • Exceptionnels

II. REFLUX GASTRO-OESOPHAGIEN

Le reflux gastro-oesophagien (R.G.O) se définit par le passage intermittent ou permanent d’une partie
du contenu gastrique dans l’oesophage. Il peut s’agir de sécrétions acides ou en cas de gastrectomie de
sécrétion bilio-pancréatiques. Le RGO est dû à une déficience de la zone fonctionnelle sphinctérienne
le plus souvent secondaire à une anomalie du carrefour oeso-cardio-tubérositaire. L’agressivité des
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Chirurgie digestive 161
sécrétions acides et/ou bilio-pancréatiques sur la muqueuse oesophagienne est susceptible d’entrainer
un certain nombre de complications.

La prévalence du RGO dans la population générale est élevée mais difficile à apprécier avec exactitude
en raison du caractère asymptomatique ou atypique possible du reflux. De plus, lorsqu’il est peu
fréquent, de brève durée et post-prandial, il faut le considérer essentiellement comme un phénomène
physiologique. Il ne devient pathologique que lorsqu’il est répété et durable dans certaines positions
(décubitus, position penchée en avant).

Circonstances de diagnostic

• L’expression clinique du RGO peut être suffisamment caractéristique pour permettre le diagnostic
dès l’interrogatoire. Le symptôme le plus fréquent est la douleur rétro-sternale à point de départ
épigastrique et de trajet ascendant. Cette douleur est à type de brûlures, elle peut survenir isolément
ou s’accompagner de régurgitations. L’association des brûlures rétrosternales suivies de
régurgitations constitue le pyrosis, signes hautement évocateurs du reflux gastro-oesophagien.

Le caracrtère postural de cette symptomatologie est un élément de grande valeur: elle est déclenchée
ou majorée par l’antéflexion, le décubitus dorsal ou le décubitus dorsal ou le décubitus latéral droit.
Pendant la nuit où le décubitus représente une condition favorable au reflux, une partie du liquide peut
pénétrer dans la trachée et déclencher une toux nocturne qui réveille le sujet. La toux, la défécation, la
contraction de la sangle abdominale, le port de ceinture trop serrée ou de gaine représentent des
facteurs déclenchants en raison de l’élévation de la pression intra-abdominale qui favorise le reflux.
L’absorption d’alcool, de boissons chaudes ou acides peuvent être également responsables des brûlures
oesophagiennes.

• Le diagnostic de RGO peut également être porté devant une ou plusieurs de ses complications:
oesophagite avec sténose et/ou ulcère et/ou hémorragie.
• Enfin la symptomatologie peut simuler une pathologie cardiaque (formes pseudo-angineuses),
laryngée (dyspnée laryngée), ou respiratoires (pneumopathie atypique, toux nocturne).

Eléments de diagnostic

Interrogatoire

Il reste l’élément essentiel. La confirmation et l’exploration du RGO sont apportées par plusieurs
examens faisant appel à des techniques radiologiques et endoscopiques relativement simples mais
aussi à des méthodes d’exploration fonctionnelle plus complexes, utilisées seulement dans des cas
difficiles et douteux.

Radiologie

Après remplissage de l’estomac par la baryte fluide, le RGO sera recherché en plaçant le malade dans
différentes positions: décubitus dorsal, en oblique antérieure gauche, pro-cubitus, position de
Trendelenburg. Ces manoeuvres simples suffisent généralement faire apparaître le reflux. Parfois il est
nécessaire de faire appel pour l’affirmer à des
manoeuvres plus compliquées qui provoquent le reflux, soit en augmentant le gradient de pression
abdomino-thoracique, soit en favorisant l’ouverture du cardia (manoeuvre de Valsava, etc). Dans ces
cas, la mise en évidence d’un RGO a beaucoup moins de valeur car elle est obtenue dans des
conditions moins physiologiques que précédemment.

Malgré ces artifices techniques, le transit baryté ne permet pas toujours d’objectiver tous les reflux et
par conséquent un examen radiologique normal ne peut éliminer le diagnostic d’un RGO intermittent.
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Chirurgie digestive 162

Endoscopie

L’oesophagoscopie ne peut être considérée comme une méthode de choix pour la mise en évidence du
RGO, la présence de l’endoscope déclenchant des ondes péristaltiques secondaires et pouvant dans
certains cas entraîner des efforts de vomissement. Chez l’individu normal, le sphincter oesophagien se
présente sous forme d’une zone d’occlusion luminale au niveau de laquelle se produisent des
mouvements d’ouverture spontanés à la suite d’ondes péristaltiques secondaires. L’existence d’une
béance cardiale est un signe indirect de RGO. En fait l’intérêt de l’endoscopie est surtout de déceler les
éventuelles anomalies de la région cardiale et surtout d’apprécier les conséquences du RGO sur
l’oesophage: oesophagite, endo-brachy-oesophage, ulcère, sténose.

Manométrie

Les études manométriques ont été à l’origine du concept du SOI, principale barrière anti-reflux
caractéristisé par l’existence au repos d’une zone de haute pression. Cependant l’utilisation de la
manométrie comme moyen diagnostic du RGO, est critiquable en raison des pourcentages importants
d’erreurs dues à de multiples raisons: instabilité dans le temps de la pression de repos du SOI, variation
de la pression en fonction du diamètre du cathéter, modifications des pressions avec les mouvements
respiratoires. Cependant, la manométrie est utile pour étudier le péristaltisme oesophagien et mettre en
évidence une éventuelle dyskinésie pouvant augmenter le temps de contact entre l’acide et la
muqueuse malpighienne.

Enregistrement du pH

La pHmétrie paraît être actuellement la méthode la plus pratique pour le diagnostic du RGO. Elle
consiste à enregistrer le pH à 5 cm au-dessus du sphincter oesophagien à l’aide d’une électrode de
verre reliée à un galvanomètre.

L’électrode est fixée à l’extrémité d’une sonde introduite par la bouche. Trois techniques peuvent être
proposées:
- la pHmètre brève, consiste à remplir l’estomac par une solution déci-normale d’acide
chlorhydrique et de rechercher le reflux au cours de différentes manoeuvres de provocation. Cette
méthode n’est, malheureusement, pas toujours spécifique et certainement pas physiologique;
- la pHmètrie longue, sur 18 ou 24 h, est la plus sensible, et la plus spécifique mais s’avère beaucoup
plus contraignante;
- la pHmétrie sur 3 heures a une spécificité et une sensibilité pratiquement identiques à la
précédente, l’enregistrement se déroulant au cours des 3 heures qui suivent un repas-test (1 heure
assis, 1 heure en décubitus dorsal, 1 heure assis). Un scope est établi en tenant compte de
l’importance de la baisse du pH oesophagien et du temps pendant lequel ce pH est inférieur à 5.
Cette technique permet également d’étudier la nature alcaline ou acide du reflux.

Dérivée de la pHmétrie, la clairance oesophagienne peut être mesurée en instillant de l’acide


chlorhydrique déci-normale dans l’oesophage et en mesurant le nombre de déglutitions nécessaires
pour ramener le pH oesophagien à la normale.

Scintigraphie oesophagienne

Cette méthode est la plus proche des conditions physiologiques, mais son utilisation reste limitée en
raison de la lourdeur des équipements nécessaires. Elle peut, également, apparaître peu performante
pour les reflux quantitativement faibles.

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Chirurgie digestive 163

Elle consiste à rechercher le reflux gastro-oesophagien après que le sujet a ingéré un isotope (sulfure
colloïdal de technétium 99) dont on peut suivre l’évacuation gastrique ou la resibilité et la spécificité
sont proches de 100 % et comparables aux résultats obtenus avec la pHmétrie de longue durée. Par
contre, elle ne permet pas de différencier reflux acide ou alcalin.

Test de Bernstein = test de perfusion acide

L’instillation de HCL à 0,1 N dans le corps de l’oesophage peut provoquer une symptomatologie
douloureuse semblable à celle que présente spontanément un patient atteint de RGO. Il permet donc en
théorie de rattacher au RGO certains symptômes moins caractéristiques et de différencier une douleur
thoracique coronarienne d’une douleur oesophagienne, cependant il n'est ni très sensible ni très
spécifique.

EVOLUTION ET PRONOSTIC

L’existence d’un RGO est la condition nécessaire et suffisante au développement de la maladie


peptique. L’intensité de la symptomatologie douloureuse n’est pas toujours en relation étroite avec
l’importance des altérations de la muqueuse oesophagienne. Ainsi certaines symptomatologies très
bruyantes ne s’accompagnent que de lésions discrètes d’oesophagite mises en évidence par l’examen
endoscopique. A l’inverse, une oesophagite intense peut évoluer à bas bruit, et le diagnostic ne sera
fait qu’à l’occasion d’une complication.

Traitement

Traitement médical

Il est à la fois symptomatologique et pathogénique.

Les moyens visant à réduire le RGO consistent à renforcer la pression de repos du sphincter et à
éviter tout ce qui peut la diminuer:
- les mesures diététiques consistent à proscrire chocolat, café, alcool, graisse et tabac, qui diminuent
la pression de repos du SOI. Les repas trop abondants et trop liquides générateurs d’hyperpression
gastrique, l’utilisation des eaux minérales gazeuses, sont à éviter;
- les mesures d’hygiène visent à réduire la pression intra-abdominale par la suppression de ceinture
et de corset. Il sera nécessaire d’éviter les positions antéflechies, et le décubitus post-prandial;
- les médicaments dont certains seront à proscrire car ils relâchent le SOI : Théophilline,
anticholinergiques, d’autres renforcent la pression de repos du SOI, comme les cholinergiques,
mais présentent l’inconvénient de stimuler la sécrétion gastrique. Le métoclopramide semble avoir
un intérêt certain, car il stimule aux doses thérapeutiques, la musculature lisse et renforce le tonus
du SOI et l’évacuation gastrique, la Domperidone (Motilium ®) également.

Les moyens pour diminuer ou neutraliser la sécrétion acide de l’estomac.


• Les pansements anti-acides tamponnent l’acidité dans l’oesophage, réduisent la durée du reflux et
améliorent le pyrosis. Ils doivent être absorbés après les repas et avant le coucher. Ils pourraient
agir sur le SOI soit directement soit surtout par l’intermédiaire de la gastrine après alcalinisation du
contenu gastrique.
• L’acide alginique (Gaviscon) ® surnage sur le liquide de stase gastrique et réalise ainsi une
barrière entre les ions H+ et la muqueuse oesophagienne en cas de reflux. L’association anti-acide
et acide alginique paraît efficace.
• Les inhibiteurs des récepteurs H2 de l’histamine (Cimétidine) ont également été proposés pour
diminuer la sécrétion gastrique acide. Ils doivent être utilisés quand une oesophagite importante est
associée au reflux acide.
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Chirurgie digestive 164

Traitement chirurgical

Il consiste essentiellement à proposer des interventions anti-reflux qui comportent toutes l’abaissement
d’un segment oesophagien en situation intra-abdominale et la confection d’un dispositif valvulaire
(fundoplicature). Une vagotomie peut être associée pour réduire la sécrétion acide.

L’indication du traitement chirurgical se pose devant la persistance des symptômes malgré un


traitement médical bien suivi pendant 2 à 3 mois, devant l’apparition d’une complication (oesophagite
sévère, ulcère peptique, sténose oesophagienne). En fait , ces indications sont modulées en fonction de
l’âge et de l’état général du sujet.

III. OESOPHAGITES

Oesophagites peptiques

Sous le terme d’oesophagites peptiques on désigne tous les états inflammatoires, sub-aigus et
chroniques de la muqueuse oesophagienne, secondaires à l’action corrosive des sucs digestifs du
reflux gastro-oesophagien. Leurs étiologies sont donc celles du reflux.

Elles réalisent une gamme de lésions importantes à connaître. Suivant leur stade évolutif, leurs
manifestations vont de la simple brûlure ou pyrosis à la dysphagie complète de la sténose ulcérée.

L’évaluation de l’importance de l’oesophagite et son évolution sous traitement reposent avant tout sur
l’examen endoscopique. Ce dernier permettra de savoir si le traitement médical est suffisant ou s’il
convient d’envisager une intervention chirurgicale afin d’éviter le passage vers cette affection
redoutable que constitue la sténose peptique.

Anatomie pathologique

Les lésions rencontrées au cours des oesophagites peptiques sont schématiquement de quatre types:
l’hyperacanthose, l’oedème, les pseudo-membranes et les ulcérations de l’oesophagite superficielle
diffuse, localisée, pouvant dépasser la paroi oesophagienne.

Circonstances de diagnostic

La clinique peut être évocatrice à un stade initial. Les symptômes sont alors ceux du reflux gastro-
oesophagien, mais la brûlure peut aussi être déclenchée lors de l’ingestion d’aliments, d’alcool, de
liquides chauds. Il s’agit souvent de brûlures descendantes qui peuvent être associées à des sialorrhées
hémorragiques nocturnes ou post-prandiales.

La dysphagie peut représenter le symptome principal. Au début, elle est intermittente, parfois
douloureuse (provoquée par un spasme oesophagien), puis elle s’aggrave pour devenir permanente en
l’absence de traitement. L’existence, à l’interrogatoire, d’un pyrosis antérieur peut constituer un
élément d’orientation en faveur de l’étiologie peptique. Mais la dysphagie peut être le premier
symptôme de la sténose peptique et entraîner par la suite une dénutrition sévère.

L’ulcère oesophagien ne s’accompagne pas d’un syndrome douloureux présentant les caractères
évolutifs de l’ulcère gastro-duodénal, en particulier il n’existe aucune périodicité ni rythmicité. Il est
souvent une découverte radiologique ou endoscopique.

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Chirurgie digestive 165

Modalités évolutives

En l’absence de traitement efficace, une sclérose inflammatoire évolutive va se constituer et atteindre


non seulement la paroi oesophagienne mais aussi le tissu médiastinal péri-oesophagien. Elle peut
aboutir à la formation d’un brachy-oesophage, c’est-à-dire d’un raccourcissement de l’oesophage
maintenant de façon permanente et irréversible le cardia et un segment d’estomac en position intra-
thoracique. Exceptionnellement le brachy-oesophage peut être d’origine congénitale et dans ce cas il
n’est plus la conséquence, mais la cause de reflux.

L’endo-brachy-oesophage à l’opposé est une anomalie uniquement muqueuse. Le cardia muqueux


est intra-thoracique et le cardia “anatomique” est en position normale. Cette anomalie s’explique par le
remplacement progressif de la muqueuse oesophagienne altérée par une muqueuse gastrique
“remontant” le long de l’oesophage. L’action aggressive des sécrétions gastriques sur la muqueuse
oesophagienne en est d’autant plus facilitée et peut provoquer des ulcères et/ou des sténoses peptiques.

La dégénérescence néoplasique d’une muqueuse de régénération d’endo-brachy-oesophage paraît


possible, mais de fréquence discutée. Elle doit toujours être redoutée.

Des hémorragies d’importance variable peuvent également se voir.

Examens complémentaires

RADIOGRAPHIE

L’oesophagite n’a pas toujours une traduction radiologique évidente. Dans certains cas, on peut
observer un aspect spiculaire des bords de l’oesophage ou une raréfaction et un épaississement des plis
au-dessus d’un cardia incontinent. L’examen radiologique peut être utile pour mettre en évidence
certains facteurs étiologiques tels qu’une hernie hiatale ou une malposition cardio-tubérositaire.

La sténose dans les cas typiques est centrée, régulière, courte et bas située, l’oesophage sus-jacent
paraissant souple et présentant un aspect en entonnoir. Au-dessous de la sténose, la présence des plis
gastriques convergeant vers elle sont très évocateurs, lorsqu’ils sont présents, de sa nature peptique.

L’ulcère de l’oesophage se traduit par une tache opaque de face, une image d’addition de profil. Il
coexiste, souvent avec une sténose.

ENDOSCOPIE

Elle apprécie, mieux que la clinique ou la radiologie, l’existence et l’importance de l’oesophage.


Schématiquement, on peut classer les lésions en trois stades;
• stade I : muqueuse érythémateuse ou d’aspect dépoli;
• stade II: oesophagite pseudo-membraneuse;
• stade III : oesophagite ulcérée ou hémorragique.

L’endoscopie permet également de préciser les modifications anatomiques éventuelles de la région. La


jonction entre les deux muqueuses gastrique et oesophagienne est repérée par des sinuosités
blanchâtres traduisant la fin de l’épithélium malpighien. Cette jonction se situe normalement en regard
de l’orifice hiatal du diaphragme. En cas d’endo-brachy-oesophage, une muqueuse de type gastrique
peut être retrouvée sur une hauteur plus ou moins importante de l’oesophage. Pour cela, il est parfois
nécessaire d’avoir recours à l’utilisation de colorants vitaux: solution de Lugol à 5 %, solution
aqueuse de rouge congo à 0,3 %. Sous l’effet du Lugol, le glycogène que contient l’épithélium
malpighien de l’oesophage prend une coloration marron qui le différencie de l’épithélium cylindrique
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du versant gastrique qui ne prend pas le colorant. En cas de métaplasie épithéliale cylindrique du bas
oesophage, l’éventuel caractère acido-sécrétant de la muqueuse peut être mis en évidence par
application de rouge congo suivi d’une stimulation sécrétoire. Le rouge congo vire au bleu au-dessous
du pH3.

Au stade de sténose, l’endoscopie permet de constater un rétrecissement blanchâtre, circulaire, plus


ou moins serré, en règle médian, et sans formation bourgeonnante. L’oesophage d’amont présente
généralement des signes d’oesophagite. Parfois, la sténose peut revêtir un aspect pseudo-néoplasique.
Les prélèvements histologiques
doivent donc être multiples et étagés. En cas de sténose très serrée infranchissable par les endoscopes
pédiatriques, il conviendra d’effectuer des biopsies et des prélèvements cytologiques à travers la
sténose, car c’est à son pôle distal (endo-brachy-oesophage) que le risque de transformation
carcinomateuse est le plus grand.

L’ulcère fréquemment associé à la sténose n’est pas toujours vu en endoscopie. Parfois, cependant, il
apparaît sous la forme d’une perte de substance plus ou moins profonde recouverte d’une membrane
jaune chamois. Il siège souvent à la jonction des muqueuses gastrique et oesophagienne (ulcère de
Barret) et peut saigner ou se perforer.

Traitement

TRAITEMENT MEDICAL

Il est en fait identique à celui du reflux gastro-oesophagien. Il est nécessaire dans tous les cas, soit seul,
soit comme préparation au traitement endoscopique ou chirurgical.

TRAITEMENT CHIRURGICAL

En cas d’oesophagite rebelle au traitement médical et secondaire à un reflux gastro-oesophagien, les


différents types d’intervention associent le rétablissement de l’anatomie normale de la jonction oeso-
gastrique (cure de la hernie hiatale ou de la malposition cardio-tubérositaire), à la réalisation d’un
procédé valvulaire anti-reflux (fundoplicature de Nissen, hémi-valve antérieure, hémi-valve
postérieure au moyen de la grosse tubérosité fixée au pilier du diaphragme, fermeture de l’angle de
His). Ces interventions menées par voies thoracique ou abdominale assurent au moins 80 % de
résultats favorables.

Le traitement des sténoses peptiques est soit conservateur associant un dispositif anti-reflux à des
dilatations pré-opératoires et éventuellement post-opératoires (Nissen) soit radical, enlevant la région
sténosée. Dans ce dernier cas, les oeso-gastrectomies exposent à un taux élevé de récidives (20 %)
aussi, l’intervention idéale semble être la résection oesophagienne suivie de coloplastie. Le choix entre
ces deux types d’intervention est fonction des auteurs et surtout fonction de la sténose, de sa
dilatabilité et de la possibilité d’abaissement du cardia. Ainsi, c’est donc parfois en cours même
d’intervention que la décision technique sera prise.

TRAITEMENT ENDOSCOPIQUE

Il comporte des dilatations par des olives de diamètre croissant poussées à travers la sténose grâce à la
mise en place d’un fil guide sous endoscopie (Eder-Puestow). Il est indiqué dans les sténoses pour
lesquelles la chirurgie est contre-indiquée en raison des affections associées ou de l’âge du patient ou
avant un traitement chirurgical pour permettre une amélioration de l’état général. Dans certains cas les
dilatations oesophagiennes peuvent être effectuées en associant avec un traitement anti-reflux. Sinon

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Chirurgie digestive 167
elles doivent toujours être suivies d’un traitement médical à base de pansements anti-acides (la
dilatation de la zone sténosée entrainant la réapparition du reflux).

Oesophagites par brûlure caustique et thermique

Les oesophagites corrosives sont liées à l’ingestion de caustiques parfois volontaire chez l’adulte dans
un but de suicide, mais le plus souvent accidentelle, notamment chez l’enfant. Les brûlures de
l’oesophage sont essentiellement provoquées par l’absorption d’alcalins, plus rarement d’acides et
exceptionnellement, d’aliments liquides brûlants.

L’extension et la sévérité des lésions oesophagiennes et éventuellement des lésions pharyngo-


laryngées et gastriques associées, sont fonction de la nature, de la concentration et de la quantité du
produit ingéré.

Anatomie pathologique

Sur le plan évolutif, on distingue 3 périodes: la phase aiguë, où prédominent les problèmes de
réanimation, la phase de réparation de la 2e ou 3e semaine avec ses bourgeons charnus et la phase
chronique, liée à une sclérose extensive des couches musculaires conduisant à la constitution de
sténoses. Selon le degré de pénétration du caustique dans la paroi oesophagienne, les lésions peuvent
être classées en superficielles, intermédiaires et profondes. C’est ainsi que les brûlures superficielles
n’altèrent que la muqueuse, la réépithéliasation s’effectuant avec peu ou pas de fibrose. Les lésions
intermédiaires détruisent la muqueuse et la sous-muqueuse. Dans les zones de nécrose, apparaît
rapidement un tissu de granulation, auquel fait suite un tissu de fibrose. Les atteintes trans-pariétales
sont causées par l’ingestion des grandes quantités de caustiques concentrés et sont caractérisées par
une nécrose massive des tuniques de l’oesophage. Elles sont souvent accompagnées de médiastinite.
Leur évolution peut être rapidement mortelle.

Evolution et pronostic

A la phase aiguë le tableau clinique associe un syndrome douloureux violent des troubles
dysphagiques et un état de choc. Les vomissements peuvent aggraver les lésions oesophagiennes, et en
cas de fausse route provoquer des brûlures caustiques bronchiques. Certains signes cliniques sont
évocateurs de complications mettant en jeu le pronostic vital. L’existence d’une dyspnée peut être due
soit à un oedème laryngé sensible aux corticoïdes, soit à la destabilisation du carrefour laryngé qui
nécessite alors une trachéotomie d’urgence. Une douleur dorsale avec emphysème cervical et pneumo-
médiastin sur le cliché thoracique doit faire redouter la rarissime perforation oesophagienne. Une
douleur épigastrique associée à une contracture abdominale et à un pneumo-péritoine sur le cliché de
l’abdomen sans préparation, témoigne d’une perforation gastrique nécessitant une intervention dont le
pronostic est réservé. L’endoscopie doit rechercher une atteinte gastrique associée et permet de classer
les lésions oesophagiennes en trois stades de gravité croissante (stade 1: congestion, hyperémie,
muqueuse sans ulcération, stade 2: ulcération et nécrose limitées, hémorragie peu abondante; stade 3:
nécrose étendue, ulcérations profondes, hémorragie abondante).

A la phase chronique, après un delai variable (2 à 3 mois), les lésions de stade 2 et 3, en raison de la
sclérose rétractile, évoluent le plus souvent vers la constitution de rétrécissements qui vont être
responsables de troubles dysphagiques d’installation progressive. C’est parfois à ce stade que l’on peut
être amené à voir le malade pour la première fois. Il est généralement facile de retrouver à
l’interrogatoire, l’accident causal et la phase d’oesophagite aiguë. Le transit baryté précisera le siège,
l’importance et le nombre des sténoses.

L’endoscopie réalisée à l’aide d’un fibroscope de faible diamètre, permettra de franchir les sténoses
modérément serrées, et d’étudier les lésions sous-jacentes ainsi que l’état de cicatrisation et de

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Chirurgie digestive 168
souplesse de la muqueuse. Les rétrécissements oesophagiens peuvent être soit réguliers, bien centrés et
circulaires, soit asymétriques ou semi-lunaires. La surveillance endoscopique constitue le meilleur
moyen de déceler l’apparition d’un cancer dont le risque de survenue sur une sténose caustique, après
10 à 15 ans d’évolution, paraît 1000 fois plus élevé que sur un oesophage normal.

Traitement et conduite à tenir

A la phage aiguë, la conduite à tenir n’est pas identique pour tous les auteurs, et reste même sur
quelques points, très controversée. Cependant la plupart s’accordent sur la nécessité d’éviter un certain
nombre de manoeuvre traumatisantes, considérées, classiquement comme bénéfiques. Parmi ces gestes
intempestifs à proscrire il faut citer:
• la tentative de neutralisation qui est illusoire car le temps de sa réalisation est toujours trop tardif (à
l’exception du permanganate de potassium pour lequel on doit utiliser l’hyposulfite de soude);
• le lavage gastrique qui est nuisible s’il s’agit d’un toxique dont la dilution va étendre les lésions;
• les émétisants qui risquent par les efforts de vomissements qu’ils déclenchent,
d’aggraver les lésions oesophagiennes et de provoquer une perforation;
• la sonde gastrique qui semble constituer un facteur traumatique susceptible d’aggraver les lésions
sans pour autant prévenir les sténoses;
• la corticophérapie qui n’empêcherait pas l’évolution du processus cicatriciel sténosant mais peut
masquer une péritonite par perforation et augmenter le risque de survenue d’une hémorragie
digestive. Elle n’est indiquée qu’en cas d’oedème laryngé;
• quant à l’antibiothérapie systématique, son intérêt est diversement apprécié.

Toute alimentation orale doit être suspendue. La nutrition parentérale exclusive est poursuivie tant que
les examens endoscopiques de contrôle ne montrent pas une cicatrisation complète des lésions.
Certains auteurs, dans les cas graves, restent partisans d’une intervention chirurgicale précoce,
consistant en une oesophagectomie avec ou sans gastrectomie assoicée et mise en place d’une
jéjunostomie d’alimentation.

Au stade de sténose cicatricielle, les muscles peuvent être traités par des dilatations instrumentales
mais les résultats sont, dans l’ensemble, plus inconstants que pour les sténoses peptiques alors que le
risque de fissuration et de perforation paraît plus élevé. Par ailleurs, la possibilité de dégénérescence
d’une sténose caustique nécessitant des dilatations répétées, doit inciter à envisager un acte chirurgical.

IV. HERNIES HIATALES

Les hernies hiatales correspondent au passage permanent ou intermittent, d’une portion de la grosse
tubérosité gastrique à travers l’orifice oesophagien du diaphragme. Ce sont les plus fréquentes des
hernies diaphragmatiques. Elles se rencontrent à tous les âges avec une prédominance marquée pour le
sexe féminin après la cinquantaine et sont parmi les affections les plus fréquentes de l’appareil digestif.
Toutefois, un bon nombre de hernies hiatales restent asymptomatiques et ne sont découvertes que de
façon fortuite, à l’occasion d’un transit oeso-gastro-duodénal.

Anatomie pathologique

On en distingue 3 types:

1. La hernie par glissement: elle est de très loin la plus fréquente (80 à 85 % des cas). Le cardia est en
situation sus-diaphragmatique; de même qu’une portion variable de la jonction cardio-tubérositaire.
Elle favorise le reflux gastro-oesophagien et est exposé à ses complications.

2. La hernie par roulement : l’oesophage abdominal et le cardia conservent leur situation normale sous
diaphragmatique, tandis qu’une portion de la grosse tuberosité s’engage dans l’orifice oesophagien du
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Chirurgie digestive 169
diaphragme et passe en situation sus diaphragmatique. Dans cette variété, les mécanismes qui
s’opposent au reflux gastro-oesophagien peuvent fonctionner normalement. Les complications
essentiellement sont dues à la présence de la poche gastrique herniée.

3. La hernie mixte: elle associe les éléments de la hernie par roulement et de la hernie par glissement.

Circonstances de diagnostic

Les circonstances de découverte d’une hernie hiatale sont généralement le fait des signes liés au reflux
gastro-oesophagien, au volume de la hernie ou à la présence de manifestations hémorragiques.

Signes liés au reflux gastro-oesophagien

Le reflux gastro-oesophagien peut être responsable d’un syndrome douloureux à type de brûlure, à
irradiation rétro-sternale. Il présente un caractère postural et peut être associé à des régurgitations.

Signes liés au volume de la hernie

La présence de la poche herniée dans le thorax peut être responsable de la manifestation à type de
dyspnée, d’extra-systoles ou de palpitations permettant d’individualiser les formes respiratoires et
cardiaques. Ces manifestations surviennent principalement après le repas et surtout après absorption de
boissons gazeuses.
L’association de signes thoraciques et de symptomes digestifs ayant une allure posturale devra
toujours faire évoquer l’éventualité d’une hernie hiatale. Toutefois, des hernies volumineuses peuvent
rester totalement latentes.

Manifestations hémorragiques et veineuses

La compression du collet de la hernie par le hiatus oesophagien peut gêner la circulation de retour et
occasionner une stase à l’origine d’ulcérations ou d’hémorragies diffuses au niveau de la poche
herniée. C’est ainsi que l’on peut découvrir la hernie devant un syndrome anémique. Il s’agit d’une
anémie de type hypochrome, microcytaire et ferriprive, en rapport avec un saignement occulte, dû à
des érosions muqueuses. La recherche de sang dans les selles permettra de rattacher cette anémie à une
origine digestive mais la hernie hiatale ne pourra être tenue pour responsable de l’anémie qu’après un
bilan digestif complet, ayant éliminé l’éventualité de tout cancer digestif.
Les hémorragies digestives extériorisées sous la forme d’une hématémèse ou d’un méléna sont
beaucoup plus rares et en général liées à l’existence d’un ulcère du collet. Il s’agit d’un ulcère de la
petite courbure juxta-cardiale et, en pratique, il se situe en regard de l’orifice hiatal.
Les phlébites souvent récidivantes font parties des signes classiques de la hernie hiatale. Des
thromboses veineuses sont souvent associées à l’anémie qui entraîne une réaction hyper-plaquettaire
avec hyper-coagulabilité. Tout comme l’anémie, les phlébites ne pourront être rattachées à la hernie
hiatale qu’après avoir éliminé toutes les autres étiologies possibles.

Eléments du diagnostic

Le diagnostic d’une hernie hiatale repose sur les renseignements fournis par la radiologie et
l’endoscopie.

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Chirurgie digestive 170

Radiologie

Il est possible dans certains cas, de suspecter une hernie hiatale sur le simple cliché pulmonaire devant
l’absence de poche à air gastrique sous la coupole gauche et la présence d’une image aérique sus-
diaphragmatique, rétro-cardiaque.

Le transit baryté, oeso-gastro-duodénal, doit être effectué avec une technique rigoureuse. L’utilisation
de l’amplificateur de brillance, ou du radio-cinéma, permet de suivre le transit du produit baryté dans
l’oesophage et le remplissage de l’estomac. Le malade doit être placé en procubitus (oblique antérieur
droit) ou en positon de Trendelenburg. Une compression abdominale peut être utilisée. Certains
artifices, comme la prise de clichés au cours de mouvements de déglutition, font apparaître des hernies
intermittentes.

SIGNES RADIOLOGIQUES DE LA HERNIE PAR GLISSEMENT

Son volume est variable. Elle se présente sous la forme d’une opacité ovalaire ou arrondie, coiffant le
pôle supéro-interne de la grosse tubérosité. Elle est toujours sus-
diaphragmatique surmontée du cardia. Les plis qui la traversent sont épais, parallèles, de type
gastrique. L’oesophage s’abouche à son sommet parfois latéralement. Il peut être soit flexueux dans sa
dernière portion et est alors considéré comme de longueur normale. Lorsqu’il est rectiligne, il faut
suspecter un brachy-oesophage acquis. Parfois le diagnostic différentiel peut se poser avec la classique
ampoule épiphrénique qui correspond à une dilatation variable et non pathologique de l’oesophage
terminal. En fait, cette dernière présente des caractères bien particuliers, avec ses plis oesophagiens, sa
symétrie par rapport à l’oesophage, sa contraction active, et son siège sus-cardial.

En cas de hernie de très petite taille, le diagnostic repose sur l’analyse de signes indirects,
oesophagiens ou gastriques: oesophage dyskinétique, stase barytée dans le bas oesophage,
convergence des plis gastriques vers le hiatus oesophagien (aspect en tête d’oiseau), effacement de
l’angle de His, réduction de la poche d’air.

Enfin, l’examen radiologique s’attachera à la mise en évidence d’un reflux gastro-oesophagien.

SIGNES RADIOLOGIQUES DE LA HERNIE PAR ROULEMENT

Ce type de hernie sera affirmé si l’abouchement de l’oesophage est parfaitement mis en évidence au-
dessous du diaphragme. L’image de la hernie est arrondie, médiane ou para-médiane, et se projette,
habituellement, au-dessus de la partie interne de la coupole gauche.

Endoscopie

Elle permet de porter le diagnostic de hernie hiatale en décelant la position intra-thoracique du cardia.
Le sphincter oesophagien inférieur est désolidarisé du hiatus diaphragmatique et on observe alors deux
formations annulaires étagées. L’endoscopie est surtout utile pour apprécieur mieux que la clinique ou
la radiologie, la présence d’une oesophagite réactionnelle ou d’un endo-brachy-oesophage. Elle permet
d’éliminer les lésions associées grâce à des biopsies étagées.

Evolution et complications

L’évolution est étonnamment variable et sans rapport avec le volume de la hernie.


• L’oesophagite peptique est une complication redoutable dont l’évolution peut conduire à une
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Chirurgie digestive 171
sténose très serrée.
• L’ulcère oesophagien peut siéger au niveau du collet, et s’observe dans les volumineuses hernies
par glissement ou par roulement. Il ne se manifeste pas par un syndrome douloureux particulier. Il
présente un risque de perforation dans le médiastin. Il peut également se compliquer d’hémorragies
abondantes. L’ulcère de Barett se rencontre habituellement à la jonction de la muqueuse
oesophagienne et gastrique et se voit principalement dans les endo-brachy-oesophages.
• L’étranglement herniaire est une complication des hernies par roulement avec volvulus gastrique.
L’étranglement donne un tableau dramatique associant une symptomatologie digestive: douleurs
épigastriques, vomissements et une symptomatologie thoracique: dyspnée et collapsus

Sur le plan radiologique, l’image typique est celle d’un double niveau hydro-aérique situé de part et
d’autre de la coupole gauche.

Traitement

La hernie hiatale ne présentant aucune symptomatologie ne nécessite aucun traitement.

TRAITEMENT MEDICAL
C’est celui du reflux gastro-oesophagien.

TRAITEMENT CHIRURGICAL

A RETENIR…

Un train peut en cacher un autre…


Ne pas rapporter trop rapidement à une hernie hiatale des
signes provoqués par une autre affection (anémie et cancer
colique par exemple).

Il ne s’adresse qu’aux hernies compliquées ou à celle dont les signes résistent au traitement médical.
Les risques ne sont pas nuls et les récidives peuvent se voir. Il existe des interventions conservatrices
qui consistent à rétablir la continence cardiale et des interventions de résections dans les cas de sténose
peptique.

POUR CONNAITRE ENCORE PLUS SUR CETTE AFFECTION ,LISEZ CE QUI SUIT :

LES HERNIES HIATALES: BASES THERAPPEUTIQUES ET INDICATIONS


CHIRURGICALES

C’est la hernie à travers le hiatus oesophagien, la plus fréquente des hernies diaphragmatiques.
Elle se revèle à tout âge, chez le nourrisson, comme chez l’adulte, elle est congénitale le plus souvent,
ou acquise, les facteurs acquis jouant plus souvent le rôle de facteur prédisposant, déclenchant ou
aggravant. Ces facteurs acquis par l’obésité, toutes les causes d’hyperpression abdominale (grossesse,
ascite) à l’opposé
des cachexies avec dénutrition et atrophie musculaire. Enfin c’est une affection qui frappe également
les deux sexes.

ANATOMO-PATHOLOGIE

Il existe deux grandes variétés du type anatomique de hernies hiatales qui diffèrent par leur
mécanisme, la position du cardia et leur évolution. La hernie hiatale par glissement (type I) qui
représente 90% de cette pathologie, la cardia est attirévers le haut, intrathoracique, il n’existe qu’un

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sac à la face antérieure du cardia et de l’oesphage. Cette migration de cardia étire la région
cardiotubérostatique, efface l’angle de His et crée des conditions du reflux gastro-oesophagien. Par
contre les complications mécaniques à type d’étranglement ne s’observe pas dans ce type de hernie.

Le deuxième type de hernie hiatale est le type II ou hernie par roulement ou encore hernie
paraoesophagienne ( 10% environ des hernies hiatales) : le cardia reste en place, il existe un sac
herniaire complet, c’est la grosse tubérosité par suite du relachement du ligament phrénogastrique qui
se déroule vers le haut attirant dans le thorax une partie de la grande courbure et de la grosse
tubérosité. Dans cette hernie l’angle de His reste intact, le reflux ne s’observe que rarement par contre
ces hernies sont susceptibles d’etranglement. Les formes mixtes qui sont des hernies à la fois par
glissement et par roulement correspondent à des hernies volumineuses, initialement
paraoesophagiennes dans lesquels les cardia a secondairement migré dans le thorax.
Le contenu de ces hernies est de façon constante le cardia et une partie de la grosse tubérosité
de l’estomac, le sac existe toujours plus ou moins complet suivant le type de la hernie comme nous
venons de le voir, la largeur du collet hernaire est variable, la réductibilité de ces hernies est obtenue
dans l’immense majorité des cas de hernies hiatales non compliquées.
Enfin la taille de ces hernies est un élément important à considerer dans le diagnostic et le traitement ;
elle est variable: dans les hernies par glissement ce sont souvent des hernies de petit volume, voire
même intermittente, voir même encore remplacées par une simple malposition canotubérositaire ou
une incométence cardiale, par contre les très grandes poches herniaires sont le fait des hernies de type
II ou des hernies mixtes. Dans ces cas là on peut observer des volvulus plu au moins permanents de
l’estomac.
Ainsi dans la hernie de type I ou ses équivalents, le traitements de l’affection va essentiellement
être le traitement de la complication qui est le reflux gastro-oesophagien alors que dans la hernie de
type II le traitement sera opposé et visera à supprimer les manifestations liées au volume de la hernie
et tout type de complication mécaniques possible en l’absence habituelle de reflux.

RAPPEL ANATOMIQUE-PHYSIOLOGIQUE sur la continence oestrogastrique:

Différents éléments assurent chez un sujet normal l’absence de reflux gastro-oesophagien ou


de hernie hiatale vraie. C’es un calibre du hiatus admettant simplement le passage oesophagien et des
pneumogastriques; c’est la contractilité musculaire de cet anneau complété en arrière par la
contractilité des piliers diaphragmatiques qui peuvent aasurer, lorsqu’ils sont en contact avec cet
œsophage la fermeture par collapsus oesophagien au moment des mouvements inspiratoires qui créent
une dépression thoracique. C’est également la longueur et l’existence du segment abdominal qui doit
mesurer au moins trois centimètres, c’est l’implication oblique de ce dernier sur la grosse tubérosité
gastrique réalisant un angle du His. C’est l’existence de façon accessoire de moyens de fixité, tels que
les lames vasculaires (la coronaire stomachique) telle que la pars condensa du petit épiploon, que le
ligament phréno-gastrique, ces éléments complètent les dispositifs antireflux. La résultante de ces
facteurs est l’existence d’un sphincter fonctionnel physiologique au niveau de l’oesophageinférieur,
détecté par la manométrie oesophagienne sous forme d’une zone de haute pression; ainsi, l’exstence
d’anomalies congénitales ou de facteur acquis, peuvent entrainer l’apparition d’un reflux ou d’une
hernie hiatale en jouant directement sur les mécanismes de la compétence cardiale.

LE TRAITEMENT CHIRURGICAL des hernies hiatales

L’endoscopie, hormis quelques cas très particuliers n’a pas sa place parmi les methodes
thérapeutiques des hernies hiatales.

1º - Les méthodes chirurgicales


Le but est double: reduction de la hernie avec reconstitution anatomique de la région hiatale
d’une part, suppression du reflux d’autre part. Ainsi quel que soit le type d’intervention choisi, la
chirurgie comporte la libération des piliers, l’abaissement du cardia et sa reintérgration si possible en

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Chirurgie digestive 173
situation sous-diaphragmatique, le rapprochement des pilliers permettant la réduction du calibre de
l’orifice hiatale, la reposition et la fixation abdominale de l’œsophage et du cardia, la restauration de
l’angle de His et des techniquesplus complètes d’anti-reflux.

Les interventions par voie abdominale: l’opération de base la plus longtemps utilisée était
l’opération de DOR ou LORTA-JACOB où le système anti reflux est constitué par une réfection de
l’angle de His et une hémivalve antérieure avec la grosse tubérosité gastrique. L’opération de
TOUPET réalise à l’opposé une valve postérieure par rapport à œsophage, le reste des temps
opératoires étant identique, l’opération de NISSEN ou fundopliature totale réalise un enfouissement
complet du bas œsophage autour d’un manchon gastrique. La gastroptexie de BOEREMA relève d’un
principe différent puisqu’elle n’aborde pas la région hiatale mais elle se contente de réaliser une
gastropexie antérieure à la paroi abdominale antérieure, il y a ainsi réduction de la hernie mais pas de
geste direct au niveau de la région hiatale. Dans la même famille d’intervention, des techniques
voisines de fixation natérieure de l’œsophage et du cardia ou de l’estomac maintiennent la réduction
de la hernie, qu’il s’agisse de fixation par une bandelette synthétique, par le ligament rond du foie ou
par une bandelette cutanée ou enfain par les prothèses siliconées actuellement. Ces opérations peuvent
avoir des compléments que sont la vagotomie avec éventuellement pyroplastie ou la pyroplastie isolée.
Ce que l’on peut dire cest qu’actuellement en déhors d’indications particulière, ces gestes associés sont
peu réalisés.

Les interventions par voie thoracique se résument à l’opération de BELSEY MARK IV dont
le principe est la dissection et la réduction de la hernie dans l’abdomen par voie thoracique avec une
transposition antérieure du cardia. Cette technique était surtout utilisée dans les pays anglo-saxons.

LES INDICATIONS DU TRAITEMENT CHIRURGICAL

Sont, chez l’adulte, réservées aux formes rebelles au traitement médical associé aux précautions
hygiéno-diététique; l’indication opératoire sera envisagée en fonction du contexte clinique tout
d’abord. Devant les formes douloureuses rebelles, dans les formes anémiques, dans les formes
thrombogènes ou pseudo-angineuses. Des constatations endoscopiques ensuite, dès qu’il existe une
oesophagite grave résistant au traitement médical même en l’absence de troubles fonctionnels
importants, il faut envisager un antireflux. Dépend ensuite du type anatomique: toute hernie par
glissement doit être dès qu’elles s’accompagne d’oesophagite rebelle ; en l’absence d’oesophagite, si
le diagnostic de hernie par glissement ou de reflux est fait de façon certaine par les examens objectifs
chez des patients qui présentent un syndrome fonctionnel pur, authentique et gênant, le traitement
chirurgical est justifié après une tentative de traitement médical. Les hernies de type II seront opérée
beaucoup plus systématiquement en raison des troubles compressifs, des risques d’étranglements et
d’hémorragies et surtout aussi de la relative facilité de la réduction herniare. Les indications
opératoires sont, bien entendu, retenus pour les malades chez qui il n’existe pas de contre-indication
chirurgicales absolue ou relative ; le terrain et l’importance des facteurs de risque chez les futurs
opérés peuvent faire opter pour des opérations courtes du type gastropexie antérieure et variante ; à
l’opposé chez les gens en parfait étant général, l’intensité d’une oesophagie fait opter habituellement
pour des opérations anti-reflux techniquement plus délicates mais également beaucoup plus efficaces
comme la fundopliature de Nissen. Les indications opératoires, enfin dépendant du terrain, elles sont
beaucoup plus larges chez le nourrisson, et l’enfant. Dans ce cas l’oesophagite est redoutable,
d’évolution souvent rapide vers des complications de sténose ou d’hémorragie.

Le choix de la voie d’abord : habituellement la chirurgie de la hernie hiatale et du reflux se fait


par voie abdominale. les indications de la voie thoracique étant certaines formes compliquées avec
brachyoesophage, les récidives des hernies hiatales opérées et également les malades très obèses. Les
suites opératoires de cette chirurgie sont caractérisées par leur bénignité habituelle, la mortatlité se
situe entre 1 et 2%, la morbidité constituée par des complications per-opératoires: le traumatisme de
l’œsophage en cours de dissection peut expliquer dans les suites un tableau d’abcès sous phrénique

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gauche. Les complications post-opératoires sont des complications avant tout thrombo-emboliques
justifiant dans ce type de chirurgie le traitement préventif de la thrombose vasculaire. Parmi les
complications mineures, on observe souvent un petit degré de gastroplégie post-opératoire avec des
sensations de plénitude gastrique post-prandiale, s’expliquant par un traumatisme vagal fréquent per
opératoire, et enfin, quelques manifestations fonctionnelles surtout marquées par l’opération de Nissen
comme les impossibilités ou les difficultés de vomir ou d’éructer qui peuvent parfois être très gênantes
pour le malade. A long terme, la seule complication importante est la récidive de la hernie ou du
reflux ; il est difficile de la chiffrer. Elle se situe globalement à 10% des malades, ce qui justifie
actuellement l’utilisation de procédés anti-reflux plus complets, comme l’opération de Nissen, ou
l’opération de Hill.

V. MEGA-OESOPHAGE

Généralités
Le méga-oesophage idiopathique, encore appelé achalasie ou cardio-spasme, selon l’interprétation
pathogénique qu’on lui attribue, est une affection d’étiologie inconnue qui touche de façon à peu près
égale les deux sexes à tous les âges. L’achalasie typique est caractérisée par l’absence de toutes
contractions péristaltiques primaires ou secondaires qui sont remplacées par des contractions
stationnaires, désorganisées, non propulsives et par l’absence de relaxation du sphincter oesophagien
inférieur. Le tonus de ce sphincter est soit normal soit élevé et, dans ce dernier cas il existe un cardio-
spasme réel. Le substratum histologique de ces troubles est généralement représenté par une altération
(absence ou raréfaction) de l’innervation intrinsèque intéressant les plexus du Meissner et d’Auerbach.
Une destruction de ces plexus d’Auerbach peut se voir dans la trypanosomiase (maladie de Chagas).
Ces anomalies permettent de comprendre que le relâchement du muscle lisse qui correspond
physiologiquement à sa phase d’activité ne se produit pas ici. La stase des aliments dans l’oesophage
va entraîner progressivement une dilatation de celui-ci justifiant le terme de méga-oesophage.

Circonstances de diagnostic
Les troubles fonctionnels sont dominés par la dysphagie. Il s’agit , habituellement, d’une dysphagie
capricieuse, non douloureuse, fréquemment aggravée par les émotions, souvent paradoxale (c’est-à-
dire prédominante pour les liquides). Elle est, quelquefois, décrite comme une sensation de plénitude
rétrosternale, qui cède chez certains patients à la déglutition de quelques gorgées d’eau froide. A côté
de la dysphagie, peuvent se produire, parfois, des régurgitations alimentaires abondantes, mais
l’absence de caractère acide permettra de les différencier des vomissements.

Au stade initial, des manifestations douloureuses thoraciques peuvent exister, elles correspondent à des
contractions intenses et répétitives du corps de l’oesophage. Cette symptomatologie douloureuse
explique le terme de “Vigorous Achalasia” retrouve dans la littérature anglo-saxonne.

Eléments du diagnostic

Radiologie

Exceptionnellement, la dilatation oesophagienne est telle qu’elle constitue une ombre médiastinale
visible sur le cliché thoracique.

Le transit baryté oesophagien va affirmer le diagnostic en montrant:


- une dilatation oesophagienne plus ou moins importante avec, dans les cas extrêmes, une
augmentation de la longueur, réalisant un véritable dolicho-méga-oesophage sur le diaphragme,
donnant l’aspect dit “en chaussette”. Il existe en permanence une stase de liquide et de débris
alimentaires;

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- un effilement progressif de l’extrémité inférieure de l’eosphage, se présentant sous l’aspect
classique en “queue de radis”. Il est régulier et axial avec, parfois quelques plis longitudinaux. Il ne
s’ouvre pas au moment de la dilatation qui peut être modérée ou même absente et, dans ces cas,
l’exploration manométrique apporte des éléments au diagnostic.

Endoscopie

Elle est difficile sur ces oesophages dilatés contenant toujours un liquide de stase et des résidus
alimentaires. Elle doit donc être précédée de lavages répétés de la cavité oesophagienne. Les risques de
perforation que l’on croyait majeurs, sont actuellement minimisés par l’emploi des fibroscopes. Elle a
surtout pour intérêt de préciser l’état de la muqueuse sus-stricturale (très souvent le siège d’une
oesophagite inflammatoire) et de dépister d’éventuelles lésions associées et, au premier chef, un cancer
de l’oesophage. La possibilité de franchir le sphincter oesophagien inférieur est très variable selon les
cas.

Toutefois, l’impossibilité de passer l’endoscope à travers le cardia doit faire rechercher plus
particulièrement une lésion organique à ce niveau.

Evolution et pronostic

La dysphagie du méga-oesophage évolue de façon très inconstante. Certains cardio-spasmes “bénins”


se manifestent par des crises de dysphagie passagères et espacées et sont assez bien tolérés. D’autres,
au contraire s’aggravent progressivement et aboutissent à un véritable état de dénutrition.

L’évolution est le plus souvent marquée par la survenue de complication.

• L’oesophagite est d’autant plus fréquente que la sténose est importante. Elle peut s’accompagner
d’érosion muqueuse, voire d’ulcération.
• Le cancer de l’oesophage, selon les statistiques, se voit dans 3 à 8 % des cas de méga-oesophage.
Il apparaît après plusieurs années d’évolution, généralement dans les cas de méga-oesophage où le
traitement initial a été inefficace ou tardif. Ce cancer peut siéger au niveau du rétrécissement de la
partie basse de l’oesophage, ou plus souvent, à distance de la zone inférieure rétrécie. Son
diagnostic est difficile, souvent tardif, masqué par la symptomatologie du méga-oesophage qui doit
donc être considéré comme un véritable état précancéreux nécessitant une surveillance
endoscopique régulière. Cette cancérisation serait favorisée par l’oesophagite chronique résultant
de la stase oesophagienne.
• Les complications infectieuses (abcès du poumon, infection broncho-pulmonaire) peuvent venir
compliquer les régurgitations intra-trachéales, surtout nocturnes.

TRAITEMENT

Une tentative de traitement médical, temporaire, peut être effectuée en utilisant la nifédipine
(Adalate® ). Celle-ci inhibant la diffusion des ions Ca2+ dans les cellules du
muscle lisse, diminue ainsi la contractibilité musculaire et agit en particulier sur la pression de base du
SOI dont le tonus est essentiellement d’origine myogénique, Ca2+ dépendant. Son efficacité clinique
dans l’achalasie compensée et la maladie des spasmes diffus de l’oesophage (30 à 50 mg par 24h)
serait intéressante. Ce traitement ne peut cependant être présenté comme définitivement curatif car à
l’arrêt de la thérapeutique la symptomatologie réapparait. Aussi est-il nécessaire soit de dilacérer, par
des dilatations instrumentales forcées, les fibres musculaires de la zone achalasique, soit de sectionner,
par une myotomie extra-muqueuse, les fibres circulaires du sphincter oesophagien inférieur (Opération
de Heller)
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Le traitement instrumental connaît un regain d’intérêt grâce au dilatateur pneumatique de Ridder-


Moeller, qui utilise le principe du fil guide mis en place à travers la sténose, sous contrôle
endoscopique. Le ballonnet est gonflé à une pression de 200mm de mercure pendant 2 à 4 min. Cette
méthode apporte des résultats fonctionnels remarquables dans 80 % des cas.

Le traitement chirurgical: Il s’agit de la cardiomyotomie extra-muqueuse ou opération de Heller.

Cette intervention est réalisée par voie abdominale et comporte une section qui intéresse les 7 à 8
derniers centimètres de l’oesophage, débordant sur le cardia et la face antérieure de l’estomac. La
plupart des chirurgiens associent à cette intervention une reconstitution de l’angle de His. Les résultats
sont excellents dans 80 % des cas, au prix d’une grande minutie évitant en particulier une perforation
de l’oesophage.

VI. MALADIES RARES ET SYNDROMES A NOM PROPRE

Diverticules

Un diverticule de l’oesophage est une poche développée aux dépens de la paroi oesophagienne,
limitant une cavité qui communique librement avec la lumière. Il est classique de distinguer les
diverticules cervicaux ou pharyngo-oesophagiens et les diverticules thoraciques que l’on divise en
para-bronchiques et épiphréniques. Les diverticules médio-thoraciques para-bronchiques sont dits de
traction, et s’opposent aux diverticules pharyngo-oesophagiens dits de pulsion. Les diverticules
épiphréniques sont, les plus souvent mixtes.

Les diverticules par pulsion sont secondaires à une hyperpression à l’intérieur de la cavité
oesophagienne. Le plus fréquent est le diverticule de Zencker, qui siège sur la face postérieure de la
jonction pharyngo-oesophagienne, avec une nette prédominance chez l’homme après 60 ans. Ce
diverticule peut être responsable de troubles, en particulier, de dysphagie et de régurgitations
alimentaires. Le diagnostic est fait par l’examen radiologique qui permet de découvrir un diverticule de
Zencker pour 800 transits oesogastroduodénaux environs. Le traitement de ces diverticules, lorsqu’ils
sont symptomatiques, est chirurgical. Une nouvelle complication a été rapportée en 1982:
l’accumulation dans la poche diverticulaire de médicaments administrés sous la forme de comprimés,
ce qui ne facilite pas l’efficacité thérapeutique…

L’intervention consiste à réaliser une diverticulectomie et une myotomie au-dessous de la résection du


diverticule pour éviter les récidives. Il s’agit d’une intervention mineure, réalisée par une petite voie
d’abord (cervicotomie) et qui donne d’excellents résultats. Le seul risque opératoire est celui d’une
fistule qui se draine en général bien vers l’extérieur et qui, en cas de survenu, se tarit assez rapidement.
La mise en place d’une sonde naso-gastrique au cours de l’intervention permet éventuellement une
reprise alimentaire par voie entérale en attendant la cicatrisation de la suture.

Les diverticules para-bronchiques siègent en général, dans la partie moyenne de l’oesophage, et sont
secondaires à la traction exercée sur la paroi oesophagienne par des lésions inflammatoires de
voisinage. Ils n’ont aucune sémiologie et sont généralement découverts au cours d’examens
radiologiques oeso-gastriques.

Les diverticules mixtes par traction – pulsion sont très rares. Ils siègent au niveau des 10 derniers
centimètres de l’oesophage. Ils ne donnent que très rarement des troubles, mais ils sont souvent
associés à un méga-oesophage ou à une hernie hiatale.

Spasmes diffus de l’oesophage ou syndrome des spasmes étagés de Barsony.

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Affection de cause inconnue, caractérisée par des anomalies du péristaltisme oesophagien responsable
d’une symptomatologie associant des crises douloureuses thoraciques à type de crampes rétro-
sternales, d’une dysphagie. La déglutition provoque une onde péristaltique normale au niveau du tiers
supérieur de l’oesophage mais arrivée au tiers moyen elle se transforme en plusieurs contractions
segmentaires de grandes amplitudes et de grande durée. Le SOI a un tonus normal et une relaxation
satisfaisante. Le transit baryté montre des anomalies sous aortiques sous la forme d’images associant
une succession de dilatations et de rétrécissements. Le traitement est représenté par des dilatations
mais ses résultats sont moins constants que ceux obtenus dans le méga-oesophage. Dans les formes
graves, une myotomie étendue (du cardia jusqu’à la crosse de l’aorte) peut être proposée. L’Adalate ®
peut être utilisé au cours des crises avec profit mais son action est temporaire.

Anneau de Schatzki

Il s’agit d’un diaphragme muqueux constitué par une fine membrane, qui s’insère perpendiculairement
sur la circonférence de l’oesophage. Il est toujours situé au-dessus d’une petite hernie hiatale à la
jonction oeso-gastrique. Sa fréquence est difficile à évaluer du fait de la latence clinique du plus grand
nombre d’entre eux. Elle serait de l’ordre de 6 à 14 %. La principale manifestation clinique est
constituée par la survenue brutale de crises dysphagiques intermittentes. Il donne une image
radiologique caractéristique de rétrecissement très segmentaire, sus-hiatale. Le traitement si nécessaire
consiste à provoquer sa rupture par voie endoscopique ou à effectuer son exérèse par voie
chirurgicale.

Dysphagia Lusoria

C’est une anomalie congénitale du développement des arcs aortiques, le plus souvent représentée par
une artère sous-clavière droite naissant de la crosse. Cette anomalie n’est pas exceptionnelle, mais elle
ne donne que très rarement des manifestations cliniques. L’indication opératoire n’est imposée que par
l’importance des troubles fonctionnels.

Pathologie traumatique

Elle regroupe les perforations instrumentales, les plaies par balles ou par arme blanche, les
ruptures au cours des traumatismes thoraciques, les plaies opératoires et les ruptures spontanées.
La rigidité de la cage thoracique s’oppose aux signes physiques directs, expliquant en partie, le retard
apporté à l’urgence de certains diagnostics, et par suite, la gravité du pronostic. La symptomatologie
clinique peut varier en fonction du siège de la perforation et de la date à laquelle est vu le malade.
Toutes ces plaies ont, généralement pour conséquence, la survenue d’une médiastinite avec ses
redoutables complications. La suspicion du diagnostic impose la recherche d’un emphysème sous-
cutané et la réalisation de la radiographie thoracique (clarté gazeuse rétro-oesophagiènne ou un
emphysème médiastinal, existence d’un pneumo-thorax ou d’un épanchement pleural). Le transit
oesophagien, à l’aide de produits hydro-solubles, confirmera la perforation, précisera son siège, et
appréciera l’état de l’oesophage. En l’absence d’un diagnostic et d’un traitement précoce, l’évolution
se fait , généralement, vers la constitution d’un syndrome de suppuration profonde, associé à des
troubles cardio-vasculaires et respiratoires compromettant le pronostic.

La rupture spontanée de l’oesophage ou syndrome de Boerhaave est due à une hyperpression


dans la lumière oesophagienne, à glotte fermée. Elle survient dans un contexte clinique particulier où
dominent les efforts de vomissement. Il s’y associe très rapidement une douleur abdominale et un état
de choc, avec une détresse respiratoire expliquée par le passage du liquide gastrique dans le médiastin
et la plèvre. La majorité des auteurs est favorable à une intervention précoce associant le traitement de
la lésion oesophagienne et le nettoyage du médiastin.

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Syndrome de Mallory-Weiss

Ce syndrome est défini anatomiquement par la déchirure longitudinale de la muqueuse de la


jonction oeso-gastrique. Ce n’est certainement pas un syndrome rare puisqu’il intervient environ dans
5 à 10 % des hémorragies digestives hautes et surtout chez l’éthylique.
Cette déchirure comparable à une fissure longitudinale et donc aisément distinguable des ulcérations
aiguës ou des érosions superficielles ovalaires provoquées par les sondes de lavage gastrique, apparaît
généralement après des efforts de vomissements. En fait, elle est directement liée à des modifications
de la pression intra-gastrique secondaires à une hyperpression intra-abdominale, qu’il y ait ou non des
vomissements.

Seule l’endoscopie faite en urgence permet d’affirmer ce diagnostic et de déceler


éventuellement des lésions associées: hernies hiatales, gastrites et ulcères… Généralement,
l’hémorragie du syndrome de Mallory-Weiss est peu importante et d’évolution favorable, la lésion
cicatrisant dans des delais rapides. La nécessité d’une intervention chirurgicale devant une hémorragie
non maîtrisable reste exceptionnelle, et elle est alors grevée d’une mortalité importante. En principe,
un traitement médical symptomatique (arrêt des efforts de vomissement, pansements gastriques, anti-
sécrétoires, transfusions), permet d’attendre une évolution favorable dans 90 % des cas.

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L’ESTOMAC – DUODENUM

I. RAPPEL
Anatomie et histologie

L’estomac occupe la plus grande partie de la loge phrénique gauche de la cavité


abdominale. Sa capacité est de 1 à 1.5 litres et il comprend schématiquement 2 parties, une partie
verticale (fundus), une partie horizontale (l’antre). Quelle que soit la zone considérée, la paroi de
l’estomac est constituée de 4 couches tissulaires :

- la séreuse superficielle qui n’est que le mésothélium du péritoine viscéral reposant sur une mince
couche de tissu conjonctivo-vasculaire;
- la musculeuse: la musculature de l’estomac est particulièrement puissante pour assurer le brassage
du bol alimentaire. La musculeuse est formée de 3 couches, superficielle longitudinale, circulaire
moyenne (renforcée au niveau du pylore en un véritable sphincter) et oblique ou plexiforme profonde;
- la sous-muqueuse: c’est une couche épaisse faite d’un tissu conjonctif fibro-cellulaire contenant
quelques fibres élastiques, mais surtout un important réseau artério-veineux plexiforme profond
connecté avec le réseau vasculaire muqueux;
- la muqueuse: elle est séparée de la sous-muqueuse par une couche de fibres musculaires lisses, la
muscularis mucosae. Il est possible de décrire une organisation d’ensemble quelle que soit la zone
considérée: l’épithélium, unistratifié, repose sur un chorion vasculaire, la lamina propria. En surface
luminale, l’épithélium dessine des cryptes. A la base des cryptes, l’épithélium s’invagine
profondément dans la lamina propria pour former des glandes débouchant dans le fond des cryptes par
une zone rétrécie, le collet , qui correspond à la zone de régénération et de prolifération mitotique. L’
épithélium cryptique superficiel est uniquement constitué de cellules muqueuses juxtaposées et reliées
entre elles par d’importants complexes de jonction apexiens. Le mucus est sécrété par exocytose. Par
sa composition particulière et différentielle selon les zones, il pourrait jouer un rôle important dans la
protection de la muqueuse contre l’acidité gastrique. Il représente en grande partie la composante
alcaline du suc et participe au pouvoir tampon de la sécrétion gastrique. Au niveau du cardia la
transition entre l’épithélium oesophagien, de type malpighien, et l’épithélium unistratifié gastrique est
brutale. Les cryptes sont larges et peu profondes: les glandes peu développées, sont du type muqueux.

• Au niveau du fundus, les cryptes sont nombreuses, courtes et étroites. Elles se prolongent dans la
profondeur de la lamina propria par des glandes tubulaires rectilignes, juxtaposées et hautement
différenciées. Deux types cellulaires principaux sont représentés dans les glandes fundiques :

- les cellules pariétales, les plus nombreuses, adaptées au transfert actif du proton et de l’ion chlore
avec de très nombreuses mitochondries, et un complexe membranaire apexien. Ce complexe subit des
modifications adaptatives en fonction de l’état de stimulation. En phase non sécrétoire il est constitué
par de nombreuses tubulo-vésicules. En phase sécrétoire les tubulo-vésicules disparaissent et
aboutissent à la formation de canalicules intra-cytoplasmiques bordés de nombreuses microvillosités,
- les cellules peptiques surtout nombreuses dans la zone basse des glandes ont toutes les
caractéristiques ultra-structurales du type séreux. Les grains de zymogène apexien contiennent les
hydrolases retrouvées dans la sécrétion gastrique et en particulier la pepsine sous forme du précurseur,
le pepsinogène, qui sera activé lors de l’abaissement du pH gastrique.
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• Au niveau de l’antre, les cryptes sont hautes et étroites. Les glandes entérales sont courtes et
fréquemment tuboloramifiées. La plupart des cellules sont du type muqueux, proches de celles
observées sur l’épithélium cryptique. La caractéristique cytologique la plus remarquable est la
présence d’un très grand nombre de cellules endocrines dont les granules sécrétoires contiennent les
polypeptides “hormonaux” gastriques. Parmi ces cellules endocrines, la cellule “G” est souvent la plus
connue. Elle synthétise et sécrète la gastrine et ses variantes moléculaires. Le polymorphisme
granulaire observé correspond à des étapes différentielles dans le cycle sécrétoire. Mais d’autres types
cellulaires endocrines ont été caractérisés dans la muqueuse antrale et également la muqueuse
fundique.

L’innervation gastrique est double: intrinsèque (plexus sous-muqueux de Meissner et surtout


myentériques d’Auerbach) et extrinsèque. Cette dernière est assurée par le parasympathique
cholinergique (nerf vague) et l’orthosympatique adrénergique (nerfs splanchniques).

PHYSIOLOGIE

Fonction motrice

La motricité de l’estomac est caractérisée par deux fonctions; une fonction réservoir assurée par le
fundus, par laquelle le volume de l’estomac s’adapte à la quantité des aliments ingérés, une fonction
d’évacuation assurée par l’antre et qui permet d’une part, la vidange gastrique et d’autre part, le
brassage des aliments.

Le contrôle myogène est assuré par un pace-maker, c’est-à-dire un groupe de cellules dont la
fréquence de dépolarisation est la plus grande et imprime son rythme aux cellules adjacentes. Cette
dépolarisation périodique ou onde lente gastrique se propage très rapidement dans le sens transversal et
se déplace dans le sens du grand axe de l’organe à une vitesse croissante du cardia au pylore. Ces
ondes lentes représentent une activité électrique omniprésente qui se produit en présence ou en
l’absence de contraction. Lorsqu’une contraction se produit, elle est accompagnée, sur
l’électromyogramme, par une bouffée de potentiel de pointe qui se greffe sur l’onde lente dans un
rapport temporel presque constant. Par ailleurs, l’accroissement de la vitesse de propagation de l’onde
lente du cardia vers le pylore, explique que les ondes de pression gastrique soient bien individualisée
au niveau du corps gastrique, alors qu’au niveau de l’antre, il existe une contraction en bloc de la
région , c’est la systole antrale.
Ce contrôle myogénique subit une modulation assurée par des facteurs nerveux et hormonaux.

La commande nerveuse est surtout assurée par le nerf vague. Des récepteurs
échelonnés sur l’estomac et le duodéno-jéjunum vont naître des influx sensitifs qui gagnent le noyau
dorsal du vague d’où partent des messages moteurs qui vont en retour, modifier la motricité gastrique.
La stimulation par la distension de l’estomac des récepteurs gastriques va ralentir sa motricité. Des
récepteurs duodéno-jéjunaux sensibles à l’augmentation de la pression osmotique, à la diminution du
pH, à l’augmentation du taux des triglycérides ou des acides aminés vont eux aussi ralentir la motricité
gastrique.

Le contrôle humoral s’effectue par l’intermédiaire des hormones gastro-intestinales: la


CCK-PZ, la sécrétine diminuent la motricité gastrique et ralentissent l’évacuation. Par un mécanisme
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Chirurgie digestive 181
différent, la gastrine, tout en augmentant la motricité antrale et duodénale, ralentit l’évacuation
gastrique.

Le pylore est le siège d’un tonus de base qui est mis en évidence par une zone de haute
pression évidente au repos. Ce tonus se relâche quelques fractions de seconde avant l’arrivée de la
contraction antrale.

Il est augmenté par les graisses, les amino-acides, l’acide chlorhydrique. Il est diminué
par la CCK-PZ ou la sécrétine.

Ainsi la motricité gastrique normale suppose: l’existence d’une relation réceptive du


fundus, des contractions antrales efficaces, un jeu du pylore correct, une coordination antro-pyloro-
duodénale efficace.

Fonction sécrétoire

Le suc gastrique joue un rôle modeste dans la digestion. C’est un liquide incolore,
légèrement visqueux, sécrété à raison de 1 à 1.5 litres par jour, le débit étant rythmé par les repas. Il
comporte des protéines du plasma (en particulier de l’albumine, des immunoglobulines) des activités
enzymatiques (pepsinogènes et pepsines), des glycoprotéines (sécrétées par les cellules muqueuses), le
facteur intrinsèque (glucoprotéine à faible teneur en glucides) et surtout une riche sécrétion acide.

Le contrôle de la sécrétion gastrique fait appel à des mécanismes nerveux et hormonaux.

L’action des vagues est essentielle à toutes les étapes de la sécrétion gastrique. Elle
s’exerce par l’intermédiaire de réflexes cholinergiques mis en jeu par des stimulations psychiques,
sensorielles et mécaniques. Elle peut se schématiser par une stimulation directe des cellules fundiques,
une sensibilisation de ces dernières à l’action de la
gastrine et une action trophique sur la muqueuse gastrique. La stimulation vagale aboutit à la sécrétion
d’un suc gastrique proportionnellement plus riche en pepsine que la stimulation gastrique.

La régulation hormonale est essentiellement sous la dépendance de la gastrine qui


provoque une sécrétion gastrique acide, et également chez l’homme une sécrétion du facteur
intrinsèque. En fait une synergie vague-gastrine est indispensable pour aboutir à un plein effet des
stimulations vagales ou gastriques. D’autres hormones interfèrent également avec la gastrine au niveau
du fundus (CCK-PZ et GGRP ou gastric gastrin releasing polypeptide). Il faut également souligner que
la gastrine possède une action trophique essentielle sur la muqueuse fundique et jéjunale en favorisant
la prolifération cellulaire. Parmi les facteurs d’inhibition de la sécrétion gastrique il faut d’abord placer
le mécanisme d’autorégulation du release de gastrine pH dépendant (feedback négatif antral). Des
mécanismes hormonaux d’origine intestinale sont également libérés par l’introduction des graisses ou
de solutions hypertoniques dans le duodénum et le jéjunum. La sécrétion pourrait inhiber la sécrétion
acide basale ou stimulée par la gastrine. Le glucagon, la somatostatine, le G.I.P., le V.I.P. et la
calcitonine ont également des effets inhibiteurs.

PHASES DE LA SECRETION GASTRIQUE

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Au moment des repas la sécrétion gastrique augmente et passe par un maximum au bout
de 2 heures pour s’abaisser en 4 à 5 heures. La phase céphalique comporte surtout des actions
stimulantes par mécanisme nerveux (pneumogastrique) et ensuite neuro-hormonal. Elle provoque une
sécrétion de pepsine, d’eau, d’acide chlorhydrique, de gastrine et un renforcement de l’effet de la
gastrine sur les cellules pariétales du fundus. La phase gastrique comporte d’abord des actions
stimulantes (stimulation mécanique par distension du fundus, stimulation chimique par les aliments au
niveau de la région antrale, stimulation mécanique par distension antrale) mais aussi des effets
inhibiteurs, les ions H+ sécrétés freinant la libération de la gastrine. La phase intestinale plus encore
que la phase gastrique comporte une profonde interaction des deux types d’actions. Cependant, ce sont
surtout les acitons inhibitrices qui prédominent et font intervenir des mécanismes nerveux et/ou
hormonaux.

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Chirurgie digestive 183

II.MALADIE ULCEREUSE GASTRO-DUODENALE

Les terme “d’ulcère” désigne des pertes de substances siégeant au niveau de la


muqueuse gastrique et duodénale, d’aspect, de forme, de taille et d’évolution souvent bien différents.

Rappel anatomo-pathologique

La maladie ulcéreuse gastro-duodénale est caractérisée classiquement par des critères


anatomo-pathologiques précis. En poussée évolutive l’ulcère se présente comme une perte de
substance à bords nets interrompant la muqueuse et la musculeuse. Son fond est tapissé par un enduit
fibreux, fibrino-leucocytaire ou cruorique et repose sur un bloc scléro-inflammatoire d’aspect différent
selon l’âge de l’ulcère. Dans les formes récentes il s’agit d’un tissu conjonctif comportant un infiltrat
inflammatoire important et de nombreux capillaires dilatés; dans les formes anciennes la sclérose est
plus dense, parsemée d’infiltrats lymphocytaires, moins bien vascularisée mais elle s’étend en
profondeur vers l’épiploon, dessinant une “étoile scléreuse”.

L’ulcère de Cruveilhier correspond à la forme chronique et évoluée comprenant


obligatoirement une interruption complète de la muqueuse et de la musculeuse par un bloc scléreux, un
retroussement de la musculeuse vers la musculaire-muqueuse, des lésions artérielles et nerveuses.

Epidémiologie

La fréquence de la maldie ulcéreuse en pathologie digestive est considérable. Sa


prévalence globale peut atteintre 8 à 9 pour 100 habitants dans la population des pays industrialisés. En
fait le rapport ulcère duodénal-ulcère gastrique témoigne de la plus grande fréquence de la maladie
duodénale puisqu’il est de 4 à 1 chez l’homme et de 2 à 1 chez la femme. L’ulcère gastrique est 2 fois
plus fréquent chez l’homme que chez la femme et la prédominance masculine de l’ulcère duodénal est
encore plus nette (4 hommes pour 1 femme).

Plusieurs facteurs épidémiologiques ont été discutés. Les uns sont d’ordre familial et
génétique, la fréquence de l’ulcère dans la parenté des ulcéreux étant significativement élevée, et
d’autre part, les sujets du groupe sanguin 0 non sécrété (c’est-à-dire n’éliminant pas dans leur salive
des glycoprotéines caractéristiques des groupes sanguins) ayant un risque considérable par rapport aux
sujets des autres groupes. Les autres sont d’ordre sociologiques et nutritionnels, l’ulcère gastrique se
retrouvant dans des conditions de dénutrition, l’ulcère duodénal, par contre, chez des sujets présentant
des tensions psychiques importantes. Ce dernier point implique l’intervention de facteurs
psychologiques mis en évidence sur le plan expérimental (ulcère de contrainte chez le rat) ou sur le
plan clinique (personnalité de l’ulcéreux duodénal) et permet de présenter la maladie ulcéreuse
duodénale comme une véritable maladie psycho-somatique. Cependant, quelle qu’en soit sa
localisation, de nombreux autres facteurs peuvent intervenir dans l’apparition de la maladie ulcéreuse:
l’intoxication tabagique, certaines hypergastrinémies et les états d’hypercalcémie. L’ingestion de
carbonate de calcium par voie orale ou l’induction d’une hypercalcémie par voie intraveineuse
provoquent une augmentation de la sécrétion gastrique acide et de la gastrinémie. Dans ces conditions
l’hyper-parathyroïdie semble multiplier par 10 la fréquence des ulcères.

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Chirurgie digestive 184
Théorie étiologique moderne: L'infection à Hélicobacter pylori

Physiopathologie

La physiopathologie de la maladie ulcéreuse est encore loin d’être connue avec


précision. La phrase classique “pas d’acide…pas d’ulcère” peut être acceptée dans de très nombreux
cas mais ne s’applique pas toujours à la réalité des faits. En sachant qu’il n’est pas encore possible de
donner un schéma physiopathologique complet et précis, il semble raisonnable de retenir deux
facteurs:

1. L’hypersécrétion chlorhydropeptique, et plus particulièrement l’ion H+, sont considérés comme le


facteur agressif primordial, la concentration des ions H+ étant un million de fois supérieure dans la
lumière gastrique que dans le milieu intérieur, le pH du contenu gastrique pouvant s’abaisser jusqu’à 1.
Ce fort gradient de concentration peut provoquer des lésions cellulaires, et c’est ainsi que, en dehors de
l’estomac (c’est-à-dire en dehors de la zone muqueuse conçue pour résister à cette agression), les
ulcérations sont essentiellement localisées au bulbe duodénal, seule région de l’intestin où le pH est
encore fortement acide. En effet, ce n’est qu’à la pointe du bulbe que le pH s’élève jusqu’à 6, sa
neutralisation étant alors provoquée par les sécrétions intestinales et biliaires. A côté des ions H+,
d’autres agents agressifs doivent être cités: les sels biliaires en milieu acide se comportent comme des
molécules non ionisées et lèsent la membrane plasmique, altérant ainsi la “barrière muqueuse”.

1. La notion d’une barrière muqueuse ne repose pas uniquement sur les données anatomiques ou
histologiques. Certes, l’épithélium unistratifié qui recouvre la muqueuse gastroduodénale peut être
considéré comme une ligne de défense principale, constamment renouvelée tous les 3 à 5 jours et
protégée par une ligne de défense avancée représentée par la sécrétion mucipare, sorte d’enduit formé
de glycoprotéines, d’eau et de bicarbonates. En fait ce rôle de protecteur du mucus est essentiellement
d’ordre mécanique (lubrifiant pour le brassage) et non clinique. Le pôle apical des cellules épithéliales
serait donc directement exposé à l’effet corrosif s’il n’existait une véritable “barrière muqueuse”
représentée par l’ensemble “glycocalix-membrane plasmique” chargée négativement par rapport au
milieu intérieur. Ce potentiel négatif très marqué dans le fundus (barrière vraiment imperméable), est
plus faible au niveau de l’antre et nul au niveau de la jonction fundus-antre (la muqueuse antrale étant
exposée au contact de l’acide) et au niveau du bulbe duodénal (avant que la neutralisation soit
effective). L’effraction de cette protection “muqueuse” peut être provoquée par de nombreux agents
agressifs. Elle entraîne l’apparition de plusieurs brèches, une rétrodiffusion des ions H+ peut
provoquer une véritable ulcération pouvant évoluer vers la chronicité.

Ce concept important de la pathologie de la “barrière muqueuse” est renforcée par des


constatations anatomiques portant sur la localisaton des ulcères chroniques qui apparaissent au niveau
de la ligne de transition entre muqueuse fundique et antrale, et entre muqueuse antrale et duodénale.
Plus précisement l’ulcère chronique siège sur le bord droit de l’estomac, sa position coïncidant avec le
renforcement de faisceaux musculaires et sa hauteur sur la petite courbure se faisant au niveau de la
ligne de transition entre fundus et antre, ligne qui est très variable selon les individus. De plus l’ulcère
gastrique est associé avec une très grande fréquence à la gastrite chronique. Celle-ci, étendue autour de
l’ulcère, se forme généralement sur une muqueuse de type antral et pourrait être provoquée par divers
agents agressifs en particulier les sels biliaires. Elle précède très probablement l’ulcère et représente un
facteur important dans l’apparition de la perte de substance gastrique favorisée par les diminutions de
résistance de la muqueuse.
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Chirurgie digestive 185

Schématiquement il est donc possible d’opposer l’ulcère duodénal, le plus fréquent,


s’observant chez l’homme, ayant un facteur héréditaire marqué et une sécrétion acide normale ou
élevée, à l’ulcère gastrique trois fois moins fréquent, avec une prédisposition masculine moins nette,
un facteur héréditaire moins marqué et une sécrétion acide faible ou moyenne. Ici la fragilité de la
muqueuse semble être un facteur essentiel, elle est renforcée éventuellement par l’action des sels
biliaires.

A côté de cette conception classique dans la génèse de l'ulcère gastro-duodénal, il faut


retenir à l'heure actuelle l'étiologie infectieuse par le Hélicobacter pylori.

HELICOBACTER PYLORI (H.P.) ET INFECTIONS GASTRO-DUODENALES.

1. HISTORIQUE :

Les connaissances sur l’infection à H.P. se sont accrues de nos jours par rapport aux décennies
passées. En effet, assez des théories étaient déjà connues concernant l’épidémiologie et son rôle dans la
pathologie des maladies ulcéro-gastro-duodénales et du cancer de l’estomac ainsi que le traitement
approprié. Toutes ces connaissances cependant n’étaient pas d’application par les chercheurs.

En 1975 Howard Steer au Royaume Uni a décrit une bactérie spiroïde en rapport avec le
syndrome gastritique. Pour Robin Warren et Barry Marshall de l'Hôpital Royal Perth dans l'Ouest de
l’Australie ,les responsables du département de microbiologie se sont convenus, sans financement, de
cultiver 100 échantillons. Après le délai voulu 34 échantillons se sont révelés sans succès (n’ont pas
poussé). Indépendament de chercheurs, la prolongation de la période d’incubation consécutive à un
week-end publique prolongé a révélé la croissance sur le milieu de culture de Compylobacter
Pyloridis : c’est en avril 1982.

Son association avec l’ulcère petique a été confirmée en 1985 par Marshall chez 114 patients
infectés à l’hôpital de FREMANTLE. En 1989, l’équipe de chercheurs du même hôpital nomma le
germe Helicobacter Pylori. Depuis lors, 18 espèces d’Helicobacter ont déjà été découvertes dont l’une
chez l’homme et les restes chez les animaux y compris les oiseaux.

2. MICROBIOLOGIE :

L’helicobacter pylori est un bacille Gram – Négatif, spiral et flagellé vivant dans le mucus de la
couche muqueuse gastrique. La région antrale distale de l’estomac est la plus touchée. L’atteinte peut
aussi intéresser d’autres régions de l’estomac. La bactérie n’envahit pas la muqueuse, mais stimule
l’infiltration de la muqueuse par les cellules inflammatoires. Ce qui par ailleurs évoque une enzyme
appelée Urease laquelle convertit en présence du suc gastrique, l’urée en ammoniaque et en dioxyde
de carbone. Cette propriété est exploitée pour détecter la présence de ce germe dans l’estomac.
L’ammoniac ayant une propriété alcaline sa production faciliterait la survie du germe dans le milieu
acide gastrique.

1. INFECTION A HP ET ALTERATIONS DE LA PHYSIOLOGIE


GASTRIQUE
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L’antre gastrique joue un rôle important dans la régulation endocrinienne et


neuroendocrinienne à la fois de la sécrétion et de la motilité gastriques.

1. HP et la gastrine

La gastrine est principalement synthétisée au niveau des cellules G de la muqueuse antrale et


elle joue un rôle majeur dans la régulation de la sécrétion gastrique. Il est connu que les patients avec
infection antrale chronique due au HP ont des taux sanguins très élevés de gastrine.
Possibles mécanismes par lesquels l’infection à H.P pourrait causer l’hypergastrinémie :

a) activité bactérienne due à l’uréase et à la production de l’ammoniac :

Ammoniac est un alcalin puissant et sa production à côté des cellules G antrales pourrait
prévenir la suppression physiologique des décharges de la gastrine par l’acidité intragastrique.

b) le rôle de la gastrine antrale : l’hypergastrinémie pourrait être due à l’inflammation causée


par l’infection de la muqueuse antrale. L’infiltration de la muqueuse antrale par les cellules
inflammatoires pouvait stimuler l’hyperplasie et l’augmentation de l’activité des cellules G gastrino-
productrices.

c) rôle possible de l’inhibition de la fonction des cellules pariétales par le HP : c’est une
réponse compensatoire de HP inhibant la sécrétion acide d’où hypergastrinémie pour redonner les
taux normaux de la sécrétion acide.

2. HP et autres hormones du T.D.

Seule la gastrine est élevée et les autres substances telles que lasomatostatine, polypeptide
pancréatique et la neurotensine sont restés normaux.

3. HP et la sécrétion gastrique

Jusqu’à présent, il n’y a pas encore d’évidence que la chute de la gastrine due à l’éradication de
HP soit accompagneé par celle de la sécrétion acide gastrique.

4. HP et la motilité gastroduodénale

Le HP altère la sécrétion de la gastrine et cela pourrait avoir aussi des conséquences sur celle
des autres substances antrales participant dans la régulation de la motilité gastrique. L’inflammation de
la muqueuse antrale pourrait interférer avec la motilité antrale.

5. HP et Pepsinogène sérique

Le pepsinogène sérique est considéré comme un marqueur génétique de la maladie ulcéreuse


duodénale et il existe une corrélation positive entre le niveau sérique du pepsinogène I et la sévérité de
la diathèse ulcéreuse. On remarque en fait la diminution du pepsinogène I sérique lors de l’éradication
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Chirurgie digestive 187
de HP. Il faut noter que la concentration du pepsinogène I sérique est en relation avec la masse
cellulaire principale.

6. HP et composition du suc gastrique

- Concentrations d’urée et d’ammoniac


Infection à HP diminution de la concentration d’urée et augmentation de celle de l’ammoniac
dans le suc gastrique. Cela peut s’expliquer par une forte activité de la masse cellulaire

- Acide ascorbique (vitamine C) : les patients avec infection à HP et une gastrite antrale chronique ont
de taux bas d’acide ascorbique dans leur suc gastrique. Il faut se rappeler que la vitamine C est une
puissante substance antioxidante prévenant la formation potentielle des nitrosamines carcinogéniques
dans l’estomac.

En résumé

HP uréase Production de l’ammoniac et stimulation de la sécrétion


Altération locale du pH de la de la gastrine par les cellules
muqueuse gastrique G.

Etat d’hyperacidité métaplasie de la région Ulcération de la


muqueuse
gastroduodénale d’où ulcère.

NB. : L’ammoniac produit enveloppe la bactérie et la protège aussi de la destruction


occasionnée par l’acidité.

4. MECANISMES PATHOGENIQUES POSSIBLES DANS L’INFECTION A HP

Les mécanismes sont complexes et multiples. Nous résumerons essentiellement les suivants :
adhérence bactérienne, les facteurs biochimiques et la réponse immunitaire

1. Adhérence bactérienne

Elle protège la bactérie du péristaltisme et entraîne des hautes concentrations des toxines
localement sur la surface épithéliale de la cellule. Conséquences : perte des microvilosités,
amincissement de la membrane et une irrégularité des bords de la lumière des cellules concernées. A
l’intérieur des cellules, nous trouvons: perte du cytoplasme, oedème, vacuolisation, tuméfaction du
réticulum endoplasmique et accumulation des lysosomes.

2. Facteurs biochimiques

a) Activités des enzymes bactériennes

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Chirurgie digestive 188
Du point de vue enzymologique, le HP possède un nombre important d’enzymes qui jouent un
rôle non négligeable dans la pathogénie. Le plus remarqué est l’UREASE dont l’activité est tellement
importante que la colonisation par le HP peut être
diagnostiquée par un test respiratoire de l’uréase ou par une biopsie testant l’uréase . Comme nous
l’avons dit, l’ammoniac produit enveloppe la bactérie et la protège ainsi des destructions dues à
l’acidité. L’ammoniac est toxique pour les cellules.

Un autre mécanisme employé par le HP est une directe altération du mucus gastrique. Cette
bactérie possède aussi des enzymes protéolytiques capables de détruire le mucus gastrique des porcs.

Tout ceci montre que le HP compromet le bon fonctionnement de la barrière mucus-


bicarbonate, ce qui fait que l’épithélium ainsi exposé aux facteurs intraluminaux agressifs connus
comme l’acidité, la pepsine, la bile et peut être aussi les médicaments.

b) Toxines.

Une des méthodes bien connues employées par les bactéries du T.D. pour exercer leur effet
cytolytique est la production de la toxine.

Le HP possède le lipopolysaccharide contenant le “lipid A “ sous classe de lipopolysaccharides


responsables des propriétés endotoxiques d’une importante variété des bactéries gram-négatives. Le
HP produit une substance cytotoxique (labile à la chaleur et protéase sensitive) de poids moléculaire
au dessus de 100 kD qui cause la vacuolisation intracellulaire.

3. Facteur immunologiques :

La réponse inflammatoire décrite dans la gastrite chronique est due aux antigènes du HP.

a) Réponses humorales

On y trouve la présence des anticorps IgG et IgA lors de l’infection de HP . Cette réponse peut
servir au diagnostic des infections à HP. Les réponses locales humorales au niveau de l’estomac
montre la sécrétion des IgA, des lysosymes et de la lactoferrine.

a) Cytokinines et l’immunité à médiation cellulaire.

Il existe une production locale gastrique de l’interleukine-6 et du facteur de nécrose tumorale.


Dans la gastrite type B, il y a élevation du taux des cellules T. Sur le plan histologique, on décrit un
type intérressant de gastrite appelé “gastrite lymphocytique” dans laquelle le compartiment épithélial
contient un excès de cellules T. Ce type de gastrite pourrait représenter une réponse immune effective
pour l’éradication de HP.

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Chirurgie digestive 189

5. H.P , LA DUODENITE ET ULCERATION DUODENALE

Voici les possibles associations des différents facteurs accusés dans la pathogénie de l’ulcère
duodénal

Acidité
gastrine

Age adulte
Homme Facteurs génétiques
et environnementaux
métaplasie
gastrique gastrite à
HP Produits
Ulcérogènes

Infection duodénale

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Duodénite à HP

Atteinte de la protection de la muqueuse

acidité
(Syndrome de Zollinger-
Ellison)
Ulcère duodénal
Tabagisme
Anti-inflammatoires
non stéroïdiens
Facteurs génétiques
(groupes sanguins)

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6. PREVALENCE :

La prévalence de l’Helicobacter Pylori augmente avec l’âge dans toutes les populations qui ont
été étudiées au monde. Néanmoins une nette différence a été remarquée entre les taux des pays
développés et ceux des pays sous développés. Dans ces derniers, l’infection est observée dans le jeune
âge tandis qu’elle est rare chez les enfants des pays développés. L’infection est souvent trainante bien
qu’elle puisse être traitée et elle est acquise dans le jeune âge de la vie. Le taux de prévalence est plus
élévé en Afrique du Nord et de l’Ouest; et aussi dans certains pays en voie de développement tels que
le Péru, le Mexique et la Thaïlande. Néanmoins, l’amélioration des conditions de vie et de l’hygiène
communautaire telle que vécu dans certains pays le siècle passé a réduit le taux de prévalence de
l’Helicobacter Pylori. L’ignorance de l’histoire naturelle de l’H.P. suggère que cette infection existe
depuis plusieurs années. Certaines récentes études ont montré que l’infection à H.P. est devenue de
moins en moins fréquente et que les adultes qui en souffriraient auraient été infectés dans l’enfance.

7. MODE DE TRANSMISSION :

La transmission directe de personne à personne est le mode de contagion le plus courant


(sécrétions orales, matériel d’endoscopie mal stérilisé, transmission féco-orale)

8. ASPECTS CLINIQUES :

Dans les pays développés l’H.P. est la principale cause de gastrites chroniques et des maladies
ulcéro-duodénales. Il est aussi reconnu comme facteur de risque de cancer de l’estomac. Chez les
enfants cette infection est souvent associée aux maladies diarrhéiques, à la malnutrition et à un retard
de la croissance. La dyspepsie est le symptôme le plus courant de l’infection à H.P. .Mais aussi on peut
avoir d’autres signes associés tels que les nausées, les vomissements, les malaises, la douleur rétro-
sternale et la sensation des brûlures épigastriques. Cependant certains malades restent
asymptomatiques et ne présentent pas les signes gastro-duodénaux.

9. DIAGNOSTIC :

Il est admis que la biopsie gastrique est le moyen sûr de mettre le germe en évidence. Une
biopsie sera prélevée au niveau de l’antre et une autre au niveau du corps de l’estomac. Par ailleurs la
culture du suc gastrique est aussi une méthode pou-
vant aider à l’identification du germe ainsi que l’analyse de l’ Uréase, enzyme produite par H.P. Cette
analyse est simple, réalisable et coûte moins chère. Pour une investigation épidemiologique de
l’infection à H.P. et pour un dépistage général, on procède au dosage des IgG circulants. En effet, le
taux d’anticorps spécifique IgG est élévé dans la plupart des infections active à H.P. Le test
sérologique a une sensibilité et une spécificité de 70-90 %.

10. TRAITEMENT :

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Chirurgie digestive 192
Il est admis que l’infection à H.P. peut être éradiquée chez les malades souffrant de l’ulcère
gastro duodenal. En effet, il est connu que dans 95 % de cas de malades souffrant de l’ulcère
gastroduodénal souffriraient aussi d’une infection à H.P. associée.

Il n’est pas donc nécessaire de chercher à mettre en évidence le germe avant d’instaurer le
traitement. Une thérapie d’éradication est efficace et simple à utiliser. Quelques combinaisons de
produits ont fait preuve de leur efficacité. Mais d’autres encore ont des effets secondaires indésirables.
La seule combinaison qui est actuellement utilisée et ayant montré un taux d’eradication de plus de 90
%`est la Trithérapie faite de:Metronidazole (400 mg x 2 ), Omeprazole (20 mg x 2 ) et l’amoxyciline
(500 mg x 3 )[O. M. A.]. ou Amoxyciline-Omeprazole-Clarithromycine (250 mg x 2) ou Omeprazole-
Metronidazole-Clarithromycine. Le taux de réinfection est rare après une éradication complète
(1%/an). Le vaccin contre l’H.P. a contribué à la baisse du taux de prévalence de l’infection dans le
monde.

Circonstances de diagnostic

Douleur ulcéreuse typique

Elle représente classiquement la symptomatologie fonctionnelle de la maladie ulcéreuse gastro-


duodénale. La douleur de localisation épigastrique à type de crampe ou de torsion, est d’intensité
variable, l’irradiation pouvant se faire vers le dos et le thorax. Dans le cas de l’ulcère gastrique elle est
relativement plus précoce (une à deux heures après les repas) que dans l’ulcère duodénal (faim
douloureuse 3 à 4 heures après les repas). En fait cette distinction classique est très inconstante et il
faut surtout retenir le caractère post-prandial de la douleur, rythmée par les repas, sa cessation après
indigestion d’alcalins ou d’aliments, et surtout sa périodicité. Le malade souffre tous les jours après
tous les repas pendant une période déterminée: c’est la crise ulcéreuse qui dure de 2 à 3 semaines puis
disparaît totalement, la “guérison” pouvant se prolonger pendant des semaines ou des mois. Les crises
ulcéreuses peuvent prendre une régularité saisonnière (printemps, automne) ou être déclenchées par
des circonstances particulières (stress psychologique ou médicamenteux).

Syndrome douloureux atypique

Il est probablement tout aussi fréquent que la symptomatologie précédente. La disparition du


rythme et de la périodicité, la localisation différente font discuter les diagnostics de lithiase biliaire, de
pathologie arthrosique ou angineuse, de syndrome dyspeptique…

Complication

Elle peut révéler une maladie ulcéreuse jusque-là latente, il s’agit le plus souvent d’une
hémorragie digestive, parfois d’un syndrome péritonéal, rarement d’un syndrome occlusif. La prise
éventuelle de médicaments doit être recherchée systématiquement.

Eléments de diagnostic

L’interrogatoire est évidemment capital quand il permet de retrouver la symptomatologie


ulcéreuse typique. Mais la certitude du diagnostic est apportée par l’examen radiologique et/ou
endoscopique.
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Chirurgie digestive 193

Transit gastro-duodénal

L’examen radiologique a représenté pendant longtemps le seul moyen de déceler la lésion


ulcéreuse (la niche) ou de mettre en évidence des signes indirects attirant l’attention. Cependant si la
concordance radio-endoscopique est satisfaisante pour le diagnostic des ulcères ronds, elle est
beaucoup plus médiocre pour les ulcères linéaires, même étudiés selon des techniques de double
contraste.

Au niveau de la petite courbure gastrique la niche se présente comme une image d’addition
faisant saillie, limitée dans les cas typiques, en amont et en aval par une dénivelation en forme de
rigole: “ulcus Wall”. Ce dernier est la traduction d’un bourrelet d’oedème péri-ulcéreux qui, sous
compression, peut alors apparaître sous l’aspect d’un collet clair cernant la base de la niche. La
dimension de la niche est variable et peut aller de la taille d’une tête d’épingle à celle d’ulcère géant
dépassant plusieurs centimètres. Elle n’a aucune signification pronostique. Sa forme peut également
être variable: niche en cône ou en éperon, niche triangulaire ou carrée. Les signes indirects peuvent se
présenter sous la forme d’une incisure spasmodique au niveau de la grande courbure en regard de la
niche, d’une convergence des plis, d’une modification de la silhouette antrale. Aucun critère
radiologique ne permet d’affirmer qu’une niche est véritablement bénigne. Aussi la discussion des
images radiologiques dans le but d’en préciser la nature est actuellement dépassée depuis le
développement des techniques endoscopiques.

Au niveau du bulbe, la niche centro-bulbaire prend l’aspect d’une tache opaque entourée par un
halo clair correspondant au bourrelet d’oedème péri-ulcéreux. Les modifications des plis peuvent,
surtout dans les ulcères anciens, entraîner des déformations importantes du bulbe, (aspect trifolié,
bulbe en chapeau mexicain, etc…) Ces modifications dues à la sclérose péri-ulcéreuse persisteront
même lors de la guérison complète de la niche.

Exploration endoscopique

Au cours de l’ulcère gastrique elle est indispensable pour préciser la nature de la lésion et ses
modalités évolutives : une règle impérative doit être systématiquement appliquée : toute niche
radiologique doit être vérifiée endoscopiquement et biopsiée largement (10 à 12 biopsies sur les
bergers de l’ulcère). L’ulcère “bénin” se présente sous l’aspect d’une ulcération ronde ou ovalaire, à
bords réguliers et souples à fond blanc crémeux et entourée de plis convergents. L’ulcère “malin” a
une forme irrégulière des bords granuleux, bourgeonnants, un fond saignotant et des plis anarchiques.
En fait cette opposition caricaturale est loin d’être toujours vraie, et seuls les contrôles biopsiques
nombreux, aidés par les colorations vitales apportent le maximum de renseignements sur la nature de
la lésion et son évolution: disparition totale de la lésion, cicatrice d’aspect stellaire, ou linéaire,
persistancce du cratère ulcéreux. L’endoscopie permet également de rechercher les lésions associées:
gastrite avec métaplasie, autres localisations ulcéreuses, reflux biliaire etc.

Au cours de l’ulcère duodénal, l’endoscopie n’est pas classiquement indispensable. Cependant


des travaux récents ont permis de distinguer selon les aspects macroscopiques de l’ulcère des
modalités évolutives différentes. Aussi l’ulcère rond, à l’emporte-pièce correspond à un ulcère jeune
dont l’évolution est le plus souvent favorable sous traitement médical en 4 ou 6 semaines. Les ulcères
irréguliers, triangulaires ou en étoile, vers lesquels convergent des plis épaissis, témoignent d’un
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Chirurgie digestive 194
caractère chronique. Les ulcères “salamis” formés d’érosions confluentes sur un socle lésionnel,
inflammatoire, ont une cicatrice lente (2 à 3 mois) et peuvent correspondre à une phase de réparation
ou à une rechute sur cicatrice. Enfin les ulcères linéaires se présentent sous forme de crevasse à fond
fibrino-nécrotique et témoignent d’une cicatrisation médiocre (3 à 5 mois). Ces ulcères linéaires
souvent méconnus par l’examen radiologique représentent 20 % des ulcères du bulbe et peuvent être
étudiés avec précision après instillation en cours d’endoscopie de bleu de méthylène. La fibrine est
colorée en bleu clair, la zone péri-ulcéreuse inflammatoire est peu ou pas colorée et la muqueuse
intestinale voisine est colorée en bleu foncé. Ainsi l’endoscopie permet-elle de suppléer aux
“défaillances” radiologiques, et de porter un pronostic de cicatrisation sur l’aspect endoscopique.
D’autre part, contrairement à la notion classique la disparition de la symptomatologique douloureuse
peut aller de paire avec la persistance ou la réapparition de la lésion ulcéreuse. Ces trois raisons
plaident en faveur de l’indication d’une fibroscopie pour surveiller un ulcère bulbaire.

Chimisme gastrique

Il est inutile pour explorer la sécrétion gastrique au cours de la maladie ulcéreuse gastro-
duodénale banale. Par contre il paraît logique, au cours de la maladie ulcéreuse
duodénale, lorsqu’une indication chirurgicale est portée, il permet de classer les sujets en
normosécréteurs et en hypersécréteurs et de déceler parmi ces derniers les sujets pouvant présenter un
syndrome de Zollinger-Ellison. Les hypersécréteurs simples représentent 20 à 30 % et sont caractérisés
par un débit acide de base (BAO) supérieur ou égal à15 mEq/h et un débit acide maximal (PAO)
supérieur à 50 mEq chez l’homme (40 meq chez la femme) sans hypergastrinémie.

La mise en évidence de ce groupe d’hypersécréteurs simples (par opposition au syndrome de


Zollinger Ellinson) n’a aucun intérêt pronostique, (il ne semble pas que les complications ou les
récidives surviennent avec plus de fréquence que dans le groupe des normosécréteurs), mais
présenterait pour certains auteurs un intérêt thérapeutique: indication d’une vagotomie avec
antrectomie plutôt que d’une vagotomie hypersélective.

Modalités évolutives

L’évolution de la maladie ulcéreuse est marquée, quelque soit sa localisation, par une tendance
à la chronicité symbolisée par une évolution cyclique spontanée : ulcère, cicatrisation – ulcère etc. Sur
ce fond évolutif peuvent se greffer à tout moment des complications aiguës transformant radicalement
le tableau de la maladie ulcéreuse. Les hémorragies et les perforations aiguës, sont plus fréquentes
chez les jeunes ulcéreux que chez les adultes.

Hémorragie

Le risque hémorragique se situe entre 15 et 25 % des cas, l’hémorragie étant un symptôme


inaugural dans 5 à 10 % des cas. La cause d’hémorragie peut être une ulcération artérielle au fond du
cratère ulcéreux (hémorragie souvent importante en jet et sans tendance spontanée à l’hémostase), une
gastrite ou une duodénite hémorragique péri-ulcéreuse plus accessible au traitement médical. La
surveillance d’une hémorragie digestive chez un ulcéreux peut être favorisée ou provoquée par des
médicaments agressifs pour la muqueuse ou par la prise d’anticoagulants. Le groupe sanguin 0 est plus
fréquemment observé parmi les ulcéreux ayant eu une hémorragie et la fréquence de survenue d’une
hémorragie semble plus liée au groupe sanguin 0 qu’au jeune âge de début de l’ulcère.
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Chirurgie digestive 195

Perforation

Elle aboutit le plus souvent à la péritonite généralisée (ulcère de la face antérieure du bulbe)
mais semble moins fréquente que les hémorragies digestives (5 à 15 %). Parfois le cratère ulcéreux,
après avoir perforé l’épaisseur de la paroi, pénètre dans un organe de voisinage, le foie pour les ulcères
de la petite courbure, le pancréas pour les ulcères de la face postérieure de l’estomac et du bulbe. Cet
ulcère perforé bouché se traduit radiologiquement par une niche très creusante à trois niveaux: niche de
Haudeck (de haut en bas : air, liquide de stase et baryte). Cliniquement il s’agit presque toujours d’une
forme calleuse, rebelle au traitement médical, hyperalgique et pouvant simuler une symptomatologie
pancréatique. Elle peut également, au niveau de la région antropylorique ou bulbaire, s’accompagner
d’une sténose.

Sténose

Il s’agit généralement d’une sténose pyloroduodénale (6 à 10 %) secondaire soit à des troubles


pyloriques fonctionnels provoqués par le spasme ou l’oedème, mais alors transitoires et régressant
avec la poussée, soit à une fibrose rétractile cicatricielle irréversible. Classiquement elle évolue en
deux phases: au début, hyper-péristaltisme antral et retard de l’évacuation pylorique avec
vomissements post-prandiaux précoces, ensuite phase d’atonie avec distension gastrique et
vomissements tardifs. Un état d’alcalose métabolique hypochlorémique et hypokaliémique avec
déshydratation cellulaire, oligurie et hyperazotémie s’installe progressivement. Le diagnostic de
sténose est fait essentiellement sur la clinique et la radiologie, l’endoscopie connaît ici ses limites
lorsque l’endoscope ne peut franchir le rétrécissement et ne permet donc pas de visualiser un ulcère
situé au-delà. L’existence d’un ulcère gastrique secondaire à la stase est fréquente. Les sténoses
médiogastriques sont rares et provoquées le plus souvent par des ulcères situés sur la petite courbure
verticale.

Cancérisation de l’ulcère gastrique

Le problème de la transformation maligne des ulcères gastriques donne toujours lieu à de


nombreuses controverses et à une riche terminologie : ulcère transformé, ulcéro-cancer, ulcer-like
carcinome, etc. La fréquence de cette cancérisation est très variable selon les statistiques (1 à 5 %)
mais est cependant élevée par rapport à la fréquence générale des cancers gastriques. Elle s’explique
par l’existence de lésions dysplasiques sévères au niveau de la muqueuse marginale de l’ulcère, c’est-
à-dire sur la berge mais aussi, bien que plus rarement, à distance de celle-ci sur la muqueuse gastrique.
Ceci justifie les nombreuses biopsies portant sur les bords des lésions ulcéreuses, même d’aspect
bénin, associée ou non à une cytologie à la brosse. L’importance du nombre des biopsies pour le
diagnostic positif de ces lésions ulcérées est capitale. Par contre le test thérapeutique n’a qu’une valeur
relative car des lésions malignes ulcérées peuvent guérir dans les délais habituels à l’ulcère pour
réapparaître ultérieurement. L’ulcéro-cancer peut être affirmé avec certitude quand existent , sur les
bergers d’un ulcère, des lésions malignes… Par contre, lorsque le processus néoplasique envahit
totalement le cratère ulcéreux, le diagnostic devient impossible entre ulcère transformé et cancer
ulcériforme. Cette discussion est cependant toute académique. Le point pratique capital étant de
considérer tous les malades porteurs d’un ulcère gastrique comme faisant partie de la population à
haut risque de cancer gastrique.

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Chirurgie digestive 196
Surveillance et traitement

Règles hygiéno-diététiques générales

Pendant longtemps elles ont été considérées comme essentielles. L’efficacité à long terme de
régimes à base de lait et de crème ne semble pas démontrée et l’adjonction de poudres alcalines peut
entrainer un syndrome d’hypercalcémie, avec lithiase rénale (syndrome de Burnett). Un régime
équilibré excluant simplement l’alcool, le tabac et les épices est suffisant dans la majorité des cas.
L’hospitalisation ou le repos ne s’imposent pas, sauf en cas de poussée hyperalgique. Par contre, des
conseils très stricts doivent être donnés en ce qui concerne l’utilisation de l’aspirine, des anti-
inflammatoires, des corticoïdes.

Traitement médical de la crise ulcéreuse

Il s’applique à tous les ulcères gastriques ou duodénaux non compliqués, diagnostiqués à


l’occasion de leur première poussée. Il repose essentiellement sur l’utilisation intensive pendant 6
semaines (parfois plus si l’on tient compte des critères endoscopiques pour les ulcères du bulbe), des
anti-sécrétoires associés éventuellement aux anti-acides. Actuellement on peut estimer qu’une
monothérapie à base de Cimétidine (1 g par jour) à raison de 1 comprimé après chaque repas et 2
comprimés le soir avant le coucher offre des résultats thérapeutiques satisfaisants dans la majorité des
cas, la crise douloureuse disparaissant au bout de 3 à 6 jours. Le plus difficile est de convaincre le
malade de continuer à prendre le médicament malgré la guérison appararente de sa maladie; la
cicatrisation de l’ulcère n’étant complète qu’au bout de 4 à 5 semaines environ.

Conduite à tenir après la guérison de la première crise

Dans le cas d’un ulcère gastrique une gastroscopie est obligatoire après la 6è semaine de
traitement. Elle doit permettre de certifier la guérison complète de l’ulcère. Sinon de poursuivre le
traitement sous surveillance étroite .

Dans le cas d’un ulcère duodénal, la guérison est classiquement affirmée par la disparition de la
douleur. Il n’est pas utile de prévoir un examen radiologique mais des études récentes ont montré que
la lésion ulcéreuse pouvait persister de façon asymptomatique. La certitude de la disparition de l’ulcère
ne peut donc être apportée là encore que par l’endoscopie.

Traitement d’entretien après la guérison de la première poussée ?

La poursuite pendant 6 mois du traitement médical (Cimétidine 400 mg le soir au coucher)


réduit considérablement la fréquence des rechutes ulcéreuses. Des gels anti-acides peuvent être
prescrits en relais de façon à avoir une protection thérapeutique pendant 10 à 12 mois après la
cicatrisation. Passé ce délai il ne paraît pas utile de continuer une thérapeutique anti-acide ou anti-
sécrétoire, mais une gastroscopie de contrôle doit être prévue pour les ulcères gastriques. En fait
lorsque au bout d’un traitement d’entretien à la cimétidine si celle-ci est interrompue, le taux de
rechute est le même que celui observé chez des sujets n’ayant subi qu’un traitement d’attaque de la
poussée. Ceci tend à démontrer que la cimétidine guérit la lésion mais ne modifie pas l’évolution
naturelle de la maladie ulcéreuse duodénale.

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Chirurgie digestive 197
Traitement antibiotique de l'ulcère duodénal: voir le paragraphe sur le Hélicobacter Pylori

Traitement chirurgical de l’ulcère gastrique

Devant un ulcère gastrique persistant (et/ou malin) la gastrectomie est une indication logique.
Ses modalités sont fonction du siège de l’ulcère, gastrectomie des 2/3 typique pour un ulcère antral,
vagotomie et antrectomie pour ulcère prépylorique ou pylorique (hyperchlorhydrie), ou pour ulcère de
l’estomac associé à un ulcère du duodénum. Cette chirurgie d’exérèse (gastrectomie des 2/3 ou
antrectomie) est d’autant plus justifiée qu’une niche ulcéreuse, même régulière, même d’aspect bénin
n’est pas obligatoirement bénigne. Les modalités, le risque vital, les séquelles de la gastrectomie pour
ulcère de l’estomac sont comparables à ceux de la gastrectomie pour ulcère du duodénum.

Une différence essentielle réside dans le risque de récidive qui est ici très faible, de l’ordre de 1 %.

Cependant cette chirurgie est considérée par certains auteurs comme trop mutilante et il a été
proposé une chirurgie plus conservatrice basée seulement sur l’ulcérectomie totale et la vagotomie.

Un contrôle histologique de la pièce opératoire es indispensable.

Traitement chirurgical de l’ulcère duodénal

METHODES

Le traitement chirurgical des ulcères du duodénum repose sur des données pragmatiques:
l’efficacité observée de différentes interventions chirurgicales. L’action thérapeutique s’explique par la
suppression permanente et durable de l’hyperactivité gastrique. Les chances de guérison sont
directement proportionnelles à l’importance de la réduction acide.

Interventions d’exérèse

La gastrectomie partielle, polaire inférieure, enlève les deux tiers inférieurs de l’estomac. Une
gastrectomie polaire supérieure, enlevant la zone à sécrétion acide serait logique, et a d’ailleurs été
utilisée, mais elle comporte un risque vital trop important.

La gastrectomie des deux tiers vise à supprimer la région antrale responsable de la stimulation
hormonale de la sécrétion acide. L’objectif est de réaliser une antrectomie, mais comme il n’existe pas
une frontière apparente, il est nécessaire de pratiquer une exérèse des deux tiers inférieurs de
l’estomac.

Le rétablissement de la continuité digestive peut se faire indifféremment par anastomose


gastro-duodénale (intervention de Péan) ou, après fermeture du moignon duodénal, par anastomose
gastro-jéjunale (intervention de Finsterer). La mortalité opératoire est, en dehors des urgences, de
l’ordre de 2 à 3 %. La gastrectomie a l’inconvénient de déterminer l’apparition de séquelles
nutritionnelles et fonctionnelles.
La fréquence des récidives ulcéreuses après gastrectomie est de l’ordre de 2 à 8 %.

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Chirurgie digestive 198
Interventions de section nerveuse

Elles sont représentées par les vagotomies. Le but est ici de supprimer la stimulation nerveuse
de la sécrétion acide. Il existe trois types de vagotomie selon que l’on sectionne en totalité ou en partie
le nerf pneumogastrique. En effet, ce nerf se distribue en trois contingents destinés aux cellules
pariétales du fundus sécrétant l’acide chlorhydrique, à la zone antropylorique qui assure la vidange de
l’estomac et aux autres viscères digestifs.

La vagotomie tronculaire sectionne les trois contingents nerveux. Elle doit être associée à une
dérivation de l’estomac (gastroentérostomie ou pyloroplastie) parce qu’elle entraîne un spasme du
pylore. Elle détermine comme la gastrectomie des séquelles fonctionnelles dont la plus fréquente est la
diarrhée. Ces séquelles fonctionnelles sont souvent aussi invalidantes que celles de la gastrectomie. La
mortalité opératoire est de l’ordre de 1 %, donc inférieure à celle de la gastrectomie. Par contre le taux
de récidive est de 5 à 8 %, donc supérieur à celui de la gastrectomie.

La vagotomie sélective sectionne les filets nerveux destinés à l’estomac (fundus et antre) et
nécessite également un drainage de l’estomac, mais préserve l’innervation extra-gastrique.
Contrairement à ce que l’on espérait, elle n’a pas moins de séquelles fonctionnelles que la vagotomie
tronculaire, car ses séquelles sont dues au geste de drainage qui rend l’estomac incontinent.

La vagotomie hypersective (VHS) sectionne uniquement les filets nerveux destinés au fundus,
c’est-à-dire les fibres sécrétrices, et respecte ainsi les fibres motrices destinées à l’antre, ce qui rend
inutile un geste de drainage et supprime les séquelles fonctionnelles des interventions classiques,
(dumping-syndrome, diarrhée). Cette intervention est d’une bénignité remarquable : 0,3 % de mortalité
opératoire. Elle nécessite une hospitalisation courte. La prescription d’un régime alimentaire est
ensuite inutile. Cependant la fréquence des récidives est encore difficile à évaluer en raison du manque
de recul, elle paraît être de l’ordre de 5 à 10 %.

Intervention de section nerveuse et résection

Elle est réalisée par l’association d’une vagotomie tronculaire et d’une antrectomie. Elle
supprime la stimulation nerveuse et la stimulation hormonale de la sécrétion acide. C’est certainement
l’intervention la plus efficace: le taux de récidive étant de 0 à 1 %.

INDICATIONS

Ces différentes interventions n’ont pas d’indications spécifiques. Pendant longtemps leur valeur
respective a été difficile à apprécier: actuellement, grâce à des études contrôlées il est possible de
souligner:
- que la vagotomie tronculaire est la moins dangereuse des interventions classiques : mortalité
opératoire de 1 %.
- Que la vagotomie antrectomie est la plus efficace: taux de récidive à long terme de 0 à 1 %;
- Que la gastrectomie des deux tiers n’a ni l’efficacité de la vagotomie-antrectomie, ni la bénignité
de la vagotomie tronculaire;
- La vagotomie hypersélective n’a pas fait l’objet de telles études comparatives; elle est la plus
séduisante, mais son taux de récidive à long terme reste à définir, et il faut savoir qu’à partir de 70 ans

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Chirurgie digestive 199
(environ), en raison d’une éventuelle insuffisance vasculaire, elle peut entraîner des lésions
ischémiques gastriques. De plus elle peut être difficile à réaliser chez les sujets obèses.

L’indication chirurgicale dans la maladie ulcéreuse duodénale doit être discutée devant un
ulcère guérissant mal ou récidivant malgré le traitement médical bien conduit. Longtemps représenté
par la gastrectomie des deux tiers puis la vagotomie tronculaire, le traitement actuel de l’ulcère du
bulbe repose sur la vagotomie hypersélective (VHS), intervention physiologique et peu aggressive ou
éventuellement la vagotomie- antrectomie exposant à un taux de récidive encore plus faible que la
VHS mais nécessitant une antrectomie. Le choix entre les deux types d’intervention ne parait pas pour
l’instant être fondé avec certitude sur les résultats du chimisme préopératoire.

Le traitement des récidives ulcéreuses après gastrectomie des deux tiers paraît être la
vagotomie tronculaire, et après vagotomie, dont il importe d’apprécier l’efficacité, il est en principe
nécessaire de faire une antrectomie et éventuellement une nouvelle vagotomie.

Dans les ulcères compliqués l’urgence est souvent incompatible avec une exploration précise
de la sécrétion acide. La perforation relève classiquement de la suture associée à la vagotomie.
L’hémorragie, après réanimation correcte et échec du traitement médical anti-acide, impose un
traitement chirurgical si possible conservateur: hémostase locale de l’ulcère et vagotomie (tronculaire
ou hypersélective).

La sténose elle-même classiquement traitée par vagotomie et gastroentérostomie peut aussi être traitée
par pyloroplastie avec dilatation et vagotomie hypersélective.

Chez les malades à haut risque le traitement de la complication sera réduit à l’intervention la
plus rapide (suture simple pour perforation, vagotomie tronculaire, pyloroplastie et hémostase locale
pour hémorragie, gastro-entérostomie pour sténose).

Le contrôle du traitement chirurgical de l’ulcère duodénal est représenté par le chimisme


gastrique sous pentagastrine réalisé 1 à 2 mois après l’intervention et comparé à des résultats
préopératoires obtenus dans les mêmes conditions. Après une vagotomie hypersélective efficace la
chute du débit acide de base (BAO) est de 80 % par rapport à l’état préopératoire et celle du débit
acide maximal (PAO) de 60 %. Deux ans après l’intervention cette diminution n’est plus que de 50 et
55 % respectivement. Par contre après vagotomie et antrectomie la chute du BAO atteint 90 % et reste
stable.

HYPERGASTRINEMIES

Ce terme permet de regrouper artificiellement certains états pathologiques entraînant des


modifications de la sécrétion hormonale gastrinique. Toutefois l’existence d’un taux sanguin élevé ne
définit pas à lui seul un état pathologique et encore moins un syndrome. Des phénomènes de
rétroaction négative ou une dissociation possible entre la concentration sanguine de l’hormone et
l’organe cible fonctionnel peuvent également entrer en ligne de compte.

III. CLASSIFICATION DES HYPERGASTRINEMIES

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Chirurgie digestive 200
Hypergastrinémies avec hypersécrétion acide

L’exemple typique est fourni par le syndrome de Zollinger Ellison. Dans le montage
expérimental de l’antre exclu chirurgicalement l’hypergastrinémie considérable est liée à la
suppression de la rétroaction négative de la sécrétion acide. Des états d’hypergastrinémie ont été
décrits au cours de l’hyperplasie antrale des cellules G, au cours des sténoses duodénopyloriques avec
stase gastrique et au cours de l’insuffisance rénale.

Syndrome de Zollinger-Ellison (Z.E)

Ce syndrome rare et pourtant très célèbre est provoqué par une hypersécrétion de gastrine
provenant d’une tumeur (gastrinome), en général pancréatique. Cliniquement il se caractérise
essentiellement par l’existence d’ulcères sévères rebelles au traitement habituel, récidivants et souvent
multiples ou atypiques par leur siège (gastriques, bulbaires, mais aussi au niveau du duodénum et du
jéjunum), associée à une diarrhée secondaire à l’hypersécrétion acide. Une circonstance particulière
mais fréquente est réalisée par la survenue d’ulcères rebelles après gastrectomie partielle ou
vagotomie proposée pour une maladie ulcéreuse apparemment banale. L’étude de la sécrétion
gastrique peut nettement orienter le diagnostic lorsque pour un estomac non opéré, le débit acide
basal est supérieur ou égal à 15mEq/h (concentration acide basale supérieur ou égale à 100mEq/l), ou
lorsqu’il s’agit d’un estomac déjà opéré, le débit acide basal est supérieur ou égal à 5 mEq/l). Le
dosage de la gastrine est le deuxième élément fondamental du diagnostic biologique. Au cours de
S.Z.E. la gastrinémie est habituellement très élevée (supérieure à 10 fois la normale) mais des chiffres
inférieurs à 5 fois la normale ne doivent pas faire éliminer le SZE, ces résultats s’expliquent par les
grandes fluctuations de la gastrine sérique. L’injection ou la perfusion de la sécrétine provoque en
général au cours du SZE une augmentation de la gastrinémie et de la sécrétion acide. L’hypercalcémie
induit une hypergastrinémie et une augmentation de sécrétion acide modérée chez le sujet normal et
l’ulcéreux duodénal, importante au cours du SZE. L’artériographie sélective est loin de mettre en
évidence de façon constante le processus tumoral (1/4 des cas seulement),mais la localisation de la
tumeur sécrétante peut être réalisée par dosages hormonaux après cathétérisation transhépatique
percutanée de la veine-porte et de la veine splénique. La certitude absolue de SZE est donnée par la
découverte opératoire de la tumeur, l’affirmation de sa structure endocrine et la caractérisation
immuno-histologique ou l’extraction de la gastrine intra-tumorale. Le traitement définitif ne peut être
que chirurgical; exérèse de la tumeur si possible, sinon gastrectomie totale afin de supprimer l’organe
cible. Les anti-histaminiques H2 à fortes doses, associés aux anti-cholinergique (éventuellement
Gastrozépine ®) permettent dans certains cas, de réduire l’hypersécrétion et d’attendre de meilleures
conditions chirurgicales.

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Chirurgie digestive 201
GASTRITES AIGUES, GASTRITES HEMORRAGIQUES ET LESIONS
AIGUES HEMORRAGIQUES.

Généralités et terminologie

Qu’elle survienne sur une muqueuse gastrique normale ou pathologique (gastrite chronique), la
gastrite hémorragique vraie se définit par un saignement en nappe de la muqueuse sans érosion visible.
En fait, sous le terme de gastrite hémorragique ou de lésions aiguës de la muqueuse gastrique sont
regroupées habituellement plusieurs appellations : exulcération simplex (perte de substance de 5 à 10
mm unique n’atteignant pas la musculeuse), ulcères aigus ou ulcères de stress avec leurs 4 stades
différents (purpura de la muqueuse, érosion superficielle, ulcère aigu non hémorragique et ulcère aigu
hémorragique), ulcère de Cushing (les lésions aiguës compliquant les interventions et les traumatismes
du système nerveux central), ulcère de Curling (lésions aiguës compliquant les brûlures), gastro-
bulbite ou gastro-duodénite érosive.

Toutes ces lésions, pratiquement toujours multiples et disséminées, qu’il s’agisse de purpura,
d’érosion, d’exulcération ou d’ulcère aigu, souvent associées entre elles, représentent les stades
différents d’une même maladie. Ces lésions siègent en règle au niveau de la muqueuse gastrique et de
la muqueuse des deux premiers segments duodénaux. Elles sont plus rarement retrouvées sur la 3è et la
4è portions duodénales. La progression est rapidé d’un stade à l’autre mais, inversement, la
cicatrisation se fait en quelques jours.

Etiologies

Le rôle du stress paraît capital dans la genèse des lésions aiguës ulcéro-hémorragiques
rencontrées en post-opératoire, dans les services de réanimation des polytraumatisés et des brûlés … au
cours des insuffissances rénales aiguës, au cours des insuffisances respiratoires sévères (rôles de
l’hypoxie – hypercapnie), dans les services de neuro-chirurgie et au cours de tous les états septiques.
Les lésions aiguës neurologiques ont une pathogénie particulière, l’augmentation de pression
intracrânienne étant suivie d’une augmentation de la sécrétion acide gastrique. Les autres lésions
aiguës paraissent toujours débuter par une ischémie de la muqueuse gastrique (aspect marbré lors de
l’endoscopie), cette vaso-constriction entrainant ensuite une rupture de la barrière muqueuse puis une
rétrodiffusion des ions H+.

Certains médicaments, aspirine, corticoïdes, phénylbutazone et autres anti-inflammatoires


jouent également un rôle très important d’autant qu’ils peuvent être administrés avant ou au cours d’un
état de stress.

L’action aggressive de l’alcool sur la muqueuse gastrique a été démontrée à plusieurs reprises.
L’ingestion d’une importante quantité d’alcool (1 g par kg) à jeûn détermine au niveau des muqueuses
gastriques ou bulbaires des lésions allant de la congestion vasculaire avec infiltration à éosinophiles de
la muqueuse à des aspects pétéchiaux ou de gastrite hémorragique.

Certaines gastrites hémorragiques peuvent survenir sans circonstances apparentes. Désignées


sous le terme de primitives, elles sont en fait secondaires à un état de forte tension émotive chez un

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Chirurgie digestive 202
sujet ayant une structure névrotique certaine. Il s’agit là d’une véritable maladie psychosomatique,
proche parente de la maladie ulcéreuse.

Diagnostic

Les lésions aiguës de la muqueuse gastrique représentent 25 à 30 % des hémorragies digestives


hautes, mais à l’intérieur des lésions aiguës, il est difficile d’estimer le pourcentage exact de lésions
véritablement hémorragiques. Certains auteurs vont jusqu’à considérer que les lésions aiguës sont
latentes neuf fois sur dix, cependant leur traduction clinique principale est la survenue d’hémorragies
digestives, sévères, soudaines et répétées. Seul l’examen endoscopique fait en période hémorragique
ou immédiatement post-hémorragique permet de reconnaître les lésions qui vont de l’aspect marbré de
la muqueuse aux véritables ulcérations découpées à l’emporte-pièce en passant par l’aspect
oedémateux d’une muqueuse parfois recouverte d’un épais enduit de mucus, l’aspect erythémateux ou
pétéchial avec érosions punctiformes, l’aspect “gastrite hémorragique vraie” d’une “muqueuse
pleurant le sang”, les érosions isolées ou multiples et les véritables ulcères aigus, hémorragiques ou
non. L’association de plusieurs types de lésions est fréquente. Les biopsies apporteront des
informations sur la profondeur de l’atteinte, l’état antérieur de la muqueuse et mettent parfois en
évidence des aspects de “puits capillaires” rencontrés au cours des gastrites hémorragiques, le plus
souvent des lésions hémorragiques ou congestives au niveau du chorion et des lésions inflammatoires
aiguës et nécrotiques de l’épithélium de surface. En général, les glandes gastriques sont épargnées. Un
aspect endoscopique de muqueuse apparemment normale ne doit pas faire négliger la pratique de
plusieurs biopsies dont les résultats peuvent témoigner de lésions aiguës en voie de régression.

Quelques problèmes particuliers de diagnostic peuvent se poser chez les malades ayant des
antécédents de maladie ulcéreuse (s’agit-il d’une lésion aiguë, d’une complication ou d’une récidive de
l’ulcère chronique) et chez les sujets cirrhotiques dont les causes de saignement sont multiples
(varices, gastrite hémorragique, ulcères).

Modalités évolutives, pronostic et traitement

Les lésions aiguës de la muqueuse gastrique sont labiles, n’évoluant jamais vers l’ulcère de
Cruveilhier. Elles tuent ou guérissent sans séquelles. Le traitement repose d’abord sur la recherche de
la cause et son éradication (défaillance circulatoire, foyer infectieux,
cause neurologique, médicaments). Le traitement symptomatique doit associer les transfusions
sanguines, les injections de Cimétidine et/ou les solutés glacés hémostatiques instillés dans l’estomac
par une sonde gastrique.

En fait, une meilleure connaissance de la pathogénie des lésions aiguës doit permettre d’en
prévenir l’apparition. On peut déjà remarquer qu’ayant les techniques d’alimentation parentérale, les
hémorragies digestives par lésions aiguës (gastro-duodénites érosives) étaient fréquentes et mortelles
dans 80 % des cas, compliquant les états de choc dès que ceux-ci se prolongeaient quelques heures.
La pratique courante de l’alimentation parentérale et entérale réduit l’apparition des lésions
aiguës chez les malades graves en permettant d’obtenir un état nutritionnel satisfaisant. La correction
rapide de l’état de choc et l’utilisation préventive de Cimétidine sont également indispensables dans le
traitement préventif chez les sujets à haut risque. Les interventions chirurgicales doivent être réduites
le plus possible mais restent une nécessité devant l’érosion artérielle.

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Chirurgie digestive 203

V.PATHOLOGIE GASTRO-DUODENALE LATROGENE

La pathologie gastro-duodénale iatrogène prend depuis une dizaine d’années une place
grandissante dans la pathologie digestive. Sans aller jusqu’à affirmer que certains médicaments
provoquent plus de maladies qu’ils n’en guérissent, on doit reconnaître que bien souvent une attitude
thérapeutique très insouciante entraîne des conséquences redoutables.

Circonstances de diagnostic

La pathologie iatrogène gastro-duodénale peut se manifester de trois façons : un syndrome


douloureux à type de brûlures épigastriques, une hémorragie digestive haute, un accident perforatif
d’une lésion ulcéreuse. Elle regroupe sur le plan anatomique plusieurs types de lésions. Les unes sont
manifestement des lésions aiguës allant de la gastrite érythémateuse ou congestive, à l’ulcère aigu, en
passant par les érosions ou micro-ulcérations et la véritable hémorragie digestive. Les autres sont des
lésions chroniques localisées (poussées ou complications d’une maladie ulcéreuse) ou généralisées
(gastrite chronique atrophique à prédominance antrale, de caractère pluri-inflammatoire avec des
métaplasies rares).

L’effet iatrogène d’un médicament naturellement agressif pour la muqueuse digestive peut
être majoré par des facteurs importants. Aussi le risque est-il d’autant plus élevé qu’il existe
antérieurement une lésion digestive (gastrite atrophique, ulcère, hernie hiatale, oesophagite, tumeurs
bénigne ou maligne), que le sujet consomme une quantité excessive d’alcool, et qu’un état de stress
(choc psychologique, infection, etc) survient pendant la prise du médicament.

Principaux médicaments responsables

Aspirine

L’aspirine est utilisée depuis 1899 et a été le premier médicament reconnu responsable de
lésions gastriques aiguës. Elle paraît actuellement incriminée dans plus de 70 % des accidents
iatrogènes gastro-duodénaux.

Corticoïdes

Contrairement à l’opinion généralement admise, il n’est pas clairement démontré que la


maladie ulcéreuse ait une fréquence particulièrement accrue chez les sujets soumis à une
corticothérapie. Ce n’est qu’à partir d’une dose quotidienne très importante et prolongée que le risque
de survenue d’un ulcère apparaît nettement.

En pratique, on peut retenir que les sujets indemnes de lésions digestives et recevant une
corticothérapie courte et de posologie moyenne (inférieure à 1 mg/kg) ont probablement de faibles
chances de faire des complications digestives.

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Chirurgie digestive 204
Anti-inflammatoires non stéroïdiens

La phénylbutazone est une molécule très aggressive pour la muqueuse digestive, cette agressivité
dépendant de la dose totale administrée, en général les acidents apparaissent en 10 jours pour une
posologie de 1 g par jour. En fait, il s’agit là de doses élevées très exceptionnellement administrées.
Les spécialités les plus courantes sont: Phénylbutazone ®, Butazolidine ®, Calibène ®, Elarzone ®,
Ketazone ®, Megazone ®, Midalgyl ®, Perclusone ®, Tandéril ®, Thémanol ®.

D’une façon générale, tous les anti-inflammatoires non stéroïdiens présentent une
agressivité moindre cependant non négligeable.

L’action aggressive des anti-inflammatoires paraît être analogue à celle des corticoïdes, elle se
fait par voie générale.

Autres médicaments

Les anticoagulants ne provoquent pas de lésions de la muqueuse, mais font saigner les lésions
ulcéreuses existantes. Il importe donc, devant toute hémorragie digestive survenant pendant un
traitement anticoagulant de rechercher la lésion sous-jacente (ulcère, cancer, diverticule…)

Effet cytoprotecteur des prostaglandines

Un effet inhibiteur des anti-inflammatoires sur la synthèse locale des prostaglandines a été
récemment démontré au niveau de la muqueuse gastrique. Ceci pourrait être l’explication de la
cytotoxicité des anti-inflammatoires et de l’aspirine puisque les prostaglandines jouent un rôle capital
dans le maintien de l’intégrité cellulaire (effet cytoprotecteur). Des études effectuées chez l’homme
viennent de prouver que l’administration de prostaglandines E normalisait les pertes digestives de sang
induites par l’aspirine et l’indométacine.

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Chirurgie digestive 205
VI. TUMEURS GASTRIQUES

VI. TUMEURS GASTRIQUES

Cancers de l’estomac

Sous ce terme sont désignés deux groupes de tumeurs malignes, les carcinomes développés à
partir des cellules épithéliales (85 à 95 pour 100). Si la conduite thérapeutique s’avère différente dans
les deux cas, les circonstances et les moyens de diagnostic permettent de les regrouper dans un même
chapitre.

Epidémiologie

Son incidence serait de 19 pour 100 000 habitants mais le risque carcinogène croît de façon
linéaire avec l’âge, l’incidence passant à 200 pour 100 000 à partir de 70 ans. Deux fois plus fréquents
chez l’homme que chez la femme, le cancer de l’estomac est également plus élevé dans le groupe
sanguin A et pourrait dans certains cas être soumis à des facteurs héréditaires. Sa répartition
géographique permet de distinguer des pays à haut risque (Japon, Chili, Autriche, Finlande) à risque
moyen (France, pays anglo-saxons). Un élément réconfortant est cependant apporté par la
comparaison des taux de mortalité entre deux périodes distantes de 5 ans : la fréquence du cancer de
l’estomac diminue dans tous les pays alors que l’évolution est inverse pour le cancer de l’oesophage.

L’épidémiologie causale doit faire envisager en priorité l’importance des états précancéreux
essentiellement représentés par la gastrite atrophique, le rôle de la métaplasie intestinale associée,
paraissant majeur. Ceci peut expliquer la fréquence du cancer de type intestinal (épithélioma organisé
en tubes et glandes à cellules bien différenciées) étroitement corrélé avec les foyers de métaplasie, la
relation avec le type diffus (épithélioma non différencié) étant moins nette. Le cancer microscopique
(inférieur à 5 mm) naît au niveau de la zone de renouvellement cellulaire de l’épithélium de surface,
son évolution va être latente pendant plusieurs années. Parmi les facteurs de la carcinogenèse, le rôle
des nitrosamines est très important mais s’il existe une relation entre cancer de l’estomac et régime
alimentaire, il semble que ce ne soit pas tel ou tel type d’aliments qui soit responsable mais plutôt leur
mode de préparation ou de conservation (poissons fumés par exemple). L’alcool et le tabac n’ont pas
un rôle pathogénique formellement établi. Il est, par contre, démontré que l’amiante est un facteur
cancérigène certain, intervenant dans de nombreux cancers digestifs et auquel sont exposées de très
nombreuses professions.

Circonstances de diagnostic

“Il n’y a pas d’histoire symptomatique de cancer de l’estomac. Il revêt tous les aspects, depuis
celui des troubles dyspeptiques de l’allure la plus banale et la plus atténuée, jusqu’à celui, typique dans
ses moindres détails, des ulcères gastriques ou duodénaux les plus douloureux” .

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Chirurgie digestive 206
Le diagnostic de cancer de l’estomac à un stade avancé est facilement évoqué devant le
tableau classique d’un homme de cinquante ans: anoréxique et amaigri, présentant un teint anémique
et, depuis quelques semaines, des vomissements fréquents. La palpation met en évidence une tumeur
épigastrique avec parfois une hépatomégalie marronnée et peut aussi découvrir des adénopathies sus-
claviculaires (Troisier) ou axillaires. Des complications bruyantes peuvent rapidement apparaître:
hémorragie, sténose, plus rarement perforation.

Un deuxième tableau d’allure dyspeptique associé à des troubels digestifs banals, une
anoréxie importante d’abord élective pour la viande et les graisses, un dégoût du tabac et un
amaigrissement prononcé.

Parfois, la symptomatologie est essentiellement douloureuse et revêt soit un aspect


typiquement ulcéreux (l’ulcère d’aspect bénin ne guérissant pas sous traitement médical ou réapparaît
à plusieurs reprises), soit une allure plus atypique. Un traitement symptomatique peut améliorer
temporairement les douleurs mais “si le malade guérit, l’estomac reste cancéreux”.

Enfin, le diagnostic de cancer gastrique doit être systématiquement évoqué devant tout
amaigrissement isolé, toute anémie hypochrome microcytaire, toute hépatomégalie tumorale, tout état
fébrile prolongé ou devant des manifestations paranéoplasiques (phlébites, acanthosis nigricans).
Une circonstance particulière est représentée par l’estomac opéré (gastrectomie partielle). Ce sont les
modifications muqueuses (gastrite chronique atrophique et métaplasie) qui peuvent expliquer le risque
accru de cancer gastrique du moignon gastrique survenant plusieurs années après une gastrectomie.

Eléments de diagnostic

Pendant longtemps la radiographie gastro-duodénale a représenté l’élément essentiel pour


faire le diagnostic ou tout au moins pour essayer d’évaluer la malignité de certaines images. Elle est
très évocatrice lorsqu’elle décèle une volumineuse lacune irrégulière ou un aspect marécageux de
l’antre (forme bourgeonnante), une niche encastrée avec signe du ménisque (forme ulcérée), une
raideur localisée au niveau de l’angle de la petite courbure (forme infiltrante). Cependant, la plupart de
ces images n’apparaissent qu’après une longue évolution des lésions et le problème d’un diagnostic
précis à la période utile ne peut être résolu que grâce à l’apport de la fibroscopie.

La fibroscopie gastrique est actuellement l’examen indispensable. Certains auteurs en font


même une exploration de première intention. Ceci peut se comprendre dans la mesure où son
indication doit être portée devant toute ulcération gastrique, quelque soit son aspect (des biopsies
dirigées sur les berges seront effectuées afin de rechercher soit une dysplasie sévère soit un véritable
cancer ulcériforme), devant des images radiologiques minimes (gros pli isolé, ou polype d’aspect
bénin) ou encore devant un transit gastro-duodénal apparemment normal ne coïncidant pas avec des
signes cliniques préoccupants et, bien entendu devant des lésions radiologiques évoquant la malignité
(certitude histologique: mise en évidence d’un lymphome). Schématiquement,
on peut distinguer des formes végétantes relativement rares, des formes superficielles (lésions
saillantes, planes ou déprimées) et des formes ulcérées pour lesquelles il est difficile de savoir s’il
s’agit d’un ulcère dégénéré ou d’un cancer ulcéré (voir ulcère gastrique). Une règle absolue en
gastroscopie doit être rappelée: il faut considérer comme valables les prélevements “positifs” et ne pas
tenir compte des résultats “négatifs” pour réfuter la malignité au niveau d’une lésion douteuse. Des
techniques cytologiques (brossage de la lésion, lavage) peuvent être effectuées au cours de
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Chirurgie digestive 207
l’exploration endoscopique. L’utilisation des colorations vitales peut également améliorer la
“performance diagnostique”.

Le dosage de l’antigène carcino-embryonnaire n’a aucune valeur diagnostique. Il est


cependant intéressant après exérèse chirurgicale du cancer; mais seuls des taux élevés (persistance ou
élevation secondaire) permettent d’envisager la récidive ou la persistance de tissu tumoral.

Formes cliniques

Le cancer superficiel. Ce terme créé pour désigner un cancer détecté à un stade où il est
encore curable par intervention chirurgicale, comprend les formes de cancers gastriques limités à la
muqueuse et à la sous-muqueuse sans envahissement ganglionnaire. Il regroupe les polypes malins
(très rares), l’ulcéro-cancer (1/5 des cancers superficiels) et surtout le cancer muco-érosif. Cette
dernière forme peut se présenter comme une lésion dont la taille va de 3 mm à plus de 40 mm, souvent
impossible à repérer par la palpation au cours de l’intervention, n’apparaissant qu’à l’ouverture de
l’estomac soit sous la forme d’un dépoli de la muqueuse, soit sous la forme d’une exulcération à
contour polyclinique et à fond granité. Il est bien certain que de telles images ne peuvent apparaître
que sur des clichés en double contraste ou des mucographies d’excellentes qualités, mais c’est
essentiellement la fibroscopie avec biopsie et éventuellement la cytologie à la brosse qui donnent le
maximum de positivité.

Les différentes formes topographiques. Les cancers de la partie supérieure de l’estomac se


manifestent souvent par une symptomatologie dysphagique ou douloureuse rétro-sternale. Ils peuvent
s’accompagner d’un envahissement oesophagien simulant un cancer du tiers inférieur de l’oesophage,
mais la biopsie confirme la nature glandulaire de la prolifération. Les cancers de la région pylorique
s’individualisent par une symptomatologie de sténose et, en urgence, le diagnostic peut faire discuter la
sténose néoplasique ou ulcéreuse.
La linite plastique représente 4 à 5 % des cancers gastriques. Il s’agit d’un cancer infiltrant
touchant toutes les couches de la paroi sans en bouleverser cependant l’architecture générale. Elle se
caractérise sur le plan macroscopique par un épaississement considérable de la paroi, qui prend un
aspect blanc nacré et par une atteinte circonférentielle transformant la cavité gastrique en un tube étroit
et rigide, la linite étant le plus souvent localisée à la région antropylorique. Sur le plan histologique, les
cellules malignes en général muco-sécrétantes (cellules en bagues à chaton) infiltrent tous les plans de
la paroi, se disséminant dans un stroma scléro-inflammatoire considérable. Ces caractères n’apportent
guère de particularité au tableau clinique mais donnent sur le plan radiologique l’image évocatrice
d’un estomac figé, raide, indéformable. Sur le plan endoscopique, cet aspect se retrouve au niveau de
la paroi mais la réalisation technique des biopsies en raison de la dureté pariétale peut être difficile
d’autant qu’elles doivent être volumineuses et profondes pour atteindre le siège habituel des cellules
tumorales. Le pronostic de ce cancer très lymphophile et métastatique (carcinose péritonéale ou
métastases intestinales à type de sténose) est, contrairement à l’opinion classique, extrêmement
mauvais. L’exérèse chirurgicale, seul traitement possible, est loin d’être toujours réalisable devant
l’existence des métastases. Seul le diagnostic précoce peut améliorer ce pronostic fâcheux, il passe par
la pratique de biopsies multiples sur toute zone suspecte (manque de souplesse, aspect figé des plis).
Cependant, les biopsies peuvent être négatives, l’infiltration et la propagation se faisant souvent dans
la sous-muqueuse.

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Chirurgie digestive 208

Les lymphomes gastriques non hodgkiniens. Les lympphosarcomes représentent 3 % des


tumeurs malignes de l’estomac. Macroscopiquement, il s’agit de tumeurs de consistance élastique et de
section blanchâtre pouvant donner une image radiologique caractéristique dans les cas évolués (image
lacunaire polycyclique avec gros plis à disposition anarchique) mais pouvant aussi se traduire par des
lésions moins caractéristiques (niche, lacune, sténose). L’endoscopie peut apporter des éléments de
présomption (gros plis hypertrophiés, pseudopolypoïdes, ulcérations multiples, rougeur excessive de la
muqueuse, enraidissement) mais le diagnostic de lymphome reste difficile à porter même sur les
fragments biopsiques, les cellulaires lymphocytaires n’ayant pas toujours un aspect blastique. C’est
dire tout l’intérêt que peut avoir, dans certains cas, une large biopsie per-opératoire. En effet, les
différentes modalités thérapeutiques (exérèse chirurgicale, radiothérapie, chimiothérapie) sont
conditionnées par un diagnostic histologique certain et un bilan d’extension précis (voir lymphomes
intestinaux). Le pronostic des formes gastriques primitives des lymphomes paraît dépendre de la
profondeur de l’atteinte et de la diffusion ganglionnaire (60 % de survie à 5 ans si elle n’existe pas, 27
% si elle existe). La présence d’une localisation gastrique au cours d’un sarcome ganglionnaire
témoigne d’une grande diffusion de la maladie.

Les tumeurs malignes rares. Parmi les tumeurs mésenchymateuses, les léiomyosarcomes sont
les plus fréquentes, il s’agit de tumeurs “intramurales” dont le développement peut se faire vers
l’extérieur (exogastrique) ou vers l’intérieur (endogastrique). Leur symptomatologie clinique n’a rien
de spécifique, mis à part la fréquence d’une masse épigastrique ou d’hémorragies digestives
abondantes et récidivantes alors que sur le plan radiologique, l’aspect le plus évocateur est donné par
une image lacunaire centrée par une ulcération. En raison du caractère sous-muqueux de la tumeur, les
biopsies endoscopiques à la pince donnent habituellement des résultats peu concluants. Le traitement
est essentiellement chirurgical, le pronostic paraissant être meilleur que celui des carcinomes.

Parmi les lésions métastatiques, il faut citer les métastases des cancers du sein, des bronches,
du rein et du testicule ainsi que les mélanomes malins. L’infiltration de la paroi gastrique au cours des
carcinomes pancréatiques est fréquente.

Traitement et pronostic

Le pronostic du cancer de l’estomac est mauvais puisque la survie à 5 ans n’est que 10 à 12 %
pour l’ensemble des cas. Ce pronostic peut être amélioré si le cancer est diagnostiqué au stade
superficiel (93 % de survie à 5 ans pour le stade sous-muqueux) mais le dépistage de ces stades est
resté pendant bien longtemps illusoire.

Les possibilités du traitement chirurgical sont donc essentiellement liées au moment du


diagnostic, la période utile étant le moment où il est possible d’opérer avec une certitude ou une
grande probabilité de guérison.

METHODES ET INDICATIONS

La gastrectomie totale est utilisée soit dans les cancers des fundus par nécessité, soit dans les
cancers de l’antre à la place de la gastrectomie partielle, par principe, car les cancers de l’estomac
s’étendent volontiers plusieurs centimètres au-delà des limites apparentes de la lésion. C’est une
exérèse cancérologique enlevant les chaînes ganglionnaires attenantes.
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Chirurgie digestive 209

Le rétablissement de la continuité digestive peut être assuré de diverses façons: très


exceptionnellement, directement, par anastomose oeso-duodénale, le plus souvent après fermeture du
moignon duodénal par une anse intestinale montée en Y ou en oméga, parfois en rétablissant le circuit
normal entre l’oesophage et le duodénum par interposition d’une anse jéjunale ou même par
reconstitution d’un néogastre.
Quelque soit le montage, les résultats fonctionnels sont en fait peu différents: on note essentiellement
des troubles nutritionnels liés à la perte de la muqueuse gastrique aboutissant à une perte de poids et à
une anémie carentielle; ces troubles sont habituellement bien tolérés.

La gastrectomie totale élargie. Elle est élargie aux viscéres avoisinants, le plus souvent à la
rate et à la queue du pancréas, soit par nécessité en raison de l’envahissement par contiguité de ces
viscères, soit par principe pour assurer une ablation aussi complète que possible des relais
lymphatiques.

Le traitement chirurgical palliatif. La gastro-entérostomie est utilisée lorsqu’une tumeur


antrale s’avère inextirpable et obstrue la lumière digestive. Lorsque la tumeur antrale est mobilisable,
une gastrectomie partielle est choisie.

L’étendue de cette gastrectomie partielle est plus importante que celle utilisée pour l’ulcère;
elle enlève les trois quarts ou les quatre cinquième de l’estomac ainsi que le grand épiploon et la
chaîne coronaire stomachique. Le rétablissement de la continuité digestive est assurée par anastomose
type Péan ou type Finsterer.

La mortalité globale du traitement chirurgical pour cancer est de l’ordre de 10 %, elle s’élève
nettement pour les gastrectomies totales ou polaires supérieures. Le taux de survie après gastrectomie
“curatrice” est de 40 % à la 5è année, mais si les ganglions
satellites de la tumeur sont envahis, il s’abaissse à 10 p. 100 environ. Ces résultats décevants ne
peuvent être améliorés que par une politique de détection appliquée aux sujets à risque élevé, reposant
sur une surveillance endoscopique couplée aux biopsies et en ayant recours à des techniques de
coloration pour repérer les foyers épithéliaux atypiques. La recherche répétée des dysplasies gastriques
permettra seule de parfaire le rendement du dépistage précoce.

Le bilan des traitements non chirurgicaux des carcinomes gastriques (chimiothérapie,


radiothérapie, immunothérapie) apparaît aujourd’hui comme encore très décevant. Une chimiothérapie
appliquée à dose efficace (5-F.U. par intraveineuse) expose toujours le malade à un risque toxique
surtout médullaire pour des résultats souvent très médiocres sur le volume de la tumeur et sans aucun
effet sur la durée de survie. L’immunothérapie n’a pas fait, à long terme, la preuve de son efficacité,
elle peut, par contre, induire des facilitations paradoxales de la croissance tumorale sur le plan
expérimental. La radiothérapie n’a pratiquement aucune place dans le traitement des carcinomes
gastriques.

Tumeurs bénignes de l’estomac

Leur fréquence est souvent sous-estimée du fait de leur grande latence. Sous une
symptomatologie clinique et radiologique relativement univoque sont regroupés différents types
anatomopathologiques.
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Chirurgie digestive 210

Diagnostic

Les circonstances de diagnostic sont essentiellement représentées par la survenue d’une


hémorragie digestive ou d’un syndrome douloureux atypique. Leur traduction radiologique dépend de
leur siège et de leur taille. L’aspect le plus fréquent est celui d’une lacune arrondie dont la base
d’implantation présente une largeur variable. L’aspect pédiculé associé à la souplesse de la paroi
gastrique adjacente est un argument en faveur de la bénignité. Une niche apicale est visible parfois au
sommet de la masse tumorale et en traduit l’ulcération. La fibroscopie gastrique s’impose dans tous les
cas. Elle permet un diagnostic plus précis et parfois un traitement endoscopique. L’aspect général le
plus souvent constaté est celui d’une masse endoluminale arrondie, de taille variable, pédiculée ou
sessile, présentant parfois à son sommet une ulcération cratériforme. Les biopsies pratiquées
directement au niveau de la tumeur peuvent souvent apporter des résultats histologiques décevants
(muqueuse normale ou gastrite…) car la tumeur est sous-muqueuse et inaccessible au prélèvement à la
pince.

L’artériographie coeliomésentérique peut être utile pour le diagnostic et le bilan d’extension de


certaines tumeurs vaculaires.

Formes cliniques les plus fréquentes

Les léiomyomes sont les plus fréquentes des tumeurs bénignes gastriques. Ils restent longtemps
cliniquement latents et peuvent atteindre une taille volumineuse.

Les schwannomes intramuraux se développent soit vers la lumière gastrique, soit vers la
cavité péritonéale. Ils peuvent peser plusieurs kilos. Leur partie centrale est très fréquemment remaniée
par un ramollissement nécrotique par une hémorragie.

Les tumeurs épithéliales (polypes vrais) sont fréquentes en cas d’atrophie de la muqueuse
(maladie de Biermer). Les adénomes, de coloration rosée et de petite taille, siègent souvent au niveau
de l’antre et peuvent dégénérer comme les polyadénomes rectocoliques. Par contre, les tumeurs
villeuses de l’estomac sont rares ainsi que les tumeurs carcinoïdes.

Les tumeurs dysgénétiques sont représentées par les tératomes, les harmatomes (formés de
tissus appartenant à l’estomac : kystes pariétaux et duplications) et les choristomes (formés de tissu
n’appartenant pas à l’estomac : pancréas aberrant, adénome brunnérien). En fait, le pancréas aberrant
de siège antral est la tumeur dysgénétique la plus fréquente.

Les pseudotumeurs inflammatoires sont représentées par le polype fibro-inflammatoire et le


granulome éosinophile attribué en général à une allergie locale due à la consommation de poissons
crus parasités.

Les angiomes gastriques sont souvent localisés à la partie supérieure de l’estomac et causent
des hémorragies digestives. Ils peuvent être multiples et/ou associés à des angiomes oesophagiens et
duodénaux ou a une véritable maladie angiomateuse. La photocoagulation par laser représente le
traitement le plus adéquat.

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Chirurgie digestive 211
LES COMPLICATIONS APRES CHIRURGIE GASTRIQUE

1.Précoces
- Lachage du moignon duodénal
Arrive surtout vers le 5e JPO
Douleurs et tableau de péritonite
CAT: Drainage adéquat
Alimentation parentérale pendant 3-4 semaines
- Rétention gastrique survient au 4e – 5e JPO
Tableau clinique: vomissements et intolérance alimentaire
CAT: Aspiration gastrique
Réanimation
Alimentation parentérale

2. Tardives
Récidives ulcérences
Causes: Opérations insuffisantes
Prise de AINS
Penser au syndrome de ZE
Clinique: Douleur, saignement
CAT: Traitement médical , chirurgie secondaire
Dumping syndrome
……………………
Perte de poids et malabsorption:
Syndrome du petit estomac
Obstruction au niveau de l’anastomose
Malabsorption.
Syndrome de l’anse afférente après Billroth II.
Clinique: vomissement
Gastrite biliaire
Anémie
Diarrhée postvagotomi
Bézoardes.
Amalgame des végétaux dans l’estomac
CAT: Prescrire les spasmolitiques et de la papaverine
Cancer du moignon gastrique

L’estomac opéré

Fonction de résorption

Une résorption dite des deux tiers diminue la capacité d’absorption du tractus gastro-intestinal.
Cela n’apparaît pas dans la plupart des cas à condition que l’alimentation soit idéale. 50% des patients
présentent une stéatorrhée accrue après résection, ainsi qu’une certaine ostéoporose et,
éventuellement, une anémie hypochrome après quelques années. Les anémies hyperchromes sont rares
et n’apparaissent pratiquement qu’après gastrectomie totale.
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Chirurgie digestive 212
Le poids moyen des patients avec résection gastrique est inférieur à celui d’un groupe d’individus du
même âge. Ce n’est pas le cas pour les patients après vagotomie, en particulier après vagotomie
proximale sélective. La diminution d’acide permet en général une colonisation bactérienne active du
duodénum supérieur, qui peut entraîner des diarrhées. Ces diarrhées sont plus fréquentes après
vagotomie, mais rarement invalidisantes. Un traitement antibiotique oral les guérit en général. Les
diarrhées sont extrêmement rares après vagotomie proximale sélective.

Syndrome de dumping

On constate souvent un dumping après opération gastrique. On distingue une forme précoce et
une forme tardive. Mais on devrait réserver l’expression dumping à la forme précoce: il apparaît 10 à
20 minutes après le repas et s’accompagne des symptômes subjectifs très désagréables (faiblesse ,
sueur, nausée ) . Dans ces formes graves, le patient est contraint de se coucher car il risque le
collapsus.

Ce tableau clinique fut longtemps une énigme. Il est dû à plusieurs facteurs. On a


d’abord cru qu’il était dû à la vidange accélérée de l’estomac dans le duodénum ou le jéjunum
qu’on notait souvent au transit baryte. Mais on a constaté qu’il existait des formes de vidange
accélérée sans dumping et vice versa. Le dumping précoce s’accompagne des signes classiques
d’hypovolémie. (Diminution de volume sanguin avec augmentation de la viscosité et de
l’hématocrite et diminution du flux sanguin musculaire et rénal.) Le flux sanguin et le débit
cardiaque sont généralement accrus. Le passage d’une partie du liquide circulant dans la
lumière intestinale joue donc un rôle causal. Le fait que les aliments à action osmotique
(hydrates de carbone) déclenchent très facilement un dumping, confirme cette hypothèse. De
plus, on note un taux accru de sérotonine plasmatique dans de nombreux patients avec dumping.
Il s’agit donc d’une combinaison des facteurs suivants: modification du débit sanguin dans le
territoire splanchnique, perte de liquide circulant dans la lumière intestinale, libération
d’amines vasoactives comme la sérotonine.

Du point de vue thérapeutique il faut surtout éviter l’absorption de grandes quantités d’hydrates
de carbone (surtout à l’heure du petit déjeuner) et rassurer le patient : ce syndrome disparaît en
quelques mois et ne manifeste pour ainsi dire jamais plus d’un an après la résection.

Le dumping tardif ou syndrome de Pickwick est une hypoglycémie postprandiale réactive


apparaissant 11/2 à 2 heures après le repas. Sa symptomatologie est analogue à celle du dumping
précoce. Il disparaît également dans les mois qui suivent l’opération. L’administration d’hydrates de
carbone dans la phase aiguë l’améliore alors que ceux-ci aggravent un dumping vrai. C’est pourquoi il
importe de distinguer les deux formes.
Le dumping précoce et le dumping tardif apparaissent après tous les types d’intervention, mais ils sont
cependant rares après vagotomie proximale sélective sans pyloroplastie.

Le syndrome de l’anse afférente

Après un B II, la vidange du duodénum peut être difficile selon la position de l’anse afférente
ou se produire par décharge brutale dans l’estomac en entraînant une détérioration de l’état général,
avec vomissement biliaire et perte de poids, parfois avec des perturbations de l’équilibre électronique.
Le seul traitement possible est la correction de la position de l’anse.
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Chirurgie digestive 213

Ulcère récidivant, ulcère peptique jéjunal (ulcère d’anastomose)

La seconde expression date de l’époque où l’on pratiquait presque uniquement des résections
de type B II et désigne la réapparition d’un ulcère sur l’anse employée pour l’anastomose. Nous
préférons l’expression d’ulcère récidivante car nous pouvons y englober les récidives duodénales après
B I ou après vagotomie. Ces récidives sont rares après les opérations d’ulcères gastriques mais
relativement élevées pour les ulcères duodénaux à cause de l’acidité résiduelle persistante. Les taux de
récidives varient de 1 à 4%. Elles peuvent se produire de nombreuses années après l’intervention.
Après les interventions du type conservateur, les récidives dépendent fortement de l’intégralité de la
vagotomie. Si les cellules pariétales sont vraiment totalement d’énervées, les récidives sont rares
(moins de 1%).

L’ulcère récidivant après opération est en général plus douloureux que l’ulcère initial. C’est une
complication très désagréable que seule une réintervention peut influencer. Les ulcères récidivants
peuvent entraîner toutes les complications de l’ulcère primitif, en particulier l’hémorragie, la
perforation et sténose, alors que la dégénérescence maligne n’apparaît que 15 à 20 ans après résection.
Les fistules gastrocoliques avec diarrhée correspondante et vomissements fécaux sont fréquentes. Le
traitement consiste en une vagotomie, parfois combinée à la correction d’une anse anastomique mal
placée ou communiquant avec le colon. Si la première intervention a été une vagotomie et une tumeur.
On cependant pu constater pyloroplastie, il faut en général la compléter par voie transthoracique par
exemple.

Gastrite atrophique

Quelques années après une résection, le moignon gastrique présente une muqueuse plus ou
moins atrophique envahie de cellules inflammatoires. Ces altérations sont moins importantes après
vagotomie et pyloroplastie et résultent vraisemblablement du reflux de contenu duodénal alcalin.

Carcinome du moignon gastrique

Les carcinomes du moignon gastrique sont un peu plus fréquents que dans un échantillon de
population normale. Il y a sans doute un rapport causal avec la gastrique atrophique. On ne peut donc
envisager la résection comme prophylaxie du carcinome.

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Chirurgie digestive 214

4. INTESTIN GRELE

1. Ischémie intestinale chronique


2. Infarctus du mésentère
3. Obstruction de l'intestin grêle
4. Affections inflammatoires en dehors du Crohn
5. Ischémie intestinale aiguë
6. Fistules intestinales grêles
7. Tumeurs de l'intestin

1. ISCHEMIE INTESTINALE CHRONIQUE (angor intestinal)

La collatéralité est bonne entre les trois territoires artériels abdominaux.

Artère gastro-duodénale et région duodéno-pancréatique entre le territoire coeliaque et mésentérique


supérieur.

Arcade de Riolan entre le territoire mésentérique supérieur et mésentérique inférieur.

Branche de l’iliaque interne (hémorroïdaire) au niveau de la vascularisation distale (recto-


sigmoïdienne) de l’artère mésentérique supérieure. Une occlusion aiguë d’un de ces trois troncs ne
provoquera un accident ischémique aigu qu’au niveau de la mésentérique supérieure.

Si l’obstruction est progressive, les collatérales joueront leur rôle et que plusieurs occlusions
artérielles sont bien tolérées grâce à cette collatéralité.

L’athérosclérose est la cause majeure d’une occlusion progressive de ces vaisseaux.

Une thrombose progressive d’un des trois troncs reste souvent asymptomatique. La symptomatologie
n’apparaîtra que si au moins un tronc artériel est atteint par l’affection.

SYMPTOMATOLOGIE :

Les plaintes sont relativement typiques: douleurs abdominales postprandiales


caractérisant l’angor intestinal. Lors de la digestion, physiologiquement il y a augmentation du débit
artériel splanchnique. S’il y a des obstacles vasculaires, la douleur apparaîtra dans cette phase de
digestion et est due à une ischémie intestinale.

Cette douleur apparaît, en général, 20 à 30 minutes après le débit du repas et peut


persister une heure. Son intensité peut être grande et peut réclamer des antalgiques. Elle se situe dans
la région profonde de l’épigastre, irradiant vers les flancs.

A un stade ultérieur, on notera une perte de poids liée le plus vraissemblablement à


une crainte du patient et à une réduction de son alimentation.

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Chirurgie digestive 215
Un souffle abdominal peut être ausculté.

Cette symptomatologie peut être mal interprétée et confondue avec une symptomato-
logie ulcéreuse, biliaire ou pancréatique.

Elle sera évoquée lorsqu’il y a d’autres phénomènes d’athérosclérose.


L’artériographie est l’examen de choix particulièrement en profil afin de bien démontrer les lésions
artérielles.

TRAITEMENT :

La chirurgie s’impose car l’évolution ne peut se faire que vers un accident ischémique aigu. On
réalisera soit une endartériectomie ou mieux, des pontages aorto-mésentériques et aorto-coeliaques par
greffe veineuse.

RESULTATS :

Les résultats sont bien sûr fonction de la gravité de l’affection initiale; comme pour
l’athérosclérose des membres inférieurs, de nouvelles sténoses peuvent réapparaître.

2.INFARCTUS DU MESENTERE

L’infarctus du mésentère représente un des aspects les plus dramatiques de la pathologie


vasculaire intestinale. Il peut être provoqué par une oblitération aiguë de l’artère mésentérique, ou
apparaître sans oblitération vasculaire. Son pronostic reste toujours extrêmement redoutable et ne peut
être amélioré que par un diagnostic extrêmement précoce.

Physio-pathologie et anatomie pathologique

L’occlusion aiguë artérielle est représentée par la thrombose et l’embolie. L’athérome est la
cause la plus fréquente de thrombose, alors que les principales cardiopathies emboligènes sont le
rétrécissement mitral avec fibrillation auriculaire, l’infarctus du myocarde et les fibrillations
auriculaires du sujet âgé.

La thrombose veineuse est le plus souvent secondaire à un foyer septique (appendicite, abcès
pelviens, péritonite etc.) ou à une stase de cause mécanique dans le système mésentérique ou encore à
un état d’hypercoagulabilité. Le rôle des contraceptifs par voie orale a été sérieusement discuté dans
certains cas. L’existence d’un déficit héréditaire en antithrombine III peut expliquer certaines
résistances à l’héparine.

L’ischémie non occlusive paraît être de plus en plus fréquente et fait suite à une diminution
prolongée du débit cardiaque de causes multiples. L’intoxication digitalique, l’augmentation de la
viscosité sanguine, l’utilisation des vasopresseurs sont des facteurs étiologiques associés et importants.
L’aspect anatomo-pathologique du méso et des anses intestinales permet de différencier l’infarctus
artériel qui n’est en fait qu’une lésion de nécrose, du véritable infarcissement réalisé par une lésion
occlusive veineuse.

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Chirurgie digestive 216
Circonstances de diagnostic

L’infarctus du mésentère peut survenir schématiquement chez des sujets ayant de lourds
antécédents vasculaires ou cardiaques, au cours d’une maladie thrombo-embolique ou enfin chez des
sujets apparemment en bonne santé.

Signes de début

La douleur est le signe le plus important. Elle peut apparaître brutalement en cas d’embolie,
mais peut aussi succéder à des épisodes d’angor abdominal en cas de thrombose artérielle. Au cours de
thromboses veineuses elle est souvent précédée d’une période prodromique pouvant s’étaler sur
plusieurs jours. Diffuse à tout l’abdomen mais prédominant en général dans la région ombilicale elle
est très intense, angoissante, à type de crampes ou de coliques. Elle s’accompagne souvent de
vomissements biliaires ou alimentaires, et parfois de diarrhée secondaire à l’hyperpéristaltisme
intestinal initial. A ce stade le diagnostic doit être évoqué et l’artériographie coelio-mésentérique doit
être demandée en urgence.

Phase d’état

L’évolution va en quelques heures se compléter avec apparition d’un état de choc intense qui
modifie le tableau clinique initial, traduisant alors le caractère irréversible des lésions. Le malade
présente alors “les signes fonctionnels d’une occlusion mais incomplets (météorisme non point sonore,
mais matité) les signes physiques d’une tuméfaction pâteuse et mate aux contours flous; les signes
généraux d’une hémorragie interne avec collapsus précoce” (H. Mondor). Parfois les vomissements et
la diarrhée deviennent et s’accentuent avant que ne s’installe l’arrêt des matières et des gaz.

Evolutions spontanées

Elles se font irrémédiablement vers la mort, dans un tableau de péritonite et de choc


hypovolémique et toxi-infectieux.

Eléments de diagnostic

Ils sont essentiellement représentés par les signes cliniques, les circonstances d’appari-tion et le
terrain sur lequel ils surviennent.

L’hyperleucocytose est souvent importante, l’amylasémie peut être élevée, l’électro-


cardiogramme permet d’éliminer une nécrose myocardique.

Le cliché de l’abdomen sans préparation fait de face, débout, permet d’éliminer la présence
d’un pneumo-péritoine mais montre une grisaille abdominale, diffuse, uniforme, avec parfois une aéro-
iléie en amont du secteur intestinal infarci ou des niveaux hydro-aériques, et des anses intestinales
figées à parois épaissies; ou encore plus tardivement, des images gazeuses dans l’épaisseur de la paroi
intestinale.

La certitude du diagnostic est apportée par la radiologie vasculaire qui doit être effectuée en
urgence chaque fois que le diagnostic est suspecté et que l’évolution le permet. L’embolie se traduit
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par un arrêt total ou incomplet avec une image de caillot associée à un état de spasme du système
collatéral avec absence de remplissage veineux. La thrombose artérielle se caractèrise par une absence
quasi complète d’opacification de l’artère mésentérique supérieure associée à des lésions
athéromateuses. L’aortographie de profil prend, là, toute son importance. L’oblitération veineuse
comporte une stase du produit de contraste dans la paroi intestinale, une absence de retour veineux
secondaire et une artère perméable mais diminuée de calibre. Par contre les signes d’ischémie non
occlusive sont les plus difficiles à reconnaître: spasme généralisé de tous les vaisseaux intestinaux avec
débit inégal sans oblitération des troncs artériels principaux.

TRAITEMENT

La réanimation dans tous les cas vise à lutter contre le choc hypovolémique (sang, plasma) le
déséquilibre hydroélectrolytique, l’acidose et l’endotoxémie (antibiothérapie veineuse). Tous les
vasoconstricteurs doivent être évités car ils augmentent la vasoconstriction splanchnique.

Le traitement de l’oblitération artérielle vise à rétablir le flux mésentérique et doit être fait
précocement, avant la sixième heure. En cas d’embolie l’embolectomie avec extraction de l’embol à
l’aide d’une sonde de Forgarty est complétée par une héparinothérapie locale et une suture artérielle.
En cas de thrombose trois possibilités peuvent être discutées: la thrombo-endartériectomie, le pontage
artério-mésentérique supérieur ou la réimplantation de l’artère mésentérique supérieure. Le traitement
de l’infarcissement intestinal doit être envisagé dès que le flux mésentérique est rétabli après avoir
évalué les possibilités de récupération de l’intestin (recoloration, reprise du péristaltisme). L’exérèse
doit être aussi conservatrice que possible.

Dans les cas douteux un “second look” 24 heures après, peut permettre de compléter la
résection de l’intestin qui n’a pas récupéré.
En cas de thrombose veineuse le geste fondamental reste la résection de l’intestin thrombosé et infarci.
Le traitement anticoagulant est ici indispensable.
En cas d’ischémie non occlusive, l’intervention peut être néfaste car elle peut aggraver l’état de choc.
Le traitement médical est essentiel et doit viser à stabiliser l’état hémodynamique et à augmenter le
débit cardiaque en évitant les vasoconstricteurs. Le traitement chirurgical apparaît nèanmoins
nécessaire si l’amélioration ne se produit pas ou si le diagnostic est hésitant.

RESULTATS

Malheureusement tous les progrès effectués dans le domaine de la réanimation et de la


chirurgie vasculaire, le pronostic reste extrêmement sévère, la guérison réelle pouvant être estimée à
10 % des cas.

3. OBSTRUCTION DE L’INTESTIN GRELE

Affection chirurgicale la plus fréquente au niveau de l’intestin grêle. Il faut savoir distinguer
une obstruction mécanique d’un iléus paralytique qui correspond à un arrêt du mécanisme intrinsèque
de la péristaltique et donc arrêt du transit. Cet iléus se voit particulièrement après laparotomie, dans
l’ischémie intestinale, après certains médicaments ou dans l’hypokaliémie.

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Chirurgie digestive 218
L’obstruction mécanique peut être simple et liée à un obstacle dans la progression du transit.
L’obstruction étranglement est compliquée d’un phénomène ischémique de l’intestin grêle qui associe
donc une atteinte de la vascularisation avec évolution vers une gangrène d’un segment intestinal.

Etiologies.

Adhérences : 60 % des étiologies. Presque toujours suite à une intervention abdominale


antérieure. La mobilité intestinale provoque l’impaction de l’intestin derrière une bride ou adhérence.
Peut s’y ajouter un phénomène d’ischémie par strangulation ou volvulus.

Les hernies : 15 % des étiologies. Se font le plus souvent dans un orifice inguinal ou crural. Il
faut donc toujours examiner les orifices herniaires lors d’un syndrome abdominal et il est parfois
difficile de détecter une hernie crurale chez une femme obèse.

L’étranglement peut également se faire dans une éventration importante.


L’étranglement herniaire se présente surtout chez le nouveau-né, dans les volumineuses hernies de
l’homme agé et au niveau de l’orifice crural chez la femme agée.

Les néoplasies : 15 % des étiologies. Les cancers primitifs de l’intestin sont rares; ce sont
surtout les carcinomatoses péritonéales (ovaires, estomac) qui sont responsables de ce genre
d’accident. Celui-ci est en général subaigu et progressif. Causes rares:10 %.

Invagination intestinale : surtout fréquente chez le bébé au niveau iléo-caecal.


Le volvulus: résulte de la rotation de l’intestin grêle sur un point fixe, le plus souvent une bride ou
adhérence. S’y ajoute un phénomène vasculaire aigu.
La malrotation de l’intestin est la cause première du volvulus chez l’enfant.
Corps étranger : évacuation d’un bezoard chez un gastrectomisé. Chez l’enfant, pièce de monnaie etc.
L’attitude est de temporiser et de surveiller l’évacuation de ce corps étranger par des radiographies
d’abdomen à blanc répétées. S’il y a obstruction, ce sera le plus souvent au niveau de l’iléon terminal.
L’iléus biliaire: calcul libéré de la vésicule par une fistule cholecysto-duodénale.
Maladie de Crohn: soit par poussée inflammatoire ou par cicatrisation; des végétaux peuvent venir
s’impacter dans une zone retrécie de l’intestin.
Stricture due à une ischémie ancienne ou à une irradiation intestinale.

Physiologie.

L’intestin d’amont est distendu par les sécrétions, particulièrement, par l’air avalé qui est la
cause principale de distension gazeuse; l’azote n’est pas bien absorbé par la muqueuse. Des quantités
importantes de liquide isotonique sont perdues à partir du plasma et des espaces interstitiels.
Rappelons qu’il existe un flux bidirectionnel d’eau et de sels entre la lumière et la muqueuse
absorbante de l’intestin. Du fait de l’obstruction, le flux d’absorption est obstrué alors que l’intestin
continue à sécréter. Ultérieurement la distension freine le drainage veineux, ce qui contribue à créer un
oedème de la paroi intestinale et à aggraver encore les pertes liquidiennes. L’abdomen à blanc
démontrera parfaitement ce phénomène : présence de liquide dans les anses distendues par l’air : en
position débout ou décubitus latéral, niveaux hydro-aériques.

Les vomissements vont alors augmenter encore la déperdition liquidienne et d’électrolytes.


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Tous ces mécanismes conduisent à une hypovolémie profonde qui est la première cause de
décès chez les patients traités tardivement.
Si aux phénomènes d’obstruction, s’ajoute un phénomène d’ischémie intestinale, celui-ci par son
évolution rapide vers la gangrène et la perforation va encore accéler la dégradation car s’y ajoutera une
perte de liquide intra-péritonéal voire de sang. Les phénomènes septiques seront rapides: risque de
choc séptique.

Au départ d’une obstruction, les ondes péristaltiques de lutte s’accélèrent pour tenter de
franchir l’obstacle. Progressivement cependant, l’intestin s’épuise et la dilatation du grêle apparaît. Les
bactéries prolifèrent dans la lumière intestinale et le con-
tenu devient fécaloide; la nature des vomissements se modifie donc progressivement.

PRESENTATION CLINIQUE.

Symptome commun : arrêt des selles et des gaz.

L’obstruction simple: la symptomatologie varie en fonction du niveau de l’obstruction sur


l’intestin grêle.

Obstruction haute: duodénum, jéjunum. Vomissements précoces et abondants. Il est rare qu’ils
aient un caractère fécaloide. La douleur abdominale est haute et plutôt permanente. A la radiographie,
les niveaux hydroaériques seront peu abondants et surtout situés dans le flanc gauche sur le jéjunum
proximal.

Obstruction basse: iléon surtout distal. La symptomatologie est surtout faite de douleurs
crampiformes de la région péri-ombilicale. Ces ‘coliques’ s’accentuent par leur intensité.
Les vomissements seront plus tardifs: alimentaires au départ, puis biliaires puis fécaloides. La
distension abdominale sera prononcée alors qu’elle n’existe pratiquement pas dans l’obstruction haute.
La palpation abdominale peut évoquer une sensibilité. L’auscultation révèle la lutte intestinale et, au
stade de dilatation, des borborygmes.

La radiographie d’abdomen à blanc montrera de nombreux niveaux hydro-aériques sur le grêle


d’amont; absence de gaz dans le côlon; ceci est en contraste avec l’iléus paralytique ou il y a de l’air
dans le grêle et le côlon.

Obstruction-étranglement: au début, rien ne distingue cliniquement l’obstruction simple de


l’étranglement. Cependant, très rapidement, l’évolution se fera vers une douleur permanente s’il y a
étranglement, au contraire d’une douleur crampiforme si l’obstruction est simple. L’abdomen sera
sensible et même avec une défense dans la région de l’ischémie; exsudat sanglant autour de l’intestin
ischémié. Le patient sera plus rapidement toxique avec tachycardie. La leucocytose sera plus marquée.

L’abdomen à blanc et, surtout l’échographie montreront du liquide intra-péritonéal. Le


traitement doit être dans ce cas très précoce.

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Biologie.

En raison des déperditions liquidiennes et ioniques, apparition rapide d’une hémo-


concentration, d’une leucocytose modérée et, surtout, de déperditions ioniques. Les amylases sont
souvent élevées.

Diagnostic différentiel.

Evoquer toujours une possibilité d’iléus paralytique qui va accompagner une pathologie
inflammatoire de l’abdomen: migration lithiasique uretérale, appendicite aiguë, diverticulite aiguë,
pancréatite aiguë, fracture de colonne lombaire etc.

L’iléus paralytique postopératoire peut se prolonger anormalement et est difficile à distinguer


d’un accident par brides ou adhérences.

La pseudo-obstruction intestinale est un syndrome simulant une obstruction; s’y associe


souvent une paralysie du gros intestin. Peut se rencontrer dans des affections neurologiques ou
endocrines; sclérodermie, myxoedème, amyloidose etc. On peut également rencontrer ce syndrome
dans le décours d’hospitalisations prolongées dans des unités de soins intensifs, notamment pour
affections cardio-vasculaires: problèmes ischémiques ?

TRAITEMENT.

La priorité doit être donnée à la rééquilibration liquidienne et ionique. Les vomissements seront
contrôlés par la mise en place d’une sonde gastrique qui décomprime la partie haute du tube digestif.
Le chirurgien sera guidé par les données cliniques pour décider de l’opportunité ou non du geste
opératoire.

Dans certaines situations, on peut espérer la résolution spontanée du phénomène ou son


amélioration: iléus paralytique postopératoire, maladie de Crohn, intestin radique etc.

Néanmoins, la priorité sera donnée au diagnostic précoce d’un phénomène ischémique.


L’apparition d’une défense, la persistance d’une tachycardie et d’un fébricule, une dégradation du
patient imposent une intervention urgente afin d’exclure ce phénomène ischémique source d’une
mortalité élevée.

Selon le site de l’obstruction, on interviendra par une laparotomie verticale si l’obstruction est
intra-abdominale. Si elle se situe au niveau d’un orifice herniaire, l’incision se fera dans la région
inguinale ou abdominale basse. Une évaluation correcte de l’abdomen sera realisée. La totalité de
l’intestin sera vérifiée car plusieurs brides peuvent être présentes. On peut également rencontrer, en
amont d’une bride-obstruction, un phénomène de volvulus par distension de l’intestin grêle.

En cas d’ischémie de stade dépassé de nécrose intestinale, éviter absolument la libération du


pédicule vasculaire qui va libérer des toxines et des bactéries dans la circulation porte. Donc, réaliser
d’emblee la résection intestinale sans libérer l’obstacle vasculaire.
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En général, on peut réaliser une suture d’emblée de l’intestin grêle sans recourir à une
dérivation de type iléostomie.

On profitera de la laparotomie pour aspirer le maximum de liquide intestinal d’amont en


descendant la sonde gastrique dans le duodénum. Accorder une grande attention à la remise en place
de l’intestin dans l’abdomen dans la crainte d’un nouvel incident adhérentiel postopératoire.

PRONOSTIC.

L’obstruction intestinale est une affection grave avec un taux de mortalité supérieur à 5%. S’il
y a ischémie, ce taux passe à 10 %.

Le simple étranglement herniaire, inguinal, chez le vieillard a un taux de mortalité supérieur à


15 %.

Donc, importance des mesures précoces et d’un geste opératoire au moment idéal. Une cause
fréquente de mort est la broncho-pneumonie par inhalation au moment de l’induction de l’anesthésie.
Donc, importance d’une bonne aspiration gastrique avant l’induction de la narcose.

4. AFFECTION INFLAMMATOIRES EN DEHORS DU CROHN.

La maladie de Crohn constitue un chapitre à part car n’étant pas spécifique de l’intestin grêle.

Yersiniose.

Le yersinia entérocolitica peut provoquer une iléite terminale aiguë avec adénopathies
nombreuses, d’autres symptomes peuvent survenir de type gastrique ou hépatique. Fièvre, diarrhée et
quelque fois vomissements peuvent être présents particulièrement chez l’enfant. La symptomatologie
est très difficile à différencier d’un problème appendiculaire. Si une appendicectomie est réalisée, on
découvre de volumineux ganglions dans le mésentère de l’iléon terminal. L’idéal est d’en faire le
diagnostic par une recherche bactérienne sur les selles et le transit baryté peut donc démontrer des
images typiques d’iléite folliculaire.

Le traitement par Tétracycline ou chloramphénicol donne de bons résultats.

TUBERCULOSE.

Affection devenue exceptionnelle mais largement présente dans certains pays, notamment
d’Afrique.

Se localise surtout au niveau de l’iléon terminal et peut être confondu avec une maladie de Crohn.

L’examen baryté permet d’en faire le diagnostic et de la distinguer de la maladie de Crohn. Le


traitement chimiothérapique conduit presque toujours a une cicatrisation en sténose qui impose une
chirurgie de résection de l’iléon terminal et du caecum.
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TYPHOIDE.

Les salmonelles peuvent causer des ulcérations au niveau de l’iléon et du caecum. La


complication la plus fréquente est la perforation. Elle se rencontre fréquement en Afrique.

L’INTESTIN RADIQUE

L’intestin grêle est très sensible à la radiothérapie. Celle-ci provoque, dans un premier temps,
un oedème des parois intestinales et, secondairement, une cicatrisation en sténose.

Dans la phase initiale, on peut rencontrer des douleurs abdominales avec nausées et
vomissements, quelques fois de la diarrhée sanglante, ultérieurement on peut voir apparaitre un
phénomène d’obstruction.

Cet intestin est ischémique et la chirurgie extrêmement dangereuse car le risque de fistulisation
postopératoire est très élevé.

L’intestin radique est un véritable cauchemar pour le chirurgien hésitant entre l’attentisme et un
traitement médical qui comportera la corticothérapie ou une chirurgie à très hauts risques de
complications.

Le radiothérapeute est bien sur averti de ce danger et doit éviter l’irradiation de l’intestin,
particulièrement dans des cancers pelviens (gynécologiques ou rectaux). Actuellement, l’irradiation
abdominale totale n’est plus guère acceptée même dans une carcinomatose de type ovarien. Lors d’une
laparotomie pour cancer, s’il y a nécessité ultérieure de radiothérapie, le chirurgien écartera l’intestin
grêle du site de radiothérapie par la mise en place d’un filet resorbable qui permettra de réaliser cette
irradiation dans le postopératoire immediat.

5. L’ISCHEMIE INTESTINALE.

La vascularisation du tractus digestif dépend de trois troncs artériels principaux: coeliaque,


mésentérique supérieur et mesentérique inférieur. Il existe des anastomoses entre ces différents
réseaux.

Le retour veineux se fait vers la veine porte.

Le tronc coeliaque vascularise l’estomac, la rate, le foie et une partie du cadre duodénal et du
pancréas.

L’artère mésentérique supérieure vascularise une partie du duodénum et du pancréas, tout le


territoire de l’intestin grêle et le côlon jusqu’à l’angle splénique. L’artère mésentérique inférieure
vascularise le côlon gauche, le sigmoïde et le rectum.

Infarctus mésentérique (obstruction mésentérique aiguë)

Lié à un obstacle artériel le plus souvent ou veineux.


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Etiologie:

Embolie venant d’un problème valvulaire ou myocardique ou d’un anévrysme. Thrombose sur
une lésion artérielle existante. Extension d’un anévrisme disséquant de l’aorte. Des accidents
cardiaques avec bas débits prolongés peuvent déclencher une multitude de micro-embolies qui
donneront des lésions segmentaires de l’intestin.
L’artère mésentérique supérieure est particulièrement exposée à ce type d’accident car son inclinaison
par rapport à l’aorte est idéale pour la pénétration d’un embole, au contraire du tronc coeliaque qui
s’implante à la perpendiculaire sur l’aorte.
La thrombose veineuse mésentérique peut suvenir dans le cadre d’une hypertension portale, d’une
infection abdominale ou des pathologies d’hypercoagulation.

PHYSIOPATHOLOGIE :

L’intestin est extrêmement sensible à l’ischémie et très précocement (une à deux heures)
survient une nécrose hémorragique de la muqueuse la plus sensible à l’ischémie. La prolifération
bactérienne est rapide dans ce segment intestinal et cette infection participe à la thrombose des
vaisseaux avoisinants. Cette prolifération bactérienne participe à la gravité du problème mais
interviennent également des résorptions de nombreuses toxines intestinales responsables de la
mortalité.

L’ischémie progresse par un épaississement de la paroi intestinale et évolue rapidement vers la


perforation à partir de la 6ème heure. La mort survient dans les 12 à 24 heures s’il n’y a pas de
traitement.

SYMPTOMATOLOGIE :

Douleurs atroces, profondes de tout l’abdomen et qui ne sont pas calmées par les morphiniques.

La sémiologie est relativement pauvre : disproportion entre les plaintes et les signes cliniques
qui sont discrets; sensibilité abdominale voire défense. L’évaluation se fait rapidement vers un état de
toxicité qui laisse un abdomen indolore à la palpation. Le choc est précoce. Les vomissements peuvent
contenir un peu de sang de même que l’évacaution de l’une ou l’autre selle; la présence de sang traduit
déjà le stade de la nécrose.

La biologie montre une leucocytose et une élévation des amylases. L’hémoconcentration traduit
l’hémorragie dans la lumière intestinale. L’acidose métabolique est précoce.

La radiographie d’abdomen à blanc peut être démonstrative: peu de gaz dans l’intestin,
quelques petits niveaux car épaississement des parois intestinales.
La tomodensimétrie est plus démonstrative en démontrant l’épaississement des parois intestinales.
L’artériographie mésentérique est l’examen de choix mais il faut penser au diagnostic d’emblée.
Le diagnostic sera donc évoqué devant l’importance de la symptomatologie et lorsqu’il y a facteur de
risque. Le scanner et l’artériographie apportent très souvent une haute probabilité.

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TRAITEMENT :

Il comporte obligatoirement la laparotomie. Si le segment ischémié se limite à une partie du


grèle, une résection intestinale est réalisée avec suture d’emblée.

Le règle est cependant de réintervenir 48 heures plus tard car il peut exister un doute sur la
qualité de la vascularisation de l’intestin restant. Si l’infarctus intéresse la totalité de l’intestin grêle,
voire le colon droit, l’embolectomie ou thrombectomie mésentérique supérieure sera tentée.
Cependant, si on se situe au-delà de la 5ème heure de l’ischémie, il n’y a pas d’espoir de récupérer
l’intestin. Ce n’est que très exceptionnellement que le diagnostic est fait très précocement et que ce
geste de reconstruction vasculaire peut être réalisé.

Se pose souvent le problème de l’attitude devant une nécrose de tout l’intestin grèle et d’une
partie du côlon: résection suivie d’une alimentation parentérale totale définitive. En général, le patient
est âgé et ce geste, extrême n’est pas réalisé. La mort survient donc dans le postopératoire immédiat.

PRONOSTIC :

L’infarctus mésentérique est une affection extrêmement grave avec une mortalité élevée parce
que le diagnostic et le traitement se font rarement avant la 5ème heure.

Seul un infarctus limité à une partie du grêle donne quelques espoirs d’une survie. La mortalité
globale se situe aux environs de 80 %.

6. FISTULES INTESTINALES GRELES

Une fistule intestinale externe peut apparaître dans le décours d’une affection par exemple
inflammatoire (Crohn). Cependant, 99 % de ces fistules sont la conséquence d’un geste chirurgical:
déhiscence d’une anastomose intestinale, blessure intestinale sous-estimée lors d’une laparotomie etc.
Ce type de fistule survient surtout après une chirurgie difficile dans des adhérences et un intestin
pathologique (entérite radique).

Cette “fuite intestinale” peut rester dans l’abdomen et créer un état de péritonite postopératoire
avec température, état toxique et septicémie. Elle impose une réintervention précoce mais le diagnostic
n’est pas toujours aisé.

Dans d’autres circonstances, la fuite intestinale va se cloisonner et apparaître vers le 10ème


jour dans la cicatrice opératoire ou au niveau d’un orifice de drainage.
La gravité de cette fistule sera fonction de sa situation sur l’intestin grêle (haute ou basse) et de son
débit.

S’il existe des phénomènes adhérentiels et d’engainement de l’intestin, cette fistule peut débiter
plus d’un litre par 24 heures et créer de graves problèmes métaboliques.

L’appareillage de ces problèmes est complexe et requiert l’expérience du personnel infirmier.

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Chirurgie digestive 225
Les déperditions électrolytiques et liquidiennes sont importanes; l’alimentation doit être
interrompue car elle augmente le débit de la fistule; celle-ci, alcaline ulcère la peau et crée de graves
problèmes d’appareillage.

La mortalité est élevée si des mesures efficaces ne sont pas prises immédiatement.

Traitement: elle impose la diète complète et l’alimentation parentérale totale. Le débit de la


fistule sera mesuré et les perfusions adaptées.

L’antibiothérapie sera donnée au début pour contrôler les phénomènes de septicité intra-
abdominale.

La somatostatine apporte un complément thérapeutique intéressant; en diminuant les sécrétions


gastriques, biliaires et pancréatiques, elle diminue considérablement le débit de la fistule. Il n’est
cependant pas prouvé que la somatostatine augmente le pourcentage de fermeture spontanée.

Il est illusoire d’envisager la chirurgie d’emblée. La cavité abdominale est impossible ou


difficile à disséquer en raison d’adhérences fraîches et de l’oedème; le risque est grand de créer
d’autres fistules ou perforations intestinales.

Le traitement idéal est donc de prolonger plusieurs semaines la nutrition parentérale avec un
drainage correcte du liquide intestinal sous somatostatine. Il peut y avoir fermeture spontanée de la
fistule s’il n’y a pas d’obstacle d’aval au niveau de l’intestin.

Ce n’est qu’après échec de plusieurs semaines (plus d’un mois) de ce traitement d’attente, que
l’on sera autorisé à réaliser une laparotomie qui permettrait de réséquer le segment intestinal fistulisé.

7. TUMEURS DE L’INTESTIN GRELE.

Tumeurs rares qui ne représentent que 2 à 3 % de toutes les tumeurs du tractus digestif. Elles
donnent peu de symptômes mais qui seront dominés par le saignement ou l’accident d’obstruction.

7.1. Tumeurs bénignes

Les polypes, tels que l’on peut les voir dans certaines maladies familiales comme dans le
syndrome de Peutz-Jeghers. La transformation maligne est rare. Chirurgie en cas d’obstruction ou de
saignement.

Dans le syndrome de Gardner, les polypes sont, au contraire, de véritables néoplasies et doivent
être traités. Surveiller surtout la région péri-ampullaire duodénale.

On décrit quelques autres tumeurs très rares : léiomyome, lipome, neuro-fibrome etc.

Tumeurs malignes

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Chirurgie digestive 226
L’adénocarcinome se présente le plus souvent au niveau du jéjunum. Peu symptomatique et
donne souvent des métastases avant d’être traité. Le traitement consiste en une résection intestinale.

Le lymphome primitif se présente surtout au niveau de l’iléon; il peut exister de multiples sites
tumoraux sur l’intestin grêle. La symptomatologie est faite d’une fièvre inexpliquée et d’incidents
subocclusifs ou de saignements.

Le traitement consistera en une résection du ou des segments malades. Eventuellement


accompagner cette chirurgie d’une splénectomie et de biopsies hépatiques afin de réaliser un bilan
d’extension correct.

Le léimyosarcome s’ulcère très souvent et provoque des saignements. Tumeur très rare.

Les lésions métastatiques du grêle sont davantage des métastases péritonéales engainant le
grêle et l’obstruant (mélanome, cancer gynécologique, du sein etc.). La chirurgie sera purement
palliative.

Tumeurs carcinoïdes et syndrome carcinoïde

Les tumeurs carcinoïdes sont des apudomes provenant des cellules entérochromaffines de
l’intestin. Les tumeurs carcinoïdes sont classées dans la pathologie endocrine. Leur site préférentiel est
l’appendice; une symptomatologie relativement fruste de la fosse iliaque droite entraîna un jour ou
l’autre une appendicectomie et cette lésion ne sera découverte qu’au microscope. Se pose souvent, à ce
moment, l’indication d’une réintervention notamment au niveau des aires lymphatiques. Elle est
rarement nécessaire et l’affection est éradiquée par la simple appendicectomie.

Cependant, l’autre site de formation est l’intestin grêle; le volume tumoral est important et des
métastases lymphatiques ou hépatiques peuvent être présentes (1 cas sur 3).

On doit considérer la tumeur carcinoïde comme un cancer d’évolution lente. Ces tumeurs, de
petit volume, sont en général asymptomatiques. Elles peuvent provoquer un problème d’obstruction,
de douleurs ou de saignements. Environ 10 % de ces tumeurs ne se manifesteront que par le syndrome
carcinoïde, celui-ci ne sera présent que s’il y a métastase hépatique.

La symptomatologie est faite de flush cutané, particulièrement au niveau du visage, de


poussées de diarrhée, de bronchoconstriction et, à un stade plus tardif, d’atteinte de la valve tricuspide
et de sténose de l’artère pulmonaire par dépôt collagènes.

Les substances actives, libérées par la tumeur carcinoïde sont inactivées au niveau du foie;
lorsqu’il y a métastase hépatique ou tumeur primitive au niveau de l’ovaire ou des bronches, ces
substances inondent directement la circulation systémique et provoquent la symptomatologie.

La sérotonine, des catécholamines, l’histamine, la bradykinine, la calicréine etc, sont


incriminées dans ces sécrétions.

Le meilleur test de laboratoire est de doser le métabolisme urinaire de la sérotonine, l’acide 5


hydroxyindolacétique (5-HIAA). Le dosage se fait dans les urines de 24 heures et est un test fiable.
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Chirurgie digestive 227

TRAITEMENT

La tumeur carcinoïde primitive doit être réséquée en réalisant une résection intestinale large
avec exérèse lymphatique.

S’il y a métastases hépatiques, il faut absolument énucléer ces métastases. La ligature ou


l’embolisation de l’artère hépatique peut être très efficace temporairement.

La transplantation hépatique a donné quelques résultats dans ce type de syndrome.


La chimiothérapie est également efficace. Enfin, la somatostatine est efficace sur la symptomatologie
du syndrome carcinoïde.

Ces lésions méritent un acharnement chirurgical et médical car le taux de survie à 5 ans dépasse
les 40 % même en présence de métastases.

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V. LA VESICULE BILIAIRE ET LES VOIES BILIAIRES

1. Rappels anatomo-physiologiques

1. Moyens de diagnostic des voies biliaires

1. Lithiase biliaire

1. Angiocholite

1. RAPPELS ANATOMO-PHYSIOLOGIQUES

TOPOGRAPHIE

Les voies biliaires drainent du foie vers les canaux hépatiques puis le canal biliaire principal.

Le vésicule biliaire est placée en dérivation et a une fonction de stockage et de la concentration


de la bile.

La voie biliaire principale :

1º au niveau hépatique, un canal gauche et un canal droit.


2º jonction de ces deux canaux au niveau du hile du foie pour former l’hépatique commun.
3º à partir de l’implantation du cystique, canal cholédoque, celui-ci passe en arrière de la jonction du
1er et du 2ème duodénum, pénetre dans la tête du pancréas pour s’aboucher à la face postéro-interne
de D2; dans 75 % des cas, il existe une jonction avec le canal de Wirsung au niveau de la papille
duodénale majeure. Chez plus de 50 % des individus, les deux canaux forment une ampoule commune
(de Vater) fermée par le sphincter d’Oddi. Celui-ci empêche le reflux de liquide duodénal vers la voie
biliaire et pancréatique. Il existe de nombreuses variantes de la jonction du Wirsung et de la voie
biliaire principale; lorsqu’il y a un canal commun, il existe un risque élevé de pancréatite lors d’une
migration calculeuse.

La vésicule biliaire est un sac piriforme d’une dizaine de centimètres de long; elle est logée
dans une fossette à la partie inférieure du foie. Elle se situe à la limite inférieure du foie gauche et du
foie droit. Le fond de la vésicule répond à un point de la paroi abdominale antérieure situé
immédiatement en-dessous du rebord costal droit, à la jonction de celui-ci avec le bord externe du
grand droit (point cystique): signe de Murphy.

En cas d’obstacle, la voie biliaire principale se dilate progressivement (plusieurs jours à


plusieurs semaines). En cas d’obstacle aigu (par exemple: calculs), la dilatation n’apparaît pas avant
plusieurs jours.

VASCULARISATION

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Artérielle: la voie biliaire principale est irriguée par les branches de l’artère hépatique propre et
droite. La vésicule biliaire et le canal cystique sont irrigués par l’artère cystique, branche le plus
souvent de l’hépatique droite. Donc, danger lors d’une cholécystectomie, de ligaturer par erreur
l’artère hépatique droite.
Lors d’une transplantation hépatique, les problèmes d’ischémie artérielle peuvent avoir une
répercussion sur la voie biliaire principale (sténose).

Veineuse: retour vers la veine porte. Le drainage de la vésicule biliaire se fait également
directement vers le foie par des branches portales; donc, dans un cancer vésiculaire, dissémination
hématogène rapide vers le foie à partir de ces petites branches veineuses.

Lymphatique: vers les ganglions échelonnés le long des voies biliaires extra-hépatiques puis
vers les ganglions duodéno-pancréatiques postérieurs, puis du rétro-péritoine dans la région aortique.

INNERVATION

Provient du pneumo-gastrique gauche et du plexus solaire par le plexus hépatique. Donc, lors
d’une vagotomie tronculaire, dénervation partielle de la voie biliaire. Conséquences à long terme peu
connues.

2. MOYENS DE DIAGNOSTIC DES VOIES BILIAIRES.

L’ABDOMEN A BLANC

Permet de mettre en évidence: des calculs radio-opaques (rares), une vésicule distendue, surtout
une aérobilie: “z” communication avec le tractus digestif; exemple: sphinctérotomie large, anastomose
chirurgicale voie biliaire-duodénum, vésicule fistulisée dans le duodénum ou dans le côlon.

LA CHOLECYSTOGRAPHIE ORALE

Prise orale de comprimés: concentration du produit de contraste dans la vésicule, 12 heures


plus tard; bon examen pour définir les parois de la vésicule biliaire et la lithiase. Ne peut être utilisée
lorsqu’il y a cholostase ou atteinte hépatique.

Lorsque la vésicule n’est pas visible, dans 95 % des cas = exclusion vésiculaire par lithiase ou
tumeur.

Technique largement supplantée par l’échographie. Reste cependant utile dans quelques
indications.

LA CHOLANGIOGRAPHIE INTRAVEINEUSE

Injection intraveineuse d’un produit radio-opaque éliminé par la voie biliaire. A exclure en cas
de sensibilité ou si déficience majeure de la fonction hépatique ou cholostase.
Utile pour mettre en évidence, par tomographie, les lithiases de la voie biliaire principale. Peu utilisée.

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LA CHOLANGIOGRAPHIE PEROPERATOIRE

Injection directe de produit de contraste par ponction de la voie biliaire ou, mieux, par
intubation du canal cystique; excellente visualisation des voies biliaires intra- et
extra-hépatiques. Démontre les obstacles ou la présence d’une lithiase de la voie biliaire principale.
Doit être systématiquement réalisée lors d’une cholécystectomie pour lithiases. Un drain biliaire par le
cystique ou dans le cholédoque peut être laissé en place pour drainer la voie biliaire et répeter ces
cholangiographies dans la période postopératoire.

LA CHOLANGIOGRAPHIE TRANS-HEPATIQUE PERCUTANEE

Utilisée en cas d’obstacle de la voie biliaire et, si échec de la cholangiographie


rétrograde.Permet en plus de laisser un drainage percutané.

Danger d’une fistule bilaire dans le péritoine au retrait du cathéter = péritonite biliaire.

LA CHOLANGIO-PANCREATOGRAPHIE RETROGRADE ENDOSCOPIQUE


(CPRE)

Un fibroscope est introduit jusqu’au 2ème duodénum, la papille visualisée et cathétérisée.


L’injection de produit de contraste permet de visualiser le Wirsung et la voie exocrine du pancréas, la
voie biliaire principale, la vésicule et les voies biliaires intra-hépatiques. Elle permet en plus, des actes
thérapeutiques: papillotomie, sphinctérotomie pour évacuer une lithiase du cholédoque. Permet la mise
en place d’une prothèse trans- tumorale de la voie biliaire ou d’un cathéter de drainage de la voie
biliaire.

Danger :

1º pancréatite aiguë surtout lors d’une sphinctérotomie,


2º angiocholite si injection de la voie biliaire au-dessus d’un obstacle. Dans ce cas, il doit y
avoir obligatoirement et immédiatement un drainage, soit par endoscopie, soit chirurgical.

SCINTIGRAPHIE VOIE BILIAIRE

Elimination d’un produit radio-marqué par la voie biliaire. Cartographie ensuite de la voie
biliaire.

Résultats souvent imprécis. Technique cependant intéressante dans le contrôle d’anastomose


biliaire, dans la démonstration d’une atrésie des voies biliaires, dans des obstacles donc mal définis de
la voie biliaire.

L’ECHOGRAPHIE

Meilleure technique actuelle de diagnostic des lithiases vésiculaires et de démonstration d’une


dilatation des voies biliaires intra- et extra-hépatiques. Définit cependant difficilement les calculs du
bas cholédoque en raison de l’air présent dans le côlon et le duodénum.

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Chirurgie digestive 231
Suivi précis d’une cholécystite aiguë, diagnostic d’une tumeur vésiculaire. Examen de
base.

LA TOMODENSIMETRIE (TDM)

Apporte peu d’avantages par rapport à l’échographie qui reste l’examen de choix. Utile dans les
problèmes tumoraux. Aucune utilité dans le diagnostic de la lithiase biliaire.

3. LA LITHIASE BILIAIRE

ETIOLOGIE

La bile contient surtout du cholestérol et de la lécithine solubilisés par les sels bilaires. La
sursaturation de la bile par le cholestérol cause la formation de cristaux puis de calculs. Le lieu de
précipitation préférentiel est au niveau de la vésicule; néanmoins des calculs peuvent aussi se former
dans le cholédoque et dans les voies biliaires intra-hépatiques.

On distingue :

A) Les calculs de cholestérol purs ou mixtes sont les plus fréquents et contiennent des sels de
calcium sous forme de bilirubinate, de carbonate et de phosphate. Les facteurs prédisposants sont les
suivants:

1º démographie: sexe féminin, pays industrialisés d’Europe et d’Amérique


2º l’alimentation: obésité, régime riche en calories et en particulier en graisses
polyinsaturées, alimentation parentérale prolongée.
3º médicaments: oestrogènes, contraceptifs oraux, hypolipémiants.
4º maladies du système digestif: maladie de Crohn, résection de l’iléon, anastomose jéjuno-
iléale, fibrose kystique du pancréas.
5º autres: âge, diabète, grossesse.

Présentation classique: FFP : female, forty (la quarantaine) et pregnancy (plusieurs grossesses).

A) Les calculs de pigments biliaires ne représentent que 10 à 20 % de l’ensemble des lithiases,


les facteurs de prédisposition sont:

1º démographiques: régions asiatiques (fréquence des infections dues à


Clonorchis Sinensis).
2º stricture et anomalies des voies biliaires, surtout compliquées d’angiocholite.
3º hémolyse chronique.
4º cirrhose alcoolique.

SYMPTOMATOLOGIE

Formes asymptomatiques

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La lithiase biliaire est, dans la majorité des cas, asymptomatique pendant plusieurs années,
voire pendant toute la vie du sujet.
L’incidence des complications ou des symptômes augmente d’années en années et, environ 75 % des
lithiasiques devront être traités.
Certaines manifestations sont: pesanteur postprandiale; migraine, ballonnement postprandial, crainte
de certains aliments car digestion lente voire douloureuse; ces troubles rentrent dans le cadre d’une
dyspepsie, il est dès lors difficile d’établir une relation entre ces symptômes et la présence d’une
lithiase.

Manifestations douloureuses

1.- La lithiase vésiculaire: la douleur est déclenchée par l’enclavement d’un calcul dans le collet
de la vésicule ou dans le cystique qui est fin (1 mm), la manifestation la plus fréquente est la crise de
colique hépatique. Elle est le plus souvent déclenchée par un repas en graisse ou trop copieux. Le
malade ressent une vive douleur, continue, avec des paroxysmes, siégeant dans l’hypochondre droit ou
le creux épigastrique. Elle irradie en hemi-ceinture vers le dos, l’omoplate ou l’épaule droite et peut
s’accompagner de nausées et parfois de vomissements. La manoeuvre de Murphy (blocage lors de
l’inspiration, une pression étant exercée sur le point cystique) est positive. La crise peut durer quelques
heures puis s’atténuer progressivement. La crise est le plus souvent vespérale ou nocturne. Elle donne
rarement un fébricule.
Si le calcul migre vers le cholédoque, la crise peut durer plusieurs jours et être accompagnée d’un
subictère. Cette crise peut être confondue avec une perforation d’ulcère, une appendicite, un
phénomène aigu pleuro-pulmonaire droit.

La biologie, les tests hépatiques sont, le plus souvent, normaux.


Examens complémentaires: l’échographie est l’examen idéal, à la fois pour démontrer la lithiase et son
évolution éventuelle vers une cholécystite. L’abdomen à blanc est peu intéressant ou montrera, dans 10
% des cas, des calculs radio-opaques. La cholécystographie orale peut être intéressante ultérieurement
pour rechercher des micro-calculs ou une atteinte de la paroi vésiculaire (cholestérolose). Enfin, il est
des crises de ce type déclenchées par de simples cristaux de cholestérol donc non visibles en
échographie ou cholécystographie. La répétition de telles crises, typiques d’un accident biliaire,
peuvent nécessiter un prélevement de bile cholédocienne par endoscopie, à la recherche de cristaux de
cholestérol.

Complications :

A. Si le calcul reste enclavé dans le col ou le cystique:


1. cholécystite aiguë ou chronique,
2. hydrocholécyste chronique,
3. vésicule scléro-atrophique exclue du circuit biliaire,
4. iléus biliaire
5. vésicule porcelaine (dépot des calculs dans les parois de la vésicule)

B. Si le calcul migre vers la voie biliaire:


1. lithiase cholédocienne,
2. pancréatite aiguë
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Diagnostic différentiel: si la douleur est intense, la colique hépatique rentre dans le cas des
diagnostic différentiels de l’abdomen aigu.

Problèmes pleuro-pulmonaires: pneumo-thorax, épanchement, broncho-pneumonie.


Pathologie ulcéreuse aiguë ou perforée: pancréatite aiguë, occlusion ou subocclusion intestinale,
lithiase rénale droite, côlon spastique ou irritable.

Traitement:

Le diagnostic est en général aisé, il repose sur une bonne anamnèse et un examen clinique. Le
traitement sera surtout symptomatique: anti-spasmodiques intraveineux ou en suppositoires. Pas
d’antibiothérapie. Si la crise se prolonge au-delà de 3 ou 4 heures, craindre l’évolution vers une
cholécystite aiguë et donc hospitaliser le patient.

2. La cholécystite chronique: ce terme désigne une atteinte scléro-inflammatoire des parois de


la vésicule qui sont rétractées sur le contenu calculeux. Le calcul est resté enclavé et il n’y a pas
d’évolution vers un état septique de type cholécystite aiguë.

La symptomatologie est celle de la lithiase vésiculaire. Certains patients peuvent rester


cependant asymptomatiques plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Cette forme fait le lit de la
cholécystite aiguë, voire à très long terme, de l’adénocarcinome de la vésicule: le calcul se dépose dans
les parois, formant la vésicule dite porcelaine, qui présente un haut risque de dégénérescence maligne.

Manifestations infectieuses

1º La cholécystite aiguë :

Etiologie: 95 % résultent de l’obstruction du cystique par un calcul vésiculaire. 5 % surviennent


en l’absence de tout calcul. L’obstruction du cystique peut être provoquée par une tumeur. Quelques
cas rares sont d’origine ischémique ou se produisent dans le décours d’une alimentation parentérale, ou
d’une septicémie.

Symptomatologie: la douleur est celle de la colique hépatique, mais elle se prolonge au-delà de
quelques heures et s’accompagne progressivement de douleurs diffuses au niveau de la paroi
abdominale et de l’abdomen.

Une fièvre modérée se rencontre souvent. L’ictère est rare et traduit la gravité d’une
cholécystite par compression de la voie biliaire principale ou une lithiase cholédocienne
d’accompagnement.

A la palpation, le point de Murphy est très net et la zone douloureuse plus large.

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Chirurgie digestive 234
La défense abdominale apparaît progressivement, surtout dans l’hemi-flanc droit, il n’y a
jamais de contracture.

Une réaction pulmonaire droite peut être présente: petit épanchement pleural ou diminution du
murmure vésiculaire à la base droite.

Biologie: hyperleucocytose (12 à 15.000) avec polynucléose. Parfois, légère augmentation des
transaminases ou signes biologiques de la cholostase. Syndrome inflammatoire.

Examens complémentaires: l’échographie est de nouveau l’examen de choix. L’abdomen à


blanc permet d’éliminer une perforation ou un état d’occlusion.

Diagnostic différentiel :
- poussée ou perforation d’ulcère gastro-duodénal,
- pancréatite aiguë,
- appendicite aiguë,
- hépatite virale ou alcoolique ou péri-hépatite (par exemple à chlamidia chez la femme),
- broncho-pneumonie de la base droite,
- infarctus du myocarde,
- colique néphrétique.

Complications: comme dans tout phénomène infectieux intra-abdominal, il y a le plus souvent


accolement par la réaction inflammatoire aux viscères avoisinants: duodénum, grand épiploon, côlon
transverse. Ce type de réaction est rencontré également dans l’appendicite aiguë et la diverticulite
sigmoïdienne.
• empyème ou cholécystite purulente: la vésicule reste cloisonnée par les organes avoisinants et
l’infection locale s’aggrave avec persistance de la fièvre, douleurs et danger d’évolution vers un état
toxi-infectieux grave.
• Perforation de la vésicule: apparition de zones de nécrose au niveau de la paroi vésiculaire et
perforation de celle-ci:

a) perforation localisée et formation d’un abcès péri-vésiculaire. La symptomatologie reste localisée


mais le syndrome infectieux s’aggrave.
b) Perforation en péritoine libre = abdomen aigu.
c) Perforation dans un viscère creux voisin et vidange du contenu vésiculaire vers cet organe. Cette
perforation se fait, le plus souvent, vers le duodénum; si le calcul est volumineux, danger d’iléus
biliaire. Parfois perforation vers le côlon transverse. Dans les deux cas = aérobilie à l’abdomen à blanc.

Dans cette forme d’évolution rare, la symptomatologie rétrocède spontanément et d’une façon
spectaculaire.

Pronostic : mortalité de 5 à 10 % chez le sujet âgé et en mauvais état général.

Traitement :

1º Au départ de type médical :


a) repos au lit, perfusion intraveineuse et correction éventuelle des troubles électrolytiques,
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Chirurgie digestive 235
b) antispasmodiques et analgésiques légers, éviter la morphine qui peut camoufler la
symptomatologie et augmente la pression du sphincter d’Oddi.
c) Antibiothérapie à large spectre Ampicilline ou Céphalosporine.

2º Toujours traitement chirurgical :

Il n’y a pas d’autre alternative à proposer au patient. Le délai entre l’apparition des symptômes
et le moment de l’intervention est variable en fonction de l’évolution. L’idéal est d’opérer le patient
dans les deux à trois premiers jours; au-delà s’installent des phénomènes de fibrose qui rendront le
geste chirurgical mal aisé. Il faut donc, idéalement, refroidir cette cholécystite par antibiothérapie et
intervenir dans les 24 à 48 heures.

Particularités:

La cholécystectomie sera pratiquée par une courte laparotomie sous-costale, peut-être par
laparoscopie.

Une cholangiographie peropératoire est importante car l’incidence des lithiases cholédociennes
est fréquente dans la cholécystite. Il n’y a plus de place actuellement pour la cholécystostomie qui est
un simple drainage de la vésicule par ouverture du fond vésiculaire. Il faut alors préférer, si on se
trouve dans des conditions désastreuses, un drainage percutané avec cathéter laissé en place dans la
vésicule.

2º L’angiocholite:

L’angiocholite est une infection bactérienne des voies biliaires et est synonyme d’une
obstruction de cette voie biliaire (elle sera développée dans les passages qui suivent).

La preuve en a été faite lors d’anastomose de la voie biliaire avec une anse intestinale ou le
duodénum; il en va de même après une sphinctérotomie endoscopique qui permet la communication du
duodénum avec la voie biliaire. Donc, il n’y aura d'angiocholite que s’il y a sténose ou obstruction de
la voie biliaire. Les causes principales sont: les calculs cholédociens, la stricture (le plus souvent post-
chirurgicale) ou le cancer des voies biliaires.

Symptomatologie: DOULEURS, FIEVRE ET ICTERE.

Tels sont les trois grands symptômes de cette affection redoutable (triade de CHARCOT). Les
complications sont rapides: dégradation de la fonction hépatique, septicémie, insuffisance rénale, etc.
La mortalité est élevée.

Biologie : leucocytose élevée, syndrome inflammatoire, hyperbilirubinémie, phosphatases


alcalines et gamma GT élevés, TGO et TGP élevés modérément.

Examens complémentaires: doivent chercher rapidement à poser le diagnostic et à être dans le


même temps thérapeutique. D’où, intérêt de l’échographie puis, le plus souvent, de l’ERCP.

Traitement : lever l’obstacle.


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Chirurgie digestive 236

L’antibiothérapie intraveineuse s’impose préalablement. Le rééquilibre des troubles


électrolytiques et la surveillance de la fonction rénale et pulmonaire s’impose d’emblée.

L’obstacle sera levé soit :

1º par endoscopie s' il y a lithiase de la voie biliaire principale et une sphinctérotomie est
réalisée avec extraction des calculs; s’il s’agit d’une tumeur, une prothèse ou un drainage trans-tumoral
est réalisé. Cependant, dans le cas des tumeurs, c’est l’ERCP qui, réalisé à titre diagnostic, est le plus
souvent responsable de l’accident d’angiocholite.

2º cathéter trans-pariétal intra-biliaire si l’obstacle peut être levé par voie endoscopique et que
le malade n’est pas accessible à une chirurgie, cette forme de drainage peut être très utile.

3º chirurgie: toute forme d’obstacle et, particulièrement, une tumeur sera idéalement traitée par
chirurgie de dérivation ou d’exérèse.

3º La pancréatite :

La pancréatite biliaire représente l’étiologie la plus fréquente des pancréatites aiguës (30 à 40
%). Un calcul dans sa migration va s’impacter quelques minutes ou quelques heures au niveau du
sphincter d’Oddi et réaliser une rétention wirsungienne et donc une pancréatite mécanique. Cette
forme de pancréatite a été longtemps considérée comme bénigne; les dernières études prouvent
cependant la gravité de cette pancréatite.

Il est actuellement admis, que lorsqu’il y a pancréatite aiguë, associée à une lithiase biliaire, un
examen par ERCP doit être réalisé rapidement dans le but de libérer la papille d’un obstacle éventuel.
La morbidité et la mortalité de l’affection semblent bien influencées par cette délivrance mécanique de
la voie biliaire et pancréatique.

Manifestations ictériques :

1º La lithiase cholédocienne :

Les calculs vésiculaires peuvent migrer au travers du cystique, vers le cholédoque et delà,
migrer vers le duodénum. Lorsque ces calculs sont de petit calibre, ils réaliseront
donc une crise de colique hépatique bien plus spectaculaire que la crise vésiculaire. Cette crise dure
plus longtemps, est souvent suivie ou accompagnée d’un subictère et d’une élévation des tests de
cholostase.

Si le calcul ne peut traverser le rétrécissement de l’ampoule de Vater, il va stagner dans le bas


cholédoque, entraîner une stase cholédocienne et, de là, la formation d’autres calculs cholédociens et
vésiculaires. Donc, le phénomène de lithiase vésiculaire au départ, s’auto-entretient au niveau du
cholédoque.
Ces calculs cholédociens peuvent parfois prendre un diamètre considérable, notamment chez des
personnes âgées et atteindre parfois plus d’1 cm de diamètre.

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C’est ainsi que 15 % des patients qui présentent des calculs vésiculaires ont également des
calculs cholédociens. Il est également accepté que des calculs puissent apparaître spontanément dans le
cholédoque sans qu’il y ait de lithiase vésiculaire et à la suite d’une stase cholédocienne ou d’une
infection (5 % des cas).

Symptomatologie: la lithiase cholédocienne peut être asymptomatique (30 à 40 % des cas), pas
de crise, pas d’ictère et découverte très tardive au 3ème âge, lors d’un accident d’angiocholite.

Le plus souvent cependant, cette lithiase entretient un tableau au minimum de dyspepsie


accompagné de crises épisodiques de colique hépatique d’intensité variable. Enfin, la lithiase
cholédocienne est découverte fortuitement lors de la réalisation d’une cholécystectomie et de la
cholangiographie peropératoire.

Il est parfois difficile de distinguer une crise de colique hépatique d’origine vésiculaire d’une
crise cholédocienne;

Plaident pour la lithiase cholédocienne:


• 1º un ictère de type obstructif qui suit le plus souvent la crise douloureuse,
• 2º une sensibilité et une douleur de toute la région haute de l’abdomen tant droite que gauche et
épigastrique,
• 3º un épisode d’urines foncées.

Il est fréquent que, dans ce tableau, la vésicule ne soit pas palpée car sclérosée ou atrophiée sur
des calculs.

Enfin, la température ne sera présente que s’il y a infection et donc angiocholite.

Biologie: épisodes d’élevation faible de la bilirubinémie. L’obstruction est en effet de caractère


incomplet et transitoire alors qu’elle est constante dans les obstructions néoplasiques. Les
phosphatases alcalines sont augmentées ainsi que les gamma GT. Les TGO et TGP sont peu modifiés
ou légèrement augmentés. Syndrome inflammatoire et hyperleucocytose en cas d’angiocholite.

Hyperamylasémie lorsque il y a un retentissement sur la sécrétion pancréatique.


Examens complémentaires: l’échographie révèle la lithiase vésiculaire, plus difficilement la lithiase du
cholédoque. L’ERCP est l’examen de choix de même qu’à titre thérapeutique.

Complications: angiocholite, pancréatite aiguë, abcès intra-hépatique, cirrhose biliaire


secondaire si l’obstruction est prolongée pendant plusieurs années.

Diagnostic différentiel: pancréatite, hépatite virale ou alcoolique, cholostase d’origine


tumorale, stricture biliaire.

Traitement: si phénomène aigu avec angiocholite, antibiothérapie première, à larges spectres,


puis endoscopie-sphinctérotomie.

A froid, le traitement doit comporter l’évacuation de la lithiase cholédocienne soit par


chirurgie, soit par endoscopie.
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Chirurgie digestive 238

Idéalement, la vésicule biliaire doit être enlevée puisque cause première de la lithiase
cholédocienne.

L’ERCP ne peut pas être systématiquement proposée à toutes les lithiases vésiculaires en raison
de l’inconfort de l’examen et de son danger. C’est le plus souvent, sur des éléments cliniques et
biologiques que l’on décidera d’une exploration du cholédoque.

Les éléments suivants doivent alerter le clinicien :


• 1º crises prolongées avec irradiation à l’épigastre et vers la gauche
• 2º subictère ou urines foncées après les crises,
• 3º élévation des phosphatases alcalines et des gamma GT lors d’une crise ou après celle-ci.
La première exploration comportera une cholangiographie intraveineuse. S’il y a un doute sur la
perméabilité du cholédoque, alors seulement l’ERCP sera proposée.

2º La lithiase intra-hépatique :

Elle peut être primitive ou secondaire à des strictures de la voie biliaire. Manifestation la plus
souvent douloureuse de l’hypochondre droit avec épisodes d’ictère.

La maladie de Caroli, forme d’affection kystique congénitale, consiste en des dilatations


sacculaires de la voie biliaire intra-hépatique. Cette anomalie peut être isolée mais, le plus souvent,
associée avec une fibrose hépatique congénitale et une atteinte de la médullaire rénale.

3º Le kyste du cholédoque :

Maladie congénitale qui peut ne se manifester qu’à l’adolescence ou chez l’adulte.


Ictère, accès d’angiocholite et douleurs de l’hypochondre droit.

Manifestations occlusives, l’iléus biliaire

Se présente souvent chez une femme âgée. Un volumineux calcul vésiculaire, d’un diamètre
supérieur à 2,5 cms de diamètre, crée une cholécystite chronique. La vésicule s’accole naturellement
au duodénum. Le calcul crée une escarre sur la paroi vésiculaire
puis duodénale et migre spontanément vers le duodénum. Ce calcul ira finalement s’impacter dans
l’iléon terminal qui est la région la plus étroite du tractus digestif. Il créera un état d’obstruction
intestinale grèle. La symptomatologie sera donc faite d’un incident récent de cholécystite aiguë puis,
d’un état d’obstruction du grêle.

L’abdomen à blanc montrera l’aérobilie et, peut-être, un calcul radio-opaque au niveau de


l’intestin grèle. Enfin, les niveaux hydro-aériques seront démonstratifs de l’obstacle grèle.

Le traitement est d’ordre chirurgical et doit permettre d’extraire le calcul de l’intestin ou de le


faire migrer vers le côlon.

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Il peut être souhaitable d’enlever la vésicule et de fermer la fistule duodénale. Cependant, si la moindre
difficulté apparaît, il ne faut pas s’acharner sur ce geste probablement inutile puisque le calcul a quitté
la vésicule biliaire.

THERAPEUTIQUE DE LA LITHIASE BILIAIRE

L’affection est fréquente, bien tolérée et, environ 15 à 20 % des lithiasiques sollicitent,
annuellement un traitement en raison d’une symptomatologie. Le pourcentage d’accidents infectieux
ou mécaniques est cependant faible : 2 à 3 %.

Traitement médical

L’acide chénodésoxycholique et ursodésoxycholique ont la propriété de dissoudre les calculs


de cholestérol. Ils n’ont aucune action sur les calculs radio-opaques. Cependant, certaines conditions
sont indispensables pour proposer leur utilisation :
1º des calculs cholestéroliques de très petite taille,
2º une vésicule fonctionnelle, c’est-à-dire non exclue à la cholécystographie orale,
3º des contre-indications majeures à une cholécystectomie.

La réponse à ce traitement n’est que partielle et la récidive lithiasique est logiquement la règle à
l’arrêt du traitement.

Ces médicaments ne connaissent donc que des indications exceptionnelles : cholangite


sclérosante, certaines formes d’hépatite, éventuellement transplantation hépatique etc.

Le traitement par lithotritie

Des ondes de choc, ultrasoniques, de hautes fréquences peuvent permettre de fracturer des
calculs cholestéroliques et les réduire en plus petits fragments qui seront éliminés par les voies biliaires
perméables.

Cette technique est complémentaire à l’utilisation des acides biliaires. Elle donne un
pourcentage de réussite de l’ordre de 80 % à un an mais le traitement médical doit être poursuivi au
moins deux ans. Les calculs ne peuvent dépasser un diamètre total de 2cms environ. Enfin, la récidive
est fréquente. Cette technique a un intérêt dans les volumineux calculs cholédociens qui ne peuvent
être extraits par endoscopie. Le calcul, une fois fragmenté, peut être finalement évacué par cette voie.

Traitement dissolvant local

Il consiste à injecter le produit dissolvant (ether) au niveau de la voie biliaire soit par cathéter
percutané dans la vésicule ou cathéter chirurgical dans le cholédoque ou endoscopie.

Traitement surtout utilisé dans l’élimination de calculs résiduels oubliés ou ignorés lors d’un
geste chirurgical.

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Traitement endoscopique

Technique qui a indiscutablement apporté, ces dernières années, un progrès dans le traitement
des affections biliaires.

Permet:

1º par papillotomie ou sphinctérotomie, d’évacuer les calculs de la voie biliaire principale soit avant
une cholécystectomie, soit lorsqu’il y a récidive au niveau du cholédoque,
2º en urgence, lors d’une angiocholite ou d’un accident de pancréatite aiguë lithiasique, permet le
drainage du pancréas ou de l’angiocholite. Cependant, la coagulation du sphincter est un acte
dangereux car l’oedème de la région peut obstruer temporairement la voie pancréatique et générer, à
son tour, une pancréatite aiguë (incidence de 3 à 4 %).

Traitement chirurgical

La chirurgie de la voie biliaire a considérablement évolué dans ses conceptions à partir de


1990. La laparoscopie chirurgicale, développée, il y a 15 ans par les gynécologues, a trouvé ici un
champ d’application très intéressant. Le développement, d’autre part, de technologies nouvelles et
notamment de caméras vidéo-endoscopiques, ont permis très rapidement d’appliquer cette technique à
plus de 90 % des indications de cholécystectomie.

La laparoscopie a, comme avantage, d’éviter des manipulations du péritoine et des anses grêles,
ce qui réduit l’iléus postopératoire. Enfin, l’étroitesse des incisions supprime pratiquement les douleurs
postopératoires au niveau de la paroi.

Le transit est rétabli à la 12ème heure après laparoscopie alors qu’il réapparaît vers la 36ème
heure après laparotomie pour chirurgie biliaire. Le traumatisme opératoire est donc très minime et la
reprise des activités physiques est précoce.

Nous disposons donc actuellement de trois voies d’abord dans le traitement de la lithiase
biliaire :

• 1º laparotomie : elle se fait habituellement par une courte incision sous-costale droite. La
laparotomie médiane sus-ombilicale est pratiquement abandonnée.

Un drainage est rarement nécessaire.

Perfusion intraveineuse pendant 24 heures.

Reprise des boissons à la 24ème heure et de l’alimentation à la 48ème heure. Hospitalisation en


moyenne de 4 à 5 jours.
Reprise des activités physiques vers la 2ème ou 3ème semaine.

• 2º laparoscopie chirurgicale : par introduction d’un laparoscope dans la région ombilicale et par 2
ou 3 petites contre-incisions, introduction d’éléments de traction ou de coagulation.

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Nécessite une anesthésie générale et un pneumo-péritoine en permanence. Habituellement pas
de drainage.

Perfusion intraveineuse pendant 12 à 24 heures.


Reprise des boissons dès le réveil et alimentation à la 24ème heure.

Hospitalisation de 2 à 3 jours. Actuellement, les malades quittent l'hôpital le même jour de


l'opération. Reprise des activités physiques au 8ème jour.

* 3º endoscopie rétrograde (ERCP) : technique déjà décrite. Nécessite habituellement une analgésie
intraveineuse. Reprise des boissons et des aliments le jour-même. Retour à la 24ème heure et reprise
rapide des activités physiques (2 à 3 jours).

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Chirurgie digestive 242

CHIRURGIE DE LA LITHIASE VESICULAIRE

1. CHOLECYSTOSTOMIE: par une courte incision, ouverture du fond vésiculaire et évacuation du


contenu. Une grosse sonde est amarrée dans le fond vésiculaire et celui-ci amarré à la paroi; la sonde
est extériorisée afin de drainer le contenu vésiculaire.

Technique qui ne connait plus, à notre sens, d’indications; donc pour mémoire.

1. CHOLECYSTECTOMIE : traitement idéal et définitif de la lithiase vésiculaire. Se pratique donc


le plus souvent par laparoscopie et, en cas de difficultés techniques par exemple cholécystite, par
laparotomie.

Les indications :

a) Lithiases vésiculaires symptomatiques ou compliquées (cholécystite, lithiase cholédocienne etc).


b) Lithiases vésiculaires asymptomatiques. Habituellement, lorsqu’une lithiase vésiculaire est
découverte et qu’il n’y a pas de symptôme, aucun traitement n’est proposé. Seules les conditions
suivantes peuvent inciter à recourir à une cholécystectomie préventive:

1º présence d’un diabète en raison de la gravité d’une évolution vers une


cholécystite.
2º une vésicule exclue.
3º une vésicule dite porcelaine (calcifiée) car risque carcinologique.
4º calculs de gros calibre
5º découverte opératoire fortuite, par exemple lors d’une laparotomie au niveau du
carrefour aortique, chirurgie du côlon, chirurgie gastrique etc.
6º patient jeune et, particulièrement, la femme jeune souhaitant des grossesses
ultérieures.

Technique: la vésicule est disséquée des éléments du hile du foie. L’artère cystique est ligaturée
et sectionnée. Le canal cystique est partiellement incisé; un fin cathéter est introduit dans le
cholédoque et une cholangiographie de la voie biliaire principale doit être systématiquement réalisée.

Dangers:

• 1º blessures ou ligatures du cholédoque. Complications redoutables qui, à long terme, peuvent


conduire à une sténose de la voie biliaire principale.
• 2º ligatures ou blessures de l’artère hépatique droite lors de la dissection de l’artère cystique.
Incidents mineurs.

• 3º fuite biliaire à partir du cystique ou de petits canaux biliaires entre le foie et la vésicule.
Incidents mineurs le plus souvent contrôlés par un drainage sous-hépatique.

Le canal cystique est ensuite ligaturé et sectionné au plus près du cholédoque, afin de ne pas
abandonner un moignon cystique long qui pourrait, dans l’avenir, générer une lithiase de ce sac exclu.
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La vésicule est enlevée et, systématiquement, analysée sur le plan anatomopathologique. La


découverte exceptionnelle d’un petit adénocarcinome peut imposer une réintervention d’évidement
lymphatique et d’hépatectomie partielle.

4. ANGIOCHOLITE

L’angiocholite est l’infection de la voie biliaire principale, elle est liée à une stase biliaire,
conséquence d’un obstacle sur le cholédoque.

Son diagnostic doit être impérativement fait de façon rapide afin de réaliser en urgence un
drainage biliaire car le malade est menacé de septicémie avec choc infectieux, insuffisance rénale et
surtout des complications infectieuses intra-hépatiques.

Circonstances du diagnostic

Forme typique

Les signes classiques de l’angiocholite associent: des clochers fébriles avec frissons, des
douleurs de l’hypochondre droit, un ictère cholestatique. L’association de ces trois signes apparus en
quelques heures est caractéristique de l’infection biliaire liée à un obstacle lithiasique. Au moment de
ces crises, l’examen clinique retrouve une hépatomégalie sensible mais l’absence de défense élimine
une cholécystite.

Les examens biologiques montrent une leucocytose à polynucléaires neutrophiles et un


syndrome de cholostase.

En présence d’un tel tableau clinique, il convient de pratiquer plusieurs hémo-cultures avant de
mettre en route une antibiothérapie à large spectre, et de surveiller la fonction rénale.

Autres aspects cliniques

Ils sont conditionnés par les modalités évolutives. En effet l’angiocholite peut évoluer par
poussées quand l’obstacle est intermittent ou de façon continue quand l’obstacle sur le bas-cholédoque
est définitif.

C’est dans ce cas qu’un choc septique peut se produire. L’état général s’altère, le malade
présente un état d’obnubilation très grave. Cette angiocholite obstructive aiguë est une urgence
médicale (car elle nécessite le traitement du choc) et chirurgicale (car elle nécessite une
décompression des voies biliaires).

L’angiocholite ictéro-urémigène secondaire à l’état hémodynamique précaire est caractérisée


par des signes d’hyper-catabolisme majeur avec notamment une hyper-kaliémie, une acidose
métabolique. L’apparition d’une insuffisance rénale doit faire éventuellement discuter la nécessité
d’une hémodialyse soit avant soit après l’intervention.

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Les angiocholites retentissent enfin sur le foie, pouvant être responsables de micro-abcès, ou
lorsqu’elles surviennent par crises à répétition, elles peuvent entraîner une cirrhose biliaire secondaire.

Problèmes de diagnostic

Diagnostic positif.

Le diagnostic doit être évoqué devant l’association de fièvre, douleur, ictère. L’obnubilation et
l’état de choc sont deux signes traduisant la gravité du tableau clinique. L’hyper-leucocytose,
l’augmentation de la bilirubinémie, le syndrome de cholostase sont le plus souvent associés. La
thrombopénie est constate au cours d’une angiocholite grave. Les hémocultures vont permettre de
reconnaître le germe pour adapter l’antibiothérapie. Escherichia Coli est le plus souvent rencontré mais
plusieurs types de germes aérobies peuvent être retrouvés. La bile peut également contenir des germes
anaérobies, c’est dire que, en attendant le résultat de l’antibiogramme, une antibiothérapie dirigée
contre les deux types de germes, aérobies et anaérobies, sera prescrite.

Diagnostic différentiel

Il peut se poser, en l’absence d’ictère, avec les états hyper-thermiques responsables de frissons
et notamment avec des accès palustres ou des fièvres urinaires. Devant une forme grave, lorsqu’il y a
une obnubilation et une insuffisance rénale, une leptospirose ictèro-hémorragique peut être discutée.

Diagnostic étiologique

La lithiase de la voie biliaire principale est la cause la plus fréquente. Il faut y penser devant
toute poussée d’angiocholite. En dehors des poussées, une biligraphie intra-veineuse fait le diagnostic.
En cas d’angiocholite obstructive aiguë, le malade étant alors ictérique, l’échotomographie permet de
retrouver des calculs et éventuellement d’apprécier l’état de la voie biliaire principale. L’opacification
de la voie biliaire par voie trans-hépatique, trans-pariétale ou trans-jugulaire, est contre-indiquée en
raison du risque de cholépéritoine et de septicémie. Eventuellement, un cathétérisme rétrograde de la
papille peut être réalisé: il a alors l’avantage de faire le diagnostic et éventuellement de permettre une
sphinctérotomie endoscopique.

L’ampullome vatérien peut donner des poussées d’angiocholite. Au cours d’une forme
obstructive aiguë, un drainage peut être réalisé en urgence pour passer la phase aiguë en attendant que
l’intervention idéale soit réalisée secondairement.

Les autres causes sont plus rares: pancréatites, parasitoses (distomatose, ecchinococcose).

L’apparition d’une angiocholite après une cholécystectomie doit faire craindre une sténose
post-traumatique de la voie biliaire principale. Les anastomoses cholédoco-duodénales, par le reflux
qu’elles entraînent dans la voie biliaire principale ou encore lorsqu’elles sont sténosées, sont également
susceptibles de se compliquer d’angiocholite.

TRAITEMENT

Le traitement des angiocholites est une urgence médico-chirurgicale.


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Le traitement médical; l’antibiothérapie doit utiliser des béta-lactamines, des aminosides et
des antibiotiques actifs sur les germes anaérobies (Métronidazole). Elle doit bien sûr être adaptée dès
que l’on a le résultat de l’antibiogramme.
L’élément essentiel du traitement médical est représenté par la prévention du choc infectieux, c’est dire
la nécessité de perfuser de grandes quantités de liquide ainsi que des grosses molécules. L’apparition
d’un choc septique doit faire utiliser la Dopamine*. Le traitement médical encadre le traitement
chirurgical.

Le traitement chirurgical consiste à réaliser un drainage externe de la voie biliaire principale


après cholédocotomie. Si le malade est dans un état qui le permet, en cas de lithiase, le traitement idéal
consiste en une cholécystectomie, avec extraction des calculs de la voie biliaire principale, vérification
de la perméabilité complète de la voie biliaire par une endoscopie biliaire per-opératoire et, enfin, un
drainage externe au moyen d’un drain trans-cystique ou d’un drain en T. Lorsque l’état du malade ne
le permet pas ou en cas d’obstruction néoplasique sur le bas-cholédoque, on peut se contenter d’un
drainage externe. Néanmoins deux alternatives palliatives à la décompression de la voie biliaire
peuvent être proposées: le drainage biliaire trans-hépatique par voie percutanée et la sphinctérotomie
endoscopique.

Le traitement chirurgical après anastomose cholédoco-duodénale consiste à démonter cette


anastomose, à éliminer les corps étrangers de la voie biliaire principale et à terminer soit par un
drainage externe, soit par une anastomose cholédoco-jéjunale, sur une anse en Y qui met à l’abri d’une
nouvelle angiocholite.

Au cours de l’intervention , un prélèvement de bile cholédocienne doit être réalisé. Celle-ci


peut être purulente, simplement trouble ou même claire, c’est dire l’importance d’une étude
bactériologique de la bile pour s’assurer du diagnostic.
Une hémodialyse peut être pratiquée, en cas d’insuffisance rénale, avant l’intervention et
éventuellement après. Classiquement, l’épuration extra-rénale est indiquée lorsque la créatinémie est
supérieure à 900 micro-moles/l (soit 100 mg/l) et le potassium à 6 mEq/l.
En fait, cette indication doit être envisagée plus précocement de façon à prévenir les complications de
l’insuffisance rénale, afin de maintenir l’azotémie inférieure à 33 mmoles/l (soit 2 g/l), la kaliémie
inférieure à 6 mEq/l, et de prévenir l’acidose et la surcharge hydrosodée.
Ces objectifs sont particulièrement importants dans le cadre de l’insuffisance rénale aiguë de
l’angiocholite, en raison des facteurs infectieux et de l’intensité de l’hypercatabolisme. Aussi les
hémodialyses sont-elles quotidiennes permettant ainsi la mise en route d’une hyper-alimentation
parentérale. L’amélioration de l’état général du patient par le traitement du choc et de l’insuffisance
rénale permet une amélioration du pronostic des angiocholites qui demeurent cependant une
complication grave de la lithiase de la voie biliaire principale.

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VI. LE FOIE

I. TRAUMATISME

Les lésions traumatiques du foie comprennent les contusions dues à des traumatismes fermés et
les plaies dues à des traumatismes ouverts.

Etiologie

Dans le cadre général des contusions de l'abdomen les ruptures du foie sont quatre fois moins
fréquentes que celles de la rate et s'observant dans environ 1/10 des cas.
La fragilité relative de la glande, son poids, son volume, sa situation thoraco-abdominale remontant
jusqu'à la heuteur du 4e espace intercostal et l'existtence d'un plan dur postérieur costo-rachidien,
s'opposant au dégagement épigastrique antérieur, sont autant de facteurs favorisant l'atteinte hépatique
et chez l'enfant la glande est encore plus exposée que l'adulte.
Le facteur déterminant est habituellement un choc direct libre ou appuyé. Les accidents de la voie
publique constituent actuellement l'étiologie la plus fréquente en pratique civil; moins souvent il s'agit
d'un choc indirect par contre-coup ou blast.
Balle, armes blanches et éclats de projectiles, spécialement en pratique de guerre, sont à l'origine des
plaies.

Anatomie pathologique et physiopathologie

La contusion du parenchyme hépatique peuvent répondre à tous les intermédiaires entre la


petite déchirure sous-capsulaire avec hématome collecté, qui tend à se rompre secondairement dans la
grande cavité péritoniale, et les déchirures profondes souvent multiples qui parfois réalisent de
véritables éclatementsdispersant des fragments hépatiques jusqu'e dans le cul-de-sac de Douglas.
L'abondance de l'hémopéritoine est fonction de l'importance des vaisseaux rompus et est responsible
du syndrome hémorragique.
La lésion des canaux biliaires peut donner un cholépéritoine, mais surtout la bile épanchée, mélangée
au sang au sein des zones lésées, favorise la nécrose du tissu hépathique; cet effet s'ajoute à l'ischémie
nécrosante due aux lésions vasculaires, favorisant le choc et l'infection secondaire, avec les risques
majeurs que cela comporte pour la fonction rénale.
Parfois, enfin, à la faveur d'un foyer d'attrition dans lequel des vaisseaux sanguins et des canaux
biliaires sont rompus, une fistule artéro ou artéro- porto-biliaire se constitue et c'est le tableau de
l'hémobile post-traumatique.

Les lésions hépatiques observées dans les plaies se rapproche beaucoup de celles des
contusions; en effet le trajet intra-parenchymateux du projectile peut y entraîner la formation:
Soit d'une tranchée plus au moins profonde, aux berges contuses et dévitalisées;
Soit d'un tunnel dont l'orifice d'entrée peut être punctiforme alors que l'orifice de sortie, s'il
s'agit d'un projectile, est beaucoup plus grand avec délabrement plus au moins important;
Soit d'un véritable éclatement lorsqu'il s'agit de projectiles explosifs ou animés d'une force
cinétique vive, dangereux par leur pouvoir rotatoire.

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De toutes façon, plus souvent que dans les contusions, on observera des dégâts vasculo-biliaires
atteignant les grosses branches dans le hile ou à son voisinage et les hémorragies en seront d'autant
plus graves. Par définition , les plaies s'accompangent toujours de lésions pariétales correspondant au
point d'entrée et éventuellement au point de sortie de l'agent en cause.
Enfin, dans les contusions comme dans les plaies du foie, on observe souvent des lésions associées qui
peuvent être pariétales, diaphragmatiques ou viscérales, en particulier du rein droit, de la rate et du
tube digestif..

Clinique

Le problème, lorsqu'il s'agit d'un traumatismefermé, est celui de réunir un nombre suffisant
d'rguments en faveur de l'existence d'une lésion du foie pour opérer sans retard dans les meilleurs
conditions techniques.
Bien entendu, il est des cas gravissimes où la mort surviendra avant qu'on puisse intervenir.
Le plus souvent cependant il s'agira d'un accidenté. Qui présente des signes de choc traumatique,
intriqués avec des signes d'hémorragie interne. Les circonstances exactes du traumatisme plus ou
moins violent qui a pu porter électivement sur l'hypochondre droit et l'existence de douleurs à ce
niveau, irradiant précisement vers l'épaule droite oriente parfois d'emblée le diagnostic. On cherchera
la triade deFinsterer: bradycardie paradoxale Etant donné l'état de choc avec hypotension, associée à
une hyperthermie et à un ictère précoce.

A l'examen de l'abdomen la douleur provoquée à la palpation de l'hypochondre droit, avec


défense à ce niveau, la matité déclive gauche disparaissant en décubitus latéral droit, la sensibilité du
cul-de-sac de Douglas au toucher rectal traduisent l'hémopéritoine d'origine hépatique. La ponction de
l'abdomen faite à l'aiguille dans chacune des quatre quadrans n'a de valeur que si elle ramène
franchement du sang , mais elle eswt peu fidèle; seule est réellement valable popur le diagnostic
d'hémopéritoine l'introduction d'un cathéter à dialyse péritonéale par lequel on perfuse du sérum
physiologique en voyant s'il revient mêlé à du sang lors son aspiration. Le traitement anti-choc et les
transfusions étant mis en oeuvre sans retard on demandera des examens complémentaires. Les
radiographies du thorax et de l'abdomen sont surtout utiles pour dépister des lésions associées, car elles
sont peu fidèles en matière d'hémopéritoine. L'hémotocrite et la numération sanguine apprécieront
l'hémoconcentration et le degré d'anémie. L'hyperglycémie est classique et on dosera les transaminases
don’t l'augmentation est en rapport avec la nécrose parenchymateuse; elles sont donc surtout utiles si
l'on n'intervient pas d'emblée. En effet, contrairement à ce qui se passe dans les traumatismes oouverts,
où la seule constatation d'une plaie pariétale commande l'exploration chirurgicale avec vérification du
foie, il est des traumatismes fermés où la décision opératoire ne sera prise que secondairement, en
raison de la pauvreté de la symptomatologie ou de la disparition rapide des signes de choc sous
l'influence de la réanimation.

C'est alors que l'artériographie sélective par le tronc coeliaque, qui n'est guère praticable dans
les conditions habittuelles de l'urgence sur un malade choqué, prend toute sa valeur en montrant,
comme dans la rupture de la rate, foyer lésionel. Grâce à elle on pourra opérer en temps utile les
classiques formes en deux temps, où, après quelques troubles passagers, il y a un intervalle libre
pouvant se prolonger plusieurs jours, puis l'hémorragie intrapéritonéale reprend brusquement, parfois
sur le mode le plus grave.

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Chirurgie digestive 248
Ailleurs, encore plus tardivement, le sang qui s'était collecté en péritoine cloisonné sous le foie
ou dans l'espace inter-hépato-diaphragmatique about it à la formation d'un abcès avec état infectieux,
qui peut être lui aussi très grave.

Enfin l'hémobilie post-traumatique constitue elle aussi un accident le plus souvent tardif, qui
peut n'être reconnu que plusieurs semaines ou mois après l'accident. Elle s'observe aussi bien dans des
cas non opérés en urgence que dans des cas ayant subi une intervention qui n'a pas retiré le foyer
lésionnel. Cliniquement elle est caractérisée par la triade d'Owen: douleurs évoquant des coliques
hépatiques, ictère peu intense et hémorragies digestive avec anémie; dans le sang les phosphatases
ainsi que transaminases sont augmentées.

La cholangiographie intrveineuse peut montrer qu'un des gros canaux hépatiques gauches ou
droits est sténosé ou lacunaire. Cependant c'est surtout l'artériographie sélective qui dans quelques cas
privilégiés a pu montrer non seulement l'interruption de la branche artérielle fistulée avec image en
flaque, mais aussi le passge du liquide de contraste dans un canal biliaire. Sans intervention la
guérison spontanée a été observée dans quelques cas, surtout chez l'enfant, mais habituellement
l'évolution se fait vers la mort par anémie du fait des hémorragies digestives.

Traitement

Les lésions traumatiques du foie relève de la chirurgie d'urgence soit que l'on opère en ayant
porté ou seulement suspecté le diagnostic, soit qu'on les reconnaissent au cours d'une laparotomie
exploratrice systématique pour plaie ou bien contusion abdominale ou thoraco-abdominale ayant pu
léser d'autres organes.

Le traitement anti-choc et la transfusion mis en oeuvre le plus rapidement possible doivent


permettre d'intevenir sous anesthésie générale.

L'icision de départ est en règle une médiane à cheval sur l'ombilic, car il importe de vérifier
l'ensemble des organes abdominaux.

Une fois que l'on a apprécié l'importance de l'hémopéritoine et fait le bilan des lésions,
différentes méthodes de traitement de l'atteinte hépatique peuvent être utilisées, lesquelles ont toutes
pour but d'arrêter l'hémorragie et d'obtenir la cicatrisation du parenchyme:
1. La suture faite au catgut avec ou sans interposition de matériel hémostatique r-sorbable convient
essentiellement à des ruptures ou des plaies périphériques peu profondes.
2. 2. Le tamponnement par mèches tassées avec ou sans matériel hémostatique résorbable peut
convenir à des lésions plus étendues et plus profondes, mais il ne met pas toujours à l'abri
d'hémorragies secondaires qui peuvent être graves. Par ailleurs il ne prévient pas la nécrose des zones
de parenchyme ischémiées avec possibilité d'acident toxi-infectieux graves et de suppurations
secondaires. Enfin, il méconnaît d'éventuelles lésions plus profondes qui peuvent être à l'origine
d'accidents tardifs au premier rang desquels l'hémobilie
3. L'ablation de tout le tissu hépatique lésé constitue donc la méthode de choix:
- elle peut se faire d'emblée, à la demande, réalisant une résection hépatique atypique, ce qui est
suffisant dans les lésions n'intéressant qu'un segement périphérique de la glande;
- au contraire, dans les cas graves, où il s'agit de grande rupture en étoile intéressant la plus
grande partie du foie droit ou du foie gauche, seule une hépatectomie réglée droite ou gauche peut
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Chirurgie digestive 249
guérir le blessé. Il en est de même lorsqu'on est en présence de plaie de grosses branches vasculo-
biliaires droites ou gauches au niveau du hile. La difficulté est de pouvoir réaliser en urgence dans de
bonnes conditions de technique et d'anesthésie-réanimation ces interventions majeures, qui, du moins
en ce qui concerne l'hépatectomie droite, nécessitent l'élargissement de la voie d'abord par l'ouverture
du thorax.

C'est pourquoi dans les cas limites, ne semblent pas nécessiter obligatoirement une
hépatectomie réglée, surtout si l'état du blessé est précaire, on aura tendance à procéder en deux temps.
Dans un premier temps, on arrête l'hémorragie par le tamponnement et on met en place un drain
biliaire de décharge pour lutter contre la fuite de bile au niveau des lésions, laquelle favorise la
nécrose parenchymateuse. Après trois ou quatre jours on réintervient, et très souvent il est facile de
retirer à la demande les zones ischémiées, qui se sont délimitées d'elles mêmes. Si une hépatectomie
réglée s'avère alors nécessaire, elle sera réalisée dans de meilleurs conditions sur un blessé bien
déchoqué.

De toutes façon les suites opératoires devront être l'objet de soins attentifs, surtout en ce qui
concerne la prévention des troubles de la crase sanguine avec hypothrombinémie, voire accident de
fibrinolyse. Par ailleurs on n'évitera pas toujours chez ces choqués polytransfusé les syndromes
d'insuffisance hépato-rénale avec fièvre, ictère, anémie, coma et trop souvent la mort malgré les
techniques actuelles d'épuration extra-rénale. Les accidents secondaires, en particulier collections
suppurées péri-hépatiques, nécessitent des réinterventions de drainge parfois itératives.

Quant aux hémobilies qui retentissent gravement sur l'état général elles relèvent de
l'hépatectomie réglée droite ou gauche après localisation exacte de la fistule,; ce n'est que dans les cas
où le terrain ne permet pas cette intervention que l'on peut proposer la ligature de l'artère hépatique
commune. En définitive, les progrès de la réanimation et des techniques chirurgicales ont permis
d'améliorer le pronostic des lésions traumatiques de foie; cependant la mortalité, encore actuellement,
est loin d'être négligeable puisque les statistiques américaines de la dernière guerre mondiale et de la
guerre de Corrée indiquent une mortalité de 27%.

Quant aux grandes statistiques civiles des dix dernières années, qui sont également américaines,
elles indiquent une mortalité de l'ordre de 15 à 20%.

II. ABCES HEPATIQUE

L’amibiase hépatique est la plus fréquente des localisations extra-intestinales. Elle résulte de
l’essaimage au foie d’amibes sous forme histolytica. Parties des lésions coliques, ces amibes
hématophages gagnent le foie par voie sanguine et s’embolisent dans les veinules portes, créant un
infarcissemen de la zone correspondante; elles franchissent la paroi vasculaire et déterminent de petits
foyers d’hépatonécrose disséminés, dont la coalescence peut aboutir à la formation d’un ou plusieurs
abcès collectés volumineux.

Ainsi, l’amibiase hépatique évolue-t-elle en deux stades: stade initial d’amibiase hépatique
présuppurative et stade ultérieur d’abcès amibien du foie.

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Chirurgie digestive 250
Anatomie pathologique. Les aspects macroscopiques sont variables suivant l’ancienneté des
lésions. Aux foyers nécrotiques disséminés du début font suite, par coalescence, des abcès ulcératifs à
parois inflammatoires et exsudatives, puis des collections nécrotiques à parois fibreuses et régulières,
évoluant en l’absence de traitement, vers la sclérose. Histologiquement, à la nécrose proprement
amibienne s’associent des lésions d’infarcissement par thrombose vasculaire pouvant réaliser l’abcès
nécrotique de Palmer au magma central inflammatoire. L’abcès ulcératif est constitué d’une collection
nécrotique centrale limitée par des franges fibrinoïdes riches en amibes auxquelles fait suite un
granulome inflammatoire qui sépare la collection du parenchyme hépatique alentour. Toutes ces
lésions réagissent bien au traitement médical. Plus tard se formera autour de la nécrose un tissu
conjonctif d’abord oedémateux puis fibreux, limitant l’extension de la lésion mais nécessitant, le plus
souvent, un drainage chirurgical de la zone centrale.

Examens complémentaires. En radioscopie, la coupole diaphragmatique droite est surélevée,


immobile; le cul-de-sac pleural est souvent comblé; il existe parfois des opacités parenchymateuses de
la base droite.

Les examens biologiques de routine ont une valeur d’orientation: l’hémogramme décèle une
hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles; la sédimentation globulaire est accelérée, à plus de 50
mm à la première heure; les tels hépatiques sont peu perturbés.

L’examen parasitologique des selles a peu d’intérêt: négatif il n’élimine pas le diagnostic;
positif, il ne l’affirme pas davantage, qu’il montre des formes histolytica, des formes minuta ou des
kystes.

Les test immunologiques ont une valeur diagnostique considérable. Les réactions de
précipitation en milieu gélifié (immunodiffusion, immunoélectrophorèse, électro-synérèse),
spécifiques, sont de réalisation délicate; les techniques d’immuno-fluorescence indirecte (sur étalement
d’amibes), d’hémagglutination passive ou d’agglutination de particules sensibilisées (latex), plus
commodes, exposent à quelques faux positifs. Une sérologie fortement positive est très évocatrice
d’amibiase viscérale, en particulier hépatique; cependant, des taux élevés s’observant parfois au cours
d’une amibiase intestinale aiguë ou longtemps après la guérison d’une amibiase tissulaire connue ou
non. A l’inverse, une sérologie négative n’élimine pas formellement l’amibiase hépatique, surtout au
début.

Pour préciser la topographie et le volume du ou des abcès, en fonction des possibilités locales,
on peut demander une échotomographie, ou un examen tomo-densitométrique du foie. L’échographie
met en évidence une ou plusieurs zones d’échostructure liquidienne (hypoéchogène ou anéchogène),
ou mixte, hétérogène, sans renforcement périlésionnel comme dans les abcès à pyogène. La
scintigraphie hépatique à l’or ou au technétium n’est plus guère utilisée. La tomodensiométrie
(“scanner”) décèle avec encore plus de précision des foyers de nécrose amibienne. Ces 2 techniques
permettent de suivre l’évolution de l’abcès traité médicalement. La régression des lésions est lente, en
plusieurs mois, et la persistance définitive de séquelles iconographiques possible.

Les autres examens complémentaires ont moins d’intérêt; laparoscopie qui découvre un gros
foie congestif, des adhérences inter-hépatodiaphragmatiques et parfois le bombement localisé d’un
abcès; l’artériographie sélective est exceptionnellement indiquée.

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Chirurgie digestive 251
La ponction exploratrice à l’aiguille garde son intérêt en zone tropicale lorsqu’il est impossible
de faire une échotomographie et des tests immunologiques; en effet, elle affirme l’abcès amibien
lorsqu’elle ramène un pus chocolat stérile (et le plus souvent sans amibes car elles restent dans la paroi
de l’abcès) et elle permet, après drainage, d’apprécier la taille de la poche grâce à l’injection d’air et
de lipiodol suivie de la prise de clichés radiographiques: en revanche, dans les centres bien équipés,
elle ne s’indique qu’à titre thérapeutique sous échographie pour drainer des abcès volumineux
(ponction écho-guidée).

Evolution. On opposait classiquement l’amibiase hépatique présuppurative, sensible aux


amoebicides tissulaires et les formes abcédées imposant ponction ou hépatotomie. En fait, beaucoup
d’abcès guérissent sans drainage et mieux vaut distinguer simplement les succès et les échecs des
amoebicides.

Le traitement est efficace dans la plupart des cas. La température revient à la normale en 3 à 10
jours; les douleurs, l’hépatomégalie régressent plus lentement, la vitesse de sédimentation globulaire
décroît rapidement et se normalise vers la 4è ou 6è
semaine; c’est le meilleur critère précoce de guérison; la polynucléose neutrophile du début disparaît
parallèlement. La régression de l’hépatomégalie et la disparition du ou des abcès éventuels ne se
produisent qu’en 3 à 6 mois. La sérologie a peu d’intérêt dans la surveillance à court terme des
amibiases hépatiques car elle ne se négative qu’en plusieurs mois ou années.

L’échec du traitement médical est rare dans les cas vus suffisamment tôt. Il peut être clinique
(persistance de la fièvre au-delà du 10è jour, a fortiori complication), biologique (vitesse de
sédimentation très accélérée à la fin du 1er mois) ou iconographie (agmentation du volume de la zone
hypoéchogène ou persistance durable). Toutes ces éventualités imposent un drainage: ponction à
l’aiguille ou hépatotomie chirurgicale.

Formes cliniques de l’amibiase hépatique

Formes symptomatiques. La fièvre peut être isolée, manquer ou rester discrète. Les douleurs
sont souvent atténuées ou ectopiques. Contrairement à l’opinion classique, un ictère de type variable
cytolytique ou rétentionnel peut survenir. Les complications pleuropulmonaires sont parfois plus
bruyantes que les manifestations hépatiques.

Formes topographiques. Les abcès postérieurs ou du lobe gauche, rares et trompeurs se


révèlent souvent par une complication. Leur pronostic est sévère du fait du retard diagnostique et
thérapeutique.

Formes subaiguës, voire chroniques. Elles évoluent à bas bruit, simulent un cancer primitif
du foie ou une cirrhose et correspondraient à des formes anatomiques particulières: abcès fibreux de
Kiener, hépatite nodulaire de Achard et Foix.

Formes graves, suraiguës ou compliquées. Elles se rencontrent surtout chez les sujets
dénutris ou en cas de retard thérapeutique. L’abcès fulminant de Roger, mortel en quelques jours,
correspond à une nécrose parenchymateuse diffuse. A un moindre degré, on observe des abcès
hépatiques multiples, délabrants, de traitement difficile. Ces abcès sont parfois surinfectés par des
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Chirurgie digestive 252
germes divers, posant le problème des abcès non amibiens du foie. L’abcès peut éroder un gros
vaisseau entrainant une hémorragie cataclysmique ou encore comprimer la veine porte (déterminant un
syndrome d’hypertention portale), les veines sus-hépatiques (exceptionnel syndrome de Budd-Chiari
d’origine amibienne) ou même d’autres organes., Surtout, l’abcès peut s’étendre aux organes voisins:
s’il siège au niveau du dôme hépatique, l’abcès diffuse à la plèvre, au poumon, au médiastin, au
péricarde; s’il siège à la face inférieure du foie, l’abcès peut se rompre dans le péritoine, engendrant
une péritonite habituellement cloisonnée, ou encore dans le tube digestif ou un autre organe; s’il est
postérieur, il peut s’étendre à l’espace rétropéritonéal.

Diagnostic différentiel de l’amibiase hépatique.

L’amibiase hépatique pose le problème de tous les gros foies fébriles et douloureux.
Les abcès bactériens du foie sont moins fréquents que les abcès amibiens en zone tropicale. Ils
compliquent habituellement une septicémie, une angiocholite, une dilatation congénitale des voies
biliaires intra-hépatiques, un foyer abdominal infecté; on peut isoler le germe responsable (anaérobie
le plus souvent). La difficulté réside dans l’existence d’abcès bactériens en apparence primitifs et
d’amibiases surinfectées.

Le cancer primitif du foie fréquent en Afrique noire, simule d’assez près l’amibiase hépatique.
L’échec du traitement d’épreuve au métronidazole, l’absence habituelle d’anticorps spécifiques
amibiens à un titre élevé, la mise en évidence d’une alphafoetoprotéine dans le sérum du malade, les
données laparoscopiques et histologiques permettent la distinction.

Certaines cirrhoses sont douloureuses et fébriles; mais l’ictère, l’ascite les oedèmes et le signes
d’hypertension portale lèvent rapidement le doute.

Le kyste hydatique du foie surinfecté peut étre confondu avec une amibiase. L’erreur est grave
quand elle conduit à la ponction du kyste.

Autres localisations

Les amoebicides tissulaires suffisent dans la majorité des atteintes pleuropulmonaires et


cutanées. Il faut parfois y adjoindre un drainage chirurgical: péricardite avec tomponade, abcès du
cerveau ou de la rate.

Traitement médical (5-nitro-imidazole ou 2-déhydro-émetine). Il s’impose dans tous les cas.


En règle, ils obtiennent à eux seuls la guérison clinique (apyréxie en moins de 7 jours), biologique
(ralentissement de la VS en moins de 6 semaines) et iconographique (disparition des images en 3 à 6
mois). Une cure complémentaire par un amoebiicide de contact est nécessaire quel que soit le résultat
de l’examen des selles.

Drainage. Il s’impose en cas d’échec des amoebicides. La ponction à l’aiguille permet un


drainage efficace et sans danger de la majorité des abcès du lobe droit, si possible localisée par
l’échographie visualisant la ou les poches. Elle peut être répétée sans inconvénient. Le drainage
chirurgical est bien codifié. L’abcès, localisé à ventre ouvert est ponctionné, puis on y injecte un
produit de contraste pour en préciser les limites et les rapports avec les voies biliaires. Il est ensuite
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Chirurgie digestive 253
largement ouvert. Des prélevements de pus et de la paroi sont adressés en parasitologie, en
bactériologie et en anatomopathologie. Le pus est évacué aussi complètement que possible; un drain
est laissé en place quelques jours, ce qui suffit habituellement à affaisser totalement la poche. Il est
exceptionnel de devoir faire une hépatectomie ou un drainage pour un abcès amibiens ancien, enkysté,
aux parois scléreuses. Les choix entre ponction et drainage chirurgical est fonction des habitudes de
chacun. Cependant, les abcès inférieurs et ceux du lobe gauche sont dangereux à ponctionner si l’on ne
peut pas guider l’aiguille sous échographie, tandis que les abcès multiples, volumineux ou anciens
(souvent enkystés ou contenant un séquestre) ne sont bien évacués que par le chirurgien. Une fois
drainés, les abcès seront surveillés aussi étroitement que ceux traités seulement médicalement.

Certaines complications dictent une attitude particulière.

Une rupture en péritoine, libre ou cloisonnée, impose la laparotomie d’urgence. Il faut


également évacuer les abcès ouverts dans l’espace rétropéritonéal, compliqués d’ictère rétentionnel
prolongé ou comprimant les gros vaisseaux (veines caves, système porte). Le pyothorax et la
péricardite sont des indications opératoires, alors que les pleurésies sérofibrineuses et même les abcès
du poumon (se drainant bien par les bronches) peuvent guérir médicalement. Les abcès très
volumineux ou multiples, ceux du lobe gauche qui risquent de se compliquer plus que les autres sont
opérés systématiquement.

PROPHYLAXIE

Prophylaxie générale. Elle comporte théoriquement plusieurs mesures: dépistage et traitement


des porteurs sains de kystes, surtout dans les collectivités et parmi les personnes manipulant les
aliments; aménagement de latrines et réglementation de l’utilisation agricole de l’engrain humain;
lutte contre les mouches; épuration des eaux de boisson (malheureusement, le chlore à la dose
habituelle ne détruit pas les kystes d’amibes). En fait, tout ceci est théorique en zone hautement
infestée.

Prophylaxie individuelle. Les règles d’hygiène sont ici essentielles: propreté des mains,
filtration ou ébullition de l’eau de boisson, nettoyage soigneux des fruits et des légumes. La
chimioprophylaxie par amoebicide de contact n’est pas utilisée: en effet, les cures prolongées sont mal
tolérées et leur efficacité est douteuse.

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Chirurgie digestive 254

VII. PANCREAS ET RATE

I. PANCREAS
1. Pancréas annulaire
2. Pancréas divisium
3. Pancréatite
4. Tumeurs

I. RATE
1. Anatomie et Physiologie
2. Splénectomie
3. Autres techniques

I. Chirurgie des hypertensions portales


1. Physiopathologie
2. Manifestations
3. Traitement essentiel des hémorragies digestives.

I. PANCREAS

A. MALFORMATIONS CONGENITALES

1. PANCREAS ANNULAIRE.

Un anneau de tissu pancréatique, venant de la tête, entoure le deuxième duodénum. Cette


pathologie se traduit le plus souvent chez l’enfant par une obstruction du deuxième duodénum avec
vomissements post-prandiaux. Cet anneau pancréatique contient un canal excréteur et ne doit pas être
sectionné. Une anastomose du duodénum d’amont sur l’aval doit être réalisée.

2.PANCREAS DIVISUM.

Il y a donc absence de fusion entre le pancréas dorsal (Santorini) et le pancréas ventral


(Wirsung). Cette anomalie congénitale est suspecte d’induire des épisodes de pancréatite aiguë par
drainage insuffisant de la papille accessoire (Santorini) qui draine 90 % du pancréas.
Dans certains cas, bien démontrés par l’étude endoscopique et physiologique, il est nécessaire de
réaliser la dilatation de cette papille accessoire ou la papillectomie d’élargissement du Santorini (abord
chirurgical trans-duodénal).

B. LA PANCREATITE.

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Chirurgie digestive 255
La pancréatite est une affection inflammatoire, non bactérienne, causée par l’activation, la
libération interstitielle et l’auto-digestion du pancréas par ses propres enzymes. L’affection peut ou
non s’accompagner de modifications morphologiques et fonctionnelles de la glande.
On en sait plus sur les étiologies des pancréatites que sur la compréhension fondamentale “du désordre
initial” responsable du phénomène de pancréatite aiguë ou chronique.

La clinique distingue 4 formes de pancréatites

1. La pancréatite aiguë caractérisée par une crise douloureuse de l’abdomen supérieur, accompagnée
de vomissements et d’hyperamylasémie.
2. La pancréatite chronique caractérisée par des douleurs chroniques souvent dorsales, avec présence
de calcifications intra-pancréatiques et d’une insuffisance exocrine (stéatorrhée) ou endocrine
(diabète). Elle est caractéristique de l’éthylisme.
3. La pancréatite aiguë récidivante caractérisée par de multiples attaques de pancréatite aiguë sans
qu’il y ait de modification morphologique au niveau du pancréas. La lithiase biliaire en est souvent
responsable.
4. La pancréatite chronique récidivante avec des poussées aiguës sur un fond de pancréatite
chronique. Caractéristique de la pancréatite éthylique.

ETIOLOGIES.

80 % des pancréatites sont provoquées par la lithiase biliaire ou l’alcoolisme. Quelques cas ont
été notés dans des hypercalcémies, traumatismes, hyperlipidémies et des prédispositions génétiques.
Elles sont dites idiopathiques lorsque l’étiologie n’est pas claire.

Il existe des différences importantes dans les manifestations et l’histoire naturelle est fonction
de cette étiologie.

Pancréatite biliaire

40 % environ des pancréatites aiguës sont associées à la présence d’une lithiase vésiculaire.
La migration de micro-calculs, vers le cholédoque et, au-travers du sphincter d’Oddi, occasionne très
vraisemblablement ces poussées de pancréatite aiguë. Même si le calcul cholédocien n’est retrouvé que
dans 25 % des cas, on pense que l’obstruction transitoire de la papille par le calcul a pu occasionner
une poussée de pancréatite aiguë.

Si les attaques de pancréatite se multiplient, il n’y a jamais évolution vers la pancréatite


chronique, au contraire de la pancréatite éthylique.

La cholécystectomie et l’élimination des calculs cholédociens suppriment presque toujours


la récidive de la pancréatite.

Pancréatite alcoolique

40 % des cas. Six fois plus fréquente chez l’homme que chez la femme. En général chez des
buveurs de vin et d’alcool fort. Elle évolue souvent et inéluctablement vers la pancréatite chronique
même si l’éthylisme est interrompu.
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Chirurgie digestive 256

Causes rares:
• Postopératoire ou post-traumatique: intervention sur la voie biliaire, ERCP (3 % des cas),
sphinctérectomie endoscopique ou chirurgicale etc.
• Anomalies anatomiques exocrines: pancréas divisum.
• Tumeurs pancréatiques: le cancer de la tête du pancréas avec obstruction du système exocrine peut
être la première manifestation. Donc, toujours rechercher une tumeur pancréatique après une poussée
aiguë chez un sujet de plus de 50 ans et ne présentant pas d’étiologie précise.
• Médicaments: contraceptifs oraux avec oestrogènes, corticostéroïdes, azathioprine, thiazide et
tétracycline.
• Infection : oreillons.
• Troubles métaboliques : hyperlipidémie
• Troubles endocriniens : hypercalcémie de l’hyperparathyroïdie.
• Pancréatite idiopathique: 15 % environ des cas. Cependant, ces patients vont souvent développer,
ultérieurement, une lithiase biliaire. On peut donc penser que nombre de ces pancréatites idiopathiques
doivent être liées à une migration de cristaux de cholestérol impossibles à diagnostiquer.

PHYSIOPATHOLOGIE.

Le mécanisme le plus souvent évoqué est celui d’une hypertension au niveau du système
exocrine et qui entraînerait une rupture des membranes cellulaires responsables du passage des
enzymes et des proenzymes dans le système extra-exocrine conduisant à une auto-digestion des tissus
pancréatiques et péri-pancréatiques. Cette théorie est confortée par la présence d’enzymes
protéolytiques dans le liquide d’ascite et par une quantité accrue de phospholipases A et de
lysoléthicine dans les tissus pancréatiques de patients en pancréatite aiguë.
Expérimentalement, la pancréatite peut être reproduite par l’injection sous pression d’enzymes actives
dans les canaux pancréatiques.
Cette théorie de l’auto-digestion est largement acceptée actuellement. D’autres facteurs sont évoqués;
l’insuffisance vasculaire, la congestion lymphatique ou l’activation du système kallicréine-kinine.

La phospholipase A, la lipase et l’élastase paraissent davantage responsables que la Trypsine.

Si cette auto-digestion est le facteur commun admis, elle n’explique pas les premières étapes
conduisant à la présence d’enzymes activés dans l’interstitium des acini. Plusieurs théories ont été
évoquées: obstruction-sécrétion, canal biliaire et pancréatique commun, reflux biliaire ou duodénal etc.

Ces différentes théories n’expliquent pas 2 formes de pancréatite aux pronostics très différents:

a) la pancréatite oedémateuse: les tissus pancréatiques et péri-pancréatiques sont le siège d’un


infiltrat par cellules inflammatoires avec quelques taches de stéatonécrose. Même si le décours
clinique est spectaculaire, cette pancréatite regresse spontanément et est bénigne dans 99 % des cas.
b) Dans la pancréatite aiguë nécrotico-hémorragique, le processus va au-delà de l’oedème et la
digestion s’étend dans la glande et aux alentours avec coagulation des vaisseaux artériels et veineux.

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Chirurgie digestive 257
Les nécroses apparaissent avec hémorragie et extravasation d’un liquide plasmatique riche en protéines
vers les tissus péri-pancréatiques et rétro-péritonéaux. Véritable brûlure du 3ème degré.
Cette digestion, avec nécrose hémorragique, fuse vers le pédicule mésentérique supérieur, le
rétro-péritoine et les aires péri-rénales, le pédicule hépatique, le médiastin etc.
Dans cette forme sévère, les manifestations systémiques sont nombreuses. Elles sont
semblables aux complications d’un multiple organe failure dans les septicémies. C’est surtout
au niveau respiratoire et rénal qu’apparaissent les complications.

LA PANCREATITE AIGUE.

- CONSIDERATIONS GENERALES

La pancréatite aiguë, qu’elle soit de type oedémateux ou de type hémorragique, est une
manifestation du même processus pathologique; la symptomatologie de départ et l’exploration
biologique de départ sont identiques. La pancréatite oedémateuse régressera rapidement et la
pancréatite hémorragique continuera d’évoluer avec ses complications et un taux de mortalité élevé.

- SYMPTOMATOLOGIE CLINIQUE

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Chirurgie digestive 258
L’attaque de pancréatite suit souvent un repas copieux, bien arrosé, et elle se traduit par une
douleur brutale dans l’épigastre avec irradiation dorsale. La douleur est constante; les nausées sont la
règle et les vomissements fréquents. L’état de déshydratation est précoce et peur aller jusqu’au choc.
La tachycardie est constante.

La perte liquidienne est importante :

1. extravasation plasmatique ou hémorragique dans la sphère pancréatique rétro-péritonéale,


2. iléus paralytique entraînant la stagnation de toutes les sécrétions biliaires et intestinales,
3. vomissements.

La température est normale ou subnormale avec fébricule à 37º5 au bout de quelques heures.
Se rappeler qu’au départ, il n’y a pas d’infection bactérienne. On peut également noter, dans les
premières heures, l’apparition d’un épanchement pleural gauche par irritation diaphragmatique.

Examens clinique :

Polypnée, défense généralisée à l’épigastre et, ultérieurement à toute la paroi abdominale.


Matité à l’épigastre et abdomen inférieur en météorisme.

A l’auscultation, silence abdominal traduisant l’iléus paralytique.


A un stade ultérieur et signe de gravité extrême : apparition d’une décoloration bleue dans les flancs
(signe de Grey Turner) traduisant l’épanchement sanguin rétro-péritonéal ou encore un hématome de la
région ombilicale (signe de Cullen) signifiant la propagation de l’hématome vers le pédicule hépatique
puis vers le ligament rond et l’ombilic.

Après plusieurs jours, on peut également palper une masse dans la région épigastrique
correspondant à une collection péri-pancréatique.

- DONNEES BIOLOGIQUES.

• Hématocrite élevée conséquence de la déshydratation,


• Hyperleucocytose fréquente et en-dessous de 15.000 en l’absence de complication infectieuse,
• Altération des tests hépatiques (bilirubine, phosphatase alcaline) souvent modérée et pouvant être
liée à plusieurs facteurs: oedème des voies exocrines dans la tête du pancréas, obstruction
cholédocienne temporaire, éthylisme etc.
• Enzymologie pancréatique :
- La lipase sérique: est tout à fait spécifique de la pancréatite aiguë. Le dosage ne peut cependant
être obtenu en urgence. Le dosage des lipases dans les urines de 24 heures est un bon test.
- L’amylase sérique est le test essentiel et le plus souvent pratiqué. L’augmentation de l’amylasémie
survient presque immédiatement. Le niveau de l’amylasémie n’est pas un indice de gravité de la
pancréatite. Des valeurs de plus de 2.000 sont notées dans les pancréatites biliaires, en général plus
bénignes que les pancréatites éthyliques.

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Chirurgie digestive 259
De même, le suivi de l’amylasémie n’a aucune valeur pronostique et la normalisation de
l’amylasémie en deux ou trois jours ne signifie pas l’arrêt du phénomène de nécrose.
Se souvenir qu’il existe également une hyperamylasémie d’origine salivaire ou dans l’ulcère
perforé ou dans l’infarctus mésentérique ou dans l’obstruction grêle voire dans la cholécystite
gangréneuse.
• Hypocalcémie est un facteur de gravité et est liée à la combinaison du calcium avec les acides gras
libérés.
• Hyperglycémie liée à l’atteinte du tissu endocrine est également un facteur de gravité.
Ranson a établi des facteurs de gravité dans la pancréatite aiguë: retenons les points suivants à
évoluer dès l’admission du patient et à la 48ème heure:
1º plus de 55 ans,
2º plus de 15.000 globules blancs,
3º glycémie à plus de 350 unités,
4º LDH à plus de 350 unités,
5º chute de l’hématocrite de plus de 15 %,
6º hypocalcémie,
7º chute de la PO2.
L’addition de ces 7 points donne un pronostic de mortalité de plus de 30 %.

- EXAMENS RADIOLOGIQUES

Radiographie de l’abdomen à blanc:

- peut montrer des calcifications pancréatiques signant un fond de pancréatite chronique


éthylique,
- des calculs biliaires calcifiés,
- un iléus intestinal, donnant une distension du grèle proximal dans le flanc gauche (jéjunum
– anse sentinelle) voire une dilatation du côlon transverse gauche.

Cet examen permet d’exclure une occlusion grèle basse par absence de niveau hydroaérique
bas et une péritonite par perforation par absence de pneumo-péritoine.

Radiographie du thorax:

A réaliser quotidiennement. Recherche une pneumopathie interstitielle (ARDS) et un


épanchement pleural surtout gauche.

Echographie :

Importante pour rechercher la lithiase vésiculaire. Examen peu contributif cependant pour
diagnostiquer la pancréatite ou suivre son évolution. Peut reconnaître ultérieurement la formation de
collection ou d’ascite.

Tomodensimétrie (scanner) :

Examen de choix et important à réaliser en urgence et dans le suivi d’une pancréatite aiguë.
Au départ, il permet de déterminer le volume de la glande et servira d’examen comparatif.
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Chirurgie digestive 260
Il diagnostique l’oedème ou la nécrose pancréatique et péri-pancréatique. Il permet de juger de
l’apparition d’éventuelles nécroses ou hémorragies. Cet examen est prédictif car son évolution précède
souvent les signes cliniques.

Examens biliaires :

La cholécystographie orale peut être réalisée ultérieurement pour rechercher une lithiase
vésiculaire.
L’endoscopie rétrograde (CPRE) doit être réalisée lorsqu’il y a forte suspicion de lithiase
cholédocienne. Elle peut permettre d’évacuer un calcul enclavé dans le bas cholédoque ou de vérifier
l’état de la papille qui vient d’être forcée par un calcul.
Elle doit cependant être réalisée par des mains expertes car cet examen ne peut injecter les voies
exocrines pancréatiques sous peine d’infecter la pancréatite.

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL.

Celui d’une pathologie douloureuse, constante, de l’épigastre donc :


1. ulcère gastro-duodénal perforé : présence d’un pneumo-péritoine et donne davantage une
contracture qu’une défense.
2. Obstruction haute du grèle : pathologie exceptionnelle et moins spectaculaire.
3. Cholécystite aiguë: douleur située davantage à droite et que l’échographie permettra de préciser.
4. L’infarctus mésentérique peut être également suspectée.

Ces différentes pathologies justifient un geste chirurgical urgent au contraire de la pancréatite


aiguë qu’il faut, éviter d’opérer sous peine d’infecter le rétro-péritoine.

COMPLICATIONS.

La forme oedémateuse est donc bénigne dans 99 % des cas. La forme nécrotique ou
nécrotico-hémorragique est redoutable par ses complications. Il est souvent nécessaire de prolonger
l’hospitalisation durant plusieurs semaines afin d’avoir l’assurance que le patient est à l’abri de tout
incident.

a. Complications locales :

1. Extension de la nécrose péritonéale pouvant fuser vers le pédicule mésentérique, l’aire péri-
rénale, le pédicule hépatique, voire le médiastin au travers de l’hiatus diaphragmatique. Cette
nécrose s’accompagne de tout un cortège de complications générales et locales de type
thrombose veineuse puis artérielle. Mortalité élevée.

2. Infection des foyers de nécrose: la cause première de mort dans les pancréatites aiguës est
l’infection du rétro-péritoine. Cette infection peut être provoquée par un geste opératoire
inutile, par une ERCP ou par les nombreux sites de pénétration de cathéter veineux. L’infection
peut également venir par voie hématogène à partir du tractus digestif.

Elle se caractérise par l’apparition d’une température élevée, d’une hyperleucocytose à


plus de 15.000, par un état toxi-infectieux du patient. L’infection est une indication formelle de
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Chirurgie digestive 261
drainage soit par voie percutanée, par ponction ou mieux par drainage chirurgical par voie rétro-
péritonéale en incisant dans le flanc gauche, derrière la rate ou par laparotomie.

3. Hémorragies: provoquées par les digestions intra- ou rétro-péritonéales, thromboses veineuses


notamment de la veine porte et de la veine splénique d’où hypertension portale. La digestion de
ces vaisseaux thrombosés peut provoquer des hémorragies artérielles ou veineuses.

A signaler également la fréquence des ulcères gastro-duodénaux aigus ou des gastrites


hémorragiques.

4. Le pseudokyste n’est pas en soi une complication et représente l’engainement des tissus
nécrotiques et de la sécrétion éxocrine du pancréas formant une collection rétro-péritonéale
(voir plus loin).
5. Tardivement, on peut voir se produire, par cicatrisation, des sténoses du duodénum, du jéjunum
proximal ou de la portion gauche du côlon transverse. Le cholédoque peut être également
comprimé par un processus de cicatrisation au niveau de la tête pancréatique et donc entrainer
un ictère.

a. Complications à distance :
1. Rénales: insuffisance rénale aiguë fonctionnelle de bon pronostic ou nécrose corticale de
pronostic sombre malgré l’hémodialyse.
2. Pulmonaire : du simple épanchement gauche au syndrome de détresse respiratoire (ARDS),
réclament dans les formes graves une assistance respiratoire prolongée.
3. Autres: cardiaque par endotoxinémie ou greffe valvulaire ou bactérienne. Confusion mentale
fréquente notamment chez les éthyliques.
Surveiller également l’apparition d’une CIVD. On a noté aussi des stéatonécroses
systématiques même cutanées.

PRONOSTIC.

La pancréatite aiguë est une affection grave dont la mortalité moyenne se situe aux environs de
15 %. Dans les formes hémorragiques, elle peut atteindre 30 a 40 %. La cause de décès est surtout
l’infection mais il faut également surveiller les problèmes systémiques, le choc et l'’nsuffisance rénale.
Les critères de Ranson (voir plus haut) sont un bon test pronostique. La tomodensitométrie régulière
est également un examen à pratiquer toutes les 48 heures au début de l’affection.

TRAITEMENT.

Ses buts sont de réduire la sécrétion pancréatique et ses stimuli et, surtout, de corriger les
désordres liquidiens et électrolytiques.
Ce traitement est donc essentiellement médical, la chirurgie étant réservée aux complications et aux
cas ne répondant pas au traitement médical. Cependant, le malade sera idéalement suivi en milieu
chirurgical car un geste d’intervention doit parfois se décider rapidement et nombre de complications
tardives réclament également une intervention.

TRAITEMENT MEDICAL :

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Chirurgie digestive 262
1. Aspiration gastrique par sonde naso-gastrique, ce qui élimine les vomissements et diminue la
stimulation pancréatique. Permet également une aspiration correcte du tractus digestif supérieur et
permet une correction des pertes liquidiennes. Cette sonde sera enlevée et l’alimentation permise
lorsque l’état du patient se sera amelioré et qu’il aura retrouvé un appétit. Les amylases auront dû
également revenir à la normale.
2. Perfusion de liquides et d’électrolytes.
Ajouter des albumines car celles-ci s’échappent dans l’exsudat rétro-péritonéal. Le volume de
perfusion sera détermine par la diurèse et par la mesure de la pression veineuse centrale. Les
contrôles biologiques seront fréquents et au minimum quotidiens.
1. Analgésique : important car l’affection est douloureuse surtout dans les premières heures.
L’analgésique permet une meilleure hémodynamique chez le patient.
Eviter les morphiniques qui provoquent un spasme du sphincter d’Oddi.
1. L’oxygène : la surveillance de l’hypoxémie est importante et les gaz sanguins doivent être mesurés
toutes les 12 heures. Il est logique de maintenir ces patients sous oxygène, éventuellement assistance
respiratoire si apparition d’une pneumopathie.
2. Calcium : l’hypocalcémie peut être sévère et est un signe de gravité. Sa correction prévient les
problèmes cardiaques.

Tels sont les points importants du traitement médical d’une pancréatite aiguë.

THERAPEUTIQUES DISCUTEES:

1. Antibiotiques: ne paraissent pas nécessaires car il n’y a pas de problème bactérien. N’améliorent en
rien le pronostic. Ne seront donnés que s’il y a preuve d’une infection surajoutée.
2. Anti-cholinergie, anti-enzymes pancréatiques, anti H2, corticoïdes, somatostatine: autant de
thérapeutiques qui ont été essayées et qui ont fait preuve de leur inefficacité.
3. Lavage péritonéal: certains centres pratiquent systématiquement l’aspiration de la cavité
péritonéale par un petit drain introduit au niveau de l’ombilic. Lorsqu’il y a présence de liquide,
notamment hématique et riche en enzymes, ils pratiquent un lavage péritonéal continu dans l’espoir
d’éliminer des toxines de la cavité abdominale. Ces toxines pourraient être réabsorbées dans la
circulation systémique.
4. Drainage du canal thoracique : au niveau de la veine jugulaire interne gauche, selon le même
principe que le lavage péritonéal et chercher d’éviter une inondation systémique par les toxines
résorbées du rétro-péritoine par le canal thoracique.
5. Nutrition parentérale: n’aggrave pas l’évolution d’une pancréatite; sera appliquée après 3 à 4 jours
lorsqu’il y a preuve que la pancréatite est sévère et que le patient ne sera pas alimenté avant 8 à 10
jours.
6. Traitement endoscopique (ERCP): malgré l’hésitation de certaines équipes, doit être réalisé dès que
possible lorsqu’il y a preuve ou suspicion d’une origine biliaire (voir plus haut).

TRAITEMENT CHIRURGICAL :

Phase précoce de la pancréatite aiguë :


Ne doit pas être appliqué, en principe, dans la phase précoce de la pancréatite aiguë. Si une
laparotomie est réalisée à ce stade par hésitation, il faut éviter d’ouvrir le rétro-péritoine et d’infecter la
nécrose, par contre il faut réaliser, de principe la cholécystectomie et le contrôle de la voie biliaire par

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Chirurgie digestive 263
cholangiographie. En cas de pancréatite biliaire, une fois la phase aiguë passée, c’est-à-dire après 8 à10
jours, réaliser précocement la cholécystectomie chirurgicale par laparotomie ou laparoscope.
Dans la phase aiguë d’une pancréatite, la laparotomie n’a de place que si le traitement médical ne
contrôle pas l’évolution, (donc, état de choc, septicémie, hémorragie, etc). L’acte chirurgical cherchera
surtout à drainer le rétro-péritoine. Cette intervention peut se faire par un abord du flanc gauche et une
dissection du rétro-péritoine sans ouvrir la grande cavité. On peut également réaliser une laparotomie
médiane et réaliser l’éradication des nécroses avec un drainage large du rétro-péritoine. La
cholécystectomie et le contrôle de la voie biliaire seront toujours associés. Il n’est pas rare de devoir
réintervenir chez ces patients pour éliminer d’autres foyers de nécrose ou d’infection. L’hospitalisation
peut être longue et atteindre deux à trois mois dans les cas extrêmes.

LA PANCREATITE CHRONIQUE.

Essentiel :

1. Douleurs abdominales hautes et surtout dorsales, persistantes ou récidivantes.


2. Présence de calcifications pancréatiques à l’abdomen à blanc, chez 50 % des patients
3. Evolution vers l’insuffisance pancréatique: malabsorption et diabète
4. Presque toujours liée à l’alcoolisme.

Quelques formes rares sont liées à l’hypercalcémie, à l’hyperlipidémie ou à une disposition


héréditaire (pancréatite familiale).

TRAITEMENT CHIRURGICAL

Trois principes :

1. La chirurgie a comme but principal de supprimer la douleur, plainte majeure et invalidante dans la
pancréatite chronique. Elle entretient l’alcoolisme qui est le meilleur analgésique pour ces patients ou
induit des médicaments de type morphine.
2. Elle s’impose dans les complications péri-pancréatiques: compression de la voie biliaire,
compression duodénale, faux kystes du pancréas.
3. La chirurgie doit éviter la résection pancréatique afin de préserver le potentiel endocrinien et donc
ne pas précipiter l’apparition d’un diabète. Cette chirurgie sera préferentielle de type dérivation.

TECHNIQUES.

- Anastomose pancréatico-jéjunale (opération de Puestow):

Intervention idéale lorsqu’il y a dilatation du Wirsung par des concrétions lithiasiques.


Le pancréas est ouvert sur toute la longueur, depuis le duodénum jusqu’au hile de la
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Chirurgie digestive 264
rate; le Wirsung est aisément répéré et ouvert sur toute la longueur. Les lithiases sont évacuées à la
vue ou par lithotritie péropératoire. Une anse jéjunale en ‘Y’ (anse de Roux) est anastomosée en latéro-
latéral sur le pancréas.

Cette intervention est idéale lorsque les conditions anatomiques le permettent . Elle donne 80%
d’excellents résultats sur la douleur. Elle ne semble pas empêcher l’évolution naturelle vers le diabète
et l’insuffisance éxocrine.

- Duodénopancréatectomie céphalique (opération de Wipple):

Intervention connue surtout en pathologie cancéreuse de la tête du pancréas. Intervention d’exérèse


plus délicate et difficile. Enlève donc le cadre duodénal et la tête du pancréas. Ne modifie pas le
potentiel endocrinien du pancréas qui est surtout corporéo-caudal.

Geste conseillé lorsqu’il y a complication biliaire (sténose) et/ou duodénale (sténose).

Pancréatectomie totale ou subtotale:

Lorsqu’il n’y a pas de possibilité de geste de dérivation, lorsqu’il y a déjà apparition de


l’insuffisance endocrine et éxocrine, on peut proposer cette solution à des patients dont la douleur reste
le symptôme le plus invalidant. Le pancréas est enlevé totalement de la queue, jusqu’au duodénum;
seul 1 cm de pancréas est préservé afin de garder l’implantation du cholédoque dans le duodénum.

Il faut donc tenter de trouver une possibilité de dérivation lorsqu’il y a pancréatite chronique.
Quel que soit le geste effectué, toujours réaliser une cholécystectomie de principe car la lithiase
vésiculaire peut être présente.

RESULTATS.

La morbidité et la mortalité sont très faibles car un pancréas pathologique est fibreux et permet
des sutures d’excellentes qualités avec l’intestin. Ceci n’est pas vrai lorsque le pancréas est sain; une
anastomose pancréatique après pancréatectomie pour cancer est sujette à complication et à
fistulisation.

Les résultats sont excellents sur la douleur lorsqu’il y a anastomose pancréatico-jéjunale ou


duodénopancréatectomie céphalique. Le problème actuel est de savoir si la chirurgie et le drainage
éxocrine retardent ou préviennent l’évolution vers le diabète.

C. TUMEURS DU PANCREAS

1. Tumeurs kystiques.

Tumeurs très rares. Le cystadénome muqueux présente un risque élevé de la cancérisation.


Fréquent dans la région corporéo-caudale.

Peut atteindre une taille considérable car asymptomatique.

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Chirurgie digestive 265
Les adénomes micro-kystiques sont des lésions bénignes. Consistent en de nombeux petits kystes
assemblés en une tumeur unique.

Il est important de distinguer ces deux formes car l’une a une potentialité maligne. Ces lésions
kystiques représentent 10 à 15 % de tous les kystes du pancréas. Le chirurgien peut les confondre avec
un faux kyste; il est dès lors dangereux de se contenter d’un drainage de cette lésion. Donc, lorsqu’il y
a drainage chirurgical d’un pseudo-kyste, il faut toujours réaliser un prélevement de la paroi à la
recherche d’un épithélium. Si celui-ci est présent, on se trouve en présence d’un vrai kyste dont
l’exérèse doit être réalisée.

2. Tumeurs neuro-endocrines.

Voir cours de gastro-entérologie

3. Adénocarcinome du pancréas.

Pour symptômes et diagnostic voir cours de gastro-entérologie.

Quelques considérations importantes :


1. La présence d’une douleur est un facteur de pronostic péjoratif car on peut suspecter un
envahissement des plexus nerveux splanchniques.
2. Le diagnostic des cancers du corps et de la queue est tardif car il ne provoque d’ictère qu’à un
stade terminal ou par leurs métastases.
3. Une pancréatite aiguë peut être le symptôme inaugural d’un cancer par obstruction de la voie
éxocrine. Donc, lorsqu’il n’y a pas d’explication à cette pancréatite aiguë, réaliser ultérieurement une
ERCP de dépistage.
4. Le diabète précède parfois de plusieurs mois les signes cliniques d’un cancer pancréatique.
5. Marqueurs tumoraux, toujours réaliser le dosage du CEA et du CA 19,9; ce dernier parait
plus spécifique.

Réaliser toujours le dosage de l’énolase. 10 % environ des cancers du pancréas ne sont pas
des adénocarcinomes mais des tumeurs neuro-endocriniennes malignes non sécrétantes.

Ce point est très important car le pronostic d’un adénocarcinome est médiocre et, à partir
d’un certain volume tumoral, on est tenté de ne pas intervenir ou résequer. Au contraire, les tumeurs
neuro- endocrines doivent être résequées largement car le pronostic est nettement meilleur et on note
des survies de plusieurs années pour des tumeurs volumineuses. La chimiothérapie adjuvante est
également intéressante.

1. Le scanner et l’échographie sont d’excellents examens de diagnostic et de dépistage. L’ERCP


est un examen important; toute sténose ou obstruction du Wirsung doit être considérée, jusqu’à preuve
du contraire, comme étant un cancer.

Traitement chirurgical de l’adénocarcinome

Comme pour tout cancer digestif, il n’y a l’espoir de guérison que par une exérèse
chirurgicale large. Le pronostic de ce cancer est cependant médiocre car les survies à 5 ans n’atteignent
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Chirurgie digestive 266
pas 10 %. L’explication peut se situer sur le plan anatomique et dans la proximité du pancréas avec les
aires lymphatiques, les pléxus nerveux et le réseau veineux très riche de la région. La chirurgie ne
permet pas facilement une exérèse large telle que celle réalisée pour un cancer colique ou gastrique.

a. Cancer de la tête du pancréas : en raison de l’intimité anatomique de la tête du pancréas, de la voie


biliaire basse et de l’ampoule de Vater, il est difficile de distinguer par les examens préopératoires, un
cancer de la tête du pancréas d’une tumeur maligne du bas cholédoque ou d’un ampullome malin.
Même l’anatomopathologiste a des difficultés à faire la distinction.
Retenir que les cancers du bas cholédoque et de l’ampoule de Vater ont nettement meilleur
pronostic que le cancer de la tête du pancréas. 40 % de survie pour moins de 10 %.
L’ictère est presque toujours le signe annonciateur.
Il est de routine de pratiquer une ERCP pour confirmer le diagnostic. Cet examen est cependant
dangéreux car il infecte systématiquement la voie biliaire. L’endoscopiste doit donc terminer son
examen par un drainage biliaire: soit une prothèse allant du duodénum jusqu’au-dessus de
l’obstacle biliaire, soit une sonde naso-biliaire c’est-à-dire cathéter suivant le trajet de l’endoscope,
de l’oesophage à l’estomac vers le duodénum et au-dessus de l’obstacle biliaire.

Dans nombre de cas cependant, l’ERCP n’est pas nécessaire. L’apparition d’un ictère
cholostatique et la découverte d’une tumeur au scanner ou à l’échoendoscopie doivent poser
l’indication chirurgicale sans passer par l’ERCP.

Critères d’exclusion : plus de 50 % de cancers de la tête ne doivent pas être opérés car le
geste n’améliorera en rien la survie.
1. Tumeur de plus de 5 cms de diamètre,
2. Envahissement de la veine porte (scanner)
3. Présence de métastases hépatiques.

La laparoscopie est également un excellent test préopératoire pour rechercher des


métastases hépatiques ou péritonéales.

Ces patients ne seront pas opérés et traités par prothèse biliaire interne (ERCP) ou
percutanée (voie trans-hépatique). La survie moyenne est de moins de 6 mois.
Si patients opérables, l’intervention idéale est la duodénopancréatectomie céphalique (opération de
Whipple).

Intervention difficile; résection du 1/3 distal de l’estomac, de tout le cadre duodénal, de la


tête du pancréas, des aires ganglionnaires péri-pancréatiques jusqu’au tronc coeliaque et l’artère
mésentérique supérieure, section de l’hépatique commun avec réséction de la vésicule. Reconstruction
par anse grèle anastomosée à l’estomac, à la voie biliaire et au pancréas.

La pancréatectomie régionale est une duodénopancréatectomie céphalique mais éradiquant


davantage tous les pléxus nerveux rétro-péritoneaux jusqu’au plan de l’aorte avec résection partielle de
la veine porte, voire résection de certains troncs artériels qui sont ensuite réanastomosés.
Chirurgie beaucoup plus lourde qui a donné l’espoir d’un meilleur résultat. Connait cependant des
séquelles de type diarrhée persistante, liée vraisemblablement à la dénervation intestinale et aux
résections lymphatiques. N’a pas fait preuve de son efficacité.

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Chirurgie digestive 267
La pancréatectomie totale associe la duodénopancréatectomie à la résection du corps et de
la queue. Elle est indiquée lorsqu’il y a extension de la tumeur vers le corps ou de multiples foyers de
cancérisation du pancréas (20 % des cas). Implique un diabète postopératoire, parfois difficile à
équilibrer.

Resultats de la chirurgie:

Mortalité de 5 à 10 %. Résultats cependant médiocres avec une survie à 5 ans de 5 %.

La morbidité est surtout liée aux fistules pancréatiques sur l’anastomose de ce pancréas, soit
au jéjunum soit à l’estomac.

Si lors d’une intervention, on découvre des facteurs pronostiques médiocres il est


cependant préférable de réaliser une résection pancréatique à une dérivation biliaire et gastrique dont le
pronostic est mauvais avec une mortalité élevée. Si la résection n’est pas possible, dériver le
cholédoque et l’estomac dans une anse en ‘Y’ afin d’éliminer l’ictère et de prévenir l’obstruction
duodénale.
La chimiothérapie adjuvante n’a rien apporté jusqu’è présent dans ce domaine.

La radiothérapie n’a d’indication qu’à titre antalgique dans les envahissements rétro-péritonéaux des
pléxus.

a. Cancer du corps ou de la queue : lésion dont le pronostic est effroyable; ne se manifeste qu’à un
stade tardif avec présence de métastases lymphatiques et hépatiques.
La chirurgie n’a d’indication qu’à titre palliatif: pancréatectomie corporéo-caudale avec
conservation de la tête. Le seul espoir du patient est d’y découvrir une tumeur non pas de type
adénocarcinome mais de type neuro-endocrine.

a. Tumeur maligne neuro-endocrine : 10 % des cancers du pancréas. Tumeur maligne non sécretante
ou dont la sécretion ne peut être déterminée. Se présente chez les individus plus jeunes mais le tableau
clinique est identique à un adénocarcinome. Plus fréquente au niveau du corps et de la queue. Cette
forme anatomopathologique mérite un acharnement chirurgical: excision large de la tumeur,
pancréatectomie totale si nécessaire.
Enucléation – excision des métastases hépatiques, voire ligature de l’artère hépatique. Un
traitement chimiothérapique secondaire sera entrepris. La survie de ces lésions peut etre chiffrée en
plusieurs années.
Cette tumeur marque le plus souvent au niveau du dosage des énolases. Il est donc essentiel, devant
toute tumeur pancréatique :
1. de doser l’énolase préopératoire,
2. d’insister auprès de l’anatomopathologiste pour distinguer une forme neuro-endocrine d’un
adénocarcinome,
3. de réaliser , systématiquement, une étude immuno-histochimique d’une tumeur du pancréas à la
recherche d’une tumeur neuro-endocrine et d’une éventulle sécretion.

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Chirurgie digestive 268
Conclusions: l’adénocarcinome du pancréas est un cancer de très mauvais pronostic. Trois tumeurs
peuvent simuler un cancer du pancréas et sont d’un excellent pronostic: le cancer de la voie biliaire
basse, l’ampullome malin et la tumeur neuro-endocrine.

II. LA RATE

Organe plein, richement vascularisé, situé dans le quadrant supéro-externe de l’abdomen entre
les 8ème et 11ème côtes, en dehors et au-dessus du fundus gastrique, sous le diaphragme et au-dessus
de l’angle splénique du côlon et du rein gauche. Une rate adulte pèse environ 100 à 150 grammes et
mesure 12 cms sur 7. Elle n’est pas palpée sauf si elle est pathologique. Elle est recouverte par le
péritoine (capsule) sur les ¾ de sa surface antérieure; la surface postérieure est directement en contact
avec le rétro-péritoine.

Lâchement attachée par les vaisseaux courts du fundus gastrique et par les ligaments postérieurs.

Perfusée par l’artère splénique, branche du tronc coeliaque et drainage par la veine splénique
qui rejoint la veine porte en passant sur la face postérieurre du corps et de la queue du pancréas.

Riche en tissu lymphatique contenant surtout des lymphocytes, des cellules plasmatiques et des
macrophages. Espace vasculaire très riche. Sur le plan anatomique, est un relais important dans le
drainage veineux de l’abdomen lorsqu’il y a hypertension portale; il y a souvent dans ces conditions
splénomégalie avec phénomène d’hypersplénisme.

PHYSIOLOGIE.

Voir cours d’hematologie.


Splénectomie permet une vie normale.

SPLENECTOMIE.

La splénectomie ne peut se faire que par voie chirurgicale, soit par une laparotomie médiane,
soit par une incision sous-costale gauche. Lorsque la rate est de volume normal, le geste est facile et
peu hémorragique, cependant, dans les affections médicales, la rate est souvent augmentée de volume
voire monstrueuse (plusieurs kilos); cette chirurgie s’accompagne d’une dyscrasie sanguine avec
thrombocytopénie et requiert une minutie d’hémostase afin d’éviter tout incident hémorragique grave.

La ligature du pédicule vasculaire peut blesser la terminaison du pancréas et entraîner une


pancréatite de la queue du pancréas. Donc, dans le décours d’une splénectomie, si température et
collection de l’hypochondre gauche, penser à une blessure pancréatique qui doit être drainée.

1.1 . Indications:

Peuvent être d’ordre médical: tumeur (sarcome), abcès, anémie hémolytique, hypersplénisme
primaire, purpura thrombocytopénique etc.
Dans ces diverses indications, un bilan de coagulation doit toujours être minutieux et l’intervention
accomapagnée quelques fois de transfusions plaquettaires. Celles-ci ne seront cependant réalisées
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Chirurgie digestive 269
qu’après ligature de l’artère splénique afin de ‘récuperer’ le maximum de plaquettes concentrées au
niveau de la rate.

Dans la maladie de Hodgkin, il est souvent recommandé de réaliser une laparotomie avec
splénectomie et étude des aires lymphatiques de l’abdomen ainsi que des biopsies hépatiques, ceci à la
recherche des localisations abdominales de l’affection.

La splénectomie est le plus souvent réalisée pour traumatisme. La rate est un organe fragile et le
plus souvent concerné dans un traumatisme fermé de l’abdomen. La rupture splénique se produit soit
par la désinsertion de la rate de ses attaches lors d’une décélération brutale, soit par contusion ou
déchirure par des fractures du gril costal gauche.

Le diagnostic sera évoqué lorsqu’il y a choc et liquide intra-péritoneal (échographie et scanner).


L’hémorragie peut être violente et réclamer une intervention d’urgence. L’hémorragie peut cependant
s’interrompre et il se créera un caillot dans la région de la rate. Cinq jours à plusieurs semaines après
ce traumatisme, la lyse du caillot peut provoquer une hémorragie secondaire et réaliser, ce qui est
communement appelé une rupture en deux temps de la rate. Le blessé, apparemment guéri de son
traumatisme, ressent une violente douleur dans l’hypochondre gauche avec éventuel état de choc.
L’anamnèse doit rappeler cette notion de traumatisme et imposer une laparotomie avec splénectomie.

La tendance est cependant de tenter de conserver la rate, surtout chez l’enfant; son rôle
immunologique n’est pas négligeable. Si le choc est contrôlé , la surveillance se fera par échographie
ou tomodensimétrie. Seule la progression de l’hémorragie ou sa récidive justifiera la splénectomie.
Dans quelques cas favorables, une splénectomie partielle d’hémostase sera réalisée.

Une autre indication de splénectomie pour traumatisme est de type iatrogène: une traction sur
l’estomac ou le grand épiploon peut provoquer une déchirure de la capsule splénique; la rate étant très
richement vascularisée, elle saigne abondamment et une hémostase ne peut toujours être obtenue. On
peut donc être amené, dans certaines interventions abdominales (chirurgie de l’estomac ou de l’angle
splénique du côlon) à réaliser une splénectomie de nécessité. Cet accident exceptionnel a cependant
posé quelques problèmes juridiques car un malade devant être opéré de l’estomac ou du côlon n’est
pas informé de cet accident éventuel et quelques procès ont été faits aux chirurgiens pour cette
splénectomie accidentelle.

Quelques indications rares de splénectomie :

- l’anévrysme de l’artère splénique est la deuxieme cause de rupture anévrysmale au niveau de


l’abdomen après l’aorte abdominale.
- Les kystes spléniques sont souvent dus à des échinocoques.
- Les abcès spléniques peuvent apparaître dans le cadre d’une septicémie ou d’une infection régionale
(pancréatite).

On note également des ruptures spontanées de la rate dans la malaria, la mononucléose, les
lymphomes, la leucémie, la fièvre typhoïde et la grossesse.

2.2. Conséquences hématologiques :

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Chirurgie digestive 270
Peu ou pas de conséquences cliniques.
Le nombre de plaquettes accroît de facon spectaculaire et atteint souvent des chiffres de 400 a 500.000.

Des thrombocytoses importantes, dépassant le million, peuvent apparaître. Il est donc important
de surveiller le taux de plaquettes dans le post-opératoire. Il existe donc un état d’hypercoagulabilité
qui peut entraîner une coagulation de la veine splénique voire de la veine porte donc une
pylethrombose pouvant entraîner une insuffisance hépatique. Cette hypercoagulation peut se
manifester également au plan général par un taux plus élevé de phlébite profonde et d’embolie
pulmonaire.

Lorsque le taux de plaquettes est trop élevé, il est prudent de donner durant quelques semaines
un traitement par des agents anti-plaquettaires telle l’aspirine.

La splénectomie a été accusée de provoquer, à court et à long terme, des septicémies. Le risque
est plus grand chez les enfants et se situe à environ à ½ % an. Cette septicémie est brutale et peut être
facilement mortelle. Elle est attribuée aux streptocoques pneumoniae, à l’haemophilus influenzae et
aux méningocoques. Cette complication certes rare mais grave a conduit à diminuer l’incidence des
splénectomies notamment dans les traumatismes.

Des vaccins ont été développés contre le pneumocoque pour prévenir cet incident. Chez les
enfants de moins de deux ans, l’antibiothérapie prophylactique doit être donnée durant plus d’un an.

Autres techniques de chirurgie splénique

1. Splénectomie partielle
2. Splénorraphie : suture de la rate
3. Greffe splénique (mettre un tout petit morceau de tissu splénique dans l'épiploon ou derrière le
muscle grand droit).

Les différentes techniques permettent d'éviter les conséquences sus décrites de la splénectomie.

VIII. LE COLON

1. Le cancer du colon
2. Le cancer de l'ampoule rectale
3. Le prolapsus du rectum
4. Les diverticules du côlon

I. LE CANCER DU COLON

Les cancers du côlon et du rectum représentent 15 % de toutes les tumeurs malignes et se


placent dans certains pays comme la France au tout premier rang de la pathologie cancéreuse. Cette

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Chirurgie digestive 271
situation se retrouve dans de nombreux pays occidentaux et l’incidence augmente environ de 10 %
tous les cinq ans.

Plusieurs facteurs alimentaires ont été envisagés. Le rôle d’un déficit en fibres alimentaires a
été suggéré dans la pathogénie du cancer du côlon et de certains états pré-cancéreux. Il n’est pas
formellement démontré mais un régime riche en fibres réduit nettement l’apparition de tumeurs
coliques expérimentalement induites chez la souris.

Des études épidémiologiques ont également permis de postuler que la dégradation métabolique
de graisses fécales en hydrocarbures cancérigènes, pouvait se produire sous l’action des bactéries
intestinales. Celles-ci métaboliseraient certains acides biliaires en cancérogènes et cocancérogènes, et
la quantité des graisses alimentaires déterminerait la quantité d’acides biliaires pénétrant dans le côlon,
et par la suite, la flore bactérienne.

L’analyse des corrélations entre l’incidence des cancers coliques et la consommation à


l’échelon national ou régional de certains aliments ou boissons permet de retrouver dans plusieurs pays
une association entre cancer du côlon et consommation de viande de boeuf. Le cancer du rectum
paraîtrait, par contre, plus nettement lié à la consommation de bière (?).

Parmi les facteurs de risque, on peut distinguer :

• l’existence de polyadénomes. La séquence polype-cancer est actuellement confirmée et paraît


obligatoire dans la presque totalité des cas.

• L’influence de l’âge. L’incidence du cancer du côlon s’élève de façon significative à partir de 40 à


45 ans pour doubler toutes les décades et atteindre un maximum à 75 ans. Cette constatation rejoint les
résultats publiés au sujet des polypes. L’âge est également un facteur important dans le pronostic du
cancer recto-colique car l’incidence des métastases lymphatiques s’élève à 70 % chez les malades de
moins de 40 ans et tombe à 40 % chez les sujets ayant plus de 70 ans.
• Le rôle d’une prédisposition génétique est certain pour les polyposes familiales. On doit
souligner également que le risque de cancer colique, chez les parents des malades présentant un adéno-
carcinome intestinal, serait trois fois plus élevé que dans la population générale. Il est possible que des
facteurs génétiques jouent un rôle dans le développement des adénomes et des cancers, mais
l’influence de l’environnement ne doit pas être négligée.

• Les antécédents de cancer colique. Loin d’exclure ou de diminuer toute possibilité d’une
nouvelle localisation colique d’un cancer primitif, ces antécédents multiplient le risque par 3 par
rapport à une population témoin. L’éventualité de cancers primitifs multiples ou successifs doit être
sérieusement redoutée.

• Les maladies inflammatoires intestinales. Le risque est en effet élevé dans la rectocolite
hémorragique et atteint après 20 ans d’évolution 20 à 30 % de cancérisation dans certaines séries. Cette
possibilité paraît être en rapport avec la longueur d’évolution de la R.C.H. et l’étendue de l’atteinte.

Formes anatomo-pathologiques

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Chirurgie digestive 272
La tumeur peut être végétante, infiltrante et ulcérée. Les formes macroscopiques dépendent de
la prédominance d’un de ces 3 caractères: bourgeon, virole, ulcération.

Histologiquement, il s’agit dans 80 % des cas d’adéno-carcinomes, dans 10 à 20 % de


carcinomes colloïdes muqueux, les carcinomes anaplasiques étant les moins fréquents.

L’extension de la tumeur se fait vers la profondeur de la paroi colique vers les chaînes
lymphatiques et vers les viscères voisins, le foie essentiellement. Si l’on considère la notion de temps
de doublement de la cellule cancéreuse, on peut admettre qu’au vingtième doublement la tumeur n’a
qu’un millimètre de diamètre et qu’au 30è doublement elle a 1 cm de diamètre. C’est seulement à
partir de là qu’elle devient visible ou détectable. La vie naturelle du cancer étant limitée à 42 ou 44
doublements, ce qui représente une tumeur de 8 à 16 mm, on voit bien qu’il n’y a pas véritablement de
diagnostic précoce, mais cependant le diagnostic reste utile puisqu’un cancer de 1 cm de diamètre n’a
pas encore envahi les tissus profonds et dans un certain pourcentage de cas n’a pas encore donné de
métastases ganglionnaires. Les cancers du côlon et du rectum ont dans l’ensemble un meilleur
pronostic que le cancer de l’estomac car leur temps de doublement est en moyenne plus long que
l’adéno-carcinome gastrique.

Circonstances de diagnostic

Elles sont nombreuses et dépendent du siège de la tumeur, de sa forme anatomo-pathologique


et du moment où apparaissent les premières manifestations.

Schématiquement, on peut distinguer :

• Les cancers coliques dépistés au cours d’une recherche systématique de polypes ou devant un
hémoccult positif.
Leur nombre peut aller de 1 à 3 pourcent dans une population dont l’âge est supérieur à 45 ans. (La
négativité du test “Hémoccult” ne doit JAMAIS faire éliminer le diagnostic de cancer).

• Les cancers coliques diagnostiqués devant des signes digestifs apparemment banals: constipation
récente, diarrhée récente, douleurs abdominales.

• Les cancers coliques révélés par une altération de l’état général, amaigrissement, hyperthermie
et/ou anémie ferri-prive qu’il ne faut pas systématiquement rapporter à l’éventuelle hernie hiatale ou la
diverticulose colique qui peuvent être souvent associées.

• Les cancers coliques diagnostiqués devant un tableau aigu d’occlusion, de perforation,


d’abcédation, de fistule ou devant la découverte, rare il est vrai, d’une tumeur palpable.

• Les cancers coliques révélés par un gros foie métastatique.

Eléments de diagnostic

Ils sont représentés par le lavement baryté en double contraste et la coloscopie. La découverte
d’une lésion néoplasique doit faire rechercher systématiquement l’existence de polypes ou d’autres

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lésions cancéreuses coliques. Les cancers multiples ne sont pas exceptionnels (2 à 5 % des cas). Toute
image radiologique douteuse implique un contrôle endoscopique obligatoire.

Le bilan doit être systématiquement complété par la recherche de métastases hépatiques


(syndrome rétentionnel anictérique, échotomographie). L’U.I,V. est utile pour rechercher un
envahissement rénal, urétéral ou, exceptionnellement, vésical.

Le dosage de l’antigène carcino-embryonnaire a un intérêt certain dans la surveillance post-


opératoire mais n’a aucune valeur pour le diagnostic.

Les problèmes de diagnostic différentiel se posent avec l’appendicite chez le sujet âgé (cancer
abcédé du côlon droit) et à tout âge avec la sigmoidite diverticulaire (cancer sténosant du sigmoïde).
La présence de diverticules compliqués ne doit JAMAIS faire éliminer un cancer associé.

Pronostic, prévention et détection du cancer colo-rectal

Le pronostic du cancer colique ne connaît guère, d’amélioration significative depuis de


nombreuses années. Les lésions en sont longtemps asymptomatiques et l’apparition des signes
cliniques correspond, malheureusement, à des formations tumorales avec envahissement lymphatique
pendant que les possibilités thérapeutiques sont réduites et le pronostic extrêmement sombre (20 % de
survie à 5 ans). Par contre, si le diagnostic est fait à un stade non invasif, les métastases à distance sont
alors peu nombreuses (environ 4 %) et la survie à 5 ans approche 90 %.

La prévention du cancer concerne les stades initiaux de la tumeur, c’est-à-dire le


polyadénome, et d’une façon générale tous les “polypes”, quel que soit leur degré de dysplasie.

La détection du cancer a pour but de diagnostiquer la lésion au stade muqueux afin d’assurer
aux malades le taux maximal de survie.
Les deux actes prévention et détection s’intriquent souvent dans la mesure où la découverte d’un
cancer peut également faire détecter un polyadénome qui sera traité par polypectomie endoscopique.

La stratégie des explorations, ayant pour but de conduire à la découverte des lésions (en
dehors du dépistage de masse), varie en fonction des circonstances:
- les sujet sans aucun trouble mais se présentant à la consultation parce qu’ils ont été
sensibilisés par une campagne d’information peuvent être explorés initialement par une
sigmoïdoscopie;
- les sujets présentant des symptômes intestinaux alarmants (rectorragies, syndrome rectal)
ou plus banals (colopathie fonctionnelle) doivent être explorés par coloscopie “complète” si
l’hémorragie est le signe d’alarme, ou par la pansigmoïdoscopie et le lavement baryté en double
contraste dans les autres cas;
- les sujets à risque élevé ayant présenté une lésion tumorale colique doivent être étroitement
surveillés: coloscopie complète après la découverte de tout adénome puis surveillance à intervalle
réguliers de 3 à 5 ans (endoscopie et/ou radiologie); coloscopie complète post-opératoire chez un sujet
opéré n’ayant pas été exploré endoscopiquement avant l’intervention et surveillance coloscopique
annuelle pendant les 5 premières années qui suivent l’intervention pour tous les opérés de cancers
coliques (ensuite tous les 3 ans)

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Chirurgie digestive 274
- les sujets à très haut risque doivent subir une coloscopie complète une fois par an tant qu’ils
n’ont pas été soumis à une colectomie totale.

Traitement du cancer du côlon

Le traitement du cancer colique est essentiellement chirurgical: hémicolectomie, ou résection


colique segmentaire en un temps qu’en deux temps. L’efficacité de la chimiothérapie actuellement
disponible est très limitée et il faut savoir qu’appliquée à une dose efficace, elle expose toujours le
malade à un risque toxique, surtout médullaire.

L’administration de 5 F.U. par voie intraveineuse a pu, dans certains cas, assurer une régression
transitoire du volume tumoral, il n’a jamais été démontré qu’elle augmente la durée de survie.

Tout malade ayant été opéré d’un cancer colo-rectal doit être soumis à une surveillance
attentive: coloscopie tous les ans au cours des 5 premières années après l’intervention. L’intérêt du
dosage de l’antigène carcino-embryonnaire peut, ici, être souligné en tant que critère de surveillance
post-opératoire.

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CANCER DU RECTUM

Plan

I. Définition
II. Gneralites
III. Anatomie pathologique
IV. Propagation
V. Clinique
VI. Bilan pronostic thérapeutique
VII. Traitement

C’est un cancer qui a beaucoup bénéficié de la chirurgie. La radiothérapie n’a pas eu les
résultats que l’on attendait.

C’est le plus fréquent des cancers digestifs. C’est un des meilleurs cancers digestifs: il est
satisfaisant et de bon pronostic s’il est dépisté et traité précocement.
Souvent hélas les malades viennent consulter assez tardivement. L’idéal serait le dépistage
systématique.

Cancer de l’ampoule rectale

Les cancers du rectum représentent 60 % de l’ensemble des cancers recto-coliques. Comme ceux du
côlon, ils se développent, à partir de polyadénomes bénins.
La prévention des cancers du rectum est donc possible: il suffit pour cela de rechercher
systématiquement l’existence de polypes du rectum et de les enlever par voie endoscopique. Une telle
tentative a été réalisée par Gilbertsein: 18 000 personnes âgées de plus de 45 ans (risque élevé) ont été
suivies durant 25 ans par des rectoscopies périodiques. Aucun cancer invasif du rectum n’est survenu.
Mais ceci pose le problème général du dépistage des cancers. La fréquence de cette affection, la
simplicité des investigations à mettre en oeuvre justifient une telle tentative.

I. DEFINITION

Le cancer du rectum comprend :


- le cancer de l’ampoule rectale comprenant deux parties:
- haute: le traitement est la résection
- basse: le traitement est l’amputation.

- le cancer de l’anus de moins bon pronostic


- le cancer de la charnière recto-sigmoïdienne identique à un cancer du sigmoïde.

Les lésions, le pronostic et le traitement sont différents pour chacun d’eux.

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Chirurgie digestive 276
Le cancer de la marge de l’anus est un cancer cutané.

GENERALITES

1. Anatomie

Le rectum :

- est situé en partie sous le péritoine


- est entouré totalement d’une gaine fibreuse, expansion de la gaine hypogastrique. Cette
gaine est une barrière à l’extension des lésions.

2. Sexe

Aussi souvent chez :


- la femme que chez
- l’homme.

3. Lésions

- Le cancer est très souvent primitif


- Parfois il survient sur des lésions secondaires :
- Polype
- Tumeur villeuse
- Recto-colite hémorragique ou ulcéreuse.

I. ANATOMIE PATHOLOGIQUE

L’aspect macroscopique d’un cancer du rectum est en relation avec son stade évolutif.
Schématiquement , tant que le polype reste bénin, mais aussi au début de dégénérescence, la lésion est
ou reste bourgeonnante. Le développement du cancer par des phénomènes d’ischémie et de nécrose
tissulaire creuse la tumeur en son sommet et lui donne un aspect ulcéro-bourgeonnant. Lorsque ce
processus s’accentue, la lésion s’aplanit, infiltre et creuse la musculeuse rectale et réalise une forme
ulcérante. L’aspect macroscopique et la taille de la lésion sont donc un bon témoin du stade évolutif;
plus la lésion est d’aspect polypoïde, plus elle est petite et moins le risque d’extension ganglionnaire
est élevé.

A. CANCER DE L’AMPOULE RECTALE

1. Siège

Les tumeurs siègent entre le Douglas et le canal anal.

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Chirurgie digestive 277
1. Aspects : 3 types de tumeurs

a. Tumeur ulcérée: la plus fréquente

- sa base s’étend sur 1 à 2 cm de hauteur


- sa surface est friable, irrégulière, bourgeonnante.

b. Tumeur végétante.

- sa base est plus ou moins large


- sa taille est variable
- elle diffère peu du polype.

c. Tumeur ulcéro-végétante

- cylindrique, typique
- cylindrique atypique
- colloïde ou mucoïde
- mélanome (rare)

B.- CANCER SUS-AMPULLAIRE

1. Siège
- au-dessus du Douglas

1. Aspect

- Tumeur sténosante: c’est un squirrhe ou un épithélioma à réaction fibreuse périphérique


importante. Le stroma détermine la sténose.
- Tumeur annulaire

1. Types histologique: idem

C. CANCER DU CANAL ANAL

1. Siège: au niveau du sphincter anal


2. Aspect: 3 types de tumeurs
a- Tumeur ulcérée : la plus fréquente
- sous forme de fissure, le plus souvent
b- Tumeur végétante: faux aspect de marisque
c- Tumeur ulcéro-végétante.
1. Types histologiques: Idem

I. PROPAGATION

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Trois variétés selon les localisations de la tumeur sont à envisager.

A. PROPAGATION LYMPHATIQUE

1. Normalement: il y a 3 groupes lymphatiques:


a) Groupe supérieur:
- les ganglions du hile du rectum (groupe principal)
- les ganglions mésentériques inférieurs
- les ganglions pré-aortiques.
b) Groupe hypogastrique
c) Groupe inguino-crural

1. Le cancer de l’ampoule rectale se propage


a- aux ganglions para-rectaux
b- aux ganglions hypogastriques
c- aux ganglions du groupe supérieur

1. Le cancer de la charnière recto-sigmoïdienne se propage au groupe supérieur.


2. Le cancer anal se propage
a- aux ganglions hypogastriques
b- aux ganglions inguino-cruraux par les lymphatiques du périnée. C’est ce qui en fait
la gravité.

B. EXTENSION LOCALE

1. Le cancer de l’ampoule rectale s’étend après avoir perforé la gaine fibreuse.


a. Latéralement
- au releveur
- à la graisse sous-péritonéale
- aux muscles de la paroi

a. En arrière :
- au sacrum
- au coccyx

a. En avant: au Douglas puis

- Chez la femme :
- au vagin
- à la cloison recto-vaginale
- à l’utérus
- Chez l’homme :
- à la prostate
- aux vésicules séminales
- à l’urètre

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1. Le cancer anal s’étend de plus :
- au sphinter anal
- à la graisse de la fosse ischio-rectale
- à la fesse
- à la peau

1. Le cancer sus-ampullaire reste longtemps mobile non adhérent

Dans les formes évolutives il s’étend:


- au promontoire sacré
- à l’utérus chez la femme
- à la vessie chez l’homme.

A. METASTASES A DISTANCE

1. La plus fréquente est la métastase hépatique


2. Plus rarement :
- poumons
- os.

I. CLINIQUE

Circonstaces de diagnostic

En pratique, le diagnostic de cancer du rectum se pose devant 3 types de malades correspondant à des
stades évolutifs différents.

“STADE DES RECTORRAGIES”

Le motif de consultation est univoque: des rectorragies isolées sans caractères spécifiques. Ce
signe, qui devrait obligatoirement motiver une rectoscopie, est trop souvent négligé par les malades et
attribué à un saignement hémorroïdaire. Un tel piège doit être systématiquement évité par le médecin
même devant des hémorroides congestives et hémorragiques. L’ “association” cancer du rectum et
hémorroïdes est très fréquente.

“STADE HABITUEL DES FAUX BESOINS”

Il correspond au stade ultérieur.


Aux rectorragies s’associe alors une symptomatologie liée aux volumes de la tumeur: sensation de
plénitude rectale, faux besoins et émission de glaires: ces troubles constituent le syndrome rectal
hautement évocateur. On retrouve généralement dans les mois qui précèdent des rectorragies isolées
négligées.

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“STADE DEPASSE”

Aux deux stades précédents succède une phase évoluée où la symptomatologie traduit les
conséquences générales du cancer (altération de l’état général), l’extension régionnale (douleurs à
type de sciatique par envahissement pelvien) et l’extension à distance (foie métastatique, adénopathie
de Troisier).

A. Circonstances de découvertes

Par ordre de fréquence elles sont multiples:

a. Cas typiques
- Sensations douloureuses
- Pesanteurs anales ou pelviennes
- Ténesme
- Troubles de la défécation
- Faux besoins
- Épreintes douloureuses

Ce sont des signes pour lesquels le malade ne vient consulter que tardivement.

- Hémoragies: il faut faire préciser leurs caractères ce qui est essentiel:

L’hémorragie précède ou enrobe les selles alors que dans les hémorroïdes elles succèdent à
l’exonération intestinale.

Plus rarement :

- Ecoulements anomaux :
- glaireux
- purulents
- Troubles du transit :
- diarrhée
- constipation
- alternance de diarrhée et de constipation.

Ces troubles sont d’apparition récente et c’est leur caractère principal.

a. Cas atypiques :
- Découverte fortuite
- hémorroïdes
- fissures
- fistules
- Symptomatologie fonctionnelle abdominale :
- douleur vague
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- flatulence
Ce sont des formes vicieuses n’orientant pas spécialement le diagnostic vers le cancer du
rectum. C’est un examen complet qui le découvrira.
- Altération de l’état général chez un vieillard sans explication
- asthénie
- anoréxie
- amaigrissement
- Etat anémique inexpliqué
- Etat fébrile sans étiologie

Ces signes peu évocateurs doivent faire pratiquer un examen général et un toucher rectal.

1. L’examen

Se compose de 4 temps essentiels :


- toucher rectal associant si possible anuscopie
- rectoscopie
- biopsie
- lavement baryté
a. Toucher rectal : c’est l’examen de base
- Technique: successivement on examine le malade dans les positions suivantes:
- Position genu pectorale
- Décubitus dorsal avec flexion des membres inférieurs sur le bassin
- Décubitus latéral.

- Il précise le type de la lésion :


- tumeur ulcérée
- tumeur végétante
- tumeur ulcéro-végétante

- Il trouve les caractères fondamentaux (++++): de la tumeur qui permettent de soupçon-


ner le diagnostic. Il s’agit d’une lésion :
- Indolore
- Indurée
- Hémorragique au toucher (+++)

- Il localise la tumeur :
- En hauteur par rapport à l’anus. Cela a une grande valeur thérapeutique.
- En surface
- Par ses limites.

- Enfin, il recherche la mobilité de la tumeur, si elle est:


- fixe : c’est un élément de gravité
- mobile.

b- La rectoscopie que tout médecin devrait savoir faire:


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- Technique
- se fait sur un rectum évacué
- avec une technique parfaite
- Valeur

- Préciser le type de la lésion


- Renseigner sur l’état de la muqueuse
- Situe la tumeur :
- en hauteur
- sur les parois,
- Permet :
- la biopsie (+++)
- des photos

- Défauts
- Technique inadéquate
- Refoulement de la paroi qui ne permet pas de mesurer la hauteur
- Peut cacher une lésion sus-sphinctérienne.

c.La biopsie
- Permet un examen histologique
- Résultats
- La valeur est capitale si le résultat est positif
- La valeur est nulle si le résultat est négatif.

Il faut en ce cas répéter la biopsie au moindre doute.

d. Le lavement baryté
- Technique
- Sur rectum évacué avec préparation parfaite
- Avec plusieurs incidences
- Images:
- Soit image de lacune
- Soit aspect marécageux
- Soit image de lacune circulaire.

BILAN PRE-OPERATOIRE ET PRONOSTIC

En pratique, le bilan pré-opératoire d’un malade porteur d’un cancer du rectum est centré sur
deux axes de recherche.

• Existe-t-il une ou plusieurs autres localisations tumorales sur le cadre colique ? Cette éventualité
fréquente doit être recherchée soit par le lavement baryté en double contraste, soit par une coloscopie,

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• Existe-t-il des métastases viscérales (en particulier hépatique) (phosphatase alcalines, gamma GT,
parfois laparoscopie) ? Leur présence contre-indique une radiothérapie pré-opératoire et peut être
même un geste chirurgical mutilant. Dans certains cas, une UIV peut être utile.

B. CANCER RECTO-SIGMOIDIEN

1. Circonstances de découvertes

a. Souvent il s’agit de troubles du transit :


- Constipation:
- non pas tellement une constipation ancienne
- mais surtout une constipation d’installation récente à 50 ou 60 ans c’est évocateur.

- Diarrhée :
- Elle amène souvent à consulter.
- Alternance de diarrhée et constipation.

a. Parfois un trouble fonctionnel abdominal:


- Un ballonnement inexpliqué post-prandial ou permanent
- Une flatulence d’apparition récente.

a. Plus rarement une hémorragie rectale.


- survenue d’une petite hémorragie
- ou selles enrobées de sang.

1. Examen

a- Le toucher rectal est à faire systématiquement mais il n’apporte rien au diagnostic car le
doigt ne peut atteindre la charnière recto-sigmoïdienne.

a- Le lavement baryté montre des images de sténose :


- siègeant sur la charnière rectosigmoïdienne
- relativement limitée : 2 à 3 cm
- excentrée
- aux bords irréguliers.
b- Rectoscopie: sigmoïdoscopie
- Montre la lésion
- Permet une biopsie qui apporte le diagnostic.

C. CANCER DU CANAL ANAL

“Il fait parler de lui très tôt “: Mais il prend un aspect banal qui a tendance à ne pas alarmer le
médecin.

1. Signes :
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a- Il est douloureux, très douloureux au moment de l’exonération (++)
b- Il donne la sensation de corps étranger dans le rectum
c- Il s’accompagne de rectorragies.

1. Examen
a- Une ulcération
- dure
- douloureuse
- saignante.
b- Une fissure indurée
c- Une marisque (hémorroïde thrombosée) il s’agit alors d’une forme:
- végétante
- dure

1. En présence de ces 3 formes: il faut demander au moindre doute un examen histologique.

V.- BILAN – PRONOSTIC THERAPEUTIQUE

Doit comprendre un certain nombre de facteurs:

A – PRECISER LA DISTANCE DU POLE INFERIEUR DE LA TUMEUR A L’ANUS

Car un cancer accessible au doigt nécessite une amputation.


Un cancer non accessible: une résection.

B – APPRECIER L’EXISTENCE DU CANCER :

1. En profondeur:

- une tumeur mobile :


- opération aisée
- bon pronostic
- une tumeur fixe :
- opération délicate
- moins bon pronostic

1. Antérieure :
- cloison recto-vaginale
- isthme utérin, urètre
- prostate, vésicule séminale
- vessie (cystoscopie)
2. Postérieure : rare, urétère (urographie).

C- RECHERCHE DES METASTASES :


- Scintigraphie hépatique
- Radiographie pulmonaire
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D- APPRECIER L’ETAT GENERAL

- Tare
- Obésité
- Infection

VI – TRAITEMENT (plan)

Le traitement du cancer de l’ampoule rectale est essentiellement chirurgical, toutefois plusieurs


moyens thérapeutiques peuvent être discutés en fonction de la situation et de l’étendue de la lésion.

La radiothérapie externe, si elle est utilisée de façon isolée, doit être considérée comme une
thérapeutique à visée palliative. Elle permet, chez des malades inopérables, de réduire le volume
tumoral, de diminuer la symptomatologie fonctionnelle et peut-être de ralentir l’évolution. Elle devient
à visée curatrice si elle est associée à la chirurgie et réalisée en pré-opératoire. Il n’est pas évident
qu’elle permette d’augmenter les chances de guérison, mais elle réduit la fréquence des récidives
locales, en particulier chez l’homme, surtout lorsqu’il s’agit d’une tumeur bas située (durée trois
semaines, dose totale 3 000 rads).

Traitements locaux. Ils sont représentés par une tumorectomie, réalisée soit par électro-
coagulation, soit par radiothérapie de contact, soit même par exérèse chirurgicale trans-anale. Cette
tumorectomie comporte une grave incertitude: n’existe-t-il pas d’éventuelles métastases ganglionnaires
au niveau de hile rectal qui pourraient être enlevées par une exérèse chirurgicale ? Les défenseurs de
ces méthodes estiment qu’une telle éventualité est rare (6 à 8 %), et qu’elle est compensée par
l’absence de mortalité opératoire. Cet argument est difficilement acceptable et l’indication de ces
méthodes est essentiellement fonction de l’âge et de l’état général des malades.

Par contre, les pourcentages de survie à 5 ans après les procédés locaux sont comparables à
ceux de la chirurgie classique lorsque l’indication est valable: tumeur de petite dimension, dont le
calibre est inférieur à 3 cm, d’aspect macroscopique bourgeonnant, car il s’agit alors de lésions peu
évoluées pour lesquelles le risque d’extension ganglionnaire est relativement faible.

Les techniques qui permettent d’enlever la tumeur et son socle musculaire (électro-exérèse,
électro-coagulation) permettent de s’assurer de l’absence d’envahissement de la musculeuse, ou de
préciser la situation inverse qui imposerait une amputation secondaire.

Traitement chirurgical
Il est chirurgical et consiste en deux opérations :
- la résection
- l’amputation avec anus iliaque définitif

A- CAS GENERAL

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1. Cancer recto-sigmoïdien
- résection par voie abdominale

1. Cancer ampullaire haut


- résection par voie abdominale

1. Cancer ampulaire bas


- amputation par voie abdomino-périnéale
- en 1 ou 2 temps
- avec 1 ou 2 équipes

1. Cancer du canal anal


- amputation large par voie abdomino-périnéale
- radiothérapie pré et post-opératoire

Les techniques chirurgicales utilisées dans le traitement des cancers du rectum sont nombreuses
et leur choix dépend pour l’essentiel du siège de la tumeur.

• Les cancers du tiers inférieur du rectum, situés de 0 à 6 cm de la marge de l’anus, ont une double
extension lymphatique, vers la chaine hémorroïdale supérieure, mais aussi latéralement vers les
hémorroïdales inférieures. Leur traitement relève systématiquement de l’amputation abdomino-
périnéale. L’exérèse, large, enlève le rectum, l’anus, l’appareil sphinctérien et la peau de la marge de
l’anus. Elle est, en fait, une pelvectomie postérieure. Elle est suivie d’un anus iliaque définitif. Cette
intervention large et mutilante, outre la colostomie, détermine des troubles génitaux et urinaires. La
survie globale à 5 ans est de l’ordre de 50 %.

• Les cancers du tiers supérieur du rectum (de 11 à 15 cm de la marge de l’anus) ont une extension
lymphatique ascendante, exclusivement vers la chaîne hémorroïdale supérieure. Ils sont accessibles par
laparotomie. On peut par cette voie, réaliser l’exérèse de la lésion et le rétablissement de la continuité.
Cette intervention qualifiée de résection antérieure consiste, en fait, à élargir aux cancers du rectum le
traitement habituellement utilisé pour les lésions sus-jacentes.

• Les cancers du tiers moyen (6 à 11 cm) sont ceux qui posent le plus de problèmes d’indication
thérapeutique.
- Ils sont parfois traités comme les lésions sus-jacentes par résection antérieure; mais cette solution
n’est pas satisfaisante sur le plan carcinologique car, du fait de l’étroitesse du bassin et de la
nécessité de conserver un segment inférieur suffisant pour réaliser une anastomose, la section passe
trop près de la tumeur, ce qui explique les mauvais résultats carcinologiques. Cette méthode doit
être rejetée.
- Ils sont souvent traités comme les lésions sous-jacentes par amputation du rectum; mais
l’amputation est inutilement mutilante pour ces lésions qui peuvent être traitées par un procédé
conservateur avec des résultats carcinologiques identiques.

Le procédé conservateur peut être :


• soit la résection abdomino-trans-anale (type Babcok), mais les résultats fonctionnels sont souvent
décevants.
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Chirurgie digestive 287
• Soit la combinaison d’une voie abdominale et d’une voie postérieure, la voie postérieure trans-
sphinctérienne permettant de réaliser une anastomose colo-anale (technique dérivée des interventions
de Localio et York-Mason) les résultats fonctionnels sont excellents.

COMMENT REALISER L’ELECTRO-RESECTION


TRANSANALE D’UNE TUMEUR ?

Après dilatation anale lorsque la tumeur est directement accessible, une électro-résection peut
être réalisée. On peut également extérioriser la tumeur par traction sur les fils implantés tout
autour (technique du parachute), ou bien on peut attirer la tumeur vers la marge anale par
dissection d’un “lambeau tracteur”, c’est à dire d’une bandelette muqueuse et musculaire
commençant à la marge anale et remontant jusqu’au pôle supérieur de la lésion.

B – DANS CERTAINS CAS

On fera la résection avec un anus iliaque temporaire pour éviter que les sutures ne lâchent.

CONCLUSION :

Le cancer du rectum est de bon pronostic, mais l’amélioration des résultats ne se fera qu’au
prix d’un dépistage plus précoce de la tumeur. L’idéal actuellement serait le dépistage
systématique comme pour le cancer du col utérin.

III. LE PROLAPSUS DU RECTUM

C’est une maladie dans laquelle la paroi entière du rectum descend à travers l’anus. Ce
prolapsus doit être différencié du prolapsus muqueux qui est particulièrement commun au niveau des
hémorroïdes.

La raison du prolapsus rectal s’apparente à une sorte d’invagination du rectum à travers l’anus
mais le facteur favorisant est un déficit dans les structures qui supportent le rectum.

Quelles sont ces structures ?

Un mésentère postérieur, des replis péritonéaux, des attachements fasciaux et les muscles
releveurs de l’anus. Dans la portion antérieure, les muscles pubo-rectaux établissent, dans les
conditions de repos, un angle aigu entre la portion inférieure du rectum et l’anus, en tirant sur l’anus en
antérieure. Ceci entraîne une espèce de fermeture pneumatique qui contribue à la continence. On le
sait, lors de la défecation, la contraction de ces muscles amène l’anus en continuité avec le rectum. Par
conséquent, lorsqu’il y a une atteinte acquise de l’activité des muscles pubo-rectaux, l’angle de
fermeture naturelle disparaît et rien ne s’oppose à un éventuel prolaps.

Présentation clinique.

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Chirurgie digestive 288
Dans la forme la plus complète, le diagnostic est évident: on voit une masse qui fait protrusion
à travers l’anus. Dans les cas initiaux, le prolaps peut ne pas être visible à l’inspection seule, il faut
demander au patient de faire un effort de défécation pour voir apparaître le prolaps.

Dans la position prolabée, la muqueuse devient irritée, elle saigne facilement, elle secrète du
mucus. Du fait de l’élargissement continuel de l’anus, on a également une incontinence quasi
constante. Outre la démonstration par l’augmentation de la pression intra-abdominale de la présence du
prolapsus, on peut apprécier l’importance de la faiblesse de la musculature pelvienne et de l’anneau
sphinctérien par toucher rectal, en demandant au patient de contracter son sphincter. On peut ainsi se
rendre compte de la diminution de la force musculaire sphinctérienne.
Diagnostic différentiel.

Essentiellement, les formes frustes de prolaps rectal doivent être différenciées des prolaps
purement hémorroïdaires.

Complications.

La muqueuse prolabée montre des signes de friabilité superficielle, d’ulcération, d’oedème.


Exceptionnellement, le prolaps sera irréductible. La gangrène de la paroi antérieure du rectum est une
complication possible, mais relativement rare.

Traitement.

Le premier point est de décider si le patient est dans un état général suffisant pour justifier un
traitement chirurgical.

Quand on a affaire à des patients à bons risques, la meilleure façon est d’aborder en trans-
abdominal et de mobiliser le rectum.
On entre dans l’espace présacré, postérieur par rapport au rectum, on tire doucement sur le rectum et
une fois qu’il est réintégré, il est profondément ancré à la paroi antérieure du sacrum.

Divers procédés ont été testés: de toute façon, il en résulte toujours une fibrose périrectale qui
contribue à ancrer le rectum en bonne position, en avant du sacrum.

Une autre technique consiste à faire une résection du rectum avec une anastomose antérieure
basse entre le côlon et la partie tout inférieure du rectum. Certains proposent également de faire la
résection recto-colique par voie périnéale, en coupant la jonction cutanéo-muqueuse et en tirant sur
l’excès de rectum et de côlon. On observe à peu près 85 % de succès par ces diverses techniques, mais
il faut dire que, si le patient est incontinent avant l’intervention, il le reste après celle-ci.

L’ULCERE SOLITAIRE DU RECTUM.

C’est une lésion rare qui peut se voir en associant avec le prolapsus complet du rectum. Le
patient se plaint d’émission de mucus et de sang par le rectum. L’ulcère est typique en apparence,
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généralement unique. Il se développe sur la paroi antérieure du rectum et à 5-10 cm du bord anal. Une
bordure d’hyperémie entoure l’ulcère, avec une fibrose associée et une nécrose à la base de la lésion.
Cet ulcère bénin doit être différencié du carcinome du rectum, de la recto-colite hémorragique, de la
maladie de Crohn,-

Le traitement de cette affection est purement médical.

IV LES DIVERTICULES DU COLON

Les diverticules peuvent se rencontrer à n'importe quel endroit du tube digestif mais 95 %
patients qui ont un diverticule présentent un sigmoïde ayant un caractère diverticulaire. La maladie
diverticulaire est assez caractéristique des populations occidentales. Au contraire, ce qu'on voit en
Asie, en Extrême-Orient, ce sont des lésions de diverticule isolé du côlon droit ou du caecum. La
pathogénie des diverticules implique des défects dans la paroi du côlon et une augmentation de la
pression dans la lumière, appliquée de dedans en dehors sur la séreuse. Les défects dans la paroi
correspondent au point d'entrée des artérioles qui nourrissent le côlon car, à cet endroit, il y a une
interruption de la couche circulaire musculaire. Enfin, les études manométriques montrent en effet qu'il
y a de très hautes pressions développées dans le côlon suite à l'ingestion de repas ou à l'administration
de stimuli pharmacologiques comme la néostigme par exemple.

1. LA DIVERTICULOSE

La diverticulose se définit par la présence de plusieurs petits diverticules.

Présentation clinique

La diverticulose, par définition, reste asymptomatique. Elle est détectée de façon fortuite lors
d'un lavement baryté. Lors de cette découverte fortuite, la diverticulose ne peut révéler sa présence que
par des complications telles que l'hémorragie et la diverticulite dont nous allons parler. Il faut admettre
toutefois que le syndrome dit du côlon irritable correspond souvent à une diverticulose non encore
compliquée. Les épisodes douloureux de l'hypochondre gauche avec alternance de constipation et de
diarrhée sont typiques de la présentation de l'individu avec une diverticulose mais ce ne sont pas les
diverticules qui sont responsables de cette symptomatologie.

Histoire naturelle

15 à 40 % des patients avec une diverticulose diagnostiquée développeront plus tard diverticulites ou
hémorragies.

2. LA DIVERTICULITE

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Chirurgie digestive 290
La diverticulite aiguë du côlon résulte de la rupture d'un diverticule et devrait donc être
appelée de façon plus précise une péri-diverticulite. La phase de diverticulite vraie, c'est-à-dire la
phase durant laquelle le diverticule est atteint par l'infection sans être rompu, n'a pas d'expression
clinique. Il faut forcément qu'il y ait une rupture partielle de la paroi externe du diverticule infecté pour
que la micro-perforation donne lieu à une inflammation localisée dans la paroi colique et dans les
tissus para-coliques. Autrement dit, il faut qu'il se produise une péri-diverticulite qui donne les
symptômes dont nous parlerons. Une perforation plus importante peut provoquer une contamination
massive par les bactéries et donner lieu à un abcès, lorsque le phénomène peut se localiser, voire à une
péritonite généralisée, dans les autres cas. L'abcès peut être confiné par les structures adjacentes ou
bien il peut grandir et se disséminer ailleurs. Il peut se résorber sous l'effet du traitement antibiotique.
Il peut se drainer spontanément dans la lumière de l'intestin ou dans un viscère adjacent pour faire une
fistule. Enfin, il peut être nécessaire de le draîner chirurgicalement. Dans les cas les plus graves,
l'abcès peut se rompre dans le péritoine libre, provoquant ainsi une péritonite purulente. Au moment
où le diverticule enflammé se rompt, l'orifice de communication du diverticule avec la lumière du
côlon est généralement fermé. Dans certains cas, cette communication reste ouverte et nous avons
alors une diverticulite communicante qui est capable de provoquer une péritonite stercorale avec
dispersion des matières fécales dans la cavité péritonéale.

Présentation clinique

L'attaque de péri-diverticulite consiste en une douleur abdominale localisée, modérée à sévère,


qui en situation sigmoïdienne évoque une appendicite gauche. Parfois encore, la douleur est au-dessus
du pubis ou dans le quadrant inférieur droit. On note une constipation ou au contraire une
augmentation de la fréquence des exonérations. Nausées et vomissements, hémorragies occultes ou
massives sont présentes.

Forme compliquée: une perforation d'emblée dans la cavité péritonéale peut provoquer les
signes d'une péritonite généralisée. D'autres fois, au contraire, la péri-diverticulite peut passer
absolument inaperçue et évoluer directement jusqu'au stade des complications tardives si bien que le
premier élément qui est par exemple le développement d'un abcès dans l'aîne ou, encore, nous avons
un tableau de fistule colo-vésicale sans histoire antérieure. Le diagnostic différentiel, lorsque l'épisode
douloureux est absent, doit se faire avec la néoplasie du sigmoïde ou encore l'annexite.

Données radiologiques

Sur un abdomen à blanc sans préparation, on peut voir de l'air libre dans l'abdomen en cas de
perforation. Si l'inflammation est localisée, on a un tableau d'iléus. On s'abstiendra de demander un
lavement baryté car le passage de baryte par d'éventuels orifices de perforation aurait des
conséquences dramatiques. En dehors de l'attaque de perforation, le lavement baryté pourra mettre en
évidence:
- une cavité abcédée à l'extérieur de la paroi colique qui communique avec la lumière,
- un abcès intramural qui provoque une indentation particulière de la baryte.
- Une compression extrinsèque par une masse para-colique
- Des sinus intramuraux
- Une fistule

Examens paracliniques:
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L'utilisation du sigmoïdoscope rigide se heurte ici à une difficulté technique à cause de la


fixation inflammatoire du recto-sigmoïde au tissu avoisinant, l'angulation aiguë qui en résulte empêche
le passage du sigmoïdoscope rigide. On utilisera donc la colonoscopie à fibre souple une semaine après
l'attaque aiguë.

Complications.

Les complications possibles de la péri-diverticulite sont la perforation en péritoine libre, la formation


d'un abcès, l'obstruction partielle du côlon et la fistulisation dans la vessie ou dans l'utérus ou le vagin.

Traitement

a) Traitement d'attente: les patients qui ont des signes de péri-diverticulite aiguë doivent être
hospitalisés. Ils doivent être laissés à jeûn. Une sonde gastrique est mise en place. Une rééquilibration
hydrolytique est entreprise et des antibiotiques à large spectre sont donnés par voie intra-veineuse. On
donne des analgésiques non morphiniques puisque la morphine augmente la pression dans le côlon et
est donc susceptible d'augmenter les phénomènes de perforation. A mesure que l'amélioration se
précise, le patient peut reprendre une alimentation orale.
b) Traitement chirurgical: le traitement chirurgical est requis s'il y a des complications aiguës telles
que péritonite localisée ou généralisée sans amélioration sous traitement médical (qui fait craindre le
développement vers un abcès). L'obstruction colique et le développement d'une fistule requièrent
également un traitement chirurgical mais rarement durant l'épisode initial de péri-diverticulite. Lors de
la laparotomie, on peut trouver un liquide péritonéal louche à franchement purulent.

Sauf dans les cas de perforation libre avec péritonite stercorale, on peut ne pas trouver le point
de la perforation réelle. Une cavité abcédée peut être cachée par le côlon ou le grand épiploon. Il peut
être nécessaire de mobiliser le sigmoïde pour la voir. On détermine ainsi:
- l'importance de l'inflammation colique
- l'importance de la péritonite
- l'état général du patient

Trois stratégies chirurgicales se présentent alors à nous :

1. Résection primaire avec anastomose colo-colique. Ceci est beaucoup plus confortable à priori
pour le patient mais comporte un risque de lâchage secondaire de suture qui est très grand

1. Résection d'emblée sans anastomose. On fait au fond l'équivalent d'une opération de


Hartmann. On réséque le gâteau sigmoïdien, l'anse d'amont est mise à la peau en colostomie et l'anse
distale est fermée en bout aveugle. On peut faire la réintégration intestinale dans un second temps.

1. Opération en trois temps:

Premier temps: on fait une colostomie en amont de la zone abcédée avec les diverticules pour
mettre au repos l'abcès sigmoïdien et amèner son refroidissement.

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Deuxième temps: par une laparotomie, on réséque l'ensemble de la zone fistuleuse abcédée
avec rétablissement de la continuité par anastomose colo-colique

Troisième temps: on ferme la colostomie d'amont.

Dans certains cas chez des patients en mauvais état général, on peut se limiter à drainer l'abcès
vers l'extérieur mais, quelle que soit la séquence choisie, le traitement radical des complications de
diverticulite implique toujours la résection de la portion du côlon qui est envahie par les diverticules en
question, c'est-à-dire le sigmoïde et éventuellement la partie distale du côlon descendant.

Histoire naturelle.

A peu près 25 % des patients admis à l'hôpital pour péri-divericulite aiguë nécessitent un
traitement chirurgical. La mortalité opératoire de ces patients est de l'ordre de 5 %.

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9. CHIRURGIE DES HYPERTENSIONS PORTALES

- La chirurgie des HPT est une chirurgie symptomatique.


- Sur l’origine des HPT nous sommes désarmés au point de vue chirurgical et ce cours
s’adressera plutôt à leurs manifestations:
- Hémorragies digestives et leur pronostic vital
- Syndrome ascitique.

PHYSIO-PATHOLOGIE

Le système porte est un système clos où le sang artériel se trouve déversé à forte pression
provenant :

- du tronc coeliaque
- des mésentérique inférieure et supérieures.

L’ensemble de cet apport sanguin artériel est drainé par un système veineux qui se rassemble
en un tronc unique qui se ramifiera à nouveau dans le foie.
On conçoit qu’un obstacle sur les branches principales, le tronc porte lui-même, ou dans le foie,
provoque très rapidement une hypertenstion veineuse en amont.
Cet obstacle peut se trouver situé à 3 niveaux :

1. Extra-hépatique ou pré-hépatique:
- Les branches de la veine porte (VP) et particulièrement la veine splénique, ou le tronc
porte lui-même seront intéressés dans ce cas.
- Les causes de l’obstacle peuvent être :
- congénitales : par aplasie
par duplication de la VP
- acquises : pancréatite chronique.

2- Intra-hépatique :
a) Pré-sinusoïdal :
Bilharziose, avec des cellules hépatiques à peu près intactes, la sclérose porte intéresse les
ramifications de l’espace porte et les sinus.
a) Persinusoïdal et post-sinusoïdal :
Dans les cirrhoses communes la sclérose englobe le sinus rameux sus-hépatique et surtout
les nodules de régénération viennent comprimer les veines sus-hépatiques.
Donc altération directe de l’hépatocyte par atteinte toxique ou par les séquelles de l’hépatite
virale, d’une part et d’autre part l’arrivée du sang porte et du sang artériel hépatique dans
les sinus étant situé en amont de l’obstacle provoque une stase avec oedème, anoxie,
contribuant à altérer l’hépatocyte. Le pronostic de cette manifestation est plus grave et le
risque thérapeutique plus grand.

3. Supra-hépatique

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Classique syndrome de Budd-Chiari mais très rare.

Les données de la manométrie splénique et de la pression sus-hépatique libre et bloquée permettent


d’étudier les modifications suivantes :

a) Pour un obstacle pré-hépatique: pression splénique: élevée


pression sus-hépatique: normale
a) Dans les cirrhoses communes ou le syndrome de Budd-Chiari
Concomitante de la pression sus-hépatique bloquée qui reflète la pression intra-sinusoïde et de la
pression splénique.

MANIFESTATIONS

I. HEMORRAGIES DIGESTIVES
Qui mettent en jeu le pronostic vital d’avantage par rupture de varices oesophagiennes que par
méïopragie capillaire.

Mécanisme de formation des varices oesophagiennes:

a) Anastomoses porto-caves
Du point de vue anatomique, elles sont relativement peu nombreuses et l’examen d’un
schéma met en évidence la primauté des voies veineuses oesophagienne et para-
oesophagienne.
- les veines coronaires stomachiques,
- les vaisseaux courts de l’estomac,
- la veine gastrique postérieure
- les vaissseaux cardio-tubérositaires
relient directement les veines oesophagiennes.

Les autres anastomoses ont peu de valeur :


- soit parce qu’elles sont exceptionnelles comme la voie ombilicale,
- soit parce qu’elles sont de faible débit : comme les anastomoses entre les V.hémorroïdales
supérieures, les moyennes et inférieures.

Citons les vaisseaux traversant le diaphragme dans les aires d’insertion des ligaments
falciformes et coronaires ou situées dans les zones d’adhérence pathologique de la rate.
Citons enfin les vaisseaux situés à l’attache des ligaments coliques et sur les zones
d’accollement des fascias rétro-colique et rétro-duodénal ou lors d’adhérences
pathologiques du grand épiploon.

On comprend donc la prédominance et le développement rapide des varices


oesophagiennes. Mais leur siège sous-muqueux les exposent à des traumatismes.

a. Des traumatismes :
- alimentaires et chimiques par reflux gastrique
- hypertension abdominale lors d’un effort de toux par exemple.

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La transsudation et la fragilité capillaire joue un rôle moins important que les traumatismes sur
les varices oesophagiennes et la muqueuse fragile.

I. ASCITE

La transsudation de plasma à travers les capillaires due à l’hypoprotidémie a un rôle moins


important que les lymphatiques qui en principe, non visibles, sont distendus et gonflés, se
dirigeant vers le foie comme on le constate à l’intervention.

TRAITEMENT ESSENTIEL DES HEMORRAGIES DIGESTIVES

1.- INTERVENTIONS DE DECONNECTION

Pour supprimer l’apport sanguin sur les varices


Pour diminuer la pression portale.

- Sur l’apport sanguin:

a. Splénectomie
Car l’artère splénique est branchée directement sur l’aorte par l’intermédiaire du tronc
coeliaque et fournit environ 30 % du courant portal.
De plus l’hypersplénisme entraîne des troubles hématologiques.
a. Déconnection péri-cardio-oesophagienne
La section musculeuse et la ligature des veines rencontrées est insuffisante et nécessite une
transsection.
a. Certains ont proposé la transsection gastrique
Au niveau de l’union ½ supérieur 1/3 moyen avec réanastomose ensuite.
a. D’autres préfèrent la transsection oesophagienne mais le risque opératoire est plus grave
car l’anastomose est plus précaire.

2. DIRECTEMENT SUR LES VARICES

- Les scléroses des varices oesophagiennes ne donnent aucun résultat,


- La ligature des varices est pratiquée par certains en urgence
- Oesogastrectomie polaire supérieure

Cette technique touche les varices elles-mêmes mais représente surtout une intervention de
déconnection avec 16 % de mortalité et la possibilité de récidives.

De plus on doit accepter le risque d’oesophagite peptique.

3. CREATION D’ANASTOMOSE PORTO-CAVE

Semble la méthode la plus radicale.

Mais nécessite non seulement une pression portale suffisante en valeur absolue (25 cm H20)
mais surtout un gradient de pression suffisant (20 cm. H20).
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Car le syndrome de BUDD-CHIARI ou une hypertrophie du lobe de Spiegel qui dans ce cas
comprime la veine cave sur les piliers du diaphragme risquent d’augmenter la pression de la
VCI avec des chiffres des 25 ou 30 cm H20 dans la veine porte.
Enfin, la taille de l’anastomose doit être suffisante (10 mm au moins).

TYPES D’ANASTOMOSES

I. TRONCULAIRES

Deux types : - latéro-latérale


- termino-latérale

Dans le type latéro-latéral on n’interrompt par le courant portal et ainsi la vascularisation du


foie permet de diriger l’excès vers la veine cave.

Par contre dans le termino-latéral la section de la VP sous le foie entraîne une vascularisation
hépatique uniquement assurée par l’artère hépatique.

Le choix entre ces 2 techniques dépend d’avantage de conditions per opératoires que d’un
programme pré-établi.

D’autre part la position respective de la veine porte par rapport à la veine cave peut rendre
impossible l’anastomose latéro-latérale et même la termino-latérale obligeant ainsi à renoncer à une
anastomose tronculaire.

Enfin, il faudra tenir compte des conditions physio-pathologiques: degré de vascularisation du


foie après clampage du tronc porte.

Si l’apport de l’artère hépatique est insuffisant le foie est exposé à l’ischémie.

Si l’apport est excessif par rapport à ce qu’il subsiste de drainage sus-hépatique et du fait de la
dilatation compensatrice pathologique du système artériel hépatique, le foie est exposé à une
hypertension intra-parenchymateuse avec oedème et altération de l’hépatocyte par stase.

Théoriquement, 3 éventualités peuvent donc survenir après clampage probable du tronc porte.

1. La pression au-delà du clamp vers le foie diminue brusquement , le foie n’est plus vascularisé et
une ischémie est à redouter.
2. La pression loin de s’abaisser monte encore, l’artérialisation hépatique était telle que le système
porte par ses varices drainait le sang des autres viscères et le sang hépatique, c’est pourquoi la
suppression de ce retour par la VP à contre-courant exposerait donc le foie à l’anoxie par stase.

1. La pression portale diminue mais se maintient à un taux qui permet d’espérer une oxygénation
hépatique suffisante.

C’est le seul cas où une anastomose termino-latérale puisse être envisagée sans danger.
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Tout ceci est très clair sans doute mais en fait trop schématique et trop théorique.

I. RADICULAIRES

A. Spléno-rénale termino-latérale

A. Mésentérico-cave

Après splénectomie le bout terminal de la veine splénique est implanté sur le bord supérieur de
la veine rénale.

Mais devant le diamètre souvent insuffisant de la veine splénique et pour augmenter le débit on
préfère la modalité termino-terminale.

Chez l’enfant par contre on préfère soit l’anostomose mésentérico-cave ou plus volontiers
mésentérico-iliaque.

INDICATIONS

Varient selon le terrain.

Le plus souvent il s’agit d’un homme de 50 ans cirrhotique, ayant présenté brusquement une
hémorragie dramatique.

On tiendra compte :
- de son âge
- de l’altération hépatique par les examens biologiques
- d’un début d’ascite.

TRAITEMENT D’URGENCE :

Par la sonde de Blakemore qui 8 fois sur 10 sera efficace. Mais il faut savoir que l’on devra
dégonfler toutes les 6 heures pour éviter une ischémie de la paroi oesophagienne.
D’autre part, ce procédé sera inefficace dans les hémorragies d’origine cardiale.

Enfin, un bilan s’impose pour porter les indications thérapeutiques. Il comprendra:

a- Une recherche de varices oesophagiennes par un examen radiologique révelant:


- des lacunes régulières en chapelet
- des encoches des bords.
b- Une étude de la pression portale
c- Une splénoportographie :

Elle objective:
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- les anastomoses et les V. oesophagiennes
- l’HTP car normalement il n’y a pas de reflux coronaire stomachique ou mésentérique
inférieur
- la taille de la veine splénique
- l’existence ou non de thrombose portale.

Examen irremplaçable malgré le risque de splénectomie d’urgence.

Ainsi une fois ce bilan réalisé on envisagera les différentes sanctions thérapeutiques selon le
niveau de l’obstacle.

a.- Barrage pré-hépatique :


- par : - folliculite hépatique ou splénique
- pancréatite

On réalise une splénectomie et anastomose spléno-portale

Chez l’enfant qui présente une sténose congénitale ou une thrombose de la V.P.,
on réalise une anastomose spléno-rénale ou mésentérico-iliaque.

b.Barrage intra hépatique


On réalise une dérivation tronculaire mais on conserve l’hypersplénisme.
En cas de thrombose de la VP toute intervention est à proscrire.

En cas d’ encéphalopathie portale l’anastomose tronculaire est à rejeter en raison de son


retentissement cérébral violent et on préfère l’anastomose spléno-rénale.

Lors d’un syndrome de Budd-Chiari.

On réalise une anastomose mésentérico-cave si le gradient de pression le permet avec le risque


d’une opération complémentaire pour libérer la veine cave.

Deux complications peuvent émailler toutes ces interventions.


- thrombose de la Veine porte
- insuffisance hépatique

TRAITEMENT DE L’ASCITE

- Le drainage échoue souvent.


- La ligature de l’artère hépatique est abandonnée.

Seul le traitement médical est efficace en supprimant le déséquilibre protidique.

RESULTATS

Environ 20 % d’amélioration avec le risque d’insuffisance hépatique ou d’encéphalopathie porto-cave.


De toute manière un cirrhotique qui a fait une hémorragie en réfera.
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10. LA PROCTOLOGIE

1. Sémiologie proctologique
2. Hémorroïdes
3. Prurit anal et dermite péri-anale
4. Maladie pilonidale
5. Syphilis
6. Anorectites sexuelles transmissibles
7. Fissure anale

VUE PANORAMIQUE DE LA PROCTOLOGIE

DEFINITION
RAPPELS ANATOMIQUES
RAPPELS PHYSIOLOGIQUES
ANAMNESE PROCTOLOGIQUE
EXAMEN PROCTOLOGIQUE:
INSPECTION
PALPATION, TOUCHER RECTAL
ENDOSCOPIE
MANOMETRIE ANO-RECTALE
DEFECOGRAPHIE
ELECTRO-MYOGRAPHIE
MATERIEL
AFFECTIONS PRINCIPALES:

PATHOLOGIE VASCULAIRE: HEMORROIDES

FISSURES ANALES
SUPPURATIONS: PERIANALES: MALADIE DE VERNEUIL
MALADIE PILONIDALE
ANALES : ABCES
FISTULES.
TROUBLES DE LA STATIQUE ANO-RECTALE :
DESCENDING PERINEAL, SYNDROME
PROLAPSUS (INTUSSUSEPCION) MUQUEUX
RECTOCELE
PATHOLOGIE DERMATOLOGIQUE : DERMITE PERIANALE
PRURIT ANAL
ECZEMA, PSORIASIS…
MALADIES SEXUELLEMENT TRANSMISSIBLES :
CONDYLOMES ACUMINES
SYPHILIS
ANORECTITES: GONOCOCCIQUES
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Chirurgie digestive 301
A CHLAMYDIA TRACHOMATIS (NICOLAS-FAVRE)
HERPETIQUES.
DOULEURS REBELLES : PROCTALGIES FUGACES
COCCYALGIES
NEVRALGIES ANORECTALES.
TUMEURS ANALES BENIGNES
RECTALES MALIGNES

SEMIOLOGIE PROCTOLOGIQUE

Les plaintes du patient atteint d’une affection proctologique expriment: des douleurs; des pertes
de sang, de mucosité, de pus; une tuméfaction de la région anale; des troubles de la défecation. Le plus
souvent il se croit atteint d’hémorroïdes, il faut se garder de ce diagnostic de facilité, l’anamnèse doit
être précise et l’examen détaillé.

ANAMNESE

On recherchera dans les antécédants familiaux: les tumeurs intestinales, une faiblesse du
système veineux (hémorroïdes, varices). On questionnera le patient sur ses antécédants digestifs
(gastriques, intestinaux, hépatiques), sur ses habitudes alimentaires (alcool, épices…), sur le transit
intestinal, la fréquence et la qualité des défécations.
On fera préciser la date du début des symptômes et leur évolution dans le temps.

1º Les douleurs

S’agit-il d’une douleur aiguë ou d’une simple gêne, d’une pesanteur ou la douleur est elle ressentie et
quels sont ses rapports précis avec la défécation ?

Une fissure anale est ressentie par une douleur aiguë, comme une brûlure débutant après la défécation
et se prolongeant longtemps pour devenir à la longue presque permanente au point que le patient se
retient d’aller à la selle.

Une douleur violente continue, d’apparition soudaine s’atténuant après quelques jours évoque une
thrombose hémorroïdaire.

Une douleur violente, pulsatile, empêchant le malade de dormir et s’accompagnant d’un état fébrile
évoque un abcès périanal.

Une sensation de brûlure au passage de la selle évoque l’anite.


Les hémorroïdes ne sont pas douloureuses mais entraînent une sensation de pesanteur anales parfois
des faux besoins et l’impression que “tout n’est pas fini” après une défécation (ténesme). Les
hémorroïdes ne deviennent douloureuses que si elles se compliquent (thrombose, fluxion,
étranglement).

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Chirurgie digestive 302
Certains patients se plaignent de douleurs fugaces, “comme si on leur enfonçait des aiguilles
dans l’anus”, comme une sensation de crampes anales irradiées vers le rectum et parfois le bas ventre,
les crises surviennent souvent la nuit : il s’agit de proctalgies souvent essentielles.
Il faut dissocier des douleurs anales, les douleurs ressenties au niveau du coccyx (coccydynies) et de la
région sacro-coccygienne (abcès sacro-coccygien).

Enfin certains patients se plaignent d’un prurit parfois féroce rarement associé à des troubles de
la sensibilité du périnée.

2º Les pertes de sang, de mucus ou de pus

Habituellement une perte anale de sang inquiète fort les malades d’autant plus qu’il suffit d’une
faible quantité pour que l’eau du vase et la cuvette prennent une bonne teinte rouge qui impressionne.

On essayera de faire préciser si le sang est apparu au moment de l’essuyage, après la selle ou au
contraire si le sang est mêlé avec la selle ou survient en dehors de toute défécation avec souvent un peu
de glaires.

Des précisions sont souvent difficiles à obtenir.

Toute perte de sang impose un examen détaillé: ano, recto-sigmoïdoscopie, colonoscopie et


examen radiologique du côlon.

De banales hémorroïdes ou une fissure anale peuvent être responsables mais les autres causes :
rectocolite, diverticulose, cancer doivent être éliminées.

Si le sang est associé à du mucus il faut penser à la rectocolite, à l’ulcère solitaire du rectum,
aux tumeurs villeuses. Les pertes de mucus qui tachent le linge s’observent dans les prolapsus
hémorroïdaires et rectaux, les tumeurs villeuses, l'écoulement évoqué ou une fistule périanale qui se
fistulise en apportant un soulagement des douleurs. Si le mucus est mêlé de selles il faut penser à des
troubles de la continence.

3º Présence d’une tuméfaction anale

Est elle apparue soudainement, est elle douloureuse, se réduit-elle spontanément ou nécessite-t-
elle de la part du malade une manoeuvre de réduction ?

Une tuméfaction évoque des marisques, une thrombose hémorroïdaire, des hémorroïdes
prolabées, parfois étranglées, un prolapsus du rectum, sa nature sera précisée par l’examen clinique.

4º Troubles de la défécation

Par la douleur, une fissure anale ou un abcès de l’anus entraîne une rétention des matières.
On fera préciser toute modification de la défécation: constipation récente, diarrhée, alternance de
diarrhée et de constipation. On demandera s’il n’existe pas de “faux besoins” en expliquant qu’il s’agit
d’un besoin qui n’aboutit qu’à l’émission d’un peu de glaire parfois teintée de selles ou de sang : cette
symptomatologie évoquant toujours l’hypothèse d’une tumeur rectale ou rectosigmoïdienne bien
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Chirurgie digestive 303
qu’elle peut aussi s’observer dans les prolapsus hémorroïdaires. On évoquera l’existence possible de
selles rubannées ou de calibre rétréci.

EXAMEN PROCTOLOGIQUE

Le patient est mis en position génu pectorale, appuyé sur les coudes fléchies et le dos creusé
pour faire saillir le postérieur et provoquer un léger écartement des fesses.

Il faut mettre le patient en confiance et expliquer les nécessités de cette position manifestement
gênante.

Dans certains cas (patientes timides, très pudiques ou en cas d’ankylose de la hanche), on peut
réaliser l’examen en décubitus latéral cuisses fléchies, la fesse supérieure étant relevée par une aide
(position de SIM).

Il faut disposer d’un bon éclairage, de doigtiers, au minimum d’un anuscope ou mieux d’un
recto-sigmoïdoscope flexible avec éclairage à la lumière froide.

ON OBSERVERA A L’EXTERIEUR DE LA REGION ANALE

Un eczéma, une dermatose avec oedème des plis périanaux


Une rougeur et la tuméfaction d’un abcès périanal
L’orifice externe d’une fistule d’où sourd un peu de pus, des condylômes.
Les cicatrices d’interventions anales antérieures.
Des marisques
Des hémorroïdes prolabées
La tuméfaction bleutée de la thrombose hémorroïdaire
Des lésions de grattage et de prurigo
Un prolapsus rectal extériorisé

En déplissant l’anus on découvrira une fissure située au niveau d’une commissure antérieure ou
postérieure ou une fissure latérale qui doit, jusqu’à preuve du contraire, faire toujours suspecter un
cancer de l’anus ou une maladie de Crohn.

On observera la région sacrococcygienne pour éliminer un éventuel kyste pilonidal abcédé ou


fistulisé et qui pour le malade est souvent interprété comme venant de l’anus.

Il faut alors demander au patient de pousser “comme s’il allait à la selle” et l’on voit
s’extérioriser des hémorroïdes internes ou un prolapsus anal ou rectal.

Les doigts seront alors protégés par un doigtier ou mieux la main sera gantée et l’examen se
poursuit par la palpation.

PALPATION

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Chirurgie digestive 304
Une palpation délicate de la région périanale permettra de percevoir la légère saillie
douloureuse d’un abcès et par une palpation bidigitale (doigt à l’intérieur, un doigt à l’extérieur) on
peut sentir le trajet légèrement induré d’une fistule.

On pratique alors le toucher rectal.


Les hémorroïdes sauf si elles sont thrombosées ne se percoivent pas au toucher rectal. On appréciera le
tonus du sphincter qui est spasmé en cas de fissure et relâché en cas d’abcès.

Le toucher rectal permet une exploration jusqu’à 7 à 10 cm. Il va permettre de découvrir des
tumeurs anales ou rectales basses. Chez la femme on percevra à travers la paroi antérieure le col utérin
et chez l’homme la prostate dont les caractères seront appréciés. On évaluera également par une
palpation entre le pouce et l’index les bords du canal anal (fibrose, cicatrices, papillites…)

ANUSCOPIE

L’introduction d’un anuscope permet un examen visuel jusque 7 à 8 cm. L’idéal est de disposer
d’un rectoscope rigide de 15 cm qui permet un examen de la totalité de l’ampoule rectale.

L’appareil est introduit délicatement avec son obturateur, il est bien lubrifié, il sera orienté dans
l’axe du canal anal (c’est-à-dire pointant vers l’ombilic) on demande au malade de pousser légèrement
comme pour aller à la selle ce qui relâche le sphincter et facilite l’introduction.

Après 2 à 3 cm d'introduction l'orientation de l'appareil est modifiée pour qu'il pointe vers le
sacrum et on poursuivra avec douceur l'introduction.

Si on utilise un rectoscope court l’obturateur est enlevé après 4 à 5 cm et la progression de


l’instrument, muni de l’éclairage se fait sous le contrôle de la vue mais toujours avec beaucoup de
douceur.

L'examen se fera de la profondeur vers l'anus en retirant lentement l'instrument. On peut


découvrir des lésions tumorales, des ulcérations, un état inflammatoire de la muqueuse.

A 3cm de la marge, on demandera au malade de pousser et on peut voir la protrusion dans la


lumière de l'instrument d'un prolapsus interne.

A la limite de la muqueuse rectale et anale à hauteur des cryptes de Morgagni on peut voir sous
forme de crête des papilles hypertrophiées. En retirant encore légèrement l'instrument peuvent
apparaître les saillies bleuâtres des hémorroïdes internes qu'une poussée vient faire prolaber dans
l'appareil. Au niveau de la marge on découvrira enfin les fissures ou les cancers de l'anus.

L'examen est alors terminé d'autres détails sont parfois nécessaires, ils seront décrits avec les
différents aspects de la pathologie ano-rectale.

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Chirurgie digestive 305
HEMORROIDES

HEMORROIDES

INDICATION: Peut être utile à tous les stades de gravité des hémorroïdes.
Plus efficaces dans les stades les moins graves.

A. REGLES HYGIENO-DIETETIQUES

1. REGULARISER LE TRANSIT :
Régime riche en fibres.
Son de froment.
Mucilages.
Boissons abondantes.
Pas de laxatifs irritants (cascara, sénosides, phénolphtaléine)
Huile de paraffine. (Agarol. Lansoyl)

1. LUTTE CONTRE LA SEDENTARITE :


Gymnastique. Natation, Sports (sans compétition acharnée)
Sauf lors des “crises hémorroïdaires”

1. ALIMENTATION :
Supprimer : les irritants (épices)
Les vasodilatateurs: café, thé, alcools.
A. MEDICATIONS.
BUTS: diminuer l’oedème
l’inflammation.

1. GENERALES :
VEINOTROPES: action: contraction de la paroi veineuse
Diminution de la perméabilité capillaire
Augmentation de la résistance capillaire
(Venoruton 300; Reparil; Fragivix; Glyvenol; Daflon)
à forte posologie
A.I.N.S.: pendant une courte durée. (Voltaren; Rofenid)

1. LOCALES:
ONGUENTS. (lésions externes)
SUPPOSITOIRES. (lésions intra-canalaires)
Corticoides (anti-inflammatoires)
Anesthésiques locaux
MentholSous-gallate de bismuth (astringent, antiseptique)
(Scheriproct; Ultraproct; Trianal; Procto-Synalar; Proctyl)

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TRAITEMENTS LOCAUX PLUS SPECIFIQUES :
Mycolog onguent
Daktacort onguent
Daktarin onguent
Daktarin poudre

TRAITEMENTS GENERAUX :
Sédatifs
Antihistaminiques
Nizoral
Sporanox

A. CHIRURGIE

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PRURIT ANAL
DERMATITE PERI - ANALE

SYMPTOMATOLOGIE:

Peut aller de la simple démangeaison à la sensation de brûlure.

TOPOGRAPHIE: souvent généralisée autour de la marge anale.


Si focalisée, rechercher une lésion locale :
- cryptite
- papillite
- marisque enflammée
- ulcération
- folliculite
- kyste sébacé infecté
- fistule

Exclure lésion dermatologique:


Eczéma (pommades, suppos) autres
localisations.
Psoariasis: idem
Lichen plan
Dermite mycotique: candida (humide)
Dermatophytes
(circiné)
lésions de grattage
condylômes
Exclure maladie générale: Diabète
Obésité
Parasitose
Crohn
Syphilis
Sinon, prurit sine materia: causes psychologiques.

TRAITEMENT :
Règle d’or : le moins possible de médicaments !
Règles d’hygiène d’abord: pas trop ! pas trop peu !
- attention aux savons et détergents
- qualité du papier de toilette
- qualité du linge de corps: slips de coton blanc (peut être
bouilli)
- bonne aération du périnée, surtout en été
- pas de café ni boissons alcoolisées
- lavages à l’eau chaude.

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Traitements locaux non-spécifiques :


- bains de siège avec camomille ou racine de guimauve.
Permanganate de K 1/10.000
- Betadermyl pain
- Tenir au sec avec talc ordinaire
- Tamponnements avec: Isobetadine dermique à 10 %
Eosine à l’eau 2 %
Mercurochrome à l’eau 2 %
Hexomédine
Violet de méthyle à 1/1000
Fluorescéine à 1/1000
AgNO3 à 1 %

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LA MALADIE PILONIDALE

LA MALADIE PILONIDALE
(Kyste pilonidal ou sacro-coccygien)

ETIOLOGIE : ACQUISE: Inclusion de poils dans le tissu cellulaire sous-cutané le plus


souvent chez des sujets poilus et soumis à des traumatismes localisés
fréquents (chauffeurs)
EMBRYOLOGIQUE: restes ectodermiques invaginés au niveau du neuropore
postérieur (phanères, peau, poils, dents).
LOCALISATION: Pli interfessier, région coccygienne.
ASPECT : Abcès se fistulisant à la peau par un ou plusieurs orifices et remontant parfois
dans les pièces osseuses, avec des trajets sinueux et arborescents.

EVOLUTION : Suppurations et tarissements successifs.


TRAITEMENTS: Passer du AgNO3 sur des tigettes dans les trajets fistuleux.
Chirurgical : après injection de bleu de méthylène exérèse large et soigneuse,
puis suture par points de Donati séparés ou marsupialisation.

SYPHILIS

Clinique:- Chancre primaire aspect de fissure, souvent latérale, sur fond d’induration,
peu ou non douloureux.
Erosions secondaires
Adénopathie inguinale

Labo : Bactério: microscope à fond noir pour rechercher du Tréponème pâle.


Sérologie : négative les premiers jours.
Jour 5: immunofluorescence +
Jour 15: VDRL +
Jour 20: TPHA +
Traitement: Pénicilline : Semi-retard: 1.000.000 U/j x 15 jours
Retard: 1 seule injection de 2.400.000 U
= 2 ampoules de Penadur LA.

ANORECTITES SEXUELLEMENT TRANSMISSIBLES.

REMARQUE: Ces affections n’ont pas d’aspect endoscopique spécifique pouvant


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nettement les différencier: anites, cryptites, rectites, ulcérations
hémorragiques et purulentes. Le diagnostic se pose à partir des
prélèvements bactériologiques et de la sérologie.

ANOROCTITES GONOCOCCIQUES:
Labo : frottis + cultures: cocci Gram - : diplocoques en “grains de café”
Traitement: Cyclines: Doxycycline : 200mg /jour x 8 à 15 jours.

ANORECTITES A CHLAMYDIA TRACHOMATIS :

Clinique: aspect granulomateux “clouté” de la muqueuse, qui est fragile, ulcérée


Souches immunotypes L1 L2 L3 : maladie de Nicolas-Favre (pays
Tropicaux): atteinte rectale grave avec importante suppuration locale
allant jusqu’à la sténose rectale + ganglions inguinaux fistulisés.
Labo : Culture sur milieu cellulaire (milieu de transport adéquat)
Traitement: Cyclines : Doxycycline 2 grs/ jour x 15 jours.
Macrolides: Erythromycine : idem.

ANORECTITE HERPETIQUE:
Clinique: épreintes, ténesme, rectorragies, température, troubles mictionnels.
Labo: cultures virales
Traitement: Acyclovir (Zovirax) parentéral ou per os.

Remarque: SIDA : Il n’y a pas de lésion spécifique “d’entrée” du virus, les lésions cutanées ou
anorectales étant celles que l’on rencontre ailleurs dans l’organisme, par exemple des
lésions angioides de Kaposi.
Labo: diagnostic sérologique
Traitement: inconnu à ce jour. Pour le moment, la trithérapine fait reculer le
temps d'exitus

Les fistules anales

Les fistules extra-sphinctériennes posent des problèmes chirurgicaux assez difficiles, qui ne
concernent que le spécialiste. Le praticien n’abordera donc lui-meme^que le traitement des fistules
intrasphinctériennes, c’est-à-dire celles dont – en gros – l’orifice est tout près de l’anus, et sur tout le
trajet au contact même de la muqueuse du canal anal.
Rappelons l’examen clef du stylet, introduit par l’orifice et cathétérisant le trajet : on doit le
sentir par le doigt rectal sur tout son parcours, sans jamais être séparé de lui par l’épaisseur du sacro-
saint muscle sphincter, gardien vigilant de la continence, hors de laquelle il n’est plus de bonne tenue.
C’est –à-dire que la moindre entaille dans ce muscle circulaire risque d’avoir des résultats désastreux,
et qu’on ne doit attaquer le traitement d’une fistule anale que si on est fermement assuré de n’avoir
aucune chance d’entamer le sphincter. En cas de doute, réserver ce risque au chirurgien.

Cure chirurgicale.

La cure proprement dite de la fistule intra-sphinctérienne comprend quatre termes :


l’anesthésie, la dilatation, le repérage, la mise à
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Chirurgie digestive 311

FISSURE ANALE

La fissure anale est une ulcération superficielle de la partie sous-vavulaire du canal anal. Elle
s’accompagne assez souvent de formations para-fissuraires: un repli cutané externe (dit “hémorroïde
sentinelle”) et une papille hypertrophiée (ou “polype fibreux hémorroïdaire interne”). C’est une lésion
fréquente, cause majeure des douleurs anales, avec les thromboses hémorroïdaires et les abcès. Elle
s’observe surtout entre 20 et 50 ans, frappant également les deux sexes avec une légère prédominance
féminine.

Etiopathogénie

De nombreuses théories (vasculaire, infectieuse, psychosomatique, mécanique) ont essayé


d’expliquer la formation d’une fissure anale. Elles ont toutes une part de vérité. Actuellement, on
insiste sur le rôle essentiel de la contracture du sphincter interne, qui explique l’apparition de la fissure
et la tendance spontanée à la chronicité ou du moins à la récidive. On peut considérer la fissure anale
comme une déchirure due à une selle dure et traumatisant un canal anal remanié.

La fissure s’installe en effet grâce à des causes favorisantes, muqueuse et musculaire. La


muqueuse est anormale, fragilisée, siège d’une parakératose, et le sphincter interne est pathologique,
siège d’une myosite fibreuse qui le rend inextensible. Cette muqueuse fragile, en pont sur un sphincter
inextensible, finit par se déchirer au cours d’un effort de la défecation dans une zone de moindre
résistance qui correspond, pour des raisons anatomiques, à la zone commissurale postérieure.

Ces altérations locales favorisantes sont liées à plusieurs facteurs: longue irritation du canal
anal provoquée par l’abus des laxatifs, la congestion hémorroïdaire et l’inflammation des cryptes, mais
aussi l’hypertonie sphinctérienne des névropathes (le trouble psycho-fonctionnel peut en effet être
primitif et entraîner à la longue des altérations anatomiques trophiques).

Diagnostic

La fissure donne lieu à des douleurs caractéristiques et une contracture sphinctérienne. La


douleur s’identifie à l’interrogatoire par ses conditions d’apparition et par son évolution chronologique.
Elle est en effet provoquée par la défécation, réalisant un rythme à trois temps, apparaissant au passage
de la selle, s’effaçant ensuite pendant quelques minutes, pour reprendre pendant plusieurs heures avec
intensité accrue, avant de disparaître complètement jusqu’à la selle suivante. Variable dans son type et
son intensité, elle est ressentie soit comme une brûlure ou une déchirure légère, soit comme une
douleur intolérable à l’application d’un fer porté au rouge. Ce syndrome douloureux évocateur
s’accompagne parfois de petites rectorragies, généralement à l’essuyage et très souvent d’une
constipation, d’ailleurs souhaitée par le malade puisque’elle espace les périodes douloureuses.

La contracture sphinctérienne est un élément essentiel du syndrome fissuraire. Elle est


déclenchée ou exacerbée par contraction des plis radiés, ce qui rend difficle, sinon impossible,
l’examen du canal anal. Il faut souvent, pour voir la fissure, réaliser une anesthésie locale du sphincter.

La fissure anale apparaît à l’examen proctologique au niveau de la partie basse du canal anal.
Elle siège habituellement au voisinage d’une commissure un peu à gauche ou à droite de la ligne
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Chirurgie digestive 312
médiane. Unique, elle est en général postérieure, plus rarement antérieure et alors plus fréquente chez
la femme que chez l’homme. Exceptionnellement, elle est double, antérieure et postérieure. Elle est
ovalaire, en raquette, avec une grosse extrémité externe et une partie interne effilée se terminant à
quelques millimètres de la ligne pectinée. L’aspect de ses bords et de son fond varie selon l’âge de la
fissure. Si la fissure est jeune, ses bords sont nets et fins. Le fond est propre et lisse. Les formations
para-fissuraires sont réduites à un minime repli cutané à l’extérieur et à une papille sur la ligne
pectinée. Si la fissure est évoluée: les bords sont épais, scléreux, décollés. Le fond est strié
transversalement par les fibres blanches du sphincter interne. Les formations para-fissures sont très
développées: le capuchon externe et le polype fibreux interne sont volumineux.

Evolution

Ces différents aspects des fissures représentent divers stades évolutifs et toutes les transitions
existent. La fissure anale évolue par poussées successives avec alternance de périodes de calme et de
récidives douloureuses. Elle peut se compliquer d’infection locale, réalisant un abcès sous-fissuraire
qui évolue vers la fistulation.

Formes cliniques

La fissure de l’enfant se distingue essentiellement par l’absence ou le caractère modéré de la


contracture. L’évolution est fréquemment favorable sous la seule influence du traitement médical.

La fissure du vieillard est rare, réalisant souvent une ulcération atone, sans contracture.
L’état fissuraire. Il s’agit d’une simple fragilité de la muqueuse anale qui provoque une brève
sensibilité au moment de la défécation et des éraillures superficielles commissurales postérieures à la
traction des plis. Cet état peut guérir ou évoluer vers une fissure véritable.

Diagnostic différentiel
Il faut différencier la fissure anale vraie primitive des autres ulcérations de l’anus:

- le chancre syphilitique (plus latéral que commissural, à fond induré en carte de visite,
accompagné constamment d’une adénopathie inguinale);

- le cancer anal à forme fissuraire (reposant sur une induration se prolongeant en coulée
dans le canal anal, avec des bords bourgeonnants imposant au moindre doute une
biopsie);

- les ulcérations anales de la malade de Crohn (généralement latérales, à bords décollés,


ménageant des ponts boursoufflés d’oedème, indolores).

- les rhagades pseudo-fissuraires (ulcérations linéaires multiples siégeant à distance de


l’anus en pleine peau, dans un contexte de dermite chronique avec prurit anal);

- les fissures mécaniques par déchirure de la base d’une procidence hémorroïdaire.

Traitement
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Chirurgie digestive 313

Le rôle primordial de la contracture du sphincter interné explique les diverses tentatives


thérapeutiques.

Traitement médical

Il comporte des mesures hygiéno-diététiques (suppression des épices et des boissons


alcoolisées, toilette après la selle à l’eau plutôt fraiche à l’aide d’une éponge en évitant les essuyages
intempestifs) et des traitements médicamenteux:

Médicamets visant à régulariser le transit intestinal en luttant contre la constipation, mais


aussi contre la diarrhée. Les laxatifs irritants doivent être supprimés et remplacés par les mucilages ou
le son associés à l’huile de paraffine.

Les analgésiques. Par voie locale, l’application in loco de gel Tronothane ®, de gel Xylocaïne
® ou de pommade Nestosyl ®, peut amener un soulagement temporaire de la douleur fissuraire après
la défécation. Mais des réactions d’intolérance sont possibles et en limitent beaucoup l’intérêt. Par voie
orale, les antalgiques généraux sont prescrits à la dose de 1 à 2 comprimés, dragées ou sachets au
moment des douleurs, soit de dérivés salicylés (Aspirine, Aspégic ® soit de Glifanan ® ou Salgydal ®.

Les décontracturants se proposent de lever la contracture sphinctérienne. On peut s’adresser à


des myo-résolutifs type Lumirelax ® ou Coltramyl ® ou à des tranquilisants à des doses filées ayant
l’avantage d’agir également sur l’anxiété habituelle des fissuraires (type Valium ®, Librium ®,
Tranxène ®, Seresta ®). Les médications comme l’Adalgur ® associant antalgiques et
décontracturants sont utiles.

Les cicatrisants peuvent être donnés par voie orale (application bi-quotidienne de pommade
Mitosyl ® ou Plasténan ® ou Placenta Soca ® ) ou par voie générale: soit orale Jonctum ® (4 à 6
gélules par jour) soit injectable de Bépanthène ® ou Solcoséryl ® IM ou IV.

Les anti-hémorraoïdaires par voie locale (suppositoire et pommade). La liste est longue (voir
traitement des hémorroïdes). Les gros suppositoires sont mal acceptés. Le Proctolog ® associant un
anti-hémorroïdaire et un anti- spasmodique paraît actif.

Cette longue liste de médicaments ne doit cependant pas faire illusion sur l’efficacité réelle du
traitement médical. Il soulage parfois un syndrome fissuraire mais guérit très rarement une fissure
(sauf certains cas de fissure jeune). Sur le plan pratique, l’ordonnance comportera: des mesures
hygiéno-diététiques, le traitement de la constipation, un antalgique décontracturant par voie orale
(Lumirelax ®, Adalgur ® ou Valium ®), localement par exemple, un suppositoire Proctolog ® avec
pommade Mitosyl ® à son extrémité matin et soir.

Traitement sclérosant

Il est réalisable par le médecin généraliste. Il consiste à injecter dans la zone sous-fissuraire, un
produit anesthésiant (2 à 3 cc de Xylocaïne ®) puis quelques gouttes d’un produit sclérosant juste sous
le plancher de la fissure (Kinurea ®) avec une aiguille de type intra-musculaire, de préférence
siliconée. L’effet est parfois spectaculaire, la douleur disparaissait dès la première injection. Parfois,
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Chirurgie digestive 314
cependant, 2 ou 3 séances sont nécessaires à trois ou quatre jours d’intervalle. Si la cicatrisation n’est
pas obtenue malgré la disparition des douleurs, la récidive du syndrome fissuraire est probable et la
poursuite des injections sous-fissuraires inutile et dangereuse. Le risque essentiel de la méthode est la
survenue d’un abcès sous-fissuraire qui peut apparaître tardivement parfois. Les récidives sont
également fréquentes. La fissure évoluée, fibreuse, avec formations para-fissuraires importantes sont
des contre-indications des infiltrations sous-fissuraires.

Traitement chirurgical

Plusieurs techniques permettent de traiter la fissure. Elles reposent toutes sur la notion
pathogénique du rôle du sphincter interne et consistent à supprimer la contracture sphinctérienne.

La dilatation anale est la méthode la plus ancienne, elle risque d’être soit trop efficace, soit
inefficace.

La diathermo-résection de la fissure et des formations para-fissuraires est possible sous


anesthésie locale.

On lui préfère actuellement la sphinctérotomie interne qui peut être soit latérale, sans enlever
le tissu fissuraire (réalisable sous anesthésie locale), soit postérieure et généralement, selon la
technique d’Arnous et Parnaud, associée à une résection de la zone fissuraire qui élimine les tissus
pathologiques, et une anoplastie qui assure, par abaissement de la muqueuse rectale et sa suture aux
bergers du sphincter interne sectionné, l’apport d’un tissu souple et solide dans le canal anal et facilite
la cicatrisation.

Conduite à tenir en pratique

Le traitement médical peut toujours être préconisé mais il n’a de chance de réussite que dans
les états pré-fissuraires et dans de rares cas de fissures jeunes.

La fissure jeune, non infectée, hyperalgique, peut bénéficier du traitement sclérosant.

En cas de fissure jeune résistant à deux ou trois séances de scléroses, et dans toutes les autres
formes de fissures (anciennes, infectées, compliquées d’un abcès, associées à des formations para-
fissuraires importantes, à des hémorroïdes volumineuses, ou à un rétrecissement anal serré), c’est
l’indication du traitement chirurgical. Le choix de la technique dépendra de l’état de la fissure et des
hémorroïdes éventuellement associées, de l’âge du malade, et de l’expérience de l’opérateur.
Correctement effectué, le traitement chirurgical donne un résultat efficace et de bonne qualité.

FISTULES ANALES

Les fistules extra-sphynctériennes posent des problèmes chirurgicaux assez difficiles, qui ne
concernent que le spécialiste. Le praticien n’ aborde donc lui-même que le traitement des fistules
intrasphinctériennes, c’est-à-dire celles dont – en gros- l’orifice est tout près de l’anus, et sur tout le
trajet au contact même de la muqueuse du canal anal.

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Chirurgie digestive 315
Rappelons l’examen clef du style, introduit par l’orifice et cathétérisme le trajet : on doit le sentir par le
doigt rectal sur tout son parcours, sans jamais être séparé de lui par l’épaisseur du sacro-saint muscle
sphincter, gardien vigilant de la continence, hors de laquelle il n’est plus de bonne tenue.
C’est-à-dire que la moindre entaille dans ce muscle circulaire risque d’avoir des résultats désastreux, et
qu’on ne doit attaquer le traitement d’une fistule anale que si on est fermement assuré de n’avoir aucne
chance d’entamer le sphincter. En cas de doute, réserver ce risque au chirurgien.

Cure chirurgicale

Le cure proprement dite de la fistule intra-sphinctérienne comprend quatre termes :


l’anesthésie, la dilatation, le repérage, la mise à plat.

Iº L’anesthésie peut être générale, mais aussi locale : celle-ci est parfaite à tous points de vue.
2º La dilatation est utile pour voir s’il y a un orifice interne. Elle s’exécutera donc de façon
instrumentale, à l’aide du dilatateur à trois branches, qu’on maintien légèrement entrouvert pour voir
ce qui se passe.
3º On injecte en effet 1 cm3 de bleu de méthylène ou d’encre de chine en se protégeant contre les
inévitables éclaboussures. Le produit instillé par l’orifice externe emplit le clapier profond, et , s’il y a
un orifice interne, intrarectal, vient apparaître à la surface de la muqueuse du canal où on le voit dans
l’entrebaillement du dilatateur.
Dans ce trajet ainsi dessiné, on introduit une seconde cannelée qui ressort par l’orifice profond
de la fistule ; on accouche par l’anus la pointe de la sonde et tout le trajet est ainsi exposé.
4º La mise à plat s’effectue alors, soit au thermo-cautère, soit à l’électrocoagulation, en détruisant sur
la sonde tout le pont de tissu qui réunit les deux orifices

Surprises.

a) Il peut ne pas y avoir d’orifice profond : la fistule est dite borgne externe. Malgré tout, le doigt
intrarectal sent le bout de la sonde bien près de lui et il n’est pas besoin d’appuyer très fort pour que,
au bout de son trajet, ladite sonde effondre le minuscule pont muqueux qui résistait encore : c’est
exactement ce qu’il faut faire, et on retombe sur le problème précédent.
b) Il peut y avoir plusieurs trajets en clapiers : on le voit grâce au repérage, parce que le bleu dans
plusieurs directions. Il faut les suivre à la sonde et mettre à plat par le même procédé les trajets qui sont
superficiels et ne risquent pas de faire léser le sphincter.

Si certains filent en profondeur, on peut les disséquer prudemment pour voir où ils
vont : généralement à une petite logette, clapier de renfort, que l’on excise ou dont
on grille les parois pour la détruire sur place.

Suites opératoires
Une compresse grasse, pommadée au mercurochrome ou au collargol fait office de pansement :
il tombe à la première selle, qu’il n’y a lieu de différer par aucun artifice. Ensuite, la propreté
élémentaire tiendra lieu de pansement, et une simple gaze, de protection.

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Chirurgie digestive 316
CHAPITRE IV : L’ANTIBIOTHERAPIE PROPHYLACTIQUE (ABP)
EN CHIRURGIE DIGESTIVE.

I. Classification des actes chirurgicaux


II. Principes de base de l'antibioprophylaxie
III. Germes
IV. Indications et modalités de l'antibioprophylaxie chez l'adulte.

Introduction

L’antibiothérapie prophylactique (A.B.P) a pour objectif de détruire les germes pathogènes du


site opératoire avant que toute infection constituée ne survienne. Son but est donc de réduire la
fréquence des complications septiques postopératoires. Sa justification a été confirmée par de
nombreux travaux cliniques depuis une dizaine d’années. Son utilisation s’avère obligatoire pour la
chirurgie dite propre et pour certains actes dont les complications septiques sont rares mais
redoutables.

1. CLASSIFICATION DES ACTES CHIRURGICAUX

Sans considération de l’organe opéré, les actes chirurgicaux peuvent être classés en 4 selon le
degré de septicité (classification d’Alteimer):

CLASSE RISQUE INFECTIEUX


I - Chirurgie propre <5%
II - Chirurgie propre contaminée > 10 %
III – Chirurgie contaminée = 20 %
IV – Chirurgie sale > 30 %
Les interventions pouvant être incluses dans chaque classe sont résumées dans le tableau ci-après:

TABLEAU I : CLASSIFICATION D’ALTEIMER

CLASSE I CLASSE II
Propre propre contaminée
-Chirurgie vasculaire sans trouble
trophique -Chirurgie pulmonaire
-Chirurgie cardiaque + médiastin -Chirurgie vasculaire avec trouble tro-
-Chirurgie endoveineuse phique
-Neurochirurgie -Urologie
-Chirurgie orthopédique réglée -Chirurgie digestive haute
-Chirurgie plastique -Chirurgie gynécologique haute
-Ophtalmologie Orthopédie Traumatologie

CLASSE III CLASSE IV


Contaminée Septique
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Chirurgie digestive 317
-Chirurgie sous-mésocolique
-ORL et chirurgie stomatologique
-Chirurgie gynécologique par voie
basse
-Chirurgie de la prostate et de la vessie -Toute chirurgie dans le pus
-Tout malade de la réanimation -Péritonite
-Amputation de membre

Stricto sensu, l’antibiothérapie prophylactique ne couvre que les actes chirurgicaux de la classe
I et II. La classe IV nécessite une antibiothérapie curative. Le groupe III est intermédiaire car il
nécessite parfois le maintien d’une antibiothérapie adaptée.

D’après le travail de Cruse portant sur près de 25000 patients, le risque infectieux
postopératoire varie principalement selon le type de chirurgie mais aussi selon d’autres facteurs
comme le montre le tableau ci-dessous.

TABLEAU II : Les facteurs de risques infectieux en post-opératoire.

-Type d’intervention (classe)


-Durée et horaire de l’intervention
- Age supérieur à 60 ans
- Diabète, obésité, dénutrition
- Durée d’hospitalisation en pré-opératoire
- Environnement per-opératoire

Il faut distinguer enfin en postopératoire l’infection du site opératoire et celle survenant à


distance de celui-ci telle qu’une pneumopathie ou une infection urinaire. Par ailleurs, il est clair que
l’origine des bactéries contaminantes provient soit de la flore saprophyte du viscère incisé ou de peau
(infection endogène), soit de l’environnement extérieur au malade (air de la salle d’opération,
infection, etcc.).

2. PRINCIPES DE BASE DE L’ANTIBIOTHERAPIE PROPHYLACTIQUE.

Afin d’obtenir une efficacité optimale avec peu d’effets secondaires, il importe que cette ABP
débute avant l’intervention et se prolonge sur une période courte de 24 à 72 heures. Au-delà tous les
travaux de la littérature observent que les bénéfices ne s’accroissent pas et que par contre
d’importantes complications d’ordre toxique, allergique ou écologique surviennent.

D’une façon générale le choix de l’antibiothérapie doit répondre à certains critères.

TABLEAU III : Critères de l'Antibioprophylaxie

- Actif sur le germe contaminant du site opératoire


- Taux sérique supérieur à la CMI
- Bonne diffusion tissulaire
- Toxicité faible
- Facilité d’injection
- Peu onéreux

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Chirurgie digestive 318

3.LES GERMES

Les germes les plus souvent impliqués dans les infections postopératoires sont indiqués dans le
tableau IV.

TABLEAU IV : Germes

INTERVENTION AEROBIES ANAEROBIES

Gastro-intestinale
Bouche Streptocoques Clostridium / Bactéroïde

Oesophage Streptocoques

Estomac Bacille Gram négatif, strep-


tocoque.

Biliaire B.G.N., strepto faecalis


Grêle terminal BGN
Côlon BGN

Gynécologique Streptocoques
Entérobactéries
Staphylocoques

Orthopédique Staphylocoques
Streptocoques

Thoracique Streptocoques Bactéroïdes oralis


Pneumocoques
Haemophilus

Cardio-vasculaire Staphylocoques
Streptocoques

Urologie BGN (E. Coli, Proteus,


Pyocyanique)

1. INDICATIONS ET MODALITES DE L’ANTIBIOTHERAPIE PROPHYLACTIQUE


CHEZ L’ADULTE.

En chirurgie digestive

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Chirurgie digestive 319
- La fréquence des sepsis postopératoires sans ABP est élevée, puisqu’elle se situe entre 10 et 20 %
pour la chirurgie gastrique et biliaire, pour atteindre 30 à 50 % dans la chirurgie colique.
- Ces complications infectieuses (tableau II et IV) vont, par gravité croissante, de l’abcès de paroi à la
gangrène gazeuse, or depuis l’utilisation d’une ABP tous les essais cliniques en double aveugle ont
conclu à une réduction significative du risque infectieux si bien qu’il devient OBLIGATOIRE de
prescrire une ABP dans la chirurgie colo-rectale et pour les patients à haut risque de la chirurgie
gastro-biliaire.

- Cette efficacité thérapeutique se limite aux infections de la zone opératoire, elle ne s’étend pas aux
infections situées à distance du champ opératoire, telles que les pneumopathies ou les infections
urinaires .

Sepsis lié directement à l’acte chirurgical Sepsis lié indirectement à l’acte


chirurgical

- Abcès de paroi - Pneumopathie


- Abcès intra-péritonéal - Infection urinaire
- Péritonite - Infection sur cathéter
- Fistule - Septicémie
- Cellulite - Infections rhinopharyngées
- Gangrène gazeuse

A.B.P. en chirurgie gastro-duodénale

- Estomac: 10 germes/ml. Flore résidente: lacto bacillus, streptocoque.


- En pathologie il faut distinguer deux groupes de patients: ceux atteints d’ulcères duodénaux aux
complications septiques rares, et ceux atteints d’ulcère gastrique, duodénal hémorragique ou sténosant,
et de cancer gastrique dont les complications septiques sont fréquentes.

POURCENTAGE DE GERME INTRAGASTRIQUE ET INCIDENCE SEPTIQUE


POST-OPERATOIRE EN L’ABSENCE D’A.B.P.

INTERVENTIONS % de germe % d’infection


intragastrique post-opératoire

Ulcère duodénal chronique 17 0


Ulcère duodénal hémorragique 100 33
Ulcère duodénal sténosant 89 11
Ulcère gastrique 83 16
Cancer gastrique 100 25

En raison de l’hypochlorydrie et de la stase gastrique ce dernier groupe de patients dit à


haut risque doit bénéficier d’une ABP. Une réserve doit être faite lorsque le 1er groupe de patient est
traité par les inhibiteurs de récepteur H2 car alors la prolifération bactérienne peut survenir par
diminution de l’acidité gastrique. L’ABP peut être la suivante:

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Chirurgie digestive 320
* soit pénicilline G: 2 M en IVD à l’induction puis réinjection toutes les 4 heures d’1 M +
gentamicine: 1 mg/kg en IM lors de la prémédication puis toutes les 8 heures. Durée 24 heures à partir
de l’incision.
* soit céphalosporine 2e génération: Ex: céfamandole (1,5 g à l’induction puis 750 mg toutes
les 6 h) ou céfoxitine (idem). Durée, 24 heures à partir de l’incision.

CAS PARTICULIERS:

a. Sujet insuffisant rénal:

* pour la gentamicine : dose unitaire de charge identique soit 1 mg/kg; dose d’entretien:
espacer les injections selon la formule: créatininémie mg/1 x 0,8 = intervalle en heure.
* pour les céphalosporines: dose unitaire de charge identique soit 1,5 g; dose d’entretien ;
espacer les injections en fonction de la clairance de la créatinine.

TABLEAU VIII

Clairance créatinine Céfamandole Cefoxitine


(ml / min) Doses maximales Doses maximales

> 80 Posologie usuelle posologie usuelle


80 à 50 1,5 g toutes les 6 h 1 g toutes les 6 h
50 à 25 1,5 g toutes les 8 h 1 g toutes les 8 h
25 à 10 750 mg toutes les 8 h 1 g toutes les 12 h
< 10 750 mg toutes les 12 h 0,5 g toutes les 12 h
b. Sujet allergique aux lactamines:

* soit Flagyl seul (500 mg x 3/24 heures IV) soit association flagyl + gentamycine 1 mg/kg x 3
en IM
* soit clindamycine (Dalacine) 300 mg dilué dans 100 ml de G 5 % toutes les 6 heures à faire passer en
10 minutes.
ABP. en chirurgie biliaire

Les complications infectieuses surviennent lorsque la biliculture est positive. Les germes
fréquemment rencontrés sont: E. Coli, Klebsiella, Enterobacter, Strepto faecalis et Clostridium dans 20
% des cas.
Les facteurs cliniques qui prédisposent à l’infection dans ce type de population sont résumés
dans le tableau ci-dessous:
FACTEURS CLINIQUES BACTERIOBILE (en %)
Age supérieur à 70 ans 53
Ictère 66
Fièvre et frissons récents 72
Intervention en urgence 94
Lithiase de la voie biliaire principale 86
Cholécystite aiguë récente 49
Réintervention sur les voies biliaires 100

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Chirurgie digestive 321
L’ABP est indiquée lorsque un ou plusieurs de ces facteurs à risque sont identifiés en
préopératoire ou bien lorsque la coloration de Gram peropératoire met en évidence un germe.

Les antibiotiques recommandés sont:

* soit une céphalosporine de 2e génération. Ex: céfoxitine 1,5 g IV à l’induction puis


750 mg toutes les 6 heures,
* soit association pénicilline G: 2 M IV à l’induction puis 2 M toutes
les 4 heures + gentamicine: 1 mg/kg en IM toutes les 8 heures. Durée de l’ABP:
24 heures.

ABP en chirurgie colo-rectale

Le côlon est un organe qui contient un nombre considérable de germe: 109 /ml avec une forte
prédominance d’anaérobies stricts (90 %). Les germes les plus souvent rencontrés dans les
complications infectieuses sont l’Escherichia Coli et le Bacteroïdes Fragilis. Des modèles animaux ont
permis de montrer qu’il existait une synergie bactérienne entre aérobies et anaérobies et que ces deux
germes pathogènes correspondaient à ceux rencontrés en clinique humaine.

L’antibiothérapie proposée doit donc être active sur les bactéries aérobies et anaérobies. En
prophylaxie deux types de préparation sont proposées: la préparation mécanique et la préparation
antimicrobienne, les deux devant être associés en cas de chirurgie réglée.

LA PREPARATION MECANIQUE.- Elle peut être réalisée; soit par un régime sans résidus,
soit par une diète élémentaire, soit par du mannitol à 10 % (1 litre).

Le but est de réduire le volume fécal, elle améliore donc le confort opératoire sans diminuer les
risques septiques si son utilisation est isolée.

LA PREPARATION ANTIMICROBIENNE.- Elle a pour but de réduire la concentration des


germes intestinaux de 109 à 105/ml. Plus de 15 études contrôlées ont démontré l’efficacité d’une ABP,
tant par voie orale que parentérale sans que l’association d’une antibiothérapie orale et systémique
n’apporte de bénéfice supplémentaire quant aux complications septiques.

Au plan pratique on peut retenir le schéma suivant:

En chirurgie réglée
- préparation mécanique par le mannitol hypertonique (1 litre à 10 %),
- métronidazole 2 g + néomycine 3 g, per os 24 heures avant l’intervention.

J-3 : régime sans résidu


J-2 : régime sans résidu
Sulfate de magnésie (1 sachet de 8 g) à 10h - 14h - 18h
J-1 : diète liquide (bouillon)
Sulfate de magnésie 1 sachet à 10h et 14h
Néomycine 1 g per os à 13h - 14h - 23h
Métronidazole 1 g per os à 13h - 14h
J : intervention à 8 h
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En chirurgie d’urgence ou chez le sujet occlus.- La voie parentérale est seule utilisable.

Association: métronidazole IV 500mg à l’induction puis toutes les 8 heures pendant 48 heures
+ pénicilline G: 2 M IV à l’induction puis 1 M toutes les 4 heures pendant 48 heures.

ABP en chirurgie appendiculaire

Les complications infectieuses de l’appendicectomie sont dues essentiellement aux germes


anaérobies: soit Bactéroïdes, soit Clostridium.

L’antibiothérapie dépend des constatations opératoires:


- si appendice sain ou inflammatoire: Flagyl IV 500mg à débuter à l’induction puis toutes les 8
heures pendant 24 heures;
- si appendice gangréné ou perforé: Flagyl IV 500mg toutes les 8 heures pendant 4 à 5 jours +
pénicilline G 1 M IV toutes les 6 heures pendant 24 heures.

Antibiothérapie et péritonite post-opératoire

L’éradication chirurgicale du foyer septique reste le geste essentiel du traitement.


L’antibiothérapie n’est que complémentaire et aux objectifs limités. Son but est de s’opposer à la
diffusion de l’infection ou de réduire la concentration bactérienne, et en ce sens elle s’apparente à une
antibiothérapie de type préventif. Malgré le caractère polymicrobien de l’infection, des travaux
cliniques et expérimentaux ont démontré qu’il existait des germes dominants aérobies et anaérobies
avec effet synergique. Ces espèces dominantes sont représentées par l’Escherichia Coli et
l’entérocoque pour les entérobactéries et par les bactéroïdes pour les anaérobies. Il en ressort donc que
les germes cibles sont le Bactéroïdes Fragilis et l’E. Coli. Le choix de l’antibiotique se portera d’une
part pour les anaérobies vers les dérivés nitro-imidazoles (métronidazole, ornidazole), la clindamycine
sera peu utilisée en première intention en raison d’un risque certain de colite pseudomembraneuse, et
d’autre part pour les entérobactéries vers les aminosides ou les céphalosporines de 3e génération.
Quant à la prévention de la gangrène gazeuse il semble raisonnable d’adjoindre de la pénicilline G
pendant une courte période.

Enfin concernant la durée de l’antibiothérapie plusieurs études suggèrent une administration de


8 à 10 jours en sachant qu’une durée brève répond aux objectifs déjà cités et qu’une antibiothérapie
prolongée risque d’entraîner des effets secondaires et notamment celui de sélectionner un germe
multirésistant.

En pratique:
- Si absence d’antibiothérapie préalable:
- pénicilline G 8 millions/j IV
- Flagyl 1,5g/j IV ==> A débuter avant l’intervention
- gentamycine 3 mg/kg/j et à poursuivre pendant 5 à 10 jours.
- Si traitement antibiotique antérieur:
- céphalosporine de 3e génération (céfotaxime: 4 g/j IV)
- Flagyl 1,5 g/j IV.

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Chirurgie digestive 323

En chirurgie gynéco-obstétricale

- Germes impliqués:
* germes aérobies : streptocoques hémolytiques B et D, staphylocoques, entérobactéries,
* germes anaérobies: Clostridium Perfringens, Bactéroïdes Fragilis.

- Indications:

Hystérectomie par voie vaginale: l’importance des streptocoques et des anaérobies justifie l’utilisation
de pénicilline G et de métronidazole pendant 48 heures.
Posologie: pénicilline G: 2 millions U x 4 IVD + métronidazole: 500 mg x 3 IV.
Bien que le risque infectieux soit plus faible, le même schéma peut être proposé pour
l’hystérectomie faite par voie abdominale.

Césarienne en urgence: l’ABP ne se discute pas dans les césariennes à risque avec rupture
prématurée des membranes datant de plus de 6 heures où l= observe 90 % d’infection dans les suites.
Ailleurs le risque infectieux des césariennes en urgence reste élevé (35 %) et incite donc à adopter le
schéma suivant:

- pénicilline G: 2 M x 4 IV
- métronidazole : 500mg x 3 IV

Prévention de la gangrène gazeuse.- La gangrène gazeuse est due à des germes anaérobies
(Clostridium, streptocoques anaérobies). Au plan tonique on distingue:
- la gangrène gazeuse vraie ou myonécrose due au Clostridium perfringens.
- et la fascéïte nécrosante limitée au seul tissu cutané et sous-cutané.
Circonstances d’apparition:
- lésions des parties molles post-traumatiques,
- chirurgie septique abdomino-pelvienne et périnéale chez des diabétiques notamment.
- chirurgie des artérites avec gangrène ischémique.
La prévention fait appel à l’administration de pénicilline G à raison de 6 à 8 millions d’unités
par jour pendant 2 à 6 jours.

CONCLUSION

La prescription d’une ABP est démontrée lorsque le risque infectieux postopératoire est élevé
ou bien lorsque la survenue d’une infection est gravissime pour le patient. Pour être efficace elle doit
remplir 4 conditions:
- être dirigée contre les germes responsables de l’infection postopératoire,
- débuter en préopératoire ou à l’induction anesthésique afin d’obtenir une concentration
tissulaire efficace durant l’acte opératoire.
- être de durée brève, ne dépassant pas 3 à 4 jours.
- être revisable en fonction des données qu’apporteront de nouvelles études contrôlées.

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Chirurgie digestive 324
Les avantages de l’ABP ne devront pas faire oublier les règles d’asepsie opératoire ni les
mesures d’hygiène ainsi que le risque écologique pour la microflore du patient et de son
environnement.

CHAPITRE V : LES COMPLICATIONS EN CHIRURGIE DIGESTIVE

PLAN

GENERALITES

TYPES DE COMPLICATIONS
1. Infections
2. Hémorragies
3. Iléus post-opératoire
4. Eviscérations
5. Douleur
6. Ictère post-opératoire
7. Pancréatites post-opératoires
8. Complications pulmonaires
9. Rétention urinaire
10. Hoquet

PROBLEMES SPECIFIQUES
. Gastrectomies
. Chirurgie colo-rectale
. Chirurgie biliaire

I.- GENERALITES

But du service de soins intensifs pour malades chirurgicaux:


- Dépistage systématique des signes précoces de complications typiques possibles
- Surveillance ou traitement complexes
- Malades fragiles ou fragilisés avec troubles métaboliques ou organiques importants
(diabète, choc, sepsies, troubles respiratoires, circulatoires ou rénaux).

Distinguer la notion de chirurgie propre ou septique


de chirurgie élective ou en urgence

II.- TYPES DE COMPLICATIONS

1) Les infections :

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Chirurgie digestive 325
Il est important de se souvenir que l’âge, l’état nutritionnel, la maladie de base, la durée de
l’hospitalisation pré-opératoire, la qualité du chirurgien ainsi que la durée de l’intervention sont autant
de facteurs capables de modifier le taux d’infections.

PAROI:l’abcès de la paroi est un risque inhérent à la chirurgie abdominale d’autant plus


important qu’il s’agit d’une chirurgie “sale”(côlon). Se présente comme une fièvre
au 3è-4è jour, une plaie un peu rouge, parfois tendue. Ne pas hésiter à faire
sauter un ou deux points.

Le seul traitement est le drainage sauf exceptionnellement si le germe est un clostridium


perfringens ou si l’on se dirige vers une panniculite.

La panniculite est une infection des flancs (parties déclives) due aux sécrétions venant de la
plaie ou de la sortie d’un drain. Placard rouge chaud, sans induration, parfois avec une zone
d’anesthésie.
Germes: Streptocoques
Anaérobes: Clostridium donnant la gangrène gazeuse (30 % de mortalité)
Peptocoque
Bactéroïdes
Traitement: drainage en cas de collection
Antibiotiques : Péni G

INTRA-ABDOMINAL: les collections sont diverses et se trouvent habituellement dans les


zones déclives (Douglas) ou sous-phréniques. On parle parfois de pompe diaphragmatique.
Se présentent surtout avec des pics fébriles. Les autres signes possibles sont: le hoquet,
insuffisance respiratoire ou une douleur à la respiration (45 % des abcès sous-phréniques). Le
diagnostic sera posé grâce à la radio, les hémocultures, le toucher rectal, l’échographie et le
scan.

Traitement : drainage
Traitement de l’affection causale
Eviter toute dissémination (arguments pour ou contre une antibiothérapie).

DRAINAGE : témoin d’un écoulement suspect


Diriger une fuite éventuelle et éviter une péritonite septique ou biliaire.

1) Les hémorragies:

Accident de moins en moins fréquent grâce aux examens pré-opératoires dépistant les troubles de la
crase et grâce aux améliorations des techniques chirurgicales visant à obtenir une hémostase
rigoureuse. On les distingue en pariétales, intra-abdominales et intra-luminales.

PARIETALES: en général, à point de départ d’un vaisseau pas ou mal coagulé.


Le sang s’infiltre dans la paroi réalisant une dissection et formant une collection.
Si l’hématome est petit, éviter de le toucher. S’il est volumineux le risque de surinfection et de
fragilisation de la paroi est important. Il faut alors l’évacuer.

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Chirurgie digestive 326
Risques: infection
Paroi peu solide

INTRA-ABDOMINALES = HEMOPERITOINE : les causes en sont multiples


- hémostase incomplète ou lâchage de ligatures (épiploon)
- vaisseaux coagulés qui resaignent (variation de TA)
- infection (destruction des vaisseaux par la nécrose)
- lésion du foie ou de la rate ou d’un autre organe méconnu (écarteur)
- troubles de la crase (médicaments, coagulopathies, polytransfusion).
Attention: le fait qu’un drain ne ramène rien n’exclut pas l’hémorragie.
Se fier aux signes généraux: hypotension, tachycardie, transpiration
Soif, distension abdominale.

Traitement: ré-opérer et refaire l’hémostase, souvent difficile car souvent saignement en


nappe.
Hémostatiques locaux
Tamponnement

INTRA-VISCERALE: hémorragie se produisant à l’intérieur du tube digestif et par consé-


quent va s’extérioriser soit par la bouche, soit par l’anus. Se rappeler qu’une grande quantité de
sang (un litre et plus) peut remplir l’estomac ou l’intestin avant d’être évacué.
Causes: tranches de section de l’estomac ou du grêle
Réactivation d’un ulcère traité par gastrectomie des 2/3
Lésion méconnue concomittante

ROLE DU DRAINAGE: toute surface cruentée et de large décollement devrait être


drainée largement. Toutefois l’absence de liquide dans le drain, n’exclut pas
l’hémorragie (surtout si elle est intra-luminale).
Le drain lui-même si mal placé, peut être source d’hémorragie en provoquant de véritables
escarres d’organes ou de vaisseaux.

1) Les iléus post-opératoires:

NORMAL: Toute ouverture du péritoine altère le péristaltisme normal.

Il faudra environ 24h pour l’estomac, 1h pour le grêle s’il n’a pas été touché, 6h s’il a été
manipulé, 24h après vagotomie et 48h pour le côlon.
Cas particulier: dilatation aiguë de l’estomac. Peut survenir après toute laparo-
tomie. Se manifeste vers le 2è jour post-opératoire par des vomissements biliaires très
importants, altération de l’état général. Amélioration spectaculaire dès la mise en place d’une
sonde naso-gastrique.

MEDICAMENTEUX: narcose, opiacés, anti-dépresseurs

METABOLIQUE OU REFLEXE: correspond à une grosse distenstion abdominale, sans


véritable douleur, absence de bruits intestinaux. La Radiographie montre une dilatation grêle et
colique avec de l’air jusque dans le rectum.
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Chirurgie digestive 327

Causes: Hypokaliémie
Interventions rétro-péritonéales (sympathectomies, vasculaires, rénales)
Péritonite
Hémopéritoine

TRAITEMENT: causal
Aspiration gastrique
Prostigmine et lavement doux

INFECTIEUX: la péritonite post-opératoire peut se présenter de deux manières


différentes:
- évolution lente, sans signes locaux mais plutôt fébricule, petite tension, tendance à
l’oligurie et troubles respiratoires. Aucune reprise du transit. Après environ 10 jours d’évolution, on se
trouve devant la formation d’adhérences solides pouvant entraîner un iléus mécanique.
- Installation brutale autour du 5è – 7è jour avec signes généraux alarmants. Correspond
souvent à un lâchage d’anastomose.

MECANIQUE: lorsqu’il survient précocement, correspond le plus souvent à une anse


grêle ou colique incarcérée ou étranglée dans un orifice anormal créé par l’opération: couloir
iliaque, brêches du mésentère ou du méso-colon. Survient aussi sur une anse anastomotique
coudée ou tordue sur elle-même.

Clinique: vomissements fécaloïdes, absence de transit, anses dilatées à la radio sans air dans le
rectum.

Traitement: ré-intervention
Proscrire la prostigmine.

1) Eviscération:

A distinguer absolument de l’éventration.

Eventration: distension progressive d’une cicatrice dans les mois ou les années qui
suivent l’intervention. Les viscères ne sont jamais extériorisés.

Eviscération: complication précoce redoutable correspondant à un lâchage de la suture


profonde avec issue des viscères entre les bords de l’incision. On distingue
l’éviscération couverte où la peau tient encore mais laisse passer un écoulement
douteux, de l’éviscération pure ou l’intestin est à l’air.
Survient sur les incisions médianes ou autres souvent en terrain infecté.
Mortalité environ 50 % !!

Prévention: fermeture soigneuse


Sanglage abdominal
Éviter les efforts abdominaux
Etat nutritionnel
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Chirurgie digestive 328

1) Douleur

Phénomène subjectif et individuel avec une part psychique certaine (anxiété, au sujet de l’intervention,
crainte de complications, peur de réveiller une douleur).

La douleur est souvent accompagnée d’insomnie et la solution la plus simple consiste à prescrire des
opiacés et des tranquilisants. Cela va aboutir à un cercle vicieux avec mauvaise reprise du transit,
troubles respiratoires, alitement. L’idéal serait de rassurer le malade de lui faire comprendre sa douleur
et mieux l’accepter et d’éviter ainsi l’excès médicamenteux.

Ne pas oublier tout de même que la douleur peut être le symptôme d’une complication.

6) L’ictère post-opératoire:

Les causes sont multiples et le diagnostic souvent difficile. La distinction se fait entre un ictère
obstructif et un ictère mixte ou libre.

Causes de l’ictère obstructif :


- calcul résiduel
- plaie de la voie biliaire
- oedème de la papille
- poussée de pancréatite
- ictère cholostatique médicamenteux

Causes de l’ictère mixte ou libre :


- décompensation cirrhotique
- poussée d’hépatite
- cholangite
- résorption de sels biliaires en cas de fuite biliaire
- hémolyse
- accident transfusionnel

L’ictère d’origine infectieuse tel qu’on le trouve dans la cholangite, les abcès intra-hépatiques ou une
sepsis, est souvent accompagné de fièvre et d’un état toxique.

Après toute intervention d’une certaine importance ayant nécessité des transfusions, il faut
penser à l’hémolyse comme premier diagnostic. Outre les examens de laboratoire, le scan et
l’ultrasonographie sont très utiles. Il faut parfois recourir à la cholangiographie transcutanée pour
arriver au diagnostic.

7) Les pancréatites post-opératoires:

C’est la complication redoutée et redoutable de la chirurgie biliaire et dans une moindre mesure
gastrique. Elle peut malheureusement survenir dans n’importe quelle intervention. Les causes en sont
multiples: extraction d’un calcul résiduel difficile avec manipulations sur la papille et notamment une
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Chirurgie digestive 329
dilatation ou une sphinctérotomie, ligature “trop à droite” avec sténose du cholédoque, chirurgie de
l’ulcère duodénal difficile par oedème de la papille voire lésion. Les symptômes sont ceux de la
pancréatite aiguë: la douleur est inconstante mais iléus, oligurie, fièvre, tachycardie, hypotension,
ictère. Au moindre soupçon de pancréatite, il faudra doser l’amylasémie et répéter l’examen. Il faudrait
même la doser chaque fois qu’un geste technique ou qu’une difficulté opératoire peut laisser entrevoir
une telle complication. Une amylasémie normale n’exclut pas le diagnostic. Une amylasémie élevée ne
l’affirme pas; en effet, une fuite grêle ou biliaire peut faire une élévation transitoire de l’amylase.

L’évolution dépend directement du type de pancréatite:


- oedémateuse, l’évolution et le pronostic sont favorables
- nécrosante, elle rejoint le pronostic de toute pancréatite nécrosante : 50 % de mortalité.

Réanimation intensive, réintervention pour nettoyer les nécroses (ni trop tôt, ni trop tard). Les
patients décèdent de complications pulmonaires (poumon de choc) ou hémorragiques ou rénales.

7) Complications pulmonaires:

C’était pendant longtemps la complication la plus redoutée du chirurgien. La “pneumonie post-


opératoire” était la première cause de mortalité dans les suites de laparotomies. Elles frappaient 40 %
des opérés avec une mortalité de 20 % !!

Après avoir incriminé tous les facteurs possibles, on en est arrivé à une évidence:
l’encombrement bronchique.

La toux et l’expectoration sont les mécanismes de défense contre ce phénomène; la narcose et


les sédatifs post-opératoires diminuent le réflexe de toux.

Si les sécrétions abondantes deviennent suffisamment épaisses et obstructrices, on arrive à la


formation du bouchon muqueux et de l’atélectasie.

Ce n’est que secondairement qu’une infection peut s’installer. La préparation pré-opératoire


acquiert toute son importance avec bilan pré-opératoire permettant de dépister une insuffisance
respiratoire et de préparer au mieux le patient (physio). Il faut se rappeler, qu’une incision médiane
peut diminuer les fonctions respiratoires de 40 %.

Ne pas oublier que l’apparition tardive d’une insuffisance respiratoire aiguë peut être le seul
signe d’une complication intra-abdominale (péritonite).

7. La rétention urinaire:

Il faut déterminer s’il s’agit d’une rétention banale


d’une anurie
d’une atteinte des voies d’excrétion.

Il est évidemment primordial de distinguer l’anurie du globe vésical banal. Parfois, il est
nécessaire de procéder à un sondage pour que les choses soient claires.

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Chirurgie digestive 330
La rétention urinaire est souvent liée à la difficulté d’uriner au lit, à la distension vésicale, à la
décompensation d’un prostatisme pré-existant.

Garder à l’esprit que le cathétérisme uréthral n’est pas un geste banal: lésions uréthrales avec
sténoses tardives (souvent très difficiles à traiter), fausses routes, infections. Il est possible que le
drainage sus-pubien améliore les choses mais il peut être malaisé (paroi cicatricielle, absence de
globe).

Pour mémoire, à rappeler que l’anurie du sujet laparotomisé est souvent due à un problème de
volume circulant. Des viscères à l’air offrent une énorme surface d’évaporation qui n’est pas toujours
suffisamment compensée.
Les risques de lésion des voies excrétrices sont grands dans la chirurgie colo-rectale et pour cela sont
rares car tout chirurgien y est particulièrement attentif.

8. Le hoquet:

Peut survenir en tant que phénomène isolé ou en tant que symptôme d’une complication (abcès
sous-phrénique, irritation péritonéale). Fatigue beaucoup l’opéré. Remèdes variés pas toujours
efficaces.
Le plus souvent disparaît seul.

III. PROBLEMES SPECIFIQUES

1) Les gastrectomies:
Hémorragies: se méfier de l’hémorragie intra-luminale (présence de sang frais à l’aspiration gastrique)

En présence d’un hémopéritoine, il faut penser au lâchage d’une ligature sur l’épiploon ou à
une hémostase incomplète (patient hypotendu qui retrouve une pression normale au réveil)
Attention aux lésions de la rate par un écarteur ou par arrachage d’un vaisseau court.
Fuite ou lâchage du moignon duodénal: principale cause de mort après gastrectomie.
Se présente comme une douleur subite suivie d’un état de choc avec fièvre, ictère.

Ecoulement de bile par le drain.


Causes: ischémie du moignon anastomosé
Infection (néo)
Traitement: aspiration gastrique
Drainage large
Protéger la peau pour éviter l’auto-digestion
Nutrition parentérale totale
Ictère obstructif: oedème du moignon duodénal
Poussée de pancréatite aiguë.

1) Chirurgie colo-rectale

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Précédemment la chirurgie colo-rectale se faisait en plusieurs temps.
Ablation de la lésion avec colostomie puis reprise pour rétablir la continuité. Actuellement, grâce aux
techniques de préparations coliques, on réalise de plus en plus de chirurgie en un temps. Les risques
sont avant tout d’ordre septique:
- abcès localisés
- abcès de paroi
- fuite anastomotique qui peut être dirigée (d’où l’importance de laisser un drain en place la
première semaine), ou fuite en péritoine libre (péritonite), lâchage d’anastomose: redoutable, patient
toxique, traité par drainage-lavage large colostomie de décharge et antibiothérapie.

1) Chirurgie biliaire:
Hémorragies: lâchage de la ligature de l’artère cystique
Lésion de la branche artérielle de la branche hépatique droite dit vésiculaire
Attention aux hématomes sous-hépatiques qui finissent par se surinfecter.
Fistule biliaire: lâchage de la ligature sur le cystique
Plaie ignorée des voies biliaires
Attention à l’iléus et à la péritonite biliaire.

Pancréatites: manipulation de la voie biliaire avec lésion ou oedème papillaire.


Ictère : sténose du cholédoque, lithiase résiduelle.

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Chirurgie digestive 332
CHAPITRE VI : LE DRAINAGE EN CHIRURGIE DIGESTIVE

DRAINAGE

Le drainage en chirurgie abdominale est un problème périodiquement débattu, comportant des


interrogations qui ne sont que partiellement résolues. Ces incertitudes sont en grande partie liées à une
conception traditionnelle sans support scientifique du drainage, ainsi qu'à un manque de rigueur
fréquent dans la description, la manipulation et les indications des différents types de drainage qui
apparaissent alors encore trop souvent utilisés "par habitude".

Disons d'emblée que, si le drinage s'impose dans certaines situations relativement rares, il y en
a d'autres où son utilisation systématique est inutile, voire nocive. Pour éclaircir ce débat, il faut tout
d'abord définir de manière précise les termes utilisés.

Le drain (anglais "to drain": faire écouler) a pour objectif essentiel l'évacuation d'une collection
liquidienne, plus accessoirement et plus discutablement la "protection" de certaines anastomoses. Le
matériel utilisé est varié, qu'il s'agisse de mèches, de lames ondulées, de tubes de caoutchouc, de
matière plastique ou de toute autre substance, qu'il s'agisse de tubes simples ou à plusieurs lumières
avec ou sans inclusion de mèches: associés ou non à un lavage, tous ces matériaux doivent répondre à
certains critères:
- ils doivent être mous, malléables, pour éviter une pression sur les vaisseaux ou les viscères pouvant
être à l'origine d'ulcérations;
- ils doivent être non irritants pour les tissus au contact et n'induire qu'une réaction adhérentielle
aussi minime que possible à leur contact, afin d'éviter leur oblitération précoce: caoutchouc et chlorure
de polyvinyle ont, de ce fait , cédé la place au silicone, mieux toléré et plus inerte; seule la recherche
d'un cloisonnement au pourtour du foyer à drainer justifie encore l'utilisation d'un tamponnement par
mèches (sac de Mikulicz);
- ils doivent être stables dans leur composition et ne pas se décomposer au contact des liquides
digestifs;

Matériaux utilisés

Le matériel utilisé doit satisfaire à ces différents impératifs.

- Tubes et lames de caoutchouc, jadis classiques, sont pratiquement abandonnés. En dehors du


drainage d'une collection suppurée parfaitement cloisonnée, par analogie avec une collection abcédée
des parties molles, un tel drainage passif apparaît désormais contre-indiqué.

- Le drainage de Jost-Redon relie directement la zone drainée à une source de vide, mais en
perforant la peau à distance de la plaie opératoire pour obtenir une étanchéité parfaite du revêtement
cutané. Très utile pour supprimer les espaces morts, certains auteurs le déconseillent pour drainer la
cavité abdominale elle-même, par crainte de l'attraction d'un viscère et/ou d'un fragment d'épiploon.
- La lame de Yeats, multitubulaire en silicone, permet un meilleur drainage par la lumière de ses fins
tubes juxtaposés, mais également le long de sa surface externe, à la façon d'une lame ondulée. Il est
toutefois possible d'y adjoindre une aspiration et/ou une irrigation sur l'un ou l'autre de ces tubes.

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Chirurgie digestive 333
- Le drain tubulaire aspiré, protégé et entouré par une lame ondulée n'est qu'un compromis mi-
passif, mi-actif. Il laisse couler au niveau de l'orifice cutané, faisant également orifice de prise d'air,
une partie des sécrétions et simultanément, permet l'aspiration par son tube central tant du contenu de
la cavité profonde que d'une partie des "bavures" orificielles.

- Les drains aspirés, les plus propices au drainage de la cavité abdominale, sont semblables à une
crépine chirurgicale. Ils comportent une tubulure centrale liée à une source d'aspiration et une tubulure
externe de protection, évitant ainsi toute succion des viscères grâce à la circulation d'air s'effectuant
entre les deux tubulures. A côté des drains de Saratoga (monoblocs moulés, à extrémité distale fermée)
et de Baraya (possèdant une mèche hydrophile dans l'espace situé entre les deux tubulures et débordant
l'extrémité distale) sont apparus trois modèles de drains en Silastic ®, préconisés et mis au point par
Vankemmel, correspondant à un "ensemble évolutif" permettant de s'adapter aux différentes situations
existantes ou pouvant survenir dans la période de surveillance postopératoire:
- drain abdominal aspiré simplifié: DAAS (avec circulation d'air évitant toute succion);
- drain abdominal aspiré capillaire: DAAC (avec filtre hydrophile interposé entre les deux
tubulures);
- drain d'irrigation-lavage: DIL (avec en complément un cathéter d'irrigation inclus dans la tubulure
externe).

Souples, transparents et en silicone, ces drains sont totalement démontables et réadaptables. En


cas d'obstruction fibrineuse de la tubulure centrale, il est possible d'ôter et de réadapter une nouvelle
tubulure centrale stérile prévue par DAAS ou DIL. Eventuellement, il est également possible d'ajouter
un cathéter d'irrigation sur un DAAS ou d'effectuer son remplacement par un DIL.

Enfin, parmi les drains aspirés, citons le drain de Shirley constitué par un tube double, dont le
tube externe de petit calibre permet l'entrée d'air qui repart par le tube principal. La prise d'air est
contrôlée à l'aide d'un filtre microbien. Ce matériel de grande efficacité est souple et bien toléré.

Modalités de drainage

- Drainage passif

Utilisé sous forme de lames ondulées, de lames entourant une mèche (Penrose), de tubes, il
s'agit d'un drainage ouvert à l'extérieur avec le risque d'une contamination rétrograde à partir des
germes cutanés. Il peut néanmoins être transformé en système clos par application d'une poche de
recueil stérile.
Le drainage passif fonctionne par débordement du trop-plein et est fortement influencé par les
pressions intra-abdominales. Placé dans la partie supérieure de l'abdomen, ce drainage est relativement
efficace à cause de la faible pression qui règne dans l'espace sous-phrénique pouvant entrainer, au
moment de l'expiration, un courant de l'extérieur vers la cavité péritonéale. Ainsi, ce drainage
fonctionne d'une manière intermittente en relation avec l'augmentation de la pression intra-abdominale.
Il a par ailleurs été démontré expérimentalement qu'après 24 heures un tel drain est partiellement exclu
par accolement de l'épiploon; 48 heures plus tard, cette exclusion est totale, le drain est alors
entièrement isolé de la cavité péritonéale.

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Chirurgie digestive 334
Ce type de drainage passif est surtout satisfaisant pour l'évacuation de petites quantités de sang,
de pus ou d'autres collections au niveau de la partie basse de l'abdomen. L'adjonction d'une mèche
(Penrose) ajoute un élément de drainage capillaire, mais insuffisant pour parler de drainage actif.

Placé au voisinage d'une zone anastomotique, il crée une zone de moindre résistance permettant
à une collection intra-abdominale éventuelle de s'extérioriser.

- Drainage actif

Il est beaucoup plus efficace et s'impose dans certaines circonstances. Il se présente sous deux
formes:

- Le drainage aspiré avec prise d'air ("sump-drainage" des Anglo-Saxons) comporte un système
d'aspiration centrale relié à une source de vide avec une prise d'air qui permet de moduler la
dépression. La situation centrale de l'aspiration permet d'éviter le ventousage des orifices du drain par
les viscères voisins. La dépression ne doit pas être trop forte (environ -50 à -100mm de mercure) si l'on
veut éviter les risques d'une contamination par les germes de l'air ambiant ou cutané. Une surveillance
rigoureuse de ce système de drainage s'impose pour éviter l'obstruction de la lumière du drain par des
caillots de fibrine:

- Le drainage aspiré étanche ("closed suction" des Anglo-Saxons) est essentiellement représenté par
la technique de Jost-Redon et ses variantes. Tout d'abord essentiellement appliquée dans la chirurgie
entraînant de gros décollements cutanés, cette technique est actuellement très fréquemment utilisée en
situation intrapéritonéale.

- Enfin, citons le drainage-lavage: il associe au drainage classique une irrigation focalisée du foyer à
drainer. Il comporte d'une manière schématique un tube en polyéthylène multiperforé à une extrémité
et muni d'un embout à l'autre extrémité, lui permettant d'être adapté sur une aspiration ou une perfusion
par l'intermédiaire d'un raccord.

Ces drains sont placés sous dépression de 100 à 200 cm2 d'eau. La solution d'irrigation est
variée: sérum physiologique avec ou sans antibiotique, solution antiseptique. Ce dispositif de drainage
doit être l'objet d'un bilan quotidien d'entrée et de sortie. Leur entretien comporte la traite
pluriquotidienne des tuyaux pour éviter leur obstruction par des caillots de fibrine. La quantité totale
de liquide perfusé par 24 heures varie entre 2 et 3 litres.

Une technique particulière constitue à inverser toutes les 12 heures le fonctionnement du


drainage, le couple de lavage devenant alors aspiratif et vice versa. Ce type de lavage est poursuivi en
principe 5 à 6 jours puis laissé 24 heures en aspiration simple, sans lavage, avant d'être enlevé.

Technique

Tout en étant très variables, les modalités techniques de la mise en place d'un drain doivent
obéir à un certain nombre de principes:
- Le drainage ne sortira jamais à travers la ligne d'incision mais par une contre-incision;
- Le drainage ne doit pas être en contact direct avec une anastomose;

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Chirurgie digestive 335
- L'orifice de drainage se situera sur le bord latéral du muscle droit pour éviter la blessure des
vaisseaux épigastriques;
- L'orifice de drainage sera suffisamment large pour éviter un étranglement du drain;
- Le trajet du drain sera toujours le plus direct et il faudra éviter toute coudure par décalage des plans
pariétaux;
- En cas de drain multiperforé, il faut veiller à ce qu'aucune perforation ne siège dans la traversée
pariétale;
- Tout drain doit être soigneusement fixé au plan cutané;
- Le drainage sera enlevé le plus tôt possible, en général 24 heures après l'arrêt de sa production; en
cas de drainage prophylactique, celui-ci doit être laissé plus longtemps car les incidents
anastomotiques se produisent vers le 8è-10è jour;
- Une main placée dans la cavité péritonéale soulève la paroi puis l'on incise franchement la peau, le
sous-cutané, l'aponévrose, le muscle mais pas le péritoine: il faut éviter la dilacération des plans
pariétaux; l'incision du péritoine se fera sur une pince: l'orifice de drainage doit admettre le passage
d'un doigt;
- Le drain sera toujours placé de dedans en dehors.

Complications du drainage

Un drain placé au contact d'une anastomose peut indiscutablement favoriser l'apparition d'une
fistule. En général, l'écoulement stercoral survient au moment de l'ablation du drain.

Une hémorragie peut survenir lors de la traversée des plans pariétaux. Celle-ci peut être
particulièrement importante s'il s'agit d'une blessure d'un vaisseau épigastrique et peut se faire aussi
bien vers la cavité péritonéale que vers l'extérieur ou même infiltrer largement les plans pariétaux.

Un drain mal placé au contact ou à proximité du gril costal peut être à l'origine de douleurs
relativement importantes au moment de l'inspiration et favoriser la survenue de complications
pulmonaires postopératoires.

Si l'incision de drainage est trop petite, la compression exercée par un tube de drainage peut
entrainer une nécrose cutanée localisée.

Une incision de drainage trop large pourra entraîner une issue viscérale lors de l'ablation du
drain ou, par la suite, être à l'origine d'une éventration.

Une aspiration trop importante sur un drain multiperforé peut être responsable d'une pénétration
partielle de la paroi viscérale dans le drain qui, lorsqu'il sera retiré, peut être responsable d'une
perforation viscérale.

Un drain mal fixé peut rapidement être aspiré à l'intérieur de la cavité abdominale.

Un drain peut être arraché par inadvertance: la remise en place de ce drain doit être prudente et
uniquement effectuée si la clinique l'impose.

Le drain peut être une porte de pénétration microbienne. Ce risque est moins important lors
d'un drainage en système clos par rapport au drainage simple.
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Chirurgie digestive 336

Conditions d'un bon drainage

Le drainage doit être déclive, c'est-à-dire se situer là où les liquides se collecteront du fait de la
pesanteur, en tenant compte de la position de l'opéré. Sur le sujet couché, la cavité abdominale
présente deux fosses où peuvent se rassembler les liquides: les hypocondres; le trop-plein glissera vers
le Douglas. Sous les coupoles, la dépression est négative à cause de l'aspiration thoracique et ces
régions représentent ainsi un point d'appel pour les collections liquidiennes. Du fait de l'existence
d'une hyperpression au niveau de la cavité abdominale, avec des à-coups tensionnels, un drain, même
mal placé, peut néanmoins fonctionner.

Le drainage doit être direct et ne jamais utiliser de voie détournée.

Le drain doit être effectif, c'est-à-dire que le drain doit avoir un calibre suffisant, être perméable
et relié à une source d'aspiration si possible.

Indications du drainage

- Le drainage thérapeutique est indiscuté en présence de matériel nécrotique purulent ou de fistule.

- Le drainage prophylactique est discutable dans son principe même. Son objectif est de créer une
cheminée de moindre résistance par laquelle s'évacueront d'éventuelles collections postopératoires et
par laquelle s'extériorisera une fistule digestive.

Drainage en chirurgie colique

Le drainage prophylactique en chirurgie colique est un sujet controversé. Pour certains il est de
règle pour d'autres ses inconvénients s'opposent à un usage systématique.

- Les arguments en faveur du drainage colique sont essentiellement de deux ordres.

Evacuer tout épanchement de sang, de lymphe qui se collecte autour de l'anastomose et cela
dans la cavité pelvienne dont la rigidité ne permet pas aux parois de se collaber. Un suintement, même
imperceptible, constaté en fin d'intervention et qui paraît alors négligeable, risque de s'aggraver dans
les jours post-opératoires, entraînant un hématome pelvien. De même, les curages ganglionnaires
ouvrent largement les voies lymphatiques; la lymphostase est toujours imparfaite et une lymphorrhée
est fréquente, sinon constante, dans les suites opératoires. Cette accumulation de sang et de lymphe
constitue un milieu de culture idéal qui va retentir sur la solidité de l'anastomose.

Le drainage assure un "regard" sur la région opératoire et avertit de l'apparition d'une désunion
anastomotique. Il joue ainsi le rôle d'une soupape de sécurité. Toute anastomose colo-rectale, même
parfaite, qu'elle soit réalisée manuellement ou mécaniquement, comporte un risque certes négligeable
mais pas nul de désunion. L'apparition par le drainage d'un écoulement purulent, et à fortiori stercoral,
est une indication précieuse qui permet de prendre à temps la décision thérapeutique appropriée. Si,
comme dans la grande majorité des cas, cet écoulement ne s'accompagne d'aucun signe d'irritation
péritonéale, le drainage constitue à lui seul le geste curateur en permettant l'évacuation vers l'extérieur
des produits de la fistule.
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Les incidents anastomotiques survenant en général vers le 6è-8è jour, le drain devra être laissé
en place assez longtemps et dépasser la date de la reprise du transit.
- Arguments contre le drainage systématique

Un des objectifs du drain est de permettre l'évacuation des sérosités qui s'accumulent autour de
l'anastomose, mais n'oublions pas les importantes capacités de résorption de la séreuse péritonéale qui
est largement à même d'assécher le foyer opératoire.

La mise en place d'un drain devant permettre l'évacuation vers l'extérieur d'une possible fuite
anastomotique ne peut être retenue sans arrière-pensée. De nombreux travaux expérimentaux ont
montré qu'au bout de 24 heures un drain est totalement isolé de la cavité péritonéale. Or, la fuite
anastomotique survenant vers le 8è-10è jour n'est donc pas toujours "protégée" par le drain.

La mise en place d'un drain à proximité d'une anastomose favorise sa désunion. Ellis a bien
montré que toute séparation physique d'une anastomose vis-à-vis de la défense péritonéale est une
source de désunion, car elle empêche les adhérences et les accolements qui se produisent très
rapidement au niveau de la zone opératoire.

Connaissant l'excellent milieu de culture représenté par tout épanchement périanastomotique et


l'effet désastreux d'une infection sur la cicatrisation d'une anastomose, on conçoit d'emblée les risques
entraînés par un drain.

- Si l'on draine, comment faut-il effectuer ce drainage ?

Le choix dépend de la situation du foyer opératoire ainsi que des buts à atteindre.

Le drainage par lame, drainage passif, est principalement efficace lorsqu'il est placé en position
déclive, or cela nécessiterait, dans le cas d'une chirurgie pelvienne, un drainage par voie périnéale, ce
qui n'est guère réalisé. Placées plus haut, les lames ne seront que partiellement efficaces et agiront
uniquement par regorgement en évacuant le trop plein de liquide sous l'effet des variations de pression
intra-abdominale. Ce type de drainage est par ailleurs celui qui est le plus fréquemment responsable de
fistules, car entravant les processus de cicatrisation en empêchant la formation d'adhérences
périanastomotiques. Il comporte par ailleurs un risque d'infection rétrograde.

Le drainage aspiratif est plus efficace et peut drainer une cavité plus bas située. Il peut être
associé à un drainage capillaire par mèches. Le système d'aspiration centrale permet d'éviter le
ventousage par les viscères voisins et la prise d'air permet d'effectuer une dépression mesurée et non
dangereuse au contact de l'anastomose. La dépression ne doit pas être trop forte (50 à 100 mm de
mercure) si l'on veut éviter une contamination des germes de l'air ou de la peau.

Le drainage aspiré, étanche, du type Jost-Redon peut également être utilisé pour drainer la
cavité pelvienne. Ce type de drainage permet d'aspirer de grandes quantités de liquides et supprimer
l'espace mort entre l'anastomose et la concavité sacrée. On lui reproche quelquefois une dépression
trop importante et non contrôlée, ainsi que son petit calibre incapable d'organiser un trajet utilisable en
cas de fuite anastomotique.

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Le drainage aspiratif avec irrigation continue: l'irrigation permet d'éviter la formation de
caillots dans la cavité sacrée et favorisera leur élimination. Cette irrigation a par ailleurs un effet
mécanique de lavage et également une action antibiotique grâce à l'adjonction d'antibiotiques
appropriés. Par ailleurs, ce lavage diminue les risques traumatiques liés à l'aspiration qui doit être
modérée et se fera habituellement sous une dépression de 100 cm d'air.

- En conclusion, nous pensons qu'il est inutile de drainer une anastomose en situation
intrapéritonéale. Dans ces conditions, un drainage sera plus nocif qu'utile. En cas d'anastomose colo-
rectale sous-péritonéale, un drainage aspiratif du type Redon placé de part et d'autre de l'anastomose
diminue l'accumulation de sérosités autour de l'anastomose. Un tel drainage est en général supprimé au
bout de 24 à 48 heures.

Drainage biliaire

Le drainage systématique du lit vésiculaire après cholécystectomie simple, préconisé dans tous
les traités de techniques chirurgicales, enseigné dans les cours de chirurgie, est-il réellement nécessaire
?

La remise en cause du drainage prophylactique après cholécystectomie à froid se justifie par la


réponse aux deux questions suivantes: le drainage est-il nécessaire et efficace ?

- Nécessaire ?

L'objectif d'un drain sous-hépatique est de permettre l'évacuation d'un éventuel épanchement
bilio-sanguin au niveau du foyer opératoire. Un petit épanchement bilieux sous-hépatique est possible
après cholécystectomie et s'explique par l'existence de canaux biliaires accessoires, en général hépato-
vésiculaires. Ces canaux accessoires sont toujours de petit calibre et leur ouverture obligatoire au cours
de la cholécystectomie n'a que peu de conséquence. Ce risque est encore réduit par une technique
opératoire minutieusement renforcée par la pratique de la radiomanométrie, qui permet de déceler et de
traiter toute hyperpression concomitante des voies biliaires.

La fréquence et la quantité de cet épanchement postopératoire ne sont pas connues avec


exactitude, mais leur réalité est attestée par les études échographiques qui montrent la présence d'une
collection liquidienne sous-hépatique chez 20 % des cholécystectomisés non drainés, contre 5 %
lorsqu'existe un drainage. Cet épanchement est rapidement résorbé par la séreuse péritonéale et montre
l'inutilité d'un drainage systématique.

En définitive, les potentialités de résorption de la séreuse péritonéale viennent facilement à bout


d'un possible épanchement bilio-hépatique, et n'imposent pas un drainage systématique.

- Efficace ?

Le drainage représente une fausse sécurité car le drain est rapidement isolé et son efficacité
devient alors douteuse.

L'efficacité d'un drainage comme témoin d'un incident postopératoire est souvent illusoire, et le
drain ne doit en aucun cas être considéré comme le substitut d'une opération imparfaite.
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Chirurgie digestive 339

Le drain a-t-il des inconvénients ? Il faut reconnaître que ces inconvénients sont mineurs et
représentés essentiellement par la possibilité de manifestations pulmonaires en rapport avec l'inconfort
du drain qui gêne les efforts respiratoires.

En conclusion, si les inconvénients du drainage après cholécystectomie simple doivent avant


tout être considérés comme constituant un inconfort léger, son utilité, voire son efficacité, est loin
d'être prouvée, et c'est pour cette raison que nous pensons que le drainage de principe après
cholécystectomie à froid constitue un geste de routine non indispensable. Lorsque l'intervention s'est
déroulée normalement avec un lit vésiculaire intact, une voie biliaire libre, un champ opératoire sec, il
n'y a aucune raison de drainer. Par contre, ce drainage reste nécessaire lorsque les impératifs ci-dessus
ne peuvent être respectés, à fortiori, lorsqu'il s'agit d'une vésicule suppurée ou lorsqu'un geste au
niveau de la voie biliaire principale s'est avéré nécessaire.

S'il y a recours à un drainage, celui-ci sera avant tout du type aspiratif (genre Redon) et
plusieurs travaux ont montré la supériorité de ce drainage aspiratif sur le drainage par simple lame.

Drainage après chirurgie splénique

Ce drainage est réalisé par un drain tubulaire perforé latéralement et qui se situe
postérieurement sous le diaphragme en arrière de l'angle colique gauche. Ce drain est ensuite
extériorisé de façon déclive sur la ligne axillaire moyenne, au-dessus de la crête iliaque gauche.
Certains lui font subir un trajet sous-péritonéal pour éviter tout contact du matériel de drainage avec les
anses intestinales.

La déclive, les mouvements respiratoires, la toux assurent l'évacuation de la loge splénique qui
sera également favorisée par une aspiration douce.

Le drainage systématique de la loge splénique après splénectomie est actuellement remis en


question. Il semble superflu de drainer l'hypocondre gauche après une splénectomie réglée.

Drainage après chirurgie gastro-duodénale

Le drainage prophylactique en chirurgie gastro-duodénale est également un sujet controversé.


Pour notre part, nous pensons qu'il est inutile dans la majorité des cas de drainer une anastomose
gastro-jéjunale. Lorsque ce drainage nous paraît souhaitable (chirurgie des ulcères compliqués, aspect
inflammatoire d'un moignon duodénal), nous utilisons de préférence un drainage aspiratif du type
Redon que nous laissons en place 48 à 72 heures. Cette attitude n'est cependant pas partagée par la
majorité des chirurgiens qui restent favorables au drainage de principe. Dans ce cas, il semble
préférable d'utiliser un Redon aspiratif, un drain capillaire aspiré.

Drainage de la cavité péritonéale

- le drainage d'un abcès, ou de toute autre collection ou d'une zone cruentée inflammatoire, est
indiscutable;

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- le drainage prophylactique du péritoine, pour évacuer une production liquidienne ou orienter une
fistulisation, est beaucoup plus discutable.

Certains auteurs ont bien montré qu'au bout de 6 heures tout drain placé dans la cavité
péritonéale est totalement exclu et ne remplit donc plus ses fonctions. Un travail expérimental a
démontré bien qu'après un à deux jours plus aucun drain ne recueille du liquide coloré injecté dans le
péritoine, et l'on a conclu à l'impossibilité physique et physiologie de drainer correctement une cavité
péritonéale.

En principe, si le foyer initial, cause de la péritonite, a été supprimé et qu'une voie d'abord
suffisamment large a permis un lavage complet de tous les recoins péritonéaux, il paraît souhaitable de
ne pas drainer, les capacités de résorption péritonéale étant alors suffisantes.

Lorsqu'un drainage est utilisé, on aura recours à du matériel en élastomère de silicone placé soit
près du foyer de déclenchement, soit pour certains au point de stagnation en décubitus dorsal (espaces
sous-phréniques, cul-de-sac de Douglas et gouttières pariéto-coliques). Un système d'irrigation-lavage
peut aussi être choisi, apportant le liquide au sommet de la cavité péritonéale et le recueillant dans les
gouttières pariéto-coliques et le cul-de-sac de Douglas. Un antiseptique (polyvinyle-pyrolidone) peut
être éventuellement ajouté au liquide de lavage isotonique. L'entretien de l'irrigation-drainage
comporte: la traite pluriquotidienne des tuyaux, la montée de cathéter d'irrigation dans les drains
paraissant exclus de la grande cavité. La durée moyenne d'utilisation de ce système est de l'ordre de 7
jours. Le contrôle quotidien indispensable est simple: bilan des entrées et des sorties, poids corporel,
volume des urines, hématocrite, protides et natrémie.

Certains auteurs sont cependant réservés vis-à-vis de l'irrigation-lavage, dont le risque est de
créer une dissémination autour d'une cavité initiale bien cloisonnée lorsque le système fonctionne mal.
Une variante consiste en un lavage repéré du drain par injection d'un liquide isotonique, ce qui permet
de "reperméabiliser" un drain et de contrôler également immédiatement l'évacuation du liquide injecté.

Que le drainage soit simple, aspiratif ou en irrigation, ni son ablation ni sa mobilisation ne


doivent être faites avant reprise franche du transit.

Par définition, l'existence d'une loge ou d'une cavité abcédée implique le retrait progressif des
drains, voire leur changement secondaire en diminuant leur calibre, ou un méchage tassé de façon
dégressive pour permettre un affaissement de la cavité évacuée, avant que l'orifice cutané de drainage
ne se soit totalement fermé.

Drainage des espaces dépéritonisés, cruentés

Dans cette éventualité, un drainage aspiratif est souhaitable. Il lutte contre les suffusions
hématiques et séro-fibrineuses à partir de la surface dépéritonisée. Celle-ci pourrait être source
d'infection conduisant à une abcédation profonde ou tout simplement à la fragilisation d'une ligne
d'anastomose située à proximité. Un drainage aspiratif par drain tubulaire multiperforé est suffisant, ce
drainage étant supprimé dès que le produit d'aspiration a un aspect séreux et ne dépasse pas 100 ml.

Conclusion

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Tout drainage doit être placé à bon escient et surveillé avec rigueur. Le drainage prophylactique
de la cavité péritonéale, à la surface d'intervention sur le tube digestif et les viscères creux, apparaît
superflu dans la plupart des cas.

Le drainage est absolument nécessaire quand on se trouve en présence d'un abcès, d'une zone
dépéritonisée et cruentée. C'est plutôt sur le mode de drainage et sur le matériel à utiliser que le choix
peut être difficile: drainage simple, aspiratif, avec ou sans irrigation, mèche. En fait c'est une affaire de
cas particuliers et d'habitudes de la part du chirurgien.

On ne peut pas dire "je ne draine jamais" et il ne faut pas non plus dire "je mets toujours un
drain". Il existe des complications liées au drainage, celles-ci seront d'autant plus regrettables que le
drainage ne s'imposait pas. Nous n'oublierons pas non plus que le drain est une fenêtre ouverte sur
l'environnement et peut propager l'infection de dehors en dedans. Le drainage peut également jouer un
rôle dans l'apparition d'une fistule anastomotique par traumatisme local. Tout drainage doit être
surveillé et un drain qui ne donne plus rien est inutile, voire dangereux, il faut l'enlever.

Le péritoine est la plus extraordinaire séreuse de l'organisme. Il possède des


caractéristiques spécifiques et des capacités de défenses propres qui conditionnent son
rôle vis-à-vis des infections diffuses: surface considérable, mobilité permanente, pouvoir
de migration, de multiplication, de sécrétion et d'absorption. Une meilleure connaissance
de ses propriétés permet actuellement de limiter les indications de drainage de la grande
cavité après chirurgie abdominale. De même, la reconstitution du péritoine en fin
d'intervention nous semble inutile, sauf pour des indications très particulières, comme la
fermeture des brèches dans les mésos, sources d'occlusion par incarcération d'une anse
grêle, c'est par habitude que nous le faisons systématiquement.

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