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L’économie circulaire

Fabienne Collard
Dans Courrier heBdomadaire du CRISP 2020/10 (n° 2455-2456), pages 5 à
72 Éditions CRISP
ISSN 0008-9664
ISBN 9782870752395
DOI 10.3917/cris.2455.0005

© CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

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Courrier hebdomadaire
n° 2455-2456 • 2020

L’économie circulaire

Fabienne Collard

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Courrier hebdomadaire
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34
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ISSN 0008 9664
TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION 5

1. L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE EN TANT QUE CONCEPT 7


1.1. Les limites de l’économie linéaire 8
1.2. Les contours théoriques de l’économie circulaire 9
1.2.1. Définition 9
1.2.2. Principes 10
1.2.3. Caractéristiques fondamentales 12
1.3. La mise en pratique de l’économie circulaire 13
1.3.1. La conception 13
1.3.2. Le cycle technique 15
1.3.3. Le cycle biologique 24
1.3.4. Les symbioses industrielles 26

2. LA RÉGLEMENTATION EUROPÉENNE 28
2.1. L’étape de réflexion : « Boucler la boucle » (2015) 28
2.1.1. Les cinq secteurs prioritaires 30
2.1.2. Les moyens de financement 33
2.2. De nouvelles règles (2018) 34
2.2.1. Une stratégie sur les matières plastiques 36
2.2.2. Les directives relatives aux déchets, à leur gestion et à leur valorisation 41
2.3. Bilan et perspectives 44
2.3.1. L’évaluation du plan d’action européen 45
2.3.2. Le « green deal européen » 46

3. LA RÉGLEMENTATION FÉDÉRALE BELGE 48


3.1. La feuille de route fédérale (2016) 48
3.1.1. Potentiel économique 49
3.1.2. Mesures et financement 49
3.2. La lutte contre l’obsolescence programmée 51

4. LES RÉGLEMENTATIONS RÉGIONALES


(WALLONIE, BRUXELLES-CAPITALE, FLANDRE) 55
4.1. La Région wallonne 55
4.2. La Région de Bruxelles-Capitale 57
4.3. La Région flamande 58
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5. ÉVALUATION ET ÉTAT DES LIEUX EN BELGIQUE 60
5.1. Utilisation rationnelle des ressources 60
5.2. Gestion durable des déchets 61
5.3. Innovation, création d’emplois et de valeur ajoutée 65

CONCLUSION 67
INTRODUCTION

L’économie circulaire est un modèle économique et industriel qui vise à maintenir


les produits, leurs composants et leurs matériaux en circulation le plus longtemps
possible, tout en veillant à garantir la qualité de leur utilisation. Ce modèle
s’oppose en cela à l’économie linéaire, qui s’appuie quant à elle sur le schéma suivant :
extraction ou récolte des ressources, fabrication et assemblage des biens, distribution et
utilisation, et, enfin, production de déchets. C’est principalement au niveau de cette
dernière étape qu’économie circulaire et économie linéaire s’opposent puisque, dans
la première, les déchets ou produits en fin de vie trouvent une nouvelle utilité (par la
réutilisation, le recyclage, la valorisation énergétique, etc.), tandis que, dans la
seconde, ils sont tout simplement éliminés. Le modèle linéaire rencontrant
aujourd’hui une série de limites importantes (impact environnemental, épuisement
des ressources, etc.), l’idée d’une transition vers un modèle davantage circulaire
rencontre une adhésion sans cesse croissante.
Bien au-delà du seul recyclage, l’économie circulaire englobe l’ensemble des étapes
du processus de production, de la phase de conception d’un produit jusqu’à celle,
ultime, de valorisation des déchets. Il entrevoit également de nouveaux modèles de
consommation, comme l’éco-fonctionnalité. Trois principes sous-tendent l’économie
circulaire. Primo, limiter au maximum l’utilisation des ressources naturelles (que ce
soit pour produire un bien ou pour le maintenir en fonction) et restaurer ces
ressources autant que possible si leur usage est incontournable. Secundo, prolonger la
durée de vie des produits, aussi bien en veillant à cette dimension lors de la
conception des produits qu’en ayant recours aux « boucles de réutilisation » : réparation,
rénovation, revente, mise à jour technologique, retour en usine et, en dernier recours,
recyclage des matériaux et composants (les cycles courts, à savoir ceux qui nécessitent le
moins d’énergie, étant privilégiés). Tertio, et selon une vision très large et même
globale de l’économie circulaire, accroître l’efficacité du système économique dans
son ensemble (dans des domaines aussi variés que l’alimentation, la mobilité,
l’habitat, etc.) et gérer les externalités négatives (comme l’occupation des sols, la
pollution de l’air et de l’eau, la libération de substances toxiques, etc.).
Si le bien-fondé de ces principes est défendu de plus en plus largement, y compris
dans les discours politiques, leur concrétisation fait encore souvent face à d’importants
obstacles (l’exemple le plus emblématique en la matière concernant très certainement
l’utilisation des matières plastiques). Cependant, cette problématique est désormais mise
en avant en raison des enjeux environnementaux qui entourent notre manière de
produire et de consommer et de l’urgence qui existe à y apporter une réponse. © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

Dans un premier temps, le présent Courrier hebdomadaire aborde l’économie


circulaire en tant que concept. Il décrit les contours théoriques de ce modèle
économique, ainsi que les divers visages que prend sa mise en pratique, que ce soit
dans le cycle technique (qui repose sur la production de biens à partir de matériaux)
ou dans le cycle biologique (qui mobilise des ressources organiques). Dans un
deuxième temps, l’étude s’intéresse en trois chapitres aux réglementations mises en
place afin de développer l’économie circulaire : à l’échelon européen, à l’échelon
fédéral belge et aux différents échelons régionaux du pays (Wallonie, Bruxelles-
Capitale et Flandre). Enfin, dans un troisième

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6 L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE

et dernier temps, est proposé un état des lieux actuel de la mise en œuvre de
l’économie circulaire en Belgique.
Par ailleurs, ce Courrier hebdomadaire aborde de manière transversale la question
des nombreux freins qui subsistent encore dans la mise en place d’une économie
circulaire à large échelle, qu’ils soient d’ordre technique ou réglementaire.

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1. L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE EN TANT
QUE CONCEPT

L’économie circulaire est régulièrement opposée, sur le plan théorique, à l’économie


linéaire. Cette dernière, héritée de la révolution industrielle, repose sur le schéma suivant :
extraction ou récolte des ressources, fabrication et assemblage, distribution, utilisation
et, enfin, production de déchets qui sont tout simplement éliminés sans aucune forme de
valorisation. Ce modèle économique est basé sur l’hypothèse implicite que les ressources
dont il a besoin pour développer et produire des biens sont illimitées (bois, métaux,
sable, etc.) et que l’énergie nécessaire à la transformation de ces ressources peut rester
indéfiniment bon marché (gaz, pétrole, charbon, etc.). Ce modèle économique a
permis un développement industriel, accompagné d’une croissance sans précédent.
Depuis 1950, dans un contexte de mondialisation, d’explosion démographique et
d’avancées techniques et technologiques, on a assisté à un développement économique
exponentiel dans toutes ses composantes : produit intérieur brut (PIB),
consommation d’énergie primaire, consommation d’eau, transports,
télécommunications, tourisme international, etc. En 2007, les climatologues Will
Steffen et Paul J. Crutzen et l’historien John R. McNeill ont proposé le terme de «
grande accélération » pour désigner ce phénomène à l’origine de bouleversements
1
sociaux mais également environnementaux .
Cette logique de consommation est cependant devenue difficilement soutenable
pour l’environnement, ce qui mène désormais certains acteurs économiques,
politiques et sociétaux à repenser entièrement la question de la production et de la
consommation, ainsi que celle de la gestion des déchets. La conjonction du
développement démographique, de la croissance de la consommation dans les pays
développés et de la volonté des pays émergents à faire de même a mené à une
consommation tellement importante des ressources naturelles que la croissance
économique telle que connue et poursuivie jusqu’à ce jour est devenue intenable. Si les
modèles linéaire et circulaire de l’économie coexistent maintenant depuis des années,
le premier est de plus en plus remis en question et le second de plus en plus valorisé.
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1
W. STEFFEN, P. J. CRUTZEN, J. R. MCNEILL, « The anthropocene: Are humans now overwhelming the great
forces of Nature? », Ambio: A Journal of the Human Environment, volume 36, n° 8, 2007, p. 614.

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1.1. LES LIMITES DE L’ÉCONOMIE LINÉAIRE

Une série de limites évidentes au développement de l’économie linéaire peuvent


être énumérées. La première d’entre elles est l’impact en termes d’émissions de gaz
à effet de serre d’une économie qui ne vise qu’à optimiser les flux produits et le
rendement, sans internaliser dans l’équation les conséquences sur l’environnement d’un
tel procédé. Or ces pressions environnementales sont loin d’être négligeables : elles
prennent notamment pour formes le changement climatique, la disparition de la
biodiversité et du patrimoine naturel, la dégradation des sols et la pollution des océans.
Depuis quelques années, les externalités négatives du modèle économique linéaire
sont partiellement intégrées dans les coûts de production de certaines industries et
autres organisations économiques, par le biais entre autres d’un système d’échange
de quotas d’émissions ou d’une taxe carbone ; cela a un impact in fine sur la
rentabilité de ces entreprises. Le problème ne se situe pas dans le fait que les processus
de production et de consommation
soient à l’origine d’émissions de CO2, mais bien dans le fait que les quantités émises
soient désormais bien supérieures aux capacités régénératives de la biosphère.
Ensuite, et cela contrairement au postulat implicite sur lequel repose l’économie linéaire,
le système économique prend place au sein d’un monde fini, dans lequel les ressources
existent dans une certaine limite, avec des capacités de renouvellement propres à
chacune d’entre elles. Au-delà d’un seuil critique d’exploitation, certaines ressources
peuvent donc être amenées à disparaître. Et cela d’autant que le modèle économique
linéaire entraîne beaucoup de gaspillage, notamment en raison de la large absence
de recyclage et de revalorisation énergétique des déchets, mais également dans la
production et même dans l’exploitation structurelle des produits de cette économie. Par
exemple, en Europe, les véhicules des particuliers restent en moyenne immobilisés 92 %
2
du temps . Selon les chiffres livrés par le Parlement européen, 20 % de la nourriture
produite dans l’Union européenne est perdue ou gaspillée. Des vêtements que l’on ne
porte que très peu, des appareils dont la technologie évolue rapidement et que l’on
remplace sans cesse, etc. Les exemples ne manquent pas. Par ailleurs, le modèle
économique linéaire expose l’industrie à la volatilité des prix des matières premières,
ainsi qu’aux fluctuations de leur disponibilité (voire à leur tarissement). Cela est
d’autant plus vrai dans les nombreuses régions du monde qui ne disposent pas
naturellement de ces matières premières et doivent recourir aux importations.
Aujourd’hui, la consommation d’objets à usage unique ou du moins à usage très
limité dans le temps, composés souvent de plastique, est devenue une problématique
qu’il n’est plus possible d’ignorer. Pour vendre toujours plus, les producteurs se sont
appuyés sur le caractère éphémère de certains produits. Ainsi, l’entreprise française BIC © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
en a même fait sa marque de fabrique avec des articles présentés comme jetables
(stylos-billes, rasoirs, briquets, etc.). Des considérations de mode, avec notamment la fast
fashion et ses vêtements bon marché ou la mise en avant d’avancées technologiques
incessantes (smartphones,

2
Ellen MacArthur Foundation, « Vers une économie circulaire : arguments économiques pour une
transition accélérée », 2016, www.ellenmacarthurfoundation.org, p. 3.

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L’ÉCONOMIE 9

tablettes, etc.), servent en outre de justificatifs à des achats à répétition. La logique est
alors d’accumuler les biens ou de s’en débarrasser pour les remplacer par des biens
3
neufs .

1.2. LES CONTOURS THÉORIQUES DE L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE

Le fonctionnement de l’économie circulaire s’inspire de celui des écosystèmes naturels


dans lesquels rien ne se perd, tout se transforme. Elle vise autant à produire et à
consommer autrement qu’à réduire les flux de matières utilisés au sein du système
économique en place. Contrairement à une idée largement reçue et qu’il convient de
démonter, l’économie circulaire ne se limite pas, dans la théorie du moins, à la
valorisation des déchets et au recyclage (d’ailleurs, le recyclage des matières ne
constitue que la dernière des « boucles de réutilisation » possibles qu’elle identifie).

1.2.1.Définition

En 1972, paraît le rapport « Les limites à la croissance (dans un monde fini) »


(communément appelé « Rapport Meadows »). Commandé en 1970 par le Club de Rome
à des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT), ce rapport
constitue la première étude d’envergure mettant en exergue les dangers que la
croissance économique et démographique, telle qu’elle se déploie depuis le milieu
e
du XX siècle, représente pour la Terre et l’humanité. À la suite de ce rapport, de
nombreuses organisations et commissions mondiales mettent en lumière la
nécessité de mettre en place une transition vers un modèle de production et de
consommation n’impliquant pas une exploitation débridée des ressources et
n’entraînant pas de sensibles répercussions environnementales. L’une des solutions
préconisées est la transition vers une économie circulaire.
L’association caritative britannique Ellen MacArthur Foundation définit l’économie
circulaire comme « restauratrice et régénérative par nature et tendant à préserver la valeur
et la qualité intrinsèque des produits, des composants et des matériaux à chaque étape
de leur utilisation. Ce modèle économique a pour objectif de décorréler le
4
développement économique mondial de la consommation de ressources limitées » .
Cette définition – qui est souvent utilisée comme référence – donne une idée
générale de ce que recouvre une économie circulaire. Par ailleurs, l’Ellen MacArthur
Foundation a contribué à médiatiser ce concept (qui n’est pourtant pas neuf) et © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
permis, dans une certaine mesure, de sensibiliser les décideurs politiques aux avantages
qui accompagnent la mise en place d’une telle économie. Il est toutefois utile de
rappeler que l’Ellen MacArthur Foundation a développé au fil du temps toute une
série de partenariats avec de grands groupes tels que BNP Paribas, Cisco, Danone, DS
Smith, Kingfisher, McKinsey

3
S. SAUVÉ, D. NORMANDIN, M. MCDONALD, L’économie circulaire : une transition incontournable, Montréal,
Presses de l’Université de Montréal, 2016, p. 42.
4
Ellen MacArthur Foundation, « Vers une économie circulaire : arguments économiques pour une
transition accélérée », op. cit., p. 2.

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and Co, Philips, Renault, Solvay, etc. et même avec l’entreprise BIC, c’est-à-dire avec
des acteurs économiques qui poursuivent une logique de production et ne visent
logiquement pas une réduction de la consommation et des besoins. Par ailleurs, l’adjectif «
régénérative » utilisé dans la définition de l’Ellen MacArthur Foundation peut laisser
entendre que de nouvelles ressources sont produites alors que, en pratique, elles sont,
au mieux, utilisées de manière plus efficace et respectueuse de l’environnement. Cette
même réserve vaut également à la lecture des deux prochains points, concernant les
principes et les caractéristiques fondamentaux d’une économie circulaire (cf. infra).
Pour sa part, l’Agence de la transition écologique (ADEME, anciennement Agence de
l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), établissement public français,
propose sa propre définition en ces termes : « L’économie circulaire peut se définir
comme un système économique d’échange et de production qui, à tous les stades
du cycle de vie des produits (biens et services), vise à augmenter l’efficacité de
l’utilisation des ressources et à diminuer l’impact sur l’environnement tout en
développant le bien-être des individus ».
D’autres définitions encore s’ajoutent aux deux mises ici en avant et coexistent, faisant
de l’économie circulaire un concept assez souple et même évolutif.

1.2.2.Principes

Un important coup de projecteur a été donné à l’économie circulaire avec la


création, en 2010, de l’Ellen MacArthur Foundation, qui a fait de cette question le
cœur de ses recherches et de ses publications. Selon les travaux menés au sein de cette
5 6
fondation , trois principes encadrent l’économie circulaire .
Le premier principe de l’économie circulaire consiste à limiter au maximum
l’utilisation des ressources naturelles, à les restaurer autant que possible si leur
usage est incontournable, et à choisir en priorité des technologies et des processus qui
fonctionnent grâce à des ressources renouvelables ou de la manière la plus efficiente
possible.
Le deuxième principe de l’économie circulaire fait intervenir la notion de cycle, ou de
boucle. L’économie circulaire vise une prolongation de la durée de vie des produits
grâce à l’usage de boucles de réutilisation : réparation, rénovation, revente, mise à jour
technologique, retour en usine et, en dernier recours, recyclage des matériaux et
composants. Ainsi, le produit et les matériaux et composants qui le constituent sont
maintenus le plus longtemps possible dans le circuit. Cela implique que ce produit
soit conçu de manière à pouvoir connaître toutes ces boucles : pouvoir être rénové,
pouvoir être remis en état, pouvoir réintégrer l’usine, etc. © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

5
Depuis 2010, l’Ellen MacArthur Foundation est devenue un acteur influent dans le développement
d’une économie circulaire, grâce à la publication d’une série d’analyses et de rapports
économiques, et un travail en collaboration avec des industriels et par le biais de projets éducatifs.
6
Ibidem, p. 7.

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Schéma 1. Principe de l’économie

circulaire
Source : Cabinet de la ministre fédérale de l’Énergie, de l’Environnement et du Développement durable,
« Ensemble, faisons tourner l’économie en développant l’économie circulaire en Belgique », octobre
2016, www.marghem.be, p. 9 (schéma retravaillé sur la base du travail effectué par l’Ellen
MacArthur Foundation).
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Les circuits courts sont privilégiés. L’économie circulaire repose sur l’idée que plus la
boucle est courte, plus le procédé utilisé est efficace. La maintenance et la réparation
d’un produit, qui sont des boucles courtes, permettent de préserver l’essentiel de la
valeur de ce produit sans engager une somme de travail et d’énergie trop
conséquente pour conserver ce produit dans le circuit. Si la réparation n’est plus
possible, les matériaux et composants du produit sont réutilisés ou réusinés. En
dernier recours, les matériaux

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et composants du produit sont recyclés ou valorisés énergétiquement. Il convient de


bien souligner que le recyclage ne constitue que la dernière des boucles de réutilisation
possibles ; toutes les autres lui sont préférées par défaut (maintenance, réparation, etc.).
Afin d’optimiser le processus, il s’agit de maximiser le nombre de boucles consécutives
ainsi que leur durée. Le partage permet également d’accroître le temps d’utilisation d’un
produit.
Comme on l’aura compris, l’économie circulaire fonctionne donc en cascade. Dans
un premier temps, l’objectif est d’allonger la durée de vie d’un produit en
l’entretenant correctement et en le réparant si nécessaire. Dans un deuxième temps, ce
produit peut être réutilisé et trouver une deuxième vie, sur le marché de l’occasion et
de la seconde main notamment. Il peut également être remanufacturé, en tout ou
en partie. Dans un troisième et dernier temps, les matériaux qui composent le
produit peuvent être recyclés. Par exemple, des vêtements en coton pourront tout
d’abord être rapiécés lorsque l’usure le nécessitera, ensuite être réutilisés comme
vêtements d’occasion et, enfin, prendre la forme de fibres ou de laine de roche isolante
et retrouver une nouvelle vie dans l’industrie de l’ameublement ou dans le secteur
de la construction ou de l’automobile.
Le troisième principe vise, d’une part, à accroître l’efficacité du système économique
dans son ensemble dans des domaines aussi variés que l’alimentation, la mobilité,
l’habitat, l’éducation, la santé et les loisirs et, d’autre part, à gérer, dans le même
temps, les externalités négatives comme l’occupation des sols, la pollution de l’air et
de l’eau, la pollution sonore et la libération dans la biosphère de substances
toxiques.

1.2.3.Caractéristiques fondamentales

Les trois principes ainsi énoncés représentent une sorte de marche à suivre pour la
mise en œuvre d’une économie circulaire. Celle-ci répond également à quatre
caractéristiques fondamentales.
Primo, éliminer les déchets. Dans une économie circulaire, les déchets sont
réaffectés. On distingue le cycle biologique du cycle technologique. Dans le premier,
les matières biologiques, non toxiques, sont utilisées jusqu’à ce qu’elles retournent,
naturellement ou avec l’intervention de l’homme, nourrir les sols sous la forme de
compost ou d’engrais ou qu’elles soient méthanisées. Le processus de méthanisation
repose sur la décomposition de déchets pourrissables (végétaux ou autres matières
organiques, mais également les boues et eaux résiduaires) grâce au travail de certaines
bactéries. Ce procédé permet par ailleurs de générer une énergie renouvelable, le
biogaz. Celui-ci peut être transformé en chaleur, en électricité et en carburant pour
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véhicules. Dans le cycle technologique, les déchets composites (alliages, polymères,


etc.) doivent être conçus pour être récupérés et réutilisés ou recyclés facilement, en
consommant le moins d’énergie possible, tout en maintenant leur qualité.
Secundo, privilégier la diversité du tissu économique. À côté des grandes entreprises, qui
assurent le volume et l’efficacité de la production, de petites entreprises doivent
pouvoir proposer des alternatives.
Tertio, alimenter prioritairement le processus économique avec des énergies renouvelables.
Favoriser l’utilisation de ce type d’énergie au sein d’une économie circulaire répond
naturellement au besoin de préservation des ressources non renouvelables, à celui
de

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réduction de la dépendance existant vis-à-vis de celles-ci et enfin à celui de résilience


des systèmes (vis-à-vis d’un choc pétrolier, par exemple). L’objectif est parallèlement
d’abaisser les seuils des niveaux d’énergie nécessaire au fonctionnement de l’économie
circulaire.
Quarto, aligner les prix sur les coûts réels. Dans une économie circulaire, les prix
reflètent les coûts dans leur intégralité, en ce compris les externalités négatives. Pour
leur part, les subventions aux effets pervers sont identifiées et supprimées.

1.3. LA MISE EN PRATIQUE DE L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE

En pratique, adhérer au concept d’économie circulaire peut prendre différentes


formes et concerner différentes étapes de la vie d’un bien. Cela commence par la
manière de concevoir ce bien et d’envisager son utilisation. Une fois utilisable et
commercialisable, un bien matériel intégrera un cycle technique tandis qu’un produit
organique (nourriture, coton, etc.) débutera quant à lui un cycle biologique. Au sein
de ces cycles, l’économie circulaire a identifié plusieurs boucles possibles, qui
permettent à un bien ou un produit usagé ou abîmé – qui, dans une économie
linéaire, serait condamné à être éliminé une fois devenu un déchet – de retrouver
une utilité et de réintégrer le cycle économique original. Ces boucles sont plus ou
moins longues en fonction de l’énergie et des matières premières qu’il faudra
mobiliser. La réutilisation, via par exemple un réseau de seconde main, constitue une
boucle courte. A contrario, le recyclage incarne la boucle la plus longue de l’économie
circulaire, l’étape ultime et la plus énergivore avant que le bien ne sorte du cycle
économique. Dans la logique de l’économie circulaire, une boucle courte sera
privilégiée à une boucle longue car elle permet d’allonger la durée de vie des biens
avec le moins de transformations possible.

1.3.1.La conception

Pour que l’économie circulaire exprime son plein potentiel, il est souhaitable que
l’ensemble de la chaîne de production s’appuie sur ce concept, à commencer par la
conception du produit.

L’économie de fonctionnalité

La stratégie commerciale classique, telle qu’elle est la plus généralement appliquée © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

aujourd’hui encore, vise à vendre un maximum de produits, avec une tendance à


écourter le temps de vie de ceux-ci (ce que l’on appelle l’obsolescence, qu’elle soit
programmée ou non) afin de vendre davantage encore. A contrario, l’intégration
dans le processus de production du concept d’économie de fonctionnalité se traduit
par le fait de vendre l’usage d’un produit (c’est-à-dire sa fonction) et non la propriété
de celui-ci. Ainsi, le producteur est incité à maximiser la longueur de vie de ce
produit, en rendant celui-ci facilement réparable et en assurant sa maintenance.
L’introduction de l’économie de fonctionnalité dans un business model signifie dès
lors la mise en place de toute une

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réflexion visant à ce que le processus de fabrication permette le plus aisément possible


la réparation et le recyclage des produits, afin d’accroître le temps de vie de ceux-ci. C’est
ainsi qu’un certain nombre de pièces mécaniques sont désormais conçues pour
pouvoir être réparées.
À titre d’exemple, le groupe Michelin, spécialisé dans les pneumatiques, rencontrait
des difficultés à vendre au juste prix des pneus qui avaient bénéficié d’une
importante innovation technologique. Pour faire face, la société Michelin propose à
ses clients d’acheter, non plus des pneus, mais des kilomètres. En conséquence, le
cycle de vie de ces produits a tout intérêt à être le plus long possible, avec en prime
quelques conseils d’utilisation et la maintenance. La marge économique s’est accrue
pour Michelin (baisse des coûts d’énergie) tandis que les frais se sont réduits pour
l’utilisateur (baisse du coût du carburant grâce à la qualité des pneus). Un autre
avantage pour Michelin est la fidélisation du client.

L’écoconception

Si l’économie de fonctionnalité doit être considérée comme un type de modèle


économique, le concept d’écoconception est une approche encore vague et modulable
en fonction de l’entreprise prétendant y souscrire. Il s’appuie sur l’idée de tendre
vers un mode de conception et de développement de produits le plus respectueux
possible de l’environnement, ce qui implique l’utilisation privilégiée de ressources
renouvelables ainsi que la prise en compte, dès la réflexion relative à la conception d’un
nouveau produit, de l’étape de sa gestion finale, lorsqu’il deviendra un déchet, ce qui
implique idéalement d’anticiper les possibilités de réutilisation, de réparation et de
recyclage de celui-ci.
En octobre 2019, la Commission européenne a adopté dix règlements d’exécution en
matière d’écoconception qui fixent des exigences d’efficacité énergétique, de
disponibilité de pièces de rechange et de consommation maximale d’eau pour les
groupes de produits suivants : réfrigérateurs, lave-linge, lave-vaisselle, dispositifs
d’affichage électronique (y compris les téléviseurs), sources lumineuses et
appareillages de commande, alimentations électriques externes, moteurs électriques,
réfrigérateurs disposant d’une fonction de vente directe (distributeurs automatiques),
7
transformateurs électriques et matériel de soudage .

L’approche « du berceau au berceau » (cradle to cradle)

Ce sont les économistes britanniques David W. Perce et Kerry R. Turner qui, dans
leur ouvrage Economics of Natural Resources and the Environment paru en 1990,
auraient pour la première fois utilisé le terme d’économie circulaire. Toutefois, c’est © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

l’approche cradle to cradle (C2C), mise au point en 2002 par le chimiste allemand
8
Michael Braungart et l’architecte états-unien William McDonough , qui a réellement
mis le concept à l’avant- plan. Leurs travaux s’appuient sur l’observation de la nature,
dans laquelle les déchets d’un

7
Commission européenne, « Les nouvelles mesures d’écoconception : explications », Questions et réponses,
er

8
1 octobre 2019, https://ec.europa.eu.
Cf. M. BRAUNGART, W. MCDONOUGH, Cradle to cradle: Remaking the way we make things, New York,
North Point Press, 2002 (édition en français : Cradle to cradle : créer et recycler à l’infini, Paris,
Éditions alternatives, 2011).

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 1

organisme deviennent une ressource pour un autre organisme et les apports en


énergie se font naturellement (solaire, éolien, thermique, etc.). Dès 2002, ce concept
C2C est devenu un label attribué à des produits (ou services) conçus de telle façon
qu’une fois arrivés en fin de vie, les matières utilisées pour les concevoir sont facilement
séparées les unes des autres pour réintégrer le cycle de fabrication d’un autre produit.
Contrairement au recyclage (cf. infra), l’approche C2C s’appuie sur la garantie du
maintien de la qualité des matières.
Le C2C Product Innovation Institute attribue plusieurs niveaux de certification aux
entreprises concernées (basic, bronze, silver, gold et platinium). L’attribution du
label dépend d’une série d’analyses portant sur la toxicité du produit pour la santé et
pour l’environnement, sur le type et la quantité d’énergie utilisée pour sa
conception, sur la réutilisation et le recyclage potentiels des matériaux qui le constitue et
sur la responsabilité sociale de l’entreprise dont il provient. Depuis 1995, entre 500 et
600 produits ont été certifiés C2C de par le monde, essentiellement aux États-Unis,
9
aux Pays-Bas et en Allemagne .
Ainsi, la firme suisse Rohner est à l’origine d’un tissu biodégradable couramment
utilisé par les fabricants de fournitures de bureau. C’est un matériau compostable,
répondant à toutes les exigences de la certification C2C. Les rognures de coupe sont
recyclées auprès d’un consortium de producteurs de fraises, qui utilisent cette
matière biodégradable comme paillage couvre-sol et isolant.

1.3.2.Le cycle technique

Au-delà de l’étape de réflexion sur la conception d’un produit, afin que celle-ci
réponde au mieux à la volonté de préserver l’environnement, l’économie circulaire
intègre, dans un second temps, le cycle de vie même de ce produit, qu’il soit fait de
matériaux (cycle technique) ou de ressources organiques (cycle biologique), afin
d’optimiser le temps de vie des ressources et composants nécessaires à la production.
Dans le cycle technique, les matériaux, les composants et les produits eux-mêmes sont
réutilisés, réparés et maintenus, reconditionnés, remanufacturés ou encore recyclés.

La réutilisation, la maintenance et la réparation

Le développement depuis quelques années de la consommation collaborative (parfois


aussi dénommée économie collaborative ou économie de partage) s’intègre
parfaitement dans le concept plus général d’économie circulaire. Il s’agit d’un modèle
économique où l’usage l’emporte sur la propriété. Si, dans le modèle linéaire, la durée
d’usage d’un produit commercialisé est en moyenne bien inférieure à la durée de vie © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

technique de ce même produit, la réutilisation, la maintenance et la réparation


permettent d’allonger son cycle de vie et ainsi de réduire la masse des déchets à gérer
tout en limitant le nombre de biens neufs à produire.

9
S. SENET, « La certification cradle to cradle veut populariser l’économie circulaire », Journal de
l’environnement, 18 avril 2019, www.journaldelenvironnement.net.

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1 L’ÉCONOMIE

Un bien peut faire l’objet d’une réutilisation par la même personne, mais pour un
usage différent. Par exemple, des bocaux à confiture qui, au lieu d’être jetés, deviennent
10
des contenants de rangement pour des épices ou des graines . Mais la réutilisation peut
également prendre la forme d’un échange ou d’un don, entre particuliers ou envers
une association, ou celle d’une revente, qui impliquera une contrepartie monétaire
et parfois un intermédiaire. On pense ici aux magasins d’objets d’occasion, aux sites
de seconde main, etc.
Au-delà de cette valorisation par la réutilisation et le partage, le plus évident, afin de
conserver un bien dans un cycle de vie économique, c’est de le maintenir en état de
fonctionner. La maintenance peut être préventive, systématique ou non, comme l’entretien
régulier d’une voiture, ou corrective, lorsqu’un dégât intervient. À ce titre, la
11
réparation est une forme de maintenance .
Quand le bien est détérioré ou tombe en panne, il peut retrouver son utilité par un
acte de réparation. On parle ici de la résolution d’un problème en particulier sans
offrir de garantie sur le bon fonctionnement global du produit. À la différence du
reconditionnement (cf. infra), qui tend à remettre des produits usagés dans un
certain niveau de qualité, la réparation se borne à remettre un produit en état de
marche.
Le concept du repair café s’intègre dans cette démarche. Il s’agit d’un événement
tenu ponctuellement et lors duquel des bénévoles aident les participants à réparer
certains objets (textiles, appareils électriques ou informatiques, etc.). La contribution
demandée en retour pour ce service est volontaire, déterminée au cas par cas par les
participants. Visant l’émancipation de chacun, le repair café est également une
occasion de partage et de transmission du savoir, afin qu’il devienne davantage
naturel et économiquement intéressant de réparer plutôt que de jeter et remplacer.
La réparation peut également être proposée par certaines marques commerciales, au-
delà donc de l’idée de consommation collaborative. Une autre possibilité encore est
fournie par des publications spécialisées ou par des sites Internet. Par exemple, la
plateforme iFixit offre ainsi aux internautes un choix de pièces détachées et de tutoriels
de réparation pour du matériel électronique, électroménager ou automobile. De manière
générale, les vidéos proposant un modus operandi clair afin de réparer les appareils
du quotidien se sont multipliées ces dernières années sur la toile.

Le reconditionnement

Le reconditionnement est un procédé destiné à redonner une certaine esthétique à


un bien ou à un composant, ou qui implique une remise en état de marche, qui
permette de le considérer « comme neuf ». Contrairement à la refabrication (cf. © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
infra), le reconditionnement ne nécessite qu’un démontage partiel du produit usagé à
remettre
« à neuf ». Par exemple, les équipements électroniques (ordinateurs, téléphones portables,
etc.), les avions de ligne, les trains et les ambulances peuvent être reconditionnés.
Apple propose ainsi des produits reconditionnés, certifiés par la marque et garantis un
an, avec une remise pouvant atteindre 15 % par rapport aux équivalents neufs ; les
produits
10
Il arrive aussi que des objets soient détournés de leur fonction principale à des fins artistiques.
11 e
R. LE MOIGNE, L’économie circulaire : stratégie pour un monde durable, 2 édition, Malakoff, Dunod, 2018,
p. 40.

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L’ÉCONOMIE 1

reconditionnés par la marque (ordinateurs, tablettes, accessoires) sont soumis à des tests
qui répondent aux mêmes exigences fonctionnelles que les produits neufs. Le
secteur de l’énergie opte lui aussi régulièrement pour le reconditionnement, avec le
réusinage des pales des turbines hydrauliques ou des éoliennes, par exemple.

La refabrication (« remanufacturing »)

Alors que le recyclage est un concept désormais bien connu, il n’en va pas de même pour
la refabrication ou remanufacturing. Il s’agit d’un processus industriel qui vise à
récupérer les composants d’un produit en fin de vie afin de les utiliser dans la
conception d’un nouveau produit présentant un niveau de performance et de
qualité identique ou supérieur à celui d’un produit équivalent neuf. Cette opération
donne lieu à une mise sous garantie du produit remis à neuf équivalente à celle
accordée pour un produit réellement neuf.
Ce procédé implique plusieurs étapes : le tri des déchets (les produits usagés qui ne
peuvent pas être remis en état sans un coût économique important sont écartés) ; le
démontage et le nettoyage des différents composants ; le tri de ces composants (les
pièces usées sont à leur tour écartées) ; le réassemblage (des pièces neuves peuvent
remplacer certaines pièces usées et une remise à niveau technologique peut être
nécessaire). Tous les produits ne sont pas destinés à être remanufacturés ; les candidats
idéaux sont généralement constitués de composants facilement démontables, avec
une évolution technologique modérée.
12
La refabrication s’est notamment développée dans l’industrie automobile . Ce secteur
est hautement dépendant de certaines matières premières et de métaux précieux et, à
ce titre, le recyclage est devenu pour lui un enjeu de taille. Toutefois, intervenir en
amont du recyclage, par le biais de la refabrication, s’avère nettement plus profitable en
termes d’économies d’énergie et de gestion des matières premières puisqu’il s’agit de
travailler à partir de pièces déjà ouvragées. À titre d’exemple, Renault produit des
moteurs remanufacturés sur le site de Choisy-le-Roi, en Île-de-France, depuis 1949.
Depuis lors, l’usine de refabrication a diversifié son offre avec les pompes à
injections, les boîtes de vitesses, les injecteurs et les turbocompresseurs. Les pièces
remanufacturées à l’usine de Choisy-le-Roi sont destinées à la réparation des
véhicules déjà en circulation. Tout en garantissant la même qualité que les pièces
neuves, ces pièces remanufacturées sont 30 % à 50 % moins chères. Ce qui n’est pas
remanufacturé à partir des carcasses de véhicule traitées est en grande partie recyclé
dans les fonderies du groupe pour produire de nouvelles pièces.
Les autres grandes marques de l’industrie automobile (PSA, Volkswagen, Volvo, etc.)
procèdent de même. En Belgique, à Braine-l’Alleud, l’entreprise AW Europe,
contrôlée par le groupe japonais Ainsi et affiliée au groupe japonais Toyota, mène
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entre autres une activité de refabrication. D’autres secteurs sont également


concernés par le remanufacturing, comme Caterpillar, pour les pièces de ses engins
de chantiers, Xerox, pour ses imprimantes, ou Philips, pour ses équipements
médicaux.

12
Ellen MacArthur Foundation, « De l’économie circulaire appliquée à l’industrie automobile. Le cas pratique
de l’usine de Choisy-le-Roi », 18 juillet 2013, www.ellenmacarthurfoundation.org.

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1 L’ÉCONOMIE

Le recyclage

La dernière boucle de l’économie circulaire avant d’en arriver à la valorisation


énergétique ou à l’élimination (enfouissement des déchets) est le recyclage. Il s’agit
d’un procédé de traitement des déchets qui vise à en extraire les matériaux qui les
composent afin de pouvoir les réintroduire dans un nouveau cycle de vie. On recourt
au recyclage lorsque le potentiel de prolongation d’un bien a été exploité ou lorsqu’il
n’existe tout simplement pas de possibilité de prolongation.
Le recyclage d’un produit en plastique peut se faire soit mécaniquement, en
réduisant le plastique en granules qui seront utilisées pour la conception de
nouveaux produits (bouteilles en plastique, rembourrage des manteaux ou des sacs de
couchage, textiles, etc.), soit chimiquement ou thermiquement, avec un résidu
utilisable ensuite dans l’industrie chimique (ce qui s’apparente pour certains
davantage à un processus de valorisation énergétique que de recyclage proprement
dit). Deux types de plastique sont actuellement couramment recyclés : ceux en
polyéthylène téréphtalate (PET), qui sont des plastiques transparents, souples et légers
(pour les bouteilles d’eau et de jus de fruits, etc.), et ceux en polyéthylène haute
densité (PEHD), qui sont quant à eux légèrement translucides ou opaques et
davantage rigides (pour les bidons de lessive, les bouteilles de lait et les flacons de
shampoing, etc.).
Pour le recyclage du papier, la première étape consiste à maintenir en suspension dans
l’eau les fibres issues des vieux papiers et cartons récoltés. La pâte grisâtre obtenue
est soumise à un processus de nettoyage afin d’en extraire les agrafes, la laque, le vernis,
13
les restes de colle, les morceaux de plastique, les cordons, etc. La production de
certains papiers recyclés demande une étape supplémentaire de désencrage car l’encre
encore présente sur les fibres traitées influence la couleur et l’homogénéité du
produit fini. Une dernière étape de blanchiment, grâce au peroxyde d’hydrogène, est
14
généralement de mise également . En toute logique, certains papiers recyclés s’avèrent
plus écologiques que d’autres, en fonction du taux de fibres recyclées incorporées dans le
papier (entre 50 % et 100 %) et des traitements subis pendant le recyclage (désencrage,
blanchiment). Ainsi, le papier 100 % recyclé, non blanchi et non désencré sera le plus
15
écologique . Le label
« FSC recyclé », reconnu au niveau mondial (et géré par le Forest Stewardship Council
- FSC), garantit que toutes les composantes en bois ou en fibres de bois du produit
sont issues à 100 % de matières recyclées.
On considère que le verre est recyclable à l’infini. La collecte des verres transparents
incolores et colorés se fait majoritairement de manière séparée, seule manière d’obtenir
à nouveau du verre incolore : s’il est possible d’obtenir du verre coloré à partir de verre
blanc, le contraire n’est pas vrai. Après avoir éliminé les impuretés collectées avec le © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
verre (telles que les étiquettes, les capsules et des déchets organiques), celui-ci est broyé
pour former du calcin qui sera ensuite fondu puis soufflé pour produire de nouveaux
emballages en verre. Le verre des plats en vitrocéramique et celui de la vaisselle
(verres à pied, assiettes, etc.) ne peuvent être mélangés aux verres d’emballage
collectés dans les bulles

13
Ces résidus sont généralement recyclés ou valorisés énergétiquement.
14
Les différentes étapes du processus du recyclage du papier sont disponibles sur le site de
l’Association des fabricants de pâtes, papiers et cartons de Belgique (Cobelpa) : www.cobelpa.be.
15
« Les papiers recyclés à la loupe », Nouvelles graphiques, 27 juin 2019, https://nouvelles-graphiques.levif.be.

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L’ÉCONOMIE 1

à verre (bouteilles, flacons et bocaux en verre transparent) car leur composition est
différente et entraîne d’importants problèmes lors de la refonte.
Le recyclage des déchets d’emballages métalliques concerne essentiellement l’acier et
l’aluminium, avec deux avantages évidents lorsqu’ils sont collectés sélectivement : une
perte minime de qualité du produit recyclé et des économies d’énergie importantes
par rapport à la production d’acier (75 %) ou d’aluminium (95 %) neuf. L’acier est trié
à l’aide d’aimants et l’aluminium grâce à des séparateurs à courants de Foucault.
C’est un autre avantage du métal dans l’optique du recyclage : le tri peut ainsi en être
facilité. L’acier et l’aluminium sont broyés et nettoyés pour donner de la ferraille qui est
prête pour le four. L’acier est envoyé à l’aciérie, l’aluminium aux fonderies
spécialisées. Le métal recyclé est ensuite transformé en produits semi-finis notamment
employés dans le secteur des transports (pièces automobiles, etc.), de la construction ou
les emballages (cannettes, plats préparés, boîtes de conserve, etc.).
Les métaux collectés pour le recyclage sont également issus des déchets d’usine (parfois
directement recyclés sur place par une refonte sur site) ou de produits en fin de vie
(dépôts dans les parcs à conteneurs, dans les entreprises spécialisées dans la
récupération et le traitement des métaux, dans les centres de recyclage des véhicules
automobiles, etc.). De manière générale, la production de matière première
secondaire requiert souvent beaucoup moins d’énergie que celle nécessaire à la
production de la matière première issue de l’extraction. Par ailleurs, les appareils
électriques et électroniques font l’objet d’une attention particulière, du fait de la
raréfaction de leurs composants, de même que les déchets issus du secteur de la
construction (qui en est un gros producteur).
Si les principes de recyclage et de valorisation énergétique sont antérieurs au
développement du concept d’économie circulaire, cette dernière est appelée à favoriser
ces processus et à permettre de récupérer un taux sans cesse plus élevé de ressources
dans les matières résiduelles, grâce à une réflexion en ce sens en amont de la
production.

Les limites du recyclage

Le recyclage est non seulement la boucle la plus longue que peut offrir l’économie
circulaire, et donc la plus onéreuse en matière de ressources mobilisées, mais ce
procédé montre également ses limites, en particulier pour les matières plastiques.
Contrairement à l’image qui est la sienne aujourd’hui dans certains milieux, le
plastique a sans doute un juste rôle à jouer au sein de notre économie. Comme le
souligne la Commission européenne, certains matériaux légers et innovants utilisés
dans le secteur automobile ou l’aviation permettent par exemple de réduire la © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
consommation de carburant et les émissions de CO2 associées. Le recours à des
matériaux d’isolation haute performance contribue à réduire les besoins en énergie. Malgré
les dérives et les emballages non appropriés, le plastique peut également, dans une certaine
mesure, permettre d’assurer la sécurité des aliments et de lutter contre le gaspillage
alimentaire. Sans compter encore

CH 2455-2456
2 L’ÉCONOMIE

l’utilisation de matériaux plastiques élaborés dans certains secteurs de pointe


16
comme la médecine .
Toutefois, les modes actuels de production, d’utilisation et de mise au rebut des matières
plastiques ont induit une congestion avérée du système avec des enjeux
environnementaux désormais criants. Environ 8 millions de tonnes de déchets
plastiques finissent chaque année leur parcours dans les océans. Alors que le papier, le
verre et les métaux se recyclent selon des taux très satisfaisants (cf. infra), il n’en est
rien pour le plastique, pour lequel un peu plus de 30 % des déchets collectés au niveau
européen sont récupérés pour être recyclés. Les produits contenant du plastique sont très
variés et se composent généralement de très nombreux polymères différents, parfois en
petite quantité, et eux-mêmes associés à d’autres composants tels que du métal, ce qui
rend l’activité de tri, en amont du recyclage, très complexe. Cette complexité est également
accrue par certaines politiques de marketing. À titre d’exemple, le tri optique opéré en
amont du recyclage pour séparer les différents types de déchets ne permet pas
d’assurer la reconnaissance d’une bouteille en PET si le fabricant y a apposé un film
plastique promotionnel, le distinguant des concurrents. De même, les stries présentes
sur certaines bouteilles invitent le consommateur à réduire celles-ci en boules alors
qu’elles devraient être aplaties dans le sens de la longueur pour faciliter leur
identification lors du tri optique.
Une autre difficulté réside dans le fait que le tri, le potentiel recyclage et
l’enfouissement à l’étranger des déchets plastiques les plus difficilement recyclables,
notamment en Asie, restent économiquement plus compétitifs, transport inclus, que le
traitement de ces déchets sur le territoire européen. L’activité de recyclage du
plastique reste encore souvent économiquement peu attractive, concerne de petites
structures et dépend de gisements d’approvisionnement de quantité et de qualité
parfois insuffisantes.
Enfin, le recyclage du plastique induit une perte de qualité par rapport à l’emballage
d’origine, ce qui implique que seul un certain pourcentage de plastique recyclé peut
intervenir dans la production d’un nouvel emballage plastique. À titre d’exemple, la
société belge Spadel intègre, depuis 2010, 50 % de PET recyclé dans ses bouteilles de Spa
17
Reine . En effet, introduire un trop grand pourcentage de PET recyclé dans une
nouvelle bouteille peut altérer la solidité du contenant ou sa couleur, ce qui est
préjudiciable pour une marque vantant la pureté de son eau. Cela est dû au fait que
les balles de PET destinées à être recyclées contiennent diverses impuretés du fait
que s’y côtoient par exemple bouteilles d’eau et bouteilles de produit vaisselle. Une
solution pourrait être, comme certains le désirent, d’augmenter la qualité des balles
de plastique collecté en mettant en place un système de consigne, comme c’est le cas
pour les bouteilles en verre, et de constituer des balles homogènes à partir de ces
bouteilles consignées. © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

Le débat est en tout cas ouvert en Belgique, parallèlement d’ailleurs, et cela peut
sembler contradictoire, aux efforts mis en place pour élargir le contenu collecté grâce aux
sacs bleus, dédiés à l’origine aux emballages PMC (sigle désignant les bouteilles et flacons
en plastique, les emballages métalliques et les cartons à boissons). Dans sa
déclaration de politique

16
Commission européenne, « Une stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie
circulaire. Communication au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social
européen et au Comité des Régions », COM(2018) 28 final, 16 janvier 2018, p. 2.
17
Les bouteilles en plastique de l’entreprise Spadel sont désormais constituées à 100 % de PET recyclable
et l’entreprise vise, pour 2025, à ce qu’elles soient constituées à 100 % de plastique recyclé.

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 2

régionale, le gouvernement wallon Di Rupo III (PS/MR/Écolo) indique vouloir, après


évaluation des expériences pilotes actuelles, défendre la mise en œuvre progressive,
à l’échelle de la Belgique, d’un système de consigne ou de prime de retour pour les canettes
et les bouteilles en PET qui soit efficace et économiquement viable. En Région de
Bruxelles-Capitale également, la mise en place d’une consigne pour les emballages
de boissons fait partie de l’accord du gouvernement Vervoort III
(PS/Écolo/Défi/Groen/ Open VLD/one.brussels-sp.a). En Flandre, la question reste en
suspens. Un système de consigne serait également une opportunité pour réduire les
déchets sauvages – qui continuent à constituer une problématique importante dans
le cadre de la gestion des déchets –, en incitant le consommateur à ramener ses
bouteilles contre rémunération au lieu de devoir débourser pour s’en débarrasser (les
sacs bleus étant payants) ou, pour éviter cette dépense, de les abandonner dans la
nature. Si un tel projet devait voir le jour, il est en tout cas fort probable que la grande
distribution s’attendra à un soutien public pour compenser la main-d’œuvre et
l’espace de stockage nécessaires en magasin.
Parallèlement à ce débat en cours, le sac bleu, traditionnellement connu par les ménages
belges pour récolter les PMC – à savoir les emballages plastiques (bouteilles et
flacons), les emballages métalliques (cannettes, barquettes, etc.) et les cartons à
boisson –, est l’objet des attentions depuis la fin de l’année 2019 car son contenu va être
18
progressivement élargi. C’est déjà le cas pour certaines intercommunales , où un
nouveau sac bleu peut désormais également contenir des barquettes et des raviers en
plastique, des pots et des tubes en plastique (pots de yaourt, tubes de dentifrice,
etc.), les films plastiques qui entourent les canettes et les bouteilles de boissons
diverses, et enfin des sacs et sachets en plastique. Pour laisser aux intercommunales,
qui organisent les collectes sélectives, ainsi qu’aux centres de tri le temps de
s’adapter au traitement du contenu élargi de ce nouveau sac bleu, celui-ci sera
introduit de manière échelonnée dans le reste de la Belgique. Fost Plus s’est engagé
à couvrir toute la Belgique dès 2021.
Pour ce qui est du papier également, le recyclage montre ses limites et ne peut
constituer qu’une partie seulement de l’approvisionnement en fibres de l’industrie
papetière. Tous les vieux papiers ne sont pas recyclables. Les vieux papiers souillés
sont écartés lors de la collecte et différents types de papier, comme le papier peint
ou les mouchoirs, par exemple, ne sont tout simplement pas recyclables. Selon
l’association européenne représentant l’industrie de la fibre de bois et du papier, la
Confederation of European Paper Industries (CEPI), environ 20 % des papiers mis sur le
marché européen ne peuvent être récupérés pour le recyclage. Par ailleurs, dans l’état
actuel des technologies, la qualité des fibres de bois est altérée lors du recyclage, ce qui
nécessite un apport systématique de fibres vierges dans le cycle global de la production
papetière. Les papiers graphiques de haute qualité nécessitent davantage de fibres © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
vierges que le papier journal ou les papiers et cartons d’emballage. Le papier recyclé
doit contenir au moins 50 % de fibres de cellulose de récupération provenant de
19
déchets de papier imprimé .
Avec sa particularité d’être recyclable à l’infini, le verre semble le candidat par
excellence pour cette pratique. Cependant, afin de maintenir la qualité de conception
du verre, le calcin issu du recyclage ne peut pas dépasser un certain pourcentage de
la masse de

18
Verko, IDM, MIWA, Ibogem, IVM, MIROM, ILVA, IVOO, BEP Environnement, Intradel (partiellement),
TIBI (partiellement) et IPALLE.
19
« Les papiers recyclés à la loupe », op. cit.

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2 L’ÉCONOMIE

matières premières utilisées (dont le sable, qui vient progressivement à manquer) : 30 %


pour le verre plat, 50 % pour le verre creux, 60 % à 70 % pour le verre cellulaire et
jusqu’à 90 % pour la laine de verre. Toutefois, les limites technologiques d’incorporation
du calcin dans la fabrication du verre sont loin d’être atteintes. Pour obtenir ce
calcin, la collecte des verres creux (bouteilles, flacons, bocaux) s’opère via les bulles
à verres, et celle des verres plats (vitres et miroirs) via les parcs à conteneurs. Seul
du verre plat est utilisé pour le calcin impliqué dans la conception d’un nouveau
verre plat, tandis que du verre creux peut être obtenu à partir d’un calcin issu de
20
verre plat et creux .
Par ailleurs, tous les types de verre ne sont pas recyclables, à l’image du verre « culinaire »
(vaisselle et plats transparents, qui contiennent de la céramique) ou des verres
spéciaux tels que les écrans de télévision, les miroirs, etc., qui nécessitent des
températures de fusion supérieures.
Enfin, le recyclage du verre demande de l’énergie et l’apport d’un certain
pourcentage de matière première non recyclée afin de maintenir le niveau de qualité
requis, ce qui rend attractive une autre solution, celle d’un système de consigne. Les
bouteilles consignées sont retournées, le plus souvent contre rémunération, à leur point
d’origine et réintègrent les chaînes d’embouteillage après avoir été nettoyées et
inspectées. L’opération peut être renouvelée entre une vingtaine et une
cinquantaine de fois environ. Si le procédé a l’avantage de réduire la quantité de
déchets produits et d’économiser l’énergie nécessaire au recyclage du verre, il est
cependant gourmand en eau. Le nettoyage des bouteilles de bière est à ce titre
particulièrement compliqué car il s’agit d’éliminer les levures qui restent parfois au fond
21
des contenants . Certains facteurs influencent l’impact environnemental du système de
consigne pour les bouteilles en verre : le nombre de kilomètres entre les points de
récolte des bouteilles consignées et les stations de lavage, l’utilisation ou non
d’étiquettes microperforées, qui se détachent plus facilement, la qualité de la bouteille
d’origine, qui permettra un nombre plus ou moins grand de réutilisations, la performance
énergétique et de consommation en eau des équipements de lavage. Dans une
étude publiée en octobre 2018, l’ADEME indique ainsi que « le système avec consigne
présente des bénéfices environnementaux potentiels par rapport au système sans
consigne lorsque la réutilisation des bouteilles est élevée, que le lavage est optimisé
avec une faible consommation d’eau et d’énergie, et lorsque les distances de transport
sont modérées, avec de préférence un lavage réalisé sur le site de conditionnement, c’est-
22
à-dire internalisé pour diminuer les distances de transport » .
En Belgique, la filière du lavage reste actuellement aux mains des grands
fournisseurs (AB InBev, Spadel, etc.) et des brasseurs, mais une offre plus locale
existe également, comme chez Axedis, une entreprise de travail adapté située à
Limal, qui est notamment active dans le domaine du lavage des gobelets réutilisables © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

des festivaliers. Même s’il constate une hausse importante de la vente de bouteilles en
verre consigné (à savoir + 25 % entre 2017 et 2019), le chief executive officer (CEO) de
Spadel, Marc du Bois, estime qu’au-delà de 200 kilomètres entre la source et le point
de vente, ce type d’emballages, à cause des trajets, perd son intérêt environnemental
23
. Par ailleurs, la consigne des

20
Informations disponibles sur le site Internet de la Fédération de l’industrie du verre (FIV) : www.vgi-fiv.be.
21
RTBF Info, 15 février 2020, www.rtbf.be.
22
ADEME, « Analyse de 10 dispositifs de réemploi-réutilisation d’emballages ménagers en verre. Évaluation
environnementale, économique et sociale », octobre 2018, www.ademe.fr.
23
RTBF Info, 23 janvier 2020, www.rtbf.be.

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 2

bouteilles en verre nécessite une certaine uniformité des contenants, ce qui peut apparaître
comme un frein pour les producteurs qui souhaitent généralement se démarquer les uns
des autres.
Le développement de nos économies s’est accompagné avec le temps d’un besoin accru
d’exploiter un nombre toujours plus important de métaux différents. Moins d’une
vingtaine de métaux étaient exploités dans les années 1970, alors que ce chiffre a désormais
24
triplé. Après les métaux ferreux et cuivreux, puis les métaux non ferreux (comme
l’aluminium, le plomb ou le zinc), c’est aujourd’hui autour des métaux destinés à la
fabrication des appareils électriques et électroniques, tels que le lithium, l’indium ou
les terres rares, que se cristallisent les enjeux d’une demande en progrès constant.
La concentration des minerais a décru avec le temps, la priorité ayant été donnée à
l’exploitation des minerais les plus concentrés, ce qui induit aujourd’hui des coûts
d’extraction de plus en plus lourds. En effet, la concentration moyenne des métaux
est négativement corrélée à la profondeur dont ils sont extraits. Parallèlement à
cela, nos modes de vie requièrent de plus en plus d’énergie, et donc de métaux, dont
l’exploitation requiert elle aussi de plus en plus d’énergie. Une part considérable de
l’énergie primaire mondiale est utilisée pour l’extraction et le raffinage des métaux. Il
s’agit là d’un cercle vicieux. À situation inchangée, il ne resterait qu’entre 30 et 60
ans de réserves pour la grande majorité des métaux. Pour l’indium (utilisé dans les
cellules photovoltaïques ou les écrans LCD) ou l’antimoine (très présente dans
l’électronique), les réserves ne couvriraient plus qu’une vingtaine d’années seulement
25
. Dans un contexte où la consommation de métaux ne cesse d’augmenter à un rythme
effréné, préserver les ressources semble donc devenu un objectif incontournable.
Dans ce cadre, le recyclage des métaux est bien entendu une option. Cependant, si
le taux de recyclage de certains grands métaux industriels, tels que l’acier ou le cuivre,
est relativement élevé (cf. infra), notamment dans les pays développés, ce n’est pas
le cas pour des métaux plus rares, dont l’exploitation est plus récente et
géographiquement très concentrée, et pour lesquels les filières de recyclage
commencent tout juste à voir le jour. Il s’agit entre autres de l’iridium, de l’indium, du
platine et des terres rares, qui sont autant de composants incontournables de
l’industrie moderne pour fournir en grandes quantités les batteries électriques, les
éoliennes, les panneaux photovoltaïques, les téléphones portables, les fibres optiques,
etc. Dans notre société high tech en pleine transition énergétique, ces métaux sont
devenus aussi rares qu’indispensables. Or, actuellement, le recyclage de ces métaux
coûte toujours plus cher que leur extraction, avec une incidence écologique parfois
désastreuse dans diverses régions du globe.
D’autres difficultés résident dans le fait, d’une part, que la complexité des produits
à recycler rend difficile le prélèvement des métaux qui les constituent et, d’autre part,
que, lorsque ces métaux peuvent être récupérés, ils sont rarement réutilisés pour les © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
mêmes applications. La complexité croissante de la composition des véhicules
automobiles donne une illustration du défi que constituent la récupération et le tri
des métaux à recycler.

24
Les métaux ferreux sont essentiellement composés de fer et ont des propriétés magnétiques. Parmi eux,
l’acier et les alliages comprenant de l’acier sont les plus utilisés.
25
V. AUREZ, L. GEORGEAULT, Économie circulaire : système économique et finitude des ressources, Louvain-la-
Neuve, De Boek Supérieur, 2016, p. 53.

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2 L’ÉCONOMIE

Il est par ailleurs impossible de séparer les métaux au sein des alliages ; ceux-ci ne
26
peuvent donc pas être recyclés .
Comme pour le plastique, l’Asie, et particulièrement la Chine, était devenue une
destination prisée des pays européens pour le recyclage plus complexe de déchets alliant
plusieurs types de métaux, voire un mélange de plastique et de métaux comme
l’aluminium (emballages alimentaires). Mais depuis fin 2017, la Chine a
progressivement limité les importations occidentales de ce type.

La valorisation énergétique

Quant à elle, la valorisation énergétique permet une récupération de l’énergie, ou d’une


partie de l’énergie, pouvant être tirée des matières traitées. Elle constitue une alternative
à l’enfouissement des déchets. En effet, lorsqu’il n’est pas possible de récupérer les
ressources sous la forme de matériaux, les déchets peuvent être, dans une certaine
mesure, convertis, par différents procédés dont celui de la combustion, en chaleur ou en
électricité. Cette option de la valorisation énergétique, et ce même si des progrès
techniques ont été enregistrés ces dernières décennies, est la plus polluante au sein de
l’économie circulaire, et doit de ce fait être envisagée en dernier recours.
27
Dans cet ordre d’idée, l’échelle de Lansink hiérarchise les différentes solutions existant
en matière de traitement des déchets. Elle a pour objectif de donner la priorité aux
modes de transformation les plus respectueux de l’environnement, le meilleur
déchet étant celui qui n’existe pas. Cette échelle de Lansink se décline de la manière
suivante, de l’option la plus vertueuse à celle la plus néfaste pour l’environnement : la
prévention, la réutilisation, le recyclage, la valorisation énergétique et, enfin,
l’élimination des déchets (essentiellement par l’enfouissement en décharge). Cette
échelle a inspiré les mesures politiques mises en place au niveau européen.

1.3.3.Le cycle biologique

Dans le cycle biologique, ce sont les déchets organiques qui, par un procédé ou un autre,
acquièrent une nouvelle vie jusqu’à, in fine, retourner à la terre. Le coton peut ainsi
fournir la matière première à la conception d’un vêtement, pour ensuite être recyclé
comme isolant dans le secteur du bâtiment, et enfin être scindé en fibres pour être
composté.

Le compostage
© CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
Le compostage est un procédé de traitement et de valorisation des déchets organiques
qui reproduit en accéléré le processus d’humification de la matière organique dans les
sols. Cette transformation des déchets organiques en humus offre une ressource
intéressante pour l’exploitation agricole, le compost pouvant être utilisé comme
engrais ou pour

26
Ibidem, p. 54.
27
Du nom du politicien néerlandais Adrianus (Ad) Lansink, qui a déposé une motion en faveur de cette
méthode auprès du parlement néerlandais en 1979.

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 2

améliorer la qualité des sols. S’il n’est désormais pas rare que les particuliers
compostent leurs déchets organiques dans le fond de leur jardin, les déchets
organiques industriels (boues des papeteries, déchets des usines agroalimentaires,
etc.) sont pour leur part compostés par des entreprises spécialisées.
À titre d’exemple, la société Agricompost, dans la province de Liège, a été fondée en
1996 par six agriculteurs afin de valoriser les déchets de leurs exploitations
respectives. Par la suite, la demande grandissante, émanant tant des agriculteurs
désireux de se fournir en engrais que des producteurs de déchets organiques (en ce
compris des intercommunales, des petites et moyennes entreprises - PME, etc.), a
poussé l’entreprise à accroître son activité. Elle fait partie de la Fédération des
entreprises de recyclage agricole en Belgique (FERAB).

La biométhanisation

Dans un milieu privé d’oxygène, des déchets organiques (fumier, purin, déchets
organiques des ménages et de l’industrie agro-alimentaire, boues des stations
d’épuration, etc.) peuvent également, sous l’action de micro-organismes spécifiques, se
décomposer pour produire du biogaz ainsi qu’un résidu solide appelé digestat. Le
biogaz peut être utilisé pour la production de chaleur ou d’électricité ou être
transformé en méthane afin de gagner le réseau du gaz naturel. Quant au digestat,
riche en nutriments, il peut, sous certaines conditions, servir de fertilisant pour les
terres agricoles.
Le processus de biométhanisation contribue à la réduction des émissions de gaz à effet
de serre, en substituant une partie de la consommation de gaz naturel fossile par du
méthane issu de la biomasse, et permet la création d’emplois non délocalisables. Il s’agit
également d’une opportunité pour les agriculteurs de diversifier leurs activités.
En Belgique, la valorisation du biogaz, à travers un système de certificats verts, vise
pour l’instant quasi exclusivement son utilisation sous la forme de cogénération, qui
fournit donc chaleur et électricité. Il peut notamment s’agir de petites structures
agricoles. Il existe des dizaines d’unités de ce type sur le sol belge. En revanche,
l’opportunité d’épurer ce biogaz pour fournir du biométhane (analogue au gaz
naturel) afin de servir de carburant ou d’être injecté directement sur le réseau n’en
est qu’à ses balbutiements. Ainsi, la Flandre a entrepris la construction, en mars
2018, de la première installation belge de biométhane sur le site de
l’intercommunale de gestion des déchets de la région de La Campine, dans la
commune de Beerse. Environ 75 % du biogaz qui y est produit est valorisé par
cogénération pour répondre à la demande locale en chaleur et en électricité. Quant à
lui, le digestat est composté avec d’autres déchets verts au sein d’une installation
présente sur le même site. Le biogaz restant est transformé en gaz naturel qui est – et © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

c’est une première en Belgique – directement injecté dans le réseau de gaz naturel. En
Wallonie, la première unité wallonne de biométhane devrait voir le jour en 2020, au Bois
d’Arnelle (Frasnes-lez-Gosselies). Un autre projet concerne le parc d’activité
économique de Leuze-Europe (Leuze-en-Hainaut). En Région bruxelloise, la création
d’un centre de biométhanisation fait du surplace, même si le gouvernement
Vervoort III espère concrétiser l’idée dans les années à venir.

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2 L’ÉCONOMIE

Le bioraffinage

Le concept de bioraffinerie (ou raffinerie végétale) est analogue à celui de la raffinerie du


pétrole permettant la production de carburants et divers produits. Il s’agit d’un
procédé industriel qui permet la transformation de biomasse en bioénergie
(biocarburants, chaleur et électricité) ou en produits biobasés (incluant des produits
alimentaires, des produits chimiques et des biomatériaux). Concrètement, plusieurs
procédés de transformation sont utilisés pour fractionner certaines ressources
végétales (bois, paille, maïs, blé, soja, etc.) en leurs différents composants (lignines,
protéines, triglycérides, etc.) afin de les convertir ensuite en produits dérivés, en
28
minimisant la production
2 de déchets et les émissions de CO .

1.3.4.Les symbioses industrielles

Sous-champ incontournable de l’écologie industrielle, la symbiose industrielle repose sur


un réseau de synergies industrielles qui s’implante sur un territoire donné. Ces synergies
industrielles prennent la forme de partenariats entre des entreprises ou des secteurs qui
partagent entre eux des produits dérivés de leur activité (énergie, eau, logistique ou
matériaux), ce qui leur permet, à travers le bouclage de ces flux de matières et d’énergie,
de réduire conjointement leur impact sur l’environnement. Les déchets alimentaires
générés dans le secteur de l’hôtellerie, de la restauration et des cafés (Horeca) peuvent
ainsi alimenter les animaux d’élevage, l’incinération de déchets industriels non
toxiques peut servir à produire de l’énergie, la vapeur des centrales thermiques peut
fournir du chauffage à des industries ou des collectivités, etc. Autre exemple, moins
conventionnel, et qui vient par ailleurs s’inscrire dans le cycle biologique décrit plus haut,
la bière Babylone, du Brussels Beer Project, est brassée à partir de pain frais recyclé
provenant des invendus des magasins Delhaize.
Il existe deux types de synergies industrielles. Les synergies de substitution permettent
à une entreprise d’utiliser comme input ou comme source d’énergie le résidu d’une autre
entreprise. Ce procédé induit une réduction de la consommation des ressources
naturelles. Les synergies de mutualisation visent à mettre en commun certains besoins,
à optimiser les frais de logistique ou encore à partager certaines ressources ou
équipements. Si les synergies industrielles peuvent s’observer de manière
individuelle, une symbiose industrielle implique la présence simultanée de plusieurs
29
synergies industrielles sur un territoire donné . Par ailleurs, dans certains cas, il reste
difficile de clairement différencier un projet de symbiose industrielle de la simple mise en
place d’une production intégrée.
La ville portuaire de Kalundborg, au Danemark, constitue un exemple emblématique © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
de symbiose industrielle. Celle-ci implique cinq partenaires historiques principaux (même
si d’autres acteurs, une quinzaine au total, sont avec le temps venus compléter les
synergies possibles) : une raffinerie, une centrale électrique, le site principal de Novo
Nordisk (biotechnologie), une usine de panneaux en plâtre et enfin la municipalité
elle-

28
P. LAURENT, J. ROIZ, J.-L. WERTZ, A. RICHEL, M. PAQUOT, « Le bioraffinage, une alternative prometteuse
à la pétrochimie », BASE. Biotechnologie, agronomie, société et environnement, volume 15, n° 4, 2011,
p. 597-610.
29
S. SAUVÉ, D. NORMANDIN, M. MCDONALD, L’économie circulaire, op. cit., p. 62.

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L’ÉCONOMIE 2

même. Dans le parc industriel de Kalundborg, la centrale électrique fournit sa vapeur


d’eau à Novo Nordisk ainsi qu’à la raffinerie de pétrole, qui elle-même offre ses eaux
usées à la centrale pour son refroidissement. Les eaux tièdes de la centrale servent
ensuite à la ferme piscicole présente elle aussi sur le site. Quant à Gyproc, l’usine de
panneaux en plâtre, elle reçoit la matière première qui sous-tend son activité, le gypse,
d’une unité de désulfuration du gaz. La municipalité a su, dès 1960, à l’ouverture du
parc, instaurer un climat incitatif pour renforcer cette symbiose, tout en bénéficiant
elle-même du concept, puisqu’elle utilise les eaux chaudes de la centrale électrique pour
alimenter son système de chauffage. Si cet exemple est une réussite, il reste un cas isolé
car les conditions pour mettre en place un tel système restent difficiles à rencontrer :
une proximité géographique, une information transparente et partagée sur les synergies
possibles, la mise en place d’un climat de collaboration et de communication entre
différents acteurs dont les modes de fonctionnement sont souvent très différents.
Très loin de constituer une règle en la matière, quelques parcs d’activité en Belgique se
veulent soucieux d’un certain respect de l’écologie et tendent vers le concept de
symbiose industrielle. En Flandre, on les retrouve sous le vocable de « duurzaam
parkconcept », à l’image d’Evolis, à Courtrai, qui souhaite allier écologie et économie
grâce à ses quatre éoliennes implantées le long de l’autoroute E17 et à sa centrale
biomasse qui fournit l’eau chaude pour le chauffage sur le site. En Wallonie, le
gouvernement régional Demotte II (PS/Écolo/CDH) a introduit le concept d’éco-
30
zoning dans son plan Marshall 2.vert (2009-2014) . Un appel à projets a été lancé en
septembre 2010 et cinq expériences pilotes ont ainsi pu démarrer dès le 7 avril 2011,
avec les projets suivants : Tertre, Chimay- Baileux, Liège Science Park, Ecopôle et
Hermalle-sous-Huy/Engis. L’objectif visé est d’encourager l’optimisation des flux
entrants et sortants entre entreprises voisines, de mutualiser les services (mobilité,
achats groupés, etc.) et d’adhérer à des principes d’aménagement du territoire et
d’urbanisme durables. Trois projets supplémentaires sont venus s’ajouter dans un
31
second temps : Ecolys, Nivelles Sud et Leuze Europe .
Parmi les éco-zonings wallons, celui de Tertre, dans le Hainaut, est souvent cité en
exemple. Ce parc d’activité, qui existe depuis 1929, a dès ses fondements utilisé les
atouts de l’économie circulaire puisque plusieurs entreprises se sont installées autour
d’une cokerie, la Carbo, avec l’idée de pouvoir exploiter les outputs de celle-ci. Depuis
2010 et l’appel à projets intervenu dans le cadre du plan Marshall 2.vert, de nouvelles
synergies ont encore été développées entre les industriels présents sur le site, avec
l’appui de l’Intercommunale de développement économique et d’aménagement du
cœur du Hainaut (IDEA) et les autorités locales. L’objectif est d’allier compétitivité
économique et performance environnementale. Ces synergies concernent la gestion
et l’utilisation des matières premières, de l’énergie et de l’eau ainsi qu’une
mutualisation de la demande de transport de marchandises et des questions de mobilité. © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
Une douzaine d’entreprises sont installées sur le site, principalement actives dans le
secteur de la chimie.

30
« Viser l’excellence. Plan Marshall 2.vert », s.d., www.wallonie.be, p. 32.
31
Service public de Wallonie, Secrétariat général, Cellule des stratégies transversales, Délégué spécial,
« Plan Marshall 2.vert. Rapport de suivi », avril 2014, http://economie.wallonie.be, p. 173.

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2. LA RÉGLEMENTATION EUROPÉENNE

Comme souvent en matière de politique énergétique et environnementale, l’échelon


européen est incontournable. Ambitionnant de donner l’exemple en matière de
transition vers une économie bas carbone, l’Union européenne (UE) a investi la
question du développement d’une économie circulaire.
Dès le 19 novembre 2008, l’Union européenne s’attaque à la question d’une gestion plus
32
optimale des déchets, en adoptant la directive 2008/98/CE relative aux déchets . Cette
directive amorce le chemin à suivre mais s’appuie sur des objectifs encore modestes,
cherchant surtout à apporter une solution aux déséquilibres observés au sein de
l’Europe en termes de collecte et de recyclage des déchets. Cette directive sera amendée en
mai 2018 par différentes nouvelles options, notamment en matière de responsabilités
élargies du producteur.
Afin de favoriser une transition vers une économie circulaire, l’Union européenne a
pris une série de mesures en 2015, qu’elle a concrétisées sous la forme de plusieurs
directives en 2018, avant d’intégrer cette préoccupation parmi les objectifs clés du «
green deal européen » défendu par la présidente de la Commission européenne, Ursula
von der Leyen, en décembre 2019.

2.1. L’ÉTAPE DE RÉFLEXION : « BOUCLER LA BOUCLE » (2015)

En décembre 2015, la Commission européenne avance un slogan, « Boucler la boucle »,


et adopte un plan d’action en faveur d’une accélération du recours au principe
d’économie circulaire au sein des États membres. Ce plan d’action repose sur 54
mesures visant les différentes étapes du cycle de vie des produits ; il ne concerne
donc pas uniquement, comme ce fut le cas par le passé, la phase finale de traitement
des déchets. En annexe, il comprend un calendrier de la mise en place attendue de ces
33
différentes mesures . © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

L’objectif du plan d’action adopté par l’Union européenne est d’offrir un cadre
réglementaire adéquat pour le développement de l’économie circulaire dans le marché

32
Directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux
déchets et abrogeant certaines directives, Journal officiel de l’Union européenne, L 312, 22 novembre
33
2008.
Commission européenne, « Boucler la boucle. Un plan d’action de l’Union européenne en faveur de
l’économie circulaire. Communication au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique
et social européen et au Comité des Régions », COM(2015) 614 final, 2 décembre 2015.

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L’ÉCONOMIE 2

unique, de donner aux opérateurs économiques et à l’ensemble de la société un signal


clair sur la voie à suivre en ce qui concerne les objectifs à long terme en matière de
déchets et de fournir un éventail de mesures concrètes à mettre en œuvre à
l’horizon 2020. Le texte balise ainsi les différentes étapes du cycle de vie d’un
produit en y accolant des recommandations et propositions : inciter à l’écoconception,
responsabiliser davantage les producteurs, promouvoir les meilleures pratiques, faciliter
les symbioses industrielles, mieux informer le consommateur sur la durabilité d’un
produit et les possibilités de réparation, analyser les options possibles pour faire face à
l’obsolescence programmée, favoriser le recours aux marchés publics écologiques,
promouvoir les engrais organiques, la réutilisation de l’eau et les matériaux recyclés
comme matière première, etc.
Parallèlement, la Commission européenne propose une révision de la législation sur
34
les déchets . Elle souhaite fixer comme objectif le recyclage de 65 % des déchets
municipaux et de 75 % des déchets d’emballages de l’Union européenne à l’horizon
2030, et contraindre à une réduction de la mise en décharge à tout au plus 10 % des
35
déchets municipaux à l’horizon 2030 . Les déchets municipaux sont « les déchets en
mélange et les déchets collectés séparément provenant des ménages, en ce compris le
papier et le carton, le verre, les métaux, les matières plastiques, les biodéchets, le bois,
les textiles, les emballages, les déchets d’équipements électriques et électroniques, les
déchets de piles et d’accumulateurs, ainsi que les déchets encombrants, y compris les
36
matelas et les meubles » . N’interviennent pas dans cette définition les déchets
provenant de la production, de l’agriculture, de la sylviculture, de la pêche, des
fosses septiques, des réseaux d’égouts et des stations d’épuration, les véhicules hors
37
d’usage ou les déchets de construction et de démolition .
Les déchets municipaux ne représentent approximativement qu’une dizaine de
pourcents de la quantité totale de déchets produite dans l’Union européenne (cf.
Graphique 1). En effet, selon Eurostat, le secteur de la construction dans l’UE28 a
contribué pour 36,4 % à la quantité totale de déchets produits en 2016, suivi des
industries extractives (25,3 %), de l’industrie manufacturière (10,3 %), des services de
gestion des déchets et de l’eau (10,0 %) et puis seulement des ménages (8,5 %). Les 9,5
% restants correspondent à des déchets produits par d’autres activités économiques,
38
essentiellement les services (4,6 %) et l’énergie (3,1 %) .

34
En 2015, la législation européenne sur la gestion des déchets repose sur la directive européenne 2008/98/CE
précitée. Conformément aux vœux de la Commission européenne, cette législation sera revue avec
l’adoption de la directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
la directive 2008/98/CE relative aux déchets (Journal officiel de l’Union européenne, L 150, 14 juin 2018).
35
Commission européenne, « Boucler la boucle : la Commission adopte un nouveau train de mesures
ambitieux sur l’économie circulaire en vue de renforcer la compétitivité, de créer des emplois et de
générer une croissance durable », Communiqué de presse, 2 décembre 2015, https://ec.europa.eu.
36
Article 3 de la directive européenne (UE) 2018/851 précitée. Selon ce même article, les « biodéchets »
sont les déchets biodégradables de jardin et de parc, les déchets alimentaires et de cuisine
provenant des ménages, des bureaux, des restaurants, du commerce de gros, des cantines, des
traiteurs et des magasins de vente au détail, ainsi que les déchets comparables provenant des usines de
transformation de denrées alimentaires.
37
Article 3 de la directive européenne (UE) 2018/851 précitée.
38
Eurostat, « Statistiques sur les déchets », https://ec.europa.eu (données extraites en juin 2019). La répartition
de la production de déchets en Belgique, par type et selon les secteurs, est disponible infra.

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3 L’ÉCONOMIE

L’attention mise sur les déchets municipaux s’explique en partie par le fait que ceux-ci sont
39
particulièrement complexes à gérer .

Graphique 1. Origine des déchets produits par les activités économiques et les ménages
(Union européenne, 2016), en %
Agriculture,
Commerce de gros de Ménages sylviculture et pêche
déchets et débris 8,5 0,8
1,0
Services
(sauf commerce
de gros en déchets Industries extractives
et débris) 25,3
4,6

Industrie
Construction manufacturière
36,4
10,3

Énergie
3,1
Déchets et eau
10,0

Source : Eurostat.

2.1.1.Les cinq secteurs prioritaires

Le document « Boucler la boucle » définit également cinq secteurs prioritaires pour


accélérer la mise en œuvre de l’économie circulaire tout au long de la chaîne de valeur.
Ces secteurs sont confrontés à des défis spécifiques dans le contexte de l’économie
circulaire : les matières plastiques, les déchets alimentaires, les matières premières critiques,
le secteur de la construction et de la démolition et, enfin, la biomasse et les bioproduits.
- Si le volume des déchets plastiques ne cesse de croître, moins d’un tiers de ces déchets
collectés en Europe sont effectivement collectés en vue du recyclage (et ce pour les
déchets les plus complexes et nécessitant le plus de main-d’œuvre, en dehors des
40
frontières européennes) . La Commission européenne souhaite que soit mise au point
une stratégie visant davantage de recyclabilité et de biodégradabilité des matières © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
plastiques, avec une conscience accrue du problème posé par la présence, dans certaines
matières plastiques, de substances chimiques dangereuses. Les déchets d’origine
plastique qui finissent dans les mers et les océans font eux aussi l’objet de l’attention
de la Commission. Par ailleurs, celle-ci relève que l’innovation dans les matières
plastiques peut également contribuer

39
Point 6 de la directive européenne (UE) 2018/851 précitée.
40
Un compte rendu statistique et un état des lieux plus poussés sur la gestion des matières plastiques en
Europe sont proposés infra.

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 3

à l’économie circulaire en préservant mieux les aliments, en améliorant la recyclabilité


des matières plastiques ou en réduisant le poids des matériaux utilisés dans les
41
véhicules .
- Une autre préoccupation ciblée par la Commission européenne est le gaspillage
alimentaire. Celui-ci intervient à toutes les étapes de la production et de la
consommation (lors de la production agricole, lors de la transformation des produits,
dans les magasins et l’horeca, et au sein des ménages), ce qui rend le phénomène
particulièrement difficile à quantifier. Selon les indicateurs de suivi mis en place par la
Commission, les déchets alimentaires en Europe représentent annuellement 88
millions de tonnes de nourriture gaspillées, ce qui correspond à environ 20 % de la
42
production alimentaire globale et génère un coût estimé à 143 milliards d’euros . Ce
gaspillage alimentaire implique par ailleurs une pression inutile sur les ressources
naturelles et l’environnement et engendre des déséquilibres sociaux. Les secteurs qui
contribuent le plus au gaspillage alimentaire dans l’Union européenne sont, dans
l’ordre, les ménages (53 %), la transformation (19 %), les services alimentaires (12
43
%), la production primaire (10 %) et le commerce de gros (5 %) .
En septembre 2015, l’Assemblée générale des Nations unies a adopté 17 objectifs de
développement durable à l’horizon 2030, parmi lesquels celui de diminuer de moitié
le gaspillage alimentaire par habitant au niveau de la distribution et du
consommateur et de réduire les pertes alimentaires tout au long de la chaîne de
44
production et d’approvisionnement, y compris les pertes après récoltes . L’Union
européenne et ses États membres se sont engagés à atteindre cet objectif.
Dans son plan d’action « Boucler la boucle », la Commission européenne s’engage
par ailleurs à élaborer une méthodologie commune au sein de l’Union européenne
pour mesurer les déchets alimentaires en étroite coopération avec les États membres
et les acteurs concernés. Parmi les autres mesures avancées, elle pointe également la
nécessité de soutenir la sensibilisation et la diffusion des bonnes pratiques en matière de
prévention du gaspillage alimentaire, à l’échelon national comme local. Elle entend
enfin offrir un cadre régulatoire permettant de faciliter les dons alimentaires et
l’utilisation d’anciennes denrées alimentaires dans la production d’aliments pour
animaux, et juge utile d’ouvrir une discussion sur la meilleure utilisation possible des
dates de péremption présentes sur les emballages.
- Le problème fondamental lié à ce que l’on appelle les matières premières critiques
réside dans le fait qu’elles sont condamnées à s’épuiser alors même qu’elles revêtent une
grande importance économique car elles sont essentielles à l’industrie moderne.
Elles sont particulièrement présentes dans les appareils électroniques (écrans
d’affichage, cartes de circuits imprimés, etc.). Dommage collatéral non négligeable,
leur extraction, qui avec le temps et leur raréfaction est opérée de plus en plus © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
difficilement, induit un impact

41
Commission européenne, « Boucler la boucle. Un plan d’action de l’Union européenne en faveur de
l’économie circulaire. Communication au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique
et social européen et au Comité des Régions », COM(2015) 614 final, 2 décembre 2015, p. 16.
42
Commission européenne, « Réduire le gaspillage alimentaire : la réponse de l’Union à un défi d’ampleur
mondiale », Fiche d’information, 28 novembre 2016, https://ec.europa.eu.
43
FUSIONS, « Food waste quantification manual to monitor food waste amounts and progression », 31
mars 2016, www.eu-fusions.org, p. 23.
44
Assemblée générale des Nations unies, « Transformer notre monde : le Programme de développement
durable à l’horizon 2030 », Résolution n° A/RES/70/1, 25 septembre 2015, https://unctad.org, point 12.3.

CH 2455-2456
3 L’ÉCONOMIE

important sur l’environnement. La Commission européenne a établi une liste, mise à


45
jour régulièrement, de ces matières premières critiques . On y retrouve vingt-sept
matières différentes ainsi qu’un constat assez largement reconnu désormais, à savoir la
suprématie de la Chine dans l’approvisionnement mondial en de nombreuses
matières premières critiques, telles que les terres rares, le magnésium, le tungstène,
l’antimoine, le gallium, le germanium, etc. Non seulement ces matières premières
critiques ne sont exploitées que dans quelques rares endroits du globe, mais elles sont
généralement peu substituables avec d’autres matières et leur taux de recyclage est
assez médiocre (quelques pourcents seulement).
Dans le cadre global d’un soutien à l’économie circulaire, la Commission européenne
estime qu’il est nécessaire de promouvoir la récupération des matières premières
critiques, de partager les meilleures pratiques à cet égard et d’encourager les États membres
à prendre des mesures dans ce sens. Concrètement, la politique européenne en la
matière s’appuie sur une directive datant de 2012 relative aux déchets
46
d’équipements électriques et électroniques (DEEE) . Ce texte encourage les États
membres à établir une meilleure coopération entre les producteurs et les recycleurs
d’équipements électriques et électroniques afin de faciliter la réutilisation, le
démantèlement et le recyclage. Il s’agit également de favoriser le tri de ce type de
déchets grâce à un processus de collecte séparée, avec possibilité également de remettre
les produits en fin de vie aux distributeurs. Un taux de collecte minimal est fixé. Il s’élève,
dès 2016, à 45 %, en poids total de DEEE collectés par un État membre par rapport au
poids moyen d’EEE mis sur le marché, sur le même territoire, au cours des trois
années précédentes. À partir de 2019, ce taux de collecte minimal passe à 65 %. Enfin,
les États membres sont priés d’apporter aux DEEE collectés un traitement approprié :
préparation en vue de la réutilisation, de la valorisation et du recyclage des matières,
extraction et traitement des fluides, etc. Des exigences de valorisation et de
recyclage sont fixées en fonction de différentes catégories d’EEE et sont reprises en
annexe de la directive.
- En termes de volume, le secteur de la construction (et de la démolition) compte
parmi les principales sources de déchets en Europe (soit environ 25 % à 30 % des
déchets générés). Ces déchets, d’une grande variété (béton, briques, plâtre, bois,
verre, métaux, plastique, etc.), sont souvent réutilisables ou recyclables, mais encore
trop peu souvent identifiés comme tels dans certains États membres. Le taux de
réutilisation et de recyclage varie en effet grandement d’un pays à l’autre. C’est
pourquoi un objectif contraignant a été fixé à l’échelle de l’Union européenne dans son
ensemble : la réutilisation, le recyclage ou une autre forme de valorisation de 70 % des
47
déchets de construction et de démolition non dangereux d’ici 2020 .
- Le cinquième secteur prioritaire identifié par la Commission européenne concerne
la biomasse et les bioproduits. Ceux-ci sont désormais utilisés dans les secteurs de la © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

construction, du textile, de la papeterie et de la menuiserie, des produits chimiques, de

45
Commission européenne, « Communication au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique
et social européen et au Comité des Régions relative à la liste 2017 des matières premières critiques pour
l’UE », COM(2017) 490 final, 13 septembre 2017, https://ec.europa.eu.
46
Directive 2012/19/UE du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 relative aux déchets
d’équipements électriques et électroniques (DEEE), Journal officiel de l’Union européenne, L 197, 24
juillet 2012.
47
Directive européenne 2008/98/CE précitée, article 11.2.

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L’ÉCONOMIE 3

l’alimentation ou encore des biocarburants. Ils ont pour eux leur caractère renouvelable,
biodégradable ou compostable. Cependant, l’un des enjeux de leur utilisation dans
l’esprit d’une économie circulaire est de favoriser une utilisation en cascade de ces
ressources, avec plusieurs cycles de réutilisation et de recyclage. La filière du bois offre un
exemple type d’une valorisation en cascade. Même si le bois est fonctionnellement
renouvelable, il s’agit d’une ressource limitée dont l’exploitation doit être réfléchie en
termes de durabilité. Dans cette optique, l’utilisation en cascade du bois permet
d’allonger le temps de vie des ressources utilisées. On parle de réutilisation en
cascade du bois lorsque celui-ci est transformé en un produit et que ce produit est
réutilisé au moins une fois à des fins soit matérielles soit énergétiques.
Concernant le secteur clé que constituent la biomasse et les bioproduits, la
Commission européenne identifie également un autre enjeu, à savoir une affectation
réfléchie des sols, en fonction, notamment, de l’impact environnemental de l’utilisation
des ressources.

2.1.2.Les moyens de financement

Le plan d’action dessiné en 2015 s’accompagne d’une politique de financement, à travers


48
les fonds structurels et d’investissements européens (fonds ESI) pour un montant
49
de 5,5 milliards d’euros . Les mesures décidées à travers ce plan d’action répondent en
effet à quatre des onze objectifs thématiques soutenus par ces fonds : « Renforcer la
recherche, le développement technologique et l’innovation », « Renforcer la compétitivité
des PME »,
« Protéger l’environnement et promouvoir l’utilisation rationnelle des ressources » et
« Favoriser la transition vers une économie à faibles émissions de CO 2 ». Les fonds ESI
sont cofinancés par l’Europe et les États membres. Associés à la période 2014-2020,
ils étaient destinés à soutenir la politique de cohésion décidée au sein de l’Union
50
européenne en 2010 et qui vise une croissance européenne plus « intelligente, durable et
inclusive », par des actions dans les domaines de l’emploi, de la recherche et du
développement, du changement climatique et de l’énergie durable, de l’éducation et
de la lutte contre la pauvreté. Cette politique, baptisée alors « Stratégie Europe 2020 », a
pour vocation de faire face à la crise économique tout en répondant aux enjeux sociétaux
et environnementaux.
À ces fonds viennent également s’ajouter d’autres sources européennes de financement
avec les programmes Horizon 2020, LIFE et COSME. Ces programmes font eux aussi
partie de la stratégie Europe 2020.
© CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

48
Ces fonds sont régis par le règlement (UE) n° 1303/2013 du Parlement européen et du Conseil du
17 décembre 2013 portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional,
au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement
rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, portant dispositions générales
applicables au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de
cohésion et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, et abrogeant le règlement (CE) n°
49
1083/2006 du Conseil (Journal officiel de l’Union européenne, L 347, 20 décembre 2013).
Commission européenne, « Boucler la boucle : la Commission adopte un nouveau train de mesures
ambitieux sur l’économie circulaire en vue de renforcer la compétitivité, de créer des emplois et de
générer une croissance durable », Communiqué de presse, 2 décembre 2015, https://ec.europa.eu.
50
Présidence du Conseil européen, « Conclusions », 17 juin 2010, https://ec.europa.eu.

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3 L’ÉCONOMIE

Horizon 2020 est un programme de recherche et d’innovation lancé en 2011 par la


51
Commission européenne et adopté en 2013 . Il bénéficie d’un financement de 80
milliards d’euros sur sept ans (entre 2014 et 2020), dont 650 millions d’euros pour le
programme
« Industry 2020 in the circular economy ». Ce programme poursuivait trois objectifs :
viser l’excellence scientifique, soutenir la compétitivité des entreprises et rencontrer
les principaux défis sociétaux, au rang desquels la lutte contre le changement
climatique et l’utilisation efficace des ressources et des matières premières. Parmi les
initiatives soutenues par le programme Horizon 2020, on retrouve le projet Barbara,
qui implique l’Espagne, l’Italie, la Suède et la Belgique (avec l’entreprise Celabor,
installée à Herve). Ce projet vise à valoriser les déchets de la production
agroalimentaire pour élaborer, via l’impression en trois dimensions (3D), des pièces
de bio plastique destinées aux secteurs de la construction et de l’automobile.
L’Union européenne finance également des projets environnementaux, climatiques et en
faveur de la préservation de la nature par le biais de son programme LIFE (acronyme
de l’Instrument financier pour l’environnement). Ce programme a été mis en place
en 1992 pour financer des projets au sein de l’Union européenne ou dans des pays
voisins ou candidats à l’adhésion. En 2013, un budget de 3,4 milliards d’euros a été
52
alloué au programme pour la période 2014-2020 . À titre d’exemple, l’entreprise
Comet Traitements, groupe industriel familial belge (basé à Châtelet) et acteur
incontournable du recyclage dans le domaine des métaux et du plastique, coordonne
un projet LIFE+ dans le domaine de l’économie circulaire des plastiques en
provenance des déchets d’équipements électriques et électroniques, ainsi que des
véhicules hors d’usage.
Le programme européen COSME entend quant à lui soutenir la compétitivité des
entreprises et des PME (son nom est l’acronyme de competitiveness for small and
medium enterprises). Il dispose d’un budget de 2,3 milliards d’euros pour la période 2014-
2020, afin d’aider les PME à accéder au crédit et aux marchés et à améliorer leur
53
durabilité . Il est question ici d’améliorer la compétitivité des PME à travers,
notamment, une utilisation rationnelle des ressources et la volonté d’accroître
l’efficacité énergétique des processus.

2.2. DE NOUVELLES RÈGLES (2018)

Forte de son plan d’action en faveur de l’économie circulaire, la Commission


européenne est passée à la mise en place et à l’évaluation des mesures qui y sont
défendues. C’est ainsi qu’ont été lancées trois plateformes liées à l’économie © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

circulaire.

51
Règlement (UE) n° 1291/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 portant
établissement du programme-cadre pour la recherche et l’innovation “Horizon 2020” (2014-2020)
et abrogeant la décision n° 1982/2006/CE, Journal officiel de l’Union européenne, L 347, 20 décembre
52
2013.
Règlement (UE) n° 1293/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 relatif à
l’établissement d’un programme pour l’environnement et l’action pour le climat (LIFE) et abrogeant
le règlement (CE) n° 614/2007, Journal officiel de l’Union européenne, L 347, 20 décembre 2013.
53
Règlement (UE) n° 1287/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013
établissant un programme pour la compétitivité des entreprises et des petites et moyennes
entreprises (COSME) (2014-2020) et abrogeant la décision n° 1639/2006/CE, Journal officiel de
l’Union européenne, L 347, 20 décembre 2013.

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L’ÉCONOMIE 3

La première, European Platform on Food Losses and Food Waste (FLW), regroupe
des entités publiques, des industries, des groupes d’affaires, des universités et des
organisations non gouvernementales (ONG). Mise en place en août 2016, elle
fonctionne comme un groupe de travail dont les experts se réunissent régulièrement
pour fournir des recommandations dans la lutte contre le gaspillage alimentaire. Le
mandat de ce groupe d’experts européens a été reconduit jusqu’à la fin 2021, mais une
54
série de recommandations ont déjà été rendues publiques en décembre 2019 .
55
Une deuxième plateforme, InnovFin , soutient le financement de l’économie
circulaire en centralisant les demandes de financement et les projets innovants en la
matière. Cette plateforme a été créée en janvier 2017, avec l’appui de la Banque
56
européenne d’investissement (BEI) et réunit la Commission européenne, la BEI, les
banques de développement nationales, les investisseurs institutionnels et d’autres
parties prenantes (ONG et autres acteurs clés de l’économie circulaire).
Enfin, une troisième plateforme est active depuis mars 2017 : la Plateforme des acteurs
européens de l’économie circulaire. Il s’agit d’une initiative conjointe de la
Commission européenne et du Comité économique et social européen (CESE) qui vise
à promouvoir l’économie circulaire en s’appuyant sur un espace d’échange des
connaissances, des bonnes pratiques et des initiatives politiques en la matière, tous
57
secteurs et tous pays confondus. Le site Internet qui incarne cet espace d’échange
regroupe également les actualités et événements liés à l’économie circulaire, ainsi
qu’une base de données de contacts et un forum de discussion.
Parallèlement, le processus régulatoire européen fait son chemin et c’est en janvier 2018
que la Commission européenne a défendu un nouvel ensemble de textes qui
58
concerne tour à tour la gestion des matières plastiques , le traitement adéquat des
59
substances chimiques dans les processus de réutilisation et de recyclage , un cadre
de suivi des progrès réalisés par rapport au plan d’action de 2015, que ce soit à
60
l’échelle de l’Union européenne dans son ensemble ou à l’échelle des États membres ,
61
ainsi qu’un rapport sur les matières premières critiques et l’économie circulaire .

54
EU Platform on Food Losses and Food Waste, « Recommendations for action in food waste prevention »,
décembre 2019, https://ec.europa.eu.
55
Cf. « InnovFin. Financement européen de l’innovation », www.bei.org.
56
Commission européenne, « Économie circulaire : la Commission tient ses promesses, fournit des
orientations sur la valorisation énergétique des déchets et collabore avec la BEI pour stimuler les
investissements », Communiqué de presse, 26 janvier 2017, https://ec.europa.eu.
57
« #CEstakeholderEU. Plateforme des acteurs européens de l’économie circulaire »,
https://circulareconomy.europa.eu.
58
Commission européenne, « Une stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
circulaire. Communication au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social
européen et au Comité des Régions », COM(2018) 28 final, 16 janvier 2018.
59
Commission européenne, « Solutions possibles pour les questions à l’interface entre les textes législatifs
relatifs aux substances chimiques, aux produits et aux déchets. Communication au Parlement européen,
au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des Régions concernant la mise
en œuvre du paquet “économie circulaire” », COM(2018) 32 final, 16 janvier 2018.
60
Commission européenne, « Communication au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique
et social européen et au Comité des Régions relative à un cadre de suivi pour l’économie circulaire
», COM(2018) 29 final, 16 janvier 2018.
61
Commission européenne, « Report on critical raw materials and the circular economy », Commission staff
working document, SWD(2018) 36 final, 16 janvier 2018, parties 1/3, 2/3 et 3/3.

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3 L’ÉCONOMIE

2.2.1.Une stratégie sur les matières plastiques


En 2018, la production de plastique en Europe (EU28 plus la Norvège et la Suisse)
s’élevait à 61,8 millions de tonnes, pour une production mondiale atteignant 359 millions
62
de tonnes (soit 17 % pour la production européenne) ; 51 % du plastique mondial est
produit en Asie (30 % pour la seule Chine, 4 % pour le Japon et 17 % pour le reste de
l’Asie).
Pour sa part, la demande de plastique au sein de l’Europe atteignait 51,2 millions de
tonnes en 2018 ; elle se répartit entre différents secteurs, à commencer par les
emballages et la construction (cf. Graphique 2).
Graphique 2. Demande de plastique en Europe (2018), en %
Autres
(dont le secteur
médical)
16,7

Agriculture
3,4
Emballages
39,9
Sports et loisirs
4,1

Équipements
électriques et
électroniques
6,2

Secteur de
l’automobile
9,9

Secteur de la
construction
19,8
Source : PlasticsEurope, European Association of Plastics Recycling and Recovery Organisations et Conversio
Market & Strategy GmbH.

Selon l’organisation patronale belge des entreprises technologiques, Agoria, la répartition


belge de la demande des transformateurs de matières plastiques par secteur (données 2018)
est assez similaire à celle observée en Europe : 45 % pour les emballages, 23 % pour
le secteur de la construction, 8 % pour le secteur de l’automobile, 4 % pour les
63
équipements électriques et électroniques et 20 % pour les autres secteurs . © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

62
Les données présentées ici, concernant la production et la demande européennes de plastique ainsi que
les déchets récoltés et traités, ont été récoltées par l’association des fabricants de plastiques en Europe
(PlasticsEurope) et l’Association européenne des organisations de recyclage et de valorisation du
plastique (European Association of Plastics Recycling and Recovery Organisations - EPRO), et
compilées par Conversio Market & Strategy GmbH dans l’étude « Plastics, the facts 2019. An analysis of
European plastics production, demand and waste data », 2019, www.plasticseurope.org.
63
Agoria et Essenscia, « Industrie belge du plastique et économie circulaire : où en est-on ? », 2019,
www.agoria.be.

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L’ÉCONOMIE 3

29,1 millions de tonnes de déchets plastiques ont été collectées en Europe en 2018 pour
être traitées. Ces déchets ont ensuite intégré trois filières différentes (cf. Graphique 3) :
la valorisation énergétique (42,6 %), le recyclage (32,5 %), et l’entreposage ou
l’enfouissement en décharge (24,9 %). Le recyclage occupe donc moins d’un tiers des
traitements opérés. Précision importante : le plastique recyclé l’est à 19 % en dehors
des frontières de l’Europe. La tendance serait ainsi clairement à la baisse, puisque le
chiffre était de 37 % en 2016. Cette amélioration de la situation étonne certains
observateurs sur le terrain, qui sont moins optimistes que les chiffres avancés. Entre
2006 et 2018, le volume de plastique collecté pour être traité a augmenté de 19 %, avec
un doublement du recyclage, une hausse de 77 % de la valorisation énergétique et une
baisse de 44 % de la mise en décharge (option qui, en 2006, représentait plus de la
moitié du volume de plastique traité). La valorisation énergétique du plastique a donc
augmenté plus vite que le recyclage. Par ailleurs, si le volume de plastique collecté s’est
accru, c’est certes grâce à un meilleur système de collecte, mais également à une
production toujours plus importante de plastique.
La différence de volume entre la demande de plastique en Europe et les déchets
plastiques collectés s’explique, par le fait que certains produits en plastique, souvent
autres que ceux utilisés pour les emballages ou les usages uniques, ont une longue durée
de vie, par le fait que tous les déchets plastiques ne sont pas à l’heure actuelle
correctement collectés, et par le jeu des importations et exportations.

Graphique 3. Traitement du plastique collecté en Europe (2018), en %

© CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

Source : PlasticsEurope, Euro ean


p Association of Plastics Recycling and Recovery Organisations et Conversio
Market & Strategy GmbH.

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3 L’ÉCONOMIE

Un potentiel encore peu exploité

Le traitement des déchets plastiques ne s’opère pas de la même manière partout en Europe.
Dix pays ont introduit des restrictions sévères au recours à la mise en décharge, avec
un taux d’enfouissement qui est dès lors inférieur à 10 % : Allemagne, Autriche, Belgique,
Danemark, Finlande, Luxembourg, Norvège, Pays-Bas, Suède et Suisse. À l’inverse,
huit pays enfouissent encore plus de 50 % de leurs déchets plastiques, souvent avec les
déchets résiduels car ils ne sont pas collectés sélectivement : Bulgarie, Chypre,
Croatie, Grèce, Hongrie, Lettonie, Malte et Roumanie. Pour leur part, les taux de
recyclage enregistrés en 2018 sont compris entre 20 % et 40 % (avec deux pays au-
dessus des 40 %, à savoir l’Espagne et la Norvège). C’est essentiellement le recours à la
valorisation énergétique qui offre actuellement une option alternative au traitement
par enfouissement. En d’autres termes, pour des taux assez équivalents entre pays
européens en ce qui concerne le recyclage, les pays ayant peu recours à
l’enfouissement optent intensément pour la valorisation énergétique, et
inversement.
Sur la base de cet état des lieux, il ressort que, avec seulement 32,5 % des déchets plastiques
collectés passant effectivement par la filière du recyclage, cette dernière conserve un
potentiel largement inexploité relativement au plastique par rapport à ce qui
prévaut pour d’autres matières plus largement recyclées comme le papier, le verre ou les
métaux (cf. Graphique 4). Selon la Confederation of European Paper Industries
(CEPI), le taux de recyclage du papier s’élevait, pour l’UE28, la Norvège et la Suisse, à
64
71,6 % en 2018 (contre 52 % au début des années 2000) . Selon la Fédération
européenne du verre d’emballage (FEVE), le taux de recyclage du verre pour l’UE28,
65
la Norvège et la Suisse se montait à 76,6 % en 2017 . Quant à la Confédération
européenne des industries de recyclage (EuRIC, European Recycling Industries’
Confederation) – qui regroupe notamment la Fédération européenne de la
récupération et du recyclage des métaux ferreux (EFR, European Ferrous Recovery
and Recycling Federation) et la Fédération européenne du négoce et du recyclage des
métaux [non ferreux] (Eurometrec, European Metal Trade and Recycling Federation) –,
elle estime à 90 % le taux de recyclage en Europe, en 2018, de l’acier inoxydable
collecté, contre 70 % pour le cuivre, et revendique un taux de 75 % de l’aluminium
produit historiquement toujours dans la boucle (sur des produits en ordre de marche
66
ou sous une forme recyclée) .

© CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

64
Confederation of European Paper Industries, « Key statistics 2018. European pulp & paper industry
», juin 2019, www.endseurope.com, p. 23.
65
Fédération européenne du verre d’emballage, « Glass Recycling Statistics Year 2017 », novembre 2019,
https://feve.org.
66
Confédération européenne des industries de recyclage, « Metal Recycling Factsheet », s.d.,
www.euric-aisbl.eu.

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L’ÉCONOMIE 3

Graphique 4. Taux de recyclage après collecte en Europe * (2018 **)


100 %

90 %

80 %

70 %

60 %

50 %

40 %

30 %

20 %

10 %

0%
Acier
Verre Aluminium Papier Cuivre Plastique
* UE28 + Norvège et Suisse.
** À l’exception du verre : 2017.
Sources : PlasticsEurope, European Association of Plastics Recycling and Recovery Organisations, Conversio
Market & Strategy GmbH, Confederation of European Paper Industries, Fédération
européenne du verre d’emballage et Confédération des industries du recyclage européen.

Outre certains problèmes techniques déjà mentionnés précédemment, la faiblesse


du taux de recyclage du plastique s’explique par le bas prix des matières premières
et par l’incertitude relative aux débouchés du plastique recyclé. La demande de
matières plastiques recyclées reste en effet encore peu importante, ce qui ne favorise pas
67
les projets d’investissement dans le secteur .
Lorsqu’elle met en avant la problématique du plastique en 2018, la Commission
européenne dresse un constat qui est toujours d’actualité aujourd’hui : « Les producteurs
d’articles et d’emballages plastiques sont peu ou pas incités à tenir compte des besoins
en recyclage ou en réutilisation lorsqu’ils conçoivent leurs produits. Les plastiques
sont fabriqués à partir de divers polymères et sont hautement spécialisés, à l’aide
d’additifs spécifiques permettant de répondre aux exigences fonctionnelles ou
esthétiques propres à chaque fabricant. Cette diversité peut compliquer le processus de
recyclage, le rendre plus coûteux et amoindrir la qualité et la valeur des plastiques
recyclés. Certains choix de conception, parfois motivés par des considérations
commerciales (comme le recours à des couleurs très sombres) peuvent aussi avoir une
68
influence négative sur la valeur des matières plastiques recyclées » . Afin de faire face,
© CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

la Commission européenne entend encourager l’introduction et le développement de


certains instruments économiques tels que le régime de responsabilité élargie des
producteurs (cf. infra). Elle fixe également des objectifs clairs. En 2030, tous les
emballages plastiques mis sur le marché de

67
Commission européenne, « Une stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie
circulaire. Communication au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social
européen et au Comité des Régions », COM(2018) 28 final, 16 janvier 2018, p. 4.
68
Ibidem, p. 11.

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4 L’ÉCONOMIE

l’Union européenne doivent être soit réutilisables soit recyclables dans des
conditions économiquement efficaces. Au même moment, plus de la moitié des
déchets plastiques générés en Europe doivent être recyclés. Pour ce faire, les capacités
de tri et de recyclage devront être quadruplées par rapport à 2015, avec la création de 200
69
000 nouveaux emplois sur l’ensemble de l’Europe .

Microplastiques et plastiques à usage unique

La Commission européenne pointe également deux problématiques particulières : les


microplastiques et les plastiques à usage unique. La présence accrue de
microplastiques, à savoir des fragments de plastiques de petite taille qui s’accumulent
désormais dans les mers et océans (et sont ingérés par les organismes marins avant
d’apparaître dans la chaîne alimentaire), dans l’eau potable, dans l’air et même dans des
aliments tels que le sel ou le miel, sont une conséquence directe de la prolifération des
déchets plastiques. Quant à la consommation croissante de plastiques à usage unique,
elle vient directement questionner les limites du recyclage, car ces petits emballages
ou autres produits de consommation (tels que les sacs, les gobelets jetables, les
couvercles, les pailles et les couverts) sont généralement jetés après une seule
utilisation, sans qu’aucune collecte sélective et donc aucun tri ne soit vraiment possible.
Deux résolutions, l’une sur les déchets plastiques et microplastiques dans le milieu marin
et l’autre sur la lutte contre la pollution par les produits en plastique à usage unique, ont
70
été adoptées par l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement le 15 mars 2019 .
Trois mois plus tard, l’Union européenne, qui avait donné le ton lors des discussions
71
menées au sein des Nations unies, adopte une directive allant dans le même sens .
72
Sur la base de celle-ci, les bouteilles en plastique devront contenir en moyenne au
moins 25 % de plastique recyclé à partir de 2025, avant que ce ratio ne grimpe à au
moins 30 % de plastique recyclé dès 2030. Ces mêmes bouteilles en plastique devront en
outre être collectées à raison de 90 % au minimum d’ici 2029. Certains types d’usages
plastiques seront par ailleurs bannis de la mise sur le marché européen, au rang desquels,
les couverts et les assiettes à usage unique, les pailles, les bâtonnets mélangeurs de
boissons, les cotons- tiges et les tiges de ballons en plastique, mais également les
plastiques oxodégradables ainsi que les récipients pour aliments et les gobelets en
polystyrène expansé. Les sacs oxodégradables sont des sacs en plastique, fabriqués donc
à base d’hydrocarbures, auxquels ont été ajoutés des additifs chimiques en vue d’entraîner
la dégradation de ces sacs au bout de quelques années grâce à l’effet oxydant de la
lumière. Il en résulte une fragmentation en microplastiques qui ne sont pas
assimilables par l’environnement et lui sont donc

69
Ibidem.
© CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
70
Assemblée des Nations unies pour l’environnement du Programme des Nations unies pour
l’environnement, « Déchets plastiques et microplastiques dans le milieu marin », Résolution
n° UNEP/EA.4/RES.6, 15 mars 2019, https://undocs.org ; Assemblée des Nations unies pour
l’environnement du Programme des Nations unies pour l’environnement, « Lutte contre la pollution
par les produits en plastique à usage unique », Résolution n° UNEP/EA.4/RES.9, 15 mars 2019,
71
https://undocs.org.
Directive (UE) 2019/904 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 relative à la réduction
de l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement, Journal officiel de l’Union
européenne, L 155, 12 juin 2019.
72
Ces bouteilles sont reprises dans l’annexe de la directive ; il s’agit essentiellement de celles constituées
majoritairement de PET.

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 4

néfastes. Les États membres ont jusqu’au 3 juillet 2021 pour transposer la directive
et appliquer cette restriction. Le texte vise également à responsabiliser les producteurs,
qui devront prendre en charge une partie des coûts de collecte et de traitement de
certains produits tels que les récipients pour aliments destinés à l’alimentation rapide, les
mégots de cigarette ou les engins de pêche contenant du plastique.

Alliance circulaire et Plastics Pact européen

Le 20 septembre 2019, une centaine de partenaires publics et privés représentant l’ensemble


de la chaîne de valeur des plastiques ont signé une déclaration d’alliance circulaire
sur les matières plastiques. Comme c’est jusqu’ici souvent le cas lorsqu’il s’agit
d’actions en faveur de l’implantation d’une économie davantage circulaire, cette
déclaration porteuse d’engagements reste symbolique, sans être accompagnée de
73
mesures contraignantes. En mars 2020, ce sont pas moins de 175 organisations qui
sont concernées par le projet, représentant l’industrie, le milieu académique et les
autorités publiques. Le principal objectif de cette alliance est d’utiliser chaque année
10 millions de tonnes de plastique recyclé pour fabriquer de nouveaux produits en
Europe d’ici à 2025. Il s’agit d’un objectif fixé par la Commission européenne dans sa
stratégie sur les matières plastiques.
Pour aller plus loin encore, le Danemark, la France et les Pays-Bas ont initié
74
l’European Plastics Pact , dont les signataires se sont réunis une première fois à
Bruxelles le 6 mars 2020. Ce pacte regroupe 17 gouvernements nationaux ou
régionaux (dont la Belgique et les trois Régions belges), 65 entreprises et 24
associations ou ONG. Quatre objectifs sont ici défendus : rendre tous les emballages
plastiques et les produits en plastique à usage unique réutilisables, lorsque cela s’avère
possible, et au minimum, recyclables d’ici à 2025 ; réduire les produits et emballages
plastiques vierges d’au moins 20 % (en poids) d’ici à 2025 par rapport à 2017, la moitié
(10 %) provenant d’une réduction en valeur absolue de la quantité de plastiques ;
augmenter les capacités de collecte, de tri et de recyclage d’au moins 25 points de
pourcent d’ici à 2025 et atteindre un niveau correspondant à la demande du marché
pour les plastiques recyclés ; et incorporer, d’ici à 2025 toujours, au moins 30 % de
plastiques recyclés (en poids) dans les nouveaux produits et emballages mis sur le
marché.

2.2.2.Les directives relatives aux déchets, à leur gestion


et à leur valorisation

S’appuyant sur les propositions émises par la Commission européenne en décembre © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
2015 et sur les travaux menés depuis lors, le Parlement européen et le Conseil de
l’Union européenne ont adopté le 30 mai 2018 quatre directives relatives à la gestion
75
des déchets et à leur valorisation . À travers ces différents textes, l’Union
européenne espère

73
Pour consulter la liste des signataires, cf. Commission européenne, « Circular Plastics Alliance. List
of Signatories », 7 mai 2020, https://ec.europa.eu.
74
Cf. le site Internet https://europeanplasticspact.org.
75
Directive (UE) 2018/849 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive
2000/53/CE relative aux véhicules hors d’usage, la directive 2006/66/CE relative aux piles et
accumulateurs ainsi qu’aux déchets de piles et d’accumulateurs, et la directive 2012/19/UE relative
aux déchets d’équipements électriques et électroniques, Journal officiel de l’Union européenne, L 150,
14 juin 2018 ;

CH 2455-2456
4 L’ÉCONOMIE

76
notamment renforcer la mise en place d’une certaine « hiérarchie des déchets » , en
imposant notamment aux États membres de prendre des mesures spécifiques en
vue de privilégier la prévention, la réutilisation et le recyclage des déchets plutôt que
77
la mise en décharge et l’incinération . Elle préconise pour ce faire l’utilisation de
certains instruments économiques tels que des redevances et des restrictions pour
la mise en décharge et l’incinération des déchets ; des incitations fiscales en faveur des dons
de denrées alimentaires ; la mise en place de régimes de responsabilité élargie des
producteurs pour certains types de déchets ; la mise en place de systèmes de consigne et
autres mesures visant à encourager la collecte efficace des produits et matériaux usagés ;
une planification solide des investissements dans les infrastructures de gestion des
déchets, notamment par les fonds de l’Union européenne ; l’adoption de marchés
publics visant à encourager une meilleure gestion des déchets et l’utilisation de
produits et de matériaux recyclés ; la suppression progressive des subventions
contraires à la hiérarchie des déchets ; le recours à des mesures fiscales ou à
d’autres moyens pour promouvoir l’utilisation de produits et de matériaux préparés
en vue d’une réutilisation ou recyclés ; le soutien à la recherche et à l’innovation en
matière de technologies de recyclage ; des campagnes de sensibilisation de la
78
population ; etc.

Responsabilité élargie des producteurs


Déjà évoquée ci-dessus relativement à la problématique particulière du plastique, la
notion de régime de responsabilité élargie des producteurs se veut fidèle au principe
de pollueur-payeur et s’applique aux déchets collectables en grandes quantités ou
revêtant un caractère spécifique ou dangereux (emballages à usage unique, piles et
accumulateurs, déchets d’équipements électriques et électroniques, pneus usés,
véhicules hors d’usage, médicaments périmés, huiles usagées, etc.). La logique est
d’intégrer dès la conception du produit les coûts inhérents à son traitement final et
d’ainsi responsabiliser les fabricants. En agissant de la sorte, cela entraîne naturellement
une réduction des coûts de gestion des déchets supportés par les pouvoirs publics,
augmente le taux de réutilisation, de recyclage et de valorisation, et pérennise les
filières de recyclage. Ce principe pourrait également induire un effet de prévention,
en incitant les producteurs à modifier la conception de leurs produits afin d’en
améliorer l’éco-efficience (production avec moins de ressources ou davantage de
matières recyclées) et l’écoconception (démontage et recyclage plus faciles des
produits proposés, moins de substances dangereuses dans leur composition). L’Union
européenne attend ainsi de ses États membres qu’ils veillent « à ce

Directive (UE) 2018/850 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive
1999/31/CE concernant la mise en décharge des déchets, Journal officiel de l’Union européenne, L 150, © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
14 juin 2018 ; Directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant
la directive 2008/98/CE relative aux déchets, Journal officiel de l’Union européenne, L 150, 14 juin 2018 ;
Directive (UE) 2018/852 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive
94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d’emballages, Journal officiel de l’Union européenne, L 150,
76
14 juin 2018.
Le principe de « hiérarchie des déchets » était déjà encouragé précédemment par l’Union européenne
à travers la directive européenne 2008/98/CE précitée qui, en son article 4, explique qu’un ordre de
priorité doit être établi en matière de déchets, en favorisant, par ordre d’importance, la prévention,
la préparation en vue de la réutilisation, le recyclage, la valorisation énergétique et, enfin,
77
l’élimination. Commission européenne, « Économie circulaire : les nouvelles règles adoptées par
l’Union européenne feront d’elle le chef de file au niveau mondial dans le domaine de la gestion et du
78
recyclage des déchets », Communiqué de presse, 22 mai 2018, https://europa.eu.
Annexe IVbis de la directive européenne (UE) 2018/851 précitée.

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 4

que les producteurs de produits assument la responsabilité financière ou la


responsabilité financière et organisationnelle de la gestion de la phase “déchets” du
cycle de vie d’un produit, y compris les opérations de collecte séparée, de tri et de
traitement. Cette obligation peut également englober la responsabilité organisationnelle
et la responsabilité de contribuer à la prévention des déchets, aux possibilités de
réutilisation et à la recyclabilité des produits. Les producteurs de produits peuvent
satisfaire aux obligations du régime de responsabilité élargie des producteurs de
79
manière individuelle ou collective » .
En Belgique, certains déchets font l’objet d’une obligation de reprise dans le but de
les recycler via des filières spécifiques et agréées. Par exemple, Bebat (pour les
batteries au plomb et les piles usagées), Recupel (pour les déchets d’équipements
électriques et électroniques) et Recytyre (pour les pneus usés) sont des
organismes de gestion qui appliquent concrètement les obligations découlant de la
responsabilité élargie des producteurs. Les organismes agréés Fost Plus (pour les
déchets d’emballages ménagers) ou Valipac (pour les emballages industriels)
fonctionnent également selon ce principe (cf. infra). Il est à noter qu’en Belgique,
contrairement à d’autres pays européens, il n’existe aucune concurrence entre les
organismes.

Objectifs en matière de réutilisation et recyclage

Dans la directive relative aux déchets et celle relative aux emballages et aux déchets
d’emballages, l’Union européenne fixe des objectifs chiffrés de réutilisation et de
recyclage.
Les déchets municipaux sont définis dans la directive (UE) 2018/851 comme « les déchets
en mélange et les déchets collectés séparément provenant des ménages, y compris le
papier et le carton, le verre, les métaux, les matières plastiques, les biodéchets, le
bois, les textiles, les emballages, les déchets d’équipements électriques et électroniques,
les déchets de piles et d’accumulateurs, ainsi que les déchets encombrants, y
80
compris les matelas et les meubles » . Les objectifs de réutilisation et de recyclage des
déchets municipaux dans leur ensemble sont fixés comme suit : 55 % d’ici 2025, 60 %
d’ici 2030 et 65 % d’ici 2035. Par comparaison, la situation enregistrée était, selon les
chiffres d’Eurostat, de 46 % en 2017.
Des objectifs spécifiques ont également été définis par type de déchets d’emballages
(cf. Tableau 1). Par emballage, il faut entendre spécifiquement les produits constitués de
matériaux de toute nature, destinés à contenir et à protéger des marchandises données,
allant des matières premières aux produits finis, à permettre leur manutention et
leur acheminement du producteur au consommateur ou à l’utilisateur, et à assurer
81 © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
leur présentation . Les objectifs de recyclage des emballages repris dans la directive
concernent tous les emballages mis sur le marché, quel que soit le secteur d’activité
concerné : l’industrie, le commerce, les services, les ménages, etc.

79
Point 14 de la directive européenne (UE) 2018/851 précitée.
80
Article 3 de la directive européenne (UE) 2018/851 précitée. Comme déjà indiqué, selon ce même article,
les « biodéchets » sont les déchets biodégradables de jardin et de parc, les déchets alimentaires et de
cuisine provenant des ménages, des bureaux, des restaurants, du commerce de gros, des cantines, des
traiteurs et des magasins de vente au détail, ainsi que les déchets comparables provenant des usines de
transformation de denrées alimentaires.
81
Définition fournie par la Commission interrégionale de l’emballage (CIE : institution publique en charge
de la législation belge relative aux déchets d’emballages et du transit de déchets).

CH 2455-2456
4 L’ÉCONOMIE

Tableau 1. Union européenne : objectifs spécifiques aux déchets d’emballages


Objectif pour Objectif pour Situation en
2025 2030 2017 *
Emballages de tous types 65 % 70 % 67 %
Plastique 50 % 55 % 42 %
Bois 25 % 30 % 40 %
Métaux ferreux 70 % 80 % –
Aluminium 50 % 60 % –
Verre 70 % 75 % 75 %
Papier et carton 75 % 85 % 85 %
* Données Eurostat.

En comparant les objectifs repris dans la directive (UE) 2018/852 et la dernière mise à
82
jour des données statistiques d’Eurostat (relatives à 2017) , il semble que les taux de
recyclage concernés progressent plus rapidement que prévu.

Collecte séparée
Pour permettre un recyclage de qualité et favoriser l’utilisation de matières
premières secondaires de qualité, l’Union européenne, dans sa directive 2008/98/CE,
avait instauré l’obligation pour les États membres d’organiser, dès 2015, une collecte
séparée pour le papier, le métal, le plastique et le verre. À travers la nouvelle directive,
l’Union européenne entend élargir ce principe de collecte séparée aux biodéchets, dès
83 84 85
2023 , aux déchets dangereux produits par les ménages et aux déchets textiles , dès
2025. Des collectes séparées devront également à l’avenir être organisées dans le secteur
de la construction.

Limitation progressive de la mise en décharge


Afin d’assurer l’application correcte de la hiérarchie des déchets, l’Union
européenne encourage les États membres à prendre des mesures appropriées pour
appliquer, dès 2030, des restrictions à la mise en décharge pour tous les déchets
susceptibles d’être recyclés ou de donner lieu à une autre valorisation (matière ou
énergétique). Plus précisément, d’ici à 2035, la quantité de déchets municipaux mis en
décharge devra être ramenée à un maximum de 10 % de la quantité totale de déchets
86
municipaux produits . Cet objectif sera revu par la Commission européenne au plus
tard le 31 décembre 2024.

2.3. BILAN ET PERSPECTIVES © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

Début 2019, la Commission européenne a procédé à un état des lieux de la politique


impulsée à partir de 2015 pour promouvoir l’économie circulaire. Dans la foulée, et

82
La dernière mise à jour date du 31 janvier 2020 (code des données en ligne : ten00063, « Recycling
rates for packaging waste »).
83
Article 10, point 6, de la directive européenne (UE) 2018/851 précitée.
84
Article 20, point 1, de la directive européenne (UE) 2018/851 précitée.
85
Article 11, § 1, de la directive européenne (UE) 2018/851 précitée.
86
Article 5, § 3bis et § 5, de la directive européenne (UE) 2018/851 précitée.

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L’ÉCONOMIE 4

suite à l’arrivée à la présidence de la Commission de l’Allemande Ursula von der


Leyen, l’Union européenne a défendu le développement de l’économie circulaire à
travers une nouvelle feuille de route, le « green deal européen ».

2.3.1.L’évaluation du plan d’action européen

En mars 2019, la Commission européenne livre son évaluation de l’état


d’avancement des 54 mesures édictées dans son plan d’action en faveur d’une économie
87
circulaire adopté en 2015 . Selon ce rapport, « les secteurs pertinents pour
88
l’économie circulaire employaient en 2016 plus de quatre millions de travailleurs,
soit une hausse de 6 % par rapport à 2012. (…) La circularité a aussi laissé entrevoir
de nouvelles possibilités commerciales, permis l’émergence de nouveaux modèles
d’entreprise et créé de nouveaux marchés, à l’intérieur de l’Union et en dehors. En
2016, des activités circulaires telles que la réparation, la réutilisation ou le recyclage
ont généré près de 147 milliards d’euros en valeur ajoutée tout en représentant des
investissements d’une valeur de 17,5 milliards d’euros environ ».
Les conclusions du rapport portent également sur les taux de recyclage et les taux
d’utilisation de matériaux recyclés (cf. Tableau 2). Dans l’ensemble, en 2016, l’Union
européenne a recyclé près de 55 % de tous les déchets à l’exclusion des principaux déchets
minéraux (contre 53 % en 2010). Le taux de récupération des déchets de construction et
de démolition s’élevait à 89 %, tandis que le taux de recyclage dépassait 67 % pour
les emballages (contre 64 % en 2010) et était supérieur à 42 % pour les emballages en
plastique (contre 24 % en 2005). Le taux de recyclage s’est établi à 46 % pour les déchets
municipaux en 2017 (contre 35 % en 2007) et a atteint 41 % pour les déchets
d’équipements électriques et électroniques, tels que les ordinateurs, téléviseurs,
réfrigérateurs et téléphones mobiles, qui contiennent des matériaux de valeur pouvant
89
être récupérés .

Tableau 2. Aperçu des taux de recyclage de différents flux de déchets


(Union européenne, 2016 *)
Tous les déchets sauf les principaux déchets minéraux 55 % recyclés
Déchets municipaux 46 % recyclés
Emballages généraux 67 % recyclés
Emballages plastiques 42 % recyclés
Déchets électroniques 41 % recyclés
Déchets de construction et de démolition 89 % récupérés
* À l’exception des déchets municipaux :
2017. Source : Eurostat.
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En dépit de taux de recyclage en progression, seulement en moyenne 11,9 % des ressources


en matériaux utilisées dans l’Union européenne en 2016 provenaient de produits
recyclés

87
Commission européenne, « Rapport au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et
social européen et au Comité des Régions relatif à la mise en œuvre du plan d’action en faveur
d’une économie circulaire », COM(2019) 190 final, 4 mars 2019.
88
Dernière année disponible lors de la collecte des données pour la réalisation du rapport.
89
Eurostat, « Record pour les taux de recyclage et l’utilisation de matériaux recyclés dans l’UE », Communiqué
de presse, 4 mars 2019, https://ec.europa.eu.

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4 L’ÉCONOMIE

et de matériaux valorisés, permettant donc d’éviter l’extraction de matières premières


90
primaires . Cet indicateur, appelé « taux d’utilisation circulaire de matières », mesure la
contribution des matériaux recyclés à la demande globale. Il n’a guère évolué ces
dernières années (cf. Tableau 3). Il s’est même très légèrement tassé entre 2016 et 2017,
les deux dernières années disponibles. Il est à noter que la Belgique figure ici parmi
les bons élèves, avec un taux avoisinant les 18 %. Seuls les Pays-Bas et la France font
mieux.

Tableau 3. Taux d’utilisation circulaire de matières


(en % de l’utilisation totale des matières)
2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017
UE28 11,1 10,7 11,5 11,6 11,5 11,7 11,9 11,7
Belgique 12,6 13,5 16,7 17,2 18,2 18,3 18,4 17,8
Source : Eurostat.

Dans son rapport d’évaluation, la Commission européenne énumère également une série
de défis pour l’avenir, comme le développement des marchés pour les matières
premières secondaires, une intensification de la recherche, de l’innovation et des
investissements dans les secteurs prioritaires, une meilleure information des
consommateurs, une rigueur accrue dans la lutte contre la toxicité environnementale
des produits, des avancées concernant la problématique spécifique des matières
premières critiques, etc. La Commission européenne estime enfin que, comme ce fut
le cas pour le plastique, d’autres secteurs nécessitent aujourd’hui une attention
particulière afin d’y permettre un développement des principes de circularité. Elle
vise ainsi les technologies de l’information, l’électronique, la mobilité,
l’environnement bâti, l’exploitation minière, l’ameublement, l’alimentation et les
boissons, et le secteur du textile.

2.3.2.Le « green deal européen »

Moins de deux semaines après son arrivée à la présidence de la Commission européenne,


l’Allemande U. von der Leyen présente, le 11 décembre 2019, sa feuille de route pour un
91
pacte vert européen, très vite rebaptisé le « green deal européen » . Dans ce document,
la Commission européenne insiste sur l’importance de mobiliser le secteur de l’industrie
en faveur d’une économie circulaire. Il faut du temps pour transformer ce secteur et
toutes les chaînes de valeur qui y sont associées. Or, regrette la Commission, le
processus en cours est trop lent. Pour appuyer son discours, elle rappelle le constat déjà
posé quelques mois plus tôt : seulement quelque 12 % des matériaux utilisés en © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
Europe proviennent du recyclage.
C’est le 11 mars 2020 que la Commission présente son nouveau plan d’action en
92
faveur d’une économie circulaire . À ce stade, celui-ci ne convainc pas vraiment les
acteurs

90
Ibidem.
91
Commission européenne, « Le pacte vert pour l’Europe. Communication au Parlement européen, au
Conseil européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des Régions
», COM(2019) 640 final, 11 décembre 2019.
92
Commission européenne, « Circular Economy Action Plan. For a cleaner and more competitive Europe »,
s.d. [avril 2020], https://ec.europa.eu.

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L’ÉCONOMIE 4

de terrain, lassés des déclarations d’intention et en attente de textes contraignants.


En substance, ce plan d’action prévoit qu’un texte législatif soit adopté afin que les
produits mis sur le marché de l’Union européenne soient plus faciles à réutiliser, à
réparer et à recycler, et contiennent autant que possible des matériaux recyclés plutôt
que des matières premières primaires. Les dispositions qui en découleront devront
également permettre de lutter contre les usages uniques et l’obsolescence prématurée. Ce
nouveau plan défendu par la Commission européenne vise aussi à une meilleure
information des consommateurs sur la réparabilité et la durabilité des produits, à la
lutte contre le gaspillage alimentaire, les allégations écologiques trompeuses de
certaines entreprises et le suremballage, au développement du marché des matières
premières secondaires, au renforcement du principe de responsabilité élargie des
producteurs, à l’émergence de nouveaux modèles d’entreprise, à l’amélioration du
système de collecte sélective des déchets, etc. Une série de mesures visent par ailleurs à
réduire au minimum les exportations de déchets de l’Union européenne et à lutter
contre les transferts illicites. Enfin, le texte proposé par la Commission européenne
met l’accent sur plusieurs secteurs utilisant le plus de ressources et dont le potentiel de
contribution à l’économie circulaire est dès lors élevé : le matériel électronique et les
technologies de l’information, les batteries et véhicules, les emballages, les matières
plastiques, les textiles, le secteur de la construction, et enfin celui des denrées
alimentaires.

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3. LA RÉGLEMENTATION FÉDÉRALE BELGE

La structure fédérale de la Belgique fait que les questions environnementales et


économiques relèvent en grande partie des compétences régionales. Cela étant, le
ministre de l’Emploi, de l’Économie et des Consommateurs et la ministre de
l’Énergie, de l’Environnement et du Développement durable du gouvernement
fédéral Michel I (N-VA/MR/CD&V/Open VLD), respectivement Kris Peeters (CD&V) et
Marie-Christine Marghem (MR), ont présenté, en octobre 2016, la contribution du
niveau de pouvoir fédéral au déploiement en Belgique de l’économie circulaire, sous
93
la forme d’un plan d’action comprenant 21 mesures . Celles-ci se situent dans le champ
des compétences fédérales. Concernant la promotion d’une économie plus circulaire,
c’est essentiellement par le biais de la protection des consommateurs que ces
compétences peuvent s’exprimer (développement des normes de produits,
écoconception, etc.). Cette feuille de route fédérale vient par ailleurs compléter les
initiatives régionales également en place que sont le Plan des déchets-ressources en
Région wallonne, le plan régional en économie circulaire (PREC) en Région de
Bruxelles-Capitale et le Vlaanderen Circulair (anciennement
94
Materialenprogramma) en Région flamande (cf. infra) .

3.1. LA FEUILLE DE ROUTE FÉDÉRALE (2016)

Afin de proposer sa feuille de route pour une économie circulaire, l’échelon fédéral
s’est appuyé sur un document de recherche préparatoire publié un peu plus tôt dans
l’année 2016. Cette étude, menée par trois organismes de consultance privés – à savoir
PricewaterhouseCoopers (PwC), en collaboration avec l’Institut de conseil et
d’études en développement durable (ICEDD) et Oakdene Hollins –, visait à chiffrer le
95
potentiel économique de l’économie circulaire en Belgique à l’horizon 2030 .

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93
Cabinet de la ministre fédérale de l’Énergie, de l’Environnement et du Développement durable,
« Ensemble, faisons tourner l’économie en développant l’économie circulaire en Belgique », octobre
2016, www.marghem.be.
94
95
Les trois Régions sont notamment responsables de la chaîne de destruction des déchets.
PricewaterhouseCoopers, « Économie circulaire : potentiel économique en Belgique », Rapport final au
SPF Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement, février 2016,
www.health.belgium.be.

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L’ÉCONOMIE 4

3.1.1.Potentiel économique

Les gains théoriques liés au développement d’une économie circulaire sont


essentiellement de deux sortes : la réduction des coûts (moindre approvisionnement en
matières premières, meilleure gestion des déchets, etc.) et le développement de
nouveaux biens et services (notamment dans le domaine de la réparation, du
recyclage, de l’économie de la fonctionnalité, etc.). L’analyse de PwC propose une
évaluation chiffrée de l’impact économique de l’économie circulaire au sein de
quatre secteurs clés : l’industrie chimique, l’alimentaire, les machines et
équipements, et l’automobile. L’économie circulaire permettrait de créer, au sein de
ces quatre secteurs et à l’horizon 2030, quelque 3 700 emplois directs si aucune mesure
particulière n’est entreprise par les pouvoirs publics et un peu plus de 11 600 emplois
directs dans l’hypothèse d’une politique volontariste. Extrapolé à l’ensemble de
l’économie belge, il s’agirait de 100 000 emplois à l’horizon 2030 si des mesures
volontaires sont prises à tous les niveaux de pouvoir. L’argument d’une réduction des
coûts est cependant remis en question par les professionnels du secteur, notamment
pour le domaine du plastique, où la concurrence des matières plastiques vierges,
plus abordables que le plastique recyclé, reste une réalité.

3.1.2.Mesures et financement

Sur cette base, et après concertation des secteurs concernés, l’Autorité fédérale a dégagé
21 mesures à mettre en place à son niveau. Parmi celles-ci, la feuille de route dite
« Marghem-Peeters » propose d’encourager le démantèlement manuel de certains
composants contenant des métaux précieux et/ou des matières premières critiques, et
d’inciter, lorsque les conditions s’y prêtent, le passage d’un modèle basé sur les
produits vers un modèle basé sur les services (conformément au principe
d’économie de la fonctionnalité). Les deux ministres souhaitent également mettre en
place une réflexion, avec les producteurs concernés, sur les microplastiques primaires
(qui se retrouvent dans le dentifrice, les particules de pneus usés utilisées pour les
terrains de foot artificiels ou encore certains résidus dans le secteur de la construction
ou les matières textiles). Ces microplastiques ne sont pas recyclables et finissent
d’une manière ou d’une autre par avoir un impact sur l’environnement. Pour
soutenir la demande en plastique recyclé, il s’agirait notamment d’intégrer un taux
de contenu en plastique recyclé dans les évaluations des marchés publics. La volonté
de l’Autorité fédérale est par ailleurs de procéder à une meilleure information des
différents acheteurs publics sur les différents principes de l’économie circulaire.
D’autres mesures proposées dans cette feuille de route concernent encore la lutte contre © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
96
les allégations environnementales trompeuses qui accompagnent certains produits ,
le développement d’outils pour assurer une meilleure information des
consommateurs,

96
Conformément à la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005
relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le
marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et
2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) n° 2006/2004 du Parlement
européen et du Conseil (Journal officiel de l’Union européenne, L 149, 11 juin 2005), dite directive
européenne sur les pratiques commerciales déloyales.

CH 2455-2456
5 L’ÉCONOMIE

l’allongement de la durée de la présomption de non-conformité en matière de


garantie (afin d’allonger le délai légal de la prise en charge d’une éventuelle
réparation), l’encadrement plus strict de l’obsolescence des produits, la mise en place de
normes de recyclabilité de certains produits (afin de faciliter le choix des
consommateurs), etc. Enfin, l’Autorité fédérale entend travailler, comme le préconise
l’Union européenne, sur la toxicité chimique de certains produits voués au recyclage,
et s’engage à développer une série d’indicateurs liés à l’économie circulaire, en
partenariat avec Eurostat.
De son côté, le Service public fédéral (SPF) Économie a publié en juin 2018 un
document de synthèse sur les échanges tenus un an plus tôt lors du séminaire «
Financement de l’économie circulaire » ayant regroupé différents intervenants du
secteur public et du secteur bancaire ainsi que des entrepreneurs de l’économie
97
circulaire . L’objectif était de mieux informer ces derniers sur les possibilités de
financement des projets circulaires. Le développement de l’économie circulaire se heurte
en effet encore aujourd’hui à une insuffisance des investissements nécessaires.
Au-delà des mesures de financement prévues par l’Union européenne (cf. supra) ou
par les Régions (cf. infra), certaines solutions commencent également à voir le jour
du côté des acteurs privés. Bien que concurrencées par différents types de
financement alternatif, les banques restent à ce titre les investisseurs les plus
importants. Cependant, selon le compte rendu fourni par le SPF Économie, PME,
Classes moyennes et Énergie,
« les établissements bancaires jugent les projets d’économie circulaire souvent trop risqués
et complexes. Les banques utilisent les mêmes outils d’évaluation pour les business
models innovants ou pour les business models classiques. Elles ont donc tendance à sous-
évaluer le potentiel économique de l’économie circulaire ». Leurs outils de financement
classiques étant peu adaptés au cas particulier de l’économie circulaire, les banques
proposent peu à peu d’autres options. C’est le cas des systèmes de leasing ou de
private equity.
C’est surtout du côté des financements alternatifs que les projets d’économie
circulaire de petite ampleur trouvent des solutions de financement. C’est le cas des
microcrédits, qui sont des prêts de faible valeur, demandant donc moins de garanties
; le problème est qu’ils s’accompagnent de taux d’intérêts souvent plus élevés que
pour un emprunt classique. Le crowdfunding est également un mode de financement
alternatif possible, pouvant mobiliser des fonds assez rapidement et portant davantage
d’intérêt au contenu d’un projet qu’à sa rentabilité immédiate. Le document de
synthèse du SPF Économie, PME, Classes moyennes et Énergie pointe cependant un
problème important : les financements alternatifs ne sont pas en mesure de financer les
projets de grande envergure émergeant aujourd’hui dans ce qui touche à l’économie
circulaire. © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

Dans sa note de politique générale, défendue à la Chambre des représentants en octobre


98
2018 , la ministre fédérale M.-C. Marghem a estimé que les 21 mesures proposées en 2016
ont toutes été mises en œuvre, bien qu’à des stades d’avancement variés. Par exemple,
le Centre de connaissance en économie durable (CCED) a été créé au sein de la
Direction générale des Analyses économiques et de l’Économie internationale du SPF
Économie, PME, Classes moyennes et Énergie ; il a pour mission d’agir comme point
de référence

97
SPF Économie, PME, Classes moyennes et Énergie, « Financement de l’économie circulaire », juin 2018,
https://economie.fgov.be.
98
Chambre des représentants, Note de politique générale. Environnement et Développement durable, n°
3296/10, 22 octobre 2018.

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 5

au niveau fédéral en matière d’économie durable pour les entreprises, les


consommateurs et les responsables politiques. Il contribue également à la recherche
sur les indicateurs d’économie circulaire, un enjeu européen, en suivant les
évolutions globales et en consultant les parties prenantes aux niveaux national et
bilatéral (institutions gouvernementales, fédérations d’entreprises et autres
organisations). M.-C. Marghem entendait alors lancer de nouveaux débats, impliquant «
différents acteurs issus d’horizons très divers afin d’aboutir à une nouvelle vision pour les
prochaines années et formuler des propositions d’actions fédérales à mettre en place lors
de la prochaine législature ». C’est ainsi qu’en 2019, une série d’ateliers de travail
99
(workshops) thématiques et transversaux ont réuni les parties concernées .
À la fin de l’année 2019, la Belgique a assuré l’organisation du « hotspot » de l’économie
circulaire. Cet événement annuel met à l’honneur les bonnes pratiques du pays
organisateur, qui accueille pendant plusieurs jours des chefs d’entreprises internationaux
et européens. Lors de cette édition, la Belgique avait notamment mis à l’honneur Anvers
(avec Blue Gate, un parc d’entreprises ancré dans l’économie circulaire, de même
que Circular South, un quartier où collaborent habitants et entreprises), Bruxelles (avec
Studio CityGate, Recy-K, Greenbizz et City Fab1), le port de Gand, ou encore le
Hainaut (qui promeut la symbiose industrielle à travers des acteurs tels que Comet
Traitements, une société très active dans le commerce et le recyclage des métaux,
ou la société Holcim, qui collecte des déchets industriels destinés aux cimenteries
belges).

3.2. LA LUTTE CONTRE L’OBSOLESCENCE PROGRAMMÉE

La lutte contre l’obsolescence programmée figure parmi les points emblématiques


qui se jouent à l’échelon fédéral. Par « obsolescence programmée », on entend « un
stratagème par lequel un bien voit sa durée de vie normative sciemment réduite dès
sa conception, limitant ainsi sa durée d’usage, pour augmenter son taux de
100
remplacement » .
En 2016, trois propositions de loi visant à lutter contre l’obsolescence programmée
101
ont été déposées à la Chambre des représentants : le 22 janvier par le CDH , le 11 avril
102 103
par Écolo et le 20 avril par le PS . Les membres de la commission chargée de
l’Économie ont ensuite travaillé sur cette base, les trois textes ayant été fusionnés le
10 mai 2016 à partir de celui déposé par le CDH. En substance, cette proposition de loi
étend la durée de la garantie à la durée de vie des produits, avec un minimum de
deux ans ; assure au
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99
Bureau fédéral du plan, « Quelle priorité pour un développement durable ? Rapport sur le développement
durable 2019. État des lieux et évaluation », juin 2019, www.plan.be, p. 40.
100
Définition proposée dans l’étude commandée par les ministres fédéraux M.-C. Marghem et K.
Peeters au bureau d’études RDC Environnement : « L’obsolescence programmée : politiques et mesures
belges de protection du consommateur. Rapport final », mai 2017, https://economie.fgov.be.
101
Chambre des représentants, Proposition de loi modifiant le Code civil et le Code de droit économique,
visant à lutter contre l’obsolescence programmée, n° 1603/001, 22 janvier 2016.
102
Chambre des représentants, Proposition de loi relative à la lutte contre l’obsolescence organisée et au soutien
103
à l’économie circulaire, n° 1749/1, 11 avril 2016.
Chambre des représentants, Proposition de loi relative à l’obsolescence programmée, n° 1783/1, 20 avril 2016.

CH 2455-2456
5 L’ÉCONOMIE

104
consommateur le bénéfice de la garantie entre la fin du sixième mois et son expiration
; augmente la garantie pour les produits d’occasion à minimum deux ans ; et oblige
le fabricant à mentionner sur les produits et les publicités le concernant la durée de
105
vie ainsi que le caractère réparable ou non de celui-ci .
En janvier 2018, le MR a dit préparer sa propre proposition de loi, en accord avec ses
trois partenaires au sein du gouvernement fédéral : le CD&V, l’Open VLD et la N-VA.
Ce projet a avorté un mois plus tard, aucun accord n’ayant pu être dégagé au sein de
106
la majorité . En parallèle, le MR a déposé, le 11 janvier 2018, une proposition de
résolution pour promouvoir l’économie circulaire et lutter contre l’obsolescence
107
programmée . Le 21 février 2018, la proposition de loi sur laquelle la commission de
l’Économie travaillait depuis deux ans a été déclarée sans objet, certains partis (le MR,
notamment) ne souhaitant pas légiférer sur la question. Le même jour, la proposition
de résolution déposée par les libéraux francophones a quant à elle été adoptée,
majorité contre opposition, mais ce texte, contrairement à une loi, n’a pas de valeur
contraignante.
La question de l’obsolescence programmée est délicate. En souhaitant étendre la
garantie légale, ou en imposant aux fabricants certaines normes sur la présentation
de leurs produits, les auteurs des trois propositions de loi visaient à faciliter les
opportunités de réparation et à responsabiliser les fabricants sur une conception
plus durable de leurs produits. Prolonger la durée de garantie légale devrait avoir
l’effet d’encourager les fabricants à proposer des produits plus solides et réparables,
évitant ainsi des coûts de réparation élevés. Toutefois, il ne s’agit pas de tenir compte
que des fabricants – qui sont généralement de grandes marques internationales – et les
consommateurs, sans prendre en considération les commerçants. Comme l’explique la
fédération belge du commerce, Comeos, « les commerçants n’ont pas d’emprise sur
la qualité des produits. C’est particulièrement problématique pour l’électronique grand
public et pour l’électroménager. Demain, si la Belgique décide seule d’un allongement de
la garantie, les grandes marques de ces secteurs ne s’adapteront tout simplement pas.
Nous n’avons aucune marge de négociation avec elles et nous ne pouvons pas nous
108
passer de leurs produits » . Les commerçants craignent également qu’un allongement
de la garantie entraîne une nouvelle augmentation de la concurrence avec le
commerce en ligne (e-commerce) provenant de l’étranger. L’enjeu serait alors de
porter le débat au niveau européen. C’est le point de vue défendu par le MR à
travers sa résolution.
Afin d’alimenter les débats, une étude a été réalisée en 2017 par le bureau d’études
109
Research, Development & Consulting (RDC) Environment , à la demande des ministres
fédéraux M.-C. Marghem et K. Peeters. Cette analyse souligne que, même s’il n’est
pas
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104
Actuellement, c’est au consommateur de prouver, au bout des six premiers mois suivant l’achat, que son
acquisition est tombée en panne en raison d’un défaut de fabrication et non d’un usage
inapproprié.
105
Chambre des représentants, Commission de l’Économie, de la Politique scientifique, de l’Éducation, des
Institutions scientifiques et culturelles nationales, des Classes moyennes et de l’Agriculture,
Proposition de loi modifiant le Code civil et le Code de droit économique, visant à lutter contre l’obsolescence
programmée. Rapport, n° 1603/4, 9 mars 2018.
106
Le Soir, 21 février 2018.
107
Chambre des représentants, Proposition de résolution visant le développement de l’économie circulaire et
la lutte contre l’obsolescence programmée, n° 2884/1, 11 janvier 2018.
108
109
Le Soir, 17 janvier 2018.
RDC Environnement, « L’obsolescence programmée : politiques et mesures belges de protection du
consommateur. Rapport final », op. cit.

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 5

exclu qu’elle existe dans certains cas, il est très difficile de démontrer l’existence de
l’obsolescence programmée : « En effet, les pratiques dénoncées sont justifiées par les
fabricants par des raisons économiques, techniques et de prévention des risques qui sont
110
crédibles . C’est pourquoi seuls trois fabricants ont fait l’objet de procédures judiciaires
dans le monde et aucune d’elles n’a débouché sur une condamnation directement
liée à la programmation de l’obsolescence ». Certains types de produits, les smartphones
par exemple, sont pourtant souvent l’objet de suspicion à cet égard. Les débats
parlementaires au sein de la commission chargée de l’Économie ont également mis
en évidence cette difficulté à prouver l’obsolescence programmée. RDC
Environnement préconise dès lors d’élargir le champ d’étude aux mesures visant à
augmenter la durée de vie des produits. Dans ce cadre, le bureau d’études défend une
série de mesures à mettre en place, et celles-ci rejoignent globalement ce qui a déjà été
proposé en commission de la Chambre : obliger les fabricants à afficher la durée de vie
attendue du produit et à mieux communiquer sur le degré de réparabilité de celui-ci,
allonger la durée de garantie légale (en fonction des catégories de produits) et celle de la
charge de la preuve, rendre obligatoire la disponibilité de pièces détachées et, enfin,
sensibiliser au mieux le consommateur. « Toutes ces mesures auront un effet plus fort si
elles sont appliquées dans l’ensemble de l’Union européenne », précise cependant
l’étude.
Si les discussions autour des propositions de loi déposées en 2016 n’ont pas abouti,
la question n’est pas pour autant enterrée. La commission de l’Économie examine
111 112
actuellement trois nouvelles propositions de loi jointes par le PS , le CDH et le
113
groupe Écolo-Groen en 2019 et 2020, défendant, en substance, la même philosophie
qu’en 2016.
À cette occasion, la commission de l’Économie a procédé, en février 2020, à
l’audition de différents acteurs associés à cette problématique : la Commission
européenne, Agoria, Comeos, Test Achats, RDC Environment, Repair&Share et
114
Écoconso . Il en ressort qu’au niveau européen, la directive de référence concernant
er 115
les contrats de vente de biens (d’application à partir du 1 janvier 2022) table sur
une garantie légale de deux ans au minimum et sur une durée d’une année durant
laquelle le défaut est présumé avoir été présent au moment de la livraison, sauf si le
vendeur apporte la preuve du contraire

110
À titre d’exemple, Apple a récemment accepté une transaction de 25 millions d’euros pour n’avoir
pas suffisamment informé ses clients du fait que les mises à jour logicielles ralentissaient ses anciens
modèles d’iPhone. L’entreprise s’est justifiée en expliquant qu’elle souhaitait ainsi épargner
l’autonomie des plus vieux smartphones.
111
Chambre des représentants, Proposition de loi visant à lutter contre l’obsolescence programmée et à
soutenir l’économie de la réparation, n° 193/1, 19 juillet 2019.
112
Chambre des représentants, Proposition de loi modifiant le Code civil et le Code de droit économique, © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
visant à lutter contre l’obsolescence programmée et l’obsolescence prématurée et à augmenter les
possibilités de réparation, n° 771/1, 19 novembre 2019.
113
Chambre des représentants, Proposition de loi visant à lutter contre l’obsolescence organisée et à
soutenir l’économie circulaire, n° 914/1, 7 janvier 2020.
114
Chambre des représentants, Commission de l’Économie, de la Protection des consommateurs et de l’Agenda
numérique, Proposition de loi modifiant le Code civil et le Code de droit économique, visant à lutter contre
l’obsolescence programmée et l’obsolescence prématurée et à augmenter les possibilités de réparation. Proposition
de loi visant à lutter contre l’obsolescence programmée et à soutenir l’économie de la réparation. Proposition
de loi visant à lutter contre l’obsolescence organisée et à soutenir l’économie circulaire. Rapport des
auditions, n° 771/3, 26 mars 2020.
115
Directive (UE) 2019/771 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2019 relative à certains aspects
concernant les contrats de vente de biens, modifiant le règlement (UE) 2017/2394 et la directive 2009/22/CE
et abrogeant la directive 199/44/CE, Journal officiel de l’Union européenne, L 136, 22 mai 2019.

CH 2455-2456
5 L’ÉCONOMIE

(délai qui peut être porté à deux ans pour les États membres qui le souhaitent). Le
Centre commun de recherche de la Commission européenne (CCR) étudie par
ailleurs la possibilité de développer un système de notation de la réparabilité des
produits. Agoria a rappelé que l’industrie technologique, qu’elle représente, avait ses
spécificités en termes de fonctionnalité, de comptabilité et de mise à jour, et que, au
risque d’affaiblir la compétitivité des entreprises belges, le délai de garantie légale
devrait être harmonisé au niveau européen. Pour Agoria, il en va de même pour ce
qui est de la méthodologie devant déterminer la durée de vie de tel ou tel produit, ainsi
que de la charge de la preuve. Comeos défend le point de vue déjà évoqué plus haut
concernant les commerçants ; elle précise également qu’une obligation de mettre des
pièces de rechange à disposition peut s’avérer compliquée en pratique et préfère jouer
la carte de la transparence envers le consommateur quant à la disponibilité ou non
des pièces de rechange, non pas sur l’emballage mais via un passeport produit en ligne.
Pour sa part, l’association de protection des consommateurs Test Achats a fait part de
son expérience issue de son point de contact, initié fin 2016 : « Trop vite usé ». Depuis
son ouverture, ce point de contact a déjà enregistré près de 9 000 signalements, relatifs
essentiellement à des téléphones mobiles, des imprimantes, des lave-linge et des
lave-vaisselle. Test Achats défend l’idée que
« l’obsolescence peut se manifester de différentes manières. Les fabricants peuvent
notamment utiliser des matériaux de qualité inférieure pour fabriquer un produit. Ils
peuvent également rendre les réparations impossibles, par exemple en collant les pièces
ou en ne fournissant pas de pièces de rechange. D’autres encore n’offrent plus de
mise à jour des logiciels et jouent sur l’aspect psychologique en séduisant les
consommateurs avec de nouveaux gadgets. (…) Un autre problème concerne les
appareils high tech qui ont été conçus de manière à ne pouvoir être réparés que par des
réparateurs agréés ». Quant à l’association Repair&Share, elle a demandé qu’un recours
accru à l’écoconception soit légalement organisé et que la Belgique dresse un registre
officiel des réparateurs exerçant sur son sol. Enfin, et sans vouloir ici entrer dans les
détails, les débats en commission de l’Économie ont également porté sur l’utilité
d’une baisse de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour les activités de réparation, le
coût occasionné par celles-ci étant souvent jugé trop élevé par rapport au
remplacement par un bien neuf.
Si les débats relatifs à l’éventualité de légiférer en Belgique sur la question de
l’obsolescence programmée sont loin d’être clos, d’autres initiatives pour lutter contre la
fin de vie précoce de certains produits ont déjà vu le jour. C’est le cas du point de contact
« Trop vite usé » déjà mentionné plus haut, qui permet à Test Achats de collecter une
série d’informations sur le vieillissement prématuré de certains appareils. De son côté,
le SPF Économie, PME, Classes moyennes et Énergie a créé en 2017 une plateforme de
concertation sur la durée de vie des produits ; elle réunit les administrations
impliquées et les parties prenantes, comme Agoria ou Test Achats, ainsi que des © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
organisations environnementales. Les mesures discutées au sein de cette plateforme
portent notamment sur l’écoconception des produits, la réparation, l’information, le
116
contrôle, les garanties et les incitations fiscales . En mars 2019, elle s’était réunie
six fois.

116
SPF Économie, PME, Classes moyennes et Énergie, « Single Market Forum 2018-2019. Circular
Economy: how to foster a sustainable paradigm (a new way of consuming and entrepreneurship)? Actes du
colloque »,
s.d. [février 2020], https://economie.fgov.be.

CH 2455-2456
4. LES RÉGLEMENTATIONS RÉGIONALES
(WALLONIE, BRUXELLES-CAPITALE, FLANDRE)

Ce chapitre propose une vue d’ensemble, non exhaustive, des mesures et plans
d’action mis en place en Belgique au niveau régional pour soutenir le développement de
l’économie circulaire. Si l’intention n’est ici que de proposer un simple survol des
politiques régionales, un prochain Courrier hebdomadaire abordera la question plus
en détail pour la Région wallonne, avec une analyse des différents acteurs concernés,
des enjeux du secteur et du poids économique de ce dernier.
Les trois Régions ont chacune établi un plan d’action visant le développement d’une
économie circulaire, avec pour lignes directrices un certain nombre d’objectifs ainsi
que des propositions pour y parvenir, dont certaines comprennent un accompagnement
et un soutien financier aux entreprises sous la forme d’appels d’offre, de concours
ou de subventions.

4.1. LA RÉGION WALLONNE

En Wallonie, les politiques de soutien à l’économie circulaire ont été à l’origine intégrées
au Plan Marshall 4.0. Adopté fin mai 2015 (pour la période 2015-2019), celui-ci rassemble
les principaux axes de redéploiement économique de la Région wallonne, dont l’axe
4 intitulé « Soutenir l’efficacité, la transition énergétique et l’économie circulaire ».
Dans ce cadre, un dispositif d’accompagnement des entreprises désireuses d’optimiser
l’usage de leurs ressources a été développé à travers le programme NEXT-Économie
circulaire. En complément de ce programme, l’Agence pour l’entreprise et
l’innovation (AEI), organisme public wallon, coordonne les mesures d’économie circulaire
en Région wallonne et aide les entreprises innovantes en la matière.
Le 22 mars 2018, le gouvernement wallon Borsus (MR/CDH) a adopté le Plan wallon
des déchets-ressources, regroupant pas moins de 700 mesures dans le but de © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

prévenir l’apparition, de réutiliser, de trier, de recycler ou encore de valoriser les déchets. «


Renforcer et soutenir le réseau des repair cafés, faciliter et encourager la location de
biens matériels plutôt que leur achat ou encore activer l’accord-cadre avec le secteur de
la distribution pour favoriser l’écoconception des emballages sont quelques exemples des
mesures phares de ce Plan ».

CH 2455-2456
5 L’ÉCONOMIE

Pour ce qui est des actions d’accompagnement, de financement et de soutien aux projets
menés dans le cadre de ce plan, plusieurs initiatives ont également vu le jour.
Parallèlement au programme NEXT, il s’agit notamment de l’appel à projets lancé
pour mettre en place une filière de recyclage du plastique en Wallonie (cf. infra), de
la possibilité de se tourner, pour les PME et très petites entreprises (TPE), vers
Novallia (filiale de la Société wallonne de financement et de garantie des petites et
117
moyennes entreprises – SOWALFIN ) et de la mise à disposition des chèques
économie circulaire. Ces derniers sont accordés pour financer des études de faisabilité
pour des projets visant une meilleure utilisation des ressources, un démantèlement plus
efficace des produits ou la prolongation de la durée de vie de ceux-ci.
Le 21 février 2019, cinq députés du Parlement wallon ont remis un rapport
introductif présentant un état des lieux de l’économie circulaire en Wallonie, ainsi
118
qu’une série de recommandations . Celles-ci se retrouvent également dans la
résolution adoptée à l’unanimité par le Parlement wallon le 3 mai 2019 et visant à
119
soutenir le développement de l’économie circulaire en Wallonie . Ce rapport
parlementaire évoque une centaine de mesures à suivre.
Le 27 novembre 2019, quelque 110 organisations publiques et privées se sont engagées
dans le projet « Green deal achats circulaires ». Une trentaine d’organisations les ont
rejointes par la suite. L’objectif de la démarche est de privilégier, par l’engagement des
signataires, l’achat de produits réutilisables ou de marchandises recyclées ou remises à neuf,
la rénovation de bâtiments avec des matériaux de réemploi, etc. Chaque signataire s’engage
pour une durée de trois ans.
La problématique de la gestion des déchets et le développement de l’économie circulaire
font l’objet d’un chapitre entier au sein de la déclaration de politique régionale (DPR)
du gouvernement wallon Di Rupo III (PS/MR/Écolo) entré en fonction en septembre
120
2019 . On y apprend notamment que le gouvernement wallon entend mettre en œuvre
les recommandations parlementaires édictées en mai 2019. Il subsidiera également les
entreprises pour la réalisation d’un audit « ressources et énergie » afin d’optimaliser
les consommations d’énergie et de ressources et définir les mesures à prendre pour
entrer en transition vers un modèle circulaire. Les zonings wallons seront
progressivement transformés en éco-zonings. Le gouvernement wallon entend
également soutenir le développement d’une économie circulaire à travers une
attention particulière accordée à l’ensemble des marchés et achats publics. Selon la
DPR, « c’est aux pouvoirs publics de montrer l’exemple ». Des labels seront instaurés
pour les entreprises qui font des efforts dans le développement de produits durables
pouvant être réparés.
Le gouvernement wallon met également clairement l’accent sur la lutte contre
l’usage inapproprié du plastique : « À l’horizon 2030, les usages du plastique ne © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
pourront être conservés que dans le cas où le plastique reste la seule solution ou la
solution la plus durable (…). En exécution de sa stratégie de sortie du plastique, la
Wallonie veillera à faire

117
La SOWALFIN est une société anonyme d’intérêt public mise en place par le gouvernement wallon
en 2002 afin de faciliter l’accès au financement pour les entreprises.
118
119
Parlement wallon, Rapport introductif sur l’économie circulaire en Wallonie, n° 1301/1, 21 février 2019.
Parlement wallon, Résolution visant à soutenir le développement de l’économie circulaire en Wallonie, n° 1330/3,
3 mai 2019.
120
« Déclaration de politique. Wallonie 2019-2024 », s.d. [septembre 2019], www.wallonie.be, p. 27-30
(chapitre 6 : « L’économie circulaire et régénératrice »).

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 5

émerger une véritable filière wallonne du recyclage du plastique, tout comme pour d’autres
types de déchets (huiles usagées, matelas, déchets de construction, etc.) ».
Enfin, un objectif de diminution d’au moins 50 % des niveaux actuels d’incinération
des déchets a été avancé pour 2027. « En ce sens, le gouvernement généralisera la collecte
de la fraction organique des déchets ménagers et encouragera la séparation de la
fraction organique pour les déchets industriels en provenance des entreprises, des
collectivités, du secteur horeca, etc. ».

4.2. LA RÉGION DE BRUXELLES-CAPITALE

En Région bruxelloise, toutes les mesures prises en faveur de l’économie circulaire


sont réunies dans le programme régional en économie circulaire (PREC) 2016-2020,
adopté par le gouvernement bruxellois Vervoort II (PS/Défi/CDH/Open
121
VLD/SP.A/CD&V) le 10 mars 2016 . Au total, pas moins de 111 mesures y sont réunies
autour de quatre axes : des mesures transversales (cadre normatif, aides directes et
indirectes, innovation en matière de marchés publics, emplois et formations,
enseignement), des mesures sectorielles (construction, ressources et déchets,
commerce, logistique, alimentation), des mesures territoriales et des mesures de
122
gouvernance (coopération renforcée entre les administrations concernées) . Le
123
pilotage de ce plan d’action bruxellois a été confié à trois membres du gouvernement
et à quatre entités administratives régionales : Impulse.brussels (agence bruxelloise
pour l’entreprise), Bruxelles Environnement (administration bruxelloise de
l’environnement et de l’énergie), Bruxelles-Propreté (agence bruxelloise de
nettoiement, de collecte et de traitement des déchets ménagers) et Innoviris
(administration bruxelloise de la promotion et du soutien de la recherche
scientifique et de l’innovation). Une série d’autres acteurs publics, privés et
associatifs sont également impliqués dans ce dispositif.
Dès la fin de l’année 2016, une série d’ateliers ont été organisés afin d’accélérer la mise
en œuvre des actions proposées et d’accompagner les acteurs concernés. Dès septembre
2017, a également été organisée la première rencontre annuelle bruxelloise sur le
thème de l’économie circulaire : le « Be Circular Annual Meeting ».
En outre, le PREC est évalué et adapté tous les 18 mois. Sur cette base, il apparaît
que, à la fin de l’année 2018, 60 % des dispositions reprises dans le PREC ont été
124
réalisées, ce qui représente 319 entrepreneurs accompagnés dans leurs démarches ,
194 projets
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121
Bruxelles Environnement, « Programme régional en économie circulaire 2016-2020. Mobiliser les
ressources et minimiser les richesses perdues : pour une économie régionale innovante », mars 2016,
https://document.environnement.brussels.
122
A. ATHANASSIADIS, S. KAMPELMANN, « Opportunities and limits of circular economy as policy framework
for urban metabolism », in S. BARLES, P. MARTY (dir.), A research agenda for urban metabolism, à paraître.
123
Céline Fremault (CDH), ministre du Logement, de la Qualité de Vie, de l’Environnement et de l’Énergie ;
Didier Gosuin (Défi), ministre de l’Économie et de l’Emploi ; Fadila Laanan (PS), secrétaire d’État chargée
124
de l’Enlèvement et du Traitement des immondices.
Les accompagnements menés au sein du PREC s’adressent principalement aux micros, petites et
moyennes entreprises qui souhaitent développer leurs projets d’économie circulaire. Ces
accompagnements sont de formes variées : certains s’adressent à une entreprise spécifiquement,
d’autres visent des groupes d’entreprises à fédérer autour d’un projet commun ou d’une filière.

CH 2455-2456
5 L’ÉCONOMIE

financés (pour un montant total de 11,5 millions d’euros) et plus de 200 séminaires
et ateliers de travail organisés sur le sujet de l’économie circulaire. Par exemple, un
centre dédié au réemploi des matériaux de construction a vu le jour à Anderlecht (le
Centre de référence professionnelle bruxellois dans le secteur de la construction -
CDR Construction), les 700 anciens sièges du Théâtre royal de la Monnaie ont trouvé
une seconde vie au sein du projet Usquare.brussels, une chaire en économie
circulaire et métabolisme urbain a été créée à l’Université libre de Bruxelles (ULB) et
un dispositif d’identification des barrières technico-administratives au développement
de l’économie circulaire a été mis en place à travers le projet Circular Regulation Deal
125
(CIREDE) .
Une étude parue en octobre 2018 propose une évaluation des réalisations amenées par
126
le PREC . Elle met en avant le caractère « novateur, ambitieux et complet » du projet.
Cependant, ses auteurs, issus du milieu académique, proposent également quelques
points d’attention pour l’avenir, parmi lesquels le besoin d’une vision prospective de
long terme, la nécessité de mettre en place une formation spécialisée en économie
circulaire dans les établissements d’enseignement supérieur bruxellois, l’opportunité de
mobiliser davantage le levier des marchés publics et l’utilité de passer d’une « discussion
de niche » à une sensibilisation élargie du public.
Pour la législature régionale en cours, le gouvernement bruxellois Vervoort III
(PS/Écolo/ Défi/Groen/Open VLD/one.brussels-sp.a), installé en juillet 2019, entend
127
appuyer plus encore le PREC – parallèlement au plan régional de gestion des
ressources et déchets (PGRD) et au plan industriel bruxellois – afin de soutenir, par
voie réglementaire, l’émergence de nouvelles filières de valorisation des déchets et des
ressources (déchets plastiques, huiles usagées, bois, textiles, matelas ou déchets de
128
construction) . Il souhaite également soutenir la mise en place d’un système d’audit «
ressources et déchets » au sein des entreprises bruxelloises, encourager une politique
régionale circulaire en matière de marchés publics et d’achats, analyser l’opportunité de
créer un label « designed/made/ grown/repaired in and around Brussels », et enfin
développer l’axe circulaire dans le secteur de la construction en veillant à localiser à
Bruxelles un maximum d’emplois et d’activité économique dans ce secteur.

4.3. LA RÉGION FLAMANDE

Dès 2006, la Flandre a initié, à l’initiative de l’Openbare Vlaamse


Afvalstoffenmaatschappij (OVAM, société publique de gestion des déchets), un groupe
de réflexion et les prémices d’un réseau informel autour d’une gestion durable des
matériaux. Ce réseau de transition,
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125
126 « be.circular be.brussels. Rapport d’activité intermédiaire 2016-2018 », s.d., www.circulareconomy.brussels.
Chair Circular Metabolism, « Évaluation du programme régionale [sic] en économie circulaire de la Région
de Bruxelles-Capitale. Un regard académique sur le programme initial et les réalisations (2016-2018) »,
127 octobre 2018, https://circularmetabolism.com.
Piloté sous cette législature par Alain Maron (Écolo), ministre de la Transition climatique, de
l’Environnement, de l’Énergie et de la Démocratie participative, et Barbara Trachte (Écolo),
128 secrétaire d’État chargée de la Transition économique et de la Recherche scientifique.
« Déclaration de politique générale commune au gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale
et au collège réuni de la Commission communautaire commune. Législature 2019-2024 », s.d. [juillet
2019], https://be.brussels, p. 57-70.

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 5

baptisé Plan C, ne visait pas uniquement à limiter la production de déchets mais bien
à promouvoir une utilisation plus efficiente des matériaux, avec des schémas de
production et de consommation différents.
En 2012, la Région flamande a présenté son plan d’action, intitulé Vlaams
Materialenprogramma (Agenda 2020), piloté par l’OVAM et relevant de 33 organisations
issues des pouvoirs publics, de l’industrie, du monde scientifique et de la société civile.
Des thématiques particulières y ont fait jour : la gestion durable des matériaux de
construction, la bio-économie, un cycle fermé pour les matériaux chimiques, et
l’utilisation des métaux dans le cadre de cycle fermé.
En mars 2018, le gouvernement flamand Bourgeois (N-VA/CD&V/Open VLD) a
dévoilé une stratégie à long terme sous les traits de la « Visie 2050 », comportant un
129
volet pour la promotion de l’économie circulaire . Dans ce cadre, le programme
Vlaanderen Circulair avait été institué dès janvier 2017. Intégré à l’OVAM, celui-ci
résulte de la fusion de Plan C et du Materialenprogramma. Il s’agit d’un partenariat
regroupant les autorités régionales et locales, ainsi que la société civile, le secteur de
la finance et le monde académique. Sous l’autorité des ministres flamands en charge de
l’Environnement et de l’Économie, plusieurs initiatives ont vu le jour, comme la
promotion d’achats circulaires, des campagnes de sensibilisation, le soutien à
l’écoconception via la remise de prix (awards) et le développement d’un outil
d’évaluation en ligne, le partage de bonnes pratiques, etc. Des appels à projets sont
également lancés, notamment pour des projets d’innovation, avec, pour les années
2017-2018, quelque 135 projets retenus et financés à hauteur de 11 millions d’euros
130
.
131
Dans son accord de gouvernement , le gouvernement flamand Jambon (N-VA/CD&V/
Open VLD), installé début octobre 2019, fixe un objectif de recyclage général de 77,5 %
pour la Flandre à l’horizon 2030 (contre 70 % actuellement), avec la volonté de recycler
autant que possible sur son propre territoire.

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129
« Startnota. Transitieprioriteit Circulaire Economie. “Vlaanderen Circulair”. Een stuwende kracht naar
een circulaire economie in Vlaanderen », s.d. [février 2017], www.vlaandereen.be.
130
SPF Économie, PME, Classes moyennes et Énergie, « Single Market Forum 2018-2019. Circular Economy:
how to foster a sustainable paradigm (a new way of consuming and entrepreneurship)? », op. cit.
131
« Vlaamse Regering 2019-2024. Regeerakkoord », [octobre] 2019, www.vlaandereen.be.

CH 2455-2456
5. ÉVALUATION ET ÉTAT DES LIEUX EN BELGIQUE

Le cadre réglementaire belge ayant été posé, tant au niveau fédéral qu’aux niveaux
régionaux, il semble opportun de fournir un bref état des lieux de ce que recouvrent
actuellement la gestion des déchets et le développement de l’économie circulaire en
Belgique.
Le tableau 4 figurant en fin de chapitre fournit les données Eurostat pour la Belgique
et les autres pays membres de l’Union européenne concernant le traitement des
déchets. Dans une approche plus qualitative de la situation, le Conseil central de
l’économie (CCE) a pour sa part procédé, en juin 2019, à l’examen de l’état des lieux
de la transition belge vers une économie circulaire sous l’angle de l’efficacité avérée ou
132
non des politiques menées pour y parvenir . Il a ainsi évalué les progrès réalisés par
la Belgique en matière d’utilisation rationnelle des ressources (à travers les concepts
de consommation, de productivité, de réutilisation et de réparation des matières), en
matière de gestion durable des déchets (production et traitement des déchets), ainsi
qu’en matière d’éco-innovation et de ses retombées positives sur la société en termes de
création d’emplois et de valeur ajoutée. C’est ce rapport qui servira de fil rouge et de
principale source au présent chapitre.

5.1. UTILISATION RATIONNELLE DES RESSOURCES

Malgré une légère hausse de la productivité des ressources et une baisse de la


consommation intérieure de matières par habitant, la Belgique, disposant de peu de
ressources naturelles, reste tributaire d’importations importantes de matières premières
et de matières à recycler. Par ailleurs, avec un taux aux alentours de 18 %, la Belgique fait
partie des leaders européens en matière d’utilisation circulaire des ressources (cf. supra).
Par contre, les activités de récupération et de réparation sont encore peu développées dans
le pays. Le CCE précise toutefois que son analyse n’a pas pu tenir compte des
activités de récupération des produits et des emballages et de réparation des biens
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mises en place directement dans les entreprises.

132
Conseil central de l’économie, « Progrès réalisés dans le domaine de l’économie circulaire en Belgique »,
Note documentaire, juin 2019, www.ccecrb.fgov.be.

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 6

5.2. GESTION DURABLE DES DÉCHETS

Selon le CCE, la Belgique est particulièrement efficace sur le plan de la valorisation


des déchets : le pays « remplit déjà l’objectif de mise en décharge des déchets
municipaux fixé par l’Union européenne. Elle occupe, de plus, une position forte dans
le domaine de l’activité de recyclage. La Belgique respecte d’ores et déjà l’objectif de
recyclage des déchets municipaux de 50 % fixé à l’horizon 2020 et l’objectif de
recyclage des déchets d’emballages de 70 % fixé à l’horizon 2030 par l’Union
européenne ». À ce sujet, Fost Plus (organisme responsable de la promotion, la
coordination et le financement des collectes sélectives, du tri et du recyclage des déchets
d’emballages ménagers en Belgique) estime que 92,8 % de tous les emballages qui ont été
133
mis sur le marché belge par ses membres ont été recyclés en 2018. Cependant, le CCE
précise que les performances de la Belgique en matière de recyclage des emballages sont
mitigées lorsque ce taux est décomposé par matière : « Le pays affiche de bons scores, et
respecte d’ores et déjà les objectifs européens à l’horizon 2030 en ce qui concerne le
recyclage des déchets d’emballages en verre (100 %), en papier/carton (89,4 %), en
métaux (98,3 %) et en bois (80,9 %). Par contre, avec un taux de recyclage de
seulement 43,4 % en 2016, et bien que la Belgique se situe au- dessus de la moyenne
de l’Union européenne (42,4 % en 2016), des progrès restent à faire en matière de
recyclage des déchets d’emballages plastiques (…) pour atteindre les objectifs
européens de 50 % d’ici à 2025 et de 55 % d’ici à 2030 ». Selon Agoria, 57 % des
déchets plastiques sont des emballages (et sont recyclés à 43 %), tandis que 8 %
proviennent du secteur de la construction (et sont recyclés à 29 %), 8 % de la filière
électrique et électronique (et sont recyclés à 28 %), 5 % de l’agriculture (et sont recyclés
à 42 %) et 3 % du secteur automobile (et sont recyclés à 29 %). Les 19 % restants
134
proviennent de filières diverses .
Greenpeace Belgium apporte encore un autre éclairage à cette problématique du
taux de recyclage des emballages plastiques en Belgique. L’ONG pointe que si 43,4 % des
déchets plastiques belges sont recyclés, cela signifie que plus de la moitié est
essentiellement incinéré (et est valorisé sous la forme d’énergie). Surtout, elle nuance
l’expression « déchets plastiques recyclés » : « Tout ce qui est exporté est considéré
comme recyclé, puisque ces déchets ont été confiés à des entreprises de recyclage.
Ce sont ces entreprises de recyclage qui décident ensuite de s’en décharger, quitte à
envoyer à l’autre bout du monde les problèmes environnementaux qui accompagnent
135
ces déchets » . À ce jour en Belgique, si quelques entreprises s’occupent du recyclage
de certains types de plastiques (Ravago, Raff Plastics, Van Werven, etc.), il n’existe en
revanche pas de filière de recyclage du PMC, dont les balles sont envoyées vers
l’Allemagne, la France ou les Pays-Bas. En mai 2019, le gouvernement wallon Di © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
Rupo III a déclaré vouloir mettre en place une véritable filière de recyclage du
plastique et a décidé de financer six projets d’unités de recyclage, retenus après un
136
appel à projets lancé quelques mois plus tôt .

133
Toutes les entreprises qui mettent des produits ménagers emballés sur le marché doivent adhérer à
Fost Plus et lui verser chaque année une contribution sur la base du nombre et du type
d’emballages.
134
Agoria et Essenscia, « Industrie belge du plastique et économie circulaire », op. cit.
135
RTBF Info, 14 juin 2019, www.rtbf.be.
136
Gouvernement wallon, « La Wallonie passe à l’ère du recyclage plastique ! », Communiqué de presse,
16 mai 2019, https://gouvernement.wallonie.be.

CH 2455-2456
6 L’ÉCONOMIE

La mise en place de Fost Plus découle du principe européen de responsabilité élargie


du producteur, qui oblige les entreprises à financer et à organiser la collecte et le
recyclage des déchets qu’elles engendrent (cf. supra). Sur cette base, le financement de
Fost Plus repose sur l’adhésion des entreprises qui mettent des produits ménagers
emballés sur le marché belge. Ces entreprises doivent s’acquitter d’une contribution
annuelle sur la base du nombre et du type d’emballages produits. En échange de
cette contribution, les entreprises concernées peuvent apposer sur leurs produits le logo
137
« Point Vert » . Ces sommes, complétées des revenus de la vente des matériaux
collectés, sont utilisées pour collecter, trier et recycler les emballages après utilisation (en
ce compris les plastiques durs, les films en plastique, la frigolite et les petits déchets
dangereux déposés dans les parcs à conteneurs).
Greenpeace Belgium n’est pas le seul observateur à avoir émis quelques doutes sur
les chiffres annoncés par Fost Plus quant à la situation du recyclage en Belgique (et
qui ont servi de base à l’analyse du CCE). Ainsi, une enquête menée par le magazine
138
Médor au printemps 2019 dévoile que, « lorsque Fost Plus calcule ses taux de
recyclage, il procède en divisant le nombre de tonnes d’emballages mises sur le marché
par ses membres avec le nombre de tonnes collectées. Mais, premièrement, toutes les
entreprises ne déclarent pas leurs déchets. Un constat particulièrement vrai dans le
secteur de l’e-commerce. Si la Commission interrégionale de l’emballage peut
constater ces infractions, elle n’a pas le pouvoir de poursuivre ces entreprises qui ne sont
pas installées sur le sol belge. Or celles- ci génèrent un nombre important de déchets
puisque les marchandises sont emballées individuellement pour chaque client.
Deuxièmement, l’estimation des emballages mis sur le marché belge ne prend pas en
compte les achats effectués à l’étranger. Les bouteilles ramenées ainsi en Belgique
viennent ensuite gonfler les résultats du verre collecté à la bulle sans avoir été prises
en compte dans le numérateur de la fraction, ce qui peut donner alors des taux de
recyclage pour le verre au-delà de 100 %. Enfin, pour calculer le nombre de tonnes
d’emballages collectées, Fost Plus pèse les matériaux à la sortie du centre de tri. Mais
d’autres pertes interviennent après cette première étape, comme les étiquettes et
surtout les fonds de bouteilles qui sont éliminés pendant le processus de recyclage ». Médor
dénonce ainsi une surévaluation des taux de recyclage mis en avant par Fost Plus, même
s’il concède que cette surévaluation reste difficile à quantifier. Pour Médor, les taux
de recyclage communiqués par Fost Plus ne sont au mieux que des taux de collecte.
Pour sa part, Fost Plus estime respecter dans ses calculs la réglementation belge et
européenne, et agir sous le contrôle de la Commission interrégionale de l’emballage
(CIE).
Cela étant dit, les taux de collecte sélective en Belgique (pour les emballages, les déchets
organiques ménagers, le papier et le carton, les déchets électriques et électroniques,
etc.) sont pour leur part à juste titre, réputés efficients, ce que souligne le CCE, qui estime © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
que, en la matière, le pays « est d’ores et déjà dans le peloton de tête européen ». En
outre, d’autres points positifs sont à noter. Les balles de plastique qui sortent des
centres de tri ont bonne réputation et une attention importante est accordée au
recyclage de proximité. Selon Fost Plus, 74,1 % des emballages ménagers belges
recyclés en 2018 l’ont été en

137
Le logo Point Vert indique donc que l’entreprise qui met le produit emballé sur le marché est
membre de Fost Plus et contribue par conséquent à la collecte sélective, au tri et au recyclage de
l’emballage. Le logo ne signifie pas automatiquement que l’emballage se compose de matériaux recyclés.
Il n’est pas non plus une garantie que l’emballage sur lequel le logo est imprimé sera recyclé.
138
S. WARSZTACKI, « Recyclage : chirurgie plastique », Médor, n° 14, 2019, p. 20-29.

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 6

Belgique, 14,7 % aux Pays-Bas, 7,4 % en Allemagne, 3,0 % en France et 0,8 % ailleurs
(cf. Graphique 5). L’organisme de collecte estime que seule « une fraction minime (moins
de 100 tonnes) » de ces emballages ménagers belges est traitée en dehors de l’Europe. Mais
il convient d’ajouter avec Médor que toutes les entreprises ne déclarent pas leurs
déchets, un constat qui est particulièrement fréquent dans l’e-commerce,
notamment.

Graphique 5. Lieu de recyclage des emballages ménagers belges (2018)


80 %
74,1 %

70 %

60 %

50 %

40 %

30 %

20 %
14,7 %
7,4 %
10 %
3,0 %
0,8 %
0%
Belgique Pays-Bas Allemagne France Autres
Source : Fost Plus.

De son côté, Recupel, l’asbl en charge de la collecte et du traitement des lampes et


des appareils électriques et électroniques, enregistre un taux de collecte en hausse mais
toujours en dessous de l’objectif européen fixé pour ce type de déchets : un peu plus
de 50 % en 2019 selon Recupel, contre un objectif européen fixé à 65 % du poids
moyen des tous les appareils mis sur le marché au cours des trois années
précédentes. Parmi les causes expliquant cette situation, la filière pointe notamment
la problématique de circuits parallèles plus attractifs pour certains types de déchets tels
139
que les machines à laver ou les frigidaires .
Le CCE estime encore dans son rapport que « des progrès restent à faire pour atteindre
l’objectif de recyclage des déchets municipaux à l’horizon 2030 ». Pour rappel, les
emballages ne constituent qu’une partie des déchets municipaux, puisque
n’interviennent pas dans la définition de ceux-ci les déchets provenant de la
production, de l’agriculture, de la sylviculture, de la pêche, des fosses septiques et des © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)
réseaux d’égouts et des stations d’épuration, les véhicules hors d’usage ou les déchets de
construction et de démolition (cf. supra).
Il convient également d’apporter ici une précision importante à l’analyse : les
déchets ménagers ne représentent que quelque 8,0 % des déchets produits globalement en
Belgique (contre une moyenne européenne de 8,5 %, cf. supra). Le reste des déchets
provient de l’industrie (52,0 %), de la construction (31,0 %), des services (8,6 %) et de
l’agriculture

139
L’Écho, 19 mai 2020.

CH 2455-2456
6 L’ÉCONOMIE

(0,4 %) (cf. Graphique 6). Bien que les déchets municipaux ne représentent en Belgique
comme ailleurs en Europe qu’une dizaine de pourcents des déchets produits, ils
concentrent dans une certaine mesure l’attention politique et les débats en cours. Cela
s’explique notamment par leur composition hétérogène, qui les rend difficiles à
traiter de manière respectueuse de l’environnement. Leur mode de traitement donne
par ailleurs une bonne indication de la qualité du système de gestion des déchets dans son
ensemble.

Graphique 6. Répartition par origine des déchets produits en Belgique (2016)


Ménages Agriculture
8% 0%

Services
9%

Industrie
52 %

Construction
31 %

Source : Statbel.

Dans le cadre du suivi statistique mis en place au niveau européen (via Eurostat)
pour juger des avancées en matière de développement d’une économie circulaire,
intervient un indicateur concernant le secteur de la construction. Il s’agit du « taux de
récupération des déchets de construction et de démolition », qui est défini comme étant
« le ratio des déchets de construction et de démolition préparés pour une
réutilisation, recyclés ou sujets à la récupération de matériaux, incluant les opérations
de remblayage, divisés par les déchets de construction et de démolition collectés et
traités suivant le règlement (EC) n° 2150/2002 sur les statistiques des déchets ». Seuls les
déchets non dangereux sont ici pris en compte. Selon Eurostat, ce ratio s’élèverait pour la
Belgique à 95 % en 2016, contre une moyenne de 89 % pour l’UE28.
Pour ce qui est du recyclage des déchets provenant de l’industrie, et comme le
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souligne le CCE, les activités qui relèvent notamment de l’éco-conception, de l’écologie


industrielle, de l’économie de la fonctionnalité et du recyclage final ne sont pas
identifiables comme telles dans les nomenclatures statistiques existantes. Pourtant,
un certain nombre d’entreprises ont par exemple opté pour un recyclage final dans
lequel les matériaux (papier, acier, batteries, etc.) sont traités et recyclés afin d’obtenir
une matière première secondaire. Pour leur part, la collecte et le recyclage des
emballages industriels sont effectués par Valipac (qui est l’équivalent de ce qu’est
Fost Plus pour les déchets d’emballages ménagers). Cet organisme de collecte estime à
88,6 % le taux de recyclage

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE 6

pour 2018 des emballages industriels mis sur le marché en Belgique. Valipac concède
cependant que le taux de recyclage des emballages industriels en plastique a quant à
lui diminué de 8 % en 2018 par rapport à 2017, pour atteindre 45,8 %. L’organisme
de collecte s’est fixé un objectif de 65 % d’emballages plastiques industriels d’ici 2030,
avec une attention accrue sur les destinations prises par ce plastique à recycler et sur
l’effectivité du processus de recyclage. Pour le reste, Valipac annonce que 100 % des
emballages industriels en papier ou carton ont été recyclés en 2018, contre 92,4 % pour les
emballages industriels en bois (beaucoup de palettes, notamment) et 74,0 % pour les
emballages industriels en métal (bidons, etc.).

5.3. INNOVATION, CRÉATION D’EMPLOIS ET DE VALEUR AJOUTÉE

Dans son état des lieux, le CCE observe un décrochage de la Belgique en matière
d’éco- innovation par rapport à la moyenne européenne, et ce depuis 2012. Ce constat
s’explique avant tout par un meilleur positionnement d’autres États membres de l’Union
européenne, en raison de l’amélioration de leurs indicateurs d’éco-innovation. Mais
le CCE met également en avant trois freins propres à la Belgique : la répartition des
compétences entre différents niveaux de pouvoir, avec peu d’attention accordée à la
diffusion des bonnes pratiques régionales au niveau national ; un manque
d’expertise en matière d’éco-innovation et d’économie circulaire au sein des PME ;
et un contrôle limité sur la conception de la plupart des produits entrant sur le
marché belge.
« Les opportunités de l’économie circulaire en termes de potentiel de création d’emplois
locaux et de valeur ajoutée (notamment dans les activités de récupération et de
réparation) sont peu exploitées en Belgique », ajoute encore le CCE. « Ce décrochage
s’explique notamment par les investissements relativement faibles dans ces secteurs et les
relativement mauvaises performances de la Belgique en matière de brevets liés à l’éco-
innovation dans les domaines analysés par rapport au reste de l’Europe ».

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6 L’ÉCONOMIE

Tableau 4. Traitement des déchets (Europe, 2016), en % du


total
Récupération Élimination
Mise en Incinération
Valorisation décharge sans valorisation
Recyclage Remblayage
énergétique et autres énergétique
Allemagne 42,7 26,6 11,3 18,1 1,2
Autriche 37,0 11,0 45,9
Belgique 76,9 0,0 12,6 6,4 4,1
Bulgarie 5,2 0,0 0,4 94,4 0,0
Chypre 10,4 28,0 3,8 57,8 0,0
Croatie 47,2 4,0 1,0 47,8 0,0
Danemark 51,4 0,0 19,5 29,1 0,0
États membres de l’Union européenne (UE28)

Espagne 37,1 5,7 3,6 53,6 0,0


Estonie 21,6 11,2 2,5 64,7 0,0
Finlande 7,4 0,0 4,5 88,0 0,0
France 55,0 10,3 5,4 27,6 1,6
Grèce 4,8 0,0 0,3 94,8 0,0
Hongrie 54,1 3,7 7,4 34,2 0,6
Irlande 10,6 46,0 4,8 38,4 0,3
Italie 78,9 0,1 4,0 14,2 2,7
Lettonie 71,7 1,1 6,8 20,3 0,0
Lituanie 33,4 4,1 5,8 56,6 0,0
Luxembourg 34,8 24,2 2,1 39,0 0,0
Malte 19,1 63,4 0,0 17,2 0,4
Pays-Bas 45,6 0,0 7,6 46,0 0,9
Pologne 46,2 22,2 3,3 28,0 0,4
Portugal 43,5 9,5 12,1 34,7 0,2
République tchèque 49,5 29,0 4,5 16,6 0,4
Roumanie 4,0 0,4 1,4 94,1 0,1
Royaume-Uni 48,5 7,8 3,4 37,5 2,7
Slovaquie 40,0 4,7 7,0 47,8 0,5
Slovénie 60,2 27,2 4,8 6,9 0,8
Suède 12,0 4,9 6,6 76,3 0,2
Total 37,8 9,9 5,6 45,7 1,0
Islande 25,0 51,0 0,4 22,3 1,3
Kosovo 0,0 0,0 0,0 100,0 0,0
territoires

Monténégro 0,8 0,0 0,2 98,9 0,0


États et
Autres

Norvège 43,5 2,6 34,0 19,5 0,5


Serbie 2,8 0,8 0,2 96,3 0,0
Turquie 33,0 0,0 0,8 0,2
Source : Eurostat.

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CH 2455-2456
CONCLUSION

Développer l’économie circulaire en Belgique, et plus largement en Europe, c’est


nourrir l’ambition de soutenir un secteur économiquement porteur et respectueux
des enjeux environnementaux. Ce modèle économique et industriel répond, tout
comme le fait l’économie linéaire, à un objectif de production, mais a pour objectif
de maintenir les produits, leurs composants et les matériaux en circulation le plus
longtemps possible à l’intérieur du système, afin de réduire au mieux l’exploitation des
ressources, la dépendance énergétique et la pollution qu’il génère. Le concept n’est
pas neuf, mais les impératifs adoptés lors de l’Accord de Paris sur le climat (adopté le
12 décembre 2015 et entré en vigueur après signature le 4 novembre suivant) – ou,
plus récemment, la prise de conscience relative au recours irréfléchi aux matières
plastiques et à la gestion des déchets qui en découle – ont sans doute contribué à rendre
l’économie circulaire attractive au sein du discours politique.
Au-delà de ce premier élan d’enthousiasme, force est de constater que la mise en
place concrète d’un tel modèle économique n’est pas chose aisée. Plusieurs facteurs
y contribuent : la complexité du concept, certaines limites techniques du système, la
place prise par le marketing dans notre système économique actuel, ou encore le faible
niveau de réemploi réel des matières premières secondaires dans la production de
nouveaux produits.
Par « complexité » du concept, il faut entendre « richesse » de celui-ci.
Contrairement à une idée encore fortement répandue, l’économie circulaire est très
loin de se borner à la seule activité de recyclage. Au contraire, celle-ci est le dernier
échelon envisagé avant la valorisation énergétique des déchets par le biais de
l’incinération. Dans la logique soutenue par l’économie circulaire, bien d’autres étapes
sont à encourager en amont. Dans un premier temps, l’objectif est d’allonger la durée
de vie d’un produit en l’entretenant correctement et en le réparant si nécessaire. Dans
un deuxième temps, ce produit peut être réutilisé et trouver une deuxième vie, sur le
marché de l’occasion et de la seconde main notamment. Il peut également être
remanufacturé, en tout ou en partie, ou remis technologiquement à jour. Et dans un
troisième et dernier temps seulement, les matériaux qui composent le produit peuvent © CRISP | Téléchargé le 29/03/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.119.28.138)

être recyclés. Pour que l’économie circulaire puisse fonctionner de la manière la plus
efficace possible, il s’agit d’intervenir dès le début du processus, lors de la réflexion
autour de la conception du produit, selon la logique portée par l’économie de
fonctionnalité, l’écoconception ou l’approche C2C. En outre, l’économie circulaire
englobe non seulement le cycle technique, mais aussi le cycle biologique. Enfin,
l’économie circulaire promeut la mise en place de synergies industrielles afin d’optimiser
l’utilisation des ressources et de l’énergie entre les différents partenaires.

CH 2455-2456
6 L’ÉCONOMIE

L’économie circulaire, donc, propose une multitude d’opportunités et de facettes


différentes. Pourtant, les objectifs édictés par les pouvoirs publics, ainsi que les
bilans réalisés par ceux-ci quant à l’état d’avancement d’une transition vers une
économie davantage circulaire, concernent essentiellement les systèmes de collectes
sélectives et de recyclage, notamment d’emballages. Il est vrai qu’il est bien plus difficile
d’appréhender, en chiffres et donc en objectifs, les avancées obtenues en matière de
refabrication (remanufacturing), d’écoconception ou de symbioses industrielles ;
pourtant, tous ces aspects sont tout aussi importants dans le cadre d’une économie
circulaire. Outre cette question, les professionnels du secteur se plaignent également du
fait que les instances politiques se bornent à ce jour à des discours d’intention, sous la
forme de « feuilles de route », de « plans d’action » ou de « green deals », alors qu’un
réel développement de cette économie nécessiterait des textes de loi et des mesures
contraignantes, auxquelles s’oppose jusqu’ici de manière plus ou moins évidente le
monde industriel.
Malgré l’attention dont il est l’objet de la part des autorités publiques, le processus
de recyclage reste entravé par certaines limites techniques ou économiques. Tel est
particulièrement le cas pour le plastique ; celui-ci est souvent constitué de différents
polymères et associé à d’autres composants, ce qui rend l’activité de tri, en amont
du recyclage, très complexe. Par ailleurs, tous les polymères ne sont pas recyclables, ou
parfois, les contraintes économiques liées à un tel recyclage sont telles qu’il reste plus
compétitif de traiter, de brûler ou d’enfuir les déchets au-delà des frontières
européennes, en exportant par la même occasion les coûts environnementaux d’un
tel procédé. Mais même si le plastique est souvent, et à juste titre, montré du doigt, il
serait faux de penser que les autres matériaux se recyclent sans contraintes. Ainsi,
certains types de papier sont écartés du processus de collecte sélective, comme les
papiers souillés, les papiers peints, les vieux papiers de type archives, etc. Les grands
métaux industriels, tels que l’acier ou le cuivre, se recyclent relativement bien, mais les
métaux rares dont sont composés les téléphones portables et les batteries se recyclent
difficilement, avec de jeunes filières souvent peu opérationnelles encore et pour un
coût qui reste supérieur à l’extraction des matières premières, malgré l’incidence
écologique désastreuse que cela implique pour certains pays. Trier ne signifie donc pas
recycler, et certainement pas recycler à 100 %. D’autant que, même si l’activité de
collecte et de tri s’avère en progression en Europe en général, et en Belgique en
particulier, le phénomène des déchets sauvages demeure problématique.
La bonne gestion des déchets s’oppose également aux contraintes de marketing que
suppose le système économique en place. Pour vendre, il faut séduire le consommateur
et se démarquer de ses concurrents, même si cela signifie mettre en place un
emballage que l’on sait difficilement recyclable ou verser dans le suremballage (que l’on
justifie parfois par des allégations écologiques trompeuses) ou que cela suppose de créer
de nouveaux besoins au nom d’une innovation plus ou moins sensible présentée comme
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une avancée technologique.


Enfin, il faut garder à l’esprit que, actuellement, seulement 12 % des matériaux
utilisés dans la production européenne proviennent du recyclage. Il faut savoir que,
outre une question de prix en leur défaveur, les matériaux recyclés induisent une perte
de qualité par rapport à la matière première d’origine. C’est pourquoi, dans de
nombreux cas de figure, la matière première secondaire ne constitue qu’un pourcentage
limité dans la conception d’un nouveau produit. Au-delà de ce pourcentage, le papier
destiné aux arts graphiques

CH 2455-2456
L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE 69

n’aura plus le rendu nécessaire ou la bouteille d’eau censée rendre hommage à la pureté
du liquide qu’elle contient pourra laisser apparaître des taches suspectes.
Pour qu’un modèle d’économie davantage circulaire vienne un jour à s’imposer, il
faudra sans doute mieux informer les consommateurs sur les diverses possibilités qui
s’offrent à eux et sur l’origine des produits qu’ils achètent. Il faudra également faciliter
les synergies industrielles qui demandent un gros travail de collaboration et de
communication entre des acteurs dont l’activité est parfois très différente, mais
justement complémentaire. Il faudra des réglementations, à l’image de ce qui se fait
désormais pour lutter contre le suremballage ou les produits à usage unique. Et il
faudra, enfin, un changement de mentalité qui ne peut voir le jour que par le
partage des connaissances et des bonnes pratiques.

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CH 2455-2456
CENTRE DE RECHERCHE ET D’INFORMATION
SOCIO-POLITIQUES

Le CRISP, Centre de recherche et d’information socio-politiques, est un organisme


indépendant. Ses travaux s’attachent à montrer les enjeux de la décision politique, à
expliquer les mécanismes par lesquels elle s’opère, et à analyser le rôle des acteurs qui y
prennent part, que ces acteurs soient politiques, économiques, sociaux, associatifs, etc.
Par ses publications, le CRISP met à la disposition d’un public désireux de comprendre la
société belge des informations de haute qualité, dans un souci d’exactitude, de pertinence et
de pluralisme. Son objectif est de livrer à ce public les clés d’explication du
fonctionnement du système socio-politique belge et de mettre en évidence les structures
réelles du pouvoir, en Belgique et dans le cadre de l’Union européenne.
Le Courrier hebdomadaire paraît au rythme de 40 numéros par an, certaines livraisons
correspondant à deux numéros. Chaque livraison est une monographie consacrée à
l’étude approfondie d’un aspect de la vie politique, économique ou sociale au sens large.
La revue du CRISP constitue depuis 1959 une source d’information incontournable sur des
sujets variés : partis politiques, organisations représentatives d’intérêts sociaux et groupes de
pression divers, évolution et fonctionnement des institutions, négociations communautaires,
histoire politique, groupes d’entreprises et structures du tissu économique, conflits
sociaux, enseignement, immigration, vie associative et culturelle, questions
environnementales, européennes, etc. C’est également dans le Courrier hebdomadaire
que sont publiés les résultats des élections commentés par le CRISP.
Les auteurs publiés sont soit des chercheurs du CRISP, formés en diverses disciplines des
sciences humaines, soit des spécialistes extérieurs provenant des mondes scientifique, associatif
et socio-politique. Dans tous les cas, les textes sont revus avant publication par le
rédacteur en chef et par un groupe d’experts sélectionnés en fonction de la
problématique abordée, afin de garantir la fiabilité de l’information proposée. Cette
fiabilité, ainsi que la rigoureuse objectivité du Courrier hebdomadaire, constituent les
atouts principaux d’une revue dont la qualité est établie et reconnue depuis plus de 60
ans.

Fondateur : Jules Gérard-Libois


Président : Vincent de
Coorebyter Équipe de recherche
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:
Benjamin Biard, Pierre Blaise (secrétaire général), Fabienne Collard, Jean Faniel
(directeur général), Cédric Istasse, Vincent Lefebve, Caroline Sägesser, David Van Den
Abbeel (coordinateur du secteur Économie), Marcus Wunderle
Conseil d’administration :
Louise-Marie Bataille, Jacques Brassinne de La Buissière (vice-président honoraire),
Vincent de Coorebyter (président), Hugues Dumont, Éric Geerkens, Nadine Gouzée,
Serge Govaert, Laura Iker, Patrick Lefèvre, Michel Molitor (vice-président), Solveig Pahud,
Pierre Reman, Robert Tollet (vice-président), Els Witte
Derniers numéros du Courrier hebdomadaire parus
2453-2454 Planification d’urgence et gestion de crise sanitaire.
La Belgique face à la pandémie de Covid-19
Catherine Fallon, Aline Thiry et Sébastien Brunet
2452 Pacte social : enjeux anciens, nouveaux défis
Évelyne Léonard
2450-2451 Le financement des pensions des agents publics locaux
Damien Piron et Baptiste Vanderclausen
2448-2449 La campagne TAM TAM
Robin Van Leeckwyck
2447 La Belgique entre crise politique et crise sanitaire (mars-mai
2020) Jean Faniel et Caroline Sägesser
2446 L’État belge face à la pandémie de Covid-19
: esquisse d’un régime d’exception
Frédéric Bouhon, Andy Jousten, Xavier Miny et Emmanuel Slautsky
2444-2445 La formation des gouvernements régionaux et communautaires
après les élections du 26 mai 2019
Benjamin Biard, Pierre Blaise, Jean Faniel, Serge Govaert
et Cédric Istasse
2442-2443 Le redéploiement économique de la Wallonie face à la diversité
de ses territoires
Jean-Marie Halleux, Bruno Bianchet, Hubert Maldague,
Jean-Marc Lambotte et Pierre-François Wilmotte
2440-2441 L’extrême droite en Europe centrale et orientale (2004-2019)
Benjamin Biard
2438-2439 Les réformes de l’assurance chômage (2011-2019)
Vincent Lefebve
2436-2437 Le statut pénal des parlementaires
Marie Solbreux et Marc
Verdussen
2435 Les évolutions électorales des partis politiques (1944-2019)
III. Les familles politiques
Cédric Istasse

La collection intégrale du Courrier hebdomadaire est accessible sur www.cairn.info.


L’accès est gratuit pour les numéros parus avant 2019.

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