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L‟EAU ET L‟ESPRIT DANS LA TRADITION PATRISTIQUE ALEXANDRINE

Par Waheed Hassab Alla*

INTRODUCTION

Comme nous l‟avons annoncé, dans notre précédent article sur le rite du baptême, nous
aborderons ici le thème « Eau et Esprit à travers la littérature théologique alexandrine des cinq
premiers siècles; nous avons en effet déjà publié les textes des Pères de „Église copte
d‟Alexandrie de langue arabe dans notre étude sur le baptême des enfants dans la tradition de
l‟Église copte d‟Alexandrie “**.
Deux raisons justifient le choix de notre thème:
— la première, c‟est l‟urgence de répondre aux questions actuelles sur l‟utilité et le sens du
baptême et en particulier sur le lien entre l‟eau et l‟Esprit dans l‟acte baptismal;
la deuxième, c‟est que nous voulons mettre en évidence le fait que l‟Incarnation a offert aux
hommes une autre vision de la création et de ses éléments matériels, vision complètement
différente de celle qui avait suivi la chute originelle.
Donc, notre sujet se situe dans le contexte de la problématique autour de la matière et de son
rôle „instrumental dans le salut des hommes.
Pour bien comprendre cette problématique de la matière, nous attirons l‟attention des lecteurs
sur le fait que l‟Église a vécu dés sa naissance et jusqu‟à aujourd‟hui, l‟expérience
douloureuse de voir quelques-uns des siens » mépriser la matière et le monde matériel.
Heureusement, l‟Église et ses Pères sont conscients du danger que représente cette attitude,
connue sous le terme de „Gnose», dont les adeptes prétendent pouvoir être sauvés uniquement
par la apure connaissance, et non pas par des matériaux utilisés par l‟Église comme
instruments. Ces adeptes, ou pour mieux les désigner, ces adversaires de la matière, cachent
derrière leur concept une autre croyance : le dualisme qui consiste à croire à un monde de
lumière, l‟esprit», créé par le dieu de la lumière et à un monde de ténèbres, „matière>‟, créé
par le dieu des ténèbres. Donc, nous sommes en présence de deux dieux, qui dirigent ces deux
mondes.
Ce rappel était nécessaire pour bien comprendre et situer les textes patristiques qui nous
intéressent et dont nous ne citerons que l‟essentiel car la littérature sur ce sujet est abondante.

1. LA THEOLOGIE TYPOLOGIQUE

On entend par «théologie typologique» tous les événements de l‟Ancien Testament, qui, à un
moment particulier de l‟histoire, ont réalisé certaines actions salvatrices pour le peuple
d‟lsraél, et qui contiennent en même temps une préfiguration des moyens par lesquels Dieu en
Jésus-Christ et le Saint-Esprit communiquerait son salut à tous les hommes.
Cette théologie n‟a pas été inventée par les Pères de l‟Église, mais elle trouve son fondement
dans le Nouveau Testament, et surtout dans l‟Évangile de saint Jean.

(*) Cf. Le Monde Copte N° 13, 1988, p. 26.


(**) W. HASSAB ALLA, Le Baptême des enfants dans la tradition de l‟Église Copte
d‟Alexandrie, Éd. Universitaires, Fribourg (Suisse), 1985.
1.1. Le premier passage qui retient toute notre attention est l‟entretien de Jésus avec
Nicodème : nous trouvons dans ce passage (Jn. 3,9) une allusion importante à la renaissance,
permettant d‟affirmer que la nouvelle naissance de «l‟eau et de l‟Esprit‟ était connue dans le
milieu juif : « Tu es maître en lsraèl et tu ignores ces choses „. D‟autre part, la typologie
baptismale, vu son importance, apporterait indirectement aux croyants une réponse à la
question de la possibilité de naître de «l‟eau et de „Esprit», et ceci d‟une manière analogique
aux événements de l‟Ancien Testament, «car tout est possible à Dieu » (Mc. 10, 27).

1.2. Le deuxième passage est celui de Jean 6, 30-35, au sujet de la manne et de l‟Eucharistie.

1.3. Le troisième passage que nous signalons est la guérison de l‟aveugle-né par Jésus,
guérison réalisée à l‟aide de la matière, ce qui est intéressant pour comprendre le baptême.
Saint Jean rapporte : «Il cracha sur de la terre, fit de la boue avec sa salive, enduisit avec cette
boue les yeux de l‟aveugle et lui dit : Va te laver à la piscine de Siloé, nom qui signifie:
„Envoyé‟. L‟aveugle s‟en alla donc, il se lava et revint en voyant clair » (Jn.. 9, 6-7); 1 ce
texte est à mettre en parallèle avec la Genèse: «Alors Yahvé Dieu modela l‟homme avec la
glaise du sol, il insuffla dans ses narines une haleine de vie et l‟homme devint un être vivant»
(Gn. 2, 7). C‟est le geste le plus important que Jésus ait accompli pour attirer l‟attention des
Juifs, et par la suite celle des autres générations, sur le fait que c‟est d‟après le mode même
selon lequel l‟homme a été créé autrefois, qu‟aujourd‟hui Dieu va réaliser la nouvelle création
à partir de la matière, par l‟action du Saint-Esprit.

1.4. Vient ensuite saint Paul qui fournit le parallèle entre la création et le baptême (Il Co. 5,
17), la traversée de la mer Rouge et le baptême (I Co. 10, 1-5). Enfin, saint Pierre évoque le
déluge en tant que préfiguration du baptême (I P., 3, 18-19). C‟est pour cela que Jean
Daniélou déclare : „Si nous voulons comprendre le vrai sens du baptême, il est bien clair que
c‟est vers l‟Ancien Testament qu‟il faut nous tourner»2 .
On peut observer que la recherche des types du baptême dans l‟Ancienne Alliance a pour but
de conduire les adversaires du baptême à reconnaître l‟importance de l‟eau, qui est l‟aspect
matériel de l‟acte baptismal. Il faut en effet savoir que l‟Église n‟a jamais parlé du seul
baptême d‟eau sans l‟Esprit-Saint. Ce qui apparaît dans l‟Ancienne Alliance, c‟est que Dieu
agit à travers la matière et ceci depuis la création de l‟homme jusqu‟à la venue de Jésus-
Christ.
La confirmation onctions sur les articulations.(image)

2. L’EAU ET L’ESPRIT DANS LES ÉCRITS PATRISTIQUES

La théologie baptismale des Pères de I‟glise a une importance tout à fait particulière; car elle
remonte à l‟époque de l‟Église ancienne. Nous insisterons davantage sur les textes patristiques
qui ne sont pas encore traduits en français.
2.1. Clément d’Alexandrie (+ avant 215)

Clément d‟Alexandrie, tenu pour l‟un des premiers docteurs de l‟Église, a développé et
structuré les premières bases de la théologie baptismale, surtout dans le 6 chapitre du 1er livre
de son premier ouvrage «Le Pédagogue».
Clément a voulu affirmer que la vraie connaissance de Dieu est obtenue par le
baptême, sans pour autant négliger d‟indiquer que cela est dû à l‟action du Saint-Esprit :

« Lorsque nous avons été régénérés, nous avons aussitôt reçu ce qui est parfait, et qui était
l‟objet de notre empressement. Nous avons été illuminés, ce qui signifie que nous avons
connu Dieu Il est donc rendu parfait du seul fait du baptême, et sanctifié par la descente de
l‟Esprit. C‟est cela!».4

« La catéchèse amène progressivement à la foi; au moment du saint baptême, on reçoit


l‟instruction de l‟Esprit-Saint. Comme la fol est l‟unique et universel moyen du salut de
l‟humanité, le Dieu Juste et Bon se communique également et de la même façon à tous».‟

2.2. Origène (+ 253/4)


Origène a pris une place importante dans la théologie baptismale, parce qu‟il l‟a développée
dans plusieurs directions, telles que : la typologie baptismale, la structure très ancienne de la
liturgie baptismale comme témoignage, le lien entre le baptême et la nourriture spirituelle
(l‟Eucharistie), sa conception au sujet du baptême de feu, la relation entre le baptême et la
circoncision.

2.2.1. Origène, dans ses homélies sur l‟Exode6 a repris les paroles de saint Paul (I Co. 10, 1-
4) concernant la figure de la sortie de l‟Égypte liée à l‟action baptismale qui libère le baptisé
de sa servitude à l‟égard du prince du monde, le diable. Mais, où peut-on obtenir cet homme
nouveau et libre? Origène répond que c‟est dans le moment où vous descendez dans l‟eau et
en sortez sains et saufs, ayant lavé les souillures des péchés «. li est donc important de citer
ces extraits du texte d‟Origène
Il appelle cela un baptême accompli en Moïse dans la nuée et dans la mer, afin que vous, qui
êtes baptisés dans le Christ, dans l‟eau et l‟Esprit- Saint, vous sachiez que les Égyptiens
suivent vos traces, qu‟ils veulent vous ramener à votre ancienne servitude, c‟est-à-dire, auprès
des princes de ce monde‟ et des «esprits mauvais dont vous fûtes les esclaves. Ils cherchent à
vous atteindre, mais vous descendez dans l‟eau et en sortez sains et saufs; ayant lavé les
souillures des péchés, vous remontez «homme nouveau «, prêts à chanter « le cantique
nouveau ,,6

2.2.2. Le rôle de l‟Esprit dans le baptême et dans le sacrement de la confirmation


Origène, dans son «Traité des Principes» a mis l‟accent sur l‟efficacité de l‟eau baptismale,
qui tire son essence de l‟action du Saint-Esprit
Et dans les Actes des Apôtres, les apôtres par l‟imposition des mains donnaient l‟Esprit-Saint
dans le baptême. Tout cela nous révèle la grande autorité et dignité qu‟a l‟Esprit-Saint en tant
qu‟être substantiel, telle que le baptême de salut ne peut être accompli que par l‟autorité de la
Trinité, la plus excellente de toutes, par l‟invocation du Père, du Fils et de l‟Esprit-Saint, et
ainsi au Père inengendré et à son Fils unique est associé le nom du Saint-Esprit
Mais, Origène a aussi formulé la différence entre les deux actes du baptême et de l‟imposition
des mains au temps des apôtres
Il crée lui-même un peuple nouveau et renouvelle la face de la terre, quand avec la grâce de
l‟Esprit, ils auront déposé le vieil homme, avec ses oeuvres et se conduiront désormais selon
une vie nouvelle. C‟est pourquoi on a raison de dire que l‟Esprit-Saint habite, non dans ceux
qui sont chair, mais dans ceux dont la terre a été renouvelée. L‟esprit-Saint était pour cette
raison transmis par l‟imposition des mains des apôtres, après la grâce et le renouvellement
apportés par le baptême ,,8

2.2.3. Origène a appelé le baptême chrétien l‟eau véritable, l‟eau du salut» qui donne »la
rémission des péchés». Il insiste, encore, sur la différence entre les baptêmes juifs et le
baptême chrétien, car celui-ci trouve sa puissance dans le lien indivisible entre l‟eau et
l‟Esprit
1. Jourdain veut dire «descente». Le fleuve de Dieu «qui descend» avec la puissance
d‟un large courant, c‟est notre Sauveur et Seigneur en qui nous sommes baptisés dans l‟eau
véritable, l‟eau du salut. C‟est aussi «pour la rémission des péchés» qu‟il prêche le baptême
venez, catéchumènes, faites pénitence afin de recevoir le baptême pour la rémission des
péchés». Il reçoit le baptême «pour la rémission des péchés «, celui qui cesse de pécher. Mais
quelqu‟un vient-il au bain du baptême, endurci dans le péché, pour lui il n‟y a pas de
rémission des péchés
Gardez-vous purs de toute souillure et de tout vice : la rémission de vos péchés vous sera
accordée lorsque vous vous serez mis vous aussi à mépriser vos propres péchés «.
2. «En effet, le baptême du Christ contenait en perfection la rémission des péchés, du
seul fait de le recevoir; tandis que celui de Jean contenait bien la rémission des péchés mais
grâce à la conversion, car il était imparfait, tout en étant plus parfait que les baptêmes des
Juifs».
3. «Aussi doit-on dire grâce au baptême de Jésus le ciel s‟est ouvert pour accorder la
rémission des péchés — non à celui «qui n‟avait pas commis de péché et dans la bouche
duquel il ne s‟est trouvé aucune fausseté «, mais au monde entier ... «

2.3. Saint Athanase d’Alexandrie (295-373)

Nous constatons dans les textes de saint Athanase un développement théologique concernant
la théologie du baptême, tout particulièrement la présence de la Sainte Trinité qui rend valide
l‟acte baptismal.
Il n‟est pas étonnant qu‟à une époque où il y avait diverses hérésies, saint Athanase ait lié
l‟efficacité de l‟acte baptismal à la foi dans les trois hypostases divines. Car il est bien
entendu que le baptême se pratique au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, sans lesquels il
n‟aurait aucune efficacité sur la personne du baptisé. Donc, s‟il manque dans la foi du baptisé
un élément essentiel de cette foi trinitaire, l‟acte baptismal avec tous ses effets est nul. Car,
nous remarquons chez saint Athanase s‟il est vrai que le baptême est le centre de la vie
chrétienne, liant à la foi dans les trois hypostases divines, cela signifie que dans le cas où il
manque un aspect à cette foi, cette faille affectera tout le mystère du Christ et par conséquent
détruira le dessein divin de sauver la créature. Car tout est lié inséparablement. La foi tout
entière est requise pour le salut.
Il a ordonné que nous soyons baptisés non pas au nom du fait et du non-fait ni au nom du
Créateur et de la créature, mais au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Car nous, qui
sommes comptés au nombre des choses faites, initiés ainsi, nous sommes faits fils et lorsque
nous prononçons le nom du Père, nous reconnaissons par ce nom le Verbe aussi qui est dans
le Père 12

2.3.1. St. Athanase dans un très beau texte a nettement démontré le lien intime entre l‟élément
de l‟eau du baptême et le Saint-Esprit en tant que Créateur avec le Père et le Fils. Sans
l‟Esprit, l‟eau du baptême reste sans aucun effet et elle n‟est qu‟une eau simple
«Qu‟ils disent donc si le salut est pour ceux qui croient au Père et au Fils et qui ne croient pas
en l‟Esprit-Saint : mais il s‟en faut! Car ils ne croient pas en Dieu, ceux qui ne croient pas en
l‟Esprit-Saint, au point que Paul, ayant rencontré quelques disciples et leur ayant demandé
s‟ils avaient reçu l‟Esprit-Saint en devenant croyants, et ceux-ci lui ayant répondu qu‟ils
n‟avaient pas entendu dire qu‟il y eût un Saint-Esprit, Paul leur dit : «Quel baptême avez-vous
donc reçu?» prouvant que ceux qui n‟ont pas été baptisés au nom de l‟Esprit-Saint ne sont pas
baptisés non plus au nom du Père et du Fils. Ainsi, nous reconnaissons que l‟Esprit-Saint est
aussi créateur. Du reste, s‟il n‟était pas créateur et que nous ayons été créés sans lui dès le
début, comment ne serions-nous pas régénérés sans lui dans la régénération? Ou si peut-être le
baptême de régénération nous a ramenés à cette époque éloignée qui était avant l‟abandon de
la loi divine par Adam, ou notre régénération d‟une plus petite fabrication d‟Adam, puisque
vous avez dit auparavant que nous avons été créés sans l‟Esprit-Saint, comment se fait-il que
celui-ci soit joint sans cause à notre régénération? Mais dire cela est irreligieux : est-ce que
l‟homme aurait été créé plus grand et plus prudent sans lui, et serait tombé, et que pour cette
raison, l‟Esprit-Saint aurait été adjoint à notre régénération, pour que nous soyons mieux
protégés? Mais aussi il est très impie que cela vienne à l‟esprit de quelqu‟un. Qu‟ils disent
donc comment l‟Esprit-Saint a été associé à notre régénération, lui qui ne nous a pas créés dès
le début, si vraiment il ne nous a pas créés; vous direz peut-être pour qu‟il sanctifie ceux qui
viennent au baptême de régénération. Car il est l‟Esprit-Saint, sanctifiant les saints, mais il
n‟est pas cependant créateur. Car toutes choses ont été créées par Dieu à travers le Fils, selon
ce que dit Paul : Pour nous, en tout cas, il n‟y a qu‟un Dieu, de qui tout vient, et un seul
Seigneur, Jésus-Christ, par qui tout existe, et par qui nous sommes.

2.3.2. Saint Athanase dans son 1e Discours contre Anus a critiqué le manichéisme 14 et sa
conception de l‟origine du monde. Et il n‟a cessé d‟attaquer l‟Arianisme. Comme nous
l‟avons déjà dit, saint Athanase a pris le saint baptême comme point de départ pour critiquer
les hérésies, et en même temps il affirme la divinité du Fils et du Saint-Esprit qui sont égaux
au Père dans la substance. Cela est le principe de la foi qui constitue le point le plus important
pour le baptisé, lui permettant d‟obtenir la participation „dans l‟Esprit-Saint.
Car Dieu, ce n‟est pas comme étant insuffisant, mais en tant que Père qu‟il a donné à la terre
sa propre sagesse comme fondement, et il a fait
Signalons aussi que St. Athanase a fait une allusion théologique primordiale pour nous
aujourd‟hui, puisqu‟il met en évidence incontestable le rôle de l‟Esprit-Saint dans le baptême.
C‟est une formule qui prouve que le baptême chrétien, à la différence des baptêmes
précédents, a un nouveau sens. C‟est la participation de la Sainte Trinité au baptême. Et cela
spécifie que le rite du baptême est tout à fait différent du rite magique. Ce sont le Père et le
Fils avec le Saint-Esprit qui baptisent l‟homme toute chose par le Verbe, qui provient de lui,
et il affermit le saint baptême dans le Fils ... Ainsi, lorsque l‟on donne le baptême, celui que le
Père baptise, le Fils le baptise et celui que le Fils baptise est initié dans l‟Esprit-Saint ... Car
ils en viennent au danger de perdre l‟intégrité du mystère (je parle du baptême). Car si nous
sommes initiés au nom du Père et du Fils, eux ne proclament pas le Père ». 15

2.3.3. Accordant une place importante au baptême, saint Athanase nous a permis de mieux
saisir la théologie baptismale et ses fondements. Ceci est mis en relief lucidement dans ses
lettres à Sérapion.
Dans la première, saint Athanase fait remarquer que l‟homme ne reçoit rien dans le baptême
sans la présence du Saint-Esprit
«C‟est précisément (cette foi) qui unit à Dieu, tandis que qui enlève quelque chose de la
Trinité et est baptisé au seul nom du Père ou au nom du Fils, ou dans le Père et le Fils sans
l‟Esprit, ne reçoit rien «.
«Quant à l‟Esprit-Saint, il n‟est que pour ceux qui l‟ont reçu en participation dans la collation
du baptême. Quand donc des catéchumènes et des païens pèchent, ils pèchent contre le Fils,
parce qu‟il est en eux, comme il a été dit ils peuvent toutefois recevoir la rémission, lorsqu‟ils
sont honorés du don de la régénération»
Le baptisé, dit-il inlassablement, obtient le renouvellement de son être par sa naissance «de
l‟Esprit» dans le baptême
«La différence est grande : car qui fait pénitence, cesse bien de pécher mais il garde les
cicatrices de ses blessures; au contraire, qui reçoit le baptême, dépouille le vieil (homme) et
est renouvelé, naissant de nouveau par la grâce de l‟Esprit».
2.4. Didyme l’aveugle (†398)

Si, pendant la crise de l‟arianisme, saint Athanase a nettement lié sa défense de la divinité du
Fils à la validité du baptême et de la nouvelle naissance, point central de la vie chrétienne, il
était aussi indispensable, à l‟époque de la crise du macédonianisme (niant la divinité du Saint-
Esprit), que Didyme l‟Aveugle13 consacrât, de son côté, son ouvrage de Trinitate 19 à
défendre la divinité du Saint-Esprit liée au baptême. Car le Saint-Esprit est l‟agent dans cet
acte sans lequel les baptisés, nous dit Didyme, n‟ont pas la perfection du baptême et c‟est en
vain qu‟ils ont subi les trois dimensions
<parce qu‟>ils ont supprimé l‟égalité d‟honneur de la Trinité...» Il va de soi que nous ne
discutons pas ici ce problème de la divinité du Saint-Esprit, tel qu‟il se posait à cette époque-
là, car ce n‟est pas le sujet principal de notre article. Ce qui nous intéresse au premier chef,
c‟est l‟eau et l‟Esprit dans la théologie baptismale de notre auteur du IVème siècle.
2.4.1. Didyme, dans le le livre de son ouvrage de Trinitate, a en effet donné une affirmation
sans équivoque sur le rôle de l‟Esprit en tant qu‟Agent dans l‟eau du baptême, afin que celui-
ci produise dans l‟homme les effets du renouvellement :
« Donc, l‟Esprit-Saint, en tant que Dieu et avec le Père et le Fils, nous renouvelle dans le
baptême et, d‟un état difforme, il nous ramène à notre beauté antérieure et nous remplit de sa
grâce au point que nous ne pourrions contenir rien de plus des choses qu‟il faut rechercher, et
il nous libère du péché et de la mort, et de nous qui sommes terrestres, c‟est-à-dire, «faits de
terre et de cendre», il fait des êtres selon l‟esprit, qui ont part à la gloire divine, fils et héritiers
de Dieu et du Père, exactement semblables à l‟image du Fils, et cohéritiers de lui-même, et
des frères qui seront glorifiés avec lui et régneront avec lui; et en échange de la terre, il donne
à nouveau le ciel, et il donne avec beaucoup de générosité le paradis, et il nous rend plus
honorés que les anges et par les flots divins de la piscine, il éteint la flamme si grande,
inextinguible, de la géhenne »20
2.4.2. Dans un autre texte, Dydime aborde un point essentiel le rôle de la matière, l‟eau, en
tant que moyen du salut. Il a fondé sa défense du baptême sur la façon dont a été créé
l‟homme (matière et esprit), sur l‟ordre divin et l‟enseignement des apôtres, afin de répondre à
une question posée, et qui se pose encore aujourd‟hui Pourquoi Dieu agit-il toujours à travers
la matière?
«Car l‟homme est conçu deux fois, l‟une par notre corps, l‟autre par l‟Esprit divin. Les
dogmatiques ont écrit de façon convenable au sujet de ces deux conceptions. Moi-même,
j‟ajouterai le nom de chacun et la doctrine elle-même. Jean «A tous ceux qui l‟ont accueilli, il
a donné pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom, eux qui ne furent
engendrés ni du sang ni d‟un vouloir de chair, ni d‟un vouloir d‟homme, mais de Dieu» (Jn. 1,
12-13). Tous ceux, dit-il, qui ont cru au Christ, ont reçu le pouvoir d‟être faits fils de Dieu,
c‟est-à-dire, de l‟Esprit-Saint, et de devenir de la même nature que Dieu; les anges n‟ont pas
été dignes de cet honneur. Car pour montrer que ce Dieu qui engendre est l‟Esprit-Saint, il a
ajouté en la personne du Christ «En vérité, en vérité je te le dis, à moins de naître d‟eau et
d‟Esprit nul ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair, ce qui
est né de l‟Esprit est esprit. Ne n‟étonne pas si je t‟ai dit : il vous faut naître d‟en haut. Le vent
(l‟Esprit) souffle où il veut et tu entends sa voix mais tu ne sais pas d‟où il vient ni où il va.
Ainsi en est-il de quiconque est né de l‟Esprit» (Jn. 3, 5-8). Lorsqu‟il dit «à moins de naître
d‟eau et d‟Esprit, nul ne peut entrer dans le royaume de Dieu », et « il vous faut naître d‟en
haut (du ciel) il montre que, même s‟ils ont cru au nom du Père et du Fils et ont été baptisés,
ils ne peuvent cependant atteindre le royaume des cieux, à moins d‟avoir cru également et de
façon semblable en la nature divine de l‟Esprit-Saint et d‟avoir été baptisés en son nom. Car
sinon, ils n‟ont pas la perfection du baptême et c‟est en vain qu‟ils ont subi les trois
immersions parce que après le baptême, en chantant la doxologie (c‟est-à-dire) l‟hymne de
glorification ils ont supprimé l‟égalité d‟honneur de la Trinité et ont transgressé leurs propres
professions de foi, ils entendent de la part des saints ce que le Prophète a dit dans le Ps. 80 :
«Les ennemis du Seigneur lui ont menti «; de la part du Fils, ce qu‟on lit dans le Ps. 1 : «Les
fils d‟étrangers m‟ont menti» et dans le Ps. 100 «Je haïs les prévaricateurs; un coeur mauvais
n‟est pas à mes côtés» ; de la part de l‟Esprit-Saint, ce qui est écrit dans l‟épître aux Romains
«J‟ai engendré des fils, je les ai élevés, mais ils m‟ont méprisé» ... En outre, dans le passage
cité de l‟Évangile, le Christ dit « Il faut naître de l‟eau» parce que l‟ablution de la saleté du
corps, qui a lieu lors du baptême, indique que ceux qui sont baptisés sont engendrés à
nouveau par l‟Esprit-Saint. En effet, la piscine engendre d‟une façon visible notre corps
visible, les prêtres faisant office de serviteurs; d‟autre part l‟Esprit de Dieu, qui est invisible
pour toutes les intelligences, baptise immatériellement en lui-même notre coeur en même
temps que notre âme, avec les anges pour serviteurs, et le régénère. Car le Baptiste lui aussi,
historiquement et d‟une manière plausible, par cette locution „par l‟eau et l‟Esprit‟, dit du
Christ : «Il vous baptisera dans l‟Esprit-Saint et le Feu». En effet comme si le corps humain
était un vase d‟argile, il atout d‟abord besoin d‟être purifié par l‟eau, puis d‟être consolidé par
le feu spirituel, et d‟être achevé (car Dieu est «le feu qui dévore «) et ainsi il a besoin de
l‟Esprit-Saint, pour qu‟il soit rendu parfait et renouvelé par lui car il sait que le feu spirituel
irrigue, il sait que l‟eau spirituelle sépare ... Lorsque le Christ dit Ce qui est né de la chair est
chair, ce qui est né de „Esprit est esprit», il enseigne brièvement que l‟homme qui n‟aurait pas
atteint le baptême est de chair, c‟est-à-dire n‟existe pas comme ayant part à la lumière céleste
... celui qui, d‟autre part, a été baptisé est spirituel, c‟est-à- dire qu‟il a part à la vie
immortelle... Mais Paul, lui aussi, confirme que l‟Église régénère aussi les illuminés (ou les
baptisés) et qu‟il a par nature la dénomination de Dieu lorsqu‟il écrit à Tite (3,5):» lI nous a
régénéré par le bain de la régénération et de la rénovation en l‟Esprit- Saint». Et dans l‟épître
aux Romains : «Mais si par l‟Esprit vous faites mourir les oeuvres du corps, vous vivrez. En
effet, tous ceux qu‟aime l‟Esprit de Dieu sont fils de Dieu. Aussi bien n‟avez vous pas reçu un
esprit d‟esclave pour retomber dans la crainte, vous avez reçu un esprit de fils adoptifs qui
nous fait nous écrier Abba! Père!» (Am. 8, 13-17). Dans l‟épître aux Galates, il dit de ceux
qui ont été baptisés «Aussi n‟es-tu plus esclave, mais fils; fils, et donc héritier de Dieu par le
Christ» (4, 7). Et il écrit aux Corinthiens des paroles voisines «Mais vous vous êtes lavés;
mais vous avez été sanctifiés; mais vous avez été justifiés par le nom du Seigneur Jésus-Christ
et par l‟Esprit de notre Dieu» (IC0. 6, 11). Observez en outre que l‟on conclut aussi de ces
paroles que la rédemption, la sanctification et la justification ne sont pas fournies sans le nom
de l‟Esprit divin. Et dans les Actes, il dit avoir demandé à quelques disciples s‟ils avaient reçu
l‟Esprit-Saint en devenant croyants. Comme ceux-ci avaient répondu «Mais nous n‟avons
même pas entendu dire qu‟il y a un Esprit-Saint» (9, 1-7), il leur dit : «Quel baptême avez-
vous donc reçu ? «, parce que évidemment il ne leur servait à rien s‟ils ne croyaient pas aussi
de même à l‟Esprit-Saint et étaient baptisés en son nom, comme ils avaient cru au Père et au
Fils. En outre, les Actes montrent que le baptême est inutile sans l‟arrivée et la sanctification
de l‟Esprit divin, par ces mots «Apprenant que la Samarie avait accueilli la parole de Dieu, les
apôtres qui étaient à Jérusalem y envoyèrent Pierre et Jean. Ceux-ci descendirent donc chez
les Samaritains et prièrent pour eux, afin que l‟Esprit-Saint leur fût donné. Car il n‟était
encore tombé sur aucun d‟eux; ils avaient seulement été baptisés au nom du Seigneur Jésus.
Alors, Pierre et Jean se mirent à leur imposer les mains, et ils recevaient l‟Esprit-Saint» (Ac.
8, 14- 18). Donc, ceux qui sont baptisés par le simple nom de l‟Esprit-Saint, et non, pour ainsi
dire, par le nom de Dieu et de l‟Esprit de Dieu, qui, par nature, est son Esprit, ceux-là ont été
lavés comme par une eau pure, ils ont espoir vain et inutile. Car lorsque nous nous
immergeons dans la piscine, par la complaisance de Dieu et du Père, par la grâce de son
Esprit, nous sommes dépouillés de nos péchés, et quittant l‟ancien homme, nous sommes
régénérés et marqués d‟un sceau par sa puissance royale; lorsque nous sortons de la piscine,
nous revêtons le Christ Sauveur comme une robe incorruptible et digne du même honneur que
celui qui nous a régénérés et marqués d‟un sceau, le SaintEsprit. L‟Écriture dit : «Vous tous
qui avez été baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ» (GaI. 3, 27); et nous recevons
cette «image et ressemblance de Dieu» (On. 1, 26) dont parlent les Écritures, que nous avions
reçue par l‟insufflation divine et que nous avons perdue par le péché; et nous nous découvrons
de nouveau tels que nous étions dans le protoplaste, dépourvus du péché, et pouvons de notre
pouvoir; c‟est en effet ce que signifie cette image et cette ressemblance, à tel point qu‟elle
s‟adapte à ce que Paul écrit des baptisés : «Pour que vous soyez à l‟image de celui qui vous a
créés» (CoI. 3, 10) et «De même que nous avons porté l‟image terrestre, nous porterons aussi
l‟image céleste» (I Go. 15, 49). Car celui qui n‟aurait pas été régénéré dans le baptême par
l‟Esprit de Dieu, marqué de sa sanctification, et fait son temple, n‟atteindra pas les biens
célestes, même si l‟on découvrait que le reste de sa vie a été sans faute. Mais ceux aussi qui,
avant le baptême, ont subi le martyre, lavés par leur propre sang, ils ont été rendus vivants
comme par le Saint-Esprit. C‟est pourquoi, joignant le témoignage à l‟exhortation, le saint
écrivain s‟exclame : «Allez vers lui, et vous serez illuminés, et vos visages ne seront pas
couverts de honte» (Ps. 33,5). Car l‟esprit digne d‟être honoré est la vrai lumière et c‟est lui
qui produit la lumière perceptible par les sens, et il est la gloire qui resplendit partout‟. 21

2.4.3.1. Didyme a également recouru aux événements salvateurs de l‟Ancienne Alliance, afin
de prouver le rôle de l‟eau, qui, avec la force de l‟Esprit Divin, a réalisé le salut du peuple
d‟lsraél. Ces événements contenaient, en même temps, la préfiguration du rôle de l‟eau
baptismale dans le salut de l‟humanité. Mais, il a aussi cité les textes prophétiques préfigurant
l‟eau du baptême
«C‟est pourquoi les psaumes disent : «Car la lumière fait connaître tes ordres sur la terre «. A
ce sujet, le psaume 28 enseigne ceci : «La voix du Seigneur sur les eaux, le Dieu de gloire a
tonné : Dieu sur beaucoup d‟eau», et dans le psaume 76 : «La voix de ton tonnerre était dans
le tourbillon, tes éclairs ont brillé pour le monde; la terre a vu et elle a été ébranlée». Car les
eaux représentent le baptême, où est fait par les prêtres comme les psaumes le chantent, un
travail important; le tonnerre représente la grâce du baptême qui s‟étend partout et qui est
accueillie avec crainte; la roue représente la vie instable et étonnamment diverse; les éclairs
indiquent la beauté spirituelle que les illuminés, c‟est-à-dire, les baptisés, ont en présence de
Dieu; le tremblement de terre indique le mouvement rapide de l‟humanité vers la
connaissance de Dieu» 22
2.4.3.2. Le baptême de Notre-Seigneur constitue un élément institutionnel pour le baptême
chrétien, car il est le point fondamental
«Car, tandis que, après l‟incarnation, le Seigneur était baptisé, tandis qu‟il tuait le dragon
existant dans les eaux, qui retenait le Jourdain avec sa bouche, comme Job le raconte de façon
énigmatique; tandis qu‟il lavait nos souillures et faisait partir l‟ancien péché et que par-dessus
les serpents, les scorpions, et toute puissance de l‟ennemi, il nous faisait marcher et nous les
faisait fouler aux pieds; et tandis qu‟il enseignait à tous que la régénération est le salut pour
les hommes, l‟Esprit-Saint était présent de même que le Père ... C‟est pourquoi, renouvelés
par le baptême, nous jouissons de la familiarité de Dieu, autant que nos forces nous le
permettent, comme l‟a dit quelqu‟un «autant qu‟une race mortelle peut être égale à Dieu «. Et
Pierre enseignant que le baptême est divin par ce que l‟Esprit-Saint, par lequel nous sommes
régénérés, est Dieu, a proclamé la doctrine catholique dans la première épître catholique en
ces termes : «engendrés de nouveau d‟une semence non point corruptible, la parole de Dieu
vivant et permanent» (I P. 1, 23). Car il révérait celui qui prescrit dans l‟Évangile selon Marc :
«Allez dans le monde entier, proclamez l‟Évangile à toute la création. Celui qui croira et sera
baptisé sera sauvé, celui qui ne croira pas sera condamné» (Mc. 16, 16). Quelle est cette
proclamation? «Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du
Père et du Fils et du Saint-Esprit». Paul observant cela a écrit «Que la grâce de notre Seigneur
Jésus-Christ, l‟amour de Dieu le Père, et la communion de l‟Esprit-Saint soient avec vous
tous» (II Co. 2, 13- 14). Cette communion spirituelle, les épîtres catholiques elles aussi
l‟avaient nommée ainsi auparavant s «Afin que vous deveniez participants de la divine nature
«
2.4.3.3. En parlant des événements de la sortie d‟Égypte, en tant que le type complet de l‟acte
baptismal comme une réalisation salvatrice dans la Nouvelle Alliance, Didyme mit en relief le
rapport entre l‟eau et l‟Esprit
«Car si, d‟après Paul, nous sommes baptisés „dans la mort du Christ, et dans le Christ‟ c‟est
justement que l‟eau est nommée avec l‟Esprit; en effet, l‟eau et le sang ont coulé en même
temps du flanc du Sauveur, comme l‟ont su la lance et le soldat. En outre Paul a écrit aux
Corinthiens «tous ont mangé le même aliment spirituel et tous ont bu le même breuvage
spirituel ; ils buvaient en effet à un rocher spirituel qui les accompagnait, et ce rocher, c‟était
le Christ» (I Go. 10, 3-4); et encore «Tous ont été abreuvés d‟un seul esprit»; et aux Hébreux :
«Il est impossible, en effet, pour ceux qui ont une fois été illuminés, qui ont goûté au don
céleste, qui sont devenus participants de l‟Esprit-Saint et qui ont goûté la belle parole de
Dieu» (6, 4-5), car l‟Esprit-Saint a été appelé le Verbe de Dieu le Père. Mais s‟il en est ainsi,
on comprend de façon appropriée dans l‟eau le Christ et l‟Esprit-Saint, et jamais le Christ et
l‟Esprit-Saint n‟habitent en aucun homme sans l‟eau du baptême ,,
2.4.3.4. Didyme a saisi que la transformation de l‟eau en vin par Notre-Seigneur est une
allusion mystique aux eaux baptismales qui, par la force du Saint-Esprit, deviennent les eaux
du salut
«Quant à moi, je pense donc que pour cette raison aussi l‟eau a été changée en vin, et en ce
qui était meilleur que le vin, par le Christ, et qu‟il a fait naître la joie au repas nuptial, car il a
voulu enseigner de façon cachée et mystique que lui- même a transformé l‟eau par l‟usage
immortel du baptême et il a complété ce qui manquait à la foi des hommes par le baptême
avec l‟Esprit divin et en accord avec Dieu le Père. Car les justes ont, à grand-peine, atteint à
peine l‟aube de ce baptême qui nous a été donné par l‟arrivée et la manifestation du Fils et de
l‟Esprit de Dieu, à cause de la connaissance de ces substances immortelles. Car la piscine de
la Trinité est un atelier pour le salut de tous les hommes fidèles; et elle libère ceux qui s‟y
lavent de la morsure du serpent et elle devient la mère de tous par l‟Esprit-Saint, en restant
vierge ,,25
2.4.3.5. Didyme a insisté sur les témoignages des critures, dans le chapitre 14 du deuxième
livre de Trinitate. Ces témoignages sont des arguments décisifs pour bien affirmer le lien
intime et indissoluble entre l‟eau et l‟Esprit- Saint. C‟est donc le Saint-Esprit qui rend
toujours l‟eau du baptême efficace Mais il est temps maintenant, puisque, des témoignages
des Écritures je rassemble ceux qui se rapportent à l‟Esprit divin et au baptême immortel,
autant que je le pourrai, avec ceux tirés de l‟Ancien Testament. Mais je commencerai un peu
plus haut. Comme la Trinité indivisible et inexprimable prévoyait de toute éternité la faiblesse
et la fragilité du genre humain, elle fit sortir du néant une substance humide, remède pour les
hommes et elle prépare la guérison à obtenir par les eaux. Ainsi, il est établi que, lorsque
l‟Esprit planait sur les eaux, il les avait sanctifiées dès ce temps-là et leur avait donné une
force vivifiante et la fécondité ... C‟est pourquoi, que le baptême ait lieu avec n‟importe quelle
eau indistinctement, même dans la mer, si une nécessité soudaine le réclame, car la nature des
eaux est unique et elle a été sanctifiée dans
son ensemble» 26
2.4.3.6. Ensuite, Didyme explique derechef la signification du Jourdain. Il importe de rappeler
que le mot Jourdain désigne dans l‟glise copte les fonts baptismaux
«Le Jourdain désigne le baptême immortel; car celui qui avait fait le Jourdain a été jugé digne,
à cause de nous, d‟être baptisé dans le Jourdain. Car le fait que le fer surnageait dans l‟eau et
qu‟il parvenait à celui qui l‟avait perdu signifiait que, par le baptême, nous sommes élevés
vers la hauteur céleste, que nous recevons la grâce d‟autrefois et que nous retrouvons notre
ancienne patrie. Ces mots „Exalte-toi‟ et ceux-là : „Il étendit la main et pris‟ signifient qu‟il
nous faut savoir que celui qui accède au baptême doit croire et exalter, c‟est-à-dire, glorifié de
la façon qui a été prescrite par la loi et la formule du baptême, et qu‟il doit maintenant tendre
avec raison vers Dieu ses mains qu‟autrefois, par la raison commune de l‟union naturelle avec
Adam, il jeta sans raison dans la plante de vie. Si quelqu‟un, refusant cela et rejetant ce que
nous avons dit, nie que ce passage des Écritures annonce le baptême, on peut à bon droit, lui
demander quelle est l‟utilité de telles paroles et d‟un tel récit, et ce que le saint écrivain a en
vue lorsqu‟il a écrit cela
2.4.3.7. L‟action divine sur la nature comme les eaux dans l‟Ancienne Alliance constitue un
point central de la typologie baptismale. Et voilà que Didyme a vu le mystère du baptême
dans le
renouvellement de l‟eau de la source à Jéricho, par Josué, après que le peuple de Dieu eut
passé le Jourdain
«Et lorsque le même prophète a rendu l‟eau de la source qui était à Jéricho douce et féconde,
d‟amère et stérile qu‟elle était, et que, jetant du sel et de l‟eau dans une nouvelle hydrie, puis
de celle-ci dans l‟eau de la source, il a dit : «Le Seigneur a dit ceci : „je guéris ces eaux‟ «, il a
annoncé, par le renouvellement de l‟hydrie et de l‟eau, la piscine de la nouvelle naissance; par
le sel (il a annoncé) la foi et l‟avantage que nous en recevons; par l‟eau, qui de sans qualités
qu‟elle était, a été faite féconde et douce pour tous, il a annoncé que ceux qui accèdent au
baptême se dépouillent des tuniques de l‟ancienne tristesse, déposant leurs fardeaux, revêtent
le don de la nouvelle grâce et jouissent de la communauté et de l‟adoption en tant que fils de
l‟Esprit de salut. En outre, il semble que le même prophète a enseigné à l‟avance les richesses
ineffables des eaux du baptême et leur propitiation, et qu‟il a indiqué en même temps que la
providence universelle de l‟Esprit-Saint s‟étend à tous ceux qui se convertissent et à toutes les
vies humaines, si bien qu‟aucun de ceux qui ne veulent pas ne sera rejeté ,,25
2.4.3.8. Didyme a poursuivi sa typologie par l‟évocation de la piscine de Béthesda à
Jérusalem. li a montré la différence entre l‟image; entre la piscine de Béthesda et la vérité le
baptême. Il est vrai que l‟image porte elle aussi une réalité, mais déterminée. Mais la réalité,
qui est la piscine baptismale de la nouvelle alliance, implique une réalité infinie,
continuellement. Didyme a aussi affirmé très fortement les divers aspects de l‟effet du
baptême, mettant l‟accent sur la guérison de l‟être humain de toutes les maladies du péché,
apportée une seule fois par le baptême du salut
«Nous découvrirons d‟autre part, outre ce que nous avons déjà rappelé, qu‟il existait autrefois
à Jérusalem une piscine, appelée en hébreu Béthesda, dont personne ne nie qu‟elle était
l‟image du baptême, mais qu‟elle n‟était pas la vérité. Car l‟on considère comme image ce qui
demeure un temps, mais vérité ce qui demeure toujours. Pour cette raison, mue par l‟ange qui
était dans la piscine, l‟eau guérissait la maladie du corps, mais pas de l‟âme, une seule fois par
année, et seulement chez celui qui descendait le premier dans la piscine. Mais le baptême
authentique, après l‟apparition, ou l‟arrivée manifeste, du Fils et de l‟Esprit-Saint, libère
quotidiennement, ou plutôt à chaque heure, pour parler plus justement, continuellement, tous
ceux qui descendent dans la piscine et de tout péché, pour l‟éternité. Et l‟on découvre une
seule guérison pour des maladies nombreuses, diverses, irrégulières et difficiles à soigner, tant
spirituelles que corporelles; et plus aucun des anciens maux ou péchés, soit intérieurs, soit
extérieurs, n‟accompagne désormais les baptisés. En outre, ce baptême rend tous les gens, par
sa grâce, frères premiers-nés et nouveau- nés, sans même excepter ceux qui sont nés
récemment ou qui sont avancés en âge. Et l‟ange lui-même qui troublait l‟eau était le
précurseur de l‟Esprit-Saint. Et, d‟après sa ressemblance avec cet ange, Jean lui aussi a été
appelé l‟ange du Seigneur et a été fait précurseur du Seigneur, et a baptisé dans les eaux. ,,29
2.4.3.9. Didyme passe à un autre sujet très important l‟onction d‟Aaron par Moïse. Cette
onction a eu lieu après qu‟Aaron eut été lavé par l‟eau. Cela représente aux yeux de Didyme
la préfiguration de tous les gestes baptismaux, ce qui nous permet de voir clairement le lien
indubitable entre l‟eau et l‟Esprit
«Et l‟onction dont il a été oint par Moïse et en outre tous ceux aussi qui ont été oints par la
corne sacerdotale, et qui, d‟après cette onction ont été appelés : christi‟, c‟est-à-dire, oints, elle
portait le type de Ponction sanctifiée que nous avons reçue. Car même si corporellement elle
coule, elle est cependant utile spirituellement. En effet, en même temps que la foi en la
bienheureuse Trinité vient dans notre front, en même temps que le baptême a été reçu et que
l‟onction nous a fortifiés, aussitôt, dis-je, on découvre que la Trinité est, par nature,
dispensatrice de biens; aussitôt elle vient à nous; au même moment, les esprits impurs
s‟éloignent et les passions corporelles de tout genre l‟éloignent de nous, toutes les fautes se
dispersent, nos noms sont inscrits dans les livres ineffaçables et l‟on nous en dispense les
biens célestes. Si bien que la Trinité elle-même, parce qu‟elle est indiciblement empressée et
prévoyante et qu‟elle veut avoir, dans toutes les bonnes choses, le premier rang, prévient
d‟elle- même un tel projet qui est le nôtre, et prend l‟initiative. Et pour parler brièvement et
garder le respect qu‟il faut montrer envers la vérité devant l‟ombre, l‟image même du baptême
illuminait toujours les Israélites de ce temps et les sauvait et elle montrait qu‟elle était le salut
conféré en commun par la Trinité consubstantielle, comme Paul, qui connaissait la loi, l‟a
écrit dans la première épître aux Corinthiens : „Car je ne veux pas que vous l‟ignoriez frères :
nos pères ont tous été sous la nuée, tous ont passé à travers la mer, tous ont été baptisés en
Moïse dans la nuée et dans la mer, tous ont mangé le même aliment spirituel et tous ont bu le
même breuvage spirituel; ils buvaient en effet à un rocher spirituel qui les accompagnait, et ce
rocher, c‟était le Christ‟ (10, 1-4). Et ainsi prophétise Ezéchiel „Je répandrai sur vous une eau
pure, et vous serez purifiés de tous vos péchés. Je mettrai mon esprit en vous et vous serez
mon peuple, et moi je serai votre Dieu‟ (36, 25); David „Tu m‟aspergeras avec l‟hysope, et je
serai pur; tu me laveras, et je serai plus blanc que neige‟ (Ps. 50, 9). Car „l‟aspersion avec
l‟hysope‟ désigne la purification juive, dont l‟habitude s‟est maintenue jusqu‟à nos jours chez
les Juifs; mais lorsqu‟il dit „plus blanc que neige‟, il parle de l‟illumination des chrétiens, qui
est le baptême. Isaïe dit : „Seront appelés saints tous ceux qui sont inscrits pour la vie à
Jérusalem; car le Seigneur lavera la saleté des fils et des filles et il purifiera le sang répandu
au milieu d‟eux par le souffle du jugement et le souffle de l‟incendie‟. Et Pierre, pour montrer
dans la première épître que si, autrefois, le baptême qui était dans l‟ombre sauvait, à plus forte
raison ce baptême, qui est dans la vérité, nous rend immortels et nous divinise, a écrit ceci „le
baptême qui est son image et vous sauve maintenant, ce n‟est pas l‟enlèvement d‟une
souillure charnelle, mais l‟engagement à Dieu d‟une bonne conscience par la résurrection de
Jésus-Christ, lui qui, passé du ciel, est à la droite de Dieu, après s‟être soumis les anges, les
dominations et les puissances‟ (3, 21-22). L‟engagement à Dieu‟ désigne la profession de foi
que nous faisons lorsque nous convenons que nous sommes baptisés dans le père, le Fils et
l‟Esprit-Saint, nommé à côté de Dieu. Donc, lsaïe crie à ceux qui ne croient pas en
„EspritSaint, et donc n‟auront pas la participation à l‟héritage à venir : „Il y a, dit-il, un
héritage pour ceux qui honorent Dieu, et vous serez les justes, dit le Seigneur. Vous tous qui
avez soif venez vers l‟eau, même si vous n‟avez pas d‟argent, venez, achetez et mangez,
achetez sans argent, sans payer, du vin et de la graisse‟ (55, 1). L‟eau désigne l‟Esprit-Saint et
les flots de sa piscine. On désignait alors par le nom de graisse et de vin ce qui faisait partie de
l‟exposition des Juifs; mais maintenant l‟or désigne ainsi la divine communion du corps et du
sang du Seigneur, que nous achetons, en même temps nous recevons un bienfait. Quant au fait
que par le mot „eau‟ sont désignés l‟Esprit-Saint et les eaux du baptême lui-même, Jean en
témoigne, lorsqu‟il fait dire au Seigneur „Celui qui croit en moi, selon le mot de l‟Ecriture, de
son sein couleront des fleuves d‟eau vive‟ (7, 38). Et il a aussitôt ajouté „Il parlait de l‟Esprit
que devaient recevoir ceux qui avaient cru en lui‟ (7, 39). Quant au fait que nous serons traités
avec justice gratuitement, à cause de la bonté extrême de la Trinité, cette parole de Paul aux
Romains le montre : „Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu; et ils sont justifiés
par la faveur de sa grâce en vertu de la rédemption accomplie dans le Christ Jésus‟, estimant
que ceux qui ont été jugés dignes de cette gratification sont heureux, le Seigneur dit à ses
disciples, chez Luc „Heureux les yeux qui voient ce que vous voyez. Car je vous dis que
beaucoup de prophètes et de rois ont voulu voir ce que vous voyez et ne l‟ont pas vu, entendre
ce que vous entendez et ne l‟ont pas entendu‟. Et nous, qui sommes rendus spirituels, non
seulement nous voyons et entendons cela, mais encore nous sommes illuminés gratuitement
par l‟Esprit-Saint et nous jouissons de cela, tandis que nous avons part au corps du Christ et
que nous goûtons la source immortelle
2.5. Cyrille d‟Alexandrie (+ 444)
2.5.1. Saint Cyrille, lui aussi comme Didyme, a mis l‟accent sur le geste de Moïse, lavant
Aaron et les Lévites avant que ces derniers reçoivent l‟onction pour commencer leur service
religieux. Il a estimé que ce lavement ne concernait que la chair, à la différence du baptême de
la Nouvelle Alliance, qui a le pouvoir d‟opérer un changement radical dans la nature même de
l‟homme. Ce pouvoir du baptême consiste dans la puissance agissante de « l‟Esprit-Saint et
du feu»
«Car Dieu a dit quelque part au prêtre Moïse „Prends les Lévites du milieu des fils d‟Israèl,
purifie-les, et procède ainsi à cette purification asperge-les de l‟eau de la purification et le
rasoir viendra sur tout leur corps et ils laveront leurs vêtements, et ils seront purs‟ (Nomb. 8,
7ss). Le très sage Paul a montré par ces paroles de quelle nature serait l‟eau de la purification
„Si le sang des boucs et des veaux, les cendres d‟une génisse, répandus sur des gens souillés
sanctifie en vue de la purification de la chair, combien plus le sang du Christ?‟ (Héb. 9, 13-
14). Donc, la loi produit la purification charnelle par l‟eau de purification, le Christ par le
baptême, nettoie toutes les souillures de l‟âme. Car nous avons été baptisés par l‟Esprit-Saint
et le feu qui fait fondre en nous chaque sorte de vice et le dissout, d‟une certaine façon, et, en
tant que matière inutile, la consume comme des déchets. Car tel est le travail du feu. Le
bienheureux Paul fait savoir cela clairement en disant : „Par sa foi en l‟avertissement divin,
Noé a préparé l‟arche pour le salut de sa maison‟ (Héb. 11, 7), dans laquelle peu de choses,
c‟est-à-dire, huit âmes, ont été sauvés par l‟eau : „Le baptême, qui est son image, nous sauve
maintenant, lui qui n‟est pas la déposition des souillures de la chair, mais l‟interrogation, vers
Dieu, d‟une bonne conscience‟ (I P. 3, 20-21). Il avertit le peuple juif de faire cela en disant :
„Lavez-vous, soyez purs‟, c‟est- à-dire, lavez la tache, en ayant comme justificateur par sa
clémence et sa bonté celui qui a été outragé par vous. Car nous voyons que le divin Pierre les
blâme parce qu‟ils ont tué le principe de la vie et qu‟ils ont demandé qu‟on leur donne un
homicide, à savoir Barabbas. Celui-ci aussi les pousse à la pénitence; car il dit: Et maintenant,
frères, je sais que vous avez agi par ignorance, ainsi que vos chefs. Repentez-vous donc, et
que chacun de vous soit baptisé au nom de votre Seigneur Jésus-Christ, et vous recevrez le
don de l‟Esprit-Saint. Car les promesses sont pour vous et pour vos fils‟ (Ac. 2, 38-39) «.3‟
2.5.2. Saint Cyrille a, d‟autre part, souligné le rôle principal du Saint-Esprit, qui a été annoncé
dans l‟Ancienne Alliance par „le feu «. Pour Cyrille, la présence de l‟Esprit et du feu est
requise pour enlever «les taches des âmes
Le baptême, dit-il, offre à l‟homme la possibilité d” exister par la sanctification «, à l‟encontre
du sens du péché qui a amené la nature humaine «à l‟anéantissement et à la mort»
Il a dit encore : Il vous baptisera dans l‟Esprit et dans le feu‟ (Mt. 3, 11). Car nous n‟avons pas
été baptisés par un feu sensible, mais par le Saint-Esprit, qui comme un feu enlève les taches
des âmes; c‟est pourquoi on a écrit au sujet du Christ : „Le voici qui entre lui-même comme le
feu d‟une fonderie et comme l‟herbe de ceux qui lavent, et il s‟assiera fondant et purifiant
comme l‟argent et comme l‟or‟ (Mt. 3, 2-3). Donc, le feu de l‟autel ne s‟éteint pas; car
l‟Esprit-Saint reste dans le Christ même s‟il est en lui selon la nature, en tant qu‟il se conçoit
et est Dieu. La loi dit aussi que le feu est le propre de l‟autel; car bien que le Fils unique ait
été fait homme et que par cette manière d‟être qui convient à la nature humaine on l‟ait dit
ayant part à l‟Esprit, l‟Esprit est cependant de lui et en lui et il est propre à lui. Si quelqu‟un
voulait faire dèriver ce qui est exposé à cet endroit sur quiconque est sanctifié dans le Christ,
pour que celui-là aussi ait à l‟esprit l‟autel divin, ce qui suit sera utile; car il convient que les
hommes sacrés qui ont décidé leur vie au Christ soient brûlants et bouillonnants par l‟Esprit,
et que cela soit perpétuellement, et n‟en viennent pas, par les plaisirs terrestres, à
l‟anéantissement et à la mort, mais plutôt à exciter, par la sanctification, l‟esprit vers l‟amour
de Dieu et la recherche de la vertu ,,32
2.5.3. Dans le commentaire In Joannis Evangelium, saint Cyrille ne cesse d‟insister sur la
différence entre l‟ombre et la lumière en parlant du baptême de Jean-Baptiste par rapport au
baptême de Jésus-Christ. Il importe ici de rappeler la parole de saint Cyrille proclamant que le
Seigneur est devenu pour nous «Le modèle»: c‟est Lui qui a fondé la route du salut le
baptême» de l‟eau et de l‟Esprit par lequel nous obtenons la rémission des péchés et avons
part à la nature divine par la participation au Saint-Esprit.
Point de meilleure analyse théologique que les paroles de saint Cyriile, qui méritent d‟être
citées intégralement, tant elles sont pertinentes
a. «C‟est de façon utile que le bienheureux Baptiste dit cela à ses disciples. En effet, comme
ils voyaient que lui-même se reconnaissait inférieur au Sauveur par la gloire, et qu‟ils étaient
offensés de cela (c‟est pourquoi ils étaient venus vers lui, disant : „Rabbi, celui qui était avec
toi de l‟autre côté du Jourdain, celui à qui tu as rendu témoignage, le voilà qui baptise, et tous
viennent à lui‟ (Jn. 3, 26), iI était nécessaire que l‟inspiré de Dieu écarte le mécontentement et
mette en ses disciples la compréhension des choses nécessaires; il explique la supériorité du
Sauveur sur toutes choses et il enseigne rien moins que la cause pour laquelle tous affluent
vers lui et abandonnant le baptême par l‟eau, se retirent vers un baptême plus divin et plus
parfait, celui qui a lieu par l‟Esprit-Saint».
b. «Donc, un débat s‟étant élevé parmi les disciples de Jean avec un juif, au sujet de la
purification, chaque partie défendait avec ardeur son opinion. Car les disciples, défendant leur
maître, soutenaient énergiquement que son baptême l‟emportait sur les ablutions légales et les
purifications symboliques des Juifs. Ils en voulaient pour preuve que beaucoup de gens
allaient vers eux après avoir abandonné les anciens rites. Les Juifs, de leur côté, comme ils
étaient entraînés la tête la premiére par les discours de leurs adversaires et étaient écrasés par
la force de la vérité ou l‟élan des eaux, sont contraints malgré leur avis et contre leur gré de
reconnaître que le baptême du Christ l‟emporte de beaucoup et ils faisaient triompher cette
idée en employant les mêmes raisons pour la démontrer et ils se dressaient contre leurs
vainqueurs avec des arguments semblables : car beaucoup plus de gens allaient vers le Christ
que vers Jean; bien plus, disaient les Juifs, tous accouraient vers lui».34
c. «Il compare le saint Baptiste à une lampe qui, autant qu‟il peut convenir à un homme, a lui
devant l‟arrivée du Christ, mais qui cependant na pas employé sa propre lumière; car la
lumière dans la lampe ne lui est pas propre, mais elle vient de l‟extérieur et est empruntée. Il
est permis de penser que l‟illumination chez les saints par le Christ dans l‟Esprit est aussi de
cette sorte. C‟est pourquoi eux-mêmes pensant et faisant des choses très généreuses,
confessent eux-mêmes cela : „De sa plénitude nous avons tout reçu‟ (Jn. 1, 16). Car le Fils
unique est lumière, c‟est-à-dire, l‟essence du Père; car la créature a part à lui et quiconque est
doué du pouvoir de raisonner et de juger est en quelque sorte un vase formé remarquablement
par Dieu, cet architecte très sage de l‟univers, pour qu‟il puisse être rempli de la lumière
divine «.
d. «Vraiment, le bienheureux Baptiste était grand, et très renommé en toute vertu et à ce point
poussé par la justice, autant qu‟un homme peut l‟être, que personne ne lui était supérieur.
Mais, tel qu‟il était, il questionnait cependant le Christ, disant : „C‟est moi qui doit être
baptisé par toi, et toi tu viens à moi?‟ (Mt. 3, 14). Tu vois comment, alors qu‟il est parfait
autant qu‟il est possible à des hommes et des gens nés de femmes, il demande cependant à
être en quelque sorte régénéré et restauré par l‟Esprit-Saint? Tu vois comment il se dit
inférieur aux régénérés lorsqu‟il dit qu‟il a besoin de la régénération? Car si le baptisé n‟était
pas supérieur, pourquoi était-il nécessaire qu‟il demande à être baptisé? Et s‟il savait qu‟il
serait supérieur après avoir reçu le baptême, pourquoi n‟attribue-t-il pas la première place en
dignité à ceux qui sont déjà baptisés? Le Christ dit que le plus petit du royaume des cieux est
plus grand que Jean lui-même, c‟est-à-dire, que celui qui a été récemment baptisé et ne s‟est
pas encore distingué par ses actes, par ceci seulement que le bienheureux Baptiste a été
engendré par une femme, mais que le baptisé est né de Dieu, selon les Écritures, et il a part à
la nature divine, ayant l‟Esprit-Saint lui-même qui habite en lui, et il est le temple de Dieu
,,•36
2.5.4. Saint Cyrille, dans son commentaire In Lucam, a fait savoir que le renouvellement
apporté par l‟incarnation du Christ ne vise pas seulement les humains, mais aussi la création
tout entière.
«Mais après que toutes choses ont été rendues nouvelles dans le Christ et que nous avons reçu
la régénération par l‟Esprit et l‟eau, nous ne sommes plus des fils de chair et de sang, mais
plutôt nous appelons Dieu „Père‟, parce que du moment où nous sommes parés d‟honneur et
que nous avons atteint la gloire de l‟adoption, nous avons part à la nature par la participation
du Saint-Esprit‟.
C‟est pourquoi, saint Cyrille répond à ceux qui s‟opposent au baptême croyant toujours à un
simple baptême, purement rituel. En quoi réside l‟essence du baptême? Quelle est sa nécessité
pour le salut? Et pouquoi? Saint Cyrille a répondu en montrant l‟action du Saint-Esprit dans le
baptême
Ce feu est salutaire et utile, par lequel nous tous, qui étions sur la terre glacés et morts à cause
du péché et de l‟ignorance du Dieu qui existe par nature et vraiment, nous sommes de
nouveau éveillés à la vie religieuse; nous sommes rendus bouillonnants par l‟esprit, selon la
parole du bienheureux Paul; en outre, nous obtenons la participation de l‟Esprit-Saint qui
habite en nous à la façon du feu; car nous avons été baptisés par le feu, le Saint-Esprit. Car
c‟est l‟habitude de la divine Ècriture d‟appeler du nom de „feu‟ l‟enseignement divin et sacré
ainsi que la force et l‟action de l‟Esprit-Saint. Car l‟un des saints prophétes a dit, au suiet de
notre Sauveur universel, le Christ : „Et soudain il entrera dans son sanctuaire, le Seigneur que
vous cherchez et l‟ange de l‟alliance que vous désirez, le voici qui vient, dit le Seigneur. Qui
soutiendra le iour de son arrivée? Qui supportera de le voir? Car il est comme le feu du
fondeur et comme la lessive des blanchisseurs. Il siégera faisant tondre et nettoyant comme
l‟argent et comme l‟or‟. Et il nomme temple le corps immaculé et saint pris grâce à la sainte
Vierge par le Saint-Esprit dans la puissance du Père>‟. 38
Par ailleurs saint Cyrille a noté que le baptême était l‟acte par lequel l‟homme obtient la
purification de ses péchés, devenant le temple saint de Dieu‟ et participant ainsi, par l‟action
du Saint-Esprit, à la nature divine
„Il vous rencontrera, dit-il, l‟homme portant une amphore d‟eau‟. Peut-être cette parole
désigne- t-elle aussi quelque doctrine cachée. Car là où l‟eau pénètre (il est clair que c‟est
l‟eau du saint baptême), le Christ l‟y verse, car le baptême purifie de tout péché, si bien que
nous devenons le temple saint de Dieu et que nous avons part à sa nature divine par la
participation du Saint- Esprit».39
Dans sa controverse avec l‟empereur Julien, Julianum, saint Cyrille a abordé deux questions
a) Quelle est la relation entre la foi et le baptême?
b) Est-ce que le baptême est capable de guérir les maladies du corps en même temps que
l‟âme de l‟homme?
Il sied de laisser saint Cyrille répondre à ces questions
«Puisque le sage (dont il a été question plus haut dans le texte) ignore tout à fait la puissance
du saint baptême, il se moque des choses les plus saintes et dit que ceux qui croient au Christ
sont nettoyés, ayant obtenu l‟eau qui a le pouvoir de laver les taches. Il ajoute à cela d‟autres
fables insignitiantes et qui conviennent à une vieille femme. Il dit que l‟eau du baptême est
absolument inutile à ceux qui souffrent de maladies et que nous déraisonnons, nous qui
pensons et disons qu‟elle efface les souillures des âmes. Mais je te réponds, homme
remarquable, que nous ne recevons en aucune façon le baptême salutaire pour soigner les
maladies du corps, et que le mystère du Christ ne concerne pas, comme tu le penses ce qui
peut être perçu par la sensation ou la vue. Donc, celui qui a accompli sans peine des choses si
remarquables et a introduit dans les eaux elles-mêmes la force de sa puissance, est-ce qu‟il ne
ferait pas connaître sa grâce, qu‟il donne par le saint baptême comme plus puissante que toute
maladie du corps? Mais nous soutenons qu‟elle nous a été donnée pour d‟autres usages. Car
par le seul examen des eaux on mesurera ce mystère, bien que Jean dise clairement et très
nettement à ceux qui venaient pour le baptême de pénitence : „Moi, je vous baptise dans l‟eau,
mais il vient après moi quelqu‟un qui est plus fort que moi, dont je ne suis pas digne de porter
les sandales; il vous baptisera dans l‟Esprit-Saint et le feu‟. A mon avis, il compare au feu la
puissance de l‟Esprit-Saint et la propriété de purifier qu‟il exerce en nous. Car de même que le
feu consume les ordures qui ont pu adhérer à des vases d‟argent, de même, ie le pense si la
force du Saint-Esprit a occupé notre âme à la manière du feu, elle nous libère de toute tache
spirituellement et divinement
CONCLUSION
Nous venons de constater que le souci de mettre en évidence le lien indivisible entre l‟eau et
l‟Esprit dans l‟acte baptismal ne date pas d‟aujourd‟hui, mais qu‟il a toujours été le centre des
préoccupations des Pères de „Église.
Nous espérons que cette contribution aidera à mieux comprendre ce qui se passe réellement
dans le baptême de l‟eau et de l‟Esprit, afin de percevoir les dimensions de l‟incarnation sur le
renouvellement et la restauration, non seulement des humains, mais aussi de la création tout
entière.

Notes :
(1) Les Pères de „Église d‟Alexandrie ont bien choisi la lecture de cet évangile pour le
sixième dimanche du Carême, dénommé le dimanche du baptême général «pour exprimer
l‟état de l‟homme né aveugle «, c‟est-à-dire, ignorant la connaissance de Dieu comme une des
conséquences du péché d‟Adam.
(2) Jean DANILOU, Bible et litrgie, Paris 1958, p. 98.
(3) CLÉMENT D‟ALEXANDRIE, Le Pédagogue I, trad. H-I. MARROU, M. HARL, Paris
1960; QUASTEN J., Initiation aux Pères de l‟Église, II, Paris 1956, pp. 12-49.
(4) Ibid., 6, 25: 1, 3; pp. 157-9.
(5) Ibid., 6,28:1; p. 163; 6,30:2; p. 167.
(6) ORIGÉNE, Hom. sur l‟Exode, introd. et trad.P. FORTIER et H. de LUBAC, Paris, 19 ;
QUASTEN J., Initiation aux Pères de l’Eglise, II, Paris 1956, pp.49-122 ; DANIELOU J.,
Origène, Paris 1948, pp.65-74.
(7) ORIGÉNE, Traité des Principes, introd. et trad. H. GROUZEL et M. SIMONETTI, Paris
1978, p. 147.
(8) Ibid., pp. 157-9.
(9) ORIGNE, Hom. sur saint Luc, trad. H. CROUZET, F. FOURNIER, P. PÉRICHON, Paris
1962, p. 295.
(10) Ibid., Fragm. 51 Lc., p. 499.
(11) Ibid., p. 349.
(12) ATI-IANASE D‟ALEXANDRIE, Contra Arianos I, P.G., t. 26, col. 82-83; De decretis
Nicaenae synodi, P.G., t. 25, col. 274-5.
(13) ATHANASE D‟ALEXANDRIE, De Trinitate etSpiritu sancto, P.G., t. 26, col. 1197.
(14) Le manichéisme a été fondé par Mani qui était né en l‟année 215-216 de l‟ère chrétienne.
Sa doctrine provient de la conception du dualisme et du gnosticime qui voient le monde divisé
en deux : le monde du corps qui est mauvais, et le monde des esprits, qui est bon. L. Bouyer
dit «Le trait principal en est un dualisme métaphysique radical, supposant un principe bon,
spirituel et lumineux dans une lutte sans fin avec un principe mauvais, matériel et obscur»
(Dict. Théol., p. 412).
(15) ATHANASE D‟ALEXANDRIE, Contra Arianos II, P.C., t. 26, col. 234-5.
(16) ATHANASE, D‟ALEXANDRIE, Lettre à Sérapion, trad. J. LEBON, Paris 1947, p. 137.
(17) Ibid., p. 188.
(18) Ibid., p. 193.
(20) P.G., t. 39, De Trinitate, Lib. Il, ch. 12, col. 667-670.
(19) L. DOUTRELEAIJ, Le «De Trinitate» est-il l‟oeuvre de Didyme l‟Aveugle? in RSR 45
(1957), pp. 514-557; L. BÉRANGEFI, Sur deux énigmes du «De Trinitate» in RSR 51
(1963), pp. 255-267; CPG, II, p. 111.
(21) Ibid., col. 669-682.
(22) Ibid., col. 683.
(23) Ibid., col. 683-687.
(24) Ibid., ch. 13, col. 690.
(25) Ibid., coi. 690-691.
(26) Ibid., ch. 14, col. 691-694.
(27) Ibid., col. 699.
(28) Ibid., col. 699.
(29) Ibid., col. 707-711.
(30) Ibid., col. 711-718.
(31) CYRILLE D‟ALExANDRIE, In Isaïm, Lib. I, orat. 1, P.G., t. 70, col. 40-41.
(32) CYRILLE D‟ALEXANDRIE, De Adoratione in Spintu et Veritate, Lib. Il, P.G., t. 68,
col. 821.
(33) CYRILLE D‟ALEXANDRIE, fl Joannis Evangelium, Lib. I, P.G., t. 73, coI. 272.
(34) Ibid., col. 289.
(35) Ibid., Lib. III, coI. 401.
(36) Ibid., Lib. V, col. 757-760.
(37) CYRILLE D‟ALEXANDRIE, comment. in Lucam, eh. III, y. 21; P.G., t. 72, ch. IV, col.
525.
(38) Ibid., col. 735.
(39) Ibid., col. 904.
(40) CYRILLE D‟ALEXANDRIE, contra Julianum, Lib.Vil, P.G., t. 76, coI. 877-879.

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