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Calcul des structures par

éléments finis
Antoine Legay
Maître de conférence
2011-2012
Cnam-Paris
Table des matières

I Approximation d’une fonction • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 1


I.1 Introduction 1
I.2 Approximation d’une fonction à une variable 1
I.2.1 Approximation de type Lagrange 1
I.2.2 Approximation de type Hermite 5
I.3 Approximation d’une fonction à deux variables 6
I.3.1 Choix d’une base d’approximation 6
I.3.2 Construction des fonctions de forme du triangle à 3 nœuds. 7
I.3.3 Approximation d’un champ de vecteurs 8
I.4 Construction d’un élément fini 9
I.4.1 Règles et propriété d’un élément fini 9
I.4.2 Elément fini de référence 11
I.4.3 Passage de l’élément physique à l’élément de référence 13

II Maillage éléments finis • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 15


II.1 Introduction 15
II.2 Maillage éléments finis 16
II.3 Fonctions de forme 17
II.4 Règles de construction d’un maillage 18

III Formulation variationnelle • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 19


III.1 Equations locales du problème de mécanique 19
III.2 Formulation variationnelle en déplacement 21
III.3 Théorème de l’énergie potentielle 23
ii

III.4 Notations de Voigt 25


III.4.1 Contraintes et déformations tridimensionnelles 25
III.4.2 Relation de comportement 26
III.4.3 Opérateur différentiel 26
III.4.4 Cas des contraintes planes 27
III.4.5 Cas des déformations planes 27
III.4.6 Cas d’un problème axisymétrique 28

IV Discrétisation par éléments finis • • • • • • • • • • • • • • • • • • 31


IV.1 Construction d’un élément fini 31
IV.1.1 Approximation du déplacement 31
IV.1.2 Expression des déformations 31
IV.1.3 Expression des contraintes 33
IV.1.4 Matrice de rigidité 33
IV.1.5 Forces extérieures généralisées 33
IV.1.6 Passage du repère local à l’élément au repère global 34
IV.2 Calculs au niveau de la structure 35
IV.2.1 Assemblage par matrice de localisation 35
IV.2.2 Résolution du problème discrétisé 36
IV.2.3 Modes de déplacement de solide rigide 37
IV.3 Structure d’un code de calcul 37

V Calcul au niveau élémentaire • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 39


V.1 Matrice de rigidité dans l’élément de référence 39
V.2 Intégration numérique 42
V.2.1 Cas unidimensionnel 42
V.2.2 Choix de l’ordre d’intégration : application au quadrangle 44
V.2.3 Critère de qualité du maillage 47

VI Eléments de structure • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 49
VI.1 Elément fini de barre 49
VI.1.1 Fonctions de forme 49
VI.1.2 Energie de déformation 51
VI.1.3 Matrice de rigidité en fonction des déplacements locaux 51
VI.1.4 Matrice de rigidité en fonction des déplacements globaux 52
VI.2 Elément fini de poutre 54
VI.2.1 Description de l’élément 54
VI.2.2 Energie de déformation 54
VI.2.3 Fonctions de forme 55
VI.2.4 Matrice de rigidité 56
VI.3 Elément fini de plaque 57
VI.3.1 Hypothèses de plaque 57
VI.3.2 Discrétisation d’un élément de Reissner-Mindlin 61
VI.3.3 Assemblage de plaques dans l’espace 63

VII Estimation des erreurs • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 65


VII.1 Lissage des contraintes 65
VII.2 Erreur et convergence 67
VII.2.1 Norme en énergie 67
VII.2.2 Ecriture de la formulation variationnelle 67
VII.2.3 Erreur en déplacement 68
VII.2.4 Taux de convergence 69
iii

VII.3 Estimateur d’erreur 70

VIII Analyse modale par E.F. • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 73


VIII.1 Formulation variationnelle du problème de dynamique d’une structure encastrée-
libre 73
VIII.2 Discrétisation 74
VIII.3 Etude des modes propres de vibration 74
VIII.4 Projection modale 75

IX Sous structuration • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 79
IX.1 Objectifs 79
IX.2 Méthode de Schur primale 79
IX.2.1 Principe 79
IX.2.2 Stratégie de résolution globale 82
IX.2.3 Généralisation à plusieurs sous-structures 82
IX.2.4 Calcul du complément de Schur 83
IX.3 Méthode de Schur duale 84
IX.3.1 Principe 84
IX.3.2 Discrétisation 85
IX.3.3 Couplage de maillages incompatibles 86

X Eléments finis étendus • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 87


X.1 Introduction 87
X.2 Déscription de l’interface 88
X.3 Discrétisation de la ligne de niveau 89
X.4 Enrichissement de la solution 89
X.5 Construction de l’élément fini enrichi 91
X.6 Intégration numérique de la matrice de rigidité 92
X.7 Erreurs introduites par l’enrichissement 92
I — Approximation d’une fonction

I.1 Introduction
Etant donnée une fonction u(M ) que l’on sait évaluer en tout point M , l’approximation
consiste à trouver une fonction ũ s’approchant au mieux de u.
L’approximation ũ est construite dans une base que l’on choisit, cette base d’approxi-
mation est souvent polynômiale dans le cas des éléments finis. Le nombre de termes de la
base, noté n, donne le nombre de points MI pour lesquels l’approximation ũ est égale à la
fonction u :

∀I de 1 à n, ũ(MI ) = u(MI ).

Le cas d’une fonction à une variable est d’abord traité (cas unidimensionnel), puis le
cas à deux variables (cas bidimensionnel) est étudié, la généralisation à trois variables (cas
tridimensionnel) étant triviale.

I.2 Approximation d’une fonction à une variable


I.2.1 Approximation de type Lagrange
On note u(x) la fonction que l’on cherche à approximer. Cette fonction prend les valeurs
uI(de 1 à n) aux n points (nœuds) d’abscisses xI(de 1 à n) (Fig. I.1). On souhaite approximer
cette fonction par un polynôme ũ(x) de degré n − 1 tel que

∀I de 1 à n, ũ(xI ) = uI .
2 Approximation d’une fonction

bc
uI
bc

ũ(x) bc
bc

bc
u(x)

x1 x2 xI xn

Figure I.1 – Approximation de u(x) par un polymôme ũ(x) de degré n − 1.

bc bc
1 1
N1 (x) N2 (x)

bc bc bc bc bc bc bc bc
x1 x2 x3 x4 x5 x1 x2 x3 x4 x5
bc bc
1 1
N3 (x) N4 (x)

bc bc bc bc bc bc bc bc
x1 x2 x3 x4 x5 x1 x2 x3 x4 x5

bc
1
N5 (x)

bc bc bc bc
x1 x2 x3 x4 x5

Figure I.2 – Polynômes de Lagrange de degrés 4 associés à 5 points.


I.2 Approximation d’une fonction à une variable 3

La fonction ũ(x) peut s’écrire sous la forme


n
X
ũ(x) = NI (x) uI
I=1

où NI (x) est un polynôme de degré n − 1 appelée fonction de forme du nœud I.


La fonction NI (x) possède la propriété de Kronecker, c’est à dire

NI (xJ ) = δIJ

ou encore, la fonction de forme NI (x) associée au nœud I (d’abscisse xI ) vaut 1 en ce nœud


et 0 aux autres nœuds (d’abscisses xJ ).
Preuve Ceci se vérifie facilement en explicitant la relation suivante :

n
X
ũ(xJ ) = NI (xJ ) uI = uJ .
I=1

Une telle fonction NI (x) peut être écrite comme un polynôme de Lagrange (Fig. I.2) :

ΠnJ=1,J6=I (x − xJ )
NI (x) = .
ΠnJ=1,J6=I (xI − xJ )

L’approximation ũ(x) construite est de degré n − 1. Elle est donc capable d’approximer
de façon exacte tous les polynômes de degré inférieur ou égal à n − 1. Pour le polynôme xk
d’ordre k ∈ [0, n − 1], cela s’écrit
n
X
NI (x) xkI = xk
I=1

Pour k = 0, on a alors
n
X
NI (x) = N1 (x) + N2 (x) + . . . + Nn (x) = 1
I=1

On dit que l’ensemble des fonctions de forme NI (x) forme une partition de l’unité : la somme
des fonction de forme fait 1. Pour k = 1, on a
n
X
NI (x)xI = N1 (x)x1 + N2 (x)x2 + . . . + Nn (x)xn = x
I=1

et ainsi de suite pour k = 2

N1 (x)x21 + N2 (x)x22 + . . . + Nn (x)x2n = x2

jusqu’à k = n − 1

N1 (x)x1n−1 + N2 (x)x2n−1 + . . . + Nn (x)xnn−1 = xn−1


4 Approximation d’une fonction

1 x
N1 (x) = 1 − l
x
N2 (x) = l

x
bc bc
0 l

Figure I.3 – Fonctions de forme d’un élément à 2 nœuds.

Dans ce cas, l’ensemble des fonctions de forme NI (x) est une partition de l’unité d’ordre
n − 1. Ceci peut s’écrire sous forme d’un système de n équations à n inconnues :
    
1 1 ... 1 N1 (x) 1
    

 x1 x2 ... xn   N2 (x)   x
   

     

 x21 x22 ... x2n 
  N3 (x)  =  x
   2 

 .. .. .. ..  
  ..   ...
  

 . . . .  .  


x1n−1 x2n−1 . . . xnn−1 Nn (x) xn−1
| {z }| {z } | {z }
=A =N (x) =b

Dans ce système, le vecteur N (x) est le vecteur des fonctions de forme et b est la base
polynomiale de l’approximation. La solution s’écrit

N (x) = A−1 b

Exercice I.1 Trouver les fonctions de forme d’un élément à 2 nœuds en prenant la base d’approximation
[ 1 x ] : par la méthode des polynômes de Lagrange et par la méthode de la résolution d’un système.
Solution :
1. Par les polynômes de Lagrange :
ΠnJ =1,J 6=I (x − xJ )
NI (x) =
Πn
J =1,J 6=I (xI − xJ )

avec n = 2, x1 = 0, x2 = l et I qui prend les valeurs 1 et 2.


x − x2 x−l x
N1 (x) = = =1−
x1 − x2 0−l l
x − x1 x−0 x
N2 (x) = = =
x2 − x1 l−0 l
2. Par la résolution d’un système :
         
1 1 N1 (x) 1 1 1 N1 (x) 1
= soit =
x1 x2 N2 (x) x 0 l N2 (x) x

La résolution de ce système donne


x x
N1 (x) = 1 − et N2 (x) =
l l
Les fonctions N1 (x) et N2 (x sont tracées sur la figure I.3.

Exercice I.2 Trouver les fonctions de forme d’un élément à 3 nœuds données sur la figure I.4 en prenant
la base d’approximation [ 1 x x2 ] sur l’intervalle [ −1 1 ] : par la méthode des polynômes de Lagrange
et par la méthode de la résolution d’un système. 
I.2 Approximation d’une fonction à une variable 5

bc N1 bc N3 bc
1.0
N2

0.5

bc bc bc
−1.0 −0.5 0.5 1.0

Figure I.4 – Fonctions de forme d’ordre 2 pour un élément unidimensionnel à 3 nœuds.

I.2.2 Approximation de type Hermite


Comme précedemment, on cherche un polynôme ũ(x) qui approxime u(x) tel que ũ(xI ) =
u(xI ) = uI pour les points x1 à xn . De plus, on souhaite que les dérivées jusqu’à l’ordre m
soient approximées de façons exactes :

ũ′ (xI ) = u′ (xI ) = u′I


ũ′′ (xI ) = u′′ (xI ) = u′′I
..
.
(m)
ũ(m) (xI ) = u(m) (xI ) = uI

Etant donné que l’on peut écrire n(m + 1) équations, le polynôme ũ(x) est de degré n(m +
1) − 1. L’approximation de Lagrange correspond à m = 0.
En choisissant n = 2 et m = 1 on construit les 4 fonctions de forme de l’élément de
poutre utilisant les hypothèses cinématiques d’Euler Bernoulli.
On prend x1 = 0 et x2 = L, on note u(x1 ) = u1 , u(x2 ) = u2 , u′ (x1 ) = θ1 et u′ (x2 ) = θ2 .
On cherche ũ(x) sous la forme :

ũ(x) = N1 (x)u1 + N2 (x)θ1 + N3 (x)u2 + N4 (x)θ2

Le polynôme ũ(x) étant de degré 2(1 + 1) − 1 = 3, sa base est [ 1 x x2 x3 ].


– si u(x) = 1 alors ũ(x) = 1 et u′ (x) = 0, u1 = 1, θ1 = 0, u2 = 1, θ2 = 0 ; on a :

N1 (x) + N3 (x) = 1

– si u(x) = x alors ũ(x) = x et u′ (x) = 1, u1 = x1 = 0, θ1 = 1, u2 = x2 = L, θ2 = 1 ; on


a :
N2 (x) + N3 (x)L + N4 (x) = x

– si u(x) = x2 alors ũ(x) = x2 et u′ (x) = 2x, u1 = x21 = 0, θ1 = 2x1 = 0, u2 = x22 = L2 ,


θ2 = 2x2 = 2L ; on a :
N3 (x)L2 + N4 (x)2L = x2

– si u(x) = x3 alors ũ(x) = x3 et u′ (x) = 3x2 , u1 = x31 = 0, θ1 = 3x21 = 0, u2 = x32 = L2 ,


θ2 = 3x22 = 3L2 ; on a :
N3 (x)L3 + N4 (x)3L2 = x3
6 Approximation d’une fonction

1.0 N1 1.0

0.5 0.5
N2
bc bc bc bc
0.5 1.0 0.5 1.0
1.0 1.0

0.5 0.5
N3

bc bc bc
N4 bc
0.5 1.0 0.5 1.0
Figure I.5 – Fonctions de forme d’Hermite de l’élément poutre d’Euler-Bernoulli pour L = 1.

Ces 4 équations s’écrivent sous forme d’un système à 4 inconnues :


    
1 0 1 0 N1 (x) 1
    
 0 1 L 1   N2 (x)   x 
   

  = 2 
 0
 0 L2 2L   N3 (x)   x 
   
0 0 L3 3L2 N4 (x) x3

La solution de ce système est

3 2 2 2 1
N1 (x) = 1 − 2
x + 3 x3 ; N2 (x) = x − x2 + 2 x3
L L L L
3 2 2 3 1 2 1 3
N3 (x) = 2 x − 3 x ; N4 (x) = − x + 2 x
L L L L

On remarque que N1 et N3 forment une partition de l’unité (N1 + N3 = 1) et que ces


2 fonctions vérifient la propriété de Kronecker. Les fonctions N2 et N4 s’annulent aux 2
nœuds, leurs dérivées aux nœuds est soit 0 soit 1. Ces fonctions sont tracées sur la figure
I.5.

I.3 Approximation d’une fonction à deux variables


I.3.1 Choix d’une base d’approximation
On note u(x, y) la fonction que l’on cherche à approximer. Cette fonction prend les valeurs
uI(de 1 à n) pour les n nœuds de coordonnés (xI , yI ). Il faut dans un premier temps choisir
une base d’approximation pour la fonction ũ(x, y). Il est utile d’utiliser le triangle de Pascal
explicité sur la figure I.6. On écrit 1 sur la ligne du haut, on complète ensuite la ligne du
dessous en multipliant par x vers la gauche et par y vers la droite chacun des termes de la
ligne du dessus.
Le choix de la base [ 1 x y ] contenant 3 termes conduit à un élément à 3 nœuds, c’est
à dire un triangle à 3 nœuds (T 3).
I.3 Approximation d’une fonction à deux variables 7

1 T3
Q9 1 x y
1
x y x y
xy 2
x xy y2
x2 y2 Q4
x3 x2 y xy 2 y3 1
x2 y xy 2
x2 y 2 x y
x2 y 2
×x ×y xy

1 T6
x y
2
x xy y2

Figure I.6 – Triangle de Pascal.

Le choix de la base [ 1 x y xy ] contenant 4 termes conduit à un élément à 4 nœuds,


c’est à dire un quadrangle à 4 nœuds. En ajoutant les termes [y 2 x2 y xy 2 x2 y 2 ] on obtient
le quadrangle à 9 nœuds.

I.3.2 Construction des fonctions de forme du triangle à 3 nœuds.


En suivant la même démarche que pour le cas unidimensionnel, les 3 fonctions de forme du
triangle à 3 nœuds peuvent être calculées en résolvant le système
    
1 1 1 N1 (x, y) 1
    
  N2 (x, y)  =  x 
 x x2 x3     
 1
y1 y2 y3 N3 (x, y) y

On peut résoudre ce système par la méthode de Cramer, il faut alors calculer les quantités
suivantes :    
1 1 1 1 1 1
   
2A = det 
 x1 x2 x3 
 2A1 = det 
 x x2 x3 

y1 y2 y3 y y2 y3
   
1 1 1 1 1 1
   
2A2 = det 
 x1 x x3 
 2A3 = det 
 x1 x2 x 

y1 y y3 y1 y2 y
où A est l’aire du triangle passant par les 3 nœuds, A1 est l’aire du sous-triangle M 23, A2
est l’aire du sous-triangle M 13 et A3 est l’aire du sous-triangle M 12 (Fig. I.7). La solution
du système s’écrit :

A1 A2 A3
N1 (x, y) = N2 (x, y) = N3 (x, y) =
A A A
8 Approximation d’une fonction

A1 =
3

A2 = A=
M 2

1 A3 =

Figure I.7 – Découpage du triangle en 3 sous-triangles.

N3
1 1
N1
1 N2
3 3 0 3
1
0
1 1 0 1
2 2
Figure I.8 – Fonctions de forme du triangle à 3 nœuds.

Il est évident que la propriété de kronecker est vérifiée : si M est sur le nœud I alors AI = A
et les 2 autres aires AJ6=I = 0. De plus la somme des fonctions de forme fait bien 1 car
A = A1 + A2 + A3 . Les fonctions sont tracées sur la figure I.8.

Exercice I.3 Trouver les fonctions de forme de l’élément tridimensionnel tétraèdre à 4 nœuds dont la
base est [ 1 x y z ].



Z
3

Z1
1


Y
Y1
2

X1 −

X 

I.3.3 Approximation d’un champ de vecteurs


On souhaite approximer le champ de vecteurs −

u . Dans le plan, le champ de vecteurs −

u (x, y)
possède deux composantes ux (x, y) et uy (x, y). On choisit le plus souvent la même approx-
I.4 Construction d’un élément fini 9

imation pour toutes les composantes du champ de vecteurs. C’est à dire que
n
X
ux (x, y) = NI (x, y)uxI
I=1

et
n
X
uy (x, y) = NI (x, y)uyI
I=1

où uxI et uyI désigne respectivement les valeurs de ux (x, y) et de uy (x, y) aux points (xI , yI )
pour lesquels on souhaite que l’approximation soit exacte. Ceci s’écrit pour le champ de
vecteurs : " # " Pn #
e ux (x, y) I=1 NI (x, y)uxI
u (M ) = = Pn = Ne qe
uy (x, y) I=1 NI (x, y)uyI

où Ne est appelèe la matrice des fonctions de forme de l’élément et q e est appelè le vecteur
contenant les inconnues aux nœuds.
Pour le triangle T 3, il vient par exemple
" #
e N1 N2 N3 0 0 0
N =
0 0 0 N1 N2 N3

et
q e = [ ux1 ux2 ux3 uy1 uy2 uy3 ]T

où uxI −

x + uy I −

y est la valeur du champ de vecteurs au nœud I. Une autre numérotation
fréquemment employée est
" #
N1 0 N2 0 N3 0
Ne =
0 N1 0 N2 0 N3

et
q e = [ ux1 uy1 ux2 uy2 ux3 uy3 ]T

Exercice I.4 Ecrire l’approximation d’un champ de vecteurs dans le cas tridimensionnel et pour l’élé-
ment tétraèdre avec →u (x, y, x) = ux →
− − y + uz →
x + uy →
− −
z . Expliciter la matrice des fonctions de forme ainsi
que le vecteur des inconnues nodales. Proposer deux numérotations. 

I.4 Construction d’un élément fini


I.4.1 Règles et propriété d’un élément fini
L’approximation dans un élément est construite à partir d’une base de fonction et s’appuie
sur des points (nœuds). Dans le cas général, on ne peut pas choisir les emplacements des
nœuds arbitrairement car cela peut conduire à une approximation inutilisable en calcul
par éléments finis. En effet, comme expliqué dans le chapitre suivant, les éléments étant
assemblés les uns aux autres dans un calcul mécanique, il faut respecter certaines règles :
– La propriété de Kronecker : la fonction de forme d’un nœud vaut 1 à ce nœud et 0 aux
autres ; cette propriété est vérifiée car on l’utilise dans la construction des fonctions
de forme.
10 Approximation d’une fonction

y y
1+α 3
1 N1
4
1
1 2 x 0 x
0 N4
1

N2 N3

Figure I.9 – Elément quadrangle dont les fonctions de forme ne s’annulent pas sur les bords.

– La compatibilité entre les éléments : les éléments doivent pouvoir s’assembler les uns
aux autres parfaitement sans discontinuité ni dans la géométrie ni dans l’approxima-
tion.
Afin d’illustrer ces règles, prenons l’exemple d’un quadrangle à 4 nœuds dont la base
d’approximation est [ 1 x y xy ] construit sur les 4 nœuds suivants : (0, 0), (1, 0), (1, 1 + α)
et (0, 1) (Fig. I.9).
Le système à résoudre pour trouver les fonctions de forme est :
    
1 1 1 1 N1 (x, y) 1
    
 0 1 1
0 
  N2 (x, y)
   x 
   
  =  
 0 0 1+α 1 
  N3 (x, y)
   y 
   
0 0 1+α 0 N4 (x, y) xy

La solution est
y
N1 (x, y) = (1 − x)(1 − y) ; N2 (x, y) = x(1 − ) ;
1+α
xy
N3 (x, y) = ; N4 (x, y) = y(1 − x) ;
1+α
Les fonctions de forme sont tracées sur la figure I.9. La fonction N1 devrait s’annuler sur
les bords opposés au nœud 1 (bords 3-4 et 2-3) afin d’éviter que ce nœud ait une influence
hors de l’élément, mais N1 ne vaut pas 0 sur le bord 3-4. La même conclusion apparait pour
la fonction N2 . Cet élément ne peut pas s’assembler avec d’autres le long du bord 3-4. On
construit alors les fonctions de forme dans un élément de référence de forme géométrique
simple, puis une transformation géométrique permet le passage de l’élément de référence à
l’élément physique.
Les éléments finis ne nécessitant pas d’éléments de références sont les éléments unidi-
mensionnels, les triangles à 3 nœuds et les tétraèdres à 4 nœuds dans l’espace.
I.4 Construction d’un élément fini 11

Elément physique Elément de référence


−1 1 r
barre - poutre

1
y quadrangle −1 1
r

x −1

t
+1
z hexaèdre +1 s
+1
1
r
x y
Figure I.10 – Eléments de références associés aux éléments physiques.

I.4.2 Elément fini de référence

Un élément de référence est un élément de forme simple qui permet de construire les fonc-
tions de forme. Un système de coordonnées lui ait attaché. Les domaines de références sont
généralement compris entre −1 et +1 dans chaque direction. Une transformation permet de
passer de l’élément de référence à l’élément physique.
Plusieurs exemples d’éléments de référence sont décrit sur la figure I.10. L’élément plan
quadrangle à 4 nœuds est utilisé dans la suite pour illustrer le principe (Fig. I.11).
Le repère (x, y) est une base globale attachée à l’espace physique. On définit un système
de coordonnées de référence (r, s) tel que sur les faces de l’élément on ait r = ±1 et s = ±1 .
Le carré défini dans le repère (r, s) dont les sommets ont pour coordonnées (−1, −1) et (1, 1)
est appelé élément de référence. Les coordonnées d’un nœud I dans l’élément de référence
sont notées (rI , sI ).
La base d’approximation des fonctions de forme NI est [ 1 r s rs ] (voir triangle de
Pascal). Le système à résoudre pour trouver ces fonctions est
    
1 1 1 1 N1 1
    
 r r2 r3 r4 
  N2   r 
   
 1
  = 
 s1 s2 s3 s4 
  N3   s 
   

r1 s1 r2 s2 r3 s3 r4 s4 N4 rs

soit
    
1 1 1 1 N1 1
    
 −1 1 −1 
1   N2   r 
   

  = 
 −1 −1 1 1   N3   s 
   

1 −1 1 −1 N4 rs
12 Approximation d’une fonction

s=1 s
(x3 , y3 ) (−1, 1) (1, 1)
s
(x4 , y4 )
r=1 4 3
r = −1
r
r

y 1 2

(x1 , y1 ) (−1, −1) (1, −1)


x (x2 , y2 )
s = −1
Elément physique Elément de référence

Figure I.11 – Passage de l’élément physique à l’élément de référence.

La solution est

1 1
N1 (r, s) = (1 − r − s + rs) = (1 − r)(1 − s) ,
4 4
1 1
N2 (r, s) = (1 + r − s − rs) = (1 + r)(1 − s) ,
4 4
1 1
N3 (r, s) = (1 + r + s + rs) = (1 + r)(1 + s) ,
4 4
1 1
N4 (r, s) = (1 − r + s − rs) = (1 − r)(1 + s) .
4 4

La fonction 12 (1 − r) s’annule aux nœuds 2 et 3 et vaut 1 aux nœuds 1 et 4, tandis que


la fonction 12 (1 + r) s’annule aux nœuds 1 et 4 et vaut 1 aux nœuds 2 et 3. De même, la
fonction 21 (1 − s) s’annule aux nœuds 3 et 4 et vaut 1 aux nœuds 1 et 2, tandis que la
fonction 21 (1 + s) s’annule aux nœuds 1 et 2 et vaut 1 aux nœuds 3 et 4. Les fonctions NI
peuvent s’écrire aussi plus simplement :

1
NI (r, s) = (1 + rI r)(1 + sI s).
4

Ces fonctions de formes sont tracées sur la figure I.12

Exercice I.5 Construire les fonctions de forme du triangle à 6 nœuds dans l’élément de référence. Tracer
ces 6 fonctions.
I.4 Construction d’un élément fini 13

N1 N4

N2 N3

Figure I.12 – Fonctions de forme du quadrangle à 4 nœuds dans l’élément de référence.

s
(0, 1)
3
3
6
5 ( 21 , 21 )
6 5
1
4
2 (0, 0) (1, 0) r
1 4 2
Elément physique Elément de référence 

I.4.3 Passage de l’élément physique à l’élément de référence

Les coordonnées d’un point quelconque situé dans l’élément sont interpolées à partir des
coordonnées des nœuds de l’élément en utilisant les fonctions de forme :

4
X
x= NI (r, s)xI ,
I=1
X4
y= NI (r, s)yI .
I=1

En notant xe (M ) le vecteur coordonnées d’un point M de l’élément e et X e le vecteur


contenant les coordonnées des nœuds de l’élément e, on peut écrire

xe (M ) = Ne (M ) X e
14 Approximation d’une fonction

où Ne (M ) contient les fonctions d’interpolations, pour l’élément quadrangle, on a


 
x1
 

 x2 

 
 x3 
" # " #



e x N1 N2 N3 N4 0 0 0 0  x4  e e
x (M ) = = 


 = N (M ) X .
y 0 0 0 0 N1 N2 N3 N4  y1 
 

 y2 

 

 y3 

y4
II — Maillage éléments finis

II.1 Introduction

Le chapitre précédent permet de construire l’approximation d’une fonction à partir d’une


base d’approximation. Cette approximation s’appuie sur des points (ou nœuds) qui forment
un domaine appelé élément. A chaque nœud de l’élément correspond une fonction de forme
dans l’élément.

Lorsque le domaine sur lequel on souhaite approximer la fonction a une forme complexe
ou bien si la fonction à approximer varie beaucoup, alors un seul élément simple ne suffit
plus. Une solution serait d’enrichir la base d’approximation de l’élément avec de nouveaux
termes, mais cela est difficilement généralisable à toutes les formes de domaine et toutes les
fonctions que l’on pourrait rencontrer : autrement dit cela n’est pas applicable à tous les
problèmes mécaniques. La méthode des éléments finis s’appuie sur une autre solution qui
est de décomposer le domaine en éléments de forme simples et dont la base d’approximation
contient relativement peu de termes. Cette solution permet de répondre aux deux limitations
de l’utilisation d’un seul élément :

– le découpage d’un domaine de forme complexe avec des éléments géométriquement


simples est toujours réalisable (Fig. II.1),
– la base d’approximation de la fonction est alors définie par morceau, la fonction de
forme d’un nœud est un assemblage des fonctions de forme des éléments adjacents
(Fig. II.3).
16 Maillage éléments finis

domaine éléments à 3 nœuds éléments à 6 nœuds

Figure II.1 – Pavage d’un domaine avec des triangles.

2 3
1
1 4

2 5
3
4 7
y 6
5
x

Figure II.2 – Exemple de maillage.

II.2 Maillage éléments finis


L’opération de maillage consiste à découper le domaine (pièce ou structure) en éléments.
Afin d’illustrer la généralisation à plusieurs éléments, on utilise dans les figures l’élément
triangle dans le plan comme exemple (Fig. II.1).
Chaque nœud est en contact avec plusieurs éléments et chaque élément est construit à
partir de plusieurs nœuds (3 pour des triangles à 3 nœuds). Le maillage est constitué de 2
tableaux de valeurs : les coordonnées des nœuds et la connectivité des éléments.
L’exemple de la figure II.2 montre un maillage de triangles à 3 nœuds constitués de 5
éléments et de 7 nœuds. La table de connectivité donne les numéros des nœuds connectés
à chaque élément. Le nombre de lignes de ce tableau est le nombre d’éléments du maillage
(5 ici), le nombre de colonnes est le nombre de nœuds par élément (3 ici) :

Numéro Nœud Nœud Nœud


d’élément 1 2 3
1 1 2 4
2 4 5 2
3 6 2 5
4 3 2 6
5 3 6 7

Les coordonnées des nœuds sont données dans un tableau dont le nombre de lignes est le
nombre de nœuds du maillage (7 ici) et le nombre de colonnes est la dimension de l’espace
de modélisation (2 ici, x et y) :
II.3 Fonctions de forme 17

1 1
y
4
2 0

Figure II.3 – Fonction de forme associée à un nœud.

Numéro Coord. Coord.


du Nœud x y
1 x1 y1
2 x2 y2
3 x3 y3
4 x4 y4
5 x5 y5
6 x6 y6
7 x7 y7

Les algorithmes de construction d’un maillage à partir d’une définition géométrique


numérique de la pièce (CAO) ne sont pas décrit dans ce cours.

Exercice II.1 Tracer le maillage constitué de triangles associé à ces coordonnées et cette connectivité :

Numéro Coord. Coord.


Numéro Nœud Nœud Nœud du Nœud x y
d’élément 1 2 3 1 0.0 0.0
1 1 4 3 2 1.0 0.0 

2 1 2 4 3 0.0 1.0
3 2 5 4 4 1.0 1.0
5 2.0 1.0

II.3 Fonctions de forme


Même si dans la pratique les fonctions de forme sont construites élément par élément, au
niveau du maillage, les fonctions de forme sont associées aux nœuds. Un nœud appartenant
à plusieurs éléments, la fonction de forme associée s’étend sur tous les éléments en contact
avec ce nœud. Sur l’exemple de la figure II.2, le nœud 4 appartient aux 2 éléments 1 et 2,
sa fonction de forme est donc un assemblage de la fonction de forme de l’élément 1 associée
au nœud 4 et de la fonction de forme de l’élément 2 associée au nœud 4 comme décrit sur
la figure II.3. La fonction de forme du nœud 4 vaut zéro dans les éléments 3, 4 et 5 non
connectés à ce nœud.
L’ensemble des fonctions de forme des nœuds du maillage constitue la base dans laquelle
la solution éléments finis en déplacement est recherchée. Plus il y a de nœuds dans le
maillage, plus la base d’approximation est riche, et donc plus la solution éléments finis est
proche de la solution exacte.
18 Maillage éléments finis

Q4 Q4 Q9 Q9
Q4
Q4 Q4 T6

Non compatible Non compatible Compatible

Figure II.4 – Exemples de maillages non compatibles.

Exercice II.2 Pour le maillage suivant constitué de quadrangles à 4 nœuds :


1. numéroter les nœuds et les éléments,
2. donner la table de connectivité,
3. tracer les fonctions de forme associées aux nœuds du maillage.

II.4 Règles de construction d’un maillage


Les règles de construction d’un maillage à respecter sont :
– les éléments ne doivent pas se recouvrir : la somme des volumes élémentaires doit être
le volume du domaine maillé,
– les éléments doivent être compatibles entre eux, c’est à dire que les fonctions de forme
doivent être continues d’un élément à l’autre (Fig. II.4).
Ces règles sont généralement respectées par les logiciels de maillage, mais l’utilisateur
peut facilement faire des erreurs de manipulation. La deuxième règle est facile à respecter
lorsque l’on utilise le même type d’élément pour tout le domaine : il suffit que tous les nœuds
du maillage se trouvent aux sommets des éléments. Lorsque plusieurs types d’éléments sont
présents dans le maillage, il ne suffit plus que les nœuds soient aux sommets des éléments,
il faut aussi que les bases d’approximations soient les mêmes sur les bords en contact avec
2 éléments. Par exemple, on ne peut pas mettre en contact des quadrangles à 4 nœuds avec
des quadrangles à 9 nœuds mais on peut mettre en contact des triangles à 6 nœuds avec
des quadrangles à 9 nœuds (Fig. II.4).
III — Formulation variationnelle

III.1 Equations locales du problème de mécanique


Soit un corps solide déformable Ω ayant pour surface extérieure ∂Ω (Fig. III.1). Les notations
suivantes sont utilisées :


• f est l’effort volumique dans Ω,
• −
→u est le champ de déplacement dans Ω,


• u d est le déplacement donné sur ∂u Ω,


• F d est l’effort surfacique donné sur ∂F Ω.


• R est l’effort surfacique inconnu sur ∂u Ω,
Remarques :
• ∂Ω = ∂u Ω ∪ ∂F Ω,
• ∂u Ω ∩ ∂F Ω = ∅.
Le problème de mécanique est de déterminer les deux champs inconnus de déplacements

→ −
→ −

u (ou ui ) et de contraintes σ (ou σij ) sous l’effet des forces appliquées F d et f .

∂F Ω



f
∂u Ω

→ −
→d
ud F
∂Ω
Figure III.1 – Problème continu.
20 Formulation variationnelle

Equations d’équilibre en statique, ensemble des champs de contraintes statique-


ment admissibles
Les équations d’équilibre s’écrivent en notation indicielle (cartésien)
σij,j + fi = 0 dans Ω , (III.1)
ou bien en notation tensorielle
−→ −
→ − →
div σ + f = 0 dans Ω ,


où σ est l’opérateur des contraintes et f est une force volumique. L’opérateur σ est
symétrique
σij = σji .
Sur le bord ∂F Ω où sont imposés les efforts surfaciques, l’opérateur des contraintes doit
satisfaire
σij nj = Fid sur ∂F Ω
ou bien


σ−

n = F d sur ∂F Ω ,
avec −

n qui est le vecteur normal extérieur à ∂Ω.

On dit que σ est statiquement admissible si et seulement si

σ ∈ S = {σ|σij,j + fi = 0 dans Ω et σij nj = Fid sur ∂F Ω}

Conditions aux limites en déplacement, ensemble des déplacements cinéma-


tiquement admissibles
Les conditions aux limites s’écrivent en déplacements
ui = udi sur ∂u Ω ,
ou bien


u =−

u d sur ∂u Ω

On dit que −

u est cinématiquement admissible si et seulement si


u ∈ U = {−

u |ui = udi sur ∂u Ω}

Hypothèse des petites perturbations


L’opérateur des déformations est fonction des déplacements, il est linéaire dans le cadre des
petites perturbations. Il s’écrit en notation indicielle
1 
ǫij = ui,j + uj,i ,
2
ou encore en notation tensorielle
1 
ǫ= Grad(− →
u ) + GradT (− →
u) .
2
III.2 Formulation variationnelle en déplacement 21

Relation de comportement
La relation de comportement relie les déformations aux contraintes. D’une façon générale,
cette relation s’écrit

σij = Cijkl ǫkl ,

où C est l’opérateur d’élasticité. Pour un matériau isotrope, les coefficients d’élasticité se


réduisent à deux constantes indépendantes (λ, µ) ou (E, ν) . La relation de comportement
devient la loi de Hooke, soit

σij = λ ǫkk δij + 2µ ǫij

en écriture indicielle, ou bien

σ = λ T r(ǫ) 1 + 2µ ǫ

en notation tensorielle. Les coefficients de Lamé (λ, µ) sont reliés à (E, ν) par

λ=
(1 + ν)(1 − 2ν)
et
E
µ= .
2(1 + ν)
La relation de comportement s’écrit aussi
1+ν ν
ǫij = σij − σkk δij ,
E E
ou bien
1+ν ν
ǫ= σ − T r(σ) 1 .
E E
Réécriture du problème de statique linéaire

Le couple (−

u , σ) solution du problème est tel que
– u est cinématiquement admissible : −

→ →
u ∈U
– σ est statiquement admissible : σ ∈ S  
– −

u et σ vérifient la relation de comportement avec ǫij = 12 ui,j + uj,i 

III.2 Formulation variationnelle en déplacement


On suppose que − →
u et σ sont solution du problème, donc − →u ∈ U et σ ∈ S. Considérons


un champ de déplacement virtuel δu quelconque. La notation δ est utilisée pour toutes les


quantités virtuelles, δu est une variation de −

u.


En multipliant l’éq.(III.1) par le champ de déplacement virtuel δu et en intégrant sur Ω,
il vient
Z Z
σij,j δui dΩ + fi δui dΩ = 0 .
Ω Ω
En intégrant par partie, on a
Z Z Z
(σij δui ),j dΩ − σij δui,j dΩ + fi δui dΩ = 0 ,
Ω Ω Ω
22 Formulation variationnelle

puis, en utilisant le théorème de Gauss


Z Z Z
− σij δui,j dΩ + σij nj δui dS + fi δui dΩ = 0 .
Ω ∂Ω Ω
Or,
∂Ω = ∂u Ω ∪ ∂F Ω,

σij nj = Fid sur ∂F Ω,

σij nj = Ri sur ∂u Ω,

en remplaçant dans l’équation précédente, on a


Z Z Z Z
− σij δui,j dΩ + Fid δui dS + Ri δui dS + fi δui dΩ = 0 . (III.2)
Ω ∂F Ω ∂u Ω Ω

En remarquant que σ est symétrique, on a la propriété suivante :

σij δui,j = σij δǫij .


Preuve
   
1 1
σij δui,j = σij δui,j + σij δui,j = σij δui,j + σji δui,j
2 2
   
1 1
= σij δui,j + σij δuj,i = σij δui,j + δuj,i
2 2
= σij δǫij

L’expression de l’éq.(III.2) devient


Z Z Z Z
σij δǫij dΩ − Fid δui dS − Ri δui dS − fi δui dΩ = 0 .
Ω ∂F Ω ∂u Ω Ω

Finalement, en utilisant la relation de comportement, nous venons d’établir que :



si −

u ∈ U est solution du problème alors ∀ δu
Z Z Z Z
Cijkl ǫkl δǫij dΩ − Fid δui dS − Ri δui dS − fi δui dΩ = 0 (III.3)
Ω ∂F Ω ∂u Ω Ω


Montrons que la réciproque est vraie, c’est à dire, montrons que :




si ∀δu et si −

u ∈ U on a
Z Z Z Z
Cijkl ǫkl δǫij dΩ − Fid δui dS − Ri δui dS − fi δui dΩ = 0
Ω ∂F Ω ∂u Ω Ω

alors −

u est solution du problème.
En utilisant la relation de comportement et par symétrie de l’opérateur des contraintes,
on peut écrire
Z Z Z Z
σij δui,j dΩ − Fid δui dS − Ri δui dS − fi δui dΩ = 0 (III.4)
Ω ∂F Ω ∂u Ω Ω

Or
Z Z   Z
σij δui,j dΩ = σij δui dΩ − σij,j δui dΩ
Ω ,j
ZΩ ZΩ
= σij δui nj dS − σij,j δui dΩ
∂Ω Ω
III.3 Théorème de l’énergie potentielle 23

En remplaçant dans l’éq.(III.4) on obtient :


Z Z Z Z Z
− σij,j δui dΩ + σij δui nj dS − Fid δui dS − Ri δui dS − fi δui dΩ = 0
Ω ∂Ω ∂F Ω ∂u Ω Ω

soit encore, en remarquant que ∂Ω = ∂u Ω ∪ ∂F Ω,


Z   Z   Z  
− σij,j + fi δui dΩ + σij nj − Fid δui dS + σij nj − Ri δui dS =(III.5)
0
Ω ∂F Ω ∂u Ω


→ −
→ − →
L’expression de l’éq.(III.5) est valable ∀ δu, elle est donc en particulier vraie pour δu = 0
sur ∂Ω, il vient alors
Z  
− σij,j + fi δui dΩ = 0 ,

soit

σij,j + fi = 0 dans Ω ,

qui sont les équations d’équilibre locales. En remplaçant dans l’éq.(III.5) on a


Z Z
    −

σij nj − Fid δui dS + σij nj − Ri δui dS = 0 ∀δu
∂F Ω ∂u Ω

soit

σij nj − Fid = 0 sur ∂F Ω

et

σij nj − Ri = 0 sur ∂u Ω .

qui sont les conditions aux limites en efforts. Les conditions aux limites en déplacements
sont satisfaites puisque −

u ∈ U.
Finalement, toutes les équations locales du problème sont satisfaites, donc le couple


( u , σ) est bien solution du problème.

Exercice III.1 Etablir la formulation variationnelle en déplacement d’une barre en traction (x ∈ [0, L])
dont l’équation d’équilibre est
N ′ (x) + p = 0 avec N (L) = F
où N est l’effort normal, p est une charge linéique et F est une force appliquée en x = L. La barre est
encastrée en x = 0. On rappelle que le déplacement u(x) est relié à l’effort normal par la relation

N (x)
u′ (x) =
ES
où E est le module d’Young et S est l’aire de la section. 

III.3 Théorème de l’énergie potentielle


D’aprés les résultats de la partie précédente, la formulation variationnelle du problème
s’écrit :
24 Formulation variationnelle


→ −

u et R sont solutions du problème


→ −
→ −

Chercher u ∈ U et R tels que ∀δu

Z Z Z Z
Cijkl ǫkl δǫij dΩ − Fid δui dS − Ri δui dS − fi δui dΩ = 0 (III.6)
Ω ∂F Ω ∂u Ω Ω

Le calcul de σ est fait a posteriori par la relation de comportement. 

– La quantitéZ Z Z
δT = Fid δui dS + Ri δui dS + fi δui dΩ
∂F Ω ∂u Ω Ω
est appelée travail des efforts extérieurs dans le champ de déplacement virtuel ou
travail virtuel des efforts extérieurs.
– La quantité Z Z
δED = σij δǫij dΩ = Cijkl ǫkl δǫij dΩ
Ω Ω
est appelée travail virtuel des efforts intérieurs ou variation virtuelle de l’énergie de
déformation.
– Le travail Zdes efforts extérieurs
Z vaut Z
d
T = Fi ui dS + Ri udi dS + fi ui dΩ .
∂F Ω ∂u Ω Ω
– L’énergie de déformation
Z vaut Z
1 1
ED = σij ǫij dΩ = Cijkl ǫkl ǫij dΩ.
2 Ω 2 Ω


Preuve Lorsque →−
u varie de δu, l’énergie de déformation varie de δED :


E D (→

u + δu) = ED (→ −
u ) + δED
Z
1 −
→ −

= Cijkl ǫij (→

u + δu) ǫkl (→

u + δu) dΩ
2 Ω
Z Z
1 1 −

= Cijkl ǫij (→

u ) ǫkl (→

u ) dΩ + Cijkl ǫij (δu) ǫkl (→

u ) dΩ
2 Ω
2
Z ZΩ
1 1 −

+ Cijkl ǫij (→

u ) ǫkl (δ →

u ) dΩ + Cijkl ǫij (δu) ǫkl (δ →

u ) dΩ
2

2 Ω
−→
Le dernier terme fait intervenir le carré de δu qui est négligeable devant les trois autres termes. Etant
donné la symétrie de la loi de comportement (Cijkl = Cklij ), le deuxième et le troisième terme sont


égaux, l’expression de ED (→−u + δu) devient
Z Z

→ 1 −

E D (→

u + δu) = Cijkl ǫij (→

u ) ǫkl (→

u ) dΩ + Cijkl ǫij (→

u ) ǫkl (δu) dΩ
2 Ω Ω
d’où par identification on a
Z


δED = Cijkl ǫij (→

u ) ǫkl (δu) dΩ

Enfin, en notant V = ED −T l’énergie potentielle et δV = δED −δT la variation d’énergie
potentielle, la formulation variationnelle devient :

Théorème III.1 Théorème de la variation virtuelle d’énergie potentielle




u est solution du problème


→ −

Chercher u ∈ U tel que ∀δu, δV = 0
III.4 Notations de Voigt 25

Ce théorème peut aussi s’écrire :

Pour un état d’équilibre stable, le déplacement cinématiquement admissible solution du


problème est celui qui minimise l’énergie potentielle et réciproquement. 


Dans la formulation précédente, δu est quelconque, en introduisant le champ de déplace-


ments cinématiquement admissible à zéro U0 = {− →
v /−

v = 0 sur ∂u Ω}, et en choisissant


δu ∈ U0 , la formulation variationnelle devient :

Théorème III.2 Théorème des travaux virtuels




u est solution du problème


→ −

Chercher u ∈ U tel que ∀δu ∈ U0

Z Z Z
Cijkl ǫkl δǫij dΩ − Fid δui dS − fi δui dΩ = 0
Ω ∂F Ω Ω

R Dans cette nouvelle proposition, les seules inconnues sont des inconnues de déplacements.

III.4 Notations de Voigt


III.4.1 Contraintes et déformations tridimensionnelles
L’opérateur des contraintes
   
σxx σxy σxz σ11 σ12 σ13
   
σ=
 σxy σyy  =  σ12 σ22 σ23 
σyz   
σxz σyz σzz σ13 σ23 σ33
est noté σ sous forme de vecteur

σ = [ σxx σyy σzz σxy σyz σxz ]T = [ σ11 σ22 σ33 σ12 σ23 σ13 ]T .

L’opérateur des déformations


   
ǫxx ǫxy ǫxz ǫ11 ǫ12 ǫ13
   
ǫ=
 ǫxy ǫyy  =  ǫ12 ǫ22 ǫ23 
ǫyz   
ǫxz ǫyz ǫzz ǫ13 ǫ23 ǫ33
est noté ǫ sous forme de vecteur

ǫ = [ ǫxx ǫyy ǫzz 2ǫxy 2ǫyz 2ǫxz ]T = [ ǫ11 ǫ22 ǫ33 2ǫ12 2ǫ23 2ǫ13 ]T .

L’énergie de déformation est égale à


Z Z Z
1 1 1
ED = σij ǫij dΩ = σ T ǫ dΩ = ǫT σ dΩ .
2 Ω 2 Ω 2 Ω
26 Formulation variationnelle

III.4.2 Relation de comportement


La relation de comportement est notée C. Elle relie les déformations aux contraintes, soit

σ = Cǫ .

Dans le cas élastique isotrope, la loi s’écrit en utilisant les coefficients de Lamé

σ = λ T r(ǫ) 1 + 2µ ǫ .

Cette expression devient en utilisant les notations σ et ǫ

    
σxx λ + 2µ λ λ 0 0 0 ǫxx
    

 σyy 


 λ λ + 2µ λ 0 0   ǫyy
0   

    
 σzz   λ λ λ + 2µ 0 0   ǫzz
0   
σ=

=
  
 = Cǫ .

 σxy   0 0 0 µ 0 0   2ǫxy 
    

 σyz  
  0 0 0   2ǫyz
0 µ 0   

σxz 0 0 0 0 0 µ 2ǫxz
| {z }
=C

III.4.3 Opérateur différentiel


On note D l’opérateur différentiel qui relie le déplacement aux déformations tel que ǫ = D−

u.
Les déformations s’écrivent
1 
ǫ= Grad(−

u ) + GradT (−

u) .
2
Cet opérateur a pour expression dans un repère cartésien

   ∂

ǫxx ∂x
0 0
   ∂ 
 ǫyy   0 0   
∂y
 ux
   
   ∂
ǫzz   0 0   uy  = D −

 ∂z
 
ǫ=

=
  ∂ ∂   u .
 2ǫxy   ∂y ∂x
0 
    uz
∂ ∂ 

 2ǫyz   0
  ∂z ∂y 
∂ ∂
2ǫxz ∂z 0 ∂x
| {z }
=D

L’énergie de déformation vaut avec ces notations


Z
1 −

ED = u T DT CD−

u dΩ
2 Ω

Dans cette expression, l’opérateur D agit à droite tandis que DT porte sur le terme situè à
sa gauche.
III.4 Notations de Voigt 27

III.4.4 Cas des contraintes planes


Dans le cas des contraintes planes dans le plan (−

x ,−

y ), on a

σzz = σxz = σyz = 0 .

Donc ǫxz = ǫyz = 0, mais ǫzz 6= 0. En utilisant la relation de comportement, on montre que
ν
ǫzz = − (σxx + σyy ) .
E
L’écriture de l’énergie de déformation se réduit à
Z Z Z
1 1 1
ED = σij ǫij dΩ = (σxx ǫxx + σyy ǫyy + 2σxy ǫxy ) dΩ = σ T ǫ dΩ
2 Ω 2 Ω 2 Ω
avec
σ = [ σxx σyy σxy ]T et ǫ = [ ǫxx ǫyy 2ǫxy ]T .
La relation entre ǫ et σ devient
    
ǫxx 1 −ν 0 σxx
  1   
ǫ=
 ǫyy  = E  −ν
  1 0  σ  .
  yy 
2ǫxy 0 0 2(1 + ν) σxy
En inversant l’écriture de cette relation, on obtient

    
σxx 1 ν 0 ǫxx
  E   
σ=
 σyy  = 1 − ν 2  ν 1
  0   ǫyy  = C ǫ
 
1−ν
σxy 0 0 2 2ǫxy

L’opérateur gradient D reliant les déformations au déplacement vaut

   

ǫxx ∂x
0 " #
ux
= D−

   ∂

 ǫyy  =  0
ǫ=  
∂y

 u .
∂ ∂
uy
2ǫxy ∂y ∂x

III.4.5 Cas des déformations planes


Dans le cas des déformations planes dans le plan (−

x ,−

y ), on a

ǫzz = ǫxz = ǫyz = 0 .

Donc σxz = σyz = 0, mais σzz 6= 0. En utilisant la relation de comportement, on montre


que

σzz = ν(σxx + σyy ) .

L’écriture de l’énergie de déformation se réduit à


Z Z Z
1 1 1
ED = σij ǫij dΩ = (σxx ǫxx + σyy ǫyy + 2σxy ǫxy ) dΩ = σ T ǫ dΩ
2 Ω 2 Ω 2 Ω
28 Formulation variationnelle

avec
σ = [ σxx σyy σxy ]T et ǫ = [ ǫxx ǫyy 2ǫxy ]T .

La relation de comportement s’écrit

    
σxx λ + 2µ λ 0 ǫxx
    
σ=
 σyy  = 
  λ   ǫyy  = C ǫ .
λ + 2µ 0   
σxy 0 0 µ 2ǫxy

L’opérateur gradient D reliant les déformations au déplacement vaut

   

ǫxx ∂x
0 " #
ux
= D−

   ∂

 ǫyy  =  0
ǫ=  
∂y

 u .
∂ ∂
uy
2ǫxy ∂y ∂x

III.4.6 Cas d’un problème axisymétrique


Le déplacement −

u est noté dans le repère cylindrique



u = u−

er + v −

eθ + w−

z.

Le gradient du déplacement vaut


   
∂u 1 ∂u ∂u
∂r r ∂θ
−v ∂z
 
 
 
   

→ 
Grad( u ) =  ∂v 1 ∂v
+u ∂v 
 .
 ∂r r ∂θ ∂z 
 
 
   
∂w 1 ∂w ∂w
∂r r ∂θ ∂z →

(→

e r ,→

eθ , k )

Dans le cas d’un problème axisymétrique, les quantités ne dépendent pas de θ et v est
nul, l’écriture se simplifie et devient

 

∂r
0
 
   
 
ǫ
 rr
 
  1 0  " #
 ǫ   r  u
= D−

 θθ   
ǫ= =  u .
 ǫzz    w
   0 ∂ 
 ∂z 
2ǫrz 



 
∂ ∂
∂z ∂r
III.4 Notations de Voigt 29

L’écriture de l’énergie de déformation se réduit à


Z Z
1 1
ED = σij ǫij dΩ = σ T ǫ dΩ
2 Ω 2 Ω

avec
   
σrr ǫrr
   
 σ   ǫ 
 θθ   θθ 
σ=  et ǫ =   .
 σzz   ǫzz 
   
σrz 2ǫrz
La loi de comportement s’écrit

    
σrr λ + 2µ λ λ 0 ǫrr
    
 σ λ λ + 2µ λ 0 
  ǫθθ
   
 θθ   
σ= =    = Cǫ .
 σzz λ λ λ + 2µ 0 
  ǫzz
   
   
σrz 0 0 0 µ 2ǫrz
IV — Discrétisation par éléments finis

IV.1 Construction d’un élément fini


IV.1.1 Approximation du déplacement
On rappelle que les fonctions de forme approximent le déplacement dans l’élément en fonc-
tion des déplacements des nœuds, ceci s’écrit dans un élément :
" # " Pn #

→ ux I=1 NI (x, y)uxI
u e (M ) = = Pn = Ne q e
uy I=1 NI (x, y)uyI

où Ne est la matrice des fonctions de forme de l’élément et q e est le vecteur contenant les
inconnues de déplacement aux nœuds.
Pour le triangle T 3, il vient
" #
e N1 N2 N3 0 0 0
N =
0 0 0 N1 N2 N3

et
q e = [ ux1 ux2 ux3 uy1 uy2 uy3 ]T

où uxI −

x + uy I −

y est le vecteur déplacement du nœud I.

IV.1.2 Expression des déformations


Dans le cas général on peut écrire, en utilisant les notations de Voigt, les déformations en
fonction du déplacement,
ǫ e = D−

ue
32 Discrétisation par éléments finis

avec  

∂x
0
 ∂

D=
 0 ∂y


∂ ∂
∂y ∂x

en deux dimensions.

En remplaçant −

u e par son expression en fonction de q e :

ǫe = DNe (M ) q e = Be (M ) q e (IV.1)

où Be (M ) = DNe (M ) est appelé opérateur gradient discrétisé. 

Pour obtenir l’expression de Be , il faut appliquer l’opérateur D à Ne (M ). Pour l’élément


triangle à 3 nœuds on a :
 
∂N1 ∂N2 ∂N3
∂x ∂x ∂x 0 0 0
 
Be (M ) = 
 0 0 0 ∂N1
∂y
∂N2
∂y
∂N3
∂y


∂N1 ∂N2 ∂N3 ∂N1 ∂N2 ∂N3
∂y ∂y ∂y ∂x ∂x ∂x

On rappelle que pour l’élément triangle à 3 nœuds l’expression des fonctions de forme est

A1 A2 A3
N1 (x, y) = N2 (x, y) = N3 (x, y) =
A A A
avec  
1 1 1
 
2A = det 
 x1 x2 x3 

y1 y2 y3
et
 
1 1 1 " # " # " #
  x2 x3 1 1 1 1
2A1 = det 
 x x2  = det
x3  − x det + y det
y2 y3 y2 y3 x2 x3
y y2 y3

qui peut s’écrire sous la forme


N1 = a1 + b1 x + c1 y

De même
N2 = a2 + b2 x + c2 y

N3 = a3 + b3 x + c3 y

Avec ces notations, l’expression de Be (M ) devient pour le triangle à 3 nœuds


 
b1 b2 b3 0 0 0
 
Be (M ) = 
 0 0 0 c1 c2 c3 

c1 c2 c3 b1 b2 b3
IV.1 Construction d’un élément fini 33

IV.1.3 Expression des contraintes


En utilisant les notations de la partie III.4, on peut écrire les contraintes en fonction des
déformations,
σ e = Ce ǫe
soit en remplaçant les déformations par l’expression éq.(IV.1)

σ e = Ce Be (M ) q e . (IV.2)


IV.1.4 Matrice de rigidité


L’énergie de déformation d’un élément e vaut
Z
e 1 T
ED = σ e ǫe dΩ
2 Ωe
e e
En remplaçant σ et ǫ par les expressions des éq.(IV.1) et éq.(IV.2), on a
Z
1
q eT BeT (M ) CeT Be (M ) q e dΩ
ED e =
2 Ωe
Etant donné que Ce est symétrique et que q e ne dépend pas de M , on peut écrire
Z
e 1
ED = q eT BeT (M ) Ce Be (M ) dΩ q e
2 Ωe

En posant
Z
e
K = BeT (M ) Ce Be (M ) dΩ
Ωe

qui est la matrice de rigidité de l’élément e, on a


1
ED e = q eT Ke q e
2

Dans le cas du triangle à 3 nœuds, étant donné que la matrice Be (M ) est constante dans
l’élément, le calcul de Ke est immédiat :

Ke = A h BeT Ce Be

où A est l’aire du triangle, h l’épaisseur (par convention, h = 1 en déformations planes)


et Ce est la matrice de comportement qui peut être écrite en contraintes planes ou en
déformations planes.

IV.1.5 Forces extérieures généralisées


Le travail des forces extérieures agissant sur l’élément e s’écrit :
Z Z Z
T T T
Te= ue F d dS + ue R dS + ue f dΩ
∂F Ωe ∂u Ωe e
| {z } | {z } |Ω {z }
terme A terme B terme C
34 Discrétisation par éléments finis

∂F Ω

111
000
∂u Ω
d
F

000
111
f

000
111
e

000
111 e
e

000
111
Terme A
000
111 Terme B Terme C

Figure IV.1 – Forces agissant sur les éléments.

soit en discrétisant
Z Z Z
Te = q eT Ne (M )T F d dΩ + q eT Ne (M )T R dΩ + q T Ne (M )T f dΩ
∂F Ωe ∂u Ωe Ωe

Dans cette expression, q ne dépend pas de M , on peut écrire :


Z Z Z
e eT e T d eT e T eT
T =q N (M ) F dΩ + q N (M ) R dΩ + q Ne (M )T f dΩ
∂F Ωe ∂u Ωe Ωe

ou encore
T e = q eT F e
où F e est le vecteur des forces extérieures généralisées agissant sur l’élément e.
Le travail peut être décomposé en trois termes A, B et C. Le terme A agit sur les éléments
dont une frontière a une force imposée (Fig. IV.1). Le terme B agit sur les éléments dont
une frontière a un déplacement imposé (Fig. IV.1). Le terme C agit sur tous les éléments
subissant une force volumique (Fig. IV.1).

IV.1.6 Passage du repère local à l’élément au repère global


Pour certains types d’éléments (poutres et barres par exemple), on calcule Kel la matrice
de rigidité élémentaire dans une base locale à l’élément telle que
1
ED e = q eT Kel q e
2
où ED e est l’énergie de déformation de l’élément e. Les déplacements nodaux qe sont exprimés
dans la base locale à l’élément. On ramène cette matrice dans les axes globaux par une
transformation Te telle que

q e = Te Qe (IV.3)

où Qe sont les déplacements nodaux exprimés dans la base globale. On a alors


1 1 1
ED e = (Te Qe )T Kel Te Qe = QeT TeT Kel Te Qe = QeT Keg Qe
2 2 2
où Keg = TeT Kel Te est la matrice de rigidité exprimée dans la base globale.
De même, on calcule les forces généralisées élémentaires F e telles que

T e = q eT F el
IV.2 Calculs au niveau de la structure 35

Table de connectivité Element II :


I 1 4 2  
0 0 0 0 1 0
II 5 2 4  
3 6 βII =  0 1 0 0 0 0 

III 2 5 3   
IV q1 0 0 0 1 0 0
IV 6 3 5  
2 III 5
   q2 
q5 



II    q3 
q II =  q2  Q=   q II = βII Q
I
  
 q4 

1 4 q4  

 q5 

q6
Figure IV.2 – Exemple d’utilisation de la matrice de localisation pour l’assemblage.

où T e est le travail élémentaire des forces extérieures et F el sont les forces aux nœuds
exprimées dans la base locale. En remplaçant par l’éq.(IV.3), on a

T e = QeT TeT F el = QeT F eg

où F eg = TeT F el sont les forces aux nœuds exprimées dans la base globale.

IV.2 Calculs au niveau de la structure


IV.2.1 Assemblage par matrice de localisation
A partir des matrices de rigidité élémentaires Keg et des efforts généralisés élémentaires F eg ,
on construit la matrice de rigidité de la structure K et les efforts généralisés F .
L’énergie de déformation ED de la structure et le travail des efforts extérieurs T valent
X X1
ED = ED e = QeT Keg Qe , (IV.4)
e e 2
X X
e
T = T = QeT F eg . (IV.5)
e e

On peut utiliser une matrice de localisation β e pour chaque élément e qui permet d’ex-
traire Qe de Q :

Qe = β e Q . (IV.6)

En remplaçant dans Eq.IV.4 et dans Eq.IV.5 on a


X1 1 T  X eT e e  1
ED = QT β eT Keg β e Q = Q β Kg β Q = QT KQ ,
e 2 2 e 2
X X 
T = QT β eT F eg = QT β eT F eg = QT F .
e e

La matrice de localisation est une matrice contenant des 0 et des 1 placés aux degrés de
liberté de l’élément e (voir exemple Fig. IV.2).
Les techniques de résolution sont plus performantes pour des systèmes diagonaux par
blocs. Il est alors souhaitable de numéroter (ou de re-numéroter) les noeuds de la structure
de façon à rendre le système diagonal par bloc.
36 Discrétisation par éléments finis

IV.2.2 Résolution du problème discrétisé


On décompose le vecteur des déplacements en deux parties : les déplacements libres [l]
(inconnus) et les déplacements prescrits [p] (connus),
 
Q[l]
Q= 
Q[p]

De même, on décompose le vecteur des forces généralisées


" #
F [l]
F =
F [p]

où F [p] correspond aux réactions d’appuis (inconnues) et F [l] correspond aux forces ap-
pliquées sur la structure (connues).
Le problème à résoudre est :

Trouver Q[l] et F [p] tels que ∀δQ,

δV = δED − δT = δQT KQ − δQT F = 0 .

L’équation précédente s’écrit alors :


   " #
K[ll] K[lp] Q[l] F [l]
[δQT[l] δQT[p] ]   = [δQT[l] δQT[p] ]
KT[lp] K[pp] Q[p] F [p]

On aboutit aux deux équations suivantes, valables ∀δQ[l] et ∀δQ[p] ,


 
δQT[l] K[ll] Q[l] + K[lp] Q[p] = δQT[l] F [l] ,
 
δQT[p] KT[lp] Q[l] + K[pp] Q[p] = δQT[p] F [p] .

soient les deux systèmes suivants à résoudre,

K[ll] Q[l] = F [l] − K[lp] Q[p] , (IV.7)


F [p] = KT[lp] Q[l] + K[pp] Q[p] . (IV.8)

Le premier système d’équations (IV.7) permet de résoudre les inconnues de déplacements


q [l] . Une fois ce système résolu, le deuxième système (IV.8) permet de résoudre les inconnues
d’efforts F [p] .
Dans le cas particulier où les déplacements imposés sont nuls sur ∂u Ω, les systèmes (IV.7)
et (IV.8) à résoudre deviennent

K[ll] Q[l] = F [l] ,


F [p] = KT[lp] Q[l] .

Le système (IV.7) est un système linéaire symétrique à résoudre, des méthodes de réso-
lution appropriées existent. Le calcul des efforts inconnus est juste une opération triviale de
multiplication matricielle.
IV.3 Structure d’un code de calcul 37

2 translations 1 translation 1 rotation aucun


et 1 rotation et 1 rotation possible mouvement
possibles possibles possible

Figure IV.3 – Exemple de blocage des modes de déplacements de solide rigide en bidimensionnel.

IV.2.3 Modes de déplacement de solide rigide


Les modes de déplacements de solide rigide QR de la structure sont ceux pour lesquels
l’énergie de déformation est nulle, soit
1 T
Q K QR = 0 avec QR 6= 0 .
2 R
Cela veut aussi dire que les forces nécessaires pour déplacer la structure sont nulles (problème
de statique, il n’y a pas d’inertie), donc on a aussi :

K QR = 0 avec QR 6= 0 .

Les modes de déplacements de solide rigide correspondent alors au vecteurs propres de K


associés à des valeurs propres nulles.
Si il existe un mode de déplacement de solide rigide, alors le système IV.7 est non
inversible car la matrice K[ll] possède une valeur propre nulle associée à ce mode de dé-
placement de solide rigide.
Pour pouvoir résoudre le système IV.7 il faut que tous les modes de déplacements de
solide rigide soient bloqués. Pour un calcul bidimensionnel, il faut bloquer les 2 translations
et la rotation (Fig. IV.3).

IV.3 Structure d’un code de calcul


Lors d’un calcul éléments finis, on effectue dans l’ordre les opérations suivantes :
• Entrée des données géométriques et matériaux
• Discrétisation de la géométrie
coordonnées des nœuds : tableau nodes
numérotation des nœuds : implicite, le nœud I est la I ième ligne de nodes
table de connectivité des éléments avec les nœuds : tableau elements
numérotation des éléments : implicite, l’élément e est la eième ligne de elements
• Calcul de K : boucle sur les éléments
calcul de Ke
assemblage de Ke dans K
• Résolution du système
identification des ddl à déplacement inconnus libres : tableau [l]
identification des ddl à déplacement connus prescris : tableau [p]
38 Discrétisation par éléments finis

résolution des ddl à déplacement inconnus :

K[ll] Q[l] = F [l] − K[lp] Q[p]

• Post-traitement :
calcul des efforts inconnus :

F [p] = KT[lp] Q[l] + K[pp] Q[p]

calcul des contraintes dans chaque élément


calcul des estimateurs d’erreurs a posteriori
visualisation graphique, exploitation et sauvegarde des résultats
V — Calcul au niveau élémentaire

V.1 Matrice de rigidité dans l’élément de référence

Le calcul de la matrice de rigidité Ke fait intervenir une intégrale dans l’élément physique
de forme parfois complexe. Cette intégrale n’est donc pas toujours possible à calculer. En
utilisant l’élément de référence, de forme simple, on peut calculer facilement cette intégrale.

L’approximation du déplacement s’écrit pour un quadrangle à 4 nœuds

 
ux1
 

 ux2 

 
 ux3 
" # " #




→ ux N1 N2 N3 N4 0 0 0 0  ux4 
u e (M ) = = 

 e e
 = N (M ) q .
uy 0 0 0 0 N1 N2 N3 N4  uy 1 
 

 uy 2 

 

 uy 3 

uy 4

où uxI −

x + uy I −

y est le déplacement du nœud I.

Cet élément est dit isoparamétrique car il fait intervenir la même approximation pour la
géométrie (passage de l’élément de référence à l’élément physique) et pour le déplacement.
On rappelle en effet que pour cet élément, les coordonnées physiques (x, y) d’un point de
40 Calcul au niveau élémentaire

l’élément en fonction de ses coordonnées de références (r, s) valent


 
x1
 

 x2 

 
 x3 
" # " #



e x N1 N2 N3 N4 0 0 0 0  x4  e e
x (M ) = = 


 = N (M ) X .
y 0 0 0 0 N1 N2 N3 N4  y1 
 

 y2 

 

 y3 

y4
Les déformations valent
ǫe = DNe (M ) q e = Be (M ) q e
avec
 

0

 ∂x 

 ∂ 
D= 0  .

 ∂y 

 ∂ ∂ 
∂y ∂x
Donc
 
N1,x ...N4,x 0...0
 
Be (M ) = 
 0...0  .
N1,y ...N4,y 
N1,y ...N4,y N1,x ...N4,x
Or Ni (r, s) est une fonction de r et s, dont les dérivées par rapport à x et y valent
∂Ni ∂Ni ∂r ∂Ni ∂s
= +
∂x ∂r ∂x ∂s ∂x
∂Ni ∂Ni ∂r ∂Ni ∂s
= + ,
∂y ∂r ∂y ∂s ∂y
ce qui s’écrit sous forme matricielle,
 
∂r ∂r
 ∂x ∂y 
h i h i 
 
N,x N,y = N,r N,s  
 
 ∂s ∂s 
∂x ∂y
| {z }
−1
=F

où F est le gradient de la transformation passant d’un point (r, s) de l’élement de référence


à son "image" (x, y) dans l’élément physique. Les dérivées des fonctions Ni (r, s) par rapport
à r et s sont facilement calculables de façon analytique :
1 1
N1,r = − (1 − s) , N1,s = − (1 − r) ,
4 4
1 1
N2,r = (1 − s) , N2,s = − (1 + r) ,
4 4
1 1
N3,r = (1 + s) , N3,s = (1 + r) ,
4 4
1 1
N4,r = − (1 + s) .N4,s = (1 − r) .
4 4
V.1 Matrice de rigidité dans l’élément de référence 41

Il reste à calculer F puis F−1 pour obtenir Ni,x et Ni,y .


Le gradient de la transformation F a pour expression
 
∂x ∂x
 ∂r ∂s 
 
F=



 ∂y ∂y 
∂r ∂s
∂x ∂x
• Calcul de ∂r
et de ∂s
4 4 4
X ∂x X ∂Ni ∂x X ∂Ni
x= N i xi , = xi , = xi
i=1
∂r i=1
∂r ∂s i=1
∂s
ce qui s’écrit aussi  
x1
 
∂x h i x 
 2 
= N1,r N2,r N3,r N4,r   ,
∂r  x3 
 
x4
 
x1
 
∂x h i x 
 2 
= N1,s N2,s N3,s N4,s   .
∂s  x3



x4
• Calcul de ∂y
∂r et de ∂y
∂s
4 4 4
X ∂y X ∂Ni ∂y X ∂Ni
y= Ni yi , = yi , = yi
i=1
∂r i=1
∂r ∂s i=1
∂s
ce qui s’écrit aussi  
y1
 
∂y h i y 
 2 
= N1,r N2,r N3,r N4,r   ,
∂r  y3 
 
y4
 
y1
 
∂y h i y 
 2 
= N1,s N2,s N3,s N4,s   .
∂s  y3 
 
y4
Finalement, on connaît F, donc F−1 et on peut calculer Be (M ).

L’expression de la matrice de rigidité du quadrangle à 4 nœuds est


Z Z 1 Z 1
e eT e e T
K = B (M ) C B (M ) dΩ = he Be (r, s) Ce Be (r, s) det F dr ds
Ωe −1 −1
e
où h est l’épaisseur de l’élément e. 

Dans la plupart des cas, l’intégration de la matrice de rigidité n’est pas possible analy-
tiquement, on utilise une intégration numérique.

Exercice V.1 Construire les fonctions de forme du cube à 8 nœuds dans l’élément de référence. Repren-
dre la démarche précédente en l’appliquant au cas tridimensionnel du cube à 8 nœuds.
42 Calcul au niveau élémentaire
f (−1) f (r)
bc
f (ri ) bc
f (1)
bc bc
bc
bc Z 1
I= f (r) dr
−1

−1 = r1 r2 ri +1 = rn

Figure V.1 – Intégration par la méthode de Newton-Côtes.

t
5 8
8
5 +1
6
6 7
7
z +1 s
1 4 +1
u3z
2 3 u3y 1
4
y r
x u3x
2 3


V.2 Intégration numérique


V.2.1 Cas unidimensionnel
Méthode de Newton-Côtes
On souhaite calculer l’intégrale I d’une fonction f (r) entre −1 et 1 (Fig. V.1) :
Z 1
I= f (r) dr .
−1

On choisit n points ri régulièrement espacés dans l’intervalle [−1, 1] avec r1 = −1 et rn = 1.


On approxime f (r) par un polynôme f˜(r) de degré n−1 prenant les valeurs f (ri ) aux points
˜ est
ri . L’expression de f(r)
n
X
f˜(r) = f (ri )Pin−1 (r)
i=1
où Pin−1 (r) est le polynôme de degré n − 1 qui vaut 1 en ri et 0 en rj6=i . En écrivant Pin−1 (r)
comme un polynôme de Lagrange, on a
Πnj=1,j6=i (r − rj )
Pin−1 (r) = .
Πnj=1,j6=i (ri − rj )
Donc l’approximation I˜ de I vaut
Z 1 n
X Z 1
I˜ = f˜(r) dr = f (ri ) Pin−1 (r) dr
−1 i=1 −1
V.2 Intégration numérique 43

nombre de points ordre du polynôme intégré exactement


2 1 (linéaire)
3 2 (parabolique)
4 3 (cubique)

Tableau V.1 – Ordre des polynômes intégrés exactement par la méthode de Newton-Côtes.

f (1)
bc


f (−1)
bc


f

−1 1
Figure V.2 – Méthode de Newton avec 2 points d’intégration - Formule des trapèzes

ou encore
n
X Z 1
I˜ = f (ri )wi avec wi = Pin−1 (r) dr
i=1 −1

que l’on sait calculer puisque les fonctions Pin−1 (r) sont connues. Les nombres wi sont
appelés poids d’intégration associés aux points d’intégration ri .
Cette méthode intègre exactement les polynômes d’ordre n−1 avec n points d’intégration,
(tableau V.1) puisque f˜(r) reproduit exactement les polynômes de degré n − 1. Les figures
V.2 et V.3 montrent de façon graphique l’intégration d’une fonction avec 2 puis 3 points
d’intégration.
Si f (r) = 1, alors
Z 1 n
X
I˜ = I = 1 dr = 2 = wi
−1 i=1
On remarque que la somme des poids d’intégration est toujours égale à la longueur de
l’intervalle intrégré, soit 2 ici.

Exercice V.2 Trouver les poids associés à 3 points d’intégration placés en −1, 0 et 1 (fig. V.3). 

Méthode de Gauss
En choisissant judicieusement les points d’intégration, on peut intégrer exactement les
polynômes d’ordre 2n − 1 avec n points.

f (−1)
bc
f (1)
f˜ bc
f (0)
bc

f

−1 1
Figure V.3 – Méthode de Newton avec 3 points d’intégration - Formule de Simpson
44 Calcul au niveau élémentaire

nombre de points ordre du polynôme intégré exactement


1 1
2 3
3 5

Tableau V.2 – Ordre des polynômes intégrés exactement par la méthode de Gauss.

Les coordonnées et les poids des points peuvent être trouvés analytiquement. Pour illus-
trer la méthode, on cherche les points et leurs poids qui permettent d’intégrer exactement
les polynômes d’ordre 3 avec 2 points. La fonction f à intégrer vaut

f (r) = a0 + a1 r + a2 r2 + a3 r3

et son intégrale entre −1 et 1 vaut


Z 1 2
I= f (r) dr = 2a0 + a2 .
−1 3
On prend 2 points d’intégration, symétriques par rapport à 0, r1 = −R et r2 = R ayant
pour poids w1 = w2 = w. D’aprés l’éq.(V.1), on a

I˜ = wf (−R) + wf (R)

soit

I˜ = w(2a0 + 2a2 R2 ) = 2w(a0 + a2 R2 ) .

Il faut que I = I˜ pour que f soit intégrée exactement, et ce quelques soient a0 , a1 , a2 et a3


donc
2 1
I = I˜ ⇔ 2a0 + a2 = 2w(a0 + a2 R2 ) ⇔ w = 1 et R2 = .
3 3
Finalement, en prenant comme points d’intégration r1 = − √13 et r2 = √1
3
avec comme poids
w1 = w2 = 1, on intègre exactement tous les polynômes d’ordre 3.
On peut généraliser pour les polynômes d’ordre 2n − 1 (tab. V.2). Le tableau V.3 donne
les positions et les poids des points de Gauss pour n de 2 à 7. L’avantage d’utiliser une
intégration par points de Gauss est que cela nécessite moins de points ce qui entraine un
gain dans le temps de calcul.

V.2.2 Choix de l’ordre d’intégration : application au quadrangle


La matrice de rigidité pour un quadrangle vaut :
Z 1 Z 1
e T
K = he Be (r, s) Ce Be (r, s) det F dr ds .
−1 −1

La base d’approximation du déplacement pour le quadrangle à 4 nœuds est [ 1 r s rs ] ;


en dérivant cette base par rapport à r d’une part et s d’autre part, on obtient la base de
B(r, s) soit [ 1 r s ].
En supposant que l’élément physique soit un rectangle (Fig. V.4), le déterminant de la
transformation det F est constant. En effet,
V.2 Intégration numérique 45

nb points ordre ri wi
2 3 ±0,5773502692 1,0000000000

3 5 ±0,7745966692 0,5555555556
0,0000000000 0,8888888889

4 7 ±0,8611363116 0,3478548451
±0,3399810436 0,6521451549

5 9 ±0,9061798459 0,2369268850
±0,5384693101 0,4786286705
0,0000000000 0,5688888889

6 11 ±0,9324695142 0,1713244924
±0,6612093865 0,3607615730
±0,2386191861 0,4679139346

7 13 ±0,9491079123 0,1294849662
±0,7415311856 0,2797053915
±0,4058451514 0,3818300505
0,0000000000 0,4179591837

Tableau V.3 – Positions et poids des points d’intégration de la méthode de Gauss.

y s

1
r
x −1 1
ly
−1

lx
Figure V.4 – Elément quadrangle de forme rectangulaire.
46 Calcul au niveau élémentaire

s
1
√1
3
r

− √13
−1
−1− √1 √1 1
3 3

Figure V.5 – Intégration par points de Gauss d’un élément quadrangle.

   
∂x ∂x lx
 ∂r 0 
lx ly  ∂s 

 2
 
x= r ; y= s; F = = 
2 2    
 ∂y ∂y   ly 
0
∂r ∂s 2

lx ly aire élément physique


det F = =
4 aire élément référence
En prenant de plus un matériau homogène dans l’élément, C est aussi constant. Finale-
ment, la base à intégrer est celle de B(r, s) au carré, soit

[ 1 r s ] × [ 1 r s ] = [ 1 r s r2 s2 rs ]

On peut alors identifier les termes de plus haut degré dans chaque direction : 2 pour r et s
dans ce cas. On trouve le nombre de points de Gauss n en écrivant 2n − 1 > 2 soit n = 2
dans chaque direction (Fig. V.5).
L’expression du calcul de la matrice de rigidité est alors
2 X
X 2
T
Ke = h wi wj Be (ri , sj ) Ce Be (ri , sj ) det F(ri , sj ) .
i=1 j=1

On peut résumé ainsi l’algorithme de calcul de K par intégration numérique :


1. Initialiser K e à zéro
2. Pour chaque point de Gauss g faire

(a) Initialiser kg à zéro


(b) Déterminer les coordonnées (rg , sg ) et le poids wg du point de Gauss
(c) Evaluer N1,r |g ; N1,s |g ;... N4,s |g au point de Gauss g
(d) Evaluer F |g
(e) Evaluer F −1 |g
(f) Evaluer B|g
(g) Evaluer la contribution kg du point de Gauss à K e

kg = he BT |g C B|g det F|g wg


V.2 Intégration numérique 47

ρ ρ
ρ ρ h h
h
h h
ρ
≈1 ρ
>1
Figure V.6 – Taux de distorsion pour le quadrangle.

(h) Ajouter kg à K e :
K e = K e + kg

3. Calculer la matrice de localisation βe


4. Assembler K e dans K :
K = K + βeT K e βe

Le calcul des forces extérieures sur l’élément se fait aussi par intégration numérique par
la même stratégie d’intégration.

V.2.3 Critère de qualité du maillage


Dans la pratique, l’élément n’est jamais un rectangle, donc la transformation F n’est pas
constante ce qui engendre des erreurs dans le calcul numérique par points de Gauss de la
matrice de rigidité. Cette erreur est maitrisée en contrôlant la qualité du maillage.
Les éléments doivent être le plus proche possible de la forme de l’élément de référence
associé. On peut par exemple utilisé le taux de distorsion d’un élément (Fig. V.6) défini
comme le rapport entre la plus grande longueur h sur le diamètre du plus grand cercle
inscrit ρ ; le critère est alors :
h
< valeur donnée (de 3 à 10 généralement)
ρ
D’autres critères de qualité de maillage propres à chaque logiciel de maillage ou code de
calcul existent, ils sont détaillés dans les notices d’utilisation.
VI — Eléments de structure

VI.1 Elément fini de barre

VI.1.1 Fonctions de forme

On désigne par barre une poutre travaillant seulement en traction-compression. Typique-


ment, les treillis de poutres sont souvent approximés dans un premier temps comme un
ensemble de barres rotulées entre elles.
Un élément de barre et représenté par un segment de droite reliant les deux extrémités
de la barre (Fig. VI.1). La barre est caractérisée par sa longueur l, par l’aire de sa section
S et par son module d’Young E. Les extrémités sont appelés les nœuds de la barre, ils ont
pour abscisses x1 = 0 et x2 = l.
Le déplacement participant à la déformation de la barre est porté par l’axe de la barre
noté −

x . On note les déplacements des nœuds 1 et 2 respectivement u −→x, u −→
x.
1 2

On approxime de façon linéaire le déplacement u(x) d’un point d’abscisse x en fonction



y
l1 (x) l2 (x)
1 x 2 −

x
Avant déformation :
u1 u(x) u2

Aprés déformation :

Figure VI.1 – Elément barre à 2 nœuds.


50 Eléments de structure

1 x
N1 (x) = 1 − l
x
N2 (x) = l

x
bc bc
0 l

Figure VI.2 – Fonctions de forme de l’élément barre.

des déplacements u1 et u2 des nœuds (calcul barycentrique) :


l1 (x)u1 + l2 (x)u2
u(x) = .
l
La valeur du poids du nœud 1 est l1 (x), c’est la distance entre le point M (x) et le nœud 2.
De même, la valeur du poids du nœud 2 est l2 (x), c’est la distance entre le point M (x) et
le nœud 1. La somme des poids est l1 (x) + l2 (x) qui vaut la longueur de l’élément l.
En prenant l’origine du repère de l’élément au nœud 1, on a :

l1 (x) = l − x et l2 (x) = x

soit en remplaçant dans l’expression de u(x)


 x x
u(x) = 1 − u1 + u2 .
l l
En posant
x x
N1 (x) = 1 − et N2 (x) = ,
l l
on a

u(x) = N1 (x)u1 + N2 (x)u2 . (VI.1)

La fonction N1 est appelée fonction d’interpolation ou fonction de forme associée au nœud


1. De même, la fonction N2 est appelée fonction de forme associée au nœud 2. La figure
VI.2 donne la représentation graphique de N1 et de N2 . On remarque que

∀x ∈ [0, l], N1 (x) + N2 (x) = 1.

On retrouve les fonctions calculées en utilisant les polynômes de Lagrange avec 2 points
ou bien en résolvant le système de 2 équations à 2 inconnues construit à partir de la base
[ 1 x ].
L’expression du déplacement d’un point quelconque de la barre en fonction des déplace-
ments aux nœuds s’écrit aussi
" #
u1
u(x) = [ N1 (x) N2 (x) ] = N(x) q
u2
avec " #
u1
N(x) = [ N1 (x) N2 (x) ] et q = .
u2
VI.1 Elément fini de barre 51

VI.1.2 Energie de déformation


L’état de traction-compression est caractérisé par l’opérateur des contraintes suivant :
 
σxx 0 0
 
σ=
 0 0 0 
 .
0 0 0 (→−
x ,→

y ,→

z)

Le calcul de l’énergie de déformation se réduit dans ce cas à


Z Z
1 1
ED = σ : ǫ dΩ = σxx ǫxx dΩ.
2 Ω 2 Ω
et la relation de comportement devient

σxx = E ǫxx

où E est le module d’Young. Donc l’énergie de déformation s’écrit


Z
1
ED = E ǫ2xx dΩ.
2 Ω
La déformation ǫxx est fonction du déplacement u(M ) suivant −→x et vaut
du
.
ǫxx =
dx
En remplaçant dans l’expression de l’énergie de déformation, on obtient
Z
1  du 2
ED = E dΩ.
2 Ω dx
L’intégrale dans Ω peut être décomposée en une intégrale dans la section à x constant puis
d’une intégrale le long de l’axe de la poutre suivant x :
ZZ Z l
1  du 2
ED = E dx dS.
2 S 0 dx
En remarquant que ZZ
dS
S
est égal à l’aire de la section S et avec E constant, on a
Z l
1  du 2
ED = ES dx
2 0 dx

VI.1.3 Matrice de rigidité en fonction des déplacements locaux


L’énergie de déformation est donnée par l’équation
Z l
1  du 2
ED = ES dx
2 0 dx
en fonction du déplacement. Cette expression fait intervenir la dérivée de u(x) par rapport
à x. En remplaçant :
du(x) dN(x)
= q
dx dx
h d  x d x i
= 1− q
dx l dx l
h 1 1 i
= − q,
l l
52 Eléments de structure

soit
du(x)
=Bq
dx
avec la matrice B qui vaut
h 1 1 i
B= − .
l l
On remarque que l’on a aussi l’expression
du(x)  T
= B q = q T BT
dx
donc  du(x) 2
du(x) du(x)
= q T BT B q.
=
dx dx dx
En remplaçant dans l’expression de l’énergie de déformation, on a
Z l
1
ED = ES q T BT B q dx.
2 0

En remarquant que q ne dépend pas de x, on a alors


Z l
1 T   1
ED = q ES B(x)T B(x) dx q = q T Kq
2 0 2
avec K qui est appelée matrice de rigidité et qui vaut
Z l
K = ES BT B dx.
0
En remplaçant B par son expression on a
 
1
 −l 
Z l
h 1 1 i
K = ES  1  − dx
0 l l
l
Z l" #
ES 1 −1
= dx
l2 0 −1 1
" #
ES 1 −1
=
l −1 1

La matrice de rigidité de l’élément barre est donc


" #
ES 1 −1
K= .
l −1 1

Cette matrice est équivalente à la matrice de rigidité d’un ressort avec une raideur
ES
k= l .

VI.1.4 Matrice de rigidité en fonction des déplacements globaux


Dans leur environnement, les barres composant un treillis sont positionnées arbitrairement

→ − →
dans l’espace et font des angles différents avec le repère global de la structure ( X , Y ) (Fig.
VI.3).
VI.1 Elément fini de barre 53



Y
u2Y −

x
2

u2X
u1Y θ


X
1
u1X

Figure VI.3 – Elément barre dans une base globale.



On note θ l’angle entre l’axe X du repère global et l’axe −

x du repère local à la barre.
Le vecteur déplacement d’un point de la barre s’écrit dans le repère local


u = u−

x.

Il s’écrit dans le repère global



→ −
→ −

u = uX X + uY Y .

En projetant les deux équations précédentes sur −



x il vient

u = uX cos θ + uY sin θ.

→ − →
En notant u1X et u1Y les déplacements suivant X et Y du nœud 1 de la barre dans le repère
global, et en appliquant la formule précédente au nœud 1, on a

u1 = u1X cos θ + u1Y sin θ.

En utilisant les mêmes notations pour le nœud 2, on a

u2 = u2X cos θ + u2Y sin θ.

Ceci peut s’écrire sous la forme matricielle suivante


 
u1X
" # " # 
u1 cos θ sin θ 0 0  u1 
 Y 
=  2 
u2 0 0 cos θ sin θ   uX


| {z } 2
=T uY
| {z }
=Q

soit
q = TQ

où Q est le vecteur des inconnus de déplacements aux nœuds de l’élément dans le repère
global et T est la matrice de transformation passant du repère global au repère local.
En remplaçant dans l’expression de l’énergie de déformation, on a
1 T
ED = q Kq = (TQ)T KTQ = QT |TT{z
KT} Q
2
=KGlobal
54 Eléments de structure

−yθ
θ


y θ

y
w(x) −

x
0 x l

Figure VI.4 – Elément de poutre en flexion.

où KGlobal est une matrice 4×4, c’est la matrice de rigidité l’élément barre pour les inconnus
de déplacements dans le repère global. Tous calculs faits, on trouve

 
cos2 θ cos θ sin θ − cos2 θ − cos θ sin θ
 
ES 
 cos θ sin θ sin2 θ − cos θ sin θ − sin2 θ 

KGlobal =  .
L 
 − cos2 θ − cos θ sin θ cos2 θ cos θ sin θ 

2
− cos θ sin θ − sin θ cos θ sin θ sin2 θ

VI.2 Elément fini de poutre


VI.2.1 Description de l’élément
Soit un élément de poutre de longueur l, de section S, de module d’Young E et de moment
d’inertie de section I (Fig. VI.4). Les deux extremités de la poutre sont les nœuds 1 et 2
d’abscisses respectives 0 et l.
On utilise les notations suivantes :
– w(x) : déplacement suivant − →y d’un point M d’abscisse x,
– θ(x) : rotation de la section en M ,
– w1 : déplacement suivant − →
y du nœud 1,


– w : déplacement suivant y du nœud 2,
2
– θ1 : rotation de la section au nœud 1,
– θ2 : rotation de la section au nœud 2,
– F1 : force extérieure suivant −
→y au nœud 1,


– F : force extérieure suivant y au nœud 2,
2
– M1 : moment extérieur suivant −

z au nœud 1,


– M2 : moment extérieur suivant z au nœud 2.

VI.2.2 Energie de déformation


On fait l’hypothèse de Bernoulli, c’est à dire qu’une section initiallement plane et per-
pendiculaire à la ligne moyenne reste plane et perpendiculaire à la ligne moyenne après
déformation. On a alors la relation
dw(x)
θ(x) = = w′ (x)
dx
VI.2 Elément fini de poutre 55

car w′ (x) représente la pente de la déformée qui est assimilable à l’angle de rotation dans le
cas de petites rotations. Le déplacement d’un point situé à la cote y de la fibre neutre vaut
alors (Fig. VI.4) :

→ x = −yw′ (x)−
u (M ) = −yθ(x)−
→ →
x.

La déformation axiale ǫxx associée à ce déplacement vaut


∂(−yw′ (x))
ǫxx = = −yw′′ (x)
∂x
et la contrainte axiale vaut
σxx = Eǫxx = −yEw′′ (x).

en faisant l’hypothèse que seul ǫxx n’est pas nul.


L’énergie de déformation vaut alors
Z Z
1 1
ED = σ : ǫ dΩ = σxx ǫxx dΩ
2 Ω 2 Ω

qui vaut en remplaçant σxx et ǫxx par leurs valeurs et en séparant l’intégrale en une intégrale
dans la section S et une intégrale dans la direction axiale x :
Z l Z
1  2
ED = E y 2 dS w′′ (x) dx.
2 x=0 S
R
Or on sait que S y 2 dS est égal à I le moment quadratique de la section autour de l’axe


z , on a finalement

Z l
1  2
ED = EI w′′ (x) dx.
2 x=0

VI.2.3 Fonctions de forme


On cherche w(x) sous la forme d’un polynôme de degré 3 :

w(x) = ax3 + bx2 + cx + d

donc
w′ (x) = 3ax2 + 2bx + c

On souhaite exprimer w(x) en fonction de w1 , w2 , θ1 et θ2 . Les conditions suivantes

w(0) = w1 ; w(l) = w2 ; w′ (0) = θ1 ; w′ (l) = θ2 ;

donnent le système suivant

d = w1
al3 + bl2 + cl + d = w2
c = θ1
2
3al + 2bl + c = θ2
56 Eléments de structure

qui est un système de 4 équations à 4 inconnues et qui a pour solution


1 1
a= (2w1 − 2w2 ) + 2 (θ1 + θ2 )
l3 l
3 1
b = 3 (w2 − w1 ) − (2θ1 + θ2 )
l l
c = θ1
d = w1 .

On peut finalement écrire w(x) en fonction de w1 , w2 , θ1 et θ2 comme

w(x) = N1 (x)w1 + N2 (x)θ1 + N3 (x)w2 + N4 (x)θ2

avec
2 3 3 2 1 2
x − 2 x + 1 ; N2 (x) = 2 x3 − x2 + x
N1 (x) =
3
l l l l
2 3 3 2 1 3 1 2
N3 (x) = − 3 x + 2 x ; N4 (x) = 2 x − x
l l l l
On retrouve bien sur les mêmes fonctions que celles trouvées précédemment dans le para-
graphe interpolation de type Hermite.
On peut aussi noter
w(x) = N(x)q = q T N(x)T

avec
N(x) = [ N1 (x) N2 (x) N3 (x) N4 (x) ]

qui est la matrice des fonctions de forme et

q = [ w1 θ 1 w2 θ 2 ] T

qui est le vecteur des inconnues aux nœuds de l’élément.

VI.2.4 Matrice de rigidité


On utilise l’expression de l’énergie de déformation en fonction de w′′ (x) pour calculer la
matrice de rigidité. On a besoin dans un premier temps de calculer w′′ (x) :
d2 (N(x)q) d2 N(x)
w′′ (x) = = q = N′′ (x)q = q T N′′ (x)T .
dx2 dx2
Ce terme est calculable puisque l’on connait N(x) en fonction de x. On a

N′′ (x) = [ N1′′ (x) N2′′ (x) N3′′ (x) N4′′ (x) ]

avec
2 3 6  2 3 
− + 2 x ; N2′′ (x) =
N1′′ (x) = −2+ x
l l l l l
2 3 6  2  3 
N3′′ (x) = − 2 x ; N4′′ (x) = −1+ x .
l l l l l
Pour calculer la matrice de rigidité, il faut maintenant remplacer w′′ (x) dans l’expression
de l’énergie de déformation. On obtient dans un premier temps
 2
w′′ (x) = w′′ (x)w′′ (x) = q T N′′ (x)T N′′ (x)q
VI.3 Elément fini de plaque 57

h


z


y



x S : plan moyen
Figure VI.5 – Structure de type plaque.

et en remplaçant dans l’énergie de déformation, on a


Z l Z l
1 1 T
ED = EI q T N′′ (x)T N′′ (x)q dx = q EI N′′ (x)T N′′ (x) dx q.
2 x=0 2 | x=0
{z }
matrice de rigidité

Finalement, en posant K la matrice de rigidité,


Z l
K = EI N′′ (x)T N′′ (x) dx,
x=0

l’énergie de déformation devient


1
ED = q T Kq.
2
La matrice de rigidité de l’élément poutre de flexion est une matrice 4 × 4. Elle vaut après
calcul des intégrales

 
6 3l −6 3l
 
2EI  3l 2l2 −3l l2 
 
K= 3  
l  −6 −3l
 6 −3l 

3l l2 −3l 2l2

VI.3 Elément fini de plaque


VI.3.1 Hypothèses de plaque
Hypothèses sur le comportement
Une plaque est un domaine dont une dimension est plus petite que les deux autres (Fig.
VI.5). Le plan moyen (noté S) de la plaque a pour repère (−

x ,−

y ). La troisième direction −

z
est celle de l’épaisseur h. La différence géométrique entre une plaque et une coque est que
la coque possède un rayon de courbure. Ce rayon de courbure provoque un couplage appelé
membrane-flexion : si la coque est sollicitée avec un effort perpendiculaire au plan tangent,
(plan moyen pour la plaque) elle travaille en flexion mais aussi en traction contrairement à
la plaque (Fig. VI.6).
58 Eléments de structure

N = 0 ; Mf 6= 0 N 6= 0 ; Mf 6= 0
Figure VI.6 – Différence entre une plaque et une coque.

La première hypothèse suppose que la contrainte σzz est nulle dans toute la plaque. La
loi de comportement s’écrit alors :
1+ν ν 1+ν
ǫxx = E σxx − E (σxx + σyy ) ǫxy = E σxy
1+ν ν 1+ν
ǫyy = E σyy − E (σxx + σyy ) ǫxz = E σxz
1+ν
ǫzz = − Eν (σxx + σyy ) ǫyz = E σyz

En inversant les relations, on montre que

    
σxx 1 ν 0 0 0 ǫxx
    
 σyy  ν 1 0 0 0 
  ǫyy
  



 E 
 1−ν 


σ =  σxy =  0 0 0 0   2ǫxy  = Cǫ .

 σ
 1 − ν2 
 0
2
1−ν
 
 xz

  0 0 2
0   2ǫxz
 

1−ν
σyz 0 0 0 0 2
2ǫyz
| {z }
=C

Les effets peuvent être décomposés en deux parties : partie plane (xx, yy, xy) et partie
hors plan (xz, yz). La partie dans le plan est due aux effets de membrane et de flexion tandis
que la partie hors plan est appelée cisaillement transverse.

Hypothèses cinématique
La cinématique peut être décomposée en 2 effets :
– flexion : rotation des segments perpendiculaires au plan moyen et déplacement suivant

→z
– membrane : déplacement suivant −

x et −

y.
Un point de la plaque est noté M (x, y, z), sa projection sur le plan moyen est notée
m(x, y). Le déplacement de m est noté



u (m) = u(x, y)−

x + v(x, y)−

y + w(x, y)−

z

Le déplacement de M vaut



u (M ) = uM (x, y, z)−

x + v M (x, y, z)−

y + wM (x, y, z)−

z

La rotation d’un segment autour de −



x (1) est notée βy , la rotation autour de −

y est notée
βx .
(1) en toute rigueur −→

x
VI.3 Elément fini de plaque 59

βx βy


z −

z

M −
→ −

z x h z y
m



z u −

z v −

z



x −

y
w

Figure VI.7 – Cinématique de plaque.

Le déplacement de M s’écrit


→ −−→ −

u (M ) = −

u (m)+M m∧ Ω = u(x, y)−

x +v(x, y)−

y +w(x, y)−

z −z −

z ∧(−βy (x, y)−

x +βx (x, y)−

y)

soit

 
u(x, y) + zβx (x, y)

→ 
u (M ) =  v(x, y) + zβ (x, y)


 y 
w(x, y)

Ecriture de la relation déformations-déplacement


– Partie plane des déformations
     
ǫxx u,x βx,x
     
 ǫyy  = 
ǫ̃ =    v,y  +z 
  βy,y 

2ǫxy u,y + v,x βx,y + βy,x
| {z } | {z }
=e =χ
– Partie hors plan des déformations : cisaillement transverse
" # " #
2ǫxz βx + w,x
γ= =
2ǫyz βy + w,y
Deux hypothèses sont classiquement utilisées pour les plaques ; Kirchoff-Love ou Reissner-
Mindlin (Fig. VI.8) :
– L’hypothèse de Kirchoff-Love est l’équivalent de Euler-Bernoulli pour les poutres,
on suppose que le cisaillement transverse est nul :

ǫxz = ǫyz = 0.
60 Eléments de structure



z Kirchoff

Mindlin

Figure VI.8 – Différences entres les modèles cinématiques de Kirchoff-Love et Reissner-Mindlin

Ceci entraine que βx = −w,x et βy = −w,y . D’un point de vue cinématique cela veut
dire qu’une section initialement plane et perpendiculaire à la surface moyenne le reste
aprés déformation. D’un point de vue interpolation par éléments finis, il faut alors
qu’il y ait compatibilité entre w et les rotations βx et βy . L’interpolation de w est
généralement d’ordre 3 et les fonctions de forme sont des polynômes d’Hermite. Ce
modèle est adapté aux plaques élancées
– L’hypothèse de Reissner-Mindlin est l’équivalent de Timoshenko pour les poutres,
on prend en compte le cisaillement transverse et aucune autre hypothèse n’est faite.
Les interpolations de w et des rotations peuvent être différentes. Ce modèle est adapté
aux plaques dites épaisses.

Ecriture de la relation de comportement


Avec l’hypothèse des contraintes planes, la loi de comportement s’écrit
" #
T σ̃
σ = [ σxx σyy σxy σxz σyz ] =
τ
avec     
σxx 1 ν 0 ǫxx
  E   
σ̃ = 
 σyy  = 1 − ν 2  ν 1
  0   ǫyy  = C̃ǫ̃
 
1−ν
σxy 0 0 2
2ǫxy
et  "
E
#
2(1+ν)
0 2ǫxz
τ = E
 = CCT γ
0 2(1+ν) 2ǫyz

Energie de déformation
Z Z " #
1 T 1 T T ǫ̃
ED = σ ǫ dΩ = [ σ̃ τ ] dΩ
2 Ω 2 Ω γ
Z " #" #
1 C̃ 0 e + zχ
ED = [ (e + zχ)T γ T ] dΩ
2 Ω 0 CCT γ
Z Z h
1 2
n o
ED = eT C̃e + z 2 χT C̃χ + zχT C̃e + zeT C̃χ +γ T CCT γ dz dS
2 S − h2 | {z }
R h
=0 car −h
2
z=0
2
VI.3 Elément fini de plaque 61

h3 T
Z n
1 o
ED = heT C̃e + χ C̃χ + hγ T CCT γ dS
2 S 12

Finalement, en posant
   
1 ν 0 1 ν 0 " #
Eh   Eh3   Eh 1 0
Cm =  ν 1 0  ; Cf =  ν 1 0  ; Cc =
1 − ν2  1−ν
 12(1 − ν 2 )  1−ν
 2(1 + ν) 0 1
0 0 2
0 0 2

on a
Z Z Z
1 1 1
ED = eT Cm e dS + χT Cf χ dS + γ T Cc γ dS
2 S 2 S 2 S

où Z
1
eT Cm e dS est l’énergie de déformation due à la membrane,
2 S
Z
1
χT Cf χ dS est l’énergie de déformation due à la flexion,
2 S
Z
1
γ T Cc γ dS est l’énergie de déformation due au cisaillement transverse.
2 S

VI.3.2 Discrétisation d’un élément de Reissner-Mindlin


Matrice de rigidité
L’élément de plaque développé ici prend en compte le cisaillement transverse. Les déplace-
ments et les rotations sont interpolées dans un élément par les mêmes fonctions de formes :
X X
u(x, y) = NI (x, y)uI = NU ; v(x, y) = NI (x, y)vI = NV
I I
X X
w(x, y) = NI (x, y)wI = NW ; βx (x, y) = NI (x, y)βIx = Nβx
I I
X
βy (x, y) = NI (x, y)βIy = Nβy
I

où U , V , W , βx et βy sont respectivement les déplacements et rotations aux nœuds du


maillage. Le calcul au niveau élémentaire étant similaire aux autres éléments (élasticité
plane par exemple), il n’est pas détaillé ici. De même, aucune forme d’élément n’est imposée
(triangle ou quadrangle).
La partie plane des déformations e vaut
     
∂ ∂
u,x ∂x 0 " # ∂x 0 " #" #
   ∂
 u  ∂
 N 0 U
e=
 v,y = 0
  ∂y

 =
 0 ∂y


∂ ∂
v ∂ ∂
0 N V
u,y + v,x ∂y ∂x ∂y ∂x
 
N,x 0 " # " #
  U U
e=
 0 N,y 
 = Bm
V V
N,y N,x
62 Eléments de structure



z

S


y
Fz
fz
L

fy


x fx
Figure VI.9 – Forces extérieures appliquées sur la plaque.

La partie flexion des déformations χ vaut


     
∂ ∂
βx,x ∂x
0 " # ∂x
0 " #" #
   ∂
 βx  ∂
 N 0 βx
χ=
 βy,y = 0
  ∂y

 =
 0 ∂y


∂ ∂
βy ∂ ∂
0 N βy
βx,y + βy,x ∂y ∂x ∂y ∂x
 
N,x 0 " # " #
  βx βx
χ=
 0 N,y 
 = Bf
βy βy
N,y N,x
La partie cisaillement transverse des déformations γ vaut
    
" # 

 w 

 N 0 0 W
βx + w,x ∂x 1 0   ∂x 1 0   
γ= = ∂
  βx  = 
  ∂
 0 N   βx 
0   
βy + w,y ∂y 0 1 ∂y 0 1 
βy 0 0 N βy
   
" # W W
N,x N 0    
γ=  βx  = Bc  βx 
   
N,y 0 N
βy βy
En remplaçant dans l’énergie de déformation, il vient
 
Z n " # " # W
1 U βx  o
ED = [ U T V T ]BTm Cm Bm +[ βx T βy T ]BTf Cf Bf +[ W T βx T βy T ]BTc Cc Bc 
 βx  dS

2 S V βy
βy
 h i 
Z  BTm Cm Bm 0
1 T   
ED = Q

 BTc Cc Bc ... 
 dSQ
2 S 0  . h i  
.. +BTf Cf Bf

avec Q = [ U T V T W T βx T βy T ]T . 

Vecteur des forces extérieures généralisées


Les forces extérieures sont appliquées sur le contour de la plaque ainsi que sur une des faces
(fig. VI.9). Sur le contour les forces surfaciques sont notées [ fx fy fz ]. On suppose que
VI.3 Elément fini de plaque 63


→x

→ 3
Y 2
→ −
− →
y
X

→ 1
Z

Figure VI.10 – Elément de plaque dans l’espace.

la force surfacique appliquée sur la plaque n’est portée que par −



z et vaut Fz . On note s
l’abscisse curviligne sur la ligne moyenne L du contour de la plaque. Le travail des efforts
extérieurs vaut
 
Z u(x, y) + zβx (x, y) Z
 
T =  v(x, y) + zβy (x, y)  +
[ fx fy fz ]   Fz w(x, y)
contour, surface S
w(x, y)
Z nZ h Z h Z h
2 2 2
= fx dz u(x, y) + fy dz v(x, y) + fz dz w(x, y)
contour, ligne=L − h2 − h2 − h2
| {z } | {z } | {z }
=tx (s) =ty (s) =tz (s)
Z h Z h o Z
2 2
+ zfx dz βx + zfy dz βy ds + Fz w(x, y)
− h2 − h2 S
| {z } | {z }
=mx (s) =my (s)

où tx (s), ty (s) et tz (s) sont respectivement les efforts linéiques sur le contour de la plaque
suivant −→
x, − →y et −
→z , et où m (s) et m (s) sont les moments linéiques sur le contour suivant
x y


y et −

x . En discrétisant les déplacements et rotations, on obtient
Z Z Z
T = tx (s)Nds U + ty (s)Nds V + tz (s)Nds W
L L L
Z Z Z
+ mx (s)Nds βx + my (s)Nds βy + Fz NdS W
L L S
Ce qui conduit au vecteur des forces généralisée
 R 
L tx (s)Nds
 R 
L ty (s)Nds
 
 R R 
 
F =  L tz (s)Nds + S Fz NdS 
 R 
 mx (s)Nds 
RL
 
L my (s)Nds

VI.3.3 Assemblage de plaques dans l’espace


Les éléments de plaques peuvent être utilisés pour calculer des structures composées de
plaques dans l’espace. Ils peuvent aussi être utilisés pour modéliser des coques.
L’élément triangle est utilisé pour illustrer la démarche (Fig. VI.10). Cet élément est

→ − → − →
placé dans l’espace associé au repère global ( X , Y , Z ). Pour chaque élément on définit un
repère local plan (−

x ,−
→y ,−

z):

→ −

– L’axe x est porté par le vecteur 12 reliant le nœud 1 au 2 :

→ −
→ −


→ 12 −
→ x ∧ 13
x = − → ; z = −
→ −
→ ; −→y =−→
z ∧− →x
k 12 k k x ∧ 13 k
64 Eléments de structure

– Le vecteur −

z est construit de façon à être perpendiculaire au triangle :

→ −


→ x ∧ 13
z = −
→ ;
k−

x ∧ 13 k

– on en déduit l’axe −

y


y =−

z ∧−

x

Le déplacement et la rotation d’un segment dans le repère global sont notés :



→ −
→ −
→ −
→ −
→ −
→ −
→ −

u = UX X + UY Y + UZ Z et Ω = θX X + θY Y + θZ Z

Le déplacement et la rotation d’un segment dans le repère local sont notés :



→ −

u = u−

x + v−

y + w−

z et Ω = −βy −

x + βx −

y

Avec ces précédentes notations, on obtient les relations suivantes :



→ −
→ −
→ −
→ −
→ −

u=−

x · (UX X + UY Y + UZ Z ) ; v = −

y · (UX X + UY Y + UZ Z )

→ −
→ −
→ −
→ −
→ −

w=−

z · (UX X + UY Y + UZ Z ) ; βx = − →
y · (θX X + θY Y + θZ Z )

→ −
→ −

βy = −−
→x · (θX X + θY Y + θZ Z )

Ces relations écrites sous forme de matrice deviennent

 
 −
→ −
→ → − → −
→ UX
x ·X − −

  
u x ·Y x ·Z 0 0 0  
  → − → − −
→ −
→  UY 
 v   − X → −


  y ·− y ·Y y ·Z 0 0 0  
 UZ 

  → → − −
→ −


 w = −
z ·X → −

 
z ·Y z ·Z 0 0 0 


  

→ −
→ −
→ −
→ −
→ −
→   θX 
 β  
 x   0 0 0 y ·X y ·Y y · Z 
 

→ −
→ −
→  θY 
−−
→x · X −−
→ −−
→  
βy 0 0 0 x ·Y x ·Z
| {z } | {z } θZ
Q T | {z }
2d
Q
3d

où la matrice T de taille 5 × 6 est appelée matrice de transformation. L’énergie de


déformation vaut alors
1 1
ED = QT2d K2d Q2d = QT3d T T K2d T Q3d
2 2 | {z }
=K3d

où K2d est la matrice de rigidité de l’élément de plaque dans son plan vue dans la section
précédente.

La matrice de rigidité de la plaque dans l’espace vaut donc

K3d = T T K2d T .
VII — Estimation des erreurs

VII.1 Lissage des contraintes


On note Qh le vecteur des déplacements aux nœuds solution du problème discrétisé. Pour
l’élément triangle à 3 nœuds et dans le cadre de l’élasticité plane, le vecteur contenant les
contraintes s’écrit :  
σxx
 
σh = 
 σyy  = CBQ
 h

σxy
où C est la matrice de comportement et B est l’opérateur gradient discrétisé généralisé à
l’ensemble du maillage. Pour le triangle T3, l’opérateur B étant constant dans un élément,
les contraintes sont constantes dans un élément. Une solution pour rendre la solution en
contraintes plus proche de la solution exacte est de faire un lissage (Fig. VII.1).
On cherche une nouvelle approximation des contraintes σ̃ basée sur les fonctions de

σ
y

x
Contrainte éléments finis σ h Contrainte lissée σ̃

Figure VII.1 – Contrainte obtenue par éléments finis et contrainte lissée.


66 Estimation des erreurs

forme. On note σ̃ une des composante de σ̃ et σ h une des composantes de σ h . En notant Σ


le vecteur qui contient les contraintes aux nœuds du maillage, σ̃ s’écrit sous la forme :
 
σ˜1
 
 σ˜2 
 = N T Σ = ΣT N
 
σ̃ = [ N1 N2 ... Nn ]  ..

 . 

σ˜n

où n est le nombre de nœuds.


L’objectif est de trouver σ̃ et donc le vecteur Σ permettant d’approcher au mieux σ h .
Ceci est réalisé par une minimisation par les moindres carrés :
Trouver Σ minimisant Z
1
(σ̃ − σ h )2 dΩ
J=
2 Ω
En remplaçant par la valeur discrétisée de σ̃, on a
Z
1
J= (σ̃ − σ h )(σ̃ − σ h ) dΩ
2 Ω
Z
1
J= (ΣT N − σ h )(N T Σ − σ h ) dΩ
2 Ω
Z Z Z
1 1 2
J = ΣT N N T dΩ Σ − ΣT N σ h dΩ + σ h dΩ
2 | Ω {z } | Ω {z } |
2 Ω
{z }
A b c
1
J = ΣT AΣ − ΣT b + c
2
La matrice A et le vecteur b sont calculés numériquement en utilisant toute la stratégie de
calcul éléments finis : élément de référence, points de Gauss, assemblage ...
La minimisation de cette dernière expression revient à résoudre le système :

AΣ = b

La composante de la contrainte lissée σ̃xx vaut alors

σ̃xx = N T Σxx

avec Σxx solution du système


AΣxx = bxx

et Z
h
bxx = N σxx dΩ

De même
σ̃yy = N T Σyy et σ̃xy = N T Σxy

avec
AΣyy = byy et AΣxy = bxy

et Z Z
h h
byy = N σyy dΩ et bxy = N σxy dΩ
Ω Ω
VII.2 Erreur et convergence 67

VII.2 Erreur et convergence


VII.2.1 Norme en énergie
On définit la forme bilinéaire suivante :
Z
a(−

u ,−

v)= u )Cǫ(−
ǫT (−
→ →
v ) dΩ

où −
→u et −

v sont des champs de déplacements. On remarque que l’énergie de déformation
du champ de déplacement −

u vaut a(−→
u ,−

u ) à un facteur 2 prés :
1 → −
u ) = a(−
ED (−
→ u ,→
u)
2
On peut montrer que a(− →
u ,−

v ) est un produit scalaire, en effet :

→ −
→ −
→ −

• a( u , v ) = a( v , u ) car C est symétrique
• a(α−→
u ,−

v ) = αa(−→
u ,−
→v ) car ǫ(α−→u ) = αǫ(−→u)

→ −
→ −
→ −
→ −
→ −
→ −

• a( u + w , v ) = a( u , v ) + a( w , v ) car ǫ(−

u +−

w ) = ǫ(−

u ) + ǫ(−

w)
• a(−
→u ,−
→u ) ≥ 0 car l’énergie de déformation d’un champ de déplacement n’est jamais
négative. On dit que a(− →
u ,−
→v ) est une forme positive.

→ −
→ −

• a( u , u ) = 0 entraine que u est un déplacement de solide rigide. Si tous les déplace-
ments rigides sont bloqués alors a(−

u ,−

u ) > 0, on dit que a(−

u ,−

v ) est une forme
définie positive.
On construit la norme au sens de l’énergie à partir de ce produit scalaire :

k−

u kE = (a(−

u ,−
→ 1
u )) 2

autrement dit Z
k−

u k2E = u )Cǫ(−
ǫT (−
→ →
u ) dΩ = 2ED (−

u)

VII.2.2 Ecriture de la formulation variationnelle


On définit la forme linéaire L(−

v ) telle que
Z
L(−

v)= −

v T F dS
∂F Ω

où F sont les efforts surfaciques donnés sur le bord ∂F Ω du domaine.


La formulation variationnelle du problème (voir section III.3) s’écrit

Chercher −

u ∈ U tel que ∀−

v ∈ U0 , a(−

u ,−

v ) = L(−

v)

De façon discrétisé, la formulation variationnelle devient

Chercher −
→ w ∈ U0h a(−
u h ∈ U h tel que ∀−
→ →
u h, −

w ) = L(−

w)

où U h représente l’espace d’approximation cinématiquement admissible et U0h représente


l’espace d’approximation cinématiquement admissible à zéro.
68 Estimation des erreurs

Uh


e


u ex



uh

Figure VII.2 – Le champ de déplacement solution est orthogonal à l’erreur dans l’espace des
champs de déplacements.

VII.2.3 Erreur en déplacement


On note −

u h la solution en déplacement du problème discrétisé, soit


u h = NQh

où N est la matrice des fonctions de forme et Qh est le déplacement solution du problème.


En notant −→
u ex la solution exacte du problème, l’erreur en déplacement −

e vaut


e =−

u ex − −

uh

On peut montrer la propriété importante suivante :

a(−

u h, −

e)=0

Le champ de déplacements solution −



u h est orthogonal à l’erreur −

e au sens du produit
scalaire a(•, •). 

Preuve La solution exacte →



u ex ∈ U h vérifie la propriété suivante :

∀→

v ∈ U0 , a(→

u ex , →

v ) = L(→

v)

Ceci est en particulier vrai pour →



v =→

w , où →

w ∈ U0h puisque U0h est inclus dans U h , donc

∀→

w ∈ U0h , a(→

u ex , →

w ) = L(→

w)

Or
∀→

w ∈ U0h , a(→

u h, →

w ) = L(→

w)
La soustraction des deux dernières expressions conduit à

a(→

u ex , →

w ) − a(→

u h, →

w ) = L(→

w ) − L(→

w)

c’est à dire
a(→

u ex − →

u h, →

w)
ou encore
∀→

w ∈ U0 , a(→

e ,→

w) = 0
En supposant que U et U0 soient identiques, autrement dit pour des liaisons encastrements, on peut
choisir →

w =→
−u h , et on a bien a(→

e ,→

u h) = 0 •
VII.2 Erreur et convergence 69

La figure VII.2 la solution exacte −→


u ex appartenant à l’ensemble U de dimension infinie
(représenté en 3 dimensions sur la figure) ainsi que la solution éléments finis −

u h appartenant
à l’ensemble U h de dimension finie (représenté en 2 dimensions sur la figure). La solution
éléments finis est la projection de la solution exacte dans U h , l’erreur est alors orthogonale
à la solution éléments finis.
En appliquant le thèorème de Pythagore dans le triangle rectangle de la figure VII.2, il
vient
a(−

u ex , −

u ex ) = a(−

u h, −

u h ) + a(−

e ,−

e)

u h k2E + k −
u ex k2E =k −
k−
→ → →
e k2E

k−

e k2E =k −

u ex k2E − k −

u h k2E

comme k −

e k2E > 0, on a alors
k−

u h kE ≤k −

u ex kE

La norme énergétique de −

u h étant inférieure à celle de −

u ex , on en conclut que les modèles
éléments finis sont toujours trop rigides.

VII.2.4 Taux de convergence


On définit l’erreur relative globale ξ comme
k−→
e kE
ξ= −

k u ex kE
donc
k−→
e k2E u ex k2E − k −
k−
→ →u h k2E
ξ2 = −
→ 2
= −
→ 2
k u ex kE k u ex kE
On peut montrer que
ξ ≤ c hp

où c est une constante qui dépend du problème, h est la longueur relative des éléments
(rapport de la longueur des éléments sur la longueur caractéristique du problème) et p est
l’ordre maximal de la base complète de l’approximation.
En bidimensionnel, p est tel que tous les termes xα y β avec α + β = p soient présents
dans la base d’approximation (Fig. VII.3). On dit que la base d’approximation est complète
jusquà l’ordre p (complétude jusqu’à l’ordre p).
Deux stratégies sont possibles afin de diminuer l’erreur ξ :
– diminuer h, c’est à dire augmenter le nombre d’éléments, on parle de méthode h ou
h-method,
– augmenter p, c’est à dire augmenter l’ordre d’approximation de la base, on parle de
méthode p ou p-method.
De façon graphique, l’erreur ξ peut être représentée en fonction de h dans un diagramme
log − log, en effet :
ξ ≤ chp ⇒ log(ξ) ≤ log(c) + p log(h)

Dans ce diagramme, l’erreur est en dessous d’une droite de pente p (Fig. VII.4). Lorsque p
augmente, la droite devient plus pentue et la convergence vers la solution exacte est plus
70 Estimation des erreurs

p=1
p=2 1 p=0
p=3 x y p=1
x2 xy y2 p=2
3 2 2 3
x xy xy y p=3
x2 y 2

Figure VII.3 – Complétude de la base d’approximation en deux dimensions.

log(ξ)

1
Erreur
plus p
faible
zone possible pour ξ
log(h)

Plus d’éléments

Figure VII.4 – Diagramme log − log de l’erreur relative en fonction de h.

rapide. Le taux de convergence caractérise la pente de la droite log(c) + p log(h), il vaut


donc p. Par exemple pour un triangle à 6 nœuds (p = 2), l’erreur en énergie est divisée par
100 si l’on multiplie par 10 le nombre d’éléments.

VII.3 Estimateur d’erreur


Dans le cas général la solution exacte n’est pas connue. On peut cependant calculer une
estimation de l’erreur. Plusieurs estimateurs existent, on présente ici un estimateur simple
à mettre en œuvre appelé ZZ1. C’est la version améliorée ZZ2 qui est fréquemment utilisée
par les codes de calculs. En effet, il est montré que contrairement à ZZ2, ZZ1 n’assure pas
de donner une estimation de l’erreur à coup sûr supérieure à l’erreur vraie.
On rappelle que l’erreur relative globale ξ vaut
k uex k2 − k uh k2 a(uex , uex ) − a(uh , uh )
ξ2 = =
k uex k2 a(uex , uex )
où Z
ex ex
a(u , u ) = ǫT (uex )Cǫ(uex ) dΩ

En remplaçant ǫ(uex ) par son expression en fonction des contraintes :

σ ex = Cǫ(uex ) ⇒ ǫ(uex ) = C−1 σ ex

on a Z
a(uex , uex ) = σ T (uex )C−1 σ(uex ) dΩ

VII.3 Estimateur d’erreur 71

de plus Z
a(uh , uh ) = ǫT (uh )Cǫ(uh ) dΩ

La contrainte exacte σ ex n’est pas connue, mais l’idée est de la remplaçer par la contrainte
lissée σ̃ (voirVII.1). La contrainte lissée est en effet plus régulière que la contrainte σ(uh ),
elle approche mieux la réalité que σ(uh ).
En remplaçant σ ex par σ̃ on obtient une estimation de l’erreur relative ξ, on note cette
estimation θ : Z Z
σ̃ T C−1 σ̃ dΩ − ǫT (uh )Cǫ(uh ) dΩ
2 Ω Ω
θ = Z
σ̃ T C−1 σ̃ dΩ

En notant θe la quantité définie pour l’élément e telle que
Z Z
σ̃ T C−1 σ̃ dΩe − ǫT (uh )Cǫ(uh ) dΩe
Ωe Ωe
θe2 = Z
σ̃ T C−1 σ̃ dΩ

où Ωe est le domaine de l’élément e, on a


nb.
X elts
2
θ = θe2
e=1

La quantité θe est la contribution de l’élément e à l’erreur relative globale.


R
La quantité Ωe σ̃ T C−1 σ̃ dΩe est calculée de façon classique (élément de référence, inté-
gration par point de Gauss) :
Z Z
σ̃ T C−1 σ̃ dΩe = ΣT N C−1 N T dΩe Σ
Ωe Ωe
R
La quantité Ωe ǫT (uh )Cǫ(uh ) dΩe vaut :
Z Z
ǫT (uh )Cǫ(uh ) dΩe = QTe BT CB dΩe Qe = QTe Ke Qe
Ωe Ωe

L’exemple d’un calcul d’une plaque entaillée en traction est présenté sur la figure VII.5.
Afin d’obtenir une meilleure solution, le maillage peut être rafiné dans les zones qui
contribuent le plus à l’erreur globale. La stratégie de maillage adaptatif peut alors être
automatisée de façon à ce que chaque élément contribue de la même façon à l’erreur globale
tout en ayant une erreur globale relative fixée par l’utilisateur notée Θ. Ce processus itératif
est détaillé sur la figure VII.6.
72 Estimation des erreurs

Non smooth stress, component number 1


25
30
20
25
15 20

10 15
10
5
5
0 0
0 10 20 30 40 50 60
h
a) Maillage déformé, forces appliquées b) σxx (u )
Smooth stress, component number 1 Contribution of each element (in %) to the global error of 7.6301%
25 25 6
30
20 20 5
25
4
15 20 15
3
15 10
10
10 2
5 5
5 1

0 0 0
0 10 20 30 40 50 60 0 10 20 30 40 50 60

c) σ̃xx d) θe pour un maillage grossier.


Contribution of each element (in %) to the global error of 5.2685%
25

20 1.5

15
1
10
0.5
5

0
0 10 20 30 40 50 60

e) θe pour un maillage rafiné prés du trou.


Figure VII.5 – Plaque entaillée en traction.

maillage initial

résolution de KQ = F
calcul de la contrainte lissée σ̃
calcul de la contribution θe de chaque élémentPà l’erreur globale θ
calcul de l’estimation de l’erreur globale θ2 = θe2

non θ<Θ

oui

rafinage des zones maillage optimisé :


contribuant le plus - chaque élément contribue de la même façon à l’erreur
à l’erreur globale - l’erreur globale est inférieure à l’objectif Θ

Figure VII.6 – Processus itératif de maillage adaptatif.


VIII — Analyse modale par E.F.

VIII.1 Formulation variationnelle du problème de dynamique d’une


structure encastrée-libre
On considère une structure encastrée sur le bord ∂u Ω et libre d’efforts. On cherche la réponse
dynamique harmonique propre de la structure, aucune conditions initiales n’est nécessaire.
Les équations d’équilibre s’écrivent en notation indicielle

σij,j (t) = ρ üi (t) dans Ω .

où t est le temps, ρ est la densité et üi (t) est l’accélération. On fait l’hypothèse des petites
perturbations et on suppose que le matériau reste dans le domaine élastique. Les conditions
aux limites s’écrivent :

ui (t) = 0 sur ∂u Ω.

On montre que la formulation variationnelle est :

u(t) est solution du problème



Chercher u(t) ∈ U tel que ∀δu ∈ U0 ,
Z Z
ρ üi (t) δui dΩ + σij (t) δǫij dΩ = 0
Ω Ω
 
1
avec σij = Cijkl ǫkl et ǫij = 2
ui,j + uj,i où U = U0 = {v/v = 0 sur ∂u Ω}. 
74 Analyse modale par E.F.

Exercice VIII.1 Retrouver cette formulation variationnelle. 

VIII.2 Discrétisation
R
En utilisant la démarche éléments finis du chapitre V, le terme Ω σij (t) δǫij vaut
Z XZ
σij (t) δǫij = δq eT BeT Ce Be q e (t) dΩ = δQT KQ(t)
Ω e Ωe

où K est la matrice de rigidté de la structure.


R
Le terme Ω ρ üi (t) δui dΩ vaut :
Z Z XZ
T
δui ρ üi (t) dΩ = δu ρü dΩ = δq eT NeT ρ Ne q¨e (t) dΩ
Ω Ω e Ωe
X Z X
= δq eT NeT ρ Ne dΩ q¨e (t) = δq eT Me q¨e (t)
e Ωe e
| {z }
=Me
= δQT MQ̈(t)

où Me est la matrice de masse élémentaire et M est la matrice de masse de la structure


après assemblage.
Finalement le problème discrétisé revient à :

Trouver Q(t) ∈ U h tel que ∀δQ ∈ U0h on ait

δQT MQ̈(t) + δQT KQ(t) = 0

ce qui revient à résoudre le système

MQ̈(t) + KQ(t) = 0

Exercice VIII.2 Montrer que la matrice de masse de l’élément barre à 2 nœuds est
 1 1

M = ρSl 3 6
1 1
6 3

Exercice VIII.3 Montrer que la matrice de masse de l’élément poutre à 2 nœuds est
 
156 22L 54 −13L
ρSL  22L 4L2 13L −3L2 
M=  
420  54 13L 156 −22L 
−13L −3L2 −22L 4L2

VIII.3 Etude des modes propres de vibration


On suppose que la solution vibratoire Q(t) peut être découplée en espace et en temps :

Q(t) = eiωt P = (cos ωt + i sin ωt)P


VIII.4 Projection modale 75

6 éléments par période 2 éléments par période :


vibration du maillage

Figure VIII.1 – Discrétisation et modes propres de vibration.

où P ne dépend pas du temps. Il vient


Q̇(t) = iωeiωt P
Q̈(t) = −ω 2 eiωt P
La proposition ??, vraie ∀δQ ∈ U0h , devient alors

 
Trouver P tel que K − ω2M P = 0

où K et M sont les matrices de rigidité et de masse de la structure restreintes aux


degrés de libertés non-encastrés. 

Le problème revient à chercher ω tel que K − ω 2 M ait une valeur propre nulle ou encore
tel que det(K − ω 2 M) = 0. Le nombre de solutions est égal à la taille des matrices K et M,
soit le nombre de degrés de libertés non-encastrés du problème discrétisé. A chaque solution
ωk est associé un vecteur propre P k tel que
 
K − ωk2 M P k = 0
où ωk est la pulsation du mode de vibration P k de la structure discrétisée.
Il est à noté que les modes de vibrations à hautes fréquences trouvés numériquement ne
sont pas physiques et sont en fait les vibrations du maillage éléments finis. Il est courant de
dire qu’il faut 5 à 10 éléments au moins par longueur d’onde pour avoir un résultat correct.
Lorsque la réponse vibratoire recherchée de la structure est dans un domaine fréquentiel
trop élevé, d’autres types d’approches non basées sur les éléments finis sont utilisées (Fig.
VIII.1).

VIII.4 Projection modale


Le problème de dynamique d’une structure soumise à un chargement s’écrit de façon
générale :

Trouver Q(t) ∈ U h tel que ∀δQ ∈ U0h on ait

δQT MQ̈(t) + δQT KQ(t) = δQT F (t)

ce qui revient à résoudre à chaque pas de temps le système

MQ̈(t) + KQ(t) = F (t)


76 Analyse modale par E.F.

Le temps est découpé en intervalles de temps et la résolution de ce problème fait inter-


venir un schéma d’intégration temporel où une solution est trouvée en un certain nombre
de piquets de temps. Cette résolution n’est pas abordée dans le cadre de ce cours.
Le comportement dynamique de la structure peut être vu comme une superposion des
modes de vibration pondérés dans le temps par des coefficients. De plus, il est courant
de pouvoir prédire le comportement dynamique de la structure en utilisant seulement les
premiers modes de vibrations basses fréquences. Cela se justifie d’une part par la physique
si les fréquences d’excitations sont plutot basses, et d’autre part par le fait que les modes
de vibration calculés ayants les fréquences les plus élevées ne sont pas physiques.
En choisissant les m premiers modes propres comme base de projection, on écrit :

Q(t) = a1 (t)P 1 + a2 (t)P 2 + · · · + am (t)P m

où ak (t) sont les m coefficients pondérateurs inconnus. Lorsque m est trés inférieur au
nombre de degrés de libertés initial n, il y a une réduction notable de la taille du problème
à résoudre à chaque piquet de temps. On suppose ici pour simplifier que les m premiers
modes propres sont retenus dans la base de projection mais il est possible de les choisir
arbitrairement (par exemple les modes 1, 3 et 7). Cela s’écrit sous forme matricielle :
 
a1 (t)
 
 a2 (t) 
 
Q(t) = [P 1 |P 2 | . . . |P m ]  .  = ΦA(t)
| {z } .. 
Φ
 
am (t)
| {z }
A(t)

La matrice Φ ne dépend pas du temps, elle possède n lignes et m colonnes. Le vecteur A(t)
possède m lignes et est le nouveau vecteur inconnu.
En écrivant δQ = ΦδA, on a :

δAT |ΦT{z
MΦ} Ä(t) + δAT |ΦT{z
KΦ} A(t) = δAT ΦT F (t)
| {z }
M̃ K̃ F̃ (t)

Finalement, le nouveau système à résoudre de taille réduite m est

M̃Ä(t) + K̃A(t) = F̃ (t)

Ce nouveau système a en plus l’avantage d’étre diagonal de part les propriétés d’orthog-
onalités des modes propres de vibration. En effet, en prennant les modes i et j différents,
on peut écrire :

KP i − ωi2 MP i = 0
P Tj KP i − ωi2 P Tj MP i = 0
et aussi P Ti KP j − ωj2 P Ti MP j = 0

Or

P Tj KP i = (P Tj KP i )T = P Ti KP j
P Tj MP i = (P Tj MP i )T = P Ti MP j
VIII.4 Projection modale 77

car K et M sont symétriques. En faisant le différence des équations VIII.1 et VIII.1 on a :

P Tj KP i −P Ti KP j − ωi2 P Tj MP i +ωj2 P Ti MP j = 0
| {z } | {z }
=P T
i KP j =P T
i MP j

(ωj2 − ωi2 )P Ti MP j = 0

Comme ωi 6= ωj pour i 6= j, la dernière équation implique que

P Ti MP j = 0

Ceci entraine que M̃ est diagonale. En remplaçant dans VIII.1, on a aussi pour i 6= j

P Ti KP j = 0

Ceci entraine que K̃ est diagonale.


En choisissant arbitrairement P Tk MP k = 1, ce qui est géréralement le cas dans les codes
de calculs commerciaux, on a alors

P Tk KP k − ωk2 P Tk MP k = 0

soit
P Tk KP k − ωk2 = 0

c’est à dire
P Tk KP k = ωk2

L’équation scalaire à résoudre pour chaque inconnue ak (t) est :

P Tk MP k a¨k (t) + P Tk KP k ak (t) = P Tk F (t)


| {z }
=F̃k (t)

soit encore
a¨k (t) + ωk2 ak (t) = F̃k (t)

En conclusion la projection modale a le double avantage de réduire le nombre d’inconnues


à chaque piquet de temps et d’aboutir à un système diagonal trés facile à résoudre : chaque
inconnue ak (t) est résolue séparement d’où un gain important en temps de calcul tout en
gardant l’essentiel de la physique du phénomène.
IX — Sous structuration

IX.1 Objectifs
Les objectifs de la décomposition de domaine sont multiples :
– utiliser un ordinateur à architecture parallèle, ou plusieurs ordinateurs connectés en
réseau (cluster),
– coupler des structures constituant une système mécanique,
– coupler des formulations différentes (ex : couplage fluide-structure)
L’idée est de séparer le "gros" problème initial en plusieurs "petits" problèmes à résoudre
séparément.
La méthode de Schur (1) primale porte son nom du fait que les inconnues nodales de
l’interface séparant les domaines sont des variables de déplacements, c’est à dire les mêmes
que celles des sous-domaines. La méthode de Schur duale introduit pour sa part la variable
duale du déplacement à l’interface, soit le vecteur contrainte.

IX.2 Méthode de Schur primale


IX.2.1 Principe
Un problème classique à résoudre en statique linéaire par la méthode des éléments finis
abouti à la résolution du système
KQ = F

où K est la matrice de rigidité, Q est le vecteur des inconnues de déplacements nodaux et


F est le vecteur des forces nodales. Afin de simplifer les notations, le vecteur Q ne contient
(1) mathématicien russe, 1875-1941
80 Sous structuration

interface
Ensemble des d.d.l. de Q Q3
sous-structure 1 sous-structure 2
Q1 Q2

111111111111
000000000000
000000000000
111111111111
000000000000
111111111111
000000000000
111111111111
00000000
11111111
00000000
11111111 0000000
1111111
0000000
1111111
00000000
11111111
00000000
11111111
Q
0000000
1111111
0000000
1111111
Q
00000000 1111111
11111111 0000000
1sl 2sl

00000000
11111111
00000000
11111111 0000000
1111111
00000000 1111111
11111111 0000000
0000000
1111111
00000000
11111111
00000000 1111111
11111111 0000000
0000000
1111111
Figure IX.1 – Décomposition en deux sous-structures.

que les degrés de liberté non bloqués. Le problème mécanique associé est représenté sur la
figure IX.1.
Par soucis de simplicité, la structure est décomposée en seulement deux sous-structures
(numérotées 1 et 2). Elles ne sont pas connectées entre elles mais elles sont en contact avec
l’interface (numérotée 3). L’ensemble des nœuds de la structure est renuméroté de façon à
avoir les inconnues nodales appartenant à la sous-structure 1 dans le vecteur Q1 . On fait de
même pour la sous-structure 2 et l’interface 3 pour les vecteurs Q2 et Q3 . En utilisant ces
notations, le système à résoudre devient
    
K1 0 K13 Q1 F1
    
0 K2   Q2  =  F 2 
K23 
    

KT13 KT23 K3 Q3 F3
On remarque que dans ce système, il n’y a pas de couplage entre les sous-structures
puisqu’elles sont choisies de façon à être déconnectées.
Exercice IX.1 Proposer une numérotation des nœuds du maillage de la figure IX.1 afin d’obtenir la
séparation entre les sous-domaines 1, 2 et 3. 

La première étape est la résolution du problème sans liaison pour chaque sous-structure.
Cela revient à résoudre indépendamment les deux systèmes suivants :

K1 Q1sl = F 1 , et K2 Q2sl = F 2 .

Les deux vecteurs Q1sl et Q2sl obtenus sont complétés par les solutions avec liaison en
introduisant les vecteurs Q1al et Q2al tels que

Q = Q1sl + Q1al , et Q = Q2sl + Q2al .


IX.2 Méthode de Schur primale 81

On remarque que cette première étape dite "sans liaison" revient à résoudre pour chaque
sous-structure un problème pour lequel l’interface est encastrée (Fig. IX.1).
En remplaçant dans le système initial, il vient
    
K1 0 K13 Q1sl + Q1al F1
    
0 K2   Q2sl + Q2al  =  F 2  .
K23 
    

KT13 KT23 K3 Q3 F3
Les deux premiers systèmes donnent

K1 Q1sl + K1 Q1al + K13 Q3 = F 1 ,

et
K2 Q2sl + K2 Q2al + K23 Q3 = F 2 .
En remarquant que K1 Q1sl = F 1 et K2 Q2sl = F 2 , il vient

K1 Q1al + K13 Q3 = 0, et K2 Q2al + K23 Q3 = 0.

Le troisième système d’équations donne

KT13 Q1sl + KT13 Q1al + KT23 Q2sl + KT23 Q2al + K3 Q3 = F 3

soit
KT13 Q1al + KT23 Q2al + K3 Q3 = F 3 − KT13 Q1sl − KT23 Q2sl
En notant
B = F 3 − KT13 Q1sl − KT23 Q2sl
on a alors
KT13 Q1al + KT23 Q2al + K3 Q3 = B
Finalement, le système à résoudre pour trouver Q1al , Q2al et Q3 est
    
K1 0 K13 Q1al 0
    
0 K2   Q2al  =  0  .
K23 
    

KT13 KT23 K3 Q3 B
Les deux premières lignes du système donnent

Q1al = −K−1 −1
1 K13 Q3 et Q2al = −K2 K23 Q3

soit en remplaçant dans la dernière ligne

−KT13 K−1 T −1
1 K13 Q3 − K23 K2 K23 Q3 + K3 Q3 = B

En notant
S = K3 − KT13 K−1 T −1
1 K13 − K23 K2 K23

on a alors le système suivant à résoudre :

SQ3 = B

La matrice S est appelée le complément de Schur.


Une fois que la solution Q3 est calculée, il suffit de remplacer dans les expressions de
Q1al et Q2al écrites en fonction de Q3 pour avoir toutes les inconnues.
82 Sous structuration

Q2

interface Q4
Q1
Q3

11111111111111111
00000000000000000
Figure IX.2 – Décomposition en n − 1 sous-structures avec n = 4.

IX.2.2 Stratégie de résolution globale


Les différentes étapes sont donc :
1. Résolution sur 2 processeurs des problèmes sans liaison :

K1 Q1sl = F 1 , et K2 Q2sl = F 2 .

2. Calcul du complément de Schur :

S = K3 − KT13 K−1 T −1
1 K13 − K23 K2 K23

3. Résolution de l’interface :

SQ3 = F 3 − KT13 Q1sl − KT23 Q2sl

4. Calcul du problème avec liaison

Q1al = −K−1 −1
1 K13 Q3 , et Q2al = −K2 K23 Q3 .

5. Construction de la solution complète :

Q = Q1sl + Q1al , et Q = Q2sl + Q2al .

IX.2.3 Généralisation à plusieurs sous-structures


L’extension à plusieurs sous-structures se fait de façon naturelle. Avec un découpage en
n − 1 sous-structures (Fig. IX.2) et en notant n l’interface entre les sous-structures, on a
alors l’algorithme suivant :
1. Résolution sur n − 1 processeurs des problèmes sans liaison :

Ki Qisl = F i ,

pour i = 1 à n − 1
2. Calcul du complément de Schur :
n−1
X
S = Kn − KTin K−1
i Kin
i=1
IX.2 Méthode de Schur primale 83


1
 1 
0
 1
0
0
1 0


 0 1111111
0000000

0000000
1111111


0
0


 1

0 1111111


0000000 0
1

0000000 0
1111111 0 1111111
0000000
   
I1 =  0  I2 =  

0 1111111
0000000 0
   

0000000
1111111

 0 




 0
0
0000000
1111111 0
0000000
1111111
0000000
1111111
0000000
1111111
X 1 = colonne 1 de −K−1 0000000
1111111
X 2 = colonne 2 de −K−1
1 K13 1 K13

Figure IX.3 – Déplacement unitaire imposé à l’interface pour la calcul du complément de Schur.

3. Résolution de l’interface :
n−1
X
SQn = F n − KTin Qisl
i=1

4. Calcul du problème avec liaison

Qial = −K−1
i Kin Qn

pour i = 1 à n − 1
5. Construction de la solution complète :

Qi = Qisl + Qial

pour i = 1 à n − 1

Exercice IX.2 Reprendre la démarche de résolution pour 3 sous-structures et une interface comme
indiqué sur la figure IX.2 

IX.2.4 Calcul du complément de Schur


Le complément de Schur dans le cas de deux sous-structures s’écrit

S = K3 − KT13 K−1 T −1
1 K13 − K23 K2 K23 .

Ce calcul fait intervenir l’inverse des matrices de rigidité K1 et K2 . Ces matrices étant en
général très importantes, il n’est pas réaliste d’en calculer directement l’inverse. De plus K−1
1
est multipliée à droite par K13 et à gauche par KT13 ce qui donne finalement une matrice
dont la taille est réduite à celle de l’interface en général très faible.
Une façon de calculer directement le produit K−1
1 K13 sans calculer l’inverse de K1 est de
résoudre une succession de problèmes en imposant les déplacements des nœuds de l’interface
à 0 ou 1 (Fig. IX.3) : la ième colonne de K−1
1 K13 est exactement la solution X i du problème
suivant : " #" # " #
K1 K13 Xi 0
=
KT13 K3 Ii Yi
où I i est le déplacement unitaire imposé à l’interface défini par

I i = [ 0 . . . 0 1 0 . . . 0]T (le 1 est en ième ligne)


84 Sous structuration

interface
Λ

Q1 Q2

11111111111100000000
00000000000011111111000
111000000
111111
problème complet sous-structure 1, sous-structure 2,
domaine Ω1 domaine Ω2

Figure IX.4 – Décomposition en 2 sous-structures par méthode Schur duale.

et où Y i sont les efforts de réaction inconnus du problème associé. En effet, le premier


groupe d’équations s’écrit
K1 X i + K13 I i = 0

ce qui donne la solution


X i = −K−1
1 K13 I i

soit la ième colonne de −K−1


1 K13 .
En notant m le nombre de degré de liberté de l’interface, il suffit de résoudre successive-
ment le problème avec
 
    0
1 0  
    
 0 


 0 


 1 
  
     0 
I1 = 
 0 
 I2 = 
 0 
 ... Im

= ..


 ..   ..  
 .


 . 


 . 
  
 0 
0 0  
1

pour avoir toutes les m colonnes de −K−1


1 K13 .

IX.3 Méthode de Schur duale


IX.3.1 Principe
La méthode de Schur duale fait intervenir les inconnues d’efforts à l’interface. Par soucis
de simplicité on fait le développement pour deux sous-structures, leurs domaines sont notés
Ω1 et Ω2 (Fig. IX.4) et on néglige les forces volumiques. Les nœuds de l’interface sont cette
fois compris dans chacune des sous-structures. Ils sont aussi compris dans le maillage de
l’interface.
On ajoute aux équations locales des domaines Ω1 et Ω2 la condition de continuité du
déplacement à l’interface Γ


u1 =−

u2 sur Γ
IX.3 Méthode de Schur duale 85

ainsi que la continuité du vecteur contrainte à l’interface

σ1 −

n 1 = −σ2 −

n2 sur Γ

où −

n 1 et −

n 2 sont respectivement les normales unitaires sortantes de Ω1 et Ω2 . En notant


λ le vecteur contrainte à l’interface on a

→ −

σ1 −

n 1 = λ sur Γ et σ2 −

n 2 = − λ sur Γ

L’idée est d’ajouter ce vecteur contrainte aux inconnues du problème. Avec cette convention,


λ est l’action de Ω2 sur Ω1 à travers l’interface Γ. L’interface est une frontière des domaines

→ −

Ω1 et Ω2 sur laquelle les efforts extérieurs valent respectivement λ et − λ . Le vecteur


contrainte λ est souvent appelé multiplicateur de Lagrange.
La formulation variationnelle dans le domaine Ω1 est alors :

→ −
→ −

Trouver −
→u 1 cinématiquement admissible, tel que ∀δu1 avec δu1 = 0 sur ∂u Ω1 on ait
Z Z Z

→ − → −
→ − →
δǫT1 C1 ǫ1 dΩ − δuT1 F d1 dS − δuT1 λ dS = 0
Ω1 ∂F Ω1 Γ

La formulation variationnelle dans le domaine Ω2 est :



→ −
→ −

Trouver −
→u 2 cinématiquement admissible, tel que ∀δu2 avec δu2 = 0 sur ∂u Ω2 on ait
Z Z Z

→T −
→ − → −
→ − →
δǫ 2 C2 ǫ2 dΩ − δuT2 F d2 dS + δuT2 λ dS = 0
Ω2 ∂F Ω2 Γ

Enfin, la condition de continuité de déplacement est assurée en multipliant l’équation



→ −

u1 =− →
u 2 par le vecteur contrainte virtuel δλ et en intégrant le long de Γ, ce qui s’écrit


∀δλ Z Z

→T − −
→ →

δλ u dS − δλT − 1 u dS = 0 2
Γ Γ

IX.3.2 Discrétisation
La discrétisation dans les domaines Ω1 et Ω2 se fait de façon classique :


u 1 = N1 Q1 et −

u 2 = N2 Q2

où N1 et N2 sont les matrices des fonctions de forme des sous-structures 1 et 2 et Q1 et


Q2 sont les déplacements nodaux associés. Le long de l’interface le vecteur contrainte est
discrétisé par des fonctions de forme. En tridimensionnel et en supposant que l’interface
contient m nœuds, on peut écrire
 
λx1
 . 
 . 
 . 
 

 λxm 

    
λx N1 . . . Nm 0 ... 0 0 ... 0 
 λy1 


→     .. 
 λy  =  0
λ =   ... 0 N1 . . . Nm 0 ... 0 
 .  = Nλ Λ

 
λz 0 ... 0 0 ... 0 N1 . . . Nm 
 λym 

 

 λz1 

 .. 

 . 

λzm
86 Sous structuration

Ω2
Ω1

Γ
Figure IX.5 – Couplage de deux maillages incompatibles.

En remplaçant dans la formulation variationnelle, on trouve de façon standard les ma-


trices de rigidité K1 et K2 des deux sous-structures, les efforts extérieurs F 1 et F 2 sur les
deux sous-structures ainsi que les matrices de couplages C1λ et C2λ telles que
Z Z

→ − →
δuT1 λ dS = δQT1 NT1 Nλ dS Λ = −δQT1 C1λ Λ
Γ Γ
Z Z

→ − →
δuT2 λ dS = δQT2 NT2 Nλ dS Λ = δQT2 C2λ Λ
Γ Γ
Finalement, la formulation variationnelle discrétisée s’écrit :

δQT1 K1 Q1 + δQT1 C1λ Λ = δQT1 F 1

δQT2 K2 Q2 + δQT2 C2λ Λ = δQT2 F 2

δΛT CT1λ Q1 + δΛT CT2λ Q2 = 0

ce qui donne le système suivant à résoudre :


    
K1 0 C1λ Q1 F1
    
0 K2   Q2  =  F 2 
C2λ 
    

CT1λ CT2λ 0 Λ 0

Ce système peut être résolu en suivant la démarche de la méthode de Schur primale (avec
K3 = 0).

IX.3.3 Couplage de maillages incompatibles


L’avantage dans cette seconde approche est qu’il n’y a a priori pas besoin que les maillages
des sous-structures soient compatibles à l’interface (Fig. IX.5). Ceci permet donc de rac-
corder des maillages incompatibles provenant par exemples de bureaux d’études différents
maillant les pièces d’un même assemblage.
Le choix du maillage de l’interface dans ce cas peut être effectué de différentes façons,
ceci n’est pas détaillé dans ce cours.
X — Eléments finis étendus

X.1 Introduction

Un certain nombre de problèmes mécaniques font intervenir des interfaces qui engendrent
des discontinuités (interaction fluide-structure, propagation de fissures, inclusions). Avec une
approche classique par éléments finis, ces discontinuités sont prises en compte en choisissant
un maillage compatible à l’interface (Fig. X.1). La méthode des éléments finis étendus
(XFEM - eXtended Finite Element Method) permet de s’affranchir de la compatibilité
de maillage à l’interface en prenant en compte dans l’approximation éléments finis ces
discontinuités.

On s’intéresse dans la suite à un problème de statique linéaire où une inclusion constituée


d’un matériau différent est présente dans une pièce mécanique.

inclusion maillage compatible maillage incompatible


Figure X.1 – Maillages compatible et incompatible pour modéliser une inclusion.
88 Eléments finis étendus

Ω = ΩA ∪ ΩB
ΩA −

n ΩA ∩ ΩB = ∅
φ>0 Γ : interface entre ΩA et ΩB
ΩB
Γ φ<0
φ=0

Figure X.2 – Déscription de l’interface par une ligne de niveau.

M
Γ


n
d

φ<0 φ>0

φ=0

Figure X.3 – Distance signée à l’interface.

X.2 Déscription de l’interface


Le domaine Ω est divisé en deux parties ΩA et ΩB ; le domaine ΩB représente l’inclusion.
L’interface entre les deux matériaux est notée Γ (Fig. X.2).
On construit la fonction φ(M ) telle que :
φ(M ) > 0 si M ∈ ΩA ,
φ(M ) < 0 si M ∈ ΩB ,
φ(M ) = 0 si M ∈ Γ.

Les domaines ΩA et ΩB peuvent être définis ainsi :


ΩA = {M ∈ Ω/φ(M ) > 0},
ΩB = {M ∈ Ω/φ(M ) < 0},
Γ = {M ∈ Ω/φ(M ) = 0}. 

La fonction φ(M ) est la ligne de niveau dont l’iso-valeur zéro localise l’interface. Une façon
de calculer la fonction φ(M ) est de la définir comme étant la distance signée d’un point à
l’interface. (Fig. X.3). La distance d d’un point M à l’interface Γ est
−−→ −−→
d =k OM − OM Γ k

où MΓ est la projection normale de M sur Γ. La ligne de niveau φ(M ) vaut alors


φ(M ) = d dans ΩA ,
φ(M ) = −d dans ΩB .
X.3 Discrétisation de la ligne de niveau 89

Ceci peut s’écrire


−−→ −−→ 

→ −−→ −−→ 
φ(M ) = min
|{z} k OM − O M̃ k ×signe n .( OM − OM̃ ) .
M̃ ∈Γ

Le gradient de la ligne de niveau le long de l’interface est égal à la normale à l’interface :


−−→
gradφ = −

n.

Exercice X.1 Calculer φ(M ) pour une inclusion circulaire de rayon r centrée en O. 

X.3 Discrétisation de la ligne de niveau


La fonction ligne de niveau φ(M ) est discrétisée en utilisant l’approximation du maillage
utilisé pour le calcul mécanique. On note NI (M ) la fonction de forme associée au nœud I.
L’ensemble des nœuds du maillage est noté S.

L’approximation φ̃(M ) de la fonction φ(M ) est


X
φ̃(M ) = NI (M )φI
I∈S

où φI désigne la valeur de la ligne de niveau au nœud I. 

Le gradient de φ̃(M ) vaut


X
φ̃,i (M ) = NI,i (M )φI .
I∈S

X.4 Enrichissement de la solution


L’inclusion introduit une discontinuité dans le champ de déformation. Le champ de déplace-
ment est alors continu à la traversée de l’interface mais de dérivée discontinue. La valeur
absolue de la fonction ligne de niveau |φ(M )| possède cette propriété lorsque l’on traverse
l’interface de façon normale à celle-ci (Fig. X.4). L’idée est alors d’enrichir l’approximation
du déplacement autour de l’interface avec la fonction φ(M ).


On rappelle que l’approximation standard ũ du déplacement −

u s’écrit
X
ũi (M ) = NI (M )UIi
I∈S

où S est l’ensemble des nœuds du maillage, NI (M ) est la fonction de forme associée au


nœud I, UIi est la composante i du déplacement au nœud I.
L’approximation du déplacement est enrichie de la façon suivante :
X X
ũi (M ) = NI (M )UIi + NJ (M )|φ(M )|AJi
I∈S J∈E

où E est l’ensemble des nœuds enrichis, AJi est la composante i de l’enrichissement du


déplacement au nœud J.
90 Eléments finis étendus

|φ| |φ|′

direction normale à l’interface


bc
0

Figure X.4 – Allure de |φ(M )| et |φ(M )|′ à la traversée de l’interface.

éléments enrichis
ensemble E des nœuds enrichis

Figure X.5 – Ensemble E des nœuds enrichis.


X.5 Construction de l’élément fini enrichi 91

L’ensemble des nœuds enrichis est défini comme l’ensemble des nœuds connectés aux
éléments coupés par l’interface (Fig. X.5).
Lorsque l’on évalue l’approximation du déplacement enrichi en un nœud enrichi J ap-
partenant à E, on remarque que sa valeur est

uJi = UJi + φJ AJi .

ce qui est différent de la valeur attendue UJi du déplacement au nœud J à cause du terme
φJ AJi . Un moyen d’éliminer ce terme additionnel est d’utiliser comme enrichissement au
nœud J la fonction (|φ(M )| − |φJ |) où φJ est la valeur de φ(M ) au nœud J. En effet, cette
nouvelle fonction s’annule au nœud J.

L’approximation enrichie du déplacement est :


X X  
ũi (M ) = NI (M )UIi + NJ (M ) |φ(M )| − |φJ | AJi
I∈S J∈E

X.5 Construction de l’élément fini enrichi




L’approximation du déplacement ũ dans un élément quadrangle enrichi s’écrit
" # " #
ũx N1 ... N4 0 ... 0 N1 ψ1 ... N4 ψ4 0 ... 0
= Q
ũy 0 ... 0 N1 ... N4 0 ... 0 N1 ψ1 ... N4 ψ4
avec
ψJ (M ) = |φ(M )| − |φJ |

où Q contient les inconnues de déplacement ainsi que les inconnues d’enrichissement de


l’élément :

Q = [ ux1 ux2 ux3 ux4 uy1 uy2 uy3 uy4 ax1 ax2 ax3 ax4 ay1 ay2 ay3 ay4 ]T

L’approximation dans un élément peut s’écrire de façon plus compacte sous la forme :



u (M ) = [ Nstd (M ) Nenr (M ) ] Q = N(M ) Q

où Nstd (M ) représente la partie standard de la matrice des fonctions de forme et Nenr (M )


représente la partie provenant de l’enrichissement.
En remplaçant dans l’expression suivante de l’énergie de déformation
Z
1 −

ED = u T DT CD−

u dΩ
2 Ω

et en posant
 
N1,x N2,x N3,x N4,x 0 0 0 0
 
Bstd = 
 0 0 0 0 N1,y N2,y N3,y N4,y 

N1,y N2,y N3,y N4,y N1,x N2,x N3,x N4,x
92 Eléments finis étendus

ΩeA

ΩeB

Figure X.6 – Découpage conforme à l’interface d’un quadrangle enrichi.

et
 
(N1 ψ1 ),x (N2 ψ2 ),x (N3 ψ3 ),x (N4 ψ4 ),x 0 0 0 0
 
Benr = 
 0 0 0 0 (N1 ψ1 ),y (N2 ψ2 ),y (N3 ψ3 ),y (N4 ψ4 ),y 

(N1 ψ1 ),y (N2 ψ2 ),y (N3 ψ3 ),y (N4 ψ4 ),y (N1 ψ1 ),x (N2 ψ2 ),x (N3 ψ3 ),x (N4 ψ4 ),x
on obtient la matrice de rigidité élémentaire suivante
 Z Z 

BTstd (M )CBstd (M )dΩe BTstd (M )CBenr (M )dΩe 
 Ωe Ωe

Ke = 
 Z


 Z 
BTenr (M )CBstd (M )dΩe BTenr (M )CBenr (M )dΩe
Ωe Ωe

Cette matrice de rigidité peut


Z être décomposée en quatre parties :
– partie standard, terme BTstd (M )CBstd (M )dΩe
Z Ωe
– partie enrichie, terme BTenr (M )CBenr (M )dΩe
Ωe Z
– couplage entre les parties standard et enrichie, terme BTstd (M )CBenr (M )dΩe
Ωe
Le calcul de Bstd (M ) est standard, le calcul de Benr (M ) fait intervenir les dérivées de
l’enrichissement qui sont calculées ainsi

(NJ ψJ ),i = NJ,i ψJ + NJ ψJ,i

avec
  4
X
ψJ,i = |φ(M )| − |φJ | = |φ(M )|,i = NI,i (M )|φI |
,i
I=1

X.6 Intégration numérique de la matrice de rigidité


L’élément enrichi possédant une discontinuité dans son approximation, l’intégration numérique
doit la prendre en compte et être compatible avec l’interface. Un découpage de l’élément
conforme à l’interface est effectué, chaque partie est alors intégrée de façon classique puis
ajoutée comme une contribution à la matrice de rigidité de l’élément enrichi (Fig. X.6 et
X.7).

X.7 Erreurs introduites par l’enrichissement


Les éléments partiellement enrichis (Fig. X.8) sont ceux qui touchent la zone enrichie et la
zone non enrichie. Pour ces éléments, au moins un nœud n’est pas enrichi.
X.7 Erreurs introduites par l’enrichissement 93

premier découpage en tétraèdres

second découpage conforme à l’interface

Figure X.7 – Découpage conforme à l’interface d’un héxaèdre enrichi.

11
0000
1100
1100
1100
1100
11
00
11
00
1100
1100
1100
1100
1100
1100
1100
11
0011
1100
00
1100
110011
110011
00
00
1100
11
00
1100
11
00
1100
11
00
1100
11
00
11
00
11
0011
110000
1100
11
0011
110000
1100
1100
11 00
11
00
11 00
11
00
11
00
1100
11 00
1100
1100
1100
11
00
1100
11
00
1100
11 00
11
00
11
00
11
00
1100 11
11 0000
11
00
1100
11
00
1100
1100
1100
11 00
11
00
11
00
11
00
11 00
1100
1100
1100
1100
1100
11
00
11
00
11 00
11
00
11
00
11
00
11 00
1100
1100
1100
11 00
11
00
11 00
11
00
11
0011
110000
1100
1100
1100
1100
1100
1100
11
00
1100
11
0011
00
0011
00
0011
00
0011
00
0011
00
0011
00
0011
00
111111111111110011
1100
éléments enrichis
11
00 nœuds enrichis
00
11
00
11
éléments partiellement enrichis

Figure X.8 – Eléments partiellement enrichis


94 Eléments finis étendus

Prenons par exemple un élément dont seulement trois nœuds sont enrichis, l’approxima-
tion du déplacement dans cet élément s’écrit
4
X 3
X
ũi (M ) = NI (M )UIi + NJ (M )ψI (M )AJi
I=1 J=1

Dans cet élément, la fonctino d’enrichissement ψ(M ) ne peut pas être correctement représen-
tée. En effet, en prenant U(1 à 4)i = 0 et A(1 à 3)i = 1, on a

ũi (M ) = N1 (M )ψ1 (M ) + N2 (M )ψ2 (M ) + N3 (M )ψ3 (M )

ũi (M ) = (N1 (M ) + N2 (M ) + N3 (M ))φ(M ) − N1 (M )φ1 − N2 (M )φ2 − N3 (M )φ3 6= φ(M )

puisque N1 (M ) + N2 (M ) + N3 (M ) 6= 1.
Les éléments partiellement enrichis introduisent une erreur dans l’approximation. Des
techniques particulières non développées dans ce cours permettent de corriger ces éléments.

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