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Cette représentation n’est pas la seule du même type et deux aquarelles détenue par le G∴
O∴ des Pays-Bas montre le même dessin, avec pourtant, sur l’une, cette rectification manus-
crite portée à l’encre (et en français) sur la même feuille : « Sur le tablier il ne faut pas de clef
mais bien la lettre Z ».
A la même époque, deux Tuileurs renommés, celui de “Delaulnaye“73, dès 1813, celui de
“Vuillaume“ 74, dès 1820, corroborent la description du “Précis Exact…“. Mais faut-il tou-
jours se fier aux tuileurs ? A propos du mot de passe du grade en vigueur à leur époque, les
deux tuileurs sont en entière opposition sur le mot employé.
Pour “Delaulnaye“ qui qualifie ce grade d’« assez insignifiant… », le mot de passe est
« Zizon ; que l’on traduit par Balustrade ». Et il ajoute à ce propos : « Voici un exemple frap-
pant d’une altération qui a fait perdre jusqu’au sens du mot primitif. Zizon n’est d’aucune
langue ; à la place de cette parole insignifiante, il faut dire ZIZA (splendor). »
Pour “Vuillaume“, le mot de passe est « ZIZA (resplendens) » qu’il commente ainsi :
« Quelques-uns disent Zizon, mais c’est une faute. On traduit aussi ce mot par balustrade, ce
qui paraît sans fondement, à moins que l’on ne considère les rayons de la gloire de Dieu,
auxquels pourrait être appliquée la signification vraie, resplendens, comme une balustrade qui
en garanti l’approche ; »
Aucun document, rituel ou tuileur, précédant ces documents ne faisant mention de Ziza com-
me mot de passe, il nous faut donc admettre que nous manquons de document(s) expliquer
cette évolution.
73
« Thuileur des trente-trois degrés de l’Écossisme du Rit Ancien dit Accepté » (1ère édition en 1813 ; 2nde en
1821 ; réédition -de l’édition de 1821- aux «“Éditions d’aujourd’hui » en 1979).
74
« Manuel Maçonnique ou Tuileur des divers rites de la Maçonnerie… » (1ère édition en 1820 ; 2nde en 1830 ;
réédition –de l’édition de 1830- aux Éditions Dervy en 1975, 1983…).
23
En fait, entre 1810-1820 et les années 1875, un seul rituel, du moins en France, semble avoir
été conservé. Conservant dans la forme, comme dans l’esprit, le contenu des premiers rituels
français du REAA, il est toutefois beaucoup plus complet dans l’explication de la pratique
gestuelle du rituel. Pouvant être daté des années 1840/1850, il n’apporte en fait que trois
“nouveautés“ :
- Il décrit pour la première fois le tablier que nous connaissons depuis l’aquarelle de 1813 :
« Le tablier est blanc et attaché avec des rubans noirs. (…) La bavette doit être bleue
avec un œil dessus, peint ou brodé en or. Deux branches, l’une de l’aurier, l’autre
d’olivier se croisent sur le tablier : dans le milieu est la lettre Z∴. »
Les archives du Suprême Conseil de France ne reprenant ensuite qu’avec un rituel manuscrit
des années 1870, nous sommes obligés d’avoir recours aux divers documents imprimés en
France ou à l’étranger.
75
Les Tuileurs Delaulnay et Vuillaume avaient déjà donné une telle représentation sans que celle-ci apparaisse
dans les rituels de l époque que nous avons pu consulter.
76
Kloss ms XXXIV-4
24
33- Les documents « étrangers ».
Une aquarelle et trois livres imprimés sur le continent américain vont essayer de combler nos
lacunes documentaires. Bien que nous ne puissions transférer automatiquement l’esprit et les
pratiques “rituelliques“ d’un pays à l’autre, celles-ci peuvent toutefois nous servir de repères.
∆ Parmi les imprimés, “Light on Masonry »77 en 1829, divulgue (entre autres) tous les degrés
conférés dans la Loge de Perfection. Il reprend, dans ses grandes lignes et parfois in extenso,
le rituel “Dalcho“ de 1801, sans toutefois divulguer les décors, les mots secrets ou de passe.
« Liturgias de los treinta y tres grados de la verdera Mazoneria ó Rito antiguo y aceptado
que se llama por antonomasia Rito Escoces »78, en 1859, décrit un rituel dont l’influence
« scientiste ou positiviste » est (hélas) déjà, présente.
Ses commentaires (sur l’intelligence, la conscience, le bien et le mal, le juste et l’injuste), qui
forment l’essentiel de la cérémonie de réception n’étant pas de notre propos, nous nous attar-
derons sur la description des décors qui présente parfois quelques variantes face aux pratiques
françaises.
Le cordon, porté en sautoir est : « de color violado con orilla negra », mais le tablier, décrit
conformément à l’aquarelle du “Précis Exact… de 1813 confirme le rituel de 18400/1850 :
« Mandil blanco orillado de negro en el que se bordan ó pintan dos ramas, la una de laurel y
la otra de olivo, que forman una corona abierta, encerrando la letra Z ».
A titre anecdotique, un recueil de titre (et d’esprit) équivalent : « Liturgias de los treinta y tres
grados de la verdera Mazoneria ó Rito antiguo aceptado escoces »79 en 1866 donne un nom
au frère second inspecteur : « el segundo Vigilante se nombra ”introductor”, y es Azarias80 ».
77
Elder David Bernard, Utica, 1829
78
Vicente A. de Castro, Nueva Orleans, 1859
25
Notons en outre que le mot de passe de ces deux documents est bien Ziza. Il serait toutefois
hasardeux de se référer à ces documents étrangers pour en déduire que Ziza a définitivement
détrôné Zizon. En effet, de nombreuses divergences de fond existent entre ces documents et
leurs homologues français (décors de Loge, âge, batterie, titres des officiers etc.). Ce sera,
plus tard, le rôle du Convent de Lausanne de tenter d’y remédier…
Dans cette revue des documents en langue étrangère, nous ne manquerons pas de signaler le
célèbre « Manual de la Masoneria »81 de 1867 qui tournant le dos aux rituels scientistes pré-
cédents, redonne à celui du 4e degré son sens “traditionnel“, mais ce faisant n’en fait, au point
de vue de l’histoire, qu’une simple traduction du rituel américain du début du siècle.
∆ Le grand silence des rituels français s’interrompt avec un rituel de Maître Secret du Suprê-
me Conseil de France des années précédant le Convent de Lausanne. Sur la page de couvertu-
re de celui-ci, outre les informations :
Rite Ecos∴ Anc∴ Acc∴
Sup∴ Cons∴ de France
Grades Capitulaires
Rituel du 4e Degré
Maître Secret
Nous trouvons, en bas de page, la mention manuscrite, bien plus tardive « entre la modifica-
tion de 1863 et le rituel imprimé de 1898 ». Quelle est la nature de cette modification ? Mys-
tère. Aucun document n’est là pour nous renseigner. Peut-on dater plus précisément le rituel ?
Sachant que les décisions du convent de Lausanne ne sont pas prises en compte par le rituel,
sa rédaction semble se situer entre 1863 et 1875. Nous le daterons c. 1870 en sachant bien
qu’en cette année funeste pour la France, les membres du Suprême Conseil de France avaient
sûrement d’autres sujets de préoccupations !
79
Viriato Alfonso de Covadonga, Brownsville, 1866
80
« le second surveillant se nomme ”introducteur”, il représente Azarias. Deux personnages bibliques partagent
ce patronyme : un roi de Judée (nommé aussi Osias) devenu lépreux en raison des fautes de son peuple -cité dans
2Rs 15, 1-6 & 2Chr 26- et un chef de guerre du temps de la révolte des Maccabées -cité dans 1Mac 5,55-62-. Les
deux personnages sont postérieurs à l’époque de Salomon.
81
Andres Cassard, Nueva York 1867 (5e édition)
82
J-M Ragon, Collignon libraire-éditeur, Paris 1861.
83
Quel est l’usage du maillet ? Aucun rituel (connu de nous) n’y fait allusion.
26
du milieu dans lequel il évolue, il épouse les données “scientistes“ de son époque et les tra-
duits dans les séquences du rituel84.
Ainsi, tandis que chaque symbole ou phrase symbolique est commentée dans le sens “à la
mode “, une planche d’instruction présentant le degré en ces sens historiques, astronomiques
et moraux clôt le rituel. Avant d’examiner ces “nouveautés“, et à la décharge des rénovateurs
du rituel de l’époque, il faut tout de même leur rendre hommage d’avoir su résister si long-
temps avant de souscrire aux thèses publiées en 1794 par Dupuis dans son livre sur
« L’origine de tous les cultes »85. Car depuis cette date, toute interprétation symbolique s’est
peu à peu alignée sur la clef astronomique, tout comme elle a tendance aujourd’hui à s’aligner
sur la clef psychanalytique.
• L’age est de « neuf ans accomplis », représentant neuf espaces de temps qui sont : « les 3 de
l’App∴, les 2 du comp∴ les 3 du M∴ et un nouvel espace, celui du lévite, espace qui corres-
pond à la marche apparente du Soleil alors qu’il recommence une course ascendante vers
l’équinoxe du printemps ». Le mémorandum en fin de rituel diffère quelque peu : « Age :
trois fois vingt ans86 accomplis ou neuf années »
• Le mot de passe donné par le T∴F∴P∴ au récipiendaire devient pour la première fois dans
un rituel français “Ziza“, mais le mémorandum du grade dit le contraire :
«Mot de Passe : en faisant le signe le Tuileur dit Zi, vous rendez le signe et répondez
Zon. Zizon est le mot de Passe. »
• L’obligation est prêtée en position debout, un flambeau à la main (sans plus de précision).
Au niveau du fond, chaque série de question-réponse est suivie d’un commentaire plus ou
moins développé.
- Certaines apportent une simple réflexion sur le sujet :
84
Cette constatation est également valable pour les rituels des degrés symboliques du GODF (rituel Murat) mais
aussi, quoique dans une moindre mesure, du SCDF (rituel 1877)
85
Et d’avoir conservé ce que le GODF avait supprimé en 1857, l’obligation de travailler à la Gloire du
G∴A∴D∴L’U∴.
86
Le mot “sept“ a été omis. Oubli du « copieur » du rituel ?
27
« Le T∴F∴P∴ - Qu’entendez-vous par ces paroles : j’ai passé de l’Equerre au com-
pas ?
Le F∴ Insp∴ - J’entends qu’après m’être livré durant les trois premiers degrés à
l’étude de l’angle droit à l’aide de l’Equerre, je suis venu dans la quatrième étudier le
cercle à l’aide du Compas. »
28
∆ Face aux divergences de pratiques entre les divers Suprêmes Conseils, le Convent de Lau-
sanne réunit sur l’initiative du Suprême Conseil de France tenta d’imposer un semblant
d’ordre. C’est ainsi que dans sa cinquième séance, le 13 septembre 1875 (séance mémorable
en ce qu’elle adopta également la ”Déclaration de Principes de la Maçonnerie écossaise”), le
Convent « décide de ne fixer d’une manière formelle que les signes, mots, attouchements et
acclamations de chaque degré, afin de rendre uniformes les moyens à l’aide desquels les ma-
çons écossais se reconnaissent dans le monde entier. Le soin de régler par des décrets spé-
ciaux les questions de forme, les points de détail, est laissé aux différents Suprêmes Conseils
agissant chacun dans sa juridiction. »87
1898.
Le Suprême Conseil de France édite le premier rituel imprimé à l’intention des Loges de Per-
fection travaillant du quatrième au quatorzième degré. Ne comportant ni cérémonie de récep-
tion ni instruction du grade, il n’était donc pas pratiqué en tant que tel, ou tout au moins
n’était pas usité pour les réceptions, celles-ci se faisant directement au quatorzième degré.
Ce court rituel fait l’objet d’une modification partielle89 entre 1907 (date de l’attribution de
l’exemplaire que nous avons entre nos mains) et 1922 qui :
• Change le titre du Président selon les prescriptions du tuileur du Congrès de Lausanne, le
“Trois fois Puissant“ devient “Trois Fois puissant Maître“ ;
• Rétablit l’âge normal du grade : « Trois fois 27 ans accomplis » ;
• Introduit la circulation du tronc et du sac des propositions ce qui prouve que le degré était
alors, ou pouvait être, pratiqué seul ;
• Voit l’apparition d’un rajout à l’ouverture des travaux. À la question d’ordre : « Êtes-vous
Maître Secret ? », il est répondu :
87
Compte-rendu des travaux du Convent des Suprêmes Conseils du Rite Écossais Ancien et Accepté réunis à
Lausanne (Suisse) en septembre 1875. Publié par les soins du suprême Conseil de Suisse.
88
C’est du moins le premier document qui en fait mention ; le rituel précédent (c.1870) étant quasiment muet sur
la décoration de la Loge et les décors des Officiers.
89
Malheureusement les bandeaux collés sur le texte original rendent ce dernier illisible.
29
« Je m’en glorifie, j’ai été reçu sous les oliviers et les lauriers, en passant de
l’équerre au compas, j’ai vu le tombeau… »
ainsi qu’un dialogue totalement inédit à la clôture. Ceux-ci s’étaient toujours terminés sur la
question : « Que nous reste-t-il à faire ? » à laquelle l’Inspecteur répondait par : « Pratiquer la
vertu, fuir le vice et demeurer en silence », celle ci est remplacée par :
« - Que vous a-t-on appris ?
- À garder les secrets, être obéissant et demeurer fidèle. »
192290.
Si cette nouvelle édition du rituel du quatrième degré ne présente aucune nouveauté dans
l’ouverture, la fermeture de la Loge ou l’instruction (nous y apprenons tout de même que Ziza
signifie ”resplendeurs”), elle marque un tournant dans la pratique de la cérémonie de récep-
tion. Introduisant la notion de “Devoir“91, le nouveau rituel renouvelle, presque entièrement,
la cérémonie de réception traditionnelle. :
-le tuilage de l’impétrant qui était autrefois simplement mentionné et effectué dans les parvis,
fait l’objet de nombreux dialogues en Loge entre le T∴F∴P∴M∴ l’expert et le maître des
Cérémonies qui assure la Loge de la qualité du futur Maître Secret en déclarant :
« Revêtu des décors de V∴M∴, je me suis assis sur les Col∴ de la L∴ des trois pre-
miers degrés à laquelle il appartient. J’ai constaté son assiduité aux Trav∴ ; j’ai été
témoin du soin paternel avec lequel il instruisait les apprentis en les débarrassant des
superstitions, des préjugés et des erreurs qu’ils avaient apportés du monde profane. Je
l’ai entendu donner des conseils de F∴ aîné à des Com∴ pour les préparer à devenir
de bons MM∴ Maç∴. Enfin, j’ai assisté aux communications qu’il a faites de mor-
ceaux d’Arch∴ dont il était l’auteur, et aux discussions auxquelles il a pris part au su-
jet de morc∴ d’Arc∴ préparés par d’autres VV∴ MM∴. J’ai été frappé de l’esprit
fraternel qu’il montrait en critiquant les Trav∴ d’Autrui et en répondant à la critique
de ses propres travaux. Cela m’a fait penser qu’il pourrait s’instruire d’avantage,
pour son plus grand bien et celui de la Maçon∴ entière. Je me suis décidé alors à
vous le proposer, afin qu’il lui soit conféré le Gr∴ de M∴S∴. »
Il effectue alors quatre voyages symboliques une corde au cou (la corde avait disparu avec le
rituel de c.1870) au cours desquels, lorsqu’il passe à l’Orient, le T∴F∴P∴M∴ prononce les
quatre sentences symboliques que nous connaissons encore aujourd’hui (même si leur énoncé
à quelque peu changé) :
- « … tu ne te forgeras point d’idoles humaines… »
- « … n’accorde de confiance aveugle à n’importe quel homme… »
- « …Quelque admiration que t’inspire le spectacle de l’univers… »
- « …ce que la maç∴ te demande, c’est d’aimer la justice, la révérer… »
90
Rituel réédité en 1932 en copie conforme.
91
Cf. l’étude de Patrick Chéné in Ordo ab Chao n°42 (deuxième semestre 2000) et spécialement pages 31 à 34.
30
Le T∴F∴P∴M∴ apprenant ensuite, par l’entremise du Maître des Cérémonies que celui qui
voyage n’est autre qu’ « un Ven∴ M∴ qui cherche la Parole Perdue », des voix s’élèvent :
- A l’Orient : « Malheur à ceux qui aspirent à ce dont ils sont indignes ! »
- Au Nord : « Malheur à ceux qui assument une charge qu’ils ne peuvent pas porter ! »
- Au Midi : « Malheur à ceux qui ensuite acceptent légèrement des devoirs et qui ensuite,
les négligent ! »
La “Maxime du Taciturne92“ (sans que soit révélé le nom -ni le surnom- de son auteur) est
alors prononcée par le T∴F∴P∴M∴, et le néophyte conduit à l’autel où le Maître des Céré-
monies lui met un flambeau en main gauche.
De nouvelles sentences sur le devoir sont alors prononcées par les mêmes voix que précé-
demment :
- A l’Orient : « Le Devoir est pour nous aussi inflexible que la Fatalité ! »
- Au Nord : « En santé ou en maladie, en prospérité ou en adversité, le Devoir est pour
nous aussi exigeant que la Nécessité ! »
- Au Midi : « Il [le devoir] s’éveille avec nous le matin et prend place sous notre oreiller la
nuit. Dans le tumulte de la cité, dans la solitude du désert, le Devoir est avec nous tou-
jours, impératif comme la Destinée ! »
Le corps incliné, la main gauche (tenant la lumière) placée sur la Constitution93 et la Clef et
les deux premiers doigts de la main droite (c’est-à-dire en faisant le “signe du Silence“) sur le
cœur, le néophyte prononce son serment (dont le fond ne change toujours pas). La corde lui
est ensuite retirée et le T∴F∴P∴M∴ étendant le Glaive sur la tête du néophyte, le reçoit et
institue l’un des Maîtres Secret de la Loge.
1950.
La tourmente de la guerre passée, les Ateliers du suprême Conseil reprennent leurs travaux.
Un nouveau rituel est imprimé dont les rituels d’ouverture et de fermeture ne diffèrent pas ce
ceux de 1922 ou 1932. La cérémonie réception est à la fois raccourcie en quantité et rallon-
gée d’éléments nouveaux.
Habillé en Maître, la tête recouverte d’un bandeau transparent sur lequel, au milieu, est fixée
une petite équerre d’argent, le néophyte, après avoir été tuilé dans les parvis par le Maître des
cérémonies, est introduit en Loge. Il est alors réexaminé par l’Expert, puis l’Orateur lui fait
lecture des “enseignements préparatoires“ « qui vous ont été donnés et que votre intelligence
a dû vous faire comprendre » :
92
« Il n’est pas besoin d’espérer pour combattre ni de réussir pour persévérer. » Attribué à Guillaume de Nas-
sau, 1533-1584
93
Ce qui implique, a contrario, que la Bible n’était pas présente, mais que la clef était déjà sur, ou à coté, du livre
sur lequel était prononcé le serment. Quand la Bible a-t-elle été remplacée par les Constitutions ? Le dernier
rituel à la mentionner expressément est celui de Dalcho, mais probablement faisait-elle partie des “meubles “
fixes de la Loge jusqu’à la seconde moitié du XIXe siècle. Rappelons-nous que la “suppression“ du
G∴A∴D∴L’U∴ au GODF date de 1857 et que l’ambiance scientiste qui prévalait alors n’épargnait pas les
Ateliers du SCDF.
31
« La franc-Maçonnerie est un Temple ouvert à tous les bons sentiments, à toutes les
nobles pensées, à toutes les aspirations de l’homme ;
Elle est la sentinelle avancée du progrès et de la civilisation.
Mais, pour rendre son enseignement plus efficace, elle l’a enveloppé de symboles et
d’emblèmes et l’a divisée par classes ou degré, afin de mieux observer l’intelligence
de ses adeptes et de ne leur donner qu’une instruction proportionnée à leurs forces.
Reconnaissant tout d’abord la nécessité d’enseigner à ses adeptes l’histoire tout entiè-
re de l’humanité, -non au point de vue des faits, mais au point de vue de l’influence de
ses croyances sur son développement intellectuel et moral, elle a cherché un moyen
simple et pratique qui, sans exiger de longues et laborieuses études, pût les initier
graduellement aux connaissances qu’il leur est nécessaire d’acquérir.
Né et vivant au milieu de peuples dont les conceptions religieuses avaient leur source
dans les traditions bibliques, elle a puisé tous ses symboles, tous ses mythes, toutes ses
premières légendes dans les livres hébraïques.
Partant de l’affirmation d’un Dieu unique, qu’elle a nommé le Grand Architecte de
l’Univers, elle a, sans jamais dévier de sa route, et en suivant l’esprit humain dans
toutes ses manifestations religieuses, passé du judaïsme à toutes les sectes qui en déri-
vent, pour aboutir à la philosophie pure, c’est-à-dire à la Raison. »
Suit un résumé de la philosophie des grades d’Apprenti, Compagnon et Maître, après quoi
commence réellement la réception qui ne diffère que par sa concision des rituels précédents.
1956.
Un nouveau rituel est imprimé. L’ouverture et la clôture demeurent inchangées. Seules «inno-
vations, dans la cérémonie de réception, la longue tirade sur les “enseignements préparatoi-
res“ ainsi que sur les trois premiers degrés est supprimée. …Mais elle est remplacée par le
retour de celle prononcée par le Maître des Cérémonies assurant la Loge de la qualité du néo-
phyte : « Revêtu des décors de V∴M∴, je me suis assis sur les Col∴ de la L∴ des trois pre-
miers degrés… »
La présence de la Bible en Loge a été rendue obligatoire par le convent de la Grande Loge de
France en 1953. pourtant, trois ans plus tard, le serment est toujours prononcé la main « sur la
Constitution et la Clef », bévue ou oubli, toujours est-il qu’un rajout manuscrit rétablit l’ordre
en indiquant, en marge du texte de l’obligation :”Serment sur la Bible”.
1978.
Ce nouveau rituel apporte de nombreuses modifications :
- Alors que depuis 1764 « il n’y a qu’un seul surveillant qui se nomme adoniram », le présent
rituel en rajoute un second (dont le rôle ne semble être que celui d’un effet d’alignement et
d’harmonie sur tous les autres degrés du Rite)94.
- Les diverses sentences lues lors de l’initiation au degré ne le sont plus par des voix anony-
mes, mais par les Frères Orateur, Hospitalier et Trésorier.
- La lecture de la colonne gravée des précédents travaux et son adoption, les excuses adres-
sées par les frères absents ainsi que la lecture du courrier sont incluses dans le rituel.
94
Il a toutefois un rôle d’instruction auprès des nouveaux Maîtres Secrets, mais en cela aussi l’on peut voir un
alignement avec les pratiques des loges bleues.
32
- Et surtout, la présence de la Bible, ouverte après la déclaration d’ouverture des travaux et
avant la lecture de la colonne gravée, est désormais officielle et obligatoire :
« Capitaine des Gardes95, veuillez ouvrir le Volume de la Loi Sacrée à la première
page du Livre des Rois »96
- Salomon a perdu son sceptre98 et son manteau noir doublé d’hermine. Il portait ce dernier,
au moins dans les rituels, depuis 1764.
1987.
Ce nouveau rituel comporte quelques changements.
∆ Dans l’ouverture des travaux :
- Un nouveau dialogue apparaît :
« - Frère premier Inspecteur, que cherchez-vous ?
-La Vérité et la Parole perdue. »
phrase qui était employée depuis 1922 au cours de la cérémonie de réception.
95
C’est la première fois que ce titre est employé en Loge de perfection pour désigner l’Expert.
96
Le Livre des rois, (avec celui des Chroniques) est celui où est relatée la construction du Temple de Jérusalem.
97
Aucune raison n’en est donné avant le mémento de 2000.
98
De 1764 (rituel St Domingue) à 1961 (Manuel de l’initié) Salomon a un sceptre ; en 1922 le maillet tient guise
de sceptre ; en 1978, le terme même de “sceptre“ sera retiré des attributs de Salomon, mais en 1987, il réapparaît,
tandis que disparaît le sceau du secret !
33
pouvoir au Maître des Cérémonies, c’est lui qui descend clore les lèvres des futurs maîtres
Secrets.
- Ziza retrouve en partie sa définition historique : elle signifie désormais « resplendeur »100
ou « balustrade ».
- Le cartouche du grade est rétabli sur le modèle de 1956 et sa description est précisée :
« Derrière le trône, à l’Orient, bien en vue, est un grand cer-
cle dans lequel est placé le triangle sacré, pointe en haut, le
tout tracé en noir sur fond blanc, portant en son centre
l’étoile flamboyante. »
Il apporte aussi, par le changement d’un seul mot, une petite préposition, un grand boulever-
sement.
Après deux siècles passés102 à répondre de la même façon à la même question :
Q. « En quel lieu avez-vous été reçu ? » ou « Où sommes-nous ? »
R. « Dans le Saint des Saints »
Le rituel de 1987 introduit une nouvelle localisation :
Q. « Frère Inspecteur, en quel lieu sommes-nous ?
R. « Trois Fois Puissant Maître, nous sommes dans le temple du Roi Salomon devant
le Saint des saints. »
1998.
99
Rappelons qu’il était à genoux de 1764 à c.1820, debout vers 1870 et incliné de 1922 à 1987.
100
Au singulier.
101
En héraldique, couleur se dit émail, rouge gueules et bleu azur.
102
La première question (et réponse) est celle du Ms de St Domingue de 1764
34
Est édité à cette date le « Mémento pour l’installation et la décoration des Temples du
4ème au 14ème degré du R∴E∴A∴A∴». Illustré, pour chaque degré, d’un plan de Loge
avec disposition de tous les décors nécessaires ainsi que de photos des principaux décors mu-
raux, ce mémento apporte quelques précisions :
Une lumière éternelle (noire) est placée sur le plateau du TFPM ainsi que, pour les initiations,
une clef d’ivoire et un sceau du secret représenté selon l’iconographie du document par une
main à l’index tendu.
2000.
Ce nouveau rituel n’apporte que peu de modifications. Quelques ajouts de précision. Ainsi, à
l’ouverture des travaux, lors de la reconnaissance de la qualité de Maître Secret par le frère
inspecteur le TFPM fait-il mettre les frères « Debout, face à l’Orient » alors qu’auparavant, ils
étaient seulement « Debout ». Autre petite modification, les termes de l’obligation qui avaient
inclus, en 1987, une clause d’obéissance au règlement intérieur de la Loge de Perfection, ont
été supprimé.
La même année est édité un mémento intitulé « Décors et Bijoux des degrés pratiqués dans
la Juridiction du Suprême Conseil de France ». Les décors du 4e degré sont précisés avec
soin et, signe de temps modernes, le “code Pantone” de chaque couleur est même indiqué. Ces
décors reprennent ceux décrits par les derniers rituels en vigueur, et une précision est même
apportée pour les sautoirs des officiers de la Loge de Maître Secret :
« En l’absence de sources historiques décisives et par référence à l’usage, les attributs
des Officiers de l’Atelier de Perfection sont identiques à ceux des Officiers remplissant
les mêmes fonctions dans la Loge symbolique. »
En conclusion, que retenir ce rapide survol des rituels que le génie de nos prédécesseurs nous
a laissé ? L’étude de la philosophie de ses diverses variations n’est pas de notre propos. Pour-
tant, nous pouvons la deviner en parcourant les grandes phases ayant abouti au rituel que nous
connaissons aujourd’hui dans notre Juridiction.
2e phase, la structure.
Avec le rituel de St Domingue (1764), le grade est structuré pour près de cent ans. Le rituel
d’ouverture et de fermeture des travaux est désormais fixé dans ces grandes lignes. Les décors
sont fixés, les principaux schèmes symboliques présents : question d’ordre (« êtes-vous Maî-
tre secret », réponse « oui je le suis et en fait gloire »), heure d’ouverture, de clôture, batterie,
lieu de l’action : le Saint des Saints.... La cérémonie de réception est codifiée : un tuilage, une
mise à genoux et un serment, une consécration par l’imposition d’une couronne de laurier et
d’olivier. La remise d’un nouveau tablier et d’un nouveau cordon auquel est suspendue une
35
clef d’ivoire. La reconnaissance enfin de la qualité de Lévite pour le nouvel impétrant et une
instruction basée sur la connaissance des décors du Saint des Saints.
Cette structure perdurera, selon les documents connus, jusque dans les années 1820 et vrai-
semblablement jusque dans les années positivistes.103
3e phase, le scientisme. Le rejet de tout ce qui, de près ou de loin, peut rappeler une forme
religieuse entraîne un rituel, aux alentours des années 1870, où toute explication relève d’un
scientisme outrancier voit la production d’un rituel réduit « au strict nécessaire ». Les arcanes
du grade ne sont pas touchés, du moins dans leur énoncé, mais leurs commentaires leur enlè-
vent toute portée initiatique.
Ce rituel, unique dans l’histoire du 4e degré du Rite Écossais, semble n’avoir eu (heureuse-
ment) que peu d’influence et n’avoir pas su, en raison même de son caractère anti-
traditionnel, résister aux “outrages du temps“.
4e phase, le Devoir.
Depuis le début du siècle, le grade de maître Secret est peu à peu pratiqué. La Grande Guerre
et les questions existentielles qu’elle n’a pas manquées de développer ont à leur tour leurs
répercutions sur le rituel. Si les phases d’ouverture et de fermeture restent stables, il n’en est
pas de même de la cérémonie d‘initiation. Tout en rejetant les innovations scientistes du siècle
précédent, le rituel de 1922 ne réintroduit pas les notions traditionnelles. Peut-être les juge-t-il
trop empreintes de religiosité ? Une nouvelle notion, totalement inédite en Franc-maçonnerie
(probablement parce qu’auparavant elle était tout simplement naturelle) fait son apparition
dans la structure de base : celle du Devoir. Elle renouvelle quasiment tout le rituel de la céré-
monie de réception. Aucun des éléments d’avant 1820 n’est conservé à l’exception de
l’imposition, somme toute assez laïque, de la couronne de laurier et d’olivier et de la remise
des décors au nouveau Maître Secret.
Cette phase perdure encore aujourd’hui et aucune modification ni aucun état d’esprit nouveau
n’est venu la troubler.
Au point de vue qui l’anime, nul doute que l’ambiance religieuse dans laquelle baignait la
société au XVIIIème siècle, a grandement influé sur la rédaction de ces rituels. Petit à petit,
parfois brusquement comme dans la seconde moitié du XIXème siècle, parfois plus insidieu-
sement tout au long de son histoire, le rituel de Maître Secret s’est transformé pour être celui
que nous connaissons et pratiquons aujourd’hui.
103
Auguste Comte (1798-1857), fondateur du positivisme a vulgarisé ses conceptions divulguées dans son
“Cours de philosophie positiviste“ de 1830 à 1842.
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Depuis 1987, il est toujours debout, sa main droite dégantée sur le volume de la Loi
Sacrée et la main gauche sur le cœur.
Nous voyons que la forme du rituel s’identifiant bien à l’époque qu’elle traverse (religieuse
jusqu’en 1850 environ, plus rationnelle ensuite), l’impétrant passe de la station de soumission
(à genoux) à celle d’acceptation (debout) sans que le fond du message (le serment) soit chan-
gé104 .
Mais quelles que soient (ou quelles qu’aient pu être) les tendances son évolution, le rituel,
parce qu’il n’est pas une fin en soi mais un moyen, nous permet de progresser sur notre che-
min initiatique. Un chemin nécessairement différent de celui du maçon du XVIIIème comme
de celui du XXIIème siécle. Évoluant comme un être vivant selon ses propres besoins, mais
aussi selon les nôtres, il permet ainsi de progresser en adaptant son message à ceux qui le pra-
tiquent tout en gardant son essence pour ne pas se trahir lui-même.
104
Le changement de position des mains, en 1987, intervertissant les cotés actifs et passifs ne fait que parfaire
cette évolution.
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Documents et rituels consultés.
Rituels « divers »
• Rituel 4e degré Collection Bonseigneur C. 1750/60 Kloss
• Rituel de Maître Elu Parfait ou Grand Ecossais C. 1750 (Latomia n°101)
• Rituel de Maître Secret c.1765, Collection Claude Gagne
• Rituel 4e degré « Cayers maçonniques » C. 1765 BN d’Australie (Latomia n°175-12)
• Rituel 4e degré « St Domingue » 1764 BN Fonds Baylot FM415
• Rituel 4e degré « Morin Ritual » 1769
• Rituels Franchen 1783
• Rituel de Grand Élu de Londres C. 1785 (Latomia n°7)
• Rituel 4e degré « The original and complete Rituals, 4e-33e of the first Supreme Counsil,
33e at Charleston, South Carolina -1801
• Rituel 4e degré REAA - GODF 1805 KLOSS XXVII
• Rituel 4e degré REAA - Ms Pyron 1811
• Tuileur du 4e degré Ms C. Gagne 1810/1820
• Ms 40 Collection SDCF C. 1820
• Ms 216 Collection SCDF C. 1820
• MS 709 Collection SCDF C. 1820
• Rituel 4e degré Collection particulière c.1840/1850
Rituels du SCDF
• Rituel c. 1870 “ Entre la modification de 1863 et le rituel imprimé de 1998 ”.
• Rituel 1898 : 1er rituel imprimé avec seulement ouverture et fermeture au du 4e degré
• Rituel 1922 : 1er rituel imprimé avec la cérémonie d’initiation du 4e degré.
• Rituel 1932
• Rituel 1950
• Rituel 1956
• Rituel 1978
• Rituel 1987
• Rituel 2000
Autres Documents :
Langue française
• 1770, tableau de Loge (collection complète de tous les tableaux des différents grades
et loges de la Maçonnerie - collection GLDF)
• Documents SHARP
• Thuileur de DELAULNAYE édition 1820
• Tuileur de VUILLAUME édition 1830
• Tuileur Général de la Franc-maçonnerie par J-M Ragon Paris (1861)
• Tuileur du convent de Lausanne 1875
Langue espagnole
•Liturgias de los 33 grados de la Verdadera Mazoneria Brownsville1866
•Liturgias de los 33 grados de la Verdadera Mazoneria Nueva Orleans 1859
•Manual de la Masoneria por Andres Cassard Neuva York 1867
Langue anglaise
• BERNARD Elder, David « Light on Masonry » Utica (USA) 1829
•LOTH « The ancient and Accepted Scottish Rite » Londres 1875
•BRIDGE « The intermediate degrees » Londres 1977
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