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LA RÉPUBLIQUE DE PLATON
RÉSUMÉ ET THÈMES
A - Méthode suivie
Afin de rendre possible et surtout efficace la confrontation entre le texte de Platon et notre
résumé, nous avons conservé, d'une part, la division en livres de I à X que l'Antiquité nous
a transmise, d'autre part, la pagination de l'édition Estienne. Nous avons ajouté à cette
pagination traditionnelle celle de l'édition Garnier-Flammarion (traduction de Robert
Baccou), la plus maniable pour les étudiants. Nous renvoyons, bien entendu, également aux
éditions Gallimard (t. I des œuvres de Platon dans « la Pléiade », trad. de Léon Robin), Les
Belles Lettres (Budé, trad. d'Émile Chambry et introd. de Auguste Diès). Ces trois éditions
sont infiniment précieuses pour la qualité de leurs notes et de leurs introductions.
B - Argument
PROLOGUE :Au Pirée, les frères de Platon (Adimante et Glaucon) rencontrent, à l'occasion
d'une fête, le sage et riche vieillard Céphale et, arrivés en sa demeure, entament une
discussion sur la destinée et la justice (327-330 b, pp. 75-78).
1) [332b-337a] Préliminaires
a)Socrate précise : ce qui est dû est ce qui convient : - comme la médecine qui donne aux
corps les remèdes ; - comme la cuisine qui donne aux mets les assaisonnements.
b)Polémarque revient à la définition : la justice procure du bien aux amis, du mal aux
ennemis.
2) [333a-334b] Première objection de Socrate : être juste est-ce, seulement, être capable de
faire le bien ?
a)Ceux qui sont capables d'utiliser leurs talents pour le bien ont forcément la possibilité de
les mettre au service du mal. Par exemple : - le médecin est le plus capable de faire du bien
ou du mal à ses malades ; - le pilote est le plus capable de faire du bien ou du mal à ses
matelots et à sa cargaison.
Donc habileté n'entraîne pas nécessairement justice.
b)En temps de guerre, le juste (ici, le loyal) semble être utile puisqu'il s'allie à ses amis et
nuit à ses ennemis. Mais, en temps de paix, la justice n'a de valeur que négative puisqu'elle
ne s'identifie pas à l'habileté (le juste se contente de garder l'argent qu'on lui a confié tandis
que l'habile financier s'emploie à le faire fructifier).
3) [334c-335c, pp. 82-83] Deuxième objection de Socrate : la fin de la définition de la
justice proposée par Polémarque n'est pas satisfaisante car on peut confondre ami et
ennemi
a)On peut, en effet, être juste et/ou le paraître : - être juste et le paraître ; - être juste et ne
pas le paraître ; - ne pas être juste et le paraître ; - ne pas être juste ni le paraître.
b) Ils'ensuit que le juste peut, sans le vouloir, faire du mal à ses amis et du bien à ses
ennemis.
4) Troisième objection de Socrate : l'extrême fin de la définition proposée par Polémarque
est également critiquable : faire du mal à un cheval ou un homme ne les rend pas meilleurs
mais pires : ce traitement rend injuste celui qui ne l'était pas et renforce la dureté de celui
qui l'était déjà.
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et l'injuste : le juste ne cherche pas à l'emporter sur l'injuste (dans une action, on est juste
ou on ne l'est pas : il n'y a pas de hiérarchie dans la justice). L'injuste, au contraire, entre en
compétition avec le juste et avec d'autres injustes (hiérarchie dans l'injustice).
b)[350b-351a] Est-ce l'injuste (selon Thrasymaque) ou le juste (selon Socrate) qui est «
sage et bon » ? - Admettons, dit Socrate, que le savant est sage et que le sage est bon. - Un
musicien est savant en musique, un médecin en médecine. - Le musicien voudra l'emporter
sur un non-musicien et non sur un autre musicien, le médecin sur un non-médecin et non
sur un autre médecin.
Donc, alors que l'homme injuste, qui se dit sage et bon, veut l'emporter et sur le juste et sur
d'autres injustes, le vrai sage et bon - comme le montrent les exemples du musicien et du
médecin - « ne voudra pas l'emporter sur son semblable mais sur celui qui ne lui
ressemble pas » Voilàpourquoi seul le juste est bon et sage alors que l'injuste est ignorant
et méchant !
hommes, on fuit la difficulté intrinsèque de la justice mais on recherche des suites : récom-
penses et distinctions. - Socrate : c'est l'opinion de Thrasymaque. - Glaucon : je vais la
reprendre et louer la vie de l'injuste afin d'entendre ta réplique.
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par la peinture de l'Hadès, la crainte de la mort : on ne doit pas représenter l'Hadès comme
un lieu terrifiant (les fleuves des Enfers : Cocyte, Styx, les spectres) car cette peinture
inciterait les jeunes gens à préférer l'esclavage à la mort, alors que l'esclavage est pire que la
mort. - Un honnête homme ne doit pas regarder la mort comme terrible quand elle lui
enlève un ami.
b)[387d-388e] Les poètes ne doivent pas inciter les citoyens aux lamentations par le
tableau de dieux et de héros s'abandonnant à ces sentiments (Achille pleurant Patrocle,
Zeus Sarpédon).
c) [388e-389b] Les poètes ne doivent pas dépeindre les dieux riant sottement car le rire est
inadmissible pour les dieux et les hommes : il nuit à l'équilibre de l'âme (désapprobation
d'Homère).
d)[389bd, p. 140] Les simples citoyens ne doivent pas mentir. Seuls les chefs de la Cité
peuvent mentir si c'est dans l'intérêt de la Cité.
e)[389d, pp. 141-142] On exaltera la résistance à la faim, la tempérance et la discipline et
on écartera tous les passages célébrant la débauche des dieux et des hommes (plaisirs de la
table et de l'amour : Zeus et Héra, Arès et Aphrodite).
f)[390e] Les guerriers ne devront pas être cupides.
g) [391d] Ils ne devront mépriser ni les hommes ni les dieux car le mal ne vient pas des
dieux.
h)[392c] Les fabulistes commettent leur plus grave erreur quand ils louent l'injustice au
détriment de la justice. Quand on aura examiné la nature de la justice, on pourra savoir ce
qu'il convient de faire dire aux poètes.
3) [398b-399b, pp. 150-151] Parmi les chants et les mélodies accompagnant les fables, on
n'admettra, dans la Cité juste, que la virile dorienne pour la guerre et la calme et noble
phrygienne pour la paix. La musique est, en effet, au service des paroles, non l'inverse !
- B - 414c-415c. - Pour que tout citoyen joue son rôle sans récriminer, on
inventera un « noble mensonge » : le mythe des trois genres.
Si la contrée où se trouve la Cité est la mère de tous les Citoyens qui doivent la chérir,
certains appartiennent : - à la race d'or : les gardiens accomplis et les magistrats ; - d'autres
à la race d'argent : les gardiens auxiliaires ; - d'autres encore à la race de fer et d'airain : les
artisans et les laboureurs. Leurs rejetons devraient leur être semblables mais il se peut que
d'un genre naisse un enfant d'un autre genre puisque tous les citoyens sont frères.
- C - 415d. - Comment faire pour que les auxiliaires soient des bergers et non
des loups pour les autres citoyens ?
Outre les précédentes mesures d'éducation, il faut que les gardiens vivent en communauté
et ne possèdent rien en propre. Ils seront les salariés de la Cité car s'ils possédaient des
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biens, et de l'argent, ils deviendraient aussi individualistes et hargneux que les laboureurs
accrochés à leur lopin de terre. (Suite des exigences dans le livre IV)
- B - 421d-423c, pp. 173-174. - Suppression, dans la Cité, des divisions qui ont
pour origine la richesse ou la pauvreté :
1) [421d] Parce que, dit Socrate, richesse et pauvreté perdent les arts et les artisans.
L'artisan enrichi cesse de vouloir accomplir sa tâche. L'artisan appauvri ne peut se procurer
tous les outils nécessaires et éduque mal ses enfants. Il faut donc éviter la richesse car elle «
engendre le luxe, la paresse et le goût de la nouveauté ; la pauvreté, car elle engendre
bassesse, méchanceté et goût de la nouveauté ».
2) [422a] Parce que, dans la guerre, une Cité non attachée à la richesse (« chiens solides
»)pourrait mieux lutter contre des Cités corrompues par le luxe (« moutons gras et tendres
») et avoir plus facilement des alliés.
3) [423a] Parce que, dans toute autre cité, il y a deux factions ennemies : les riches et les
pauvres.
3) [427ab] Parce que ces lois ou sont inutiles, ou découlent des instructions précédentes.
4) Pour tout ce qui regarde le culte, il suffit de s'en remettre à Apollon. La cité est donc
fondée (p. 179).
- A - Être juste consiste à suivre l'ordre naturel, injuste, à se dresser contre la nature, c'est-
à-dire, à bouleverser la hiérarchie des classes de la Cité ou des parties de l'âme.
- B - Il y a, en conséquence, une seule forme de nature vertueuse mais
beaucoup de formes de vices.
Il y a beaucoup de mauvais régimes politiques mais il n'y a qu'un seul que l'on puisse
qualifier de bon. Il est à la fois monarchique si l'on considère le rôle dévolu aux chefs, et
aristocratique si l'on prend en compte l'aide que leur apportent les gardiens auxiliaires
(N.B. il ne faut pas se méprendre sur le sens de ce passage qui anticipe sur le livre VIII et
faire comme si la terminologie politique n'avait pas évolué depuis Platon : dans la mesure
où, selon lui, le classement des citoyens dépend seulement de leurs aptitudes, cette
conception peut, à bon droit, passer, aujourd'hui, pour démocratique).
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2) [461d] Communauté de parenté : tous les enfants d'une même génération sont frères et
la génération antérieure est celle des « pères et mères ».
- A - 466e. - Les enfants des gardiens assisteront aux combats pour prendre
exemple sur leurs aînés mais ils seront exercés à s'enfuir rapidement en cas de
danger.
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et en détaillant :
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Si on lit le tableau ci-dessus, de gauche à droite, on voit qu'on progresse vers la réalité et
l'unité, de droite à gauche, qu'on régresse vers les reflets et la multiplicité. Autrement dit,
de droite à gauche, on se dirige de l'unité vers la multiplicité ou encore du modèle vers les
copies, puis des idées anhypothétiques vers les schémas hypothétiques, puis des schémas
hypothétiques vers les objets existants au sens courant, puis, enfin, des objets existants à
leurs images.
Elle est destinée à faire comprendre l'état d'esprit de l'homme avant l'éducation, l'état
d'esprit de celui qui a passé par toutes les phases de l'éducation et la méthode éducative
elle-même.
De ces statues, ou marionnettes, les prisonniers ne voient que les ombres projetées sur le
fond de la caverne. Des paroles échangées par les montreurs de marionnettes, ils
n'entendent que l'écho.
Qu'un prisonnier brise ses chaînes, se retourne, gravisse la pente jusqu'au mur : il verra
alors les marionnettes elles-mêmes. Elles seront, pour lui, les originaux, les modèles dont
les ombres de la caverne n'étaient que des copies.
Dépassons encore ce stade : on comprend que les objets et les êtres du monde sensible ne
sont que les copies des Idées et que le soleil est, comme on l'a compris précédemment,
l'image sensible du Bien intelligible.
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On peut, si l'on veut, figurer de dessous et de profil ce récit pour le rendre encore plus
parlant.
Bien.
4) [518e-519b] Si, dès l'enfance, on éduque avec discernement les talents de l'âme, celle-ci
pourra alors être en mesure de distinguer le Bien.
5) [519ce] Ne seront capables de diriger convenablement l'État ni les gens sans culture ni
ceux qui auront consacré à la culture toute leur vie. C'est pourquoi il faut contraindre ceux,
qui auront été capables de contempler le Bien « de redescendre auprès des prisonniers
»,car, ne l'oublions pas, on doit faire le bonheur non d'une classe mais de la Cité tout
entière.
6) [520a-521c] Cette mesure n'est pas une injustice car ces philosophes-là auront des
devoirs envers la Cité qui a pourvu à leur éducation. Ils paieront leur dette en redescendant
dans la Caverne parce qu'ils sont les seuls à même de gouverner une réalité d'État et non un
rêve d'État. Un tel État ne sera parfait qu'à condition que ceux qui le gouvernent
accomplissent leur tâche non par ambition mais par devoir.
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La discursion comprend les disciplines que l'on a, jusqu'ici, appelées, par habitude «
sciences ». Ce qu'on dénommera, désormais, « Science » relève de la dialectique. Le
dialecticien « saisit pour chaque chose la raison de son essence ». Quant à la contempla-
tion du Bien, elle est nécessaire pour rassembler en elle toutes ces raisons.
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On recrutera les futurs magistrats dès leur jeunesse car c'est la jeunesse qui possède
l'endurance nécessaire à un tel cursus.
- C - 537d-539e, pp. 296-297. - Quand ils auront atteint trente ans environ,
seront désignés, s'ils ont renoncé à l'usage de leurs sens, ceux qui sont aptes à
la Dialectique.
Mais il convient de prendre, ici, une précaution capitale : le discrédit dans lequel tombe
souvent la philosophie provient de ce qu'on a présenté trop tôt la Dialectique à des jeunes
gens. Si on la leur présente, en effet, à l'âge des jeux, ils ne se servent de l'art d'argumenter
que pour réfuter à tort et à travers. Ils tournent en dérision les sages maximes des ancêtres
dont l'autorité les impressionnait enfants. Ils finissent par ne plus croire en rien, tels des
enfants adoptifs qui, ayant percé le mystère de leur naissance, ne respectent plus ceux qui
les ont élevés et tombent sous la coupe des flatteurs.
Son édification, on l'a compris, est très difficile car elle dépend très étroitement de
l'éducation. Aussi ne deviendra-t-elle possible que le jour où l’on décidera de ne conserver,
dans la future Cité, que les enfants de moins de dix ans : ce sont eux seuls qui ne sont pas
corrompus par les mœurs actuelles. Ainsi se terminent les propos sur la Cité juste et les
hommes qui lui correspondent.
1) [543ac, p. 103] Socrate rappelle à Glaucon qu'ils s'étaient accordés sur les conditions
nécessaires à l'établissement d'un bon gouvernement : communauté des femmes et des
enfants, éducation identique pour les deux sexes, communauté économique pour les
gardiens, pouvoir aux meilleurs.
2) [543c-544b] Glaucon, quant à lui, rappelle que, selon Socrate, ce type d'État et les
hommes qui y vivent sont les meilleurs. À l'opposé, existent quatre formes défectueuses de
gouvernements et d'hommes que Socrate n'a pas, jusqu'ici, eu le loisir d'analyser. Glaucon
souhaite que Socrate développe maintenant son point de vue sur ce sujet.
3) [544c-545b, pp. 304-305] Socrate accepte et remarque qu'existent en effet ces quatre
sortes de mauvais gouvernements ainsi que des formes intermédiaires. Ce sont, par ordre
de dégradation : la timarchie[1], l'oligarchie, la démocratie, la tyrannie. Il y a donc, en
tenant compte du bon gouvernement (monarchique et aristocratique), cinq formes de
gouvernements et de tempéraments. On examinera lequel est le plus juste et procure le plus
de bonheur.
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Qu'un État soit gouverné par des riches entraîne inévitablement la division des citoyens
entre deux groupes antagonistes : les riches et les pauvres. Lors d'une guerre, les riches
hésiteront à employer les pauvres de crainte qu'ils ne se rebellent.
Mais surtout un tel régime ne comporte plus la stabilité des classes nécessaires à la
cohésion de l'État. Chacun étant libre d'acheter ou de vendre, peut changer sans cesse de
fonction. Plus grave, ce libéralisme économique et politique entraîne dans la pauvreté la
grande masse des citoyens, dont certains sont réduits à devenir coquins ou mendiants.
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étranger ou d'un candidat à la tyrannie dans leur propre pays. Serviles devant les puissants,
odieux aux faibles, ces jeunes gens sont incapables « de goûter à la liberté et à l'amitié
authentiques ».
Chacun de ces trois hommes glorifie le plaisir qui lui est propre et méprise les deux autres
types de plaisirs ;
b)[581e-583b, p. 344] La supériorité du philosophe : le philosophe l'emporte sur les deux
autres parce qu'il développe le plus, en lui, l'expérience et le raisonnement. Il est donc
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On peut se représenter l'homme comme étant un être composé, d'une part dans son
intérieur, d'un côté, d'une sorte d'hydre (serpent fabuleux à sept têtes) se terminant par des
têtes, les unes d'animaux paisibles, les autres de bêtes féroces, d'un autre côté, d'un lion
plus petit que l'hydre ; d'autre part, d'un revêtement extérieur - plus petit que la chimère
précédente - qui a allure humaine. Si cet homme entretient surtout ses bêtes féroces, il est
tout à fait injuste. S'il entretient à la fois les bêtes féroces et les animaux paisibles, il est à
demi-injuste mais finira par succomber à l'injustice. Si, au contraire, c'est l'homme, aidé du
lion, qui commande à l'hydre, la partie raisonnable de l'âme triomphe sur la partie bestiale.
La liberté absolue n'est donc pas souhaitable. En l'âme doit régner la raison. Si nous
sommes incapables d'obéir à celle-ci, alors, les gardiens de la Cité, qui la représentent et la
défendent, doivent nous soumettre à son autorité. Sous l'autorité de la raison, les autres
éléments de l'âme peuvent vivre en harmonie comme les musiciens sous l'autorité du chef
d'orchestre.
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sentiments inférieurs au lieu d'exalter les supérieurs. Les poètes sont donc bien dangereux
pour l'État.
4) [605c-608c, pp. 370-373] Poésie tragique et poésie comique ont des objectifs opposés à
ceux de la philosophie.
a)[605c-606d] La poésie tragique contamine même les plus sages car son charme nous
entraîne à approuver, pour notre plaisir, les attitudes irraisonnées des héros qu'elle chante
et à alimenter ainsi nos propres émotions alors que la raison se doit de les combattre ;
b)[606cd] De même, la poésie comique nous fait rire de conduites que notre raison
désapprouve ;
c) [606e-608b] Concluons que ces sortes de poésie méritent d'être éloignées de la Cité ou,
tout au moins que l'éducation philosophique nous mette en garde contre elles et nous
rappelle que la justice et les autres vertus doivent être le but suprême de notre conduite.
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- C - 621c. - Conclusion.
Puisque notre âme est immortelle et responsable de ses choix, à nous de suivre la direction
du salut et de la justice !
Il nous a paru utile de regrouper les remarques de notre commentaire dans six rubriques :
morale, psychologie, pédagogie, théorie de la connaissance, métaphysique.
I - LA MORALE DE « LA RÉPUBLIQUE »
Dans le Gorgias, Platon s'interrogeait sur la meilleure conduite à suivre en cette vie, sous la
forme d'un dilemme que l'on retrouve dans La République : vaut-il mieux être juste ou
injuste ?Interrogation qui en entraîne une autre : quelle est la nature de la justice si l'on a
pu prouver qu'il vaut mieux être juste ? Ces questions concernent non seulement la vie de
l'homme ici-bas mais éventuellement aussi sa destinée dans l'au-delà. Le Gorgias et La
République s'achèvent, en effet, par un tableau mythique du jugement des morts. Mais si,
dans le Gorgias, cette description semble quelque peu surajoutée, elle est, dans La
République, appelée par les réflexions liminaires du vieux Céphale au livre 1 et par
lescritiques des considérations des poètes sur les dieux au livre II. Céphale assure avoir tiré
parti avec justice de ses richesses lors de son existence : il s'apprête donc à entrer sans
crainte dans le royaume des morts et à passer la tête haute devant le tribunal divin. Ce
tribunal qui sera évoqué dans un tableau d'une intense poésie à la fin de l'œuvre. Évocation
et description du tribunal suprême encadrent donc la question centrale : vaut-il mieux
vivre dans la justice que dans l'injustice ?
Thrasymaque, qui n'a pas la fougue de Calliclès, abandonne rapidement la joute avec
Socrate. Il convient, ici de remarquer qu'on ne trouve de véritable dialogue, dans La
République, que dans les livres I et II : des arguments, qu'aurait pu soutenir Thrasymaque,
sur les avantages de la conduite du demi-injuste et de l'injuste accompli seront proposés
seulement aux livres VIII et IX... par Socrate qui, comme tout bon orateur, ne se les oppose
que pour mieux les réfuter.
La notion de fonction propre apparaît pour la première fois au livre II, 369e : se proposant
de construire une Cité idéale, Socrate assigne à chacun des citoyens un certain nombre de
fonctions compte tenu, d'une part, des tâches à accomplir, d'autre part, des aptitudes
différentes des citoyens. Un citoyen n'est juste, une Cité n'est juste que si leurs fonctions
sont correctement hiérarchisées, c'est-à-dire que si, en eux, la raison commande. C'est
pourquoi la justice n'est pas, à proprement parler, une vertu particulière mais le résultat de
l'harmonie hiérarchique des trois vertus qui correspondent aux trois parties de l'âme et aux
trois classes de la Cité (cf. notre résumé, de 428b à 432b, livre 1V, de 580d à 581e, livre IX,
et de 588b à 592b, livre IX). Au livre IX, Platon compare l'homme à un composé d'animaux
paisibles et d'animaux féroces. La justice consiste dans la domination de la partie
rationnelle de l'âme sur la partie bestiale. L'injuste commet, dans la réalité, des actes que le
juste se contente de n'accomplir qu'en songe (574c-575a, passage que cite Freud dans
L'interprétation des rêves).Une fois établies les exigences de la justice, il reste à déterminer
quelles conditions la réaliseront. Ces conditions relèvent de la politique, de la pédagogie, de
la théorie de la connaissance et de la métaphysique.
II - LA POLITIQUE DE « LA RÉPUBLIQUE »
Contre Thrasymaque qui voulait donner l'avantage aux plus forts, Socrate souhaite que le
pouvoir soit détenu par les plus compétents. Le gouvernement sera donc aristocratique : le
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gouvernement des meilleurs. Bien entendu, le vocable « aristocratie » a, chez Platon, son
sens originaire et non celui qui est devenu courant depuis le Moyen Age. Pour comprendre
pleinement la signification que lui donne Platon, nous examinerons successivement
l'organisation de la Cité, ses conditions d'édification et enfin les causes de sa dégradation.
1 - L’organisation de la Cité
C'est par une transition méthodologique que Platon passe de la morale à la politique : on ne
parvient pas, dit-il, à étudier l'essence de la justice dans l'individu parce qu'elle y est écrite
en « trop petits caractères ». Puisque la Cité est « plus grande que l'individu »,c'est dans
ce « cadre plus grand » que la justice sera « plus grande et plus facile à étudier »(livre II,
369a, p. 117). « Plus grande » peut avoir plusieurs significations. On peut comprendre, en
effet, la Cité soit comme un ensemble d'individus, soit comme un individu non réductible à
la somme de ses parties. On peut la comprendre comme une organisation ou comme un
organisme. C'est un organisme si on veut dire que son existence répond à une nécessité
quasi-biologique, une organisation rationnelle si on estime que c'est sur la raison et non sur
des pulsions qu'elle doit reposer.
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tant leur diversité est grande et se multiplie au fur et à mesure du développement de la Cité.
Le problème se résout plus simplement si l'on classe les métiers selon leurs objectifs : on
pourra alors les répartir en trois catégories. Certains concourent à la production et aux
échanges, d'autres ont pour objet la défense contre l'ennemi et la sécurité à l'intérieur de la
Cité, d'autres concernent, enfin, l'administration et le gouvernement. La Cité comprendra
donc trois classes : les artisans et commerçants, les guerriers, les magistrats.
Pour que la Cité soit tout entière heureuse (420a, p. 171), son organisation devra être
harmonieuse et hiérarchisée : à son sommet dominent les magistrats qui, par
l'intermédiaire des guerriers, régentent artisans et commerçants. Chaque classe a une
fonction propre. Chaque classe et non chaque caste : on ne sait, à la naissance d'un citoyen,
dans quelle classe ses aptitudes lui permettront d'entrer. L'éducation fera le tri. Puisqu'il
s'agit d'assurer le bonheur de l'ensemble de la Cité, on fera en sorte que tous les citoyens
aient la conviction que « la contrée qu'ils habitent est leur mère et leur nourrice ».
Aussipourront-ils « la défendre contre qui l'attaquerait et traiter les autres citoyens en
frères, en fils de la terre comme eux »(livre III, 415a, p. 166). Pour ancrer cette conviction
patriotique, les magistrats inventeront un pieux mensonge en disant aux citoyens des trois
classes qu'ils sont égaux mais qu'ils appartiennent à trois races : d'or s'ils sont aptes à
devenir magistrats, d'argent s'ils sont capables d'être des guerriers, de fer ou d'airain s'ils
ne peuvent accomplir que des tâches d'artisan. On développera en chacun les vertus de sa
classe : la sagesse pour les gardiens-magistrats, le courage pour les guerriers, la tempérance
pour les artisans.
Les causes majeures de dissensions entre citoyens sont les inégalités, souvent cumulées
entre elles, ayant pour origine la richesse et la naissance. On se gardera donc, en particulier
dans la classe des artisans, de l'extrême richesse tout autant que de l'extrême pauvreté, de
peur que la Cité ne se divise entre riches et pauvres (421d-423b, l. IV, p. 174). Les familles,
si on les conservait sous leur forme actuelle, feraient courir un risque grave à la Cité. D'une
part, elles incitent à s'attacher à son conjoint et à ses enfants plus qu'à la Cité, d'autre part,
elles confinent les femmes dans des tâches inférieures. C'est pourquoi, au moins dans la
classe des gardiens (parce que la Cité qu'on veut édifier devra d'abord éduquer ceux qui
auront pour mission de gouverner), on supprimera les familles et on confiera les mêmes
tâches à des hommes et des femmes qui auront reçu une éducation communautaire
semblable. Il est, en effet, déraisonnable d'affirmer que les femmes sont moins aptes que
les hommes à administrer et à gouverner (451c457b, pp. 205 et suivantes). Pour réduire la
part du hasard dans l'éducation, on favorisera, comme les éleveurs, les unions entre sujets
d'élite. Si la science le justifie, on n'hésitera donc pas à transformer les classes en castes, ce
qui restreint l'analyse proposée au paragraphe précédent sans l'annuler : il n'est pas
impossible qu'un fils d'artisan ait les aptitudes nécessaires pour devenir gardien (458c-
460b). Enfin, on supprimera les causes familiales de dissensions entre citoyens si on
apprend aux enfants, pris très tôt en charge par des nourrices et des pédagogues de l'État,
qu'ils sont tous frères et que tous les hommes et toutes les femmes de la génération
antérieure à la leur sont, collectivement, leurs parents (462a-466d).
A quelle condition une telle Cité est-elle réalisable, demande Glaucon à Socrate (473a) ?
Une seule, répond Socrate ! Il « suffit » que les philosophes deviennent rois ou que les rois
deviennent philosophes. Les philosophes dont il s'agit ne sont pas ceux que la foule
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confond avec les sophistes. Ce sont des hommes (et des femmes) capables de discerner les
valeurs que doit suivre la Cité. Ils ne méritent le nom de philosophes que s'ils ont franchi
avec succès les étapes d'une éducation appropriée que nous examinerons bientôt. A cette
condition de droit, Socrate finit par ajouter une condition de fait. Quand les philosophes
auront pris le pouvoir, ils s'empresseront de « reléguer aux champs »les enfants qui auront
dépassé l'âge de dix ans, afin de pouvoir élever les autres en conformité avec les principes
qui fondent la Cité modèle (1. VIII, 540d-541b, p. 300).
Platon ne dissimule pas que la réalisation de ces conditions est une formidable gageure et il
ne s'attarde guère à décrire la prise de pouvoir par les philosophes. Cette réalisation ne lui
semble pas impossible si des législateurs conformes à ses vues ont, dans leurs conduites,
pour guide le modèle de la Cité idéale.
Platon sait que même si les magistrats se prémunissent contre les dangers de l'innovation,
toujours pernicieuse, on ne peut écarter des causes de décadence. Au livre VIII, Platon
décrit la dégradation de l'aristocratie en timocratie, de la timocratie en oligarchie, de
l'oligarchie en démocratie et de la démocratie en tyrannie. La cause initiale de ces
dégradations : les hasards inévitables de la biologie. Malgré tous leurs efforts pour
réglementer la procréation, les magistrats ne pourront, en effet, empêcher la naissance,
chez les gardiens, d'enfants ayant en eux des traces d'argent, voire de fer (545c-547h). A
cause de ces indignes rejetons, l'abolition de la propriété privée sera remise en cause. Avec
sa restauration renaît la division de la Cité en riches et pauvres. Resurgiront les familles
avec leurs inconvénients. La hiérarchie des classes sera bouleversée et, au milieu de ces
troubles, finira par prendre le pouvoir un tyran qui gouvernera en satisfaisant les plus bas
instincts.
Vision pessimiste ? Non, car au début du livre IX, Platon souligne l'infinie distance qui
sépare le vrai bonheur du philosophe de la peu enviable condition du tyran
perpétuellement menacé par des ennemis de plus en plus nombreux. Si, d'autre part,
Platon n'a pas jugé bon d'achever son œuvre avec le triomphe des philosophes-rois, au livre
VII, c'est probablement parce qu'il a voulu montrer à ses lecteurs que l'édification de sa
Cité est une œuvre de longue haleine et que, même réalisée, c'est une construction très
fragile.
Pour construire cet édifice aussi beau et harmonieux que le Parthénon, il faut repenser
complètement l’éducation...
Quand les échanges ne suffisent plus à assurer l'ordre social, il convient d'accorder la plus
grande attention à ce qui permet la constitution et la reproduction de la Cité, c'est-à-dire à
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l'éducation. C'est, en effet, dans l'enfance qu'on « façonne un être jeune et tendre et qu'il
reçoit l'empreinte dont on veut le marquer »(377ab, p. 126). C'est aux gardiens qu'on doit
dispenser l'éducation la plus élaborée, en particulier du point de vue moral, pour éviter
qu'ils ne confisquent le pouvoir politique à leur profit.
Pourquoi ? Parce qu'« une cité ne sera heureuse qu'autant que le plan en aura été tracé
par des artistes utilisant un modèle divin » (l. VI,500e, p. 258). C'est seulement quand
auront été éduqués les futurs gardiens que, par eux, pourra être éduquée la masse des
citoyens. On trouve, au livre V, une allusion à l'apprentissage des fils d'artisans lorsque
Socrate le compare à l'entraînement des futurs gardiens à assister aux combats de leurs
aînés. Il est, en effet, nécessaire que les enfants « voient d'avance ce qu'ils auront à faire
quand ils seront arrivés à l'âge mûr ». Socrate fait remarquer la similitude, sur ce point,
des deux types d'éducation : « N'as-tu pas remarqué ce qui se pratique dans les métiers,
et, par exemple, quel long temps les fils de potier passent à aider et à regarder travailler
leurs pères, avant de mettre eux-mêmes la main à l'ouvrage »(466d, p. 222).
Cette comparaison entre l'éducation des artisans et celle des gardiens montre l'importance
que revêt, pour Platon, dans l'éducation et dans d'autres domaines, l'imitation,
accompagnée ici de l'apprentissage. C'est pourquoi il faudra savoir distinguer entre vrais et
bons modèles d'une part, faux et mauvais modèles d'autre part. Il ne suffit pas d'indiquer
quelles disciplines seront enseignées, il faut surtout préciser en vue de quelles valeurs. La
comparaison entre le métier de l'artisan et celui du gardien permet, en outre, de
comprendre pourquoi Platon décrit deux phases, deux périodes dans l'éducation
(l'apprentissage du métier, l'exercice du métier) : la deuxième phase révèle les sujets d'élite.
De même qu'un petit nombre d'artisans seulement sera capable de produire des « chefs-
d'œuvre », de même un petit nombre de gardiens seulement sera capable d'accéder à la
philosophie et à exercer les fonctions de magistrat. Voilà pourquoi, en utilisant notre
vocabulaire, on peut distinguer, dans la République, un enseignement élémentaire et un
enseignement supérieur.
3 - L'enseignement élémentaire
Confiés peu après leur naissance à des sortes de fonctionnaires, les filles et fils de gardiens,
ainsi que quelques enfants sélectionnés des autres classes, reçoivent une éducation
communautaire. Dans une Cité « où chacun n'aura à soi que son corps et où tout le reste
sera commun », « les citoyens seront à l'abri de toutes les dissensions que fait naître
parmi les hommes la possession de richesses, d'enfants et de parents » (l. V,464d, p. 220).
Grâce à une observation attentive, les pédagogues amèneront les enfants à s'instruire en
jouant (l. VII,536d, p. 295). C'est qu'à cet âge, ils ne sont pas capables de penser par eux-
mêmes : il est donc vain de les engager dans des études abstraites et prédialectiques. C'est
pourquoi on ne s'écartera pas, à cette période, du plan traditionnel d'éducation grecque : on
enseignera les Lettres, les Arts, la Musique et l'Éducation physique. Mais si le cadre est
conservé, le contenu est considérablement remanié en vue de l'édification de la Cité.
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Au livre X, Platon compare le poète épique au peintre. Quand un peintre représente un lit,
il ne le figure que sous un point de vue, en cherchant à donner, sur une surface plate,
l'impression du relief. Bien plus, pour exécuter son tableau, le peintre n'a nul besoin de
connaître l'usage de l'objet peint ou la manière dont il a été fabriqué ou, encore moins, le
modèle idéal dont s'est inspiré l'artisan pour le construire (598ad). Il en va de même
d'Homère : s'il avait vraiment connu ce dont il parle (sentiments, problèmes politiques,
etc.) il ne se serait pas borné à écrire des vers mais il aurait conseillé des princes ou tout au
moins des individus. Quand il décrit des sentiments, Homère célèbre les plus
déraisonnables parce qu'ils sont les plus spectaculaires. Sa lecture est néfaste pour les
adultes, a fortiori pour des enfants. L'enfance est, en effet, façonnée de manière durable
par les modèles qu'on lui impose. Elle n'a pas de ressources intellectuelles suffisantes pour
les critiquer.
Comme exemples de modèles pernicieux, Platon indique, aux livres II et III, les plaisantes
mais fallacieuses peintures des dieux chez Homère : ce ne sont que parricides et adultères
qui risquent d'inciter lecteurs et auditeurs, devenus adultes, à suivre de tels exemples. Les
poètes inspirent la crainte de la mort alors qu'on doit inspirer le courage aux futurs
guerriers. Ils chantent des dieux menteurs alors qu'une saine éducation doit apprendre la
vérité. Ils célèbrent la désobéissance et l'intempérance alors qu'on doit éduquer les jeunes
gens dans la tempérance et le respect des chefs. Ils ne cessent, enfin, de louer diverses
formes d'injustice.
Voilà pourquoi Platon les condamne. Henri-Irénée Marrou remarque que les Grecs « n'ont
pas ratifié cette condamnation d'Homère, d'autant plus que l'œuvre de Platon témoigne
de sa connaissance extrêmement précise d'Homère et des tragiques... Par l'usage qu'il en
fait, Platon démontre contre lui-même la fécondité de cette culture littéraire et quel profit
l'esprit philosophique pouvait en tirer » (Histoire de l'éducation dans l'Antiquité).Sans
doute, mais l'avertissement platonicien demeure : il ne faut pas considérer la littérature
comme les autres arts. On trouve, dans tout texte littéraire, une idéologie sous-jacente. Il
faut éduquer l'esprit critique des jeunes lecteurs et veiller au choix des textes.
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b) La musique
Platon est, sans doute, le premier philosophe qui s'inquiète des répercussions des différents
types de musique sur le comportement. Il remarque que certains accompagnent des
banquets où se côtoient « ivresse, mollesse et indolence ». Ilfaut les bannir ainsi que les
harmonies plaintives qui imitent les sentiments chantés par les poètes. On doit, en
revanche, conserver et développer les musiques martiales qui entraînent les braves au
combat... Bref, il faut, dans l'éducation musicale, préférer « Apollon et les instruments
d'Apollon (lyre et cithare) à Marsyas et à ses instruments (famille des flûtes) »(398b-
399d, pp. 150-151).
Remarquons enfin qu'à quelques exceptions près, Platon ne donne pas (contrairement aux
Lois) d'indications précises sur les exercices qu'il préconise pour ses gardiennes et
gardiens. Preuve que ce qui lui importe ce sont les objectifs généraux de l'éducation qu'il
explicite lorsqu'il parle de...
IV - LA THÉORIE DE LA CONNAISSANCE
Platon la décrit par étapes. Au livre V (476a-479e, pp. 232-237), il distingue d'abord la
science de l'opinion, puis il divise en deux, d'une part l'opinion, d'autre part la science, et il
compare les deux domaines sous l'angle de leur source : le soleil pour le monde visible,
l'idée du Bien pour le monde intelligible.
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Nous renvoyons ici au résumé des livres VI et VII. On s'interroge souvent sur la
correspondance entre l'allégorie de la Caverne et la théorie de la connaissance. Il serait
assez vain de tenter de la retrouver point par point : l'allégorie est la copie de la théorie et,
en termes platoniciens, une copie est forcément une dégradation par rapport au modèle. En
outre, selon l'interprétation qu'en donne Platon lui-même, l'allégorie poursuit une autre
fin : montrer la condition du philosophe-roi parmi les hommes. Celui-ci n'a pas le droit de
négliger ses frères sans le labeur desquels il n'aurait pu poursuivre ses brillantes études et
contempler la lumière du Bien. Il doit prendre ses responsabilités, c'est-à-dire gouverner au
royaume des ombres parce qu'il est le seul à avoir été éclairé.
V - LA MÉTAPHYSIQUE
Elle n'a pas de frontière rigide avec la théorie de la connaissance : on s'est souvent
demandé si le Bien est le nom platonicien de Dieu. Si on laisse de côté cette question
controversée, il n'en demeure pas moins que Platon indique clairement, dans La Répu-
blique, ses conceptions sur la nature de Dieu et sur celle de l'âme.
1 - Dieu
Dieu, parce qu'il est bon, ne peut mentir : le mensonge est détesté des dieux (Platon est à la
foi mono- et polythéiste, ce qu'est bien, d'une certaine manière, le christianisme) et des
hommes (382a, p. 132). Dieu n'aime ni les furieux ni les insensés.
Dieu n'est pas le magicien dépeint par les poètes, capable d'apparaître sous des formes
diverses. C'est « plutôt un être simple, le moins capable de sortir de la forme qui lui est
propre »(380d, p. 130).
Immuable et non trompeur, Dieu n'a donc aucun rapport avec les images
anthropomorphiques qu'en donnent les poètes. Il est donc ridicule de s'imaginer qu'il
apparaît dans la réalité ou en songe ; il faut repousser les fables qui font peur aux enfants
sur la damnation éternelle et l'enfer. Pourtant Platon ne renonce pas tout à fait à ce langage
comme en témoignent les mythes d'Er le Pamphylien et celui du jugement des morts dans
le Gorgias. C'est parce que c'est celui que peuvent entendre des lecteurs qui ne peuvent
maîtriser la théorie de la connaissance à cause des difficultés du parcours dialectique.
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2 - L'âme
Preuve étrange de son immortalité que donne Platon au livre X (608c-611a) ! Elle se fonde
sur l'idée - qui fera fortune chez les cartésiens - de l'hétérogénéité de sa nature et de celle
du corps. De même que, quand l'âme est pervertie, cette perversion n'entraîne pas une
perversion du corps, de même, quand le corps est anéanti, cet anéantissement n'entraîne
pas celui de l'âme. Platon objecte alors qu'il s'ensuit de ce raisonnement que le nombre
d'âmes ne peut varier car du périssable ne peut naître l'impérissable. Ce qui le conduit,
pour sauver la conception de l'âme individuelle, à admettre la métempsychose (thème
développé dans le mythe d'Er le Pamphylien). Un contemporain pourrait demander à
Platon comment l'expansion démographique se peut concilier avec sa théorie. Piètre
objection car même si elle bat en brêche l'argumentation platonicienne en faveur de
l'immortalité de l'âme, elle ne ruine nullement celle sur la distinction de nature entre l'âme
et le corps, elle-même fondée sur la distinction entre le sensible et l'intelligible.
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