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î L'HÉRITAGE
J DE I(ANT
MÉLANGES PHILOSOPHIQUES
OFFERTS AU P. MARCEL RÉGNIER
DIRECTEUR
DES
ARCHIVES DE PHILOSOPHIE

Le Père Marcel RÉGNIER


Directeur des
BEAUCHESNE
Archives de Philosophie
NOTE LIMINAIRE

Comme professeur, puis comme directeur des Archives de


Philosophie, le P. Marcel Régnier a toujours estimé que
l'indispensable fidélité à la grande tradition philosophique ne
pourrait se maintenir vivante si elle négligeait la peusée de
Kaut et celle de ses successeurs. Il s'est donc montré ouvert
à toutes les formes de la pensée moderne et contemporaine :
française, allemaude, italienne, anglo-saxonne. Son don de
contact et d'amitié lui a permis d'entrer en relation person-
nelle avec un nombre considérable de philosophes en des pays
très divers, et d'établir, ainsi, à travers les frontières, des
échanges philosophiques internationaux. Le recueil, qui lui
est offert par ses collègues et amis, en hommage et en recon-
naissance, devait refléter autant que possible cette activité.
Dû à l'initiative de François Evain et de Beauchesne, pré-
paré en collaboration avec quelques membres du Comité des
Archives de Philosophie, en particulier Xavier Tilliette, Heuri
Bouillard et François Marty, ce volume de Mélanges offre
des contributions inédites, groupées par thèmes sous l'uuité
qui a présidé à son projet.
Il constitue un hommage de haute qualité et uue attes-
tation de la vitalité permanente de la philosophie.
H.B.

Pour toute documentation sur nos publications s'adresser à


BEAUCHESNE EDITEUR
72, me des Saints-Pères - 75007 Paris

Tous droits de traduction, de reproduction ou d'adap~ation


en quelque langue et de quelque façon que ce smt
réservés pour tous pays,
© 1982, by BEAUCHESNE EDITEUR

I.S.B.N. 2-7010-1029-2
LISTE DES COLLABORATEURS

Yvon BELAVAL, Université de Paris-Sorbonne.


Manfred BUHR, Berlin, République Démocratique Allemande.
François EVAIN, Université Grégorienne, Rome.
Pierre FRUCHON, Université de Bordeaux.
Hans-Georg GADAMER, Université de Heidelberg.
Joseph GAUVIN, Centre Sèvres, Paris.
Klaus HAMMACHER, Aix-la-Chapelle.
Eric HEINTEL, Université de Vienne.
Dieter HENRICH, Université de Heidelberg.
Heinz KIMMERLE, Université de Rotterdam.
Hehnut KUHN, Université de Munich.
Pierre-Jean LABARRIÈRE, Centre Sèvres, Paris.
Reinhard LAUTH, Université de Munich.
Hywel D. LEWIS, Université de Londres.
Johannes-Baptist LoTZ, Munich.
Hermanu LÜBBE, Université de Zurich.
Joseph MOREAu, Université de Bordeaux.
Alexis PHILONENKO, Université de Paris.
Otto POGGELER, Université de Bochum.
Tom ROCKMORE, Université de Yale.
Hans-Jorg SANDKÜHLER, Université de Brême.
Adolf SCHURR, Université de Ratisbonne.
Livia SICHIROLLO, Université de Mîlan.
Josef SIMON, Université de Tübingen.
Robert SPAEMANN, Université de Munich.
Xavier TILLIETTE, Institut Catholique de Paris, Université
Grégorienne, Rome.
Joachim WIDMANN, Munich.
SOMMAIRE

Portrait sur le vif, par Xavier TILLIETTE 1

Laudatio, par Robert SPAEMANN 17

I-KANT

YVON BELAVAL, Libres remarques sur le schématisme


transcendantal. 27
A constater que le chapitre concernant le schématisme trans-
cendantal n'a pas été modifié daos l'édition de 1787 de la
C:ri~ique de la raison pure, on est enclin à penser que ce thème
81 l~portant doit avoir une autre signification que. celle -:
traditIonnelle - d'intennédiaire, en quelque sorte Juxtapose
entre la sensibilité et l'entendement. Sunnontant la dualité de
l'empirisme (Locke, Berkeley, Hume) et de l'intellectualisme
(Leibniz), il concerne l'ensemble de iaCritique et même. de ,
la philosophie traoscendaotale. Comme l'ont compris Schellmg
et Fichte, il ne se présente pas comme une «troisième faculté»,
mais comme le fondement même de la sensibilité et de l'enten-
dement. Il se rapporte, en définitive à la Nature (générale, hu-
maine, individuelle), «comme un art caché dans les profondeu~s
de l'âme humaine ». Ainsi trouve-t-on chez Kant une théone
du «génie ».

Joseph MOREAU, La critique kantienne et le renouveau


de la métaphysique. 43
La philosophie transcendaotale - en dépit des dénégations
éparses dans la Dialectique transcendantale _ ne ferme pas
l'accès à la métaphysique. Elle la distingue de la science et tente
SOMMAIRE XI
x L'HERITAGE DE KANT

de la réformer en corrigeant son ambition de s'achever en système.


Il faut revenir à la corrélation inéluctable entre «visée inten~
tionnelle» et «donnée intuitive». Dans la Critique de la raison II - KANT ET FICHTE
pure, Kant dépasse l'idéalisme de type cartésien. Il le fait en
deux: étapes, qui seront, ultérieurement, celles de la phénomé M

nologie transcendantale de Husserl et de l'ontologie fondamentale Klaus HAMMACHER, La dialectique en transition : de


de Heidegger. Ceci n'est possible que parce que l'idée de la vérité Kant à Fichte. 97
ou de l'être est déjà présente à notre esprit.
Partant de la Logique transcendantale, on fait paraître un
passage légitime de la dialectique de l'Antiquité à la dialec-
Alexis PHILONENKO, Kant et la philosophie biologique, 63 tique moderne. L'examen de la table des catégories manifeste,
en effet, que celles-ci ne s'identifient pas aux fonctions de la
L'étude, dans la deuxième partie de la Critique de la faculté logique formelle, mais contiennent en genne une démarche pro-
de juger, de l'analytique téléologique (§§ 61-68) fait apparaître prement dialectique, que reprendra Fichte. Ceci s'applique, en
que la philosophie biologique de Kant s'inspire de Linné pour particulier, aux jugements singuliers, indéfinis ou de disjonction.
l'anatomie, et de Blumenbach pour la physiologie. Les concepts La dialectique fichtéenne s'est ainsi développée à partir de la
sont ici ceux de finalité et d'organisation. La finalité est à la fois 1re partie de la Logique transcendantale (1'Analytique trans-
interne (parce que son mouvement s'accomplit dans l'individu) cendantale). Analyse et dialectique sont liées en ce sens que les
et extelne (parce qu'elle implique une relation réciproque de fin antinomies de la dialectique transcendantale se comprennent
à moyen). L'être organisé doit être distingué de l'être vivant: grâce aux fonctions reconnues aux jugements. L'influence de
le premier relève de la juxtaposition des éléments; le second, Salomon Maimon et de Karl Leonhard Reinhold marquent cette
par leur subordination, justifie son aptitude à la reproduction. « transition».
Ainsi le jugement téléologique ré~ulte-t-il d'une démarche réfle~
xive dans laquelle - à la différence du mathématicien qui dit :
«parce que» - le biologiste dit : «comme si». La philosophie Reinhard LAUTH, Kants Lehre von den «Grundsiitzen
biologique pennet, par là, non de connaître, mais de penser la des V erslandes» und Fichtes gr!!nd-
vie par analogie. siitzliche Kritik derselben. 119
r
Les principes de entendement dans la Critique de la raison
Adolf SCHURR, Von der Unmoglichkeit eines ontolo- pure montrent que ce n'est _pas seulement ce que nous expéri~
gischen 8eweises vom Vasein Gottes. 81 mentons, mais aussi le fait que nous expérÙllentions ainsi, qui
est pour Kant un fait d'expérience, qui ne peut pas être davan-
Examen de la «contradiction» de l'argument ontologique tage fondé. Là commence la critique de Fichte : la doctrine de
selon Kant. On ne peut faire appel à l'autorité de celui-ci pour Kant est seulement une critique, mais non un système de la rai-
maintenir l'impossibilité d'une preuve ontologique de l'existence son; la facticité de la multiplicité est constatée, sans aucune
de Dieu. Dans le contexte kantien de la possibilité de la connais~ e!,pl~cation « scientifique ». Il faut donc s'interroger sur la signi-
sance en général, il s'agit de savoir quelle unité doit être reconnue fication de «comprendre» et «expliquer», en opposition à
entre la simple représentation et la réalité. Si une pensée sans « constater» et simplement «dire». La dernière question est
contenu est vide, des intuitions sans concepts sont aveugles. La alors celle de la compréhension de soi du sujet réfléchissant
philosophie transcendantale est impossible si elle demeure enfer M lui-même.
mée dans des intuitions qui ne seraient que sensibles. Kant
établit que la connaissance est fondée parce que l'être le plus
réel est identiquement l'être le plus nécessaire. Joachim WIDMANN, Existenz zwischen Sein und Nichts.
Fichtes Vaseins-Aualyse von 1805. 137
Le «4e Exposé de la doctrine de la science », fait par Fichte
à Erlangen en 1805, opère un déplacement tenninologique du
SOMMAIRE XIII
XII L'HeRITAGE DE KANT
élargit et prolonge le point de vue kantien dans le domaine de
« Je ~ à 1'« existence », comme « existence de l'être ». Fichte part l'~on, mais en écrasant le côté de l'objectivité et donc la mé-
de la chose en soi, sans existence, comme «rien», incompré~ diation. Plus fidèle à Kant, Schelling revalorise l'objectivité et
hensible, limite qui marque le début de la philosophie; et fina- l~ N il;ture, et par là effectue la médiation et la synthèse, qui
lement, l'Idéalisme absolu, synthèse suprême de la philosophie s ~xpr~ent dans l'~, mais comme réconciliation illusoire, an-
de Fichte en 1805, est lui-même «rien ». Deux occasions per- histonque. Hegel cntlque et dépasse ses prédécesseurs en insé-
mettent d'éclairer cette position de Fichte, l'accusation de nihi- ra~t et fondant la médiation et la synthèse dans la contradiction
lisme, portée par Jacobi, et l'essai de Schelling, pour déduire la qUI. est au cœur des choses. Dans cette perspective se forme ou
réalité. Face à ce «rien», se forme \IDe libre réflexion du sujet deVIent une totalité, une véritable synthèse des contradictoires
sur lui-même, dans l'inquiétude de l'existence vivante de l'être. et le mouvement qui l'engendre s'appelle dialectique C'est pour~
L'article se termine par quelques remarques sur le rapport entre quoi la question de l'Histoire est la question de l'identité.
intuition et concept et sur la voie vers la transcendance qu'offre
la connaissance des autres sujets humains.
Joseph GAUVIN, Gestaltungen dans la Phénoménologie
de /' esprit. 195
III - SCHELLING ET HEGEL L:hypothèse proposée est celle d'un itinéraire, dont les étapes
ser31ent, le passage de la Wissenschaft der Erfahrung des Be-
wusstsems au System der Erfahrung des Geistes, et, du même
Dieter HENRI CH, Altérité et absoluité de l'esprit. De coup, de la Darstellung des erscheinenden Wissens à la Phénomé-
Schelling à Hegel : sept étapes sur le n?logie de l'esprit. Cette hypothèse est examinée à travers les
dIX ~ccurrences de Gestaltungen, remises dans le moment systé-
chemin. 155 matI9ue de l'œuvre où elles interviennent, ce qui permet de faire
~~raltre lc::s connexions caractéristiques de chacune d'elles. De
De Schelling à Hegel, de l'Identité absolue à l'Absolu comme 1 I?-troductlOn, avec son projet de présentation du savoir appa-
Esprit, du monisme de l'Unitotalité à sa conception dialectique, ratss~t, on passe ~~ occurrences du dernier chapitre, sur le
le parcours spéculatif de Hegel peut se décomposer en sept saVaIT absolu; les diffIcultés de cet aboutissement font remonter
« pas», qui transforment l'idée d'Absolu et son rapport au fini : aux occ-.;rrences précédentes, et jusqu'à celle de la préface, posant
autosuppression du fini au regard de l'Absolu - autonégation la questIOn du rapport entre conscience individuelle et esprit du
pure et simple - présence de l'Absolu dans cette autonégation m~:m~e. La questlOn demeure ouverte, ce qui suggère un autre
du fini _ nature négative de l'Absolu établie dans l'égalité à soi prmcIpe de lecture que celui proposé dans l'introduction.
et incluse dans la relation négative du fini, plus absohûté du fini
du fait de sa nature négative - identité et réciprocité de l'Ab-
solu et du fini par la négation (le fini comme altérité de soi-même)
_ l'Absolu rapporté à soi comme autre de soi-même, l'Esprit,
ou l'Absolu identique au fini par l'altérité - l'Esprit absolu IV - KANT ET HEIDEGGER
comme procès logique, automédiation du fini, procès de la cons-
cience de soi. Ainsi l'Unitotalité a été pensée par Hegel jusqu'au
bout, et reconduite à soi. François EVAIN, Impératif catégorique et problématique
de l'être. Rosmini entre Kant et Hei-
Manfred BUHR, Die Frage der ldentitat ist die Frage degger. 211
nach der Geschichte. 183 Sur la question discutée de savoir si la Critique de la raison
pu!e fer~e ou non l'accès à l'ontologie, l'étude des implications.
La gradation classique, Kant-Fichte·Schelling-Hegel, se reflète meta~~yslques des fonnulations de l'impératif catégorique dans
et se vérifie dans la problématique idéaliste centrale de l'Identité, la CntIque de la raison pratique se révèle instructive. L'examen
c'est-à-dire de la synthèse (des non-identiques). Kant amorce et par A. Rosmini des exigences théoriques de l'universalité du
résout le problème par le schématisme, œuvre de l'imagination rapport personne et fin, et de l'autonomie du vouloir manifeste
créatrice en tant que faculté synthétique par excellence. Fichte
XIV L'HERITAGE DE KANT SOMMAIRE XV

la requête d'une problématique de l'être dont l'Homme serait les catégories qui, seules, rendent possible la nécessité de contenus
la clé. Cette analyse semble pouvoir être rapprochée de la lec- objectifs. C'est à partir d'elles que procède la synthèse qui abou-
ture de Kant par Heidegger, et la position de ce dernier déclarant tira à une «pré-organisation» de la perception sensible. Il appar-
que l'essence de l'Homme est essentielle à la vérité de l'être. tiendra à l'idée d'Unité globale de la réalité objective d'indiquer
quelles significations le temps reçoit dans chacune de ces situa-
tions.
Johann-Baptist LOTZ, Die ap/'io/'ischen E/'kenntnissbe-
dingungen bei Kant im Lichte
der Offenba/'keit des Seins von
Heidegger. 221 v- HEIDEGGER

Dans la Critique de la raison pure de Kant, l'étant est ramené


à l'apparence phénoménale: il n'échappe pas à l'oubli de l'être. Hans-Georg GADAMER, Die /'eligiOse Dimension in Hei-
Heidegger, en revanche, à travers l'accomplissement de la diffé- degger. 271
rence ontologique, progresse vers l'être-même et, de là, vers
l'étant. Cependant, il demeure enfermé dans les nombreuses La pensée de Heidegger, qui, dans les débuts, se désignait
vicissitudes historiques de l'être. L'être un, au contraire, à partir comme une théologie chrétienne, a des connotations religieuses.
duquel seraient surmontées ces vicissitudes, pourra sans doute Elle s'efforce cependant de se libérer de la domination de la
être approché : il demeure toutefois insaisissable. Heidegger théologie : sa pensée, en effet, ne réussit pas à parler de Dieu
n'atteint pas les ultimes profondeurs transhistoriques de l'être, d'une manière qui aide la foi à prendre conscience d'elle-même.
parce qu'il ne découvre pas, dans le temps, l'éternité cachée qui Stimulé par l'expérience des premiers chrétiens, il en arrive, à
s'y dévoile. propos de la structure du souci dans le Dasein à la notion de
J

retour (Kehre) ou mouvement de l'être pour se produire lui~


même. En même temps, son itinéraire le conduit, par-delà
Tom ROCKMORE, Le Kant de Heidegger: remarques sur Nietzsche, à HOlderlin : avec lui, sur les traces des dieux dis-
l'anthropologie philosophique. 239 parus, il augure l'attente d'un nouveau partage du Divin.

Le propos de Heidegger est de mener à terme la problématique


anthropologique de la Critique de la raison pure. C'est là une for- Otto PiiGGELER, Heidegger und das Problem der Zeit. 287
me d'herméneutique légitime : celle par laquelle un a,uteur uti-
lise la pensée d'un autre pour proposer la sienne. L'anthropologie Contre les Grecs, qui pensaient l'être comme localisé et, par
kantienne s'inaugure dans le nouveau rapport entre sujet et conséquent de façon univoque, comme présence, Heidegger déve-
objet que formule la «révolution copernicienne ». Heidegger, loppe le «là» de l'être comme «lieux instantanés », c'est-à-dire
allergique sans doute à l'idée de révolution, semble n'avoir pas comme éloignement dans le transitoire et retour transformé. Il
accepté que l'anthropologie de Kant soit à la fois empirique et suit de là que le néant appartient à l'être aussi longtemps que le
transcendantale. C'est pourquoi son analyse du Dasein semble « découvrir» est masqué par le «recouvrir ». En outre, l'espace
remplacer plutôt qu'accomplir l'anthropologie kantienne. Il y a et le temps sont donnés comme spatialisations et temporalisations
toutefois, chez ces deux auteurs, un souci semblable de compren~ fondamentales. L'auteur fait enfin une remarque critique en di-
dre l'homme. rection de la philosophie française : il considère comme insuffi-
s~tes l'élabo:ation, par Bergson, du temps vécu, ainsi que l'expé-
nence du TOI que l'on pressent chez Rosenzweig et Lévinas.
Josef SIMON, Zum Verhiiltnis von Denken und Zeit
bei Kant und Heidegger. 25.5
Kant distingue le temps subjectif, qui découle de la perception
et les contenus objectifs temporels des phénomènes. Cette
tinction se trouve dans le temps lui-même, sur lequel se fo:nd,enli
XVI L'HÉRITAGE DE KANT SOMMAIRE XVII

conscience est considérée en son intentionalité, son objet suprême


est Dieu. Le ~ Je » ne se sépare pas du «nous ». Les deux fon-
dateurs de la philosophie moderne sont Descartes mais défonné
VI - MÉDITATIONS POST-KANTIENNES ensuite dans le «sujet transcendantal », fictif, et Hegel, que l'on
défonne quand on en vient à un subjectivisme historique. Dans
la voie ouverte par Hegel, il peut se produire un centrage sur
Erich HEINTEL, Zum Begriff des Menschen ais «das- l'homme, mis à la place de Dieu, décevant. On peut aussi, à sa
suite, faire de l'homme le sujet de l'histoire, entre-deux de l'hu-
eiende Transzendentalitiit». 311 main et du divin, éclairé par la croix, où se réconcilient les
contraires.
Les deux formes de la philosophie que sont l'Aristotélisme
(ontologie aristotélico-scolastique) et le transcendantalisme (phi-
losophie contemporaine du « Je») doivent se compléter mutuel- Pierre-Jean LABARRIÈRE, Pour une métaphysique de la
lement, en ce qui concerne le concept de l'homme. La première
comprend l'homme comme âme d'un corps vivant, sans fonction relation. 375
expresse de « Je» par rapport à son monde. La seconde comprend
le sujet comme fonction de conscience de la connaissance objec- Réflexions sur la condition du philosophe et l'équilibre qu'il
tive, sans réalité biologico-ontologique. Ce n'est que dans leur lui faut trouver entre la théorie et la pratique, dans la question
jeu commun que peut être atteint le concept de l'homme comme fondatrice de la vérité. Parce que celle-ci fait émerger la relation
«transcendantalité existante », en tant que celui-ci représente du sujet et de l'objet, la pensée humaine a été tentée de privi-
un « Je» existant naturellement. A l'occasion de développements légier tour à tour, chacun de ces deux tenues. Mais la vérité se
sur Aristote, Kant et Fichte, l'auteur expose ses propres pensées tient précisément dans «l'entre-deux» : c'est-à-dire dans la rela-
philosophiques sur ce problème. tion. Le philosophe devra donc être constamment non seulement
révélateur, mais encore créateur de liens en vue de penser la
relation pour mieux la vivre, et de la vivre pour mieux la penser.
Heinz KIMMERLE, Wege der Kritik an der Metaphysik. 357
Les chemins de la critique de la métaphysique sont exposés en Livio SICHIROLLO, Réflexions sur Eric Weil. Kant après
sept étapes, allant de Kant à deux penseurs contemporains, en Hegel (et Weber). 385
passant par Hegel et Marx. 1 - Le concept critique (Kant).
2 - Dialectique métaphysique critique (Kant). 3 ..,.- L'expé- Pour E. Weil, selon une problématique reprise de M. Weber,
rience de l'unité et son auto-explication (Hegel), 4 - Présen-' le monde n'a de sens que pour l'homme. L'anthropologie philoso-
tation critique de la métaphysique comme logique (Hegel). phique est abordée dans une perspective différente de celle qui
5 - Critique de la métaphysique critique par la praxis (Marx). résulterait d'une simple confrontation avec celles de Kant et de
6 - La destruction de la métaphysique de l'ontologie tradition- H\gel et d'~e reprise de cet examen avec Aristote. La philoso-
nelle (Heidegger). 7 - Le dépassement de la métaphysique par phIe de WeIl offre, en effet, une nouvelle compréhension du
sa déconstruction (Derrida). rapport entre histoire, morale et politique, qui répond au « choix
absolu» de sa Logique.

Helmut KUHN, Jenseits der Transzendentalphilosophie.


Ein Entwurf. 357
Ce texte sert d'introduction à un ouvrage présentant le che-
min de la conscience à l'être. La recherche, à la suite de HusserJ,
est phénoménologique; elle explore des «dimensions », .bipo-
larité, couple de contraires, caractérisant l'état de la conscIence,
et des «structures» dynamiques, exprimées dans les figures du
chemin, de la montée. La forme est celle d'une méditation; la
1-
L'HÉRITAGE DE KANT SOMMAIRE XIX
XVIII
concret, où l'eros,. comme pass!o~, lie religion et philosophie, et
\(:mde l~ fo~me dl~ogale des ecnts. La deuxième partie expose
VU-VARIA 1 mterpretatlOn du d~s~ours de Diotime, rapporté par Socrate dans
le Bl!nquet. ~a pOSItion démonique de l'eros donne à la philo-
S?I?hle a la ~OlS son statut religieux et son indépendance. L'iden-
hte e;ntre bIen et beau, sous la fonne de l'utilité la théologie
Hywel D, LEWIS, The Elusive Self, Some Contentions négatlve~. ~a?s .1'altérité complète du beau, pressen'tie dès le dé-
of Issues in Recent Continental but ~de 1 Itinera.lre, dans la beauté des corps, l'éternité fondant la
Thought, 397 dureAe, font .VOIr q?e le dualisme souvent reproché à Platon est
plut?t le frut d7s mterprè"tes. Le lien religion et philosophie est
La question : «Qu'est-ce que l'homme?» ou «Qu'est-ce aUSSI une questIOn posée a Heidegger.
qu'être une personne?» devient, subsidiairement : «Que signi-
fie, pour moi, être l'individu que je suis?» Le Soi est ce qui
s'élude : sa particularité m'échappe, du moins dans le sens, et Hans Jiirg SANDKÜHLER, Uber die Einheit der Philo-
la modalité, où chacun se reconnaît «lmique». S'il n'est pas sophie. Pliidoyer für eine ges-
impossible de faire une description du Soi, il n'y a pas, toutefois,
deux « Soi» : l'un qu'on pourrait décrire et l'autre non. L'article chichtsbewusste Philosophie-
étudie, dans la «philosophie continentale », le déplacement geschichte. 453
effectué du sujet qui s'élude au sujet que peut être décrit, notam-
ment chez W, Dilthey, G, Marcel et J,-P, Sartre, .L'unité de la phil?sophie. est. une histoire de la philosophie,
fa~te. avec une conSCIence hlstonque. Elle consiste dans l'appro-
p.natIOn par le mouvement ouvrier, dans le socialisme scienti-
Hermann LÜBBE, Heinrich Heine und die Religion nach ~lque, e~ en vue de .la vérité, de la philosophie qui appartenait
a. la~ SOCIété bourgeoIse. Le départ est pris du statut, dans la so~
der Aufkliirung. 413 C:1éte bourgeoise, de la science, reflet des contradictions capita-
!lstes. Le rapport e?-tre base et superstructure éclaire la place des
Le cas de Heine manifeste, de façon paradigmatique, quelques mtellectuel~, restremte, dans la philosophie bourgeoise classique
positions importantes d'une critique éclairée de la religion. Cette ~ la connaIssance. Le mouvement ouvrier, lié inévitablement au~
critique a pour traits: un aspect politico-social, le refus du dog- m!ellectuels, ~ouve avec le marxisme, outre la science écono-
matisme, et l'historicisation de la tradition religieuse. Tous les ~lque, une sCle;fi~e ~maté~ialiste de l'histoire. Il est à même, par
trois demeurent encore présents et valables dans la nouvelle l~, ~~ gagner 1hegen:ome dans. la connaissance. Le progrès et
religiosité du vieux Heine. Il ne les reprend pas. Le nouvel aspect 1 unlt~ dans la ~C(:rn?U1.ssance philosophique ne peuvent se faire
décisif se trouve plutôt dans l'expérience de notre absence de au P;U d.e la yente; 11 faut refuser le pluralisme relativiste. La
pouvoir sur les conditions de notre vie et de notre bonheur, p~n~ee, dial~ctIque, progresse dans la reconnaissance des contra-
absence qui s'expérimente sinon dans le bonheur, du moins dans dIctIons, vraI sens de la tolérance.
la souffrance, ainsi que dans la reconnaissance de la valeur de
la réponse judéo-chrétienne face à cette expérience. L'auteur
tient ce changement de Heine pour conséquent avec son expé:..
rien ce, et prend position, en face de l'accusation marxiste de
perte de réalité, pour l'humble foi en Dieu de l'homme ordinaire,
où Heine cherche une consolation.

Pierre FRuCRON, Compréhension et passion. 431

G. Krüger prolonge son étude sur Kant par celle de Platori,


auquel renvoie finalement la recherche kantienne de la méta-
physique. Une première partie présente le type d'interprétation
que l'on peut faire aujourd'hui de Platon: on part de l'homme
PORTRAIT SUR LE vrp
par
XAVIER TILLIETTE

L'éloge d'un vivant est un exercice difficile, il consiste à


faire «du posthume avant la lettre », selon l'expression dont
s'est enchanté Gabriel Marcel dans Le Chemin de Crête. Les
amis rassemblés ici, collègues et élèves, offrent les fruits mûris
de leur labeur, et cette forme iudirecte d'hommage est celle
qui agrée assurément le plus à la légendaire modestie du
Père Marcel Régnier. Cependant, plutÔt que de présenter
ceux qni se présentent fort bien tout seuls portantes mani-
pulos suos, j'entreprendrai à mes risques une sorte de lauda-
fio, tàche périlleuse après qu'on a entendu sur le thème le
professeur Spaemaun (voire le Père Régnier dans ses propres
affaires)1. Que le destiuataire veuille bien me pardouner de
lui faire «humer ici sa future fmuée >, dans l'odeur il est
vrai agréable de quelques graius d'encens.
Ce recueil déjà imposant anrait surabondé si l'on avait fait
appel à tous ceux qni, proche ou lointaine, ont une dette
de reconnaissance envers le Père Régnier. Si celni-ci a tant

1. Cf. ici même le texte de R. Spaemann. L'allocution du P. Ré-


gnier, lors de l'attribution du doctorat d'honneur à Munich, a paru
dans les Archives de Philosophie, 43, 1980, p. 353-362 (<< Amitiés
philosophiques par-dessus les frontières»).
Né le 3 septembre 1900 au Havre, l\1arcel Régnier est entré en
1917 au noviciat de la Compagnie de Jésus à Lyon. Ordonné prêtre
en 1930, il a commencé à enseigner dès 1931 au scolasticat S.J. de
philosophie, d'abord la cosmOlogie, puis l'histoire de la philosophie
moderne. Cet enseignement, à Vals et ensuite à Chantilly. s'est pour-
suivi sans interruption jusqu'en 1970. date du transfert du scolasticat
à Paris. Le P. Régnier assume la direction des Archives de Philoso-
phie depuis 1954. Depuis 1970 il est vice-président de l'Internationale
Hegel- Vereinigung.

U~,IIVERSI[)A[) DE t'JAVARRA
1
I!
[lIBUC\f~Cj\ DE HUI'AANIDADES
2 XAVIER TlLLlETTE PORTRAIT SUR LE VIF 3

d'amis de par le monde et, hélas, aussi tant d'amis disparus, de la philosophie pendant un quart de siècle. Elles ont fait
c'est qu'il possède un don de cordialité qui confine au géuie. sa notoriété, mais il leur a tout donné, son temps, son éner-
Son amitié a des caractéristiques propres, elle n'est pas gie, son érudition, sa finesse de jugement, il lenr a sacrifié
bruyante, pas tapageuse, elle est faite de mémoire, d'atten- la possibilité d'une œuvre en son nom propre, et, ce que
tion, de discrétion, de délicatesse. A l'analyser, on lui trouve beaucoup ne savent pas, bien des lectures, des auditions,
les traits de cette charité qui, dans saint Paul, déclenche toute des perfectionnements culturels désirés par un esprit curieux,
une litauie de vertus. L'art de réconcilier les contraires n'est aux intérêts multiples. Et elles doivent énormément, pour le
pas le moindre de ses talents, et Robert Spaemaun signalait réseau de collaborations internationales qui les composent,
avec une surprise amusée que les ennemis de ses amis étaient au rayonnement affable et discret de sa personnalité, devenue
quand même ses amis. familière dans les congrès de divers pays. Car, par conscience
En somme le Père Réguier a transposé tout naturellement plus encore que par goût, il fréquente ces assemblées doctes,
dans le monde philosophique le style exquis de rapports hu- colloques, symposions, congrès, de petit ou de grand calibre,
mains que l'on apprenait au noviciat de la Compagnie de qui réunissent à intervalles les philosophes. II y est une fi-
Jésus d'autrefois. Pas un mot de trop, pas une parole qui gure appréciée, révérée. II n'a pas besoin de beaucoup de
puisse blesser ou seulement égratigner, pas un jugement témé- paroles pour se faire admettre et aimer, partout il ne compte
raire, un calendrier de fêtes et d'anniversaires très à jour, que des amis. Cette assiduité, que ne motive aucune gloriole,
une gentillesse et une patience d'accueil à toute épreuve, a énormément contribué au standing de la revue. Elle lui a
doublées d'un sens pratiqne dont l'ingéuiosité et la précision permis d'évaluer la philosophy in the making (comme disait
confondent. Les premiers bénéficiaires de son empressement le pittoresque P. André Bremond) et de recruter d'excelleuts
et de sa serviabilité ont été ses Supérieurs, dont il devine articles. S'il est devenu peu à peu une sorte d'émineuce grise
intuitivement les raisons et la solitude. Comme leur vie serait (voire de commis voyageur) de la philosophie européeune,
plus douce s'ils n'avaient que des sujets de la trempe du c'est d'abord à cause de sa présence constante, en chair et
Père Réguier, surtout en notre époque de récrimination et en os, puis de sa fidélité épistolaire (1 500 lettres et billets
d'indiscipline 1 Ils peuvent rendre au vénéré directeur des par an!). En outre on sait qu'il n'a jamais nourri aucune
Archives ce témoignage qu'il ne les a jamais contristés, qu'il ambition égoïste, n'a poursuivi aucune carrière, qu'il n'a nul
est constamment disposé à les comprendre, à leur obéir et à souci de placer des disciples et des clients; médiateur né,
les sortir d'embarras. Avoir vécu longtemps avec lui, si près infatigable s'il s'agit de proposer ses services, ses bons offices,
de lui, a la valeur d'une mouition permanente et la vertu d'un il fut d'nn grand secours dans les relations épineuses entre
examen de conscience quotidien. les deux associations hégéliennes. II est un des très rares
C'est par obéissance qu'il a pris la direction de la revue hommes qui, comme on dit, font l'unanimité.
fondée en 1923, mise quelque temps en hibernation', et il est
entré dans les vues de l'autorité au-delà de tout espoir. Ce Ceux qui le voient à l'œuvre depuis un quart de siècle
qu'il a fait des Archives redivivae est étalé sous les yeux, un s'émerveillent de le découvrir toujours aussi diligent, à son
monument de science et d'intelligence où s'inscrit le cours affaire, les rênes bien en mains, abattant un travail considé-
rable (il est notamment un traducteur anonyme iulassable).
Le Père Régnier ne change pas, ai-je entendu dire bien sou-
vent. Inchangé, en effet, à peine parcheminé, même pour qui
2. Exactement de 1949 à 1954. Les précédents directeurs avaient l'observe et le scrute à partir de son propre vieillissement.
été, en remontant le temps, le Père Blaise Romeyer, le Père Joseph
Souilhé et, tout au début, le Père Robert de Sinéty. De Jersey le II s'est tellement identifié à sa tâche qu'eHe lui prescrit toutes
Père Pedro Descoqs collaborait activement. ses mauières d'être et l'emploi admirablement ponctuel de
4 XAVIER TILLlETTE PORTRAIT SUR LE VIF 5
ses journées. Sa vie a la sublime monotonie de celle de Kant, sa chambre, où sa présence avait l'effet d'un catalyseur intel-
le penseur très admiré, très étudié. lectuel. Je viens de lire dans des souvenirs de Louis Agassiz
Pourtant la fonction n'a pas créé l'organe, le Père Régnier que quelque chose du même genre avait lieu _ avec Schel-
n'a pas toujours été le compétent promoteur des Archives, il Iiug, Baader, Oken, DiilIinger... - dès les débuts de la neuve
a eu, si j'ose dire, son précédent. Et c'est vers le Marcel Université de Muuich, dont le P. Réguier est docteur honoris
Régnier d'avant, confiné dans la réclusion des scolasticats, causa. II a favorisé aussi, avec succès, les réunions de profes-
que je voudrais me tourner, en stimulant quelque peu mes seurs, puis les rencontres entre scolasticats, Fourvière et Vals.
souvenirs. Lui que l'on dit sans âge, il a été jeune, en tout
cas il passait pour jeune dans l'imposant corps professoral Ainsi, en pleine guerre et occupation, le Père Régnier
du scolasticat unifié, depuis la guerre, à Vals-près-Le Puy. n'hésitait pas à nous initier à la grande philosophie allemande,
Déjà il avait la réputation d'un puits de connaissances. Ne qu'il était allé découvrir sur place lors de séjours inoubliables.
travaillait pas sous sa houlette qui voulait, il fallait avoir fait Hegel n'était d'ailleurs pas le seul bénéficiaire de cette entrée
ses preuves; à d'autres, les classes enfantines de la philoso- en force de la pensée germauique. Le Père Jean-Marie Le
phie ! Et pourtant il était l'accueil et l'amabilité mêmes, mais Blond, enseiguant prestigieux, revenu glorieux de la capti-
il avait une façon de se taire ou de mesurer la louange, qui vité, avait essayé de présenter un Fichte - avant le Père
valait son pesant de découragement; et le naïf était bien Louis-Philippe Ricard - quelque peu édulcoré à travers
vite dégrisé. La charité étant toujours sauve, les aléas d'une Xavier Léon. II n'avait pas le monopole de ce philosophe
direction de revue l'ont rend,u un peu plus indulgent et géuial et difficile entre tous qui avait séduit le Père Auguste
pitoyable, comme le prouvent certains articles extraits enfin Valensin, et dont R. Lauth et A. Philonenko nous restituent
d'un long purgatoire. Mais il a gardé devant telle ou teIle maintenant la stature: car le Père Régnier, lors de ses études
prestation des réticences tacites qui ne trompent pas. C'est de scolasticat, avait en guise d'exercice traduit intégralement
sans doute ce qu'on appelle la qualité de silence. l'Initiation à la Vie bienheureuse, lointaine préparation à ce
cahier mémorable sur Fichte qui consacra la réputation des
Archives ressuscitées. Le Père Auguste Brunner, très à l'aise
II introduisait donc, en ces mémorables années du scolas-
sur son terrain naturel, citait volontiers Scheler, N. Hart-
ticat de guerre et d'après-guerre, un groupe trié à la sévère
mann et les Phénoménologues. Mais le Père Réguier, à côté
école de la pensée hégélienne. On défrichait ligue par ligue la
du séminaire hégélien, produisait un cours magnifique, extrê-
Phénoménologie de l'Esprit. Le maître ne jouait pas du tout
mement fouillé, sur Kant. D'année en année, il le remaniait,
au docte, ses approbations étaient surtout des hochements de
le complétait, le tenait à jour de la bibliographie. Je me
tête, il laissait les commentateurs improvisés tâtonner, bal-
rappelle qu'il avait été frappé par un article de Dietrich
butier, s'embarrasser, ou au contraire submerger leur igno-
Mahnke sur la vision du monde baroque et ses échos réper-
rance d'un flot de paroles. Ce silence d'or produisait un
cutés dans les philosophies de Leibniz et de Kant'. Les mo-
extraordinaire effet cathartique. D'autant que, dans l'ombre
nades comme des tuiroirs et des trompe-l'œil se propageaient
du maître, avait grandi à vue d'œil l'as des as hégéliens,
dans les clôtures phénoménales et les synthèses figuratives.
et qui l'est resté, le Père Joseph Gauvin, bientôt capable de
C'est par de tels aperçus que le P. Réguier savait nous fas-
ces relais splendides qui sont la récompense et l'apauage des
ciner, sans jamais élever le ton. Il donnait aussi des leçons
meilleurs professeurs. Le Père Régnier avait en somme accli-
maté à Vals l'idée de tuteur, dont il avait remarqué les
bienfaits lors d'un séjour d'études à Oxford. Il encourageait
les réuuions et les discussions de petits groupes, souvent dans 3. «Die Rationalisierung der Mystik bei Leibniz und Kant»
(Bliitter jür deutsche Philosophie XIII/l, 1939).
6 XAVIER TILLIETTE PORTRAIT SUR LE VIF 7

très suivies, très appréciées, sur Heidegger, alors relativement avaient fait l'objet de savants exposés, clairs, réfléchis, qui
peu connu. li mettait l'accent sur la finitude ontique du n'étaient pas des compilations. Au total, des centaines et des
Dasein (plus tard il déplacerait le centre de gravité vers centaines de feuilles à distribuer, qui s'empilaient dans l'offi-
«vérité et historicité»); et si l'on établit un parallèle entre cine du polycopiste. Le Père les tapait lui-même au stencil.
cette accentuation et la note dominante du cours kantien, La pénurie du papier contraignait à réutiliser les versos de
c'est bien la notion de finitude radicale, irrémédiable, qui cours différents et à remplir à ras bord les blancs des rectos,
ressort. Mais en ce temps-là le Père Régnier semblait accorder plusieurs paginations chevauchaient, si bien que le lecteur
une certaine préférence à Jaspers - si tant est qu'on ait pu attentif zigzagnait dans ces tirages disparates. li fallait consul-
deviner des préférences sous la parfaite abnégation de l'ex- ter l'auteur pour s'y retrouver dans ses palimpsestes.
posé objectif - sans doute à cause des nombreuses traces
kierkegaardiennes qui couvrent Philosophie. L'analyse ne Quand on lni rendait visite pour une information moins
pouvait évidemment pas anticiper les développements (filan- purement technique, le P. Régnier avait pour premier soin
dreux) de Von der Wahrheit, elle en restait à l'autre grand d'ouvrir le cours aporétique à la page ad hoc. Ce geste avait
livre (un pen défriché par le P. de Tonqnédec lors de ses pour effet d'annihiler l'espoir d'une explication hors texte.
loisirs forcés jersiais), que j'avais eu la témérité d'emprunter Au surplus, le décor des soirées d'hiver dans la chambre sans
dès la première semaine de mon arrivée au scolasticat, sans luxe et sans joie avait quelque chose de fantasmagorique :
aller au-delà de l'éloquente préface! Le Père Régnier ter- une densité des ténèbres amassées, lIDe forme noire emmitou-
minait donc l'exposition de Jaspers nécessairement par l'échec, flée et, sur le front dégarni, l'éclat vif de la lampe, issu d'une
le Scheitern ... lm Scheitern das Sein erfahren. J'ai beanconp ampoule bleutée, qni ménageait les yeux. L'accueil état char-
pensé à la voix du Père Régnier, dans la sombre et vétuste mant, laconique, elliptique même pour certains. Le Père Ré-
salle de classe étonnamment silencieuse, quand dix ans pIns gnier a su instituer la valeur didactique et philosophique de
tard j'ai commenté à mon tour cette sentence et ces pages l'interjection (bien! entendu !) et du silence. Quand j'y réflé-
inspirées'. Toutefois les leçons sur Hegel, doublant le sémi- chis, je découvre rétrospectivement une très haute portée
naire, baptisé alors travaux pratiques (T.P.), des happy tew, à ce peu de solution et d'explication. La relative aphasie
restaient l'élément prépondérant de la répntation sans éclipses était d'nne habile méthode pour nous apprendre à philoso-
du P. Régnier. Nulle envie, du reste, ne rongeait les collè- pher. Ce ne sont pas les longues conversations qui suscitent
gnes, nul fiel, tellement sa gentillesse était grande et sa compé- les penseurs et transmettent les étincelles, c'est bien plutÔt
tence reconnue. une hésitation, un mot échappé, une indication bibliogra-
Ces cours offerts alternativement selon la méthode de l'as- phique, une onomatopée... J'ai tiré beaucoup moins encore
solement pédagogique, recueillaient un succès mérité, et je- de mon vieux patron de thèse Jean Wahl, qni en remontrait au
taient leurs précieuses semences dans de jeunes esprits. lis colonel Bramble et dont les conseils et avis se rapprochaient
n'étaient pas les seuls à avoir requis une curiosité multiple de l'amnissement sceptique, et néanmoins mes petits écrits
et une disponibilité sans égale de religieux· d'autrefois. En étaient tous pendants de son jugement. J'ai retenu davantage,
effet un volumineux cours de cosmologie appartient au début certes, du P. Régnier, mais surtout des indices isolés, qni
déjà lointain de l'enseignement. Saint Thomas, bien sûr, et s'environnaient d'une aura affective ou symbolique, la fini-
Descartes et Malebranche et Leibniz et, je crois, Spinoza tude, l'existence, l'historicité, l'hypotypose, l'écriture chiffrée,
le «gaufrier des formes» (Fichte sur Kant), le «gabarit»
des catégories ... Dévalant la pente de la mémoire, je me rac-
4. Dans mon Karl Jaspers (CoU. Théologie, Aubier, Paris, 1960), croche à ces touffes éparses, mais je ne voudrais pas donner
p. 73-80, 164. l'impression d'un contact intellectuel purement anecdotique
8 XAVIER TlLLIETTE PORTRAIT SUR LE VIF 9

et sporadique. Si le Père Régnier u'avait pas son pareil pour Son diplôme d'études supérieures (de 1928), sous la direction
indiqner et apporter la lecture topique et appropriée, sa seule de Jacques Chevalier - anglomane lni aussi - avait porté
fréquentation était une incitation perpétuelle à l'étude et à sur « la critique du théisme par David Hume». Il restait très
la culture. Toutes les questions l'intéressaient, les arts, la lit- lié avec ses collatéraux britanniques (une branche de sa fa-
térature, la politique étrangère. Il n'était pas rare que, frap- mille grand-maternelle avait émigré vers 1860), il parlait
pant à sa porte à l'heure où d'autres font la sieste, on le l'anglais couramment : de Boulogne-sur-Mer, la ville de sa
découvrît en train de lire une partition de Bach ou de Haydn, jeunesse (il est né au Havre, d'un père fonctionnaire des
connue si c'était un roman. Il tenait volontiers l'harmonium Douanes), il apercevait par beau temps les côtes d'Angle-
à la chapelle, et son rêve eût été de jouer à la perfection terre; il se sentait chez lni à Oxford, à Heythrop, à Farm-
de cet instrument prestigieux, l'orgue. Il aimait regarder de Street (sans omettre Jersey), heureux de revêtir la gown aux
belles gravures, des reproductions. Le baroque, rencontré en ailerons flottants, que le Père Teilhard portait avec tant de
Allemagne et en Autriche, le captivait; il enrichissait d'al- majesté. Vers 1937 on lni proposa, et il regretta de ne pouvoir
bums et de livres d'art la bibliothèque aujourd'hui dispersée. accepter, d'enseiguer à l'Université de Belfast l'histoire de la
Il n'était pas du tout reclus dans une spécialité et, d'ailleurs, philosophie médiévale; pour l'enconrager on l'assura : «As
la philosophie entière, de Thalès à Merleau-Ponty, lui ouvrait a Frenchman you have very little chance to be shot». Outre
ses trésors. Il se délectait des aspects humains et même trop la famille éloignée, que d'amis parmi les jésnites ou les intel-
humains des penseurs, comme de son cher Kant, maniaque lectuels, du Père M. D'Arcy et du P. F. Copleston à A.E. Tay-
et métronome. Souriant de satisfaction, il me tendit un jour lor, W.G. de Burgh, J. Muirhead et H.D. Lewis! II n'a
un gros volume bleu, la biographie de Max Weber par Ma- jamais cessé de nouer et de maintenir des liens avec les in-
rianne Weber, et il se mit à en gloser le conteuu. Troeltsch sulaires, avec leurs coutumes aussi. TI lisait, et il lit encore,
également avait ses faveurs. Il me fit lire La Montagne ma- soigneusement, le. supplément littéraire du Times. II appré-
gique dans une ravissante édition qui s'est égarée pendant le ciait (il apprécie encore) l'exercice physique ou plutôt la
déménagement. Et quelque part dans la campagne du Velay marche, les longues promenades hygiéniques (par exemple à
nous conversions posément de La Mort à Venise et des pro- travers les paysages vivifiants de ses brèves vacances, en
blèmes qni s'y rattachent. Etti Briest ne l'enchantait pas Ardèche, en Vivarais), les baius glacés entre deux rochers
moins, et les Autrichiens l'attiraient, le charme désuet de la dans un torrent de Haute-Loire. Quand il réside à Chantilly,
monarchie finissante, Arthur Schnitzler, Paul Zifferer, dont il arpente le parc à pas pressés, frileusement couvert, une
à mon retour de Vienne et du STO il me fit lire La Ville im- heure durant, chaque jour.
périale, mais aussi Rilke, pnis Kafka; je ne crois pas qn'il
ait été aiguillé vers Musil. Mais je m'aperçois que je privi- J'évoque une période où les loisirs étaient de règle. Mais
légie indûment, snivant ma propre ligne, le domaine germa- entre l'absorbante préparation des cours et les excursions
niqne. apostoliques, le Père Régnier remettait sur le métier le manus-
crit de la thèse sur Bradley. Pourquoi Bradley? II est au
Or l'universel et polyglotte Père Régnier était tourné aussi, confluent de l'hégélianisme et de la tradition anglo-saxonne;
nouvean Janus, vers le monde anglo-saxon, et même en prio- de plus, ce n'est pas un auteur vertigineux, quand on dispose
rité, puisqu'il avait amorcé une thèse de très lougue haleine de peu de temps. Le P. Régnier pensait connue nous tous
sur l'idéalisme de Bradley. Il avait séjourné à Oxford en que, depuis la mort du grec, la philosophie s'est mise à parler
1926 et 1927 (<< Beautiful city! so venerable, so lovely, so allemand. Mais pas exclusivement; et les descendants de
unravaged by the fierce intellectual !ife of our century, so Locke et de Hume, descendants infidèles, ont quelque chose
serene 1» Matthew Arnold, préface d'Essays on Criticism). à nous dire; par exemple les Prolegomena to Ethics, de
10 PORTRAIT SUR LE VIF 11
XAVIER TILLIETTE

?:een (que devait étudier feu M. Pucelle) furent connue une uécessités du sonnuaire ont souvent iufléchi et canalisé ses
~tiation .. Historien polyvalent et quasi encyclopédique de la lectures. Il poursuit, d'une manière de plus en plus souter-
~ ~osOphle, le P. Régnier faisait son possible pour donner raine, une vie intellectuelle assez ramifiée encore, sinon arbo-
p~Oit de cité à la pensée anglaise, assuré de l'approbation du rescente. Certes il aime la boutade d'un de ses amis anglais
~re Christian Burdo, jersiais impénitent, du Père André (calquée d'un mot de Whitehead qui le dit de Platon), selon
~rc, peu porté sur l'Allemagne, et du très anglophile et laquelle l'histoire ultérieure de la philosophie s'est contentée
~eme anglomane Père Jean-Marie Le Blond qui striait son de mettre quelques annotations au bas des pages d'Aristote,
I;sc~urs de vocables importés connue le fameux backbane. et il s'est appliqué pour sa part à émailler d'échos discrets le
'1 n a pas trop réussi, l'ombre de Hegel étant démesurée, mais texte du maître des doctes! En plus sa délicatesse naturelle,
~ rendait familiers les noms de Whitehead, d'Alexander, de sa modestie exquise, ne l'incitent pas à clamer à tous les
Co~~'l.uet. Il les iusérait dans son cours de cosmologie. échos : avez-vons lu Baruch, avez-vous lu Rosmini? Cepen-
die lU-C.I contient, par exemple, une brillante exposition et dant longue serait la liste de ses penchants successifs, lesquels
l'.sc~s.lon des thèses (assez sophistiques) de Mac Taggart sur d'ailleurs cumulent et symbolisent. Je l'ai connu, alors qu'il
dll"r~alité du temps, avec les réactions et réfutations de Broad, jetait une passerelle entre Hegel et Heidegger, très kierke-
de aylor, de Pattersou'... Cette méthode anglaise d'attaque gaardien, très barthien, plongé dans Emil Brunner, Gogarten,
c es problèmes a une allure franche, drue, matter-af-fact, et et la prédication d'une Transcendance abrupte; ses mots de
~!,endant fiue et snbtile, connue on le voit par le transfuge passe étaient la temporalité, le fini, l'historicité, sa pensée avait
d Itt~~nstein. Quel donnuage que nous n'ayons pas profité une forte tonalité existentielle. Puis, sans renier cet acqnis,
gne~ lnts que dispensait l'enseignement ésotérique du P. Ré-
d ler'L'i
. gnorance d e la pensé ' est une des tares
e anglatse
il est revenu au grand rationalisme, de texture plus éthique
qne spéculative. A ses débuts, connue la plupart de ses co-
ne nos étudiants. Elle le rend soucieux. Lni-même, surpre- scolastiques, il avait reçu l'empreinte de Lachelier. C'est
Pant d'alacrité, s'est passionné ces dernières années pour dans cette perspective qu'il interprétait Kant, à travers l'ami-
a o~per ,et la discussion épistémologique, connue autrefois il tié de Gerhard Krüger, de Gottfried Martin, de Richard
~aI~ fre~uenté Austin ou Ryle. Il anime avec le Père Russo, Kroner, d'Eric Weil: connue le grand héritier de la tradition
ri e e Sevres, un sémiuaire de philosophie des sciences. Pour rationnelle et l'iuaugurateur de choses non voulues. Il a ré-
d:~': monde il ne manquerait ce rendez-vous hebdomadaire digé maiutes notes - pierres d'attente? - sur Kant, l'ana-
bl ~er. Depnis ses débuts de professeur où, de but en logie, l'intuition intellectuelle, dont il donne une interpré-
d anc,. Il fut chargé du cours de cosmologie, la philosophie tation personnelle, rigoureuse; et récennuent il s'est remis
es SCiences est restée un de ses fiefs de recherche. à «son livre sur Kant », dont nous accueillons avec ferveur
d M~is vers quoi n'a-t-i1 pas braqué, pendant cinquante ans l'augure. Plus d'une idée, déjà, a fécondé l'œuvre en tous
Ce ~e enseignante et studieuse, sa curiosité polyvalente? points excellente du Père François Marty, autre disciple qui
Cet Isem; incroyablement diligent n'est pas enseveli sous les fait honneur au maître et marche son égal. Dans quelle
en cahiers de la nouvelle série des Archives, même si les mesure cette reprise de Kant, à maints égards contraire au

-
J .M.E. gruer a !'amab'!"
5. LeMP 'TRé' ! re'f'erences :
lIte de me retrouver 'es
ct. A E ~ AGGART, The Nature of Existence, chap. 33, §§ 304~349.
Examin . t' AYLOR, The Faith of a Moralist, l, 112-117; C.D. BROAD,
livre fameux de Heidegger, a-t-elle été déterminée par l'amitié
exemplaire avec Eric Weil? Weil se défiuissait un kantien
après Hegel, il me semble que Marcel Régnier n'est pas loin
de cette manière de penser. Qu'il soit permis de salner le
'fERSON a iOn of McTaggart's Philosophy, vol. II, Part 1; RL. PAT- souvenir de ce sage entre les sages, qui nous visitait à Chan-
sophical ~Dr: Broad's Refutation of McTaggart's Philosophy», Philo- tilly et dont la voix traiuante et caractéristique nous charmait,
eVlew, 1941, 602-610.
12 XAVIER TlLLIETTE PORTRAIT SUR LE VIF 13

de même que sa bonhomie, son enjouement, la supérioritê de regretté, le Père de Lnbac, le Père Bonillard... , et la cohorte
son intelligence! Il manqne à la gloire de ce livre, comme serrée des collègues et amis des générations postérieures, pour
aussi un autre ami très cher, Joachim Ritter, admirable moni- lesquels il ne suffit pas, hélas, de feuilleter ce volume, mais
teur et formateur des esprits, pourvoyeur de l'élite de l'Uni- Reinhard Lauth, mais Robert Spaemann, Dieter Henrich,
versité allemande. Lowith, Heimsoeth, Kruger, Martin, Kro- Otto Poggeler, Karlfried GrOnder, Klaus Hammacher, Ludger
ner, Wahl, Acton... comptent également parmi les cruels Oeing-Hanhoff, G. Radnitzlcy, Manfred Buhr, Emmerich Co-
absents, et, bien sûr, Martial Gueroult, grand honnête homme, reth, Yvon Bélaval, Alexis Philonenleo, François Evain, et les
véritable régent, sinon spiritus rector, de la philosophie fran- Italiens Lnigi Pareyson, Valerio Verra, Livio Sichirollo, Marco
çaise durant de longues années, historien probe et sourcil- M. Olivetti (le P. Régnier a trop peu fréquenté l'Italie, bien
leux, qni prodiguait à la revue son estime et ses encourage- qu'à deux reprises, fin 1939 et en 1955, l'Université Grégo-
ments; Jean Hyppolite, si cordial, enclin aux confidences, rienne de Rome ait souhaité l'embaucher comme professeur ;
épanché, rival du P. Régnier en bienveillance et son complice mais inoubliables pour lui les séjours à Urbino et à Santa
en hégélianisme critique. Ces derniers le reliaient à l'école Margherita Ligure !)... les noms prestigieux et chers afflue-
exigeante, très admirée, des Brunschvicg, Delbos, Xavier raient, et que les omis me pardonnent! L'extraordinaire
Léon, Auguste Valeusin... De la génération décimée qui est autant que délicate action du P. Régnier tient à ce que les
celle du P. Régnier il reste avec lni Gadamer, Hinslee, Kuhn, relations personnelles ont coustamment précédé et pris le
Lewis, Findlay, le cher Aimé Forest, Joseph Moreau ... , Gada- pas sur les débats d'idées. L'échange amical désamorce les
mer, grand personnage, à l'iustar de Weil hôte estimé de Chan- contrastes. Son œuvre aura été d'un initiateur, d'un licteur
tilly, qui est pour beaucoup daus l'orientation herméneutique des bonnes volontés et, accessoirement, d'un adroit manager.
récente des pensées latentes du Père Régnier. J'avais remar- Peut-on espérer plus? Ce qui est publié est peu, mais de
qué autrefois qu'il rouvrait avec insistance les volumes arides choix, et lorsqu'on éditera un florilège des cours, on apercevra
de Schleiermacher (du Schleiermacher tardif), qui sans lui tout ce que cachait le boisseau; Tant que le poids de la revue
seraient restés indécoupés daus l'éteruité de la bibliothèque. pèse sur ses épaules, la production est forcément très ralentie.
C'était un pressentiment, un préparatif. Il s'est même attaché Toutefois, il s'est mis à évoquer comme futurible un ouvrage
attentivement à Bruno Bauer. Car les problèmes de théologie sur les dimensious de l'intelligibilité, fruit des séminaires
philosophique l'ont toujours retenu, dans ses cours comme épistémologiques, qui sera(it) le miroir de son esprit parfaite-
daus ses rares et précieux (précieux parce que rares) articles' ment stratifié! La veille de sa fête à Vals, le 15 janvier 1946,
sur la théologie de Hegel, anqnel il donne la bénédiction avant nous lui offrions nos vœux daus sa chambre vespérale, et je
l'absolution. m'étais enhardi à proférer l'apostrophe «Tu Marcellus eris »,
Je ressaisis aiusi le fil qne la digression sur l'amitié m'avait en l'aignillant vers d'autres floraisons que funèbres. Somme
fait perdre. Je ne le lâche plus - et pourtant ce serait si toute j'étais bon prophète, puisque la lumière confidentielle
beau d'évoquer les grandes amitiés jésnites, Jean-Marie Le d'il y a trente-cinq ans a connu eusuite un rayonnement qui
Blond, si longtemps le plus proche, Gaston Fessard tant n'était pas prévisible. Si nous espérious une moisson d'œuvres,
ç'aura été à la façon du Sic vos non vobis. Là où nulle impnis-
sance d'écriture n'empêche l'expression, la stérilité apparente
6. En renvoyant à la bibliographie inédite de M. Régnier établie proviendra d'une-sévère autocritique et plus encore, je crois,
par Je Père Michel Sales, je signale une stimulante et interrogative
causerie inédite, «L'analytique existentiale de la temporalité et les d'une capacité hypercritique. A force de circuler parmi les
problèmes de la philosophie théologique », qui fit l'objet d'une COID- auteurs et les doctrines, on est tenté de les neutraliser les
mlmicàtion lors d'un colloque inter-scolasticats de Fourvière, vers
1950. uns par les autres, les vérités fragmentaires s'annulent mu-
2
14 XAVIER TlLLIETTE PORTRAIT SUR LE VIF 15
tuellemeut; et du vide miroitant le désir de l'e~prit est cata- Weizsacker... L'énumération pourrait s'allonger! S'il ne cite
pulté vers la vertical~ de la ,!ra?Bceudance, ,ou I.e ~ett~ le guère de son propre chef certaines célébrités du moment, et
péril ardemment couJuré du fidéisme. Je schematise, J~ sun- notamment la trinité fatale Marx-Nietzsche-Freud, ou encore
plifie outrageusemeut l'itinéraire mental du P. Régme~. Il Schopenhauer et même Sartre, ce n'est pas désintérêt ui évi-
faut bien chercher une explication nou accidentelle, quoique demment ignorance; c'est leur distance, leur écart par rap-
tant soit peu fictive, à sa parcimonie. Dans. la persp~ctive .du port à sa propre vision du monde, qui le détache d'eux :
faire de la liberté, le Dieu de Jules Leq';ll~r est f~zre fal.re. preuve que l'historien recouvre un authentique philosophe.
Au Père Régnier a été dévolu un rôle divm; maIS ce dieu Mais la revue n'étant pas l'instrument de ses choix et de ses
n'est pas sociuien, il paye de sa personne. préférences, il ne les y a nullement frappés d'ostracisme; le
Père Valadier peut en témoigner.
En réalité il n'est pas le moins du monde éclectique, et je
crains que l'impasse ne soit détermiuée finalemeut par des
raisons contingentes : la direction des Archives n'a pas été Avant de hisser le portrait sur le chevalet (un Gestell qui
un bienheureux alibi (snrvenant après une période de santé avait aussi son sens heideggerien d'injonction !), il me reste-
précaire), mais une mission de dévonement e~ de renoncement rait bien des touches à apporter pour que le Kennen devienne
acceptée en toute lucidité, en toute connaissance de cause un Erkennen. Ai-je assez souligné sa disponibilité, ou son
(et qui dira son tact et sa diplomatie de «Mons~e~r Bons humour, ou son culte du détail? Il n'est jamais morose, même
Offices» à la vice-présidence de la Hegel-Vere1ll1gnng ?). lorsqu'il se tait; et dans ses moments allègres, nul commensal
Ayant le privilège de vivre à son omb~e depui~ main,tes a~­ n'est plus délicieux, le sel qu'il ne tolère pas dans le potage,
nées, j'observe la récurrence de ses preoccnpatlOns des q~ Il il le sert dans la conversation. Il adore les anecdotes, les
rompt son aphasie philosophiqu~ : l'~te~~ct. et l~ cO,unalS: petites nouvelles, les flashes; il va droit au trait significatif,
sance de foi qui correspondent a un mteret Jamais demeuti au menu détail qui, dans la conception leibnizienne, éclaire
pour Rouss;lot, Maréchal et la néo-scolastiq~e,. les. ~tes tout. Son sens pratique aigu aurait fait de lui un économe
de l'homme et de l'esprit humain, le temps, 1 hlstonclte, le avisé ou un bibliothécaire hors pair. Il lui advient d'inter-
schématisme, l'analogie, pour lesquels il invoque et confronte rompre brusquement une discussion savante par nn rappel
Kaut, Kierkegaard, Heidegger, l'épist~mologie et. le laug~ge, terre à terre. Ce n'est pas incongruité, c'est sa forme de
qui requièreut le concours des AnglaIS, la questIOn de 1 ab- socratisme. Fiches et dossiers, chemises et documents, sont
solu et de la vérité qui le laisse déchiré entre Hegel et Jaspers, en ordre impeccable et cela malgré le fatras apparent dn
Gabriel Marcel, l'hennéneutique, qui le reconduit à. Fessard burean cantilien. Il a transposé dans la confection de ses cours
et à Gadamer, enfin la conscience morale et la fondatIOn de la et l'administration de la revue ses dons flagrants de «Socrate
morale qui le restituent à saint Thomas, à Kant, à Scheler, gestionnaire» (selon l'expression de Pierre Oster que m'a
à Blondel et, dans une mesure malaisée à évaluer,.à sdn digne soufflée le recteur Saint-Sernin). Le défunt logicien Roger
maître grenoblois, Jacqnes Chevalier... Un exammateur per- Martiu ne tarissait pas d'éloges sur ses rapports précis et
çant reconnaîtra l'émergence peu voyante de ces thèmes dans parfaits adressés au C.N.R.S. J'ajoute que cette capacité
la collection des Archives rajenuies. Ils n'épuisent pas le pln- organisatrice n'est pas sans incidence snr le plan de sa philo-
ralisme intellectuel de M. Régnier qui n'est pas fait d'en- sophie et de son comportement. Il est un adepte, cauteleux
gouements, mais de leibnizienne polyphonie et c?nco~dance, comme il lui sied, de la philosophie concrète. Le réel, se
hospitalière anssi à de moins illustres comme Nlcolal Hart- plaisait-il à nous dire, c'est ce qui résiste, ce qui meurtrit,
mann, Franz Rosenzweig, Léon Brunschvicg, Louis Lav~lle, qu'il faut vaincre, c'est le tuf de la vérité; et il n'a jamais
Leonhard Nelson, Moritz Geiger, Hedwig Conrad-MartlUs, compris autrement Hegel que comme le grand artifex du
16 XAVIER TILLIETTE

réel. Il Ya dam; le P. Régnier un empirique, un asclép~a~e7, qui


ne s'abuse nullement... L'« expérience» est pour lUI msepa-
rable des données concrètes, des petits faits révélateurs, de
l'histoire compacte et embrouillée des hommes. La tension
du concept n'est en aucune hypothèse licence de ruiner sa
santé. L'asclépiade, comme on peut s'y attendre, est un dévot ROBERT SPAEMANN
d'Esculape, la santé est un domaine insigne de l'empirie et
la médecine pour Descartes la reine des sciences. Il faut payer
le prix de la longévité. . .
On la voudrait illimitée ou presque, hélas! Tandis que Je LAUDATIO •
mets une dernière main à ces souvenirs (biffant ce qu'ils
avaient de trop confidentiel), ma pensée, quittant le Père
Régnier, se reporte à leur premier lecteur, le Père Henri
Un docteur en philosophie? Enseigner la philosophie?
Bouillard, qui a beaucoup contribué à la préparation de cette N'est-ce pas paradoxal? La philosophie met en question la
Festschrift. Ce fut son ultime labeur, il est décédé subitement compétence propre à un enseignant. Elle n'est pas une doc-
le 22 juin 1981. Malgré la maladie qui le minait et lui restrei- trine de la révélation, ni une doctrine de sagesse comme
gnait le temps, il a assumé unetelle tâche avec abnégation, celle de Confucius ou de Lao-Tseu, à laquelle on fait crédit
avec le pressentiment du Sic vos non vobis déjà cité, mais et qui se prouve en ce qu'on vit mieux avec elle que sans elle.
aussi avec sa précision coutumière, méticuleuse, heureux d'em- La philosophie examine discursivemeut si ces doctrines sont
ployer au service de l'ami le reste de ses forces. Il est juste vraies. Elle est un discours sur les questions ultimes. A ses
que ce grand théologien, qui avait l'étoffe d'un grand philo- origines on trouve Socrate; non seulement il met en question
sophe, soit associé à l'hommage rendu au Père Régnier, les prétentions des autres à la compétence, mais il n'y pré-
d'autant qu'il a pris une part considérable au rayonnement tend pas lui-même. Assurément, au cours des siècles s'est
des Archives. Que ces lignes finales lui soient dédiées! Il constituée une sorte de compétence philosophique. En effet,
était d'une rare pudeur dès qu'il s'agissait de sa personne et quand un dialogue dnre longtemps, qui veut y prendre part
non de ses idées. En tant que réviseur il avait préféré sup- doit d'abord acquérir ce qu'on peut appeler l'état de la discus-
primer la conclusion dans laquelle j'essayais brièvement de sion. La compétence philosophique consiste surtout à conna1-
lever le voile sur la vie intérieure du Père Régnier. Je tre les topai, les «lieux» d'argumentation. A ce stade de la
m'impose à son égard, nonobstant le sentiment de gratitude, discussions, des discours particuliers se constituent à l'intérieur
la même consigne de discrétion. «Celui qui s'abstient, fait des écoles. Or il y a là pour la philosophie un danger mor-
mieux» (cf. l Cor. VII 38). tel; et pourtant on ne peut éviter de se former dans des écoles.
Parce que les divers points de départ sont incommensurables,
il est plus utile de développer pareils points de départ dans

* Lors de la promotion du P.M. Régnier au doctorat h.c. en l'Uni-


versité de Munich le 18 janvier 1980, après l'allocution du profes-
seur N. Lobkowicz, président de l'université, le professeur R. Spae-
7: Le Père J.-M. Le Blond avait construit sa thèse mémorable mann, doyen de la Faculté de philosophie, a prononcé la Laudatio
(Logique et Méthode chez Aristote) sur la distinction ancienne, re- dont la traduction est présentée ici. La traduction du discours pro-
prise par Jaeger, du platonicien et de l'asclépiade dans Aristote. noncé ensuite par le P.M. Régnier est pa11le dans les Archives de
philosophie, tome 43 (1980), cahier 3, p. 353-362.
18 ROBERT SPAEMANN
LAUDATlO
19
des discours intérieurs aux écoles qne de s'épuiser à force
toire toujonrs vivante de la pensée allemande. Cela est cer-
de travail pour s'en dégager. Mieux vaut les mettre en rapport
tamement une lacune. Qu'il en aille autrement en ce qui con-
les uns avec les autres et apprécier ce qu'ils peuvent rendre.
cerne l'échange philosophique entre l'Allemage et la France
Or cela est d'autant plus difficile que la philosophie elle mê-
cela tient, d'une manière extraordinaire, au collègue qu~
me met en question les notions de productivité philosophique
et de la méthode pour en apprécier les résultats. nous honorons aujourd'hui, le Révérend Père Marcel Réguier.
Après la fm de l'existentialisme, l'influence indirecte de Hus-
Et pourtant la philosophie ne peut subsister sans son univer- serl et de Heidegger s'est achevée largement en France. Ce-
salité. Si une école n'accepte pas, en sa propre conscience, p.endant, que le public français s'intéressant à la philosophie
d'être mise en question, elle devient une idéologie doctrinaire, rut connu ce que l'on pense et écrit en Allemague, cela est
elle n'est plus un discours sur les questions ultimes, elle cesse dû bea~coup au Père Marcel Réguier, par les livres qu'il
de poser la question de la vérité dans un horizon qui englobe a tradmts, par la revue qu'il dirige, par Son rôle dans les
tout. Il y a alors un point de vue plus englobant que celui sociétés philosophiques internationales, par son activité dans
de la philosophie: c'est celui qui compare les philosophies l'organisation de congrès, par son action discrète, ses conseils
entre elles. Si la philosophie ne le fait pas elle-même, elle ne ses intercessions, grâce à ses relations amicales avec tant d~
répond pas à son concept. philosophes dans tous les pays de l'Europe, à l'Est et à
l'Ouest.
Mais j'en viens maintenant à ce qui est la raison d'être de
l'honneur conféré ici. Aujourd'hui le discours philosophique
universel ne va plus de soi. Ce n'est pas seulement que, Le P. Marcel Régnier est né en 1900, d'une famille fran-
co-anglaise; son père était fonctionnaire des douanes insti-
tant par une inertie naturelle que par une rationalité écono-
misant les forces, on prête attention à ce qui se présente dans tution qui veille sur les frontières. Mais franchir les fro'ntières
est devenu habituel pour son fils lorsque, à dix-sept ans, il
le cadre de la tradition spirituelle à laquelle on appartient.
On écoute et on lit en premier lieu ce qui est dit et écrit dans e~t entré dans l'o~?re des Jésuites, pour qui il faut toujours
depasser les frontieres nationales. Ses études en France fu-
sa propre langue, depuis que le latin n'est plus la langue
rent entrecoupées de séjours à Oxford. Deux travaux, l'un sur
scientifique européenne. Certes aujourd'hui tous lisent l'an-
glais, mais ce n'est pas la même chose. Car les nations et les Hume, l'antre sur Bradley, en résultèrent, avant que Hegel
écoles philosophiques ne sont pas toutes aussi proches ou ne devînt pour ainsi dire son destin philosophique. J'omets
aussi lointaines de l'anglais. La prédominance de l'anglais va de parle~ ic.i de son a~tivité comme professeur de philosophie
de pair avec une large réception de la traditiou propre à l'école et de theone de la SCIence dans les collèges de son ordre et
empiriste et aualytique qui a sa patrie dans les pays anglo- de ses leçons dans des uuiversités anglaises. La valeur et la
profondeur de son enseignement apparaissent dans ses rru'es
saxons. Or ce processus de réception est une sorte de voie
à sens unique. Chez nous on prend connaissance des discus-
pub~cations en histoire de la philosophie, par exemple les
chapItres sur Hegel et le néo-thomisme dans l'histoire de la
sions des écoles anglo-saxonnes jusque dans le détail de leurs
ramifications et de leurs subtilités les plus fines. Sur le conti- philosophie parue chez Gallimard sous la direction de Yvon
Belaval. Le meilleur témoignage en faveur de Son enseigne-
nent, une réponse à la continuation de ces discussions se
trouve tout au plus sporadiquemeut dans la tradition de la ment, ce sont ses élèves, et particulièrement les éminents
chercheurs que sont devenus plusieurs d'entre eux, tels les
philosophie classique, de l'idéalisme allemand, sans parler
professeurs Gauvin, Labarrière, Marty et Xavier Tilliette,
de la phénoménologie. Là où surgit un nouvel iutérêt pour
cette philosophie du moude anglo-saxon, il doit le plus sou- dont les deux derniers sont ici présents. L'activité du P. Mar-
vent être satisfait sans avoir de contact plus étroit avec l'his- cel Réguier comme professeur doit être mentionnée comme
Un arrière-plan, car le rôle d'intermédiaire qui est le sien n'au-
20 ROBERT SPAEMANN LAUDATlO 21
rait pas été possible sans une compétence peu ordinaire. Qui- chives de Philosophie» ne sont aucunement une revue orien-
conque a eu affaire à lui, au directeur de revue, au traducteur, tée spécialement vers l'Allemagne. L'essentiel a été et reste
ou comme à un interlocuteur aura constaté l'étendue de sa toujours de présenter régulièrement les recherches philoso-
science sa large perspective sur les problèmes ainsi que sa phiques françaises. Le P. Réguier a aussi le mérite de faire
grande' modestie. Il y a deux ans, invité à la Sorbonne, j'y connaître de plus en plus des travaux de la philosophie an-
donnais des leçons sur la philosophie politique. Le P. Régmer glaise, du néo-empirisme, de la philosophie analytique, du
eut l'amabilité de revoir mon manuscrit français, ou plutôt rationalisme critique. Il joue là un rôle de premier plalI en
de le reprendre à fond. Il remarqua qu'un argument casuis- France où ces courants philosophiques ont moins d'influence
tique de Medina, théologien moraliste espaguol du XVI" siècl~, qu'en Allemagne. La philosophie joue, semble-t-il, dans la
était rapporté faussement, en ignorance du contexte. Je l'avais vie de l'esprit en France, un rôle plus grand qu'en Allemagne
cité de seconde main, car l'ouvrage original est fort peu acces- ou en Angleterre, mais, précisément à cause de cela, elle a
sible. Le P. Régnier remarqua immédiatement l'erreur et la un caractère très littéraire et elle y est peut-être plus qu'ail-
corrigea grâce à la bibliothèque de Chantilly. Avec une éru- leurs affaire d'une certaine mode. Par comparaison il est ca-
dition historique étendue et une connaissance étonnalIte de ractéristique du P. Régnier que, dans sa revue, il est indé-
la production philosophique iuteruationale actuelle, le P. Ré- pendant des modes philosophiques et s'applique à maintenir
gnier s'est consacré à un rôle d'intermédiaire et aussi de di: le uiveau scientifique et le caractère international de la re-
recteur du dialogne philosophique, spécialement en ce qUI cherche philosophique. Comme son activité s'est étendue
concerne la philosophie allemande. Assurément, Leibuiz sur plusieurs décennies, elle comporte une iraportalIte cor-
Kant, Fichte, Schelling, Hegel n'ont jamais été en France des respondance internationale qui pourrait bien être un miroir
étrangers. Il arrive même que, en quelques-uns de ces do- de la vie philosophique des cinquante deruières années.
maines la recherche fralIçaise dépasse ce qui se fait en Alle-
magne: Mais la place qu'occupent maintenant en. Fra~ce Les «Archives» sont au centre de l'activité du P. Régnier
Leibniz, Kant, Fichte, Schelling et Hegel dans la discussIOn comme médiateur. Mais ce n'est pas tout. Sa passion pour
philosophique doit beaucoup aux traductions de .livres par ~e rapprocher ne se liraite pas à sa revue, pas plus qu'elle ne
P. Régnier et aux publications dans les" Archives de PhI- s'arrête au rideau du fer qu'il s'efforce sans cesse de per-
losophie >. II n'est pas facile de mesurer, l'étendue <;le s~s forer philosophiquement. Parrui les multiples congrès iuter-
mérites. Par modestie son nom n'apparaIt presque JamaIs nationaux dont il s'est occupé de façon magistrale, je ne men-
au bas des traductions. Pour donner une idée de ce qu'on lui tionne que le dernier, celui de la Hegel-Vereinigung - Asso-
doit mentionnons que, outre les quatre ouvrages allemands ciation internationale pour l'étude de la philosophie hégé-
qu'il a traduits, sont parus, en une vingtaine d'années, dans
lienne - qui s'est tenu à Fontenay-aux-Roses en septembre
les «Archives de philosophie», 102 articles d'auteurs alle- 1979, ayant pour thème la Philosophie du droit de Hegel.
mands 655 recensions de publications allemandes, les tra- Le P. Réguier est un des deux vice-présidents de cette asso-
ductio~s ayant été assurées par lui; n'o~blions pas ~on ~lus ciation fondée par Gadamer et dont Dieter Henrich est main-
les traductions des livres et d'articles éCfIts en anglais. AJou- tenalIt le président. En même temps le P. Régnier a été un
tons les excellents cahiers spéciaux, dont les deux deruiers membre actif de la Hegel-Gesellschaft dont Raymund Beyer
ont été consacrés aux Lumières allemandes du XVIII" siècle. est le fondateur et le président. Si on a pu arriver à un certain
On ne trouve rien de comparable dans les revues allemandes « modus vivendi» entre ces deux associations, après un passé
actuelles. péuible, alourdi par des différents personnels et idéologiques,
c'est surtout grâce au P. Régnier qui a joué le rôle d'une
Tout cela est d'autant plus digne d'estime que les «Ar- « éminence grise».
LAUDATIO 23
22 ROBERT SPAEMANN

Le P. Régnier a l'art de réunir autour d'une même table diverses - aussi par son très aimable accneil, à Chantilly, des
des traditions et des positions nationales, politiques, philoso- individus et des colloques de séminaires philosophiques alle-
phiques et idéologiques les plus diverses; cela tient à trois mands. Par cette amitié le P. Réguier est toujours au service
de la philosophie. Dès que les choses marchent bien, il évite
raisons.
de rester au centre. Il entraine des collègues, qui parfois
Tout d'abord c'est que lui-même, dans le dialogue philoso- sont en mauvais termes les uns avec les autres, sur un plan
phique, se contente presque toujours de diriger et prend rare- incliné en vertu du principe : «Les amis de mes amis sont
ment la parole. Qu'il ait relativement publié assez peu, lui à mes amis.» Continuellement des amis du P. Réguier décou-
permis sans doute d'exercer snpérieurement un pareil rôle. vrent que leurs ennemis personnels sont aussi de ses amis. Ce-
Deuxièmement, cela tient sans doute aussi à ce qu'il appar- la est important pour l'universalisme de la philosophie. La
tient à une communauté intéressée à la philosophie, mais non philosophie doit en être reconnaissante au P. Régnier. Aujour-
pas défiuie par la philosophie. Seul celui dont l'identité n'est d'hui l'nuiversité de Muuich, prenant de court une autre
pas défiuie par une position philosophique pent montrer une célèbre université allemande, prend la parole au nom de tons
«bonne volonté désintéressée» envers les positions philoso- ceux, très nombreux, qui éprouvent le besoin de lui dire :
phiques les plus divergentes et apprécier, indépendamment « merci ».
d'une position partisane sur le contenu, la solidité et le sé-
rieux des publications philosophiques. Si, derrière l'activité
du P. Régnier comme éditeur d'une revue, il y a bien une
prise de position personnelle, elle s'exprime dans le concept
très largement compris d'une «philosophia perenuis», où
Aristote est de toute façon un des pins grands philosophes,
d'un intérêt permanent, où l'idéalisme allemand est un des
stades les pins importants du dialogue philosophique, où
Hegel n'est pas un charlatan, contrairement à ce qu'a dit
Popper, lequel appartient pourtant lui aussi à la grande li-
guée de la «philosophia perenuis ».
J'ai parlé d'uue «bonne volonté désintéressée». Là est
le troisième et le pIns important secret de l'activité du P. Ré-
gnier : bonne volonté et amitié. C'est que le discours philoso-
phique, par différence avec les discours partiels propres aux
sciences, n'est pas structuré par avance par des décisions
méthodiques ou théoriques; il lui est indispensable que ceux
qui y participent soient prêts à considérer, avec bonne volonté
et amitié, ce qu'ils ne veuleut ou ne peuvent réaliser eux-
mêmes. .
Le P. Régnier est un géuie de l'amitié philosophique, d'une
amitié qui n'est pas de nature exclusivement trop personnelle
ou privée, mais qui dépasse de beaucoup les relations d'af-
faires et entre collègues. Il est toujours prêt à aider de toutes
mauières ses nombreux amis aux origines spirituelles les plus
Première partie

KANT
YVON BELAVAL

LIBRES REMARQUES
SUR
LE SCHÉMATISME TRANSCENDANTAL

« Le schématisme, écrit Kant, est au fond un des points les


plus difficiles. Même M. Beck n'arrive pas à le pénétrer entiè-
rement. Je tiens ce chapitre pour nn des pIns importants. »'
Mais aussi un des plus énigmatiques, puisque le schématisme
«ist eine verborgene Knnst in den Tiefen der menschlichen
Seele », dont il est bien difficile d'arracher à la nature les
véritables procédés ou tours de passe-passe (wahre Hand-
griffe)'.

Antres sujets d'étonnement : ce chapitre est le seul à ne


pas être modifié en 17873, alors que la philosophie de l'ima-
gination semble modifiée dans cette seconde édition. De plus,
à S'en tenir à son contenu explicite, ce chapitre, après avoir
accompli son office le plus manifeste - rattacher l'un à l'au-
tre l'entendement et la sensibilité - n'est plus nommément
invoqué daus la suite de la Critique de la raison pure, dans

e 1. Cité par HEIDEGGER, Kant und das Problem der Metaphysik,


2 éd., p. 106. Trad. A. de Waelhens et W. Biernel, Paris, 1953,
p. 171. Relevé par A. PHILONENKO, L'œuvre de Kant, Paris, 1969,
t. J, p. 177.
2. KrV, B, 180-181. Cf. notre communication : «Sensibilité et
entendement dans la Critique de la Raison pure», dans Sinnlichkeit
und Verstand in der deutschen und franzosischen Philosophie von
Descartes bis Hegel, hrsg. von Hans Wagner, Bonn, 1976, p. 141-150.
3. Souligné par Pasquale SALVUCCI, La Dottrina kantiana della
Schematismo transcendentale, Urbino, 1951, p. 82. A. PHILONENKO,
op. cit., p. 176.
28 YVON BELAVAL LE SCHI':MATISME TRANSCENDANTAL 29

la Raison pratique, dans la Faculté de juger, pas même dans Cette prolifération envahit, nous l'avons indiqné, la philo-
les Prolégomènes qui, pourtant reprennent synthétiquement sophie transcendantale tout entière, en particu1ier la Kritik
le projet de l'Analytique : expliquer la connaissance scienti- der Urteilskraft, sans qu'il soit nécessaire de rappeler nom-
fique par l'application des catégories au divers de la sensibi- mément le schématisme (même qnand il s'agit, au § 59, du
lité. schématique rattaché à l'entendement et distingué du symbo-
Si le schématisme a trouvé, dès 1781, sa formulation défi- lique; ce schéma n'étant pas la simple réplique du schème de
nitive, s'il n'a plus à être nommément invoqué, cela ne signi~ l'Analytique). La prolifération nous semble encore plus in-
fie pas que son rôle soit occasionnel, au contraire il est fonda- contestable dans la doctrine du «génie» où Kant s'avance
mental. En ce chapitre, « quelque chose» se décide sans quoi à la limite du pensable pour arracher à la nature les procédés
l'entreprise critique n'aurait pu être poursuivie et qui, par du schématisme cachés dans les profondeurs de l'âme hu-
conséquent, commande la philosophie transcendantale tout maine.
entière, par exemple dans l'obligation où elle est partout de Par delà l'œuvre de Kant, la prolifération se prolonge dans
traiter, bien que de mauières différentes, de l'espace et du l'Histoire de la philosophie. Ne citons que deux noms: Fichte
temps, et, du coup, de la sensibilité sous différentes perspec- et Bergson. Dans sa preruière philosophie Fichte considère
tives'. Ce «quelque chose» quel est-il? En gros, au uiveau le schématisme transcendantal comme la théorie de l'imagi-
de l'Analytique, on ne risque rien à répondre: la liaison de nation productrice, cette imagination déterminant une rela-
l'entendement et de la sensibilité. Qui se contenterait de cette tion entre activité et passivité - on notera l'étrange parenté
réponse? On insistera: comment cette liaison se fait-elle? Ce entre la déclaration de Kant par laquelle nous avons commen-
«quelque chose» n'est pas simple : ui élément isolable, ni cé et celle de Fichte au § 16 de la WL 1798 : «la doctrine de
facilité réductible à une dénomination, c'est un nexus de fonc- l'imagination productrice est peut-être ce qui est le plus diffi-
tions « dont il est difficile d'arracher le secret à la nature» ; cile, mais sans conteste aussi le plus essentiel dans la pre-
on y discerne synthèse (le mot le plus fréquent et souvent le ruière Doctrine de la Science» - et, en 1810, une sorte
plus multivoque de la Critique) depuis la synthèse de l'intui- d'apothéose du Schème. Avec Bergson nous n'avons plus
tion et la synthèse figurée entre (s'il est perruis de s'exprimer affaire à une logique transcendantale liée à des catégories;
ainsi) la sensibilité et le schématisme, jusqu'aux synthèses mais lorsque nous lisons, du schéma dynamique, que «cette
intellectuelles entre l'entendement et le schématisme, mé- représentation contient moins les images elles-mêmes que l'in-
thode, temporalisation des catégories, conceptualisation et in- dication de ce qu'il faut faire pour les reconstituer», com-
imagination du concret, etc. Une telle complexité est nouée ment ne pas se rappeler que le schème transcendantal est
si étroitement' que Kant n'avait plus à en changer le texte. « la représentation d'une méthode» (einer Methode) pour re-
Mais cette complexité proliférante change le contexte où elle présenter uue multitude dans uue image, la «représentation
se place; par les questions qu'elle posait et les réponses d'un procédé général (von einem allgemeinen Verfahren) de
qu'elle suggérait, elle a certainement modifié le sens de la l'imagination pour procurer à un concept son image ... » (KrV,
preruière rédaction de l'Analytique et Kant a dû beaucoup B, 180)? On reconnalt Bergson lecteur de Kant'.
corriger pour 17 87.

4. Dans Sinnlichkeit und Verstand, op. cit., la communication de 6. Cf. A. PHILONENKO, La liberté humaine dans la philosophie de
Louis GmLLERMIT, «Esthétique et Critique », p. 123-140. Fichte, Paris, 1966, p. 119 et le commentaire des §§ 77-104 de la
5. Heidegger débrouille cette liaison - Kant und das Problem ...• WL 1794. p. 247-300. La silhouette générale de la Doctrine de la
p. 105-106, trad. cit. p. 170 - et prouve par son analyse que: 4: Il Science, trad. Pierre-Philippe DRUET, en son Fichte, Namur, 1977,
n'y a pas la moindre raison d'incriminer sans cesse l'incohérence et la p. 170-185. Pour BERGSON, L'Energie spirituelle, Be éd., Paris, 1922,
confusion prétendues du chapitre du schématisme.» p. 172.
30 YVON BELAVAL LE SCHEMATISME TRANSCENDANTAL 31

Il ne saurait être question pour nous ni de traiter en son la logique générale, peut·être, ici, la dialectique transcendan-
ensemble du schématisme transcendantal, ni, moins encore, de tale nous promet·elle une Odyssée de la conscience plus per-
répondre - même sous le prétexte de l'éclairage rétros- suasive : qu'on pense à Fichte et à Schelling.
pectif projeté parfois par l'Histoire - aux difficultés sur
3. Il reste une troisième solution, celle de Bergson: affir-
lesquelles Kant préfère, comme il le fait souvent, avouer son
mer que les choses sont du même tissu que l'image et que
ignorance. Notre propos se borne à quelques libres remarques
dans ce tissu, notre action les découpe telles que nous le~
- libres des contraintes que ne manquerait pas d'imposer voyons.
une étude d'ensemble avec son apparat philologique.
Recourir à l'intermédiaire de l'imagination offre donc cette
••• première difficulté, c'est qu'on y admet l'image, on la consta-
te, on ne l'explique pas. Dès lors, ou bien la constitution de
Convaincu par le paradoxe des objets symétriques non- l'image est escamotée, ou bieu on doit la situer dans le pas-
superposables que le réel n'obéit pas à l'analyse leibnizienne sage de la subjectivité des qualités sensibles à l'objectivité
et qu'il faut recourir aux synthèses de la logique transcen- de l~ perception, et c'est bien ce problème qu'essaiera, à sa
dantale, Kant en arrive à opposer, contre Leibniz, la sponta, mamère,. de résoudre l'Analytique. A sa manière, c'est-à-dire
néité du concept à la réceptivité sensible : entendement et par des Jugements synthétiques a priori et non par des juge-
sensibilité seraient hétérogènes. ments dogmatiques. En tout cas, pas à la manière de Des-
On ne peut pourtant pas les laisser séparés. Pour les mettre cartes : «Quand on scrute les causes naturelles, par exemple
en communication le moyen traditionnel est l'intermédiaire le soubassement de la mémoire, on peut spéculer à l'aveugle
de l'imagination. Cet intermédiaire offre le choix entre trois (comme l'a fait Descartes) sur ce qui persiste dans le cervean
démarches: des traces qu'y laissent des sensations éprouvées; mais il
faut avouer qu'à ce jeu on est seulement le spectateur de ses
1. La première procède de la sensibilité à l'entendement : représ~ntations; on doit laisser faire la nature pnisqu'on ne
on part donc de la sensation, on en snit l'écho dans l'image, connaIt pas les nerfs et les fibres du cerveau, et qu'on n'est
l'association par ressemblance en tire l'idée générale, la liai' pas capable de les utiliser pour le but qu'on se propose: toute
son de telles idées par synthèse judicatoire ou par habitude spéculation théorique sur ce sujet sera donc en pure perte»'.
constitue notre entendement. On reconnait cette orientation,
sommairement, chez Kant, dans le passage de l'Esthétique Une deuxième difficulté inhérente au choix de l'imagination
à l'Analytique. (en sa conception traditionnelle) comme intermédiaire entre la
sensibilité et l'entendement, c'est que si l'on se place aux deux
2. L'orientation inverse - de l'entendement à la sensibi- bouts de la chaine, le chaînon qni la lie, d'une part à la sensi-
lité, de l'abstrait au concret - nous est moins naturelle, elle bilité, d'autre part celui qui la lie à l'entendement restent
nous semble même obscnre, parce qu'elle nous engage à dé-
duire ce que nous ne pouvons pas vérifier. Par exemple, les
Idées platoniciennes sont-elles des images? Platon en a pro- 7: Anthropol?gie du po~nt de vue pragmatique, trad. M. Foucault,
Pans, 1970, Preto p. 11. BleD entendu, personne ne saurait confondre
bablement douté s'il est vrai, comme le suggère Aristote aux ce ~ point de, vue pragmatique» avec le point de vue transcendantal.
Livres M et N de la Métaphysique que son Maître aurait fina- Mats nous n oublIons pas non plus la conclusion d'E. WEIL Pro.
blèmes ka'!tiens, .Paris, 1970, à sa première étude, Penser et con~aîtreJ
lement remplacé ses Idées par les Nombres pytbagoriciens; sur la phIlosop~lle transcendantale, p. 33 : «Il appert ainsi que le
et quand bien même il s'en serait tenu aux Idées, comment fondem~nt dermer de la philosophie kantienne doit être cherché dans
s'institue leur reflet dans le monde sensible? La participa- sa t:I;~or!e ?e l'homme, d~ns l'a~thr~pologie philosophique, non dans
une. theone de la connaIssance', nt même dans une métaphysique
tion n'a jamais paru claire à un entendement. Plutôt que qUOIque les deux représentent des parties essentielles du système.» J
32 YVON BELAVAL LE SCHÉMATISME TRANSCENDANTAL 33

mal explicables l'uu et l'autre, chacuu en son genre. Le mé- blosse Wirkung der Einbildungskraft, einer blinden obgleich
canisme de Descartes nous fait croire que nous concevons unentbehrlichen Funktion der Seele, ohue die wlr überall
mieux le premier de ces deux chaînons: l'image est un dépla- gar k~ine Erkenntnis .haben würden, der wir uns aber selten
cement de la sensation, et la subjectivité de la sensation s'ap- nur elumal bewusst smd» (A. 78, B. 103). Gardent-elles le
puie sur l'objectivité évidente de la substance étendue; le même sens?
mécanisme procède insidieusement à une réduction (sans
doute illusoire) à l'homogène qui nous rend, semble-t-il, plus
aisé à suivre l'enchaînement. Mais cela n'est plus vrai dès •••
que l'on se rapporte à l'autre bout de la chaîue où l'on ris-
que de retrouver l'énigme du rapport de l'âme et du corps. Kant ne s'est pas expliqué sur les changements élaborés
Chez Kant la difficulté nous attend aux deux bouts de la entre 1781 et 1787. Les interprètes ont interprété. Aucune
chaîne: la subjectivité de la sensation n'est plus fondée sur conclusion n'est décisive. A lni seul le maintien du texte de
1781, concernant le schématisme, dans contexte corrigé de
l'objectivité évidente d'un en-soi et, d'autre part, entendement
et sensibilité sont par principe de nature radicalement diffé- 1787 reste à justifier. La multiplicité des interprétations ne
rente. Du coup, l'imagination traditionnelle n'est-elle pas prouve pas qu'elles soient inutiles ou fausses: elles font vivre
l'œuvre.
contradictoire en elle-même? Comment réussit-elle à mettre
en communication des entités totalement hétérogènes? Est- Revenons .a,;, .t~bleau .~'ensemble du schématisme'. A gau-
elle un mixte? A -t-elle une nature propre? che, la senslbill!e (malIere et forme)· en intermédiaire le
schématisme avec ses, deux faces, l'une 'tournée vers la sensi-
En troisième difficulté : on juxtapose sur le même plan bi~té à laquelle la rattachent la synthèse de l'intnition (la sen-
Sensibilité, Imagination, Entendement, comme si l'on avait satIOn) et la reproduction dans l'imagination (l'image) en
affaire à trois facultés ou fonctions exactement délimitables ; bref l~s éléments de l'empirisme (Locke, Hume), l'autre 'face
et puis, confusément, on essaie - de gauche à droite ou de tournee vers l'entendement auquel la rattache la recognition
droite à gauche - de les mettre en rapport selon on ne sait dans le concept, c'est-à-dire l'intellectualisme leibnizien. D'un
trop quelle causalité - mécaniste? dynamique? vitale? Mais côté la liaison de la synthèse figurée (figürliche) de l'autre la
pourquoi sur le même plan? Pourquoi dans l'ordre où nous synthèse intellectuelle du jugement (l'universel et le néces-
les avons énoncées, si l'une devait fonder les deux autres? saire). Ajoutons que la Géométrie unit la forme - la forme
Faut-il même compter jusqu'à trois? L'une de ces fonctions s.eule - de la sensibilité à la face intellectuelle du schéma-
peut en absorber une autre. Ainsi la troisième difficulté trahit tisme, tandis qu'à cette même forme se joint l'entendement
un équilibre et une hiérachie instables qui sans doute ont par la médiation du schématisme, pour déterminer l'intuitio~
appelé les changements apportés à la deuxième édition de la de. ~'espace et du temps; enfin, par la même médiation, l'in-
Critique de la raison pure. En 1781, Kant privilégie l'imagi- ;n'lIon formelle se constitue dans le rapport de l'entendement
nation comme facnlté autonome; il lui attribue avec insistance a la matière de la sensibilité.
le pouvoir de synthèse qui rend possible le penser; il va jus- L'originalité de Kant a été de formaliser le penser - et
qu'à en faire (A. 124) la faculté fondamentale de l'âme; elle pe~~r, c'est juger - par la table des catégories. Ainsi résol-
travaille dans les profondeurs de la nature humaine où ses vait-il une des questions fondamentales du XVIII' siècle. Le
procédés nons échappent, nous ne connaissons que les résul- refus de l'innéité des idées, chez Locke, avait eu pour consé-
tats, ceux-là mêmes qni nons permettent de counaître et de quence l'effondrement de la métaphysique dogmatique, rem-
penser. Certes, nombre de ces formules se maintieunent en
1787. Par exemple, la synthèse en général est toujours «die 8. Sinnlichkeit und Verstand, notre article p. 150.
34 YVON BELAVAL LE SCHEMATISME TRANSCENDANTAL 35

placée par la tabula rasa sur laquelle l'expérience sensible tualisme, avec ses possibles, est incapable de produire le réel.
devait inscrire ses traces jusqu'à ce qu'on y voit apparaître Pour dépasser cette dualité du possible et du réel (de Leibniz
des idées générales par la répétition des jugements de per- et de Locke), J.-H. Lambert prend pour modèle la rigueur de
ception et par illusion langagière (Berkeley). Kant lui aussi la perspective qui, à partir du point de vue sur un objet
refuse l'innéité des idées et, avec elle, la métaphysique du perçu (le réel) permet de calculer (le possible) l'appa-
siècle précédent. Mais ce refus condamnait-il l'innéité de rence des autres points de vue : la phénoménologie
toute affection et tendance? Le génétiste le plus impénitent (il crée le terme) est ainsi considérée comme une Op-
(peut-être Condillac dans le Traité des sensations) devait ac- tique transcendante (aIs eine transcendente Optik) qui
corder pour le moins l'innéité du sens. Et puis l'on pouvait conduit à la véritable universalité (Allgemeinheit)lO. Kant,
s'inspirer de Leibniz dont la Préface aux Nouveaux Essais reprenant le terme, l'adapte à sa table des catégories, dans
(1765) défend un innéisme des idées compris comme actua- la quatrième partie (celle de la Modalité) de ses Anfangs-
lisation formelle'. Kant snit l'orientation leibnizienne. Mais gründe où le mouvement et le repos se déterminent par leur
il la complète et il la corrige. Il la complète en constmisant seul rapport à notre manière de les représenter, ou modalité,
méthodiquement la table des catégories (qu'il croit exhaus- par conséquent comme phénomène des sens externes". Quoi
tive et définitive), de telle sorte que, par opposition à la tabula qu'il en soit, la dualité de l'empirisme et de l'intellectualisme
rasa empiriste, le Verstand a une structure. Il la corrige en doit être surmontée. Le schématisme transcendantal s'y ap-
soutenant contre Leibniz qu'entendement et volonté ne sont plique. Dès 1781 son texte définitif est acquis. Néanmoins
pas de même nature : il en résulte qne le passage réglé de la l'empirisme que Kant garde en esprit, cet empirisme dont
circonférence à l'ellipse, de l'ellipse à la parabole, et de la pa- l'insuffisance est patente puisqu'il ne réussit pas à garantir la
rabole à l'hyperbole, qui trouve sa méthode dans la définition nécessité des lois de Newton, donc la valeur de la science,
de « conique» (exemple dn QuM sit Idea) ne pent plus se jus- charrie avec lui, dans la Critique, des «images» d'avant
tifier par l'implication analytique (du prédicat dans le sujet) l'âge critique, quand on ne parlait pas encore de l'intuition
de la logique générale, il exige l'activité synthétique a priori formelle. Aussi bien les commentateurs ne s'entendent-ils pas
de la logique trauscendantale. Un rappel encore : à gauche sur le statut de l'imagination dans le chapitre sur le schéma-
du tableau, la sensibilité, déterminable par l'eutendement du tisme : est-elle autonome ou une fonction de l'intellect!2? de
Je pense, ne peut plus être, maintenant qu'elle est devenue quoi sont faites les synthèses dont elle est le pouvoir? Fichte
l'étoffe subjective des phénomènes, celle de la philosophie aura son interprétation, nous en donnerons un exemple. Cro-
pré-critique, plus particulièrement de l'empirisme. ce ne discerne dans la Critique que deux sortes d'imagina-
En 1781, Kant se récite toujours les leçons de l'empirisme tions : reproductrice et combinatoire.
(Locke, Berkeley, Hume) et de l'intellectualisme (Leibniz). En 1787, le chapitre (inchangé) du schématisme s'inscrit
L'empirisme, qui ne peut rendre raison du possible, se croit dans un contexte corrigé : gardera-t-il le même sens? On
capable de reprodnire le réel par des idées-images; l'intellec-
10. Neues Organon, 1764, hrsg. H.W. Arndt, Hildesheim, 1965,
t. II, p. 220. Cf. la trad. italienne annotée de Raffaele Ciafardone,
9. Le Quid sit ldea, motivé par la lecture de l'Ethique en 1677, ,ne Editori Laterza, 1977, et, du même Semeiotica e Fenomenologia, ed.
devait être publié, par Gerhardt, qu'en 1890. Dans un contexte bIen Laterza, 1973.
entendu non transcendantal, Leibniz semble y annoncer quelque chose 11. Metaphysische Anfangsgründe der Naturwissenschaft, 1786,
du schématisme en distinguant l'idée et la méthode qui conduit à sa Insel Verlag, Vorrede, p. 22 : « ... das vierte aber ihre Bewegung oder
découverte : « •.. nam qui methodum habet quam si sequatur ad rem Ruhe bloss in Beziehung auf die Vorstellungsart, oder Modalitat,
pervenire possit, non ideo habet ejus ideam» (p. VII, 263). Mais en mithin aIs Erscheinung ausserer Sinne, bestimmt, und Phanomenologie
1677 il ne faut pas penser seulement à Spinoza, mais aussi au Menon genannt wird ».
et à Aristote. 12. Pasquale SALVUCCI, op. cit., p. 32, 54, 67.
LE SCHEMATISME TRANSCENDANTAL 37
36 YVON BELAVAL
sées et dans l'expérience », cependant, elles «ne sont nulle-
dirait que le schème y remplace l'image. L'Analytique en son
men: rest~eintes. d,!"s leur portée », «elles pensent le supra-
ensemble s'était édifiée à partir de l'intuition sensible, qui
senSIble, 1 en-sOl, 1 absolu» : on observe une évolution chez
était la matière de l'image; à la synthèse de l'imagination suc-
Kant «non senlement de l'une à l'autre des deux éditions et
de l'une à l'autre des trois Critiques, mais dans les paIiies ~on
cède la synthèse du schème qni se rattache à l'unité de l'acte
aperceptif du Je pense. Notre tableau ne se parcourt plus
modifiées de la Critique de la Raison pure même' la fonction
de gauche à droite, mais de droite à gauche. L'imagination
métaphysique des catégories pures est de plus e~ plus souli-
semble perdre la dignité de troisième faculté originaire de
gnée à mesure que progresse l'enquête, de la sensibilité par
l'esprit, et Heidegger en arrive à prétendre que «dans la se-
l'analyse de l'entendement vers la Raison et les objets de celle-
conde édition l'imagination est présente uniquement de
ci, tandis qu'elle reste cachée, on dirait intentiomIellement au
nom »13, Toute image comporte une figure et, même en rêve,
départ... ». Ainsi (ibid., p. 28) Kant affirme clairement' (B.
le savoir de ce que représente cette figure. C'est pourquoi le
432, Préf. B. XXXIX) «la possibilité, voire la nécessité, d'un
schématisme reste lié (en 1781 et 1787) d'une part à la syn-
usage analogique il est vrai, mais néanmoins réel, des caté-
thèse figurée, d'autre part à la Rekognition im Begriff. Mais
gories là où le sensible n'intervient pas au début, mais est
en 1787, le schème, en tant que pouvoir transcendantal d'uni-
seulement visé à la fin». Du coup, il nous est aisé de com-
fication, rompt ses attaches avec l'empirisme et, renouvelant
prendre la nouvelle importance du mJme chapitre sur le sché-
l'intellectualisme classique pour en faire un intellectualisme
matisme dans l'édition de 1787. Libéré de tout empirisme
critique (si cette expression est permise), trouve la source de
qui ne l'explique pas, mais qu'il pent expliquer, le schème
de son pouvoir dans l'entendement. Cela signifie que les syn-
r:'as~~me. pas seulement sa fonction dans l'Analytique (qne
thèses des catégories qui dépendent de l'activité du [ch denke
sIgmfIeraIt ce «seulement» ?), il s'exerce dans toute la Cri-
et qui, par conséquent, règlent la faculté de juger, se substi-
tique de la Raison pure et même, par delà, dans toutes les
tuent aux synthèses de l'imagination invoquées en 17 81. Sché-
Critiques - dans toute la philosophie transcendantale an-
matisées les catégories se temporalisent, et cette temporali-
noncions-nous plus haut. Dès lors, il devient permis de penser
sation unit l'entendement à la sensibilité, ce qui était le pro-
à une réinterprétation de l'imagination de 1781, désormais
blème premier du schématisme. Voilà donc l'imagination de-
faculté de synthèses pures, inconscientes par essence, et non
venue fonction de l'intellect et, même, l'entendement se fait
plus simple faculté d'images figurées.
imagination".
Nous nous en sommes tenus à l'entendement parce que le La réinterprétation de l'imagination à laquelle aboutit le
chapitre sur le schématisme appartient à l'Analytique qui est schématisme en multiplie les perspectives. Alexis Philonenko
_ nous l'avons dit ailleurs" - le Traité de l'entendement hu- (op. cit., p. 177) Y voit la possibilité «de ce que nous nom-
main de notre philosophe. Or l'esprit humain est un. La Rai- mons actuellement une phénoménologie pure de la synthèse».
son s'ordonne, elle aussi, sur les synthèses catégoriales. Eric Hegel et Heidegger y voient la racine commune de la sensi-
Weil rappelle fort bien, avec références incontestables (op. cit., bilité et de l'entendement", si bien que, pour répondre à la
p. 26) que si, en effet, les catégories « ne servent qne schémati- ?ifficulté que nous soulevions plus haut (p. 32), il ne faut pas
Juxtaposer sur le même plan Sensibilité, Imagination, Enten-
dement, ce qui place manifestement l'Imagination en inter-
13. Kant und das Problem ... , p. 149.
14. « In questa seconda Deduzione - écrit Pasquale Salvucci, op. médiaire, il faut faire de cette dernière le fondement, enfoni
cit., p. 65 _ poichè la sua sintesi è in sè puramente intelletuale, il dans les profondeurs de l'àme humaine, de la sensibilité et
Verstand deve farsi immaginazione, per cio che non pue - e cio per
l'ostacolo delle eterogeneità - riportarsi direttamente alla sensibi-
lità... » 16. Kant und das Problem .... p. 127.
15. Nos Etudes leibniziennes. Paris, 1976, p. 277.
YVON BELAVAL LE SCHEMATlSME TRANSCENDANTAL 39
38

de l'entendement. N'est-ce pas cette orientation que suit la sensibilité et l'entendement, comme un art caché dans les
Schelling dans son System des transzendentalen ldealismus, profondeurs de l'âme humaine, dont nous ne pouvons arra-
lorsqu'il dérive d'une Urtiitigkeit absolue, en relation dialec- cher à la nature ses procédés. Ouvrons la Critique du jugement
tique, le monde et la pensée? Ici encore le schématisme, que aux articles 46-49 sur le géuie dans les beaux-arts. Nous y
chacun ne peut connaitre que par sa propre expérience in- retrouvons les profondeurs secrètes de l'âme humaine et la
terne, se libère de l'image : «Das Schema muss unterschieden même ignorance des procédés de la nature. Le géuie ne se
werden sowohl vom Bild, aIs von Symbol, mit welchem es rapporte-t-il pas au schématisme? Il s'y rapporte assurément
sehr haufig verwechselt wird ,,17. Dix ans plus tard, en 1810, comme le singulier à l'universel ou (bien que cela ne revienne
Fichte nous fera assister à une sorte d'assomption du schème pas tout à fait au même) comme l'exceptiounel au comruun.
dans Silhouette générale de la Doctrine de la science. Suivons Mais nous voici entre l'entendement et la raison, et si nous
la présentation que nous en procure Pierre-Philippe Drnet voulions parler d'« âme » ce serait, plus spécialement, le pou-
(loc. cit.) : Dieu, y apprenons-nous, n'est pas le concept mort, voir de pénétrer les idées esthétiques, ces représentations de
il est vie pure, notre savoir l'exprime, et « une telle expression l'imagination qui donnent « beaucoup à penser» - à penser
est une image ou un schème», un schème que l'on ne doit et non à cQnnaître, donc sans concepts adéquats: en pendant,
pas considérer comme un produit de Dieu, mais comme unë les idées rationnelles (= de la raison) sont des concepts sans
suite immédiate de l'être de Dieu; «absolument rien ne peut intuitions adéquates (§ 49). Avec l'entendement de la première
exister hors de Dieu si ce n'est le schème", etc. Revenons à Critique, l'Analytique traitait du jugement déterminant, cons-
Kant. En 1787, le schème s'enracine dans l'entendement, titutif des phénomènes que la science prenait pour objets et
avec ses structures catégoriales, et, par là même, à la Raison. propres à la déduction; avec l'Analytique du jugement esthéti-
Mais Kant ne laisse d'insister sur la difficulté d'arracher à la que, en particulier du Sublime où l'on aborde la doctrine du
nature les véritables procédés du schématisme. On devrait géuie, on a affaire au jugement réfléchissant, régulateur, cons-
ici se montrer particulièrement attentif à l'étude de Paci, Cri- titutif de la seule faculté de désirer: il est propre à l'analogie.
tica dello Schematismo transcendentale (dans Rivista di Filo" Rien de cela n'exclut le schématisme. D'abord, nous le savons,
sofia, n° 2, 1955, p. 390, 393, citée par P. Salvucci, op. cit., l'action du schème ue s'arrête pas à l'entendement mais le dé-
p. 76) : selon ce chercheur, rien de plus étonnant que cet passe 'vers la raison. En outre, la raison utilise en Esthétique
extraordinaire passage de Kant où le schématisme apparaît des schémas « s'il s'agit de purs concepts de l'enteudement >,
comme un art issu non seulement de l'âme humaine, mais pour leur donner a priori des intuitions correspondantes; cette
encore enraciné dans la nature, et ainsi, «le categorie sen1- correspondance manque-t-elle s'il s'agit d'un coucept que
brano affiorare dalla natura per poi fissarsi nella tabella dei « seule la raison peut concevoir» ? alors par un procédé, non
filosofo ». pas identique (par manque d'intuition adéquate), mais analo-
gue (par identité formelle), la raison invente des symboles (§

•• 59). Le formalisme (puissance d'unification) du schème s'im-
pose donc bien à toute la philosophie transcendantale, depuis
Quitte à s'en excuser on répétera une fois de plus - ces li- les profondeurs de l'âme humaine et de la nature auxquelles
bres remarques tirent de là leur origine - que le schématisme renvoyait la Critique de la raison pnre, jusqu'aux profon-
se présente, en 1787 et déjà en 1781, en intermédiaire entre deurs du génie et de la nature auxquelles nous renvoie la Criti-
que du Jugement. Quelle nature? On est en droit de distin-
17. System des transzendentalen ldealismus, présenté par Walter guer : 1. la nature en général, «ais Inbegriffe aller Gegens-
Schulz, Hamburg, 1957, p. 176. Cf. X. TILLIETTE, Schelling. Une stande der Sinne », c'est-à-dire des phénomènes, eux-mêmes
philosophie du devenir, Paris, 1970, t. I, p. 214, passim.
40 YVON BELAVAL LE SCHÉMATISME TRANSCENDANTAL 41

fondés sur notre faculté de connaître et de penser le monde; que nature, il donne ses règles à l'art », il ne peut l'enseigner,
2. la nature humaine, dont l'unité générique est présupposée il ne peut que lui obéir, «c'est pourquoi sans doute le mot
par le beau, le sublime, le génie (Cf. E. Weil, op. cit., p. 71- génie est dérivé de genius, l'esprit particulier attribué à un
72-73) ; 3. la nature individuelle. Chacun de nous appartient homme à sa naissance pour le protéger et le conduire, et qui
à ces trois natures : il participe à l'espace et au temps par lui inspire des idées originales» (K.U. §. 46). De toute ma-
la seusibilité, coudition a priori de toute expérience, - par nière, la nature n'imite pas, elle crée. Par conséquent, on ne
l'entendement catégorial schématisé, condition de notre con- rend pas compte d'nu génie par la seule force de tête: ce que
naissance du monde temporalisé, - par la raison enfin, saris Kant disait de lui-même, [ch bin ein grosser Kopf20, il le dit
laquelle nous ne penserions ni notre âme, ni le monde, ni de Newton (K.U. § 47) et de tout savant qui se forme et en-
Dieu, ni notre faculté de désirer. Partout nous expérimentons seigne par des imitations. Le génie n'imite pas, ne se commu-
nos limites. L'inné nous échappe, bien qu'il soit iuné à nous nique pas. Et puisque les Beaux-Arts sont les arts du génie,
mêmes. Nous ne comprenons pas la vie. Si l'un de nous jouit les Beaux-Arts ne progressent pas, tandis que les sciences
de quelque supériorité de jugement, c'est là un don particulier progressent. Homère, Wieland restent indépassables parce
- un fait - constatable et inexplicable (A. 133). Et ainsi qu'ils sont incomparables: Newton ne peut être que dépassé.
de suite pour les variations moyennes de la nature humaine La théorie kantienne du génie est neuve. A l'analyser hors
dont on ne peut asbtraire le schématisme, fût-ce dans la vie de son contexte historique, on en reconnaîtrait partout des
éternelle, s'il existe nu tempus noumenon. Chercher à l'abs~ éléments21 • Ce serait oublier qu'avec la révolution coperni-
traire, ce serait comme vouloir expliquer un organisme meca- cienne l'esprit humain a cessé d'être le miroir du réel, pour
nicè, sans le comprendre en sa dynamique vitale, sans prin- deveuir le règle du seul réel que nous puissions connaître
cipe organisateur, sans monas dominans 18 • Nous vivons SUT et penser. Ce serait oublier l'irréductibilité de la logique
des profondeurs insondables : «il n'y a, pour ainsi dire, sur transcendantale à la logique générale, et la productivité des
la carte immense de notre esprit, que quelques régions illu- synthèses a priori. Le génie est désormais le medium de
minées : voilà bien qui peut nous émerveiller sur notre na- la nature - transcendantale, faut-il préciser, même quand
ture »19. Certains hommes hors du commun ont 1'« esprit de le romantisme l'oublie. N'en concluons pas que toutes les
la nature » qu'ils expriment en ses règles et en ses apparences théories pré-critiques du génie sont fausses : elles sont autres.
dans les Beaux-Arts? Ils sont rares. Ce sont des «favoris A chacun de choisir. Mais on ne peut choisir de laisser de
de la nature» (K.U. §. 49). Ce sont des génies . .Quel est leur côté «un des points les plus difficiles», le chapitre à tenir
principe d'individuation? La philosophie transcendantale «pour un des plus importants» : le schématisme transcen-
s'interdit certaines réponses : une élection divine, une notion dantal.
complète dans l'omniscience du Créateur, la physiologie ex-
ceptionnelle d'un cerveau, une concrétion imprévisible de
l'évolution créatrice. La philosophie transcendantale ne peut
que les considérer comme des faits, des dons. Interrogerons-
nous un génie? «Il ne sait pas lui-même d'où lui viennent
les idées », «il est incapable d'indiquer comment, en tant
20. Se référant à P. GRAPPIN, La théorie du Génie dans le préclas-
sicisme allemand, Paris, 1952, G. ToneIli (cf. note ci-après) rappelle:
« Bodmer still employs grosser Kopf, grosser Gelst to mean a poetical
18.. Claudt? DEBR~, «L'introduction du concept d'organisme dans genius submitted to rules of nature and of reason only, not ta those
la phIlosophle kantienne, 1790-1803 », Archives de Philosophie, 43 imposed by the critics».
(1980), p. 487-514. 21. Cf. Giorgio TONELLI, «Genius from the Renaissance ta 1770 »,
19. Anthropologie... , éd. cit., p. 23. Dictionary of the History of Ideas, ed. by Philipp P. Wiener, vol. II.
JOSEPH MOREAU

LA CRITIQUE KANTIENNE
ET LE RENOUVEAU
DE LA MÉTAPHYSIQUE

Ceux qui, au lendemaiu de la Seconde Guerre mondiale,


ont divulgué en France la phénoménologie husserlienue et
l'ontologie heideggerienne, entendaient par là rompre avec
la tradition idéaliste issue du cogito cartésien et de la critique
kantienne, et qui se perpétuait dans l'enseignement univer-
sitaire. Eu proclamaut cette rupture, ils oubliaient apparem-
ment que la réduction phénoménologique était une applica-
tion du doute cartésien, de la suspensiou du jugement, par
laquelle les objets de la perception sensible sout convertis
en phénomènes; ils onbliaient aussi que la question ontolo-
gique, l'élucidation du sens de l'Nre, en qui tous les êtres
compris dans le monde doivent trouver leur fondement, a son
point de départ dans une réflexion sur l'être du sujet cous-
cieut (le Dasein), à qui sont présents tous les objets de con-
naissance; la restauration de l'ontologie n'est possible que
sur la base de la réflexion guoséologique, des conclusions de
l'idéalisme transcendental. Il n'y a donc pas rupture, mais
continuité, de l'idéalisme de l'âge classique aux innovations
de la philosophie de notre siècle; il est à cet égard siguificatif
que Husserl ait écrit des Méditations cartésiennes, et que l'ou-
vrage fondamental de Heidegger, Sein und Zeit, ait été pré-
cédé d'une étude sur Kant et le problème de la métaphysique.
Ce titre même dénote que la critique kantienne ne siguifie
pas, comme on l'a cru, le congé défiuitif de la métaphysique.
Ce qu'établit l'Analytique transcendentale, c'est que les
44 JOSEPH MOREAU RENOUVEAU DE LA METAPHYSIQUE 45

connaissances de l'entendement ne peuvent s'étendre au-dela C'est là ce qu'iudiquait déjà la Méthodologie transcenden-
du champ de l'expérience; et la Dialectique transcendentale tale; et la raison de cette ouverture métaphysique se relie
le confirme en montrant qne les idées de la raison (idée de aux considérations foudamentales de l'Analytique, selon les-
l'âme, du monde, de Dieu) sont des concepts hyperbolique~ quelles la certitude de la science dépend du fonctionnement
qui ne peuvent trouver dans l'expérience aucun contenu ~m de notre faculté de connaître, de ses' conditions a priori. La
leur soit adéquat; ils ne peuvent donc procurer une c0o:>a,,:- connaissance scientifique n'est certaine que parce qu'elle
sance objective, équivalente à celles de l'entendement SCl~ntI­ est relative à la constitutiou de uotre esprit; elle ne s'élève
fique. Mais ces concepts n'en sont pas moins ~es pro~~JCtIo?S à l'objectivité de la représeutation, elle ne s'affrauchit de la
nécessaires de la raison dans sa recherche de 1 mconditionne ; subjectivité des impressions, que dans la mesure où elle s'ap-
s'ils ne peuvent servir à l'extension de la connaissance, ils plique à les déterminer selou les exigeuces de l'entendement.
sont indispensables à son organisation1• La raison s'efforce, Mais ces impressions sont reçues par nos sens, données à tra~
en effet de ramener la diversité des connaissances de l'en- vers les formes de notre faculté sensible; elles se réduisent
tendem~nt à la plus parfaite unité; notre esprit est avide à des phénomènes présents à la conscience d'un sujet, inclus
d'étendre ses connaissances, mais il s'intéresse plus encore dans la subjectivité transcendentale, et susceptibles par là-
à leur unification systématique; voire, l'accroissement de même d'uue élaboration par l'entendemeut, qni les relie en
la connaissance ne correspond pas à «l'intér~t suprême de une représentation objectives; mais le sujet connaissant ne
la raison ,,'. La connaissance intellectnelle, la science des ob- saurait sortir de lui-même pour atteiudre des choses en soi.
jets d'expérience, nous fournit un modèle de certitude; la Seulement, observe Kant, si les objets de la connaissance
philosophie critique marque les limites de ce que nous pou- scieutifique ne peuvent être regardés comme des choses eu soi,
vons savoir; mais l'intérêt suprême de la raison réside au- du moins doivent-ils pouvoir être pensés comme tels'. La cho-
delà des certitudes de la science; il consiste à déterminer clai- se en soi se dérobe à la connaissance; celle-ci n'aperçoit que
rement ce que nous devons faire et à estimer raisonnablement le phénomène; mais le phénomèue ne peut être regardé com-
ce qu'il nous est permis d'espérer'. Kant semble s'être pro- me tel que par référence à la chose eu soi, ou plus géuérale-
posé d'abord de conten~r la. ,:"étaphysiq,;e daus. les l~it.es dn ment à quelque chose qui le dépasse. La relativité de la cou-
savoir de la certitnde sClentifique' ; la metaphyslque arusl con- naissance, professée par l'idéalisme transcendental, se réfère
çue s; réduirait à la critique de la connaissance, à la détermi- nécessairemeut à la trausceudance de l'être.
nation a priori des conditions de l'objectivité scientifique; tel
est le but primordial de la Critique de la raison pure; mais les C'est par là que la critique kantienue, en dépit de déné-
réflexions de l'auteur sur cet ouvrage, telles qu'elles s'ex- gations éparses dans la Dialectique transcendentale, reste ou-
priment notamment dans la Préface de la 2' édition, nous verte à la métaphysique; aussi a-t-on vu en notre siècle les
découvreut que la tâche de la raison s'éteud au-delà des li- adversaires les plus résolus de la métaphysique se détourner
mites du savoir empirique. de la philosophie transceudentale et se réclamer paradoxa-
lement de l'aualyse leibnizienne qui était, pour sou inventeur,
!a base du ratioualisme métaphysique. Pour Leibniz, en effet,
1. Cf. Appendice de la Dialectique transcendentale : De l'usagé 11 u'est point de limites à la counaissance rationnelle; toute
régulateur des idées de la raison pure. . , vérité est connaissable a priori, c'est-à-dire qu'elle se ramène
2. Méthodologie transcendentale, II 1 : Du but fmal de 1 usage de
notre raison.
3. Ibid., II 2 (B 832 833). Les lettres A et- B désignent respective--
M
. 5: ~f. Esthétique transcendentale, § 3, Conclusion B (B 44) : L'ob-
ment la 1re et la 2 e édition de la Critique de la Raison pure. . JectIVlté de la connaissance, la réalité empirique des objets dans
4. Cf. le titre des Prolégomènes à toute métaphysique future qUl l'espace, suppose leur idéalité transcendentale.
pourra se présenter comme science. 6. Critique de la Raison pure. Préface de la 2e édition (B XXVI).
3
46 JOSEPH MOREAU RENOUVEAU DE LA MÉTAPHYSIQUE 47

par l'analyse à une identité. Si nous sav.ions ~se~ ple~ement une compréhension abstraitement délintitée, dont la réso-
de cette méthode, «nous pourrions, dit Lelbmz, ra1S?nn~r lution en ses éléments premiers ne requiert pas «U11e analyse
en métaphysique et en morale à pen près c01~me en geome- infinie, que Dieu seul peut accomplir »13. Ainsi sont écartées
trie et en analyse»'. Kant dénonce, au contraIre, cet abus du d'emblée ces «notions individuelles complètes », dont la com-
raisonnement l'illusion de prendre la logique, qm est ~e binaison fait l'objet d'un calcul divin, d'où résulte la détermi-
règle formell~ du jugement, pour un instrument ~e c~nnals­ nation parfaite de l'Univers14 • A de telles spéculations corres-
sance'. L'entendement est la faculté de lier la. diverSIté ~es pondent les concepts transcendants de la métaphysique,
impressions sensibles; il ne pr~duit. !a connalssa~ce q~ en ceux qui selon Kant sont incapables de nous procurer une
s'appliqnant aux données de 1 mtmtlOn, aux phe?omenes connaissance objective, mais qui contribuent cependant à
reçus par la faculté sensible. Car ~ n'y a de l?héno:nenes ,ue éclairer les questions auxquelles s'attache l'intérêt suprême
pour une conscience réceptive, qm ne p."ut tlfe~ d."lle-~em~ de la raison. La philosophie transcendentale de Kant, en pro-
le contenu de la connaissance, le prodmre a priOri, m~ls qUi clamant que la connaissance scientifique repose nécessaire-
est astreinte à le recevoir de l' extérieur. La connrussance ment sur des données sensibles et ne peut atteindre que le
humaine suppose, selon Kant, la .d~~lité de. l'ente,,;dementet phénomène, ne récuse pas absolument la métaphysique; mais
de la faculté sensible, la réceptmte des ImpreSSI?nS et J~ elle s'applique à marquer ce qui la distingue de la science.
spontanéité des concepts'; pour Leibniz, au ~o.".tr,alr~, à qUi La position de Kant concorde curieusement sur ce point
il s'oppose sur ce point fondamental, la senslbll:te n ~st qu~ avec celle de Thomas d'Aquin, pour qui «l'objet propre de
de l'intelligence confuse ; il n'y a !ien ?~ns le ph;nomene ').UI l'intelligence humaine, c'est la quiddité ou nature existant dans
ne soit réductible à des rapports mtelhglbles lO• C ~st ce rat1~­ une matière corporelle »". Notre connaissance ne se tire pas
nalisme intégral qui a séduit le positivisme l~glqU~, tan~ls d'idées innées, de formes aperçues directement dans l'entende-
que l'Esthétique transcendentale, relevant le role, ~eces~alfe ment divin; ces formes doivent être dégagées des images sen-
et irréductible du sensible, semblait conserver ";fl resldu ,d em- sibles par l'action de notre intellect16 • On a pu reprocher à
pirisme, receler une menace pour le rationalIsme, menager l'innéisme cartésien d'assimiler la connaissance humaine
une transcendance possible". à la connaissance angélique; U11 tel reproche ne saurait être
Mais pour faire de l'analyse leibnizi~~,,;e U11 inst~ment adressé à Kant, qui dénie à notre entendement le pouvoir de
d'élimination de la métaphysique, le pOSItiVisme ~n. ~~lt r~~: se donner lui-même son objet. Notre intellect n'est pas mIe
treindre l'usage à éprouver la consistance des deflU1t~o~ , faculté d'intuition ; il a seulement une fonction de liaison, de
or, celle-ci ne peut être vérifiée que si le concept deflU1 a détermination objective du divers dOmIé à l'intuition". Toute
notre connaissance repose donc sur l'expérience et ne s'appli-
que qu'à des objets sensibles, à des choses matérielles. C'est
ce que répète inlassablement de son côté S. Thomas!'; et si
7 LEIBNIZ à Gallois (G. Phil., VII 21). . 8)' L .
8' KANT éritique de la Raison pure, IntroductIon (B • oglque
tra~cende~tale, Introduction III (Bd 8~~. 1 (B 74) . Analytique trans- 13. G., Phil., VII 200.
14. De rerum originatione radicali (G., Phil., VII 304-305). Cf.
9. Logique transcendentale, Intro ue Ion ,
cendentale, § 22 (B 146-148). L'Univers leibnizien, p. 201-204.

~~: ~i: ~~~:t~i~1~~n~CTr~Jti~~Bet6~~~~mité


15. S. THOMAS, Summa theologica, 1 84, 7.
dans la pensée de 16. Ibid., 1 85, 1 : Ad 4tum dicendum quod phantasmata et illu-
Leibniz », Studia Leibni~iana, 197,2. p. f5-5ie'bniZ pour la mise en ffiinantur ab intellectu agente... Ad 5tum dicendum quod intellectus

œu~~ S: ~:~~~~~~a~!~~io:i~~~~ecf~ein.
(G., Phil., IV 424), Animadversione~
':editariOnes de Cogniti~~tcÏ'
!?arteslUm, 1 ad art. 17 ( .,
noster et abstrahit species intelligibiles a phantasmatibus. Cf. notre
ouvrage: De la connaissance selon s. Thomas d'Aquin, p. 49-60.
17. Analytique transcendentale, § 21 (B 145-146).
359), et notre ouvrage L'Univers le,bmzlen, p. 219. 18. Summ. theol., 1 12, 12 : naturalis Dostra cognitio a sensu prin-
RENOUVEAU DE LA MÉTAPHYSIQUE 49
JOSEPH MOREAU
48
délivrer de ses prétentions dogmatiques, de son ambition de
la connaissance de Dieu, de l'âme, des êtres immatériels, ne
s'ac~ever en nn système. Une telle ambition n'a pas été ré-
nous est pas, à son avis, interdite, elle n'est possible que par
des voies détournées, à partir de la considération des choses pudiée cependant par ceux qu'on a appelés les post-kantiens
qui se sont proposé au contraire d'accorder avec les exigence~
sensibles, en remontant à leur cause (ut causam), ou par . . déC critiques l'idéal du savoir absolu, d'assumer daus la nécessit'
de la nature ou la prédestination de l'histoire la liberté de l' ~
passement analogique (per excessum), ou avec les :estnctlOns
prit". Aussi les ~éritables hé~tiers d~ Kant sont-ils ceux q:',
de la théologie négative (per remotionem)19. MaIS, observe
S. Thomas, une telle connaissance, si elle est imparfaite, n'en
en. vue de constituer «la phzlosophle comme science rigo _
reuse », se sont détournés du système et ont prétendn revem~r
est pas moins précieuse; de même, aux yeux de Kant, la mé-
taphysique, si elle n'équivaut pas à la science, est néanmoins A

«aux ~hoses mernes », c'est-à-dire aux données immédiates à


l'exercice d'une fonction de la pensée qui répond à l'intérêt
suprême .de la raison. Cette observation, sur laquelle Kant l'expénence préobjective, antérieure à l'élaboration sponta~'
rejoint S. Thomas, est empruntée par ce dernier à Aristote, qUI. b · 'a1:' perception des objets extérieurs, des choses
a outit ee

opposant à la science des êtres célestes, des astres, si loin- sensl?les, apprehendées dans leur évidence naturelle. La phé-
nomenologle transcendentale se propose de remonter de cett
q~
tains qu'ils ne se découvrent qu'incomplètement à l'obser-
vation, l'étude des êtres vivants qui pullulent autour de nous, évidence . naturelle à une évidence première et immédiate ,UI
A . ,

et dont l'observation, la capture et l'examen anatomique sont


tout fe OIS ?e ~eut etre ~attemte qu'a travers une réduction criti-
toujours à notre portée20 • Mais les connaissances les plus ai- que, apphquee anx demarches spontanées de la perception et
sément à notre portée ne sont pas nécessairement celles qui du langage, en vue de délimiter rigourensement le contenu de
l'assertion, l'objet intentionel du jugement, qui ne doit pa
ont pour nous le plus de prix. Cette remarque d'Aristote est
appliquée par S. Thomas aux rapports de la métaphysique excéder ce q~ui es! présentement donné à la conscience. C'es~
~ar .c~tte adequatlOn entre la visée intentionelle et la donnée
et des sciences empiriques : la moindre connaissance qui
mtuItlve, par cette confirmation directe, que se caractéri
nous soit accessible visant les réalités suprêmes a plus d'in-
l'évidence
~.
première et
~
immédiate, dont la certitude repose
se
térêt pour nouS que la certitude scientifique touchant les cho-
nea~oms sur, un; reduction transcendentale23. Or, cette ré-
ses d'ici-bas21 •
~uctlOn, par o~ s e~ectue le passage de l'évidence naturelle
a la certitude mdubltable, propre à l'attitude critique avait
été nettement définie par Descartes dans un passage d~s Re-
*
** gulai''' ~t c'est par ce procédé qu'il se délivre de l'incerti- :
tude umverselle des sceptiques, qu'il parvient à l'évidence i'!
,:i

La Critique de la Raison pure ne marque donc pas la fin 1


de la métaphysique; elle vise seulement à la réformer, à la 1

22. Cf. notre étude : Spinoza et le spinozisme (Coll. «Que .


je? », p. 112-120. SaIS- '1
cipium sumit. Vnde tantu~ se nostra nat~\aFs c~gnitio extendere 23. Nous nous permettons de renvoyer sur ce point à notre U.
potest in quantum manuducl potest per senslbIlm. lb~d., II 2, quo 173, vrage : La conscience de l'être, ch. VII : La phénoménologie transcO - .1
art. 3' : quia in nobis perfectum judicium intellectus ~~be~ur 1?er dantale, p. 91-93. en-
conversionem ad sensibilia, quae sunt prima nostrae cogmtlOntS _pnn-
~4. DESCARTES, R~gulae ad directionem ingenii, XII (A.T., X 423)·
cipia. De même Sent. IV, d. 9, a. 1, q. 4. Cf. De la connaissance selon Dbl notandum est, mtellectum a nullo unquam experimento d .:
s. Thomas d'A., p. 89-97. posse-, si praeci~e tantm.n intueatur rem sibi objectam, prout i~l~~
19. Summ. theol.~ 1 84, 7 ad 3um. h.abe~ vel III ~e IpSO vel III phantasmate, neque praeterea judicet ima-
20. ARISTOTE, De partibus animalium. 1 5, 644 b 22-31. .
g.matlOn~m ftdehter refe~e sensuum objecta, nec sensus veras rerum
21. Ibid., 34-35, et Summ. theol., 1 1, 5 ad 1 m~. : et tamen .mI-
nimum quod potest haberi de cognitione rerum altisslmap~m~ deside- figuras lll":uere:, ne? demq~le res ex!ernas tales semper esse quales
rabilius est quam certissima cognitio quae. habetur de mlmmlS rebus. apparent; m his emm ommbus erron sumus obnoxii.
50 JOSEPH MOREAU Rl<"NOUVEAU DE LA MÉTAPHYSIQUE 51

d C "to Or, c'est par la généralisation de ce P!oce'd'ehi'. appIi-_ des objets extérieurs et enti'atne le paradoxe de l'idéalité, la
n og'.. s'effectue dans la philosop e mo
qué en toute ngueur: que t de l'idéalisme carté- doctrine désignée par Kant sous le nom d'idéalisme problé-
derne, issue du dCOgll~: le déPas~e:::: marquées en notre siè- matique. Or, pour dissiper ce paradoxe, il suffit, estime Kant,
sien. Les étapes e ce epassemen d Husserl et par de dénoncer le paralogisme de la substantialité qni lui sert
cIe par la phénoménologie transcendentale. e . t insuf- d'appui, qni nous fait considérer le sujet pensant comme nne
l'ontologie fondame~tale de Heid.egger ; mal~r~~u'!u~;;eler ici substance. Il faut pour cela détacher du Cogito sa conclusion
fisamment remarque, et sur q~01 nous vou n seulement au- substantialiste. La conclusion ergo sum : «je snis une chose
l'atte?tion, ~'~st ~ue ces. d;u:m:~~~:e~~~~c~~ses dans le déve- qui pense» déborde l'évidence du Cogito, son contenu indu-
noncees, prefIgurees, malS 0 . ure si l'on prend gar- bitable. Tout ce que nous découvre, estime Kant, l'expérience
loppement de la Critique de la R~,son p de' la réflexion, celui du Cogito, c'est qn'il n'y a pas d'objet de pensée, de cogitatum,
de à la distinctIOn entre de.ux n;v~~ux sans un sujet pensant, un cogitans : «Le je pense, dit-il, doit
1: cha itre de la
où ene s'installe dès la premlèr~ edJtion, dans les ~aralogiS­ pouvoir accompagner toutes mes représentations »28, Point
Dialectique transcen~~ntale °lu. s~ntelelex:~~e dans la Réfu- de pensée qui ne renvoie à un sujet, point de conscience qni
d 1 ison pure- et ce Ul ou .,
mes e a ~~,.
ne soit la conscience de quelqu'un; mais point non plus de
'. ne addition à l'Analytlque, m-
tation de l,dealzs2';'';'dqti~1 ;;t LUe premier de ces points de vue pensée qui ne se rapporte à un objet, qui ne soit la conscience
d 'tdansla e[on. . de quelque chose. Ce que nous enseigne indubitablement le
tro UI e , l' d 1 phénoménologie transcen- Cogito, c'est cette corrélation des cogitata et de l'ego cogi-
correspond exactement a ce.UI e a . d le sens externe
dentale; le second nous fadIt apercev~r se a~~finit essentieIIe- tans; mais cette corrélation même ne se détermine dans l'oP"
cette «ouverture au mon e », par,o .. position du moi et du monde que par l'activité origiuaire du
ment le Dasein, l'existence d'un sUJet fml. je pense, au regard d'nn ego transcendental, antérieur à tout
. ,m,augu.re le progrès contenu de conscience, et devant lequel le moi empirique,
La critique kantienne du Cog,to . n des deara-
la
existant dans le monde, apparatt comme nn phénomène, au
réflexion idéali~te,. en serv~nt ~~ bi~;e ~l l:é~~~:~s~~vant pDes- même titre que les objets extérieurs. Par cette considération
logismes. De 1éVIdence u g" t .en d'autre transcendentaIe s'accomplit la rédnction eutreprise par le
si les objets de notre pensee ne son ::' ,
carte q~~ées des déterminations de notre espnt, et n ~nt
d doute cartésien, et qni doit s'étendre non seulement aux ob-
que t •etrSe 'en dehors de nous aucune réalité, pas plus qu~ e~
jets extérieurs, mais aux aspects de la vie iutérienre; le moi
peu -e . nsant du mOInS, mOl qw ne se connatt lui-même que dans ses modifications, qui se
iIIusion~1 ~:t ~:~u~~~;~~ ~::~~:~l~~ent exist~
j' : dans le C~- réduisent eIles aussi à des phénomènes", comme ceux du mon-
de extérieur. Ainsi, avec le privilège ontologique accordé par
pense, 1 • ., 'e suis une chose qw pense, que e
gito, il est nnpl~que
queb] tance tandis que les objets pensés, Descartes au moi pensant, regardé comme nne substance, est
sujet pensant es une su S 'apercevons dans l'espace, ne retiré le prétexte Sur lequel s'appuie l'idéalisme problémati-
ment ceux que nous . d t que : le moi et le monde, le moi existant dans le monde et les
et notam " i a araissent à un sn]et, et on
sont que des p~e~ome~:s~:e c~~science est douteuse, voire, objets aperçns dans le monde, n'ont ni plus ni moins de réa-
l'existen?e :nd' e or: ble" Dans le Cogito cartésien, la cer- lité l'un qne l'autre". Dans la discussion des paralogismes,
a-t-on dIt, zn em?n r a ; r contraste avec l'idéalité
titude de mon eXIstence s accuse pa
28. Anal. transe., 1 2, § 16 (B 131).
.
25 Critique de la Rmson pure. Dialectique transcendentale, 29. Esth. transe., § 8 II fin (B 69) ; Anal. transe., 1 2, § 24 (B 152-
153, 156).
(\~41iti~0: ~n~riti!~;)iranscendentale. II 3, 4 (B 214·219). 30. Dial. transe., II 1 (Ira éd.), Critique du 4 e paralogisme (A 370-
21: Ibid., B 214. 371) : CI: J'ai conscience de mes représentations; elles existent donc et
JOSEPH MOREAU RENOUVEAU DE LA METAPHYSIQUE 53
52

Kant veut s'affrauchir de l'idéalisme problématique en accé- que l'expérience interne ne peut s'édifier que sur la base
dant au point de vue de la phénoménologie transcendentale. de l'expérience externe: je ne saurais déterminer la succes-
sion de mes états intérieurs, non plus que celle des change-
Mais ce point de vue ne saurait être définitif. La réduction ments qni arrivent dans le monde, si je ne me représentais des
phénoménologique, conduite jusqn'à son terme, désarme, objets permanents, qui ne peuvent être donnés que dans l'es-
pour ainsi dire, l'idéalisme problématique, en ruinant le para- pace; car il n'est rien de permanent dans le cours de ma vie
logisme de la substantialité du sujet pensant, qui par contraste intérieure32• '
lui servait d'appui. Mais si la présence des objets extérieurs est
Mais si l'expérience externe est à ce point fondamentale
alors aussi innnédiate à notre conscience que celle des modifi-
que sans elle ne saurait se constituer l'expérience interne, il
cations du moi, c'est à condition de suspendre le jugement
n'en reste pas moins que toute expérience est composée de
qui les tient de part et d'autre pour réels, à condition de
représentations, comme le soutient l'idéaliste, de sorte que la
mettre « entre parenthèses» l'existence du moi et du monde,
en s'abstenant de les poser comme étants. Le paradoxe idéa- Réfutation de l'idéalisme, telle qu'elle résulte de cette pre-
mière interprétation du Théorème, ne serait pas convain-
liste est donc par là généralisé plutôt qu'aboli; et c'est pour
cante, s'il n'était précisé en outre que la permanence requise
y échapper, c'est afin de surmonter victorieusement l'idéa-
pour la détermiuation de la succession de mes états iutérieurs
lisme problématique, que Kant va tenter de retourner contre
n'est pas celle d'une simple représentation (celle d'un objet
lui l'argument qni lni sert d'appui. L'idéalisme considère que
représenté), mais celle d'uue chose en dehors de moi". C'est
les objets extérieurs sont des représentations qui appartien-
à éclaircir ce point que s'attache particulièrement Kant dans
nent à un sujet, et qu'ils sont compris dans son état intérieur;
une longue note de la Préface de la 2' édition".
Kant entreprend de démontrer au contraire ce Théorème: que
la conscience de mon existence comme succession déterminée, Qu'y a-t-il donc qni puisse être donné en permanence à
comme suite d'états de conscience rangés dans le temps, est la conscience, si ce n'est un objet permanent de représenta-
impossible sans la permanence d'objets extérieurs dans l'es- tion ? Pour résoudre cette question, il faut considérer que tou-
pace". Au regard de l'idéaliste, l'expérience externe est in- te représentation est la détermination d'uu phénomène, donné
cluse dans l'expérience interne; pour Kant, au contraire, il dans une intuition empirique, et que l'intuition empirique a
résulte des considérations de l'Analytique transcendentale pour condition l'intuition pure, qui est la fOlme a priori de la
réceptivité sensible, autrement dit du sens externe. L'exté-
moi~même avec elles ... Je n'ai pas plus besoin de faire un raisonne- riorité pure et amorphe est présente à notre esprit antérieu-
ment concernant la réalité des objets extérieurs qu'en ce qui regarde rement à toute représentation empirique, voire à la représen-
celle de l'objet de mon sens intime (celle de mes pensées); car les tation géométrique de l'espace, déterminée selon les trois di-
premiers et le dernier [c'est-à-dire les objets extérieurs, ou le monde,
et le moi] ne sont que des représentations, dont la perception immé- mensious ; et c'est cette présence permanente qni rend possi-
diate (la conscience) est en même temps une preuve suffisante de leur ble la détermination des rapports de succession· la cons-
réalité. » Ces explications de Kant évoquent une remarque de LEIBNIZ,
Animadv. in Cartesium, 1 ad art. 7 (G., Phil., 357) : Veritates facti cience même de la succession, la perception du te~ps, n'est
primae tot sunt quot perceptiones immediatae sive conscientiae, ut sic pas une intnition immédiate, mais le résultat d'une sYnthèse
dicam. Non tantum autem mei cogitantis sed et meorum cogitatorum
conscius sum, nec magis verum certurnve est me cogitare, quam illa
vel illa a me cogitari. Cf. notre communication : «Leibniz und das
phanomenologische Denken », Akten des internat. Leibniz-Kongresses,
Hannover, 1966, Bd. I, p. 24-25. «Leibniz et la pensée phénoménolo- 32. Ibid., Remarque 1 (B 276-277).
gique », Archives de Philosophie, 32 (1969), p. 232-234. Sur l'ensem- 33. Ibid., Preuve (B 275) : Also ist die Wahrnehmung dieses
ble de la critique kantienne du Cogito, cf. La conscience de ['être, BeharrIichen nur durch ein Ding ausser mir und nicht durch die
p. 72-73. blosse Vorstellung eines Dinges ausser mir mëglich.
31. Réfutation de l'idéalisme (B 275) : Théorème et Preuve. 34. Critique de la Raison pure, B, p. XL-XLI.
RENOUVEAU DE LA MÉTAPHYSIQUE 55
54 JOSEPH MOREAU
univers~lité indéterminée, au-delà de toute catégorie, autre-
inhérente à la description du mouvement daus l'espace", L'in- ment dIt ,transcendental au seus scolastique du terme", Dans
tuition pure de l'espace, correspondant à la forme a priori du une pare;lle vue, le, moi et le monde ne peuvent être posés
sens externe, est ce donné immédiat dont la présence perma-
co~e etant :n SOl; le~r existence est «mise entre paren~
nente est la condition de toute représentation", mais qui ne theses » ; pa~eIllement 1 ego pur et l'être en général, reqnis
peut être confondue avec la représentation (qui est toujours
comm,e con~I~I~ns, ,de la, repI:é~entation, sont des corrélatifs
détermination d'un objet), ni comprise, comme la représenta-
par o~ se, ~ef1ll1t 1 :nten:,onallte de la connaissance; ils sont
tion, dans l'état intérieur d'un snjet. En cette intuition se tra- des r~qulslts gno~eologtques, ils sont présupposés par la
duit la situation trauscendentale d'une couscience finie, d'un counaIssance ; malS, pas plus que le moi et le monde ils ne
sujet connaissant qui ne peut tirer de lui-même son objet,
sont pos~s ~ans !'~t;;e; leur statut ontologique reste 'fonciè-
qni doit le recevoir d'ailleurs; et l'extériorité, liée à la forme
rement ~dete:nnne , La phénoménologie trauscendentale,
même de la réceptivité, dénote à la conscience finie sa relation
en condll1sant a son terme la réduction critique aggrave donc
le para~oxe de, l'idéalisme problématique; ~t c'est contre
à un réel qni la dépasse: «car, écrit Kant, le sens externe est
déjà en lni-même relation de l'intuition à quelqne chose de
cet~e attitude, ou se tient particulièrement Husserl que réagit
réel hors de moi »37. HeIdegger, '
Ainsi l'idéalisme trauscendental de Kant se délivre du para-
doxe de l'idéalité, dépasse le niveau de la réduction phénomé-
nologique, de l'idéalisme problématique, et assure à la con-

.*
naissance un fondement dans l'être, C'est cette intégration de
la gnoséologie dans l'ontologie qu'a voulu réaliser Heidegger, Il ~ai;, valoi~ qu~ !a relation du snjet à l'objet, par où se
Du point de vue phénoménologique, atteint par Kant dans ~éfmlt 1 mtentlOnaht~ de la connaissance, et en quoi consiste
la discussion des paralogismes, et qni ne paraît pas dépassé, 1 essence de la conSCIence, ne saurait demeurer flottante sans
à première vue, dans l'explication du Théorème, les objets f~nd~ment dans l'~n:e, Sujet et objet sont, en effet, de~ cor-
extérieurs compris dans le monde et les états intérieurs dont relatifs purement Ideaux, sans consistance réelle tant qu'ils
se compose le moi sont les objets respectifs du sens externe restent seulement supposés par l'analyse gnosé~logique en
et du sens interne, des représentations constituées dans la dehors d~ moi et ,en dehors du monde; ils ne peuvent e~trer
conscience d'un sujet par l'activité synthétique du je pense, en exerCIce que SI le sujet pur est récupéré par le m' , -
t t t . l'" Ol eXlS
dn sujet pur ou ego transcendantal, antérieur à la représenta- an " e SI ,et~; en ~énéral se concrétise dans les objets de la
tion, et qni a pour corrélatif l'objet en général, l'être dans son representation , MalS cette double opération ne pent s'effec-
tner tant que n'est pas dissipée l'équivoque du terme Dasein ,
35. Analytique transcendentale, 1 2, 2 e sect., § 24 (B 155). Cf. no-
tre article: «Intuition et appréhension lo, Kant-Studîen, 1980, p. 291- 38. Cf. «De l'ambiguïté transcendentale », p. 8~ 10.
293, bl ~~. HElDEG~ER, ~ein und Zeit, p. 203 : In diesem formalen Ansatz
36. Ibid., II 2, 3e sect., 3 (B 291) : car l'espace se,uI peut recev<?ir 1 e~ ehn aber d~e Gheder der Korrelation ebenso wie diese selbst onto-
une détermination permanente; le temps, au contrmre, et par sUlte OglSC unbe~tllnmt. Cf. La conscience et l'être, p. 110~111.
tout ce qui est dans le sens interne, s'écoule constamment. Cf. «In- 1 40. Cf: Sem und Zeit, p. 60, où est dénoncé le concept idéaliste de
tuition et appréhension », p. 297. ~ co~m~sance «com!lle relation d~ ~ujet à l'objet ». Cette concep-
37. Préface de la 2 e éd. (B XL) : denn der au~se~e Sinn ist sch(:m h~n, dIt 1 a~teur, «re~~le. autant de vente que d'inanité (Leerheit). Car
an sich Beziehung der Anschauung auf etwas Wlrkliches ausser mIr. sujet et objet ne comcldent pas tout à fait avec moi-existant et
Nous avons maintes fois dégagé et mis en relief la portée de c~tte m~mde:!>. Et plus l?ln, p. 61 : «Connaître est un mode d'être du moi
déclaration notamment dans La conscience et l'être, p. 81 et SUIV., j.xlstant en tant. qu ~tre~au-monde », et qui trouve son fondement dans
ainsi que clans plusieurs articles des Kant~Studien : «De l'ambiguïté In.~der~Welt~sem (etre~au-monde), dans la relation ontologique du
transcendantale» (1972, p. 1O~17); «Le temps, la succession et le mOl au monde.
sens interne» (1974, Sonderheft, p. 197-200).
56 JOSEPH MOREAU RENOUVEAU DE LA MF:TAPHYSIQUE 57
qui dans l'énoncé du Théorème désigne également ma propre assimilable à un objet, déterminé dans nne essence; il n'est
existence et celle des objets extérieurs'!. Cette équivoque ré- pas compris dans le monde comme une chose; c'est le mon-
sulte d'une aualyse insuffisaute de la notion d'étant (ov, ens), de, au contraire, qui lui est présent : il est «ouvert» au
appliquée d'abord aux objets de la perception extérieure, monde. Dans cette ouverture, cette relation intentionelIe aux
tenus spontauément pour réels. Cette réalité des objets ex- objets qui apparaissent à notre conscience, consiste l'existence
térieurs, le doute cartésien la met en question; mais cette proprement dite, celle du sujet conscient, le Dasein, en situa-
même réalité, cette façon d'exister, problématique en ce qui tion (Da) dans le monde". La présence du monde ne peut
regarde les objets extérieurs, Descartes l'accorde sans hésita- être éliminée, écartée de notre pensée, même lorsque par
tion au sujet de la pensée: je pense, donc j'existe; je suis une la réduction critique ene est mise en question. Par là se mar-
chose qui pense". Faute d'avoir analysé le sens du sum, que la signification et la portée de l'idéalisme. Je puis mettre
croyant que la notion d'être se comprend d'elle-même, qu'elle en question la réalité de telle perception particulière (c'est
est parfaitement claire et univoque, Descartes attribue au ainsi que s'opère la rectification de notre connaissauce);
sujet pensant, au moi, la réalité ou l'être d'une chose43 , et ce voire, je puis feindre que tous les objets compris dans le
mode d'être présumé dans les choses, et qu'il leur conteste monde ne soient qu'un produit de mon imagination, un son-
d'abord pour l'attribuer au moi, il s'efforcera ensuite labo- ge; mais je ne puis supposer que l'extériorité qui m'envi-
rieusement de le restituer aux choses, de démontrer la réa- ronne et où m'apparaissent tous les objets, que le monde
lité des corps. comme horizon de toutes mes représentations, au-delà des
Berkeley semble avoir le premier remarqué que le mot objets compris en lui, des «étants intramondains », ne soit
être n'a pas le même sens lorsqu'il s'applique aux objets sen- qu'une fiction47• Le monde ainsi entendu, dans sa transcenR
sibles, ou qu'il se dit du sujet pensant; dans le premier cas, dauce à toutes les déterminations objectives, est inséparable
être signifie hre perçu, dans le second percevoir : Esse est de mon existence; il est lié à la structure du Dasein ; il est un
existential48 .
percipi aut percipere". Or, cette équivocité ne parait pas
être prise en considération par Kant dans l'énoncé du Théo-
rème, où le terme Dasein désigne indistinctement l'exis~
tence du sujet conscient et celle des objets extérieurs; c'est interne, leur mode d'être doit être désigné par le terme de Vorkanden-
sein (présence donnée) j mais ni le moi ni le monde ne se réduisent à
ce que lui reproche expressément Heidegger, pour qui la des objets, contenus dans la représentation j ils ne s'identifient pas
désignation de Dasein doit être réservée à l'existence du su- non plus avec le sujet pur et l'objet en général, qui ne sont que des
transcendentaux; ils sont réciproquement l'être en situation le moi
jet, au moi exisfant45• Le sujet conscient n'est· pas, en effet, existant (Dasein), et l'horizon transcendant dans lequel lui ~pparais­
sent les objets, et sont liés l'un à l'autre ontologiquement. Cf. La cons-
cience et l'être, p. 103-104.
41. Cf. l'énoncé du Théorème (B 275) : Das blosse, aber empirisch 4,~' Cf. Sein und Zeit, § 12 (p. 52 et suiv.), sous le titre général :
hestimmte Bewusstsein meines eigenen Daseins beweiset das Dasein « L etre-au-monde comme constitution fondamentale du Dasein ».
der Gegenstande im Raum ausser mir. 47. Ibid., p. 64-65. Ce point capital avait été mis en lumière par
42. DESCARTES, Meditatio II (A.T., VII 25) : Ego sum, ego existo ... Ka~t, Réfutation de l'idéalisme, Remarque 1, note (B 277) : «Il est
Ibid., 28 : Sed quid igitur sum? Res cogitans. clair que rien que pour nous· imaginer (einzubilden) quelque chose
43. Cf. Sein und Zeit, p. 24 : «Ce qu'en ce commencement radical comme extérieur... , il faut que nous ayons déjà un sens externe... Car
Descartes laisse indéterminé, c'est le mode d'être (Seinsart) de la res supposer que nous ne fassions qu'imaginer un sens externe c'est
cogitans, ou plus exactement le sens ontologique du sum (der Seinssinn ~~éan~r I~ faculté. m~me d'intuition, qui attend d'être déterminée par
des sum). Cf. La conscience et l'être, p. 105. ltmagmation» (EmbIldungskraft). Cf. La conscience et l'être p. 84-
44. BERKELEY, Commonplace Book (Works, ed. Campbell Fraser 85; «De l'ambiguïté transcendantale », p. 14-15. '
IV 422) j Principes de la connaissance humaine, l, § 81, 89. Cf. L~ 48. Sein und Zeit, p. 44-45, 64 : Dieses (sc. das In-der-Welt-sein)
conscience et l'être, p. 106-107. aber kennen wir aIs existenziale Bestimmung des Daseins. Cette liai-
45. Cf. Sein und Zeit, p. 203. Tant que le monde et le moi sont son avait été aussi relevée par Kant (Préface de la 2 e éd., B p. LX) :
considérés comme les objets respectifs du sens externe et du sens «La conscience empirique de mon existence n'est déterminable que
58 JOSEPH MOREAU RENOUVEAU DE LA MÉTAPHYSIQUE 59
Il est manifeste qu'une telle conception est totalement op- Mais la transcendance de l'être ne se confond pas avec
posée à celle de la monade leibnizienne, conçue comme une la transcendance du monde. Si, comme le veut Heidegger",
substance individuelle, sans communication avec l'extérieur, il faut entendre par monde, non pas la totalité donnée des
et dont tontes les perceptions se succèdent comme des consé- étants, mais l'horizon où apparaissent tous les étants, au-
quences déduites de sa notion propre : «Les monades n'ont trement dit l'extériorité infinie dans laquelle se déterminent
point de fenêtres, par lesquelles quelque chose y puisse en- tous les objets, il est clair que cette extériorité pure, cette
trer ou sortir »49. Mais cette réclusion de la monade se trou- diversité infinie de parties indifférenciées, ne saurait subsister
vait déjà rompue par Kant au terme de sa Réfutation de l'idéa- en soi"; elle n'est qu'une apparitio (Erscheinung) an regard
lisme, dans l'élucidation finale du Théorème, où il montre d'un sujet, un phénomène sous-jacent à tous les autres, anté-
dans l'intuition pure de l'extériorité, correspondant à la for- rieur à toute détermination intelligible comme à toute qualifi-
me a priori du sens externe, une relation de la conscience cation sensible, et qui est aperçu dans une intuition a priori,
finie à un réel qui la dépasse. Cette réalité n'est pas l'es- où se reflète la structure transcendantale de la conscience
pace lui-même, qui n'est pas absolument et en soi, mais seu- finie. La transcendance de l'espace infini, ou plus exactement
lement pour nous, sans être cependant en nous. Ainsi l'exté- de l'extériorité indéfinie, à laquelle se ramène la transcen-
riorité, qui est le phénomène fondamental, symbolise à la dance du monde, ne peut être qu'une transcendance phéno-
conscience finie la transcendance de l'être50 • Nous ne pou- ménologique, à travers laquelle s'exprime la situation onto-
vons rien connaitre au-delà des phénomènes, des objets de logique du sujet conscient, du moi existant. C'est parce que
l'expérience, mais notre connaissance serait sans objet s'il notre existence n'équivaut pas à l'être absolu, c'est parce
n'y avait rien au-delà de son objet, en dehors de la repré- que notre conscience est en défaut eu égard à la connais-
sentation ; l'intentionalité de la connaissance suppose la trans- sance parfaite, c'est parce que notre capacité de connaitre
cendance de l'être". ne trouve pas elle-même son objet", c'est pour cela que
s'ouvre à notre esprit un horizon d'extériorité qui reflète à
par relation à quelque chose qui en dehors de moi est lié à mon exis- notre conscience son propre déficit d'être.
tence (durch Beziehung auf etwas, was mit meiner Existenz verbunden C'est donc la situation ontologique du Vasein, sa distance
ausser mir ist). Cette conscience de mon existence dans le temps est
celle d'une référence à quelque chose en dehors de moi; elle est reliée à l'être absolu, qui se traduit dans son ouverture au monde;
à elle et s'y identifie (Dieses Bewusstsein meines Daseins in der Zeit ist mais, prenons-y garde, il ne serait pas ouvert au monde, le
aiso nùt dem Bewllsstsein eines VerhüItnisses zu etwas ausser mir monde ne serait pas pour lui un horizon transparent, mais
identisch verbunden) ; c'est donc l'expérience et non la fiction, le sens
et non l'imagination, qui rattache inséparablement le monde extérieur une clôture opaque, s'il était inclus dans le monde comme
à mon sens interne; car le sens externe .... » (suite ci-dessus, n. 37. une chose, s'il n'était d'abord ouvert à l'être. Jeté dans le
Cf. «De l'ambiguïté transcendantale », p. 17, n. 45.
49. LEIBNIZ, Monadologie, § 7.
50. Cf. La conscience et l'être, p. 82-87; «De l'ambiguïté trans- 52. Cf. Sein und Zeit, p. 64-65, et La conscience et r~tre, p. 120-
cendantale », p. 15-17; «Le temps, la succession et le sens interne », 121.
p. 197·200.
51. Cf. «De l'ambiguïté transcendantale », p. 10 : De même que 53. Ce qui est divisible à l'infini ne saurait subsister en soi; l'exté-
riorité réciproque des parties de l'espace dénote qu'elles ne peuvent
la connaissance requiert l'acte transcendantal d'un sujet qui n'est ja- coexister que dans l'unité d'un esprit. Cette idéalité de l'espace, cor-
mais donné dans la représentation, puisqu'il en est le principe et la
respondant à la phénoménalité de l'étendue, avait été mise en lumière
source, elle se réfère nécessairement à un objet qui est. Celui-ci n'est par Leibniz. Cf. notre article: «L'espace et les vérités éternelles chez
jamais donné qu'en relation avec un sujet, à qui il apparaît, en tant Leibniz », Archives de Philosophie, 29 (1966), p. 496-497, 501-502.
que phénomène; mais il est irréductible à la représentation, à un état Kant dira dans le même sens que les parties de l'espace ne peuvent
intérieur du sujet; il doit avoir son fondement en dehors du sujet à être antérieures à l'unité qui les comprend toutes, comme si, l'espace
qui il apparaît; «autrement, on aboutirait à cette inepte proposition infini résultait de leur composition; elles ne peuvent au contraire être
qu'il y a apparition (Erscheinung) sans quelque chose qui apparaisse» pensées qu'en lui (Esth. transe., § 2, 3 (B 39).
(Préface de la 2 e éd., B XXVI-XXVII.) 54. Cf. ci-dessus, n. 17.
60 JOSEPH MOREAU RENOUVEAU DE LA MJ';TAPHYSIQUE 61
monde, séparé de l'être, il se réfère cependant à lui ; il n'existe analyses qui, à travers la critique kantienne, conduisent aux
que dans sa clarté et reçoit de lui la lmuière faute de laquelle élucidations de la phénoménologie et de l'ontologie contem-
il serait incapable de déterminer des objets, de découvrir des poraines60•
étants, de les tirer de l'obscurité, de les amener dans la clarté
de l'être, où ils sont vus dans leur vérité". C'est dans l'horizon
du monde, dans sa transcendance phénoménologique, qne
se déterminent les objets; mais cette détermination objective,
la vérité de la connaissance ou vérité antique, n'est acces-.
sible qu'à un sujet en référence à l'être absolu, relié à la ln-
mière en sa source, à la vérité ontologique56• Sans la trans-
cendance ontologique, celle de l'être et de sa lumière, il n'y
aurait pas de vérité, d'objectivité de la connaissance, ni mê-
me d'horizon phénoménologique, de transcendance du monde.
La réduction phénoménologique, qui convertit en phénomè-
nes les choses sensibles, les objets perçus dans le monde, les
préparant ainsi, selon les vues de l'idéalisme transcendantal,
aux déterminations objectives de l'entendement", cette ré-
duction serait impossible sans la présence à notre esprit de
l'absolu transcendant, sans l'idée de la vérité ou de l'être.
Cette exigence ontologiqne, en sa transcendance absolue,
se mauifes!e clairement chez Descartes : si nous pouvons
conclure valablement de cogito à Deus est, c'est que sans
référence à l'être absolu, présent en nous par son idée, il
nous serait impossible de mettre en question la vérité de nos
jugements spontanés, la réalité des objets extérieurs". La
réduction phénoménologique, la suspension du jugement,
qui nous conduit à l'évidence du cogito, à l'expérience d'être-
au-monde, serait impossible sans l'ouverture du moi existant
à l'être, sans l'illumination transcendante par où il est capable
de mettre en questiou toutes choses et de s'interroger sur son
existence même59•
La réflexion cartésienne est donc toujours à l'origine des

55. Cf. Sein und Zeit, p. 218-219; La conscience et l'être, p. 136


et suiv.
56. Sein und Zeit, p. 221; La conscience et l'être, p. 141-143. 60. Sur ce thème fondamental, développé dans La conscience et
57. Cf. ci-dessus, n. 5. l'être et dans L'horizon des esprits, on pourra se reporter à deux ex-
58. Cf. notre ouvrage: L'horizon des esprits. Conclusion: Les ré- posés simplifiés: «Phénoménologie et idéalisme », Giornale di Meta-
quisits du Cogito, et principalement, p. 132. jisica, 1960, p. 557-575; «Extériorité et transcendance », Teoresi,
59. Cf. Sein und Zeit, p. 12; La conscience et l'être, p. 116-117. 1973, p. 3-24.
ALEXIS PHILONENKO

KANT ET LA PHILOSOPHIE BIOLOGIQUE

TI n'est pas dans notre intention d'exposer sous tous ses


aspects la philosophie biologique de Kant. C'est un ouvrage
entier qui serait nécessaire pour exposer dans un ensemble
cohérent les divers ouvrages ou articles consacrés par Kant
à ce sujet. Nous voudrions seulement esquisser quelques
idées en partant essentiellement de la seconde partie de la
Critique de la faculté de juger qui constitue à la fois le degré
le plus bas et le plus sûr aussi de la philosophie biologique.
Nous nous abstiendrons de revenir sur la question de savoir
si la Critique de la faculté de juger constitue un tout" de
même nous ne chercherons pas à reprendre la vieille querelle,
si bien illustrée avec tout son parti-pris par V. Basch, qui
consiste à se demander si la deuxième partie de la Critique de
la faculté de juger ne se trouvait pas déjà dans la théorie des
Idées régulatrices de la raison dans la Critique de la Raison
pure. Bien plus! nous nous limiterons en pratique à l'analy-
tique téléologique, c'est-à-dire du § 61 au § 68.

1. Personne ne sera étonné si l'on affirme que Kant ne pen-


se pas, pour ainsi dire, à vide, mais réfléchit sur des œuvres
scientifiques concrètes dont il formule les présuppositions
philosophiques. Entre autres auteurs il s'est particulièrement
inspiré de Linné et de Blumenbach. Le premier ayant réussi
à élaborer un classement clair et maniable des espèces végé-
tales, résumant en quelques groupes l'inuneuse variété des
espèces reconnues par ses prédécesseurs - par exemple dans

1. A. PHILONENKO, L'œuvre de Kant, t. II.


ALEXIS PHILONENKO LA PHILOSOPHIE BIOLOGIQUE 65
64
son Historia plantarum (1686) John Raya recensé plus de de l'Analytique téléologique. Le premier intéresse le concept
18 000 espèces - montrait qne la biologie pouvait être .sYs; de finalité, le second la notion du vivant. On a dit et répété
tématique. La dixième édition du Systema naturae de Lmne que Kant écartait toute finalité externe et Bergson fut parti-
demeure un fondement toujours appréciable. Dans l'œuvre culièrement incisif3. Citons Kuno Fischer, Reininger, Kühne-
de Linné Kant n'a pas seulement trouvé une systématique maun, Daval, Vleeschauver, B. Rousset. .. , etc. qui tous rejet-
binaire, mais encore un usage sûr de la logique géné~ale. tent la finalité externe. Ils ont raison s'il s'agit seulement de la
Kant n'a jamais condamné sans la moindre nuance la logtqu,e finalité dogmatique, de la finalité-solution comme nous ai-
générale; il en a vu l'application juste ~a~~ l'œuvr~ de Lmne. mons à le dire. Il est bien évident que Kant ne croit pas du
Il fut conduit dès lors à fonder la posslblhté de 1 apphcatlOn tout avec Chr. Wolff que le jour est assez long pour que nous
de la logique générale et cela dès la première partie d~ la puissions ne pas trop dépenser de chandelles. Mais s'il s'agit
Critique de la faculté de juger, l'esthétique, qui nouS enseigne de la finalité externe problématique, ou encore de la finalité-
que le jugement réfléchissan~ ~e ~eut s'expl~que~ dans .son adaptation la position de ces interprètes éminents est moins
activité de comparaison, de distinctIOn que grace a !a I?gl~ue solide. La finalité n'est pas toujours à envisager sous le mo-
formelle. Mais enfin ce que Kant a retenu de Lmne n est dèle de la solution et c'est ainsi qu'i! faut comprendre le § 63
rien de moins que la notion de système. Cette notion qni chez au demeurant bourré d'allusions à la pensée dogtnatique de
Linné vaut surtout par sa valeur formelle Kant l'a complétée, Moïse Mendelssohn. En revanche dès qu'il y a problème, la
sans doute grâce à Blumenbach, beaucoup plus que de Haller. créature doit le résoudre et soit se perfectionner ce faisant
L'œuvre de Blumenbach est mal connue et son Handbuch der - d'où vient le fil directeur de la philosophie de l'histoire de
Naturgeschichte n'a pas connu la même influence que ~i~né. Kant - soit rétablir un équilibre adapté aux exigences du
Toutefois cette œuvre, quand même traduite en fr~~ms y p milieu. La fin du § 64 est à ce sujet très claire. Kant y distin-
a plus de cent ans, n'est pas ~ans. mérites. J~ dirai meme gue l'anomalie et l'anormalité. L'anomalie correspond à l'ef-
qu'elle en a de grands et Kant 1 a. ?lCn vu en cltan~ Blu:nen- fort d'un être affligé par un trouble pour établir un équilibre
bach avec éloges au § 81 de la Cntlque de la faculte de luger. vital. Kant parle de l'auto-défense (Selbsthllfe) et évoque
A regarder les choses de haut il ne serait pas inexac~ de le phénomène si précieux pour la biologie de la compensa-
dire que Linné représente pour ~ant .le mon;ent a;'~tomlque tion. Cette opération n'a rien à voir avec la finalité dogma-
et Blumenbach le moment physIOlogique. D un cote la sys- tique. Elle dévoile un problème que l'être organisé doit ré-
tématique, de l'autre le système de l'orgauisation. Lim,:é soudre. L'anormalité, elle, répond à l'incapacité à résoudre
s'est, pour ainsi dire, poursuivi dans Blumenbach. Il ne fmt le problème. et rejoint ce que nous nommerons le déficit pur
gtlère de doute que d'autres chercheurs ~ue Blumenbach - physiologique. Si nous considérons mieux le phénomène de
qui s'est si souvent corrigé - ont pu Influencer Kant. On compensation, il faudra parler de finalité interne-externe.
peut se contenter de consulter le second tome de l'œuvre Interne parce que son mouvement s'accomplit dans l'indi-
magistrale d'Adickes Kant ais Naturforscher. C'est sans vidualité, externe parce que la compensation suppose qu'entre
doute sur l'édition de 1782 du livre de Blumenbach que Kant les parties distinctes d'un être orgauisé une relation réciproque
s'est appuyé, le plus fermement toutefois. de fin à moyen s'établit. L'exemple de l'arbre donné au § 64
renforce considérablement cette lecture. Sous le triple nexus
qui désigue ses fonctions (génération, assimilation, conserva-
2. Les malentendus ont cependant foisonné dans la lecture
tion) l'arbre nous met en présence d'une relation dynamique,

2. E. ADICKES, Kant ais Naturforscher, Bd. Il, §§ 332-338. surtout


p. 481.
3. H. BERGSON. L'évolution créatrice, p. 41.
66 ALEXIS PHILONENKO LA PHILOSOPHIE BIOLOGIQUE 67

d'autant plus intéressante que si l'arbre est une totalité, ce la faculté de juger expliquée par l'antipathie de l'homme pour
n'est pas une nnité. Cette totalité évoque la notion de commu- l'homme : dans les textes tardifs il a attribué à la nature ou
nauté humaine où chacun sert à chacun sans cesser de de- provideuce le soin de créer cette discorde afin que les hom-
meurer un individu : «C'est pourquoi, écrit Kant, ou peut mes peuplent toute la terre (AK, VIII, 364).
considérer chaque rameau, chaque feuille d'un même arbre
comme simplement greffé ou écussonné sur celui-ci, c'est-à-
3. C'est pourtant sans doute au sujet de la notion de vi-
dire comme un arbre existant pour lui-même qui s'attache
vant que Kant a été le plus mal compris. On a assimilé le
simplement à un autre arbre et se nourrit comme un parasi- vivant et l'organisme. Or si tout ce qui est vrai de l'orgauis-
te. » Cette feuille que je vois sur cet arbre est elle-même un ar-
me l'est aussi du vivant, la réciproque n'est pas vraie. Ce
bre, qui entretient des relations internes-externes avec les au-
n'est nullement un hasard si dans le § 64 Kant choisit un
tres feuilles ou plus justement avec les autres arbres. Les feuil-
arbre pour exemple. L'arbre ne connaît pas les strnctures
les sont pour le tronc, comme le tronc qui véhicule la sève est
de l'articulation. C'est, en somme, une république définie
pour les feuilles, étant bien entendu que chaque moment
par nne limite bien précise : la greffe. A la fin du § 64 Kant
constitue une relation à soi, qui permet de l'ériger en tota- insiste sur la greffe : «L'œil d'une feuille d'arbre, enté sur
lité autonome pénétrant dans un rapport de relation externe le rameau d'un autre arbre, donne naissance sur un pied
réciproque avec les autres moments auxquels il lui faut s'adap-
étranger à une plante de sa propre espèce, de même la greffe
ter et inversement. Si l'on ne peut pas dire que l'herbe est sur un autre arbre. » En revanche le vivant soumis au régime
pour le mouton et celni-ci pour le lion (finalité-solution ex-
de l'articulation résiste à une très grande quantité de greffes.
terne), en revanche il faut dire que sous l'angle du problème
Par exemple on ne peut pas greffer ma main sur un autre
cette feuille-arbre est pour les racines. L'organisme, lieu d'une
individu et réciproquement. Cette notion de bon sens a tota-
interaction externe-interne est dans son perpétuel mouvement
lement échappé aux lecteurs de Kant qui du même coup se
le problème que ne cesse de résoudre la totalité. De ce point
sont interdit de comprendre l'esthétique de la troisième Cri-
de vue la finalité externe comme adaptation et problème
tant il est vrai que le goilt définit la fine pointe de
doit être réintégrée dans les catégories kantiennes. On peut greffer une feuille sur un arbre. On
Il n'est pas même silr que la finalité dogmatique soit en- peut pas greffer un goilt sur un autre. Le vrai problème
tièrement écartée. Dans la critique qu'en présente le § 63, il l'esthéti~ue est l'ipséité et repose sur un tbème métaphy-

n'est pas dit que la finalité relative ou encore externe soit claSSIque : lndividuum est ineffabUe'. Au demeurant
absolument à rejeter. Kant écrit, en effet, ceci: «la finalité déclarations de Kant étaient formelles. Dans le § 65 où il
relative, bien qu'elle donne hypothétiquement des indications a,tralité de l'organisation dans la rigueur transcendantale il
sur les fins naturelles, n'autorise cependant aucun jugemeut >ëhl~rclie à la défiuir et dit que ce serait trop peu de la n;m-
téléologique absolu ». S'il repousse uu tel jugement, Kant ne un analogon de l'art mais qu'on s'en approche davantage
refuse pas les indications hypothétiques. Il y a quaud la nomme un analogon de la vie» Qu'est-ce que
un système téléologique du monde et en outre comme ? La réponse est claire d'après ce que nous venons
kantien le sait les exemples rejetés par Kant dans la rritia'l1e d1('xpOSI0f : c'est une totalité qui ressemble fort à une répu-
de la faculté de juger seront hypothétiquement certes, On observera que Kant dans la note du § 65 se féli-
positivement repris dans le Prajet de paix perpétuel/e, qu'un grand pays, la France, se transformant en Etat ait
meilleur étant la guerre'; la guerre était dans la Critique
Ca,ssirer a bien vu le thème, mais il ne l'a pas suffisamment
4. A. PHILONENKO, Essais sur la philosophie de la guerre.
68 ALEXIS PHILONENKO LA PHILOSOPHIE BIOLOGIQUE 69

si souvent employé le terme d'organisation. Quant à la fonc- mençons par Linné en prenant les choses d'assez ~aut. II
tion de la greffe, elle se trouvait dès lors déterminée : elle faut pour cela se reporter à quelques ~ext~s et le prenne~ ~era
fonctionne chez Kant (et Blumenbach) comme index de l'orga- La déduction transcendantale des categories dans la Crztlque
nisation et sa détermination comme modèle est républicaine, de la Raison pure. Qu'avait donc prouvé Kant? Une toute
tandis qu'en revanche l'individualité ne peut que se révéler petite chose mais sans laquelle rien n:eût ~té possible. ,Cet~e
despotique. petite chose c'était s~plement la ,posslb~~e pour la categone
de détermmer l'mtUltion ou SI 1 on prefere, le monde sen-
Si Kant a choisi l'arbre comme exemple, on se doute bien sible. Le problème de la synthèse était résolu en droit. A cha-
que ce ne fut pas sans raisons. D'une part c'était l'exemple que effet sa cause. Encore fallait-il que techuiquen;'ent la
le plus clair. D'autre part il suivait une conception de la hié- synthèse pût s'élaborer et l'honnêteté co~ande de dire que
rarchie dans la nature (la pierre, l'organisme, le vivant, la cela n'était pas évident. Kant a ressenti un doute profond
personne morale) qni se retrouve chez Fichte et même chez en songeant à l'Historia plantarum de John Ray. 18000. es-
Hegel. Son souci n'était pas d'inventer, mais d'ordonner. - pèces cela fait beaucoup:. «C'~s~, écrit-il, qu'il est pOSSIble
Ce point assuré il est clair que toute l'Analytique téléologique qu'en dépit de toute l'uniformIte des choses ?e la natur.e
devait être conduite par le concept d'organisation; que par d'après des lois universelles, sans le~quelles il n,". saurrut
exemple l'homme fût considéré en ce cadre, non pas comme même y avoir la forme d'une connaIs~ance ~~plnque en
un individu, mais com~e une organisation républicaine: si générale, la différence spécifique des 100S~mplflques d~ la
l'on me passe l'expreSSIOn. Un texte du § 67 peut parailre nature, ainsi que de tous leurs effets, pourrail cependant etre
inexplicable si l'on ne retient pas cette orientation métho- si grande qu'il serait impossible pou~ .notre entend~ment
dique. Kant dit quelques mots du taenia et il pour~uit : « ... et de découvrir un ordre saisissable, de dIVIser ses prodUIts en
alors je demanderai si les rêves ... ne pourraient être une
genres et en espèces, afin d'appliquer le~ ~r!~cipes ~e la défi-
disposition finale de la nature». Les commentateurs s'achar- nition et de l'intelligence de l'un à la defmltion et a la com-
nent sur la fonction que Kant prête aux rêves : maintenir préhension de l'autre et de faire d'une matière. aïn.;i confu~e
l'activité vitale pendant le sommeil. Ils n'ont pas tout à fait pour nous (à proprement parler se~l,ement mfmlm~nt dI-
tort; mais si l'on compare ce que Kant dit du taenia et du verse et ne convenant pas à la capacile de notre espnt) une
rêve, un trouble s'empare de l'esprit le plus cartésien. Car expérience cohérente» (AK. V, 185). Dans la pre~ère In-
formellement l'action du taenia qui est un parasite est la mê- troduction il avait déjà écrit ce même texte avec som (AK.
me que celle du rêve : maintenir l'activité vitale. La conclu- XX 209). Dans ses Werke, édition Cassirer (V, p. 196) il
sion obligatoire qui s'impose est que le rêve n'est pas moins avait de manière très visible posé la question suivante : «Ti-
uu parasite que le taenia. Et cela se comprend : daus la mée aurait-il jamais pu concevoir ridée d'un système, s'il
conception méthodique de l'organisation, que je dirai répu- avait cru toute comparaison rationnelle impossible?» Et il
blicaine, et qui commande toute l'analyse, l'homme doit être cite Linné qlÙ a conçu un système de la nature (AK. XX,
regardé au niveau de l'organisatiou. Fichte l'a bieu vu dé- 215).
clarant que l'homme est uue plante parfaite et aussi quelque
chose de plus. A ce stade de la Critique de la faculté de juger, Le grand mérite de Linné est d' avoir compris qu'il n'y
dans l'Aualytique téléologique, l'homme est regardé comme a pas autant de problèmes que d'existants. Si nous nous en
une orgauisatiou. Le vivant est une toute autre affaire.
tenons à la Critique de la Raison pure, il est difficile de ré-
soudre le problème. Après tout les catégories peuvent valoir
4. Ces malentendus écartés il s'agit de savoir ce que Lin- pour nne infinité d'existants et par exemple chaque plante
né et Blumeubach ont apporté à la réflexiou kantienne. Com- peut être à elle-même sa propre espèce sans que la règle de
70 ALEXIS PHILONENKO LA PHILOSOPHIE BIOLOGIQUE 71.

causalité en souffre le moins du monde. Mais ce sera un dé- relIes, présentées par les êtres orgauisés, nous a autorisé à
sordre immense dans lequel notre entendement ne trouvera concevoir l'Idée d'un grand système des fins de la nature. »
jamais l'issue. L'œuvre de Linné est immense, en ce sens Linné a bien donné un système, au sens grec : qui se tient
tr~s p~·~c~s qu'il d~co,:vre une systématique permettant l'ap- ensemble; c'était là encore une fois ce dont la simple syn-
phcabdlte des categones dans leur riguem et leur fécondité thèse ne pouvait nous fournir la notion.
à l'expérience. Il apporte une «classification ». Le devoir
de ~ant est de la fonder en assmant le champ de la logique
génerale, compte tenu des impératifs de la logique trans- 5. La physiologie a plus particulièrement retenu l'attention
cendantale. En somme Linné était un esprit ordonné et sévère de Kant. Si la catégorie est le préjugé, comme le disait L.
q~i sut donner quelque cohérence à la nature organisée. On Brunschvicg, c'est un préjugé pire encore de croire que le
Salt avec quelle obséquiosité Rousseau lui prodigua les plus développement de l'Analytique téléologique est libérée de ce
beaux éloges. Mais Kant a compris avec nne remarquable préjugé. En fait après les deux premiers §§ introductifs (61-
profoudeur que sans Linné il n'amait pas pu passer de la pro- 62), Kant s'applique à la construction de la catégorie de fina-
blémati~ue de la synthèse à celle du système. Il pouvait pas- lité. Le § 63 s'applique à la finalité externe dogmatique, dont
ser enfm de la théorie de l'analogie universelle possible en le § 64 nous laisse entrevoir la transformation. Le § 65 traite
général à la dialectique de l'analogie particulière. J'ose de la finalité interne et enfin à partir du § 66 Kant vise la
affinner que sans l'œuvre de Linné ce passage se fut révélé synthèse de ces deux moments de la catégorie dans la pers-
impossible. Dire que Kant a approuvé toutes les théories pective du système. Le titre du § 67 est révélateur : «Du
de Linné serait bien excessif. Mais il est constant que l'ordre principe du jugement téléologique sur la nature en général
qu'il découvrit en cette œuvre lui fut d'un secours immense. comme système des fins.» Ce troisième moment de la caté-
Il faut dire ce qui est et rien de plus. Kant a pu songer à une gorie de la finalité est un dépassement des données offertes
histoire des espèces, mais dans l'ensemble il demeurait attaché par les précédentes analyses qui s'en tiennent à l'être or-
à lem permanence. C'est l'ordre, la systématique qui a im- gauisé.
primé en lui la plus fenne pensée. Et voilà pomquoi Linné Le § 65 est d'une difficulté redoutable. On peut le décom-
est, pour nous, l'anatomiste de Kant si l'on ose dire. Il faut poser en trois moments. Premièrement l'énoncé des réquisits
faire attention au terme d'anatomie; ce mot ne désigne pas de la définition de l'organisme, et qui seront mutatis mutandis
seulement l'art de disséquer les différentes parties du corps, valables pom l'être vivant. Deuxièmement un exemple d'une
mais plus essentiellement la science qui a pom objet les extrême importance. Troisièmement l'esquisse d'une brève
corps considérés à l'état de repos et pour but la connaissance dialectique visant d'une part à limiter les tentatives de la
de leur constitution. C'est l'œuvre méthodique et systéma- raison dogmatique et d'autre part en conséquence à déter-
miner les êtres organisés comme ne pouvant être pensés
tique que Linné léguait à la philosophie transcendantale.
comme possibles qu'au seul titre de fin de la natme.
C'est sans aucun doute en hommage à Linné que sont rédigées
ces phrases conclusives du § 67 : «De même la beauté de Le développement des réquisits est simplement la reprise
la natme, c'est-à-dire son accord avec le libre jeu de nos scientifique des considérations fournies sm l'orgauisme au §
64. Kant insiste particulièrement sm le fait que les parties
facultés de connaltre dans l'appréhension et le jugement de
ne peuvent exister et fonctionner que dans l'uuité avec un
sa manifestation, peut de cette façon être considérée comme
tout qui les englobe. Ce tout est en fait une Idée' qui déter-
finalité objective de la nature en sa totalité, en tant que sys-
tème dont l'homme est un membre; cela est possible lorsque
le jugement téléologique de la natme d'après les fins natu- 6. Réalisez cette pensée, vous obtiendrez la philosophie de Schopen-
hauer.
72 ALEXIS PHILONENKO LA PHILOSOPHIE BIOLOGIQUE 73

mine la forme et la liaison de toutes les parties. Et Kant pré- rigueur Kaut consentirait à voir daus la montre uue image de
cise. qu.e cette Idée n'est pas une idée de l'art, car alors l'or- la médecine, il ne peut que s'opposer à la métaphysique qu'on
gamsatlOll auraIt sa cause extérieure à elle-même et nous en- en veut déduire. Si l'homme est le sommet de la création ce
traînerait dans la simple dîmension de la causalité, mais seu- n'est certainement pas parce qu'il est une horloge immense,
~ement une. Idé~, p~incipe de connaissance pour celui qui mais parce qu'il a une destination éthique fondamentale.
Juge, ce qUI r~Vlen~ a ra~ass~r en une phras~ la philosophie On pourrait «à la rigueur » conforter nos aspirations mo-
du «comn:e SI» necessaue des lors qu'on depasse le niveau rales et nos devoirs en nous représentant tout ce que notre
du pur eXistant. Dans l'enchevêtrement savant des réquisits physiologie a d'intéressant, mais opérer en sens inverse serait
Kant s'applique à définir l'organisme comme une œuvre sans de la perversion métaphysique.
projet, un Nachbild sans Vorbild, ce qni le sépare radicale-
ment de l'œuvre d'art. C'est donc - conformément à la dé-
finition de la finalité dynamique externe-interne - nn être 6. Dans son exemple, que dis-je dans l'exemple classique,
organisé et s'organisant lui-même. Kant commence par nous expliquer que dans une montre
un rouage n'est pas la cause efficiente d'un autre rouage. En
Cette définition conclnsive après l'analyse des réquisits d'autres termes il n'y a pas de processus de corrélation im-
nous offre l'accès à l'exemple. Il est bien entendu question manent. La corrélation est le fait d'un moment extérieur à
de physiologie et le § 19 du Handbuch der Naturgeschichte la montre, c'est-à-dire l'artisan. Ici le Vorbild commande le
s,era sa~s cesse à l'arrière-plan. Dans cet exemple Kant oppose Nachbild. Blumenbach avait parfaitement aperçu ce point
1 orgamsme et la montre. La montre n'est pas un objet com- et en somme il ne fallait qu'avoir du bon sens pour observer
me les autres .. Tout d'abord c'est l'automate le plus vulgaire, la corrélation que nous présente un arbre dont les feuilles
en ce sens qu'il est le plus facile à voir. Quand Descartes veut protègent le tronc qui les nourrit. Le premier moment - qui
expliquer la mort, il dit en somme que la montre pour une cau- sépare la montre et l'organisme - est la corrélation. La suite
se ou pour une autre s'est arrêtée (AT. XI, 330-331). La Met- du développement de Kant, toujours inspiré par Blumenbach,
trie qni n'aime pas toujours Descartes et lui reproche comme insiste sur le phénomène de la subordination ou génération.
à, Malebranche, son spiritualisme, déclare que le' «corps Dans une montre un rouage «ne peut en prodnire un autre
n e~t .q.u'u~e horloge» (Œuvres philosophiques, IIII, p. 340). et encore moins une montre d'autres montres». Le troisième
Il edlfle la-dessus, il se trouve assez fort pour élaborer une moment est clair et correspond à ce que Blumenbach appe-
médecine et une métaphysique : «Cette oscillation naturelle lait la reproduction extraordinaire. On ne pent pas attendre
ou propre à notre machine, écrit La Mettrie, et dont est doué~ d'une montre qu'elle se répare elle-même; c'est pourtant,
chaque fibre, et pour ainsi dire, chaque élément fibreux l'expérience la plus commune le pronve, ce que fait l'orga-
semblable à celle d'une pendule, ne peut toujours s'exercer: nisme capable par exemple de cicatriser ou de régénérer.
Il faut la renouveler, à mesure qu'elle se perd; lni donner des On dira que tout ceci est bien médiocre. Ce n'est pàs si sûr.
forces quand ene langnit, lorsqu'elle est opprimée par un D'une part Kant retient les trois grandes catégories que défi-
excès de force et de vigueur. C'est en cela seul que la vraie nira après lui le Dr W. Roux dans un texte assez célèbre.
m~decine consiste» (ibid.). Mais la métaphysique n'est pas Mais d'autre part lorsqu'on lit le texte avec attention on
lOin : «Je ne me trompe point; le corps humain est une s'aperçoit d'une chose bien curieuse que nous hésitons à
horloge, mais immense ... » (ibid., p. 345). De là à conclure croire totalement inspirée par Blumenbach. Kant dit en som-
que l'homme est. la fin d~ monde et de la nature parce qu'il me : C'est parce que l'organisme est capable de corrélation
est une horlo?e bien plus 1lllmense qu'un canard, il n'y a qu'un qu'il est capable de subordination et c'est parce qu'il est ca-
pas à franchlf et La Mettrie le franchit aisément. Or si à la pable de subordination qu'il est capable de reproduction.
LA PHILOSOPHIE BIOLOGIQUE 75
74 ALEXIS PHILONENKO

Dans ma traduction de la Critique de la faculté de juger (p. force formatrice et qu'i1 substitue au devenir historique et
193) j'ai indiqué le mot allemand «daher» pour faire en- politique le calme géométrique et inerte de la mécanique.
tendre cette conjugaison. Ce que je ne pouvais indiquer c'est Sans doute est-ce un progrès par rapport à l'idée magique en
que la conjugaison pouvait s'opérer dan le sens iuverse de sa forme causale de l'ancienne compréhension. Kant dans
celui qui vient d'être exposé. On peut partir de la reproduc- nne première dimension transforme l'image que la philoso-
tion ou encore régulation pour retrouver les autres moments. phie biologique peut fournir à la vie humaine polit~qu~ : «En
Dans le fait Kant me semble être allé plus loin que Blumen- revanche. écrit-il eu note dans le § 65, on peut eclatrer par
bach. Cette diversité apparente de fonctions est dans le fait une analogie avec les fins naturelles immédiates indiquées
une triplicité ou si l'on préfère une trinité indivisible. une certaiue liaison, qui toutefois se rencontre plutôt dans
une Idée que dans la réalité. C'est ainsi qu'à l'occasion de la
Deux points supposent une explication. Le premier est transformation récemment entreprise d'un grand peuple en
simple. mais nous entraînera dans la fiction. Nous pouvons un Etat, on s'est très souvent servi du terme organisation
supposer un automate parfait capable de corrélation. de su- d'une manière très appropriée pour l'institution des magistra-
bordination et de régulatiou. Il en existe. paraît-il dans de tures .... etc., et même du corps entier de l'Etat. En effet dans
lointaines usines. Mais nous pouvons dire, avec sûreté, que ces un tel tout chaque membre ne doit pas seulement être moyen,
fonctions sont juxtaposées dans l'automate. Une machine mais aussi en même temps fin, et tandis qu'il contribue à la
peut, maintenant, en engendrer d'autres, mais ce n'est pas possibilité du tout. il doit à son tour, en ce qni concerne sa
cela qui lui permettra d'être en état d'auto-corrélation. L'au- place et sa fonction, être déterminé par l'Idée du tout.»
tomate u'est qu'une somme de juxtapositions de fonctions Vaughan a eu bien tort de saluer en Fichte la naissance d'une
dont la raison. le Real-Grund. est transcendante. Puisque compréhension organique de I·Etat'. Elle se trouvait déjà
Kant reconnaît la valeur régulative du mécanisme dans la chez Kant. Il suffit d'observer que dans le texte du § 65 Kant
téléologie'. pour autant qu'i1 est déterminé par l'homme (l'ar- parle de force formatrice - bildende Kraft - et que dans la
tiste. le mécanicien. etc.). on peut bieu dire que les juxtapo- note il parle de transformation - Umbildung. La grande
sitions sont fondées par une finalité intentionnelle technique. nouveauté fichtéenne est dans la re-définition de la propriété"
- La seconde remarque est plus décisive. Si Kant men- et dans la réflexion sur le travail. Comme nous le disions
tionne en dernier lieu la régulation. c'est sans doute - et au § 2 l'être organisé - l'arbre décrit par Kant - évoque le
non pas sans aucun doute. - afin de séparer aussi nette- mouvement et la dialectique de la communauté humaine.
ment qu'i1 se peut la force motrice. et nne force formatrice Il est assurément possible que des «vitalistes» aient précé-
ou encore créatrice. En soi cette remarque peut paraître in- dé Kant. Mais ce qui, en revanche, est impossible c'est qu'ils
siguifiante. mais elle possède deux dimensions qui d'une part aient su procéder avec la rigueur de Kant. Cette dimension
limitent et d'autre part rendent siguifiante la philosophie politique qui s'impose dans la réflexion sur la philosophie
biologique. A l'ancienne compréhension politique de l'orga- biologique nous instruit: Kant a vu clairement que la pensée
nisme en laquelle l'âme gouvernait le corps comme un roi biologique. même réduite au niveau de l'analogie, déterminait
son royaume. Descartes avait substitué «l'image technolo- une compréhension du monde politique. Et ce n'est vraiment
gique de "commande" d'un type de causalité positive par pas un hasard si cette réflexion politique se trouve dans une
un dispositif ou par un jeu de liaison mécanique »'. L'in-
convénient majeur de ce schème est qu'i1 ne dépasse pas la
9. C.E. VAUGHAN, Studies in the History of political Philosophy,
7. A. PHlLONBNKO, «L'antinomie du jugement téléologique chez 1939. vol. II. . , .
Kant " R.M.M., 1977. 10. A. PHILONENKO, «Autour de Flchte et de Jaures li, ln Erneue-
8. G. CANGUILHELM, La connaissance de la vie, p. 162 SS. rung der Transzendentalphilosophie.
76 ALEXIS PHILONENKO LA PHILOSOPHIE BIOLOGIQUE 77

note du § 65 qu'on peut légitimement considérer comme avait insisté sur la relativité du jugement déterminant appelé
le centre de l'Analytique téléologique. S'il avait eu quelque à porter sur les phénomènes et non sur la chose en soi, la
doute, c'est dans le § 64 en marge de l'analyse de l'arbre qu'il situation était la suivante : en quoi le jugement téléologique
l'eût placée. Toutes ces réflexions nous permettent de mieux qui ne porte pas non plus sur les choses en soi était-il plus
saisir encore la défiuition de l'organisation. Soit une montre relatif que le jugement déterminant 1 En un mot tous les ju-
ou je ne sais quel automate, la notion de greffe n'a pas de ments devaient pouvoir prétendre atteindre l'absolu ou som-
sens puisque l'on peut juxtaposer à l'infini des dispositifs. brer sans différence dans le règne vague et imprécis de l'im-
Dans l'organisation on peut greffer et presque à l'infini. pression, du «für uns Menschen». Il est très évident que,
Mais la greffe n'a pas le même sens dans les deux cas. La disciple trop fidèle de Hegel, Kroner visait à ramener toute
juxtaposition n'est du point de vue politique que détermi- la philosophie kantienne à une doctrine de la réflexion.
nation numérique : elle n'explique rien. Eu revanche la Cependant cette diatribe manquait de fondement. Le juge-
greffe au niveau de l'organisation trouve une image politique ment déterminant est le résultat d'une démonstration osten-
impressionnante : la volonté générale. Et sans s'astreindre sive; en revanche le jugement téléologique est le résultat
à de trop longues digressions et même chaînes de raisons, on d'une démarche réflexive. Ancune comparaison n'est possi-
peut dire que sur ce fondement la pensée politique allemande, ble et surtout ce n'est pas à la lumière de l'Absolu que ces
notamment chez Fichte et Hegel a pu se développer. Ce n'est jugements doivent être pesés. Ici et là on ne pense et ne
pas sans motifs que dans la Grundlage des Naturrechts Fichte juge que sur des phénomènes, mais il se trouve que la struc-
avant d'en venir à la pure politique se préoccupe de définir ture du jugement n'est pas la même. Le mathématicien dit
les éléments biologiques. « parce que »; le biologiste dit « comme si ». Le fil conduc-
teur du discours n'est pas le même et l'analogie possède
Mais une question se pose que nous ne pouvons pas traiter
une fonction claire : au fur et à mesure qu'on s'élève dans
ici, mais seulement formuler. Kant dit, en somme, que l'orga-
les degrés de l'être le « comme si » s'impose avec plus d'éner-
nisation est le type de l'édifice politique. Mais il prononce
gie ll , Il faudrait concevoir comme une succession de «com-
le mot : analogie qni dans ce contexte possède un sens pour
me si» s'engrenant les uns sur les autres, de telle sorte que
ainsi dire vulgaire, qui exprime la réserve et la prudence.
des modèles distincts et successifs se superposent, perdant
Or il n'est pas évident que Fichte et encore bien moins Hegel
de plus en plus de leur valeur parce que l'objet échappe
aient conservé la même attitude de prudence. Chez Kant il
de plus en plus à l'entendement. La question qni se pose est
s'agit d'une nécessaire métaphore; le «vitalisme» hégélien
évidemment celle de savoir dans quelle mesure le «ais ob »
va évidemment plus loin. Dès lors que la philosophie biolo-
ne finit pas par l'emporter dans la pensée kantienne, dont
gique cesse d'être une métaphore pour s'imposer comme
on peut bien se demander si à la fin elle n'est pas plus une
modèle éthique le danger du totalitarisme apparaît.
philosophie du «comme si» que dn «parce que». Il est un
fait relevé par E. Cassirer : ce qui sépare Leibniz de Kant,
7. Le second point peut paraître découler du précédent. c'est que le premier dit toujours «parce que >, tandis que le
Mais le problème est à la fois plus complexe et plus facile. second depuis longtemps dit « comme si ».
Il porte sur la signification du jugement réfléchissant et sur Ces précautions étaient nécessaires pour délimiter avec
sa portée anagogique. Richard Kroner dans son livre Von soin le statut de la philosophie biologique dont Kant connais-
Kant bis Hegel s'était bien malheureusement laissé aller à sait l'anatomie, si j'ose dire, et le moment physiologique.
poser la question de savoir ce qui séparait réellement le ju-
gement déterminant du jugement réfléchissant en leur rapport
11. Cf. Alexis PHiLONENKO, Kant und die Ordnungen des Reellen,
à l'Absolu. Puisque Kant dans la Critique de la Raison pure Kant-Studien, 1970.
4
ALEXIS PHILONENKO LA PHILOSOPHIE BIOLOGIQUE 79
78

Dans le § 65 il délimite clairement le champ défini par l'or- à la fin du XVIII' siècle et au XIX' siècle. Dans le fond la criti-
ganisation, seul concept recevable. «On dit trop peu de la que kantienne, si bien fondée, était néanmoins trop peu étoffée
nature et de sa faculté dans les produits organisés quand on pour canaliser avec force ces nouveaux développements.
la nomme un analogon de l'art... On s'approche davantage Cette réponse ne satisferait pas tout lecteur. Les preuves
peut-être de cette qualité insoudable lorsqu'on la nomme plus précises relèvent de l'historiographie. Et elles sont trop
un analogon de la vie.» Analogiquement la philosophie bio- nombreuses pour que nous puissions les développer et en faire
logique permet non de connaître, mais de penser la vie. La la sy~thè.se. ~ais toute l'œuvre de Kaut atteste que la philo-
sagesse critique s'en tient là et repousse l'hylozoisme et le sophie bIologIque, pas plus que la philosophie de la nature
spiritualisme. Chacun connaît l'avertissement. Mais c'est de Newton, ne pouvait se dépasser elle-même, deveuir une
la juste conséquence qu'il en faut dégager. Elle est simple métaphysique et encore moius une métaphysique de la mé-
et pourtant, si l'on fait exception pour Fichte, fut méconnue taphysique.
par l'idéalisme allemand. La philosophie biologique a été éri-
gée en ontologie, soit que avec Hegel on ait voulu voir dans
le mouvement de la génération le mouvement dialectique
du réel, soit qu'avec Schelling on ait accordé une fonction
essentielle à la vie, soit enfin qu'avec Schopenhauer la vie
fût considérée comme la parousie de la Volonté. Plus loin,
Bergson qui connaissait bien Schopenhauer devait, appuyé
sur une conception ontologique de la vie, renverser l'orien-
tation kantienne en partant de la vie pour aboutir à une
critique de la métaphysique".
Dans le fait la pensée philosophique a toujours été, si j'ose
dire, fondamentalement anti-kantienne. L'incompréhension
des structures de la finalité exteme-inteme, la méconnais-
sance de la distinction entre l'être orgauisé et l'être vivant,
l'oubli des fondements scientifiques, Linné et ..B1umenbach,
ont beaucoup fait pour conduire à l'ignorance de la pensée
kantienne. Cela peut paraître étonnant et l'est en effet. Pour-
quoi a-t-on si aveuglément cherché à ériger en la philoso-
phie biologique une nonvelle ontologie, ce que Kant, bien
opposé à cela chez Aristote, avait toujours refusé? TI existe
une réponse bien faible, mais qui ne doit pas être négligée :
non seulement le Sturm und Drang ne pouvait se développer
dans le cadre trop strict de la relation kantienne à la biologie,
mais encore comme l'indique une brève étude de la pensée
de Schopenhauer, la biologie prenait nn essor insoupçonné

12. P. TROTIGNON, L'idée de vie chez Bergson et la critique de la


métaphysique. Cf. la recension que nous avons donnée de ce livre
dans les Archives de philosophie, 33 (1970), p. 73-95.
ADOLF SCHURR

« VON DER UNMOGLICHKEIT ElNES


ONTOLOGISCHEN BEWEISES
VOM DASEIM GOTTES ))

Zut « Widerlegung
)) des ontologischen
Gottesbewdses bd Kant

1. VORÜBERLEGUNG

Eine Analyse des genannten Passus in Kants Kritik der


reinen Vernunft legt nahe, zunachst anf die meist nnd allein
rezipierte Argumentation zurückzukommen. :Bei Kant steht
auch die scheinbar so einsichtige Vergleichung : «Hundert
wirkliche Thaler enthalten nicht das Mindeste mehr, aIs hun-
dert môgliche» (B 627). Damit will Kant zum Ausdrnck
bringen : «Und so enthalt das Wirkliche nichts mehr aIs das
bloss Môgliche» (ibid.), d.h. das mit einer Vorstellung Ge-
meinte, nicht nur im Bewusstsein Wirkliche, enthiilt nicht
mehr aIs die blosse Bewusstseinsvorstellung selbst.
Zweifellos besteht Kants Ueberlegung zu Recht: «Wenn
ich also ein Ding, durch welche und wieviel Pradicate ich
will (... ). deuke, so kommt dadurch, dass ich noch hinzusetze :
dieses Ding ist, nicht das Miodeste zu dem Dinge hinzu.
Denn sonst würde nicht eben dasselbe, sondern mehr exis-
tiren, aIs ich im Begriffe gedacht hatte» (B 628). lst aber
die Applikation dieser Vergleichung ebenso statthaft : « beuke
ich mir nun ein Wesen aIs die Mchste Realitat (... ), so bleibt
noch ionner die Frage, ob es existire, oder nicht ?» (B 628).
Waren diese Ueberlegungen die einzigen, die sich von Kant
82 ADOLF SCHURR DER ONTOLOGISCHE BEWEIS 83

her gegen den ontolog!schen Gottesbewe!s führen liessen, so .istisclle Einwendung nicht abwe!sen : es ware eine blosse Welt
hatte man mit deren Widerlegung leichtes Spie!. Bei allen Vorstellungen denkbar, die ebenso wie die Welt einer
sogenannten «Verfechtern» des ontologischen Arguments i13:rfa.hrllllg in einem Kontext stünde, wenn auch in dem Kon-
liisst sich eines nich finden : dass sie «die Existenz des blossen Vorstellens. Der behauptete Kontext der Er-
Dinges mit dem blossen Begriffe des Dinges ( ... ) verwech_ fa~lfmlg reicht nicht zu, Existenzaussagen zu legitimieren.
seIn» (B 628). Warum aber wird dennoch dem Dinge ein S' eht man von der miiglichen Verifikation von Existenz-
« mehr » im Vergleich zu dessen Begriff zugesprochen ? s:agen nach Kant ab, so bleibt der Hinblick, wora~f nach
Es ist nicht ausser Acht zu lassen, dass sich die Ueber-
legungen keineswegs auf einer philosophischen, noch weniger
~ant Existenzaussagen aUein m~glich sind ---:- nan:lic~ ~ur
n einem Gegenstand der S,nne» - eme wllikurllch
a~er auf einer transzendental-philosophischen Ebene bewegen, «vo
gesetzte Beschrankung ~es U rteilsvermogens
.. undeme' noch
WIe aus dem Kontext hervorgeht. Denn Kant fahrt fort : zu eriirternde Problematik.
« Aber in meinem Vermiigenszustande ist mehr bei hundert Wird die Moglichkeit von Existenzaussagen in dem ge-
wirklichen Thalern, ais bei dem blossen Begriffe derselben» benen Zusammenhang nicht zureichend geliist, welches ist
(B 627). - Es !st keine Frage, dass dieser Fortführnng der ~e nn die Bedeutung von Existenzaussagen auf der Reflexions-
Vergleichung jedermann zustimmen würde; es ist aber frag- ~fe auf welcher Kants Argumentation allgemein für stich-
lich, wie - abgesehen vom «Vermiigenszustande» _ sich
ein «mehr» des Gegenstandes im Vergleich zu dessen Be-
~alti~ erachtet wird ? Wie ist das Verhaltnis von Gegenstand
an sich lmd dessen blosser Vorstellung auf der Ebene eines
griff grnndsiizlich fassen liisst. Es stellt sich damit folgende
Problematik : vorphilosophischen Bewusstseins zu b~stimmen? Der V?r-
stellungsinhalt soli in beiden Fallen em und derselbe sem,
also der ais bloss vorgestellt und der ais wirklich (nicht ~ur
im Bewusstsein seiend) gedachte Gegenstand sollen matenal-
2. DIE FRAGE NACH DER MiiGLICHKEIT UND BEDEUTUNG VON inhaltlich nicht differieren. Dennoch werden beide unter-
EXISTENZAUSSAGEN schieden - auch bei Kant; aber dem « Gegenstand an sich »
wird von Kant eiu «mehr» im Vergleich zu dessen Vor-
Wie sind Existenzaussagen überhaupt miiglich? Wie beant- stellung abgestritten.
wortet Kant diese Frage? Ohne Zweifel ist die Frage unent- Um diese Frage zu eutscheiden, sei eine grundsiit:lic~e
scheidbar vom bloss Materialen her gesehen. Kant sag! zu Ueberlegung angestellt : In ei.nem. Grund-Folg~-':'erhaltn~s
Recht, dass sich VorsteUung und Gegenstand inhaltlich ge- wird dem Grundsein insofern em prms und datlUt lm kanti-
sehen decken, d.h. keine Verschiedenheit aufweisen dürfen schen Sinne ein «mehr» zugesprochen, aIs die Foige nicht
und kiinnen. Aus welchen Gründen wird aber dann geurteilt : ohne ihren Grund gedacht werden kann. Das «mehr» eines
ein beliebiger Vorstellungsinhalt sei entweder bloss vorge- nicht bloss vorgestellen, sondern ais wirklich gedachten
stellt oder nicht bloss vorgestellt, sondern unabhiingig von Gegenstandes bestünde analog darin, dass der Gegenstand
meiner Vorstellung an sich gegeben ? ais Grund der V orstellung gedacht wird und nicht umgekehrt,
Kant antwortet auf diese Frage folgendermassen : «durch die Vorstellung ais Grund des Gegenstandes. Diese Verhiilt-
den Begriff wird der Gegenstand nur mit den allgemeinen nisbestimmung erfolgt wohlgemerkt auf einer v.orphi/osoph!-
Bedingungeu einer miiglichen empirischen Erkenntnis über- schen Reflexionsebene und liesse sich darum lelcht entschel-
haupt aIs einstimmig, durch die Existenz aber aIs in dem den «für» ein «mehr» des Gegenstandes. - Nun bewegt
Context des gesamten Erfahrung enthalten gedacht» (B 628/ sich jede philosophische Reflexion in der Dimension von
29). Ware demnach der Kontext der Erfahrung alleiniges Grund-Folge-Zusammenhangen. Die kantische transzenden-
Kriterium für Existenzbehauptung, so Iiesze sich eine ideali- tal-philosophische Reflexion fragt expressis verbis nach den
84 ADOLF SCHURR DER ONTOLOGISCHE BEWEIS 85

Bedingungen der Moglichkeit und damit nach dem Grunde


von Wissen überhaupt. Welche Losung dieser Frage eroffnet
der Ansatz Kants ? 4. DER ERKENNTNISBEGRIFF

3. FRAGESTELLUNG UND ANSATZ


Vorausgesetzt wird der Nachweis der Kritik der reinen
Vernunft, dass jegliche Vorstellung von etwas nur moglich
Will man eine Fragestellung nicht verfehlen, so muss man ist auf Grund der Synthesis mehrerer Momente, d.h. eine
ihre ganze Dimension in Anschlag bringen und sie nicht am beliebige Vorstellung ist nicht ein einfaches, sondern ein
Ende - bei Kants Vergleichung von «hundert moglichen komp lexes Gebilde aus Jkgriffs- und Anschauungsmomenten.
und wirklichen Thalern» - anfassen. Hiilt man an der Die Frage, die sich in diesem Zusammenhang stellt, betrifft
kantischen Grundfrage einer Philosophie fest : Wie ist Wissen die von Kant aIs allein moglich betrachtete Anschauung. Er
überhaupt moglich?, welche Moglichkeit ru derer Beant- sagt : «Nun ist aile uns mogliche Anschauung sinnlich (...)
wortung ist dann von Kants eigenem Ansatz her gegeben ? Folglich Iiefern uns die Kategorien vermittelst der Anschau-
Jede Antwort ist durch den Horizont ihrer Fragestellung ung auch keine Erkenntuiss von Dingen, aIs nur durch ihre
vorbestimmt und durch deren Intention mitbedingt : Wonach mogliche Anwendung auf empirische Anschauung, d.i. sie
nicht gefragt wird, dies kann in der Beantwortung nicht ohne dienen nur zur Moglichkeit empirischer Erkenntniss. Diese
Inkonsequenz in den logischen Fortgang eingeführt werden. aber heisst Erfahrung.» (B 146/47) Damit wird eine Grund-
Wird ausschliesslich nach der Konstitution des Wissens siun- these ausgesprochen, welche Erfahrung und Erkenntnis auf
licher Gegensüindlichkeit gefragt, wird ferner Erkenntnis und die sinnliche Anschauungsbasis allein reduzier!. Mit welcher
Wissen nur in diesem Bereich zugelassen, 80 ist weder der Begründung erfolgt diese Einschrankuug?
Fragestellung noch dem Ansatz nach die Moglichkeit gegeben, Kant sagt : «Unsere Natur bringt es so mit sich, dasz die
die Frage nach dem Absoluten zu erortern - ja, dessen Be- Anschauung niemals anders aIs sinnlich sein kann» (B 75).
griff ware überhaupt nicht moglich; denn die Frage der Uebernimmt man Kants philosophische Fragestellung nach
Konstitution des Wissens sinulicher Gegenstiinde führt nicht einer Genesis des Wissens, d.h. nach einer Erklarrnrg von
weiler aIs auf das Formale der apriorischen Vernunitsstrnktur Tatsachen des Bewusztseins aus ihren Wesensgründen, dann
(mit den reinen Formen der Anschaunng und den reinen muss man notwendigerweise hinter die Strukturierheit der
Verstandesbegriffen) einerseits und dem begrifflich-irrednzi- Vernunft selbst zurückfragen und sie nicht aIs Faktum stehen-
bIen Materialen der Empfindnng andererseits. Der Versuch, lassen. Es ist demnach unzulassig, ein Faktum in eine philo-
ans diesen beiden Momenten ein Absolutes ru konstruieren, sophische Argumentation einzuführen, weil eine philosophi-
d.h. den Begriff des Absoluten überhaupt ru entwerfen, sche Reflexion ja gerade aile Faktizitat (inr weitesten Sinne)
konnte ru keiner anderen Seinsweise führen aIs eben der verstehen will. Was konnte man daher begründend erwidern,
faktisch-gegenstiindlichen. wenn Anschauung nicht im kantischen Behaupten anf sinn-
Nun wird niemand behaupten, wir verbiinden mit der liche Anschauung eingeschrankt würde? Es stünde ein Fak-
Gottesvorstellung nicht eine ganzlich andere Seinsvorstellung. tum der Behauptung gegen ein anderes, und man konnte
Wie aber ist letztere moglich, da sie der kantische Ansatz nicht entscheiden, welches nun eigentlich begründbar ware.
ausschliesst? Offensichtlich erforder! das Faktum der Gottes- Die Deduktion einer nicht-sinnlichen Anschaunng ru geben,
und der damit sich verbindenden Seinsvorstellung eine Kor- würde über den gesetzten Rahmen dieser U eberlegungen
rektur des kantischen Ansatzes. - Zunachst gilt es diesen hinausführen. Hier genügt die Feststellung einer Tatsache
Ansatz zu prazisieren und Kants eigene Begründung ru des Bewusstseins : «Es gibt» eine nicht-sinnliche Anschau-
prüfen. ungsbasis, wie aus dem von Kants Ansatz her unerklarbaren
DER ONTOLOGISCHE BEWEIS 87
86 ADOLF SCHURR

Faktum einer moglichen Gottesvorstellung erheUt. - Aber bestimmt denken, ohue dass er die entgegengesetzte Bej~ung
selbst Kants eigene Analyse des Erkenntnisvermogens ware znm Grunde Iiegen habe.» Dieses Prinzip wird ':" el~em
unmoglich, würde er nicht für den Vollzug der Reflexion in Beispiel iIIustriert : «Der Elindgeborene kann slch mcht
der Kritik der reinen Vernunft nicht-sinnliche Anschaunng die mindeste Vorstellung von Finsteriss machen, weil er
voraussetzen; denn wie ware die Synthesis der transzenden- keine vom Lichte hat» (B 603). Mit anderen Worten : eine
talen Apperzeption begrifflich überhaupt fassbar, wie - mit sinnvolle Negation setzt die Moglichkeit der negierten Posi-
Kant gesprochen - das Urteil moglich : «Das : Ich denke, tion voraus. Nun enthalt jede Bestimmung von etwas die
muss aile meine Vorstellung begleiten konnen» (B 132)? Negation aller anderen in derselben Beziehung und zugl~ich
Die Notwendigkeit des « !ch denke» ais Bedingung der Mog- moglichen Bestimmbarkeiten, indem ibm diese, und mcht
lichkeit aller V orstellung Iiisst sich doch wohl nicht daraus andere mogliche Bestimmungen zugesprochen werden. J ede
begründen, was Kant ais Erfahrnng zuIiisst. Es muss also eine Bestimmung ist daher eine Ausgrenzung aus einer geschlos-
andere Anschauungsbasis moglich sein, um die von Kant zu senen Totalitat von Bestimmbarkeit, setzt aber zugleich ais
Recht genannte Bedingung der Moglichkeit der Synthesis im deren Negation eine solche TotaliHit voraus : Kant nennt sie
«Ich denke» überhaupt erkennen zu konnen. Wie wlire es eine « omnitudo realitatis» : «Wenn also der durchgangigen
moglich, von einem bloss sinnlichen Anschauungsdatum aus Bestimmung in unserer Vernunft ein transscendentales Sub-
zu solch kategorischen Aussagen zu gelangen? Wenn nach stratum zum Grunde gelegt wird, welches gleichsam den
Kant der Tatbestand besteht : «Gedanken ohne Inhalt sind ganzen Vorrath des Stoffes, daher aile moglichen :rad~cate
leer, Anschauungen ohne Begriffe sind blind », und wenn er der Dinge genommen werden konnen, enthillt, so lst dIeses
darum fortflihrt : «Nur daraus, dass sie sich vereinigen, kann Substratum nichts anderes, ais die Idee von einem Ali der
Erkenntniss entspringen» (B 75/76), dann ist zu fragen, wie Realitlit (omnitudo realitatis)>> (B 603/604). «( ... ) und die
Kants Erkenntnis der transzendentalen Apperzeption moglich durchgangige Bestimmung eines jeden Dinges beruht anf der
ist, da sie doch, wie aile Erkenntnis, Begriff und Anschauung Einschrankung dieses Ail der Realitat, indem Einiges der-
voraussetzt ? selben dem Dinge beigeleg!, das übrige aber ausgeschlossen
Diese Ueberlegungen erweisen, dass jegliche philosophische wird» (B 605).
Reflexion, insbesondere die transzendental-philosophische Eine solehe geschlossene und aile Priidikation erm5g-
Kants, nicht moglich ist in einer Beschrankung der Anschau- Iichende Totalitat muss konsequenterweise von Kants Ansatz
ung auf nur sinnliche Anschauung. Diesen Tatbestand hat her vorausgesetzt werden. In welcher Weise? Na?h den bi~­
auch Kant zugegeben, wenn er sag! : Die Synthesis des Ver- herigen Ueberlegungen bedeutet eine solche ommtudo reali-
standes ist, «wenn er für sich allein betrachtet wird, nichts tatis nichts anderes ais die «Vorstellung des Inbegriffs aller
anderes ais die Einheit der Handlung, deren er sich ais einer Realitat» (B 605), nicht aber die Vorstellung eines «~och­
solchen auch ohue Sinnlichkeit bewusst ist» (B 153). - sten Wesens ». Wie ist der Uebergang von dem «Inbegnffe»
N ach dieser Korrektur des Erfahrnngsbegriffs komme ich zu der «Materie zur Moglichkeit aller Gegenstande der Sinne »
der gestellten Problematik der «Unmoglichkeit eines onto- zu dem in der Gottesvorstellung Gemeinten moglich ? Er ist
logischen Beweises vom Dasein Gottes. » gedanklich schlechtweg unmoglich, weil es sich um zwei
ganzlich verschiedenartige Seinsvorstellungen ha:,delt. ~e~
Denken ist zwar ein einsichtiger Uebergang von emem gelsll-
5. DER BEGRIFF DES ABSOLUTEN gen Sein zu einem sinnlichen Sein mog!ich, .. nicht ~be~ d~e
Umkehrnng des Verhiiltnisses. Denn wl.e ko.nnte ~ms~chtlg
Kants Ueberlegungen beruhen anf dem unmittelbar ein- anfgezeig! werden, dass aus dem Begnff emer slllnhc~en
sichtigen Prinzip : «Nun kann sich niemand eine Verneinung eine geistige Seinsweise ableitar ware? - Diese grundsatz-
l

88 ADOLF SCHURR DER ONTOLOGISCHE BEWEIS 89

liche UeberIegung zeigt, <lass von Kants Erfahrnngsbasis aus faches, allgenugsames, ewiges USW., mit einem Worte, es in
sich die Frage nach dem Absoluten gar nicht stellen und seiner unbedingten Vollstiindigkeit durch aile Priidicamente
darum auch nicht entscheiden Hisst; eine Textaualyse liisst bestimmen konnen. Der Begriff eines solchen Wesens ist der
dies leicht erkennen. von Gott» (B 608).
Es ist vollig richtig, dass auf diese Weise niemals in strin-
a) Ver Begriff des ens realissimum geuter Weise der Begriff eines absoluten Wesens entfaltet
werden kann und darum auch solcherweise die Frage nach
Die Vorstellung der omnitudo realitatis erscheint in ihrer einem «Dasein Gottes» nicht' entschieden werden kann.
Hypostasierung unter zwei Aspekten : zuniichst ais «blosses Hiitte sich Kant auf die Zurückweisung einer falschen und
Aggregat von abgeleiteten Wesen» (B 607) - also ais das irrigen Hypostasierung des Gedankens eines «AlI der Reali-
Insgesamt aller nur moglichen Erscheinungen selbst in eins tiit» zu einem Begriffe von Gott beschriinkt, so bestünde
gedacht. Aber diese Vorstellung des «Absoluten », die allein seine Kritik am ontologischen Argument zu Recht. Die Frage
aus Kants Ansatz sich folgem liisst, wird von Kant zurück- ist nur, ob Kant mit seiner- Verwerfung die Argumentation
genommen, «Weil man auch nicht sagen kann, dass ein trifft, welche er das «ontologlsche Argument» nennt; diese
Urwesen aus viel abgeleiteten Wesen bestehe» (B 607). Man Frage aber muss sowohl aus inneren Systemgründen aIs auch
müsste fragen, woher die weiterIeitende Vorstellung eines aus faktischen Gründen im Hinblick auf die Vertreter dieser
Urwesens genommen werden kaun, wenn nur die Erkenntnis Argumentation vemeint werden.
von sinniichen Einzelwesen zu Grunde liegt. Suspendiert man
diese Frage und konzediert den Gedanken eines Urwesens - b) Ver Begriff des ens necessarium
nach Kant ein ens originarium, summum und ens entium -
wie müsste daun nach Kant auf einer hoheren Reflexionsstufe Das «Absolute» ais ens realissimum wird von Kant in
das Verhiiltnis von ens realissimum und omnitudo realitatis eins gesetzt mit dem ens necessarium. Wie das Verhiiltnis
bestimmt werden? Kant korrigiert den ersten Aspekt des dieser beiden Aspekte zu denken ist, sei zuniichst zurück-
Urwesens ais eines «blossen Aggregats von abgeleiteten gesteUt. Wie kommt es überhaupt zu dem Gedanken eines
Wesen », wenn er sagt : «Vielmehr würde der Moglichkeit ens necessarium? - Er ist nach Kants Argumentation der
aller Dinge die hOchste Realitiit aIs ein Grund und nicht ais eigentliche Grund der Hypostasierung. - Bleibt es nach den
[nbegriff zum Grunde liegen und die Mannigfaltigkeit der bisherigen Ueberlegungen offen, warum die Vemuuft die
ersteren nicht auf der Einschriinkung des Urwesens selbst, omnitudo realitatis in ein hochstes Wesen transformiert, so
sondem seiner vollstiindigen Folge beruhen» (B 607). Er- wird nun unter dem Aspekt des ens necessarium diesen
scbOpft sich demnach das Sein des hier konzipierten Absolu- Gründen nachgegangen mit der Frage : «wie kommt die
ten im «Grundsein» der «Mannigfaltigkeit der Dinge», so Vemunft dazu, aUe Moglichkeit der Dinge aIs abgeleitet von
wird in diesem Gedanken eines Absoluten alles andere aIs einer einzigen, die zum Grunde liegt, niimlich der der hoch-
das Absolute gedacht, welches sich mit der Gottesvorstellung sten Realitiit, anzusehen und diese sodann ais in einem
verbindet. besonderen Urwesen enthalten vorauszusetzen?» (B 609).
Dass dieser Versuch aber tatsiichlich untemommen wird, Die Beantwortnng dieser Frage wird von zwei verschiede-
geht aus dem unmittelbaren Anschluss des zitierten Textes nen Reflexionsstufen aus versucht : die erste, unkritische
hervor : «Wenn wir nun dieser unserer Idee [niimlich der Losung argumentiert ganzlich unphilosophisch anf der Ebene
Idee einer hochsten RealitiitJ, indem wir sie hypostasiren, so des vorphilosophischen Bewusstseins : «Wenn etwas, was es
femer nachgehen, so werden wir das Urwesen durch den auch sei, existirt, 80 muss auch eingeraumt werden, dass
blossen Begriff der hochsten Realitiit aIs ein einiges, ein- irgendetwas nothwendigerweise existire. Denn das Zufiillige
90 ADOLF SCHURR DER ONTOLOGISCHE BEWEIS 91

existirt nur unter der Bedingung eines anderen ais seiner Es gilt, die Gründe zu prüfen, die sich bei Kant für die
Ursache, und von dieser gilt der Schluss fernerhin bis zu Hypostasiernng der Gottesvorstellung finden. Der erste Ver-
einer Ursache, die nicht zufallig und eben darum ohne such, bei einem beliebigen Sein anzusetzen, um auf dessen
Bedingung nothwendigerweise da ist. Das ist das Argument, Ursache und schliesslich auf eine Letzlursache zurückzugehen,
worauf die Vernuuft ihren Fortschritt zum Urwesen grün- erwies sich ais unhaltbar. Kant versucht eine zweite Losung,
det» (B 612). Verhielte es sich in der Tat so wie Kant bei der nicht irgendein faktisches Sein vorausgesetzt, sondern
. '
kommentiert, dass dies die einzige Argumentationsweise blei- ausgegangen wird von dem Begriff eines absolut notwendigen
ben müsste, worin der «Fortschritt (der Vernuuft) zum Ur- Wesens.
wesen» griindet, dann bestünde die Widerlegung des onto- Woraus wird der Begriff der N otwendigkeit genommen,
logischen Beweises von Kant zu Recht. Die Argumentation woraus ist er nach Kants Ansatz überhaupt ableitbar? Kant
wie sie hier. geführt wird, abstrahiert nicht von der Zeit' benemIt Beispiele : den « Satz der Geometrie, z. B. dass ein
setzt diese viehnehr ais RealWit voraus, um die gedanklich~ Triange! drei Winkel habe, ist schlechthiu notwendig» (B
Unendlichkeit der Zeitreihe nach ihrem Anfang hin abzu- 621), und er trifft im Anschluss daran die Unterscheidung :
sClJ.'iessen. ~ies muss darum mit Kant eine Willkürsetzung « Alle vorgegebenen Beispiele sind ohne Ausnahme nur von
blelben, weil der Uebergang von einem Zeitmoment in ein UrtheUen, aber nicht von Dingen und deren Dasein herge-
nachstfolgendes nicht eingesehen werden kaun, weun eine nommen» und Kant resümiert zu Recht : «Die unbedingte
objektive Zeitauffasung und mit ihr reale Gegenstande in der Nothwendigkeit der Urtheile aber ist nicht eine absolute
Zeit unterstellt werden. Die einzige Feststellung auf dieser Nothwendigkeit der Sachen.» (B 621)
Stufe der Reflexion bleibt eine indnktiv erschlossene Regel- Was ist zu dieser Explikation zu sagen? Die Ueberlegungen
massigkeit mit dem charakter blosser WalIrscheinlichkeit. heben an bei einer notwendigen Form des Urteilens : der
Entfillit die Einsicht in das Uebergehen in einem Ursache- Begriff der Notwendigkeit ist darum faktisch, d.h. in einem
Wirkungszusammenhang, so muss die These eines absoluten Nicht-anders-komIen einer vorfindbaren Seinsweise der Ver-
Aufangs der Zeitreihe eine blosse Hypothese bleiben. nuuft begründet. Die Uebertragung einer immanenten Ver-
nuuftstrnktur auf eine Daseinsweise, niimlich eines absolut
Man konnte freilich den zitierten Passus, wemI er aus dem notwendigen Wesens, ist selbstverstandlich unzulassig. Eine
Kontext herausg~nommen würde, ganzlich anders interpretie- rein logische Basis reicht nicht zu für das, wofür sie nach
ren, und er erhIelte voile Gültigkeit; damI namlich wemI Kant gefordert ist und darum wird zu Recht gesagt : «Die
~cht ein beliebig Existierendes, sondern das esse der c~gitatio unbedingte Nothwendigkeit der Urtheile aber ist nicht eine
III Ansatz gebracht wÜfde, dem nach Kants bloss kategorialer absolute Nothwendigkeit der Sachen. DemI die absolute Noth-
Seinspradikati.on überhaupt keine Realitat zugesprochen wer- wendigkeit des Urtheils ist nur eine bedingte Nothwendigkeit
den kann, weI! es ais Bedingung der Moglichkeit aller Pradi- der Sache, oder des Priidicats im Urtheile.» (B 622)
kati.on von Sein zu Grunde Iiegt, darum ais Ermoglichungs- Wird die hier angesetzte Notwendigkeit des Urteilens nicht
bedIllgung doch wohl von einer vorzüglicheren, aber von eingesehen, und zwar aus einer vollig anderen Rückfrage aIs
Kants Ansatz aus unfassbaren Seinsweise ist. Genau bei dieser der von Kant faktisch durchgeführten, wiewohl von ibm
nicht. willkürlich, sondern für jegliche Fragestellung not- selbst postulierten, daun bleibt der Ausgangspunkt einer bloss
wendlg vorauszusetzenden Realitat des cogito / sum setzt die logisch konzipierten N otwendigkeit für die Bewiiltigung der
Reduktion bei Anselm und Descartes an, um auf eine ab- hier gestellten Problematik eine Abstraktion. Eine Abstraktion
solute, sich selbst begründende Seinsweise zurückzuführen deshalb, weil nicht eingesehen, d.h. nicht aus einem geneti-
Die Darstellung einer so anhebenden und fundierten Refle: schen Grunde abgeleitet und damit der Modus der Not-
xion Iiegt abseits von der hier gestelltcn Problematik. wendigkeit eines Urteilen-Müssens nicht begriffen, sondern
92 ADOLF SCHURR DER ONTOLOGISCHE BEWEIS 93

aIs Faktum stehengelassen wird. Die Basis der Reflexion wird des Durch-sich-Seins auch auf seiten nichtabsoluten Seins,
bei Kant verkürzt, und es bleibt keine Mëglichleeit, die eigene namlich im Willen : Der Wille ist formaI gesehen nicht anders
Vollzugsweise von Vernunft überhaupt verstehen zn kënnen. zu fassen denn aIs Grundsein; ein einsichtig sich selbst be-
gründendes Grundsein ist aber nur mëglich in der Rück-
c) Das ens realissimum aIs ens necessarium bindung auf eiu materiales, sich selbst haltenden und tra-
gendes Sollsein.
Der aus der bloss logischen Notwendigkeit des Urteilen- Diese Andeutungen mogen genügen, um zu zeigen, dass
Müssens genommene Begriff von Notwendigkeit reicht nicht sich die Frage nach dem Absoluten nur in einer vëllig anderen
zu, den Gedanken eines notwendig existierenden Wesens zu Dimension erërten liisst aIs der von Kant zu Grunde gelegten
begründen. «Nun sieht sich die Vernnnft nach dem Begriffe Dimension eines bloss faktischen Daseins. Wenn er in Frage
eines Wesens um, das sich zn einem solchen V orzuge der stellt : « es giebt Subjecte, die gar nicht aufgehoben werden
Existenz aIs die unbedingte N othwendigleeit schiclee» (B 613) kënnen, die also bleiben müssen », d.h. «es giebt schlechter-
- mit dem Ergebnis : «Der Begriff eines Wesens von der dings nothwendige Subjecte» (B 623), so ist nach einem
hëchsten Realitat würde sich also unter allen Begriffen miig- Modus der Selbstbegründung gefragt, der von Kants Ansatz
licher Dinge zu dem Begriffe eines unbedingt nothwendigen aus gar nicht in den Blicle leommen leann. Ist aber der Begriff
Wesens am besten schicleen» (B 614). Achtet man darauf, absoluter Selbstbegründung miiglich - und auch Kant spricht
was Kant unter diesen beiden Konstrulctionsmomenten syn- von einem Wesen, «dessen Begriff zn allem Warum das Dar-
thetisiert, danu muss man ihm zustimmen : Anf diese Weise um in sich enthalt» (B 613) - dann widerspricht er sich
ist nicht einmal der Begriff des Absoluten miiglich. Dennoch selbst, wenn er sagt : «ich kann mir nicht den geringsten
findet sich dessen Formalbestimmung in Kants Kritik, nam- Begriff von einem Dinge machen, welches, wenn es mit allen
lich eines Wesens, «dessen Begriff zn allem Warum das seinen Pradicaten aufgehoben würde, einen Widerspruch
Darum in sich enthlilt» (B 613). Wie ist ein solcher Modus zurück liesse» (B 623/24). Der Begriff ist miiglich, und eine
von absoluter SelbstbegIÜndung aIs blosser Begriff überhaupt transzendentalphilosophische Reflexiou dürfte keine Tatsache
miiglich ? Von Kants Ansatz einer nur sinulichen Anschau- des Bewusstseins einfach leugnen, sie müsste vielmehr das
ungsbasis ware ein solcher Gedanke uufassbar. Findet er Faktum der Gottesvorstellung genetisieren, d.h. die Bedingung
sich doch im Bewusstsein, aufgrund welcher Erfahrnngsbasis seiner Miiglichkeit aufweisen. Dies erforderte eiue Aufhebung
ist er danu allein konzipierbar ? der im kantischen Systemansatz unhaltbaren Beschrankung
Wie ist der Begriff eines einsehbaren Durch-Sich-Seins einer miiglichen Anschauungsbasis auf blosse Sinulichkeit.
überhaupt miiglich? Eines ist sicher : Der Gedanke einer
notwendigen Existenz lasst sich nur aufgrund eines absoluten
Durch-sich-Seins begründen. Wie kann Kant den Gedanken
einer absoluten Notwendigkeit der Existenz in einer solchen
A1lgemeinheit fassen, dass er sagen kann : «Es wird uns
vielmehr unbenommen bleiben, aIle übrigen eingeschranlete
Wesen [namlich nicht nur die aIs uneingeschriinkt gedachte
"Mchste Realitat"] eben so wohl für unbedingt nothwendig
gelten zn lassen» ? (B 616). Das Merkmal allen nichtabsolu-
ten Seins besteht doch gerade darin, dass die N otwendigkeit
seines Daseins (abgesehen von einer faktischen Notwendig-
keit) eine rein zufallige ist. Dennoch findet sich der Modus
,
94 ADOLF SCHURR

RESÜMEE

Mag man sich in der Problematik der «Unmoglichkeit


eines ontologischen Beweises vom Dasein Gattes» zwar auf
Kant aIs eine « Autoritat» berufen, sa dürften diese Ueberleg-
ungen den Nachweis geführt haben, wie fragwürdig eine
soIche Berufung sein muss *. Deuxième partie

KANT ET FICHTE

,,* V gl. zur Erorterung des «ontologischen Gottesbeweises:t> : Hans-


Jurgen VERWEYEN, Nach Gatt fragen, Anselms Gottesbegriff ais
AHrsnleitung , in : Christliche Strukturen in der modernen Welt. Bd. 23.
g. v. Wilhelm PlOger, Essen, 1978.
Adolf SCHURR, Die Begründung der Philosophie durch Anselm von
Canterbury. Eine Erorterung des ontologischen Gottesbeweises, Stutt-
gart, 1968.
KLAUS HAMMACHER

LA DIALECTIQUE EN TRANSITION
DE KANT A FICHTE

La question dialectique n'est plus posée comme question


purement logique depuis Hegel. Du moins les partisans de
la philosophie hégélienne, et les mouvements qui empruntent
à cette philosophie les instruments de leur propre système,
jugent-ils impossible une manière d'argumenter qui serait
purement formelle. Par suite, on ne voit aucune continuité
entre la dialectique antique et la dialectique moderne après
Kant. La dialectique antique utilisait deux méthodes diffé-
rentes: l'une venant de Platon, l'autre d'Aristote. La première
cherchait à découvrir le vral par une série de séparations ou
distiuctions entre les concepts des choses visibles et se ter-
minait à l'intuition des idées (O,,,,lPEO"LÇ), la seconde cher-
chait une méthode de discussion formellement exacte à partir
d'expériences communément acceptées et vraisemblables
(~o",,,l}); on dirait en termes modernes : à partir d'expé-
riences intersubjectives vérifiables. Il y avait cependant un
point commun entre ces deux modèles antiques de dialec-
tique : c'était de découvrir le vrai ou le vraisemblable par
une méthode formelle.
Cette manière d'argmnenter en dialectique n'est plus ad-
mise, chez Kant, que dans La logique transcendantale de la
Critique de la raison pure. C'est pourquoi, pour rencontrer
une dialectique vérifiable formellement, il faut partir de la
Logique transcendantale de Kant et non pas de sa Dialectique
transcendantale. Dans les paragraphes qni constituent une
transition entre l'Analytique transcendantale et la Dialectique
transcendantale, Kant indique ce que doit être la tâche d'une
98 KLAUS HAMMACHER LA DIALECTIQUE EN TRANSITION 99

Topique transcendantale (A 268 B 324, tr. 236)1 c'est-à-dire Dialectique transcendantale de la Critique de la raison pure,
d'uue dialectique au sens d'Aristote transformée au niveau en utilisant la raison sans recours à l'empirie, pour y trouver
transcendantal, qui fait découvrir le lieu logique (ibid.) des l'origine de la dialectique post-kantienne. Or, c'est surtout la
concepts purs de l'entendement, tandis que, par sa définition méthode appliquée par Fichte dans Les principes de la doc-
de la dialectique transcendantale comme logique de l'appa- trine de la science qui peut être considérée comme le premier
rence (A 293 B 343 sq., tr. 251)2 il rompt expressément avec stade d'une dialectique des concepts des choses qui se joue
une dialectique qui enseignait comment argumenter dans le dans la conscience, avec cette réserve que Fichte utilise le
domaine du vraisemblable (ibid.). Partant de la Logique mot dialectique uniquement dans ses dernières années et que
transcendantale pour constituer une dialectique transcendan- l'on dit accomplie par Schelling et Hegel. Mais la validité de
tale on peut exposer et justifier en termes logiques la pensée la méthode dialectique ne peut pas être démontrée en faisant
dialectique même dans une telle transformation, parce que appel aux phénomènes qui contiennent la logique nécessaire
Kant lui-même fait découler la logique transcendantale de pour comprendre les antithèses et les rendre compatibles à la
la logique formelle mais démontre en même temps pourquoi manière de l'école hégélienne. Par contre, comme j'entends
la logique formelle ne vaut plus pour déterminer les consé- le montrer, il y a aussi chez Fichte un usage de la dialectique
quences qu'il faut tirer au niveau transcendantal dans la dia- ancienne. On la trouve dans Les principes de la doctrine de
lectique. la science, adaptée pour qu'elle puisse s'appliquer à la doc-
Or la logique formelle s'est complètement renouvelée de trine des catégories proposées par Kant, dans la Logique
nos jours; il faut donc rendre compte des arguments que la transcendantale de la Critique de la raison pure. La dialec-
logique a trouvés concernant les modes de penser que Kant tique transcendantale au sens de Kant et de Fichte découle
a interprétés en un sens transcendantal. C'est pourquoi je de la logique transcendantale répondant adéquatement aux
comparerai la logique transcendantale de Kant et la logique règles inhérentes à l'usage de la raison elle-même.
formelle, en dégageant les origines de la dialectique moderne. C'est pourquoi je confronterai d'abord les tables du juge-
ment et des catégories de Kant aux fonctions analogues dans
Le propos de mon exposé est de mettre en lumière l'évo-
la logique formelle prenant garde à leur importance pour la
lution de la dialectique pour y déceler une transition légitime
conception de la dialectique fichtéenne. Ensuite je préciserai
de la dialectique de l'antiquité, encore présente dans la philo-
comment s'effectue la transition de la dialectique de Kant
sophie des écoles au XVIIIe siècle, à la dialectique moderne.
à Fichte sous l'influence de Salomon Maimon et de Carl
Que celle-ci ait trouvé son origine dans la philosophie trans-
Leonhard Reinhold. En ce sens les considérations de cet
cendantale, c'est communément admis. Mais on a mis au
exposé complètent mon analyse historique et critique de la
premier plan les contradictions que l'on rencontre dans la
dialectique de Fichte dans Der transzendentale Gedanke3•

1. Les pages indiquées se réfèrent à la première (A) ou à la se·


conde (B) édition de la Critique de la raison pure. La traduction de
la Critique est citée d'après l'édition Tremesaygues-Pacaud, 1944. 1
2. Dans son livre Erscheinung bei Kant. Ein Problem der «Kritik
der reinen Vernunft », Berlin, 1971, spécialement au chapitre III,
Gerold Prauss a essayé de déterminer les «jugements de perception» La table des jugements logiques présentée par Kant au
à,l';;tide d~ mé!h0des modernes d'analyse du langage et d'expliquer
aInSI la dialectique transcendantale comme une «théorie de l'appa~
renee ». Mon essai, me semble+il, vise à déterminer où se situe, dans 3. Cf. «Problemgeschichtliche und systematische Analyse von
l'histoire de la philosophie cette théorie qui, sous un autre aspect, Fichtes Dialektik», dans : «Der transzendentale Gedanke. Die
arrive à des conceptions analogues, ainsi par exemple dans la con- gegenwartige Darstellung der Philosophie Fichtes» (Schriften zur
naissance catégoriale comme théorie du jugement selon la critique Transzendentalphilosophie? Band 1). Herausgegeben von Klaus Ham-
de la science. . macher, Hamburg, 1981, p. 388-406.
.~----~~.~-------------

n
1

i
LA DIALECTIQUE EN TRANSITION 101
100 KLAUS HAMMACHER

début de son analyse transcendantale s'écarte de la classifica- et du particulie,o n'est pas faite au premier lieu pour se rendre
tion de la logiqne formelle. La logique formelle établit des compte des relations que contiennent les jugements au regard
tables des fonctions logiques en les ordonnant selon une de la connaissance, elle est fondée dans l'aspect transcendan-
régularité qui ne se montre que si on compare les diverses tal de la genèse du jugement et nous laisse saisir en même
formes de combinaison des jugements soit dans la logique temps un premier élément de la dialectique post-kantienne.
traditionnelle dans le syllogisme, soit dans la logique nouvelle Ce terme «singulier» qui détermine le jugement singulier
dans les matrices des fonctions de validité. Pour Kant la
logique décrit les fonctions qui règlent nos jugements pour 5. Pour la commodité du lecteur on reproduit ici la table des juge-
la connaissance d'une chose et qui nous sont données dans ments et cel1e des catégories :
l'usage que nous en faisons. En autres termes, Kant découvre TABLE DES JUGEMENTS
les fonctions de la logique dans l'utilisation que nons en 1
faisons et c'est-à-dire il pense méthodiquement selon la tra- Quantité des jugements:
dition cartésienne. Universels.
En tant que les jugements sont liés à la connaissance chez Particuliers.
Kant, la vérité se rapporte à un contenu : selon une sentence Singuliers.
2 3
célèbre de Kant, les pensées sans l'intuition sont vides (A 51 Qualité Relation:
B 76, tr. 77). Et même, Kant définit le jugement comme un Affirmatifs. Catégoriques.
mode de connaissance : «Le jugement est donc la connais- Négatifs. Hypothétiques.
Indéfinis. Disjonctifs.
sance médiate d'un objet, par conséquent la représentation
4
d'une représentation de cet objet» (A 68 B 93, tr. 87 - sou-
Modalité
ligné par moi). Bien qu'il ne faille pas associer cette formule Problématiques.
réflexive à une logique psychologiste, cela montre aussi une Assertoriques.
différence par rapport à la pensée cartésienne mentionnée. Si Apodictiques.
on définit le jugement comme un mode de la connaissance, la TABLE DES CATEGORIES
règle n'est plus comprise seulement comme exerçant une fonc-
1
tion mais elle doit de plus recevoir l'intuition qui chez nous
DE LA QUANTITÉ :
- selon Kant - est réceptivité, c'est-à-dire sensible. Unité.
Ce en quoi Kant s'est écarté de la logique formelle pour- Pluralité.
rait se réduire au lien qu'il établit entre les jugements et la Totalité.
connaissance. Il ajoute par exemple dans les jugements de 2 3
DE LA RELATION :
quantité un troisième groupe : les jugements singuliers. Les DE LA QUALITÉ
Réalité. De l'inhérence et de la subsis-
logiciens déclarent que ce troisième groupe est inutile et qu'il tance (substantia et accidens).
Négation.
n'y a pas de raison logique de le distingner, ce que Kant Limitation. De la causalité et de la dépen-
admet d'ailleurs pour la logique formelle (cf. Logik 162 dance (cause et effet).
De la communauté (action réci-
AA IX, 104)'. Mais la distinction du singulier, de l'universel proque entre l'agent et le pa-
tient).
4
DE LA MODALITÉ :
4. Immanuel Kants Logik. Ein Handbuch zu Vorlesungen, heraus-
gegeben von Gottlob Benjamin Jasche, 1800. A la pagination de cette Possibilité - Impossibilité.
première édition est ajoutée cel1e qui y correspond dans le volume Existence - Non-existence.
de l'édition de l'Académie (AA). Nécessité - Contingence.

Ui',I!\fERSIDl\D DE NAVARRA
1[e!·\ HUi\t\Ai',lIDADES
102 LA DlALECTIQUE EN TRANSlTlON 103
KLAUS HAMMACHER

(iudicium singulare) se trouve aussi dans la description de compte de la mauière dont est formé un tel jugement. C'est
l'espace comme forme a priori de l'intuition (A 25 B 40 tr. 56 ce que précise Kant en disant autrement que les jugements
- la traduction «unique» est incorrecte, comme on voit le généraux qui sont aussi évoqués dans des jugements singu-
liers se rapportent aux jugements uuiversels comme l'unité se
en co~para~t avec les passages sur le temps et l'espace dans
la Dlss~rtatlO)., Dans la Dissertatio qui contient déjà sa rapporte à l'indéfini (A 71 B 96, tr. 80). Cela veut aussi dire
conc~pt.lOn de 1 espace et du temps courme intuitions pures que les jugements singuliers se rapportent à l'indéfini courme
a pnOrI, Kant les caractérise expressément comme «idées horizon des autres prédicats qui peuvent être énoncés. On
singulières» (Diss. 15, 19 AA II 399 402 tr Mou 45 utilise une règle comprise méthodiquement comme «repré-
52)6. " , ,. y, sentation d'une représentation ». Nous trouvons le même acte
de compréhension d'un singulier dans la détenuination spatio-
Daru: la ~ogi~ue. formelle on peut considérer que le juge-
temporelle qui ne détermine pas un prédicat quelconque
n;ent sn;~h~r eq.Ulvaut au jugement uuiversel parce que la
d'une chose spéciale, mais qui détenuine cette chose en
smgulante n exprIme pas une limitation de l'extension d'un
général. Par là on voit en quel sens attribuer au temps et à
co~cept .et. ne se borne pas à attribuer quelque propriété au
sUjet Amsl, pour la première figure du syllogisme Barbara l'espace la «singularité».
la mmeure est aussi indiquée par a (affirmo universaliter) Plus que par cette subdivision, la dialectique postkantienne
comme, ~a maj~~re, même si nous trouvons qu'il s'agit d'une a été influencée par la différenciation concernant la qualité
proposl~lOn qUI enonce un jugement singulier7. Dans son cours des jugements et faisant référence à l'autre différenciation
de Logique Kant remarque aussi qu'il y a uue différence réelle déjà traitée. Kant ajoute, aux jugements affirmatifs et néga-
entre des propositions générales et des propositions univer- tifs, les jugements indéfinis. Il donne comme exemple pour un
sel!es (Loglk 158, AA IX, 102). Pour lui des propositions jugement indéfini des propositions telles que «l'âme est non-
lmlverselles sont des propositions qui affirment d'un sujet mortelle» (A 72 b 97, tr. 89) ou «Quelques hommes sont
quelconque en général (ibid.) comme c'est le cas dans les non-savants» (Logik 161, AA IX, 104). Pour Kant, la pre-
exemples mentionnés. mière phrase est un jugement indéfiui parce que «j'ai réelle-
ment affirmé, au point de vue de la forme logique, il est vrai,
. Il. sem?le alors que la différenciation se réduise à la relation puisque j'ai placé l'âme dans la catégorie illimitée des êtres
~lgmfICatJve. des propositions pour la connaissance. Or les qui ne meurent pas », c'est-à-dire: «la sphère d'indéfinité
Ju~ements smguliers contiennent toujours un acte de décision de tout le possible n'est limitée par là qu'en ce qui est mortel
pU.lSqU~ ch~que proposition énonce un prédicat général d'u~ en a été écarté et que l'âme est placée dans l'espace restant
s~Jet sm~l~er, sou~ un certain aspect qui dépend de l'atten- de cette circonscription» (A 72 B 98, tr. 89/90). Cette dis-
t:on P?rtee a un objet concret en faisant abstraction - comme tinction aussi n'est pas admise par la logique fonnelle. Mais,
1 expr~me Kant - de la variabilité des propositions qu'on si on prête attention à « la fonction que l'entendement exerce
peut enoncer concernant le même sujet. Il faut donc tenir ici» (A 73 B 98, tr. 90), il faut remarquer que la périphérie
du jugement n'est pas défiuie par l'exclusion.
6 .. E. KANT, La Dissertation de 1770. Traduction avec une intro- Fichte se réfère expressément à ces jugements indéfinis pour
cl uchon et des notes, par Paul Mouy. Paris, 1942.
7" Dans les ~anuels de logique il y a bien des exemples où la mi- constituer sa méthode dialectique (cf. SW l, 118 GA l, 2, 278,
~UIe du syllogIsme Barbara se trouve être une proposition singulière tr. Philonenko, 35)8. On peut découvrir la relation systéma-
M:. p~ eXi~~le Albert MENNE, Einführung in die Logik (UTB 34)' tique de ce jugement pour la logique transcendantale grâce
, une en fi, p. 66 : «Tous les rectangles ont des diagonale~
é::i:~' »C~tep:~gurde estcl un rectang!e : ce!te. figure a des diagonales
. . an ~r a onc formule ce pnnclpe : Quidquid de omni-
bus valet, vale~ etwm de quidbusdam et singulis. Cf. Joseph Dopp 8. J.G. FICHTE, Œuvres choisies de philosophie première (1794-
Leçons de Loglque, 3 vol., Louvain, 1949/1950, l, 129, 149. J 1797). Traduction de A. Philonenko, Paris, 1964.
104 KLAUS HAMMACllER LA DIALECTIQUE EN TRANSITION 105

aux autres paradigmes logiques que donnent les deux auteurs geant une sphère close et, pour enlever la contrariété, ils ont
pour les propositions indéfiuies. Kant dit dans son cours de institué une médiation par l'intuition - sensible ou intellec-
Logique: «Tout possible est soit A soit non-A» - et infère tuelle - médiation grâce à laquelle identité et non-identité
de ce jugement: «il y a quelque non-A» (Logique 160, AA constituent l'objectivité de la pensée dialectique.
IX, 104). Ce que Fichte écrit dans la déduction du troisième Mais chez Fichte comme chez Kant, il n'y a pas de partage
principe de la Doctrine de la science nous indique d'où vien- complet de l'extension des jugements par exclusion de l'indé-
nent les jugements indéfiuis dans la méthode dialectique : fiui; il Y a cependant une division, comme distribution de
«Par la position d'un non-A, A est supprimé et n'est pas leurs fonctions. Parce qu'il s'agit d'une distribution des
supprimé» - et il infère : «Par conséquent il n'est sup- connaissances, elles sont à distribuer en tant qu'elles sont
primé qu'en partie» (SW l, 111, GA l, 2, 272, tr. Philo- reliées indirectement à l'intuition, c'est-à-dire, chez Kant, aux
nenko, 31). Et il commente la conciliation des énoncés formes de l'intuition a priori, chez Fichte, comme nous le
contraires en cette manière : par un autre exemple : «A est verrons, ce lien à l'intuition est supprimé dans des proposi-
beau (dans la mesure où A contient une qualité qui réside tions contraires. Mais cela ne veut pas dire que l'intuition
aussi dans l'Idéal du beau), est un jugement thétique [ou elle-même contienne le fondement de la division, tandis que
indéfini]' ; en effet je ne puis pas comparer cette qualité avec les contraires distingués dans la distribution sont unis par la
l'Idéal, puisque je ne connuis pas celui-ci» (SW 1,117, tr. 35). fonction de l'imaginationll .
La place du prédicat demeure vide pour la détermination
possible, c'est-à-dire il reste le problème d'un fondement Pour mieux comprendre comment la pensée dialectique
comme tâche (Aufgabe) d'une approche finie de l'infini (SW moderne se développe en relation à l'intuition, il nous faut
l, 117, tr. 34/35). Cela aussi est une maxime méthodique. simplement continuer à examiner en termes logiques la table
Pour Fichte tâche (Aufgabe) est suivant Wolff la traduction des jugements de Kant. Parmi les fonctions de la pensée dans
du latin problema : une expression qui vient de la mathéma- les jugements de relation, nous intéresse à nouveau la troi-
tique où dans un problème les règles sont données pour trou- sième, que Kant appelle la disjonction. Il y comprend des
ver la solutionlO• Je reviendrai à ce problème. jugements qui opèrent une division par laquelle deux ou
même trois propositions s'excluent réciproquement l'une
Kant aussi avait déjà remarqué qu'il s'agit d'une opposi- l'autre. Au contraire, la logique nouvelle désigne par la dis-
tion entre des contraires, mais qui ne contient qu'une exclu- jonction une relation où une au moins des deux propositions
sion de négation. Cela veut dire qu'on n'y peut appliquer est vraie et où peut-être les deux sont vraies (en symboles :
le principe du tiers exclu pour la négation dans une telle p v q où v a la signification du mot latin «vel», non exclu-
argumentation. Le jugement indéfini compris selon la logique sive). On pourrait penser qu'il ne s'agit que d'une équivoca-
formelle s'identifie avec l'opposition de contrariété. Mais en tion entre les deux systèmes, sinon Kant n'admettrait pas la
exerçant les fonctions de jugement selon une «discipline de signification non exclusive mais adjonctive quand nous exer-
la méthode» - c'est ainsi qu'est comprise la logique trans- çons ces fonctions par des jugements sur les objets au moyen
cendantale comme telle (A 83 B 108, tr. 96) - on ne peut des catégories. La combinaison des propositions dans le théo-
pas partager la sphère d'extension du jugement lui-même. rème : «Tous les corps s'attirent réciproquement et se repous-
Or les successeurs de la dialectique fichtéenne, Schelling et sent l'un l'autre» (B 113, tr. 97), représente le schéma de la
Hegel ont compris les jugements contraires comme se parta-
11. Dans son livre La liberté humaine dans la philosophie de
. ~. Quelques lignes plus loin il est rangé parmi les jugements indé- Fichte Paris 1966 Alexis Philonenko a bien montré, pour la pre-
fims. mière 'fois, t~ute l'i~portance de l'imagination pour la dialectique de
10. Cf. à ce sujet mon article indiqué dans la note 3, p. 394, 405. Fichte.
106 KLAUS HAMMACHER LA DIALECTIQUE EN TRANSITION 107

catégorie de l'action réciproque, qui ne relève pas du principe on peut les utiliser dans des opérations. Concrètement la
de contradiction. disjonction a la même matrice que l'addition de la valeur
Cette observation devrait nous étonner. On pourrait s'en p et q, sous la condition qu'il n'y ait pas de valeur supérieure
étonner et objecter que la contrariété vient de l'intUition et à 113• On peut alors transformer la fonction de disjonction
ne peut être levée que dans l'intuition. Mais Kant ne prend en un système arithmétique binaire, c'est-à-dire que la carac-
pas la chose aussi aisément, parce qu'il comprend le pro- téristique de la disjonction dans la logique moderne vient de
blème d'un point de vue d'une théorie de la science. Or de ce la maniabilité. C'est pourquoi on ne voit plus un fondement
point de vue, «il ne devait attribuer aux choses que ce qui dans les faits de l'ordre des fonctions de vérité; elles ne sont
résulterait nécessairement de ce que lui-même y avait mis, plus dotées de signification comme dans la logique ancieune.
conformément à son concept» qu'on réalise «par construc- Cependant la comptabilité des jugements est décidée en der-
tion» (B XII, tr. 17). nière instance, même dans le calcul, par l'état des choses.
Il suit de là qu'on ne peut pas résoudre l'incompatibilité La logique transcendantale comme discipline méthodique
logique en faisant référence à la détermination temporelle cherche à comprendre la genèse des jugements qui intervien-
c'est-à-dire à l'intuition. La proposition «un homme qui es! nent daus la connaissance en analysant leur rapport à l'intui-
non-érudit n'est pas érudit» (A 153 B 192, tr. 159) n'est tion. Souvenons-uous que, d'après Kant, même dans les ma-
pas valide pour Kant. Mais, pour assurer sa validité il ne thématiques, les formes a priori de l'intuition sont consti-
suffit pas d'ajouter, selon la défiuition du principe de ~ontra­ tuantes. Pourquoi n'en serait-il pas de même dans le calcul
diction la détermination du temps comme l'a fait Aristote qui est conçu par analogie avec les mathématiques? Et ne
(Mét. 1055 b 19, 1010 b 18 ssq.). Au-delà il faut remarquer suit-il pas de là que la question de l'origine des fonctions de
le procédé par lequel on a séparé tout d'abord un prédicat vérité n'a de réponse que dans l'analyse des conditions de la
d'une chose du concept de cette chose et par lequel aussi connaissance des choses?
on a ensuite lié à ce prédicat son contraire (A 153 B 192,
tr. 159), ce qui ne constitue une contradiction que si les deux Dans la perspective de la genèse des jugements, la vérité
prédicats sont posés en même temps. se réalise en relation avec les actes par lesquels nous formons
la synthèse cognitive. Pour reveuir à notre problème de la
Kant se présente avec une méthode scientifique au seus disjonction : d'après Kant un jugement disjonctif est d'abord
cartésien. Cela veut dire qu'il fait usage d'une forme de problématique. Le paradigme de Kant : «Le monde eXiste
contrôle différente de la logique moderue. Pour éclaircir la soit en vertu d'un hasard aveugle, soit par l'effet d'uue néces-
différence nous retournons à la fonction de disjonction. La
sité intérieure, soit par une cause extérieure» (A 74 sq. B 99
logique moderue obtient la disjonction par les combinaisons sq., tr. 90) ne détermine pas la question de la vérité. Cette
possibles dans une matrice de validitéu. Les fonctions de
question de vérité devient décisive pour le jugement hypo-
vérité qui forment la disjonction sont organisées pour être
manipulées indépendamment du contenu et par conséquent
13.
Transformation des fonctions de
12. la disjonction dans une matrice
Table de Fonctions de vérité arithmétique
La disjonction somme 1
p q pvq
1 1 1 1 + 1 = 1 0
V F V 0 1
V F V 1 0 1 1 + 0 =
0 1 1 0+1 = 0 1
F V V 0 0
F F F 0 0 0 0+0 =
108 KLAUS HAMMACHER LA DIALECTIQUE EN TRANSITION 109

thétique, c'est-à-dire, d'après Kant, si l'antécédent est donné d'une chose. Fichte a décrit la différence en se servant d'un
réellement, on peut passer au conséquent : en autres tennes exemple géométrique : on ne peut pas construire nn certain
en ce cas nous trouvons la condition. Mais la compréhension angle en supposant que divers points sont situés d'un même
de la vérité d'un jugement quelconque résulte de ce que l'on côté. Il faut construire l'angle et voir si les points s'y trouvent
voit l'implication déterminée par une loi de l'entendement (SW l, 446, GA l, 4, 205). Les hypothèses se vérifient dans
dans nn jugement apodictique (A 76 B 100, tr. 92). La vérité l'expérience. Les expériences font un tri dans ce qui est à
est contrôlée méthodiquement dans la Logique transcendan- rechercher. Mais l'observateur connait ce qu'il a fait en orga-
tale par les actes accompagnés de connaissance réflexive. nisant l'expérience.
C'est ce qne Kant nous enseigne par la division des modalités Kant et Fichte se servent tous deux du concept d'expéri-
du jngement en jugements problématiques, assertoriques et mentation pour caractériser la méthode de recherche de la
apodictiques. conscience. Or, parce qu'il s'agit ici des actions que notre
Kant et Fichte, en réfléchissant sur leur méthode, expri- intelligence exerce sur elle-même, le problème se pose de
ment cette méthode par des formulations presqne identiques savoir en quoi y consiste la vérification expérimentale. Avec
qni paraissent annoncer un solipsisme et au-delà un cercle cette question nous retournons encore une fois à notre débat
vicieux. Kant écrit, comme déjà cité, «qu'il ne devait attri- sur la disjonction. Kant dans une note explicative de la Pré-
buer aux choses que ce qui résulterait nécessairement de ce face de la 2" édition de la Critique de la raison pure caracté-
que lui-même y avait mis, conformément à son concept» rise l'expérimentation en forme d'une disjonction : «On ne
(B XII, tr. 17) et Fichte note : «II est vrai que nous ne pourra donc faire cet examen que sur des concepts et des
connaissons pas les lois par l'observation mais qu'elles sont principes admis a priori en les envisageant de telle sorte que
à la base de toute observation et qu'elles sont moins des lois les mêmes objets puissent être considérés sous deux points
pour la nature indépendante de nous que des lois pour nous- de vue différents d'une part comme objets des sens et de
mêmes indiquant comment nous devons observer la nature» l'entendement dans l'expérience et d'autre part comme objets
(GA l, 2, 136). que l'on ne fait que concevoir, c'est-à-dire comme des objets
Mais il ne faut pas voir un cercle vicienx dans la méthode de la raison pure isolée et s'efforçant de s'élever au-dessus
de la logique transcendantale. Le Moi conscient ne donne des limites de l'expérience» (B XIX, tr. 19).
anx choses que la nécessité qni est contenue dans le concept, Il suit de là que l'expérimentation consiste dans le contrôle
ce n'est pas la même chose que de tirer des conséquences conscient du changement, si nous exerçons les différents actes
d'une définition implicite où elles étaient déjà contenues. du jugement dans la connaissance. La prépondérance métho-
C'est le sens strict du procédé hypothétique dans la recherche dique de la disjonction est déjà remarquable parce que nons
de la natnre, recherche que Kant et Fichte reconstruisent dans l'appliquons pour obtenir la connaissance transcendantale de
la conscience. Pour mieux comprendre ce parallélisme, fon- nos fonctions, connaissance obtenue à travers les jugements
damental pour la dialectique fichtéenne, il convient de faire de la logique pure qui s'excluent les uns les autres. Cela peut
encore quelques remarques sur l'hypothèse. être illustré par l'exemple déjà mentionné de l'ensemble des
Dans ce procédé l'hypothèse ne prescrit que la direction de lois d'attraction et de répulsion dans notre connaissance de
l'investigation et ne contient pas les éléments d'un concept la nature.
de la chose que l'on examine. Si la théorie de la science selon Dans Les principes des fondements métaphysiques de la
Popper maintient que les présuppositions des procédés em- nature, Kant a démontré que ces deux théorèmes (lois d'at-
ployés influent sur les résultats, elle confond deux choses : traction et de répulsion) qui selon lui sont formés d'après le
présupposer uue finalité daus l'objet qu'on veut étudier et schème de la catégorie d'action réciproque ne peuvent pas
suivre la règle qu'on se donne pour atteindre la connaissance être conçus dans la même direction de la compréhension expé-
5
110 KLAUS HAMMACHER LA DIALECTIQUE EN TRANSITION 111

rimentale de la nature. Nous ne pouvons pas penser dans le cendantale. Si la raison juge, elle peut toujours être contrôlée
même système les deux principes qui forment ces théorèmes. par les conditions qui l'appliquent à l'intuition sensible, parce
La répulsion et les forces centrifuges ne sont observées que qu'elle exerce les mêmes fonctions du jugement suivant les
par le mouvement des lieux mais on comprend l'attraction en catégori~s que daus la connaissance. Cependant les jugements
les situant au centre des corps, sans le mouvement. Pourtant de la nuson pure sont exécutés sans qu'on soit contraint de
ce n'est que par la communauté des deux que nous compre- juger d'une façon qui corresponde à l'intuition.
nons les mouvements réels de la nature et nous les com- , Mai.s P?ur tirer de~ conséquences critiques dans le champ
prenons par un jugement disjonctif. (Cf. Metaphysische d ~pplication de la rmson pure, champ qui n'est pas circons-
Anfangsgründe der Naturwissenschaften, 142 ssq. AA IV, cnt par. la représentation dans l'intuition sensible, on peut
556, 559 ssq.) au~sI fmre us~ge ~e la possibilité positive d'une procédure
Il faut souligner que Fichte déclare que la catégorie d'ac- stnct?ment ,?ethodIque. Je pense que c'est la possibilité que
tion réciproque est la plus importante de toutes les catégories la ~hil~sophle post-kantienne a sentie dans sa première étape.
kantiennes et que, dans son dernier système de la Doctrine de M,alS. c est ~a chance que seul Fichte a saisie complètement.
la Science, il développe ses déductions d'une disjonction fon- AinsI ~e presentent des problèmes de dialectique pour Fichte
damentale". du pomt de vue méthodique et ils n'ont rien à voir avec
l'exp,érience directe ?e l'intuition sensible. Ils ne peuvent
pas etre démontrés dIrectement dans l'expérience sensible.
II
M~s la c~ance que Fichte a trouvée était préfigurée dans
Nous avons parcouru les fonctions du jugement de la table la phIlosophie de Kant lui-même. La transition à la dialec-
des formes logiques et des catégories de la Logique transcen- tique est en continuité avec la Logique transcendantale de
dantale en contraste avec la logique formelle et nous avons K~nt. ~l me reste à exposer cette transition de la pensée
trouvé les germes de la dialectique fichtéenne. Fichte a déve- method.,que en passant par Maimon et Reinhold qui à nou-
loppé sa méthode dialectique à partir de la première partie de veau dIscutent la signification de la logique transcendantale
e~ aux~uels Fichte doit aussi son concept du principe dans la
la Logique transcendantale de Kant, c'est-à-dire de l'Analyti-
dIalectIque.
que transcendantale. C'était la thèse que je voudrais prouver.
Mais Kant lui-même, dans une note de la Préface de la se- Alors o~ peut découv~ un sens positif de la dialectique
conde édition, nous a dit qu'analyse et dialectique sont liées dans la Crtllque de la raIson pure, sens qui est lié à la mé-
ensemble, en se servant une autre fois de la forme disjonctive thode développée dans l'Analytique transcendantale; il se
pour exprimer cette relation : les connaissances que l'analyse tr.ouv~ dans les Remarques sur l'amphibolie des concepts de
sépare sont réunies par la dialectique dans l'idée de l'incon- reflexlon, sous le nom traditionnel déjà mentionné de To-
ditionné; cette réunion ne se produit que par distinction pique. Ici topique est compris comme une «doctrine qui
que montre l'usage réductif de la raison dans l'analyse (B XXI, nous préserverait foncièrement des surprises de l'entendement
tr. 20). Concrètement cela veut dire qu'il nous faut compren- et des illusions qui en découlent> (A 268 B 325, tr. 236 _
dre les antinomies de la dialectique transcendantale grâce souligné par moi). De là on peut découvrir la possibilité d'un
aux fonctions du jugement déjà analysées. En ce sens l'ana- contrôle par «comparaison des représentations qui précède
lyse porte sur le champ méthodique de la dialectique trans- l~ ~oncept des choses» (A 269 B 325, tr. 237). Cela se
re~hse dans ?ne comparaison qui se rapporte à la possibilité
qUi ne ~~ut etre pensée que dans les relations qui se distin-
14. Cf. Die Wissenschaftslehre von 1804. J.G. FICHTE, La Théorie guent recIproquement selon leurs perspectives mais se com-
de la Science. Exposé de 1804. Traduction, préface et notes par Di-
dier Julia, Paris, 1967. plètent les unes les autres.
112 KLAUS HAMMACHER LA DIALECTIQUE EN TRANSITION 113

Tel est le sens positif de la dialectique comme méthode, comparaison de Kant avec la philosophie traditionnelle peut
sens caché dans l'exposition des antinomies. Si on ne com- nous éclairer: en discutant avez Leibniz il dit qu'une goutte
prend la dialectique qu'objectivement, co=e théorie de d'eau se distingue d'une autre en faisant abstraction des déter-
l'apparence, la solution de cette apparence doit être consi- minations quantitatives et qualitatives (c'est-à-dire de l'intni-
dérée co=e se développant à partir des opposés, en se tion sensible) non pas par la vraisemblance graduelle de leur
référant immédiatement à l'intuition. comportement observé mais parce qu'elles sont aperçues en
On peut tout d'abord définir le concept de possibilité avec même temps à des lieux différents (A 264 B 320, tr. 234).
une formule caractéristique de Kant : «En réalité, la possi- La possibilité dépend des conditions de la connaissance et
bilité absolue (qui est valable à tous les points de vue) n'est parmi ces conditions se trouvent aussi les formes de l'intni-
pas un simple concept de l'entendement et ne peut d'aucune tion sensible. Fichte fait précisément de cette pensée de la
façon être d'un usage empirique possible de l'entendement; possibilité le fondement de sa méthode dialectique et en ter-
elle n'appartient· qu'à la raison qui dépasse tout usage pos- mes de psychologie transcendantale la situe dans le «flotte-
sible empirique de l'entendement» (A 232 B 285, tr. 210- ment de l'imagination ,,". Cependant il la comprend aussi
211). La pensée du possible ouvre donc une sphère qui ne d'une manière strictement formelle. C'est certainement la
peut pas découler des concepts purs de l'entendement. D'autre nouvelle logique de Salomon Maimon qui l'y a amené. Chez
part cette pensée peut faire comprendre co=ent nos juge- ce dernier le concept kantien de la possibilité négativement
ments sont toujours rapportés aux «conditions formelles de exclusive est transformé logiquement, c'est-à-dire que le dou-
l'expérience» (ibid.). De ces pensées possibles il ne suit pas ble sens ou «amphibolie" dans la détermination catégoriale
que les énoncés contradictoires dans les lois de la nature, est pris logiquement pour saisir les opposés. Même quand il
comme nous l'avons mentionné, sont directement levés dans y a une contradiction formelle entre les énoncés des lois de la
l'intuition sensible. D'après Kant, la possibilité de penser nature comme nous l'avons vu, c'est-à-dire s'il y a une
quelque chose en ce sens est toujours la possibilité de connaî- contradiction logique des énoncés, lesquels cependant ne
tre une chose, mais non pas de la penser comme pouvant être s'excluent plus s'ils sont rapportés à l'intnition sensible, il
réelle. Un exemple pris par Kant de l'histoire de la méta- en découle seulement, d'après Maimon, «qne la simple
physique peut expliquer cela : pour Descartes, la connais- absence d'une contradiction ne donne pas encore la pensée
sance du triangle, à partir de la règle de sa construction avec d'un objet réel et, bien que dans le cas présent l'objet est
la so=e des angles égale à deux droits, équivaut à l'évidence réel, il n'est réel que du point de vue de la faculté d'intnition
de l'existence de Dieu, avec cette différence que l'existence
possible d'un pareil triangle n'est pas affirmée (V. Méditation
A.T. VII, 64-66). Au contraire Kant établit que même la
possibilité d'un pareil triangle reste toujours douteuse bien 15. Dans son livre déjà cité, La liberté humaine dans la philoso-
phie. de F.,ichte, Alexis Philonenko croit que Fichte ne pense pas que
que nous ayons le concept d'un tel triangle. Pour la vérité de sa dialectIque est une méthode pour construire sa théorie mais qu'il
cette connaissance, on ne peut pas se référer à la réalité d'une ne l'emploie que pour réduire à l'absurde les argumentations tradi-
tionnelles formulées en manière logique. Assurément c'est à partir de
existence donnée. Il faut le comprendre dans toutes ses condi- ce point de vue qu'on peut apprécier la dialectique de Fichte en
tions pour le saisir dans sa possibilité transcendantale (A 223/ opposition à la logique, particulièrement son argumentation indirecte
24 B 271/272, tr. 203). Il s'agit ici, pour le sens transcen- par négation. Mais le lien avec les argumentations de Maimon et de
~ei~old m~t;rifeste déjà l'i?-tent~on systémati~ue. Cependant, la signi-
dantal de la dialectique, de comprendre qu'il y a un rapport fIcatIOn positlVe de cette dialectique ne peut etre perçue que si on la
indirect à l'intuition dans la pensée de la possibilité. Kant comprend comme pensée méthodique. Concernant les fautes d'argu-
menta~ion commises par Fichte dans ses conclusions des propositions
lui-même ne l'a pas remarqué mais il s'impose à ses succes- contralfes et remarquées par Philonenko, cf. mon artic1e indiqué ci-
seurs par la possibilité conçue traditionnelle. Une antre dessus.
114 KLAUS HAMMACHER LA DIALECTIQUE EN TRANSITION 115

·ble et non pas du point de vue de la faculté de penser» dans l'opposition bien connue que nous retrouvons chez
~~'::such über die Transzendentalphilosophie. p. 360-361). Reinhold entre l'universel et le nécessaire (op. cit., 32 ssq.).
C' t pourquoi il faut réaliser une transformation consi- Or, en tant que Reinhold comprend par le principe de la
déra;;e dans cette pensée méthodique en con?,aste av~c la représentation ce qui doit faire saisir cette différence, et sans
logique formelle, plus importante que la réfleXIOn ~antien~e subordonner seulement sous une forme de validité des raisous
à partir de la logique formelle. Cela sera. déve~op?: ~omple­ suffisantes, il apporte dans le concept de raison une différen-
t ment dans des réflexions sur les fonctions JudlC~alres des ciation mais qui n'est pas conçue chez lui logiquement: «La
c:tégories kantiennes. Dans l'exécution .d'un tel ~roJe\{épon­ représentation est distinguée, dans la conscience, du repré-
dant à la recherche critique des catégories de Mannon,' nous senté et du représentant et elle se rapporte aussi, à l'un et à
retrouverions la contradiction logique, que Kant a leve;, .dans l'autre» (op. cit., 144). Puisqu'il ne s'agit ici que d'une consi-
l'attribution catégoriale des jugements se complétant rec~pro­ dération méthodique, négligeons la signification de ce prin-
quement et qu'il a exposée excellemment dans la C~té?one de cipe, sans rien ajouter à la formulation et demandons seule-
l'action réciproque, chez Fichte d~s le~ ,;o.ntradlctions l?- ment quelle est sa relation au concept de raison suffisante.
giques développées dans les procédes antitheliques et synthe- Il y a donc deux directions de pensée divergentes, c'est-à-dire
tiques qui se complètent réciproquement. distinguer et relier. Représenter devient raison suffisante en
distinguant les caractères spécifiques que j'attribue comme
Le principe de contradiction ne suffit plus comme p~cipe prédicats à un sujet; représenter devient anssi raison suffi-
à partir duquel, dans la logique transcendantale on pe~t Ju~er sante en tant que je rapporte une sensation à quelque chose
des procédés propres à l'entendement dans les ~ate~o~Jes. comme étant la raison de cette chose (op. cit., 155 ssq., 354
Karl Leonhard Reinhold a cependant perçu la necesslt.e de ssq.).
trouver un nouveau principe à partir duquel on pe;tt Juger Cependant ces déterminations n'étaient pas représentables
formellement et matériellement sur les actes opposes de la logiquement pour Reinhold parce que les caractères sont
pensée et les accorder ensemb~e. Nous ne ~;nons compte 5lue compris par l'attribution de prédicats à un sujet et les sen-
'de ce qui concerne la fondalion f~~elle : Pour celle~cl. la sations seront rapportées à un être qui sera tiré par une
philosophie scolaire de Wolff offrail a Remhold le pnnc:pe équivoque de la copule, ce que Reinhold a remarqué lui-
de raison. Cependant ce principe n'est pas reconn~ p~r Rem- même.
hold comme principe premier et absolu ?~r~~ qu il n est que
logique. Par suite il ne voit la «posslblhte» que comme Maimon a renforcé la prétention logique de la pensée si
elle doit procéder méthodiquement. Cela oblige Fichte à ren-
« Possibilité d'être pensé» (Denkbarkeit) et c'~s~ aussi insuf.
verser le procédé méthodique en argumentation logique. Si
fisant. Ce principe ne contient que «l'hypoth~tiqueme~t ~é­
je renvoie un prédicat à un sujet logique dans la proposition:
cessaire» et non pas «l'absolument-nécessarre» (Belfrage
« L'oiseau est un animal », les deux formes de la raison suf-
zur Berichtigung bisheriger Missverstiindniss~n, 37 ssq:, 110
ssq.). Par conséquent Reinhold parle de rmsons suffisantes fisante sont en jeu, la raison de relation, le concept de l'ani-
au pluriel (op. cit., 41, 71). Et celles-ci à leur tour se trouvent mai mais qui ne peut pas être employé que parce qu'on fait
abstraction de la raison de différence, c'est-à-dire des diffé-
rentes espèces d'animal, bipèdes, quadrupèdes, avec fOUriure
16 En ce qui concerne Salomon Maimon, voir aussi M. GUÉROULT, ou avec plumes (SW I, 116, GA I, 2, 276, tr. 34). Qu'est-ce
La hilosophie de Salomon Maimon, Paris, 1929.
ç
1 Au sujet de Reinhold, voir aussi, outre les travaux fc:'ndame!l~
taux 'd'A. Klemmt : Karl Leonhar~ Rein~olds ~lemento;rphliosoph~e.
qui rend possible deux actes de pensée différents mais ne
nous permet d'exécuter l'un qu'en faisant abstraction de
Hamburg 1958 et maintenant aUSSl : Phllosophte aus emem PrmZlp. l'autre?
Karl Leo~hard 'Reinhold. Herausgegeben von Reinhard Lauth, Bonn,
1974. Ce sont des jugements thétiques. Fichte décrit, dans sa
LA DIALECTIQUE EN TRANSITION 117
116 KLAUS HAMMACHER
terminologie dialectique: «La totalité consiste en la complé-
Grundlage des jugements thétiques en tunt qu'ils diffèrent
tude d'un rapport et non pas dans une réalité» (SW l, 204,
des jugements antithétiques qui indiquent la raison de dis-
GA l, 2, 349, tr. 93). Cette formule a été même confirmée
tinction, et des jugements synthétiques en tant qu'ils indiquent
par la logique moderne".
la raison de relation. Par là il renverse la démarche logique
Fichte comprend la réuuion des énoncés formellement
traditionnelle et il peut fonder cela en snivant sa pensée
contradictoires qui se trouvent dans des conuaissances scien-
méthodique. Il fant remarquer un acte de la pensée qui est tifiques par nn contrôle méthodique, c'est-à-dire par nne
supprimé dans la logique traditionnelle. Là apparaît la dé-
position de quantité dans le moi ou la conscience". C'est la
marche que snit la logique formelle, arbitrairement et sans
raison pour laquelle une totalité peut être pensée. Fichte
fondation méthodologique : en tant qu'elle élève les opposés
appelle cela la catégorie de la détermination (Bestimmung)
à un concept supérieur, «plus uuiversel, plus compréhensif »,
et par là il a rendu formellement saisissable la catégorie
ajoute Fichte, le concept d'espèce, et exige à partir de là kantienne de l'action réciproque comme acte dialectique d'une
qu'nne certaine définition doit donner la raison de rela-
pensée qui se saisit dans la connaissance.
tion comme raison de distinction, c'est-à-dire, dans leur ter-
minologie, la différence spécifique, elle a chaque fois pré-
supposé nn acte de pensée qu'elle n'avait pas nommé. Par
exem~le dans la phrase: «l'or et l'argent sont des métaux »,
la logique a supprinlé la raison de la distinction, c'est-à-dire
leurs couleurs différentes par lesquelles ils sont caractérisés
comme tels (SW l, 118, GA l, 2, 278, tr. 35).
La méthode dialectique de Fichte cherche à suivre le pro'
cédé de la pensée - c'est-à-dire précisément la pensée scien-
tifique. Ce qui est distingué par une opposition devient équi-
valent non pas à un concept « supérieur» mais à un concept
« inférieur », c'est-à-dire par divisibilité ou, en termes kan-
tiens, par limitation. La synthèse est non une « montée» mais
une «descente» (SW l, 119, GA l, 2, 279, tr. 36). Et si on
peut exiger là aussi une «invention », c'est-à-dire la «tâche»
mentionnée au commencement de notre exposé, elle se trouve
dans un ordre de la pensée qui est conforme à la démarche
scientifique.
Quand on se forme un concept du fer, on le pense en ter-
mes logiques comme substance, sans tenir compte du mou-
vement. Mais cependant il manifestera dans le mouvement
ses propriétés spécifiques (SW l, 193 sq., GA l, 2, 340 sq.,
tr. 85 sq.). On attribue au fer le mouvement quand on le
reconnaît comme se comportant d'une muuière très spécifique 18. Cf. Whitehead Russel, Principia Mathematica, p. 38.
dans le mouvement, par exemple s'il y a de l'attraction ma- 19. Comme Martial Guéroult dans son livre qui a fait époque,
L'Evolution et la Structure de la Doctrine de la Science chez Fichte
gnétique. Une définition du fer ne peut pas contenir ce qni Paris, 1930, je comprends Fichte expressément à partir de la méthod~
est pensé réellement en lui. Une défiuition complète ne peut de penser commençant avec Descartes, laquelle a conduit à fonder
douc être donnée que par exclusion du réel, ou, dans nne philosophiquement la science moderne.
REINHARD LAUTH

KANTS LEHRE VON DEN "GRUNDSATZEN


DES VERSTANDES» UND FICHTES
GRUNDSATZLICHE KRITIK DERSELBEN

Kants Darlegungen in der Kritik der reinen Vernuntt


dienen unter anderen dem Zweck zu zeigen, dass wir das,
was die Natur ist, keineswegs der Erfahrung (ais Historie)
allein entnehmen, sondem dass die Natur nns ais ein ge-
ordnetes Ganzes nur dadurch gegeben ist, dass wir reine
Formen des Geistes, Denk- und Anschauungsformen, ent-
falten und auf das, was die Erfahrung allein uns gibt, die
bestinnnten Empfindungen, anwenden. Andererseits erhellt
die KI'. d. r. vtt. aber auch, dass wir die Natur nicht aus
blossen Begriffen, selbst wo wir diese auf Anschauungen be-
ziehen, erkennen kaunen, sondem dazu auf eine mannig-
faltige besondere Gegebenheit von Empfindungen, die nns
nur die Erfahrung gibt, angewiesen sind, um wirkliche Gegen-
stande und deren Verhaltnis untereinander zu erkennen.
Jene apriorischen Elemente der Naturerkenntuis, die Ka-
tegorien, deren Schematisierung, d.i. Beziehnng auf Zeit
nnd Raum, uns die Grundsiitze des Verstandes liefert, geben
uns nur die Form einer Erfahrung überhaupt und in dieser
ein «Ding überhaupt », anders gesagt eine Verbindung des
Mannigfaltigen, wodurch es überhaupt geordnetes Objekt un-
serer Erkenntuis zu sein vermag. Das Bestimmte dieses Ob-
jekts gibt allein die Erfahrnng. «Der Verstand », schreibt
Kant in der Kritik der Urtheilskratt, «ist zwar a priori
im Besitze allgemeiner Gesetze der Natur, ohue welche
sie gar kein Gegenstand einer Erfahrnng [cf. ais Empirie]
seyn kaunte : aber er bedarf doch auch über dem noch
eirer gewissen Ordnung der Natur, in den besonderen Regeln
120 REINHARD LAUTH DiE GRUNDSATZE DES VERST ANDES 121

derselben, die ihm nur empirisch [sc. historisch] bekannt würde» (Kr. d. U., XXXI), niimlich einer « Zweckmiissigkeit
werden kiinnen und die in Ansehung seiner zufiillig sind» der Objekte », unter einer ffu uns iikonomischen Anzahl
(1. Aufl., S. XXXIII). besonderer Gesetze erfasst zn werden.
Es ergibt sich somit folgende grundsiitzliche Konstitution «Nun behaupte ich », schreibt Kant (in der Kr. d. r. Vft.,
der Natur : «Die Materie [ ... ] der Erscheinungen, wodurch A 111), «die [... ] Categorien sind nichts ander[e]s, ais
uns Dinge im Raume und der Zeit gegeben werden, kann die Bedingungen des Denkens in einer mëglichen Erfahrung,
nur in der Wahruehmung, mithin a posteriori vorgestellt so wie Raum und Zeit die Bedingungen der Anschauung zu
werden. Der einzige Begriff, der a priori diesen empiri- eben derselben enthalten. Aiso sind iene auch Grundbegriffe,
schen Gehalt der Erscheinungen vorstellt, ist der Begriff Obiecte überhaupt zn den Erscheinungen zu denken, und
des Dinges überhaupt, und die synthetische Erkenntniss von haben also a priori, obiective Gültigkeit». Es sind die reinen
demselben a priori kann nichts weiter, ais die blosse Rege1 Denkformen, «deren Verhaltuiss zur Sinnlichkeit überhaupt
der Synthesis desjenigen, was die Wahmehmung a posteriori [ ... ] aIle transscendentale Grundsiitze des Verstandesge-
geben mag, niemals aber die Anschanung des realen Gegen- brauchs vollstandig und in einem System» ergibt. (Kr. d. r.
standes [,] a priori liefem, weil diese nothwendig empirisch vtt., B 187/88). Grundsiitze heissen diese, «weil sie die
seyn mnss. » (Kr. d. r. Vft., B 748.) Gründe anderer Urtheile in sich enthalten» (ib.); sie sind
Wir haben also zweierlei in Betracht zu ziehen nnd niiher synthetische Urteile, die erst die Einheit des Mannigfaltigen
zu untersuchen, um die Konstitution der N atur zn verstehen : in der Anschauung ermiiglichen. Die reinen Verstandesbe-
das apriorische Rahmengerüst, d.i. «allgemeine [Gesetze] griffe sind in ihnen «aIs Begriffe von Anschauungen über-
der materiellen Natur überhaupt» (Kr. d. U., 309), die die haupt» «in Ansehung eines oder des andem [Moments]
Vemunft gibt, und das empirische Material, das die Sinne zu Urtheilen [ ... weiter] bestimmt [ ... ]. Hierdurch [sind] die
uns zuliefem. Dabei wird sich die Frage stellen, ob und wie Grundsiitze a priori der Miiglichkeit aller Erfahrung, aIs
wir von der apriorischen Grundverfassung der N atur zn einer ohjektive gültigen empirischen Erkenntuiss, ganz genau
einer geordneten Vorstellung (<< Erfahrung» im Sinne einer bestimmt ». (Prolegomena, S. 85.)
Verarbeitung der einzelnen Data auf ihren durchgehenden Das heisst, die Denkformen werden auf die erscheinende
Znsammenhang bin) der besonderen Verfassung dieser N atur Realitiit bezogen und von ihr priidiziert. Das geschieht aber
kommen kiiunen. nur über die beide Seiten vermittelnde Zeit- und Rauman-
Von Erfahrung in diesem Sinne kann nur gesprochen wer- schauung. Die Empfindungen, ais das erscheinende Ob-
den, wenn sich eine «durchgiingige nnd synthetische Einheit jektive, werden in Zeit und Raum aufgefasst; auf die zeit-
der Wahruehmungen» (Kr. d. r. Vft., A 110) herstellen Iiisst. lich sich darbietenden Empfindungen werden die Kategorien
Es ware niimlich prinzipiell auch denkbar, «dass ein Ge- bezogen, d.i. aIs Begriffe von diesen Anschauungen ausge-
wühle von Erscheinungen unsere See1e ausfüllete, ohne dass sagt. Auf diese Weise kommt es zn denjenigen Satzen, durch
doch daraus iemals Erfahrung werden kiinte» (ib. A 111). die alle Erfahrung bestimmt ist. «Erfahrung aber giebt den
Dies wird zuniichst einmal durch den transzendentalen Ein- Fall, der unter der Regel steh!. » (Kr. d. r. vtt., A 159.)
heitsgruud aller empirischen Begriffe von Naturgegebenhei- Nach Kant ergeben sich entsprechend den von ihm festge-
ten verbindert. Die Erfahrung ist durch die «syuthetische stellen vier Kategoriengruppen (Quantitat, Qualitat, Rela-
Einheit der Erscheinungen nach Begriffen» (ib. A 110) ge- tion und Modalitat) vier Arten von Grundsatzen, die er
wiihrleistet. Auf der anderen Seite bedarf es einer gewis- « Axiome der Anschanung» (für die Quantitat), «Antizipa-.
sen Besc~affenheit der Anordnung der Empfindungen, «weil tionen der Wahmehmung» (für die Qualitat), «Analogien
sonst kem durchgiingiger Zusammenhang empirischer Er- der Erfahrung» (für die Relation) und « Postnlate des empiri-
kenntnisse zn einem Ganzen der Erfahrung stat! finden schen Denkens überhaupt» (für die Modalitat) nennt. Die
r 1

122 REINHARD LAUTH DIE GRUNDSÀTZE DES VERSTANDES 123

Grundsatze der ersten beiden Kategoriengruppen, «mathe- Die apriorische Antizipation der Wahrnehmung wird da-
matische» genannt, beziehen sich bloss auf das anschanliche durch moglich, dass die Qualitatskategorien Realitat, Nega-
Sein, die der beiden letzten, «dynamische» genannt, auf das tion und Limitation auf das «Reale der Empfindung»
durch Denken zu erfassende empirische Dasein der Er- (B 207) bezogen werden, d.L auf dasjenige, wodurch das
scheinungen. Die ersteren müssen notwendig angesetzt wer- Subjekt affiziert wird und was es aufs Objekt bezieht. Jede
den, um die Erscheinungen überhaupt aufzufassen; die Empfindung wird in einem einzigen Augenblick (und nicht
letzteren führen «zwar auch den Character einer Nothwen- sukzessiv von Teilen aufs Ganze gehend) apprehendiert.
digkeit a priori, aber nur unter der Bedingung des empirischen « Nun ist aber iede Empfindung einer Verringerung fiihig »
Denkens iu einer Erfahrung» (Kr. d. r. vtt., A 160) bei (A 168), fabrt Kant fort. Diese erfolge gradweise vom rea-
sich; sie haben diskursive, die mathematischen Grundsatze len Bewusstsein bis zum Aufhoren aller Realitat in einem nur
hingegen intuitive Gewissheit. noch formalen Gegenstandsbewusstsein (z.B. einer mathemati-
Nach der 2. Auflage der Kr. d. r. Vtt. bedürfen wir, um schen Kugel). Zwischen bestimmter Realitat und Negation
die Moglichkeit der Dinge zufolge der Kategorien zn ver- derselben bestehe ein kontinnierlicher, in einer unendlichen
steh~n, urspriinglich immer iiusserer Anschauungen (B 291), Unterteilbarkeit in immer minderen Graden moglicher Fort-
«weIl der Raum allein beharrlich bestimmt» (ib.). Da wir gang. Kein Teil an Intensitat ist dabei der kleinst!"oglic~e.
uns in dieser Betrachtung sowieso nur mit der Konstitution «[Es] ist vom empirischen Bewusstseyn znm remen eme
der Aussennatur befasseu, lassen wir diese Behauptung stufenartige Veranderung moglich, da das Reale desselben
Imerortert Iiegen. ganz verschwindet, und ein bloss formales Bewusstseyn (a
Die «Axiome der Anschauung» ergeben sich durch die priori) des Mannigfaltigen in Raum und Zeit üb~g bleibt :
Beziehung der Begriffe Einheit, Vielheit, Allheit auf das in also auch eine Synthesis der Grossenerzeugung emer Emp-
Zeit und Raum Angeschaute. Infolge ihres Befasstseins in den findung, von ihrem Aufange, der reinen Anschauung = 0,
Anschauungsformen sind die Erscheinungen extensive Gros- an, bis zn einer beliebigen Grosse derselben. » (B. 208.) Der
sen, d.L Synthesen von mannigfaltig Gleichartigem mittels der Grundsatz, durch den aIle Wahrnehmung antizipiert werden .
genannt~n D.enkformen, wobei nach Kant «die Vorstellung kann, lautet somit : In aller Erscheinung hat das Reale eme
der Thelle dIe Vorstellung des Ganzen moglich macht (und intensive Grosse. Diese und ihre «unendliche Stufeufolge
also nothwendig vor dieser vorhergeht)>> (ib. A 162). Der immer niederer [oder hoherer] Grade» (A 172) erlaubt
apriorisch gewisse Grundsatz, dass aIle N aturerscheinungen erneut eine Anwendung der Mathematik auf das Naturobjekt
ihrer Anschauungsweise nach extensive Grossen sind, macht (was spater für die Kraftbestimmung von Bedeutung ist).
« .die reine Mathematik in ihrer ganzen Priizision auf Gegen- Die apriorische Antizipierbarkeit der Wahrnehmung ais
stande der Erfahrung anwendbar» (ib. 165). intensiver Grosse erreicht Kant in Wirklichkeit nur, indem er
Kant lasst (im Gegensatz zu Fichte und spater Hegel) be- die gegebene Verschiedenartigkeit von Empfindungen voraus-
merkenswerterweise die Kategoriengruppe der Quantitat der- setzt..Dass jede Empfindung veriinderliche Intensitat besitzt,
jenigen der Qualitat vorangehen. Einer der Gründe dafür wüssten wir nicht, wenn wir nicht vel'schieden intensive Em~
dürfte sein, dass er das Aussenobjekt schrittweise in der An- pfindungen empirisch hatten. In einer (abstrakt denkbaren)
schauung (blosse Quautitat), Wahrnehmnng (quantitative Bewusstseinssituation, in der nur Eine Empfindung stets
Qualitat), iu der Erfahrung und im empirischen Denken gleicher Intensitat gegeben ware, wüssten wir nichts von
konstituiereu will. Die Schematisierung der Quantitatskate- Intensitat, sondem nur von einem eigenstiindigen Sein der
gorien ergibt noch keine Realitat, sondern nur anschauliche (in Zeit und Raum verbreiteten) Empfindung (also zngleich
Extensitat, eine Beschaffenheit, die auch dem rein Anschau- von deren Nichtsein an je anderer Stelle nnd von der gegen-
lichen znkommt. seitigen Limitation). Insofem geht Kant hier zn weil. Auch
124 REINHARD LAUTH
DIE GRUNDSATZE DES VERSTANDES 125
muss der Satz Von der volligen Kontinuitiit der Empfindungs_
[anderen] nothwendig verbunden sey» (A 179). Kant be-
starke bestritten werden. Wenn es verschiedene Empfin-
dungen geben solI, muss jede Empfindung von der anderen zeichnet die Verhiiltnisgesetze auch ais «regulative Princi-
in ihrem Empfindungscharakter verschieden sein, kann aber pien» (A 179), weil sie uns eine unumstOssliche Regel an
eben darin nur diskontinuierlich (wenn auch vielleicht in die Rand geben, bei gegebener Mehrheit von Wahmehm-
Gradstufen auffassbar) verschieden sein. ungen zu ihnen jeweils ein bestimmtes Relationsglied (bzw.
Glieder) aufzufinden.
Nach Kants Ergebnissen liisst sich durch die beiden mathe-
matischen Gmndsiitze zusammenfassend sagen : «Alle Er- In der ersten Analogie wird der immer wechselnden Appre-
scheinnngen [der Aussenwirlichkeit] überhaupt sind dem- hension der Erscheinungen etwas «Beharrliches» unterlegt,
nach continuirliche Grossen, sowol ihrer Anschauung nach, «von welchem aller Wechsel nnd Zugleichseyn nichts, ais
ais extensive, oder der blossen Wahrnehmung (Empfindung so viel Arten (modi der Zeit)>> sind, wie das Beharrliche
und mithin Realitiit) nach, ais intensive Grossen.» (A 170.) existiert. (A 182). Wir legen gedanklich ein Substrat unter,
an dem Wechsel und Zngleichsein wahrgenommen werden
Die aus der dritten Kategoriengmppe hervorgehenden konnen (B 225). Das im Zeitfluss Wechselnde bekommt eine
«Analogien der Erfahrung» betreffen das Verhaltnis der Unterlage, die dauert; sie, ais Substanz, wird veriindert,
Wahrnehmungen ais extensiver und intensiver Grossen unter- wiihrend das Wandelbare einen Wechsel erleidet. «Durch
einander mit Bezug auf ihr Dasein in der Zeit. Wir haben es das Beharrliche allein bekomt das Daseyn in verschiedenen
bei dieser «Erfahrung» mit einer nnr gedanklich zu fassen- Theilen der Zeitreyhe nach einander [ ... ] Daner.» «Denn
den «Synthesis der Wahrnehmnngen, die selbst nicht in der in der blossen Foige allein ist das Daseyn immer ver-
Wahmehmnng enthalten ist» (B 218) zu tun, die ihr Dasein schwindend und anhebend.» (A 183.)
betrifft, nicht nnr das Verhiiltnis, «wie es in der Zeit
Es fiillt auf, dass Kaut in der 2. Auflage der Kr. d. r. vtt.
zusammengestellt» erscheint. (B 219.) Durch Verhiiltnisse
das Zugrundelegen eines Beharrlichen mit der viel engeren
dieser Art kommen wir erst zu einer «Natur », d.L einem
V oraussetzung zu identifizieren sucht, dass das Quantum der
«Zusammenhang der Erscheinungen, ihrem Daseyn nach,
Substanz « weder vermehrt noch vermindert» (B 224) werden
nach nothwendigen Regeln» (A 216). «Die drey Analogien
kann. Das zeigt NB., dass Kant bei der Funktion der Grund-
der Erfahmng [ ... ] sind [ ... ] Grundsiitze der Bestimmnng der
siitze des Verstandes teils an die Konstitution der umnittel-
Erscheinnngen in der Zeit, nach allen drey modis derselben,
baren Erfahrung, teils an die der wissenschaftlichen Erfah-
dem Verhiiltnisse zu der Zeit selbst, ais einer Grosse (der
rung denkt. Streng genommen ergibt die Anwendung der
Grosse des Daseyns, d.i. die Dauer [richtiger : Erstreckung]),
Inhiirenz- und Subsistenz-Kategorien aber nur, dass in der
dem Verhiiltnisse in der Zeit, ais einer Reihe (nach einander),
Natur «ais Inbegrif der GegensHinde iiusserer Sinne» (Kr.
endlich anch in ihr, ais einem Inbegriff alles Daseyns, (zn-
d. U., 309) eine tragende Substanz, ein Hypokeimenon, dem
gleich).» (A 215.) Der allgemeine Grundsatz aller Relation
Wechsel der Verandemngen nnd dem Zugleichsein von
lautet : «Alle Erscheinungen stehen, ihrem Daseyn nach,
Erscheinnngen unterlegt werden muss, wenn es zu einer
a priori unter Regeln der Bestimmnng ihres Verhiiltnisses
zusammenhiingenden Erfahmng kommen sol. Ais Grosse
untereinander in einer Zeit.» (A 176/77.) Die Relationen
aufgefasst, mnss diese Snbstanz notwendig ais mit sich iden-
sollen das Verhiiltnis des Mannigfaltigen, «nicht wie es in
tisch angesetzt werden. Das besagt aber gar nichts darüber,
der Zeit [von der Apprehension] zusammengestellt wird,
ob eine etwa anzunehmende physikalische Snbstanz in ihrem
sondern wie es objectiv in der Zeit ist» (B 219), bestimmen.
Sie lassen sich ais solche nicht mathematisch konstrnieren; riiumlichen Vorhandensein oder ihrer Gesamtkraft vermehrt
oder vermindert werden kann.
wir konnen nnr a priori angeben, wie Eine Erscheinnng,
Dnrch die zweite Analogie wird die Foige der Erscheinun-
«dem Daseyn nach, in diesem modo der Zeit, mit iener
gen nach dem «Grunsatz der Erzengung» verstanden :
126 REINHARD LAUTH DIE GRUNDSATZE DES VERST ANDES 127

« Alles, was geschieht l ... ] sezt etwas voraus, worauf es nach bestimmen. Das ist aber nur der Fall, wenn beide in Kausal-
einer Regel folgt. » (A 189.) Es geht dabei um das Verhiiltnis relation zueinander gebracht werden, uud zwar in die dop-
des Wahrgenommenen untereinander, nicht um die Zuf1illig- pelte : B aus A und A aus B. Denn nnr dasjenige, was Ur-
keit der sich folgenden Apprehensionen; es geht um eine zu sache ist, bestinnnt einer Erscheinung aIs seiner Wirkung ihre
denkende Gesetzlichkeit, die etwas «Objektives» konsti- zeitliche Stelle. A in t, bestimmt, dass B in t, ist ; und B in t,
tuiert. Das anzunehmende Verhaltnis ist hlerbei stets das bestimmt, dass A in 1, ist. «AIso muss iede Substanz (da
einer Kausalitat, d.i. dass jedes Wahrgenommene stets Wir- sie nur in Ansehung ihrer Bestinnnungen Folge seyn kan)
kung einer Ursache ist, die dieser vorhergeht. B kann deshalb die Caussalitat gewisser Bestimmungen in der an<lem, und
dem eintretenden A nnr folgen, niemals ibm vorhergehen. zugleich die Wirkungen von der Caussalitat der andem in
« Also geschleht es immer in Rücksicht auf eine Regel, nach sich enthaIten» (A 212). Ohne ein solches Commercium
welcher die Erscheinungen in ihrer Folge, d.i. so wie sie ge- kiinnten wir es wohl tnit isolierten Kausalreihen, aber nicht
schehen, durch den vorigen Zustand bestimt sind, dass ich mit einer Einheit aller Erfahrung zu tun haben. Auch in der
meine subjective Synthesis (der Apprehension) obiectiv « Gemeinschaft» denkt übrigeus Kant die Kausalitat in dem
mache, und, nur lediglich unter dieser Voraussetzuug allein, zuvor bezeichneten objektiv modalen Notwendigkeitsverhalt-
ist selbst die Erfahrung von etwas, das geschieht, miiglich» nis.
(A 195). Die einzelne Erscheinung erhaIt hierdnrch ihre Die vierte Art von Grundsatzen, die «Postulate des empi-
(kausal-) bestinunte Stelle. rischen Denkens überhaupt », bestimmt nach Kant nichts am
Kant geht aber noch einen Schritt weiter : er erklart nicht Objekt, sondem nnr dessen Verhaltnis zum Erkenntnisvermii-
nnr ftir deuknotwendig, dass jedes Geschehnis eine Ursache gen. (A 219.) Diese Postulate lauten : « 1. Was mit den forma-
hat, er unterstelIt auch das objectiv modale Verhiiltnis, dass len Bedinguugen der Erfahrung (der Anschauung nnd den
auf ein A jederzeit notwendig dasselbe B und nur dieses Begriffen nach) übereinkomt, ist miiglich. 2. Was mit den
folge. (A 193, 198, 200.) Wir wissen übrigens nach Kant materialen Bedingungen der Erfahrung (der Empfindung)
nur, dass alles, was geschieht, notwendig Wirkung einer zusammenhlingt, ist wirklich. 3. Dessen Zusammenhang mit
Ursache ist; das Wie erkennen wir nicht, nicht eimnal in dem Wirklichen nach allgemeinen Bedingungen der Erfah-
seinem generellen Modus. (A 206/207.) rung bestimt ist, ist (existirt) nothwendig.» (A. 218.)
Der Grundsatz der «Gemeinschaft» ais Satz der dritten Anders ausgedrückt heisst das, dass die in den Grund-
Analogie besagt, dass das (im Raume) zugleich Wahrgenom- satzen aus den drei ersten Kategoriengruppen ausgesproche-
mene in Wechselwirkung miteinander stehen muss. Wir nen Gesetze, wenn sie erfül1t sind, etwas vorzustellen er-
kiinnen nach Kant immer nnr Eine Erscheinung nach der lauben, das in der Erfahrung miiglich ist. Ist so etwas in der
anderen apprehendieren. Stellen wir nun fest, dass wir ein B Empfindung gegeben (und nicht nnr angenommen), so ist es
sowohl vor A ais auch nach A wahruehmen kiinnen, so halten wirklich. Was nach den Analogien der Erfahrung zu einem
Wir beide für gleichzeitig existierend. Was aber garantiert uus, wirklich Wahrgenommenen hlnzugedacht werden muss (i.e.
dass die wechseIseitige Folge nicht nnr in. der Apprehension, das Beharrliche, die Ursache bzw. Wirkung und die Wech-
sonderu ais Kausalfolge auch in den Objekten ist? «Ohne selnrsache bzw. -wirkung), ist notwendig zu denken.
[Kausal-] Gemeinschaft ist iede Wahrnebmung [... ] von der Diese Denknotwendigkeit, die ja ein Verhaltnis des Ob-
anderu abgebrochen» (A 213/214), und wir hatten nur von jekts zum (subjektiven) Denken desselben bezeichnet, muss
einander ganzlich isolierte Kausalreihen. SolI die Gleich- nicht mit der rein objektiven Notwendigkeit verwechselt
zeitigkeit nicht nnr eine solche der Apprehension sein (A werden, aIs die Kant die Kausalitat versteht, insofem eine
nach B, wie gleicherweise B nach A), so muss B dem A und Erscheinung B stets die gleiche Ursache A haben solI.
A dem B seinen Zeitpunkt, und zwar denselben Zeitpunkt, N ach allem Dargelegten führt die Schematisierung der
128 REINHARD LAUTH DIE GRUNDSATZE DES VERSTANDES 129

Kategorien nur zu einer Ontologie aIs einer Wissenschaft die Wissenschaftslehre die systematische Konstitution der
yom ausseren Objekt überhaupt, nicht aber zu dem, was Kant (lnnen- und) Aussenwelt. «Das V ernünftige Wesen han-
« Physiologie» nennt, d.i. zu einer Wissenschaft yom Inbe- delt; u. handelt auf eine gewisse bestimmte Art. Man findet
griff gegebener Gegenstande. Kant fragt nun : «Wie ist es in seinem Handeln etwas einfarmiges, festes, stets wieder-
maglich, nach Principien a priori, [ ... ] zu einer rationalen kommendes : Z.B. den Begriff der Kausalitat [angewendet].
Physiologie zu gelangen?» und antwortet : «Wir nehmen Diese Handelnsweisen [des Verstandes] heissen, nachdem
aus der Erfahrung nichts weiter, aIs was nathig ist, uns sie begriffen sind, [ ... ] AIIgemeinBegriffe, wenn man die
ein Object [ ... ] des ausseren [ ... ] Sinnes zu geben. [Das] implicite Regel in Satze bringt, Grundsiitze der Vft. » (Akad.-
geschieht durch den blossen Begriff Materie [ ... ]. Uebrigens Ausg. II, 4, S. 49.)
mmsten wir in der ganzen Metaphysik dieser Gegenstande, «Anf Veranlassuug eines [ ... ] Anstosses anf die urspriing-
uns aller empirischen Principien ganzlich enthaIten, die über liche Th1itigkeit des lch produciert die [ ... ] EinbiIdungs-
d[ies]en Begriff noch irgend eine Erfahrung hinzusetzen kraft etwas [ ... ] zusammengeseztes [cf. das Bestimmbare].
machten, um etwas über diese Gegenstande daraus zu ur- Da im Ich, laut seines Begriffes, nichts seyn kann, das. es
theilen.» (B 875/876.) Diese Materie fasst Kant aIs ein im nicht in sich setze, so muss es anch jenes Faktum in slch
Raum Ausgedehntes, Bewegliches auf, das durch Kraft wirkt. setzen, d.i. es muss sich dasselbe urspriinglich erkl1iren,
Es muss mindestens zwei derartig materieIIe Gegenstande vollstandig bestimmen nnd begrüTIden. Ein System derjenigen
geben. Die rationale Physik legt einen solchen empirischen Thatsachen welche in der urspriinglichen ErkIiirung jenes
Minimalbegriff zugrunde. Kant, das ist ffu unser Interesse Faktum im' Geiste des vemünftigen Wesens vorkommen, ist
entscheidend, kommt nur über eine solche empirische Anlei- eine [ ... ] Wissenschaftslehre [ ... ]. Ich sage mit Bedacht :
he zu einer Physik. die ursprüngliche Erklarung jenes Faktum. Dasselbe ist ohne
Fichtes grunds1itzliche Kritik an Kants durch die Grund- unser wissentliches Zuthuu in uns vorhanden; es wird ohne
satze des Verstandes bestinunten Ontologie, aIs Wissenschaft unser wissentliches Zuthun [ ... ] nach den Gesetzen und der
von den aUBseren Gegenstanden überhaupt, hebt mit der Natur eines vemünftigen Wesens erklart.» (Gr. d. E., S. 2.)
Bemerlrung an, dass Kant, indem er nur eine Kritik, kein Da Kant in seinem durch die Kritik (nicht : System) be-
System der Vemunft lieferte, nur bei den apriorischen Vor- dingten Ansatz einseitig von den aIs apriorisch vorgegebenen
aussetzungen in bestinunten Bereichen des Geistes ansetzen Kategorien über deren Schematisierung zur Empfindung
konnte. Sa schreibt er : «Kant, der die Kategorien ursprüng- fortgehen musste, konnte er von der anderen Seite diese
Iich ais Denkformen erzeugt werden Iiisst, und der von seinem Empfindungen nur aIs ein Gegebenes in Ansatz bringen.
Gesichtspunkte [cf. der Kritik] aus daran viiIlig Recht hat, «Kant geht aus von der Voraussetzung, dass ein Mannig-
bedarf der durch die EinbiIduugskraft entworfnen Schemate, faltiges für die miigliche Aufnahme zur Einheit des Bewust-
um ihre Anwenduug auf Objekte maglich zu machen» seyns gegeben sey, und er konnte, von dem Punkte aus, auf
(Grundriss des Eigenthümlichen der Wissenschaftslehre, 1795, welchen er sich gesteIlt hatte (cf. yom Punkte der Kritik aus] ,
S. 76). «In der Wissenschaftslehre [cf. aIs einem System der von keiner andern ausgehen. Er begrüTIdete dadurch das be-
Vemunft] entstehen sie [sc. die Kategorien] mit den Ob- sandre für die theoretische Wissenschaftslehre.)} (Gr. d. E.,
jekten zugleich und um dieselben erst maglich zu machen, S. 3.) Die Wissenschaftslehre geht hingegen yom Schweben
anf dem Baden der EinbiIdungskraft.» (ib.) der EinbiIdungskraft und dessen Prodnkt aus und verfolgt
Das Schweben (dialegein) der Einbildungskraft zwischen systematisch die Bestimmung des letzteren durch die Vernunft.
dem durch den Anstoss verendlichten und dem die Unend- Sie zeigt, wie das Gefühl zur Empfindung und Wahrnehmnng,
lichkeit ausfülIenden Ich liefert ein Bestimmbares, das von die WaIrrnehmung durch das Verstandesdenken zur Erfahrung
der Vemunft bestimmt wird. Von diesem Punkte aus verfolgt wird uud wie die Erfahrung im empirischen Denken (und
131
130 REINHARD LAUTH DIE GRUNDSATZE DES VERSTANDES

reflektierenden Urteilen) znr Vorstellun einer' .. schreibt Fichte schon in den Eignen Meditationen « Kant
N atur verarbeitet wird. g einhelthchen. bezieht bloss mehreres Nicht Ich auf einander. 1ch beziehe
Dabei ergebeu sich nuu charak . . [cf. zuvorderst] das absolute NichtIch, aufs absolute lch.»
iu der Methode, in der Systematik u~~n~tis~he ?nterschiede (Akad.-Ausg. II, 3, S. 91.) So wird gezeigt, dass Empfiudun-
stimmungen. N ach Fichte muss von Anfang m en emzelneu
an b h Be- . geu nur objektiviert werden, wenn ihnen eine (Kraft) Substanz
werden, dass der Gegenstand nicht e erZigt untergelegt wird; nur dadurch sind sie mr das Subjekt etwas
sondern auch durch praktische M nur durch ~he?retische, Selbstandiges. Desgleichen wird deren Hemmendsein durch
In Fichtes Entfaltun d . ~mente konstltUlert wird. den Begriff der Ursache, die auf das Subjekt einwirkt, erkIart,
g er apnonschen K t' .
ausseren Objekte findet' . ons ltutlva der iInd nur dadurch ist das Objekt mr UlIS ein «wirkliches»
der W.L. nova ;"ethod~ 7~:~ _":..n slCh selbst am Beginn Diug. Endlich muss der Begriff der Gemeinschaft immer in
« die bisher gewohnliche Abthel' usg. IV, 2, S. 17) sagt, Anweuduug kommen., weil die Wirkung des Nicht-Ich nur in.
retische und praktische nicht stl ~ngs der Philosop.~ie in .theo- Einheit und Verbindung mit der Wirkung des Ich gedacht
phie überhaupt vor _ theoretis~h' ondern e~ tragt Philoso-
[ ... er] zieht [ ... ] das praktisch:?"d :aktls~he vereinigt;
werden kann.
Aber die Entfaltung dieser Relationen in Bezug auf das
um aus jenem dieses [' . ms eoretlsche heruber hemmende GefühI ist nur dann moglich, wenn es mehrere
. m gewlSsen Stücken] kr'
Allerdings stelIte dies, ais Fichte di zu er aren.» und verschieden.e GemhIe im Bewusstsein gibt. «Kant geht
sammten Wissenschaftslehre und d eG Grun~lage der. ge- in der Kritik d. r. Vft. von dem Reflexionspunkte ans, auf
thümlichen schrieb, «eine Freiheit :nd ru~drzss ~es Elgen- welchem Zeit, Raum, und ein Mannigfaltiges der Anschau-
nicht herausznnehmen getra t ar, die er slCh «noch ung gegeben, in dem Ich, und ffiT das Ich schon vorhanden
Konstitutivmomente im Pr~~:~h:odass. er die praktischen sind.» Die WL hat dies erst ais notwendig zn deduzieren.
getrennt darsteIlte, obwohi sie auc~ Jeli der Grun~lage ... (Gr. d. E., S. 108.) Weil Kant das nicht leistet, kon.nte er
theoretischen in Einheit gedacht ama~s schon Illit den auch nnr «ein koIIektives AIlgemeines, ein Ganzes der bis-
Leser, dass er die in den 5waren. Dies erfordert yom herigen ErfaiIrung, ais Einheit unter den gleichen Gesetzen,
erarbeiteten Bestimmungen : § G und fge. der. Grundlage erklaren ». (ib., S. 3.) Leugnet der Gegner diese Voraus-
tensitat, Kraft auf die in § 4 eds egenstandes, Wle z.B. In- setznngen ais notwendig, so kan.n Kant ihn nicht wideriegen.
. . ' er Grundlage d' G
YlSZ des Elgenthümlichen entfaIt t ?" un ru~­ «Dass ffiT eine mogliche Erfahrung ein Mannigfaltiges ge-
mungen aufprojiziert um di G e en theoretlschen Bestim- geben sey, muss erwiesen werden; und der Beweiss wird
In der Systemat& ergibte Sic~~t~?nstitution ~ erfass.en. folgendenuaassen gemhrt [ ... ] : das gegebene musS etwas
dass das Gemhl nicht ais b unachst auf diese Welse, seyn, es ist aber nur insofern etwas, inwiefern es noch ein
dem praktischen Handeln ~;;e I~n angese~zt, s~ndern aus anderes giebt, das auch etwas, aber etwas anderes ist».
stoss»). Gemhle entstehen durch ~ abgeleltet Wlrd (<< An- (Gr. d. E., S. 4.)
g
Aktivitiit des Ichs. Sie werden durc;m,;"un der setzenden. lm Grundriss des Eigenthümlichen wird, von diesem Be-
Ich abgehoben und in dieser Abh b die Aoschauung yom weis der Notwendigkeit mehrerer Empfindffilgen ffiT das Zu-
griffen. e ung Yom Verstand be-
standekommen des Bewusstseins ausgehend, gezeigt, dass
Dabei ergibt sich aber etwas f"" . . letztere nur extensiv in Zeit und Raum gegeben sein kon.nen.
Charakteristisches durch d
.. . '
. .urdie Wlssenschaftslehre
as sie slCh von d K 't'k d Die Differenz in der lntensivitiit ist durch das Verschieden-
satzhch unterscheidet .. D'le K ategonen
. treter niin1l'
1 grnn-
h b . sein der Empfindungen (Qualitiit) gegeben - und da sie durch
der Gegenstandskonstitution nicht l' h en n lC el praktische Konstitution. vorhanden ist, braucht Fichte sie nicht
bestimmungen, sondern zunachst ~o~ el~ ais Gegenstands- ais blosse empirische Gegebenheit subreptiv znm Apriorischen
haltnisses des Gegenstandes (N' aht l ehs)timmungen des Ver- zu erheben. (Es bleibt natfiTlich Ruch bei Fichte, im Gegen-
lC - C znm Ich auf. So
132 REINHARD LAUTH DIE GRUNDSATZE DES VERST ANDES 133

satz zu Schelliug uud Hegel, reiu empirisch, i.e. historisch zu Uebereinkommende; ob es mit den Bedingungen des [mo-
konstatieren, weIche lntensitaten auftreten : nur das. eine dalen] Denlœns ühereinkommen wird, weiss ich noch nicht. »
Verschiedenheit zur Konstitntion des Bewusstseins sein muss «Daraus würde folgen [ ... ], dass Erkliirung vieles Wirklichen
Hisst sich a priori nachweisen.) Die verschieden intensiven nicht moglich ist. » (Eigne Meditationen, II, 3, S. 162.)
Empfindungen ihrerseits veranlassen zur Entfaltnng von Ex- «Eine gründliche und vollstandige Philosophie hat den
tension in Zeit und Raum (Quantitat), durch die allein sie Grund anfzuzeigen, warum [ ... ] einiges uns aIs znfiillig er-
appositionell gegeneinander abgegrenzt und zueinander in scheine [ ... ]. Was uns in dieser Forschung leiten kann, ist
ein noch nicht kategoriales Verhaltnis gesetzt werden konnen. die Bemerkung, dass das Merkmal der Zufiilligkeit [ ... ] ein
lm empirischen Denken werden die ais Snbstanzen ursachlich Zeichen ist dass etwas ais Produkt unsrer Freiheit gedacht
in objektiver Gemeinschaft gestellten und so ursprünglich werde ». Aber dann muss man denken, «dass unsre Freiheit
erfahrenen Aussenwirklichkeiten als zufanig oder notwendig selhst ein theoretisches Bestimmungsprincip unsrer Welt
gedacht (vgl. Akad.-Ausg. II, 4, S. 147), in Beziehung auf ris!] ». (Das System der Sittenlehre, Akad.-Ausg. l, 5, S. 77.)
sinnliche Empfindung aIs moglich oder unmoglich. (ib., « Für jene Urvolker, von denen wir noch Denkmaler haben,
S. 211.) die ihre Erfahrungen wenig vereinigten, sondern die ein-
Fichte ist, im Gegensatz zu Kant, der hei dem letztern zelnen Wahrnehmungen zerstreut in ihrem Bewusstseyn liegen
anzutreffenden Konfusion von nrsprünglicher Erfahrnng und liessen, war keine soIche, wenigstens weit fortgehende [mo-
empirischem Denken nicht unterworfen. Was «ohne unser dale] Kausalitat, noch Wechselwirkung. Fast alle Gegenstande
[cf. in seknndarer Reflexion] wissentliches Zuthun, bloss in der Sinnenwelt belehten sie [cf. und verstanden sie so ur-
durch, und nach den Gesetzen [ ... ] eines vernünftigen We- sprünglich auch relational kausal, d.i. überhaupt verur-
sens » gedanklich investiert wird, neunt Fichte « die ursprüng- sachend und bewirkend], und machten dieselben zu ersten
liche Erklarung. - Etwas ganz anderes ist die wissentliche, freien Ursachen, wie sie selbst waren. Ein soIcher allge-
und wissenschaftliche Erklarung. » (Gr. d. E., S. 2.) meiner [modal notwendiger] Zusammenhang hatte für sie
nicht etwa keine ReaUtat, sondern er war überhaupt nicht da
So sieht Fichte sehr genau, dass wir ur.prünglich zwar für sie. Wer aber seine Erfahrungen zur [vollstandigen] Ein-
b. immer als aus einem a. erfolgend erfahren; dass dies aher heit [des empirischen Denkens] verkuüpft, [ ... ] der musS
keineswegs schon hedeutet, das a. notwendig stets h. mit nothwendig anf jene [modale] Weise verknüpfen, und für
sich führt. Das Objektive wandelt notwendig, hedeutet ihn hat der dadurch gegebene Zusammenhang des Ganzen
hinsichtlich der Kausalitat nur : «wie a. anhebt, ist für den Realitat. » (Akad.-Ausg. l, 3, S. 336.)
Verstand schon h.» (Akad.-Ausg. II, 3, S. 124) und wo b. Was wir aIs in modal notwendiger Wechselwirkung stehend
ist, nimmt der Verstand ein ursachliches a. au. Wir hahen wissenschaftlich denken, das wird uns zur Natnr. Die Weil
dadurch «eine fixirte, nothwendige, nach Gesetzen [cf. der der Freiheit denken wir anders, und die Welt des Zweckhaf-
Ursache und Wirkung] sich richtende Wandelharkeit; u. das ten entsteht uns durch Kombination eines spezifischen Frei-
ist deun die Kausalitat.» (II, 3, S. 128.) Dass a. ais not- heitsmomentes, des Zweckes, mit einem spezifischen Natur-
wendig einzige Folge h., und b. aIs notwendig einzige Ur- moment, der modal notwendigen Wechselwirkung.
sache a. hat, - diese modale Notwendigkeit schreibt erst Hier sei nur noch anmerkend hinzugefügt, dass abgeleitete
«die wissentliche, und wissenschaftliche Erkliirung» der Pradikabilien, wie z.B. die Bewegung, nach Fichtes Einsicht
Aussenwirklichkeit zu. In diesem Bereich kann man auf die immer erst yom Verhiiltnis des Ich zum Nichtich - im ge-
Frage : «Muss alles Wirkliche mit der Regel [notwendiger gebenen Falle : Linienziehen - abgezogen werden müssen,
Kausalfolge] übereinstimmen?» nur antworten : «Woher um auf das Verhiiltnis von Ohjekten untereinander ange-
sollte das folgen? Wirklich ist das mit der Empfindung wandt werden zu kounen. «Bewegung» ist allerdings nach
-
134 RE1NHARD LAUTH DIE GRUNDSATZE DES VERST ANDES 135

Fichte schon ein Begriff der reflektierenden UrteiIskraft, zu andern TheiIen fortgetrieben werde.» (Akad.-Ausg. l, 3,
dem diese uur kommt, indem sie Substanz und Akzidenz S. 377.)
verwechselt. Es besteht zwischen den Konstitutivmomenten, die in je-
Das Verhiiltnis der Uebertragung aufs rein Objektive gilt dem Falle benutzt werden, wo nnr überhaupt Vorstellung von
auch für aIle praktischen Momente. Sobald das Gefühl in der Aussenwirklichkeit ist, und denjenigen, die eine gewisse
Anschauung objektiviert wird, wird auf die Objekte aIs Hem- Freiheit der Reflexion zur Bedingung haben, insofem kein
mungen Kraftiiusserung übertragen. Kraftiiusserung auf sich Unterschied, ais sie inuner vom !ch auf das Nicht-!ch über-
solbst, sodass das Gegebene « bestinunend und bestimmt zu- tragen werden. «!ch trage, laut der W.L. auf die Natur den
gleich» ist, ist lntensitiit des Gegenstandes. Die Substauz Begriff meiner selbst über, [in der freien Reflexion] so weit
wird aIs Kraft, deren Akzidenz die Kraftiiusserung ist, ver- ich es kann, ohne die N atur selbst zu vemichten» (Siitze zur
standen, der Hemmuugswirkung irn !ch denkt der Verstand Erliiuterung des Wesens der Thiere, Akad.,Ausg. II, 5, S.
eine Ursiichlichkeit im Gegenstand entsprechend. lntensitiit 421), d.i. ohne sie zur personalen Manifestation zu machen.
Kraftiiusserung und Kraft werden analog im Verhaltnis de; Das wahre Substrat der N atur ist darum «ein bloss
Objekte zueinander obwaltendgedacht. Die reflektierende Bestimmbares », das von der Vernuuft bestimmt wird.
UrteiIskraft geht auch noch darüber hinaus, sie versteht das « Dieses ist die Natur ihren durchaus unerkliirbaren und un-
Objektive aIs bewegt, zweckgerichtet und organisiert, endlich begreiflichen GrundElementen nach.» (Akad.-Ausg. II, 5,
im hiichsten Bereich ais frei aufrufend und antwortend. S. 422.) Aus diesen « ursprünglichen Begrenzungen» (Akad.-
Ausg. IV, 1, S. 36), die in ihrer Bestimmtheit nur historisch
« Unser empfindendes !ch, in sofern es erkliirbar ist, ist erfahren werden kiinnen, baut die Vernuuft ihre Naturer-
das Objekt. Es ist immer Eins, ob wir die Erscheinung zu fahrung (Erfahrung ais Empirie, nicht Historie) auf. « Wie
Grund legen, u. die Regel mit ihr vergleichen; oder die Re- ist [ ... ] denn nun in diesem Zusammenhange zu erkliiren, [ ... ]
gel, u. mit ihr in der Hand die Erscheinungen aufsuchen, u. warum [... ] eine solche Beschriiuktheit gesetzt werden müsse
ordnen. Es ist der Gang eines Experiments, wie Kant [Kr. [ ... ] ihrem Materiale nach; d.h. warum diese Beschriinktheit
d. U. Einleitung, Kap. V] sag!. » (Akad.-Ausg. II, 3, S. 190.) gerade so gedacht [sc. vorgestellt] werde, wie sie gedacht
Man kann die Frage aufwerfen : « Welche Realitiit solI denn wird [ ... ]. Da hier scblechthin nicht weder Dinge an sich,
nun jenen ausserhalb des Umkreises alles Bewusstseyns noch Naturgesetze ais Gesetze einer Natur ausser uns ange-
liegenden, und irn Bewusstseyn nicht gesetzten Handlungen nommen werden sollen; so liisst diese Beschriinktheit sich
zukommen, wenn nur dem Realitiit zukommt, was durch das nur 80 begreifen, dass das lch selbst num einmal sich so
Ich nothwendig gesezt wird?» - und Fichte antwortet beschriinke, und zwar nicht etwa mit Freiheit und Wmkühr,
darauf : «Natürlich keine, ausser inwiefern es gesez! wird ». denn dann ware es nicht beschriinkt, sondern zufolge eines
(Akad.-Ausg. l, 3, S. 336.) immauenten Gesetzes seines eignen Wesens ; durch ein N atur-
« Was heisst denn verstehen, oder begreifen? » fragt Fich- gesetz seiner eigenen (endlichen) Natnr. [ ... ] diese Einrichtung
te. « Es heisst festsetzen, bestimmel!, begrenzen. !ch habe liiszt sich [... ] nicht weiter erkliiren.» (Akad.-Ausg. l, 5,
eine Erscheinung begriffen, wenn ich ein vollstandiges Gan- S. 101.)
zes der Erkenntniss dadurch erhalten habe, das allein seinen «Alle Eigenschaften der Materie, - diejenigen, welche
TheiIen nach in sich begründet ist [ ... ]. Dadurch erst ist aus den Formen der Anschanung herkommen, allein abgerech-
es vollendet, oder begrenzt. - !ch habe nicht begriffen, net, - sind nichts anders, ais die Beziehungen derselben
wenn lch noch im Erkliiren [begriffen] bin, wenn mein auf uns, und insbesondere auf unsre Wirksamkeit [ ... ] : es
~afürhalte~ noch ein Schweben, und a1so noch nicht befestigt sind die Verhiiltnisse unsrer bestimmten Endlichkeit zu un-
ISt; wenn lch noch von den TheiIen meiner Erkenntniss zu srer angestrebten Unendlichkeit.» (Akad.-Ausg. l, 5, S. 100.)

, i

136 REINHARD LAUTH

« Wenn man soIche einzelne Beschriinknngen zusammenfasst,


lilld ausser und vor aller Zeit denkt, so werden es absolute
Schranken. [ ... ] Durch diese Schrankung ist nun meine Welt
praestabilirt, wiefern sie Welt, objektiv ist; das Subjektive
in mir ist keines weges praestabilirt.» (Akad.-Ausg. IV,
1, S. 35.) «In der vorliegenden Natur sind von jedem Punkte JOACHIM WIDMANN
aus [uns] unendliche Richtungen [zu nehmen] moglich. -
Ueber diese kann, die also [aIs Gesamtbeschr1inkung] ange-
sehne Natur, durchaus nichts bestimmen : weil hierüber in EXISTENZ ZWISCHEN SEIN UND NICHTS
ihr nichts liegt. Das Wissen reist sich hier [ ... ] vom Seyn
los; oder die Natnr lasst es los, was ganz dasselbe ist. - das
Richtung geben. Hier ist das freiseyn absolutes formales Ge- Fichtes Daseins - Analyse von 1805
setz. Zwar wie das !ch eine Richtung nimmt, fallt es wieder
unter das Naturgesezt, das der Concretion [ ... ] Die Natur
bestimmt [dann] die lntelligenz allerdings, aber nicht nach
ihrem, sondern nach der Intelligenz immanentem Gesetze. Eines der erstaunlichsten Dokumente zur Gedaukenge-
[... ] die Intelligenz [ ... ] macht daher die Naturreihe ». (WL schichte des Existentialismus findet sich im Nachlass von
1801/02, II. Teil, § 8.) Johann Gottlieb Fichte. Das bislang unveroffentlichte (und
Das bedeutet nun, dass die Natur oder richtiger gesagt, darum der Existentialismus-Diskussion praktisch unbekannte)
deren Substrat überhaupt nicht in einer fertigen Ordnung Manuskript mit der Bezeichnung «4ter Vortrag der Wissen-
gegeben, sondern nichts ais ein urspriingliches Bestimmbares schaftslehre - . Erlangen, im Sommer 1805 ,,1 enth1i1t 30 Vor-
und ais solches pluripotentiell ist; erst die Handlungen der lesungen Fichtes über die transzendentale Grundlegnng seines
Vernunft, welche aber, von den Gnmdkonstitutionen abge- Denkens.
sehen, im Fortgange frei ist, erstellen eine bestimmte Welt, Verschiedene Merkmale weisen diesem Text einen hohen
bestimmt durch die Koustitutionsmomente des lch ebenso Rang zu, ebenbürtig der berühmten zweiten Vortragsreihe'
wie durch die qualitative Bestimmtheit und die anschauliche über die «Wissenschaftslehre» von 1804, wenn sie nicht
Ordnung, in der sich das Mannigfaltige von sich aus prasen- sogar an Kraft und Konzentration des Gedankengangs über-
tiert. Unsere Welt ist eine der für uns moglichen Welten, die bietend. Die Frucht intensivster, von ausseren Ablenkungen
wir durch unsere freie Progression zur Wirklichkeit erhoben kaum gestorter fünfjahriger Arbeit und die Erfahrungen aus
haben. In der Wahrnehmung - abgesehen von der Richtrmg, drei Berliner Vortragszyklen im Jwe 1804 verbinden sich
die wir ihr geben, - uud im ursprünglichen kategorialen hier mit einer Phase 'schopferischer Hochleistung, in der
Beziehen auf uns sind wir vollig gebunden, in den hOheren Fichte glaubte, «nur zugreifen zu dürlen», um seine Ge-
Bestimmungen relativ frei. Der Erkenntuistrieb wird aller-
dings nur befriedigt, wenn er den Gegenstand so weit, ais es 1. J.G. FICHTE, «4 ter Vortrag der Wissenschaftslehre» (abgek.
ihm überhaupt nur moglich ist, erklart. Dabei ist die Er~ hier: WL 1805) Ms. III 10 a im J.G. Fichte-Nachlass der Deutschen
klanmg nach den Grundsatzen des Verstandes nur der erste Staatsbîbliothek Berlin. Éntzifferung von H. Gliwitzky in Vorbereitung
bei Felix Meiner Verlag, Hamburg. - Die Zitate sind vom Verf. der
Schritt, dem der zweite des Reflektierens der Urteilskraft und modernen Orthographie und Interpunktion angepasst, die haufigen
der dritte der Sicherklarung des Wissens folgen muss, wo Abkfuzungen in Fichtes Text sind ausgeschriebe:n. .
konsequent anf das Ende zugegangen wird. 2. J.G. FICHTE, Die Wissenschaftslehre. Zwetter Vortrag lm. Jabre
1804 vom 16. April bis 8. Juni. Gereinigte Fassung hrsg. v. Remhard
Lauth und Joachim Widmann. Hamburg, 1975 (abgek. WL 18042).
-
138 JOACHIM WlDMANN EXISTENZ ZWISCHEN SEIN UND NICHTS 139

danken in einleuchtendster Form vortragen zu künnen'. Auch aber sei der Grundirrtnm und die Quelle aller übrigen
erlaubte ihm der aussere Rahmen eines Privatissimums vor Irrtümer'.
anderu Universitiitsprofessoreu, auf aile propadeutischen Eine soIche gedankliche Unterscheidung ist jedoch nur
oder gar populiir fasslichen Umschreibungen der Keruge- moglich, wenn überhaupt Wissen vom «Sein» existiert. Und
danken verzichten und diese in einer bis dahin einmaligen wie wird in einem soIchen Vorverstiindnis das Wesen des
Direktheit aussprechen zu künnen'. Seins gedacht? Ais «von sich selber, in sich selber, durch
Das alles verleiht den Formnlierungen dieser Vortragsreihe sich selber, sich bestimmend ,'. Aber eben durch eine solche
eine Authentizitat, die für die mittlere Schaffensperiode Beschreibung widerfiihrt dem «Sein », was seinem wesent-
Fichtes von keinem anderu Text übertroffen wird. Fichte hat lichen U nterschied zum Existenten widerspricht : es wird wie
hier eine Art Künigsweg in das Zentrum seines Philoso- ein pradizierbares Seiendes behandelt, aIs Objekt des Denkens
phierens gebahnt. projiziert, in die Form eines bestimmbaren Existenten trans-
Gerade an diesem Weg aber reissen in unheimlicher Un- formier!.
mittelbarkeit und Foigerichtigkeit jene Abgründe auf, in die Dieser Widerspruch allerdings ist unvermeidlich, wenn das
sich ein Jahrhundert spater die Existential-Philosophie ge- Sein überhaupt bedacht werden solI. Doch nicht nur das :
worfen fand : Das Problem des Seins im Unterschied zum die Existenz dieses Widerspruchs ist ihrerseits notwendig,
Seienden - die Koufrontation mit dem Todeshauch des damit überhaupt der Unterschied zwischen dem Wesen des
Nichts - die. absolute Herausforderungdes Existenz. Seins und dem Wesen der Existenz bewusst werden kann.
Blosse Denkverweigerung erbringt hier gar nichts. Erst wenn
das Denken sein Bedenken des Seins überdenkt, kann ihm
1 aufgehen, dass seine Existenz nicht das reine Sein ist, sonderu
etwas anderes : das «Daseyn des Seyns »'.
Fichte hatte über ein J ahrzehut in immer neuen Ansatzen Hier nun kommt auch die entscheidende transzendentale
nach einer konzentrlerten Problemformel gesucht, aus der Wendung zum Tragen, die Fichte schon in den «Vorerinner-
sich quasi more geometrico aile elementaren Fragen der ungen ,> am Eingang der V ortrage umriss : Eine Existenz, die
Philosophie entfalten und sukzessive zur Lüsung bringen sich ais solche begreift, « weiss» von sich, ist sich ihrer selber
lassen sollten. 1805 sah er diese Ursprungsformel in der bewusst aIs eines existierenden Daseins. Sie ist «sich wis-
einfachen Frage «Was ist Existeuz? »'. sende Existeuz» oder, was dasselbe bedentet, «existentes
In einer ersten Analyse konstatiert Fichte nicht nur, dass Sich-Wissen ». Mit dieser Ueberlegung bekriiftigt sich Fichtes
zwischen «Existenz» und «Sein» ein grundlegender Unter- Einleitungsbehauptung « die Existe~z ist Wissen .10.
schied zu setzen sei, sonderu merkt zugleich nachdrücklich Zugleich wird mit dieser Definition von Existenz eine
an, auf diese Unterscheidung komme in der Transzendental- priuzipielle Ueberwindung der dualistischen Subjekt-Objekt-
philosophie « alles an : sie zu machen ist die Bedingung, oime Spaltung sichtbar : Die Existenz ist in diesem ihrem Sich-
welche nicht »'. Nur in der seichten und oberflachlichen An- wissen beides in einem, Subjekt und Objekt ihres Wissens-
sicht wird die Existenz zum «Seyn selbst gemacht», der aktes. In Fichtes Terminologie : sie ist ein «Ich». Dabei
Charakter des Seins «an die Existenz weggeworfen»; dies ist nachdrücklich zu erinnern, dass (entgegen weitverbreiteten

3. J.G. FICHTE, Briefwechsel, hrsg. v. Hans SchuIz Bd. II, S. 596. 7. Ibid., p. 3 r f.
4. WL 1805, p. 1 r. 8. Ibid., p. 3 r.
5. Ibid., p. 2 v. 9. Ibid., p. 4 r.
6. Ibid., p. 3 r. 10. Ibid., p. 2 v.

140 JOACHIM WlDMANN


EXISTENZ ZWISCHEN SEIN UND NICHTS 141
Missverstandnissen) Fichtes Ich-Begriff eine definitorische sagen : Das «Daseyn des Seyns» aIs das «wahrhaft realiter
Festlegung ist, mit der eine Existenzform bezeichnet wird, Existierende» ist «der gôttliche Begriff.".
die sich ihrer selbst und zugleich auch reflexiv ihres Selbst-
Bewusslseins bewusst ist. Hierin beruht die LegitimWit aller rationalen Wissenschaft :
Das Verstehen der Welt ist miiglich, weil aile Existenz und
Da Fichte in den Erlanger Vortdigen für das absolute alles Seiende im « Daseyn des Seyns» ursprünglich und voll-
« Seyn» bevorzugt das Wort «Gott » gebraucht, so kann er kommen verstanden sind. Die Schwierigkeiten des kontingen-
auch formulieren : Die Form des unmittelbarem giittlichen ten individuel/en Begreifens entspringen aus einer ganz an-
Existentialaktes ist die «Existenz» und diese ist «lch» _ deren Quelle: Dieses individuelle Begreifen ist nicht identisch
und zwar « da reines praktische Ich »11. Und wiedemm ist im mit dem absoluten Begreifen, sondem ein individuell-existen-
Blick auf diese «absolute Existenz »12 keineswegs die kon- tielles «Nachkonstruieren» jenes ursprünglichen Begriffen-
tingente Existenz vereinzelter lndividuen gemeint, sondem seins; wobei es der Freiheit des einzelnen lndividuums an-
schlechthin das sich-wissende «Daseyn des Seyns». Die heimgegeben ist, wieweit es die Begreifbarkeit der Realitat
Individuen sind (oder genauer : sollen durch Freiheit sein) nachvollziehen will und wieweit nicht. «Unbegreiflichkeit»
Bilder des absoluten !ch - und auch dies nicht in ihrer ist darum keine «objektive» Eigenschaft der Welt des Da-
aussereu, objekthaften Erscheinung, sondem in ihrem un- seins nnd ihrer Bedingnngen, sondem nur die Konsequenz
mittelbaren Existentialaktl3. individuell-existentieller Entscheidungen, nicht weiter begrei-
Der Existentialakt kann nicht objektiviert und damit auch fen zu wollen - oder auch Nichtexistentes begreifen zu
nicht wie ein beliebiges Objekt betrachtet werden. Wamm wollen.
nicht? Weil er selber das «Objektivieren» ist". Diese Aus-
kuuft Fichtes ist genial, denn sie wahrt zum cinen die unauf-
gebbare Differenz von «Seyn» und «Seiendem» ; der actus II
des «Objektivierens» ist uicht identisch mit seinem Resultat
dem «Objekt». Zum andem aber verlmüpft er eben da~ Das Bemühen, das Sein «an sich» und unabhiingig von
Unterschiedene in rational eiuleuchtender Weise : das «Da- seinem existenten Dasein zu denken, stellt nun eben einen
seyn des Seyus» erzeugt durch seinen Existentialakt des soIchen Versuch dar, «Nichtexistentes» begreifen zu wollen.
« Objektivierens » die Welt nicht nur der Existenzen, sondern Denu ein Sein ausserhalb der Existenz ist in hôchst praziser
auch des Seienden, «objektiv» Wahrnehmbaren. und eiufacher Konsequenz «nicht existentes» Sein.
Entsprechend verbindet ein weiterer Denkansatz Fichtes Aber dieser Versuch scheitert nicht eiufach an seiner er-
die Rationalitat aller Erkenntnis mit ihrem unerforschlichen müdenden Vergeblichkeit, sondern führt spontan und direkt
~nmd des Seins. Das sich helle «Daseyn des Seyns» wirkt in die Koufrontation mit dem «Nichts». Ganz wie die
mcht nur «Weltschiipfung» aIs «factum fiens »15 sondem Sprache artikuliert : Die Anstrengnng des Begriffs «führt»
ist darin zugleich vollkommenes Begreifen seiner selbst seines in diesem FaIl «zu nichts». Und genau betrachtet ist es
Wirkens und des Geschaffenen. Fichte kann dam;' auch auch der einzige Fall, bei dem das Begreifen direkt und ur-
sprünglich auf die absolute Barriere des Nichts stOsst. Nur
11. Ibid., p. 20 v. hier, an der Grenze des daseienden zum « nicht daseienden »
12. Ibid., p. 4 r. Sein, begegnet die Existenz der absolnten nnd ewigen Radi-
13. Ibid., p. 22 r : 4: Das reine Ich [ ... ] kann sich nur in einer kalitiit des Nichts.
Person stel1en.»
14. Ibid., p. 22 v.
15. Ibid., p. 28 r.
16. Ibid., p. 23 v.
8
EXISTENZ ZWISCHEN SEIN UND NICHTS 143
142 JOACHIM WIDMANN

Und hier ereignet sich auch aIs Anfang aller Philosophie, Und sogar vom «Lichte», dem «gôttlichen Existential-
was Fichte das «Begreifen des Unbegreiflichen» 17 nennt, akte »", wird gesagt : «Es versteht sich in diesem Selbst-
hier sind Begreifen und Nichtbegreifen unlosbar ineinander verstehen aIs Nichts : setzt drum sein inneres Wesen voraus
verschluugen. Denn : «nichts» Hisst sich schlechterdings aIs Nichts [... ] und nimmt sich wahr ais Nichts »26. Da aber
nicht begreifen und prasentiert sich so aIs das ewig «Un- sein Verstehen «das nrsprüngliche Leben selbst »71 ist, so
begreifliche» - und doch wird es aIs dies Unbegreifliche gilt : «es ist also, wie es sich versteht im sich also Verstehen
« begriffen» samt dem absoluten Unterschied, der zwischen _ eben Nichts »".
ihm und dem Sein sowie allem Daseienden existier!. Desgleichen hdsst es vom «Gesetz» der «absoluten
An der begriffenen Unbegreiflichket hebt für Fichte das Selbstschopfung », es sei «Gesetz dnes absoluten sich Ma-
«absolute Begreifen »18 des Philosophierens an. Auf ihr chens aus dem reinen und absoluten Nichts zum bleibenden
sucht er die «hochste Synthesis» 19 des Denkens zu bauen, und absoluten Nichts »". Dazu im selben Zusammenhang :
die ibm nach der « Grundlage der gesammten Wissenschafts- «Gott ist WeltschOpfer : Nein : denn es gibt keine Welt
lehre»" noch zn leisten übrig geblieben war. An der Funk- und kann keine geben, denn nnr das Absolute ist; das Ab~
tion, die er dem Wissen vom Nichts in dieser absoluten solute aber kann nicht realiter und wahrhaftig ans ihm selber
UeberwOlbung seiner Wissenschaftslehre znweist, zeigt sich herausgehen. Aber in Gottes innerem, rein geistigen Wesen
aber gerade in unserm Text von 1805 eine Problematik, die liegt, es, dass das Nichts ihm gegenüber sich aIs Nichts
sich dank ihrer fuhninanten Gedankenscharfe aIs geradezu verstehe und in diesem Verstehen eben, und lediglich durch
paradigmatische Vorausuahme spaterer nihilistischer und exi- dasselbe, zu einem scheinbaren Etwas sich selbst gestalte
und erschaffe, und so das Absolnte in einer jedoch ewig leer
stenzphilosophischer Entwicklungen darstellt.
bleibenden Anschauung anschaue [ ... ] Die absolute sich selbst
Klar ist für Fichte dabei allerdings, dass das Nichts weder Erschaffung des Nichts ist nur die iiussere Bedingung der
Eigenschaft noch N ame des «absoluten Seyns» ist - «das- Moglichkeit, d.i. die urspriingliche Form diesel' Anschaunng.
selbe nicht im Nichts und als verschmolzen mit dem Nichts Die WeU daher erschafft schlechthin sich selber, und eben
duldend »'1. Das gewusste Nichts ist auch nicht Produkt der
in diesem Erschaffen, dieser Genesis aus dem Nichts liegt
« innern» Form des gottlichen Existierens, sondern nur die unanstilgbare Spur ihres Nichts, denn aus Nichts wird
Produkt von dessen «ausserer» Form2Z• Nichts [ ... ] Nichts bleibt ewig Nichts : diese Siitze gelten
Die Problematik setzt dort ein, wo Fichte die Form des hier streng ». Und wenig spater priigt Fichte einen Satz, wie
« Daseins» mit dem Nichts identifiziert. Schon in den Ber- ihn die schroffste Kritil( am deutschen Idealismus nicht lapie
liner Vortragen von 1804 nannte er die «Existenz der Kor- darer zn formnlieren vermochte : «Leere Form, ohne allen
per» das «ais Nichts dargestellte Nichts »23. J etzt heisst es Gehalt, reines Nichts überall, wohin wir blicken. Absoluter
unmissverstiindlich auch von der «intellektuellen Anschau- Idealismus »".
ung », sie verstehe sich « offenbar aIs ein absolutes Nichts »24.
Dieser Text von 1805 - vorgetragen lediglich einem pri-
vaten Zirkel von (vermutlich ungliiubig staunenden oder
17. WL 1804', S. 21 (SW X, S. 104 L). liichelnden) Gelehrten einer schliifrigen Provinzuniversitiit -
18. Ibid.
19. J.G. FICHTE, Briefwechsel, hrsg. v. H. Schulz Bd. II, S. 323.
20. J.G. FICHTE, Grundlage der gesammten Wissenschaftslehre
1794/1795. J.G. FICHTE, Gesamtausgabe der Bayerische.n. Akademie 25. Ibid., p. 13 r.
der Wissenschaften I, 2 S. 251-451.
26. Ibid., p. 35 r.
27. Ibid., p. 34 v.
21. WL 1805, p. 34 r. 28. Ibid., p. 34 v.
22. Ibid., 21 v. 29. Ibid., p. 36 v.
23. WL 18041, S. 90 (SW X, S. 158). 30. Ibid., p. 38 r.
24. WL 1805, p. 34 r.
144 JOACHIM WIDMANN EXISTENZ ZWISCHEN SEIN UND NICHTS 145

dürfte kaum eine Wirkungsgeschichte gehabt haben. Und beschrlinken, Fichtes eigene Konstruktion dieses metaphysi-
doch - was für ungeheuerliche Perspektiven wurden hier schen Ueberhaus seiner gennin trauszendentalen Erkenntnisse
aufgerissen ! AIs Ziel hOchsten sittlichen Handelns und Er- auf ihre Tragf1ihigkeit und Stringenz zu untersuchen.
kenntnisstrebens : das eigene Ich, die individuelle Existenz Ein hOchst undramatischer,schlicht methodisch bedingter
nicht nur aIs nichtig, sondern aIs in Wahrheit absolutes Nichts Ausgangspunkt Fichtes darf dabei keineswegs aus den Augen
zu begreifen - aufzugehen in einer nicht etwa erfüllenden, gelassen werden :
sondern ewig leer bleibenden Anschauung! Und dies zu- Es ist ein Faktum unseres Bewusstseins, dass wir einen
gleich ewig gebunden au die faktisch nicht auszutilgende ei- Begriff von unserem Verstaud haben. Doch - wie kommt
gene individuelle Existenz mit ihren ewig sich wandelnden em- unser Verstand zu einem Begriff von sich selber? Wie kann
pirischen Wahrnehmungen, - allein im intellektuellen Auf- er sich selbst, ohne Beimischung eines andern Ph1inomens,
schwung durch einen ewig zu leistenden «Unglauben» an also «rein », zum Objekt werden? Genau besehen nur dann,
die ebenso ewig fortbestehende Faktizitat des konkreten wenn er Verstand von «Nichts» ist : denn nur in der Aus-
Daseins !". richtung auf «nichts» ist er frei von einer Synthese mit
kaukreter Objektivitat - nur hierbei ist ausser ihm sdber
buchstablich nichts da, was er verstehen konnte, ais eben nur
III sein eigenes Dasein.
Die reiue Koufrontation mit dem Nichts wird so ffu das
Was brachte Fichte nach seiner genialen Erhellung der Verstehen zur einzig moglichen «Experlmentalbedingung»,
Bewusstseinsstrukturen in phanomenologischen Bereich seiner unter der es sich selbst ohue jede Verunreinignng durch ein
Wissenschaftslehre32 zu einer derartigen Konzeption der mitverstandenes «etwas» fassen und reflektieren kann. Die
« hOchsten Synthesis» seiner Philosophie? radikale Koufrontation mit dem Nichts ist in der Tat condi-
tio sine qua non für die Selbstreflexion des Begriffs.
An ausseren Umst1inden lassen sich besonders zwei Im-
pulse herausstellen : Zum einen Fichtes Versuch, dem Nihi- Dadurch ist - abseits aller Pathetik spaterer nihilistischer
lismus-Vorwuf Jacobis" mit den Mitteln des eigenen Systems Philosophieentwfufe - eine nüchterne funktionelle Not-
zu begegnen, seine bedingte Berechtigung auzuerkennen, wendigkeit der existentiellen Koufrontation mit dem Nichts
ihn jedoch gegenüber Fichtes Seins-Lehre ais absolut unhalt- erfass! : Nur wenn das existentielle Verstehen sich dem
bar zurückzuweisen. Zum andern mag die Scharfe mancher Nichts koufrontieli weiss und diese Konfrontation durch-
Formulierungen auch das Ziel gehabt haben, die Absurditat steht35, kanu es die Grundwendung der Ichwerdung - und
zn geisseln, mit der Schelling «die Wirklichkeit abzuleiten damit auch aller Individualisierung - nachvollziehen, eben
sich plagt »34. Wir wollen unsere Betrachtung jedoch darauf die Re-flexion zur Bewusstmachung seiner selbst.
Anzunehmen, die Koufrontation mit dem Nichts führe
allein schon und quasi antomatisch zu durchgeführter Selbst-
31. Das «Verstehen des Nichts» Îst nach Fichte Dur moglich reflexion, ware allerdings ein grober Irrtum; sie ist nur not-
« durch Gegensatz des Btwas der Realitat» : daher. ist. jenes Sichver-
stehen aIs Nichts unabtrennbar von der Gegebenhett emes «Btwas». wendige, nicht aber allein hinreichende Bedingung. Die
Vgl. WL 1805, p. 35 r. koufrontierte Existenz kann sich dnrchaus auch mit einem
32. Vgl. Joachim WIDMANN, Die Grundstruktur des transzendentalen
Wissens. Nach Joh. Gott!. Fichtes Wissenschaftslehre 1804Z, Hamburg, blossen begrifflichen Hinstarren auf das Nichts beguügen,
1977, S. 45-201, 246-247. das dann - hOchst wortlich! - zu weiter nichts führt.
33. J.G. FICHTE Gesamtausgabe III, 3 S. 245 : <1: Idealismus, den
ich Nihilismus sch~lte 1>, Jacobi in einem 5ffentlichen Brief an Fichte
v. 3.-21, Marz, 1799. 35. Vgl. die totale Negation in der Begriffsformel des «Subjekts» ;
34. WL 1805, p. 37 r. WIDMANN, Grundstruktur. S. 82~90.
146 JOACHIM WlDMANN EXISTENZ ZWISCHEN -SEIN UND NICHTS 147

Der entscheidende lmpuls zur Selbstreflexion geht von zum absoluten Sein bestimmen zu wollen. Auch nicht die
einem andem Moment aus : von der Beunruhigung des Hia- Relation, dass das «Dasein » gemessen am «absoluten
tus zwischen «Seiendem» und «Nichts». Denn im Bemer- Sein» radikal «Nichts» sei, so verführerisch und immanent
ken dieses Hiatus gerat die Existenz «zwischen» beide : in zwingend hier die Anwendung des Satzes vom ausgeschlos-
der radikalen Zuwendung zum Nichts lost sie sich vom senen Dritten erscheint. Hier hat die Alternative der Prlimis- i:
Seienden - aber gleichermassen lost sie sich auch wieder sen unbedingten Vorrang : entweder (a) eine Relationsbe-
vom Nichts durch die Rückwend,ung zum Seienden. lndem ziehung zum «Sein» ist denkbar, aber dann kann es nicht
sie aber beide Loslosungen vollführt, vermag sie zu erkennen, das von Fichte aufgestellte «absolute Sein» sein - oder
dass sie selber weder «Seiendes» noch «Nichts», sondem (b) eine Relationsbeziehung zum «absoluten Sein» ist, wie
ein - zunachst sich selber ratselhaftes - Tertium isl. Was Fichte postulielt, unmiiglich, dann sind auch keine Konklu-
ist dies Tertium? Dnrchaus nicht «reines Sein» - denn sionen moglich, die eine solche Relationsbeziehung voraus-
dies ist nach Fichte absolut relationslos und ruhend". Sie setzen, und sei es einzig die zum Nichts. Ohne die Anwendung
aber erkennt sich gerade in der relativierenden Differenzie- einer solchen Absolutheitsrelation ergibt sich aber keinerlei
rung zwischen Nichts und Seiendem ais «Beziehung, Rela- « absolute» Notwendigkeit, das Dasein ais «nichtig» zu
tion »37 und überdies auch ais Bewegung,· ais genetisch-Ieben' bezeichnen. Und sollte es doch faktisch zur Erscheinung von
digen, Einsicht schaffenden actus. Sie ist daher lebendiges « Nichtigem» im Dasein kommen so, waren dessen Gründe
« Dasein» des Seins. in anderen Bereichen aIs dem einer unm5glichen Absolutheits-
Soweit ist Fichtes Gedankengang h5chst plausibel, be- relation zu suchen und aufzudecken.
schreibt korrekt und nachvollziehbar die funktionellen Vor- Des weiteren weist auch das Verstandnis des Nichts kate-
aussetzungen der (individuellen!) Selbsterkenntnis. Zutiefst gorisch j eden Versuch ab, irgend etwas, das nicht ais Nichts
problematisch aber formieren sich die Konklusionen, die er erscheint, mit dem Nichts zu identifizieren. Das Nichts ist
auf dieser Basis zusammenzufügen sucht. Denn nun argumen- absolut nur «nichts» und keineswegs sonst noch irgend
tiert er : (1) Nur das reine Sein « ist» in Wahrheit - (2) was etwas". Darum kann auch der Verstand sich umnoglich ais
nicht reines Sein ist, ist nicht «wirklich» - (3) was nicht Nichts «verstehen» : denn ais lebendiges Verstehen ist er
wirklich ist, ist in Wahrheit «nichts» -'- (4) folglich ist das umnittelbar nicht nichts - und hait er sich für Nichts, so
«Dasein des Seins» ais nicht «reines Sein» in Wahrheit versteht er mit Sicherheit sich nicht und damit auch nicht
nicht wirklich, sondem «nichts». sich.
Was stimmt an dieser - formai ja ganz stimmigen - Darüber hinaus teilt Fichte - wenngleich in sublimster
conclusio dennoch nicht? und abstraktester Form - an diesem Punk! den metaphysi-
Zunachst ihre Priimisse. Fichte folgert stillschweigend eX schen Irrtum Schellings und Hegels : auch er glaubt, es sei
non concessis. Denn das absolute Sein ist von ihm ausdrück- dem philosophierenden lndividuum m5g1ich, sich über seine
Iich und einleuchtend ais absolut relationslos definiert". individuelle Existenz zu "erheben» und - wenngleich bei
Damit aber ist es de iure unmoglich, überhaupt eine Relation Fichte nicht material, sondern nur formai - vom Stand-
punkt der «absoluten Existenz» und ihrer umfassenden Ver-
36. Vgl. WL 1804', S. 148 (SW X, S. 281) : «Seyn und Bestehen nunft aus zu philosophieren. So gesehen trifft das verzweifelte
und Beruhen»; dazu die Bestimmung des «Lebens» aIs eines Aufbegehren des posthegelianischen Existentialismus gegen
«flüssig werden des Seyns », in WL 1805, p. 31 r.
37. WL 1805, p. 8 v. die Aufl5sung des lndividuums in einer ideellen Allgemein-
38. Das Absolute aIs «Glied einer Relation» ist «gar nicht Ab-
solutes >. WL 1805, p. 15 f. Vgl. auch WL 1804>, S. 148 (SW X,
281 1). 39. Vgl. WIDMANN, Grundstruktur, S. 300·303.
148 JOACHIM WlDMANN EXISTENZ ZWISCHEN SEIN UND NICHTS 149

heit nicht nur deren klassischen Protagonisten Hegel, sondem (1) Die Anschauung erblickt ihr «Sein» stets und ohne
auch jenen Aspekt der Fichteschen Absolutheitsphilosophie, Ausnahme ais das, von dem alles in ibr Angeschaute um-
dem das individuelle lch nur,« das erbiirmliche relative der fasst" wird und mit dem sich alles Angeschaute verbindet -
werthen Person »40 ist. eben ais jenes Moment, das die Sprache ais das «ist» des
Die gedanklichen Verstrickuugeu, in die Fichte bei seiuer Angeschauten aussagt".
Konzeption eines metaphysischen Nihilismus gerat, sind (2) Das Begreifen erfasst die Selbstreflexion der Anschau-
ausserst subtil. Setzeu wir zu ihrer naheren Aufhellung bei ung keineswegs mit einem Schlage, sondem schrittweise. Der
seinem Begriff der «Ieeren Anschauung» an. Soll, analog umnittelbar erste Schritt dieses sukzessiven Prozesses ist
zur Selbstreflexion des Begriffs, die Anschauung rein sich dabei, dass das hier Erblickte - jenes eiufachste Reale
sehen k6nnen, so muss auch sie - wie Fichte richtig po- aller Wahrnehmung - ais «Sein» begriffen wird. Und erst
stuliert -- in der Tat «Ieer» von allem andem sein, was in weiteren Schritten wird begriffen, dass dies Sein wesen-
nicht sie selbst ist. Aber im Unterschied zum Begriff, der haft Sein der bewusst gemachten Anschauung ist : namlich
sich an der begriffenen Unbegreiflichkeit des Nichts ent- « Bewusst-Sein ».
deckt, erblickt eine « leere» Anschauung niemals «nichts» : (3) Anf dieser Basis wird direkt plausibel, dass das
Das Nichts ist schlechthin nicht sichtbar nnd darum auch « Sein» in der Tat ursprüuglich nicht das Sein des Seienden,
schlechterdings kein m6gliches Substrat für eine «anschau- der Dinge, der Phanomene, sondem das Sein der Existenz
liche» Betrachtung; ibm ist nur der Begriff, nicht aber die ist - das in seiner Eigenstiindigkeit nur wahrnehmbar wird
Anschauung konfrontiert. im ganzlichen Absehen von allem «Etwas» der erscheinen-
Was dann sieht die Anschauung, wenn sie leer von allem den Objektwelt. Aber : gerade darum ist es in seiner er-
andem ist? «Nichts» kann sie nicht sehen; würde sie über- blickten Einfachheit nicht schon das «absolute » Sein,
haupt nicht «sehen», so ware sie nicht «Anschauung»; sondem das Sein der jeweiligen individuel/en Existenz.
sahe sie anderes ais sich, so ware sie nicht « leer ». Es bleibt So genial Fichte das existentielle Wechselspiel von An-
darum als Erkenntnismodell nur der Gedanke übrig, dass schauung und Begriff anfgehellt hat - der existentiell-kon-
sie in diesem Falle sich selbst sieht. Und hier sind denn auch krete Ursprung des Seins-Begriffs blieb in merkwürdigem
die wesentlichen Bedingungen durchaus erfüllt : Die An- Dunke!. Darum konnte Fichte auch keinen Anlass sehen,
schauung ist darin «Ieer» von fremden Beimischungen und seine bravour6se Anfdecknng und Beschreibung der lnter-
sie «schaut» wirklich etwas an, niimlich ihre eigene existen- personalstruktur" in den Kliirungsprozess der Seinsfrage mit
tielle qualitas. einzubeziehen, sondem glaubte, von dem vorgefundenen
Das von der Anschauung im blossen Sichsehen Erblickte Seinsbegriff direkt zum absoluten Seinsbegriff «aufsteigen»
ist zugleich das einfachst mogliche Substrat anschaulicher zn kannen.
Wahmehmung überhaupt : denn jeder zusatzliche lnhalt Damit fehlt jedoch seinen Ueberlegungen ein entscheiden-
macht die Anschauung komplexer, ais sie sich in ihrem der Parameter : Denn erst durch die Erkeuntnis «anderer»
blossen Sichsehen darbietet. Wie aber wird dies einfachst lndividuen entspringt der individuellen Existenz der Begriff
m6gliche, aller - ob materiellen oder intellektuellen - An- eines «allgemeinen» Seins, der das anschaulich begriffene
schauung inharente Substrat begriffen ? Ais « Sein». Sein der einzelnen lndividualitat «transzendiert».
Die ungewohnte Behauptung bedürfte einer ausführlicheren
Erlauterung, ais wir sie in der hier gebotenen Kürze ent- 41. Ibid.
falten k6nnen. So müssen drei Hinweise genügen : 42. «Dieses ist daher ist seine Existenz; aussere Umfassung und
Umgebung », ibid., p. 2 v.
43. In Grundlage des Naturrechts nach Principien der Wissen-
40. WL 1805, p. 5 r. schaftslehre, J.G. FICHTE, Gesamtausgabe I, 3, S. 340-348.
150 JOACHIM WlDMANN EXISTENZ ZWISCHEN SEIN UND NICHTS 151

Dieser - auch von andem Denkem wenig beachtete wenn sie sich ebenso unbedingt, niirnlich in absolut freier
quasi natürliche Ursprung des Begriffs der Transzendenz Wahl dazu entschliesst44.
gewinnt seine metaphysische Bedeutung allerdings erst im Wiihlen aber kann sie nur, wenn sich ihr eine echte Ent-
Bedenken des Nichts. Denn hier wir klar, dass desseu scheidungs-Altemative bietet. Und hier formieren die Be-
Herkunft sich weder ans dem jeweiligen individuellen Sein griffe von « Sein» und « Nichts » ihre ultimate Entscheidungs-
noch aus dem gemeinsamen Sein von Individuen «ihres- situation: Sie kann den Weg zum Sein gehen - sie kann
gleichen» erkIareu Iasst. Der Ursprung des Wissens vom ebenso den Weg zum Nichts gehen. Für welche der beiden
Nichts kann nicht in deren relativer Transzendenz, sondem M6glichkeiten es sich entscheidet, ist der Freiheit jedes Indi-
nUl" im Sein einer «absoluten» Transzendenz liegen. viduums anheimgegeben.
Mit dieser aussersten Konsequenz des Freiheitsdenkens
Damit tritl eine wesentliche Funktion des Nichts-Begriffs lasst sich auf der von Fichte gesicherten transzendentalen
in den Blick. Denn ohne den Ansatz einer absoluten Tran- Ausgangsbasis eine gauz andere Sinndeutung des empirischen
szendenz wiire das individuelle Sein stets nur ais relativ wie ideellen Daseins der lndividuen und ihrer gemeinsamen
belangloses Moment in einem aIs wandelbar oder starr oder WeU geben, ais Fichte dies m6glich war : Denn die existen-
gar nichtig gedachten «allgemeinen Sein» zn deuten; mit tielle Situation eines Daseins vor jener ultimaten Entschei-
der Existenz eines absolut transzendenten Seins dagegen liisst dung kann weder aIs absolut seinserfü11t, noch ais absolut
sich anch der kontingent-individuellen Existenz eine absolut nichtig interpretiert werden. Sie kann darum auch in toto
einzigartige und unvergiingliche Würde zusprechen : Sind die so wenig ais Bild des Seins wie aIs Bild des Nichts verstanden
Individuen niirnlich in ihrer vollen und realen Existenz werden.
« Bilder» des Einen, absolnt existierenden Seins, so repra- Ihre - in der Synthesis von empirischer nnd transzenden-
sentiert nicht nnr ihre Gemeinsamkeit dessen Einheit, sondem taler Erkenntnis sich erschliessende - Existenzform ist in
ebenso bildet sich in ihrer nnverwechselbaren nnd einmaligen sehr prazisem Sinn eine «potentielle» Genesis : sie entfaltet
individuellen Besonderheit die Singularitiit der absoluten die Entscheidungsm6glichkeit zur Teilhabe am wirklichen
Existenz ab, die schlechthin nichts Vergleichbares neben Dasein des Seins und seiner erfüllten Lebendigkeit. Aber
sich hat. Eine abstrahierende oder gar konkrete «Vemich- eben darum Mfnet sich ihr zur andem Seite der Abgrund
tnng» der existentiellen lndividualiüit zugunsten einer ideal- des Nichts nnd wird offen bleiben, bis sie den Entscheidungs-
gleichgültigen Allgemeinheit bringt darum nicht etwa dem punkt erreicht und ihre Wahl getroffen hat.
Grund des Daseins naher, sondem zerstOrt umgekehrt die
existentielle Verwurzelung der interpersonalen Gemeinschaft
in diesem Grnnd.
Aber noch eine andere Funktion kommt dem Wissen vom
Nichts in diesem absolut existentiellen Zusammenhang ZU.
Wiiren namlich die Individuen allein durch absolute Setzung
lmd ohne ihr Zutun existentielle «Bilder» des absoluten
Seins, so waren sie in der Wurzel ihres Daseins genau
genommen auch absolut unfrei. Der letzte und eigentliche 44. Vgl. J. WIDMANN, « ... denn wohlverstanden bat er recht ...
Aspekt der individuellen Freiheit, ihre absolute sittliche Gedanken zu Fichtes Jenaer Bemerkungen über Leibniz. In Erneue-
Legifunation beruht aber gerade daranf, dass sich in ihr die rung der Transzendentalphilosophie, hrsg. v. Klaus Hammacher und
Karl Mues, Stuttgart-Bad Cannstatt, 1979, S. 477-478. Sowie das
U nbedingtheit der absoluten. Existenz abbildet. Bild dieser Kapitel über Religion, in J. WlDMANN, Johann Gottlieb Fichte -
Unbedingtheitkann die individuelle Existenz aber nur sein, Einführung in seine Philosophie, Berlin, 1972.
Troisième partie

SCHELLING ET HEGEL
DIETER HENRleH

ALTÉRITÉ ET ABSOLUITÉ DE L'ESPRIT

Sept pas sur le chemin de Schelling à Hegel

Deux problèmes seront ici évoqués; de deux types tout


à fait divers, ils seront cependant développés selon un enchaî-
nement de pensées unique. L'un de ces problèmes est de
nature historique, l'autre se pose quand des philosophes réflé-
chissent snr le principe dernier de toutes choses, dans la pers-
pective la plus ancienne de pensées de ce genre, telle qu'elle
fut ouverte par Parménide.
Hegel a élaboré un système philosophique qni se distingue
par sa haute complication et par son art de formation des
concepts, mais tout autant par sa forme singulière. Ce sys-
tème veut prendre son point de départ dans les relations
formelles les pins simples, on peut dire relevant d'une théorie
de la relation. A partir d'elles, en développement linéaire, et
sans adjoindre d'autres données ni d'autres prémisses pour
ainsi dire de l'extérieur, doit être construite une suite de
toutes les relations formelles et développée en définitive une
quintessence de toutes les relations pensables en général,
comprenant toutes les autres. De cette quintessence doit pou-
voir être dit qu'elle est identique à ce point de départ et à
cette snite, et qu'en elle est épuisé tout ce qui est pensé en
général et pensé comme réel. Cette qnintessence est donc un
résultat en elle-même, et pas seulement pour notre connais-
sance, tout en étant le Réel premier et unique pleinement
indépendant. Parmi les nombreux titres dont Hegel use à son
propos, on relève : le «tout», 1'« absolu », et, comme tel,
ALTERITE ET ABSOLUlTE 157
156 DIETER HENRICH

«le sujet », et «l'esprit ». Parce qu'il est le tout et que, de où Hegel commençait d'enseigner. Hegel s'y est rallié - non
façon interne, il procède des relations les plus simples, il est pas bien sûr comme un élève docile au mot à mot, mais par
aussi déduit de la pensée à partir d'elle-même. De la sorte, la une réélaboration personnelle, sans dissentiment de principe.
philosophie n'a besoin d'aucune autre disposition analytico- La force singulière de pensée dans le développement d'inter-
critique pour acquérir la cormaissance à laquelle elle tend; dépendances formelles ainsi que les résultats auxquels il était
pour peu à tout le moins qu'elle se soit engagée sur ce chemin parvenu dans ses analyses antérieures de la forme des situa-
difficile qui consiste à méditer sur le développement formel tions du monde et des fondements du développement histo-
propre à l'Absolu lui-même. rique rendaient Hegel capable de continuer à façonner la
forme conceptuelle dans laquelle Schelling avait exposé ses
Depuis quelques années, nous savons que c'est pendant son conceptions et de la mener jusqu'à une nouvelle forme
temps d'enseignement à Iéna que Hegel a élaboré, sous la conceptuelle. Celle-ci à nouveau rendit nécessaire un chan-
forme qui lui est propre, ce modèle fondamental de système. gement de conception du système comme tout. Ainsi vint
Le précédèrent une série d'esquisses de systèmes, avec sous- au jour la forme systématique que seul Hegel sut projeter et
jacentes d'autres représentations concernant l'essence de la réaliser. Et c'est l'unique raison pour laquelle la compréhen-
connaissance philosophique; des esquisses qui concevaient sion des raisons qui président au développement philoso-
autrement l'idée de la réalité deruière de l'absolu. Dans ces phique de Hegel, raisons qui comme telles ne mériteraient
esquisses, la Science de la Logique, qui plus tard engage le qu'un intérêt très limité, soulève un autre intérêt qui, de
développement d'objets formels dans la dimension où aussi par sa nature, est philosophique; un intérêt pour une méta-
peuvent être atteints les énoncés derniers concernant le réel physique qui ne procède, ou, peut-on dire, n'est construite
dans son ensemble, est encore saisie comme une scîence seu- purement qu'à partir de la pensée philosophique.
lement introductive et de fonction surtout critique; son but
est alors, par le jeu d'une destruction des formes fiuies de la Cette position philosophique, qui ne veut tolérer qu'un
pensée, de préparer à la connaissance absolue. Dans la uuique réel radicalement indépendant, doit être désignée
connaissance proprement dite elle-même, la connaissance mé- sous le nom de «monisme». Le fini n'est pas seulement
taphysique, la définition de l'absolu ne se trouve pas encore borné du fait qu'il a une existence limitée dans l'espace
donuée par l'explication du terme «Esprit» sous la forme et le temps, qu'en lni n'est réalisée qu'une faible part du
qui est caractéristique pour le Système que Hegel a exposé possible, et qu'il procède lui-même d'une autre réalité effec-
pour la première fois dans ses derniers semestres de Iéna. tive. Même cette réalité en soi déjà bornée est, pour le
Pour rendre compte des modifications qui ont amené à monisme, en un sens encore tout autre et plus fondamental,
ce système, beaucoup d'hypothèses entre-temps ont été avan- dépendante du fait que le fini, radicalement dépendant en
cées. Je voudrais montrer ici que ce problème historiqne lui-même, n'a consistance que dans son rapport avec cela
concernant le développement de la pensée de Hegel peut être seul qni, de soi et à proprement parler, est réel. Dans cette
largement clarifié si l'on prend en compte avec suffisamment mesure, on peut dire que le fini n'est réel que comme sa
de netteté un développement objectif, un type de consécution fonction - la fonction de l'absolu - ; qu'il n'est réel que
spéculativo-logique. Ce développement concerne la manière « dans» lui, ou comme mode de sa substance infinie. Sim-
selon laquelle sont conçus les rapports qui règnent entre la plement à titre de programme ce sont les Eléates qui ont
peusée du réel fiui, borné, et ce réel qui au début, de façon découvert le mouisme. Spinoza, dans le langage conceptuel
encore totalement inarticulée, est à penser comme 1'« absolu». proposé par la métaphysique moderne, avait su le premier
A ce propos, l'on peut et l'on doit partir de la conception de déployer ce mouisme en une interprétation concrète du
ce rapport que Schelling avait élaborée justement à l'époque monde. C'est en son nom que Jacobi l'avait confié à la philo-
158 DIETER llENRICH ALTERITE ET ABSOLUlTE 159

sophie transcendantale comme l'uniqne programme encore boration moniste des concepts dans laquelle l'intériorité du
possible. Dans la première décennie du XIX· siècle sont ués fini dans le Réel Un n'est pas pensée et maintenue en
ensuite les systèmes monistes qui s'efforcent, à partir des pleine conséquence. Tout comme la formule se dispose en
formations conceptuelles de la philosophie transcendantale, opposition tout à fait simple, mais aussi tout à fait fonda-
de développer la forme conceptuelle permettant d'élaborer mentale, à l'image naturelle, en- soi complexe, du -monde,
les pensées fondamentales du monisme, tout d'abord dans une ainsi contraint-elle en même temps les élaborations concep-
ontologie formelle autonome, et ensuite dans uue vue du tuelles qui provieuuent de la prise en compte du programme
monde qui doit permettre d'interpréter la réalité familière moniste à s'engager dans une voie de complexification conti-
mieux même que ne le faisait le langage naturel, mieux que nuelle. Mais c'est précisément en suivant cette impulsion
ne le permettaient les descriptions scientifiques ou même constructive que le monisme peut se mettre en situation
celles de la métaphysique traditionnelle qui prend son point d'amener sa vision du monde jusqu'à uue position qui est
de départ dans les opinions fournies par la vision quotidienne capable d'entrer en concurrence avec la vue naturelle du
du monde ou la religion historique. Celui qui veut étudier monde. Etant donné que cette formule-programme elle-
en leur lieu adéquat les perspectives auxquelles ouvre le même, du point de vue de la pensée naturelle, doit apparaître
monisme et les problèmes qu'il pose doit aujourd'hui encore et agir comme paradoxe, sa réalisation et les étapes de cette
se tourner vers les systèmes de cette décennie - vers Fichte réalisation se présentent aussi sous .les apparences du para-
et sa seconde Doctrine de la Science, vers Schelling et son doxe - et cela jusqu'au point où le monisme se met en
système de 1801, vers la logique spéculative de Hegel, qui situation de revendiquer que soit élaborée la conséquence de
comme telle est une métaphysique. la formule paradoxale Hen-Panta, et que par là justement
Le monisme ne peut se déployer qu'en opposition théo- aient été gagnées uue forme conceptuelle et une interprétation
rique aux présuppositions par lesquelles la compréhension du monde consistantes et répondant à la complexité effective
naturelle du monde s'engage dans les individus multiples et du monde.
dans les rapports qui existent entre eux. Il conteste qu'entre C'est de cette manière aussi qu'est déjà venue au jour
ces individus trouve place en vérité le type de différenciation l'élaboration conceptuelle, par Schelling, de l'Absolu conçu
radicale dont nous partons toujours d'abord. Dans cette me- de façon moniste. Et comme elle marque le point de départ
sure, le monisme est un programme correcteur pour mener du développement autonome de Hegel, elle doit être déployée
à la vérité. A ce programme correspond la formule et le mot au préalable dans ses traits fondamentaux. - Dans la for-
d'ordre par lesquels il énonce sa position de la façon la plus mule-programme de l'Un et Tout, ce qui domine c'est l'unité
claire : «Hen-Panta 1» - il faut penser l'Un et Tout, et comme unicité. Car elle exige de penser que la différence en-
partant la forme particulière d'unité dans laquelle tout a tre des finis singnliers n'est pas pour ainsi dire le point de
subsistance dans le Réel Un et Unique. départ inébranlable de notre rapport objectif, mais plutôt un
Ce n'est pas seulement pour corriger la vue uaturelle du point de départ intenable. L'Absolu est d'abord à penser
monde que cette formule engage une perspective directrice. dans son autosuffisance par le fait que toute différence on-
Elle met aussi à disposition la ligne directrice méthodique tique est, non pas seulement éloignée de lui, mais, au sens
indispensable pour la construction même d'un système mo- strict, niée. Il est absolu dans la mesure où rien à côté de lui
niste. Tout comme elle veut contraindre à renoncer à la fausse n'a de subsistance indépendante, dans la mesure par consé-
croyance à la réalité du purement fini, ainsi peut-elle quent où tout réel est en définitive en ou «dans» un seul
aussi, dans le cours ultérieur du déploiement de chaque et même Réel, et, en ce sens, est la même chose. Dans cette
monisme, être dressée en retour contre toute forme d'éla- mesure, l'Absolu se laisse décrire comme Identité absolue.
160 DIETER HENRICH ALTERITE ET ABSOLUITE 161

Par là, on satisfait à la dominance de l'Un dans la for- motif moniste, on peut la décrire comme une intégration dans
mule de l'Un et Tout. Mais elle n'exige pas que le multiple le cadre moniste des concepts platoniciens fondamentaux. A la
ne soit plus du tout évoqué. Elle exige plutôt, à l'inverse, question portant sur le fait de savoir s'il y a du particulier
de le comprendre identiquement dans l'Un comme selon hors de l'absolu, donc du particulier radicalement précaire,
sa réalité dernière. L'Un n'est pas seulement quelque chose ou si tout fini n'est que comme une propriété ou un état de
d'unique, mais, par rapport à ce qu'il comprend en soi, l'absolu, le monisme doit donner une réponse claire. Conçoit-
il est justement cela même que l'image naturelle du monde il le particulier comme attribut et mode, il en vient alors à
présupposait comme quelque chose d'immensément multiple: des difficultés concernant l'interprétation du monde réel:
il est Tout. Pour autant qu'on se réfère au multiple lni- conçoit-il ce particulier comme autonome en un sens fini quel-
même, il faut, concernant 1'« indifférence» qni subsiste entre conque, alors vient au jour aussitôt la question qui consiste
le multiple pour autant qu'il est pensé comme existant- à savoir de quelle manière le monopole de réalité de l'Un et
« dans» l'Un, penser l'identité de cet Un comme «totalité». Tout peut bien encore perdurer. Schelling fut le premier
Identité, indifférence et totalité sont donc des expressions moniste à céder à la conséquence qui peut être tirée de la
dépourvues de signification lorsque ne peut être pensé aussi formule de l'Un et Tout, pour autant que l'Unitotalité ne
un divers, en rapport auquel seulement l'unité de l'Un peut doit pas être seulement un concept tourné critiquement contre
être définie comme Identité. Ainsi, nonobstant le fait que la le monde naturel, mais la base d'une description du monde
pensée de l'absolu dément la différence comme forme ori- à partir de l'Absolu lni-même : il doit, pour des raisons d'or-
ginale de l'effectif, cette différence doit cependant être prise dre conceptuel, y avoir le multiple, qni dans l'Un en son
dans le concept de cet absolu, et elle doit l'être comme la ensemble partage la propriété de l'identité. Mais alors, com-
pensée d'une différence qni ne subsiste que dans la mesure ment son existence peut-elle être encore affirmée et comprise
où l'unicité sans concurrence de l'Absolu a sa subsistance dans l'un?
uniquement indépendante. Schelling répond d'abord par deux conséquences, qni, de
Schelling emploie une série de couples conceptuels qni façon étonnante, amènent à penser ensemble le monopole de
doivent servir à concevoir par le langage l'immanence du sin- l'Absolu et l'existence du fini : le fini, qni est co-pensé dans
gnlier fini dans l'Absolu : l'Absolu est 1'« universel» auquel le concept de l'Absolu lui-même, ne peut être en quelque
les particularisations inhèrent sans s'ajouter à lui; même manière réellement différent de l'Absolu lui-même que s'il
1'« infini», dans lequel les limites du fini sont seulement présente lui-même le caractère de l'absoluité. Mais ce carac-
dessinées, de telle sorte que de son côté il demeure présent tère est Unitotalité; et de la sorte tout fini, dans sa manière
dans le fini; 1'« intuition», qni porte toute différenciation d'être, doit être déjà le tout du réel : lui aussi est en soi
conceptuelle; l'essence, qui est réalisée aussi dans les diffé- totalité. Mais comme en même temps il faut penser la dif-
rences de sa forme. Toutes ces expressions veulent dire que férence des finis qui sont admis en même temps que l'Absolu,
la différence, dans le fini, n'est pas de principe mais seule- cette différence maintenant ne peut plus être marquée par les
ment dédnite radicalement - que le fini ne subsiste stric- qualités que présente du fini déterminé, mais senlement par
tement qu'en vertu de l'absolu, et partant en lui. le type de répartition de ces qualités. Toute différence entre
Mais Schelling a donné à ce théorème fondamental du mo- les finis, qui tons ensemble sont des totalités, et dans cette
nisme une autre tournure, qui d'abord donne la forme systé- mesure aussi une totalité, ne peut être que quantitative.
matique pour lni caractéristique, mais pose aussi par après les Par là et dans un premier sens est posé le fondement d'une
points d'ancrage du développement conceptuel qui conduit au inclusion de Platon dans le cadre moniste : si tout fini, dans
concept de système de Hegel. Quand on regarde l'histoire du une certaine perspective et accentuation, est le tout, on peut
r
ALTERITE ET ABSOLUlTE 163
162 DIETER HENRICH

dire qu'en tout fini c'est l'Absolu qui vient au phénomène. ontologie universelle seulement par le fait que, renouvelée
Et l'on peut dire en outre que ce fini .est contenu dans le chaque fois, elle est appliquée au résultat d'une conséquence
concept de l'Absolu selon son idée, de telle sorte que l'unique qui avait été atteinte à l'étape précédente de son application.
Absolu est en même temps le tout des idées du fini. Elle doit toujours être à nouveau appliquée lorsque la
forme conceptuelle résultant de l'application précédente n'est
En tout état de cause, si c'est en un sens platonicien qu'il cependant pas conciliable avec les hnplications précisément de
est question d'« idée », le term~ de «phénomène», ici, se cette formule-programme elle-même. Pour la répétition de son
trouve encore en question dans une tout autre signification : application, il y a dans le cas envisagé un motif particuliè-
pas seulement comme manifestation de l'Absolu, mais aussi rement valable. Le principe de l'Unitotalité requielt ponrtant
dans la mesure où le phénomène fini demeure essentiellement en tout premier lieu que la différence ne tronve place qne
en retrait derrière l'Absolu lui-même. Si ce motif platonicien dans l'Un. Or ce principe, de son côté, parnt avoir pour
se trouve également assumé, le fini, en tout état de cause, est conséquence une différence qui ne peut être pensée que si
en un sens qui porte encore beaucoup plus loin, une confir- elle est reconnue aussi comme une différence en regard de
mation ontologique. Et il est caractéristique pour la posi- l'Un. En effet, si le fini est indépendant, et de cette indépen-
tion de Schelling, qu'il tire cette confirmation du sens de la dance justement qni constitue l'absoluité de l'Un, il semble
formule concernant l'Absolu. La conséquence qui suit de là
qu'il doive aussi être en face de l'Absolu. Et par snite, cet
procède d'une conviction qui s'articule au caractère qui fait
Absolu n'est pas l'Un et Tout.
que le fini est déjà lni-même totalité : si le· fini, en effet,
est totalité, et si l'Un et Tout, en vertu de son unicité et par- Si donc il y a un monisme quelconque qni résiste à son
tant de son autosnffisance, a la propriété d'être totalité, propre développement logique, c'est seulement lorsque l'indé-
il faut qu'au fini, dans la mesure où il exprime l'Absolu, pendance du fini n'est pas une indépendance définitive. Le fini
soit attribuée également l'autosuffisance en vertu de sa to- doit nécessairement être posé comme indépendant, et en même
talité. Mais ensnite, quoique radicalement dépendant de l'Ab- temps être aussi supprimé dans son indépendance, si l'uni-
solu, il est lui-même aussi, dans cette mesure, indépendant. totalité se trouve assumée. L'Absolu est donc, d'entrée de jeu,
C'est parce qu'il donne l'infini, et parce que le fini lui ap- à penser dans nn double rapport au fini : à partir d'un seul
partient pleinement, que ce fini justement est indépendant. Et et même principe, il lui donne une indépendance qui, de
c'est ainsi que Schelling peut dire qu'il est quelque chose façon tout aussi radicale, est caduque. De même que le fini
qni n'a part à son idée dans l'Absolu que pour cette raison a dans l'Absolu une «vie double» (E II 117), comme idée et
qu'il doit aussi exprimer en soi la forme de l'absolnité, comme individu indépendant, ainsi l'Absolu a-t-il également
à savou· par son existence autonome. Avec cette idée, le une double relation à lui : il est à son égard constitution et
monisme s'est prémnni contre le danger de devoir nier la snppression, position et négation à la fois.
subsistance du fini purement comme tel. Il s'est transformé L'impression peut surgir qu'avec de telles formulations le
en universalisme: l'autonomie du fini est inunédiatement fon- monisme serait entré déjà dans le champ de gravitation des
dée dans l'Absolu; le sens de l'existence-dans l'Absolu in- essais de pensée de Hegel. Effectivement, elles ont été aussi
clut aussi à l'égard du fini son autonomie. le point de départ pour la constitution ultérieure du sys-
Ce résultat était tiré de la formule-programme de l'Un et tème moniste de Hegel. Cependant, elles peuvent être re-
Tout, laquelle prouve justement par là sa convenance à être jointes sans plus dans le projet propre de Schelling, et elles
principe de construction d'une ontologie. Mais on voit déjà sont même la limite qui marque sa forme systématique et sa
qu'on ne peut s'en tenir à lni. La formule-programme - on portée. L'intégration caractéristique du platonisme et de la
l'a déjà dit - devient principe de construction pour une doctrine de l'Unitotalité ne peut en effet venir à une conclu-
n
-( ,

ALTERITE ET ABSOLUITE 165


164 DIETER HENRICH

sion satisfaisante qu'en faisant la démarche qni conduit à l'ac- sur la fiuitude comme telle; un aspect de finitude qui est
ceptation de la double relation de l'Absolu au fini. aussi, selon la vérité des choses, posé effectivement en elles.
Une telle pensée, que Hegel nomme «réflexion >, imite (au
Par là se montre alors aussi que Schelling dispose de sens platonicien) le vrai et le cache en même temps par
moyens qui pouvaient lui laisser penser que le reproche sa tendance à l'isolement du singulier fiui. C'est ainsi que
adressé à lui plus tard par les hégéliens, reproche portant sur l'individu fixé dans la limitation doit, dans la pensée critico-
le fait qu'il ne connaîtrait que la substance vide, l'être immo- logique, se trouver supprimé, «néantisé», pour que puisse
bile, l'absolu sans le logos, est totalement sans objet et sans apparaître la vérité à même la limitation.
fondement de droit dans le projet de système élaboré par lui-
Ici, la suppression de la finitude est à mettre au compte
même. On ne peut certes montrer ici de quelle mauière il
de la counaissance philosophique; elle n'est pas une relation
insérait le fait du développement et de la connaissance dans
sa conception de l'Un et Tout. Mais qu'il n'ait pas prévu com- qui subsiste dans l'Absolu lui-même. Pourtant Hegel présup-
pose qu'une telle relation de négation ne se trouve pas instau-
ment cette conception pouvait échouer sur nne telle tâche,
on le saisira si l'on voit qu'elle se fondait sur une double rela- rée par la logique comme philosophie seulement dans un sens
épistémique, critique, mais qu'elle doit se trouver présup-
tion de l'Absolu au fini. Dans cette double relation, « procès»
et « production» constituent la façon qu'a le fiui de sortir de posée aussi dans l'Absolu lui-même. La suppression de la
finitude dans la pensée philosophique est justement possible
l'Absolu et d'y retourner. Et relations «spirituelles» sont les
relations dans lesquelles l'uuité de l'Un et Tout manifeste du fait que toute finitude n'est pas seulement posée en elle-
son primat sur la différence quantitative tout autant que sur même, mais tout autant reprise dans l'Absolu.
l'indépendance relative du fiui. La totalité de Schelling, dans C'est en lien avec cette pensée d'un rapport négatif de
cette mesure, est en mouvement à l'intérieur de soi. Sans l'Absolu au fini posé avec son concept que le développement
doute Schelling présente-t-il ces mouvements comme surve- autonome de Hegel dans la spéculation philosophique engage
nant de façon intemporelle et sans résistance dans son sein. maintenant son propre cheminement. Cette pensée est le point
Et cela correspond dans une égale mesure aux racines spino- de départ décisif également pour la considération qui doit
rjste et platonicienne de sa spéculation. Dans une telle pré- suivre maintenant. Car la position mûre de Hegel en philoso-
sentation, on reconnaîtra facilement aussi une différence par phie, la forme de son système, la conception nouvelle de la
rapport à la conduite du discours et à l'exposé propre de logique et le concept fondamental qui lni est propre de l'Ab-
Hegel. Mais savoir si à cette différence correspond aussi un solu comme .Esprit se laissent déployer également à partir de
écart dans les fondements de la théorie et dans la pensée de ce point d'ancrage - comme des conséquences qui s'ensui-
l'Absolu, et savoir quand a surgi une telle différence, voilà vent dans une ligue unique - pas seulement comme des
qui doit encore être décidé en tout premier lieu. perspectives théoriques qni peuvent s'introduire à bon droit
dans une problématique complexe. Ce raisonnement peut être
Dans les premiers écrits hégéliens d'Iéna, le double rap-
articulé dans une suite de sept pas.
port de l'Absolu an fiui est institué en motif central de la
théorie spéculative. Qu'i! acquière une place si dominante
s'explique en bonne partie par la mauière selon laquelle Avant qu'ils ne soient développés successivement, une
Hegel projette la logique comme une science introductive à remarque est encore nécessaire, qni porte sur une classifi-
la théorie proprement dite de l'Absolu. Cette Logique, comme cation de la méthode d'interprétation : pour que soit mon-
on sait, a tout d'abord une tâche critique : les idées des trécomment il est possible de dédnire des prémisses de Schel-
relations pures, qui sont situées dans l'Absolu, sont fixées ling la philosophie propre au seul Hegel, on ne doit pas affir-
sur l'aspect de la fiuitude par une pensée totalement orientée mer que le développement historique de la pensée de Hegel
166 DIETER HENRICH ALTÉRITÉ ET ABSOLUlTÉ 167

s'explique eu ce qu'i! aurait élaboré et organisé son système en engagent d'abord des modifications du côté de l~ forme
A

portant uue attention préalable concentrée sur l'analyse de conceptnelle par laquelle seulement peut etre ~ffectue le l:~­
la pensée de l'absolu, et suivant la consécution des vues qui gramme moniste. Il sera montré que Hegel a faIl !e pa~ decls~
s'offraieut à lui au cours de cette aualyse. La tâche qui vers la pensée de l'Absolu, qui comme tel est 1 Espnt attel-
consiste à découvrir la liaison effective des motifs de la guant l'idée d'un fini qni, en rapport à soi-même, est un autre.
pensée dans le procès du développement de Hegel est certai-
nement plus complexe, et beaucoup trop complexe pour pou-
Les sept pas jalonnant la consécution de pensées spécula-
voir être entreprise ici. Cependant, la déduction de la position
hégélienne à partir de l'évolution de celle de Schelling fait tives, et qui transforment la pensée de l'abso!u entendue, dans
le double rapport de position et de suppressIOn en pense: de
plus que mettre une construction logique à la place du déve-
l'Absolu comme Esprit, se dégagent tous ensemble de la meme
loppement historique effectif. On peut en effet moutrer que
manière dont aussi la pensée de Schelling sur le principe de
l'avancée dans la conception spéculative de l'absolu ne se
l'Un et Tout avait atteint l'autonomie relative et en même
donne certes pas à connaître dans des recherches qui résulte-
temps supprimée du fini : à savoir par la valorisation nouvelle
raient, de façon séparée et comme des touts, des déplacements
de la formule-programme du monisme à l'état atteint chaque
intervenus dans les projets systématiques, mais qu'elles corres-
fois de l'articulation de la pensée de l'Un absolu.
pondent aux étapes du déploiement de la forme conceptuelle
propre de Hegel. C'est la raison pour laquelle on doit à tout
le moius prendre en compte le fait que la conception de l'ab- 1. Le premier pas part de la question suivante : comment
solu et les étapes de son déploiement entraient dans le chemin doit-on se représenter à proprement parler le processus dans
effectif que Hegel prit vers son système final, et qu'elles y lequel l'Absolu termine en même temps ou n~a~tise l'a~to,no­
entraient dans la mesure où elles sont inséparables des condi- mie du fini posé avec lni ? L'acte de poser le fuu pourrait a la
tions de formation de la langue de la logique spéculative riguéur être conçu comme un processus dans lequel l'Absolu
qui, par-delà des étapes détachables l'une de l'autre, se reste en rapport .avec lui-même seulement. Son autarCIe, et
construisit jusqu'à la forme conceptuelle de la Science de la partant le fait que, dans toutes les relations, il n'est en rapport
Logique postérieure. La force philosophique de Hegel, d'ail- qu'à soi-même, est un des caractères qui, pour l'Absolu mo-
leurs, n'a jamais tenu dans le fait de décrire des concepts niste sont fondamentaux. Schelling et Hegel se rencontrent
théoriques comme tels, de les examiuer ou de les esquisser. sur ce point dans l'usage de l'expression «égalité à soi ».
Il pouvait penser des figures spéculatives de pensée sans pou- L'Absolu pourrait bien être représenté de telle manière que,
voir exposer les éléments de leur structure comme détachés dans cette égalité de soi à soi seulement, il libère le fini conte-
nu en lui, donc à partir de son propre concept. Mais si l'Ab-
les uns des autres, et sans pouvoir par conséquent rendre la
solu est pensé en rapport à ce fini aussi bien comme suppres-
figure transparente. Même dans les questions fondamentales,
sion et néantisation; cette relation aiors n'iruplique pas seule-
sa pensée était concrète au sens qu'i! exigea par après, au
meut un être-relatif, mais encore une référence à quelq~e
sens où elle s'était pour ainsi dire perdue dans l'élaboration, chose d'extérieur. Car cette néantisation semble ne pouvoir
à propos des concepts ontologiques, de relations formelles, être représentée que comme un faire de l'Absolu à l'égard du
en sorte que Hegel ne discutait les projets théoriques que fini qui procède de lui ..
sous le rapport des relations formelles auxquelles elles sont
Mais c'est contre cette représentation que le principe mo-
liées . dans leur réalisation. C'est ainsi que l'on doit donc
niste doit intervenir. Dans cette situation de son usage mo-
s'attendre à ce qne des modifications concernant le déploie- derne, il exige que l'on conçoive la néantisation du fini au~r~­
ment de la formule-programme de la doctrine de l'Unitotalité ment que comme une action externe de l'Absolu sur le fml.
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168 DIETER HENRICH ALTJ!;RITJ!; ET ABSOLUITJ!; 169

De cela Hegel tient compte peu à peu par certaines mesures On peut maintenant obvier à cela si on s'en tient plus
dans la formation conceptuelle : tout d'abord il admet que au fait que, dans un terme, avec l'idée d'un fini posé grâce
la négation du fini ne provient pas directement de l'Absolu à l'Absolu est déjà posée aussi l'idée de sa suppression dans
mais ~ar. réplique finie du fini qu'il faut supprimer, don~ cet Absolu. Qu'il soit supprimé ne devrait donc absolument
pour ainsi dire par un iutermédiaire et représeutant. Dans la pas être représenté comme le résultat d'une quasi-activité à
m~sur~ où i:s sont d:s termes à supprimer, une telle réplique laquelle est soumis l'être du fini. Qu'il doive être supprimé
dOit necessrurement etre pensée en rapport à tous les termes relève tout autant de son concept propre que sa position.
finis. - Que la dimension de la finitude soit celle de la dif- Dans cette mesure le fini, en étant supprimé n'est pas contraint
férence de corrélats, cela était déjà admis par Schelling. Mais à un nouveau rapport à l'Absolu. Supprimé, il l'est bien, mais
cette différence n'était pas nécessairement à penser de telle en aucune manière de façon ex~erne - ni par l'Absolu ni
sorte que les termes différents se tiennent les uns en regard même par son terme opposé. Comment donc? Un tournant
des autres dans le rapport d'une suppression réciproque. Par décisif que prend Hegel sous l'influence de l'inéluctabilité de
le pas que fait Hegel, la non-identité des termes différents se cette question conduit à cette énonciation : le fini se trouve
trouve en tout premier lieu repoussée et renforcée jusqu'à supprimé par lui-même. Tout fini, d'entrée de jeu, est à com-
l'incompatibilité. prendre de telle sorte qu'il se comporte négativement à l'égard
de soi-même. Fini, il l'est justement pour cette raison que,
comme Hegel le formule plus tard, il porte en soi sa limite,
2. Par là le second pas est déjà préparé. Si le fini se trouve sa fin, ce par quoi il se dépasse. Néantisé, il ne peut l'être
supp~é par un corrélat logique, l'Absolu n'a pas besoin, que dans la mesure où avant toutes choses c'est par lui-même
pour farre en sorte qu'advienne la néantisation du fini, de se qu'il va au-devant de la néantisation.
~ourner contre ce fini. Le corrélat fini propre au fini veille
a. ce q~e soit supprimée son indépendance - une supres-
sl~n qm cer~es survient en vertu de l'Absolu, mais non par 3. En lien immédiat à cette réflexion peut trouver place le
lm. ToutefOis la suppression que le fini inflige au fini est troisième pas. Il retient seulement les conséquences qui ré-
demeurée une suppression externe. Et comme elle survient sultent de l'idée d'auto-suppression du fini pom' un concept
de façon réciproque, elle ne peut d'abord être pensée que de d'absolu qui est pensé totalement selon le principe de l'Uni-
telle sorte que d'elle procède à nouveau l'éternelle restitution totalité. De ce concept découlaient d'abord l'autouomie du
du fini. Car pour que quelque chose puisse être supprimé de fini, puis le fait que ce fini est aussi supprimé dans l'Absolu.
façon externe, il faut qu'il y ait un autre qui accomplisse une PourtaIlt, il sembla que l'absoluité de l'Absolu se trouvait
telle suppres~ion; et si cet autre se trouve lni aussi supprimé, mise en danger par cette double relation. Mais si l'être-sup-
ce ne. peut etre que par son corrélat, lequel du même coup primé du fini est à entendre à partir d'un rapport de négation
devrait au préalable être restitué. De la sorte le fini une de ce fini à l'égard de soi-même, le principe moniste en vertu
f~is Ii?ér~ par l'Absolu, demeurerait engagé dans le jeu :l'une duquel les termes différents ne peuvent trouver place dans
neantisatlOn et d'une restitution réciproques, un jeu qni éter- l'Absolu acquiert un sens nouveau. Si le fini, en effet, est sup-
nellement se déroulerait devant le trône de l'Absolu, lequel primé par l'Absolu, et si cette suppression se réalise par le fait
de la sorte (comme spectateur) se tiendrait aussi lui-même que le fini se comporte négativement à l'égard de lui-même,
toujours en relation externe à son fini. On pourrait en tirer il faut alors dire en outre que l'Absolu est présent dans le
la conséquence snivante : pnisque la néantisation du fini a fini précisément par son auto-néantisation et par conversion
dû être déléguée au fini, sa néantisation absolue dans l'Ab- interne dans son contraire. L'auto-suppression du fini n'est
solu est devenue précisément impensable. ainsi que la manière selon laquelle a lieu sa néantisation par
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170 DIETER HENRICH ALTERITE ET ABSOLUITE 171 1

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l'Absolu. Si le priucipe de l'Vnitotalité vaut, la suppression velle et non au sens où il est aussi toujours déjà du négatif de
du fini du côté de l'Absolu ne peut en vérité absolument l'Absolu. Ainsi est-il bien rapporté à soi négativement, mais 'l1'
:1

pas être différente de sa suppression à partir de lni-même. non en vertu du rapport à soi de sa nature négative. 1
Mais alors de l'absolu est lui-même «à l'œuvre» daus le l,
fini lui-même, dans la mesure où il se néantise. 5. C'est pourquoi il faut faire un cinquième pas. L'Absolu
s'était certes trouvé identifié au fiui, dans la meSure où
celui-ci se supprime lui-même. Par là il ne s'était pas trouvé
4. A partir de cette formulation, on peut déclencher un identifié au fini comme tout et à tous égards. Cependant,
quatrième pas. L'Absolu est, comme tel, égalité à soi, pur qu'une telle identification soit admissible, voilà qui résulte
r~pport à soi. En plus, il était à penser comme le rapport de
immédiatement de ce que le principe du monisme de l'Vni-
negatlOn dans lequel le fini se tient par rapport à soi-même. totalité se trouve amené une nouvelle fois à application : le
Si l'on se demande comment cette présence sienne dans le fini fini ne peut être rien de radicalement différent de l'Absolu.
est à concevoir de façon plus précise, on pourrait d'abord pré- Schelling l'avait doté d'indépendance relative précisément
sume~ q~e l'auto-suppression du fini viendrait de ce que la
parce que c'est seulement ainsi qu'il répondait en lui-même
consti!utlOn fondamentale de l'Absoln, qni consiste à être rap- au caractère de l'absoluité. Cette indépendance était en même
port. ~ SOI, es~ ~s; en valeur anssi dans la nature propre temps à supprimer. Et comme cela à nouveau ne pouvait
~u fml. Le hru, mdependamment de l'autonomie par laquelle
se produire que de façon interne, Hegel en conclut que l'Ab-
il ressemble à!' Absolu, est, comme fini, ce que 1'Absolu n'est solu est présent dans le fini comme sa propre négation par
p~s; !l est ainsi déterminé négativement en regard de lui.
soi. Mais cette pensée ne tient bon que si, de façon renouvelée
~I m.aInte~ant sa nature négative se trouve soumise à l'égalité
et donc avec un sens nouveau, on peut dire que le fini est
a SOI de 1 Absolu du fait qu'elle se comporte aussi négative- l'Absolu, et donc aussi l'Absolu le fini. L'Absolu est le fini
ment contre soi-même, alors par là est à nouveau instauré dans la mesure où celui-ci n'est de façon générale rien d'autre
le primat de l'Absolu en regard du fini et il l'est à partir ni de plus que rapport négatif à soi-même.
de lui-même. '
Cette identification nouvelle de l'Absolu avec le fini donne
Mais dans ce modèle on ne tient plus que l'Absolu lui-même en tout premier lieu une signification précise et en même
a un ~ôté négatif. L'Absolu est seulement encore pensé comme temps beaucoup plus dramatique qu'auparavant au discours
ce qUI transporte le négatif, qui auparavant était sorti de lui portant sur le fait que le fini en vient à partir de lui-même
~ans l'égalité de l'Absolu avec soi-même, comme ce qui p'; à ce terme dans lequel il se supprinIe. Le concept de fini, qui
la r~nd la nature négative relative à soi, de telle sorte qu'elle est posé avec celui d'absolu, doit maintenant être défini en-
deVIent l'a~to-s,:ppres~ion. Mais que ce rapport à soi soit rap- tièrement par son inversion de soi. L'Absolu, n'est pas dans
port négatif, VOIlà qUI est attribué de ce fait au fini, non à le fini, ce qui l'engage à l'inversion de soi. II est le fini
I:A?solu. Le contraire était cependant requis au départ de dans la mesure où celui-ci n'est rien d'autre que le procès
I.Idee. Plus. lourd e~core pèse le fait que, dans la nature néga- permanent d'une telle auto-suppression.
~Ive .du fH~ .au plem sens de cette forme logiqne, un rapport
a SOI en venté ne peut pas du tout être établi. Car la finitude Hegel a enserré ce concept spéculatif dans une forme
comm~ telle a un sens négatif autre que celui qui doit être
conceptuelle qui plus qu'aucune autre est appropriée à l'ex-
allégne lors de sa suppression : la finitude comme telle est prinIer et aussi à l'élaborer dans une théorie du monde qui
limit~ti~n e~ exclusion de l'absoluité, tandis qne la suppression
répond au postulat moniste fondamental : le fini comme tel
est élImmatIon. Le fini se supprime donc bien lui-même mais est l'autre de soi-même.
en vérité sur fond d'une puissance de nier totalemen{ nou- II y a bien des raisons pour lesquelles, dans le cadre
r

172 DIETER HENRICH ALTÉRITÉ ET ABSOLUITÉ 173

conceptuel de la doctrine de l'Unitotalité, on peut dire que le fini qui doit se supprimer fut défini par son auto-suppres-
le fini est quelque chose d'autre. Ainsi il est choses différentes sion. Pour la raison justement que l'Absolu est le fini, celui-
dans l'Un, et il est aussi différent de l'Un dans la mesure ci est à penser comme autre de soi-même. Le négatif comme
où il exprime son indépendance de celui-ci. Dans de telles tel se tient en rapport à soi. Et c'est pour cela que l'égalité
descriptions, une différence quelconque est toujours encore de l'Absolu à soi est l'essence propre du fini. Il est évident
maintenue entre le fini comme tel et son être-autre. Pourtant qu'avec ce pas c'est aussi l'idée d'absolu qui se trouve mise
la forme conceptuelle de l'autre de soi-même ne doit pas seu- à nouveau en mouvement et doit être conçue de manière
lement penser le fini avec la propriété essentielle qu'il va neuve. Dans le cinquième pas, on n'a d'abord fait que dé-
à sa fin, mais le définir précisément par l'auto-référentialité ployer les conséquences qu'a pour la pensée du fini lui-même
dans son être-autre. la nouvelle intelligence de l'intériorité de l'Absolu dans le
Cette forme conceptuelle ne peut pas ici être analysée ni fini. Il faudra donc que d'autres pas soient faits.
même débattue dans ses implications et ses variantes. Hegel Mais auparavant il faut éveiller l'attention au fait qu'avec
pense et doit penser que toutes les catégories de la finitude la nouvelle forme conceptuelle de Hegel c'est aussi la mo-
peuvent être entendues à partir de la manière dont ont été dification de la forme de son système philosophique qui fut
intégrées l'une à l'autre dans l'autre de soi-même les relations rendue possible, et même nécessaire. Même dans le premier
formelles du rapport à soi (<< ••• de soi-même») et du rapport- système la Science de la Logique était la première discipline.
étranger (<< l'autre ... »). Il est facile de voir jusqu'à quel point Mais comme telle elle n'était que l'introduction indispensable
le fini, avec cette idée, est devenu essentiellement procès, et à la science de l'Absolu lni-même, la métaphysique. Concept
aussi que la dimension de résistance à soi relevant de ce qni et forme de l'Absolu devaientêtre arrachés à une pensée qui
maintient le procès en mouvement vient du concept propre se raidit sur ce qni n'est que fini en lui. Jusqu'à quel point ce
du fini. Mais il faut aussi comprendre en outre que le rap- fini est toujours déjà supprimé et retourné à l'unité, c'est seu-
port à soi qui caractérise l'Absolu est maintenant totalement lement une pensée autre qni pouvait le compreudre. Cette
amené à expression dans la nature négative propre du fini. peusée, trouve Hegel, doit se tenir dans une intuition pure
Car si un autre comme tel se tient en rapport à soi, il est et ferme de l'Absolu lui-même, de l'Absolu qlÙ n'est res-
certes bien un déterminé quelconque, ou un immédiat, qui pecté par la simple réflexion que dans la mesure où il est le
doit être différent d'un autre. Mais il ne l'est que parce qu'en fondement effectif, encore qu'obscurci, de toute finitude. Ainsi
tant qu'autre, il se tourne à partir de soi-même contre soi. n'y a +i1 aucune connaissance pure du fini entendu de cette
Pour autant qu'il est essentiellement autre en rapport à soi, manière qni ne se réfère en même temps aussi, de façon di-
il est justement le déterminé en rapport auquel il est à soi- recte, à la pensée suprême de l'Un et Tout.
même un autre. Finalement, en raison de la constitution
Maintenant, si le fini est pensé de telle sorte qu'à partir
conceptuelle, on ne peut plus dire d'une telle altérité radica- de lni-même il supprime essentiellement sa propre finitude,
lement autoréférentielle que l'auto-suppression du fini s'ajoute
et pas seulement parce que l'Absolu agit en lui, et partant
à sa nature finie. Car l'altérité que le fini montre en lui-même
sur lni, mais parce qu'il est défini comme autre de soi-même,
est exactement la même que celle qu'il a aussi en rapport à
et, du même coup, à partir de son auto-suppression, alors la
soi-même. Si l'autre est autrement que lui-même alors par là
situation théorique change de fond en comble. Si le fini,
son altérité primaire est supprimée de par lui-même. Son
selon son concept propre, se supprime dans l'Absolu, alors
rapport à soi est négation de soi.
pour que le concept de cet Absolu soit conçu, absolument
Tout cela vieut de ce que le principe de la doctrine de rien d'autre n'est nécessaire que de penser le fini purement
l'Unitotalité fut appliqué une nouvelle fois, et que par là pour soi; - sans points de vue externes, et sans norme
7
174 DIETER HENRICH
ALTERITE ET ABSOLUlTE 175
qui devrait être tirée de l'Absolu lui-même. On pense déjà de
6. Le sisième pas est maintenant déjà préparé. En lui, la
façon pure, et, peut-on dire, «dans» l'absolu comme tel
pensée de l'Absolu comme tel est à développer plus avant, et
lorsque l'on pense le fiui comme tel. Et cela se comprend cela eu égard à la propriété qui entre-temps a été assumée
par le fait que cette idée implique celle d'absolu par-delà dans le concept de l'Absolu, par-delà l'identification du fini
l'auto-suppression du fiui, et en outre par le fait que le fini et de son auto-suppression avec l'Absolu lui-même. Comment
lui-même, pour autant qu'il se supprime lui-même, est iden- penser l'Absolu qui est l'auto-suppression du fiui ?
tique à l'Absolu.
A l'Absolu lui-même appartient maintenant le fait qu'il
C'est pourquoi la Science de la Logique peut aussi com- subsis~e déjà comme tel dans le fini, lequel se transpose
mencer avec n'importe quelle idée de fini. La fiuitude du essentiellement dans l'idée de cet Absolu, qui lui-même n'est
fiui se prouvera dans cette idée par-delà l'auto-suppression rien de fiui. La formule de l'Unitotalité subit maintenant
à laquelle, de soi, elle conduira. Comme cette pensée se une transformation de sens qui consiste à comprendre l'uuité
suppdme dans son contraire et que celui-ci également est à du fiui qui s'élimine lui-même et de l'Absolu dans lequel il
nouveau fini, doit se dégager tout d'abord un couple de dé- se supprime comme le sens de l'Uuique Absolu.
terminations de pensée qui, par son auto-suppression réci-
proque, se montre comme posé dans l'absolu. Mais il subsiste Le fiui dans l'Absolu est l'autre de soi-même. Cette forme
également toute chance pour que, sur ce chemin, l'idée de couceptuelle est· d'abord à expliciter sous cette forme qu'un
l'Absolu lui-même puisse être atteinte dans sa pleine détermi~ fiui se supprime dans un autre fiui. Celui-ci aussi est eusuite
nation, même s'il n'est pas tout de suite prévisible sur quels à son tour supprimé à partir de lui-même, et il l'est soit
chemins et par quelles étapes de l'explication spéculativo- en revenant au premier ou en passant à un autre fini, qui
conceptuelle. Car le fiui lui-même est l'Absolu daus son rap- se supprime égalemeut dans un autre, en sorte que se pré-
port à soi négatif. «Auto-dépassemeut du fiui », en effet, ne sente lme série infiuie de termes fiuis dont chacuu a deux
signifie pas seulement le dépassement de fini en fiui, de telle voisins - lm dont il procède, et un dans lequel il disparaît.
sorte qu'à la fin ce serait toujours à nouveau un fiui qui serait Aucuue de ces deux interprétations de l'altérité auto-référen-
attesté dans son indépendance. Elle est dépassement de toute ciée ne peut épuiser le sens de l'Uuitotalité, étant douné que
finitude dans l'Absolu. De la sorte, il faut donc s'attendre à toutes deux aboutissent à une confirmation définitive du fiui.
ce que l'idée du fiui implique l'idée d'Absolu pas seulement Mais d'autres explications de l'altérité auto-référenciée
de façon abstraite, mais comme une idée complète, et dans peuvent aussi être atteintes. Cela peut adveuir par exemple
cette mesure cette idée doit être pensée de telle sorte qu'en par le fait que des finis, dans la mesure où ils sont anh'es,
elle tout fini est défiuitivement caduc. Si la Science de la sont conçus selon leur propriété qui est d'être essentiellement
Logique, d'ailleurs, n'a pas seulement l'intention de penser des symétriques. Si par suite l'on pense leur anto-suppression
l'absolu, mais d'être complète et de ne laisser aucune pensée réciproque dans une seule et même peIisée, et pas seulement
fiuie conune simple présupposition, alors elle fait bien de l'auto-suppression de chacun dans l'autre, c'est aussi le sens
veiller à ce que la pensée la plus simple de l'immédiat soit de la cOlTélation elle-même qui est par là modifié, cette
rapportée à son commencement à elle, le commeucemeut de corrélation que l'on avait mise en ligne de compte. Le fini
la logique. Mais eu tout cas, que ce soit daus sa dimension peut alors, dans la mesure où il se tient dans la différence de
complète ou comme fragment, elle est déjà elle-même, en couples de fiui, être l'autre de soi-même. Mais par là il est
tant que Logique, Métaphysique, pas seulement destruction uuité indifférente. Des modifications multiples qui se font
critique des pensées fiuies, mais saisie absolue de leur auto- jour dans le déploiement de la pensée de l'altérité auto-
destruction. référenciée, seule la Logique qui est elle-même métaphysiqne
peut rendre compte.
DIETER HENRICH ALTÉRITÉ ET ABSOLUITÉ 177
176

Qu'elles soient toutes développées, ce n'est pourtaut abso- essentiellement rapporté à son autre. Mais il est rapporté à
lument pas uue présupposition uécessaire pour qu'il soit po:- cet aut~e de telle manière que cet autre, dans ce rapport,
sible de saisir de façou déterminée l'idée de l'Absolu lUl- ~st p.ose, non seulement comme sa propriété, mais comme
même par rapport à l'auto-suppression du f~. C,ar, da~ ~ne ldentlqne à lni. On peut l'exprimer aisément ainsi aussi
de ses explications, la pensée de l'autre de S~l-meme cOlnClde avouons-le, à travers UIl déplacement de sens : l'Absolu s;
radicalement avec celle de l'Absolu. On VOlt cela de la ma- ra~po~te à l'a~tre en tant que dans l'autre, il se rapporte à
nière suivante : SOI-meme. Qu Ii se rapporte à l'autre inclut que dans ce rap-
port il subsiste comme lui-même. Qu'il se rapporte à l'autre
L'Absolu était à penser comme identique au fini qui se
co.mme à soi-même signifie que l'Absolu, sans considérer le
supprime lui-même. Mais l'auto-suppression de cel~-ci ne
fal! que l'autre demeure un autre, dans cet autre n'est rap-
pouvait épuiser le concept d'Absolu. Car dans le neant ~~
porté à rien qu'à soi seulement.
fini l'Absolu seulement s'établit, et de telle sorte que le fml
se supprime dans l'Absolu. Mais par là est introduit à nou- Hegel est d'avis qn'un tel rapport n'est possible absolu-
veau UIl problème du type de celui qui, à partir de tous l~s ment que comme rapport épistémique. Et c'est ainsi que, de
niveaux de développement du principe moniste de l'Uru- façon plus précise, se comprend alors le «comme» explicatif
totalité, nous est familier : le différent doit être pensé comme qui doit être utilisé lorsque l'altérité trouve dans l'absolu
distinct de l'unité et en même temps comme cette unité elle- son expression lingnistiqne : l'Absolu se rapporte à son autre
même. Ici, l'absolu est maintenant d'un côté ce dans quoi comme à soi-même. Ainsi l'Absolu, conformément au pos-
tout fini, et partant son auto-suppression, atteint son but, tulat de l'Unitotalité, n'est-il pensable que lorsqu'il est pensé
et d'Ull autre côté en même temps ce fini également dans son comme connaître, et cela daus la forme particnlière et su-
processus d'auto-suppression. Ainsi est-il, en soi et par rappo~ prême de la connaissance de soi. Hegel, par là, a atteint une
à soi-même, un autre: car il est le fini, et ce rapport à quoI interprétation spéculative de la connaissance en vertu de la-
aucun fini ne subsiste. Même l'Absolu comme tel est l'autre quelle aussi la connaissance est UIl objet formel. Ce n'est pas
de soi-même. dans son statut ontologique, mais seulement dans la concré-
Bien entendu, il ne l'est pas exactement comme le fini, tion de sa déterminité qni cet objet formel est différent des
pas comme quelque chose qni vient à succomber dans son nombres et des catégories. Conformément au postulat métho-
autre ou, peut-on dire, succombe à l'altérité qui lni est .e"."en- ?ologique du monisme, il est en tout cas l'unique forme pure
tielle. TI est identifié à l'altérité rapportée à soi du flU1 - a laquelle, au terme de l'analyse, revient l'indépendance. Tou-
mais de telle sorte qu'il est en même temps à penser comme tes les autres formes peuvent être pensées comme incluses
ce qui se tient en face du procès de cette altérité, ce dans dans la forme du rapport à soi de l'esprit.
quoi le procès de l'auto-suppression de l'altérité vient ,à son L'Absolu comme Esprit peut se comprendre dans son ideu-
terme. Dans cette mesure, l'Absolu est les deux : le resultat tité au fini parce que ce fini lni-même remplit trois condi-
et le procès, et dans ce seus lui-même et son autre. tions : tout d'abord il présente les mêmes déterminatious fon-
~amentales qui définissent aussi l'Absolu comme tel. En effet,
L'Absolu est Esprit. Cette définition lapidaire de l'Absolu, 11 est rapport pur à soi, pour autant qu'il est rapport à soi
la plus haute que Hegel ait à donner, dérive de cette. q~es­ de l'autre. Mais il est aussi, pour la même raison, différent
tion : comment comprendre que l'Absolu, au sens qUI VIent en soi. Car il est altérité et suppression dn fiui dans l'au-
de résulter, puisse être lni-même et aussi son autre? .TI n'est tre de soi. En second lieu, l'Absolu est lui-même autre en rap-
pas ce qui est un autre en ce qu'il se perd nécessarrement port à soi. En effet, il est fini, et conjointement ce qui rend
dans son autre. C'est sans une telle perte de soi qu'il est caduc tout fini. Mais comme il n'est pas autre de soi-même
178 DIETER HENRICH ALTÉRITÉ ET ABSOLUlTÉ 179

dans le même sens que l'est le fiui dans son auto-suppression, débuter par le fiui ? Il faut encore poser cette question, bien
il ne peut en troisième lieu s'identifier à ce fiui que dans la que le fini se soit déjà trouvé identifié à l'Absolu. Car l'Esprit
mesure où le fiui se transforme en l'Absolu, dans un procès maintenant, a en tant que finitude lui-même pour commence-
déterminé seulement par son propre concept. ment. Mais il doit avant tout être l'uuité qui est l'Unitotalité.
Hegel prend en compte toutes ces formes de fondation des La réponse ne peut être donnée que si le sens de la for-
choses sans articuler leurs différences et la connexion entre mule «l'Absolu est Esprit» est développé plus avant. On
elles. Elles aboutissent toutes pour lui à l'essentiel qui con- pense manifestement de façon toujours insnffisamment fon-
siste à rendre l'Absolu identifiable au fini, et à laisser l'Ab- dée lorsque l'on raisonne comme suit : s'il est essentiel à
solu comme tel être défini dans cette identification. En outre, l'esprit de se saisir lui-même, ce qui se saisit et ce comme
il fait confiance à la puissance de sa langue spéculative. Sa quoi il se saisit doit au préalable être réel. Et si l'Esprit
concentration et son pathos logiqne s'expliquent justement ne peut se comprendre qu'à distance de soi et par-delà une
par le fait qu'il peut évoquer dans une proposition, et partant auto-identification, il faut également que soit réel ce qui rend
tout d'une haleine, les modes divers du rapport de l'Absolu possible une telle identification, c'est-à-dire le fiui.
au fiui. Mais dans ce raisonnement, les deux choses, l'existence de
l'esprit et l'existence du fiui, sont conçues comme des condi-
7. Un deruier pas reste à faire. L'argument qui a conduit tions nécessaires de la possibilité de ce qui devient réel
à la défiuition de l'Absolu comme Esprit avait trouvé son comme connaissance de soi de l'esprit. Cependant, par là est
point de départ dans la pensée du double rapport de l'Absolu déjà ôtée toute assise à l'affirmation que l'Absolu, et donc
au fiui et de son autonomie. Elle s'était engagée en déve- tout ce qui est en général, ne serait rien qu'Esprit. En effet,
loppant la pensée d'uu rapport négatif de l'Absolu au fini. cette affirmation n'aurait de sens que si le fait que le fini est
Etant ensuite toujours présupposé qu'avec l'Absolu entre non médiatisé et s'engage dans le procès de l'auto-suppres-
en scène le fini. Or, cela réside assurément dans son concept, siou entre dans la défiuition de l'Absolu comme Esprit, et
pour autant que l'Absolu est pensé selon le principe de l'Uni- . n'est pas seulement postulé comme une condition néces-
totalité dans laquelle, d'après les flwdements de Schelling, le saire de la possibilité de l'Esprit.
fini doit être «posé». Pourtant, on ne peut plus se référer à L'Esprit est rapport coguitif à soi. S'il est comme tel l'Ab-
cette conséquence formelle sans plus de réflexion après que solu, son rapport à soi ne peut être peusé de telle sorte que,
l'Absolu a été radicalement identifié au fiui et à son rapport pour sa compréhensibilité, des conditious doivent entrer en
à soi négatif. L'Absolu comme Esprit doit inclure le fini ligne de compte qui sont encore extérieures à son rapport à
qu'il est et comme quoi il peut se comprendre. Il doit même soi. Cela aussi est à nouveau nn postulat qui procède immé-
se présupposer soi-même dans la forme de cette sienne fiui- diatemeut du principe de l'Uuitotalité. Si l'Absolu est pensé
tude. Car s'il est Esprit, c'est seulement dans son rapport à soi co~e Esprit, alors c'est comme la forme logique d'un procès
coguitif, lequel ne peut avoir lieu que pour antant qu'exis~e qUi commence comme fiuitude non médiatisée, et qui dans
un autre qui, dans l'Esprit, est conçu comme l'Absolu lUI- l'auto-suppression de cette fiuitude en rapport à soi et en
même. Quelle siguification a donc, pour le concept de l'Ab- savoir, est tout au loug identique à soi.
solu comme Esprit, le fait qu'il se présuppose du fini et son Qu'uue telle forme logique (bien qu'elle s'écarte en appa-
rapport à soi négatif? Il ne peut se rapporter à soi comme reuce totalemeut de tout ce qui est plausible) n'est pas pen-
à soi que pour autant que son autre est déjà entré en rap- sée de façon enonée, cela se montre de la façon la plus
port avec lui et s'est engagé dans le procès de son auto-sup- aisée si dans la pensée de l'Esprit et de sa connaissance de soi
pression. Comment l'Absolu peut-il ainsi, sans médiation, se trouve introduit ce qui pour beaucoup, et sûrement aussi
180 DIETER HENRICH ALTÉRITÉ ET ABSOLUlTÉ 181

pour Hegel, est fondamental en ce qui concerne l'idée de pour aller vers la connaissance de soi. Cela signifie à nouveau
conscience de soi: la conscience de soi n'entre pas simple- que lui-même aussi tout d'abord ne peut être qu'en tant que
ment en scène, mais est à établir. Mais elle ne peut pro- fini, mais eu tant que ce fiui qui est à penser à partir de
venir de ou être actuée par un autre hors ce qui est en relation son rapport négatif à soi-même, et qui, dans cette mesure,
à soi-même. Elle doit commencer à partir d'elle-même. Dans est d'un côté l'Absolu lui-même, d'un autre côté ceci : venir
la mesure où elle le fait, elle n'est pas encore dans le rapport à son auto-relation complètement déterminée, et dans cette
qui constitue l'acte de s'entendre comme soi-même. Cepen- mesure être procès dans et tout autant vers l'Esprit Un et
dant, ce déclenchement relève de la conscience de soi comme Tout.
telle. S'il n'y avait aucune venue à soi à partir de soi-même, Ainsi se montre aussi que d'un côté la forme conceptuelle
il n'y aurait pas non plus une telle conscience de soi. de Hegel, forme qui rend le fini auto-référencié et dans la-
Si donc l'Absolu est radicalement Esprit, pas seulement quelle il est pensé comme l'autre de soi-même, et de l'antre
spirituel ui, avant cela ou par-dessus le marché, encore autre côté sa définition de l'Absoln comme Esprit sont en con-
chose, alors cet Esprit doit être pensé comme une conscience nexion indissoluble. Il n'est pas indifférent que cette connexion
de soi qui va vers soi en commençant à partir de soi-même, soit perceptible sous le concept fondamental du mouisme de
pour parveuir à l'acte de se comprendre soi-même comme l'Uuitotalité et puisse devenir perceptible seulement dans le
soi-même. En se comprenant ainsi, il se comprend comme déploiement formel de ce concept.
enfermé en soi. Et par là justement, l'Esprit comprend aussi L'idée de l'Unitotalité fut introduite par Parméuide dans
son commencement propre par le fiui non médiatisé qui se le monde de la pensée. Elle déconcerte toute la tradition
supprime et partant se modifie lui-même, pas seulement occidentale, et même là où, parce qu'elle demeurait inarticu-
comme quelque chose en soi, mais comme ce qu'il est lui- lée et inapte à l'iuterprétation du moude effectif des choses
même, bien que ce ne soit que lui-même dans l'état d'immé- singulières, elle promouvait des pensées fondameutales tout
diateté. Mais il est nécessairement dans ce comme quoi il est autres, qui se faisaient convaincantes en argumentant à son
pensé, et nécessairement comme ce qui est le Premier en lui. encontre. Comment elle peut être introduite daus l'interpré-
tation du monde effectif, c'est ce que dans les temps récents
Spinoza et Schelling avaient cherché à montrer. Mais que
Au début de cet enchainement de pas qui conduisait au ce soit seulement dans sa définition comme Esprit qu'elle
concept de l'Absolu comme Esprit, l'Absolu se tenait dans remplisse le programme qui se trouvait déjà dans sa version
deux rapports au fini : dans celui qui consiste à le poser, et la plus simple comme Uuitotalité, c'est cela qui a été l'in-
dans le rapport négatif à son endroit, rapport qui consiste à tuition de Hegel. Ainsi compreud-on pourquoi la Logique
supprimer le fini. Tout d'abord le rapport négatif, sous le de Hegel, à la fin, ue peut être séparée de sa Philoso-
postulat de l'Unitotalité, en était venu à un rapport qui est phie de l'Esprit - mais à partir de raisons logiques, non
immanent au fini. An terme, ce qui se montre maintenant, en fonction des besoins d'une description théorique d'une
c'est qu'aux conséquences qui peuvent et doivent être tirées quelconque situation mentale (ou même sociale). On com-
de ce principe appartient aussi celle-ci : l'autre relation de prend en outre pourquoi toute tentative d'user de la méthode
l'Absolu au fini, en vertu de laquelle le fini en général était de Hegel et de repousser en même temps le foudement spé-
posé par l'Absolu, peut être caduque, au sens où elle implique culatif du système a conduit à une situation intenable au plan
une relation de quelque chose de différent. Le fini est dans théorique. La forme conceptuelle paradoxale de la méthode
lui-même. Mais cela signifie seulement que l'Absolu, dans ne se laisse maîtriser rationnellement que sous le postulat
la mesure où il est Esprit, doit démarrer à partir de lui-même mouiste de la doctrine de l'Uuitotalité. Avant tout l'on
182 DIETER HENRICH

comprend pourquoi Hegel n'a p~s joué seulemen~ avec la


pensée et la prétention qui eus~te est apparue, a tout le
moude co=e hybride : à saVOIT que sa pensee, par sa
forme et par son achèvement serait. ~upérieure à. tous les
systèmes antérieurs de la. grande tra~itlOn métar:hyslq~e. On
a atteint de nouveau le lieu et le pomt de vue a partir des- MANFRED BUHR
quels il pouvait se savoir plutôt complètement sûr de son
affaire.
DIE FRAGE DER IDENTITAT
IST DIE FRAGE NACH DER GESCHICHTE

In seinen «Ferneren Darstellungen aus dem System der


Philosophie» aus dem Jahre 1802 formuliert Schelling eine
allgemeine Forderung dialektischen Denkens, niimlich «nicht
nach dem bloss logischen Gesetz der Identitiit, ... sondern nach
dem Vernunftgesetz der Identitiit» zn suchen.
Das von Schelling anvisierte «Vernunftgesetz der Iden-
titiit» hebt auf eine neue Stufe des Nachdenkens über die
Identitiitsproblematik seit Kants transzendentalphilosophi-
schem Standpunkt ab. Für Schelling gilt - im Unterschied
zur vorkantischen philosophischen Entwicklung - «in An-
sehung» des «Vernuuftgesetzes der Identitiit» der «Gegen-
satz des Analytischen und Synthetischen» nicht mehr. Mehr
noch : Dieses Gesetz ist « einziges Prinzip aller Konstruktion
und demonstrativen Erkeootnis »'.
In der Tat wird die Identitiitsproblematik in der klassischen
deutschen Philosophie nicht mehr aIs bloss logische (wie noch
exemplarisch bei Leibniz) oder psychologische (das heisst:
als Problem des Selbstbewusstseins - wie im englischen
Empirismus) behandelt. Die Identitiitsproblematik wird nun-
mehr prinzipiell neu gefasst. Diese entwickelt sich im deut-
schen Geistesleben am Ende des 18. Jahrhunderts zn einem
weltanschaulichen Zentralproblem, das nicht nur philoso-

1. Schellings W àke, hrsg. von M. Schroter, München, 1956, Erster


Erganzungsband, S. 397.
184 MANFRED BUHR IDENTlT;n UND GESCHICHTE 185

phisch, sondern auch asthetisch und gesellschaftspolitisch stand erzeugbar, herstellbar - also zwischen Nichtidenti-
hervortritt. schem?
In der «Kritik der reinen Vernunft» geschieht die ange-
Innerhalb der philosophischen Dynamik der Zeit wird die strebte Synthesis durch den «Schematismus der reinen Ver-
Frage nach der Identitat zunachst allgemein ais Problem der standesbegriffe ». Dem Schematismus hat Kant einen zen-
Synthesis diskutiert. Dabei werden wesentliche Zusammen- tralen Platz in seiner philosophischen Systematik zugewiesen.
hange des Uebergangs vom metaphysisch-ontologischen zum Er betont : «Ueberhaupt ist der Schematismus einer der
dialektischen Denken angesprochen. Ging es dort um die schwierigsten Punkte. ... !ch halte dies Kapitel für eins der
Fixierung von isolierten Dingen bzw. um die (psychologische) wichtigsten »'.
Ausstattung eines isolierten Erkenntnissubjekts, so geht es Zweifellos hat der «Schematismus der reinen Verstandes-
jetzt - seit und mit Kant - um die «Mechanismen» der begriffe» innerhalb der Entwicklungsgeschichte de.r klassi-
V ermittlung zwischen Mensch und Wirklichkeit, zwischen schen deutschen Philosophie eine weitreichende Bedeutung
dem erkennenden (und handelnden) Subjekt und dem Objekt, nicht zuletzt hinsichtlich der Identitatsproblematik.
den objektiven Verhaltuissen und Prozessen. Was leistet der transzendentale Schematismus?
Erstens : Durch das transzendentale Schema wird die ge-
Der epochemachende Wandel im philosophischen Ver-
forderte Synthesis von Verstand und Sinnlichkeit erst ver-
standnis von Identitiit wird von Kant eingeleitet. Identitat wirklicht, erst durch diese Konstruktionsvorschrift wird Iden-
ist in der «Kritik der reinen Vernunft» nicht schon hin- titat erzeugt : Erscheinungen werden intellektualisiert, und
reichend errasst in der «reinen» oder «ursprünglichen Begriffe werden versinnlicht. Das Produkt dieser Identitatser-
Apperzeption» aIs demjenigen Selbstbewusstsein, welches zeugung ist dann das synthetische Urteil a priori, das heisst :
«die Vorstellung [ch denke hervorbringt» (B 132). Diese wirkliche Erkenntnis.
ist vielmehr nur das Vermogen zu reinen Verstandesbegriffen
und realisiert allein noch keine wirkliche Erkenntnis. Kant : Zweitens : Mit dem « Schematismus der reinen Verstandes-
« ... sich einen Gegenstand denken, und einen Gegenstand begriffe » hat Kant ein fundamentales Vermogen der mensch-
erkennen [ist] nicht einerlei» (B 146). Dadurch aber wird lichen Gattung angesprochen, das mit seiner erkenntuis-
ein für das Denken von Identitat entscheidendes Problem erzeugenden Funktion noch nicht ausgemessen ist. Denn das
anfgeworfen. Noch einmal Kant : «Zum Erkenntnisse ge- transzendentale Schema «ist an sich selbst jederzeit nur ein
hûren niimlich zwei Stücke : erstlich der Begriff, dadurch Produkt der Einbildungskraft», genauer : der produktiven
überhaupt ein Gegenstand gedacht wird (die Kategorie), und Einbildungskraft (B 179).
zweitens die Anschauung, dadurch er gegeben wird ... » Mit diesem Lehrstück der Kantschen Philosophie ist die
(B 146). Es entsteht also ein Anwendungsproblem, und philosophische, asthetische und gesellschaftspolitische Diskus-
zwar dergestalt, wie sich die reinen Verstandesbegriffe (Ka- sion der Zeit folgeureich befruchtet worden. In der philoso-
tegorien) mit den von diesen verschiedenen (sinniichen) phischen Diskussion wurde es vor allem von Fichte und
Dingen, das heisst : den Erscheinungen, verbinden kônnen. Schelliug bei ihren Bemühungen zur Ueberwindung des
Erst eine solche Synthesis ware transzendentalphilosophisch Kantschen Dualismus von Ding an sich und Erscheinung zur
absesichert und positiv ais Identifat ansprechbar. Das Stich- Geltung gebracht. In der iisthetischen und gesellschaftspoliti-
wort lautet : Identitiitserzeugung im Sinne von Erkenntnis- schen Diskussion kam es vor allem bei Schiller, Goethe,
produktion. Solche ist - nach Kant - die Aufgabe einer
Logik der Erfahrung. Und deren Grundproblem lautet : 2. Lose Bliitter aux Kants Nachlass, hrsg. von R. Reicke, Konigs-
wie ist Identitiit (Synthesis) zwischen Sinnlichkeit und Ver~ berg, 1889, 1. Heft, S. 129.
186 MANFRED BUHR IDENT1TAT UND GESCH1CHTE 187

Wilhelm von Hnmboldt nnd Hôlderlin znm tragen. Hier dessen Potenzen nur erkenntuistheoretisch. Erst Fichte wird
insbesondere bei der Frage, wie eine zerrissene, entzweite, ihn erweitem und weiterführen4•
harmonielose Welt bewiiltigt werden, wie - wie Schiller es Die Erweiterung der ursprüngIich Kantschen Fragestellung
ansdrückte - «aus der Zusammenstückelung unendIich in der Philosophie Fichtes war verursacht durch die Ge-
vieler, aber lebloser Teile ein mechanisches Leben im Gan- schichtserfahrung des bürgerIichen Subjekts in der Franziisi-
zen» sich bilden kônne'. schen Revolution. Deshalb radikalisiert Fichte das Kantsche
Der weltanschauIiche Einsatz war in diesen philosophi- Synthesis-Vermiigen nicht zufiillig. Sein absolutes !ch be-
schen, iisthetischen und gesellschaftspoIitischen Diskussionen stimmt sich aIs Tathandlung. Der revolutionare Anspruch der
je ein Vorstoss in der Suche nach der verlorenen bzw. herbei- Philosophie Fichtes ist in diesem unangefochtenen Primat
zuführenden Identitiit des Menschen, der menschlichen Gat- von Handlung zu suchen. Es bestimmt aIle Ausgestaltungen
tnng mit seiner lihrer natürIichen und gesellschaftIichen Um- der «Wissenschaftslehre».
weIl. In der « Kritik der Urteilskraft » hatte Kant selber noch In der «Wissenschaftslehre» wird die WirkIichkeit (das
den Anstoss dazu gegeben : «Die Einbildungskraft (aIs Objekt) aIs selbstentworfene, selbstproduzierte, selbsterzeugte
produktives Erkenntnisvermiigen) ist niimIich sehr miichtig für den Menschen (das Subjekt) schlechthin verfügbar. Die
in Schaffung gleichsam einer andem Natur, aus dem Stoffe, damit gesetzte Identitiit von Subjekt und Objekt ist allerdings
den ihr die wirkIiche gibt» (§ 49). so keine mehr der Vermittlung von Subjekt und Objekt (aIs
Und diese Auffasung der Einbildungskraft bedeutete eben Produkt), sonderu die innere Verfassung des Produzierenden
eine Ziisur im philosophischen und asthetischen Denken der (des lch) selber. Die WirkIichkeit wird bei Fichte zur blossen
Zeit. Bei vorkantischen Autoren und bei den Gegnem Kants Funktion des absoluten !ch. Dieses allerdings steht in der
war und blieb die Einbildungskraft, gefasst aIs individuelles Gefahr, sich aus dem transzendentalen Status heraus zum
nnd psychisches Vermiigen, in überwiegend pejorativen Wer- individuellen (vorkantischen) Selbstbewusstsein zu entobjek-
tungen eingebettet - es war und blieb das Vermiigen zu tivieren oder sich zu mystifizieren. Die Art und Weise der
Fiktionen, zu blosser Phantasie, bestenfalls noch in der « Eliminierung» des «Ding an sich» durch Fichte macht
Poesie brauchbar. Kant entdeckte die Einbildungskraft aIs diese Gefahr deutlich.
produktive Einbildungskraft und so aIs genuin synthetisches Mit seinem revolutioniiren Pathos überspielte Fichte die
Vermogen : die produktive Einbildungskraft «nach Prinzi- philosophischen SubtiIitiiten in der Fragestellung, wie das
pien des Schematism der Urteilskraft... ist Werkzeug der Subjekt zum Objekt, das !ch znm Ding (und nmgekehrt)
Vemunft und ihrer Ideen, aIs solches aber eine Macht, unsere kommen kann, vorschnell. Soweit Fichte hier überhaupt ein
Unabhiingigkeit gegen die Natureinflüsse zu behaupten ... » Problem gesehen hat, bleibt dieses in seiner Philosophie un-
(§ 29, Allgem. Anm.). reflektiert. Denn in der «Wissenschaftslehre» wird «kein
Dieser Denk-Einsatz bIieb bei Kantselber hinsichtlich des
Uebergangs yom Erkenntnisbegriff der Synthesis zu einer 4. Die Bedeutung Fichtes für die Entwicklungsgeschichte der 1

klassischen deutschen Philosophie ist lange vernachHissigt worden.


objektiven Synthesis zwischen dem (erkennenden) Menschen Erst in den letzten Jahren wird diese Bedeutung niiher und vorurteils-
und der objektiven ReaIitat noch defizient. Er vereinnahmte frei untersucht. Den Anstoss hierzu gab zweifellos der Beginn der
J.G. Fichte-Gesamtausgabe und das rasche Erscheinen ihrer ein-
zelnen Biinde, was das Verdienst von R. Lauth und seinen Mit-
arbeitem ist. In diesem Zusammenhang muss auch die Sondemummer
des «Archives de Philosophie» (juillet-décembre 1962) gesehen wer-
den, die wesentlich auf die Initiative von M. Régnier zurückgeht -
wie M. Régnier durch seine anregende Tatigkeit überhaupt viel zur
3. Schillers Werke (Nationalausgabe), hrsg. von B. von Wiese, philosophiehistorischen Forschung im HinbIick auf Kant, Fichte,
Weimar, 1962, Zwanzigster Band, S. 323. Schelling, Hegel und ihren zeitgenBssischen Umkreis beigetragen hat.
188 MANFRED BUHR lDENTITAT UND GESCHICHTE 189

Sein abgeleitet... Ein Sein ist lediglich für das beobachtete hervorhebt. Er sucht Identitat wieder ais Vermittlung von
Ich; ... für den Philosophen ist Handeln, nnd nichts aIs Objekt und Subjekt, von Natur und Mensch.
Handeln ... »'. Sdn ist für Fichte aIlein Tatigkeit, Handeln, Wie Fichte greift anch Schelling auf Kants Konzeption der
tatiges Sein. transzendentalen EinbiIdungskraft zurück. Er entwickeIt hier-
Unübersehbar sind bei Fichte die Paradoxien seiner idea- ans - von Fichte ausgehend - die Problematik der inteIlek-
Iistischen Erzeugungstheorie. In ihr wird nach den Gesetzen tueIlen Anschauung. Doch anders ais bei Fichte verstromt
des Bewnsstseins (das die Totalitat der objektiven Realitat deren Tatigkeits- und Produktivitatspotential nicht im Un-
ausmacht) die Wirklichkeit deduziert, vieIleicht besser : ima" endlichen, sondern solI sich in einem realen Produkt ausfor-
giniert. Das absolute lch produziert aus sich heraus das Nicht- men und vergegenstandlichen, vornehmlich im Kunstwerk.
Ich. Dieses aber beschriinkt letztlich doch das leh, was Für ScheIling ist das Knnstwerk die produzierte (kon-
dessen urspTÜnglicher Bedingung, namlich ungebrochene freie struierte) ldentitat von Objekt und Snbjekt, v'ln Realem und
Tatigkeit zu sein, widerspricht. ldealem (aIs zweiter Natur). Und aIs soIches ist es die Wahr-
Fichtes Versuch, die Identitat von Snbjekt nnd Objekt heit der inteIlektueIlen Anschauung. Die Knnst stelIt sich
herzusteIlen, ist nicht gelungen. Eine Seite des Widerspruchs dar aIs die beherrschbare, weil yom Subjekt selber hervorge-
zwischen Ich und Ding wird von Fichte einfach ausge15scht. brachte Synthesis von Objekt und Subjekt, von Natur und
Hegel bemerkt in der «Differenzschrift» zutreffend : «Das Freiheit. ScheIling : « ... die Kunst [ist] das einzige wahre
Prinzip der Identitat wird nicht Prinzip des Systems; sowie und ewige Organon zugleich und Dokument der Philoso-
das System sich zu bilden anfangt, wird die Identitat anf- phie ... , welches i=er nnd fortwiihrend aufs neue beurkundet,
gegeben »6. was die Philosophie ausserlich nicht darsteIlen kann, namlich
das Bewusstlose im Handeln und Produzieren nnd seine
Fichte biegt die Kantsche transzendentale Einbildungskraft
urspTÜngIiche ldentitat mit dem Bewussten »7•
auf die transzendentale Apperzeption ZUTÜCk. Damit reduziert
er aber hinsichtIich der Identitatsproblematik die transzen- In der «Differenzschrift hebt Hegel an Schelling hervor,
dentalphilosophische Systematik um die Schematismus-Funk- dass er « das Prinzip der ldentitat » zum « absoluten Prinzip »
tion. Und dadurch bringt er sie um ihre produktive Fuuktion, der ganzen Philosophie erhoben habe'. Aber die Art nnd
um ihre entscheidende VermittlungsroIle. Weise, wie Schelling die ldentitat von Objekt und Subjekt
(ais koukrete im Kunstwerk) hersteIlte, stosst auf seine Kritik.
Dem Gedanken, Identitat ais Synthesis nnd damit aIs Er-
Bis zum «System des transzendentalen ldealismus» ver-
zeugtes, Produziertes zu erfassen, ist von Anfang an die
meinte Hegel ein gemeinsames Vorgehen mit Schelling, nam-
Tendenz zur Geschichtlichkeit immanent. Fichte rekuITierte
Iich Philosophie aIs fortschreitende Geschichte des Selbst-
- ungeachtet aIler Einschrankungen, die gemacht werden
bewusstseins und, seiner Objektivationsformen zu begreifen.
miissen - auf die innere Geschichte, auf die des Bewnsst-
Doch Hegel sieht das Streben nach ldentitat in Schellings
seins. Der junge Schelling wird kontrar dazu das Feld der
Philosophieren zu vorschneIl abgebrochen'. Denn indem bei
ausseren Geschichte, das der N atur, auszuleuchten versuchen.
Schelling ist dabei - im Vergleich mit Fichte - insofem
der treuere Kantianer, aIs er an den objektiven Dingen (aIs 7. Schellings Werke, a.a.O., Bd. 2, S. 627 f.
8. G.W.F. HEGEL, Werke, a.a.O., Bd. 2, S. 94.
Natur) wieder ihre Eigenstandigkeit und EigengesetzIichkeit 9. Mit diesen Fonnulierungen reden wir nicht jenem seit Rosen-
kranz weitverbreiteten 'philosophiehistorischen Standpunkt - um
nicht Vorurteil zu sagen - das Wort, der ein Zusammenwirken von
5. J.G. FICHTE, Werke, hrsg. von Medicus, Leipzig o.J., Bd. III, Schelling und Hegel in Jena (und damit eine Beeinflussung von Hegel
S. 83. durch Schelling und umgekebrt) ausschliesst oder nur mit Vorbebalten
6. G.W.F. HEGEL, Werke (Suhrkamp), Franldurt am Main, 1970 und widerwillig zugibt. Wir glauben, dass das Gegenteil der FaU ist.
Bd. 2, S. 94. ' X. Tilliette hat jüngst mit Recht unter dem etwas provokatorischen
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190 MANFRED BUHR lDENTITAT UND GESCHICHTE 191

Schelling - so steUt Hegel spater in den « V orlesungen über anderen methodischen und begrifflichen Instrumentarium
die Geschichte der Philosophie» fest - «der letzle Punkt (einer anderen Logik), ais es die Transzendentalphilosophie
ais Einbildungskraft, ais Kunst bezeichnet ist, so ist dies bereitstellte. Diese Forderuug durchzieht die Jenaer Entwürfe
selbst im Subjekt ein untergeordneter Staudpunkt; und so und Schriften uud kommt in der «Phanomenologie des
ist dieser Punkt selbst nicht [die] absolute Identitiit des Geistes » zn einer ersten Einiéisung. In diesem Prozess philo-
Subjektiven und Objektiven ,". sophischer Neubesinnung und Neuformulieruug spielt - nach
Lage der Dinge - auch die Identitatsproblematik eine ent-
Identitat ais geschichtliche Aufgabe wird bei Schelling auf- scheidende Rolle. Hegel überwindet dabei insofern die tran-
gegeben im Kunstwerk ais einem inunerwiihrenden schéinen szendentalphilosophische Fragestellung, aIs er nnn nicht mehr
Bild der Verséihnung. Es war diese, auch gesellschaftspolitisch nach den Bedingungen der Méiglichkeit von Erkenntnis, Frei-
verhangnisvolle Illusion über die Wirklichkeit, die Hegel bei heit, Natur, Kunst usw. fragt, sondern nach allen méiglichen
Schelling bedenklich findet. Denn in Schellings Kunstwerk Zusanunenhangen zwischen den Menschen und den Dingen,
erweckt die Wirklichkeit den Schein der Geschichtslosigkeitll. aiso : Totalitat anzielt. Allein, die Leistungen der Kant-
In der kritischen Auseinandersetzung Hegels mit Kant, Fichte-Schellingschen Transzendentalphilosophie werden in
Fichte und Schelling erwachst seine Forderung nach einem diesem Zusammenhang - und überhaupt - von Hegel sehr
bestinunt anerkannt. Die Entwürfe und Schriften der Jenaer
Titel «Hegel in Jena aIs Mitarbeiter SchelHngs» festgehaIten : Zeit, aber auch noch die «Wissenschaft der Logik», die
«Ueber Hegela und Schellings Beziehungen waltet ein Unstern. Die «Enzyklopadie der philosophlschen Wissenschaften» und
Parteisucht, der Parteigeist, haben die wissenschaftliche Diskussion
vergiftet, die Differenz ist Entzweiung geworden. Die unmittelbaren die «Vorlesuugen über die Geschichte der Philosophie»
Schüler und Anhanger haben sich in feindlichen Lagem verschanzt. legen davon betont Zeugnis ab.
Aber die zwei Philosophen waren selbst Urheber ihrer Entfremdung.
Die Spottereien Heines waren hier am Platze. Die Schatten eines lang- Hegel geht nunrnehr auf die Anerkennung und die Ver-
jahrigen Streites werden auf die friedIichen Anfange zurückgeworfen.
Schelling in seiner letzten Philosophie rekonstruiert seine Vergangen-
mittlung der Gegensatze aus, nich auf ihre bloss schiichte
heit auf eine Weise, die kein gutes Haar am ehemaligen Freund Aufhebuug oder theoretische Unterschlagung der einen Seite.
llisst; el' greift ihn fast unaufhorlich an, und zwar hamisch. Aber In der «Jenenser Logik» hait er fest : «Die Uuendlichlceit
der heitere Hegel seinerseits ist nicht ganz frei von Seitenhieben
und Persiflage. Die Auseinandersetzung dauert, wie hekannt, über das ist ihrem Begriffe nach das einfache Aufheben des Gegen-
Grab fort. - Besonders die Historiker Hegels sind peinlich bestrebt, satzes, nicht das Aufgehobensein; dies ist das Leere, dem
jeden Makel der Scbellingscben Aehnlicbkeit auszutilgen, als ob es der Gegensatz selbst gegenübersteht »12. Und in der «Dif-
ein Frevel ware, irgend eine Uebereinstimmung zuzugeben. Wenigstens
in der früheren Gefolgschaft.» (X. TILLIETTE? «Hegel in Jena ais ferenzschrift, wird dann der folgenschwere Satz formuliert,
Mitarbeiter Schellings », in : Hegel in Jena. HegelMStudien. Beiheft 20. der einen Schlüssel zur Hegelschen philosophischen Neube-
Hrsg. von D. Hemich und K. Düsing, Bonn, 1980, S. 12 f.) X. Til-
liette verweist dann ais Beispiele auf Rosenkranz, Dilthey, G. Lasson sinnung darstellt : «So gut die Identitat gelteud gemacht
und Haering. Wir haben den Feststellungen von X. Tilliette nichts wird, so gut mnss die Trennung geltend gemacht werden. »
hinzuzufügen - nur : dass das Abhehen auf je nur eine Philosophie Und erlauternd rugt Hegel an : «Insoferu die Identitat und
bzw. je nur einen Philosophcn in der philosophiehistol'ischen For-
schung immer zu Vernachllissigungen, wenn nicht Einseitigkeiten, die Trennung einander entgegengesetzt werden, sind beide
führt, besondel's im Hinblick auf wirklicb stattgefundene Beziehungen.
Vgl. zu dieser Problematik auch : K. DUESING, «Spekulation und
Reflexion. Zur Zusammenarbeit ScbeUings und Hegels in Jena », in : lichen Philosophie, Berlin, 1977, S. 179 ff.; St. DIETZSCH, «Zeit -
Hegel-Studien, 5 (1969), S. 95-128. Geschichte - Kunst. Zur Struktur von ScheIlings "Systems des trans-
10. G.W.F. HEGEL, Werke, a.a.O., Bd. 20, S. 434. zendenta!en Idealismus" (1800) », in : Natur - Kunst - Mythos. Bei-
11. Vgl. H.J. SANDKUEHLER, Freiheit und Wirklichkeit. Zur Dialek- îdige zur Philosophie F.W.J. Schellings, hrsg. von St. Dietzsch, Ber-
tik von Polilik und Philosophie bei Schelling, Frankfurt am Main, lin, 1978, S. 91·106.
1968, S. 73 fi. und 154 fi.; M. BUHR, Vernunft - Mensch - Ge- 12. ,G.W.F. HEGEL" Jenaer Logik, Metaphysik und Naturphiloso-
schichte. Studien zur Entwicklungsgeschichte der klassischen bürger- phie, btsg. von G. Lasso~ Berlin, 1968, S. 33.
192 MANFRED BUHR lDENTITAT UND GESCHICHTE 193

absolut; und wenn die Identitiit dadurch festgehalten wer- ander, um die der Totalitat qna Totalitiit. Und eine solche
den soli, dass die Entzweiung vemichtet wird, bleiben sie Betrachtung muss sich - im Gegensatz zur bisherigen Tran-
einander entgegengesetzt. Die Philosophie muss dem Trennen szendentalphilosophie - den Standpunkt zu eigen machen :
in Subjekt und Objekt sein Recht widerfahren lassen; aber «Nicht das eine oder das andere hat Wahrheit, sondern ...
indem sie es gleich absolu! setzt mit der der Treunung ent- ihre Bewegung... »15.
gegengesetzten Identit1it, hat sie es nur bedingt gesetzt, so Eben dieser Standpunkt der Totalitat aIs Bewegung er-
wie eine solche Identit1it - die durch Vemichten der Ent- heischt eine neue methodische und begrillliche Perspektive.
gegengesetzten bedingt ist - auch nur relativ ist. Das Ab- Denn es gilt, philosophisch dem Werden der Tatalital nach-
solute selbst aber ist darum die Identitat der Identitiit und zuspüren. Und gefordert wird dadurch zwangsl1iufig eine
der Nicht-Identitiit ; Entgegensetzen und Einssein ist zugleich Logik des Werdens, der Bewegung, das heisst : die Dialektik.
in ibm »13. Hegel fasst die Anstrengungen bei der Suche nach der
Diese Auffassung der Identit1it - und wir kannen jetzt Identitiit von Subjekt und Objekt, von Mensch und Welt
auch sagen : des Widerspruchs - wird Hegel nie wieder seit Kant zusammen und hebt sie kritisch auf. Dabei gibt er
aufgeben. Wir verweisen nur auf das zweite Bueh der «Wis- das weiterwirkende Zeichen : Die Frage nach der ldentitat ist
senschaft der Logik», in dem Ideutitiit und Widerspruch die Frage nach der Geschichte. Der Geschichtsprozess - und
gleichgesetz! werden : «Wenn nun die ersten Reflexious- er aUein - ist der Ort, wo die «Identitat der Identit1it und
bestimmungen, die Identitiit, die Verschiedenheit nnd die der Nicht-Identitiit» hersteUbar wird.
Entgegensetzung, in einem Satze aufgestellt worden, so sollte
noch vielmehr diejenige, in welche sie ais in ihre Wahrheit
übergehen, namlich der Widerspruch, in einen Satz gefasst
und gesagt werden : Alle Dinge sind an sich selbst wider-
sprechend, und zwar in dem Sinne, dass dieser Satz gegen
die übrigen vielmehr die Wahrheit und das Wesen der Dinge
ausdrücke. »
Mehr noch : Hegel bemerkt, weun «von Rangordnung
die Rede und beide Bestimmungen », Identitiit nnd Wider-
spruch, « ais getrennte festznhalten waren, so ware der Wider-
spruch für das Tiefere und Wesenhaftere zu nehmen. Denn
die Identitat ihm gegenüber ist nur die Bestimmung des
eiufachen Urunittelbaren, des toten Seins; er aber ist die
Wurzel aller Bewegung und Lebendigkeit; nur insofern e!Was
in sich selbst einen Widerspruch hat, bewegt er sich, hat
Trieb und T1itigkeit »".
Hegel geht es so nicht mehr um die Analyse von isolierten
Tatsachen, sondern um die philosophische Betrachtung der
Zusammenhange, der Beziehungen dieser Tatsachen zuein-

13. G.W.F. HEGEL, Werke, a.a.O., Bd. 2, S. 96.


14. G.W.F. HEGEL, Wissenschaft der Logi"; hrsg. von G. Lasson,
Leipzig, 1948, Zweiter Teil, S. 58. 15. G.W.F. HEGEL, Werke, a.a.O., Bd. 3, S. 568.
JOSEPH GAUVIN

GESTALTUNGEN
DANS LA PHÉNOMÉLOGIE DE L'ESPRIT

La Wissenschaft der Erfahrung des Bewusstseins pouvait-


elle être rédigée sans devenir le System der Erfahrung des
Geistes, saus que, du même coup, la Darstellung des er-
scheinenden Wissens ne devienne la Phénoménologie de l'Es-
prit 1' .
Pourquoi ne me risquerais-je pas à avancer une image,
résolument anachronique, pour tenter d'exprimer, tel que je
le vois, ce qui fut? - Toutes assurances prises et toutes les
vérifications nécessaires accomplies - c'est l'Einleitung,
Hegel se lance dans un long rallye automobile. Mais les
conditions météorologiques ont changé; des routes ont été
pratiquement coupées. Les dérapages se succèdent, plus ou
moins facilement contrôlés, avec, éventuellement, des tête-
à-queue, après lesquels on se remet doucement en marche,
parfois même en marche arrière, pour tenter d'arriver...
De quel droit, cependant, tirer une image quelconque de
données lexicales 1 Des graphiques sont utiles, certes, pour
les visualiser, mais ce n'est pas de telles images qu'il s'agit.

1. J'indiquerai ainsi les références au texte de la Phénoménologie:


1) page (S.) de l'édition de Johannes Hoffmeister - que je cite -
(Hamburg, 1952); 2) tome et page de la traduction de Jean Hyppo-
lite (Paris, 1939-1941); 3) nO de paragraphe et, après une barre
oblique, nO de la (ou des) phrases concernées dans ce paragraphe (cf.
J. GAUVIN, Wortindex zu Hegels Phanomenologie des Geistes, Bonn,
1977). On sait que la Vorrede a été écrite en dernier lieu et l'Ein-
leitung (désignation ajoutée par les éditeurs) en premier lieu. D'où les
séquences de références: S. 14; I. 77; 90/1 et S. 33; I. 33; 39/1 -
S. 66; I. 68; 78/10 et S. 26; I. 25, 28/1.
196 JOSEPH GAUVIN GESTALTUNGEN DANS LA PHENOMENOWGIE 197

TI s'agit d'un essai d'interprétation de ces données. Et cet dans l'Einleitung. A la «purification» se substitue la « cul-
essai ne m'est possible que dans la mesure où j'adopte en face ture» :
d'elles le point de vue d'un lecteur absolument naïf, c'est-
à-dire plein de préjugés, qui ont déjà été dénoncés comme Die Reihe seiner Gestaltungen, welche das Bewusstsein
tels par des chercheurs qui ont utilisé nne autre méthode que auf diesem Wege durchliiuft, ist vielmehr die ausführliche
la mienne. Geschichte der Bi/dung des Bewusstseins selbst zur Wissen-
Il me faut donc, je le reconnais volontiers, affronter déli- schaft'.
bérément le risque d'avancer des hypothèses parfaitement J'avance une hypothèse : au temps des Mystères antiques,
triviales ou follement hasardeuses en réfléchissant à partir
on pensait que l'âme pouvait s'arracher à sa naturalité et à
de faits qui me surprennent. - Bien plus, l'ordre d'exposi- sa contingence pour trouver l'Absolu; daus le monde actuel,
tion n'étant pas nécessairement celui d'invention, il me faut il faut que la conscience ait le même courage pour accomplir
beaucoup de témérité, je ne le sais que trop, pour faire sup- douloureusement un itinéraire analogue. Mais le succès est
porter à l'examen des dix pauvres occurrences du terme assuré par cela même que la conscience est intrinsèquement :
Gestaltungen le poids d'une enquête portant sur une masse de son propre Begriff, qui la distingue radicalement de tout ce
données beaucoup trop considérable pour que je puisse les qui se trouve enfermé dans les limites d'une vie simplement
examiner ici. uaturelle'. Le reste est affaire de méthode... Bref - un peu
trop rapidement, je crois - Hegel pense alors que sa théorie
••• de la «conscience» lui garantit, dem Begriffe (der Erfah-
run) nach, de saisir dans sa Science de l'expérience de la
« Il faut présenter le Savoir tel qu'il apparaît» : en quatre conscience «t\mt l'empire de la vérité de l'esprit» 5.
paragraphes, dans l'Einleitung, Hegel nous a conduits à cette On notera que, dans ce dernier paragraphe de l'Einleitung,
conclusion. Et il ajoute : les Gestalten des Bewusstseins ne s'opposent pas aux Begriffe
de la Science en sa forme pure. Hegel préfère parler de
Weil nun diese Darstellung nur das erscheinende Wissen
zum Gegenstande hat, so scheint sie selbst uicht die freie abstrakte, reine Momente'. C'est que le terme Begriff a déjà
in ihrer eigentiimlichen Gestalt sich bewegende Wissen~ largement servi pour opposer et conjuguer Begriff, Ansich et
schaft zu sein, sondern sie kann von diesem Standpunkte Gegenstand dans la théorie de la méthode, Begriff et Rea-
aus ais der Weg des natiirlichen Bewusstseins, das zum lisierung dans l'énoncé de l'objectif poursuivi'.
wahren Wissen dringt, genommen werden, oder aIs der Et le mot Realisierung tiendra finalement ses promesses'...
Weg der Seele, welche die Reihe ihrer Gestaltungen, aIs Mais le mot Gestaltungen ne nous décevra pas, lui non
durch ihre Natur ihr vorgesteckter Stationen, durchwan-
dert, dass sie sich zum Geiste Hiutere, indem sie durch die plus : en voici la dernière occurrence dans le dernier cha-
vollstiindige Erfahrung ihrer selbst zur Kenntnis desjeuigen pitre :
gelangt, was sie an sich selbst ist'.

Cette phrase constitue tout un paragraphe. Le suivant 3. S. 67; I. 69·70; 80/3 et 6.


reprend : «Das natürliche Bewusstsein... ». TI ne va plus être 4. S. 69 ; 1. 71 ; 82/3 et 4.
question, maintenant, de «purification» : c'est «le doute 5. S. 74; 1. 77; 91/l.
6. S. 75; 1. 77; 91/l.
ou plutôt le désespoir» ; et le mot Seele ne reparaîtra plus 7. S. 67; J. 69; 80 et S. 71; J. 73·74; 86.
8. J'en ai fait l'étude, ainsi que celle des autres dérivés de res dans
la Phénoménologie. A paraître in Atti des III Colloquio Internazionale
2. S. 66·67; J. 69; 79. A comparer avec S. 499; II. 234; 762/6. deI Lessico Intelletuale Europeo.
GESTALTUNGEN DANS LA PHENOMENOLOGIE 199
198 JOSEPH GAUVIN

Diese Vereinigung beider Seiten ist noch nicht auf- chapitre : «Die Religion», Hegel n'avait opéré le regrou~e­
gezeigt; sie ist es, welche diese Reihe der Gestaltungen ment des six chapitres précédents, comme relevant du pomt
des Geistes beschliesst; denn in ihr kommt der Geist de vue de la «Conscience de l'Esprit», à distinguer de sa
dazu, sich ru wissen nicht nur, wie er an sich, oder nach « Conscience de soi», dont il va être question :
seinem absoluten lnhalte, noch nur, wie er für sich nach
seiner inhaltIosen Form, oder nach der Seite des Selbst- In den bisherigen Gestaltungen, die sich im aIlgemein~n
bewusstseins, sondern wie er an und für sich ist'. ais Bewusstsein, Selbstbewusstsein, Vernunft und Ge,~t
unterscheiden ist zwar auch die Religion, ais Bewusstsem
Cette fois, nons sommes bien arrivés; nous allons atteindre des absoluten' Wesens überhaupt vorgekommen, - allein
«la dernière figure de l'Esprit», «le Savoir absolu», dans vom Standpunkte des Bewusstseins aus, das sich des abso-
laquelle Begriff et Realisierung coïncident. .. ID • Mais cette luten Wesens bewusst ist; nicht aber ist... d~s Selbst-
arrivée est laborieuse. Déjà le mot Gestaltungen est apparu bewusstsein des Geistes in jenen Formen erschJenen13•
deux fois dans ce dernier chapitre :
Un peu plus loin, les grandes divisions entre ces Gestalt-
Der lnhalt des Vorstellens [in der offenbaren Religion] ungen seront appelées Momente :
ist der absolute Geist; und es ist allein noch um das Auf-
heben dieser blossen Form [der Vorstellung] zu tun, oder Der Geist ais solcher enthiilt die bisherigen Gestaltungen
viehnehr weil sie dem Bewusstsein ais solchem angeh6rt, in den alIgemeinen Bestinunungen, den soeben genannten
muss ihre Wahrheit schon in den Gestaltungen desselben Momenten. Die Religion setzt den ganzen Ablauf derselben
sich ergeben haben". voraus 14 •

Est-ce si facile, en fait, de dépasser cette « simple forme » ? Il faut, en effet, multiplier les distinctions, pour exprimer
Le paragraphe qui snit nous Ôte toute illusion en nous indi- les relations qu'entretiennent dans le :emps le~ Gestalt~n~en
quant que le résultat ne sera obtenu ni inunédiatement ni que nous avons vues et ce qui va smvre. MalS un pnnclpe
directement. (C'est d'ailleurs pourquoi, après bien des réinter- fondamental va tout justifier :
prétations, il nous faudra «réunir les deux côtés ») :
Denn der Geist steigt aus seiner Allgemeinheit durch
Es ist jedoch nicht das Wisseu ais reines Begreifen des Bestimmung zur Einzelheit herab. Di~ Bestim~ung. oder
Gegenstandes, von dem die Rede ist ; sondern dies Wissen Mitte ist Bewusstsein, Selbstbewusstsem usf. DIe Em~el­
solI nur in seinem Werden oder in seinem Momenten nach heit aber machen die Gestalten dieser Momente aus. Dlese
der Seite aufgezeigt werden, die dem Bewusstsein ais sol- stellen daher den Geist in seiner Einzelheit oder W irklich-
chem angeh6rt, und die Momente des eigentümlichen Be- keit dar ... ".
griffes oder reinen Wissens in der Form von Gestaltungen
des Bewusstseins12.
Si j'ai cité ce texte, .c'est que les deux occurre~ces ~e
Gestaltungen qui précèdent celles que nous venons d examt-
Si difficile qu'elle soit, cette marche vers la «conclusion» ner concernent elles aussi, un, ou plutÔt deux, « syllogismes»,
aurait été absolument impossible, si, au début du septième auxquels nous 'conduit Die Beobachtung der Natur. Et il im-

9. S. 553; II. 298; 845/4. 13. S. 473 II. 203; 713/1.


10. S. 556; II. 302; 849/1. 14. S. 476 II. 207; 720/3 et 4.
11. S. 549; II. 293 ; 839/2. 15. S. 477 II. 207-208; 720/11-14.
12. SiO; Il. 295; 840/4.
200 JOSEPH GAUVIN GESTALTUNGEN DANS LA I:HÉNOMÉNOLOGlE 201

porte de remarquer que, depuis l'Einleitung, jamais le mot n'était sans doute pas inutile, puisque, dans la «Vérité de la
Ges.t~ltungen .n'a été employé. certitude de soi-même », nous avions lu que «la Vie ren-
VOICI le premIer « syllogisme» : voyait à un autre qu'elle n'est, à savoir la conscience pour
laquelle elle est comme... umt . é ou comme genre» " .
Wir sehe~ daher einen Schluss, worin das eine Extrem Considérant ici «la singularité », c'est-à-dire : le vivant
das allgememe Leben aIs Allgemeines oder aIs Gattung, singulier, il écrit :
das an~re EJ<,trem aber dasselbe ais Einzelnes oder aIs
allgememes Individuum ist; die Mitte aber ist aus bei*en Diese Einzelheit ist uicht zugleich allgemeines Indivi-
zus~ITenge~etzt: das erste scheint in sie sich als bestti - duum, d.h. an dem die Allgemeinheit ebenso aussere ~irk­
~the dgem~mhelt oder als Art, das andre aber aIs eige t- lichkeit hatte, sondern dies fallt ausser dem Orgamsch-
IC e 0 er elnzelne Einzelheit zu schickenl6. Lebendigen. Dieses allgemeine Individuum aber, wie es
unmittelbar das Individuum der natürlichen Gestaltungen
~~xte q~'~ faudrait commenter avec l'enthousiasme d'un ist ist uicht das Bewusstsein selbst; sein Daseiu ais einzel-
lOgIcIen medléval! Dans ce syllogisme, si nous le cousidé- ne~ organisches lebendiges Individuum müsste nicht ausser
r.o~ selon ~ I:ar~re de Porphyre», nons ne jouons pas à par- ibm fallen, wenn es dieses sein sollte20 •
tIr ~ ~a distinction : animé/non-auimé. La phrase qui suit
Ie preCIse: Ces considérations montrent bien - ce qui ne surprendra
personne - que la logique de Hegel n'est pas celle de Po~­
phyre. Il n'était peut-être pas inutile, cependant, de recouru
u~~ da die.ser Schluss überhaupt der Seite der Gestaitung
::fge ort, s~ ISt unter ibm ebenso dasjeuige begriffen, was à ce type de pensée archaïque pour tenter d'analyser la com-
s unorgamsche Natur unterschieden wird17. paraison que Hegel a voulu instituer entre deux «syllogis-
mes », dont nous avons vu le premier, bâtard, assurément,
C:es~ d~nc,l~ distinction: corporel/incorporel qui fixe no- tant par son moyen tenne que par ses extrêmes assez hétéro-
tr,e !lm~te infen.eure; la limite supérieure étant posée par la gènes.
distmction : rationnel/non-ratioUllel se trouve être la « Vie» Mais voici le second, introduit par une hypothèse irréelle :
enGce sens restrictif, qui est du même coup posée comm~
« enre ». Wenn im Schlusse der orgauischen Gestaltung die Mille,
worein die Art und ihre Wirklichkeit aIs einzeme Indivi-
Quel no~,. cependant, assigner à la limite inférieure? dualitat fallt, an ihr selbst die Extreme der innern Allge-
:- De la lImIte supérieure on peut descendre jusqu'à elle meinheit und der allgemeinen 1ndividualitiit hatte, so würde
a .travers une pluralité d'espèces d'êtres vivants· mais ce diese Mitte an der Bewegung Ihrer Wirklichkeit den Aus-
f~lsant, on subdivise le genre «Vie» en classifian't des htdi- druck und die N atur der Allgemeinheit haben und die sich
V1~us sans p!lrvenir à la substance «simpliciter». Cette Ii- selbst systematisierende Entwick1un~ sein. -:- So hat d~s
~te ne serrot-elle donc pas un «individu », mais «univer- Bewusstsein, zwischen dem allgememen GelSte und ZW1-
se.» tout autant que la «Vie», parce qu'il la supporte et schen seiner Einzelheit oder dem sinnlichen Bewusstsein,
agIt sur elle, tout en étant indifférent à elle? C'est la planète zur Mitte das System der Gestaltungen des Bewusstseins,
« Terre », ce n'est pas la «conscience »18.
als ein zum Ganzen sich ordnendes Leben des Geistes, -
das System, das hier betrachtet wird, und welches ais Welt-
Hegel, en effet, a déjà tenu à préciser ce point; ce qui geschichte sein gegenstiindliches Dasein hat".

16. S. 218 r. 245-246; 304/1. 19. S. 138; 1. 152; 178/3.


17. S. 218 r. 246; 304/2. 20. S. 218; I. 245; 309/9 et 10.
18. S. 219 I. 246; 305/3. 2!. S. 219 ; J. 247 ; 306/2 et 3.

Ul'·jiVERSID/\D DE NAVARRA
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.-L!j'I' ANID1-\'DES
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GESTALTUNGEN DANS LA PHÉNOMÉNOLOGIE 203


202 JOSEPH GAUVIN

Quelle est la limite supérieure? Nous le chercherons plu~/ vue de la Vie comme «Genre», telle la snivante, exposée,
tard. Nous savons, du moins, ou croyons savoir ce qu'est/la elle aussi, à travers une hypothèse irréelle :
« conscience sensible », qui constitue l'extrême de la singula~
Die Exitenz zu welcher die Negativitiit des (organi-
rité de la conscience, dont le System der Gestaltungen consti- schen) Allgem;inen oder der Gattung gelangt, ~st nur die
tue le moyen terme entre ces extrêmes qni ne sont certaine- entwickelte Bewegung eines Prozesses, welcher slCh an den
ment plus hétérogènes. Mais voici - faut-il le souligner? - TeUen der seienden Gestalt verlauft. Hatte dIe Gattung
ce System devenu moyen terme de ce qu'est la Vie de l'Es- an ihr aIs ruhender Einfachheit die nnterschiedenen Teile,
prit22 se donnant expression dans et par cette «conscience», und ware somit ihre einfache Negativitat aIs solche zugleich
dont il constitue l'universalité intérieure, mais dont elle cons- Bewegung, welche sich durch ebenso einfache, unmittelbar
titue l'effectivité extérieure, toujours universelle dans sa an ihnen allgemeine Teile vediefe, die aIs solche Momente
singularité, si bien qne la Weltgeschichte est le corrélatif hier wirklich wiiren, so wiire die organische Gattung Be-
objectif de ce «système» que nous ne cessons - mais le wusstsein24•
savions-nous? - de considérer.
Comment tirer une méthode quelconque d'une pareille
La «conscience» correspond donc tant à la fois et en définition ?
mieux à ce que sont et l'espèce et l'individu dans le pseudo-
Mais en fait Hegel n'a-t-il pas depuis longtemps déclaré
système de l'organische Gestaltung. En mieux, parce que
qu'il n~ pouvait plus appliquer la «méthode» préconisée
l'espèce n'est que pseudo-universalité, et parce que l'individu
dans l'Einleitung? Dès le début du quatrième chapitre n'a-t-i1
vivaut qui n'est que singulier est, cependant, la Vie même
pas dit que Begriff et Geg~nst~n~ ~e co~espondaient ~ain:e­
étant-là, sans qu'on puisse comprendre pourquoi elle a revêtu
nant, que l'Ansich de l'objet etrut IdentIquemeut son fur-em-
uu tel mode d'être. Dans l'individu vivant, pourrait~on dire,
Anderes-Sein ?15.
la Vie s'épuise effectivement à faire vivre, sans que le mou-
vement de son « syllogisme» réalise le mouvement « satisfai- Il semble même avoir mis une remarquable obstination à
sant» que serait l'Histoire". se couper ainsi l'herbe sous le pied, si j'ose dire. Car je cons-
tate que, dans Kraft und Verstand, il, a indéfinimen~ r~pé~é
Mais en vertu de quel principe la Vie de l'Esprit se pose- le terme Begritf soigneusement module par les emplOIS lllde-
t-elle en System der Gestaltungen des Bewusstseins? La «na- finiment répétés, eux aussi, du terme Unterschied, dans le
ture» de l'Esprit? Ou celle de la «conscience», comme le but explicite que «la conscience saisisse son concept comme
donnait à penser l'Einleitung? - Tout ce que je puis dire, concept », «se devienne à soi-même conscience conce-
c'est que la situation actuelle me paraît beaucoup moins vante »26. Le terme Erscheinung a été, lui aussi, employé très
claire qu'elle ne l'était initialement, la progression moins souvent, pour montrer qu'il n'y avait pas d'Erscheinung ... 21 •
assurée, et que nous venons sans doute de faire un énorme
trajet en marche arrière pour tenter de poursnivre notre Une victoire aussi radicale sur le kantisme était peut-être
itinéraire, sans qu'on puisse dire que cette entreprise se solde dangereuse - en tout cas trop cher payée. TI faut reprendre
par un succès.
24. S. 217; I. 244; 303/4.
Car, de la « conscience », nous n'avons plus guère que des 25. S. 133; 1. 145-146; 172/5 et 6. .
définitions négatives, par opposition à la Vie et au point de 26. S. 103; 1. 103; 109-110; 137/3 ~t 138/3. Dans ce chapItre,
le terme Begri!! sous toutes ses fonnes a eté employ:é 53 fOlS (56 dans
Die offenbare Religion et 49 dans Das abso~ute Wlssen, ?2 au total).
22. Opposée à la vie simplement organique telle qu'elle donne Le tiers des occurrences du terme Unterschled y figure. 114. Je ne
forme à l'être-là: an dem gestalteten Dasein. S. 219; 1. 247; 306/1. puis exposer ici le jeu instauré par Hegel entre ces termes. .
23. S. 220; 1. 247; 306/4. 27. 39 occurrences, plus du tiers du total...
204 JOSEPH GAUVIN GESTALTUNGEN DANS LA PHÉNOMÉNOLOGIE 205

la polémique au début du cinquième chapitre; et Hegel est-il


en meilleure position que le premier idéalisme, qui est
..•
contraint à l'empirisme für die Erfüllung des leeren Meins, Quelles que soient les difficultés, l'œuvre n'en sera pas
d.h. für den Unterschied und aile Entwicklung und Gestaltung moins achevée, et le mot Gestaltungen paraitra une fois en-
desselben ?111. Toujours est-il qu'il a recours à «la Raison core dans la V orrede :
observante ».
Plus particulièrement curieuse à cet égard est «die B eo- Der Anfang des neuen Geistes ist das Produkt einer
bachtung der Natur» : le terme Begriff s'y retrouve surabon- weitUiufigen UmwalzUng von mannigfaltigen Bildungs-
dammeut employé, non point tant, cette fois, en liaison avec formen, der Preis eines vielfach verschlungnen Weges und
ebenso vielfacher Anstrengung und Bemühung. Er ist das
le terme Unterschied que conjugué avec les mots Gestalt, aus der Sukzession wie aus seiner Ausdehnung iu sich
Gestaltung, ce qui n'était assurément pas le cas dans le troi- zurückgegangene Ganze, der gewordne einfache Begriff
sième chapitre, Kraft und Verstand. Aussi bien, le mot desselben. Die Wirklichkeit dieses einfachen Ganzen aber
Gestaltung, qui ne figure pas dans l'Einleitung, ne commence besteht darin, dass jene zu Momenten gewordnen Gestalt-
à être employé qu'au début du quatrième chapitre, pour ungen sich wieder von neuem, aber in ihrem neuen Ele-
parler de la Vie". mente, in dem gewordenen Sinne entwickeln und Gestal-
Mais peut-être les relations entre la Conscience'de-soi et tung geb en32.
la Vie ont-elles alors été traitées un peu trop rapidement,
la Vie assumant en quelque sorte pour son propre compte Voilà pourquoi la Science, «la couronne d'un monde de
tout l'être objectif et ne le restituant à la Conscience-de-soi l'Esprit» n'est pas achevée dans son commencement, lorsque
qu'en tant que celle-ci est vivante". Il semble qu'il faille tout surgit un nouveau visage du monde.
préciser à nouveau, puisque voici le programme que Hegel Ce n'est pourtant pas ce fait qui invite à écrire la Phéno-
assigue à laSeobachtende Vernunft : ménologie de l'Esprit; c'est le fait que l'individu a le droit
de réclamer qu'on lui moutre en lui-même un fil conducteur
Das Tun der beobachtenden V"rnunft ist in den Mo- vers la Science. Sans doute, le point de vue de la conscience,
menten seiner Bewegung zu betrachten, wie sie die Natur, dans lequel il se sait près de soi, est-il « la perte de l'Esprit» ;
den Geist, und endlich die Beziehung beider ais sinnliches il n'en demeure pas moins vrai que, sans la certitude de soi-
Sein aufuimmt und sich aIs seiende Wirklichkeit sucht3l • même que l'individu possède, la Science manque d'une effec-
tivité dont elle a besoin; elle n'est qu'un En-soi qui doit
Mais ce programme, sauf sur le premier point, ne sera pas s'extérioriser.
suivi à la lettre, le mot Selbstbewusstsein venant, dans les
deux autres, se substituer au terme Gdst et, pour le second Il faut, cependant, traiter le problème de cet achemine-
point, juste après le syllogisme des Gestaltungen des Bewus- ment de l'individu jusqu'au Savoir en considérant «l'individu
stseins, que nous avons examiné. universel », le Weltgeist, dans sa culture ...33 •
Mais pourquoi Hegel, quand il terminait Die Beobachtung
der Natur, ne nous a-t-il pas dit que le Weltgeist était le

28. S. 180; I. 202; 247/4. 32. S. 16; J. 13; 13/5 - S. 15-16; I. 12; 12.
29. Begrit! : 79 occurrences (un record absolu). Unterschied : 36. 33. S. 25-26; I. 24-25; 27/7, 9, 12-15; 28/1; 29/1. Weltgeist est
Gestalt: 28 ; Gestalten : 1. Gestaltung : 9, plus du tiers du total. Je le terme employé dans la première édition, selbstbewusste Geist dans
ne puis évidemment pas présenter l'analyse de ces données. les suivantes. Weltgeist demeure présent dans le paragraphe suivant,
30. S. 135; I. 147; 174/1 - S. 140; I. 154; 182/6. S. 28; I. 27; 30/5. C. HEGEL, Gesammelte Werke, Bd. 9, Hamburg,
31. S. 185; J. 206; 253/1. 1980. S. 24-25.
JOSEPH GAUVIN GESTALTUNGEN DANs LA PHENOMENOLOGIE 207
206

véritable «individu universel» ? - De ce We/tgeist, il avait sera plus question avant Die offenbare Religion, Dos absolute
pourtant parié deux fois déjà, une fois à propos du stoïcisme" Wissen ... et la Vorrede, qni reprend le problème".
et une fois au début de ce chapitre même. En attendant, le syllogisme des Gesta/tungen des Bewus-
En fait, une formule embarrassée, que nous avons déjà stseins traduit, je pense, avec toutes ses incertitudes, la posi-
lue, donne, je crois, la réponse : si «l'individu u?iversel~, tion de Hegel au moment même où il écrit.
dans la Vie organique, était «la conscience», sem Dasem En effet, sa limite supérieure, der allgemeine Geist, ne
aIs einzelnes organisches lebendiges Individuum müsste nicht serait-elle pas das V olk, point où coïncident - i.e. où de-
ausser ibm fallen". vaient coïncider - Erfahrung des Bewusstseins et eigentliche
La conscience serait-elle donc le Dasein du Weltgeist sous Wissenschaft des Geistes, selon l'Einleitung ?40. «Das Volk,
la forme d'un individu vivant singulier - et cependant uni- die hergestellte Natur », dit la Jenaer Realphilosophie41 • Et,
versel? Sans doute. Car le principe a déjà été posé d'une de fait, la Beobachtende Vemunft nous en ouvre, finalement,
absolue correspondance entre Weltgeist et B ewusstsein : la perspective, à travers le «Jugement infini», gigantesque
tête-à-queue réalisé comme prévu - peut-être, mais sans
Das Bewusstsein wird sein Verhiiltniss zum Anderssein doute autrement qu'il n'était prévu : bien compris, il serait
oder seinem Gegenstande auf verschiedene Weise bestim- die V ollendung des sich selbst erfassenden Lebens", mais
men, je nachdem es gerade auf ein~r Stuf~ des sich. be- serait-ce là cette «Vie de l'Esprit s'ordonnant en un tout »,
wusstwerdenden Weltgeistes steh!. Wle er slCh und semen dont pariait le syllogisme ?43.
Gegenstand jedesmal unmittelbar findet und bestimmt, Toujours est-il que Hegel semble retrouver une certaine
oder wie es für sich ist, hiingt davon ab, was er schon euphorie dans Die Verwirklichung des vemünftigen Selbst-
geworden oder an sich ist36 • bewusstseins... Euphorie, car, si je voulais jouer le rôle ridi-
cule d'un censeur pointilleux, je serais tenté de dire que
On aura remarqué l'extraordinaire entrecroisement des Hegel n'a jamais mieux respecté la «méthodologie» de
pronoms en ces phrases, pour avance~ une affirmation .dan- présentation qu'il semblait s'être assignée dans l'Einleitung.
gereuse : que devient alors ~e chemm. parc~u~ .dep:"s la Mais en vertu d'un tout autre principe :
« certitude sensible» ? - Mals ne faut-il pas Justifler a nou-
veau - et autrement - cet idéalisme que le chemin par- J edes Moment, weil es Moment des Wesens ist, muss
couru dans les quatre premiers chapitres avait déjà justifié ?". selbst dazu gelangeu, aIs Wesen sich darzustellen"'.
Le thème de la Versicherung, qni justifiait dans l'Einleitung
la rédaction du livre que je lis, vient d'être repris d'une ma- Dans ce principe, auquel j'accorde une valeur aussi bien
nière, à ce qu'il me semble, assez fâcheuse ...".
Quoi qu'il en soit, «l'Observation de la Nature» n'a rien 39. S. 527; II. 265; 807/5; S. 559; II. 306; 853/8.
simplifié et, quand elle se termine, faute de mieux, je crois, 40. S. 75; J. 77 ; 91/2.
41. Ed. Johannes Hoffmeister, Hamburg, 1969. S. 272. A compa~
Hegel se coutente d'attribuer à la «conscience» die aUge- fer avec S. 256-257 ; J. 290; 364/2.
meine Individualitat, sans mot dire du We/tgeist, dont il ne 42. S. 254; J. 287; 35917.
43. J'ai signalé plus haut que, dans les deux dernières subdivisions
de la Beobachtende Vernunft, Hegel avait substitué, dans leur titre, le
34. S. 153 j I. 169; 207/5. On notera la relation avec la Geschichte mot 8.elbstbewusstsein au terme Geist. On remarquera que; présent
des Geistes au paragraphe précédent, 206/1. S. 223-225; J. 252- 253 ; 314/2, 315/1, 316/3 dans la deuxième sub-
35. S. 218; I. 245; 303/10. division, le terme Gelst ne reparaît plus, me semble-t-il, avant S. 234,
36. S. 178; 1. 198-199; 243/9 et 10. I. 264; 332/8, pour parler .de la sinnliche Gegenwart des individuellen
37. S. 176-177; 1. 198; 242. Geistes. Le biais est enfin trouvé...
38. Comparer: S. 177; 1. 198; 243/1 et S. 66; 1. 68; 78/8. 44. S. 259; J. 293; 1. 293; 369/3.
208 JOSEPH GAUVIN

rétrospective que prospective45, je serais tenté de voir l'énoncé


de la théorie du livre, qui, depuis la fin du deuxième chapitre,
s'est subrepticement substituée à celle de l'Einleitung, une
théorie fondée sur le concept d'Unendlichkeit.
Affirmation téméraire? - Je suis le premier à lerecon-
naitre. Mais on voudra bien admettre, sans doute, que les
concepts qui pouvaient permettre au professeur d'Iéna de
Quatrième partie
rédiger des notes ponr prononcer ses cours interdisaient pra-
tiquement à l'auteur de poursuivre, l'âme en paix, l'œuvre
qu'il s'était engagé à publier, une œuvre dont l'objet véritable
était absolument inavouable: une Wissenschaft des erschei-
KANT ET HEIDEGGER
nenden Wissens".
Somme toute, Hegel a, pour un moment, réussi, non sans
mal, à échapper à la tentation de la transparence «scienti-
fique •. C'est pourquoi - oserai-je dire? - l'idée de la
Phiinomenologie des Geistes me parait finalement moins
obscure que celle de la Wissenschaft der Erfahrung des
Bewusstseins, sans que, à travers le simple examen des occur-
rences du mot, la notion de Gestaltungen me soit devenue
évidente dans l'nu on l'autre cas ...

45. Parce qu'elle me semble être la «justification du parcours pré-


cédent» qui nous est présentée S. 255 ; J. 288-289; 362/2.
46. Finalement, Hegel a trouvé un titre allemand, qui aurait, peut-
être, ,été acceptable : Dieser- Band steilt das werdende Wissen dar.
S. XXXVII. Dans la Vorrede aussi bien que dans l'Einleitung, il lui
faut justifier la publication d'un livre qui ne traite pas du Vrai ,comme
Vrai (8. 66 j 1. 69 j 79/1), et qui donc, comme l'avoue la Vorrede ne
traite que du Faux (S. 33; J. 33; 39/1) ... Le titre Phiinomenologie
était une invention difficile, et donc tardive...
FRANÇOIS EVAIN

IMPÉRATIF CATÉGORIQUE
ET PROBLÉMATIQUE DE L'ÉTRE
ROSMINI ENTRE KANT ET HEIDEGGER

L'être se rend lumineux à l'Homme dans Un


projet extatique*.

Un siècle et demi environ s'écoule entre la publication


de la Critique de la Raison Pure et celle de Kant et le pro-
blème de la Métaphysique'.
En revenant à Kant, «l'intention profonde de Heidegger,
telle qu'elle s'est découverte par les écrits qui font suite à
Kant et le problème de la Métaphysique, est de dépasser
Kant, non pas certes dans le sens classique de «l'idéalisme
allemand », mais dans celui·d'une remontée au fondement de
la métaphysique »2. '
Or sur la trajectoire de la pensée philosophique étudiée
ici - celle qui va de Kant à Heidegger - un auteur, encore
peu connu: Antoine Rosmiui proposait, dès 1830, un projet
semblable. Dans son Nouvel Essai sur l'origine des idées, il
est historiquement le premier à mesurer l'impOliance de la
philosophie transcendantale et à tenter de surmonter ses
apories pour rouvrir ces «Holzwege» que sont les chemins
vers l'être. TI est ainsi conduit à dénoncer ce qu'il appelle
« l'erreur fondamentale du Criticisme» : le germe d'un idéa-

* Brie! über den Humanismus, Bem, 1947, s. 84.


1. Respectivement: 1781 et 1927 (11'6 éd.).
2. M. HEIDEGGER, Kant et le problème de la métaphysique, Intr.
et tf. par A. de Waelhens et W. Biernel; Paris, GalIimard, 1953;,
Intr., p. 43.
ROSMINI, KANT, HEIDEGGER 213
212 FRANÇOIS EVAIN
a de l'analogie avec la connexion universelle de l'existence
lisme absolu qui identifierait la Chose réelle à l'Objet de des choses selon des lois uuiverselles, qui est l'élément for-
pensée'. mel de la nature en général.'. L'impératif catégorique
Sans qu'il soit possible de déceler une influence quelcon~ue s'énonce donc d'abord ainsi : «Agis comme si la maxime
de Rosmini sur Heidegger, on observe cependant, chez 1 un de ton action devait être érigée par ta volonté en loi uni-
comme chez l'autre, un même mouvement de retour à Kant verselle de la nature» 7.
inspiré par un même souci de redéco~lVrir l'être ou~lié. En Cette uuiversalité ne saurait se prétendre telle que si elle
outre, cette quête de l'être est entrepnse par une meme ap- est a priori : exempte de toute attache expérimentale. C'est
proche : l'Homme qui en est le «berger •. pourquoi Kant place la moralité dans la liberté : indépen-
Or ce dévoilement de l'être par l'Homme - la manifes- dante de l'expérience contingente, elle ne peut fonnuler d'au-
tation de sa vérité comme «alètheia» - s'effectue, selon tres lois qu'uuiverselles'.
Rosmini dans la re-connaissance de sa dialecticité interne : Selon Rosmiui, il y a là une équivoque : il convient de
l'opposition des modalités idéelle et réelle, trouvant leur distinguer «la doctrine de-la moralité» et «la moralité en
« Aufhebung» dans la modalité morale'. exercice ». La première doit, sans aucun doute, être néces-
saire et universelle : elle exprime l'intelligibilité de la loi
C'est pourquoi nous tenterons d'évoquer la modificati0!l
qu'elle énonce et appartient par conséquent à l'ordre idéel.
de la problématique de l'être que propose cet auteur à partir
de la critique qu'il effectue des trois fonnulations de l'impé- Mais «la moralité en exercice» se situe sur un autre plan :
ratif catégorique chez Kant'. Elle n'appartient exclusivement ni à l'ordre idéel (celui
de la loi) ni à l'ordre réel (celui de l'acte accompli par la
volonté), mais consiste dans la conjonction de ces deux
1. L'universalité ordres (qui constitue l'ordre mora[)'.

La première se rapporte au concept de nature, qui fon~e L'équivoque consiste à dire à la fois que la morale est uui-
son universalité : «La propriété qu'a la volonte de valoIT verselle et nécessaire - c'est-à-dire a priori - et qu'elle a
comme loi universelle pour des actions possibles, écrit Kant, pour siège la liberté de la volonté humaine, laquelle est en-
gagée dans l'expérience". TI s'ensuit que cette première for-
3. A. ROSMINI, Nuovo saggio suU' origine dell~ idee (10 ~d:. Roma,
Salviucci, 1830. Edizione nazionale delle opere dl A. ROSIDtnI, Roma, 6. KANT, Grundlegung... (Samtliche Werke, Leipzig, VerIag von
ARE 1934 vol. III), §§ 332 et 337, pp. 308-314). . F. Meiner, 1920, Bd. III). Traduction française : V. Delbos (Paris,
4. 'Cf. F.' EVAIN, «L'Homme, Signe de l'ên:e dans l'Anthropologie Delagrave, s.d.), p. 165.
Morale d'A. Rosmini », Archives de Philosop~~e. 36 ~1973), p. 2~7 S8: 7. Ibid., s. 44 (Born, p. 296; tr. Delbos, p. 137).
5. Rosmini cite d'abord Kant dans une édl~l?n latIne, du XVI~1 s.. 8. KANT, Metaphysik der Sitten (éd. cit. Bd. III, p. 14).' Dans l'éd.
lmmanuelis Kantii Opera ad philosophiam crUlcam! la~me vert!t Fr~­ de Born: lnstitutio ad Metaphys. morum, 1 (o.c., t. IV, p. 552).
dericus Gottlob Born. Lipsiae, imp. Engelhard Bemannn SChWl?~ertt, 9. ROSMINI, Storia comparativa... , o.c., p. 209.
4 vo1., 1796-1798. Par la suite, i11ira cet auteur dans le texte ongmal. 10. Ibid., p. 210. Rosmini signale (ibid., n. 1) que Kant lui~même
On trouve également dans sa bibliothèque. personnell~ des traduc- estime qu'il n'y a de devoirs moraux qu'envers les hommes (qui se
tions : en italien et en français (celle de Tlssot : Pans, Ladgrange, situent donc dans l'expérience sensible) : «Si secundum solum ratio-
1836). . , t t d . nem judicemus, videbimus hominis nullam praeterea officium esse,
La «philosophie pratique» de Kant est examme? s.ru: ou ans. quam solum erga hominem (se ipsum vel alium)... Haec persona,
Storia comparativa e critica de' sistemi intorno al prmppw 1elllf .mo- necesse est, ut tanquam res experientiae subjecta data sit» (souligné
rale. 10 ed., Milano, Bonardi-Pogliani, 1837. Nous CItons 1 Edizlone >i par Rosmini). KANT: Ethices, pars prior (il s'agit de : Doctrina ele-
Nazionale, Milano, Bocca, 1941, vol. XXI. . mentaris ethicae, Born, éd. cit, t. IV, p. 768, correspondant à : Die
Rosmini, se réfère principalement à : Grundlegung zur M etaphy,nk Metaphysik der Sitten : no Teil: Tugendlehre, § 1 Bthisches Elemen-
der Sitten (1785) j Die Religion innerhalb ,der Grenzen der blossen tarmehre (Samt. Werke, ed. cit., 'Bd. III, s. 261 88.).
Vernunft (1793) et : Die Metaphysik der Sztten (1797).
ROSMINI, KANT, HElDEGG(!:R 215
214 FRANÇOIS EV AIN
seulement comme moyen dont telle ou telle volonté puisse
mulation n'est pas entièrement a priori et ne peu,t d?nc user à son gré (... ). Les êtres raisonnables sont appelés des
s'énoncer de façon universelle. Kant ne prouve pas 1 obhga- personnes parce que leur nature raisonnable les désigne
tion, relève Rosnrini : il la présuppose!1. C'est là «trop déjà comme des fins eu soi »". De là, une seconde formnla-
demander parce que c'est demander tout». On se trouve en tion de l'impératif catégorique : «Agis de telle sorte que tu
effet devant un dilemme : traites l'humauité, aussi bien dans ta personne que dans la
_ ou la volonté libre n'est déterminée par aucune autre personne de tout autre, toujours en même temps comme une
raison qu'elle-même, mais dès lors l'action ne devient-elle fin et jamais simplement comme un moyen »17.
pas plutôt absurde que morale?; Il y a là une perspective qui se veut objective et paraît
_ ou elle est déternrinée : que dévient alors la «pure» impliquer - le voulant ou non - une certaine anthropo-
liberté12 ? logie. C'est là, sans doute ce qui, chez Kant, séduit Rosmini,
Cette aporie requiert un nouvel examen des relations de malgré les nombreuses difficultés soulevées.
l'esprit à l'être. Elle découvre l'implication, dans le problème Il reconnait que Kant a bien vu la situation éthique de la
éthique, d'une anthropologie. liberté :
Kant semble s'y refuser : «Il est de la plus haute impor-
tance, écrit-il, de se tenir ceci pour dit: c'est qu'il ne faut (L'homme) a conscience de devoir agir d'une manière
pas du tout se mettre en tête de vouloir fai~e d~river la. ré~:ité conforme à la lumière de la raison et que c'est là, pour lui,
de ce principe (de la morale) de la constItutIOn parncuhere une nécessité absolue. D'où son penchant à se croire libre
de la nature humaine »". et, surtout, capable d'accomplir ce que la loi demande
(même quand il l'enfreint)".
Mais les questions posées par Rosmiui demeurent : la
moralité se vit dans l'expérience de la liberté. Celle-ci serait- Est-ce à dire que cette liberté s'identifie à la loi morale
elle «la raison sans raison des valeurs »14? Est-il possible de qu'il faudra respecter absolument en soi et en autrui? Ros-
lui reconnaître un sens autrement qu'en référence à une mini croit déceler ici une pétition de principe :
anthropologie?
On veut que la loi soit la liberté et, ensuite, on prétend
que nous ne nous procurons l'idée de liberté que parce que
2. La personne et la fin celle-ci est nécessaire pour observer la loi".

Il faudra expliquer comment la volonté se détermine elle- Si l'on identifie la liberté et la loi, comment distinguera-
même dans l'agir moral. Kant écrit qn'elle le fait «confor- t-on, dans l'homme, «celui-qui-oblige» et «celui-qui-est-
mément à la représentation de certaines lois », ce qui sup- obligé» ? Kant confond la réceptivité de l'homme vis-à-vis
pose un principe objectif de cette anto-détermination et ce de la loi (d'ordre subjectif) avec la loi elle-même (d'ordre
principe est la finIS. «Or, précise-t-il, l'homme et, en général objectif) :
tout être raisonnable, existe comme fin en soi et non pas
La première est l'homme, la seconde non : elle est seu-
11. ROSMINI, Storia comparativa ... , o.c., p. 218.
12. Ibid., p. 219. 5 16. Ibid., p. 149.
13. KANT, Grundlegung... (Tr. Delbos, P', 1~4-14 )'. 17. Ibid., p. 150.
14. Selon la remarque de Sartre dans L eXlstentlalzsme est un hu- 18. ROSMINI, Storia comparativa ... , o.c., p. 216, n. 1.
manisme, p. 82. 19. Ibid., p. 217-218.
15. KANT, Grundlegung ..• (tr. Delbos, p. 168).
~--- .~_...-----

216 FRANÇOIS EVAIN ROSMINI, KANT, HEIDEGGER 217

lement la lumière de l'homme. L'homme est lié c'est la Rosmini estime que le principe de la morale est encore
loi qui lie". enfermé dans la subjectivité. «Principe stérile, à vouloir être
trop fécond »", la liberté, comme pure indétermination, ne
Dans ces erreurs sur la liberté, sont impliquées, selon peut aucunement inciter le sujet à fonder son action sur l'ob-
Rosmini, des contradictions concernant la personnalité, terme jectivité dont l'assurerait la reconnaissance de l'humauité, en
du respect moral. Pour Kant, «la personnalité morale n'est lui et en autrui, comme une fin en soi. Un tel désintéresse-
rien d'autre que la liberté de la nature et de la raison sou- ment est impossible
mises aux lois morales ». D'où cette conséquence qui sur-
prend Rosmini : «la personne n'est soumise à aucune autre tant qu'on ne cherche pas le principe de la morale... dans
loi que celle qu'elle se donne »21. Kant fait ainsi consister la la vérité qui est essentiellement objective".
grandeur de l'homme dans cette sorte de force créatrice qui
se détermine elle-même : En d'autres termes, le respect de la personne comme fin
est, en son principe, reconnaissance de l'être comme objet,
Le principe de la morale est placé dans l'indépendance parce que c'est ainsi seulement que la personne se constitue
essentielle de la volonté. Traiter l'humanité en moi comme comme personne. C'est le thème que Rosmini développe lon-
une fin, s'énoncerait dans ce précepte ': «Respecte, main- guement dans son Anthropologie morale". TI nous paraît
tiens la liberté.» Qui ne voit, conclut Rosmini, que, dans annoncer ce qu'écrira Heidegger : «Le respect est la récep-
ce raisonnement, une condition du mérite (c'est-à-dire de tivité à l'égard de la loi morale, c'est-à-dire ce qui nous rend
la moralité) est prise pour le mérite lui-même ?22.
capables de recevoir cette loi morale. (... ) Le respect pour la
On ne comprend pas davantage comment se justifie l'autre loi... est, en lui-même, un dévoilement de moi comme soi
agissant »28.
membre de la deuxième formulation de l'impératif catégo-
rique : traiter l'humanité comme fin dans la personne de tout
autre.
Comment, en effet, la liberté, qui est pure indépendance, 3. L'autonomie du vouloir
«qu'aucune raison extérieure ne peut ui atteindre, ui vio-
lenter et encore moins détruire », va-t-elle pouvoir s'accorder La réflexion sur lui-même de l'agir humain renvoit donc
avec la volonté d'autrui ?". ainsi au dynamisme fondamental du vouloir être. C'est pour-
quoi la clef de voûte de l'impératif catégoriqne est la volonté,
Si la liberté ne peut jamais être contrainte (mais seule- caractérisée par le concept d'autonomie : «Agis selon la
ment dans ses effets au plan du phénomène) d'où vient le maxime qui peut, en même temps, s'ériger en loi uuiver-
devoir de ne pas contraindre, de ne pas violer, la liberté selle »". Le type de la moralité pour Kant est, en effet, ob-
d'autrui? (... ) Pourquoi nous est-il interdit de gêner ce serve Rosmini, l'idée de volonté instituant une législation
qui satisfait les autres et pourquoi dois-je le promouvoir ?24.
25. Ibid.
26. Ibid., p. 220.
20. Ibid., p. 204. 27. A. ROSMINI,-Antropologia in servizio della scienza morale (10
21. Ibid., p. 204. ll. 2. Rosmini cite Kant: Institutio ad metaphys. ed., Milano, Pogliani, 1838); 4 0 ed. (ed. crit. a cura di F. Evain) :
morum, Born, t. IV, p. 563 ; correspondant à : Metaphysik der Sitten, Opera di A. Rosmini, vol. 24, Roma, Città Nuova ed., 1981.
ed. cit. Bd. III, p. 26. 28. HEIDEGGER, Kant et le problème de la métaphysique, éd. cit.,
22. Ibid., p. 211-212. p. 214-215.
23. Ibid., p. 225. 29. KANT, Grundlegung ... , -o.c., p. 63 (Born, p. 314; Tr. Delbos,
24. Ibid., p. 226. p. 164).
218 FRANÇOIS EVAIN ROSMINI, KANT, HEIDEGGER 219

universelle". Ce serait commettre uue grave erreur d'interpré- soune, parce qu'en lni la modalité morale de l'être se révèle
tation au sujet de cette troisième formulation de l'impératif dans la volonté comme son principe suprême".
catégorique que de méconnaître ce caractère typique : «le
Cette esquisse de la critique rosminienne des trois formu-
concept de personne autonome est originairement une idée »31.
lations de l'impératif catégorique proposées par Kant laisse
C'est sur cette conception de l'homme que porte la cri-
entrevoir, comme en arrière-plan, une problématique de l'hre
tique de Rosmini. Selon lui, la personne ne saurait être ni
dont l'Homme serait la clé.
«autonome », ni une «idée ». S'il est vrai que la moralité
concerne la volonté, c'est dans la mesure où celle-ci est ac- Son ontologie personnaliste se présente - avant la let-
cordée à la loi" : tre - comme une philosophie existentiale, c'est-à-dire comme
« l'examen transcendantal de ce qu'est l'homme en tant qu'il
La loi est la connaissance directe des choses (dans) se pose la question de l'être »". Il utilise en effet à ce point
l'idée d'être, forme de toutes les autres idées. Elle est donc la réflexion transcendantale qu'on a voulu voir en lui le
la loi première et forme de toutes les lois. La volonté se « Kant italien »38. C'est ignorer son refus du « subjectivisme»
conforme à la loi par un acte de réflexion délibérée, par qu'il attribue - peut-être avec excès - à Kant en rejetant
laquelle elle «re-connaît» les choses telles qu'elles sont,
conformément à la connaissance directe33 • «de façon décisive l'assertion selon laquelle la vérité ne
serait pas transcendante à l'homme, mais produite par lui »".
En faisant de l'idée d'être l'unique forme a priori de l'esprit,
Ainsi la relation LoijVolonté n'est, pour Rosmini, que
Rosmini reconnaît en elle la lumière originelle de l'esprit"'.
la formulation éthique de celle de l'être et de l'esprit. La
volonté revêt, en effet chez lui, une signification métaphy- De même pour Heidegger la «luminosité» de l'être dans
sique : vouloir-être fondamental, elle vient de l'être et tend l'Homme ne correspond nullement à une réduction «subjec-
vers lui". Dans la dynamique interne de l'être (la dialecticité tiviste» du problème de la métaphysique. Ce serait - ici
de ses trois modalités) la volonté est dévoilement de l'ultime encore - faire de cette pensée une lecture «trop unilatéra-
Logos : l'être en sa forme morale". 1ement kantieune. En effet, rapprochant l'être de l'a priori de
Cet éclairage moral de la métaphysique n'est pas une Kant (cette interprétation) le prend pour un projet (Entwurf)
réédition du platonisme ou du plotiuisme. Il permet à Ros- apriorique de l'homme »41. Heidegger, on le sait, refuse ce
mini de progresser vers une véritable «onto-Iogie» : celle
dans laquelle l'être-homme joue le rôle de révélateur de l'être. 36. Cf. F. EVAIN, Etre et personne chez A. Rosmini (Paris, Beau-
Ni «autonome» ni «idée-type », l'homme est, en effet per- chesne et Roma, Univ. Gregoriana ed., 1981) : Ille Partie, ch. 16 :
L'être-en-per8onne, p. 335 S8.
37. H. RAHNER, «Le concept de philosophie existentiale », Recher-
30. Ibid. (Tr. Delbos, p. 154). Dans la Storia comparativa (a.c., ches de science religieuse, 30 (1940), p. 160.
p. 208, n. 2) Rosmini cite Born : Constitrttio metaphysices morum, 38. G. GENTILE, Rosmini e Gioberti: saggio sulla filosofia deI Ri-
D.C., t. II, p'. 307. sorgimento (2e ed., Firenze, Sansoni, 1955), p. Xl et 65. Cette inter-
31. G. KRUEGER, Critique et morale chez Kant, tr. de M. Régnier, prétation «kantienne» de Rosmini se retrouve dans une certaine
Paris, Beauchesne, 1961, p. 129. tradition universitaire italienne, par exemple chez B. Spaventa (1817-
32. ROSMINI, Staria comparativa... , o.c., p. 209. 1883), B. Varisco (1850-1933) et son disciple: P. Carabellese (1877-
33. ROSMINI, Principi della scienza morale (1 0 ed., Milano, Po- 1948) dans: La teoria della percezione intelletiva di A. Rosmini (Bari,
gliani, 1831. Ediz. Naz., Milano, Bocca, 1941, vol. XXI, p. 114). Alighieri, 1907).
34. Cf. ROSMINI, Compendio di etiea (posth., Ediz. Naz., Roma, 39. M.F. SCIACCA, lnterpretazioni rosminiane (Milano, Marzorati,
ARE, 1937, vol. VI, § 95, p. 31; Teosofia (posth., Ediz. Naz., ibid., 1958), p. 53 ss.
vol. IX, 1938, § 1037, p. 328. 40. Cf. F. EVAIN, Etre et Personne chez A. Rosmini, o.c., p'e Par-
35. Cf. C. BERGAMASCHI, «La volontà, atto sostanziale di amore e tie, ch. 4 : L'être, forme de l'esprit, p. 115 ss.
base della persona nel pensiero di A. Rosmini », Rivista Rosminiana 41. J.-B. LoTZ, Il: Heidegger et l'être », Archives de Philosophie, 19
(Stresa), 58 (1964), p. 250 ss. (1956), p. 7-8.
220 FRANÇOIS EVAIN

contresens : l'être n'est pas un produit de l'Homme"-. C'est,


au contraire, l'Homme qui « est jeté par l'être lui-même dans
la vérité de l'être »43.
C'était déjà, nous semble-t-il, ce que, par sa critique de
Kant, Rosmini tentait d'établir. En situant l'Anthropologie
« au service de la morale», il propose un nouveau centrage JOHANNES B. LOTZ
de la problématique de l'être: celui qui, déjà, découvre que
«l'essence de l'homme est essentielle à la vérité de l'être »".
DIE APRIORISCHEN
ERKENNTNISBEDINGUNGEN BEI KANT
lM LICHTE DER OFFENBARKEIT
DES SEINS VON HEIDEGGER

Wie Heidegger überzeugend herausgearbeitet hat, ist das


Thema der «Kritik der reinen Vernunft» uicht die Erkenut-
uistheorie ; vielmehr zieIt die leitende Frage auf die Miiglich-
keit der Metaphysik hin, weshalb es um deren Grundiegung
geht'. Die Untersuchung führt zn dem Ergebnis, dass die
Metaphysik des Wissens uumiiglich und aufznheben sei, um
den freien Raum für die einzig miigliche Metaphysik des
GIaubens zn bereiten'. Zu dieser Folgerung kommt Kant
vermiige der sogenannten kopernikauischen Wende, gemiiss
der sich die Gegenstiinde nach der Erkenntnis richten. Die
entgegengesetzte Annahme, dass sich niimlich die Erkenntuis
nach den Gegenstiinden richtet, war zu überwinden, weil sie
die notwendigen und aIIgemeingültigen Siitze uicht erkliiren
kann, von deuen jede Wissenschaft lebt'.

1
42. On observera que c'est exactement ce que Rosmini reproche à
Kant ... Heidegger écrit : «Dieser Entwurf schafft nicht das Sein... ~ Die Grundeinstellung, die der hier angedeuteten Alter-
(cité par J.-B. Latz, art. cit., p. 8, n. 2). native innewohnt, Iiisst sich durch zwei Gesichtspunkte ge-
43. HEIDEGGER, Brie! über den Humanismus, O.C., s. 75. Cf. F.
EVAIN, «L'être en question dans la p'ersonne. Un affrontement entre
Rosmini et Heidegger» (Memorias dei XIII Congresso Internacional 1. M. HEIDEGGER, Kant und das Problem der Metaphysik. 3Frank-
de Filoso/ia, Mexico, Univ. Nacional Autonoma, 1962, vol. II, p. 29 furt, 1965.
S8. Cf. Riv. rosm., 58, 1964, p. 29 88.). 2. B XXX.
44. HEIDEGGER : Briel über den Humanismus (tr. fr., p. 94). 3. B XVI f.
JOHANNES B. LOTZ DIE OFFENBARKEIT DES SEINS 223
222
~ugang zn allem Seieden hats. Infolgedessen verwirklicht
nauer umschreibeu. Erstens hat es unser Erkennen mit
Gegenstiinden zu tun, was nicht nur für den durch die Sinn- 81ch unser Erkennen ais Se~nlassen des Seienden', stat! dieses
lichkeit erfü\lten Verstand, sondem auch für die Vemunft zn setzen oder hervorznbnngen.
gilt, deren Ideen die Gegenstande Well, See1e, Gott entspre-
.Dadm:ch, dass bei Kant das Sein ausfiillt, wird das an sich
chen', die freilich nicht zngiinglich sind, weil die sie erôffnende Selende lU das für uns Erscheinende verkehrt10 • Dazu kommt
intellektuelle Anschauung dem Menschen versagt ist. Gegen- er dur~h die Art, wie er die transzendentale Fragestellung
stande aber gehôren in Heideggers Sicht dem Seienden an
oder dl~ Frage nach den Bedingungen der Môglichkeit des
oder machen den Bereich des Seienden ans; demgemiiss
mensc~hch7n Erkennens durchführt. Diese sind wegen der
bewegt sich auch die Metaphysik im Seienden. Zweitens steht kopermkamschen Wende im Menschen selbst niiherhin in
den Gegenstiinden ein Erkennen gegenüber, das im Sinne seiner Sinnlichkeit, in seinem Verstand und i~ seiner Ver-
der von Heidegger so genannten «Metaphysik der Subjekti- n~nft zn suchen. Das sinuliche Anschauen wird durch die
vitiit» genommen wird5 • Dabei sucht das znniichst für-sich- r~lUen Ansch~uungen des Raumes und der Zeit ennôglicht,
seiende Subjekt durch sein Erkennen den Weg zn den Gegen- die das von s!Ch aus chaotische Empfinduugsmaterial durch-
sHinden, indem es diese bestimmt und nur insoweit zu er- fonnen. Erkenntnis von Gegenstiinden kommt znstande in-
fassen imstande ist, wie es sie bestimmt'. Der Gegenstand
ais Gegenstand wird somit schon nach Kant vom Subjekt
~em sich die von sich aus blinden Anschauungen mit deu' von
s!Ch ans leeren reinen Verstandesbegriffen oder Kategorien
gesetzt oder hervorgebracht, wenn ihm auch die vom Ding- verbindenll • Dabei sind die Bedingungen der Môglichkeit der
an-sich herkommenden Empfindungen zngrunde liegen. E:.kenntnis auch die ~rmôglichenden ;Bedingungen der Gegen-
Die beiden eben anfgewiesenen Gesichtspunkte zeigen Kant stande der ~rkenntuls~. Das. gill einzig für die Gegenstiinde
ais einen Philosophen der Vergessenheit des Seins oder des aIs ?ege~tande:. da Ja ~llelU sie von jenen Bedingungen
Nicht-Vollzngs der ontologischen Differenz. Damit unterliegt g~pragt smd, wahrend die Gegenstiinde ais Seiende nicht
er dem Schicksal wenigstens des neuzeitlichen Denkens, aus emer solchen Priigung unterliegen nnd dahel' für uns nicht
dem Heidegger sich losringt, indem er das Sein neu znr ~ugiinglich sind. Hiennit sind uns aber die Gegenstiinde nicht
Sprache bringt'. Alles Seiende gründet im Sein, durch dessen gegeben, wie sie sind, sondern lediglich, wie sie sich uns
Mitteilung es allererst ein Seiendes ist. Dementsprechend hat gefonnt durch. die. menschlichen Erkenntnisbedingungen, dar:
es unser Erkennen nicht nur mit dem Seienden, sondem vor stellen oder Wle Sie uns erscheinen. Aiso hat sich tatsiichlich
allem mit dem Sein zn tun; allein durch dessen Vermittlung das an sich Seiende in das uns Erscheinende verkehrt. In den
sind wir imstande, das Seiende ais ein solches zn erfassen. Worten Kants ausgedrückt: menschliches Erkennen ist
Auch wird es für die Metaphysik môglich, die ihr eigenen w~sent~ich anf den .Bereich môglicher Erfahrung beschriinkt13•
Gehalte anf die Weise des Seins zu erreichen oder muss sie Wle diese GrenZZlehung, tiefer geschaut, durch das Aus-
nicht etwa Got! auf die Weise des Seienden denken. Ebenso
durchbricht der Mensch die Schranken der Metaphysik der
8. ~eidegger de~t gegen den Humanismus, der das Sein ausser
Subjektivitiit, insofern sein Denken immer schon und wesent- A~ht lasst; er vertntt aber den wahren Humanismus, der die Mensch~
lich vom Sein angesprochen ist und daher mit ihm zusam- helt des Menschen aus der Nahe zum Sein denkt wobei dieses
mengehôrt oder durch seine ldentiûit mit dem Sein den den Mensch~n bes~mmt und den Primat über ibn innehat (Brie! über
den Humamsrr;us, In Wegma~ken, Frankfurt, 1967, 161 und 173).
9. «Das Semlassen des Selenden» (V om Wesen der Wahrheit in
Wegmarken, 88 ff. '
4. B 383 f. 10. B XIX f.; A 129 ; Kr. prakt. Vern. (Cassirer), 60 und 104.
5. Dazu M. HEIDEGGER, Holzwege, 4Frankfurt, 1963, Die Zeit des
11. B 75.
Weltbildes, bes. 84-86. 12. B 161.
6. B XVIIl. 13. B XIX; B 166.
7. Darauf zielt, Sein und Zeit ganz und gar hin.
224 JOHANNES B. LOTZ DIE OFFENBARKE1T DES SEINS 225

bleiben des Seins bedingt ist, haben wir im folgenden zu Bestimmungen an sich selbst» 19 oder «ausserhalb meinem
verdentlichen. Begriffe »20. Daher kann Sein zwar ais «Iogisches Pradikat»
dienen, nie aber ais ein «reales Pradilcat» verwendet wer-
den21 ; denn ich kann Sein im Sinne von «Existenz» zwar
von einem Ding aussagen, füge aber dadurch zu seinem
II Begriff keinen nenen Gehalt, von Kant «Realitat» genannt",
hinzu. Demnach fallt das Sein im Anschluss an die nach-
Znnachst scheint das Sein nicht auszuble!~en; den~ es thomanische Sinngebung wiederum mit Position oder Setzung
kommt an wenigstens drei Stellen der. «KfltJ~ der rem.,:n zusammen, wahrend die Fülle (Realitat) ausdrücklich von
Vernnnft» vor. Erstens tritt uns das Sem ais el~~. der zwolf ihm ausgeschlossen wird".
Kategorien entgegen; die Gruppe der ~o~litat umf.as,~t Wie die Diskussion der drei Stellen, an denen das Sein in
zwischen der Moglichkeit und der Notwe~dl~keIt das Dasem . der «Kritik der reinen Veruunft» vorkommt, zeigt, bleibt
Dieses jedoch führt gerade ais Kategofl~ ube~ das uns Er- das Sein ais der Grund alles Seienden, das in der ontologi-
scheineude nicht hinaus, weshalb nur em geflnger. Abglanz scheu Differenz hervortritt, bei Kant tatsachlich aus. Da
des Seins erreicht wird, das Sein-selbst aber ausblelbt. jedoch das Seiende sich ganz und gar oder allein ans dem
Zweitens bin ich mir in der «synthetischen urspTÜng- Sein herleitet, hort mit dem Verschwinden des Seins auch das
lichen Einheit der Apperzeption» des «.Ic~ denke ~ «be- Seiende auf, nus wahrhaft ais Seiendes zu begegnen, und
wusst, nicht wie ich mir erscheine, noch w~e lch an nu; selbst wird es von Kant folgerichtig anf das für uns Erscheinende
bin sondern nur dass ich bin »15. Das ISt weder em An- reduziert, wodurch dem spateren Positivismus der Weg be-
sch~uen noch ein Erkennen, sondern ein Denk~n, das. ,,?m reitet wird. Zugleich wird Gott, der ja nicht dem für nns
Inhalt hat : «!ch existiere ais Intelligenz, die slch I~dlglich Erscheinenden, das durch die Sinnlichkeit gegeben ist, ange-
ihres Verbindungsvennogens bewusst ist »". Wenn lch. er- hort, ais das reine An-sich unerkennbar. Auch gleicht die
fasse, dass ich bin, greife ich zwar über das. blos~e Er~chemen Anseinandersetzung mit dem ontologischen Gottesargnment
hinaus oder rühre an das Sein. Doch errelChe lch Wlederum Gott offensichtlich dem Ding an; wie bei diesem wird nam-
nur einen ersten Schimmer des Seins, weil das !ch statt nach lich das Verhrutnis nutersncht, das sich zwischen dem Be-
seinem An-sich lediglich ais Verbindungsfunktion oder.. ais griff Gottes und dem ihrn eigenen Sein spannt, wobei sich
oberste transzendentale Bedingnng alles Erkennens. z:nganf,- ergibt, «dass ein jeder Existenzialsatz synthetisch sei »24. Das
Iich wird, womit das Denken genau zusammen~tJm?'t .. Sein tritt also zum Begriff Gottes, der von sich aus nicht
Ausserdem zeigt sich dadnrch, dass i.ch ?in, das. Sem emz;g Sein besagt, hinzu, womit Gott ais ein Seiendes angesetzt
ais Setzung, nicht aber ais Fülle. Schhesshch be~ft das Sem wird, das aber unerreichbar ist.
allein das !ch, keineswegs aber des sen Gegenstande. Bisher haben wir nur die Sinnlichkeit und den Verstand
Drittens ist hier der Nachweis «der Umuoglichkeit eines
ontologischen Beweises vom Dase!n Got~es» zu beacht~n18. 19. B 626.
Sein meint «bloss die Position emes Dmges oder gewlsser 20. B 627.
21. B 626.
22. B 106.
14. B 106. 23. Dazu vgl. M. HEIDEGGER, «Kants These über das Sein », in :
15.
B 157. Wegmarken, 273-307. A. HAYEN, La communication de l'être d'après
B 158.
16. E k . d' t us S. Thomas d'Aquin, 2 Bde.) Paris~Louvain, 1957~1959.
Das Denken entwirft im Gegensatz zum r ennen le f3:. -
17 24. B 626. Gewisz erkennen wir Gottes Wirklichkeit synthetisch
zend~ntalen Bedîngungen, zu denen auch das «lch denke» gehort. oder a posteriori; dadurch wird aber nicht ausgeschlossen dasz Gott
18. B 620. das subsistierende Sein selbst ist. .
JOHANNES B. LOTZ DIE OFFENBARKEIT DES SEINS 227
226
betrachtet; es fragt sich, ob sich durch die Vernunft etwas teilend, diese aIs solche konstituiert". Mit der Offenbarkeit
au dem gewonnenen Ergebnis andert. Dem Verstaud aIs .dem des alles überhaupt gründenden und folglich umfassenden
Verm6gen der Begriffe tritt die Vemu:nt. aIs das Vermogen Seins greift die Vemunft damI auch auf die in den drei Ideen
der Ideen gegenüber; damit eraffnet Sl~ lffi ?efolg~ ~latons aufleuchtenden Ganzheiten aus, wobei diese nicht leere Ent-
die Metaphysik. Wie die reinen Begriffe dIe apnonschen, würfe bleiben, sondem in ihrem durch das Sein er6ffneten
dem a posteriori oder durch Erfahrung Gegebenen ~orau~­ An-sich erreicht werden. Insofem die Vemunft weiterhin
gehenden Entwürfe des Verstandes sind, so stellen slch dIe den Verstand und die SimIlichkeit durchdringt, sind anch
Ideen aIs die apriorischen Entwürfe der Vemunft dar : W~lt, diese nicht auf das uns Erscheinende eingeschrankt oder
Seele, Gott. Begriffe und Ideen sind glei~hermassen von slch nicht grundsatzlich von dem an sich Seienden ausgeschlossen,
aus leer und bedürfen, damit Erkenntms zustande. komm~, obwohl es nicht immer leicht ist, im Einzelfall das wahrhafl
der sie erfüllenden Anschanung. Nun ist d~n ~e~nffen dIe Seiende von dem nur Erscheinenden abzuheben.
sinnliche Anschauung zugeordnet, wodurch SIe dIe Ihnen en!-
sprechenden Gegenstaude konstituiereu. und so ~rkennt?'s
vermitteln, die aber einzig für den Berelch d~s F~r-nns gIlt. III
lm Gegensatz dazu greifen die Ideen wesenthch m das .~n­
sich aus, das allein der intellektuellen Anschauun~ zugang- WemI nun in! Erfassen des Seienden immer schon die
lich sein kannte, die aber dem Menschen versagt ISt; daher Offenbarkeit des Seins aIs dessen ermiiglichender Gmnd ent-
vermagen die Ideen nicht die ihnen ents~rechenden G~gen­ hallen ist, vermag die transzendentale Rückbesinnung auf
stande zu konstituieren und so auch keIlle ErkemItuls zn jenes Erfassen eben diesen Grund oder die Offenbarkeit des
vermitteln. Doch kommt den Ideen eine regulative Bedentung Seins und damit das Sein selbst freizulegen". Foiglich kom-
zu insofem sie die ErkemItnisse des Verstandes zu den letzten men wir zum Sein auf dem Wege der transzendentalen Rück-
G~nzheiten von Welt, Seele und Gott hingeleiten nnd zusam- führung, in der jederzeit der Mensch in seinen aktiv voll-
menschliessen". Ausserdem bereiten die Ideen den Boden genen Rück-gang das untermenschliche Seiende hineinnimmt,
für die praktische Metaphysik des Glaubens". das so passiv zurück-geführt wird. Anders ausgedrückt, isl
dem Menschen und allein ibm der vollendele Rückgang
Kant ko=t über den in Gestalt der d~ei Ideen ges.chehen- (reditio èompleta)" oder der Rückgang bis zum Sein aIs dem
den leeren Entwurf des An-sich nicht hmans, WeIl Ihm der letzten Grund verliehen, an dem er aIs auf die Welt bezogener
eigentliche Kern der Vernunft verschlossen. b~eibt und er das Untermenschliche leil-nehmen Jasst. Letzteres ist deshalb
lediglich zu dessen Auswirkungen gelangt, dIe Ihm eben aIs untermenschlich, weil es des vollendeten Rückgangs nicht
die Ideen von der vorausgehenden Entwicklung überliefert fahig ist oder das Sein zwar verborgen enthalt, es aber nicht
werden. Daher andert auch die Vemunft ,:ichts an d~m in die Entborgenheit erheben kann.
gewonnenen Ergebnis, namlich an der Gren~zIehung,.. gem~s Die soeben umschriebene transzendentale Besinnung hat
der unser Erkennen anf das Erscheinend~ eu;'geschrankt Ist.
Der eigentliche Kem der Vemunft aber IS~ Ihr Zus.a=en-
gehëren mit dem Sein oder die Offenbarkelt des Sems, v~r­ 27. «Der Mensch ist vom Sein selbst in die Wahrheit des Seins
geworfen », Briel über den Hum, in Wegmarken, 161.
mage der das Sein, sich der Vemunft ohne Unterlass mlt- .28. J. '!--OTZ,. T.ranszende~tale Erfahrung. Freiburg, 1978. Darin
wlrd gezelgt, Wle lU der onhschen Erfahrung des Seienden wesentlich
die ontologische Erfahrung des Seins enthalten ist (bes. 27-59).
29 . .Dazu. J. LOTZ, «Erkenntnistheorie-Erkenntnismetaphysik-Me-
taphysI1( », fi : Neue Erkenntnisprobleme in Philosophie und Theo-
~~: ~ ~~~. f.; 579 f.; Kr. prakt. Vern. (Cassirer), 143; ahnlich logi~. Freiburg, ~968, 64-96. Darin wird die «reditio completa» des
Aqumaten folgenchtig transzendental interpretiert.
bezüglich der Begriffe, ebd. 56.
,1

DIE OFFENBARKEIT DES SEINS 229


JOHANNES B. LOTZ
228
der die Vernuuft aIs bleibendes Vermogen konstituiert ist,
Kant nicht bis zum Kern der Vernunft oder bis zur Offen-
ais auch um die aktuelle Mitteilung, der die Vollzüge der
barkeit des Seins vorgetrieben". In Folge davon kommt .er
zum An-sich nicht auf dom transzendentalen Wege und memt Vemuuft zu verdanken sind". Wahrend sich in der Ausrich-
tung auf das Sein, die jeder Begegnung mit einzelnen Seien-
er, es sei einzig durch die uns versagte inte/le~tue/l~ Anscha~­
den vorausgeht oder a priori zugrunde liegt, etwas Selbes
ung erreichbar. Darin, dass diese uns versagt lst, stimmen wrr
durchlüilt, sind die aktuellen Mitteilungen intmer wieder an-
Kant zu; darin jedoch unterscheiden wir uns von ibm; d~
uUS deshalb der Zugang zum An-sich verschlossen sel. Mit dere oder unterliegen dem geschichtlichen Wandel, wobei
der bis zum Sein durch-geführten transzendentalen Besinnung die ontologische Geschichte des Seins für die ontische Ge-
niimlich kommen wir ohne die intellektuelle Anschauung schichte des Seienden bestimmend ist. Vermoge seiner Ver-
nunft ist der Mensch ebenso imstande, das Sein in das
zum An-sich wodurch sich die Berufung auf diese aIs über-
Seiende hineinzubilden wie das in diesem bereits niedergelegte
flüssig erwei~t. _ Genauer gesprochen, haben wir zwischen
dem transzendentalen Rückgang und der trauszendentalen Sein aus der Verborgenheit in die Entborgenheit überzufüh-
ren. Dabei spielt der Verstand eine vermittelnde Rolle, dom
Besinnung zu unterscheiden. Ersterer ist in jedem Vollziehen
die Vemunft das ihr eigene Sein so mitteilt, dass er auf die
des Seienden aIs eines solchen auf die Weise der begleitenden
Wesenheit (Seiendheit) der materiellen oder innerweltlichen
Reflexion enthalten; allein indem diese das Sein a-thematisch 34
erreicht, kann Seiendes aIs solches vollzogen werden. Letztere Dinge oder auf deren Weise-zu-sein ausgerichtet ist •
schliesst sich an das Vollziehen des Seiendèn ais eines sol-
chen ais der weitere Akt der nachfolgenden Reflexion an;
sie hebt das Sein thematisch heraus und ist das Nach-denken IV
31
über den Vollzug des Seienden aIs Seienden • - Dass ein
solcher Vollzug tatsachlich geschieht, zeigt die tagHigliche Er- Nach Heidegger ist die überlieferte Metaphysik ganz in
fahrung; dieser widerspricht Kant, wenn er ~as Seiende a~ der Vergessenheit des Seius befangen. Zwar denkt sie das
das Erscheinende reduziert. Waren wir ganz m das Erschel- Seiende aus der Offenbarkeit des Seins, sie denkt aber nicht
nende eingeschlossen, so konnten wir von diesem das Seiende diese Offenbarkeit selbst; daher ist sie zwar Ontologie, nicht
nicht unterscheiden, ja wüssten wir nicht einmal, was das aber Fundamentalontologie. Sie bereitet zwangslaufig dem
Seiende int Unterschied zum Erscheinenden besagt. Kurz Nihilismus den Weg ; indem sie n1imlich das Sein vergisst und
formuliert : eine Fiktion ist nicht das Ausgreifen unseres so das Sein für sie nichts bedeutet und nichts ist, zerrinnt ihr
Erkennens auf das Seiende, sondern dessen Eiuschranken auch das Seiende in nichts". Die Metaphysik, wie sie in der
auf das nur Erscheinende. «Kritik der reinen Vemunft» vorkommt, ist nicht einmal
mehr Ontologie, weil ihr das Sein g1inzlich abgeht; sie denkt
Die bis zum Sein vorstossende trauszendentale Besinnung
nicht aus der Offenbarkeit des Seins und daher auch nicht
schliesst ein dass sich das Sein st1indig der Vernuuft mitteile ;
das Seiende, sondem nur noch, wie wir dargelegt haben,
diese ist ge:adezu jene innerste Tiefe des Menschen, in der 32 das Erscheinende. Diese Art von Metaphysik hebt sich selbst
und aIs die jederzeit die Mitteilung des Seins geschieht •
auf und führt tatsachlich in den Nihilismus. Mit Recht erkliirt
Dabei geht es sowohl um die habituelle Mitteilung, kraft
33. lm Anschluss an den Aquinaten entfaltet in J. LOTZ, Das
30. Dazu J. LoTZ, «Die transzendentale Methode in Kants Kriti~ Urteil und das Sein, Pullach, 1957, 128-130 (franz. Le Jugement et
der reinen Vemunft und in der Scholastik », in : Kant und dle
l'Etre, 1965).
Scholastik heute, Pullach, 1955, 35-108. 34. Naheres in dem von Anm. 28 genannten Buch (bes. 50-54).
31. Genau entwickelt in dem von Anm. 28 genannten Buch (bes. 35. Dazu M. HEIDEGGER, Einleitung zu Was ist Metaphysik?, in
77-79). Wegmarken, 195-211.
32. Vgl. Anm. 8 und 27.
DIE OFFENBARKEIT DES SEINS 231
230 JOHANNES B. LOTZ

sie Kant aIs im Bereich des Wissens unm5giich; zngleich vital oder die Begrenzung auf die blosse Erscheinung über-
aber zieht er uicht die Folgeruug des Nihilismus, soudem stiegen, wodurch wir imstande sind, die Dinge so zu erkennen,
sucht sie auf dem Wege des praktischen Glaubens zu retten. wie sie an sich sind.
Sie ist jedoch uicht zu retten, solange wir in der Vergessen-
heit des Seins verharren. Erst wenn die Ontologie in die
Fundamentalontologie übergeführt oder das Seiende ans V
dem Sein und so das Sein selbst ausdrücklich gedacht wird,
folglich die bei Kant auftretende und von Heidegger gemeinte Den vorstehend entwickelten Zusammenhiingen scheint
Metaphysik überwunden wird, kann das Denken seine neue die unleugbare Endlichkeit des Menschen zu widerstreiten.
von der Gegenwart und der Zukunft geforderte Gestalt Einerseits namlich kann im Sein allein dann alles Seiende
hervorbringen. grüuden, wenn das Sein-selbst die grenzenlose oder absolute
Hier ist noch ein bedeutsamer Unterschied zu besprechen, Fülle besagt, also unendlich ist. Dasselbe ergibt sich vom
durch den sich die «Kritik der praktischen Vemuuft» von Standpunkt unserer Erkenntnis her, der allein dadurch Ab-
der « Kritik der reinen Vemuuft» abhebt. Wahrend in jener solutheit erreicht, dass er im all-umfassenden, eben absoluten
der Mensch wegen der Unbedingtheit des kategorischen oder unendlichen Sein gründet. Andrerseits zeigt die tagtag-
Imperativs in Kommuuikation mit allen InteIIigenzen steht", liche Erfahrung, dass die Vemnuft des Menschen keineswegs
ist er in dieser wegen der Bedingtheit seines Erkennens auf absolut oder unendlich ist. Niiherhin ist sie geschichtlich oder
sich selbst zUIÜckgewOifen und eingeengt, also von der ge- verwirklicht sie sich immer nur in je und je epochal begrenz-
nannten Kommunikation ausgeschlossen, weshalb ibm ledig- ten Auspragungen furer selbst, wodurch das ihr zugeordnete
lich diejeuige mit seinesgleichen oder mit allen Menschen Sein dieselben geschichtlichen Auspragungen aufweist. Hei-
zukommt. Daher erkennt er aIle Dinge nur, wie sie von dem degger spricht in dieser Hinsicht von den vielen und viel-
" begrenzten Standpunkt des Menschen her aussehen, nicht gestaltigen Schickungen des Seins, die einander ablosen und
'i
aber wie sie an sich sind; ein relativer Standpunkt reicht von denen keine das Sein auszuschopfen vermag37 • Die
namlich uie über die ibm zugeordnete Perspektive oder Er- Schickungen entstammen dem immer wieder neuen Ereignis,
scheinung hinaus. - lm Gegensatz dazu gewinnt unser Er- weshalb man vom Sein, das von diesem gewahrt wird, sagen
kennen durch das Erfassen des Seienden aIs eines solchen muss, dass es endlich seps.
Unbedingtheit. Diese gIÜndet in der Offenbarkeit des Seins Zugleich jedoch liegt den vielen Schickungen das eine
selbst die unsere Vemuuft konstituiert. Insofem aber im Sein und den wechselnden Schickungen das stete oder blei-
Sein 'alles Seiende wurzelt, umfasst es aIles-überhaupt, ist bende Sein zugrunde, wodurch das Sein-selbst die Schick-
es insbesondere nicht auf den Menschen eingeengt, sondem ungen übersteigt oder eine gewisse Transzendenz innehat.
greift über diesen hinaus oder umspannt aIle InteIIigenzen Auch ist es in dem Sinne allumfassend, dass ans ibm samtli-
oder Trager von Vemunft, die sich im Sein treffen. Damit che Schickungen wie Knospen entspringen. Ob es aber ab-
gewiihrt das Sein die Kommuuikation mit allen InteIIigenzen, solut und unendlich oder die schlechtinuige Fülle ist, bleibt
was mit dem Erreichen des absoluten Standpunktes gleich-
bedeutend ist. Von diesem her ist immer schon die Perspekti-
37. Wir sind «weit entfernt von einem Einblick in die jeweilig~n
Epochen des vollen Seinsgeschickes und in die Art, nach der dIe
36. Kant spricht von «einem Gesetze für aUe vernünftig~n Epochen jlih aufspringen wie Knospen» (M. HEIDEGGER, Der Satz
Wesen ». Dieses «schrlinkt sich also nicht blosz auf Menschen em. vom Grund, PfuHingen, 1957, 154.
sondem geht auf aIle endliche Wesen, die Vemunft und Wi1l~n habe~, 38. «Die Elldlichkeit des El'eignisses, des S~ins ». (Protokoll zu
ja schliesst sogar das unendliche Wesen ais oberste Intclhgenz mIt einem Seminar über den Vortrag «Zeit und Sem », m : Zur Sache
eiD ». Kr. prakt. Vern. (Cassirer). 37. des Denkens. Tübingen, 1969, 58).
DIE OFFENBARKEIT DES SEINS 233
232 JOHANNES B. LOTZ

bei Heidegger offen. Er hait es sogar für geboten, nicht Sein meldet, steht oder ruht in sich selbst und wird deshalb
nur auf die Antwort, sondem schon auf die Frage zu ver- vom Aquinaten ais das subsistierende Sein bezeichnet.
Zu dieser verborgensten Tiefe oder diesem innersten Selbst
zichten, weil sich das Denken sonst in unentwirrbare Wider-
sprüche verwickle oder in leere Konstruktionen gerate". des Seins dringt Heidegger nicht var, womit er im Bezug
daranf die Vergessenheit des Seins nicht überwunden hat und
Gewiss ist mit der Endlichkeit und Geschichtlichkeit des Thomas von Aquin in der Entdeckung des Seins weiter ais
Menschen oder seiner Vemunft ebenfalls die Endlichkeit und er gelangt ist. Weil. zugleich das Sein ais das subsistierende
Geschichtlichkeit des ibm mitgeteilten Seins gegeben. Mit ganz es selbst oder ganz bei sich selbst ist, zeigt sich ohne
dieser Hillt aber (selbsl nach Heidegger) das Sein-selbsl nicht weiteres seine Personalitiit und damit seine FreiheU, die nur
ganzlich zusammen, weil es sonst zu einem Seienden herab- ein anderer Ausdruck für seine Subsistenzoder seine Ab-
gesetzt würde. Insofem es also wahrhaft um das Sein-selbst solutheit ist". Vermoge seiner Freibeit kann sich das personal-
geht, übersteigt es immer schon und wesentlich die Endlich- absolute Sein dem Seienden und namentlich dem Menschen
keit und Geschichtlichkeit, weshalb es sich seiner iunersten mitteilen es muss sich aber nicht mitteilen. Von hier aus
Eigenart nach aIs überendlich und übergeschichtlich und stellt sich die Mitteilung, die bei Heidegger Ereignis heisst,
damit zuletzt ais unendlich und ewig erweist. Hierdurch aIs SchOpfung ans dem Nichts dar, für die es wesentlich ist,
werden wir von dem endlich-geschichtlichen Sein, das aus das Sein zu verendlichen und sa zu zeitigen oder der Zeit
dem Ereignis stammt, zu dem unendlich-ewigen Sein geführt, zu unterwerfen. Damit trit! das endlich-zeitliche Sein-habende
aus dem das Ereignis stammt. Mit der Unterscheidung dieses oder Seiende dem unendlich-überzeitlichen oder ewigen Sein
zweifachen Seins werden die oben erwahnten scheinbar un- gegenüber, das es übersteigt und ihm zugleich innewohnt. Es
entwirrbaren Widersprüche überwunden, ohne dass wir in ist das gottliche Sein, nach seiner personalen Priignng Gott
leere Konstruktionen geraten, weil sich das übergeschicht- genannt43 •
liche Sein im geschichtlichen ais dessen ermiiglichender
Grund ankündigt"'.
Wahrend nun das mitgeteilte Sein wesentlich Sein des VI
Seienden ist, also auf den Menschen angewiesen ist oder
ihn braucht und daher nie ohne seine Zuwendung zum Men- Warum stOsst Heidegger dazu nicht var? Warum ltidt er
schen anftreten kann41, gilt von dem der Mitteilung zugrun- uns ein, diesbezüglich nicht nur auf die Antwort, sondem
de liegenden Sein das genaue Gegenteil. Das Sein-selbst ist sogar auf die Frage zu verzichten? Das erklart sich daraus,
wesentlich nicht Sein des Seienden; es ist nicht auf den dass Heidegger zwar Kants Seinsvergessenheit überwunden
Menschen angewiesen, braucht ibn also nicht und ist gerade hat, indem el' das Sein freilegt, dass hingegen Kants Bindung
ohne die Zuwendung zum Menschen es selbst. Das vom Mene an die ZeU bei Heidegger fortdauert, ja radikalisiert wird.
schen unabhlingige und damit von ibm 10s-gelOste oder ab- Kants Bindung an die Zeit pragt sich var allem im « Schema-
solute Sein, das sich in dem immer schon uns mitgeteilten tismus der reinen Verstandesbegriffe» aus". Diese lassen
sich namlich allein insofem anf die Sinnesgegebenheiten an-
39. «Es ist kein lee1"er Schall, wenn wir sagen "Sein" ... Zugle.ich wenden, ais das jedem Verstandesbegriff zugehiirige zeitliche
sind wir ratIos ... , wenn wir darin übereinkommen sollen, dass Wll". •• Schema entworfen wird; die Sinnlichkeit steigt zur Zeit anf
geschichtlich das Selbe denken» (Satz vom Grund, 154 f.). Auch :
« Zeit tmd Sein» in: Zur Sache des Denkens, 21 und 18.
40. lm eil1zeln~n durchgeführt von J. LOTZ, Martin Heidegger und 42. Dazu das Anm. 40 angeführte Buch 200-206.
Thomas von Aquin. Pfullingen, 1975, bes. 125-167 und 192-199. 43. Ausführlich in dem Anm. 40 genannten Buch 207-259.-
41. Dazu M. HEIDEGGER, «Zur Seinsfrage », in : Wegmarken,
44. B 176-187.
213-253.
DIE OFFENBARKEIT DES SEINS 235
234 JOHANNES B. LOTZ

und der Verstand steigt zur Zeit herab, wodurch sich beide Kommunikation mit den anderen Intelligenzen und vor allem
treffen und allererst Erkenntnis moglich wird. Das dem die Begegnung mit Gott".
Schematismus zugeordnete Vermogen ist die transzendentale Das Uebersteigen der Zeit, das Kant fUr den praktischen
Einbildungskraft, die damit eine zentrale Bedeutung gewinnt". Bereich entwickeIt, findet bereits irn theoretischen Bereich
Weil diese Bedeutung in der ersten Aufiage der «Kritik der statt, wofUr der Ansatzpunkt in der Spannung zwischen den
reinen Vcrnunft» deutlicher hervortritt, zieht sie Heidegger vielen Mitteilungen und dem einen Sein Iiegt, die wir oben
bei seiner Kant-Auslegungvor der zweiten Auflage heran. in Heidegger aufgewiesen haben50• Das eine Sein hait sich
Dabei raclikalisiert er clie Auffassung Kants, indem er auch in den vielen Schickungen ais der bleibende Grund durch,
dessen Vemunft dem um die EinbiIdungskraft zentrierten der sie alle umfasst und daher ein ihr Nacheinander über-
GesamtvoIIzug des menschlichen Erkennens einordnet und steigendes Zugleich besagt. Daran rUhrt Heidegger selbst,
folglich der Zeit einen alles durchwaltenden Einfluss zuteiIt46 • wenn er in seinem V ortrag « Zeit und Sein» die drei Dirnen-
Hier bereitet sich Heideggers These von der Zeit oder der sionen der Zeit auf eine vierte, die in Wahrheit clie erste ist,
Temporalitat ais dem Horizont für clie Eroffnung des Seins zuriickführt, niimlich auf die alles bestimmende «Einheit
vor". Spater leehrt dasselbe Thema insofern wieder, ais die des Reichens ", clie den anderen Dimensionen ihr je Eigenes
zeitlichcn oder geschichtlichen Mitteilungen oder Schickungen zu-reicht oder sie in ihr je Eigenes bringt". In dieselbe Rich-
des Seins das Denken so in ihren Bann schlagen, dass das tung weist die Aussage, das Ereignis, das uns die verschie-
darUber hinausgreifendc Sein-selbst ungreifbar wird". denen Gestalten des epochalen Seins zuschickt, sei selbst
«ungeschichtlich, besser geschicklos ,,". Offenbar kann man
Heideggers RückfUhrung der Vernunft auf die Einbildungsc clic Abfolge, clie zur Zeit gehort, nicht zu Ende erfahren,
kraft hat im regulativen Gebrauch der ersteren ihren Ansatz- ohne auf das Zugleich ais ihren inneysten Grund zu treffen ;
punkt ; denn danach ist sie auf die Erkenntnis des Verstandes wer in der Abfolge, ohue das Zugleich zu erreichen, unter-
und damit auch auf clie EinbiIdungskraft bezogen. Zugleich geht, ist nicht irnstande, die Abfolge ais solche zu erfassen,
jedoch erschopft sich clie Vernunft nicht in cliesem Gebrauch, weil er irn einzelnen Zeitpunkt versinkt und daher nicht viele
sondern ist die reine Vernunft zu der praktischen hin offen zusammen im Blick hat, wodurch erst die Abfolge greifbar
und findet in dieser ihre Erfilliung. Ueberhaupt liegt in dieser wird.
Richtung das Schwergewicht des kantischen Philosophierens,
Nach allem überwindet clie Temporalitat des Seins sowohl
indem es die Schein-Metaphysik des Wissens beseitigt, um
seitens der Temporalitat ais auch seitens des Seins von innen
fUr die einzig mogliche Metaphysik des Glaubens Platz zu
heraus sich selbst. Das Nacheinander der Temporalitat ent-
schaffen. So gesehen, sprengt aber Kant die Bindung an clie
hait ais seinen ermoglichenden Grnnd das Zugleich in sich,
Einbildungskraft und damit an clie Zeit und vollzieht den
das den Kern der Ewigkeit ausmacht, von dem sich erst
Schritt in die von allen sinnlichen und damit zeitlichen
die Dauer ohue Anfang. und ohne Ende herleitet. Das Sein
Bindungen befreite Vernunft hinein, was dem Eintreten in
ist in der Temporalitat mit ihrem Noch-nicht der Zukunft
das Ewige gleichkommt. Die Bestatigung dafUr bietet die
und ihrem Nicht-mehr der Vergangenheit wesentlich dem
Nicht-sein unterworfen und damit sich selbst entfremdet;
45. A 115-128. «Also bezieht sich die transzendentale Einheit der allein in dem alles Nicht-sein übersteigenden und damit alles
Apperzeption auf die reine Synthesis der Einbildungskraft aIs eine
Bedingung a priori der Mëglichkeit aller Zusarnmensetzung des Man-
nigfaltigen in eiDer Erkenntnis» (A 118). 49. Vg!. Anm. 2 und 36.
46. So Heidegger in dem Anm. 1 genannten Buch.
47. Vgl. den letzten Satz von Sein und Zeit : «Offenbart sich die 50. Oben S. 10.
51. Zeit und Sein (Anm. 39), 14-16.
Zeit selbst aIs Horizont des Seins?» (437). 52. Protokoll (Anm. 38), 44.
48. Dazu vg!. Anm. 39.
236 JOHANNES B. LOTZ DIE OFFENBARKEIT DES SEINS 237

Sein umfassenden Zugleich ist das Sein ganz Sein oder ganz Sein nicht nur auf die Antwort, sondern schon auf die Frage
es selbs!. Indem wir also keineswegs aus der Temporaiitat zu verzichten.
aussteigen, sondern sie bis zu ihrem eigenen inneren Ende Vnsere gesamten Dariegungen überblickend stellen wir
durch-führen, werden wir durch sie selbst über sie hinaus- zu fest : wie Kant bezügIich des Seins durch Heidegger über-
der Ewigkeit hin-geführt, die erst dem Sein ganz gemass oder wunden wird, so ist bezügIich der Zeit auch Heidegger durch
in der erst das Sein ganz es selbst istS3 • Demnach nillt die bis Heidegger zu überwinden. Für die Philosophie der Zukunft
zum letzten ernstgenommene GeschichtUchkeit des Seins mit giit es, auf diesem Wege, ohne in die Heidegger vorausge-
dessen Uebergeschichtlichkeit zusammen. Weil Heidegger hende Seinsvergessenheit zurückzufalIen, weiter voranzu-
diesen Schritt nicht mitvollzieht, bleibt für ihn das Sein- schreiten.
seIbst ungreifbar, wobei es sich jedoch zugleich aIs das un-
greifbare in seinem Denken behauptet.
Hierin ist eine letzte Folgerung vorgezeichne!. Das dem
Seienden innewohnende geschichtlich-zeitIiche Sein ist zuin-
nerst bereits das übergeschichtlich-ewige Sein. In dieser Aus-
pragung ist das Sein zugleich es selbst und nicht es selbst
oder Iiegt es mit sich selbst im Widerstreit. Dieser steigert
sich zu einem das Sein zerstorenden Widerspruch, wenn das
J a und das N ein dieselbe Ebene oder dieselbe Tiefe betreffen
oder mit derselben N otwendigkeit zum Sein gehoren. Das
trifft aber genau zu, solange das dem Seienden innewohnende
Sein aIs dessen einzig mogliche Verwirklichung angesetzt
wird. Veber diese Annahme treibt jedoch gerade der dro-
hende Widerspruch hinaus, der nur dadurch vermieden wer-
den kann, dass wir zu dem das Seiende trauszendierenden
oder zum transzendenten Sein aufsteigen. Damit gehûrt nlim-
Iich das übergeschichtlich-ewige Geprage zum ureigenen Wesen
und folglich mit absolutcr Notwendigkeit zum Sein, wahrend
sein geschichtlich-zeitliches Geprage zu jenem Wesen hin-
zutritt, und zwar allein insoweit, wie sich das Sein in Freiheit
dem Seienden mitteilen will. Weil aber das geschichtIich
mitgeteilte oder immanente Sein wahrhaft Sein ist, tragt es
die übergeschichtliche Tiefe in sich, die auf das ewige trans,
zendente oder subsistierende Sein aIs ihren ermëgIichenden
Grund verweist54 • Dadurch, dass für Heidegger das Sein-
selbst ungreifbar bleibt, ist er geneigt, beim subsistierenden

53. Durchgeführt an den Anm. 40 genannten Stellen.


54. Naheres bietet das Kapitel über metaphysische Erfahtung in
dem Anm. 28 genannten Buch (149-241).
9
TOM ROCKMORE

LE KANT DE HEIDEGGER

Remarques sur l'anthropologie philosophique

Il convient, en rendant hommage au Père Régnier, d'attirer


l'attention sur le rapport entre deux penseurs importants car
depuis longtemps déjà celni-ci s'est toujours occupé, dans
un monde philosophique de plus en plus fragmenté, de veiller
en quelque sorte à ce que le dialogue coutinue ou, à défaut,
s'instaure. Or, il est indéniable que la lecture heideggerienne
de Kant marque une étape importante dans la compréhension
de la philosophie critique. Sévère à l'égard des néo-kantiens,
auxquels Heidegger reproche de trop souliguer la théorie de
la connaissance, et dont il nie l'existence même chez Kant,
il met aussi l'accent sur le rôle joué par l'imagination trans-
cendantale dans la «Critique de la Raison Pure».
Cette lecture de Kant pourrait s'examiner à plusieurs chefs,
par exemple, pour éclaircir le rapport, toujours mal compris,
de Heidegger à Husserl, auquel il dédia son ouvrage le plus
important. Comme chacun des deux, tout en jetant les bases
de sa propre pensée, s'est servi de la pensée kantienne, celle-
là pourrait aider à comprendre le rapport de ceux-ci. Or,
but plus modeste, on pourrait utiliser la lecture heideggerienne
de Kant, ce que je m'efforcerai de faire ici, pour éclairer sa
propre position. Comme nous le verrons tout à l'heure, en
dépit de la valeur de son interprétation, en fin de compte,
il s'agit peut-être moins d'une lecture de la pensée kantienne
par Heidegger que d'une rencontre entre deux philosophes.
Cette cliscussion portera donc essentiellement sur le rap-
TOM ROCKMORE LE KANT DE HEIDEGGER 241
240
port de Heidegger à Kant en fonction de so~ interprétatic:n ger pour mieux tenir à un inlage de l'auteur de la philosophie
de la pensée de ce dernier. Compte tenu de 1 espace dont ]e critique qni lni était plus familière ainsi qu'à d'autres cher-
dispose, je ne traiterai qu'un seul des aspects, à savoir la cheurs dans ce domaine. Or, comme le travail de rééquili-
dimension anthropologique. Or, ceci dit, je n'ignore pas que bration a déjà été fait, et comme les mérites de la lecture
la lecture heideggerienne de Kant a déjà fait l'objet d'une heideggerienne sont bien connus déjà, il n'y a pas lieu à y
discussion dans la littérature, où. la réaction a été rapide, revenir. Au contraire, je voudrais ici surtout mettre en vi-
mais pas toujours favorable. Pour commencer, je me propose gueur un conseil de Heidegger, qui ressort des débats à
de prendre à titre de témoin la réaction de Ernst Cassirer, Davos. Selon le compte rendu, dans la dernière phrase Hei-
un des plus grands spécialistes de Kant de ce siècle. Sa réac- degger dit en partie qu'en ce qui concerne l'histoire de la
tion traduit bien le souci de rétablir l'ordre dans le kantisme philosophie il intporte de «se libérer de la différence des
après le passage de l'ouragan heideggerien. Car dans les positions et des points de vue» car «c'est justement la dif-
études kantiennes, comme dans l'histoire de l'ontologie en férenciation des points de vue qui est la racine du travail
général, Heidegger préféra semer la destruction immédiate philosophique ,2. Autrement dit, je voudrais poser la signi-
et quasiment totale plutôt que de participer au travail patient fication des différences qni paraissent à un nivean général
d'interprétation. entre la position de Heidegger et celle de Kant en reprenant
la dimension anthropologique de son interprétation de la
Le livre de Heidegger sur Kant, dont l'Avant-Propos de
philosophie critique.
la première édition est daté de la Pentecôte 1929, a paru
à l'automne de la même année. Quelques mois avant sa Or, il n'y a pas de lecture innocente. Chaque lecture, aussi
parution, un entretien à Davos opposa Heidegger à Ernst fidèle soit-elle, renferme toujours un parti pris, un angle de
Cassirer. Par la suite, Cassirer développa et, sans rien en vision, un penchant dont il faudrait tâcher de se rendre
retrancher, nuança sa première réaction dans une récension compte afin d'en évaluer l'intportance. Le problème hermé-
du livre' publiée deux ans plus tard. Dans la récension, tout ?e~tique,. qui est actuellement à la mode, a été surtout porté
en applaudissant la précision et la clarté de l'analyse heideg- a 1 attentIOn par les travaux de Gadamer et de Heidegger,
gerienne du chapitre sur le schématisme, Cassirer reproche à tous deux s'appuyant sur Dilthey. Pourtaut ses racines re-
Heidegger d'avoir donné trop de poids à cette dintension, montent plus loin, d'nne part jusqu'à l'exégèse biblique et
voire d'avoir volontairement déformé la pensée kantieune, d'autre part jusqu'à l'antiqnité grecque, surtout à Aristote,
en voulant en quelque sorte rendre tout à fait central ce qui qui a écrit un traité bien connu à ce sujet. Autant dire qu'il
n'est qu'une dimension intportante. ne peut pas être question de formuler ici une théorie d'her-
méneutique générale, même en abrégé.
Le rappel à l'ordre cassirien, bien entendu, peut se dis-
Néanmoins, je crois qu'il serait utile de distinguer trois
cuter quant aux détails et on peut ne pas être d'accord sur
formes de lecture, du reste le plus souvent reliées entre elles
le fond. Mais il trahit bien le désir d'un grand connaisseur
et de ce fait rarement présentes à l'état pur. Une approche,
de Kant qui, à force de travailler patiemment, avait réussi
qui répond à une intention répandue, consiste en un effort
à recouvrir l'architectonique kantienne d'un édifice interpré-
d'élucider, ou de tirer au clair tant bien que mal, la pensée
tatif, dans lequel il préférait faire rentrer la lecture heideg-
d'un texte, sans rien y ajouter, en se cantonnant strictement
gerienne pour y trouver sa place plutôt que de tout laisser
en dedans des limites plus ou moins explicitement précisées
bouleverser. Dans un sens Cassirer récuse le Kant de Heideg-
dans l'écrit en question. Ici on ne cherche pas à déceler ce
1. «Kant und das Problem der Metaphysik. Bemerkungen zu
Martin Heideggers Kant-Interpretation », in Kant-Studien, XXXVI 2. Ernst Cassirer et Martin Heidegger. Débat sur le kantisme et la
(1931), p. 1-26. philosophie.
,

l'ri
242 TOM ROCKMORE LE KANT DE HEIDEGGER 243

qu'on aurait dft dire, mais ce qU'?n a, dit, .et de mê~e on le livre sur Kant, dont la date de parution en 1929 a déjà
n'essaie pas de développer ce qm a eté dit plus lom que été évoquée ci-dessus, donc après l'autre livre, avait précé-
le stade actuel dont témoigne l'écrit. Une autre forme de demment fait l'objet de trois séminaires avant la publication
lecture consiste pourtant en une tenta~ive d'amelier à terme l~ de «l'Etre et le Temps» : pendant le semestre d'automne
pensée d'un auteur qui pour nne nuson ou une autre a du de 1925-1926, plus tard à l'Institut Herder à Riga en sep-
s'arrêter avant le but qu'elle s'était fixé, soit parce que son tembre 1928, et enfin à Davos en mars 1929.
auteur n'a pas complètement compris le sens de sa propre
démarche ou pour tout autre mobile. Enfin, il Y a une autre Une deuxième et différente sorte d'indication provient du
forme de lecture où nu auteur se sert de la pensée d'un autre rapport entre ces deux livres qui ne se chevauchent pas seule-
principalement, sinon exclusivement, pour faire progresser ment dans le temps, mais aussi et surtout en ce qui concerne
leurs contenus respectifs. La dernière partie du livre snr
la sienne.
Kant, par exemple, concerne principalement, sinon uuique-
D'emblée, on s'aperçoit qu'en dépit du sérieux d~ l'ana: ment, la problématique déjà discutée dans l'autre livre à tel
lyse à laquelle Heidegger soumet le système kantien, ou point que, à partir du paragraphe 43, et même plus tôt, elle
la précision et l'examen détaillé de passages cl~f~, sont lar- nous livre un bon exposé de ses lignes générales. En revanche,
gement en évidence, sa lecture relève de la trolsleme ~orte beaucoup de thèmes, et même l'analyse explicite de Kant
que je viens d'identifier. Disons-le en toute clarté : Heideg- daos les mêmes termes, se trouvent déjà en forme condensée
ger se sert de la pensée kantienne, qu'il discute de p~ès dans dans le premier livre. C'est le cas surtout au paragraphe 6,
ce livre, non pas seulement pour la comprendre,. bien que en~roit stratégique en «l'Etre et le Temps» s'il y en a, où
ce motif ne fasse jamais entièrement défaut, malS surtout Heidegger évoque pour la première fois ce qui sera désormais
afin, en s'appuyant sur elle, de fonder sa propr~ pensée. ~ans un des courants principaux de sa pensée, à savoir la destruc-
sa présentation des textes du débat entre Cassirer et Heideg- tion de l'histoire de l'ontologie. Autrement dit, le contenu
ger, Monsieur Aubenque, qui, à mon avis,. ne réussit pas to~t de chaque livre est imbriqué directement dans celui de l'autre
à fait à cacher sa sympathie pour ce dermer, a pourtant :"1- jusqu'à ne pas pouvoir s'en séparer, ce qui pourrait mettre
son quand il écrit ce qui pourrait aussi se dire pour le hvre en question toute tentative de les interpréter de façon isolée.
sur Kant : «Ce ~ue montre tout au plus la discussion de
Davos, c'est que le problème du schématisme, qui oc~upe la Il y a, troisièmement, les quelqnes remarques faites par
plus grande partie du livre sur Kant, n'est pour Heidegger Heidegger au cours de son interprétation, et qui semblent
qu'un moment dans nue entreprise plus générale, qui est la indiquer que, dans son livre, la violence faite au système
fondation de la métaphysique ... ,,'. kantien, une violence souvent évoquée par les commenta-
teurs, tel Cassirer, est inévitable et même nécessaire. Ainsi,
Le bien-fondé de l'identification de l'interprétation hei- dans l'Avant-Propos écrit pour la deuxième édition, daté
deggerienne de Kant à la création de sa propre pensée se de juin 1950, il reconnaît l'existence d'erreurs d'interpréta-
laisse facilement démontrer. Ici il Y a trois sortes d'indication. tion que l'on peut, dit-il, toujours reprocher à toute tentative
n y a, premièrement, les circonstances entourant ~a ,comp~­ de mettre en chemin un dialogne entre penseurs. En plus,
sition du livre sur Kant, qui font qn'il précède et smt. a la fOlS au paragraphe 35, Heidegger nous informe que le but de
la parution de «l'Etre et le Temps». Or, ce dermer, dont son livre est de tirer au clair ce que Kant «voulait dire»,
la Préface à la première édition est datée du 8 avril 1926, c'est-à-dire l'impensé chez Kant. Ensuite, dans le même en-
parut pour la première fois au printemps de 1927. Par contre, droit et, un peu plus loin, dans la courte Introduction qui
ouvre la quatrième partie, il est question de la répétition
3. Op. Cil., p. 13. selon laquelle on découvrirait, voire réaliserait, toutes les
LE KANT DE HEIDEGGER 245
244 TOM ROCKMORE

possibilités inhérentes dans nne problématiqne donnée, en structure ontologique, sujet de la metaphysica generalis,
terme qui chez lui recouvre exactement l'ontologie, Heideg-
l'occurrence celle de Kant.
ger affirme que le but de ce livre est de comprendre les
Il est évident de ce qui a été dit, qu'il y a de la violence conditions de la possibilité de la connaissance ontique à tra-
dans l'interprét~tion heideggerienne de Kant, c.e do~t l:au- vers celle de la possibilité ontologique. Autrement dit, la
teur est même conscient. Cette violence ne proVIent fil dune «Critique de la Raison Pure» s'occupe de l'ontologie et
inattentiou ui d'uu manque de compréhensiou, mais plutôt non pas de la théorie de la connaissance. Comme il s'agit
du but visé à savoir de faire commencer un dialogue entre de la pensée humaine, qui est fiuie, il est nécessaire d'en
l'interprète 'et celui dont la pensée est int,erprétée. Mai.s cette dégager ses caractéristiques fondamentales, tout en se rap-
approche herméneutique n'est pas forcement la me;!leure. pelant son statut métaphysique et non pas psychologique.
En effet il faudrait se demander en quelle mesure, s Il faut Or, la connaissance humaine se compose de la sensibilité
nécessai;ement au cours de la lecture, faire violence au sys- et de l'entendement, deux capacités dont l'uuité repose en
tème qu'on s';fforce d'interpréter, il serait néanmoins pos- l'imagination transcendantale qui les sous-tend. Ce sujet est
sible ainsi de penser un impensé qui lui appartient afin de discuté dans le chapitre fameux, mais difficile, sur le schéma-
réaliser sa problématique? Car, si l'interprét~tion qu'on fait tisme. Pourtant Kant a dû reculer devant sa conception de
subir à un texte afin de commencer le dialogue a pour l'imagination transcendantale, car elle impliquait la destruc-
résultat nécessaire qu'on le mutile, ou même qu'on y substi- tion de la métaphysique occidentale. Pour reprendre la pro-
tue une autre problématique, la justification ne peut. pas ,être blématique kantienne, il faudrait s'efforcer de penser le
une vraie rencontre de deux pensées car au mOIns 1 une concept de l'homme se dirigeant de par sa nature vers la
d'entre elles paraîtra sous une optique qui n'est pas la sienne. possibilité de la métaphysique, mais à un uiveau antérieur
Pour discuter de la lecture heideggerienne de Kant, il va à toute science positive, y compris l'anthropologie philoso-
falloir la résumer brièvement afin d'en isoler la dimension phique.
anthropologique. Mais avant même de commencer, une re- La valeur de l'interprétation proposée est incontestable,
marque me semble s'imposer. On a voulu prétendre que il va sans dire, mais il ne saurait pas en être question ici.
l'exposé que Heidegger fit lors de la discussio." ~e Davos Au contraire, suivant le conseil de penser la différence, je
dépasse le point de vue de son livre,. rendant ~msl cad.uque voudrais tout de suite m'occuper de la différenciation de ces
la critique du prétendu anthropologmme k~tien. CecI ,"'e deux points de vue, il savoir ceux de Kant et de Heidegger.
semble improbable dans la mesure ?ù le .debat. en questIOn Bien que Cassirer ait raison de souliguer le caractère néo-
eut lieu après que l'Avant-Propos fut ~C~lt, malS avant .q~e kantien du système heideggerien, il serait malaisé de confon-
le livre ne paraisse, donc presque aussilot que fut termmee dre ce système avec celui de Kant si on ne doit pas prendre
la rédaction du manuscrit. Quoi qu'il en soit, cet exposé, ses désirs, c'est-à-dire ceux de Heidegger, pour la réalité.
dont le texte a été vraisemblablement corrigé par le confé- En effet, en dépit de sa propre croyauce de prolouger et de
rencier avant de paraître', comporte l'ava.nt~ge considé:able mener à bien la problématique kantienue, et en dépit aussi
de nous proposer une image synthétique qUi n est pas touJours d'une continuité certaine, il y a néanmoins une rupture évi-
facile à dégager dans un livre où les détails abondeut. dente entre les deux pensées. Essayons maintenant de cerner,
Résumons maintenant en restant près du langage heideg- du moins en partie, ce qui les sépare, en nous limitant volon-
gerien. Distinguant entre la connaissance de .l'étant, dont tiers au thème de l'anthropologie dans le système kantien
s'occupe la metaphysica specialis, et la connaissance de la ainsi que son interprétation par Heidegger.
L'anthropologie kantienne est d'une interprétation délicate,
car mal connue. Dans une époque où les études kantiennes
4. Davoser Revue, IV, p. 194~198.
TOM ROCKMORE LE KANT DE HEIDEGGER 247
246

ont pris des proportions quasiment industrielles, et où chaque dante. Selon Kant, la possibilité même de la connaissance
aspect est étudié de près en se servant même de l'ordinateur, exige que le sujet produise ce qu'il connaît selon ses propres
le livre tardif où Kant discute explicitement de l'anthropo- règles afin de ponvoir le connaître. Ainsi l'objet n'est plus
logie ne fait pas souvent l'objet d'une discussion approfondie. indépe~dant, mais dépend de celni qni le connaît, bien que
Il est donc significatif à cet égard que Heidegger, dont les la vrale nature de cette dépendance soit difficile à saisir.
connaissances philosophiques sont admirables, quoi qu'on ~e même, le sujet n'est plus un simple spectateur, mais de-
peuse de ses interprétations, semble s'appuyer sur les résul- vient un acteur, quoique le caractère de son activité reste
tats d'une thèse de doctorat récente. En plus, il importe de forcément caché dans les profondeurs de l'âme humaine.
souligner que le côté anthropologique de la pensée kantienne Bien entendu, on peut ne pas être d'accord avec la révo-
n'est pas cantonné au livre dont s'occupe Heidegger presque lution opérée par Kant dans la théorie de la connaissance.
exclusivement, c'est-à-dire de la «Critique de la Raison A partir de Fichte, tous les épigones kantiens crurent que
Pure». En fait, le courant anthropologique est primordial Kant n'était pas allé suffisa=ent loin et tons essayèrent
chez Kant, et traverse toute sa pensée d'un bout à l'autre. de radicaliser encore davantage la philosophie critique. On
En effet, la dimension anthropologique se laisse aperce- peut aussi récuser cette tentative de renversement, ce qui
voir à plusieurs reprises dans le système kantien, sous pins se fait actuellement dans la philosophie anglo-saxonne, qni
d'une forme, et à des niveaux différents. Or, il ne peut pas est, de par sa nature, foncièrement anti-idéaIiste. On y parle
être question ici de tenter de constituer une seuIe doctrine beaucoup de Kant, mais en fait on se rattache étroitement
anthropologique kantienne des éléments qui ne sont peut- aux penseurs qui évitent les retombées de la « Critique de la
être pas conciliables entre eux. Mais il importe de les iden- Raison Pure », comme Moore et Wittgenstein, Russell et
tifier afin de mesurer la portée de la critique souIevée par Austin. Par contre, Heidegger, qui est peut-être allergique
Heidegger dans ce domaine afin de pouvoir se rendre compte à l'idée de la révolution sous toutes ses formes, ne parle
si la greffe de doctrine que Heidegger voudrait faire subir gnère de cette phase de la pensée kantienne. Mais je ne vois
à ce système va dans le même sens que la philosophie kan- absolument pas co=ent quelqu'un qui voudrait nier un
caractère épistémologique à la « Critique de la Raison Pure»
tienne.
puisse ne pas discuter à fond d'un passage où tous les com-
Un endroit où le souci anthropologique fait jour chez Kant
mentateurs sont d'accord pour y reconnaître un caractère
est dans la très célèbre Révolution Copernicienne. Or, cette
épistémologique très profond. Ceci est d'autant plus surpre-
Révolution Copernicienne est en fait une vraie révolution
nant que par ailleurs Heidegger se livre à des analyses fouil-
philosophique dont on n'a toujours pas, à mon avis, tiré
lées, par exemple en ce qui concerne les différences entre la
toutes les conséquences. Par la snite, l'effort déployé par
première et la deuxième édition, ainsi que ses remarques
Kant pour relativiser le rapport sujet/objet, qui relie des
concernant l'Opus Posthumum, pour ne pas parler de la lec-
penseurs aussi disparates que Fichte et Marx, Schelling et
ture détaillée à laquelle il soumet le chapitre sur le schéma-
Schopenhauer, se prolonge tout au long de l'idéalisme alle-
tisme.
mand qui s'ensuit, et dont il constitue un des fils conducteurs
ainsi qu'une aide précieuse à son interprétation. Or, il se peut Compte tenu de ses intentions, cet aspect de la lecture
que, ainsi que Heidegger le laisse entendre, Kant n'ait pas heideggerienne, il faut le dire, est assez décevant. En revan-
compris le sens de sa propre démarche philosophique. Ton- che, Heidegger nous propose, au moins à deux reprises, son
jours est-il que le but avoué de ce passage est de renverser interprétation d'autres dimensions de l'anthropologie kan-
l'ordre établi entre le sujet et l'objet de la connaissance, un tienne. Ainsi, au début de la troisième partie (paragraphe 27),
ordre rendu explicite surtout dans la philosophie cartésienne nous trouvons un bon résumé de l'exposé sur l'imagination
où le sujet passif s'efforce de connaître une réalité indépen- dans «l'Anthropologie» de Kant. Ici il est dit que l'anthro-
248 TOM ROCKMORE LE KANT DE HEIDEGGER 249

pologie kantienne est donblement empirique,'et'1'arce' que le système kantien d'anthropologisme, pourvu que nous com-
la discussion que Kant en donne se meut au niveau de l'expé- prenions ce que cela implique dans le contexte de la philo-
rience ordinaire, et parce que Kant n'y étudie les facultés sophie critique. De même que Husserl, surtout dans les «Re-
de l'âme qu'avec l'intention de comprendre leurs rapports cherches Logiques», récuse le psychologisme sous toutes ses
aux choses expérientielles. Par contre, selon Heidegger, il formes, de même Heidegger s'oppose à toute tentative de
est inutile de vouloir saisir le rôle ontologique de l'imagina- fonder la métaphysique dans une anthropologie philosophique
tion. Ensuite, au début de la dernière partie (paragraphes 36- qui, n'étant pas pure, est donc empirique. C'est bien pour
37), Heidegger évoque brièvement les trois questions posées cette raison qu'il se propose de suppléer l'analyse kantienne
dans la «Critique de la Raison PUre », auxquelles Kant par sa propre analyse du Dasein (Daseinanalytik), Mais avant
ajouta plus tard, dans sa « Logique >, la question fondamen- de vouloir combler une lacune théorique, il faudrait bien se
tale, qu'est-ce que l'homme? Heidegger, citation à l'appui, demander si lacune il y a. En l'occurrence, il me semble que
cède volontiers que c'est la quatrième question qui prime. Heidegger voudrait surtout substituer l'analyse du Dasein
Mais il affirme, par contre, que l'anthropologie kantienne est pour l'anthropologie kantienne parce qu'il ne comprend pas
empirique et que, de toute façon, une anthropologie philo- en quelle mesure celle-là n'est justement pas empirique mais
sophique ne peut pas fonder la métaphysique. transcendantale ou, pour employer son terme, pure.
Le résumé heideggerien, me parait-il, n'est pas satisfaisant, Pour comprendre en quel sens l'anthropologie kantienne
car trop incomplet. Kant était parmi les premiers, sinon le n'est pas seulement nne étude empirique, il ne sera pas inutile
tout premier, à enseigner l'anthropologie à la faculté en Alle- de se rappeler ici certaines vérités premières de la philosophie
magne, ce qu'il a fait pendant plus de vingt ans avant de kantienne, qui, justement parce qu'elles sont bien connues
rédiger et de publier ses cours. Que son livre soit riche en de tous, comme dirait Hegel, ne sont pas toujours reconnues.
détails empiriques, personne ne le nie à ma connaissance. Comme tout le monde sait, la philosophie kantienne com-
Mais il y a aussi un autre côté, également important, qui prend et un réalisme empirique et un idéalisme transcen-
semble se dérober au regard heideggerien. En allemand, le dantal. Ce donble statut se voit, par exemple, au niveau de
titre de ce livre est «Anthropologie im pragmatischer Hin- la déduction transcendantale, dont la première version part
sicht ». De même, dès la première page de la Préface, Kant de l'entendement pour arriver à l'intuition et la seconde em-
attire l'attention sur une distinction, fondamentale d'ailleurs prunte le même chemin en sens inverse. Si maintenant nous
pour la compréhension de toute sa pensée et non seulement laissons de côté la première forme de la déduction, qui pose
dans sa dimension anthropologique, entre l'étude de ce que des problèmes d'interprétation difficiles dont la résolution
la nature fait de l'homme et celle de ce que l'homme fait, n'est pas nécessaire ici, nons ponvons voir que la seconde
pourrait faire, et devrait faire de lui-même en tant qu'être forme de la déduction remonte d'nn donné expérientiel pour
libre (freihandelndes Wesen), c'est-à-dire le côté pragmatique. découvrir la faculté qui le rend possible. Autrement dit, l'ar-
C'est bien ce qu'est l'homme qui apparaît sur le plan empi- gumentation est à la fois empirique et transcendantale, empi-
rique, tandis que ce que fait l'homme de lui-même, ne s'y rique car elle prend racine dans un donné de l'expérience,
rencontre qu'indirectement dans la mesure où son activité et transcendantale car elle remonte de façon régressive pour
libre sous-tend et donc en quelque sorte rend possible le en découvrir la possibilité.
niveau phénoménal. En ne s'apercevant pas de la dimension Nous pouvons voir, par analogie, dans l'anthropologie
active et donc anti-cartésienne du sujet kantien, Heidegger kantienne, une tentative empirique et transcendantale de
passe à côté d'un des principaux apports du système kantien comprendre l'homme à travers ce qu'il fait librement, à sa-
et de sa principale nouveauté sur le plan anthropologique. voir les formes d'activité qni aboutissent en ses connaissances
Pourtaut, dans un certain sens, Heidegger a raison de taxer pures et pratiques. Ainsi, partant du fait de l'existence des
LE KANT DE HEIDEGGER 251
TOM ROCKMORE
250
connaissances scientifiques et mathématiques, ce dont. il n'a En effet, au lieu de reprendre l'anthropologie kantienne
jamais douté, dans la première «Critique», ~ant eSSaie d'en en essayant de la sortir de son impasse conceptuelle, Heideg-
comprendre leur possibilité de façon régres~l~e, notamm.en~ ger se propose de la remplacer par sa propre théorie du
en invoquantle concept d'nn jugement synthetiqne et a pnon Dasein. En dépit de ce que pense Kant, le problème de
ainsi que la Révolution Copernicienne. pe mêm~,. ~n sa l'ess~nce de l:homme ne ,relève pas de l'anthropologie philo-

deuxième «Critique », ayant déjà prouve l~ posslb1l!té d~ sophique, malS de la metaphysique du Dasein. Cette méta-
la raison pure, Kant démontre celle de la raison prati~~.e a physique n'est pas une fin en soi, mais constitue le moyen
l'aide de l'impératif catégorial.. Finalem~nt, dans .la troJSlè~e choisi pour éclaircir le problème de l'Etre en tant que tel,
«Critique », Kant s'efforce, vamement a mon aVIS, de conCI- à distinguer de l'étant. L'intérêt même du problème de la
lier les deux facultés ainsi mises au jour, après avoir avoué finitude humaine réside en ce qu'il rend possible la compré-
la faiblesse d'une tentative ultérieure de subordiuer la rai- hension de l'Etre (paragraphe 42). Mais il ne faudrait pas
c~n.fondre une telle analyse avec celle qni s'occupe de «l'ex-
son pure à la raison pratique, en pro~osant de .les fonder
en la faculté de juger. li Y a donc tout lieu de crOire que, au penence» ou des «facultés humaines», ce qui laisse sup-
lieu de se confiner à une simple étude de ce qu'est l'honune, poser une anthropologie philosophique da1JS le style kantieu.
Kant essaie de tenir un double pari: à savoir, de comprendre Au contraire, on ne peut venir aux prises avec la finitude du
la possibilité de la connaissance à travers une conception de Dasein qu'à travers une étude approfondie de l'existence de
l'honune qui en est le sujet, et de c?mpr:~dre. encor~ ce tous les jours (Alltiiglichkeit), dont l'exposé le plus complet
qu'est l'honune en fonction des facultes qu Il dOit posse~er se trouve en «L'Etre et le Temps».
obligatoirement afin que les différentes fonnes de connaiS- A Heidegger revient le droit absolu de définir le sens de
sances soient réellement possibles. ses propres recherches. Mais du moment où il prétend, ce qui
Il n'y a rien d'extraordinaire dans cette f~çon d'~terpr.éte.r est le cas pour l'analyse du Dasein, mener à bien la problé-
la démarche kantienne, qui a souvent éte compnse amsl. matique kantieune, car il est question à cet égard d'une répé-
Fichte, par exemple, qui est probablement le plus grand, de tition dans le sens technique qu'il accorde à ce mot, il faut
tous les kantiens n'a-t-il pas essayé de résoudre le probleme se demander si le but qu'il se fixe et celui de Kant sont
posé par le rapp~rt des facultés théorique et pratiq~e en le~ identiques? Nous avons bien vu que Kant s'occupe surtout
faisant découler de l'activité, c'est-à-dire de la raiSon qUi de comprendre les conditions de la possibilité de telle ou telle
est la caractéristique propre de l'honune? Ce qui est plutôt forme d'expérience ou de connaissance, car chez lui on ne
extraordinaire, c'est que Heidegger, de même que pour la saurait distinguer entre ce qui apparaît au sujet, et est donc
Révolution Copernicienne, n'en parle presque pas, et surtout phénoménal, et ce qu'il connaît. En revanche, pour Kant,
pas en profondeur. Il ne semble donc pas comprendre en on ne peut pas aller au-delà de l'appareuce sans tomber dans
quelle mesure l'authropologie kantienne pose le. ~roblèm~ de un abus de la raison. Heidegger, par contre, ne s'intéresse
la subjectivité humaine à un niveau non-empmque, 111 en aux phénomènes que dans la mesure où ils peuvent le ren-
quelle mesure cette anthropolo~e non-empiriqu~ :s~ apte à seigner sur ce qui est justement transphénoménal, car l'Etre
fonder la connaissance en fonction de la capacite mnée de ne peut jamais être réduit aux étants. Autrement dit, il y a
l'esprit fini. Enfin, il ne s'aperçoit pas que, ~u lieu de recul~r une divergence profonde entre Kant et Heidegger car l'un
s'intéresse à l'ici-bas en tant que tel et l'autre ne s'en occupe
devant les implications de sa propre pensee, Kant les SUIt
jusqu'au bout, quitte à tomber dans l:impasse q~i ressort de que pour accéder à l'au-delà. Car, en fin de compte, même
l'impossibilité d'arriver à une conception synthétique et donc si K~nt veut limiter la raison pour faire place à la foi, sa
unie de l'honune en partant de l'étude analytique des phases pensee se meut sur le plan de la raison. Mais, au contraire,
la pensée de Heidegger, qni se veut plus rationnelle que celle
expérientielles.
TOM ROCKMORE LE KANT DE HEIDEGGER 253
252

de tous ces prédécesseurs, y compris Kant, se meut surtout propre chemin philosophique en essayant de tirer au clair
sur le plan de la ,foi. les insuffisances présumées de la pensée kantienne. Mais de
Résumons rapidement la discussion. Heidegger prétend même que personne n'oserait confondre les systèmes de
mener à bien la problématique kantienne annoncée dans la Fichte et de Kant, ui ceux de Marx et de Hegel, il ne faudrait
« Critique de la Raison Pure», en partie en y apportant son pas le faire pour Heidegger et pour Kant, même si, comme
analyse du Dasein pour suppléer aux défauts de l'autbropo- Fichte à l'égard de Kant, Heidegger prétend achever la
logie kantienne empirique. Mais Heidegger, qui apparemment problématique de la philosophie critique. Car il me paraît
n'apprécie pas le double statut empirique et transcendantal difficile pour un penseur original porté vers l'histoire de la
de cette antbropologie, qui découle de la tentative de com- philosophie d'exprimer l'originalité de sa propre pensée au-
prendre la possibilité des formes de la connaissauce pure et trement qu'en mal interprétant d'autres systèmes philoso-
pratique, et l'homme eu fonctiou de ses connaissances, ré- phiques. A cet égard, et c'est bien la leçon de cette discussion
interprète cette problématique en métaphysique eu Y substi- la lecture heideggerienne de Kant est exemplaire car, dans ~
tuant une théorie du sujet qui pose le problème de l'Etre. certain sens le caractère tendancieux du Kant de Heidegger
En conclusion, deux remarques s'imposent. Premièrement,
et la nouveauté de sa propre pensée ne font qu'un.
toute théorie de la connaissance, que ce soit de l'étant ou
de l'Etre, comporte nécessairement, ne fut-ce qu'implici~e­
ment, nue conception du sujet connaissant, et toute teutah,:,e
de tirer an clair ce sujet, par quelque mauière que ce SOIt,
relève de l'antbropologie philosophique. Heidegger, qui sem-
ble igoorer la dimeusion non-empirique, mais transcendan-
tale, de l'anthropologie kantienne, a raison de souligoer les
limites intrinsèques des sciences dites positives, comme l'an-
thropologie, la biologie et la psychologie, où le problèmo: dn
sujet n'est pas posé. En plus, il y a nue différence capItale
eutre le sujet kantien de la connaissance et le sujet heideg-
gerien de la métaphysique. Mais cette différence mise à part,
chez les deux penseurs on retrouve un souci semblable de
compreudre l'homme à travers ce qu'il fait, ce qui est bel
et bien un souci antbropologique.
Deuxièmement, sans vouloir m'ériger en interprète infail-
lible de la « Critique de la Raison Pure» et tout en admet-
tant la possibilité de plus d'uue lecture de ce texte, il faut
bien recounaître uue distinction entre le Kant de Heidegger
et celui que l'ou peut voir dans les écrits kantieus. Pourtant,
cette mécompréhension ne me paraît pas fortuite. Au con-
traire, elle me semble presque inévitable dans toute tentative,
ce qui n'est bien entendu pas nuique à Heidegger, de dia-
logoer avec un autre penseur sur pied d'égalité. En pIns de
ce qu'il nous apprend sur Kant, le livre de Heidegger nous
appreud qu'en partie, du moins, Heidegger a commencé son
JOSEF SIMON

ZUM VERHALTNIS VON DENKEN


UND ZEIT BEI KANT UND HEIDEGGER

Die These, Kant spreche «mentallstisch» von V ermogen


des menschlichen Subjekts im Sinne einer Naturanlage des
Menschen, hait sich hartnackig, und gewiss finden sich bei
Kant selbst genug FormullelUngen, die dem Vorschub leisten.
Es ware jedoch sonderbar, wenn ein Philosoph von der
Scharfsinnlgkeit Kants im Zusammenhang mit der Frage nach
der objektiven Gültigkeit synthetischer Urteile a priori und
damit nach der Wahrheitsf1ib:igkeit nnseres Denkens über-
haupt, insofern es sich in gewissen Formen der Urteilsbildung
niederschIagt, sich darauf berufen hatte, dass das erkennende
Subjekt quasi ein Ding sei, das über diese Formen verfüge.
Dies setzte ja gerade die vollzogene Erkenntnis soleh eines
Subjektdinges und damit die Mogllchkeit der Erkenntnis vor-
ans, nach der zn fragen das Thema der transzendentalen
Fragestellung erst ist.
Kausallta! ist zum Beispiel nach Kant ein reiner Verstan-
desbegriff. Anf die V orstellung Humes hin, er sei induktiv
von den Naturerscheinungen her gewonnen, wendet Kant be-
kanntlich ein, dass dieser Begriff schon an die N atur heran-
getragen sein müsse, um überhaupt Erscheinungen nach dem
Gesetz des Zusammenhangs zwischen Ursache und Wirkung
verbinden zn konnen, von denen man sonst allenfalls sagen
koune, dass sie bisher innner zusammen subjektiv wahr-
genommen worden seien, aber nicht, dass sie einen davon
unabhangigen objektiven Zusammenhang darstellten. Die
« Gewohnung» an das Zusammensein verschiedener Er-
scheinungen in der Wahrnehmung enth1ilt noch keinen Grund
256 JOSEF SIMON DENKEN UND ZEIT 257

dafür, auf deren notwendiges Zusammensein zn schliessen. nach der Hegel es daranf angelegt habe, Geschichtlichkeit
Sie enthiilt keinen Grund für die Benennung der einen ais und Zeitlichkeit mit dem Begriff einer «Veruunft in der
Ursache der anderen. Die eine ist nicht ais Ursache der Geschichte» doch wieder der sich aIs überzeitlich verstehen-
anderen gegeben, d. h. «Ursachesein» und «Wirkungsein» den Subjektivitat des Denkens unterzuordnen.
sind keine Eigenschaften, die wir an den Dingen wahruehmen, Mit Heidegger wiire nun also zu fragen, wie es um die
und diese Bestimmungen konnen auch nicht ais Relation Subjektiviüit des Denkeus bestellt ist. Unter «Subjektivitat»
zwischen zwei Erscheinungen allein dadurch an ihnen hervor- ist hierbei der Begriff yom Denken verstanden, in dem es
springen, dass wir sie immer zusammen wahrnehmen, auch sich aus der Zeit herauszuwinden versucht, wenn es sich
dann nicht, wenn dies immer in einer bestimmten zeitlichen selbst aIs Subjekt alles Zeitlichen voraus-, d.h. in einem
Abfolge geschieht. Denn die Benennung der einen ais Ursache sich verabsolutierenden Selbstbegriff aus der Zeit heraus-
der anderen bedeutet, dass diese Abfolge nicht nur immer setzt. Es unterscheidet sich im Begri!!, Subjekt zu sein,
so (gewesen) sei, sonderu dass dies notwendig so sein müsse. von den Erscheinungen «in» der Zeit, die es sich denkend
Sie impliziert nicht nur einen Wahrheitsanspruch für die ais Objekte gegenübersetzt. Die Hauptkritilc Heideggers an
gewesenen, sonderu auch fiir aile zukiinftigen Wahrueh- dem vorherrschenden Begriff des Denkeus bezieht sich dem-
mungen dieser Art. Der Begriff der Kausalitat ist demgemiiss nach. anf dieses Sichunterscheiden, in dem die Tradition die
bei Kaut - wie die anderen Kategorien - innerhalb der Grundstruktur von Bewusstsein gesehen hatte. Genau besehen
transzendentalen Reflexion als subjektive Form vorauszuset- richtet sie sich damit allerdings nicht nur gegen diesen
zen, wenn seine objelctive Gültigkeit soli gedacht werden bestimmten vorherrschenden Begriff des Denlcens von sich
konnen. Aber er ist damit noch nicht «mentalistisch» einem selbst, sonderu gegen das Vorherrschen solcher Selbstbegriffe
Subjekt-Wesen inl Sinne der Erlcenntnis eines Ding-Eigen- überhaupt, in denen sich eine Zeit epochal verabsolutiert,
schaftsverhiiltnisses zugeschrieben. Gerade von Kants Icriti- d. h. sich ihrer eigenen Zeitlichkeit zu entheben glaubt.
schem Erkenntnisbegriff her wird die Moglichkeit einer sol- Der Subjekt-Objekt-Gegensatz kommt damit ais etwas Frag-
chen Erkenntnis von Subjektivitat :lusgeschlossen. würdiges in den B1ick. In. der Tat ist es dieser Gegensatz
Heidegger stellt den Begriff des Menschen als« Subjekt » uud nicht die Voraussetzung eines Subjekts ais des InbegJiffs
mit der Bestimmung, denkendes Subjekt zu sein, grundsatz- bestimmter «Vermogen », bei dem Kant ansetzt. Mit ihm ist
lich in Frage. Er erbliclct darin eine Gebundenheit des der Punkt bezeichnet, an dem Kantisches und Heidegger-
Denkens an das metaphysische Schema der Definition, nach sches Denken sich so aufeinander beziehen, dass darin jede
dem etwas ais etwas von einer bestimmten Gattnngszugehorig- Seite in ihrer vollen Starke zur Geltung kommt. Es ist zu-
keit mit einer spezifischen Differenz gedacht wird. Er ver- gleich der Punkt, au dem sich das jeweilige Zeitverstandnis
weist demgegenüber auf den Zeitbezug des Denkens, in dem entscheidend artilculiert. Denn auch Kant entwickelt den
solche vorgegebenen Denkfiguren wie die der Metaphysik Subjekt-Objekt-Gegensatz in voiler Scharfe am Phanomen der
selbst ihre Zeit haben. Die Zeitlichkeit des Denkens wird Zeit. Es ist also zu fragen, wie Zeit bei Kant hierbei ver-
gegen dessen Selbstverabsolutierung in irgendwelchen Be- standen ist und ob der Heideggersche Einwand demgegenüber
stimmungen oder Formen gestellt, in der es sich «selbst» philosophisch weiterfülrrt.
aus der Zeit herauszustellen glaubt, indem es sich «selbst» lm Beweis des «Grundsatzes der Zeitfolge nach dem
aIs « Subjekt» des Denkens zeitlicher Erscheinungen versteht. Gesetz der Kausalitiit» geht es Kant zum Beispiel darum, ein
Den Anstoss dazu mag Nietzsche gegeben haben, und viel- Kriterium der Unterscheidung zwischen der Zeitfolge zu
leicht Iconnte man sogar schon die Hegelsche Denkfigur der benennen, in der Dinge nacheinander subjektiv wahrgenom-
Geschichtlichkeit ais Anbahnung solch eines Denkens ver- men werden, und der V orstellung einer Zeitfolge, in der sie
stehen, wenn nicht eine Hegelinterpretation vorherrschte, objektiv nacheinander seien. Wir unterscheiden in unserem
JOSEF SIMON DENKEN UND ZEIT 259
258

Zeitbewusstsein llI)11littelbar. zwischen beiden Weisen des heit unseres Denkens, sondern um Gedanken, die gedacht
Nacheinander und überhaupt zwischen Zeitbestimmungen werden, indem die genannte Unterscheidung zwischen Wahr-
des Wahrnehmens wie Dauer, N acheinander und Zugleichsein nehmungsfolgen und objektiven Zeitverhaltnissen geschieht.
und entsprechenden Zeitbestimmungen der Realitat. Ohne lhre Notwendigkeit grÜlldet in der Notwendigkeit dieser Un-
diese Unterscheidung ware zum Beispiel nicht von Gegen- terscheidung, die unmittelbar in unserem Zeitbewusstsein
standen oder Teilen von Gegenstanden zu reden, die wir erfolgt und ohne die wir überhaupt nichts von unserer Wahr-
zwar nacheinander wahrnehmen, vou denen wir aber deunoch nehmung unterscheiden oder uns aIs objektives Verhaltnis
sagen, sie seien gleichzeitig. Es fehIte die Moglichkeit der vorstellen würden. Selbst ein Raum des Zugleichseins von
Versammlung einer Wahrnehmungsfolge zu einem, d. h. in Dingen ware, wie gesagt, nicht anders vorstellbar. Es liesse·
seinen Teilen gleichzeitig seienden Gegenstand, weil wir nicht sich der Raum aIs subjektive Form des Anschauens nicht
über ein wahrgenommenes N acheinander hinans denken vom Raum aIs formale Anschauung oder aIs Gegenstand
konnten. Die Zeit selbst aIs Gefüge einer Ordnung des in ihr der Geometrie aIs einer sachhaltigen Wissenschaft unter-
oder zeitlich Existierenden konnen wir, wie Kant immer scheiden. Wir kënnten von einem Raurn, von dem wir sagen,
wieder betont, nicht wahrnehmen (Kr.d.r.V. B 225, 233, 257). dass die Dinge «in ibm» oder «ausser uns» ihre Ordnung
Also, so argumentiert Kant nun, bleiden nur reine Verstandes- hiitten, so wenig sprechen wie von einer von uns selbst aIs
begriffe ais begrililiche Fassung solch einer Unterscheidnng Subjekten unabhangigen Zeit.
übrig. So bedeutet zum Beispiel die «Anwendung» des Dass wir aber so sprechen und darin nicht nur einen Sinn,
Begrills von einem Zusammenhang zwischen Ursache und sondern den Sinn a1len Sprechens über «etwas» Seiendes
Wirkung, dass das aIs Ursache Gedachte das aIs Wirkung sehen, heisst schon, in den Kategorien zu denken. lhre
Gedachte notwendig zur Folge hat. Bestimmtheit gegeneinander, d. h. die Verschiedenheit der
Der Gedanke der Kausalitat und der Gedanke einer Unter- Bedeutungen der einzelnen Kategorien hat ihren Grund in
scheidung zwischen Wahrnehmungsfolge und objektiver Zeit- der auf Objektivitat bezogenen Unterscheidung von Zeitver-
folge sind also derselbe Gedanke. Entsprechend sind auch hiiltnissen. Deshalb nennt Kant sie auch «selbstgedachte»
der Gedanke einer Wechselwirkung zwischen Dingen und der Prinzipien. Sie werden zwar abstrakt am Leitfaden der Urteils-
Gedanke eines objektiven Zugleichseins irn Unterschied zu form aufgefunden. Aber von der Sache her drückt sich um-
einem blossen Zugleich von Wahrnehmungen derselbe Ge- gekehrt in den Urteilsformen nur das Denken aus, das in
danke. Generell kann gesagt werden, dass jeder Zeitbestim- den genannten zeitlichen Unterscheidungen seinen Ursprung
mung von GegensHinden, von denen wir sagen, sie seien « in » hat.
der Zeit und die wir damit von einer bloss subjektiven Dieser Unterscheidung ist deshalb weiter nachzufragen.
Zeitordnung unserer Wahrnehmung der Gegenstande uuter- Wir «machen» sie, aber wir müssen sie doch andererseits
scheiden, eine Kategorie des Verstandes entspricht. Das Den- offenbar gemass unserem Zeitbewusstsein notwendig machen,
ken der Zeit aIs Form objektiver Verh1iltnisse ist dasselbe und wir, machen sie zurn 13eispiel auch dann, wenn wir von
wie das Denken in einer der Kategorien der Relation. (Die uns selbst sagen, wir seien zeitlich und hatten unsere eigene
übrigen Kategorien und deren jeweilige Funktion bei der begrenzte Zeit. Wir machen sie im Denken unserer eigenen
Konstitntion objektiVer Zeitverhaltnisse sollen hier der Kürze Existenz aIs Dauer, indem wir mitdenken, dass mit dem Ende
wegen ausser Betracht bleiben.) Die Kategorien sind mithin unserer zeitlichen Existenz die Zeit selbst gleichwohl nicht
nicht «uns mit unserer Existenz zugleich eingepflanzte An- au~h6re. Selbst der Nietzschesche Gedanke einer «ewigen
lagen zum Denken», sondern «selbstgedachte erste Prin- Wlederkehr des Gleichen» ware eine Vorstellung einer von
zipien a priori unserer Erkenntnis» (B 167). Es handelt ?nserer Wahrnehmungsfolge verschiedenen Zeitfolge. Wie
sich bei ihnen nicht um irgendeine vorgegebene Beschaffen- Immer man sich «die Zeit» auch denken mag, man denkt
260 JOSEF SIMON DENKEN UND ZEIT 261

sie ais von einer blossen' Ordnung der Wahrnebmuugen ver- Synthesis überhaupt. «Synthesis überhaupt» ist nicht sinn-
schieden. Man macht diesen Unterschied schon dann, wenn liche Synthesis. Kant denkt die Leistung des Verstandes aIs
man mit dem Ansprnch auf Wahrheit sagt, eine bestimmte « reine», nicht niiher bestimmte Synthesis. Eine sinnliche
Wahrnebmnng sei vorbei und es folge ihr eine andere. Denn Synthesis der EinbiIdnngskraft ist für Kant, insofern sie
damit setzen wir auch schon nnsere Wahrnebmuugen in eine überhaupt Synthesis und damit «eine Ausübung der Spon-
objektive, von uns unabhangige Zeitordnung. taneitat ist », vom Verstand her bestimmt. Ais sinnliche ist
Diese Unterscheidung Iiegt offenbar in der Zeit selbst. sie keine «Ausübuug der Spontaneitat », sondern der Re-
In diesem Sichwenden der Zeit erhaIt nicht nur sie selbst, zeptivitiit. Sie ist assoziativ und damit ohne angebbare Regel.
sondern überhaupt alles Seiende «ReaIitat ». Wenn immer Die Vorstellung von etwas bringt, wenn der Akzent auf der
Zeit in diesem Sinne ein Urphanomen unseres Weltbezuges SiunnIichkeit Iiegt, ohne Regel die von etwas anderem mit
ist, dann folgt darans auch schon das «Selbstdenken» von sich. Sie geht ohne Kontrolle in die von etwas anderem über,
Kategorien. Sie gfÜnden in der ZeitIichkeit des Daseins. und von daher wiire überhaupt nicht zu unterscheiden, wo
Bei Kant aber bestimmt der Verstand mittels der Katego- das Wahrnehmen in blosse EinbiIdungen übergeht oder wo
rien die SinnIichkeit, deren Form die Zeit sei. Von daher ist es überhaupt bzw. immer noch Wahrnebmen von sinnIich
zu denken, dass die verschiedenen Zeitbestimmnngen wie Gegebenem ist. Für Kant garantiert allein die Spontaneitiit
Dauer, Nacheinander uud Zugleichsein Widerspiegelungen von Synthesis, dass solche Verwirrnng der Sinne durch die
der verschiedenen Relationskategorien seien und nicht UID- Nichtunterscheidbarkeit von rezeptiver SinnIichkeit und Ein-
gekehrt. Kant drückt dieses Rangverhiiltnis zwischen Denken bildungskraft nicht geschieht, denn in ihr ist das Subjekt
und Zeit bekanntIich erst in der zweiten Auflage der «Kritik stets ais Identitiit «selbst» dabei. Es erhiiIt seine Identitiit
der reinen Vernuuft» so deutIich aus. Die transzendentaie im BIick auf die Regel, an die es sich hait, und nur dadurch
Synthesis der EinbiIduugskraft, die «der subjektiven Be- passieren ihm keine assoziativen Abschweifnngen der Ein-
dingnng wegen, unter der sie allein den Verstandesbegriffen bildungskraft. Sein Ansprnch auf Objektivitat wird nicht
eine korrespondierende Anschauung geben kann, zwar zur von seiner eigenen SinnIichkeit oder passiven Natürlichkeit
Sinnlichkeit» gehiirt, wird dennoch, insofern «ihre Synthesis in Mitleidenschaft gezogen. Nur in diesem wachen Dabeisein
eine Ausübuug der Spontaneitiit ist », «eine Wirkung des ais SpontaneiHit haIt es sich in einer auf objektive Einheit
Verstandes auf die SinnIichkeit und die erste Anwendung ausgerichteten Identitiit seiner Unterscheidung zwischen sub-
desselben» genannt (B 151 f.). Kant sieht aIso den Verstand jektiver und objektiver Zeit.
auch schon bei der Ordnuug des sinnlich Gegebenen nach Der VOlTang des Verstandes sol1 dieser Unterscheidung,
Zeitverhaltnissen in der Wahrnebmung ais das Bestimmende die an sich schon im Zeitbewusstsein selbst Iiegt, ihre iden-
an. Die Ordnung des Wahrnebmens soll schon eine Vor- tische Ausrichtung geben. Von der Zeit selbst her wiire ja
ordnung für die Synthesis des Wahrgenommenen durch die noch nicht festgelegt, ob z. B. ein Nacheinander des Wahr-
Kategorien des Verstandes sein. Kant Iiegt offenbar daran, nebmens auch ais objektives Nacheinander oder vielleicht
eine solche Rangordnung herzusteIlen, obwohl andererseits ais objektives Zugleichsein beurteilt oder gedacht sein soll.
doch die objektive Gültigkeit der «Grnndsatze» aIs Prinzi- Von der Zeit selbst her ware nur vorgegeben, überhanpt
pien ffu aIle miigIiche Erfahruug sich ans der Unterscheidung die subjektive Zeit von einer objektiven zu uuterscheiden.
zwischen blosser Wahrnehmungsfolge und davon uuabhangi- In welche objektive Zeitbestimmung eine Wahrnebmungsfolge
gen, objektiven Zeitverhiiltnissen beweisen soll und damit denlcend transponiert werden soIl, muss um des Gedankens
eine eigene Ordnung des Wahrnebmens voraussetzt. der Notwendigkeit des Resultats des Denkens willen seinen
Der Grnnd für diese Ueberordnung des Verstandes Iiegt Grnnd darin haben, dass die Transpositionen so vollzogen
offenbar in dessen Bestimmuug aIs oberste Einheit von werden, dass sie insgesamt der Idee der Einheit der objektiven
262 JOSEF SIMON DENKEN UND ZEIT 263

Realitat zuarbeiten, die' mithin erst den jeweiligen Regeln Resultate seiner Umdeutungen von Wahrnehmungszeit fallen-
der Synthesis ihre Dignitat verleiht. Von dieser Idee her wer- zulassen. Mit dem BUck auf die Idee der Einheit aller ReaUtat
den die Zeitverhaltnisse der Wahrnehmungen a priori aIs erscheint ihm diese Freiheit sogar ais Notwendigkeit.
etwas bloss Subjektives gewusst, dessen Ordnung sich mog- Diese Notwendigkeit resultiert aus der eigenen Zeitlich-
Iicherweise von der der Realitat unterscheidet, so dass zum keit des Denkens oder aus dem Unterschied zwischen frühe-
Beispiel ein Nacheinander in der Wahrnehmung nur miig- rem und spaterem Denken. Der Blick auf die Idee der
licherweise auch ein objektives Nacheinander, moglicher- Einheit aller ReaUtat setzt voraus dass das Denken sich
weise aber auch ein objektives Zugleichsein ist. Um der Idee seiner früheren Akte erinnert und deren Resultate dafür
der durchgehenden Einheit der Realitat willen muss dies mitbestimmend sein liisst, ob und wie es fernere Wahrneh-
allein von der Wahrnehmung her immer offenbleiben. Es mungsfolgen zeitlich umdeuten soli, obgleich auch diese
muss ein Spielraum bleiben für die Arbeit einer reinen von früheren schon «freie» Bestinunungen objektiver Zeitver-
der Sinnlichkeit und von einer ihr zuzurechnenden Ei~bild­ haltnisse gegenüber der Wahrnehmungsfolge waren. Das
ungskraft freien Synthesis. Denken denkt sich in diesem Erinnern selbst ais Gewesenes.
Dies ist der Kantische Grundgedanke der Miiglichkeit von Kant hilft sich an diesem Punkt mit der Unterscheidung
Erfahrung aIs einer Erkenntnis aus Wahrnehmungen. Er- zwischen einem reinen Aktus «dass ich denke» und «in-
fahrnng ist nach Kant erst das, was der Verstand aus der nerer» Wahrnehmung, um nicht denken zu müssen, dass
Wahrnehmung und deren Zeitverhaltnissen in eigener Sponta- das Denken «selbst» «in» der Zeit sei. Er schafft sich
neitiit, d. h. in von Sinnlichkeit freier und insofern reiner damit das von ihm selbst allerdings nicht mehr bedachte
Spontaneitiit im Blick auf die Idee einer durchgehenden Ein- Problem, wieso das Denken denn wisse, dass es sich an
heit der ReaUtat «selbst» macht. Es fragt sich natürlich, ob « sich selbst» erinnere, wenn es auf eine übergeordnete Ein-
man sich diesem Ziel auch jederzeit « wirklich» annahert, d,ho heit im Laufe eines Verfahrens der Wendungen der Zeit zu
ob der Verstand in diesem Verstandnis überhaupt WirkUch- objektiven Zeitverhaltnissen reflektiert. Es entsteht die Frage,
keit hat. Kant nennt schon das Resultat der Verstandesarbeit wieso «innere» Wahrnehmung zeitlich auseinanderliegender
« Erkenntnis », das sich im blossen Bemiihen um solch eine Denkakte aIs Selbstwahrnehmung des in sich einen, Wahrneh-
Einheit jeweils einstellt, und allein die Kohiirenz mit früheren mungszeit kategorial umdeutenden Denkens gedacht werden
Erfahrungsurteilen kann von da aus der Massstab für die kann. Die Identitiit zwischen «innerer» Wahrnehmung und
Gültigkeit weiterer Erfahrungsurteile sein, d. h. für die wei- Selbstwahrnehmung des Denkens muss sich doch offenbar
tere Transposition von Wahrnehmungsfolgen in miiglicher- einer Synthesis verdanken, die von den zu vereinigenden und
weise anders bestimmte, objektive Zeitverhaltnisse, obwohl ais solche zeitlich auseinanderliegenden Ereignissen der
doch auch gerade die Objektivitat der früheren sich erst in « inneren» Wahrnehmung her sinnlich bedingt ist, namlich
ihrer Einordnung in spatere bewahren solI. Die reine Sponta- dadurch, dass das Denlœn im Laufe der Zeit seine IdentWit,
neitat des Denkens verliert ihren Bezug auf Sinnlichkeit viil- d.h. sich «selbst», auch insofern es nicht «dauernd» tatig
Ug, wenn die jeweilige Wendung der Zeitverhaltnisse der oder reine Spontaneitat gewesen ist, trotzdem behalten hat.
Wahrnehmung zu bestimmten objektiven Zeitverhaltnissen Eine objektiv verstandene Dauer kiinnte dem Kantischen
durch den Verstand sich allein gegenüber dem rechtfertigen Ausatz nach ja nicht die Identitiit von Denken, sondern nur
soli, wie er selbst schon zuvor Zeitverhaltnisse der Wahrneh- dessen Produkt sein.
mung zur Vorstellung objektiver Zeitverhaltnisse gewendet Kant reflektiert, wie gesagt, diese Fragen nicht mehr. Er
~atte. Bei mangelnder Koharenz zwischen seinen diesbezüg- geht davon aus, dass dem Denken seine früheren Akte offen-
lIchen Tatigkeiten behalt er in diesem Begriff seiner selbst bar in UrteiZen umnittelbar verfügbar oder gegeben sind. Er
stets die Freiheit, entweder die früheren oder die spiiteren geht damit im Grunde von der Voraussetzung einer Sinnlich-
264 JOSEF SIMON DENKEN UND ZEIT 265

keit aus, die an ihr selbst Gedanken ausdrückt und ais sie Akte im Interesse seiner Einheit beziehen kann. Das frühere
selbst darin verschwindet. Das Denken «selbst» wird damit Urteilen wird aIs irgendwie pdisent und verfügbar vorgestellt.
zu einem Denken, dass eine solche symbolische Sinnlichkeit Bei Heidegger erscheint die Sprache, generell das Verstehen
unmittelbar versteht, d. h. in dieser verstehenden Zuwendung im hermeneutischeu Sinn ais das Phlinomen, an dem diese
zur Sinniichkeit ais dem anderen seiner selbst unmittelbar Anfhebung der Zeitdifferenz geschieht.
in der Gewissheit seiner selbst bleibt. Eine den früheren lm Paralogismuskapitel legt Kant auseinander, dass aus
Gedanken für die Reflexion unmittelbar bereithaltende nnd der Tilgung der Zeit im Begritf des Snbjekts uicht auf eine·
darin symbolische Sinnlichkeit wird somit, ohne dass dies bei Unsterblichkeit der Seele zu schliessen sei. Es folge daraus
Kant selbst noch thematisch wird, in der inneren Struktur des nicht die Existenz einer denkenden Substanz, die frei davon
Denkens aber doch radikal von einer sonstigen Sinnlichkeit sei, ihrerseits ihre Zeit und Dauer zu haben. Diese Tilgung
unterschieden, die dem Denken eine Mannigfaltigkeit in zeit- ist nur « Prinzip» des Denkens. Es wirkt darin, dass voraus-
lichen Verhiiltnissen so darbietet, dass es dabei gerade nicht gesetzt werden muss dass dem Denken seine früheren Akte
denkt, diese Verhliltnisse seien unmittelbar schon die der Rea- prinzipiell in Urteilen gegenwartig sind, indem es sich mit
litlit. Die Ordnung der Symbole gilt im Unterschied zu der der dem Blick auf die Idee der Einheit aller Realitlit verstehend
« Wahrnehmungen » unmittelbar ais die der Realitlit, d. h. sie auf solche UrteiIsbiidungen zurückbezieht. Wenn einzelne
stellt schon sinnlich über besondere Zeichen sicher, wie sie dieser Akte auch inzwischen vergessen sein mogen : soweit
verstanden werden soli, vor allem, ob die Reihenfolge der sie für die stlindig herzustellende Koharenz des Denkens in
Symbole ais solche schon «von Bedentung» sein soli oder Frage kommen nnd also nicht vergessen sind, werden sie
ob und wie sie «anders» zu lesen sei. nach demselben Prinzip verstanden, nach dem überhaupt Ur-
In dieser Méiglichkeit, dass die sinnliche Foige von Wéirtern teile gebildet werden : nach dem Plinzip, dass eine in der
nur «méiglicherweise » für den Sinn massgeblich ist, d. h. im Wahrnehmung gegebene Zeitfolge nicht unbedingt auch der
unmittelbaren Verstehen grammatischer Symbole liegt mithin zeitlichen Ordnung der Dinge entspreche. In welche Ordnung
der Schlüssel dafür, dass der Verstand im Auffassen einer eine in der Wahrnehmung gegebene Ordnung denkend ge-
Sinnlichkeit aIs symbolisch unmittelbar bei sich selbst bleibt wendet wird oder welche Kategorie dazn « angewandt» wird,
und seine Identitlit über die Zeit hinweg behalten kann. Man ist vielmehr bedingt durch den Gesichtspunkt der Konstitution
kann dies «im Lanf der Zeit» so wenig lernen wie man allmiih- eines einheitlichen Bildes der Realitlit. Die früheren Urteile
lich von einer blossen Anschanung zum Denken kommen signalisieren durch ihre Bildungsform oder Grammatik, dass
kann; es ist nur aIs intellektuelles Anschauen méiglich. Hei- eine bestimmte Weise dieser Transposition bei ibrer Bildung
degger hat gesehen, dass der Sprache in der Tat eine für das « angewandt» worden war. Ais auf diese Weise festgewor-
Denken konstitutive Bedeutung znkommt und dass das trans- denes Denken bestimmen sie das spatere Denken. Sie bestim-
zendentale Selbstverstlindnis des Denkens aus innerer Notwen- men es jedoch ohue Zwang und suspendieren es somit davon,
digkeit in ein sprachliches Selbstverstlindnis übergeht. Die selbst eine Vergangenheit zn haben. Denn sie geben ihm nur
Sprache is kein Werk des Verstandes. Vielmehr ermoglicht sie zu bedenken, ob es sie, so, wie sie sind, in die herzustellende
dessen Identitlit in seinem Verhliltnis zur Zeit. lm Verstehen Identittit einbeziehen oder um der leichteren Herstellung von
von Sprache «elinnert» sich das Denken an sich «selbst», Identitlit willen fallenlassen soli : Urteile müssen, auch wenn
indem es sich verstehend auf etwas anderes ais auf sich sie der Form ibrer Bildung nach von der Foige der Wahrneh-
selbst, nlimlich auf etwas Vergangenes und mithin Zeitliches mungen abgeléist und auf die Zeitordnung von Obiekten
aIs auf vergangenes Denken bezieht. Nur darin «tilgt» es bezogen sind, nicht deshalb auch schon wahr sein. Durch
die Zeit. Bei Kant bleibt undeutlich, wie dies méiglich sein diesen Bezug erheben sie erst einen Anspruch auf Wahrheit,
kann, d. h. wie das Denken sich zeitlos auf « seine » fdtheren d. h. sie sind Urteile. Der Inhalt kann «ftilschlicherweise»
JOSEF SIMON DENKEN UND ZEIT 267
266

in dieser Fona vorgestellt sein, d. h. er kann nm einer aIs Zeit, in der das Erleben der Realisierung der Idee
durchgehenden Ein,heif des Bildes der Realitat willen ieder- standig in gleicher Weise aussteht. Das Prinzip des Denkens
zeit fallengelassen werden. In dieser bleibenden Freiheit des ist bei Kant auch nicht in der V orstellung eines Erkenntnis-
Fallenlassens um der durchgehenden Identitat willen besteht fortschrittes verzeitlicht. Es bleibt iederzeit denkbar, dass
das Prinzip der Identitat. Es besteht darin, dass das Denken das Denlcen um seiner ferneren Moglichkeit willen alles
sich bestandig dessen bewusst bleibt, dass es yom ihm « selbst- bisher Erreichte wieder fallen lassen muss. Insofern enthebt
gedachte» Prinzipien sind, durch die es sich objektive Ver- es sich gerade nicht der Zeit. Es tilgt sie nicht dadurch, dass
hilltnisse im Unterschied zu subjektiven Wahrnehmungsver- es « in » ihr gewiss sein fconnte, in Richtung auf die Idee fort-
haltnissen vorstellt, so dass es deren «Anwendung» im zuschreiten und darin seine Identitat ru bewahren. «In» ihr
bestimmten Fall iederzeit revozieren kann. ist es vielmehr des Endes aller diesbezüglichen Sorge, d. h.
Nicht das denkende Wesen, sondern das Denken in seinem seines Todes gewiss. Der Tod ist das wirklich Identische im
Prinzip ist nach Kant frei von Zeit. Es mag einem bestimmten Denken. Er ist ihm gerade dadurch bestandig gegenwartig,
denkenden Wesen nicht gelingen, sich von seinen vergangenen dass es nur in Urteilen ais gewesenen Gedanken aIs «es
Urteilen oder Vor-Urteilen um des Prinzips der Identitat selbst» für sich gegenwartig ist und es yom Wesen des
willen zu losen oder, beim Festhalten an früheren Urteilen Urteils her offen bleibt, ob und wie diese «eigenen» Urteile
ais «seinen» Akten, weitere Urteile nur so ru bilden, dass nach dem freien Prinzip des Denlcens im einzelnen ver-
sich dadurch die Idee eines durchgehenden Zusammenhangs standen, d. h. in fernere Versuche der Anniiherung an die
der Naturerscheinungen ru realisieren scheint. Insofern unter- Idee einbezogen oder ais Urteile bestehen bleiben. Von Hei-
Iiegt es «selbst» der Auflosung im Laufe der Zeit. Dies ge- deggers Denken her wird deutlich. dass das Denken nach
~chieht nach Kant dann aber nicht ihm ais Denken, sondern seinem Kantischen Begriff über kein Kriterium für die Ver-
Ihm «selbst» nur insofern, ais Denken nicht gelingt. Es ge- wirklichung seiner Idee der Wahrheit von sich aus verfügt.
schieht nicht dem Denken, sondern nur dem Wesen, insofern Der bei Kant nicht thematisch gewordene entscheidende
es, obwohl es sich normativ aIs denkendes reflektiert, nicht Punkt seines Philosophierens, das «dialektische» Bei-sich-
denkt. Die Gründe für dieses Misslingen sind demnach in der selbst-sein des Denkens im anderen seiner selbst, im gelingen-
Natur und nicht im Denlcen zu suchen, weil das Misslingen den Verstehen von Sinnlichem ais gewesenem Denken kommt
ia bedeutet, dass Denken nicht stattfindet. Und auch diese im Blick dieses Denkens zurn Vors chein.
Gründe konnen nur nach Prinzipien des Denlcens fonauliert
werden. Dem Denken aIs Prinzip kann der Kantischen
Bestimmung des Denlcens nach überhaupt nichts geschehen,
weil aile Bestimmung eines objektiven Geschehens eben nach
seinen Prinzipien zustandekommen muss.
Heidegger hebt im Begriff des «In-der-Welt-seins» her-
vor, dass mit dem so verstandenen Prinzip des Denkens
dessen Gelingen keineswegs garantiert sei. Das ist nur eine
Hervorhebung des schon bei Kant selbst Gedachten. Selbst
dann, wenn sich eine Einheit der Urteile über die Realitat
untereinander zeitweise herrustellen scheint, darf nach Kant
daraus keineswegs geschlossen werden, dass man sich 'im
Laufe der Zeit' der Idee einer solchen Einheit anniihere.
Die Zeit bleibt bestandig ais Zeit moglichen Misslingens,
Cinquième partie

HEIDEGGER

Il
HANS-GEORG GADAMER

DIE RELIGIOSE DIMENSION


IN HEIDEGGER

Die Frage nach der religiiisen Dimension in Heidegger


stellen gleicht einer Herausforderung oder mindestens einem
patadoxen Unterfangen. Man braucht nur an Jean-Paul Sar-
tre zu denken, der aIs einer seiner Bewunderer ihn geradezu
- an der Seite von Nietzsche - ais einen der reprasenta-
tiven atheistischen Denker unserer Epoche herausstelIte.
Doch miichte ich zeigen, dass ein solches Verstiindnis Hei-
deggers ais eines atheistischen Denkers nur aus einer liusser-
Iich bleibenden Aneignung seiner Philosophie herrühren
kann.
Eine ganz andere Frage ist es freilich, ob die Inanspruch-
nahme Heideggers durch die christliche Theologie berech-
tigt ist - und es geht inzwischen durch ein halbes J ahrhun"
dert, dass christliche Theologen sich auf das Denken Hei-
deggers berufen. Dass die Frage nach dem Sein, die neu zu
stellen Heideggers eigenster Auftrag war, nicht ais die Frage
nach Gott verstanden werden darf, hat Heidegger selber
unzweideutig klargemacht. Seine Stellung zur zeitgeniissi-
schen Theologie beider Konfessioner nalun im Lawe der
labre an kritischer Schlirfe mehr und mehr zu. Aber man
hat sich zu fragen, ob solche Kritik der Theologie nicht ge-
radezu bezeugt, dass «Gott » - der offenbare oder der
verborgene - für ibn kein leeres Wort war. Bekanntlich
stammte Heidegger aus einer katholischen FamiJie und wurde
in der katholischen Religion erzogen. Er besuchte das
G}'mnasium in Konstanz, das, ohne eine rein katholische
DIE RELIGIOSE DIMENSION 273
272 HANS-GEORG GADAMER

Schule zu sein, dqch in einer Landschaft lokalisiert .war, kert schrieb er seine Dissertation über die Lehre vom Ur-
in der beide christlichen Konfessionen, die kathohsche teil inI Psychologismus - seine Nebeuflicher im Examen
wie die protestantische, ein starkes kirchl~ches. Leben ha~­ waren - man rat es nicht - Mathematik und Physik ! _.
ten. Nach seiner Schulzeit trat er ais Kandldat m das NOVi- Er erwahnte diese Arbeit in einer Marburger Vorlesung mit
ziat der Jesuiten in Feldkirch (Vorarlberg) ein, das er aber den Worten «Ais ich noch Kindereien trieb». Er habili-
bald wieder verliess. Anschliessend gehorte er noch einige tierte sich mit 27 Jahren und wurde Assisteut von Rickerts
Semester dem Theologischen Konvikt in Freiburg an. Nachfolger in Freiburg, Edmund Husserl, dem Begründer
Beides, religiOses Engagement und philosophische Neigun- der Phanomenologie, von dem er die grossartige Technik
gen, waren schon im gauz jungen H?idegger stark ausge- phanomenologischer Deskription lernte. Schon in diesen
pragt. Auch in den frühen J ahren se~ner unangefoch~enen frühen Dozentenjahren hatte Heidegger einen ungewohnli-
religiosen und kirchlichen Gebundeulielt war er von lelden- chen Lehrerfolg und gewamI bald einen geradezu magischen
schaftlichen Interesse für Philosophie erfüllt. Sein Rektor Einfluss auf die Jüugeren und Gleichaltrigen, von denen
am Konstanzer Gymnasialkonvikt, der spatere Bischof Julins Ebbiughaus, Oskar Becker, Karl Lowith, Walter Broc-
von Freiburg Groeber, erkannte früh seine brillante Beg~­ ker heute bekallilte Namen sind. Das Gerücht von ibm er-
bung und seine Hingabe an Philosophie. Heidegger h~t m.lf reichte mich in Marburg, wo ich mein Doktorat vorbereitete.
einmal erzlihlt, dass ihn einer seiner Lehrer - gewiss m Studenten kamen von Freiburg und berichteten schon da-
einer langweiligen Stunde - dabei erwischte, wie er unter mais, 1920/1921, weniger von Husserl ais von Heidegger
der Bank Kants Kritik der reinen Vernuult las! Das war und seiner überaus eigenwilligen mId tiefsinIIing-revolutiona-
wohl wirklich eine Art Freipass für eine grosse geistige Zu- ren Vorlesung. Da habe er Z.B. die Wendung gebraucht :
kunft. Darum gab mm Grueber ein damais «modernes», «Es weltet ». Das war, wie wir heute erkennen, eine grossar-
ge\ehrtes, aber durchaus nicht tiefsinniges Buch. über A;ïsto- tige Antizipation seines spateren und spatesten Denkens. So
teles zum Lesen : Franz Brentanos «über die manmgfal- etwas kOmIte man damais von keinem Nenkantianer horen.
tigen Bedeutungen des Seienden bei Arist~te\es.». Diese Auch von Husserl nicht. Wo blieb denn da das transzen-
Studie entfaltete in gewisseuliafter Analyse dl~ V~elfalt der dentale Ego? Was war das überhanpt für ein Wort? Gab
Bedeutungen von Sein bei Aristoteles und bheb Jede. Ant- es das überhaupt ? Zehn Jahre, bevor Heidegger seine eigene
wort auf die Frage schuldig, wie dieselben zusammenhingen, transzendentale Selbstauffassung und seine Anlehnun~ an
und gerade das wurde für den jungen Hei~egger zu~ Inspi- Husserl in der sogenannten «Kehre» überwand, f",{'d er
ration. Heidegger hat das oft berichtet. DIe versc~ledenen hier ein erstes Wort, in dem nicht vom «Subjekt» und dem
Bedeutungen von «Sein», die Aristoteles unt~rsc~ed, for- transzendentalen «Bewusstsein überhaupt» ausgegangen
derten dazu heraus, nach mrer verborgenen Einhelt "':' fr~­ wurde, sondern da. «Ereignis» der «Lichtung» sich wie
gen, gewiss nicht im Sinne einer Systematisierung, wle. SIC in einem Vorboten im «Welten» aussprach.
Cajetan und Suarez, die Scholastiker der GegenreformatlOn,
in den Aristotelismus zu bringen suchten. Aberdass das Wir wissen inzwischen Einiges über diese erste Phase
« Sein» nicht « Gattung» war, sowie die scholastische ~ehr.e Heideggerschen Denkens in Freiburg nach dem ersten Welt-
von der « Analogia entis », waren Motive, ~ie fortan bel.Hel- krieg. Piiggeler hat darüber berichtet, Karl Lehmarm hat in
degger ofters auftauchten - nicht ais eme ~etaph~.s1Sche einem vorzüglichen Aufsatz die Bedeutung von Paulus für
Lehre sondern ais Ausdruck einer offenen, emer drangen- den jungen Heidegger rekonstruiert, und Thomas Sheehan hat
den Frage, die zu stellen man lernen müsste : Was ist das, uns kiirzlich einen ausfiihrlichen Bericht über Heideggers
Vorlesung «Phlinomenologie der Religion» von 1920 ge-
das «Sein» ?
Heideggers Talent brachte mm schnelle Erfolge : bei Ric- ben kiimIen, die ibm aus einer Nachschrift zuganglich wurde.
DIE REUGI6SE DIMENSION 275
274 HANS-(}EOR(} (}ADAMER

Daraus sehen wif, dass es insbesondere die Zeiterfahrnng nicht die «neukantianische» Programmatik der «Ideen ».
der frühen Christengemeinde war, die Heidegger faszinierte, (von 1913) war, was er aIs Husserls Assistent im Unterricht
dieser eschatologische Augenblick, der keine «Erwartung », lehrte, sondem die «Logischen Untersuchungen», über die
kein Durchmessen und Berechnen einer ablaufenden Zeit bis Husserl selber weit hinauszusein meinte, und innerhalb der-
zur Wiederkehr Christi ist - denn er kommt «wie ein Dieb selben vor allem die sechste Untersuchung, die damaIs in
in der Nacht» (1. Thess.). Die «gemessene» Zeit, das neuer Bearbeitung erschieu. Darin hatte die Frage, was das
Rechnen mit der Zeit, und der gesamte Hintergrund der « ist» meint, einen 'Yichtigen Platz : was für ein «noeti-
griechischen Ontologie, die unseren Zeitbegriff in Philoso- scher» Akt ist es, in dem diese formale Kategorie des «ist»
phie und Wissenschaft beherrscht, versagen vor dieser Er- intendiert ist? Es war die Lehre von der «kategorialen
fahrung. Dass es hier nicht nur um eine philosophische He- Anschauung» - und gewiss auch Husserls meisterhafte
rausforderung ging, sondem um das religiose Grundanliegen Analysen zum Zeitbewusstsein (die Heidegger spater erst-
des jungen Denkers, zeigt der private Brief, den Heidegger mals herausgeben soIlte) - , was Heidegger herausforderte :
damaIs (1921) an Karl Lowith, einen seiner jungen Schü- welche minutiose analytische Kunst - und welche Sack-
1er und Freunde, schrieb. Da hiess es, es sei «ein Gruud- gasse, die von der Heidegger umtreibenden Frage des Chri-
fehler, dass Sie und Becker mich (hypothetisch oder nicht) stenglausbens noch viel weiter entfemte als Augustins be-
an Masstaben wie Nietzsche, Kierkegaard... und irgend- rühmte Verzweiflung am Begreifen des Ratsels der Zeit.
welchen schopferischen Philosophen messen. Das ist unver- Es war nicht die « idealistiche » Ausarbeitung der
wehrt - aber daun ist zu sagen, dass ich kein Philosoph «Ideen », was ·ihn anzog: da mochte er die Konsequenz
bin, und ich bilde mir nicht ein, auch nur etwas Vergleich- bewundem, mit der Husserl sich in das Themenfeld der
bares zu machen». Und dann heiss! es : «!ch bin ein trauszendentalen Snbjektivitat einarbeitete, und gewiss wur-
christlicher Theologe» ! de er dadurch gegen billige «realistische» Ausbruchsversu-
Man geht nicht fehl, weun man hier die tiefste Motiva- che im Stile der «Münchener Phanomenologie» und selbst
tion für Heideggers Denkweg erkeunt : er sieht sich - da- des damaligen Scheler gefeit. Aber das Prinzip des transzen-
maIs - als einen christlichen Theologen. Das will sagen : dentalen Ego erschien ihm von friih an verdachtig. Thomas
aIle seine Anstrengungen, mit sich und seinen eigenen Fra- Sheehan hat mir erzahlt, dass Heidegger ihm einmal seinen
gen ins Reine zu kommen, sind herausgefordert durch die Sonderdruck von Husserls Logos-Aufsatz von 1910 «Philo-
Aufgabe, sich von der herrschenden Theologie, in der er er- sophie als strenge Wissenschaft» zeigte. Da gibt es eiue
zogen war, freizumachen, um ein Christ sein zn konnen. SteIle, wo Husserl sagt : unsere Methode und unser Prinzip
Von bedeutenden Lehrem der Freiburger theologischen Fa- muss sein «Zu den Sachen selbst» ~ und da halte der
kultat erhielt er, wie er selbst berichtet hat, das Rüstzeug junge Heidegger an den Rand geschrieben : «Wir wollen
für diese «theologische» Aufgabe, und vor allem hat der Husserl beirn Wort nehmen ». Das war natürlich polemisch
junge Luther damaIs für ihn entscheidende Bedeutung ge- gemeint : Statt sich in die Lehre von der transzendentalen
wouuen. Aber dass er mit wahrer Wahlverwanstschaft auf Reduktion und die Letztbegriindung im cogito zu verstricken,
die aItesten Urkunden des Neuen Testaments, die Paulus- soIlte er dieses eigentliche Prinzip «Zu den Sachen selbst ,>
briefe, zurückging, lehrt uns die erwahnte V orlesung zur befolgen !
«Phanomenologie der Religion». Heidegger selbst fand, um selber den rechten Abstand
Es waren zwei Lehrmeister, die ibn damals mit der rech- zu Husserls transzendentalem Idealismus zu gewinnen, ohne
ten begrifflichen Schulung versahen. Da war einmal Husserls in die Naivitat eines dogmatischen Realismus zuriickzufal-
phanomenologische Meisterschaft. Bezeichnend, dass es len, einen anderen grossen Lehrmeister , AristoteIes. Zwar,
DIE RELIGWSE DIMENSION 277
276 HANS-GEORG GADAMER
in Aristoteles «praktischer Philosophie» und in seiner
einen Eideshelfer füf sein eigenstes religiôs motiviertes Fra-
« Rhetorik» greifen liess : Die Weisen des «Wahrseins»,
gen konnte er da nicht erwarten. Aber die Rückkehr des
des &;À:t]~'UELV, die im 6. Buch der Nikomachischen Ethik
phanomenologisch Geschulten zu seinen frühen Aristoteles-
erôrtert werden, hatten für Heidegger vor allem diese Be-
Studien liess ihn einen neuen Aristoteles entdecken, der
deutung, dass der Primat des Urteils, der Logik und der
ganz andere Seiten zeigte als die von der scholastischen
« Wissenschaft» für das Verstandnis der Faktizit1it des
Theologie bevorzugten. Gewiss konnte er sich nicht darü-
menschlichen Lebens an diesen Texten zu entscheidender
ber Hiuschen, dass der griechische Zeitbegriff durch die
Begrenzung gelangte. Ein ii.À.À.o yévoç yvwcr.wç harn zu
aristotelische Physik gepragt worden war und dass von da
seinem Recht, das nicht «Gegenstande» erkennt und «ob-
kein direkter Weg zur begrifflichen Klarung des eschatolo-
jektives» Wissen sein will, sondern die dem faktisch geleb-
gischen «Augenblicks» führen konnte. Aber die Nahe des
ten Dasein môgliche Helligkeit meint. So wurde neben der
aristotelischen Denkens zum faktischen Dasein in seinem
« Ethik» auch die aristotelische Rhetorik deshalb wichtig,
konkreten Lebensvollzug und in seiner natürlichen Welt-
orientiemng brachte indirekte Hilfe. In einer Reihe von weil sie von den "p&;Yl-'' ' '
und ""il1jl-'''''''
weiss - und
nicht von «Gegenstanden».
Semestem tmg Heidegger seine Studien zur aristotelischen
Ethik, Physik, Anthropologie (De anima) und zur «Rhe- Auf eine erstauuliche Weise konnte sich überdies der
torik» vor - und natürlich auch zu den zentralen Partien junge Heidegger für seine «existenzielle» Kritik am trans-
der Metaphysik. Das sollte 1923, wie er mir in einem Brief dentalen Subjekts und Objektsbegriff bei der aristote-
ankündigte, eine grosse Publikation im «Jahrbnch für Phi- lischen Kritik an Platos «Idee des Guten» Schützenhilfe
losophie und phanomenologische Forschung» werden. Dazu ver"chaffen. Wie «das Gute» nicht ein hôchstes «Objekt»
kam es dann nicht, weil ihn die U ebernahme der Professur oder «Prinzip» ist, sondern in die Vielfalt seiner Bege-
in Marburg ganz vor neue Aufgaben stellte .. Immerhin blieb gnisweisen sich differenziert, so ist auch «das Seiu» in
Aristoteles eines der Zentren seiner Marburger Lehrtatigkeit. allem, was ist, «anwesend», mag auch am Ende ein emi-
nent Seiendes stehen, das aile Anwesenheit verbürgt. Es ist
Was war es, wozu ihm Aristoteles dienen konnte? Nur
die Frage nach dem «Sein ais solchem», die Aristoteles
zur Abhebung gegen die christliche Zeiterfahrung und die
und mit ihm Heidegger zu beantworten sucht. Was Heideg-
fundamentale Rolle der Geschichtlichkeit im neueren Den-
ger in dieser Absicht an der aristotelischen Physik und Me-
ken? Nur als Gegenbild ? taphysik zum Sprechen brachte : das Sein in seiner Bewegt"
Das Gegenteil ist wahr. Aristoteles wirkte wie ein Kron- heit, das Sein in seiner Unverborgenheit, sind nicht so sehr
zeuge für den Zugang «zu den Sachen selbst» und damit Regionen von Gegenst1inden, über die Aussagen gemacht
indirekt, auch gegen seine eigene «ontologische» Vorein- werden, aIs dass sich alles Verst1indnis von «Sein» auf das
genommenheit durch das, was Heidegger spater «Sein ais der Bewegtheit und aile wahre Aussage auf die unverbor-
Vorhandenheit» nennen sollte. So wurde er ein kriti- gene Anwesenheit, arn Ende aIso auf das 5v wç &;À.1j1)éç
scher Helfer für das neue Fragen Heideggers. Die phano- gründet. Das mein! keinen dem subjektiven Idealismus ent-
menologischen Interpretationen zu Aristoteles, die Heideg- ~egengestellten «Realismus» und überhaupt keine «Theo-
ger damals für die Verôffentlichung in Husserls «Jahrbuch» n.e der Erkenntuis », sondern beschreibt «die Sache selbst »,
vorbereitete, zielten nicht so sehr auf die der Scholastik so dIe als !n-der-Welt-Sein von der «Subjekt-Objekt-Spaltung»
teure philosophische Theologie, die in der aristotelischen nichts «weiss».
Orientierung an der « Physik» und im Bewegergott der Me-
Nun drangt aber hinter diesem Interesse an einem unscho-
taphysik ihre letzte Grundlage hat, ais auf die Sachnahe zu lastischen Aris!oteles die alte Frage Heideggers an die
dem konkreten faktischen Daseinsvollzug, die sich vor allem
DIE RELIGIOSE DIMENSION 219
218 HANS-GEORG GADAMER
die christliche Theologie ihrer eigensten Aufgabe entfremdet
«christlichen Theologen», ob es nicht ein angemesseneres hat. In der Tat wurde nicht nur Paulus' und Luthers Recht-
Selbst-Verstiindnis des Christen gibt ais das durch die zeit- fertigungslehre für ilm bedeutsam - er nahm auch Har-
genossische Theologie angebotene_ Insofern ist seine Neu- nacks These von der verhangnisvollen Hellenisierung der
Interpretation des Aristoteles nur ein erster Schritt auf ei- christlichen Theologie wieder auf, und am Ende sollte er
nem langen Denkwege_ Dass er bewusst ais ein soIcher von nicht nur an der Angemessenheit seiner theologischen Er-
Heidegger gewagt wurde, zeigte die Ein!eitung seiner Aristo- ziehung irrewerden, sondern darüber hinaus in dem grie-
teles-Interpretationen, die Heidegger 1922 als Manuskript cbischen Erbe, das auf allem neuzeitlichen Denken lastet
an Pan! Natorp schickte und die ich damais von Natorp zn den Ursprung jener Verlegenheit über das «Sein» und di;
lesen bekam : eine Analyse der «hermeneutischen Sitna- Geschichtlichkeit des menschlichen Daseins erkennen, die
tion» für eine Interpretation des Aristoteles_ Und womit i!un das Motto zu «Sein uud Zeit» diktiert hat.
begann sie? Mit dem jungen Luther, eben dem Luther, der
von jedem, der wirklich Christ sein wollte, verlangte, er Es waren gerade auch die Aporien des modernen Den-
müsse dem Aristoteles abschworen, diesem «grossen Lüg- kens, die ibm in Bergson, Simmel, Lask und vor allem in
ner ». Und dann folgten, wie ich mich genau erinnere - der Dilthey entgegengetreten waren, die ilm in den entscheiden-
Text ist noch nicht ediert, soll aber erhalten sein, wenig- den Jahren seiner Entwicklung, in der Zeit des ersten Welt-
stens im Typoskript, ohne die zahllosen handschriftlichen krieges, umtrieben, und 80 galt für ihn, was rur Unamuno,
Zusatze, die das an Natorp gesandte Exemplar enthielt - Haecker, Buber, Ebner, Jaspers und viele andere galt, dass
andere Namen : Gabriel Biel, Petrus Lombardus, der «Sen- Kierkegaards Begriff des Existierens zum neuen Kennwort
tenzenmeister », Augustin und schliesslich Paulus : Kein wurde. Kierkegaards Schriften wurden damaIs durch die
Zweifel, es war das alte, wohlbezeugte Anliegen Heideggers deutsche Ausgabe bei Diederichs neu wirksam. Dort fand
an der originaren christlichen Botschaft, was hinter dem Heidegger in brillanten Essays seine eigensten Themen wie-
Aristoteles-Unternehmen stand. der. Nicht nur vom Religiosen her die Polemik gegen He-
gel, diesen letzten und radikaIsten Griechen, wie Heidegger
Nicht, dass Heidegger meinen konnte, für dieses Anlie- ihn einmal genannt hat, der das Entweder-Oder der menschli-
gen eine unmittelbare Hilfe in Aristoteles zn finden. lm chen Existenz verschleiere. Auch die ausdrückliche Entge-
Gegenteil : dass die Theologie, die er gelernt hatte und die gensetzu,ng d~s griechischen Begriffs der «Erionerung »
sich weithin auf die aristotelische Metaphysik stützte, nicht musste . Ihm emleuchten. War doch Kierkegaards Kategorie
einmal den wirklichen Motiven des griechischen Denkens de~ Wtederholung, gerade dadurch gepragt, dass sie zur
entsprach, mnsste fül' ihn die Auseinandersetzung mit die- Ennnerung, zur lllusion einer Wiederkehr des Selben ver-
sem Denken nur noch verschiirfen. Das in Paulus lebendige, blasst, wenn sie nicht als das Paradox der Geschichtli;hkeit
von Heidegger wiedererkannte Zeitverstandnis war über- aIs die Wiederholung des Unwiederholbaren, als Zeit jenseit~
haupt nicht griechisch. Der griechische Zeitbegriff, den Plato aller Zeit erfahren wird.
und Aristoteles ais Maass und Zahl der Bewegung formu- Das war die Zeiterfahrung, die Heidegger an Pan!us er-
liert hatten, beherrschte aber die begrifflichen Moglichkei- kannte, die der Wiederkehr Christi, die keine zu erwartende
ten aller spateren Zeiten, von Augustin bis Kant und bis Rückkehr ist und die ais Parusie ein Kommen meint und
Einstein. So musste an seinem eigensten und tiefsten Pro- nicht Anwesenheit. Var allem aber mussten ilm Kierkegaards
blem, dem der christlichen Endzeiterwal1ung, die Frage le- religiose Reden bestatigen, die damais unter dem Titel «Le-
bendig bleiben, ob nicht der Druck des griechischen Den- ben und Walten der Liebe» auf deutsch zuganglich wurden.
kens auf die christliche Glaubenserfahrung die christliche Dort findet man die bemerkenswerte Unterscheidung zwi-
Botschaft überhanpt unkenntlich gemacht und mindestens
DlE RELIGlOSE DIMENSION 281
280 HANS·GEORG GADAMER

schen dem «Verstehen auf Abstand» und dem Verstehen farmlich vordemonstrierten. Er war durch die Schiilerschaft
in Gleichzeitigkeit. Darauf zielte Kierkegaards Kritik an der bei Hnsserl vor der Gefahr gefeit, den transzendentalen
Kirche, dass sie mit der christlichen Botschaft keinen existen- Idealismus in seiner Konsistenz zu unterschatzen und ilrm
ziellen Ernst mache und das Paradox der Gleichzeitigkeit einem naiven «Realismus» unter Bernfung auf die Parolen
abmildere, das in der christlichen Botschaft Iiege. Wenn der der Phiinomenologie entgegenzustellen. Nicht darnm konnte
Kreuzestod Jesu auf Abstand verstanden wird, hat das kei- es gehen, mit Pfander oder mit dem jungen Scheler darauf zu
nen wahren Ernst, und ebenso gilt ror ein Reden über Gott bestehen, dass die Dinge sind, was sie sind und uicht durch
nnd über die christliche Botschaft, wie es die Theologie (und das Denken «erzeugt» werden. Weder der Marburger Be-
die dialektische Spekulation der Hegelianer) betreibe, dass griff der «Erzeugung» noch Husserls umstrittener Begriff
man sie in Abstand stelle. Kann man über Gott wie über der «Konstitution» haben etwas mit dem metaphysischen
ein Objekt reden? lst das nicht die Verrohrnng der grie- ldealismus des Bischofs Berkeley oder mit dem erkennt-
chischen Metaphysik, über die Existenz und die Eigenschaf- nistheoretischen Problem der «Realitat der Aussenwelt» zu
ten Gottes wie über ein Objekt der Wissenschaft zu argn- tun. Husserls Absicht war gerade, die «Transzendenz» der
mentieren? Hier bei Kierkegaard liegen die Wurzeln der Dinge, ihr «Ansich-Sein», transzendental verstiindlich zu
«dialektischen Theologie », die 1919 mit Karl Barths Kom- machen, sozusagen «inunanent» zu begründen. Die Lehre
mentar zum Ramerbrief ihren Aufang nahm. In den Mar- von dem transzendentalen Ego und seiner apodiktischen
burger J ahren von Heideggers Freundschaft mit Bultmann Evidenz war uichts anderes ais dieser Begründungsversuch
ging es daber vor allem um die Abrechnung mit der «histo- aller «Objektivitat» und «Geltung». Aber just dieser Ver-
rischen» Theologie und darum, die Geschichtlichkeit und such verstrickte sich in inuner mehr verfeinerte Analysen
Endlichkeit des menschlichen Daseins radikaler denken zu der Zeitstruktur der Subjektivitiit. Die Konstitution des
lernen. transzendentalen Ego, die ais Aufgabe anerkannt wird, führt
auf so paradoxe Begriffsbildungen wie Selbstkonstitution
Damals berief sich Heidegger wiederholt auf den Kirchen- des Bewusstseinsstroms, Selbsterscheinung des Flusses, ur-
historiker Franz Overbeck, den Freund Nietzsches, dessen tümliche Gegenwart, Urwandel. Das mag dem jungen Hei-
Kampfschrift über die «Christlichkeit der Theologie» die degger bestatigt haben, dass weder der Begriff des Objekts
eigensten Zweifel, die Heidegger beseelten, aussprach. Sie noch der des Subjekts auf sein Problem, die Faktizitat des
bestiitigte gauz seine philosophische Erfahrnng von der Unan- menschlichen Daseins, anwendbar war. In WaIrrheit hat er
gemessenheit des griechischen Seinsbegriffs für den christ- seinen Weg damit begonnen, vom VoIlzugscharakter der
lichen Gedanken des Eschaton, das nicht Erwartung eines Daseinsbekfunmerung - spater : der Sorge - statt vom
kommenden Ereignisses ist. Wenn er in jenem Brief an vergegenwiirtigenden Bewusstsein auszugehen und Existenz
Lawith schrieb : Ich bin ein «christlicher Theologe », so ais Zukünftigkeit zu bestinunen. Sa trat ror ihn aus theolo-
mein!e er gewiss :ich machte gegen die angemasste Christ- gischer Absicht und uicht unter dem· Einfluss des Historismus
lichkeit der heutigen Theologie die wahre Aufgabe der Theo- die Geschichtlichkeit des Daseins in den Blick und leitete
logie anpacken, «das Wort zu finden, das imstande ist, zum die Frage nach dem Sinn von «Sein».
Glauben zu rnfen und im Glauben zu bewahren» (Worte,
die ich 1923 in einer theologischen Diskussion von ibm Wie aber Iiess sich Theologie ais Wissenschaft denken,
horte). Das aber war eine Aufgabe des Denkens. ohne ihre Christlichkeit zu verlieren und ohne erneut in
Und das hatte er gelernt, uicht nur an Aristoteles, son- den Bannkreis der Begriffe von Subjektivitiit und Objekti-
dern auch an Husserl, dessen meisterhafte Analysen des vitat zu geraten ? Heidegger hat schon in den frühen Mar-
Zeitbewusstseins ibm die Folgelast des griechischen Denkens burger JaIrren, wenn ich mich recht erinnere, in der Rich-
282 HANS-GEORG GADAMER DIE RELlGlOSE DIMENSION 283

tung gedacht, die in dem Tübinger Vortrag von 1927 for- Bekanntlicb hat selbst diese vorsicbtige Beschrlinkung des
muliertwurde : l:heologie ist eine positive Wissenscbaft, da pbanomenologischen Apriorismus zur Kritik berausgefor-
sie von etwas Seiendem handelt, niimlicb von der Christlich- dert. lst der Scbuldcbarakter des Daseins wirklich gegenüber
keit Sie ist ais begriffliche Auslegung des Glaubens zu der cbristlicben Glaubensgescbicbte neutral und von ibr unab-
bestimmen_ Damit aber steht sie der Chemie oder Biologie bangig ?Oder das Gewissen-baben-woIIen, oder das Vor-
naher ais der Philosophie. Denu diese hat es, ais einzige Jaufen znm Tode? Heidegger würde das für sich selber und
Wissenschaft, nicht mit Seiendem (vorgegebenem - und sei seinen Erfahnmgsboden scbwerlich abstreiten konnen und
es auch lediglich im Glauben -l, sondern mit Sein zu tun : müssen - und nur festhalten, dass von jedem menscblicben
sie ist die «ontologische» Wissenschaft Erfahrungsboden aus Endlichkeit und «Sein zum Tode»
Man sieht wohl die bewusste Provokation in dieser wissen- einlosbar sind und dass samit die begrifflicbe Ausgelung der
schaftstheoretischen These. lm Glauben begegnet auch das cbristlichen Glaubenserfahrung für jedermann ibre Anlei-
im Glauben Geglaubte - und dieses ist ebenfalls, wenn tung erführe.
überbaupt der Glaube, einer begrifflicben Auslegung fiihig. FreiIicb, misslich genug stebt es mit der ganzen Konfron-
lst dies Geglaubte etwa ein Gegenstand oder ein Feid von tation von Theologie lmd Philosophie, solange die Grund-
Gegenstanden wie die chemischen Stoffe oder die Lebewesen, voiaussetzung dahinsteht, ob Tbeologie überbaupt eine Wis-
nnd betrifft es nicbt vielmehr - wie die Pbilosopbie - das seuscbaft sei (15), ja, ob die Theologie wirklich dem Glau-
Ganze des menscblicben Daseins und seine Welt? So muss ben auferlegt ist Misslicher noch steht es mit der Frage,
denn aucb Heidegger auf der anderen Seite die ontologi- ob die Konkretisierung des faktischen DaseinsvoIlzngs in
scbe Grundverfassung des menscblicben Daseins, die die Gestalt der «Sarge» das wirklich zu leisten vermag, was
Pbilosophie erkennt, ais Korrektiv für die begriffliche Aus- sie solI, die ontologische VorgreifIicbkeit der «transzenden-
legung des Glaubens bebaupten. Die Pbilosophie, die das talen SubjektivWit» binter sicb zu lassen und «Zeitlich-
« Existenzial» der «Schuld» aus der Zeitlicbkeit des Da- lœit» als Sein zu denken. Sorge ist gewiss am Ende ebenso
seins entspringen sieht, kann freiIicb nur eine formale An- « Bekürumenmg » um sich selbst, wie das Bewusstsein Selbst-
zeige für die im Glauben erfabrene Sünde darsteIIen. bewusstsein ist. Das bat Heidegger aIs die Tautologie von
Hier gebraucht Heidegger den, wie man weiss, früher viel Selbstsein und Sorge mit Recht hervorgehoben. Aber er
von ibm benutzen Begriff der «formalen Anzeige », fast ein hat geglaubt, in der «Sarge» ais der urspriinglichen Zeiti-
Aequivalent des Kierkegaardscben «Aufmerksammacbens», gnng die ontologische Enge des !ch-Sagens und der darin
und man gebt gewiss nicht fehl, wenn man darin die Absicbt sich konstituierenden Identitlit des Subjekts überwunden zu
siebt, im Unterscbied zn dem aprioristiscben Rahmen, den haben. Indessen, was ist jene «eigentliche» Zeitlichkeit
HusserIs «Ontologien» rur die empiriscben Wissenschaften der Sorge? Erscbeint sie nicbt ais cine SeIbstzeitignng?
« Das Dasein ist eigentlich selbst in der ursprünglichen Ver-
vorznschreiben beansprncbten, in der «formalen Anzeige»
die Anerkennung zn seben, dass die pbilosophiscbe «Wis- einzelung der verscbwiegenen, sich Angst zumutenden Ent-
senscbaft» zwar bei der begriffIicben Auslegung des Glau- scblossenheit» (§ 64). Der spatere Heidegger bemerkt hièr
bens - in der Tbeologie - beteiligt sein mag, aber nicbt zn «Angst» : «d.b. Licbtnng des Seins ais Seins» (S. 247).
bei dem VoIIzug, der Sacbe des Glaubens selbst ist. Dabin- Würde er sagen konnen, das Dasein mute sich die «Licb-
ter stand gewiss die weitergebende Erkenntnis, dass am tung» zn?
Ende auch die Frage nacb dem Sein keine Frage im Sinne So· wie der spatere Heidegger das Denken des Seins als
der Wissenscbaft ist, sondern «ins ExistenzieIIe zuriick- Zeit nicht mehr auf die «transzendentale Analytik des Da-
scblagt •. seins» griinden mochte und von der «Kehre» sprach, in
284 HANS-GEORG GADAMER DIE RELlGli5SE DIMENSION 285

die er geraten war,konnte auch das Verhiiltnis von Philo- ist. Was bei Nietzsche aIs das Heraufkommen des europat-
sophie und Theologie nicht mehr auf der Voraussetzung ge' schen Nihilismns beschrieben wird, versteht Heidegger aIso
dacht werden, dass es sich hier um das VerMltnis zweier nicht als den Prozess einer Entwertung aller Werte, sonderu
Wissenschaften handle- Schon im Text des Tübinger Vor- im Gegenteil als die endgiiltige Etablierung des Denkens in
trages lasst es mindestens aufmerken, dass die Theologie Werten - und nennt das «Seinsvergessenheit».
nicht nur als «historische» iu einem radikalisierten Sinn, Nietzsche ist ibm nicht nur der Dlagnostiker des Nihilis-
sondern auch als «praktische Wissenschaft» bezeichnet war_ mus - am Nichts wlrd das Sein sichtbar. So fUbrt er in
« Jeder theologische Satz und Begriff spricht aIs soIcher sei- den «Holzwegen» die Szene des tollen Menschen an, der
nem Gehalt nach und nicht erst nachtriiglich auf Grund, so- auf dem Markt unter dle Vielen tritt, weIche nicht an Gatt
genannter praktischer "Anwendung" in die glaubige Exi- glaubten und schreit : Ich suche Gatt, ich suche Gatt, und
stenz des einzelnen Menschen in der Gemeinde hinein»_ der weiss : «Wir haben ihn getotet». Der Sucher Gattes,
Man ist nicht erstaunt, dass Heidegger spater (1964) seine das ist Heideggers Punkt, «weiss» von Gott - diejenigen,
Bemerkungen znm «nichtobjektivierenden Denken und Spre- die seine Existenz zn beweisen suchen, sind es, die ihn eben
chen» mit der negativ gettinten Frage schliesst, «ob die auf diese Weise tOten. Denn Suchen setzt Missen vorans und
Theologie noch eine Wissenschaft sein kann, weil sie ver- Missen Wissen - des Abwesenden, gewiss, aber das Abwe-
mutlich überhaupt nicht eine Wissenschaft sein darf» (46)_ sende ist nicht nicht. Es ist ais abwesendes «da».
So war es am Ende nicht mit Hilfe der Theologie, son- Das nun war es, was Heidegger an HOlderlin wiederent-
deru in Abkehr von ihr und in der Abkehr von der die deckte : das Lied auf das Dasein der entschwundenen Gotter.
Theologie beherrschenden Metaphysik und «Ontologie », Der letzte der Gotter der Alten Welt war fUr HOlderlin
dass die religiose Dimension in Heidegger ihre Sprache such- Christus, der letzte, der «unter den Menschen» geweilt hat.
te_ Er fand sie, soweit er sie fand, durch die neue Begeg- Seither haben wir nichts als die Spuren der entflohenen
nung mit Nietzsche und durch die ZungenlOsung, die ibm Gotter : «Aber des Gottlichen haben wlr doch viel » ...
in der Anslegung der Dichtung Holderlins widerfnhr. Das war das V orbild, nach dem Heidegger neu, d.h. nicht
Es ist ganz irreführend zn denken, dass Nietzsche wegen im Sinne der Metaphysik, nicht im Sinne der Wissenschaft
der atheistischen Implikationen seines Denkens für Heideg- zn denken versuchte und Denken zn denken versuchte. Wie
ger bedeutsam wurde. Das Gegenteil ist der Fall. Die Ra- man vom GOttlichen weiss ohne Gott zu «begreifen» und
dikalitiit dieses Denkens liess gerade auch den atheistischen zn erkennen, ist auch das Denken des Seins nicht ein Be-
Dogmatismns hinter sich. Es war die verzweifelte Kühnheit, greifen, nicht ein «Haben» und «Beherrschen». Ohne die
mit der Nietzsche die gesamte Metaphysik und den theore- Parallele mlt der Gotteserfahrung und der Wiederkehr Christi,
tischen Begriff von «Wahrheit» hinterfragte und überall die immerhin von hier ans «richtiger» gedacht werden kann,
den «Willen zur Macht» erkannte, was Heidegger anzog. zn forcieren, darf man doch sagen, dass auch «Sein» mehr
Nicht die Umwertung aller Werte - das schien ihm ein ist als blosse «Prasenz» (geschweige denn «Vorgestellt-
oberfIachlicher Aspekt Nietzsches - sonderu dass der heit) - es ist ebenso sehr «Absenz », eine Form des
Mensch überhaupt ais das wertsetzende und wertschiitzende « Da », in der nicht nur das «Es gibt», sonderu auch
Wesen gedacht war. Das war die Geburtsstunde für den Entzug, Rückzug, Ansichhalten erfahren wlrd. «Die N atur
wohlbekannten Heideggerschen Ausdruck vom «rechnen- Iiebt es, sich zn verbergen» - dies Heraklitwort zog Hei-
den» Denken, das alles auf seinen Wert hin berechnet, und degger oft heran. Es liidt nicht znm Angriff und znm Ein-
das in der Technik und technischen Einrichtnng des In-der- dringen ein, sondern zum Warten - und Rilke hatte recht,
Welt-Seins znm Schicksal der Menschheitskultnr geworden wenn er - in seinem Malte, in seinen Elegien - , die Un-
286 HANS-GEORG GADAMER

fiihigkeit zu warten beklagt. So spricht der spiite Heidegger


vom An-Denken, das nicht nur Denken au etwas, das ein-
mal war, ist, sondem ebenso Denken an etwas Kommendes,
das eiuen schon an es denkeu lasst - auch wenn es kommt
«wie der Dieb in der Nacht •.
Es ist keine Ontologie und erst gar nicht eine «Theolo- OTTO POGGELER
gie », was sich in solchem Denken vorbereitet. Und doch
miige zum Schluss daran erinnert sein, dass Heidegger --..: im
Denkeu HOiderlinscher Dichtung - einmal sagt, die Frage : HEIDEGGER UND DAS PROBLEM
Wer ist Gott? sei zu schwer für die Menschen. Sie seien
Mchstens imstande zu fragen : Was ist Gott ? - und damit
DER ZEIT
deutete er auf die Dimension des Heiligen und des Heilen
und sagte dariiber : «Der V erlust der Dimeusion des Hei-
ligen und des Heilen ist vielleicht das eigentliche Unheil
unseres Zeitalters ». Er mochte damit mit-meinen, dass wir Hegel hat die Zeit - neuplatonisch und neuspinozistiscQ
Gott deshalb nicht erreichen kiinnen, weil wir über Gott in _ ais ein Herausfallen aus der Ewigkeit verstanden. 80
einer Weise reden, die dem Selbstverstandnis des Glaubens polemisiert z.B. der Jenaer Aufsatz Glauben und Wiss en
niemals helfen kann. Aber das ist Sache der Theologen. gegen Jacobi : «Jede Zeile in Spinozas System macht den
«Meine Sache, die des Philosophen» - kiinnte Heidegger Satz, dass Zeit und Sukzession blosse Erscheinung ist, zu
mit Recht gesagt haben und das für jedennann, nicht nur einer solchen Trivialitat, dass nicht die mindeste Spur von
für die Christen oder gar nur für die Theologen - war Neuheit und Paradoxie darin zu sehen ist.» Der Satz spieit
zu warnen, dass die herkiimmlichen Wege des Denkens nicht unüberhiirbar auf Kant an tmd auf Kants Verarbeitung der
Weise, wie Newton und Leibniz die Zeit sahen. Von daQer
zureichen.
konnte Hegel gegen Ende seiner Jenaer Jabre fragen, Vlie
wir Ausdrücke wie «Dieses», «!ch», «Hier» und «.Jetz! »
gebrauchen. Damit war gerade die Endlichkeit, die mit der
Zeitlichkeit gegeben ist, neu zum Problem geworden; dOch
die nun entfaltete «Negation der Negation» gestattete es
Hegel, auch und gerade dieses Negative der Zeit zurückzu_
nehmen in die Ewigkeit : für die Phanomenologie ist die Zei!
nur das Schicksal des unvollendeten Geistes; durch die Vol!_
endung des Geistes soli die Zeit (in ihrer Endlichkeit ais
un~ur~hschautes Schicksal) «getilgt» werden. Gerade die
chItSthche Offenbarung aIs Geschichte erscheint aIs religio_
ses Vorspiel und ais koukrete Enniiglichung dieser Aufgabe.
doch fasst Hegel diese Offenbarung konsequent als eine SÏch
vollendende Geschichte. «Alles heraus aus dem verscblos_
senen Gotte », 80 lautet deshalb eine Notiz über die christ_
liche, die «geoffenbarte, vielmehr offenbare» Religion, die
Hegel sich zum § 465 seiner Heidelberger Enzyklopiidie
288 OTTO POGGELER DAS PROBLEM DER ZEIT 289

machte. Sagt die VOITede ZUT Rechtsphilosophie von der dem man von den chinesischen Historikem das angeblich
Philosophie, sie sei ihre Zeit in Gedanken gefasst, sa nimmt hohe Alter der chinesischen Kultur übemalnn und zngleich
man dieses berühmte Wort nicht in seiner Schiirfe, wenn darauf hinwies, dass diese Historiker die Sintflut nicht kann-
man nicht sieht, dass das In-Gedanken-Fassen nach Hegel ten. Johannes von Müller, der massgebliche Historiker der
ein Tilgen der Zeit aIs Schicksal ist. Diese Hegelsche Auffas- Goethezeit, hat diese Schwierigkeiten auszuraumen versucht,
sung ist uns unverstandlich geworden. Immerhin ~at Alexan- und Hegel stützt sich auf ihn : man gewinnt einige Jahrhun-
dre Kojève sie noch seinen epochemachenden Panser Hegel- derte Geschichte in der jüdischchristlichen Zeitrechnung,
V orlesungen zugrunde gelegt : haben die Menschen für ihr wenn man der alexandrinischen Bibelübersetzung folgt, denn
Leben in dem sich entfaltenden Weltstaat erst einmal ratio- nach dieser liegen zwischen Sintflut und Abraham nicht nur
nale Priozipien der Politik gefunden und rationale Prinzi- drei, sondem eIf Jahrhunderte (zwischen Abraham und Adam
pien der Religion und Religionskritik, dann sind die klassi- dreizehn). Man kommt dann auf 3473 Jahre var Christi
schen geschichtlichen Aufgaben zu Ende; man kann weder Geburt, und von dem Augenblick an, in dem Gott Adam in
einen neuen Staat gründen noch den Menschen neue Gotter den geschichtslosen Garten der Natur setzte, bis heute sind
finden, sondem in der neuen Weltkultur nur mit Nietzsches es jedeufalls nicht einmal 6000 Jahre. Hegel las nicht nur,
letzten Menschen «blinzeln» oder - positiver ausge- was der Graf Volney nach abenteuerlichen Orientreisen über
drückt - mit den J apanem Bogenschiessen und Blumen- die Melancholie der Ruinen schrieb; er studierte auch und
stecken. Da Hegel in seiner Phiinomenologie die Anthropo- verteidigte das Zend-Avesta, das Anquetil-DupeITon heraus-
genese und die Zielgerichtetheit der Geschichte in nuce be- gab. Die «parsische» Erfahrung des Lichts, das sich von
griffen hat, bleibt für uns nicht einmal das lebend}ge Philo- der Finsternis scheidet, erschien ais Beginn aller Sittlichkeit
sophieren (man tragt es nun ais etwas schon GelelStetes, aIs und Religion. Dieser Begino soli dann nach Indien und
ein Buch - Hegels Phiinomenologie - unter dem Anu). Aegypten ausgestrahit haben; seine Entfaltung vor allem
Kojève hat die Konsequenzen aus seinen Gedanken gezo- im Weltreich des Kyros soli Weltgeschichte im eigentlichen
gen : nachdem die rechte Sicht der Dinge gefunden ist, gilt Sinn begründet haben. AIs im J ahre 612 v. Chr. plotzlich
es nun, das Eingesehene auch praktisch-politisch zur Ver- das assyrische Reich fiel, ais bald das neubabylonische und
wirklichung zu bringen. Seinen Besuchem soli der politisch- das medische Reich folgten, fanden die MerlSchen in einem
praktisch Tatige erzahlt haben, er habe Hegel zuerst für Schock, den sie nicht vergassen, das Schema von der Ge-
veITÜckt gehalten,' dann aber eingesehen, dass Hegel recht schichte ais einer Abfolge der Weltreiche; in dieser Abfolge
habe, und wo zwei da.'lselbe glaubten, habe ihr Glaube doch erscheint nach den grossen «Tieren» der «Menschen-
etwas für sich... sohn ». Dieses Schema bestimmt auch noch Hegels Ge-
schichtsverstandnis : in eben dem Augenblick, in dem die
Es faUt auf dass Hegel noch sehr wenig Zeit für den
europaische Geschichte sich ZUT «Weltgeschichte Europas»
Weg zur V olle~dung des Geistes brauchte. Da er gelegentlich (Hans Freyer) auszuweiten beginot und Europa aIs Mitte
die Sterne als Ausschlag des Hinunels abqualifizierte, konnte der Welt untergeht, artikuliert Hegel noeh einmal das alteu-
ihn die Zeit der Entstehung der Stemensysteme wenig inte- ropaische Selbstversmndnis.
ressieren; doeh auch die Arten des Lebendigen waren für
ibn den man inuner wieder einen Denker des Werdens Hegel erinnert uns daran, dass es erst wenige Genera-
ne~nt, noch nicht innerhalb einer Evolution oder «Geschich- tionen her ist, seit die N aturwissenschaften und die Geistes-
te» entstanden. Für die eigentliche, die menschliche Ge- wissenschaften sa viel Zeit für ihre GegensHinde beanspm-
schichte genügten ihm wenige tausend J ahre. Man hatte die chen. Vielleicht braucht man fünfzehn oder sechzehn Mil-
herrschende Zeitrechnung in Schwierigkeiten gebracht, in- Iiarden Jahre für die Entstehung der Stemensysteme; jeden-
290 OTTO POGGELER DAS PROBLEM DER ZEIT 291

falls erscheint manchem Biologen die zur Verfügnng ste-


hende Zeit für die Entstehung des Lebens auf dieser Erde
schon etwas kurz, obwohl es doch Milliarden Jahre sind. 1
Vor die Geschichte der Hochkulturen hat die Geschichts-
wissenschaft die ungehenren Zeitdiume der Vor- oder Bergson hat in babnbrechenden Analysen zu zeigen ver-
Frühgeschichte gelegt, in denen Geschichte erst langsam sucht, dass die Weise, wie das Leben sich seiner fliessen-
ins Rollen gerat. Die Wissenschaft kann - trotz aller Ar- den Dauer aufbaut und erlebt, nicht mit Hilfe der quanti-
gnmente für bestimmte Hypothesen - jene Fragen nicht tativ formulierten physikalischen Zeit erlasst werden konne.
entscheiden, die den Menschen doch interessiereu müssen : So hat er philosophisch jene Aufmerksamkeit auf die erlebte
ob man überhaupt von einer «Geschichte» des Universums Zeit dnrchgesetzt, wie sie im dichterischen Bereich Proust
aIs einer gerichteten, vielleicht gar einmaligen Bewegnng zeigt; er hat ein K1ima geschaffen, in dem die Biologie die
sprechen kann; ob das Leben im Universum einmalig ist, Evolution des Lebendigen sowie Umwelt und Verhalten der
sp1irlich oder vielfaItig zerstreut; ob Leben sich gemass Arten des Lebendigen untersuchen konnte, die Ethik ausge-
einer Grnndtendenz zum bewussten Leben erhebt. Unsicher richtet werden konnte auf das Zusichfinden menschlichen
ist, ob diese unsere menschliche Geschichte vor einer Kata- Lebens im ausgezeichneten Augenblick. Nicht der analysie-
strophe oder erst an ihrem eigentlichen Anfang steht... Das rende Verstand oder der Intellekt, sondern die Intnition
bewusste Leben - der Geist, wie er im Menschen sich fin- sollte die fliessenden Ganzheiten sich erlebenden Lebens er-
det - muss sich in den Abgründen von Raum und Zeit sehr fassen. Wilhelm Dilthey konnte den a1lgemeinen Begriff der
verloren vorkommen. Die Philosophie kann die Fragen, die Intuition durch eine konkrete Lehre von der Hermeneutik
die Wissenschaft offen lassen muss, nicht entscheiden. Aber ersetzen. Seine umfassende Besinnung auf das V orgehen der
vielleicht kann sie die Selbstbesinnung der Menschen da- Geisteswissenschaften und auf ihr Fundiertsein im sich erle-
durch stützen, dass sie deutlich zu machen versucht, wel- benden und .ausdIÜckenden Leben nahm aber jene detail-
ches VerhaItnis zur Zeit überhaupt moglich ist. Darum ha- lierte Analyse der Zeit nicht auf, zu der Bergson durchge-
ben sich Philosophen seit Hegel bemüht, und hier gibt es stossen war. Das Zeitproblem von einer anderen Tradition
ein franzosisch-deutsches Gesprach, das noch nicht zu Ende (der Theorie der Wahrnehmung) her wieder aufzunehmen,
gebracht ist. Vergleicht man die cartesianischen Meditatio- das war die Leistung der phiinomenologischen Philosophie,
nen Husserls tnit den Meditationen von Descmtes selbst, wie Husserl sie zum Durchbruch brachte. AIs Ingarden bei
dann wird unmittelbar deutlich, dass der Zeitbezug, den' Hus- Husserl über Bergson promovierte und Husserl Bergsons
serl einbringt, einen grundsiitzlichen Unterschied gegenüber Gedanken vortrug, solI Husserl denn auch gesagt haben,
Descartes gesetzt hat; stellt man nrngekehrt Heidegger in das sei doch er (Bergsons Gedanken seien seine Gedanken).
einen Bezug zu Bergson, dann wird auch sichtbar, dass viel Wieweit freilich der spate Husserl Bergson wirklich auf-
an konkreter Selbstbesinnung, die Bergson schon gewonnen nahm, wieweit er überhaupt noch «las», mag hier offen-
hatte, im Fragen der deutschen Philosophie wieder verloren bleiben. Heidegger wnrde von ihm beauftragt, die Disserta-
ging. So mag ein Hinweis auf eine kleine Phase aus diesem tion des Polen Ingarden stilistisch durchzusehen, und Hei-
Gespriich in der Festschrift stehen, die jenen ehrt, dessen degger war es auch, der durch die Frage nach Sein und Zeit
Lebensarbeit der Forderung des Gespraches zwischen franzo- der Philosophie eine neue Moglichkeit zu eroffnen suchte.
sischem und deutschem Philosophieren gewidmet ist. lm Sommer 1925 las Heidegger eine Vorlesung Geschichte
des Zeitbegriffs, die Prolegomena zu âner Phiinamenologie
von Geschichte und Natur bringen solIte. Heidegger wollte
die Geschichte des Zeitbegriffs aus der Gegenwart her IÜck-
292 OTTO POGGELER DAS PROBLEM DER ZEIT 293

wlirts vetfolgen, nlimIich von Bergson ans zu Kant und New- tionell als Anwesenheit und damit ais Gegenwart genom-
ton und daun zu', Aristoteles. Da Heidegger zuerst darlegte, men wird, steh! daun nicht hinter dem Sein die Zeit, die
was Phiimenologie sein kônne und wie sie zum Zeitproblem aber nicht nur ais Gegenwart, sondern in ihrer vollen eksta-
komme, kam er gar nicht zur DarsteIIung Bergsons und der tischen Vetfassung etfahren erden mnss ?2.
Geschichte des Zeitbegriffs'. Spliter hat er die Zeittheorie
In der Logik-Vorlesung vom Winter 1925/1926 bricht
Bergsons (wie die HegeIsche) kurzschliissig auf Aristoteles
Heidegger die geplante Aristoteles-Darstellung unvermittelt
ZUTÜckgeführt, die nôtige Auseinandersetzung mit Bergson
ab und entwickeit seine Fragen in Auseinandersetzuug mit
überhaupt verloren.
Kant. lst Lebendiges nach Aristoteles Tlitigkeit, so hatte
Heideggers Anmerkungen zur Psychologie der Weltan- Kierkegaard die Tatigkeit des Menschen ais Existenz sehen
schauungen von Karl Jaspers, in den Jahren unmittelbar gelehrt ; Kants Lehre von der schematisierenden Einbildungs-
nach dem Ersten WeItkrieg ausgearbeitet, zeigen uus Hei- kraft schien den Zeitbezug der Wurzel aller Existenzwei-
deggers frühe Phanomenologie des Lebens : Heidegger setzt sen - selbst des Gewissens - zu artikulieren, so die Ans-
an innerhalb der Lebensphilosophie von Bergson und Dilthey, eiuandersetzung mit aller Transzendentalphilosophie -
die existenzphilosophisch verschiirft worden war; aber er auch der transzendentalen Phauomenologie Husserls - zu
mochte auch für die «Intuition» begriffliche Mittel gewin~ ermôglichen. Sein und Zeit folgt diesen Denkmotiven, gerat
nen. Hier soll HusserIs Phanomenologie helfen, doch will so aber mit seinem Ansatz in verschiedene Aporien. lst die
Heidegger anders ais Husserl nicht die Sphiire der Wahr- Zeit mit ihren Schemata ein Prinzipiengefüge zur Unter-
nehmung und der Theorie zur leiteudeu machen, sondern scheidung der Daseins- und Seinsweisen oder Charaktere
eher die Sphiire von Praxis und Religion. Wie sehr Heideg- jenes Mediums, in dem sich überhaupt erst Prinzipiengefüge
ger geschichtlich denkt, geht daraus hervor, dass er seine aufbauen oder «Wurzeln» wie die Einbildungskraft entfal-
Phauomeuologie in einem grossen Buch über Aristoteles ten? Kaun dieses Entweder-Oder durch die Analogie als
vorstellen will; Husserl will das Buch in seiuem Jahrbuch Ansrichtung auf eine leitende Bedeutung und so durch die
drucken, obleich die Weise, Aristoteles ais Phauomenologen Genealogie der Seins- und Daseinsweisen überbrückt werden
anszugeben, eigentlich ein Affront gegen die transzendentale oder scheiter! diese U eberbrückung an dem ungekliirten
Phauomenologie ist. Jener Aristotelische Text, der in einem Verhiiltuis der genannten Genealogie zur Geschichte ?'. Zu
positiven Sinne der entscheideude ist, ist das sechste Buch dieser ersten Aporie kommt eine zweite. In der Kantvorle-
der Nikomachischen Ethik, das auch für die Bereiche von sung vom Winter 1927/1928 sagt Heidegger selbst (viel-
Techue und Praxis Wahrheit beansprucht und die Phronesis leicht im Hinblick auf die genaunte Logik-Vorlesung) :
für das Etfassen der Situatiou einsetz!. Heidegger sieht dann « Ais ich vor einigen J ahren die Kritik der reinen Vernunft
- nach seinen eigenen Angaben 1922/1923 - ein, dass emeut studierte und sie gleichsam vor dem Hintergrund der
Aristoteles und die Tradition in einer bestimmten metaphy-
sischen Option das Sein als Anwesen fassen, damit die Si-
tuation und den Kairos in ihrem Sein zum anwesenden (zu- 2. Die Jaspers-Rezension ist jetzt auch in den Band 9 der Heideg-
künftigen, vergangenen, gegenwartigen) Jetztpunkt nivellie- ger-Gesamtausgabe (Wegmarken, Frankfurt a.M., 1978) aufgenom-
ren müssen. Wenn aber, so fragt Heidegger non, Sein tradi- men wordeil. Zu Heideggers früher PhanomenologÎe des Lebens und
dem Problem der Schematisierung vgl. auch meinen Aufsatz <il: Hei-
deggers Neubestimmung des Phanomenbegriffs », in : Phiinomenolo-
gische Forschungen 9 (1980), 124-162.
3. Vgl. dazu meinen Vortrag <il: Heidegger's Topology of Being»,
1. Heideggers Vorlesung wurde denn auch unter einem vera.nderten in : Oit lIeidegger and 'Language. Ed. J.J. Kockelmanns, Evanston,
Tite! verôffentlicht; vgl. den Band 20 der Heidegger-Gesamtausgabe : 1972, 107-146; deutsch, in : Philosophie und Po/itik bei Heidegger,
Prolegomena zur Geschichte des Zeitbegrifls, Frank.furt a. M., 1979. Freiburg/München, 1972 und 1974, 71 ff.
294 OTTO püGGELER VAS PROBLEM DER ZEIT 295

Phanomenologie HnsserIs las, fiel es mir wie Schnppe~ von gischen U~tersuchnng.en zur Ge?llletrie und über dies~ hin-
den Angen, und Kant wurde mir zu einer :nesenthchen aus auf· emen vorwissenschaftlichen und vortheoretischen
Bestatigung der Richtigkeit des Weges, auf dem I~h such~e. » Raumbezug zurückgeht und das Raumgeben oder Einrau-
Husserl hatte die ZeitanaIyse zuerst innerhaIb emer Phan?- men mit seiner Dynamik von N1ihe und Ferne aIs etwas
menologie der Wahrnehmung angesetzt : so ents~~nd die UrspfÜngIiches in den Blick bringt.
Gefahr dass das was von der franzosischen Tradition her
Wenn die Abhandlung Vom lVesen des Grundes den
erlebte' oder gelebte Zeit genannt wird, von .~~r «p~ysika­
Ansatz von Sein und Zeit fortführt, dann stelIt sie die apo-
lischen» Zeit her aufgefasst und auf Modahtaten wle ~u­
retisch gewordene temporale Interpretation erst einmaI zu-
küuftigsein, Gegenwartigsein, Vergangensein bezogen wrrd.
rück. Wenn diese Abhandlung sich am Platonischen aga-
Wahrend die er1ebte Zeit den Zukunfts- und Vergangen-
thon orientiert, dann wird dieses agathon oder die Sonne
heitsbezug in die einheitliche «Dauer» zusammenfasst (aIs?
des Platonischm Hohlengleichnisses z.B. in der V orIesung
zweigliedrig ist bzw. - wenn das Ganze a~ch. aIs Tell
über das Wesen der Wahrheit vOlll Winter 1931/1932 als
gezablt wird - dreigliedrig), wird von der Onenti.erung an
«.Zeit» angesprochen; Wahrheit und Fremeit werden aIs
den Modalitiiten her auch die erlebte Zeit oder elgenthche
Geschehm und Geschichte gen0lllnten. Heidegger hat sich
Zeitigung von Zeit aIs drei- bzw. viergliedrig au.tgefasst.
aber nicht auf Platons Naturphilosophie und deren Zeitauf-
So parallelisiert Heidegger in seiner Kantinterpreta~lOn Ap-
fassung eingelassen, sondem mit den Vorsokratikem und
prehension, Reproduktion und Recognition aIs :Z:eilstruktur
dm griechischen Tragikern und vor allem mit Holderlin
der Einbildungskraft mit Gegenwart, Vergangenhett und Zu-
nach der Zeit (aIs der Zeit de~ Seins) gefragt. «Zeit» in
kunft und in Sein und Zeit verstrickt er sich in Unstinrrnig-
dem von Heidegger gesuchten SInn solIte nun aus dem Ge-
keiten, wenn er in einer temporalen Interpretation d~r ent-
schehen der Wahrheit verstandon Werden _ etwa im An-
scheidenden Stroktunnomente des Daseins deren Drel- bzw.
halt an H5IderIins Verse : «Lang ist / Die Zeit, es ereiguet
Viergliedrigkeit herausstellen will'. Der Gedankenblitz, der
sich aber / Das Wahre.» So fand Heidegger zu einem
Heidegger bei der Auseinandersetzung mit Kant und Hus-
neuen Deukansatz, den er z.B. 1936-1938 in den Beitra-
serl traf, war eine Intuition, die sich an den Phanomene~
gen zur Philosophie darsteIIte. Dort blickt im Abschnitt
nicht bewahrt, weil sie unterschiedliche Bezüge zur Zelt
« Sprung» der Aphorismus 150 auf Sein und Zeit und den
vennischt. Eine dritte Aporie ergibt sich auS dem Verhiiltn.is Weg durch Sein und Zeit zurück :
zwischen Zeit und Raum : in Auknüpfung an Kant. und m
Auseinandersetzung mit ihm will Heidegger den Raum auf «Die 'Zeit' soIlte erfaltrbar Werdm aIs der 'ekstatische'
die Zeit z!ffÜckführen; das widerspricht aber seinem Raum- Spielraum der Waltrheit des Seyns. Die Ent-fÜckung iu das
begriff, in dem Heidegger mit Oskar Beckers phiinomenolo- Gelichtete solIte die Lichtung selbst grüuden aIs das Offene,
in dem das Seyn sich in sein Wesen sanmtelt. Solches Wesen
kann nicht wie ein Vorhandenes nachgewiesen werden, seine
Wesung muss wie ein Stoss erwattet werden. Das Erste und
4. Vgl. Heidegger~Gesamtausgabe Band 25 : Phiinomenologische Lange bleibt : in dieser Lichtung Wartm zu k6nnen, bis die
Interpretation von Kants Kritik der reinen Vernunft, Frankfurt a.~.,
1977, 431; HEIDEGGER, Kant und das Problem der MetaphY~'l~~ Wiuke kommen. Denn das Denken hat nicht mehr die Gunst
Vierte, erweiterte Auflage, Frankfurt a.M., 1973, 170 ff. Zur. Kntt~ des 'Systems' - es ist geschichtIich in dem einzigen Sinne,
vgl. meinen Vortrag «Temporal Interpretation and Hel'meneuttc ~hl~
losophy» (Akten des New Yorker Kongresses von .1977 der s.0cJety dass das Seyn selbst aIs Er-eignis iede Geschichte erst tdgt
for Phenomenology and Existential Philosophy; ID. Vorbereltung). und deshalb nie errechnet werden kann. An die Stelle der
Ueber Kants Zeittheorie und, ihre moderne ReceptIon vgL. Klaus
DUSING, «Objektive und subjektive Zeit », in : Kant-Studlen, 71
Systematik und der Herleitung trit! die geschichtIiche Bereit-
(1980), 1-34. schaft für die Wahrheit des Seyns. »
OTTO poGGELER DAS PROBLEM DER ZEIT 297
296

Heidegger hiilt hier test, dass das Denken nicht nur das Interpretation der Daseinsanalyse oder der seinsgeschichtli-
Dasein und den Sinn von Sein, also die ersten beiden und chen Besinnung abgelehnt :
den dritten Abschnitt von Sein und Zeit, zusammenfassen «Aber bleiben muss der Ausgriff in den Zeit-spiel-raum
muss, sondern vor allem den ersten und den zweiten Teil des Seyns - dieser Ausgriff ergreift jeden, der stark genug
von Sein und Zeit, die systematische Konstruktion und die geworden, die ersten Entscheidungen durchzudenken, iu
historische Destruktion. Weil diese Zusammeufassung in deren Bereich mit dem Zeitalter, dem wir eingeeignet blei-
Sein und Zeit noch nicht gelang, wurde der hermeneutische ben, ein wissender Ernst zusammentaugt, der sich nicht mehr
Zirkel, in dem das Denken sich bewegte, nicht ausgeschrit- stOsst an gut und schlecht, an Verfall und Rettung der Ueber-
ten. Die nachsten beiden Abschnitte unseres Aphorismus lieferung, an Gutrnütigkeit und Gewalttat, der nur sieht und
relativieren denn auch Sein und Zeit ais blossen Einstieg in fasst, was ist, um aus diesem Seienden, darin das Unwesen
die Geschichte der Wahrheit : waltet ais ein Wesentliches, in das Seyn hinauszuhelfen und
die Geschichte in ihren eigenwüchsigen Grnnd zu brin-
«Und dies fordert zuvor, dass diese Wahrheit selbst aus gen. / Sein und Zeit ist daher kein 'Ideal' und kein 'Pro-
ihrem kaum anklingenden Wesen doch schon die Grund- granun' - sondern der sich vorbereitende Aufang der We-
züge ihrer Silitte schaffe (das Da-sein), in deren Erbauer sung des Seyns selbst - nicht was wir erdenken, sondem
und Wachter das Subjekt des Menschen sich verwandelu was uns, gesetzt dass wir dafür reif geworden, in ein Denken
muss. / Um den V ollzug dieses V orbereitenden unserer Ge- zwingt, das weder eine Lehre gibt, noch 'Existenz' sicher!,
schichte handelt es sich allein in der Seinsfrage. Alle 'In- das wielmehr 'nur' die Wahrheit gründet als den Zeit-spiel-
halte' und 'Meinungen' und 'Wege' im Besonderen des er- raum, in dem das Seiende wieder seiend, d.h. zur Verwah-
sten Versuchs von Sein und Zeit sind zufallig und konnen rung des Seyns werden kann. »
verschwinden. » Die Vortrage über den Ursprung des Kunstwerks (1935/
Heidegger hat in den B eitriigen im Sein auch den 1936) zeigen, dass Heidegger das Ereignis desWahren und
« Grimm» gefunden (in dem Jakob Bohme nach Hegel die damit die Zeit sich massgeblich vom griechischen Tempel,
«Negativitat» dachte); der Humanismus-Brief an Jean von der griechischen Tragôdie, von den Hymnen HOlderlins
Beaufret denkt dann das Sein ais das Strittige, sieht in ihm her verstandlich macht. So schliesst denn auch unser Apho-
zugleich den Grimm und von diesem her das Bose sowie rismus mit einem Hinweis auf die Kunst :
andererseits das Heile und das Heilige. Heidegger hat nicht «Weil es dieser Verwahrungen mancheiner und auszeich-
nur Schellings Metaphysik des Bosen interpretiert, die eine nender bedarf, um überhaupt das Seiende in sich erstehen
Begründung der menschlichen Freiheit darstellt, sondern zu lassen, muss die Kunst sein, die in ihr Werk die Wahrheit
auch Nietzsches Lob zitiert, der Deutsche Idealismus suche setzt'. »
einen «Pantheismus », in dem das Bose kein Argument
gegen die Gottlichkeit sei. Wenn Heidegger die «national-
sozialistische Revolution» in seinen Reden von 1933 als II
«vollige Umwalzung» des «deutschen Daseins» auffasste,
dann gehorte für ihn wenn nicht das. Bose, so doch das
Heidegger nimmt in den dreissiger Jahren die Besinnung
Strittige zu dieser Umwalzung hinzu. Freilich hat er auch
betont, dass es einem nur «vorbereitenden» Denken um
Entscheidungen gehe, die den eigentlichen politischen (oder S. Der Text wurde von Egon Vietta veroffentlicht : Die Seins/rage
bei Martin Heidegger, Stuttgart, 1950, 128-130. Zu den «Beitragen»
religiosen) Entscheidungen noch vorausliegen und über diese vgl. meine Darstellung : Der Denkweg M. Heideggers, Pfullingen,
nicht schon mitentscheiden. Er hat deshalb jede moralische 1963.
298 OTTO P6GGELER DAS PROBLEM DER ZEIT 299

auf das Wabrheitsgeschehen in der Knnst znsammen mit der yom ersten Aufang des Denkens einen anderen Anfang
seinsgeschichtlichen Besinnnng ais Leitfaden für ein neues « znspielen », obgleich sie diesen nur im «Sprung» errei-
Fragen nach Sein und Zeit. Wie aber ist in diesem Fragen chen kënnen. Werm sie die «Gründung» der Wahrheit
die Zeit überhaupt in den Ansatz gebracht? Heidegger sucht des Seins übemehmen, erscheint das Da des Seins ais Zeit-
mm nicht mehr die Riiumlichkeit auf die Zeitlichkeit zurück- Raum (oder auch ais Zeit-spiel-raum). Das Wort «Zeit-
zuführen. Er interpretiert auch nicht znerst das Dasein auf Raum» meint hier aber nicht eine Spanne Zeit (etwa einen
seine Zeitlichkeit hin, um dann eine temporale Interpretation Zeitraum von hundert Jabren), sondern die «Augenblicks-
des Sinnes von Sein geben zn wollen : das Dasein ist ais Statte »'. Diese Augenblicksstatte ist für Heidegger nicht
Da, ais Offenheit des Seins, aufgefasst, die durch das Werk Zeit im Gegensatz zur Ewigkeit; vielmehr geht es in ihr
im Seienden eingerichtet oder geborgen werden muss. (Wenn mit der Zeit auch um die Ewigkeit, die gerade nicht das
Heidegger dabei das Werk der staatengründenden Tat vom Fortwiihren der sempitemitas sein soll, aber auch nicht das
Werk des Künstlers, des Dichters oder des Denkers unter- Zusammeufassend-Statische im nunc stans der aetemitas,
scheidet, führt er in neuen Dimensionen auch die Daseins, sondem die Freiheit, ais Vorbeigang im Augenblick abtre-
analyse fort.) Heidegger gibt vor aIlem nicht einerseits eine ten zu kënnen, um verwandelt (nicht ais das Gleiche) wie-
systematische Konstruktion und andererseits eine historische derzukehren. Diese Augenblicks-Statte entschwand dem Den-
Destruktion, sondem in einem die seinsgeschichtliche Be- ken, ais das Sein von der Anwesenheit her einseitig àls Ge-
sinnung auf das Da des Seins. Der Sinn von Sein erscheint genwart gedacht wurde, umgekehrt dann die Zeit von ihrem
nunmehr ais Wahrheit des Seins, namlich ais Unverborgen- «Seiu» her ais bestandiges Anwesen (so ais Jetzt : ais Noch-
heit oder Lichtung für das Sichverbergen, in der das Ent- nichtjetzt, Jetzt, Nichtruehrjetzt). Die Besilindigkeit ware
bergen zugleich ist mit einem Verbergen. Seiendes kann sich ais Ausdauer der Entrückung in Zuknuft und Gewesenheit
in einem unterschiedlichen Sein zeigen (z.B. ais Zuhanden- (so ais Instiindigkeit) zu fassen gewesen; Ausdauer hatte
sein oder ais Vorhandeusein usf.); diese Seinsweisen gehë- zugleich Einraumung, namlich Raumgeben für das Einzu-
ren ihrerseits in die Wahrheit des Seins, die so Grund für riiumende sein müssen. Die Ausdauer wnrde aber ais Dauer
jede Ontologie ist. Sie ist freilich abgründig-ungriindiger gefasst, deren Gesammeltheit Anwesenheit und Gegenwart
Grund : abgriindig, weil sie, die alles Gründen in sich trag!, erbringt. Damit wurden Raum und Zeit nicht nrsprtinglich
nicht mehr durch ein « Warum ?» auf einen weiteren Grund ais Zeitigung und Einramnung erfahren, und so gelangte das
befragt werden kaun; ungriindig, weil die aus ihr entlasse- Sein ais bestandiges Anwesen in den Anschein der Zeitlo-
nen Entbergungen ihrerseits ihren Grund und andere mëg- sigkeit. Raum und Zeit wurden dann dem Greifbarsten, dem
liche Entbergungen verbergen. Die Verbergung gehërt also Stofflich-Kërperhaften zugewiesen und von der Bewegung
zwiefach zur Unverborgenheit : ais abgründiges Sichverber- ais Umschlag (Metabolee) her gefasst. Die christliche Ausle-
gen des Geheimnisses und ais die Irre, die das Verbergen gung des Seienden ais des Geschaffenen und die neuzeitliche
mit dem Entbergen verbindet. Wird diese Wahrheit in ihrem Mathematisierung des Denkens radikalisierten diese Auffas-
Gründen eigens ais Da des Seins gegriindet, dann zeigen
sich in ihr' Raum und Zeit; Raum und Zeit müssen nun-
mehr aus dem Geschehen der Wahrheit des Seins gedacht 6. Vgl. die entsprechenden Zitate aus den Beitriigen in meinem
Buch De,. Denkweg M. Heideggers 244, 161, 178 und Ofters; über
werden. Raum und Zeit u.\1d über die Zukünftigen des letzten Gottes vgl.
dort 251 ff. und 262 ff. Diskussionen über die «Beitrlfge» sowie
Dk Beitriige zur Philosophie gehen konsequent in der über die Arbeiten des Nietzsche-Werkes waren ein Hauptinhalt langer
Weise seinsgeschichtlicher Besinnung vor : sie suchen in der Gesprache mit Heidegger in den sechziger Jahren. Vgl. auch Eugen
FINK, Zur Ontologischen Frühgeschichte von Raum-Zeit-Bewegung,
Seinsverlassenheit den «Anklang» des Seins; sie lassen sich nen Haag, 1957.
300 OTTO POGGELER DAS PROBLEM DER ZEIT 301

sung von Raum und Zeit; wenn die Physik .in u~serer Wie konnen nun Zeit und Raum aus der zogernden Ver-
Zeit Raum und Zeit wieder verkoppelte und dIe Zett als '"sa!~Ull,],; der Wahrheit aIs wer gemeinsamen Wurzel verstand-
vierten Parameter zum Raum hinzutat, bezog sie sieh nur gemaeht werden? AIs Versagen isl das zogernde Ver-
auf Raum und Zeit, soweit diese das Zahlbare sein konnen. sagen en!rÜekend (in die «Ekstasen» der Zeit) : zum Vor-
enthalt der Zukunft und zum Aufbreehen der Gewesenheit.
Heidegger will soIche Ausführung~n zur Gesehicht~ des AIs erinnemdes Erharren ist das En!rÜeken Sammlung in
Zeitbegriffs nieht aIs gelehrte Hrr:we,,:e verstanden Wlssen, die Zugehiirigkeit zum Sein und den Zuruf des Seins und
sondern als Anzeige der Aufgabe, m emem and~ren Anf";,,g so ein Zeitigen. AIs Zogem ist das Versagen berückend :
den abgriindig-ungründigen Grund der Wahrhett des Sems ein Feststellen des Sichversagens aIs Sehenkung des Gewahr-
als Da des Seius und so aIs Augenblieks-Statte eigens ru ten. Die Sammlung der Entrüekung findet in der Berüekung
gründen. Hier zeig! sieh dann das Niehts aIs zuge~orig z~ einen Umhalt und ist so Einraumen. Damit sind Zeitraum
Wahrheit des Seins namlich aIs das Andere des Sems. (HeI- und Augenbliekssüitte aus dem Ursprung der abgründigen
degger sag! wie H~gel : als das Ander~ ~ein~r s.~lbst. Damit Wahrheit des Seins gedaeht, ein Einrücken in die Wahrheit
aber will er gerade nieht Hegels Dlalek~ ubernehm~n. des Seins und so Fügung aIs Entrücken und Berücken, aIs
Eine Auseinandersetzung mit der spatplatomsehen Dmlektik, sammelnder Umhalt. Diese Wahrheit des Seins, die Lichtung
dem Neuplatonismus und dem Spin?zism~s fehlt und ~egel für, das Sichverbergen, ist zu bergen im Seienden (<< einzu-
erscheint als der grosse Geguer, weIl HeIdegger dem asthe- richten » in dieses, wie der Kunstwerkaufsatz sag! ; keineswegs
tiseh-theoretisehen Charakter der abendlandisehen Geist- aber ist zuerst die Wahrheit gegeben und dann das Bergen,
metaphysik ausweichen will. So spielt e~ in den früh~n Vo~­ ,solod"m Wahrheit geschieht nur im Bergen). So muss der
lesungen Augustin gegen den Neuplatomsmus aus, spater dIe ",elL-,~",,'ll< nicht nur als das in Vergessenheit Sinkende des
«tragische» Welterfahrung und deren Fügung gegen M~ta­ ersten Anfangs des Denkeus und als Aufgabe des anderen
physik und Dialektik.) Das Nichts ist ~as .Anden:. d~s Se~, Anfangs gefasst werden; es muss auch gezeig! werden, dass
weil die Wahrheit des Seins als abgrundIg-ungrundige sieh aus dem ursprünglichen Zeit-Raum Raum und Zeit entsprin-
versag!, indem sie sich gibt; so ist sie zogemde V ~rsagung. : gen, wie sie in unterschiedlichen Weisen Z.B. zum Ding,
sie entlasst eine gleichsam gestund~~e ~ntber~ng, mdem SIe zum Zeug, zum Werk gehoren. Damit werden alle jene Fragen
sich zwiefaeh (abgründig und ungrundig) ~erbrr~t. Das V~r­ zmückgewonnen, die zuerst zurückgestellt wurden: nach der
bergen durehrag! das Entbergen und trag! dleses sonut; « Wirklichkeit» von Raum und Zeit, nach der «Unendlich-
damit «füg!» das Verberg~nde. Entb.erge~ jeweils. Unver- keit », nach der Moglichkeit der Mathematisierung usf.
borgenheit. lm «Wink» zeIg! sich die z?ge~d SI~hversa­
gende, indem sie sich entzieht; gerade S? I~~ s~e Z~~t-Raum Lassen sich diese Gedanken Heideggers - gegen Hei-
und Augenblieks-Statte. Hochstes Zeuguis fu~ w.zogemdes deggers Absicht - auch von bekannten Denkansatzen her
Sichversagen ist unser Sein zum Tode. DIe Fügung der verstandiich machen? Heidegger wehrt sich dagegen, dass
Wahrheit zeig! sich aIs Streit von Erde und WeIl, aIs Gegen- seine Auslegung des Zeit-Raums auf «mythische Vorstellun-
über der Gottliehen und der Sterbliehen. Da Heidegger in gen» abgeschoben wird, denn diese seien erst zuletzt aIs vor-
den Beitriigen die « Zukünftigen» (di~ die neue Dagründung anfanglich für den ersten Anfang zu fassen. Doch war der
eigens übemehmen) auf den «Vor~eIgang des l~tzten <:,ot- entscheidende Anstoss die Weise, in der «Wahrheit» in den
tes» verweist, ist diese Fügung zuhochst Entseheldung uber Hymnen Holderlins geschieht. Die erste Hiilderlin-Vorle-
N1ihe und Ferne der Gotter oder des «letzten» Gottes, der sung sncht zu zeigen : Holderlins Dichtung entspring! einer
erst alles ersehienene Gottliehe in sein Wesen (den «Vorbei- Grundstimmung (dem trauernden Verzicht auf die alten Got-
gang») hebt. ter und der Bereitschaft für einen anderen Vorbeigang des
11
302 OTTO POGGELER DAS PROBLEM DER ZEIT 303
Gottlichen); diese Grundstimmung aber ist epochal delmers Ansatz vernichtend : um Wahrheit kann es in
bindlich. Die Fügung der Wahrheit des Seins wird nun nicht gehen, werm diese im Gefühl oder in einer
aIs eine Stimmung (ein Gestimmtsein) verstanden; diese èur,dsltimmllmg wurzelt; werm die Stimme des Seins in
Stinnuung wird letztlich zurückbezogen auf eine «Stimme» oder Affekten aufgenommen wird, bewegt man
des Seins. Dem nur «vorbereitenden» Denken geht es von Vernunft und Philosophie. In der Zukehr
um Lehre oder Verkündigung, sondern - im anderen An- Ab,kellf der Stinnuungen mag Zeit oder Zeit-Raum
fang - um eine Umstimmung. Da Zeit ais «Strom» auf- 'éd'àIuren werden, doch nicht die Zeit, anf die die theoretische
gefasst wird, kann Heidegger in seiner zweiten Holderlin-
Vorlesung die Umstimmung als Augenblicks-Stâtte verdeut- ··~~~~~~~~.I~s'~iCh bezieht. Heideggers Opposition gegen solche
lichen, indem er den Ister aus Holderlins Hymnen mit dem
il philosophischen Unterscheidungen konnte dann
einen Sinn haben, werm sich nachweisen liesse, dass
tragischen Geschehen der sophokleischen Antigone zusam- die Theorie (oder die Praxis) in eine Offenheit einge-
mendenkt'.
ist, die uns geschichtlich überkommt und unverfügbar
Wenn Heidegger die Walrrheit des Seins im Da als Zeit-
Raum und Augenblicks-Stiitte gründet und den Zeit-Raum ~è >~r:;:~~:a:b~e:r;~;in
einer Gestimmtheit
hingeführt werden aufgenommen
kann. Stimmung und und
zu
massgeblich in der Stimmung erfahren werden liisst, liefert und die in ihnen sich artikulierende Besinnung
er dann die Grundlegung der Philosophie nicht dem lrra- nicht das wohlunterschiedene Dritte zu Erkenntnis
tionalen ans? Für Kant z.B. gehOren die Affekte zum Ge- Willen, sondern wiesen hin auf eine vorgiingige fundie-
fühlsvermogen. lm Gefühl zeigt sich an, wie ich mich - in rende Sphiire. Weniger an Affekte, als an «Tugenden» war
Lust oder Unlust - meinem Mich-Vorfinden zukehre oder gedacht, werm man von Augustin bis Pascal in diesem Sinn
mich von diesern abkehre. Gefühle wie die des SchOnen und formulierte : «Non intratur in veritatern, nisi per chari-
des Erhabenen mogen die grosste Bedeutung für den Men- tatern. »
schen haben; aber auch in ihnen geht es nicht um Erkennt-
nis, nicht um objektive Bestimmungen des Gegenstandes.
Das Gefühlsvermogen ist eben vom Erkermtnisvermogen zu
unterscheiden, aber auch vom Begehrungsvermogen. Zum III
Begehrungsvermogen gehoren freilich die Leidenschaften _
jene Neigungen, die die Ueberlegung der Vernunft auszu-
schalten suchen, denen die Tugenden aIs vernunftgemiisse lm September 1969 hat Heideger in einem Seminar in
Bestimmungen des Begehrungsvermogens gegenüberstehen; Le Thor in der Provence über den Weg seines Denkens
zu diesen Leidenschaften haben die Affekte eine gewisse ausgeführt, auf diesem habe er zuerst nach Sein und Zeit
Niihe, da auch sie die Ueberlegung nicht aufkommen lassen und so nach dem Sinn von Sein gefragt, dann nach der
und das Gernüt um seine Fassung zn bringen drohen. Kants Wahrheit des Seins ais Geschichte und aIs Ereiguis, schliess-
Distinktionen waren, wenn sie das letzte Wort hatten, für lich aber in einer Topologie des Seins nach Ort und Ge-
gend. Nicht umsonst versuchte Heidegger in den ersten J ah-
ren nach dem Zweiten Weltkrieg Laotse zu übersetzen; auch
7. Vg!. Band 39 der Heidegger-Gesamtausgabe (Hiilderlins Hymnen
«Germanien» und <r Der Rhein », Frankfurt a.M., 1980). Vg!. 109 Heidegger denkt vom Weg her jene Bewegung, die sich in
über Stimmung ais Zeitigung; 111 und 54 wagt Heidegger im An- Zeit und Raum aufgliedert. Freilich bringt ein so stark
schlusz an H61derlin die paradox scheinende Rede von der «Ver- scholastisierender Vortrag wie der über Zeit und Sein in
ganglîchkeit des Ewigen». Zur spateren noch unpublizierten Hôlder-
lin-Vorlesung vgl. meinen Bericht in Der Denkweg M. Heideggers, der Anknüpfnng an Sein und Zeit wieder die genannte Drei-
220 ff. bzw. Vierdimensionalitiit der Zeit ins Spie!. Doch schei-
304 OTTO P6GGELER DAS PROBLEM DER ZEIT 305

nen nun der Raum und die «Metaphem », die ihm entnom- wenn man von den hier notigen Auseinanderset-
men sind, einen Vorrang zu bekommen - genau wie im absieht, ergibt sich ~ine Grundfrage an Heidegger.
gleichzeitigen franzosischen Philosophieren, das anch in der >B~itrii'g e denken das Sem ais Ereignis, indem sie die
Zeit der Unbehaustheit die «Wahrheit des Wohnens» neu ~~~:~:~~, des Daseins an die Wahrheit des Seins aIs
entdeckt. So konnte Bataille in einer e!was kurzschlüssigen le Daseins an sich selbst nehmen; so wird das
Polemik gar schreiben : «Bevor er 'in die Welt geworfen' (in seiner Gegliedertheit vom Einzemen bis zum Volk
wird, wird der Mensch in die Wiege des Hauses gelegt» 8 • Volk~m) ein Sel?st, ~nd dieses Selbst fasst Heideg-
« Eigentnm» (m Smne z,B. von «Fürstentum»).
Die Tradition Bergsons ist in Frankreich auf verwandelte
Weise fortgeführt worden. E. Levinas z.B. ist mit Bergson der metaphysischen Begrifflichkeit, die von Platon
"Fle~,el Identitiit in ihrer Selbstbezüglichkeit mit Differenz
darin eins, dass wir an die Dauer oder die Zeitigung nicht
herankommen, wenn wir einseitig von de1· Zeitwahrnehmung ':(~jtf::~:~ti hat die «Grundstimmung» jeweils den
\: von Ereignis und Austrag» auszustehen _ ge-
ausgehen; Zeitigung erfahre ich vielmehr z.B. dann, weilll
ich mich aus der Müdigkeit aufraffe. Anders aber aIs bei der traditionnellen Formel von der Identitat der Iden-
Bergson bekommt in den entsprechenden Analysen das Abrei- und Differenz : den Austrag aIs Differenz zwischen
ssen und das N euansetzen in der Zeitigung einen Akzent. Sèiendelm und seinem Sein (Vorhandensein, Zuhandensein
,,;,ciiUl;!.), das Erei~ aIs Iden~tat oder «< tautologische ») Sel-
Diese Diskontinuierlichkeit erlangt ihre Schiirfe in1 Altern
und Sterben der Menschen, aber auch in1 V"rbiiltnis der Ge- T'IeJŒtitiitvon Sem. UI~d Dasem, den Einklang ais Geweilige)
'" v~n Er~lgms und Austrag. Da jedoch in der Wahr-
nerationen (so der Eltern zn den Kindem). lm Augenblick ein
Letztes zu finden und doch andere Augenblicke freizulassen, . des Sems die Ver?~rgung die Entbergung in zwiefacher
so den Hiatus zwischen der Zeit und einer statisch-perfekten Welse durchragt, beseltigt Heidegger spliter die Assoziation
von Eigentlichkeit, Sichzueigensein und Eigentum aus d
Ewigkeit zurückzunehmen, erscheint aIs Aufgabe einer Philo- ··
sophie, die den Konigsweg der Ethik geht und ausdrücklich .' ~elgms.:
E er dk em
en t. es zug!eich ais Enteignis und ErliugnislO.
D1e We1se der philosophischen Ueberliefetung von Pl t
biblische Traditionen aufninlmt. Von solchen Gedankenglin- b·IS Pl· a on
otin und Hegel, Zeit ais blosses Abbild der Ewigk ·t
gen her muss Levinas die Nlihe zu Heidegger anerkennen,
und als die verhangnisvolle Unruhe des Herausfallen el
andererseits ,aber doch Heideggers Weg (anch abgesehen
von dessen politischen Verstrickungen) aIs einseitig «iisthe-

w:
leser
E· gk . hm s aus
. elt zu ne. en, wird zugunsten der christlichen
tisch» kritisieren. Weilll Heidegger in den für ihn schwieri- und nGeuzehilt~chhen SOW1e schliesslich der tragischen Erfahrung
gen Nachkriegsjahren jedoch eine Uebersetzung des Tao- v?n desc h c : e und Geschick verabschiedet. Wird aber
n1~hturc die Umgestaltung des metaphysischen S
te-king begann, fand er dort auch den Satz,: «Wird das ... d· prach-
SpIeIs« Id e~tJtat » Ie Endlichkeit, d.h. die Abgrüudigkeit
grosse Tao verlassen, gibt es Humanitiit und Gerechtigkeit. »
Die Ausrichtnng auf das «Aesthetische» oder das «Ethi- d.er Wahrhe1t des Seins in ihre jeweilige epochale Eigenheit
emgeschlossen ? Man wird Heidegger nicht unterstellen wol-
sche» führt auf letzte Grundeinstellungen zuruck, über die
len, er ~olge der Forderung, wie sie inzwischen schon in
sicherlich nicht schnell entschieden werden kann'.
allen Ze1tungen steht : auf seinem Lebensweg die .
IdentiCt a zu fi n den 0 der nach einer moglichen «nationalen» elgene
8. Zitiert nach der zusammenfassenden Darstellung von Otto Frie-
drich BOLLNOW, Mensch und Raum, Stuttgart, 1963, 275.
9. Vgl. E. LEVINAS, De l'existence à l'existant, Paris, 1947; Tota- 1.0. Das Wortspiel «Ereignis» hat Heidegger 1941 in dem M
lité et Infini, Den Haag, 1961. Zu Heideggers Laotse-Uebersetzung sknpt «Das Ereignis» b~~it e!ltfaltet. Zur Sache des Denkens. Tü~~=
vgl. Paul SHm-YI HSIAO, in : Erinnerung an Martin Heidegger, hrsg. gen, 1969, 23: zu «.~augrus». und «Einklang von Ereignis und
v. G. Neske, Pfullingen, 1977, 119-129. Austrag» vgl. . Identltat und Dlfferenz, PfulIingen, 1957, 28, 10.
306 OTTO P(jqGELER ' DAS PROBLEM DER ZEIT 307

Identitiit zu fragen bzw. nach einem Ersatz für diese. Kann X'Ûl~beteiUigteAufnehmen des Anderen und das Eintreten für
jedoch nicht auch das abgründig-ungründige «Spiel» der zn vermag. Die Katastrophe der Weltkriege schien
Wahrheit des Seins, der Zeit-spiel-raum, einseitig auf «Iden- Aufbrnch zu Anderem notig zu machen' wurde dieses
titat» ausgerichtet werden ? l'{ And,)re a~er nicht nur in .der Fixierung auf das Eigene ge-
? Konnte dagegen mcht die heutige Bestimmung Eu-
Wenn Heidegger 1939/1940 Holderlins Rede von der '/'1> ..,m•• gerade darin liegen, für den Anfbau der neuen Welt-
« allgegenwartigen », «gottlichschonen» Natur ausIegt, fasst geltend zu machen, dass die Menschen nur so
er das Berückende ais das Auseinauderhalten z.B. von Hohe zn Eigenem findem, dass sie Anderes mit sich wissen ? Franz
und Tiefe, das Entrückende ais Einrücken in die Einheit des RoSe~weig ~at. schon 1~~0 !n Kasseler Vorlesung Au-
Zusammengehorens des Auseinaudergehaltenen. Die Ent- genblick, E:el~s und .Eraugms zusammengebracht; spater
rückung, isoliert genommen, konne deshalb wie eine «my- dann der blshengen Philosophie, die nur vom Ich gewusst
stische Versenkung» erscheinen". Traditionell würde man habe, die Erfahrung des Du entgegengestellt· dass dieser
gesagt hab en, dass der Raum zusammenhalte, die Zeit aber Ansatz un~ seine Bedeutung fi!' die Philosophi~ Thema phii-
trenne. Doch dieses Trennende der Zeit wird von Heidegger n~m7~ol~gJScher. N;'~ysen se~ kaun, hat E. Levinas ge-
beiseitegeschoben : das abschiedliche Sichentziehen der Ver- zeJgt . Die dabe~ notige A?Bemaudersetzung mit Heideggers
gangenheit wird nur berücksichtigt aIs verwaudeites Bleiben, Fragen nach Sem und ZeJt und somit eine weitere Phase
niimlich ais uns bestimmende Gewesenheit; die Zukunft ist im Gesprach zwischen frauzosischem und deutschem Philo-
nicht die audere, sondem nur unsere eigene Zukunft. In einer sophieren hat aber kaum begonnen.
befremdlichen Phiinomenblindheit schiebt Heidegger deshalb
z.B. für die Ieitende Todesaualyse das Dabeisein bei Ster-
benden beiseite. Die Orientierung am «ewigen» Stemen-
himmel ist hinfiillig geworden; der Versuch, dem Menschen
dennoch «Heimat» zu gewinnen, geht aber nostaigisch
von der Gegenwendigkeit zwischen Erde und Himmel aus,
wie sie seit Laotse (oder gar seit der neolithischen Hinwen-
dung zum «Wohnen» ) als «natürlich» erscheinen. Hat
aber nicht Z.B. die Aufdeckung des atomaren Geschehens
oder die Radioastronomie uns mit einer gauz auderen Na-
türlichkeit konfrontiert? Es ist schwer zu sehen, wie Heideg-
ger seiner Analyse des Zeit-Raums noch den Zeit-Raum,
der für diese Natürlichkeit massgeblich ist,integrieren konnte.
Zwar wird die sog. «metaphysische» Tradition ais ein selbst-
herrlicher Zugriff auf das Seiende kritisiert; die Frage
bleibt jedoch, ob die Einkehr in das Ereignis nicht ihrerseits
selbstbezogen ist, wenn. sie die metaphysische Tradition in
dieser Weise auffasst, in der Mathematik nicht das Erfassen V 12. V~l. die A~t. II~ v~n Rosenzweigs Gesammelten Schriften (in
von Gestalten des Anderen und in der Historie nicht das Dorberettung). Dle .~nentlerung am Eigenen und am Anderen des
u ~raucht den ~uckbezug auf das AIlgemeine nicht auszuschlie-
s~~n , vgl. dazu memen Vortrag «Between Enlightenment and Roman-
ttc~sm : Ros~nzweig and Hegel» (Jerusalemer Rosenzweig-Kollo-
. 11. Erliiuterungen zu Holderlins Dichtung, Vierte, erweiterte Auf- qUll!m,. 19~O, 1ll.Vo~?ereitung): Zu Heidegger vgJ. auch meinen Nach-
lage, Frankfurt a.M., 1971, 53 f. ruf III . ZeJtschrzft fur allgememe Wissenschaftstheorie, 8 (1977), 1-21.
Sixième partie

MÉDITATIONS
POST-KANTIENNES
ERICH HEINTEL

BEGRIFF DES MENSCHEN ALS


DASEIENDE TRANSZENDENTALITAT»

,'~"v folgenden Ausführungen beschiiftigen sich von Kant


.- ,_._1. einem Problem, das eine lange Geschichte aufweist.
mich geht es dabei ausserdem darum, an ibm zu zeigen,
sebr bezüglich des Begriffs des Menschen Aristote-
(aristotelisch-scholastische Ontologie) und Transzen-
delltaJ.isnms (neuzeitliche Ich = Philosophie) auf einauder
angewiesen sind.
Seit Platon und Aristoteles .keunen wir im Rahmen der
philosophischen «Psychologie» die Dnterscheidung von Vi-
talseele und Geistseele. Ohne an dieser Stelle die Tennino-
lôgie im Griechischen und im Lateinischen im einzelnen zu
v~rfoJgen, kann man sagen, dass in der Sprache der Scho-
Jatisk sich mit dem Begriff des Menschen notwendig die
Forderung verbindet, ibn in seiner geschopflichen BeseeIt-
heit ais Einheit von forma corporis (Vitalseele) und forma
formarnm (Geistseele) zu denken. Durch letztere ist er von
allem anderen natÜflichen Seienden und speziell von den
Tieren unterschieden. Die Sonderstellung des Menschen er-
gibt sich damit aus der Besonderheit dieser seiner Geistseele.
Dm aber den natürlichen Menschen in dieser Besonderheit
in den Gesamtraum der Ontologie einordnen zu konnen,
muss die menschliche Seele trotz dieser Besonderheit und
d.h. einschliesslich die Geistseele aIs forma corporis go-
dacht werden kounen. Hier sehe ich bedeutende fundamen-
talphilosophische Schwierigkeiten, auf die ich an anderem
Ort ausführlich eingegangen bin (<< Die beiden Labyrinthe
der Philosophie», systemtheoretische Betrachtungen zur Fun-
312 ERICH HEINTEL «DASElENDE TRANSZENDENTALIT JiT» 313

damentalphilosophie des abendliindischen Denkens Bd. 1, Transzendentalitiit über ihre Transzendentalitiit· hinaus in
1968, §§ 5, 10, 11). Die neuzeitliche Transzendentalphilo- einem Weltbezug steht, ohne den Transzendentalitiit lediglich
sophie ist von ihrem Begriff des «Ich» und seiner Freiheit- ein beziehungsloses Abstraktum wiire. lm Grunde ist diese
Iichkeit her der Problematik grundsiitzlicher gerecht gewor- Problematik dem Denken durch Kant unabweisbar gestellt
den als die traditionelle Ontologie. Sie hat aber ihrerseits worden. Jede inhaltliche Bestimmtheit meiner selbst setzt
wiederum besondere Schwierigkeiten, die «daseiende Trans- Erfabrungsgegebenheiten voraus, die ais solche selbst wieder
zendenta/itiit» des Menschen ais eines natürlichen lndivi- transzendental konstituiert sind. Nun geht aber die transzen-
duums fundamenta/philosophisch zu bewiiltigen. Auch darü- dentale Gegenstandskonstitution bei Kant über die Anschau-
ber habe ich an anderem Orte Genaueres und Mehreres ungs-und Verstandesformen nur bis zu einer Erscheinungs-
gesagt (A.a.O. §§ 32 und 33). welt ohne eigentliche lnnerlichkeit, die daher ais solche weder
Wie steht es nun bei Kant um die Selbsterkenntnis des ontologisch differenziert werden kann (eben im Sinne der
Menschen, die zentrale Frage seines «We1tbegriffs» der Problematik der aristotelischen «Psychologie»), noch es
Philosophie? Da aile empirischen Bestimmtheiten, auch in gestattet, dass «Ich» sich (mich) selbst ais daseiend in der
der Se1b.sterkenntnis des Menschen, diesen innner schon als Ercheinungswelt von allem anderen Daseienden grundsiitz-
Vermittlung (ais Transzendentalitiit) voraussetzen, kann sich Iich absetzen kann. Damit aber wird unter anderen die
einerseits diese seine Selbsterkenntnis grundsiitzlich niemals Frage nach «meinem» Leib zu einem zuletzt unlosbaren
in Erfahrungserkenntnis erfüllen, lasst sich andererseits aber Problem. Es ist daher nicht vel"W1.mderlich, dass Fichte die
auch nicht in der Weise der Metaphysik vollziehen, die für Deduktion des Leibes im Zusammenhang mit der Anerken-
Kant - iihnlich dem Vorgehen der von Aristoteles kritisier- nung des Du vornimmt, ganz einfach deshalb, weil die Diffe-
ten Platoniker die «abgetrennte» Idee betreffend - die denzierung der Erscheinungswelt in der Richtung auf mei-
Transzendentalitiit des Menschen, sein «lch», in eigen- nen Leib einerseits, in der Richtung auf das Du (aIs «alter
tümlich gespensterhafter Weise verselbstiindigte. Kant schreibt Ego» in einem anderen Leib) andererseits vor die gleiche
daber kritisch : «Dagegen bin ich mir meiner selbst in der Schwierigkeit stellt. Nnr nebenbei sei hier bemerkt, dass im
transzendentalen Synthesis des Mannigfaltigen der Vorstel~ konsequenten Transzendentalismus auch das Ding an sich
lungen überhaupt, mithin in der synthetischen ursprÜllgli- keine Differenzierungsmoglichkeiten bietet, sofem man es
chen Einheit der Apperzeption, bewusst, nicht wie ich mir - wie es allein moglich ist - grenzbegrifflich und nicht
erscheine, noch wie ich an mir selbst bin, sondèm nur dass • affizierend» versteht. Es hat dann lediglich und ohnehin
ich bin. » (Kritik der reinen Vemunft, B 157.) bedeutsam genug die Aufgabe, Unmittelbarkeit vor Vermitt-
Demgemiiss geht es in aller Se1bsterkenntnis des Menschen lung so sicher zu stellen, dass Vermittlung nicht ais ein
(im «!ch denke» ais blosse Transzendentalitiit) darum, Erschaffen der Dinge missverstanden werden kann. Dieses
dieses «dass ich bin» (der daseienden Transzendentalitiit) grenzbegriffliche Ding an sieh sichert damit niimlich zuletzt
einzuholen bzw. über die Einsicht in die Grenze des jeweili- den Kontaktpunt von Denken und Sein im Sinn der Kor-
gen Versucbs den Gedanken systematisch weiterzuführen. respondenztheorie der Wabrheit, freilieh unter der Voraus-
Von diesem Ansatz her aber werden wir nun in eigentüm- setzung, dass aile bestimmte Realitat schon vermittelt (d.h.
Iich antinomische Sachverhalte verwickelt : ist es doch einer- im weiteren Sinn wahrheitstheoretiseh «kohiirent») ist, ohne
seits klar, dass nur daseiende Transzendentalitiit überhaupt deshalb in Vermittlung anfzugehen. Diese Einsicht ist für
ein Problem der Differenzierung der Erscheinungswelt über die Wesensbestimmung der Wabrheit sehr wichtig, doch ver-
den in der Artgesetzlichkeit des Tieres fundierten Umwelt- mag Kant von hier aus niemals zu einer ontologisehen Be-
bezug hinaus haben kann, dass andererseits nur daseiende grÜlldung des «Naturzwecks» zu gelangen und sprengt sei-
314 ERICH HEINTEL • DASElENDE TRANSZENDENTALlT AT » 315

nen Transzendentalismus überdies auch noch, wenn cr im lismus in dieser Kontroverse leicht zu heifen. Sind doch rur
Rahmen seiner Ethik dem jeweils sich freiheitlich bestim- ibn Raum und Zeit Anschauungsformen des transzendenta-
menden Ich seinen eigenen «intelligiblen Charakter» zu- len Ich, ohue die bestimmte Erfahruogswelt weder sein noch
schreibt. Bei einiger Konsequenz kann «lch» (daseiende gedacht werden kann. Und diese Verteidigung ist nicht zu
TranszendentalWit) im Transzendentalismus ebenso wenig widerlegen : ohue transzendentale Zeitlichkeit gibt es keine
zu «meinem» Leib gelangen wie ich in moralischer Selbst- innerzeitliche Gegenstandlichkeit, sodass aile zeitlichen Ab-
bestimmung handeind ais das leibliche GeschOpf, das ich laufe in ihrer jeweils bestimmten und Erfabrungswissen-
bin, mich von «meinem» intelligiblen Charakter her bes- schaften erst enniiglichenden Realitat sich als vennittelt er-
timmen kann. weisen, d.h. aber daseiende Transzendentalitat voraussetzen
Das hier Wesentliche lasst sich anch noch auf andere müssen, so wie ich mich daseiend selbst als solche voraussetze.
Weise in Sicht bringen, namlich mit dem Hinweis, dass Kein empirischer Begriff des Menschen kann den «existie-
Kants Unterscheidung von transzendentalem ldealismus nnd renden Begriff» (Hegel) der daseienden Transzendentalitat
empirischem Realismus mitten durch die daseiende Trans- erfassen und muss ihu doch voraussetzen.
zendentalitat geht und sie daher niemals zu dem gelangen Die kritische Unterscheidung von transzendentalem ldea-
lassen kann, was ich ais natiirliches Individuum bin. Wir lismus nnd empirischem Realismus zeigt sich hier metho-
wollen diese Einsicht in einem bestimmten Aspekt, namIich disch in schOnstem Licht : sie gibt einerseits der empirischen
dem temporalen, noch genauer exemplifizieren, zumal es sich Wissenschaft freien Raum für jede Forschung am Menschen
dabei um ein Problem handelt, das in der Diskussion mit in innerzeitlichen Zusammenhangen, verhindert aber ande-
dem dialektischen Materialismus und dem erkenntnisphilo- rerseits, dass diese Forschung ais letztes Wort den Menschen
sophischen N aturalismus eine bedeutende Rolle spielt. so vereinnahmt, dass er in seiner Transzendentalitat und da-
Es ergibt sich niimlich folgende Aporie : ohne das trans- mit überhaupt ais « Mensch» zu Grunde geht und verschwin-
zendentale lch ist eine bestimmte Erfahrungswelt ais Vo- det. Wie schon bei Aristoteles mit seinem «von aussen»
raussetzung aller Erfahrungswissenschaften nicht gegeben. kommenden «Geist» wird damit z.B. jede Naturalisierung
In der Welt aber erscheint daseiende Transzendentalitat nur des « !ch» kritisch verhindert und der philosophische Raum
ais der Mensch, der ich jeweils bin. Es liegt nun die beson- der Fragestellung offengehalten : der Mensch wird damit
ders auch von dialektischen Materialisten gestellte Frage nahe, . keineswegs aus der Evolution der Tiere auf der Erde heraus-
ob es vor dem Auftreten des Menschen in der Entwicklung genommen und doch wird zugleich verhindert, dass naive
der Organismen auf der Erde gewissennassen keine Welt Verabsolutierung in der Weise einer «biologischen» Er-
gegeben habe? Damit aber scheint der empirische Rea- kenntnisphilosophie mit ihrer das Problem eliminierenden
Iismus, in nnserem Beispiel derjenige der Evolutionstheorie, « Erklarung» des Apriorischen ais «neue kopernikanische
jeden Transzendentalismus ad absurdum geführt zu haben. Wendung» (wie jüugst im iisterreichischen Fernsehen) ge-
Denn es ist eine nicht wideriegbare Erfahrungstatsache der feiert werden kiinnen.
Biologie, dass dem Menschen auf dieser Erde in grossen Für die Philosophie aber bleiben gerade von diesen Ein-
Zeitraumen andere tierische Organismen vorausgegangen sichten her weitere fundamentalphilosophisch schwerwie-
sind, ohne die die Voraussetzungen rur das Dasein des Ge- gende Fragen offen : in ihr geht es ja um den «ganzen»
schOpfes Mensch in den Zeitablaufen gar nicht gegeben ge- Menschen, den sie ais daseiende Transzendentalitat weder
wesen waren. an methodische Abstraktionen der Biologie noch an eine
Nun vennag sich freilich der transzendentale ldealismus Transzendentalitat verlieren darf, die in der Unterscheidung
mit seiner kritischen Unterscheidung vom empirischen Rea- von transzendentalem ldealismus und empirischem Realis-
ERICH HEINTEL «DASEIENDE TRANSZENDENTALIT AT. 317
316

mus jedenfalis nicht so fixiert werden kann, dass sie sich falls in der Erfahrnng gegebenen Wirkung durch Freiheit
ihrerseits ais eine ad hoc gesetzte philosophische Fiktion und unterscheiden ? ... (diese letztere ist jedenfalls nur unter der
damit selbst ais Abstraktion erweist. Für den Transzenden- Voraussetzung denkbar), dass die Ursache jener Wirkung
talismus ergeben sich hier bezüglich der Logik der Dialek- gieichfalls vernünftig und frei sey. Hieraus entsteht, dass ich
tik interessante Aporien die man unter den Ueberschriften in die Kantische Terminologie eingreife, eine Wecbselwir-
« mein» Leib (wie bin ich ais Transzendentalitiit natürli- kung nach Begriffen; eine zweckmassige Gemeinschaft; und
ches Individuum ?), «ich handle» (wich bin ich aIs «Frei- diese ist es, die ich Gesellschaft nenne.» (Werlœ, Lauth
heit» natiirliches Individuum?) und ich sterbe (wie ist Ill. S. 36 f.) Am 29. August 1795 schreibt Fichte an Rein-
TranszendentaliHit zugleich aIs nicht innerzeitlich und doch hold unter anderem folgendes : «Ich reite das Pferd, ohue
einen natürlichen Tod erleidend - in der Zeit verendend - esum Erlaubnis zu fragen, und ohue von ihm hinwiedernm
denkbar?) thematisieren kann. geritten seyn zu woIlen; warnm bin ich doch bei dem Pfer-
deverleiher bedenklicher. Dass das arme Tier sich nicht
Interessant sind in diesem Zusammenhange Ausführungen wehren kann, kann nichts zur Sache beitragen. Und so
Fichtes, die sich mit der transzendentalen Deduktion dessen bleibt es immer eine sehr bedenkliche Frage, ob ich nicht,
beschaftigeli, was er «GeseIlschaftlichkeit» (III. S. 38.) des anf die allgemeine Meinung gestützt, das Pferd mit eben dem
Menschen nennt. Sie setzen immer schon die Weltlichkeit der Unrechte reite, mit weIchem der rnssische Edelman, gleich-
daseienden Transzendentalitat voraus : es muss also das falls auf die alIgemeine Meinung gestützt, seine Leibeigenen
Nicht-Ich (aIs Inbegriff des Erscheinenden) schon konsti- verschenkt, verkanft, und zum Spass knutet... (Nun findet
tuiert (<< gesetzt ») sein. Erst über ein Hinterfragen der Er- sich) im synthetischen Gange der W.L. der Satz : Ich muss
scheinungswelt kommt es zur Realisierung des Du aIs eines wch ais Individuum denken, d.h. aIs bestimmend meine
vernünftigen Mitrnenschen und damit zur Konstitution der Sphare von Dingen, die nicht anfangen konnen (Die Indi-
GeseIlschaft. Damit aber müsste es über Kant hinaus schon yidualitiit drückt sich nur in der Sinnlichkeit aus, das reine,
mit der Frage nach dem eigenen Leib zn einer Anerkennung uneudliche Ich ist Eins; und da es Individualitat eines Ich
des Naturzwecks» kommen, der dann nicht bloss ein (me- seyu solI, so kann sie. nur thatig bestimmend sein) bestimmt
thodisches) AIs-Ob der «reflektierenden Urteilskraft» blei- in ciner Sphare vernünftiger Wesen ausser mir : ich kann
ben kann, und darüber hinaus zn derjenigen des «Du» ais das nicht, ohue Individuum (zu) sein, ohne eine soIche
(eines vernünftigen) alter Ego, das damit gewissennassen zu Sphare, und jedes Objekt in dieser Sphiire gleichfals aIs In-
einer zweiten daseienden Transzendentalitiit wird, bzw. wer- dividuum zu setzen : mithin ec. Es ist kein Individuum,
den müsste. Von Fichtes Ansatz her ergeben sich hier nicht wenn es ihrer nicht wenigstens zwei giebt... [es ist] absolu!
unbedeutsame Schwierigeiten, die er freilich nicht vollig klar unmoglich, dass ich mich aIs Individuum setze, ohue ein
gesehen hat. J edenfalls aber entsprechen seine Argnmenta- Wesen ausser mir aIs Individuum zn setzen.» (III. S. 301.)
tionen der angegebenen Problemlage. Er führt namlich die
GeseIlschaftlichkeit mit folgenden Gedankengangen ein : Fichte zielt hier (darum die Abhebung von dem unbedeu-
« Die Natur wirkt auch da, wo sie zweckmassig wirkt, nach klich gerittenen Pferd, das ais «Naturzweck» im Unter"
notwendigen Gesetzen; die Vemunft wirkt immer mit Frei- schied zu einem allenfalis pferdeahnlich erscheinenden FeIs-
heit. Mithin würde U ebereinstimmung des Mannigfaltigen stück oder zum Pegassus oder zn einem Hutschpferd im
zur Einheit, die durch Freiheit gewirkt ware, der sichere nnd Ringelspiel dann freilich schon ein Hinterfragen der Erschei_
untrügliche Charakter der Vernünftigkeit in der Erscheinung nungen aIs soIcher verlangt) anf die Deduktion der Rechts-
seyn. Es fragt sich nnr : wie solI man eine in der Erfahrnng sphare, zuletzt aber geht es bei alledem um die fundamen-
gegebene Wirkung durch Nothwendigkeit, von einer gleich- talphilosophische Bedeutung des Mitrnenschen, der ja auch
318 ERICH HEINTEL «DASElENDE TRANSZENDENTALITJfT> 319

sehon bei Kant niemals bloss als Mittel, sondem immer auch stimmt werden. Und so giibe der Begriff des Freiseyns ein
ais Selbstzweck anzuerkennen ist. Auf diese Weise wird die theoretisches Denkgesetz ab, das mit Nothwendigkeit herrsch-
Gesellschaftlichkeit des Menschen in die systematischen te über die ideale Tiitigkeit der Intelligenz.» (Werke, Lauth
Grundlagen der Wissenschaftslehre selbst aufgenommen. Da V., S. 77 f.)
niimlich ein vemüuftiges Wesen sieh nicht selbst setzen kann, Freilich fragt sich hier, welchem «Ich» eigentlich das
ohne die Aufforderung zur freiheitlichen Selbstbestimmung, «priidikat der Freiheit» zugesprochen werden kann? lm
muss es sieh über sein Dasein als «Naturzweck» (Tier) Grunde doch nur der schon daseienden Transzendeutalitiit,
hinaus notwendig in der Gesellschaftliehkeit anderer ver- d.h. dem in der Welt handelnden Ich 1 Insofem muss die
nünftiger Wesen setzen. «ner Mensch (so alle endliche" We- ursprÜllglich setzende Tathandlung des transzendentalen Ich
sen überhaupt [1]) wird nur unter Menschen ein Mensch, selbst schon aus der Analogie zum eigentlich handelnden
und da er nichts auderes seyn kann, denn ein Mensch, und Ich ais (freilich «unbewusst») unter dem Gesetz der Frei-
gar nichts seyu würde, wenn er dies nicht wiire - sollen heit gedacht werden, obwohl dieses handelnde Ich immer
überhaupt Menschen seyn, so müssen mehrere seyu. Dies schon leiblich individuell in Gesellschaft mit anderen leiblich-
ist nicht eine willkührlich angenommene, auf die bisherige individuellen Mitruenschen erst aus dem transzendentalen
Erfahrung, oder auf andre Wahrscheinlichkeitsgründe auf- Ich deduziert ist. Fichte fiihrt an der eben zitierten Stelle
gebaute Meinung, sondem es ist eine aus dem Begriff des folgendermasseu fort: «Beispiele dieser Art der Bestimmung
Mensehen streng zn erweisende Wahrheit.» (III. S. 347.) unserer Objecte haben wir schon in einer andem Wissen-
Dagegen wird sehwer etwas zu sagen sein, ist aber die sehaft gefunden, in der Rechtslehre. Weil ieh frei bin, setze
. Ableitung aus dem « Begriff des Menschen » ais immer schon ich die Objecte meiner Welt ais modifieabel, schreibe ieh
daseiender Transzendentalitiit gleichzusetzen mit derjenigen mir. einen Leib zu der durch meinen blossen Willen nach
aus dem «Eins» des reinen unendlichen Ich? Individuell meinem Begriff in Bewegung gesetzt wird, nehme ieh Wesen
daseiende Transzendentalitiit ist sieher nicht ohne andere meines gleichen ausser mir an, u.dergl... Wenn sieh diese
individuell daseiende Transzendentaliüit zu denken, wie aber Muthmassung, dass ein Theil unserer vorgefundenen Welt
ist individuell daseiende Transzendentalitiit überhaupt in der durch die Freiheit, ais theoretisches Princip, bestimmt sey,
notwendigen Einheit und Unterschiedeuheit zugleieh mit bestiitigen, und es sich finden sollte, dass gerade dieser Theil
dem reinen weseutlichen Ich zu denken. Kürzer : wie bin die Sphiire der Objecte unseret Pflichten ausmacht, so warde
« Ich» ais Transendentalitiit und natürliches Individuum in das Gesetz der Freiheit, ais praktisches Gesetz an das
einem zn denken ? Bewusstseyn gerichtet, nur fortsetzen, was dasselbe, als theo-
Für Fiehte besteht die L6sung dieser Frage darin, dass er retisches Princip, ohne Bewusstsein der Intelligenz selbst ange-
eben das « praktische Ich » in den Konstitutionsgedanken sei- fangen hiitte... »
ner Transzendentalphilosophie eingehen liisst, in dem ebenso Mit dem fundamentalphilosophisch angesetzten «Unbe-
interessanten wie fruehtbaren Ansatz seiner «Sittenlehre ». wussten» geraten wir stets in eine Art psychoanalytischen
Fichte sehreibt : «U nsere Welt ist sehleehthin niehts ande- Transzendentalismns, der sieh entweder aus der Analogie
res, ais das Nieht-Ich ist gesetzt, lediglieh um die Besehriinkt- ZUT Natur (dem Ansatz nach in Schellings Naturphilosophie)
heit des Ich zu kliiren, und erhiilt sonach aile ihre Bestim- oder ZUt Freiheit (Fichtes praktisches Ich) versteht. Sieher
mungen nur durch Gegensatz gegen das Ich. Nun soli unter exisliert «daseiende» Transzendentalitiit nur leiblich und
anderen, oder vielmehr vorzugsweise, dem Ich das Priidikat handelnd und scheint so entweder naturalistische oder ge-
der Freihet znkommen; es muss sonach ja wohl auch durch sellschaftlich-geschichtliche (pragmatische oder hermeneuti-
dieses Priidikat das Entgegengesetzte des Ich, die Welt, be' sche) Voraussetzungeu anch ihrer selbst ais Transzendenta-
«DASElENDE TRANSZENDENTALlTllT» 321
ERICH HElNTEL
320
litat zu fordem. Zuletzt ist es dann rclati" gleichgü1tig, ob sation - der Zweck ist Reife zur Fortpflanzung. In-
ich die «transzendentale Differenz» mit unbewussten oder Btinkt - der Zweck ist animalisches Leben - u. 50 wird
bewussten Voraussetzungen unterlaufe : Fichte und Schelling es immer weiter fortrücken; bis zur Moralitiit.» (S. 261 L)
haben jedenfalIs bis auf die Gegenwart in beiden Versionen Freilich schliesst sich an diese Stufenleiter sofort eine sehr
N achfolger gefunden, die Kants kritische Scheidung von kritische Bemerkung an : «Selbsterhaltung ist allerdings er-
transzendentalem Idealismus und empirischem Realismus so stes Gesez des Menschen wenn man ibn von seinem niedrig-
oder so nicht emst genug genommen haben, womit wir frei- sten Theile zu betrachten anfiingt; insofem er nemlich ve-
lich wieder bei den Aporien der position des kritischen getiert; sein Pflanzenleben lebt. Das Moas hat diesen Trieb
mit ibm gemein, u. eine soIche Moral erhebt sich nicht über
Transzendentalismns gelandet sind.
das Moos.» (S. 262.)
Wiederum im Znsanunenhang mit dem «Leib» gelangt
übrigens Fichte in seiner Sittenlehre zu einer Deduktion ~es Wenden wir uns nun noch einer heute vieldiskutierten
!ch aIs eines «organisierteu N aturprodukts» : «sa geWISS position zu, die in der Tat atlS Fichtes «Moos »-Perspek-
ich bin, so gewiss muss ich der Natur Kausalitiit zuschrei- tive die Dinge angeht. Es handelt sich um einen Aufsatz
ben; denn ich kann mich selbst nur als ihr Produkt setzen. » von K. Lorenz (Bliitter für Deutsche Philosophie, Band 15,
(S. 118, S.a. S. 122 L) 1941/1942, S. 94 If.), in dem «Kants Lehre vom Aprio-
In früheren Denkansiitzen (um das Ende von 1793, Werke, rischen im Liehte gegenwiirtiger Biologie» behandelt wird
und seither als «biologische Erkenntnistheorie» Rang und
Lauth, Reihe II, Band III) stand Fichte diesem Ansatz
Namen gewonnen hat. K. Lorenz geht dabei von folgender
wesentlich kritischer gegenüber; er spricht damal~ von «te-
Feststellung ans : «Die aller unserer Anschaung von vom-
leologischen Betrachtungen» bei Aerzten und Physiologen :
herein anhaftenden Formen des Raumes und der Zeit und
«Sollten sie moglich seyu, so konnten sie wohl zu et:-v as
führen. Z.B. man nimmt an, wenn der Korper zu semer ganz ebenso die Kausalitiit und die andereu Kategorieu un-
seres Denkeus sind für Kant Gegebenheiten, die, 'a priori'
Erhaltung etwa Alkali braucht, so zeigt sic~ ein. App~tit
festliegend, die Form aller Uf1Serer Erfahrung bestimmen, ja
nach alkalischen Sachen. - lst denn aber hier mcht eme
Antinomie? nemlich, das Streben aIs Streben soll schlechthin Erfahrung als solche überhaupt erst moglich machen.» Die
a priori festliegenden «Gegebenheiten» aber erregen die
aus dem !ch, aus der strebenden N atur des !ch kommen .. -:-
kristiche Aufmerksamkeit des «von der Tatsachlicheit des
Das materielle des Appetits kiime aber hier ans der Orgam-
sa:tion _ u. man müste demnach dem Nicht-lch eine neue grossen schëpferischen Entwicklungsgeschehens in der Na-
!Ur» überzeugter Biologen : «Besonders die immer dring-
Kausalitiit über das strebende lch einriiumen.» (S. 257 f.)
licher werdenden Fragestellungen des Entwicklungsgedan-
In einer vorHiufigen Randbemerknng in diesem Zusammen-
hang meint Fichte, da" wir von hier aus auch einsehen kens haben zu Auffassungen vom Apriorischen geführt, die
konnten «wass wir vemunftmiissig über Thiere zu denken Kant selbst vielleicht nieht so feme lagen wie dem an den
hiitten.; (S. 258) Tatsiichlich kommt es auch im weiteren Wortlaut seiner Begriffsbestimmungen gefesselten Kantphi-
lologen.» (Ebenda.) Ihnen gegenüber besteht für den Na-
zu fast aristotelisch anmutenden Betrachtungen über den
turforscher die «Pflicht, den Versuch der natürliehen Erklii-
Unterschied von Pflanze, Tier und Mensch im Rahmen ei-
rung zu machen, ehe er sich mit der Heranziehung ausser-
nes universalen Zweckgedankens : «Der Zweck der Pflanze
ist blosse Fortpflanzung (Vegetation) der des Thier's anima- natürlicher Faktoren znfriedengibt. .. » (S. 95.) Damit ist nun
freilich die ganze Frage schon entschieden : Transzendental-
lisches Leben. Befriedigung des Instinkts. Die Fortpflanzung
wird darum se1bst Instinkt. Der Mensch ist alles. Wir erken- philosophie ist Gspenstermetaphysik, die mit «aussematÜf-
nen in dieser Betrachtungsart eine Stnfenleiter. - Organi- lichen Faktoren» (den «jenseitigen Entitiiten» des Neopo-
-------------

322 ERICH HEINTEL «DASEIENDE TRANSZENDENT ALITAT> 323

sitivismus) arbeitet. Die transzendentale Gege>IlStandskonsti- Kant aber hat eben in «rein statischer Betrachtungsweise...
tution verwandelt sich in «angeborene Reaktionsweisen» nur den erwachseneu Kultnrmeuschen aIs ein unveriinder-
von Organismen, d.h. in eine von dem einzelwissenschaft- liches, gottgeschaffenes System in Betracht» (S. 96.) gezo-
lichen Entwicklungsgedanken bestimmte und modifizierte gen. Damit wird der «erwachsene Kulturmensch» zn einem
«Physiologie des Verstandes» im Sinne Lockes, die Kant Gegenstand der spezifischen Forschung in der methodischen
erkenntnisphilosopbisch in ihrer Unhaltbarkeit endgültig wi- Abstraktion der biologischen Verhaltensforschung. Nun kann
derlegt hat. K. Lorenz aber kann jetzt ohne weiteres schrei- es friihlich weitergehen : «Das ' Apriori', das die Erschei-
ben : «Wenn man nun die angeborenen Reaktionsweisen nungsformen der realen Dinge unserer Welt bestinunt, ist,
von uutermenschlichen Organismen kennt, so liegt die Hypo- kurz gesagt, ein Organ, genauer : die Funktion eines Orga-
these ungemein nahe, dass das Apriorische auf stammesge- nes » (S. 98), der « Verstand », Hisst sich aIs «Organfunktion
schichtlich gewordenen, erblichen Differenzierungen des Zen- auffassen, wogegen sich nicht der geringste stichhaltige Grund
tralnervensystems beruht, die eben gattungsmiissig erworben vorbringen Hisst. .. » (S. 99.) Darauf ist der Weg für einen
sind und die erblichen Dispositionen in gewissen Formen zn handfesten, scheinbar einzelwissenschaftlich fundierten Vul-
denken, bestimmen. Man mnss sich klar darüber sein, dass giirmaterialismns bzw. - Naturalismus geebnet : «Wir sind
diese Auffassung des ' Apriorisehen' aIs Organ die ZerstO- überzeugt, dass das ' Apriorische' auf zentralnerviisen Appa-
rung seines Begriffes bedeutet...» (S. 95 f.) Der letzte Satz raten beruht, die viillig ebenso real sind wie etwa unsere
ist ebenso konsequent wie aufschlussreich : der Begriff des Hand oder unser Fuss, v511ig ebenso real wie die Dinge der
Apriorisehen mu", aufgegeben werden. Der apriorische «Ap- an sich existenten Ausseuwelt, deren Erscheinungsform sie
parat [il miiglicher Erfahrung mit all seinen Anschauungs- für uns bestimmen. Diese zentrainerviise Apparatur schreibt
formen nnd Kategorien ist nichts Unveriinderliches, von au- keineswegs der Natur ihr Gesetz vor, sie tut das genau so
ssernatürlichen Faktoren Bestimmtes... , sondem viehnehr et- wenig, wie der Huf des Pferdes dem Erdboden seine F orm
was, das innerhalb der Natur, die er widerspiegelt, in eugster vorschreibt. Wie dieser stolpert sie über nicht vorgesehene
Wechselwirkung mit ihreu Gesetzlichkeiten entstanden... » Veriinderungen der dem Organ gestellten Aufgabe. Aber so
(S. 96.) Die im kritischen «Grenzbegriff» des «Dinges an wie der Huf des Pferdes auf den Steppenboden passt, mit
sich» fundierte Unterscheidung von Transzendenz und Im- dem er sich auseinandersetzt, so passt unsere zentralnerviise
manenz einerseits, von Erscheinung und transzendentaler Weltbild-Apparatur auf die reichhaltige reale Welt, mit der
Apperzeption andererseits, wird zu einem innerzeitlichen (in sich der Mensch allseinandersetzen muss, und wie jedes Or-
der Erfahrung unmittelbar gegebenen) Verhiiltuis verscbie- gan, so hat auch sie ihre arterhaltend zweckmiissige Form
dener Arlen von Lebewesen und artspezifischen Orientiert- in iionenlangem stammesgescbichtlichen Werden durch diese
sein innerhalb dieser Gesetzlichkeit, d.h. zu einem Verhiilt- Auseinandersetzung von Realem mit Realem gewonnen...
nis von bestimmter Art und ihrer jeweiligen, eben artspezi- Unsere vor jeder individuellen Erfahrung festliegenden An-
fisehen «Umwelt». Die «Grenze, die das Erfahrbare vom schauungsformen und Kategorien passen ans ganz denselben
Transzendenten abschliesst, [ist] für jede einzelne Art von Gründen auf die Aussenwelt, ans denen der Huf des Pferdes
Lebewesen eine andcre. Ihr artbezeichneuder Ort muss von schon vor seiner Geburt auf den Steppenboden, die Flosse
FaU zu Fall Gegenstand einer besonderen [rein empirischen] des Fisches, schon ehe er dem Ei entschlüpft, ins Wasser
Forschung sein. Den rein zufiilligen, heutigen Ort dieser passt. Bei keinem derartigen Organ glaubt irgendein ver-
Grenze bei der Spezies Mensch in die Definition des 'An nüuftiger Mensch, dass seine Form dem Objekt seine Eigen-
sich' Seienden einzubeziehen, würde fiir uns einen nicht zn schaften 'vorschreibe', sondern jedermann nimmt a1s selbst-
rechtfertigenden Anthropomorphismus bedeuten.» (S. 97.) verstiindlich an, dass das Wasser seine Eigenschaften viillig
324 ERICH HEINTEL «DASElENDE TRANSZENDENTALiT AT. 325

unabhlingig von der Frage besitzt, ob Fischflossen sich mit und der Lehre vom Ding an sich. Alle die
ihnen biologisch [1] auseinandersetzen oder nicht. Ganz :~:~~~~~~!~ unseres Verstandes, die wir apriorisch vor-
selbstverstiindlich sind es irgendwelche Eigenschaften [1] ind ja kein Lusus naturae. Wir leben ja davon 1 U~d
die dem Ding, das hinter der Erscheinung 'Wasser' steckt, ~ tlichen Sinn konnen wir nur bein InbetrachtZle-
e1gen . d' L' hne
an sich [1] zukommen, die zu der speziellen Anpassungsfonn ihrer Funktion einsehen. Und sowemg ~.e e1c.~ .0 .
der Flossen geführt haben, die von Fischen, Reptilien, Vo-
schon lange vor ihrer Konstruction
k
ausgeubte Tatlgke1t
' d'te f ertige
geln, Saugern, Cephalopoden, Schnecken, Krebsen, Pfeil- Photographierens entstehen onnte, sowemg
wünnen usw. usw. unabhlingig voneinander herausdifferen- mit allen ihren gauz unglaublich durch~achten und
ziert wurden. Offensichtlich sind es [jetzt nur und nicht mehr Konstruktions-Einzellieiten vom Hmunel gefal-
dingansichliche] Eigenschaften des Wassers, die diesen so ist, sowenig ist es unsere noch unendlich viel wunder-
verschiedenen Lebewesen die übereinstimmende Form und naJ'Olv 'reine Vernunft'. » (S. 100 f.)
Funktion ihres Lokomotionsorganes vorgeschrieben haben.
Aber ausgerechnet bczüglich der Struktnr und Funktions- Und so bleibt es dabei, «dass aIle Gesetze der :reinen
weise seines eigenen Gehirns ninunt der Transzendentalphi- yemunit' auf hochst korperlichen, wenn man s? w111, ge-
losoph grundsiitzlich anders an. » (S. 98 f.) dezu auf maschinellen Strukturen des menschlichen Zet;-
~alnervensystems beruhen, die in aonenlangem Werden w~e
Ob K. Lorenz Kant je gelesen hat? Verstanden hat er ir endein anderes Organ entstanden sind .... » (8. 103.! Sle
ihn jedenfalls nicht. Zwar ist er «mit Kant und gegen Hume h;ben sich freilich «als Arbeitshypothesen m der ~,:"e1.nan­
durchaus der Ansicht, dass 'reine', d.h. von jeder Erfahrung dersetzung unserer Art mit der absoluten Realitat 1hres
unabhlingige Wissenschaft von den angeborenen Denkfor- Lebensraumes bewiihrt.» (Ebenda.)
men des Menschen moglich sei. Diese 'reine' Wissenschaft Zur Grundlagenforschung der Mathematik. erfahren wir,
wird aber nur ein sehr einseitiges Verstlindnis für das eigent- dass auch sie «mit allen ihren Gese~~n:.. rucht mehr und
liches Wesen apriorischer Denkfonnen vermitteln konnen, nicht weniger aIs ein Organ = QuantifiZlerung .~on Aussen-
weil sie den Organcharakter dieser Strukturen vernachliis- dingen [ist], und zwar ein für den Menschen hochst lebe~-
sigt und die konstitnierend biologische [1] Frage nach ihrem . htiges Organ ohne das er seine erdbeherrschende Rolle. me
arterhaltenden Sinn in der Tat gal' nich stellt. Das ist, um es WIC, '1 . h . lie
und nimmer spielen konnte, die sich also b10 ogtSC so ~,e a .
grob auszudrücken, ganz so, ais wolle einer eine 'reine' Lehre anderen 'notwendigen' Denkstruktnre~ aus.serorden.thc~ be-
über die Eigenschaften einer modernen Lichtkamera, etwa wâhrt hat. » (S. 104.) Der in alledem s!Ch ze1gende histon;;che
einer Leica, schreiben, ohne in Betracht zu ziehen, dass diese Bezug zu Nietzsche führt zu folgender Feststellung : dleser
ein Apparat, ein Organ zum Photographieren der Aussen- habe namlich das «Verhiiltnis zwischen Struktur. und. Pla-
welt sei, und ohne die von ihr gelieferten Bilder zum t· 't"t un' menschlichen Denken in folgender hWelse dlchte-
Verstlindnis ihrer Funktion und des eigentlichen Sinnes ihres SIZla h' fi" .
risch geformt : 'Ein Gedanke - jetzt noc elSS ~SSlg,
Daseins herauziehen. Die Leica ist, was die von ihr gelie- Lava : Aber jede Lava baut um sich selbst :~e. Burg, J~der
ferten Bilden (gleich Erfahrungen [1]) anlangt, durchaus aprio- Gedanke erdrückt sich zuletzt mit 'Gesetzen, ~leses Glelc~­
risch. Sie ist vor und unabhlingig von jedem Bild da, be- nis von der aus flüssigem Aggregatzustand sl~h ~erauskri­
stimmt von vornherein die Fonn der Bilder, ja macht diese stallisierenden Struktnr geht vielleicht noch Viel tiefer" aIs
überhaupt erst moglich. Nun behaupte ich : Die Trennung Nietzsche selbst es aimt : Es ist gar nicht vollig. unmo~l,,:h,
einer 'rein en Leicalogie' von der Lehre von den von ihr dass schlechterdings alles Sich-Verfestigende, lm Gelstig-
gelieferten Bildern ist um nichts sinnloser ais die Trennung Seelischen ganz wie im Korperlichen, ein U ,:ber~ehen des
der Aprioritatslehre von der Lehre der Aussenwelt, von flüssigen Aggregatzustandes gewisser Plasmatelle lU den fe-
326 ERICH HEINTEL «DASEIENDE TRANSZENDENT ALITAT» 327

sten ist.'» (S. 107.) Fichte scheint doch wortlich recht zu be- Uebersetzung, 1964). «Nach allem, was sich wahrneh-
halten, dass sich der Mensch einreden lasst, eher «ein mungsmassig darüber ausmachen lasst, geht... das Bewuss~­
Stück Lava im Mond denn ein Ich» zu sein. K. Lorenz je- sein in dieser unserer raum?chen Welt ~inher .gespens~­
denfaIls versichert : «In der Naturphilosophie bin ich ent- scher aIs ein Gespenst. UnslChtbar, ungreifbar, lBt es em
schiedener Materia1ist, aber ich behaupte nicht, zu wissen, Ding ohne jeglichen Umriss; es ist überhaupt kein 'Ding'.
was Materie ist. Ich warte darauf, dass mir das die Manner Es bleibt unbestatigt durch die Sinne und bleibt das für
der Wissenschaft [?] sagen.» (S. 110.) Wozu dann eigent- immer.» Schriidinger selbst erkJart sich ciann zu dies.em
lich noch «Na/ur» philosophie? «merkwürdigen Sachverhalt» folgendermassen : « Wah-
Was aber würde Kant selbst zu alledem sagen ? rend alles Material zum Weltbild von den Sinnen qua Orga-
nen des Geistes geliefert wird, wahrend das Weltbild selber
«Würde er unsere vollig natürliche Deutung der für ihn für einen jeden ein Gebilde seines Geistes ist und bleibt ...
aussernatürlichen Gegebenheiten der menschlichen Vernunft
bleibt doch der Geist in dem Bild ein Fremdling, er hat darin
aIs jene Profanierung des Heiligsten empfinden, die sie in nicht Platz, er ist nirgends darin anzutreffen.» Weiter ist
den Augen der meisten Neukantianer ist? Oder würde er
die Problematik im Rabmen einzelwissenschaftlicher Me-
sich angesichts des Entwicklungsgedankens, der ibm manch- tbode nicht zu bringen : die Trennung der gegenübergestell-
mal so nahe zu liegen schien, mit unserer Auffassung be-
teil Bereiche kann bei ihrem Vorgehen innner nur aIs das
freundet haben, dass die organische N atur kein moralisches, Zusammenleimen von Erfahrungsinnnanenz und Gespenster-
von Gott verlassenes Etwas, sondern in allem ihrem schop- transzendenz erfolgen. Schriidinger bleibt daher auch kritiscb
ferischen Entwicklungsgeschehen grundsatzlich ebenso 'hei- bei dem asthetisch und sachlich ansprechenden Bilde stehen,
lig' ist wie in den Mchsten Leistungen dieses Geschehens, das die «verwirrende Doppelrolle des Geistes» folgender-
in Vernunft und Moral des Menschen? Wir sind geneigt, massen fixiert : «auf der einen Seite ist er der Küustler, der
dies zu glauben, denn wir glauben, dass die N aturforschung das Ganze geschaffen hat, auf dem Bilde aber ist er eine
nie eine Gottheit zerschlagen kann, sondern innner nur die
urtbedeutende Staffage, die auch fehlen konnte, ohue die
tOnernen Füsse eines von Menschen gemachten Gotzen.» Gesamtwirkung zu beeintracbtigen.» (A.a.O. S. 243 f.)
(S. 124 f.) Wie schon, dass es so ist, zumal wenn man be-
denkt, dass die «Wegdressur» von Graugansen «gleich- Abschliessend sei noch darauf hingewiesen, dass im übri-
sam» etwas mit dem « starren Festhalten an der 'Tradition' » gen auch die jeweilige Eingeordnetheit ~es Organis~us in
und dem religiosen Zeremoniell in Glauben und Aberglau- seine Umwelt keine so einfache (ohuewelters «empmscb»
ben zu tun hat. (S. 116 f.) :lu bewaltigende) Problematik darstellt, wie es bei K. Lorenz
Ganz gehen die Dinge freilich nicht auf : denn die «An- herauskommt. Der Initiator der Umweltbiologie, J.v. Uexhüll,
schauungsformen und Kategorien sind für uns nicht der kommt bei dieser Thematik (Bedeutungslehre 1940, S. 61 f.)
Geist, sondern Maschinen, die von ibm benutzt werden ... » zu eigentümlicb dialektiscb anmutenden Formulierungen :
(123.) Was ist denn nun dieser «Geist» und wo kommt er « Das Korperhaus ist einerseits der Erzeuger der Bede~tungs­
pliitzlich her? Er kann in ein System des N aturalismus symbole, die seinen Garten bevOlkern und andererselts das
immer nur von aussen (ilUpcdlEV) kommen, wie es schon Erzeugnis der gleichen Symbole, die als Motive in den Haus-
Aristoteles gezeigt hat. Doch mag zu dem Thema an dieser bau eingreifen. - Dem Augenfenster des Hauses ve:-dankt
Stelle ein anderer N obelpreistrager der N aturwissenschaft, die Sonne ihren Schein und ihre Gestalt droben am Hunmel,
E. Schrodinger, zu Wort kommen : Er zitiert übersetzend der den Garten überwOlbt. Sie ist aber zugleich das Motiv
(Acta Physica Austriaca 1/3. 1948, S. 232.) Ch. Serriug- für den Aufbau des Augenfensters. - Dieses gilt für Tiere
ton (Man on his Nature, 1940, jetzt auch in deutscher und Menschen... Uns ist wahrend unseres Lebens die Auf-
328 ERICH HEINTEL

gabe zugewiesen, mit unserer Umwelt eine Taste in der rie-


senbaften Klaviatur zu bilden, über die eine unsichtbare
Hand spielend hinübergjeitet. »
. Verlassen wir diese schiinen und bei aller Erbaulichkeit
~ Unterschied zu K. Lorenz problemoffenen Gedanken~
HEINZ KIMMERLE
gange bedeutender Naturwissenschaftler mit dem Hinweis
dass aile (innerzeitlich) genetischen Ableitungen der Kate:
gorien (abgesehen von der viilligen Verkennung der transzen-
dentalen Differenz) in eine temporale Aporie geraten : WEGE DER KRITIK
« ... aile früheren Aussagen lassen sich ibren wiederkehren- AN DER METAPHYSIK
den Formen. nach genetisch, sei es psychologisch, historisch
oder naturallStisch begreifen, in Hinsicht des unmittelbaren
J etzt, in dem auch die Anssagen über das Vergangene abge-
geben werden, versagt diese Betrachtung. Denn in dem Au-
genbliclce, da wir sie auf die jetzt in Verwendung stehenden
Zum Begriff der Kritik.
~ategorien anwenden wollen, hebt sie sich selbst auf. Denn
lhre Anwendung steht wieder unter denselben Ausdmcksbe-
dingungen, welche sie relativieren will. Eine Relativiemng
der gegenwartigen Aussageweisen ist daher inuner erst in der
Zukunft miiglich, für die unmittelbare Gegenwart selbst be-
"Kritik im Sinne von Kant ist Grenzziehung. Die Linien,
de~te,:,- sie .ein Absolutum.» (R. Reininger, Metaphysik der
dieer zieht, umgrenzen einen Raum, innerhalb dessen Er-
WrrkhchkeIt, l, 1947', S. 175.) Damit aber sind wir über sittliches Handeln und astbetisch-teleologisches
die b~ologische Beleuchtung des Apriorischen zurückgelangt
urteu.en auf bestimmte Weise qualifiziert werden. Was in-
z.u semer fundamentalphilosophischen Problematik (Dialek-
filerhalb der Grenze liegt, ist in der Begrifflichkeit der tran-
tIk), eben im Zeichen der transzendentalen Differenz. Logik ais analytisch bestimmt. Das heisst, es
einen Raum, in dem «objektiv gültige» Erkenntnis,
seiner Moralitat gesichertes sittliches Handeln bzw. allge-
asthetisch-teleologisches Urteilen mo-
sind. Die naheren Bedingungen für die Realisiemng
Moglichkeiten werden prazise und unzweideutig abge-
Was ausserhalb der Greuze liegt, ist in derselben Be-
grifflichkeit ausgedrückt, dialektisch. Das heisst nicht, dass
es .willkürlich oder zufallig ware. Es stellt die Vernunft vor
die analytisch nicht auf16sbar sind, die aber von
der Analytik her notwendigerweise gestellt werden müssen
und die in ilrrer Erorterung von dortber mit der vollen
Strenge verantwortlicher Denkarbeit strukturiert werden. Der
(Spiel-)Raum der Analytik determiniert also nicht nur, was
. inherhalb seiner Grenzen m6glich ist, sondern zugleich auch,
330 HEINZ KIMMERLE KRITIK AN DER METAPHYSIK 331

welche Wege für das Denken ausserhalb dieser Grenzen In den betreffenden Passagen der drei Kritiken
vorgezeichnet sind. die traditionellen Themen der mctaphysica spe-
Wer die eine oder andere Seite der Kantischen Kritik ausführlich zur Sprache : SeeIe, Welt, Gott ; das hiichste
vemachlassigt, fallt hinter ihren Standpunkt zurück. Es . die Ideen der ScMnheit und der Zweckmassigkeit.
scheint indessen das Schicksal der europliischen Philosophie , Themen und das darin Gedachte sind also nicht ein-
zu sein, dies wird durch das bisherige Werk M. Régniers erledigt. Dass Metaphysik ais Wissenschaft nicht mo-
deutJich hervorgehoben, dass wir hinter den Standpunkt der ist, dass sie ausserhalb des umgrenzten Bezirks gesi-

f~fi~,; • ~~~~~~th~ieo~
kritischen Philosophie in1 Sinne des Kantischen Kritikbe-
griffes nicht zurückkonnen. lch hoffe seinem Denken einen retischen und praktischenBeurteilung
asthetisch-teleologischer Wissens sowie
liegt,allge-
be-
Dienst zu erweisen, wenn ich diesen Kritikbegriff zu kIaren nicht, dass sie aus der Philosophie verbannt ware.
versuche. Dabei geht es mir nicht um eine einfach analy- Rede yom «Alles-Zermalmer» ist eine unsinnige Erfin-
tische KHirung dieser Kritik, sondem um die Umgrenzlmg verangstigter Theologen. Die Metaphysik bildet ais Dia-
ilIres MOglichkeits(spiel)raumes. Kurz gesagt, es geht mir i.i. ·,.---0 einen notwendigen Bestandteil der Systematik der
um eine Kritik der Kritik. Was ist innerhalb der kritischen ~J<:antiscl!ien Kritiken. AIs Dialektik hat die Metaphysik selbst
Philosophie moglich uud welche Wege des Denkens sind kritische Form angenommen.
dadurch ausserhalb der kristischen Philosophie vorgezeich- freilich nicht um die Rettung irgendwe1cher tradi-
net?
Themen. Allein das dariu Gedachte ist wesentlich
Die Beantwortung dieser Doppelfrage muss sich anschlies- die Philosophie. AIs kritische Metaphysik stellt die Dia-
sen bei der Kant-Kritik von Hegel und von Heidegger. Denn der Kantischen Kritiken folgende sachlichen Themen
dies sind kritische Erorterungen der kritischen Philosophie
im Sinne Kants, Grenzziehungen in Bezug anf die kritische
Philosophie selbst, die deren Standpunkt verpflichtet blei- lch ais die lnstanz des Denkens ist selbst die Einheit,
ben, indem sie ihn auf sich selbst anwenden. Es wird sich im Ganzen der Welt die Vielheit ihrer E1emente um-
indessen zeigen, dass diese Grenzziehungen scheitem, dass und die in1 Begriff des hiichsten Wesens aIs perso-
Hegel und Heidegger schliesslich doch innerhalb des Rau- gedacht wird.
mes operieren, der durch Kant abgesteckt worden ist, dass ist das einzige Thema der dialektisch-metaphysichen
sie nicht diesen Raum insgesamt umgrenzen, um nun in ror:ter,un!!en in der «Kritik der reinen Vemunft». Darauf
erweiterter Ausdehnung etwas wirklich Neues über die kri- der sachliche Gehalt der übrigen Problemgebiete
tische Philosophie und ihr Ausserhalb sagen zu kiinnen. Um Dass Kant dieses Thema zu den traditione!-
diesen Schritt vollziehen zu kiinnen, werde ich die Kant- Themen der Metaphysik ins Verhaltnis setzt, indem er
Kritik Hegels von Marx her und in analoger Weisediejenige Lehrsilicke über SeeIe (Paralogismen), WeIt (Antino-
Heideggers von Derrida her erweitem. . Got! (problem der Beweisbarkeit seines Daseins)
m.VUl.t, wird bereits innerhalb der «Kritik der rein en Ver-
» nicht recht einsichtig. Die entsprechenden Lehrsrucke
«Kritik der praktischen Vemunft» und der «Kritik
2. Dialek.tik. ais k.ritische Metaphysik. (Jrteillslo,aft» lassen erkennen, dass hier etwas Schema-
der Architektur des Systems der Vemunft, wie
(Kant) es vorstellt, zum Ausdruck kommt. Die Rückorien-
an den traditionellen Themen verdunkelt den Ab!ei-
An die Stelle der Metaphysik tritt im Denken Krun.ts die l!h!!sZllsamnlen:haJn.g des Vemunftsystems. Sie stellt Schein-
332 HEINZ KIMMERLE KRlTIK AN DER METAPHYSIK 333

probleme zur Diskussion, die nicht aIs notwendiger « um die es hier geht. K. Düsing hat gezeigt, dass
tischer Schein» der weitergehenden Fragen ZUL :~~~~!~;~~~ Z~Lec~:;:~~:"~ der Natur (und der Kunst) bei Kant
ist, die über den Bereich analytischer Gü1tigkeit ~ li. begrüudet ist'. Dies bedeutet, dass ihre
In der «Kritik der praktischen Vernunft» ist es sehr in der Miiglichkeit des Subjekts zur freien Wil-
weniger deutlich, dass es allein der Gedanke der ellldli<:hei bestimmumg ihren eigentlichen Grund hat. So mündet
Subjektivitat ist, sofern sie Subjektivitat, d.h. Freiheit die Dialektit der «teleologischen Urteilskraft» in
der die Annahme der Einheit der entgegengesetzten aus, dass die Physicotheologie in der Ethicotheo-
von Pflicht und Neigung bzw. Pflichterfüllung und fure Begründung findet, dass jene durch diese ergiinzt
seligkeit notwendig macht. Die «Dialektik» der pnlktischen muss, will sie wahrhaft Theologie, Lehre von einem
Vernunft, in der die traditionellen Themen des «hii,:hslterr: Wesen sein'. Eine Untersnchung der Dialektik-
Gutes », der «Unsterblichkeit der Seele» und (erneut) der drei Kritiken, die ich hier natürlich nur in
«Daseins Gottes» an die Reihe kommen, verhüllen grilbsten Umrissen skizzieren konnte, macht also deut-
das zugrnndeliegende gedankliche Motiv, als dass sie es die Subjektivitat es ist, die der Veruunft die Fra-
Ausdruck brlngen. Dennoch ist gerade dieser Gedanke 'mlfgibt, denen sie sich nicht entziehen, die sie aber
die Systematik der Kritik notwendig vorauszusetzen. auch nicht liisen kann. Die Unabweisbarkeit
Noch um eine Stufe schwieriger liegt dieser Sachverhalt durauf, dass die analytischen Probleme des Erken-
der «Kritik der Urteilskraft ». Ihre dialektischen Teile Wollens und Zweckmassig-Findens im Kern allemal
recht offensichtlich um einer schematischen Gl.eic:haliil~ke>it die Subjektivitat aufliisbar werden. In der «Kritik
des Aufbaus willen so entworfen. Der eigentlich düt1elmsche Vernunft» führt Kant hierfür im Zusammenhang
Gehalt ist in der Einleitung - wie bekannt vor allem Prot,lerns «objektiv gültiger» Erkenntuis den Begriff
der ersten Fassung dieses Textes - anfzusuchen. Das transzendentalen Apperzeption» ein. Dasjenige, wo-
retische und praktische Wissen, die auf ihrem jeweiligen aile anderen Probleme aufliisbar werden, scheint selbst
biet die Einheit ihrer entgegengesetzten Seiten der Subj"k-. sich unterschiedenen Liisungsgrnndes zu bedürfen,
tivitat des Wissenden verdanken, finden ihrerseits eine auf der Grundlage der kritischen Philosophie nicht
heitliche Basis in der «reflektierenden Urteilskraft». en(lffiffien werden kann. So bleibt fur zunachst nichts, als
fülIrt nicht zu einer Erfahrung im Sinne bestimmter empi- Paradoxie in der Konsequenz der Systematik des ver-
rischer Erkenntnis. Aber sie basiert sich doch anf der Erfah' Denkens ais « transzendentale Dialektik» auseinan-
rung, dass im empirischen Erkennen und in der falctisch.,n
Willensbestimmung stets die Einheit der Erkennenden
Wollenden anwesend ist, weil jene sonst .nicht zu einem Zu-
sammenhang ihrer besonderen Bestinlmungen gelangen kiinn-
ten, sondern nur ein «blosses Aggregat» hervorbringen Die Erfahrung der Einheit und ihre Selbstexplik.ation
würden1•
Die sog. Antinomien der asthetischen und der teleologi-
schen Urteilskraft stehen kaum in einem angebbaren VerMlt,
nis zum kritisch-dialektischen Gehalt der metaphysischen Problem der Subjektivitat ist von Kant der Philoso-

1. S. KANT, Erste Fassung der Einleitung in die Kritik der Ur- K. DÜSING, Die Teleologie in Kants Weltbegriff. Bonn,
tei!skraft, Abschnîtt VI. In : Kants Werke. Hrsg. von W. Weischedel. 100 f.
WIesbaden, 1957. Band 5, S. 185. KANT, a.a.O.S. 570.
12
334 HEINZ KIMMERLE KRlTIK AN DER METAPHYSIK 335

phie nach ibm als die zentrale Fragestellung aufgegeben. (und wollenden) Bewusstseins. Dabei fiillt von An-
Der Zuspitzung dieser Frage bei Fichte wird durch H(i1d,er- an anf, dass das Wollen wie aueh die iisthetisehen und
lin und Schelling Einhalt geboten. Sie suchen nach Aeusserungsformen des Subjekts zn Systemen des
Grnnd der Einheit des leh sowie des Seius der Natur und bzw. Wissens gemaeht werden. Und iunerhalb
Gesellschaft. H6Iderlin spricht eine Einheitserfahrung hat das Ansehauen nur den Wert eines ersten
die in den politisch-gesellschaftlichen Verhiiltnissen kein':F sich ganz und gar unwahren Ausgangspunktes. Das Pro-
lei Anhaltspunkte mehr findet. Die Franzosisehe Re,vol!ution. seiner Philosophie ist also weniger sein extremer Idea-
hat in dieser Hinsieht keine durchgreifende Verandenmg da er stets reiches empirisehes Material verarbeitet,
gebraeht. Die Situation H6Iderlins gewinnt so aus objel<:tiven, vie:lmehr der extreme Intellektualismus.
Griinden ihre tiefen tragisehen Grnndzüge.
, Femer gibt Hegel keine Auskunft auf die Frage, wodureh
Hegel bat sieh bewusst von dieser ausweglosen Perspek, Bewusstsein in seiner Selbsterfahrung geleitet wird, so
tive abgewandt und die Anstrengung auf sich genommen, die deren denkender N aehvollzug «die ganze F olge der
Subjektivitiit als den Grund ihrer sel~st u:>d ihrer ~inheit G(,staLlten des Bewusstseins in ihrer Notwendigkeit» dureh-
mit dem Sein zu erweisen. Er sueht die Dlfferenz zwisehen kann. Er gesteht zn, dass dies für uns, die auf phi-
endlicher und absoluter Subjektivitiit zu übersteigen, die ê,,;losopllùs,'he Weise die Selbsterfahrung des Bewusstseins naeh-
Kant in der Paradoxie und Holderlin in der Tragik enden «gleichsam hinter seinem Rücken vorgeht» 4 •
Iiess indem er das Denken befiihigt, nur sich selbst ais das Iiegt das methodisehe Grundproblem des Hegelsehen
abs;lutum zu erfassen und auszudrüeken. Der Weg zu die~, :x$:yst,ems, das in sich, wenn man seine Priimissen akzeptiert,
sem Ziel wird dadureh besehritten, dass Hegel sich die Er- und mit grosser methodiseher Strenge aufgebaut
fahrung ZU1U Thema maeht, die bei Kant an der genannten Hegels Losungversuch der Frage, die dureh die Kan-
Stelle in der Einleitnng zur «Kritik der Urteilskraft» an- ,'ji.eI,e Philosophie gestellt war, ist zwar kühu und trifft mit
klingt : die Erfahrung der Einheit des Verstandes in seinen Priizision den Punkt des mogliehen Weiterdenkens,
verschiedenen empirisehen Erfahrungserkenntnissen. Diese er hat aueh von Anbeginn etwas Gewaltsames, sofern
wird von Hegel ais Selbsterfahrung des Erkennenden (bzw. eigenen Voraussetzungen in wesentlieher Hinsieht
Wollenden) theoretiseh explizierbar gemacht. Das geschieht ,i2{: ,Ullexpliûelrt Uisst. Wenn ich von dieser Fragestellung aus das
in der «Wissensehaft der Phiinomenologie des Geistes », die 2Yerlliil1nis Hegels zu Kant zu interpretieren suehe, besehiif-
urspriinglich den Titel «Wissensehaft der Erfahrung des ich mieh nieht mit Hegels Kant-kritik. Hierüber ist viel-
Bewusstseins» bekommen sollte. f:',rac:n und gründlieh gearbeitet worden'. Es geht mir darum
Die Ausgangsfrage des kritisehen Systems von Kant : '~,' 'ik~~~~~'i:;;n dass Hegels «Phanomenologie» seine Kritik der
« Wie ist Metaphysik als Wissensehaft moglich ?» lost Hegel z;, Metaphysilckritik ist. Die Subjektivitiit, die nach
dureh eine Art Gewaltstreich. Die theoretische Explikation den Formen des empirisehen Erkennens zugrundeliegt,
der Grundlage des empirisehen Erkennens und seiner Einheit,
die schliesslich in der «transzendentalen Apperzeption» des
leh festgemaeht wird, dieses Wissen vom Wissen kann nieht 4. S. G.W.F. HEGEL, Phiinornenologie des Geistes. Hrsg. von J.
<',

Roffmeister. Leipzig, 1949, S. 74.


niedriger stehen als die empirisehe Wissenschaft, es m,:ss 5. Vgl. H. WACKER, Das Verhiiltnis des jungen Hegel zu Kant.
hoher stehen als diese, als eine Wissensehaft von der WIS- Berlin, 1932 j 1. GORLANDT, Die Kant~Kritik des ;ungen Hegel. Frank-
furt a.M., 1966; D. HENRICH, Historische Voraussetzungen von
senschaft selbst Wissen.schaft sein. Diese Wissensehaft ist Hegels System Il. In : ders., Hegel im Kontext. Frankfurt a.M., 1971,
moglich, weil sie wirklich ist. Hegel verwirklieht sie dureh S. 41-72; K. DÜSING, «Die Rezeption der Kantischen Postulaten-
den denkenden N aehvollzug der Selbsterfahrung des erken- lehre in den früheren philosophischen Entwürfen Schellings und
,Hegels ». In Hegel-Studien. Beiheft 9. Bonn, 1973, S. 53-90.
336 HEINZ KIMMERLE KRITIK AN DER METAPHYSIK 337

ist im Sinne Hegels auch in diesen Formen ais das Bestim, gebrecWichen methodischen Ausgangsposition bezahlt
mende anwesend. lndem die Vollstandigkeit der Bei aller U eberlegenheit der systematischen Ausführung
des erkennenden (und wollenden sowie asthetisch oder Wer die ungelosten Probleme, die er an die Philosophie
gios sich aussernden) Bewusstseins durchlaufen w~rden, wird ibm weitergibt. M. Theunissen hat diese innere Aporie
schliesslich der Beweis erbracht, dass das Wlssen lm AEldern H,~ge[scllen Denkens auf die Formel gebracht : «Er tut
seiner selbst stets nnr sich selbst, seine eigenen B,ostilmlmu'n' fast unglaublicher Virtuositat, wovon er zugleich nicht
gen wiederfindet, also Einheit des Wissens und des Gewus-, was es ist »7.
sten ist. .
Die Subjektitivat erweitert sich von sich aus zur. U~ver'
salitat des Seins. Holderlins tragisches Bewusstselns lSt uber- Kritische Darstellung der Metaphysik, aIs Logik,
wunden durch den «Hervorgang» der Einheit von Subjek-
tivitat und Susbtantialitat. Er hat zwei einander korrespon-
dierende Seiten an sich : «die eine ist diese, dass sie Sub-
stanz sich ihrer selbst entaussert und zum Selbstbewusstc " T'o" soeben erwahnte Autor hat Hegels «Wissenschaft
sein wird die andere umgekehrt, das. das Selbstbewusstsein Logik» unter dem Gesichtspunkt interpretiert, unter dem
sich sein~r entaussert und zur Dingheit oder zum allgemei- ais ein Weg der Kritik an der Metaphysik im Gefolge der
nen Selbst macht... und hierdurch ist ihre wahre Vereinigung Kiinti'scllen Problemstellung gesehen werden muss. !ch will
entstanden »'. Das bedeutet : das Selbstbewusstsein hat . wichtige Buch zu unserer Frage hier nicht im einzel-
sich zwei Seiten, die aber beide .Bewusstsein bzw. Selbst. sind, diskutieren. H.F. Fulda und R.P. Horstmann haben mit
ein einzelnes und ein allgememes, und ais, solches lSt es und kritischer Scharfe auseinandergesetzt, in wel-
aile Substanz. Die Entfaltung de,' Bestimmungen, die im ,.f eh,p~ Sinn die «Logik» Hegels von Theunissen ais «Kri-
Selbstbewusstsein anzutreffen sind, der Kategorien des reinen Darstellung der Metaphysik» ausgelegt wird'. Für
Denkens, ist also zngleich Ontologie, Vorzeichnung der Ge- vorliegenden Problemzusammenhang ist wichtig, dass
samtheit der Bestimmnngen des Seins in N atnr uud Ge- ::'l',ille:ser lnterpretationsgesichtspunkt sehr geuau wiedergibt, was
schichte bzw. Gesellschaft. Was Kant ais deu Grund l,l:He,gel selbst gewollt hat. Hegel will die Ableitung der Kate-
Ableitungen unabgeleitet Iiess, ais «Faktum der Vernun.ft» die bei Kant den Kern des «kritischen Geschafts»
hingenommen hat, expliziert sich bei Hegel nnter der ZuslCht bildet, zur inhaltlichen Entfaltung der Metaphysik
des philosophischen Denkens selbst. Die SubjektiviHit kann ;'l:.lloac,heJu, Die Bestimmungen des reinen Denkeu, die von
in der Tat ein Letztes sein, das aIle Bestimmungen des Er- scheinbaren Objektbedingtheit gereinigten lnhalte der
kennens (und Wollens usw.) begründet, weil sie zugleich tF:.>Si;bjei~ti~~i;;it~ konnen nicht unkritisch sein im Sinne der
Objektivitat ist, die vorausgesetzten Bestimmungen des Er- Weigerung, objektiv giütige Erkeffiltuis auf dem
kenneus in sich tragt. Ware Hegel der Beweis dieser These Gebiet der Metaphysik zuzulassen. lhre Entfaltung ist un-
gelungen, hatte er, wie er selbst geglaubt zu haben scheint, mittelbar die weitere Ausführung des « kritischen Geschafts ».
die Aporie der Kantischen Philosophie aufgelOst und konk.ret Die FOffilen des Denkens (Kategorien) werden zum Inhalt
gezeigt, wie Metaphysik ais (kritische) Wissenschaft moglich
ist. Wir haben jedoch bereits gesehen, dass er hierfür den
Preis einer extremen intellektualistischen Verengung und ei- 7. S.M. THEUNISSEN, Sein und Schein. Die kritische Funktion der
Hegelschen Logik. Frankfurt a.M., 1978, S. 88.
8. Vgl. H.F. FuLDA, R.P. HORSTMANN, M. THEUNISSEN, Kritische
l)arstellung der Metaphysik. Eine Diskussion über Begels «Logik ».
6. S. HEGEL, a.a.O.S. 525. Frankfort a.M., 1980.
KRITIK AN DER METAPHYSIK 339
HEINZ KIMMERLE
338 serliche Objektiviilit
Objektivital den He setze
el . n. D er U ebergang des Begriffs zur
der Metaphysik erkliirt. Die so entstehende Kategorienlehre
kann der inhaltlichen Argumentation als methodischer Leit-
voIlzieht ruhrt .
,
hg mu~rhalb der «subjektiven Lomk»
mctzuemern l' 0&
barkeil, die Seinsbesti . euen ogtSchen Unmitttel-
faden dienen. Sie ist innerhalb doc Entwicklung des Hegel- setzt und nemert sondn:::'eungeSn muerhalb des Subjektivitat
schen Systems ais wissenschaftlich gültige Form der Dialektik ".., u. zur etzung des 1" l' h
zeitlichen Anssereinander und . na ur IC en raum-
anzusehen. stinunung , in denen sich die N a~he?,~~der.. e.inzelner Be-
lu furer eigenen Inhaltlichkeit ist diese «Logik» im furer selbsl en vorfind 1 D S~b)ektivJtal vollig ausserhalb
strikten Sinn zugleich Kritik und Darstellung der Metaphyc . . . e . er Begriff bestimmt . h
effiS!Chtige Weise zur RealiCt dli SIC zwar auf
sik. K. Düsing hat bereits deutlich gemacht, dass sie daun als die Formen des Urteils ab en. cher Prlidikationen, die
Subjektivitatstheorie und wcht noch etwas anderes ausser- nicht in sich seine eigene aof~I~I.e~ ~er.den, .aber er kann
dem sein muss, wie etwa strukturierung der Objektivitat raumzeitlicher Bestimmtheit setl:n.ti-;"tat lm Slnn~ liusserer
iunerhalb der Subjektivitat'. Der kritische Grundzug der dennoch geht stellt sich" enn Hegel dlCsen Weg
« objektiven Logik» wird in der «subjektiven Logik» nicht des sub)' ektiv;n Begriff dmmlptten der Selbstdurchsichtigkeit
s as aradox . d' .
voll durchgehalten. Hier werden Inhalte restituiert, die wcht stimmungen der Aeusserli hk .t d em, le Inneren Be-
ais Selbsterkenntuis der Subjektivitat entfaltet werden. Diese sereinander als die M5gli~hk e\ ~u eduzieren, z.B. das Aus-
Brochigkeit im Argumentationsgangder «Logik» muss ich sie innerhalb der Einheit des e~e e; Ieeren erdopplung, wie
:v
an dieser Stelle ais Foige der intellektualistischen Verengung durch enlsteht" ~fs stattfmden kann. Hier-
und der methodischen Aporie im Ansatz der «Phanomeno- ~cklungsgang, eme muere UnstImmigk t ' 1 .
die zugleich den h" el lm. ?glSchen Ent-
logie» zu erkliiren suchen. SlSchen Auspruch dieses W k . ochsten kritisch-metaphy-
Hierfiir greife ich auf deu Anfang der «Phanomenologie lichen lom<chen U b er es m Frage stellt. lm vermeint-
. zu~ . b)ektlVltat
• 0- e ergang vom Begn'ff O" .
des Geistes» zutÜck. Dass die Aeusserlichkeit der Objek- setzt s!Ch die absolute Subjekf ltat . ..
tivitiit, z.B. die raumzeitliche Bestimmtheit der mechanischen nach Hegel identisch mit de: aIs ?b)ektivüat. Das isl
Naturerscheinungen, iunerhalb der «Logik» nicht zurei- Dasein Gottes, in welchem on~olog:tschen Beweis vom
chend erfasst werden kaun, erklart sich daraus, dass am ais Sein perfectissimum b' ~em h?chsten Wesen das Sein
Beginn der Lehre vom wahren Wissen bereits die Anschauung der logischen Entwicklun;lge e~ wlrd. ~nf früheren Stufen
eskamotiert worden ist. Das bedingt ferner : Die vollstiindig hingearbeitet. Die M5gli hk~r e au~ diesen Puukt bereits
"diz' . c elten endhcher Bestunm'
mit sich vermittelte Identitat des logischen Begriffs geht in Pr a ICrung blldeten Seinsm' ung und
sich über zut RealiHit, indem sie sich ais Urteil setzt. Dieses Diese führten indessen omente nu unendlichen Denken.
übersteigt seine endlichen Aussagem5glichkeiten, indem es Bestimmungen des Deuk:: ; r a~strakte~ Realitiit innerer
gang des Begriffs d s. IC vo enden slch nun im Ueber-
sich zu einer Abfolge von Urteilen im Schluss erweitert. Anf
diese Weise vollzieht der logische Begriff in sich noch ein- . tat, die aber von H:~e~b:flu.ten Subjektivitiit zur Objektivi-
mal die Bewegung von der Bestimmtheit des Seins zu seiner G1eichheit des Aussereina:~nn~e Aeusserlichkeit, ais leere
Negation im Wesen und der Rückkehr zur Bestimmtheit ais dann im nachhinein in . e~- esteheus gefasst wird, das
derjewgeu des Negierens selbst. Er ist die absolute Subjektivi- tetwird. Resultat: Die s::~~ I.dealen Verhiiltuissen betrach-
tat der « Rückkehr zu sich », in der die gesamte Bewegung des tesbeweises bleibt mt . tulerung des ontologischen Got-
reinen Denkens sich zusanunenfasst und abschliesst. Sie kann der seine Beweiskraftlhl'nfe~ell':" paradoxalen Schein behaftet
a Ig macht. '
wcht auch noch in sich die N egativiilit ihrer sèlbst ais aus-

9. Vg1. K. DÜSING, «Das problem der SubjektivWit in


Logik ». Hegel-Studien. Beiheft 15. Bonn, 1976, bes. S. 289 f.
KRITIK AN DER MET APHYSIK 341
340 HEINZ KIMMERLE
terial hinterlassen mit eingehenden Reflexionen auf den be-
grifflichen Aufbau und den damit gegebenen methodischen
f. Kritik. der k.ritischen Metaphysik. durch Praxis Fortgang. Eine ausgeführte Darstellung der dario enthaltenen
Dialektik, die «das Rationelle an der Methode, die Hegel
entdeckt, aber zugleich mystifiziert hat» 10, auf verstiindliche
(Marx)
Weise herausstellen sollte, ist von ihm indessen nich über-
Die kritische Darstellung der Metaphysik in Hegels «Lo- Iiefert.
gik» verfiingt sich am Ende in der Schwierigkeit, ihre Abge- Um diese Methode zu erfassen, ist man darauf angewie-
schlossenheit im reinen Denken zur Aeusserlichkeit des raum- sen, die hlerauf bezüglichen Aeusserungen in den früheren
zeitlichen Daseins übersteigen zu wollen. Die Gesetzmassig- Werken von Marx aufzusuchen, diese in die Entwicklungs-
keiten der N atur sind ais ideale Bestimmungen zwischen geschichte der Marxschen Theorie einzuordnen und von die-
« Objekten» gedacht, die selbst in leerer bestimmungsloser sen Voraussetzungen aus das begriffliche Gerüst der Argu-
Gleichheit nebeneinander bestehen und darum ais Nichts mentation im «Kapital» zu erfassen. Zur Lasung dieser
qualifiziert werden. Marxens Kritik der Hegelschen Philo- Aufgabe haben G. Reichenberg und D. Schweitzer einige
sophie snbstituiert der «Logik» eine «Phiinomenologie », erste Schritte untemommenll . Auf diesem Weg müsste man
die mit der erforderlichen methodisch-wissenschaftlichen weitergehen, um die Marxsche Dialektik ais ein kritisches
Stringenz ausgestattet ist. Auf diese Weise kann sei der Ablei- Aequivalent zur Hegelschen «Logik" immer besser heraus-
tung der Kategorien des reinen Denkens ein neues Funda- zupriiparieren. Die genannte Studie macht deutlich, dass
ment verschilien, das im Stande sein müsste, die schliessli- Arbeit und Geschichte, Totalitiit, konkrete Einheit und Praxis
che Aporie dieses Ableitungsganges zu beseitigen. Sie ist von Begriffe sind, die im Marxschen Denken einen zentralen
daher ais kritische Berichtigung der kritischen Darstellung metbodischen Stellenwert besitzen. Der Argumentationsgang
der Metaphysik durch Hegel zu interpretieren. Zugleich ist des «Kapital», in dem dieses Denken seine wissenschaftlich
diese Substitution freilich auch ein Auswechseln der absolut- gültige Form erlangt, liefert den Zusarnmenhang, in dem
idealistischen Pramissen Hegels, die dieser von Fichte über- diese Begriffe ihren Ort bekommen.
nimmt, durch die Anlmüpftmg an die materialistische Tra- aierbei zeigt sich, dass Marx in systematischer Hinsicht
dition. von Verhiiltuisbestimmungen ausgeht und durch analytische
Ais die Ausarbeitung einer solchen Wissenschaft, die den Argumentationsschritte die darin enthaltenen einfachen Be-
Ansgangspnnkt liefert, um zur Aufstellung der Kategorien stimmungen aufweist. Mit dem « eiufachsten Verhiiltuis », das
des wissenschaftlichen Denkens übergehen zu kiinnen, in- der bürgerlich-kapitalistischen Gesellschaft zugrnnde liegt, dem
(erpretiere ich das «Kapital.., In erster Linie liefert dieses gleichen Wert verschiedener Waren, die untereinander ge-
Werk eine Untersuchung der Verhaltuisse der bürgerlich- tauscht werden kannen, beginnt daun die primiir synthetische
kapitalistischen Gesellschaft. Es versteht sich aber zugleich Darstellung. Diese führt schliesslich zurück zur konkreten To-
ais theoretische Rekonstruktion der Wirklichkeit dieser Ver- talitiit der gegebenen Wirklichkeit, die nunmehr in ihren
Mlnisse, die in der begrifflichen Gliederung ibrer Darste1- iuneren Ordnungsstrukturen begriffen ist. Der logische Auf-
lung die inneren Ordnungsstrukturen dieser Wirlichkeit b~u des Werks im Sinne des Fortgangs vom einfachsten zu-
sichtbar macht. Marx hat eine solche Darstellung für den
« Produktionsprozess des Kapitals» im ersten Band des be- 10. S. K. MARX, Briefe über das Kapital. Berlin, 1954, S. 79.
treffenden Werkes vollstiindig ausgearbeitet. Für den «Zir- 11. Vgl. G. REICHENBERG/D. SCHWEITZER, «Karl Marx:t. In :
kulationsprozess des Kapitals» und für den «Gesarntprozess U; 'KIMMERLE (Hrsg.), Modelle der materialistischen Dialektik. Den
Ha.g, 1978, S. 32-54.
der kapitalistischen Produktion» hat er ausführliches Ma-
342 HEINZ KIMMERLE KRITIK AN DER METAPHYSIK 343

grundeliegenden Verhliltnis zu immer starker in sieh geglie- sie überhaupt Waren tausehen wollen, in weJchem Ausmass
derten Verhiiltnissen des «konkreten, lebendigen Ganzen» sie das wollen, hiingt indessen nieht von ibnen ab, sondem
dieser Gesellsehaft, wird immer wieder unterbroehen und von der iikonorrusehen Entwieklung der Gesellsehaft, in der
gewissennassen abschnittweise begleite! durch bistoriche Pas- sie leben. lhr Handeln setz! also mehr voraus, als ilmen
sagen, die die wirkliche Genesis der betreffenden Strukturen bewusst ist. Sofern diese Voraussetzungen aber aueh von
deutlieh machen. Eiuige sehr wiehtige Argumentationssehritte ilmen gesehaffen sind, briugt es aueh mehr hervor ais aus-
werden iudessen nieht «logiseh» begründet, sondem nur drüeklieh iutendiert wird. Hegel hat in seiner Gesehiehtspbi-
bistorieh eiugefülut, so z.B. das Auftreten des «freien Ar- losopbic hierfür den Begriff «List der Vemunft », dureh den
beiters» ais Bediugung der Mogliehkeit für die Produktion .er wieder, wie aueh in der «Phanomenologie» und in der
von Mehrwert oder die «ursprüugliehe Akkumulation» ais «Logik », die absolute zur endliehen Subjektivitat ius Ver-
Voraussetzung für die Vermehrung des Kapitals aufgrund hiiltnis setzt. Bei Marx geht es bingegen um ein Zugleich
des «sieh verwertenden Werts »12. von bewussten Willensakten, die ftei sind, und unbewussten
Als Sehlüsselbegriff zum Verstandms der Marxsehen Me- Bediugungen, unter denen die Mensehen produzieren und
thode als einer Kritik an Hegels kritiseher Darstellung der von denen sie im Fortgang der iikonomisehen Entwieklung
Metaphysik kaun der Begriff der Praxis dienen. Die kon- abhiingig siud. Wie dieses Zugleieh zu denken ist, lasst sieh
krete Totalitiit der gegenwartigen Gesellsehaft ist Moment Begriff der Arbeit ablesen. Sie bildet naeh G. Lukaes
eiues Prozesses, iu dem sie ein Durehgangsstadium bildet. die «ontologisehe Zentralkategorie» und vollzieht sich als
Dieser Prozess ist iu letzter lnstanz dureh die iikonomisehen ;' teleologisehe Setzung», d.b. ais Verwirkliehung ideeller
Verhiiltnisse bestimmt, d.h. durch die Produktions-, Di- ·i?.Ii'lro1ürfe unter materiellen Bediugnngen14• Dies findet er iu
stributions- und Konsumtionsverhaltnisse. lhre jeweilige Fonnulierung von Marx ausgesproehen, dass der Mensch
Form ist vom Willen der einzelnen Mensehen unabhangig. der Arbeit nieht nur eine zufiillige «Fonnveranderung
Die iikonomisehen Verhaltnisse bilden sieh ab iu den Reehts- Natürliehen bewirkt; er verwirklicht im Natürliehen
verhaUnissen, die ais WilJensverhaltnisse fassbar sind. In :.~lgle:ieh seinen Zweck, den er weiss, der die Art und Weise
Bezug auf sie sagt Hegel ganz riehtig, dass sie individuelle, Tuns als Gesetz bestimmt und dem er seinen Willen
reehtsfiibige Subjekte, Personen im Siune des riimisehen
Reehts, voraussetzen. Marx zeigt jedoeh, dass die Personen , i~~~~~~~:~~~m!;u:!ss ,,". Für die
Produktionsweise iudustrielle
wird Arbeitvon
dieses Wissen derden
kapita-
Na-
von den iikonorruseheu Verhaltnissen ausgehen, dass sie zur Verfügnng gestellt In Bezug auf das
nur «Charaktennasken», nur die «Personifikationen» der leS!~I1s,~haft]i,che:
ffu das dieselbe Struktnr des Zugleich gilt,
Verhaltnisse sind, «als deren Trager sie sich gegenüber- dureh seine Untersuehung der Verhatnisse im Ka-
treten »". italisml1s im Wege eines analytisch-synthetischen Verfah-
Die Praxis der Mensehen spieU sieh in diesen Verhiilt- entspreehendes Wissen hervorbringen.
nissen ab. Das bedeutet meht, dass die Subjekte keiuerlei darf man freilieh nicht vergessen, dass es eine
Freiheit haben, sondem dass ihre Freiheit unter bestinlmten llng:en<le und eiue misslingende Form des «unrnittelbaren
in sich gegliederteu Bediugungeu steh!. Wenn sie rruteinan- larakte'rs der lebendigen Arbeit» gibt. Dureh die viillige
der Handel treiben, sehliesseu sie Vertrage, bei denen sie ~jel<tivieflung der natürlichen und gesellsehaftliehen Bedin-
frei bestimmen, mit wem und was sie tausehen wollen. Dass unter denen diese Arbeit getan werden muss, ist
12. Vgl. H. KIMMBRLB, 4: Paradigma der Logik des revolutionaren
Denkens >. In : Hegel-Jahrbuch, 1976. Këln, 1978, S. 122-138. S. G. ~UKACS, Zur Ontologie des gesellschaftlichen Seins. Die
13. Vg!. K. MARX, Das Kapital. Ausg. Dietz-Verlag. Berlin, 1960. Neuwled und Darmstad'S 1973, S. 13.
Bd. 1, S. 90·91. S. K. MARX. a.a.O.S. 180.
344 HEINZ KIMMERLE KRITIK AN DER METAPHYSIK 345

dieser ihr unmittelbarer Charakter ein «bIass einzelner». es gewusst werden und wird dnrch das wissenschaft-
Die Arbeit wird atamisiert, und anch der Arbeiter ist nur Wissen von ihm die Voraussetzung eines adaquaten
ein isoliertes einzeines Teilchen im Riiderwerk dieser Pro- dazu hervorgebracht. Das ist aber nur zum
duktion, das auf iiusserliche Weise mi! den übrigen Teileu wahr ; der darin zum Ausdruck gebrachte Wissenschafts-
ineinandergreift. Worauf es ankommt, ist nach Marx eine liegt noch in der Verliiugernng des Hegelschen Intel-
qualitative Verandenmg der Arbeit, das «Setzen der Tii- lktllalismus. Das Eigene der Natur und der GeselIschaft hat
tigkeit der Individuen ais unmittelbar aIIgemeiner oder ge" moraiische Ansprüche an den Menschen. Und es bleibt
seIlschaftIicher ». Die «gegenstiindlichen Momente der Pro- iisthetischen Beœich wirksam, indem es zum Gleichklang
duktian », d.h. ihre natÜTIichen und geseIlschaftIichen Be- dem DargesteIlten auffordet. Diese Dirnensionen des
dingungen, sind dann nicht mehr entfremdet, sondem «ge- J.ge"eIlsclmflIi,;h<m Einzelnen », der sich zu N atur und Ge-
setzt ais Eigentum, als der organische geseIlschaftIiche Leib, .,seV"Cam" verhalt, treten bei Marx noch nicht in den Blick.
wOlin die Individuen sich reproduzieren ais Einzelne, aber philosophischen Dimensionen der Marxschen Theorie
ais geseIlschaftIiche Einzelne» 16. ~;b]leit)en iiberhaupt weitgehend unausdliicklich. Deshalb ist

Der einzelne Mensch ist also nicht die Subjektivitiit, die vielleicht kein ZufaIl, dass auch die «zwei oder drei
~I:uckb,)ge'n» nicht ausgearbeitet worden sind, auf denen
aller gültigen Erkenntuis wie auch allem moraiischen Han-
deln und iisthetisch-teleologischen Urteilen zugrundeliegt und seine Dialektik auseinandersetzen wollte". Marx hat
sich ais das sinnstiftende Prinzip des Ganzen dieser Erkennt- Denkanstrengnngen darauf verwendet, in der Kritik
nis mit seinen moralisch-iisthetisch-teleologischen ImpIika- Hegels kritischer Metaphysik eine neue Rolle der Philo-
tionen begreift. Er verhalt sich nicht nUT zu sich selbst, so zu bestimme.n. Ab~r er hat die neue Philosophie, die
dass das Andere seines Wissens schliesslich auch ais sein Rolle entspncht, mcht entwickelt. Wohl ist deutlich
Sichwissen erwiesen wird, sondern er verh1ilt sich, indem er' diese Philosophie nicht wieder Metaphysik sein kann:
sich zu sich selbst verhiilt, zugleich ZUT Natur mit ihren Reflexion auf den Prozess der Praxis, in dem das wissen-
eigenen Gesetzmiissigkeiten und zur GeselIschaft mit ihren 'sC.~,aftIiclle Wissen die Funktion bekommt, die Natur bear-
überindividuellen Hervorbringungen. Die vëlIige Veriiusser- und die GeselIschaft veriinderbar zu machen bildet
Iichung und Verobjektivierung dieser Verhiiltnisse ist das die Grundlage dieses gesamten Prozesses' sie k~n ihn
Gegensilick zur Abgeschlossenheit des Denkens ins Innere nicht kategorial volIstiindig vorausentwerfen. Die For-
der Subjektivitiit. Es mag als eine romantische Perspektive jnngen Marx, dass die Philosophie aufgehoben werden
erscheinen, wenn demgegenüber die nailirlichen und geselI- bezieh~ sich .anf ihre Rolle aIs Metaphysik, sei diese
schaftlichen Bedingnngen des Handelns der Menschen als ais dIe mhalthche Entfaltung des Prinzips der Kritik
ihr « organischer geselIschaftlicher Leib» charakterisiert wer- . Metaphysik. konzipiert. Die neue Philosophie zeigt
den. Aber es ist deutlich, dass in ihnen Anderes, Eigenes, em Zugrundehegendes anf, das die Praxis letztIich de-
nicht yom Subjekt ais dem einzigen Einheitspunkt sinnvollen )~:::::. Sie steckt ein Raster von sich überlagemden Ver-
Handelns Gesetztes zur Geltung kommt. " (Strukturen) ab, das den Praxisprozess durchzieht
stets nur unter den gegebenen Handlungsnotwen:
Was dieses Andere in N atur und GeseIIschaft ist, das in ,diigk"ite,n durchsichtig und begreiflich macht.
der Praxis des Menschen mitspielt, bleibt bei Marx indessen
nnterbestimmt. Sofem es für den Arbeitsprozess relevant ist,

16. S. K. MARX, Grundrisse der Kritik der politischen Oekonomie.


Ausg. Dietz~Verlag. Berlin, 1953, S. 716. S. oben Anm. 10.
346 HEINZ KIMMERLE KRITIK AN DER MET APHYSIK 347

ô. Die Destrufetion der Metaphysife ais traditioneller anf den Begriff gebracht hat. Der Geist, die
Subjektivitiit ist unendlich, d.h. zeillos. Seine Ver-
Ontologie die Manifestation seiner inneren Bestimmungen
(!Îllss.eren Verlauf der Zeit veriindert diese nicht. Die end-
(Heidegger)
Manifestationen des Geistes vollenden sich, indem sie
tüc:kfind"n zum reinen Begriff, wie er vor aller ausseren
Marx hat die Frage nicht gestellt, was das Eigene in der «Wissenschaft der Logilc» anfgestellt
Natur und der Gesellschaft ist : ausserhalb seiner mi'iglid,en
ist. Konsequenterweise er6rtert Hegel die Probleme
Thematisierung im Selbstverhiiltnis des Menschen, aus-
Raum und Zeit auch aUein im Zusammenhang des An-
serhalb der menschlichen Arbeitsiutentionen und revolutio- der Natnrphilosophie, an dem die absolute Subjekti-
niiren Zielsetzungen. Deshalb ist Heidegger gegenüber Marx
iu die Aeusserlichlceit des Aussereinander-Bestehens der
der radikalere Denker. Er hat mit der Seinsfrage gerade das « gefallen» ist, die nur durch mechanische Gesetz-
Seiu zum Thema gemacht, dass im menschlichen Sichverhal-
assigkeit"n miteiuander verknüpft bleiben. Die iiusseren
ten, d.h. Wissen (Erkennen), Handeln usw. eine Bestimmung siud «Geist iu der Zeit », der Uebergang zum Geist
erhiilt, das aber dieser Bestinnnung auch vorausliegt. Marx
hat sich zwar gegen die gewaltsam anmutende L6sung He- SSI~I~!:~~,ist die Tilgung der Zeit. Die Zeit ist der Mangel
gels gewaudt, dass das Ich eiu Ding sei, weil es aUe Bestim-
is der nicht «iu sich vollendet» ist.
mungen der Diugheit in sich hat. Er war mit der Kehrseite Interpretation haIt Heidegger entgegen : «Der
dieser These konfrontiert, dass aUe menschlichen Verhiiltnisse (die Subjektivitiit) flillt nicht erst in die Zeit, sondem
im Kapitalismus in der Tat verdinglicht sind. Aber er hat aIs ursprungliche Zeitnng der Zeitlichkeit. Diese
nicht gefragt, welche ontologischen Priimissen dmin zum die Weltzeit, in deren Horizont die 'Geschichte'
Ausdruck kommen. Mit anderen Worten : er hat seine Kri- iurler:wiltig'''' Geschehen ' erscheiuen' kann» 18. Was He-
tik an der kritisch konzipierten Metaphysik Hegels nich aIs radilcaler Form anf den Begriff bringt, ist die Konse-
Kritik an seiner traditionell bleibenden Ontologie formuliert. der Einseitigkeit des Aristotelischen Zeitbegriffs ais
Diese Fragerichtnng eiuer Kritik an der Metaphysik, die zljliunkt, der freilich bei diesem noch mit den Weseusmerk-
Marx ganz unausgearbeitet liess, hat Heidegger bis zur Mo- der Diuge im Zusanuueuhang steht. Iunerhalb der
nomanie zum zentralen Thema seines Denkens gemacht. Hei- esa:ml<m Tradition von Aristoteles bis Hegel ist Kant «der
degger richtet daun auch die Spitze seiner Kritik gegen He- und Eiuzige » gewesen, der die Zeit im Erkennen selbst
gel, sofem er die neuzeitliche Metaphysik Descartes' zur dem Erkennen zugrundeliegenden Subjektivitai fest-
VoUendung gebracht habe. Sein Ansatz ist demjenigen der hat. Dies geschieht freilich nur in Ansiitzen, aber
neuzeitlichen Metaphysik strikt entgegengesetzt : das cogi- die Voraussetzungen deutlich, von denen aus das
tare des ego cogito ist keine res, es ist ein Seiendes von an- des menschlichen Subjekts aIs zeitlich gedacht werden
derer Art, dessen Sein nicht vorliegt, sondem sich immer
nur ereignet. War für Hegel das Nichts das Nicht-Etwas, 0' 'Hlerhei denkt Heidegger gerade nicht die Zeit aIs «reine
das Fernhalten jeglicher Bestimmung, so isl es für Heidegger ::Ans(:hauung,;folrm », in der, parallel zur Raumauffasung,
das Nichtseiende im Sinne des Vorliegens, das Sichentziehen Empfiudungsdaten wahrgenommen werden. Entgegen
des selbstverstiindlich Anwesenden. Die Seinsfrage, die im' eigener Intention, wie sie iu der Umarbeitung der
Horizont des Zeitverstiindnisses gesteUt wird, sieht sich mit
Hegel aIs mit demjenigen konfrontiert, der das giingige Ver-
standnis der Zeit aIs «abstrakten Aussereinander» von S. M. HEIDEGGER, Sein und Zeit. Tübingen, 1953, S. 436.
Vgl. a.a.O.S. 22-27.
348 HEINZ KIMMERLE KRITIK AN DER MET APHYSIK 349

« Kritik der reinen VertlUnft» anIasslich der 2. Auflage zum gungsmoglichkeit mit der Anschauung durch das «transzen-
Ausdruck kommt, ist für Heidegger der Zusammenhang von dentale Schema», sofem beide ihren Grund findem im «Ich
innerer Verbildlichung durch die Anschauung und kate~o­ denke» der transzendentalen Apperzeption. Dies sind die
rialeT Bestimmung durch das Denken von hochster Wichtig- metaphysisch zentralen Passagen seines Werks. Die Sonder-
keit, der so nur in der ersten Anflage dieses Buches zu finden stellung Kant innerhalb der traditionellen Metaphysik b~­
ist. lm anschauenden Denken resp. denkenden Anschauen steh! aufgrund der Verbindung dieses hochsten Seienden mIt
zeigt sich e!was von der Zeitlichkeit der Denkbestimmungen der Zeitlichkeit, die dieses in seinem Sein erfassbar macht,
selber. Die Verbindung mit dem «Ich denke » bleibt bei das nicht dom Vorliegenden einfach zugrundeliegt, sondern
Kant auch in der 2. Auflage seines Buches bestehen, sofem dieses jeweils erst zu einem solchen macht.
die Verzeitlichung der Kategorien ais die Moglichkeitsbe-
Diese Ahnung vom Sein aIs zeitlich, ais e!was das jetzt
dingung ihrer Synthesis mit der Anschauung letzlich darauf anwesend ist und darin zugleich zu erkennen gibt, dass es
beruht. Eine genaue Interpretation des Kapitels «Von dem
sich auch wieder entziehen kann, führt bei Kant zu einer
Schematismus der Teinen Verstandesbegriffe», in dem diese
«Widerlegung des Idealismus», der das Sein im hO~hste."
Vermittlung zwischen der intellektuellen Sphiire des Denkens
Seienden einer Idee gesichert glaubt. Kants «Bewels fur
und der sinnlichen des Anschauens anfgezeigt wird, gibt Hei-
das Dasein der Dinge ausser mir» anfgrund der Selbster-
degger in seinem Buch «Kant und das Problem der Meta-
fahrung des Ich ais empirisch seiend «stützt sich darauf,
physik »20. Aber Kant selbst sieht nicht den Zusammenhang
dass zum Wesen der Zeit gleichurspriinglich Wechsel und
dieses Problems mit den metaphysischen Fragen, und er zieht
Beharrlichkeit gehoren ». Zeitbestimmthcit setzt also «etwas
nicht die Konseqnenz, die Hervorbringung von Zeit und Ge-
beharrlich Vorhandenes varaus. Dieses aber kann nicht 'in
schichte ais Seinsbestimmnng des lranzendentalen Subjekts zu
interpretieren. uns' sein, 'weil eben mein Dasein in der Zeit durch dieses
Beharrliche allererst bestimmt werden kann'. Mit dem em-
Heidegger findet in diesen Gedankengiingen Kants Ansiitze pirisch gesetzten vorhandenen Wechsel 'in mir' ist dah~r
für eine neue Grundlegung der Metaphysik. Sie knüpft nicht notwendig empirisch mitgesetzt ein varhandenes Beharrh-
an bei den tradiiionellen Themen der metaphysica specialis, ehes 'ausser mir' »21. Das Ich wird damit im Grunde jenseits
sondem ist von vornherein auf dem fundamentaleren Gebiet des Streits von traditionellem Idealismus und traditionellem
der ontologia generalis angesiedelt. Die gesamte Tradition Realismus (Materialismus) ais In-der-Weit-sein gefasst. Seine
der Metaphysik von Aristoteles bis Hegel ist Onto-theo- Zeitlichkeit und Geschichtliehkeit konstituiert diejenige der
logie. Damit wird der religiose Protest Kierkegaards gegen «WeIt ». Dabei muss freilich daran erinnert werden, dass
Hegel oder Pascals gegen Descartes in seiner Unwirksamkeit Kant diesen Ansatz nicht durchhiilt, sondem zum Subjekt
erkliirt, weil el' die traditionelle Metaphysik nicht von ihrem aIs «Substanziale» d.h. ais einem, «innerweltIich Vorhan-
Grund her in Frage stellt. Diese Metaphysik übersteigt das denen» zuriickfiillt. Denn er zeigt nicht, auf welche Weise
Seiende zu einem hochsten Seienden hin, sei dies nun ais Ich und Welt durchgehend von der Zeitlichkeit bestimmt,
Gott, absoluter Geist oder Subjekt gedacht. Dies geschieht ais zeitlich seiend jeweils im Sein gehalten werden22•
bei Kant nicht in den Dialektikabschnitten seiner Kritiken Die Destruktian der Metaphysik aIs traditioneller Ontolo-
obgleich dies sehr wohl ais das eigentliche Problem diese; gie, die Heiddeger auf diese Weise volIzieht, zielt also nicht
Abschnitte erwiesen werden kann (s. o.), sondem in der «De- auf ein Zuniehtemachen dieser Metaphysik, sondern darauf,
duktion der reinen Verstandesbegriffe» lmd ihrer Vereini-
21. S. Sein und Zeit, S. 203 f.
20. Frankfurt a.M., 1973'; vg!. bes. S. 85-109. 22. S. a.a.O.S. S. 320 f.
HEINZ KIMMERLE KRITIK AN DER MET APHYSIK 351
350

ihren Status aIs «Seinsvergessenheit» bloss zu legen und Auf diesem Weg will ich Heidegger indessen nicht folgen.
nach Anzeichen zn forschen, in denen die Seinsfrage inmit- Er endet füt meinen Begriff in schwer verstandlichen, ra-
ten einer Ontologie der Seiendheit sich dennoch als das fun- tional kaum fassbaren Sprachformen. Unterscheidungen wie
damentalere Problem kundgibt. Sofem die Metaphysik durch der «Grund aIs 'Warum'» und der «Grund ais 'Weil'»
die Hereinnahme der Seinsfrage neu begründet werden kann, oder die Charakterisierung der Differenz ais etwas, das die
liegt ihr Problem auf einer allgemeineren Ebene aIs derjenigen Identitat zwischen Seienden überhaupt erst maglich macht,
der traditionellen metaphysischen Themen. Um dieses Problem sind noch begrifflich ldar, aber wie daun der Grund der
von der traditionellen Metaphysik (und Ontologie) deutlich Metaphysik durch eine « Interpretation» einzelner Fragmente
abzuheben, ist es aIs das der «ontologischen Differenz» zu der Vorsokratiker zurückgeholt werden soll, entzieht sich
fassen. Der Ausgangspunkt muss deutlich bleiben : es geht ebenso meiner Maglichkeit des kritischen Nachvollzugs wie
nicht um die Begriindung der Seiendheit des Seienden, son- die niihere Kennzeichnung der (ontologischen) Differenz. AIs
dem um dessen Grund im Sein. Woher kommt das Seiende? Veranschaulichung gebe ich ein Zitat aus vielen langen Pas-
Wodurch bringt es sich im Dasein des Menschen zur Ver- sagen gleicher Art : «Die Differenz von Sein und Seiendem
standlichkeit seines Seins? Warum gibt es sich der Bear- ist ais der Unter-Schied von Ueberkommnis und Anlcunft
beitung und Bestimmung durch den Menschen anheim und der entbergend-bergende Austrag beider'24.
haIt sich fiir diese Bearbeitung und Bestimmung zur Ver- Das Thema einer Verwindung der Metaphysik durch das
fügung? Denken der Differenz ist fassbarer und konkreter ausgear-
beitet bei einigen neueren franzasischen Autoren wie z.B.
Erst weun diese Fragen beantwortet wiiren, würde die M. Foucault, G. Deleuze, L. Irigaray oder J.F. Lyotard. !ch
«ontologische Zentralkategorie» von Marx, das Zugleich werde dieses Thema anhand einiger Texte von J. Derrida
menschlicher Zwecke und natürlicher Gesetzmiissigkeiten so- etwas weiter verfolgen, dessen Schritte freilich auch je lan-
wie gesellschaftlich entstehender Verhaltuisse, fundamental- ger desto mehr in schwer verstandliche und dunkle Aus-
ontologisch aufkHirbar. Aber Heidegger geht nicht weiter drucksweisen abzugleiten scheinen. Aber in machte die
auf diesem Weg einer neuen Grundlegung der Metaphysik. Wege der Kritik an der Metaphysik, die schliesslich zu deren
Das Kantbnch wird im Vorwort zn seiner 4. Auflage ais ein Verwindung führen sollen, bis zum aussersten Punkt mit-
«fragwürdiger Umweg» zur Entfaltung der Seinsfrage be- gehen, an dem für mein Verstandnis noch mit logisch-kate-
zeichnet". Hierfiir wird ein «anderer Aufang» gesucht. Mit gorialer Deutlichkeit argumentiert wird.
der Metaphysik wird in lhren Grund, das Sein im Horizont
der Zeit, zurückgegangen. So geth es nicht mehr um eine
Destruktion der traditionellen Metaphysik zum Zwecke ihrer 7. Die Verwindung der Metaphysik. durch ihre
emeuten Grundlegung. Die Aufgabe lautet nun : Verwindung
der Metaphysik, das ist ein mühsamer Prazess des Fertigwer- Dek.onstruk.tion
dens mit ihr und Hinausgelangens über sie durch das Zurtick-
gehen in den Grund und das Zmiickholen dieses Grundes, (Derrida)
aus dem heraus sie entsand. Nietzsche wird wichtig, der die
gründenden Anfange der europiiischen Geschichte neu hinter- Was Metaphysik ist, hat sich auf den verschiedenen Wegen
fragt. Die Erfahrung der Ueberlieferung gerat in ein veran- Yi'. <.1 ••Kritik an ihr jedesmal weiter verschoben. Kant ging es
dertes Licht. der Metaphysik um notwendige weiterführende Fragen

24. S.,HEIDEGGER, ldentitiit und Differenz. Pfullingen, 1957, S. 63.


23. Vgl. Kant und das Problem der Metaphysik l S. XV.
KRITIK AN DER MET APHYSIK 353
352 HEINZ KIMMERLE

aufgruud der Analytik des Erkeunens, Wollens und asthetisch- um ganz neue Dimensioneu des Denkens geht, dass etwas
teleogischen Urteilens. In ihnen faud er die traditionellen grundlegend anderes gemeint lst ais das Seiende lmd dessen
Themen der metaphysica specialis wieder. Ihœ Behandlung Sein lm Sinne der Seiendheit. Er folgt dabei auf eine begrif-
verlief zwar mit methodischer Strenge, führte aber nicht zu flich nicht mehr ausweisbare Weise der Sprache und ist
wissenschaftlicher Erkenntnis. Hegel erlasste diese Fragen «Unterwegs zur Sprache» aIs dem «Haus des Seins» das
im Kern als das Problem der Subjektivitat. Er entwickeIte , aIs solehes noch nicht gedacht werden kann. J. Derrid~ hat
die Kategorienfolge des sich denkenden Denkens der abso- dieses Unterwegssein gewissermassen abgekürzt indem er
luteu Subjektivitat und wies dariu emeut die traditionell- den Zeic~enbegriff der modemen Linguistik aclgreift, um
ihn von mnen heraus anfzuliisen und zu transformieren
metaphysischen Themen au. Mit seiner Ableitnng verband .
indem er - nut anderen Worten - in bezug auf die Spra-
'
er den Anspruch hochster Wissenschaftlichlceit einschlies-
slich des Beweises yom Dasein Gottes. Marx nahm Hegels che das Verlaltren der Dekonstruktion einsetzt und in we-
Aufweis der Bewegungsformen des dialektischen Denkens sentlicher Hinsicht weiterentwickelt.
zuruck in die wissenschaftliche Untersuchung des Verhiilt- Heidegger hat die Linguistik und die Reflexion auf ihre
nisse der bÜTgerlich-kapitalistischen Gesellschaft. Diese Wis- '.{'/ ':".Bel~iffe ais «Metaphysik» bestinunt und sich daraufbin
senschaft stellte er in den Dienst einer sie übergreifenden « abschatzig» sein zu wollen, einer ganz anderen Mo-
gesellschaftlicll-geschkhtlichen Praxis. Die Marxsche Theorie ,':;<glicllkeit zugewaudt, niimiich «mit der Sprache eine Erfah-
versteht sich dahei unmetaphysisch und antimetaphysisch, ist ::>'""5 zu machen »26. Derrida hingegen arbeitet die «Meta-
aber fassbar fÜT die Grundlegung einer Ontologie des ge- des Zeichens» deutlich heraus, wie sie im Ansatz
sellschaftlichen Seins. Heidegger schliesslich kritisiert die modernen Linguistik bei de Saussure begründet wird21 •
gesamte traditionelle Ontologie und die ihr zugehorige Me- 2,JEiners,eits knüpft er bei der Ausgangsthese de Saussures an,
taphysik. Unter seine Kritik fallen also auch die nicht meta- die sprachlichen Zeichen «arbitrar» sind. Sie emp-
physisch aufgefassten InhaIte der Kantischen lmd Marxschen ihren «Wert» aus der Unterscheidung von den übri-
Ontologie. Seine Destruktion dieser Metaphysik zieIt im An- Zeichen desselben Sprachsystems. Andererseits macht
schluss an Kant auf iltre neue Grundlegung, die das Sein ,s}.per.ri,!a deutlich, dass sich auch von diesem Ausgangspunkt
des menschlichen Daseins aIs zeitlich (sich zeitigende Zeit- eine «Metaphysik des Zeichens» nur vermeiden msst
lichkeit) interpretiert. Gegenüber diesem Ansatz sucht er das Zeichen konsequent ais «Spur» gedacht wird:
spater einen «neuen Anfang », der austelle iltrer Destruk- ."".'""" soIche Abwesendes anwesend sein lasst und die nicht
tion die Verwindung der Metaphysik vorbereiten solI. Ding selhst führen solI, das so die Spur zu sich bin über-
machen würde. Der Zusammenhang von «signifiant»
Die Verscbiebungen dessen, was Metaphysik ist, sind nicht
signifié» wird ais «gramma» aufgefasst, in dem das
Ausdruck einer Inkoharenz. Die Wege der Kritik an der
Metaphysik, anf denen sich diese Verschiebung vollzieht 1ezeichtr,ete stets sogleich wieder ein Bezeichnendes wird und
einem anderen Bezeichneten verweist. Die «Gramma-
gehoren bereits ais ein Vorausliegendes zum Prozess der Ver-
» gibt die Regehl an für das Spiel dieser fortwahren-
windnng der Metaphysik, in den sie einmünden. Heidegger
Verschiebungen im System einer Sprache. Sie ist zwar
hat das Prograntm dieser Verwindung 'formuliert, und er
unterninunt einige grundlegende Schritte in diese Richtung. Sprachwissenschaft », sofern sie nicht die be-
Dass er Seyn mit y schreibt oder in der Schrift «Zur Seins-
frage» kreuzweise durchstreicht", match deutlich, dass es HEIDEGGER, Unterwegs zur Sprache. PfuIlingen, 1959, S.

J. DERRIDA, Grammatologie. Frankfurt a.M., 1974, bes.


25. S. HEIDEGGER, Zur Seins/rage, Frankfurt a.M., 1956, S. 30-44. ,,,,,gUI":", und Grammatologie », S. 49-129, auch zum folgenden.
354 HEINZ KIMMERLE KRITIK AN DER MET APHYSIK 355

sonderen Verhaltnisse einer bestimmten Sprache oder Spra- indem er das Gebaude mit seinem Fundament niederzureis-
chenbruppe untersucht, aber sie ist nicht synchronisch irn sen bestrebt ist. Auch das Progranun einer Fundamentalon-
Gegensatz zn einer diachronischen Theorie, weil sie die Spra- tologie bleibt nach seiner Auffassung den Voraussetzlmgen
che prinzipiell ais Geschehen (Ereignis) zum Thema macht. der Metaphysik verhaftet. Aber er will nicht einfach de-
Das wechselnde Spiel der Bedeutungen kaun sich besser, struieren, sondem zugleich umbauen. Er setzt au bei den
sachgemasser au der geschriebenen Sprache vollziehen als Strukturen der Metaphysik, und indem er sie auflost gibt er
an der gesprochenen. Die Sprache ist auf diese Weise we- ibnen ihre «Strukturalitat» zurück". Das heisst, er nimmt
niger au die Situation des Gesprochenwerdens gebunden, die sie hinein ins Geschechen der Sprache ais Spiel sich ver-
ihr ein einmaliges Sein zn geben versucht. Die Schrift offnet schiebender Bedeutungen. Auf diese Weise findet er einem
sich den Differenzen verschiedener moglicher Interpretatio- neuen Weg, um das Programm des spateren Heidegger auszu-
nen. Sie gewinnt in wechselnden Verweisungszusanunenhan- führen, das nicht auf Destruktion, sondem auf Verwindung
gen, die mit verschiedenen Situationen gegeben sind, stets der Metaphysik gerichtet ist.
andere Bedeutungsbinsichten und veranderte Bedeutungs- Mit der Arbeit der Dekonstruktion der Metaphysik steh!
funktionen. Derrida begreift die Schrift als Spur, in die sich Derrida nicht alIein. Am Ende des vorigen Abschnitts habe
Verweisungssysteme konkreter Sinngebung (Bedeutung) ein- ich einige andere Namen genannt. Er sucht jedoch, diese
geschrieben haben und die sich in solche Systeme einschreibt. « Arbeit» auf den Begriff zu bringen, die «Regeln» dieses
Es siud Differenzen im Seinsverstandnis, die darin zum Aus- « Spiels» zn «formalisieren». Hierfür findet er folgende
druck kommen. Ais Schrift ist die Sprache nicht etwas, das Formulierungen : «Die Bewegungen dieser Dekonstruktion
immer schon da ist und verfügbar bleibt, sondem das in liihren nicht von aussen an die Strukturen. Sie sind nur
seinem Anwesendsein auf Abwesendes verweist. Sie geht nie moglich und wirksam, konnen nur etwas ausrichten, indem
vollig auf in einer konkreten Bezeichnungsfunktion, in ihr sie diese Strukturen bewohnen... Die Dekonstruktion hat
sind nicht nur Differenzen, sondem die Differenz ais solche notwendigerweise von innen her zu operieren, sich aller sub-
(das différer der Differenz) ausgedriickt". versiven, strategischen und okonomischen Mittel der alten
Derridas Eingehen auf die Lingnistik und ihre innere Struktur zn bedienen, sich ihrer strukturell zn bedienen, das
Transformation znm Denken der Differenz kann deutlich heisst, ohne Atome und Elemente von ihr absondem zu kon-
machen, was er unter der Dekonstruktion der Metaphysik nen. Die Dekonstruktion wird inuner auf bestinunte Weise
versteht. Er grenzt dies Verfahren ausdriicklich von Heideg- durch ihre eigene Arbeit voraugetrieben »30. Für Derrida hat
gers Versnch einer Destruktion der Metaphysik ab, die noch diese Arbeit der Dekonstruktion des Metaphysik also zn-
darauf zielte, das Gebaude der Metaphysik im Siune der gleich auch unmittelbar praktische Bedeutung. Sie kann nicht
traditionellen Ontologie zu zerstoren, um dessen Fundament, in den gaugbaren Formen der universitaren Wissenschaft
die Zeitlichkeit des Seins zum Ausgaugspunkt ihrer neuen betrieben werden, die einen Teil des bestehenden Erziehungs-
Begriindung zn machen. Derrida will radikaler zersWren, systems ausmachen.
lm zweiten Teil der «Grammatologie» zeigt Derrida den
28. Vgl. a.a.O.S. 40-43 und «Die differance », in : DERRIDA, Rand~ Zusammenhang auf zwischen gesprochener Sprache und Ur-
gange der Philosophie. Frankfurt a.M. - Berlin - Wien, 1976, S. 6-
37. Die Veranderung der Schreibweise von différence in différance sprungsdenken, dem die Schrift als die Moglichkeit einer
Uisst sich beim deutschen Wort Differenz nicht ohne sehr gewollte
Sprachpdigungen (Differanz) nachvollziehen. Was Derrida in der
genannten Veranderung zum Ausdruck bingen will, lasst sich sehr 29. ·Vgl. DERRIDA, Die Schrift und die Differanz. Frankfurt a.M.,
viel besser wiedergeben durch die Schreibung von Unterscheid an- 1972, S. 422.
stelle von Unterschied. 30. S. Grammatologie, S. 45.
356 HEINZ KIMMERLE

freieren Vedinderung des SpieJs der Bedeutung entgegenge-


setzt wird". Das Werk Rousseaus wird zum Paradigma für
die Verbindung von Ursprungsdenken und Padagogik. Das
Kind hommt nur noch als der unfertige Erwachsene in den
Blick. Das macht eine Dekonstruktion der Padagogik und ihrer HELMUT KUHN
Stellung im Zeitalter der "Schule», sowie der zentralen po-
litischen Rolle des Erziehungssystems notwendig. Sofem die
Philosophie ais universWire Wissenschaft an diesem System ]ENSEITS DER
tei!nimmt, hat ihre eigene Dekonstruktion ais Dekonstruk-
tion der Metaphysik politische und gesellschaftliche Effekte. TRANSZENDENTALPHILOSOPHIE
Das hat Derrida konkret umgesetzt in seinen Beitriigen zur
Gründung und Begründung der Groupe de Recherche sur Ein Entwurf'
l'Enseignement de Philosophie". Auf diese Weise gewinnt
die Metaphysikkritik die praktischen Dimensionen zurnck,
die in der Marxschen Theorie bereits den Angelpunkt des
kritischen Ansatzes bildet. Philosophie-Unterricht bewirkt Gegenstand unserer Untersuchung ist zuniichst das Be-
im Konte,,! des gangigen Erziehungssystems dessen Dekon-
'.,vU!,sts:eÎ11, und es ist zugleich das Bewusstsein, das die Un-
struktion, sofem er die Verhiiltnisse des technischen Denkens,
das alles als verfügbar und machbar ansieht, ebenso auflost .; ~'~~~~:~:n anstellt. Das sich auf sich selbst besinnende
;', nennen wir, in Einschrankung des gewohnlichen
und differentiell setzt wie die Verhiiltnisse des Ursprungsden-
'" ortgebnmc:hs, Selbstbewusstsein. Es geht somit um die
kens, das die auszubildenden Philosophen von dem fertigen
,À,ufl,ei"hnmng eines einmaligen Vorgangs durch den Produ-
Bild des ausgebildeten Philosophen her betrachtet. Auch eben dieses Vorgangs. Insofem beruht die Unter-
diese Dekonstruktion wird von der Dynamik ihrer eigenen ., siucrmng in jeder Phase auf originiir Gegebenem, iihnlich
Arbeit vorangetrieben. Beschreibung einer wirklich gesehenen Landschaft. Zn-
;/'ileic:h aber macht sie den Anspruch der Allgemeinheit :
diese oder jene von mir gewiihlte Landschaft soli zum
Vorscheiin kommen, sondem die allen gemeinsame. Die Be-
beansprucht, repriisentativ zu sein. Sie will eine
jled"mmrm offene Moglichkeit aufweisen. Selbstbewusstsein,
Unterschied von Bewusstsein überhaupt und von prak-
;:tÏsdner Selbstunterscheidnng, will sich selbst ais den Ort
Aktualisierung von Allgemeinheit. Es verwirklicht sich
<;~~:~e]~'~ne Besinnung, mit der, gemiiss der sokratischen
•..•. die Philosophie ihren Anfang nimm! : «Erkenne
selbst !» Diese Besinnung ist keine Wissenschaft, so-

31. Vgl. a.a.O.s. 171 ff.


32. Vgl. DERRIDA, «Où commence et comment finit un corps en- Die folgenden Seiten dienen aIs Einleitung zu dem im Frühjahr
seignant », sowie den Sammelband im ganzen, in dem dieser Artike1 verëffentlichten Buch : Der Weg vom Bewusstsein zum Sein
erschienen ist : F. CHATELET, u.a., Politiques de la philosophie, Paris, Klett~Cotta, Stuttgart).
1976.
358 HELMUT KUHN JENSEITS DER TRANSZENDENT ALPHlLOSOPHlE 359

fem niimlich eine jede Wissenschaft sich einem spezifischen des immer drohenden katastrophischen Dammb~chs
Gegenstaud oder Gegenstaudsgebiet zuwendet, wahrend das aIs die Knn~t der Entriegelung, gewi.ss,?""ass.en. emer
Bewllsstsein, unser Gegenstand, alle erdenldichen Gegen- vOlrsic:hti.gelo Irrigation, die eine cultura amm. ermoglicht:
stande in sich urnfasst. Doch liegt sie aller Wissenschaft U ebersicht zu gewiunen, müssen wir uns eme
zugrunde, da jede Wissenschaft wahr sein will. Siun und ii.~~:~;;~~o~, von Grundlinien vor Augen stellen - von
Ursprung von Wahrheit aber lassen sich nur im Licht des ;è. die den Fortschritt der Besinuung leiten sollen.
Bewusstseins geschehender Allgemeinheit, d.h. des Selbst- werden uns au die Hand gegeben durch. die bereits se~t
bewnsstseins, begreifen. /J.) ",eblr ais zwei J ahrtausenden wwende Besmmmg, dIe Wlr
Geschichte der Philosophie neunen und in die wir. mit un-
Man kann nicht von Bewusstsein sprechen, ohue an das seren Ueberlegungen, von die~er unserer Vorg~schichte be-
Unbewusste oder auch an Vor- und Unterbewusstes zu und zugleich gefesselt, emtreten. Deun dIC Vors~hdf­
denken. Aber wie schon ihre sprachliche Form andeutet, die uns diese von Widersprüchen zerrissene Geschichte
sind diese Begdffe dem Begriff des Bewusstseins eingeordnet. .\tiloterHi:\st, werden lesbar und nützlich nur ais Anweisungen
Das Unbewusste, durch Extrapolation rekonstrnierbar, ist Selbstentdeckung. Entdeckung aber ist nicht gleichbe-
potentia! Bewusstes. Daber ist jede Bewusstseinserforscbung >!!eutend mit Erfindung. Die gesuchten Grundlinien müssen
in Tuchfiihllmg mit dem Unbewussten. Selbstbesiunung zielt operativ in unserem Selbst- und Weltverstandnis
auf Bewusstmachung yon Noch-nicht-bewusstem: durch 1;'wirksarn sein, bevor wir ihrer ausdrücklich und bewusst hab-
Anammesis kaun sich das Noch-nicht als Schale eines verbor- werden kounen. Einerseits sind sie Resultat der Selbst-
genen Nicht-mehr entpuppen. Die Selbstbesinnung wirft ihr . anderseits Hilfsmittel und Koder, die dem
Licht nicht auf schlicht Vorliegendes und sie ist nichts we- und Halbbewussten weitere Erkenntnis-
niger ais eine Bestaudsaufnahme. Sie ist ein gesteuertes entlocken. Zu den Lehren, die uns die Geschichte
Werden _ Bewusstwerdung des Unbewussten. Und sie ge- Philosophie erteil!, gehort auch und in erster Linie die
schieht nicht durch Ausdchtung des Blicks nach iunen, nicht Flreil:,eit der platonischen Synopsis, des suchend-zusammeu-
dnrch Reflexion, sondern durch Entriegelung. Nur durch .sl,haneJod,m Hinblicks auf die sich uns zeigende Wirklich-
Freimachung des Blicks «nach aussen », in die 'Weite des Ais den Wiederentdecker dieser Freiheit für unsere Zeit
Seienden, kannen wir das sich im Unbewussten Verstek-. ;ei:kenn,:n wir Edmund Husserl, den BegtÜnder der moder-
kende ius Bewusstsein locken. Bewusstwerdung ais Erschlie- Phanomenologie, und im Hinblick darauf dürfen wir
ssung des im Unbeiwussten Verschlossenen befreit von dem .... uloselren Versuch ais «phiiuomenologisch» klassifizieren.
Vomrteil, das die Sphare des Unbewussten zur Statte irra-
tionalen Trieblebens travestiert. Die frühen Entdecker des Die phiiuomenologische Durchforschung d~ Bewusstseins
Unbewussten, die Gdechen und voran Platon, dürften das priien.tielt sich an pdnzipien, die keineswegs lm. Nu, d~rch
Richtige getroffen haben, als sie in ibm sowohl die Region Akt geistiger Anschauung etwa, zu ge:;mne~ s~d.
unsagbaren Entsetzens wie auch einer meuschliche Begdffe 91IW(In! es ihre Aufgabe ist, zu begdiuden, klaren SIe slch
übersteigenden Gottlichkeit vermuteten. Sie ahnten, und ihr schlittweise, im Fortgaug der forschend auf sie gedch-
gelehdgster Schiiler, Augustin, wusste mit brennender Ent- Analyse, als das auf, was sie sind und bedeuten. D~S
bchiendenheit, dass die Aktualitat unseres Bewusslseins mit Sache nach Ursprüngliche und Erste ist zwar auch fur
einer belichteten Insel zu vergleichen ist, die sich, durch Untersuchung das Erste, aber nur in Vorwegnahme und
Deiche und Damme befestigt, aus dem sie dunkel umbrau- Leitfaden. Ais entfaltetes Phanomen hingegen ist das
denden Ozeau des Unbewussten heraushebt. In der Tat ist das Letzte. Wir bewegen uns also im Kreis : die Pha-
die sokratische Selbstbesirmung zu verstehen als rettende Ab- itlIJlllen()lo!~e, der wir folgen, ist dem Gesetz des hermeneu-
360 HELMUT KUHN JENSEITS DER TRANSZENDENTALPHlLOSOPHlE 361

tischen Zirkels unterworfen. N un fordert schon die seinen subtil durchgebildeten Ausfonuungen durch-
~ehmende Uebersich eine Zweiteilung, die auch :W"gell. Man denke an das Gegensatzpaar von Yang und
f i ~rscheinung treten muss. Zwecks Gliederung des
iro alten China oder an die konstitutive Bedeutung von
Geslehtsfeldes unterseheiden wir zwischen Dinlensionen . und Apeiron (oder verwandter Gegensatzbestimmun-
Strukturen und dieser Unterseheidung entspreehend im griechischen Denken vor wie auch nach Sokrates.
tet die Untersuchung im Zweitakt voran. Die SU'uk:tuirell der abendUindischen philosophischen Tradition ais gan-
~nalyse setzt die dimensionale Analyse voraus. Die sich sagen, dass in ihr, wenn auch meist hinter-
SlOnen lassen das Bewusstsein ais Zustand die Str,,1ch,.o. und durch andere Motive verdrangt, der Polariüits-
aIs Tatigkeit und Gesehehnis in Ersehein,,'ng treten : wirksam bleibt. Heut aber schiebt er sich in weit
naehdem die Totalgestalt des Bewusstseins ausgemessen .einalnd.er entfemten denkerischen Zusammenhangen in
lasst sie sich in Bewegung vorführen. Ab,," sowohl der Vordergrund. Ein religiëser Denker wie Romano Guar-
tlsehe Aspekt, als Gefüge von Dinlensionen wie aueh hat sich in seiner ersten philosophischen Verëffentli-
dynantisehe Aspekt, das strokturierte Werde~, zeigt sieh « Gegensatz und Gegensatze» (1917) zu ibm ais dem
beherrseht von je einer Grundfigur - das dimensionale zutiefl;t bewegenden Problem bekannt, um, ein Halb-
von der Bipolaritat, das strukturale Feld von dem Svmtl<' spater, bei der akademischen Feier anllisslich
d~s A~fstiegs. Mit diesen beiden Grundfiguren führen
70. Geburtstages, dieses Bekenntnis zu erneuern. Tra-
meht eme erdach~e Neuordnung ein. Vielmehr knüpfen und gewagte Modernitat begegnen einander :
an Motive an, dIe das menschliche Nachdenken schon franzësische Ethnologe Claude Lévi-Strauss baut sein
s<:inen Anfangen belebt haben und die heut, in der der pensée sauvage, insbesondere seine Interpretation
meht bloss des Zerfalls, sondern der ausdrücklichen Totemismus nach dem Prinzip einer multipolaren Ge-
nung der metaphysischen Tradition, zu ueuer Be:deutlmnnk',it:
erwachen.
:-Aehlllich wird bei der Behandlung der dynamischen Struk-
Zunaehst zur Grundfigur der Polaritat : was wir «Di" zu verfahren sein, und von der Herkunft und Ge-
me~sion» nennen, ist zu denken aIs Erstreckung 'zwischen des in dieser Sphare leitenden Symbolgegriffs ist
zwel Polen, d. i. von zueinander gegensatzliehen und zu- (ehnli,ch,," wie über die Polaritat zu sagen : «Weg» oder
gleieh voneinander abhangigen Gegensatzen. Zu diesen sinn- Allfstieg» lautet der Name der Struktur, in die spezielle
stiftenden Gegensatzen gehërt beispielsweise die Opposition einzuschreiben sind. Auch er bezeichnet, ver-
von erkennendem leh (dem eartesianisehen cogito) und dem lêi<;htlar dalin wiederum der Polaritat, ein Ursymbol, das
erkennbaren Gegenstand; oder die von Aktivitat und Pas- Jahrtausende und Jahrhunderte unter verschiedenen
~ivitat Jede dieser zahlenmassig begrenzten Dimensionen pra:ehllieblen Formen und Bildern im denkerisehen Gespraeh
lst glelchsursprünglich und unableitbar ; aber keine von ihnen Mensehheit mit sich selbst weitergereicht worden ist -
kann für sich gedaeht werden. Sie sind, wie die Analyse Tao inl fernostlichen Altertum über den visionaren
zelgt, v:eehselseitig mit einander verfugt und gemeinsam <~~~:)~~:~!f~b~ei~P!anuenides
und Platon, über die aus bibliseher
bilden SIe den «Raum» aller Sinnhaftigkeit - einen Raum ;" stammende Hiromelsleiter, die scala periec-
in dem sieh eine binar gestaltete Wirkliehkeit enthül1t S~ cc ,• der Mystik, über den erlësenden Aufstieg in Faust II
.v ....

unübersehbar sich aufdrangend ist die konstitutive Du~litiit sehliesslich, naeh dem Zusammenbruch des Fortschritts-
der Wirkliehkeit, dass sie bereits die frühesten Dokumente zu unserer eigenen Zeit. Da lebt an der Spitze
eines logisch noeh unentwiekelten Naehdenkens über die Modernitat, z.B. bei Ludwig Wittgenstein und Samuel
Welt pragt, um dann wieder in Zeiten der Reife und Ueber- :;Beek"tt, das Sinnbild der Leiter wieder auf - freilieh in
362 HELMUT KUHN .IENSEITS DER TRANSZENDENTALPHlLOSOPHIE 363

einer sich selbst in Frage t li d Die literarische Fonn der Gedankenentwicklung ist durch
dem Aussichtspunkt ob s e en en Verbildlichung. Ist von den Gegenstand vorgeschrieben. Wir nennen sie «medita-
Nichts? Muss etwa d' e~ ~och anderes zu erblicken ais - ti" ». Diese Darstellungsweise unterscheidet sich von der
klommen hat wieder le. eIter von dem, der die Hohe er- didaktischen Fonn, die eine These voranstellt, um ibre Be-
N achfolge geben kaun ~mgezogen werden, so dass es keine gründung nachfolgen zn lassen; aber auch von der syste-
matischen Fonn, die, von obersten Prinzipien ausgehend,
lm Symbol des Wegs ve . . . . ein System, will sagen ein znsammengefügtes Ganzes, vor
terscheidbaren Motiven Z rel.mgen. slCh eine Reihe von un-
d D' " uuachst lSt der Weg in der Natur Augen stellt. Meditation ist die am wenigsten anspruchsvolle
s:'on ':~a;::;:e;:tet : wir fi~den oder verfehlen ihn ais Foro : sie unternimmt es, eine Gedaakeufolge ais realen
allgemeine Begehu asse. Abbe~ dIe Bahn lasst sich auch für Vollzng darznstellen und zum Mitvollzng einzuladen - eine
ng zu ereIten und b f t' d Einladung, die die Freiheit des Mitdeokenden zu schonen
(006,) zur Methode ([L'6 Il ). e es Igen, er Weg trachtet. Sie ist, mit dem von Augustin erfundenen Wort
Bild m'cht d e 0 0, ausbauen. Ferner meint das
nur en vorgezeiCh t W bezeichnet, eiu soliloquium - ein verinnerlichtes Gesprach,
Begehen des Wegs Di B ne en eg, sondern auch das
ein Ende einen AJrl ese ewe~g hat einen Beginn und das nach aussen treten und Dialog werden will.
Rahmen 'der D' ~ng und em ZIeI : anhebend von der im Freilich hat es mit der Freiheit des Mitdenkenden eine
nnenslOnen entf lt t S· af . . ,
auf Sinnerfüllung. Ob aber B a e .?n mnh tlgkelt zwlt er eigue Bewandtnis. Die dem Leser vorgelegte Einladung rührt
gung selbst _ Weg . t ahn fur Bewegung oder Bewe- an einen Punkt, an dem die Aufforderung mitzudenken zur
dies beherrschende ;: /o~ allem Konti~uiüit. Doch gerade Herausforderung wird. Davon gibt bereits der richtig ver-
Bewegung Schritt fü ~ '~lSt proble;natisch. Kontinuitat ist ;é st:anl:lerw Titel einen V orgesmack. V om Bewusstsein soli die
wundene Diskontinu~r'tc D tt, d.h .. e~ne kontinuierlich über- sein - von den konstituierenden Dimensionen und
Bewegung von neu a. en~ mIt ]edem Schritt fangt die von den Strukturen seiner Entfaltung. Damit ist jedoch kein
em an DIe K r 't" d
in Spannung zu m" rh' . on mm at es Wegs steht mit anderen Gegensttinden vergleichbarer Gegenstand ange-
oder muss socrar zougm'Cscehr ?d,skontinuitat. Der Weg kaun, Denn aile erdenklichen Gegenstande sind gegen-
o , ,
eutscheidenden Augenbr k
el eweg we d d S hri .
r en, er c tt, lm
modernen Existenzphil lC h'zn~ Sprung. Die Wahrheit der
,< .stanl:lli"h nur für ein wirkliches oder mogliches Bewusstsein.
Also scheint sich UlISere Gegenstandsbestimmung in die
Notwendigkeit des S osop le hegt darin, dass sie auf der Allheit von Gegensttinden zu verlieren, Dieser Verlegenheit
prunges beharrt ih 1 h,~' d
nachHissigung des W N' .' r rr,~u m er Ver- konnten erklaren : es sei das menschliche Bewusstsein, mit
egs, ur m BeZlehu W 1 d
Prinzip der Kontinnita"t bleltder«Sp
'b ng zum . eg aIID s em dem wir uns zn beschtiftigen gedenken. Damit aber würden
tragische Drama kann . h rung» smnvo. as wir das von uns Gesnchte, das Bewllsstsein, abhtingig ma-
dahinfliessenden E os a~'c. nur vor dem Hintergrund des chen von dem Wesen, an dem es haftet - vom Menschen;
sen des Wegs bed~utet a~;~e~:h~as augenb~ick~che Abreis- es ergabe sich die Notwendigkeit, unserer Frage die
baren verliert nnd das D ' dass e.r s.lCh .nn Ungang- andere Frage vorzuschalten : was ist « der Mensch » ? Damit
Vielmehr bringt d' Menke.n der BeheblgkeIt ausliefert. würden wir UlIS zn einer Denkweise bekennen, die Philo-
es Ie otonk d b
zugleich zu vollziehenden B er ~u . etrachtenden nnd sophie mit Anthropologie znsammeufallen Hisst und die
einem «unbegehbare W ewegung mit slCh, dass auch von . untel' dem Titel des «Hominismlls» sogar in der Theologie
n eg»zuspreh . 'd
einer letzten Wegstrecke di . c en sem ,wlr , d.h. von Eingang gefunden hat. Aber zugleich wtirden wir UlISere
will sagen zn einem wiss~nsc~~lC~ mch~ z~ emer Methode, eigene, das BeWllsstsein betreffende Frage ihrer philosophi-
ausbauen Hisst. Dies ist . ~,ch le.!lItllmerten Verfahren, chen Diguitat berauben. Denn auch der Mensch gehOrt ja
moglichen ZlIsammenflie~s Wle slCh ~elgen wird, der Punkt in das Ali von Gegenstanden, von seienden Wesen oder
ens von WlSsen nnd Glauben.
364 HELMUT KUHN
JENSEITS DER TRANSZENDENT ALPHILOSOPHlE 365
Dingen, die dadurch sind, dass sie für uns sind, und Zuflucht, durch eiue logische Metamorphose zum
Siun dieses «für uns» stünde in Rede. Nun konnen wir Subjekt stilisiert. Der Gegenstand der Er-
sehr wohl eine Welt ohne Menschen denken. Aber das Be- aber - das dem Bewusstsein Entgegeusteheude -
wusstsein davon - vou der Welt ohne Menschen -
'.'Y/,rli,ert dauu seine eigenstiindige Bedeutung; er wird ZUlll
nicht weggedacht werden. Es ist im Begriff «Welt »,
Pr,odiIKI eiuer ihn konstituierenden Bewusstseinsleistung. Und
in jeglichem Gegenstaudsbegriff, mitenthalten. Insofern steht
d.llfüber droht der Anspruch auf Wahrheit verloreu zu gehen.
das Bewusstsein wahrhaft und unverrückbar am Anfaug.
Philosophie hat Bewusstseinsphilosophie zu sein. Das hat ';::~C'~~l;~~~s~is~~thim Begriff, zur subjektiven Weltaoschauung
.<1 zur Ideologie zu werdeu. Demgegenüber
Descartes gelehrt und hinter Descartes konnen wir nicht
.bedel!tet die Wiederherstellung des Begriffes «Bewnsstsein»
zurückgehen. Oder konnen wir doch ? Die in der folgenden :;X;\;eine Wiederaufnahme und ein Weiterdenken des von Bren-
Untersuchlmg gewagte Antwort sag! «nein » zu dieser Frage, und Husserl in die moderne Philosophie eingeführten
aber in einem e.ingeschrankten Sinn auch «ja».
der Intentionalitat und der iuteutionaleu Struktur
Die moderne Philosophie seit Descartes ist Bewusstseinsphi- Bewnsstseins. Bewusstsein ist immer und wesentlich
losophie uud an sie haben wir uns anzuschliessen, nicht Um etwas. Jeder Bewusstseinsakt meint eine Sache. Bewusst-
der Zeit zu dieuen, sondern bezwungen durch den Sachver- sind wir ausser uns, bei dem Gewussten, und im
hait. Das kosmologische Denken des vor-cartesischen Zeit- ,,,II-Iasse, in dem wir bewnsst werden, enthüllen sich uns Ge-
alters ist uns zwar verstiindlich, aber wir konnen es uns nicht Indem wir uun unsere Aufmerksamkeit diesem
unmittelbar zueigen machen. Dass «Erkennen» auch dies Charakter von Bewusstsein zuwenden, bemer-
ist : ein Eteignis, das sich aus seiner mundanen Verwur- dass Bewusstsein in erster Linie Zugaug zu dem
zelung erkUirt, leuchtet ein. Aber ais Grundlage und Aus- was es selbst nicht ist - zum Sein; dass aIso
gangspunkt will diese Feststellung nicht taugen. Das Bewusst- sachgemasse Interpretation die Restitution des asym-
sein, das immer Bewusstsein von etwas ist, scheint uns Gleichgewichts zwischeu Bewnsstheit und Sein
der Sache nach früher und grundlegender zu sein. Alleu ar- Und damit nahern wir uns, nicht durch Kompromiss,
chaisierenden Bekenntnissen zum Platonismus, Aristotelismus durch Radikalisierung, auf dem Wege der modernen
oder auch zum Thomismus gegenüber verstehen wir uuser der vor-modernen und vor-carte-
Philosophieren ais «modern». Aber wir machen eiuen Un- Asymmetrisch nennen wir das Gleich-
terschied. égéwÎ<:ht, sofern Bewusstsein die Ausgaugsposition, Sein aber
Die Bewusstseinphilosophie ist in eine Krise geraten, die Ziel bedeutet. Bewusstsein jedoch is nicht bloss ein Weg
von Heidegger und seinen Gefolgsleuten ais «Eude der Phi- Sein : es isf dieser Weg, und es gibt keinen auderen.
losophie» diagnostiziert worden ist. Was aber in Wahrheit der Verwirklichung dieses Programms treten eine
erschopft ist und zuendegegangen, ist vielmehr, so will uns von Zentralbegriffen in Funktion, die hier nur ge-
scheinen, eine Auspragnng der Bewusstseinsphilosophie, die nicht entwickelt werden kannen. Da ist an erster
ihre eigne Grundlage, das Bewusstsein, zerstort hat, um "'!;:,'St'elle der Begriff der Ausgaugsposition : sie besteht nicht in
schliesslich im Subjektivismus zu erstarren : das Objekt ist durch Reduktion gewonuenen Vernuuft-Ich oder ei-
in Verlust geraten. Erkenutnis wird missdeutet ais produk- transzeudentalen Ego. Vielmehr schenkt sie sich uns
tiver Ausdruck, wobei der sich ausdrückende Produzent in den unverkürzten Reichtum eines von Lebenserfah-
der Rolle des Individuums oder eines konkreten Kollektivs gesattigten Bewllsstseins, der Disziplin philosophischer
oder auch des Totalkollektivs der sich in ihrer Geschichte :,:SyrLop'sis unterworfen. Au zweiter Stelle ergib! sich, dass
darlebendeu Menschheit auftritt; wenn er sich nicht, seiue uns der Methode der «zetetischeu Phiinomenologie»
13
HELMUT KUHN JENSElTS DER TRANSZENDENT ALPHILOSOPHIE 367
366

bedienen : in Durchforschung des aktuellen Bewusstseins will f~~~~:~OJW~i~~r-~~bewusstsein, ëffnet sich mit seiner Besinnung
sie seine auf mehr oder weniger verbogene Weise sinnbestim, ( des eigenen Seins. Denn das Jetzt, ais unser
menden Prinzipien aufdecken. Auf diese Weise soll das zéitgenëssisches Jetzt, stellt sich uns dar ais die edebte Ge-
wusstsein erst recht zu dem gemacht werden, was es seiner (genw:Jrt, die ans einer lebendig-verdanunernden Vergangen-
Mëglichkeit und Bestimmung nach immer schon ist : in eine unbekannte aber geahnte Zukunft hineinwachst.
Weg zum Sein. Schliesslich, drittens, nennen wir den Urge, umschliesst das Wir, die Hmse unseres Ich-Bewusst-
genstand, das summum objectum, in welchem sowohl ausser den Mitlebenden auch die Generationen der
Bewusstsein ais der Weg sein Ziel findet wie in ihm auch V'orfafucen und der Nachfahren. Das Selbstbewusstsein,
die Gegenstandlichkeit ais existierende Wesenheit ihre wie es ist vom Jetzt-und Wirbewusstsein,
lendung eriangt, Gott; wir meinen also, dass Philosophie, sich, wenn auch noch so dun1œl, ais getragen von der
immer schon und aus sich selbst, im Begriffe ist, Theologie es hinausreichenden Geschichte und somit ais «Sohn
zn werden oder eine Theologie zu begründen. Zeit» : unter dem Gebot «erkenne dich selbst!»
'j:.ntllüllit sich uns unsere eigene Geschichtlichkeit.
Um diese einleitende Erwagung abschliessen zu
bedürfen wir einer noch ausstehenden Klarung des Die moderne Philosophie ist zweimal gegründet worden.

;~.~~;~~~s:d!u:r~c~h~~D~:es~~c;art~~~e~s;
nisses von «Weg» und «Augsgangsposition ». In
undsein.
zu seitdem
Zum kann sie Mal
zweiten nichthat
umhin,
He-
chung von der Transzendentalphilosophie versuchen
nicht, die Augsgangsposition ais allgemeines « a priori» . und mit und nach ihm muss sie Geschichts-

r·:~~~~~~~:~kl'~~:~:
lich herzustelleu. Wir nehmen sie, wie wir sie finden - in sein und bleiben. Aber ganz wie
selbst, in nnserem durch Besinnung zn zum so ist auch in Bezng auf
Stillstand gebrachten Leben. Nur in solcher Pause kOJmrr,t; Hegelianismus eine Einschrankung und Abgrenzung er-
nns unser eigenes Leben ais Weg und Bewegung zu Gesich!. '\I[ofl:lerlicJil. Und diese Forderung ist dringlich, weil beide
Dabei lernen wir, in dem nur je uns selbst eigenen Weg die ··;<[Ienlkinlpulse nicht nur Schule gemacht, sondern die den-
Spuren des allgemeinen Wegs - des Menschenwegs i~erjjs.ch.e Atmosphare verandert haben : zum Geheimnis ihrer

hin - zu entziffern. gehërt ihre partielle Anonymitat. Mit der Wendung


Transzendentalphilosophie, so meinen wir, hat das mo-
Dieser Weg jedoch, der vom Ich zur En.Hü,s""mng, Prinzip des Bewusstseins, das zugJeich das Prinzip der
Bewnsstsein zum Sein führt, ist von vornherein $~,bj"ktivitt'it ist, seine Greuze überschritten : wer ihr folgt,
schon nicht bloss mein, sondern unser Weg. Nur auf Gefahr, sich durch Entfernung von dem griechischen
einer künstlichen Reduktion kann er ais tJrsuruln~ seines Tuns aus der Philosophie hinausznphiloso-
schlossene Bewegung vorgestellt werden. Auch der ~tw"œll. Das überforderte !ch des Bewusstseins formalisiert
mitten in einsamer Meditation bleibt in der ~~:,i:~::;!;! der logischen Konstruktion eines fiktiven «transzen-
Das Ich, seiner selbst im Se1bstbewusstsein gewahr ir!enlalen Subjekts ».
!indet sich, wie es sich auch stellen mag, in der Hmse
Wir eingeschlossen. Die Sprache, ohue die ich nicht zn A"hr,lich die V erlegenlheit des Philosophierenden, der den
ken vermag, ist nicht meine, sondern unsere Sprache. des von Hegel entdeckten Prinzips der Geschicht-
Wissenschaft, die ich pflege, ist unsere Wissenschaft. i;lichl<:eit über die ibm gesetzten Greuzen hinans folgt. Auch
Jetzt-bewusstsein, das mein Se1bstbewusstsein ein unvergangliches Erbe zn verwalten und ist doch
ist ein J etzt-zeitbewnsstsein, in dem ich mich mit Gefahr, durch seinen masslosen Gebrauch alles aitfs Spiel
kannten Anderen zu einem zeitgenëssischen Wir vel'bund,m - sich selbst und die Philosophie. Denn er ver-
weiss. Das Selbstbewusstsein aber, eingehüllt in ein was Hegel selbst nich vergass : dass der Jetzt-Augen-
368 HELMUT KUHN JENSEITS DER TRANSZENDENTALPHlLOSOPHlE 369

blick ibm seine Geschichtlichkeit nur dann offenbart, Die Geschichte, von diesem GegenwartsversHindnis aus
er sich im nunc stans des Augenblicks auf Ewiges be:zieht gesichtet, kannte nun wahrhaft ais Geschichte des Menschen
und also spürt, dass er im Grunde doch uur ein «A,d01)thr- gelten : ais homo religiosus kann er sich in ihr ebenso aus-
sohn der Zeit» ist. Andereufalls rettet ihu nichts vor leben wie ais vemuuftbegabtes, denkendes Wesen nnd
Abgleiten in den aile Begrifflichkeit auflasenden subjek- schliesslich anch als animal politicum. Tatsiichlich aber
tiven Historismus. reicht die von Hegel definierte Geschichtlichkeit über den
Geschichte ist nicht ein Geschehen, das wir registrieren Menschen hinaus, und zwar in zweideutiger Weise. Das er-
weist sich am ersten und am zweiten der von uns unter-
kannten wie Geschehen sonst. Denn wir selbst, auch und
gerade, wenn wir es zu verstehen suchen, sind dieses Ge_ schiedenen Ursprungsmotive. Die urspriingliche Versahnung
durch den Mensch gewordenen Erlaser isl Gottes - und
schehen. Das wahrgenommene Geschehen ist zugleich ein
nicht Menschenwerk. So ist auch die Vernunft, die am Ende
Tun, zu dem wir uus entscheiden. Anders gesagt : der
sich über aile Widerspriiche erhebt, gattliche Vernunft : sie
den wir suchend begehen, ist zugleich ein Pfad langs einet
vielbegangenen Heerstrasse. So sehr ich mich ais Einzelgiin- vermag kraft ihrer dialektischen Logik das Sein zu erfassen,
wie es schon vor der Erschaffung der Welt gewesen ist. So
ger weiss, füge ich mich doch einer Prozession ein, die
vor mir unterwegs war : jede Ausgangsposition ist bleibt Hegel seinem Gedanken treu, wenn er die Menschen-
Station. Aber nur von illl: her und von dem sie geschichte ais Gottesgeschichte Iiest : ais das zeitliche Zu-
den Jetzt-Bewusstsein aus kann der Einzelne' seinen sich-selbst-kommen des absoluten Geistes. Wenn Hegel mit
beriihmt gewordenen Fonoel in der Vorrede zu den
Weg und die Strasse, in die er sich schickt,
überschauen. Ein Geschichtsbewusstsein haben heisst also Gu:ndlin,ien der Philosophie des Rechts (ed. Glockner, VII
die Gegenwart, die ich selbst bin, mit einer universalen von der Philosophie sagt, sie sei jeweils «ihre Zeit, in
Ge.danken erfasst», so bedeutet das keine Preisgabe der
schichte verfugt zu denken.
Philosophie nnd ihres Wahrheitsanspruches zugunsten eines
Das GegenwartsbewusEtsein mm, aus dem Hegels Ge' uferlosen Relativismus. Voraussetzung niimlich ist wiederum
schichtsphilosopie wuchs, setzt sich aus drei Faktoren cin Gegenwartsverstiindnis : die Annahme, die Geschichte
sammen : (1) Die Weltgeschichte kulminiert in der habe im Denken des Philosophen Hegel den Augenblick
sahnung der zwischen abstraktem Gesetz und s:;~nl~~~~::~~. '.. rationalen Transparenz erreicht. Weil alle wesentlichen
zerrissenen Menschheit durch die in Christus Mensch in der Wirklichkeit aufgelast sind, fallt für den
dene gattliche Liebe. Der Gegenwart aber nuit die Aufga.be die Logik des Seins. mit der Logik des Werdens
zu, durch Ueberwindung des abstrakten «du sollst» ·.zusammen, d.i. mit der Geschichte.
Liebestat denkend zu bestiitigen und zu erneuem. (2)
werkstelligt wird diese Bestiitignng durch Dialektik : sie er- . Es liegt auf der Hand, dasz ein so ungeheuerlicher An-
hebt uns über die Widerspriiche des Seins zum Sein spruch den nicht überleben konnte, der ibn erhob. So kommt
und zu der die Beschriinktheit des Verstands überwindenden . dass den von Hegel Belehrten - und das heisst so viel
Vemnuft. (3) Vernunft verwirklicht sich ais Freiheit. Deswe- : uns und unseren Zeitgenossen - zwei in entgegenge-
gen ist Menschengeschichte die Geschichte der menschlichen sêtztler Richtung verlaufende Wege offen stehen.
Freiheit, die schliesslich als Prinzip der Franzosischen Da ist einmal der Weg des Hominismus. Ihren progres-
volution zur affentlichen Anerkennung gelangt. Der G"gen~' Umriss nach kann die von Hegel konzipierte Gottes-
wart fiillt nun die Aufgabe zu, die in der Abstraktion ,g;eschichte beibehalten werden. Aber das Subjekt der Ge-
engebliebene revolutioniire Freiheit im freiheitlichen wird ausgetauscht : für Gott (oder den absoluten
konkret werden zn lassen. setzt der Mensch sich selbst ein. Zugleich wird das
lENSEITS DER TRANSZENDENT ALPHlLOSOPHIE 371
370 HELMUT KUHN
seiner Menschlicbkeit und seiner Geschichtlicbkeit erst
Gegenwartsbewusstsein umgestülpt : Ausgangsposition bewusst, dass cr seine Existenz als Spannung ZUT
nicht die Hochstimmung gewahrter Vollendung, sondern die ôttlicllen Wirklicbkeit erfabrt. Geschichtlichkeit wird zUUl
Not von Versageu und Zerfall. Dem entsprechend verw'Ln" esc:hi"htlswiss,m nur in der Sphare des menschlich-gottlichen
delt sich die Perspektive. An die Stelle der gel!chlossen.eri in dem von Plato so genannten "Metaxy».
oder sich schliessenden Dialektik tritt die otl'ene Dialektik, 1es.ohi.oht,e, so dürfen wir mit Eric V oegelin definieren, "ist
die fure Synfuese in die Zukuuft projiziert. Ganz wie He:gels. ein Strom menschlicher Wesen und ihrer Taten in der
Dialektik ist we hoministische Kopie futurisch au:sgeridhtet; sondern der Prozess der Teilhabe des Menschen am
befeuert von der Leidenschaft des Noch-nicht. èSI;hatol.ogi:sch gerichteten Strom gottlicher Gegenwart» (Or-
beherrschende Ziel wird nicht mebr in Gott gesucht, SOllde:n1: and History, IV, 1974, S. 6).
vom Menschen für den Menschen ZUl" Stillung seines Die vom Idealismus gefabrdete Unterscheidung zwischen
blichen Verlangens gesetz!. Und unerachtet seiner Menschlich' und Gott verlangt die weitere Unterscheidung von
keit behauptet es seinen absoluten Anspruch uud ragmatÎSc:heI Geschichte und Heilsgeschichte - zwei An-
liert an ein inbrünstiges Verlangen, nicht lauger Gott, ein und derselben Wirklicbkeit, die sich gegenseitig
wie Gott erachtet. Philosophie zur Ideologie travestiert, urc,hdringell, aber für unsere Augen niemals zur Deckung
Paradies der Freiheit zur Holle der Knechtschaft (zum es sei defil in der einzigartigen Person des Mensch
chipel Gulag), das hochste Gut zur Utopie des eWI)rdencm Gottes. So entschieden ist die Ditl'erenz der po-
verzerrt _ dieser dreifache Betrug ist zwar Erbschaft l1."gels, Geschichte und der Heilsgeschichte, dass in den
verderbt aber durch die hoministische Substitution, die Geschichte gliedernden theophanischen Ereiguissen par
seits ennoglicht wird durch die' Ambiguitat des hegelscllCll i:ce'ilel"ce die weltliche Katastrophe mit der geistlichen Er-
Begriffes von «Geist». Heute nun in unserer Welt ist :ll~~:i zusammeni1illt : das Kreuz ist das Symbol der
Betrug «das Machtige, was man auch sage», so m,ichtig; :jr des Unterschiedenen. Und wer kafil sagen, ob sich
dass seine otl'entliche Wirksamkeit die philosophische in dem religiosen Erwachen der unterdrückten und
gangspesition mitbestimmen mus>. Nur ais ideologischen Verfiihrungskünsten nmlauerten Jugend
kann Philosophie sich GehOr verschaffen. Nicht, Sowjet-Republik eine Erneuerung des verkommenen
sich für dieses oder jenes politische Ziel engagieren dürfte arolpaÎl!chle~ Kontinents ankündigt. Doch bleibt der Punkt,
sie selbst ais denkende Behauptung der Freiheit ist J;;Ilgagl>' sich das itinerarium hominis und das itinerarium men-
ment. Dort, wo der Weg zum Hominismus abgabelt, .fnlchtb~1l" kreuzen, ein Geheimnis.
sie ihre Warntafel aufstellen. Weg, den wir inl Auge hab en, unterscheidet sich aufs
Auch zu dem anderen, dem Hominismus von jenem ideologischen Denken, das heute, in der
setzlen Weg, den wir zu gehen gedenken, lassen wir uus der Dritten AufkUirung und des atlantischen Sini-
Hegel führen. Die grosseu Faktoren, die seine das Obr der Oetl'entlichkeit gewOfilen hat. Doch
sition bestinunten und seine Philosophie zur Ge,scltic!lts!)hi- der Weg mit dem Abweg gemeinsam : statt Hegel
losophle werden Iiessen, sollen auch für uns gelten. iUlugl,hen führt er durch Hegel hindurch. Mebr noch : er
anders ais Hegel halten wir an der Unterscheidung vou der gleichen Strasse, auf welcher der deutschen histori-
und Mensch fest uud geben der Menschheitsgeschichte Geisteswissenschaft unter Anleitung von Wilhelm DiI-
wahres Subjekt zurück - den Menschen. Aber diese we unveralteten Entdeckungen gelungen sind. Diese
schliche, in der Zeit verlaufende Geschichte wird uns Beziehung wird nur dadurch verdunkelt,
standlich nur dadurch, dass wir sie ani ein die Geisteswissenschaft, aufgewachsen uuter den Augen
Sein beziehen. Defil der Mensch in der Geschichte
JENSEITS DER TRANSZENDENTALPHILOSOPHIE 373
372 HELMUT KUHN
der von Hegel in Bewegung gesetzt worden ist. Ist er
der naturwissenschaftlich voreingeno=enen Richter
für die moderne Welt der Enantiologe schlechthin.
Wissenschaftlichleit, ihren metaphysischen Kern veltste:ck,
ziehen wir eine Scheidewand. Wir nnterscheiden zwi-
mnsste. Und sie konnte dieses Spiel treiben, da ihr, ais
zwei Fonnen der Gegensatzlichkeit, die sich nicht auf-
satz für Hegels «Geist», «Lelien» zur Verfügung
reduzieren lassen, so sehr sie auch ineinandet ein-
- ein zwischen Bios und N ons, Vitalitat nnd lnl:ell.ektuall
Der für das Welt-sein der Welt konstitutiven Pola-
tat schwebender Begriff. In ihrem Nachleben aber in
stellen wir die Antithetik gegenüber, ohne die Transzen-
ihr von H.-G. Gadamer gegebenen Fonn der H,:mleneut
und Ueberwelt nicht gedacht werden konnen und wir
hat sie sich von den lebensphilosophischen Vorurteilen
zeigen, dass die beiden sich zu einander verhalten
trennt und ist unverkenubar auf dem Weg zur M1etaphys
zurückgehalten nul' durch die Scheu nicht des Zv,eil'el.Lder Sinnhaftigkeit zur Sinnerfüllung. Damit trennen wir uns
HegeIs unitarisch-dialektischer Logik. Aber die Tren-
sondern des Wissenden.
betrifft nicht den tieferen, im Hegelianismus unterge-
Die Frage nach Geschichte und Geschichtlichkeit 1mpuIs seines Denkens. Zur Bestatigung erinnern
ziert sich für Gadamer, den Erben Diltheys, im W,,gel"tliche einer Aeusserung Hegels, die el' ais Vorrede der
auf die Frage nach der Mog1ichkeit, Texte der V ,:rg:m!~enhe Auflage der Wissenschaft der Logik vorausgeschickt
zu verstehen, und er findet die Auflosung des Ratsels in Sie stannnt aus dem Jahr 1812, dem Jahr, in dem Na-
nem Begriff, der das Verstehen ais Geschehen eigener Stern zu sinken beganu, und sie umreisst die geistige
im Rahmen des grossen Geschehens der Tradition jener verflossenen Krisenzeit. Mit merkwürdiger
- ais eine Verschmelzung, die die Fremdheit des ~~~~:L:~k~onnen wir uns heute mutatis mutandis in ihr
Text bezeugten Vergangenheitshorizontes im Verhaltuis
Gegenwartshorizont überwindet. Aber die Kraft der
rektion kaun dem Versteheuden, der doch iu seinem exoterische Lehre der kantischen Philosophie, -
Horizont wohnt und lebt und denkt, nurdann zuge1'taJlde der Verstand die Erfahrung nicht überfliegen dürfe,
werden, wenn beide, das überlieferte Wort und seine werde das Erkenntnisvennogen theoretische Vernunft,
wartige Deutung, in das «Offene ihrer Fraglichkeit » für sich nichts aIs Hirngespinst gebare - hat es von
werden (Wahrheit und Methode, Tübingen, 1960, S. wi:ssensc:haftlichen Seite gerechtfertigt, dem spekulativen
Dank dieser Offenheit kann in der Sprache des IVlIons,cu1 zu entsagen. Dieser popularen Lehre !cam das Ge-
die Sprache der Dinge horbar werden : Hermeneutik der modernen Padagogik, die Not der Zeiten, die den
Philosophie, Methode müudet in Wal1rheit. Ptti\c.sophiie auf das unmittelbare Bedürfnis richtet, entgegen, dass,
nach Gadamers Versicherung, kenut keinen gClscbLicJltlicheJ die ErkenutrLis die Erfahrung das Erste, so für die
Fortschriftt, sondern nur Teiihabe. Denn sie ist «eiu im offentlichen und Privatleben, theore-
gleichbleibendes Widerfahrnis des Menschen », «das ihn Einsicht sogar schadlich, und Uebung und praktische
Menschen auszeichnet» (Die Idee des Guten zwischen überhanpt das Wesentliche, allein Forderliche sei.
und Aristote/es, Heidelberg, 1978, S. 8). So führt die 'JnuelTI sa die Wissenschaft nnd der gemeine Menschen-
senschaftstheoretische Erwagung unvennntet in jenes sich in die Hande arbeiteten, den Untergang der
nisch gedachte Dazwischen, ans welchem der Geschichte etaph'fsik zn bewirken, so schien das sonderbare Schau-
übergeschichtlicher Sinn zufliesst. herb,:ig"führt zu werden, ein gebi/detes Voile ohne Me-
lndem wÎr der Lehre von den Gegensatzen einen dOlmird, zu sehen; wie einen sonst maJmigfaltig ausge-
renden Platz einraumen, haben wir schon gewiihlt. Wir :funüd,ten Tempel ohne Allerheiligstes. - Die Theologie,
nen nicht umhin, uns dem gewaltigen Gedankenstrom in früheren Zeiten die Bewahrerin der speknlativen
374 HELMUT KUHN

Mysterien und der obzwar abhiingigen Metaphysik war


hatte diese Wissenschaft gegen Gefühle, gegen das Praktisch:
populare und gelehrte Historische aufgegeben. Welcher
iinderung entsprechend ist, dass anderwiirts jene EÏl1samen,.~
die. von ihrem Volk aufgeopfert und aus der Welt ausge" PIERRE-JEAN LABARRIERE
schJeden wurden, zn dem Zwecke, dass die Kontemplation
des Ewigen und ein ihr aIIein dienendes Leben vorhanden
sei, nicht um eines Nutzens, sondem um des Segens willen;
- verschwanden; ein Verschwinden, das in einem andereli POUR UNE MÉTAPHYSIQUE
Zusannnenhang, dem Wesen nach als dieselbe Er:scbleiIlUrlg, DE LA RELATION
wie das vorhin Erwiibnte, betrachtet werden kann. - Sa
dass, nach Vertreibung dieser Finstemisse, der farblosen .
Beschaftigung des in sich gekehrten Geistes mit sich selbst
das Dasein in die heitere Welt der Blumen verwandelt zu La vocation du « philosophe» - j'entends ici par ce terme,
sein schien, unter denen es bekanntlich keine schwarze .;'Ju-,aela de 1'« honnête homme» qui a goût de réfléchir sur
gibt. » événements du monde, celui qni s'attache à les penser
So der Philosoph, der in Verteidigung der Philosophie die techniquement et à les comprendre dans leur portée spécula-
einzige philosophisch legitimierte Waffe, das Schwert der .!Îve - est de celles qni requièrent, pour son honneur, le
Ironie, aus der Scheide zieht. Mit geziemendem Abstand vaste engagement de forces: d'esprit et de cœur.
folgen wir dem grossen Beispiel. Obwohl inzwischen «die A la base, dans l'idéal des choses, un « intérêt» auquel il
heitere Welt der Blumen» noch üppiger gediehen ist, ais faut certes reconnaître des liInitations, tenant à l'expérience
d'un chacun, mais qui tend cependant à s'ouvrir sur toutes
Hegel es ahnen konnte, versuchen wir zu philosophieren,
les formes de la culture et du vivre commun des hommes;
getragen von der Ueberzeugung, dass es auch heut noch
et non d'abord dans la distance de l'étude : dans cette pré-
moglich ist, sich dieser «farblosen Beschiiftigung» hinzu-
>senlce effective qui est.l'inter-esse de 1'« intérêt».
geben. Ueberdies dürfen wir vielleicht die Vermutung wagen,
Présence exigeante, et pour soi-même et pour l'autre : s'at-
dass eben dies heute notiger sei als je.
tachant à «comprendre ce qni survient», le philosophe est
essentiellement - devrait être! - l'homme de la présence
du présent, je veux dire celui qni cherche à donner forme et
signification actuelles à la multiplicité des contingences et
des conditions. Pour cette œuvre, qui est de clarification lo-
gique, et qui porte au plus haut l'exigence proprement « tech-
nique» de ce métier de penser, le philosophe fait appel à
toutes les ressources d'un savoir qui sait qu'il n'est d'épon-
sement des choses que dans certaine distance consentie : por-
teur d'une mémoire du monde, il saura donc convoquer au
rendez-vous toujours nouveau de l'intelligence le souvenir des
décisions de sens dont porte trace l'histoire des idées, et
s'aventurer même, sans nulle volonté de prophète, sur les
chemins d'une pré-vision raisonnable des formes de l'humain.
376 METAPHYSIQUE DE LA RELATION 377
PIERRE-JEAN LABARRlERE

En sorte pourtant que cette double distanciation, hOlmnlage" . nifl'cation créatrice que lui donnent les artisaru qui
sig . )
l'universalité de l'acte de peruer, demeure toute oniollUé'e b:u'iselll des irutrmnent de mUSIque .
la compréheruion de ce qui est: car ce qui est, c'est la praxis. Sous ces deux parts d~ son dom:uue ,que
•'t:aditia,n récente, avec raison parfOIS, a dressees 1 une
Formule qui sonne aisément comme portense : 1 • an! des vertus de la seconde contre les
démesurée. Chez Hegel, qni l'emploie en l'acception que l'autre, JOu
e la remière, je voudrai~voir. pou~ ~on compt~ ,:",e
sait, elle ne siguifie pourtant pas une consécration qu,elc,on'lUè d exig~nce intérieure d'artIculation recIproque qUI. rm-
de l'immédiateté comme immédiateté : on ne saurait voir la validité propre de chacun d,: ces deux domames.
elle quelque avatar de la théorie du meilleur des mondes est impossible, en régime humam c,orr:ctement co.m-
sibles. Deux notes introduisent à son intelligence : d'enl~a!~er une action qui ne soit adossee a une réfleXIOn
sa vérité s'entend de la fausseté de sa contradictoire, car juge en se confrontant à elle tout au long de
qui n'est pas, ce qui ne relève pas de l'effectivité hiS:tOliq',e, l'inverse déjà insinué ci-dessus, n'est pas
ne saurait prétendre d'aucune façon à la dignité d'une .. 1 théorie q,rl n'a jamais sa fin en elle-même,
« rationnelle» ; ensuite et en conséquence, sa pleine validiité:' vraI. a , é 1. t d"tr
our la validité de son propre d p OIemen , e e
requiert l'engagement d'une liberté qui s'attache à
former le donné pour le nouer, d'une parole risquée, en
f sa propre traduction en hi~:oi\e. ~t ]Jas, seuleme.nt
de on e'laboration
s , comme sils agISsaIt ." d un confIT-t
totalité de sens. D'une parole risquée: car nul n'est as,:uri'; rès coup de l'excellence de ses affirmatioru : c es
de science certaine, que le discours qu'il élabore soit au ni,'eala' aua longp de , . lUI
son procès qu'li , f aut s.a
' ffirme~ en dia-.
de vérité qu'appellerait la situation qui le provoque; nul roprement constitutif avec une praXIS humaIne: ~XI­
plus n'est assuré, à un niveau plus primitif, que la situation ~ue l'on pourrait être tenté de comprend,:e, a m;mm~,
en cause appelle quelque «discours» que ce soit - loi banale des essais et des erreu~s, p~ocedure d expe-
si l'on veut bien laver ce terme de ses connotations unique- exhaussée aux choses de 1 espnt; pourtant,. la
ment et abstraitement «idéelles» pour le charger des valeurs i)enltauLon ici plus loin et touche à l'essentiel de la q~estIO~
concrètes qu'implique tout «parcours» d'expérience. D'où ;t~l)h)'siqlUe en mettant en jeu la vérité de l'acte d'llltelli-
le sens aigu, qui devrait marquer le philosophe, d'une certaine la mesure où celui-ci requiert toujours la coru-
précarité du verbe en même temps que de sa force quasi d'un comprendre et d'un agir.
démiurgique.
peut appeler de divers noms c~tte confro.ntatio~ tou:
Plusieurs «notes» déconlent de là, qui portent la philoso- essentielle entre théorie et praxIS. Un ~nc Weil,. qUI
phie, dans son accomplissement d'elle-même, aux confins de précisément les catégories de sa logIque dep~u:, la
la sagesse. Qne le discours où elle se propose ne soit pas abstraction de la vérité jusqu'à la .concrétude pl~mere
constitué seulement d'un agencement d'« idées» au sens ba- sagesse, parle ici de «discussion ~aIsonn~ble » ..~lSCUS-
nal et dommageablement abstrait que l'on réserve trop sou- entre l'homme et le raonde dont il reçOIt conditionne-
vent à ce terme, voilà qui élargit le champ de son influence . discussion entre l'homme et l'homme, entre l'homme
en multipliant ses moyens d'expression. Elle n'est pas can- , hommes, à propos précisément et de l'horm:ne et du
tounée, en effet, dan.s ce que notre tradition la plus ancienne : les catégories et les attitudes, tant du savOIr qu~ de
a nommé la «théorie >, comprenant là d'abord la liberté d'un ,l'adi,on. telles que les mettent en œuvre l'homme de la raIson
savoir déployé dan.s la distance de la «vision» ; elle inclut l'homme de la violence, se rencontrent et s'a~r?ntent
aussi une «pratique», autrement dit, encore une fois, un le medium du langage, avec sa double et très ~Vldente
engagement raisonnable dan.s une «facture» active et res- y9 rdination intrinBèque vers la théorie et vers la praxIS:
ponsable du monde et de soi-même G'entends ici ce terme Tout en acceptant ce vocabulaire et cette analyse, le ten-
379
METAPHYSIQUE DE LA RELATION
PIERRE-JEAN LABARRlÈRE
378 uue trace en ce monde - la «parole» d'une vie à d'autres
terai pourtant de déborder l'acception peut-être encore for- déchiffrable, potentiellement pro-posée à la discussion raison-
melle et, si je puis dire, simplement «localisante» du terme nable de tous.
de «discussion» en parlaut ici de relation - concept qui, Relation de soi à soi par relation de soi à ce qni est exté-
sous certains attendus que je vais maintenant expliciter, im- rieur à soi: la forme prochaine daus laquelle se dit ce schème
plique la reconnaissance et l'affirmation de procédures qui d'abord indéterminé, c'est le rapport entre le sujet et l'objet.
touchent de près au contenu tant de la compréhension que Et c'est dans ces termes, précisément, que s'est posée long-
de l'engagement philosophiques. Pour cela, faisant appel temps la question de la vérité. Le problème à résoudre im-
comme il convient, et pour ce temps de médiation, à une pliquait la découverte d'un critère ou de critères qui portent
certaine technicité réflexive, je prendrai le détour de l'his- assurance de ce que cette rencontre nécessaire entre intérieur
toire, convoquant ici, selon qu'il fut dit plus haut, certaines et extérieur, entre sujet et objet, pouvait s'opérer sans essen-
des « décisions de sens» qui ont marqué notre tradition philo- tielle déperdition de sens; mieux, selon des procédures qui
sophique. Ce faisant, j'honorerai la perspective qui noue si garantissent une rectitude et une plénitude de signification de
fort la philosophie à son histoire; comme on sait, celui qui l'intériorité qui se dit aussi bien qu'un respect de l'extériorité
plus que d'autres illustra cette méthode, à l'orée des temps dans laquelle elle se dit. En somme, exorcisée la tentation
modernes, fut Hegel; et nul n'ignore l'influence qu'exerça d'un simple enfermement du sujet en lui-même, hors de toute
sa pensée sur celui auquel ces lignes sont dédiées. effectivité historique et donc de toute réalité propre, restait

.., à surmonter encore la seconde aliénation possible, celle qui


mettrait l'individu définitivement hors de lui-même, livré à
une extériorité étrangère et dépersonnalisante.
La question fondatrice de la philosophie est celle de la Selon la lecture commune des choses, relayant ici ce qni
vérité. Une vérité, fut-il déjà précisé, qui ne s'entend pas seu- paraissait de simple sens commun, le critère du vrai fut
lement d'affirmations « théoriques», mais de cette exacte arti- d'abord cherché du côté de l'objet. Une compréhensible mé-
culation du dire et du faire qui constitue l'expérience de fiance face aux variations de l'approche subjective des choses
l'homme comme une totalité potentielle de sens. Toute notre contribua à installer la réalité extérieure en position déter-
tradition occidentale le comprit de la sorte, qui mit au centre minante, et à la parer des vertus de constance et de fiabilité
de ses préoccupations, pour nous en tenir d'abord à une dont son appréhension cognitive semblait par trop dénuée.
formulation logique indéterminée, la relation première et L'« adéquation» recherchée entre l'intellect et le réel n'im-
dernière entre intériorité et extériorité. Schème tout à fait pliquait certes pas l'extinction totale des formes propres
général, et qui concerne aussi bien le rapport de l'homme d'existence et d'action du premier de ces termes : l'adage
à lui-même _ expression de soi en extériorité intérieure - affirmant que «Tout ce qui est reçu est reçu selon le mode
que la relation de l'homme à l'homme ou de l'homme au de celui qni reçoit» ne sonnait pas tant comme l'affirmation
monde. Relation, expression de soi : sous une autre formalité, d'une limite malheureuse que comme celle d'une richesse
de même valeur intégrative, c'est la question du langage qu'ici marquant l'expérience de la connaissance. Tout un monde
nous rencontrons, dans sa dimension proprement essentielle, de l'esprit, grandiose et vénérable, s'engendra de cette pers-
constitutive de l'expérience humaine. Car l'homme est fon- pective et de cette foi; et nul d'entre nous, pour libéré qu'il
damentalement « mobile», je veux dire qu'il n'atteint à l'iden- s'en venille, ne peut se tenir totalement quitte des fruits de
tité de lui-même que dans l'active opposition de soi à soi; /!!aveur variée que cette aspiration à des «vérités objectives»
ce qui ne se « dit» pas n'est pas, et nul Robinson, d'aventure encore mûrir jusqu'en notre modernité.
ou de choix, n'échappera à cette règle minimale de l'existence Ce n'est donc point l'échec de cette perspective - hors
historique : vivre, c'est toujours engager un acte qui laisse
380 PIERRE-JEAN LABARRlilRE MÉTAPHYSIQUE DE LA RELATION 381

les cas extrêmes de fixité, elle garde validité mesurée pour qui trer d'abord que cette catégorie fondamentale de relation,
s'attache à la quête du vrai - qui aurait amené son rempla- avec l'essentielle conversion qu'elle implique pour chacun
cement par quelque autre plus adaptée à ce qui là se cher- des termes en jeu, était déjà opératoire dans le moindre
che : mais un certain nombre de facteurs, qui importaient à « dialogue» d'une conscience individuelle avec le monde des
cette entreprise de la constitution d'un savoir, firent émerger objets qui l'entourent; mais il a surtout manifesté, en régres-
peu à peu, jusqu'à la porter au premier plan, uue dimension sant de cette situation jusqu'à celle qui constitue le véritable
dont cette aventure fut tissée dès son origine. Il y eut l'évi- point de départ de la philosophie, que la cellule-mère de la
dence grandissante de ce que l'objet, et même s'il s'agit de réflexion et donc de l'expérience n'est autre que l'affronte-
la réalité matérielle la plus exactement déterminée - son ment des consciences de soi, un affrontement ordonné à leur
traitement «scientifique» nous en avertit amplement - n'est mntuelle «reconnaissance». Visée fondamentale, au sens
jamais quelque entité fixe, achevée en elle-même, et sur la- propre de ce terme : elle met définitivement à la base de
quelle l'esprit pourrait se modeler: l'objet est toujours lui- l'intelligence que nous pouvons avoir de l'homme et de sa
même pris daus un devenir propre, et l'intelligence doit situation dans le monde cette catégorie de «relation» que
s'attacher à la poursuite de ses déterminations en mouve- nous avons déjà reconnue comme l'expression de l'essentielle
ment Son appréhension par le sujet ne le laisse d'ailleurs pas transitivité de l'homme, et, si je pnis dire, de la qualification
indemne, mais le modifie dans sa signification et parfois dans métaphysique qui fait de lui un être «extatique» - jamais
sa structure. Que dire si 1'« objet» auquel je me rapporte plus lui-même en vérité que lorsqu'il se reçoit activement
est lui-même un sujet? Entre les deux se joue alors une d'un autre, et peut-être, sous certaines conditions, de l'Autre
tentative d'adaptation réciproque de deux mondes pareille- radical.
ment mouvants et incertains d'eux-mêmes, engagés dans un A ce compte, la vérité, qui n'est jamais simplement donnée,
rapport qui est pour chacun médiation de lui-même dans et mais toujours à frure, se trouve correctement située, ainsi
par son autre. A quoi il faut enfin aj outer les brèches que la qu'il sied, dans l'espace de liberté qui est celui du sujet;
liberté est toujours susceptible de pratiquer dans le tissu des mais sans que soit niée par là la force d'un rapport propre-
choses comme dans la détermination des relations : raison- ment conditionnant à l'extériorité objective : car la liberté
nable ou violente, elle dit alors d'éloquente façon quelle n'est jamais liberté que lorsqu'elle s'affirme et se reçoit
priorité revient en fait au sujet dans l'équation du connaître «hors» d'elle-même, dans cet espace qui n'est ni purement
concret. .le ..mien ui purement le tien, mais comme la somme et l'unité
Mais cette seconde étape ne condnirait qu'à un autre uni- plurielle de nos capacités par là mises en rapport. Rien
latéralisme si elle ne s'avisait que le critère de la vérité n'est alors de plus paradoxalement assuré que cet entre-deux rela-
pas plus purement dans le sujet qu'il n'était dans l'objet : tionnel toujours incertain de ses formes: c'est de là et c'est
simple renversement qni n'impliquerait aucune subversion ainsi que s'affirme l'esprit dans son espoir d'universalité
véritable de la problématique première. Cela fut dit déjà, concrète.
d'ailleurs, et il suffit de le souligner, en donnant à cette
affirmation toute sa portée : ce qni qualifie et définit la
recherche de la vérité, en toute dernière instance, c'est l'effort
..•
de mutuelle intelligence et d'adaptation réciproque que con- Le philosophe peut-il s'en tenir à cette découverte? Il est
sentent deux univers en relation - la forme-type de cette Certes loisible d'imaginer, et l'histoire nous en offre des exem-
situation étant évidemment celle dans laquelle deux libertés ples, qu'un individu, qu'une école de pensée s'absorbent dans
s'avisent et se répondent dans le monde et à propos du la contemplation intérieure de ces propos de raison, et se
monde. Dans sa Phénoménologie de l'Esprit, Hegel a su mon- contentent d'en tirer toute conséquence sur le plan d'une
382 PIERRE-JEAN LABARRlERE METAPHYSIQUE DE LA RELATION 383

organisation logique des concepts et des déterminations de l'on jugera que la pensée est décidément trop pauvre pour
la pensée. Systèmes qui magnifient la relation, et qui se pro- parvenir au vrai, et on la troquera, à un moment de son
posent eux-mêmes d'aventure comme étroitement oppositifs ! procès, coutre quelque réalité de plus de poids; ou bien l'on
C'est de là que la philosophie tire parfois certain discrédit s'avisera de ce que la réflexion, correctement lestée de son
dont il faut bien reconnattre qu'il n'est pas totalement im- poids d'expérience et de vie, ramène d'elle-même vers l'im-
mérité. médiateté dout elle demeure lourde. Dans le premier cas, on
li est vrai qu'il lui arrive de se commettre étroitement dira qu'il couvient de limiter la pensée pour faire droit aux
avec le monde tel qu'il va ou tel qu'il devrait aller. La figure relations vécues; dans le second cas, c'est dans la force de
du «roi-philosophe» - exigence idéale plus que réalité - cette pensée que l'on abordera le monde de la concrétude -
se détache en bonne part sur le fond de cette requête qui fait et non pour penser moios, mais au contraire plus juste et
devoir au pèlerin de l'ultime, sioon d'ordonner lui-même mieux.
directement les affaires de la cité, du moins de jeter sur elles Sans doute sera-t-il utile en cepoiot de récapituler, selon
l'éclat de sa sagesse. Prenons cette exigence dans son expres- la perspective dont on fait choix ici, les rapports qni se nonent
sion la plus ancienne, telle que la pose Platon en sa Répu- entre ce que l'on appelle la. pensée et ce que l'on nomme
blique. Il y aurait certes beaucoup à dire sur certaine lecture le réel : propos décisifs quand il s'agit de se prononcer sur
de ces textes qui transcrit immédiatement eu dualisme la ce que pent signifier une «métaphysique de la relation». -
tension entre le moude des ombres et celui du soleil : nous Deux abstractions possibles menacent le procès de l'intelli-
savons que le Platou de la dernière période, celui du Timée, gence. La première consisterait à s'en tenir à l'ionnédiat tel
sut boucler le «périple» spéculatif qu'il engagea au début qu'il est donné : l'objet, le monde, leur retentissement sur
de sa réflexion (Lettre VII), et montrer commeut l'intelligible mon sentiment et sur ma conscience première - bref, ce
est réellemeut présent à ce sensible qui tire de lui toute sa qu'en deçà de toute pensée véritable nous appelons curien-
validité dérivée, par «participaiion». Reste qu'alors le retour sement le «vécu». Tentation bien présente parmi nous, las-
du voyant dans la pénombre commune, si même il ne procède sés qne nous sommes des subtilités d'esprit trop délivrées
d'aucune condescendance, iostitue le philosophe en figure de de leur poids de terre! C'est que le périple de l'expérience,
révélateur de ce qui ne saurait émerger à la conscieuce des qui, dans ce donné même, prend distance vis-à-vis de lui
autres hommes : il lui faut enseiguer ce que les autres ne pour le corn-prendre en vérité, est toujours en danger de
savent pas, ce qu'ils ne sauront sans doute jamais d'expé- perdre de vue cet enracioement pourtant permanent et si
rieuce personnelle. Situation qui iostaure d'emblée une dis- totalement déterminant. Abstraction seconde qne celle-là :
tance au seio même de la relation : serait-elle donc le signe elle fait que l'iotelligence, ayant pris son envol, perd de vue
de ce que tout homme n'a pas accès par lui-même à ce qui le «sens» du périple engagé et s'absorbe dans la création
rend humain ? d'uu autre monde, un monde d'idées délié de toute allégeance
Au vrai, bieu des raisons couduiraient plutôt le philosophe à celui qui forme le fonds commun de l'existence historique.
à désespérer de son savoir... S'il lui faut «reveuir» parmi Exorcisant l'une et l'autre de ces abstractions, l'authen-
les hommes, ce n'est doue pas en vertu de l'excellence de la tique philosophie s'efforce à honorer dans leur exacte tension
scieuce par lui laborieusement acquise en ses grimoires; c'est signifiante ces deux parts du réel que sont le vécu et le dit
au coutraire souveut parce que, désespérant de pouvoir tran- - l'acte de vivre et l'acte de dire. Alors, la pensée ne se voit
cher les subtiles questions théoriques qui se posent à lui, il plus consignée dans l'un des moments de ce procès - celui
éprouve confusément qu'il lui faut les replonger dans l'humus qui, en position médiane, risque toujours de se constituer
vivant où elles trouvent origine et sens. Démarche qui pour- dans l'autonomie illusoire d'une abstractiou seconde - mais
tant est susceptible d'une double ioterprétation : ou bien elle épouse la totalité du mouvemeut qui, de l'ionnédiat dou-
384 PIERRE-JEAN LABARRIi!:RE

né à l'immédiat com-pris - ou plutôt à l'i=édiat en adve-


nir de com-préhension, au rythme d'une liberté de déchiffre-
ment et de création étroitement conditionnée - transite, par
le jeu d'une logique médiatisante, de l'appréhension première
du phénomène à son intelligence proprement méta-physique.
LIVIO SICHIROLLO
Périple que plus que d'autres doivent honorer dans son
intégralité ceux qui tiennent que l'achèvement des recherches
« logiques» dont notre tradition porte témoignage trouve son
expression, ainsi qu'il fut dit, dans l'intelligence de la relation. RÉFLEXIONS SUR ÉRIC WEIL
Co=ent en effet, sans lui faire violence, pourrait-on réser-
ver ce terme à la solution d'un problème seulement et étroi-
tement «théorique»? La relation, terme singulier lourd de
Kant après Hegel (et Weber)
pluriels dont chacun porte son poids de chair et de sang, per-
drait sans doute toute signification au regard de la pensée si
elle ne trouvait à s'accomplir - et pas seulement à se véri-
fier, comme en seconde instance - dans l'exercice exigeant Celui qui vient d'écrire les pages que voici a connu - i l y a
des multiples relations que tout un chacun connaît en ce pres,?ue trente années - en même temps le Père Régnier et
eil. L'amitié entre le Père Régnier et Weil a été solide
monde - le philosophe autant et peut-être plus qu'nn autre. weltbekannt. Sujet d'innombrables conversations et discus-
Car la philosophie, science et sagesse de l'entre-deux des _ en Angleterre, à Heidelberg, Paris, Urbino, Chantilly,
choses, sait, dans les réussites les plus achevées qu'elle con- - Kant (parmi d'autres sujets, bien entendu :
naît parmi nous, se proposer et parfois s'imposer co=e homo unius libri n'a jamais été concevable ni à l'un ni à
créatrice de liens, créatrice de relations. Et cela, une fois en- r n11"". Ce n'est pas par hasard que c'est le Père Régnier qui
core, dans la vigneur d'une pensée qui n'est authentiquement a traduit le Kant de Krüger, et qui a voulu comme préfacier
pensée qu'à s'affirmer hors de la «pensée». S'il nous faut Eric Weil (Beauchesne, 1961). Celui qui travaille sur Weil sait
donc révérer ceux qui ont force et grâce de forger des caté- savoir) qu'il travaille Kant - Kant, si on veut encore
gories neuves pour notre intelligence du monde, nous savons ti/\.pens:er, aujourd'hui. De la part d'un ami fidèle (qui lui doit
qu'il est plus grand encore, oubliant ce que ces joutes d'es- de travail - fructueux amusement - à la Biblio-
de Chantilly) le Père Régnier voudra bien accepter ces
prit peuvent entraîner en fait de ruptures et d'exclusives, de f n,ouvres « réflexions» qui rappellent à leur tour la mémoire
travailler à l'instauration concrète de relations entre les êtres. :-:.:Ivn."'e d'un ami avec qui nous avons passé des heures heu-
Mais la philosophie atteint à son sommet lorsque, sans se de réflexion, de theoria.
limiter à l'une ou l'autre de ces tâches, elle sait les conjuguer
et les valoriser l'une par l'autre : penser la relation pour On ne peut pas parler de la «philosophie» de Weil ni,
mieux la vivre, la vivre pour mieux la penser. fortiori, l'expliquer ou l'interpréter. Il faut considérer cette
·. •
f
~~~~of:i~ comme un philosopher, comme une proposition
la pensée de l'auteur même), comme un instrument
peut émettre plus qu'une voix. Essayons de découvrir une
pour la comprendre (si l'on veut la comprendre, ça va
dire), essayons de parcourir à nouveau le chemin le
duquel nous pouvons penser d'être parvenus à une cer-
compréhension. Certes, nous pouvons nous demander
386 LIVIO SICHIROLLO ERIC WEIL 387

tout de suite de quelle compréhension s'agit-il là, et cette lUàtérialiste, mécaniste'; de la science en tant qu'elle ne
question est légitime. La réponse: reconnaître les problèmes COlUp'or1:e pas de considération de valeur, c'est-à-dire qu'elle
si c'est possible le problème - mais les laisser librement ne peut pas prouver son objectivité et universalité même
agir, et cela ne peut se faire que par deux voies : les laisser coffilUe des valeurs'; de la politique en tant que catégorie
solliciter par le mouvement de l'histoire et des idées, objec- fondamentale (avec la science) du monde moderne dans sa
tivement, et les laisser agir en nous et à travers nous-mêmes ,<JUJOlS'" naissance à partir du XVIe siècle: nous mentionnons à
comme le résultat - en taut que mouvement contiuu ce p~opos le~ deux célèbres conférences lues par Weber à
notre lecture et réflexion, d'uue réflexion qui porte directe- MUlllCh et citons les paroles de la Logique : « ... ce que
meut sur cet œuvre et le moude en qui nous vivons et . c~erch; maintenant (après Hegel, après l'Absolu)
nouveau sur ce monde même qui a été visé par la lecture de' et Il smt qu Il le cherche - c'est la catégorie qui soit
cet œuvre. Telle est l'attitude de celui qui a lu et réfléchi, de < attitude ... ou, pour le dire plus simplement, une action rai-
celni qui lit et réfléchit. A ce momentclà il n'importe pas so~able ... ,.L:unit~ .de la philosophie et de la politique n'est
l'on a parcouru un chemin direct ou indirect, une voie attemte qu ICI, et ICI seulement la politique se pense. Ce n'est
ou un détour: ce chemin est notre façon de comprendre .... que, !usqu'à m~ntenant, elle a été sans concept autre
œnvre qui loin de s'épuiser dans la contradiction entre philo- que technique ... mais avant que l'unité du discours ne soit
sophie (compréhension) et violence, a posé comme thème établie par l'Absolu, c'est-à-dire (vue de la politique) avant
à soi-même aussi - le problème de la compréhension tous les hommes soient entrés dans une seule 'société
général (le problème du sens) et de cette hUlUair.l' (q~oique ce soit à des titres différents), politique
même. philosophIe ne l~uv~nt pas coïncider, et la politique ne
pas etre la re~hsatJ?~ de la philosophie, la philosophie
peut pas se saVOIf politique. La réconciliation de la révolte
du .discours n,e peut pas être entreprise avant que les deux
1. Avec Max Weber au-delà de Max Weber sOient allés a leur forme extrême »'.
l'Introduction à la Logique, paragraphe : La philo-
Un philosophe, un penseur, a toujours un inl:erlocute:ur, . . .~L,/1hie comme possibilité humaine et le choix absolu. Le lan-
réel et/ou présumé, déclaré ou non: il parle le (et par de la violence, on peut lire un «portrait» de M. Weber
langage de son temps, naturellement le langage qu'il le nom --:- comme presque toujours - n'est pas cité) :
être le plus apte à le représenter (sanf qu'il n'invente pas ';'«Viol,:nce, enfin, au fo~d de l'existence de celui qui, travail-
nouveau langage). Langage, c'est-à-dire des problèmes, cherchant, se dommant, ne pense pas pouvoir se débar-
leur monde - des choses. Nous pouvons démontrer dn donné en tant que tel et en sa totalité, et qni, accep-
doit voir en Max Weber l'interlocuteur de Weil et le JauLgalle son sort de force mineure en face d'une force immense
qui lui correspond. Ce n'est pas par hasard qu'il est le emphase et sans pathos, s'affirme dans des succès tem:
seur le moins cité (mais cité par un auteur qui cite très jlc>raires. passagers, vains et qu'il connaît comme tels» (Lo-
ment des noms), le plus admiré, certes, même le seul . p. 57). Dans le tableau que nous avons esquissé Weber
tionné par1lli ses contemporains, en positif et dans les Immédiatement derrière nous - et Weil le décla:e expli-
ments décisifs de sa réflexion. Weil accepte la P~~~'~~~::i;~~
wébérienne, qui a une valeur définitive pour la ( Philmwp.hie politique, Vrin, 1956, § 22.
de la structure du monde moderne et, du moins jusqu'à et la civilisation moderne... » (1965), in Essais et
certain point, pour la compréhension de son sens : l'a.nalvs 1970, I, partie. §§ II et VI.
de la structure de la société qui, en principe est calcu~alTice, L"gi'1ue de. philosophie, Vrin, 1950, p. 394, 397, 410 (ensuite
LO .•toi"e duectement dans mon texte).
LIVlO SICHIROLLO ERIC WEIL 389
388

citement : « ... l'homme n'a pas d'intérêt, mais est intérêt» ; de la négativité en une politique comme science (science
et en note au bas de la page: «Max Weber se tient sur le sociale)'.
même plan, dans la réflexion méthodologique, mais le dé- La «morale philosophique », formelle et négative (kan-
passe dans sa pensée historique et, surtout, politique» (Lo- tienne : la fin du christianisme ou du moins le commence-
gique, p. 265 et note 2) : cela veut dire, si nous avons bien ment de sa fin), c'est le résultat deruier et définitif de la
compris, que 1'« historisme» wébérien, tout en considérant réflexion sur la finitude de l'homme libre et en même temps
tous les systèmes de valeur comme équivalents, et en les la condition de la politiqne : étant donné que la morale doit
projetant tous sur le même plan, a fini par poser à notre se réaliser (c'est le sens de son univèrsalité, de quelque façon
attention le problème (philosophique) du sens des systèmes qu'on l'entende dans la situation) et la politique avoir un
cohérents de valeur (les types idéaux), qui seuls permettent sens pour l'homme (lutte de pouvoir pour... ; lutte contre la
«de comprendre l'histoire et les attitudes humaines. Mais violence et la ruse)'. Il s'agit là d'un chemin que le philo-
les attitudes humaines concrètement présentes dans l'histoire sophe parcourt de l'homme au monde et du monde à l'homme
ne sont pas plus cohérentes que n'est libre la chute réelle à la recherche du sens des valeurs respectives qui ne sont
des corps dans la nature» : le monde, réel, historique, ou au fond qu'une valeur, puisque l'homme agit et agit dans le
bien a un sens ou bien n'est pas un monde - s'il a un sens monde, consciemment. Weil aurait pu esquisser une énième
il ne peut l'avoir que pour l'homme, «s'il choisit d'y cher- philosophie existentialiste sur la ligne. de l'i~age que la
cher un sens» 4• science avait entre temps donnée de SOl, ou bIen offnr une
nouvelle perspective à la science même en élaborant nn
« nouveau» système philosophique à même d'indiquer les
2. L'homme fini (Cet» raisonnable, et son monde (cosmos) nouveaux sens de la science et à la science. En effet, il a
parcouru l'existentialisme allemand e~ français tout e~~er,
Mais tout cela c'est Kant, qui dans ses dernières œuvres mais il en est parvenu au-delà (cf. Logique, XV : «Le fml »,
insiste sur la nécessité morale d'une union ou réunion des ou l'homme comme fait pour lui-même, p. 374 et suivantes),
deux royaumes, de celui des valeurs (liberté) et de celui des en montrant le sens de la pensée kantienne (envers laquelle
faits (nature) : «La vie, l'action, la science elle-même, avait-il grande était la dette de l' existentialisme) - qu'il avait re-
été amené à penser, seraient inconcevables si le sens, c'est- trouvé en étudiant les Grecs, Aristote surtout.
à-dire les valeurs, n'existait pas et si la réalité était dénuée de Kant n'arriva pas (ou bien il ne voulut pas) déterminer
valeur, et par conséquent insensée »'. C'est Kant, qui conçoit l'image de ce troisième royaume qui selon lui aurait dû unifier
l'homme étant fini et raisonnable, être besogneux et libre, les valeurs et les faits, la liberté et la nature, et il ne put
violence et raison (philosophie), comme il l'a fait pendant pas par conséquent passer de la critique et/ou de la science
toute sa vie. Mais c'est nn Kant qui admet maintenant le choix de la nature à la philosophie; cette image n'a même pas
pour le mal radical, la violence (un problème quand même permis à Weber (ce fut son choix) d'esquisser les contours
présent à Kant, qui l'avait tourmenté longtemps) - donc, d'une philosophie en le contraignant à limiter sa recherche
maintenant un Kant qui a lu et accepté la leçon de Hegel et dans les faits empiriques; Hegel même avait escamoté cette
Marx : d'une part, l'analyse de la société civile et de ses
morales historiques (calcul, rationalité, violence); de l'autre, 6. Les deux problèmes en : Problèmes kantiens, Vrin, 19702, 7hap .
la traduction de la philosophie politique et de sa dialectique IV et Hegel et ['Etat, Vrin, 1950, Appendice: «Marx et la phIloso-
phie du droit».
7. Philosophie politique, cit., p. 22 : «primauté objec~ive d7 la
4. «La science... », dt., p. 287. politique» _ «priorité subjective (objectivement, c'est-à-dlre umver-
5. Loc. cit., p. 286. sellement, subjective) de la morale ».
390 LlVIO SICFIIROLLO ERIC WEIL

image par l'idée de l'historicité du réel et de l'homme. Weil science arrogante dans ses prétentions en a pu sanctionner
pense cette saisie dans un ancien message, mais la reprend l'inexistence. La réflexion sur Aristote, cette véritable reprise,
par la juste médiation : la science moderne, grande dans ses ouvre de nouveau le chemin au «système», un système qui
résultats et ses limites, dont le sens est saisi à travers ses n'envisage pas le dualisme entre morale et science, politique
récentes vicissitudes, redécouvre (mieux: re-découvre) com- et philosophie, mais pense ce qui les unifie, et sur cette unité
me totalement fondée l'idée aristotélicienne du monde peut fonder une p~litique. qui soit conforme aux e;"ig.ences
comme cosmos. En l'ayant dépouillée de ses implications respectives de la philosophie et de la morale. Il ne s agIt pas
cosmologiques et théologiques, il la représente par le concept donc d'une opération extérieure, ou éclectique. Weil n'adjoint
de monde sensé; le monde, le cosmos n'est pas le lieu et pas Weber à Marx, ni Marx à Hegel, ui Hegel à Kant, ui
la source des valeurs (ce qui avait dérouté Max Weber), Kant à Aristote; il ne veut même pas corriger l'un par l'autre.
mais la dimension dans laquelle se font les choix par les Aucun de ces penseurs ne garde son ancienne image dans
hommes qui la chargent d'un sens, du sens : «la connais- le résultat, c'est-à-dire dans le système, qui est nouveau parce
sance du monde conduit l'homme à la connaissance de Ini- qu'il questionne chaque fois les fondements de leur pensée,
même en lui indiquant la meilleure manière de vivre »'. à la recherche d'une perspective difft!rente lO •
La réflexion weilienne sur ce point se fait par la nouvelle
description de l'expérience moderne tout entière - de l'âge
qui a vécu l'angoisse du dualisme, de Kant jusqu'à nos jours
- donc de l'histoire et de la structure de l'uuivers objectif ;. La philosophie et l'histoire, La «Logique de la philo-
même que la science moderne a réduit radicalement en sophie» aujourd'hui
phénomène : l'anthropomorphisme et l'anthropocentrisme
ayant été refusés, et l'idée grecque de la vérité comme sys- Voilà donc la nouvelle perspective: histoire, morale, poli-
tème de discours cohérents ayant été maintenue, on a néan- dans la compréhension que la philosophie peut offrir,
moins nié «l'existence d'un monde sensé et qui puisse être dans un discours qui se veut cohérent (ou mieux: dans
compris à la manière. de Platon et de tous ces philosophes discours - puisque l'histoire, la morale et la politique
grecs qui pensaient comprendre le cosmos». Mais: la science, se montrent en discours, sont elles-mêmes des dis-
qui ne comporte aucune considération de valeur, est «unè Mais mon choix pour la philosophie, pour la coM-
entreprise humaine» : «elle n'est [donc] possible que dans ne peut pas être démontré comme une valeur : valeur
un monde stmcturé et sensé», que dans ce monde réel plein tècùrulUe comme telle en même temps que mon choix. Alors,
de sigttification pour celui qui y agit, pour celui qui choisit pour celui qui fait et accepte ce choix, ce discours
« d'y chercher un sens». Ainsi, la science même, qui n'énon~e ou,"o,." peut être exposé dans un système. Or, le système
de jugements de valeur ui n'a d'intérêts - la science mo, la compréhension - qui est dans son origine un
deme - est reprise, mais non pas transformée dans cette --'- a déjà en soi-même le sens (et partant la valeur)
idée; ou mieux, elle y est replacée en gardant les caractères compréhension même : l'exposition qne le système en
que lui reconnaît l'épistémologie contemporaine'. pose en fait le rapport avec l'histoire et ses problèmes
Le troisième royaume, qu'a tourmenté la recherche kan- que le problème de la fin de l'histoire. A cette difficulté
tienne, a été toujours là, même si pendant des époques en- :>c~. .,. ••.u fond - puisque nous la retrouvons, nous-mêmes,
tières nous en avions perdu la trace, et si seulement une
de l'essai «L'anthropologie d'Aristote» (1946), in
43. discuté ce § 2 avec mes amis G. Ciafrè et
8. «La science... », dt., p. 280.
9. Loc. cit., p. 280 et 287. ~~~~~~~~:lJ~'lV•.ill,ml
sur Weil (le dernier a un livre sur le rap-
ERIC WEIL 393
392 LIVlO SICHIROLLO
possible. Ce qu'elle peut affirmer, si elle réussit dans son
au fond des grands systèmes en tant qne leur difficulté, en entreprise, c'est que la vérité est, que le discours est achevable
tant que la question non posée à laquelle cependant il parce qu'il est achevé... Elle comprend tout et soi-même,
fallait répondre - c'est maintenant la Logique qui ré- parce qu'elle comprend l'homme dans la philosophie, la
pond : « .•. elle sera bien la fin de l'histoire, de même que philosophie dans l'homme, pa~ce qu'elle compr.end la coh~­
tout système est la fin de l'histoire, de son histoire, de cette rence dans la violence et la VIolence dans le discours cohe-
histoire sans laquelle il ne serait pas et qui ne se comprend
rent» (ibid.).
qu'en lui comme histoire sensée» (p. 83). L'homme, à tra-
Après Hegel, Marx, Weber, c'est encore une fois de K",:,t
vers et après la Logique, pourrait ne plus s'occuper de philo-
sophie, sans que cela signifie ui protestation ni révolte contre qu'il est question ici : le problème de la fin de la pbilosophie
la philosophie. TI ne serait plus philosophe et en même temps tombe ensemble avec le problème de sa réalisation - mais
_ et ce serait la même chose - il vivrait dans la pré- dans le sens (kantien) de la réalisation de l'homme et du
sence, dans la vérité. L'homme libre de s'exprimer, tel qu'il commencement d'une véritable histoire. Le monde de l'uni-
n'éprouve pas le besoin de se révolter contre la philosophie, versalité réalisée, qui se dessine à la fin de l'Introduction à la
Logique, c'est le monde que nous pouvons penser comme
et qu'il vit dans la certitude que la raison, non plus et non
seulement lien et limite, qui s'ouvre comme présence dans la perspective raisonnable. Q~an~ à Marx, il, s:agit d'u?" « m~xis­
me» qui n'oublie pas l'hIstOIre de 1 hentage phIlosophique
certitude de son agir, serait enfin l'homme d'un monde véri-
de Marx, d'un côté, et de la violence de nos jours, de l'autre
tablement humain, «dans lequel la violence aurait disparu,
côté (cf. Logique, chap. XIV-XV-XVI : L'œuvre, Le fini,
aurait été écartée par l'homme agissant raisonnablement se-
L'action). Certes, ceux qui pensent que le marxisme est déjà
lon le discours portant sur la violence : toute violence serait
et seulement une science, que la philosophie est toujours et
violence entre l'individu et l'individu, à l'intérieur d'un monde
en tout cas idéologie, qu'elle sera supprimée de facto -
cohérent, la lutte ne serait plus lutte avec la uature, soumise
donc non pas aufgehoben : sublimée, supprimée et conser-
par le travail, ni avec la société, organisée raisonnablement,
vée" _ par l'action du prolétariat, leur paraitra «abstrait»
mais lutte du sentiment avec le sentiment - lutte possible
(le reproche bien connu) que l'on parle encore de philosophie,
seulement dans un monde de l'universalité réalisée ... ». Ce
serait un monde dans lequel les transformations faites par la de système. Mais alors c'est bien la pbilosophie qui doit de
nouveau rechercher le sens de l'histoire, de l'action politique
praxis humaine seraient telles à rendre inconcevables des
et de la politique, de la liberté et de la morale, du boulIeur
protestations raisonnables et en même temps universelles :
des hommes qui cherchent la satisfaction des besoins de cha-
l'individu serait enfin libre de vivre «en présence et dans 12
le sentiment de la présence », en étant raisonnablement cons- cun et de tous, et leur contentement ;
cient que la raison s'est réalisée (Logique, p. 85).
Celui qui, dans et par la Logique, veut comprendre et se
Le monde de l'universalité réalisée n'est pas notre monde. comprendre (et peut penser une Philosophie morale, une Phi-
Nous ne pouvons dire ni qu'il le sera ni qu'il ne le sera pas; losophie politique ... ), aura fait «le choix absolu» entre la
nous pouvons bien sûr affirmer qu'il ne l'est pas encore, qu'il raison et la violence, et choisi le discours : « ... choix premier,
n'est pas encore à la portée de tous. Notre histoire est une parce qu'il est antérieur à tout discours pour le discours
histoire de transition. Notre pbilosophie, la fin de l'histoire
qui se révèle dans la logique de la pbilosophie, est une philo-
sophie de transition. Comme telle veut-elle du moins se pré- 11. Hegel et l'Etat. cit., p. 103.
12. Cf. R. MORRESI, «Logique de la phi1o~ophie : Int!oducti~m~,
senter, se faire comprendre. «Entre temps - et nous vivons in Filosofia e violenza. lntroduzione a E. Wez! (a cura dl G. Ciafre,
dans cet entre-temps - la logique de la pbilosophie ne garan- R. Morresi, L. Sichirollo, P.P. Tabonî), Galatina, ed. Congedo, 1978,
tit pas et ne saurait garantir qu'une telle vie soit réellement p. 87-89.
394 LIVIO SICHlROLLO

même ... » (Logique, p. 59). Mais cette fois-ci ce discours ne


peut ni être mis de côté ni être tout simplement repris en
tant qu'il porte sur le fondement même et de l'idée (et de la
réalité) de la philosophie et du système : il est «la fin de
l'histoire», «de son histoire, qui est ici l'histoire de la philo-
sophie ou (car la philosophie n'a pas d'histoire, seul l'homme
en a) la fin de la recherche du contentement par le discours»
Septième partie
(Logique, p. 84). Ab initia et initia, donc, l'être moral de
l'homme, ses choix dans le monde, en vue du sens de l'homme
et du monde. VARIA
\~.!i.1
1
~ J
•.
1

HYWEL D. LEWIS

THE ELUSIVE SELF

Sorne Conflations of Issues in Recent


Continental Thought

The questions "What is man?» or "What is it to be a


person ?» and the subsidiary form of tbis, namely «What
is it for me to be the particular person that I am», have
been at the centre of philosophical thought and speculation
Jrom very early times. They have been equally important in
religion and general culture. There have, however, been many
strands in the general question we raise about the nature of
persans. Of these there are two which have great importance
for the philosopbical treatment of the subject today.
The first of these is the question reflected in the issue, on
this topic, between Hume and Kant, namely whether, over
and above the fleeting, transitory course of our mental states,
We have to recognise also a distinct and abiding subject of
and agent in conduct. If there is such a subject, it
cannot be itself described in terms of the particular course of
our lives _ or our bistory - or the dispositional tendencies
constitute our characters or nature. In principle, the
can always be discovered and described. Indeed, the
; oli>vi'Dus way to describe a person is to give bis name, explain
he lives and what he is like, slow-witted or intelligent,
or malicious, witty, artistic, etc. There is no inherent
;l"cübllem about this. We can all be described in such terms.
But what is it to be the particular person who has these
and dislikes and to whom various. things have happen-
14
THE ELUSlVE SELF 399
398 HYWEL D. LEWIS
where. In the meantime the credit is given ta a spate of
ed ? Is this a proper further questiou or has everythlng been
Continental philosophy for keeping the issues of inwardness,
said at the level at which 1 can be described ? Many still hold
subjectivity, and freedom, ta the fore. This credit is !ully
(mysell among them), in the tradition of Descartes and Kant in
deserved, but it has also happened, in many magnificent and
modern philosophy, that the full story is not told in describing
influential instances, that the emphasis has shifted, without
what sort 01 person one is. There is also the Me, the Self,
clear understanding that it does so, from the irreducible
which has these peculiarities. In my own writing, 1 have been
elusiveness of the self as ultimate subject of experience ta a
much concerned to defend this view of the distinctness and
quite different sense al the limitation, in fact il not in prin-
finality 01 individual persans, especially in the form in which
ciple, of our understanding of ourselves at the level at which
each one knows hirnself ta be the unique persan he is in the
lact 01 being himsell and having any kind of experience. 1 a persan can be very properly described.
will not repeat here what 1 have tried ta set out in this vein It is !his confusion of major issues, as they seem ta he,
in my booksl But it will 1 hope be evident that the self at that characterizes the work of sorne very outstanding Con-
this level cannot itself be further described. tinental philosophers of today, and in the remainder of this
This is why the self is said ta be elusive. Thal is not becanse aliicle l wish ta illustrate this submission lrom the work of
it is, as Kant at tirnes suggested, a mere «imaginary focus » three philosophers, Wilhelm Dilthey, Gabriel Marcel and
or presupposition of having experience. It must be, as one of Jean-Paul Sartre.
the most notable of Kant's followers in Britain2 stressed, «a l begin with Dilthey. He, as is well-known, was reacting,
something ». But !his something cannat in turn be described, in much of his work, agaiust N eo-Kantian philosophers al
although it is not mysterious in the sense that it is not known. his day, notably the Marburg school, but had also in mind
Each 01 us knows quite well what it is ta be himself, but more severely empiricist thlnkers such as J.S. Mill and others
there is an ultimacy about this which defies further elabora- who came under a similar atlack from their own idealist
tion. compatriots such as Green and Bradley. Dilthey draws a
n would be very misleading on this basis ta suppose that sharp distinction between the way we give a scientific account
there are two selves. It is the one self which can be described of the course of things in the world around us, and unify our
and ils also, as each knows initially in this own case, more impressions of it, and the understauding we have of our own
than that, elusive but not with the mystery of sorne «thing experience and the course al our lives. «The methods by
in itself» altogether out of our range. means of which we study psychic life, history and society
It has olten been thought that this view is alien ta British are very different from !hase which have led ta the knowledge
philosophy today. But that is because of a very lirnited im- of nature »'. «Hypotheses do not all play the same role in
pression that is taken of British philosophy. Sorne of the psychology as in the stndy of nature »'. «In the domain of
finest delences of the notion of an ultimate subject al ex- psychic Iife, it is impossible ta specify the facts with the exact
perience have been made by notable British philosophers in determinacy which is required of a theory through the con-
our day'; and by their counterparts in America' and else- frontation of its consequences with such data» 7 •

1. For example, The Elusive Mind and Persons and Lite aiter 4. For example, Peter Bertocci, the leading figure in the PersonaIist
Dea/h. School of philosophy, and Roderick Chisholm.
2. James WARD, author of Philosophical Principles, A Realm of 5. Wilhelm DILTHEY, Descriptive Psychology and Historical Under-
Ends, A Pluralistic Universe, etc. He is one of the mûst influentiaI standing, trans. R.M. Zaner and K.L. Heijes, Martinus Nijhoff, 1977,
and outstanding philosophers of the 19th century, and 1 hope he is
as well-known in Europe as he deserves to be. p. 28.
3. For example, H.J. Paton, C.A. Campbell, A.C. Ewing, and 6. Ibid., p. 28.
1atterly, Richard Swinburne. 7. Ibid., p. 28.
400 HYWEL D. LEWIS THE ELUSlVE SELF 401

The main consideration here, and in many variations on This is the proper «psychological base» for human studies
the same theme, is «the lived. character of «t~e inner and it enables us to avoid the dileuuna of a purely subjective
experiences themselves •. We have to heed what IS «co:'- approach and also «a superficial and sterile empiricism»,
tinuously given as !ife itself »8. But we are also warned III an «increasing separation of !ife from knowledge .16. No
the same context of the dangers of «depending only on a «transcendental method », no «leger-demain of the Kantian
subjective and equivocal psychology of !ife >,'. As Professor schoal »17 will avail of itself; for the «theoretician of know-
Mackreel observes, in his introduction to the same volume : ledge» there presupposes and impocts into bis theory the
«The concept of lived experience is somewhat ?ifficult to «nexus in bis own living consciousness »18, the «unique
define and therefore has often been confused Wlth that of nexus» which «is originally and continuously given as life
inner experience... Lived experience is broader in scope and itself »19. There is no stage in which this is absent, but what
certainly does not carry the subjective connotations so often is thus iuunaneut in al! experience can be made more explicit
associated with inner experience »10. by reflection and understanding, the latter including in Dil-
Il is not altogether clear what is being rejected here, but they's later thought much concern with expressions of ex-
the main emphasis is unambiguous. What Dilthey wants to perience and language. This has much to do with our know-
bring into prominence is a peculiar uuity of psychic existence ledge of one another, and the initial disposition to regard
which is given in a11 experience itself as an inera~icabl~ feature our own inner experience as the intuitive basis for the under-
of il. There is, as Professor MacKreel puts It agam, «an standing of others tends to give way to the more refined and
originally experienced sense of connectedness» Il. There is, objective understanding that cornes through reflectionon
an essential «psychlc nexus» in aU experience, «an inner language and expression. This is not mere self-completion,
connectedness (Zusammenhang) because psychic life is itself nor, on the other hand, a self-transcendence involved in the
a nexus »12 «The human studies ar.e distingnished from the concepts of objective expression and intentionality. The
sciences oi nature first of a11 in that the latter have for their outer mode is taken up into the inner and reflected out again
objects facts which are presented to conciousness as from into onr grasp of experience as a whole.
ontside, as phenomena given in isolation, while the objects
As Professor H.A. Hodges puts it" :
of the former are given originalities from within as real and
as a living continuum» 13. Il is this vital continuum that
matters, and, by contrast with science, where a s~stem of Thns lived experience and understanding, though theo-
nature is established by «inferential arguments which sup- retica11y separable, are in practice bound up with one
another. We are present to ourselves in lived experience,
plement the data of experience by means of a combinati<:n but titis experience needs to be clarified by understanding.
of hypotheses », in the human studies «the nexus of psychlC
life constitutes origina11y a primitive and fundamental da,
tum »14. «The experienced (erlebte) whole (Zusammenhang) This understanding penetrates to «mental attitudes (Stell-
which lie deeper than the surface series of psycho-
is primary here »15.
events, and control it in the interests of wider pur-
»2!. The insights of our own lived experience provide
8. Ibid., p. 35.
9. Ibid., p. 29.
10. Ibid., p. 5. 16. Ibid., p. 29.
11. Ibid., p. 7. 17. Ibid., p. 32.
12. Ibid., p. 31. 18. Ibid., p. 32.
13. Ibid., p. 27. 19. Ibid., p. 35.
14. Ibid., p. 27. The Philosophy of Wilhelm Di/they, p. 125.
15. Ibid., p. 27. Ibid., p. 125.

UNIVERSIDAD DE NAVARRA c
BIBUQTECA DE HUMJ-\NIDADL,
THE ELUSIVE SELF 403
402
HYWEL D. LEWIS
factors which are in turn deemed to be the essence of evalua-
the intuitive basis for the lmderstanding of others, and to tbis tion. In the extension of Dilthey's initial themes to aesthetics
extent the understanding of others is an extension of the initial and historical understanding, with wbich he was especially
experience of myself. Self-understanding is fundamental, but concerned, it is tbis interplay that cornes into prominence.
in later thought the emphasis is sbifted by Dilthey to the And thus, although Dilthey could not be thought to have
greater role of understanding, wilh conscious reflection on the fallen fonl of «the philosopbical breakers of Charybdis »23
expressions of others. How far tbis sbift goes is not clear, but wilh the N eo-Kantians, in seeking to avoid the reef of
it certainly does not seem to be a case of dispensing with
: te~ous empiric~sm », ~e does come a little close to neglect-
the immediacy of the lived experience or superseding il. Even
mg bis own. warmng. It ~s sorne kind of transcendental unity,
in our knowledge of others we need the insights of our know- sorne essential and pecuhar wholeness that is most distinctively
ledge of ourselves. Thus Hodges continues in the context evident in the lived experience also and extended and made
from which 1 have quoted already : more explicit in understanding and reflection in our expres-
sions. Il is tbis that is brought into prominence in «adult
But further, the understanding of others would be psychic !ife »".
essentially impossible, as a process, without the living
movement and intimacy of lived experience ... Lived ex- The position is thus not so very far removed from that of
perience gives my experience reality and !ife, nnderstanding more typical nineteenth century idealists, like the British philo-
gives it comprehensiveness and objectivity. The !wo are sophers Green and Bradley and especially those, at the close
thus inseparable, and together form the basis of all com- of the pre-eminence of British idealism, who were concerned
merce with the world of the mind". to preserve a place for distinct persons as at least a special
centre of unification with the ultimate whole. How far this
The question how far understanding may be thought to go comparisou can go is not perhaps easy to settle, but it gains
beyond erlebnis or lived experience and to function indepen- strength when we find a drift also towards a more corporate
dently in terms of reflection on language and expression is doctrine of persons then might be suggested initially in the
important for my present purpose. But it is not as important prominence given to lived experience and immediacy. There
as the question of how we are to understand the initial is «a rediscovery of the 1 in the Thou », and although this
continuum and nexuS of lived experience. Just what does the carries with it the insistence that the individual is an intrinsic
lived experience disclose to us? One is disposed to assume value», tbis is itself attenuated in the notion of the individual
that it gives us an immediate awareness of our own mental as «a structural configuration of certain dominant quali-
processes, but the more we consider the emphasis on inward- Jies »25. As. Prof:,ssor .MacKreel puts il : «The individuality
ness and immediacy in the appropriate contexts, the more it of the self IS defmed lU terms of the structural articnlation of I,
III
seems to be concerned with the nexuS itself, the continuum, the ac~uired psycbic nexus. No qualitative uniqueness need ',1

the wholeness and comprehensiveness wbich is initially evi- be posIted to explain individuality »26. There is a sense indeed
dent, however incomplete, in the most elementary and un- in w~c~ i.ndivid.uality ripens and is itself the goal of bistory.
reflective experience. Is there more than tbis initial and self- The mdiVidual 1S also thought of as a point of intersection
developing unity, and just how must we understand that? pf various cultural systems wbich have themselves «a struc-
There clearly is more, but tbis itself seems to be conceived,
mainly if not wholly, in terms of the interplay of the strictly
23. Descriptive Psychology and Historical Understanding p 30
cognitive features of experience with emotive and purposive 24. Introduction by Professor MacKreel. ' . .
25. D~scriptive Psychology and Historical Understanding, p. 11.
26. IbId., p. 10.
22. Ibid., p. 126.
THE ELUSlVE SELF 405
404 HYWEL D. LEWIS

tural unity, comparable with that which we find in an indi- there is, they were exhibiting what is most distinctive and
beyond ordinary explication in our awareness of ourselves.
vidual.". This is very strikingly evident in the work of Gabriel Marcel
It is not essential ta understand this in a severely corporate
ta which l now turn.
sense, but it is also hard ta see how that can be avoided when
the individual, and his lived experience, is thought of mainly Marcel retums repeatedly, in meditative and more im-
in terms of configurations of qualities and wholeness. The pressionistic works, like Being and Having, and in more
epistemalogical ego is certainly rejected, the concept of the systematic and comprehensive statements of his views, like
self being « explicated out of consciousness • and individuality his two volumes of Giffard Lectures with the general titIe
defined through a psychic nexus that has beeu acquired .". Mystery of Being, ta the themes of mystery and the pecnliar
We can thus also «speak of transpersonal subjects without way in which the self, at the core of it, is «uncharac-
reifying them »29 and they can be «logical carriers of objec- terisable »31 or «rebellious ta descriptions »32. He presents
tive spirit »30, a «Zeitgeist», though not the anthropomor- this extensively in terms of an inwardness of experience and
phism of a V olksseele. a something beyond the Me which has qualities and can be
identified in terms of them. «Ta identify», he declares, «is
It is in these contexts that we see most clearly how the
in fact ta recognise that something, or sameone, has, or has
insistence on inwardness and an indispensable immediacy not, such and such a character, and, conversely, such-and-
of experience can be given much prominence, and made
such a character is relative ta a possible identification .33. Bnt
fundamental, in very different contexts from those of the
this is significant only at the level of « Having », which means
individual's immediate awareness of the course of his own
here having predicates - « l return ta the category of having
experience and of himself as the irreducible subject of it. If in sa far as it is implied in the fact, for a subject, of having
there is a discovery of the self, and a mystery which remains, (Le. of carrying with it) predicates .34. But «the question
it is that of the proper placing of items of experience and the 'What am I?' has no equivalent on the level of Having »35.
setting of our lives in a context which is not yet completely
As it is aIso put, but a little more obscurely :
manifest ta us. This is very different from the self-disclosure
of inunediate experience and the mysteriousness of the sub-
ject solely in the sense that it cannat be caught, in its essence, l must develop what l said about the uncharacterisable.
in descriptive characterization. We cannat think of a charaeter without attachlng it ta a
subject by the link expressed by the verb to belong. But
It does not follow by any means that we must withhold tbis supposes a sort of patteru whose nature we must try
from Dilthey the proper credit for aIl that he does say, ta make clear. We are here in an arder which essentially
although l suspect that he himself thought that he had said carries with it the use of the expression «also.; tbis
most, if not all, that it is important ta say about the primacy character is chosen among others. We are not, however,
and immediacy of lived experience. Others who came after faced with a collection, as phenomenalism would have us
him were certainly confused and assumed that, in setting our believe, there is always the transcendence of the qui".
experiences in relation ta one another and in the complexities
of a wider context, including in sorne instances the radically
different mystery of sorne ultimate transcendent source of aU
31. and 32. Being and Having, p. 170.
27. W.A. HODGES, The Philosophy of Wilhelm Di/they, p. 268. 33. Op. cit., p. 153.
34. Op. cit., p. 149.
28. R.A. MACKREEL, Dilthey, p. 313. 35. Op. cit., p. 153.
29. Ibid., p. 313. 36. Op. cit., p. 152-153.
30. Ibid., p. 313.
THE ELUSIVE SELF 407
406 HYWEL D. LEWIS
What sets out therefore as a promising account of «the
Again distinction between what we have and what we are »45, in
l am preoccupied by the question what it means ta tertns of an nltimate identity of the individual person which
passes qualities. The ward «also» seems ta me only ta is not reducible to attributes and history, becomes inflated
have meaning in the arder of Having. Perhaps the recourSe into the totally different consideration of divine or absolute
ta the arder of Having for thinking of qualities is an transcendence. Characterization belongs to the world of limit-
expedient, a makeshift necessary if we are ta conceive (or ed, finite, existences and their relations, but Gad, as infinite
persuade ourselves that we conceive) the juxtaposition of being, is, in his essence beyond this, however hard that thought
qualities37 • may be. This is why «any doctrine of the Attributes would
tend inevitably to lead us astray. The l am that l am of
But to think of myself in these ways, in the world of Having, Scripture would be truly the most adequate formula from
as being characterised by qualities or predicates, is also to
an ontological point of view »".
think of myself in terms of «dispossibility». At a certain
level, or in a certain way, we have to think in terms of This is no doubt important, however much it may admit
qualities or predicates, ta be « conscious of being fixed within of being qualified in other ways. It has also a bearing, for
a zone of determiuate scale .". But tbis is only «what a those who accept it, on our conspectus on everything else,
superficial enquiry would seem to show»", and it is when the world of nature and our personal and. moral relations.
we think of ourselves as being « non-disposable » persons that But it is an entirely different concern. The elusiveness of our
we are liable also to «self-preoccupation ». We have an own identity is very peculiarly bound up with the finality of
«ego-centric topography» which can only be corrected in the distinctuess of persons, their irreducible individuality, and
« encounters» which make us «sharply aware of the acci- it is in tbis context, where the other retains ils integrity as
dentai character of what l have called our mental space, and distinct existence, that love and detachment have their proper
of the rigidities on which its possibility rests» 40. place, not in a metaphysical dilution of self and other in an
In these latter nuances we seem to be passing into a some- extension of strictly religious transcendence to ail there is.
what different uuiverse of discourse for the main theme, or a The sense in which the self is non-characterizàble has a very
different setting, and it becomes dear that what we are led important place in a final religious view, but in itself it is
to is the transcendence of the level of characterization and religiously neutral and can be admitted quite as properly by
determinate qualities. This is what detachment and charity the agnostic as by the believer. To acknowledge that there is
«as absolute disposability» 41 properly involve. «The world « A kind of mystery there », though that term is not the most
of the Same and the Other is the world of the identifiable» 42. apposite to what is at the core of self-awareness, does not
But love transceuds the opposition of the same to the other require us to «believe we could find a whole theOly of the
by planting us in Being »43. This is the proper « transcendence Thou within it ,47. The «thou» at the finite level is a quite
of the qui» already mentioned. It is «a function of the separate issue.
attitude l take up in the face of the qui ,44. The same themes presented by Marcel in a loose and
somewhat explanatory impressionistic way in Being and
37. Op. cit., p. 147.
Having became the core of the more exhaustive presentation
38. Op. cit., p. 73.
39. Op. cit., p. 73.
40. Op. cit., p. 71.
41. Op. cit., p. 69. 45. Op. cit., p. 155.
42. Op. cit., p. 153. 46. Op. cit., p. 147.
43. Op. cit., p. 152. 47. Op. cit., p. 72.
44. Op. cit., p. 153.
THE ELUSIVE SELF 409
408 HYWEL D. LEWIS
of it, it seems to mel! away into preconceptions about what
of his views in his Gifford Lectures, Mystery of Being". But
the world in general must be like. Insights into states of mind
the outcome is the same, and in sorne ways the presentation
and crncial situations of personal perplexities and decisions
is more precise and easy ta apprehend in the earlier work than
tend to be overlaid by permutations of thought which partly
in the extended deviations of the Giffard Lectures. For the
present puspose l have therefore limited myself ta the pre- ring the bell and partly bewilder.
sentation of Marce!'s views in the work already mentioned". Il would be a very complicated business to follow this out
in all its ramifications in Sartre's writings, and, as with other
We find very much the same situation as l have just been thinkers who present us with highly convoluted systems of
describing, in essenlials, in the work of other writers who do thought, there is a risk in seeking ta lay hold of a few
not have lhe explicit religious motivation of Marcel or any indisputable themes - we may do injustice ta other things
proper recognition of a strictly transcendent source of present that are said. But it is a risle worth taking, for the desperation
existence, though they use the term in a rather different way. with which Sartre struggles ta maintain an acceptable position,
Conspicuous among these is J.-P. Sartre, the outstanding in the varieties of his acceptances and repudiations, seems ta
existentialist philosopher. Even more than Marcel his own me ta high-Iight very clearly the need for a view of the self
involvements were many, including the world of general lite- of the kind l have been seeking to defend elsewhere.
rature as weil as academic study. This has made it seem
especially impressive ta many who welcome this broad concern, The main ambiguity is that of the nature of consciousness
and insight into the emphases appropriate at present, that he itself. Sartre malees a move now very familiar when he ob-
should have brought questions of personal existence and in- serves : «When l run after a streetcar, when l look at the
volvement ta the centre of the stage, for himself and others. time, when l am absorbed in looking at a portrait, no l is
present. There is consciousness of the street-car having to be
A great deal of Sartre's more severely philosophical think- caught, etc., and non-positional conscÎousness of that cons-
ing takes ils course as a reaction against the teaching of his dousness. On these occasions l am immersed in the world of
own original mentors, especially Husserl and Heidegger, and objects; they constitnte the unity of my consciousness, they
in particular as the retention, in sub!le ways, of features of present themselves with values, with qualities that attract or
the thought of these thinkers which he seemed ta be most repel _ but l have disappeared. l am nothing. There is no
firmly rejecting. He never broke away entirely from their place for Me at this level of consdousness. This is not acci-
spell. This accounts, more l suspect than the particular cast dentaI, it is not due to a temporary lapse of attention, but ta
of his own mind and bis style of writing, for the difficulty of
the strncture of consciousness itself »so.
making his own position precise enough and for the para-
doxical character of his central themes. The pre-eminence of Just how must ail this be understood? «The world of
consciousness for his own system is clear, and however diffi- abjects» itself constitutes «the unity of my conscionsness ».
cult it may be to discover how precisely this must be under- Could this be interpreted in a severely phenomenalist sense,
stood, it is certain that any form of materialism or of posi- objects being just objects of consciousness. This would be
tivism is being rejected. There is sorne sense, and that of hard ta reconcile with the strong realist streale in Sartre's
radical importance for Sartre, in which mental existence is thought. Il is «the being of the world which is implied by
genuine and matters; and yet, in the account that he gives
50. Transcendence of the Ego. 1 have quoted here and elsewhere
from the Selections, The Philosophy of lean-Paul Sartre, ed. by
4~. This is the title of the two volumes which bear respectively the -R.D. Cumming, p. 53. There is a full translation of the book by
subtiles Reflection and Mystery and Faith and Reality. Forest Williams and Robert Kirkpatrick, Octogon Books, New York,
49. 1 discuss his views more exhaustively in my forthcoming The
Elusive Self (Marmillan, London). 1972.
THE ELUSIVE SELF 411
410 HYWEL D. LEWIS

consciousness », «this table, this package of tobacco »". In thing ». There is simply «the nnitary organization of imma-
opposition to the idealists, Sartre insists that it is the real nence »53, or as it is also put: «At the limit of coincidence
worid that we apprehend, in the appearances thernselves, with itself, in fact, the self vanishes to give place to identical
«not a noumenal being which is hidden bebind them »52. being. The self can not be a property of being-in-itself. By
But is the nnity and being of consciousness itself then just nature it is reflexive. The self refers, but it refers precisely to
sorne aspect or modification of the worid as presented, is this the subject. It indicates a relation between the subject and
what is meant by « constitutive conscÎousness », a conscÎous- himseIf, and this relation is precisely a duaIity, but a particular
ness of tbings which are «transcendent» in the sense of not duality since it requires particular verbal symbols. But, on
being exhaustively presented, but where the consciousness is the other hand, the self does not designate being either as
also «innnanent» ? Is there no ultimate wedge to be driven subject or as predicate. In fact the self cannot be apprehended
between consciousness and the worid apprehended ? as a real existent...»54. Or, as we also read : «Ta introduce
into the unity of a pre-reflective cogito a qualified element
One point which Sartre certaiuly has in mind here is that external to this cogito would be to shatter its unity, to destroy
there is no pure consciousness, in the sense maintained by its translucency ; there would then be in consciousness some-
sorne mystics - especially in the East - , namely a conscious- thing of which it would not be conscious and which would
ness with no sort of object; consciousness for Sartre must not exist in itself as consciousness »55.
always be «of» sometbing, and, in this, 1 for one reacliIy
concur. But it does not follow that consciousness is not some- This is even more starkly put in another context : «Pheno-
thing to be prized apart from the worid it apprehends. The menology can still be reproached for providing an escapist
position is made more difficult when Sartre, in line with doctrine, for drawing a piece of man out of the world, and
bolder reductionists, diverts attention to dispositional matters thereby turning our attention away from real problems. It
and irrelevances, for the present issue, such as the ability to seems to me that this reproach no longer has any justification,
ask questions. This may be important in sorne aspects of the Me is made an existent strictly contemporaneous with the
understanding what consciousness is Iike, but it does nothing world, whose existence has the same essential characteristics
to indicate what it is to be conscious in distinction from the as the world... It is sufficient that the Me be contemporary
worid being there. with the World and that the subject-object duaIism, which
is purely logical, finally disappear from the preoccupations
This is not eased by talk of «self-refIective» conscious-
ness, because this itself, as in Ryle's acconnt of being self- of philosophers ,56.
conscious, is understood in terms of special ways of noting Not surprisingly, Professor Peter Caws surns up the posi-
things and of activity, akin to noting peculiarities of any tion, in an excellent concise survey of Sartre's treatment of
experience which is mine without considering any more basic consciousness and subjectivity51, when he says :
sense in which they are mine or belong. But even if we
hesitate to take Sartre the whole way with reductionist and
The Sartrian Ego has the elusiveness of a burst bubble,
immanentist views of consciousness, one tbing is cIear - he and the outcome of the analysis is an empty l, correlative
has no place for a proper subject as a distinct existent
required to make sense of our being conscious at all. As stated
in the quotation above - «1 have disappeared, 1 am no- 53. Being and Nothingness, as above, p. 76.
54. Ibid., p. 76.
55. Ibid., p. 77.
56. Transcendence of the Ego, Selections ed. by R.D. Cumming,
51. Being and Nothingness, trs. Hazel Barnes, Methuen, 1957,
p. 57. Cf. Williams and Kirkpatrîck, p. 103.
p. LXII. 57. Peter CAWS, Sartre, Routledge and Kegan Paul, chapter IV.
52. Ibid., p. LXII.
412 HYWEL D. LEWIS

to a Me reduced to nothingness, together maintaining a


spontaneous unitY of states and actions".

Thes~ tortuous moves and ambiguities are not, how-


ever, wlthout signifieance. 1 have followed them, in the
c";le of. Sartre as of the other philosophers discussed in HERMANN LÜBBE
tbis artIcle, in ontline but with as much explicit reference
to actual text as reasonable space would allow, because
they seem to me, in their persisteuce and influeuce as HEINRICH HEINE UND DIE RELIGION
much as in their difficulty and ambignity, to show what
obstacles and frustration we set up for ourselves if we faiI NACH DER AUFKLARUNG
to appreciate that, at the core of al! awareness there is the
self which is aware and which must itself be ~nderstood to
b~ an entity, as much as entities in the world around us, but Die Religionskritik der europaischen Aufkliirung ist in
Wlth the peculiarity that it cannot be known or described like ihren wichtigsten Intentionen und Argumentationen auch im
extemal objects in terms of special attributes, but only in the Lebenswerk Heiurieh Heines gegenwartigl. Originell ist Heine
awar~ness of himself that each one has in bis own case in any aIs Religionskritiker nicht. Wohl aber aussert er sich, mit
expenence whatsoever. With this allowed, the seeming empti- Sitz in Frankreieh, früher und entschiedener aIs die Mehr-
ness a~d elusiveness of mental existence can be properly zahl der Intellektuellen in Deutschland, in religionskritischer
appre~Iated, as they are only dimly recognised in the writings Absieht unzweideutig und unmissverstandlich'. Vor allem
to whlCh 1 have just been alluding, without desperately seeking für seine Mitteilungen an das franzosische Publikum Mitte
to ~educe them in tum to extemal reality or some phenomeno- der dreissiger Jahre über das religionsauflOsende «Schnl-
loglca~ account of what we find our actual experiences to be geheimnis »3 der deutschen Philosophie von Kant bis Hegel
or to mvolve. Acknowledge the proper elusiveness of the self
gilt das.
and we .can be spared much wandering in alluring mazes
from which there lS no proper exit.
1. Die altere Literatur zu diesem grossen Thema ist verzeichnet
bei Gottfried WILHELM und Eberhard GALLEY. Heine-Bibliographie.
Band 2 : Sekundiirliteratur, 1822-1953, Weimar, 1960, p. 120-122.
2. «!ch glaube, es ist nicht Talentlosigkeit, was die meisten deut-
sehen Ge1ehrten davon abhalt, über Religion und Philosophie sich
popuHir auszusprechen. Ich glaube, es ist Scheu vor den Resultaten
ihres eigenen Denkens, die sie nicht wagen, dem Volk mitzuteilen.
Ich, ich. habe nicht diese Scheu, denn ich bin kein Gelehrter, ich
selber bm Volk.» Zur Geschichte der Religion und Philosophie in
Deutschland, in : Heinrich HEINE, Siimtliche Werke in zwolf Teilen.
Mit' Einleitung und Anmerkungen herausgegeben von Paul Beyer,
K~rl Hanns Wegener, Leipzig o.J., VIII, 137 (Zitate werden künftig
m}t Werktitel sowie Band- und Seitenzahl dieser Ausgabe nachge-
wIesen).
3. «Ja, was' die deutsche Philosophie betrifft, so hatte ich un-
umwunden das Schulgeheimnis ausgeplaudert, das, eingewickelt in
scholastische Fonneln, nur den Eingeweihten der ersten Klasse be-
kannt war:r., sagt Heine in Gestiindnisse im Rückblick auf seine
Darstellung der Geschichte der Religion und Philosophie in Deut-
58. Ibid., p. 58. schland, XII, 193.
HEINRICH HEINE 415
414 HERMANN LOBBE

Der spate Heine ist demgegenüber bekanntlich ein Autor ideologisches Herrschaftsmedium nicht. Seitdem die soziale
von Selbstbekundungen neuer Friimmigkeit. Zum Renegaten Frage entdeckt ist, spitzt sich diese politische Religionskritik
der Argumente religiiiser Aufkliirung wird aber Heine auch auch bei Heine sozialkritisch zu - in unüberbotener Scharfe,
in seinen letzten Lebensjahren nicht4• Keines der religions- zum Beispiel, im Gedicht über die Schlesischen Weber, in
kritischen Argumente, die uns über den Ursprung der reli- welchem der Fluch auf das Vaterland dem Kanigsfluch folgt
giiisen V orstellungen aus unseren unerfü11ten Bedürftigkeiten und beiden Flüchen der Fluch, der Gott selbst gUt, voraus-
belehren, wird zurückgenommen. Gleichwohl haben wir es, geht. Dieses Gedicht erschien im Juli 1844 im «Vorwalis »,
deutlich und unverkennbar, mit Aenssenmgen eines reli- gegen dessen Mitarbeiter die preussische Regierung am Tage
giiisen Subjekts zu tun. Anders sind, wie mir scheinen will, darauf Haftbefehl erliess'. Friedrich Engels publizierte es
zum Beispiel, Heines Nachwort zum «Romanzero », oder einige Monate spater iu englischer Uebersetzung in «The
seine «Gestiindnisse», und überdies zahllose seiner Briefe New Moral World »7. Das Gedicht ging rasch in den poli-
aus den fünfziger J ahren nicht verstandlich. tischen Liederschatz der Arbeiter und Handwerksgesellen
In einem ausserordentlichen Fall liisst uns somit das Werk ein' : « Ein Fluch dem Gotte, zu dem wir gebeten/ln Winters-
Heinrich Heines erkennen, wie Religion ihre Kritik über- kalte nnd Hungersnot ;/Wir haben vergebens gehofft und
geharrt,/Er hat uns geafft und gefoppt nnd genarrt - /Wir
daneli und Friimmigkeit mit vollendeter Anfkliirung sich
vertdigt. Von den religionskritischen positionen der Auf- weben, wir weben 1 », - Wie innner die Theologie dieses
kliirung wird, noch einmal, keine zurückgenommen. Gleich- Fluchs zu interpretieren sein mag - sein politischer Sinn
ist offenkundig die Weigenmg, mit Gotteslohn an Stelle von
wohl ist Heine in seinen letzten Lebensjahren ein religiiiser
haheren Liihnen noch langer vorlieb zu nehmen. Heine ist
Autor. Was er aIs solcher an Texten uns hinterlassen hat,
ein Dichter dieser Weigerung. «Ein neues Lied, ein besseres
sind Dokumente einer Gestalt der Religion nach der Anf-
Lied» übert6nt «das Eiapopeia von Himmel». Die viel-
kliirung'. ziterte poetische Prophetie" lautet : «Es wachst hienieden
Zunachst miichte ich jetzt einige wichtige Positionen anf-
geklarter Religionskritik, wie wir sie auch bei Heine wieder-
finden, skizzieren, und ich machte insbesondere zeigen, wie 6. Cf. Fritz MENDE, Heinrich Heine. Chronik seines Lebens und
Werkes, Berlin, 1977, p. 215.
sie auch beim spaten Heine unverandert in Geltung sind. 7. a.a.O., p. 221.
Anf diese Weise ergibt sich der Hintergrund eines intellektuel- 8. «Hunderte von Arbeitern versammelten sich noch vor wenigen
len Orientierungskontinuums, vor dem dann die besonderen Tagen zu allerlei Feier und sangen dabei nach den Flüchen über den
Konig und die Reichen» dieses Heine-Gedicht, berichtet kein Ge~
Züge der Altersfriimmigkeit Heines deutlich werden. ringerer aIs Johann Hinrich Wichern. Cf. «Kommunismus und die
Unter den Positionen religiiiser Aufkliirung, wie wir sie HUfe gegen ibn» (1848), in : Johann Hinrich WICHERN, Siimtliche
Werke. Herausgegeben von Peter Meinhold. Band I. Die Kirche und
anch bei Heine studieren kiinnen, fehlt selbstverstandlich ihr soziales Handeln, Berlin und Hamburg, 1962, p. 133-151, p. 141.
die Kritik der Religion in ihrer politischen Fnnktion aIs 9. IV, 103.
10. Dahei haben es Dolf Stemberger besonders die «Zucker-
erhsen» angetan : « ... "Schonheit und Lust"», und nachdem Heine
4. Das ist, auch in Uebereinstimmung mit Heines Selbstbekundun- «so hoch gestiegen... macht er's wieder gut und findet ein ganz
gen, die Mehrheitsmeinung der Interpreten, zum Beispiel : «Man neues essbares Pendant zum Brot, das zum Unterschied von diesem
8011te aiso nicht von Bekehrung sprechen oder von Wiederruf », so wie von den Rosen und Myrten wohl nie zuvor in der ganzen WeIt-
Eberhard Kirsch, in : Eckehard PETERS und Eberhard KIRSCH, «Reli- literatur irgend symbolischen Zwecken gedient hat : "Zuckererbsen",
gionskritik bei Heinrich Heine », Leipzig, 1977. Er/urter Theologische frisch aus des Dichters Hand 1» - Dolf STERNBERGER, Heinrich
Heine und die Abschaffung der Sünde. Mit einem Nachtrag, 1975,
Schriften. Herausgegeben von Wilhelm Ernst und Konrad Feiereis, Frankfurt am Main, 1976, p. 26. - Der Positivist darl hierzu aIs
Band 13, p. 109. Forschungsdesiderat anmelden herauszufinden, wo Heine wohl Zucker-
5. Zum Thema «Religion nach der Aufkllirung », cf. meinen
gleichnamigen Aufsatz in : Hennann LÜBBE, Philosophie nach der erbsen aIs regionalküchenspezifische Gemüsebeilage kennengelernt
Aufkliirung. Düsseldorf, Wien, 1980, p. 59-85.
haben mag. Schon im Rheinland ? Wenn oicht dort, dann vermutlich
HERMANN LOBBE HEINRICH HEINE 417
416

Brot genug/Für aile Menschenkinder / Auch Rosen und Myr- Wstorisch relativiert. Die beiden Satze lauten : «Die bisherige
ten, Schonheit und Lust,/Und Zuckererbsen nicht minder ». spiritualistische Religion war heilsam und nothwendig,
Wenn das das « Himmelreich » ist, 80 Hisst es sich, im Prinzip, solange der grosste Theil der Menschen im Elend !ebten und
allerdings «hier auf Erden» «errichten »". «Durch die sich mit der himmlischen Seeligkeit vertrosten mnssten. Seit
Lehre von der Verwerflichkeit aller irdischen Güter, von der aber, dnrch die Fortschritte der Industrie und Oekonomie,
auferlegten Hundemut und Engelsgeduld », so heisst es schon eS moglich geworden die Menschen aus ihrem materiellen
in der Romantischen Schule, sei die Religion « die erprobteste Elende herauszuziehen und auf Erden zu beseligen, seitdem
Stütze des Despotismus» gewesen. Nun aber haben die _ Sie verstehen mich »15. Soweit Heines Religionskritik aIs
Menschen « das Wesen dieser Religion erkannt» nnd « lassen Kritik der falschen religiosen Triistungen.
sich nicht mehr mit Anweisnngen auf den Himmel ab- Zu den frühesten Formen aufgeklarter Religionskritik ge-
speisen »12. «Die Eisasser und Lothringer », verheisst Heine hort die Kritik der Bindung des Rechts zur Betatigung des
den Deutschen im Vorwort zum « Wintermarchen », «werden Verstandes an Grenzen, die dnrch dogmatisierte Geltung re-
sich wieder an Deutschland anschliessen, wenn wir das vollen- ligioser Lehren gesetzt sind. Das nimmt Heine, unter ande-
den, was die Franzosen begonnen haben» und «weno wir rem, in sein Lessing-Bild auf. Lessing, indem er den Streit
die Dienstbarkeit bis zu ihrem letzten Schlupfwinkel, dem nm die Warheit konkurrierender dogmatisierter Glaubensleh-
Himmel, zerstOren» 13. - Es ist wahr, dass Heine spater, in ren für unentscheidbar erkIart - ihn erhebt Heine in den
seinen «Gestandnissen», den nach «Kase, Branntwein und Rang eines «Johanaes» der «Vernnuftreligion », deren
Tabak» stinkenden Atheismus des plebejischen «Janhagel» Messias noch nicht erschienen sei". «Die Bekampfung des
mit esoterischem Intellektuellen-Degout sehr von oben herab religiOsen Aberglaubens» - das ist die Praxis dieser Ver-
abgefertigt hat14. Das sind in der Tat neue Tone, die man nuuftreligion, sofern sie negiert, und im «Verneinen» sei
beim frühen Heine nicht hOren kann. Dass damit gleichwohl Lessing « stark» gewesen. Dass er dadnrch zugleich der Aus-
die Ideologiekritik der Religion in ihrer politischen Funktion breitung einer sich schliesslich ins «Lappische und Leere »
aIs Kompensation sozialen Elends nicht dementiert wird - verlaufenden «AufkIarungssucht» Vorschub geleistet habe,
das wird zu zeigen sein. wird kritisch angemerkt17 • Aber AufkIarung ais Reklama-
tion und Betatigung einer durch institutionelle religiose
!ch fasse Heines politisch-soziale Religionskritik in zwei Disziplin nicht einschrankungsfiihigen Freiheit des Geistes -
Satzen aus Heines Brief an Heinrich Laube vom 10. Juli 1833 sie hillt sich in Heines eigener Philosophie llOgebrochen bis
zusammen, in welchem Heine die Religion zugleich sozial- in seine letzten Lebensjahre hinein durch. Was er 1826 in
seinen Nordsee-Reisebildern schrieb, wird niemals zurückge-
in Ostfriesland, wo man sie im Frühsommer statt Spargel aIs Beilage nommen : «Der Geist hat seine ewigen Rechte, er lasst sich
zu rohem Schlnken schatzt. Heine schatzte ja seinerseits die Ost- nicht eindammen durch Satzungen und nicht einlullen dnrch
friesen (<< .•. die guten Bürger Ostfrieslands, ein Volk, das flach und
nüchtem ist wie der Boden, den es bewohnt, das weder singen noch GlockeugeIaute »18. Die Sache ist !ediglich die, dass die
pfeifen kann, aber dennoch ein Talent besitzt, das besser ais aIle
Triller und Schnurrpfeifereien, ein Talent, das den Menschen adelt
und über jene windige Dienstseelen erhebt, die al1ein edel zu sein 15. Heinrich HEINE, Briefe. Erste Gesamtausgahe nach den Hand-
wahnen, ich meine das Talent der Freiheit», so in : Die N ordsee, schriften herausgegeben, eingeleitet und erUiutert von Friedrich HIRTH,
VI, 93) und so moglicherweise auch ihre Zuckererhsen, für die er, Zweiter Band, Mainz, 1950, p. 40. .
zumindest 1826, auch früh genug, namlich Anfang Juli, in Ostfries- 16. Die romantische Schule, XI, 27 : Il In allen semen Werken
land eintraf (cf. Fritz MENDE, a.a.O., p. 55). lebt die selbe grosse soziale Idee, die selbe fortschreitende Humanit~t,
11. Deutschland. Ein Wintermarchen, V, 90 f. die selbe Vernunftreligion, deren Johannes er war, und deren Messlas
12. Die romantische Schule, XI, 18. wir noch erwarten.»
13. Deutschland. Ein Wintermarchen, V, 87, 88. 17. a.a.O., XI, 28, 30, 28.
14. Gestandnisse, XII, 194, 193. 18. Die Nordsee, VI. 80.
419
HEINRICH HEINE
418 HERMANN LOBBE

Aktualitlit der Aufkliirung, die das geltend lebendig23 ; Kiimpfe um die Katholikenemanzipa~on erl~b~. er
'n England24 und des Liberalen Napoleonsschwarmerel lasst
mit ihrem Siege schwindet. Freilich gibt es N adllmt,gef,echte: l ' . G
zum Beispiel im Kampf zwischen Liberalen und Klerikal'en jhn sogar noch die Inthronisierun~ N apo~ens III: ~t enu~-
über die lehrfreiheitseinschr1inkende Rolle der Religion . tuung begrüssen25 • Der Anachromsmus emer Zelt, ID der d!-e
iiffentlichen Unterrichtswesen, und über solche Gefechte be- Philosophie die Fiilligkeiten religiiis~r AnfkHirung auch ~n
Deutschland Iangst vollbracht hatte, ID der aber andererselts
richtet Heine, zum Beispiel, 1843 aus Paris den Leseru der
Augsburger Allgemeinen Zeitung19• Dabei ist nicht zweifel- die Taufe ais gesellschaftliches Emanzipationsmittel immer
noch nahezu unvermeidbar war - das liess ais unausliisch-
haft, welcher Partei seine Sympathie gehiirt, und eben dieses
bare biographische Erfahrung auch beim spaten Heine den
intellektuelle Engagement bei Fiilligkeiten, in erueuerter
kultureller Zuwendung zur religiiisen Ueberlieferung zugleich . unaufhebbareu Zusammenhang von Religious- uud Bürger-
das Ergebnis der Aufkliirung festzuhalten, bestimmt ja anch freiheit gegenwartig bleiben. Was immer Heines neue Alters-
seine Kritik an der romantischen Schule. Das hiilt sich uLUrcn, friimmigkeit lebenspraktisch gewesen ist - einem Akt der
Bekehrung, der das Bewusstsein rekonfessionalisiert und
ais nun auch Heine seinerseits wieder fromm wird. Sein
Geltuugsansprüche dogmatisierter Lehrgehalte erueuert, en~­
«himmlisches Heimweh », vermerkt er 1854, mache ibn
stammt sie nicht. Progressive Heine-Interpreten, denen die
«weder für ein Dogma noch für irgendeinen Kultus »20
neue Altersfriimmigkeit Heines nie recht geheuer war", haben
schwiirmen, und über ein Kriterium reiner Lehre, das den
insoweit recht : Heine selbst hat sich mit Nachdruck der
Frommen nach Ansprüchen der Wahrheit zu einer Ent-
« christlichen Zudringlichkeit» erwehrt, die «über die Um-
scheiduug zwischen den Konfessionen zwiinge, verfügt er
nicht. «Ausdrücklich widersprechen muss ich... dem Ge- wand1ung... in Bezug anf giittliche Dinge" die in seinem
«Geiste stattgefunden» hatte, wie über ein «Damaskus»
rüchte, aIs hiitten mich meine Rückschritte bis zur Schwelle
sich zu sprechen erlaubte. «Nein, ihr glliubigen Gemüter,
irgen?einer Kirche oder gar in ihren Schoss geführt »21, 27
ich reiste niemals nach Damaskus », schreibt er noch 1852 •
schrelbt er, um Missverstiindnissen vorzubeugen, ausdrück-
Die Frage, ob denn «die lutherische Glaub~nsuniform »"
Iich, und kehrt seine neue undogmatische Friimmigkeit sogar
ibm nunmehr einigennassen passe, beantwortet slch von. daher
noch gegen jene neue « Intoleranz », in der der « hohe Klerus
von selbst, und so auch das Gerücht, er sei « zum kathohschen
des Atheismus ,", anstatt für die Freiheit der Religion zu
Glauben übergetreten», das sich, wie Heine schrieb, «zur
streiten, zum Kampf für die Befreiung der Menschen von
selben Zeit» auszubreiten begann, «wo mir in Deutschland
der Religion sich erhoben hat.
ln der Quintessenz heisst das : Heines neue Friimmigkeit
23. Cf. Eberhard GALLEY, Heinrich He.ine. Stuttl?art, ~CML~III,
setzt Religionsfreiheit voraus und nimmt sie in Anspruch. p. 7 f. _ «Denk ich an den grosse~. Kaiser, so :wud es 1ll memem
Das politische Interesse, Viiterreligion, Bekenntnis und fak- Gedachtnisse wieder recht sommergrun und goldlg ... » : Ideen. Das
tische Friimmigkeitspraxis von Bürger- und Menschenrechten Buch Le Grand, VI, 134. '
24. Cf. dazu Englische Fragmente, VII, 263 ft. : «Die Emanzl-
'
abgekoppelt zu halten, erlischt nicht. Die Jugenderinnerung
pation ». b b'ld d D' h
25. Cf. Walther VONTIN, Heinrich Heine. Le ens l er es lC ~
an die Freiheit der Juden im napoleonischen Rheinland bleibt
ters und Kiimpfers, Berlin, 1949, p. 175 f. . . ,
26. Vom «Zuruckschrecken vor der mat.en~hst1scl:en Ko~s~quenz»
spricht zum Beispiel Hans KAUFMANN, ~emYlch H.eme. Gelstlge Ent-
wicklung und künstlerisches Werk. ~erlil1: und 'Yeunar, 1970, p. ,12;0.
«Erkenntnistheoretisch gesehen» sel Herne «hmter dem Matenahs-
19. Lutezia. Berichte über- PaUli"; Kunst und VoIksleben. Zweiter
Teil, X, 250 If. mus» zurückgeblieben, ibid. .' .'
27. Zur Geschichte der Rehgwn und Phzlosophle in Deutschland.
20. Gestiindnisse, XII, 214. Vorrede zur zweiten Auflage, VIII, 134.
21. Nachwort zum «Romanzero », ilI, 155.
22. a.a.O. III, 153. 28. Gestiindnisse, XII, 209.
421
HEINRICH HEINE
420 HERMANN LOBBE
auch Bischof in seiner Hausburg sein soli ,,34. lhre Ueber-
der Protestantismus die nnverdiente Ehre erzeigte, mir eine bietung findet dann die liberale Geschichtsphilosophie yom
evangelische Erlenchtung zuzutrauen ,". lm Brief yom 1. Junj {]rsprung der Demokratie aus der Reformation in der Er-
1850 an Julius Campe findet sich Heines schmste Aeusserung hebung von Christus und Moses in die Rolle von Erzsozial-
über diesen Punkt : «Es waren Gedanken », die seine «relie isten". Speziell anf Moses wird dabei, sozusagen, der Re-
giOse Umwiilzung » bewirkten nnd «nicht die Phosphordiinste formsozialismus zurückgefiihrt : «Moses wollte nicht »,
der Glaubenspisse »30. - Soweit Heines Religiouskritik schreibt antikommunistisch Heine, «das Eigentum abschaf-
Kritik des intellektuell unbefreiten Glaubens sowie ais Kritik . fen, er wollte vielmehr, dass jeder dessen besasse, damit
politisch bindender Konfession - . niemand durch Armut ein Knecht durch knechtische Gesin-
Die subtilste Form der AufkUirung im Verbaltnis zur relie nung sei. Freiheit war immer des grossen Emanzipators letzter
giosen Ueberlieferung ist deren Historisierung. Histori-
Gedanke »".
sierungsprozesse sind, wie man vermuten darf, Heines geschichtsphilosophische Retrospektiven auf re-
irreversibel, und historisch gebrochen bleibt auch ligios e Ursprünge politischer und sozialer Freiheit liessen
biographisch letztes Verhiiltnis zur Religion. In diesen sich durch lange Reihen von Bemerkungen über die religiose
Zusammenhang gehOrt Heines religionsphilosophische Scbat- Herkunftspragung europiiischer GegenwartskuJtur erganzen.
zung der Reformation und des Protestantismus, in der er Sogar die romische Kirche kommt dabei schliesslich gut weg.
Lessing wie mit Hegel übereinstimmt. Durch Luthers Der jüdisch gepriigte sittliche Rigorismus der friihen Christen,
setzung aller Christen ins Recht immediater Bibellektüre so sieht es Heine, habe den Sturz des korrupt gewordenen
sei «in Deutschland die sogenannte Geistesfreiheit beschleunigt, aber «auf die übergesunden Volker des
die Denkfreiheit" entstanden und in ihrer religiOs prafe,t. Nordens» «heilsam" gewirkt : «die allzu... barbarischen
mierten «Konsequenz" sei es, dass heute «die Frage der Leiber wurden christlich vergeistigt; es begann die euro-
Pressfreiheit» auf der politischen Tagesordnung stünde. Folg- paische Zivilisation ». « Die katholische Kirche erwarb sich in
lich sei die Pressfreiheit, schliesst Heine, ein «protestanti- dieser Hinsicht die grossten Ansprüche auf unsere Verehrung
sches Recht »31, und es ist in diesem Aspekt, dass sein Herz ùnd BeWlmderung ». So sag! es Heine sogar in seiner Dar-
sogar fiirs protestantische Preussen zu schlagen beginnt. Der stellung der romantischen SchuJe37 , und er sag! es, um durch
Versuch, Preussen zu lieben, so hatte Heine sich über Victor diese geschichtsphiJosophische Historisierung den Eindruck
Cousin geaussert - das sei ja wohl «das Schwerste ,,32, der regressiven Tendenz zu verstarken, mit der, wie Heine
«lm Kampf... mit der katholischen Partei" jedoch, schreibt Angehorige dieser Schule «sich in den alten Geistes-
er im Borne-Buch, dürfe man allein Preussen «den Sieg
wünschen »33, Der Protestantismus, 80 sieht es Heine noch in kerlœr wieder ,," hineindriingen.
Es ist diese historische Distanz, die Heine zwischen sich
seinem vorletzten Lebensjahr, habe, zumal im Ausgang
die Machte unserer religiosen Herkunftsgeschichte leg!,
England, Bewegungen des Untergangs aller scharfen dogma,
tischen Bekenntnisgrenzen « in einem allgemeinen Bibeltume » die ibn zugleich milde über die relikthafte Gegenwart dieser
ausgelOst, und eben damit habe er «die grosse Demokratie » Machte urteilen Jass!. Ais Kritiker ist Heine kein Eiferer,
gefOrdert, «wo ja der Mensch nicht bloss Konig, sondem 'vielmehr lroniker mit Scharfblick fiir die ihm stets un-

29. a.a.O., 214. 34. Gestiindnisse. XII, 211.


30. Heinrich HEINE, Briefe, a.a.O. Dritter Band, Mainz, 1950; 35. «Es gibt wahrhaftig keinen Sozialisten, der terroristischer ware
p. 217. Herr und Reiland », a.a.O. xn, 212.
31. Zur Geschichte der Religion und Philosophie a.a.O. XII, 213.
VIII, 162, 164. 37. Die romantische Schule, XI, 19.
32. Die romantische Schule, XI, 145. 38. a.a.O., XI, 36.
33. Ludwig BORNE. Eine Denkschrift. XI, 259.
422 HERMANN LVBBE HEINRICH HEINE 423

angenehmen Fanatiker, und so nimmt er in Schntz, worauf Bild darf man nicht aus den Augen verlieren, wenn man
sich die Eiferer mit ihrer ikonoklastischen Abraumwut sehen will, von welcher besonderen Art die neue Frammig-
stürzen. Dazu gehart nun eben auch mancherlei Katholisches keit ist, die unter fortgeltenden AufkHirungspriimissen der
_ die Jesuiten gegen ihre «Popanz »- und Sündenbock- spate Heine bekundet. Es handelt sich natürlich um die
Rolle in der Verschwiirungslegende «der liberalen Partei .39, Frammigkeit einer Religion der Trastung, die, wie Heine
die « Poesie, welche in der Symbolik des katholischen Dogmas an Laube schrieb, in der «Verzweiflung des Leibes» eine
und Kultus blüht », die «emste Güte. seiner geistlichen Wirkung der Gewissheit. Gottes ist - sei es ais «Labung»
Lehrer am Düsseldorfer Lyzeum40 und schliesslich die Kirche durch «fluchende. Lasterung Gottes, die ja «dem Atheis-
überhaupt gerade auch dann, wenn es wahr wiire, dass sie, ten... uicht vergiinnt» 44 ist, sei es ais Ergebung in seinen
eine «Bastille des Geistes., «jetzt nur noch von Invaliden « heiligen Willen »45, Liingst bevor seine defiuitive Erkrankung
verteidigt» werde41 • Der «Geschichtskundige », wie Heine ihn uiederwarf, hat Heine den Grund, der der Religion stets
sich nennt, weiss, dass es gleichwohl « noch viele J ahrhunderte das letzte Wort in der Beantwortung menschlicher Fragen
dauem mag », bis ihr «Grauitgebaude» in seiner «Riesen- sichert, ais den eigentlichen Grund für den Triumph der
haftigkeit» schliesslich abgetragen sein wird42• Solche Ge- jüdisch-christlichen Religion über die Gatterwelt der Antike
schichtselegie widerspricht dem Spott über die romantische angeführt. Was ist der Grund? Die Unverfügbarkeit der Be-
Bewegung zur Vollendung des Kiilner Dombaus keineswegs. dingungen unseres Lebens und unseres Lebensglücks, die,
Die Geschichtslust ist ja die Lust des Friedens, den das wenn uicht schon im Glück, im Leiden erfahren wird, und
Vergangene und Vergehende um sich verbreitet, und der Eifer die bessere Antwort, die Juden und Christen auf diese Er-
det Rekonstrukteure start diesen Frieden. Heine uimmt sogar fahrung zu geben wussten. «Da p15tzlich keuchte heran ein
an, dass der Kirche selbst diese Friedensstiirung auS sich bleicher, bluttriefender Jude », heisst es im IV. Kapitel der
politisierendem N euerungswillen Uistig sei. lhre Furcht sei, Reisebilder zur Stadt Lucca, «mit einer Dornenkrone auf
notiert er, « dass so ein Eiferer, staU den Pantoffel zu küssen, dem Hallpte und mit einem grossen Holzkreuz auf der Schul-
ihr in den Fuss beisse mit rasender lnbrunst» 43. - Soweit ter; und er warf das Kreuz auf den hohen Gattertisch, dass
die historisierende Komponente in Heines Verhiiltuis zur die goldenen Pokale zitterten und die Gatter verstummten
Religion nach der Aufkliirung. und erblichen und immer bleicher wurden, bis sie endlich
lch wiederhole dass auch der spate Heine insoweit nichts ganz im N ebel zerrannen.. «Wer seinen Gott leiden sieht,
revoziert hat. Die geschichtsphilosophisch erkHirte Distanz tragt leichter die eigenen Schmerzen. Die .. , heiteren Gotter,
zur religiasen Ueberlieferung hait sich durch; der Sinn der die selbst keine Schmerzen fühlten, wussten auch uicht, wie
intellektuellen und bürgerlichen Emanzipation aus konfes- armen gequiilten Menschen zumute ist .... Es waren Festtags-
sionalisierten religiasen Geltungsansprüchen bleibt unbestrit- gatter », meint in leicht pennalerhaftem Klassizismus Heine,
ten, und dasselbe gilt für das Recht der Kritik der Religion « um die man lustig herumtanzte, und denen man nur danken
aIs Ideologiekritik ihrer moralisch und politisch falschen konnte. Sie wurden deshalb auch uie so gauz von ganzem
Trastungen. Herzen geliebt. Um so gauz von ganzem Herzen geliebt zu
Damit haben wir ein hinreichend deutliches Bild von Heines werden - muss man leidend sein »46.
Verhiiltuis zur Religion nach der AufkHirung, und dieses Antiker Gatterkult und Nazarenertum - eben dieses

39. Gestiindnisse, XII, 219.


40. a.a.O., XII, 217. 44. An Heinrich Laube am 7. Februar 1850, Brie/e, III, Band,
41. a.a.O., XII, 217. a.a.O., p. 198.
42. Ibid. 45. An Dr. L. Wertheim am 15 Marz 1850, a.a.O." p. 199.
43. Gedanken und Ein/iUle, XII, 292. 46. Reisebilder. Italien, III. Die Stadt Lucca, VU, 179, 180.
HEINRICH HEINE 425
424 HERMANN LOBBE
natürlich zur Sache fragen, wie denn nun eigentlich Heines
asthetische Szenario, das für die Kultur seiner Lebensepoche neue Fr6mmigkeit mit den Rationalitatspratentionen eines
so wichtig war, ist es denn auch, das Heine zu der berühmten aufgekliirten Geistes zu vereinbaren sei. Dolf Sternberger hat
Schildenmg seiner religiiisen Kehre im physischen Verfall gefunden, Heine sei «kein Doktrinar, nicht einmal ein
aufbaut. «Es war in Mai 1848, an dem Tag, wo ich zum konsequenter Denker » gewesen", und so k6nnte man denken,
Ietzten Mal ausging, aIs ich Abscbied nahrn von den holden Heines Wende zur Religion habe denkerische Inkonsequenz
Idolen, die ich angebetet in den Zeiten meines Glücks. Nur zur Bedingung, !ch halte stattdessen diese Wende für er-
mit Mühe schleppte ich mich bis zum Louvre, und ich brach fahrungskonsequent, Die Ideologiekritik der falschen reli-
fast zusammen, aIs ich in den erhabenen Saal trat, wo die gi6sen Tr6stungen, zunachst, hat ja ganz recht, wenn anders
hochgebenedeite G6ttin der Sch6nheit, Unsere liebe Frau von sie sagen will, man solle nicht in den Himmel schreiben,
Milo, au! ihrem Postamente steh!. Zu ihren Füssen lag was sich an Gerechtigkeit, Freiheit und Wohlfahrt auch
ich lange, und ich weinte so heftig, dass sich dessen ein hienieden schon einrichten Hisst, Aber dem Dasein in der
Stein erbarmen musste. Auch schaute die G6ttin mitleidig Matratzengruft ist mit Sozialkritik schlecht au!zuhelfen, und
auf mich herab, doch zugleich so trostlos, ais wollte sie sagen : Analoges gilt für aile sonstigen Lebensbestande, für die,
siehst du denn nicht, dass ich keine Arme habe und also wenn man sie zu beklagen hat, die jeweils Herrschenden nicht
nicht helfen kann? »47 - Gottfried Keller hat poetisch die richtige Adresse sind und auch nicht die angemessene
Heines Schilderung dieser Szene so kommentiert : «Denn Adresse des Dankes, wenn man in ihnen sich wohlbefindet
nach vielen glaubenslosen/Und verp6nten Heldentagen/ Kurz : Religion ist auch nach der Aufkliirung niitige Lebens-
Dachte sich mit grossem Pomp/Heinrich Heine zn bekeh- praxis des angemessenen Verhaltens zum Unverfügbaren,
ren »48. Wahr ist, dass Diskretion nicht die aufflilligste Eigen- und die Fr6mmigkeit dieser Religion ist die Fr6mmigkeit
schaft der Mitteilungen Heines an das publikum über seine Heines, Die Erfahrung, die in diese Fr6mmigkeit eingegangen
Wende zur Fr6mmigkeit ist. Aber wahr ist auch, dass er ja ist, hat die Charakteristik, in ihrem Erkenntnisgehalt ebenso
selbst noch diese Texte im Selbstdistanzierungsmediurn der banal zu sein wie sie in ihrer Lebensbedeutsamkeit funda-
Ironie prasentiert und so dem Leser, anstatt ihm eine Wende mental ist, namlich : Die Bedingungen unserer Existenz sind
znr Fr6mmigkeit zuzumuten, die Freiheit beliisst, an diesen in unsere iudividuellen wie kollektiven Disponibilitaten nicht
49
Texten Geschmack zu finden oder auch nicht • integrierbar. Eben diese banale Einsicht ist auch die ver-
Unabhangig von solchen asthetischen Fragen liisst sich nünftige Substanz im «demütigen Gottesglauben des ge-
meinen Mannes», und da der lntel1ektuelle es nicht besser
weiss, kann er aus gegebenem Lebensanlass, wie neine an
47. Nachwort zum «Romanzero », III, 155. Heymann Lassalle berichtet, auch zu diesem Glauben zu-
48. Gottfried KELLER. Der Apotheker von Chamonix. Ein Buch
Romanzen, Gesammelte Werke, Fünfter Band, Stuttgart/Berlin-Gune- ruckkehren5l_ Es ist die reine Veruunft, die sich jener banalen
wald o.J., p, 410. Einsicht iiffnet, und weil die Wahrheit dieser Einsicht zu-
49. Karl Kraus nannte den Zynismus Heines bekanntlich cine
«altbackene Pastete aus Witz und Weh» (Karl lCRAUSB, Heine und geich lebensumfassend ist, will die von Heine zu ihrer Kenn-
die Foigen, in : Ausgewlihlte Werke, Band l, 1902-1914, MÜllchen,
1977, p. 290-320, p'. 308). Eine angemessenere Deutung der Alters-
Zynismen Heines scheint mir diese zu sein : Sie sind Medien der
emotionalen Distanz, durch die sich schützt, wer Schwierigkeiten hat,
anderen in ernsten Sachen ernst zu kommen. Es ist naheliegend, dass
das, was so vor Peinlichkeit schützen soU, aui einige selber peinlich
wirkt. _ Cf. dazu auch den Abschnitt «Ironische Konfession : Die 50. Dolf STBRNBERGER, Heinrich Heine und die Abschaffung der
Gestandnisse P, in : Heinrich Heine. Epoche - Werk - Wirkung. Sünde, a.a.O., p. 301.
Von Michael BEHAL, Martin BOLLACHER, Jürgen BRUMMACK, Bernhard 51. An Heyman Lassalle am 30. Apr. 1850, Brie/e, III, Band,
MANN, Jürgen WALTER, Herausgegeben von Jürgen Brummack, Mün- a.a.O., p. 211.
chen, 1980, p, 290-292,
HEINRICH HEINE 427
HERMANN LOBBE
426
ganger» sieht er durch einen «Sieg des Kommunismus
zeichnung gewahlte Metaphorik der «Blitze des Lichtes» bedroht ». Dabei ist die Pobel-Angst nur die eine Seite der
auf sie passen,2 53. Sache. «Die Emanzipation des V olkes war die grosse Anf-
Selbstverstandlich erscheint in diesem Licht die Welt neu, gabe unseres Lebens »", sagt er in demselben Kontext, und
und illBbesondere gilt das für den Kommunismns, sofern das wird nicht zurückgenommen, vielmehr die Notigkeit
er sich durch die atheistische Komponente seiner Ideologie unterstrichen, ilan endJich Bildung durch «Unterricht auch
in fundamentaler Weise lebensunwahr gemacht hat. Noch mit den dazugehorigen Butterbroten» zu verschaffen. Dann'
im Anhang zum )3uche «Lntezia» hatte ja Heine die kom- werde man schliesslich «ein Voile sehen, das hübsch propre
munistische Bewegung historisch mit der über die alte Welt ist, ein Voile, das sich gewaschen hat »59. «Der fanatische
siegreichen frühen Kirche verglichen und ihre Theoretiker Eifer» der atheistischen «Prtidikanten »60 jedoch ist keine
mit den Kirchenvatern54 • Noch sei diese Bewegung, wie die Frage von « Butterbroten " und auch nicht von Bildung. Ganz
« Ecclesia pressa des ersten J ahrhunderts », «verfolgt» und im Gegenteil. Marx, Bauer, etc. - sie entstammen ja alle-
« verachtet », aber doch erfü!lt von "GlaubellBeifer» und samt bester idealistischer deutscher Schule und bezeugen aIs
«düsterem Zerstorungswillen» und darin gleichfalls «an «gottlose Selbstgotter »61, die sie geworden sind, die atheis-
galiUiische Anfange" erinnernd. So also sprach er 1843 «von tische Konsequenz, wie sie Heine ja schon zehn Jahre zuvor
den Kommunisten; der einzigen Partei in Frankreich, die aIs das «Schulgeheimnis» der deutschen Meisterdenker
eine entscblossene Beachtung ,," verdiene. erkannt zu haben vermeinte. Wie immer man Heines Bild
Jetzt, in den «Gestandnissen» 1854, nimmt Heine das, der Philosophie des deutschen Idealismus von Kant bis Hegel
was seine Vermutung über die Zuknnftsfahigkeit des Kom- philosophiehistorisch beurteilen muss - er hat scharf gese-
munismus anbelangt, nicht zurück, aber er beknndet das hen, dass Fanatismus die unvermeidliche Kousequenz jedes
56
« Grauen", das ihn in dieser Perspektive erfül1t • «Wir Versuchs ist, eine Theorie des absoluten WissellB in politische
haben jetzt », schreibt er, «fanatische Monche des Atheimus, und moralische Praxis umzusetzen. «Es werden", so hatte
Grossiuquisitoren des Unglaubens, die den Herrn von Voltaire Heine geschrieben, «bewaffnete Fichteaner anf den Schau-
verbrennen lassen würden, weil er doch im Herzen ein ver- platz treten, die in ihrem Willens-Fanatismus weder durch
steckter Deist gewesen ist ,,57. Dergleichen intellektuelle Kon- Furcht noch durch Eigennutz zu bandigen sind ,,62. Das ist
sequenzenmacher zumaJ aus der Schule deutscher Philo- die Heine'sche Einsicht in den Ursprung der Gewalt aus dem
sophie aIs Führer einer kommunistischen Volksbewegnng - Idealismus der reinen Gesinnung in Verbindung mit dem
das ist der Jnhalt der Schrecleensvision. «Unsere ganze absoluten politischen Wissen", und einen Satz zuvor teilt er
moderne Zivilisation, die mühselige Errungenschaft so vieler sogar mit, wogegen die so definierte Gewalt sich richten
J ahrhunderte, die Frucht der edelsten Arbeiten unserer Vor-
58. a.a.O., XII, 194.
52. An Julius Campe am 1 sten Juny 1850, a.a.O., p. 217. 59. a.a.O., XII, 195 f.
53. «Heine war ein Dichter und brauchte Symbole : Was einst 60. a.a.O., XII, 193.
Jupiter geleistet hatte, das leistete mm Gottvater », kommentiert 61. a.a.O., XII, 205 - auf diese Kennzeichnung «gottlose Selbst-
Ludwig Marcuse Heines neue Religiositat (Ludwig MARCUSE, Hein- gotter» hat Heine besonderen Wert gelegt - : Er veranlasste brief-
rich Heine, Reinbek bei Hamburg, 1960, p. 155). - Das mag für lich ihre Einsetzung in das bereits an den Verleger abgesandte Manus-
die Ebene der literarischen Textproduktion gelten, aber für die Ebene kript. Cf. Heine an Julius Campe am 7. Juni 1852, Briele, III, Band,
praktischer Lebensorientiel'ung, auf die sich inhaltlich diese TeXte a.a.O., p. 389.
beziehen, verharmlost dieser Kommentar Heines religiëse Wende. 62. Zur Geschichte der Religion und Philosophie in Deutschland,
54. Lutezia. Berichte über Politik, Kunst und Volksleben. Anhang. VIII, 253.
Kommunismus, Philosophie und Klerisei, X, 261. 63. Zu Heines Terror-Theorie, cf. meinen Aufsatz «Freiheit und
55. a.a.O., 260 f. Terror », in : Hennann LÜBBE, Philosophie nach der Aulkliirung,
56. Gestandnisse, XII, 194. Düsseldorf, Wien, 1980, p. 239-260, p. 252 ff.
57. a.a.O., XII, 193.
HEINRICH HEINE 429
HERMANN LOBBE
428
~owohl theoretisch wie praktisch-kulturell ortlos. Gegen diese
wird : Es werden philosophische Truppen aufmarschieren, mtellektuelle Lebensblindheit aus atheistischem Pradikanten-
«die auch in der Erscheinungswelt von keiner Pietat etwas eifer richtet sich die Iiterarische Expression der Religiositat
wissen wollen und erbarmungslos mit Schwert und Beil den des spaten Heine in ihrer polemischen Spitze. Auf ihren
Boden unseres europaischen Lebens durchwühlen, um auch Begriff gebracht ist diese Position des spaten Heine nachauf-
die letzten Wurzeln der Vergangenheit auszurotten »64. gekltirt, die Iiberale Position der befreiten Religion :..- in auS-
Die letzten Wurzeln der Vergaugenheit ausrotten - ich drücklicher Kontraposition zum iIIiberalen Fanatismus ihrer
kenne keine pragnantere Formulierung des Prinzips der ikonoklastisch-kulturrevolutionaren Liqnidation. Dabei ist die
politischen Kulturrevolution. Was die Exelcution dieses Prin- Religion, auf die Heine kraft Einsicht in ihre Unumganglich-
zips in Beziehung auf die Religion heissen kann, hat weniger keit verweist, nicht ein Intellektuellen-Konstrukt. Es handelt
ais zehn Jahre spater Karl Marx in seiner Judenschrift auS- sich vielmehr, da sich Religion nicht wie ein System der
gesprochen : U eberbietung der «Judenemauzipation» durch Philo~ophie. ~onstruieren ltisst, um die überlieferte Religion,
«die Emanzipation der Menschheit vom Judentum» und um die Religton der Vater. Daran andert auch der historisti-
überhaupt die Fortsetzung der Befreiung der Religion in die sche Bruch im aufgekltirten Verhaltnis zur Religion gar nichts.
Befreiung der Menschen von der Religion". Historismus - das ist die Einsicht in die Kontingenz unserer
Was die Religion der falschen Trostungen anbelangt, so Herkunftswelten, aher gerade nicht Wunsch und Wille zur
halte ein solches Programm Heines Widerspruch nicht eiu- A~slëschung unserer Pragung durch sie. Lebenspraktisch
mal finden müssen, und man konnte, insoweit, Heines Winter- helsst das : der aufgekl1irte Fromme Heine wird zum f1eissigen
66
mfu.chen parallel zu Marx' Jndenschrift lesen • Dass aber Bibel~eser, \lnd mit Rekurs auf seine katholische Tranung mit
Marx die Religion auf das reduzierte, was an ihr politischerc Mathilde ruhmt er, bei dem für Feministen nur wenig zu
Ideologiekritik zuganglich ist - das ist ein Vorgang intel holen ist, wie «sehr gut» es sei, «wenn die Frauen einer
lektuellen Realitatsverlustes mit realitatszerstorenden prak- positiven Religion anhangen ». Dabei schlitzt er den speziellen
tischen Foigen. Der ebenso banale wie fundamentale Bestand, Lebensvorzug katholischer Frauen folgendermassen ein :
dass Menschen, individuell wie kollektiv, in Bezug auf die « Wenn sie einen Fehler begangen haben, behalten sie nicht
Bedingungen ihrer Existenz nicht souveran sind, wird somit lange Kummer darüber im Herzen, und sobald sie yom Pries-
ter Absolution erhielten, sind sie wieder trallernd aufgeheitert
und verderben sie ihrem Manne nicht die gute Laune oder
64. a.a.O. (cf. Anm. 62). Suppe durch kopfhangerisches Nachgrübeln über Sünde ,,"-
65. «Die Judenemanzipation in ihrer letzten Bedeutung i8t die
Emanzipation der Menscbheit vom Judentum.» - «Der Mensch Ohne ironischen Oberton hatte Heine bereits in seiner
wurde... nicht von der Religion befreit, er erhielt die Religionsfrei-
heit.» _ So Karl MARX, Zur Judenfrage (1843), in : Karl MARX, Polen-Schrift für solche historischen Kontingenzen die schone
Friedrich ENGELS, Werke, Band 1, Berlin, 1970, p. 347-377, p. 373, Kennzeichnung «schone Besonderheiten» gefunden, und er
369. _ Zur Interpretation, cf. meinen Aufsatz «Zur Philosophie des hatte. zugleich der Vorstellung widersprochen, dass die «all-
Liberalismus und seines Gegenteils ». in : Liberalismus - nach wie
var. Grundgedanken und Zukunftsfragen, Herausgegeben von Willy gememe Menschenverbrüderung» in der wechselseitigen
Linder, Hanno Helbling, Hugo Bütler. Zürich, 1979, p. 243-253, Anerkennung ihrer herkuuftsunabhangigen G1eichheit die
p. 248 f. ; 252 f.
66. Zum Vergleich der Religionskritik von Heine und Marx, cf.
Aufhebung dieser «schonen Besonderheiten" zur Konse-
Peter MEINHOLD, «"Opium des Volkes"? Zur Religionskritik von quenz haben müsste68 • Das ltisst sich auf das Verhaltnis des
Heinrich Heine und Karl Marx », in : Monatsschrift tür pastoraltheo- spaten Heine zu unseren religiosen Herkunftspragungen über-
[ogie. Herausgegeben von Robert Frick, Kurt Fror, Wilhelm Hahn,
Hans-Joachim Iwand, Hans Thimme und Adolf Wischmann, 49.
Jahrgang, Gôttingen, 1960, p. 161-176. - Ferner auch : Hans-
Gerhard- KOCH, «Heinrich Heine und die Religion. Eine Ausein- 67. Gestiindnisse, XII, 215.
andersetzung mit dem marxistischen Heine-Bild », in : Zeitwende. 68. Veber Polen, XII, 82 f.
Die Neue Furche, 1961 (32/11), p. 742·753. 15
HERMANN LOBBE
430
tragen. Sie sind, sozusagen, a prio~i zufii~lig, weil his.:ori~ch,
aber a posteriori notwendig, weil f.a~tisch ~umga~glich.
Des spaten Heine Verhtiltnis zur RehgiOn .schhesst ~le ~­
erkennung dieser Kontingenz ilrrer Ueberl~efer~~ em .. Die
Religion selber wird damit - was inmler SIe darube~ hlnaus PIERRE FRUCHON
ist _ in ihrer nachaufgekUirten Gestalt zum Medium der
Erhaltung kultureller und politischer Libe~alit~t gegen den
Fanatismus kulturrevolutionarer VollemanzlpatiOn. COMPRÉHENSION ET PASSION

Que devient la lecture de Kant avec et après Heidegger?


Telle est la question à laquelle répond Philosophie et Morale
dans la Critique kantienne de Gehrard Krüger'. On me per-
mettra de n'y répondre qu'indirectement en évoquant quel-
ques traits majeurs de l'ouvrage publié par le même auteur
en 1939 : Einsicht und Leidenschaft, das Wesen des platoni-
schen Denkeni'. Ce détour ne fait pas oublier la question;
il en révèle plutât, au yeux de Kruger, l'enjeu ultime. L'au-
teur ne ménage pas à Heidegger l'expression de sa reconnais-
sance mais il s'en sépare résolument, aussi bien par sa com-
préhension du présent que dans sa lecture de la tradition
phllosophique, notamment dans ses interprétations de Kant
et de Platon. Il importe, selon Krüger, de parvenir à la véri-
table reconnaissance envers Heidegger, c'est-à-dire de main-
tenir, éventuellement contre sa problématique et les inter-
prétations qu'elle a nourries, la radicalité de l'interrogation
qu'elle a réveillée'. Il ne m'appartient pas de procéder ici à la
confrontation directe des deux problématiques, mais de la
préparer, de la donner à entendre telle qu'elle transparaît

1. Philosophie und Moral in der kantischen Kritik, Mohr, Tübin·


gen, 1931; 2. unveranderte Auflage durch 2 Beitrage und Bibliogra·
phie erweitert, Mohr, Tübingen, 1967 (dans la suite PMK.K); tra-
duction française de la première édition par le P.M. Régnier, avec
préface d'Eric Weil, Beauchesne, Paris, 1961.
2. Intelligence et Passion, l'essence de la pensée platonicienne,
L. Auflage, V. Klostermann, Frankfurt am Main; je renvoie dans cet
article à la quatrième édition, qui date de 1973; N.-B. : ces renvois
sont intégrés au texte et non donnés en note.
3. PMKK, 8/trad., 24-25.
COMPREHENSION ET PASSION 433
PIERRE FRUCHON
432
être visibles, de même et combien plus les maîtres de la
chez Krüger. L'ouvrage qu'il a consacré à Platon poursuit pbilosophie ne se révèlent-ils que dans les situations parti-
l'itinéraire entamé avec l'étude de Kant. C'est la lecture de culières et peut-être uniques de la pensée, qui est celle d'un
Kant qui renvoie à celle de Platon: chez celui-là, le modèle temps ou d'un autre. La connaissance de la vérité historique
de la science moderne ou, plus généralement, l'adhérence a elle-même un destin historique» (XI).
aux «Lumières», en somme, la face que le kantisme tourne Or, la recherche sur Platon, qui s'est, dans la modernité
spontanément vers nous, recouvre et dissimule en fait sa
véritable pensée, enracinée dans la métaphysique tradition-
s~bstituée à la simple continuation de la tradition platoni:
Clenne (XI-XII) porte actuellement en elle-même un conflit
nelle de l'homme, non pas souverain en dernière instance, qu'elle ne surmonte pas. Elle reste partagée entre, d'une
mais créature. Voilà ce qui rattache Kant non seulement au part, l'interprétation pbilosophique qui, relayant, notamment
christianisme mais au platouisme et ce qui conduit Krüger chez Natorp6, la critique kantienne de la métaphysique tradi-
de la lecture de Kant à celle de Platon. Ce n'est point par tionnelle et la perspective moderne de la subjectivité, insère
hasard que son ouvrage sur Kant s'achève sur un renvoi à la la pensée platonicieune dans la «théorie de la connaissance
figure de Socrate'. ~t l~ philosopbie de la culture» (XII), de l'autre, l'inves-
De l'ouvrage sur Platon je ne retiendrai que deux moments tigatIOn philologique et historique qui découvre la spécificité
essentiels : de la pensée antique mais en sacrifiant la philosophie de Pla-
1) Le traité de l'interprétation par lequel il commence'. ton et l'unité de son œuvre. Cependant, cette situation n'est
2) L'interprétation du discours de Socrate (Banquet, 201- pas sans issue et il devient possible d'interroger à la fois la
212 c) ou, plus exactement, du discours de Diotime rapporté lettre et l'enseigoement philosophique du platonisme parce
que, de fait, la philosophie moderne' est elle-même en crise
par Socrate.
et se trouve comme au tenue de son itinéraire. La montée
~es philosophies de la «vie et de l'existence» (XV), la cri-
1 tique qu'elles élaborent de la «philosophie du sujet», indi-
quent la voie bien qu'elles ne soient pas en mesure de la
L'itinéraire est long et ardu qui, dans l'état actuel de la tracer. Elles indiquent la voie qui mène vers la rencontre
recherche platonicienne et, plus généralement, de la culture, de Platon parce qu'elles redécouvrent, au moins partiellement
permet d'aborder la lecture de Platon en rendant justice à la et indirectement, 1'« humanité de la philosophie», en la pla-
spécificité de son discours. Le discernement du présent, de çant sur «le terrain de l'homme concret>, non pas celui
ses chances et de ses limites, est nécessaire à sa juste com- d~ la conscienc,e q~i se prétend autonome, mais dans le champ
préhension du passé : «Les objets que nous offre l'histoire ou elle apparatt bien comme recherche et non possession de
la sagesse, le champ où elle s'interroge sur la «mort» la
« ~o~:uunication amoureuse» ou la politique, et où elle p~ur­
de l'esprit sont trop grands pour être en tout temps à portée
de la recherche. De même que, de la terre, on ne peut scruter
certains astres que rarement, grâce à des constellations favo- ratt s mterroger sur la montée vers le «beau en soi» (XV-
rables, bien qu'ils ne cessent jamais d'être présents et peut- XVI). Telle est la chance qu'offrent les philosophies de la
vie et de l'existence, ou plutôt qu'elles ne donnent qu'indi-
rectement à saisir, puisqu'elles la dissimulent autant qu'elles
4. Ibid.. 236/272; figure dans laquelle l'interrogation philoso- la laissent entrevoir. Car elles ne la laissent entrevoir que liée
phique «inconditionnée» réunit «intelligence» et «passion»; cela
en lien avec de multiples références au platonisme, notamment 13/30,
14/32, 230_231/266-268.
5. Sur ce traité, cf. H.-G. GADAMER, Philosophische Lehr;ahre, 6. ~ur Natorp, voir notamment le c Sach- lmd Namenregister»
V. Klostermann, Frankfurt am Main, 1977, p. 228; on lira avec de Emsucht and Leidenschaft à l'article «AufkUirung 'P.
profit l'ensemble du portrait de Krüger, p. 222-230.
COMPRÉHENSION ET PASSION 435
434 PIERRE FRUCHON

au refus de l'exige)!ce absolue de vérité, enfouie dans le pers- surhumaine (10), la passion exclut l'indépendance de l'être
pectivisme, l'bistoricisme, l'anthrop?centrisme de la, «c~m­ humain et non point pour l'enchaîner, puisqu'elle l'emporte
préhension de soi et de la résolutIOn», dans la reductlOn vers les biens les plus hauts, sur un itinéraire non de spé-
du monde lui-même au chaos et de tout ordre que découvre culation mais d'expérience qui nourrit le langage de la
sa perception à une position de l'esprit humain (XVII-XVIII). louange, de la reconnaissance pour les biens reçus. Elle
Ainsi les philosophies de la vi~ .et de l' existe~ce ne .repré- justifie également que le mythe, au lieu d'être exclu par le
sentent rien de plus qu'une «cnUque. de la philosol?hie m?- « logos» soit son expression et qu'il constitue, notamment
derne par elle-même» et, destructrices. de la phl1~sop~e dans le Banquet, «la seule fonne sous laquelle la philosophie
même elles se réduisent à la «reconnrussance de 1 aporIe puisse dire le plus grand et le plus haut» (8). Remise en
qui e~t la nôtre» (XVIII). «Qu'est-ce, pour la vie même, question absolue de l'anthropocentrisme moderne, la pro-
que la philosophie, si, sortie de l'impulsion que la vie lui blématique de 1'« éros» met en évidence la réalité et la
communique, elle ne s'élève pas à l'aperception de la réa~ité fécondité d'un pâtir révélant à l'homme l'action d'une «puis-
plus forte, qui, en nous et hors de nous, fonde toute cond~Ite, sance surhumaine» qui appelle la «célébration» et la
si créatrice soit-elle?» (ibid.). Tel est l'enjeu de fond qUI se « prière» (5-6). - Inversement, cette communauté de vues
cache mais que l'on peut détecter sous le conflit de la re- initiale entre le platonisme et la religion traditionnelle ne doit
cherche historico-philologique et de l'interprétation philoso- pas masquer la spécificité de la religion platonicienne. Et
phique néokantienne : il concerne finalement le statut non surtout, il convient de saisir commeut cette religion porte
pas purement anthropologique mais religiens et théologique le «logos» philosophique, en même temps qu'elle est liée
de 1'« humanité de la philosophie» : «y a-t-il une autre à une critique du mythe sur laquelle il est courant de se mé-
élévation au-dessus de la vie limitée que l'élévation à la cons- prendre. D'accord avec la religion traditionnelle sur la «dé-
cience pure, qui se solde pru· la méco?"aissance de notre pendance essentielle de l'homme» (18), Platon conçoit celle-
condition d'hommes? Telle est la questIon ouverte avec la- ci autrement, en dépassant la tradition vers le « logos». Mais
il importe de bien comprendre ce dépassement, c'est-à-dire
quelle nous abordons Platon» (ibid.).
d'en reconnaître le caractère religiens. En passant du culte
Posée à partir du présent, cette question de fond pennet traditionnel d'Aphrodite, saisissement total par la beauté qui
de reconna!!re le type de la pensée platouicienne, le lien, exclut tout retour sur soi, à celui de 1'« éros», Platon intro-
tout à fait surprenant pour nouS modernes, qu'elle ne cesse
duit la louange d'un « ... dieu auquel les Grecs n'ont pas
pas de présupposer entre philosophie et religion, en somme,
rendu un culte officiel et unanime ... » (19; Phèdre, 177 cl.
la présence du mythe à l'intérieur même du discours philo-
Et ce nouveau dieu, qui «nous révèle la philosophie» (ibid.)
sophique qui ne saurait s'exprimer autrement que dans des
a comme un aîr de «Lumières» : introduisànt une uouvelle
dialogues. C'est en vérité le thème de 1'« éros» qui exige et c?uception, plus anthropologique de la passion, il se situe à
garantit la réunion de l'investigation historico-philologique distance de la tradition religieuse reçue. La passion n'est
et de la compréhension philosophique. plus comprise comme le pur ravissement qui prive l'homme
Or ce thème conteste radicalement notre modernité dont de toute indépendance, bien qu'elle ne se trouve pas réduite
l'idéal d'« indépendance» déprécie la passion en la réduisant pour autant, elle et la «passivité» (Zustiindlichkeit) qui lui
à une donnée simplement anthropologique qui cache l'essence
est iultérente, à un mode du sujet et de son rapport au monde.
de l'homme au lieu de lui être inhérente, ce qui conduit
Ce qui est neuf dans le culte et la pensée de 1'« éros», c'est
également à comprendre la religion en tennes purement an-
qu'ils reconnaissent comme point de départ la réalité de
thropologiques. Platon au contraire offre «non pas une com-
préhension philosophique de la religion mais une compré- l'homme et lui donnent consistance. A l'inverse de la religion
hension religieuse de la philosophie» (7). Puissance réelle et traditionnelle, ils partent de la passion même, au lieu de
COMPRÉHENSION ET PASSION 437
PIERRE FR UCHON
436
Ce qui n'exclut pas que le thème de l'imitation ne soit trans-
céder à la pure fascination dn divin. Ce qu~ ne les emI;êc~~ posé pour rendre justice à sa portée religieuse. Eclairant alors
pas de concevoir la passion comme prodmte par la reahte le statut de l'indépendance et de la dépendance humaines,
non-humaine qui saisit l'homme. Sans faire de l'homme une celui de la passion, il ne se borne pas à faire reconnaître le
pure réceptivité (23), ils comprennent l'homme à la lumière lien de la «passivité» humaine au contexte intra-mondain
de son autre : «L'homme se comprend comme possibilité des forces cosmiques qui nous affectent, au manque de fait
selon la mesure de ce qui le subjugue : il reçoit aussi par qui n'atteint que « la matière (de notre comportement) » (49).
principe comme un don, soli moi le plus propre, tel qu'il De manière radicale, en contexte d'« initiation religieuse »,
est présent dans la multiplicité de ses états» (24). Ainsi, pour il révèle le lien de notre passivité à la réalité supra-mondaine
Platon qui ne propose nulle interprétation anthropomorphique qui seule donne à l'homme d'« être maître de sa propre maî-
des dieux, l'homme, qui les suit, les imite, et leur appartient, trise» (51). Telle est la réalité, telle est la démarche dont
est l'être essentiellement «théomorphe», saisi et conduit par l'expression, correspondant à la nature de 1'« éros », appelle
les dieux qui ne sont pas 1'« éros» (25-26). Mais on notera la forme du mythe. Démon et non pas dieu, 1'« éros» appelle
en même temps que, comprises dans la perspective de la le type de discours qui signifie sa limitation, celui dans lequel
passion reconnue comme donnée première qui pousse l'amant se dit une connaissance religieuse qui «reste aporétique»
vers l'aimé, les puissances divines n'exercent plus sur l'homme (62) : celui qui prévient et aussi bien assure la recherche du
d'action directe. La divinisation de l'aimé se borne à faire «.logos» (66-67) : savoir de 1'« opinion droite» dont le
resouvenir du dieu qui n'est pas immédiatement présent en caractère intermédiaire correspond à celui de l'amour. Savoir
lui (27-28; Phèdre, 252-254). essentiellement marqué, dans le contexte de la religion plato-
La position mixte du platouisme, qui rompt avec la tradi- nicienne, par son inadéquation à ce qu'il accueille.
tion religieuse commune sans verser pour autant dans les Voilà ce qui justifie en dernier ressort chez Platon le
« Lumières», commande sa critique de la poésie et du mythe, recours au dialogue comme mode de l'expression philoso-
tout en justifiant, contre la modernité, leur intégration à la phique. Il ne suffit pas d'invoquer à ce propos 1'« ignorance
philosophie. Certes, dans la perspective nouvelle de 1'« éros », socratique », c'est-à-dire la figure historique de Socrate (67),
l'unité de la connaissance et de la poésie fait problème. Elle même si l'on retient la portée religieuse du thème, soit chez
n'est plus tout simplement donnée comme dans la traditio~ Socrate lui-même, soit dans sa reprise platonicienne. Il con-
religieuse antérieure, pour laquelle le poète-voyant se bornait vient d'écarter, au contraire, ou du moins de tenir pour
à accueillir et à transmettre «la manifestation de la gloire seconde, et sous sa double forme, la question historique :
divine» (33; République, 607 cl'. Voilà précisément ce que relation des dialogues écrits, soit au Socrate de l'histoire, soit
le platonisme vise dans sa critique de 1'« imitation» qui serait à l'auteur et à l'homme qui se nommait Platon. Cette pers-
le privilège du poète : il refnse la «réceptivité mythique illi- pective moderne sur les dialogues en dissimule la nature et
mitée» (35). «Le Socrate platonicien réunit la compréhension la portée. Les dialogues donnent corps et carrure à des per-
parfaite de la poésie païenne et une prise de position réso- sonnages qui, même dans le cas de Socrate, ne sont pas les
lument extérieure à ses présuppositions» (42). Rapproché porte-parole de ce que l'on appellerait la doctrine de Platon.
de l'artisan, le poète n'est en vérité qu'un «fabricateur ». Par ailleurs, au lieu de rendre littéralement leur réalité his-
Livré à l'arbitraire des puissances «mondaines » il ignore torique, le dialogue pousse ses protagonistes, en les respectant
les «formes», la vérité des modèles, qui sont œuvres non chacun, vers leur « accomplissement idéal», vers leur « idée».
des hommes mais des dieux (43 ; République, 596 b-597 b). Voilà ce que réalise la «liberté poétique» du platonisme,
en se gardant de 1'« arbitraire» : «eUe ne perd pas le contact
7. Ce qui exclut évidemment que le statut de la poésie ait été avec la réalité historique, car eUe se lie rigoureusement aux
alors esthétique au sens moderne du terme.
COMPRÉHENSION ET PASSION 439
438 PIERRE FRUCHON
Voilà ce que le platonisme oppose non seulement à la
possibilités de ces personnes réelles : elle se borne à en tirer question de l'auteur ou à notre goût de l'exposé systématique
les conSéquences» (69). Bien qu'il soit ici question non de mais à l'ensemble de notre modernité. Voilà ce qui oblige sou
Personnes mais de vérité il est exclu que l'on ait recours à
, A étude à retrouver l'unité de la philologie et de la philosophie,
l'exposé systématique, à la présentation du contenu meme ~n pour se laisser guider, dans la lecture du platonisme, par
sa pureté', libéré des limitations que lui inflige telle mentalité l'unité, qui, placée sous le sigue de 1'« éros >, lni est essen-
ou expression humaine. Le dialogue, qui n'est pas d'abord tielle : unité d'une conception du vrai et de la forme littéraire
inspiré par un souci historique, rend justice à l'histoire, ins- qui la donne à entendre : « ... la poésie platonicienne corres-
piré qu'il est par sa conception «érotique» de la vérité : pond à l'essence de la religion platonicienne... » (73).
« Lorsque la puissance que l'homme a de lui-même est seu-
lement celle de s'approprier une vérité qui lui est pa~ es:
sence supérieure, la pensée ne saurait se séparer d~ celm qm
pense» (70). Ainsi le dialogue platonicien n'« enselgue pas» II
la vérité «comme s'il la possédait» : procédant du «non-
savoir », il montre positivement et négativement cette vérité
sur les personnages qu'il met en scène: c'est le destin (de la Tel est le principe qui doit guider notanmIent la lecture
vérité) dans le dialogue qui la manifeste» (70). Ce qui exclut du discours de Socrate; il éclaire aussi bien le statut et la
la question moderne de l'auteur et fait au contraire penser portée de la « théologie négative» dans laquelle culmine son
au passage de la République qui oppose à 1'« imitation» la enseignement. Ce discours se présente à la place qni est la
«présentation pure et simple» (71; Rép., 392 css). La sienne, la dernière; mais cela ne siguifie nullement que, So-
« présentation indirecte des dialogues», qui sont des dialogues crate devant avoir raison, il lui appartiendrait de clore le
racontés et racontés non par Platon mais par un autre, relève débat. Après l'intermède de «Lumières» qu'occupent les
non de l~ première mais bien de la seconde. Alors que 1'« imi- interventions de Pausanias (95-104) et d'Eryximaque (105-
tation» permet à l'auteur de se dissimuler dans les person- 119), on est revenu au mythe grâce à Aristophane (119-130)
nages auxquels il ne cesse pas de prêter son discours et qu'elle qui renoue avec Phèdre. Et on ne le quitte pas lorsque vient
tolère ainsi les métamorphoses à travers lesquelles l'auteur le tour d'Agathon, bien que la célébration de 1'« éros» comme
masqué place le lecteur sous l'empire du sentiment, la «pré- le plus jeune de tous les dieux trahisse le goût de la nouveauté
sentation pure et simple» se refuse à subjuguer le lecteur. comme telle qui porte, lui aussi, la marque des «Lumières»
Et il est naturel qu'on la retrouve dans le récit des dialogues, (130-138). Socrate se montre seul en mesure de dépasser sur
où précisément le récit maintient la distance du texte au leur propre terrain, aussi bien la religion traditionnelle en
lecteur, où l'auteur du récit paraît en clair, accomplissa:,t sa rapportant le mythe qu'il tient de Diotime, que les «Lumiè-
tâche propre. La vertn de cette présentation est de restremdre res» en demandant que la louange soit soumise à la vérité
la part de l'imitation, plus exactement, de « ... tourne; para: (139-140). Il a 1'« indépendance» qni lui permet de recon-
doxalement le désir d'imitation vers les êtres humams qm naitre et de mettre à profit sa véritable « dépendance». Dans
stimulent à l'indépendance... » et d'empêcher « ... l'illusion le récit d'ensemble que constitue le Banquet', Socrate fait
irresponsable» (N-B de l'identification) en faisant passer le le récit de son initiation par Diotime. Ainsi sa victoire sur
« drame» des dialogues par le filtre du récit en discours ses interlocuteurs n'est pas en vérité la sienne (142). Et il
importe de définir le statut et le rôle de Diotime pour com-
« indirect» (72).

9. Récit fait par Apollodore, qui le tient d'Aristodème : 172 a-


173 c.
8. Allusion transparente à Hegel.
COMPRÉHENSION ET PASSION 441
PIERRE FRUCHON
440
l'unité du «monde» (Weltlichkeit) et du divin. En montrant
prendre le contenu et la portée de la théologie négative qui la nécessité du «démonique» pour relier les hommes et les
est la sienne, et non celle de Socrate. dieux, la critique de la religion traditionnelle procède à une
«dédivinisation du monde» qui est sans précédent. Alors
A. Il convient de montrer comment le statut de Diotime que « ... les dieux du paganisme étaient par essence des puis-
autorise son enseignement, qui est proprement théologique sances personnelles intra-mondaines », la critique déclare ici
ou mieux théocentrique, notamment quand il oppose d'avance qu'« un dieu véritable ne peut exister qu'au-delà du monde»
à la vision moderne de l'utilité, sa conception du rapport (152). Pas accompli en direction du christianisme, creuse-
entre le beau et le bien. ment d'un « abîme entre Dieu et l'homme» (153) et menace
C'est du double visage de Diotime que procède celui de radicale pour l'unité du réel, dans un contexte où l'homme
Socrate et de la philosophie. Diotime est apparue à Socrate n'est pas enlevé au monde, comme dans les religions à mys-
non pas comme la voix de la raison également présente en tères, mais garde un statut mondain. Telle est précisément
tout homme, mais au contraire comme la « mystagogne abso- la distance que la médiation de l'amour fait parcourir sans
lument sage et avertie» (143), qui l'a initié à la réalité supra- l'annuler pour autantlO • En raison du double héritage qu'il
humaine, mythique de 1'« éros ». Ce qui n'interdisait pas à la tient de son père et de sa mère, 1'« éros» est l'être du monde
mystagogue d'être aussi bien philosophe, d'entrer, par la pra- qui, a;t lieu de limiter au monde l'exercice de son industrie,
tique du dialogue, qui soutenait pas à pas l'effort de compré- condUit an-delà du monde. Il détermine ainsi la nature de la
hension de Socrate, dans la « sphère (commune) de l'exis- philosophie : non pas « ... sagesse obtuse qui ne vise que la
tence raisonnable et indépendante» (ibid.) où elle dispensait maîtrise rationnelle du monde ... » mais, au contraire, « ... sai-
à celui-ci un enseignement socratique : un enseignement qui sissement (Ergriffensein) par la puissance démonique de ...
introduisait son auditeur lni-même à la raison et à l'indé- (l')amour, (par) l'inquiétude qui pousse vers le lointain, vers
pendance. Or, ce double statut de Diotime, mystagogue et le divin véritable qui, lui seul, est sage ... » (156). Telle est,
philosophe, la fait apparaître comme sophiste, à la fois être en somme, l'anthropologie théocentrique que Diotime, à tra-
humain parmi les autres, et prétendant pourtant enseigner, vers. Socrate, oppose à tous les orateurs qni l'ont précédé,
quand on oublie que la «modestie» de son socratisme pro- aUSSl bien aux tenants des «Lumières» qui tentent de s'en-
cède chez elle du sacerdoce reçu des dieux (145). Statut dou- fermer dans l'authropologie, qu'aux porte-parole de la tradi-
ble et difficile à entendre, que l'on retrouve dans le double tion religieuse qui ne creusent pas entre l'homme et le divin
aspect de ce qu'enseigne Diotime, c'est-à-dire dans la condi- la distance nécessaire à son apparition (156-157).
tion « démonique» de 1'« éros ». Il faut souligner le contexte Le double aspect de cette anthropologie - anthropologie
daus lequel la « dédivinisation» de l'amour entraine non pas explicitement développée et développée en contexte résolu-
le rejet mais la «purification» de la théologie, en assurant ment théologique - trouve une illustration majeure dans
simultauément l'indépendance et le statut religieux de la la «convertibilité» du beau et du bien, c'est-à-dire dans la
philosophie : la réfutation d'Agathon par Socrate se borne conception de 1'« utile» que le Banquet oppose d'avance à sa
à répéter la réfutation de Socrate par Diotime qui lni a révélé conception moderne. Alors que la pensée kantienne, au moins
la vraie nature de 1'« éros» (146). La «reconnaissance reli- par l'un de ses versants, tend à disqualifier comme purement
gieuse» non seulement de la passion mais de la «pnissance » humaine l'instance du bonheur, 1'« ... investigation platoni-
qui (la) suscite (148), et non point comme dieu mais comme cienne prend au sérieux le fait que la pensée se. règle tout
démon, fait pièces aussi bien à la tradition religieuse qu'aux
« Lumières». La dénonciation de l'anthropomorphisme im-
10. Sur la comparaison avec le christianisme, cf. p. 153 et égale-
pliqué dans l'identification de 1'« éros» à un dieu révèle à la ment l'index de l'ouvrage, p. 326.
pensée indépendante aussi bien la distinction radicale que
COMPREHENSION ET PASSION 443
442 PIERRE FR UCHON
sions ... »12. Bornons-nous à rappeler ici les principes res-
entière sur l'indigence humaine ... » (158), sur la condition
pectifs des deux visions et la radicalité de leur opposition.
de l'homme et non sur celle des dieux qui ne connaissent ni
Alors que la perspective moderne comprend l'utile soit comme
le désir, ni la philosophie. C'est la substitution du bien au ce qui est à la disposition d'une subjectivité autonome, soit
beau qui permet dans un premier moment de défiuir la visée
comme ce dont elle doit se libérer pour parvenir à l'instance
de l'amour. Celle-ci reste inaperçue en dehors du contexte
qui fonde son autonomie, consommation d'une rupture, in~
eudémouiste où s'impose l'évidence qu'a pour l'homme la
surmontable dans l'être humain, eutre le sensible et l'intel-
recherche du bonheur, l'aspiration à l'acquisition et à la
ligible, le platonisme se préseute comme l'avocat de l'unité".
possession des choses bonnes, en somme, à ce qui rend heu-
Et il peut assumer ce rôle parce qu'il part, non de l'indépen-
reux (158; Banquet, 204-205). Ainsi le terme visé par
dance présupposée de l'être humain mais, au contraire, de son
1'« ~ros» se découvre d'abord sous les espèces non du beau
« manque». Ainsi peut se poser la question de savoir ce qui
maiS du bien, c'est-à-dire à partir du manque qu'il comble
est véritablement utile à l'homme et on peut lui répondre.
chez l'homme: «Le concept de bien caractérise l'être (N-B
On peut lui répondre par l'anthropologie théologique qui,
qui répond au désir) comme nécessaire et portant secours»
contestant absolument la suffisance de l'homme et mainte-
(160). Inversement, l'eudémonisme qui assure 1'« humanité
nant qu'il est destiné au plus «lointain », souligne aussi bien
de la philosophie» n'enferme pas, bien au contraire dans un
r~lativisme et un anthropocentrisme du bonheuru : ~'est pré- la condition irréductiblement «mondaine» de l'être humain
que son statut théologique ou qui, plus exactement, intègre
Cisément en lui que se pose la question du bonheur ou du
la condition «mondaine» de l'homme à son statut théolo-
bien véritable, qui opère le retour du bien au beau 060·
Ménon, 87 e ; Rép., 608 e, 505 e, 505 dl. Si le bien ne tr~mp~ gique.
pas l'homme sur «le bien qu'il lui fait », c'est en raison de B. Ce statut prend place dans la théologie de Diotime qui
sa consistance propre et du mouvement par lequel il se porte pourrait bien constituer pour notre modernité un défi majeur.
au-devant du désir humain, c'est en raison de sa beauté : Nous nous croyons «éclairés» parce que nous poursuivons
«Le bien prend de la sorte un sens qui fait comprendre que la critique des «arrière-mondes», à moins que nous ne la
le beau lui soit substitué; car ce qui apaise non pas médio- tenions pour acquise. Croyant avoir accédé à la réalité et à
crement mais réellement et totalement le besoin est beau... son unité, nous dénonçons dans le platonisme ou ses dérivés,
Le concept de beau signifie que cet être (N-B qui comble le le dualisme essentiel du monde et d'un «arrière-monde» :
désir) vient de lui-même à la rencontre du désir. Le beau un dualisme qui atteint le monde lui-même lorsqu'il se traduit
i~0ll:de. de joie l'être qui désire parce qu'il lui souhaite pour dans celui de l'âme et du corps. Nous nous employons à
amsl dire la bienvenue, salue en lui ce qui est « en harmonie». dissiper l'apparence de 1'« arrière-monde» pour rendre au
Cet. être est, sous les espèces du bien, ce que l'on cherche à monde son unité et sa dignité. Ce que nous ignorons c'est que,
attemct:"e par besoin; il est, sous les espèces du beau, ce qui fils non seulement de Marx et de Nietzsche mais, plus essen-
par sOI-même attire et comble» (ibid.). tiellement des « Lumières» dont ils sont largement tributaires,
Telle est la conception de 1'« utile» que le platouisme nous réduisons naïvement au monde l'Etre même qui, lui,
oppose par avance à sa compréhension moderne. Elle lui
permet notamment de faire valoir l'utilité interne de la 12. Cf. p. 193 S5. où Kruger montre comment, comprise à la
sci~nce, utilité attachée non pas à ses applications techuiques lumière de la convertibilité du beau et du bien, la science combine
pour le platonisme «l'abandon requis par le beau» et «le recul
malS à « ..• sa valeur salutaire pour l'âme prise dans les pas- critique requis par le vrai ».
13. Ce que feraient bien de méditer à mon sens tous ceux qui,
venant d'horizons très divers, placent le platonisme en particulier et
parfois l'ensemble de la pensée grecque sous le signe du dualisme.
Il. Dénoncé à la fois par Kant et par Nietzsche.
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.

COMPRÉHENSION ET PASSION 445


444 PIERRE FR UCHON
tion, elle souligne l'altérité du divin lui-même par rapport
résiste à notre violence" en ressurgissant contre nous sous la
à la connaissance dans laquelle il se manifeste (204; 169).
forme d'un «arrière-monde ». Voilà ce qu'exprime en vérité
Or la théologie de Diotime ne cesse pas d'être uégative
notre critique du dualisme platonicien, la critique de notre
lo;squ'(en 211 b) elle détermine en apparence l'être du divin,
dualisme que nous prêtons à Platon contre toute vraisem-
« ... les traits de l' "au-delà" (Ueberweltlichkheit) ... » qu'elle
blance. A la faveur d'un renversement lourd de conséquences,
«confronte avec ceux du monde» : il est «lui-même, en
la «théologie négative» de Diotime, qui à la fois découvre
lui-même avec lui-même, un par sa forme et toujours exis-
l'Etre au-delà de toute «mondanité» et montre comment il
tant» (214). Comme le note Kruger, « ... cette manière de
se manifeste à et dans la mondanité qu'il porte, pourrait
caractériser (le divin), bien que l'expression en soit positive,
cons~tuer la critique des «arrière-mondes» qni sont les nô-
ne cesse pas de prendre place dans la théologie négative,
tres, a nous modernes et non ceux que nous aurions hérités
car cette expression tient tout son sens de l'opposition à la
du platonisme ou du christianisme.
1. La théologie de Diotime, qui veut précisément, contre
temporalité qui est ici niée» (ibid.).
la religion traditionnelle, dissiper l'assimilation de l'Etre au Le statut et la portée de cette théologie s'éclairent si l'on
monde, est d'abord résolument négative. voit en elle, non pas la solution « ... d'un problème logi~ue
et épistémologique, au sens purement théonque de la philo-
L'opposition est absolue entre le point de départ et le
sophie moderne, mais au contraire un mode d~ compré~en­
terme de l'initiation (179), entre la beauté d'un corps et le
sion fondé dans l'amour... » (202), dans le «demon », c est-
beau lui-même, la beauté divine qni exclut toute beauté sen-
à-dire dans l'être du monde qui est en quête de l'au-delà du
sible. Cette rupture se traduit jusque dans la discontinuité
monde (203). Le premier moment, expressément négatif, dans
des étapes qui jalonnent l'itinéraire (179 ss) ; ce qui fait pen-
la démarche de Diotime, celui qui oppose par excellence la
ser à la « fuite du monde» évoquée par le Phédon, à 1'« idéal
béatitude et l'éternité au manque et à la temporalité, révèle
ascétique» dénoncé par Nietzsche (192). C'est en se détour-
le caractère religieux de la connaissance amoureuse, la fo~c­
nant du sensible, en se libérant de la «prévision active et
tion médiatrice de 1'« éros» : médiation qui parcourt la dIS-
de l'entreprise humaine» que l'on accède à la pureté et à la
tance du monde au supra-monde, mais sans l'abolir: «savoir
liberté de la «théoria» (187). Ensuite et surtout, la beauté
qui procède du manque» et qui ne l'abolit p.as dans sa
même, bien que sa mauifestation finale accomplisse l'ensemble
reconnaissance du divin (ibid.). Voilà ce que confIrme le mo-
de l'itinéraire précédent, se révèle «soudainement» (201;
ment apparemment positif de la théologie enseignée à So-
B.anquet, 210 e), rupture dans la durée, et, rupture ontolo-
crate par Diotime. Le lien y est manifeste entre l~ nature
gIque, comme « ... toute autre que tout ce qui est intra-mon-
« érotique» de la connaissance et le statut ~ntologique d:,
dain ... » (201; 179 ss). Or, cette suite de ruptures culmine
dans la théologie négative de Diotime qui « ... nie du divin
« beau lui-même» , irréductible non seulement a ce que voyalt .,
en lui Aristote mais à sa compréhension dans la modermte
ce qui constitue, à tous ses degrés, l'essence de 1'« intra-
(215). Il pouvait encore être question .d'i~~e général~, de
mondain» : premièrement la temporalité, deuxièmement la
réflexion et d'abstraction aux stades mfeneurs et mtra-
relativité, c'est-à-dire l'insertion en un contexte d'étant· troi-
sièmement 1'« inhérence» (du divin), qui serait alor~ une
mondains de l'initiation, car celle-ci n'avait pas encore libéré le
regard de toute «mondanité» (ibid.; 210 b). Mais l'amour,
propriété, à une «substance» qui en serait distincte (201).
qui déjà ne pouvait s'attacher qu'à une réalité «unique» et
Cette théologie commence bien par être négative : elle ne
« incomparable», rencontre finalement la réalité en ~e~ors
connaît le divin que comme la réalité que l'on ne peut saisir
de toute «conceptualisation» (ibid.). Il rencontre ronsi la
en son fond, celle du «tout autre» ; elle ne le conna!t qu'èn
divinité non pas comme une «abstraction» mais comme la
reconnaissant ce qu'il n'est pas ; elle n'oppose pas seulement
réalité même qui vient vers lui : comme « ... l'invulnérabilité
sa connaissance à toutes celles qui ont précédé sa manifesta-
, ~"'/h®f:_
H

COMPREHENSION ET PASSION 447


446 PIERRE FRUCHON

d'un "concret originaire" que son indépendance, qni se suffit dant, fondée sur cette altérité du beau, une correspondauce
véritablement à elle-même, soustrait à toute menace possible, entre lni et ce qui appartient au monde» (227)15.
issue d'un être autre et de même rang ... » (ibid.)". L'amour Il n'est pas besoin de souligner longuement la continuité
accède de la sorte à la reconnaissance dn divin co=e réalité de l'itiuéraire que parcourt l'initiation amoureuse, la justifi-
ou, plus exactement, il découvre l'être indépendant en vérité, cation de chacun de ses stades et notamment du premier
qui n'est pas l'homme, ni aucun être du monde mais la (177 ss) : ce qui coufirme la condition «érotique» de la
« beauté divine» qui «a sa consistance absolument en elle- philosophie, recherche humaine et non savoir supérieur, « spé-
même» (216) bien qu'elle la révèle ou la co=unique auX culatif» (178). Entre le commencement et le terme il n'y a
être du monde et d'abord aux «idées» dont il importe de pas seulement rupture mais correspoudance, une correspon-
soniigner le double statut. Dans la perspective de 1'« éros», dance qni s'étend aux stades intermédiaires. Amour d'un beau
de même que celui-ci reconnaît en l'aimé la beauté indépen- corps ou de la beauté physique et manifestation de la « beauté
dante de lui-même, de même et co=e en retour le divin, même» ont en co=un un double trait: le saisissement par
qui est l'indépendance et la réalité même, située au-delà de la vision y supprime l'indépeudance raisonnable, tout en
tout être, communique aux idées qui y participent, ce qui excluant la fusion : la distinction qni subsiste entre l'amant
les enlève au monde : l'unicité, la réalité et la «transcen- et l'aimé reparaît entre l'éternité du beau lui-même et l'initié
dance» (Jenseitigkeit) qui sont originairement les siennes. qui reste, dans le temps et le monde, être de besoin (180).
Et il ne les absorbe pas pour autant. Il apparait ainsi, d'une Le premier stade prend ainsi fignre de modèle, dans la me-
part, que seul l'enthousiasme de l'amour peut accéder aux sure où il équilibre «ravissement» et reconnaissance de
idées, dans la mesure où elles sont de 1'« être divin», de l'altérité, arrachement de l'être mondain à lui-même, dans le
l'autre, que l'indépendance de l'itinéraire discursif et ration- monde même auquel il n'est pas enlevé, et accès à la réalité
nel reste assurée, dans la mesure où l'idée est, par son autre de l'être mondain découverte par l'amour, au fond, dans la
face, «concept mortel» (224). En somme, le beau, qni est mesure où, excluant l'hypothèse d'un «dualisme» platoni-
l'indépendance même, fonde l'indépendance, la rationalité cien, il conteste d'avance tout dualisme, toute séparation de
relativement autonome de la recherche qu'il nourrit. Renver- l'Etre en monde et « arrière-monde». Ainsi le stade temporel
sement radical de la perspective moderne. le plus élevé, celui de la «belle science» (187 ss) n'assure
2. Ce qui invite à relire sous lm angle complémentaire pas tout simplement la liberté de la «théoria», pure vision
du précédent le récit de l'initiation amoureuse, à découvrir et non construction (co=e l'est la théorie moderne), c'est
cette fois la continuité relative de ses étapes et finalement la dans le monde qu'il l'assure, dans l'ho=e être du monde,
« correspondance» entre l'éternel et le temporel. Tout se dont elle découvre et comble le manque, le «besoin reli-
passe comme si l'ascèse qui permet de découvrir la «beauté gieux », jusque dans la pensée qni est son essence: «L'ho=e
même» en sa transcendance absolue était nécessaire pour reste dépendant jusque dans l'indépendance de sa pensée ...
reconnaître au monde la consistance qni est bien la sienne, il dépend, aussi comme être pensant, de quelque chose dont
mais qu'il reçoit de cette beauté et d'elle seule : «La "théo- il a besoin et la "tendance" orientée vers ce bien, qni senl
logie négative" n'aurait pas de sens, si tout en reconnaissant "sauve" la recherche même, n'est pas arbitraire. Son refus se
la hauteur incomparable du beau, elle ne révélait pas cepen- solderait par la méconnaissance de la réalité fondamentale
de la pensée même, de sa condition de finitude et de besoin

15. Ce qui mutatis mutandis fait singulièrement penser à la Cri~


tique du Jugement, évidemment privilégiée dans l'interprétation que
Kruger donne de Kant. Cf. PMU.
14. Référence directe et critique à Natorp.
COMPRÉHENSION ET PASSION 449
448 PIERRE FR UCHON
n'a pas à le retenir comme la vieillesse); au moins de ma-
dans le "cosmos"» (194-195). La science elle-même qni nière passagère, elle dispose de cette puissance par ailleurs
ouvre à la théorie pnre est, pour l'homme «besogneux », un menaçante. Ainsi le corps en sa maturité fait-il oublier tout
«bien qui sauve» en le libérant de la «fausse sagesse» ; souci de durée : il apparaît comme soustrait au temps ... »
tout comme au terme de l'itinéraire la beauté, qui surgit (232). Mauifestation du divin dans le sensible, la beauté
« soudainement», comble sa recherche puisqu'elle est celle sensible est également victoire sur la «relativité». Bien que
« en vue de laquelle s'étaient déployés tous nos efforts anté- son apparition soit liée au hasard et suspendue à l'attente,
rieurs» (210 el. la beauté sensible bouleverse le contexte dans lequel elle
Telle est la continuité qui, compensant la rupture, éclaire fait irruption : effaçant les dimensions de l'absence, passé
et fonde la «théologie négative» de Diotime. Celle-ci ne et aveuir dans lesquels le temps comme passage fait sentir
peut pas ne pas présupposer et finalement justifier « ••• un sa puissance, elle leur oppose et leur substitne « ... la joie de
lien (Gemeinsamkeit) de l'éternel au temporel... », fondé sur la présence» (233; Phèdre, 251 d-e). Enfin le beau corps,
la « participation» de celui-ci à celui-là (228). Ainsi « .,. tonte auquel sa condition temporelle interdit d'être «en soi », n'en
connaissance de l'éternel repose, comme connaissance, sur a pas moins, en vertu de sa beauté, « .,. la forme localement
la rencontre de ses "copies" ... finies, pendant. que les néga- délimitée qui, aux yeux de l'amant, le distingue et le fait
tions veillent seulement à ce que ne soit pas méconnue sa préférer à tout autre, comme uuique. Cette "élection" (Er-
transcendance» (ibid.). Loin de se durcir en «arrière- lesenheit) de la forme belle est aussi bien isolement par rap-
monde», l'éternel sauve le temporel en Y prenant fignre, en port au reste que fermetnre sur soi : ce n'est pas pour ainsi
y donnant à ses figures la «durée» qui fait relativement dire par hasard et à la manière d'un profil vide, dessiné à peu
échec à 1'« éphémère». Voilà ce que Krüger oppose ferme- de frais que la figure du beau est détachée de son environ-
ment au thème moderne ou heideggerien de 1'« historicité». nement, c'est au contraire elle-même qui s'en détache dans
Nous n'en retiendrons ici que la portée pour le statut de la mesure où les limites extérieures de la forme corporelle
l'être seusible, c'est-à-dire l'application qui en révèle le mieux procèdent de son articulation essentielle,. qui lui est inté-
la radicalité. Comme nous l'avons déjà remarqué, le premier rieure ... » (234). «Enigme» décisive non seuiement du vivant
stade de l'initiation est exemplaire, parce qu'il la préfigure sensible mais de la vie à laquelle il participe, en elle-même
tout entière : « ... le thème de l'iuitiation par degrés prescrit durée soustraite à la fuite du temps, réalité même et non
son chemin à la compréhension : il doit y avoir à l'intérieur donnée du monde, réalité évoquée notamment par la question
même du temporel une approximation relative' de l'éternel, « pathétique» de l'étranger dans le Sophiste (238; 248 e-
une détemporalisation graduelle du beau et, déjà dans ce qui 249 a).
est le plus temporel, la vue des caractères négatifs ... de l'éter- Tel est l'enseignement qui atteint de plein fouet notre
nel doit nous conduire à comprendre le beau sous des angles moderuité et notamment les expressions qu'elle reçoit dans
bien déterminés à partir de son opposition à la puissance du les thèmes de la vie et de la temporalité. Ce qu'il donne
temps» (230). Le divin donne à l'être sensible de prendre clairement à entendre, ce n'est pas seulement que le supra-
consistance en lui communiquant, autant qu'il est possible, ses sensible ou l'éternel rie se réduit nullement à un «arrière-
traits essentiels. D'abord la «durée », qui accède à la pré- monde» mort et inconsistant qui menacerait cependant la
sence» : la beauté physique mauifeste la « durée» non seule- consistance du monde humain, c'est aussi et surtout que notre
ment en apparaissant comme propre àl'« engendrement» dont vie et notre monde tiennent toute leur consistance et leur
procédera la suite des générations, mais en frappant par la vitalité de l'éternel, du supra-sensible, du « vivant originaire»
« matnrité » qui fait oublier son caractère périssable (206 d) : (238; réf. à Natorp) que seule une perspective purement
« Son temps (celui de la maturité) est venu (da); il est en mondaine réduit à un « arrière-monde », à «un profil dessiné
sa possession (elle ne l'attend pas comme la jeunesse et elle
COMPRÉHENSION ET PASSION 451

PIERRE FRUCHON
450 philosophie qu'elle soutient. - Il reste que, pour Krüger,
à peu de frais>. Le platonisme formule ainsi la critique la l'historicité se résume dans les limites de fait que l'interpré-
plus sévère de notre «dualis:ne» patent ou larvé. en refu~~nt tation doit contribuer à abolir pour faire apparaitre ou au
d'avance « .. , la gnose négatnce .du monde ... » ~m caract~nse moins pressentir le thème sous-jacent, intemporel, que ses
le néo-platonisme (280), en faIsant succéder a la «fmte» expressions temporelles ne donnent à lire que dans l'ambi-
du monde le retour au monde, la vie dans 1'« engendrement», guïté ou inversé. Il s'agit ainsi pour la compréhension, non
la seule où l'homme puisse connaître et pratiquer le bien, pas d'intégrer au présent le message ressurgi du passé mais,
engendrer le vrai, car «celui qui a été. "init~é" a maintenant au contraire, de le lui opposer, de dresser clairement devant
à l'intérieur de sa vie temporelle un heu ou la présence de lui et contre lui les questions qu'il ne se poserait pas de lui-
l'éternel et du beau le sauve de la puissance du temps ... » même. Il convient, en somme, de provoquer le présent à leur
(ibid.). Justification et définition ultime de 1'« humanité de
répondre lui-même, à accomplir sa propre tâche philoso-
phique, celle dont aucune lecture du passé ne peut le dis-
la philosophie».
..

penser. C'est ainsi que Krüger pratique, à l'image du plato-
uisme, 1'" humauité de la philosophie».
Kruger ébauche ainsi par une lecture de Platon qui pro- 2) Il transpose délibérément dans une métaphysique théo-
longe et précise l'itinérair~ entamé p.ar la lecture de Kant, logique, qui se laisse instruire mais non impressionner par
la conception du tempS qm conteste virtuellem~nt la perspec- les critiques kantienne et heideggerienne, le thème de la
tive moderne et notarmnent la pensée de HeIdegger, ou du fiuitude humaine. S'il Y a, pour lui aussi, un destin de la
moins celle du Heidegger antérieur à la Kehre. Je n'en retien- pensée occidentale ou, plus exactement de la modernité, ce
n'est pas que celle-ci porte à ses dernières conséquences
drai ici que deuX aspects : l'oubli de l'Etre, inaugnré par le platouisme; c'est au con-
1) Kruger n'exclut. ,:ullem.ent l'historicité, la temporalité
de l'interprétation malS tlla SItue dans un tout autre contexte traire que la modernité, oublieuse de l'Etre, dans la mesure
que Heidegger oU Gadarner" ..Il ne prétend pas non plus à où elle l'est de la métaphysique, ne le conçoit plus, chez
une lecture immédiate des dialogues et ne se borne pas Heidegger lui-même, que sous les espèces de la temporalité;
à dénoncer la précarité ,," philolo?ique >. d;S int~rpr.étatio,:s ce qui revient à lire la tradition métaphysique occidentale
heideggeriennes. La ma:nere d?nt il r~umt 1 ~ves~gatlO~ phi- à travers la grille de la modernité et comme sa préparation.
lologique et l'interrogation Fbilosophlqu~. fmt droIt à ~ histo- Il s'impose donc non seulement de contester les interpréta-
ricité de l'interprétation. D abo~d che.z 1 mterp~.ète qm, pom; tions heideggeriennes de la tradition métaphysique pour que
rencontrer le platonisme, met a profIt le, « kalfos» que lm celle-ci puisse de nonvean nons libérer et nouS instruire, mais
offre la modernité même, au moment ou elle pressent ses de repérer dans le thème moderne de l'historicité cela même
lézardes et son épuisement17 • Ensuite dans le platonisme, dont qui recouvre et dissimule la vérité de la fiuitude humaine.
Kruger tente de discerner 1'« e~s~nce» e~ s'attacha,:t à sa Ce qui revient à entendre la conception de la temporalité et
genèse, à la naissance de la .rehgl~!, de 1 « éros» qm fonde de son lien à l'éteruité qui perce dans le platonisme. Seule
1'« humanité de la philosophie», 1 mdépendance dans la dé- voie qui nouS ramène, non pas en arrière mais en avant, à
pendance, en soulignant. é~alement, avec a?t~nt18 de netteté 1'« humauité de la philosophie», à la consistance éthico-
que de discrétion, les limites de cette religlon et de la religieuse d'une vie, temporelle, certes, mais qni soit assurée
par le «tout autre», à la fois transcendance radicale et
mauifestation, voire don de soi, de «maitriser sa propre
16. Cf. Sein und Zeit, §§ 29-33; Wahrheit und Methode, 2. Teil,
maitrise ». Tel est l'hommage difficile et exigeant que Kruger
p. 250 ss. R
pense rendre à Heidegger.
17. Notamment
18. Cf. supra, p.par
432rapport
S8. . . .
au chnstIarusme, cf. l'index de Ein
sicht und Leidenschajt, p. 326.
HANS JORG SANDKÜHLER

ÜBER DIE EINHEIT DER PHILOSOPHIE


PHidoyer für eine geschlchtsbewusste
Philosophiegeschichte

Konstruktion von Ansichten, die ein Ver-


halten ergeben oder aus einem solchen
kommen.
Bertolt BRECHT

Philosophiegeschichte wird oft ais historische Abfolge von


Philosophien, Systemen und Theorien geschrieben. Philo-
sophiegeschichte wird zu oft ais Abfolge grosser Denker un-
historisch geschrieben. Raum und Zeit - wirkliche Orte des
Denkens und logische Kalkü\e aner Erkenntnis - scheinen
in Philosophiehistorien Von Kant bis Hegel oder Von Hegel
zu Nietzsche ausser Kraft gesetzt. Wer baute die Brücken
zwischen Kaut, Fichte, Schelling uud Hegel, wer ebnete die
Wege von Hegel zu Marx uud zu Lenin ?
Die folgenden Ueberlegungen sonen ein P\1idoyer sein
für eine geschichtsbewusste Philosophiegeschichte. Zugleich
ein Veto gegen historiographische Vergesslichkeit. Die Philo-
sophiegeschichte hat zum Thema das Problem Philosophie
und Geschichte, oder sie hat keines. Doch selbst die For-
mulierung Philosophie und Geschichte erweist sich aIs irre-
fiihrend, gerade so aIs seien Philosophie und Geschichte zwei
Welten und verlangten nach philosophiehistorischem Dualis-
mus. Geschichte, Geschichtlichkeit - sind sie nicht vielmehr
das Integral aller menschlichen, materiellen und geistigen
Tatigkeit? Die Zeit der grossen Systeme, die keine Philo-
EINHEIT DER PHILOSOPHIE 455
454 HANS !ORG SANDKOHLER
Philosophie ais Geschichte eines produktiven und reproduk-
sophiegeschichte ohne Geschichtsphilosophie kannten, ist Ver- tiven Elements der Geschichte.
gangheit. Historisch bewnsste Vergangenheit wird sie für Die Philosophie wird dann zum Ausdruck von Verhalt-
uns, sobald wir die Erkenntnisinstrumente nutzen, über die nissen, in die sie selbst reflektorisch und Neues antizipierend
wir heute verfügen. Es sind dies Instrumente der Philosophie eingreift. Was aber heisst die Philosophie? Dieser Kollektiv-
und der Wissenschaften. Die Wissenschaft der Geschichte, die singular unterstellt Einheit. Einheit anstelle von Unterschied,
Theorie der Wissenschaft und ihrer Geschichte, die Metho- Gegensatz und Widerspruch ? Die Philosophie selbst hat die
dologie historischer Forschung und das Wissen der Philo- innere Struktur dieser Einheit schon früh in der Kategorie
sophie selbst bilden Voraussetzungen der Philosophiege- der Einheit der Widersprüche, der Dialektik, begriffen. Die
schichtsschreibung. Wer baute die BIÜcken und die Wege? materialistische Dialektik zeichnet dabei gegenüber der Ideen-
Kann die Philosophiegeschichte sich darauf beschranken, geschichte aus, dass sie sowohl den Begriff der Einheit wie den
philosophierende Individuen zu addieren ? Erreicht sie so das Begriff des Widerspruchs über die engen Grenzen einer
Leben der Philosophen und Raum und Zeit ihrer Existenz? blossen Logik der Theorieentwicklung hinaus historisch-
Wollen wir methodischen theoriehistorischen Individualismus ontologisch begründet. Sie fragt nach den materiell-gegen-
vermeideu, haben wir unser Interesse auf die Beziehung stiindlichen, objektiv nalÜr1ichen wie objektiv gesellschaft-
zwischen Philosophieentwicklung und historischer Zeit und lichen Determinanten, unter deren Wirkung WiderspIÜche
historischen Prozess zurichten. Eine der Konsequenzen einer Einheiten struktnrieren. Eine dialektische Philosophiege-
derart einheitlichen Perspektive auf die Philosophie in ihrer schichtsschreibung nimmt in ihr Forschungsprogramm das
Geschichte wird sein, dass wir historiographischen Formeln Problem dialektischer Verhaltnisse zwischen Subjekten und
und Schematismen misstrauen. Denn diese Formeln entspre- Tragern der Erkenntnisentwicklung auf. Wer sind - fragt
chen haufig nur der verganglichen Selbstreflexion der Philo- sie _ die bestimmenden historischen Snbjekte einer Forma-
sophen. Sie sperren sich gegen die Prozessualitat unseres Wis- tion oder Epoche und wer verhalt sich ais Trager philosophi-
sens. Wir konnen die Zeit ihrer Entstehung nicht reprodu- scher Erkenntnis, indem er sich zu fIÜheren oder zeitgenos-
zieren. Warnm also sollten wir ihre Begrenztheit in der Zeit sischen Philosophien, Wissenschaften und gesellschaftlichen
wiederholen? Dichotomien wie Rationalismus versus Empi- und politischen Praxen verhiilt, bewusst oder unbewusst zu
rismus oder IdeaUsmus versus Materialismus führen aIs diesen Subjekten? Als Theorie der geschichtlichen Verhii/t-
heuristische Prinzipien eher in die Irre ais znr Sache. Ais nisse zwischen diesen Subjekten, nicht aber voneinander iso-
Dichotomien versperren sie uns die Sicht auf die Verhaltnisse lierter monadenhafter Krafte, orientiert der historische
und Beziehnngen zwischen Theorien und zwischen Theorie Materialismus die Philosophiegeschichtsschreibung auf das
und Praxis. Gerade aber die Verhiiltnisse zwischen den Denk- widerspIÜchliche Ensemble der gesellschaftlichen Verhiilt-
weisen, den Erkenntnisprozessen und zwischen Erkenntnis und nisse, innerhalb derer die Philosophie den Widerspruch denkt
Realitiit bilden die innere Struktur der Philosophiegeschichte. und selbst in Wiedersprüchen existiert. Wird eS so nicht
schwer, historisch-materialistisch die Einheit der Philosophie
Zweite Konsequenz eines wirklich historischen Programms
zn behaupten? Geht es um die Einheit des historischen
der Philosophiegeschichtsschreibung ist, dass wir die Trager
Prozesses? Oder geht es um die Einheit der Verhiiltnisse
und Subjekte des philosophischen Erkenntnisprozesses ent- zwischen den Triigern philosophischer Erkenntnis? Es geht
decken, wie sie in Theorieverhiiltnissen und in Praxisverhiilt- um beides, denn erst die Einheit der Philosophie in jeder
nissen Wissen genutzt und geschaffen haben. Mit andern einzelnden Epoche begründet die Einheit der Philosophiege-
W orten : wir schreiben die Geschichte der Philosophie nicht
schichte.
mehr ohne BeIÜcksichtigung ihres tatsiichlichen geschicht- Das gesellschaftsgeschichtlich begründete Veto gegen jede
lichen Kontextes. Oder : wir schreiben die Geschichte der
456 HANS J(JRG SANDKtJHLER EINHEIT DER PHILOSOPHIE 457

blosse Ideengeschichte hat sich freilich se1bskritisch auch schen Reduktiou des Wissens auf dessen historischen art und
der Gefahr zu vergewissern, wie sie in jder blossen sozial- auf dessen soziale Funktiou konzentriert sich die historisch-
historischen oder iikonomisch reduktionistischen Subsumtions- materialistische Philosophiegeschichtsschreibung auf den Wahr-
logik auftritt. Die Subsumtion von Theorien unter je gegebene heitsgehalt der Philosophie. Von hierher erst ergibt sich die
gesellschaftliche Verh1iltnisse verabsolutiert sowohl die reak- Miiglichkeit, Philosophien objektiv und ohne denunziatorische
tiven Erkenntnisfunktionen und verhindert die historische Absicht zu kritisieren. lm Vorgriff sei gesagt : die gnoseo-
ErkJarung der antizipativen Erkenntnisfunktionen, wie sie logische nnd ontologische Begründung der Einheit der Philo-
die Einheit der gegenstandlichen und der gesellschaftlichen sophie hat über ihre analytische Bedeutung hinaus eine
Determination der Erkenntnisentwicklung aus dem Blick ver- ethische Funktion. Ueber diese Funktion s01l unter dem Titel
liert. Die Einheit der Philosophie und der Wissenschaft einer DiaZektik und ToZeranz spater verhandelt werden.
Formation oder Epoche grundet aber nicht ausschliesslich Diese ersten programmatischen Ueberlegnngen zur Philo-
im Ensemble der gesellschaftlichen Verhaltnisse: Ontologi- sophlegeschichtsschreibung sollen im folgenden exemplarisch
scher Grnnd dieser Einheit ist viehnehr, dass sich anch die prazisiert werden. Exemplarisch bedeutet hier : es ist keine
- ihrer sozialen Genese und Funktion nach - unterschied- chronologische Analyse zur Entwicklung der Philosophie ins-
\jchsten Erkenntnisse, Theorien und Wissenssysteme auf die gesamt oder znr Entwicklung der Philosophie in der bÜfger-
Realitat in ihrer objektiven Existenzweise beziehen. Der Grad lichen Gesellschaft beabsichtigt. Typologisierende, sympto-
und das Ausmass der gesellschaftlichen Vermittlungen zwi- matische Interpretation ausgewiihlter EntwicklungsUrtien der
schen Theorie und Realitiit miigen dabei ganz verschieden Philosophiegeschichte ist vielmehr das Ziel. Einheit und
sein; die materiell-gegenstiindliche, «stoffliche» Determi- Widerspruch der Philosophieentwicklung yom 18. zum 19.
niertheit der Experimentalphysik ist mit den Determinanten Jahrhundert sollen in der Dialektik bürgerUcher und sozia-
religiosen Glaubens nicht identisch. Dass sie aber einen listischer Theoriebildungsprozesse aufgedeckt werden.
idee lien Bezug zn einer ranm-zeitlichen Realitiit in deren
bestimmter historischer Existenzweise darstellen, gilt fÜf alle
Erkenntnis- und Wissensformen. Die philosophiehistorische 1. WrsSENSCHAFT IN DER BÜRGERLICHEN GESELLSCHAFT
Annahme einer Dialektizitiit der Philosophieentwicklung um-
fasst in diesem Sinne folglich weit mehr aIs nur den Gedanken Sozial, politisch, iikonomisch und ideologisch gehiirt der
der Historizitiit und Gesellschaftlichkeit philosophischen Wis- Widerspruch im Wissenschaftssystem zur bürgerlichen Gesell-
Sens. Dialektik ist nicht nur die historische Form des Inhalts schaft, seit ihrer Entstehung und bis in die Phase mrer
der Philosophie, sondern die ontologische Grundlage der Ueberwindung : Wissenschaft tritt nicht nur in der Dimension
philosophischen Erkenntnis in den Erkenntnisobjekten selbst. « Kapital » auf, sondern - entsprechend deren Entwicklungs-
Insofern richtet sich das Programm einer geschichtsbewussten prinzipien - ebenso in der Arbeiterbewegung. Dieses « Nicht-
Philosophiegeschichtsschreibung nicht mit einem historischen nur/Sondern-auch» ist freilich nur eine umgangssprachliche
Interesse allein auf die Entwicklung der Philosophie in ihrer Verlegenheitsliisung für einen theoretisch klarer fassbaren
geschichtlichen Aufeinanderfolge, sondern auf die Entwick- Tatbestand. Diese Konjuktion unterschliigt, worin die Be-
lung der kognitiven Beziehungen der Philosophie zur objek- ziehung ihre Struktur hat : in einem historisch bestimmten
tiven Wirklichkeit. Mit andern Worten : die historisch- Verhiiltnis aller Momente der bürgerlichen Gesellschaft, die
materiaUstische Theorie der Philosophieentwicklung ist nur zusammen einen «historischen Block» bilden. Wissenschaft
in dem Masse zur Kritik philosophischen Wissens fiihig, wie in der bürgerlichen Gesellschaft ist determiniert nicht allein
sie die Frage nach der Wahrheit der Philosophie stellt. lm vom Kapital und dessen isoliert betrachteter Reproduktion,
Gegensatz zu einer wissenssoziologischen oder sozialhistori- sondern vom Kapital- aIs Reproduktionsverhiiltnis. Sa wiire
458 HANS J(JRG SANDKOHLER EINHEIT DER PHILOSOPHIE 459

es falsch, allein der Bourgeoisie die Umsetzung von Wissen- dessen Instrument und Ergebnis sie aber nicht ware. Driftens:
schaft in (okonomische) Praxis zuzuschreiben, dem Faktor die Wissenschaft ist eine Funktion des Gesamtsystems der
« Arbeiterklasse» - weit gefasst ais :Begriff für aile lohn- Antagonismen des Kapitalverhiiltnisses, des Klasseukarnpfs
abhiingigen, Yom Kapital bedrohteu Schichten - aufgrund und der politisch-rechtlichen Strukturen der Gesellschaft und
von deren Unterdrückungssituation aber allein die Entwick- bildet dieses System - hier ihre ideologische Funktion -
lung eiuer «alternativen» Ideologie zuzurechnen. Historisch notwendig adaquat ab ; adaquat ist nicht gleichbedeutend ntit
und aktuell entsteht in den Auseinandersetzungen der Ar- « wahr» bzw. «richtig» (logisch), sondern meint : Wissen-
beiterbewegung und über sie hinaus etwa in Wissenschaftler- schait ist Widerspiegelung der Widersprüche des Kapitalismus
bewegungen ein qualitativ neuer Typus der Beziehung zwischen in der Fmm eines widersprüchlichen Wissenschaftssystems.
Theorie und Praxis und der Ueberführung von Wissenschaft
in gesellschaftliche Produktivkrafte, ausgezeichnet durch den
historisch notwendigen Vorrang des Politischen, welches in 2. DER HISTORISCHE BLOCK VON BASIS UND UEBERBAUTEN
letzter verandernder Instanz cine soziaHikonomische Wirkung
bereits vor der Phase der Ueberführung der gesellschaftlichen Philosophie und gesellschaftliche Bewegungen bilden in der
Produktionsmittel in gesellschaftliches EigentÜffi ausübt. bürgerlichen Gesellschaft eiue Einheit. Dies gilt seit der
V oraussetzung dieser Eiuschatzung ist. dass der Begriff der okonontischen, politischen und kulturellen Konstituierung des
« Produktivitat der Wissenschaft » zwar yom Terminus «pro- Proletariats ais Klasse auch für den Zusammenhang zwischen
duktiv» im Sinne der politischen Oekonontie ausgeht, ibn philosophischer Theorie und sozialistischer Bewegung. Die
aber zugleich überschreitet in der Frage nach der Nützlich- Art und Weise, in welcher sich Philosophie und gesellschaft-
keit der Wissenschaft für den gesellschaftlichen Fortschritt. liche Bewegrmgen vereiuigen, veranlasst freilich dazu, mit
Wie prodnktiv ist Wissenschaft? In wessen Interesse wird dem :Begriff dieser Einheit sofort die strukturellen Unter-
Wissenschaft produziert? Verscharft die Entwicklung wissen- schiede hervorzuheben, die das System der Beziehungen
schaftlicher Produktivitat den Widersprnch zu den kapitalisti- zwischen Philosophie und sozialen Tragern der Theorie-
schen Produktionsverhaltnissen? Oder entwickelt der Kapi- bildung pragen : das philosophische Denken verandert sich
talismus die Produktivkraft Wissenschaft prinzipiell nur im Uebergang yom feudalen oder bürgerlichen Trager iu den
soweit, wie sie der Reproduktion des bestehendenKapital- Bereich der Arbeiterbewegung.
verhaltnisses, d. h. der langfristigen Systemstabilitat dient? Es stellt sich dantit das Problem der Vermittlung zwischen
Antworten auf diese Fragen müssen folgende Punkte gesellschaftlicher Basis und Ueberbauten, und dieses Problem
berücksichtigen : Erstens darf der Begriff der kapitalistischen bildet den Kern der Beziehung zwischen Philosophie und
Produktionsweise nicht so eingesetzt werden, dass der gesetz- gesellschaftlicher Bewegung. Die Gesellschaft besteht nicht
massige Charakter des «Uebergreifens» der materiellen aus Basis und Ueberbau. Die logische Befiihigung unserer
Produktion auf alle Lebensbeziehungen sich in eiuer Stabilitat theoretischen Umgangssprache erschopft sich in diesem der
des Systems ausdfÜckt, nicht aber in dessen Dialektik; das « Logik» gesellschaftlicher Verhaltnisse unangemcssen Und
kapitalistische Gesetz der Produktion und Reproduktion der zu früh; es kommt daranf an, die systematischen Knoten-
Arbeiterklasse muss hier eine wesentliche Rolle spielen. puukte in der Vernetzung materieller Produktion und Re-
Zweitens muss die sozialokonontische produktive Funktion produktion, gesellschaftlicher Organisation und Institutiona-
der Wissenschaft ais Bedingung des Uebergangs zum Sozialis- lisiernng und aller kulturellen Tatigkeiten aufzudecken.
mus erscheinen und nicht erst ais dessen Resultat; sonst fiele Die Entwicklung der Beziehungen zwischen Philosophie
die Wissenschaft aus dem Klassenkampf heraus, dessen gesellschaftlicher Bewegung stosst geradezu jede philo-
Errungenschaften sie bestenfalls zu sichern in der Lage wiire, ;s(>phi<',- und wissenschaftschichtliche Forschung auf einen
460 HANS JORG SANDKOHLER EINHEIT DER PHILOSOPHIE 461
derartigen Knotenpunkt : die Funktion der Intel!e!ctuellen. ten Unterscheidung zwischen Philosophie und Ideologie be-
Neue gesellschaftliche Krafte und Interessen verfugen mcht greifen kann :
spontan über die Erkenntnismittel, ohne deren Einsatz sie sich Bezogen auf die reale Tatigkeit der Angehôrigen der Ar-
nicht artikulieren k6nnen. Sie bedienen sich weitgehend des beiterklasse erscheint iede philosophische Theorie mit dem
akkumulierten Wissens der alten gesellschaftlichen Verhalt- Anspruch auf einen Erkenntniswert für das Proletariat ais
nisse, in deren sozialem Gefüge die Intellektuellen in der Amnassung. Denn innerhalb der Typologie der sozialen
Regel nicht in den Hauptklassen aufgehen, sonderh aIs Funktionen der Philosophie und der Wissenschaften, die dem
Kategorie oder Schicht imnitten der grundlegenden Wider- Reproduktionstypus der bürgerlichen kapitalistischen Gesell-
sprüche auch Freiraume der Parteinahme für das N eue inne- schaft angemessen ist, gibt es fÜf eine nicht-bÜfgerliche Philo-
haben. Die Intelligenz, genauer : Teile der Intelligenz, wirkt sophie keinen Orto Solange die Stellung der Arbeiterklasse im
haufig ais vermittelndes Glied zwischen der materiellen Basis Reproduktionsprozess des Kapitals ais natürliche Foige
der bestehenden Gesellschaft und politischen und kulturellen bürgerlicher Hegemonie aufgefasst wird, ist iede über den
Interessen einer neuen, zur Hegemonie drangenden Klasse, Einsatz der physischen Arbeitskraft hinausgehende Tatigkeit
die sich nicht allein ihrer Lage im helTschenden System ohne Funktion im System.
bewusst werden will, sondern sich ais befreite Klasse ent- In dieser Selbstverstandlichkeit, mit welcher iede bürgerlich
wirft. Auf diesen Prozess der Widersprüchlichkeit in der Ent- interessierte Geschichtsschreibung philosophische Bestrebun-
wicklung von Basis und Ueberbau bezieht sich B. Brechts gen der Arbeiterbewegung entweder gemass der bürgerlichen
Satz : «Die Art, auf die Ueberbau entsteht, ist : Antizipa- Wissenschaftsdefinition leugnet oder aber ais unzeitgemasse
tion»1. Ideologie und Utopie und damit aIs Gegenstand der Philo-
Der traditionelle bürgerliche Intellektuelle rechnet spontan sophiegeschichte verwirft, setzt sich - gegen den Ansprnch
die Philosophie hinsichtlich ihres kognitiven Status, also ihres auf die Neutralitat bürgerlicher Wissenschaft - ein me-
besonderen wissenschaftlichen, gleichwohl von den Wissen- chanisch-funktionalistisches Prinzip durch : der kognitive
schaften unterschiedenen Wissens, wie hinsichtIich ihrer so- Status der Philosophie wird identifiziert mit deren sozialer
zialen, politischen und kultll'ellen Funktion auch dann d~m Funktion im bestehenden System. Die behauptete Funktions-
hegemonialen Triiger seiner Gesellschaftsordnung, dem Bll'- losigkeit der Philosophie für die Arbeiterklasse führt dazu,
gertum, zu, wenn er selbst mit ihm :,ls Klasse. nur ~ttelb~r dass ein von der besonderen Beziehung zwischen Erkenntnis
verbunden ist. In seinem Bewusstsem setzt die Philosophie und Praxis im Reproduktionsprozess der bÜfgerlichen Klassen-
die Standards der wissenschaftlichen Bildung des Bürgertums, herrschaft abweichender neuer Zusammenhang zwischen
die Normalitat bürgerlicher Institutionen und die arbeitsteilige kognitiven und sozialen Funktionen der Philosophie nicht
Freiheit gegenüber der materiellen Produktion voraus. Die wahrgenommen wird.
Entwicklung philosophischer Theorie innerhalb der prodn- Verandert sich - ist zu fragen - bei unterschiedlichen
zierenden Klasse, in deren ganzlich anderen Institutionen und Subsumtions- und Vergesellschuftungstendenzen nur die so-
Organisationsformen, integriert in deren Politik, führt zu ziale bzw. politische Funktion des Wissens oder verandert
einer neuen, eine neue Praxis normierenden Weltanschauung sich zugleich das Beziehungsgefüge zwischen Erkenntnis und
und zu einer die Wirklichkeit neu strukturierenden Erkennt- Praxis und damit der kognitive Status von Theorien ? Und
nisweise ; dies widerspricht dem bürgerlichen Philosophiever- ein wesentliches Problem stellt sich, sobald zwischen norma-
standnis derart, dass es diese Entwicklung nll' in der abstrak- tiven und analytischen Funktionen der Erkenntuis in Philo-
sophie und Wissenschaften unterscbieden wird : wie vedindern
1. B. BRECHT, Thesen zur Theorie des Ueberbaus. In : Gesammelte sich Weltanschauungen, wenn sie im wissenschaftlichen
Werke in 20 Bd., Bd. 20, Frankfurt/M., 1967, S. 77. Erkenntuisprozess in Theorien transformiert werden; wie
16
HANS JORG SANDKOHLER EINHEIT DER PHILOSOPHIE 463
462
Theorien, wenn sie aus der iutellektuellen Produktioussphare Fr~ge nach den Notwendigkeitsbedingungen produktiver
in die alltagliche Weltanschanung von Massen überführt WlSseuschaf.t hl~aus eine zweite Seite : die der Uebersetzung
~er ~evolutlOn I~ D~uken .in Fortschritte im Recht. Wesent-
werden '1 hch ISt,. dass die burgerhche Philosophie in Deutschland
Wenn der Sa!z _ alles spricht dafür - gilt : «Die un- Ka~egonen zur ~ystematischen Erfassung dieser Beziehung
vollstiindige Uebereiusthrnnung zwischen gesellschaftlichem zWlSchen Ideologie und gesellschaftlicher Bewegung erarbeitet
Bewusstsein und Sein ist allgemeine, unaufhebbare Regel »2, Natur, .Gesellschaft und Erkenntnis werden - in sehr unter~
dann richtet sich die Frage nach der Uebersetzung der Wirk- schIed\Jchen Systemausatzen - ais einheitlicher Pro -
lichkeit in uusere Erkenntnis nicht allein nach dem Adaqua- fassl .. h . d zess er
: zuna? st m . er Idee der Identitiit des Nicht-Identi-
tionskriterium der Wahrheit auf die Uebereinstimmung, son- schen, d. h. llll Begnff der dialektischen Totalitiit. (Dies li
dern vor allem auch nach dem historischen Praxiskriterium gll: notabene nur für die «klassische» bürgerliche da ~s
auf die Unvollkommenheit dieser Ueberinstimmnng. Ueber r~tional~ ~ufkliir~ngs-und Transzendentalphilosophie, . di~
welches Wissen verfügt eine Gesellschaftstransformation? hIer allem mteresswrt, wiihrend irrationalistische Striimungen
Wie weit begreift ein lndividuum seine Wirklichkeit? um ~ 80? noc~ vernachliissigt werden kiinnen.)
DIe b~rge.rhch~ Philosophie stellt ais zentrale Fragen :
- ~w lst sIChere Erkenntnis miiglich? Wie ist die
3. ZUR PROBLEMLAGE BÜRGERLlCHER PHILOSOPHIE DM 1800 ko."-t~olll~rte Reflexi~n auf den Erkenntnisprozess miiglich?
W~~ Ist die Autonomie des Erkenntnisproduzenten bei gleich-
ze:tlger A:ne.rkennung der Objektivitat der Erkenntnisgegen-
Die bürgerliche Philosophie findet sich in folgender Pro- stande mogbch '1
blemlage : die Schulphilosophie ais Disziplin stagniert; um - W:ie ~ann Freiheit (Koustitution) mit Notwendigkeit
so auffalliger ist der Fortschritt erkliirender, experimentell- (Deternllnatlon) zusammengedacht werden in einem System-
induktiver wie theoretisch-deduktiver Wissenschaften; die ent;vurf, der v~m Erkenntnisprozess ausgehend durch Ana-
besondere Fnnktion philosophischer Erkenntnis, den Wissens- logten den PraxIsprozess konstrniert '!
zuwachs einzelnder Sektoren zu verallgemeinern und totali-
sierende Erkenntnismethoden zur Verfügung zu stellen, wird
.I
- Wie ist ~er akobinismus der ldeen ohne politische
Terreur .zu ~e~,::,rklichen,. d. h. wie kann hei freier Konkurrenz
nicht mehr wahrgenommen; der Mangel an Allgemeinheit ~er SubjektlV1t~t lln~ bel Individualisierung der gesellschaft-
der Kategorien der Philosophie steht im Kontrast zur supra- hch~n Prod~tion dw Reproduktion mit Tendenz zum Fort-
nationalen Ausweitung sozialer und akonomischer Verhalt- schnt! staatlich organisiert werden ?
nisse; die Verkoppelung von iikonomischer und wissensch~­ Und sie gibt aIs zentrale Antworten :
lichem Fortschritt stellt die Philosophie zunehmend vor dIe . - Transzendentale überhistorische, gesetzmassige Be-
Aufgabe über die Reflexion des Prozesses hinaus nach den dmgungen der Er.kenntuis garantieren ein ohjektives Wissen,
Bedingu;gen zu fragen, unter denen auch die soziale dUf<~h das der Burger erst zum historiscben, d. h. planenden
Dimension des Fortschritts eraffnet werden kannte. Das Subjekt werden kann.
Freiheitsproblem hat für die bürgerliche Intelligenz in dem - Der Idealismus v.erw.irft hewusst die erkenntnis-egoisti-
Masse, wie sie sich organisch mit dem Fortschritt ihrer sche Leugnung der objektlven Realitiit verneint jedoch die
Klasse verbindet, über die vorrangig erlœnntnistheoretische ~rkennb~rkeit der. ei~e:,tlichen Struktdren der Dinge. Dies
jedoch mcht so prmzlpwll, dass nicht Postulate der prakti-
2. E. LANGE, H. BARTH, «Methodologische Fragen der Geschichte schen Vernuuft und Imperative des Handeills miiglich waren.
der Philosophie ». In : Deutsche Zeitschrift !ür Philosophie, 27 (1979), - Entsprechend der neuen gesellschaftlichen Rolle der
H. 9, S. 1054.
464 HANS JORG SANDK()HLER EINHEIT DER PHILOSOPHIE 465

Wissenschaft ais Modell rationaler Produktivita~ (ihre Inte- - Welchen Theorie-Status nimmt die Philosophie ein,
gration in die Produktion erfolgt erst spater) ~d das .Sub- welche Empirie und Experiment trotz Anerkennung apriori-
jekt der Geschichte ais produzent von Ideen begriffen, die zn scher Erkenntnis für unverzichbar hait?
Maximen der AufkIiirung und der rechtIichen Reform ~e~de~. - Welchen Theorie-Status nimmt eine Philosophie ein,
_ Philosophie Wissenschaft besteht in e:ster Lmle. m welche ais nichtempirische systematische Wissenschaft Ana-
der Systembildung, mit der der geseIlschaftIichen. AJ;belts- lyse der Wirklichkeit sein will, diese Wirklichkeit aber ais
teilung totalisierend begegnet wird, und in der Theonebl~dun~ Gegenstand der Kritik wahrnimmt und aufgrund der ange-
auf der Ebene grosster AIlgemeinheit. In dieser AIIgeme~nhelt nommenen Nicht-Wirklichkeit des Vernünftigen Ana/ytik
wird der einzelne empirisehe Forsehungs?est~n~ gemel~sam und Normativitiit vennitteln muss ?
mit spekulativen Entwürfen wieder zum einhelthc?en Wlssen Diese Fragen konnen ein Forschungsprogramm begründen,
vermitteIt Diese Form des Wissens eriaubt Verbreltung durch zu dessen Prinzipien der Verzicht auf eine gegenüber dem
Bildung ~d Erziehung. Ohne Philosophie ais Wissenschaft historischen Gegenstand verselbstandigte Logik und Metho-
ist AufkIiirung undenkbar. dologie der Wissenschaftsgeschichte ebenso gehort wie die
- D' D' 1 kt'k . d zur bestimmenden Form des InhaIts kritische Distanziernng von einem methodentheoretisch un-
le la e 1 Wlf d d' AIl bewussten, geradezu empiristischen ZngIiff anf den Untersu-
der Wissensehaft : sie strukturiert das System un. le ge-
'nh 't b" l' h Bewusstseins In logisch wldersprnchs- chungsgegenstand.
mel el urger le en . Th .
freier Form erfasst die Dialektik ais Schema der eone
und der Methode reale Entwicklnngen in Natur und Ge-
schichte. Die jeden einzelnen Widersprnch bzw.. Gegensatz 4. DER WISSENSCHAFTSANSPRUCH DER PHILOSOPHIE
aIIgemein nmfassende Kategorie Dialektik kennZel?hn~t de~
Stellenwert der besonderen Erscheinnngen der Wlrkl.lCh~~lt Der Artikel Philosophie der franzosischen Enzyklopadie
genetisch, d. h. ais Element einer evolutioniire?- Kontll'.U1tat. setzt einen wichtigen Akzent : «Philosophie ist Wissen-
Die Aufmerksamkeit der Philosophiegesehlchtsehr~lbllng schaft », genauer : «Philosophie : Dieses W011 bedentet,
ist - wissenschaftslogisch - anf einige Fragen :ru nchte~, Verknüpfung der Wissenschaften». Diese Definition ist ge-
deren Untersnchung zu einer vertieften Ker:ntm.~ der. die pragt vom Interesse an der Unterscheidung zwischen der
Philosophie nnd die Wissenschaften. zur Zelt burgerhcher bewusstlosen Praxis der Menschen und dem Philosophen.
Revolution integrierenden Faktoren fuhren kann. lm Gegensatz zur Masse erkennt er «die Ursachen, soweit
_ Gibt es nicht-explizite theoretlsche y oraussetzungen dies in seiner Macht steht, kommt ihnen auch zuvor und
der Philosophie in der WissenschaftsentwlCklung an der steIlt sich bewusst in ihren Dienst »'. Der Wissenschaftsan-
Wende zum 19. Iahrhundert? sprnch der Philosophie ist nie Selbstzweck, sondern praktisch
_ Welche Form nimmt eine Philosophie an, de:en ~e­ begründet. 1783 gliedert 1. Kant die Hauptfrage seiner
sehichtIicher Ort _ theoretisch gesehen - das zeltg.enos- Prolegomena, «Wie ist Erkenntnis aus reiner Vernunft
sische System der Wissenschaften und der Status philoso- mogIich? » in folgeude Teilfragen : « 1) Wie ist reiue Mathe-
phischer Tradition ist? . . matik moglich ? 2) Wie ist reine Naturwissenschaft moglich ?
_ Wie lost eine Philosophie das Problem der Sicherheit 3) Wie ist Metaphysik überhaupt mogIich? 4) Wie ist Meta-
ihrer Erkenntnisse und der Wahrheit ihrer Anssagen a~ge­ physik ais Wissenschaft moglich?» 4 Diese Gliederung ist
sichts der zeitgenossischen Standards von WlSsenschaftIie~­
keit _ eine Philosophie die sich bewusst zum ErkenntnlS-
for~chritt verhiiIt und sidh doch nur kritisch gegenüber dem 3. Artikel aus der von Diderot und D'Alembert hrsg. Enzyklopiidie.
Hrsg. v. M. Naumann, Frankfurt/M., 1972, S. 49; S. 396; S. 842.
erreichten Stand wissenschaftlichen Wissens definieren kann ? 4. I. KANT, Akademie-Ausgabe, Bd. IV, S. 280.
HANS JORO SANDKOHLER EINHEIT DER PHILOSOPHIE 467
466
nicht zufallig, sondern sie ist Ausdrnck der Erwartung, a~s Teil der Naturwisseuschaft ist ». Wiihrend sich die Epigonen
dieser Hierarchie praktische Vernunft.exakt und .?hne diC Kants noch mit dem Ding-an-sich herumschlügen, ereigne-
Aporien des Empirismus und Sensualismus begrun~en zu ten sich. in der N aturwÏssenschaft «Entdeckungen, an die sich
konnen. Ohne diese Hervorhebung von. Mathematik ~nd bald die gesunde Philosophie unmittelbar anschliessen»
N aturwissenschaft ware Kant die Kennzelchnung der ~hJ!o­ werde". Es kommt freilich bei Schelling bereits zu einer
sophie ais «Gesetzgebung (Nomothetik) der ~enschlichen symptomatischen Wendung des Problems : «was für die theo-
Vernunft »5 bzw. ais «Wissenschaft von der BezlChung. aller retische Philosophie die Physik ist, ist für die praktische die
Erkenntuis auf die wesentlichen Zwec~e d~r mensch\J~hen Geschichte, und so entwickeln sich aus diesen beiden Haupt-
Vernunft »6 nicht moglich gewesen. ZICI dieser Funktions- teilen der Philosophie die beiden Hauptzweige unseres empiri-
bestimmung ist es, die Mannigfaltigkeit der Erschemunge~ schen Wisseus »12. Nach dem Modell von Mathematik und
und der Erfahrungen nach apriorischen Gesetzen oZU orgam- Physik konzipiert, wird die Philosophie zum Lehrer eines
.
Sleren. D'le« Kn·tik der rel'nen Vernunft» ('1787) stellt fest, . neuen nicht-empiristischen Typs empirischer Wissenschaft.
die Vernunft bereite dem Verstand sein ~e~d ~or durch die Zu dieser Rolle geeignet ist sie ais «System des gesamten
«Prinzipien der Homogenitlit, der Speziflkat~on un~ der Wissens »13.
Kontinuitiit ». Auffallend ist dabei, dass Kant dl~se loglschen
Geselze ausserphilosophisch absichert : das loglsche Gesetz
der KontinniHit der Formen setze ein «tr~nszendentales 5. DIE AMBIVALENZ DER BÜGERLICHEN PHILOSOPHIE
voraus (lex continui in natura) ,,'. Die Philosophie selbst strnk-
turiert sich entsprechend der Architektonik .. ~er Ven:unft Gerade wenn man die Realitatshaltigkeit bürgerlicher
(Kant), welche «alle Erkenntnisse aIs gehong zu emem Ideologie zur Zeit der bürgerlichen Revolutionen herausge-
moglichen System» betrachtet8• arbeite! und die Auffassung vom nur illusionaren Charakter
Schellings Schrift Veber die Moglichkeit einer Form der bürgerlichen Denkeus bestreitet, faUt die Diagnose der Gren-
Philosophie überhaupt von 1794 ist ein weiterer Beleg .unter zen dieses Erkenntnistypus urnso klarer aus. Die Zielprojek-
vielen : «Die Philosophie ist eine Wissensc~aft, d. h. Sie h~t tionen der mit der Bourgeoisie verbundenen Intelligenz sind
einen bestimmten lnhalt unter einer bestimmten FO~1Il». nicht praktisch umsetzbar. Das in der Theorie unterstellte
lhrer Absicht nach « nicht bloss auf eine Refo"'.' d~r. Wlssen- Subjekte der Praxis ist fiktiv, nicht-objektiv, nicht existent.
schaft sondern auf ganzliche UnJ!œhrung der PrmZ1plen, d. h. Fichtes Voraussage, durch die «aUgemeine Verbreitung der
auf ;ine Revolution derselben» gerichtet , schlii?t au~h
lO
Wissenschaftslehre» werde «das ganze Menschengeschlecht
Schellings Philosophie vor 1800 den Weg Kants em : die von dem blinden Zufall erlost »14, muss sich an die Abstrak-
Philosophie wird Wissenschaft nach de~. Muster der Na~r­ tion der Gattung richten, obwohl die Stossrichtung antifeudal,
wissenschaft. Die Abhandlungen zur Erlauterung des ~dealzs­ bürgerlich und damit partikuHir ist. Fragt man aber nach dem
mus des Wissenschaftslehre von 1796/97 b~rufen slCh auf Subjekt dieser Wissenschaft (im Sinne von «Motor der
d' mit der Philosophie «verwandten WlSsenschaften..:, Wissenschaftsentwicklung »), dann driingt sich die Unter-
b~:onders aber Naturwissenschaft und Medizin, insofern SIe scheidung zwischen Subjekten und Tragern auf : Subjekt, d. h.

5 1. KANT, Nachlass 4925. 11. F.W.J. SCHELLING, Bd. l, S. 348.


6: 1. KANT, KrV (Reclam-Ausg.), S. 845 f. . 12. F.W.J. SCHELLING, Bd. II, S. 4.
7. 1. KANT, Krv (Akademie-Ausg.), Bd. III, S. 435, S. 437. 13. EW.J. SCHELLING, Bd. III, S. 330.
8 1 KANT Akademie-Ausgabe, Bd. III, S. 329. 14. ~.lt. n',BuHR/IRRLITz, D~r Anspruch der Vernuntt. Die klassi-
9: ri.W.J. SCHELLING, Ed. K.F.A. Schelling, Bd. l, S. 89. sche burgerbche deutsche Phllosophie aIs theoretische Quelle des
10. F.W.J. SCHELLING, Bd. l, S. 156. Marxismus, KOln, 2. Auf!., 1976, S. 86.
EINHEIT DER PHILOSOPHIE 469
HANS JORG SANDKOHLER
468
geschic~tlicher y ~rhaltnisse keine subjektuale Qualitat kor-
zugrundeliegende Ursache der Entwicklung ist - dies sieht respondiert. !ndivlduation und Vergesellschaftung werden ais
der Idealismus in seiner Generalisierung «Gattung» nnr Gegensatz, mcht aber ais für Geschichte konstitutiver Wider-
der Tendenz nach - das Ganze der menschlichen Bezie- spruch .begriffen: Die wahlweise Ersetzung eines konkret-
hungen. Der Kreis der Trager aber ist sozial eng beschrankt ; allgem~~ne:, Sub]~kts, wie es der Marxismus im Begriff der
« intellektuelle Anschauung. ist die Erkeuntnisfiihigkeit anf- « Verhaltrusse zWlschen Verhaltensweisen» beschreibt, durch
geklarter Intelligenz. « V ~~k », «Gattung», «Menschheit», etc. beweist, dass die
Entsprechend ambivalent ist die Allgemeinheit des Wisseus. A~aherung von Subjekt und Substanz letzlich folgenlos
Zum einen wird sie zum erkenntnisleitenden Paradigma jeder bleJbt. Der I~ealismus such~ ~nf der Ebene der Allgemeinheit
kritischen Wissenschaft; zum andern verleitet sie zur Kon- das Gegens.tuck zum IndlVlduum; die reale Abstraktheit
struktion historischer Gesetze auS Analogien zur Natur. Dies g~sellschafthcher Verhaltnisse in einer Abstraktion abzu-
bedeutet : es fehlt noch weitgehend, was in dieser Allgemein- b~lden. gelingt ilmI nicht. Erst Hegels Herr-Knecht-Dialektik
heit strukturbildend wirkt, - die Einheit von Besonderheit führt. lU d~r Enzyk!opiidie zur Formulierung : «Dies all-
und Allgemeinem (z. oB. in der Kategorie der Arbeit). geme~ne .Wle~ersche,:,en. d.e~. Selbstbewusstseins, der Begriff,
~e~ ~lch lU semer Ob]ektivilat ais mit sich identische Subjek-
Die fiir die idealistische Philosophie symptomatische Kom-
promissbereitschaft zu materialistischen Kategorien der Objek- tivltat ~d daru~. all~emein weiss, ist die Substanz, jeder
tivitat und Notwendigkeit führt einmal dazu, Beziehungen wesentlichen GelstIgkelt, der Familie, des Vaterlandes des
Staats »17. '
zwischen Subjekt und Objekt zu erfassen; auf der andern
Seite aber droh! sie jederzeit umzuschlagen in eine Fetischi- Gerade a~gesichts der Aussenbeziehung der klassischen
sierung überhistorischer Gesetze (List der Vernunft, etc.). d~utschen Philosophie zur bürgerlichen Revolution kommt .
Wenn für Hegel «das wahre Verhaltnis des Individunms diesem hier. skizz~erten Forschungsprogramm der Wisse:
zu seiner allgemeinen Substanz» darin besteht, Organ des sc~aftsges~hichte ~m~ besondere Bedeutung zu. Denn diese
« substanziellen Geistes» zu sein, wenn in seiner Geschichts- p'hilosophle stellt m Ihrer relativen Unabhiingigkeit von so-
auffassung die «welthistorischen Individuen» vom Glück Zlalen Bewegungen ihrer Zeit eine Potenz des Fortschritts
gepragt sind, «die Geschiiftsführer eines Zwecks zu sein, d~r u~d kann keineswegs allein ais theoretischer Ausdruck
der eine Stufe in dem Fortschreitungsgange des allgemeinen hlstonscher Zurückgebliebenheit in Deutschland erkl"'rt -
Geistes bildet» 15, sa spricht hieraus das Veto gegen den d en: O"
. Ie Innerhla bdes dominanten Idealismus auftretenden
a wer
Subjektivismus. ZugJeich jedoch handelt es sich nm das realis~chen Ten?enzen und materialistischen EinscWüsse
Dementi bürgerlicher Subjekt-Ansprüche. Schelling Satz, der v~rwel~en auf dIe :r:'otwendigkeit einer Interpretation in
Mensch habe nur deshalb Geschichte, weil er sie «nicht mit-, dialektischen Kategone!'. Der Idealismus ist Widerspiegelung
sondern selbst erst hervorbringt .", hat in der Missachtung S?woW der Ch~ncen Wle der Grenzen bürgerlich-gesellschaft-
objektiver generierender Voraussetzungen beirn «Machen der I,,:hen Fortschntts. Die Anniiherungen an die Wissenschaften
Geschichte» Hegels Reaktion provoziert. Die im Idealismus w;e a~er auc? die Qualifizierung der Wissenschaften durch
standig vorhaudene Idee einer Geschichte ohne Subjekt oder dIe ~hllosop~~ ge~en der Wissenschaftsgeschichte ihr Thema
einer Substanz sui generis verdeutlicht, dass dem Subjekt der und Ihre Le?'t~ation ais unverzichtbares Element der gesell-
Erkenntnistheorie, dem schopferischen Produzenten der Ob- sch~fts~eschichtlichen Analyse. In dieser Analyse wird der
jekte der Erkenntnis, anf der Ebene der Ailgemeinheit Prels s!Chtbar, den die in Analogie zur Naturphilosophie

15. G.W.F. HEGEL, Die Vernunft in der Geschichte. Mrsg. v. J. 17. G.W.F. HEGEL, Enzyklopiidie der philosophischen Wissen-
Hoffmeister, Hamburg, 1955, S. 98 ff. schaften im Grundrisse, Stuttgart. 1927, S. 256.
16. F.W.J. SCHELLING, Bd. l, S. 471 f.
EINHEIT DER PHlLOSOPHEE 471
HANS IORG SANDKOHLER
470
sozialistischen Arbeiterbewegung an der Philosophie aIs einer
konstruierte Geschichtsphilosophie zahlt : die A;nuahrue ~bjek­
spezifisch bügerlichen Erkenntnisweise geübt wird. N ahezu
tiver Entwicklungsgesetze in der Geschich.te g.el~.gt nur, l'.:dem
der ldealismus des Sollens und der Sub]ektivttat zwar uber- gleichzeitig aber wird sichtbar, in welchem Masse die Anti-
Philosophie selbst philosophischen Wissens bedarf, mu sich
wunden wird, die wissenschaftliche Philosoph!e aber ein
normatives System bléibt. Jenes historische Sub]ekt, welches zn artikulieren. In der Kritik entsteht eine neue Philosophie.
nicht nur aIs Moment der Substanz existiert, sondern aIs Ueber lange Jahre und Jahrzehnte ist die Arbeiterbewegung
gesellschaftlich identifizierbare Macht in der Geschichte wirkt auf das Bündnis mit der fortschrittlichen bürgerlich-demo-
und deshalb aIs empirisches Subjekt auch ~~ Gegenstan~ kratische.n und sozialistischen lntelligenz angewiesen, um am
einer historischen Analytik werden kann, tntt m der klaSSI- akkumulierten Wissen der bürgerlichen Gesellschaft effektiv
schen bürgerlichen Philosophie noch nicht .offen an den Ta~. teilhaben zu k5nnen. Kontinuitiit oder Bruch? Dies ist eine
Gleichwohl hat diese Philosophie trotz ihrer J3egrenztheIt Scheinalternative, denn es sind zwei Elemente, welche in der
Erkenntnisse fonnuliert, die eine allgemein~ hmuane. ~e­ Entstehung des Marxismus notwendig beide Fonnen histori-
deutung haben und mit hmuanistischem. Zl~l :;ktuahslert scher Entwicklung, Kontinuitat und Diskontinuitat, zur
werden k5nnen. Die Arbeiterbewegung wlrd lU mrer Ent- Geltung bringen : die koguititve, von der Erkenntnisfonn der
wicklung bewusst die überlieferten Erkenntniss~ der P~ilo­ Philosophie ausgehende, und die sozialhistorische, iru Büudnis
sophie benutzen. Allgemein kann man sagen : dIe klas.slSche zwischen Proletariat und lntellektuellen gründende, Detenni-
bürgerliche Philosophie wird im Kontext der ~lasslschen nation dieser Revolutionierung im Evolutionsprozess der
englischen und schottischen bürgerlichen Oekononne und .d~r Erkenntuis. Nicht zufallig, sondern im Bewusstsein dieser
theoretischen und praktischen Erfahrungen des vorma,:"sü- Problemlage, hat Lenin den Rechenschaftsbericht des Marxis-
schen Sozialismus in Frankreich und in England zn elUe~ mus über seine theoretischen Ursprünge mit dem Titel über-
Medium der Bewusstwerdung der Arbeiterklasse werden. DIe schrieben Drei Quellen und drei Bes/and/eile des Marximus.
hier angedeutete KontinuUiit der Erkenntnisges~hic~te hat Der Marxismus hat aIs entwickelte theoretische Widerspie-
freilich wieder die Merkmale jener Struktur an slch, ~ wel- gelung des Interesses der sozialistischen Bewegung, die
cher Einheit und Widerspruch, KontinuWit ffild Bruch, lU der Hegemonie in der bürgerlichen Gesellschaft zu brechen, die
Fonn der ldentitiit des Nichtidentischen wirksam werden. Form philosophischer Erkenntnis nicht zerstOrt. Aus der Not-
Mit andern Worten : das Kontinuum vermittelt sich über wendigkeit des Rückgriffs aus bürgerliche Qnellen entsteht
die Dialektik der KrUik, der Aufhebung, der Umwalzung. das Problem der Qnellen aIs Bestand/eile. AIs Problem ist
es nur erfassbar, wenn der richtige Verweis anf die Auf-
hebung dieser Bestandteile durch die sozialistische Kritik
nicht verdeckt, dass der soziale Trager zunachst nnd über
6. KRITIK DER lNTELLEKTUELLEN UND DER PHILOSOPHIE
lange Zeit iru wesentlichen die Intelligenz ist, die für das
Proletariat Partei nimmt, ohne selbst Trager proletarischen
Eine Philosophiegeschichtsschreibung, wel.ch~ das. Ganze Klassenbewusstsein zn sein.
der Geschichte und das Ganze der Philosophie lm Bhck hat,
lm geschichtlichen Rückblick ist die Auseinandersetzung
stOsst bereits im frühen 19. Jahrhundert auf eine Besouder-
um die Berechtigffilg der Philosophie in der Arbeiterbewegung
heit der Philosophieentwicklung : auf den Zusammenh:;ng
(zngleich Auseinandersetzung über die Rolle der lntellektuellen
von Kritik der lntellektuellen und Kritik der PhilosopJ;rle;
und die Fruchtbarkeit spontan arbeiterkommunistischer Theo-
es handelt sich hierbei sowohl um die Kritik aus der Arbetter-
rien iru Konstitutionsprozess des Proletariats aIs Klasse)
bewegffilg an der lntelligenz wie an der Philosophie wie auch
entschieden. Vom frühen 19. Jahrhundert bis zmu Vonnarz
um die Selbstkritik der lntellektuellen ffild der Philosophie. lm
ist dieser Kampf allerdings mit ausserordentlicher Harte
Vordergrnnd steht zunachst die. Kritik, die von der früben
1
! EINHEIT DER PHILOSOPHIE 473
HANS JORG SANDKOHLER
472
hatte. ~erichtet, in Brüssel habe man die Arbeiter aus der
geführt worden. Die junge sozialistische Bewegnng begegnet Veremlgung ausgeschlossen. Auch nach der RichtigsteUung
dem Wissenstypus Philosophie mit Misstrauen. Das philo- durch Marx bleibt für die Londoner der Vorgang erwlihnens-
sophische Wissen wird mit dem privilegierten Kopfarbeiter wert : Weitling «schrieb zwar, dass Ihr nur der Sicherheit
und aIs Instrument feudaler oder bürgerlicher Herrschaft wegen die Arbeiter aus Eurem Vereine ausgeschlossen habet
identifiziert. Die landliiufige Kritik an der Philosophie richtet aber. auch hieri~.lag eine Beleidigung, indem man ja durchau~
sich nicht erster Linie gegen deren spekulative und scholasti- erklarte, man konne den Arbeitem uichts anvertrauen. Unser
sche Verfassung. lhr Adressat ist viehnehr der Intellektuelle, Gedanke war aber, dass Ihr im Sinne hattet eine Art Gelehr-
der über dieses den Handwerkem und Arbeitem fremde ten-Aristocratie zu gründen, und das Volk von Eurem neuen
Instrument verfügt. Von der sozialen Funktion der Philo- G5ttersitz herab zu regieren. - Wir hatten schon unsere
sophie wird _ eher intuitiv aIs theoretisch reflektiert - auf Vorkehrungen getroffen, ais Euer Brief ankam und dieselben
ihren koguitiven Status geschlossen. Der Schein der Allge- unn5thig machte. - Es war sehr gut, dass lm' schriebt deun
meintheit, unter dem die klassische bürgerliche Geschichts- soust ware der kaum erstickte Hass zwischen den Gel~hrten
und Naturphilosophie die besonderen Interessen des Bürger- und Arbeitem wieder auf das Heftigste ausgebrochen sein. »
tums in dessen revolutionarer Phase vertritt, diskreditierte die
Philosophie überhaupt aIs die Wissenschaft des Aligemeinen. Diese Wamung ist jedoch nur die eine Seite eines durchaus
Gab es eine N otwendigkeit, Philosophie dennoch in die so- ambivalenten Verhaltnisse zur Intelligenz. Dessen andere
zialistische Bewegnng einzubeziehen? Oder war sie nur die Seite spricht aus eben derselben Adresse an Marx: «Wenn
Morgengabe der nicht-proletarischen Intelligenz an die Ar- ~e geistig: Revol."tion, welche jetzt angefangen hat, beendigt
beiterbewegung? Auffallig ist zuuachst die Gleichzeitigkeit Ist, wrrd die physische kommen, wenn die Gewalthaber nicht
von Philosophiekritik und- rezeption, auffallig dann vor allem. aufgeben. - Unsere Aufgabe ist das VoUe aufzukliiren und
dass sich die Philosophiekritik zur Selbstkritik der Philosophie Propaganda für die Gütergemeinschaft zu machen· lh.'woUt
entwickelte. Schliesslich : die Selbstkritik der Philosophie dass~lbe, also reichen wir uns die Hande, und ';'irken mit
wurde zum Ausdruck d.er kritischen Selbstreflexion bürgerlich- veremter Kraft für eine bessere Znkunft» 18.
demokratischer und politisch sozialistischer Intelligenz, zur In einem weiteren Dokument, einen Monat spater datiert,
Rechtfertigung gegenüber der sozialistischen Bewegung. wendet sich das Londoner Komitee ement voll V orbehalten
Aus der Zahl wichtiger Auseinandersetzungen verdienten an das Korrespondenzkomitee in Brüssel. Man wartet auf
die zwischen Wilhehn Weitling und Marx, die zwischen Marx eine von Brüssel «versprochene Schilderung der philosophi-
und den Junghegelianem hervorgehoben zu werden. Be- schen Bewegung Deutschlands », erwiihnt die Feuerbach-
sonders bezeichnend freilich sind die eher zum politischen Diskussion mi! Hervorhebung, berichtet über einen zum
Alltag der frühen Arbeiter- und Handwerkerbewegung Verein hinzugestossenen « deutschen Professar» und «einen
geh5renden Streitigkeiten, so. z. B. im und um den Bund der Heidelberger Studenten», beide «entschiedene atheistische
Kommunisten. Der Briefwechse1 zwischen den Kommunisti- Kommuuisten oder besser Hnmauisten». Doch obwohl dies
schen Korrespondenz/comitees in London und in Brüssel ist die Al!taglichkeit des Umgangs mit der Philosophie belegt,
ein Dokument der geschiirften Anfmerksamkeit von Führem fuhlt s!Ch das Londoner Komitee veranlasst, die Brüsseler -
der sozialistischen Bewegnng gegenüber verbündeten Intel- das heisst in erster Liuie : Marx - zu ZUfÜckhaltung und
lektuellen. AIs 1846 «eine allgemeine Organisation der Pro-
paganda, ein Austausch unter den Kommnnisten aUer 18. ~arl MARx/~riedrich ~~GELS, Gesamtausgabe (MEGA). Hrsg.
Uinder» unumganglich erscheint, wendet sich das Kommu- v. Instlt:ut f. Mar?n~mus~Lemlllmus b. ZK der KPdSU u. v. Institut
f. ~an(l8mus-Lemmmus ~. ZK d. SED, Berlin, 1975, ff. Dritte Abt.
Bnefwechsel, Bd. 2, Berlm, 1979, S. 219~223.
nistische Korrespondenzkomitee in London an Karl Marx in '
Brüssel, um Missverstiindnisse auszuraumen. W. Weitling
HANS J7JRG SANDKtJHLER EINHEIT DER PHILOSOPHIE 475
474
Geduld zu mahnen; zur Geduld mit den Arbeitern, zur Vor- allgemeinen Phrasen geliefert »19. Die sozialistische InteIIigenz
sicht vor einem intellektuellen Avantgardismus gegenüber der trennt sich vom Kleinbürgertum - und vom Bourgeois-
Arbeiterbewegnng. Die Marxsche Kritik der Philosophie wird sozialismus. Beklagt Moses Hess gegenüber Marx 1846 die
nur im Prinzip bestatigt : «Ihr habt Recht wenn Ihr die « weitlaufige, aber ganz hohle, philosophisch-prinzipielle Pole-
philosophische und sentimentale Richtung des Kommunismus mU, gegen den Kommunismus »20, dann spielen Philosophie-
bekampft, sobald sie einseitig siud oder werden und sich aus- Kritik und Suche nach eiuer neuen Wissenschaft zusammen :
schiiesslich geltend machen wollen, aber lhr müsst auch « So nothwendig im Artfange eiu Anknüpfen der kommunisti-
vermeiden eiuseitig zu werden, und Ihr werdet es, wenn lhr schen Bestrebnngen an die deutsche Ideologie war, so noth-
die Moglichkeit des Kommnnismus bloss auf die wachsende wendig ist jetzt die Begründung auf geschichtliche und 6ko-
Noth der Arbeiter und die VervoIlIcommung der Maschiuen, nomische Voraussetzungen, sonst wird man weder mit den
etc. gründen wollt. - Lasst den Philosophen seinen Kom- "Sozialisten", noch mit den Gegnem aller Farben fertig »21.
munismus wissenschaftlich entwickeln, lasst ihn zeigen, dass Die Begründung des Sozialismus, die Begründung der Rolle
wir bis jetzt die Natur des Menschen noch nicht erkannt der Arbeiterklasse aIs des Subjekts der geschichtlichen Ent-
hat!en - und so Unrecht hat der Philosoph doch nicht - wicklung, wird in den Jahren nach 1846 Aufgabe eiuer neuen
lasst ihn zeigen dass die Harmonie zwischen dem Menschen, Wissenschaft sein, die nicht Politische Oekonomie heisst. Sie
der Gesellschaft und der N atur wieder hergestelIt oder besser ist viehnehr materialistische, philosophische Wissenschaft der
ins Leben gerufen werden muss ... - nicht Alle sind grosse Geschichte, historischer Materialismus. Gestützt auf die Er-
NationalOkonomen wie Ihr, veriangt daher auch nicht, dass kenntnisse der Kritik der klassischen englischen bürgerlichen
Alle den Kommunismus auffassen sollen wie Ihr es thut.» Oekonomie und gestützt auf die Kdtik bürgerlicher Ideologie
richtet diese philosophische Wissenschaft ihr Augemnerk nicht
Die Kritik von Handwerkern und Arbeitern an Intellektuel- vereinseitigend auf die Bewegungsgesetze der materiellen
len gewinnt hier eine Dimension, iu der es nicht mehr um Produktion und Reproduktion, sondern auf die Basis und auf
das Misstrauen gegenüber dem InteIIektuellen ais dem Ver- die Ueberbaustrukturen mit gleicher Intensitiit. Die Bedeutung
treter der Bourgeoisie geht, sondern um die Ungleichzeitigkeit des Rechts, der Kultur, der Religion, kurz : aller ideologischen
politischer Reifeprozesse iu der InteIIigenz und in der Ar- Reflexe und Antizipationen, wird nicht unterschtitzt. Der neue
beiterklasse, letztlich um das Eutwicklnngstempo der revo- Materialismus geht aus von der Erfahrung, dass alle gesell-
lutionaren Bewegung. schaftliche Praxis von den Leistungen des menschlichen Be-
wusstseins durchsetzt ist, durch den Konservatismus der
Die kommunistische Kritik an der Philosophie, vor allem Institutionen und Weltanschauungen in ihrer Entfaltung be-
durch die Anhanger WeitIings, und die mit einer Kritik an den
inteIIektuellen Kritikern der Philosophie und Vertretern der
neuen Wissenschaft - der politischen Oekonomie - ver-
bundene Verteidigung der Philosophie bilden über Jahre eiu 19. MEGA, Erste Abt., Werke, ArtikeI, Entwürfe. Bd. 10, Berlin,
kaum nach Prinzipien zu ordnendes Gemenge. Eindeutig ist 1977, S. 331. Fr. Engels schrieb den Artikel 1850. Zur «demo-
jedoch, dass zum Weg der fortschrittlichen demokratischen kratischen Partei» vgl. die Ansprache der Zentralbehorde des Bundes
der Kommimisten vom Miirz 1850 : «Diese Partei, die demokratische,
und sozialistischen InteIIigenz die Philosophiekritik gehOrt. die den Arbeitem weit gefiihrlicher ist, aIs die frühere liberale, besteht
aus drei Elementen : 1. Aus den fortgeschrittensten Theilen der
Die alte, überholte Philosophie dient nicht mehr der Welt, grossen Bourgeoisie... 2. Aus den demokratischRkonstitutionellen
nnd sie ist sozial zurechenbar. So Engels : «Die Auflosungs- Kleinbürgem ... 3. Aus den republikanischen Kleinbürgern... » (MEGA
l, 10, S. 256).
periode der deutschen Philosophie hat überhaupt der demo- 20. MEGA III, 2. S. 269.
kratischen Partei iu Deutschland den grossten Theil ihrer 21. ebd., S. 270.
476 HANS IORG SANDKOHLER EINHEIT DER PHILOSOPHIE 477

hindert und durch kritische Analyse und revolutioniiren Ent-


wurf befijrdert wird. 7. UEBER PHILOSOPHIE UND ARBEITERBEWEGUNG
Die Kritik aller bisherigen Philosophie ist eine der V oraus-
setzungen für die Fordemng nicht allein von Marx, das Prole~ Es !iegt im kognitiven Status der Philosophie begründet,
tariat solle die Philosophie verwirklichen. Die zweite Vor- dass die Arbeiterbewegung gerade bei ihr ansetzt, um Wissen-
aussetzung liegt darin, dass sich die mit der sozialistischen schaft im eigenen Interesse zu organisieren. Philosophie be-
Bewegung aIllierte Intelligenz in der Philosophiekritik aus deutet die Verfügung über das akkmnulierte Wissen der
den Zwangen des auf die Hegemonie der Bourgeoisie gerichte- Menschheit in der den politischen und ideologischen
ten Ueberbaus emauzipiert. Diese Emauzipation aus der Forderungen wie auch dem Bildungsstand in der Arbeiter-
Religion und der Philosophie wie auch - aufgrund staat- bewegung allein angemessenen FOffiI. Die Philosophie ver-
licher Diskriminiemng und Verfolgung - aus den Institu- bindet ais Theorie der Moglichkeit objektiver Erkenntnis aIs
tionen des Staats voIlzieht sich für verschiedene Intellektuelle Theorie der Totalitat des mannigfaltig Wirklichen, aIs Th;orie
in unterschiedlicher Nahe oder Distanz zur organisierten der Gesetzmassigkeit der Entwicklung und ais über die Un-
Arbeiterbewegung. Man kann eindeutig feststeIlen, dass der mittelbarkeit der Empirie hinausgreifende Erkenntnis objek-
Nahe und dem Grad der Integration in die Organisationen tiv moglicher Zukunft sowohl die Erfahrungen der Menschen
der sozialistischen Bewegung die Aufgabe spekulativer Prin- wie das AIlgemeine des wissenschaftlichen Wissens. Damit
zipien der Philosophie zugunsten eines immer weitergehenden bietet sie zugleich instrumentelles Wissen für die Analyse des
Realismus - philosophisch : Materialismus - korrespon- Hier und Jetzt und die wissenschaftliche Begründung der
diert. Die Umstülpung der idealistischen Dialektik wie auch NOffiIen einer auf Vedinderung zielenden Weltanschauung.
des überlieferten Materialismus des 18. Jahrhunderts in der Für die Arbeiterbewegung ist die Philosophie damit faktisch,
materialistischen Dialektik der Geschichte (spater : der Na- was sie im Hegelschen System der Philosophie nur der Idee
tur) ist theorieimmanent nicht zu erkliiren. Die in den Quel- nach sein konnte : Wissenschaft und System allen Wissens.
len und Dokumenten der Arbeiterbewegung belegten theo- In einer spateren Phase der Arbeiterbewegung hat Fr. En-
retischen und politischen Anforderungen an die Intelligenz gels gegenüber dem Dühringschen Versuch, diese Funktions-
und an die aus der Intelligenz heraus wissenschaftlich ent- bestimmung rückgiingig zu machen, die beiden Elemente der
wickelte neue Theorie zeigen ein klare Tendeuz : gefordert Begründung der Notwendigkeit der Philosophie herausge-
ist die wissenschaftliche Qualifizierung der spontanen Welt- arbeitet. Nach der Kritik traditioneller Philosophie blieb er-
anschauung der Sozialisten. Es geht darum, die Kritik am halten «die dialektische Denkweise und die Auffassung der
Bestehenden analytisch zu begriinden; und es geht darum, natürlichen, geschichtlichen und inteIlektueIlen Welt ais einer
die historische Perspektive der Arbeiterbewegung tiefer, ais sich ohne Ende bewegenden, mnbildenden, in stetem Prozess
durch moralische Motivationen moglich, zu sichem. Ein ent- von Werden und Vergehn begriffenen. Nicht nur an die
scheidender Kontext dieses Fundierungsprozesses ist die Philosophie, an aile Wissenschaften war jetzl die Forderung
Wissenschaftsentwicklung. Seit ihren Aufangen hat die prole- gestellt, di.e Bewegungsgesetze dieses steten Umbildungspro-
tarische Bewegung eine weitgehend klare Wabmehmung der zesses auf Ihrem besondern Gebiet aufzuweisen. Und dies war
Bedeutung der Wissenschaften für die Entwicklung der bür- das Erbteil, das die Hegelsche Philosophie ihren Nachfolgern
gerlichen GeseIlschaft. . hinterliess »22. Indem der «Moderne Materialismus» das
philosophische AIlgemeine auch « der neueren Fortschritte der
Natnrwissenschaft» darsteIlt und erklart, dass «die N atur

22. MEW, Bd. 20, S. 23.


EINHEIT DER PHILOSOPHIE 479
478 HANS JORG SANDKOHLER
wegung und Verandernng, auf die Gesetze der Entwicklung
ebenfalls ihre Geschichte in der Zeit hat ", be~ëtigt e~ «ke~e und auf die DialektizWit des Fortschritts.
über den andern Wissenschaften stehende Philosophie me. r.
lu diesem Sinne gibt es für Engels überhaupt keine mit dem
Sobald an jede einzelne Wissenschaft die Fordernng ~erantntJ
kognitiven Status traditioneller philosophischer Theorie ver-
über ihre Stellung im Gesamtzusammenhang der D~ge ~n gleichbare « Philosophie mehr, sondern eine einfache Weltan-
der Kenntnisse von den Dingen sich klarzuwerd~n, lSt .. ~de schauung, die sich nicht iu einer aparten Wissenschaftswissen-
besondre Wissenschaft vom Gesamtzusammen ang u ~r­
schaft, sondern in den wirklicheu Wissenschaften zu bewahren
flüssig ». AIs Wissenschaft, freilich n~c~t aIs. « besondre WlS-
uud zn betatigen hat. Die Philosophie ist hier also "auf-
senschaft" hat die Philosophie - hlenn mit den « andern »
gehoben", das heisst "sowohl überwunden aIs aufbewahrt" ;
Wissensch;ften übereinstimmend - so,,:ohl einen G~gen- überwunden, ihrer Forrn, aufbewahrt, ihrem wirklichen Inhalt
. h ie eine eigentiimliche wlssenschaftsloglsche
standsb erelC w D nk d seinen nach »24.
QualWit : Philosophie ist «Lehre vo~ e. en .un Die Gründe für die theoretische und weltanschauliche Leit-
Gesetzen _ die formelle Logik nnd dle Dmlektik". funktion der Philosophie in der Arbeiterbewegung liegen -
Die Ei entümlichkeit der Philosophie erkHirt Engels i~ der neben den Ursachen aus dem Charakter der materiellen At-
g'd
U n tersch el zur Entwl'cklung der Natur- und Geschlchts- beit und bildungssoziologisch erkliirbaren Folgen der Lage
ung . ffl' h
Wlssensc a. r h ebt ab auf die unterscheldbaren
. h ft E . sta di IC en der Arbeiterklasse - in der Verrasstheit dieses Erkenntnis-
und gesellschaftlichen Detenninanten der Entwlcklung . eser systems selbst. Die wissenschaftliche Dialektik sichert ein
Wissenschaftsbereiche. Die Naturwi::~~cha~:ra~~:r:;~ der einzel-, vor allem naturwissenschaftIichen Erkenntnis-
ihren Erkenntniszuwachs aus den sto c en . objektivitiit ebenbürtiges Gesetzeswissen. Und dieses Wissen
er egens ·· d e. Dl'e Geschichtswissenschaft entwlckelt
an . L ist anf Entwicklung bezogeu, auf Veranderbarkeit, auf Fort-
ihr G t
. h l'taü'v anderen Prozessen : « 1831 hatte m yon schritt, damit auf die uumittelbaren Interessen der Klasse .
SIC aus qua 1 1838 b' 1842
der erste Arbeiteraufstand stattgefunden; ~. d Was ist einfach an dieser Weltanschauung? Inwiefern ist
erreichte die erste nationale Arbeiterbewegung, le e~ sie geeignet, sich sowohl in den Wissenschaften wie im All-
englischen Chartisten, ihren Hëhepunkt. Der Klassenkamp tagsleben zu bewahren ? Die Antwort auf diese Frage erkHirt
zwischen Proletariat und Bourgeoisie trat ~ den Vordergrn~d zugleich die Rezeptionsbereitschaft der Arbeiterbewegung
der Geschichte der fortgeschrittenste~ L~nder Europas, .m gegenüber dem Marxismus. Sie begründet den Erfolg des
demselben Mass wie sich dort einerselts die grosse Industne, wissenschaftIichen Sozialismus gegenüber den spontanen ar-
andrerseits die ~eueroberte politische Herrschaft der Bour- beiterkommunistischen Anschauungen des frühen 19. Jahr-
geoisie entwickelte .". hundert.
Der in der hilosophischen Dialekt!k entfaItete Wissen- Die materialistische Dialektik sprengt die mit dem dualisti-
p. 1t d'lese b eiden - mternen schen WeItbild der klassischen bürgerlichen Philosophie
schaftstypus vernntte . ' und externen
W' gesetzten Grenzen der Erkenntnis. Das monistische Prinzip
_ Deterlllinanten zur Einheit. Was die el~e!nen ..JSsen-
schaften mangels V ergleichskriterie~ nicht tot~lisleren konnen, dieser Weltanschauung erweitert die Wahrnehmungs- und
· 1 kü'k aIs die allgememe Theone der sttnkturell Erkenntnisfiihigkeit der Menschen über den Bereich der all-
k ann die D me 'k'
gleichen oder vergleichbaren Gesetzmasslg eiten m er
. dEnt
f taglichen Empirie und der experimentellen Naturbeherrschung
hinaus um die Dimension der Geschichte. Geschichte re-
. kl d Natur der Erkenntnis und der Gesellschaft au
WlC ung e r , .. kf"h uf Be prasentiert den Zusammenhang von Arbeit an der Natur,
ein Identisches im Nicht-Identischen zurnc u ren : a -
Organisation des gesellschaftlichen Lebens und Leistung des

24. Ebd., S. 129.


23. Ebd., S. 24/25.
EINHEIT DER PHILOSOPHIE 481
HANS JORO SANDKOHLER
480
Philosophie bzw. des wissenschaftlichen Sozialismus wichtige
Bewusstseins. Es gibt keine anderen al." historische Grenzen
Probleme offen. Zu ihnen zahlt vor allem eines : das der
der Erkennbarkeit und Veranderbarkelt der Welt. Beschleunigung des Entwicklungstempos der Wissenschaften.
Einfach ist diese Weltanschauung aus einem zweiten Grund. Es ware eine nInsion zu meinen, die «einfache Weltan-
Sie dchtet sich nicht nur auf die bewusstere Planung der schaunng » garantiere über die Orientierung, N ormierung und
menschlichen Praxis sondem sie erlaubt die Ueberpriiful1;g Regulierung proletarischer Erfahrung inI politischen, 6kono-
ihres Wahrheitsgehalts uud mrer Nüt~lichkeit in d~r PraxIs mischen und ideologischen Kampf hinaus zugleich anch schon
selbst. Sie vermittelt Erfahrung und WlSsenschaft. DIe Uebe:- ein Schritthalten mit dem Wisseuschaftswachstum nnd der
prüfungskriterien der Wissenschaften sind nicht mehr die Vergesellschaftung der Wissenschaft im bürgerlichen 6kono-
einzigen. Diese Kriterien anzuwenden war aufgrund der gesell- mischen und staatlichen System. Die Vergesellschaftungs-
schaftlichen Arbeitsteilung den Intellektuellen vorbehalten. prozesse auf der Ebene der Arbeiterbewegung führen dazu,
Die neue Theorie_Praxis-Beziehung verandert die position der dass sich die wissenschaftlich-technischen Mittel der Kapital-
Arbeiterklasse gegenüber de~ Instit~tionen u~d der Kult~r der reproduktion nicht unangefochten geltend machen k6nnen.
bürgerlichen Gesellschaft. DIe BeZlehung zWlschen B.asIS ~d Solange aber Oekonomie und Staat bürgerliche Hegemonie
Ueberban wird eiufacher. Die Arbeiterbewegung begmnt Slch aIs Zwang auch ohne Konsens aufrechterhalten, steht die
von der nicht-proletarischen Intelligenz, aus einer Zwangs-
L6sung des Grundproblems der Arbeiterbewegung noch aus :
ehe zu Iiisen erkmrt sich ihre Tatigkeit und ihre Ziele selbst
die Transformation des Staates, deren objektive Müglicbkeit
nnd macht einen Schritt in Richtung mrer Hegemonie. in der Arbeiterbewegung bereits gedacht ist und ais Perspek-
Die Veranderung des sozialen Orts und der so~alen ~nk­ tive sozialistischer Strategie wirkt. Der Zusammenhang zwi-
tion der Philosophie und die Auf~.ebu~g phil?sophIScher schen sozialer Funktion und kognitivem Status von Philoso-
Erkenntnis in einer für Massen zuganghchen Wlssenschaft- phie und Wissenschaften und Weltanschauung muss deshalb
lichen Weltanschauung führt zu Verauderungen im Erkennt- um die dritte DinIension erweitert werden, in welcher sich
nis- und Wisseuschaftssystem der bürgerlichen Gesellschaft. diese Beziehung verwirklicht : um die Dimension von Herr-
Die gesellschaftliche Arbeitsteilung uud die ..H~gen:0nie .der schaft, Staat und Hegemonie. Ohne diese Dimension gilt
bürgerlichen Klasse hat nicht mehr zwangslaufig dIe sozmle B. Brechts Aussage, der Ueberbau entstehe aIs Antizipation,
Foige des Ausschlusses der Arbeiterklasse aus Kultur und nicht nur für den EntstehungszusammeniIang. Ohne politische
Wissenschaft. Zum andem drangt diese Entwicklung das und ükonomische Hegemonie bleiben Veranderungen im
bürgerliche Denken auf allen seinen Ebenen, von ~er welta.n- Ueberban wirklungslos.
schaulich regulierten alltaglichen ":ahrne~nng bIS zur WIS-
senschaft in eine neue KoufrontatlOn. Tells noch gebunden Aus diesem Grund muss eine in die Geschichte der Ar-
in der A~seinandersetzung mit fendalen Ueberbauelementen, beiterbewegung einbezogene Philosophie- nnd Wissenschafts-
muss die Bourgeoisie sich einem neuen Antagonisn:us s~elle~. geschichte das Verhaltnis von Philosophie und Politik ins
Die Ideologien der L8sung der sozialen Frage Wle dIe selt Zentrum ihres Interesses stellen. Die marxistische Theorie
Mitte des 19. J ahrhunderts zunehmend feststellbaren Reak- entwickelt bereits vor der Revolution Elemente der ideo-
tionen auf Sozialismus und Kommunismus und auf den logischen Führung der Arbeiterklasse. Die tatsachliche Hege-
Marxismus kemIZeichnen nicht nur objektiv das veranderte monie der Bourgeoisie Iasst aber die Kultnr der Arbeiterklasse
« nur eine variable Kombination von Altem und Neuem sein
Krafteverhaltnis sondem auch die subjektive Ausstrahlung
sozialistischer politik und Kultur auf Teile der Bourgeoisie,
.'
. momentanes GlelChgewicht der kulturellen Beziehungen,'
eIll
das mit dem Gleichgewicht der sozialen Beziehungen korres-
vor allem der Intelligenz. pondiert. Nur nach der Gründung des (nicht mehr bürger-
Dennoch bleiben nach diesen Feststellungen zum Zusam-
lichen, H.J. Sa.) Staats stellt sich das kulturelle Problem in
meniIang von sozialer Funktion und kognitivem Status der
EINHEIT DER PHILOSOPHIE 483
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seiner ganzen Komplexitiit und tendiert zu einer grnndsiitz-


8. DIALEKTIK UND TOLERANZ
licheu Losung »25.
Kann man also feststellen, dass das Politische zum Integr~1
des wissenschaftlichen Sozialismus wird und sich der kogm- Die Einheit der Philosophie realisiert sich Îlll Erkenntnis-
tive Status auch der Philosophie gerade hierin in seiner neuen prazess : historisch ais Kontinuum, je aktuell ais gesamtgesell-
Qualitiit ausdrückt dann bildet das Problem der Revolution schaftliche Realitatsaneignuug. Der Erkenntnisprazess ist
und des Staats ein;n wesentlichen - auch erkenntnistheoreti- nicht nur sozialhistorisch deterrniniert, sondem bildet ais ein
schen _ Kem der Geschichte der Philosophie in der bürger- System ideeller Tatigkeiten in seiner Strnktur die Strnicturen
der objektiven Welt ab. Die Definition des Erkenntuis-
lichen Gesellschaft. prazesses ais eines Systems sozialer Tatigkeiten en!h1ilt not-
Philosophiegeschichtsschreibung findet damit, unabhiingig
von der Subjektivitiit des Historikers, auf einem veriinderten wendig ais Strnkturmoment die Beziehung Individuum/Gesell-
Terrain statt. Zu dieser Terrainveriinderung hat die Philoso- schaft : Erkenntnis ist an individuelle Trager gebuuden, zwi-
phie selbst ihren besonderen Beitrag geleistet. Mit ihrer schen denen Verhiiltnisse existieren und Verhaltensweisen
Iutegration in die sozialistische Bewegung". findet. die Philo- bestimmen. Die philosophische und philosophiebistorische
sophie ein neues Niveau ihrer ~~lbstreflexlOn: .Em Mome~t Erkenntuis der Dialektizitat der Philosophieentwicklung rich-
dieser Selbstreflexion ist die knhsche AktuahslCrung des m tet sich deshalb ungeachtet wer AlIgemeinheit Îlllmer auch
die Tradition, in das geschichtliche Erbe einb~schlossenen auf die Individuen, die Wissenschaftler, die PhIlosophen. Ein
Erkenntuisfortschritts. Philosophiegeschichtsschre1bung kann Ziel meiner Ueberlegungen war es, ans der Analyse der
und muss heute die wirkliche Dialektik der Interessen an der objektiven Dialektik der Philosophie eine Verhaltensnorm zu
Philosophie aufdecken und erkliiren, - In~eressen, ~e der gewinnen, welche innerhalb gegebener widersprücblicher
Philosophie nicht iiusserlich sind, sondem wen Ort m der gesellschaftlicber Verhiiltuisse individuelles Verhalten regu-
Philosophie selbst haben. Damit wird die Philosophiehistorie liereu konne. Denn das subjektive Handeln stôrt oder befor-
zugleich zum Ort der Auseinandersetz;mg ~a~ber, was Er- dert den Erkenntnisfortschritt und ist deshalb keine wissen-
kenntuisfortschritt historisch ist. ReduZlert SIe slch also letzt- schaftssoziologisch zu vernachUissigende Grosse. Dialektik der
lich doch auf einen Konflikt der Interpretationen ? Sollte die Philosophie bedeutet : Einheit und Kampf der Widersprüche
gnoseologisch nnd ontologisch begrtindete Einheit der Philo- in der Philosophie; nicht aber Kampf oder Einheit der
sophie so zwar existieren, aber nur an-sich und unerkennbar ? Philosophen. Die e!bische DÎlllension der Einheit der Philo-
Wiire die Schlussfolgerung zu ziehen, dass die Einheit der sophie ist nicht utilitaristisch ais subjektives moralisches
Philosophie nur ein postulat der theoretischen Vemuuft ist, Regulativ rur den Kampf der Philosophen untereiuander (um
faktisch aber immer nur in zerstOrter Form auftritt, diffus Karrieren, um Anerkennung, um Geltung etc.) zu bestlnnnen.
geworden durch den Zugriff konkurrierender Interessen an Sie gründet vielmehr in dem ontologischen uud gnoseologi-
schen Fundameut dieser Einheit : die Dialektik der pbiloso-
philosophischem Wissen? phischen Erkenntuis ist wesentlich auf Wahrheit zentriert. In
diesem Kampf um Wahrheit sind e!hische Maximen legitim
und notwendig. Und unter dieser Bedingung wird niemand
25. A. GRAMSCI, Il materialismo storico e la filosofia di B. Croce, aus der Geltung der Maxime Toleranz den Zwang zum Oppor-
Torino, 1948, S. 107. . d . l' . h B tunismus ableiten, man habe Toleranz zu üben auch gegen-
26. V gl. H.J. SANDKÜHLER, «~hilosophl~ un . SOZla }stlsc e e- über Irrationalismen und Philosophemen, in denen die Philo-
wegung. Kognitiver Status und sOZlale FunktIOn phtlosophlscher .Theo-
rie in der Arbeiterbewegung.» In : H.H. HOLZ/J:i.J:. SAND~U!ILl:R sophie keine Wahrheitsfunktion hat. Die Wahrheit der philo-
(Hrsg.), Betr. : Gramsci. Philosophie und revolutwnare PolJtlk lU sophischen Erkenntuis besteht nicht darin, dass diese zu
Italien, K61n, 1980, S. 187-224.
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punkt wird die Idee der Einheit des Philosophie fruchtbar.
einem bestimmten sozialen Zweck nützlich ist. Philosophie Gibt man diese Idee preis, dann desorientiert die Philosophie,
ist vielmehr nützlich, wenn und nur wenn sie Wahrheit be- verliert sie ihre Wahrheitsfunktion, führt in Skepsis und An-
greift und vermittelt. Weit über die Entscheidungskompeten- passung an den Status quo.
zen der formalen Logik hinaus entwickeln sich in humanen
Praxen historisch und gegenwartig Kriterien zur Unterschei- Was heute aus politisch-ideologischen Gründen ais Plura-
dung von Wahrheit und Nicht-Wahrheit. lismus propagiert wird, ist ein Denkverbot gegenüber der
Idee der Einheit der Erkenntnis, der Einheit der Philosophie.
Das programm der philosophischen Fragen I. Kants nach Der Pluralismus verabsolutiert die Idee der historischen Re1a-
den Maglichkeiten wahrer Erkenntnis und humaner Praxis tivitat der Erkenntnis und wird wm Relativismus-Gebot. Was
entMlt im Kern wesentliche Elemente jener Einheit der mit W. James bereits im 19. Jahrhundert aIs Pluralismus
Philosophie, die auf der Ebene des individuell~n V ~rhaltens auftritt, bebalt auch heute seine Stossrichtung, ob in empiri-
nach Tolerauz verlangt. Die Frage «Was kann lch Wlssen ? » stischer oder agnostizistischer Form angeboten : «dass die
kann ais Vorbedingung für die Beantwortuug der weiteren Substanz der Wirklichkeit niemals zur vi:illigen Einheit zusam-
Fragen gelten : «2. Was soll ich tun? 3. Was darf ich hof- mengebracht werden kann... und dass eine mehr distributive
fen? 4. Was ist der Mensch? ,27. Wir wissen heute, dass der Form der Wirklichkeit - die Einzelform - ebenso logisch
Beantwortung dieser Fragen Grenzen gesetzt waren, die annehmbar und empirisch wahrscheinlich ist .". Jede auf
weniger in idealistischen Erkenntnisschranken ais vielmehr in dieser erkenntnistheoretisch und ontologisch « pluralisti-
der Nicht-Existenz eines sozialen Subjekts fortschrittlicher schen» Grundlage argumentierende Position reduziert die
Praxis gegeben waren. Dennoch gibt es keinen Grnnd, diese Wahrheit philosophischer Erkenntnis auf blosse Konven-
Fragen heute nicht zu stellen. Aus diesen Fragen entwickeln tionen. Die politische Kehrseite des Konventionalismus ist
sich Kriterien für die Geltung der Philosophie, historisch wie der Dezisionismus, der Gebrauch der Macht und der Defi-
zeitgenassisch. nitionshoheit darüber, was ais wahr anerkannt werden soll,
Die Erkenntnisse der Philosophie kannen philosophiehisto- gegen die Freiheit des Denkens. (So ist es kein Zufall, dass
risch nach ihrer Wahrheitsfunktion gewichtet werden, und in der Bundesrepublik Deutschland Berufsverbote und Theo-
zu historischen Relativismus besteht kein Anlass. Diese Er- rieverbote «pluralistisch» begründet werden.) Es kann kein
kenntnisse orientieren, im Unterschied zum Wissen der Zweifel daran bestehen, dass der Pluralismus selbst, indem
positiven Wissenschaften, unser 13ewu~stseiu ~u~ die allg~­ er die wirklichen Widersprüche und deren Einheit leuguet,
meinen Gesetze der Entwicklung, und SIe konstitU1eren so em ein Ausdruck des Versuchs ist, inmitten dieser Widersprüche
Orientierungswissen, Weltbilder. über Sieg oder Niederlage von Widerspruchsparteien zu
Diese Weltbilder totalisieren das Mannigfaltige, sie re- bestimmen.
prasentieren 13eziehungen und Verhiiltnisse in der N atur, im Bildet der Pluralismus insofern selbst ein Element der
gesellschaftlichen Entwicklungsprozess und zwischen der Ge- Einheit der Widersprüche der Philosophie, so liegt es naher,
schichte und unseren Erkenntnissen. Diese allgemeine philo- diese Einheit ais allgemein Kampf politisch wirksamer Ideen
sophisch-wissenschaftliche Fundieru~g ~nserer O~i~n~erun~s­ zu beschreiben denn ais Harmonie oder ais Resultat sich
und Handlungsfahigkeit in der obJektlven Reahtlit lSt e~ne versahnender Widersacher. In der TaI. Es gibt keine Einheit
unabdingbare Voraussetzung dafür, dass wir trotz der Ar?eIts- der Philosophie, die als Kompromiss verstanden werden
teilung in der Erkenntnisgewinnung überhaupt noch Wlssen- kannte. So hatte die Idee der Einheit der Philosophie nicht
schaftlich wissen kannen. Und gerade unter diesem Gesichts-
28. W. JAMES, Vas pluralistische Universum, Leipzig, 1914, S. 17.
27. J. KANT, Akademie·Ausgabe, Bd. IX, S. 25.
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nisfortschritt in der Philosophie setzt diese Bewussheit
einmal eine strategische Funktion? Stiftete kein Bündnis aller voraus, denn ohne sie ist ein «Vom-Gegner-Lernen» nicht
Philosophen ? d.enkbar. Die ~ie1e einer humanistischen Philosophie setzen
Dieses Büudnis muss Fiktion bleiben. Es würdè den Wider- slch lm prozesslerenden Widersprnch nicht automatisch durch
spruch im Wissenschaftssystem nicht suspendieren. Worin Die Wirkungsweise der Widersprüche aber konnen wir be:
also liegt die ethische Dinlension der Idee einer Einheit der wusst g~~talten. Toleranz will dabei den Widerspruch nicht
Philosophie? harmonlSl~ren.. Toleranz will die Freiheit, inl philosophischen
Es gibt heute wie in der Geschichte der Philosophie philo- Denken die fur humane Zwecke notwendige Wahrheit zu
sophische Perspektiven und positionen, die sich aIs atheisti- denken, befordern. Dass Toleranz in der Dialektik philoso-
sche oder theologisch begründete, materialistische oder phischer Erkenntnis eine Chance hat und eine Chance ist -
idealistische Auffassungen im Widerspruch entzweien und hierfür ist Marcel Regnier Zeuge. '
zugleich dem Ziel verpflichtet wissen, die Fragen Kants neu
zu stellen und zu beantworten. Dieser Widerspruch kann
produktiv sein. Er ist weit entfernt von der antagonistischen
Qualitiit der Widersprüche zwischen humanistischen und
faschistischen positionen in der Philosophie. Die Antworten
sind auch innerhalb des humanistischen Spektrums nicht
identisch. Einheit besteht aber im Bewusstsein, dass die
Philosophie antworten kann und antworten musS und ihre
Antworten inl offentlichen, gesellschaftlichen, politischen
Leben zu vertreten hat. Was konnen wir wissen ? Wir konnen
unsere Welt erkennen. Was sollen wir tun ? Wir haben unsere
Erkenntnisse anf das Ziel einer humanen Existenz der Men-
schen zu richten. Was dürfen wir hoffen? Wir haben objek-
tive Gründe für die Hoffnung, dass der Fortschritt lmter der
Voraussetzung des Friedens planbar ist. Was sind die Men-
schen ? Die Wirklichkeit ihrer geistigen und praktischen Ant-
worten auf ihre Fragen.
Die Unterschiede, Gegensatze nnd Widersprüche in unseren
philosophischen Antworten, ja bereits in der Formulierung
der Fragen, führen notwendig zu Kritik, und die Freiheit der
Kritik ist eine Voraussetzung für eine prodnktive Wirkung der
Widersprüche. Eine Kritik, die im Bewusstsein des Zusam-
menhangs von Dialektik und Toleranz verfahrt, wird die bei
der Suche nach humanistischen Problemlosungen unverzicht-
bare Einheit, das Bündnis, nicht denunziatorisch zerstoren.
Wahrend schlechte Kompromisse auf dem Niveau des klein-
sten gemeinsamen Nenners das Potential der Kritik und des
Fortschritts liihmen, konnen Respekt und Toleranz dazu
beitragen, die objektiv bestehende gegenseitige Durchdringnng UI',lIvER:,'llAD D!: l''ÎAVARRA
der gegensatzlichen positionen bewusst zu machen. Erkennt-
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