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Terrorisme et armes de guerre

Physiopathologie des blasts et


traumatismes par armes de guerre
DIU de Prise en charge des Traumatisés sévères

Lyon, le 18 janvier 2017


Alain Puidupin, Nicolas Brossard, Nicolas Cazes, Rémy Dubourg
Ministère de la santé, Ministère de la défense, Paris,
Hôpital d’Instruction des Armées Laveran, Marseille
Plan

1. Les armes et les munitions


2. Les mécanismes et effets vulnérants
3. Les moyens de protection
Introduction
Le contexte
ALPC
Approvisionnement clandestin en armes légères de petits calibres :
• Europe de l’Est (1989)
• Balkans (1991-2001)
• Libye (2011)

Rapport d’informations parlementaire N° 2642 sur


les violences par armes à feu et l’état de la
législation présenté par Claude Bodin le 22 juin
2010. http://www.assemblee-nationale.fr

Antoine JC. Le trafic d’armes en provenance d’Europe de l’Est.


La banalisation et le renouveau dû aux Printemps arabes.
Revue « Regard sur l’Est ». 15 février 2012.
Hyper terrorisme:
attentats à la bombe

Attentats de Madrid
11 mars 2004
(131 morts, 400 blessés)

Attentats de Londres
7 juillet 2005
(56 morts, 700 blessés)
Prises d’otages massives
(POM)

Ecole de Beslan (2004):

1300 otages
• 344 morts dont 186 enfants

Aéroport de Marignane (25 décembre 1994):

160 otages
• 4 terroristes abattus par GIGN

Paris Porte de Vincennes (9 janvier 2015):


20 otages
• 4 otages tués par le terroriste, lui-même
abattu par RAID/BRI
Attaques massives
par armes de guerre
Attaques de Bombay (2008):

en 3 jours => 10 attaques par 10 extrémistes


armés d’AK47
• 173 morts
• 312 blessés

Oslo et Île d’Utoeya (22 juillet 2011)

• attentat à la bombe au siège du


gouvernement d’Oslo
• fusillade au sein d’un rassemblement de
jeunes sur l’Île d’Utoeya:
•77 tués
•220 blessés

Attaque à Paris (13 novembre 2015):

• 130 tués
• 660 blessés
1. Les armes et les munitions
Armes à feu
Armes de poing

Revolver Smith & Wesson 629 .44 Magnum

Pistolet Beretta M9 Parabellum 9mm


Armes d’épaule

Pistolet mitrailleur

Pistolet mitrailleur allemand Machine Pistole MP 40

Pistolet mitrailleur français de 9 mm modèle 1949 MAT 49

Pistolet mitrailleur israélien de 9 mm Uzi Mini-Uzi Micro-Uzi


Fusils et carabine

fusil 22LR

fusils de chasse et fusils à pompe


Fusils d’assaut

-1947: L’Union soviétique adopte l’ AK 47

Sturmgewehr 44 à l'origine de l’AK-47

- 1953: L’US Army analyse les causes des blessures par balles:

- Plus de blessés par rafales que par tirs ajustés


- Une majorité de blessés le sont à moins de 30 mètres, très peu
à plus de 300 mètres
- 7,62 mm (30.06) => trop de recul en rafale

- Mise au point du 5,56 (.223) dérivé du .222 Remington Magnum

M16
AK 47

7,62 x 39mm Soviétique

chargeur de 30 cartouches 5.56 mm OTAN

FAMAS

AK 74
M16
5.45mm x 39 Soviétique

HK 417
Munitions
Schéma de principe de la munition
d'une arme à feu
1. Balle
2. Douille ou étui
3. Charge explosive propulsive
(nitrate en général)
4. Culot
5. Amorce
cartouche

chevrotine
Munitions.

1) Calibre 12 d'arme de chasse - canon lisse


2) Pile type AA
3) .454 Casull
4) .45 Winchester Magnum
5) .44 Remington Magnum
6) .357 Magnum
7) .38 Special
8) .45 ACP
9) .38 Super
10) 9 mm Luger
11) .32 ACP
12) .22 LR
- OTAN 9 mm

Calibres -
-
US
GB
.38
.357

En mm pouce '' Exemples de munitions

4,6 mm _ _ 4,6 x 30 mm de Heckler & Koch

5,45x39 mm M74 ex-munition soviétique utilisé


5,45 mm _ _
notamment par les fusil AK-74 et Nikonov AN-94
.22'' / .22 Court, .22 Long Rifle, 5,56 mm OTAN ou
5,56 mm _
.223'' "5,56 OTAN", .223 Remington
7,65 mm .32'' _ .32'' ACP (7,65 Browning)
.38'' / 9 x 19 mm Parabellum, .38 Super, .380 ACP, .38
9 mm _
.357'' Special, .357 Magnum,.357 SIG
10 mm .40'' _ 10 mm Auto, .40 S&W
11 mm .44'' _ .44 Magnum, .44-40 WCF, .44 Special
11,43 mm .45'' _ .45 ACP, .45 Colt
Cartouche avec balle à ogive blindée et balle à tête creuse

Munitions de fusil d’assaut


Explosifs
L’engin explosif artisanal Le terroriste kamikaze
Improvised Explosive Device Suicide Bomber
2. Les mécanismes
et effets vulnérants
Balistique lésionnelle

Ambroise Paré Edmond Delorme Martin L. Fackler

Philippe Jourdan. Éléments de balistique lésionnelle.


Cours de l'EASSA, Edit Val-de-Grâce, Paris, 1995
Effets des balles et éclats:

Énergie= 1/2MV²

5,56 mm 3,6g 9 mm 8g
1000 joules 490 joules
Vitesse initiale
basse vélocité: <450m/s
haute vélocité 790 à 900 m/s

Vitesse Poids Energie


30.06 850 m/s 10 g 3 612 J
(7,62 x 36)
5,56 x 45 975 m/s 3,5 g 1 664 J
Stabilité de la balle G<=>F

d’après Jourdan
Profils lésionnels selon les projectiles

Stretch
Neck Crush
Balistique lésionnelle
d’après Jourdan

Fackler M. Bullet fragmentation: A major cause of tissue disruption.


J Trauma 1984, 24: 34-9
Éclats de grenade

tournoiement d’un éclat


Cinq scenarii pour les trajets de balles
1 Balles blindées

Trajet rectiligne:
Balle blindée ne basculant pas Cal 11.43 mm .45
Poids 15 g vitesse initiale 270 m/s énergie 547 J
2 Balles semi ou non blindées, hollow point, Dum-Dum

Champignonnage:
Balle semi-blindée Cal 357 Magnum 9 mm
Poids 9,8 g vitesse initiale 400 m/s énergie 784 J
3 Balles blindées d’armes d’épaule

Bascule
Balle blindée créant une cavité temporaire lors de la bascule
Cal 7,62 mm
Poids 9,8 g vitesse initiale 850 m/s énergie 3432 J

Dragunov
4 Balles blindées 5,56 mm OTAN, de fusils de Grande chasse,
Dum Dum

Fragmentation
Balle blindée se fragmentant à une distance < 120m
Cal 5,56 mm
Poids 3,5 gr vitesse initiale 990 m/s énergie 1680 J
5 Chevrotine

Polycriblage
Chevrotine 9 grains
Poids total 35 gr vitesse initiale 420 m/s énergie 3087 J
Balistique lésionnelle: les légendes urbaines

• Onde de choc

« L’onde de choc explosive du 5,56 à haut transfert d’énergie »

• Effet calorique

• Pouvoir d'arrêt: capacité d'une munition à mettre un


adversaire hors de combat dès le premier impact

• Balles de guerre « pour blesser »


Comportement des tissus exposés

d’après JP Tourtier
Comportement des tissus exposés

d’après JP Tourtier

Trajet des projectiles et dégâts associés => inévaluables en préhospitalier


Lésions balistiques

Les plaies balistiques thoraciques

Orifice Orifice de
d’entrée sortie
Lésions thoraciques
Zones anatomiques

P. Carli, P. Incagnoli
Médecine d'urgence 2000, p. 77-86.
© 2000 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS, et SFAR
Poumons touchés dans 80% des TPT
Hémorragies
-dilacérations sur le trajet
-plaie des vaisseaux
Plaies des gros vaisseaux
(10% des blessés arrivant vivants à l’hôpital)

-Artère SC=>Ao descendante=>VP=>VC


Plaies du cœur (7 à 10% des TPT)
-VD=>VG=>OR
-tamponnade
60% de décès sur place
Association à une plaie trachéo-bronchique
=> Décès sur place fréquent

55% des blessés survivants ayant une plaie de trachée présentent


une atteinte des gros vaisseaux.
Les plaies balistiques abdominales

grêle 50%
colon transverse, estomac, colon sigmoïde
organes pleins : foie, rate, organes RP

avant tout des lésions d’organes creux

d’après P Balandraud
Deux orifices
Lésions d’organes creux
contamination péritonite
Lésions d’organes pleins

Foie et rate

✓ Hématomes intraparenchymateux
✓ Déchirures capsulaires
✓ Plaies

hémorragies

d’après P Balandraud
Plaies d’organes rétropéritonéaux

Pancréas
Vaisseaux centraux :
aorte, VCI, VP, AMS
Reins...

d’après P Balandraud
Les conséquences

Pronostic immédiat :
- hémorragie non compressible

Pronostic à très court terme :

- péritonite
- cellulite rétropéritonéale

d’après P Balandraud
Lésions par explosions

kPa Effets

7 Bris de vitres
15 Fissuration des plâtres
35 Bris de murs de briques
35 Seuil tympanique
175 Seuil pulmonaire
300 Destruction des murs en béton
500 50 % de lésions pulmonaires
800 Seuil de mortalité

Owen-Smith MS. High velocity missile wounds. London,


Edward Arnold Ltd, 1981
Explosions
Lésions I
Lésions II
Lésions III
Blast pulmonaire

• Seuil 175 à 200 kPa


• sang dans l’alvéole = « cf.
contusion »
• fuite d’air = pneumothorax
pneumomédiastin
• fistules alvéolo-veineuses
(et embolies gazeuses)
Blast pulmonaire

« rib marking »

Zuckerman. Lancet, 1940, aug 24, 219-24


Blast digestif

• Seuil lésionnel = poumon


• Blast liquidien
… ou très proche de l’épicentre
… milieu fermé
• Très rarement isolé
Blast digestif

Pétéchies, hématomes de paroi

perforations retardées
Lésions orthopédiques

Amputations métaphyso-diaphysaires

Hull JB. J Trauma 1996;40(3):S198-S205.


Gravité

17 à 45 % des morts
(Hadden WA. Br J Surg 1978)
(Frykberg ER. Ann Surg 1988)
Selon le milieu :
1,3 % en « ouvert »
13 % en « fermé »
(Leibovici D. J Trauma 1996)

Mortalité critique :
0 à 37 %
(Frykberg ER. J Trauma 2002)
Otoscopie ?

Tympan normal Pas de blast ?


DePalma RG. N Engl J Med 2005;352:1335-42
Otoscopie

647 survivants - 7,5% blast


Leibovici D. Ann Emerg Med 1999
243 survivants - 8 % blast
Gutierrez JP. Crit Care Med 2005
Blast pulmonaire
Signes cliniques

• SF : dyspnée, douleur thoracique,


toux, hémoptysie
• SP : polypnée, cyanose,
air intrapariétal, crépitants

Pizov R. J Trauma 1999


Pats B. EMC Anesthésie Réanimation
2000
Blast pulmonaire
Signes radiologiques

Avidan V. Am J Surg 2005


Formes retardées ?

• PO2/FiO2 = 200 à l’entrée


(Sorkine P. J Trauma 1998)
• pas de blast retardé
(Leibovici D. Ann Emerg Med 1999)
• intubation < 2h
(Avidan V. Am J Surg 2005)
• symptomatologie d’emblée
(Ashkenazi I. N Engl J Med 2005)
Lésions I Lésions projectilaires
Lésions II
Lésions III • les plus fréquentes
– terrorisme urbain
– rayon vulnérant étendu
• inhabituelles en Europe
• multiples
• difficiles à diagnostiquer
• imagerie = « goulet »

Hirshberg A. J Trauma 1999


Peleg K. N Engl J Med 2005

d‘après B Debien
Profils lésionnels

Amputé
Brûlé Brûlé
Blasté Blasté Blasté
Projeté Projeté Projeté Projeté
Criblé Criblé Criblé Criblé Criblé

Epicentre Distance de l’explosion

d‘après B Debien
Fréquence des lésions
Fréquence

Criblés

Projetés
Blastés
Brulés

d‘après B Debien
Charge « faible »
(qq kg de TNT)
milieu clos
(RER, bus…)
• peu de morts (amputés...)
• lésions tympaniques + + +
• lésions projectilaires + + +
• blast pulmonaire + +
• létalité  10 %

Charge importante
« voiture suicide »
> 100 kg de TNT
• recherche des victimes
• pas de blast
• ensevelissement +++
• létalité >> 10 %

Oklahoma city (1995)


d‘après B Debien
3. Les effets de protection
Casques en kevlar
Gilets pare-balles
Notion d’effet arrière
Conclusion

Toute plaie par balle est grave jusqu’à preuve du contraire

L’examen clinique est essentiel


l’analyse balistique apporte peu à la prise en charge

« En attendant, je continuerai à traiter


les plaies et non l’arme »
Douglas Lindsey

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