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CHAPITRE VII

Réhabilitation des forages


« Les innocents ne savaient pas que la chose
était impossible, alors ils l’ont faite »
Mark Twain

La réhabilitation d’un captage d’eau souterraine constitue une intervention


importante pour l’exploitant et la collectivité propriétaire de l’ouvrage. Comme nous
l’avons vu, la réalisation d’un captage d’eau souterraine est une opération complexe.
Nous allons voir que la réparation d’un captage déficient est également une opération
longue et compliquée. Il existe de nombreuses techniques de réhabilitation ou de
régénération et la principale difficulté est de bien poser le problème et de choisir la ou
les méthodes les plus adaptées. En effet l’analyse des échecs montre que, le plus
souvent, la technique utilisée par l’entreprise n’est pas nécessairement la mieux
adaptée au problème posé, celui-ci ayant été mal identifié, voire même, pas identifié
du tout.
Il n’est pas rare, par exemple, qu’une entreprise qui maîtrise bien les
acidifications propose systématiquement ce type de traitement sans se préoccuper de
la cause réelle du colmatage et des conséquences que pourrait avoir l’acide sur celui-
ci. Devant ce manque de professionnalisme, et les incertitudes et aléas liés aux
opérations de diagnostic, certains maîtres d’ouvrage optent pour la construction de
captages neufs plutôt qu’une réhabilitation. A l’opposé, il faut reconnaître que la
réhabilitation de certains ouvrages très anciens, ou particulièrement vétustes et
surtout mal conçus, donc peu performants, ne se justifie pas forcément.
Par ailleurs, même si la nature des travaux est bien définie, l’inadéquation des
moyens d’intervention peut être très préjudiciable. Dans le cas d’un changement de
crépine dans un forage ancien par exemple, l’extraction nécessite l’emploi d’une
machine qui devra intervenir dans le tubage existant. Si celui-ci est corrodé et aminci
par l’âge, il risque d’être détruit par la manœuvre. D’où la nécessité de contrôler au
préalable si toutes les conditions techniques sont réunies pour effectuer le
changement de crépine avec succès. Le diagnostic préalable portera, d’une part, sur
l’état général des parties concernées directement ou indirectement par l’opération et,
d’autre part, sur la nature des moyens à mettre en œuvre. Le fait que ceux-ci ne soient
pas parfaitement adaptés ferait courir un risque supplémentaire à l’opération.
Il est donc important d’effectuer un diagnostic d’intervention très rigoureux. Il est
indispensable de réaliser un diagnostic sérieux et complet, permettant non seulement
de déterminer l’origine du phénomène mais aussi de définir les moyens les mieux
adaptés avant de vouloir procéder à une réhabilitation des captages.
Réhabilitation des forages 282

Heureusement la compréhension des phénomènes qui sont à l’origine du


dépérissement d’un captage a beaucoup avancé depuis la dernière décennie, tout
particulièrement dans le domaine du colmatage des captages. Ce type de problème est
très répandu en Afrique, en Asie, sur le continent américain et en Europe. La
difficulté reste cependant très grande à vouloir tenter des comparaisons et chaque
problème doit trouver sa solution dans un diagnostic spécifique.

TABLEAU VII-I — Problèmes les plus souvent rencontrés en fonction des


aquifères et périodicité de la maintenance.

Type de roche aquifère Problèmes les plus souvent Fréquence d’entretien


rencontrés (forage AEP)
Colmatage argilo-sableux,
précipitation de fer, présence
d’incrustations, colmatage
Alluvions biologique, baisse de 2 - 5 ans
rendement, rupture du
tubage, ...
Colmatage des fissures,
Grès rupture de tubage, présence 6 - 10 ans
de sable, corrosion.
Colmatage du réseau de
Calcaires fissures et de fractures, 6 - 12 ans
présence d’argiles,
précipitation de carbonates.
Laves basaltiques Colmatage par des argiles, 6 - 12 ans
dépôts.
Colmatage du réseau de
Métamorphique fissures par des argiles, 12 - 15 ans
minéralisation des fissures.
Colmatage par des ions (fer-
Sédiments consolidés manganèse), réduction du 6 - 8 ans
débit.
Intrusion de sable et/ou
Sédiments non consolidés d’argiles, incrustations, 5 - 8 ans
colmatage biologique, ...

La figure 7-1 indique comment s’organise le diagnostic préalable à toute


opération de réparation.
Dans le cadre de la remise en état d’un ouvrage de captage, on distingue deux
types de réparations : la régénération et la réhabilitation.
— Régénération : c’est l’ensemble des méthodes hydrauliques et chimiques
employées pour lutter contre le vieillissement des forages d’eau, afin d’en augmenter
le rendement.
— Réhabilitation : fait appel aux mêmes procédés mais en les appliquant à des
ouvrages momentanément abandonnés et dont on souhaite la remise en état pour
l’exploitation (le diagnostic sera ici établi d’après une nouvelle courbe caractéristique
et éventuellement une auscultation vidéo, en l’absence de données régulières sur
l’exploitation).
Réhabilitation des forages 283

Dans ce chapitre, nous utiliserons indistinctement les termes de réhabilitation et


de régénération.

Identification de la
nature des travaux
à entreprendre

Définition du programme
technique de l'intervention

Contrôle des Choix des moyens


conditions d'exécution à mettre en œuvre

INTERVENTION

Figure 7-1
Schéma du diagnostic préalable (d’après document GEOTHERMA, 1991 - collection inter-
agences de l’eau).

Une fois le diagnostic de vieillissement établi et le type de dégradation défini, la


régénération d’un forage va généralement comporter deux phases :
— phase 1 : procédés pneumatiques ou hydrauliques,
— phase 2 : traitements chimiques.
Le choix du procédé de régénération adapté au type de dégradation est
fondamental, un traitement inadapté pouvant accentuer la baisse de rendement d’un
ouvrage.

7.1 Traitement de l’ensablement


L’ensablement d’un captage d’eau souterraine trouve le plus souvent son origine
dans la corrosion, la surexploitation ou une mauvaise conception de l’ouvrage.
Malheureusement il n’y a pas vraiment de remède rationnel contre l’ensablement
d’un ouvrage définitivement équipé.
Devant un ouvrage ensablé, le premier problème auquel on se trouve confronté
est de savoir précisément d’où vient le sable. On peut cependant distinguer
l’ensablement accidentel de l’ensablement permanent.
Traitement de l'ensablement 284

— Dans le premier cas, l’ensablement est produit sous l’effet de la rupture de la


crépine (dans ce cas, on peut retrouver des éléments du massif filtrant dans le forage)
ou éventuellement d’un désordre hydraulique important dû à un surpompage.
— Dans le second cas, l’ensablement est progressif et peut devenir un réel
problème pour l’ouvrage au terme de plusieurs années. Cette situation est plus
caractéristique d’une mauvaise conception (mauvais choix de l’équipement et du
massif filtrant, mauvais développement du forage) ou d’une surexploitation.
Quoi-qu’il en soit, il sera nécessaire, dans un premier temps, d’enlever le dépôt de
sable qui encombre le forage (parfois sur des hauteurs de plusieurs mètres). Cette
opération peut se faire de diverses façons en fonction de la profondeur ou du diamètre
du captage.
— Air lift ou émulseur. Cette technique consiste à introduire un dispositif
d’émulseur (cf. chapitre 3.5) et l’air comprimé injecté au fond de l’ouvrage permet de
faire remonter le sable en surface. Ce procédé nécessite des moyens qui ne sont
raisonnablement applicables qu’aux forages de petits diamètres et de profondeur
faible à moyenne (jusqu’à une centaine de mètres environ). Dans le cas contraire, les
débits et les pressions d’air deviendraient trop importants.
— Curage. C’est une opération mécanique qui permet d’extraire le sable à l’aide
d’une soupape descendue au fond du forage. C’est un système simple mais qui est le
plus souvent proscrit car l’outil est descendu rapidement pour permettre à la soupape
de s’enfoncer dans le sable et les détériorations de l’équipement sont fréquentes.
— Pompage. Lorsque les ouvrages sont peu profonds, on peut envisager de
procéder au désensablement par pompage, soit avec une pompe spécialement conçue
à cet effet (pompe dessableuse), soit à l’aide d’hydro-éjecteur si les volumes à
extraire sont peu importants.
— Traitement à la pompe par pistonnage. A l’extrémité de l’aspiration on
descend un piston de désensablement (cf. figure 7-2).
Les pistons de désensablement sont constitués par 2 ou 3 disques en bois joints
entre eux par des disques en cuir ou en caoutchouc. L’ensemble est manoeuvré par le
treuil à l’aide des tiges de forage.
On peut faire varier la distance qui sépare les deux disques, ce qui permet de
limiter l’action de désensablement aux zones voulues. A un débit donné, la vitesse
d’entrée dans le panier est supérieure à celle qu’il y aurait si l’eau entrait dans la
crépine toute entière. Il s’ensuit un lavage de la formation plus intensif dans un temps
plus court. A chaque zone traitée, on augmente progressivement le débit. Quand le
désensablement par paliers est terminé, on enlève le panier de désensablement et on
pompe dans l’ouvrage à un débit une fois et demie supérieur à celui du régime
permanent d’exploitation.
Les agitations à la pompe ont pour but d’agiter la formation et le massif de
graviers à proximité de la crépine et de détruire ainsi les ponts et les vides anormaux
qui pourraient s’y créer. On procède à des mises en route et des arrêts brutaux de la
pompe. En pompage, l’eau coule dans une direction donnée. A l’arrêt, la descente de
l’eau dans la tuyauterie — la pompe n’a pas de clapet de pied — provoque un
mouvement inverse qui agite la formation. Ces mouvements brutaux demandent que
les crépines présentent des caractéristiques mécaniques suffisantes.
Traitement de l'ensablement 285

Tubage du forage

Mouvement de va-et-vient
devant le tubage

Disque en cuir ou
en caoutchouc

Disques en bois

Figure 7-2
Piston de dessablage.

Quelle que soit la méthode employée, cette opération n’est que provisoire car elle
n’élimine pas la cause de l’ensablement. C’est la raison pour laquelle il faudra, à la
fin, effectuer un examen complet pour cerner les causes exactes de la déficience.
— Si le sable pénètre dans le forage par une crépine perforée ou dont les
ouvertures sont mal dimensionnées, on pourra équiper le forage avec une nouvelle
crépine placée à l’intérieur de l’ancienne. Ce double crépinage peut limiter les
arrivées de sable à condition que la nouvelle crépine soit choisie convenablement (par
exemple une crépine Johnson à très faible slot et fort coefficient d’ouverture). Il
faudra mettre en place un nouveau massif de gravier entre les deux crépines. Les
inconvénients d’un tel procédé sont les suivants :
• coûts élevés,
• diamètre intérieur du forage réduit (problème pour installer la pompe),
• pertes de charges supplémentaires dans le forage, donc diminution de débit.
— Si le colmatage est dû à des venues de sable liées à des vitesses de pénétration
trop importantes, la solution la plus sage est de limiter le débit d’exploitation de
manière à réduire les vitesses de l’eau au droit des équipements. Cette solution doit
être associée à un nettoyage périodique du forage et à de fréquentes vérifications de
l’usure de la pompe.
Traitement de l'ensablement 286

7.1.1 Dispositif de distribution uniforme d’afflux


Le professeur KIRSCHMER de la « Technische Hochschule Darmstadt » a
démontré expérimentalement que les champs de vitesses de l’eau à travers une
crépine n’étaient pas uniformes. La vitesse d’afflux est maximale à l’extrémité
supérieure (près de la pompe) et diminue rapidement au point d’être pratiquement
nulle dans la partie inférieure de la crépine. Il est apparu que la vitesse de l’eau
traversant la crépine suit une loi exponentielle. Dans un forage en exploitation ce
phénomène induit des vitesses d’autant plus élevées que l’on se rapproche du sommet
de la crépine. Il se créé ainsi des lignes de flux divergentes dans le bas de la crépine
et convergentes en haut du massif filtrant. Ce phénomène induit des différentiels de
vitesse dans le massif filtrant et dans l’aquifère. Vitesses qui peuvent être localement
très élevées et responsables d’entraînement de sable et propices au développement
bactérien.
Pour pallier ce problème, il est possible d’installer un dispositif de distribution
uniforme d’afflux (DDUA). Le DDUA peut être assimilé à une seconde crépine où
les fentes ont été dimensionnées, en fonction des caractéristiques du puits, de manière
à ce que le flux soit constant sur toute la hauteur de la partie captante. Ce procédé a
eu des résultats spectaculaires notamment dans des forages ensablés où
l’uniformisation des flux a diminué considérablement les apports de sable (jusqu’à
99 %).
Le DDUA peut également être utilisé avec succès dans le cas de forage présentant
des risques d’incrustation et/ou de développement bactériens.
Le DDUA a fait l’objet d’un dépôt de brevet et est produit par EUCASTREAM
(voir adresses des fournisseurs au chapitre X). Le coût du DDUA est de l’ordre de
5 % du coût de l’ouvrage, il est évidemment fonction des caractéristiques
hydrodynamiques du puits et surtout de sa complétion.

7.2 Traitement du colmatage mécanique


Le colmatage mécanique est dû à un entraînement mécanique de matériaux en
suspension tels que vases, limons, argiles ou éléments très fins de grès ou sables
pulvérisés. Il se produit généralement sous l’effet d’une déstabilisation de la
formation aquifère dans l’environnement proche du captage. Il concerne plus
particulièrement les forages ayant fait l’objet de surpompages excessifs et
incontrôlés, même temporaires. Sous l’effet des perturbations hydrauliques
provoquées par le pompage, le massif de graviers qui entoure la crépine est
déstabilisé, entraînant des pertes de charges supplémentaires et par conséquent une
réduction de débit.
A titre d’exemple, voyons comment une eau à 100-150 ppm de matières en suspension
(MES) est colmatante. Dans un forage de 12”, 1 mg/litre au débit de 120 m3/h, donne un
dépôt de 3 kg par 24 heures. Tous les vides peuvent être comblés sur un rayon de 15
centimètres en 7 à 8 mois.
Traitement du colmatage mécanique 287

7.2.1 Traitement physique


Le colmatage mécanique est dû aux éléments fins qui s’accumulent à l’intérieur
du massif de gravier (colmatage interne), sur sa face extérieure (colmatage externe)
ou qui bouchent les ouvertures des crépines. Ce phénomène aboutit à une réduction
de la perméabilité et par conséquent à une baisse du débit d’exploitation du forage.
Plusieurs techniques peuvent être mises en œuvre, essentiellement basées sur le
principe de déstabilisation du massif filtrant (destruction du granoclassement qui s’est
établi).
Avant tout, comme pour le désensablement, il faudra procéder à l’élimination des
fines, y compris d’une partie de la fraction argileuse. Là encore, il faut éviter
l’utilisation de la « soupape », cause fréquente de détérioration des crépines.

a) Pompage à l’émulseur
La technique du pompage à l’émulseur décrite précédemment peut être mise en
œuvre efficacement en y ajoutant des pistons de désensablement, permettant ainsi un
traitement par tranche de terrain.

b) Surpompage contrôlé
Cette méthode consiste à pomper en augmentant progressivement le débit. On
démarre avec un débit égal au cinquième du débit final et, par hausses successives, on
termine à un débit deux fois supérieur à celui de l’ouvrage en exploitation
permanente. A chaque augmentation, l’eau ressort chargée de sable et d’argile et,
progressivement, devient de plus en plus claire. Le temps de pompage peut être très
long (plusieurs jours à raison de 24 heures de pompage par jour).
Dans le cas de terrains très hétérogènes, avec des zones à perméabilités variées,
les zones à éléments fins risquent de ne pas être désensablées. C’est l’inconvénient de
cette méthode qui met en exploitation d’un bloc toute la zone captée. Pour y
remédier, il faut effectuer un pompage par paliers progressifs en traitant une zone
après l’autre.

c) Traitement à l’air comprimé


L’envoi d’air comprimé dans un forage, au-dessus du niveau statique, crée une
surpression qui refoule l’eau dans la formation aquifère à travers les crépines. Il faut
évidemment prendre soin d’empêcher toute communication avec l’extérieur afin de
travailler dans un milieu fermé. Par la suite, en décomprimant lentement ou
brutalement, on provoque un afflux de l’eau dans l’ouvrage. La répétition de ces
mouvements agite le massif de gravier et la formation aquifère elle-même, cela
entraîne une désagrégation du terrain et tout particulièrement des éléments fins,
meubles et peu fixés comme les particules de sable ou d’argile collées sur les crépines
ou sur les grains de gravier.
Traitement du colmatage mécanique 288

L’importance du rabattement est fonction de la pression d’air comprimé. Avec


une pression de 7 kg, la nappe peut baisser d’environ 70 mètres. On nettoie ensuite
l’ouvrage avec un émulseur et on termine avec un pompage.
Cette méthode n’est cependant pas sans danger pour l’ouvrage. Il faut s’assurer au
préalable que le système de captage peut résister aux pressions mises en œuvre et que
les crépines ne risquent pas de s’écraser.
En présence d’un massif de graviers, on peut craindre un bouleversement qui
provoque des passages privilégiés au sein de la formation. C’est probablement en
milieu autodéveloppable que ce procédé peut être utilisé avec le moins de risques.
Toutefois, bien qu’excellent pour nettoyer les ouvrages, ce procédé ne supprime pas
les causes du colmatage.

d) Injection d’eau
L’injection d’eau avec ou sans pression permet de nettoyer les ouvrages colmatés
par des dépôts tendres et peu fixés. Il est intéressant de l’utiliser en complément des
autres méthodes, notamment celle du nettoyage à l’air comprimé ou par air lift
(méthode qui reste la plus pratique à mettre en œuvre).
La méthode la plus simple consiste à débiter directement dans l’ouvrage à partir
du sol ou du haut du tubage. L’injection ainsi effectuée passe du forage dans la
formation à travers les fentes de la crépine et l’action du contre-courant est de nature
à décoller et à déplacer les dépôts qui sont entraînés dans la formation. L’action
décolmatante est d’autant plus efficace que le débit injecté est plus important. On
peut cependant toujours craindre que des passages privilégiés ne se forment et qu’on
ne nettoie pas d’une manière uniforme toute la formation. Toutefois, on pallie en
partie cet inconvénient en faisant suivre l’injection d’une série de pompages qui
nettoient l’ouvrage des particules mises en suspension. Ces pompages s’imposent
d’autant plus qu’il convient de ne pas « pousser » trop loin dans la formation les
particules décollées. C’est pourquoi on procédera en alternant injection d’eau,
pompage, injection d’air comprimé éventuellement, le temps et le débit d’injection
augmentant progressivement.
On a souvent intérêt à agir directement là où les dépôts se forment, et plus
spécialement en face de la zone captée. On pratiquera avec succès la méthode du jet
horizontal qui consiste en une injection horizontale, face aux crépines, par l’intérieur
de l’ouvrage.
L’appareil est du même type que celui que nous avons décrit au chapitre 3
(développement au jet sous pression, (cf. figure 3-14). Il est constitué par des
injecteurs (tubes avec un ajutage calibré de 4 à 10 mm), au nombre de 1 à 4 placés
horizontalement à l’extrémité d’un tube, de 50 mm de diamètre fermé à sa partie
inférieure et qu’on descend dans l’ouvrage en face des crépines. On prévoira que les
injecteurs puissent être déplacés sur toute la hauteur de la zone captée et que le tube
d’injection puisse tourner sur lui-même aux fins d’intéresser toute la surface crépinée.
En surface, le tube d’injection est relié à une pompe d’injection.
Il existe plusieurs systèmes, basés sur le principe du jet rotatif ou du nettoyage
réversible ; nous citerons pour mémoire les deux procédés proposés par la Société
Carela : les systèmes HD et KW.
Néanmoins, il est rare que le décolmatage mécanique soit suffisant, en particulier
lorsqu’on se trouve en présence d’ouvrages très anciens avec colmatage par
Traitement du colmatage mécanique 289

particules fines argileuses. C’est pourquoi il est souvent nécessaire de prévoir un


traitement chimique complémentaire.

7.2.2 Traitement chimique


En complément des procédés Carela HD et KW, la société Carela préconise
l’utilisation d’un de ses produits : le Carela bio plus forte, composé d’acides
chimiquement purs, de détergents, d’inhibiteurs, d’agents auxiliaires, et de peroxyde
d’hydrogène (eau oxygénée). Il faut noter que ce produit a été « agréé alimentaire »
par les autorités européennes pour être utilisé dans le domaine de l’eau potable.
Dans le cas du système Carela HD, le fabricant préconise l’utilisation de son
produit à raison de 1 litre de « plus » pour 30 litres de « bio », à une concentration de
10 %, pour un temps de contact de 12 à 24 heures : la documentation précise que
durant ce temps de réaction, les dépôts et incrustations seront totalement éliminés. De
plus, le forage sera parfaitement désinfecté. Des agents mouillants hydrophiles
confèrent au « Carela bio plus forte » une bonne capillarité ; ce dernier agit ainsi en
profondeur dans le massif filtrant et jusque dans l’aquifère.
Dans le cas du procédé KW, la mise en œuvre du produit est différente, le
principe étant d’obstruer le tube crépiné sur trois niveaux avec trois corps de jante qui
forment deux chambres, isolées de l’eau qui se trouve au-dessus et en-dessous du
système. Une pompe injecte le produit dans ces deux chambres, et par conséquent
dans le flux qui traverse le massif filtrant. Le corps de jante central est équipé d’une
pompe-hélice à moteur qui crée une différence de pression entre les deux chambres.
La surpression dans une des chambres et la dépression dans l’autre créent un flux de
produit dans la crépine et le gravier. L’inversion de la pompe-hélice inverse
également le flux.
La tête de régénération (cf. figure 7-3) est composée de brosses rigides ou
souples, d’un support de brosses à fentes hélicoïdales, d’un piston à trois paliers
munis de lèvres flexibles et de quatre buses haute pression décalées à 90° permettant
le nettoyage et/ou le dosage du produit. La particularité de ce système réside dans la
combinaison du nettoyage mécanique et hydraulique des tubes crépinés. Les trois
paliers du piston provoquent des surpressions et dépressions alternatives dans la
colonne d’eau. Les courants forcés à travers la crépine diffusent les réactifs dans le
massif de gravier.
D’autres types de produits peuvent être utilisés pour dissoudre les fines
argileuses ; il s’agit des phosphates de sodium : l’application de ces produits peut être
très efficace à condition que le type de phosphate soit adapté au cas à traiter.
Traitement du colmatage mécanique 290

Terrain

Crépine

Massif filtrant

Figure 7-3
Schéma de la tête de régénération CARELA© France

Le choix des produits impose la connaissance de ceux-ci, et de leurs propriétés.


Les phosphates de sodium sont dérivés des différents acides phosphoriques.
— Les sels de l’acide orthophosphorique H3PO4 que l’on trouve dans le
commerce sous forme anhydre ou cristallisée :
• orthophosphate monosodique, NaH2PO3
• orthophosphate disodique, Na2HPO4
• orthophosphate trisodique, Na3PO4
— Les acides polyphosphoriques H4P2O7n HPO3 sont très nombreux. Le
premier terme de la série est l’acide pyrophosphorique H4P2O7 dont les sels les plus
connus sont :
• pyrophosphate disodique ou acide Na2H2P2 O7,
• pyrophosphate tétrasodique ou neutre Na4P2O7.
Le second terme est l’acide tripolyphosphorique H5P3O10 dont le sel de sodium le
plus connu est le tripolyphosphate pentasodique Na5P3O10. Les termes suivants
constituent les polyphosphates vitreux qu’on caractérise souvent par leur teneur en
P2O5. Quand celle-ci est inférieure à 63 %, on dit que l’on a affaire à des
polyphosphates chaînes courtes. Dans leur formule P2O7Na4n PO3Na, n est égal ou
supérieur à 2. On y trouve :
• tétrapolyphosphate à 60,5 % de P2O5,
• pentapolyphosphate à 62 % de P2O5.
Traitement du colmatage mécanique 291

Les polyphosphates chaînes longues ont une teneur en P2O5 supérieure à 63 %.


Leur formule est P2O5n NaPO3 avec n toujours très élevé. A la limite on a
l’hexamétaphosphate dont la teneur théorique en P2O5 est de 69,7 % et celle des
produits commerciaux de l’ordre de 68 %.
— Les acides métaphosphoriques (HPO3) dont le premier terme connu est le
trimétaphosphate de sodium (NaPO3)3.
Ces sels ont quatre propriétés essentielles :
— Le pouvoir complexant qui leur permet de fixer des anions ou des cations pour
donner de nouveaux corps appelés complexes.
— Le pouvoir de séquestration est celui de former avec un sel métallique soluble
un complexe dans lequel le métal perd ses propriétés cationiques usuelles. On conçoit
qu’en présence d’eau ferrugineuse ou de précipités ferriques, cette propriété permette
l’emploi des phosphates de sodium.
— Le pouvoir de solubilisation caractérise l’aptitude des phosphates à former
des sels complexes solubles, en fixant des sels insolubles dans leur molécule. Cette
propriété paraît intéressante pour détartrer les incrustations de carbonate ou de sulfate
de calcium par exemple.
— Le pouvoir de dispersion ou de peptisation est une propriété qui permet de
disperser et de fluidifier. Elle est à retenir en présence d’un milieu argileux.
Ces propriétés varient avec le procédé de préparation des phosphates, c’est ainsi
que le pouvoir complexant augmente avec la longueur de la chaîne. Celui du
pyrophosphate est faible tandis que celui de l’hexamétaphosphate est le plus élevé.
Au contraire, le pouvoir dispersant augmente quand la longueur de la chaîne
diminue : celui des pyrophosphates est donc très puissant, alors que celui des
polyphosphates vitreux à très longues chaînes est moyen à leur pH propre de 6 à 8.
En vue de traiter un milieu sablo-argileux aquifère, il faut obtenir un phénomène
de défloculation des argiles. Dans ce cadre, il apparaît que les polyphosphates sont de
nature à donner satisfaction, tandis que les orthophosphates sont à écarter ; les
polyphosphates vitreux présentent un certain intérêt. En vérité, la défloculation est un
problème complexe et l’on a souvent recours à des produits dans lesquels on associe
au pouvoir dispersant des propriétés complexantes, ou, inversement, des propriétés
dispersantes à un produit essentiellement complexant. On entre là dans le domaine
des polyphosphates spéciaux dont l’exemple le plus typique est le Calgon aux Etats-
Unis et le Giltex en France.
Les propriétés des phosphates de sodium varient également dans le temps. Les
pyrophosphates, polypyrophosphates et métapyrophosphates sont en effet produits à
partir des orthophosphates et reviennent progressivement à cette forme. Ce
phénomène de réversion est accéléré par les températures élevées. Il varie avec le pH
et augmente quand le pH est inférieur à 7 et au-dessus de 8,5 mais cette augmentation
est plus rapide avec un pH acide qu’avec un pH alcalin.
Nous donnons ci-après quelques valeurs de l’hydrolyse des polyphosphates en
orthophosphates, en fonction du pH, pour des températures comprises entre 20 et 40°
C.
— Pyrophosphate : pH 7, 40°C, 1 % en 60 heures.
— Pyrophosphate : pH 9, 40°C, 1 % en 400 heures.
— Tripolyphosphate : pH 7, 40°C, 1 % en 30 heures.
— Tripolyphosphate : pH 9, 40°C, 1 % en 100 heures.
Traitement du colmatage mécanique 292

— Métaphosphate : pH 7, 25°C, 1 % en 60 heures.


— Métaphosphate : pH 9, 25°C, 1 % en 90 heures.
En conséquence, les propriétés des phosphates de sodium varient avec les
conditions d’emploi : température, pH, concentration. Aussi convient-il de préciser
quelque peu les conditions d’emploi des divers sels du commerce.
En ce qui concerne la température, il semble qu’entre 20 et 40°C les pouvoirs
dispersants et complexants des sels de sodium varient peu. Les milieux naturels dans
lesquels on aura à faire agir ces produits sont à une température comprise entre 20 et
40°.
Les pyrophosphates du commerce se trouvent sous les deux formes suivantes :
— pyrophosphate disodique Na2H2P2O7, pH 4,2,
— pyrophosphate tétrasodique Na4P2O7, pH 10,2.
L’association de ces deux sels permet de balayer toute la zone de pH comprise
entre 4,2 et 10,2 et cela donne la possibilité de s’ajuster exactement à un pH choisi à
l’avance. Le pyrophosphate disodique permet d’ajuster un pH lorsqu’on se trouve en
milieu trop alcalin.
Les polyphosphates du type hexamétaphosphate ont souvent un pH acide, 6 à 7.
On peut augmenter leur pH si besoin est. Les pH des polyphosphates spéciaux sont
variés. Les ph du Giltex E et deGiltex N, sont respectivement 7,1-7,6 et 8,3-8,8.
Nous retiendrons la possibilité qu’offrent les phosphates de sodium de s’ajuster à
un pH choisi à l’avance.
Nous voyons que les conditions de mise en œuvre de tel ou tel produit varient en
fonction de nombreux paramètres. Il est clair qu’il n’y a pas de produits universels
pouvant convenir à tous les cas à traiter, et malheureusement nous sommes obligés de
constater que ce type de traitement est rarement bien appliqué.
Dans le cadre du traitement aux polyphosphates, il y généralement trois causes
majeures d’échecs.
— 1e cause. D’après ce qui a été exprimé au sujet du pH du milieu pour obtenir
la défloculation des argiles, il apparaît que celui-ci doit être basique, de l’ordre de 9.
Avec un pH inférieur à 5, l’argile, au contraire, flocule.
Une cause d’échec paraît donc résider dans l’emploi seul du pyrophosphate
disodique ou acide, qui a un pH de 4-4,3, en milieu acide et même en milieu basique,
car il est douteux que l’on puisse obtenir un pH du milieu compatible avec la
défloculation des argiles. A ce sujet d’ailleurs, les entreprises utilisatrices sont à peu
près unanimes à avoir constaté l’inefficacité de ce produit. Toutefois, cela ne
condamne pas d’une manière systématique son emploi si, au préalable, on traite le
milieu, ou le produit, avec une substance adjuvante susceptible de relever le pH
comme, par exemple, la soude caustique NaOH, ou le carbonate de sodium Na2CO3.
On peut aussi le mélanger avec du pyrophosphate tétrasodique ou neutre dont le
pH est compris entre 10,1 et 10,6. Nous avons déjà traité ce sujet qui mérite d’être
retenu, car il paraît a priori intéressant d’utiliser le grand pouvoir de dispersion qui
caractérise ce pyrophosphate.
Traitement du colmatage mécanique 293

Une constatation s’impose : on ne connaît pas les pH du milieu au moment des


traitements, et il est par la suite difficile d’expliquer les résultats obtenus.
Après un traitement à l’acide chlorhydrique, il se peut que des hydroxydes
ferriques se forment et, emprisonnant les particules argileuses, forment un « gel ». Il
n’y a plus seulement action des phosphates de calcium sur les argiles, mais une action
sur des composés ferriques.
En conclusion, le pH seul n’est pas suffisant pour expliquer les résultats obtenus,
bien qu’il faille rechercher l’obtention d’un milieu basique pour défloculer les argiles.

TABLEAU VII-I — Caractéristiques de quelques polyphosphates.

Nom du produit % P 2O 5 Densité pH Solubilité Pouvoir Pouvoir


solution à dans 100 g complexant dispersant
1% d’eau
Pyrophosphate
disodique ou 62 - 63 1,15 4 - 4,3 13 g à 20°C faible très fort
acide, P2O7Na2H2
Pyrophosphate 5,5 g à 20°C
tétrasodique ou 52 - 52,5 1,10 10,1-10,6 12,5 g à faible fort
neutre, P2O7Na4 40°C
22 g à 60°C
Métaphosphate
tétrasodique ou 67,5 - 1,40 6,30 illimitée fort moyen
neutre, (NaPO3)n 68,5

Giltex E (mélange
de 66 - 67,5 1,30 7,1 - 7,6 25 g à 20°C fort moyen
polyphosphates)

— 2e cause. Une seconde cause d’échec réside dans les quantités de produits à
mettre en œuvre. Un trop faible volume ne produira pas d’effet. Une trop grande
quantité peut produire un effet contraire à celui que l’on souhaitait. Rappelons qu’une
augmentation de la concentration du pyrophosphate tétrasodique est une cause du
renversement de sa propriété défloculante qui devient floculante. Il est donc
indispensable de connaître les quantités à mettre en œuvre suivant la nature du
produit utilisé, et suivant le rôle qu’on veut lui faire jouer. On peut penser, en effet,
que les quantités varient suivant qu’on désire disperser les argiles, complexer des
ions de calcium ou des ions ferreux.
D’une manière générale, les quantités de produits à utiliser sont exprimées en
fonction du volume d’eau contenu dans le forage. Les renseignements obtenus sur ce
sujet sont exprimés ci-après :
• Calgon aux Etats-Unis : 1,7 à 3,4 %
• Progil indique pour les produits français, tel le Giltex, une valeur de 2 %.
Cette valeur est à prendre en compte pour les autres produits,
pyrophosphates et hexamétaphosphates.
Traitement du colmatage mécanique 294

• Layne USA propose, pour des produits de sa fabrication, une proportion de


1,2 % dans le cas de régénération d’ouvrages, et dans « The Johnson
National Drillers Journal » de juillet-août 1954, on lit, concernant le
traitement de la boue de forages, qu’il ne faut pas dépasser 0,6 % pour le
pyrophosphate tétrasodique, le tripolyphosphate, l’hexamétaphosphate et le
septaphosphate.
Théoriquement, le volume d’eau à prendre en considération est celui situé juste en
face de la crépine, sur toute la hauteur de cette dernière, majorée pour tenir compte
des phénomènes d’osmose ou de dilution locale dans l’eau au-dessus et au-dessous de
la crépine. Ce volume doit être augmenté du volume des vides de la formation au
droit de la crépine intéressée par le traitement.
— 3e cause. On sait qu’une troisième cause d’échec peut résider dans la durée
des propriétés des produits. Rappelons que les propriétés défloculantes du
pyrophosphate tétrasodique par exemple n’ont pas un caractère permanent et ne
durent que quelques heures. La littérature est à peu près unanime pour conseiller de
ne laisser les produits en contact avec les terrains qu’un laps de temps compris entre
24 et 36 heures, au maximum 48 heures. Nous avons signalé quelques valeurs de
l’hydrolyse des polyphosphates en orthophosphates en fonction du pH.
Enfin, l’expérience semble montrer que le Giltex par exemple ne doit pas rester
en contact avec le terrain plus de 12 heures.

7.3 Traitement du colmatage par les carbonates


Sous le terme de carbonates, on désigne les mélanges de carbonates, de
bicarbonates, de sulfates alcalino-terreux, d’hydrates et d’hydroxydes. Sous l’action
de différents facteurs physiques (vitesse, aération, variations de pression, etc.), l’eau
de la nappe est amenée parfois à déposer sur la partie captante de l’ouvrage (crépine,
drains, massif de graviers) des concrétions calcaires ou ferrugineuses ou, quelque
fois, les deux en même temps.
Cet entartrage ne se produit pas forcément de manière régulière. Il peut toucher
certaines parties du système captant et laisser subsister des passages suffisants pour
maintenir un certain débit. La réduction de productivité de l’ouvrage reste néanmoins
l’indice caractéristique du colmatage de l’ouvrage.
Le phénomène d’entartrage physico-chimique peut être influencé par les
conditions d’exploitation, par exemple lorsque l’ouvrage est soumis à de fréquents
démarrages et arrêts du pompage.
Le colmatage physico-chimique peut être également une conséquence de la
corrosion. L’attaque des métaux constitutifs de certaines crépines peut former des
concrétions qui obstruent les orifices provoquant des colmatages localisés ou
généralisés de dépôts ou incrustations, visibles en auscultation vidéo.
Une étude récente [AVOGADRO A., MARSILY G. de, 1983] rassemble les
équations proposées par différents auteurs pour décrire le mécanisme de filtration et
de rétention des colloïdes. La concentration de ces particules dans la solution décroît
logarithmiquement avec la distance parcourue dans le filtre, pendant que l’efficacité
du filtre se détériore selon une loi semblable en fonction du temps. Mais il semble
qu’il n’y ait pas accord sur les paramètres de ces modèles mathématiques au sein de
la communauté scientifique.
Traitement du colmatage par les carbonates 295

Le vieillissement des forages induit une baisse progressive du rendement


essentiellement due à un colmatage des parties crépinées. L’origine et la composition
de ces dépôts s’avèrent très variables. Très souvent l’analyse des causes n’est pas
faite et l’exploitant se contente de réduire le débit de la pompe par vannage jusqu’à
abandon de l’ouvrage. Cette opération entraîne une baisse de rendement de la pompe
et un coût d’exploitation plus élevé alors qu’il existe des techniques qui permettent de
ralentir le colmatage ou même de régénérer les ouvrages. La réhabilitation nécessite
cependant la parfaite connaissance des caractéristiques du forage ainsi que la mise en
œuvre d’études complémentaires du point de vue hydrogéologique et chimique :
— identification des caractéristiques hydrogéologiques et notamment de leurs
variations dans le temps, par la comparaison de courbes caractéristiques par
exemple ;
— définition des variations de la qualité chimique de l’eau par une campagne
d’analyses physico-chimiques ;
— analyse des dépots colmatants et de leur extension, il n’est pas systématique
que toute la hauteur crépiné soit touchée ;
— reconnaissance de l’équipement du forage, certains produits de traitement
étant contre-indiqués en présence de métaux comme l’acier galvanisé, le zinc, etc.,
— choix du traitement le mieux adapté et définition d’une stratégie de
réhabilitation comprenant une succession de traitement physiques (action macanique
et hydraulique) et chimiques (dissolution des calcaires et stérilisation).
Les produits les plus couramment utilisés pour le traitement du colmatage par les
carbonates sont l’acide chlorhydrique (ou muriatique) et l’acide sulfamique pour les
acides. Le produit commercial le plus courant est à 33 % (HCl à 22°Bé) et il est
ramené à environ 10 % lors de l’opération de décolmatage. Compte tenu du pH acide
et de la teneur en chlorures du milieu, les métaux acier, inox, bronze sont attaqués.
On utilise également des polyphosphates dans certains cas particuliers (présence de
dépôts d’argile ou de limon). Les acides sont bien entendu passivés par des
inhibiteurs pour rendre leur action compatible avec les constituants métalliques de
l’ouvrage.
Les passivants les plus utilisés sont :
— le formol mais il contient souvent un anti-oxydant à base de méthanol qui
présente un caractére toxique, il n’est donc pas recommandé de l’utiliser ;
— l’acide sulfamique en poudre, moins corrosif vis-à-vis des métaux que l’acide
chlorhydrique mais son coût est plus élevé ;
— des acides minéraux ou organiques sont parfois rencontrés dans des
formulations spécifiques (phosphorique, ascorbique, etc.).
Remarquons que dans tous les cas et quelque soit l’acide utilisé et même en
présence d’un passivant, le zinc et l’acier galvanisé sont corrodés et sont donc à
proscrire dans les équipements de forage dont les eaux sont calcaires et incrustrantes.
Des combinaisons de produits en mélange sont proposées par certains
fournisseurs et prestataires qui les mettent en œuvre. Il s’agit principalement des
produits suivants :
— Herli-rapid-TWB-FCM-l- (liquide) distribué en France par les établissements
Victor HEINRICH (67), et fabriqué par FELDMANN-Chimie.
Les principaux éléments entrant dans la composition de ce produit sont les
suivants, les pourcentages indiquant les concentrations :
Traitement du colmatage par les carbonates 296

• Acide formique à 85 %
• Acide phosphorique à 85 %
• Acide chlorhydrique à 37 %
• Acide isopropylique à 99 %
• Inhibiteurs FCM IV/1 - FCM IV/2 - FCF IV/8 - FCM IV/10
• Alcool gras 5 Vol. aethix
• Acide ascorbique DAB 7
Ce produit est autorisé par le ministère chargé de la santé et a recu un avis
favorable du conseil supérieur d’hygiène publique de France.
— ID 60, fabriqué par la société DARC et commercialisé par DEGREMONT.
C’est un passivant pour acide chlorhydrique à action bactéricide. Il est composé de
cinq éléments (propiolate d’amine, mouillant, inhibiteur, notamment), chaque
constituant serait sur une liste agréée alimentaire. Il présente l’avantage de pouvoir
être suivi grâce à un traceur incorporé.
— Carela bio-forte et Carela plus distribués par CARELA-France (67).
Ces produits comportent un mélange d’éléments de base (acide chlorhydrique
pur, acide citrique, acide tartrique) et d’inhibiteurs de corrosion contenant des
détergents non moussants. Un additif à mélanger au moment du traitement est
constitué essentiellement d’eau oxygénée.
— Acide Nu-well® et JWR (Johnson Well Regenerator) distribués par Johnson
Filtration Systems, France.
Le premier produit se présente sous forme de comprimés à base d’acide
sulfamique, de manipulation relativement facile et le second, sous la forme d’une
composition d’acides chimiquement purs, organiques et minéraux, ainsi que des
agents biodégradables.
Un des problèmes de fond consiste à savoir si il est raisonnable de réaliser une
opération de décolmatage en laissant la pompe d’exploitation en place ou si au
contraire il vaut mieux retirer la pompe qui risque d’être altérée par les produits de
décolmatage. Une étude récente réalisée par le CIRSEE [J. CORDONNIER, 1992]
montre qu’il n’y a pas de réponse simple sur les plans techniques et économiques.
L’attention doit notamment être portée sur :
— l’importance du diagnostic,
— le choix des réactifs et le processus de mise en œuvre,
— l’âge du captage et de la pompe,
— la fréquence des interventions.
Ces observations doivent, bien sûr, être complétées en tenant compte des
observations des exploitants et des conditions locales (nombre de forages et âge, type
de dépôts, équipements du secteur, matériaux en présence, systématique de
réhabilitation et expérience, etc.) qui peuvent être des facteurs prépondérants au
niveau des choix et des coûts. Ceci devrait permettre une meilleure approche des frais
d’exploitation en incluant la main d’œuvre dans des bilans comparatifs.
Traitement du colmatage par les carbonates 297

D’une façon générale la mise en œuvre de ces produits nécessite généralement un


matériel spécial permettant d’effectuer au préalable, ou en même temps, un brossage
de la paroi et une injection du produit sous pression et par paliers. Il convient donc de
faire appel à des entreprises spécialisées.
Enfin, on relève, dans la littérature, des avis très contradictoires sur l’efficacité de
ces traitements, tout à fait positifs pour certains et sans effet concluant pour d’autres.
Il apparaît toutefois que ces jugements n’ont pas été étayés par un exposé des
conditions dans lesquelles ils ont été mis en œuvre. Ces produits sont en effet
disponibles à l’achat et peuvent être utilisés dans des conditions très différentes.
D’une manière générale, le décolmatage d’un captage par des produits chimiques
s’accompagne d’interventions mécaniques nécessitant des moyens et des matériels
spécialisés (packer, pistons, etc.). Il faut en effet évacuer les produits dissous et
stériliser ensuite, d’où la définition indispensable d’un programme spécialisé,
convenablement préparé en moyens par un maître d’œuvre qualifié.

7.3.1 Traitement préventif aux polyphosphates


Avant d’aborder les moyens de traiter les ouvrages entartrés, signalons une
méthode pour prévenir cet entartrage. Il existe en effet des polyphosphates de sodium
qui permettent d’éviter le dépôt de tartre sur les crépines, la pompe ou les
canalisations. Il suffit de faire circuler ce polyphosphate sous le niveau d’aspiration
de la pompe.
On admet communément qu’il faut approximativement 1 gramme de
polyphosphate par m3 d’eau et par 10 degrés français de dureté temporaire. On admet
également que lorsque les eaux circulent, 2 à 5 g/m3 conviennent dans la plupart des
cas.
Les deux graphiques de la figure 7-4 résument l’action des polyphosphates.
Le graphique 1 représente, pour une eau à 60°C de dureté temporaire chauffée
pendant une heure à 80°C, la quantité de CaCO3 précipité en fonction de la quantité
de polyphosphates ajoutée. On constate qu’il y a un seuil à partir duquel toute
addition supplémentaire est sans effet. Ce seuil est de 2 mg/litre de polyphosphates.
Le graphique 2 représente, en fonction de la température, la quantité de CaCO3
restant en solution après injection de 2 mg/litre de polyphosphate. On constate qu’à la
température moyenne des eaux souterraines normales (entre 25 et 40°C), 2 mg de
polyphosphate permettent de maintenir en solution 800 mg/l au moins de
bicarbonates de calcium.
Traitement du colmatage par les carbonates 298

mg/l bicarbonate de Ca
CaCO3 précipité (mg/h)
800
Concentration maximum de
bicarbonates possible, sans
obtention de dépôts
300 600
1 2

200 400

100 200

0
2 6 10 40 60 80 100
Métaphosphate (mg/l) Température

Figure 7-4
Action des polyphosphates.

7.3.2 Traitements mécaniques


Les méthodes de traitement mécanique sont le grattage et les tirs à l’explosif.
Précisons avant tout que ces méthodes ne connaissent qu’un développement restreint
dans la pratique. Nous les citons ici pour mémoire.

a) Grattage
D’une manière générale, les dépôts carbonatés sont très durs, donc les procédés
de grattage ne donnent que des résultats médiocres s’ils sont utilisés seuls. Ils restent
cependant un outil de travail pour le détartrage des tubes et des crépines.
On utilise un « hérisson » ou une brosse à lames métalliques flexibles qui, grâce à
un mouvement de va-et-vient dans le forage, permet de détacher les tartres. Ce
procédé est sans effet sur les incrustations qui peuvent être déposées dans les fentes
des crépines ou à l’intérieur du massif filtrant.
On emploiera cette méthode avec plus de succès si les incrustations peuvent être
préalablement ramolies et dissoutes.

b) Emploi d’explosifs
Ce procédé, employé avec les précautions d’usage, donne des résultats lorsque les
dépôts sont fragiles et se dégagent facilement sous les chocs.
La manœuvre opératoire consiste à placer des petites charges d’explosifs
régulièrement espacées sur le tubage et les crépines. En les faisant exploser à
intervalles réguliers, il est possible de provoquer une onde de choc continue.
Traitement du colmatage par les carbonates 299

Ces ondes se propagent à travers l’eau de la nappe et désagrègent les dépôts sans
abîmer les tubes et les crépines.
On admet généralement une charge de l’ordre de 12 à 36 grammes d’explosif par
mètre.

7.3.3 Traitement à l’acide


L’acidification consiste en l’injection sous pression ou par gravité d’acide
chlorhydrique ou sulfamique ou de produits chimiques industriels, en plusieurs
passes à différentes hauteurs. Ce procédé permet, entre autres, de dissoudre les dépôts
carbonatés qui se sont déposés à l’intérieur ou dans les fentes des crépines, à
l’extérieur de celles-ci, dans le massif filtrant, ou dans la formation aquifère elle-
même.
Il faut noter que le volume d’acide à utiliser pour traiter une des crépines
incrustées est plus faible que celui qui est nécessaire pour un développement acide
d’une formation calcaire. En général, le dosage utilisé est de 1,5 à 2 fois de solution
acide par rapport au volume d’eau dans le crépine pour une concentration à 18-20°
Baumé.
— acide chlorhydrique (HCl) à 20 ou 22° Baumé, injecté à basse pression
(maximum 2 bars) ou par gravité. Il sera nécessaire d’opérer en plusieurs passes en
injectant à différentes hauteurs plutôt qu’en une seule.

A titre d’exemple, pour un trou de 50 m de profondeur, de diamètre compris entre 200 et


300 mm, il faut prévoir au minimum 3 tonnes d’acide à injecter en trois passes.
. Temps de contact : 1 à 2 heures maximum.
. Agitation : toutes les 15 minutes.
. Retrait de l’acide par pompage (air-lift).

— acide sulfamique (NH2SO3H). Même mode opératoire que pour le précédent.


Il présente l’avantage d’être livré en cristaux, donc d’une plus grande facilité
d’emploi, mais il a l’inconvénient d’être d’un coût nettement plus élevé.
Attention : ces acides ne doivent jamais être utilisés sur des équipements en zinc
ou en acier galvanisé.

a) Principe de l’acidification
L’acide chlorhydrique (le plus couramment employé) a la propriété de dissoudre
les carbonates et bicarbonates de calcium (ou de magnésium) en les transformant en
chlorures de calcium (ou de magnésium) solubles dans l’eau par les réactions
suivantes :

Ca (CO3) + 2HCl = CaCl2 + H2O + CO2

Ca (HCO3)2 + 2HCl = CaCl2 + 2H2O + 2CO2

Un litre d’acide chlorhydrique à 15 % attaque théoriquement 221 grammes de


carbonate de calcium (CaCO3) ou 203 grammes de carbonate de magnésium ou
dolomie (Ca, Mg) 2CO3.
Traitement du colmatage par les carbonates 300

Cette concentration de 15 % est la concentration optimale. En effet, si l’on


augmente la dose d’HCl, la viscosité des produits dissous (CaCl2 et MgCl2)
augmente également. Ces derniers, associés aux impuretés du terrain, finissent par
former une sorte de gel qui colmate l’ouvrage.
D’autres expériences ont montré que, dans des conditions normales de pression et
de température (25°C à la pression atmosphérique), l’acide chlorhydrique est
neutralisé à 95 % au bout de 40 minutes en présence de calcaire et en 50 minutes en
présence de dolomie.
Dans tous les cas, la quantité de carbonates dissous n’est pas fonction du temps
mais seulement du volume d’acide mis en œuvre. Il est donc inutile de prolonger
l’acidification trop longtemps, d’autant plus que des phénomènes secondaires dus aux
impuretés de la roche peuvent apparaître avec le temps.

b) Introduction d’adjuvants
Les formations aquifères captées contiennent des oxydes de fer et d’aluminium
qui sont dissous par l’acide chlorhydrique lorsque celui-ci est à un pH relativement
bas (2,5 à 4). En précipitant, les oxydes forment des composés gélatineux
d’hydroxydes qui absorbent de grands volumes d’eau (jusqu’à 40 fois leur propre
volume) et peuvent ainsi provoquer le colmatage des fissures et des crépines.
Pour éviter ce problème, il faut maintenir ces oxydes en solution dans de l’acide
citrique ou de l’acide actique durant toute l’opération. En général, une solution
d’acide citrique à 10 grammes par litre suffit à empêcher la précipitation du fer dans
une formation calcaire ayant moins de 1 % de Fe2O3 en poids, ce qui est assez
fréquent. Dans certains cas, il est possible d’employer aussi un tartrage double de
potassium et de sodium (appelé également sels Rochelle) concentré à 4 grammes par
litre d’acide chlorhydrique à 15 %.
Par ailleurs, les formations captées peuvent contenir du sulfate de calcium (gypse
par exemple) qu’il est nécessaire d’éliminer. Or, celui-ci n’est soluble dans l’acide
chlorhydrique que lorsque le pH de ce dernier est égal à 5. On utilise alors du bi-
fluorure d’ammonium (NH4F2H) qui transforme le sulfate de calcium insoluble en
sulfate d’ammonium soluble. Les quantités couramment employées sont de l’ordre de
7 à 8 grammes par litre de solution acide inhibée.

c) Réalisation de l’acidification
La plupart du temps, l’introduction de l’acide dans une formation calcaire, par le
simple fait de la gravité, ne donne pas de bons résultats. L’acide reste en contact avec
les parois du trou et l’on aboutit seulement à une augmentation du diamètre. Il est
préférable de procéder à l’acidification sous pression qui permet une diffusion plus
importante dans le réseau de fissures.
En effet, lorsque la pression de la pompe est importante par rapport à celle de la
nappe, l’acide peut aller très loin dans les terrains. Il s’ensuit une diminution notable
des pertes de charge locales et une augmentation des perméabilités au voisinage du
trou.
Par contre, lorsque la pression de la nappe est élevée, elle s’oppose à l’action de
la pompe. On utilise alors des « agents de chasse » (air comprimé par exemple) pour
déplacer le fluide d’acide dans la formation. Cette méthode facilite la pénétration de
l’acide dans la formation aquifère considérée mais permet également, grâce à la
Traitement du colmatage par les carbonates 301

décompression brutale lors de l’échappement du gaz, le retour rapide de l’acide usé et


des particules insolubles au trou de forage.
Pour ce qui est des quantités d’acide à utiliser, il n’y a pas de règles précises. Il
est toutefois conseillé d’effectuer plusieurs acidifications successives en utilisant des
quantités croissantes. La première dose sera équivalente au volume du trou au droit
de la formation aquifère afin de laver le trou. On pourra doubler puis tripler cette dose
au cours des opérations suivantes. On peut prolonger l’acidification jusqu’à
l’obtention d’un résultat notable.
La vitesse d’injection de l’acide a également une grande importance sur les
résultats obtenus. On conçoit que, plus le pompage est lent, plus facilement l’acide
sera neutralisé aux abords immédiats du trou. Si au contraire, l’acide est pompé et
injecté rapidement, il sera encore actif lorsqu’il atteindra les parties éloignées de la
formation. De plus, l’injection de l’acide dans les zones profondes se fera d’autant
plus facilement que les fissures au droit du trou seront plus largement ouvertes. Cela
montre qu’il faut bien attaquer ces fissures lors de la première acidification puis
augmenter progressivement la pression pendant le pompage.
En pratique, l’injection de l’acide chlorhydrique se fait avec la pompe à boue de
l’atelier de forage. Le volume à injecter étant lié à la pression et au débit de la pompe,
le temps d’injection sera d’autant plus réduit que la pression de la pompe sera élevée.
Les conditions que doit remplir la pompe d’injection peuvent être approchées par la
formule suivante :

Q. P. T
V=
60

avec :
V : volume d’acide à injecter en m3. Il est donné par le volume du trou et
calculé en fonction de l’ordre des opérations.
Q : débit en m3/h et pour un kg de pression de la nappe souterraine. Il sera
défini par un pompage préalablement à l’acidification. Il varie en
principe après chaque acidification et sa valeur doit augmenter.
P : pression (en kg) de la pompe.
T : temps en minute pendant lequel on veut injecter l’acide. Il convient de
rappeler que ce temps doit être tel que le nettoyage du trou soit
intervenu avant la formation des hydroxydes.

A la fin de l’acidification, il faut pomper longuement (au moins 24 heures) à des


débits croissants pour éliminer toute trace des produits de l’acidification. Il peut
parfois être intéressant de procéder à des circulations inverses par injection d’eau. On
prendra soin de vérifier l’élimination complète de l’acide en effectuant un dosage
dans les échantillons d’eau pompée.
Traitement du colmatage par les carbonates 302

Dans le carbonifère du Nord de la France, le débit d’un forage ainsi traité a été multiplié
par 6. L’opération a consisté en une succession de quatre acidifications (au total 14 tonnes
de solution d’HCl à 15 %) sous des pressions comprises entre 1,5 et 10 bars, d’une durée
de 40 à 60 minutes chacune.

d) Un exemple d’acidification
Supposons que l’on veuille acidifier un trou ayant un volume de 0,5 m3 et qu’il
soit prévu quatre opérations d’acidification. Le volume de solution aqueuse d’HCl à
injecter après lavage sera le suivant :
— pour la 1ère opération : V1 = 2 . 0,5 m3 = 1,0 m3
— pour la 2e opération : V2 = 3 . 0,5 m3 = 1,5 m3
— pour la 3e opération : V3 = 4 . 0,5 m3 = 2,0 m3
— pour la 4e opération : V4 = 5 . 0,5 m3 = 2,5 m3
Supposons que le débit de la nappe souterraine avant acidification soit égal
à 4 m3/h pour 1 kg de pression et que le temps d’injection soit égal à 10 minutes. Les
caractéristiques successives de la pression d’injection et du débit de la pompe figurent
dans le tableau VII-II.

TABLEAU VII-II — Caractéristiques des opérations d’acidification.

Opérations Pression Débit de la pompe


d’injection
d’acidification (m3/h)
(kg/cm2)
Lavage du trou 0,75 7,5
1ère opération 1,50 15,0

2e opération 2,25 22,5

3e opération 3,00 30,0

4e opération 3,75 37,5

Nous avons vu qu’un forage évolue dans le temps. Le problème consiste à


déterminer à partir de quel moment il convient d’intervenir au moyen de traitements
particuliers pour lui redonner ses caractéristiques originelles.
Dans le cas d’aquifères de moyenne épaisseur (20 à 30 mètres) susceptibles de
fortes variations piézométriques, cette comparaison ne sera valable que si cette
variation est inférieure à 10 % de l’épaisseur de l’aquifère, ce qui ne change pas de
manière significative la transmissivité. La comparaison des capacités spécifiques
permettra de constater si le forage s’est dégradé.

A titre d’exemple, nous présentons le cas du forage A4 du champ captant d’Aubergenville


dont le piézomètre le plus proche est le ST17. La situation est la suivante (cf. figure 7-4).
Traitement du colmatage par les carbonates 303

Situation A.
. Mesure du débit en février 1977 : 405 m3/h
. Cote du niveau dynamique : 7,57 m
. Cote du niveau de la nappe ST17 : 13,18 m
. Abaissement A : 5,6 m

Situation B.
. Mesure du débit en mars 1983 : 210 m3/h
. Cote du niveau dynamique : 8,33 m
. Cote du niveau de la nappe ST17 : 14,99 m
. Abaissement B : 6,66 m

La différence de niveau statique entre les deux périodes : 14,99 – 13,18 = 1,80 m.
L’épaisseur moyenne de l’aquifère est de 25 mètres.
Le rapport variation/épaisseur est égale à 1,8/25 = 0,07.
La variation est inférieure à 10 % donc la comparaison est possible.

Chute de rendement du forage entre février 1977 et mars 1983.


Elle peut être définie par la relation suivante :

B – B1
= 2,35
B1

Soit 235 % par rapport à la situation d’origine.

Situation C.
. Mesure du débit en mai 1983 : 363 m3/h
. Cote du niveau dynamique : 7,00 m
. Cote du niveau de la nappe ST17 : 15,30
. Abaissement C : 8,30 m

La différence de niveau de nappe entre mai 1983 et février 1977 est de 15,3 - 13,2 = 0,08.
La variation est inférieure à 10 % donc la comparaison est possible.

Chute de rendement du forage entre février 1977 et mai 1983.


Elle peut être définie par la relation suivante :

C – C1
= 0,84
C1

Soit 84 % par rapport à la situation d’origine.


Traitement du colmatage par les carbonates 304

100 200 300 400 500 Débit en


m 3/h

2 • Courbe caractéristique originelle


B1 = 2 m

4 C1 = 4,5 m

5
• A = 5,6 m
6 (février 1977)

7
B = 6,7 m
8 février 1983

C = 8,3 m
Rabattement mai 1983
en mètres

Figure 7-5
Forage A4, champ captant d’Aubergenville : évolution du débit spécifique entre février
1977 et mai 1983.

Analyse de la situation
Entre la situation A et la situation B, le forage s’est détérioré à un point tel qu’il n’était
plus possible d’extraire que la moitié du débit d’origine. Cette chute de rendement s’est
traduite, pour ce nouveau débit, par un abaissement dans le forage supérieur de 235 % au
rabattement originel.
Après l’acidification de mai 1983, la situation s’est améliorée mais le nouveau débit
exploitable entraîne tout de même un rabattement supérieur de 84 % au rabattement
originel.

Conclusion
1 On a certainement trop attendu entre les situations A et B, ce qui a provoqué un
colmatage très important et profond au niveau de l’équipement du forage.
2 L’acidification a permis de remédier partiellement à la situation mais n’a pas réussi à
redonner au forage ses caractéristiques originelles.
3 Il aurait été préférable d’intervenir avant que la chute de rendement n’atteigne 50 %
pour avoir le maximum de chances de retrouver la situation d’origine.

7.4 Traitement du colmatage fer-manganèse


Le colmatage par dépôts ferrugineux provient généralement de composés
insolubles d’hydroxydes de fer et de manganèse (dans la zone de battement de la
nappe si la crépine est dénoyée) : il est généralement admis qu’aucun traitement n’est
possible.
Traitement du colmatage fer-manganèse 305

D’autres dépôts ferrugineux peuvent parfois être traités à l’acide ou avec des
produits chimiques industriels.
Les causes d’un tel colmatage résident, nous l’avons vu précédemment, dans un
apport d’oxygène (généralement au sommet des crépines ou au niveau de la partie
supérieure des drains horizontaux). Celui-ci peut provenir de la surface dans le cas
d’une nappe libre ou par le trou du forage dans le cas d’une nappe captive.
On peut distinguer trois types de dépôts :
— des composés d’hydroxydes de fer et de manganèse,
— des dépôts ferrugineux mélangés à des dépôts calcaires,
— des dépôts floconneux, granuleux et colloïdaux.
Dans le premier cas, il s’agit de dépôts insolubles. C’est le type de concrétions
fer-manganèse que l’on peut observer dans la zone de battement de la nappe lorsque
la crépine est dénoyée. Toute tentative de traitement est vouée à l’échec.
Dans les deux autres cas, on peut traiter à l’acide comme pour les carbonates.
Enfin, on peut citer les produits Carela bio plus forte et Herli rapid TWB-FCM1
qui ont fait leurs preuves et qui sont agréés alimentaires.
Le Carela bio plus forte possède en effet deux produits complémentaires :
— un acide minéral qui permet la solubilisation des incrustations ferriques,
— des acides organiques associés à de l’eau oxygénée qui assurent l’attaque des
incrustations manganiques.
Le mélange équilibré de ces différents produits permet un traitement simultané
des incrustations et une désinfection de l’ouvrage. Ceci est essentiel car la très grande
majorité des dépôts ferro-manganiques trouvent leur origine dans une activité
bactérienne.

7.5 Traitement du colmatage biologique


Les signes du colmatage lié à une activité bactérienne sont maintenant bien
connus. Ils se manifestent par la présence de masses ou d’agglomérations
gélatineuses ou visqueuses qui adhèrent indifféremment sur toute partie du captage et
de la pompe. Les crépines s’obstruent progressivement, allant parfois jusqu’à
entraîner une réduction du débit d’exhaure supérieure à 50 % de la productivité
habituelle de l’ouvrage. Ce type de colmatage semble être lié à un apport de flux
nourricier à la faveur du pompage favorisant la formation d’une biomasse colmatante.
Pour lutter contre le colmatage biologique, il convient généralement d’injecter,
sous pression ou par gravité, des produits stérilisants, type chlore sous forme
d’hypochlorite de calcium, d’hypochlorite de sodium (eau de Javel), de permanganate
de potasse, de peroxyde d’hydrogène, etc.
Le colmatage peut se produire :
— au droit de la crépine,
— au sein du massif filtrant,
— au sein de la formation aquifère.
Dans les deux premiers cas, des traitements de stérilisation à intervalles réguliers
ou en continu (hypochlorite de calcium, hypochlorite de sodium, permanganate de
potassium, etc.) peuvent donner de bons résultats. En cas de traitement continu, celui-
ci doit se faire à une teneur de 1 g/l de chlore actif au droit de la zone à traiter.
Traitement du colmatage biologique 306

Dans le troisième cas (et parfois le second aussi), le traitement de choc à l’aide
d’hypochlorite de sodium paraît prometteur. Il reste encore à vérifier l’absence de
réactions secondaires indésirables et à préciser la durée d’efficacité de ce type de
traitement.
L’analyse de la bibliographie montre toutes sortes d’essais, allant de la
désinfection par injection de vapeur aux traitements aux rayonnements gamma et aux
ultrasons. Le traitement le plus « classique » consiste, bien entendu, dans l’utilisation
de différents acides ou mélanges d’acides et d’inhibiteurs.
Des études ont été effectuées pour sélectionner des produits de traitements
capables d’actions bactéricides ou bactériostatiques sur le colmatage bactérien. Mais
l’expérience qui confirmerait l’action favorable de tel ou tel produit fait d’autant plus
défaut qu’il est clair qu’un produit déterminé ne se comporte pas de la même façon
partout, compte tenu du fait que les conditions physico-chimiques et biologiques
locales sont extrèmement variables.
Selon l’étude GEOTHERMA 1991 (collection inter-agences de l’eau), le traitement
le plus répandu en France, et qui semble obtenir le plus grand succès, consiste en une
opération de brossage du captage suivi d’une forte chloration. Le procédé a au moins
l’avantage d’être à peu près standard et inoffensif pour l’ouvrage et l’aquifère. Enfin,
les opérations les plus usuelles consistent en des traitements :
— au dioxyde de chlore,
— à l’hypochlorite de sodium (eau de Javel),
— à l’acide sulfamique,
— avec des ammoniums quaternaires,
— au permanganate de potassium,
— à l’acroleïne.
Utilisés seuls, ces produits ont un effet désinfectant temporaire. Les deux
premiers se révèlent statistiquement les plus utilisés. Leur combinaison avec une
acidification, en particulier dans les aquifères carbonatés, donne les meilleurs
résultats.
En résumé, il apparaît que le colmatage bactérien est un phénomène complexe qui
a, dans chaque cas, ses composantes spécifiques. La prévention est malheureusement
difficile à organiser, sauf en décelant à l’avance que l’environnement du captage
présente des indices favorables au déclenchement d’un tel phénomène (contexte
organique). Dans tout traitement chimique, qu’il s’agisse d’une procédure curative ou
d’un traitement préventif, le produit utilisé doit nécessairement satisfaire à deux
impératifs essentiels :
— la conservation de la potabilité des eaux qui seront exploitées peu de temps
après la fin du traitement ;
— la conservation des équipements de captage et de pompage obligatoirement
mis en contact avec les produits traitants. Ce problème intéresse essentiellement le
tubage et des crépines qui ne peuvent pas, au contraire de la pompe, être extraits.
En terme de procédés, applicables de façon industrielle, on distingue
généralement trois types de traitement :
— Les traitements curatifs, mis en œuvre sur un forage colmaté, à partir d’un
seuil de colmatage fixé (généralement 30 %), avec une dose forte (plusieurs dizaines
de m3) d’un ou plusieurs produits chimiques enchaînés, injectés dans le forage
pendant un temps de quelques heures, pour limiter la durée pratique d’immobilisation
de l’ouvrage.
Traitement du colmatage biologique 307

La durée pratique d’immobilisation du forage est statistiquement de l’ordre de 1 à


2 semaines, correspondant à la mise en place des équipes, au retrait de la pompe, aux
différentes manœuvres liées aux traitement, et à la remise en place de la pompe
d’exploitation.
— Les traitements préventifs discontinus, qui pourraient être mis en œuvre de
façon périodique, (par exemple tous les 6 mois ), sur des forages récents, ou des
forages anciens colmatés ayant préalablement suivi un traitement curatif ; l’injection
de produits traitants se faisant à des doses moins fortes que dans les traitements
curatifs, éventuellement à partir de piézomètres disposés à cet effet autour du forage
(cf. figure 7-6).
A chaque traitement, il est nécessaire d’arrêter l’exploitation pendant 1 à 2 jours,
pour faciliter la répartition de la solution traitante dans le terrain, et pour évacuer les
résidus du traitement. Le produit traitant sera anticorrosif, et autant que possible
déterminé pour qu’il ne soit pas nécessaire de retirer la pompe d’exploitation.
— Les traitements préventifs continus, consistent à injecter en permanence une
solution traitante inhibitrice à très faible dose par l’intermédiaire de piézomètres
situés autour du forage (cf. figure 7-6).
Le produit traitant et la dose nécessaire doivent être déterminés de manière à
inhiber le processus sans altérer la qualité de l’eau distribuée.
D’une façon générale, le traitement s’effectue à partir du forage colmaté. Pour
que ce traitement soit effectif il convient d’intéresser des cylindres successifs
d’aquifère autour de la crépine. Le traitement curatif peut être réalisé avec un ou
plusieurs produits selon la nature du problème à résoudre.
Bien que la solution du produit unique ne paraisse pas devoir être retenue dans la
pratique (aucun produit ne permettant à lui seul de jouer tous les rôles : bactéricide et
destructeur de la matière organique), cette analyse permet de mettre en évidence les
volumes à mettre en œuvre. L’utilisation de 2 ou 3 produits successifs correspond à la
solution généralement retenue.
Le développement d’une biomasse dans l’aquifère représente le problème majeur
posé par le colmatage bactérien. En terme de traitement, il convient d’identifier le
volume d’aquifère contaminé et de définir une stratégie de traitement qui permette de
détruire la biomasse colmatante et de l’évacuer. La marche à suivre est la suivante :
— évaluer le volume d’aquifère contaminé,
— déterminer les cylindres successifs à traiter, compte tenu du type de bactéries,
de la nature de l’aquifère, des caractéristiques physico-chimiques de l’eau, de la
nature du ou des produits de décolmatage à mettre en œuvre,
— établir un protocole de traitement.
Traitement du colmatage biologique 308

2m
Piézomètres
d'injection

Forage à traiter

Figure 7-6
Dispositif de traitement préventif avec quatre piézomètres.

7.5.1 Evaluation du volume d’aquifère contaminé


La vitesse de l’eau à proximité du captage semble être la principale cause du
développement bactérien dans la mesure où elle est le vecteur d’un flux nourricier. Le
problème revient à déterminer à quelle distance du captage la vitesse de l’eau dans
l’aquifère redevient suffisamment faible pour que la biomasse ne s’y développe plus.
L’étude du colmatage des forages de l’Yprésien reflète bien ce phénomène et
montre que 78 % des captages dont la vitesse de l’eau dans l’aquifère dépasse
10 mm/s sont colmatés, alors que 60 % des forages non colmatés ont une vitesse
inférieure à cette valeur.
Sur le plan pratique, connaissant la porosité de l’aquifère, le débit d’exploitation
du forage et sa hauteur crépinée, on peut calculer la vitesse à laquelle l’eau
souterraine va circuler à travers divers cylindres d’aquifère. Il convient de calculer la
distance à partir de laquelle la vitesse de l’eau dans l’aquifère est suffisamment faible
pour ne plus favoriser le développement de biomasse. Dans le cas de l’Yprésien, il est
apparu qu’à une vitesse inférieure à 1 cm/s, les bactéries ne formaient pas de
biomasse colmatante.
Traitement du colmatage biologique 309

Le problème revient donc, dans ce cas, à déterminer la distance à laquelle la


vitesse dans l’aquifère est inférieure au cm/s :
on a Q = VS avec S = 2πrhp et on cherche r pour V ≤ 1.10–2 m/s
avec :
Q : débit en m3/s
V : vitesse en m/s
S : section de terrain productif en m2
P : porosité
r : rayon par rapport à l’axe du forage en m
h : hauteur crépinée en m

On pose :
Q
S = Vmin

Q
r=
Vmin . 2 π h . P

Q
Si Q est exprimé en m3/h et V en m/s : r = 226 . h . P

La vitesse de l’eau dans l’aquifère au repos peut également être calculée et


comparée aux vitesses obtenues à proximité du captage. BOURGUET et al. ont mis en
évidence dans le cas de l’Yprésien des vitesses de 2 à 30 mm/s à proximité du
captage, alors que la nappe s’écoule naturellement à une vitesse de l’ordre de
3 microns par seconde. On constate que la vitesse naturelle de l’eau est multipliée, du
fait du pompage, par un facteur de 1 000 à 10 000.

7.5.2 Détermination des cylindres successifs à traiter


Compte tenu du type de bactéries, de la nature de l’aquifère, des caractéristiques
physico-chimiques de l’eau, de la nature du ou des produits de décolmatage à mettre
en œuvre, il convient d’appréhender les volumes des solutions traitantes à mettre an
œuvre.
Traitement du colmatage biologique 310

Le volume capacitif Vc du forage s’obtient facilement :

2
Vc = π ro h

avec :
ro : rayon du forage
h : hauteur d’eau dans le forage

Le volume à mettre en œuvre (cf. figure 7-7) pour traiter les cylindres colmatés Vt
s’obtient selon la formule suivante :

2 2
Vt = π ( rt — r0 ) . h = π (ro + rt) e h

avec :
e : distance entre deux cylindres successifs
h : hauteur d’eau dans le forage

e
h

r0

rt

Figure 7-7
Détermination des cylindres successifs d’aquifère à traiter.

Le terrain étant a priori d’autant plus colmaté que l’on se trouve plus près du
forage, on aura intérêt à traiter des cylindres d’abord étroits, puis de plus en plus
larges, au fur et à mesure que l’on s’éloigne de l’axe du forage.
Traitement du colmatage biologique 311

3m

4 e cylindre

3 e cylindre

2 e cylindre

1 er cylindre

Forage

Figure 7-8
Traitement curatif, vue en coupe des cylindres d’aquifère à traiter.

TABLEAU VII-III — Volume par mètre des cylindres d’aquifère à traiter (cette
valeur est à multiplier par la porosité de l’aquifère).

Diamètre Effet cylindre cylindre cylindre cylindre cylindre cylindre cylindre


tubage capacitif 0,25 m 0,5 m 1m 2m 3m 4m 5m
(mm) (m3/m) (m3/m) (m3/m) (m3/m) (m3/m) (m3/m) (m3/m) (m3/m)
200 0,03 0,35 1,10 3,77 13,82 30,14 52,75 81,64
300 0,07 0,43 1,26 4,08 14,44 31,09 54,01 83,21
400 0,13 0,51 1,41 4,40 15,07 32,03 55,26 84,78
500 0,20 0,59 1,57 4,71 15,70 32,97 56,52 86,35
600 0,28 0,67 1,73 5,02 16,33 33,91 57,78 87,92
700 0,38 0,75 1,88 5,34 16,96 34,85 59,03 89,49
800 0,50 0,82 2,04 5,65 17,58 35,80 60,29 91,06

7.5.3 Protocole de traitement


Le protocole de traitement se décompose classiquement en :
— première injection dans le terrain d’une solution de produit traitant, de
volume égal au volume des vides du premier cylindrique d’aquifère à traiter ; après
arrêt de l’injection, on respecte un temps de contact qui permet d’obtenir l’efficacité
du traitement sur la tranche de terrain atteinte en dernier par l’injection.
Traitement du colmatage biologique 312

— premier pompage de nettoyage pour évacuer les résidus et les boues produites
par le traitement,
— nouvelle injection de produit traitant, d’un volume égal au volume des vides
d’un deuxième cylindre d’aquifère à traiter ; lorsque le volume nécessaire a été
injecté, on effectue une chasse à l’eau à débit modéré, pour que le produit actif
traverse le premier cylindre déjà traité, et aille se mettre en place et imprègne
complètement le deuxième cylindre à traiter (effet piston).
L’opération précédente se répète : temps de contact, puis 2e pompage de
nettoyage, à la suite de quoi on recommence éventuellement l’opération pour traiter
un 3e cylindre, et ainsi de suite.

Volume en m3 par tranche de 1 m


50

45

40

35

30

25

20

15

10

0
1 2 3 4 5 6 7
Distance au forage (m)
Volume terrain Porosité de 20 %
Porosité de 35 % Porosité de 15 %
Porosité de 30 % Porosité de 10 %
Porosité de 25 % Porosité de 5 %

Figure 7-9
Volume à mettre en œuvre pour un traitement décolmatant.

Enfin, il faut avoir présent à l’esprit que, quelque soit le degré de précision des
calculs, la détermination des porosités du massif filtrant et de la zone aquifère
développée n’en reste pas moins empirique à appréhender. Par ailleurs l’aquifère, de
par sa composition physico-chimique et de par la biomasse qu’il est susceptible
d’abriter, va consommer des quantités variables de réactif.
Traitement du colmatage biologique 313

7.5.4 Traitement à l’hypochlorite de sodium


Dans le cas de développements bactériens dans les ouvrages d’exploitation, un
moyen efficace et de mise en œuvre facile est le traitement des forages à l’eau de
Javel ou hypochlorite de sodium (NaClO). Cette méthode a notamment été employée
pour traiter les forages Yprésiens du bassin parisien, colmatés par des
développements bactériens (Champ captant de Villeneuve-la-Garenne dans le 92). Le
chlore, introduit au fond du forage, a deux actions :
— tuer les bactéries ;
— brûler les boues organiques.
Le but de ce traitement est non seulement d’éliminer les bactéries et la boue
bactérienne présente sur les crépines de l’ouvrage, mais aussi d’avoir une action en
profondeur dans le massif filtrant et dans le terrain encaissant.
L’eau de Javel est un produit oxydant basique, c’est aussi une solution instable.
Elle est caractérisée par sa teneur en chlore actif qui s’évalue en degrés
chlorimétriques, sachant que 1° chlorimétrique = 3,17 g de chlore actif par litre.
Ainsi :
1 litre d’eau de Javel à 18° contient 57 g de Cl2 actif ;
1 litre d’eau de Javel à 48° contient 152 g de Cl2 actif.
D’une façon générale il est conseillé de traiter à un taux de 2 000 ppm. On
calculera le volume d’eau contenue dans le forage, le massif filtrant et le terrain
encaissant. Il convient de calculer auparavant le rayon que l’on souhaite traiter autour
du forage.
Ce traitement doit bien entendu être adapté en fonction du degré de colmatage et
du volume d’aquifère à traiter. Il convient de calculer le volume des cylindres
d’aquifère intéressés et d’adapter le traitement en faisant augmenter le volume traité
jusqu’à la limite d’alimentation des bactéries. Cette dernière s’appréhende en
considérant les vitesses de flux nourricier (vitesse de l’eau dans l’aquifère) ; quand la
vitesse devient très faible, il n’y a plus de développement de biomasse.
Sur le plan pratique, l’introduction de l’eau de Javel se fera à partir d’un tube
PVC, ceci afin de pouvoir répartir le produit sur toute la hauteur noyée du forage. La
densité de cette solution (d = 1,21) étant supérieure à celle de l’eau, la solution devra
être introduite au-dessus de la zone à traiter. Afin de faire pénétrer le produit dans le
terrain encaissant, il est nécessaire d’introduire un volume d’eau de 5 à 10 fois le
volume d’eau présent dans le forage. Il est souhaitable d’avoir la possibilité
d’effectuer un pompage en circuit fermé, ceci afin de brasser la solution qui sera
laissée en place durant un minimum de 12 heures.
L’introduction du produit se fera en plusieurs passes successives, (3 à 5 en
général) entrecoupées de pompages de nettoyage, afin d’intéresser des cylindres de
rayon de plus en plus grand.
Afin d’éliminer la totalité des éléments détachés lors du traitement du forage, il
est nécessaire de réaliser un pompage long en fin de traitement. Ce dernier est
important afin d’éliminer la totalité des éléments solides et d’éviter qu’ils ne viennent
se refixer sur la partie externe du massif filtrant.
Traitement du colmatage biologique 314

Exemple théorique de traitement


Considérons un forage de 20 m de profondeur, captant un aquifère de porosité efficace de
15 %, sur une hauteur de 10 m, l’aquifère étant capté sur toute sa hauteur (10 m de
crépines), le niveau statique étant à 8 m/sol. Le forage est tubé en 600 mm sur toute sa
hauteur.
2
Calcul de l’effet capacitif : Vc = π ro h = 3,14 . (0,3)2 . 12 = 3,4 m3
Le volume capacitif correspond à la chasse d’eau qu’il faudra utiliser à chaque passe pour
pousser le produit de traitement dans l’aquifère. Dans le cas d’un traitement avec
plusieurs cylindres successifs, le volume de la chasse d’eau sera égal à :
Vc = V1 + V2 + ... + Vn

TABLEAU VII-IV — Exemple de calcul de volume de cylindres (volumes initiaux


en partie gauche, volumes résiduels suite à des injections successives en partie
droite).

Volume de Volume Volume des Volume des Volume


solution d’hypochlorite chasses traitements résiduel
traitante de sodium à successives successifs d’hypochlorite
48° de sodium 48°
(m3) (l) (m3) 3
(m ) (l)
cylindre 0,25 m 1,2 16 3,4 1,2 16
cylindre 0,5 m 3,1 41 4,6 2 25
cylindre 1 m 9 119 4,3 6 78
cylindre 2 m 29,4 387 12,1 20,4 268
cylindre 3 m 61 803 38,4 31,6 416
cylindre 4 m 104 1 368 90,4 43 565
cylindre 5 m 158 2 082 165 54 714
Cumul 318 158 2 082

S’agissant d’un matériau naturel poreux, il faut il faut tenir compte du fait qu’une partie
importante de chlore actif est susceptible d’être passivée par les éléments constitutifs de
l’aquifère. Compte tenu de l’adsorption du chlore par les fines, il est prudent de majorer le
volume d’hypochlorite de sodium.
Après la dernière passe, la face interne de la crépine est brossée à l’aide d’un hérisson.

Cet exemple montre à quel point les volumes à mettre en œuvre sont importants.
Ce calcul explique vraisemblablement pourquoi tant de tentatives de décolmatage ont
été des échecs. En effet, la zone de vitesse s’étend généralement sur plusieurs mètres
autour des forages, les volumes nécessaires au traitement sont considérables, et dans
la plupart des décolmatages pratiqués, les traitements n’atteignent pas les cylindres
situés entre 2 et 5 mètres autour des forages. Nous pensons, comme BOURGUET et
al., 1984, qu’il est nécessaire de s’intéresser à cette zone, dans laquelle peuvent se
situer des phénomènes déterminants générateurs de colmatage.
Traitement du colmatage biologique 315

Exemple de traitement à l’hypochlorite de sodium


Le forage 5S’ du champ captant de Villeneuve-la-Garenne (92) exploité par Lyonnaise
des Eaux-Dumez, a été créé en 1974. Il a progressivement donné des signes de colmatage
et a été traité à l’hexamétaphosphate en 1982, suite à un mauvais diagnostic de colmatage.
Suite à ce mauvais traitement, le débit du forage est passé de 115 m3/h avec 30 m de
rabattement en 1980 à 53 m3/h et 44 m de rabattement fin 1987. Devant cet état de fait, un
nouveau diagnostic a été effectué et a permis d’identifier les causes réelles du colmatage :
un développement bactérien.
Le traitement a eu lieu au moyen de plusieurs passes d’hypochlorite de sodium et a
permis de retrouver plus de 100 % des caractéristiques initiales, le forage s’étant
développé au fil du temps. Le traitement a été entrepris conformément à la méthodologie
présentée précédemment.

10

1e traitement 3e traitement
20
co
Rabattement en m

ur

2 e traitement cour
be

be o
rigin
av

30 elle
an
tr
éh
ab

40
ilit
at
io
n

50

0 20 40 60 80 100 120
Débit en m3/h

Figure 7-10
Réhabilitation du forage 5S du champ captant de Villeneuve-la-Garenne. D’après
document Lyonnaise des Eaux-Dumez.

Notons que l’étude Burgeap préconise, à partir d’essais réalisés sur des
éprouvettes, une séquence mouillant / oxydant bactéricide / acide. Le traitement
optimum serait réalisé en deux phases avec :
— un premier traitement « oxydant » réalisé à l’aide d’hypochlorite de sodium,
avec un mouillant et éventuellement un enzyme, l’ensemble étant destiné à détruire la
biomasse ;
— un second traitement composé d’un mélange d’acide chlorhydrique et d’un
mouillant bactéricide. L’acide chlorhydrique est destiné à ramener le pH à une valeur
telle qu’il remette en solution ferreuse le fer précipité par l’hypochlorite. Le
mouillant bactéricide est destiné à éliminer les dernières bactéries présentes et qui
auraient résisté au premier traitement.
Bien entendu ce protocole de traitement serait à adapter en fonction du degré de
colmatage du forage à traiter.
Régénération après corrosion 316

7.6 Régénération après corrosion


Rappelons que la corrosion est provoquée par des eaux, en fonction de leur
concentration en ions hydrogène et/ou de la présence des éléments suivants :
— oxygène dissous (même en petite quantité),
— hydrogène sulfuré (H2S),
— gaz carbonique CO2,
— acide chlorhydrique (HCl),
— chlorures,
— acide sulfurique (H2SO4),
— argiles riches en sulfate de calcium (gypse).
Ces agents influencent le pH qui est généralement acide (< 7) et rendent l’eau
agressive vis-à-vis du métal. La vitesse de circulation de l’eau et la température ont
également une certaine influence. La corrosion chimique des métaux est beaucoup
moins fréquente que la corrosion électrochimique dans le cas des forages d’eau.

7.6.1 Les actions préventives


Au titre de la prévention, nous retrouvons inévitablement le problème de la
conception. C’est évidemment à ce stade que les dispositions préventives les plus
efficaces peuvent être prises. Ces dispositions requièrent au minimum :
— S’assurer d’une compatibilité absolue entre les métaux constituant l’ouvrage
et éviter, bien évidemment, tout contact direct entre métaux différents.
— Concevoir la protection du tubage sur toute la partie non aquifère par une
cimentation étanche à réaliser avec des ciments spéciaux chaque fois qu’une
formation capable d’attaquer le ciment sera traversée (niveaux gypseux).
— Mettre des tubages d’une épaisseur suffisante pour que leur oxydation
n’entraîne pas un affaiblissement généralisé de l’ensemble dans un délai très court.
— Evaluer, en fonction de la composition de l’eau, son agressivité éventuelle
aux métaux et privilégier dans certains cas les équipements en PVC (présence d’H2S
notamment).
— Protéger l’ouvrage contre les effets des courants telluriques (protection
cathodique) si ces effets sont à craindre, en particulier à proximité des lignes SNCF
(certains forages sont percés en 1 an ou 2, à 100 mètres d’une ligne à grand trafic).
— Etre particulièrement attentif lorsque l’ouvrage capte un aquifère à plusieurs
niveaux (alternance de niveaux productifs et stériles dans la même formation) en
raison des différences possibles de composition de l’eau.
— Veiller à ce que les vitesses de l’eau dans l’ouvrage ne soient pas excessives
par crainte d’un risque d’érosion et par suite d’une fragilisation de certaines parties
métalliques.
Régénération après corrosion 317

7.6.2 Le contrôle
Pendant son exploitation, le suivi de l’ouvrage a également une très grande
importance pour la détection d’un début de corrosion. Il existe à ce sujet de
nombreux moyens pour effectuer ce type d’examen, dont le choix doit être fait par un
spécialiste. A titre d’exemple, un examen par caméra ne permettra pas d’estimer une
corrosion qui se manifesterait par une réduction de l’épaisseur du tubage, alors qu’un
autre type d’investigation permet de le faire.
Les diagraphies permettant de déceler tel ou tel type de corrosion doivent être
déterminées en fonction des caractéristiques de l’ouvrage. Il est évident que si on ne
connaît rien de celui-ci, il est nécessaire de commencer par définir sa composition.
Ensuite, on pourra préciser les diagraphies complémentaires à réaliser.
Dans l’ensemble, on dispose actuellement d’une gamme de mesures qui
permettent de faire de bons diagnostics, gamme qui s’enrichit constamment avec le
développement des moyens informatiques.
Les contrôles à effectuer dans le cadre d’un suivi, et pour un ouvrage en
exploitation dont on peut craindre la corrosion, peuvent se répartir de la façon
suivante :
— Contrôle de la cimentation des tubages (décollement, fissures, attaque
chimique, etc.). On peut même déceler la formation de poches de dissolution derrière
la cimentation (C. GRIOLET).
— Contrôle de l’état des tubages. Diverses diagraphies permettent de vérifier
l’épaisseur, les déformations, les ruptures ou les percements. On peut également
déceler sur certains forages profonds le percement du tubage par des essais de débits
en paliers.
— Contrôle de l’état des crépines. En complément de l’examen par caméra qui
peut permettre de localiser une perforation ou une rupture.
— Contrôle du massif de gravier. Cette dernière vérification, bien que ne
concernant pas directement la corrosion, permet de vérifier l’état du massif par
rapport à sa position d’origine, d’où une éventuelle modification dans le régime
hydraulique de l’ouvrage.
L’interprétation de ces mesures et contrôles ne peut être faite que par des
spécialistes expérimentés, toute erreur pouvant entraîner des conséquences sur le
choix de la réhabilitation à prescrire.

7.6.3 La réhabilitation
La réhabilitation d’un captage endommagé par la corrosion est généralement une
opération lourde et délicate à conduire.
En principe on peut se trouver en face de deux types d’interventions qui
consistent, soit à réhabiliter le tubage (tubage en place percé ou corrodé avec risque
d’écrasement), soit à réhabiliter la partie crépinée (perforée ou usagée). Ces deux
réhabilitations ne sont pas systématiquement couplées, bien que dans la pratique, on
soit amené à les effectuer ensemble pour plus d’efficacité.
La réhabilitation du tubage consiste à rechemiser l’ouvrage, c’est-à-dire à placer
un tubage neuf à l’intérieur du tubage existant, puis à cimenter l’annulaire.
Régénération après corrosion 318

Ce schéma n’est pas toujours possible si le diamètre de l’ouvrage initial est trop
faible car le tubage à replacer à l’intérieur ne permettrait plus d’installer le pompage.
C’est l’inconvénient des forages trop petits par rapport à leur productivité. Le risque
peut éventuellement être apprécié lors de la conception.
Actuellement une technique consistant à rechemiser un forage à l’aide d’une
enveloppe en polyéthylène formée à chaud directement sur le tubage existant est en
cours de texte. Ce procédé est inspiré d’une technique américaine utilisée pour le
rechemisage des conduites d’eau horizontales (procédé U. Liner distribué par
Tubafor International). Elle met en œuvre un polyéthylène alimentaire à haute densité
qui présenterait, appliqué sur un tubage de forage, une très faible réduction du
diamètre par rapport à un nouveau tube, une étanchéité complète, des pertes de
charge plus faibles et une meilleure résistance à la corrosion. En toute hypothèse, le
coût devrait être inférieur à celui d’un rechemisage en acier.
La réhabilitation de la crépine peut s’effectuer de deux façons différentes, soit par
extraction de celle en place et remplacement par une neuve, soit par la pose d’une
seconde crépine plus petite à l’intérieur de la première et la constitution d’un massif
de gravier intermédiaire.
La première opération n’est pas toujours possible dans la pratique car tout dépend
de la façon dont la crépine a été posée. La seconde a l’inconvénient d’induire une
perte de charge supplémentaire et par suite de réduire sensiblement la productivité de
l’ouvrage.
A ce niveau de réhabilitation, le diagnostic effectué préalablement devra
apprécier l’objectif de résultat et le coût de l’intervention afin de ne pas entraîner le
maître d’ouvrage dans une opération dont le coût serait prohibitif par rapport au
résultat et par comparaison avec un ouvrage neuf.

7.6.4 Traitement de la corrosion chimique


Soulignons avant tout qu’il n’existe pas de remède possible pour stopper la
corrosion chimique. On peut tout au plus prévenir ses effets et les limiter grâce à une
protection préventive. Nous avons traité ce problème au chapitre précédent.
Rappelons simplement qu’il existe trois actions possibles :
— la galvanisation des tubages,
— la protection préventive par le choix des matériaux d’équipement du forage
lors de sa réalisation semble être la meilleure méthode pour se prémunir contre ce
problème,
— en cas de corrosion avancée, le seul remède est un remède indirect. Il consiste
à doubler (chemisage) les tubages et crépines. Toutefois, ce système entraîne une
diminution du rendement par augmentation des pertes de charges quadratiques.
Régénération après corrosion 319

7.6.5 Traitement de la corrosion électrochimique


Pour qu’une corrosion électrochimique se produise, deux conditions sont
nécessaires :
— une différence de potentiel électrique développé par deux métaux différents,
ou par des métaux identiques mais séparés l’un de l’autre, même par une distance
infime ;
— une eau contenant assez de sel dissous pour constituer un fluide conducteur de
courant (électrolyte).
Une soudure sur un même métal, une fente exécutée au chalumeau ou au coupe-
tube, une coupure dans le métal au droit du joint ou une éraflure sur la peinture
isolante de revêtement sont autant de points sensibles à la corrosion.
Lorsque deux métaux différents sont en contact dans un électrolyte, il se produit
une corrosion bimétallique par effet galvanique (cas d’une crépine en inox et d’une
colonne en acier doux). Pour pallier ces inconvénients, deux méthodes peuvent être
appliquées avec succès :
— la protection préventive par le choix approprié des matériaux lors de
l’équipement du forage,
— la protection cathodique.
Ces deux méthodes ont été abordées dans le chapitre précédent.

7.6.6 Traitement de la corrosion bactérienne


Dans le cadre de la lutte contre la corrosion bactérienne, on distingue les
méthodes physiques et les méthodes chimiques.
— méthodes physiques :
• rayonnement UV,
• « pasteurisation » par élévation de la température,
• traitement aux ultrasons.
— méthodes chimiques :
• injection d’acides,
• injection de solutions chlorées,
• mise en œuvre de dispersants de type polyphosphates.
Ce sont des traitements efficaces mais d’action limitée dans le temps et qui
impliquent des interventions régulières.

7.7 Nettoyage et pompage


Après toute intervention de régénération, mécanique et/ou chimique, il est
impératif avant de remettre la pompe immergée en place, de procéder au nettoyage de
l’ouvrage par pompage à l’émulseur, avec injection d’air sous pression en alternance
dans et sous le tuyau d’eau, et ce jusqu’à obtention d’eau claire sans sable ni
particules argileuses.
Nettoyage et pompage 320

La pompe immergée d’exploitation est ensuite remise en place, afin de procéder à


de nouveaux pompages d’essai par paliers et d’établir la courbe caractéristique du
forage après régénération.
L’analyse de cette nouvelle courbe conduira soit à la remise en service du forage
après un éventuel pompage d’essai de longue durée, soit à une nouvelle phase de
régénération.

7.8 La vétusté
La vétusté est à l’origine d’une part importante de la dégradation des captages
d’eau souterraine en France. L’âge moyen des captages, tous types confondus, est
compris entre 10 et 50 ans pour environ 70 % d’entre eux.
L’âge lui même est bien entendu un facteur naturel de vieillissement, mais le
manque d’entretien aggrave les effets de ce vieillissement et contribue à l’apparition
de problèmes parfois difficiles à résoudre en raison de l’état des ouvrages.
Le colmatage, la corrosion et l’ensablement sont très souvent le lot des captages
anciens. Il s’y ajoute parfois une conception archaïque qui fait que, dans beaucoup de
cas, il n’y a malheureusement pas d’autre solution que le renouvellement pur et
simple de l’ouvrage.
Les effets du vieillissement pourraient, dans la majorité des cas, être retardés et
dans tous les cas diagnostiqués, si les captages faisaient l’objet d’un contrôle régulier.
Il n’est pas inutile de rappeler la place de l’eau souterraine dans l’alimentation en
eau potable : selon les dernières statistiques, 62 % environ des prélèvements d’eau
souterraine en France sont consacrés à l’alimentation en eau potable des populations,
avec une légère tendance à l’accroissement, nettement plus marquée dans certains
bassins. Par rapport à l’ensemble des consommations en eau potable, l’eau
souterraine représenterait environ la moitié du volume total des ressources utilisées,
les eaux de surface assurant l’autre partie.
En France on trouve des forages dans tous les départements. La maintenance,
l’entretien et la gestion des forages est donc une préoccupation nationale.
Pour exploiter l’eau souterraine, on utilise en France près de 30 000 captages,
uniquement pour l’alimentation en eau potable publique. Leur répartition est
évidemment très inégale, les plus importants étant situés dans des formations
sédimentaires.
Même si globalement leur nombre ne devrait pas radicalement évolué dans
l’avenir, la création de nouveaux captages sera vraisemblablement nécessaire pour
plusieurs raisons :
— le parc français de captages est vétuste et devra être renouvelé en grande
partie dans les dix ou vingt prochaines années ;
— il faudra abandonner des forages isolés pour préférer le développement de
grands champs captants dans des zones protégeables ;
— les forages, même si leurs eaux nécessitera tôt ou tard un traitement, ont
l’avantage de donner une eau brute dont la qualité varie donc plus facile à traiter que
les eaux superficielles ;
La vétusté 321

— la vulnérabilité de certaines ressources, eaux de surface comprises, entraînera


la nécessité de les diversifier et de créer des ouvrages d’appoint ou de secours à partir
de nouvelles ressources, préférentiellement souterraines ;
— certains aquifères sont actuellement sous-exploités, en particulier des
aquifères karstiques. Leur mise en valeur, jusqu’ici freinée par les difficultés et aléas
de la recherche, conduira à la création de nouveaux ouvrages ;
— de nombreuses communes, notamment rurales, ne sont alimentées que par un
seul et unique point d’eau, forage, puits ou source. Pour des raisons de sécurité
d’approvisionnement, un certain nombre d’entre eux devra être doublé ou
réaménagé ;
— les difficultés techniques rencontrées dans l’exploitation de certains captages
conduiront des maîtres d’ouvrage à réaliser de nouveaux captages, plutôt que d’en
réhabiliter ou après échec de cette technique.
Dans un tel contexte, il serait dommage que toutes ces créations ne soient pas
entreprises avec une approche différente de celle du passé, prenant en compte
l’environnement, la protection et la gestion, sans oublier bien entendu l’apport des
techniques modernes de réalisation et de suivi d’exploitation.

7.9 Rappel des dispositions à prendre


avant tout traitement
Pour qu’un traitement soit efficace, il est nécessaire de connaître les causes ayant
provoqué des incidents sur le forage à traiter. Pour cela :
— on mesurera le pH de l’eau ce qui permettra de voir :
• qu’avec un pH < 7 on se trouve en présence d’une eau acide, donc
agressive et corrosive ;
• qu’avec un pH > 7 on se trouve en présence d’une eau alcaline ayant
tendance à provoquer des incrustations. Ces eaux contiennent des
carbonates, des bicarbonates ou des hydroxydes.
— on procédera à des prélèvements d’échantillons de dépôts (sur pompes, tuyau
d’aspiration, crépine...) afin de déterminer la nature et la composition du dépôt,
— on étudiera la charge de matières dans l’eau pompée.
Le traitement sera approprié à la nature de l’échantillon prélevé :
— pour les concrétions avec des carbonates de chaux, par emploi d’acide
chlorhydrique (ou muriatique) ou d’acide sulfamique (ou amino-sulfamique),
— pour les oxydes de fer et de manganèse, par emploi de polyphosphates,
— pour les bactéries, par emploi de chlore (hypochlorite), d’eau oxygénée
(H2O2) ou d’acide acétique (CH3COOH),
— pour les limons et argiles, par emploi de polyphosphates,
— pour les formations gréseuses, par emploi d’acide fluorhydrique permettant
d’attaquer la silice. Cet emploi concerne plus particulièrement les pétroliers, mais
encore faut-il que la perméabilité de la matrice permette d’appliquer une pression
supportable par la roche.
Rappel des dispositions à prendre avant tout traitement 322

Lorsqu’on constate la présence simultanée de plusieurs des éléments ci-dessus, on


peut envisager un traitement mixte.
Aux acides utilisés pour ces traitements, il sera nécessaire d’ajouter un inhibiteur
pour acier afin de protéger ce matériau des équipements du forage.
En dehors des traitements chimiques, lorsque cela est possible, on peut utiliser
d’autres procédés tels que brosses, jets, explosifs, ...
Les méthodes d’acidification peuvent être :
— l’acidification sous pression,
— l’acidification à forage ouvert,
— le traitement au chlore,
— le « jet cleaning » pour traitement mixte au chlore et polyphosphate.

7.10 Abandon d’un ouvrage


Si, malgré toutes les opérations de réhabilitation entreprises, l’ouvrage ne
retrouve pas au moins des caractéristiques permettant une exploitation correcte, il
sera alors nécessaire de l’abandonner, en respectant certaines règles.
En effet, la structure de l’ouvrage abandonné va se détruire par corrosion et
mettre en communication toutes les formations géologiques intéressées par le forage.
On risque par conséquent de mélanger des niveaux aquifères de mauvaise qualité
avec des niveaux plus intéressants. Cela peut aboutir à la destruction partielle ou
totale de l’aquifère.
A cette interférence entre niveaux géologiques, s’ajoute l’introduction dans
l’ouvrage abandonné des eaux de surface comme des eaux de pluie ou, plus grave
encore, des eaux polluées. L’abandon d’un ouvrage est donc un problème sérieux
qu’il faut traiter avec soin.
Le forage doit être rebouché de manière étanche, ce qui exclut bien évidemment
son remplissage par des matériaux divers. En effet, le remplissage par un matériau
perméable n’isolerait pas la nappe des autres niveaux, éventuellement aquifères,
entraînant ainsi une source de pollution supplémentaire.
La seule façon de reboucher un captage est de le cimenter hermétiquement. On
évitera l’introduction de ciment par gravité dont le résultat est aléatoire. En effet, le
ciment risque de se diluer avant d’atteindre le fond, et ceci d’autant plus que
l’ouvrage est profond et le diamètre important.
La méthode la plus efficace consiste à introduire le ciment (laitier) par le fond
(cf. figure 7-10).
Dans le cas où la partie crépinée est très détériorée, ou si les terrains captés
comportent des fissures importantes, on doit éviter de faire pénétrer le ciment dans
l’aquifère. On mettra en place un bouchon visqueux (bentonite ou bentonite et
polymère) au droit de la partie captante. Ce bouchon sera surmonté d’une
cimentation.
Abandon d'un ouvrage 323

Sur le plan technique, nous voyons que le rebouchage dans les règles nécessite
quelques précautions. La composition des produits, leur densité ainsi que leur totale
innocuité pour le milieu doivent être définies en fonction des conditions d’abandon de
l’ouvrage (crépine cassée ou non, nature de l’aquifère, etc.).
Il faut savoir qu’une enquête réalisée en 1991 mettait en évidence que dans plus
de 60 % des cas, les forages abandonnés n’étaient pas rebouchés. Il est donc clair que
cet état de fait aura pour conséquence de mettre en communication toutes les
formations traversées par l’ouvrage, à plus ou moins long terme (corrosion,
éboulement, etc.). Compte tenu de l’ancienneté du parc actuel de forages français, et
de la probabilité associée du nombre conséquent de renouvellements qui devraient
s’opérer dans les années à venir, cette pratique d’abandon des captages en l’état
constitue une menace grave pour la protection de la ressource.

Pompe

Remplissage progressif
par le fond du forage

Figure 7-11
Cimentation d’un forage abandonné.

7.11 Conclusion
La connaissance des conditions de réalisation d’un forage, de la mise en place de
son équipement et du suivi régulier de son exploitation permettent de déceler les
phénomènes de colmatage et/ou de corrosion pour y remédier assez tôt, et ainsi éviter
une forte diminution du rendement. Dans le cas contraire (constat d’une baisse de
rendement et/ou de la variation de la qualité de l’eau), les opérations à mener sont
schématisées en. figure 7-11.
En termes de coût, une opération de régénération dans un forage de 35 m de
profondeur avec 15 m de crépines de 200 mm de diamètre est de l’ordre de 10 % du
prix du forage neuf.
Conclusion 324

Une étude récente montre que 76 % des captages français ne font pas l’objet
d’entretien systématique par un organisme spécialisé. Il apparaît que l’entretien des
captages n’est pas encore passé dans les mœurs. Les contrôles périodiques de niveau
constituent la démarche la plus répandue.
Pratiquement tous les exploitants évoquent le manque chronique d’informations
techniques sur les ouvrages qu’ils exploitent et, surtout, l’absence de consignes
d’exploitation ou de recommandations.
Comme le précise l’étude GEOTHERMA, l’origine de cette situation est bien
souvent l’ancienneté des ouvrages dont les caractéristiques n’ont pas été transmises
aux exploitants successifs. Pour de trop nombreux ouvrages, on ne connaît que la
profondeur approximative et le diamètre du tubage, mais rien sur la nature de la
crépine et encore moins sur les essais de débit d’origine. Heureusement cette
remarque ne concerne généralement que les ouvrages de plus de 10 ans d’âge et
isolés, l’exploitation de champs captants ne pouvant guère se satisfaire de l’absence
de données techniques.
L’analyse des rapports de fin de forage met cependant en évidence le manque de
consignes d’exploitation des ouvrages. Cet état de fait se traduit généralement dans le
temps par des situations de surexploitation extrêmement préjudiciables à la pérennité
des ouvrages et parfois involontaires du fait de l’absence de repères.
L’expérience prouve qu’il existe un problème de transmission des données
techniques entre le concepteur et l’exploitant d’un captage d’eau souterraine. Cette
situation est particulièrement répandue en milieu rural. Les avis sont unanimes sur le
défaut d’entretien des captages d’eau souterraine en France. Les efforts financiers
importants qui ont été réalisés depuis la dernière guerre pour assurer la desserte en
eau potable des populations à plus de 95 % n’ont malheureusement pas été
accompagnés des dispositions d’entretien nécessaires. Dans la majorité, sinon la
presque totalité des cas, les interventions sur captages ont été dictées uniquement du
fait de pertes de débit ou de détériorations graves, entraînant des difficultés
d’exploitation.
Le mal est souvent beaucoup plus profond dans la mesure où le captage d’eau
souterraine n’est pratiquement jamais considéré par un maître d’ouvrage comme la
partie essentielle de sa distribution d’eau, sauf le jour où le débit fait défaut. Et
encore ce jour-là, recherche-t-on la solution la moins onéreuse et malheureusement
souvent la plus précaire, par manque d’information.
En terme de coût d’entretien, un budget annuel de 8 à 10 % du prix de l’ouvrage
permettrait de prévenir la plus grande partie des problèmes en permettant un entretien
préventif.
Le désintérêt des maîtres d’ouvrages pour leurs captages d’eau souterraine en
général et pour leur entretien en particulier, est très largement confirmé par l’état
actuel des périmètres de protection des ouvrages. L’énorme proportion de captages
dont les périmètres ne sont pas en conformité illustre bien la nature du problème en
France.
Conclusion 325

Collecte des données

Conditions de Données
réalisation d'exploitation
et d'équipement
du forage

Etude et analyse

données suffisantes données insuffisantes

Investigations complémentaires
(pompages par paliers, examen
vidéo, analyses d'eau)

Diagnostic
de vieillissement

Abandon de l'ouvrage Régénération

Nettoyage

Pompage par paliers

Pas d'amélioration Amélioration

Pompage par paliers

Remise en exploitation

Figure 7-12
Résumé des opérations à mener dans le cadre de la réhabilitation d’un ouvrage de
captage.
Conclusion 326

Le temps semble être venu de travailler, dans l’optique de répondre aux besoins
des générations futures, à ce vaste projet que représente l’action sur les eaux
souterraines. Il convient de le construire autour des grands axes suivants :
— se placer résolument dans la réalité de l'espace scientifique européen, pour la
formation et pour la recherche. C’est-à-dire former et informer tous les acteurs de
l’eau à la gestion des captages d’eau souterraine ;
— développer et coordonner des compétences locales, nationales et
internationales dans plusieurs disciplines de la géologie, de l'hydrogéologie, de la
géochimie, de la géophysique ;
— utiliser l'imagerie (image satellitaire, géophysique, informatique, ...) pour
reconnaître et modéliser les structures aux différentes échelles ;
— concevoir et réaliser tous les captages neufs selon une démarche orientée vers
l’entretien, le suivi et la maintenance ;
— donner la priorité au travail d'équipe et aux travaux de terrain ;
— développer la notion de gestion des données patrimoniales et établir, pour
tous les ouvrages existants, un diagnostic de leur état ;
— ne plus voir un captage d’eau souterraine comme l’instrument ponctuel d’un
prélèvement en nappe, mais considérer son environnement de surface et souterrain
comme un ensemble dont le comportement doit être étudié, géré et protégé ;
— établir et diffuser des documents contractuels, guides à l’usage des maîtres
d’ouvrage et des maîtres d’œuvre, définissant les conditions d’intervention et les
règles à observer pour la réhabilitation des captages, ainsi que les contrôles à
effectuer ;
— utiliser des techniques de modélisation informatique pour simuler et mieux
appréhender la nature et la complexité des problèmes hydrogéologiques, sur le terrain
(modèles de nappe) ou sur le plan cognitif (systèmes experts).
En résumé, on se doit d’introduire la notion d’un suivi obligatoire des captages
d’eau souterraine, correspondant à une prestation précise, régulière et quantifiée. En
matière de contrôle et de suivi, les moyens de gestion informatisée des captages qui
existent permettent dès à présent d’optimiser la gestion des données et de gérer la
ressource.

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