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Fiche de lecture : Les Contemplations, Le Mendiant

Introduction :
Victor Hugo est un écrivain, poète, homme politique, académicien et intellectuel engagé français du XIXe
siècle. Il est considéré comme le plus important des écrivains romantiques de langue française.

Le recueil Les Contemplations est composé 158 poèmes rassemblés en 6 livres que Victor Hugo a publié en
1856. La plupart des poèmes ont été écrits entre 1841 et 1855. Le recueil a pour thème le souvenir, l’amour,
la joie, la mort, le deuil et le mystique.

Le mendiant appartient au livre I, le livre du souvenir. Ce court poème dépourvu d’emphase dans lequel ne
s’exprime aucune vue philosophique de l’auteur possède une simplicité exemplaire.

Problématique :
Comment le regard du poète transfigure-t-il le portrait du mendiant ?

Mouvements :
o Le récit surréaliste de la rencontre avec un mendiant (V1 à 13)
o La transfiguration d’un mendiant grâce à la poésie (V14 à 24)

Mouvement 1 : Le récit surréaliste de la rencontre avec un mendiant

 On assiste à une scène d'hospitalité entre 2 personnages : une personne (le narrateur, le poète) et
un pauvre très banale (vers 1 : « Un pauvre »). La scène se passe en décembre, ce qui aggrave la
détresse « le givre et le vent ». Avec un comportement civique, Hugo (vers 3). Il reçoit le
mendiant. En arrière-plan du décor : « paysans accroupis sur leurs bâts », « âne », « marché » (V4 et
5) ; scènes simples représentant la réalité quotidienne.
 Hugo emploie un vocabulaire familier pour la description du mendiant « le vieux vit dans une niche »
vers 6. Puis le ton se modifie. La vision devient de plus en plus proche, le pauvre prend ses aises –
vers 9 : « Tendant les mains pour l'homme et les joignant pour Dieu ». Il s'agit d'un moine mendiant
coupe au milieu : rythme régulier Zeugma (= mettre sur le même plan des éléments opposés ; ex. :
abstrait / concret), il y a rejet de l’action « rêve »(V7), rejet de la fréquentation des hommes
« solitaires »(V7), uniquement contact avec la nature « un rayon de ciel triste »(V8).
Le pauvre est un être plus près de dieu que les autres hommes. Tous ces détails prosaïques se
chargent de poésie puisque le poète nous propose une transformation du réel.
 « Un pauvre » (vers 1), « le vieux » (vers 6), "Le pauvre" (vers 12), Hugo rejette donc une
transfiguration et une incarnation de toute la misère.
 Le rôle du poète est d’être un être généreux. Victor Hugo accueille le mendiant « de façon civile »
(v.3) en lui disant « Entrez brave homme. » (v.12) et s’occupe de lui « Venez vous réchauffer un peu
» (v.10), « je lui fis donner une jatte de lait » (v.13) évoque la sympathie, l’affection qu’a le poète
pour son hôte traduit par un vouvoiement sympathique.

Mouvement 2 : La transfiguration d’un mendiant grâce à la poésie

 Le mendiant « me parlait » (v.14) : cela confirme le besoin de se confier qu’a ce pauvre homme.
 Le poète s’évadait dans la fascination qu’il avait pour ce mendiant par tous ses sens : la pensée : « Et
je lui répondais, pensif et sans l'entendre » au vers 15, le songe : « Je songeais que cet homme était
plein de prières » au vers 24, le regard : « Et je regardais, sourd à ce que nous disions » au vers 25, la
vision : « Sa bure où je voyais des constellations » au vers 26 : la vision envahit tout, le poète
poursuit sa vision intérieure. Le manteau représente le ciel de la nuit dans lequel « la braise » (V20),
les étoiles, sortent et billent. Le sentiment éveille l’imagination du poète.
 Le manteau « jadis bleu » (V18) parce qu'il a perdu sa couleur paraît noir à contrejour comme le ciel
nocturne puisqu'il recouvre entièrement l'ouverture de la cheminée qui laisse filtrer la lumière du
foyer à travers les trous de l'étoffe. Le poète observe alors un silence recueilli marqué par la césure
après l'évocation de « l'âtre » (V21), puis par le biais d'un relais il va s'élever peu à peu d'un réalisme
banal à une vision symbolique. En effet, le manteau étalé sur le feu fait penser au ciel, or nous
savons que le ciel est sacré. Ainsi le manteau est sacré et élève le pauvre jusqu'à la gloire de Dieu.
 D'ailleurs l'alliance rare entre le « haillon » (V22) réalité concrète et l'adjectif « désolé » (V22)
employé d'ordinaire pour des personnes, lui donne un relief humain plein d'émotion. C'est parce
que l'homme « était plein de prières » (V24), c'est à cause de cette vie toute spirituelle que les trous
deviennent étoiles.
 Mais la transfiguration se fait principalement par le regard du poète aux dépens de l'ouïe. La
progression est sensible et scandée par la comparaison que suggère le verbe « semblait » (V21),
l'élévation de « je songeais » (V24) jusqu'à la vision finale « je voyais » qui jaillit et s'épanouit grâce
aux sonorités amples et nobles du mot « constellations » (V24) contrastant avec l'épaisseur rude de
la bure mise en valeur avant la césure.
 Nous retrouvons la grande idée de Bossuet Sur l'immense dignité des Pauvres qui portent en eux « le
caractère de Jésus-Christ ».

Conclusion :
L’idée que développe l’auteur est belle, mais banale. Cependant le paysage de la réalité la plus banale à la
vision poétique est ici noté avec une précision qui donne au lecteur l’impression de voir naître l’image sous
ses yeux. Le poème Le Mendiant fait l’éloge de la pauvreté en montant sa valeur spirituelle, dans un décor
simple. Hugo transforme, dans ce poème, la réalité, par la vertu d’un sentiment, en vison. Ce poème
apparaît aussi comme le témoignage de ce qu'est la poésie, cette transfiguration du réel rejoint l'idéal de
Baudelaire « faire de l'or avec de la boue ».

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