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Correction

Traité de versification

*Rappel des notions de base de la versification

Complète le texte suivant avec les mots ci-dessous.

Paragraphes rime strophes vers

Les poèmes sont des textes écrits en vers, qui sont regroupés dans des
paragraphes qu’on appelle strophes. La fin de ces vers a souvent le même son que
la fin du vers précédent ou du vers suivant, c’est ce qu’on appelle une rime.

 LES STROPHES

Les strophes sont des « paragraphes » de vers, elles sont un nom différent selon
le nombre de vers qu’elles contiennent.
Sauras-tu retrouver à quel nombre de vers correspondent les strophes suivantes :

Une strophe d’un seul vers est ● ● Un distique


Une strophe de deux vers est ● ● Un tercet
Une strophe de trois vers est ● ● Un quintil
Une strophe de quatre vers est ● ● Un monostiche
Une strophe de cinq vers est ● ● Un quatrain

Une strophe de six vers est ● ● Un dizain


Une strophe de sept vers est ● ● Un neuvain
Une strophe de huit vers est ● ● Un sizain
Une strophe de neuf vers est ● ● Un huitain
Une strophe de dix vers est ● ● Un septain

*Activité :
Quels sont les noms des strophes suivantes (tu peux t’aider en comptant les vers)

L’horizon tout entier s’enveloppe dans l’ombre, De la musique avant toute chose,
Et le soleil mourant, sur un ciel riche et sombre, Et pour cela préfère l’impair,
Ferme les branches d’or de son riche éventail. Plus vague et plus soluble dans l’air,
Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.

(Les Trophées, Heredia, 1893) (Jadis et Naguère, Paul Verlaine, 1884)

Tercet Quatrain

1
Mignonne, allons voir si la rose Ses bras en branches s'étendent;
Qui ce matin avait déclose Ses doigts en rameaux se fendent;
Sa robre de pourpre au soleil, Ses blonds cheveux séparés
A point perdu cette vesprée En des feuilles vertes pendent,
Les plis de sa robe pourprée, Et ne sont plus si dorés.
Et son teint au vôtre pareil.

(Ode à Cassandre, Pierre de Ronsard,


XVIème siècle)

Sizain Quintil

Les Djinns funèbres,


Ah la belle pleine Lune, Fils du trépas,
Grosse comme une fortune ! Dans les ténèbres
Pressent leurs pas ;
Leur essaim gronde :
Ainsi, profonde,
Murmure une onde
Qu’on ne voit pas.
(Les Complaintes, « Complainte de la lune
en province », Jules Laforgue) (Les Orientales, « Les Djinns », Victor Hugo)

Distique Huitain

*Exercice : Les vers de deux strophes se sont complètement mélangés. Sauras-tu


les remettre à leur place ? (Pour t’aider, ton professeur a toutefois écrit le premier et
le dernier vers à leur place initiale.).
Les rimes sont généralement des rimes plates ou suivies.

« La salle à manger » de Francis Jammes

Il y a une armoire à peine luisante Il y a une armoire à peine luisante


Peut-être qu’elle est cassée, Qui a entendu les voix de mes grand-tantes,
Je ne peux pas le lui demander. Qui a entendu la voix de mon grand-père,
Qui a entendu les voix de mes grand-tantes, Qui a entendu la voix de mon père.
La voix qui était dans son ressort. A ces souvenirs l’armoire est fidèle.
Car je cause avec elle On a tort de croire qu’elle ne sait que se taire,
On a tort de croire qu’elle ne sait que se taire, Car je cause avec elle.

Qui a entendu la voix de mon grand-père, Il y a aussi un coucou en bois.


Je ne sais pourquoi il n’a plus de voix. Je ne sais pourquoi il n’a plus de voix.
A ces souvenirs l’armoire est fidèle. Je ne peux pas le lui demander.
Il y a aussi un coucou en bois. Peut-être qu’elle est cassée,
Qui a entendu la voix de mon père, La voix qui était dans son ressort,
Tout bonnement comme celle des morts. Tout bonnement comme celle des morts

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 LES VERS

Complète les définitions ci-dessous avec les mots suivants  :

Disyllabe Alexandrin Décasyllabe


monosyllabe octosyllabe Trisyllabe
Pentasyllabe Tétrasyllabe Hexasyllabe

Un vers d’une syllabe est un


Monosyllabe
Un vers de deux syllabes est un
Disyllabe
Un vers de trois syllabes est un
Trisyllabe
Un vers de quatre syllabes est un
Tétrasyllabe
Un vers de cinq syllabes est un
Pentasyllabe
Un vers de six vsyllabes est un
Hexasyllabe
Un vers de sept syllabes est un Heptasyllabe

Un vers de huit syllabes est un


Octosyllabe
Un vers de neuf syllabes est un Ennéasyllabe

Un vers de dix syllabes est un


Décasyllabe
Un vers de onze syllabes est un Hendécasyllabe

Un vers de douze syllabes est un


Alexandrin (ou dodécasyllabe)

*Remarque n°1 : Comment compter les syllabes en poésie ?

En poésie, une syllabe compte pour un pied (12 pieds = un alexandrin).

MAIS, en poésie, les pieds/syllabes sont comptées différemment dans les deux cas
ci-dessous :
 Les voyelles en fin de vers ne comptent pas :

Mais parle que je sois la terre favorabl(e) = alexandrin (si on avait compté le e final, le
1 1 1 1 1 1 1 1 1 11 1 vers aurait fait 13 syllabes),

 Le e entre deux voyelles s’élide (= on le rattache à une autre syllabe) :

Laissez-l(e) au moins ignorer que c’est vous. = décasyllabe (si le e


1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 ne s’était pas élidé,
cela aurait fait 11
syllabes)
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*Activité :
Sais-tu compter les syllabes ? Lis les vers suivants et essaie de retrouver quels sont
les types de strophes et les types de vers utilisés.

Le Temps a laissé son manteau Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
De vent, de froidure et de pluie, Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
Et s’est vêtu de broderie J’irai par la forêt, j’irai par la montagne,
De soleil luisant, clair et beau. Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.

« Le printemps », Charles d’Orléans Les Contemplations, Victor Hugo (1856).


(XVème siècle).

Octosyllabes Alexandrins

Il pleure dans mon cœur Claire Vénus, qui erres par les Cieux,
Comme il pleut sur la ville. Entends ma voix qui en plaints chantera,
Quelle est cette langueur Tant que ta face au haut du Ciel luira,
Qui pénètre mon cœur ? Son long travail et souci ennuyeux.

Romances sans paroles, Paul Verlaine (1874) « Sonnet V », Louise Labé (XVIème siècle)

Hexasyllabes Décasyllabes

Nous faisons la guerre


Aux Rois de la terre,
Bravant les plus glorieux,
Par notre prudence
Et notre vaillance ;
J’ai vécu d’aimer, j’ai donc vécu de larmes ; Nous commandons en maints lieux,
Et voilà pourquoi mes pleurs eurent leurs charmes. Domptant les efforts
Des plus hardis et forts,
D’un bras victorieux.

Marceline Desbordes-Valmore « Chanson des Amazones », Catherine des


Roches (XVIème siècle)

Hendécasyllabes Pentasyllabes/Heptasyllabes

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 La césure :

Ce mot vient du latin « caesura » qui signifie « coupure ».


La césure partage les vers de plus de huit syllabes en deux parties, qui
deviennent donc des hémistiches « (moitié de vers »).

L’exemple ci-dessous est emprunté au poème « Ariane » de José-Maria de


Heredia.

*Exemple :

Et sa bouche éperdue, ivre enfin d’ambroisie,


Oubliant ses longs cris vers l’infidèle amant,
Rit au baiser prochain du Dompteur de l’Asie.

Et sa bouche éperdue, // ivre enfin d’ambroisie,

Hémistiche 1 Hémistiche 2

Césure

La césure est une sorte de « pause » dans le rythme du vers.


Dans la poésie traditionnelle, les mots de césure, ainsi que les mots de rimes
sont mis en valeur.
Dans le tercet de Heredia, la césure met en valeur le mot « ivre », qui
accentue le désarroi d’Ariane.

Le décasyllabe suit un rythme 4/6 ou 6/4.

L’alexandrin suit un rythme 6/6 (avec des coupes intermédiaires).

Les poètes de la fin du XIXème siècle s’amuseront à scinder les mots grâce à
la césure. L’alexandrin sera « coupé » en 4/4/4, ce que l’on appellera le « trimètre
romantique ».

 Les vers et la syntaxe

Souvent, la syntaxe de la phrase suit le rythme du vers mais parfois, une


proposition se poursuit sur le vers suivant, on appelle cela un rejet, un contre-rejet
ou un enjambement selon les cas.

*Exemple :

Ces vers sont de Jules Laforgue :

Minuit un quart ; quels bords te voient passer, aux nuits


Anonymes, ô Nébuleuse-Mère ? Et puis
Qu’il doit agoniser d’étoiles éprouvées.

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 LES RIMES

Définition : Répétition d’un même son, sur deux vers ou plus.

Il existe trois types de rimes, classées selon leur disposition dans le poème.
 Les rimes suivies ou plates (quand deux sons se suivent d’un vers sur
l’autre selon le schéma aabb),
 Les rimes alternées ou croisées (quand les rimes s’échelonnent sur deux
vers : abab).
 Les rimes embrassées (quand deux rimes identiques encadrent deux rimes
plates : abba).

*Activité : Essaie de retrouver le type de rimes dont il s’agit dans les vers suivants :

On vendit le chien et la chaîne, Ils allaient conquérir le fabuleux métal Ô saisons, ô châteaux,
Et la vache, et le vieux buffet, Que Cipango mûrit dans ses mines lointaines Quelle âme est sans défauts ?
Mais on ne vendit pas la peine Et les vents alizés inclinaient leurs antennes
Des paysans que l’on chassait. Aux bords de monde Occidental.

Rimes alternées Rimes embrassées Rimes plates

La rime peut être pauvre (un phonème/son identique, « pain/faim », suffisante


(deux phonèmes sont identiques, « orage/ravage » ou riche (trois phonèmes
identiques ou plus, « heureux/malheureux »).

On parle de rime léonine quand deux syllabes ou plus sont répétées de vers
en vers (cf extrait de « Brise marine » de Stéphane Mallarmé).

Je partirai Steamer balançant ta mâture,


Lève l’ancre pour une exotique nature !

 Des rimes plus rares…

Il existe d’autres dispositions de rimes mais elles sont plus complexes et il est
peur probable que vous soyez interrogés sur ces points au baccalauréat.
Voici quelques exemples intéressants :

 Rime annexée ou concaténée : les phonèmes de la rime sont répétées au


début du vers suivant.
*Exemple :
Fort se plaint, ne sait ce qu’il doit dire
Ire me tient en grief martyre.

Fort se plaint, ne sait ce qu’il doit dire Rime


annexée ou
concaténée
Ire me tient en grief martyre.

6
 Rime batelée : rime qui se répète à la césure du vers suivant, comme dans
ces vers de Valéry.
*Exemple :

Où l’âme, ivre de soi, de silence et de gloire,


Prête à s’évanouir de sa propre mémoire,
Ecoute, avec espoir, frapper au mur pieux
[…]

Où l’âme, ivre de soi, de silence et de gloire,


Prête à s’évanouir de sa propre mémoire, Rime
Batelée
Ecoute, avec espoir, frapper au mur pieux
[…]

 Rime brisée : les vers riment deux fois, par la césure et par la fin des vers,
comme dans ces vers de Paul Valéry (encore).
*Exemple :

Je me voyais me voir, sinueuse, et dorais


De regards en regards, mes profondes forêts.

Je me voyais me voir, sinueuse, et dorais


Rime
brisée
De regards en regards, mes profondes forêts.

 L’alternance des rimes

Dans la versification traditionnelle (fixée au XVIIème siècle), il devait y avoir une


alternance des rimes féminines et des rimes masculines.

La rime féminine se termine par un –e muet, suivis ou non par un –s ou –ent (des
verbes conjugués au présent donc)

La rime masculine se termine par une consonne ou par une terminaison du


subjonctif, de l’imparfait ou du conditionnel.

Les règles de versification traditionnelle exigeaient qu’il y ait une alternance


strophique entre rime masculine et rime féminine.

La rime orpheline est une rime qui ne rime avec aucun autre vers.

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*Activité : Dans ces vers extrait du poème « La vie des champs » de Victor Hugo,
sauras-tu retrouver les rimes féminines et des rimes masculines.

Strophe Type de rime


Je leur raconte aussi l’histoire ; la misère F
Du peuple juif, maudit qu’il faut enfin bénir ; M
La Grèce, rayonnant jusque dans l’avenir ; M
Rome ; l’antique Egypte et ses plaines sans ombre. F
Et tout ce qu’on y voit de sinistre et de sombre. F

Dans ce quintil, Victor Hugo ne respecte que partiellement la règle de


l’alternance des rimes.

 LA VERSIFICATION MODERNE

A la fin du XIXème siècle et tout au long du XXème siècle, certains poètes


remettront en question toutes les règles de la versification traditionnelle qui s’est
établie entre le XVIIème et le XVIIIème siècle (utilisation de vers impairs, découpage
de l’alexandrin, etc) et redécouvriront certaines formes médiévales abandonnées par
l’âge classique (Verlaine, Rimbaud, etc).

La strophe sera démantelée et le vers s’’émancipera des contraintes


métriques au profit des images et des sonorités, c’est ce qu’on appellera le vers
libre.

D’autres poètes, quant à eux, conserveront la métrique traditionnelle


(Heredia…).

 LE VERS LIBRE

Le vers libre a été créé à la fin du XIXème siècle.


Les vers libres ne sont pas forcément des mètres, ils ont leur rythme propre.
Le vers libre ne rime pas obligatoirement avec le vers suivant.
Ainsi, ils peuvent s’enchaîner sans cohérence du nombre de syllabe.

(Rappel : le mètre est la mesure du nombre de syllabes prononcées et


prosodiquement comptées dans un vers.)

*Exemple :

C’est la saison. Oh déchirements ! c’est la saison !


Tous les ans, tous les ans,
J’essaierai en chœur d’en donner la note.

(Jules Laforgue)

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Stéphane Mallarmé abolira les contraintes du vers dans son célèbre recueil Un coup
de dés jamais n’abolira le hasard. Voici un des poèmes les plus célèbres de ce
recueil.

 LES VERSETS 

Ce sont des longs vers présentant une unité rythmique.

Des civilisations s’en furent aux feux des glaces, avec la flamme des grands
vins,
Et les aurores descendues des fêtes boréales, aux mains de l’habilleuse
N’ont pas encore changé leur jeu de lingerie.

Vents, Saint-John Perse

 LES POEMES EN PROSE

Le poème ne prend pas la forme de vers, ni de strophes mais de paragraphes.

Une chambre qui ressemble à une rêverie, une chambre véritablement


spirituelle, où l’atmosphère stagnante est légèrement teintée de rose et de bleu.
L’âme y prend un bain de paresse, aromatisé par le regret et le désir. – C’est
quelque chose de crépusculaire, de bleuâtre et de rosâtre ; un rêve de volupté
pendant une éclipse.
Les meubles ont des formes allongées, prostrées, alanguies. Les meubles ont
l’air de rêver ; on les dirait douées d’une vie somnambulique, comme le végétal et le
minéral. Les étoffes parlent une langue muette, comme les fleurs, comme les ciels,
comme les soleils couchants.

Le Spleen de Paris (Petits poèmes en prose), Charles Baudelaire.

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