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Les Représentations Sociales, SECA
Les Représentations Sociales, SECA
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cursus sociologie
3. Un regard ternaire
2. De nombreuses utilisations
3. Relations internes
4. Savoirs communs
TROISIÈME PARTIE - Dynamique et praxis
Chapitre 5 - Saisie de la structure : complexité et schèmes
1. Relations entre les cognitions
2. Vérification de la centralité
2. Systèmes de communication
bibliographie
glossaire
© Armand Colin, Paris, 2010, 2 édition.
e
978-2-200-25969-3
cursus sociologie
S G F in dex
D
BAJOIT, Le Changement social
BARTHÉLEMY/GRANIER/ROBERT, Démographie et Société
BENOÎT, Comprendre Tocqueville
BÉRA/LAMY, Sociologie de la culture
BERTHIER, Les Techniques d’enquête. Méthode et exercices
corrigés
CANDAU, Anthropologie de la mémoire
DELANNOI, Sociologie de la nation
DELIÈGE, Anthropologie de la famille et de la parenté
DUPRET, Droit et sciences sociales
DUPUY, Anthropologie économique
EYRAUD, Les Données chiffrées en sciences sociales. Du
matériau brut à la connaissance des phénomènes sociaux
FERRÉOL, La dissertation sociologique
FERRÉOL, Les Notions clés de la sociologie
FERRÉOL/NORECK, Introduction à la sociologie
GÉRAUD/LESERVOISIER/POTTIER, Les Notions clés de
l’ethnologie. Analyses et textes
GUIBERT/JUMEL, La socio-histoire
GUICHAOUA/GOUSSAULT, Sciences sociales et
développement
LEGROS/MONNEYRON/RENARD/TACUSSEL, Sociologie de
l’imaginaire
LOMBARD, Introduction à l’ethnologie
NACHI, Introduction à la sociologie pragmatique
POLICAR, La Justice sociale. Les enjeux du pluralisme
RAULIN, Anthropologie urbaine
REZSOHAZY, Sociologie des valeurs
RIVIÈRE, Anthropologie politique
RIVIÈRE, Socio-anthropologie des religions
SCIEUR, Sociologie des organisations
SECA, Les Représentations sociales
SOULÉ/CORNELOUP, Sociologie de l’engagement corporel.
Risques sportifs et pratiques « extrêmes » dans la société
contemporaine
STÉBÉ/MARCHAL, Sociologie urbaine
TABBONI, Les Temps sociaux
VALIÈRE, Le Conte populaire. Approche socio-anthropologique
VALIÈRE, Ethnographie de la France
Internet : http://www.armand-colin.com
Conception graphique : Vincent Huet
avant-propos à la deuxième édition
Approches du contenu
Saisies de la structure
▼
Articulation avec les pratiques sociales
origines et significations
Chapitre 1
ENJEUX THÉORIQUES ET
SOCIOPOLITIQUES
1. DES OBJETS DE TRANSACTIONS ET DES PROCESSUS
2. UNE NOTION TRANSDISCIPLINAIRE
3. UN REGARD TERNAIRE
– Ils ont un caractère collectif. Ils sont réappropriés par la plupart des
membres d’un ensemble social ou d’une foule. Ils correspondent, par
conséquent, à des symboles d’appartenance et de fusion.
– En étant activés, ils masquent les tensions ou les différences entre les
sous-groupes d’une foule ou d’une société. Ils unifient, solidarisent,
restructurent au-delà des appartenances de classe ou de catégories diverses.
Il se déroule alors une sorte d’identification amoureuse au leader, porteur de
nexus, qui lui confère une proximité et une similarité psychiques avec les
membres d’un public.
– Ils apparaissent plus puissants et influents lors de situations de crise ou
d’oppositions polémiques. La guerre ou la menace favorisent leur force de «
reliance » (la « patrie en danger »).
– Ils se réfèrent à des entités abstraites qui facilitent des états projectifs ou
d’identification ambiguè. Ils suscitent plus facilement des situations
imaginaires « à réaliser » et accentuent l’exigence utopique, au détriment de
l’adaptation à la quotidienneté.
– « Ils sont indexés par un terme unique qui les exprime totalement.
Typiquement, ce terme n’a pas d’équivalent qui pourrait lui être substitué dans
l’usage » (ibid.) Rouquette donne alors l’exemple du substantif « fou »,
connoté différemment de « malade mental » pour faire remarquer : « Les
nexus correspondent, en somme, à la fusion de la dénotation avec la
connotation » (ibid.).
– Ils sont l’objet de discours emphatiques et de proclamations démesurées,
solennelles ou exaltées (hommages, répétitions, hymnes, slogans martelés,
langue de bois, vibrants appels, déclarations de dernière minute, etc.).
Temporalité, spatialité et RS
3. Un regard ternaire
Attitudes et RS
Début du Schéma S – R
siècle
5. Attribution, cognition et RS
L’étude des RS implique une prise en considération de l’acteur comme
producteur de connaissances. L’homme de la rue et son mode de pensée
quotidien sont l’objet d’un champ de recherche centré sur l’analyse des
causes d’une situation et des savoirs utilisés dans les relations
interpersonnelles, initiés par Fritz Heider, dans les années 1950. Ce courant,
dit de « l’attribution causale », a aussi inspiré les études sur les RS et des
travaux sur les processus de mobilisation et de traitement des connaissances
dans les relations interpersonnelles (Beauvois et al., 1989a ; Deschamps et
Clémence, 1990 ; Guimelli, 1999 ; Truchot, 1994). Plus spécifiquement
centrées sur l’individu et son mode d’appréhension de l’information (Ghiglione
et al., 1990), ces recherches sur la « cognition sociale » sont interrogées, du
point de vue de la théorie des représentations, sur la hiérarchie accordée à
des notions comme l’historicité, la position sociale et la société comme entité
sui generis. L’instance « cognitive » est déclarée, sur la base de nombreux
travaux, comme pouvant être analysée en tant qu’entité autonome vis-à-vis
des systèmes de croyances, de valeurs et d’autres propriétés internes
(cerveau, perception) à l’individu. On s’appuie alors sur les « lois internes aux
univers cognitifs » (Deschamps et Beauvois, 1996, p. 189).
Qu’est-ce qu’une attribution ? Elle renvoie à « l’élaboration, par inférence,
de certains éléments de l’univers cognitif, à partir de l’observation par le sujet
des événements et des comportements qui se déroulent dans son monde »
(ibid., p. 190). L’émission d’un jugement ou l’inférence d’une qualité, d’une
intuition sur l’état d’un individu ou sur la cause d’un événement, à partir
d’informations diverses, constitue, dans un tel cadre théorique, un phénomène
d’étude en soi. L’individu recherche ainsi les facteurs d’un événement, c’est-à-
dire « une structure permanente, mais non directement observable, qui sous-
tend les effets, les manifestations directement perceptibles » (Deschamps,
1996, p. 210). Dans une telle approche, l’individu est un savant naïf ne
maîtrisant pas correctement les méthodes et les règles de la logique. Le
principe de non-contradiction ou de consistance cognitive (travaux de Heider,
Kelley ou Festinger) est un exemple des processus analysés dans un tel
cadre. D’autres mécanismes ont été mis en évidence, tel celui qualifié par
Moscovici de personnalisme (Moscovici, 1986, p. 49), la tendance à
l’imperméabilité à l’information, ou encore la prégnance à la constitution de
mondes clos, confirmant une croyance par la recherche d’indices conformes à
ce qu’elle implique. Le personnalisme, décrit aussi par certains comme une «
erreur fondamentale » (Nisbett et Ross), est vu comme un biais cognitif par les
représentants de ce courant. Il s’agit de la tendance, vérifiée très souvent
dans des recherches, à sous-estimer le poids des circonstances et à
surévaluer celui de l’individu dans une action ou dans une situation
problématique.
Pour Moscovici, ces travaux ne tiendraient pas suffisamment compte du fait
« que les êtres humains sont gouvernés par une curiosité authentique, des
croyances religieuses ou philosophiques, et une sorte d’engagement éthique
». Il ajoute : « Toute théorie de la cognition, toute analyse de notre vie mentale
qui n’assigne pas un rôle pivot à l’étude des modes de culture qui créent le
langage, qui ne s’intéresse pas au type de rapports entre les gens ou à leurs
attitudes envers les connaissances et les institutions, me semble sans objet »
(Moscovici, op. cit., p. 62). On comprendra que le débat sur la question se
veut à la fois feutré et polémique. Sous les atours de la scientificité, les
travaux centrés sur la seule cognition atténuent ou éludent la portée
anthropologique de la théorie des RS au profit de son seul contrôle
méthodologique ou d’une conception logico-mathématique et réductrice de la
rationalité psychosociale (Palmonari et Emiliani, op. cit.).
À retenir
« Collectionner des opinions » sous une forme désordonnée n’est pas
synonyme d’« étudier des représentations sociales ». Opposer l’individu
(psychologie) et la société (sociologie) n’a pas de sens théorique pertinent car
les RS relient l’un et l’autre. Durkheim fut le fondateur, en 1898, de ce courant
d’étude. Moscovici le développe et l’affermit théoriquement dès 1961.
Les RS sont des phénomènes durables, structurés, provenant d’une
mémoire commune mais aussi susceptibles d’émerger face à des événements
extraordinaires, des objets nouveaux, étranges, ou sources d’enjeux vitaux ou
polémiques. Elles sont liées à la vie mentale des foules, au développement
des aptitudes enfantines, aux cultures orales traditionnelles, comme à celles
plus proches de la modernité. Les modes de communication modernes et la
démultiplication des savoirs, tant scientifiques, techniques, managériaux que
culturels, influencent de façon déterminante leur évolution et leurs contenus.
Le but des systèmes représentationnels est d’intégrer le mouvement des
pratiques et des appropriations mentales et sociales multiples qui altèrent
progressivement leurs formes quasi stables d’interprétation du réel.
Chapitre 2
Il s’agit bien d’une pensée d’un type particulier, générée par les
acteurs sociaux, imprégnée partiellement d’idéologie et centrée sur
l’action dans la vie en société.
« Il s’agit d’une forme de connaissance, socialement élaborée
et partagée, ayant une visée pratique et concourant à la
construction d’une réalité commune à un ensemble social.
Également désignée comme “savoir naïf”, “naturel”, cette forme
[…] est distinguée, entre autres, de la connaissance scientifique
[…]. On reconnaît généralement que les représentations
sociales, en tant que système d’élaboration régissant notre
relation au monde et aux autres, orientent et organisent les
conduites et les communications sociales […], la diffusion de
connaissances, le développement intellectuel et collectif, la
définition des identités personnelles et sociales, l’expression des
groupes et les transformations sociales. »
Jodelet, 1989a, p. 36-37
Connaissance et vulgarisation
Idéologies et préjugés
Santé et maladie
Santé et maladie
Environnement
Culture et éducation
Minorités et exclus
L’innommable déchéance
L’analyse de l’exclusion ne peut se résumer dans les seules
conséquences de la récession économique. Parias, exilés,
réfugiés, persécutés, prisonniers, apatrides ou marginaux forment
depuis des siècles des franges en errance aux portes des cités ou
des grands empires, décrits par Bronislaw Geremek ou Philippe
Sassier (Geremek, 1976, 1987 ; Sassier, 1990). Avec la Révolution
urbaine et industrielle, la question sociale devient le thème
politique et scientifique dominant. La croissance démographique,
la généralisation des modes de gouvernement démocratique, la
multiplication des conflits régionaux, identitaires ou corporatistes,
parallèlement à l’augmentation des frustrations alimentées et
créées par les systèmes de consommation de masse, donnent
naissance, durant le e siècle, à une forme plus intense et subtile
de rejet de l’individu « non conforme ». L’augmentation de la part
de chômeurs de longue durée dans l’ensemble des personnes
sans emploi en France, de 10 % en 1974 à environ 30 % en 1995-
2000 (Lamarque, 1996, p. 36), la précarisation du statut de salarié
et du contrat de travail à durée indéterminée, pendant la période
1980-2000, combinée à la perte de l’emprise des pouvoirs
syndicaux dans les entreprises privées, conduisent à la
métamorphose de la question sociale (cf. titre du livre de Robert
Castel, 1995) dont on se demande si elle sera un jour remplacée
par celle, urgente aussi, du rapport à la nature et à
l’environnement.
Théoriser l’exclusion, c’est donc se placer aux confluences de
facteurs psychologiques, sociaux, économiques, culturels,
historiques et politiques (Ferréol, 1993 ; Neculau et Ferréol, 1999 ;
Paugam, 1994). En étudier les représentations, c’est dérouler peu
à peu les fils de chacun de ses composants. On peut penser que
la folie, le chômage, la privation des droits politiques et humains, la
pauvreté et la maladie composent l’essentiel de cet ensemble
notionnel. C’est d’ailleurs sur ces différentes dimensions qu’un
ouvrage, sous la direction de Jean-Claude Abric, sur les RS et
l’exclusion a été publié (Abric, 1996). Il s’agit d’un thème d’analyse
complexe parce qu’il renvoie aux processus qui conduisent au
malheur et à certains destins funestes. Étudier cet objet
pluridimensionnel, c’est aussi tracer la carte des minorités
stigmatisées portant les marques de la chute « hors les murs » ou
les signes de la malédiction. Parallèlement, il consiste dans le
décryptage des discours des communautés humaines sur le « tiers
exclu », l’innommable, le déviant, le fou ou le bouc émissaire. La
fatalité de ces mouvements vers la négativité voisine enfin avec la
mort et son anthropologie. La relation à l’exclu, qu’il soit condamné
à périr sur un bûcher, malade physiquement ou mentalement,
prisonnier, licencié, mis à l’index, demandeur d’asile ou sans-
papier, laisse perler, imperceptiblement mais sûrement, et sans
l’ombre d’un doute, tout le poids des idéologies, des croyances,
des stéréotypes ainsi que le fonds commun culturel d’une société
qui, en s’appropriant, en refoulant ou en rejetant le cycle fatal de
l’exclusion et ses causes possibles, énonce ce que l’ordre et la
justice du monde peuvent ou doivent être (Bourdieu, 1993).
Abric propose de distinguer deux modes d’approches des RS
relatives à ce phénomène (op. cit., p. 14-15). La première
concerne les représentations agissant chez ceux qui en sont les
victimes et bénéficient des politiques d’aide ou de prévention.
Quelle vision de tels sujets ont-ils d’eux-mêmes et sur quelles
modalités culturelles élaborent-ils leur identité, qu’elle soit perçue,
par eux ou par autrui, comme négative ou non ? Quelles sont les
explications qui sont générées sur les causes et la nature des
problèmes subis ? Quels types de solutions ces groupes exclus ou
stigmatisés envisagent-ils, concernant les difficultés qu’ils vivent
(chômage, maladie, violence, drogue) ?
La seconde dimension se rapporte aux RS que les acteurs de
l’insertion (éducateurs, politiques, administratifs, policiers) mettent
en œuvre quand ils agissent contre l’exclusion et pour les exclus
(perception de leur rôle, de leurs pratiques, de l’efficacité d’une
action et des déviants, c’est-à-dire de leurs « clients » ou publics
éventuels).
On ajoutera une troisième orientation d’enquête à celles qui
viennent d’être énoncées : les représentations sociales des
populations non concernées ou non impliquées par la lutte contre
l’exclusion. C’est dans ces groupes sociaux peu impliqués qu’on
risque de trouver des réflexes psychosociaux et idéologiques,
enfouis dans l’histoire et la mémoire collective, qui se déclenchent
plus facilement face à des entités inconnues ou mal appréhendées
et dont les décideurs politiques ou administratifs peuvent tenir
compte.
À retenir
Abondance de définitions ne nuit pas. Même s’il faut savoir utiliser le rasoir
d’Occam à bon escient, la diversité des définitions des RS fait émerger les
notions de système sociocognitif hiérarchisé et de principe organisateur des
activités symboliques et cognitives en articulation avec l’insertion sociale et les
pratiques. On retiendra aussi la distinction entre « processus » et « produit » :
une représentation ayant la propriété d’être les deux à la fois.
Les objets de RS sont essentiellement générés suite à un manque relatif
d’informations par rapport à leur référent et en fonction de l’existence d’un
degré de consensus ou de dissension dans le groupe qui les élabore. De tels
objets doivent être pluriels, complexes, polymorphes, inconnus ou peu
connus. Ils peuvent aussi être très familiers mais sources de polémiques, de
conversations, de rêves, de répulsions et d’une dynamique sociale.
Ce champ de recherche est en fort développement en France et sur le plan
international. L’activité de revues, de laboratoires, de réseaux spécialisés,
divers sites internet et de nombreuses publications l’attestent.
DEUXIÈME PARTIE
PHÉNOMÉNOLOGIE
Chapitre 3
1.1. Objectivation
1.2. Ancrage
2. De nombreuses utilisations
2.1. Construction de la référence et identité
Productions identitaires
Emprise prescriptive
7. L’effet Pygmalion
Les expériences de Robert Rosenthal et Lenore Jacobson sur la perception
de l’intelligence des élèves chez des instituteurs illustrent, sans que ceux-ci se
revendiquent du courant dont on parle dans ce livre, cette fonctionnalité des
RS (Rosenthal et Jacobson, 1968). On annonce alors à des enseignants du
Primaire, en début d’année scolaire, qu’une partie de leur public a obtenu des
résultats à des tests d’intelligence qui la classe dans la catégorie des élèves
précoces alors qu’il n’en est rien : en fait, tous les enfants de la classe
obtiennent un score normal à ces tests. On laisse aussi croire aux instituteurs
que ce genre de mesure permet de prédire la réussite scolaire.
La représentation implantée dans l’esprit de ces pédagogues va ainsi agir
sur leur pratique et augmenter leur attention pour les 20 % de leur classe,
positivement évalués et choisis, en réalité, au hasard dans l’échantillon
d’observation. À la suite d’une période de temps assez longue (quatre, huit et
vingt mois après), ceux-ci s’avèrent être devenus des individus plus studieux,
mieux notés et obtenant effectivement des résultats supérieurs aux tests (+ 10
à 15 points) qu’ils avaient déjà passés en début de formation. Dans certains
cas, les attentes sont prescriptives de comportements éducatifs. Elles finissent
par produire une conduite qui n’existait pas objectivement au départ.
Ce phénomène n’a pas été fondamentalement remis en cause depuis ces
recherches, même si certaines discussions méthodologiques sur les effets des
attentes des expérimentateurs sur les sujets « manipulés » ont été engagées,
y compris par les auteurs eux-mêmes. Divers travaux, aux États-Unis, ont
confirmé l’existence de ces prédictions créatrices et des conséquences
stigmatisantes des préjugés. (J.-C. Croizet et J.-P. Leyens, 2003 ; Rosenthal,
1969). Les études sur les effets de la représentation de la tâche, du groupe,
de soi, d’autrui ou du partenaire (Abric, 1987 ; Codol, 1979) ont permis
d’explorer le fonctionnement d’autres aspects du même mécanisme.
3. Relations internes
1. Verbalisations
Dynamique et praxis
Chapitre 5
15. La RS de la formation
Afin de déterminer le champ de la représentation et l’attitude des 168
formateurs d’un deuxième échantillon, deux recueils de données sont
effectués. D’abord, les vingt substantifs plus le mot « formation » (n = 21)
servent à former 210 paires possibles de termes (d’après la formule : « n (n –
1)/2 »), soumises à évaluation sur une échelle en cinq points (allant de « très
semblable » à « très peu semblable »). Chaque couple de mots, par exemple
« apprentissage – emploi », est jugé par cette procédure.
L’étude de l’attitude consiste ensuite à faire évaluer chacun des 21 concepts
au moyen de huit échelles à sept degrés, du type « différenciateurs
sémantiques », comme par exemple « utile – inutile » ou « difficile – facile ».
Les données sont traitées par des analyses factorielles des correspondances
(AFC) et par une classification ascendante hiérarchique (CAH). Les AFC
portent sur les réponses au degré un (très semblable) sur les cinq existants de
l’échelle d’évaluation des 210 paires de substantifs. Le premier facteur (F1 =
32,76 % de la variance) fait apparaître la place notable de « chômage »,
évoqué dans sa dimension de privation socio-affective, et opposé à «
communication, échange, connaissance, développement ». Dans le facteur 2
(F2 = 22,82 %), « entreprise, emploi, profession, travail » sont en opposition
au monde scolaire symbolisé par les termes « école, enseignement, éducation
». Le troisième facteur (F3 = 19,24 %) est caractérisé par une distinction entre
« relation, communication, échange » (valeurs relationnelles) et «
apprentissage, étude, compétence » (valeurs du savoir et du savoir-faire).
Cette AFC, traduite en projection graphique de F1 et F2, ci-après, laisse
apparaître l’existence d’un principe organisateur de la RS, opposant le cognitif
au relationnel.
Regroupements en « paquets »
2. Vérification de la centralité
À retenir
Le repérage de la structure d’une RS peut prendre plusieurs chemins. Le
but étant de faire produire, par les sujets eux-mêmes, des contenus et des
évaluations, soumis à divers traitements de données.
L’une des méthodes les plus simples (le lien « fréquence/rang » d’une liste
de termes induits) peut être complétée par des analyses de similitude et
diverses approches multidimensionnelles.
La vérification expérimentale de l’effective existence et de la nature
qualitativement distincte des éléments du noyau central a été opérée en 1988
par Pascal Moliner, puis affinée par la méthode « ISA » (induction par scénario
ambigu).
Le développement le plus sophistiqué, malaisé à appliquer, notamment sur
des objets de RS émergentes ou peu connues, est la procédure « SCB »
(schèmes cognitifs de base), proposée par Rouquette et ses collaborateurs.
Ce protocole devrait pouvoir compléter utilement une approche par entretiens
et des analyses statistiques préalables de description des dimensions
principales « à vérifier » dans leurs effets.
Chapitre 6
1.1. Rationalisations
1.2. Transformations
L’économie d’information
L’attaque sorcière est d’autant plus efficace qu’on ignore qui est
l’agresseur. Lorsque le sorcier n’est pas identifié comme tel et
qu’aucune force magique ne vient se placer sur son parcours, son
action tend vers son pouvoir maximal. Dans le schéma ci-après,
on observe que ce type d’agression consiste dans le fait de puiser
dans la positivité (ou fragilité ou encore suffisance) d’un individu
quelconque. L’avidité ou jalousie fondamentale du sorcier est
essentielle. Sur le plan du visible et topologique, c’est le domaine
de l’ensorcelé qui est investi. Au niveau des forces engagées
(invisibles), celles du sorcier viennent envahir le territoire de sa
victime et « rattirer » ce qu’elle a « en plus ». Il y a intrusion dans
le « corps » et « vampirisation » de l’ensorcelé. Passons sur
l’interprétation de ce lexique et présentons des schématisations
des attaques sorcières.
Schématisation (I) d’une attaque sorcière*
D’après Favret-Saada, 1977, p. 349-350.
Schématisation (II) de l’ensemble sorcier*
*Op. cit., p. 355-356.
Bulletin de psychologie
Cahiers internationaux de sociologie
Culture and Psychology
European Journal of social psychology
JIRSO (Journal International sur les Représentations sociales)
Les Cahiers de l’Imaginaire
Les Cahiers internationaux de psychologie sociale
Psychologie et société
Revue française de pédagogie
Revue française de sociologie
Revue internationale de psychologie sociale
Social Science Information
Sociétés
Textes sur les représentations sociales
glossaire
Affect : état de l’émotion dont l’agrégation en ensembles actifs
oriente le comportement vers des formes plus ou moins inhibées
ou cathartiques. Le lien entre les phénomènes inconscients,
pulsionnels, quantitatifs et leur « figurabilité » ou symbolisation
convertie, déplacée, obsédante, triste ou anxieuse, est opéré par
la médiation de représentations, émanant à la fois de l’individu et
d’une modalité fusionnelle, collective d’être au monde.
Ancrage : assignation d’un sens à une figure, implantation et
distribution d’une RS chez différents groupes et membres d’une
société. Ce mécanisme donne lieu à une transformation du mode
de pensée (conversion, schèmes étranges, rationalisation) ou à
une intégration de l’objet de RS dans le système cognitif
préexistant (familiarisation, normalisation, justification, négation).
Association : propriété des éléments d’une représentation,
activée lors de collectes de données, par l’application de tests
associatifs structurés autour d’un mot inducteur susceptible de
faire émerger des termes induits dont on analyse la centralité
(valence, connexité), la sémantique et le lexique. La
caractérisation à la fois projective, affective et cognitive d’un tel
phénomène est avérée.
Attitude : composant d’une RS, décrivant principalement
l’orientation affective, évaluative vis-à-vis de l’objet. L’attitude est
une structure individualisée et hiérarchique d’opinions, typique du
mode « propagation » de construction d’une représentation, et
défini comme une prédisposition à l’action d’un sujet.
Attribution : élaboration cognitive (schème causal ou
d’événement) servant à produire une explication sur les relations
interpersonnelles ou sur l’origine d’un fait, du point de vue d’un
sujet. Des modèles d’analyse décrivent divers « biais cognitifs »
tels que la survalorisation de l’individu, vu comme responsable
(causalité interne ou « erreur fondamentale ») d’un accident ou
d’un échec à un examen.
Catégorisation sociale : regroupe diverses approches sur la
genèse des catégories composant une RS. L’une des grilles
théoriques postule qu’un groupe, se représentant socialement, est
le lieu d’un nivellement catégoriel (assimilation en interne), de
façon concomitante à son opposition à un autre collectif
(stéréotypes et formes identitaires, émergeant par contraste avec
autrui). D’autres travaux indiquent que certains ensembles peuvent
produire des définitions différenciées d’eux-mêmes tout en
maintenant une cohésion interne forte (prototypes, groupes «
collection »).
Cognition : désigne, parfois sous l’appellation « cognème »,
tout élément de connaissance causal, descriptif, prescriptif ou
fonctionnel, plus ou moins négociable ou central, composant le
système d’idées et d’actions collectivement partagées qu’est une
RS.
Conversion : intériorisation de valeurs innovantes, originales ou
d’adhésion à de nouvelles pratiques. Elle implique une crise
morale ou spirituelle des acteurs (état naissant) qui la vivent et
l’efflorescence de représentations hétérogènes, à la valence
contradictoire, bousculant radicalement ou progressivement un
champ cognitif conventionnel ou structuré. Les « canevas étranges
» sont un exemple de tels processus.
Croyance, valeur, idéologie : renvoyant à des formes
systémiques, de type religieux, moral, scientifique ou politique,
plus permanentes, transhistoriques, ritualisées ou
institutionnalisées, des représentations. Une valeur se compose de
grands principes et d’orientations générales. Elle correspond à la
dimension idéelle (modèle) de la norme (concrétisation).
L’idéologie (communisme, par exemple) renferme le même genre
de tension entre l’utopie et sa réalisation. Elle présuppose aussi
une volonté de justifier l’existant (idéologie libérale de l’individu
autonome et rationnel). Comme d’autres idéologies, le libéralisme
se présente, par ailleurs, comme un programme utopique et sous
des formes scientifiques (économétrie). La croyance religieuse
implique une alternance assez similaire (parole du Christ opposée
à son institutionnalisation dans l’église). Ses traductions profanes
n’échappent pas à cette tendance.
Image : aspect figuratif, iconique, matérialisé dans les qualités
sensorielles d’un objet absent. Une image d’un objet X peut être
structurante d’une RS ou bien dépendre du noyau central dont on
doit détailler les éléments pour mieux comprendre le sens et les
fonctions des dimensions visuelles et non verbales. Ne pas
confondre « figure », impliquant la construction active d’un sens
analogique et représentationnel, et « image », dont la forme est
passive, mimétique.
Interaction : propriété définie par une suite d’actions mutuelles,
de comportements, de relations et d’échanges plus ou moins
symbolisés, signifiants, réciproques, symétriques ou
complémentaires, d’altérations et d’influences entre divers
individus ou groupes. La possibilité de rétroaction et l’aptitude à
métacommuniquer (parler sur l’acte de communication en train de
se faire et usage de signes abstraits pour en évoquer d’autres, de
même nature) donnent une spécificité à cette notion. Les RS sont
générées essentiellement durant des séquences interactives tant
linguistiques que non verbales, mettant en jeu un « tiers »
symbolique présent ou absent et la relation avec la totalité sociale
et historique.
Naturalisation : usage classificateur et pragmatique de
catégories, élaborées durant l’étape d’objectivation, comme si elles
étaient naturelles et univoques. On adhère alors à une notion («
complexe » ou « complexé »), comme si son origine
conventionnelle, approximative et discutable n’avait jamais existé.
On parle, par exemple, sur un objet pluriel à partir d’un élément qui
le représente de façon réduite, schématique mais englobante (le
sans-domicile comme prototype de la pauvreté).
Normalisation : mécanisme d’intégration dans les systèmes de
représentations où les éléments ou objets nouveaux, dérangeants,
sont déniés, placés en marge, à la périphérie. Cette familiarisation
de l’étrange implique une sorte d’inversion, par la mise en
conformité des contenus extérieurs, aberrants ou inconcevables.
Les « canevas de la négation » (Flament, Rouquette) sont un
exemple de ce type d’ancrage. L’influence minoritaire peut
engendrer de telles dénégations.
Objectivation : attribution d’une figure à un sens, sélection des
informations concernant un objet polymorphe et matérialisation de
la RS autour d’un schéma figuratif, d’un paradigme ou d’un noyau
commun à un groupe, permettant d’en parler de façon collective,
naturelle ou naturalisée.
Opinion : constituant d’une attitude, et donc d’une RS,
renvoyant à une position plus ou moins partagée par des individus
à propos d’un objet X, à un instant t. Elle est une réalité statistique
fluctuante, étudiée par des sondages, susceptible d’évoluer en
fonction de facteurs de contexte et d’influence sociale et
correspond au mode « diffusion » de l’ancrage d’une RS.
Principe organisateur : « programme sociocognitif », actualisé
dans les rapports sociaux symboliques, ou collection de conduites
potentielles, d’opinions, d’attitudes et d’informations, articulées
entre elles sur la base de relations de dichotomie, d’adaptation,
d’assimilation, de syncrétisme. Le métasystème ou ensemble
dynamique de facteurs institutionnels, groupaux, intergroupaux,
idéologiques, positionnels, statutaires, hiérarchiques,
d’appartenance socioprofessionnelle ou de classe est, sur la base
d’une certaine homologie structurale, articulé aux (voire similaire
ou proche des), principes générateurs d’opinions que sont les RS
et, donc, aux activités symboliques et perceptives des acteurs
sociaux.
Prototype : catégorisation, repérée par Eleonor Rosch (1973),
ayant un statut intermédiaire, entre des classes supra-ordonnées
et l’hétérogénéité d’éléments appartenant à tel ou tel ensemble. Le
groupe social, forte ment diversifié, des « cadres » se prête
utilement à l’analyse prototypique (Boltanski, Desrosières,
Goubert-Seca, Thévenot). Ce type de catégorie est caractérisé par
sa forte fréquence de citation dans un test associatif (Vergès,
1992). Il s’agit d’une « synthèse cognitive », aux contours flous,
reflétant, par sa relative mais effective précision, la pluralité des
cas d’un ensemble (« ingénieur » comme prototype du groupe «
cadres » ; « rose » pour la catégorie des fleurs ou « moineau »
pour les oiseaux). Le prototype correspondrait parfois à la zone de
définition d’un système central de RS.
Rationalisation : processus consécutif à des situations de
soumission forcée ou de libre engagement où le sujet est conduit à
agir dans un sens contraire à ses principes ou à affronter des
situations dissonantes. Il se traduit par une modification des
attitudes et des conduites d’un acteur de façon à les rendre
conformes à l’acte de soumission extorqué ou socio-
organisationnellement vécu, soit en contexte de contrainte, soit en
situation de liberté.
Regard ternaire : mode d’analyse de la relation à trois pôles
entre le sujet (ou acteur social), l’objet (matériel, idéel, culturel,
abstrait, concret…) et la représentation qui leur donne sens. Cette
dernière permet à l’objet d’être communiqué, échangé, reformulé
et au sujet d’élaborer son identité, de formuler un savoir sur l’objet,
de trouver une orientation à son action et une explication de sa
situation.
Rite et pratique sociale : une pratique sociale renvoie à des
actes signifiants reliés entre eux par une finalité et une logique
fonctionnelle, symbolique ou adaptative. Un rite est une pratique
sociale, plus connotée par son rapport au sacré, organisée en
fonction d’un code ou de mythes, impliquant un réinvestissement
corporel et mental du sens par des communautés et des individus,
lors des séquences temporelles et spatiales particulières.
Schème : cognition ou classe d’événements, d’objets ou
d’actions, synthétisant, à gros traits, l’expérience d’un sujet,
permettant d’accueillir et d’interpréter d’autres informations sur la
réalité et pouvant se traduire en prescriptions, descriptions, scripts,
scénarios et attentes vis-à-vis d’un objet. Les schèmes cognitifs de
base (Guimelli, Rateau, Rouquette) sont l’une des synthèses
possibles, à la fois formalisées et méthodologiques, de l’influence
de ces structures actives, articulant des opérations élémentaires
(connecteurs et hyperconnecteurs) et leurs modelages contextuels
(application à des objets lestés de sens psychosociologique).
Stéréotype : dimension cognitive du préjugé, lequel implique
une catégorisation négative, une extrapolation hasardeuse, une
généralisation rigide, une antipathie accentuée vis-à-vis de
certains groupes et de leurs membres. Constituant essentiel des
activités de propagande, il renvoie à des oppositions radicalisées
en termes de vie et de mort ou de vrai et de faux, incitant les sujets
sous leur emprise à des jugements hâtifs sur un individu sur la
base de son appartenance catégorielle et potentielle à une ethnie,
un statut, une religion, une nationalité ou une classe.
Système de communication : ensemble coordonné de moyens
de production, de publics, de rapports sociaux, de systèmes de RS
et de finalités financières, commerciales, politiques, idéologiques
ou distractives. Trois types sont repérables : l’un axé sur le ciblage
d’une masse sérielle et de l’opinion qui la représente
minimalement (diffusion) ; l’autre organisé sur la régulation
attitudinale de l’information auprès d’un groupe hiérarchisé et
informé, (propagation) ; et le dernier impliquant l’assimilation
stéréotypique de données à l’intention d’un groupe d’adeptes, de
militants ou de soldats recherchant des ressources mentales pour
combattre un ennemi réel, imaginé ou imaginaire (propagande).
Systèmes « central » / « périphérique » : hiérarchisation en
deux structures complémentaires d’une représentation. Le
système central composé de cognitions non négociables, de
définitions de l’objet, de prescriptions et de normes est
qualitativement générateur et organisateur des schèmes du
système périphérique plus nombreux, conditionnels, contextualisés
et variables.
Thêma (ou thêmata, plur.) : notion proposée par Holton (1981),
puis reprise par Moscovici et Vignaux, en 1994, se présentant
généralement sous la forme d’idées-sources, d’archétypes, de
schémas d’oppositions (homme/femme ; élite/peuple ;
liberté/contrainte ; sacré/profane), impliquant une « thématisation »
générique et des modulations socio-historiques, argumentatives et
spatio-culturelles, intégrées plus ou moins fortement dans les RS.