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Tribunal de commerce de Versailles, Chambre 00,

23 novembre 2016, n° 2016R00269

Sur la décision

Référence :T. com. Versailles, ch. 00, 23 nov. 2016, n° 2016R00269


Juridiction :Tribunal de commerce de Versailles
Numéro(s) : 2016R00269

Sur les personnes

Avocat(s) :Céline COTZA, Sophie BRASSART


Parties :LE COMITE D ENTREPRISE DE LA SA SOCOTEC c/ SOCOTEC France

Texte intégral

projets de résolution à l’assemblée générale des


TRIBUNAL DE COMMERCE actionnaires a introduit la présente instance ;

DE VERSAILLES ORDONNANCE DE REFERE du Par acte en date du 1° août 2016, le comité


23  Novembre  2016  N° RG: d’entreprise de la société SOCOTEC a fait donner
2016R00269 DEMANDEUR assignation à la SA SOCOTEC d’avoir à comparaître
devant nous le 26  septembre  2016  afin de nous
LE COMITE D ENTREPRISE DE LA SA SOCOTEC 3 av
entendre :
du Centre les Quadrants […] – comparant par SCP
LEGENDRE PICARD SAADAT représentée par Vu l’article 8 du préambule de la constitution de 1946,
e Vu les articles L.2323-67  et R.2323-13  du code du
M  Céline COTZA 11 […]
travail,
DEFENDEUR
— Dire et juger le comité d’entreprise de SOCOTEC
SA SOCOTEC France 3 […] comparant par recevable et bien fondé en ses demandes ;
Me BRASSART 89 ave […]
— Constater le refus de la part du président du conseil
Débats à l’audience publique du 9  Novembre  2016, d’administration de SOCOTEC de transmettre à
devant M.  Denis LAMBREY de SOUZA, juge délégué l’assemblée générale des actionnaires du
23  juin  2016  les projets de résolutions régulièrement
par le président du tribunal, assisté de Me Frédérique
votés par le CE ;
CHAMAILLARD, greffier d’audience.
— Désigner un mandataire ad hoc afin de convoquer
Prononcée publiquement par mise à disposition au
l’assemblée générale ordinaire des actionnaires de la
greffe le 23  Novembre  2016, les parties en ayant été société SOCOTEC dans le mois suivant la décision ;
préalablement avisées à l’issue des débats dans les
conditions de l’article 450  du code de procédure — Fixer à l’ordre du jour de la réunion le point
civile. suivant  : 'examen des résolutions votées par le comité
d’entreprise le 27  mai  2016  en vue de l’assemblée
Minute signée par M.  Denis LAMBREY de SOUZA, générale des actionnaires’ ;
juge délégué par le . président du tribunal et par
Me  Frédérique CHAMAILLARD, greffier d’audience — Condamner la société SOCOTEC à verser au comité
auquel la minute de la décision a été remise par le d’entreprise la somme de 5 000 € au titre de l’article
juge signataire. 700 du CPC ;

Décision contradictoire et en premier ressort. — Condamner la société aux entiers dépens ;

FAITS ET PROCEDURE Par conclusions déposées lors de l’audience du


19  septembre  2016  la SA SOCOTEC France nous
Le comité d’entreprise de la société SOCOTEC demande de :
estimant avoir été empêché d’exercer ses prérogatives
dans le cadre de sa faculté légale de proposer des Vu les articles L.  2323-67  et R.2323-13  du code du
travail,
— Constater que le Comité d’Entreprise ne justifie pas SOCOTEC de transmettre à l’assemblée générale des
de l’urgence qui lui permet de recourir à l’article actionnaires du 23  juin  2016  les propositions
L.2323-67 al. 1 du code de commerce (sic) ; régulièrement votées par le CE ;

— Constater que les projets soumis au conseil Attendu que sont produits aux débats les échanges
d’administration par le comité d’entreprise ne sont pas épistolaires entre le secrétaire du CE, Monsieur Y Z et
des projets de résolutions et ne rentrent pas dans le Monsieur X, président du conseil d’administration de
champ de compétence de l’assemblée générale ; la société SOCOTEC ; que ces échanges culminent par
le courrier de Monsieur X, en date du 15 juin 2016 qui
— Constater que le comité d’entreprise dispose oppose son refus de porter les propositions faites par
d’autres moyens légaux afin d’obtenir ce qu’il le CE devant l’assemblée générale des actionnaires du
demande ; 23 juin 2016 ;
En conséquence, Attendu qu’en conséquence, et sans aucunement nous
prononcer sur la validité des arguments avancés par
'- Débouter le Comité d’Entreprise de toutes ses Monsieur X, nous constaterons, de façon purement
demandes et notamment de sa demande de désignation
factuelle, le refus du président du conseil
d’un mandataire ad hoc afin de convoquer l’assemblée
d’administration de SOCOTEC de transmettre à
générale ordinaire des actionnaires de la société l’assemblée générale des actionnaires du
SOCOTEC et de fixer l’ordre du jour de la réunion ;
23 juin 2016 les propositions régulièrement votées par
le CE ;
En toute hypothèse,
Attendu que la demande du comité CE est introduite
— Condamner le Comité d’Entreprise de la société
SOCOTEC à verser à SOCOTEC, la somme de devant nous, juge des référés, au visa de l’article 8 du
5 000  euros au titre de l’article 700  du code de préambule de la constitution du 27  octobre  1946  et
procédure civile ; des articles L.2323-67  et R.2323-13  du code du
travail ; que si l’article 8  du préambule de la
— Condamner le Comité d’Entreprise de la société constitution de 1946 ne fait nullement référence à une
SOCOTEC aux entiers dépens ; quelconque urgence, condition nécessaire pour
introduire une action en référé, l’article L.2323-67 du
Par dernières conclusions déposées pour l’audience du code du travail, dans son premier alinéa, dispose
9  novembre  2016, les parties ont réitéré leurs
précédentes demandes ; quant à lui que «le comité d’entreprise peut demander
en justice la désignation d’un mandataire chargé de
Nous avons entendu les parties le 9  novembre  2016 ; convoquer l’assemblée générale des actionnaires en
SUR CE cas d’urgence » ;

Attendu que le comité d’entreprise de SOCOTEC, ci Attendu que de plus, l’article R.2323-13  du même
après le « CE », nous demande de le dire recevable en code dispose que « Le comité d’entreprise représenté
ses demandes ; par un de ses membres peut, dans les conditions
prévues au premier alinéa de l’article L.. 2323-67,
Attendu que l’article L.2323-1  du code du travail demander au président du tribunal de commerce
dispose que « Le comité d’entreprise a pour objet statuant en référé la désignation d’un mandataire de
d’assurer une expression collective des salariés justice chargé de convoquer l’assemblée des
permettant la prise en compte permanente de leurs actionnaires. » ;
intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à
l’évolution économique et financière de l’entreprise, à Attendu que l’urgence est la seule condition de mise
l’organisation du travail, à la formation professionnelle œuvre de l’action de l’article L.2323-67  alinéa 1  du
et aux techniques de production » ; que le même article code du travail, consistant pour le comité d’entreprise
dispose également que le comité d’entreprise « exerce à demander au juge la convocation d’une assemblée
ses missions sans préjudice des dispositions relatives à générale par mandataire ; que les conditions
l’expression des salariés, aux délégués du personnel et d’existence d’une situation exceptionnelle et de
aux délégués syndicaux » ; conformité à l’intérêt social ne sont pas requises, dans
la mesure où le texte fondant la demande, tel que
Attendu que l’article L.2325-1  du code du travail contenu dans le code du travail, est une disposition sui
précise que le comité d’entreprise est doté de la generis autonome puisque le législateur a
personnalité civile ; que cette personnalité civile lui volontairement introduit cette disposition dans le code
donne capacité à ester en justice par l’intermédiaire du travail et non pas dans le code de commerce ;
d’un mandat donné à l’un de ses membres ; que le CE
justifie par son PV de la réunion du 5  juillet  2016, Attendu que l’urgence peut être caractérisée alors
produit aux débats, avoir donné mandat à Monsieur Y même que la situation économique et financière de la
Z, secrétaire du CE, pour ester en justice sur un société n’est pas en péril ; que les caractéristiques
fondement qui est précisément celui de la présente définissant l’urgence, qui ne sont pas précisées par le
instance ; législateur, ne doivent pas être limitées au seul péril
affectant la situation économique et financière de
Attendu qu’en conséquence, nous dirons le CE l’entreprise et peuvent également résider dans la
recevable en ses demandes ; nécessité d’établir promptement un dialogue avec les
actionnaires sur des questions relevant de la
Attendu que le comité d’entreprise de SOCOTEC, ci
compétence du comité d’entreprise et de la
après le « CE », nous demande de constater le refus de compétence des actionnaires siégeant en assemblée
la part du président du conseil d’administration de générale ;
Attendu que le CE, pour justifier l’urgence visée dans Attendu qu’au cas d’espèce, le CE présente au conseil
le texte législatif, allègue d’une atteinte à ses droits et d’administration cinq propositions qu’il lui demande
prérogatives telles qu’accordés par les dispositions de soumettre au vote de l’assemblée générale des
légales ; que le CE soutient que ses droits tels que actionnaires du 23 juin 2016 ;
conférés par les dispositions de l’alinéa 2  de l’article
L.2323- 67  du code du travail, ont été bafoués par la Attendu que la première proposition consiste en une
direction de SOCOTEÉC qui a refusé de présenter à recommandation que ferait l’assemblée générale au
l’assemblée générale des actionnaires, tenue le conseil d’administration de nomination de deux
23  juin  2016, les propositions de résolutions rédigées représentants des salariés au comité de
par le CE et adoptées par ce dernier le 27  mai  2016 ; rémunérations ; que les statuts de SOCOTEC, produits
que de ce fait, l’urgence serait constituée par le péril aux débats, précisent en leur article 22 la composition
qui menacerait sa faculté d’exercer ses droits et le mode de désignation des membres du comité de
fondamentaux ; rémunérations ; que la désignation de ses membres est
donc une disposition statutaire ; que les statuts ne
Attendu que le législateur, dans sa rédaction de peuvent pas être modifiés par une délibération
l’article L.2323-67  du code du travail, a clairement d’assemblée générale ordinaire ; que de ce fait, la
séparé la prérogative permettant au comité première proposition du CE n’est pas du ressort de
d’entreprise de solliciter la désignation d’un l’assemblée générale ;
mandataire chargé de convoquer l’assemblée générale
et a précisé que cette prérogative n’était applicable Attendu que les seconde et troisième propositions du
qu’en cas d’urgence ; que cette prérogative doit donc CE consistent en la sollicitation de l’assemblée
être considérée comme autonome ; que séparément, et générale à faire des recommandations au conseil
en second alinéa, le législateur précise une autre d’administration sur des points d’orientation
prérogative, également autonome, permettant au stratégique et de politique économique de
comité d’entreprise de requérir l’inscription de projets l’entreprise ; que ces points relèvent de la seule
de résolutions à l’ordre du jour des assemblées ; que la compétence du conseil d’administration au visa des
finalité de la disposition textuelle est, de toute dispositions de l’article L.225-35  du code de
évidence, de permettre au comité d’entreprise commerce qui dispose que « Le conseil
d’œuvrer comme un actionnaire, en vue de provoquer d’administration détermine les orientations de
la réunion de l’assemblée et non d’utiliser cette l’activité de la société et veille à leur mise en œuvre.
procédure dans le cadre d’une concertation sociale ou Sous réserve des pouvoirs expressément attribués aux
d’une action syndicale ; qu’il nous appartient donc assemblées d’actionnaires et dans la limite de l’objet
d’apprécier le mérite de l’urgence invoquée par le CE social, il se saisit de toute question intéressant la
au regard de l’intérêt social et non pas uniquement du bonne marche de la société et règle par ses
seul intérêt des salariés ; délibérations les affaires qui la concernent » ;

Attendu que la rédaction de l’alinéa 2  de l’article Attendu que les quatrième et cinquième propositions
L.2323-67  du code du travail donne au CE toute sont adressées directement au conseil d’administration
liberté pour faire les propositions qu’il juge utiles à en ce qu’elles sont rédigées comme suit  : « le comité
l’entreprise et prive le conseil d’administration de tout d’entreprise demande au conseil d’administration
droit de juger de l’opportunité ou de la rédaction des …… » ; que de ce fait ces propositions qui doivent faire
propositions ; que cependant les propositions de partie des discussions directes entre le CE et le conseil
résolutions faites par le CE doivent nécessairement d’administration dans le cadre de la représentation de
CE au sein du conseil, ne peuvent nullement être
relever de la compétence de l’assemblée convoquée ; considérées comme des propositions de résolutions
qu’en l’espèce les propositions faites par le CE l’ont devant être soumises à l’approbation ou au refus de
été pour l’assemblée générale ordinaire du l’assemblée générale des actionnaires ;
23 juin 2016 ;
Attendu qu’au vu de ce qui précède, il est patent que
Attendu que les compétences d’une assemblée dans le cadre des dispositions de l’article L.2323-
générale ordinaire, dite « de droit commun » et réunie 67 du code du travail, les propositions du CE rédigées
pour la prise des décisions normatives affectant la et proposées au
société au moins une fois par an, sont clairement
définies par le code de commerce ; que ces conseil d’administration pour être présentées à
compétences sont limitées à l’approbation des comptes l’assemblée générale du 23  juin  2016, n’obligeaient
(article L.225-100 du code de commerce), l’affectation nullement le conseil d’administration à les ajouter à
du résultat (article L.232-12 du code de commerce), la l’ordre du jour de ladite assemblée générale ;
désignation ou la révocation des membres du conseil
d’administration (article L.225-18  du code de Attendu que ce refus du conseil d’administration ne
constitue nullement un péril imminent affectant la
commerce) et le cas échéant la ratification d’une
désignation (article L.225-24  du code de commerce), situation économique et financière de l’entreprise ni
l’approbation du rapport spécial du commissaire aux comme l’affirme à tort le CE, une négation de ses
comptes (article L.225-38  du code de commerce), droits, qui pourrait justifier l’urgence prévue à
l’allocation éventuelle de jetons de présence aux l’article L.2323-67 du code du travail ; que ce refus ne
membres du conseil d’administration (article L.225- prive nullement le comité d’entreprise de la possibilité
45  du code de commerce), la désignation, hors de soulever les points proposés dans le cadre d’un
dialogue avec les membres du conseil d’administration
nomination statutaire, du ou des commissaires aux
comptes (article L.823-1  du code de commerce) et puisque ces points sont de la compétence dudit conseil
l’agrément des cessions d’actions si les statuts le où siège le CE ; que le CE n’allègue nullement d’un
prévoient ; délit d’entrave tel que prévu par les dispositions de
l’article L.2328-1  du code du travail et se contente
d’invoquer, sans le prouver, l’urgence du fait d’un — - Cependant, dès à présent et par provision  : o
péril allégué menaçant ses droits ; Disons le comité d’entreprise de SOCOTEC recevable
en ses demandes ; o – Constatons le refus du président
Attendu que les conditions de désignation d’un du conseil d’administration de SOCOTEC de
mandataire ad hoc, telles que prévues par les transmettre à l’assemblée générale des actionnaires du
dispositions de l’article L.2323-67  du code du travail 23 juin 2016 les
ne sont pas réunies ; qu’en conséquence, nous
débouterons le CE de l’intégralité de ses demandes ; propositions régulièrement votées par le CE

Sur l’article 700 du CPC o Déboutons le comité d’entreprise de SOCOTEC de


l’ensemble de ses demandes ;
Attendu qu’il serait inéquitable de laisser à la charge
de la SA SOCOTEC l’intégralité des frais irrépétibles o – Condamnons le comité d’entreprise de SOCOTEC à
qu’elle a engagés pour se défendre en l’instance ; que payer à la SA SOCOTEC la somme de 4 000 € au titre
nous condamnerons le CE à lui verser la somme de de l’article 700 du CPC ; '
4 000 euros au titre de l’article 700 du CPC ;
o – Condamnons le comité d’entreprise de SOCOTEC
Sur les dépens aux dépens ;

Attendu que le CE succombera en l’instance ; que nous — - Rappelons que l’exécution provisoire est de droit.
mettrons les dépens à sa charge ;
Leî greffier, le président,
PAR CES MOTIFS  : AU PRINCIPAL, – - Renvoyons les
parties à se pourvoir ; \

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