Vous êtes sur la page 1sur 100

Faculté de droit et de science politique d'Aix-Marseille

TRAVAUX DIRIGES

DROIT SPECIAL DES SOCIETES


Master 1 Droit des affaires
Aix-en-Provence

Cours de Monsieur Bastien BRIGNON

Chargés de travaux dirigés :


Monsieur Aymeric ALIAS
Monsieur Jean BRUSCHI
Monsieur Anthony JULIO
Monsieur Vincent MARTINEZ

Année universitaire 2022-2023

1
Faculté de droit et de science politique d'Aix-Marseille

TRAVAUX DIRIGES DROIT SPECIAL DES SOCIETES

Master 1 Droit des affaires


Aix-en-Provence - Année universitaire 2022-2023

SEANCE 1 - LA SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE

- Cass. com., 4 mai 2010, n°09-13205, Bull. Joly Sociétés 2010, § 134, p. 647, note B.
Dondero ; D. 2010, p. 1206, obs. A. Lienhard ; Rev. sociétés 2010, p. 222, note A. Couret ;
Chron. F. Deboissy et G. Wicker JCP E 2010, 1993 ; Publié au Bulletin.

Sur le moyen unique, après avertissement délivré à la partie :


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Poitiers, 26 février 2008), que M. X..., associé de la société à
responsabilité limitée Feu décor (la société) l’a assignée ainsi que les deux autres associés, M. et
Mme Y... pour obtenir l’annulation de cinq assemblées des associés tenues entre 2002 et 2006 et
des délibérations qui en découlaient ayant approuvé les conventions portant sur la rémunération
versée à la gérante, Mme Y... et sur la prise en charge par la société des cotisations personnelles
obligatoires de celle-ci ;
Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande tendant à l’annulation des
délibérations des assemblées annuelles des associés de la société des 22 juillet 2002, 21 juillet
2003, 26 juillet 2004 et 25 juillet 2005 alors, selon le moyen :
1°/ que la rémunération du gérant de société à responsabilité limitée constitue une convention
entre la société et son gérant soumise aux dispositions de l’article L. 223-19 du code de commerce
; qu’en estimant que les délibérations des assemblées générales en cause des années 2003, 2004,
2005 et 2006 aux termes desquelles il avait été statué sur la rémunération de Mme Y... gérante
associée de la société étaient régulières, l’article 223-19 du code de commerce ne s’appliquant pas
aux conventions portant des opérations courantes conclues à des conditions normales et que le
montant de la rémunération du gérant doit être considérée comme une opération courante, la
cour d’appel a violé les articles L. 223-19 et L. 223-20 du code de commerce ;
2°/ qu’à supposer pour les besoins de la cause que la décision relative à la rémunération du gérant
ne soit pas soumise au contrôle prévu par l’article L. 223-19 du code de commerce en faut-il que
celle-ci ne soit pas importante ou ne présente de caractère exceptionnel faute de quoi elle ne peut
suivre le régime des opérations courantes ; qu’en se bornant à énoncer qu’il est de droit que tant
le principe que le montant de la rémunération du gérant ainsi que la prise en charge des
cotisations sociales professionnelles sont considérées comme des opérations courantes sans
prendre soin de préciser les conditions de rémunération de Mme Y... comme les conclusions de
M. X... l’y invitaient puisqu’il était relevé que l’exécution des délibérations contestées expliquait
qu’il n’y ait jamais eu de dividendes à distribuer entre les associés, ce qui emportait contestation
du caractère normal de la rémunération de la gérante, la cour d’appel a privé sa décision de base
légale au regard des articles L. 223-19 et L. 223-20 du code de commerce ;
3°/ que l’on admette que la fixation de la rémunération du gérant de société à responsabilité
limitée ait un caractère institutionnel et ne relève pas de la procédure de contrôle ou bien encore
qu’il s’agit d’une opération courante le gérant doit s’abstenir de voter afin d’éviter tout conflit
d’intérêt ; qu’en estimant que les délibérations des assemblées générales ordinaires des années
2003, 2004, 2005 étaient régulières cependant que Mme Y... avait pris part au vote portant sur la
fixation de sa rémunération, la cour d’appel a violé les articles L. 223-19 et L. 223-20 du code de

2
commerce ;
Mais attendu que la détermination de la rémunération du gérant d’une société à responsabilité
limitée par l’assemblée des associés ne procédant pas d’une convention, le gérant peut, s’il est
associé, prendre part au vote ; que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, l’arrêt se
trouve légalement justifié ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :REJETTE le pourvoi ;

Dans le même sens que Cass. com., 30 mai 1989, pourvoi n° 87-18.083, Bull. 1989, IV, n° 174 (2)
(cassation)

- Cass. com., 4 octobre 2011, n°10-23398, Publié au bulletin

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que MM. X... et Y..., et la société Lanner France dont M. X... était
le gérant, ont constitué le 23 avril 2005 la société à responsabilité limitée Novaxess technology (la
société) ; que MM. X... et Y... ont été désignés cogérants de la société ; qu’une assemblée générale
réunie le 31 juillet 2008 a décidé de mettre fin aux fonctions de gérant de M. Y... ; que, lors de
l’assemblée générale du 30 décembre 2008, M. X... et la société Lanner France, détenteurs
ensemble de 51 % des parts, ont adopté une résolution unique portant sur la rémunération du
gérant, calculée à compter de l’exercice 2008 à hauteur de 50 % de l’excédent brut d’exploitation
de la société ; que M. Y..., invoquant des faits constitutifs d’abus de majorité, a demandé que cette
délibération soit annulée et que M. X... soit condamné à lui payer des dommages-intérêts ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l’article 1382 du code civil, ensemble les articles L. 223-19 et L. 223-20 du code de
commerce ;
Attendu que pour juger abusive la délibération indexant la rémunération du gérant sur l’excédent
brut d’exploitation, l’arrêt retient, par motif adopté, que cette délibération a été votée par le seul
porteur de parts y ayant un intérêt personnel ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que la détermination de la rémunération du gérant d’une
société à responsabilité limitée par l’assemblée des associés ne procède pas d’une convention, ce
dont il résulte que le gérant associé, fût-il majoritaire, peut prendre part au vote, la cour d’appel a
violé les textes susvisés ;
Et sur la deuxième branche du moyen :
Vu l’article 1382 du code civil ;
Attendu que pour dire que la délibération indexant la rémunération du gérant sur l’excédent brut
d’exploitation est constitutive d’un abus de majorité, l’arrêt relève, par motifs propres et adoptés,
que cette rémunération comporte, par définition, dans son contenu des éléments destinés à la
préservation du patrimoine social tels qu’amortissements et provisions ; qu’il retient encore que
ce mode de calcul, permettant au gérant de prélever la moitié de l’excédent brut d’exploitation,
provoque une rupture dans l’égalité des droits des porteurs de parts au regard de la répartition des
bénéfices ;
Attendu qu’en se déterminant ainsi, sans expliquer en quoi la délibération ayant arrêté la
rémunération litigieuse, considérée en elle-même, avait été prise contrairement à l’intérêt social et
dans l’unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la minorité, la cour
d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 12 mai 2010, entre les parties,
par la cour d’appel de Riom ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Lyon ;

3
- Cass. com., 25 septembre 2012, n°11-22754, publié au bulletin

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :


Vu l’article L. 223-18 du code de commerce ;
Attendu que la rémunération du gérant d’une société à responsabilité limitée est déterminée soit
par les statuts, soit par une décision de la collectivité des associés ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par actes des 17 octobre 2007 et 7 janvier 2008, M. Z... et Mme
A..., son épouse, titulaires de l’intégralité des parts représentant le capital de la société à
responsabilité limitée Préfabriqués Garreau (la société), ont cédé celles-ci à M. B... ; que faisant
valoir que M. Z..., qui avait exercé jusqu’à la cession de sa participation les fonctions de gérant de
la société, avait prélevé, avant la cession, au titre de sa rémunération afférente à l’exercice 2007,
certaines sommes dont le versement n’avait pas été autorisé par l’assemblée des associés, la
société et M. B... ont fait assigner M. et Mme Z... en paiement de ces sommes, augmentées des
charges sociales ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l’arrêt retient que M. et Mme Z... étant les seuls associés
de la “ société cédée “, il est sans intérêt de s’attacher à déterminer si les prélèvements critiqués
ont été ou non autorisés par l’assemblée générale ;
Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu entre les parties, le 15 juin 2011,
par la cour d’appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rouen,
autrement composée ;

- Cass. com., 18 mai 2010, n°09-66.172, JCP E 2010, 1793, Note M. Roussille

Sur le moyen unique :


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Reims, 10 février 2009) que Mme X... a confié à la SARL J.J. Y...,
ayant M. Y... pour gérant, la réalisation de travaux d’aménagement des espaces extérieurs de sa
maison ; que des malfaçons ayant été constatées postérieurement à l’ouverture d’une procédure
de liquidation judiciaire à l’égard de la société J.J. Y..., Mme X... a assigné M. Y... en paiement de
dommages-intérêts ;
Attendu que M. Y... fait grief à l’arrêt d’avoir accueilli cette demande, alors, selon le moyen, que la
responsabilité civile du gérant d’une société à responsabilité limitée à l’égard des tiers n’est
engagée que lorsque le dirigeant a commis intentionnellement une faute d’une particulière gravité
incompatible avec l’exercice normal des fonctions sociales ; que ne constitue pas une telle faute le
fait pour un gérant d’une société à responsabilité limitée ayant pour objet la création et l’entretien
de jardins et d’espaces verts d’avoir accepté d’aménager un jardin et d’y faire en outre des travaux
d’édification d’une allée en pavés et de piliers de clôture ; que le seul fait que les travaux exécutés
dépassent l’objet social de la société et que le gérant ait omis de souscrire à cette occasion une
assurance de dommages et de responsabilité n’est pas séparable des fonctions du dirigeant et ne
saurait engager sa responsabilité personnelle ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé
l’article 1382 du code civil ensemble l’article L. 223-22 du code de commerce ;
Mais attendu que l’arrêt constate qu’il résulte du registre du commerce et des sociétés que la
société J.J. Y... avait pour objet la création et l’entretien de jardins et d’espaces verts ; qu’il retient
que les travaux que cette société a réalisés pour le compte de Mme X..., à savoir notamment la
pose de pavés et d’un dallage sur une dalle en béton armé dosé à 250 kg et la construction de
trois piliers d’une hauteur de deux mètres en béton armé avec habillage en plaquettes de pierre
n’entraient pas dans l’objet social de la société J.J. Y... ; que l’arrêt ajoute que ces travaux, réalisés
en 2001, faisaient appel aux techniques de travaux du bâtiment et étaient par conséquent soumis à
l’assurance obligatoire instituée par l’article L. 241-1 du code des assurances dans sa rédaction

4
alors applicable ; qu’il relève encore que M. Y... a accepté que la société dont il était le gérant
exécute des travaux qui n’entraient pas dans l’objet social de cette société et qui n’étaient pas
couverts par une assurance de responsabilité décennale ; qu’en l’état de ces constatations et
appréciations établissant que M. Y... a commis une faute intentionnelle d’une particulière gravité
incompatible avec l’exercice normal de ses fonctions de gérant de la société J.J. Y... la cour
d’appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 28 septembre 2010, n°09-66255, P+B+R+I, JCP E 2010, 2084, note M.
Roussille

Sur le moyen unique pris en sa troisième branche :


Vu l'article L. 223-22 du code de commerce, ensemble l'article L. 243-3 du code des assurances ;
Attendu que le gérant d'une société à responsabilité limitée qui commet une faute constitutive
d'une infraction pénale intentionnelle, séparable comme telle de ses fonctions sociales, engage sa
responsabilité civile à l'égard des tiers à qui cette faute a porté préjudice ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme D. ont confié à la société STS, entreprise de
bâtiment qui avait Mme J. pour gérante, la réalisation de travaux de rénovation, y compris le gros
oeuvre, dans un immeuble leur appartenant ; que les travaux ont commencé au cours de la
première semaine d'octobre 2000 ; que des malfaçons et inexécutions diverses ayant été
constatées, M. et Mme D., faisant valoir que Mme J. avait engagé sa responsabilité à leur égard en
ne faisant pas souscrire à la société qu'elle dirigeait une assurance couvrant sa garantie décennale,
l'ont assignée en paiement de dommages-intérêts après la mise en liquidation judiciaire de la
société STS ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que, même constitutif du délit prévu et
réprimé par les articles L. 111-34 du code de la construction et de l'habitation et L. 243-3 du code
des assurances, et caractérisant une abstention fautive imputable à la gérante de la société STS
assujettie à l'obligation d'assurance, le défaut de souscription des assurances obligatoires de
dommages et de responsabilité n'était pas séparable des fonctions de dirigeant ; qu'il ajoute que la
société STS a négocié avec une compagnie d'assurances pour être garantie au point qu'elle a pu
penser – fût-ce de façon erronée – qu'elle était couverte ou à la veille de l'être au moment où elle
a entrepris le chantier D. et que seul le contrat finalement signé en novembre 2000 a caractérisé
qu'il n'y avait pas de reprise du passé ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que Mme J. avait sciemment
accepté d'ouvrir le chantier litigieux sans que la société STS fût couverte par une assurance
garantissant la responsabilité décennale des constructeurs, la cour d'appel a violé les textes
susvisés ;
PAR CES MOTIFS (...) : – CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4
février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; (...) les renvoie devant la cour d'appel
de Douai, autrement composée (...).

En sens contraire pour le gérant d'une EURL, Cass. 3e civ., 4 janv. 2006 : JCP E 2006, 2035, § 1, obs. J.-J.
Causain, F. Deboissy et G. Wicker.

Responsabilité personnelle du gérant : Cass. com., 27 mai 2014, n° 12-28.657, F-P+B

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 25 septembre 2012), que la société PAAM investissements et
sa filiale, la société PAAM logistique, ont été mises en redressement judiciaire le 4 juin 2008, la
SCP Y...-Z...-A...étant désignée mandataire judiciaire de ces sociétés et la SCP C...-D...-E...
administrateur du redressement judiciaire de la filiale avec mission d'assistance ; que le plan de
redressement par voie de continuation de la société PAAM investissements a été arrêté le 3 juin

5
2009 et la société PAAM Logistique mise en liquidation judiciaire le 1er juillet suivant, la SCP
Y...-Z...-A...devenant liquidateur (le liquidateur) ; que ce dernier a assigné M. X..., gérant des deux
sociétés en responsabilité civile personnelle, lui reprochant de n'avoir pas déclaré au passif de la
société mère le montant du compte courant d'associé de la filiale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande, alors, selon le moyen, que la
responsabilité personnelle d'un dirigeant à l'égard des tiers ne peut être retenue que s'il a commis
une faute intentionnelle d'une particulière gravité, incompatible avec l'exercice normal de ses
fonctions sociales ; que ne constitue pas une faute intentionnelle d'une particulière gravité
l'absence de déclaration, par le dirigeant d'une SARL en redressement judiciaire, de la créance que
celle-ci détient sur une autre société du même groupe, dès lors que l'existence de cette créance est
connue de l'ensemble des organes de la procédure ; qu'en considérant que l'absence de
déclaration, par M. X..., de la créance détenue par la société Paam logistique sur la société Paam
investissements au titre d'un compte courant, était constitutive d'une fraude de nature à engager
la responsabilité personnelle de celui-ci, quand cette créance était connue de l'ensemble des
organes de la procédure, y compris la SCP Y..., Z..., A..., ès qualités, la cour d'appel a violé
l'article L. 223-22 du Code de commerce ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 223-22, alinéa 1er, du Code de commerce que le gérant
d'une SARL est personnellement responsable envers les tiers des fautes commises dans sa
gestion, lorsqu'elles sont séparables de ses fonctions ; qu'engage sa responsabilité à ce titre le
gérant qui commet intentionnellement une faute d'une particulière gravité incompatible avec
l'exercice normal de ses fonctions ; qu'ayant retenu que M. X..., en s'abstenant de mentionner la
créance de la société PAAM logistique sur la liste des dettes de la société PAAM investissements
remise au mandataire judiciaire de celle-ci et en ne la déclarant pas, avait sciemment voulu
avantager la société mère au détriment de la filiale et de ses créanciers, les privant de la possibilité
d'obtenir un règlement dans le cadre du plan de redressement, la cour d'appel a légalement justifié
sa décision, peu important que la créance omise ait pu être connue des organes des procédures
collectives ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, qu'en cas de carence du
débiteur dans l'établissement de la liste certifiée de ses créanciers, le représentant des créanciers
est tenu d'avertir personnellement tous les créanciers connus de l'obligation qui pèse sur eux de
déclarer, dans les délais légaux, leur créance au passif du débiteur en redressement judiciaire ;
qu'en affirmant au contraire que M. Z..., représentant des créanciers de la société Paam
Investissements, n'était pas tenu d'informer la société Paam Logistique dont il connaissait
pourtant la créance, de la nécessité de déclarer celle-ci au passif de la société en redressement
judiciaire, la cour d'appel a violé l'article L. 622-6 du Code de commerce ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu que l'absence d'invitation par le mandataire
judiciaire de la société PAAM investissements à la société PAAM logistique en tant que créancier
connu de déclarer sa créance était sans incidence sur le défaut de déclaration de cette créance, dès
lors que M. X... avait connaissance de l'ouverture de la procédure collective de la société PAAM
investissements dont il était dirigeant ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. X... fait encore le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ que l'administrateur judiciaire a, quelle que soit l'étendue de la mission qui lui a été confiée
par le tribunal, le pouvoir d'accomplir seul les actes conservatoires qui sont destinés à préserver le
patrimoine de l'entreprise et notamment celui de procéder à une déclaration de créance ; qu'en
affirmant au contraire, qu'en sa qualité d'administrateur judiciaire, M. C...pouvait s'abriter derrière
le fait qu'il s'était vu confier une simple mission d'assistance pour ne prendre aucune initiative afin
d'éviter l'extinction des créances de la société Paam logistique, la cour d'appel a violé
l'article L. 631-12 du Code de commerce ;

6
2°/ qu'en toute hypothèse, il appartient à l'administrateur judiciaire, s'il l'estime nécessaire pour
préserver les intérêts de l'entreprise qu'il est chargé d'assister, de demander l'extension de la
mission qui lui a été confiée ; qu'en affirmant qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'encontre
de M. C..., administrateur judiciaire, dès lors qu'il ne pouvait agir sans le concours du représentant
légal de la société Paam logistique, sans rechercher comme elle y était expressément invitée, si
l'administrateur judiciaire, constatant la carence de M. X..., n'aurait pas dû prendre l'initiative de
demander une extension de sa mission, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard
de l'article L. 631-12 du Code de commerce ;
Mais attendu que, lorsqu'un administrateur a été désigné avec mission d'assistance, il appartient au
débiteur en redressement judiciaire de déclarer ses créances avec son contreseing, cet
administrateur n'ayant ni le pouvoir de les déclarer seul, ni l'obligation de demander que sa
mission soit, à cette fin, étendue à l'administration de l'entreprise ; qu'ayant relevé que M. X...
n'alléguait ni avoir sollicité le concours de la SCP C...-D...-E..., ni s'être heurté à son refus, la cour
d'appel en a exactement déduit qu'il ne pouvait s'exonérer de sa responsabilité personnelle pour
n'avoir pas déclaré la créance litigieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le quatrième moyen :
Attendu que M. X... fait enfin grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer au liquidateur judiciaire
de la société PAAM logistique le montant du compte courant d'associé, alors, selon le moyen :
1°/ que le droit de poursuite individuelle du créancier qui n'a pas déclaré sa créance au
redressement judiciaire de son débiteur est maintenu en cas de résolution du plan ; que le
créancier non déclarant à la première procédure peut alors valablement déclarer sa créance dans la
seconde procédure collective ouverte à l'encontre de son débiteur ; qu'en décidant que la créance
de la société Paam logistique ne pourrait faire l'objet d'une déclaration dans le cadre de la seconde
procédure collective ouverte à l'encontre de la société Paam investissements en cas de résolution
du plan de redressement de celle-ci, la cour d'appel a violé l'article L. 622-26 du Code de
commerce ;
2°/ que le préjudice lié à l'extinction de la créance ne correspond pas nécessairement au montant
de cette créance ; qu'en fixant le montant du préjudice de la société Paam logistique au montant
de sa créance au titre de son compte courant dans la société Paam investissements arrêté au 3 juin
2008, soit 276 018 euros, quand le montant du préjudice ne pouvait être supérieur au montant
auquel elle aurait pu prétendre dans l'apurement du passif de la société Paam investissements, la
cour d'appel a violé l'article L. 223-22 du Code de commerce ;
Mais attendu que, loin de refuser d'apprécier les possibilités d'apurement du passif de la société
PAAM investissements, la cour d'appel a retenu qu'en fonction du chiffre d'affaires, des résultats,
des actifs et des perspectives de redressement de cette société, la créance de la société PAAM
logistique aurait pu être réglée dans son intégralité dans le cadre du plan de redressement de la
société mère ; que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa première branche, pour critiquer un
motif surabondant, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 31 janvier 2012, n°10-15489, Non Publié

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 4 février 2010) et les productions, que suivant promesses
synallagmatiques de cession du 20 juin 2007, les sociétés Le Grain de poivre et DB réceptions (les
sociétés), représentées par leur gérant, M. Benjamin B..., se sont engagées chacune à céder leur
fonds de commerce à M. A... ; qu’ultérieurement, ce dernier a été informé par M. Didier B..., père
du gérant, que les sociétés renonçaient à donner suite aux deux cessions, à défaut d’autorisation
de l’assemblée générale des associés ; qu’invoquant le préjudice que lui faisait subir cette
renonciation, M. A... a assigné les sociétés en dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... et la SCP Y...- Z..., ès qualités, font grief à l’arrêt d’avoir dit les sociétés

7
défaillantes dans l’exécution de leurs engagements respectifs et d’avoir accueilli la demande
indemnitaire de M. A..., alors, selon le moyen :
1°/ que la cession du fonds de commerce exploité par la société relève de la compétence des
associés dès lors qu’une telle cession implique une modification de l’objet social ; que tel est
notamment le cas lorsque le fonds de commerce cédé représente la seule activité de la société, la
cession lui imposant, soit de disparaître, soit de modifier son objet social ; qu’en l’espèce, les
sociétés Le Grain de poivre et DB réceptions faisaient valoir que la cession de leurs fonds de
commerce impliquait la disparition de leur objet social, en sorte qu’une telle cession imposait la
consultation préalable des associés lors d’une assemblée générale, qui n’avait jamais eu lieu ; que
les promesses de vente signées le 20 juin 2007 étaient donc nulles et ne pouvaient être exécutées
par les sociétés signataires ; qu’en considérant néanmoins qu’en n’exécutant pas leur engagement
respectif, les sociétés DB réceptions et Le Grain de poivre auraient commis une faute ayant causé
un préjudice à M. A..., sans rechercher si les promesses signées le 20 juin 2007, ayant pour objet
la cession de l’unique fonds de commerce des sociétés signataires, n’avaient pas pour
conséquence la modification de l’objet social et ne relevaient pas, dès lors, de la seule compétence
des associés, en sorte qu’il ne pouvait être reproché aux sociétés de ne pas avoir exécuté un acte
de promesse de cession du fonds de commerce affecté d’une nullité d’ordre public, la cour
d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 223-18 et L. 223-30 du code de
commerce, et 1147 du code civil ;
2°/ que la répartition légale des compétences entre le dirigeant social et les associés est d’ordre
public ; que l’accomplissement par le dirigeant social d’un acte relevant de la compétence
exclusive de l’assemblée générale des associés est frappé d’une nullité opposable au tiers signataire
de cet acte ; qu’en l’espèce, les sociétés Le Grain de poivre et DB réceptions faisaient valoir que la
cession de leurs fonds de commerce impliquait la disparition de leur objet social, en sorte qu’une
telle cession imposait la consultation préalable des associés lors d’une assemblée générale, qui
n’avait jamais eu lieu ; qu’en retenant la responsabilité des sociétés DB réceptions et Le Grain de
poivre, au motif inopérant que leurs statuts, qui ne faisaient que rappeler la règle légale d’ordre
public relative à l’exigence d’un accord préalable des associés pour la cession d’un fonds de
commerce, auraient été inopposables à M. A..., sans rechercher si les promesses litigieuses,
relatives à la cession du seul fonds de commerce exploité par ces sociétés, n’avaient pas pour
conséquence la modification de l’objet social, et ne relevaient pas dès lors de la seule compétence
des associés en vertu de la loi, de sorte qu’en l’absence de consultation des associés, elles étaient
bien atteintes d’une nullité opposable à M. A..., en vertu de la loi et abstraction faite des statuts, la
cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 223-18 et L. 223-30 du
code de commerce, et 1147 du code civil ;
3°/ que la répartition légale des compétences entre le dirigeant social et les associés est d’ordre
public ; que l’accomplissement par le dirigeant social d’un acte relevant de la compétence
exclusive de l’assemblée générale des associés est frappé d’une nullité opposable au tiers signataire
de cet acte ; que les sociétés DB réceptions et Le Grain de poivre faisaient valoir que l’assemblée
générale des associés n’avait pas autorisé le gérant à céder leurs fonds de commerce ; qu’en
retenant la responsabilité des sociétés DB réceptions et Le Grain de poivre, au titre de
l’inexécution des promesses signées le 20 juin 2007, au motif inopérant que le gérant avait lui-
même déclaré dans les actes avoir été dûment habilité par décision de l’assemblée générale des
associés, sans rechercher si une telle décision avait été effectivement prise par les associés avant la
signature des promesses, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.
223-18 et L. 223-30 du code de commerce, et 1147 du code civil ;
Mais attendu que le gérant d’une société à responsabilité limitée est investi, dans les rapports avec
les tiers, des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom de la société, sous réserve des pouvoirs
que la loi attribue expressément aux associés ; que la cession d’un fonds de commerce ne
constituant pas, en elle-même, un acte relevant des pouvoirs légalement réservés aux associés, et
dès lors qu’il n’était pas allégué que les promesses litigieuses auraient rendu nécessaire une

8
modification des statuts des sociétés promettantes, la cour d’appel, qui a constaté que lesdites
promesses avaient été conclues par M. Benjamin B... en sa qualité de gérant de ces sociétés, a par
ce seul motif et sans avoir à procéder aux recherches inopérantes visées par le moyen, légalement
justifié sa décision ; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen :
Attendu que M. X... et la SCP Y...- Z..., ès qualités, font encore grief à l’arrêt d’avoir accueilli la
demande indemnitaire de M. A... au titre de son préjudice matériel et d’avoir condamné in
solidum les sociétés à payer à ce dernier la somme de 30 000 euros, alors, selon le moyen, que le
droit à réparation de la victime peut être réduit ou supprimé à raison de la faute qu’elle a
commise, lorsque cette faute a contribué à la survenance de son dommage ; qu’en l’espèce, les
sociétés DB Réceptions et Le Grain de Poivre faisaient valoir que M. A... était salarié de la société
Le Grain de Poivre et qu’il avait conscience que la cession des fonds de commerce objet des
promesses signées le 20 juin 2007 impliquaient un accord des associés ; qu’elles faisaient
également valoir que M. A... s’était précipité à tenter de prendre la possession des fonds de
commerce litigieux, et en particulier avait quitté son emploi chez Total de manière imprudente et
hâtive, sans même s’assurer de la bonne finalisation des opérations projetées, comme l’avaient
d’ailleurs retenu les premiers juges ; qu’elles faisaient ainsi valoir que M. A... avait commis des
fautes ayant concouru au préjudice qu’il invoquait, et ainsi de nature à anéantir, ou à tout le moins
réduire, son droit à réparation éventuel ; qu’en se bornant à retenir que les sociétés DB réceptions
et Le Grain de poivre auraient causé à M. A... un préjudice matériel résultant d’un congé sans
solde de deux années de son employeur Total, sans rechercher si M. A..., en agissant avec une
légèreté blâmable, notamment sans s’assurer de l’accord de la majorité des associés, n’avait pas
commis une faute ayant contribué à son dommage, la cour d’appel a privé sa décision de base
légale au regard de l’article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu’ayant retenu que la cession des fonds de commerce relevait des pouvoirs du
gérant, la cour d’appel, qui n’avait pas à effectuer une recherche qui ne lui était pas demandée, a
légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 15 novembre 2011, n°10-15049, Publié au bulletin

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société à responsabilité limitée Clos du Baty, ayant pour
gérant M. X... et pour autres associés la société Fabi, M. Y... et la société DL finances, a engagé la
construction de la première des deux tranches d’un programme immobilier destiné à la
gendarmerie nationale ; que reprochant à M. X... et à la société Fabi d’avoir détourné à leur profit
les bénéfices de la première tranche du programme immobilier et d’avoir fait réaliser la seconde
par une société civile immobilière Chanterie, ayant pour gérant M. X..., M. Y... et la société DL
finances les ont assignés en paiement de dommages-intérêts pour concurrence déloyale et ont
sollicité la condamnation de M. X... et de la société Fabi au paiement de dommages-intérêts pour
comportement déloyal ; que le 7 février 2007, M. Y... et la société DL finances ont déposé plainte
avec constitution de partie civile des chefs de divers délits financiers visant M. X... en sa qualité
de gérant de la société Clos du Baty ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y... et la société DL finances font grief à l’arrêt d’avoir rejeté la demande de
sursis à statuer dans l’attente de la décision pénale à intervenir alors, selon le moyen :
1°/ qu’il est sursis à statuer sur l’action civile lorsque la décision à intervenir sur l’action publique
en cours est de nature à influer sur la solution du litige ; qu’en déboutant M. Y... et la société DL
finances de leur demande de sursis à statuer en retenant qu’ils n’étaient pas recevables à saisir la
juridiction pénale d’une même demande que celle dont ils avaient déjà saisi la juridiction civile, la
cour d’appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure pénale ;
2°/ que M. Y... et la société DL finances faisaient valoir que l’arrêt de la chambre de l’instruction

9
du 2 avril 2009, qui ordonnait un complément d’information afin de déterminer les
responsabilités encourues dans le détournement de la clientèle, constituait un élément nouveau de
nature à influer sur la solution du litige ; qu’en se bornant à adopter les motifs de l’ordonnance du
18 octobre 2008 du conseiller de la mise en état, sans répondre aux conclusions de M. Y... et de la
société DL finances sur ce point déterminant, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de
procédure civile ;
Mais attendu qu’aux termes de l’article 4 du code de procédure pénale, modifié par la loi n 2007-
291 du 5 mars 2007, loi de procédure d’application immédiate en l’absence de disposition
spéciale, la mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des
autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu’elles soient, même si la
décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une
influence sur la solution du procès civil ; que le moyen est inopérant ;
Et sur le second moyen, pris en sa deuxiéme branche :
Attendu que M. Y... et la société DL finances font grief à l’arrêt d’avoir rejeté leurs demandes en
paiement de dommages-intérêts alors, selon le moyen, que l’associé, tenu d’un devoir de loyauté,
ne peut entreprendre, sans en informer les autres associés, un projet pour le compte d’une autre
société, fût-il distinct, qui vient en concurrence avec celui présenté par la société ; que dès lors, en
considérant que la société Fabi n’avait pas engagé sa responsabilité, par des motifs inopérants
selon lesquels l’abandon du projet initial était le fruit de la volonté de la gendarmerie et que les
deux projets étaient distincts, sans rechercher, ainsi qu’elle y était expressément invitée, si l’associé
n’avait pas engagé sa responsabilité en menant de front deux projets parallèles pour deux sociétés
différentes, sans en informer ses coassociés, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au
regard de l’article 1382 du code civil ;
Mais attendu que, sauf stipulation contraire, l’associé d’une société à responsabilité limitée n’est,
en cette qualité, tenu ni de s’abstenir d’exercer une activité concurrente de celle de la société ni
d’informer celle-ci d’une telle activité et doit seulement s’abstenir d’actes de concurrence
déloyaux ; que le moyen n’est pas fondé ;
Et attendu que le second moyen, pris en sa troisième branche, ne serait pas de nature à permettre
l’admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l’article L. 223-22 du code de commerce ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. Y... et de la société DL finances en paiement de
dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par l’attitude déloyale de M. X..., l’arrêt
retient que la gendarmerie nationale qui devait investir massivement dans la commune de Saint-
Astier a très largement réduit l’ampleur de ses projets et que l’opération de construction
finalement portée par la société La Chanterie constituait un projet distinct de celui que se
proposait de réaliser la société Clos du Baty ;
Attendu qu’en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure tout manquement de M.
X... à l’obligation de loyauté et de fidélité pesant sur lui en raison de sa qualité de gérant de la
société Clos du Baty, lui interdisant de négocier, en qualité de gérant d’une autre société, un
marché dans le même domaine d’activité, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a rejeté les demandes de M. Y... et de la société
DL finances en paiement de dommages-intérêts à l’encontre de M. X..., l’arrêt rendu le 26 janvier
2010, entre les parties, par la cour d’appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la
cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les
renvoie devant la cour d’appel de Bordeaux, autrement composée ;

10
- Cass. com., 2 novembre 2011, n°10-15887, Publié au bulletin

Sur le moyen unique :


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 11 février 2010), que M. X..., associé de la SARL Lamid,
ayant notifié à cette dernière ainsi qu’à ses coassociés, MM. Y... et Z..., un projet de cession de ses
parts sociales à M. A..., la société lui a fait connaître sa décision de refuser l’agrément de ce
dernier ; que MM. Y... et Z... ont demandé en justice la prolongation du délai de trois mois qui
leur était imparti pour acquérir ou faire acquérir les parts et la désignation d’un tiers chargé de les
évaluer ; que M. X... les a ultérieurement assignés afin d’être autorisé à céder ses parts à M. A... ;
Attendu que MM. Y... et Z... font grief à l’arrêt d’avoir accueilli cette demande, alors, selon le
moyen :
1°/ que lorsqu’une société à responsabilité limitée a refusé de consentir à la cession de parts
sociales à un tiers étranger à la société, les associés sont tenus, dans un délai de trois mois à
compter de ce refus pouvant être judiciairement prolongé de six mois, d’acquérir ou de faire
acquérir les parts à un prix fixé dans les conditions prévues à I’article 1843-4 du code civil, sauf si
le cédant renonce à la cession de ses parts ; qu’en vertu de ce texte, dans tous les cas où sont
prévus la cession des droits sociaux d’un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur
de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit
à défaut d’accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des
référés et sans recours possible ; qu’en sollicitant du président du tribunal la désignation d’un
expert chargé de déterminer la valeur des parts sociales, les associés ayant refusé I’agrément et à
qui la loi n’accorde aucun droit de repentir manifestent nécessairement leur volonté ferme et
définitive d’acquérir les parts litigieuses au prix qui sera fixé par cet expert ; que pour autoriser M.
X... à procéder à la cession de ses parts sociales à M. A..., I’arrêt retient que MM. Y... et Z... ne se
sont jamais formellement engagés à acquérir les parts cédées en s’en remettant à l’estimation de
l’expert pour la fixation du prix, de sorte que le cédant a retrouvé sa liberté de procéder à la
cession initialement prévue après I’expiration du délai d’achat accordé aux associés ; qu’en
statuant ainsi, après avoir constaté que MM. Y... et Z... avaient saisi le président du tribunal aux
fins de désignation d’un expert pour fixer la valeur des parts sociales et que le rapport d’expertise
avait été remis avant la fin du délai d’acquisition, la cour d’appel a violé les articles L. 223-14 du
code de commerce et 1843-4 du code civil ;
2°/ que lorsqu’une société à responsabilité limitée a refusé de consentir à la cession de parts
sociales à un tiers étranger à la société, les associés sont tenus, dans un délai de trois mois à
compter de ce refus pouvant être judiciairement prolongé de six mois, d’acquérir ou de faire
acquérir les parts à un prix fixé dans les conditions prévues à I’article 1843-4 du code civil, sauf si
le cédant renonce à la cession de ses parts, que pour autoriser M. X... à procéder à la cession de
ses parts sociales à M. A..., I’arrêt retient qu’il ne résulte pas des pièces du dossier que MM. Y... et
Z... se soient formellement déclarés acquéreurs des parts litigieuses ; qu’en se déterminant ainsi,
sans rechercher si le paiement d’un acompte par MM. Y... et Z... à M. X..., qu’avaient constaté les
premiers juges, ne démontrait pas la volonté ferme et définitive des solvens d’acquérir les parts
sociales de l’accipiens, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de
l’article L. 223-14 du code de commerce ;
Mais attendu que l’arrêt relève qu’après que l’expert désigné sur la demande de MM. Y... et Z...
pour fixer la valeur des parts eut déposé son rapport, ceux-ci se sont abstenus de se manifester
avant l’expiration du délai qui leur était imparti pour réaliser l’acquisition, ce qui a conduit M. X...
à agir en justice aux fins d’être autorisé à céder ses parts à M. A... ; qu’en l’état de ces
constatations, desquelles il résulte qu’aucune des solutions prévues aux troisième et quatrième
alinéas de l’article L. 223-14 du code de commerce n’était intervenue avant l’expiration du délai
légal, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à la recherche inopérante visée par la
seconde branche, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

11
- Cass. com., 30 mai 2012, n°11-16272, Publié au bulletin

Sur les moyens uniques, pris en leur première branche, de chaque pourvoi, qui sont rédigés en
termes identiques :
Vu les articles L. 223-30 et L. 235-1 du code de commerce ;
Attendu qu’il résulte du second de ces textes que la nullité d’un acte modifiant les statuts d’une
société commerciale ne peut résulter que d’une disposition expresse du livre deuxième du code de
commerce ou des lois qui régissent la nullité des contrats ;
Attendu, selon l’arrêt, attaqué, que la société First Racing (la société), avait pour associés M. Y...
et la société Identicar, ayant M. X... pour dirigeant ; qu’ils étaient, respectivement, titulaires de 49
% et 51 % des parts représentant le capital social ; que M. Y... a demandé en justice l’annulation
des décisions prises lors des assemblées générales des associés des 25 juillet 2008, 11 décembre
2008 et 13 janvier 2009 et de la décision prise par la société Identicar, devenue associé unique, le
14 janvier 2009 ;
Attendu que pour annuler les décisions prises les 11 décembre 2008, 13 janvier et 14 janvier 2009,
l’arrêt, après avoir relevé que selon l’article L. 223-30, alinéa 3, du code de commerce, les statuts
peuvent prévoir une majorité plus élevée que celle instituée par ces dispositions, en déduit que les
statuts de la société, créée le 13 mars 2006, qui prévoient en ce qui concerne les décisions
collectives extraordinaires, c’est-à-dire “celles qui ont pour objet la modification des statuts ou
l’agrément des cessions ou mutations de parts, droit de souscription ou d’attribution”, une
majorité d’au moins les trois quarts des parts sociales, sont conformes à la loi ; qu’il relève,
ensuite, que la première résolution adoptée lors de l’assemblée du 11 décembre 2008, qui porte
sur le principe du maintien de l’activité de la société, comme la deuxième résolution, laquelle
opère un “coup d’accordéon” en amortissant les pertes sociales par la réduction du capital à zéro,
nécessitaient la réunion d’au moins 75 % des parts sociales mais qu’elles ont été prises par un
associé représentant seulement 51 % des parts ; qu’il relève encore que les autres résolutions du
11 décembre 2008, qui ne font que tirer les conséquence de la deuxième, sont viciées par la même
cause d’irrégularité ; que l’arrêt ajoute que l’annulation des résolutions adoptées le 11 décembre
2008 emporte celle des décisions prises le 13 janvier 2009, qui n’ont plus de fondement, et qu’il y
a lieu d’annuler également la décision prise par l’associé unique le 14 janvier 2009, qui découle de
la décision du 13 janvier 2009 ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que l’article L. 223-30 du code de commerce ne sanctionne pas
par la nullité l’inobservation des dispositions statutaires relatives à la majorité applicable aux
décisions modifiant les statuts, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE,
mais seulement en ce qu’il a annulé les résolutions prises par l’assemblée générale des associés de
la société First Racing les 11 décembre 2008 et 13 janvier 2009 et la décision de l’associé unique
du 14 janvier 2009, l’arrêt rendu le 10 mars 2011, entre les parties, par la cour d’appel de
Bourges ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Orléans ;

- Opposabilité à un tiers d'une cession de parts sociales non publiée. - Cass. com. 24
septembre 2013 n° 12-24.083 (n° 881 FS-PB), Crédit immobilier de France Nord c/
Ferrero ; Rev. sociétés mars 2014, p. 175, note B. Brignon et D. Poracchia.

Tous les associés d'une société civile immobilière (mais la solution vaut aussi pour des associés de
société en nom collectif ou de SARL) avaient cédé leurs parts sans qu'aient été publiées ni cette
cession ni la cessation des fonctions de l'associé qui assurait la gérance. Par la suite, la société
avait acquis par acte notarié divers biens immobiliers financés par un prêt bancaire.
Ce prêt étant resté en partie impayé, la banque avait engagé une saisie immobilière contre la
société et avait poursuivi les cédants en remboursement du prêt ; elle faisait valoir que, certes, elle

12
avait eu connaissance de la cession des parts lors de la passation de l'acte notarié, mais que
cette connaissance avait été remise en cause par le fait que l'ancien gérant avait déclaré qu'il était
toujours en fonctions à l'occasion de la procédure de saisie, si bien que la cession ne pouvait pas
lui être opposée.
Cette argumentation a été écartée : la cession avait bien été portée à la connaissance de la banque
par une mention expresse figurant dans l'acte notarié et par le fait que l'acte de cession des parts
avait été annexé à l'acte notarié, auquel la banque était partie ; la banque ne pouvait pas revenir
sur l'opposabilité de la cession qui en résultait à son égard en se prévalant du défaut de publicité
de la cessation des fonctions de l'ancien gérant au registre du commerce et des sociétés (RCS) ni
de la circonstance que celui-ci aurait toujours exercé ces fonctions car la qualité de
gérant n'implique pas nécessairement la qualité d'associé.

Note : 1° Les tiers ne peuvent pas se prévaloir du défaut d'accomplissement d'une formalité de
publicité au RCS s'ils ont eu personnellement connaissance des faits ou actes (ici la cession de
parts litigieuse) dont la publicité a été omise (C. com. art. L 123-9, al. 3). En l'espèce, cette
connaissance était établie et ne pouvait pas être remise en cause par la croyance du maintien de
l'un des cédants dans ses fonctions de gérant. En effet, même si l'intéressé se présentait
comme gérant, cela n'en faisait pas pour autant un associé « apparent », les deux qualités n'étant
pas liées (un gérant peut être choisi en dehors des associés : C. civ. art. 1846, al. 1 pour les
sociétés civiles ; C. com. art. L 221-3, al. 1 et L 223-18, al. 2 pour les sociétés en nom collectif et
les SARL). L'argumentation de la banque ne pouvait donc pas être accueillie.
2° L'arrêt ci-dessus a apporté une autre précision, d'ordre procédural : les anciens associés qui
avaient agi en vue de faire déclarer la cession de parts opposable à la banque n'étaient pas tenus
de mettre en cause la société et les autres associés. Leur action était donc recevable même s'ils ne
l'avaient pas fait.

- Contribution aux pertes d'un associé de SARL liquidée. - Cass. com. 8 octobre 2013 n°
12-24.825 (n° 936 F-PB), Sté de la Prée c/ Charrieau.

Les associés de SARL (mais c'est aussi vrai pour les actionnaires de société par actions)
supportent les pertes sociales à concurrence de leurs apports (C. com. art. L 223-1, al. 1). Après la
clôture de la liquidation de la société, l'ancien associé est tenu à l'égard des créanciers sociaux non
désintéressés dans la mesure de ce qu'il a pu percevoir indûment à l'occasion des opérations
de partage.
Ayant énoncé ce principe, la Cour de cassation en a déduit qu'il y avait lieu de rechercher si les
sommes perçues par l'associé d'une SARL liquidée au titre de la reprise de ses apports et du boni
de liquidation lui permettaient de s'acquitter d'une dette sociale (remboursement à l'acquéreur du
fonds de commerce de la société de sommes dues à un salarié employé à l'exploitation du fonds)
dont le paiement lui était demandé.
Une cour d'appel ne pouvait donc pas rejeter cette demande en se fondant sur l'argumentation
inopérante suivante : la clôture de la liquidation était intervenue sans que la société ait été
informée d'une éventuelle créance de l'acquéreur du fonds, le premier courrier d'information de
celui-ci lui ayant été adressé neuf mois plus tard, et la société n'avait pas été informée que le
salarié avait saisi les prud'hommes deux mois avant la clôture de la liquidation ; aucune faute de
l'associé n'était démontrée puisqu'il ne pouvait pas prendre en compte, pour l'inscrire au passif de
la SARL, une dette sociale qui n'existait pas à la clôture de la liquidation.

Note : L'associé d'une SARL liquidée peut être condamné au paiement d'une dette sociale à la
clôture de la liquidation ; l'associé est tenu de payer la totalité de la dette si la quote-part d'actif
qui lui revient est supérieure à celle-ci (notamment Cass. com. 3-7-2001 n° 1298 : RJDA 12/01
n°1221) ; dans le cas contraire, le montant à payer ne peut pas excéder ce qu'il a reçu. Il importe

13
peu que la société n'ait pas été avertie de l'existence de la dette avant la clôture ou que l'associé
poursuivi n'ait commis aucune faute dans la détermination du passif social, l'associé étant
poursuivi en paiement sur le fondement de l'article L 223-1 du Code de commerce, et non en
réparation d'une faute délictuelle.
Rappelons que la règle de limitation des pertes à concurrence des apports ne s'applique pas dans
les sociétés civiles et dans les sociétés en nom collectif, dont les associés répondent indéfiniment
des dettes (C. civ. art. 1857 ; C. com. art. L 221-1).

- Validité de la procédure légale d'agrément applicable en cas de cession de parts de


SARL à un tiers. - Cass. com., QPC, 27 septembre 2013, n°13-40045.
La question de la constitutionnalité de l'article L. 223-14 du code de commerce, qui organise une
procédure obligatoire d'agrément en cas de cession de parts de SARL à un tiers ainsi que les
suites d'un refus d'agrément, ne se pose pas.
L'article L. 223-14 du code de commerce pose le principe selon lequel toute cession de parts
d'une société à responsabilité limitée à un tiers étranger à la société doit être soumise à l'agrément
de la majorité, au moins, des associés. Il précise la procédure selon laquelle cet agrément est mis
en œuvre, ainsi que les suites d'un refus d'agrément.
Il était demandé à la Cour de cassation de transmettre au Conseil constitutionnel la question
suivante : l'article L. 223-14 du code de commerce porte-t-il atteinte au principe de sécurité des
actes juridiques concernant les SARL ou au principe d'égalité ?
La Cour de cassation observe que cette question n'est pas nouvelle. Elle observe, également, que
la disposition critiquée ne porte aucune atteinte au principe de sécurité juridique, non plus qu'à
celui de l'égalité devant la loi. Elle en conclut que la question posée ne présente pas de caractère
sérieux au regard des exigences qui s'attachent aux principes de valeur constitutionnelle qu'elle
invoque.
Elle décide qu'il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.

- Révocation du gérant. – Cass. Com. 12 févr. 2013, n° 11-23610. - La révocation du gérant de


- Obligation de non-concurrence. – Cass. Com. 19 mars 2013, n° 12-14407. - Sauf
stipulation contraire, l'associé d'une société à responsabilité limitée n'est pas, en cette qualité, tenu
de s'abstenir d'exercer une activité concurrente de celle de la société et doit seulement s'abstenir
d'actes de concurrence déloyale ; ayant relevé que le contrat de travail de l'associé ne contenait
aucune obligation de non-concurrence et que les statuts de la société ne faisaient peser aucune
obligation de non-concurrence sur ses associés, la cour d'appel a statué à bon droit.

- Non-respect d'une clause limitative des pouvoirs d'un gérant invoqué par un tiers -
Cass. com., 13 nov. 2013, n° 12-25.675, n° 1058 F-D

Un tiers ne peut valablement invoquer à son profit le non-respect d'une clause statutaire d'une
SARL limitant les pouvoirs de son gérant si les statuts précisent expressément que cette clause ne
peut être invoquée par les tiers.
L'adjudicataire d'un bien immobilier allègue l'irrecevabilité de la surenchère formée par une SARL
représentée par son gérant au motif que celui-ci ne justifiait pas avoir été autorisé à accomplir un
tel acte par une décision collective des associés. Il fait valoir une clause statutaire disposant, « à
titre de règlement intérieur », que « tout achat, vente ou échange d'immeubles ne pourront être
réalisés sans avoir été autorisés par une décision collective des associés ».

Au visa des articles L. 223-18 du code de commerce et 117 du code de procédure civile, la Cour
de cassation retient que l'adjudicataire n'est pas fondé à se prévaloir des statuts de la société pour
contester le pouvoir de son gérant de la représenter en justice. Elle relève en effet, que les statuts

14
de la SARL précisaient que la limitation des pouvoirs du gérant, « à titre de règlement intérieur »,
ne pouvait être opposée aux tiers ni invoquée par eux.

- Non-respect d'une clause de préemption : Cass. com., 11 mars 2014, F-P+B, n°13-10.366

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société à responsabilité limitée Rubens & Partner (la société)
a pour associés M. X..., M. Moïse Y... et M. Paul Y... ; que par acte du 21 avril 2009, ce dernier a
cédé ses parts sociales à M. X... ; que faisant valoir que cet acte était intervenu en violation de la
clause des statuts prévoyant qu’en cas de cession, les parts devront être proposées par priorité aux
autres associés, au prorata de leur participation, M. Moïse Y... en a demandé l’annulation ; que les
premiers juges ayant accueilli cette demande par une décision assortie de l’exécution provisoire,
M. Paul Y... a, par acte du 14 janvier 2011, cédé deux de ses trois parts à M. Moïse Y... ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande tendant à l’annulation de la vente du
14 janvier 2011 alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation de l’arrêt attaqué sur le premier moyen, en ce que la cour d’appel a confirmé
la nullité de la cession des parts à M. X..., entraînera la cassation de l’arrêt attaqué en ce que la
cour d’appel a refusé, en conséquence de la nullité de cette cession, d’accueillir la demande de M.
X... en annulation de la cession de ces mêmes parts à M. Moïse Y... le 14 janvier 2011 en violation
de son droit de propriété, par application des dispositions de l’article 625, alinéa 2 du code de
procédure civile ;
2°/ qu’en écartant l’irrégularité et partant la nullité de la cession des deux parts à M. Moïse Y...,
après avoir considéré que la clause litigieuse obligeait les associés, à offrir préalablement à toute
cession, l’acquisition des parts aux autres associés et après avoir constaté qu’en l’espèce, M. Paul
Y... s’était contenté d’offrir à M. X... par courrier reçu par ce dernier le 2 février 2011,
l’acquisition de la part qu’il n’entendait pas céder à M. Moïse Y..., auquel il avait d’ores et déjà
cédé ses deux autres parts le 14 janvier 2011, ce dont il résulte que cette cession avait été
consentie au mépris de l’article 13 des statuts tel qu’interprété, la cour d’appel n’a pas tiré les
conséquences de ses propres constatations au regard de l’article 1134 du code civil qu’elle a violé ;
3°/ que la nullité de la cession consentie au mépris de la priorité prévue par les statuts au profit
des associés n’est pas subordonnée à la preuve d’un grief, de sorte qu’en se déterminant comme
elle l’a fait sur le fondement de l’absence d’irrégularité faisant grief, la cour d’appel a violé l’article
1134 du code civil ;
4°/ que si le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond ; qu’en se fondant
pour écarter la demande de nullité de la cession consentie à M. Moïse Y... par M. Paul Y..., sur la
non comparution de ce dernier, la cour d’appel, qui a qualifié de surcroît sa décision d’arrêt
réputé contradictoire, a violé l’article 472 du code de procédure civile ;
Mais attendu, de première part, que le chef de l’arrêt rejetant la demande d’annulation de la
cession de parts du 14 janvier 2011 ne se rattache pas par un lien de dépendance nécessaire à
celui prononçant l’annulation de la cession de parts intervenue le 21 avril 2009 entre M. Paul Y...
et M. X... ;
Attendu, de deuxième part, qu’après avoir rappelé qu’aux termes des statuts les parts sociales
devaient, en cas de cession, être proposées aux autres associés à proportion de leur participation,
l’arrêt relève, d’un côté, que M. Paul Y... avait proposé de céder deux de ses trois parts à M.
Moïse Y... et la dernière à M. X... et, de l’autre, que l’acceptation de cette proposition par M.
Moïse Y... n’avait pas mis obstacle à l’acceptation par M. X... de la proposition le concernant ;
qu’ainsi, c’est sans méconnaître les conséquences légales de ses constatations que la cour d’appel
a statué comme elle a fait ;
Attendu, de troisième part, que M. X... ayant fait valoir, dans ses écritures d’appel, que la nullité
d’un acte conclu en violation d’un pacte de préférence était subordonnée à la double condition de
la connaissance du pacte et de la connaissance de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir, le

15
moyen est incompatible avec l’argumentation développée devant les juges du fond ;
Et attendu, enfin, que les motifs critiqués par la quatrième branche sont surabondants ;
D’où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n’est pas fondé pour le surplus ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches :
Attendu que M. X... fait encore grief à l’arrêt d’annuler la cession du 21 avril 2009 alors, selon le
moyen :
1°/ que la clause des statuts selon laquelle « en cas de cession, les parts devront être proposés par
priorité aux autres associés au prorata de leur participation », stipulée à propos de la cession des
parts à un tiers et après qu’il ait été précisé que les parts sont « librement cessibles entre associés
», ne s’applique qu’en cas de cession des parts à un tiers ; qu’en faisant application de cette clause
à une cession de parts entre associés, la cour d’appel a dénaturé l’article 13 des statuts de la
société et violé l’article 1134 du code civil ;
2°/ qu’en statuant comme elle l’a fait, sans même répondre aux conclusions de M. X... qui faisait
valoir que la clause litigieuse ne peut recevoir application qu’en cas de cession à un tiers, la cour
d’appel a en tout état de cause, violé l’article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que le droit de préemption permet à son bénéficiaire de se substituer à l’acquéreur dans les
droits et obligations d’un contrat de vente déjà signé tandis que le pacte de préférence donne à
son bénéficiaire le droit de se voir proposer la vente par priorité préalablement à toute cession ;
qu’en prononçant la nullité de la cession faute de preuve que préalablement à la cession du 21
avril 2009, M. Moïse Y... s’est vu proposer l’acquisition des parts de son fils Paul Y... au prorata
de sa participation, après avoir décidé que la clause litigieuse ne constituait pas un pacte de
préférence mais un droit de préemption ce dont il résulte qu’aucune offre préalable de vente ne
pouvait être exigée, la cour n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard de
l’article 1134 du code civil qu’elle a violé ;
Mais attendu, d’une part, que M. X... ayant soutenu devant la cour d’appel que l’interprétation de
la clause litigieuse devait donner un sens à celle-ci, le moyen, qui invoque une dénaturation de
cette stipulation, est incompatible avec la position ainsi adoptée devant les juges du fond ;
Attendu, d’autre part, qu’en faisant application de cette stipulation à des cessions consenties entre
associés après avoir relevé qu’elle ne portait pas atteinte au principe de « libre négociabilité » des
parts sociales entre associés affirmé par l’article L. 223-16 du code de commerce, même si elle y
apportait une restriction, la cour d’appel a répondu aux conclusions invoquées ;
Et attendu, enfin, que la cour d’appel n’a fait qu’appliquer la stipulation considérée en retenant
qu’elle imposait à l’associé cédant de proposer ses parts par priorité aux autres associés, à
proportion de leur participation ;
D’où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n’est pas fondé pour le surplus ;
Mais sur le même moyen, pris en sa quatrième branche :
Vu les articles 1134 et 1142 du code civil ;
Attendu que la violation d’une clause de préemption figurant dans les statuts d’une société à
responsabilité limitée n’emporte pas par elle-même nullité de la cession de parts conclue entre
deux associés ;
Attendu que tout en constatant, pour rejeter la demande de M. Moïse Y... tendant à la
condamnation de M. X... au paiement de dommages-intérêts au titre de « l’accaparement
irrégulier de parts », que la collusion frauduleuse entre ce dernier et M. Paul Y... n’est pas
caractérisée, l’arrêt retient que la cession de parts entre associés consentie en violation des droits
d’un coassocié bénéficiaire d’une clause statutaire de préemption est nulle ;
Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu que la cassation de ce chef du dispositif de l’arrêt atteint, par voie de conséquence,
celui rejetant la demande de dommages-intérêts formée par M. Moïse Y... à l’encontre de M. X...,
qui s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a annulé la cession de parts du 21 avril 2009 et

16
rejeté la demande de M. Moïse Y... en paiement de dommages-intérêts, l’arrêt rendu entre les
parties, le 18 octobre 2012, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur
ces points, la cause et les partie dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait
droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;

- Respect du formalisme des cessions de parts : Cass. com. 21 janv. 2014, F-P+B, n°12-
29.221

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société à responsabilité limitée Bilton’s, ultérieurement
transformée en société civile immobilière (la société), a été créée en 1991 par M. X... et par Mme
Y..., alors son épouse, pour l’exploitation d’un fonds de commerce de restaurant ; que Mme Y... a
cédé les parts sociales lui appartenant à M. Z... qui les a, par la suite, vendues à M. A..., lequel les a
cédées à Mme Y... par acte du 30 décembre 2005 ; que faisant valoir que cet acte, ne leur ayant
pas été notifié, était intervenu en violation des dispositions de l’article L. 223-14 du code de
commerce, M. X... et la société ont fait assigner Mme Y... et M. A... afin d’en voir prononcer
l’annulation ; qu’un arrêt du 28 avril 2011, rendu par défaut, a déclaré valable la cession de parts
du 30 décembre 2005 ; que M. A... ayant fait opposition à cette décision, la cour d’appel l’a rejetée
et a dit que les dispositions de l’arrêt du 28 avril 2011 reprendront effet à l’égard de toutes les
parties ;
Sur les premier et deuxième moyens :
Attendu que ces moyens ne seraient pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l’article L. 223-14 du code de commerce ;
Attendu que les parts d’une société à responsabilité limitée ne peuvent être cédées à des tiers
étrangers à la société que dans les conditions et selon les modalités prescrites par ce texte ;
Attendu que pour rejeter la demande de la société et de M. X... tendant à l’annulation de la
cession de parts du 30 décembre 2005, l’arrêt, après avoir énoncé que tous les actes juridiques
frappés de nullité relative peuvent être confirmés, relève que le 4 janvier 2006, une « assemblée
générale » de la société a réuni M. X... et Mme Y... en qualité de seuls associés et a autorisé le
premier, en qualité de gérant, à vendre le fonds de commerce de la société ; que l’arrêt ajoute
qu’une « assemblée générale extraordinaire » du 19 juin 2006, réunissant M. X... et Mme Y..., a
autorisé à l’unanimité la transformation de la SARL en société civile immobilière et a désigné ces
deux associés comme cogérants ; qu’il relève encore que les nouveaux statuts de la société ont été
signés par ces derniers le 19 juin 2006 ; que l’arrêt en déduit que l’acte de cession de parts du 30
décembre 2005 a été confirmé par M. X... et que celui-ci n’est pas fondé à en demander la nullité ;
Attendu qu’en se déterminant ainsi, par des motifs erronés ou inopérants, sans constater que le
projet de cession de parts avait été notifié à la société et à M. X..., la cour d’appel n’a pas donné
de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 18 octobre 2012, entre les
parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties en l’état
où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de
Versailles, autrement composée ;

17
- Rémunération du gérant de SARL et révocation : Cass. com., 21 juin 2017, n° 15-19.593,
publié au bulletin

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X... que sur le pourvoi incident relevé par la
société Philippe-Le Coat-Ach ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 14 septembre 2006, M. X... a cédé les parts qu'il détenait
dans le capital de la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Philippe-Le Coat-Ach (la
société Philippe), dont il était associé et cogérant ; que soutenant que la société Philippe restait lui
devoir diverses sommes, notamment au titre d'indemnités de gérance, M. X... l'a assignée en
paiement ; que la société Philippe a notamment soulevé l'irrecevabilité de ces demandes en se
prévalant de l'existence d'un protocole d'accord ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable :
Attendu que la société Philippe fait grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande en paiement de
M. X... alors, selon le moyen :
1°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la
contradiction ; qu'il ne peut, à ce titre, soulever un moyen d'office sans avoir préalablement invité
les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de ce que le
protocole d'accord valant transaction, rédigé par acte sous seing privé le 24 juillet 2006, était
inopposable à M. X..., à défaut de comporter sa signature, sans avoir préalablement invité les
parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de
procédure civile ;
2°/ qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, s'il résultait de l'acte de cession de
parts sociales du 14 septembre 2006, selon lequel les cessionnaires avaient « également droit à la
fraction des bénéfices éventuels de l'exercice en cours qui sera attribué auxdites parts cédées »,
que M. X... avait renoncé à toute rémunération supplémentaire devant être prélevée sur les
bénéfices, de sorte que son action était irrecevable, la cour d'appel a privé sa décision de base
légale au regard des articles 1134 du code civil, 31 et 32 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, que la société Philippe ayant fait valoir dans ses conclusions que M. X...
était irrecevable à solliciter le paiement d'une indemnité de gérance à raison de la transaction
intervenue le 24 juillet 2006, dont la communication n'était pas contestée, le moyen était dans le
débat ;
Attendu, d'autre part, que la société Philippe n'ayant pas soutenu, dans ses conclusions d'appel,
que M. X... avait renoncé à toute indemnité de gérance pour les mois de janvier et février 2006
par l'acte de cession de parts du 14 septembre 2006, le grief de la seconde branche manque en fait
;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 223-18 du code de commerce ;
Attendu que la société à responsabilité limitée est gérée par une ou plusieurs personnes
physiques, associées ou non, dont la rémunération, fixée soit par les statuts soit par une décision
collective des associés, est due tant qu'aucune décision la révoquant n'est intervenue ;
Attendu que pour rejeter la demande en paiement de M. X..., l'arrêt, après avoir relevé que
l'assemblée générale ordinaire des associés a fixé la rémunération de gérance à laquelle chaque
gérant aurait droit à 6 000 euros par mois, retient que l'indemnité due à ce dernier doit
correspondre à un travail réalisé pour la société, travail que ne pouvait accomplir l'associé absent
pour maladie, sauf à celui-ci d'établir qu'il était demeuré à même d'exercer sa fonction de
cogérant, preuve qu'il ne rapporte pas ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
REJETTE le pourvoi incident ;
Et sur le pourvoi principal :

18
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande en paiement d'indemnités
de gérance présentée par M. X..., l'arrêt rendu le 7 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel
de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Difficultés juridiques autour de l’agrément de l’héritier d’un associé de SARL décédé

L’héritière d’un associé de SARL décédé et dont la demande d’agrément avait été refusée par
l’assemblée générale de la société, n’est devenue associée de la société qu’à l’expiration de la
prorogation du délai accordée sur requête pour le rachat par la société des parts sociales dont elle
avait hérité.

par Xavier Delpech le 18 mai 2018

Com. 3 mai 2018, F-P+B, n° 15-20.851

Sur le moyen unique, pris en ses première, deuxième et troisième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 1er avril 2015), que le capital de la
SARL CP Agrivert (la société) était détenu à parts égales par Daniel Z... et M. B... C..., ce dernier
en étant le gérant ; que les statuts prévoyaient un agrément des nouveaux associés et que, pour les
transmissions par voie de succession, l'agrément serait décidé par les associés subsistants
représentant au moins les trois quarts des parts sociales ; que Daniel Z... est décédé le [...], en
laissant comme légataire universel Mme A... qui a sollicité son agrément comme associée par
lettre du 9 août 2011 ; que par décision du 27 septembre 2011, l'assemblée générale extraordinaire
de la société a refusé l'agrément à Mme A... ; que par délibération du 7 octobre 2011, l'assemblée
générale de la société a ratifié la rémunération de M. B... C... ; qu'une ordonnance sur requête du
19 janvier 2012 a autorisé le gérant de la société à bénéficier d'un délai supplémentaire de six
mois, avec effet à compter du 28 décembre 2011, pour le rachat, par la société, des parts sociales
de Daniel Z... à son héritière, Mme A... ; qu'une proposition de rachat a été adressée par la société
à Mme A... le 20 février 2012 pour un certain montant, à laquelle il n'a pas été donné suite ;
qu'estimant être devenue associée faute de rachat dans le délai légal, Mme A... a assigné M. B...
C... et la société en annulation des délibérations prises par les assemblées générales les 30
septembre 2011 et 7 octobre 2011, condamnation de M. B... C... à restituer la somme qu'il s'était
attribuée à titre de salaire de gérant pour l'exercice 2010/2011, la somme mensuelle qu'il s'était
versée depuis le 1er avril 2011 et les cotisations sociales liées à ces rémunérations et en
condamnation de M. B... C... à lui payer des dommages-intérêts ;

Attendu que Mme A... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes d'annulation des délibérations
des assemblées générales des 30 septembre et 7 octobre 2011 et de condamnation de M. B... C... à
restituer les rémunérations qu'il a reçues au titre de l'exercice 2010/2011 et à compter du 1er avril
2011 et à justifier de ces restitutions alors, selon le moyen :

1°/ que si un héritier de l'un des associés est agréé, ou réputé agréé après un refus d'agrément
non suivi du rachat de ses parts, la qualité d'associé lui est attribuée rétroactivement ; qu'en
considérant que l'agrément acquis par Mme A... le 26 juin 2012, après un refus initial non suivi du
rachat de ses parts, ne lui aurait pas conféré la qualité d'associée depuis son envoi en possession
des parts sociales, la cour d'appel a violé l'article L. 223-13 du code de commerce ;

2°/ que l'exercice des droits afférents à des parts sociales léguées par un associé décédé est
suspendu, et un mandataire ad hoc doit être désigné pour représenter ces parts "gelées" en

19
assemblée générale ; qu'en considérant qu'un mandataire désigné par le président de la juridiction
ne pourrait exercer plus de droits que n'en disposerait le mandant lui-même, la cour d'appel a
violé l'article L. 223-13 du code de commerce ;

3°/ que l'exercice des droits afférents à des parts sociales léguées par un associé décédé est
suspendu, et un mandataire ad hoc doit être désigné pour représenter ces parts "gelées" en
assemblée générale ; que c'est à la société ou aux associés de demander la désignation d'un
mandataire, et en aucun cas à un héritier non agréé ; qu'en considérant qu'il aurait appartenu à
Mme A... de demander la désignation d'un mandataire, la cour d'appel a violé les articles L. 223-
13 et L. 223-27 du code de commerce ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient à bon droit que Mme A..., héritière d'un associé
et dont la demande d'agrément avait été refusée par l'assemblée générale de la société, n'est
devenue associée de la société qu'à l'expiration de la prorogation du délai accordée sur requête par
le président du tribunal mixte de commerce pour le rachat par la société des parts sociales dont
elle avait hérité ; que le grief de la première branche, qui postule le contraire, manque en droit ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt énonce exactement qu'aucune disposition n'interdit au gérant
de convoquer une assemblée générale au cas où une procédure d'agrément est pendante, et qu'il
n'appartenait pas à la société ou à son gérant de solliciter, dans l'attente de l'achèvement de la
procédure d'agrément, la désignation d'un mandataire pour le compte de la dévolution
successorale ;

D'où il suit qu'inopérant en sa deuxième branche, qui critique des motifs surabondants, le moyen
n'est pas fondé pour le surplus ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris
en ses quatrième et cinquième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la
cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

20
Cession de droits sociaux (droit de préemption) : action en nullité du tiers évincé
Si l’acquéreur évincé a intérêt à l’annulation de la préemption prévue par les statuts, il n’a pas
qualité pour agir à cette fin.

par Alain Lienhard le 11 février 2016

Com. 2 févr. 2016, FS-P+B, n° 14-20.747

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 mai 2014), que les sociétés Entremont alliance et Sodiaal
international ont créé une filiale commune, la société par actions simplifiée Nutribio, dont elles
étaient chacune associées à hauteur de 50 % du capital ; que les statuts de cette société stipulaient
que si l'un des associés projetait de céder à un tiers sa participation dans le capital de la filiale,
l'autre associé aurait la faculté d'exercer son droit de préemption ; que la société Entremont
alliance ayant notifié à la société Sodiaal international l'offre faite par la Société industrielle laitière
du Léon (la société Sill) d'acquérir la totalité de sa participation dans le capital de la société
Nutribio, la société Sodiaal international l'a informée de son intention d'exercer son droit de
préemption au prix proposé par la société Sill ; que soutenant que le droit de préemption n'avait
pas été régulièrement exercé, la société Sill a assigné les sociétés Sodiaal international, Entremont
alliance et Nutribio aux fins de cession à son profit des actions de la société Nutribio détenues
par la société Entremont alliance ; qu'elle a, à titre subsidiaire, formé contre la société Sodiaal
international une demande de dommages-intérêts pour exercice fautif par cette dernière de son
droit de préemption ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Sill fait grief à l'arrêt de déclarer sa demande de cession des actions à son
profit irrecevable pour défaut de qualité à agir alors, selon le moyen :

1°/ que lorsqu'un tiers entend se substituer à l'acquéreur en usant d'un droit de préemption, soit
en dehors du champ d'application de ce droit, soit en contrariété avec les conditions de fond et
de forme permettant sa mise en oeuvre, l'acquéreur, illégalement évincé, est en droit de demander
au juge de constater l'irrégularité de la mise en oeuvre du droit de préemption à l'effet de se
prévaloir de l'accord intervenu à son profit ; qu'en estimant le contraire, pour décider qu'une telle
demande était irrecevable, les juges du fond ont violé les articles 31 du code de procédure civile et
1134 du code civil ;

2°/ que si antérieurement à la mise en oeuvre du droit de préemption l'acquéreur n'a


effectivement pas de lien de droit avec le tiers qui entend exercer le droit de préemption, il
demeure que, une fois que le tiers a manifesté la volonté d'user d'un droit de préemption,
l'acquéreur évincé est la cible de l'acte unilatéral aux termes duquel le tiers entend exercer ce droit
; qu'à ce titre, il peut incontestablement agir devant le juge pour faire constater l'irrégularité de
l'acte unilatéral aux termes duquel le titulaire du droit de préemption a entendu user de ce droit ;
qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 31 du code de procédure civile
et 1134 du code civil ;

3°/ que dès lors qu'il est évincé, l'acquéreur a nécessairement intérêt à agir, à l'effet de faire
constater l'irrégularité de l'acte aux termes duquel le tiers entend user de son droit de préemption,
et cet intérêt lui donne qualité pour agir ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé
les articles 31 du code de procédure civile et 1134 du code civil ;

21
4°/ que si même il fallait faire abstraction de ce qui précède, de toute façon, étant la cible du droit
de préemption et la mise en oeuvre de ce droit de préemption ayant pour objet et en tout cas
pour effet de l'évincer, l'acquéreur a nécessairement qualité pour faire statuer sur l'irrégularité de
l'acte aux termes duquel la préemption est mise en oeuvre ; qu'à tous égards, l'arrêt encourt la
censure au regard des articles 31 du code de procédure civile et 1134 du code civil ;

Mais attendu que si l'acquéreur évincé a intérêt à l'annulation de la préemption prévue par les
statuts, il n'a pas qualité pour agir à cette fin ; qu'ayant relevé que la société Sill, tiers à la
convention de préemption, n'avait aucun lien de droit avec le bénéficiaire de celle-ci, la cour
d'appel en a exactement déduit que cette société n'avait pas qualité pour agir en nullité de la
décision de préemption ainsi qu'en cession des actions à son profit ; que le moyen n'est pas
fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la société Sill fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts alors,
selon le moyen, qu'en leur article 9-1, les statuts de la société Nutribio instituant un droit de
préemption énonçaient : « les associés n'appartenant pas au groupe du cédant disposeront d'un
délai d'un mois à compter de la réception de la délégation de cession, pour notifier (...) aux autres
associés, ainsi qu'au président du conseil leur intention : (i) - d'exercer le droit de préemption et
de se porter acquéreur de la totalité des actions à céder, et ce au prix de transaction, (ii) - d'exercer
pour ce même prix leur droit de sortie conjointe pour un nombre d'actions calculées au prorata
du nombre d'actions dont le cédant envisage la cession » ; que le propre d'une préemption est de
substituer le tiers, qui dispose du droit de préemption, aux droits et obligations de l'acquéreur
qu'il évince ; que si la clause visait le prix et les actions comprises à la cession, elle restait
silencieuse sur les autres conditions auxquelles devait adhérer le tiers titulaire du droit de
préemption pour user de ce droit, sachant qu'en cas de préemption, il y a substitution pure et
simple du tiers à l'acquéreur évincé et reprise dans tous les droits et obligations conclus entre le
vendeur et l'acquéreur évincé ; qu'ainsi les juges du fond étaient tenus de se livrer à un travail
d'interprétation face à une clause lacunaire ; qu'en refusant de se livrer à ce travail d'interprétation,
pour s'en tenir aux énoncés formels de la clause, pourtant équivoque du seul fait des obligations
attachées à l'idée de préemption, les juges du fond ont violé les articles 4 du code civil et 12 du
code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt constate que si l'article 9.1 des statuts de la société Nutribio impose à
l'associé non cédant de notifier dans les formes et délais prescrits son intention d'exercer son
droit de préemption et de se porter acquéreur des actions à céder au prix de transaction, il ne
comporte aucune autre obligation ni restriction quant aux modalités de paiement du prix ou à la
date du transfert de propriété, lesquelles relèvent de la seule volonté des associés cédant et
cessionnaire ; qu'ayant exactement retenu que les statuts, qui avaient seuls vocation à s'appliquer,
n'imposaient pas au bénéficiaire du droit de préemption de se substituer à l'acquéreur évincé dans
toutes les modalités accessoires de son offre, la cour d'appel, qui a fait application de stipulations
claires et dépourvues d'ambiguïté, ne nécessitant donc aucune interprétation, a statué à bon droit ;
que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

22
Nullité de la cession de parts sociales pour défaut de notification
Le caractère d’ordre public de l’article L. 223-14 du Code de commerce impose un respect
scrupuleux du formalisme légal en cas de cession de parts sociales à un tiers étranger. Le projet
doit être notifié à la société et à chacun des associés, et aucune confirmation implicite de la
cession ne peut faire échec à l’annulation d’une opération effectuée en violation de cette règle.

Cass. com., 14 avr. 2021, n° 19-16468, F–D

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 mars 2019), par deux actes du 9 mars 2016, MM. [E] [U] et [L],
seuls associés de la Sarl l'Empreinte, ont, chacun, cédé les parts qu'ils détenaient dans le capital de
celle-ci, respectivement à M. [Z] et à M. [T].

2. Soutenant que ces cessions étaient intervenues en violation des dispositions de l'article L. 223-
14 du code de commerce imposant la notification du projet de cession à chacun des associés et à
la société, MM. [E] [U] et [L] ont assigné MM. [Z] et [T] et la société l'Empreinte en annulation
desdites cessions.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. M. [Z] et la société l'Empreinte font grief à l'arrêt de déclarer nulles les cessions, alors :

« 1°/ qu'il incombe au cédant d'informer ses associés du projet de cession qu'il envisage au profit
d'une personne étrangère à la société ; qu' en rejetant le moyen mis en oeuvre par la société
l'Empreinte tiré de ce que c'est à M. [E] [U] et à M. [L], cédant, qu'il revenait de notifier les
projets de cession, de sorte que M. [E] [U] était mal venu d'invoquer l'absence de notification,
motif pris de ce que l'auteur de la notification n'aurait pas été précisé par la loi et le décret, la cour
d'appel a violé l'article L. 223-14 du code de commerce ;

2°/ qu'en se bornant, pour déclarer nulles les cessions de parts sociales du 9 mars 2016, à relever
qu'aucune notification du projet de cession à la société et à chacun des associés n'était versée au
débat, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas du procès-verbal de
l'assemblée générale extraordinaire du 9 mars 2016, régulièrement produit au débat, que les
actionnaires avaient été convoqués le 15 février 2016 et qu'ils avaient reçu avec cette convocation,
l'ordre du jour de cette assemblée, comportant l'approbation des projets de cessions litigieuses, de
sorte que la société et les associés s'étaient vu notifier les projets de cession par la convocation, la
cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 223-14 du code de
commerce ;

3°/ qu'en ne répondant pas au moyen péremptoire tiré de ce que les projets de cessions avaient
été approuvés par l'unanimité des actionnaires, lors de l'assemblée générale extraordinaire du 9
mars 2016, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. Ayant relevé qu'aucune notification du projet de cession à la société et à chacun des associés
n'était versée au débat et retenu qu'en raison du caractère d'ordre public de l'article L. 223–14 du
code de commerce, il convenait de respecter scrupuleusement le formalisme légal, aucune

23
confirmation implicite de la cession ne pouvant faire échec à l'annulation d'une cession effectuée
en violation de ce formalisme, c'est à bon droit, abstraction faite du motif surabondant critiqué
par la première branche, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche
invoquée par la deuxième branche ni de répondre aux conclusions invoquées par la troisième
branche, que ses constatations rendaient inopérantes, a prononcé l'annulation des cessions
litigieuses.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 9 mars 2010, n°09-11631, Bull. civ. IV, n°52

Sur le moyen unique :


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 2 décembre 2008), que la société Inter Clamp est devenue
l’associé unique de la société à responsabilité limitée Oetiker (la société Oetiker) par la réunion de
toutes les parts entre ses mains ; qu’elle a décidé de mettre fin au mandat de co-gérant de M. X... ;
que celui-ci, soutenant que sa révocation de ses fonctions de co-gérant avait été décidée sans juste
motif et dans des circonstances abusives et vexatoires, a assigné la société Oetiker et la société
Inter Clamp en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que M. X... exposait page 7 de ses écritures que l’assemblée générale ayant décidé de sa
révocation était irrégulière pour avoir été convoquée par l’associé unique de la SARL, en violation
de l’article 13 des statuts prévoyant que les assemblées sont convoquées “par la gérance” ou par
un ou plusieurs associés “après une mise en demeure faite par lettre recommandée au gérant” ;
qu’en déboutant M. X... de ses demandes d’indemnisation au motif adopté que “le seul associé
détenant par définition plus de la moitié des parts sociales” a procédé à la décision de révocation,
de telle sorte que la révocation serait conforme aux articles L. 223-25 et L. 223-29 du code de
commerce, la cour d’appel qui a statué par un motif inopérant au regard de la procédure statutaire
de révocation, lors d’une assemblée qui n’avait été ni convoquée par le gérant ni après mise en
demeure de celui-ci, a privé sa décision de base légale au regard des textes cités, ensemble les
articles 1382, 1835 et 1836 du code civil ;
2°/ que la révocation du gérant décidée en méconnaissance des stipulations statutaires prévoyant
que les assemblées sont convoquées “par la gérance” ou par un ou plusieurs associés “après une
mise en demeure faite par lettre recommandée au gérant” porte atteinte au principe du
contradictoire ; qu’en déboutant M. X... de ses demandes d’indemnisation au motif adopté que
“le seul associé détenant par définition plus de la moitié des parts sociales” a procédé à la décision
de révocation, de telle sorte que la révocation serait conforme aux articles L. 223-25 et L. 223-29
du code de commerce, la cour d’appel qui a statué par un motif inopérant au regard de la
procédure statutaire de révocation, lors d’une assemblée qui n’avait été ni convoquée par le gérant
ni après mise en demeure de celui-ci, a privé sa décision de base légale au regard des textes cités,
ensemble les articles 1382, 1836 et 1836 du code civil et le principe du contradictoire ;
3°/ que M. X... exposait page 5 de ses écritures que la convocation de l’assemblée générale ayant
décidé de sa révocation n’avait pas respecté le délai de 15 jours devant précéder la convocation de
ladite assemblée ; qu’en déboutant M. X... de ses demandes d’indemnisation au motif adopté que
“le seul associé détenant par définition plus de la moitié des parts sociales” a procédé à la décision
de révocation, de telle sorte que la révocation serait conforme aux articles L. 223-25 et L. 223-29
du code de commerce, la cour d’appel qui a statué par un motif inopérant au regard de la

24
procédure statutaire de révocation, a violé l’article R. 223-20 du code de commerce, ensemble le
principe du contradictoire et l’article 1382 du code civil ;
4°/ que M. X... rappelait, page 10 de ses écritures, en produisant la pièce citée, qu’à
l’avertissement donné à l’associé unique de la SARL sur les risques de redressement auxquels il
refusait d’exposer la société et sa responsabilité de gérant, M. Z..., au nom dudit associé, lui avait
répondu le 23 janvier 2006 “que les remarques du commissaire aux comptes ne sont pas à
prendre en considération tant qu’elles n’ont pas été confirmées par un contrôle fiscal” ; qu’en
jugeant qu’il “n’est justifié d’aucun redressement ou condamnation quelconque en relation avec
les risques ainsi identifiés, que la société Oetiker et la société Inter Clamp ont ainsi été mises en
mesure de corriger”, sans vérifier, comme il lui était demandé et comme l’établissaient l’ensemble
des pièces versées aux débats, si la société Oetiker n’avait pas au contraire refusé de corriger les
risques dénoncés, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 223-25
du code de commerce, ensemble l’article 1382 du code civil ;
Mais attendu que dans le cas où la société ne comporte qu’un seul associé, celui-ci est habile à
prendre la décision de révoquer le gérant non associé aux lieu et place de l’assemblée des
associés ; que l’arrêt retient que la société Oetiker étant une société à responsabilité limitée à
associé unique, il appartenait à celui-ci de se prononcer sur la cessation des fonctions de co-
gérant de M. X... par une décision unilatérale et relève que ce dernier avait été informé du projet
de révocation le concernant et mis en mesure de présenter ses observations avant la prise de la
décision de révocation ; qu’en l’état de ces énonciations et constatations, rendant inopérants les
griefs des trois premières branches tirés de la violation des règles de fonctionnement de
l’assemblée des associés, la cour d’appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la
quatrième branche, a justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 25 septembre 2012, n°11-22337, publié au bulletin

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par acte du 21 décembre 2007, M. X..., gérant et associé unique
de la société A’semblable (la société), a cédé à la société PA La Financière l’intégralité des parts de
cette société ; que les parties ont conclu le même jour une convention de garantie de passif et
d’actif ; qu’invoquant des opérations comptables irrégulières effectuées par M. X... avant la
cession des parts, la société, après avoir fait pratiquer une saisie conservatoire sur les comptes
bancaires de celui-ci, l’a assigné en paiement de diverses sommes sur le fondement de la
convention de garantie ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande en paiement de dommages-
intérêts en réparation du préjudice subi par elle du fait du détournement d’un chèque, alors, selon
le moyen, qu’il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de sa
prétention ; que s’il appartient à la société qui argue du détournement d’un actif social par son
gérant associé unique d’en démontrer la réalité, il appartient en revanche à ce dernier, qui a admis
avoir falsifié et encaissé personnellement un chèque établi à l’ordre de la société, de rapporter la
preuve de sa prétendue passation en comptabilité ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a elle-même
relevé que M. X... ne contestait pas avoir personnellement encaissé le chèque litigieux, établi à
l’ordre de la société A’semblable, mais qu’il “prétendait” seulement que cet encaissement avait été
porté en comptabilité de la société A’semblable et avait fait l’objet d’un prélèvement sur son
compte courant ; qu’en énonçant néanmoins, pour débouter la société A’semblable de sa
demande de dommages-intérêts, que celle-ci ne rapportait pas la preuve des fautes qu’elle
imputait à M. X..., cependant qu’il résultait de ses propres constatations qu’il appartenait à ce
dernier – qui avait reconnu avoir personnellement encaissé le chèque litigieux – d’établir que cet
encaissement avait été porté dans la comptabilité de la société, la cour d’appel a inversé la charge
de la preuve en violation de l’article 1315, alinéa 2, du code civil ;

25
Mais attendu qu’ayant retenu qu’au titre du bilan arrêté pour la période du 1er juillet 2006 au 30
juin 2007 par M. X..., la société ne versait pas aux débats les pages du grand livre des comptes
pour les mois de juillet et août 2006 qui permettraient seules de constater qu’elle avait été lésée
par l’absence de mention à son crédit de la facture établie pour 35 880 euros, tandis que,
curieusement, elle produisait la page de décembre 2006 ayant trait à la mention de la facture de
197,22 euros, laquelle était insuffisante à établir la preuve du détournement qui lui incombait et
que, détentrice de tous les comptes sociaux et fiscaux de l’entreprise, elle ne produisait pas non
plus copie en détail de la déclaration de TVA pour la période considérée aux fins de justifier que
M. X... n’avait pas, en son temps, déclaré la somme de 33 880 euros comme produit de la société,
c’est sans inverser la charge de la preuve que la cour d’appel a décidé que la société ne rapportait
pas la preuve du détournement de fonds imputé à M. X... ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société fait grief à l’arrêt de l’avoir condamnée à verser à M. X... une certaine
somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que celui qui triomphe, même partiellement, en son appel ne peut être condamné à des
dommages-intérêts pour procédure abusive ; qu’en condamnant néanmoins la société pour
procédure abusive, après avoir cependant jugé qu’elle était en droit d’obtenir la condamnation de
M. X... à lui payer diverses sommes au titre du compte courant débiteur et d’un trop-perçu de
loyers, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil ;
2°/ que si toute faute dans l’exercice des voies de droit est susceptible d’engager la responsabilité
des plaideurs, il appartient cependant aux juges de caractériser avec précision l’existence et la
réalité de cette faute, sous peine de porter atteinte au droit fondamental d’agir en justice ; qu’en
l’espèce, en se bornant à énoncer, pour condamner la société à verser à M. X... la somme de 3 000
euros à titre de dommages-intérêts, que plusieurs saisies avaient été pratiquées par la société PA
La Financière sur les comptes bancaires de ce dernier avant la saisie conservatoire contestée, pour
un montant de 39 952,88 euros, autorisée par ordonnance du 16 janvier 2009 et confirmée par
jugement du 28 mai 2009, et que M. X... “a été privé de la jouissance de cette somme sur son
compte jusqu’à décision du tribunal de commerce d’Angers du 6 janvier 2010” en sorte que “la
gêne financière qui s’en est nécessairement suivie fonde son droit à réparation à hauteur de 3 000
euros”, sans aucunement caractériser les circonstances qui auraient fait dégénérer en abus le droit
de la société de faire pratiquer la saisie conservatoire querellée, la cour d’appel a privé sa décision
de base légale au regard de l’article 1382 du code civil ;
Mais attendu, d’une part, que la société a été condamnée à payer des dommages-intérêts en
réparation de la gêne financière subie par M. X... du fait de la saisie conservatoire d’une certaine
somme et non au titre d’un abus du droit d’agir en justice ;
Et attendu, d’autre part, que l’article 73, alinéa 2, de la loi du 9 juillet 1991 n’exige pas pour son
application la constatation d’une faute ; qu’ayant retenu que la société avait fait pratiquer une
saisie conservatoire à concurrence de 39 952,88 euros, que M. X... avait été privé de la jouissance
de cette somme sur son compte jusqu’à décision du tribunal de commerce du 6 janvier 2010 et
que la gêne financière qui s’en était suivie fondait son droit à réparation, la cour d’appel, qui
n’avait pas à caractériser un abus de droit, a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
D’où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n’est pas fondé pour le
surplus ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles L. 223-31 et R. 223-26 du code de commerce ;
Attendu que la décision fixant la rémunération du gérant associé unique d’une entreprise à
responsabilité limitée doit être répertoriée dans le registre prévu au troisième alinéa de l’article
L.223-31 du code de commerce et qu’une telle décision, prise en violation de cette disposition,
peut être annulée à la demande de tout intéressé ;
Attendu que pour limiter la condamnation de M. X... à payer à la société la somme de 6 101,19
euros au titre du compte courant débiteur, rejetant celle en paiement d’une somme de 17 500

26
euros résultant de divers prélèvements effectués par M. X..., gérant de la société, durant la
période du 1er juillet au 20 décembre 2007, sans délibération des associés de la société, l’arrêt
retient que, si dans la dernière délibération tenue le 21 décembre 2007 en présence de M. X...,
associé unique, la rémunération du gérant pour le second semestre 2007 n’a pas été approuvée, la
loi n’exige pas que la rémunération d’un gérant, par ailleurs associé unique, fasse l’objet d’une
délibération préalable ; qu’il relève encore que l’acquéreur des parts de la société, en décembre
2007, n’ignorait pas la rémunération habituelle du gérant sous forme de prélèvements mensuels et
la ratification de ceux-ci par délibération de l’associé unique en fin d’exercice ; qu’il constate que
les exercices de la société étaient clôturés chaque année le 30 juin, que l’acquisition des parts est
donc intervenue en milieu d’exercice comptable et que l’acquéreur disposait, avant sa décision
d’acheter les parts, des bilans et des délibérations antérieurs faisant apparaître les montants de la
rémunération du gérant ; qu’il relève qu’il n’est jamais entré, dans la convention de cession de
parts, la circonstance et la condition que M. X... ne réclamerait pas paiement de sa rémunération
jusqu’à sa démission de gérant et que la délibération du 21 décembre 2007 prenant acte de la
démission du gérant n’avait pas à approuver les rémunérations de ce gérant puisque les comptes
annuels n’étaient alors pas clôturés ; qu’il en déduit que, dès lors que ces prélèvements avaient été
portés à la connaissance des nouveaux associés avant la cession de parts et que ceux-ci n’avaient
présenté aucune objection, ils devaient être soumis, en parfaite bonne foi, ainsi que les charges
sociales y afférentes, à l’approbation des nouveaux associés en fin du bilan suivant, comme
dépense juste, régulière et nécessaire à l’activité de l’entreprise et que la société n’est en
conséquence pas fondée à soutenir d’emblée qu’ils représentent une dépense indue et à les porter
au débit du compte courant de l’associé ;
Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a limité la condamnation de M. X... à payer à la
société A’semblable la somme de 6 101,19 euros au titre de son compte courant débiteur, l’arrêt
rendu le 17 mai 2011, entre les parties, par la cour d’appel d’Angers ; remet, en conséquence, sur
ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait
droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Angers, autrement composée ;

Droit de vote de l’associé : Cass. com., 21 janv. 2014, n° 13-10151


Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l’article 1844, alinéa 1er, du code civil ;
Attendu que tout associé a le droit de participer aux décisions collectives ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la nue-propriété d’une partie des parts représentant le capital
de la société civile Earl de Fauque (la société) est indivise entre Mme Chantal X..., épouse Y...,
Mme Nadia X... et M. Jérôme X... ; que la société a fait assigner Mme Y... et M. Y..., son conjoint,
à qui elle avait donné mandat de la représenter lors des assemblées d’associés, pour qu’il soit dit
que Mme Y... n’a aucune qualité pour assister à ces assemblées et pour qu’il soit fait défense à
Mme Y... de s’y faire assister ou représenter par son conjoint et, à ce dernier, de pénétrer au siège
social ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l’arrêt retient que dès lors qu’un mandataire commun
a été désigné pour représenter l’indivision X... aux « assemblées générales » de la société, il n’y a
pas lieu de dissocier artificiellement la discussion préalable des points soumis au vote et le vote
lui-même, qui participent d’une seule démarche intellectuelle, en sorte que la présence des
indivisaires eux-mêmes aux assemblées générales est nécessairement exclue par la désignation
d’un mandataire commun pour représenter l’indivision ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que les copropriétaires indivis de droits sociaux ont la qualité
d’associé, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 20 septembre 2012, entre les

27
parties, par la cour d’appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où
elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de
Rouen, autrement composée ;

Cass. com., 21-04-2022, n° 20-10.809, FS-B, Rejet


Le jugement de liquidation judiciaire d'une société, s'il entraîne sa dissolution de plein droit, est sans effet sur sa
personnalité morale, qui subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de la
procédure, de sorte que, tant que cette publication n'est pas intervenue, les parts sociales composant son capital ont
toujours une existence juridique et peuvent faire l'objet d'une restitution en nature.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse,17 janvier 2018), M. [V] a, par un acte du 3 janvier 2013, cédé
l'intégralité des parts composant le capital de la SARL Entreprise [V] à la société 2E, devenue la
société 2EI, moyennant un prix déterminé au vu d'un bilan arrêté au 30 septembre 2012.

2. La société Entreprise [V] a été mise en redressement puis liquidation judiciaires,


respectivement les 21 janvier et 18 février 2014.

3. Soutenant que la situation présentée par M. [Aa] ne correspondait pas à la réalité, la société 2EI
l'a assigné en exécution de la garantie d'actif et de passif prévue par l'acte de cession et en
paiement de dommages-intérêts puis a demandé principalement l'annulation de la cession et la
remise des parties dans la situation où elles se trouvaient antérieurement ainsi que la
condamnation de M. [V] à lui payer des dommages-intérêts.

4. Une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'égard de M. [Aa], la société [R] et
associés étant désignée liquidateur.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. M. [V] et la société [R] et associés, ès qualités, font grief à l'arrêt d'annuler la convention de
cession de parts du 3 janvier 2013, d'ordonner, en conséquence, la restitution des parts à M. [Aa]
et de rejeter la demande de paiement de prix de ce dernier, alors « que la cour ne statue que sur
les prétentions énoncées au dispositif ; qu'en ordonnant en conséquence de la nullité de la cession
des parts sociales de la SARL Entreprise [V], la restitution desdites parts à M. [Aa], alors que dans
leurs dernières conclusions ni la société 2EI, ni M. [V] n'avait formulé une telle demande, la cour
d'appel a jugé au-delà des prétentions des parties et violé les articles 4 et 954 du code de
procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. La société 2EI ayant, dans le dispositif de ses conclusions, demandé à la cour d'appel de
confirmer le jugement entrepris, notamment, en ce qu'il avait dit et jugé que les parties étaient
remises dans leurs situations antérieures à la signature de l'acte de cession des parts du 3 janvier
2013, le grief manque en fait.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

28
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

8. M. [V] et la société [R] et associés, ès qualités, font le même grief à l'arrêt, alors « que tout
jugement doit être motivé à peine de nullité, le défaut de réponse à conclusions constituant un
défaut de motif ; que dans ses conclusions, M. [V] faisait valoir "l'impossibilité de replacer les
parties dans leur état initial d'avant la cession du fait de la liquidation de la société Entreprise [V]
à l'initiative de la demanderesse", et demandait par conséquent à la cour de condamner la SAS
2EI non pas à lui restituer lesdites parts, mais à lui payer la somme de 150 000 euros ; qu'en
omettant de répondre à ce moyen, pertinent en ce qu'il aurait permis à M. [V] d'obtenir la
restitution en valeur des parts sociales qui n'existaient plus, et en ordonnant la restitution des
parts sociales de la SARL Entreprise [V] à M. [Aa], la cour d'appel a entaché sa décision de défaut
de réponse à conclusions et violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

9. M. [Aa] ayant demandé, non la restitution en valeur des parts sociales de la société Entreprise
[V], mais des dommages-intérêts aux motifs qu'il avait été privé du prix de cession de ces parts,
qu'il avait été évincé de son poste de gérant de la société Entreprise [V] et privé de son poste de
responsable régional, contractuellement dû pendant une certaine durée, et que la société
Entreprise [V] avait été pillée de ses actifs au profit de la société 2EI sans bourse délier, la cour
d'appel, qui a retenu que la privation du prix de cession des parts n'était que la conséquence de
l'annulation de la cession du fait des dissimulations auxquelles M. [V] s'était livré et ne pouvait
donner lieu à indemnisation, que M. [Aa] ne démontrait pas que la société 2EI avait pillé la
société Entreprise [V] de ses actifs ou avait tiré un quelconque bénéfice durant la période
séparant la
cession des parts de son annulation, et qu'il ne pouvait se prévaloir d'un engagement pris dans le
cadre d'une convention annulée en raison de sa déloyauté, a répondu, en les écartant, aux
conclusions prétendument délaissées.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

Et sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

11. M. [V] et la société [R] et associés, ès qualités, font le même grief à l'arrêt, alors « qu'en cas
d'annulation d'une cession de parts sociales, si la restitution desdites parts consécutive à cette
nullité est impossible, le cédant est en droit d'obtenir la restitution de la valeur qu'elles avaient au
jour de la cession litigieuse ; qu'en ordonnant la restitution de parts sociales de l'entreprise [V] à
M. [Aa], alors que la société avait fait l'objet d'une liquidation judiciaire de sorte que les parts
sociales n'existaient plus, la cour d'appel a violé les articles 1844-8 du code civil, L. 237-2 du code
de commerce et 1234 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause. »

Réponse de la Cour

12. Il résulte de l'article 1844-7, 7°, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de
l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014, ainsi que des articles 1844-8, alinéa 3, du même code
et L. 237-2, alinéa 2, du code de commerce, que le jugement de liquidation judiciaire d'une

29
société, s'il entraîne sa dissolution de plein droit, est sans effet sur sa personnalité morale, qui
subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de la procédure, de
sorte que, tant que cette publication n'est pas intervenue, les parts sociales composant son capital
ont toujours une existence juridique et peuvent faire l'objet d'une restitution en nature.

13. Le moyen, qui soutient que la restitution en nature n'est plus possible en raison de la seule
liquidation judiciaire de la société Entreprise [V], sans prétendre que la procédure avait été
clôturée par un jugement publié, n'est pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Cass. com., 15-12-2021, n° 20-12.307, FS-B, Rejet


Si c'est à tort que la cour d'appel a énoncé que le juge, saisi par un associé détenant au moins la moitié des parts
sociales d'une SARL d'une demande de désignation d'un mandataire chargé de convoquer une assemblée générale
ayant pour ordre du jour la révocation du gérant, n'a pas à apprécier cette demande au regard de l'intérêt social, sa
décision n'encourt pas pour autant la censure dès lors que les allégations du gérant et de la société, selon lesquelles la
demande du majoritaire n'était pas conforme à l'intérêt social, n'avaient, en réalité, pour objet que de contester les
motifs de la révocation envisagée.
Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 23 janvier 2020), rendu sur renvoi après cassation (chambre
commerciale, financière et économique, 6 février 2019, pourvoi n° 16-27.560), la société U10
Corp (la société U10), associée majoritaire de la société à responsabilité limitée U-Web ayant pour
gérant et coassocié M. [W], a, le 19 février 2016, demandé à ce dernier la convocation d'une
assemblée générale ayant pour ordre du jour la décision à prendre sur la révocation du gérant et la
désignation d'un nouveau gérant. Devant le refus de M. [W], la société U10 a saisi en la forme des
référés le président d'un tribunal de commerce afin d'obtenir la désignation d'un mandataire
chargé de convoquer l'assemblée générale. M. [W] et la société U-Web se sont opposés à cette
demande.

Enoncé du moyen

2. M. [W] et la société U-Web font grief à l'arrêt de désigner un mandataire ad hoc avec pour
mission de convoquer une assemblée générale de la société U-Web ayant pour ordre du jour la
révocation éventuelle du mandat de gérant de M. [W] et la nomination, le cas échéant, d'un
nouveau gérant, alors « que si, saisi par un associé majoritaire d'une demande de désignation d'un
mandataire ad hoc chargé de convoquer une assemblée générale en vue de la désignation d'un
nouveau gérant, le juge ne peut en apprécier l'opportunité, il n'en doit pas moins vérifier sa
conformité à l'intérêt social ; qu'en se considérant au contraire "tenu[e] d'y faire droit, sans
pouvoir en apprécier l'opportunité, notamment, au regard de l'intérêt social", la cour d'appel a
violé l'article L. 223-27 du code de commerce, ensemble l'article 1833, alinéa 2, du code civil. »

Réponse de la Cour

3. Si c'est à tort que la cour d'appel a énoncé que le juge, saisi par un associé détenant au moins la
moitié des parts sociales d'une société à responsabilité limitée d'une demande de désignation d'un
mandataire chargé de convoquer une assemblée générale ayant pour ordre du jour la révocation
du gérant, n'a pas à apprécier cette demande au regard de l'intérêt social, sa décision n'encourt pas

30
pour autant la censure dès lors que les allégations de M. [W] et de la société U-Web, selon
lesquelles la demande de la société U 10 n'était pas conforme à l'intérêt social, n'avaient, en
réalité, pour objet que de contester les motifs de la révocation envisagée.

4. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

31
Faculté de droit et de science politique d'Aix-Marseille

TRAVAUX DIRIGES DROIT SPECIAL DES SOCIETES

Master 1 Droit des affaires


Aix-en-Provence - Année universitaire 2022-2023

SEANCE 2 - LA SOCIETE PAR ACTIONS SIMPLIFIEE

- Cass. ch. mixte, 19 novembre 2010, n°10-10.095, P+B+R+I, SAS Whirlpool France c/ J.

o Attendu, selon l'arrêt attaqué, que contestant la mesure de licenciement pour faute grave dont il
avait fait l'objet de la part de la société par actions simplifiée Whirlpool France (la société), son
employeur, suivant lettre signée par la personne responsable des ressources humaines, M. J. a saisi
un conseil de prud'hommes ;
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article L. 227-6 du code de commerce, ensemble l'article L. 1232-6 du code du travail ;
o Attendu que si, selon le premier de ces textes, la société par actions simplifiée est représentée à
l'égard des tiers par son président et, si ses statuts le prévoient, par un directeur général ou un
directeur général délégué dont la nomination est soumise à publicité, cette règle n'exclut pas la
possibilité, pour ces représentants légaux, de déléguer le pouvoir d'effectuer des actes déterminés
tel que celui d'engager ou de licencier les salariés de l'entreprise ;
o Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la
société ne justifie pas de la désignation conforme aux statuts d'un directeur général avec
délégation du pouvoir de licencier ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 227-6 du code de commerce, ensemble les articles L. 1232-6 du code du travail,
1984 et 1998 du code civil ;
o Attendu qu'aucune disposition n'exige que la délégation du pouvoir de licencier soit donnée par
écrit ; qu'elle peut être tacite et découler des fonctions du salarié qui conduit la procédure de
licenciement ;
o Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient
l'absence de qualité à agir de la signataire de la lettre de licenciement ;
o Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la lettre de licenciement avait
été signée par la personne responsable des ressources humaines de la société, chargée de la
gestion du personnel et considérée de ce fait comme étant délégataire du pouvoir de licencier, la
cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes
susvisés ; Par ces motifs (...) : - Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5
novembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; (...) les renvoie devant la cour
d'appel de Versailles, autrement composée (...)

- Cass. ch. mixte 19 novembre 2010, n° 10-30.215, P+B+R+I, SAS ED c/ P.

o Attendu, selon l'arrêt attaqué, que contestant la validité du licenciement dont il avait fait l'objet
de la part de son employeur, la société par actions simplifiée ED (la société), suivant lettre
recommandée signée par MM. M. et G., en leurs qualités respectives de chef de secteur et de chef
des ventes, M. P., ainsi que l'union syndicale Solidaires Paris et le syndicat SUD-ED ont saisi un
conseil de prud'hommes, statuant en formation de référé, afin d'obtenir, notamment, la
constatation de la nullité de ce licenciement ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

32
Vu l'article L. 227-6 du code de commerce, ensemble l'article L. 1232-6 du code du travail ;
o Attendu que si, selon le premier de ces textes, la société par actions simplifiée est représentée à
l'égard des tiers par son président et, si ses statuts le prévoient, par un directeur général ou un
directeur général délégué dont la nomination est soumise à publicité, cette règle n'exclut pas la
possibilité, pour ces représentants légaux, de déléguer le pouvoir d'effectuer des actes déterminés
tel que celui d'engager ou de licencier les salariés de l'entreprise ;
o Attendu que pour constater la nullité du licenciement, l'arrêt retient que la lettre de licenciement
doit émaner soit du président de la société par actions simplifiée, soit de la personne autorisée par
les statuts à recevoir délégation pour exercer le pouvoir de licencier détenu par le seul président ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article L. 1232-6 du code du travail, ensemble l'article 1998 du code civil ;
o Attendu qu'en cas de dépassement de pouvoir par le mandataire, le mandant est tenu de l'acte
de celui-ci s'il l'a ratifié expressément ou tacitement ;
o Attendu que pour constater la nullité du licenciement, l'arrêt retient qu'il a été prononcé par une
lettre dont les signataires n'avaient pas le pouvoir de licencier ;
o Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses propres énonciations que la société, en la
personne de son représentant légal, reprenait oralement ses conclusions aux termes desquelles
elle soutenait la validité et le bien-fondé du licenciement dont M. P. avait fait l'objet et réclamait
le rejet de toutes les prétentions de ce dernier, ce dont il résultait la volonté claire et non
équivoque de cette société de ratifier la mesure prise par ses préposés, la cour d'appel a violé les
textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS (...) : - CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3
décembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; (...) les renvoie devant la cour
d'appel de Paris, autrement composée (...).

- Cass. com., 21 juin 2011, n°10-20878, Publié au bulletin

Sur le moyen unique :


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Fort de France, 15 janvier 2010 rectifié par arrêt du 30 avril 2010)
que la Société de développement régional Antilles Guyane (Soderag) ayant consenti un prêt à la
société la Prairie Ouest (la société la Prairie), MM. Laurent et Patrice X..., ainsi que Marcel X..., se
sont portés cautions solidaires des obligations de la société emprunteuse ; que la société Sodema,
cessionnaire de la créance née du prêt, aux droits de laquelle se trouve la société par actions
simplifiée Sofiag, a assigné la société la Prairie ainsi que les cautions en paiement du solde du prêt
; que la société débitrice ayant été mise en redressement puis en liquidation judiciaires, la société
Sofiag a déclaré sa créance et demandé la condamnation de MM. Laurent et Patrice X..., ainsi que
celle de Mmes Françoise, Marie Béatrix et Marie Dominique X... et de M. Nicolas X..., ces
derniers en leur qualité d’héritiers de Marcel X... (les consorts X...), au paiement de cette créance ;

Attendu que les consorts X... et M. Z..., ce dernier en sa qualité de liquidateur de la société la
Prairie, font grief à l’arrêt d’avoir fixé le montant de la créance de la société Sofiag et d’avoir
condamné solidairement les cautions à la payer, alors, selon le moyen :
1°/ que selon l’article L. 227-6 du code de commerce, la société par actions simplifiée est
représentée à l’égard des tiers par un président, investi des pouvoirs les plus étendus pour agir au
nom de la société ; que les statuts peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs
personnes autres que le président, portant le titre de directeur général ou de directeur général
délégué, peuvent exercer les pouvoirs confiés à ce dernier ; qu’il résulte de ces dispositions que les
conditions dans lesquelles un directeur général ou un directeur général délégué peut exercer les
pouvoirs du président doivent être fixés par les statuts eux-mêmes ; qu’en l’espèce, les statuts de
la société Sofiag fixaient les conditions de nomination des directeurs généraux délégués, mais non

33
leurs pouvoirs ; qu’en retenant néanmoins que M. A..., directeur général délégué de la Sofiag,
avait bien qualité pour déclarer la créance de cette société dès lors qu’il avait été nommé par une
délibération du conseil d’administration du 23 décembre 2004 le chargeant plus particulièrement
du recouvrement et du contentieux avec tous pouvoirs de procéder aux déclarations de créance,
et qu’il importait peu que les statuts n’évoquent pas les pouvoirs de représentation du directeur
général délégué puisque l’article L. 227-6 du code de commerce les reconnaît explicitement aux
personnes dotées de ce titre, la cour d’appel a violé le texte susvisé, ensemble l’article L. 622-24
du code de commerce ;
2°/ que l’article 14. 2 des statuts de la société Sofiag prévoyait que le conseil d’administration «
nomme, sur proposition du président, le directeur général, qu’il peut révoquer à tout moment. Il
nomme également, le cas échéant, le ou les directeurs généraux délégués, dans les mêmes
conditions que celles du directeur général » ; que comme le faisaient valoir M. Z..., ès qualité de
liquidateur judiciaire de la société Prairie Ouest et les consorts X... dans leurs conclusions d’appel,
cette clause n’avait trait qu’aux conditions de nomination du directeur général délégué, et
n’habilitait pas le conseil d’administration à déterminer ses pouvoirs ; qu’en retenant qu’en
nommant le directeur général délégué conformément aux statuts, le conseil d’administration était
habilité à préciser les pouvoirs de représentation qui étaient liés à ses fonctions, la cour d’appel a
méconnu les clauses claires et précises des statuts de la société Sofiag, et a violé l’article 1134 du
code civil ;
Mais attendu qu’après avoir relevé que la déclaration de créance émanait de M. A..., directeur
général délégué de la Sofiag, l’arrêt retient que ce dernier a, conformément aux statuts, été
nommé à ces fonctions par le conseil d’administration et chargé par cet organe social “ du
recouvrement et du contentieux, qu’il s’agisse de dossiers issus de la Soderag, de la Socredom ou
de ceux propres à la Sofiag, avec le pouvoir de procéder aux déclarations de créances au nom de
la Sofiag “ ; qu’en l’état de ces seules constatations, la cour d’appel, qui n’a pas dénaturé les
stipulations des statuts de la société Sofiag, a légalement justifié sa décision ; d’où il suit que le
moyen, inopérant en sa première branche, qui critique un motif erroné mais surabondant, n’est
pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

34
- Cass. com., 6 novembre 2012, n°11-30648, publié au bulletin

Sur le moyen unique :


Vu les articles L. 820-1 et L. 823-3 du code de commerce ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société Facto média, constituée sous la forme d’une société à
responsabilité limitée, a été transformée en société par actions simplifiée à compter du 1er janvier
2009 ; qu’à cette date, elle a nommé un commissaire aux comptes et un suppléant ; que ces
derniers ont ultérieurement donné leur démission avec effet rétroactif au 1er janvier 2009 ; que la
société Facto média a demandé qu’il soit procédé à la suppression de leur inscription du registre
du commerce et des sociétés ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l’arrêt relève qu’il n’est pas contesté que les
conditions légales en vigueur ne rendent plus obligatoire la désignation d’un commissaire aux
comptes des sociétés par actions simplifiées qui, comme la société Facto média, ne dépassent pas
les seuils déterminés par l’article L. 227-9-1 du code de commerce pour deux des trois critères
qu’il détermine ; qu’il constate que le commissaire aux comptes et son suppléant ont démissionné
et que cette démission, qui pouvait être contestée par le ministère public, ne l’a pas été ; qu’il
retient qu’elle ne saurait l’être devant le juge chargé du contrôle du registre du commerce et des
sociétés qui n’est pas compétent pour en apprécier la régularité ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que la société Facto média avait désigné à compter du 1er
janvier 2009 un commissaire aux comptes et un commissaire aux comptes suppléant pour la
durée légale de six exercices, de sorte qu’il ne pouvait être procédé à la radiation de leur
inscription du registre du commerce et des sociétés à défaut de leur remplacement pour la durée
du mandat restant à courir, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 13 octobre 2011, entre les
parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état
où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de
Versailles, autrement composée ;

- Cass. com., 27 octobre 2009, n°08-20384, RLDA décembre 2009, note D. Poracchia et L.
Merland
Attendu, selon l’arrêt attaqué, rendu sur contredit, et les pièces de la procédure, que la société
Interservice AE (la société Interservice), créancière de la société par actions simplifiée Air
horizons au titre de fournitures de carburant pour aéronefs, et bénéficiaire d’un engagement de
caution des obligations de cette dernière souscrit par la société Sarao, a fait assigner, devant le
tribunal de commerce, MM. X... et Y..., à qui elle reprochait d’avoir commis des fautes à l’origine
du préjudice né de l’inexécution de leurs obligations par les sociétés Air horizons et Sarao ; que
MM. X... et Y... ayant soulevé l’incompétence du tribunal de commerce et demandé que l’affaire
soit portée devant le tribunal de grande instance, le premier juge a rejeté l’exception
d’incompétence ;
Sur le premier et le second moyens, pris en leur première branche, réunis :
Vu l’article L. 721 3 du code de commerce ;
Attendu que pour accueillir le contredit, l’arrêt retient que bien qu’il soit soutenu que MM. X... et
Y... dirigeaient les sociétés Air horizons et Sarao et qu’ils auraient commis à l’occasion de leur
gestion des fautes les rendant justiciables du tribunal de commerce, force est de constater que ces
sociétés n’ont pas été appelées devant cette juridiction ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que la circonstance que les sociétés qui auraient été gérées par
MM. X... et Y... n’aient pas été mises en cause ne pouvait avoir pour effet de les soustraire à la
compétence de la juridiction consulaire, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Et sur la deuxième branche des moyens réunis :
Vu l’article L. 721 3 du code de commerce ;

35
Attendu que les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux sociétés
commerciales ;
Attendu que pour statuer comme il a fait, l’arrêt retient encore que rien ne permet d’établir
l’intervention de M. X... ou de M. Y... en qualité de commerçants, dans leurs rapports avec la
société Interservice, ou leur intervention en qualité de dirigeants de la société Sarao lors de la
souscription ou de l’exécution du cautionnement litigieux, étant précisé qu’il n’est pas établi que
M. X... ou M. Y... en ont été les dirigeants ou représentants légaux et pas davantage ceux d’une
société Air horizons, dénoncée comme pouvant être impliquée dans la réalisation du dommage
dénoncé ;
Attendu qu’en se déterminant par de tels motifs, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les
faits allégués ne se rattachaient pas par un lien direct à la gestion de sociétés commerciales, peu
important que M. X... ou M. Y... n’ait pas eu la qualité de commerçant non plus que celle de
dirigeant de droit de ces sociétés, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE,
dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 25 juin 2008, entre les parties, par la cour d’appel de
Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit
arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

36
- Responsabilité du commissaire aux comptes pour absence de mention de conventions
réglementées dans son rapport. - Cass. com. 26 février 2013 n° 11-22.531 (n° 223 FS-PB),
Sté Cosmetic collections-soins et parfums c/ Sté Audit conseil union. Une SAS, membre
d'un groupe, avait poursuivi son commissaire aux comptes en réparation du préjudice que lui
avait causé le défaut de mention, dans le rapport spécial sur les conventions réglementées, de
l'acquisition par la SAS de titres détenus par la holding dans une autre société du groupe pour un
montant disproportionné au regard de ses capitaux propres.
Cette demande a été écartée. En effet, si le commissaire aux comptes d'une SAS doit présenter
aux associés un rapport sur les conventions réglementées, les conventions non approuvées
produisent néanmoins leurs effets, à charge pour la personne intéressée et éventuellement pour le
président et les autres dirigeants d'en supporter les conséquences dommageables pour la société
(C. com. art. L 227-10). Il en résulte qu'à les supposer démontrés, les manquements reprochés au
commissaire aux comptes dans la présentation de son rapport spécial n'étaient pas la cause du
préjudice né de la conclusion de ces conventions, et il n'était pas soutenu qu'ils étaient à l'origine
de la perte d'une chance de ne pas approuver les conventions litigieuses

- Exclusion d'un associé de SAS décidée en application d'une clause irrégulière. - Cass.
com. 9 juillet 2013 n° 11-27.235 (n° 731 FS-PB), Sté Logistics organisation Grimonprez c/
Bils (I)
Cass. com. 9 juillet 2013 n° 12-21.238 (n° 733 FS-PB), Sté Logistics organisation
Grimonprez c/ Bils (II)
Une clause des statuts d'une société par actions simplifiée (SAS) prévoyait qu'un associé pouvait
être exclu sur décision de l'assemblée générale et que l'associé concerné par l'exclusion ne pouvait
pas participer au vote. Le président de la société avait néanmoins invité un associé minoritaire
dont l'exclusion était envisagée à prendre part au vote, ce que l'associé avait refusé. Exclu sans
avoir pris part au vote, l'associé avait invoqué l'irrégularité de la clause statutaire lui interdisant
de voter pour demander en justice l'annulation de la délibération l'ayant exclu et sa réintégration
dans la société.
Note :
I. La Cour de cassation a fait droit à sa demande en se fondant sur l'argumentation suivante : elle
a tout d'abord rappelé qu'il résulte de l'article 1844, al. 1 et 4 du Code civil que tout associé a le
droit de participer aux décisions collectives et de voter et que les statuts ne peuvent déroger à ces
dispositions que dans les cas prévus par la loi (Cass. com. 23-10-2007 n° 06-16.537 : RJDA 1/08
n° 50) ; elle a ensuite précisé que toute clause statutaire contraire à ce principe est réputée non
écrite par application de l'article 1844-10, al. 2 du même Code et qu'il n'entrait pas dans les
pouvoirs du président de modifier à sa guise la clause contestée, une telle modification
nécessitant l'accord unanime des associés (C. com. art. L 227-19) ; l'exclusion étant intervenue sur
le fondement d'une clause contraire à une disposition légale impérative, et donc réputée non
écrite pour le tout, la délibération litigieuse devait être annulée
Précision inédite.
sur la portée de la sanction prévue par l'article 1844-10, al. 2 du Code civil, selon lequel toute
clause statutaire contraire à une disposition impérative du Code civil sur le contrat de société dont
la violation n'est pas sanctionnée par la nullité de la société est réputée non écrite : la clause est
réputée non écrite dans son ensemble même si seule une partie d'elle, détachable de l'ensemble,
est illicite. Il n'est donc pas possible de faire jouer les seules stipulations licites de la clause en
écartant celle jugée contraire à la règle impérative.
En pratique, les dirigeants de SAS ont tout intérêt à demander à la collectivité des associés de
supprimer des statuts les clauses interdisant à un associé visé par un vote d'exclusion de prendre
part au vote. Si l'ensemble des associés est d'accord, la modification statutaire peut même
consister à confier, non plus à la collectivité des associés, mais à un organe de gestion ou de

37
surveillance de la société le soin de décider de l'exclusion d'un associé, ce qui a pour effet
d'empêcher valablement celui-ci de se prononcer sur la question.
II. Pour faire échec à la demande de l'associé, le président avait réuni une assemblée générale
extraordinaire qui avait supprimé la clause litigieuse à la majorité. L'associé ayant objecté qu'une
telle modification statutaire ne pouvait être valablement adoptée qu'à l'unanimité (art. L 227-
19 précité), le président avait demandé au juge de déclarer la clause non écrite.
Cette demande a été rejetée car il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de se substituer aux
organes de la société en ordonnant la modification d'une clause statutaire au motif que celle-ci
serait contraire aux dispositions légales impératives applicables.
Cette solution est également inédite ; elle s'inscrit dans la droite ligne de l'arrêt précité du 23
octobre 2007 : puisqu'il ne peut pas être dérogé, même dans les SAS, aux dispositions d'ordre
public régissant le droit des sociétés si le législateur n'en a pas décidé autrement, il ne saurait être
demandé au juge de se substituer aux organes de la société en validant un vote intervenu au
mépris de ces dispositions.

Nullité de la décision d’exclusion d’un associé en application d’une clause statutaire


réputée non écrite. - Cass. com., 6 mai 2014, n° 13-14.960, F-D

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :


Sur le moyen unique, après avertissement délivré aux parties :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai, 29 janvier 2013), que M. X..., associé de la société par
actions simplifiée Socoldis (la société), a été exclu de celle-ci par délibération de l’assemblée
générale des associés du 10 février 2010 ; que M. X..., faisant notamment valoir qu’elle avait été
prise en application d’une clause des statuts devant être réputée non écrite, a demandé en justice
l’annulation de cette délibération et sa réintégration en qualité d’associé ;
Attendu que la société fait grief à l’arrêt d’accueillir cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que l’article 11.2 des statuts de la société Socoldis stipulait que « l’exclusion d’un associé par
l’assemblée générale peut résulter de la perte pour quelque cause que ce soit de la qualité de
salarié de la société » ; qu’en l’espèce, pour écarter le jeu de la clause d’exclusion, la cour d’appel
s’est fondée sur la seule résiliation judiciaire du contrat de travail de M. X... aux torts de son
employeur, la société Socoldis, prononcée par un arrêt de la chambre sociale de la cour d’appel de
Douai du 19 juin 2012, et en a déduit que la perte, par M. X..., de sa qualité de salarié serait
exclusivement imputable à la faute de son employeur et que celui-ci ne pourrait donc s’en
prévaloir à l’appui d’une décision d’exclusion d’associé ; que, dès lors, en application de l’article
625 du code de procédure civile, la cassation, à intervenir, de l’arrêt du 19 juin 2012 entraînera la
cassation par voie de conséquence de l’arrêt infirmatif présentement attaqué ;
2°/ que dans les conditions qu’ils déterminent, les statuts d’une SAS peuvent prévoir qu’un
associé peut être tenu de céder ses actions ; qu’en l’espèce, l’article 11.2 des statuts de la SAS
Socoldis stipulait que « l’exclusion d’un associé par l’assemblée générale peut résulter de la perte
pour quelque cause que ce soit de la qualité de salarié de la société » ; que la cour d’appel a retenu
que cette stipulation était licite et valable ; que, dès lors, en se fondant sur la seule circonstance,
inopérante, tirée de ce que la perte, par M. X..., de sa qualité d’associé serait, en définitive,
imputable à faute à la société Socoldis, pour écarter le jeu de cette clause statutaire et pour
annuler la décision d’exclusion prise sur son fondement, quand le caractère éventuellement illicite
de cette rupture ne pouvait, cependant, atteindre la validité de la décision d’exclusion, la cour
d’appel, qui a méconnu la loi des parties, a violé, par refus d’application, les articles 1134 du code
civil et L. 227-16 du code de commerce ;
3°/ que lorsqu’un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu’il
reproche à son employeur et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit, d’abord,
rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée et que c’est seulement
dans le cas contraire qu’il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l’employeur ; qu’en

38
l’espèce, la cour d’appel a expressément rappelé que, dans le volet prud’homal du litige ayant
opposé M. X... à la société Socoldis, il avait été fait application de ces règles spécifiques, de sorte
qu’en définitive, aucun grief n’avait pu être retenu contre M. X... ; que c’était donc uniquement en
raison du fait qu’elle avait accueilli la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail
formée par M. X..., lequel avait ainsi pris l’initiative de la rupture de ce contrat, que la chambre
sociale de la cour d’appel de Douai n’avait pas pu examiner les griefs que l’employeur avait
reprochés à son salarié à l’appui de la mesure de licenciement ; qu’en conséquence, en ayant
affirmé que la rupture du contrat de travail et la perte, corrélative, de la qualité de salarié de M.
X... serait « exclusivement imputable » à la société Socoldis et à la « faute » de celle-ci, la cour
d’appel n’a pas tiré les conclusions qui s’évinçaient de ses propres constatations et a violé les
articles 1134 du code civil et L. 227-16 du code de commerce, ensemble l’article L. 1231-1 du
code du travail ;
4°/ que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu’en
l’espèce, l’article 11.2 des statuts de la société Socoldis stipulait que « l’exclusion d’un associé par
l’assemblée générale peut résulter de la perte pour quelque cause que ce soit de la qualité de
salarié de la société » et que la cour d’appel a retenu que cette stipulation était licite et valable ;
qu’en se fondant sur la circonstance, inopérante, tirée de ce que la faute de la société Socoldis, en
sa qualité d’employeur, serait à l’origine de la rupture du contrat de travail de M. X... et de la
perte, corrélative, de sa qualité de salarié pour estimer que la société Socoldis cherchait à « se
prévaloir de sa propre turpitude » et, ainsi, pour écarter le jeu de cette clause sans constater que la
rupture dudit contrat de travail aurait été mise en oeuvre par la société Socoldis dans le but précis
de procéder, ensuite, à l’exclusion de M. X... en sa qualité d’associé et, partant, d’ourdir une
fraude à ses droits ou, à tout le moins, d’agir avec mauvaise foi à son égard, la cour d’appel a
privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 227-16 du code de
commerce et L. 1231-1 du code du travail ;
Mais attendu, en premier lieu, que le pourvoi formé contre l’arrêt visé par la première branche
ayant fait l’objet d’une décision de non-admission, la critique est sans portée ;
Et attendu, en second lieu, qu’il résulte de l’article 1844, alinéas 1 et 4, du code civil que tout
associé a le droit de participer aux décisions collectives et que les statuts ne peuvent déroger à ces
dispositions que dans les cas prévus par la loi ; qu’il résulte encore de l’article 1844-10, alinéa 2,
du même code que toute clause statutaire contraire est réputée non écrite ; que l’arrêt constate
qu’aux termes de l’article 11 des statuts de la société, « dans tous les cas, l’associé objet de la
procédure d’exclusion ne peut prendre part au vote de la résolution relative à son exclusion et les
calculs (de quorum) et de majorité sont faits sans tenir compte des voix dont il dispose » ; qu’il
s’ensuit qu’ayant été prise sur le fondement d’une clause réputée non écrite, la décision
d’exclusion de M. X... est nulle, peu important que ce dernier ait été admis à prendre part au vote
; que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués par les trois dernières branches, l’arrêt se
trouve légalement justifié ;
D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

39
- SAS : suspension des droits non pécuniaires de l’associé exclu, et date d’évaluation de
ses actions. - Cass. com., 16 sept. 2014, n 13-17807, Sté Menco Int Ltd, FS–PB, BJS déc.
2014, p. 695, note Paul Le Cannu
La suspension de l’exercice des droits non pécuniaires de l’associé de SAS, tenu de céder ses actions tant qu’il n’a
pas procédé à cette cession, est sans incidence sur sa qualité d’associé. Faute de clause statutaire fixant la date
d’évaluation des titres, la somme déterminée à la date la plus proche de la cession future peut être retenue (C. civ.,
art. 1843-4)

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 mars 2013), que le 11 juillet 2008, M. X...,
associé de la société par actions simplifiée Great Northern International, devenue la société
Seafoodexport (la société), a fait l'objet d'une décision d'exclusion de cette dernière ; que les
parties étant en désaccord sur la valeur de ses actions, un expert a été désigné en application des
dispositions de l'article 1843-4 du code civil ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que la valeur de ses droits sociaux est de 39 600
euros alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque l'associé exclu perd l'exercice de ses droits d'associé avant le remboursement de
ses droits sociaux, c'est à la date de cette perte que l'évaluation de ses droits doit intervenir ; qu'en
retenant la date la plus proche de celle du remboursement de la valeur des droits de M. X... après
avoir constaté que ses six cents actions étaient « gelées » depuis le jour de son exclusion de la
société et qu'il n'avait plus le droit de vote depuis cette date, la cour d'appel a violé les articles L.
227-16 du code de commerce et 1843-4 du code civil ;
2°/ que la décision de l'expert, en cas de désaccord des parties sur le prix de cession des actions,
s'impose à elles et il n'appartient pas au juge d'imposer aux parties une convention différente de
celle qu'elles avaient entendu établir ; qu'en ayant retenu la somme de 39 600 euros après avoir
constaté qu'elle ne correspondait qu'à une hypothèse d'évaluation demandée par la société Menco
et M. Y..., l'expert ayant conclu que la valeur des parts devait correspondre à la somme de 101
892 euros au jour de l'exclusion de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 1843-4 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que la suspension de l'exercice des droits non pécuniaires de l'associé
tenu de céder ses actions tant qu'il n'a pas procédé à cette cession étant sans incidence sur sa
qualité d'associé, la cour d'appel a statué à bon droit ;
Et attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que les statuts de la société ne précisaient pas la date à
laquelle la valeur des titres de l'associé exclu devait être déterminée et constaté que le tiers
estimateur avait fixé à 39 600 euros la valeur des actions de M. X... « à la date la plus proche de la
cession future », la cour d'appel a fait l'exacte application des dispositions de l'article 1843-4 du
code civil en retenant cette somme ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- Représentation de la SAS par un directeur général. - Cass. com. 9 juillet 2013 n° 12-
22.627 (n° 715 F-PB), Sté Swiss Post Solutions c/ Sté Newspring.
Si les statuts d'une société par actions simplifiée (SAS) instituent un ou plusieurs directeurs
généraux ou directeurs généraux délégués, ils peuvent, on le sait, leur conférer le même pouvoir
général de représenter la société à l'égard des tiers que celui attribué par la loi au président (C.
com. art. L 227-6, al. 3).
Il résulte de ces dispositions, qui doivent être mises en œuvre à la lumière de l'article 10 de la
directive européenne sur les sociétés (Dir. 2009/101 du 16-9-2009), que les tiers peuvent
toujours se prévaloir à l'égard de la société des engagements pris pour son compte par une
personne portant le titre de directeur général ou de directeur général délégué de la société.

40
Ayant énoncé pour la première fois ce principe, la Cour de cassation en a déduit que le directeur
général d'une SAS avait valablement engagé la société par la conclusion pour son compte d'un
contrat avec un apporteur d'affaires sans que celle-ci puisse utilement faire valoir qu'il n'était pas
habilité à le faire.
Note : La Cour suprême reconnaît expressément aux directeurs généraux et directeurs généraux
délégués de SAS à qui les statuts ont conféré le pouvoir de représenter la société la qualité de
représentants légaux au même titre que le président (notamment Cass. ch. mixte 19-11-2010 n°
10-10.095 et 10-30.215 : RJDA 1/11 n° 56, 1e et 2e espèces). Il faut que les statuts régulièrement
publiés mentionnent le pouvoir de représentation du directeur général ou du directeur général
délégué (Cass. com. 3-6-2008 n° 07-14.457 : RJDA 10/08 n° 1042 ; Cass. com. 14-12-2010 n° 09-
71.712 : RJDA 2/11 n° 162).
Cette solution est-elle susceptible de nuire aux tiers contractants ? En d'autres termes, la société
peut-elle se soustraire à ses engagements en opposant que ceux-ci ont été passés par un dirigeant
qui, bien que portant le titre de directeur général ou de directeur général délégué, n'a pas été
investi par les statuts du pouvoir de représentation ou a été investi d'un pouvoir de représentation
limité à tel ou tel acte ?
La Cour répond par la négative. Certes, l'article L 227-6 du Code de commerce ne précise pas
qu'une clause limitant les pouvoirs des directeurs généraux ou des directeurs généraux délégués
est inopposable aux tiers, comme il le prévoit pour le président (al. 4). Mais, comme le souligne la
Cour, il convient d'interpréter ce texte à la lumière du droit communautaire ; or, l'article 10 § 2
de la directive 2009/101 sur les sociétés, applicable à la SAS, énonce que les limitations de
pouvoirs des organes sociaux sont toujours inopposables aux tiers, même si elles sont publiées.
Cette inopposabilité doit donc jouer pour tous les dirigeants visés à l'article L 227-6, qu'il s'agisse
du président ou des directeurs généraux. La sécurité juridique des transactions, privilégiée par le
droit communautaire, s'en trouve renforcée.

- Obligation de non-concurrence. – Cass. Com. 10 septembre 2013, n°12-23888. - Sauf


stipulation contraire, l'associé d'une société par actions simplifiée n'est pas, en cette qualité, tenu
de s'abstenir d'exercer une activité concurrente de celle de la société et doit seulement s'abstenir
d'actes de concurrence déloyale.
Note : La Cour de cassation étend à la SAS la solution qu'elle avait déjà précédemment retenue
en matière de SARL (Cass. com. 15-11-2011 n° 10-15.049 : RJDA 2/12 n° 164 ; Cass. com. 19-3-
2013 n° 12-41.407 : RJDA 6/13 n° 514)

Contrôle des rémunérations des dirigeants de SAS : les associés majoritaires reprennent
la main. - Cass. com., 4 nov. 2014, n 13-24889, SAS société d’exploitation de l’Hôtel
Casadelmar, F–PB, BJS janv. 2015, p. 13, note Pierre-Louis Périn
La rémunération du président fixée par une décision collective des associés n’a pas à être soumise à la procédure des
conventions réglementées (C. com., art. L. 227-10). L’associé majoritaire étant aussi le président et assumant les
responsabilités de cette fonction, l’abus de majorité dans la fixation de sa rémunération n’est pas établi dès lors que
la rémunération n’est pas excessive et contraire à l’intérêt social.

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 24 juillet 2013), que, réunis en assemblée le 29 juin 2009, les
associés de la société par actions simplifiée dénommée société d'exploitation de l'Hôtel
Casadelmar (la société Casadelmar) ont décidé, à la majorité simple, d'attribuer une rémunération
au président de cette dernière à compter du 1er janvier 2009 ; que, faisant valoir que l'attribution
d'une rémunération au président s'analysait en une convention qui aurait dû être soumise à la
procédure de contrôle prévue à l'article L. 227-10 du code de commerce, la société Grand Sud

41
investissements (la société Grand Sud) a fait assigner la société Casadelmar et la société Syracuse
Investissements, associé majoritaire ; qu'elle a demandé, à titre principal, la condamnation de cette
dernière au remboursement du montant de la rémunération et, à titre subsidiaire, l'annulation
pour abus de majorité de la décision du 29 juin 2009 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Grand Sud fait grief à l'arrêt de rejeter la première de ces demandes alors,
selon le moyen, que la convention, portant sur la rémunération du président de la société par
actions simplifiée, doit être soumise à la procédure de contrôle des conventions réglementées ;
que si les statuts prévoyaient que les modalités d'une éventuelle rémunération étaient fixées dans
la décision de nomination, la nomination du président en exercice n'avait précisément prévu
aucune rémunération, si bien que la décision de le rémunérer devait faire l'objet d'une convention
réglementée ; qu'en n'ayant pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si la circonstance que la
décision de nomination du président ne prévoyait aucune rémunération ne devait pas conduire à
observer la procédure relative aux conventions réglementées, la cour d'appel a privé son arrêt de
base légale au regard de l'article L. 227-10 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, qu'il résultait des statuts de la société
Casadelmar que la rémunération de son président devait être fixée par une décision collective des
associés prise à la majorité simple, la cour d'appel en a exactement déduit, sans avoir à faire
d'autre recherche, que la société Grand Sud n'était pas fondée à se prévaloir de l'inobservation
des dispositions de l'article L. 227-10 du code de commerce ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société Grand Sud fait encore grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à
l'annulation pour abus de droit de la décision des associés du 29 juin 2009 alors, selon le moyen :
1°/ que l'abus de majorité est constitué par une décision prise contrairement à l'intérêt général de
la société et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la
minorité ; qu'une rémunération ne peut être regardée comme conforme à l'intérêt de la société du
seul fait qu'elle n'est pas disproportionnée avec le résultat de celle-ci ; qu'en ayant écarté
l'existence d'un abus de majorité, résultant du vote de l'associé majoritaire en faveur d'une
rémunération versée à lui-même, en se bornant à comparer le montant de cette rémunération
avec le dernier bénéfice connu, sans rechercher en quoi l'intérêt de la société n'avait pas été
méconnu par le refus concomitant d'accepter la proposition de M. X... d'exercer bénévolement la
présidence, ceci dans le contexte de crise, invoqué par l'associé majoritaire lui-même, ayant
conduit à la décision prise lors de la même assemblée générale d'affecter tous les résultats
bénéficiaires à la constitution d'un fonds de roulement en prévision de la vente du fonds de
commerce, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382 du code
civil ;
2°/ que l'abus de majorité est constitué par une décision prise contrairement à l'intérêt général de
la société et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment de la
minorité ; qu'une rémunération ne peut être regardée comme conforme à l'intérêt de la société du
seul fait qu'elle n'est pas disproportionnée avec le résultat de celle-ci ; qu'en ayant écarté
l'existence d'un abus de majorité, résultant du seul vote de l'associé majoritaire en faveur d'une
rémunération versée à lui-même, en se bornant à comparer le montant de cette rémunération
avec le dernier bénéfice connu, sans se prononcer, ainsi qu'elle y était invitée, sur le fait que les
fonctions de président n'impliquaient aucune charge de travail, notamment du fait que
l'établissement était géré par un directeur sur place en permanence, et que le président de la
société s'était consacré secrètement à compter de 2009 au lancement d'une nouvelle société ayant
une activité concurrente, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382
du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir relevé, par motifs adoptés, que le président de la société Casadelmar
assumait la responsabilité, tant civile que pénale, inhérente à ses fonctions sociales, et précisé, par
motifs propres et adoptés, que la rémunération allouée à ce dernier s'élevait à la somme annuelle

42
brute de 55 000 euros tandis que la société avait réalisé en 2008, dernier exercice dont les chiffres
étaient connus à la date de l'assemblée litigieuse, un résultat net de 410 000 euros, l'arrêt retient,
par motifs adoptés, que la rémunération des fonctions exercées par le président de la société ne
saurait être considérée comme excessive et contraire à l'intérêt social ; qu'en l'état de ces
constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre la société Grand Sud
dans le détail de son argumentation, a pu décider que l'abus de majorité invoqué n'était pas établi ;
que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 19 novembre 2013, n°12-26702, non publié au bulletin


Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société par actions simplifiée Acos (la SAS) a pour président
M. X... et pour directeur général M. Z..., lequel a été investi par les statuts des mêmes pouvoirs
que le président, « sous réserve du droit de veto attribué à ce dernier » ; que la SAS ayant été mise
en redressement puis liquidation judiciaires les 10 janvier et 13 mars 2012, M. Z..., déclarant la
représenter, a interjeté appel du jugement de conversion en liquidation judiciaire ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SAS, représentée par son directeur général, fait grief à l’arrêt d’avoir écarté ses
conclusions déposées et signifiées le 26 juin 2012, alors, selon le moyen :
1°/ que les parties peuvent notifier leurs conclusions jusqu’au jour de l’ordonnance de clôture ;
qu’en affirmant que le principe du contradictoire interdit à une partie de notifier des conclusions
à la date même de la clôture, la cour d’appel a violé les articles 15, 16, 135 et 783 du code de
procédure civile ;
2°/ que, subsidiairement, lorsqu’une partie se borne à répliquer aux conclusions de son
adversaire, sans elle-même présenter aucun moyen nouveau, ses conclusions sont recevables
jusqu’au jour de l’ordonnance de clôture ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a relevé que dans ses
dernières conclusions en date du 5 juin 2012, le mandataire judiciaire avait procédé à l’historique
complet de la situation de la SAS au sein du groupe Z...et de l’évolution de sa situation
économique, outre qu’il avait soulevé l’irrecevabilité de l’appel de la SAS, « moyen qu’elle n’avait
évidemment pas abordé » ; qu’en écartant les conclusions récapitulatives de la SAS notifiées la
veille et le jour de la clôture, aux motifs inopérants qu’il ne pouvait y être répliqué, que le report
de la clôture n’était pas possible et que la SAS n’expliquait pas en quoi elle avait dû attendre trois
semaines pour répondre aux conclusions du mandataire judiciaire, la cour d’appel, qui n’a à aucun
moment caractérisé que les simples conclusions en réplique de la SAS appelaient une réponse et
partant, que le principe de la contradiction aurait été méconnu à l’égard de ses adversaires, a privé
sa décision de base légale au regard des articles 15, 16, 135 et 783 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d’appel a souverainement retenu que les conclusions datées du 26 juin
2012, jour du prononcé de l’ordonnance de clôture, n’avaient pas été signifiées en temps utile au
sens de l’article 15 du code de procédure civile ; que le moyen n’est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l’article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable l’appel interjeté par le directeur général de la SAS, l’arrêt
retient qu’en l’absence de précisions dans les statuts quant au mode d’exercice du droit de veto
reconnu au président, toute manifestation d’opposition de sa part doit être prise en considération
et qu’il est impossible de soutenir que M. X... n’aurait pas exercé son droit de veto, dès lors qu’il
était favorable à la conversion en liquidation judiciaire, comme il l’avait exprimé dans une lettre
adressée au président du tribunal de commerce puis au cours des débats en première instance, en
ne s’opposant pas à la demande en ce sens de l’administrateur judiciaire ;
Mais attendu qu’en statuant ainsi, alors que le mandataire judiciaire et le ministère public
concluaient que, non consulté sur la décision d’appel du directeur général, le président n’avait pas
été en mesure d’exercer son droit de veto, sans avoir invité au préalable les parties à présenter
leurs observations sur le moyen relevé d’office tiré de la possibilité d’un exercice implicite de ce

43
droit, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a déclaré l’appel irrecevable, l’arrêt rendu le 17
août 2012, entre les parties, par la cour d’appel de Besançon ; remet, en conséquence, sur ce
point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait
droit, les renvoie devant la cour d’appel de Besançon, autrement composée ;

- Cass. com., 25 janvier 2017, n° 14-28.792, FS-P+B+R+I


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. et Mme X... et la Société de traitement
comptable informatisé (la société STCI) que sur le pourvoi incident relevé par la société Cabinet
Rexor et la Société financière et de réalisation d'expertise comptable (la Sofirec) ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., qui était actionnaire majoritaire et président du conseil
d'administration de la société anonyme Cabinet Rexor, a, par un protocole d'accord du 22 janvier
2005, cédé 98, 81 % de la participation qu'il détenait dans le capital de cette société à la Sofirec ;
que ce protocole stipulait que le prix de cession des actions serait diminué en cas de baisse du
chiffre d'affaires au cours des exercices 2005 et 2006 dans la mesure où M. X... serait maintenu à
son poste d'administrateur ; que l'assemblée générale de la société Cabinet Rexor a, le 26 avril
2005, décidé la transformation de cette société en société par actions simplifiée ; que soutenant
que la société Cabinet Rexor et la Sofirec n'avaient pas respecté leurs engagements contractuels,
M. et Mme X..., ainsi que la société STCI, celle-ci agissant en qualité de bailleresse de la société
Cabinet Rexor, les ont assignées en paiement ; que la société Cabinet Rexor et la Sofirec ont
reconventionnellement demandé que la clause de réduction du prix prévue par le protocole de
cession soit déclarée applicable à M. X... ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que la société Cabinet Rexor et la Sofirec font grief à l'arrêt de condamner la première à
payer à M. X... une indemnité de fin de carrière alors, selon le moyen, que le dirigeant social qui
invoque, à l'appui de prétentions salariales ou indemnitaires, l'existence d'un contrat de travail
parallèlement à son mandat social, doit l'établir en prouvant l'effectivité de fonctions réellement
exercées dans l'entreprise, sans pouvoir utilement se prévaloir de mentions portées sur des
bulletins de salaire ; que pour retenir que M. X... pouvait prétendre au paiement d'une indemnité
de fin de carrière contestée par la société Cabinet Rexor, la cour d'appel a retenu que ce dernier,
outre sa qualité de dirigeant social, était également salarié au sein de cette société entre 1998 et
2004, au vu de ses bulletins de salaire, qualité non incompatible avec son mandat social ; qu'en se
fondant sur ces seules mentions, la cour d'appel qui n'a pas constaté l'effectivité de fonctions
réellement exercées par M. X... au sein de la société Cabinet Rexor, n'a pas légalement justifié son
arrêt infirmatif au regard des articles L. 1231-1 du code du travail et L. 822-9 du code de
commerce pris ensemble ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions d'appel de la société Cabinet Rexor et
de la Sofirec qu'elles aient contesté la qualité de salarié de M. X... et l'effectivité des fonctions
réellement exercées par lui au sein de la société Cabinet Rexor ; que le moyen, nouveau, et
mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :
Vu les articles L. 227-1 et L. 227-5 du code de commerce ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que seuls les statuts de la société par actions
simplifiée fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée ;
Attendu que pour dire que la clause de révision de prix prévue par le protocole de cession
d'actions était applicable à M. X..., l'arrêt relève que, si les statuts de la société par actions
simplifiée Cabinet Rexor ne font pas référence à un conseil d'administration, les documents
produits aux débats, dont rien n'autorise à remettre en cause la sincérité, attestent du maintien
d'un conseil d'administration au sein de la société Cabinet Rexor après sa transformation en

44
société par actions simplifiée et jusqu'au mois de juillet 2007, et démontrent que M. X... a
conservé la qualité d'administrateur de cette société jusqu'au 30 septembre 2006 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les statuts de la société par actions simplifiée
Cabinet Rexor ne faisaient pas mention d'un conseil d'administration, ce dont il résultait que M.
X... n'avait pas conservé sa qualité d'administrateur à la suite de la modification de la forme
juridique de cette société, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses
constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi incident ;
Et sur le pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. X... à payer à la société Sofirec
la somme de 21 441, 88 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 8 juillet 2008 et en ce
qu'il statue sur les dépens et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt
rendu le 24 juin 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet en conséquence, sur
ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait
droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

45
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 12 mai 2021, 20-12.670, Publié au
bulletin
Arrêt n° 408 F-P
Pourvoi n° K 20-12.670

Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 5 décembre 2019), la société par actions simplifiée LCF a
été mise en redressement judiciaire le 6 décembre 2016, puis en liquidation judiciaire le 24
janvier 2017. Un arrêt a ensuite fixé les créances de la société Axyo au passif de la procédure
collective de la société LCF au titre de factures impayées antérieures.

2. Invoquant une surévaluation des apports en nature effectués par MM. [M] et [B] [J],
coassociés de la société LCF lors de la constitution de la société, la société Axyo les a
assignés en paiement des sommes dues au titre de ces factures, sur le fondement des articles
2285 du code civil et L. 223-9 du code de commerce.

Examen du moyen

Sur le moyen relevé d'office


3. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il
est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu l'article 2 du code civil et l'article L. 227-1, alinéa 7, du code de commerce, dans sa


rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 :

4. Selon le premier de ces textes, la loi ne dispose que pour l'avenir ; elle n'a point d'effet
rétroactif. Il en résulte que la responsabilité extracontractuelle est soumise à la loi en vigueur
au jour du fait générateur de responsabilité.

5. Aux termes du second de ces textes, lorsqu'il n'y a pas eu de commissaire aux apports ou
lorsque la valeur retenue est différente de celle proposée par le commissaire aux apports, les
associés sont solidairement responsables pendant cinq ans, à l'égard des tiers, de la valeur
attribuée aux apports en nature lors de la constitution de la société.

6. Il en résulte que ce texte n'est applicable que lorsque les statuts de la société ont été signés à
compter du 11 décembre 2016, date d'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre
2016.

7. Pour rejeter les demandes formées par la société Axyo, l'arrêt se fonde sur l'article L. 227-1,
alinéa 7, du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre
2016, la société LCF étant une société par actions simplifiée.

8. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la société LCF avait été mise en
redressement judiciaire le 6 décembre 2016, de sorte que la constitution de la société LCF
était nécessairement antérieure à la date d'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1691 du 9
décembre 2016, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 décembre 2019, entre les
parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

46
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 12 mai 2021, 19-17.566, Publié au
bulletin

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 avril 2019), la SAS Alfred de Musset (la société Sasam),
dont le capital est détenu par M. [B] [O], M. [G] [O], Mme [U] [Q], épouse [O], Mme [H]
[O], Mme [I] [O], épouse [Y], Mme [Y] [O], épouse [E], Mme [W] [O], épouse [C] et M. [C],
détient 50,75 % du capital de la société Compagnie industrielle et financière d'entreprise (la
société Cife).

2. Le 13 juin 2014, l'assemblée générale des actionnaires de la société Cife a approuvé la


vente des actions que celle-ci détenait en autocontrôle, qui représentaient 9,46 % de son
capital.

3. Le 30 juin 2014, l'assemblée générale de la société Sasam a approuvé une augmentation de


capital, destinée à financer une éventuelle acquisition des actions autodétenues par la société
Cife, la clôture de l'augmentation de capital devant intervenir le 31 juillet 2014.

4. Le 19 juillet 2014, les actionnaires de la société Sasam, à l'exception de M. et Mme [E] et


de M. et Mme [C], ont renoncé à leur droit préférentiel de souscription au profit de la société
Embregour, dont M. [G] [O] est associé.

5. Le 25 juillet 2014, ils ont agréé cette société afin de lui permettre de souscrire à
l'augmentation de capital votée le 30 juin.

6. Le 31 juillet 2014, ils ont refusé d'agréer les sociétés EI BTP et HTB, détenues par M. et
Mme [C] et présentées par eux à cet agrément.

7. Selon un procès-verbal du 4 août 2014, l'assemblée générale de la société Sasam a constaté


que l'augmentation de capital avait été définitivement réalisée au prix de 14 140 euros l'action,
les époux [Z] souscrivant quatre-vingt titres et la société Embregour deux cent quatre vingt
quinze titres. A l'issue de l'opération, M. [G] [O] possédait, directement ou indirectement, via
la société Embregour, 24,2 % du capital de la société Sasam, tandis que M. et Mme [C]
voyaient leur participation au sein de cette société passer de 28 % à 23,6 %.

8. Le 28 mai 2015, les actions autodétenues par la société Cife ont été acquises par la société
Sasam, à concurrence de 6,96 %, et par un investisseur financier à concurrence de 2,5 %.

9. M. et Mme [C] ont assigné la société Sasam, M. [B] [O], M. [G] [O], Mme [U] [Q], épouse
[O], Mme [H] [O], Mme [I] [O], épouse [Y], M. [Y], Mme [Y] [O], épouse [E] et M. [E] en
annulation de l'augmentation de capital de la société Sasam votée le 30 juin 2014 et des
assemblées générales des 30 juin, 31 juillet et 4 août 2014, ainsi qu'en paiement de
dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, et le deuxième moyen, pris
en sa troisième branche, ci-après annexés

47
10. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de
statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas
de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, et le second moyen, pris en ses première,
deuxième et quatrième branches, réunis

Enoncé des moyens

11. Par leur premier moyen, M. et Mme [C] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes
tendant, d'un côté, à voir annuler l'augmentation de capital de la société Sasam votée le 30
juin 2014, les délibérations prises lors des assemblées générales des 31 juillet et 4 août 2014,
ainsi que tous les actes ultérieurs se rapportant à l'augmentation de capital, et de l'autre, à voir
condamner in solidum leurs coassociés à leur verser à chacun une certaine somme en
réparation du préjudice résultant de l'abus de majorité et de la fraude, alors « que la fraude
corrompt tout ; que, pour refuser de reconnaître à l'augmentation de capital votée le 30 juin
2014 un caractère brutal de nature à entraver toute souscription significative de la part des
époux [C], la cour d'appel a relevé que ces derniers étaient informés depuis décembre 2013
des problèmes liés aux actions auto-détenues par la Cife et de la possibilité de rachat de ces
actions par la holding Sasam, ce pour quoi l'assemblée générale extraordinaire de la Sasam
avait décidé le 30 juin 2014 de procéder à une augmentation de capital ; qu'en statuant par ces
considérations, sans rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions des époux [C],
si la brutalité de l'opération ne résultait pas de la brièveté du délai de souscription dont le
terme était fixé au 31 juillet 2014, soit un mois seulement après le vote de l'augmentation de
capital, de surcroît en période estivale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au
regard du principe susmentionné, ensemble l'article L. 227-9 du code de commerce. »

12. Par leur second moyen, M. et Mme [C] font le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui
sont fournies par les parties ; que, pour considérer que l'augmentation du capital de la Sasam
votée le 30 juin 2014 en vue de financer le rachat des actions autodétenues par sa filiale, la
Cife, n'avait pas pour objet une opération illicite, et n'était pas de ce fait contraire à l'intérêt
social, la cour d'appel a relevé qu'il n'était pas établi, au vu de la note rédigée le 4 février 2014
par le cabinet [V], que les actions auto-détenues par la Cife devaient être annulées en
application de l'article L. 225-214 du code de commerce ; qu'en se fondant sur une telle
considération, quand il lui appartenait d'examiner par elle-même si les conditions de
l'annulation prévue à l'article L. 225-214 du code de commerce, lorsque des actions sont
possédées en violation des articles L. 225-206 à L. 225-210 dudit code, étaient réunies
s'agissant des actions auto-détenues par la Cife, la cour d'appel a méconnu son office, en
violation de l'article 4 du code civil ;

2°/ qu'il résulte de l'article L. 225-214 du code de commerce que, passé le délai d'un an à
compter de leur souscription ou de leur acquisition, les actions possédées en violation des
articles L. 225-206 à L. 225-210 dudit code ne peuvent plus être cédées mais doivent
obligatoirement être annulées ; qu'il suit de là que la cession de telles actions au-delà du délai
d'un an à compter de leur souscription ou de leur acquisition est nécessairement illicite ; qu'en
jugeant cependant, pour en déduire que l'augmentation de capital votée le 30 juin 2014 en vue
de financer le rachat des actions auto-détenues par la Cife n'avait pas pour objet une opération
illicite, et n'était pas de ce fait contraire à l'intérêt social, que les actions de la Cife pouvaient

48
être régulièrement cédées tant qu'elles n'avaient pas été annulées, indépendamment du point
de savoir si les conditions de leur annulation sur le fondement de l'article L. 225-214 du code
de commerce étaient réunies, la cour d'appel a violé ce dernier texte ;

4°/ que la fraude constitue une cause de nullité de l'augmentation de capital décidée par
l'assemblée générale, nonobstant l'absence de disposition expresse du code de commerce en
ce sens ; que la cour d'appel, à supposer qu'elle ait adopté le motif des premiers juges selon
lequel aucune disposition du code de commerce prévoyant la nullité d'un acte modifiant les
statuts d'une société commerciale ne s'appliquait en l'espèce, a statué par une considération
inopérante, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles 1844-10 du code
civil et L. 235-1 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

13. En premier lieu, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que M. et Mme [C] étaient au
courant du problème posé par la détention, par la société Cife, d'une partie de ses propres
actions, depuis la fin de l'année 2013 et, par motifs adoptés, qu'ils connaissaient, depuis cette
date, l'intention des autres actionnaires de la société Sasam de procéder à une augmentation de
capital pour le résoudre. En l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que M.
et Mme [C] avaient disposé du temps nécessaire pour se préparer à l'augmentation de capital
litigieuse et, s'ils souhaitaient y participer, de réunir les fonds nécessaires à la souscription des
actions émises, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise invoquée par
la première branche du premier moyen, a légalement justifié sa décision.

14. En second lieu, après avoir rappelé qu'aux termes de l'article L. 225-214 du code de
commerce, « les actions possédées en violation des articles L. 225-206 à L. 225-210 doivent
être cédées dans un délai d'un an à compter de leur souscription ou de leur acquisition. A
l'expiration de ce délai, elles doivent être annulées », l'arrêt énonce exactement qu'aucune
sanction de nullité automatique n'est prévue par cet article et qu'un vote de l'assemblée
générale est nécessaire pour prononcer l'annulation des actions. Relevant ensuite que les
actions autodétenues par la société Cife n'avaient pas fait l'objet d'une telle décision, c'est à
bon droit et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et quatrième
branches du second moyen que la cour d'appel en a déduit que ces actions pouvaient faire
l'objet d'une cession et que, dès lors, l'augmentation de capital litigieuse n'avait pas un objet
illicite.

15. Les moyens ne sont donc pas fondés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

49
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 17 mars 2021, 19-14.525, Publié au
bulletin

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 28 février 2019), par une décision de l'assemblée générale du
26 juin 2012, Mme G... a été nommée présidente de la SAS [...] (la société) pour une durée de
trois ans, les statuts de la société prévoyant que la révocation du président ne pourrait
intervenir que pour un motif grave, par décision collective unanime des associés autres que le
président, et que toute révocation intervenant sans qu'un motif grave ne soit établi ouvrirait
droit à une indemnisation du président.

2. L'assemblée générale du 23 juin 2015 ne s'est pas prononcée sur le renouvellement du


mandat de Mme G..., qui est toutefois restée en fonction. Celle du 22 mars 2016 a décidé « de
ne pas [la] renouveler [...] dans ses fonctions de présidente à compter de ce jour ».

3. Soutenant qu'elle avait fait l'objet d'une révocation fautive et que cette mesure était
intervenue dans des conditions brutales et vexatoires, Mme G... a assigné la société en
paiement de l'indemnité statutaire et de dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Mme G... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes indemnitaires, alors :

« 1°/ que dans le cas où la société par actions simplifiée ne comporte qu'un seul associé, celui-
ci est habile à prendre toute décision aux lieu et place de l'assemblée des associés ; que le
mandat du président d'une société par actions simplifiée détenue par un associé unique peut
ainsi être reconduit, expressément ou tacitement, en accord avec cet associé sans que cette
reconduction ne puisse être rendue inefficace par l'absence de mise en oeuvre des dispositions
statuaires organisant la désignation du président par l'assemblée générale des associés ; qu'en
l'espèce, la cour d'appel a constaté que les titres de la société étaient détenus par un seul
associé, à savoir la SAS [...] ; qu'en jugeant qu'au-delà du 26 juin 2015 Mme G... n'avait pas
été reconduite dans ses fonctions de présidente de droit de la société au motif que les statuts
prévoyaient que le président devait être désigné par l'assemblée générale des associés selon un
formalisme particulier et que le mandat de Mme G... n'avait en l'espèce pas été reconduit
selon ces conditions qui s'imposaient quel que soit le nombre d'associé, ce dont elle a déduit
que Mme G... n'était pas éligible à l'indemnité de rupture prévue par les statuts, la cour d'appel
a violé les articles L. 227-1 et L. 227-20 du code de commerce ;

2°/ que le mandat du président d'une société par actions simplifiée peut être reconduit
expressément ou tacitement avec l'accord de l'associé unique de cette société ; qu'en retenant
qu'un tel mandat ne pouvait faire l'objet d'une reconduction tacite, la cour d'appel a violé les
articles L. 227-1 et L. 227-20 du code de commerce ;

3°/ que la transformation de la société par actions simplifiée en société par actions simplifiée
unipersonnelle s'opère du seul fait de la réunion des parts en une seule main ; qu'en affirmant,

50
pour exclure toute reconduction du mandat de Mme G..., en accord avec l'associé unique de la
société, que la SAS [[...] n'est pas une société par actions simplifiées à associé unique mais
une société par actions simplifiées", alors qu'elle constatait que les actions de la société étaient
détenues par un seul actionnaire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses
propres constatations et violé l'article L. 227-1 du code de commerce ;

4°/ qu'en jugeant qu'à partir du moment où Mme G... n'avait pas été reconduite dans ses
fonctions de présidente de droit dans les conditions prévues par les statuts et avait continué à
exercer ses fonctions en qualité de présidente de fait, elle ne pouvait revendiquer le bénéfice
de l'indemnité que les statuts accordaient au président révoqué de ses fonctions, cependant
qu'elle constatait que l'article 16 des statuts prévoyait sans autre forme de précision que toute
révocation du président intervenant sans qu'aucun motif grave ne soit invoqué ouvrait droit au
versement d'une indemnité à son profit, ce dont il résultait que cette indemnité était due à
Mme G... qui, jusqu'à la date de sa révocation, avait exercé la fonction de présidente de la
société pendant quatre ans et sans discontinuité, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les
conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1103 du code civil dans sa
rédaction applicable à la cause (anciennement l'article 1134 du code civil). »

Réponse de la Cour

5. Lorsque le président d'une société par actions simplifiée a été nommé pour une durée
déterminée, la survenance du terme entraîne, à défaut de renouvellement exprès, la cessation
de plein droit de ce mandat. Le président qui, malgré l'arrivée du terme, continue de diriger la
société ne peut donc pas se prévaloir d'une reconduction tacite de ses fonctions et devient
alors un dirigeant de fait qui, à l'égard de la société, ne peut revendiquer les garanties dont
bénéficie le seul dirigeant de droit.

6. Après avoir relevé que le mandat de présidente de Mme G... n'avait pas été renouvelé à
l'expiration de la durée de trois ans pour laquelle elle avait été nommée le 27 juin 2012, c'est à
bon droit, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par les première et
troisième branches, que la cour d'appel a retenu qu'à compter du 27 juin 2015, Mme G... avait
géré la société en qualité de dirigeante de fait et en a déduit que, n'ayant pas été régulièrement
reconduite dans ses fonctions de présidente, elle ne pouvait revendiquer l'application des
dispositions statutaires relatives à la révocation du président pour prétendre percevoir
l'indemnité prévue en cette circonstance par les statuts.

7. En conséquence, le moyen, pour partie inopérant, n'est pas fondé pour le surplus.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. Mme G... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'indemnisation pour révocation
vexatoire, alors :

« 1°/ que le président révoqué de ses fonctions dans des conditions vexatoires et injurieuses a
droit à l'indemnisation du préjudice qu'il a subi de ce fait ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a
constaté que dans les heures ayant suivi sa révocation, Mme G..., qui était au service de la
société depuis quatorze ans, avait été immédiatement invitée à reprendre l'intégralité de ses
affaires et à quitter les lieux de l'entreprise sous l'escorte d'un tiers, à savoir M. K..., huissier

51
de justice ; qu'en jugeant que la révocation de Mme G... n'était pas intervenue dans des
conditions vexatoires et injurieuses au motif inopérant que la présence de M. K... pouvait se
justifier, sur le principe, par des raisons de sécurité, la cour d'appel a privé sa décision de base
légale au regard de l'article 1382 du code civil (devenu l'article 1240 du même code) ;

2°/ qu'en écartant toute révocation vexatoire et injurieuse de Mme G... au motif qu'il résultait
du procès-verbal établi par M. K... que le départ de cette dernière s'était fait en toute
discrétion et sans témoin, cependant que M. K... n'avait rien constaté de tel et avait constaté
en sens contraire que l'expulsion de Mme G... était intervenue en plein après-midi, la cour
d'appel a dénaturé le procès-verbal de constat de M. K... en date du 22 mars 2016 et violé le
principe selon lequel ne juge ne peut dénaturer les documents qui lui sont soumis ;

3°/ qu'en jugeant que la révocation de Mme G... n'était pas intervenue dans des conditions
vexatoires et injurieuses sans répondre aux conclusions par lesquelles cette dernière faisait
valoir que M. B... lui avait brutalement annoncé sa révocation en plein milieu d'une réunion
ayant lieu en présence de plusieurs collaborateurs de la société, la cour d'appel a violé l'article
455 du code de procédure civile ;

4°/ qu'en s'abstenant de rechercher si la seule circonstance que la révocation de Mme G...
avait été décidée seulement cinq jours après son annonce et que son départ avait été
immédiatement organisé alors qu'elle était au service de la société depuis quatorze ans ne
démontrait pas le caractère brutal et vexatoire de sa révocation, la cour d'appel a privé sa
décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil. »

Réponse de la Cour

9. L'arrêt relève que l'examen du procès-verbal de constat dressé par l'huissier de justice,
relatant les échanges qu'il avait enregistrés à l'issue de l'assemblée générale du 22 mars 2016,
révèle, d'un côté, que c'est par crainte d'une disparition de documents que le directeur
juridique a proposé à Mme G... de récupérer ses affaires personnelles en présence de cet
huissier de justice, de l'autre, que Mme G... est allée les récupérer sans incident et que
l'arrivée et son départ de la société se sont effectués en toute discrétion et sans témoin. En
l'état de ces constatations et appréciations, dont elle a déduit que Mme G... ne rapportait pas la
preuve qu'il avait été mis fin à ses fonctions dans des conditions vexatoires, la cour d'appel,
qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a, sans
dénaturation du procès-verbal de constat précité, légalement justifié sa décision.

10. En conséquence, le moyen, inopérant en sa quatrième branche, en ce qu'il critique des


motifs qui ne sont pas le soutien du chef de dispositif qui a rejeté la demande d'indemnisation
pour révocation vexatoire, n'est pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

52
Cass. com., 09-03-2022, n° 19-25.795, F-B, Rejet

Les conditions dans lesquelles les dirigeants d'une société par actions simplifiée peuvent être révoqués de leurs
fonctions sont, dans le silence de la loi, librement fixées par les statuts, qu'il s'agisse des causes de la révocation ou
de ses modalités ; Par conséquent, le directeur général d'une société par actions simplifiée peut être révoqué sans
qu'il soit nécessaire de justifier d'un juste motif, dès lors que les statuts ne subordonnent pas la révocation du
dirigeant à une telle condition.
Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 17 septembre 2019), rendu sur renvoi après cassation (chambre
commerciale, financière et économique, 27 juin 2018, pourvoi n°16-10.018), M. [Ab] a été
révoqué en mai 2012 de ses fonctions de directeur général de la SAS Hubbard holding, de
directeur général de la SAS Hubbard et de gérant de la SARL Avicompost.

2. Faisant valoir que ces révocations étaient intervenues sans juste motif et dans des conditions
brutales et vexatoires, il a assigné ces sociétés en paiement de dommages-intérêts. Celles-ci,
agissant reconventionnellement, et la SA Groupe [S] La Corbière, leur société mère, intervenant
volontairement à l'instance, ont recherché la responsabilité deAbM. [N].

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches, les deuxième et
troisième moyens du pourvoi principal, et sur le moyen du pourvoi incident, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer
par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à
entraîner la cassation.

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. [Ab] fait grief à l'arrêt de juger que les modalités de révocation de son mandat de directeur
général de la SAS Hubbard n'étaient pas fautives et n'engageaient pas sa responsabilité, et que sa
révocation était donc régulière et n'était pas intervenue dans des conditions brutales et vexatoires,
et de le débouter, en conséquence, de l'ensemble de ses demandes contre la société Hubbard,
alors « que les modalités de révocation d'un dirigeant d'une société par actions simplifiée sont en
principe fixées librement par les statuts ; qu'en l'absence de mention statutaire dispensant la
société de justifier d'un motif pour procéder à la révocation du dirigeant, la révocation ne peut
intervenir que pour un juste motif ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'article 18 des
statuts de la SAS Hubbard stipulait que "les dirigeants sont révocables à tout moment par
l'associé unique ou, en cas de pluralité d'associés, par l'assemblée générale ordinaire des associés
sur proposition du président" ; qu'en estimant que la révocation de M. [Ab] de la SAS Hubbard
pouvait intervenir sans motif, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction
antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles L. 227-1, L. 227-5 et L. 227-6
du code de commerce. »

Réponse de la Cour

5. Après avoir exactement énoncé que les conditions dans lesquelles les dirigeants d'une société
par actions simplifiée peuvent être révoqués de leurs fonctions sont, dans le silence de la loi,

53
librement fixées par les statuts, qu'il s'agisse des causes de la révocation ou de ses modalités,
l'arrêt constate que l'article 18 des statuts de la société Hubbard stipule que les autres dirigeants
que le président « sont révocables à tout moment par l'associé unique ou, en cas de pluralité
d'associés, par l'assemblée générale ordinaire des associés sur proposition du président » et retient
que, sauf à ajouter à l'article 18 précité, celui-ci ne conditionne nullement la révocation du
dirigeant à l'existence de justes motifs.

6. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, c'est à bon droit que l'arrêt décide
que la révocation de M. [Ab] en tant que directeur général de la société Hubbard pouvait
intervenir sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un juste motif.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

54
Faculté de droit et de science politique d'Aix-Marseille

TRAVAUX DIRIGES DROIT SPECIAL DES SOCIETES

Master 1 Droit des affaires


Aix-en-Provence - Année universitaire 2021-2022

SEANCE 3 - LA SOCIETE ANONYME

Dirigeants et administrateurs

- Cass . com., 7 juin 2011, n°10-17732, Publié au Bulletin

La Cour,
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les sociétés Tradition Securities And Futures et Tradition
Securities And Futures-OTC (les deux sociétés) ont fait assigner M. Belkacemi aux fins de
rétractation d'une ordonnance du 30 décembre 2008, rendue sur la requête de M. Belkacemi,
ayant désigné un huissier de justice pour assister aux assemblées générales des deux sociétés du 5
janvier 2009 et ont sollicité sa condamnation à leur payer diverses sommes à titre de dommages-
intérêts ; que par ordonnance du 7 avril 2009, le président du tribunal de commerce a maintenu sa
précédente décision ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 225-25 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de
la loi du 4 août 2008 ;
Attendu que pour dire que M. Belkacemi avait intérêt et qualité pour présenter sa requête,
confirmer en conséquence l'ordonnance du 7 avril 2009 et débouter les deux sociétés de
l'ensemble de leurs demandes, l'arrêt relève qu'il résulte d'un constat d'huissier du 22 décembre
2008 que M. Belkacemi n'était propriétaire d'aucune action des deux sociétés et retient que,
désigné le 27 février 2007 en qualité d'administrateur, il n'a jamais été mis en demeure de
régulariser sa situation, que les deux sociétés l'ont laissé poursuivre ses activités en leur sein sans
aucune observation de ce chef et qu'à aucun moment, il n'a été constaté sa démission d'office et
le remplacement de l'intéressé en qualité d'administrateur ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait qu'au moment de sa désignation en qualité
d'administrateur le 27 février 2007, M. Belkacemi ne détenait aucune action des deux sociétés, en
contrariété avec leurs statuts, et qu'il n'avait pas régularisé cette situation par la suite, de sorte qu'il
devait être réputé démissionnaire d'office à compter du 27 mai 2007, la cour d'appel, qui n'a pas
tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 2 du code civil, ensemble l'article L. 225-25 du code de commerce dans sa rédaction
antérieure à la loi du 4 août 2008 ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore que le délai de six mois, prévu par
l'article 57 de la loi du 4 août 2008 modifiant l'article L. 225-25 du code de commerce, n'a pu
commencer à courir qu'à compter de l'entrée en vigueur de la loi et qu'au jour où l'ordonnance a
été prononcée, le délai pour régulariser n'était pas expiré ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence d'une volonté contraire expressément affirmée
par le législateur, la loi qui a modifié le délai de régularisation prévu à l'article L. 225-25 du code
de commerce, n'a pas eu d'effet sur une démission d'office acquise antérieurement à son entrée
en vigueur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :

55
Vu l'article L. 225-47 du code de commerce ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient enfin que M. Belkacemi avait la qualité de
président des conseils d'administration des deux sociétés au 30 décembre 2008 dès lors qu'il
n'avait pas été régulièrement révoqué de ces fonctions ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait qu'au moment de sa désignation en qualité
d'administrateur, le 27 février 2007, il ne détenait aucune action des deux sociétés et qu'il n'avait
pas régularisé cette situation, de sorte qu'il devait être réputé démissionnaire d'office à compter
du 27 mai 2007 et que n'ayant plus la qualité d'administrateur à compter de cette date, il n'avait
plus celle de président du conseil d'administration de chacune des deux sociétés, la cour d'appel a
violé le texte susvisé ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief:
Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 mars 2010, entre les parties, par la
cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris,
autrement composée ;

- Cass. com., 12 juillet 2011, n°10-16118, Publié au bulletin

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Odalys résidences que sur le pourvoi
incident relevé par la SCP A..., agissant en la personne de M. X..., en qualité d’administrateur
judiciaire de la société Mona Lisa Holding :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 février 2010) rendu sur renvoi après cassation
(première chambre civile, 17 décembre 2008, pourvoi n° S 07-19. 915), que la société Odalys SA,
aux droits de laquelle se trouve la société Odalys Sas (la société Odalys), a acquis, le 2 novembre
1999, la totalité des parts que la société BGF, aux droits de laquelle se trouve la société Mona Lisa
Holding (la société Mona Lisa), détenait dans le capital de la société Geci Vacances, une garantie
de passif étant prévue par acte séparé ; que la société Odalys ayant mis en oeuvre la garantie de
passif, à la suite d’un redressement fiscal, et la société Mona Lisa ayant prétendu à la nullité pour
dol des conventions, un tribunal arbitral a été constitué ; que l’arrêt du 12 juin 2007 réformant la
sentence arbitrale a été cassé faute d’avoir fait référence à l’équité ou la mission d’amiable
compositeur qui avait été confiée à la cour d’appel ; que par jugement du 16 juin 2009, la société
Mona Lisa a été mise en redressement judiciaire M. Y... étant nommé administrateur avec une
mission d’assistance et la SCP A... représentant des créanciers ; que devant la cour d’appel de
renvoi, ces derniers ont notamment sollicité la nullité des conventions ; qu’ultérieurement, la
société Mona Lisa a été mise en liquidation judiciaire, la SCP A..., prise en la personne de M. X...,
étant désignée en qualité de liquidateur judiciaire de la société Mona Lisa (la liquidateur) ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que le liquidateur fait grief à l’arrêt d’avoir dit qu’au titre de la garantie de passif de la
société GECI Vacances, il était dû par la société Mona Lisa, cédante, à la société Odalys,
cessionnaire, une somme équivalente au solde du prix restant à payer, soit 157 263, 51 euros,
alors, selon le moyen, que les cautions, avals et garantie donnés par des sociétés autres que celles
exploitant des établissements bancaires ou financiers font l’objet d’une autorisation du conseil
d’administration dans les conditions déterminées par décret en Conseil d’Etat ; qu’en estimant
que la société Mona Lisa, venant aux droits de la société BGF, ne pouvait invoquer ce texte en sa
qualité de souscripteur d’une garantie de passif dans la mesure où cette garantie ne correspond en
aucune façon à un cautionnement donné pour garantir un tiers, puisque la garantie est donnée au
cocontractant et non au tiers, quand une garantie de passif constitue un engagement financier pris
en faveur d’un tiers à la société garante, peu important que ce tiers soit par ailleurs un
cocontractant, et que cet engagement représente un risque financier très important justifiant une

56
autorisation préalable du conseil d’administration, la cour d’appel a violé par refus d’application
l’article L. 225-35 du code de commerce ;
Mais attendu que s’agissant d’une garantie relative non à des engagements pris par des tiers mais
d’une garantie afférente à ses propres engagements, l’autorisation du conseil d’administration
prévue par l’article L. 225-35 du code de commerce n’est pas requise de la société ; que la cour
d’appel, qui a relevé que la garantie de passif visait à protéger la société cessionnaire contre toute
mauvaise surprise en cas de découverte d’un passif social préexistant mais non comptabilisé, en a
exactement déduit que cette garantie donnée par la société Mona Lisa au titre de son propre
engagement de cession n’entre pas dans le champ d’application de ce texte ; que le moyen n’est
pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE les pourvois principal et incident ;

- Cass. com., 10 novembre 2009, n°08-70302 (n° 1043 FS-PB) Bernard c/ Sté Carrefour

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 7 octobre 2008), que M. X... a, le 3 février 2005, démissionné
de ses fonctions de président du conseil d’administration de la société Carrefour, qu’il exerçait
depuis le mois d’octobre 1992 ; que, faisant valoir que le conseil d’administration de cette société
avait souscrit à son égard, le 29 août 2001, un engagement particulier de retraite additionnelle qui
avait été réitéré le 3 février 2005 et que cet engagement avait pris effet le 18 février 2006, date à
laquelle il avait atteint l’âge de 60 ans, M. X... a fait assigner la société Carrefour en paiement de
sommes correspondant aux deux premières annuités de retraite ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté cette demande, alors, selon le moyen, qu’il
résulte des constatations de l’arrêt attaqué que, par sa délibération du 29 août 2001, le conseil
d’administration de la société Carrefour avait décidé l’attribution à M. X... d’une retraite d’un
montant égal à 40 % de la rémunération globale “Groupe” qu’il percevrait au cours de la dernière
année de référence ; qu’il avait précisé que ce montant était indépendant des pensions acquises au
titre des régimes légaux et conventionnels ; qu’il avait ajouté que les versements au titre de la
retraite commenceraient lorsque M. X... atteindrait l’âge de 60 ans, peu important qu’il soit ou
non président de la société Carrefour à ce moment ; que le complément de retraite alloué à M.
X... avait ainsi fait l’objet d’une décision du conseil d’administration à la fois sur son montant
rendu parfaitement déterminable par la référence, dans la délibération, à la rémunération globale
qui serait perçue par l’intéressé au titre de la dernière année de référence et par la non prise en
compte expresse des pensions légales et conventionnelles et sur ses modalités (point de départ
des versements, indifférence au maintien du mandat de président de M. X... jusqu’à ses 60 ans) ;
que le procès-verbal des délibérations mentionnait l’approbation expresse des termes du
document annexé, qui comportait l’ensemble de ces précisions ; qu’en estimant néanmoins que la
délibération du 29 août 2001 ne satisfaisait pas aux exigences légales, la cour d’appel a violé
l’article L. 225-47 du code de commerce ;
Mais attendu qu’ayant relevé que le montant de la rémunération accordée à M. X... sous forme de
complément de retraite n’avait pu être connu qu’après la liquidation de son assiette constituée par
le salaire brut fiscal perçu par celui-ci au cours des douze mois précédant sa cessation d’activité,
que cette liquidation avait été faite le 3 février 2005 et qu’ainsi ce n’était qu’à cette date que le
conseil d’administration avait fixé le montant du complément de retraite litigieux, la cour d’appel
en a exactement déduit que les délibérations antérieures, y compris celle du 29 août 2001, ne
satisfaisaient pas aux exigences légales ; que le moyen n’est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait encore le même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ qu’il incombe au demandeur à l’exception de nullité d’une délibération du conseil
d’administration prise en application de l’article L. 225-47 du code de commerce de faire la
preuve que les conditions de l’octroi d’une retraite complémentaire ne sont pas réunies ; qu’en

57
retenant qu’il n’est pas démontré par M. X... que les services dont il se prévaut, accomplis dans
l’exercice de son mandat de président du conseil d’administration de Carrefour, justifient
l’allocation d’une rémunération s’ajoutant à celle qu’il a perçue au cours de la période considérée
au titre de son mandat, la cour d’appel a inversé la charge de la preuve et, partant, violé l’article
1315 du code civil ;
2°/ que l’octroi d’un complément de retraite entre dans les prévisions de l’article L. 225-47 du
code de commerce lorsqu’il a pour contrepartie des services particuliers rendus à la société par le
président du conseil d’administration, pour autant que l’avantage accordé soit proportionné à ces
services et ne constitue pas une charge excessive pour la société ; qu’en revanche la confiance des
actionnaires ou l’évolution des résultats de la société ne constituent pas, en eux-mêmes, des
éléments pertinents ; qu’en se bornant à relever qu’au début de l’année 2005, M. X... avait perdu
la confiance des actionnaires de référence de la société Carrefour, que l’évolution de la situation
du groupe au cours de la période 2000-2004 avait été marquée par un ensemble de facteurs
défavorables et que la presse spécialisée était réservée dans l’appréciation du titre Carrefour, la
cour d’appel a énoncé des motifs impropres à justifier la solution retenue et de ce fait, a privé son
arrêt de base légale au regard de l’article L. 225-47 du code de commerce ;
3°/ que l’octroi d’un complément de retraite entre dans les prévisions de l’article L. 225-47 du
code de commerce lorsqu’il a pour contrepartie des services particuliers rendus à la société par le
président du conseil d’administration, pour autant que l’avantage accordé soit proportionné à ces
services et ne constitue pas une charge excessive pour la société ; que la proportionnalité s’entend
d’un rapport suffisant entre les services particuliers rendus et l’avantage consenti ; qu’en se
bornant à relever le caractère “insolite”, du point de vue de la fiscalité et des charges sociales, des
modalités du complément de retraite alloué à M. X..., sans comparer le montant de l’avantage
accordé et la qualité des services particuliers rendus par le président de la société Carrefour, la
cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard de l’article L. 225-47 du code de
commerce ;
Mais attendu qu’ayant retenu, sans inverser la charge de la preuve, que si le bilan de l’action de M.
X... de 1992 à 2005 était positif, il n’était pas pour autant établi que les services dont il se
prévalait, qui avaient été rendus par lui dans l’exercice de ses fonctions de président du conseil
d’administration de la société Carrefour, justifiaient l’allocation d’une rémunération venant
s’ajouter à celle qu’il avait perçue au titre de ces fonctions, la cour d’appel a, par ces seuls motifs
et abstraction faite de ceux, surabondants, que critiquent les deuxième et troisième branches,
légalement justifié sa décision ; que le moyen, non fondé en sa première branche, ne peut pour le
surplus être accueilli ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 8 février 2011, n°10-11896, Publié au Bulletin

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :


Vu l'article L. 225-42 du code de commerce ;
Attendu que l'action en nullité d'une convention visée à l'article L. 225-38 du même code et
conclue sans autorisation du conseil d'administration se prescrit par trois ans à compter de la date
de la convention ; que, toutefois, si elle a été dissimulée, le point de départ du délai de la
prescription est reporté au jour où elle a été révélée ; que s'il y a eu volonté de dissimulation, la
révélation de la convention s'apprécie à l'égard de la personne qui exerce l'action ; que les
conséquences ainsi tirées du texte susvisé, qui s'écartent de celles retenues depuis un arrêt du 24
février 1976, sont conformes à l'exigence de sécurité juridique au regard de l'évolution du droit
des sociétés ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière
et économique, 20 février 2007, pourvoi n° 04-16.438), que le 2 octobre 1998, M. X... a cédé à M.
Y..., qui s'est substitué la société Safival, la totalité des actions représentant le capital de la société

58
anonyme X... ainsi qu'une partie de celles représentant le capital de la société anonyme Docks du
bâtiment ; qu'en 1990, la société X..., dont M. X... était le représentant légal, avait souscrit auprès
de la caisse mutuelle d'assurance sur la vie, au bénéfice de l'ensemble des collaborateurs des deux
sociétés, des contrats d'assurance permettant le versement d'une indemnité de fin de carrière ; que
lors de son départ en retraite, le 9 octobre 1998, M. X... a perçu des sociétés X... et Docks du
bâtiment les indemnités découlant de ces conventions ; que la société PB et M Ile-de-France
Nord (PB et M), venant aux droits des sociétés X... et Docks du bâtiment, faisant valoir que les
contrats d'assurance "indemnités de fin de carrière", auxquels M. X... était intéressé, étaient nuls à
l'égard de ce dernier pour avoir été conclus sans autorisation du conseil d'administration, ont
demandé sa condamnation au remboursement des sommes reçues à ce titre ; que M. X... leur a
opposé la fin de non-recevoir tirée de la prescription triennale ;
Attendu que pour déclarer recevable l'action de la société X..., et accueillir sa demande, l'arrêt,
après avoir relevé que les attestations versées aux débats démontrent que les membres des
conseils d'administration étaient informés de l'existence des conventions conclues en 1990 mais
que cette connaissance, ne valant pas autorisation préalable, ne pouvait suppléer la décision du
conseil d'administration, retient que l'approbation par les assemblées générales des sociétés X... et
Docks du bâtiment des comptes des exercices au cours desquels les cotisations étaient prélevées
en exécution de ces conventions ne suffit pas à démontrer que celles-ci avaient été révélées ; qu'il
ajoute que la révélation pour les sociétés concernées s'est faite en réalité le 9 décembre 1998, date
de paiement des indemnités de fin de carrière ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, sans rechercher si les conventions litigieuses
avaient été dissimulées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE

- Cass. com., 9 mars 2010, n° 08-21.547 et 08-21.793, P+B, SA EPF Partners c/ A. ; JCP E
2010, 1483, note S. Schiller

LA COUR (...) :
• Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société anonyme Gaudriot (la société), qui fournissait aux
collectivités locales et aux industriels des prestations de service portant sur l'analyse et la maîtrise
de leurs investissements dans le domaine de l'environnement et de l'aménagement du territoire, a
été admise au nouveau marché de la bourse de Paris le 12 mai 2000 ; qu'il a été procédé, par la
suite, à trois nouvelles augmentations de capital par offre de titres au public la dernière en juillet
2002 ; qu'à partir de l'exercice 2000, la société est passée d'une méthode dite de comptabilisation «
à l'achèvement » à celle de la comptabilisation « à l'avancement » du chiffre d'affaires au titre de
ses contrats à long terme ; que le 30 avril 2004, la société a suspendu la cotation de son action
dans l'attente de la publication de ses comptes à la suite d'un audit effectué en décembre 2003,
qui avait conclu à la nécessité d'une évaluation du poste « produits non encore facturés » ; que
selon le rapport d'audit, ce poste devait être évalué entre quatre et huit millions d'euros au lieu des
quarante sept millions d'euros publiés au titre de l'exercice 2002 ; que la société a été mise en
redressement judiciaire sur déclaration de l'état de cessation des paiements par jugement du 2
juillet 2004 ; qu'après l'adoption d'un plan de cession des actifs de la société, l'action Gaudriot a
été radiée de la cote par Euronext le 14 avril 2005 ; que, le 3 mars 2006, M. A. et d'autres
actionnaires de la société, faisant valoir qu'ils avaient été incités à investir dans le titre Gaudriot et
à conserver leurs actions en raison de fausses informations diffusées par les dirigeants, d'une
rétention d'informations et d'une présentation aux actionnaires de comptes inexacts, ont assigné
M. G., ancien président du conseil d'administration de la société, ainsi que la société EPF
Partners, MM. Gi. et F., anciens membres du conseil d'administration ; que ces actionnaires et
d'autres qui sont intervenus à l'instance aux mêmes fins (les consorts A.) ont demandé paiement
d'une certaine somme à titre de dommages-intérêts, à répartir entre les cent soixante demandeurs,

59
selon le montant de leurs pertes respectives ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° M 08-21.547, qui est recevable, et le premier moyen du
pourvoi n° D 08-21.793, qui est recevable, réunis :
• Attendu que la société EPF Partners et MM. Gi., G. et F. font grief à l'arrêt d'avoir déclaré
recevables les demandes des actionnaires de la société, alors, selon le moyen (...) :
• Mais attendu, en premier lieu, que la recevabilité de l'action exercée par un associé à l'encontre
des dirigeants d'une société faisant l'objet d'une procédure collective, pour des faits antérieurs au
jugement d'ouverture, est subordonnée à l'allégation d'un préjudice personnel, distinct de celui
subi par la personne morale, peu important que la procédure collective fasse apparaître une
insuffisance d'actif ;
• Et attendu, en second lieu, qu'ayant constaté que les actionnaires de la société soutenaient qu'ils
avaient été incités à investir dans les titres émis par celle-ci et à les conserver en raison de fausses
informations diffusées par les dirigeants, d'une rétention d'information et d'une présentation aux
actionnaires de comptes inexacts, la cour d'appel en a exactement déduit que le préjudice ainsi
invoqué revêtait un caractère personnel ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi n° M 08-21.547 et le deuxième moyen du pourvoi n° D 08-
21.793, réunis :
• Attendu que la société EPF Partners et MM. Gi., G. et F. font le même grief à l'arrêt, alors,
selon le moyen (...) :
• Mais attendu qu'après avoir relevé que c'est avec la publication au BALO du 3 décembre 2004
des comptes 2003 portant annulation de produits non encore facturés au 31 décembre 2003 à
hauteur de 45 056 000 euros que les actionnaires ont, de fait, été avertis de la situation exacte de
la société et ont pu constater que tant les comptes que les communiqués portés jusqu'alors à leur
connaissance par les dirigeants de la société ne donnaient pas une image fidèle de sa situation,
l'arrêt retient que le fait dommageable n'est pas constitué par la difficulté liée à l'absence d'outils
de gestion fiables au sein de la société mais par les agissements de ses dirigeants qui, en ce qu'ils
ont incité les actionnaires à acquérir ou à conserver les titres de la société, sont à l'origine du
préjudice par eux allégué ; que l'arrêt ajoute que la carence de la société à mettre en place les outils
de gestion fiables nécessités par l'adoption de la méthode de comptabilisation à l'avancement, est
à rapprocher des communiqués très optimistes qui présentaient la société sous un jour
particulièrement favorable, en omettant de rappeler les réserves émises par les commissaires aux
comptes mais aussi, en faisant état pour certains d'entre eux, de comptes consolidés pro forma
sans préciser que les évolutions d'une année sur l'autre n'étaient pas à périmètre constant ; que
l'arrêt relève encore que ces informations ne faisaient que corroborer les résultats
particulièrement favorables publiés jusqu'en 2002 et donner l'image d'une entreprise florissante
alors que les dirigeants n'ignoraient pas leur incapacité à gérer efficacement les informations,
s'agissant des produits non encore facturés ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations,
desquelles il résulte que le dommage invoqué a pour origine la dissimulation par les dirigeants de
la société, au moyen de la diffusion d'une information trompeuse, de la situation financière de
cette dernière et que le caractère trompeur de cette information leur a été révélé moins de trois
ans avant l'introduction de l'instance, la cour d'appel, qui n'a pas modifié les termes du litige, a
légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen du pourvoi n° M 08-21.547, pris en sa première branche :
• Attendu que la société EPF Partners fait grief à l'arrêt d'avoir dit qu'elle avait engagé sa
responsabilité à l'égard des actionnaires de la société et de l'avoir condamnée au paiement de
dommages-intérêts, alors, selon le moyen, qu'elle avait démissionné de son mandat
d'administrateur par lettre du 20 septembre 2002 avec effet au 23 septembre 2002 ; qu'il résulte
des constatations de l'arrêt attaqué que les administrateurs ont été avisés des difficultés liées à
l'absence d'outils fiables de gestion par les rapports des commissaires aux comptes établis les 10
juin 2002 et 6 juin 2003 ; que l'information financière jugée trompeuse figure dans des

60
communiqués publiés, selon l'arrêt attaqué, les 15 avril 2002, 23 octobre 2002, 14 février 2003, 11
avril 2003, 27 octobre 2003, 29 décembre 2003 ; que les faits reprochés aux administrateurs, qui
ont été appréciés globalement par la cour d'appel, étaient ainsi, pour l'essentiel, postérieurs à la
démission de son mandat d'administrateur donnée par la société EPF Partners ; qu'en omettant
néanmoins de s'expliquer spécialement sur l'imputabilité à la société EPF Partners de la carence et
de la rétention d'informations financières défavorables qu'elle retenait à la charge des
administrateurs de la société Gaudriot, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision
au regard de l'article L. 225-252 du code de commerce ;
• Mais attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que l'absence de sincérité des
comptes, liée à l'adoption d'une méthode inadaptée dès le départ à la nature de l'activité de la
société et étendue aux nombreuses entreprises rachetées chaque année, ne pouvait échapper au
principal dirigeant, ni aux administrateurs avertis (MM. Gi., F. et la société EPF Partners), dont
l'attention avait été attirée par les commissaires aux comptes sur le problème essentiel de la
valorisation des encours ; qu'il relève que, conscients de l'absence de fiabilité des comptes
présentés, M. G. et les administrateurs de la société ont délibérément retenu les informations qui
auraient été susceptibles de remettre en cause l'image de la société telle qu'elle se présentait au
regard des comptes communiqués ; qu'il ajoute que s'il est vrai que M. G. est seul à l'origine des
communiqués de presse tronqués, les administrateurs, qui doivent débattre de toutes difficultés
portées à leur connaissance, ce qui était le cas des réserves des commissaires aux comptes, ne
sauraient arguer de ce qu'ils n'avaient pas connaissance du caractère trompeur tant des comptes
que de ces communiqués ; que la cour d'appel a ainsi procédé à la recherche prétendument omise
; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen du pourvoi n° M 08-21.547, pris en sa seconde branche, et le troisième
moyen du pourvoi n° D 08-21.793, réunis :
• Attendu que la société EPF Partners et MM. Gi., G. et F. font encore grief à l'arrêt d'avoir
déclaré fondées les demandes des actionnaires de la société, alors, selon le moyen :
• Mais attendu que la mise en oeuvre de la responsabilité des administrateurs et du directeur
général à l'égard des actionnaires agissant en réparation du préjudice qu'ils ont personnellement
subi n'est pas soumise à la condition que les fautes imputées à ces dirigeants soient
intentionnelles, d'une particulière gravité et incompatibles avec l'exercice normal des fonctions
sociales ; que le moyen, qui fait grief à la cour d'appel de ne pas avoir caractérisé de telles fautes,
est inopérant ;
Mais sur la deuxième branche du quatrième moyen du pourvoi n° M 08-21.547 et la troisième
branche du quatrième moyen du pourvoi n° D 08-21.793, réunis :
Vu l'article L. 225-252 du code de commerce ;
• Attendu que celui qui acquiert ou conserve des titres émis par voie d'offre au public au vu
d'informations inexactes, imprécises ou trompeuses sur la situation de la société émettrice perd
seulement une chance d'investir ses capitaux dans un autre placement ou de renoncer à celui déjà
réalisé ;
• Attendu que l'arrêt retient que le préjudice des actionnaires de la société ne s'analyse pas en la
perte d'une chance d'investir ailleurs leurs économies dès lors qu'il est, en réalité, au minimum de
l'investissement réalisé ensuite des informations tronquées portées à leur connaissance ;
• Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs (...) : – Casse et annule, sauf en qu'il a déclaré M. A. et autres recevables en leurs
demandes et mis hors de cause Mmes Anne et Cécile G., l'arrêt rendu le 6 octobre 2008, entre les
parties, par la cour d'appel de Limoges ; (...) les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers (...).
Mme Favre, prés., MM. Le Dauphin, rapp., Lacan, av. gén. ; SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez,
SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan, av.
V. également Etude D. Martin, La réparation du préjudice des investisseurs en cas de fausse information, JCP E
2010, 1777.

61
- Substitution de cautionnement non autorisée par le conseil d'administration. - Cass.
com. 15 janvier 2013 n° 11-27.648 (n° 36 F-PB), Sté coopérative agricole Agy c/ Sté Bati
Lease. Une société anonyme (SA) avait acquis d'un associé une participation dans une autre
société dont les engagements financiers à l'égard d'un crédit-bailleur étaient garantis par un
cautionnement de cet associé. La SA s'était engagée dans l'acte de cession à se substituer au
cédant dans le cautionnement mais cet engagement de substitution n'avait pas été autorisé par
son conseil d'administration. A la suite de la défaillance de la société garantie, le crédit-bailleur
avait agi en responsabilité délictuelle contre la SA, lui reprochant d'avoir commis une faute en
n'exécutant pas son engagement.
Une cour d'appel avait condamné la SA à indemniser le crédit-bailleur en développant
l'argumentation suivante : l'engagement de substitution, qui constituait un engagement autonome
de garantie soumis à l'autorisation préalable du conseil d'administration de la SA, s'analysait en
une obligation de faire de la part de celle-ci (l'obligation de se porter caution) ; le défaut
d'exécution de cette obligation engageait la responsabilité contractuelle de la SA envers le cédant
et, le cas échéant, sa responsabilité délictuelle envers le crédit-bailleur, tiers à la cession.
Décision censurée par la Cour de cassation : la cour d'appel ayant constaté que l'engagement
de substitution litigieux nécessitait l'autorisation préalable du conseil d'administration, cet
engagement était, en l'absence d'une telle autorisation, inopposable à la SA et ne pouvait faire
peser sur elle aucune obligation.

Note : L'arrêt d'appel qui vient d'être censuré, rendu sur renvoi après cassation (Cass. com. 1-12-
2009 n° 08-18.896 : RJDA 3/10 n° 259), énonçait exactement que l'engagement de substitution
litigieux constitue une garantie devant faire l'objet d'une autorisation préalable ; mais
contrairement à la Cour suprême, qui déduit du défaut d'autorisation l'inopposabilité de la
garantie à la société (Cass. com. 24-6-2003 n° 1052 : RJDA 11/03 n° 1083), il estimait que ce
défaut d'autorisation était générateur de responsabilité envers la société qui avait souscrit
l'engagement. Or, l'inopposabilité d'une convention a les mêmes effets que la nullité à l'égard de
la partie qui peut s'en prévaloir : elle l'anéantit rétroactivement et ne peut donc faire naître aucune
obligation à la charge de cette partie.
En l'espèce, le crédit-bailleur pouvait demander à l'associé cédant d'exécuter le cautionnement,
dont celui-ci n'avait pas été déchargé par l'effet de la cession (il n'en aurait été autrement que si la
SA avait consenti à libérer le cédant à l'égard du crédit-bailleur). Mais cette action était vaine en
raison de l'insolvabilité du cédant.

- Nullité d'une convention réglementée irrégulière. - Cass. com. 15 janvier 2013 n° 11-
28.244 (n° 29 F-PB), Etienne c/ Sté nouvelle clinique Sainte-Marie. Un médecin,
administrateur d'une société anonyme exploitant une clinique, avait demandé à la société le
versement de l'indemnité de résiliation prévue par le contrat d'exercice professionnel qu'il avait
conclu avec elle depuis plus de trois ans. La société avait opposé à cette demande la nullité du
contrat faute pour celui-ci d'avoir été autorisé par le conseil d'administration.
Une cour d'appel avait donné raison à la société : certes, l'action en nullité de la
convention, qui se prescrit par trois ans à compter de sa conclusion (C. com. art. L 225-
42, al. 2), était éteinte, mais la société pouvait toujours soulever la nullité par voie
d'exception, laquelle est perpétuelle.
La Cour de cassation a censuré néanmoins cette décision au motif que la cour d'appel ne pouvait
pas valablement statuer ainsi sans relever que le contrat n'avait pas été exécuté, même
partiellement.

Note : 1° Confirmation de jurisprudence. L'exception de nullité d'un contrat irrégulier ne peut


pas être soulevée pour faire échec à une demande d'exécution du contrat si celui-ci a reçu un
commencement d'exécution. Comme le rappelle la chambre commerciale de la Cour de cassation,

62
cette solution vaut pour les contrats à exécution successive partiellement exécutés, tel un contrat
d'exercice en commun d'une profession libérale (Cass. com. 3-4-2007 n° 06-10.834 : RJDA 7/07
n° 733). Les autres chambres de la Cour ont rendu des décisions dans le même sens (Cass. 3e civ.
14-5-2003 n° 593 : RJDA 8-9/03 n° 816 en matière de bail ; Cass. 1e civ. 17-6-2010 n° 09-
14.470 : BRDA 12/10 inf. 1 en matière de contrat de prestation de services).
2° Rappelons qu'une convention réglementée non autorisée par le conseil d'administration ne
peut être annulée que si elle a eu des conséquences dommageables pour la société (C.com. art. L
225-42, al. 1) ; pour un exemple, voir Cass. soc. 12-6-2012 n° 11-10.135 : BRDA 14/12 inf. 5.

- Opposabilité à une SA d'une délégation de paiement consentie par son dirigeant. -


Cass. com. 15 janvier 2013 n° 11-28.173 (n° 28 F-PB), Banque Safra c/ Lakah. Les cautions,
avals et garanties donnés par une société anonyme (SA) doivent, on le sait, être autorisés par le
conseil d'administration (C. com. art. L 225-35, al. 4). Il résulte de ce texte que seuls les
engagements souscrits par la société en garantie des obligations pesant sur un tiers doivent faire
l'objet d'une telle autorisation (notamment Cass. com. 4-5-1999 n° 889 :RJDA 7/99 n° 794).
Après avoir rappelé ce principe, la Cour de cassation vient d'en faire application à une délégation
de paiement dans l'affaire suivante.
Un contrat d'affrètement conclu entre deux compagnies aériennes et un voyagiste prévoyait que
l'intégralité des prestations dues par celui-ci au titre du contrat devait être réglée à l'une des
compagnies, une SA, qui devait rétrocéder à l'autre compagnie (A) la part lui revenant. La SA
avait donné en nantissement à une banque un compte de dépôt en garantie du remboursement
d'une ouverture de crédit que celle-ci avait consentie à la compagnie A afin de faire face aux
obligations résultant du contrat d'affrètement. Par une convention de délégation de créance, la
SA, débitrice de la compagnie A, s'était aussi engagée à payer à la banque les sommes dues au titre
de cette ouverture.
La compagnie A avait ensuite été placée en liquidation judiciaire et la banque, qui n'avait pas été
remboursée, avait réalisé le nantissement. La SA avait alors demandé la restitution des fonds en
faisant valoir que son conseil d'administration n'avait autorisé ni le nantissement ni la convention
de délégation.

Note : Précision inédite.


Il est courant qu'une entreprise empruntant des fonds à une banque demande à l'un de ses
propres débiteurs de payer directement à la banque les sommes dues au titre du prêt. Cette
délégation, par laquelle le débiteur « délégué » s'oblige envers la banque (le délégataire), est dite
imparfaite, c'est-à-dire qu'elle n'emporte pas novation par changement de débiteur ni substitution
de l'obligation nouvelle du délégué à l'obligation d'origine du délégant, dès lors que, comme en
l'espèce, le délégataire ne décharge pas expressément le délégant de son obligation (C. civ. art.
1275).
La délégation imparfaite produit le même effet qu'une garantie pour le délégataire puisqu'elle crée
à son égard un engagement nouveau (celui du délégué) qui s'ajoute à celui du débiteur initial, de
sorte que le délégataire peut se retourner contre deux personnes au lieu d'une. Mais cette analyse
ne vaut pas pour le délégué qui, en payant le délégataire, se libère de sa dette envers le délégant.
Le mécanisme n'a pas pour objet, en ce qui le concerne, de garantir l'engagement du délégant. Il
n'en irait autrement que si le paiement auquel il consentait excédait le montant de sa propre dette.
D'où la censure prononcée par la Cour de cassation dans l'arrêt ci-dessus.

63
- Prescription de l'action en nullité d'une convention réglementée. - Cass. com. 3 avril
2013 n° 12-15.492 (n° 339 F-PB), Sté Procars c/ Sté Albene. - La prescription triennale de
l'action en nullité fondée sur l'inobservation des dispositions applicables aux conventions
réglementées ne s'applique pas lorsque leur annulation est demandée pour violation des lois ou
principes régissant la nullité des contrats.

Une société anonyme (SA) avait conclu des conventions avec une société dont le gérant et unique
associé était son directeur général délégué. Elle avait demandé l'annulation de ces conventions,
qui constituaient des conventions réglementées, pour fraude et illicéité de leur cause.
Une cour d'appel avait déclaré prescrite cette action par application des dispositions prévoyant
que l'action en nullité d'une convention réglementée qui n'a pas été régulièrement approuvée se
prescrit par trois ans (C. com. art. L 225-42). Elle avait ajouté que les adages selon lesquels la
fraude corrompt tout et la prescription ne court pas contre les contrats non valables ne
permettaient pas à la SA d'échapper à la prescription.
La Cour de cassation a censuré cette décision au motif que la prescription triennale de l'action en
nullité fondée sur l'inobservation des dispositions applicables aux conventions réglementées ne
s'applique pas lorsque l'annulation de ces conventions est demandée pour violation des lois ou
principes régissant la nullité des contrats.

Note : Le fait que les dispositions régissant les sociétés commerciales prévoient que les
conventions réglementées irrégulièrement conclues produisent néanmoins leurs effets
(notamment, C. com. art. L 223-19 ou L 225-41) n'interdit pas à la société d'en demander
l'annulation en invoquant une cause de nullité des contrats (absence ou vice du consentement,
défaut de capacité d'une des parties, défaut ou illicéité de l'objet de la convention, absence de
cause ou, comme en l'espèce, illicéité de la cause ou fraude) (Cass. com. 22-5-2001 n° 978 : RJDA
11/01 n° 1119) ou un abus de majorité (Cass. com. 21-1-1997 n° 156 : RJDA 4/97 n° 525).
Lorsque la nullité d'une convention réglementée est demandée sur le fondement du droit
commun des contrats, la prescription triennale applicable aux actions fondées sur les dispositions
spécifiques aux conventions réglementées est écartée.
La prescription triennale de l'article L 235-9 du Code de commerce n'est pas non plus, à notre
avis, applicable. Ce texte vise en effet la nullité des actes ou délibérations de la société postérieurs
à la constitution de la société et une convention conclue entre une société et un tiers n'est pas un
tel acte ou délibération. D'ailleurs, la Cour de cassation a jugé que le délai abrégé n'est pas
applicable à l'action en nullité d'une cession de parts sociales pour vice du consentement (Cass. 3e
civ. 6-10-2004 n° 965 : RJDA 12/04 n° 1330). L'action en nullité est donc soumise aux règles de
prescription de droit commun (cinq ans).

Prescription applicable en matière de nullité des conventions réglementées - Cass. com.,


21 janv. 2014, n° 12-29.452, F-P+B

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... est le président-directeur général de la société anonyme
de la Tourelle, dont les actions sont réparties entre la famille X..., actionnaire majoritaire, et Mme
Y..., épouse Z... et ses deux enfants ; que le conseil d'administration de la société de la Tourelle a,
le 28 mai 2004, autorisé M. X... à consentir à la SCI Marceau un bail emphytéotique sur un
ensemble de biens immobiliers ; que le bail a été conclu le 15 janvier 2005 entre la société de la
Tourelle et la SCI Marceau dont M. X... est cogérant ; que soutenant que cette convention n'avait
pas été régulièrement autorisée par le conseil d'administration, Mme Z... a, par acte du 28
novembre 2008, fait assigner la société de la Tourelle, M. X... et la SCI Marceau en annulation de
la délibération du 28 mai 2004 et du bail emphytéotique du 15 janvier 2005, ainsi qu'en paiement
de dommages-intérêts ; que ces derniers ont soulevé la prescription de l'action en nullité ;
Sur le second moyen :

64
Attendu que Mme Z... fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré prescrite sa demande tendant à la
condamnation de M. X... au paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du
fait de la conclusion et de l'exécution du bail, alors, selon le moyen, que la prescription triennale
édictée par l'article L. 235-9 du Code de commerce pour les actions en nullité de la société ou
d'actes et délibérations postérieurs à sa constitution ne s'étend pas à l'action en responsabilité
dirigée contre celui qui est intéressé à une convention réglementée ayant provoqué des
conséquences dommageables pour la société ; qu'en déclarant prescrite la demande de Mme Z...
tendant à la condamnation de M. X... à réparer les conséquences dommageables du bail
emphytéotique conclu le 15 janvier 2005, convention réglementée à laquelle il était intéressé, en
application de ce texte, au motif que l'action a été engagée plus de trois ans après l'adoption de la
délibération autorisant la conclusion de cette convention, la cour d'appel a violé, par fausse
application, l'article L. 235-9 du Code de commerce ;
Mais attendu que, sous le couvert d'un grief de violation de la loi, le moyen critique une omission
de statuer sur la demande indemnitaire formée à titre subsidiaire par Mme Z... ; que l'omission de
statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du Code de procédure civile,
le moyen n'est pas recevable ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 225-42 du Code de commerce ;
Attendu que pour déclarer prescrite l'action en nullité formée par Mme Z..., l'arrêt constate qu'il
est acquis aux débats que la convention litigieuse a été autorisée par le conseil d'administration
suivant délibération du 28 mai 2004 ; qu'il relève que cette action tend à la nullité d'une
convention réglementée au sens de l'article L. 225-38 du Code de commerce à raison de l'absence
d'autorisation régulière ; qu'il retient que dès lors que l'action est fondée sur une irrégularité
affectant la décision sociale, la prescription applicable est celle qui régit l'action en nullité des
actes de la société, prévue par l'article L. 235-9 du Code de commerce, dont le délai est de trois
ans à compter du jour où la nullité est encourue, c'est-à-dire à compter du jour où la délibération
a été prise ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'action en nullité formée par Mme Z... était fondée sur
l'inobservation des dispositions applicables aux conventions réglementées dans une société
anonyme, ce dont il résultait que cette action était soumise aux règles de prescription de l'action
en nullité de ces conventions, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré l'action prescrite et rejeté les
demandes subséquentes, l'arrêt rendu le 12 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de
Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient
avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement
composée ;

- Application de la procédure des conventions réglementées à une indemnité de départ


d'un salarié devenu dirigeant. - Cass. soc. 10 avril 2013 n° 11-25.841 (n° 701 FS-PB), Sté
Atlan technologies c/ Floren. En cas de nomination à des fonctions de direction (président,
directeur général, directeur général délégué ou membre du directoire) d'un salarié d'une société
anonyme dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, les dispositions
du contrat de travail correspondant à des éléments de rémunération, des indemnités ou des
avantages dus à raison de la cessation ou du changement de « ces fonctions » sont soumises à la
procédure d'approbation des conventions réglementées (C. com. art. L 225-22-1 et L 225-79-1).
N'est pas soumise à cette procédure la clause prévoyant une indemnité de départ, contenue dans
un contrat de travail conclu régulièrement et sans fraude à une date à laquelle le bénéficiaire
n'était pas encore mandataire social.

65
Par suite, une société cotée a été condamnée à verser à un membre de son directoire ayant
démissionné l'indemnité prévue par le contrat de travail de l'intéressé conclu 10 mois avant qu'il
ne soit désigné comme dirigeant, indépendamment de ce mandat et sans fraude.

- Nomination d'un salarié comme dirigeant en cours de période d'essai. - Cass. soc. 24
avril 2013 n° 12-11.825 (n° 819 FS-PB), De Kermadec c/ Sté Gazocéan. Un salarié d'une
société anonyme avait été nommé directeur général avant la fin de la période d'essai prévue à son
contrat de travail dont l'exécution avait été suspendue lors de sa nomination. Plusieurs années
après, la société l'avait révoqué de son mandat social et elle avait rompu la période d'essai,
mettant ainsi fin au contrat de travail. Le salarié avait fait valoir que sa nomination en tant que
dirigeant social avait mis fin à la période d'essai, si bien qu'il avait été licencié sans cause réelle et
sérieuse.
Argument rejeté par la Cour de cassation : la désignation du salarié comme mandataire social avec
suspension du contrat de travail pendant la durée du mandat ne met pas fin à la période d'essai
qui reprend donc après la révocation du mandat.

- Révocation abusive d'un dirigeant de SA. - Cass. com. 14 mai 2013 n° 11-22.845 (n° 486
FS-PB), Girardier c/ Sté Asterop. Un administrateur d'une société anonyme, également
président-directeur général, avait été révoqué lors d'une assemblée générale d'actionnaires. Il avait
demandé des dommages-intérêts pour révocation abusive à la société, lui reprochant de ne pas
avoir respecté le principe du contradictoire.
La Cour de cassation a censuré la décision de la cour d'appel qui, pour juger que le contradictoire
avait été respecté, avait retenu que des suspensions de séance de plus de trois heures au total
avaient permis à l'administrateur de contacter des tiers et de rédiger un communiqué et que sa
révocation n'avait été votée qu'après qu'il avait présenté ses observations écrites et orales (CA
Paris 31-5-2011 n° 10/16540 : BRDA 14/11 inf. 4). La cour d'appel aurait dû rechercher si
l'intéressé avait eu connaissance des motifs de sa révocation avant qu'il fût procédé au vote.

Note : Revirement de jurisprudence.


La Cour de cassation avait en effet jugé que la révocation d'un administrateur n'avait pas à être
justifiée par un motif quelconque ; elle avait, en conséquence, rejeté la demande d'un
administrateur qui soutenait que sa révocation était abusive car l'assemblée générale des
actionnaires avait refusé de lui communiquer précisément et en détail les motifs de cette
révocation (Cass. com. 3-1-1985 n° 83-16. 014 : Bull. civ. IV n° 6).
Un administrateur peut être révoqué à tout moment par l'assemblée générale ordinaire des
actionnaires (C. com. art. L 225-18, al. 2). Le conseil d'administration peut également révoquer à
tout moment son président (C. com. art. L 225-47, al. 3). La révocation d'un administrateur ou du
président qui intervient sans juste motif ne peut pas donner lieu à dommages-intérêts,
contrairement à la révocation du directeur général (C. com. art. L 225-55, al. 1). Mais absence de
juste motif ne signifie pas absence de motif : la révocation à tout moment et sans juste motif
(révocation ad nutum) a pour limite le cas où elle intervient dans des circonstances révélant une
faute ouvrant droit à réparation du préjudice (C. civ. art. 1382), la révocation devenant abusive.
Le non-respect des droits de la défense et du contradictoire constitue une telle faute. Ainsi, le
dirigeant doit être mis en mesure de présenter ses observations avant la décision de révocation,
faute de quoi celle-ci est abusive (Cass. com. 24-2-1998 n° 95-12.349 : RJDA 6/98 n° 740, 1e
espèce ; Cass. com. 15-5-2007 n° 05-19.464 : RJDA 11/07 n° 1102). Encore faut-il qu'il
connaisse les motifs de cette révocation pour que le respect des droits de la défense ne soit pas
un simulacre. La Cour de cassation avait déjà jugé, à propos de la révocation d'un directeur
général - donc sur justes motifs -, que le dirigeant devait être avisé de ces motifs avant la prise de
décision (Cass. com. 29-3-2011 n° 10-17.667 : BRDA 8/11 inf. 5). Il résulte clairement de la
présente décision que, pour respecter les droits de la défense, un motif de révocation doit être

66
communiqué au dirigeant avant la décision, même lorsque la révocation sans juste motif ne
donne pas lieu à dommages-intérêts.

- Clause contraire à la libre révocation d'un administrateur. - Cass. com. 14 mai 2013 n°
11-22.845 (n° 486 FS-PB), Girardier c/ Sté Asterop. Un administrateur et président-directeur
général d'une société anonyme qui avait été révoqué lors d'une assemblée générale d'actionnaires
avait demandé des dommages-intérêts aux actionnaires majoritaires. Il invoquait la violation d'un
pacte d'actionnaires qui prévoyait que la désignation des personnes clés de la société devait être
préalablement autorisée par le conseil d'administration. Selon lui, cette clause devait s'appliquer
aussi en cas de révocation, par parallélisme des formes.
La Cour de cassation a rejeté cette demande. Cette interprétation du pacte d'actionnaires aurait eu
pour effet de limiter le droit de l'assemblée générale de révoquer un administrateur à tout
moment. Or, toute stipulation qui a pour objet de porter atteinte à la libre révocabilité d'un
administrateur est illicite.

Note : illustration d'une jurisprudence constante écartant les clauses portant atteinte à la libre
révocabilité d'un administrateur. Les administrateurs peuvent être révoqués à tout moment par
l'assemblée générale ordinaire des actionnaires (C. com. art. L 225-18, al. 2). Ni les statuts ni un
pacte d'actionnaires ne peuvent faire échec à ce principe de révocation dite « ad nutum ». Cette
révocation n'a pas à être fondée sur un juste motif. Toutefois, afin de respecter le principe du
contradictoire, la Cour de cassation vient de juger, dans la même affaire, qu'un motif doit être
communiqué à l'administrateur avant décision

- Election des représentants des salariés au conseil d'administration. - Cass. soc. QPC 30
mai 2013 n° 13-40.010 (n° 1204 FS-PB). Lorsque les statuts d'une société anonyme prévoient la
nomination d'administrateurs par les salariés, les salariés de la société et le cas échéant de ses
filiales directes ou indirectes peuvent être électeurs et élus (C. com. art. L 225-27 et L 225-28).
Ces textes sont-ils contraires à la Constitution en ce qu'ils font obstacle à ce que des salariés mis
à la disposition de la société ou de ses filiales puissent être électeurs et élus ?
La Cour de cassation a estimé que cette question présente un caractère sérieux et elle l'a donc
renvoyée au Conseil constitutionnel.

Note : Aux termes du préambule de la Constitution de 1946, tout travailleur participe, par
l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la
gestion des entreprises (§ 8). La présence de représentants de salariés aux organes de direction
d'une société se rattache à la participation à la gestion de l'entreprise (Cons. const. 12-1-2002 n°
2001-455 DC § 110). Par ailleurs, le droit de participer à la gestion de l'entreprise a pour
bénéficiaires tous les travailleurs intégrés de façon étroite et permanente à la communauté de
travail qu'elle constitue, même s'ils n'en sont pas salariés (Cons. const. 7-8-2008 n° 2008-568
DC).
La même question que celle dont était saisie la Cour de cassation se pose pour les articles L 225-
79 et L 225-80 du Code de commerce prévoyant des dispositions similaires concernant les
membres du conseil de surveillance des SA élus par les salariés et pour l'article L 225-28 du Code
de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de
l'emploi ; cet article prévoit en effet, pour les sociétés tenues d'avoir des administrateurs salariés,
que ces derniers doivent être liés par un contrat de travail avec la société ou l'une de ses filiales
(BRDA 12/13 inf. 23).

67
- Election des représentants des salariés au conseil d'administration. - Cons. const. déc.
n° 2013-333 QPC, 26 juill. 2013

Le Conseil constitutionnel a, on le rappelle, été saisi d'une question prioritaire de


constitutionnalité sur les articles L 225-27 et L 225-28 du Code de commerce (Cass. soc. QPC
30-5-2013 n° 13-40.010 : BRDA 13/13 inf. 5). Ces textes limitent, lorsque les statuts d'une
société anonyme prévoient la nomination d'administrateurs par les salariés, le corps électoral aux
seuls salariés de la société et le cas échéant de ses filiales et font ainsi obstacle à ce que des
salariés mis à la disposition de la société ou de ses filiales puissent être électeurs et élus.
Le Conseil constitutionnel vient de déclarer ces dispositions conformes à la Constitution.
Certes, le législateur a entendu permettre que la participation des travailleurs à la gestion des
entreprises soit renforcée. Pour autant, il ne résulte pas du 8e alinéa du préambule de la
Constitution de 1946 tel qu'interprété par le Conseil (droit de tout travailleur intégré de façon
étroite et permanente à l'entreprise, même s'il n'en est pas salarié, de participer à la gestion de
celle-ci par l'intermédiaire de ses délégués : Cons. const. 7-8-2008 n° 2008-568 DC) que cette
participation doit être mise en oeuvre dans les mêmes conditions selon qu'elle s'applique aux
organes dirigeants de l'entreprise ou aux institutions représentatives du personnel. Eu égard
aux attributions du conseil d'administration (il détermine les orientations de l'activité de la
société : C. com. art. L 225-35, al. 1), le législateur pouvait donc, sans méconnaître le principe
constitutionnel précité, limiter le corps électoral pour l'élection des salariés à ce conseil aux seuls
salariés de la société et, éventuellement, de ses filiales.

Note : Dans son commentaire de cette décision (disponible sur son site internet), le Conseil
précise que les salariés mis à disposition, concernés au premier chef par les attributions des
institutions représentatives du personnel de l'entreprise, ne sont pas concernés au même titre par
les compétences purement économiques du conseil d'administration alors même qu'ils font
partie de la communauté de travail de l'entreprise. Naturellement, ajoute le Conseil, les salariés
mis à disposition peuvent voter et être élus aux élections des représentants au conseil
d'administration qui se tiendraient chez leur employeur.
Il se déduit de la décision ci-dessus la conformité à la Constitution des autres
textes prévoyant des dispositions analogues à celles des textes critiqués : articles L 225-79 et L
225-80 (élection des membres du conseil de surveillance par les salariés) ; articles L 225-27-1 et L
225-79-2 issus de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi (désignation
obligatoire d'administrateurs ou de membres du conseil de surveillance représentant les salariés
dans les sociétés employant plusieurs milliers de salariés.

- Membres d'un conseil de surveillance atteints par la limite d'âge : sort des délibérations
du conseil - CA Paris 1er octobre 2013 n° 12/17788, ch. 8-5., Sté Animated Ventures c/ Di
Sabatino - BRDA 22/13

Pendant plusieurs mois le conseil de surveillance d'une société anonyme comportant six membres
s'était réuni alors que trois d'entre eux, âgés de plus de 70 ans, étaient réputés démissionnaires
d'office (application de l'article L 225-70 du Code de commerce).
Un actionnaire de la société avait demandé l'annulation des délibérations prises par le conseil ainsi
composé et notamment de celles relatives à la nomination de deux membres du directoire, ainsi
que l'annulation par voie de conséquence des délibérations de cet organe.
La cour d'appel de Paris a rejeté sa demande pour les raisons suivantes :
- l'irrégularité de la composition du conseil de surveillance au regard des règles légales de
limite d'âge n'affecte pas, à elle seule, la validité des délibérations prises par l'organe social ;

68
- la nullité est encourue si les délibérations du conseil dont un ou plusieurs membres sont réputés
démissionnaires d'office ont été prises sans que soit respecté le quorum ; mais en l'espèce,
le quorum était atteint au cours de chaque réunion, abstraction faite des membres réputés
démissionnaires d'office ;
- si les réunions avaient été convoquées par un président qui n'avait plus qualité pour le faire,
compte tenu de son âge, cette circonstance était sans incidence sur la validité des délibérations
dès lors que les règles relatives à la convocation de cet organe ne sont pas impératives.

Note : La loi n'a pas prévu le sort des décisions prises par un conseil d'administration ou de
surveillance composé de membres démissionnaires d'office en raison de leur âge. Les
délibérations peuvent être annulées si le défaut de composition a eu une incidence sur le respect
des règles impératives de quorum ou de majorité. Mais qu'en est-il lorsque, abstraction faite des
membres qui n'auraient pas dû voter, le quorum est atteint et une majorité subsiste en faveur des
résolutions adoptées ?
Plusieurs dispositions de la loi prévoient expressément que la présence et le vote d'un
administrateur irrégulièrement désigné ne vicient pas les délibérations du conseil (C. com. art. L
225-21 : cumul de mandats, L 225-22 : salarié nommé administrateur, L 225-24 : nomination à
titre provisoire). En l'absence de précision s'agissant des règles relatives à la limite d'âge, la
volonté du législateur de restreindre les nullités en droit des sociétés invite à écarter la nullité.
La Cour de cassation s'est prononcée en sens inverse, dans une affaire où la composition
irrégulière du conseil était le résultat, non d'une violation des règles sur la limite d'âge, mais d'un
abus de majorité (Cass. com. 24-4-1990 n° 88-17.218 : Bull. civ. IV n° 125). Elle a fait à nouveau
application de cette solution en matière de société coopérative agricole, jugeant que la nullité
d'une délibération du conseil d'administration peut résulter de la violation de dispositions
impératives concernant la composition de ce conseil (Cass. 1e civ. 28-3-2000 n° 97-20.779 : Bull.
civ. I n° 109). Il reste maintenant à savoir si les dispositions en matière de limite d'âge sont
impératives.

Caractère non-fautif du refus temporaire des commissaires aux comptes de certifier les
comptes - Cass. com., 18 févr. 2014, n° 12-29.075, FS-P+B

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 octobre 2012), que les sociétés Hainaut immobilier et
Créer promotion (les sociétés) ont fait assigner la société KPMG ainsi que MM. X...et Y...(les
commissaires aux comptes), aux fins d'obtenir réparation du préjudice qu'elles estimaient avoir
subi en raison de leur refus temporaire de certifier leurs comptes ;
Attendu que les sociétés font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes, alors, selon le moyen,
que commet une faute le commissaire aux comptes qui refuse de certifier les comptes réguliers,
sincères et fidèles au prétexte qu'il doute de la légalité d'un acte juridique conclu et exécuté par
l'entreprise au cours de l'exercice ; qu'en décidant, au contraire, que le refus de certification des
comptes opposé par la société KPMG au 30 juin 2006 n'était pas critiquable parce qu'elle n'avait
pu lever qu'après cette date ses incertitudes sur la régularité de la cession immobilière intervenue
le 23 septembre 2005 entre les sociétés Créer promotion et HLM du Hainaut, la cour d'appel a
violé les articles L. 823-9 et L. 822-17 du Code de commerce ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que les commissaires aux comptes avaient eu des doutes sur la
régularité d'une opération de cession immobilière qui avait notamment pour effet de priver l'une
des sociétés du groupe Hainaut d'une plus-value qu'elle s'était engagée auprès de l'administration
à réinvestir dans de nouveaux logements sociaux et que l'annulation de cette opération aurait
nécessairement eu une incidence sur les comptes des sociétés en cause, l'arrêt retient que ces
doutes n'ont été levés qu'ultérieurement à la suite d'une lettre d'un avocat aux Conseils ; que de
ces constatations, la cour d'appel a pu déduire que le refus temporaire des commissaires aux

69
comptes de certifier les comptes ne revêtait pas un caractère fautif ; que le moyen n'est pas
fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

Détermination du point de départ de la prescription de l’action récursoire contre les


anciens dirigeants - Cass. com., 6 mai 2014, n° 13-17.632, F-P+B

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par arrêt du 25 juin 2008, la cour d'appel de Paris a dit que la
société anonyme Marionnaud (la société) avait manqué aux obligations résultant des articles 2 et 3
du règlement de la Commission des opérations de bourse n° 98-07 relatif à l'information du
public en publiant, entre 2002 et 2004, des communiqués contenant des informations inexactes
sur sa situation financière ; que ces manquements ont été imputés à la société ainsi qu'à MM.
Marcel et Gérald X... qui exerçaient respectivement, à l'époque considérée, les fonctions de
président directeur général et de directeur général délégué ; que par acte du 22 juillet 2009, la
société Afi Esca (la société Esca), qui avait acquis, entre le 9 janvier 2003 et le 25 mars 2004, 8
592 actions émises par la société, a fait assigner celle-ci en paiement de dommages-intérêts ; que
par acte du 11 janvier 2010, la société a fait assigner MM. Marcel et Gérald X... en garantie des
condamnations qui pourraient être mises à sa charge ;
Sur la recevabilité du pourvoi n° Y 13-18.473, examinée d'office après avertissement délivré aux
parties :
Attendu qu'une même personne, agissant en la même qualité, ne peut former qu'un seul pourvoi
en cassation contre la même décision ;
Attendu que la société Marionnaud, agissant à titre personnel, ayant formé le 17 mai 2013, contre
l'arrêt attaqué, un pourvoi enregistré sous le n° J 13-17.632, n'est pas recevable à former, le 30
mai 2013, en la même qualité et contre la même décision, un nouveau pourvoi enregistré sous le
n° Y 13-18.473 ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° J 13-17.632 :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer une indemnité à la société
Esca, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en l'absence de présomption de lien de causalité, la diffusion d'informations trompeuses
ne peut justifier la condamnation de la société émettrice que s'il est démontré que l'investisseur
s'est effectivement référé aux informations diffusées pour décider de vendre, de conserver ou
d'acheter des titres de la société concernée ; qu'en ne vérifiant pas par une analyse concrète des
pièces du débat, comme elle y avait pourtant été invitée par la société Marionnaud, si la société
Esca avait effectivement été déterminée, dans ses choix, par les informations litigieuses, et en se
bornant à se référer au caractère trompeur desdites informations, pour en déduire l'existence d'un
préjudice réparable, la cour d'appel, qui n'a donc pas caractérisé la relation directe et certaine
entre les manquements reprochés à la société Marionnaud et le préjudice allégué par la société
Esca, a privé décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
2°/ que la société Marionnaud avait fait valoir que la continuité de la possession par Esca des
titres litigieux acquis en 2003 et 2004 n'était pas établie par la production d'un relevé complet des
mouvements de son portefeuille d'actions, aucune preuve n'étant apportée de ce qu'elle n'aurait
pas, durant cette période, procédé à d'autres opérations sur ces titres, par exemple en en
revendant certains pour en acheter d'autres et ainsi réaliser des plus-values sur reventes, et donc
qu'en l'absence de preuve de l'existence d'un préjudice certain, la société Esca était dénuée de tout
droit à réparation ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions, pourtant déterminantes de la
solution du litige, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société avait diffusé entre avril 2002 et décembre 2004 des
communiqués mensongers de nature à gonfler artificiellement le cours de bourse et à inciter les
actionnaires à acheter des titres à un cours supérieur à sa valeur réelle, ou à les conserver, et

70
retenu que la société Esca avait été, de manière certaine, privée de la possibilité de prendre des
décisions d'investissements en connaissance de cause et de procéder à des arbitrages éclairés, en
particulier en renonçant aux placements déjà réalisés, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à
la recherche et pas davantage à répondre aux conclusions inopérantes invoquées par le moyen, a
caractérisé le lien de causalité entre les fautes commises par la société et le préjudice, s'analysant
en une perte de chance, subi par la société Esca ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 225-254 du Code de commerce ;
Attendu que pour déclarer irrecevable comme prescrite l'action exercée par la société à l'encontre
de MM. Gérald et Marcel X..., l'arrêt retient que les faits dommageables imputés à ces derniers
résident dans la diffusion de fausses informations sur le marché ; qu'il ajoute que ces faits, révélés
à compter du 24 décembre 2004, étaient connus de la société ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la prescription de l'action récursoire en garantie formée
par la société à l'encontre de ses anciens dirigeants n'avait pu commencer à courir avant la
délivrance de l'assignation principale, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du deuxième moyen,
non plus que sur le troisième moyen :
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi n° Y 13-18.473 ;
Et sur le pourvoi n° J 13-17.632 :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite l'action
exercée par la société Marionnaud à l'encontre de MM. Gérald et Marcel X..., l'arrêt rendu le 19
mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la
cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les
renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Détermination du délai de prescription de l'action en responsabilité engagée par un


créancier à l'encontre d'un liquidateur amiable d'une société - Cass. com., 25 juin 2013,
n° 12-19.173, F-P+B

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Domaine de Clesseven, qui avait cédé à la société
Relais de chasse de Klesseven, par acte du 29 juin 2000, un fonds de commerce incluant le droit
au bail des lieux servant à son exploitation, a été dissoute le 30 septembre 2000, Mme X... étant
nommée en qualité de liquidatrice ; que la vente du 29 juin 2000 a été annulée par un arrêt du 6
mai 2003, devenu irrévocable à la suite de la non-admission du pourvoi formé contre cette
décision ; que faisant valoir que Mme X... avait commis diverses fautes, la société Relais de chasse
de Klesseven l'a fait assigner en paiement de dommages-intérêts par acte du 13 novembre 2008 ;
que Mme X... lui a opposé la fin de non-recevoir tirée de la prescription triennale applicable à
l'action en responsabilité visant le liquidateur ;
Sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, qui est préalable :
Vu les articles L. 237-12 et L. 225-254 du Code de commerce ;
Attendu que pour déclarer recevable l'action de la société Relais de chasse de Klesseven l'arrêt,
après avoir relevé que la procédure engagée par cette dernière aux fins d'annulation de la vente du
fonds de commerce et de la cession concomitante du droit au bail et de réparation de son
préjudice avait donné lieu à un jugement, puis à un arrêt de la cour d'appel et à la non-admission
du pourvoi formé contre cet arrêt, retient que la décision définitive sur les droits de cette société à
l'encontre de la société Domaine de Clesseven est celle qui ne peut faire l'objet de recours et que
tel est le cas de la non-admission du pourvoi formé contre l'arrêt ayant statué sur le préjudice
imputable à la société Domaine de Clesseven dont Mme X... a été la liquidatrice amiable ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le délai de la prescription de l'action en responsabilité
engagée à l'encontre de Mme X..., au titre des fautes qu'elle aurait commises dans l'exercice de ses
fonctions de liquidatrice de la société Domaine de Clesseven, avait commencé à courir le jour où

71
les droits de la société Relais de chasse de Klesseven ont été reconnus par une décision passée en
force de chose jugée (au sens de l'article 500 du Code de procédure civile), la cour d'appel a violé
les textes susvisés ;
Et sur le premier moyen :
Vu l'article 12 du Code de procédure civile ;
Attendu qu'après avoir relevé que la publication de la clôture des opérations de liquidation de la
société Domaine de Clesseven, intervenue le 26 octobre 2000, avait rendu opposable aux tiers la
cessation des fonctions de liquidatrice de Mme X... et après avoir apprécié au regard des
dispositions des articles L. 237-12 et L. 225-254 du Code de commerce la recevabilité de l'action
en responsabilité dirigée contre cette dernière, l'arrêt lui impute diverses fautes, dont le défaut de
contestation du congé avec refus de renouvellement délivré par le bailleur le 24 septembre 2007
et la conclusion d'un nouveau bail, en exécution d'un acte du 6 juin 2008 ; que l'arrêt en déduit
que ces fautes ont permis à Mme X... et à son époux de récupérer le fonds, sans contrepartie
sérieuse ; qu'il condamne ensuite Mme X... à payer à la société Relais de chasse de Klesseven une
certaine somme « par application des dispositions de l'article 1382 du Code civil » ;
Attendu qu'en statuant ainsi, par une décision qui ne permet pas à la Cour de cassation de
déterminer si la responsabilité de Mme X... a été retenue au titre du régime applicable aux
personnes investies de la qualité de liquidateur d'une société dissoute ou par application des règles
de droit commun en matière de responsabilité civile, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE […]

72
Les actionnaires

- Cass. com., 17 janvier 2012, n°09-17212, Publié au bulletin

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X..., détenteur d’actions de la société Astek et bénéficiaire,
par un protocole conclu le 30 juin 2006 avec la société Robinson participations, actionnaire
principal de la société Astek, d’une promesse d’achat de ces actions, a décidé de les apporter à la
société Anaodo management (la société Anaodo) à compter du 30 décembre 2006 ; que par une
délibération du 6 décembre 2006, le conseil d’administration de la société Astek a donné son
agrément à cet apport, sous la double condition de la signature d’un ou plusieurs avenants de
substitution de parties aux différents actes composant l’accord du 30 juin 2006 et de la signature
d’un protocole d’accord entre M. X..., la société Astek et la société Robinson participations
concernant le changement de contrôle de la société Anaodo ; que le 9 janvier 2007, M. X...et la
société Anaodo ont notifié à la société Robinson participations qu’ils levaient l’option sur l’achat
des actions Astek ; que la société Robinson participations a indiqué à M. X...que, n’étant plus
actionnaire de la société Astek depuis le 30 décembre 2006, il ne pouvait plus solliciter
l’application à son égard du protocole du 30 juin 2006 ; que le 14 juin 2007, la société Astek a
écrit à la société Anaodo et à M. X...qu’en l’absence de régularisation des actes prévus à titre de
condition suspensive dans la décision du conseil d’administration, l’agrément de la société
Anaodo était réputé ne pas être intervenu ; que la société Anaodo et M. X...ont assigné la société
Robinson participations, le dirigeant de celle-ci, M. A... et la société Astek en exécution forcée de
la cession des actions Astek et en paiement d’une certaine somme au titre du prix de vente ;
Sur le second moyen :
Attendu que le moyen ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Sur la recevabilité du moyen, contestée par la défense ;
Attendu que le moyen, qui est de pur droit, est recevable ;
Et sur le moyen :
Vu les articles L. 228-23, alinéa 4, et L. 228-24 du code de commerce ;
Attendu que si une clause d’agrément est stipulée, l’agrément d’un actionnaire doit être pur et
simple de sorte que les conditions posées par l’organe social habilité à autoriser la cession sont
réputées non écrites ;
Attendu que pour déclarer nul l’apport des actions de la société Astek par M. X...à la société
Anaodo, l’arrêt retient que le principe et les modalités d’un agrément d’une cession d’actions sont
fixés par les statuts de la société, aux dispositions desquels il ne peut être dérogé, et que les
prescriptions imposées par le conseil d’administration comme condition de l’octroi et de
l’efficacité de l’agrément sollicité ne peuvent être écartées ou remplacées par d’autres modalités et
relève qu’il est constant qu’à la date de levée d’option, les accords de substitution auxquels était
subordonné l’agrément n’avaient pas été signés ;
Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur l’autre grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a déclaré nul par application des dispositions
de l’article L. 228-23, alinéa 4, du code de commerce, l’apport par M. X...à la société Anaodo
management des actions de la société Astek du 27 novembre 2006 et débouté la société Anaodo
management de ses prétentions au titre de l’engagement d’acquisition des actions Astek consenti
par la société Robinson participations au profit de M. X..., l’arrêt rendu le 17 septembre 2009,
entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause
et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie
devant la cour d’appel de Versailles, autrement composée ;

73
- Cass. com., 15 mai 2012, n°10-23389, Publié au bulletin
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 10 juin 2010), que lors de l’assemblée générale mixte des
actionnaires de la société Eiffage du 18 avril 2007, le bureau de l’assemblée, se fondant sur
l’existence d’une action de concert entre la société Sacyr, détentrice de 33,32% du capital, et 89
autres actionnaires, dont les sociétés Geciter, Hôtel d’Albe et Capucines, appartenant au groupe
Gecina, a “constaté” la privation légale des droits de vote de ces actionnaires au delà du seuil de
33,33% du capital ; que les sociétés Geciter, Hôtel d’Albe, Capucines et Gecina ont fait assigner
la société Eiffage aux fins d’annulation de la décision du bureau les concernant ;
Attendu que la société Eiffage fait grief à l’arrêt d’accueillir cette demande, alors, selon le moyen,
que le bureau de l’assemblée générale des actionnaires qui a le pouvoir et le devoir de contrôler
l’exercice du droit de vote, peut apprécier, sous le contrôle du juge, l’existence de toute action de
concert et doit, en présence d’indices graves, précis et concordants d’une action de concert ayant
entraîné un franchissement de seuil irrégulier, appliquer la privation des droits de vote prévus par
l’article L. 233-14, alinéa 1er, du code de commerce ; qu’en décidant que le bureau ne pouvait
faire l’application de ce texte que pour certains cas de concert, la cour d’appel a violé les articles
L. 233-7, L. 233-9, L. 233-10 et L. 233-14 du code de commerce ;
Mais attendu qu’aucun texte n’attribue au bureau de l’assemblée le pouvoir de priver des
actionnaires de leurs droits de vote au motif qu’ils n’auraient pas satisfait à l’obligation de notifier
le franchissement d’un seuil de participation dès lors que l’existence de l’action de concert d’où
résulterait cette obligation est contestée ; que le moyen, qui soutient une thèse contraire, n’est pas
fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 10 juillet 2012, n°11-21789, Publié au bulletin

Sur le moyen unique :


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Lyon, 24 mai 2011), rendu en matière de référé, que MM. Gérald et
Jean-Michel X... et Mme Caroline X... détiennent en indivision une partie des actions représentant
le capital de la société JMGC Participations ; qu’une assemblée générale extraordinaire ayant été
convoquée, MM. Gérald et Jean-Michel X... ont demandé en référé que le premier soit désigné en
qualité de mandataire spécial chargé de représenter les indivisaires lors de cette assemblée ;
Attendu que Mme Caroline X... fait grief à l’arrêt d’avoir accueilli cette demande, alors, selon le
moyen :
1°/ que lorsque les propriétaires indivis de droits sociaux sont en désaccord sur le choix du
mandataire unique chargé de les représenter aux assemblées, c’est au juge qu’incombe le soin de
désigner ce mandataire unique, lequel ne peut être choisi parmi les indivisaires eux-mêmes ; qu’en
estimant néanmoins que le différend important qui, en l’espèce, opposait “ les deux frères à leur
soeur “ quant à la désignation du mandataire chargé de représenter l’indivision à une assemblée
dont les résolutions pourraient conduire à disposer des actions indivises, ne constituait “ pas un
obstacle “ à la désignation de M. Gérald X..., “ comme mandataire de l’indivision, dès lors que
son action dans l’intérêt commun peut garantir des intérêts sociaux “, la cour d’appel a violé les
articles L. 225-110, alinéa 2 et R. 225-87 du code de commerce, ensemble l’article 815-3 du code
civil ;
2°/ qu’en désignant M. Gérald X..., en qualité de mandataire spécial de l’indivision X..., pour la
représenter à l’assemblée générale extraordinaire de la société JMGC Participations du 7
décembre 2010, ce qui conduisait à lui conférer un pouvoir de représentation supérieur à celui
que représentait sa quote-part dans l’indivision, et donc à une sur-représentation de cet indivisaire
désigné en qualité de représentant de l’indivision, la cour d’appel a violé le principe de l’égalité des
actionnaires, posé par l’article 1844 du code civil, ensemble l’article L. 225-110 du code de
commerce ;

74
Mais attendu, d’une part, que l’arrêt retient exactement que le juge des référés saisi en application
des dispositions de l’article L. 225-110, alinéa 2, du code de commerce peut désigner le
mandataire parmi les indivisaires ou en dehors d’eux ; qu’ayant constaté que la procédure
antérieure révélait l’implication de M. Gérald X... en vue de la sauvegarde des intérêts sociaux, et
relevé que cette implication était de nature à garantir une bonne défense de l’intérêt de
l’indivision, la cour d’appel a pu en déduire que l’existence d’un différend entre les co-indivisaires
ne constituait pas un obstacle à la désignation de l’un d’entre eux comme mandataire de
l’indivision ;
Et attendu, d’autre part, qu’ayant relevé que le mandat judiciaire donné à l’indivisaire s’inscrivait
dans un cadre légal même s’il conférait à cet indivisaire un pouvoir de représentation supérieur à
ce que représente sa quote-part dans l’indivision, c’est sans méconnaître le principe de l’égalité
des actionnaires que la cour d’appel a statué comme elle a fait ;
D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 25 septembre 2012, n°11-17256, Publié au bulletin

Sur le moyen unique :


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Orléans, 3 février 2011), que le capital de la société anonyme
Lioser, qui avait, en 1998, conclu avec la société ITM Entreprises un contrat d’enseigne d’une
durée de dix ans pour l’exploitation d’un supermarché alimentaire, était détenu à concurrence de
66% par M. et Mme X..., le solde, soit 34 %, étant détenu en nue-propriété par la société ITM
Région parisienne (la société ITM), filiale de la société ITM entreprises, et en usufruit par M. X... ;
que le 29 juin 2007, une assemblée générale des actionnaires de la société Lioser, à laquelle
n’assistait pas la société ITM, qui y avait été convoquée, a décidé une augmentation du capital
social réservée aux salariés ayant la qualité d’adhérents à un plan d’épargne d’entreprise et a
supprimé le droit préférentiel de souscription ; qu’ont été émises cent soixante quatorze actions
nouvelles, dont cent soixante cinq ont été souscrites par M. X... ; qu’après que la société Lioser
eut notifié à la société ITM entreprises sa décision de ne pas renouveler le contrat d’enseigne à
son échéance, la société ITM l’a fait assigner aux fins d’annulation des résolutions n° 5 et 6
adoptées par l’assemblée du 29 juin 2007 ;
Attendu que la société Lioser et M. X... font grief à l’arrêt d’accueillir cette demande alors, selon
le moyen :
1°/ que le capital social d’une société anonyme peut être augmenté, notamment par émission
d’actions nouvelles, les anciennes comportant un droit préférentiel de souscription qui est d’ordre
public ; que la loi offre néanmoins à l’assemblée générale qui décide cette augmentation la faculté
de supprimer alors ce droit ; qu’elle lui permet aussi de réserver cette augmentation à certains
bénéficiaires, quels qu’ils soient, auquel cas ladite réserve emporte, nécessairement, exclusion du
droit préférentiel ; qu’il s’ensuit qu’une convocation à une assemblée générale extraordinaire pour
y proposer une augmentation de capital réservée à des personnes particulières emporte,
nécessairement, convocation à voter la suppression du droit préférentiel sans laquelle cette
réserve est à tous égards impossible ; qu’en décidant dès lors d’annuler les résolutions 5 et 6, au
motif que l’assemblée ne pouvait délibérer sur la question de la suppression du droit préférentiel,
qui ne figurait pas à l’ordre du jour de la convocation, quand cette dernière invitait explicitement
les actionnaires à se prononcer sur une «augmentation du capital social réservée aux salariés dans
les conditions prévues à l’article L. 443-5 du code du travail, en application de l’article L. 225-129-
6 du code de commerce», ce qui emportait, nécessairement, convocation à voter sur une
suppression du droit préférentiel, la cour d’appel a violé l’article L. 225-105 alinéa 3 du code de
commerce, ensemble les articles L. 225-135 et L. 225-138 du même code ;
2°/ que pour annuler les résolutions n° 5 et 6 de l’assemblée générale extraordinaire appelée à
voter l’augmentation de capital réservée au profit des salariés, dans les conditions de l’article L.

75
3332-18 du code du travail, la cour d’appel a retenu que s’il était obligatoire de présenter tous les
trois ans un projet de résolution à cette fin, il n’était pas obligatoire de l’adopter, de sorte que
l’assemblée convoquée pour le 29 juin 2007 n’était pas davantage tenue de l’adopter ; qu’en se
déterminant par de tels motifs, inopérants, la cour a privé son arrêt de base légale au regard des
articles L. 225-105 alinéa 3, L. 225-135 et L. 225-138 du code de commerce ;
3°/ que pour justifier l’annulation des résolutions n° 5 et 6 de l’assemblée générale extraordinaire
appelée à voter l’augmentation de capital réservée au profit des salariés, dans les conditions du
code du travail, la convocation à cette assemblée ne faisant pas explicitement état d’une
suppression du droit préférentiel, la cour d’appel a retenu que l’article L. 225-138 du code de
commerce disait que l’assemblée générale qui décide une augmentation de capital réservée «peut
(le) supprimer » ; que cependant ce verbe “pouvoir” vise, non pas la faculté de supprimer ou non
le droit préférentiel en cas d’augmentation réservée puisque cette suppression est alors nécessaire,
mais la faculté de déroger au principe d’ordre public du droit préférentiel ; qu’en suggérant dès
lors, sur le fondement du texte visé, que la convocation à voter l’augmentation de capital réservée
n’emportait pas nécessairement suppression de ce droit, de sorte que l’éventualité du vote d’une
telle suppression, facultative, devait être explicitement prévue par la convocation, en plus de
l’invitation à voter l’augmentation réservée, la cour d’appel a violé par fausse application l’article
sus visé ;
4°/ que pour justifier l’annulation des résolutions n° 5 et 6 de l’assemblée générale extraordinaire
appelée à voter l’augmentation de capital réservée au profit des salariés, dans les conditions du
code du travail, la convocation à cette assemblée ne faisant pas explicitement état d’une
suppression du droit préférentiel, la cour d’appel a retenu que la convocation ne comportait
aucune référence au rapport spécial du conseil d’administration et au rapport spécial des
commissaires aux comptes ; qu’en se déterminant ainsi, quand la question de la nécessité de
l’indication de cette référence dans la convocation n’avait pas été discutée par les parties, la cour
d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;
Mais attendu que selon l’article L. 225-105, alinéa 3, du code de commerce, sous réserve de la
dérogation qu’il prévoit, l’assemblée générale des actionnaires ne peut délibérer sur une question
qui n’est pas inscrite à l’ordre du jour ; qu’il résulte de l’article L. 225-138, I, du même code que la
suppression du droit préférentiel de souscription pour les besoins de la réalisation d’une
augmentation de capital réservée doit être soumise au vote de l’assemblée ; qu’ayant constaté que
l’assemblée générale des actionnaires de la société Lioser avait voté la suppression du droit
préférentiel de souscription pour la totalité de l’augmentation de capital à laquelle elle décidait de
procéder sans que cette question ait été inscrite à l’ordre du jour, la cour d’appel en a exactement
déduit, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deuxième, troisième et
quatrième branches, que les résolutions litigieuses devaient être annulées ; que le moyen, qui ne
peut être accueilli en ses trois dernières branches, n’est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 24 mai 2011, n°10-12163, Publié au bulletin

Attendu, selon les arrêts attaqués, que par acte du 25 avril 2002, M. X..., agissant tant en nom
personnel qu’en sa qualité de gérant de la société Alliances industrielles développement (la société
AID) (les cédants), a promis de céder la totalité des actions qu’ils détenaient dans le capital de la
société Sega à M. Y... qui s’est engagé à les acquérir, avec faculté de substitution ; que cette
convention prévoyait que dès que les conditions suspensives qu’elle contenait auraient été levées,
les parties s’engageaient à signer les ordres de mouvement portant sur les actions cédées d’une
part, et à en payer le prix, d’autre part, et précisait que la transmission des actions devait s’opérer
avec transfert de propriété le jour de la signature des ordres de mouvement au plus tard le 15 juin
2002 ; que par courrier du 30 juillet 2002 adressé aux cédants, M. Y... a indiqué lever la condition

76
suspensive et reporter, en accord avec eux, la date de signature des “documents” ; que la
transmission des actions de la société Sega n’est pas intervenue et que celle-ci a été mise en
liquidation judiciaire le 15 janvier 2003 ; que le 27 janvier 2003, M. Y... et la société Matic
production SF, devenue la société Oxy matic sociétés industrielles, appelée à se substituer à ce
dernier, ont fait assigner les cédants pour voir prononcer la nullité de la convention sur le
fondement du dol et du dépérissement de la chose vendue ; que les cédants, invoquant la
défaillance contractuelle de M. Y..., ont reconventionnellement demandé la condamnation de M.
Y... et de la société Matic production SF à leur payer des dommages-intérêts en réparation de la
privation du prix convenu ; que par un premier arrêt, la cour d’appel a rejeté les demandes de M.
Y... et de la société Matic production SF, accueilli la demande en dommages-intérêts des cédants
et a sursis à statuer sur la fixation du montant des dommages-intérêts ; que par un second arrêt, la
cour d’appel a condamné M. Y... et la société Matic production SF à payer aux cédants une
certaine somme à titre de dommages-intérêts ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que le moyen ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 1603, 1604, 1607 et 1610 du code civil, ensemble l’article L. 228-1 du code de
commerce dans sa rédaction alors applicable ;
Attendu que pour condamner M. Y... et la société Matic production SF à payer aux cédants une
certaine somme à titre de dommages-intérêts équivalant au montant du prix de la vente des
actions Sega, l’arrêt retient que si les actes de cession des actions de la société Sega n’ont pas été
signés, c’est du fait de M. Y... qui est donc mal fondé à se prévaloir de l’inexécution de
l’obligation de délivrance de la chose vendue qu’il a lui-même provoquée en ne respectant pas
son engagement réitéré de signer les actes de transfert des actions de la société Sega ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que l’obligation de délivrer les actions cédées s’exécute par la
signature des ordres de mouvement et que cette formalité incombe au seul cédant, la cour d’appel
a violé les textes susvisés ;
Et sur le troisième moyen :
Vu l’article 1108 du code civil ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l’arrêt retient que s’il est vrai que le protocole d’accord du
25 avril 2002 a été signé par M. Y... et M. X..., l’article 3-1 de ce contrat prévoyait une faculté de
substitution pour le cessionnaire par toutes personnes physiques ou morales de son choix et qu’il
n’est pas discuté que la société Matic production SF a été constituée aux fins d’acquérir les
actions de la société Sega si l’opération devait être menée à son terme ; que l’arrêt en déduit qu’il
s’est opéré une cession de contrat qui permet aux cédants de poursuivre directement le
cessionnaire, la société Matic production SF, qui est tenue envers eux en vertu du contrat
transmis, nonobstant l’absence de volonté expressément exprimée de se substituer au cédant ;
Attendu qu’en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser le consentement de la
société Matic production SF à se substituer à M. Y... dans ses engagements, la cour d’appel n’a
pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, les arrêts rendus les 11 avril 2006 et 17
novembre 2009, entre les parties, par la cour d’appel d’Angers ; remet, en conséquence, la cause
et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les
renvoie devant la cour d’appel d’Angers, autrement composée ;

77
- Action en responsabilité formée par un associé au nom de la société. - Cass. com. 19
mars 2013 n° 12-14.213 (n° 274 F-PB), Sté Arcade investissements conseil c/ Sté Antibes
Jules Grec. L'article L 225-252 du Code de commerce autorise les actionnaires d'une société
anonyme à agir en responsabilité au nom de la société contre les administrateurs ou le directeur
général en vue d'obtenir réparation du préjudice que ceux-ci lui ont causé (exercice de l'action
sociale « ut singuli »).
La Cour de cassation vient de juger que ce texte n'autorise l'exercice de l'action sociale ut singuli
qu'à l'encontre de ces dirigeants, de sorte que l'action formée par des actionnaires contre des tiers
est irrecevable.

Note : Cette solution, qui résulte de la lettre même du texte, vaut pour toute société dans laquelle
l'action sociale ut singuli est ouverte aux associés (SARL : C. com. art. L 223-22, al. 3 ; société
civile, en nom collectif et en commandite simple : C. civ. art. 1843-5 ; SAS et société en
commandite par actions par application du régime des SA).
En l'espèce, la SA exploitait une résidence de tourisme dont les murs appartenaient à une filiale
de son actionnaire majoritaire. Un conflit était né entre l'actionnaire majoritaire et les actionnaires
minoritaires sur le point de savoir qui, de la filiale ou de la SA locataire, devait supporter le coût
de travaux de remise aux normes de la résidence. La SA, représentée par son président-directeur
général, actionnaire minoritaire, avait poursuivi la filiale en justice sur la question des travaux.
Mais après la révocation du président, la SA, par l'intermédiaire de son nouveau dirigeant, s'était
désistée dans cette procédure. L'ancien président et deux autres actionnaires minoritaires étaient
alors intervenus volontairement à l'instance par la voie de l'action ut singuli, pour tenter de
maintenir l'action de la SA contre la filiale, abandonnée selon eux par la SA au mépris de ses
intérêts.
Mais, si un associé peut exercer l'action sociale tendant à réparer le préjudice causé à la société par
la faute de ses dirigeants, il ne peut pas agir en justice au nom de celle-ci (Cass. com. 6-12-1977 :
Rev. sociétés 1979 p. 373 note D. Schmidt ; CA Paris 28-5-2009 : RJDA 12/09 n° 1084).

- Expertise de gestion sur une opération de restructuration intragroupe. - Cass. com. 10


septembre 2013 n° 12-16.509 (n° 778 F-PB), Sté Wolters Kluwer France c/ Comité
d'entreprise de la Sté Wolters Kluwer France

Pour les besoins de la réalisation d'une opération de transmission du patrimoine de plusieurs


sociétés d'un groupe à une sous-filiale (une société par actions simplifiée) constituée à cet effet,
celle-ci avait souscrit auprès de la société à la tête du groupe un emprunt important (445
millions d'euros) au moyen duquel elle avait remboursé une avance en compte courant que lui
avait consentie la société holding qui la contrôlait (et qui était elle-même une filiale de la société
tête du groupe). Le comité d'entreprise de la sous-filiale, estimant que cet emprunt avait privé les
salariés de celle-ci de leur droit à participation aux résultats de l'entreprise, avait agi contre elle et
contre la société holding afin d'obtenir la désignation d'un expert chargé de présenter un rapport
sur les conséquences du financement de l'opération de transmission (application de l'article L
225-231 du Code de commerce).
Une cour d'appel avait accueilli la demande de désignation de l'expert et elle avait chargé celui-ci
d'examiner l'ensemble de l'opération. La sous-filiale avait critiqué cette décision en faisant valoir
qu'elle portait atteinte à ses intérêts et qu'elle étendait illégalement la mission de l'expert au-delà
du périmètre de la sous-filiale, où le comité d'entreprise exerçait sa fonction de représentation des
salariés.
La Cour de cassation a écarté ces objections :

78
- l'ensemble des conditions prévues à l'article L 225-231 étaient réunies et il n'y avait pas à
rechercher si, en outre, la mesure d'expertise ordonnée était de nature à porter atteinte à
l'intérêt de la sous-filiale ;
- la demande du comité portant sur les conditions dans lesquelles la sous-filiale avait souscrit
l'emprunt destiné à rembourser le compte courant consenti lors de l'opération de transmission, la
cour d'appel n'avait fait qu'user des pouvoirs qu'elle tient de l'article L 225-231 en prenant
ces éléments en considération pour déterminer la mission de l'expert.
Comme la cour d'appel, la Cour suprême a par ailleurs jugé irrecevable l'action du
comité dirigée contre la société holding. En effet, l'action obéit aux conditions posées par
l'article L 225-231, qui ne prévoit pas qu'elle puisse être formée contre une société autre que celle
dont le demandeur est l'actionnaire ou le comité d'entreprise.

Note : Précisions inédites.


Pour que la demande d'expertise soit recevable, elle doit porter sur une ou plusieurs opérations de
gestion déterminées et revêtir un caractère sérieux (jurisprudence constante). Il n'est pas exigé en
outre, comme le soutenait la société, que la mesure d'expertise ne porte pas atteinte à l'intérêt
social.
Par ailleurs, la cour d'appel pouvait valablement charger l'expert d'examiner l'opération dans son
ensemble dès lors que le montant de l'emprunt était la conséquence directe du choix fait par les
dirigeants du groupe de restructurer celui-ci par voie de cession d'actif. C'est donc à juste titre que
les juges d'appel avaient apprécié l'opération de gestion litigieuse dans sa globalité, en tenant
compte de son aspect financier (les modalités de l'emprunt et du remboursement du compte
courant) et de son aspect économique (les conditions des cessions d'actif à l'origine de l'emprunt).
Limiter la mission de l'expert au seul aspect financier n'aurait donné au comité d'entreprise qu'une
analyse partielle de la situation.
La dernière précision apportée par l'arrêt ci-dessus, de nature procédurale, concerne la société
visée par la demande : il ne peut s'agir que de la société dont le demandeur est l'actionnaire ou,
comme en l'espèce, le comité d'entreprise puisque l'article L 225-231 ne mentionne pas d'autre
société. Au cas particulier, l'argument du comité d'entreprise selon lequel l'opération avait été
menée sous le contrôle de la société holding était donc sans incidence sur la recevabilité de la
demande à l'égard de celle-ci. De même, lorsque, comme l'article L 225-231 l'autorise, la demande
porte sur une opération de gestion accomplie par une filiale de la société dont le demandeur est
l'actionnaire ou le comité d'entreprise, seule cette société doit être assignée ; il n'y a pas lieu de
mettre en cause la filiale (le texte imposant seulement d'apprécier la demande au regard de
l'intérêt du groupe).

79
Faculté de droit et de science politique d'Aix-Marseille

TRAVAUX DIRIGES DROIT SPECIAL DES SOCIETES

Master 1 Droit des affaires


Aix-en-Provence - Année universitaire 2022-2023

SEANCE 4 - SOCIETE CIVILE, SOCIETE EN NOM COLLECTIF, SEP ET GIE

- Cass. com., 15 juin 2010, n°09-15130, JCP E 2010, 1966, note H. Hovasse

Sur le moyen unique :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 16 avril 2009), rendu sur contredit, que la société Delahaye
et associés (la société Delahaye) exerce une activité de courtier en assurance et commercialise des
produits d'assurance AFER ; que cette société, reprochant au Groupement d'intérêt économique
AFER (le GIE) d'avoir abusivement transféré au bénéfice d'autres courtiers certains contrats
souscrits par son entremise, l'a fait assigner devant un tribunal de commerce et demandé le
paiement des commissions ainsi éludées ainsi que des dommages-intérêts ; que le GIE ayant
soulevé l'incompétence du tribunal de commerce, celui-ci s'est déclaré compétent ;
Attendu que le GIE fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté le contredit et dit le tribunal de commerce
compétent, alors, selon le moyen :
1°/ que seule une opération intéressant le fonds de commerce passée par un commerçant et
nécessaire à l'activité du commerce entre dans la compétence du tribunal de commerce ; qu'en
retenant que la décision de décodification des trois contrats litigieux était un acte de commerce
intéressant le fonds de commerce aux seuls motifs que cette décision avait des incidences sur le
fonds de commerce de la société Delahaye, sans avoir constaté l'existence d'un acte nécessaire au
commerce passé par un commerçant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard
de l'article L. 110-1 du Code de commerce ;
2°/ que le GIE n'est justiciable du tribunal de commerce que s'il exerce de façon habituelle, dans
le cadre de son activité réelle, des actes de commerce ; que la cour d'appel, par motifs repris des
premiers juges, ne pouvait déterminer la nature commerciale de l'activité du GIE par seule
référence aux statuts de celui-ci sans rechercher, par l'analyse de son activité réelle, s'il effectuait
de façon habituelle des actes de commerce ; qu'en statuant par des motifs inopérants, déduits de
la seule rédaction des statuts du GIE, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard
des articles L. 121-1 et L. 251-4 du Code de commerce ; (...)
4°/ qu'il résulte des termes clairs et précis de l'article 3 des statuts du GIE que ce groupement
pourra effectuer toutes opérations administratives, financières, et commerciales, mobilières ou
immobilières tendant directement ou indirectement à faciliter l'activité de ses membres tout en
précisant que le GIE ne poursuit aucun but lucratif, et met à disposition de ses membres, à prix
coûtant, l'ensemble des services nécessaires ; qu'en déduisant néanmoins des statuts que la
réalisation d'un acte de commerce entrait dans ces prévisions statutaires, la cour d'appel en a
dénaturé les termes clairs et précis et a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt, par motifs propres et adoptés, relève que les statuts du GIE autorisent
celui-ci à effectuer toutes opérations commerciales se rattachant directement ou indirectement à
la réalisation de son objet et en déduit, sans dénaturation, que ce groupement effectue des actes
de commerce et que son objet présente un caractère commercial ; qu'en l'état de ces constatations
et appréciations, et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et

80
troisième branches, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen, qui ne peut
être accueilli en ses première et troisième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 3 mai 2012, n°11-14844, Publié au bulletin

Sur le moyen unique :


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 25 février 2010), que Mme X..., associée de la société civile
immobilière Artouan et créancière de celle-ci au titre d’avances en compte-courant, a, après avoir
vainement poursuivi la société en paiement, assigné Mme Y..., épouse Z..., sa coassociée, à
proportion de sa part dans le capital social ;
Attendu que Mme X... fait grief à l’arrêt de l’avoir déboutée de sa demande alors, selon le moyen,
que l’associé ayant prêté de l’argent à la société civile est un créancier comme un autre ; qu’en lui
refusant le droit d’agir contre les coassociés, dans la mesure de leur part dans la société, la cour
d’appel a violé l’article 1857 du code civil ;
Mais attendu que les associés ne pouvant se prévaloir de l’obligation aux dettes sociales instituée
au seul profit des tiers par l’article 1857 du code civil, la cour d’appel a statué à bon droit ; que le
moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- Cass. 3ème civ., 12 septembre 2012, n°11-17948, Publié au bulletin

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Colmar, 15 mars 2011), que par acte du 10 septembre 2001, la
caisse de crédit mutuel Porte du Sundgau (la CCM), a consenti un prêt à la société civile
immobilière ADC (la SCI) garanti par une hypothèque sur le bien immobilier de la SCI, que ce
prêt avait notamment pour finalité le rachat de deux prêts consentis à une sarl Sporting France
par la CCM et la banque Kolb ; que par acte du 17 septembre 2002, la SCI s’est portée caution
hypothécaire et solidaire auprès de la CCM pour le remboursement d’un prêt consenti à M. et
Mme Thierry Y...; que par acte du 4 novembre 2004, la SCI s’est portée caution solidaire et
hypothécaire auprès de la CCM pour le remboursement d’un second prêt personnel consenti aux
époux Thierry Y...; que par suite de la mise en liquidation judiciaire de la SCI, la CCM a déclaré
trois créances à titre privilégié, correspondant à chacun de ces trois actes, contestées par Me
Z...en sa qualité de liquidatrice de la SCI ;
Sur le premier moyen :
Vu l’article 1849 du code civil ;
Attendu que pour infirmer l’ordonnance du juge-commissaire et fixer la créance de la CCM au
titre du prêt du 10 septembre 2001 à la somme de 215 858, 46 euros, outre intérêts contractuels,
l’arrêt retient que si le rachat de prêts n’entrait pas dans l’objet social de la SCI tel que défini par
l’article 2 de ses statuts, l’acte de prêt avaient été signé par Victor Y...et Marguerite A...son
épouse, associés uniques de la SCI et que, conformément aux articles 1852 et 1854 du code civil,
la SCI avait été engagée par cet acte, et que la créance devait être admise sans procéder au
moindre abattement fondé sur la destination du financement accordé par la banque ;
Qu’en statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu’il le lui était demandé, si la garantie consentie par la
SCI n’était pas contraire à son intérêt social, dès lors que la valeur de son unique bien immobilier
évaluée à 133 000 euros était inférieure au montant de son engagement et qu’en cas de mise en
jeu de la garantie, son entier patrimoine devrait être réalisé, ce qui était de nature à compromettre
son existence même, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le second moyen :
Vu l’article 1849 du code civil ;
Attendu que pour infirmer l’ordonnance du juge-commissaire et fixer la créance de la CCM au
titre du cautionnement du 17 septembre 2002 à la somme de 38 067, 82 euros, outre intérêts

81
contractuels, l’arrêt retient que cet acte est valable puisqu’il résulte du consentement unanime des
associés, les remarques de l’intimé relatives à l’intérêt social étant à cet égard indifférentes ;
Qu’en statuant ainsi, alors que le cautionnement même accordé par le consentement unanime des
associés n’est pas valide s’il est contraire à l’intérêt social, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a fixé, à titre privilégié la créance de la CCM,
au titre du prêt du 10 septembre 2001, à la somme de 215 858, 46 euros, outre les intérêts au taux
de 7, 97 % l’an à compter du 25 novembre 2008 et au titre du cautionnement du 17 septembre
2002, à la somme de 38 067, 82 euros, outre les intérêts au taux de 8, 20 % l’an et les cotisations
d’assurance-vie au taux de 0, 50 % l’an à compter du 25 novembre 2008, l’arrêt rendu le 15 mars
2011, entre les parties, par la cour d’appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ces points, la
cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les
renvoie devant la cour d’appel de Nancy ;

- L'obligation aux dettes sociales des associés de SCI : Cass. com., 13 octobre 2015, n° 11-
20.746, F-P+B

Sur le premier moyen :


Attendu que Mme Edouard fait grief à l'arrêt de rejeter sa fin de non-recevoir tirée de la
prescription de l'action de la Sofiag alors, selon le moyen :
1°/ que nul ne peut se prévaloir des actes d'une procédure périmée ; qu'en se fondant, pour
retenir la péremption de la procédure de saisie immobilière, sur un acte de cette procédure
périmée, lequel n'était pas susceptible d'entraîner l'interruption de la prescription, la cour d'appel
a violé l'article 389 du code de procédure civile ;
2°/ qu'aux termes de l'article 110-4 du code de commerce dans sa rédaction applicable en
l'espèce, les actions en paiement de dettes commerciales se prescrivent par dix ans ; qu'en se
déterminant comme elle l'a fait, sans constater, sur une période de près de onze ans courant du
mois de novembre 1995, date du dernier paiement des loyers, au 6 juin 2006, date de déclaration
de la créance, aucun autre acte interruptif de prescription qu'un commandement de saisie-
immobilière périmé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte précité ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la créance de la Sofiag avait été irrévocablement admise le 28
juin 2010 au passif de la liquidation judiciaire de la SCI, l'arrêt retient à bon droit qu'elle était ainsi
définitivement consacrée dans son existence et son montant à l'égard des associés, sans que ceux-
ci, tenus à l'égard des tiers indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le
capital social, puissent se prévaloir de la prescription éventuelle de la créance ; que par ce seul
motif, abstraction faite de celui, erroné mais surabondant, critiqué par le moyen, la cour d'appel,
devant laquelle Mme Edouard n'a pas prétendu avoir présenté une réclamation contre l'état des
créances, a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que Mme Edouard fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la Sofiag la somme de
135 268,31 euros en sa qualité d'associée de la SCI alors, selon le moyen :
1°/ que la mise en oeuvre de la responsabilité civile de droit commun ne nécessite la violation
d'aucune disposition légale ou réglementaire spéciale ; qu'en refusant d'examiner la responsabilité
de l'établissement de crédit, au motif inopérant qu'aucune disposition légale ne permettrait à
l'associé d'une société civile d'opposer au créancier une décharge en raison de la perte d'une
garantie pour le recouvrement de la créance, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les
articles 1382 et 1383 du code civil ;
2°/ que différentes fautes peuvent avoir concouru à la réalisation d'un dommage, la faute
éventuelle de la victime n'excluant pas celle d'un tiers ; qu'en se bornant à affirmer que la
condamnation de Mme Edouard n'était pas la résultante d'une faute délictuelle de l'établissement
financier mais de la défaillance de la SCI et des engagements de Mme Edouard en tant

82
qu'associée, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si le versement de fonds
nonobstant la non-réalisation des garanties prévues au contrat ne constituait pas une faute
imputable à l'établissement financier et ayant concouru à la réalisation du dommage, la cour
d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du code civil ;
Mais attendu que c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que le préjudice subi par Mme
Edouard, qui résulte, non d'une faute délictuelle du prêteur, mais directement de la défaillance de
la SCI dans le remboursement du prêt et de son obligation corrélative de supporter les pertes
sociales en sa qualité d'associée, ne présente pas le caractère personnel de nature à justifier de sa
part une action en responsabilité contre le prêteur ; que par ce seul motif, abstraction faite de
ceux critiqués par le
moyen, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le troisième moyen :
Attendu que Mme Edouard fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à voir limiter le
montant de sa condamnation au principal à la somme de 51 185,75 euros et de la condamner à
payer à la Sofiag la somme de 135 268,31 euros en sa qualité d'associée de la SCI alors, selon le
moyen, que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement et
a été tranché dans son dispositif ; que par l'arrêt rendu le 28 juin 2010, la cour d'appel de Basse-
Terre jugeait uniquement « que la créance de la société Sofiag sera[it] inscrite au passif privilégié
de la liquidation de la SCI Pyramide à hauteur de 110 677,97 euros », sans faire mention dans son
dispositif d'un quelconque solde admis à titre chirographaire ; qu'en déduisant néanmoins du dit
arrêt l'existence d'un solde chirographaire, d'un montant au demeurant indéterminé, la cour
d'appel a méconnu l'autorité de la chose jugée de l'arrêt précité du 28 juin 2010 et violé l'article
1351 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel n'a pas méconnu l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt du 28
juin 2010 en retenant qu'il avait admis la créance de la Sofiag pour 110 667,97 euros à titre
privilégié, « le solde étant de nature chirographaire », dès lors que cet arrêt se bornait à rectifier un
précédent arrêt du 20 avril 2009, lequel, en n'infirmant que partiellement l'ordonnance déférée du
juge-commissaire, n'avait statué que sur le caractère privilégié d'une partie de la créance déclarée
pour un montant total de 338 170,78 euros, le solde faisant l'objet d'une admission chirographaire
sans contestation ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

- Cass. com., 20 septembre 2011, n°10-24888, Publié au bulletin

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société civile professionnelle Pernay-Angel, aux droits de
laquelle vient la société civile professionnelle Angel-Hazane (le liquidateur judiciaire), liquidateur
judiciaire de la société civile de moyens Cabinet médical François (la SCM), a assigné les associés
de cette société, MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., E... et F... (les associés), en paiement d’une
certaine somme au titre de leur participation aux charges résultant de l’exploitation de la SCM sur
le fondement de l’article 1832 du code civil ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l’article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour dire cette action irrecevable, l’arrêt retient qu’en fait de pertes, le liquidateur
judiciaire sollicite le paiement par les associés du passif définitivement admis dans le cadre de la
procédure collective, soit celui des dettes sociales ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que dans ses conclusions, le liquidateur judiciaire demandait à
la cour d’appel de constater le montant du passif définitivement admis et celui des actifs réalisés
en vue de la fixation de la contribution aux pertes des associés, la cour d’appel a méconnu l’objet
du litige et a violé le texte susvisé ;
Et sur la deuxième branche :

83
Vu l’article 1832 du code civil ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l’arrêt retient que l’article 1832 du code civil ne vise que
la contribution aux pertes, laquelle joue exclusivement dans les rapports internes à la société et est
étrangère à l’obligation de payer les dettes et ne peut servir de fondement à l’action en
recouvrement du passif social par le liquidateur judiciaire à l’encontre des associés ; qu’il retient
encore que les associés d’une société civile demeurent tenus personnellement à l’égard des
créanciers sociaux, même en cas de procédure collective, et que ni le représentant de créanciers ni
le liquidateur judiciaire n’ont qualité pour agir contre les associés en paiement des dettes sociales ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que le liquidateur judiciaire était recevable à agir à l’encontre
les associés de la SCM pour voir fixer leur contribution aux pertes sociales par la prise en compte,
outre du montant de leurs apports, de celui du passif social et du produit de la réalisation des
actifs, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, (...) CASSE ET ANNULE,

- Cass. com., 20 mars 2012, n°10-27340, Publié au bulletin

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :


Vu les articles 1315 du code civil et L. 221-1 du code de commerce ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X... a présenté à l’encaissement un chèque tiré à son ordre
par la société en nom collectif C...- D...- E... et F... (la société) sur la Banque de Tahiti ; que ce
chèque, ayant été rejeté pour provision insuffisante, a été l’objet d’un certificat de non-paiement
ultérieurement rendu exécutoire ; qu’après avoir vainement engagé une procédure de
recouvrement à l’encontre de la société, M. X... a fait délivrer un commandement de payer à MM.
A..., B..., C..., D... et E... (les associés) ; que M. A... a demandé que le commandement de payer
soit annulé ; que les autres associés sont intervenus à l’instance ;
Attendu que pour condamner les associés au paiement d’une certaine somme, l’arrêt relève
qu’après avoir, en vertu d’un titre exécutoire, engagé en vain une procédure de recouvrement à
l’encontre de la société, M. X... a exercé son recours contre les associés, tenus indéfiniment et
solidairement des dettes sociales ; qu’il retient que, l’obligation des associés au paiement des
dettes sociales ne revêtant qu’un caractère subsidiaire, et le recours cambiaire exercé contre la
société n’ayant pas été contesté, les observations des associés relatives à l’inexistence de la créance
fondamentale ne peuvent être prises en compte ; qu’il retient encore que ces observations ne sont
au surplus pas fondées dès lors que si certains d’entre eux indiquent que le chèque litigieux avait
été émis en garantie d’un achat de perles, ils ne démontrent nullement que les perles aient été
restituées ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors que les associés d’une société en nom collectif ne sont pas les
coobligés de cette dernière, de sorte qu’il incombait au porteur du chèque de rapporter la preuve
de la dette sociale dont il leur réclamait le paiement, une telle preuve ne pouvant résulter du seul
titre exécutoire obtenu contre la société, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 10 décembre 2009, entre les
parties, par la cour d’appel de Papeete ;

- Cass. com., 25 septembre 2012, n°11-30018, Publié au bulletin

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Amiens, 28 octobre 2010), que M. B..., liquidateur judiciaire de la
société en commandite simple Etablissements D... Y... et compagnie (la SCS EGBB) a assigné la
société en nom collectif Y... (la SNC Y...), MM. X..., Z... et C... Y... et Mmes Brigitte et Virginie
Y... (les consorts Y...) pour faire déclarer inopposables à la liquidation judiciaire et aux créanciers
de la SCS EGBB, la cession des parts de cette société consentie le 7 avril 1972 par M. Emile Y... à
MM. Z... et Yves Y... et à Mme Brigitte Y... et la cession des parts de cette même société

84
consentie le 8 février 2003 par MM. X... et Patrick Y... et par Mme Brigitte Y... à M. Yves Y...,
invoquant l’absence de signification de ces cessions à la SCS EGBB en application de l’article L.
221-14 du code de commerce ;
Sur le premier moyen, après avertissement délivré aux parties :
Attendu que les consorts Y... font grief à l’arrêt d’avoir déclaré inopposables à la liquidation
judiciaire de la SCS EGBB et aux créanciers de cette procédure les cessions de parts sociales de la
SCS EGBB, alors, selon le moyen :
1°/ que la durée de la prescription est déterminée par la nature de l’obligation sur le fondement
de laquelle l’action est introduite si bien que lorsque l’obligation est née à l’occasion du commerce
d’un commerçant ou entre commerçants et non commerçants, la durée de la prescription est celle
applicable en matière commerciale, si elle n’est pas soumise à une prescription spéciale plus
courte ; qu’une société en commandite simple est une société commerciale et les associés
commandités de celle-ci, qui ont le statut des associés en nom collectif, ont la qualité de
commerçant ; qu’ainsi, les obligations nées à l’occasion de cessions de parts sociales d’un associé
commandité d’une société en commandite simple, dont celles relatives à l’accomplissement des
formalités édictées par l’article L. 221-14 du code de commerce et prévues pour les sociétés en
nom collectif afin de rendre opposables les modifications survenues parmi les commandités
d’une société en commandite simple, sont-elles soumises à la prescription commerciale édictée
par l’article L. 110-4 du code de commerce ; qu’en écartant dès lors la fin de non-recevoir tirée de
la prescription de l’obligation d’accomplir les formalités destinées à rendre opposables les
cessions de parts sociales d’un associé commandité survenues au sein d’une société en
commandite simple, édictée par l’article L. 221-14 du code de commerce, par un motif inopérant
tiré de l’objet de la demande en inopposabilité qui ne tend ni à l’anéantissement d’un acte, ni à
l’exécution de celui-ci, la cour d’appel s’est déterminée par un motif impropre à établir que la
prescription applicable avait été déterminée par référence à la nature de l’obligation sur laquelle
l’action avait été fondée ; qu’elle a ainsi violé l’article L. 110-4 du code de commerce dans sa
rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 ;
2°/ qu’un associé commanditaire ne peut faire aucun acte de gestion externe si bien que
l’accomplissement des formalités de publicité d’une cession de parts sociales d’une société en
commandite simple destinées à rendre celle-ci opposable aux tiers comme à la société, lesquelles
supposent le dépôt en annexe au registre du commerce et des sociétés de deux originaux de l’acte
de cession qui constitue un acte de gestion externe, incombe nécessairement à un associé
commandité, lequel a la qualité de commerçant ; que l’accomplissement de ces formalités de
publicité constitue donc un acte de commerce ; qu’il est dès lors soumis à la prescription
commerciale prévue par l’article L. 110-4 du code de commerce ; qu’en considérant que l’action
en inopposabilité des cessions de parts sociales de la société en commandite simple EGBB
survenues pour la première entre Emile Y..., associé commandité et cédant, et Patrick Y..., Yves
Y... et Brigitte Y..., cessionnaires, et pour la seconde entre M. Emile Y..., Patrick Y... et Brigitte
Y..., commandités et cédants et M. Yves Y..., cessionnaire, n’était pas soumise à la prescription
édictée par l’article L. 110-4 du code de commerce, sans avoir recherché si l’accomplissement des
formalités prévues par l’article L. 221-14 du code de commerce ne constituait pas un acte de
commerce mis à la charge d’un associé ayant la qualité de commerçant et être né à l’occasion du
commerce d’un commerçant et entre commerçants eu égard à la qualité de commandités des
cédants dans l’un et l’autre cas, la cour d’appel s’est déterminée par des motifs impropres à écarter
le caractère commercial de l’obligation dont l’omission avait été à l’origine de l’action de M. B...,
ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SCS EGBB ; qu’elle a dès lors privé sa
décision de base légale au regard de l’article L. 110-4 du code de commerce ;
3°/ que par application de la prescription trentenaire, la cour d’appel ne pouvait déclarer la
cession de parts sociales de la SCS EGBB du 7 avril 1972, enregistrée le 20 avril 1972
inopposable à la liquidation judiciaire de la SCS EGBB ; qu’ainsi, l’arrêt est entaché d’une
violation des articles 2219, 2248 et 2262 ancien du code civil ;

85
Mais attendu, en premier lieu, que les formalités à accomplir en application de l’article L. 221-14
du code de commerce, qui ne constituent pas une obligation née à l’occasion du commerce entre
commerçants ou entre commerçants et non commerçants, ne relèvent pas de la prescription
prévue à l’article L. 110-4 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin
2008 ; que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, la décision se trouve justifiée ;
Et attendu, en second lieu, qu’il ne résulte ni des écritures des parties, ni de l’arrêt que les
consorts Y... avaient soutenu le moyen tiré de la prescription trentenaire ; que ce moyen est
nouveau et mélangé de fait et de droit ;
D’où il suit que le moyen, irrecevable en sa seconde branche, ne peut être accueilli pour le
surplus ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que les consorts Y... font le même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ que le liquidateur judiciaire, qui est le représentant légal du débiteur admis au bénéfice d’une
procédure de liquidation judiciaire et qui peut introduire les actions qui relèvent de la compétence
du représentant des créanciers, exerce les droits et actions patrimoniaux du débiteur, pendant
toute la durée de la liquidation judiciaire ; qu’il n’est donc pas un tiers à l’égard du débiteur ; qu’en
considérant dès lors que la faculté offerte au liquidateur d’un débiteur admis au bénéfice d’une
procédure de liquidation judiciaire d’introduire les actions patrimoniales relevant de la
compétence du représentant des créanciers lui conférait la qualité de tiers à l’égard du débiteur,
sans avoir recherché si la qualité de représentant légal du débiteur n’était pas exclusive de la
qualité de tiers à l’égard de celui-ci, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de
l’article L. 622-9 du code de commerce, ensemble l’article L. 622-5 de ce même code ;
2°/ que les cessions de parts sociales d’une société en commandite simple détenues par un
associé commandité au profit d’autres associés de celle-ci sont opposables à la société et à son
représentant légal malgré l’absence de publicité au registre du commerce et des sociétés ; qu’en
considérant dès lors que les cessions de parts sociales de la société en commandite simple EGBB
survenues pour la première entre M. Emile Y..., associé commandité et cédant, et Patrick Y...,
Yves Y... et Brigitte Y..., cessionnaires, et pour la seconde entre M. Emile Y..., Patrick Y... et
Brigitte Y..., commandités et cédants et M. Yves Y... cessionnaire, tous associés dans cette société
étaient inopposables aux tiers et dès lors à M. Vincent B..., ès qualités de liquidateur et de
représentant des créanciers de celle-ci, sans avoir constaté, ainsi qu’il y avait été expressément
invité, que la qualité de représentant légal du débiteur de M. Vincent B... n’était pas exclusive de la
qualité de tiers à la SCS EGBB, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de
l’article L. 221-14 du code de commerce ;
Mais attendu qu’ayant relevé que le liquidateur judiciaire, s’il représente le débiteur, est également
investi de la mission de défense de l’intérêt collectif des créanciers et que cette dualité de
fonctions lui confère en tant qu’organe de défense de cet intérêt collectif la qualité de tiers par
rapport au débiteur, la cour d’appel, qui en a exactement déduit que M. B..., ès qualités, était
recevable à invoquer dans l’intérêt collectif des créanciers de cette procédure les dispositions de
l’article L. 221-14, alinéa 2, du code de commerce, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa
décision ; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le troisième moyen :
Attendu que les consorts Y... font le même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ que si la cession des parts sociales d’une société commerciale est rendue opposable à la
société dans les formes prévues par l’article L. 221-14 du code de commerce, la société dont le
gérant, à défaut de l’accomplissement de ces formalités, réunit une assemblée générale
extraordinaire à laquelle il participe en tant qu’acquéreur des parts cédées et au cours de laquelle
les statuts sont modifiés en conséquence de cette cession, ratifie expressément par ses organes la
cession de parts intervenue et renonce à se prévaloir de l’inopposabilité de la cession à son égard ;
en considérant dès lors que la cession des parts sociales de la société EGBB en date du 8 février
2003 au profit de son gérant en fonction, M. Yves Y..., était inopposable à celle-ci sans avoir

86
précisé en quoi la réunion des assemblées générales auxquelles le gérant avait participé en prenant
en compte les parts sociales ainsi acquises ne valait pas ratification expresse par les organes de
gestion de la SCS EGBB des cessions de parts sociales en date du 8 février 2003 et renonciation
de celle-ci à se prévaloir de l’inopposabilité des cessions à son égard faute d’accomplissement des
formalités prévues par l’article L. 221-14 du code de commerce, la cour d’appel n’a pas répondu
au moyen péremptoire développé par les consorts Y... et selon lequel, la cession litigieuse avait
été constatée aux cours des assemblées postérieures à celle-ci et ratifiées par M. Yves Y...,
cessionnaire et gérant, de sorte que la SCS EGBB avait une parfaite connaissance des cessions de
parts sociales intervenues ; qu’elle a ainsi violé l’article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que l’opposabilité d’une cession de parts sociales à une société peut résulter de la signification
de cette cession par voie de conclusions au cours d’une instance ; en considérant que la cession
de parts sociales en date du 8 février 2003 était inopposable au liquidateur de la société EGBB et
à celle-ci sans avoir recherché si la communication de cession de parts sociales en cours
d’instance, ainsi que l’y invitaient les consorts Y... qui avaient communiqué cette cession sous la
pièce n° 2, n’avait rendu cette cession opposable à la SCS EGBB et à son liquidateur, la cour
d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 221-14 du code de commerce,
ensemble l’article 1690 du code civil ;
Mais attendu que la cour d’appel, qui n’était pas tenue de répondre aux conclusions invoquées dès
lors qu’elles ne portaient pas sur la cession de parts du 8 février 2003, seule visée au moyen, et qui
a procédé à la recherche visée à la seconde branche, a légalement justifié sa décision ; que le
moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- La Semaine Juridique Entreprise et Affaires n° 51, 19 Décembre 2013, act. 929


Les associés d'une SNC sont exclus du bénéfice des dispositions relatives au
surendettement - Cass. 2e civ., 5 déc. 2013, n° 11-28.092

Les articles L. 631-2 et L. 640-2 du Code de commerce, dans leur rédaction issue de l'ordonnance
n° 2008-1445 du 18 décembre 2008, entrée en vigueur le 15 février 2009, disposent désormais
que les procédures de redressement judiciaire et de liquidation judiciaires sont applicables à « toute
personne exerçant une activité commerciale ou artisanale... » et non plus « à tout commerçant, à toute
personne immatriculée au répertoire des métiers... ». Or, l'article L. 221-1 du Code de
commerce précise que les associés en nom collectif ont tous la qualité de commerçant.
La deuxième chambre civile de la Cour de cassation avait sollicité l'avis de la chambre
commerciale pour savoir si la modification terminologique des articles L. 631-2 et L. 640-2 du
Code de commerce entraînait l'exclusion des associés de société en nom collectif du régime des
procédures collectives du Code de commerce leur ouvrant ainsi le bénéfice des procédures de
surendettement. Le 9 juillet 2013, la chambre commerciale de la Cour de cassation a émis l'avis
selon lequel les associés de société en nom collectif ayant de droit la qualité de commerçants sont
réputés exercer une activité commerciale au sens des articles L. 631-2 et L. 640-2 du Code de
commerce dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 et
relèvent donc des procédures collectives(Cass. com., avis, 9 juill. 2013, n° 1128092).
La deuxième chambre civile, suivant cet avis, décide que les associés gérants d'une société en nom
collectif sont exclus du bénéfice des dispositions relatives au surendettement des particuliers car,
ayant de droit la qualité de commerçants, ils sont réputés exercer une activité commerciale au
sens des articles L. 631-2 et L. 640-2 du Code de commerce qui disposent, dans leur rédaction
issue de l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 , que les procédures de redressement et
liquidation judiciaires sont applicables à « toutes personnes exerçant une activité commerciale ou artisanale».

87
- Procédure collective d'une SNC et situation des associés
Rép. min. n° 17665 à M. Christophe Castaner : JOAN Q, 19 nov. 2013, p. 12126
En application de l'article L. 624-1 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi
n°2005-845 du 26 juillet 2005, le tribunal qui ouvrait une procédure de redressement ou de
liquidation judiciaire avait l'obligation de prononcer le redressement judiciaire ou la liquidation
judiciaire de chaque associé solidairement ou indéfiniment responsable du passif social. Depuis
l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005, l'ouverture d'une procédure collective n'entraîne
plus l'ouverture de plein droit, à l'égard de chacun de ces associés [d'une SNC], d'une procédure
collective, l'article L. 624-1 ayant été abrogé. Cependant, les procédures ouvertes en vertu de
l'article L. 624-1 dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005, ne sont pas affectées par
ces nouvelles dispositions, comme le précise l'article 192 de cette loi. En conséquence, les
associés concernés demeurent soumis aux procédures ainsi ouvertes jusqu'à leur clôture, qui peut
être une clôture pour insuffisance d'actif entraînant l'application de l'article L. 643-11 selon lequel
le jugement de clôture pour insuffisance d'actif d'une liquidation judiciaire ne fait pas recouvrer
aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur. En ce qui concerne les
obstacles découlant de ces procédures, l'article R. 123-135 du Code de commerce, relatif à la
radiation d'office du registre du commerce et des sociétés de mentions relatives aux procédures
collectives a été modifié par le décret n° 2011-1836 du 7 décembre 2011 afin de limiter plus
strictement dans le temps la durée de ces mentions. En outre, le décret n° 2012-405 du 23 mars
2012 a modifié dans le même sens l'article D. 144-12 du Code monétaire et financier. Selon ce
texte, les informations détenues par la Banque de France qui peuvent être communiquées à des
tiers pendant une période limitée ne sont que celles qui concernent les dirigeants d'entreprise et
les entrepreneurs individuels. En complément de ces améliorations, qui assurent un meilleur
compromis entre l'information des créanciers et les droits des dirigeants ou entrepreneurs, il est
apparu nécessaire, pour ces derniers, de modifier les modalités de cotation faites à partir des
informations issues de la base de données du Fichier bancaire des entreprises, dit FIBEN. Les
associés solidairement et indéfiniment responsables du passif social qui ont fait l'objet, en cette
qualité, d'une procédure collective sur le fondement des anciennes dispositions seront concernés
par ces modifications s'ils avaient également la qualité de dirigeant de la société soumise à la
procédure collective initiale. Comme l'article L. 221-3 du Code de commerce dispose que, sauf
stipulation contraire des statuts, tous les associés d'une société en nom collectif sont gérants,
chaque associé d'une telle société bénéficiera donc, à ce titre, des modifications de l'indicateur
dirigeant de la Banque de France pour les personnes physiques qui exercent ou ont exercé une
fonction de représentant légal ou d'entrepreneur individuel dans une entreprise ayant fait l'objet
d'un jugement de liquidation judiciaire datant de moins de 3 ans.

- L'associé de SNC n'est pas salarié : Cass. soc., 14 octobre 2015, n° 14-10.960, FS-P+B
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 novembre 2013), que la société en nom collectif HKM
(SNC HKM) exploitant un fonds de commerce de « café bar restaurant brasserie » à Paris a été
constituée le 26 mars 2009 entre M. Bensid, Mme Menad et M. Sahridj ; que M. Sahridj tenait
l'établissement une partie du temps et logeait dans l'appartement situé à l'étage ; que se prévalant
d'un contrat de travail, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappels de salaires et
d'indemnités pour rupture abusive ;
Attendu que M. Sahridj fait grief à l'arrêt de rejeter son contredit, de dire que le conseil de
prud'hommes de Paris n'était pas compétent pour connaître de ses demandes et de renvoyer
l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris alors, selon le moyen :
1°/ que le fait d'être associé, minoritaire et non gérant, d'une société en nom collectif et d'être à
ce titre commerçant, n'exclut pas une relation salariale dans cette société ; que le cumul des
qualités d'associé et de salarié dans la même société en nom collectif est possible, aucun texte
relatif aux sociétés en nom collectif ne l'interdisant ; qu'en se bornant à affirmer, pour rejeter le

88
contredit et renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris, que M. Sahridj avait la
qualité d'associé de la SNC HKM et donc de commerçant, qualité exclusive d'une relation
salariale, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 et L. 1411-1 du code du travail ;
2°/ qu'en se bornant à relever, pour rejeter le contredit et renvoyer l'affaire devant le tribunal de
commerce de Paris, que la charge de travail inhérente à la fonction d'associé ne saurait constituer
un contrat de travail à durée indéterminée sans rechercher, comme elle y était invitée, si M.
Sahridj n'occupait pas des fonctions salariées distinctes de sa qualité d'associé puisqu'il lui revenait
de prendre en charge une mission purement opérationnelle en s'occupant, sous la subordination
juridique de la société, du bon fonctionnement du service dans le café durant certaines tranches
horaires décidées par son employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard
des articles L. 1221-1 et L. 1411-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu que M. Sahridj était associé de la SNC HKM, et à
ce titre, en vertu de l'article L. 221, alinéa 1, du code de commerce, commerçant répondant
indéfiniment et solidairement des dettes sociales, en a exactement déduit que cette situation
excluait qu'il puisse être lié à cette société par un contrat de travail ; que le moyen n'est pas
fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;

- Groupement d’intérêt économique (GIE) : sanction de l’inobservation des dispositions


statutaires. - Cass. com., 6 mai 2014, n°13-11.427, FS-P+B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Rennes, 16 octobre 2012), que le groupement d’Achat de
transformateurs d’étiquettes (le GIE) est un groupement d’intérêt économique ayant pour objet
de négocier les prix des produits entrant dans le domaine d’activité de ses membres et de leur
redistribuer les remises de fin d’année obtenues des fournisseurs ; qu’après son exclusion du GIE,
la société Compagnie industrielle d’étiquettes (la société CIE), a fait assigner celui-ci aux fins,
notamment, d’annulation de la décision adoptée le 25 mai 2007 par l’assemblée des membres du
groupement, ayant introduit dans les statuts une clause prévoyant qu’en cas de réalisation de
bénéfices, l’assemblée affectera une partie de ceux-ci en réserve, et de condamnation du GIE à lui
restituer la fraction qui aurait été indûment prélevée sur les remises consenties par les
fournisseurs au titre des années 2007 et 2008 ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société CIE fait grief à l’arrêt de rejeter ces demandes alors, selon le moyen :
1°/ que dans ses conclusions d’appel, la société CIE faisait valoir que la décision de modification
du règlement intérieur du GIE GATE avait été adoptée à la majorité, quand les statuts exigeaient
qu’une telle modification soit adoptée à l’unanimité de sorte qu’en se bornant à retenir que la
modification statutaire avait été régulièrement décidée sans répondre aux conclusions d’appel de
l’exposante qui se prévalait de l’unanimité requise pour décider d’une modification du règlement
intérieur, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu’il résultait tant des écritures de la société CIE que de celles du GIE GATE que celle-là
n’avait pas approuvé la modification des statuts et du règlement intérieur décidée lors de
l’assemblée générale du 25 mai 2007, mais s’était abstenue ; qu’en retenant néanmoins que « cette
modification statutaire actant la possibilité pour le GIE GATE de constituer une réserve a vait
été approuvée par la société CIE », la cour d’appel a dénaturé les termes du litige, en violation de
l’article 4 du code de procédure civile ;
3°/ que les bénéfices réalisés par un groupement d’intérêt économique sont la propriété exclusive
et immédiate de ses membres à qui ils doivent être intégralement distribués ; qu’en estimant
valable la délibération du 25 mai 2007 ayant modifié les statuts et le règlement intérieur du GIE

89
GATE pour stipuler que les bénéfices réalisés ne deviendraient propriété des membres qu’après
dotation d’une réserve, quand une telle modification méconnaissait la règle impérative faisant
défense aux GIE de réaliser des bénéfices pour eux-mêmes, la cour d’appel a violé les articles L.
251-1 et L. 251-5 du code de commerce ;
4°/ que l’irrecevabilité de la demande d’une société membre d’un GIE tendant à l’annulation
d’une décision d’une assemblée générale à laquelle elle a participé est subordonnée à la
constatation de l’inexistence de son intérêt à agir ; qu’en déduisant dès lors de la participation de
la société CIE au vote de l’assemblée générale ayant décidé la mise en réserve d’une partie des
remises dues aux membres du groupement pour l’année 2007 son irrecevabilité à agir en nullité
de la délibération prise, sans cependant constater son défaut d’intérêt à agir, la cour d’appel a
privé sa décision de base légale au regard des articles 31 du code de procédure civile et 1844-10
du code civil ;
5°/ qu’en relevant, pour écarter la demande de la société CIE tendant à obtenir la condamnation
du GIE GATE à lui restituer la portion qu’il avait prélevée sur les sommes qu’il devait lui
reverser au titre des remises consenties pour l’année 2008, que l’exercice 2008 était « déficitaire et
ne pouvait donner lieu à aucune redistribution », tout en constatant qu’il « comport ait une
provision (51 602 euros) sur le litige ayant opposé le GIE GATE à plusieurs de ses membres
dont la CIE », la cour d’appel, qui a statué par des motifs contradictoires, a violé l’article 455 du
code de procédure civile ;
6°/ que les bénéfices réalisés par un groupement d’intérêt économique sont la propriété exclusive
et immédiate de ses membres à qui ils doivent être intégralement distribués ; qu’en se fondant,
pour écarter la demande de la société CIE tendant à ce que lui soit restituée la somme prélevée
par le GIE sur les remises que celui-ci devait intégralement lui reverser, sur le caractère déficitaire
de l’exercice 2008, quand le GIE GATE admettait lui-même avoir effectué un prélèvement sur
les sommes redistribuées à la société CIE pour en mettre une partie en réserve, ce qui suffisait à
justifier sa condamnation à restitution peu important le caractère déficitaire de l’exercice, la cour
d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 251-1 du code de commerce ;
Mais attendu, de première part, qu’il résulte de l’article L. 251-5 du code de commerce que la
nullité des actes ou délibérations d’un groupement d’intérêt économique ne peut résulter que de
la violation des dispositions impératives des textes régissant ce type de groupement, ou de l’une
des causes de nullité des contrats en général ; que, sous réserve des cas dans lesquels il a été fait
usage de la faculté, ouverte par une disposition impérative, d’aménager conventionnellement la
règle posée par celle-ci, le non-respect des stipulations contenues dans les statuts ou dans le
règlement intérieur n’est pas sanctionné par la nullité ; qu’il s’ensuit que la cour d’appel n’avait pas
à répondre aux conclusions inopérantes visées par a première branche ;
Attendu, de deuxième part, que le motif critiqué par la deuxième branche est surabondant ;
Attendu, de troisième part, que si le but du groupement d’intérêt économique n’est pas de réaliser
des bénéfices pour lui-même, cette règle ne fait pas obstacle à ce qu’une partie des résultats
provenant de ses activités soit mise en réserve dans les comptes du groupement pour les besoins
de la réalisation de son objet légal ; qu’après avoir relevé qu’afin de satisfaire aux besoins de
fonctionnement et aux objectifs du GIE, il avait été décidé, en assemblée générale, depuis 1997,
de prélever avant leur redistribution à ses membres 2 % des remises de fin d’année versées par les
fournisseurs pour constituer la “réserve GATE” et précisé qu’il s’agissait en réalité de la
mutualisation anticipée des risques, destinée à faire face aux frais de fonctionnement, l’arrêt
retient que “ce système” a été repris dans la modification statutaire du 25 mai 2007, de sorte qu’il
y a continuité dans les comptes du GIE ; que de ces constatations et appréciations , la cour
d’appel a exactement déduit que la délibération litigieuse ne contrevenait pas aux dispositions de
l’article L. 251-1 du code de commerce ;
Attendu, de quatrième part, que la cour d’appel, qui a retenu que la modification des statuts
critiquée par le moyen avait été régulièrement décidée, n’a pas déclaré la société CIE irrecevable
en sa demande tendant à l’annulation de cette décision ;

90
Attendu, de cinquième part, que les motifs critiqués par la cinquième branche ne sont pas
entachés de contradiction ;
Et attendu, enfin, qu’il résulte de la réponse aux troisième et quatrième branches que la société
CIE n’était pas fondée en sa demande tendant à condamnation du GIE au paiement d’une partie
des sommes prélevées sur les remises de fin d’année, conformément à ses statuts, au titre des
exercices 2007 et 2008 ;
D’où il suit que le moyen, pour partie inopérant, n’est pas fondé pour le surplus ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société CIE fait encore grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande tendant à
l’annulation de la décision de l’assemblée générale du 16 avril 2008 ayant prononcé son exclusion
et d’avoir, en conséquence, écarté sa demande d’indemnisation du préjudice causé par cette
exclusion alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation d’une disposition de l’arrêt attaqué entraîne l’annulation par voie de
conséquence des autres dispositions de l’arrêt qui s’y rattachent par un lien d’indivisibilité ou de
dépendance nécessaire ; qu’en l’espèce, pour estimer valable l’exclusion de la société CIE décidée
par une délibération de l’assemblée générale du 16 avril 2008, la cour d’appel a retenu que cette
exclusion était justifiée par les contestations élevées par la société CIE à l’encontre de « décisions
déjà prises régulièrement par le GIE GATE » ; qu’il en résulte que le rejet de la demande
d’annulation de la décision d’exclusion de la société CIE est indivisible du rejet, d’une part, de sa
demande d’annulation de la délibération du 25 mai 2007 et, d’autre part, de sa demande de
restitution des sommes indûment mises en réserve par le GIE GATE, critiqué par le deuxième
moyen ; que la cassation qui interviendra sur le deuxième moyen entraînera dès lors, par voie de
conséquence, la cassation de la disposition de l’arrêt relative au rejet de la demande de la société
CIE tendant à l’annulation de la délibération de l’assemblée générale ayant décidé son exclusion,
en application de l’article 625 du code de procédure civile ;
2°/ que dans ses conclusions d’appel, la société CIE faisait valoir que lors de l’assemblée générale
du 16 avril 2008, elle n’avait pas été autorisée à prendre part au vote relatif à l’exclusion de la
société Serec et que celle-ci n’avait pas été autorisée à prendre part au vote concernant l’exclusion
de la société CIE, quand les statuts n’autorisaient qu’un membre du GIE soit privé de son droit
de vote qu’en ce qu’il était statué sur sa propre exclusion et non sur celle d’un autre membre ;
qu’en statuant sur la régularité de la délibération sans se prononcer sur cette méconnaissance des
statuts soulevée par la société CIE, la cour d’appel a privé sa décision de motif en violation de
l’article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d’une part, que le deuxième moyen ayant été rejeté, la première branche est sans
portée ;
Attendu, d’autre part, qu’ayant relevé que la société CIE ne justifiait d’aucune cause d’annulation
de la décision d’exclusion, la cour d’appel a répondu aux conclusions invoquées par la seconde
branche ;
D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Et attendu que le premier moyen ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

- GIE : mise en réserve des résultats et droit du membre retrayant sur sa part dans les
réserves : Cass. com., 19 janvier 2016, n° 14-19.796, FS-P+B

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :


Vu l'article L. 251-1 du code de commerce ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que si le but du groupement d'intérêt économique n'est pas de
réaliser des bénéfices pour lui-même, cette règle ne fait pas obstacle à ce que tout ou partie des
résultats provenant de ses activités soit mis en réserve dans les comptes du groupement pour les
besoins de la réalisation de son objet légal ; qu'il en résulte également qu'à défaut de clause

91
statutaire ou de décision d'assemblée en ce sens, le membre du groupement d'intérêt économique
qui se retire de celui-ci ou en est exclu ne peut obtenir le remboursement de sa part dans les
réserves régulièrement constituées ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société à responsabilité limitée Alain Richard a participé à la
constitution du groupement d'intérêt économique C9 (le GIE), dont elle est restée membre
jusqu'à son exclusion intervenue le 4 juillet 2008 ; que lors des assemblées des 8 juillet 2005, 7
juillet 2006, 22 juin 2007 et 4 juillet 2008, les membres du GIE ont décidé d'affecter le résultat
positif de l'exercice à la réserve facultative prévue par les statuts et le règlement intérieur ; que la
société Alain Richard ayant été mise en liquidation judiciaire, son liquidateur a assigné le GIE en
paiement de la quote-part de cette société dans les bénéfices mis en réserve avant son exclusion ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt, après avoir constaté que la mise en réserve de
tout ou partie du résultat du GIE était admise par les statuts et le règlement intérieur pour des
raisons de bonne gestion, retient, par motifs propres et adoptés, que les sommes figurant dans le
compte de réserves sont la propriété des membres du GIE à proportion de la quote-part des
résultats auxquels ils ont droit ; qu'il retient encore que cette quote-part, si elle ne leur a pas été
versée, leur est acquise et ne peut
leur être retirée sauf à profiter de manière illicite au GIE, lequel ne peut faire de bénéfices pour
lui-même ; qu'il ajoute qu'aucune clause des statuts ne prive le membre du GIE qui a fait l'objet
d'une exclusion de son droit au paiement de sa part dans les réserves non distribuées ainsi que
dans les résultats positifs de l'exercice en cours ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que la prescription triennale de l'article 1844-14 du
code civil n'est pas opposable à M. Benoit, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société
Alain Richard, l'arrêt rendu le 9 avril 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet,
en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant
ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

- Nullité du cautionnement consenti par une SCI pour contrariété à son intérêt social. -
Cass. 3e civ., 9 déc. 2014, n°13-25219, SCI de l’Égalité, F–D, BJS févr. 2015, p. 75, note
François-Xavier Lucas
Ayant retenu souverainement que l’engagement de caution était contraire à l’intérêt social de la SCI dès lors qu’il
conduisait à la vente forcée de l’unique bien composant son patrimoine et compromettait jusqu’à son existence même
sans qu’elle ait reçu un quelconque bénéfice en contrepartie et exactement que les dispositions de l’article 1844-16
du Code civil ne concernaient que les nullités relatives aux conditions de fonctionnement de la société, la cour
d’appel en a déduit à bon droit que la nullité de l’engagement de caution était opposable au créancier.

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :


Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu qu’ayant retenu souverainement que l’engagement de caution était contraire à l’intérêt
social de la société civile immobilière de l’Egalité dès lors qu’il conduisait à la vente forcée de
l’unique bien composant son patrimoine et compromettait jusqu’à son existence même sans
qu’elle ait reçu un quelconque bénéfice en contrepartie et exactement que les dispositions de
l’article 1844-16 du code civil ne concernaient que les nullités relatives aux conditions de
fonctionnement de la société, la cour d’appel, qui a répondu aux conclusions, en a déduit à bon
droit que la nullité de l’engagement de caution était opposable à la société Etablissements
Verney ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

92
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 16 mai 2018, 16-16.498, Publié au
bulletin

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 2 février 2016), que la société La Goélette SNC (la
société La Goélette) comptait trois associés à parts égales, M. X..., Mme A... et la société
Immobilière des deux frères (la société Immobilière) ; que par acte enregistré le 27 janvier 1995, la
société Immobilière a cédé à la société Farner et Cie les quarante parts sociales qu'elle détenait
dans le capital de la société La Goélette ; que la société Immobilière a été dissoute par décision
déposée au registre du commerce et des sociétés (RCS) le 4 novembre 1996, son gérant, M. Y...,
étant désigné liquidateur ; que les opérations de liquidation ont été clôturées le 27 juin 1997 ; que
la société La Goélette, M. X... et Mme A... ont assigné la société Copadig, venant aux droits de la
société Farner et Cie, pour voir juger que ni l'une ni l'autre de ces sociétés ne sont ses associées ;
que la société Copadig et M. Y..., ce dernier intervenant à l'instance en qualité de mandataire ad
litem de la société Immobilière, ont demandé reconventionnellement l'annulation de l'assemblée
générale du 10 août 2009 d'approbation des comptes sociaux de 2002 à 2008 de la société La
Goélette ainsi que des assemblées suivantes, faute d'y avoir été convoqués ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que la société La Goélette, M. X... et Mme A... font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable
leur demande d'annulation de la cession des parts détenues par la société Immobilière dans la
société La Goélette et de rejeter en conséquence la demande de la société La Goélette en
répétition d'une somme de 4 500 euros alors, selon le moyen :

1°/ que la nullité d'une cession de parts d'une société en nom collectif n'ayant pas reçu l'agrément
unanime des associés peut être invoquée uniquement par la société elle-même ou par ses associés
; qu'en déclarant que la société en nom collectif elle-même et ses associés, tiers à la cession,
étaient irrecevables à en demander la nullité, la cour d'appel a violé l'article L. 221-13 du code de
commerce ;

2°/ que la cession des parts d'une société en nom collectif qui n'a pas reçu l'agrément unanime de
tous les associés est nulle ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que la cession des parts sociales
que détenait la société Immobilière des deux frères dans la société La Goélette qui avait été
consentie successivement à la société Farner et Cie, puis à la société Copadig, n'avait pas reçu
l'agrément des autres associés, M. X... et Mme A..., l'arrêt attaqué ne pouvait pas décider que cette
cession était uniquement inopposable aux autres associés et à la société elle-même ; qu'en statuant
comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 221-13 du code de commerce ;

Mais attendu que le défaut d'agrément unanime des associés à la cession des parts sociales d'une
société en nom collectif n'entraîne pas la nullité de la cession, laquelle est seulement inopposable
à la société et aux associés ; que le moyen, qui postule le contraire en sa seconde branche, et
critique, en sa première branche, des motifs erronés mais surabondants, ne peut être accueilli ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que la société Copadig et M. Y..., ès qualités, font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable
leur demande d'annulation des assemblées générales de la société La Goélette alors, selon le
moyen :

1°/ que la personnalité morale d'une société dissoute subsiste, malgré sa radiation du registre du
commerce et des sociétés, aussi longtemps que les droits et obligations à caractère social ne sont

93
pas liquidés ; qu'en considérant que M. Y..., ès qualités de mandataire ad litem de la société
Immobilière, n'était pas recevable à demander l'annulation d'assemblées générales d'approbation
des comptes de la société La Goélette auxquelles la société Immobilière, associée, n'avait pas été
convoquée, cependant que le droit dont disposait la société Immobilière de demander
l'annulation des assemblées en cause constituait un droit à caractère social, la cour d'appel a violé
les articles L. 237-2 et L. 237-24 du code de commerce ;

2°/ que lorsqu'une cession, par un associé, de parts sociales d'une société en nom collectif n'a pas
reçu l'agrément des autres associés, le juge, saisi par le cédant et le cessionnaire de demandes
d'annulation d'une assemblée générale, ne peut, à la fois, pour rejeter ces demandes, opposer au
cessionnaire le défaut d'agrément et opposer au cédant la revente de ses parts sociales ; qu'en
considérant, pour rejeter la demande de M. Y..., ès qualités de mandataire ad litem de la société
Immobilière, que cette dernière avait revendu en totalité, antérieurement à sa liquidation, les parts
sociales qu'elle détenait dans la société La Goélette, après avoir opposé à la société Copadig le
défaut d'agrément des autres associés, la cour d'appel a violé l'article L. 221-13 du code de
commerce ;

Mais attendu que l'arrêt constate que par acte enregistré le 27 janvier 1995, la société Immobilière
a cédé les parts sociales qu'elle détenait dans le capital de la société La Goélette, qu'elle a été
dissoute par décision du 30 juillet 1996 déposée au RCS le 4 novembre 1996 et que les opérations
de liquidation ont été clôturées le 27 juin 1997 ; qu'il retient que M. Y..., au nom de la société
Immobilière, est irrecevable à demander l'annulation des assemblées générales d'approbation des
comptes du 10 août 2009 pour les exercices 2002 à 2008 inclus et les assemblées postérieures
pour l'approbation des comptes de 2009 à 2013 puisque la société dont il est le mandataire ad
litem ne conserve la personnalité morale que pour les besoins de la liquidation des droits et
obligations à caractère social subsistant après la clôture des opérations de sa liquidation ; qu'ayant
ainsi fait ressortir que le mandataire ad litem n'invoquait aucun droit ou obligation à caractère
social de la société liquidée nés avant sa liquidation, c'est à bon droit, abstraction faite des motifs
surabondants critiqués par la deuxième branche, que la cour d'appel a déclaré sa demande
irrecevable ; que le moyen, pour partie inopérant, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

94
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 10 avril 2019, 17-28.834, Publié au
bulletin

ur le moyen unique, pris en ses troisième et septième branches, qui est recevable :

Vu les articles 1872-2 et 1873 du code civil ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que la dissolution d'une société créée de fait peut résulter à tout
moment d'une notification adressée par l'un d'eux à tous les associés, pourvu que cette
notification soit de bonne foi, et non faite à contretemps ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par lettre recommandée du 25 juin 2014, M. Y... a notifié à M.
D..., son associé dans une société créée de fait exploitant une officine de pharmacie, sa volonté de
mettre un terme à leur indivision ; qu'il l'a ensuite assigné en dissolution de cette société, sur le
fondement de l'article 1872-2 du code civil ;

Attendu que pour rejeter sa demande, l'arrêt retient que M. Y... ne démontre pas que,
contrairement à ses allégations, tous les candidats acquéreurs ont été systématiquement évincés
par M. D..., et qu'il ne justifie d'aucune démarche postérieure à la fin de l'année 2012 et antérieure
à la notification de la dissolution de la société, près de deux ans après ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser une notification faite de
mauvaise foi ou à contretemps, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 juin 2017, entre les parties,
par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon,
autrement composée ;

95
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 11 mai 2017, 14-29.717, Publié au
bulletin

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le groupement d'intérêt économique Les Indépendants (le
GIE) a été créé, en 1992, par des radios locales en vue d'agréger leurs audiences respectives afin
de proposer aux annonceurs nationaux une offre d'espaces publicitaires groupée ; que les sociétés
Radio Nova et TSF Jazz en sont devenues membres en 1993 et 2003 ; que le mode de
fonctionnement du GIE est régi par son règlement intérieur, que chaque nouveau membre et
adhérent est tenu d'accepter et dont les évolutions s'imposent à lui ; que l'article 21.1 de ce
règlement , dans sa version signée en 2009 par les sociétés Radio Nova et TSF Jazz, prévoit qu'en
cas de départ d'un membre ou d'un adhérent du GIE, celui-ci s'engage, pendant la durée du
préavis, i) à ne pas apparaître dans un autre produit ou couplage commercial et ii), pour le produit
national, à ne pas apparaître seul dans les résultats nationaux d'audience publiés par l'institut de
sondage "Médiamétrie", ces engagements étant assortis d'une faculté de dédit, moyennant le
versement d'une indemnité égale à 30 % du chiffre d'affaires de publicité nationale perçu dans les
douze derniers mois précédant la décision de retrait ; que le 31 août 2011, les sociétés Radio
Nova et TSF Jazz ont informé le GIE de leur démission et de la commercialisation de leurs
espaces publicitaires par la société Nova régie à l'issue du préavis expirant le 30 septembre 2012 ;
que, constatant que l'enquête publiée le 18 avril 2012 par "Médiamétrie" mentionnait l'audience
de Radio Nova et celle d'un nouveau couplage regroupant les audiences des deux radios, le GIE a
réclamé aux sociétés Radio Nova et TSF Jazz le paiement de l'indemnité de dédit ; que soutenant
que la clause prévue à l'article 21.1 créait un déséquilibre significatif dans les droits et obligations
des parties, celles-ci ont assigné le GIE en annulation de cette clause, sur le fondement de l'article
L. 442-6, I, 2°, du code de commerce ; que le GIE a poursuivi, à titre reconventionnel, la
condamnation des deux sociétés au paiement de l'indemnité de dédit, tandis que celles-ci ainsi
que la société Nova régie ont, par une seconde assignation, demandé la condamnation du GIE et
de la société TF1 publicité, chargée de la commercialisation du produit publicitaire national
intitulé "Les Indépendants", au paiement de dommages-intérêts pour concurrence déloyale et
parasitaire et pour pratiques commerciales trompeuses ;

Sur le troisième moyen du pourvoi incident :

Attendu que les sociétés Radio Nova, TSF Jazz et Nova régie font grief à l'arrêt du rejet de leurs
demandes de dommages-intérêts fondées sur le parasitisme alors, selon le moyen, que le
parasitisme est constitué par la captation de la valeur économique d'autrui, qu'elle soit ou non
intentionnelle ; qu'ayant constaté que la société TF1 publicité avait laissé subsister Radio Nova et
TSF Jazz dans la liste des radios du produit "Les Indés radios" après leur départ, la cour d'appel,
qui a retenu, pour rejeter l'action de ces sociétés fondées sur le parasitisme, que la régularisation
était intervenue dans de brefs délais et qu'il n'était donc pas établi que la société TF1 publicité ait
eu l'intention de s'immiscer dans le sillage des sociétés Radio Nova, TSF Jazz et Nova régie, a
statué par un motif inopérant, et violé l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que les sociétés Radio Nova et TSF Jazz reprochaient au GIE et à
la société TF1 publicité d'avoir laissé figurer leurs noms en page 38 des conditions générales de
vente de cette dernière, postérieurement à leur retrait du GIE intervenu le 30 septembre 2012,
l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que ce document indiquait clairement que la liste
mentionnant le nom des deux sociétés était celle des membres du GIE au 30 novembre 2011 ;
qu'il relève encore que, dès le 26 septembre 2012, la société TF1 publicité a mis à jour les
éléments les plus accessibles et les plus consultés de son site internet afin que n'y figure plus le
nom des deux radios et ajoute que les annonceurs étaient parfaitement informés du retrait de
celles-ci du GIE ; qu'en l'état de ces seules constatations et appréciations, faisant ressortir que le

96
GIE et la société TF1 publicité n'avaient pas tiré indûment profit de la valeur économique des
sociétés Radio Nova et TSF Jazz, la cour d'appel, abstraction faite du motif erroné mais
surabondant critiqué par le moyen, a pu retenir que le maintien du nom des radios sortantes dans
les conditions générales de vente de la société TF1 publicité ne caractérisait pas un acte de
parasitisme à l'égard de ces sociétés ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le quatrième moyen du même pourvoi :

Attendu que les sociétés Radio Nova, TSF Jazz et Nova régie font grief à l'arrêt du rejet de leurs
demandes de dommages-intérêts pour pratiques commerciales trompeuses alors, selon le moyen,
que constitue une pratique commerciale trompeuse la fausse allégation relative aux
caractéristiques essentielles d'un produit ou d'un service ; qu'en se bornant à retenir, pour exclure
toute pratique commerciale trompeuse de la part des sociétés TF1 publicité et du GIE, qu'il était
conforme à l'usage d'intégrer par anticipation les audiences des médias ayant vocation à rejoindre
la régie publicitaire, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'intégration anticipée des
audiences de Sud radio et Wit FM, conjuguée au maintien artificiel de Radio Nova et TSF Jazz
dans la liste des radios adhérentes, ne leur avait pas permis de dissimuler une perte d'audience sur
la période d'octobre à décembre 2012, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard
de l'article L. 121-1 du code de la consommation ;

Mais attendu qu'ayant constaté que les radios Sud radio et Wit FM , qui avaient adhéré au GIE le
25 septembre 2012, pour une entrée effective au 1er janvier 2013, avaient été intégrées dans les
résultats d'audience du GIE de septembre-octobre 2012, publiés le 15 novembre 2012, l'arrêt
retient qu'une telle publication correspond à une pratique normale du marché, mise en oeuvre par
les sociétés Radio Nova et TSF Jazz elles-mêmes, qui permet aux radios d'être en mesure de
préparer la commercialisation de leurs espaces publicitaires et de diffuser le message des
annonceurs, dès le 1er janvier suivant, et en déduit que la société TF1 publicité et le GIE n'ont
commis aucune tromperie sur le périmètre exact du produit national, les "Indés radios", en
intégrant de manière anticipée les deux radios dans les résultats d'audience du GIE ; qu'il retient
encore, écartant par là-même l'allégation de maintien artificiel de Radio Nova et TSF Jazz dans la
liste des radios adhérentes du GIE, que l'apparition du nom de ces radios sur une page des
conditions générales de vente de TF1 publicité n'a créé aucune confusion dans l'esprit des
annonceurs, lesquels étaient parfaitement informés du départ du GIE de ces radios au 1er
octobre 2012 ; que par ces constatations et appréciations, faisant ressortir que la société TF1
publicité et le GIE n'avaient pas donné de fausse information sur les caractéristiques essentielles
du produit national du GIE et rendant inopérante la recherche prétendument omise, la cour
d'appel a légalement justifié sa décision; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal :

Vu les articles L. 251-1, L. 251-8, L. 251-9 et L. 442-6, I, 2°, du code de commerce ;

Attendu que sont exclues du champ d'application de l'article L. 442-6, I, 2°, du code de
commerce les modalités de retrait du membre d'un groupement d'intérêt économique, prévues
par le contrat constitutif ou par une clause du règlement intérieur de ce groupement ;

Attendu que pour dire que l'interdiction prévue au ii) de l'article 21.1 du règlement intérieur du
GIE et l'indemnité pour s'en affranchir induisent un déséquilibre manifeste entre les parties et
annuler ces dispositions, l'arrêt retient que le GIE et les sociétés Radio Nova et TSF Jazz
constituent des personnes morales distinctes dont les relations se développent dans un secteur
économique pour lequel le GIE offre aux radios locales ou régionales une prestation de

97
regroupement de leur audience en vue d'une commercialisation commune, en contrepartie d'une
rémunération constituée par un droit d'entrée, de sortie et des cotisations pendant la vie du
contrat ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal ni
sur les premier et deuxième moyens du pourvoi incident, qui sont éventuels :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette les demandes fondées sur la concurrence déloyale
et parasitaire, les pratiques commerciales trompeuses et l'article L. 420-1 du code de commerce,
rejette la pièce n° 133 et écarte des débats certains développements des conclusions, l'arrêt rendu
le 29 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les
autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être
fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

98
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 27 mai 2021, 19-16.716, Publié au bulletin

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 30 janvier 2019), invoquant des fautes commises dans sa gestion, la
société civile immobilière [Personne physico-morale 1] (la SCI) a assigné M. [M], son ancien
gérant, en réparation de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deuxième à quatrième branches, et sur le
moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer
par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à
entraîner la cassation.

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. M. [M] fait grief à l'arrêt de le condamner à verser à la SCI la somme de 120 000 euros en
réparation de son préjudice financier, alors « que ne constitue pas une faute l'acte du gérant dont
l'assemblée lui a donné quitus en pleine connaissance de cet acte et des circonstances l'entourant ;
qu'en retenant la responsabilité pour faute du gérant pour un acte ratifié par l'assemblée de la
société, sans rechercher si l'assemblée, constituée des associés avec lesquels il avait été décidé de
vendre les lots 22 et 23 et connaissant aussi bien la grille tarifaire que le prix de vente de ces lots,
n'avait pas, en connaissance de l'acte et des circonstances l'entourant, valablement ratifié l'acte de
son gérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1843-5 et 1850
et 1998 du code civil dans leur rédaction applicable au litige. » Réponse de la Cour

4. La cour d'appel a rappelé qu'en application de l'article 1843-5, alinéa 3, du code civil, aucune
décision de l'assemblée des associés ne peut avoir pour effet d'éteindre une action en
responsabilité contre les gérants pour la faute commise dans l'accomplissement de leur mandat.

5. Elle en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche inopérante relative à
l'information des associés, que le quitus donné par l'assemblée des associés ne pouvait avoir
d'effet libératoire au profit de M. [M] pour les fautes commises dans sa gestion.

6. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

99
Cass. civ. 3, 27-05-2021, n° 19-16.716, FS-P, Rejet
En application de l'article 1843-5, alinéa 3, du Code civil, aucune décision de l'assemblée des associés ne peut
avoir pour effet d'éteindre une action en responsabilité contre les gérants pour la faute commise dans
l'accomplissement de leur mandat, de sorte que le quitus donné par l'assemblée des associés ne peut avoir d'effet
libératoire au profit de l'ancien gérant pour les fautes commises dans sa gestion.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 30 janvier 2019), invoquant des fautes commises dans sa gestion, la
société civile immobilière San Michele (la SCI) a assigné M. Ab, son ancien gérant, en réparation
de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deuxième à quatrième branches, et sur le
moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer
par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à
entraîner la cassation.

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. M. Ab fait grief à l'arrêt de le condamner à verser à la SCI la somme de 120 000 euros en
réparation de son préjudice financier, alors « que ne constitue pas une faute l'acte du gérant dont
l'assemblée lui a donné quitus en pleine connaissance de cet acte et des circonstances l'entourant ;
qu'en retenant la responsabilité pour faute du gérant pour un acte ratifié par l'assemblée de la
société, sans rechercher si l'assemblée, constituée des associés avec lesquels il avait été décidé de
vendre les lots 22 et 23 et connaissant aussi bien la grille tarifaire que le prix de vente de ces lots,
n'avait pas, en connaissance de l'acte et des circonstances l'entourant, valablement ratifié l'acte de
son gérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1843-5 et 1850
et 1998 du code civil dans leur rédaction applicable au litige. »
Réponse de la Cour

4. La cour d’appel a rappelé qu’en application de l’article 1843-5, alinéa 3, du code civil, aucune
décision de l'assemblée des associés ne peut avoir pour effet d'éteindre une action en
responsabilité contre les gérants pour la faute commise dans l'accomplissement de leur mandat.

5. Elle en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche inopérante relative à
l'information des associés, que le quitus donné par l'assemblée des associés ne pouvait avoir
d'effet libératoire au profit de M. Ab pour les fautes commises dans sa gestion.

6. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

100

Vous aimerez peut-être aussi