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RJF 2016

Impôt sur les sociétés


C 514. Transfert de bénéfices à l’étranger : dialectique de la preuve

CONCLUSIONS du rapporteur public Frédéric Aladjidi

CE 16 mars 2016 no 372372, 9e et 10e s.-s., Sté Amycel France > Lire les observations…

1. Quelle est la dialectique de la preuve lorsque l’administration entend imposer, en application de l’article 57 du CGI, des
bénéfices indirectement transférés à des sociétés étrangères avec lesquelles il est acquis que le contribuable a des liens
de dépendance de fait ?
Telle est la question posée par ce pourvoi présentée par la société requérante à l’encontre de l’arrêt du 25 juillet 2013 par
lequel la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté son appel, confirmant le redressement dont elle avait fait l’objet au
titre de ses exercices déficitaires 1998 à 2001, à raison de ce que l’administration a estimé être une minoration des prix de
vente de ses produits à deux sociétés sœurs néerlandaise et britannique.
Le premier et principal moyen qui est soulevé et que nous vous proposerons d’accueillir, est, en effet, tiré de l’erreur de
droit et de l’insuffisance de motivation dont l’arrêt attaqué serait entaché :
– en déduisant de la seule mise en évidence par l’administration du caractère inférieur des prix en cause par rapport
à ceux pratiqués avec les autres clients, l’existence d’une présomption de transfert indirect de bénéfices ;
– alors que la requérante soutenait, devant elle, que les deux prix n’étaient pas comparables, dès lors d’une part, que
les sociétés sœurs étaient des distributeurs des produits vendus alors que les autres clients en étaient des
consommateurs finaux, et dès lors d’autre part, que les marchés en cause étaient différents.

2. S’agissant du bien-fondé des impositions, la cour a repris un considérant de votre décision CE 2 mars 2011 no 342099,
Sté Soutiran et Cie : RJF 6/11 no 733, concl. E. Geffray BDCF 6/11 no 73 qui juge :
– que « l’article 57 du CGI n’institue de présomption de l’existence d’un transfert indirect de bénéfices par une
société assujettie à l’impôt sur les sociétés en France vers l’étranger que lorsque l’administration fiscale a établi
(s’agissant de la condition qui nous intéresse) l’octroi d’avantages consentis par cette société à ces entreprises » ;
– et « qu’il s’agit d’une présomption simple, que la société contribuable peut combattre en apportant la preuve que
ces avantages ont été justifiés par l’obtention de contreparties favorables à sa propre exploitation et ne constituent
pas un transfert indirect de bénéfices ».
Puis elle s’est effectivement contentée de relever le caractère inférieur des prix de vente aux sociétés sœurs par
rapport aux autres clients, pour en déduire l’existence d’une présomption et préciser qu’il revenait à la société de
combattre cette dernière. Ce n’est, alors, que dans un second temps, que la cour a examiné les divers arguments mis en
avant par la requérante dont celui qu’elle a analysé comme étant tiré de ce que ses sociétés sœurs auraient « pris en
charge, à due concurrence des avantages tarifaires consentis, une partie des frais de transport, de
commercialisation et de stockage qu’elle a supportés au cours des exercices litigieux ainsi que, dans la même proportion,
une partie des frais fixes dits d’administration générale ».

Analyse de la classification
3. Dans ses conclusions sur l’affaire de Plénière du 27 juillet 1988 no 50020, Sté Boutique 2M : RJF 10/88 no 1139, avec
concl. O. Fouquet p. 577 dont la décision précitée Soutiran n’a fait que reprendre la solution, O. Fouquet expliquait que
celle-ci remontait à une décision CE 29 janvier 1964 no 47515 : Dupont p. 253, dont nous avons retrouvé une application,
au Lebon, deux ans plus tard dans la décision CE 23 février 1966 no 64449, min. c/ Sté X : Dupont no 8199, mais qui n’a
donné lieu à un fichage aux tables du Lebon, en tant que telle, que dans la très récente décision CE 9 novembre 2015
no 370974, Sté Sodirep Textiles SA-NV : RJF 2/16 no 121 avec concl. M. -A. Nicolazo de Barmon (C 121).
Notre illustre prédécesseur détaillait les deux temps successifs en ces termes :
– « L’administration démontre-t-elle l’existence d’un avantage accordé par la société établie en France à la société
établie à l’étranger ? » ;
– « Si l’administration le démontre, le contribuable établit-il l’existence d’une contrepartie à cet avantage ? »
Après avoir relevé que la commission départementale des impôts avait rendu un avis favorable à
l’administration et qu’étaient applicables les dispositions de l’article L 192 du LPF antérieures à la loi Aicardi de 1987, O.
Fouquet indiquait qu’au stade du premier temps « la société peut soit apporter la preuve, contre l’avis de la
commission départementale, de l’inexistence de l’avantage dont la réalité conditionne l’application de l’article 57, soit,
sans nier l’existence de cet avantage, démontrer qu’il s’inscrivait dans une gestion commerciale normale » .
Et dans cette affaire qui portait sur des commissions plus importantes quand elles étaient versées à des sociétés liées, il
précisait qu’en soutenant que les sommes en cause « rémunéraient des services effectivement rendus », le contribuable
contestait l’existence même de l’avantage « car une commission qui rémunère à son juste prix une prestation n’est pas un
avantage ». Et il continuait en disant « il en irait autrement si la société, sans contester que les commissions ne
rémunéraient aucun service précisément rendu, soutenait que cette apparente libéralité présentait un intérêt pour sa
politique commerciale. La société entendrait alors détruire la présomption de gestion anormale instituée par l’article 57 du
CGI ».
L’importance de cette distinction, même si elle était qualifiée « d’assez subtile dans le cas d’espèce », était soulignée,
précisément dans le cas d’une « minoration de prix à l’exportation » au regard de la charge de la preuve, O.
Fouquet expliquant que « l’existence de la minoration, établie en général par voie de comparaison, peut donner lieu à
l’avis de la commission départementale dont le sens est susceptible de modifier la charge de la preuve sur ce point. Une
fois établie l’existence de la minoration, la société qui l’a consentie peut démontrer qu’elle l’a fait dans son intérêt
commercial ».

4. Nous souscrivons à cette analyse qui distingue parmi les arguments du contribuable :
– ceux qui contestent l’existence même d’un avantage et pour lesquels la charge de la preuve pèse sur
l’administration, depuis que l’article L 192 du LPF ne prévoit plus de basculement au détriment du contribuable, en
cas d’avis défavorable de la commission départementale des impôts ;
– et les arguments qui justifient l’octroi d’un avantage avéré par l’existence d’une contrepartie, pour lesquels, la
charge de la preuve pèse sur le contribuable.
Elle nous semble avoir été confirmée, depuis lors, par la décision CE 7 novembre 2005 no 266436 et 266438, min.
c/ Sté Cap Gemini : RJF 1/06 no 17 avec concl. E. Glaser p. 11, dont se prévaut la requérante et où vous avez jugé, dans
une affaire de majoration de redevances pour usage de marques et de logos, que « c’est sans méconnaître les règles de
dévolution de la charge de la preuve que, pour juger mal fondées les impositions litigieuses, la cour … a relevé… que la
valeur d’usage d’une marque et d’un logo étant susceptible de variations au cours du temps et suivant le marché où ils
sont utilisés, le service n’établissait pas, en se bornant à se référer au montant des revenus perçus par la société mère de
ses filiales françaises, ou de ses filiales étrangères au cours d’exercices postérieurs aux années en litige, qu’elle avait
consenti un avantage en ne percevant aucune rémunération pour leur utilisation … ».
A la lumière des conclusions d’E. Glaser, vous avez redressé, ce faisant, la rédaction d’un arrêt qui avait, un peu trop vite,
affirmé que le ministre avait démontré l’existence d’un avantage lié au versement des redevances, avant de faire droit,
dans un second temps seulement, à l’argument de la société selon lequel cette redevance correspondait à la valeur des
marques et logos.

5. Sans doute, y a-t-il des cas où il ne sera pas aisé de procéder à cette classification, mais au cas d’espèce, il n’y a guère
de doute à juger que relevait de la première catégorie, l’argumentation d’appel de la requérante qui consistait à
expliquer la différence de prix entre ceux qui étaient facturés à ses sociétés sœurs et ceux qui étaient facturés à ses
autres clients, par deux facteurs :
– d’une part, le fait que les premières n’étaient que des distributeurs alors que les seconds étaient des
consommateurs finaux, argument qui nous semble très fort ;
– et d’autre part, avec une valeur moindre à nos yeux, la différence de marché.
a) Sur le second point, la requérante se prévalait, dès l’appel, de la décision CE 21 février 1990 no 84483, SARL
Solodet : RJF 4/90 no 376 où vous avez jugé que « l’administration n’apporte pas la preuve qu’une société française a
minoré ses prix de vente … à une société allemande avec laquelle elle était en relation d’intérêt, dès lors que la méthode
de comparaison de prix par laquelle elle entend démontrer la minoration est entachée de défauts importants, (dont le fait)
que la situation des marchés à l’exportation peut justifier que les prix facturés au client allemand soient inférieurs à ceux
pratiqués avec le client français ».
Mais il n’y avait, factuellement, aucun élément justifiant, ici, qu’il puisse y avoir une différence de tarification entre les
marchés néerlandais ou britannique et français.
b) S’agissant, en revanche, du premier point, il nous paraît impossible de se contenter d’une différence
arithmétique entre les prix pratiqués, même à produit identique, pour faire bénéficier l’administration d’un
renversement de la charge de la preuve, lorsqu’il y a une discussion sur un élément aussi fondamental pour expliquer
leur niveau que la circonstance qu’il s’agirait, pour les prix les plus élevés, de ceux qui sont appliqués à des
consommateurs finaux et, pour les prix les plus faibles, ceux qui sont destinés à des distributeurs.
Le ministre n’est nullement fondé à soutenir que le moyen serait nouveau en cassation car c’est sur ce point précis, et non
selon une logique de contrepartie, que l’argument d’appel relatif aux frais de transport, de commercialisation et de
stockage était avancé. Il renvoyait à l’idée simple, qu’à marge identique, un produit est nécessairement vendu plus cher,
lorsque ces diverses fonctions sont plus coûteuses pour le vendeur, comme c’est le cas dans la vente au détail, que
lorsqu’elles sont moins onéreuses, comme c’est le cas pour la vente en gros.

6. On trouve, dans votre jurisprudence, deux précédents traitant d’une question proche :
– il y a presque quarante ans, dans une décision CE 2 juin 1976 no 94758 : RJF 9/76 no 371, vous avez validé un
redressement, fondé sur l’article 57 du CGI qui concernait des prix anormalement bas consentis à un particulier
suisse, qui possédait la marque du produit en cause et qui était le principal acheteur de ce dernier. Mais vous avez
pris soin de relever, ce faisant, que « les réintégrations opérées par l’Administration ont tenu compte des frais de
« commercialisation » à l’étranger pris en charge par (l’intéressé) » ;
– par ailleurs, il y a un peu moins de vingt ans, dans la décision CE 28 septembre 1988 no 60805, Vercel : RJF 11/88
no 1254, vous avez jugé à propos des transactions entre un galeriste parisien et une société américaine que « compte
tenu du volume des affaires traitées avec ce seul client, qui est très supérieur au montant des opérations … faites
avec l’un quelconque des marchands de tableaux ou des particuliers qui formaient le reste de sa clientèle, la
circonstance, seule invoquée par l’administration fiscale, que les prix de vente consentis … étaient, en moyenne, très
sensiblement inférieurs à ceux qui étaient généralement pratiqués … ne suffit pas à établir l’existence du transfert de
bénéfices par voie de minoration de prix qui justifie le redressement correspondant ».
Et en terme de charge de la preuve, nous approuvons la RJF d’avoir fiché cette décision :
– en rappelant qu’ « en matière de transfert indirect de bénéfices à l’étranger, il incombe à l’administration d’établir que
l’entreprise se trouve dans le champ d’application de l’article 57 du CGI et donc notamment de démontrer l’existence
d’un avantage » ;
– et en indiquant qu’« une telle démonstration n’est pas apportée par l’administration lorsque, dans le secteur du
commerce des tableaux modernes, elle invoque seulement la circonstance que les prix de vente consentis à une
société étrangère sont en moyenne très sensiblement inférieurs à ceux généralement pratiqués pour les ventes aux
autres clients sur le marché national ».

Analyse de la comparaison
7. L’erreur de droit et l’insuffisance de motivation que nous vous invitons à censurer traduisent, à notre sens, une validation
trop rapide par la cour de la comparaison à laquelle l’administration a recouru, alors qu’il appartenait à cette dernière
de démontrer – ce que la cour n’a pas vérifié dans ce premier temps – que les arguments mis en avant par la société
n’étaient pas fondés.
Dans la décision précitée de 2005 Cap Gemini, vous avez précisé que lorsqu’elle recourt à une telle approche
comparative, il faut, pour que l’administration soit regardée comme établissant l’existence d’un avantage, qu’elle
« constate que les prix facturés par une entreprise établie en France à une entreprise étrangère qui lui est liée, sont
inférieurs à ceux pratiqués par des entreprises similaires exploitées normalement, c’est-à-dire dépourvues de liens
de dépendance ». Et la remise en cause du redressement litigieux venait de ce qu’en l’espèce, les seules comparaisons
fournies ne concernaient que des sociétés liées.
Nous ne voyons pas pourquoi, dans le cas où, comme ici, le contribuable n’a pas, parmi ses clients, que des sociétés qui
lui sont liées, il faudrait lui imposer de comparer les prix pratiqués à l’égard de ces derniers avec ceux qu’une autre
entreprise pourrait offrir à ses propres clients. S’agissant du vendeur, la condition de similitude qui est posée par la
décision précitée est, en effet, nécessairement remplie par le contribuable lui-même.
Mais cette condition de similitude ne se limite pas au vendeur, comme pourrait le donner à penser la rédaction qui
qualifie les prix de « pratiqués par des entreprises similaires ». Elle vaut tout autant pour l’acquéreur, les
conclusions d’E. Glaser expliquant à juste titre que ce qui compte c’est que les transactions retenues à titre de
comparaison soient réalisées dans des « circonstances équivalentes », ce qui justifie que votre décision, qui n’est pas
fichée aux tables, l’ait été à la RJF en qualifiant les prix de « pratiqués entre entreprises similaires ».

8. L’approche ici en cause peut renvoyer, dans la terminologie de l’OCDE sur les prix de transfert (cf. Mémento F. Lefebvre
sur les groupes de sociétés no 12600), aux « méthodes fondées sur les transactions » mais aussi aux « méthodes
transactionnelles de bénéfice » dans le détail desquelles nous nous garderons de rentrer mais qui reposent toutes sur la
détermination d’un prix dit de « pleine concurrence », laquelle n’est possible, d’après les principes directeurs adoptés en
1995 et révisés en 2010, qu’après la réalisation d’une « analyse fonctionnelle » :
– qui renvoie à l’idée que « la rémunération des différentes entités qui composent un groupe doit … correspondre,
d’une façon générale, aux fonctions assumées par chaque entreprise, compte tenu des actifs mis en œuvre et des
risques assumés » ;
– et qui implique d’identifier les « fonctions des entités en présence : fabrication, montage,
recherche et développement, prestations de services, distribution, transport, publicité… ».
Pour ce qui est de la méthode dite « du prix comparable sur le marché » ou (comparable uncontrolled price en anglais
souvent appelée par l’acronyme CUP), qui est la plus simple, cette « analyse fonctionnelle » est capitale car c’est elle qui
permet d’assurer la comparabilité :
– soit parce qu’ « aucune différence entre les transactions faisant l’objet de la comparaison, ou entre les entreprises
effectuant ces transactions, n’est susceptible d’avoir une incidence sensible sur le prix du marché libre » ;
– soit parce que « des correctifs suffisamment exacts peuvent être apportés pour supprimer les effets matériels de ces
différences ».
S’agissant de la variante que constitue la méthode dite du « prix de revient majoré » (cost plus) que l’administration
soutient avoir utilisée, il n’y a pas lieu de raisonner différemment.
Au cas d’espèce, il est clair qu’il y avait des différences substantielles selon que les mêmes produits étaient vendus
aux sociétés sœurs ou aux autres clients. Et il semble que l’administration en ait, d’ailleurs, pour partie tenu compte,
puisqu’ainsi qu’elle le rappelle devant vous, elle a ramené de 10 % à 3 % la marge dans le premier cas par rapport au
second.
Mais la cour ne s’est pas prononcée, dans l’arrêt dont vous êtes saisis, sur la pertinence de ce correctif et si elle a
évoqué les frais de transport de commercialisation et de stockage, c’est en inversant la charge de la preuve puisqu’elle a
reproché à la société de ne pas justifier par les tableaux qu’elle avait produits de ce qu’ils correspondraient « à due
concurrence » aux avantages tarifaires. Il lui reviendra donc, après renvoi, de reprendre cette analyse.


9. Si vous nous suivez, vous pourrez, à ce stade, mettre à la charge de l’Etat le versement à la requérante de 3500 € au titre
de l’article L 761-1 du Code de justice administrative.
Et par ces motifs, nous concluons à l’annulation de l’arrêt attaqué, au renvoi de l’affaire devant la cour administrative
d’appel de Nantes et à l’octroi des frais irrépétibles.

C 515. Modalités de remboursement de la créance de « carry


back »

CONCLUSIONS du rapporteur public Emilie Bokdam-Tognetti

CE 9 mars 2016 no 385265, 9e et 10e s.-s., Sté Fimipar et CE 9 mars 2016 no 385244, 9e et 10e s.-s.,> Lire les observations…

1. Si le nom de Carrie est, pour les cinéphiles, évocateur de film d’horreur, celui de carry back est parfois, pour les
fiscalistes, eu égard à ses ambiguïtés (1), synonyme de cauchemar. C’est néanmoins sans appréhension que nous vous
invitons à vous pencher sur ces dossiers, qui posent la question de savoir dans quelles conditions et sous quels délais un
contribuable qui a opté pour le report en arrière de ses déficits peut demander le remboursement à l’administration de sa
créance sur le Trésor.

Notions préliminaires sur le carry back


2. Le report en arrière des déficits, ou « carry back », est autorisé et encadré par l’article 220 quinquies du CGI. Dans sa
rédaction antérieure aux durcissements opérés par la loi 2011-1117 du 19 septembre 2011, cet article permet, par
dérogation aux règles de droit commun de report en avant des déficits prévues à l’article 209, à une entreprise soumise à
l’impôt sur les sociétés d’opter pour le report en arrière du déficit constaté au titre d’un exercice, c’est-à-dire pour son
imputation sur un exercice passé qui a déjà été imposé.

3. L’excédent d’impôt sur les sociétés en résultant, qui ne procède pas d’une taxation excessive au sens de l’article L 80
du LPF (CE 12 janvier 2005 no 257652, SA Europinvest : RJF 4/05 no 310, concl. L. Vallée BDCF 4/05 no 41), fait alors
naître au profit de l’entreprise une créance d’égal montant, qui n’est pas imposable et qui est remboursée au terme
des cinq années suivant celle de la clôture de l’exercice au titre duquel l’option a été exercée (2), mais peut être utilisée
pour le paiement de l’impôt sur les sociétés dû au titre des exercices clos au cours de ces cinq années, la créance
n’étant alors remboursée qu’à hauteur de la fraction qui n’a pas été utilisée pour ce paiement. L’article 46 quater 0-W de
l’annexe III au CGI dispose que l’entreprise qui exerce l’option pour le report en arrière doit joindre à la déclaration de
résultat de l’exercice au titre duquel cette option a été exercée une déclaration conforme à un modèle fixé par
l’administration. Le II de cet article, supprimé pour les créances ou réductions d’impôt constatées à compter du
1er novembre 2004, prévoit quant à lui qu’en cas d’utilisation de la créance pour le paiement de l’impôt sur les sociétés ou
de cession, l’entreprise doit produire l’état de suivi qui lui avait été remis, à sa demande, par l’administration. Indiquons
qu’en pratique, la demande de remboursement du montant de la créance non imputée sur l’impôt sur les sociétés à l’issue
de la période de cinq ans est formulée sur le relevé de solde d’impôt sur les sociétés déposé auprès du service dont
dépend l’entreprise. Enfin, l’article L 171 A du LPF dote l’administration de pouvoirs de contrôle, en prévoyant que, pour
l’application de l’article 220 quinquies du CGI, l’administration est fondée à vérifier l’existence et la quotité de la
créance et à en rectifier le montant, même si l’option pour le report en arrière du déficit correspondant a été exercée au
titre d’un exercice prescrit.

Conditions de remboursement de la créance de carry back


4. Lorsqu’une entreprise a opté pour le report en arrière des déficits et qu’elle n’a, à l’expiration du délai de cinq ans
mentionné à l’article 220 quinquies du Code, pas ou pas intégralement utilisé sa créance pour le paiement de ses
cotisations d’impôt sur les sociétés, le remboursement de la créance qu’elle conserve sur le Trésor est-il subordonné à
la présentation d’une demande de remboursement, dans les délais et conditions de réclamation fixés à l’article
R 196-1 du LPF, ou ce remboursement doit-il intervenir spontanément de la part de l’administration ?

5. Les juridictions du fond se sont divisées sur cette question.


Ainsi, tandis que le tribunal administratif de Paris avait jugé, par un jugement Sté Jet Multimedia Hosting (TA Paris
21 octobre 2009 no 05-19135 : RJF 5/10 no 468, concl. Mme K. Weidenfeld BDCF 5/10 no 54), que le remboursement
d’une créance de carry-back n’est pas conditionné par la formulation d’une demande tendant à ce qu’il soit procédé à ce
remboursement, et qu’il y avait lieu de faire application de la prescription quadriennale prévue à l’article 1er de la loi 68-
1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’Etat, les départements, les communes et les
établissements publics, le tribunal administratif de Montreuil et la cour administrative d’appel de Versailles, dans les
présentes affaires, par des décisions également publiées, ont estimé à l’inverse que la demande de remboursement d’une
créance de carry-back était constitutive d’une réclamation contentieuse au sens de l’article L 190 du LPF, distincte de la
déclaration d’option pour le report en arrière des déficits, laquelle ne vaut pas demande de restitution, et qu’elle relevait
par suite de l’article R 196-1 du LPF.
6. Si vous n’avez, quant à vous, pas encore pris parti sur cette question, la solution nous semble toutefois déjà largement
engagée par votre jurisprudence sur la nature de la déclaration d’option et, contrairement à ce qu’ont soutenu certains
commentateurs de l’arrêt de la cour de Versailles, dans un sens opposé à l’approche de transposition retenue par celle-ci.

7. En effet, par votre décision min. c/ SA Sectronic (CE 30 juin 1997 no 178742 : RJF 8-9/97 no 776, avec conclusions
contraires sur ce point du président J. Arrighi de Casanova p. 511), vous avez jugé que la déclaration d’option pour le
report en arrière qui doit être jointe à la déclaration de résultat de l’exercice valait réclamation au sens de l’article L 190
du LPF.

8. Si cette solution avait été initialement dégagée pour justifier l’application aux contestations de refus de report en arrière
des règles du plein contentieux fiscal, vous en avez ensuite tiré les conséquences sur les règles de présentation de
telles demandes. Ainsi, vous avez d’abord jugé, par votre décision SA Vérimédia (CE 19 décembre 2007
no 285588 et 294358 : RJF 3/08 no 347, avec chronique Mme J. Burguburu p. 211, concl. C. Landais BDCF 3/08 no 42),
que cette réclamation doit s’exercer dans les formes, conditions et délais prévus par le LPF, et avez apprécié la
recevabilité d’une demande de report en arrière de bénéfices rectifiés à la suite d’une procédure de reprise par
l’administration au regard des règles de délai posées par l’article R 196-1 du LPF et de la notion d’événement motivant la
réclamation au sens du c de cet article. Puis dans votre décision min. c/ Sté Maysam France (CE 23 décembre 2011
no 338773 : RJF 3/12 no 232, concl. E. Geffray BDCF 3/12 no 31), vous avez jugé que si, en vertu des dispositions de
l’article 46 quater-0 W de l’annexe III au CGI, cette déclaration doit être en principe souscrite en même temps que la
déclaration des résultats de cet exercice dans le délai légal de déclaration, ces dispositions ne peuvent avoir eu pour
effet d’interdire à une entreprise, dans le cas où elle aurait souscrit sa déclaration de résultats après l’expiration de ce
délai, de régulariser sa déclaration d’option pour le report en arrière d’un déficit jusqu’à l’expiration du délai de
réclamation prévu par les dispositions de l’article R 196-1 du LPF.

9. Si la déclaration d’option vaut ainsi réclamation au sens de l’article L 190 du LPF, c’est parce qu’elle tend au bénéfice
d’un droit résultant d’une disposition législative, en l’occurrence de l’article 220 quinquies du CGI. Le remboursement de
la créance sur le Trésor née de l’option au terme des cinq années suivant celle de la clôture de l’exercice au titre duquel
cette option a été exercée, est en effet non seulement de droit – l’article 220 quinquies utilise ainsi l’indicatif et ne
subordonne ce remboursement à aucune formalité particulière, notamment aucune demande complémentaire à la
déclaration d’option – mais constitue le droit commun du report en arrière, l’utilisation anticipée de la créance pour le
paiement de l’impôt sur les sociétés dans ce même délai de cinq années n’apparaissant que comme une faculté,
dérogeant au principe du remboursement au bout de cinq ans. Dès la déclaration d’option, qui fait naître la créance sur le
Trésor, le montant de cette créance est connu, les règles relatives à son calcul étant posées par l’article 220 quinquies lui-
même. L’administration dispose toutefois des pouvoirs nécessaires à son contrôle, grâce à l’article L 171 A du LPF, ainsi
qu’à son suivi au fur et à mesure de son utilisation éventuelle pour le paiement de l’impôt, grâce notamment à
l’article 46 quater 0-W de l’annexe III.

10. Dès lors que le droit au bénéfice du report en arrière et le droit au remboursement de la créance ne forment qu’un
seul et même droit et que la déclaration d’option vaut ainsi réclamation contentieuse tendant à la constatation de
l’existence d’une créance sur le Trésor et à son remboursement au terme du délai de cinq ans, pour la fraction qui n’aura
pas été utilisée pour le paiement de l’impôt sur les sociétés, point n’est besoin pour le contribuable de présenter une
nouvelle réclamation contentieuse à l’expiration de ce délai pour obtenir ce remboursement, qui doit intervenir
spontanément de la part de l’administration. En cas de cession à un établissement de crédit de la créance de carry-back,
le contribuable et l’établissement devraient, selon nous, en tenir informée l’administration, afin qu’au terme des cinq
années le remboursement puisse intervenir au profit de l’exact bénéficiaire.

11. Dans l’hypothèse où l’administration ne s’acquitte pas de son obligation de remboursement spontané à
l’expiration du délai de cinq années prévu à l’article 220 quinquies, il appartient au contribuable de lui présenter une
demande tendant à ce remboursement dans le délai de prescription quadriennale prévu par l’article 1er de la loi du
31 décembre 1968, et, en cas de rejet de cette demande, de porter le litige devant le juge de plein contentieux.

12. C’est en effet, compte tenu de ce que nous venons de vous dire sur l’existence et l’acquisition de la créance par le
contribuable dès la première réclamation, ce délai de prescription qui nous semble applicable, à l’exclusion de celui de
l’article R 196-1 du LPF. Nous n’ignorons pas votre jurisprudence min. c./ Sté Champagne Jeanmaire et min.
c/ Sté Champagne Beaumet (CE 14 février 2001 no 202966 et no 202967 : RJF 5/01 no 671, concl. J. Courtial BDCF 5/01
no 70), dans laquelle vous avez jugé que la prescription quadriennale instituée par la loi du 31 décembre 1968 n’est
applicable que sous réserve des dispositions définissant un régime légal de prescription spécial à une catégorie
déterminée de créances susceptibles d’être invoquées à l’encontre de l’une de ces personnes morales de droit public, que
les dispositions de l’article R 196-1 du LPF, alors même qu’elles se présentent comme instituant des délais de
réclamation, ont pour effet d’instituer un régime légal de prescription propre aux créances d’origine fiscale dont les
contribuables entendent se prévaloir envers l’Etat, et que ces créances sont, de ce fait, exclues du champ d’application de
la loi du 31 décembre 1968. Mais cette jurisprudence ne nous semble pas applicable au cas d’une créance fiscale dont
l’administration a déjà admis, à l’occasion d’une première réclamation réalisée dans les formes et selon les conditions des
articles L 190 et R 196-1 du LPF, l’existence, et dont il ne s’agit plus que d’obtenir le paiement.

13. Enfin, la solution que nous vous invitons aujourd’hui à adopter ne nous paraît pas miroiter avec celle que vous avez
retenue en matière de crédit d’impôt recherche, pour lequel vous avez jugé que la demande de remboursement présentée
sur le fondement de l’article 199 ter B du CGI constitue une réclamation au sens de l’article L 190 du LPF (CE 8 novembre
2010 no 308672, Sté ICBT Madinox : RJF 2/11 no 229). En effet, si pour le crédit d’impôt recherche, il y a bien une
première déclaration avant la demande de remboursement, cette déclaration n’a toutefois jamais été qualifiée de
réclamation contentieuse par votre jurisprudence.
Les présentes espèces
14. Venons-en maintenant aux faits des deux espèces. La société BFO, le 27 avril 2001, et la société Fimipar, le 18 juin 2002,
ont opté pour le report en arrière du déficit constaté au titre des exercices clos respectivement en 1999 et en 2001,
faisant ainsi naître au profit de chacune une créance sur le Trésor. N’ayant pas utilisé cette créance pour le paiement de
l’impôt sur les sociétés au terme du délai de cinq ans mentionné à l’article 220 quinquies, elles en ont sollicité le
remboursement le 23 novembre 2009 et le 23 novembre 2011, par des demandes que l’administration fiscale a rejetées
comme tardives au regard du délai de réclamation fixé par l’article R 196-1 du LPF. Le tribunal administratif de
Montreuil, par deux jugements dont l’un a été publié (TA Montreuil 23 mai 2013 no 1201493 : RJF 1/14 no 12, concl. V.
Restino BDCF 1/14 no 3), a rejeté les demandes des contribuables tendant au remboursement de ces créances. Saisie en
appel par les sociétés, la cour administrative d’appel de Versailles, par les deux arrêts du 8 juillet 2014, également
publiés et commentés (no 11VE03849 et no 13VE02399 : RJF 11/14 no 987), attaqués devant vous aujourd’hui, a confirmé
ces jugements.

15. A l’appui de leurs pourvois, les sociétés soutiennent notamment que la cour a commis une erreur de droit en jugeant
que le remboursement de leur créance de carry-back était subordonné à la présentation, dans les délais prévus à
l’article R 196-1 du LPF, d’une réclamation contentieuse distincte de la déclaration d’option qu’elles avaient effectuée.
Compte tenu de ce que nous vous avons expliqué, ce moyen nous paraît fondé. Vous ferez donc droit aux pourvois, sans
qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens qu’ils soulèvent.

16. Par ces motifs, nous concluons :


– à l’annulation des arrêts du 8 juillet 2014 de la cour administrative d’appel de Versailles ;
– au renvoi des affaires à cette cour ;
– et à ce que l’Etat verse à la société Fimipar et à la société BFO la somme de 3 500 € chacune au titre de l’article
L 761-1 du Code de justice administrative.

(1) Voir par exemple, M-C. Bergeres, « Les ambiguïtés du régime juridique de la créance de carry-back », Dr. fisc. 15/04 no 16.

(2) C’est-à-dire l’exercice d’origine du déficit et non celui durant lequel la société déclare opter pour le report (CE 4 août 2006
no 285201, min. c/ Sté Kaufman & Broad Participations : RJF 11/06 no 1330, concl. F. Séners BDCF 11/06 no 127).

C 516. Régime mère-fille : conséquences de l’inconstitutionnalité


de la différence de traitement des titres d’autocontrôle

CONCLUSIONS du rapporteur public Benoît Bohnert

CE 6 avril 2016 no 367256, 8e s.-s., Sté Metro Holding France > Lire les observations…

1. La société anonyme simplifiée CRFP Cash, filiale à 100 % du groupe Carrefour créée en juin 2000, a reçu en apport la
participation détenue par le groupe Carrefour dans la société Metro Holding France, à hauteur de 20 %. En 2001, le
groupe Carrefour a cédé cette filiale à la société Metro Cash and Carry international holding Gmbh, qui l’a cédée à son
tour, fin 2002, à la société Metro Holding France. Dans le cadre d’une politique de simplification de son organigramme,
cette dernière a décidé en 2003 de supprimer la boucle d’autocontrôle en rachetant la participation de 20 % que détenait
sa filiale CRFP Cash, par voie de rachat de titres suivie d’une réduction de capital. A cette occasion, la société CRFP
Cash a réalisé un produit exceptionnel de 146,8 M€ qui a été déduit extra-comptablement du résultat imposable, à
l’exception d’une quote-part de 5 % pour frais et charges, dès lors qu’elle avait opté pour le régime fiscal prévu par les
articles 145 et 216 du CGI exonérant d’impôt les produits versés par les filiales à leur société mère. Dans la foulée de
cette opération, la société Metro Holding France a procédé le 21 août 2003 à la dissolution sans liquidation de la société
CRFP Cash par transmission universelle de patrimoine.

2. A la suite d’une vérification de comptabilité de la société CRFP Cash portant sur l’exercice qui s’est achevé par la
dissolution de cette société, l’administration fiscale a remis en cause le bénéfice du régime mère-filles, au motif que
le b. ter du 6 de l’article 145 du CGI excluait de l’exonération prévue par ce régime fiscal les produits afférents à des
titres auxquels ne sont pas attachés de droits de vote. En conséquence, le produit lié au rachat par la société Metro
Holding France auprès de la société CRFP Cash de 20 % de ses actions a été soumis à l’impôt et des cotisations
supplémentaires d’impôt sur les sociétés ont été mises à la charge de la société Metro Holding France, venant aux droits
de la société CRFP Cash pour un montant de 62,2 M€. Après avoir contesté en vain ce redressement, la société a saisi
du litige le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et soulevé une question prioritaire de constitutionnalité par un mémoire
distinct. Le tribunal administratif a refusé de transmettre cette question prioritaire de constitutionnalité puis rejeté sa
demande par jugement du 8 juillet 2011. La société Metro Holding France a relevé appel de ce jugement devant la cour
administrative d’appel de Versailles, et contesté par ailleurs le refus de transmission de la question prioritaire de
constitutionnalité.

3. La cour a confirmé le refus de transmission et rejeté la requête d’appel par un arrêt du 29 janvier 2013 (CAA Versailles
no 11VE03279 : RJF 7/13 no 747, contre lequel la société s’est pourvue en cassation devant vous. Par votre décision du
12 novembre 2015 (no 367256 : RJF 2/16 no 175, concl. B. Bohnert sur abonnes.efl.fr (C 175), vous avez annulé
l’article 1er de l’arrêt attaqué par lequel la cour a refusé de vous transmettre la question prioritaire de constitutionnalité
soulevée dans ce litige. Puis, réglant l’affaire au fond sur ce point, vous avez constaté que les dispositions du b. ter du 6
de l’article 145 du CGI créent une différence de traitement entre les sociétés mères françaises, selon que les
filiales dont elles perçoivent des distributions sont établies en France ou dans d’autres Etats membres de l’Union
européenne, et par suite, regardé comme sérieux le moyen tiré de ce qu’elles portent atteinte aux principes d’égalité
devant la loi et devant les charges publiques garantis par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l’Homme et du
citoyen de 1789, ce qui vous a conduits à renvoyer cette question devant le Conseil constitutionnel.

4. Par sa décision Cons. const 3 février 2016 no 2015-520 QPC : RJF 4/16 no 366 avec étude S. Austry et D. Gutmann
p. 418, le Conseil constitutionnel a considéré qu’il résulte des dispositions du b. ter du 6 de l’article 145 "telles
qu’interprétées par une jurisprudence constante" une différence de traitement entre sociétés bénéficiant du régime
fiscal des sociétés mères selon que la filiale distributrice des dividendes est établie dans un Etat de l’Union
européenne (auquel cas les produits de titres sans droits de vote sont susceptibles d’être éligibles à l’exonération prévue
par le régime mère-fille), ou au contraire établie en France ou dans un Etat tiers à l’Union européenne (auquel cas
l’exclusion de l’article 145, 6 b ter du CGI continuait de s’appliquer). En conséquence, le Conseil constitutionnel a jugé ces
dispositions, dans leur rédaction issue de la loi de finances pour 1992, étaient contraires aux principes
constitutionnels d’égalité devant la loi et d’égalité devant les charges publiques, respectivement prévus par les
articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, et les a censurées pour ce motif.

5. L’abrogation prononcée par le juge constitutionnel prend effet à compter de la date à laquelle sa décision a été
rendue, mais cette dernière prend soin de préciser que la déclaration d’inconstitutionnalité peut être invoquée dans
toutes les instances en cours. Il s’ensuit qu’en se fondant sur ces dispositions pour rejeter la requête de la société
Métro Holding, la cour a commis une erreur de droit. Par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du
pourvoi, la société requérante est fondée à demander l’annulation de l’article 2 de l’arrêt de la cour administrative d’appel
de Versailles qu’elle attaque.

6. Vous pourrez ensuite régler vous-même l’affaire au fond. Compte tenu de ce que nous venons de vous dire, la société
requérante est fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande
tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de contribution sur cet impôt auxquelles
elle a été assujettie au titre de l’exercice clos en 2003 ainsi que des pénalités correspondantes.

7. Vous ferez droit aux conclusions présentées par la société sur le fondement de l’article L 761-1 du Code de justice
administrative en mettant à la charge de l’Etat le versement à celle-ci de la somme de 5 000 €.

8. Par ces motifs, nous concluons à l’annulation de l’article 2 de l’arrêt de la cour administrative de Versailles du 29 janvier
2013 et du jugement du 11 juillet 2011 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, à la décharge des cotisations
supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de contribution sur cet impôt auxquelles la société Métro Holding a été
assujettie au titre de l’exercice clos en 2003 ainsi que des pénalités correspondantes, et enfin à l’octroi des frais
irrépétibles.

C 517. Notion de conception de nouveaux produits ouvrant droit


au crédit d’impôt métiers d’art

CONCLUSIONS du rapporteur public Aurélie Bretonneau

CE 9 mars 2016 no 390719, 10e s.-s., SARL Mistigris Communication et CE 9 mars 2016 no 381127, 10e s.-s., min. c/ Sté Mister Brown
> Lire les observations…

1. Qu’est-ce qu’un métier d’art ? Que produisent les artistes ? Qu’est-ce que la nouveauté ? Ces questions ont été plus
abondamment traitées par les philosophes que par les fiscalistes. C’est malheureusement en cette qualité qu’il vous
appartient aujourd’hui d’y apporter des éléments de réponse. La question n’est pas tout à fait évidente, mais peut être
traitée dans cette formation de jugement compte tenu tant des indications données par quelques jalons jurisprudentiels
que de la portée purement rétroactive de ce que vous jugerez en droit, le texte ayant, par chance, été modifié en 2012.
Nous traiterons d’un même mouvement l’ensemble des affaires appelées bien que l’instruction des dossiers n’en soit pas
au même stade – deux dossiers admis et trois en procédure d’admission au pourvoi en cassation.

2. La question centrale est celle de l’interprétation de l’article 244 quater O du CGI qui, dans sa rédaction applicable à
l’année en litige (2010) prévoyait que les entreprises « dont les charges de personnel afférentes aux salariés qui
exercent un des métiers d’art énumérés [par] arrêté (…) représentent au moins 30 % de la masse salariale totale »
« peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt égal à 10 % de la somme : / 1o Des salaires et charges sociales afférents aux
salariés directement chargés de la conception de nouveaux produits » . Ce crédit d’impôt sur les métiers d’art est plus
connu sous l’acronyme de Cima.

3. Par la loi 2012-1510 du 29 décembre 2012, le texte a été modifié pour ne plus réserver le bénéfice du Cima qu’aux
entreprises exerçant une activité de « création d’ouvrages uniques, réalisés en un exemplaire ou en petite série ».
Les travaux préparatoires montrent sans ambiguïté qu’il s’agissait de préciser la notion de « nouveaux produits »
sujette à d’importantes difficultés d’interprétation dans l’état antérieur des textes, et de restreindre ce faisant le champ des
activités éligibles. Vous avez d’ailleurs pris acte de cette volonté de restriction par une décision CE, 9 avril 2014
no 373436, Sté Anges et design et autres : RJF 7/14 no 673, rejetant le recours pour excès de pouvoir formé par plusieurs
entreprises, dont l’une des requérantes, contre une instruction fiscale accusée de restreindre la portée du dispositif.

4. Les contentieux qui vous sont soumis concernent des entreprises exerçant pour trois d’entre elles (Mister Brown,
Mistigris et Bambuck) des activités de graphisme et pour la dernière (Prugent ébénisterie) une activité d’agencement
d’espaces de vente, qui toutes souhaitent bénéficier du crédit d’impôt au titre d’années antérieures à la modification
législative. Ils supposent de manier le critère du « nouveau produit » pour des activités relevant de la prestation de
services se traduisant par la fourniture de biens largement incorporels. Or force est d’avouer que ce critère, déjà assez
peu maniable pour les biens corporels, est particulièrement inadapté aux prestations immatérielles.

5. Précisons pour commencer que, par votre décision précitée, vous avez, par un a contrario, plutôt jugé que dans leur
rédaction antérieure à la loi de 2012 les dispositions sur la Cima n’excluaient pas par principe du champ des nouveaux
produits les biens incorporels produits dans le cadre d’une activité de prestation de services (« Considérant que ces
dispositions, issues de l’article 35 de la loi du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012, réservent
désormais le bénéfice du crédit d’impôt en faveur des métiers d’art aux entreprises exerçant une activité de
« création d’ouvrages uniques, réalisés en un exemplaire ou en petite série », alors que pouvaient bénéficier de ce
crédit d’impôt, dans la rédaction antérieure à cette loi, les activités de « conception de nouveaux produits » ; qu’ainsi qu’il
ressort des travaux parlementaires, cette modification a eu pour objet de restreindre les activités pouvant bénéficier
de ce crédit d’impôt, en excluant du bénéfice de ce dispositif, par l’emploi du mot « ouvrage », d’une part les activités
de prestation de services, d’autre part, celles conduisant à la production de biens immeubles ou de biens
meubles incorporels »). Le ministre ne soutient d’ailleurs à aucun moment que ce type de produits ne pouvait par
principe être éligible au Cima dans l’état des textes applicables.

6. Pour comprendre la portée exacte du débat, nous vous proposons de décrire les activités en cause dans deux des
dossiers, où deux cours administratives d’appel, celle de Paris (par un arrêt publié à la RJF) et celle de Lyon, ont retenu
des solutions opposées face à des produits très comparables. Il s’agit des affaires concernant la société Mister Brown
d’une part et la société Mistigris de l’autre.

Les affaires Mister Brown et Mistigris


7. Ces deux sociétés exercent une activité de création graphique et d’infographie, l’une dans le domaine de la publicité,
l’autre dans le domaine de la communication. Le métier de graphiste figure effectivement au nombre des métiers d’art
listés par un arrêté du 12 décembre 2003 et entrant à ce titre dans le champ du Cima. Dans les deux cas, les cours ont
relevé, et il n’est pas contesté, que les sociétés produisent des images, logos, illustrations ou présentations
graphiques résultant, pour chacun d’entre eux, d’un travail de création original et se distinguant à ce titre des autres
« produits » des sociétés. Dans le cas de Mister Brown, la cour administrative d’appel de Paris en a déduit qu’il
s’agissait donc bien de « nouveaux produits » au sens de l’article 244 quater O ; dans le cas de Mistigris, la cour
administrative d’appel de Lyon a relevé que, pour autant, la société ne faisait, en créant ces « produits », que répondre
aux commandes qu’elle recevait, ce qui excluait la qualification de nouveaux produits, notion qui doit exclusivement
s’entendre selon elle de produits entièrement sortis de l’imagination de leurs auteurs « en vue de répondre aux attentes,
exprimées ou non, de futurs clients ».

8. Relevons encore que dans la ligne de mire des deux cours figuraient les dispositions de l’article 49 septies ZL de
l’annexe III au CGI, pris pour l’application de l’article 244 quater O, selon lesquelles « (…) les opérations de conception
de nouveaux produits s’entendent des travaux portant sur la mise au point de produits ou gamme de produits qui, par leur
apparence caractérisée en particulier par leurs lignes, contours, couleurs, matériaux, forme, texture, ou par leur
fonctionnalité, se distinguent des objets industriels ou artisanaux existants ou des séries ou collections précédentes ».
Nous disons « dans la ligne de mire » car il ne peut s’agir là que d’un élément d’interprétation, la définition de l’assiette
d’un crédit d’impôt ne pouvant être entièrement déduite d’un article réglementaire. N’était pas non plus absent du débat
l’article L 511-1 du Code de la propriété intellectuelle, qui dispose que : « Peut être protégée à titre de dessin ou
modèle l’apparence d’un produit, ou d’une partie de produit, caractérisée en particulier par ses lignes, ses contours, ses
couleurs, sa forme, sa texture ou ses matériaux. (…)/ Est regardé comme un produit tout objet industriel ou artisanal,
notamment les pièces conçues pour être assemblées en un produit complexe, les emballages, les présentations, les
symboles graphiques et les caractères typographiques, à l’exclusion toutefois des programmes d’ordinateur. » Sa
présence dans le débat n’a pour le coup rien d’illégitime, dès lors qu’une première version du texte de l’article 244 quater
O envisageait d’y faire allusion et que le renvoi n’a été supprimé lors des débats parlementaires que parce que l’exigence
d’un dépôt à l’Institut national de la propriété intellectuelle semblait trop restrictive. Les travaux préparatoires montrent
donc qu’on a bien pensé la notion de nouveau produit en s’inspirant de celle de produits issus de dessins et modèles
susceptibles d’être déposés.

9. Même avec la béquille de ces textes, il faut reconnaître que la tâche des deux cours était difficile. Admettre comme
l’a fait la cour de Paris que chaque logo produit par un graphiste est un nouveau produit revient à lui ouvrir le bénéfice de
l’impôt pour chacune de ses productions, puisque par définition, il ne vend pas deux fois le même logo à des personnes
différentes. Sa situation en est très peu comparable à celle, par exemple, d’un fabriquant de chaises ou de portail, qui
produit des gammes de produit dont seules les têtes de gamme sont des nouveaux produits. D’un autre côté, raisonner
comme l’a fait la cour de Lyon revient à ne pas très bien voir dans quelles circonstances un graphiste pourrait être amené
à concevoir un nouveau produit, puisque son métier est bien de répondre à des commandes. Or force est de constater
que le métier de graphiste est dans le champ du dispositif [(1)], de même que la prestation de services n’en est pas exclue.

10. Dans ces conditions, nous pensons que c’est la position de la cour de Paris qui est la plus convaincante. Dans la
mesure où un produit procède d’un effort original de création, alors nous estimons qu’il s’apparente à un nouveau
produit au même titre d’une tête de gamme et non à une déclinaison d’un produit préexistant. Cette grille de lecture
appliquée aux logos trouvent d’ailleurs un appui textuel dans l’article L 511-1 du Code de la propriété intellectuelle dont
nous avons vu qu’il n’est pas totalement illégitime de s’inspirer. Le critère posé par la cour de Lyon n’est ni opérationnel ni
présent dans les textes et revient en réalité à exclure la prestation de services, ce qui n’est advenu qu’avec la loi de 2012,
comme le relève d’ailleurs expressément l’arrêt.

11. Cette position nous conduit, dans l’affaire Société Mistigris, à faire droit au moyen central d’erreur de droit du pourvoi de la
société (invention d’un critère non prévu par les textes), ce qui conduira à l’annulation et au renvoi. Elle nous conduit
symétriquement, dans l’affaire Ministre c/ Mister Brown, à écarter le moyen unique (en sens inverse) et à rejeter les
conclusions du ministre.

L’affaire Société Prugent ébénisterie


12. Ces jalons étant posés, la question de savoir s’il convient d’admettre les pourvois (identiques, l’un étant un doublon de
l’autre) de la société Prugent ébénisterie n’est pas soldée pour autant. Dans cette affaire, la cour administrative d’appel
de Versailles a commencé par expliquer que pour bénéficier du Cima, le contribuable « doit, notamment, concevoir des
nouveaux produits, soit des produis qui, par leur apparence ou par leur fonctionnalité, se distinguent des objets industriels
ou artisanaux existants ; qu’il appartient au juge de l’impôt d’apprécier, au terme de son instruction et compte tenu des
différents éléments produits par les parties, si le contribuable remplit les conditions pour bénéficier de ce crédit d’impôt ».
Si l’on fait abstraction de la part un peu trop belle faite au texte réglementaire, elle a donc raisonné selon une grille de
lecture proche de celle de la cour administrative d’appel de Paris – un produit est nouveau quand il n’est pas la
simple déclinaison d’un produit préexistant. Appliquant ces principes à la requérante, qui exerce une activité de création
de supports de communication et de présentation sur le lieu de vente (visiblement, des agencements d’espaces de vente,
avec meubles adaptés), elle a estimé que chaque pièce correspondait certes à un cahier des charges et était conçue sur
mesure pour chaque client, mais que les produits réalisés dans ce cadre ne se distinguaient pas, par leur aspect et leurs
fonctionnalités, des produits préexistants. En somme, elle a estimé que la société ne faisait, chaque fois, que décliner un
même produit, sans effort de création original pour chacun. Elle s’est inspirée de la jurisprudence de plusieurs cours
relatives à des conceptions de portails ou de véranda sur mesure, estimant qu’un nouveau type de portail ou de véranda
est un nouveau produit, mais qu’il n’y a pas nouveau produit à chaque fois que le même type de portail ou de véranda est
simplement ajusté aux dimensions de l’ouvrage dans lequel il trouve à s’insérer.

13. C’est donc une pure question d’appréciation que pose le premier moyen du pourvoi, tiré de l’erreur de qualification ou
de la dénaturation à avoir estimé les produits en cause hors champ du Cima. Nous pensons que vous devez sans doute
exercer un contrôle de qualification juridique (voir, par analogie, sur la question de savoir si une opération de recherche
est éligible ou non au crédit d’impôt recherche, CE 28 mais 2001 no 221133, Virion : RJF 8-9/01 no 1045, concl. S. Austry
BDCF 8-9/01 no 105), mais à partir de la description des activités souverainement appréciées par la cour. En l’espèce, ce
que la cour a décrit s’apparente à une adaptation à des configurations et marques particulières d’un type d’agencement
unique. Il est difficile de dire qu’il y a là dénaturation des pièces produites. Nous y sommes d’autant moins
poussée, et d’autant moins encline à en déduire une qualification juridique erronée, que le seul point d’accroche que nous
trouvons pour faire entrer le « métier » exercé par la société dans le champ d’application du dispositif est l’item « fabricant
de meubles », pour lequel le critère du « nouveau produit » n’est pas aussi contre nature que s’agissant des
graphistes et qu’il n’y a donc pas d’aberration de principe à entrer dans une catégorisation en termes de produit générique
décliné en séries. Bref, nous ne croyons pas, dès lors que le problème de droit qui se posait dans les dossiers précédents
n’existe pas en l’espèce, que l’appréciation de la cour soit problématique et vous conduise à admettre le pourvoi.

14. Le second moyen est pour sa part totalement dépourvu de sérieux. Il tient à la dénaturation et à l’erreur de droit
qu’aurait commise la cour en écartant l’argumentation tirée de l’obtention par la société, en 2014, du label « entreprise du
patrimoine vivant ».

15. Devant la cour, la société faisait valoir cet élément de fait et en déduisait que, compte tenu des critères d’attribution du
label, il y avait là la preuve que ses productions étaient des produits nouveaux. La cour n’a pas été charitable avec les
écritures en écartant comme inopérant l’argument au motif que l’obtention était postérieure au fait : en réalité, la société
tentait de faire valoir que, sa production n’ayant pas évolué, l’attribution du label en 2014 mettait au jour la nature de ses
productions depuis le début. De là à y voir une dénaturation des écritures, il y a un pas que nous ne serions pas prête à
franchir. Il n’y a pas erreur de droit à avoir jugé une circonstance postérieure inopérante et, même en collant à
l’argumentation exacte de la société, il n’y aurait pas eu erreur de droit non plus à estimer que l’attribution du label ne
réglait pas la question du produit nouveau : il résulte de l’économie même de l’article 244 quater O que les entreprises
bénéficiant de ce label entrent dans le champ du crédit d’impôt, à condition de remplir la condition de produit nouveaux,
qui justifie donc une appréciation ad hoc du juge de l’impôt.
16. Nous sommes donc d’avis de ne pas admettre.

L’affaire SA Bambuck et associé


17. Le dernier pourvoi, de la société SA Bambuck et associé, ne pose pas directement la question du produit nouveau. La
cour administrative d’appel s’est en effet placée en amont de cette condition en estimant que la société n’établissait pas
relever du III de l’article 244 quater O, faute d’établir que les charges de personnel afférentes aux salariés exerçant des
métiers d’art pèseraient au moins 30 % de la masse salariale.

18. Le premier moyen, de procédure, est tiré de la tardiveté de la mise en ligne du sens des conclusions du rapporteur
public et de l’imprécision des informations données à ce titre. S’agissant du délai, vous avez déjà admis, en
l’absence de circonstances particulières, que 24 heures suffisaient (CE 29 septembre 2014 no 365922, SNCF [(2)]) : or
aucune circonstance particulière de nature à signifier que ce délai était en l’espèce trop court n’est invoquée ici.
S’agissant de la teneur, votre décision de section CE Section 21 juin 2013 no 352427, Communauté d’agglomération du
pays de Martigues : Lebon p. 167 juge clairement qu’il n’y a aucune irrégularité à n’informer les parties que du dispositif, à
l’exclusion des motifs. La pratique dont se plaint le requérant est donc pleinement bénie par la jurisprudence – nous
aurions tendance à inciter les justiciables à perdre l’habitude de soulever à l’avenir ce moyen qui n’est pas de nature à les
mener bien loin.

19. Le second moyen, de fond, est tiré de l’erreur de droit et de qualification juridique à avoir estimé que M. Bambuck,
« directeur créateur », ne comptait pas au nombre des salariés directement chargé de la conception de nouveaux
produits, ce qui a eu pour effet le non-franchissement de la barre des 30 %. Il n’y a très certainement pas erreur de droit
à s’être fondé sur tous les éléments disponibles pour tenter de cerner les fonctions de l’intéressé, y compris le descriptif
du poste et la convention collective. Pour le reste, le contrôle de qualification juridique est largement étouffé par le poids
que prennent, dans l’appréciation, les faits souverainement appréciés quand à la réalité des fonctions. En tout cas, nous
ne croyons pas qu’il y ait erreur à ne pas qualifier d’activité éligible les tâches décrites par la cour, consistant à
superviser et à coordonner le travail des créatifs, le travail de conception incombant en réalité aux seuls directeurs
artistiques, à l’exclusion de M. Bambuck.

20. Nous préconisons donc de ne pas admettre.

21. Par ces motifs, nous concluons :


– Sous le no 381127 (Mister Brown), au rejet du pourvoi du ministre et à l’octroi à la société de 3 500 € au titre des frais
irrépétibles ;
– sous le no 388655 (Bambuck), à la non-admission ;
– sous le no 390719 (Mistigris), à l’annulation, au renvoi à la cour administrative d’appel de Lyon et à l’octroi de 4 000 €
au titre des frais irrépétibles ;
– sous les no 392821-392935 (Prugent ébénisterie), à la non-admission, à moins que vous ne souhaitiez plus
radicalement radier le second dossier des registres, s’agissant d’un pur doublon (voir no 349831).

(1) Il en a récemment été retiré.

(2) V., pour le caractère satisfaisant d’un délai de 48 heures, CE 10 juillet 2015 no 379593, Sté Orange c/ M. Luci, ; CE 29 décembre
2014 no 382058, Elections municipales de Gauchy ; pour le caractère non raisonnable d’un délai de 4 heures, sans qu’il y ait
d’ailleurs là une règle de principe : CE 31 juillet 2015 no 383317, Sté La Comedia, (qui ne fait que le suggérer) ; CE 23 octobre
2013 no 362437, Sté Bernard Leclerc architecture (qui relève que c’est une question d’espèce). Et sur l’éventuelle neutralisation
des effets d’une communication tardive dans le cas où l’intéressé ne s’en est pas plaint à l’audience ou par une note en délibéré,
CE 1er octobre 2015 no 366538, M. et Mme Gauchot, : Lebon p. 325.

RJF 2016
(c) 2023 Editions Francis Lefebvre

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