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UNIVERSITE DE BOURGOGNE 2023-2024

FACULTE DE DROIT, SCIENCES ECONOMIQUE ET POLITIQUE

DROIT DES SOCIETES

PREMIER SEMESTRE

Cours de V. THOMAS
Travaux dirigés : M. DELL’ACQUA et C. SANCHEZ

TD n° 5

Les sociétés sans personnalité morale


I. – Documents : analysez les arrêts en vous aidant des questions

1- Cass. com., 27 mars 2001, JCP E 2001, p. 1677, note J.-P. Storck (à lire sur la bibliothèque numérique) : qu'est-ce qu'un pool bancaire ?
qu'est-ce que le chef de file du pool bancaire ? qu'est-ce qu'un abandon de créance ? quel était l'objet de la société en participation créée par les
banques parties au litige ? entre qui est né le litige ? la Cour de cassation fait-elle application du droit des sociétés ou du droit des contrats ? pourquoi
?

2- Cass. com., 26 nov. 1996, JCP G 1997, II, 22904, note D. Gibirila (à lire sur la bibliothèque numérique) : expliquez la différence entre société
en formation et société en participation ; pourquoi la société est ici qualifiée de société en participation et non de société en formation ? que signifie
agir en qualité d'associé au vu et au su des tiers ? quel est l'intérêt de bien définir cette expression ? quel est l'enjeu du litige ?

3- Cass. civ. 1, 20 janvier 2010, n° 08-13200 (Berniac) et n° 08-16.105 (Marinelli), Rev. sociétés 2010, p. 430, note B. Dondero (à lire sur la
bibliothèque numérique) : 1er et 2ème arrêt : quel est l'intérêt pour les demandeurs de démontrer l'existence d'une société créée de fait ? que
doivent-ils prouver ? pourquoi la Cour de cassation refuse-t-elle d'admettre la société de fait entre concubins ? la société créée de fait est-elle encore
possible entre concubins ? 2ème arrêt : définir l'enrichissement sans cause et chercher son régime juridique ; pourquoi l'enrichissement sans cause
n'est pas recevable ici ? Mme Marinelli aurait-elle pu tenter d'invoquer un autre moyen ? si oui, lequel ?

4- Cass. com., 29 mars 1994 : Bull. Joly 1994, § 189, p. 665, note J. Vallensan (à lire sur la bibliothèque numérique) : comment est prouvée la
société créée de fait ? pourquoi ?

5- Cass. com., 7 janvier 2014, n° 11-25.635 et 11-26.918 : Rev. sociétés 2014, p. 234, note B. Saintourens (à lire sur la bibliothèque
numérique) : pourquoi la SCI a-t-elle perdu sa personnalité morale ? quelle conséquence cette perte entraîne-t-elle ? que prévoit l'article 1844-3 du
Code civil ? pourquoi la SCI n'a-t-elle pu se transformer ?

6- Cass. Com., 10 avril 2019, n° 17-28.834 (F-P+B) : Rev. Sociétés 2019.759, note JF Barbièri : quand et comment un associé peut-il sortir d’une
société créée de fait ?

II. – Exercice : résoudre le cas pratique

M. BRETT, 61 ans, et M. FRICKE, 37 ans, ont vécu pendant 11 ans et jusqu'à l'année dernière en parfait concubinage. Peu
avant leur rencontre, M. BRETT a acheté en son nom un important mas en Provence dont le couple avait, par la suite, décidé une
rénovation totale en vue d'en faire, d'une part, leur domicile et, d'autre part, plusieurs logements de vacances destinés à la location.

Tous les travaux ont été financés par M. BRETT au moyen d'un prêt bancaire dont il est établi que Mme FRICKE avait refusé
de se porter caution.

En revanche, cette dernière a souvent payé la taxe foncière de l'immeuble, ainsi que les factures EDF. Par ailleurs, elle a
réalisé par elle-même des travaux de carrelage, peinture et papier-peint. Les fournitures en cause ont été cependant réglées avec le
compte chèque de M. BRETT pour lequel elle disposait d'une procuration. Mme FRICKE s'occupait aussi de la location des

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logements de vacances, dont les baux étaient établis au nom de M. BRETT, et s'occupait de la réception des nombreux clients
étrangers de ce dernier, accueillis l'été en fin de semaine.

En juin dernier, le couple s'est séparé dans de mauvaises conditions. Mme FRICKE, qui vient d'apprendre la mise en vente
du mas par M. BRETT pour un prix de 1,2 millions d'euros, vous consulte afin de savoir si elle peut faire valoir des droits sur cette
somme.

Cass. com., 27 mars 2001, JCP E 2001, p. 1677, note J.-P. Storck
Vu l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article 13 de la loi du 24 juillet 1966, devenu l'article L. 221-4 du Code de commerce ; Attendu que
même si un "pool" bancaire peut être assimilé à une société en participation, le chef de file, sauf disposition conventionnelle contraire, ne peut, sans
excéder ses pouvoirs, consentir, sans leur accord, un abandon de créance engageant les membres du "pool", sauf à établir le caractère abusif de leur
refus d'y consentir ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par lettre du 28 février 1990, la Banque industrielle et commerciale (BIC), aux droits de laquelle s'est
trouvée la Société financière immobilière (SFI) et se trouve aujourd'hui la Banque régionale d'escompte et de dépôts (BRED), a donné son accord au
Crédit industriel et commercial (CIC), pour "participer à hauteur de 5 % en risque et trésorerie" dans le crédit que celui-ci avait accordé à la SCI
Levallois Front de Seine (la SCI) pour la réalisation d'un programme immobilier ; que reprochant au CIC d'avoir dépassé son mandat, en concluant,
malgré son opposition, un accord comportant abandon partiel de créance, dans le cadre d'une procédure de règlement amiable instituée par la loi du
1er mars 1984, la BIC a demandé judiciairement la résolution du contrat de participation conclu avec le CIC, le paiement du capital et des intérêts
restant dus ainsi que des dommages-intérêts ;
Attendu que pour rejeter ces demandes, l'arrêt, après avoir énoncé qu'il est reconnu par les parties qu'une société en participation avait été
constituée, dont seul le CIC, chef de file du pool bancaire, était gérant, retient que les pouvoirs du gérant n'avaient pas été clairement délimités, qu'il
n'est pas établi que le CIC avait dépassé son mandat de gérant ou agi dans son intérêt personnel, que le protocole de règlement amiable avait été
conclu dans l'intérêt de toutes les parties et qu'un associé ne saurait, sans abus, faire échec à une décision prise dans l'intérêt commun ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que la signature du protocole du 18 juillet 1994 excédait, à défaut de disposition contractuelle l'y
autorisant, les pouvoirs de gestion que le CIC tenait de sa qualité de chef de file du "pool" bancaire et que la seule considération que les règlements
amiables sont pris dans l'intérêt commun et qu'ils seraient tous voués à l'échec s'il était reconnu à une banque, membre d'un "pool" bancaire, le
pouvoir de s'y opposer était inopérante à cet égard, sans rechercher si le refus de la BIC de consentir à ce protocole portant règlement amiable
constituait un abus, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres
branches du moyen : - Casse et annule, (...)

Cass. com., 26 nov. 1996, JCP G 1997, II, 22904, note D. Gibirila :

Vu l'article 1872-1, alinéa 2, du Code civil ; Attendu que dans les sociétés en participation, chaque associé contracte en son nom personnel
et est seul engagé à l'égard des tiers ; qu'il en est toutefois différemment si les participants agissent en qualité d'associé au vu et au su des tiers ou si
un associé a, par son immixtion, laissé croire au cocontractant qu'il entendait s'engager à son égard ;
Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, que, le 15 juin 1987, a été constituée la société Création système (la société) ; que les
époux Lautier ont, le 17 novembre 1987, conclu avec M. Malnory, agissant en tant que représentant de cette société, une convention pour la
construction d'un immeuble ; qu'ayant été mise en redressement judiciaire le 26 mai 1988, la société a été inscrite au Registre du commerce le 30 mai
suivant ; que les époux Lautier ont assigné tous les associés de la société, dont les époux Chery, en réparation du préjudice résultant de malfaçons
affectant l'immeuble objet de la convention ;
Attendu que, pour condamner les époux Chery, solidairement avec les autres associés de la société, à payer une certaine somme aux époux
Lautier, l'arrêt retient qu'il est manifeste que l'inscription tardive de la société au Registre du commerce est dépourvue d'intérêt ; que, cependant, le
fonctionnement de la société et les actes accomplis dans le cadre de l'objet social, et plus particulièrement découlant de la convention passée avec les
époux Lautier, entrent dans les prévisions de l'article 1872-1, alinéa 2, du Code civil ; que la simple chronologie des faits en cause conduit à
considérer que le défaut d'inscription au Registre du commerce est délibéré et ne peut en aucun cas s'analyser en une simple négligence, pas plus
pour M. Malnory que pour les autres membres de la société ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, sans caractériser les actes personnels des époux Chery permettant de considérer qu'ils
avaient agi en qualité d'associé au vu et au su des époux Lautier ou qu'ils s'étaient immiscés dans l'accord passé par M. Malnory avec ceux-ci, leur
faisant croire qu'ils entendaient s'engager à leur égard, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. Par ces motifs : Casse et annule
(...)

Civ. 1, 20 janvier 2010, FS-P+B, n° 08-13.200, Berniac c/ Fremcourt


Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Vu l'article 1832 du code civil ;
Attendu que l'existence d'une société créée de fait entre concubins, qui exige la réunion des éléments caractérisant tout contrat de société,
nécessite l'existence d'apports, l'intention de collaborer sur un pied d'égalité à la réalisation d'un projet commun et l'intention de participer aux
bénéfices ou aux économies ainsi qu'aux pertes éventuelles pouvant en résulter ; que ces éléments cumulatifs doivent être établis séparément et ne
peuvent se déduire les uns des autres ; Attendu que M. Berniac et M Fremcourt ont vécu en concubinage et ont eu ensemble un enfant né en 1977 ;
que le 13 novembre 1990, M. Berniac a acquis un terrain situé à Schoelcher ; qu'ils ont, en qualité de co-emprunteurs, souscrit un emprunt pour
financer la construction d'un pavillon sur ce terrain ; que M Berniac a vendu ce bien en 1999 ; que le 12 octobre 1999, M Fremcourt, invoquant
l'existence d'une société créée de fait, a assigné M. Berniac en paiement de la moitié du produit de la vente du pavillon ;
Attendu que pour dire qu'il a existé une société de fait entre M. Berniac et M Fremcourt et que celle-ci devait supporter la moitié des charges
et recevoir la moitié des produits de la vente de la maison, l'arrêt retient que la construction a été financée par un emprunt de 756 000 francs souscrit
par les concubins en qualité de co-emprunteurs, remboursé à concurrence de 4 379,64 francs par mois par M Fremcourt et 4 500 francs par mois par
M. Berniac ; que ceux-ci, en prenant la décision d'effectuer un emprunt pour financer un projet commun de construction d'une maison ont témoigné
d'une affectio societatis, leur but étant de partager une vie de famille stable puisqu'ils avaient un enfant commun ; qu'il n'est pas contesté que M
Fremcourt a assuré l'entretien et les charges de l'immeuble ainsi que les impôts et taxes et que ces éléments établissent la volonté des concubins de
participer aux bénéfices et avantages tirés de la jouissance du bien et aux pertes ; Qu'en se déterminant ainsi alors que l'intention de s'associer en vue
d'une entreprise commune ne peut se déduire de la participation financière à la réalisation d'un projet immobilier et est distincte de la mise en commun

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d'intérêts inhérents au concubinage, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu de statuer sur
les autres branches du moyen : Casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt (...)

Civ. 1, 20 janvier 2010, FS-P+B, n° 08-16.105, Marinelli c/ Roppolo


Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches : Attendu que M Marinelli fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 22
janvier 2008) de l'avoir déboutée de sa demande tendant à la reconnaissance d'une société créée de fait constituée avec son concubin, Salvatore
Roppolo, alors, selon le moyen : 1°/ qu'en retenant, pour débouter M Marinelli de sa demande tendant à la reconnaissance d'une société créée de
fait, qu'elle ne démontrait pas que sa participation dans l'entreprise excédait la seule entraide familiale quand, d'après ses propres constatations, elle
avait pourtant exercé une activité dans l'entreprise et s'était inscrite au registre des métiers comme chef d'entreprise, la cour d'appel a violé l'article
1832 du code civil ; 2°/ que la cour d'appel, pour écarter l'existence d'une société créée de fait s'agissant de l'entreprise de maçonnerie, a considéré
que M Marinelli ne démontrait pas avoir exercé une activité excédant une simple entraide familiale, ni avoir investi des fonds personnels dans
l'entreprise ; qu'en statuant à l'aune de ces seules constatations matérielles qui n'excluaient pourtant en rien l'existence d'un apport en industrie, fût-il
limité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1832 du code civil ; 3°/ qu'en retenant, pour écarter l'existence
d'une société créée de fait s'agissant de l'entreprise de maçonnerie, que M Marinelli ne démontrait pas avoir exercé une activité excédant une simple
entraide familiale ni avoir investi des fonds personnels dans l'entreprise, sans rechercher si de tels éléments excluaient l'intention de M. Roppolo et de
M Marinelli de collaborer ensemble sur un pied d'égalité à la réalisation d'un projet commun ainsi que l'intention de participer aux bénéfices ou aux
économies en résultant, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1832 du code civil ; 4°/ que M Marinelli fait
valoir dans ses conclusions, sans être contredite, qu'elle avait abandonné son activité salariée pour se consacrer à l'entreprise de maçonnerie et
qu'elle administrait l'entreprise dans ses relations avec les administrations, les fournisseurs, les avocats et les clients, eu égard à l'illettrisme de son
concubin ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que M Marinelli, inscrite au registre des métiers en qualité de chef d'entreprise, avait par ailleurs
exercé une activité de secrétaire de direction dans diverses sociétés, incompatible avec le plein exercice des responsabilités de chef d'entreprise
quand il n'était pourtant pas contesté que M Marinelli avait rapidement abandonné son activité salariée pour s'impliquer totalement dans l'entreprise, la
cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que si elle était inscrite au registre des métiers comme chef de l'entreprise de maçonnerie, M Marinelli
avait exercé, dans le même temps, une activité de secrétaire de direction, d'abord auprès de la société Corege du 24 août 1978 au 15 août 1981 puis
de la parfumerie Pagnon du 1 février 1985 au 31 mai 1989, difficilement compatible avec les responsabilités d'un chef d'entreprise qui apparaissaient
avoir été assumées en réalité par M. Roppolo et que celui-ci avait acquis seul, le 26 juillet 1979, un bien immobilier alors que le couple vivait en
concubinage depuis 1964, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel, qui a procédé à la recherche invoquée et
n'a pas méconnu l'objet du litige, a estimé que l'intention des concubins de collaborer sur un pied d'égalité à un projet commun n'était pas établie ;
qu'elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen : Attendu que M Marinelli fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande fondée sur l'enrichissement
sans cause, alors, selon le moyen, qu'en relevant cependant, pour considérer que l'enrichissement sans cause de M. Roppolo au détriment du
patrimoine de M Marinelli n'était pas démontré, que rien n'établissait que les emprunts de faibles montants avaient été utilisés, non pour les besoins de
la famille, mais dans le seul intérêt de son concubin et qu'elle avait été hébergée dans l'immeuble acquis par celui-ci, autant de circonstances
insusceptibles d'exclure un appauvrissement sans cause de M Marinelli, né de la seule implication dans l'entreprise sans rétribution, la cour d'appel a
violé l'article 1371 du code civil ensemble les principes régissant l'enrichissement sans cause ;
Mais attendu qu'ayant souverainement estimé que l'assistance apportée sur le plan administratif par M Marinelli à la bonne marche de
l'entreprise artisanale de maçonnerie qu'elle avait constituée avec son concubin n'excédait pas une simple entraide, la cour d'appel a pu en déduire
que celle-ci n'était pas fondée à réclamer une indemnisation sur le fondement de l'enrichissement sans cause et a ainsi légalement justifié sa décision
; Par ces motifs : Rejette le pourvoi ;

Cass. com., 29 mars 1994 : Bull. Joly 1994, § 189, p. 665, note J. Vallensan :

Sur le moyen unique pris en ses deux branches : Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué (Toulouse, 26 février 1992) qu'ayant pris
connaissance d'une annonce publicitaire de l'entreprise "Agencements 32" pour la fourniture et l'installation de cadres d'aluminium, les époux Y... sont
entrés en relation avec M. Z... ; que celui-ci leur a envoyé des documents, puis leur a rendu visite et a recueilli leur commande ainsi qu'un chèque
d'acompte de 20 460 francs établi à l'ordre d'Agencements 32 ; que les époux Y... ont rétracté leur commande dans les 7 jours et demandé restitution
de l'acompte ; que ne l'ayant pas obtenu, ils ont assigné MM. Z... et X..., lequel avait exercé son activité sous l'enseigne Agencements 32, pour qu'ils
soient condamnés solidairement à remboursement ;
Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné solidairement avec M. X... à payer aux époux Y... la somme de 20 640 francs avec
intérêts au taux légal à compter du 29 février 1988, en retenant l'existence d'une société de fait, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en se bornant à
affirmer l'existence d'une société de fait entre eux sans constater ni leur volonté de s'associer, ni les apports qu'ils auraient fait à cette société de fait,
ni qu'ils se seraient partagé les bénéfices et les pertes, la cour d'appel qui a omis de constater la réunion en l'espèce des éléments constitutifs d'une
telle société ou encore l'apparence d'une telle société à l'égard des époux Y... a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1832 du Code
civil ; alors, d'autre part, qu'en énonçant que l'association de fait entre lui et M. X... résultait d'un contrat de sous-location du 22 février 1988, et que
l'activité avait été exercée indifféremment sous l'enseigne Agencement 32 et Europe Aluminium, sans répondre à ses conclusions faisant valoir que le
bail visé avait été exécuté par la seule société Europe Aluminium à laquelle M. X... n'avait jamais été associé en fait, et dont l'immatriculation était
postérieure aux faits litigieux, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, que si l'existence d'une société de fait exige la réunion des éléments constitutifs de toute société, l'apparence d'une
telle société s'apprécie globalement, indépendamment de la révélation de ces divers élément ; que la cour d'appel, qui a relevé l'existence du bail
conclu par MM. Z... et X... le 22 février 1988, le fait que MM. Z... et X... exerçaient, à l'époque, l'un comme l'autre, leurs activités sous l'enseigne
Agencements 32 ou Europe Aluminium et en a déduit qu'ils avaient créé vis-à-vis des tiers, et notamment des époux Y..., l'apparence d'une société de
fait, a légalement justifié sa décision ;
Attendu, d'autre part, que le fait invoqué par M. Z... n'ayant pu modifier l'apparence d'une société de fait qu'après la date de conclusion du
contrat avec les époux Y..., la cour d'appel n'avait pas à répondre à ce chef inopérant des conclusions de M. Z... ; D'où il suit que le moyen n'est fondé
en aucune de ses deux branches ; (...) PAR CES MOTIFS : (...) REJETTE le pourvoi formé par M. Z... ;

Cass. com., 7 janvier 2014, n° 11-25.635 et 11-26.918 : Rev. sociétés 2014, p. 234, note B. Saintourens :
Joint le pourvoi n° S 11-25.635 formé par l'association Em Habanim - La Source de la vie et la société ECI Consulting et le pourvoi n° M
11-26.918 formé par le syndicat des copropriétaires du 188 avenue Victor Hugo, qui attaquent le même arrêt ;

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Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 mai 2011), que la société civile immobilière Foncière D Boussac (la SCI) a acquis, en 1961, des biens
immobiliers dépendant d'une copropriété sise avenue Victor Hugo à Paris ; que la SCI n'avait pas fait procéder à son immatriculation au registre du
commerce et des sociétés à la date du 1er novembre 2002 ; que par acte du 20 mai 2009, le syndicat des copropriétaires a fait assigner l'association
Em Habanim - La Source de la vie (l'association) et la société ECI Consulting (la société ECI), associées de la SCI à cette date, en paiement des
charges de copropriété demeurées impayées, dont celles visées par un jugement du 16 mars 2005 ayant condamné la SCI au paiement d'une
certaine somme à ce titre ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° S 11-25.635 :


Attendu que l'association et la société ECI font grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable la demande du syndicat des copropriétaires et de les
avoir condamnées au paiement des charges au prorata de leurs participations respectives dans la SCI, alors, selon le moyen :
1°/ que comme le faisaient valoir l'association et la société, selon l'article 1844-3 du code civil, « la transformation régulière d'une société en
une société d'une autre forme n'entraîne pas la création d'une personne morale nouvelle. Il en est de même de la prorogation ou de toute autre
modification statutaire » ; qu'il en résulte que, bien que transformée en société en participation du fait de son défaut d'immatriculation au registre du
commerce et des sociétés avant le 1er novembre 2002, les modifications statutaires apportées à la SCI pour permettre son immatriculation au registre
du commerce et des sociétés du Luxembourg n'ont pas entraîné la création d'une personne morale nouvelle, si bien que cette société est restée la
propriétaire du lot n° 2 ; qu'en énonçant que, du fait de la perte de la personnalité morale de la SCI non immatriculée à Paris, il n'y a pas une seule et
même société qui aurait transféré son siège mais deux sociétés de même nom, celle qui a perdu la personnalité morale et celle immatriculée au
Luxembourg qui a la personnalité juridique, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1844-3 du code civil ;
2°/ que le défaut de réponse aux conclusions équivaut au défaut de motifs ; que, pour démontrer que le syndicat des copropriétaires
reconnaissait expressément l'existence juridique de la SCI et contester son affirmation selon laquelle cette société n'aurait pas de patrimoine propre,
l'association et la société soulignaient qu'il résultait de sa pièce n° 22 qu'il continuait à adresser les appels de fonds à cette société, d'une part, et des
pièces adverses n° 37 et 38 que c'était bien cette société qui avait commencé à régler sa dette par deux versements de 5 000 euros, d'autre part ;
qu'elles ajoutaient qu'en faisant assigner la SCI en référé en 2010 et en lui faisant signifier l'ordonnance rendue sur cette assignation le 6 septembre
2010 à son siège social au Luxembourg par exploit d'huissier en date du 5 novembre 2010, le syndicat des copropriétaires avait expressément
reconnu l'existence juridique de cette société et sa qualité de propriétaire du lot n° 2 ; qu'en s'abstenant totalement de s'expliquer sur ces moyens
particulièrement opérants, la cour d'appel a encore violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que le défaut de personnalité juridique d'une société en participation n'est pas de nature à étendre les effets des condamnations
prononcées à l'encontre de cette seule société aux associés qui n'étaient pas personnellement parties aux instances ayant conduit à ces
condamnations ; que ni l'association ni la société n'était partie au litige ayant donné lieu aux condamnations prononcées par le jugement du tribunal de
grande instance de Paris du 16 mars 2005 et l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 11 mai 2006 ; qu'en faisant droit à la demande en paiement du
syndicat des copropriétaires des causes de ces deux décisions de justice à l'encontre de celles-ci bien que l'absence de personnalité morale de la SCI
n'était pas de nature à étendre les condamnations prononcées contre elle seule à ses deux associées qui n'y étaient pas personnellement parties, la
cour d'appel a violé les articles 1351 et 1871 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient exactement que la SCI ayant perdu sa personnalité morale faute d'avoir procédé à son
immatriculation au registre du commerce et des sociétés avant l'expiration, le 1er novembre 2002, du délai prévu à cette fin par l'article 44 de la loi n°
2001-420 du 15 mai 2001, ses associés n'étaient pas fondés à se prévaloir des dispositions de l'article 1844-3 du code civil pour en déduire que la
société immatriculée au registre du commerce et des sociétés du Luxembourg le 23 mai 2008 n'était pas une personne morale nouvelle ; Attendu,
d'autre part, qu'en relevant que les associés de l'ancienne société Foncière D Boussac ne justifiaient nullement avoir cédé ou transféré par acte
notarié le lot de copropriété litigieux à la société créée au Luxembourg et que la qualité de titulaire du lot qu'ils prêtaient à cette dernière n'était pas
davantage établie par les éléments non dépourvus d'équivoque qu'ils invoquaient à cette fin, la cour d'appel a répondu aux conclusions prétendument
délaissées ;
Attendu, enfin, qu'il ne résulte ni des conclusions, ni de l'arrêt que l'association et la société ECI ont fait valoir que la demande du syndicat
des copropriétaires en paiement des charges visées par le jugement du 16 mars 2005 tendait à l'extension à leur encontre des effets d'une décision à
laquelle elles n'étaient pas parties, en violation des dispositions des articles 1351 et 1871 du code civil ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait
et de droit ;

D'où il suit que non fondé en ses deux premières branches, le moyen est irrecevable en sa dernière branche ; Et attendu que le second
moyen du même pourvoi ne serait pas de nature à permettre son admission ; (...)

PAR CES MOTIFS : REJETTE les pourvois ;

Cass. Com., 10 avril 2019, n° 17-28.834 (F-P+B) :

Vu les articles 1872-2 et 1873 du code civil ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que la dissolution d'une société créée de fait peut résulter à tout moment d'une notification adressée par l'un d'eux à
tous les associés, pourvu que cette notification soit de bonne foi, et non faite à contretemps ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par lettre recommandée du 25 juin 2014, M. K a notifié à M. L, son associé dans une société créée de fait
exploitant une officine de pharmacie, sa volonté de mettre un terme à leur indivision ; qu'il l'a ensuite assigné en dissolution de cette société, sur le
fondement de l'article 1872-2 du code civil ;

Attendu que pour rejeter sa demande, l'arrêt retient que M. K ne démontre pas que, contrairement à ses allégations, tous les candidats acquéreurs ont
été systématiquement évincés par M. L, et qu'il ne justifie d'aucune démarche postérieure à la fin de l'année 2012 et antérieure à la notification de la
dissolution de la société, près de deux ans après ;

Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser une notification faite de mauvaise foi ou à contretemps, la cour d'appel a privé sa
décision de base légale ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

Casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 juin 2017,

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