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POLE SCIENCES ECONOMIQUES, JURIDIQUES ET DE L’ADMINISTRATION

(SEJA)
Licence 2/Promo 9/Semestre 3
Sciences Juridiques (SJ)
Droit Informatique Legaltech (DIL)
DROIT DES CONTRATS
Année Académique 2022-2023

ÉQUIPE PEDAGOGIQUE :
Concepteur : Pr. Jean-Louis COREA
Animatrice : Eliane Pauline Ngoné MBAYE
TRAVAUX DIRIGES :

Eliane P. N. MBAYE-Binta THIAM-Papa Alassane Barry SALL-Marie Rose LUDLOFF-


Amadou BADJI-Idrissa DOLE-El Hadji Moussa DIEDHIOU-Maydianga DIALLO-Babacar
SENE-Ababacar NDIAYE-Khady DABO-Fatou SENE-Thierno SOUMARE-Sérigne Abdou
Lahat dit Amar MBAYE

Séance n°4

THEME 4 : LES EFFETS DU CONTRAT


SOUS-THEME : LA FORCE OBLIGATOIRE

NOTE INTRODUCTIVE :

1
« Dans cette vision traditionnelle, voué au culte de l’immobilisme contractuel et
dénoncée par les chantres de l’équité et de la justice contractuelle, la révision ne peut être
appréhendée autrement que comme une entreprise liberticide et une source d’insécurité ». Voici
comment se conçoit le contrat dans la période classique et si ce n’est pas trop dire, à l’heure
actuelle.
Le principe de la force obligatoire du contrat reste et demeure un principe fondamental
en droit des contrats, même si on peut noter qu’au cours des dernières décennies le principe
connaît quelques dérogations apportées par le juge en plus des dérogations conventionnelles.
Dans cette séance N°4, il sera question de revenir sur l’article 96 COCC socle du
principe de la force obligatoire du contrat au Sénégal. Et voir comment cette disposition du
Code des Obligations Civiles et Commerciales s’article avec les intempéries que subissent le
principe de la force obligatoire du contrat, tout dernièrement.
L’Equipe Pédagogique

Exercice : Commentaire d’arrêt


ARRET N°85 Du 19 septembre 2012 ………. MATIERE : Civile et commerciale
N° AFFAIRE : J/15/ RG/ 12
L’ONG Form’ Action Contre L’ONG PLAN Sénégal

La COUR,
Ouï Monsieur, Mouhamadou DIAWARA, Président en son rapport ;
Ouï Monsieur Oumar DIEYE, Avocat général, en ses conclusions tendant au rejet du pourvoi ;
Vu la loi organique n° 2008-35 du 08 août 2008 sur la Cour suprême, notamment en son article
38 ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu que par l’arrêt attaqué, la Cour d’Appel
de Ac Ae, statuant sur renvoi après cassation, a débouté Form’ Action de toutes ses demandes
dirigées contre Plan Aa Ad ;
Sur le premier moyen pris de la dénaturation d’un écrit ;
Mais attendu qu’en raison de son imprécision, le moyen est irrecevable ; D’où il suit que le
moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen pris d’un manque de base légale ;
Mais attendu que pour débouter l’ONG Form’ Action de toutes ses demandes, la cour d’appel,
après avoir relevé que le protocole d’accord du 30 mars 1999 a été signé pour la durée du projet
: Survie de l’enfant, que selon le rapport d’expertise d’avril 2004, ledit projet « a été mis en

2
œuvre pendant la période de septembre 1998 à décembre 2002 » et constaté « qu’aucun
protocole signé à la suite de celui-ci n’avait stipulé un terme plus éloigné que le 31 décembre
2003 », a énoncé que dés lors, en attendant l’arrivée du terme stipulé pour notifier à sa
cocontractante la fin de leurs relations, Plan Aa Ad n’a pas violé le principe de la force
obligatoire des conventions posées par l’article 96 du Code des Obligations Civiles et
Commerciales ; qu’il ne s’agit pas, en effet, d’une rupture avant terme mais plutôt d’une rupture
par l’arrivée du terme d’un contrat. » ;
Qu’en l’état des constatations et énonciations, elle a légalement justifié sa décision ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondée ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi formé par l’O.N.G. Form’ Action contre l’arrêt n° 1 du 21
avril 2011 rendu par la Cour d’Appel de Saint-Louis ;
La condamne aux dépens.

LES DISPOSITIONS LEGALES :

1 / Code civil : Ordonnance de 2016

Art. 1193.- Les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des
parties, ou pour les causes que la loi autorise.
Art. 1194.- Les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les
suites que leur donnent l’équité, l’usage ou la loi.
Art. 1195.- Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat
rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer
le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue
à exécuter ses obligations durant la renégociation.
En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du
contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au
juge de procéder à son adaptation. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à
la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe.

2 / Code des obligations civiles et commerciales


Article 96 : Force obligatoire du contrat
Le contrat légalement formé crée entre les parties un lien irrévocable.

Article 97 : Résiliation et révision

3
Le contrat ne peut être révisé ou résilié que du consentement mutuel des parties ou pour les
causes prévues par la loi.

BIBLIOGRAPHIE :
Corinne RENAULT-BRAHINSKY, Droit des obligations, 16e Edition, GUALINO,
LEXTENSO, 2019.
François TERRE, Philippe SIMLER, Yves LEQUETTE, François CHENEDE, Droit
Civil (les Obligations), 12e édition , Dalloz 2019.
Fiches d'orientation : Force obligatoire du contrat | Avril 2019
Muriel Fabre-Magnan, Chapitre III. L’obligation, Le droit des contrats (2018), pages 48 à 69.

Nicolas MOLFESSIS, Force obligatoire et exécution : un droit à l'exécution en nature ?


Revue des contrats, 01 janvier 2005 n° 1, p. 37.

DOCUMENTS JOINTS A LA PRESENTE FICHE :


DOCUMENT 1 :

Nicolas MOLFESSIS, Force obligatoire et exécution : un droit à l'exécution en nature ?


Revue des contrats, 01 janvier 2005 n° 1, p. 37.

1. C'est une histoire faite de plusieurs concepts et de plusieurs textes. Et c'est de leur rencontre
ou au contraire de leur indifférence réciproque que semble dépendre la réponse à la question
posée : force obligatoire et exécution : un droit à l'exécution en nature ?

Du côté des concepts, on oppose volontiers exécution forcée en nature et exécution par
équivalent. C'est d'ailleurs l'intitulé même du colloque. Une telle opposition, comme il vient de
l'être montré par Pauline Rémy-Corlay 1 , est déjà à elle seule source de controverses. Faut-il
ainsi parler d'exécution en nature 2 et surtout d'exécution par équivalent ; le terme de réparation
n'est-il pas plus approprié, qui vient traduire la remise en état que l'inexécution appelle ? À
moins qu'il ne faille, au rebours de cette conception, proscrire le terme même de réparation - ce
que l'intitulé de la manifestation présuppose : ce serait alors toujours d'exécution forcée qu'il
serait question lorsqu'il s'agit de tirer les conséquences d'une inexécution contractuelle, jamais
de responsabilité ou de réparation. La responsabilité, ce « faux concept » 3 , n'aurait pas de place
en matière contractuelle.

4
Au-delà de ce désaccord fondamental, la notion même d'exécution en nature suscite
l'interrogation : recouvre-t-elle uniquement la seule hypothèse d'une exécution à l'identique de
la prestation promise ou bien s'étend-elle aux cas dans lesquels une prestation similaire mais
donc dissemblable sera ordonnée ? Ces deux éventualités méritent-elles un même traitement ?

Du côté des textes, nul n'ignore la teneur de ceux qui ont voix au chapitre : articles 1134, 1142,
1143, 1144. Mais leur signification même est à nouveau source de discussion, au point d'ailleurs
qu'une part importante du débat tienne à la portée prêtée à l'article 1142. En affirmant, d'une
formule générale, que « toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages-
intérêts, en cas d'inexécution de la part du débiteur », il se présente - ou plus exactement il est
présenté - comme l'adversaire contemporain de l'article 1134 et d'un éventuel droit à l'exécution
en nature. C'est d'ailleurs à ce titre que Laurent Aynès vient d'en clairement régler le sort, en
proposant sa suppression.

Il ne faudrait toutefois pas omettre les autres dispositions qui sont dans la cause. À commencer
par l'article 1184, alinéa 2 du Code civil, dont la vocation à participer à la discussion n'est pas
douteuse, puisqu'il prévoit que pour le cas où l'une des parties ne satisferait pas à son
engagement, « le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement
n'a point été exécuté, a le choix de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est
possible, ou d'en demander la résolution avec dommages-intérêts ». Il a son envoyé spécial dans
le droit des voies d'exécution, où l'article 1er de la loi du 9 juillet 1991 dispose que « tout
créancier peut, dans les conditions prévues par la loi, contraindre son débiteur défaillant à
exécuter ses obligations à son égard ».

2. C'est une histoire qui ne se comprend que si l'on prend soin d'en rechercher les ressorts et
d'en mesurer les implications. Derrière le tour technique, au point d'apparaître souvent d'une
subtilité excessive, qu'emprunte le débat sur les suites de l'inexécution contractuelle, se
dissimulent diverses interrogations, toutes essentielles. Elles portent sur la notion même de
contrat ou d'obligation - intègre-t-elle les suites de son inexécution ; le contrat, qui crée une
obligation à la charge du débiteur, comporte-t-il en lui-même une obligation à l'exécution forcée
en nature, au cas d'inexécution de son obligation par le débiteur ? Elles renvoient également au
rôle du juge face au lien contractuel - est-il asservi par le lien contractuel au point de devoir
automatiquement prêter son imperium au contrat, pour contraindre à son exécution ; au
contraire, doit-il toujours rester maître des conséquences à tirer de l'inexécution du contrat, sous
prétexte qu'il lui appartient de trouver la ou les sanctions les plus appropriées au cas

5
d'inexécution ? Elles tiennent également à la notion même de force obligatoire du contrat -
celle-ci est-elle méconnue par une réparation par équivalent ou en est-elle la cause ? Elles
portent encore sur les limites mêmes du contrat - faut-il traiter à l'identique les obligations
expressément stipulées par les parties et celles que la jurisprudence a découvertes dans le contrat
? Elles se nourrissent aussi du conflit entre la protection de la liberté d'un côté - qui constituerait
le bouclier offert au débiteur défaillant pour ne pas être contraint à l'exécution forcée - et
l'objectif de sécurité juridique ou contractuelle de l'autre - qui serait l'arme offerte au créancier
pour imposer l'exécution.

3. C'est sans doute parce que les questions et les enjeux ne manquent pas que la littérature
juridique, sur ce thème, est particulièrement abondante. La diversité des opinions soutenues
dans la doctrine française est éloquente, par son ampleur comme par sa richesse. La plupart des
civilistes français se sont prononcés sur cette question, soit directement, soit indirectement à
travers des débats dont on sait les répercussions sur notre question - existence de la
responsabilité contractuelle ; distinction de la force obligatoire du contrat et de son contenu
obligationnel. Au demeurant, les thèses se multiplient, signe qui ne saurait tromper : en moins
d'un an ont été publiées une thèse sur la primauté contemporaine du droit à l'exécution en
nature 4 et une autre sur l'étude comparative des sanctions de l'inexécution du contrat 5 , l'une et
l'autre assurément d'ailleurs en opposition.

4. Quant à la jurisprudence, elle n'est pas en reste, qui renvoie dans des directions différentes
selon les problèmes, les chambres, les époques... au point parfois de sembler dépourvue de toute
cohérence ou d'unité comme en témoigne à elle-seule la question de la nécessité de rapporter la
preuve d'un préjudice pour avoir droit à dommages-intérêts.

5. Ces incertitudes trouvent au surplus un engrais fertile dans la diversité des schémas
contractuels et la variété des conséquences qu'emporte l'inexécution, par un débiteur, de son
obligation. Les litiges auxquels ils donnent lieu rendent la systématisation très incertaine : s'il
faut compter avec des inexécutions fautives qui font naître un dommage, il ne faut pas omettre
les inexécutions sans dommage ou encore les dommages qui ne sont pas la suite d'une
inexécution fautive. L'inexécution d'un contrat a des effets pluriels, pouvant atteindre les
prévisions du créancier ou dépasser très nettement ce qui aurait pu être anticipé. De toutes ces
hypothèses, peut-on dégager un principe unique de solution ?

6
6. Aussi, notre droit est loin de se présenter à nous sous l'architecture rassurante d'un jardin à la
française, dont les allées, parce que bien dessinées et nettement tracées, permettraient de suivre
des voies bien distinctes : il n'y a à l'évidence pas une position mais des solutions diverses,
parfois contraires et contradictoires, qui s'entremêlent et font naître la controverse.

Toutefois une tendance domine, sinon dans le droit contemporain, du moins dans la doctrine
qui s'en fait l'écho et entend en orienter les solutions. Comme en rend parfaitement compte
l'intitulé retenu par les organisateurs du colloque, celle-ci consiste à faire jaillir du principe de
la force obligatoire du contrat un droit à l'exécution en nature. Au reste et par extension, même
lorsque celle-ci n'est pas possible, il conviendrait de prôner une exécution par équivalent, en
refoulant toute idée de réparation et de responsabilité liée à l'inexécution du contrat. A l'essor
de l'exécution forcée en nature (I) s'ajoute ainsi la tentation de l'exécution par équivalent (II).
Le principe de la force obligatoire du contrat ne conduit pourtant pas à une telle extension (III).

I. - L'essor de l'exécution forcée en nature

7. Le mouvement est manifeste, qui s'épanouit en doctrine et en jurisprudence depuis le milieu


du XXe siècle. Il a sa cause, que l'intitulé dans sa subtilité suggère : elle tient au rattachement
des suites de l'inexécution au principe de la force obligatoire du contrat.

N'insistons pas sur les manifestations de ce mouvement. Elles sont connues et conduisent à
considérer, généralement, que l'article 1142 du Code civil est devenu un texte d'exception, le
droit à l'exécution forcée étant devenu le principe 6 . Pour en attester, on montre aisément que
le domaine d'intervention de l'article 1142 s'est réduit comme peau de chagrin. L'exécution
forcée en nature s'impose lorsqu'il s'agit pour le bailleur d'assurer la jouissance de la chose louée
au preneur, pour l'entrepreneur de faire ses travaux, pour un contractant d'accomplir un acte
juridique, de remettre les lieux en l'état, de cesser une activité, céder ses parts, pour le vendeur
de livrer la chose, pour l'acquéreur d'en prendre livraison, etc. 7 .

Quelques exemples marginaux subsistent, dont ce peintre tant aimé et enseigné qui s'est engagé
à exécuter un portrait et qu'on ne saurait contraindre à prendre le pinceau pour s'exécuter. Dans
8
ce concert, détonnent les arrêts sur la promesse unilatérale de vente et sur le pacte de
préférence 9 . Mais les foudres doctrinales que la Cour de cassation a subies en retour traduisent
bien la tendance de fond 10 .

7
8. La justification donnée par la doctrine est d'ailleurs sans ambiguïté : c'est la force obligatoire
qui justifie cet essor de l'exécution forcée en nature et ce recul de l'article 1142. La plupart des
auteurs estiment ainsi, comme l'a écrit Mlle Viney, que « le droit à l'exécution est l'effet le plus
direct du principe de la force obligatoire du contrat » 11 .

On en vient même, dès lors, à proposer une relecture de l'article 1142 du Code civil qui
convainc, puisqu'elle fait vaciller ce dernier opposant. Une thèse récente a ainsi, avec écho,
proposé de ne lire dans l'article 1142 qu'une disposition visant l'hypothèse dans laquelle le
débiteur n'aurait pas exécuté, non pas l'obligation qu'il aurait contractée, mais la condamnation
en justice qu'il aurait subie par suite de l'inexécution de son engagement 12 . Autrement dit,
l'inexécution du contrat entraînerait condamnation à exécution forcée en nature ; ce n'est qu'en
cas d'inexécution de ladite condamnation que l'article 1142, jusque-là inopérant, assurerait que
« toute obligation de faire ou ne pas faire se résout en dommages et intérêts, en cas d'inexécution
de la part du débiteur ».

9. Dès lors, c'est la recherche des fondements mêmes d'un tel mouvement qui doit retenir
l'attention.

Il repose à l'évidence sur une conception subjectiviste et volontariste du contrat, dont l'écho
pourrait sembler en décalage avec les tendances dominantes du droit des contrats. Il s'agit en
effet d'assurer sans partage l'exécution du contrat et de mobiliser le juge pour assurer, par son
imperium, le respect d'un engagement, par hypothèse inexécuté. Dans ce schéma, l'exécution
forcée est la manière par excellence d'assurer le respect de l'engagement contracté. Sous cet
aspect, la tendance est si forte qu'elle rallie ceux-là mêmes qui prônent par ailleurs la révision
du contrat, l'interventionnisme judiciaire, l'équilibre contractuel. Ainsi oppose-t-on l'article
1134 du Code civil à l'article 1142. Dans cette approche, l'essor d'un droit à l'exécution forcée,
lié au principe de la force obligatoire du contrat, signifie le respect impératif de l'obligation,
quelles que puissent être les conséquences de l'exécution forcée. Corrélativement, il implique
l'effacement du rôle du juge, à nouveau au service du lien contractuel et non plus partie à son
écriture. Il n'est alors pas question de lutte contre les excès du contrat, de quête de
proportionnalité ou d'équilibre. Voilà qu'au stade de l'inexécution de l'engagement, l'article
1134 du Code civil retrouverait une vigueur qu'on ne lui connaissait plus.

8
Une telle logique s'affirme clairement dans un arrêt du 3 avril 1996 rendu par la troisième
13
Chambre civile de la Cour de cassation , dont la teneur, relative à une hypothèse de
démolition, doit être rapportée :

« Attendu que, pour décider que l'obligation de la SCI à l'égard de M me Giudicelli, sur le
fondement de l'article 1723 du Code civil, doit se résoudre en dommages-intérêts, l'arrêt retient
que la demande de la locataire est justifiée en son principe, mais qu'une démolition des
constructions aurait des conséquences hors de proportion avec les données et la dimension du
litige, qu'elle conduirait à la destruction d'une dizaine de boutiques tenues par des commerçants
étrangers à la procédure et apporterait un préjudice à d'autres locataires de boutiques pendant
les travaux de remise en état (...) ;

Cassation ».

10. Au reste, c'est bien parce que la solution est entièrement assise sur les prévisions des parties
que l'on propose dans le même temps de soustraire à l'emprise de l'exécution forcée en nature
les obligations contractuelles inventées par la jurisprudence, notamment sur le fondement de
l'article 1135 du Code civil : leur méconnaissance ressortirait au domaine de la responsabilité
et non de l'exécution, faute d'être le reflet des prévisions contractuelles ou, si l'on préfère, d'être
véritablement contractuelles. Dans ce retour à la volonté, la liberté contractuelle est évidemment
le moteur de l'exécution forcée appelée, dans le même temps, à délimiter son rayonnement. Ce
que la volonté n'a pas voulu ne saurait être sous l'emprise de l'exécution forcée. La part créatrice
du juge - pas de la loi ? - se trouverait démasquée au stade de l'inexécution de l'engagement,
pour donner lieu à un traitement différent.

11. Sur cette voie, c'est souvent l'idée de sécurité juridique ou de sécurité contractuelle qui est
ici mise en avant. Force obligatoire du contrat et sécurité contractuelle sont les deux faces d'une
même pièce. Refuser l'exécution forcée serait méconnaître la sécurité juridique. Par où l'on fait
retour insensiblement à l'idée naguère défendue selon laquelle en n'imposant pas l'exécution
forcée, on en viendrait à permettre au débiteur de ne pas exécuter son obligation. Cette
conception, dans sa radicalité, aboutit parfois à considérer que l'obligation du débiteur serait
dès lors facultative, puisqu'il aurait toujours le choix de ne pas la respecter au seul risque des
14
dommages-intérêts . Édulcorée, elle aboutit à considérer qu'en ne faisant pas droit à
l'exécution forcée, on en vient à méconnaître « la force obligatoire du contrat » ou encore, plus
nettement, que l'on « récompense [la] malice » du débiteur 15 .

9
Un tel glissement est évidemment fort discutable : l'allocation de dommages-intérêts, on y
reviendra, sanctionne l'inexécution du contrat par le débiteur de l'obligation. Loin de «
récompenser » la violation de son obligation, elle la punit. Ce n'est pas la sanction de
l'inexécution du contrat qui méconnaît sa force obligatoire mais l'attitude du débiteur qui la
précède.

12. C'est en réalité un problème différent qui est ici en cause, celui de la vocation des
dommages-intérêts à dissuader le débiteur de violer son engagement. Que le risque encouru par
le débiteur soit élevé - et donc dissuasif - suffirait à renforcer la protection de la sécurité
juridique. D'où le fait que l'on puisse éventuellement déplorer l'absence de dommages-intérêts
punitifs. Il reste que les parties peuvent stipuler par avance la somme due en cas d'inexécution
: la pénalité pourrait alors être dissuasive tandis que c'est bien la force obligatoire du contrat
qui conduirait à la condamnation du débiteur dont l'engagement aurait été violé. Sous réserve
que la peine contractuellement prévue ne soit pas manifestement excessive car nul ne discute
ici qu'elle risquerait alors d'être soumise à la réduction prévue à l'article 1152 du Code civil...

13. En réalité, l'essor de l'exécution forcée repose plus généralement sur le constat de
l'infériorité des dommages-intérêts en matière contractuelle, du moins sous l'angle de la
responsabilité. On déplore ainsi fréquemment leur inaptitude à permettre la satisfaction du
créancier. Comme s'il l'on escomptait qu'ils contribuent à l'exécution du contrat et non à la
réparation de sa violation. Mais une chose est leur aptitude à dissuader de la violation du contrat
- là est le véritable enjeu -, une autre est leur capacité à remplir le créancier de ses droits. Or par
hypothèse, faute d'être une exécution du contrat, l'allocation de dommages-intérêts n'est jamais
de nature à remplir le créancier du droit que le débiteur a violé. Sous cet aspect, il est injustifié
d'attendre des dommages-intérêts un résultat identique à celui que l'on escompte en cas
d'exécution, spontanée ou forcée, du contrat. Ce n'est plus là affaire d'infériorité des dommages-
intérêts mais de différence de nature, d'objet et de condition de mise en oeuvre de ce qui n'est
qu'une sanction. La tentation de l'exécution par équivalent doit être, à son tour, discutée.

II. - La tentation de l'exécution par équivalent

14. On pourrait vouloir opposer, sous le regard du principe de la force obligatoire du contrat,
l'exécution forcée en nature et l'exécution par équivalent. L'incitation est dans la formulation
même du thème proposé. Mais précisément, ce qui est notable, c'est que le rattachement de la

10
sanction de l'inexécution au principe de la force obligatoire du contrat pousse également une
partie de la doctrine à l'essor d'une exécution forcée par équivalent et, corrélativement, à un
recul de la réparation.

Nul n'ignore qu'il a toujours été admis qu'à la place de l'exécution forcée en nature, le créancier,
victime de l'inexécution du contrat, puisse solliciter des dommages-intérêts. Ce qui est notable,
c'est la tentation de ramener l'octroi de dommages-intérêts dans le giron de l'exécution forcée.
Le mouvement a été rappelé précédemment, qui se nourrit d'arrêts importants des diverses
chambres de la Cour de cassation. Ainsi, selon la formule employée, les dommages-intérêts «
16
sont une modalité d'exécution par équivalent de l'obligation demeurée impayée » (étant
entendu que l'obligation violée ne consistait pas en une somme d'argent). Bien que la
jurisprudence ne soit pas fixée en ce sens 17 , la tendance ne saurait être négligée.

15. Les conséquences sont déterminantes : les dommages-intérêts sont alors dus sur le seul
constat de la défaillance du débiteur, « peu important que cette inexécution n'ait pas été fautive
» ; plus encore, ils sont dus sans qu'il y ait besoin de prouver un préjudice 18 .

L'expression d'exécution par équivalent manifeste en ce cas la force obligatoire du contrat sur
le terrain de son inexécution avérée : les dommages-intérêts deviennent une modalité de
19
l'exécution de l'obligation , certes imparfaite mais prétendument satisfactoire. Et l'on retrouve
la justification précédente, qui n'a fait qu'étendre son influence. Il suffit de relire ce qu'écrit M.
Ph. Stoffel-Munck sous l'arrêt de la Chambre sociale du 4 décembre 2002 : la solution «
raffermit la force obligatoire du contrat, ce qui est sécurisant aussi bien du point de vue des
parties qu'au point de vue du législateur. S'agissant, en premier lieu, des parties, il ne faudrait
pas oublier que le créancier est en droit d'obtenir paiement des prestations qui lui sont dues et
que le débiteur doit s'attendre à les fournir. Exiger du créancier qu'il démontre le préjudice que
lui cause l'inexécution avant de lui accorder une satisfaction par équivalent est faire peu de cas
de ces prévisions » 20 .

Toutefois, le raisonnement ajoute à celui mené dans le contexte d'une exécution forcée en
nature. La solution repose en effet sur l'idée que le lien d'obligation a une valeur en soi, dont
l'inexécution serait nécessairement le reflet, sans que l'on ait besoin et plus encore sans que l'on
doive s'interroger sur le préjudice subi. À la fonction compensatoire et indemnitaire des
dommages-intérêts s'ajoute une fonction satisfactoire, l'idée même d'équivalence que les
dommages-intérêts assumeraient en apportant témoignage.

11
16. Évidemment, on pourra croire qu'il y a tout de même quelque paradoxe à, d'un côté,
dévaloriser la fonction indemnitaire des dommages-intérêts, en estimant comme on l'a vu
précédemment qu'ils ont, sur le terrain de la réparation, une vertu inférieure à l'exécution forcée
et, de l'autre, venir faire appel à eux pour permettre l'exécution de l'obligation. Mais le paradoxe
n'est qu'apparent : d'une part, parce que les dommages-intérêts dont on parle sur le terrain de
l'exécution par équivalent n'en sont pas, précisément faute de dommage : c'est uniquement une
somme d'argent qui est allouée en guise d'exécution par équivalent 21 ; d'autre part, parce qu'un
même mouvement est censé justifier ces solutions, qui tient au transport du principe de la force
obligatoire du contrat au stade de l'inexécution de l'obligation. Mais c'est sur ce déplacement,
cette charge avérée, qu'il convient de dire un mot pour finir. Loin de justifier le refoulement de
la réparation, le principe de la force obligatoire justifie d'en admettre l'existence et de la
distinguer des hypothèses d'exécution forcée.

III. - La force obligatoire du contrat comme justification


de la distinction de l'exécution et de la réparation

17. Mettons de côté les textes eux-mêmes, même si, on le verra, ils pourraient servir de guide.
Dans ce mouvement d'expansion de la force obligatoire du contrat, ce qui importe n'est pas tant
de savoir si les textes - notamment ceux de 1804 - le justifient que de déterminer si les notions
22
de contrat, d'inexécution - ou d'exécution -, et de réparation s'en accommodent.

18. On admettra tout d'abord que l'exécution forcée en nature n'est pas une sanction mais une
mise en force du contrat 23 . On ne punit pas un contractant en l'obligeant à faire ce à quoi il s'est
engagé. On le punit s'il ne le fait pas. Au reste, l'article 1184 alinéa 2 ne s'y trompe pas, qui
distingue dans le contrat synallagmatique le droit de demander l'exécution forcée et celui de
solliciter la résolution avec dommages-intérêts. Ce faisant, il sous-entend d'une part que le droit
pour le créancier de demander l'exécution forcée aura pour effet-retour, dans les contrats
synallagmatiques, de mettre en force sa propre obligation, l'obligeant, si ce n'est déjà fait, à
s'exécuter - le contrat est donc revigoré ; on n'est pas dans une sanction de l'inexécution -, tandis
qu'il n'est pas question, d'autre part, de dommages-intérêts pour le cas où il aurait choisi
l'exécution forcée, ce qui confirme l'idée que c'est le contrat qui en œuvre.

L'exécution forcée en nature est inévitablement la traduction de la force obligatoire du contrat 24


. Cela n'empêchera pas que le droit à demander une telle exécution forcée peut être subordonné

12
à certaines conditions, posées par la loi et parfaitement autonomes par rapport à l'article 1134
du Code civil. Autrement dit, affirmer que l'exécution en nature est une suite de la force
obligatoire du contrat ne signifie pas qu'elle est un droit discrétionnaire attaché à la qualité de
créancier. L'article 1er de la loi du 9 juillet 1991 ne s'y trompe pas, qui énonce, on l'a relevé, que
« tout créancier peut, dans les conditions prévues par la loi, contraindre, son débiteur défaillant
à exécuter ses obligations à son égard ». Sans jouer sur les mots, on dira alors que s'il y a un
droit à demander l'exécution forcée, cette exécution forcée ne saurait être de plein droit.

Il reste que cette mise en force du contrat est a priori souhaitable, tant il est vrai qu'elle vient,
par hypothèse, assurer le respect de la loi contractuelle, pour servir les prévisions voulues par
le contrat. Seuls des motifs spécifiques - exécution moralement, physiquement ou
matériellement impossible - doivent permettre d'y déroger. On relèvera simplement que la
politique juridique pourrait jouer ici son rôle.

19. Parce qu'elle vise à mettre en force le contrat, la demande d'exécution forcée diffère de la
demande de réparation que pourrait faire le créancier. De la même manière que la violation de
nombre de règles peut ouvrir sur plusieurs actions différentes - action en nullité ou action en
dommages-intérêts par exemple -, la violation du lien contractuel ouvre sur deux actions aux
régimes distincts : d'une part, l'action en exécution ; d'autre part, l'action en réparation. Leurs
conditions diffèrent logiquement : indépendamment des conditions posées par la loi - et donc
de la possibilité matérielle ou morale de l'exécution forcée -, l'action en exécution ne suppose
rapportée que la preuve d'une inexécution de l'obligation ; l'action en réparation, quant à elle,
requiert un préjudice.

20. On aura compris qu'une telle perspective présuppose qu'une demande d'exécution forcée ne
peut jamais être qu'en nature. Elle consiste à considérer qu'il existe une contradiction dans les
termes à admettre l'exécution forcée par équivalent : contraindre le débiteur à autre chose que
ce à quoi il s'est engagé consiste à le sanctionner, tandis que permettre au créancier d'obtenir
autre chose que ce qui lui était promis vise à réparer ce qu'il n'a pas eu 25 . Dans cette hypothèse,
les règles de la responsabilité doivent s'appliquer, qu'il s'agisse d'un équivalent monétaire ou
d'une prestation en nature distincte par hypothèse de celle à laquelle s'était engagé le débiteur 26
. Comme l'exprime la Cour de cassation dans un arrêt de sa troisième chambre du 28 février
1969, « l'obligation de réparer le dommage est distincte de l'obligation contractuelle dont la
violation a causé le dommage » 27 . Par suite, on ne saurait concevoir que des dommages-intérêts
soient alloués sans preuve du préjudice. Certes, il est gênant qu'un débiteur puisse s'en tirer

13
mieux lorsqu'il a violé le contrat et que celui-ci ne peut plus être exécuté que lorsqu'il peut
encore l'être. Mais il n'y a pas de raison de le punir si le créancier ne souffre pas de l'inexécution
de l'obligation. La tentation de l'exécution par équivalent manifeste en définitive l'emprise d'une
conception morale sinon moralisatrice, trop fermement ancrée au principe de la force
obligatoire. Le principe de la force obligatoire du contrat n'implique pas l'idée d'une exécution
par équivalent : imposer l'exécution de ce que le contrat ne prévoit pas en méconnaît les termes
et revient, au rebours de ce qui est présupposé, à admettre une forme de révision - pour raisons
pratiques - du contrat.

21. Indépendamment de cette distinction, il convient de souligner que la demande d'exécution


suppose qu'une obligation devait être... exécutée. Truisme, certes, mais dont Pascal Ancel a
remarquablement montré toutes les implications dès lors que l'on admet qu'il est des cas où le
28
contrat oblige alors qu'il n'y pas d'obligation à exécuter . Le créancier ne saurait en ce cas,
par hypothèse, solliciter l'exécution forcée : il se contentera de demander l'application de
l'engagement du débiteur. La distinction n'est pas sans importance. Ainsi, dans une promesse
unilatérale de vente, le promettant est-il engagé par la promesse, sans qu'il en résulte une
29
obligation qu'il devrait par la suite exécuter . S'il venait à violer son engagement, l'action
consécutive du bénéficiaire ne viserait donc pas à l'exécution mais à l'application de la
promesse. Les limites tenant à la possibilité d'une exécution forcée - bref, l'article 1142 du Code
civil - ne sauraient dès lors être opposées par le promettant au demandeur. C'est ainsi le pouvoir
du juge et la portée du jugement qui s'en trouvent modifiés 30 . Au fond, c'est dans une telle
hypothèse que le principe de la force obligatoire du contrat doit trouver son expression la plus
pure : le contrat s'applique.

Et c'est bien parce qu'il est question d'application du contrat que l'on ne saurait assimiler le pacte
de préférence à la promesse unilatérale de vente : le premier, au rebours de la seconde 31 ,
n'emporte pas consentement - définitif et irrévocable - à la vente au profit du créancier de la
préférence. Cela ne signifie évidemment pas, comme il l'a été rappelé, que le débiteur de la
préférence soit libre de vendre à un tiers. En cette hypothèse, il devra être sanctionné pour avoir
violé son engagement. Mais on ne saurait raisonner comme en matière de promesse unilatérale
de vente : le juge ne peut en effet constater la réalisation de la vente au profit du créancier de la
préférence ni ordonner une vente forcée - qualifiée souvent abusivement de « substitution » -,
faute pour celle-ci de constituer l'exécution de l'engagement stipulé dans le pacte de
préférence 32 .

14
22. Ce dernier constat ne revient pas à méconnaître le principe de la force obligatoire du contrat.
Au contraire. L'application d'un tel principe présuppose de prendre en compte ce à quoi s'était
engagé le débiteur. Lui imposer l'exécution d'une obligation à laquelle il ne s'était pas engagé
n'est pas servir le principe de la force obligatoire du contrat : c'est en permettre le détournement,
sans doute pour punir l'inexécution. Ce n'est pas le contrat inexécuté qui est alors mis en force.
Ce qui permet de comprendre que même dans le refus d'une prétendue exécution forcée - il ne
s'agit plus d'exécution - se manifeste le principe de la force obligatoire du contrat.

DOCUMENT 2 :

Muriel Fabre-Magnan, Chapitre III. L’obligation, Le droit des contrats (2018), pages 48 à 69.

L’article 1103 du Code civil reprend une célèbre formule du Code civil de 1804 : « les contrats
légalement formés tiennent lieu de lois à ceux qui les ont faits ». La métaphore de la loi est prise
pour signifier le type d’obligation le plus contraignant. Le contrat a en effet force obligatoire (I),
ce qui signifie que les parties sont tenues, par la loi, de respecter la parole qu’elles ont
donnée (II). Le contrat n’oblige cependant en principe que les parties qui l’ont voulu : on parle
à cet égard de l’effet relatif des contrats (III). L’obligation est enfin toujours gouvernée par le
principe de bonne foi (IV).

I. – La force obligatoire du contrat

21. Un vinculum juris. – Le contrat est source d’obligations, ce qui signifie que les parties
sont attachées et liées juridiquement l’une à l’autre : c’est le sens du verbe ligare, lequel est ici
précédé du préfixe ob (« pour, à cause de, en échange de »). Le premier sens attesté du mot est
juridique : en droit romain, l’obligation était décrite comme un vinculum juris, à savoir un «
lien de droit ». L’image utilisée était forte, car les vinculi étaient, au sens propre, les chaînes ou
les fers permettant de retenir un prisonnier.

3L’image du lien est présente dans plusieurs autres grandes cultures. Ainsi, en hindi, le
terme anubandh, utilisé pour désigner le contrat, « renvoie littéralement au lien (bandh,
“attacher, lier”) selon (anu-) lequel les deux parties vont œuvrer [1][1]A. Montaut, in
P. Legendre (dir.), Tour du monde des concepts,… ». En japonais encore, l’un des deux
caractères qui forme le mot « contrat » (keiyaku), yaku, est un « caractère par lequel est souligné
le fait de lier, de nouer et, de façon extensive, d’établir un engagement », « d’où la connotation

15
relativement charnelle du mot, qui désigne même anciennement le fait de copuler [2][2]O.
Nishitani, ibid., p. 297. ». On peut citer aussi la sourate V du Coran qui énonce : « Ô vous qui
croyez ! Respectez vos engagements » (trad. D. Masson). C’est le mot ‘uqud qui est utilisé en
arabe, pluriel de ‘aqd, et qui, dans le contexte, vise plutôt les obligations religieuses acceptées
par les croyants. Il est cependant utilisé à d’autres reprises dans le Coran pour viser un accord
entre deux groupes, ou même un contrat de mariage. Le mot vient de la racine ‘a-q-d qui signifie
faire un nœud avec deux cordes. Quand quelqu’un conclut un contrat, il manifeste son
acceptation en « nouant sa langue [3][3]Un grand remerciement pour ces précieuses indications
à… », ce qui renvoie aussi à l’image de la parole (sur laquelle voir infra, p. 53).
4L’obligation contractuelle n’est pas toujours pure et simple. Elle est parfois assortie de
modalités (art. 1304 sq.) qui en affectent l’existence (la condition, qui peut être suspensive ou
résolutoire) ou la durée (le terme, qui peut être suspensif ou extinctif). Certaines modalités
affectent l’objet même de l’obligation : une obligation peut ainsi être plurale, lorsqu’elle prévoit
une pluralité d’objets (l’obligation peut être cumulative, alternative ou facultative) ou une
pluralité de sujets (pluralité de créanciers ou débiteurs : l’obligation est alors en principe
divisible, mais elle peut aussi être solidaire ou à prestation indivisible).

52. Force obligatoire et contenu obligationnel du contrat. – Comme l’a souligné Pascal
Ancel dans un très bel article paru dans la Revue trimestrielle de droit civil en 1999, il ne faut
pas confondre la force obligatoire du contrat avec le contenu obligationnel du contrat. Tout
contrat a par définition même un effet obligatoire, c’est-à-dire que les parties seront désormais
obligées par le contrat qu’elles ont librement conclu, et ne pourront le modifier ou le révoquer
qu’avec leur consentement mutuel ou pour certaines causes que la loi autorise. L’une et/ou
l’autre d’entre elles peuvent par ailleurs avoir souscrit des obligations concrètes, qui sont des
obligations de faire ou de ne pas faire quelque chose. Même dans un contrat unilatéral, dans
lequel une seule des parties s’engage sans qu’il y ait d’engagement réciproque de l’autre, par
exemple une donation (par opposition à un contrat dit « synallagmatique », du grec synallama,
« échange », dans lequel les contractants s’obligent réciproquement les uns envers les autres,
par exemple une vente), les deux parties sont obligées (liées) par le contrat.

6Le Code civil consacre deux sous-sections différentes (art. 1193 sq., puis art. 1196 sq.)
respectivement à la force obligatoire et à l’effet translatif. Cependant, l’effet translatif du contrat
est également un effet obligatoire : les parties sont bien liées par le contrat translatif, même si
l’on admet aujourd’hui, en droit français tout au moins (il en va différemment en droit allemand,

16
par exemple), que le transfert est un effet automatique ou légal, et non pas à proprement parler
l’objet d’une obligation.

73. L’effet translatif du contrat. – Depuis le droit romain, on distinguait plusieurs types
d’obligations : les obligations de faire, de ne pas faire, de donner (du latin dare et non
pas donare, qui signifie « transférer la propriété » mais pas nécessairement à titre gratuit), et
enfin parfois aussi les obligations de mise à disposition des choses sans transfert de propriété
(obligations de praestare), comme dans le prêt ou la location. Le Code civil n’utilise plus ces
dénominations qui ne semblent plus avoir d’enjeux, même si elles reviendront sans doute
naturellement dans le discours juridique, au moins pour les obligations de faire et de ne pas
faire.

8Dans les contrats ayant pour objet l’aliénation de la propriété ou la cession d’un droit, le
transfert s’opère automatiquement dès la conclusion du contrat. Le contrat de vente aussitôt
conclu entraîne ainsi de plein droit le transfert à l’acheteur de la propriété de la chose vendue,
et le vendeur est dès lors simplement obligé de la délivrer, c’est-à-dire d’en transférer la
possession à l’acheteur. Ce transfert peut être différé par la volonté des parties (des clauses
peuvent ainsi réserver la propriété au vendeur jusqu’à complet paiement du prix), par la nature
des choses ou par l’effet de la loi.

9Le transfert de propriété emporte transfert des risques de la chose. Toutefois, le débiteur de
l’obligation de délivrer en retrouve la charge à compter de sa mise en demeure, sous réserve
que celle-ci soit possible. L’obligation de délivrer la chose emporte obligation de la conserver
jusqu’à la délivrance, en y apportant tous les soins d’une personne raisonnable.

10Le code prévoit enfin expressément quelques règles en cas de vente d’une même chose à
deux personnes. Lorsque deux acquéreurs successifs d’un même meuble corporel tiennent leur
droit d’une même personne, celui qui a pris possession de ce meuble en premier est préféré,
même si son droit est postérieur, à condition qu’il soit de bonne foi. Lorsqu’il s’agit d’un
immeuble, c’est celui qui a, le premier, publié son titre d’acquisition passé en la forme
authentique au fichier immobilier qui est préféré, même si son droit est postérieur, à condition
toujours qu’il soit de bonne foi.

114. La durée du contrat. – « On ne peut engager ses services qu’à temps, ou pour une
entreprise déterminée », dit déjà l’article 1780 du Code civil propre au contrat de louage de
services. On en avait tiré une règle générale qu’exprime désormais l’article 1210 : « Les

17
engagements perpétuels sont prohibés. » S’engager pour toute la durée de sa vie porterait en
effet une atteinte excessive à la liberté individuelle. Le contrat n’est alors pas nul, mais chacun
des contractants peut y mettre fin de façon unilatérale, dans les conditions prévues pour les
contrats à durée indéterminée (contrats conclus sans indication de date de fin). L’article 1211
prévoit ainsi que, lorsque le contrat est conclu pour une durée indéterminée, chaque partie peut
y mettre fin à tout moment, sous réserve de respecter le délai de préavis convenu ou, à défaut,
un délai raisonnable.

12En revanche, lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, chaque partie doit
l’exécuter jusqu’à son terme (art. 1212 sq.). Nul ne peut exiger le renouvellement d’un tel
contrat, qui peut cependant être prorogé si les contractants en manifestent la volonté avant son
expiration. Il peut également être renouvelé par l’effet de la loi ou par l’accord des parties. Le
renouvellement donne naissance à un nouveau contrat dont le contenu est identique au
précédent, mais dont la durée est indéterminée. Lorsqu’à l’expiration du terme d’un contrat
conclu à durée déterminée, les contractants continuent d’en exécuter les obligations, il peut y
avoir tacite reconduction, laquelle produit les mêmes effets que le renouvellement du contrat.

II. – Le respect de la parole donnée

131. L’engagement par la parole. – On peut, d’un point de vue anthropologique, être obligé
par des paroles ou par des actes [4][4]Voir A. Leroi-Gourhan, Le Geste et la Parole, Paris,
Albin…. Le statut respectif des paroles et des actes diffère selon les cultures. En France,
l’engagement par la promesse volontaire, c’est-à-dire par la parole, a longtemps été
l’engagement par excellence. La formule de Loysel citée à la première phrase de ce livre en
garde la trace, même si de nombreux engagements sont aussi involontaires, et résultent d’un
devoir d’assumer les conséquences de ses actes (ainsi, le droit de la responsabilité civile
délictuelle).
14On trouve trace de l’idée de parole dans d’autres langues. En russe, la plus ancienne
traduction du mot « contrat », attestée dès le XVIe siècle, est le mot dogovor, dont « le
radical govor […] désigne l’activité de parole [5][5]R. Camus, in P. Legendre (dir.), Tour du
monde des concepts,… ». Alain Supiot rappelle que le Verbe occupe dans la culture occidentale
une place centrale ; il a certes une très grande place en Afrique subsaharienne, ou encore en
Chine, mais c’est seulement en Occident que « l’on a pensé qu’à l’image de Dieu, tout homme
pouvait disposer pour son propre compte de la puissance législatrice du Verbe et enfermer

18
l’avenir dans des paroles » ; ainsi, « là où l’Occident fait pleine confiance au verbe explicite, le
Japon ne se fie qu’à l’acte lui-même [6][6]« La relativité du contrat en questions », in La
Relativité du… ».
152. Pacta sunt servanda. – Le caractère obligatoire des contrats n’a pas toujours été acquis.
En droit romain, et même encore dans les codifications justiniennes, seuls quelques contrats
nommés (la vente, le mandat, etc.), qui moulaient les relations dans une forme bien précise,
recevaient le soutien du droit. Ces actes formels s’opposaient aux simples conventions
(conventio) ou pactes (pactum), engagements purement consensuels sans aucune forme et pour
le respect desquels le droit n’accordait aucune action. Selon la formule d’Ulpien reprise au
Digeste : ex nudo pacto nulla nascitur actio (« du pacte nu, c’est-à-dire revêtu d’aucune forme,
ne naît aucune action »).

16La redécouverte du droit romain au XIIe siècle provoqua une rupture, correspondant à la
renaissance du droit savant qui influença aussi les praticiens. Le droit romain enseigné fut en
réalité remanié par les commentateurs médiévaux qui, par leurs gloses (d’où leur nom de «
glossateurs »), c’est-à-dire les petites notes écrites sur les manuscrits entre les lignes du texte
ou plus souvent dans ses marges, enrichirent considérablement les textes anciens. Ces derniers
reprirent la fameuse formule d’Ulpien sur le pacte nu d’où ne peut naître aucune action, pour
élaborer la théorie des vêtements (vestimenta) du pacte, que Bartole (au XIVe siècle) utilise
toujours, et qui permettent de valider celui-ci. On distinguait au total six catégories de
vêtements, dont quatre correspondaient aux catégories romaines : la parole (contrats verbis),
l’écriture (contrats litteris), la remise (contrats re), et même le consentement, dans les contrats
consensuels comme la vente ; Azon y ajouta, vers la fin du XIIe siècle, la cohaerentia, pacte
adjoint à un contrat, dont il dit que, « n’ayant pas de vêtement propre, il va se blottir sous le
vêtement d’un autre », et l’interventus rei, qui correspondait au cas où une chose est remise
après le consentement, c’est-à-dire à l’hypothèse où l’une des parties exécute son engagement.
Pour tenter d’expliquer que le consentement pouvait être considéré comme un vêtement, alors
même que traditionnellement le pacte nu se définissait précisément comme un simple
consentement, le plus célèbre glossateur, Accurse, auteur de la Grande Glose (mise en ordre de
toutes les autres gloses, achevée vers 1227-1230), expliqua que certains pactes, ceux qui sont
vus avec faveur par le droit et qui sont « gras et chauds » (cum favorabiles et pingues et calidi),
pouvaient se contenter d’un vêtement « léger » (tenuis vestis), certes élégant mais un peu froid
(minus frigidum) [7][7]Voir J.-L. Gazzaniga, Introduction historique au droit des….

19
17Le tournant se fit au Moyen Âge, sous l’influence déterminante du droit canonique
[8][8]Voir F. Spies, De l’observation des simples conventions en…. Les Évangiles prohibaient
le serment, mais l’Église finit tout de même par le réglementer. Le décret de Gratien
au XIIe siècle énonce que Dieu ne fait pas la différence entre un serment et une simple parole,
et le droit canonique élabora alors la théorie des « péchés de la langue » (mensonge, parjure,
faux serment). Selon l’Église, le mensonge est un péché que commet celui qui ne respecte pas
sa parole et ses engagements. Le formalisme fut alors atténué, et le simple accord put désormais
obliger. En 1234 furent publiées les Décrétales de Grégoire IX ainsi que certains canons anciens
; parmi ceux-ci, le canon Antigonusreproduisait une décision rendue en 348 à Carthage où il
était dit : « Que la paix soit conservée, que les pactes soient observés » (pax servetur, pacta
custodiantur), qui sera progressivement appliqué même devant les tribunaux séculiers.
18Quant au droit coutumier, il rend également compte dès le XIIIe siècle de l’avancée du
consensualisme : on trouve ainsi dans les coutumiers des formules telles que « toutes
convenances sont à tenir » (Beaumanoir), ou encore « convenances accordées par bonnes
mœurs font le marché, non pas la paumée, et le cœur doit suivre la parole » (Jostice et Plet). Ce
n’est qu’au XVIe siècle que sera acquise la force obligatoire des simples conventions, c’est-à-
dire que sera reconnue la valeur du simple échange des consentements (en particulier chez
Dumoulin). Au XVIIe siècle, Pufendorf met au rang des maximes les plus importantes du droit
naturel « que chacun doit tenir inviolablement sa parole ».

19La règle pacta sunt servanda est considérée comme typique du droit français, par opposition
au droit américain qui est plutôt gouverné par un principe d’utilité et d’échange de valeurs entre
les parties. A ainsi été théorisée, et appliquée par les juges, l’idée que les contractants devraient
au contraire être incités à ne pas respecter leurs promesses lorsqu’ils y ont un intérêt
économique, car elles ont entre-temps trouvé mieux (c’est-à-dire plus rentable) ailleurs. C’est
ce qu’on appelle la « violation efficace du contrat » (efficient breach of contract). Richard
Posner, le « pape » de l’analyse économique du droit aux États-Unis, a ainsi écrit qu’on ne
devrait jamais blâmer quelqu’un qui n’exécute pas son contrat [9][9]R. Posner, « Let us Never
Blame a Contract Breaker », Michigan…. Les attaques sur la parole inhérentes à cette
conception ont certes des effets diffus, mais les conséquences sur la confiance de cette perte de
valeur sociale de la parole sont néanmoins perceptibles (voir infra, chap. V). Même à l’aune de
l’efficacité économique, il n’est pas sûr qu’un commerçant agissant sur cette ligne gardera
longtemps tous ses clients.

20
203. L’autonomie de la volonté. – Le contrat est placé sous le signe de l’autonomie de la
volonté. La volonté a le pouvoir de s’obliger, c’est-à-dire de se donner à elle-même (auto) sa
propre loi (nomos). De leur plein gré, les êtres humains peuvent ainsi s’engager les uns envers
les autres.

21L’autonomie de la volonté ne suffit cependant pas à rendre compte du contrat. Si la volonté


était réellement toute-puissante, elle pourrait en effet non seulement se lier mais encore se délier
quand elle ne voudrait plus exécuter. Le Conseil constitutionnel a quant à lui refusé de donner
une valeur juridique à ce principe doctrinal, et énonce « que ne résulte ni de l’article 4 de la
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ni d’aucune autre norme de valeur
constitutionnelle un principe constitutionnel dit de l’“autonomie de la volonté” ».

22La volonté a certes le pouvoir de s’engager et de se lier, mais il faut que la loi y apporte son
soutien et sa garantie (voir infra, chap. IV). Si les contractants se font confiance, c’est parce
qu’ils savent que le droit viendra à leur secours dans l’hypothèse où l’autre violerait sa
promesse. Pour certains auteurs, et en particulier pour Georges Rouhette, on peut alors dire que
la force obligatoire du contrat trouve sa source dans la loi et non pas dans la volonté. Elle est
comme la lumière qui, certes, est déclenchée lorsque les personnes appuient sur l’interrupteur,
mais qui provient d’une autre force que la simple volonté. Cette explication n’est cependant
que partiellement convaincante, car elle suppose qu’une société pourrait changer la loi et se
passer de la force obligatoire des contrats. De fait, la confiance peut, dans d’autres cultures, être
instituée et garantie par autre chose que la loi et les juges (par exemple par une contrainte sociale
plus diffuse, mais aussi parfois plus forte que dans nos sociétés), mais il n’empêche qu’une
société où la parole ne serait plus garantie par un tiers ne pourrait pas fonctionner bien
longtemps.

234. La confiance légitime. – Les juristes anglais justifient plus souvent la force obligatoire
des contrats par l’idée d’attentes légitimes que la promesse a suscitées et que le droit doit
garantir. La théorie de lareliance (du verbe to rely on, « compter sur », « se fier à ») explique
ainsi que, lorsqu’une partie a pu légitimement se fier à la parole d’autrui, le droit doit protéger
ces attentes. L’origine de cette idée peut être trouvée dans la célèbre action d’assumpsit (qui
signifie en latin « il a assumé », « il s’est engagé »). Vers le début du XVe siècle, cette action
permettait de se plaindre lorsqu’une personne s’était engagée à faire quelque chose et qu’elle
le faisait de façon défectueuse et dommageable. Le défaut total d’exécution ne pouvait en
revanche permettre au créancier d’aller en justice, sauf si une forme avait été respectée et que

21
la promesse avait été faite sous sceau. Les juges admirent ensuite que la consideration (forme
de contrepartie) pouvait remplacer l’exigence d’un sceau. Surtout, certaines promesses furent
déclarées exécutoires (actionable) dès leur échange et avant même tout début d’exécution, et
ce, pour éviter que le créancier ait à prétendre avoir fait quelque chose sur la foi de la promesse
pour pouvoir en exiger l’exécution forcée. L’intérêt de cette théorie est d’insister sur le fait que,
si le droit doit garantir les promesses, c’est afin d’encourager la confiance et donc les liens entre
les personnes (sur cette idée, voirinfra, chap. V). L’explication est cependant un peu circulaire :
on justifie la force obligatoire d’une promesse par le fait qu’une personne a pu légitimement y
faire foi, mais une personne ne peut légitimement y faire foi que si elle sait au préalable que
cette promesse sera garantie par le droit et donc obligatoire.

24L’idée de confiance légitime imprègne progressivement le droit français, et la réforme de


2016 introduit l’idée à de multiples reprises. Ainsi, on a vu qu’un devoir d’information existe
dès lors que, légitimement, l’une des parties ignore une information, ou a fait confiance à son
cocontractant. De même, un acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses
pouvoirs est inopposable au représenté, sauf si le tiers contractant a légitimement cru en la
réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations
du représenté. De même encore, si la qualité de la prestation n’est pas déterminée ou
déterminable en vertu du contrat, le débiteur doit offrir une prestation de qualité conforme aux
attentes légitimes des parties. La doctrine et les juges français se sont aussi inspirés de
l’estoppel du droit anglais (action défensive permettant de forcer l’autre à se tenir à ce qu’il
avait commencé à faire ou même laissé entendre qu’il ferait) pour imposer aux contractants un
devoir de ne pas se contredire au détriment d’autrui.

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