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Chapitre 5 

: Les obstacles à l’annulation par le juge

Notion de nullité contextuelle : le Conseil Constitutionnel estime que dans l’hypothèse où le


Parlement oublie de prévoir une sanction posée par le texte, on peut interdire au juge de
conclure la nullité du contrat alors même que la sanction prévue ne serait pas expresse dans
les textes.

Section I – La confirmation

Confirmer un contrat veut dire confirmer sa validité en connaissance de sa nullité, la


renonciation à demander la nullité du contrat.

Article 1181 du Code civil : « La nullité relative ne peut être demandée que par la partie que
la loi entend protéger.

Elle peut être couverte par la confirmation.

Si l’action en nullité relative a plusieurs titulaires, la renonciation de l’un n’empêche pas les
autres d’agir.  »

Article 1182 du Code civil : « La confirmation est l’acte par lequel celui qui pourrait se
prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l’objet de l’obligation et le vice
affectant le contrat.

La confirmation ne peut intervenir qu’après la conclusion du contrat.

L’exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation.


En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu’après que la violence a cessé.

La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés,
sans préjudice néanmoins des droits des tiers. »

 C’est l’hypothèse d’un vice du consentement, d’une erreur. Un tableau beaucoup restauré
non authentique, l’acheteur confirme la nullité. Il purge la nullité.

 C’est la raison pour laquelle la confirmation ne peut intervenir qu’en toute connaissance
de cause, donc la volonté de la victime de la nullité doit être certaine.

Elle peut être expresse : courrier, mail, sms


Elle peut être aussi tacite.

L’article 1182 considère que l’exécution du contrat vaut confirmation.


Par exemple : une partie du prix n’a pas encore été payée, l’acheteur victime de l’erreur,
envoie son chèque ou fait le virement alors même qu’il est au courant de la restauration
excessive, c’est une confirmation tacite.
Donc c’est valable.
En revanche, l’hypothèse d’une clause insérée par avance dans le contrat qui prévoit que les
parties par avance renoncent : cette clause n’est pas valable, on ne peut pas renoncer par
avance à un droit.

La confirmation par définition ne s’applique qu’aux nullités relatives, de protection. En cas


de nullité absolue, une personne ne pourrait pas renoncer à demander la nullité du contrat.

Article 1183 du Code civil : « Une partie peut demander par écrit à celle qui pourrait se
prévaloir de la nullité soit de confirmer le contrat soit d’agir en nullité dans un délai de six
mois à peine de forclusion. La cause de la nullité doit avoir cessé.

L’écrit mentionne expressément qu’à défaut d’action en nullité exercée avant l’expiration du
délai de six mois, le contrat sera réputé confirmé. »

Section II - La prescription
Faut-il mettre un terme pour qu’une victime d’une nullité quelconque puisse agir en justice ?

Jusqu’à une loi de 2008, il y avait une prescription spécifique qui était de cinq ans à compter
de la découverte du vice de nullité.
Exemple : 3 ans après l’achat d’un tableau, ses amis dont un est un expert en matière
artistique lui dit que son tableau ne vaut rien du tout. Il a donc découvert le vice 3 ans après la
vente, le point de départ est la découverte, et c’est à ce moment-là qu’on a les cinq ans. Ça
fait 8 ans.

L’ordonnance de 2016 a supprimé la prescription spécifique en matière de nullité et a


généralisé à toutes les actions en justice, ce mécanisme des cinq ans à compter dès la
connaissance.

Article 2224 du Code civil : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq
ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaitre les faits lui
permettant de l’exercer.  »

 Cet article peut s’appliquer à toute sorte d’action en justice. Ce texte a généralisé le point
de départ de la prescription à compter de la connaissance ou de la découverte

Délai butoir : un délai au-delà duquel même si la découverte est tardive, la victime ne pourra
plus agir. Un délai de 20 ans, à compter du moment de la conclusion du contrat.
Ça c’est pour l’action en justice de la victime qui assigne la nullité.

 Question qui est celle du cas où la victime est en défense, elle est assignée en exécution du
contrat par l’autre partie qui est à l’origine de la nullité.

Par exemple : le cas d’un prêt. Un banquier qui assigne en justice les emprunteurs parce
qu’ils ont payé tardivement les intérêts réclamés et ceci s’aperçoit tardivement que le contrat
est nul. Peuvent-ils invoquer en défense une nullité alors que s’ils étaient demandeurs ils
seraient prescrit ?
Adage du Moyen Âge selon lequel lorsqu’on est en défense, la nullité peut être invoquée de
façon perpétuelle. Par conséquent, même s’il était trop tard pour agir en nullité contre le
banquier, dès lors que c’est le banquier qui nous assigne et qu’on est en défense, aucune
prescription ne peut vous être invoquée.

 La Cour de cassation dans une série d’arrêts a estimé que dès lors que la victime a
commencé d’exécuter le contrat, elle ne peut pas se prévaloir de l’exception de nullité.

Les magistrats confondent avec le mécanisme de la confirmation. Si les emprunteurs sont mis
au courant de l’existence d’une nullité relative au calcul des intérêts et qu’ils continuent de
payer, ils confirment. Mais s’ils paient pendant un temps sans savoir quelle nullité et qu’ils le
découvrent parce qu’ils sont allés voir un avocat après assignation, à ce moment-là le
commencement d’exécution du contrat n’a aucune valeur en soi.
La Cour de cassation a maintenu sa position et sa position a été consacrée dans l’article 1185
du Code civil.

Article 1185 du Code civil : « L’exception de nullité ne se prescrit pas si elle se rapporte à
un contrat qui n’a reçu aucune exécution. »

Section III – La turpitude


C’est une attitude contraire à la morale. La question très pratique se pose de savoir si toujours
dans l’hypothèse où un contrat est nul et que la responsabilité de cette nullité incombe à une
des parties coupables, si elle peut se prévaloir de la nullité pour obtenir la restitution de ce
qu’elle a versé.

Exemple : la corruption. Une entreprise qui a remis à un intermédiaire 200 000 euros pour
qu’il soudoie un maire pour obtenir un marché public. C’est un contrat affecté d’un vice de
nullité absolue. Le corrupteur peut-il se faire rendre l’argent par l’intermédiaire ?
La réponse dès l’ancien droit c’est NON.

Adage : « nome au ditur propriam turpitudinem allegans ». Nul ne peut alléguer sa propre
turpitude.

 Celui qui est à l’origine des rapports sexuels en contrepartie de cadeaux et celui qui est à
l’origine de corruption pour le marché public, le juge refusera la restitution.

C’est une application de la morale dans le droit.

A ce principe il y a des exceptions.

Corruption : l’intermédiaire est aussi fautif.

Même si les deux parties sont coupables, on va interdire à celle qui a versé quelque chose de
se le faire restituer.

Exception : la fraude fiscale


Mécanisme : la simulation

Exemple : des gens qui achètent une maison à 800 mille euros, il y a un impôt qui doit être
payé par le vendeur au moment du contrat. Plus le prix est élevé, plus le droit de mutation
sera élevé. Il y a des gens qui mettront dans l’acte notarié que le prix est de 500 mille. Ils
déclarent à l’administration fiscale une vente de 500 mille, ce qui permettra d’avoir un impôt
moins élevé. C’est une fraude fiscale.
Dans cette hypothèse, c’est une nullité absolue. L’acheteur qui aurait payé les 300 mille peut
se faire restituer et dénoncer la fraude à laquelle il était partie. C’est pour encourager les
dénonciations.

Section IV – Le prononcé de la nullité


C’est le juge qui va prononcer ou refuser la nullité. Si le juge prononce l’annulation, il faut
chercher les effets de celle-ci.

I- L’étendue de l’annulation

Le juge a une alternative.

Il estime que tout le contrat doit être annulé : en présence de dol, le juge estime qu’il y a
erreur sur la qualité essentielle, et donc prononce l’annulation. L’acheteur rend le meuble, le
prix lui est restitué.
 Cependant, la victime n’a pas toujours intérêt que tout le contrat soit anéanti.
Théorie jurisprudentielle et doctrinale sur la nullité partielle. Exemple : prêt conclu pour 20
ans, les emprunteurs ont pu acheter une maison mais une clause sur le contrat n’est pas
conforme aux Codes, elle est nulle. Si le juge prononce la nullité du contrat, les acheteurs
devront rendre l’argent. Ils n’ont aucun intérêt à demander la nullité totale. Ils peuvent
demander la nullité de la seule clause.
Exemple : La compagnie aérienne air France imposait à son personnel, leur interdisant de se
marier. Clause de célibat pour des raisons fonctionnelles. La Cour de cassation estime que la
clause nulle, portant atteinte au droit fondamental de se marier, mais le contrat est maintenu.
Écoles catholiques, interdisaient aux professeurs de divorcer : contraire aux droits
fondamentaux, donc nullité partielle.
La nullité partielle est codifiée à l’article 1184 du Code civil.
Article 1184 du Code civil : «  Lorsque la cause de nullité n’affecte qu’une ou plusieurs
clauses du contrat, elle n’emporte la nullité de l’acte tout entier que si cette ou ces clauses
ont constitué un élément déterminant de l’engagement des parties ou de l’une d’elles.
Le contrat est maintenu lorsque la loi répute la clause non écrite, ou lorsque les fins de la
règle méconnue exigent son maintien. »
 Souvent c’est la loi qui prononce que la clause nulle est réputée non écrite (nullité
partielle).
On peut revenir aux clauses abusives : les conditions générales, les clauses attribuant
compétences qu’au tribunal de San Francisco ( Apple ). Tout le contrat est valable sauf cette
clause.
 Synonyme de nullité partielle : clause réputée non écrite
II- La rétroactivité

En matière contractuelle, l’annulation par le juge est rétroactive. On fait comme si le contrat
n’avait jamais existé, on l’efface.

Effet partagé avec la loi : les lois ne sont pas rétroactives mais en matière contractuelle, la
nullité absolue prononcée par le juge est rétroactive, on fait comme si le contrat n’avait
jamais existé.
Exemple : erreur sur les qualités essentielles de la table excessivement rénovée : contrat
totalement effacé, le vendeur restitue le prix et le meuble est restauré.
Exceptions :
 L’intérêt des parties : il y a des contrats qui peuvent être nuls alors qu’ils se sont
exécutés.
Distinction entre contrat à exécution instantanée et successive : instantané, pas de
difficulté pour la rétroactivité. À exécution successive : contrat de bail, au bout de 2 ans,
le locataire demande la nullité totale du bail : si on utilise le mécanisme de la nullité
rétroactive, le bail s’est déjà exécuté, il devrait restituer tout le loyer pendant deux ans, ce
qui ne peut pas être apprécié en argent, parce que le locataire ne peut pas rendre une
jouissance. La Cour de cassation a jugé que dans les contrats à exécution successive, la
nullité est pour l’avenir, elle n’est pas rétroactive.
 Sur la restitution de biens frugifères : un bail rural. Le fermier a exploité la terre
pendant deux ans et il y a eu des récoltes. Le bail est annulé, puisque chaque partie
doit rendre à l’autre tout ce qu’elle a reçu, est ce que le fermier doit rendre les récoltes
qui sont les fruits naturels ou industriels du bien ?

En théorie oui, mais la jurisprudence codifiée en 2016 par l’ordonnance, considère que dès
lors que le possesseur du bien était de bonne foi, il peut conserver les fruits et n’aura pas à les
restituer au propriétaire du bien.

 Les règles sur les restitutions se trouvent aux articles 1352 et suivants du Code civil.
Deuxième difficulté liée à la rétroactivité :

Les rapports avec les tiers : l’erreur sur les qualités essentielles a été subie par le vendeur et
non pas par l’acheteur. Il s’en aperçoit postérieurement à la vente et il demande la nullité
deux ans après. Le problème c’est que l’acheteur a revendu le tableau au musée du Louvre.
La rétroactivité ne peut pas marcher.

Est-ce que le vendeur peut invoquer la nullité contre le tiers et se faire restituer par le Louvre
ce tableau ? Non, le tiers est de bonne foi. En fait de meubles la possession vaut titre. Le
demandeur pourra demander l’annulation du contrat mais ne pourra pas récupérer son tableau
sauf si l’acheteur est de mauvaise foi.

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