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§4 – La rétractation de l’acceptation

Contrats entre absents – La question du moment précis de la conclusion du contrat


ne soulève pas de difficulté lorsque l’offrant et l’acceptant sont présents dans un
même lieu (ou lorsque, bien qu’éloignés, ils communiquent de façon quasiment
instantanée, par téléphone ou internet par exemple). Mais si l’échange des
consentements a lieu par correspondance, les délais d’acheminement du courrier
compliquent la situation. C’est ce que l’on appelle les « contrats entre absents ». En
pareille hypothèse, l’acceptant peut-il rétracter son acceptation avant que le pollicitant en
ait connaissance ?

Il existe, en matière de « contrats entre absents » deux façons d’envisager la formation


du contrat : la théorie de l’émission et la théorie de la réception.

Selon la théorie de l’émission, le contrat est formé lorsque le destinataire de l’offre


formule son acceptation (i.e. lorsqu’il envoie le courrier).

Selon la théorie de réception, le contrat est formé lorsque l’offrant à connaissance de


l’acceptation (i.e. lorsqu’il reçoit la lettre d’acceptation).

Ces deux théories produisent des conséquences opposées lorsque l’offre est révoquée
entre le moment où son destinataire a exprimé son acception et celui ou l’offrant
reçoit cette acceptation. Si l’on considère que le contrat est formé au moment où
l’acceptation est intervenue (théorie de l’émission), toute rétractation ultérieure sera
inefficace. En revanche, si l’on considère que le contrat est formé lorsque
l’acceptation parvient à l’auteur de l’offre (théorie de la réception), la rétractation est
efficace et fait obstacle à la formation du contrat.

Avant la réforme de 2016-18, la jurisprudence retenait la théorie de l’émission. Le


contrat était donc formé dès que l’acceptation était émise et ce bien que l’offrant n’en
soit pas encore informé. Toutefois, l’offrant pouvait préciser le contraire dans son
offre. Celle-ci pouvait stipuler que le contrat était formé lorsqu’il avait pris
connaissance de l’acceptation. De plus, on admettait, de façon d’ailleurs peu logique,
que l’acceptant pouvait toujours revenir sur son acceptation tant qu’elle n’est pas
encore parvenue à destination (par exemple en téléphonant, en envoyant une
télécopie ou un courriel).

La réforme de 2016-18 revient sur cette jurisprudence. C’est, désormais, la théorie


de la réception qui est retenue. En effet, selon l’article 1121, le contrat est conclu dès
que l’acceptation parvient à l’offrant. Autrement dit, tant que l’offrant n’a pas encore
connaissance de l’acceptation, le contrat n’est pas formé. Il s’ensuit que l’offrant peut
rétracter son offre avant d’avoir eu connaissance de l’acceptation, tandis que
l’acceptant peut rétracter son acceptation tant que celle-ci n’est pas parvenue à la
connaissance de l’offrant (article 1118, alinéa 2).
2

En somme, désormais, le contrat est formé lorsque l’acceptation est parvenue à


l’offrant.

Droit de rétractation – En dehors de l’hypothèse des contrats entre absents, la loi ou le


contrat peuvent prévoir un délai de rétractation avant l’expiration duquel celui qui en
bénéficie peut rétracter son consentement (article 1122 du Code civil). En législation, ce
droit de rétractation est apparu afin de protéger le consommateur contre un accord donné
à la hâte (v. par exemple l’article L. 221-18 du Code de la consommation qui fixe à 14
jours le délai pendant lequel le consommateur peut se rétracter en cas de contrat conclu
à distance à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement). Bien souvent,
ce droit de rétractation s’accompagne de mesures destinées à en assurer l’effectivité
(information sur l’existence de ce droit, obligation de joindre un bordereau de rétractation,
interdiction d’un commencement d’exécution avant l’expiration du délai).

En dehors de ces cas légaux, les contractants peuvent toujours se réserver eux-mêmes, ou
à l’un d’entre eux, les mêmes facultés de rétractation. Très fréquente est par exemple la
clause de dédit. Cette clause permet à une partie de se délier de son engagement
moyennant une certaine somme d’argent, appelé « dédit », et ce pendant un certain délai
(le dédit ne sanctionne pas une inexécution contractuelle, puisqu’il est prévu que les
parties peuvent se rétracter). Cette faculté de dédit est connue depuis longtemps par la
pratique des arrhes1. Le terme arrhes désigne une somme d’argent qui permet aux parties
à un contrat de revenir sur leur engagement. Si celui a versé les arrhes se rétracte, la somme
reste acquise à l’autre partie. Si c’est celui qui a reçu les arrhes qui se rétracte, il devra
restituer à l’autre partie le double de la somme. Si aucune rétractation n’a lieu, les arrhes
s’imputeront sur le prix. Depuis une loi de 1992, tout versement anticipé par un
consommateur est présumé constituer des arrhes (article L. 214-1 du Code de la
consommation).

Chapitre 2 – La négociation du contrat

La négociation du contrat est la période préalable à la conclusion de celui-ci pendant


laquelle les parties discutent du contenu de leur accord. La négociation n’est ni une
condition d’existence, ni une condition de validité du contrat. Un contrat peut
parfaitement se former instantanément, sans qu’il y ait eu de discussions préalables.

Mais pour les contrats importants, la formation n’est pas instantanée. Elle résulte d’un
processus où l’accord des parties se fait progressivement.

Parfois, ce processus passe par la conclusion d’un contrat intermédiaire par lequel elles
formalisent leur accord partiel. Ces contrats intermédiaires sont communément désignés
sous l’expression « avant-contrat ».

1
A. Triclin, « La renaissance des arrhes », JCP G 1994, I, n° 3732.
3

Dès lors, une distinction sera opérée entre les négociations contractuelles (§1) et les avant-
contrats (§2).

§1 – Les négociations précontractuelles

Avant la réforme de 2016-18, le régime des négociations contractuelles (on parlait


également de « pourparlers ») était défini par la jurisprudence. Le Code civil prévoit
désormais expressément quelques règles gouvernant cette période 2 . Il confirme pour
l’essentiel les règles jurisprudentielles. Un double principe est posé :

D’une part, chacun est libre de rompre les négociations. C’est là une manifestation de la
liberté de contracter ou de ne pas contracter. Par principe, donc, la rupture des
négociations n’est pas en soi, fautive.

Mais, d’autre part, il faut que la négociation soit menée de bonne foi. Dès lors, une partie
engage sa responsabilité en cas de rupture abusive sans raison légitime.

Tel est le cas lorsque la rupture est intervenue sans motifs légitimes, même en l’absence
de toute volonté de nuire. Il en va de même si les négociations ont été menés de mauvaise
foi ou avec une légèreté coupable. Par exemple, lorsqu’une personne fait traîner les
négociations en longueur alors qu’elle n’a pas l’intention de contracter. Dans la mesure
où le contrat n’est pas encore conclu, la rupture fautive des négociations engage la
responsabilité civile extracontractuelle de son auteur (et non la formation forcée du
contrat).

En pratique, la faute sera souvent difficile à prouver. En effet, les négociations font en
général l’objet de discussions verbales et non écrites. Si la faute peut être prouvée, la
sanction prendra la forme de dommages et intérêts. À ce titre, pourront être indemnisés
les frais inutiles occasionnés par la négociation, les études préalables effectuées. L’étendue
du préjudice réparable est cependant limitée. Avant la réforme de 2016-18, il avait été
jugé que, « la perte d’une chance de réaliser les gains que permettait d’espérer la
conclusion du contrat » ne pouvait donner lieu à réparation3. Cette solution est reprise par
l’article 1112 du Code civil qui dispose que la réparation du préjudice « ne peut avoir
pour objet de compenser la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni de la
perte de chance d’obtenir ces avantages »4.

2
Article 1112, alinéa 1er, du Code civil : « L’initiative, le déroulement et la rupture des négociations
précontractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi ».
3
Cass. com., 26 novembre 2003 : D. 2004, p. 869 et note A.-S. Dupré-Dallemagne ; RTD civ. 2004, 80,
obs. J. Mestre et B. Fages ; JCP G 2004, I, 163, §18 et s., obs. G. Viney. – Cass. 3e civ., 7 janvier 2009 : RTD
civ. 2009, p. 113, obs. B. Fages ; RDC 2009, p. 480, obs. Y.-M. Laithier. – Adde J. Ghestin, « Les dommages
réparables à la suite de la rupture abusive des pourparlers », JCP G 2007, I, 157.
4
Les termes « ni de la perte de chance d’obtenir ces avantages » ont été ajoutés par la loi de ratification du
20 avril 2018 (article 3). En vertu de l’article 16 de cette loi, cet ajout présente un caractère interprétatif et,
partant, s’applique à tous les contrats conclus à compter du 1er octobre 2016 (v. supra n° 17).
4

Précisons qu’il n’est pas contraire à la bonne foi de mener des négociations avec plusieurs
partenaires potentiels5. Il s’ensuit qu’il n’y a pas faute pour l’un de ces partenaires de
conclure les négociations par un contrat (autrement dit, plusieurs négociations peuvent
être menées de front). Il en va autrement si celui qui a conclu le contrat avait l’intention
de nuire à son concurrent (par exemple, vouloir empêcher ce concurrent de conclure le
contrat alors qu’il n’était pas lui-même intéressé) ou a utilisé des manœuvres frauduleuses
(par exemple, fournir des informations mensongères sur son concurrent).

Devoir d’information – L’article 1112-1 du Code civil consacre un devoir d’information


précontractuelle. La place de ce texte dans le Code civil intrigue. Ce devoir d’information
est situé dans une « sous-section 1 » consacrée aux négociations. Pour autant, le devoir
d’information ne semble pas être limité au seul cas où il y a des négociations. Même dans
un contrat non négocié, l’une des parties ne peut dissimuler une information qui pourrait
déterminer le consentement de l’autre…

L’article 1112-1 reprend les principaux acquis jurisprudentiels antérieurs à la réforme de


2016-18. Ce texte d’ordre public énonce qu’au moment de contracter, celui qui connaît
une information dont il sait à la fois qu’elle est déterminante pour l’autre et que ce dernier
l’ignore, doit la partager.

Il est important de préciser que ce devoir ne concerne pas « l’estimation de la valeur de la


prestation ». Autrement dit, chacun doit s’informer par soi-même sur cette valeur et ce
d’autant que l’erreur sur la valeur n’est pas admise.

La sanction de ce devoir est la responsabilité civile de celui qui en était tenu.

§2 – Les avant-contrats

La formation d’un contrat, surtout lorsqu’elle peut s’avérer complexe, peut être encadrée
contractuellement. Les parties concluent un contrat, qui a pour objet de préparer la
conclusion d’un futur contrat. Ces contrats préparatoires sont désignés sous l’expression «
avant-contrat ». L’expression peut être trompeuse. L’avant-contrat est bien un contrat, qui
précède la formation du contrat que les parties envisage de conclure.

Les avant-contrats se rencontrent très fréquemment en matière de vente immobilière. En


ce domaine, il est difficile, sinon même impossible, de conclure d’emblée le contrat
définitif. Dans l’attente de la conclusion de la vente, les parties peuvent conclure une
promesse de contrat.

Les principaux avant-contrats sont le pacte de préférence et les promesses – unilatérales


ou synallagmatiques – de contrat. Depuis la réforme de 2016-18, le Code civil précise la
définition du pacte de préférence et de la promesse unilatérale.

5
Cass. com., 26 novembre 2003 : préc.
5

Le pacte de préférence6 est un contrat unilatéral par lequel une partie s’engage, dans le
cas où elle déciderait de contracter, à proposer prioritairement le contrat au bénéficiaire
du pacte. Le pacte de préférence peut-être inséré dans un autre contrat dont il devient
l’accessoire (p. ex. dans un bail au profit du locataire ou dans une constitution
d’hypothèque au profit du créancier hypothécaire). Il peut également faire l’objet d’un
contrat principal.

La promesse unilatérale de contrat7, par exemple de vente, est le contrat par lequel une
partie, appelée « promettant », accorde à l’autre partie, appelée bénéficiaire, le droit
d’opter pour la conclusion d’un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés. Dans
ce contrat, seul le promettant s’engage. Le bénéficiaire n’a qu’un droit d’option. Il est libre
de lever ou non l’option pendant le délai de la promesse. S’il lève l’option, le contrat est
formé. S’il ne lève pas l’option, le promettant recouvre sa liberté.

La promesse unilatérale de contrat est un contrat en principe unilatéral, c’est-à-dire faisant


naître des obligations à la charge d’une seule partie, en l’occurrence le promettant. Elle
peut être un contrat synallagmatique lorsque le bénéficiaire accepte de supporter certaines
obligations, comme par exemple payer une indemnité d’immobilisation, qui restera
acquise au promettant s’il ne lève pas l’option. Si le contrat de promesse devient alors
synallagmatique, la promesse reste unilatérale : si le promettant s’est engagé à conclure un
contrat (par exemple, une vente), le bénéficiaire ne s’est pas corrélativement engagé à
conclure ce contrat.

Titre II – La validité du contrat

Pour qu’un contrat soit valable, il faut qu’il ait été régulièrement formé. Pour ce faire, les
conditions de validité fixées par la loi doivent être respectées (Chapitre 1). Lorsque ces
conditions font défaut, des sanctions sont encourues (Chapitre 2).

Chapitre 1 – Les conditions de validité du contrat

Avant la réforme de 2016-18, l’article 1108 du Code civil fixait quatre conditions
« essentielles » à la validité des « conventions » :

– « le consentement de la partie qui s’oblige ;

– sa capacité de contracter ;

– un objet certain qui forme la matière de l’engagement ;

6
Article 1123, alinéa 1er, du Code civil : « Le pacte de préférence est le contrat par lequel une partie
s’engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de
contracter ».
7
Article 1124, alinéa 1er, du Code civil : « La promesse unilatérale est le contrat par lequel une partie, le
promettant, accorde à l’autre, le bénéficiaire, le droit d’opter pour la conclusion d’un contrat dont les
éléments essentiels sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du
bénéficiaire ».
6

– une cause licite dans l’obligation ».

Depuis la réforme de 2016-18, ces conditions de validité sont au nombre de trois. Selon le
nouvel article 1128 du Code civil : « sont nécessaires à la validité d’un contrat :

1° Le consentement des parties ;

2° Leur capacité de contracter ;

3° Un contenu licite et certain ».

La cause, en tant que condition de validité du contrat, a été supprimée. Toutefois, comme
on le verra, les fonctions qu’elle occupait avant la réforme sont désormais remplies par
d’autres règles (v. supra).

Les conditions de validité fixées par le Code civil (anc. article 1108 et désormais l’article
1128) s’appliquent à tous les contrats quelle que soit leur nature. Il peut exister des
conditions supplémentaires prévues par le régime applicable à tel ou tel contrat en
particulier.

Les deux premières conditions de validité concernent la volonté des contractants : pour
contracter, il faut que le consentement soit intègre (Section 1) et que le contractant qui
consent soit apte à consentir (Section 2). La dernière concerne le contenu du contrat
(Section 3).

Section 1 – L’intégrité des consentements

Pour être formé, le contrat suppose la rencontre de deux volontés au moins. Les volontés
exprimées par les parties ne peuvent les obliger que si elles sont réelles, libres et
conscientes.

Depuis la réforme de 2016-18, le Code civil envisage l’existence même du consentement


avant les vices du consentement que sont l’erreur, le dol (i.e. la tromperie) et la violence
(i.e. la contrainte)8. Cette présentation est maladroite. En effet, le paragraphe consacré à
l’existence du consentement ne comporte qu’un seul article (1129) qui renvoie à un texte
sur le trouble mental (article 414-1). Le fait que ce paragraphe s’insère dans la section 2
relative à la « validité du contrat » (et non dans la section 1 consacrée à la « conclusion
du contrat ») indique que le contrat est formé. Il existe bel et bien, mais n’est pas valable9.
Pour le dire autrement, le contractant atteint d’insanité d’esprit a bien exprimé un
consentement, mais celui-ci ne permet pas de révéler une volonté suffisante pour être en
mesure de l’engager.

8
Article 1130, alinéa 1er, du Code civil : « L’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils
sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions
substantiellement différentes ».
9
En ce sens, v. O. Deshayes, Th. Genicon et Y.-M. Laithier, p. 203.
7

On abordera donc successivement l’insanité d’esprit (§1), l’erreur (§2), le dol (§3) et la
violence (§4).

§1 – L’insanité d’esprit

L’article 1129 du Code civil introduit dans la partie du code relative au droit commun des
contrats un principe déjà exprimée par l’article 414-1 qui dispose que « pour faire un acte
valable, il faut être sain d’esprit ». Cet article, qui se trouve dans la partie du Code civil
consacrée aux incapacités, fait figure de principe général10 . L’article 1129 ne fait que
reprendre ce principe général au sein du droit commun des contrats (tout en renvoyant à
l’article 414-1 du Code civil pour ce qui concerne les conditions de l’action en nullité).
Autant dire que ce texte ne modifie pas le droit positif antérieur à la réforme.

Cause de nullité – Si l’insanité d’esprit constitue une cause de nullité, on relèvera qu’elle
n’est pas définie par les textes du Code civil qui s’y réfèrent. On estime généralement
qu’elle consiste en un « trouble d’ordre psychique, une altération des facultés mentales »11
qui affecte le discernement au point de priver le contractant de lucidité ou de volonté12. Le
trouble mental peut être durable ou temporaire. Divers facteurs peuvent l’avoir causé
(troubles psychiques, usage de stupéfiants,…).

Pour être une cause de nullité, le trouble mental doit exister « au moment de l’acte ». Cette
preuve peut être rapportée par tous moyens (témoignage, expertise médicale,…).

Régime de l’annulation – L’article 1129 du Code civil ne fournit aucune indication


concernant les conditions de l’action en nullité. Il y a donc lieu d’appliquer l’article 414-2
du Code civil. Le régime varie selon que l’auteur de l’acte est vivant ou mort.

Lorsque l’auteur de l’acte est vivant, l’article 414-2 du Code civil indique l’action en nullité
est ouverte à l’intéressé lui-même (s’il est en mesure de l’exercer, ce qui suppose qu’il ait
retrouvé ses facultés). Elle peut être exercée par un tuteur ou un curateur qui lui aurait été
attribué.

Lorsque l’auteur de l’acte est décédé, l’action en nullité obéit à un régime plus restrictif.
Ainsi, les héritiers ne pourront obtenir l’annulation de l’acte qu’en établissant que le contrat
porte « en lui-même la preuve d’un trouble mental » (article 414-2, alinéa 2, 1°). C’est le
système dit de la « preuve intrinsèque » : le trouble mental doit être établi au vu des
incohérences contenues dans l’acte lui-même et non plus par tous moyens. Une telle
preuve est difficile à rapporter. Le système mis en place par le législateur est destiné à éviter
que les héritiers puissent trop facilement remettre en cause les actes à titre onéreux conclus
par les personnes âgées. Ce système ne joue pas pour les actes à titre gratuit. Il est écarté,
pour les actes à titre onéreux, si l’intéressé était placé sous sauvegarde de justice (article
414-2, alinéa 2, 2°) ou si une procédure de tutelle ou de curatelle était en cours lors du

10
Principe repris par l’article 901 qui dispose que « pour faire une libéralité, il faut être sain d’esprit ».
11
Fr. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette et Fr. Chénedé, n° 157.
12
G. Chantepie et M. Latina, n° 290.
8

décès (article 414-2, alinéa 2, 3°). Dans ces hypothèses, la preuve de l’insanité au moment
de l’acte peut être rapportée par tous moyens.

§2 – L’erreur

L’erreur a pour conséquence de dénaturer le consentement. Par erreur, il faut entendre


une représentation inexacte de la réalité. Si le contractant « avait su », il n’aurait pas
contracté, ou pas aux mêmes conditions…

Lorsque le Code civil envisage l’erreur, seul est pris en compte l’état d’esprit du contractant
qui s’est trompé. La bonne ou mauvaise foi de son partenaire est indifférente. C’est
pourquoi, la nullité pour erreur porte préjudice à l’autre partie, surtout si elle est de bonne
foi. Aussi bien, l’erreur ne sera admise que si l’autre contractant pouvait la déceler ou s’il
pouvait la prévoir. Admettre trop facilement la nullité pour erreur ruinerait la sécurité des
transactions. Un contractant pourrait aisément se délier de son engagement au motif qu’il
s’est trompé lorsqu’il a contracté. Un équilibre subtil doit être trouvé entre la protection
du contractant victime de l’erreur et la sécurité juridique. Cela explique que les solutions
du droit positif sont nuancées.

Les différentes variétés d’erreur seront abordées (A/) avant d’analyser les conditions de la
nullité pour erreur (B/).

A/ Les différentes variétés d’erreur

Toutes les erreurs ne peuvent être retenues en matière de vice du consentement. Il convient
de distinguer les erreurs recevables (1°) de celles qui sont indifférentes à la nullité (2°).

1° Les erreurs recevables

Erreur-obstacle13 – L’erreur obstacle n’est pas expressément visée par le Code civil, ni
avant, ni après la réforme de 2016-18. Cette erreur porte sur la nature même ou sur l’objet
même du contrat. Elle « fait obstacle » à la formation du contrat, en ce sens qu’il n’y
a pas « suffisamment » d’accord de volontés pour que l’on puisse considérer qu’un
contrat a été formé. Par exemple, l’erreur sur la nature du contrat : une partie croyait
conclure une vente alors que l’autre souhaitait simplement louer son bien. Par
exemple, l’erreur sur l’objet du contrat : une partie croyait vendre tel bien tandis que
son partenaire entendait en acheter un autre 14 (autre exemple d’erreur sur l’objet, un
prix est entendu par une partie en euros et par l’autre en francs).

Erreur sur les qualités essentielles de la personne – L’article 1134 pose en principe que
l’erreur sur les qualités essentielles du cocontractant n’est une cause de nullité que dans
les cas où cette personnalité était déterminante. Envisagée de façon restrictive, cette
erreur ne concerne les contrats conclus intuitu personæ (c’est-à-dire ceux qui sont

13
F. Durand, « La nullité pour erreur-obstacle », LPA 25 mars 2010, p. 3
14
Cass. 3e civ., 21 mai 2008 : Bull. civ. III, n° 92 ; RDC 2008, p. 716, obs. Th. Genicon, pour une erreur de
désignation de parcelles.
9

conclus en considération de la personne même du contractant, de son identité et de


ses qualités personnelles). Il s’agit de tous les contrats à titre gratuit (car on n’est pas
généreux avec tout le monde), des contrats de prestations de service (contrat de
travail, de mandat, d’entreprise), etc. Les risques d’erreur sur la personne paraissent
moindres dans les contrats portant sur des biens. Ainsi, la personnalité du vendeur,
du bailleur ou du prêter importe peu au contractant. Mais à l’inverse, la solvabilité
du contractant est souvent déterminante, par exemple, celle de l’acquéreur, du
preneur ou de l’emprunteur…

Les qualités essentielles du cocontractant varient selon les contrats. Par exemple, le nom,
l’âge ou la nationalité, qui sont des éléments de l’identité, seront rarement essentiels (sauf
pour des raisons particulières, par exemple la nationalité d’un associé peut influer sur
certaines activités). Certaines qualités peuvent être déterminantes pour un type de contrat
et non pour un autre (par exemple, le passé d’un repris de justice importe à son employeur,
mais non à son vendeur dès lors qu’il est solvable).

Erreur sur les qualités essentielles de la prestation – C’est de loin la catégorie la plus
fréquente d’erreur. En l’occurrence, l’erreur porte sur les prestations mêmes prévues par le
contrat : une partie se trompe sur ce qui est dû en vertu du contrat. Ces qualités essentielles
peuvent être d’ordre matériel (par exemple, l’authenticité d’une œuvre d’art) ou juridique
(par exemple, le caractère constructible ou non d’un terrain)15.

Dans sa version d’origine, le Code civil ne visait pas l’erreur sur les qualités essentielles de
la prestation mais l’erreur sur la substance. D’après l’ancien article 1110 du Code civil,
l’erreur « tombe sur la substance même de la chose ». Ce texte était susceptible de deux
interprétations, objective et subjective. Selon une conception objective, la substance
désigne la matière dont la chose est faite (par exemple, lorsque la chose est en argent non
en or par exemple). Mais selon une conception subjective, l’erreur porte sur les qualités de
cette chose : si l’errans (i.e. celui qui invoque l’erreur) avait su que cette qualité n’existait
pas, il ne se serait pas engagé. La jurisprudence a retenu la conception subjective de
l’erreur, ce qui a permis d’en étendre le domaine. Libérée de toute référence à la matière,
l’erreur couvre un nombre infini d’hypothèses. La réforme de 2016-18 conforte cette

15
Cf. admettant l’erreur sur la possibilité de louer l’immeuble acheté, Cass. 3e civ., 3 mai 2018, n° 17-
11.132 et 17-14.090 : JCP G 2018, 782, §3, obs. Y.-M. Serinet. Jugé qu’ « ayant souverainement relevé qu’il
résultait de l’acte authentique de vente que le bien vendu était loué et qu’en se portant acquéreur du
logement, la SCI entendait disposer de la pleine propriété du bien comprenant la possibilité de le mettre en
location, qu’il s’agissait d’une qualité essentielle de la chose vendue qui était entrée dans le champ
contractuel et qui avait été déterminante de son consentement, qu’elle n’avait pas la qualité de professionnel
de l’immobilier et que son erreur sur cette qualité essentielle du logement était excusable, la cour d’appel,
qui a, à bon droit, fait application des dispositions du règlement sanitaire départemental, non incompatibles
avec celles du décret du 30 janvier 2002 qui ne l’a pas abrogé et plus rigoureuses que celles- ci, a pu en
déduire que le consentement de la SCI avait été vicié et que la vente devait-être annulée ». Cet arrêt reprend
point par point les conditions de l’erreur, une cause de nullité : l’erreur doit avoir porté sur une qualité
essentielle (art. 1132 du Code civil), être entrée dans le champ contractuel (article 1133 du Code civil),
avoir été déterminante du consentement (article 1130 du Code civil) et ne pas être inexcusable (article 1132
du Code civil).
10

jurisprudence tout en précisant que ce sont les qualités essentielles (et non substantielles)
de la prestation qu’il faut prendre en compte.

La question se pose de savoir de quelle façon doit être apprécié le caractère essentiel de la
prestation. Il existe, à cet égard, deux modes d’appréciation : l’appréciation in abstracto et
l’appréciation in concreto.

L’appréciation in abstracto retient une qualité qui est jugée essentielle par tout le monde,
par la moyenne des hommes (par exemple, l’authenticité d’une œuvre d’art).

L’appréciation in concreto retient une qualité qui est considérée comme essentielle par la
victime de l’erreur.

La jurisprudence, implicitement, a adopté l’appréciation in concreto. Cette solution est


reprise par l’article 1130 du Code civil qui tient compte du consentement des deux
contractants en cause, non de contractants abstraits.

L’errans doit donc prouver le caractère pour lui essentiel de telle ou telle qualité de la
prestation. Pour ce faire, il doit démontrer que l’erreur est commune. Cette expression est
trompeuse car elle laisse entendre qu’il est nécessaire que les deux parties se soient
trompées. En définitive, cette condition signifie que la qualité jugée essentielle par la
victime de l’erreur doit être connue de l’autre partie, c’est-à-dire qu’elle doit être entrée
dans le champ contractuel (l’autre partie devait savoir que telle qualité, peut-être
insignifiante pour tout le monde, présentait un caractère essentiel pour son partenaire).

Lorsqu’une qualité est normalement essentielle pour tout à chacun, elle peut être
présumée l’avoir été pour l’errans ainsi qu’avoir été connue de l’autre contractant (par
exemple, le caractère authentique d’une œuvre d’art). Si la qualité n’est pas substantielle
ou essentielle pour tout le monde, la victime de l’erreur doit démontrer, d’une part, que
cette qualité a déterminé son consentement et, d’autre part, que son contractant savait que
pour elle, cette qualité était essentielle (d’où l’expression erreur commune, signifiant que
pour les deux parties, il est clair que telle qualité est essentielle pour l’une d’elle).

L’erreur sur sa propre prestation – Généralement, l’erreur sur les qualités essentielles de
la prestation porte sur celle qui est attendue de l’autre partie. En effet, il peut paraître
singulier de commettre une erreur sur sa propre prestation (i.e. sur celle que l’on fournit à
son partenaire). Mais, depuis une célèbre affaire, la jurisprudence a admis qu’un
cocontractant peut invoquer l’erreur commise sur sa propre prestation 16 . Cette
jurisprudence est consacrée par le nouvel article 1133 alinéa 2, du Code civil (« l’erreur
est une cause de nullité qu’elle porte sur la prestation de l’une ou l’autre partie »).

« L’aléa chasse l’erreur » – Il existe cependant un cas où l’on ne peut annuler un contrat
pour erreur sur les qualités essentielles de la prestation. C’est celui où le contrat

16
Cass. 1re civ., 22 février 1978 (« Poussin »), n° 76-11.551 : Bull. civ. I, n° 74 ; D. 1978, jur. p. 601, note
Ph. Malinvaud ; RTD civ. 1979, p. 127, obs. Y. Loussouarn.
11

présente un caractère aléatoire 17 . En pareille hypothèse, l’erreur ne peut pas être


invoquée car les parties ont conclu le contrat à leurs risques et périls. Ainsi, lorsque
l’aléa sur l’authenticité d’une œuvre d’art entre dans le champ contractuel, il y a
acceptation de l’aléa ce qui empêche l’errans de se prévaloir du défaut d’authenticité (par
exemple, lorsqu’une œuvre d’art est vendue comme étant « attribué à » : cette mention
laisse planer un doute sur l’authenticité de l’œuvre, sans pour autant l’exclure)18. Si après
la formation du contrat, l’œuvre se révèle authentique, l’aléa aura joué en faveur de
l’acquéreur (et inversement dans le cas contraire).

Mais encore faut-il que le doute au sujet des qualités substantielles ou essentielles ait été
partagé par les parties. Si la conviction de l’errans n’est pas affectée par l’aléa, l’erreur peut
être caractérisée. Ainsi, il y a erreur du vendeur lorsque celui-ci a la certitude que l’œuvre
d’art a pour auteur un artiste peu prestigieux alors qu’un doute sérieux subsiste qu’elle a
pour auteur un artiste de renom19.

L’erreur de droit – c’est-à-dire une erreur ayant un caractère juridique (par opposition
à une erreur de fait) – peut vicier le contrat et entraîner son annulation. L’adage « nul
n’est censé ignorer la loi » est ici sans application. Cet adage signifie simplement
qu’une personne ne peut invoquer son ignorance pour écarter l’application de la loi.
Il n’empêche pas, dans les rapports individuels, de demander l’annulation d’un contrat
qui aurait été vicié par la méconnaissance des règles juridiques applicables. Ici,
l’errans s’est trompé sur l’existence, la nature ou l’étendue des droits qui ont fait l’objet
du contrat. En pratique, l’erreur de droit est le plus souvent invoquée par un contractant
qui pensait à tort être tenu de contracter en vertu de la loi20.

17
Article 1133, alinéa 3, du Code civil : « L’acceptation d’un aléa sur une qualité de la prestation exclut
l’erreur relative à cette qualité ».
18
Cass. 1re civ., 24 mars 1987 (« Verrou de Fragonard »), n° 85-15.736 : D. 1987, jur. p. 489, note J.-L.
Aubert.
19
Cf la célèbre affaire « Poussin » (Cass. 1re civ., 22 février 1978, préc.) : les propriétaires d’un tableau
attribué à l’école des Carrache l’avaient mis en vente par adjudication. Les musées nationaux exercèrent
leur droit de préemption (droit qui permet de se substituer à l’acquéreur d’un bien), puis présentèrent le
tableau comme étant l’œuvre de Nicolas Poussin. La Cour d’appel avait rejeté la nullité au motif qu’il n’était
pas prouvé que le tableau fût une œuvre authentique de Poussin. Son arrêt fut censuré pour défaut de base
légale au motif qu’elle n’avait pas recherché « si, au moment de la vente, le consentement des vendeurs
n’avait pas été vicié par leur conviction erronée que le tableau ne pouvait pas être une œuvre de Nicolas
Poussin ». Autrement dit, même si la réalité (ici l’authenticité du tableau) est incertaine. L’erreur pourra
néanmoins être retenue en cas de différence entre la conviction de l’errans et cette réalité (les vendeurs
étaient certains que le tableau ne pouvait pas être de Nicolas Poussin, dans la réalité, il est peut-être, ou pas,
l’œuvre de cet artiste).
20
Cf. p. ex. Cass. 1er civ., 24 mai 2000, n° 98-16.132 : Bull. civ. III, n° 114 ; D. 2001, p. 1135, obs. D.
Mazeaud et 2002, p. 472, obs. S. Amrani-Mekki et p. 926, obs. O. Tournafond ; JCP G 2000, II, 10494, note
C. Duvert ; RTD civ. 2000, p. 824, obs. J. Mestre et B. Fages ; Def. 2000, p. 1318, obs. D. Mazeaud (erreur
de droit commise par un bailleur qui vend un appartement à son locataire en croyant à tort que la loi lui
octroyait un droit de préemption).
12

2° Les erreurs indifférentes

L’erreur sur les motifs est, en principe, indifférente21. Il s’agit d’une erreur qui porte sur les
raisons d’être d’un contrat. Cette erreur n’affecte pas la validité du contrat. En effet, il
importe peu de savoir pourquoi les parties ont consenti, dès lors qu’on sait ce à quoi elles
ont consenti (par exemple, celui qui achète un logement dans une ville parce qu’il croit
qu’il va y être muté).

Mais il en va autrement lorsque le mobile est entré dans le champ contractuel. C’est le cas
lorsque l’élément qui constitue la base même du contrat a déterminé le consentement des
deux parties. Si cet élément n’a déterminé le consentement que de l’une des parties, il
deviendra également un motif déterminant s’il a été porté à la connaissance de l’autre
partie. Dès lors, s’il apparaît que ce motif déterminant est erroné, l’erreur sera prise en
compte et viciera le contrat.

L’erreur sur la valeur résulte d’une mauvaise appréciation de la valeur économique d’un
bien ou d’une prestation. La jurisprudence, consacrée par l’article 1136 du Code civil,
écarte traditionnellement ce type d’erreur. En principe, l’erreur sur la valeur ne peut
entraîner la nullité du contrat et ce pour principalement pour deux raisons : d’une part, si
une telle erreur était admise, les contrats seraient très souvent contestés ; d’autre part,
il appartient aux parties de bien évaluer la valeur monétaire, y compris en se
renseignant auprès d’experts.

Pour ne pas être une cause de nullité, l’erreur sur la valeur ne doit pas être la conséquence
d’une erreur sur les qualités essentielles. Il est bien évident que si une partie se trompe sur
les qualités essentielles de la prestation, il en résulte presque toujours une erreur sur la
valeur. Dans une telle hypothèse, le fait qu’une erreur sur la valeur ait été commise
n’empêchera pas l’errans d’obtenir sur la nullité, mais celle-ci sera prononcé sur le
fondement de l’erreur sur les qualités essentielles de la prestation.

B/ Les conditions de la nullité pour erreur

Pour que le contrat soit annulé, il ne suffit pas d’être en présence d’une erreur susceptible
d’entraîner la nullité du contrat (erreur sur les qualités essentielle de la prestation ou du
cocontractant…). Il faut, en outre, qu’elle présente deux caractères : l’erreur doit avoir été
déterminante du consentement, l’erreur doit être excusable.

L’erreur doit être déterminante du consentement, en ce sens que le contractant doit établir
que, s’il n’avait pas commis cette erreur, il n’aurait pas conclu le contrat (soit pas du tout,
soit pas aux mêmes conditions). Cela conduit les juges à effectuer une analyse
psychologique souvent très délicate (le juge devra se reporter à une période antérieure dans
le temps et se mettre à la place du contractant au moment de la conclusion).

21
Article 1135 du Code civil : « L’erreur sur un simple motif, étranger aux qualités essentielles de la
prestation due ou du cocontractant, n’est pas une cause de nullité, à moins que les parties n’en aient fait
expressément un élément déterminant de leur consentement ».
13

L’erreur doit être excusable. Lorsqu’elle est trop grossière, l’erreur apparaît inexcusable.
La jurisprudence, consacrée par l’article 1132 du Code civil, en a déduit qu’elle ne peut
entraîner la nullité. Il y a là une sanction à l’égard d’une partie fautive. Le vice du
consentement existe, mais la grossièreté de l’erreur emporte une déchéance du droit de
demander la nullité.

Le caractère inexcusable doit être apprécié in concreto, en fonction de la personnalité


et notamment de la compétence professionnelle de l’errans et de la qualité en laquelle
il est intervenu. Cela dit, la seule constatation de la qualité de professionnel du
demandeur en nullité ne suffit pas à rendre son erreur inexcusable.

L’erreur de droit peut-elle être inexcusable ? Ce point de vue pourrait se justifier par
l’idée que le droit est trop complexe pour être connu de tous avec évidence. Un arrêt
avait statué en ce sens22. On peut néanmoins se demander si cette solution perdure avec
la réforme dès lors que l’article 1132 du Code civil ne fait aucune différence entre
l’erreur de fait et l’erreur de droit23. Aussi bien peut-on désormais affirmer que l’erreur
doit toujours être excusable, qu’elle soit de droit ou de fait.

Date d’appréciation de l’erreur – Lorsqu’une erreur remplit toutes les conditions, la


question se pose de savoir à quel moment elle doit être appréciée ? L’erreur s’apprécie
à la date de la conclusion du contrat. C’est à ce moment-là qu’il faut se placer pour
savoir ce que les cocontractants avaient en vue. Mais cela n’empêche pas de se référer
à des éléments découverts postérieurement à la formation du contrat. Par exemple,
s’agissant de la vente d’un tableau, la réalité s’appréciera au jour de la vente (c’est bien
le même tableau qui n’a pas changé) mais en tenant compte des éléments (expertises,
etc.) postérieures à la vente24.

§3 – Le dol

Définition – Selon l’article 1137 du Code civil issu de la réforme de 2016-18, « le dol est
le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des
mensonges »25. Ce texte ne permet pas de rendre compte de toutes les conditions de la
nullité pour dol. Il ne fait qu’indiquer les moyens par lesquels le dol doit être perpétré. Il
ne précise pas que le dol doit avoir provoqué une erreur. En effet, le dol ne sera retenu, en
tant que vice du consentement, que si les manœuvres, mensonges ou dissimulations (v.

22
Cass. 3e civ., 20 octobre 2010, n° 09-66.113 : D. 2011, p. 279, note A. Binet-Grosclaude et p. 387,
note O. Tournafond ; JCP G 2011, n° 63, obs. Y.-M. Sérinet ; Def. 2011. 271, note Ph. Malaurie, qui a
jugé que le caractère inexcusable de l’erreur de droit à l’origine de la notification du droit de préemption
est sans incidence sur la validité de l’offre.
23
En ce sens, v. O. Deshayes, Th. Genicon et Y.-M. Laithier, p. 215.
24
De même, s’agissant de la vente d’un terrain présenté comme constructible par un certificat
d’urbanisme erroné et illégal, on l’annulera pour erreur sur la substance car l’inconstructibilité existait
lors de la vente ; peu importe que cette réalité n’ait été révélée que plus tard, par suite de l’annulation
— d’ailleurs rétroactive — du certificat d’urbanisme.
25
Comp. anc. art. 1116, alinéa 1er, du Code civil : « Le dol est une cause de nullité lorsque les manœuvres
pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait
pas contracté ».
14

infra) pratiqués par une partie ont provoqué une erreur chez son partenaire. Pour le dire
autrement, dans le vice d’erreur, une partie s’est trompée ; dans le vice de dol, une partie
a été trompée. On retrouve néanmoins dans l’article 1139 du Code civil une référence à
l’erreur provoquée par le dol. Il aurait été plus net de l’inclure dans la définition de de vice
du consentement…

Intérêt du dol par rapport à l’erreur – La question se pose alors de savoir quel est l’intérêt
du dol. Que l’erreur soit spontanée ou provoquée, n’est-elle pas, à elle seule, une cause
de nullité ? Cet intérêt apparaît à trois points de vue :

– tout d’abord, parce que la preuve du dol – qui se manifeste par des manœuvres,
mensonges ou dissimulations – est souvent plus facile à rapporter que l’erreur ;

– ensuite, parce que si le dol doit avoir provoqué une erreur, celle-ci peut être indifférente,
c’est-à-dire ne pas être, en elle-même, une cause de nullité (par exemple, une erreur sur
la valeur)26 ;

– enfin, parce que, outre la nullité pour vice du consentement, l’auteur du dol pourra être
condamné à des dommages et intérêts. Le demandeur peut demander, à son choix, la
nullité du contrat ou des dommages et intérêts ou les deux cumulativement.

Les conditions de la nullité pour dol doivent être appréciées relativement à l’auteur du dol
(A/) qu’à sa victime (B/).

A/ Les conditions relatives à l’auteur du dol

Conditions de la nullité pour dol – Le dol suppose tout d’abord des « manœuvres » de
l’une des parties contre l’autre. Le terme « manœuvre » utilisé par le Code civil doit être
compris comme visant des actes caractérisés de tromperie. Il s’agit d’une mise en scène
destinée à tromper son partenaire. Sur le plan pénal, le pendant du dol est constitué par le
délit d’escroquerie (article L. 313-1 du Code pénal), de tromperie dans les ventes de
marchandises (article L. 213-1 et suivants) ou de pratiques commerciales trompeuses (i.e.
publicité mensongère, articles L. 121-1 et suivants du Code de la consommation).

La définition du dol issue de l’ancien article 1116 du Code civil ne faisait référence qu’aux
« manœuvres ». La jurisprudence avait interprété ce texte de manière extensive en y
incluant le mensonge. Selon la Cour de cassation, « un simple mensonge, non appuyé
d’actes extérieurs, peut constituer un dol »27. Cette jurisprudence a été consacrée par la
réforme de 2016-18. La nouvelle définition retenue par l’article 1137 du Code civil vise
« des manœuvres ou des mensonges ».

26
Article 1139 du Code civil : « L’erreur qui résulte d’un dol est toujours excusable ; elle est une cause de
nullité alors même qu’elle porterait sur la valeur de la prestation ou sur un simple motif du contrat ».
27
Cass. 3e civ., 6 novembre 1970 : JCP G 1971, II, n° 16942, note J. Ghestin ; Def. 1971, p. 1264, note J.-
L. Aubert.
15

Tout mensonge, néanmoins, ne peut être constitutif de dol. On distingue


traditionnellement le dolus bonus, simple vantardise du commerçant à l’égard de sa
marchandise, du dolus malus, qui dépasse l’habileté permise à tout vendeur. En d’autres
termes, s’il est toujours déloyal de mentir, le mensonge n’altère pas toujours le
consentement. On ne saurait être victime ni des menus mensonges habituels au
commerce, ni des mensonges excessifs et donc non crédible. En définitive, seul le
mensonge délibéré manifestant l’intention de tromper peut constituer un dol. Et ce, à
condition qu’il présente une certaine gravité.

Réticence dolosive – Avant la réforme de 2016-18, la jurisprudence avait admis que le fait
de se taire alors que l’on dispose d’une information de nature à influer sur le consentement
de l’autre partie pouvait, à certaines conditions, constituer un dol. Autrement dit, les
« manœuvres » visées par l’ancien article 1116 du Code civil n’étaient pas seulement des
actes positifs. La jurisprudence y incluait le silence gardé sciemment par une partie. Ce que
l’on nommait « réticence dolosive » se trouve désormais repris par le Code civil. Selon
l’article 1137, alinéa 2, du Code civil, « constitue également un dol la dissimulation
intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère
déterminant pour l’autre partie »28.

Ce texte exige un acte positif de dissimulation et en met en lumière l’exigence du caractère


intentionnel. Ces deux éléments permettent de séparer le dol en tant que vice du
consentement et le manquement à l’obligation précontractuelle d’information (lequel
n’engage que la simple responsabilité de son auteur). Certes, dans les deux cas, un
contractant ne délivre par une information qu’il connait (ou qu’il est sensé connaître) alors
que cette information est déterminante pour le consentement de l’autre (i.e. si celui-ci
avait eu l’information, il n’aurait pas contracté ou à des conditions différentes). Mais seul
constitue un dol la dissimulation intentionnelle, c’est-à-dire frauduleuse, d’une
information que l’on sait être déterminante du consentement de son contractant.

Avant la réforme, une question divisait la jurisprudence : celle de savoir si l’erreur sur la
valeur du vendeur provoquée par le silence de l’acheteur qui connaissait la véritable valeur
de la chose pouvait entraîner l’annulation du contrat. Certains arrêts imposaient une

28
C’est à la réticence dolosive « que correspondent les plus nombreux des cas par lesquels les recueils de
jurisprudence illustrent la férocité des contractants : une banque recueille la garantie d’une caution en lui
taisant l’état désespéré de l’entreprise garantie ; le défaut de viabilité de l’opération financée ou même la
destination réelle du crédit garanti ; une commune achète un terrain non constructible sans informer le
vendeur du déclenchement d’une procédure le rendant constructible ; un expéditeur cache au transporteur
le caractère dangereux du chargement ; le dirigeant d’une société achète des actions sans révéler qu’il a
déjà trouvé à les revendre à un prix supérieur ; le vendeur d’un fonds de commerce dissimule que son
épouse exploite un fonds voisin concurrent celui d’un jardin ensoleillé cache le projet d’une haute
construction voisine ; celui d’une maison dissimule qu’elle est frappée d’une interdiction administrative
d’habitation ; le gérant d’une société la cède en dissimulant un accident du travail pour lequel il a été
pénalement condamné et dont la société devra supporter les conséquences ; le garagiste affirme que la
voiture qu’il vend après réparation n’a subi qu’un accident anodin, alors qu’il ignore tout de cet accident ;
le vendeur d’un appartement situé au-dessus d’un bar obtient de l’exploitant qu’il réduise son activité durant
les visites ; le cédant d’une entreprise gonfle artificiellement le chiffre d’affaires dans le mois précédant la
vente » (A. Bénabent, n° 101).
16

obligation de se renseigner à la charge du vendeur qui ne pouvait alors invoquer la


réticence dolosive de son partenaire. Ainsi, il avait été jugé dans l’affaire des photographies
de Baldus qu’aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur29.

À première vue, ce courant jurisprudentiel trouve sa consécration dans l’article 1112-1,


alinéa 2, issu de la réforme de 2016-18 selon lequel le devoir d’information « ne porte pas
sur l’estimation de la valeur de la prestation ». Il faudrait alors en déduire que l’erreur sur
la valeur de la prestation fournie (i.e. du vendeur) provoquée par une dissimulation
intentionnelle de la partie qui reçoit cette prestation (i.e. l’acheteur) est indifférente30.

Mais d’un autre côté, la réticence dolosive portant sur la valeur semble admise par
l’ordonnance du 10 février 2016 si l’on combine les articles 1137, alinéa 2, et 1139 du
Code civil. Alors que le premier de ces textes, on l’a vu, considère que la dissimulation
intentionnelle d’une information est dolosive, le second précise que l’erreur qui résulte
d’un dol est une cause de nullité alors même qu’elle porterait sur la valeur de la prestation.
Il faudrait en conclure que la dissimulation par le vendeur de la valeur de la chose vendue
par l’acheteur constitue un dol31. La réforme aurait ainsi brisé la jurisprudence Baldus.

Si tel était le cas, la cohérence du système mis en place par l’ordonnance de 10 février
2016 serait pour le moins douteuse. Il est, en effet, pour le moins contradictoire d’indiquer,
d’une part, qu’une partie n’est pas obligée de renseigner l’autre sur l’estimation de la valeur
de la prestation (1112-1, alinéa 2) et, d’autre part, d’admettre qu’une dissimulation
intentionnelle provoquant une erreur sur la valeur de la prestation (1137 et 1139) entraîne
la nullité pour dol. Sauf à mettre l’accent sur le caractère intentionnel de la dissimulation.
Dans cette perspective, le dol ne serait caractérisé que si le silence d’une partie a
véritablement eu pour volonté de tromper son partenaire. Mais n’est-ce pas toujours le
cas ? On voit mal comment contractant pourrait véritablement soutenir que c’est par
« mégarde » qu’il a oublié de renseigner l’autre partie de la valeur de la chose, oubli qui
lui a permis de réaliser une bonne affaire...

29
Cass. 1re civ., 3 mai 2000 : JCP G 2000, I, n° 272, §1 à 3, obs. G. Loiseau et 2001, Il, 10510 et note Ch.
Jamin ; Def. 2001, 1110, art. 37237, n° 64, obs. D. Mazeaud (contre) et Ph. Delebecque (pour) ; RTD civ.
2000, p. 566, obs. J. Mestre et B. Fages ; Contrats, conc. consom. 2000, comm. 140, obs. L. Leveneur ; D.
2002, somm. p. 928, obs. O. Tournafond.
En l’espèce, des photographies du célèbre photographe Baldus avaient été vendues à un prix dérisoire
par rapport à la valeur des clichés sur le marché de l’art. Le vendeur, manifestement, en ignorait la valeur
réelle. Pour autant, la première Chambre civile avait jugé que l’acquéreur ne commettait pas de dol par
réticence en s’abstenant d’informer le vendeur de la valeur exacte de ces photographies.
Dans le même sens, la troisième civile avait estimé qu’un marchand de biens n’avait pas l’obligation
d’informer son vendeur de la valeur réelle de la maison objet de la vente (Cass. 3e civ., 17 janvier 2007 :
JCP G 2007, II, n° 10042 et note crit. Ch. Jamin ; D. 2007, jur. p. 1051, note crit. D. Mazeaud et note approb.
Ph. Stoffel-Munck et pan. p. 2969, obs. S. Amrani-Mekki ; Def. 2007, art. 38562, n° 28, obs. F. Savaux et
art. 38612 et note Y. Dagorne-Labbé ; RTD civ. 2007, p. 335, obs. J. Mestre et B. Fages ; RDC 2007, p. 703,
obs. Y-M. Laithier, et p. 798, obs. E Collart-Dutilleul ; Contrats, conc. consom. 2007, comm. 117, obs. L.
Leveneur). En l’espèce, l’acheteur se trouvait dans une situation précaire, s’agissant d’un agriculteur devenu
manœuvre dont l’épouse était en incapacité de travail. Jugé que « l’acquéreur, même professionnel, n’est
pas tenu d’une obligation d’information au profit du vendeur sur la valeur du bien acquis ».
30
En ce sens, M. Fabre-Magnan, n° 363. Plus nuancé, A. Bénabent, n° 103.
31
En ce sens, G. Chantepie et M. Latina, n° 327.
17

Afin de corriger cette incohérence, la loi de ratification du 20 avril 2018 a ajouté un


troisième alinéa à l’article 1137. Selon ce texte, « ne constitue pas un dol le fait pour une
partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation ».
Ce texte, qui permet de reconduire la jurisprudence Baldus, ne s’applique qu’aux contrats
conclus à compter du 1er octobre 2018. Pour les contrats conclus entre le 1er octobre 2016
et le 30 septembre 2018, la question peut se poser de savoir si la réticence dolosive portant
sur la valeur serait admise32. Sauf si la jurisprudence décide d’interpréter l’article 1137 dans
sa version initiale à l’aune de sa version modifiée33.

Si la solution de l’arrêt Baldus est rétablie par l’article 1137, alinéa 3, du Code civil, est-ce
à dire qu’aucun espace ne subsiste pour la réticence dolosive portant sur la valeur ? Avant
la réforme, la jurisprudence était parvenue à un équilibre. Ainsi, la réticence dolosive avait
été admise lorsque l’acheteur connaissait les qualités de la chose vendue et n’en avait pas
averti le vendeur qui les ignorait (hypothèse différente de l’arrêt Baldus où le vendeur
connaissait les qualités de la chose vendue (des photographies de Baldus), son authenticité,
mais ignorait le cours de celle-ci). À titre d’exemple, la nullité avait été retenue à propos
de la vente d’une parcelle susceptible d’être exploitée pour un usage de carrière et dont
les propriétaires, à la différence de l’acquéreur, ignoraient tout du sous-sol34. De même, la
nullité était prononcée lorsque l’acquéreur était tenu d’un devoir de loyauté
particulièrement renforcé. Ainsi dans l’arrêt Vilgrain, la Cour de cassation a jugé que le
dirigeant d’une société s’était rendu coupable d’une réticence dolosive en achetant des
actions qu’un associé lui avait demandé de vendre, sans l’informer de négociations menées
avec un autre acquéreur pour les vendre à un prix supérieur35. Ces tempéraments à la
jurisprudence Baldus sont affaires de circonstances. Il faut espérer que le nouvel article
1137 les laissera subsister36…

Dol du cocontractant et dol d’un tiers – Le dol n’est une cause de nullité que s’il émane
du cocontractant. S’il est le fait d’un tiers, il donnera seulement lieu à dommages et intérêts.
La nullité peut toutefois être prononcée lorsque le dol commis par un tiers a provoqué une
erreur qui, en elle-même, est une cause de nullité du contrat (par exemple, une erreur sur
les qualités essentielles). Mais, dans ce cas, le contrat est annulé, non pour dol mais pour
erreur37.

32
Cf. O. Deshayes, Th. Genicon et Y.-M. Laithier, p. 237 et s.
33
En ce sens, G. Chantepie et M. Latina, n° 327-1.
34
Cass. 3e civ., 15 novembre 2000 : RTD civ. 2001, p. 355, obs. J. Mestre et B. Fages. Dans cette affaire,
l’acquéreur avait non seulement gardé le silence, mais il s’était dissimulé derrière un prête-nom afin que les
vendeurs ignorent qu’ils contractaient avec professionnel exploitant des carrières. À cela s’ajoutait un projet
d’acte authentique stipulant que la parcelle était destinée pour partie à l’habitation et le surplus pour un
usage agricole. En somme, à la réticence dolosive s’ajoutaient des manœuvres positives afin de ne pas
éveiller l’attention des vendeurs sur les intentions de l’acquéreur…
35
Cass. com., 27 février 1996 : D. 1996, jur. p. 518, note Ph. Malaurie ; JCP G 1996, II, 22665, note J.
Ghestin.
36
En ce sens, v. not. O. Deshayes, Th. Genicon et Y.-M. Laithier, p. 239 ; Fr. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette
et Fr. Chénedé, n° 157.
37
Cf. Cass. 1re civ., 3 juillet 1996 : Bull. civ. I, n° 228 ; RTD civ. 1996, p. 895, obs. J. Mestre.
18

La jurisprudence antérieure à la réforme de 2016-18 avait toutefois admis des exceptions,


lorsque le cocontractant a été le complice du dol commis par le tiers ou lorsqu’il l’a inspiré.
L’article 1138 reprend cette solution en étendant la liste des auteurs potentiels du dol. Selon
ce texte, « le dol est également constitué s’il émane du représentant, gérant d’affaires,
préposé ou porte-fort du contractant ». Ce texte ajoute qu’il en va de même « lorsqu’il
émane d’un tiers de connivence ». Cette dernière formule est suffisamment large pour
englober toutes les hypothèses de fraude.

Preuve du dol – La charge de la preuve du dol repose sur celui qui prétend avoir été trompé.
Et, s’agissant de la preuve d’un fait, il pourra prouver le dol par tous moyens, y compris par
présomptions.

En cas de réticence dolosive, cette règle doit se combiner avec la preuve du devoir
d’information précontractuelle consacré par le nouvel article 1112-1 (v. supra n° 70). En
effet, le simple manquement à l’obligation d’information ne suffit pas à entraîner
l’annulation du contrat sur le fondement du dol. Il faut, en plus, prouver l’intention de
tromper. Sur le terrain de la charge de la preuve, il appartient à celui qui détient une
information de prouver qu’il a renseigné l’autre partie (sous peine d’engager sa
responsabilité civile). Mais il appartient à celui qui n’a pas reçu l’information de prouver
que cette dissimulation était intentionnelle pour caractériser le dol.

Cette solution peut sembler (trop ?) rigoureuse pour la victime du dol par réticence. En
effet, le silence gardé par l’autre partie, qu’il soit intentionnel ou non, l’a incité à conclure
un contrat qu’elle n’aurait pas conclu si l’information lui avait été communiquée. D’un
autre point de vue, il pourrait être avancé que le défaut d’information n’avait pas pour
intention de surprendre le consentement de l’autre partie. Si, d’une manière générale, la
preuve d’une intention est très difficile à rapporter, l’on peut penser que l’importance de
l’information non divulguée peut laisser présumer que la dissimulation a été
intentionnelle38.

B/ Les conditions relatives à la victime du dol

Caractère déterminant du dol – Pour que la nullité soit prononcée, il ne suffit pas qu’il y
ait eu des manœuvres ou des mensonges. Il faut, en outre, que ces manœuvres ou ces
mensonges aient entraîné une erreur et déterminé le consentement de la victime du dol.
Autrement dit, le dol doit avoir provoqué une erreur déterminante du consentement. Ce
caractère déterminant s’apprécie in concreto, en fonction de la personnalité de la victime
(v. l’article 1130 du Code civil selon lequel le caractère déterminant « s’apprécie eu égard
aux personnes et aux circonstances dans lesquels le consentement a été donné »).

38
Rapp. Cass. com., 9 janvier 2019, n° 17-28.725 : RTD civ. 2019, p. 326, obs. H. Barbier. Dans cette
affaire, rendue en matière de cession d’actions, la chambre commerciale considère que le silence gardé le
cédant sur des informations de nature à affecter les résultats et les perspectives des sociétés cédées, dont il
ne pouvait ignorer l’importance dans la mesure où elles faisaient peser un aléa sur la pérennité des sociétés
qu’il cédait, « était nécessairement intentionnel ».
19

Dol principal/dol incident – On opposait traditionnellement le dol dit « principal » au dol


dit « incident ». Le dol principal était le dol déterminant, le seul à pouvoir entraîner la
nullité. Le dol incident était celui qui portait sur un élément accessoire du contrat. En ce
cas, il n’y avait pas nullité car la victime aurait quand même contracté, mais à des
conditions différentes. Seuls des dommages et intérêts pouvaient être demandés (c’est-à-
dire, en fait, une diminution du prix convenu).

La distinction dol principal/dol incident était contestée par de nombreux auteurs. On


pouvait la trouver trop radicale : entre la tromperie sans laquelle une partie n’aurait pas
contracté et celle qui n’aurait rien changé à sa décision, il existe toute une série de
situations intermédiaires qu’il est difficile d’appréhender. Aussi bien, une partie importante
de la doctrine estimait que « le dol dit incident doit suffire à justifier l’annulation si celle-
ci est demandée »39. La jurisprudence s’était prononcée en ce sens40.

Cette solution est reprise par l’article 1130 du Code civil. Bien que ce texte concerne tous
les vices du consentement (lesquels doivent présenter un caractère déterminant), il
condamne, comme tous les commentateurs l’ont relevé, la distinction du dol principal et
du dol incident. Le dol vicie le consentement et la nullité est encourue même si, sans la
tromperie, l’autre partie aurait seulement « contracté à des conditions substantiellement
différentes » (article 1130).

§4 – La violence

Définition – La violence est une contrainte exercée sur l’un des contractants en vue de
l’amener à contracter. En cela, la violence diffère des autres vices du consentement. Ici, le
consentement n’est pas vicié par une erreur (que ce soit une erreur spontanée ou provoquée
par un dol). La victime a parfaitement conscience qu’elle conclut un « mauvais contrat ».
Mais elle se trouve, d’une certaine façon, contrainte de donner son consentement sous
l’empire de pressions, physiques ou morales. Plus rare que les deux autres vices du
consentement, elle est aussi plus grave. Voilà pourquoi la violence, contrairement au dol,
est une cause de nullité même si elle émane d’un tiers.

Pour que la violence soit retenue comme vice du consentement, il faut démontrer
l’existence d’une contrainte (A/), puis établir que celle-ci a été illégitime (B/) et, enfin
déterminante (C/).

A/ La pression d’une contrainte

La contrainte peut indifféremment porter sur la « personne » ou sur sa « fortune ». Le terme


« personne » vise aussi bien les personnes physiques que sur des personnes morales.
Celles-ci peuvent être victime de violence lorsque la contrainte s’exerce sur les personnes
physiques qui les représentent (par exemple par une SARL dont le consentement à un

39
J. Flour, J.-L. Aubert et É. Savaux, n° 214.
40
Cass. 1re civ., 22 juin 2005, n° 04-10415 : RDC 2005, p. 1025, note Ph. Stoffel-Munck ; Contrats, conc.,
cons. 2005, comm. 186, note L. Leveneur
20

contrat aura été extorqué grâce à des menaces exercées sur son gérant). Le terme « fortune
» désigne les biens de la personne.

Parfois, la contrainte exercée contre un tiers sera prise en compte. L’ancien article 1113 du
Code civil retenait la violence exercée « sur son époux ou sur son épouse, sur ses
descendants ou ses ascendants ». La doctrine s’accordait à considérer que cette liste n’était
pas limitative. La violence était prise en compte lorsqu’elle s’exerçait contre toutes les
personnes qui sont chères au cocontractant (fiancé(e), amant ou maîtresse, ami intime,
etc.). L’idée générale était que le consentement était vicié de la même manière, que la
menace s’adresse à la personne même du cocontractant ou à ceux auxquels il porte intérêt
et affection. Cette solution est reprise par l’article 1140 du Code civil qui dispose désormais
que la violence peut être exercée contre les « proches » du contractant.

Les contraintes peuvent prendre des formes diverses. La contrainte peut être physique. Par
exemple, lorsqu’elle se traduit par l’emploi de menaces sur la personne ou l’exercice de
voies de fait (coups, séquestration, etc.).

La contrainte peut également être morale. Par exemple, des menaces de diffamation, de
poursuites scandaleuses ou d’autres faits de nature à porter atteinte à l’honneur,
harcèlement sexuel ou autre, pressions de toutes sortes, etc. Le droit pénal fait une
application de cette idée lorsqu’il réprime « l’abus de faiblesse » (articles L. 122-8 et
suivants du Code de la consommation et article 223-15-2 du Code pénal).

Abus de dépendance – La contrainte peut-elle avoir pour origine l’état de nécessité de la


victime ? En pareil hypothèse, aucune personne n’exerce de pression physique ou morale
sur le contractant. Mais sous la pression des événements, celui-ci est obligé de conclure
un contrat à des conditions qui le désavantage (par exemple, un contrat d’assistance
maritime, de dépannage automobile, etc…).

La violence ne saurait toutefois découler du seul état de nécessité de la victime. Si on


admettait trop facilement la nullité du contrat parce qu’une personne a contracté sous la
pression des événements, cela créerait une trop grande insécurité juridique. Aussi, la
jurisprudence décide-t-elle que la pression des circonstances ne suffit pas à constituer la
violence. Celle-ci n’existe que si le cocontractant a profité de ces circonstances pour
imposer des conditions anormales. En bref, c’est l’abus de situation qui se trouve ici
sanctionné.

Il en va de même en matière de violence économique. Il s’agit d’une forme particulière


d’état de nécessité. La contrainte économique est celle qui altère la liberté de contracter
d’une personne placée en situation de dépendance économique ou de détresse sociale.

La violence économique est admise en son principe. Mais elle ne peut entraîner la nullité
du contrat qu’en cas d’abus. Selon la Cour de cassation, « seule l’exploitation abusive d’une
situation de dépendance économique, faite pour tirer profit de la crainte d’un mal
menaçant directement les intérêts légitimes de la personne, peut vicier de violence son
21

consentement »41. En d’autres termes, il n’y a pas violence lorsqu’un cocontractant profite
de la situation de dépendance économique de l’autre partie. La nullité ne sera encourue
que si ce contractant profite de la situation pour exploiter abusivement la dépendance
économique de son partenaire. Comme pour l’état de nécessité, c’est donc l’abus de
situation qui est sanctionné par la nullité du contrat. Autant dire que les possibilités
d’invoquer un tel vice sont réduites (où commence l’abus ?).

La réforme de 2016-18 consacre les solutions jurisprudentielles retenues en matière d’état


de nécessité et de violence économique (article 1143 du Code civil). Lorsqu’une partie de
trouve dans un état de dépendance (économique ou autre) par rapport à une autre42, le
vice de violence ne sera retenu que lorsque l’autre partie obtient d’elle un engagement
qu’elle n’aurait pas souscrit en l’absence d’une telle contrainte et en tire « un avantage
manifestement excessif ».

Violence exercée par un tiers – À la différence du dol, la violence est prise en considération
de la même manière, qu’elle émane du cocontractant ou d’un tiers. La règle est posée par
l’article 1142 (anc. 1111) du Code civil. Cette solution est justifiée par le caractère
particulièrement intolérable de la violence. Il n’en demeure pas moins que la nullité
prononcée dans de telles circonstances peut apparaître injuste pour le cocontractant
innocent. On peut toutefois se demander si ce n’est pas là un faux problème. En effet, sauf
circonstances tout à fait exceptionnelles, un tiers ne se livrera à des violences que s’il y a
été invité plus ou moins directement à le faire par le cocontractant qui bénéficie de
l’opération. Dans ce cas, il est juste que la nullité du contrat soit prononcée.

B/ Une contrainte illégitime

Toutes les violences n’entraînent pas la nullité du contrat. Pour retenir le vice de violence,
il est nécessaire que la contrainte exercée sur la victime présente un caractère illégitime43.

La contrainte illégitime est celle qui présente un caractère abusif. Ainsi, sur le terrain de la
contrainte morale, la menace de poursuites judiciaires (ou de l’emploi de voies de droit)
ne constitue pas en principe une violence. Il n’y a pas faute à exercer un droit. Il en va
autrement lorsque l’auteur de la contrainte abuse de l’action en justice qui lui est ouverte
afin d’en retirer un avantage indu. Cette solution est reprise par l’article 1141 du Code civil.
Selon ce texte, « la menace d’une voie de droit ne constitue pas une violence. Il en va

41
Cass. 1re civ., 3 avril 2002 : D. 2002, jur. p. 1860, note Gridel et J.-P. Chazal, somm. p. 2844, obs. D.
Mazeaud ; JCP G 2002, I, n° 184, §6 et s., obs. G. Virassamy.
42
Dans sa version initiale, l’article 1143 visait uniquement l’état de dépendance d’un contractant. Cela
aurait rendu possible une interprétation (trop ?) large du texte en permettant à toute personne en état de
dépendance (parce qu’âgée, malade, fragile) de pouvoir bénéficier de l’article 1143. La loi de ratification a
précisé que l’état de dépendance devait être apprécié « à l’égard » du contractant auteur de l’abus, ce qui
exclut la prise en compte de la seule la vulnérabilité intrinsèque du contractant. Cette modification a une
valeur interprétative (et, partant, s’applique à tous les contrats conclus depuis le 1er octobre 2016).
43
L’ancien article 1114 du Code civil en donnait un exemple désuet. Ce texte précisait que le sentiment de
crainte que suscitent les parents envers leurs enfants majeurs ne suffit pas à lui seul à annuler le contrat. Il
s’agit de ce que l’on appelle la « crainte révérencielle », qui est considérée comme légitime (il en va toutefois
autrement en cas de véritables menaces).
22

autrement lorsque la voie de droit est détournée de son but ou lorsqu’elle est invoquée ou
exercée pour obtenir un avantage manifestement excessif »44.

C/ Une contrainte déterminante

La violence ne permet d’annuler le contrat que si elle a été suffisamment grave. L’article
1140 parle de menace d’un « mal considérable ».

Comme pour l’erreur ou le dol, il est nécessaire que la contrainte ait été déterminante du
consentement (article 1130, alinéa 2 in fine). Concrètement, cela signifie que la victime
doit avoir le sentiment qu’elle n’a pas d’autre choix que de conclure le contrat.

Comment apprécier ce caractère déterminant ? La gravité de la crainte inspirée doit-elle


être appréciée in concreto ou in abstracto ? L’appréciation in concreto conduirait à se
demander si la violence exercée a été suffisante pour forcer le consentement de celui qui
a contracté. Au contraire l’appréciation in abstracto conduirait à se demander si la violence
aurait fait céder un cocontractant raisonnable.

La rédaction de l’ancien article 1112 du Code civil était ambiguë. L’alinéa 1er de ce texte
se référait à l’appréciation in abstracto. La violence retenue était celle qui était « de nature
à faire impression sur une personne raisonnable ». Mais l’alinéa 2 précisait qu’il fallait tenir
compte de l’âge, du sexe et de la condition des personnes. Ces critères invitaient à une
appréciation in concreto.

La jurisprudence avait adopté l’appréciation in concreto. Cette appréciation est désormais


consacrée par la réforme. Comme pour l’erreur et le dol, le caractère déterminant doit
s’apprécier « eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement
a été donné » (article 1130, alinéa 2). Il est logique d’apprécier au cas par cas l’influence
de la violence sur le consentement puisqu’il s’agit de rechercher si un cocontractant a été
victime d’un vice du consentement.

Sanction de la violence – La sanction peut être de deux ordres. D’une part, la nullité du
contrat. D’autre part, des dommages et intérêts. Ces deux actions sont indépendantes. La
victime peut exercer l’action en responsabilité alors même que l’action en nullité serait
prescrite (en cas d’infraction pénale, ou encore de violation des règles de la concurrence,
il ne pourra y avoir lieu qu’à dommages et intérêts).

La preuve suit ici les règles de droit commun. C’est à la victime de rapporter la preuve de
la violence. S’agissant d’un fait juridique, la preuve peut être rapportée par tous moyens.
La violence peut aussi être établie en se fondant sur les éléments postérieurs au contrat,
même si elle doit avoir lieu au moment de la formation du contrat.

44
Exemple (A. Bénabent, n° 111) : des personnes détournent de l’argent au détriment d’une société. Celle-
ci s’en aperçoit et obtient sous la menace de poursuites judiciaires que les auteurs lui vendent leur maison.
Si le prix de la maison vendue était un prix normal, il n’y a pas nullité. Mais si le prix de la maison, était
anormal, il y aurait nullité. Dans les deux cas le consentement n’a pas été libre. Mais dans le premier, le
résultat n’est pas illégitime.
23

Section 2 – L’aptitude à contracter

La question de savoir qui détient l’aptitude pour conclure valablement un contrat fait
appel à deux notions juridiques bien distinctes. Tout dépend de savoir si une personne
souhaite contracter pour son propre compte ou pour le compte d’autrui. Si elle contracte
pour elle-même, il s’agit de savoir si elle en a la capacité juridique (§1). Si elle contracte
pour le compte d’autrui, il s’agit de savoir si elle en a reçu le pouvoir (§2).

§1 – La capacité

Selon 1145 du Code civil, « toute personne physique peut contracter sauf en cas
d’incapacité prévue par la loi »45. La capacité est donc le principe. Ce n’est qu’à titre
d’exception qu’une personne peut être déclarée incapable. Seule la loi peut déclarer une
personne incapable. Cette incapacité peut être générale ou ne concerner que tel ou tel
type d’acte. À cet égard, on distingue classiquement les incapacités de jouissance (A/) des
incapacités d’exercice (B/).

A/ Les incapacités de jouissance

Les incapacités de jouissance sont celles qui privent certaines personnes du droit même
de conclure certains contrats. Les incapacités de jouissance sont toujours spéciales. Cela
signifie qu’elles visent un acte déterminé, et non pas tous les actes. Elles ne sont jamais
générales. Sinon, cela aboutirait à priver une personne du droit de contracter. Ces
incapacités s’expliquent par une idée de méfiance. La loi craint que, pour tel contrat
déterminé, telle personne abuse de sa position privilégiée au détriment de son
cocontractant.

Par exemple un mineur non émancipé ne peut faire aucune donation (article 903 du Code
civil). Il ne peut faire de donation lui-même, ni par l’intermédiaire de son représentant
légal (i.e. les parents du mineur ne peuvent faire une donation pour le compte de leur
enfant, autrement l’interdiction serait trop facilement détournée).

Autre exemple, le médecin traitant d’un mourant ne peut recevoir aucune libéralité de
celui-ci (article 909 du Code civil). De même, les personnes admises dans un
établissement dispensant des soins psychiatriques ne peuvent conclure certaines ventes au
profit du personnel (médecin, personnel soignant, etc.) de l’établissement (article L 3211-
5-1 du Code de la santé publique).

B/ Les incapacités d’exercice

Les personnes frappées d’une incapacité d’exercice ont les mêmes droits qu’une personne
capable. Mais on ne leur reconnaît pas la capacité de les exercer elles-mêmes ou, à tout
le moins, sans autorisation. En bref, pour contracter, ces personnes protégées doivent être,

45
S’agissant des personnes morales, la capacité « est limitée aux actes utiles à la réalisation de leur objet tel
que défini par leurs statuts et aux actes qui leur sont accessoires, dans le respect des règles applicables à
chacune d’entre elles ».
24

soit autorisées, soit assistées par un tiers, soit représentées. Si ces conditions sont
respectées, le contrat conclu sera valable. Il produira ses effets comme s’il avait été conclu
par une personne capable. Dans le cas contraire, le contrat pourra, sous certaines
conditions, être annulé pour cause d’incapacité.

Les incapacités d’exercice protègent classiquement deux catégories de personnes


(article 1146 du Code civil) :

- les mineurs non émancipés (article 388 du Code civil). Ceux-ci ne peuvent en principe
contracter que par l’intermédiaire de leur représentant (administrateur légal ou tuteur).
Néanmoins, l’usage veut qu’ils puissent accomplir seuls certains actes de la vie courante
(articles 389-5 et 408 du Code civil) ;

- les majeurs incapables (article 425 du Code civil). L’incapacité des majeurs est
fonction de la gravité de leur état. Tout dépend de la mesure de protection qui a été
mise en place. Les majeurs sous sauvegarde de justice conservent l’exercice de leurs
droits. Les majeurs sous curatelle ou sous tutelle sont frappés d’une véritable
incapacité d’exercice. Cette incapacité est spéciale dans le cas de la curatelle. Elle
ne concerne que les actes pour lesquels la loi requiert l’assistance du curateur. Cette
incapacité concerne les actes de dispositions, mais pas les actes d’administration
(c’est-à-dire les actes de gestion courante). En cas de la tutelle tous les actes, en
principe, nécessitent la représentation du tuteur. Toutefois, le juge peut habiliter le
majeur à accomplir certains actes seuls ou avec l’assistance du tuteur.

§2 – Le pouvoir de contracter pour autrui

La représentation – Il est possible pour une personne de conclure un contrat non pour
elle-même, mais pour le compte d’autrui. Il existe pour cela une technique juridique, que
l’on appelle représentation. Dans la représentation, une personne, le représentant, conclut
un contrat pour le compte d’une autre, le représenté. Certains en font même leur
profession, tels par exemple les agents immobiliers. Ajoutons que la technique de la
représentation est indispensable pour le fonctionnement des personnes morales. En effet,
si les personnes morales accèdent à la personnalité juridique, elles ne peuvent passer des
actes juridiques qu’à travers les personnes physiques qui les représentent.

La réforme de 2016-18 a inséré dans le Code civil un paragraphe consacré à la


représentation au titre de la validité des contrats. Pour l’essentiel, les nouvelles dispositions
n’opèrent pas un grand changement.

Le pouvoir de représenter peut avoir plusieurs sources (article 1153 du Code civil) :

- la représentation peut être d’origine contractuelle. Tel est l’objet du contrat de mandat.
Ce contrat donne à une personne, le mandataire, le pouvoir d’accomplir, pour le compte
une autre personne, le mandant, un ou plusieurs actes juridiques ;
25

- la représentation peut être d’origine légale. On a vu que les mineurs non émancipés sont
frappés d’une incapacité d’exercice. C’est pourquoi, les parents (ou le représentant légal
du mineur) le représentent pour l’administration des biens. Autre exemple déjà mentionné,
les représentants légaux des personnes morales (sociétés, associations,…) ;

- la représentation peut être judiciaire. Par exemple, lorsqu’un époux est hors d’état de
manifester sa volonté, son conjoint peut être autorisé en justice à le représenter (article
219 du Code civil).

Quant aux effets de la représentation, tout se passe comme si le représenté avait lui-même
contracté 46 . Le représentant s’efface derrière le représenté. Il en résulte une double
conséquence. Premièrement, le contrat n’a d’effet qu’à l’égard du représenté (c’est lui, par
exemple, qui vend ou qui achète). Deuxièmement, le contrat n’a aucun effet à l’égard du
représentant. Celui-ci n’assume en principe aucune obligation à l’égard de la personne
avec qui il contracte. Néanmoins, dans son rôle d’intermédiaire contractuel, il pourra
engager sa responsabilité pour manquement à son devoir de conseil (c’est notamment le
cas pour l’agent immobilier).

Le représentant ne peut agir que dans la limite du pouvoir qui lui a été donné, tel
qu’il est défini par la loi, le jugement ou le contrat de mandat. Au-delà, il agit sans
pouvoir et n’engage donc pas le représenté (article 1156 du Code civil). Il y a là un
danger important pour le cocontractant qui doit donc vérifier avec soin l’étendue de
la mission confiée au représentant.

Sur ce point, la réforme introduit une innovation. Afin de sécuriser l’opération, l’article
1157 permet au tiers d’interroger le représenté par écrit sur l’étendue du pouvoir du
représentant. À défaut de réponse du représenté dans le délai fixé dans la demande (et
qui doit être raisonnable), le représentant est réputé habilité à conclure l’acte

Mais les circonstances rendent parfois difficile cette vérification. Aussi la jurisprudence
a-t-elle créé un palliatif, pour protéger ce tiers contractant lorsqu’il est de bonne foi et
a fait preuve de la diligence nécessaire : il pourra invoquer la notion de mandat
apparent. De ce fait, le représenté se trouvera obligé envers les tiers comme s’il avait
donné mandat au représentant.

À cet égard, le nouvel article 1156 du Code civil indique qu’en cas de dépassement de
pouvoir du représentant, l’acte est opposable au représenté « si le tiers contractant a
légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du
comportement ou des déclarations du représenté ».

Les juges disposent d’un large pouvoir d’appréciation quant à la légitimité de l’erreur du
tiers. Il est ainsi tenu compte de ses compétences (profane ou non), de la nature de l’acte

46
Article 1154, alinéa 1er, du Code civil : « Lorsque le représentant agit dans la limite de ses pouvoirs au
nom et pour le compte du représenté, celui-ci est seul tenu de l’engagement ainsi contracté ».
26

(à titre gratuit ou à titre onéreux) et de la qualité ou non de professionnelle de


l’intermédiaire, du comportement ou des déclarations du représenté

Lorsque le mandant apparent est reçu, il conduit à une véritable expropriation privée du
titulaire du droit qui va devoir le céder. Le représenté ne dispose alors que d’un recours
en responsabilité contre le représentant.

Section 3 – Le contenu du contrat

Selon l’article 1128 du Code civil, le contrat doit avoir un contenu licite et certain. À
l’inverse de l’orientation adoptée par la réforme de 2016-18, on envisagera dans un
premier temps l’exigence d’un contenu certain du contrat (Sous-section 1), avant celle de
sa licéité (Sous-section 2). Il peut en effet sembler plus judicieux d’aborder de quelle façon
les parties déterminent le contenu de leur contrat avant d’envisager les limites imposées
par l’exigence d’un contenu licite.

Sous-section 1 – L’exigence d’un contenu certain

Le contrat doit respecter certaines exigences afin de protéger l’intérêt individuel de chaque
contractant. Avant la réforme, ces exigences étaient appréciées à travers les notions
d’« objet » et de « cause » 47. Si le terme « objet » est maintenu dans certains articles, la
« cause » disparait. Cette disparition est l’une des modifications les plus emblématiques de
la réforme.

La sous-section du Code civil relative au contenu du contrat contient des dispositions


disparates. Une première série de règles envisagent la prestation contractuelle en tant que
telle (§1). Une seconde série envisage l’équilibre contractuel (§2).

§1 – La prestation contractuelle

L’article 1163 du Code civil énonce que « l’obligation a pour objet une prestation »48. Ce
texte n’indique pas la variété des prestations susceptibles d’être fournies par contrat.
L’ancien article 1101 du Code civil énonçait, lorsqu’il définissait le contrat, la trilogie des

47
Ces deux conditions concernaient les obligations créées par le contrat. Le contrat crée des obligations, et
pour que celles-ci soient valables, il était nécessaire qu’elles reposent sur des éléments objectifs, qu’elles
aient une réelle consistance (i.e. le débiteur doit s’engager à quelque chose). Il était également nécessaire
que les obligations aient une réelle justification (i.e. le débiteur doit s’engager pour une raison précise). À
défaut, le contrat ne produirait que du vent…
48
Avant la réforme, le Code civil utilisait les expressions « objet du contrat » et « objet de l’obligation »,
laissant penser que le contrôle de cet élément de la validité du contrat s’effectuait à deux stades différents.
Cette dualité se retrouvait dans les ouvrages de droit des obligations même si la formule « objet du contrat »
était jugée impropre par la majorité des auteurs. Le contrat, en soi, n’a pas d’objet. Il produit des effets,
lesquels consistent justement en la création de plusieurs obligations. Ce sont ces obligations qui ont un objet.
Par objet de l’obligation, il faut donc entendre les prestations des parties (et les exigences auxquelles elles
doivent répondre).
27

obligations de donner, de faire et de ne pas faire. Celle-ci n’a pas été reprise par la
réforme49.

D’une manière générale, on peut distinguer les prestations selon qu’elles rapportent à une
chose – qui peut être corporelle (une voiture, une maison) ou incorporelle (un logiciel) –,
à un service (soins prodigués par un médecin, réparations effectuées par un garagiste, etc.)
ou à une somme d’argent qui exprime le prix d’une chose ou d’un service (sous des
dénominations variées selon les types de contrats : prix dans une vente, loyer dans un bail,
salaire d’un contrat de travail, etc.).

L’article 1163, alinéa 2, du Code civil fixe les exigences auxquelles doit répondre la
prestation objet de l’obligation : celle-ci doit être possible (A/) et déterminée ou
déterminable (B/).

Il n’y a, en l’occurrence, aucune nouveauté. L’article 1163 ne fait que condenser des
exigences qui figuraient déjà dans le droit antérieur à la réforme.

A/ Une prestation possible

Cette exigence est la transposition de la maxime « à l’impossible nul n’est tenu ». Le contrat
pourra être annulé si le débiteur s’est vraiment trouvé dans l’impossibilité d’exécuter sa
prestation. Cette impossibilité peut être matérielle (une pièce n’est plus fabriquée) ou
juridique (la marchandise est frappée d’une interdiction à l’exportation).

Mais pour être annulable, l’impossibilité doit être absolue. Cela signifie qu’aucun débiteur
ne pourrait exécuter l’obligation promise. Par exemple, un entrepreneur ne peut pas
construire en raison de l’instabilité du sous-sol et aucun autre entrepreneur ne pourrait le
faire. Autre exemple classique : la vente de la chose d’autrui. Cette vente se heurte à une
impossibilité absolue puisque personne ne peut transférer plus de droit qu’il n’en a lui-
même

En revanche, si l’impossibilité n’est que relative (par exemple, l’entrepreneur ne peut


construire un immeuble élevé faute d’outillage suffisant), la nullité sera écartée. En effet, le
débiteur est fautif d’avoir souscrit imprudemment un engagement qu’il ne pouvait pas tenir
(et qu’il savait ne pas pouvoir tenir). Il pourra être condamné éventuellement à des

49
C’était surtout l’obligation de donner (i.e. transférer la propriété) qui était contestée. Dans la mesure où
le transfert s’effectue de manière automatique lorsque la chose est un corps certain, il n’y a pas lieu à
exécuter une telle obligation. C’est pourquoi, certains auteurs ont estimé que l’obligation de donner, bien
qu’envisagée par le Code civil, n’existait pas ou bien, si elle existait, qu’elle n’avait aucune utilité. Ajoutons
que lorsque l’obligation a pour objet une chose de genre, le transfert de propriété n’est pas instantané. Il ne
s’opère que par l’individualisation de la chose. Cette individualisation ne se fait généralement qu’au moment
de la livraison et pour l’exécution de cette obligation. Or cette obligation est une obligation de faire (Sur ce
débat, cf. not. P. Bloch, « L’obligation de transférer la propriété dans la vente », RTD civ. 1988, p. 673 ; D.
Tallon « le surprenant réveil de l’obligation de donner », D.1992, chron. p. 67 ; M. Fabre-Magnan, « le
mythe de l’obligation de donner », RTD civ. 1996, p. 85 ; J.-P Chazal et S. Vicente, « Le transfert de propriété
par l’effet des obligations dans le Code civil », RTD civ. 2000, p. 477 ; A.-S. Courdier-Cuisinier, « Nouvel
éclairage sur l’énigme de l’obligation de donner. Essai sur les causes d’une controverse doctrinale », RTD
civ. 2005, p. 521).
28

dommages et intérêts. Si le créancier souhaite annuler le contrat, il devra agir sur un autre
fondement (par exemple en se plaçant sur le terrain des vices du consentement, dol ou
erreur en particulier).

B/ Une prestation déterminée ou déterminable

Selon l’article 1163, alinéa 2, du Code civil, la prestation doit être « déterminée ou
déterminable ». Cette exigence évoque, dans une version simplifiée et modernisée, celle
de l’ancien article 112950. Elle semble aller de soi. En effet, pour que la prestation puisse
être exécutée, il faut bien savoir en quoi elle consiste. C’est pourquoi, le contrat doit définir
de façon suffisamment précise la prestation promise pour que l’on puisse savoir au jour de
l’exécution ce qui est dû par le débiteur.

Le caractère déterminé ou déterminable obéit à des règles différentes selon que l’obligation
en cause est ou non une obligation de payer une somme d’argent.

1° La détermination des obligations non monétaires

Les obligations non monétaires sont celles qui ont pour objet une prestation portant sur
une chose ou sur un service.

Lorsque la prestation se rapporte à une chose, celle-ci doit être suffisamment spécifiée
pour être déterminée ou déterminable : on ne peut pas vendre ou louer « un immeuble »
ou un « terrain », mais tel immeuble ou tel terrain identifié. De même, on ne peut pas céder
« des créances » (à une banque par exemple) sans préciser l’identité du débiteur et l’origine
de ces créances. S’il s’agit de « choses de genre », c’est-à-dire de marchandises (blé,
vins...), il faut en spécifier la nature et la quantité.

Toutefois, il n’est pas nécessaire que l’identification de la chose soit d’une précision totale
au moment de la formation du contrat. Si la chose n’est pas immédiatement déterminée,
elle sera considérée comme certaine dès lors qu’elle est déterminable au jour de
l’exécution du contrat.

Une prestation est déterminable si elle peut être déterminée d’après les indications mêmes
du contrat. L’article 1163, alinéa 3, y a ajouté une référence aux usages ou aux relations
antérieures des parties. Par exemple, la vente des objets entreposés dans tel garde-meuble,
même s’ils ne sont pas décrits ; la vente de telle superficie de terrain à délimiter sur une
parcelle plus grande ; la cession de toutes les créances qu’on détiendra sur telle personne
à une date précise. Mais en toute hypothèse, aucun un nouvel accord des parties ne doit
être nécessaire (faute de quoi l’obligation n’est pas valable).

Lorsque la chose objet de la prestation n’existe pas, le contrat est nul (par exemple, la vente
d’un animal qui est déjà mort). C’est au moment précis de la conclusion du contrat qu’il

50
« Il faut que l’obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce.
La quotité de la chose peut être incertaine, pourvu qu’elle puisse être déterminée ».
29

faut se placer pour apprécier l’existence de la chose. Si la chose périt après la formation
du contrat, le contrat n’en reste pas moins valable.

Il existe toutefois deux exceptions.

En premier lieu, dans les contrats aléatoires, l’existence de la chose n’est pas nécessaire.
Encore faut-il que le caractère aléatoire du contrat soit démontré (par exemple, l’achat à
ses risques et périls d’un lot de marchandises en cours de transport par mer, ou la reprise
des stocks d’une entreprise en « faillite »).

En deuxième lieu, l’objet peut porter sur une chose future (objet à fabriquer, récolte à venir,
immeuble à construire, etc.). Et si, finalement, la chose ne vient pas à exister sans qu’il y
ait faute de part ou d’autre, le contrat devient caduc (par exemple, la récolte est détruite
avant terme).

Lorsque la prestation n’a pas pour objet une chose mais un service (anc. obligation de
faire ou de ne pas faire), celui-ci doit, comme les autres obligations, être déterminé avec
précision. Ainsi, serait nul l’engagement d’effectuer « toute prestation » (d’où un minimum
de précision quant à l’emploi dans le contrat de travail), ou l’engagement de ne jamais
faire un acte en général.

2° La détermination du prix

Presque tous les contrats comprennent une obligation de somme d’argent, qui exprime le
prix d’une chose ou d’un service. L’exigence de la détermination de l’objet a posé des
difficultés spécifiques en matière de prix.

Pour certains types de contrats tels la vente, le prêt, le bail d’habitation, le contrat de travail
ou d’assurance, etc., la loi donne une réponse claire à la question de la détermination du
prix qui est une condition de validité du contrat.

Mais s’agissant des nombreux autres contrats à titre onéreux qui interviennent dans la vie
économique, la loi ne donnait pas de réponse avant la réforme de 2016-18. La question
s’était surtout posée dans les contrats cadre et dans les contrats de prestation de services.
Pour ces contrats, le prix pouvait-il être fixé unilatéralement par l’un des contractants après
la formation du contrat ? Si, d’un côté, le principe de liberté contractuel incite à permettre
une telle fixation unilatérale, l’on peut craindre, d’un autre côté, que la partie en position
de force en profite pour imposer un prix défavorable à son cocontractant.

Principe du caractère déterminé ou déterminable du prix – La jurisprudence antérieure à


la réforme avait admis que l’ancien article 1129 du Code civil « n’était pas applicable à la
détermination du prix » 51 . Il s’ensuivait que, sauf disposition légale particulière, la
détermination du prix ne constituait pas une condition de validité du contrat en droit
commun. Cette règle n’a pas été reprise par la réforme de 2016-18. Le prix est bien une

51
Cass. ass. plén., 1er décembre 1995, n° 93-13.688, v. infra.
30

prestation au sens de l’article 1163 du Code civil. Il doit donc être déterminé ou
déterminable.

Toutefois, cette exigence est assouplie par l’admission d’une fixation unilatérale du prix
dans deux hypothèses déterminées : les contrats cadre52 (a) d’une part, les contrats de
prestation de service (b) d’autre part.

a) Les contrats cadre53

Pour bien comprendre le droit issu de la réforme de 2016-18, il convient de revenir sur les
solutions dégagées par la jurisprudence antérieures. Après une évolution jurisprudentielle

52
Article 1111 du Code civil : « le contrat cadre est un accord par lequel les parties conviennent des
caractéristiques générales de leurs relations contractuelles futures. Des contrats d’application en précisent
les modalités d’exécution ».
53
Cette catégorie comprend généralement les contrats de distribution (approvisionnement, concession,
franchise). On peut y inclure également les contrats de maintenance. Cette catégorie pourrait s’étendre aux
contrats de longue durée qui suppose la réalisation de prestation, sinon régulière, du moins répétée (Fr.
Terré, Ph. Simler, Y. Lequette et Fr. Chénedé, n° 385).
31

« en dent de scie »54, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation a rendu, le 1er décembre
1995, quatre arrêts qui ont fixé sa jurisprudence55. Quatre principes de s’en dégagent :

54
Sous l’empire du droit antérieur à la réforme, la question de savoir si les contrats cadre devaient être
soumis à l’exigence de la détermination du prix fut marquée par une évolution jurisprudentielle
mouvementée et donna lieu à d’âpres débats doctrinaux. Afin de protéger le cocontractant économiquement
faible, principalement dans les contrats dit « de bière » ou de « pompiste de marque » (contrats liant un
brasseur avec un cafetier ou un pétrolier avec un pompiste, dont le prix des marchandises est fixé
unilatéralement par le fournisseur le jour de la livraison ou bien en référence à un marché qui, dans les faits,
est monopolisé par le brasseur ou la compagnie pétrolière), la jurisprudence les avait soumis à cette exigence
(sur l’évolution de la jurisprudence sur cette question, cf. M.-A. Frison-Roche, « L’indétermination du prix »,
RTD civ. 1992, p. 269). Pour ce faire, il fut dans un premier temps jugé que ces contrats cadre constituaient
des promesses de ventes (unilatérales ou synallagmatiques) afin de pouvoir leur appliquer l’article 1591 du
Code civil (Cass. com., 27 avril 1971 : D. 1972, jur. p. 353, note J. Ghestin ; JCP G 1972, II, n° 16975, note
J. Boré). Cette qualification, très contestée en doctrine, fut dans ensuite abandonnée. Mais l’exigence de
détermination du prix demeura, la jurisprudence changeant tout simplement de fondement textuel. Écartant
l’article 1591 du Code civil – applicable qu’au seul contrat de vente –, la Cour de cassation procéda à une
relecture de l’article 1129 du Code civil afin d’y trouver le siège du principe de la détermination du prix
dans les contrats cadre de distribution (Cass. com., 11 octobre 1978 : D. 1979, jur. p. 135, note R. Houin ;
JCP G 1979, II, n° 19034, note Y. Loussouarn).
Par la suite, la jurisprudence sembla assouplir sa position en refusant d’annuler pour indétermination du
prix les contrats faisant naître essentiellement des obligations de faire ou de ne pas faire (Cass. com., 22
janvier 1991 : JCP G 1991, II, 21679, note G. Virassamy). Malheureusement, le critère de distinction entre
les contrats cadre faisant naître essentiellement des obligations de faire (et de ne pas faire) et ceux faisant
naître des obligations de donner (au sujet de laquelle, cf. D. Tallon, « Le surprenant réveil de l’obligation de
donner (à propos des arrêts de la Chambre commerciale de la Cour de cassation en matière de détermination
du prix) », préc.) s’avéra difficile à mettre en œuvre. Il fallait, semble-t-il, tenir compte du sens dans lequel
jouait l’exclusivité. Lorsque ces contrats cadre avaient pour objet un approvisionnement exclusif en produit
déterminé plutôt élémentaire (bière, pétrole (?)), ils relevaient de l’obligation de donner parce qu’étroitement
solidaires des ventes successives (Cass. com. 5 novembre 1991 et 19 novembre 1991 : Contrats, conc.,
cons. 1992, n° 3 ; Cass. com., 23 juin 1992 : Bull. civ. IV, n° 247 ; 16 février 1993, Contrats, conc., cons.
1993, n° 84 ; Cass. com., 16 février 1993 : Contrats, conc., cons. 1993, n° 130). En revanche, lorsqu’ils
organisaient la distribution de produits plus élaborés, ces contrats-cadres s’apparentaient davantage à des
obligations de faire ou de ne pas faire. Cette distinction, quelque peu arbitraire et délicate à mettre en œuvre,
fut critiquée par la majorité de la doctrine. Il apparaissait, en définitive, que la jurisprudence répugnait à
permettre une fixation unilatérale du prix, qu’il puisse ou non être déterminé au moment de la formation du
contrat. Tout dépendait du point de savoir si les parties disposaient de la possibilité de débattre et d’accepter
librement le prix des ventes d’application. Dans l’affirmative, le contrat-cadre ne pouvait être annulé pour
indétermination du prix. Si tel n’était pas le cas, le prix devait être déterminé ou déterminable lors de la
formation du contrat-cadre (sur l’influence de la détermination de prix sur la structure du contrat cadre, cf.
M. Béhart-Touchait, « La structure du contrat cadre de distribution et la détermination du prix des contrats
d’application », JCP G 1994, I, n° 3800).
Lorsque le prix n’avait pas à être déterminé, les parties devaient se mettre d’accord sur le prix lors des
ventes successives. On pouvait d’ailleurs se demander dans quelle mesure le prix pouvait être librement
accepté dès lors que l’acheteur ne pouvait refuser la vente en raison du contrat l’obligeant à s’approvisionner
exclusivement auprès du vendeur. Si aucun accord n’avait lieu, les parties se trouvaient dans l’impasse. Mais
même si le prix n’avait pas à être déterminé, les parties pouvaient avoir prévu un mode de fixation. Dans
cette occurrence, le contrat pouvait être annulé si la fixation intervenait unilatéralement (Cass. com., 23
février 1993 et Cass. com., 9 mars 1993 : Contrats, conc., cons. 1993, n° 129). Cette situation pouvait
sembler paradoxale dans la mesure où l’indétermination du prix n’était dans ce cas pas une cause de
nullité…
La nullité pour indétermination du prix pouvait produire des effets choquants. Le prix devait être restitué
alors que les marchandises, si elles avaient disparu, devaient être restituées en valeur. Or, l’opération pouvait
se révéler avantageuse pour la partie qui souhaitait « sortir » du contrat (la valeur des marchandises étant
moins importante que leur prix, le vendeur devait restituer la différence). De plus, la nullité permettait
également d’écarter certaines obligations gênantes comme les obligations de non-concurrence. Aussi bien,
une partie de la doctrine critiqua la nullité pour indétermination du prix considérée comme injustifiée et
32

– l’absence de détermination du prix n’affecte pas la validité du contrat, sauf dispositions


légales particulières (i.e. dans tous les contrats pour lesquels il n’existe pas de texte
particulier, la détermination du prix par les parties n’est pas une condition de validité du
contrat)56 ; cette solution, on l’a vu, n’a pas été reprise par la réforme ;

– pour être valable, le contrat cadre n’a pas à prévoir le prix des contrats ultérieurs dont il
organise la conclusion (cette solution, on le verra, est également écartée par la réforme) ;

– le contrat cadre peut prévoir que le prix des contrats d’application sera fixé en référence
au tarif du fournisseur ;

– dans ce cas, l’abus dans la fixation du prix ne donne lieu qu’à résiliation ou
indemnisation.

inappropriée. Pour « sortir de l’impasse », il fut proposé de se fonder sur l’article 1134, alinéa 3 du Code
civil (anc.) selon lequel les parties doivent exécuter de bonne foi leur contrat : si le fournisseur abusait de sa
position pour imposer un prix élevé, les tribunaux pourraient, sans fixer eux même le prix, le condamner à
exécuter convenablement le contrat ou à réparer en nature les conséquences dommageables de son
inexécution (L. Aynès, « Indétermination du prix dans les contrats de distribution : comment sortir de
l’impasse ? », D. 1993, chron. p. 25). Pour une autre partie de la doctrine, la validité du contrat-cadre ne
pouvait être admise qu’à la condition de confier au juge le pouvoir de fixer le prix ou bien de ne reconnaître
au contrat-cadre que la portée d’un simple accord de principe de négocier de bonne foi les prix des ventes
successives d’application (J. Ghestin, « Réflexions sur le domaine et le fondement de la nullité pour
indétermination du prix », D. 1993, chron. p. 251).
Sensible à ces critiques doctrinales, la Cour de cassation modifia sa jurisprudence. Dans un premier
temps, la première Chambre civile jugea, dans les arrêts Alcatel (Cass. 1re civ., 29 novembre 1994 (2 arrêts) :
JCP G 1994, II, n° 22371, note J. Ghestin ; D. 1995, jur. p. 122, note L. Aynès ; RTD civ. 1995, p. 358,
obs. J. Mestre) que, d’une part, la référence au tarif du fournisseur rendait le prix déterminable au sens de
l’article 1129 du Code civil et que, d’autre part, l’exécution du contrat, quant à la clause relative à la fixation
du prix, pouvait être appréciée par le juge sur le fondement de l’article 1134, alinéa 3 du Code civil. Cet
arrêt revenait sur la solution antérieurement admise selon laquelle le prix devait être librement débattu et
accepté au fur et à mesure de l’exécution du contrat. Désormais, toute nouvelle négociation sur le prix était
rendue inutile dès lors que le prix des prestations futures pouvait être fixé par les tarifs du fournisseur. Encore
fallait-il que ce dernier n’ait pas abusé de sa situation pour fixer un prix à son seul avantage. Si tel était le
cas, le fournisseur engageait sa responsabilité contractuelle et le juge pouvait intervenir en se fondant sur la
violation de la bonne foi dans l’exécution du contrat, afin de réparer, en nature ou par équivalent, les
conséquences de la faute commise. Cette solution, au demeurant largement admise en droit comparé, fut
approuvée par les auteurs dans la mesure où elle permettait d’échapper à la nullité tout en restaurant la
bonne foi. Mais les arrêts Alcatel ne constituèrent que le premier pas vers une approche radicalement
différente de la question de la détermination du prix qui fut consacrée par les quatre arrêts de l’Assemblée
plénière du 1er décembre 1995 (v. infra).
55
Cass. ass. plén., 1er décembre 1995 (4 arrêts) : JCP G 1995, II, n° 22565, concl. M. Joel, note J. Ghestin ;
D. 1996, jur. p. 17, note L. Aynès ; LPA 1995, n° 155, p. 11, note D. Bureau et N. Molfessis. Adde J.
Fossereau, « L’indétermination du prix dans les contrats », in Rapport de la Cour de cassation 1995, p. 111
et « La détermination du prix : nouveaux enjeux un an après les arrêts de l’assemblée plénière », coll.
Thèmes et Commentaires, Dalloz, 1997 ou RTD com. 1997, p. 1 ; A. Brunet et A. Ghozi, « La jurisprudence
de l’Assemblée plénière sur la détermination du prix du point de vue de la théorie du contrat », D. 1998,
chron. p. 1.
56
Si les contrats d’application sont de ceux dont des « dispositions légales particulières » imposent la
détermination du prix, telle la vente, la doctrine estime que l’exigence de la détermination du prix est
satisfaite dès lors qu’une clause prévoit que le prix doit être fixé par référence au tarif du fournisseur (Fr.
Terré, Ph. Simler, Y. Lequette et Fr. Chénedé, n° 376). Admettre le contraire reviendrait à remettre en cause
le cœur même du système élaboré par la Cour de cassation.
33

La réforme de 2016-18 s’inspire des deux dernières solutions de l’assemblée plénière.


L’article 1164 précise en effet « que dans les contrats cadre, il peut être convenu que le
prix sera fixé unilatéralement par l’une des parties, à charge pour elle d’en motiver le
montant en cas de contestation ». Le même texte ajoute qu’« en cas d’abus dans la fixation
du prix, le juge peut être saisi d’une demande tendant à obtenir des dommages et intérêts
et le cas échéant la résolution du contrat ».

Fixation unilatérale du prix – La fixation unilatérale du prix est donc admise pour les
contrats cadre. Celle-ci peut intervenir à travers la stipulation d’une clause dite « prix
catalogue », qui renvoie aux tarifs en vigueur au jour de la commande, à l’instar de ce qu’a
prévu l’assemblée plénière en 1995.

Lorsque le contrat cadre ne prévoit aucune modalité de fixation unilatérale du prix,


l’assemblée plénière de la Cour de cassation semblait estimer que le contrat demeurait
valable. Cette solution ne donnant aucune indication pas sur le mode de fixation du prix
des contrats d’application, il faut, en toute logique, qu’un nouvel accord des parties
intervienne à l’occasion de la formation ce chacun de ces contrats57...

Cette solution ne vaut que pour les contrats conclus avant le 1er octobre 2016. En effet,
l’article 1164 du Code civil ne semble déroger au principe de la détermination du prix fixé
par l’article 1163 que dans l’hypothèse où une clause de fixation unilatérale a été stipulée58.
Pour les cas, rares en pratique, où le contrat cadre demeurerait silencieux sur les modalités
de fixation d’un prix, l’exigence d’une détermination du prix s’applique de sorte que la
nullité sera encourue.

Enfin, on relèvera que si la réforme autorise l’une des parties de se voir attribuer le droit de
fixer unilatéralement du prix, c’est « à charge pour elle d’en motiver le montant en cas de

57
Que faire, dès lors, lorsque les parties ne s’accordent pas sur ce prix lors à l’occasion de la formation des
contrats conclus en application du contrats cadre ? La réponse à cette question aurait pu être la
reconnaissance du pouvoir du juge de fixer le prix lorsque le contrat ne contient pas de clause relative à la
fixation du prix. La Cour de cassation s’y était refusée s’agissant de la vente et les arrêts de l’Assemblée
plénière ne résolvent rien puisqu’ils ne mentionnent que le pouvoir accordé au juge pour contrôler la fixation
du prix par l’une des parties. Il y a là une incohérence qu’un auteur a tenté de contourner en affirmant que
la validité du contrat-cadre est limitée au cas où le prix est fixé unilatéralement par l’une des parties (J.
Ghestin, note préc., spéc. n° 18). Cette analyse doit cependant être écartée car l’un des arrêts de l’Assemblée
plénière a admis la validité du contrat cadre en ne faisant aucunement référence à un tarif quelconque mais
tout en rappelant que l’absence de détermination du prix n’est pas une condition de validité. Il semblait
donc bien, avant la réforme, que le principe de cette validité était admis, que le contrat cadre renferme ou
non une clause renvoyant au tarif du fournisseur.
Un autre moyen d’écarter cette incohérence consisterait à admettre que même en l’absence de clause
relative à la fixation du prix, ce prix pourra être réputé ultérieurement fixé de manière unilatérale par l’une
des parties, ce qui signifie que seul un contrôle de l’abus serait suffisant (Ch. Jamin, « Les apports au droit
des contrats-cadres », in « La détermination du prix : nouveaux enjeux un ans après les arrêts de l’assemblée
plénière », préc., p. 22, note 4). L’Assemblée plénière aurait alors consacrée le pouvoir pour une partie de
fixer unilatéralement le prix (Th. Revet, « Les apports au droit des relations de dépendance », in « La
détermination du prix : nouveaux enjeux un ans après les arrêts de l’assemblée plénière », préc., p. 37). La
clause de fixation ne serait qu’une des manifestations de ce pouvoir. Il ne serait alors plus nécessaire de
souhaiter l’intervention du juge lors de la formation des contrats d’application.
58
En ce sens, v. not. O. Deshayes, Th. Genicon et Y.-M. Laithier, p. 311 ; Fr. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette
et Fr. Chénedé, n° 376.
34

contestation ». Cette exigence de motivation lui impose (à l’occasion d’un procès, par
exemple), de s’expliquer sur les raisons qui l’ont conduite à fixer le prix comme elle l’a fait.
Elle constitue la contrepartie du pouvoir unilatéral accordé à la partie.

Abus dans la fixation du prix – Tout comme l’avait décidé l’assemblé plénière, il est prévu
qu’« en cas d’abus dans la fixation du prix, le juge peut être saisi d’une demande tendant
à obtenir des dommages et intérêts et le cas échéant la résolution du contrat ». L’abus n’est
pas aisé à caractériser. Jusqu’ici, les décisions sanctionnant l’abus dans la fixation du prix
ont été relativement rares. La Cour de cassation utilise des critères assez divers pour
caractériser l’abus (par exemple, la volonté de réaliser un profit illégitime)…

La sanction de cet abus est la résolution (pour l’avenir) et l’indemnisation. La résolution


sera possible « le cas échéant ». Cette sanction n’est donc en rien automatique. Tout est
affaire de circonstances On peut penser qu’elle sera prononcée lorsque l’abus a été
suffisamment grave pour empêcher le maintien du rapport de confiance qui unissait les
parties et, partant, leur relation contractuelle. Cette résolution ne devrait produire ses effets
que pour l’avenir mais non pour le passé (ce qui était le cas dans le solution dégagée par
l’assemblée plénière qui se référait à la « résiliation »). Dès lors, les contrats d’application
passés antérieurement sont maintenus. Il en va de même des stipulations accessoires, et
notamment celles qui organisent la « sortie » du contrat.

L’indemnisation ne sera pas non plus facile à mettre en œuvre. Le juge devra allouer des
dommages et intérêts en considérant le préjudice réellement subit par la partie victime de
l’indétermination du prix … au prix d’un retranchement entre le prix abusif, qu’il devra
déterminer (prix fautif, empêchant l’autre partie de profiter de l’opération ou prix excessif
ou lésionnaire, ou bien anormalement élevé) et le prix normal, conforme aux exigences de
la loyauté contractuelle.

b) Les contrats de prestation de services

ll est depuis longtemps admis que l’exigence d’un prix déterminé est écartée pour le contrat
d’entreprise. Pour ce contrat, la jurisprudence avait admis que le juge pouvait fixer après
coup le prix sur lequel les parties ne s’étaient pas accordées. La Cour de cassation avait
étendu cette exception à tous les contrats créant une obligation de faire. Il avait ainsi été
jugé que « dans les contrats n’engendrant pas une obligation de donner, l’accord préalable
sur le montant exact de la rémunération n’est pas un élément essentiel de la formation de
ces contrats »59. Ajoutons que si les parties avaient convenu d’un prix au moment de la
formation du contrat, le juge pouvait également le réviser s’il se révélait excessif.

L’article 1165 énonce que « dans les contrats de prestation de service, à défaut d’accord
des parties avant leur exécution, le prix peut être fixé par le créancier, à charge pour lui
d’en motiver le montant en cas de contestation ». Le texte ajoute qu’« en cas d’abus dans
la fixation du prix, le juge peut être saisi d’une demande tendant à obtenir des dommages

59
Cass com., 29 janvier 1991 : Bull. civ. IV, n° 43 ; .Cass. 1re civ., 24 novembre 1993 : Bull. civ. I, n° 339.
35

et intérêts et, le cas échéant, la résolution du contrat »60. On constate que l’article 1165 du
Code civil ne reprend pas la jurisprudence qui accordait au juge un pouvoir de fixation ou
de révision du prix. Faut-il y voir l’abrogation du pouvoir modérateur du juge ? On pourrait
le penser 61 , même si la doctrine n’est pas unanime sur ce point62 . Le rôle du juge se
limiterait alors qu’à sanctionner l’abus dans la fixation du prix la même façon qu’en matière
de contrat cadre (v. supra).

…/…

60
Dans la version issue de l’ordonnance, l’article 1165 indiquait qu’« en cas d’abus dans la fixation du prix,
le juge peut être saisi d’une demande en dommages et intérêts ». La loi de ratification y a ajouté la résolution
du contrat, alignant ainsi le mécanisme des sanctions de l’abus dans la fixation du prix avec celui prévu
pour les contrats cadre (article 1164). Cette modification de l’article 1165 a un caractère interprétatif (Loi du
20 avril 2018, article 16, I, alinéa 3) et, partant, s’applique aux contrats conclus à compter du 1er octobre
2016.
61
En ce sens, v. not. O. Deshayes, Th. Genicon et Y.-M. Laithier, p. 320.
62
Conta, v. not. Fr. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette et Fr. Chénedé, n° 392.

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