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CORRIGE 2018 DOSSIER 3 – DROIT DES CONTRATS

1. La société DISTRITECHNOLOGIC peut-elle obtenir l’exécution de la cession


des actions de la société WEB4TIC à son bénéfice ?

Problème de droit
Cette question pose le problème de la formation des contrats.

Règles applicables
• Tout contrat résulte d’un accord de volontés réalisé par la rencontre
d’une offre et d’une acceptation.
Cette manifestation de volonté peut prendre la forme d’une déclaration
exprimée oralement ou par écrit, mais lorsqu’une offre a été faite à une société,
l’acceptation de cette offre ne peut émaner que de son représentant légal, c’està-
dire du président dans le cas d’une SAS. Une acceptation formulée par une autre
personne ne peut donc pas engager la société.

• Si le code civil pose le principe selon lequel « On ne peut s’engager en


son propre nom, que pour soi-même », il autorise toutefois la promesse de
porte-fort, c’est-à-dire le contrat par lequel une personne que l’on appelle le
porte-fort promet à son cocontractant qu’un tiers s’engagera.
Une telle promesse ne remet pas en cause la règle posée par le code civil,
puisque le promettant n’engage que lui-même, le tiers restant libre de s’engager
ou non. S’il refuse finalement de s’engager, le contrat ne sera pas conclu, mais
le porte-fort pourra être condamné à indemniser le bénéficiaire de la promesse.

Application au cas
En l’espèce, M. Béta est le directeur financier d’une filiale de la société INVESTOR et rien
dans l’énoncé ne permet de penser qu’il serait également le président d’INVESTOR.
N’étant pas le représentant légal d’INVESTOR, il ne peut l’engager auprès des tiers.

Le courriel qu’il a adressé à la société DISTRITECHNOLOGIC ne peut donc pas s’analyser comme
une acceptation de l’offre présentée par cette société à INVESTOR.
DISTRITECHNOLOGIC ne pouvant pas invoquer la conclusion du contrat, elle ne pourra pas obtenir
l’exécution de la cession des actions à son bénéfice.

Mais si le courriel de M. BETA exprimant sans ambiguïté qu’INVESTOR accepterait l’offre


de DISTRITECHNOLOGIC si celle-ci portait son prix au montant qu’elle a finalement
proposé ne peut constituer une acception de cette offre, il pourrait en revanche
s’analyser comme une promesse de porte-fort.

Dans cette hypothèse M. BETA pourrait être condamné à indemniser la société


DISTRITECHNOLOGIC, mais en tout état de cause, cela ne remettrait pas en cause le
fait que DISTRITECHNOLOGIC ne pourrait pas obtenir la cession des actions.

2. La SAS INVESTOR a-t-elle manqué à son devoir d’information en taisant cette


indication ?
Problème de droit
Cette question pose le problème du déroulement des négociations précontractuelles.

Règles applicables
En matière de négociations précontractuelles, le code civil pose un principe de liberté,
qu’il s’agisse de l’initiative, du déroulement ou de la rupture de ces négociations, mais
il impose en la matière une obligation de bonne foi.
Lorsqu’une faute est commise dans les négociations, celui qui en est victime peut obtenir réparation
du préjudice qu’il a subi.

De plus, depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10 février 2016, l’information


précontractuelle est devenue une obligation générale, quels que soient le contrat et les
cocontractants.

Le code civil prévoit en effet que si une des parties connaît une information dont
l'importance est déterminante pour le consentement de l'autre, elle doit l'en informer
dès lors que, légitimement, celleci ignore cette information ou fait confiance à son
cocontractant.

L’obligation porte sur les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contrat ou
la qualité des cocontractants, à l’exclusion toutefois de celles qui concernent l’estimation de
la prestation.

En cas de non-respect de l’obligation, par exemple en cas d’absence d’information,


d’information incomplète ou d’information inexacte, la responsabilité délictuelle de celui
qui a méconnu son obligation peut être engagée, et la victime du manquement peut
donc obtenir l’indemnisation du préjudice qu’elle a subi, à savoir la perte d’une chance
de ne pas conclure le contrat ou de le conclure à des conditions différentes.

Notons que ce manquement est sanctionné même s’il n’est pas intentionnel, ce qui permet
de le distinguer du dol qui suppose l’intention de tromper et dont la sanction serait la nullité
du contrat.

Celui qui invoque le non-respect de l’obligation d’information doit apporter la preuve que celle-ci
lui était due, à charge pour l’autre partie de prouver qu’elle l’a bien fournie.

Application au cas
En l’espèce, KAP2NET pourrait aisément démontrer le caractère déterminant de
l’information selon laquelle DISTRITECHNOLOGIC était l’unique distributeur de WEB4TIC
et pouvait contractuellement résilier le contrat de distribution liant les deux sociétés en
cas de changement d’actionnariat.

Le dirigeant d’INVESTOR ne pouvant prouver que cette information a été fournée à


KAP2NET pendant les négociations, il apparait qu’INVESTOR pourrait être condamnée à
indemniser le préjudice subi par l’acquéreur des actions pour manquement à l’obligation de
bonne foi et l’obligation d’information.
En revanche, faute d’intention de dissimuler l’information, le dol, donc la nullité du contrat de
cession des actions semble exclue.

3. Cette clause est-elle licite ?

Problème de droit
Cette question pose le problème des clauses de non-responsabilité dans les contrats entre professionnels
et consommateurs.

Règles applicables
• Dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou
consommateurs, sont abusives, les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer,
au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif
entre les droits et les obligations des parties.

Le code de la consommation donne deux listes de clauses présumées abusives,


considérées comme « non écrites » et qui ne peuvent donc produire aucun effet
juridique.

Un premier article cite douze clauses qui sont présumées abusives de manière
irréfragable, en raison de la gravité des atteintes qu'elles portent à l'équilibre du
contrat. Du fait du caractère irréfragable de la présomption, le professionnel n’a pas
la possibilité de prouver le caractère non abusif de la clause contestée.
Parmi ces clauses figurent celles qui ont pour objet ou pour effet de supprimer ou
réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de
manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations.

• Par ailleurs, le code de la consommation précise que dans les contrats conclus à
distance, le professionnel est responsable de plein droit à l'égard du consommateur
de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, et ce, que ces obligations
soient exécutées par le professionnel luimême ou par d'autres prestataires de
services.

En l’absence de livraison, il est donc responsable envers le consommateur même s’il a


chargé un transporteur d’assurer la livraison.

Cela signifie qu’il ne peut s’exonérer de sa responsabilité en invoquant celle du


prestataire transporteur, car dans cette hypothèse d’un contrat à distance celui-ci n’est
pas considéré comme un tiers dont la faute pourrait permettre au vendeur d’échapper
à sa responsabilité.

Application au cas
En l’espèce, WEB4TIC a vendu par correspondance un équipement domotique à un client
particulier qui ne l’a pas reçu.

Le contrat ayant été conclu à distance, WEB4TIC ne peut invoquer la faute du transporteur
qu’elle a chargé de la livraison et qui ne peut être considéré comme un tiers.

Bien que la livraison ait été confiée à un prestataire de services, WEB4TIC est la seule
responsable de la bonne exécution du contrat de vente.

Elle a donc manqué à son obligation contractuelle de délivrance. Et comme la clause


qui figure dans les conditions générales de vente a pour objet réduire le droit à
réparation du client dans cette hypothèse, elle est présumée abusive de manière
irréfragable, donc réputée non écrite.

4. En vous aidant de l’annexe 1 et étant rappelé que la Convention de


Rome du 19 juin 1980 est un accord de l’Union européenne, indiquer si
la loi applicable est la loi française ou la loi belge.

Problème de droit
Cette question pose le problème de la loi applicable dans les contrats internationaux.

Règles applicables
La convention de Rome du 19 juin 1980 règle la question de la loi applicable aux obligations contractuelles
internationales.

Selon ce texte, en l’absence de choix effectué par les parties, le contrat est régi par la loi du
pays avec lequel il présente les liens les plus étroits.
Il faut donc en conclure que si les parties ont choisi la loi applicable, celle-ci s’applique et il
n’y a donc pas lieu de rechercher avec quel pays le contrat a les liens les plus étroits.

Dans l’arrêt du 16 septembre 2015, c’est parce que les parties au contrat n’avaient pas fait
de choix que la Cour de cassation a cherché à établir l’existence de ces liens.

Application au cas
En l’espèce, le contrat prévoyant l’application de la loi française, celle-ci doit s’appliquer
même si on peut relever que cet engagement de garantie présentait en fait plus de liens
avec la Belgique qu’avec la France.

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