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Revue des sociétés
Revue des sociétés 2011 p.692
L'affaire Hermès, ou l'émergence de la notion de concert « de fait »
Note sous Cour d'appel de Paris, ch. 57, 15 septembre 2011, n° 2011/00690, ADAM c/ Dumas
Hervé Le Nabasque, Professeur à l'École de droit de la Sorbonne (Paris I)
L'essentiel
La dérogation à l'obligation d'avoir à déposer un projet d'offre publique d'acquisition portant sur tous les titres de
la société Hermès International est confirmée par la cour de Paris, motif tiré de ce que la promesse d'apporter plus
de 50% des titres de cette société à une société holding constituée entre les cinquantedeux demandeurs à la
dérogation, tous membres de la famille Hermès, n'entraînerait pas de changement de contrôle de cette société.
La Cour,
Sur la procédure
En ce qui concerne la régularité de la saisine :
Considérant que l'ADAM soutient que l'AMF ne pouvant être valablement saisie d'une demande de
dérogation à l'obligation de dépôt d'un projet d'offre publique que par des personnes physiques ou morales
établissant leur qualité d'actionnaire et, à tout le moins, précisant leur identité, la décision déférée encourt
l'annulation en ce qu'elle ne précise pas le nombre d'actions HERMÈS détenues par chacune des personnes
physiques ou morales ayant saisi l'Autorité et en ce que le nombre, les noms et les représentants des «
sociétés patrimoniales » ne sont même pas mentionnés ;
Mais considérant que s'il est vrai que la décision déférée qui, après avoir mentionné, dans son premier
paragraphe, la liste complète des cinquantedeux personnes physiques ayant saisi l'Autorité des marchés
financiers d'une demande de dérogation, se borne ensuite à énoncer « et leurs sociétés patrimoniales
actionnaires directs d'Hermès », il n'en demeure pas moins que la liste complète de ces sociétés, dont le
capital est détenu exclusivement par ces personnes physiques, ainsi que leur participation individuelle au
capital d'Hermès ont bien été préalablement communiquées à l'Autorité, à laquelle aucun texte particulier
ne fixe d'exigences concernant les indications que doivent contenir ses décisions individuelles ; que, dès
lors, il suffit de constater, qu'en la forme, la décision attaquée satisfait assurément aux prescriptions de
l'article 3 de la loi n° 79587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs qui dispose
que la motivation exigée par cette loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et
de fait qui constituent le fondement de la décision ;
Que, dès lors et, par surcroît, en l'absence d'allégation d'un quelconque grief, le moyen sera rejeté ;
En ce qui concerne l'autorisation antérieure de l'opération :
Considérant que la requérante soutient aussi que la décision déférée est également entachée d'irrégularité
dès lors que l'AMF a déjà pris position sur l'opération, en consentant une approbation initiale, comme
l'atteste la formulation d'un précédent communiqué publié le 5 décembre 2010 par HERMÈS, qui indique
que l'opération de « reclassement » décidé le 3 décembre 2010 « sera soumise à l'approbation définitive
de l'Autorité des marchés financiers avant sa mise en oeuvre » (soulignement ajouté) ; qu'en ne
demandant aucune rectification alors qu'elle contrôle l'information diffusée par les sociétés cotées et que,
alors que la requérante s'était étonnée auprès des services de l'Autorité qu'HERMÈS ait pu faire état d'une
telle approbation, l'AMF a admis l'existence de cette approbation initiale, probablement accordée par ses
services ; que, cependant, aucun texte ne lui permet de délivrer de telles approbations initiales qui pèsent
ensuite nécessairement sur l'instruction du dossier, le collège « ne pouvant qu'être à tout le moins gêné
par l'approbation initiale d'ores et déjà donnée » ;
Mais considérant qu'il suffit de relever qu'alors que, dans un communiqué du 5 décembre 2010, HERMES
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avait en effet indiqué que l'opération sera soumise à l'approbation définitive de l'Autorité des marchés
financiers avant sa mise en oeuvre, l'autorité s'est en réalité bornée à demander à la société HERMÈS de
bien vouloir publier un communiqué rectificatif destiné à expliciter la phrase en cause, estimée peu claire,
afin de bien marquer que l'opération envisagée était soumise à la condition suspensive d'octroi d'une
dérogation purgée de tout recours ; que c'est dans ces conditions que HERMES a publié le communiqué
rectificatif suivant :
« Pour éviter toute ambiguïté, la famille Hermès souhaite préciser, à la suite de son communiqué diffusé le
5 décembre 2010 au soir, que l'engagement de la famille de constituer le holding mentionné dans ce
communiqué est pris sous réserve de l'obtention d'une dérogation définitive (i.e. purgée de tout recours)
de l'Autorité des marchés financiers à l'obligation de dépôt d'une offre publique raison du franchissement
des seuils qui résulterait de l'apport par la famille de plus de 50 % du capital d'Hermès International » ;
Que le moyen ne peut être qu'écarté ;
En ce qui concerne le caractère incomplet du dossier de l'Autorité :
Considérant que l'ADAM affirme encore que la décision est nulle dès lors que l'AMF n'établit pas la
présence au dossier remis aux membres du collège de l'AMF le 6 janvier 2011 :
d'une liste complète des demandeurs, incluant les « sociétés patrimoniales »,
de « l'accord » ou des « accords » du 3 décembre 2010 auxquels se réfère la décision,
de l'approbation initiale donnée aux demandeurs,
des éléments établissant qu'auraient été constamment déposées dans les caisses sociales de la SARL
Emile Hermès des actions HERMÈS INTERNATIONAL représentant plus de 50 % du capital de cette société,
des pièces justifiant que, à supposer que HERMÈS INTERNATIONAL était auparavant une société
contrôlée, le prétendu « reclassement » n'entraînera pas un changement de contrôle,
plus généralement, de tous les documents permettant d'établir les « circonstances » relevées par l'AMP
au soutien de sa décision :
Que l'ADAM souligne que la régularité d'une décision du collège de l'AMF s'apprécie au vu des documents
examinés par ce dernier lors de sa séance ainsi qu'au vu de la décision ellemême, telle que publiée, et
que, dès lors, c'est en vain que l'Autorité tente de justifier désormais des « circonstances » qu'elle a
relevées dans sa décision alors que leur justification devait figurer dans le dossier sur la base duquel le
collège a statué ; qu'en refusant la communication du dossier, l'AMF se place ainsi dans l'incapacité
d'apporter la preuve qui lui incombe, ce qui doit entraîner l'annulation de la décision litigieuse ;
Mais considérant que le recours portant sur la décision de dérogation prise par le collège et ayant pour
objet d'en vérifier la légalité au regard des textes applicables, il appartient à la requérante de démontrer,
soit que le collège a fait une mauvaise application du droit au fait d'espèce, soit que la décision a été prise
dans des conditions irrégulières ; que son recours ne peut avoir pour objet d'examiner la nature et la
teneur de documents purement préparatoires, comme tels dénués de toute portée juridique, qui sont
préparés par les services pour le collège, étant par ailleurs observé que l'Autorité n'est pas tenue
d'instruire sa décision autrement que par l'examen des demandes, pièces et mémoires qui lui sont
transmises ou dont elle demande la production ;
Qu'au surplus, sous couvert d'un moyen d'annulation tiré d'une irrégularité de procédure, la requérante,
lorsqu'elle évoque certains éléments, tels ces « circonstances », visés dans la décision attaquée, critique,
en réalité, la motivation adoptée par le collège, ce qui relève du fond du débat ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
En ce qui concerne le manquement au devoir d'indépendance et d'impartialité ;
Considérant que l'ADAM prétend également qu'il ressort de la décision attaquée que l'AMF a écarté certains
moyens invoqués par les demandeurs à l'appui de leur demande de dérogation, en particulier ceux tenant
au statut de société en commandite par actions et leur en a substitué d'autres, reposant sur
l'interprétation de « circonstances » qu'elle relève ellemême, de sorte que l'Autorité a manqué à son
devoir d'indépendance et d'impartialité ; que la requérante précise que si l'AMF estimait que les moyens
invoqués ne lui permettaient pas d'accorder la dérogation demandée, elle devait simplement refuser de
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l'accorder et, qu'en se substituant aux demandeurs pour justifier la dérogation, sans même solliciter son
avis ni celui des autres actionnaires minoritaires d'Hermès qui s'étaient manifestés auprès d'elle, sur les
moyens de pur fait qu'elle a retenu d'office, l'AMF a adopté un comportement partial et partisan
incompatible avec son statut d'autorité administrative indépendante ; que cette circonstance doit
également conduire la cour à prononcer l'annulation de sa décision ;
Mais considérant que, dans l'exercice de ses compétences en matière d'offre publique, l'Autorité, à qui il
revient d'appliquer une réglementation d'ordre public, n'est tenue de rechercher les motifs de ses décisions
qu'au regard des exigences de cette réglementation, sans être aucunement liée par les motifs que les
demandeurs auront choisi de développer à l'appui de leur requête, étant également observé que l'Autorité
a, en tant que de besoin, la faculté de procéder à toute requalification qu'elle jugerait utile ; qu'au surplus,
la réglementation applicable à la procédure devant l'autorité de marché ne lui impose, ni d'entendre en
séance tous les actionnaires minoritaires qui en feraient la demande ou de répondre à leurs observations
éventuelles, ni de leur communiquer les documents relatifs aux projets d'offre publique ;
Qu'au demeurant, la cour observe que, dans la présente espèce, l'AMF a pris soin d'exposer les principaux
arguments mis en avant par les actionnaires minoritaires et d'y répondre et qu'en réalité, sous couvert
d'un grief d'annulation de la décision tiré d'un défaut d'indépendance et d'impartialité du collège, l'ADAM
critique une nouvelle fois la motivation en droit et en fait de la décision attaquée, ce qui constitue
précisément le fond du débat ;
Que le moyen sera également rejeté
En ce qui concerne le respect des règles de fonctionnement de l'Autorité des marchés financiers :
Considérant que l'ADAM fait encore grief à la décision entreprise de ne pas mentionner les noms des
membres du collège ayant délibéré le 6 janvier 2011, ce qui ne permet pas à la cour de contrôler, à la
simple lecture des deux communiqués publiés, si la décision a été rendue dans le strict respect du principe
d'ordre public d'indépendance et d'impartialité garanti par la Convention européenne de sauvegarde des
droits de l'homme et en conformité avec les prescriptions des articles L. 6214 et R. 6211 du code
monétaire et financier relatifs aux quorum et incompatibilités applicables au collège, circonstance qui doit
emporter l'annulation de sa décision ; que la requérante observe qu'en tout état de cause, alors qu'il
appartient à l'Autorité de justifier la régularité de la procédure qui a conduit à la décision litigieuse au
regard des règles qui régissent son fonctionnement, la seule production d'un extrait très limité du procès
verbal de la réunion du collège de l'AMF du 6 janvier 2011 ne permet pas d'apprécier si toutes les règles
qui viennent d'être rappelées ont été respectées ;
Mais considérant que si les textes cités par la requérante posent en effet des règles de fond en matière de
prévention des conflits d'intérêts, il n'en résulte nullement que le texte de la décision luimême doive
mentionner le nom des membres du collège ayant délibéré, étant au demeurant observé que l'Autorité a
communiqué à l'ADAM un extrait du procèsverbal de la séance du collège du 6 janvier 2011 indiquant les
noms des membres du collège ayant participé à la décision, ce qui lui permet ainsi, en tant que de besoin,
de constater que les dispositions des articles L. 6214 et R. 6211 du code monétaire et financier avaient
bien été respectées en l'espèce ;
Que ce moyen d'annulation sera écarté :
En ce qui concerne l'identification des bénéficiaires de la dérogation :
Considérant que la requérante prétend, enfin, qu'alors qu'une décision de l'AMF ne peut bénéficier qu'à des
personnes morales ou physiques parfaitement identifiables, la décision critiquée est également entachée
d'une irrégularité devant conduire à son annulation, dès lors qu'elle est prononcée au bénéfice de «
sociétés patrimoniales » dont ni les noms ni les noms de leurs représentants n'ont été précisés ;
Mais considérant qu'il convient de se référer aux développements qui précèdent concernant la régularité de
la saisine, dont il ressort que la liste complète de ces sociétés, dont le capital est de toute façon détenu
exclusivement par les personnes physiques demanderesses à la dérogation ainsi que leur participation
individuelle au capital d'Hermès ont bien été préalablement communiquées à l'Autorité, de sorte que le
marché a été pleinement mis en mesure de connaître le périmètre du groupe familial bénéficiaire de la
dérogation ;
Que le moyen n'apparaît pas fondé ;
Sur la demande de communication de pièces formulée par M . Repplinger
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Considérant que ce requérant demande à la cour d'enjoindre aux bénéficiaires de la dérogation de produire
aux débats les statuts de la holding et les « accords » du 3 décembre 2010 dont, comme l'AMF, ils se
prévalent dans leurs écritures, en faisant valoir, qu'en l'absence de ces pièces, il lui est impossible
d'apprécier et de critiquer leurs écritures ;
Mais considérant que cette demande est désormais privée d'objet en ce qui concerne les accords du 3
décembre 2010, qui ont été communiqués par les demandeurs à la dérogation le 16 mai 2011 (bordereau
de communication de pièces récapitulatif du 16 mai 2011) ; que, concernant les statuts de la société
holding, le recours de M, Repplinger portant sur la décision de dérogation prise par le collège et ayant pour
objet d'en vérifier la légalité au regard des textes applicables, il revient seulement au requérant de
démontrer, soit que le collège a fait une mauvaise application du droit au fait d'espèce, soit que la décision
a été prise dans des conditions irrégulières ; qu'à cet égard, il suffit de constater que la décision déférée
page 2 deuxième paragraphe relate de manière précise le contenu d'une série de clauses des statuts du
holding en question, et que, dans ces conditions, M. Repplinger n'a pas été privé de la possibilité d'exercer
son recours dans les conditions qui viennent d'être relatées ; qu'au surplus, contrairement à ce que
prétend le requérant, ni les demandeurs à la dérogation dans leurs écritures, ni l'AMF dans ses
observations, ne font état d'autres clauses des statuts de la holding que celles qui ont été rappelées par le
collège dans la décision attaquée ;
Que, dès lors, la demande de communication de pièces formulée par M. Repplinger ne peut qu'être rejetée
;
Sur le fond
Considérant que le troisième alinéa de l'article L. 4333 du code monétaire et financier dispose : « Le
Règlement général de l'Autorité des marchés financiers fixe [...] les conditions dans lesquelles l'autorité
peut accorder une dérogation à l'obligation de déposer un projet d'offre publique portant sur des
instruments financiers émis par une société dont le siège social est établi en France et dont les instruments
financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé d'un Etat membre de la Communauté
européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen. » ;
Que l'article L. 23310 du code de commerce précise : « I. Sont considérées comme agissant de concert
les personnes qui ont conclu un accord en vue d'acquérir ou de céder des droits de vote ou en vue
d'exercer les droits de vote pour mettre en oeuvre une politique visàvis de la société. » :
Que l'article 2348 du Règlement général de l'Autorité des marchés financiers (Règl. AMF) énonce : «
L'AMF peut accorder une dérogation à l'obligation de déposer un projet d'offre publique si la ou les
personnes concernées justifient auprès d'elle remplir l'une des conditions énumérées à l'article 2349,
L'AMF se prononce après avoir examiné les circonstances dans lesquelles le ou les seuils ont été ou seront
franchis, la répartition du capital et des droits de vote et les conditions dans lesquelles, le cas échéant,
l'opération a fait ou fera l'objet d'une approbation par l'assemblée générale des actionnaires de la société
visée. » ;
Qu'enfin, l'article 2349 du Règl. AMF précise : « Les cas dans lesquels l'AMF peut accorder une dérogation
sont les suivants : [...] 7° Opération de reclassement, où s'analysant comme un reclassement, entre
sociétés ou personnes appartenant à un même groupe. » ;
Considérant qu'au soutien de son recours, l'ADAM prétend que les conditions exigées par l'article 2349 du
Règlement général de l'Autorité des marchés financiers pour obtenir le bénéfice d'une dérogation ne sont
pas réunies en l'espèce, dès lors que les demandeurs à la dérogation ne constituent pas un groupe au sens
de ces dispositions, que l'opération envisagée ne constitue pas un reclassement et, également, que,
portant gravement atteinte aux intérêts des actionnaires d'HERMÈS, cette opération n'est pas conforme
aux principes régissant les offres publiques ;
Que la requérante affirme, en premier lieu, que la dérogation a été accordée par la décision critiquée au «
groupe familial Hermès tel que défini par les demandeurs », alors qu'il s'agit d'une « entité à géométrie
variable » particulièrement fluctuante et floue, tant au niveau des demandeurs euxmêmes, qui font
référence tantôt à euxmêmes, tantôt à toute la famille Hermès, que dans la décision de l'AMF pour qui ce
même groupe est, soit constitué uniquement par les demandeurs à la dérogation, soit composé de tous les
actionnaires de HERMÈS appartenant à la famille Hermès ; que, cependant, les demandeurs ne peuvent
pas être assimilés à la famille Hermès définie comme constituée de tous les descendants d'Emile Hermès
et de son épouse, puisque leur petitfils, M. Nicolas Puech, qui détient plus de 5 % des droits de vote
d'HERMES international selon sa déclaration au CMF du 9 juin 1997 qui n'a jamais été suivie d'une
déclaration de franchissement de seuil à la baisse, ne figure pas parmi les demandeurs ; que la requérante
précise, qu'en tout état de cause, si le groupe familial Hermès est uniquement constitué des demandeurs,
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c'estàdire des membres de la famille Hermès ayant participé à la réunion du 3 décembre 2010 et ayant
donné leur accord au schéma de restructuration du capital d'HERMÈS qui est envisagé, ce groupe n'avait
aucune réalité avant cette réunion et ne peut donc revendiquer aucune antériorité dans le contrôle
d'HERMÈS ; que, selon la requérante, ce groupe est également une entité non structurée ; qu'en effet,
alors que l'AMF retient que le seul lien qui unit les demandeurs à la dérogation est d'avoir pour ancêtre
communEmile Hermès et son épouse, tous les. demandeurs tel M. de Seynes ou, a fortiori, les sociétés
patrimoniales ne remplissent pas cette condition et que, par ailleurs, tous les actionnaires d'HERMÈS
ayant la qualité de descendants d'Emile Hermès, tel Nicolas Puech déjà cité, ne figurent pas parmi les
demandeurs, de sorte que ce « lien du sang lointain et partiel » ne peut suffire à structurer un groupe
d'actionnaires agissant de concert ; que, par surcroît, la qualité d'associé de la Emile Hermès SARL ne peut
davantage structurer le groupe familial, puisque les susnommés M. de Seynes et les sociétés
patrimoniales ne sont pas associés de cette société et qu'il n'est pas établi que les autres demandeurs le
soient à ce jour, dès lors que, le 2 juin 2005, dernière date à laquelle la composition de cette société à
capital variable a été connue, celleci ne comprenait que 21 associés ; qu'enfin, indéfini et sans véritable
lien entre ses membres, ce prétendu groupe, qui ne se présente pas comme tel, n'a jamais non plus été
révélé au public, puisque la notion de groupe familial est absente des documents de référence et des
autres communications d'HERMÈS des 10 dernières années :
Que l'ADAM fait valoir, en deuxième lieu, que l'opération envisagée ne peut être qualifiée de «
reclassement », lequel implique que le capital de la société concernée est déjà contrôlé et que le contrôle
ne se trouve pas finalement modifié ; qu'en effet, jusqu'au 3 décembre 2010, la situation de la société
HERMÈS se caractérisait, tout d'abord, par l'absence de tout contrôle déclaré, dès lors que personne, et en
tout cas aucun « groupe familial », n'avait déclaré et encore moins revendiqué le contrôle du capital ou des
droits de vote d'HÈRMÈS ; que si un groupe familial de concert contrôlant le capital de HERMÈS avait
réellement existé, ses dirigeants auraient donc dû déclarer que la. société était contrôlée, avec comme
seule conséquence l'obligation de donner la composition du « groupe familial de concert », sans obligation
de dépôt d'un projet d'offre publique ; que les membres du groupe familial de concert auraient simplement
dû, d'une part, déclarer le franchissement à la baisse du seuil de 80 % et, d'autre part, lors de chaque
franchissement de seuil par ses diverses composantes, rappeler l'existence et la composition du concert ce
qui, précisément, n'a pas été le cas ; qu'à l'opposé, depuis l'introduction de ses actions en bourse,
HERMÈS et ses actionnaires familiaux ont constamment fait savoir au marché que le capital de la société
n'était pas contrôlé, les déclarations de franchissement de seuil, seul ou de concert, effectuées par les
différents actionnaires familiaux ne dépassant pas le seuil de 10 % du capital d'HERMÈS, étant précisé que
la seule fois où un actionnaire a franchi le seuil de 10 % de droits de vote, il a indiqué qu'il n'avait pas
l'intention « d'acquérir le contrôle de la société HERMÈS » ; que, de la sorte, HERMÈS n'a jamais indiqué
qu'elle était une société contrôlée et que, jamais, à la connaissance du public tout au moins, l'AMF ne lui a
fait d'observation sur ce point ; qu'à l'opposé, dans ses notes d'information visées par l'AMF, HERMÈS a
précisé qu'elle n'était pas contrôlée et que, dans ses documents de référence annuels, la société ne
distingue même pas les actionnaires familiaux des autres actionnaires, comme le font généralement les
sociétés dont le capital est partiellement détenu par les membres d'une même famille mais, simplement,
les actionnaires détenant plus de 5 % du capital des autres actionnaires ; que l'ADAM ajoute que la
situation antérieure se caractérise, ensuite, par l'absence de tout concert conférant un contrôle et, qu'à
supposer que HERMÈS soit contrôlée, cela ne pourrait être que par des actionnaires familiaux agissant de
concert dans le cadre du « groupe familial de concert » dont l'AMF a, pour l'occasion, relevé l'existence,
après avoir visé pendant des années des documents faisant état d'une absence de contrôle ; que,
cependant, en l'absence d'accord répondant aux conditions exigées par l'article L. 23310 du code de
commerce et l'article L. 233 11 du même code, une telle action de concert n'est pas caractérisée ; que
l'ADAM précise ainsi qu'il n'est pas sérieusement contestable que HERMÈS n'est pas une société au capital
contrôlé et que, si les actionnaires familiaux d'HERMÈS, à qui aucune volonté de tromper le marché en
dissimulant une action de concert ne peut être imputée, n'ont jamais déclaré contrôler de concert HERMÈS,
« c'est tout simplement qu'ils ne la contrôlaient pas de concert », n'ayant aucune raison de dissimuler
l'existence d'une action de concert si celleci était avérée ; que, par surcroît, les luttes d'influence existant
entre les actionnaires familiaux et la volonté d'optimiser la gestion de leurs patrimoines propres,
notamment au plan fiscal, excluaient toute action de concert ; qu'alors qu'à l'origine, le statut de
commandite par actions était, selon eux, censé leur assurer une protection suffisante contre toute
offensive externe, comme l'indique le communiqué de l'AMF du 24 octobre 2010 consécutif à l'annonce de
la prise de participation de LVMH, pour des raisons non révélées, tenant vraisemblablement à des
préoccupations divergentes des membres de la famille, ils ont majoritairement changé d'avis le 3
décembre 2010 et opté pour la mise en place d'une holding détenant 50,2 % du capital de la société
HERMES ; que ce récent revirement ne permet pas pour autant de relever un contrôle dans le cadre d'un
concert qui, selon leurs propres déclarations n'a jamais existé ; qu'en revanche, selon l'ADAM, si
l'opération projetée est réalisée, HERMÈS deviendra une société contrôlée par la holding qui détiendra
dans l'immédiat 50,2 % et, à terme, 62,8 % du capital ; qu'en application de l'article L. 23310 II 4° du
CMF, tous ses associés contrôleront de concert HERMES et du fait de ce contrôle assuré pour une durée
illimitée, les actions HERMÈS perdront le supplément de valeur lié à l'absence de contrôle, la prime de
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contrôle passant à la holding sans qu'elle ait pour autant été tenue de désintéresser les autres actionnaires
:
Que la requérante souligne, en dernier lieu, que la dérogation accordée par des motifs inopérants par l'AMF
est, par surcroît, contraire à plusieurs principes régissant les offres publiques ;
Que tel est le cas, tout d'abord, de la transparence des marchés, dans la mesure où la décision valide le
passage d'une absence de contrôle à un contrôle par une société holding en interdisant le libre jeu des
offres et des surenchères et porte ainsi atteinte au contrat d'investissement conclu avec les actionnaires,
de manière contradictoire avec les messages reçus par le marché sur l'absence de contrôle d'HERMÈS,
situation désormais remis en cause par l'opération incriminée, qui aboutit à un contrôle pour une durée
indéterminée ; qu'à ce sujet, la requérante fait observer que, préalablement à l'introduction en bourse de
l'action HERMÈS en 1993, une holding familiale intermédiaire a été absorbée pour « améliorer la
transparence financière par suppression du double niveau de holding » et que, le projet des demandeurs
étant désormais de recréer une holding intermédiaire regroupant les participations d'une partie des
membres de la famille, le parallélisme des formes exige que, dans le même souci de transparence, « le
retour à une forme d'organisation du passé s'accompagne d'une possibilité offerte aux actionnaires
d'Hermès international de céder leurs actions dans le cadre d'une offre publique » ;
Que l'ADAM affirme aussi que la dérogation accordée porte atteinte à l'égalité des actionnaires ainsi qu'à
l'intégrité du marché et à la protection de l'épargne ; qu'en effet, alors qu'à présent tous les actionnaires
commanditaires d'HERMÈS disposent des mêmes droits, et que, la société n'étant pas contrôlée, la liquidité
du marché de l'action est assurée, de fait, par les opérations, notamment les ventes des actionnaires
familiaux, contexte dans lequel les actionnaires ont investi dans le cadre d'un contrat d'investissement, tel
ne sera plus le cas désormais dans la situation du contrôle de concert des demandeurs au travers de la
holding projetée, qui s'attribuera la prime de contrôle au détriment des actionnaires actuels et qu'alors, le
droit de vote des autres actionnaires sera dépourvu de toute valeur, HERMÈS cessant d'être un société «
opéable » ; que, dans une telle situation, la liquidité du marché, et donc son intégrité, deviendront
problématiques et que les intérêts des actionnaires ayant transféré leur participation dans la SAS de
contrôle qui, intéressés par le contrôle, ne pouvant pas vendre, seront sensibles aux avantages, en
particulier fiscaux, d'une baisse du cours du titre, divergeront de ceux des autres actionnaires qui, à
l'opposé, recherchent une valorisation de leurs actions ; qu'ainsi, en accordant aux demandeurs une
dérogation qui leur donne ou donne à certains d'entre eux un pouvoir qu'ils n'ont pas aujourd'hui, et en
dévalorisant par là même la valeur des actions des autres actionnaires, la décision litigieuse porte atteinte
au principe d'égalité des actionnaires ;
Considérant que, de son côté, M. Repplinger poursuit également l'annulation de la décision déférée en
prétendant aussi que l'AMF n'a pas fait une juste appréciation des conditions de dérogation à l'obligation
de déposer un projet d'offre publique d'acquisition ;
Que, selon ce requérant, cette inexacte appréciation procède, en premier lieu, de l'absence de contrôle
capitalistique préexistant ; qu'en effet, la dérogation à l'obligation de déposer un projet d'offre publique
d'acquisition s'explique par le fait que le contrôle n'est pas substantiellement modifié : dès lors que le
franchissement de seuil par la holding « sera actif, et les intérêts des actionnaires minoritaires ne seront
pas protégés autrement », le fondement de l'article 2349,7° repose uniquement sur l'absence de
changement de contrôle d'HERMÈS ; qu'en effet, la raison d'être de l'obligation de déposer un projet
d'offre publique d'acquisition étant de permettre aux actionnaires minoritaires d'exercer leur droit de
retrait dans des conditions équitables lors d'un changement de contrôle, seule l'absence d'un changement
de contrôle peut justifier une dérogation à cette même obligation ; qu'ainsi, pour que l'AMF accorde une
dérogation sur le fondement d'une opération de reclassement ou s'analysant comme un reclassement
entre sociétés ou personnes appartenant un même groupe, il est nécessaire que l'AMF constate que ce
groupe contrôlait au préalable la société visée et que la société visée demeure contrôlée par ce même
groupe ; qu'à cet égard, il convient de distinguer le contrôle de gestion du contrôle capitalistique, seul
considéré pour établir l'existence d'un contrôle au sens de la réglementation applicable, les dispositions
des articles L. 4333,1 du code monétaire et financier et 2342 du RGAMF édictant une obligation d'offre
publique raison du franchissement du seuil du tiers du capital et des droits vote d'une société, fûtelle
constituée sous la forme d'une société en commandite par actions, de sorte qu'il incombait ainsi à
l'Autorité de rechercher si les bénéficiaires contrôlaient le capital d'HERMÈS ; qu'en l'absence, en l'espèce,
de contrôle capitalistique exclusif, l'Autorité devait rechercher si les bénéficiaires contrôlaient
conjointement HERMÈS avant ces opérations, et donc s'ils agissaient de concert ; que le concert ne
pouvant se déduire d'un simple parallélisme des comportements ou d'un état de fait, l'AMF était dès lors
tenue de relever l'existence d'un accord, consistant nécessairement en un acte juridique contraignant et,
qu'en ne le relevant pas, l'Autorité a violé les articles L. 2333 III et L. 23310 du code de commerce ainsi
que les articles 2342 et suivants du Règlement général ; qu'au surplus, non seulement l'absence de cet
accord n'est pas palliée par les cas de présomption d'un accord, mais encore, jusqu'à la demande de
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dérogation, les bénéficiaires ont toujours nié l'existence d'une quelconque action de concert pouvant
donner lieu à un contrôle conjoint du capital d'HERMÈS, ayant, de façon constante, procédé à des
déclarations de franchissement de seuils sans jamais déclarer les actions ou les droits de vote possédés
par leurs sociétés patrimoniales respectives et les documents émanant d'HERMÈS mentionnant l'absence
de contrôle ou de concert ; qu'au demeurant, dans les situations où des tiers cherchent à démontrer
l'existence dissimulée d'un concert, à l'encontre de concertistes cherchant à échapper à leurs obligations,
le concert est en effet un fait juridique pour les tiers qui peuvent le prouver par tout moyen, ce qui
autorise l'AMF à recourir à la méthode du faisceau d'indices ; que cependant, tel ne peut être le cas en
l'espèce, où les parties au prétendu accord souhaitent démontrer l'existence entre elles d'un accord qui, de
ce fait, doit être considéré comme un acte juridique pour les bénéficiaires et dont la preuve doit être
rapportée par écrit, conformément à l'article 1341 du code civil ; qu'en tout état de cause, les indices
retenus par l'AMF, pris seuls ou combinés, ne permettent pas de prouver l'existence d'un accord en vue
d'acquérir, de céder ou d'exercer des droits de vote pour mettre en oeuvre une politique commune visà
vis d'HERMÈS ou pour obtenir le contrôle d'HERMÈS ; qu'en effet, la notion, floue, de dépôt par les
bénéficiaires de leurs actions dans les caisses de la SARL Emile Hermès ne constitue pas un élément
pertinent, alors que les bénéficiaires demeurent propriétaires de leurs actions HERMÈS et continuent
d'exercer individuellement les droits de' vote qui y sont attachés sans concertation préalable et que, par
surcroît, la présence des bénéficiaires au sein de Emile Hermès SARL peut s'expliquer par d'autres raisons
qu'une action de concert, en particulier le désir de ne pas être exclus de la gestion de cette société ; que
les liens de parenté pouvant unir les bénéficiaires ne sont pas non plus susceptibles de constituer l'indice
d'un tel accord, alors même que la définition d'un groupe familial dont il n'a jamais été fait état dans la
documentation d'HERMÈS soulève des difficultés, s'agissant d'un groupe s'étendant sur six générations,
avec trois branches distinctes issues du mariage de trois héritières de Emile HERMÈS et, qu'en tout état de
cause, même si les bénéficiaires étaient réputés faire partie d'une même famille, l'existence d'un lien de
parenté entre les cinquantedeux bénéficiaires issus de familles différentes ne constitue pas un élément de
preuve d'un quelconque accord en vue d'acquérir, de céder ou d'exercer des droits de vote, pour mettre en
oeuvre une politique commune visàvis d'HERMÈS ou pour obtenir le contrôle de la société ; que, ni la
présence et l'implication des bénéficiaires dans la gestion d'HERMÈS, ni le fait que ceuxci votent de
manière convergente au sein de l'assemblée générale des associés commanditaires d'HERMÈS ne peuvent
constituer l'indice d'un accord, une communauté de vue entre actionnaires n'étant pas suffisante pour
caractériser une action de concert, une majorité formée en assemblée générale pouvant en effet résulter
d'une rencontre purement conjoncturelle ou d'appréciations convergentes à un moment donné ; qu'enfin, à
aucun moment, les bénéficiaires de la dérogation n'ont expliqué en quoi consistait la politique commune
dont ils tentent de se prévaloir pour prouver un concert ;
Que M. Repplinger affirme, en second lieu, que l'AMF n'a pas fait une juste appréciation des circonstances
du franchissement de seuil par la holding et par ses bénéficiaires ainsi que de la répartition du capital et
des droits de vote, portant par là même atteinte aux principes directeurs des offres publiques ;
Que, tout d'abord, selon le requérant, l'appréciation incorrecte portée par l'AMF sur les circonstances du
franchissement de seuil par la holding n'est pas conforme :
en premier lieu, au principe de protection des actionnaires minoritaires, du fait que les opérations
envisagées conduiront à placer HERMÈS sous le contrôle de la holding, sans pour autant permettre aux
actionnaires minoritaires qui le souhaitent de sortir du capital à des conditions équitables via une offre
publique d'acquisition, le nonrespect de ce principe, sousjacent à l'obligation de déposer une offre
publique, entraînant pour lui comme pour les autres actionnaires minoritaires un préjudice certain et
l'apparition d'un actionnaire de contrôle ayant par surcroît pour conséquence de réduire la capacité
d'intervention des actionnaires minoritaires ;
en deuxième lieu, au principe d'égalité de traitement des actionnaires, du fait que le transfert par les
bénéficiaires d'une partie de leurs actions HERMÈS à la holding suppose l'organisation d'une « offre privée
d'échange », qui ne s'adressera qu'aux bénéficiaires et dont sont exclus les actionnaires minoritaires de la
société, étant par surcroît précisé que la holding devenant majoritaire au sein des assemblées générales
d'HERMÈS, il est à craindre que les décisions prises par ces assemblées ne cherchent qu'à satisfaire les
intérêts des bénéficiaires, spécialement en ce qui concerne les dividendes ;
en troisième lieu, aux principes, pourtant inhérents au régime des offres publiques, de transparence, de
loyauté et de libre jeu de la concurrence, en ce que la décision critiquée d'octroi de la dérogation, qui
constate l'existence d'une action de concert non déclarée, ne tire pas les conséquences du grave
manquement à l'obligation d'information du marché, constatée par l'AMF au niveau du souhait d'une « plus
grande précision sur la définition du groupe familial », allant audelà des déclarations des intéressés
pourtant publiées dans des documents officiels destinés au marché, pour satisfaire à leurs demandes ; que
M. Repplinger précise que les déclarations faites au marché sur l'absence de contrôle au sein d'HERMES
ont eu une incidence réelle sur les conditions de son investissement et de son entrée au capital de cette
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société et que, dans ces conditions, il serait inéquitable que la décision de l'AMF prenne en compte de
fausses déclarations de contrôle pour accorder la dérogation demandée ; que M. Repplinger ajoute, par
ailleurs, que la fermeture du capital examinée en l'espèce, en empêchant toute prise de contrôle par un
tiers, entraînera une perte de valeur par rapport à la situation où cette société serait demeurée « opéable
», ce qui conduira à une réduction de la liquidité des titres détenus par les actionnaires minoritaires qui
seront privés du bénéfice d'un prix de prise de contrôle fixé par le libre jeu du marché et des offres de
surenchères ;
Qu'ensuite, selon M. Repplinger, l'Autorité n'a pas fait une juste appréciation de la modification en
profondeur de la répartition actuelle du capital et des droits de vote d'HERMÈS, caractérisée par le fait que
le capital n'est contrôlé par aucun actionnaire, alors que l'opération envisagée conduira à une « détention
capitalistique ultime majoritaire » par la holding, la nouvelle actionnaire ; que l'équilibre actionnarial
préexistant s'en trouvera bouleversé et que les actionnaires n'appartenant pas au groupe constitué parles
bénéficiaires deviendront, à la suite de l'apparition d'un « actionnaire contrôlant », des actionnaires
minoritaires ne disposant, tout au plus, que du solde de 17 %, ce qui signifierait, qu'à terme, ils n'auraient
pas vocation à devenir majoritaires, ni même à bénéficier d'un flottant satisfaisant leur assurant une
liquidité du titre à des conditions équitables ; que M. Repplinger précise aussi que la constitution de cette
holding par les demandeurs est, en réalité, destinée à éviter une nouvelle intrusion hostile dans le capital
d'HERMÈS, dans lequel ils souhaitent radicalement et définitivement modifier leur mode de participation
qui, jusqu'alors, s'est en effet avéré impropre à empêcher l'entrée de LVMH ; que, dès lors, l'existence de
ce moyen de défense contre une OPA hostile prouve que HERMÈS se pensait « opéable », ce qui exclut
donc tout contrôle préexistant du capital ou des droits de vote d'HERMES par les bénéficiaires de la
dérogation ; que, dans ces conditions, les opérations devraient donc consister, non en une dérogation,
mais en une offre publ ique obligatoire afin de lui permettre, ainsi qu'aux autres actionnaires minoritaires
qui n'ont pas consenti à cette modification de la répartition de l'actionnariat, de sortir du capital d'Hermès
à des conditions équitables ; que le requérant affirme, enfin, que l'octroi de la dérogation emporte des
conséquences préjudiciables pour le marché, compte tenu de la diminution de la liquidité des actions
HERMES, qui pèsera durablement sur la valeur des titres, et que l'octroi d'une dérogation à l'obligation. de
déposer un projet d'offre publique revient à limiter sérieusement son droit d'investissement, ce qui est
ainsi contraire à l'intérêt du marché et des investisseurs et/ou des stratégies d'investissement à court et
/ou long terme, la répartition de l'actionnariat, dont notamment l'absence d'un actionnaire de contrôle au
sein d'HERMÈS constituant un des éléments du « contrat d'investissement » auquel il a souscrit et qui
s'avère profondément modifié par les opérations en question ;
Mais considérant que c'est par des appréciations pertinentes, que la cour fait siennes, que l'AMF a décidé
que les demandeurs à la dérogation font partie d'un groupe familial, dont le projet de regrouper une
participation majoritaire, provenant principalement des actions déposées dans les caisses sociales de
l'associé commandité, Emile Hermès SARL, au profit d'une holding, peut s'analyser comme une opération
de reclassement entre personnes appartenant à un même groupe, sans incidence sur le contrôle de la
société HERMES et que, sur ces bases, en application des articles 234 8, 2349 7° et 23410 du
Règlement général de l'AMF, l'Autorité a accordé au groupe familial Hermès, tel que défini par les
demandeurs, la dérogation à l'obligation de dépôt d'un projet d'offre publique ;
Considérant que, comme l'Autorité l'a relevé à titre liminaire, il n'est ni contesté ni contestable que la
réglementation sur les offres publiques est pleinement applicable aux sociétés en commandite par actions
et que, dans ce cadre, il importe en effet de rechercher si, au regard des exigences fixées par l'article 234
9 du Règlement général de l'AMF, les demandeurs à la dérogation pouvaient être effectivement considérés
comme constituant un groupe d'actionnaires familiaux, associés commanditaires et contrôlant le capital de
la société ;
Considérant qu'à cet égard, il est exact, comme le soulignent les requérants et comme l'Autorité elle
même n'a pas manqué de le relever, tout en observant aussi, de son côté, que la communication adressée
au public mettait l'accent sur les caractéristiques particulières de la société HERMÈS procédant de son
statut de commandite familiale, que :
hormis le document de référence de la société HERMES relatif à l'exercice 2009, les documents émanant
de la société ou des membres de la famille ne mentionnent pas formellement l'existence d'un groupe
familial et que les déclarations de franchissements de seuils faites par des membres de la famille retracent
uniquement des détentions individuelles ;
des documents émanant de la sociéténotes d'information relatives à la mise en oeuvre de programmes
de rachat dont la dernière remonte à 2005 mentionnent l'absence de contrôle ;
Considérant, cependant, que les affirmations formulées par les demandeurs à la dérogation au soutien de
leur requête, puis réitérées dans leurs écritures déposées devant la cour, suivant lesquelles « l'existence
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d'un groupe familial est incontestable et a toujours été de notoriété publique », ne sont pas pour autant
dénuées de portée ;
Considérant, en effet, que le mécanisme de pouvoir résultant des statuts de société en commandite par
actions et la concentration des pouvoirs stratégiques et de gestion entre les mains de l'associé
commandité, la société Emile Hermès SARL, qui permettent de retenir, pour HERMÈS, la qualification de
commandite familiale, figurent depuis le rapport annuel 2006, soit postérieurement à l'entrée en vigueur
de l'article L. 2251003 du code de commerce, dans la partie relative aux éléments susceptibles d'avoir
une incidence en cas d'offre publique :
« HERMES international est une société en commandite par actions et bénéficie à ce titre des particularités
de cette forme sociale dont certaines, légales ou statutaires, sont susceptibles d'avoir une incidence en cas
d'offre publique et notamment :
la désignation et la révocation des gérants sont de la compétence exclusive de l'associé commandité ;
l'obligation pour Emile Hermès SARL, associé commandité, de maintenir dans ses statuts un certain
nombre de dispositions concernant sa forme sociale, son objet et les conditions à respecter pour déténir la
qualité d'associé [...] ;
aucune décision des assemblées des commanditaires (actionnaires) n'est valablement prise si elle n'a pas
été approuvée par la société commandité et au plus tard à la clôture de ladite assemblée » ;
Que la forme de la société en commandite par actions, dans un premier temps, puis la description des
pouvoirs d'Emile Hermès SARL et notamment ceux de nommer et de révoquer les gérants dans un
second temps, figuraient également dans les notes afférentes au programme de rachat d'actions publiées
par la société, les membres du groupe familial pouvant ainsi affirmer que la société a décrit son
organisation juridique plutôt que de la qualifier en termes de contrôle « afin que le public ait une
information transparente sur la situation et les conditions du contrôle qui sont en l'occurrence atypiques »
;
Qu'en ce qui concerne l'information proprement dite sur la participation détenue dans HERMÈS, il est
constant que la note d'introduction en bourse, de même que les rapports annuels de 1993 et 1994 font
état de la répartition du capital et des droits de vote en distinguant « le groupe familial Hermès » et le «
public » et que le document de référence de la société pour 2009, qui constitue l'information à jour, affiche
ainsi la participation familiale : « A la connaissance de la société, la somme des actions détenues par les
membres de la famille Hermès représente environ 73 % du capital social » ;
Qu'en ce qui concerne enfin l'information sur la présence de membres du groupe familial au sein des
organes sociaux, que la présentation des informations relatives aux mandataires sociaux traduit également
la présence de ce groupe, dès lors que les documents de référence font mention du critère d'appartenance
à la famille, chaque mandataire social étant présenté en fonction de ses liens avec la famille Hermès ;
Considérant qu'audelà de ces affirmations sur l'existence d'un groupe familial, à tout le moins
apparemment structuré autour de la société Hermès SARL, l'Autorité, estimant qu'une plus grande
précision sur la définition du groupe familial eût, malgré tout, été préférable, a été légitimement conduite à
décider que la démonstration de l'existence d'un groupe familial, le cas échéant de concert, pouvait
résulter d'autres éléments que les seules déclarations des intéressés ; que c'est ainsi que le collège a
relevé :
que le groupe familial détient au jour de sa décision 62,8 % du capital et 71,9 % des droits de vote
d'Hermès, soit une très large part plus de 85 % du total des actions HERMÈS détenue par tous les
membres de la famille Hermès, qui détiennent au total plus de 70 % du capital ; que les demandeurs
personnes physiques sont tous associés d'Emile Hermès SARL et exercent ensemble des pouvoirs dévolus
à celleci en qualité d'unique associée commanditée, les membres du conseil de gérance étant
exclusivement issus de cette société ; qu'ils ont accepté de déposer leurs actions Hermès dans les caisses
sociales d'Emile Hermès SARL ; que ce dépôt, bien que les associés de cette société puissent reprendre
leurs actions à tout moment et qu'ils en demeurent % propriétaires, exerçant à ce titre les droits de vote
attaché auxdites actions HERMÈS est librement consenti par les demandeurs, ce qui constitue un indice de
leur volonté de diriger ensemble la société ;
que les actions HERMES déposées dans les caisses d'Emile Hermès SARL représentent 57,25 % du capital
au 30 novembre 2010 ; que ce dépôt a représenté plus de 50 % du capital et les droits de vote de façon
quasicontinue depuis l'introduction en bourse de la société HERMÈS intervenue en 1993, étant précisé que
le groupe familial a toujours détenu plus de 50 % du capital et des droits de vote d'Hermès ;
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que les membres du conseil de surveillance d'HERMÈS, lequel représente les associés commanditaires,
sont majoritairement issus de la famille Hermès depuis au moins 2006 et sont signataires des accords du 3
décembre 2010, étant souligné que l'intégralité des associés d'Emile Hermès SARL et des membres du
conseil de gérance ont souscrit auxdits accords ;
que les demandeurs sont impliqués dans la gestion de la société, puisque 25 personnes exercent
actuellement des fonctions de salariés ou de mandataires sociaux dans les sociétés du groupe HERMÈS,
que 17 d'entre eux sont membres du conseil de gérance d'Emile Hermès SARL ou du conseil de
surveillance d'HERMÈS, soit au total 33 personnes parmi les demandeurs ;
qu'au sein de l'assemblée générale des associés commanditaires d'HERMÈS, les demandeurs votent de
manière convergente ; qu'en outre, ils déterminent en fait les décisions prises lors des assemblées
générales ; qu'à cet égard, les pourcentages que représentent en assemblée générale d'HERMÈS les votes
des membres du groupe familial en faveur des résolutions présentées ont, depuis 2007 au moins,
représenté plus de deux tiers des voix exprimées ;
que le projet de regroupement des participations du groupe familial dans la holding ne donnera lieu à
aucune modification de la composition des organes sociaux de la société HERMÈS ;
que les éléments fournis par les demandeurs montrent que les conditions dans lesquelles les membres du
groupe familial exercent leurs pouvoirs au sein d'HERMÈS sont demeurées stables dans le temps
participation consolidée de la famille, titres HERMÈS en dépôt chez Emile Hermès SARL, stabilité des
organes sociaux, présence importante de la famille au sein des organes sociaux d'HERMÈS, cette stabilité
devant s'apprécier nonobstant « l'évolution des générations » qui ne remet pas en cause pour autant ce
rôle familial ;
Considérant que, rapprochés et analysés de manière conjuguée, ces éléments constituent autant d'indices
concordants, procédant tant de réalités objectives que d'une communauté de comportement, qui
traduisent effectivement la mise en oeuvre par les membres du groupe familial d'une politique commune,
continue et réitérée, visàvis d'HERMÈS, dont ils déterminent les orientations stratégiques, notamment
par l'exercice des droits de vote des demandeurs et leur présence majoritaire au sein des organes sociaux
;
Que, contrairement à ce qu'affirment les actionnaires minoritaires, l'Autorité a relevé à juste titre que,
pour autant, ces éléments ne reposent pas sur les seuls liens de parenté entre les demandeurs, ni sur le
seul contrôle de l'associé commandité par ces derniers, et qu'ils sont largement antérieurs au contexte,
précédemment rappelé, dans lequel s'inscrivent les accords du 3 décembre 2010 et la demande de
dérogation déposée le 6 décembre 2010 ;
Que, dès lors, l'Autorité était en droit de conclure, sans être tenue d'exiger par surcroît la preuve d'un
accord formel et contraignant conclu entre les membres du groupe, que ceuxci agissent ensemble comme
un groupe familial de concert au sens des dispositions de l'article L. 233 10 du code de commerce pour la
mise en oeuvre de la même politique et qu'ils contrôlent ensemble la société HERMÈS ;
Considérant qu'au rebours de ce que soutiennent M. Repplinger et l'ADAM, le comportement et l'action,
dans la durée, des demandeurs à la dérogation à l'égard d'HERMÈS, suffisent à caractériser l'appartenance
à un groupe au sens de l'article 2349 du Règl. AMF, qui n'exige pas qu'un tel groupe, distinct de
l'ensemble des membres de la famille Hermès détenant une participation dans le capital de la société,
présente les caractéristiques mises en exergue par les requérants telles que, notamment, une
représentation complète et homogène des différentes branches de cette famille ainsi qu'une structuration
ou une révélation particulières ;
Qu'au surplus, c'est à tort que M. Repplinger critique la pertinence de la prise en compte du dépôt par les
demandeurs de leurs actions HERMÈS dans les caisses sociales de Emile Hermès SARL comme un indice de
la volonté des membres du groupe familial de diriger ensemble la société HERMÈS, dès lors qu'il est
constant que, comme l'a constaté l'AMF :
ce dépôt, librement consenti, a représenté plus de 50 % du capital et des droits de vote de façon
continue depuis l'introduction en bourse d'HERMÈS en 1993, le groupe familial ayant par ailleurs toujours
détenu plus de 50 % du capital et des droits de vote d'HERMÈS,
et qu'il est constant, par surcroît, qu'alors que les associés de la société Emile Hermès SARL, comme les
statuts de cette société les autorisaient pourtant à le faire, n'ont jamais manifesté le souhait de soustraire
leurs titres Hermès des caisses sociales de la société ;
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Qu'au demeurant, au regard de la mise en oeuvre par l'Autorité de la méthode du faisceau d'indices en vue
d'apprécier la réalité de l'existence préalable d'un contrôle familial qui ne sera pas modifié, il importe peu
que, pris isolément, certains des éléments retenus puissent, le cas échéant, être considérés comme ne
présentant pas un caractère suffisamment probant ;
Qu'il importe peu, également, que l'AMF ait antérieurement apposé son visa sur des notes d'informations
relatives à des programmes de rachat, dont la dernière a été mise en oeuvre par HERMÈS en 2005,
mentionnant l'absence de contrôle de la société, dès lors que, plus de cinq ans plus tard, le collège a été
saisi, cette foisci en application de l'article 2349 du Règlement général de l'Autorité des marchés
financiers, d'une demande distincte de dérogation fondée sur d'autres éléments de fait et de droit ;
Qu'à cet égard, il est constant que le contrôle de la gestion et de la direction de cette commandite par
actions, qui appartient à l'associé commandité statutairement détenue par le seul groupe familial Hermès,
ne sera pas modifié et qu'il en va de même concernant le contrôle du capital dès lors qu'à l'issue des
opérations de reclassement la holding détiendra 50,2 % du capital d'HERMÈS et au moins autant en droits
de vote et qu'elle bénéficiera d'un droit prioritaire portant sur les actions qui seront détenues par le groupe
familial Hermès et qui ne lui seront pas transférées, soit environ 12,6 % du capital ; que, non seulement,
la holding dont le capital sera détenu, directement et indirectement, par le groupe familial aura donc ainsi
le contrôle du capital de la société HERMÈS postérieurement au reclassement, mais encore que, comme l'a
constaté l'Autorité dans sa décision, le projet de regroupement des participations du groupe familial dans
la holding ne donnera lieu à aucune modification de la composition des organes sociaux de la société
HERMÈS ;
Et considérant que l'ADAM et M. Repplinger invoquent en vain l'irrégularité de la décision entreprise au
regard des principes généraux du droit boursier ;
Considérant que, s'il est vrai que l'article L. 6211 du code monétaire et financier précise que l'AMF a pour
mission de veiller à « l'information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés d'instruments
financiers », il n'en demeure pas moins que les principes dont se prévalent les requérants sont des «
principes directeurs des offres », édictés en vue des procédures d'offre publique par l'article 2311 du Règl.
AMF, qui énonce : « En vue d'un déroulement ordonné des opérations au mieux des intérêts des
investisseurs et du marché, toutes les personnes concernées par une offre doivent respecter le libre jeu
des offres et de leurs surenchères, d'égalité de traitement et d'information des détenteurs des titres des
personnes concernées par l'offre, de transparence et d'intégrité du marché et de loyauté dans les
transactions et la compétition » ;
Or considérant qu'en l'espèce, l'Autorité était saisie d'une demande de dérogation à l'obligation de dépôt
d'une telle offre, dont il vient précisément d'être démontré qu'elle répondait aux exigences fixées par
l'article 2349 du Règlement général de l'AMF touchant à l'existence d'une opération de reclassement,
entre personnes appartenant à un même groupe dans des circonstances où le contrôle, avéré, de la
société HERMÈS, n'a pas été modifié ;
Qu'en réalité, sous couvert de griefs touchant au nonrespect de certains principes du droit boursier, les
requérants formulent à nouveau à l'encontre de la décision de l'AMF des critiques, dont la pertinence n'a
pas été reconnue, sur l'absence de contrôle de concert des demandeurs ;
Qu'au demeurant, la décision critiquée n'est susceptible de porter atteinte, ni à l'égalité des actionnaires
de la société concernée, principe qui doit s'apprécier au regard d'une situation identique, laquelle n'est
précisément pas établie en l'espèce, dès lors que les demandeurs à la dérogation, membres d'un groupe
familial contrôlant de concert HERMES, ne se trouvent pas dans la même situation que M. Repplinger et
l'ADAM, ni aux principes précités de transparence, d'intégrité et de loyauté, dans la mesure où, en
l'espèce, l'Autorité n'était pas conduite à vérifier les conditions d'information du marché en période d'offre
publique ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les recours seront rejetés ;
Par ces motifs
Rejette la demande de communication de pièces formulée par M. Repplinger,
Rejette les recours de l'ADAM et de M. Repplinger,
Condamne l'ADAM et M. Repplinger aux dépens
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M. Remenieras, cons. ff de prés. de la chambre ; Mmes Tardif, Beaudonnet, cons. ; SCP Grappotte
Benetreau et PelitJumel, Me Geniteau, av.
Note
Curieux arrêt tout de même que cet arrêt de la cour de Paris du 15 septembre 2011 (1). Non pas
tellement parce qu'il se borne à reproduire la plupart des considérants qui avaient été adoptés les 6 et 7
janvier 2011 par l'AMF (2) au soutien de sa décision d'accorder aux cinquantedeux demandeurs (tous
membres de la famille Hermès) le bénéfice de la « dérogation » qu'ils sollicitaient sur le fondement de
l'article 2349, 7° du Règlement général de l'Autorité des marchés financiers (3) (encore que l'on peut
être d'accord avec l'autorité des marchés financiers sans se résoudre à pratiquer l'exercice du
copier/coller), mais parce que, sur le fondement d'un concept nouveau, qui serait celui du « concert de fait
» (donc du concert qui aurait existé « en fait » entre les demandeurs à la dérogation), il accepte de leur
accorder le bénéfice d'une dérogation alors que, dans le même temps, il est amené à sousentendre qu'ils
se seraient rendus coupables d'un certain nombre de violations de ce même Règlement général (défaut de
déclaration de l'action de concert, défaut de déclaration des multiples franchissements de seuils réalisés de
concert, etc.). En d'autres lieux, mais sous d'autres latitudes, ces mêmes manquements à l'obligation
d'information du marché ont entraîné, on s'en souvient, des sanctions plus sévères.
Au cas particulier, les demandeurs (cinquantedeux personnes au total, toutes membres de la « famille »
Hermès), représentant ensemble 62,8 % du capital social et 71,9 % des droits de vote de Hermès
International (une société en commandite par actions), avaient conclu, le 3 décembre 2010, sous condition
suspensive de l'obtention d'une dérogation à l'obligation d'avoir à déposer un projet d'offre publique sur les
titres de la SCA, un accord par lequel ils s'étaient engagés à (i) transférer une partie de leurs actions
Hermès International à une holding familiale appelée à détenir 50,2% du capital de la SCA et au moins
autant de droits de vote et à (ii) consentir à cette holding familiale (à créer) un droit prioritaire
d'acquisition sur les actions qui ne lui auraient pas été transférées (soit, environ, 12,6 % du capital). En
conséquence de cette opération, la holding franchirait à la hausse le seuil du tiers (aujourd'hui des trois
dixièmes) du capital et des droits de vote de Hermès International et était donc en position de devoir
déposer un projet d'offre publique obligatoire portant sur tous les titres de capital ou donnant accès au
capital de la SCA (art. 2342 du RG AMF). Les demandeurs sollicitaient donc de l'AMF le bénéfice d'une
dérogation à cette obligation sur le fondement de l'article 2349, 7° du RG AMF qui prévoit la possibilité
d'accorder une telle dérogation en cas « d'opération de reclassement, ou s'analysant comme un
reclassement, entre sociétés ou personnes appartenant à un même groupe » (4).
La cour de Paris, reprenant un à un les arguments avancés par l'Autorité des marchés financiers, qui avait,
dans la décision précitée, accordé aux cinquantedeux demandeurs le bénéfice de la dérogation sollicitée,
confirme la décision de l'AMF motif tiré qu'il aurait existé entre les membres de la famille Hermès (ou, plus
exactement, les cinquantedeux demandeurs à la dérogation) une sorte de « concert de fait » (à défaut de
tout accord contraignant qui en serait le socle) (I) justifiant, à lui seul, que la dérogation puisse leur être
accordée puisque le projet de constitution du holding n'entraînerait pas, de fait, le moindre changement
dans le contrôle de la commandite par actions (II)
I. Où il est établi que le concert « de fait » existerait
Comme l'Autorité des marchés financiers, en son temps, la cour de Paris accepte d'entrer dans le débat qui
consiste à savoir si la société en commandite par actions se prête, à raison de sa forme et, plus encore, de
son organisation, à un changement de contrôle au sens du droit des offres publiques. Et, comme l'Autorité
des marchés financiers, elle répond que « oui » alors qu'il eût été tout aussi convaincant de répondre à
cette première question par la négative... et de clore par ce biais le débat.
A. L'offre publique obligatoire n'est pas exclue du droit applicable à la société en commandite
par actions
Une première façon de penser serait de dire que, quoiqu'il arrive du côté des actions, et donc des
actionnaires commanditaires, aucun changement de contrôle ne peut en résulter dans une commandite par
actions car le contrôle serait toujours, dans ce type de société, entre les mains des associés commandités
(de la SARL Emile Hermès, au cas particulier), non entre celles des actionnaires commanditaires (5). Et,
de fait, les pouvoirs détenus par l'associé commandité (surtout lorsqu'il est seul) dans une commandite par
actions sont à ce point considérables qu'il est assez tentant d'en déduire qu'il contrôle seul la société,
au sens de l'article L. 2333 du code de commerce, parce qu'il maîtrise seul la plupart des décisions
collectives. C'est ainsi qu'aucune décision collective (ou peu s'en faut) ne peut être adoptée, dans une
société en commandite par actions, seraitelle modificative des statuts, sans le consentement de l'associé
commandité (6) (sauf le droit pour les commanditaires de procéder, seuls, à la désignation des membres
du conseil de surveillance (7), lequel n'est toutefois, comme son nom l'indique, qu'un organe chargé du
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contrôle de la gestion de la commandite, non de sa direction). Au résultat, quelle que soit la quotité de
capital (ou de droits de vote) dont pourrait disposer un actionnaire commanditaire, agissant seul ou de
concert avec d'autres commanditaires, il ne détiendra jamais le droit de déterminer, seul ou de concert, le
sens des décisions collectives au sens de l'article L. 2333, I, II ou III du code de commerce (sauf le droit
qu'il pourrait avoir, selon les circonstances, de nommer seul ou de révoquer seul, ou en agissant de
concert avec d'autres, la « majorité des membres » du conseil de surveillance au sens de l'article L. 2333,
I, 4° du même code (8)). Mieux, même, le ou les associés commandités peuvent s'arroger le droit de
nommer, seul(s), le ou les gérants de la société puisque la disposition qui voudrait qu'il soit nommé par les
deux catégories d'associés n'est pas d'ordre public (art. L. 2262, al. 2) et qu'il est assez fréquent en
pratique qu'une clause des statuts réserve ce droit (comme c'était le cas en l'espèce) aux associés
commandités ; lesquels contrôlent alors la société, au moins au sens de l'article L. 2233, I, 4° (préc.).
S'arrêter là, toutefois, eût été à la fois politiquement très incorrect (autant dire en effet que les sociétés en
commandite par actions ne seraient pas concernées par le droit des offres publiques, donc que leurs titres
ne devraient pas être admis aux négociations sur un marché réglementé) et juridiquement inexact puisque
la SCA se prête, tout au contraire, à une figure originale de « cocontrôle » (qui n'est toutefois pas celle du
contrôle conjoint) en ce sens (et c'est l'histoire éternellement recommencée du verre « à moitié plein, à
moitié vide ») que, quels que soient les pouvoirs importants dont pourrait disposer un associé commandité
dans une commandite par actions, il n'en reste pas moins, ainsi que le relève la cour de Paris, que les
commanditaires ont, eux aussi, des pouvoirs «importants » : celui de faire obstacle à l'adoption d'une
décision collective, par exemple (9) ; ou celui et bien sûr de pouvoir nommer, seuls, les membres du
conseil de surveillance de la société (soit une forme de contrôle au sens de l'article L. 2333, I, 4°,
précité).
C'est donc à juste titre que, après que l'AMF l'ait ellemême relevé, la cour de Paris choisit d'enfoncer le
clou en soulignant, comme l'on s'y attendait, que les commanditaires disposent, eux aussi, de pouvoirs «
importants » dans une commandite par actions (v. supra) ; que le contrôle, au sens de l'article L. 2333 du
code de commerce, ne se réduit pas au pouvoir de nommer les dirigeants ou la majorité des dirigeants de
la société (art. L. 2333, 4°) mais s'exprime également, et surtout, en termes de capital et de nombre de
droits de vote détenus au sein des assemblées (seraientelles celles des actionnaires commanditaires
(10)) ; ou que, surtout, les articles L. 4331 du code monétaire et financier et 2342 du RG AMF imposent
de déposer un projet d'offre publique obligatoire en cas de franchissement du seuil de 30 % (en capital ou
en droits de vote) ; ce qui, évidemment, ne peut que concerner aussi les actionnaires commanditaires
d'une société en commandite par actions, peu important l'imperfection (ou l'inadaptation) de l'article L.
2333 à cette forme de société.
Aussi la cour de Paris finitelle par poser, comme l'avait fait l'AMF avant elle, qu'il n'est « ni contesté, ni
contestable que la réglementation sur les offres publiques est pleinement applicable aux sociétés en
commandite par actions et que, dans ce cadre, il importe [désormais] de rechercher si, au regard des
exigences fixées par l'article 2349 du règlement général de l'AMF, les demandeurs à la dérogation
[peuvent] être effectivement considérés comme constituant un groupe d'actionnaires familiaux, associés
commanditaires et contrôlant le capital de cette société ».
B. La preuve que le groupe familial contrôlait le capital de la société en commandite par actions
Hermès International aurait été brillamment rapportée
Mais c'est précisément dans le rapport de cette preuve (que le groupe familial constitué par les cinquante
deux demandeurs contrôlerait le capital de la commandite par actions), dont l'objet est précis, et
que la Cour s'est imposée ellemême, après que l'AMF l'eût fait, que l'arrêt de la cour de Paris n'est pas
très convaincant.
De prime abord, il y avait bien en effet, du fait du projet de holding, changement de contrôle de la société
(ce dernier apprécié dans la personne des actionnaires commanditaires) puisque, tant la communication
financière émanée de Hermès International que les déclarations de franchissement de seuils souscrites par
divers membres de la famille Hermès indiquaient que Hermès « n'était pas contrôlée » (en capital ou en
droits de vote) ou qu'il n'existait « aucun concert » entre les membres de la famille susceptible de faire
apparaître le moindre contrôle conjoint (11). Et, d'ailleurs, si la constitution du holding ne devait « rien
changer » (alors qu'il a vocation, lui, à recevoir plus de la moitié des droits de vote de la SCA), on se
demande pourquoi l'idée même de le faire naître a pu germer un jour dans l'esprit d'une partie des
membres de la famille Hermès?
Quoiqu'il en soit, de même que l'Autorité des marchés financiers avait pu estimer, en son temps, que
l'absence de toute déclaration d'action de concert ne faisait pas obstacle à ce qu'un tel concert existât « en
fait », la cour de Paris va s'efforcer de le faire apparaître, elle aussi (12), en recourant à la technique du
« faisceau d'indices ». Compte tenu, toutefois, de l'objet de la preuve qu'elle s'est ellemême imposée
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de rapporter, nombre de ces indices ne sont pas pertinents, en ce qu'ils ne tendent pas à démontrer que le
« groupe familial », constitué par les cinquantedeux demandeurs, contrôlait le capital de la
commandite par actions.
Observons!
1°/ Une première catégorie d'indices tendent en effet à démontrer que « le groupe familial » aurait,
en fait, contrôlé... la SARL Emile Hermès, seul associé commandité de la commandite par actions.
A titre d'exemple, la Cour relève, après que l'AMF l'ait fait ellemême, que :
Les demandeurs (cinquantedeux au total, soit une partie significative, mais néanmoins minoritaire, de la
famille Hermès) « font tous partie d'un même groupe familial (ce qui est assez peu contestable) et sont
tous associés... de la SARL».
Qu'ils auraient exercé « ensemble » les pouvoirs dévolus à l'associé commandité ; ce qui n'est pas, au
fond, tout à fait pertinent, ni tout à fait exact, car les pouvoirs dévolus à l'associé commandité sont dictés
en l'espèce par les décisions du conseil de gérance de la SARL, dont tous les demandeurs ne sont pas
membres, quoiqu'il soit vrai que les membres du Conseil soient désignés à la majorité des associés de la
SARL.
Que onze des demandeurs (sur les cinquantedeux au total) sont membres du conseil de gérance de la
SARL.
Autrement dit, la Cour s'efforce de démontrer que les actionnaires commanditaires (par ailleurs associés
de la SARL Emile Hermès et majoritaires en capital dans la commandite par actions) contrôleraient...
l'associé commandité, soit la SARL Emile Hermès.
Pour autant, lorsqu'on s'assigne pour objectif premier de démontrer qu'un hypothétique « groupe familial »
(apparu seulement lors de la conclusion de l'accord portant projet de constituer le holding familial)
contrôlerait « en capital » la SCA Hermès International (donc indépendamment de l'influence que peut y
exercer l'associé commandité), la démonstration paraît courte ; car ce n'est pas parce que certains des
actionnaires commanditaires contrôleraient l'associé commandité (à supposer que cela fût exact) qu'ils
contrôleraient « en capital » la société en commandite par actions.
L'AMF, en son temps, avait perçu la faille du raisonnement en relevant que ces « premiers » indices
étaient, somme toute, assez peu convaincants, car le problème (tel qu'elle se l'était ellemême posé, et tel
que se le pose la cour d'appel de Paris) n'était pas de savoir si les commanditaires contrôlaient on non
l'associé commandité (13) ; mais de vérifier que les commanditaires (demandeurs à la dérogation)
contrôlaient conjointement le capital et les droits de vote de la SCA Hermès International dans ses
assemblées générales de commanditaires ; en vertu de prime abord, du moins d'un accord «
contraignant » qui aurait pu les lier.
L'AMF, autant que la cour de Paris, le reconnaissait clairement lorsqu'elle notait, en passant en revue
d'autres indices, présupposés plus pertinents, que « ces circonstances, qui ne reposent pas sur les seuls
liens de parenté entre les demandeurs, ni sur le seul contrôle de l'associé commandité par ces derniers,
traduisent effectivement la mise en oeuvre d'une politique commune » visàvis de Hermès international
(14).
2°/ Les critères pertinents se nicheraient donc ailleurs. A l'examen, toutefois, ils ne se révèlent pas
beaucoup plus convaincants que les précédents.
Selon la Cour, ils devraient être recherchés dans les rapports directs que le « groupe familial », venu d'on
ne sait où (15), entretiendrait, pris en sa qualité de « commanditaire », avec la SCA ellemême. C'est
ainsi qu'elle relève, après que l'AMF l'eût fait ellemême, que :
• Le « groupe familial » détiendrait à ce jour 62,8 % du capital social et 71,9 % des droits de vote de la
commandite par actions. Ce qui, en, soi, n'est pas de nature à révéler, ni l'existence d'un groupe familial
fortement structuré sinon au moment même où il arrête le projet de constitution du holding , ni
l'existence d'un accord concertant qui, préexistant à ce projet, aurait été le fondement d'une action de
concert et d'un contrôle conjoint exercé par ce groupe sur le capital et/ou sur les droits de vote de la
commandite par actions.
• Que les actions appartenant à ce « groupe » auraient été « déposées » dans les caisses de la SARL, ce
qui laisserait clairement entrevoir, au travers de cet acte « librement consenti », l'indice « fort » d'une
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volonté (de tous les actionnaires commanditaires déposants) de « diriger ensemble la société » (16).
Avouons, au terme d'une réflexion passablement austère, qu'on ne voit pas vraiment en quoi cet acte de «
dépôt », « librement consenti », constituerait l'indice de la moindre volonté de s‘accorder, enfin, sur les
modalités d'exercice des droits de vote au sein des assemblées (des associés commanditaires) de la
commandite par actions. La cour le reconnaît d'ailleurs lorsqu'elle relève, après que l'AMF l'eût dit, que ce
« dépôt » laissait chaque déposant libre d'exercer ses droits de vote et n'affectait aucunement la propriété
des actions. Le vrai est que le « dépôt » n'est aujourd'hui qu'une façon de parler, depuis la
dématérialisation des valeurs mobilières ; et n'était, en l'espèce, qu'une façon d'établir que chaque
commanditaire détenait effectivement le nombre d'actions requis (9 000 pour recevoir une part) pour
devenir associé de la SARL (17). Une nouvelle fois, c'est donc par le truchement de la SARL (la volonté
d'en faire partie, parce qu'elle est l'associée commanditée de la société en commandite), que la cour en
déduit qu'il y aurait accord portant sur « l'exercice des droits de vote » des actionnaires commanditaires
dans la commandite par actions (au sens de l'article L. 23310 du code de commerce) ; ce qui est loin
d'être établi.
• Que ces mêmes actions déposées ont toujours représenté plus de 50 % du capital de la commandite par
actions (et 57,25 % au 30 décembre 2010) ; ce qui, en soi, ne veut pas dire grandchose, si l'on agrée
l'idée que le « dépôt » n'est aucunement révélateur de la moindre action de concert, au sens de l'article L.
23310, n'étant qu'une simple clé d'accès au capital de la SARL, par justification de la propriété du nombre
de titres requis par les statuts de cette dernière.
Que dire, alors, des autres indices relevés par la cour de Paris, parmi lesquels figurent, pèle mêle : (i) le
fait que les membres du conseil de surveillance d'Hermès International, lequel « représente les associés
commanditaires », sont majoritairement issus de la famille Hermès (six sur dix) ; circonstance qui relève
uniquement de la constatation qu'il existe un lien de parenté entre les membres (ou la majorité des
membres) d'un organe chargé, au demeurant, non de déterminer la politique sociale, mais du contrôle de
la gestion ; ou que (ii) les demandeurs (ou tout du moins trentetrois d'entre eux, représentant ensemble
42 % du capital et 47 % des droits de vote de Hermès International), sont « impliqués dans la gestion »
de la société en commandite ou du groupe qu'elle chapeaute, motif tiré qu'ils y exerceraient un certain
nombre de mandats sociaux ou y travailleraient en qualité de salariés ; ou bien encore (iii) qu'un certain
nombre d'entre eux (dixsept sur cinquantedeux, sembletil) seraient soit membres encore du conseil
de gérance de la... SARL, soit membres du conseil de surveillance de la société en commandite ; ou que,
enfin, (iv) la constitution du holding « n'entraînera pas de changement » dans la composition des organes
de cette société. Tous ces éléments, en effet, attestent qu'une partie des demandeurs est effectivement
impliquée dans la gestion de la société, qu'ils y détiennent une fraction importante du capital social, et qu'il
existe entre eux des « liens de famille » ; mais aucun, en revanche, ne laisse deviner ni vaguement
entrevoir qu'ils auraient conclu un accord autre que celui portant promesse de constitution du holding
en vue de mener ensemble une politique commune visàvis de la société (18).
Reste, toutefois, qu'un dernier élément est relevé par la Cour, comme il l'avait été par l'AMF, peutêtre
plus déterminant que les précédents (19), et qui tiendrait au fait que les demandeurs au bénéfice de la
dérogation votaient de manière convergente dans les assemblées générales de Hermès International (où
ils représentaient plus des deuxtiers des voix), déterminant ainsi en fait ses décisions, depuis au moins
2007 (avait ajouté l'AMF).
Voilà, enfin, une référence précise aux dispositions de l'article L. 2333 du code de commerce qui dispose,
en effet, qu'une société (entendons une ou plusieurs personnes) est considérée comme en contrôlant une
autre lorsque (I, 3°) « elle détermine en fait, par les droits de vote dont elles dispose, les décisions dans
les assemblées générales de cette société » (20).
Certes ! Mais à y regarder de plus près, il est douteux que cet élément soit véritablement plus pertinent
que les autres, pour au moins trois raisons.
La première est que les décisions adoptées dans les assemblées générales de Hermès International
semblent l'être, depuis plusieurs années, à la majorité (extraordinaire !) de... 98 %, sans pour autant que
l'on puisse en déduire que les commanditaires extérieurs à la famille Hermès agiraient de concert avec elle
(21).
La seconde est que cette « convergence » des votes peut aussi résulter d'un simple parallélisme de
comportements (22) dont on sait qu'il n'est en principe pas le signe d'une action de concert, sauf s'il
résulte évidemment d'un accord préalable dont il n'est plus alors que la simple expression.
La troisième est que, lorsqu'on évoque la notion de « contrôle de fait » (au sens de l'article L. 2333, I, 3°,
préc.), elle paraît beaucoup plus adaptée à l'hypothèse d'un contrôle exclusif (que détiendrait une
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personne agissant seule) qu'à celle d'un contrôle exercé conjointement par deux ou par plusieurs
personnes. Autrement dit, autant, lorsqu'on détient le contrôle exclusif d'une société, ce contrôle peut
s'induire du fait que l'on détermine seul, en fait, les décisions qui sont prises en assemblée générale (c'est
là le sens de l'article L. 2333, I, 3°, précité), autant, lorsqu'il y a contrôle conjoint reposant sur un concert
« de fait », fautil établir ce concert ; lequel suppose, nécessairement, l'existence d'un « accord » et,
normalement, d'un accord « contraignant » (23), conclu en vue d'acquérir, de céder ou d'exercer des
droits de vote pour mettre en oeuvre une politique commune visàvis de la société ou aujourd'hui (24)
d'en prendre le contrôle (C. com., art. L. 23310). Autrement dit, encore, il n'y a pas de contrôle conjoint
sans concert (comme le dit l'article L. 2333, III du code de commerce (25)) ; et pas de concert sans
accord préalable, qui plus est « contraignant » (26).
Au cas particulier, on peut, en conséquence, s'interroger encore sur l'existence d'un tel « accord »
qu'auraient conclu les membres du « groupe familial » relativement à l'exercice de leurs droits de vote
dans la commandite par actions. Qu'il y ait une certaine « entente » entre les associés commanditaires
(membres, du moins, de la SARL et de la famille Hermès) et/ou entre les cinquantedeux demandeurs à la
dérogation pour contrôler les actes de l'associé commandité, est une chose (et encore, c'est la majorité en
assemblée ou au conseil de gérance de la SARL qui décide de la conduite à adopter par le gérant de la
commandite). Mais qu'il y ait, de ce fait, accord conclu entre les associés commanditaires relativement à
l'exercice de leurs droits de vote dans Hermès international est une autre question. Laquelle reste en
suspens, même à lire et relire l'arrêt de la cour de Paris. Autrement dit, on a le sentiment diffus et
perturbant que ni l'AMF, en son temps, ni la cour de Paris, aujourd'hui, ne parviennent à répondre à la
question qu'elles s'étaient pourtant ellesmêmes posée : savoir si les commanditaires contrôlaient
conjointement, ou non, le capital de la commandite par actions. Malgré les détours empruntés,
l'impression finalement est que le projet de constitution du holding ne changera pas grandchose à la
situation préexistante ; parce que, si contrôle il y a, dans une commandite par actions, il est entre les
mains de l'associé commandité ; non entre celles des associés commanditaires.
II. Où il est établi que « moins par moins fait plus »
Le plus curieux, dans la décision commentée, est qu'il y est implicitement acté que, tant les associés
commanditaires que la société en commandite par actions, ont manifestement manqué à leur obligation
d'informer le marché de ce que la commandite était, au vrai, contrôlée conjointement, de concert, par
certains membres de la famille Hermès (27) ; et ce depuis au moins un certain temps (qui n'est pas
précisé) (A). Au résultat, le holding (qui n'est pas encore constitué au jour où ces lignes sont écrites) n'en
obtient pas moins le bénéfice d'une dérogation à l'obligation d'avoir à déposer un projet d'offre publique,
ce qui appelle tout de même un certain nombre d'observations (B).
A. Les manquements sousjacents..
De prime abord, il y avait, en effet, du fait du projet de constitution du holding, changement de contrôle de
la société (ce dernier apprécié dans la personne des actionnaires commanditaires) puisque, tant la
communication financière émanée de Hermès International que les déclarations de franchissement de
seuils souscrites par divers membres de la famille Hermès indiquaient que Hermès « n'était pas contrôlée
» (en capital ou en droits de vote) ou qu'il n'existait « aucun concert » entre les membres de la famille
susceptible de faire apparaître le moindre contrôle conjoint.
Le fait que la société ait fait savoir au marché qu'elle était organisée sous la forme d'une «commandite par
actions », ne supplée pas, contrairement à ce que la cour de Paris laisse entendre dans l'un de ses
attendus, les manquements dont les commanditaires et la société ellemême se sont rendus coupables
visàvis du marché : manquement à l'obligation d'avoir à déclarer qu'ils agissaient de concert (ce qu'ils
apprennent, sans doute) ; mais manquement, également, à l'obligation de déclarer qu'ils ont franchi
ensemble certains seuils (presque tous) de concert, y compris donc celui de 30 %.
Encore, si le concert « de fait » datait de l'introduction en bourse d'Hermès International (en 1993), les
choses seraientelles peutêtre un peu moins graves ; mais comme personne ne le sait, ou ne le dit
clairement (même pas la cour d'appel), on est amené à constater que son arrêt porte, en luimême,
reconnaissance de ces manquements.
Comme le disait l'AMF en son temps (décision précitée), l'absence de toute déclaration d'action de concert
ne fait (sans doute) pas obstacle à ce qu'un concert existe réellement ; mais il n'empêche que cette
absence constitue un manquement, dont on observe qu'il n'interdit pas, cependant, l'octroi de la
dérogation.
B. ... N'interdisent aucunement d'accéder au bénéfice de la dérogation
Le moins que l'on puisse dire est que la situation est curieuse et, apparemment, inédite.
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On se souvient pourtant que, dans l'affaire Gecina, le projet d'OPRA que cette société se proposait de
lancer sur ses titres fût retoqué par l'AMF motif tiré de ce que sa réalisation « amènerait nécessairement
MM Rivero et Soler, agissant de concert (visàvis de Gecina), en situation de dépôt obligatoire d'un projet
d'offre publique visant les actions Gecina » (par franchissement du seuil du tiers (28)). En foi de quoi,
elle estima que les (autres) actionnaires de Gecina « ne disposaient pas, en l'état, de l'information
cohérente et complète » à laquelle ils avaient droit en cas de dépôt d'une offre publique (savoir :
l'existence du concert), et conclut donc à l'absence de conformité du projet d'offre (29).
Dans la figure « Hermès », la situation est inverse. L'information due au marché est tout aussi déficiente
que dans l'affaire Gecina (quoique les concertistes, dans « l'affaire Hermès », n'aient sans doute jamais eu
la moindre conscience qu'ils agissaient de concert et contrôlaient, de ce fait, conjointement Hermès
International) ; mais il ne s'agissait pas de soumettre au visa de l'AMF un projet d'offre publique (en
considération d'une information du marché jugée insuffisante) mais, au contraire, de tenter de ne pas le
faire. Autrement dit, ce n'est pas l'information due au marché « en cas d'offre publique » qui était, ici, en
cause ; mais, à l'inverse, l'information qu'il aurait dû avoir avant que la dérogation ne soit accordée.
Dans ces conditions, l'on est contraint, au moins juridiquement, de ne pas brocarder la solution retenue
par la cour de Paris (sur ce point), pour au moins deux raisons.
1°/ La première est que sa décision (toutes conditions par ailleurs réunies, comme l'aiment à le dire les
économistes) demeure assez logique : si la constitution de la holding familiale n'entraînait pas « vraiment
» un changement de contrôle (ce qui est discutable), il n'est pas aberrant que, quels que soient les
manquements aujourd'hui imputables à la « famille Hermès », le bénéfice de la dérogation puisse lui être
accordé. Après tout, si l'on quitte les rives, quelque peu dogmatiques, du droit des sociétés et du droit
financier, chacun pensait, sinon savait, que la société Hermès International était « aux mains » de la
famille Hermès, y compris, et bien sûr, l'ADAM ou le président de LVMH. Juridiquement, bien sûr, ces
conclusions ne valent pas l'attention qu'on pourrait leur porter, mais elles ont c'est certain guider la
plume de l'AMF, puis celle, assez servile, de la cour de Paris.
2°/ La seconde, un peu plus juridique, est qu'un manquement connaît logiquement SA sanction, laquelle
est édictée soit par le code monétaire et financier, soit par le Règlement général de l'AMF. Or le
manquement à l'obligation de déclarer un franchissement de seuil, réalisé seul ou de concert, comme celui
qui consiste à ne pas déclarer que l'on agit de concert (qu'on le sache ou qu'on ne le sache pas), consiste
dans la privation des droits de vote attachés aux actions « excédant la fraction qui aurait dû être déclarée
» (C. mon. fin., art. L. 23314), outre les amendes par ailleurs encourues. Autrement dit, la sanction ne
saurait consister dans l'impossibilité d'accéder au bénéfice d'une dérogation, quelle que choquante que la
solution puisse paraître.
Reste que « moins par moins » (deux manquements, a minima) finit donc par faire « plus » (l'accès au
bénéfice de la dérogation) ; ce qui n'est pas, on l'avouera, pleinement satisfaisant.
Mots clés :
MARCHE FINANCIER * Offre publique d'achat * Procédure obligatoire * Dérogation * Hermès * Concert
de fait
(1) Dalloz Actualités, 20 sept. 2011, obs. X. Delpech ; D. 2011. 2275, obs. X. Delpech ; Bull. Joly 2011,
§ 462, p 882, note D. Schmidt ; Bull. Joly Bourse déc. 2011, note S. Torck, à paraître.
(2) Décisions AMF, n° 211C0008 du 6 janv. 2011 et n° 211C0024 du 7 janv. 2001, Hermès international,
abondamment commentées : Rev. sociétés 2011. 364, note F. Martin Laprade ; RD banc. fin. 2001,
Comm. n° 69, obs. D. Bompoint ; Bull. Joly 2011, p 201, n° 115, note A. Couret ; Bull. Joly Bourse mai
2011, p 326, n° 148, note S. Torck ; Dr. sociétés 2011, Comm. n° 115, obs. R. Mortier ; JCP G 2011. 159,
note T. Brocas.
(3) Qui dispose que l'AMF peut accorder une dérogation à l'obligation d'avoir à déposer un projet d'offre
publique en cas (7°) d'« opération de reclassement, ou s'analysant comme un reclassement, entre sociétés
ou personnes appartenant à un même groupe ». Or l'on sait que le « groupe », au sens de cet article, peut
recouvrir à la fois un groupe de sociétés ou un « groupe familial » : V., pour un précédent, Paris, 19 mars
2002, D. 2002. 1678 , obs. M. Boizard ; JCP E 2002, n° 26, p 1100, notre A. Viandier ; RD banc. fin.
https://www-dalloz-fr.ezproxy.univ-paris1.fr/documentation/Document?id=REVSOC/CHRON/2011/0191&ctxt=0_YSR0MT0ib3JpZW50YXRpb25zIHN0cmF0w… 17/20
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2002, n° 121, obs. A. Couret ; Dr. sociétés 2002, n° 162, obs. Th. Bonneau ; Banque et Droit marsavr.
2002, 33, obs. H. De Vauplane et J.J. Daigre.
(4) V. note 3.
(5) Au cas particulier, la société en commandite par actions Hermès International a pour seul associé
commandité une SARL, la SARL Emile Hermès. Seuls les descendants d'Emile Hermès et de son épouse
(alors que la famille Hermès comporte trois branches) ont qualité pour devenir associés de la SARL, sous
condition qu'ils justifient de la propriété d'un certain nombre d'actions de la commandite (9 000 actions
donnant droit à une part dans la SARL). Le gérant de la SARL est nommé par le commandité. Ses décisions
sont, au vrai, le reflet de celles qui sont préalablement adoptées par un « conseil de gérance » institué
dans la SARL et composé d'un certain nombre d'associés de la SARL, nommés par l'assemblée.
(6) C. com., art. L. 22611, pour la modification des statuts. C. com., art. L. 2216 (relatif aux SNC, mais
applicable dans les commandites pour ce qui est des décisions relevant de la compétence, là des associés
en nom, ici des associés commandités). Au résultat, la plupart des décisions collectives requièrent, dans
une commandite par actions, la double approbation des associés commanditaires, d'une part, et des
associés commandités, de l'autre.
(7) C. com., art. L. 2264.
(8) Où il est dit qu'une société est réputée en contrôler une autre « lorsqu'elle est associée ou actionnaire
de cette société et dispose du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes
d'administration, de direction ou de surveillance de cette société ».
(9) En conséquence de la règle qui requiert, en principe, que les décisions collectives soient adoptées à la
fois par les commanditaires et les commandités.
(10) V., dernièrement, Com. 15 mars 2011, Bull. Joly 2011, p. 388, n° 187, note D. Schmidt, d'où il
ressort qu'une action concertée au niveau du conseil d'administration de la société ne préjuge pas
nécessairement d'un accord conclu en vue de déterminer les décisions de ses assemblées générales.
(11) Ce que la cour de Paris relève évidemment dans l'un de ses attendus.
(12) Elle note à cet égard que malgré l'absence de concert déclaré, il n'en reste pas moins que « les
affirmations formulées par les demandeurs à la dérogation au soutien de leur requête [...] suivant
lesquelles « l'existence d'un groupe familial est incontestable et a toujours été de notoriété publique » ne
sont pas pour autant dénuées de toute portée ».
(13) Car, après tout, il est bien évident que les associés d'une SARL « la contrôlent ». Une autre question
serait de savoir qui la contrôle majoritairement en vertu d'un accord.
(14) Décision AMF, préc. ; le même raisonnement est emprunté par la cour de Paris puisqu'elle note, au
final, que les indices qu'elle a répertoriés et qui étayent sa conclusion (selon laquelle le « groupe familial »
existerait et que ses membres « [mettraient] en oeuvre une politique commune visàvis d'Hermès, dont
ils [détermineraient] les orientations stratégiques»), « ne reposent pas sur les seuls liens de parenté entre
les demandeurs, ni sur le seul contrôle de l'associé commandité par ces derniers ».
(15) Que le « groupe familial », formé des cinquantedeux demandeurs, soit apparu le 3 décembre 2010
(jour de la conclusion de l'accord portant promesse de constitution du holding) est évidemment assez
peu contestable, comme l'est d'ailleurs le fait que cet accord constituait un concert au sens de l'article L.
23310, puisqu'il était conclu « en vue de céder des droits de vote ». Il est moins évident qu'il existait
antérieurement, encore que la cour de Paris affirme le contraire en relevant que les indices (qu'elle jugera
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pertinents) seraient « largement antérieurs au contexte, précédemment rappelé, dans lequel s'inscrivent
les accords du 3 décembre 2010 et la demande de dérogation déposée le 6 décembre 2010 ».
(16) Ainsi que le relève D. Schmidt, note préc. (p. 893), cette circonstance (du « dépôt de titres dans les
caisses sociales de la SARL ») est évoquée à trois reprises par la cour de Paris ; signe que l'indice est, pour
elle, important.
(17) V. H. Le Nabasque, Du dépôt de titres « dans les caisses sociales » dans ses rapports avec l'action de
concert, RD banc. fin. 2011, « repère » n° 3.
(18) La cour, à cet égard, a beau jeu de relever que lorsque l'on met en oeuvre la technique du « faisceau
d'indices », il n'est pas nécessaire que chacun de ces indices soit, à lui seul, pertinent, car c'est «
rapprochés et analysés de manière conjuguée » qu'ils finissent quelquefois par emporter la conviction.
Mais, quand aucun n'est vraiment pertinent, on se demande comment, « appréciés de manière conjuguée
», ils peuvent asseoir une conclusion.
(19) En sens, D. Schmidt, note préc., p 893 (2, a).
(20) Curieusement, l'art. L. 2333 C. com. n'est jamais visé par la cour de Paris (il ne l'avait pas été non
plus par l'AMF). En revanche, les références à l'existence d'un « accord concerté », donc d'un contrôle
conjoint (au sens de l'art. L. 2333, III), abondent dans la décision.
(21) La circonstance est relevée par D. Schmidt, note préc., p 893, note 20.
(22) Comme il est assez probable en l'espèce.
(23) L'exigence n'est pas au texte de l'art. L 23310, mais la doctrine et la jurisprudence s'accordent sur
sa nécessité, car on ne voit pas qu'un accord qui n'obligerait à rien, ou porterait de simples obligations «
morales », puisse constituer une action de concert : V., en ce sens, en doctrine, A. Viandier, OPA, OPE et
autres offres publiques, Ed. Fr. Lefebvre, 2010, n° 1431 s., ou encore les auteurs du Mémento Sociétés
commerciales, Fr. Lefebvre, 2012, n° 64 173 ; et, en jurisprudence, Paris, 24 juin 1991, Rev. sociétés
1992. 70, note J.Y. Martin et D. Carreau ; RTD civ. 1992. 755, obs. J. Mestre ; RTD com. 1992. 832,
obs. Y. Reinhard ; Paris 24 juin 2008, Bull. Joly Bourse 2008, p 389, obs. B. Zabala ; T. com. Nîmes, 18
février 1992 (pour un protocole portant de simples obligations morales), Bull. Joly 1992, p. 536, note P. Le
Cannu. Comp., toutefois, posant que l'accord peut ne pas être constaté par écrit (ce qui est exact) et qu'il
n'aurait nul besoin d'être contraignant (ce qui ne convainc pas), Paris, 2 août 2008, RJDA 6/08, n° 676.
(24) Depuis la loi n° 20101249 du 22 oct. 2010 (art. 48).
(25) Art. L. 233, III : « pour l'application des mêmes sections du présent chapitre, deux ou plusieurs
personnes agissant de concert sont considérées comme en contrôlant conjointement une autre
lorsqu'elles déterminent en fait les décisions prises en assemblée générale ».
(26) Cette circonstance est négligée par la cour de Paris qui souligne, au contraire, que l'AMF n'était pas «
tenue d'exiger la preuve d'un accord formel et contraignant conclu entre les membres du groupe » (?) ; «
accord » que les demandeurs ne disaient pas, d'ailleurs, avoir jamais conclu. On peut s'étonner de la
démarche, car le seul moyen d'obtenir le bénéfice de la dérogation (sur le fondement de l'art. 2349, 7° du
RG AMF invoqué en l'espèce ou sur celui de l'art. 23496° existence d'un concert majoritaire
préexistant ) est tout de même de passer par la case préalable qui veut que la constitution du holding ne
« change[rait] rien » aux conditions d'exercice du contrôle dans la commandite par actions. Or, si la
situation reste identique, c'est que nécessairement un contrôle conjoint résultant d'une action de
concert préexistait au projet de constitution du holding : soit la nécessité d'établir l'existence de « l'accord
» qu'évoque l'art. L. 23310, I C. com. Mais il est vrai, aussi, que l'AMF semble aujourd'hui estimer de
plus en plus clairement que l'absence de tout « accord conclu » ne constitue pas forcément un obstacle à
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la caractérisation d'une action de concert : V., en dernier lieu, Décis. AMF n° 211C0028, 10 janv. 2011,
Union Technologies Informatique Group.
(27) Telle est, effectivement, la conclusion de la cour de Paris lorsqu'elle relève que « dès lors, l'autorité
des marchés financiers était en droit de conclure, sans être tenue d'exiger par surcroît la preuve d'un
accord formel et contraignant conclu entre les membres du groupe (sic) que ceuxci agissent ensemble
comme un groupe familial de concert au sens des dispositions de l'article L 23310 du code de
commerce pour la mise en oeuvre de la même politique et qu'ils contrôlent ensemble la société
Hermès ».
(28) La seconde offre devait permettre, en effet, aux groupes Rivero et Soler de détenir ensemble environ
42,7 % du capital et des droits de vote de Gécina.
(29) AMF, décis. n° 207C2792 du 13 déc. 2007.
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