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Introduction au droit

Cours de M. Houssier

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne


Fiche
méthodologique n° 2
Comment lire un arrêt de la Cour de cassation ?
La lecture d’un arrêt de la Cour de cassation constitue
pour tout étudiant de Licence 1 l’une des premières
difficultés à surmonter.

Outre des constructions de phrases parfois surprenantes,


les arrêts de la Cour de cassation utilisent un vocabulaire
juridique et technique qui n’est pas, au premier abord,
facilement accessible.

La lecture d’un arrêt de la Cour de cassation exige donc


un certain entraînement et une bonne connaissance de la
technique de rédaction adoptée.
Après quelques rappels préliminaires sur le rôle de la
Cour de cassation, nous passerons à des exercices de
lecture d’arrêt.
I. Rappels préliminaires sur le rôle de la Cour de cassation

La Cour de cassation occupe, dans la hiérarchie judiciaire, la


position la plus élevée : c’est la juridiction de dernier
recours, celle à qui l’on s’adresse après avoir été débouté en
première instance et/ou en appel.
Cette position particulière de la Cour de cassation s’explique
par sa mission principale :

La Cour de cassation est chargée de contrôler la bonne


application du droit et d’unifier l’interprétation de la loi dans
tout le pays, pour éviter qu’un litige identique reçoive une
solution différente suivant qu’il soit jugé à Marseille ou à Lille.

C’est pour cela qu’il n’existe qu’une seule Cour de cassation,


qui siège à Paris. En comparaison, il existe :

36 cours d'appel
161 tribunaux de grande instance
155 tribunaux pour enfants
115 tribunaux des affaires de sécurité sociale
307 tribunaux d'instance et tribunaux de police
210 conseils de prud'hommes
6 tribunaux du travail
136 tribunaux de commerce
La Cour de cassation ne juge qu’en droit.

Cela signifie que son rôle n’est pas d’apprécier si telle ou


telle partie au litige a raison ou tort, mais de vérifier si la
loi a correctement été appliquée ou interprétée par les
juges d’appel ou de première instance.

Si les juridictions inférieures ont correctement appliqué


ou interprété la loi, la Cour de cassation va rendre un
« arrêt de rejet », et l’affaire s’arrêtera là.

Si, à l’inverse, les juridictions inferieures ont mal appliqué


ou interprété la loi, la Cour de cassation va rendre un
« arrêt de cassation », et l’affaire sera à nouveau rejugée
devant une autre cour d’appel.
Un premier vocabulaire doit être maîtrisé :

• La partie qui porte l’affaire devant la Cour de cassation


est appelée « demandeur au pourvoi ».

Généralement, cette partie n’est pas satisfaite de la


décision rendue en première instance ou en appel. C’est
pourquoi elle critique l’une de ces décisions dans son
« pourvoi », où elle affirme que la loi n’a pas été respectée
ou mal interprétée.

• La partie en défense est appelée « défendeur au


pourvoi ».

Généralement, cette partie est satisfaite de la décision


rendue en première instance ou en appel, car elle lui a
donné raison. Elle va donc se contenter de soutenir
devant la Cour de cassation que l’affaire a correctement
été jugée en première instance ou en appel.
II. La structure des arrêts de la Cour de cassation

La rédaction des arrêts de la Cour de cassation n’est pas


identique suivant que l’arrêt est de rejet ou de cassation :

Arrêt de rejet Arrêt de cassation

Un premier paragraphe rappelle les faits du litige et la procédure


suivie devant les juridictions inférieures.

Un second paragraphe indique Un second paragraphe indique la


l’argumentation du demandeur solution retenue par la Cour
au pourvoi, c’est-à-dire ce qui d’appel ou la juridiction de
est reproché à la Cour d’appel première instance

Un troisième et dernier paragraphe mentionne la solution adoptée


par la Cour de cassation, suivi du dispositif.
Pour quelle raison les arrêts de rejet et de cassation ne sont-ils pas
structurés de la même façon ?

• Dans les arrêts de rejet


La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le demandeur, c’est-
à-dire qu’elle estime que ce pourvoi n’est pas fondé, et donc que la
« décision attaquée » a correctement appliqué ou interprété la loi.
Puisque la réponse de la Cour de cassation va consister à dire que le
pourvoi n’est pas fondé, il faut nécessairement connaître ce pourvoi.
C’est pourquoi le deuxième paragraphe de l’arrêt retranscrit ce
pourvoi.

• Dans les arrêts de cassation


La Cour de cassation casse la décision attaquée, c’est-à-dire qu’elle
estime que cette décision a mal appliqué ou mal interprété la loi.
Puisque la réponse de la Cour de cassation va consister à dire que la
décision attaquée n’est pas fondée, il faut nécessairement connaître
cette décision. C’est pourquoi le deuxième paragraphe retranscrit
cette décision.
On retiendra donc, à ce stade, que :

• Dans les arrêts de rejet

- Le premier paragraphe rappelle les faits et la procédure.


- Le deuxième paragraphe retranscrit le pourvoi du
demandeur.
- Le troisième paragraphe mentionne la solution adoptée
par la Cour de cassation, suivi du dispositif.

• Dans les arrêts de cassation

- Le premier paragraphe rappelle les faits et la procédure.


- Le deuxième paragraphe retranscrit la décision attaquée.
- Le troisième paragraphe mentionne la solution adoptée
par la Cour de cassation, suivi du dispositif.
Prenons un exemple d’arrêt de rejet (Civ 1ère, 13 décembre 2005)

Attendu que M. X... et Mme Y... se sont mariés le 11 décembre 1995 ; que Mme Y... a engagé une action en nullité du mariage sur le
fondement de l'article 180, alinéa 2, du Code civil en soutenant avoir découvert, le soir de son mariage, que son mari entretenait une
liaison avec une femme mariée ; Ce premier paragraphe est le rappel des faits

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 20 décembre 2001) de l'avoir déboutée de sa demande, alors, selon le
moyen :
1 / que l'erreur sur les qualités "substantielles" de la personne ne saurait s'apprécier de façon purement abstraite, sans considération
pour les convictions religieuses ou philosophiques qui ont pu déterminer le consentement de l'autre partie, qu'en refusant de prononcer
la nullité du mariage contracté par Mme Y... au motif "qu'en l'état actuel des moeurs "la liaison durablement entretenue par M. X... avec
une femme mariée ne pouvait pas constituer une cause de nullité du mariage, sans rechercher si, au regard des convictions religieuses
très ancrées de Mme Y..., apparemment partagées par M. X... et communes à tout leur environnement social, cette liaison adultérine
cachée à Mme Y... n'avait pas pu caractériser une erreur déterminante du consentement de celle-ci, la cour d'appel n'a pas légalement
justifié sa décision au regard de l'article 180 du Code civil ;
2 / qu'il était soutenu, et de surcroît non contesté, que la liaison que M. X... entretenait depuis sept ans avec une femme mariée s'était
prolongée au moins jusqu'au matin même de son mariage civil avec Mme Y..., qu'en se bornant à énoncer que Mme Y... "ne prouve
pas" que M. X... ait eu l'intention de continuer à entretenir cette liaison après son mariage, sans rechercher si le comportement de M.
X... n'était pas objectivement incompatible avec la fidélité due au lien matrimonial et la loyauté des époux qui constituaient les qualités
essentielles sur la foi desquelles Mme Y... avait donné son consentement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard
de l'article 180 du Code civil ; Ce deuxième paragraphe (subdivisé en trois paragraphes) est l’argumentation du demandeur au pourvoi

Mais attendu que la cour d'appel, qui s'est livrée à la recherche prétendument omise, a relevé que si M. X... reconnaissait avoir
entretenu avant son mariage des relations avec une autre femme, il n'était pas démontré qu'il ait eu l'intention de poursuivre cette
liaison après son mariage, en dépit des allégations malveillantes de cette personne sur la persistance de leur relation jusqu'au jour du
mariage ; qu'elle a pu en déduire que le fait pour M. X... d'avoir caché à son épouse l'existence de cette relation antérieure ne constituait
pas une tromperie sur ses qualités essentielles et a souverainement estimé que les convictions religieuses de Mme Y... ne permettaient
pas d'établir que celle-ci n'aurait pas contracté mariage si elle avait eu connaissance de cette liaison passée de son mari dans la
mesure où les aspirations de M. X... à une union durable n'étaient nullement mises à mal par cette circonstance ; qu'elle a ainsi
légalement justifié sa décision ; Ce troisième paragraphe est la solution adoptée par la Cour de cassation

PAR CES MOTIFS :


REJETTE le pourvoi ; C’est ici le dispositif
Prenons maintenant un exemple d’arrêt de cassation
(Civ. 1ère, 4 novembre 2011)

Vu l'article 1133 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a souscrit le 10 mai 2007 un contrat de courtage matrimonial, prévoyant des frais
d'adhésion de 8 100 euros TTC, auprès de la société Centre national de recherches en relations humaines, exerçant sous l'enseigne
Eurochallenges (la société) ; que celle-ci l'a assigné en paiement puis a soulevé la nullité de la convention ; Ce premier paragraphe
est le rappel des faits et de la procédure

Attendu que pour annuler le contrat litigieux "aux torts" de M. X... et condamner ce dernier à verser des dommages-intérêts à la
société, l'arrêt retient qu'il s'est présenté, lors de la signature de la convention, comme divorcé en cochant dans l'acte la case
correspondante, bien qu'il ait été alors toujours engagé dans les liens du mariage puisque le jugement de divorce le concernant n'a
été prononcé que le 22 avril 2008, soit près d'une année plus tard, ajoute que s'il avait avisé la société de sa situation, elle n'aurait
pas manqué de l'informer de l'impossibilité de rechercher un nouveau conjoint en étant toujours marié, puis énonce que le contrat du
10 mai 2007 doit donc être annulé pour cause illicite comme contraire à l'ordre public de protection de la personne ainsi qu'aux
bonnes mœurs, "un homme encore marié ne pouvant légitimement convoler en une nouvelle union" ; Ce deuxième paragraphe
retranscrit la décision attaquée

Qu'en statuant ainsi alors que le contrat proposé par un professionnel, relatif à l'offre de rencontres en vue de la réalisation d'un
mariage ou d'une union stable, qui ne se confond pas avec une telle réalisation, n'est pas nul, comme ayant une cause contraire à
l'ordre public et aux bonnes mœurs, du fait qu'il est conclu par une personne mariée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Ce
troisième paragraphe est la solution adoptée par la Cour de cassation

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :

CASSE ET ANNULE C’est ici le dispositif


Il peut cependant arriver que, dans un arrêt de cassation, les
paragraphes rappel des faits et décision attaquée soient réunis
en un seul et même paragraphe.

Prenons un exemple (Civ. 1ère, 30 septembre 2003)

Vu l'article 242 du Code civil ;

Attendu que pour prononcer le divorce des époux X... aux torts exclusifs de Mme Y... et débouter cette dernière de l'ensemble de ses
demandes, la cour d'appel a retenu que les témoignages produits par l'épouse n'établissaient pas l'adultère du mari, ni la preuve
d'une attitude équivoque de celui-ci ; Ce premier paragraphe réunit le rappel des faits et la décision attaquée

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le fait, pour le mari d'avoir été vu plusieurs fois avec une autre
femme faisant des courses, attablé à une terrasse de café sur le lieu de la résidence secondaire des époux et de se rendre tous les
soirs au domicile de cette même personne, fins de semaine comprises, n'était pas de nature à démontrer l'attitude injurieuse du mari
à l'égard de l'épouse, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; Ce deuxième paragraphe est la solution adoptée

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE C’est ici le dispositif


Vous avez certainement remarqué, dans les deux exemples
précédents, que les arrêts de cassation commençaient par une
première ligne indiquant « Vu l’article… ».

Vu l'article 1133 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a souscrit le 10 mai 2007 un contrat de courtage matrimonial…

Vu l'article 242 du Code civil ;

Attendu que pour prononcer le divorce des époux X... aux torts exclusifs de Mme Y...

Cette première ligne est un « visa ».

Elle ouvre systématiquement les arrêts de cassation.

En effet, comme la Cour de cassation est juge du droit, elle doit


indiquer, dès la première ligne de sa décision, quel article de loi
ou quel principe a été méconnu.

Si un arrêt commence par un visa, vous pouvez donc être sûr


qu’il s’agit d’un arrêt de cassation.
Ce visa peut cependant être plus développé, et ne pas se limiter à
une seule ligne visant un article de loi.

Il peut ainsi :

- reproduire le contenu d’un ou plusieurs articles

- poser un principe
Prenons un premier exemple (Civ. 2ème, 5 novembre 1969)

Sur le moyen unique : vu l'article 232 du Code civil ;

Attendu que les excès, sévices et injures ne sont une cause de divorce qu'à la condition d'être fautifs et imputables à l'époux contre
lequel ils sont invoqués ; Ce premier paragraphe est un visa comprenant une reproduction de l’ancien article 232 du Code civil

Attendu que, pour prononcer le divorce aux torts de Dufour, l'arrêt énonce que six mois après la célébration du mariage, la vie
commune avait été interrompue à la demande de la femme, Dufour laissant sa jeune femme déçue, en possession de son plein état
de fait de jeune fille, que la preuve du non-empressement de Dufour, ou pour le moins de son inefficacité, résultait indubitablement
des constatations du médecin qui avait examine dame Dufour, un tel comportement du mari étant suprêmement injurieux pour la
femme, et essentiellement de nature à rendre intolérable le maintien du lien conjugal ;
Que l'arrêt ajoute que Dufour avait seulement suggéré devant la cour, sans s'en expliquer, que sa femme n'était pas étrangère à ces
résultats, qu'il est, semble-t-il, le seul à ne pas estimer décevants ; Ce deuxième paragraphe réunit le rappel des faits et la décision
attaquée

Attendu qu'en se déterminant par ces seuls motifs, sans rechercher si la non-consommation du mariage était imputable à la faute de
Dufour, la cour d'appel n'a pas donné une base légale à sa décision ; Ce troisième paragraphe est la solution adoptée

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE C’est ici le dispositif


Prenons un deuxième exemple (Civ. 1ère, 4 novembre 2011)

Vu les articles 6 et 1128 du Code civil, ensemble l'article 353 du même Code ;

Attendu que, la convention par laquelle une femme s'engage, fût-ce à titre gratuit, à concevoir et à porter un enfant pour l'abandonner
à sa naissance contrevient tant au principe d'ordre public de l'indisponibilité du corps humain qu'à celui de l'indisponibilité de l'état des
personnes ; Ce premier paragraphe est un visa posant un principe (l’interdiction des contrats de mères porteuses)

Attendu selon l'arrêt infirmatif attaqué que Mme X..., épouse de M. Y..., étant atteinte d'une stérilité irréversible, son mari a donné son
sperme à une autre femme qui, inséminée artificiellement, a porté et mis au monde l'enfant ainsi conçu ; qu'à sa naissance, cet enfant
a été déclaré comme étant né de Y..., sans indication de filiation maternelle ; Ce deuxième paragraphe est un rappel des faits

Attendu que, pour prononcer l'adoption plénière de l'enfant par Mme Y..., l'arrêt retient qu'en l'état actuel des pratiques scientifiques et
des moeurs, la méthode de la maternité substituée doit être considérée comme licite et non contraire à l'ordre public, et que cette
adoption est conforme à l'intérêt de l'enfant, qui a été accueilli et élevé au foyer de M. et Mme Y... pratiquement depuis sa naissance ;
Ce troisième paragraphe retranscrit la décision attaquée

Qu'en statuant ainsi, alors que cette adoption n'était que l'ultime phase d'un processus d'ensemble destiné à permettre à un couple
l'accueil à son foyer d'un enfant, conçu en exécution d'un contrat tendant à l'abandon à sa naissance par sa mère, et que, portant
atteinte aux principes de l'indisponibilité du corps humain et de l'état des personnes, ce processus constituait un détournement de
l'institution de l'adoption, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; Ce quatrième paragraphe est la solution adoptée

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE C’est ici le dispositif


En résumant ce qui précède, on remarque donc qu’un arrêt de
cassation est classiquement composé :

- d’une ligne de visa


- d’un paragraphe rappelant les faits
- d’un paragraphe retranscrivant la décision attaquée
- d’un paragraphe mentionnant la solution adoptée
- du dispositif

Il peut toutefois :

- comprendre, outre une ligne de visa, la retranscription d’un


article de loi ou d’un principe posé par la Cour de cassation

- ne pas être composé de deux paragraphes distincts pour les


faits et la décision attaquée, mais d’un seul paragraphe
réunissant les deux précédents.
Cela étant, un même arrêt peut parfois être de rejet et de
cassation.

Cette hypothèse se présente lorsque la décision attaquée est


pour partie fondée et pour partie infondée.

Dans ce cas :

- Une partie du pourvoi va être rejetée


- Une partie de la décision attaquée va être cassée

On appelle ce type d’arrêt un « arrêt de cassation partielle ».


Prenons un exemple (Civ. 1ère, 17 novembre 1981)
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que Ahmed T., né en Algérie en 1941, qui a perdu la nationalité française le 1er janvier 1963 faute
d'avoir souscrit en temps utile une déclaration tendant à la reconnaissance de cette nationalité, a épousé G. G. de nationalité française, le 14 février
1970 ; que ce mariage a été dissous le 21 mai 1976 par décision prononcée sur la requête conjointe des deux époux ; que, le 19 juin 1976, M. Ahmed
T. et Mlle Giselle G. se sont remariés et que, le 13 septembre suivant, M. T. a fait devant le juge d'instance une déclaration en vue d'acquérir la
nationalité française conformément à la disposition introduite par la loi du 9 janvier 1973 à l'article 37-1 du Code de la nationalité française ; que le
ministre de la population a refusé l'enregistrement de cette déclaration au motif de fraude à la loi, en retenant que le divorce et le second mariage de M.
T. avaient été dictés par le seul dessein d'acquérir la nationalité française ; que M. T. a assigné le Procureur de la République en vue de faire
reconnaître qu'il avait valablement acquis la nationalité française ; que le ministère public a assigné les époux en tierce opposition à la décision de
divorce et en annulation du remariage ; que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté les demandes du ministère public et, accueillant la demande de M. T., a
dit que ce dernier avait acquis la nationalité française a la date du 13 septembre 1976 ; Ce premier paragraphe est un rappel des faits et procédure
Attendu que le procureur général près la cour d'appel reproche a celle-ci de n'avoir pas rétracté le jugement de divorce et annulé le remariage pour
fraude à la loi et atteinte à l'ordre public, alors que la fraude à la loi peut résulter de l'usage de droits pour parvenir à un but auquel la situation d'une
personne ne lui permet pas de prétendre, et que le fait de détourner le divorce de son but, qui est de mettre fin à l'institution matrimoniale, constitue un
trouble à l'ordre public ; Ce deuxième paragraphe est une retranscription d’une partie de la décision attaquée
Mais attendu que la décision de divorce prononcée sur la demande conjointe des époux ne pouvait être annulée, sur demande du ministère public, en
raison des mobiles qui avaient pu inspirer le consentement des époux ; que le moyen n'est pas fondé ; Ce troisième paragraphe est une partie de la
solution adoptée
REJETTE LE PREMIER MOYEN ; C’est ici le premier dispositif
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 37-1 du Code de la nationalité française ;
Attendu qu'aux termes de ce texte l'étranger qui contracte mariage avec une personne de nationalité française peut acquérir cette nationalité par
déclaration, sur justification de l'acte de mariage auprès de l'autorité administrative compétente ; attendu que ce texte ne peut être appliqué lorsque les
époux ne se sont prêtés à la cérémonie du mariage, qu'en vue d'atteindre un résultat étranger à l'union matrimoniale ; Ce quatrième paragraphe est un
visa reproduisant un article de loi puis posant un principe
Attendu que la cour d'appel a constaté que les époux T. n'ont divorcé par consentement mutuel pour se remarier immédiatement que dans le dessein
de permettre au marié d'acquérir la nationalité française par application du nouvel article 37-1, introduit dans le Code de la nationalité française par la
loi du 9 janvier 1973 et dont il n'avait pu bénéficier lors de la première union célébrée en 1970 ; qu'elle a cependant dit qu'il n'y avait pas fraude à la loi
dans le fait que les époux eussent voulu bénéficier des nouvelles dispositions de la loi sur le divorce qui autorise la rupture du lien conjugal par
consentement mutuel pour pouvoir ensuite bénéficier des dispositions plus libérales du Code de la nationalité qui permet depuis 1973 à un mari
étranger de réclamer lors du mariage la nationalité de son épouse ; Ce cinquième paragraphe est une retranscription de l’autre partie de la décision
attaquée
attendu qu'en statuant ainsi, alors que, de ses constatations, la cour d'appel aurait du déduire que, si le divorce prononcé et le second mariage qui
l'avait suivi demeuraient valables, ce second mariage n'avait pu produire l'effet acquisitif de nationalité frauduleusement recherché, elle a violé le texte
susvisé ; Ce sixième paragraphe est l’autre partie de la solution adoptée
Par ces motifs : CASSE ET ANNULE, MAIS SEULEMENT SUR LE SECOND MOYEN C’est ici le second dispositif
Au terme de cette présentation, nous avons abordé les
trois types d’arrêts rendus par la Cour de cassation :

- Les arrêts de rejet

- Les arrêts de cassation

- Les arrêts de cassation partielle


La rédaction complexe de ces arrêts pourrait surprendre,
voire même être critiquée.

Il faut toutefois se garder d’un tel reproche.

Certes, il peut apparaître contestable de conserver un


style rédactionnel vieux de plus de 200 ans…

Mais ce style particulier permet aux arrêts de la Cour de


cassation de se limiter à une ou deux pages, quand les
arrêts de la Cour européenne des Droits de l’Homme
s’étalent sur des dizaines, voire sur une centaine de
pages…
La rédaction des arrêts de la Cour de cassation a donc les
défauts de ses avantages :

Grâce à leur concision, ils peuvent être lus rapidement.

A cause de cette concision, il est nécessaire d’apprendre


à les lire, c’est-à-dire de comprendre leur structure pour
en comprendre le sens.
C’est en vous exerçant, et à force de lire des arrêts, que
vous pourrez progresser et les comprendre sans peine.
Fiche
méthodologique n° 2
Comment lire un arrêt de la Cour de cassation ?

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