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Il ne faut pas oublier de viser tant la condamnation au visa de l’article 700 du code de
procédure civile que celle aux dépens dans les chefs de critique du jugement, au risque
de se voir jugé irrecevable sur cette question dans les conclusions d’appel, ce qui
pourrait engendrer de graves conséquences lorsque, par exemple, une expertise a été
ordonnée.
En quoi la structuration des
écritures d’appel est-elle
fondamentale et pas
uniquement cosmétique ?
L’article 913 du code de procédure civile autorise le conseiller
de la mise en état à enjoindre aux avocats de mettre leurs
conclusions en conformité avec les dispositions des articles
954 et 961 du code de procédure civile.
Cour de cassation, 2ème civ., 31 janvier 2019, n° de pourvoi : 18-10983
Attendu que la société Itinéraire d'Afrique fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables, comme non
constitutives de conclusions d'appelant, les conclusions déposées le 27 juin 2016, non conformes
aux exigences des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile et portant atteinte au
principe du contradictoire, de déclarer irrecevables, comme hors délai, les conclusions
rectificatives déposées le 11 octobre 2016, inopérantes pour venir se substituer aux précédentes,
et, en conséquence, de prononcer la caducité de la déclaration d'appel formée par la société
Itinéraire d'Afrique […]
Que la cour d'appel a constaté que les seules conclusions d'appelant prises dans le délai prévu par
l'article 908 comportaient un dispositif qui ne concluait pas à l'infirmation, totale ou partielle, du
jugement déféré ;
Que de ces constatations et énonciations, qui faisaient ressortir que ces conclusions d'appelant
ne déterminaient pas l'objet du litige porté devant la cour d'appel, c'est à bon droit que celle-ci,
abstraction faite des motifs, erronées mais surabondants, pris de l'irrecevabilité de ces
conclusions, a constaté la caducité de la déclaration d'appel ;
I. Définition des conclusions d’appel
Article 910-1 du code de procédure
« Les conclusions exigées par les articles 905-2 et 908 à 910 sont celles,
adressées à la cour, qui sont remises au greffe et notifiées dans les délais
prévus par ces textes et qui déterminent l'objet du litige. »
Les conclusions doivent comporter un premier chapitre « Faits et procédure » et un second « Discussion ».
La chapitre sur les faits et la procédure doit être conclu par un paragraphe distinct indiquant clairement les chefs
du jugement critiqués.
Le chapitre sur la discussion doit impérativement contenir les moyens au soutien des prétentions : si jamais les
moyens figurent dans le chapitre relatif aux faits et à la procédure, ils ne seront pas examinés (art. 954, al. 3,
CPC).
Lors des échanges successifs d’écritures, les nouveaux moyens doivent être signalés (art. 954, al. 2, CPC) : ils
peuvent, soit être inclus dans un nouveau paragraphe, distinct, mentionnant qu’ils sont nouveaux dans les
conclusions du (date), soit être signalés d’un trait vertical dans la marge.
Les pièces doivent être visées avec leur numérotation et leur intitulé au fil des écritures et figurer sur un
bordereau récapitulatif annexé à ces écritures.
1. Le chapitre « Faits et procédure »
A contrario, les faits qui ne sont sans lien avec le dossier ne doivent pas être relatés, même si le
client y tient particulièrement, sauf à les insérer dans une ou deux phrases contextuelles en tête du
chapitre.
Les faits débattus, et qui seront précisément les moyens factuels, ne doivent pas non plus figurer
dans ce chapitre car ils ne seront pas utilisés par la juridiction en tant que moyens : dès qu’un
débat ou une appréciation est formulé(e) sur un fait, il faut le descendre dans le chapitre
« Discussion ».
Ø Quels éléments de la procédure doivent y figurer ?
Exemples :
• mention de la décision de 1ère instance, de sa date, de son dispositif,
• mention de l'auteur et de la date de l'appel,
• mention des modalités d'assignation des intimés non constitués ou,
s'agissant des procédures orales, non présents ou représentés,
• pour la procédure écrite : mention des dates des dernières écritures.
2. Le chapitre « Discussion »
Ø On commence par introduire le plan, qui doit nécessairement comporter les termes
de confirmation ou d’infirmation (le cas échéant d’annulation) dans chacun des
titres.
Ø C’est le chapitre dans lequel on critique le jugement donc le syllogisme devra partir
du jugement.
Enfin, les demandes doivent apparaître dans l'ordre et être qualifiées de « principales » ou
« subsidiaires » (petite piqûre de rappel : le subsidiaire n’affaiblit pas le principal).
ATTENTION : Toute demande/prétention non reprise dans le dispositif ne sera pas examinée (art. 954,
al. 3, CPC) : il s’agit de la solution qui était dégagée de la jurisprudence (Cass. Civ. 3ème, 2 juillet 2014,
n° 13-13.738).
Ø Ce qu’il ne faut pas faire :
§ demander une amende civile (art. 32-1 CPC) s'agissant d'une disposition qui ne peut être
mise en œuvre qu'à l'initiative de la juridiction ; une telle demande émanant d'une partie
est irrecevable : il convient de fonder sa demande d'indemnisation pour appel abusif sur
l'ancien article 1382 du code civil ou le nouvel article 1240 du même code ;
§ demander la restitution des sommes auxquelles une partie a été condamnée en première
instance, la décision d'infirmation emportant de plein droit obligation de restituer ;
§ former des prétentions non soumise au tribunal sauf à ce qu’elles en soient l'accessoire, la
conséquence ou le complément nécessaire.
Ø Ce qu’il faut bannir :
A NOTER : Les conclusions portant sur les loyers, arrérages, intérêts, autres
accessoires échus et débours sont toujours recevables, y compris après l’ordonnance
de clôture, si leur décompte ne peut faire l’objet d’aucune contestation sérieuse (art.
783, al. 2, CPC).
E. Précisions concernant les pièces
Les travaux issus en 2016 d’un groupe de travail sur la rédaction des écritures entre le barreau
de Paris et la cour d’appel de Paris, et qui ont vocation à être intégrés dans un protocole à
venir entre le barreau de Paris et les juridictions parisiennes, ont permis de faire ressortir
l’importance des éléments suivants :
§ les pièces doivent être numérotées dans l’ordre où elles sont invoquées dans les conclusions
§ le libellé de la pièce doit être précis
§ lorsqu’un rapport d’expertise est déposé, il doit être paginé avec le détail de ses annexes
§ seules des pièces complètes, lisibles et exploitables, notamment les éléments graphiques et
photographiques, doivent être déposées
§ elles doivent être visées dans les conclusions en précisant leur numéro et leur intitulé
§ chaque fois que cela est possible la numérotation de première instance doit être conservée ou, à tout le
moins, éviter par une surcharge, toute ambiguïté sur le numéro de la pièce
§ quand une pièce est composée de plusieurs pages, le nombre de pages doit être précisé dans le bordereau
§ toutes les pièces qui sont communiquées, y compris celles qui ne sont pas évoquées dans les écritures,
doivent être mentionnées sur le bordereau de communication de pièces avec leur date de communication
À NOTER : les pièces en langue étrangère seront, de préférence, traduites. en effet,
si seules les pièces de procédure doivent être traduites en français en application de
l’article 111 de l’ordonnance de Villers Cotterêts d’août 1539 (Cass. crim., 31 mai
2006, n° 04-87350 ; 14 juin 2001, n° 99-30207 ; Cass. 1ère civ., 24 mai 2011, n° 10-
18608), la Cour de cassation a néanmoins jugé que le juge pouvait écarter les pièces
non traduites en français : « … si l’ordonnance de Villers-Cotterêts d’août 1539 ne
vise que les actes de procédure, le juge, sans violer l’article 6 de la Convention de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, est fondé, dans
l’exercice de son pouvoir souverain, à écarter comme élément de preuve un
document écrit en langue étrangère, faute de production d’une traduction en langue
française » (Cass. 1ère civ., 27 novembre 2012, n° 11-17185).
En pratique, l’avocat qui produit une pièce en langue étrangère fournira soit une
traduction jurée soit, tout aussi valablement, une traduction libre et si la partie
adverse n’est pas satisfaite de la traduction, ce sera à elle de fournir une traduction
jurée.
Résumé des éléments à faire figurer dans les écritures
Le fond La forme
- exposer clairement et synthétiquement - au fur et à mesure du déroulement des
les faits constants ; distinguer les faits conclusions, indiquer clairement la référence
objectifs, nécessaires au litige, des autres aux pièces, bien cotées, avec des références
précises, cotation initiale et nouvelle cotation
faits, inutiles,
(le cas échéant),
- former ses demandes de confirmation, - répondre aux conclusions adverses dans le
infirmation, annulation et critiquer, développement même des écritures,
positivement ou négativement, le
- prévoir une numérotation des parties et des
jugement titres dans l’hypothèse où il y a plusieurs
- poser clairement la (les) question(s) de demandes et introduire les plans de chaque
droit, partie,
Toujours pour exprimer un doute sur ce que la partie adverse soutient ou une critique sur ce qui a été
jugé, il faut utiliser un vocabulaire adapté tel que les verbes « soutenir », « prétendre » par opposition à
« dire » ou « confirmer » et les expressions « à tort », « de manière erronée » par opposition à « à juste
titre », « à bon droit », « justement »… Il faut également penser à utiliser le conditionnel lorsque l’on
évoque la position de la partie adverse, pour insinuer un doute sur la véracité de ses propos : « M. Éric
Dupond soutient qu’il aurait parfaitement respecté les termes du contrat » ; il en est de même lorsque
l’on critique une décision : « le tribunal a jugé que la société Metropolitanus se serait livrée à des
manœuvres anticoncurrentielles en ce qu’elle aurait… ».
Par opposition, lorsque l’on exprime la position de son client ou lorsque l’on souhaite voir une décision
confirmée, l’on utilise l’indicatif : « M. Éric Dupond a parfaitement respecté les termes du contrat en ce
qu’il a… » ou « le tribunal a, à juste titre, jugé que la société Metropolitanus avait commis des
manœuvres anticoncurrentielles lorsqu’elle a… ».
Enfin, l’on demande à une juridiction de juger « irrecevable » une partie lorsque l’on a développé une fin
de non-recevoir, mais de la débouter ou de rejeter ses demandes lorsque l’on a développé des moyens
de pur fond : l’on ne peut pas solliciter de la juridiction qu’elle juge irrecevable ou recevable une partie
lorsque ne figurent nulle part dans les écritures de fins de non-recevoir.
Ø Typologie
Lorsqu’un doute existe sur la manière correcte d’écrire certains mots ou formules, il convient de se reporter aux arrêts
de la Cour de cassation ou aux codes.
Voici, cependant, quelques conseils, en rappelant que la typologie doit être uniforme au sein des jeux d’écritures et
que l’on ne peut pas écrire, alternativement, dans les mêmes écritures, par exemple « M. Dupond » et « Monsieur
Dupond » puis « Eric Dupond » ou encore « la société Metropolitanus » puis « Metropolitanus sa » et «
MetRoPolitanus » : il faut choisir une version et la conserver tout au long des écritures.
La seule hypothèse où l’on écrit Monsieur, Madame, Mademoiselle, Messieurs, Mesdames et Mesdemoiselles est
lorsque l’on s’adresse à la ou aux personne(s), et non lorsque l’on parle d’elle(s) : c’est le cas sur une enveloppe ou en
tête d’une lettre (par exemple : « cher Monsieur » ou « Monsieur Éric Dupond » avant de préciser son adresse).
Il faut également retenir que, lorsque l’on parle d’un défunt, l’on ne fait pas précéder son nom ni de M., ni de Mme, ni
de Mlle.
■ Majuscules ou minuscules ?