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Episode 54 : comment nous apprenons.

 
[00:00:12] Salut à tous, c’est Hugo et je suis très content de vous retrouver pour un nouvel épisode. Si c’est la
première fois que vous m’écoutez, sachez que je fais ce podcast pour aider les gens à apprendre le français. Et en
particulier, les gens qui ont un niveau intermédiaire. Moi, je suis professeur de français depuis quelques années et ce
que j’ai remarqué [what I’ve noticed], c’est que quand on a un niveau intermédiaire, ça peut être assez compliqué de
trouver des ressources intéressantes (que ce soit [whether] des choses à écouter, à lire ou à regarder). C’est pour ça
que j’ai décidé de faire ce podcast dans lequel je parle de différents sujets qui, moi, m’intéressent et j’espère que ça
peut plaire aux différents auditeurs, aux personnes qui écoutent et dont vous faites partie.
 
[00:01:04] Et vous ne le savez peut-être pas mais depuis un peu plus de quatre ans maintenant, j’habite à Varsovie,
en Pologne. Malheureusement, depuis deux semaines, il fait assez froid. On a l’impression que l’hiver est arrivé
même si officiellement, ça n’est pas le cas. Les températures ont vraiment beaucoup baissé [dropped] et les journées
se sont raccourcies, les journées sont devenues plus courtes. En général, il fait nuit [it’s dark] vers 4 ou 5 heures.
Entre 4 et 5 heures, il commence déjà à faire nuit. Donc voilà, les journées sont plus courtes, c’est un
peu déprimant [depressing] parfois mais heureusement, on a encore quelques journées ensoleillées donc ça permet
de garder le moral[keep your chin up] et garder un peu d’énergie.
 
[00:01:53] Et puis, dans un mois maintenant, je vais rentrer en France pour les fêtes de Noël. Donc ça va être une
bonne occasion de « recharger les batteries », comme on dit en France, c’est-à-dire de refaire le plein d’énergie, de
récupérer un peu d’énergie.
 
[00:02:10] Une autre chose qui me donne de l’énergie, c’est de recevoir vos messages (que ce soit des emails ou des
enregistrements audio). Et ça tombe bien parce qu’il y a quelques semaines, j’ai reçu un enregistrement d’Amarildo
qu’on va écouter maintenant ensemble.
 
[00:02:27] Bonjour Hugo,
 
Je m’appelle Amarildo. J’habite au sud du Brésil. J’ai connu vos podcasts à travers une amie anglaise. C’est votre
élève. J’ai écouté tous les podcasts que vous avez fait. Je comprends tout ce que vous dites parce que votre français
très clair. Il y a un podcast dans lequel vous avez dit que vous êtes végan. Je ne suis pas végan mais je ne mange pas
de bœuf ni de porc. Mais malheureusement, je mange du poisson, du fromage, je bois du lait, etc. En tout cas, je
trouve très intéressante votre manière de penser sur ce sujet. Vous avez dit dans un autre podcast que vous êtes en
train de préparer un nouveau projet. Ce projet m’intéresse beaucoup. Quand il sera  disponible  [available],j’aimerais
y participer. Merci beaucoup pour vos podcasts. Avec eux, je peux améliorer mon français.
Au revoir  Hugo
 
[00:03:54] Merci Amarildo pour ton message, ça m’a fait très plaisir. Et merci aussi à Gaby, mon élève anglaise, qui
t’a fait découvrir le podcast. J’ai l’impression qu’on a pas mal de Brésiliens qui nous écoutent en ce moment parce
que la dernière fois, dans le dernier épisode, j’avais déjà diffusé un message d’une Brésilienne, de Fabiana. Donc
voilà, j’en profite pour passer le bonjour à tous mes amis brésiliens : salut à vous et merci d’écouter le podcast !
 
[00:04:27] Ce qui m’a fait plaisir, Amarildo, dans ton message, c’est que tu m’as reparlé de cet épisode que j’avais
fait sur le véganisme, l’épisode dans lequel j’expliquais, eh bien, pourquoi je suis devenu végan. Ça me fait vraiment
plaisir de voir que ça t’a fait réfléchir à tout ça, même si, toi, tu consommes des œufs, des produits laitiers, etc. Je
sais que chacun prend ses propres décisions. L’important, c’est de parfois se remettre en cause [to reassess], de
questionner un peu nos habitudes et c’est simplement ça que j’ai essayé de faire avec cet épisode. D’ailleurs, c’est
un des épisodes du podcast pour lequel j’ai reçu le plus de messages. Donc je vois que c’est un sujet qui semble vous
intéresser et peut-être que j’en reparlerai sous un angle un peu différent dans un épisode futur.
 
[00:05:26] Aujourd’hui, j’ai décidé de vous parler d’un livre que j’ai fini de lire récemment. C’est vrai que quand on
apprend une langue, la lecture, c’est vraiment un bon moyen pour renforcer le vocabulaire. Moi, en général, la
plupart [most of] des livres que je lis sont en anglais parce que c’est vraiment la langue qui domine dans le domaine
de la recherche, des revues académiques, etc. Donc j’ai l’impression d’être un peu snob, parfois, parce que je lis
assez rarement des livres en français, finalement. Depuis que je parle anglais et que je suis capable de bien
comprendre les livres, ce que je lis, eh bien j’ai tendance à plutôt m’orienter vers des livres en anglais parce que
souvent, ce sont les livres de référence.
 
[00:06:14] A présent, je ne lis pas vraiment des livres anglais pour améliorer mes compétences, pour améliorer ma
compréhension de la langue. C’est simplement quelque chose qui est devenu une habitude. Pour moi, c’est plus ou
moins la même chose, en fait, de lire un livre en français ou en anglais, peu importe [it doesn’t matter]. Et souvent,
les informations intéressantes sont plus accessibles dans la littérature anglo-saxonne.
 
[00:06:41] Et vous savez aussi sûrement que j’apprends le polonais, comme j’habite en Pologne. Donc depuis
quelques mois, j’essaye de lire de plus en plus de livres dans cette langue. Au début, j’avais commencé avec
quelques romans [novels], souvent des romans qui étaient écrits dans les deux langues (donc une page en anglais et
une page en polonais). C’était pas mal mais malheureusement, pour moi, les histoires n’étaient pas très
intéressantes et le vocabulaire n’était pas non plus très utile.
 
[00:07:11] En général, et ça, c’est très personnel, je trouve que dans les romans, il y a beaucoup de mots qui
sont, certes [admittedly], très jolis mais qui ne sont pas les mots les plus utiles, surtout quand on est à un niveau
intermédiaire. À mon avis, quand on est au niveau intermédiaire, c’est plus utile de lire des livres qui ne sont pas des
romans, qui ne sont pas de la fiction (par exemple, des essais ou des biographies) parce que dans ce type de livres,
vous allez avoir des mots de vocabulaire de la vie quotidienne, des choses que vous allez vraiment pouvoir utiliser
dans vos conversations. Alors que dans les romans, dans les histoires, la fiction, très souvent, il y a beaucoup de mots
descriptifs qui ne sont pas utilisés dans la langue quotidienne, dans la langue de tous les jours.
 
[00:08:05] Après, vous savez aussi que, je pense que quand on apprend une langue, le plus important, c’est de faire
des choses qui nous procurent du plaisir, qui nous donnent du plaisir. Donc si vous avez plus de plaisir en lisant des
romans, eh bien continuez de lire des romans. Mais à mon avis, au niveau intermédiaire, c’est plus utile de se
concentrer sur des autobiographies, des essais, bref sur des œuvres qui ne sont pas de la fiction. Ah oui d’ailleurs,
vous pouvez aussi chercher des livres sur le développement personnel [self-help] parce que là aussi, vous allez
trouver beaucoup de mots très utiles, beaucoup de vocabulaire et d’expressions de la vie quotidienne.
 
[00:08:45] Voilà, je referme cette petite parenthèse sur la lecture [I bring this small  digression about reading to an
end] et on va passer à notre sujet du jour, au sujet de cet épisode : le livre How we learn qui a été écrit par le
journaliste Benedict Carey, publié en 2014. Donc l’auteur, Benedict Carey, c’est un journaliste qui travaille au New
York Times depuis de nombreuses années et qui couvre plutôt les sujets médicaux et scientifiques.
 
[00:09:17] D’ailleurs, je trouve que, en général, les Américains sont excellents pour vulgariser [popularize] les sujets
compliqués. Autrement dit, pour prendre des sujets assez techniques, assez compliqués, qui normalement sont
plutôt réservés à un public d’experts, et les rendre [make them] accessibles au plus grand nombre pour, on pourrait
dire, « démocratiser » ces connaissances qui sont très pointues.
 
[00:09:44] Justement, c’est exactement ce que fait Benedict Carey dans son livre. En fait, ce livre Comment nous
apprenons (How we learn), c’est une synthèse des dernières recherches en psychologie, en psychologie sociale et en
neurosciences, qui se concentre sur la façon dont notre cerveau absorbe et mémorise de nouvelles informations.
Autrement dit, sur les différentes techniques qu’on peut utiliser pour apprendre quelque chose.
 
[00:10:17] Dans ce livre, on peut dire que l’auteur a deux objectifs principaux.
 
[00:10:24] Le premier objectif, c’est de démentir [to refute] les idées préconçues que l’on a sur l’apprentissage. Une
idée préconçue [preconception], c’est un peu comme un préjugé, comme un stéréotype, c’est-à-dire une idée qu’on
obtient à l’avance, sans vraiment y réfléchir; une idée qu’on a peut-être sur un sujet ou sur quelqu’un sans vraiment
s’être posé de questions. Paradoxalement, ces idées préconçues, elles nous sont assez souvent transmises à l’école.
Je dis que c’est paradoxal parce que normalement, à l’école, on devrait apprendre à apprendre
plus efficacement [efficiently], justement. Mais le problème, c’est qu’il y a tout un tas de [pile of] préjugés, de
croyances, qui existent depuis très longtemps dans le milieu scolaire qui font qu’on a la mauvaise approche quand
on essaie d’apprendre quelque chose de nouveau. Et l’objectif, justement, de Benedict Carey, c’est de montrer grâce
aux dernières recherches pourquoi ces idées préconçues sur l’apprentissage sont fausses.
 
[00:11:36] Et ce qui est intéressant, c’est que les découvertes scientifiques récentes sur le fonctionnement du
cerveau, donc par exemple les découvertes faites dans le domaine des neurosciences, eh bien elles sont souvent
contre-intuitives. Elles vont contre l’intuition qu’on a sur le sujet de l’apprentissage. Et le plus difficile, c’est
d’accepter qu’elles fonctionnent, d’accepter que ces découvertes scientifiques sont pertinentes et que si on veut
apprendre plus efficacement, il faut complètement changer notre attitude vis-à-vis de[regarding] l’apprentissage.
 
[00:12:14] Le deuxième objectif du livre, c’est d’apprendre plus efficacement sans nécessairement faire plus
d’efforts. Donc ça, évidemment, c’est une promesse très séduisante. En général, on n’a pas envie d’entendre qu’il
faut travailler plus ou qu’il faut travailler plus dur pour obtenir des résultats. On préfère penser que si on change un
peu de technique, si on est plus malin[smart], plus intelligent, eh bien on va pouvoir obtenir de très bons résultats
sans nécessairement faire plus d’efforts. Et c’est un peu sur ce levier que joue Benedict Carey en nous faisant la
promesse qu’on va pouvoir améliorer nos techniques d’apprentissage en utilisant les découvertes qu’il décrit dans
son livre.
 
[00:13:04] Ça, ce sont donc les deux objectifs qui structurent le livre. Et la façon dont, moi, je vais structurer cet
épisode, c’est que je vais vous parler simplement des idées qui me semblent les plus intéressantes dans ce livre de
Benedict Carey et on va voir comment on peut les appliquer très concrètement à l’apprentissage des langues. Donc
ce sont des idées et des conseils que vous allez pouvoir mettre directement en pratique après avoir écouté ce
podcast.
 
[00:13:38] Vous êtes prêts ? Alors, c’est parti !
 
[00:13:48] Un des points essentiels qui est abordé [tackled] au début du livre, c’est l’oubli. L’oubli, c’est l’ennemi
numéro un de tous les élèves. Quand ils se préparent pour un examen, la chose dont ils ont le plus peur, c’est de
tout oublier le jour J, le jour de l’examen. Et on peut les comprendre parce que c’est vrai que si on oublie tout le jour
d’un examen et qu’on rend une copie blanche, qu’on rend une feuille blanche, sans aucune réponse, les
conséquences vont être assez négatives. On va peut-être avoir zéro et quelques problèmes avec notre professeur.
C’est pour ça que bien souvent, on a tendance à considérer l’oubli comme quelque chose de négatif.
 
[00:14:33] Mais en fait, l’oubli, c’est un mécanisme essentiel pour nous. Il se comporte un peu comme un filtre anti-
spam. Vous savez, c’est comme quand votre boîte mail filtre certains emails indésirables, des spams, pour vous
permettre de vous concentrer sur les choses essentielles. Eh bien, c’est pareil avec l’oubli. On oublie beaucoup
d’informations parce qu’elles ne nous sont pas directement utiles. Par exemple, quand on change le mot de passe de
notre boîte mail, notre cerveau filtre l’ancienne information, l’ancien mot de passe, pour le remplacer par le
nouveau parce que ce nouveau mot de passe, il nous est beaucoup plus utile que l’ancien qui ne sert plus à
rien [isn’t useful anymore].
 
[00:15:22] Mais malheureusement, on ne peut pas toujours bien contrôler ce filtre. C’est comme avec l’exemple des
élèves qui apprennent pour réussir l’examen et qui oublient tout au moment de répondre aux questions. Donc
l’oubli, c’est un outil très intéressant, très efficace, mais malheureusement un peu difficile à contrôler parfois.
 
[00:15:46] Justement, à la fin du XIXème siècle, il y a un philosophe allemand qui a décidé de s’intéresser en
profondeur à ce sujet. Ce philosophe, c’est Hermann Ebbinghaus. On le considère comme le père de la psychologie
expérimentale. Son objectif, c’était d’analyser comment fonctionne notre mémoire et à quelle vitesse on oublie les
choses.
 
[00:16:12] Pour faire ça, il a développé une méthode très rigoureuse et très complète. En fait, il a inventé une liste
de combinaisons de trois lettres sans aucun sens. Il ne voulait pas simplement apprendre des listes de mots parce
que c’étaient des mots qu’il peut-être connaissait déjà, qui avaient une certaine place dans son cerveau, dans sa
mémoire. Donc il a décidé de prendre des combinaisons de trois lettres qui n’avaient aucun sens, qui étaient
complètement neutres, pour voir à quelle vitesse il allait être capable de les apprendre mais surtout de les oublier.
Et on peut dire que Hermann Ebbinghaus était quelqu’un de très très très discipliné. Il chronométrait chacune de ses
sessions d’apprentissage et ensuite il faisait des tests à différents intervalles pour voir combien de combinaisons il
avait réussi à mémoriser.
 
[00:17:13] Grâce à ses recherches, Ebbinghaus a découvert que 20 minutes après avoir appris une liste de
combinaisons, il se souvenait de seulement 58%. Et après une heure, ce chiffre tombait à 44% puis, après un mois, à
21% (autrement dit, un cinquième [one fifth] de ce qu’il avait appris). Avec tout ça, il a créé ce qu’on appelle
aujourd’hui la courbe de l’oubli (the forgetting curve, en anglais). Cette courbe de l’oubli, elle nous montre justement
à quelle vitesse nous oublions une chose que nous avons apprise. Donc ça, c’était la première découverte majeure
de ce philosophe allemand.
 
[00:18:01] Et sa deuxième découverte, c’est qu’en révisant [by reviewing] régulièrement, on améliore notre
mémoire. Autrement dit, si on veut contrer[counter] les effets de cette courbe de l’oubli, il faut revoir les choses
qu’on a apprises de façon régulière. Ça, c’est une connaissance qu’on a bien internalisée, qui est très connue et
très répandue [widespread] dans les écoles et dans tous les systèmes universitaires. On sait que si on veut se
rappeler d’une chose pendant longtemps, il faut la réviser, il faut la revoir régulièrement.
 
[00:18:39] Ces découvertes d’Ebbinghaus, elles ont été fondamentales pour la psychologie expérimentale et il a
fallu [we had to] attendre assez longtemps avant que d’autres chercheurs décident de les approfondir. Ces
chercheurs, c’étaient deux chercheurs américains : Robert et Elizabeth Bjork de l’Université de UCLA. Ce couple de
professeurs a découvert que chaque souvenir [memory] a deux forces.
 
[00:19:08] La première force, c’est la force de stockage [storage]. Autrement dit, comment le souvenir a été appris.
Par exemple, si vous apprenez un nouveau mot, vous pouvez peut-être l’apprendre parce que vous l’avez traduit
rapidement dans un dictionnaire après l’avoir lu. Ou alors, vous pouvez le noter dans un carnet avec une définition
et un exemple. La première façon (simplement traduire un mot), elle est évidemment beaucoup moins forte, elle a
beaucoup moins de force de stockage, que la deuxième méthode dans laquelle vous allez noter avec détails et écrire
une définition et un exemple. Autrement dit, la force de stockage de cette deuxième méthode est beaucoup plus
grande.
 
[00:20:00] La deuxième force qui existe pour un souvenir, c’est la force de récupération [retrieval]. Autrement dit,
c’est la facilité avec laquelle vous vous rappelez d’un souvenir, la facilité avec laquelle ce souvenir vous vient à
l’esprit[comes to mind]. On peut voir ça comme la vitesse de circulation de l’information dans votre cerveau. Par
exemple, quand vous parlez avec des amis français et que vous avez besoin de ce mot que vous avez appris il y a
quelques jours, vous allez être capable de le ressortir [to bring it up again] à une vitesse plus ou moins élevée. C’est
ça, la force de récupération.
 
[00:20:41] Et ce qui est intéressant, c’est qu’un souvenir, une fois qu’il a été stocké dans votre cerveau, eh bien il ne
peut jamais disparaître. Il est toujours présent quelque part. En fait, un souvenir, c’est simplement un réseau de
neurones. Vous savez, ces neurones qu’on a dans le cerveau, ils sont connectés entre eux et ça forme un réseau [a
network]. Et en réalité, quand on pense oublier quelque chose, ça signifie simplement que la force de récupération
de ce souvenir est de zéro (ou qu’elle est proche de zéro). Donc en réalité, ce souvenir est toujours présent quelque
part dans votre cerveau mais vous êtes incapable de faire remonter cette information.
 
[00:21:28] Mais pour ces deux chercheurs, l’oubli, ce n’est pas quelque chose de négatif. Au contraire, c’est un peu
comme quand vous allez à la salle de sport. Quand vous allez à la salle de sport, vous savez que pour construire un
muscle, pour le faire grossir, il faut d’abord le détruire. Il faut le détruire pour le renforcer. Eh bien, c’est exactement
la même chose avec les souvenirs. Pour renforcer la force d’un souvenir, il faut d’abord l’oublier. C’est ce qu’ils
appellent la « difficulté désirable ». Plus c’est difficile de se rappeler de quelque chose, plus la force de cette chose va
augmenter au moment où vous serez capable de vous en souvenir. C’est cette difficulté désirable qu’il faut
rechercher pour être capable de mémoriser quelque chose plus longtemps.
 
[00:22:22] Heureusement, maintenant, il existe pour les langues (ou en général pour l’apprentissage) des
applications de flash cards. C’est sûrement quelque chose dont vous avez déjà entendu parler [that you’ve already
heard about]. Ces applications, assez souvent, elles sont basées sur ce qu’on appelle le SRS (autrement dit, Spaced
Repetition System). C’est quelque chose qui reprend directement les découvertes, les intervalles, d’Ebbinghaus et la
célèbre courbe de l’oubli. Ces applications sont très utiles parce qu’elles calculent à votre place la durée idéale pour
tester votre connaissance, pour oublier quelque chose et ensuite le garder en mémoire le plus longtemps possible.
 
[00:23:08] Mais si vous utilisez une méthode un peu plus traditionnelle comme par exemple un cahier dans lequel
vous notez les mots de vocabulaire, les phrases, les exemples que vous voulez apprendre en français, vous pouvez
faire un peu la même chose en essayant de ne pas réviser les mots chaque jour mais plutôt d’espacer les sessions.
Autrement dit, quand vous avez appris un nouveau mot, n’essayez pas de le réviser dès le lendemain [the next day]
mais attendez quelques jours pour augmenter la difficulté. Plus ça va être difficile pour vous de vous rappelez de ce
mot, plus, quand vous allez le faire, il va s’inscrire pour le long terme dans votre mémoire.
 
[00:23:49] Autrement dit, et pour résumer [to sum up] toute cette partie sur l’oubli : l’oubli c’est quelque chose de
positif. Quand on ne se rappelle pas d’un mot, en général, c’est plutôt bon signe. Ça veut dire qu’ensuite, il va rester
plus longtemps dans votre mémoire.
 
[00:24:13] Un deuxième domaine relativement important, c’est l’environnement, l’environnement dans lequel on
apprend. La croyance populaire, l’idée préconçue qu’on a, c’est que pour apprendre, on a besoin d’un
environnement silencieux et surtout d’un environnement qui soit toujours le même. Vous savez, on pense qu’il faut
aller par exemple à la bibliothèque et mettre un casque[headphones] pour ne pas entendre les autres et de rester
concentré pendant des heures sur son cahier, sur ses notes, si on veut apprendre quelque chose.
 
[00:24:48] En réalité, là encore, les expériences récentes en psychologie ont montré que cette croyance, cette idée
préconçue, est complètement fausse. Ils ont fait plusieurs expériences en changeant les environnements des
étudiants avec par exemple des étudiants qui devaient apprendre quelque chose en ayant une musique de
fond [background music] (c’est-à-dire en entendant une musique dans la salle). Et les chercheurs se sont
aperçus que [realize that] quand les étudiants faisaient un test avec la même musique de fond, ils obtenaient de
meilleurs résultats que l’autre groupe d’étudiants qui avait appris dans une salle silencieuse. Ça, c’est encore une fois
assez contre-intuitif parce que, souvent, on pense que pour se concentrer, on a besoin de silence et qu’au contraire,
la musique va être une source de déconcentration.
 
[00:25:42] Alors là, vous vous demandez sûrement comment la musique a fait dans cette expérience pour améliorer
les résultats des étudiants. En réalité, quand on forme un souvenir dans notre cerveau, je vous ai dit qu’on forme un
réseau de neurones, des neurones qui sont connectés. Et plus on a d’éléments qui sont associés à ce souvenir, plus
le réseau va être important dans notre cerveau (autrement dit, plus c’est un souvenir qui va être très présent et
qu’on va pouvoir faire remonter assez rapidement). Ça va donc augmenter les deux forces : la force de stockage et la
force de récupération.
 
[00:26:27] Ici, dans le cas des étudiants, ils ont associé la musique aux choses qu’ils apprenaient et ensuite, en
entendant cette musique, c’était plus facile pour eux de faire remonter [to pull up] ce souvenir. Autrement dit, si
vous apprenez dans différents environnements, vous allez renforcer la force du souvenir. Vous allez créer plus de
connexions parce que vous allez associer différents signaux, différents éléments de ces environnements, à votre
souvenir.
 
[00:26:57] Ça, c’est génial avec les langues parce que c’est quelque chose qui est très facile à faire. Souvent, le
problème quand on apprend une langue à l’école, c’est qu’on utilise cette langue seulement à l’école, seulement
dans la salle de classe, donc dans un environnement qui est très limité et qui n’est pas vraiment représentatif des
conditions réelles. C’est pour ça qu’il faut utiliser la langue dans, justement, les vraies conditions, dans la vie réelle :
en parlant avec différentes personnes (ça peut être sur internet ou dans des groupes de rencontre dans votre ville,
par exemple), en lisant, en écoutant, etc. Plus vous allez multiplier les environnements dans lesquels vous utilisez le
français, plus vous allez avoir d’associations dans votre cerveau avec la langue et ça va devenir beaucoup plus facile
pour vous de l’utiliser.
 
[00:27:51] Mais ce qui est aussi intéressant, c’est que ça ne concerne pas seulement l’environnement mais aussi
notre manière d’apprendre. Quand on apprend quelque chose de nouveau, si on le fait simplement en lisant une
information, eh bien ça va être beaucoup moins efficace que si vous lisez cette information puis vous l’écoutez, puis
vous l’utilisez pour faire des exercices par exemple. Plus vous allez manipuler cette information et l’utiliser de
différentes façons, plus vous allez vous l’approprier et ça va être facile pour vous de la mémoriser. On peut imaginer
ça très facilement avec les mathématiques. Si vous apprenez une théorie mathématique simplement en la lisant, ça
va être beaucoup moins efficace que si vous faites des exercices avec elle et si vous essayez de l’expliquer à
quelqu’un, par exemple. Si vous faites ça, si vous utilisez différentes méthodes, ça va être beaucoup plus efficace que
de passer une ou deux heures à simplement relire cette théorie.
 
[00:28:58] C’est pour ça que quand on apprend quelque chose, il faut vraiment essayer de s’approprier
le contenu [content]. Par exemple, si vous avez pris des notes, il ne faut pas seulement relire ces notes mais essayer
de les réorganiser, peut-être de les lire à quelqu’un, de les expliquer à quelqu’un. Car si vous faites ça, vous allez
apprendre de manière beaucoup plus efficace.
 
[00:29:20] Une autre très bonne méthode pour finir, c’est de se tester. C’est vrai que quand on est étudiant ou
quand on est à l’école, les tests, les examens, ce sont les choses qu’on déteste le plus [we hate the most]. Mais en
réalité, les tests sont très efficaces pour mémoriser quelque chose. C’est pour ça que, quand on apprend, ça peut
être vraiment utile de s’auto tester ; ne pas attendre le test le jour de l’examen mais de se poser soi-même des
questions ou même de faire des exercices pour voir les choses qu’on a comprises.
 
[00:29:58] D’ailleurs, les chercheurs ont établi un ratio pour savoir comment utiliser son temps, quel temps il
faut consacrer [to dedicate] à l’apprentissage et quel temps il faut consacrer aux tests. Et vous allez peut-être être
surpris parce que les chercheurs disent qu’il faut consacrer seulement 30% de notre temps à apprendre et 70% à
tester (ça peut être des tests sous différentes formes, par exemple réciter les choses qu’on a apprises, se poser des
questions, faire des exercices, etc.). Donc 30% du temps à l’apprentissage et 70% du temps aux tests, à la récitation.
 
[00:30:39] Ce ratio, vous pouvez l’utiliser également avec les langues. Si vous avez une heure par jour à consacrer à
la langue, ne passez pas une heure à[don’t spend an hour] lire des listes de vocabulaire. Passez seulement 30% de
cette heure (autrement dit, environ 20 minutes) à revoir votre vocabulaire, à revoir les choses que vous avez
apprises et ensuite passez le reste de cette heure à discuter avec quelqu’un, à utiliser le vocabulaire (peut-être dans
de nouvelles phrases, en écrivant un texte, etc.). Si vous faites ça, vous allez être beaucoup plus actifs et justement,
ça va vous permettre de mieux mémoriser les choses que vous avez apprises.
 
[00:31:32] Finalement, la conclusion de ce livre, c’est que les salles de classe et les techniques d’apprentissage
traditionnelles ne sont pas adaptées à la façon dont notre cerveau fonctionne. Les recherches en psychologie ont
montré qu’on pouvait apprendre de manière plus efficace en changeant d’environnement, en faisant des pauses, en
essayant différentes techniques et différentes méthodes, et pas seulement en passant des heures à réviser nos notes
à la bibliothèque.
 
[00:32:03] À mon avis, c’est une bonne idée de toujours remettre en question les techniques qu’on utilise, remettre
en question nos habitudes et tester différentes choses pour voir ce qui peut fonctionner pour nous. Le critère
numéro un quand on apprend une langue, le plus important, c’est de trouver une méthode durable [lasting],
quelque chose que vous allez être capable de faire même les jour où vous n’êtes pas trop motivés, les jours où vous
n’avez pas envie de faire de français, parce que ce sont ces méthodes durables qui vont vraiment devenir des
habitudes et qui vont vous permettre de garder un contact avec la langue.
 
[00:32:44] Voilà, j’espère que cet épisode vous a plu et qu’il vous a peut-être fait découvrir quelques techniques que
vous allez pouvoir implémenter dans votre apprentissage du français. Si vous avez des questions ou des suggestions,
vous pouvez m’envoyer un email à l’adresse hugo@innerfrench.com. Et si vous voulez me soutenir, si vous voulez
m’aider, je vous invite comme d’habitude à laisser une évaluation sur iTunes ou sur l’application de podcasts que
vous utilisez.
 
[00:33:19] C’est tout pour aujourd’hui, on se retrouve dans deux semaines pour un nouvel épisode et en attendant,
n’oubliez pas de faire un peu de français chaque jour. A bientôt, salut !

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