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Épisode 44 : est-il plus facile d’apprendre une langue quand on est enfant ?

[00:00:13] Salut à tous. Bienvenue pour ce 44ème épisode du podcast. Comme d’habitude, je suis très content de vous retrouver,

de passer un petit moment avec vous. Là où j’habite, à Varsovie en Pologne, il fait très beau. Et cette semaine, il va y avoir du

soleil tous les jours. Ils annoncent [it is forecast] même qu’il va faire 30 degrés, donc c’est des températures estivales (ça veut dire

des températures d’été). Et je vais en profiter pour passer du temps à l’extérieur, faire du vélo, me promener, retrouver des amis

pour aller boire des cafés. Donc vraiment, je suis de très bonne humeur et je pense que ça va être une super semaine ! Ah oui, je

dis ça parce que, aujourd’hui, on est lundi car j’enregistre le podcast toujours quelques jours avant la publication. Donc voilà, pour

moi c’est seulement le début de la semaine au moment où j’enregistre cet épisode. Mais pour vous, si vous l’écoutez au moment

de sa publication, on sera déjà plus proches du weekend parce que je vais publier ce podcast le jeudi, comme d’habitude.

[00:01:33] Alors aujourd’hui, on va parler des enfants et de la façon dont les enfants apprennent les langues. C’est vrai que tous

les enfants arrivent à [get to,  manage to] apprendre une langue. Tous les enfants réussissent à apprendre leur langue maternelle

et les enfants apprennent leur langue maternelle sans avoir d’instruction formelle. En fait, quand ils commencent à apprendre

comment la langue fonctionne (les règles de grammaire, par exemple, la conjugaison), ils sont déjà capables de parler. En France,

par exemple, on commence à apprendre la grammaire à l’école quand on a environ 7 ans. Et évidemment, à 7 ans, les petits

Français sont déjà capables de bien parler français. Donc c’est un peu contre intuitif quand on y pense [when you think about it]

parce qu’on apprend une chose qu’on connaît déjà. On est déjà capables de parler, d’utiliser cette langue pour communiquer mais

on en apprend les règles, on en apprend la grammaire. Mais on peut très bien imaginer que sans ces cours de grammaire, les

enfants seraient aussi capables de continuer à utiliser la langue et de continuer à développer leurs compétences en grandissant.

[00:02:59] Donc ça, c’est un argument qui est en faveur de la méthode d’acquisition naturelle des langues. Vous savez, j’en ai

beaucoup parlé dans le premier épisode du podcast, j’ai beaucoup parlé du professeur qui a théorisé cette méthode, le professeur

Stephen Krashen. Vous savez que j’adore cette théorie et que je pense qu’elle fonctionne vraiment. C’est une méthode qui dit que

pour être capable de comprendre une langue, il faut y être exposé le plus possible, être exposé le plus possible à cette langue et

se concentrer sur des choses qui correspondent à notre niveau et surtout qui nous intéressent, des choses qu’on a vraiment envie

de comprendre. Et quand on fait tout ça et qu’on est patients, naturellement on est capables d’acquérir cette langue. Donc on peut

dire que c’est un peu la méthode qu’utilisent les enfants et ça, c’est quelque chose qui est très frustrant pour les parents parce

qu’ils ont l’impression que c’est beaucoup plus facile pour leurs enfants d’apprendre une nouvelle langue que pour eux.
[00:04:12] C’est quelque chose qui est très visible par exemple avec les enfants d’immigrés. Quand il y a une famille qui immigre

dans un pays et que la langue dans ce pays est différente de leur langue maternelle, en général les enfants apprennent la nouvelle

langue du pays d’accueil beaucoup plus vite que leurs parents. Et leurs parents ont l’impression que pour leurs enfants, c’est

vraiment très facile d’apprendre cette langue alors que pour eux-mêmes, ça demande énormément d’efforts et ça peut être un peu

déprimant. Alors naturellement, on peut se demander si c’est vraiment plus facile pour les enfants d’apprendre une nouvelle langue

que pour les adultes.

[00:04:57] Donc dans cet épisode, on va voir 6 arguments qu’on entend souvent en faveur de cette théorie (en faveur de la théorie

qui dit que les enfants apprennent les langues plus facilement que les adultes) et on va voir si ces idées sont des mythes ou des

réalités. Quand je dis « une réalité », ça veut dire qu’il y a des études pour soutenir, pour prouver que cette idée est vraie. Et

d’ailleurs, dans les notes de cet épisode je vais mettre toutes les références des études que j’ai utilisées pour préparer cet épisode.

Comme ça, vous pourrez voir vous-mêmes si vous êtes d’accord avec les conclusions de ces études. Et à la fin de l’épisode, on

verra ce qu’on peut utiliser dans ces théories pour rendre notre apprentissage du français plus rapide et plus efficace. Ok vous êtes

prêts ? Alors, c’est parti !

[00:06:05] La première idée pour commencer : les enfants apprennent les langues plus vite que les adultes. Ça, c’est quelque

chose qu’on entend très souvent. Mais je vais commencer par une petite explication sur la différence entre « vite » et « rapide »

parce que j’entends souvent les élèves faire des erreurs sur ça. « Rapide », c’est un adjectif donc on l’utilise avec un nom. Par
exemple, on peut dire qu’un joueur de foot est rapide. On peut dire qu’une voiture est rapide. « Vite », ce n’est pas un adjectif, c’est

un adverbe. Ça veut dire qu’on l’utilise pour modifier un verbe. Par exemple, vous pouvez dire que moi je ne parle pas vite, je parle

lentement, donc je ne parle pas vite. Mais il y a des Français qui parlent très vite, il y a des Français qui parlent très rapidement.

Vous voyez « vite », c’est un adverbe et « rapidement », c’est l’adverbe qui est formé sur l’adjectif « rapide ». OK donc avec un

nom on utilise l’adjectif « rapide » et avec les verbes on utilise « vite » ou « rapidement » (vous pouvez utiliser les deux, ils sont

complètement synonymes). « Vite » et « rapidement » avec un verbe. C’est clair ? Ok donc on va continuer.

[00:07:41] Alors je vous ai parlé dans l’introduction des familles qui immigrent dans les nouveaux pays et dont les enfants

apprennent la nouvelle langue très rapidement. Leurs parents sont un peu jaloux parce qu’ils voient que les enfants sont capables

de communiquer avec leurs camarades à l’école ou avec leurs amis quand ils vont jouer dans un parc. Et les parents, eux, ils sont

toujours incapables d’avoir des conversations très basiques avec les gens dans les magasins ou avec les autres parents d’élèves.

Donc ils peuvent se sentir un peu déprimés. Mais quand on regarde de plus près, on observe que les enfants et les parents n’ont

pas du tout les mêmes conditions.

[00:08:33] La première grande différence, c’est le temps passé. Les enfants sont en général dans une école où on utilise la langue

du pays d’accueil [host country] donc ils ont une exposition très très grande à cette langue. Alors que les parents, eux, ils ne sont

peut être pas obligés d’utiliser cette langue. On peut même imaginer qu’au travail, ils utilisent une autre langue, par exemple

l’anglais (qui est la langue internationale dans les entreprises) et ce n’est peut être pas nécessaire pour eux de connaître cette

langue, la langue qui est utilisée dans le pays d’accueil. Donc on voit qu’il y a une grande différence en matière de [in terms of]

temps passé. Les enfants ont beaucoup plus d’exposition, ils passent beaucoup plus de temps avec cette nouvelle langue que les

parents.

[00:09:29] La deuxième différence, c’est le filtre émotionnel. Quand on est enfant, on est moins conscient de nous-mêmes et on a

moins peur du jugement des autres. Les enfants essayent de parler, ils essayent de communiquer et s’ils font des erreurs, pour

eux ce n’est pas très grave. Alors que les parents, ils sont beaucoup plus sensibles au regard des autres, au jugement des autres.

Et ça, ça crée une espèce de filtre émotionnel négatif, quelque chose qui nous bloque parce qu’on a peur de parler, parce qu’on a

peur du jugement des autres.

[00:10:12] La troisième chose, c’est la motivation. La motivation n’est pas forcément la même pour les enfants et les adultes. Les

enfants, à l’école, ils ont besoin de cette langue pour pouvoir jouer, pour pouvoir communiquer avec les autres enfants, avec leurs
camarades. Donc ils ont une motivation qui est vraiment très forte. Alors que pour les parents, comme je l’ai dit un peu plus tôt,

apprendre cette langue n’est peut-être pas une nécessité. Peut-être qu’ils peuvent se débrouiller dans le pays d’accueil sans

maîtriser cette langue. C’était le cas avec moi par exemple quand j’ai déménagé en Pologne. La première année, c’était suffisant

d’utiliser l’anglais pour la vie quotidienne, j’avais pas vraiment besoin de connaître le polonais. Et comme je ne savais pas si j’allais

rester plus longtemps en Pologne, j’étais pas spécialement motivé pour apprendre le polonais.

[00:11:14] Mais ce qui est très intéressant, c’est que les manuels scolaires (les livres pour apprendre les langues) montrent que les

enfants ont besoin de plus de temps pour apprendre les choses que les adultes. Si vous comparez un livre pour apprendre le

français destiné aux enfants et un livre pour apprendre le français destiné aux adultes, la progression dans les livres pour les

adultes est beaucoup plus rapide. Ça, ça s’explique par le fait que [by the fact that] les adultes ont déjà appris à apprendre. Ils ont

développé des stratégies quand ils étaient à l’école, ou plus tard pendant leurs études, pour pouvoir apprendre plus efficacement

(par exemple une stratégie pour mémoriser du vocabulaire plus rapidement). Et puis ils ont aussi une meilleure capacité de

concentration. D’un autre côté, les enfants, eh bien déjà, ils ne savent pas très bien lire et les études montrent que la lecture, c’est

une méthode très efficace pour apprendre une nouvelle langue. Lire des livres, lire des articles, ça permet d’être exposé à la

langue et d’enrichir son vocabulaire. Mais les enfants, s’ils ne savent pas encore lire, eh bien ils ne peuvent pas utiliser cette

stratégie pour apprendre une nouvelle langue.


[00:12:44] Et puis, la deuxième chose intéressante, c’est que les enfants et les parents n’ont pas besoin du même niveau de

langue. Évidemment, les enfants ont besoin d’un niveau beaucoup plus basique. Ils ont besoin simplement de pouvoir

communiquer avec leurs camarades sur des sujets assez limités. Quand vous écoutez les enfants, c’est vrai qu’ils ont un nombre

de thèmes très limité qui concernent principalement le jeu (le fait de jouer avec leurs amis). Ils aiment bien aussi raconter des

petites histoires et parler avec leurs parents de choses assez basiques. Mais on ne va jamais demander à un enfant de présenter

les résultats financiers de son entreprise, par exemple, alors que c’est une chose qu’on peut attendre des parents. Donc les

parents ont des idées plus complexes, un nombre de sujets beaucoup plus large, ce qui fait qu’ils ont besoin d’avoir un niveau

vraiment très élevé, très avancé, s’ils veulent être capables de communiquer avec les autres adultes.

[00:13:59] Donc vous l’aurez compris, cette première idée, c’est plutôt un mythe. Les enfants n’apprennent pas plus rapidement

une langue que les adultes. Ils sont simplement dans de meilleures conditions parce qu’ils ont une très forte exposition à la langue.

Et puis ils ont besoin d’avoir un niveau plus basique pour parler de sujets limités. C’est pour ça qu’on a l’impression que c’est facile

pour eux.

[00:14:33] Maintenant, la deuxième idée : apprendre une langue tôt permet d’avoir un meilleur accent. Encore une fois, si on

compare les enfants d’immigrés et leurs parents, c’est vrai que, après quelques années, on peut avoir l’impression que ces enfants

parlent parfaitement la nouvelle langue et n’ont pas du tout d’accent, alors que pour leurs parents, c’est plus difficile de perdre leur

accent. C’est plus difficile de se débarrasser de leur accent. Pour comprendre ça, il faut savoir que chaque langue a un système

phonologique. Un système phonologique, c’est simplement un ensemble de sons, des combinaisons de sons pour distinguer, pour

donner du sens à un langage. Par exemple, en français, il y a la différence entre le son /e/ et le son /ɛ/ que l’on peut entendre dans

« un élève ». Dans « un élève », le son /e/ est au début et le son /ɛ/ sur la deuxième syllabe. Ou la différence entre « on » et

« en », par exemple l’adjectif « long » et l’adjectif « lent ». Pour les Français, c’est quelque chose d’évident, c’est quelque chose

qui est très facile à distinguer. Mais pour les étrangers, c’est beaucoup plus difficile parce que ces sons ne font peut être pas partie

de leur système phonologique, du système phonologique de leur langue maternelle.

[00:16:08] Et ce qui est vraiment passionnant, à mon avis, c’est que les études ont montré que les bébés sont capables

d’apprendre toutes les langues. Au départ, un bébé peut comprendre les sons de tous les systèmes phonologiques, de toutes les

différentes langues. Mais petit à petit, le bébé se concentre uniquement sur les sons de sa langue maternelle, sur les sons qui font

partie du système phonologique de sa langue maternelle, parce qu’il comprend qu’il n’a pas besoin de connaître les autres sons,
tout simplement parce qu’ils ne sont pas utilisés autour de lui. Donc après quelques années, le bébé ne réagit plus aux autres sons

car ils sont devenus inutiles. C’est pour ça que quand les enfants sont exposés à une langue étrangère quand ils sont jeunes, c’est

plus facile pour eux d’avoir une bonne prononciation. Ils sont capables d’entendre les différences entre les différents sons, même si

c’est un système phonologique différent de leur langue maternelle. Et comme ils sont capables d’entendre ces différents sons, ils

sont aussi capables de les reproduire. Ils sont capables de s’exprimer et d’avoir un accent parfait parce que leur cerveau peut

distinguer cette différence. Mais pour les adultes, c’est beaucoup plus difficile parce que leur cerveau est déjà conditionné. On peut

dire qu’il est fermé aux sons qui n’appartiennent pas à leur système phonologique. Ça signifie qu’il faut beaucoup d’exposition pour

être capable de distinguer ces nouveaux sons.

[00:17:59] Moi, j’ai beaucoup d’élèves, ou en tout cas plusieurs élèves, qui ont un accent quasiment parfait. C’est très difficile

d’entendre qu’ils sont étrangers, on peut avoir l’impression qu’ils sont français. Mais ça leur demande beaucoup d’efforts de parler

avec cette prononciation française. Et quand ils sont fatigués ou quand ils sont stressés, ils commencent à perdre cet accent

français et à retrouver un accent qui se rapproche de leur langue maternelle. Là, on comprend que ce n’est pas une chose très

naturelle et que ça demande beaucoup d’efforts. Alors que pour les enfants, au contraire, c’est une chose naturelle s’ils sont

exposés assez tôt à cette langue étrangère. Autrement dit, cette idée, elle est plutôt vraie. Quand on apprend une langue plus tôt,

on a une meilleure prononciation, on a un meilleur accent.


[00:19:05] Ça nous conduit à la 3ème idée qui dit que les enfants doivent apprendre une langue le plus tôt possible. C’est pour ça

que dans certaines écoles, il y a des cours de langue étrangère dès l’âge de 4, 5 ou 6 ans. On pense que si on expose les enfants

très tôt, ils vont avoir plus de facilité pour apprendre cette langue. Ça, c’est vrai pour la prononciation comme on l’a vu avant.

[00:19:34] Mais en réalité, les études montrent que, à cet âge, ça n’a pas beaucoup de différence. Par exemple, si un petit

Américain a deux heures de français par semaine à l’école, ça ne va pas vraiment lui permettre d’apprendre à parler français

couramment. Et surtout, à cet âge-là, c’est très facile de rattraper. Par exemple, si un enfant commence à apprendre le français à 6

ans et qu’il fait seulement deux heures par semaine, ensuite un deuxième enfant qui commence à apprendre le français à 8 ou 9

ans va pouvoir rattraper [to catch up] très rapidement le premier enfant. Parce que, pendant ces deux ou trois ans de français avec

deux heures par semaine, le premier enfant n’aura pas eu le temps de beaucoup progresser. Il n’aura pas eu le temps de

beaucoup avancer et ce sera très facile à rattraper pour le deuxième enfant. Donc c’est vrai pour la prononciation et c’est vrai aussi

car ça donne l’opportunité aux enfants de les intéresser à cette langue et peut être de les motiver à l’apprendre.

[00:20:52] La 4ème idée : apprendre deux langues en même temps peut perturber le développement de l’enfant. Ça, c’est une

chose qu’on entend parfois de personnes qui disent : « il faut parler une seule langue à la maison parce que sinon l’enfant

va mélanger [to mix up] les langues, il va être perturbé et il ne va pas pouvoir bien se développer  ». Ça, c’est une idée

complètement fausse. Il y a beaucoup d’études qui montrent au contraire que parler deux langues différentes à la maison, par

exemple une langue avec le papa et une langue avec la maman, ça a des effets positifs sur le cerveau des enfants. Vous pouvez

réécouter l’épisode 6 du podcast sur les avantages cachés [hidden benefits] de l’apprentissage des langues parce que je parle

justement des avantages sur le cerveau des personnes bilingues, des personnes qui parlent parfaitement deux langues.

[00:21:53] Mais c’est vrai que les enfants ne sont pas toujours aussi à l’aise dans les deux langues. Ça, c’est une expression

importante : être à l’aise [to feel/be comfortable]. En fait, en français, on ne peut pas dire « être confortable » pour une personne.

On dit « être à l’aise » quand vous faites quelque chose avec facilité, que vous n’avez pas de difficultés, vous pouvez dire que vous

êtes « à l’aise ». Par exemple : je suis à l’aise en anglais. Ça veut dire que je parle anglais sans difficulté. Vous pouvez utiliser

« confortable » pour un canapé, un sofa, un fauteuil, un lit. Ça, ça peut être confortable mais vous, vous ne pouvez pas être

confortable.

[00:22:38] Donc c’est vrai qu’en fonction de l’exposition aux deux langues, l’enfant ne sera pas toujours aussi à l’aise et n’aura pas

toujours la même facilité.


[00:22:48] Et une deuxième chose à souligner, c’est qu’il faut faire attention au développement de la langue maternelle, par

exemple avec les enfants immigrés. Un enfant immigré a besoin de développer sa langue maternelle à un niveau assez avancé

pour être capable d’apprendre une deuxième langue. Si un enfant va à l’école très jeune et qu’il n’a pas eu le temps de développer

d’abord sa langue maternelle, ça va être plus difficile pour lui d’apprendre cette deuxième langue. Tout simplement parce que,

quand on développe sa langue maternelle à un niveau avancé, on obtient un certain niveau de complexité. On est capable de

comprendre des choses plus compliquées et ça, c’est très utile pour apprendre une deuxième ou une troisième langue. C’est pour

ça qu’on déconseille [to advise against] aux parents d’immigrés de parler la langue du pays d’accueil à la maison. C’est important

qu’à la maison, les enfants parlent leur langue maternelle et qu’ils développent leurs compétences dans cette langue maternelle

pour ensuite être capables d’apprendre une deuxième langue, d’apprendre la langue du pays d’accueil par exemple.

[00:24:51] La cinquième idée : il ne faut pas parler aux enfants seulement dans la langue étrangère, sinon ça va les perturber. Ça

aussi, c’est une idée qui est fausse. C’est un mythe parce que les enfants ont une plus grande tolérance à l’ambiguïté. Ils ont

l’habitude d’être dans des situations où ils ne comprennent pas tout. Les premières années de leur vie, ils les passent justement à

essayer de comprendre ce qui se passe autour d’eux et de comprendre ce que les gens essaient de leur dire. Quand on est adulte,

au contraire, on est mal à l’aise dans ce genre de situations. Donc « mal à l’aise », vous comprenez, c’est le contraire de « être à

l’aise ». « Être mal à l’aise » [to feel/be uncomfortable], c’est quand vous ne vous sentez pas bien dans une situation. Les adultes

sont mal à l’aise, ils ne sont pas tolérants à l’ambiguïté. Encore une fois, à cause du jugement des autres. Les adultes ne veulent
pas perdre la face [to lose face]. [1.6] Donc s’ils ne comprennent pas quelque chose, ils peuvent commencer à paniquer et, à ce

moment-là, il y a un filtre négatif. Il y a un filtre négatif dans leur tête, ils paniquent et ils « bloquent », on peut dire, les informations.

C’est encore plus difficile pour eux de comprendre ce qu’on leur dit.

[00:25:42] Au contraire, les enfants développent des stratégies très très intelligentes pour comprendre les choses qu’on leur dit. Ils

utilisent le contexte, donc les gestes, le ton de la voix, tous les éléments visuels. Bref, toutes les choses qu’ils ont autour d’eux et

qui peuvent leur permettre de comprendre ce qu’on leur dit. C’est pour ça que parler seulement dans une langue étrangère avec

les enfants qui veulent l’apprendre, c’est une très bonne méthode.

[00:26:15] Mais évidemment, il faut adapter la façon de parler. C’est exactement ça que moi je fais avec vous. J’adapte ma façon

de parler pour que ça soit plus facile pour vous de comprendre ce que je dis, même si je parle seulement en français. Par

exemple : je parle plus lentement, je fais des pauses, je choisis des mots qui ressemblent à l’anglais pour que vous soyez capables

de comprendre ce que je dis, pour comprendre le sens. Bien sûr, vous ne comprenez pas 100% de ce que je raconte, mais vous

comprenez suffisamment pour que ce que je raconte ait du sens pour vous.

[00:26:58] La 6ème idée, pour finir, qui est très importante aussi, à mon avis : il faut systématiquement et rapidement corriger les

erreurs des enfants. Ça, également, c’est une idée qui est fausse. Les études montrent que, en réalité, les parents corrigent

rarement leurs enfants. Et ils les corrigent seulement quand les enfants font des grosses erreurs ou des erreurs qui sont très

visibles et qui sont récurrentes, que les enfants font souvent. Une erreur que les enfants français font souvent, par exemple, c’est

le pluriel irrégulier pour les mots qui se terminent par « a-l », les mots masculins qui se terminent par « al ». Par exemple : un

cheval. Le pluriel de « un cheval », c’est « des chevaux ». Ça, c’est une erreur qu’on entend très facilement en français que les

Français reconnaissent très facilement. Si quelqu’un dit : « des chevals », pour nous c’est vraiment une erreur évidente, une erreur

flagrante. Quand les parents entendent leurs enfants faire ce genre d’erreur, ils les corrigent tout de suite. Mais à part ça, les

parents corrigent très rarement les enfants. Et malgré cela, les enfants apprennent progressivement les bonnes formes, les formes

correctes et ils apprennent assez rapidement.

[00:28:29] En fait, c’est parce que chaque langue a un ordre naturel d’apprentissage. Il y a des erreurs que tout le monde fait au

début et qui, petit à petit, disparaissent. Quand on apprend une langue, il y a différents stades  [stages] avec des erreurs qui sont

associées à chaque stade mais, petit à petit, ces erreurs disparaissent.

[00:28:53] C’est pour ça qu’il faut se concentrer sur le sens. Autrement dit, du moment que [as long as] quelqu’un dit quelque
chose de compréhensible, même s’il y a des petites erreurs, ça n’est pas grave. Car avec le temps, la pratique et l’exposition, ces

erreurs vont se corriger d’elles-mêmes [by themselves]. C’est beaucoup plus important d’encourager les enfants à parler pour qu’ils

aient un filtre positif, pour qu’ils soient motivés à parler et qu’ils aient confiance en eux. Moi, c’est quelque chose dont je suis

convaincu. C’est pour ça que, avec les élèves avec lesquels je travaille, le plus important, la chose sur laquelle je me concentre,

c’est leur donner confiance en eux, leur donner envie de parler et leur montrer qu’ils sont capables d’exprimer leurs idées. Je

corrige simplement quand il y a des erreurs assez flagrantes ou des erreurs qu’ils répètent souvent. Et puis, je note toutes ces

petites erreurs et je les partage avec eux à la fin du cours. Comme ça, pendant le cours, les élèves peuvent se concentrer sur la

conversation. Ils peuvent développer leur confiance en eux et puis ensuite, petit à petit, ils corrigent ces différentes erreurs.

[00:30:23] En conclusion, on va voir comment on peut imiter les enfants pour rendre notre apprentissage du français plus efficace.

D’abord, et ça je vous le répète tout le temps, il faut être exposé au maximum à la langue. Ça veut dire : écouter des choses, lire

des choses, regarder des choses. Bref, essayer de passer un maximum de temps avec la langue et également avoir une attitude

positive. C’est pour ça que si vous faites des choses qui vous intéressent et si vous parlez avec des personnes qui sont patientes

et qui ont envie de vous aider, vous allez avoir de plus en plus confiance en vous et ça va vous permettre de progresser.

[00:31:11] La deuxième chose, c’est qu’il faut privilégier des ressources, des contenus, qui sont seulement dans la langue

cible [the target language]. Donc des choses qui sont seulement en français. C’est pour ça que moi, je ne fais pas de traduction

complète des podcasts. D’abord, parce que je n’ai pas le temps mais surtout parce que je pense que c’est contre-productif. C’est
contre-productif parce que si on a la traduction, très rapidement on va être paresseux et on va lire la traduction au lieu de lire la

version originale. On ne va pas faire d’efforts pour essayer de comprendre, mais on va tout de suite regarder la traduction. Ça,

c’est une très mauvaise méthode.

[00:31:57] Et ça nous conduit au troisième point important : c’est la tolérance à l’ambiguïté. Si vous ne comprenez pas tout ce que

vous lisez ou ce que vous écoutez, ça n’est pas grave. C’est complètement normal. Ça fait partie du processus. Il faut apprendre à

être à l’aise dans ce genre de situations, à se concentrer sur les mots qu’on connaît, les structures qu’on comprend, pour donner

du sens à tout ça. Donc n’essayez pas de tout traduire. N’essayez pas de comprendre à 100% mais essayez plutôt de donner du

sens à ce que vous entendez, à ce que vous lisez, et à ne pas paniquer dans ce genre de situations.

[00:32:42] Et puis la dernière chose importante, c’est qu’il faut accepter les erreurs. Encore une fois, j’insiste sur ça : c’est

complètement normal de faire des erreurs. Ça fait partie du processus. Ça fait partie de l’ordre naturel d’acquisition d’une langue.

Ne vous bloquez pas si vous faites des erreurs. Acceptez-les et soyez patients parce que, petit à petit, ces erreurs vont disparaître.

[00:33:15] Voilà, c’est la fin de cet épisode. Merci à tous. Merci pour votre fidélité. Je vois qu’il y a de plus en plus d’auditeurs du

podcast, parce que le podcast est aussi disponible sur Spotify, depuis quelques semaines vous pouvez l’écouter sur Spotify si vous

voulez. Merci pour tous les messages, encore une fois, que vous m’avez envoyés. Ça me fait très plaisir. Continuez de le faire.

J’essaye de répondre à tout le monde. Ça prend parfois quelques jours. Ne vous inquiétez pas [don’t worry]. J’ai reçu encore

beaucoup de questions sur le programme. Sachez que ça avance. Ça me demande pas mal de temps [quite some time], j’ai

encore beaucoup de choses à faire mais ça avance [we’re getting there]. Je pense que dans le prochain épisode, je pourrai vous

donner plus d’informations sur ce programme que je suis en train de créer. Donc soyez patients. On se retrouve dans deux

semaines. En attendant, n’oubliez pas de faire un peu de français tous les jours. À bientôt, salut !

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