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La chanson de Roland

La plus ancienne chanson de geste française, en 4 002 décasyllabes assonancés.


On la date de la fin du XIe siècle, et nul texte de ce genre ni de cette importance en langue vernaculaire ne
lui est antérieur. L'auteur est inconnu, mais on a voulu le voir dans le Turoldus, qui signe le dernier vers du
poème.

1. LE RÉCIT

Bataille de Roncevaux
De retour d'Espagne, l'armée de Charlemagne voit son arrière-garde, confiée par l'empereur à son
neveu Roland, attaquée par des sarrasins très supérieurs en nombre, à la suite d'une trahison de Ganelon.
Malgré leur bravoure, les preux (Roland, son ami Olivier, l'archevêque Turpin) sont massacrés
à Roncevaux. Prévenu trop tard parce que Roland n'a voulu sonner du cor qu'à la dernière extrémité,
l'empereur venge ses pairs et fait mettre à mort le félon.

2. LA COMPOSITION ET L'ÉCRITURE
Mort de
Roland
L'équilibre de la composition atteint d'emblée une perfection surprenante, avec la trahison de Ganelon, la
bataille et la mort de Roland, puis, dans une seconde partie, l'affrontement de Charlemagne avec l'émir
Baligant, et le châtiment du traître : deux parties, donc, le martyre de Roland et la vengeance, qui en
soulignent l'ordonnance déjà classique.
Le découpage en laisses, en tirades d'inégale longueur, dont l'apparente improvisation renvoie à la
technique orale des jongleurs, introduit dans cette architecture toutes les nuances de l'émotion. Nous
n'avons pas affaire à un pur récit, mais à une narration mêlée de stances lyriques. Et, comme il convient au
genre épique, dont le type d'énonciation est mixte, d'importants dialogues traduisent l'affrontement des
personnages et des idées.
Le substrat rhétorique et philosophique est très solide. Dans le détail même, l'emploi de formules
stéréotypées pour décrire les actions (notamment les batailles) et les réactions (particulièrement la colère et
la douleur), tout en nous donnant l'image du style oral et comme l'écho de l'intonation du décasyllabe
fortement articulé avec sa césure, ses assonances et ses clausules, confère au langage une gravité hiératique.
L'écriture a su tirer parti des procédés de la parole à des fins littéraires.

3. LA SIGNIFICATION
Elle ressort de cette composition même, plus particulièrement mise en valeur par le manuscrit découvert en
1832 à la bibliothèque Bodléienne d'Oxford. De l'événement historique du 15 août 778, la défaite infligée
par les Basques ou les Gascons à l'armée de Charlemagne dans les parages de Roncevaux, au mythe
héroïque reconstruit autour de Roland, la transformation est considérable. On peut interpréter l'affaire du
point de vue de la propagande : une cuisante défaite ruinant les « châteaux en Espagne » de Charlemagne
est ainsi masquée. Mais c'est faire de l'œuvre le résultat d'un lent processus politique, peu vraisemblable. En
substituant à la défaite de Roncevaux la passion d'un saint laïque, c'est vers la réflexion sur l'homme, son
destin, son orgueil, son drame familial, son attachement au roi, son dévouement à Dieu, que se tourne la
lumière du texte. Sous la gloire épique, ce n'est pas la vengeance politique, mais la souffrance humaine qui
fait sens.

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