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1 Introduction
On peut dénir un simulateur de vol comme un système dans lequel un pilote réel est aux
5 commandes d'un avion virtuel dont le comportement est obtenu par simulation. Dans sa ver-
sion professionnelle, il se présente généralement sous la forme d'une cabine de pilotage, mobile
ou non, actionnée par logiciel. Il existe aussi des simulateurs de vol en jeu vidéo, pour lesquels
du matériel informatique grand public sut, mais nous nous intéresserons davantage aux si-
mulateurs dits à base mobile, c'est à dire animés de mouvements suivant plusieurs degrés de
10 liberté. Ces simulateurs de vol sont largement utilisés par les compagnies aériennes, l'industrie
aéronautique militaire et civile pour la formation continue des pilotes (nouveau type d'avions ou
d'équipements, situations extrêmes, opérations militaires) et développer de nouveaux avions. Il
permet notamment aux pilotes des avions de ligne de s'entraîner et de se former aux situations
d'urgence.
chariot équipé d'un stylet reproduisait sur table traçante le trajet virtuel de l'avion et l'instructeur
pouvait donner des ordres à l'élève à l'aide d'un micro. Ce simulateur, très utilisé lors de la
30 Seconde Guerre mondiale essentiellement pour le vol aux instruments, connut diverses évolutions
jusque dans les années 1960.
La mise en ÷uvre de modèles de vol sur calculateurs, analogiques d'abord dès les années
1950 puis numériques, a donné aux simulateurs la possibilité de représenter plus dèlement le
comportement d'un aéronef en vol.
35 Le grand projet Whirlwind du Massachusetts Institute of Technology en 1946 fut de concevoir
et mettre au point un calculateur numérique en temps réel nécessaire à un simulateur de vol
militaire.
Outre la puissance de calcul souvent insusante, la restitution visuelle des premiers simula-
teurs, limitée aux phases de décollage et d'atterrissage, n'était rendue que par le déplacement
40 d'une caméra vidéo survolant mécaniquement une maquette réelle de terrain de grande dimen-
sion. Ce n'est que plus tard, au milieu des années 1970, que commencèrent à apparaître des
images de synthèse encore très schématiques mais qui permettaient un rendu ponctuel très pré-
cis des feux de piste, de nuit. Au début des années 1980, la représentation en trois dimensions de
surfaces avec ombrage avait une allure plus réaliste mais il a fallu attendre les années 1990 pour
45 voir dans les simulateurs des images de synthèse 3D texturées.
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Axe Déplacement Vitesse Accélération
Vertical ±10m 5m/s 8m/s2
Latéral ±6m 2, 6m/s 5, 3m/s2
Longitudinal ±1, 3m 1, 3m/s 3, 3m/s2
Roulis ±18o 40o /s 115o /s2
Tanguage ±18o 40o /s 115o /s
Lacet ±24o 46o /s 115o /s
trois axes de translation et les trois axes de rotation. Ajoutons que la conguration Stewart est
légère, rigide, symétrique, et isotrope. Il est à noter cependant que ses déplacements sont limités
(débatement des vérins), que cinématiquement, il existe des points singuliers contraignants, et
qu'il existe une grande inuence limitative d'un axe sur les autres (20d'assiette limite fortement,
55 voire complètement les capacités de mouvement selon les autres axes). Malgré ces quelques
défauts, la plate-forme de Stewart reste la plus répandue. A titre d'exemple, on peut citer le
simulateur russe PSPK-102, mis en service en 1982 pour le développement de la navette Bourane,
orant des déplacements importants (±1,2m en vertical, ±1,5m en latéral et longitudinal, et
±30, 40et 60en roulis, tangage et lacet respectivement). Le simulateur du SIMONA (gure 2)
60 est, quant à lui, particulièrement performant en terme de bande passante puisqu'il peut reproduire
des mouvements jusqu'à 15Hz de 0, 02g à 1, 5g en mouvement vertical. Plus exotique, le "Vertical
Motion Simulator" (VMS) de la NASA propose des performances tout à fait impressionnantes
comparées à une plate-forme de Stewart classique (tableau 1).
65 Les deux principaux composants d'un simulateur de vol sont le c÷ur logiciel d'une part, et
un ensemble matériel nécessaire au pilote pour piloter le simulateur et percevoir les réactions de
l'avion virtuel.
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Figure 2 Le simulateur SIMONA de l'université de Delft (Pas-Bas)
les modèles de l'environnement (typiquement l'atmosphère et son évolution), les bases de données
nécessaires aussi bien en vol à vue qu'en vol aux instruments, les modèles nécessaires aux scénarii
comme le trac, les échanges radio, les incidents, etc.
Les solutions logicielles sont maintenant nombreuses sur le marché : l'expansion des jeux
75 vidéo contribue largement au développement de simulateurs de plus en plus réalistes. Lorsque ces
simulateurs sont ouverts pour permettre d'ajouter ses propres créations, beaucoup d'utilisateurs
deviennent créateur d'avion en réalisant, à l'aide de logiciels de modélisation 3D, des modèles
d'avions militaires ou d'avions de ligne. D'autres créent des versions personnelles et virtuelles
basées sur de vrais avions de ligne, ou même des décorations virtuelles de compagnies ctives
80 comme Virtual Delta, Mexicana de Aviacion Virtual, Virtual Aeroot, Viasa Virtual, et d'autres,
que l'on peut trouver sur Internet.
A noter qu'en plus du pilotage virtuel, beaucoup d'utilisateurs découvrent le trac aérien
en ligne : lorsque les pilotes et des contrôleurs du trac aérien virtuels jouent ensemble en
temps réel pour simuler un véritable trac.
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sinon on parlera de simulateur à base xe.
Le système de visualisation est constitué d'un générateur d'images de synthèse, qui est un
calculateur spécialisé, très rapide. Il possède en mémoire une base de données (le paysage) et il
calcule l'image qui serait vue par le pilote compte tenu de la position géographique du mobile,
95 de son orientation, de son altitude, de l'heure, des conditions atmosphériques, etc. Ce calcul
s'eectue plusieurs dizaines de fois par seconde (en général 60 fois). L'image produite par le
calculateur doit être présentée selon un champ visuel conforme à celui existant dans la réalité.
Dans un avion de ligne, par exemple, le champ visuel est limité par les fenêtres de la cabine
de pilotage, soit environ 45°et 220° dans les directions respectivement verticales et horizontales.
100 Les systèmes de visualisation simulée peuvent tout à fait couvrir ce champ visuel. De plus, les
images sont projetées à travers un système optique qui les renvoie à l'inni pour que les yeux de
l'observateur puissent s'accommoder à l'inni, comme dans la réalité.
Les bruits sont, eux aussi, synthétisés et des enceintes acoustiques sont placées aux endroits
adéquats autour de la cabine pour être perçus là où ils le seraient en réalité.
105 Pour piloter, le pilote doit percevoir les mouvements de l'avion dans l'espace : cette perception
se fait par l'observation visuelle à l'extérieur du cockpit (ligne d'horizon, pente, dimension des
objets au sol), à l'intérieur par la lecture des instruments de vol mais aussi grâce aux sensations
des capteurs humains comme ceux de l'oreille interne qui fonctionnent comme des accéléromètres.
Le simulateur idéal doit donc restituer ces deux aspects ; la solution actuelle la plus utilisée est
110 l'hexapode ou plateforme de Stewart (gure 3).
Les ordres envoyés aux vérins ne cherchent pas à reproduire l'attitude du mobile simulé, mais
à recréer les accélérations ressenties à bord. Ces accélérations sont dues aussi bien aux actions
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de l'équipage sur les commandes de vol qu'à la turbulence atmosphérique, aux vibrations des
moteurs et à celles résultantes de l'action des freins, etc.
Même si la question n'a pas de réponse absolue, on peut faire un constat simple pour commen-
cer : la perception du mouvement est plus rapide par les organes dédiés que par une dérivation
mentale, certes inconsciente, des informations visuelles. L'avance procurée par les organes iner-
tiels de perception du mouvement est estimée à quelques 150ms. De plus cette perception est
120 active quelle que soit la charge de travail du pilote, alors que sur base xe, le mouvement n'est
pas perceptible lorsque l'attention de celui-ci est attirée par les instruments. Cette perception
directe des accélérations réduit la constante de temps absolue du pilote, augmente la stabilité
du système pilote/avion et permet au pilote d'adapter sa stratégie de pilotage (augmentation du
gain pilote).
125 A titre d'exemple, on peut considérer la simulation du modèle de comportement de l'avion dit
souple (typiquement A340-500/600), notamment le phénomène de couplage pilote/structure par
simulation pilotée. Ce phénomène génère des oscillations relativement hautes fréquences (3Hz) et
d'amplitudes faibles mais susantes pour causer des accélérations latérales et verticales pénibles
d'une part, et alimentant l'oscillation par action involontaire du pilote sur le manche, d'autre
130 part. Sans mouvement cabine, deux facteurs manquent à l'appel :
le mouvement oscillatoire n'est pas perçu en utilisant uniquement le visuel, les accélérations
étant de trop faibles amplitudes et surtout trop hautes fréquences.
l'entretien du phénomène, s'il doit avoir lieu, est impossible car le bras du pilote n'est pas
soumis aux accélérations.
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Un autre argument est bien sur l'aspect économique : pour former un pilote de ligne sur un type
d'avion, il fallait 40 h de vol dans les années soixante. Sur les avions modernes, pourtant bien plus
complexes, l'entraînement se fait pratiquement intégralement sur simulateur. Les compagnies aé-
riennes importantes ont toutes leurs simulateurs. On compte en moyenne un simulateur pour 25
140 avions, sachant que chaque avion est utilisé par plusieurs équipages (de 5 à 10 équipages selon le
type d'avion), et que chaque équipage doit eectuer un certain nombre d'heures d'entraînement
par an (20h en moyenne).
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Sensations nx ny nz p q r
4 Perception du mouvement
Quelques études récentes ont tenté d'établir des seuils de perception des accélérations en
dessous desquels un opérateur humain ne sentirait pas le mouvement. Grâce à des études expé-
rimentales sur simulateur et en vol, on a pu compiler des chires intéressants sur les seuils de
160 perception des accélérations selon divers axes. Le tableau 2 résume les fonctions de perception
des diérents organes sensoriels vis-à-vis des accélérations linéaires suivant les 3 axes (nx en lon-
gitudinal, ny en transversal, nz en normal) et des vitesses angulaires (p en roulis, q en tangage ,
r en lacet).
Au niveau des accélérations linéaires, presque tous les récepteurs entrent en jeux. Les seuils
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165 absolus de perception sont pratiquement indépendants de la fréquence lorsque celle-ci dépasse
environ 0, 5Hz. L'ordre de grandeur de ces seuils est de 0, 01g en vertical et de 0, 004g en latéral
et longitudinal.
On peut également s'intéresser à la sensibilité aux changements d'accélération (accélérations
diérentielles). On montre alors que les pilotes sont beaucoup plus sensibles aux accélérations
170 diérentielles linéaires en latéral (c'est d'ailleurs un axe particulièrement désagréable et qui induit
plus que les autres d'éventuelles actions involontaires sur le manche). D'une façon générale, la
sensibilité est plus grande aux accélérations diérentielles qu'aux accélérations "continues", et
plus de 50% de l'eet informatif du mouvement cabine réside dans la restitution des événements
et des vibrations.
175 Les accélérations angulaires sont, quant à elles, principalement perçues par le système ves-
tibulaire. C'est d'ailleurs en terme de vitesse angulaire qu'il convient de mesurer les seuils de
perception puisque des études ont montré que le système vestibulaire agit comme un accéléro-
mètre couplé à un intégrateur pour des fréquences comprises entre 0, 03Hz et 3Hz. Donc au
niveau des seuils de sensibilité, les résultats sont les suivants et à peu près constants à partir de
180 0, 3Hz :
p0 est à 0, 4◦ /s pour le roulis
q0 est à 0, 5◦ /s en tangage
r0 varie de 0, 8 à 0, 9◦ /s en lacet
Ces résultats ont été complétés par des essais en vol, montrant que les environnements vibratoire
185 (0, 02 à 0, 05g de 0 à 10Hz) et sonore jouent un rôle très important sur les seuils de perception
des accélérations, et ce principalement pour les accélérations linéaires (le tableau 2 rappelle que
les vitesses angulaires sont principalement perçues par le système vestibulaire).
5 Le pilotage du mouvement
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195 ordres à envoyer aux actionneurs du mécanisme,
le mécanisme, qui permettra au pilote de ressentir les eets physiques du vol.
La génération du mouvement est le point clé de la simulation à base mobile dans la mesure où
elle établit le lien entre le monde simulé et le monde physique. Le détail de cette étape est donné
sur la gure 5, et ses spécicités sont détaillés ci-après.
Les ltres washout sont en fait un système de restitution du mouvement qui permet de donner
l'illusion d'un mouvement continu alors que le mouvement réel de la cabine est limité. Un bon
exemple de ce phénomène est la mise en virage de la cabine : la simulation d'un virage de 90° ne
va pas se traduire par une rotation de la cabine de 90° (mécaniquement impossible). Dans ce cas
220 là, le système de restitution simule la première partie de la manoeuvre, c'est à dire le tout début
du virage. Ensuite, la cabine revient lentement à sa position initiale (alors que visuellement le
pilote continue de virer) de telle façon que le pilote ne se rende pas compte qu'il est en fait ramené
à la position neutre. L'information sur l'ancienne position a été eacée (washed out). Ensuite,
lorsque le pilote commandera un nouveau virage, la cabine repartira d'une position neutre lui
225 laissant ainsi un maximum d'amplitude suivant les diérents axes de liberté.
En résumé, les ltres washout imposent un retour de la cabine en position de référence en
anticipation du prochain mouvement qui sera demandé, ceci sans que le pilote ne ressente cette
manoeuvre de retour (et donc ne s'en aperçoive). Ce ltrage s'eectue sur tous les axes (3 axes
de translations, 3 axes de rotation). Toujours dans un souci de restriction des amplitudes des
230 mouvements, un gain est appliqué avant le ltrage. Comme il a été précisé précédemment, le
pilote est plus sensible aux changements dans l'amplitude de l'accélération qu'à l'amplitude elle
même. Alors, même diminuée, la restitution des accélérations restera correcte. On retrouve ces
ltres washout dans la structure complète du processus de génération de mouvements présentée
sur la gure 5.
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235 5.2 La coordination d'inclinaison
Il n'en reste pas moins que l'avion n'est pas seulement soumis à des accélérations hautes
fréquences de faible amplitude. C'est la raison pour laquelle des artices de simulation sont
introduits pour simuler les accélérations linéaires latérales et longitudinales. Les restitutions
présentées sur la gure 6 montrent qu'au début de l'accélération, le mouvement est, pendant un
240 cours instant, très bien rendu. Au bout d'un certain temps τ , la restitution est plus mauvaise,
voire fausse. Pour une accélération linéaire continue, l'artice consiste alors à introduire une
inclinaison de la cabine coordonnée avec ce temps τ . Cette fonction incline légèrement le poids
(relativement bien sûr). C'est la technique dite de coordination d'inclinaison (Tilt Coordination
ou Vertical Apparent) car si les pilotes sont sensibles aux variations d'amplitude des accélérations,
245 ils sont aussi sensibles à leurs directions. Les ltres de coordination d'inclinaison agissent sur les
composantes basses fréquences des accélérations longitudinales et latérales pour les reporter sur
le tangage et le roulis respectivement (gure 5).
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250 de rentrer en conit avec les informations visuelles. Ainsi apparaît une nécessité pratique de
travailler autour de la position d'équilibre, du "zéro mécanique". Finalement, la structure du
pilotage du mouvement est assez simple (gure 4). Il n'en reste pas moins que le développement
des éléments de cette structure est réservé aux spécialistes (typiquement 2 ans de développement
et 10 ans de mise au point pour un avion complet).
255 Annexes
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